tag:theconversation.com,2011:/us/topics/charbon-22073/articlescharbon – The Conversation2023-02-28T18:14:13Ztag:theconversation.com,2011:article/2007742023-02-28T18:14:13Z2023-02-28T18:14:13ZLa hausse du prix du quota de CO₂, une arme anti-charbon<p>Lorsque la Russie a envahi l’Ukraine en février 2022, les prix de l’énergie se sont envolés. Celui du quota de CO<sub>2</sub> sur le marché européen du carbone a perdu un bon tiers de sa valeur. Certains ont alors cru que le système n’allait pas résister à la flambée des prix énergétiques.</p>
<p>Un an après, le prix du quota se porte bien. Depuis le début d’année 2023, il a gagné plus de 15 %. Le 27 février, le prix du contrat à terme à échéance d’un an a atteint la barre symbolique de 100 €/t. Le prix spot, réglé au comptant, a atteint un pic historique de 97€.</p>
<p>Pour comprendre ces mouvements de prix, il faut rappeler les <a href="https://climate.ec.europa.eu/system/files/2017-03/ets_handbook_en.pdf">principes</a> sur lesquels repose le marché européen des quotas carbone, le principal instrument de la stratégie européenne d’atténuation du changement climatique.</p>
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<span class="attribution"><span class="source">Auteur à partir des données Trading Economics</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<h2>Un mécanisme de rationnement avec flexibilité</h2>
<p>Complexe dans sa mise en œuvre, le principe de base du système d’échange des quotas de CO<sub>2</sub> est en fait d’une grande simplicité. Il s’agit d’un mécanisme de rationnement avec flexibilité.</p>
<p>Le rationnement est imposé aux industriels soumis au système par la fixation d’un plafond global d’émission à ne pas dépasser. Si ce plafond est contraignant, il crée de la rareté sur le marché ce qui fait monter le prix du quota. S’il est laxiste, le prix aura au contraire tendance à baisser. S’il n’y a plus aucune contrainte, le prix tendra vers zéro.</p>
<p>La flexibilité résulte de la possibilité pour les industriels soumis au système d’échanger les quotas qui sont autant de droits à émettre une tonne de CO<sub>2</sub>. Chaque année, ces industriels doivent restituer autant de quotas qu’ils ont émis de CO<sub>2</sub>. S’ils font défaut, ils payent une pénalité dissuasive. Plus le prix du quota est élevé, plus il devient coûteux d’émettre une tonne de CO<sub>2</sub>. Les acteurs du système sont alors incités à réduire leurs émissions.</p>
<h2>Prix du quota et objectifs climatiques</h2>
<p>Durant la décennie 2010, le dispositif n’a pas été contraignant pour une raison de fond. L’objectif climatique de l’Union européenne – une baisse de 20 % des émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2020 – n’était pas contraignant. La meilleure preuve : l’objectif a été atteint dès 2013 comme l’indique <a href="https://www.eea.europa.eu/publications/annual-european-union-greenhouse-gas-1">l’inventaire européen des émissions</a> qui sert de juge de paix en la matière. Pas besoin d’un système de quota pour viser un objectif déjà atteint !</p>
<p>Face à cette situation, la Commission est parvenue à apposer quelques rustines au système en mettant sur pied une « réserve de stabilité » à partir de 2018. Cette réserve a retiré des quotas du marché, ce qui a fait remonter le prix aux alentours de 20 €/t.</p>
<p>La donne a totalement changé en décembre 2021 quand les chefs d’État européens ont relevé l’objectif de réduction d’émission à 55 % à l’horizon 2030, contre 40 % antérieurement. L’engagement a été déposé auprès des Nations unies au titre de la <a href="https://unfccc.int/sites/default/files/NDC/2022-06/EU_NDC_Submission_December%202020.pdf">contribution de l’Union européenne</a> à la réalisation de l’Accord de Paris. Il est donc inscrit dans le marbre.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/512678/original/file-20230228-2266-zg0s1s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/512678/original/file-20230228-2266-zg0s1s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=605&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/512678/original/file-20230228-2266-zg0s1s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=605&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/512678/original/file-20230228-2266-zg0s1s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=605&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/512678/original/file-20230228-2266-zg0s1s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=761&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/512678/original/file-20230228-2266-zg0s1s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=761&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/512678/original/file-20230228-2266-zg0s1s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=761&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="attribution"><span class="source">Frédéric Rossi (données EU-ETL)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Le marché n’a pas été long à réagir. Le prix du quota est remonté en quelques mois au-dessus de 80 €/tonne. À ce prix-là, l’électricité décarbonée devient très rentable relativement à celle produite à partir du gaz ou du charbon.</p>
<p>La remontée du prix du quota alourdit aussi le coût de production de l’acier dans des hauts fourneaux où le charbon est utilisé à la fois comme combustible et comme agent réducteur du minerai de fer. En France, les deux installations les plus émettrices de CO<sub>2</sub> sont les deux hauts fourneaux d’Arcelor Mittal basés à Foss et à Dunkerque. Dès que le prix du quota de CO<sub>2</sub> a dépassé 80 €, l’industriel a sorti de ses cartons des <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/industrie-lourde/decarbonation-de-lindustrie-arcelormittal-va-fermer-trois-de-ses-cinq-hauts-fourneaux-en-france-1384499">projets d’investissement</a> pour reconvertir ces deux complexes industriels vers le bas carbone.</p>
<h2>Les impacts de la guerre en Ukraine</h2>
<p>Arrive la guerre en Ukraine. Les prix du charbon et du gaz utilisé en Europe s’envolent, du fait de la grande dépendance de l’UE aux approvisionnements russes. Celui du pétrole remonte également, mais dans des proportions moindres. Cette envolée des cours assombrit les perspectives macroéconomiques et incite à la baisse des consommations de gaz et de charbon.</p>
<p>Ces deux variables économiques conduisent logiquement à une correction à la baisse du prix du quota. Il s’y ajoute un facteur politique. Face à la flambée des prix de l’énergie, les gouvernements européens rivalisent d’inventivité pour mettre en place des <a href="https://www.bruegel.org/dataset/national-policies-shield-consumers-rising-energy-prices">boucliers tarifaires</a> pour protéger citoyens et industriels face à l’envolée des prix.</p>
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<p>Parmi la panoplie des mesures, certains pays souhaitent suspendre le système des quotas qui renchérit le coût des énergies fossiles. C’est notamment le cas de la Pologne qui le <a href="https://www.euractiv.com/section/emissions-trading-scheme/news/eus-von-der-leyen-rebuffs-polish-call-to-suspend-carbon-market/">réclame officiellement</a> lors du Conseil européen de l’énergie d’août 2022.</p>
<p>Ces tentatives n’aboutissent pas. Non seulement le système n’est pas suspendu, mais le Parlement et le Conseil européen parviennent le 17 décembre 2022 à un <a href="https://www.consilium.europa.eu/fr/infographics/fit-for-55-eu-emissions-trading-system/">accord politique</a> pour mettre en œuvre les propositions de réforme préparées par la Commission. Cela renforce la crédibilité politique du marché des quotas de CO<sub>2</sub>.</p>
<h2>La remontée du prix du quota : une arme anti-charbon</h2>
<p>Outre le renforcement de la crédibilité politique, la forte remontée du prix du quota en janvier et février 2023 répond aussi à la baisse du prix du charbon simultanément observée sur le marché de l’énergie.</p>
<p>La détente du prix du charbon est apparue sitôt que les risques de rupture d’approvisionnement sur le système électrique, élevés à l’approche de l’hiver, se sont atténués. Elle a été forte et rapide, car l’industrie avait constitué des stocks de précaution dans le nord de l’Europe qui n’ont pas été utilisés.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/512676/original/file-20230228-3678-t1lipl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/512676/original/file-20230228-3678-t1lipl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/512676/original/file-20230228-3678-t1lipl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/512676/original/file-20230228-3678-t1lipl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/512676/original/file-20230228-3678-t1lipl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=575&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/512676/original/file-20230228-3678-t1lipl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=575&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/512676/original/file-20230228-3678-t1lipl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=575&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">charbon.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur à partir des données Trading Economics</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Dans une économie sans régulation carbone, un prix du charbon qui baisse, ce sont des consommations et donc des émissions de gaz à effet de serre en plus. Surtout quand il existe des substitutions possibles entre combustibles, ce qui est le cas à une assez grande échelle en Europe entre le charbon et le gaz.</p>
<p>Avec le système d’échange de quotas, l’Union européenne va largement échapper à cet enchaînement pervers. La baisse du prix du charbon est en effet contrariée par le renchérissement des quotas de CO<sub>2</sub>. Le système d’échange des quotas agit ainsi comme une arme anti-charbon. C’est précieux au moment où il faut accélérer la transition énergétique pour être au rendez-vous du <a href="https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/green-deal/fit-for-55-the-eu-plan-for-a-green-transition/">-55 % de réduction des émissions nettes de gaz à effet de serre pour 2030</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/200774/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian de Perthuis ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La remontée du prix du quota de CO₂ en Europe a des effets sensibles sur un marché de l’énergie chamboulé par le conflit russo-ukrainien.Christian de Perthuis, Professeur d’économie, fondateur de la chaire « Économie du climat », Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1946522022-11-20T16:01:58Z2022-11-20T16:01:58ZComprendre les taux record atteints par les émissions de CO₂ en 2022<p>Cette année, les émissions mondiales de dioxyde de carbone (CO<sub>2</sub>) générées par toutes les activités humaines seront restées à des niveaux record, selon une nouvelle analyse du <a href="https://www.globalcarbonproject.org">Global Carbon Project</a>, un organisme réunissant des scientifiques du monde entier.</p>
<p>Chaque année, au sein du Global Carbon Project, nous calculons le <a href="https://doi.org/10.5194/essd-14-4811-2022">« bilan carbone »</a> de la Terre, c’est-à-dire la quantité de CO<sub>2</sub> que les humains ont rejetée ainsi que la quantité qui a été « retirée » de l’atmosphère par les océans et les écosystèmes terrestres.</p>
<p>À partir de là, nous évaluons la quantité de carbone qui peut encore être émise dans l’atmosphère avant que la Terre ne dépasse le seuil crucial de réchauffement climatique de 1,5 °C.</p>
<h2>Rester sous la barre de 1,5 °C de réchauffement</h2>
<p>Cette année, les émissions mondiales de CO<sub>2</sub> générées par nos activités devraient atteindre 40,6 milliards de tonnes de CO<sub>2</sub> ; ce qui nous laisse un « budget carbone restant » de 380 milliards de tonnes de CO<sub>2</sub> pour limiter le réchauffement global à 1,5 °C.</p>
<p>Cette quantité d’émissions est désastreuse pour le climat : aux niveaux actuels, il y a 50 % de chances que la planète atteigne l’augmentation de la température moyenne mondiale de 1,5 °C en seulement neuf ans.</p>
<p>Si nous constatons des progrès significatifs vers la décarbonation et la réduction des émissions de certains secteurs et pays, en particulier dans <a href="https://theconversation.com/theres-a-huge-surge-in-solar-production-under-way-et-l%E2%80%99australie-pourrait-montrer-au-monde-comment-l%E2%80%99utiliser-190241">l’électricité renouvelable</a>, l’effort mondial global reste largement insuffisant.</p>
<p>Or l’humanité doit réduire de toute urgence ses émissions pour être en mesure d’éviter les impacts les plus catastrophiques du changement climatique.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/493661/original/file-20221106-52309-e3mlth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/493661/original/file-20221106-52309-e3mlth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/493661/original/file-20221106-52309-e3mlth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=302&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/493661/original/file-20221106-52309-e3mlth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=302&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/493661/original/file-20221106-52309-e3mlth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=302&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/493661/original/file-20221106-52309-e3mlth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=380&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/493661/original/file-20221106-52309-e3mlth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=380&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/493661/original/file-20221106-52309-e3mlth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=380&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Budgets carbone à 1,5 °C, 1,7 °C et 2 °C de température moyenne mondiale, avec des émissions restantes de 380 milliards de tonnes de CO₂, 730 milliards de tonnes de CO₂ et 1 230 milliards de tonnes de CO₂, respectivement. Celles-ci seront consommées dans 9, 18 et 30 ans si les émissions actuelles persistent, à partir de 2023.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project 2022</span></span>
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<h2>Une croissance et un ralentissement</h2>
<p>Sur la base de données préliminaires, nous prévoyons que les émissions de CO<sub>2</sub> provenant de l’utilisation du charbon, du gaz naturel, du pétrole et du ciment (on les appelle « émissions fossiles ») augmenteront de 1 % en 2022 par rapport aux <a href="https://theconversation.com/global-emissions-almost-back-to-pre-pandemic-levels-after-unprecedented-drop-in-2020-new-analysis-shows-170866">niveaux de 2021</a>, pour atteindre 36,6 milliards de tonnes.</p>
<p>Cela signifie que les émissions fossiles de 2022 atteindront à un niveau record, légèrement au-dessus des niveaux pré-pandémiques de 36,3 milliards de tonnes en <a href="https://theconversation.com/global-emissions-to-hit-36-8-billion-tonnes-beating-last-years-record-high-128113">2019</a>.</p>
<p>Mais il faut caractériser plus finement cette croissance de 1 % (soit environ 300 millions de tonnes) pour 2022 :</p>
<ul>
<li><p>ce 1 % équivaut à ajouter <a href="https://www.epa.gov/greenvehicles/greenhouse-gas-emissions-typical-passenger-vehicle">70 millions</a> de voitures, comme on en voit rouler sur les routes du monde pendant un an ;</p></li>
<li><p>ce 1 % est supérieur à la croissance annuelle moyenne de 0,5 % de la dernière décennie (2012-2021) ;</p></li>
<li><p>mais il est inférieur à la croissance annuelle moyenne de 2,9 % au cours des années 2000 (qui était en grande partie due à la croissance économique rapide de la Chine) ; il est également inférieur à la croissance annuelle moyenne de 2,1 % des 60 dernières années.</p></li>
</ul>
<p>Ainsi, en termes relatifs, on peut affirmer que la croissance mondiale des émissions de CO<sub>2</sub> fossile est en train de ralentir.</p>
<h2>Hausse des émissions de charbon et de pétrole, baisse du gaz, ralentissement de la déforestation</h2>
<p>En 2022, la croissance des émissions fossiles est en grande partie due à une utilisation accrue de pétrole et de charbon ; et, plus particulièrement, de pétrole, l’industrie aéronautique repartant fortement après la pandémie.</p>
<p>Les émissions de charbon ont également augmenté cette année en réponse à la hausse des prix du gaz naturel et aux pénuries d’approvisionnement de cette ressource. Dans un tel contexte, il est ainsi possible que les émissions de charbon soient cette année supérieures au pic <a href="https://www.carbonbrief.org/global-coal-use-may-have-peaked-iea-world-enery-outlook/">historique de 2014</a>.</p>
<p>Une autre source majeure d’émissions mondiales de CO<sub>2</sub> concerne le changement d’affectation des terres – c’est-à-dire le flux net entre la déforestation et la reforestation. Nous prévoyons que 3,9 milliards de tonnes de CO<sub>2</sub> seront rejetées au total cette année. </p>
<p>Il faut toutefois souligner que les incertitudes des données sont plus élevées pour les émissions liées au changement d’affectation des terres que pour les émissions de CO<sub>2</sub> fossiles. Les émissions liées au changement d’affectation des terres étant estimées indirectement par des modèles de <em>bookkeeping</em> à partir de données par pays de changement des surfaces allouées aux cultures ou prairies.</p>
<p>Bien que les émissions liées au changement d’affectation des terres restent élevées, nous avons constaté une légère baisse au cours des deux dernières décennies, principalement en raison de l’augmentation du reboisement alors que les taux de déforestation restent relativement stables.</p>
<p>Ensemble, les combustibles fossiles et le changement d’affectation des terres sont responsables de 40,6 milliards de tonnes de CO<sub>2</sub>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/493981/original/file-20221107-21-jd8qq0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/493981/original/file-20221107-21-jd8qq0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/493981/original/file-20221107-21-jd8qq0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/493981/original/file-20221107-21-jd8qq0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/493981/original/file-20221107-21-jd8qq0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/493981/original/file-20221107-21-jd8qq0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/493981/original/file-20221107-21-jd8qq0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/493981/original/file-20221107-21-jd8qq0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Émissions mondiales de CO₂ liées aux fossiles et à l’utilisation des sols (gigatonnes de CO₂ = milliards de tonnes de CO₂).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project 2022</span></span>
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<h2>Un contexte international instable et troublé</h2>
<p>Cette année, les États-Unis et l’Inde sont responsables des plus fortes augmentations des émissions de CO<sub>2</sub> fossiles.</p>
<p>Les émissions états-uniennes devraient augmenter de 1,5 %. Alors que les émissions de gaz naturel et de pétrole sont plus élevées, les émissions du charbon continuent sur une longue tendance à la baisse. Les émissions de CO<sub>2</sub> fossiles de l’Inde devraient augmenter de 6 %, principalement en raison d’une augmentation de l’utilisation du charbon.</p>
<p>Pendant ce temps, les émissions de CO<sub>2</sub> provenant de sources de combustibles fossiles en Chine et dans l’Union européenne devraient diminuer cette année de 0,9 % et 0,8 %, respectivement.</p>
<p>Le déclin de la Chine est principalement dû aux <a href="https://edition.cnn.com/2022/11/09/china/china-Covid-guangzhou-lockdown-intl-hnk/index.html">fermetures en masse à cause de la pandémie de Covid</a> dans le pays, qui ont ralenti l’activité économique. Cela comprend un ralentissement marqué dans le secteur de la construction et la baisse de la production de ciment qui y est associée.</p>
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<p>Sur le continent européen, l’invasion de l’Ukraine par la Russie devrait entraîner une baisse de 10 % des émissions de CO<sub>2</sub> de l’Union européenne provenant du gaz naturel en 2022, en raison de pénuries d’approvisionnement. Cette pénurie a été partiellement remplacée par une plus grande consommation de charbon, entraînant une augmentation de 6,7 % des émissions européennes liées à cette énergie.</p>
<p>Le reste du monde représente 42 % des émissions mondiales de CO<sub>2</sub> fossile (avec une hausse de 1,7 % par rapport à l’an passé).</p>
<p>Au niveau des émissions mondiales de CO<sub>2</sub> dues au changement net d’affectation des terres, l’Indonésie, le Brésil et la République démocratique du Congo contribuent à 58 % des émissions globales.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/493665/original/file-20221106-23-o9f8cw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/493665/original/file-20221106-23-o9f8cw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/493665/original/file-20221106-23-o9f8cw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/493665/original/file-20221106-23-o9f8cw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/493665/original/file-20221106-23-o9f8cw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/493665/original/file-20221106-23-o9f8cw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/493665/original/file-20221106-23-o9f8cw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/493665/original/file-20221106-23-o9f8cw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Émissions mondiales de CO₂ fossile des principaux émetteurs et du reste du monde, avec des estimations préliminaires pour 2022 (gigatonnes de CO₂ = milliards de tonnes de CO₂). Source : Friedlinsgtein et al. 2022 ; Global Carbon Project 2022.</span>
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<h2>Des puits de carbone naturels sursollicités</h2>
<p>L’océan et la terre agissent toujours comme des puits de CO<sub>2</sub>. L’océan absorbe le CO<sub>2</sub> lorsqu’il se dissout dans l’eau de mer et en exporte une partie importante vers les grandes profondeurs. Sur terre, les plantes absorbent le CO<sub>2</sub> et l’accumulent dans leurs troncs, branches, feuilles et sols.</p>
<p>Cela fait des puits océaniques et terrestres un élément crucial de la régulation du climat mondial. Nos données montrent qu’en moyenne, les puits terrestres et océaniques éliminent environ la moitié de toutes les émissions de CO<sub>2</sub> des activités humaines, agissant comme une réduction de 50 % sur le changement climatique.</p>
<p>Malgré ces processus, la concentration de CO<sub>2</sub> atmosphérique continue de grimper. En 2022, il atteindra une moyenne projetée de 417,2 parties par million. C’est 51 % au-dessus des niveaux préindustriels, et plus élevé qu’à n’importe quel moment au cours des 800 000 dernières années.</p>
<p>Si les puits de carbone sont toujours en croissance régulière à mesure que le CO<sub>2</sub> s’accumule dans l’atmosphère, ces puits souffrent néanmoins déjà des conséquences du changement climatique (réchauffement global, augmentation des extrêmes climatiques et changements dans la circulation océanique) ; en conséquence de quoi, ils sont moins importants (de 17 % pour les puits terrestres et de 4 % pour les puits océaniques) que ce qu’ils auraient pu être en l’absence de changement climatique.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/494595/original/file-20221110-23-eztluc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Rivière serpentant à travers une forêt" src="https://images.theconversation.com/files/494595/original/file-20221110-23-eztluc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/494595/original/file-20221110-23-eztluc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/494595/original/file-20221110-23-eztluc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/494595/original/file-20221110-23-eztluc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/494595/original/file-20221110-23-eztluc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/494595/original/file-20221110-23-eztluc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/494595/original/file-20221110-23-eztluc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les puits de carbone, comme les forêts tropicales, absorbent la moitié des émissions de CO₂ émises par les activités humaines.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ivars Utinans/Unsplash</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Répétons-le : des progrès significatifs ont été réalisés cette année dans le déploiement des énergies renouvelables, l’élaboration de politiques et les engagements des gouvernements et des entreprises envers de nouveaux objectifs d’atténuation du changement climatique plus ambitieux.</p>
<p>Mais nous devons de toute urgence atteindre zéro émission nette de CO<sub>2</sub> pour maintenir le réchauffement climatique bien en dessous de 2 °C durant le XXI<sup>e</sup> siècle. Les émissions massives de nos activités pour 2022 soulignent la tâche monumentale qui nous attend.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/194652/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pep Canadell a reçu des financements du Australian National Environmental Science Program (NESP) Climate Systems Hub.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Corinne Le Quéré a reçu des financements via le programme de recherche et d'innovation Horizon 2020 de l'Union européenne sous la convention de subvention n° 821003 (4C), par le Natural Environment Research Council des Nations Unies sous la subvention NE/V011103/1 (Frontiers), et par la Royal Society britannique sous la subvention RP\R1\191063 (Research Professorship). Corinne Le Quéré préside le Haut conseil pour le climat et est membre du UK Climate Change Committee. Sa position exprimée dans cet article est la sienne et ne reflète pas nécessairement celle de ces groupes.
Traduit avec <a href="http://www.DeepL.com/Translator">www.DeepL.com/Translator</a> (version gratuite)</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Glen Peters a reçu des financements du programme de recherche et d'innovation Horizon 2020 de l'Union européenne sous les conventions de subvention n° 821003 (4C), 820846 (PARIS REINFORCE) et 958927 (CoCO2).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Judith Hauck a reçu des financements du Fonds d'initiative et de mise en réseau de l'Association Helmholtz (Helmholtz Young Investigator Group Marine Carbon and Ecosystem Feedbacks in the Earth System, MarESys, numéro de subvention VH-NG-1301).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pour ses travaux, Philippe Ciais a reçu des financements pour la recherche de l'Agence nationale de la recherche française, de la Commission européenne et d'organisations privées. Ses résultats de recherche sont publiés dans la littérature évaluée par les pairs. Philippe Ciais est professeur à temps partiel à l'organisme public de recherche de l'Institut de Chypre.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pierre Friedlingstein a reçu des financements du programme de recherche et d'innovation Horizon 2020 de l'Union européenne dans le cadre de la convention de subvention 821003 (4C).
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Robbie Andrew a reçu des financements du programme de recherche et d'innovation Horizon 2020 de l'Union européenne, sous les conventions de subvention n° 821003 (4C), 820846 (PARIS REINFORCE) et 958927 (CoCO2), ainsi que de l'Agence norvégienne pour l'environnement.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Rob Jackson a reçu des financements de la Fondation Gordon et Betty Moore et de la California Energy Commission.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Julia Pongratz ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Aux niveaux actuels d'émissions, il y a 50 % de chances que la planète atteigne la hausse de température moyenne mondiale de 1,5 °C dans les 9 ans à venir.Pep Canadell, Chief Research Scientist, Climate Science Centre, CSIRO Oceans and Atmosphere; Executive Director, Global Carbon Project, CSIROCorinne Le Quéré, Royal Society Research Professor of Climate Change Science, University of East AngliaGlen Peters, Research Director, Center for International Climate and Environment Research - OsloJudith Hauck, Helmholtz Young Investigator group leader and deputy head of the Marine Biogeosciences section at the Alfred Wegener Institute, Universität BremenJulia Pongratz, Professor of Physical Geography and Land Use Systems, Department of Geography, Ludwig Maximilian University of MunichPhilippe Ciais, Directeur de recherche au Laboratoire des science du climat et de l’environnement, Institut Pierre-Simon Laplace, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)Pierre Friedlingstein, Chair, Mathematical Modelling of Climate, University of ExeterRobbie Andrew, Senior Researcher, Center for International Climate and Environment Research - OsloRob Jackson, Professor, Department of Earth System Science, and Chair of the Global Carbon Project, Stanford UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1935682022-11-11T17:13:37Z2022-11-11T17:13:37ZSortir du capitalisme, condition nécessaire mais non suffisante face à la crise écologique<p><em>Alors que les impératifs de sobriété et de décarbonation se font de plus en plus pressants, les pays restent dans leur immense majorité extrêmement dépendants des ressources fossiles, dont la combustion à l’échelle mondiale aggrave et accélère la crise climatique. Dans « L’Emballement du monde », <a href="https://ecosociete.org/livres/l-emballement-du-monde">qui vient de paraître aux éditions Écosociété</a>, l’ingénieur et économiste Victor Court propose d’explorer les liens historiques entre énergie et domination au sein des sociétés humaines. L’extrait que nous vous proposons ci-dessous se consacre plus particulièrement à l’examen critique du concept de « Capitalocène », proposé par le chercheur et militant suédois Andreas Malm, pour identifier les responsables du réchauffement climatique.</em></p>
<hr>
<p><a href="https://theconversation.com/les-mots-de-la-science-a-comme-anthropocene-146440">Le concept d’Anthropocène</a> suggère que toutes les actions humaines peuvent être instantanément subsumées sous une activité globale dont l’empreinte affecte la biogéosphère. Il fabrique ainsi une humanité abstraite, aussi uniformément concernée que responsable.</p>
<p>Ce grand discours est problématique, car, s’il est certain que tous les humains vont subir les conséquences du dérèglement climatique et de l’effondrement de la biodiversité (dans des proportions très différentes cependant), il est impossible au regard de l’histoire d’affirmer que tous les membres de l’humanité partagent le même degré de responsabilité dans ce désastre.</p>
<p>Un Nord-Américain ne peut pas être aussi responsable des bouleversements du système Terre qu’un Kenyan qui consomme en moyenne 30 fois moins de matières premières et d’énergie que lui.</p>
<p>C’est principalement en raison de cette défaillance conceptuelle qu’<a href="https://lafabrique.fr/lanthropocene-contre-lhistoire/">Andreas Malm</a> a proposé, l’un des premiers, la notion de « Capitalocène » comme solution de remplacement.</p>
<p>L’humanité évoluerait dans cette époque depuis environ 200 ans, au moment de la mise en place du capital fossile – un système défini par Malm, rappelons-le, comme « la production de valeur d’échange et la maximisation des profits au moyen de l’énergie fossile ».</p>
<p>Bien qu’elle soit très enrichissante sur le plan intellectuel, cette idée n’est pas non plus exempte de défauts.</p>
<h2>L’avènement du capitalisme fossile</h2>
<p>Tout d’abord, si le concept de Capitalocène sert à désigner une nouvelle époque géologique qui aurait commencé avec la révolution industrielle, alors il souffre d’un problème de dénomination, car le capitalisme ne désigne pas un mode d’organisation économique que l’on peut restreindre aux 200 dernières années. […]</p>
<p>Il a existé en Europe un capitalisme marchand que l’on peut qualifier de « <a href="https://www.cairn.info/une-histoire-du-monde-global--9782361060299-page-231.htm">concentré</a> » à partir du XII<sup>e</sup> siècle environ. De plus, les premiers indices d’acquisition de terres par quelques riches familles datent du milieu du III<sup>e</sup> millénaire avant l’ère commune à Sumer, tandis que la propriété privée lucrative – concept qui fonde probablement plus que tout autre la notion de capitalisme – est avérée depuis les Romains.</p>
<p>Comme le synthétise l’archéologue <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/une_histoire_des_civilisations-9782707188786">Dominique Garcia</a> :</p>
<blockquote>
<p>« L’accumulation du capital couplée à la recherche de profit s’est d’abord développée avec l’appareil d’État et les institutions des palais et des temples. » […]</p>
</blockquote>
<p>La question de l’origine antique ou médiévale du capitalisme est très complexe, et il n’est pas question ici de tenter d’y répondre convenablement. Malgré tout, il faut admettre que le capitalisme marchand du second Moyen Âge et du début de la période moderne a été suivi à partir du XIX<sup>e</sup> siècle par un capitalisme fossile, auquel on peut d’abord ajouter le qualificatif d’« industriel », mais qui serait peut-être mieux désigné aujourd’hui par le terme « financier » – même si l’industrie reste forcément le soubassement sur lequel la finance et les services s’appuient pour activer leurs processus d’accumulation du capital.</p>
<p>Il est même clair qu’à partir du XVI<sup>e</sup> siècle, le capitalisme marchand a préparé le terrain pour que le capitalisme industriel s’exprime pleinement par la suite, notamment par le biais du système colonial des plantations esclavagistes.</p>
<p>En effet, nous disent <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/l-evenement-anthropocene-jean-baptiste-fressoz/9782757859599">Christophe Bonneuil et Jean-Baptiste Fressoz</a> :</p>
<blockquote>
<p>« L’Anthropocène n’est pas sorti tout armé du cerveau de James Watt, de la machine à vapeur et du charbon, mais d’un long processus de mise en relation économique du monde, d’exploitation des hommes et du globe, remontant au XVI<sup>e</sup> siècle et qui a rendu possible l’industrialisation. »</p>
</blockquote>
<p>La dénomination de Capitalocène n’est donc pas adaptée pour désigner les 200 dernières années du capitalisme fossile, comme Andreas Malm et d’autres souhaitent le faire. Si Capitalocène il y a, celui-ci remonte au XVI<sup>e</sup> siècle, voire au début du second Moyen Âge (XII<sup>e</sup> siècle), et peut-être même à l’Antiquité dans des formes plus diffuses.</p>
<h2>Des régimes non capitalistes extrêmement extractivistes</h2>
<p>Ensuite, le terme Capitalocène tend à évincer un fait majeur du XX<sup>e</sup> siècle, à savoir que des régimes non capitalistes – ou en tout cas n’autorisant pas la propriété privée – ont été extrêmement extractivistes et polluants. Tout comme les sociétés capitalistes, ces régimes d’inspiration socialiste prenant la forme de collectivismes bureaucratiques et totalitaires ont massivement eu recours aux énergies fossiles, tout en engendrant des désastres écologiques comparables à ceux du capitalisme occidental.</p>
<p>Partant de ce constat, le philosophe <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/l_age_productiviste-9782707198921">Serge Audier</a> écrit :</p>
<blockquote>
<p>« Si l’on décidait de parler de « capitalocène », peut-être faudrait-il alors se résoudre à parler également, en un certain sens, de « socialocène » et surtout de « communistocène », ce que curieusement personne ne se risque à faire. Aussi pénible que soit la reconnaissance du rôle majeur joué dans la crise écologique non seulement par les régimes communistes, mais aussi, beaucoup plus largement, par le socialisme et la gauche dans leur axe majoritaire, cette responsabilité historique doit être pleinement assumée. »</p>
</blockquote>
<p>Andreas Malm reconnaît cette objection et il propose d’ailleurs de désigner par « stalinisme fossile » ce type de système économique qui se définit par « la maximisation du pouvoir bureaucratique au moyen des combustibles fossiles ». Pour autant, Malm ne conclut pas que cette réalité invalide sa proposition d’utiliser le concept de Capitalocène pour désigner l’époque où l’humanité est devenue une force agissante d’ampleur tellurique.</p>
<p>Ses arguments consistent à dire que « chronologiquement, causalement, historiquement, le lien entre l’économie fossile et le capitalisme semble plus étroit » et que « surtout, le stalinisme est mort ».</p>
<p>Certes, le stalinisme n’est plus, et allons même jusqu’à admettre l’intensité moindre de son lien avec l’énergie fossile par rapport au capitalisme (hypothèse hautement contestable qu’il s’agirait de démontrer). Cela n’enlève strictement rien au problème : il a existé des économies fossiles ne reposant pas sur le capitalisme (de propriété privée) au XX<sup>e</sup> siècle, et il faut reconnaître que les doctrines socialistes et communistes ne se sont réellement souciées des contraintes écologiques qu’assez récemment.</p>
<p>Ceci renforce l’idée que le concept de Capitalocène est inadapté pour correctement qualifier la période pendant laquelle les activités humaines ont fait sortir la Terre de l’Holocène.</p>
<h2>Un jour, la fin de l’accumulation infinie ?</h2>
<p>En plus de son incapacité à capter la réalité du passé, le concept de Capitalocène pourrait être aussi inopérant dans le futur.</p>
<p>Même s’il est difficile de le définir, le capitalisme a bien eu un début et par extension il est fort probable qu’il aura une fin – même s’il nous paraît parfois <a href="https://newleftreview.org/issues/ii21/articles/fredric-jameson-future-city">plus facile d’imaginer la fin du monde que celle du capitalisme</a>.</p>
<p>En vérité, on peut être absolument certain que la fin du capitalisme arrivera un jour pour une raison très simple : dans un monde où les limites physiques sont par définition finies, l’accumulation infinie du capital est logiquement impossible […].</p>
<p>Cette fin du capitalisme ne correspondra sûrement pas à une chute brutale. Comme son origine, elle sera issue d’un long processus qui impliquera qu’au bout d’un moment, à force de mutations, le mot « capitalisme » recouvrira une réalité trop différente pour que les politologues et les économistes continuent d’utiliser cette notion.</p>
<p>Dans ce futur hypothétique, les humains vivront peut-être dans des sociétés non capitalistes, mais en soi cela n’implique pas automatiquement que les activités humaines ne perturberont plus l’environnement à une échelle planétaire. Dans un monde où la propriété (privée ou étatique) aurait disparu – ou en tout cas ne serait plus une source de domination et d’exploitation comme aujourd’hui –, il faudrait encore parvenir à empêcher la mise en place d’autres formes d’accaparement sauvage de l’énergie et des matières premières pour que les humains ne poursuivent pas leur entreprise de destruction massive de la biogéosphère.</p>
<h2>L’hypothèse d’un communisme réel</h2>
<p>Plutôt que de réfléchir à cette question par un voyage dans le futur, tentons de voyager dans le passé. Imaginons qu’à partir du XVI<sup>e</sup> siècle, le monde ait emprunté une trajectoire différente.</p>
<p>Au lieu de prendre la voie du capitalisme moderne en allant exploiter les Amériques et l’Afrique, l’Europe aurait choisi celle d’un communisme réel – donc très loin des expériences soviétiques et chinoises de collectivisme d’État que nous avons connues au XX<sup>e</sup> siècle. On parle ici d’un communisme libertaire tel que celui imaginé par <a href="https://wildproject.org/livres/l-ecologie-sociale">Murray Bookchin</a> dans les années 1970-80, ou plus récemment par <a href="https://ladispute.fr/catalogue/en-travail-conversation-sur-le-communisme/">Bernard Friot et Frédéric Lordon</a>. On pourrait aussi évoquer l’écosocialisme d’<a href="https://www.seuil.com/ouvrage/leur-ecologie-et-la-notre-andre-gorz/9782021451863">André Gorz</a> et d’<a href="https://www.seuil.com/ouvrage/la-convivialite-ivan-illich/9782757842119">Ivan Illich</a>.</p>
<p>Maintenant, quels arguments peut-on avancer pour établir que, dans ce genre de configuration, les combustibles fossiles n’auraient pas été exploités ? Bien sûr, les penseurs que nous venons de citer ont justement formulé leurs propositions pour nous aider à sortir des combustibles fossiles – et plus largement à rester à l’intérieur des limites du système Terre.</p>
<p>Mais est-on certain que ces intellectuels auraient fait preuve du même égard pour le climat et la biodiversité s’ils avaient vécu au XVIII<sup>e</sup> ou au XIX<sup>e</sup> siècle ? Et en dehors de ces individus, en quoi les sociétés dans leur ensemble auraient-elles été mieux positionnées pour choisir délibérément de renoncer à l’abondance matérielle associée à la manne fossile ? Honnêtement, on ne voit pas bien comment élaborer un argumentaire convaincant.</p>
<p>Tout au plus peut-on imaginer que les ressources fossiles auraient été exploitées un peu moins frénétiquement, et sûrement aussi avec plus d’équité. Mais on peut penser que le résultat en matière de déstabilisation du système Terre aurait été <em>grosso modo</em> le même, le désastre environnemental que nous connaissons aujourd’hui serait seulement arrivé un peu plus tard.</p>
<p>Ainsi, si on peut être certain de la nature intrinsèquement destructrice du capitalisme – et qu’en cela les souhaits de développement durable, de croissance verte et d’économie circulaire s’inscrivant dans ce cadre ne pourront jamais être autre chose que de vaines incantations –, rien ne dit qu’une économie non capitaliste conduirait automatiquement à une société plus soutenable.</p>
<h2>Exploitation, accaparement, pillage</h2>
<p>Mettre le capitalisme à l’arrêt est donc une condition nécessaire, mais non suffisante pour instaurer un vivre humain qui demeurerait à l’intérieur des limites du système Terre. Si les géologues du présent entérinent finalement la sortie de l’Holocène et nomment Capitalocène l’époque géologique actuelle, ceux du futur se retrouveront dans une situation très embarrassante si le capitalisme vient à disparaître, mais qu’en même temps les humains maintiennent leur emprise destructrice sur la planète.</p>
<p>Enfin, comme le concept d’Anthropocène, celui de Capitalocène entraîne un problème d’identification des responsabilités.</p>
<p>Il pourrait tout d’abord laisser penser à certains que les capitalistes – c’est-à-dire les détenteurs des moyens de production – sont les seuls coupables. Nul doute que par le pouvoir et la richesse qu’ils détiennent, certains capitalistes, sinon la plupart, sont individuellement responsables d’un grand nombre d’actions néfastes pour l’humanité.</p>
<p>La réalité est tout de même plus complexe […], et chaque individu peut comprendre qu’il participe lui aussi à la perpétuation du capitalisme fossile, ne serait-ce que par ses choix de consommation – ou plutôt par son non-choix de changer radicalement son mode de vie –, sans oublier bien sûr la responsabilité énorme qui revient aux dirigeants politiques à cause de leur inaction. […]</p>
<p>C’est bien parce que tous ces acteurs sont interconnectés aux processus de production et de consommation – très souvent au travers de relations antagonistes – que nous avons tant de mal à renoncer aux énergies fossiles.</p>
<p>Mais quoi qu’il en soit, avec le concept de Capitalocène, ce que Malm et d’autres penseurs souhaitent désigner comme le vrai responsable des maux de l’humanité correspond plutôt au capital, c’est-à-dire le rapport social d’exploitation qui existe entre les capitalistes et les travailleurs ne détenant pas les moyens de production.</p>
<p>La source de la propension destructrice de certaines sociétés humaines – dans lesquelles se trouve la quasi-totalité de l’humanité aujourd’hui – se situerait donc non pas dans le fait qu’il existe des capitalistes en tant que tels, mais dans le fait que ces derniers – comme d’autres avant eux – sont en mesure d’exploiter leurs semblables, notamment en rétribuant leur force de travail à une valeur inférieure à celle produite réellement par ce travail, afin de créer une plus-value qu’ils peuvent accaparer.</p>
<p>En fin de compte, la logique du capital renvoie à un phénomène plus large que chacun peut observer dans l’histoire et surtout dans sa vie quotidienne : l’existence protéiforme et omniprésente de relations de domination entre les individus […]. Et l’existence d’une domination institutionnalisée qui traverse la totalité de la société n’est pas une exclusivité des 200 à 300 dernières années.</p>
<p>[…]</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/494752/original/file-20221110-16-vihmxh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/494752/original/file-20221110-16-vihmxh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/494752/original/file-20221110-16-vihmxh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=896&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/494752/original/file-20221110-16-vihmxh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=896&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/494752/original/file-20221110-16-vihmxh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=896&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/494752/original/file-20221110-16-vihmxh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1126&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/494752/original/file-20221110-16-vihmxh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1126&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/494752/original/file-20221110-16-vihmxh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1126&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">« L’Emballement du monde » est paru aux éditions Écosociété le 10 novembre 2022.</span>
<span class="attribution"><a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>Finalement, malgré ses qualités indéniables, le concept de Capitalocène souffre d’insuffisances à la fois trop nombreuses et trop importantes pour être un substitut pertinent du concept d’Anthropocène. L’exploitation de la majorité par une minorité pour accaparer des surplus tout en pillant les ressources de la nature n’a pas attendu le capitalisme moderne pour exister.</p>
<p>Le capitalisme n’est donc pas en soi la cause ultime de la destruction de notre environnement global, même s’il faut reconnaître qu’il fait preuve d’une efficacité redoutable dans ce domaine, en particulier depuis qu’il est basé sur l’énergie fossile. </p>
<p>[…]</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/193568/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Victor Court est membre de la chaire « Énergie & Prospérité » et chercheur associé au Laboratoire Interdisciplinaire des Energies de Demain (LIED, Université Paris Cité). Les opinions exprimées dans ces pages n’engagent que leur auteur, elles ne reflètent en aucun cas le point de vue des institutions auxquelles il est affilié.</span></em></p>Peut-on vraiment dire que le capitalisme industriel des 200 dernières années est le responsable du réchauffement climatique ?Victor Court, Enseignant-chercheur en économie à IFP School, IFP Énergies nouvelles Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1804742022-05-10T18:00:18Z2022-05-10T18:00:18ZRapports du GIEC : il faut cesser de réchauffer la planète<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/461082/original/file-20220503-19379-pmjkcy.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=39%2C0%2C6511%2C4922&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des personnes marquent le Jour de la Terre par une marche, le 22 avril 2022, à Montréal.</span> <span class="attribution"><span class="source">LA PRESSE CANADIENNE/Ryan Remiorz</span></span></figcaption></figure><p>Le dernier rapport du Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publié le 4 avril, a suscité de grandes inquiétudes, comme le précédent publié au début de l’année 2022. Le premier porte sur les <a href="https://www.ipcc.ch/report/sixth-assessment-report-working-group-ii/">impacts</a> des changements climatiques. Le deuxième présente un <a href="https://www.ipcc.ch/report/sixth-assessment-report-working-group-3/">portrait</a> des solutions possibles en réponse à la crise du climat.</p>
<p>Cet article vise à créer un lien entre ces deux rapports majeurs et revient sur les points essentiels qu’il faut retenir.</p>
<p>Chargé de cours à l’Université de Montréal, je suis directeur de la diplomatie climatique internationale du Réseau action climat Canada. J’analyse et je suis les négociations climatiques internationales, surtout en ce qui concerne les obligations et responsabilités climatiques du Canada à l’échelle internationale, l’implantation des plans climatiques à l’échelle domestique et la finance climatique internationale.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/climat-le-rapport-du-giec-est-bouleversant-il-est-maintenant-temps-dagir-165851">Climat : le rapport du GIEC est bouleversant. Il est maintenant temps d’agir</a>
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<h2>Accélérer l’action climatique, c’est possible</h2>
<p>Selon le rapport sur les solutions d’atténuation aux changements, nous pouvons respecter les objectifs climatiques dans le cadre de <a href="https://unfccc.int/fr/processus-et-reunions/l-accord-de-paris/l-accord-de-paris">l’Accord de Paris</a>. Cela exige cependant une transformation des systèmes politiques, économiques et sociaux qui nous gouvernent. Cela demande également une plus grande mobilisation de tous les acteurs de la société civile, du secteur privé et de tous les paliers du gouvernement. Par exemple, les experts du GIEC concluent que les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gr%C3%A8ve_%C3%A9tudiante_pour_le_climat">grèves pour le climat</a> ont contribué à accélérer l’action climatique en donnant la parole aux jeunes dans plus de 180 pays.</p>
<p>Les solutions d’atténuation pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) de moitié d’ici 2030 et atteindre la carboneutralité des émissions en 2050 sont aujourd’hui moins chères que jamais et disponibles. Par exemple, entre 2015 et 2019, le coût unitaire de plusieurs sources d’énergie renouvelable a rapidement chuté. Par conséquent, on remarque une augmentation dans le déploiement de l’énergie solaire de <a href="https://report.ipcc.ch/ar6wg3/pdf/IPCC_AR6_WGIII_FinalDraft_TechnicalSummary.pdf">170 % et de l’énergie éolienne de 70 % entre 2015 et 2019</a> (section 5.1).</p>
<p>Mais nous devrons également faire face à plusieurs défis sociaux et politiques alors qu’on accélère l’implantation des politiques climatiques à l’échelle globale.</p>
<h2>Trois défis</h2>
<ol>
<li><strong>Les impacts de la crise climatique s’accélèrent</strong></li>
</ol>
<p>On observe aujourd’hui de plus en plus des pertes et dommages dus aux changements climatiques dans tous les écosystèmes et dans toutes les régions du monde. Environ <a href="https://report.ipcc.ch/ar6wg2/pdf/IPCC_AR6_WGII_FinalDraft_TechnicalSummary.pdf">3,3 milliards de personnes</a> vivent dans des contextes très vulnérables face au réchauffement planétaire. Depuis 2008, plus de <a href="https://report.ipcc.ch/ar6wg2/pdf/IPCC_AR6_WGII_FinalDraft_TechnicalSummary.pdf">20 millions de personnes</a> ont été déplacées à l’intérieur de leur pays chaque année en raison d’événements extrêmes liés aux conditions météorologiques. S’en suivent des effets négatifs sur la santé mentale, le bien-être, la satisfaction dans la vie, le bonheur, les performances cognitives et l’agressivité des populations exposées.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/461092/original/file-20220503-11804-nnewan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="homme marche dans une rue inondée" src="https://images.theconversation.com/files/461092/original/file-20220503-11804-nnewan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/461092/original/file-20220503-11804-nnewan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/461092/original/file-20220503-11804-nnewan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/461092/original/file-20220503-11804-nnewan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/461092/original/file-20220503-11804-nnewan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=506&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/461092/original/file-20220503-11804-nnewan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=506&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/461092/original/file-20220503-11804-nnewan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=506&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Sur cette photo d’archive du 6 novembre 2020, un résident marchant dans une rue inondée regarde les dégâts causés par l’ouragan Eta à Planeta, au Honduras.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Delmer Martinez, File)</span></span>
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</figure>
<p>Déjà, entre 2010 et 2020, la mortalité humaine due aux inondations, aux sécheresses et aux tempêtes était 15 fois plus élevée dans les régions très vulnérables, par rapport aux régions très peu vulnérables.</p>
<p>Un dépassement du réchauffement climatique au-delà de 1,5 °C entraînerait des impacts majeurs inévitables et irréversibles. Par exemple, il accélérerait la dégradation des récifs coralliens, la perte du patrimoine culturel ou la perte des petites îles en raison de l’élévation du niveau de la mer. Une fois survenus, les impacts persisteraient même si les températures mondiales baissaient par la suite.</p>
<ol>
<li><strong>Les émissions continuent d’augmenter… surtout chez les riches</strong></li>
</ol>
<p>Les émissions nettes totales de GES sont désormais supérieures de <a href="https://report.ipcc.ch/ar6wg3/pdf/IPCC_AR6_WGIII_SummaryForPolicymakers.pdf">54 % à celles de 1990</a> (section B.1.1), année du début des négociations internationales sur le climat. Le GIEC confirme la plus forte augmentation absolue des émissions de GES jamais enregistrées dans l’histoire de l’humanité.</p>
<p>D’ailleurs, ce rapport du GIEC s’attaque aux enjeux liés aux inégalités des revenus et inégalités des émissions. Depuis 1980, on observe une croissance économique disproportionnée pour les individus faisant partie du groupe des 1 % les plus fortunés de la planète. D’après certaines recherches analysées par les scientifiques du GIEC, ce groupe aurait une empreinte carbone moyenne 175 fois supérieure à celle d’une personne faisant partie des 10 % les plus pauvres. Les ménages dont les revenus se situent dans les 10 % les plus élevés contribuent à environ 36-45 % des émissions mondiales de GES.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/461094/original/file-20220503-23-nl12sj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="paysage avec centrales électriques" src="https://images.theconversation.com/files/461094/original/file-20220503-23-nl12sj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/461094/original/file-20220503-23-nl12sj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/461094/original/file-20220503-23-nl12sj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/461094/original/file-20220503-23-nl12sj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/461094/original/file-20220503-23-nl12sj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=460&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/461094/original/file-20220503-23-nl12sj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=460&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/461094/original/file-20220503-23-nl12sj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=460&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La centrale électrique de Liddell, à gauche, et la centrale électrique de Bayswater, une centrale thermique alimentée au charbon, près de Muswellbrook, en Australie, en novembre 2021. Le premier ministre australien Scott Morrison a lancé un fonds d’investissement d’un milliard de dollars australiens pour accélérer les technologies émergentes à faibles émissions, notamment le captage et le stockage du carbone.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Mark Baker)</span></span>
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</figure>
<ol>
<li><strong>La résistance au changement</strong></li>
</ol>
<p>Tout retard additionnel dans l’action mondiale nous fera manquer une courte fenêtre d’opportunité, qui se refermera rapidement si nous souhaitons garantir un avenir viable et durable pour tous.</p>
<p>Nous disposons de suffisamment de ressources, de capitaux mondiaux et de liquidités pour combler l’écart en matière d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques.</p>
<p>Mais les institutions et gouvernements tardent à débloquer, institutionnaliser et accélérer les politiques qui conduisent à de profondes réductions des émissions. Il y a résistance des entreprises dans les secteurs à forte émission de carbone qui ne souhaitent pas voir l’implantation de politiques ambitieuses à l’échelle domestique.</p>
<p>Les fonds publics sont mal utilisés. Nous devons rapidement arrêter de subventionner les combustibles fossiles. La fin des subventions aux énergies fossiles peut réduire les émissions mondiales de CO<sub>2</sub> de <a href="https://report.ipcc.ch/ar6wg3/pdf/IPCC_AR6_WGIII_SummaryForPolicymakers.pdf">1 à 4 %</a> (section B.1.1), et les émissions de GES jusqu’à 10 % d’ici à 2030.</p>
<h2>Il faut cesser de réchauffer la planète</h2>
<p>Ces deux rapports nous présentent un même constat. Les plans et les politiques climatiques actuels nous rendront plus vulnérables et plus pauvres. Ils finiront par miner le bien-être de centaines de millions de personnes à haut risque de vagues de chaleur extrêmes.</p>
<p>L’approvisionnement alimentaire se verra perturbé, les dommages économiques s’intensifieront et les systèmes naturels s’effondreront. Et ce, avec des coûts bien plus importants que ceux observés jusqu’à maintenant, en particulier sur les groupes traditionnellement marginalisés, les peuples autochtones et les habitants des pays vulnérables.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1510998128224317448"}"></div></p>
<p>Nous avons encore des choix. Plus nous émettons de GES, plus la situation s’aggrave. Chaque fraction de degré de réchauffement entraîne des conséquences plus graves. Moins nous réchauffons la planète, moins nous verrons d’impacts. Il s’agit d’une question de justice sociale et d’équité puisque cette crise représente déjà une menace pour notre bien-être et pour la santé de la planète.</p>
<p>En octobre, un autre document sera présenté : le rapport de synthèse, qui reprendra les messages clés des trois groupes de travail. Il s’agit de la plus ambitieuse contribution scientifique du GIEC aux décideurs politiques et aux citoyens de tous les coins de la planète.</p>
<p>Toutefois, le défi sera de transformer ce savoir en action lorsque les États-nations se rencontreront en novembre pour la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Conf%C3%A9rence_de_Charm_el-Cheikh_de_2022_sur_les_changements_climatiques">grande conférence onusienne sur le climat en Égypte, la Cop 27</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/180474/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Eddy Pérez est membre du Réseau action climat international. </span></em></p>Le dernier rapport du GIEC dresse un portrait des solutions visant à freiner le changement climatique. Cela exige une transformation des systèmes politiques, économiques et sociaux qui nous gouvernent.Eddy Pérez, Lecturer, certificat en coopération internationale, Université de MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1719842021-12-13T18:20:30Z2021-12-13T18:20:30ZLes mineurs marocains, derniers damnés des Houillères<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/436995/original/file-20211210-91139-18h59ef.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C4%2C2971%2C2989&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">« Arrivée de main-d'œuvre marocaine à l'aéroport de Lesquin, 9 janvier 1976 »
</span> <span class="attribution"><span class="source"> Centre Historique Minier (prêt ANMT)</span></span></figcaption></figure><p><em>Le ventre des hommes</em>, roman de Samira El Ayachi <a href="https://www.babelio.com/livres/Ayachi-Le-ventre-deshommes/1339150">qui vient de paraître aux éditions de L’Aube</a>, entraîne le lecteur dans les dernières années de l’exploitation du charbon dans le Bassin du Nord-Pas-de-Calais. Le sort des ouvriers marocains, recrutés sur place dans leur pays par un envoyé spécial des Houillères pour sortir les <a href="https://www.cairn.info/revue-plein-droit-2009-2-page-35.htm">dernières tonnes de houille du bassin</a> est, avec la figure du père de la narratrice – un homme « aux yeux tirés », « aux yeux pliés par l’inquiétude » – au cœur de ce récit.</p>
<p>De nombreuses questions liées à la place dévolue aux travailleurs immigrés au sein de la société française y sont abordées. À quel travail sont-ils astreints ? À quel type de contrat ont-ils droit ? Quels logements leur sont attribués ? Comment peuvent-ils lutter contre les conditions qui sont leur sont faites ? Pourtant en filigrane tout au long du livre, comme une note d’espoir, il y a la présence de l’école de la République. Celle qui donne aux enfants de ces travailleurs, qui savent s’en saisir, les clefs d’un autre monde !</p>
<h2>Les mineurs marocains</h2>
<p>Dans les années 1960, puis 70 – lors du premier choc pétrolier, – les Houillères du Nord Pas-de-Calais font appel, chaque année, à plusieurs milliers de travailleurs marocains pour contribuer à l’extraction du charbon. Autre personnage très présent dans le roman, Félix Mora, un <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2020/06/25/le-tampon-vert-tu-partais-en-france-le-rouge-tu-retournais-au-bled-sur-la-piste-de-felix-mora-l-homme-qui-a-embauche-des-milliers-de-travailleurs-marocains-pour-les-mines-francaises_6044081_3212.html">ancien officier de l’armée française qui parle l’arabe et qui est au cœur d’un processus de recrutement commencé dès 1949</a>. Pour le compte des Houillères, il se rend à de très nombreuses reprises dans le sud du Maroc où il sélectionne, dans la vallée du Drâa, d’où est originaire le père d’Hannah l’héroïne du roman de Samira El Ayachi, dans le Tafilalet, ou encore dans la région de Ouarzazate, des milliers de paysans pauvres. Entre 1949 et 1977, <a href="https://www.septentrion.com/fr/livre/?GCOI=27574100455490">78 000 Marocains seront recrutés pour travailler dans les mines</a>. Mora ne s’est-il pas vanté à la télévision d’avoir « regardé dans le blanc des yeux un million de candidats au moins » ?</p>
<p>Par petites touches, puis dans un long historique, <em>Le Ventre des hommes</em> rappelle les conditions dans lesquelles ces Marocains âgés de plus de 21 ans, pesant au minimum 55 kilos, sans infirmité et ayant une très bonne acuité visuelle, sont arrivés dans le bassin houiller. Ils ne sont pas tous venus en avion, comme voudrait le faire accroire la « com’ » des Houillères, mais en camion ou en car jusqu’à Casablanca, puis par bateau jusqu’à Marseille ou Bordeaux, enfin en train à leurs frais jusqu’à Douai. Logés dans des « baraques » de quelques mètres carrés ou dans des camps pour célibataires, car ils doivent arriver seuls, <a href="https://www.septentrion.com/fr/livre/?GCOI=27574100455490">ils vivent isolés des autres mineurs</a>.</p>
<p>Ils ne savent donc pas qu’ils ne bénéficient <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00277/le-regime-minier.html">d’aucun des avantages du Statut du mineur, décrété en juin 1946</a>. Ils n’ont, en effet, ni contrat de travail ni logement, « à vie ». Ils sont loin de se douter que les mines sont sur le point de fermer et qu’ensuite il leur sera proposé des incitations matérielles pour retourner dans leur pays. Ils ont pourtant travaillé des années au fond, à moins 1300 mètres de profondeur, ne ménageant pas leur peine. Réputés courageux, <a href="https://www.persee.fr/doc/homig_1142-852x_1995_num_1192_1_2550">ils sont affectés aux tâches les plus pénibles et les plus dangereuses</a>, au bowettage – percement des galeries – et à l’abattage du minerai, là où les risques de développer une maladie respiratoire sont les plus importants. La silicose rôde ! À la fin du roman en document annexe l’auteur a cru bon, à juste titre, d’inclure les quatre pages de « Conseils à la maîtrise », rédigés par la Direction du Personnel des Houillères du Bassin du Nord et du Pas-de-Calais (HBNPC) à propos du « comportement [à avoir] envers les ouvriers nord-africains ».</p>
<p>Ils insistent, en conclusion, sur le caractère contradictoire des Nord Africains, qui ont d’une part « un complexe d’infériorité » parce qu’ils ne parlent pas le français et ne sont pas au fait des techniques du travail souterrain et, d’autre part, font preuve « d’une grande fierté [au sujet] de leur race et de leur origine. En agissant sur ce dernier sentiment, vous pouvez obtenir beaucoup de ces ouvriers » !</p>
<p>En 1980 et 1987, les <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00279/revendications-d-anciens-mineurs-marocains-pour-faire-valoir-leurs-droits.html">mineurs marocains se mettent en grève</a>. La CGT fait circuler des tracts en arabe et encourage ces travailleurs à la rejoindre. Chez Hannah, de mystérieuses réunions se tiennent « avec des Français bien habillés », de l’argent provenant de collectes circule. Des Marocains « s’organisent entre eux contre les Houillères » et veulent récupérer les droits qu’ils n’ont pas eus, quitte à aller « jusqu’à La Haye ». Mais d’autres, sans espoir, décident d’aller chercher du travail en Belgique et, certains, de rentrer au Maroc, comme le propose leur employeur. Le retour au pays s’organise, ironie du sort, sous la houlette de celui qui avait été « chercher du muscle » pour les mines du Nord-Pas-de-Calais, des années auparavant : Félix Mora. Pour la plupart, ce sera le désenchantement !</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/WgLESF4ZnjM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>En février 2013, après trois décennies de combat, la justice donnera raison à dix mineurs marocains – appartenant à <a href="https://www.atmf.org/?p=2734">l’Association des Mineurs marocains du Nord-Pas-de-Calais (AMMN)</a> – qui se disaient victimes de discrimination. 40 000 euros seront versés à chacun d’entre eux. Cette victoire n’est que symbolique, au regard des 78 000 autres qui n’ont jamais rien obtenu !</p>
<h2><em>Germinal</em> et l’école de la République</h2>
<p>En France ces hommes, « réduits à leurs bras », sont discriminés dans leur travail, comme dans leur vie quotidienne. Nombre d’entre eux se sentent déclassés. Certains n’étaient-ils pas, à l’image du père d’Hannah, chef de village avant de partir. Ajoutée à cela, leur difficulté à s’exprimer dans une langue autre qu’un mélange de « françarabe et de picard » ! Avec leurs familles, ils ne s’intègrent donc qu’à la marge.</p>
<p>Mais il y a, pour les enfants de ces mineurs marocains, l’enfance dans le bassin minier. Car si leurs femmes vivent entre elles, n’apprenant que quelques bribes de français, leurs petits côtoient d’autres jeunes, dont les pères sont aussi venus de pays étrangers pour travailler dans les mines. Dans le roman, comme dans la vraie vie, le coron joue un rôle social et familial important, tant il constitue un îlot isolé du reste du monde, mais dans le même temps un lieu dans lequel règne une grande promiscuité. Autour d’eux, les enfants voient les terrils, qui leur sont familiers, tout comme les chevalements qui dominent le paysage. Ils savent intuitivement qu’ils marchent sur la veine dans laquelle leurs pères abattent le charbon.</p>
<p>Dans le bassin il y a des écoles, qui ne sont plus depuis longtemps celles mises en place par le patronat, dirigées par des membres de congrégations religieuses. L’école de la République est ouverte à tous les enfants qui y découvrent, parfois avec délectation, les livres, la littérature. Il y a cette institutrice, qui apprend à Hannah les mots de la langue française et lui offre son premier ouvrage. Plus tard, pousser les portes de la Bibliothèque municipale aura pour elle quelque chose de magique, d’autant que la bibliothécaire lui laisse prendre plus de livres que règlementairement autorisé.</p>
<p>Dans le coron, l’école et la place s’appellent Emile Zola ! Hannah fait très vite une overdose de <em>Germinal</em> : le matin, le midi, le soir, en livre, comme en film. Longtemps, pour elle, c’est juste un roman de « gueux en galère », qui la renvoie à « son habit de malheureuse » ! « Et puis, un soir, quelque chose se passe. [Elle] ouvre Zola. [Elle] li[t] Zola. <em>Germinal</em> dans les bras. Et [elle] pleure ». Elle sera « la première fille de la cité des mines » à partir loin, pour poursuivre ses études, ce qui lui vaudra d’être interviewée sur « la réussite scolaire des enfants du bassin minier » !</p>
<p>Longtemps, ces mineurs marocains parleront du retour au pays, où ils rêvent de se construire une maison, à Zagora par exemple. Certains le feront, mais elle restera souvent vide et inachevée. Puis, avec la deuxième génération qui n’a connu que la France, le Maroc ce sera juste pour les vacances !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/171984/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>De nombreuses questions liées à la place dévolue aux travailleurs immigrés au sein de la société française sont abordées dans « le ventre des hommes », de Samira El Ayachi.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1712272021-11-04T13:34:05Z2021-11-04T13:34:05ZCombien de tonnes d’émissions de CO₂ pouvons-nous encore nous permettre ?<p><a href="https://essd.copernicus.org/preprints/essd-2021-386/">Une nouvelle étude</a>, publiée ce jeudi 4 novembre 2021, montre que les émissions mondiales de dioxyde de carbone (CO<sub>2</sub>) ont rebondi après une baisse liée au Covid-19.</p>
<p>Elles devraient ainsi atteindre pour 2021 des niveaux proches de ceux d’avant la pandémie. Un constat inquiétant à l’heure où les dirigeants du monde entier sont réunis à Glasgow pour la COP26, dans une nouvelle tentative d’éviter un réchauffement délétère de la planète.</p>
<p>Ces résultats sont le fruit des travaux du <a href="https://www.globalcarbonproject.org/carbonbudget">Global Carbon Project</a>, un consortium de scientifiques du monde entier qui produit, collecte et analyse des informations sur les gaz à effet de serre.</p>
<p>La reprise rapide des émissions de CO<sub>2</sub>, après la <a href="https://theconversation.com/global-emissions-are-down-by-an-unprecedented-7-but-dont-start-celebrating-just-yet-151757">forte baisse</a> de l’année dernière imputable au contexte pandémique, n’est pas une surprise. La relance économique mondiale très soutenue a entraîné une hausse massive de la demande d’énergie, sollicitant un système énergétique mondial toujours fortement dépendant des combustibles fossiles.</p>
<p>Le plus inquiétant concerne la tendance à la hausse des émissions de CO<sub>2</sub> imputable au pétrole et du gaz sur le long terme ; la croissance des émissions liées au charbon en 2021 est également préoccupante. Tout cela ne nous rapproche pas de la neutralité carbone à l’horizon 2050.</p>
<h2>39 milliards de tonnes de CO₂ attendues pour 2021</h2>
<p>En 2020, les émissions mondiales de CO<sub>2</sub> provenant des combustibles fossiles ont diminué de 5,4 % par rapport à 2019. Cette année, elles devraient augmenter d’environ 4,9 % par rapport aux niveaux de 2020 pour atteindre 36,4 milliards de tonnes. Ce qui nous ramène presque aux niveaux de 2019.</p>
<p>Pour 2021, il faudra ajouter 2,9 milliards de tonnes d’émissions de CO<sub>2</sub>, correspondant aux effets des activités humaines impactant les terres (déforestation, dégradation des sols, végétalisation…).</p>
<p>Nous atteignons ainsi un total prévisionnel de plus de 39 milliards de tonnes de CO<sub>2</sub> pour 2021.</p>
<p>La croissance rapide des émissions s’explique par la demande accrue d’énergie, à mesure que l’économie mondiale repart après la pandémie – les différents plans de relance économique dans le monde atteignant les <a href="https://www.f4b-initiative.net/post/majority-of-17-2-trillion-covid-stimulus-packages-doing-more-harm-than-good-to-environment">17,2 billions de dollars</a>.</p>
<p>Cette année, quel que soit le combustible fossile utilisé – charbon, pétrole ou gaz naturel –, toutes les émissions de CO<sub>2</sub> sont à la hausse.</p>
<p>Notons que celles imputables au charbon et au gaz naturel auront davantage augmenté en 2021 qu’elles n’ont diminué en 2020. Si les émissions liées au charbon étaient en baisse avant que le Covid frappe début 2020, elles sont reparties à la hausse ces derniers mois. Quant aux émissions liées à l’utilisation mondiale du gaz, elles ont retrouvé la tendance haussière observée avant la pandémie.</p>
<p>Les émissions de CO<sub>2</sub> provenant de l’utilisation mondiale du pétrole restent bien inférieures aux niveaux d’avant la pandémie, mais elles risquent d’augmenter dans les années à venir, le transport routier et l’aviation se relançant après les restrictions liées au Covid.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/429469/original/file-20211031-17-1pa5f0i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/429469/original/file-20211031-17-1pa5f0i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/429469/original/file-20211031-17-1pa5f0i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/429469/original/file-20211031-17-1pa5f0i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/429469/original/file-20211031-17-1pa5f0i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/429469/original/file-20211031-17-1pa5f0i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=469&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/429469/original/file-20211031-17-1pa5f0i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=469&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/429469/original/file-20211031-17-1pa5f0i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=469&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Émissions mondiales de CO₂ pour la période 1960-2020.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project</span></span>
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<h2>La Chine et l’Inde tirent les émissions vers le haut</h2>
<p>Les émissions de la Chine se sont redressées très rapidement avec une augmentation de 0,4 milliard de tonnes en 2021. Ce pays fait partie des rares où les émissions ont augmenté en 2020 (de 1,4 %) ; la croissance prévue cette année devrait être de 4 %.</p>
<p>En 2021, les émissions de CO<sub>2</sub> de la Chine devraient ainsi être supérieures de 5,5 % à celles de 2019, pour atteindre 11,1 milliards de tonnes. En 2020, la Chine détenait 31 % des émissions mondiales.</p>
<p>Les émissions de charbon dans ce pays devraient augmenter de 2,4 % cette année. Si cette hausse se réalise, elle correspondrait alors à ce qui a été décrit en 2013 comme « le pic des émissions de charbon » pour le géant asiatique.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/429471/original/file-20211031-75805-1jh07jf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/429471/original/file-20211031-75805-1jh07jf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/429471/original/file-20211031-75805-1jh07jf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=435&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/429471/original/file-20211031-75805-1jh07jf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=435&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/429471/original/file-20211031-75805-1jh07jf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=435&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/429471/original/file-20211031-75805-1jh07jf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=547&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/429471/original/file-20211031-75805-1jh07jf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=547&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/429471/original/file-20211031-75805-1jh07jf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=547&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Émissions régionales pour la période 2019-2021.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les émissions de CO<sub>2</sub> de l’Inde devraient également augmenter avec une hausse relative de 12,6 % in 2021 après une baisse de 7,3 % en 2020. Les émissions de cette année devraient être supérieures de 4,4 % au niveau de 2019, atteignant 2,7 milliards de tonnes. L’Inde a représenté 7 % des émissions mondiales en 2020.</p>
<p>Les émissions des États-Unis et de l’Union européenne devraient augmenter de 7,6 % cette année. Cela conduirait respectivement à des émissions de 3,7 % et 4,2 %, inférieures aux niveaux de 2019.</p>
<p>Les États-Unis et l’Union européenne représentent 14 % et 7 % des émissions mondiales en 2020.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les différents types d’émissions de CO₂ pour la France pour la période 1960-2020.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.globalcarbonproject.org/carbonbudget">Global Carbon Project</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les émissions en France sont en baisse depuis le milieu des années 2000, celles de 2020 ayant chuté dramatiquement suite à la pandémie. Pour 2021, les données ne sont pas encore disponibles ; si on s’attend à un rebond, les émissions françaises devraient toutefois rester à un niveau inférieur aux conditions pré-pandémie.</p>
<p>Les émissions du reste du monde (en prenant en compte la part des transports internationaux, et tout particulièrement le transport aérien) devraient augmenter de 2,9 % cette année, mais resteraient inférieures de 4,2 % au niveau de 2019. Ensemble, ces pays représentent 59 % des émissions mondiales.</p>
<h2>La boussole des budgets carbone</h2>
<p>Notre constat est clair : les variations relativement importantes des émissions au cours des deux dernières années n’ont eu aucun effet perceptible sur la vitesse à laquelle le CO<sub>2</sub> s’accumule dans l’atmosphère.</p>
<p>Les concentrations de CO<sub>2</sub>, et le réchauffement climatique associé, sont déterminés par l’accumulation de gaz à effet de serre – en particulier le CO<sub>2</sub> – depuis le début de l’ère industrielle. Cette accumulation s’est accélérée au cours des dernières décennies.</p>
<p>Pour empêcher la poursuite du réchauffement climatique, les émissions mondiales de CO<sub>2</sub> doivent cesser ou atteindre le niveau « net zéro » – signifiant que toute émission restante de CO<sub>2</sub> devrait être compensée par l’élimination d’une quantité équivalente dans l’atmosphère.</p>
<p>Dans la lutte contre le dérèglement climatique, les « budgets carbone » représentent un moyen utile pour mesurer la quantité de CO<sub>2</sub> pouvant encore être émise, relativement à un niveau donné de réchauffement climatique.</p>
<p>Dans <a href="https://essd.copernicus.org/preprints/essd-2021-386/">notre nouvelle étude</a>, nous avons ainsi mis à jour le budget carbone en nous appuyant sur le dernier rapport du GIEC <a href="https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg1/downloads/report/IPCC_AR6_WGI_SPM.pdf">paru en août 2021</a>.</p>
<p>À partir de janvier 2022, si nous voulons atteindre l’objectif d’une limitation à 1,5 °C de réchauffement global pour le XXI<sup>e</sup> siècle, nous pourrons encore émettre 420 milliards de tonnes de CO<sub>2</sub> supplémentaires au niveau mondial ; ce qui correspond à 11 ans d’émissions en prenant 2021 comme année de référence.</p>
<p>Pour limiter ce réchauffement à 2 °C, le budget carbone mondial s’élèvera à 1 270 milliards de tonnes de CO<sub>2</sub> supplémentaires, soit 32 ans d’émissions au rythme actuel.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les budgets carbone restants pour limiter le réchauffement à 1,5 C et 2 , à partir des données du GIEC d’août 2021.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces budgets sont notre boussole vers des émissions nettes nulles. Conformément à l’engagement pris par de <a href="https://eciu.net/netzerotracker">nombreux pays</a> d’atteindre des émissions nettes nulles d’ici 2050, les émissions de CO<sub>2</sub> doivent en conséquence diminuer de 1,4 milliard de tonnes en moyenne chaque année.</p>
<p>Il s’agit d’une quantité comparable à la baisse enregistrée en 2020, soit 1,9 milliard de tonnes. Ce fait souligne l’extraordinaire défi à relever et la nécessité d’accroître les engagements à court et à long terme pour faire baisser les émissions mondiales.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/171227/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pep Canadell a reçu des financements de Australian National Environmental Science Program - Climate Systems Hub.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Corinne Le Quéré a reçu des financements du programme Horizon 2020 de l’UE grant agreement Nos. 821003 (4C) et 776810 (VERIFY)), du UN Natural Environment Research Council (grant NE/P021417/1 (SONATA) et NE/V011103/1 (Frontiers)) et du UK Royal Society (grant RP\R1\191063, Research Professorship).
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Glen Peters a reçu des financements du programme Horizon 2020 de l’UE – grant agreement Nos. 821003 (4C), 776810 (VERIFY), 820846 (PARIS REINFORCE), and 958927 (CoCO2).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pierre Friedlingstein a reçu des financements du programme Horizon 2020 de l’UE (4C Project).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Robbie Andrew a reçu des financements du programme Horizon 2020 de l’UE – grant agreement Nos. 821003 (4C), 776810 (VERIFY), and 958927 (CoCO2).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Rob Jackson ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Après une forte baisse des émissions en 2020 due à la pandémie de Covid-19, 2021 témoigne d’une inquiétante reprise, souligne la nouvelle étude du Global Carbon Projet.Pep Canadell, Chief research scientist, Climate Science Centre, CSIRO Oceans and Atmosphere; and Executive Director, Global Carbon Project, CSIROCorinne Le Quéré, Royal Society Research Professor of Climate Change Science, University of East AngliaGlen Peters, Research Director, Center for International Climate and Environment Research - OsloPierre Friedlingstein, Chair, Mathematical Modelling of Climate, University of ExeterRobbie Andrew, Senior Researcher, Center for International Climate and Environment Research - OsloRob Jackson, Professor, Department of Earth System Science, and Chair of the Global Carbon Project, Stanford UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1707602021-10-28T14:44:32Z2021-10-28T14:44:32ZVoici comment on peut laisser 83 % du pétrole canadien dans le sol et bâtir de nouvelles économies fortes<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/428906/original/file-20211027-23-1rgppae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1089%2C461&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’élimination progressive des combustibles fossiles nécessite que l’on considère la production actuelle comme un sommet, et que l’extraction et les infrastructures doivent désormais décliner.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Green Energy Futures/flickr)</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>La combustion du charbon, du pétrole et du gaz naturel est responsable de <a href="https://www.carbonbrief.org/analysis-fossil-fuel-emissions-in-2018-increasing-at-fastest-rate-for-seven-years">près de 90 % des émissions de dioxyde de carbone dans le monde</a>. Si nous voulons avoir 50 % de chances de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C, <a href="https://doi.org/10.1038/s41586-021-03821-8">plus de 83 % des réserves de pétrole du Canada doivent demeurer sous terre</a>.</p>
<p>Pourtant, le gouvernement libéral fraîchement réélu, qui a placé la lutte contre les changements climatiques au centre de son programme, prévoit une longue vie pour les combustibles fossiles. Au lieu de laisser le pétrole dans le sol, les <a href="https://liberal.ca/fr/notre-plateforme/plafonner-et-couper-les-emissions-du-secteur-petrolier-et-gazier/">libéraux se sont engagés</a> à plafonner et à couper les émissions dans ce secteur, puis à compenser les émissions restantes d’ici 2050.</p>
<p>Cela permettrait à la production de combustibles fossiles de se poursuivre indéfiniment au Canada, ce qui nécessiterait <a href="https://www.reuters.com/world/americas/exclusive-oil-companies-ask-canada-pay-75-carbon-capture-facilities-2021-10-07/">d’énormes investissements publics</a> pour le captage et le stockage du CO<sub>2</sub>. De plus, cela engendrerait des <a href="https://www.policyalternatives.ca/sites/default/files/uploads/publications/BC%20Office/2021/06/CCPA%20report_Dangerous%20Distractions%20Net%20Zero.pdf">systèmes de comptabilité douteux</a> qui feraient disparaître les émissions des livres sans pour autant mettre fin à leur production.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un champ de canola avec des chevalets de pompage en arrière-plan" src="https://images.theconversation.com/files/428044/original/file-20211022-9803-1q1pc4b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428044/original/file-20211022-9803-1q1pc4b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428044/original/file-20211022-9803-1q1pc4b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428044/original/file-20211022-9803-1q1pc4b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428044/original/file-20211022-9803-1q1pc4b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428044/original/file-20211022-9803-1q1pc4b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428044/original/file-20211022-9803-1q1pc4b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des chevalets de pompage extraient le pétrole du sol dans un champ de canola près d’Olds, en Alberta.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Jeff McIntosh</span></span>
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<p>Dans le cadre du <a href="https://www.corporatemapping.ca/">Corporate Mapping Project</a>, mes collègues et moi avons étudié le pouvoir et l’influence de l’industrie des combustibles fossiles dans l’Ouest canadien. Nos recherches montrent que pour survivre aux politiques en réponse à la crise climatique, les pétrolières doivent convaincre le gouvernement que la carboneutralité peut fonctionner et qu’un avenir sans combustibles fossiles est sombre.</p>
<p>Mais pour garder 83 % du pétrole canadien dans le sol, il n’est pas nécessaire de fermer le robinet du jour au lendemain. Il faut plutôt mettre fin progressivement à l’industrie en faisant appel à des métiers spécialisés, tout en créant de nouveaux secteurs d’activité pour restaurer les terres et mettre l’accent sur l’importance de prendre soin les uns des autres.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/ges-le-canada-veut-desormais-atteindre-la-carboneutralite-et-cela-change-tout-166623">GES : le Canada veut désormais atteindre la carboneutralité et cela change tout</a>
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<h2>Pas d’avenir pour le pétrole canadien</h2>
<p>Une large part du pétrole canadien doit rester dans le sol parce qu’il est plus difficile à atteindre – il se trouve en grande partie dans les sables bitumineux du nord de l’Alberta, ce qui complique son extraction, son traitement et son transport – et <a href="https://nationalpost.com/news/canada/why-has-canada-spent-billions-of-dollars-buying-saudi-arabian-oil">plus lourd que les pétroles bruts légers non sulfurés produits dans des endroits comme le Moyen-Orient</a>. Si on fait le calcul par baril, le pétrole canadien <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/environnement/2021-09-09/le-baril-de-petrole-canadien-parmi-les-plus-polluants-au-monde.php">émet plus de gaz à effet de serre</a>, coûte plus cher à extraire et <a href="https://yaleclimateconnections.org/2021/03/canadas-oil-sands-industry-is-taking-a-big-hit/">se vend moins cher sur les marchés internationaux</a>.</p>
<p>En cette période de lutte contre les changements climatiques, le Canada tente de maintenir à flot son industrie, <a href="https://doi.org/10.25318/36280001202100700003-eng">qui représente environ 5 % de son PIB</a>, grâce à d’énormes subventions publiques qui se chiffrent quelque part <a href="https://cascadeinstitute.org/wp-content/uploads/2021/04/Carter-Dordi-Canadas-one-eye-shut-climate-policy-1.1-April-16.pdf">entre 2 et 63 milliards de dollars par an</a>. Mais l’illusion d’une production pétrolière carboneutre ne tient pas compte du cycle de vie complet des émissions liées au pétrole – on n’y prend pas en considération les émissions produites par la consommation de pétrole et de gaz, seulement celles issues de la production.</p>
<p>Le pétrole et le gaz produits au Canada seront brûlés au pays et à l’étranger dans des moteurs à combustion et des centrales électriques alimentées au gaz. Ces émissions de « portée 3 », <a href="https://www.spglobal.com/marketintelligence/en/news-insights/latest-news-headlines/equinor-s-move-to-halve-carbon-intensity-scope-3-emissions-both-praised-panned-56984504">qui peuvent représenter plus de 90 %</a> des émissions associées au cycle de vie complet du pétrole et du gaz, ne seront plus acceptées dans les États du monde entier qui tentent de réduire à zéro leurs émissions de gaz à effet de serre.</p>
<h2>Le temps qu’il faut</h2>
<p>L’élimination progressive des combustibles fossiles ne nécessite pas de tout arrêter dès demain. Mais il faut considérer que la production d’aujourd’hui est un sommet, et qu’à partir de là, l’extraction et les infrastructures doivent diminuer pour atteindre une production près de zéro au milieu du siècle.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Des médecins et des infirmières réunis dans une pièce d’un hôpital" src="https://images.theconversation.com/files/428073/original/file-20211022-9357-nq0gw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428073/original/file-20211022-9357-nq0gw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428073/original/file-20211022-9357-nq0gw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428073/original/file-20211022-9357-nq0gw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428073/original/file-20211022-9357-nq0gw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428073/original/file-20211022-9357-nq0gw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428073/original/file-20211022-9357-nq0gw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La pandémie de Covid-19 a mis en lumière la pénurie d’infirmières au Canada. Avec le vieillissement de la population, le pays aura besoin de plus de préposés aux bénéficiaires, d’infirmières et d’autres professionnels de la santé.</span>
<span class="attribution"><span class="source">TLa Presse canadienne/Jonathan Hayward</span></span>
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</figure>
<p>Cela laisse du temps pour bien planifier une transition ordonnée et soutenir les travailleurs de l’industrie des combustibles fossiles et leurs communautés. Si nous commençons aujourd’hui, nous aurons le temps de réduire progressivement une partie de nos activités tout en développant d’autres secteurs, comme ceux des énergies renouvelables, de l’assainissement de l’environnement, des maisons efficaces sur le plan énergétique et des emplois à faible émission de CO<sub>2</sub> dans les professions à vocation sociale, notamment les soins aux personnes âgées et aux enfants, les soins de santé et l’éducation.</p>
<p>En fait, pour chaque dollar dépensé, le nombre d’emplois directs et indirects créés dans ces secteurs <a href="https://www.policyalternatives.ca/sites/default/files/uploads/publications/BC%20Office/2020/03/ccpa-bc_Winding-Down-BCs-Fossil-Fuel-Industries.pdf">dépasse de loin</a> ceux créés dans le domaine de l’extraction du pétrole et du gaz.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="graphique à barres montrant que les emplois créés dans l’éducation et les soins de santé sont plus nombreux que ceux créés dans les secteurs minier, pétrolier et gazier par million de dollars de production" src="https://images.theconversation.com/files/428074/original/file-20211022-9013-1pcaxe9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428074/original/file-20211022-9013-1pcaxe9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=381&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428074/original/file-20211022-9013-1pcaxe9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=381&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428074/original/file-20211022-9013-1pcaxe9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=381&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428074/original/file-20211022-9013-1pcaxe9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=479&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428074/original/file-20211022-9013-1pcaxe9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=479&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428074/original/file-20211022-9013-1pcaxe9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=479&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Emplois directs et indirects en Colombie-Britannique par million de dollars de production. Les investissements ne se valent pas tous. Le pétrole et le gaz créent relativement peu d’emplois.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Winding Down BC’s Fossil Fuel Industries, 2020/Corporate Mapping Project)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Certaines économies seront touchées de manière disproportionnée : les provinces de l’Ouest et Terre-Neuve seront plus gravement frappées. Ces provinces, et les régions rurales, auront davantage besoin de soutien et d’attention.</p>
<h2>À quoi ressemblerait une élimination progressive ?</h2>
<p>La question de savoir ce que serait une élimination progressive et ordonnée du pétrole et du gaz fait l’objet d’un débat. C <a href="https://iris-recherche.qc.ca/blogue/environnement-ressources-et-energie/le-gouvernement-doit-coordonner-l-arret-de-l-exploitation-du-petrole-des-sables-bitumineux">ertains suggèrent que les industries devraient être nationalisées</a>, afin de mettre fin à leurs tactiques de déni et de retardement. Dans ce scénario, des sociétés d’État présideraient à la réduction progressive des activités, en commençant par fermer la production la plus coûteuse et la plus polluante, et en investissant les revenus de la production pétrolière dans l’assainissement et la remise en état des sites d’infrastructure pétrolière.</p>
<p>Au fil du temps, les entreprises publiques passeraient de l’extraction du pétrole et du gaz au nettoyage des puits de pétrole, des sites miniers et des pipelines, ce qui permettrait aux travailleurs du secteur des combustibles fossiles de conserver leur emploi en utilisant leurs compétences actuelles.</p>
<p>Une étude récente a examiné la façon dont la <a href="https://doi.org/10.1038/s41558-018-0337-0">Californie pourrait limiter la production de combustibles fossiles</a> pour réduire les émissions de dioxyde de carbone. Si l’État cessait d’approuver de nouveaux permis pour les puits de pétrole, l’épuisement naturel des puits existants ferait diminuer la production de 70 % d’ici 2030, ce qui réduirait considérablement les émissions de gaz à effet de serre à l’échelle de la planète.</p>
<h2>Le gros ménage</h2>
<p>Un des plus importants défis à relever pour mettre fin aux activités de l’industrie est sans doute le nettoyage de ses infrastructures tout en veillant à ce que le public n’ait pas à en payer le prix. Les compagnies pétrolières et gazières louent souvent des terrains pour leurs infrastructures ou pour avoir accès à leurs droits miniers lorsque la surface est déjà utilisée à d’autres fins, comme de l’agriculture, de l’élevage, des parcs ou des habitations privées.</p>
<p>Dans le cadre de <a href="https://uofmpress.ca/books/detail/fault-lines">mes recherches sur les communautés rurales productrices de pétrole en Saskatchewan</a>, j’ai rencontré de nombreux propriétaires terriens mécontents, qui se retrouvaient avec des puits et des installations non remis en état, ou de petits pipelines. Ces infrastructures peuvent causer des fuites de pétrole, de gaz et d’eau salée qui risquent d’affecter les cultures, d’engendrer beaucoup de gaz à effet de serre et de contaminer les eaux de surface et souterraines.</p>
<p>Le nombre de puits inactifs – qui ne produisent pas de pétrole et qui doivent être nettoyés – a augmenté de façon vertigineuse au cours de la dernière décennie, et des <a href="https://financialpost.com/commodities/energy/unpaid-oilpatch-property-taxes-have-tripled-in-two-years-rural-municipalities-say">municipalités</a> et des <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1502606/puits-orphelins-alberta-entreprises-petrole-taxes-municipales">propriétaires terriens</a> se plaignent du non-paiement des impôts fonciers et des baux de surface.</p>
<p>Selon l’<a href="https://www.aldpcoalition.com/">Alberta Liabilities Disclosure Project</a>, le passif de l’industrie albertaine se situerait entre 58 et 260 milliards de dollars. Avec seulement 1,5 milliard de dollars détenus en titres, les gouvernements doivent planifier dès maintenant la façon dont ils vont récupérer la facture de nettoyage.</p>
<p>Les gouvernements pourraient créer des fiducies de restauration, financées par l’augmentation des titres, des redevances et des taxes sur le pétrole et le gaz, qui emploieraient des travailleurs du secteur pétrolier et gazier pour nettoyer les infrastructures de l’industrie. La remise des terres en état permettrait d’ouvrir la voie pour les économies futures.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/170760/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emily Eaton reçoit un financement du Conseil de recherches en sciences humaines et fait partie du Corporate Mapping Project, un projet de recherche et d'engagement public qui examine le pouvoir de l'industrie des combustibles fossiles dans l'Ouest canadien, dirigé par l'Université de Victoria, le Centre canadien de politiques alternatives (bureaux de la Colombie-Britannique et de la Saskatchewan) et le Parkland Institute. Elle est affiliée au Centre canadien de politiques alternatives, à SaskForward, au Treaty Land Sharing Network, et est active dans d'autres causes de justice sociale et écologique.
</span></em></p>Le Canada ne cessera pas l’exploitation de son pétrole du jour au lendemain. Les métiers spécialisés seront essentiels pour mettre fin à l’industrie et créer de nouveaux emplois.Emily Eaton, Associate professor, Department of Geography & Environmental Studies, University of ReginaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1671982021-09-05T16:55:10Z2021-09-05T16:55:10Z« Germinal », le destin d’un roman culte<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/419037/original/file-20210902-27-1jqk14y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=100%2C9%2C1497%2C1053&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'oeuvre de Zola reste un chef-d'oeuvre inégalé, qui continue à inspiré le cinéma et la littérature. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.allocine.fr/article/fichearticle_gen_carticle=18702290.html">Allociné</a></span></figcaption></figure><p>Au moment où le roman de Zola, <em>Germinal</em>, est présenté au public français pour la première fois sous la forme d’une <a href="https://www.allocine.fr/series/ficheserie_gen_cserie=25257.html">minisérie télévisée en six épisodes</a> (coproduction franco-italienne bientôt sur France 2), il faut se souvenir qu’avant même d’être publié en version livre chez Charpentier en 1885, c’est en format feuilleton qu’il paraît entre le 26 novembre 1884 et le 25 février 1885 dans le quotidien <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b90129825.item"><em>Gil Blas</em></a>). C’est là que les lecteurs se sont familiarisés avec les aventures de Catherine et de Lantier.</p>
<h2>Les Houilleurs de Polignies</h2>
<p>« Siècle du journal », le XIX<sup>e</sup> siècle voit fleurir au rez-de-chaussée des premières pages des quotidiens, ainsi que dans les pages intérieures des hebdomadaires et des revues, des feuilletons qui font rage parmi les amateurs, de plus en plus nombreux, de littérature populaire. Le premier d’entre eux – <em>La Comtesse de Salisbury</em> d’Alexandre Dumas – commence à paraître en 1836 <a href="https://gallica.bnf.fr/html/und/presse-et-revues/la-comtesse-de-salibury?mode=desktop">dans le quotidien <em>La Presse</em> d’Émile de Girardin</a>).</p>
<p>C’est grâce à ce type de lecture que les Français découvrent progressivement le monde de la mine, d’autant qu’ils ne peuvent plus guère ignorer l’importance économique de l’industrie minière qui, dans les années 1870, emploie quelque 110 000 personnes. Peut-être certains ont-ils lu le tout premier « roman de la mine », <a href="https://www.laporterie.com/produit/houilleurs-de-polignies-les-par-elie-berthet/"><em>Les Houilleurs de Polignies</em> d’Élie Berthet</a>)- auteur d’une centaine de romans et premier à avoir osé situer son récit dans une mine –, paru dans la « Bibliothèque variée » chez Hachette en 1866.</p>
<p>Zola, depuis 1862, est employé par cette grande maison d’édition où il est rattaché au service de la publicité nouvellement créé. Dans ce cadre, il est chargé de rédiger, pour le <em>Bulletin du libraire et de l’amateur de livres</em>, les notices des livres à paraître. En janvier 1866, la note qu’il écrit sur <em>Les Houilleurs de Poliginies est élogieuse</em> :</p>
<blockquote>
<p>« Monsieur Elie Berthet sait admirablement dramatiser ses récits […], il nous fait descendre dans une mine de houille et il traite […] avec beaucoup de talent ces scènes de désespoir et d’angoisse qui se passent dans les entrailles du sol […] le livre est plein de très curieux détails sur la vie et les mœurs des houilleurs. C’est un monde particulier et étrange dont le romancier a tiré parti en conteur pittoresque et intéressant […]. La partie dramatique est habilement mêlée aux détails techniques et rien n’est plus attachant que les amours d’Amélie et de Léonard, se déroulant au milieu des péripéties des houilleurs conduits pas un coquin qui finit par expier ses crimes ».</p>
</blockquote>
<h2>Aux origines de <em>Germinal</em></h2>
<p>Près de vingt plus tard, le père des Rougon-Macquart se rend à Denain (Nord) du 23 février au 2 mars 1884, à la fosse Renard de la Compagnie des Mines d’Anzin, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fosse_Renard#/media/Fichier:Denain_-_Fosse_Renard_(C).jpg">où une grève s’est déclarée</a>). Là, en compagnie du député socialiste de Valenciennes Alfred Giard qui le fait passer pour son secrétaire, il descend au fond. Comme on peut le découvrir dans ses <em>Carnets d’enquête</em>, <a href="https://www.persee.fr/doc/colan_0336-1500_1987_num_72_1_982_t1_0118_0000_4">publiés dans la collection Terre humaine chez Plon</a>, Émile Zola « a revêtu la chemise, la culotte, ou cule, la veste, le jupon, il a coiffé le béguin bleu et le chapeau de cuir dur, ou barrette, il est allé chercher la lampe individuelle et il est entré dans la « berline » de descente », devenant ainsi l’espace d’un jour, un mineur parmi les mineurs, risquant sa vie à leurs côtés !</p>
<p>Fort de cette expérience et de ses abondantes lectures, notamment techniques et médicales, il s’est sans aucun doute souvenu du roman de Berthet qui contenait déjà tous les topoï, tous les stéréotypes, de ce qui deviendra un quasi-genre littéraire : le « roman de la mine ».</p>
<p>Comme dans <em>Germinal</em>, et comme dans quasiment tous les autres récits de ce type, on y retrouve : une foule de travailleurs exploités, une catastrophe souterraine, un sauvetage difficile, une ducasse (fête régionale), un mouvement social. Mais aussi un groupe de personnages, souvent assez manichéens, comprenant un jeune ingénieur, un ouvrier frondeur, un patron en difficulté, une jeune fille - ouvrière ou fille du patron de la mine, selon que le feuilleton soit rose, ou noir comme <em>Germinal</em> qui se place d’emblée sur le terrain de la lutte entre le Capital et le Travail.</p>
<p>Zola est loin d’être un précurseur puisqu’entre 1866 et 1885 pas moins de dix romans et nouvelles, portant en partie ou en totalité sur la mine et les mineurs, ont été publiés. Mais, aucun d’entre eux ne provoquera une bombe éditoriale, un séisme littéraire, comparable à celui causé par le plus célèbre volet des Rougon-Macquart.</p>
<h2>Germinal, le roman des mineurs du XXᵉ siècle</h2>
<p>En moins de deux décennies la corporation des mineurs s’est approprié <em>Germinal</em>, faisant sien le roman naturaliste. En témoigne la présence d’une délégation de « gueules noires », venus de Denain vêtus de leurs habits de travail avec leur fanfare aux obsèques de l’écrivain. <a href="https://www.google.fr/search?q=mineurs+denain+obs%8Fques+Zola+paris&newwindow=1&sxsrf=AOaemvLzquXcviGmUWdG16PYH5Aa">Ils accompagneront le convoi jusqu’au cimetière de Montmartre</a>. Comme le note un journaliste de <em>L’Aurore</em> dans l’édition du 6 octobre 1902 : « Ils portent une boîte en bois blanc, dans laquelle se trouve une couronne, qu’ils viennent déposer sur la tombe de celui qui chanta leurs misères » et de la foule rassemblée au cimetière, monte des cris : « Germinal, Germinal » !</p>
<p>A l’autre bout du siècle, en 1992-1993, lors du tournage du long métrage de Claude Berri, un certain nombre d’anciens mineurs – le dernier puits dans la région ayant fermé à Oignies (Pas-de-Calais) le <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00211/la-derniere-remontee-des-mineurs-a-la-fosse-9-9-bis-d-oignies.html">21 décembre 1990</a> – sont invités par le metteur en scène à jouer leur propre rôle. Nombre d’entre eux semblent avoir été particulièrement motivés par les scènes de protestation collective, de manifestations et de grève ! Un petit groupe de participants a même composé un texte en vers offert à l’acteur Renaud, <a href="https://www.alamyimages.fr/photo-image-germinal-germinal-etienne-lantier-renaud-m-catherine-maheu-judith-henry-legende-locale-sony-1994-52698379.html">admiré dans le rôle de Lantier</a>.</p>
<p>Notons également la création, au cours du tournage, d’une « Association des amis de Germinal et anciens mineurs », ainsi que l’augmentation du nombre d’exemplaires du roman vendus dans les librairies du nord de la France.</p>
<p>Mais l’engouement pour <em>Germinal</em> ne se limite pas aux anciens membres du « Peuple de la nuit ». Nombreuses sont les personnalités politiques de tous bords à se rendre sur le lieu du tournage. Le culte de <em>Germinal</em> atteindra même les sommets de l’État. François Mitterrand, réputé être fin connaisseur de littérature, se voit même présenter par Claude Berri le scénario de son film ! La minisérie réalisée par David Hourrègue et Julien Lilti, qui se sont autorisé quelques libertés avec le récit originel – ajoutant quelques personnages – relance à son tour l’intérêt du grand public pour cette œuvre. Mais <em>Germinal</em>, chef-d’œuvre inégalé, a-t-il toujours la même place dans l’univers mental de nombreux Français ?</p>
<h2>De la mine à l’écriture</h2>
<p>Pour les hommes du charbon, ce roman, signé par l’un des plus grands écrivains français, entré au Panthéon dès 1908, a donné à leur corporation la dignité à laquelle ils aspiraient. Certains d’entre eux – environ 70 mineurs francophones – qui se réclament de <em>Germninal</em>, ont été conduits sur le chemin de l’écriture, quasiment toujours autobiographique. Mais pour la plupart, comme pour l’écrivain-mineur belge Constant Malva (1903-1969) : « Zola a tout dit, il s’est servi magistralement de tous les éléments que la mine peut fournir pour un roman » !</p>
<p>Ce « roman-culte du fond » a, selon Henri Mitterand grand connaisseur de l’œuvre de Zola, su cristalliser « toutes les virtualités tragiques, épiques et symboliques » du monde de la mine. Si Zola n’a pas su anticiper une catastrophe aussi terrible que celle qui s’est produite à Courrières (Pas-de-Calais) le 10 mars 1906, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Catastrophe_de_Courri%C3%A8res#/media/Fichier:Courri%C3%A8res_1906_LeJ.jpg">au cours de laquelle 1099 mineurs trouvent la mort</a>, il a senti toute la violence contenue dans les bassins miniers, à son époque.</p>
<p>Sa description de la sauvage émasculation de Maigrat l’épicier qui refuse de faire crédit aux familles de mineurs affamées et révoltés paraît impensable. Pourtant dans la réalité, en 1886 à Decazeville, les houilleurs de cette cité minière défenestrent, dans une scène d’une barbarie inouïe, <a href="https://www.google.fr/search?q=watrin+defenestration&newwindow=1&sxsrf=AOaemvKIUJ8wZQAqvcbplmsqtZn5G_okWg:1630508341442&source=lnms&tbm=isch&sa=X&ved=2ahUKEwjsp_rzhN7yAhVG1hoKHa2dCToQ_AUoAnoECAEQBA&biw=1440&bih=738#imgrc=ZjCX7Xbj5PxiwM">l’ingénieur Watrin</a>, donnant ainsi naissance à l’expression <a href="https://www.cairn.info/revue-entreprises-et-histoire-2009-2-page-149.htm">« watrinade »</a>.</p>
<p>Ce roman naturaliste, qui donné des lettres de noblesse aux « gueules noires », occupe une place à part dans la littérature française. Ses héros de chair et d’os se sont entièrement reconnus dans le portrait de leur vie, s’appropriant l’œuvre avant la mort de son auteur pour s’en réclamer, ensuite, plus d’un siècle durant.</p>
<p>Connu et reconnu dans le monde entier, <em>Germinal</em> a inspiré bien des écrivains, comme <a href="https://www.amazon.fr/Sub-Sole-Baldomero-Lillo/dp/8492491086?asin=1502743779&revisionId=&format=4&depth=1">Baldomero Lillo (1867-1923)</a>, pour ne citer que lui, qui se voulait le Zola chilien, mais également des cinéastes comme <a href="https://www.cinematheque.fr/film/47172.html">Capellani en 1903</a> et Yves Allégret en 1963, qui <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00009/tournage-de-germinal-par-yves-allegret.html">dans son film, intitulé également <em>Germinal</em>,</a> fit jouer Claude Brasseur et Jean Sorel.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/167198/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour les hommes du charbon ce roman, écrit par l’un des plus grands écrivains français, entré au Panthéon dès 1908, a donné à leur corporation la dignité à laquelle ils aspiraient.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1605072021-06-28T19:53:49Z2021-06-28T19:53:49ZL’énergie fossile, cette drogue dont nous n’arrivons pas à nous sevrer<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/403660/original/file-20210531-21-13nj2gq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le charbon reste la première source pour la production d’électricité dans le monde. </span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Notre opulence matérielle des 200 dernières années est directement imputable aux combustibles fossiles – charbon, pétrole et gaz. Mais, comme toutes les drogues, l’énergie fossile produit son lot d’effets secondaires, désormais trop visibles pour être ignorés.</p>
<p>Boosté par ce cocktail charbon-pétrole-gaz, le rêve moderne s’est peu à peu transformé en cauchemar. En cause, une perturbation sans précédent du <a href="https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/2018/03/WG1AR5_SPM_brochure_fr.pdf">système Terre</a> qui affecte déjà l’espèce humaine.</p>
<p>D’après la communauté scientifique, cette menace aura dans le futur des <a href="https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/2018/03/ar5_wgII_spm_fr-2.pdf">conséquences encore plus désastreuses</a> ; conséquences qui semblent pour l’instant inévitables au vu des maigres résultats des négociations climatiques.</p>
<h2>Laisser les fossiles là où ils sont</h2>
<p>Les réserves de combustibles fossiles correspondent à des émissions potentiellement colossales de gaz à effet de serre : il y a au moins trois fois plus de CO<sub>2</sub> sous nos pieds que ce que nous pouvons nous permettre d’émettre pour avoir une chance raisonnable de contenir le réchauffement climatique sous les 2 °C. Au niveau mondial, un <a href="https://www.nature.com/articles/nature14016">tiers des réserves de pétrole, la moitié des réserves de gaz et plus de 80 % des réserves de charbon</a> doivent rester inutilisées.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/M9MayBUgSHI?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Why we need to keep fossil fuels in the ground (The Guardian/Youtube, 2015).</span></figcaption>
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<p>Dans ce contexte, l’augmentation des productions d’hydrocarbures dits « non conventionnels » – pétrole et gaz de roches mères, sables bitumineux, offshore profond – et l’exploitation de nouvelles ressources, comme en Arctique, vont à contresens des efforts nécessaires pour limiter le dérèglement du climat si les émissions de CO<sub>2</sub> engendrées par ces productions ne sont pas immédiatement <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/enjeux-et-prospective/decryptages/climat-environnement-et-economie-circulaire/reduire-les-emissions-industrielles-co2-captage-et-stockage-du-co2">captées et séquestrées</a>.</p>
<p>Plus nous retardons le moment où nous amorcerons réellement la décarbonation de l’économie mondiale, <a href="https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2017/12/note_danalyse_les_indc_et_le_budget_carbone_the_shift_project_0.pdf">plus les efforts nécessaires deviendront draconiens</a>. Si la réduction des émissions mondiales de CO<sub>2</sub> avait été engagée en 2018, l’humanité aurait pu se contenter d’une baisse annuelle de 5 % jusqu’en 2100 pour limiter le réchauffement à 2 °C. Amorcer ce travail colossal en 2020 demanderait de maintenir une réduction de 6 % par an jusqu’à la fin du siècle.</p>
<p>Patienter jusqu’en 2025 pour amorcer ce chantier, c’est s’obliger par la suite à réduire de 10 % par an les émissions mondiales de CO<sub>2</sub>. Or vouloir transformer durablement, tous les ans, 10 % de l’économie mondiale est une tâche proprement titanesque qui n’a aucun précédent dans l’histoire de l’humanité.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/dgJmgpy1WkI?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Russie : Arctique, la nouvelle frontière (Arte/Youtube, 2019).</span></figcaption>
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<h2>L’inertie des infrastructures industrielles</h2>
<p>Si l’apparition incessante de nouveaux gadgets dans la vie quotidienne donne l’impression d’un changement rapide des systèmes techniques contemporains, ce sont les infrastructures industrielles aux durées de vie très longues – centrales et réseaux électriques, pipelines, raffineries, routes, voies ferrées, canaux, ports, équipements lourds (sidérurgie et chimie) ou collectifs (hôpitaux, stations d’épuration) – qui sont les véritables marqueurs du paradigme technique dans lequel une société se trouve.</p>
<p>Tous ces « parcs » installés impliquent une inertie gigantesque quand il s’agit de changer l’existant et de réaliser une transition vers un monde plus écologiquement soutenable.</p>
<p>Cet effort a d’ailleurs bel et bien été engagé en 2020, mais de façon totalement involontaire puisque c’est la crise sanitaire de la Covid-19 qui nous y a contraints ! En obligeant un sixième de la population mondiale à se confiner, l’économie a ralenti au point de réduire les émissions de CO<sub>2</sub> <a href="https://www.nature.com/articles/s41558-020-0797-x">d’environ 6 % sur l’année</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/covid-et-baisse-des-emissions-de-co-une-nouvelle-etude-fait-le-point-secteur-par-secteur-138971">Covid et baisse des émissions de CO₂ : une nouvelle étude fait le point secteur par secteur</a>
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<p>Pour limiter le dérèglement climatique à une valeur à peu près acceptable d’ici la fin du XXI<sup>e</sup> siècle, il faudrait donc qu’un nouvel effort de cette ampleur vienne <a href="https://www.europe1.fr/societe/ecologie-il-nous-faudrait-un-covid-tous-les-ans-pour-respecter-laccord-de-paris-3968991">s’ajouter tous les ans à ceux des années précédentes</a>.</p>
<h2>L’empilement des systèmes énergétiques</h2>
<p>Toutes les transitions énergétiques du passé ne l’ont été qu’en termes relatifs – c’est-à-dire en parts de la production ou de la consommation totale. Au XX<sup>e</sup> siècle, l’usage relatif du bois, des terres arables et du charbon a baissé par rapport à celui du pétrole, du gaz, de l’hydroélectricité et du nucléaire… mais les consommations de toutes ces sources d’énergie ont augmenté au niveau global.</p>
<p>Comme le montre le graphique ci-dessous, les deux derniers siècles – et plus largement la totalité de l’histoire humaine – n’ont été qu’une succession d’empilements de ressources : il n’y a jamais eu de remplacement total d’un système énergétique par un autre.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/403657/original/file-20210531-21-7pajqe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/403657/original/file-20210531-21-7pajqe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/403657/original/file-20210531-21-7pajqe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/403657/original/file-20210531-21-7pajqe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/403657/original/file-20210531-21-7pajqe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/403657/original/file-20210531-21-7pajqe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/403657/original/file-20210531-21-7pajqe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/403657/original/file-20210531-21-7pajqe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution de la consommation mondiale d’énergie primaire, 1850–2019. À noter qu’on peut trouver des estimations différentes en fonction des conventions de calcul retenues pour convertir l’électricité provenant du nucléaire, des barrages hydrauliques, des éoliennes et des panneaux photovoltaïques en équivalents primaires.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.droz.org/product/9782600560078">Production de l’auteur à partir des données de Etemad & Luciani (1991) numérisées par The Shift Project (2019), Smil (2016), et British Petroleum (2020)</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Seule la transition énergétique que l’humanité amorce aujourd’hui avec beaucoup de difficultés mérite pleinement ce nom, car elle doit impérativement engendrer une transformation radicale et non pas relative des sources d’énergie.</p>
<p>Le problème, c’est que, justement, les renouvelables ne font pour l’instant que s’additionner aux fossiles.</p>
<h2>84 % de l’énergie primaire commercialisée</h2>
<p>En 1960, à l’échelle mondiale, les combustibles fossiles fournissaient <a href="https://www.bp.com/en/global/corporate/energy-economics/statistical-review-of-world-energy.html">94,4 %</a> de l’énergie primaire commercialisée (c’est-à-dire extraite de l’environnement avant d’être transformée en formes consommables et échangeables sur des marchés). Leur part n’est passée qu’à 87,4 % trente ans plus tard ; elle est encore d’environ 84,3 % aujourd’hui.</p>
<p>En comptant les formes traditionnelles de biomasse – bois et résidus agricoles – qui sont consommées hors marchés, la part des fossiles dans le mix mondial prend même une tendance inverse : <a href="https://vaclavsmil.com/2016/12/14/energy-transitions-global-and-national-perspectives-second-expanded-and-updated-edition/">75 %</a> en 1960, 78 % en 1990, et 79 % en 2019.</p>
<p>Les machines qui ont suppléé le travail humain tournent donc en quasi-totalité grâce à l’énergie fossile.</p>
<p>Sur les <a href="https://www.bp.com/en/global/corporate/energy-economics/statistical-review-of-world-energy.html">15,7 %</a> d’énergie primaire commercialisée non carbonée du mix mondial, le nucléaire compte pour 4,3 %, l’hydroélectricité pour 6,4 % et les nouvelles technologies renouvelables (éolien, photovoltaïque, géothermie, agrocarburants et combustion des déchets) pour 5 %.</p>
<p>Répétons-le : un effort énorme doit encore être fourni pour accélérer la décarbonation de l’économie mondiale.</p>
<h2>Nous sommes toujours à l’ère des fossiles !</h2>
<p>Certes, les <a href="https://www.bp.com/en/global/corporate/energy-economics/statistical-review-of-world-energy.html">données</a> montrent que sur les deux dernières années l’augmentation de la consommation mondiale d’énergie primaire (hors biomasse traditionnelle) s’est autant faite par les énergies renouvelables modernes que par les combustibles fossiles. Mais depuis 1990, les énergies fossiles ont contribué 7 fois plus à l’accroissement de la demande que les nouvelles technologies renouvelables. De fait, d’après un <a href="https://www.ran.org/wp-content/uploads/2021/03/Banking-on-Climate-Chaos-2021.pdf">rapport</a> publié récemment par un consortium d’ONG environnementales, l’investissement dans le secteur fossile continue de croître au niveau mondial.</p>
<p>Nous sommes donc toujours à l’ère du charbon – qui demeure la première source d’électricité –, du pétrole et du gaz. Nul mystère donc à ce que les émissions de CO<sub>2</sub>, et plus largement de gaz à effet de serre, continuent d’augmenter chaque année – excepté en 2008 et 2020 pour cause de contraction économique. Malgré les annonces triomphantes de nouvelles installations renouvelables et la <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2021/04/22/joe-biden-s-engage-a-reduire-les-emissions-de-gaz-a-effet-de-serre-des-etats-unis-de-moitie-d-ici-a-2030_6077684_3210.html">surenchère des objectifs de décarbonation</a>, force est de constater que pour l’instant le compte n’y est pas.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/6lJ2uZSRfHI?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">A Short History of Global Emissions from Fossil-Fuel Burning, 1750-2010 (Aurélien Saussay/Youtube, 2015).</span></figcaption>
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<h2>De l’énergie carbonée pour de l’énergie bas carbone</h2>
<p>Une des raisons de notre incapacité à stopper rapidement notre addiction aux énergies fossiles vient d’une caractéristique fondamentale de l’histoire : l’apparition de nouvelles formes d’approvisionnement énergétique a toujours engendré un surcroît d’utilisation des énergies qui existaient auparavant.</p>
<p>Ce recours plus intense aux formes d’énergies déjà connues a toujours été nécessaire pour déployer les nouvelles, et ainsi doper d’autant plus l’activité économique et l’accroissement de la population. Il y a 10 000 ans, la domestication des plantes et des animaux a intensifié le travail des muscles humains et la combustion du bois. Il y a 200 ans, le recours de plus en plus massif au charbon a quant à lui stimulé le travail des animaux de trait dans les champs et à la ville. De la même manière, sur le dernier siècle, le développement du pétrole et du gaz a augmenté la demande en charbon.</p>
<p>La situation présente ne déroge pas à cette règle puisque la construction et l’utilisation des panneaux photovoltaïques, des éoliennes et des voitures électriques ne pourraient pas se faire aujourd’hui sans le charbon, le pétrole et le gaz.</p>
<p>C’est en effet majoritairement l’emploi d’énergie fossile qui permet l’extraction de toutes les matières premières requises pour produire et utiliser les nouvelles énergies bas carbone.</p>
<h2>Des énergies pas si vertes</h2>
<p>Prenons un exemple inspiré du documentaire de Jean‑Louis Perez et Guillaume Pitron, <a href="https://boutique.arte.tv/detail/la-face-cachee-des-energies-vertes"><em>La Face cachée des énergies vertes</em></a>. Il nous conduit au Chili, plus grand détenteur de réserves de cuivre au monde et premier producteur de ce métal indispensable au secteur électrique.</p>
<p>Pour extraire chaque année les 5,6 millions de tonnes de cuivre qu’elles mettent à disposition sur le marché mondial, les mines chiliennes utilisent des milliers de tonnes de pétrole raffiné pour faire avancer leurs bulldozers, mais aussi de l’électricité qui est produite à 40 % à partir de charbon. Ce dernier est importé par bateau depuis la Colombie et la Nouvelle-Zélande, dans une chaîne d’approvisionnement qui repose elle aussi sur du pétrole et du gaz consommés par des camions, des trains et des bateaux. Une partie du cuivre chilien arrive en Norvège, figure de proue de la transition écologique – une voiture neuve sur deux y est électrique – mais aussi quinzième exportateur mondial de pétrole.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1323165446456123395"}"></div></p>
<p>On pourrait multiplier les exemples de ce type, en se focalisant notamment sur le lithium de Bolivie ou les métaux rares de Chine, indispensables aux nouvelles technologies bas carbone. On observerait à chaque fois que, pour l’instant, les énergies dites « vertes » stimulent le métabolisme fossile des sociétés humaines au lieu de le ralentir.</p>
<p>Un outil comme <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/breve/infographie-analyse-du-cycle-vie-acv">l’analyse du cycle de vie</a> devrait être plus systématiquement utilisée pour établir l’existence d’une transformation réelle et durable du système énergétique mondial.</p>
<h2>Face à l’addiction</h2>
<p>Pour l’instant, nous ne parvenons pas à trouver de réelles solutions pour nous débarrasser de notre addiction aux énergies fossiles.</p>
<p>En pratique, cela se voit facilement puisque les technologies bas carbone consistent essentiellement à changer la nature de la production d’électricité, sans réellement toucher aux autres secteurs recourant à l’énergie fossile. Le charbon, le pétrole et le gaz sont respectivement indispensables à la production d’acier, de plastique et d’engrais ; sans oublier le secteur des transports où le pétrole reste roi.</p>
<p>Des technologies sont à l’étude pour consommer les énergies fossiles là où elles présentent le plus d’intérêt tout en évitant de rejeter dans l’atmosphère leurs produits de combustion. Des <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/article/captage-co2-lancement-dinamx-projet-demonstration-pilote-industriel-du-procede-dmx">projets pilotes</a> permettent la capture du dioxyde de carbone sur des processus industriels tels que la sidérurgie, la pétrochimie ou la production d’hydrogène.</p>
<p>De même, des <a href="https://eralberta.ca/wp-content/uploads/2017/05/C110149-Carbon-Engineering-Final-Report-Public.pdf">prototypes</a> sur la capture du CO<sub>2</sub> directement depuis l’atmosphère pourrait faire partie de l’ensemble des solutions à mettre en œuvre pour lutter contre le changement climatique.</p>
<p>Cependant, l’essor de telles technologies à l’échelle industrielle nécessite des investissements colossaux, et donc une volonté politique forte.</p>
<h2>Dépasser l’indépassable croissance ?</h2>
<p>En raison de la dépendance de nos sociétés aux énergies fossiles et de la recherche permanente d’une croissance économique infinie dans un monde fini, la probabilité de maintenir le réchauffement climatique sous les 2 °C paraît extrêmement faible – elle serait précisément de l’ordre de 5 % d’après une <a href="https://www.nature.com/articles/nclimate3352">étude</a>.</p>
<p>De plus, le problème de l’« <a href="https://theconversation.com/la-demande-energetique-mondiale-est-sous-estimee-et-cest-un-vrai-probleme-pour-le-climat-158042">effet rebond</a> », notamment dans la <a href="https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/ab6788">sphère digitale</a>, et le fait que le déploiement des énergies alternatives doit se faire sans s’appuyer sur les combustibles fossiles, sont autant d’éléments qui sont pour l’instant mal intégrés dans les analyses de prospective.</p>
<p>En tenant compte de tous ces mécanismes, et encore une fois dans un monde où la croissance économique reste un objectif prioritaire, il semble quelque peu illusoire de penser que le climat de demain ne sera pas beaucoup plus chaud qu’aujourd’hui.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/160507/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Victor Court est membre de la chaire « Énergie & prospérité ».</span></em></p>Les combustibles fossiles fournissent toujours aujourd’hui plus de 80 % de l’énergie utilisée dans le monde.Victor Court, Enseignant-chercheur en économie à IFP School, IFP Énergies nouvelles Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1593522021-04-20T18:06:43Z2021-04-20T18:06:43ZClimat : qu’attendre du « sommet Biden » à Washington ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/395972/original/file-20210420-19-yj2wym.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Joe Biden (de dos) et John Kerry à Washington en janvier 2021. </span> <span class="attribution"><span class="source">MANDEL NGAN / AFP</span></span></figcaption></figure><p>Dans la salve des premiers décrets présidentiels de Joe Biden a figuré celui ramenant les États-Unis dans l’accord de Paris. Avec John Kerry à la tête de la diplomatie climatique, les États-Unis disposent aujourd’hui d’une équipe aguerrie en la matière.</p>
<p>Son premier test grandeur nature arrive avec le <a href="https://www.whitehouse.gov/briefing-room/statements-releases/2021/03/26/president-biden-invites-40-world-leaders-to-leaders-summit-on-climate/">Sommet des 40 leaders</a>, convoqué par la Maison Blanche ces 22 et 23 avril, à <a href="https://www.climate-chance.org/agenda/cop26/">huit mois de la COP26</a> de Glasgow.</p>
<p>Vis-à-vis de ses pairs, Biden y joue sa crédibilité, altérée par les multiples volte-face des États-Unis dans la négociation climatique : adoption du protocole de Kyoto sous Clinton (1997), abandonné par l’administration Bush (2001) ; engagements d’Obama à Copenhague (2009), rejetés l’année suivante par le Congrès ; ratification de l’accord de Paris en 2016, dénoncée par Donald Trump dès son arrivée à la Maison Blanche.</p>
<p>L’impact du retour américain dépendra des engagements que les États-Unis mettront dans la corbeille, de la capacité de la nouvelle administration à leur donner une véritable crédibilité et des effets d’entraînement sur le reste du monde.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/06YS8w1Gy2A?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">John Kerry signe l’accord de Paris en compagnie de sa petite-fille. (US Department of State, 2015).</span></figcaption>
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<h2>Quelle contribution mettre dans la corbeille ?</h2>
<p>On peut compter sur le ticket Biden/Kerry pour réaffirmer l’ambition de parvenir à la neutralité climatique à l’horizon 2050. C’est désormais une formule obligée en matière de diplomatie climatique. La question cruciale concerne l’objectif intermédiaire de 2030 permettant d’y arriver.</p>
<p>La <a href="https://www4.unfccc.int/sites/ndcstaging/PublishedDocuments/United%20States%20of%20America%20First/U.S.A.%20First%20NDC%20Submission.pdf">contribution déposée</a> en 2015 par les États-Unis d’Obama dans le cadre de l’accord de Paris portait sur une baisse de 26-28 % des émissions de gaz à effet de serre entre 2005 et 2025.</p>
<p>Si l’administration Biden se contentait de cet objectif, ce serait un manque total d’ambition. Elle a déjà donné le ton en annonçant à l’amont du sommet que ses engagements internationaux seront réévalués.</p>
<p>Mais à quelle hauteur fixer la nouvelle marche d’escalier ?</p>
<h2>2030 en ligne de mire</h2>
<p>Reprenant les <a href="https://www.edfaction.org/blog/2020/11/02/us-will-withdraw-paris-agreement-wednesday-how-long">propositions</a> de l’économiste Robert Keohane, qui fut conseiller énergie-climat d’Obama, une <a href="https://www.wemeanbusinesscoalition.org/ambitious-u-s-2030-ndc/">coalition</a> de 300 chefs d’entreprise préconise de viser une baisse des émissions de 50 % entre 2005 et 2030.</p>
<p>Cela représenterait un effort d’ici 2030 d’un ordre de grandeur comparable à la baisse de 55 % relativement à 1990 désormais visée par l’UE (voir le graphique ci-dessous).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/395953/original/file-20210420-15-10k5xkw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/395953/original/file-20210420-15-10k5xkw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/395953/original/file-20210420-15-10k5xkw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/395953/original/file-20210420-15-10k5xkw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/395953/original/file-20210420-15-10k5xkw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/395953/original/file-20210420-15-10k5xkw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/395953/original/file-20210420-15-10k5xkw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/395953/original/file-20210420-15-10k5xkw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Graphe présentant l’ensemble des gaz à effet de serre, hors changement d’usage des sols (2019 estimé). Les États-Unis fixent leurs objectifs de réduction d’émission relativement à 2005 et l’UE relativement à 1990. Un objectif de réduction de 55 % relativement à 1990 pour l’UE représente un effort de – 51 % relativement à 2005, soit un niveau proche de l’objectif proposé par Nathaniel Keohan pour les États-Unis.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Christian de Perthuis</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le premier test pour la crédibilité de Joe Biden concernera ce chiffre : si les États-Unis restent en dessous, ce serait un mauvais signal ; s’ils fixent la barre plus haut, ce serait un nouveau signal envoyé au Vieux Continent, après celui de son plan de relance qui révèle une Europe plutôt timorée au regard des milliards supplémentaires injectés dans l’économie américaine.</p>
<h2>Accélérer l’investissement vert</h2>
<p>Mais c’est le second test de crédibilité qui sera le plus déterminant.</p>
<p>Il se déroulera au Congrès par lequel doit passer Joe Biden pour faire passer l’« American Jobs Plan », son plan projetant d’investir sur huit ans plus de 2 trillions de dollars (1 trillion = 1 000 milliards), soit de l’ordre de 0,6 % du PIB.</p>
<p>Sur ces montants, la moitié est directement fléchée sur la transition bas carbone, avec deux objectifs prioritaires : décarboner la production d’électricité pour atteindre une fourniture zéro carbone à l’horizon 2035 ; basculer l’industrie automobile vers le tout électrique.</p>
<p>Bien qu’en retrait sur les promesses de campagne, ce plan injecterait dans la transition bas carbone bien plus que ce qui avait été envisagé par les précédentes administrations démocrates.</p>
<p>Mais le jeu va être compliqué au Sénat où les démocrates ne disposent que d’une voix d’écart. Les tractations y seront rendues compliquées par les réserves ou l’hostilité d’élus démocrates représentant des États fortement dépendants des énergies fossiles (comme le Wyoming ou le North Dakota).</p>
<p>Même si le plan sort à peu près intact de l’examen de passage, il risque de ne pas être suffisant pour atteindre les objectifs visés, en particulier la décarbonation du secteur électrique qui implique d’ici 2030 une baisse annuelle des émissions de l’ordre de 7 % d’après <a href="https://www.economist.com/leaders/2021/04/10/joe-bidens-climate-gamble"><em>The Economist</em></a>.</p>
<h2>L’épineuse question du désinvestissement des énergies fossiles</h2>
<p>Si le plan fournit bien une masse impressionnante d’incitations à investir dans le bas carbone, il reste timoré sur le volet le plus complexe de la transition pour un gros producteur d’énergie : le désinvestissement des énergies fossiles.</p>
<p>Comme l’a <a href="http://www.robertstavinsblog.org/2021/01/14/international-climate-change-policy-action-in-the-biden-administration/">analysé</a> l’économiste Robert Stavins, un compromis est plus facilement trouvé au Congrès sur des mesures de relance à base de ristournes fiscales et de subventions que sur l’instrument clef pour accélérer la sortie des fossiles : la taxation du CO<sub>2</sub>.</p>
<p>Le renoncement à cette mesure, pourtant présente (de façon assez floue) dans le programme de campagne est la grande faiblesse des propositions actuelles.</p>
<p>Une telle taxation permettrait en premier lieu de sécuriser les dépenses additionnelles pour le budget fédéral, un gage important de crédibilité : les facilités actuelles du financement monétaire et de la faiblesse des taux d’intérêt en résultant sont difficilement extrapolables à l’horizon 2030.</p>
<p>Surtout, le retrait des énergies fossiles pose un problème de restructuration industrielle d’une ampleur bien plus considérable qu’en Europe, pour une économie dont des pans entiers reposent sur la disponibilité d’une énergie fossile à bas prix extraite localement comme l’analysent les <a href="https://www.tresor.economie.gouv.fr/Articles/2020/03/05/tresor-eco-n-257-effet-du-prix-du-petrole-sur-l-economie-americaine">économistes du Trésor</a>.</p>
<h2>La mère de toutes les batailles</h2>
<p>Durant sa présidence, Obama a amorcé le retrait de l’utilisation du charbon dans le secteur électrique, même si son projet de <a href="https://archive.epa.gov/epa/cleanpowerplan/fact-sheet-overview-clean-power-plan.html">« Clean Power Plan »</a> n’a pas pu être appliqué du fait des recours juridiques.</p>
<p>Malgré l’introduction de normes sur les émissions des véhicules automobiles et le blocage du projet d’extension de <a href="https://www.nytimes.com/2017/01/24/us/politics/keystone-dakota-pipeline-trump.html">l’oléoduc Keystone</a>, son administration n’a pas lancé une dynamique équivalente sur le pétrole et le gaz d’origine fossile.</p>
<p>La véritable crédibilité de Biden apparaîtra s’il parvient à amplifier cette sortie des énergies fossiles, en l’élargissant au pétrole et au gaz d’origine fossile. C’est la mère de toutes les batailles.</p>
<p>En l’absence d’une tarification carbone ambitieuse, cette bataille impliquera une multiplication de réglementations qui deviendront bien vite plus impopulaires qu’une taxe carbone correctement paramétrée et redistribuée.</p>
<h2>Clarifier la position de la Chine</h2>
<p>Au plan externe, les effets d’entraînement potentiels du sommet Biden concernent en premier lieu la Chine et l’UE. Les positions de l’UE étant déjà connues, c’est vers la Chine que se tourneront en priorité les regards.</p>
<p>À l’origine d’un peu plus du quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre, la voix de la Chine pèse lourd. Elle est devenue parfaitement inaudible.</p>
<p>Lors de l’Assemblée annuelle des Nations unies de septembre 2020, le Président Xi Jinping s’est prononcé pour la première fois en faveur de la neutralité climatique à l’horizon 2060. Un pas dans la bonne direction.</p>
<p>Simultanément, les réglementations intérieures gelant les investissements dans le charbon ont été assouplies. En 2020, pour la <a href="https://globalenergymonitor.org/wp-content/uploads/2021/04/BoomAndBust_2021_final.pdf">première fois depuis 2015</a>, les investissements dans les nouvelles capacités d’électricité thermique ont augmenté : un pas en arrière qui pourrait remettre en cause la très forte inflexion des émissions chinoises durant la dernière décennie.</p>
<h2>Entraîner le « Reste du monde »</h2>
<p>Si clarifier la position de la Chine peut constituer un effet conséquent du sommet, ses capacités d’entraînement les plus importantes concernent cependant le « Reste du monde » devenu, devant la Chine, le plus gros contributeur à l’accroissement des émissions mondiales (graphique).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/395958/original/file-20210420-15-yn0xwa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/395958/original/file-20210420-15-yn0xwa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/395958/original/file-20210420-15-yn0xwa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=462&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/395958/original/file-20210420-15-yn0xwa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=462&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/395958/original/file-20210420-15-yn0xwa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=462&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/395958/original/file-20210420-15-yn0xwa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=581&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/395958/original/file-20210420-15-yn0xwa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=581&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/395958/original/file-20210420-15-yn0xwa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=581&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">En 2018, les 3 premiers émetteurs de gaz à effet de serre (Chine, US et UE-28) ont représenté 47 % des rejets mondiaux de GES. Le « Reste du monde » en représente 53 %. C’est lui qui a le plus contribué à l’accroissement des émissions mondiales durant la dernière décennie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pbl.nl/sites/default/files/downloads/pbl-2020-trends-in-global-co2-and-total-greenhouse-gas-emissions-2019-report_4068.pdf">Christian de Perthuis</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au sein de ce groupe, les pays producteurs et exportateurs d’énergie fossile – comme les pays du Proche-Orient, la Russie ou encore l’Indonésie – sont ceux qui ont le plus accru leurs émissions.</p>
<p>Depuis la COP-1 (Berlin, 1995), ils jouent la montre en freinant ou bloquant les négociations, notamment dès que la question d’un rehaussement des objectifs vient sur la <a href="https://www.lemonde.fr/climat/article/2018/12/10/cop24-les-etats-petroliers-experts-en-blocage-des-negociations-climatiques_5395462_1652612.html">table</a>.</p>
<p>Il convient de les réintégrer dans le processus, car il sera impossible de viser une cible de réchauffement inférieure à 2 °C sans une réorganisation drastique de leurs économies.</p>
<h2>Elargir l’accès à l’énergie</h2>
<p>Les pays moins avancés – majoritairement situés en Afrique au sud du Sahara et en Asie du Sud – pèsent encore peu dans les émissions mondiales du fait de la faiblesse des rejets par habitant. S’ils reproduisent les sentiers de croissance historiques reposant sur les énergies fossiles, ils seront demain les plus gros émetteurs mondiaux.</p>
<p>Pour l’éviter, il convient d’amorcer directement la transition bas carbone par un gigantesque effort d’investissement élargissant <a href="https://ideas4development.org/acces-energie-green-new-deal-subsaharien/">l’accès à l’énergie</a> dont est privée une grande partie de leur population.</p>
<p>Il y a urgence en la matière, car ces pays sont lourdement affectés par la crise économique provoquée par la Covid-19.</p>
<h2>Alléger la dette publique</h2>
<p>La voie la plus noble pour accompagner le retour des États-Unis dans l’accord climatique, serait de l’assortir d’une proposition immédiate d’allègement de la dette publique de ces pays et d’y engager un programme massif d’investissements verts.</p>
<p>Si Biden s’engageait sur une telle voie, en y associant la Chine et l’Europe, le sommet de la Maison Blanche pourrait constituer un point d’inflexion majeur en matière d’action climatique internationale.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/159352/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian de Perthuis ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ces 22 et 23 avril 2021, le Somment des 40 leaders à Washington constitue un premier test pour l’orientation climatique de l’administration Biden.Christian de Perthuis, Professeur d’économie, fondateur de la chaire « Économie du climat », Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1536792021-01-24T17:23:40Z2021-01-24T17:23:40ZExploitation minière : les terrils, dangers oubliés et patrimoine retrouvé<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/379965/original/file-20210121-17-nfmy53.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C0%2C2192%2C1424&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Capture d'écran, Netflix.</span> </figcaption></figure><p>Tous ceux qui suivent la série <em>The Crown</em> ont pu assister, dans le deuxième épisode de la saison trois, au dramatique effondrement d’un terril qui eut lieu dans la petite ville minière d’Aberfan dans le sud du pays de Galles, le 20 octobre 1966. Rares, pourtant, ont été les accidents de ce type dans l’histoire de l’exploitation minière dans le monde.</p>
<p>Traditionnellement, les grands ennemis des hommes de la mine – et de leurs familles – sont réputés être au nombre de trois. L’air vicié de « grisou » ou « terrou », un gaz difficile à détecter qui asphyxie, qui prend feu et explose dans les galeries, comme lors de la catastrophe de Courrières <a href="https://www.herodote.net/10_mars_1906-evenement-19060310.php">qui fit 1099 victimes le 10 mars 1906</a>. L’eau qui provoque des inondations comme le met en scène Hector Malot dans <em>Sans famille</em> (1878), lorsqu’une rivière en crue envahit une mine dans les Cévennes. La terre, enfin, qui est à l’origine de nombreux éboulements au fond. Petits ou grands, ils sont responsables de la plupart des accidents au quotidien. Mais les terrils, amoncellements de déchets remontés des profondeurs, ne figurent pas au nombre des dangers redoutés des mineurs, tant leurs effondrements sont exceptionnels dans l’histoire de l’exploitation minière.</p>
<h2>Amoncellement de déchets</h2>
<p>Dans les premiers temps de l’exploitation souterraine, les déchets sont laissés au fond. Vers le milieu du XIX<sup>e</sup> siècle, ils sont progressivement amenés à la surface et entassés à l’extérieur du puits, à l’aide de petits wagonnets mus manuellement. La mécanisation progressive des mines voit naître les premiers terrils. Avec le temps, ils deviennent de plus en plus grands et de plus en nombreux, au point de faire désormais partie intégrante du paysage minier, partout dans le monde.</p>
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<figcaption><span class="caption">Terrils, du noir au vert.</span></figcaption>
</figure>
<p>Les terrils sont connus pour être des sources de chaleur qui se consument de l’intérieur pendant des années – jusqu’à 30 voire 50 ans –, comme à la Ricamarie dans la Loire. À Alès (Gard), à l’automne 2004, quarante ans après la fermeture du dernier puits de ce bassin, deux terrils, un très ancien et un autre plus récent, constitué entre 1945 et 1975, <a href="https://www.liberation.fr/terre/2004/11/06/ales-brule-d-un-feu-interieur_498503">sont entrés en combustion à plus de 900°</a>. Il en a été de même <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00880725/document">à Tcheliabinsk dans le sud de l’Oural</a> et au Portugal <a href="https://www.geocaching.com/geocache/GC67F4D_gn16-terril-en-combustion?guid=68d8e48f-ad7f-4102-a36a-586184f6a3ef">dans le Douro</a>.</p>
<p>Les terrils peuvent aussi, parfois, s’effondrer. Dans les années 1930, à Donetsk en Ukraine, des bâtiments de trois étages <a href="https://www.geosoc.fr/publication/geochronique/sommaires-et-resumes/576-geochronique-127-septembre-2013-regards-sur-mines-de-nouvelle-caledonie-sables-bleutes-du-var-transition-energetique-combustion-des-terrils/file.html">ont été ensevelis à la suite de l’éboulement d’un « terikon »</a>. Aujourd’hui encore, ce bassin minier en compte quelque 600. Elles constituent les seules montagnes de la région.</p>
<h2>A Aberfan, un accident sans précédent</h2>
<p>Trois décennies plus tard, la catastrophe d’Aberfan va endeuiller à jamais cette petite communauté minière. C’est un terril de 40 mètres de haut – seuls, semble-t-il, des monticules ne dépassant pas les six mètres étaient officiellement autorisés – érigé sur une petite colline sous laquelle coule une source, qui s’effondre. 230 000 m<sup>3</sup> de déchets miniers se déversent, dans un bruit apocalyptique et avec une violence inouïe sur l’école du village, ôtant la vie à <a href="https://www.politics.ox.ac.uk/news/iain-mclean-on-the-anniversary-of-the-disasters-natural-and-political-at-aberfan.html">109 écoliers et 5 de leurs enseignants, ainsi qu’à huit autres adultes, soit au total 144 victimes</a>. La menace que représentait ce terril était pourtant connue. Il était trop élevé et en surplomb des maisons, mais le dénoncer risquait d’accélérer la fermeture de cette mine, considérée comme de moins en moins rentable.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/1lzJLww3DvM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Moins de 10 ans plus tard, le 26 août 1975, en pleine nuit à Calonne-Ricouart (Pas-de-Calais), nouveau drame. Cette fois, le terril prend feu et explose. Bilan : six morts, 47 maisons détruites et trois hectares de terrain <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00151/explosion-d-un-terril-a-calonne-ricouart.htm">sont recouverts de cendres</a>. À Herstal (Belgique), dans le quartier de la Préalle, à la mine de la Petite Bacnure, le 1<sup>er</sup> avril 1999 un terril s’affaisse, sans faire de victime, sur sept habitations. Pendant plusieurs années, il a continué à barrer la route et laissé derrière lui un spectacle de désolation.</p>
<p>À long terme, au-delà de l’éventualité qu’un terril se consume lentement avant d’exploser, il y a toutes les substances nocives pour l’environnement que certains d’entre eux contiennent et laissent échapper. En octobre 1992 un ancien et très important terril, composé de 600 000 m<sup>3</sup> de résidus différents – oxydes de fer, aluminium, silicium, sodium, titane, calcium – laissés derrière lui par Aluminium Péchiney, s’est effondré. Constitué au cours de la première moitié du XX<sup>e</sup> siècle, il est coincé entre la voie ferrée Marseille-Aubagne et L’Huveaune, <a href="https://social.shorthand.com/lamarsweb/j2yJySguMc/crassiers-dalumine-lheritage-pas-si-invisible">principale rivière se jetant dans la mer au niveau de la cité phocéenne</a>, il continue à déverser dans les eaux souterraines des concentrés de radionucléides, des éléments instables donc potentiellement dangereux. Son impact chimique et radiologique sur l’environnement est loin d’être inoffensif. Sur le terrain d’une ancienne compagnie pétrolière, un terril de plus de quatre mètres de haut s’est effondré en octobre 1996. La coulée menaçait une ferme implantée plus bas, dont le bâtiment se fissurait. Enfin, du méthane qui s’échappait <a href="https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/accident/12085/">faisait craindre une explosion</a> !</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1350036106331435010"}"></div></p>
<p>Pourtant, malgré leur dangerosité, les terrils font partie des lieux de mémoire de la mine. À Denain (Nord) le terril Renard, qui tire son nom de la fosse éponyme, est de ceux-là. Le puits creusé en 1836 a été fermé en 1948, <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00241/une-maison-de-mineur-a-denain.html">après plus d’un siècle d’exploitation</a>. C’est sous la conduite du jeune ingénieur Louis Mercier qu’Émile Zola, préparant <em>Germinal</em>, <a href="https://www.cairn.info/revue-travailler-2002-1-page-37.htm">descend à 675 m de profondeur dans cette fosse le 25 février 1884</a>. C’est également là que travailla pendant plus de 45 ans, le père du truculent personnage de mineur <a href="http://www.cafougnette.com">connu sous le nom de Cafougnette</a>, Jules Mousseron (1868-1943) le <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00241/une-maison-de-mineur-a-denain.html">célèbre mineur, poète et chansonnier</a>.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=924&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=924&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=924&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1161&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1161&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1161&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Jules Mousseron en 1912.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jules_Mousseron#/media/Fichier:Jules_Mousseron_1912.jpg">Wikimedia</a></span>
</figcaption>
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<p>Le <a href="https://www.bassinminier-patrimoinemondial.org/actualites/classement-de-chaine-terrils-titre-de-loi-paysage/">28 décembre 2016</a>, 78 terrils formant une chaîne, situés dans ce qui était le bassin du Nord et du Pas-de-Calais, ont été jugés dignes d’appartenir au patrimoine national au titre de la loi du 2 mai 1930 « ayant pour objet de réorganiser la protection des monuments naturels… »</p>
<p>Certains d’entre eux ont été rendus à la nature, voire à l’expérimentation agronomique, d’autres sont désormais dédiés aux loisirs. Le terril de Pinchonvalles à Avion (Pas-de-Calais), est le plus long d’Europe. Entièrement boisé, il fait la joie des naturalistes et des amateurs de champignons. Son biotope est d’une grande richesse. Espèces animales et végétales rares y cohabitent, comme ces pommiers de variétés anciennes, issues des pépins laissés au fond par les <a href="https://www.ville-avion.fr/node/261">mineurs d’antan à l’heure du « briquet »</a>, surnom donné au casse-croûte dans le bassin du Nord-Pas-de-Calais.</p>
<figure>
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<figcaption><span class="caption">Loin des montagnes, le ski toute l’année sur un terril.</span></figcaption>
</figure>
<p>Pour les fous de glisse, un terril de 129 mètres de haut a été aménagé en piste de ski, à Noeux-les-Mines dans le Pas-de-Calais.Le <a href="https://www.tourisme-bethune-bruay.fr/a-voir-a-faire/culture-patrimoine/loisinord-1070412">complexe Loisinord</a> attire également les foules avec son grand stade nautique. Enfin, les terrils jumeaux (n°s 11 et 19) de Loos-en-Gohelle, les plus hauts d’Europe avec leurs 186 mètres, ont été aménagés pour les promeneurs. Non loin de là se trouve le Louvre-Lens, musée et lieu d’exposition.</p>
<p>À Aberfan, le <em>Memorial Cemetery and Garden</em> a été construit sur le site de la Pantglas School. Lieu de mémoire émouvant, avec ses arches de pierre blanche représentant <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Aberfan#/media/File:Mynwent_Aberfan.jpg">chacune une des petites victimes</a>, il a été inauguré par la reine en mars 1973, avec dépôt d’une couronne de fleurs. Voulait-elle, ce faisant, faire taire les critiques que lui avait valu le retard avec lequel elle s’était rendue sur place sept ans plus tôt et dont la série <em>The Crown</em> se fait l’écho ? Elle s’y rendra à plusieurs reprises, par la suite, en 1997, puis en 2016 à l’occasion du 50<sup>e</sup> anniversaire du drame d’Aberfan.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153679/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En se consumant de l’intérieur, les terrils (ces accumulations de déchets liés à l’exploitation minière) ont provoqué de nombreux accidents au cours de l’histoire.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1519512021-01-04T19:17:00Z2021-01-04T19:17:00ZVers la fin du « King coal » : quel avenir pour le charbon et l’extraction minière ?<p>À l’heure des énergies renouvelables, le charbon a-t-il un avenir ? Est-il en mesure de se transformer en <a href="https://www.connaissancedesenergies.org/le-charbon-propre-est-un-nouveau-type-de-charbon-150910">énergie propre</a>, comme le promettent certains ? Les exploitations minières laisseront-elles un jour derrière elles des terres vierges de pollution et des régions en mesure de se redynamiser ?</p>
<p>Le charbon constitue une source d’énergie présentant un certain nombre d’avantages : ses réserves mondiales sont importantes et pourraient, selon les estimations, être exploitées pendant encore un siècle et demi. Il se transporte aisément, n’est pas toujours coûteux, mais s’avère très polluant. Responsable de près de la moitié des émissions de CO<sub>2</sub> dans le monde, il rejette des gaz soufrés, des oxydes d’azote ainsi que des particules fines.</p>
<p>Actuellement, <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/36-de-l-electricite-mondiale-reste-produite-au-charbon.N977641">36 % de l’électricité mondiale</a> est produite dans des centrales à charbon, dont le nombre augmente notamment dans des pays qui s’accordent… sur la nécessité de protéger le climat !</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"940260060474863618"}"></div></p>
<h2>De grands pays encore fortement dépendants</h2>
<p>Depuis quelques années, en Chine, de nombreuses centrales électriques ont <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/centrales-a-charbon-un-recul-inedit-sauf-en-chine-1228151">été construites</a>. Or, l’empire du Milieu est déjà le plus important émetteur de gaz à effet de serre dans le monde. Dans ce pays où 60 % des besoins en énergie primaire sont assurés par le charbon, un marché national du CO<sub>2</sub> a été mis en place fin 2017.</p>
<p>En Inde, la production et la consommation de charbon augmentent également et le secteur emploie quelque 350 000 personnes. 60 % de l’électricité indienne provient de la houille, mais comme en Chine, le gouvernement dit vouloir encourager les énergies renouvelables… En Asie du Sud-Est, en Indonésie et au Bangladesh, de nouvelles centrales électriques au charbon ont été prévues pour être construites respectivement à Kalselteng 2 dans l’île de Kalimantan et à Matarbari, district de Cox Bazar, dans le Sud-Est du pays.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"732526129869815809"}"></div></p>
<p>En Afrique, une centrale électrique au charbon a été mise en route fin 2018 <a href="https://www.medias24.com/MAROC/ECONOMIE/ENTREPRISES/188569-La-centrale-thermique-de-Safi-entre-en-service.html">à Safi</a>, au Maroc, alors que le gouvernement chérifien annonce être capable en 2030 de produire un plus de la moitié de son électricité grâce aux énergies renouvelables. L’Afrique du Sud ne fait pas exception avec Medupi 2, dans la province de Limpopo. Sa nouvelle centrale électrique est alimentée par le charbon de la <a href="https://www.globalafricanetwork.com/company-news/efficient-mining-at-lephalale/">mine à ciel ouvert de Grootegeluk</a> située non loin, 3200 personnes y travaillent.</p>
<p>Grand pollueur, les États-Unis ont vu en 2019 leur consommation de charbon plonger au plus bas depuis 1975, grâce notamment à la fermeture d’une cinquantaine de centrales électriques. <a href="https://www.lesechos.fr/monde/etats-unis/etats-unis-la-consommation-de-charbon-chute-a-son-plus-bas-depuis-1975-1161139">Selon un rapport indépendant</a>, rédigé par le groupe Rhodium, les émissions de CO<sub>2</sub> auraient diminué d’environ 2 % au cours de la même période. Pourtant, en Virginie, dans de petites communautés charbonnières depuis longtemps en déclin – à l’image de Logan et de Dixie, bourgades blotties au cœur des Appalaches –, les habitants appauvris ont placé tous leurs espoirs en Donald Trump, grand défenseur du « King coal ».</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-coup-de-grisou-de-ladministration-trump-72397">Le coup de grisou de l’administration Trump</a>
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<p>En Australie, où ce minerai est exploité depuis la fin du XVIII<sup>e</sup> siècle sur la côte au nord de Sydney, la grande époque du charbon tire à sa fin. Pays exportateur, l’Australie voit ses plus gros clients, le Japon et la Chine, mettre un frein à leurs commandes.</p>
<p>Comme dans d’autres pays, des mouvements de protestation ont éclaté <a href="https://observers.france24.com/fr/20150729-australie-queensland-abbot-point-bassin-galilee-adani-charbon-grande-barriere-corail">contre des projets d’ouverture</a> de mines jugées trop polluantes. Les banques semblent, quant à elles, hésiter à financer ce type de projet. Si Glencore, une société suisse présente en Australie, <a href="https://www.glencore.com.au/en/who-we-are/energy-products/Pages/coal.aspx">n’abandonne pas le charbon</a>, elle se tourne néanmoins progressivement vers d’autres minerais, tels que le cobalt, le cuivre et le nickel, censés favoriser la transition vers les énergies renouvelables.</p>
<h2>La place marginale de l’Europe</h2>
<p>À l’échelle mondiale, le poids du charbon européen est marginal. À terme, sa production est sans doute destinée à disparaître. Alors qu’en Allemagne près de 40 % de l’électricité provient toujours de la combustion de la houille et de la lignite, les autorités disent <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/06/03/en-allemagne-une-sortie-du-charbon-toute-en-contradictions_6041601_3234.html">vouloir « sortir » du charbon</a>. Or, en 2019, la construction d’une nouvelle centrale électrique à Datteln, dans le land de Rhénanie, a été mise en route…</p>
<p>En Pologne, où le charbon est à l’origine d’environ <a href="https://www.ft.com/content/d44cca2d-1bf1-4fbd-81fc-bdf0da79eb4f">75 % de l’électricité</a>, les dirigeants déclarent vouloir en avoir fini avec ce minerai, dont le coût de production est relativement élevé… mais pas avant 2050 ! En Serbie, c’est grâce à des prêts chinois qu’une unité thermique a récemment été construite, à Kostolac sur le Danube.</p>
<p>Au Royaume-Uni, à Whitehaven, dans le comté de West Cumbria, où une <a href="https://theconversation.com/une-plongee-dans-les-mines-de-charbon-sous-marines-95986">mine de charbon sous-marine</a> a été exploitée jusqu’en 1986, la communauté de communes a accordé le 2 octobre dernier, un permis de construire à la West Cumbria Mining (WCM). Cette compagnie prévoit d’extraire 3 millions de tonnes de houille par an, destinées à la production d’acier. Mais les <a href="https://www.liberation.fr/amphtml/terre/2020/12/27/en-angleterre-un-projet-minier-devient-un-enjeu-de-justice-climatique_1809633">écologistes sont vent debout</a> et le gouvernement n’a pas encore donné son accord pour le lancement du chantier.</p>
<p>En France, quatre centrales électriques sont encore en activité. Celle de Cordemais (Loire-Atlantique) continuera, à bas régime, jusqu’en 2024, voire 2026. Au Havre (Seine-Maritime) et à Saint-Avold (Moselle), la fin est programmée respectivement pour avril 2021 et 2022. Enfin, à Gardanne (Bouches-du-Rhône), la fermeture devrait avoir lieu prochainement, le président Emmanuel Macron s’étant engagé à mettre un terme à leur activité avant la fin de son mandat. En France, 1,5 % à 2 % de l’électricité est produite avec du charbon et « seulement » 1400 emplois sont concernés par cette mesure.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1090672892545851392"}"></div></p>
<h2>L’épineuse question de « l’après »</h2>
<p>Une fois les centrales électriques fermées et les bassins miniers abandonnés, est-il possible de donner une nouvelle vie à ces lieux et de proposer des alternatives aux employés du secteur ?</p>
<p>La tâche est très difficile, comme nous le rappelle l’exemple du bassin du Nord-Pas-de-Calais en France et celui des anciennes régions minières d’Angleterre.</p>
<p>Même des expériences qui se voulaient novatrices n’ont pas été convaincantes, à l’image de celle lancée par l’ONG « Mined mines » dans les Appalaches, région minière nord-américaine en déshérence. Destinée à réorienter les ex-mineurs dans les métiers du codage informatique pour les aider à trouver un emploi lucratif tout en demeurant dans leur région d’origine, elle a beaucoup déçu.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"936248472247980034"}"></div></p>
<h2>Pas que le charbon</h2>
<p>Sur le front des dégâts écologiques causés par l’exploitation minière, rappelons qu’ils ne concernent pas uniquement le charbon.</p>
<p>À Cuidanovita, ville minière située dans les montagnes roumaines du Banat, où l’uranium a été exploité à partir des années 1960 par une société roumano-soviétique, l’extraction est au point mort. Les anciens ouvriers mineurs et leurs familles vivent au milieu de fortes radiations émanant de terrils radioactifs. Ils se servent d’une eau provenant d’une nappe phréatique dont le <a href="https://www.uradmonitor.com/ciudanovita/">taux de pollution</a> est extrêmement élevé.</p>
<p>En France, à Salsigne (Aude), située à une vingtaine kilomètres de Carcassonne, l’extraction de l’or s’est arrêtée en 2004. La vallée de l’Orbiel, dite « Vallée de l’arsenic », site de l’ancienne plus grande mine d’or de France, est désormais le lieu le <a href="https://www.fne.asso.fr/actualites/salsigne-la-vall%C3%A9e-de-l%E2%80%99arsenic-un-scandale-d%E2%80%99%C3%A9tat">plus pollué de l’Hexagone</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"966315070966976512"}"></div></p>
<h2>Polluer moins</h2>
<p>Comment, dans l’avenir, poursuivre l’activité minière dans de meilleures conditions ? Le charbon peut-il véritablement devenir « propre » grâce au système prôné par certains <a href="https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/capture-et-stockage-du-co2-ccs-une-situation-etrange">défenseurs du « carbon capture and storage »</a> (CCS) ? Cet ensemble de techniques a pour objectif d’améliorer le rendement, de diminuer les émissions de CO<sub>2</sub> et de traiter les fumées, mais pour le moment son coût reste prohibitif.</p>
<p>Une fois le charbon abandonné, il y aura toujours des exploitations minières dangereuses et polluantes : d’uranium, de cuivre, d’étain de cuivre, de zinc, d’or… que rejettent souvent les populations locales.</p>
<p>En Roumanie, en <a href="http://www.stopmines23.fr/solidarite-opposants-aux-mines-dor-en-grece-appel-a-dons/">Grèce</a> et en Macédoine du Nord, des villes entières se sont opposées à des projets miniers. <a href="https://www.courrierdesbalkans.fr/Macedoine-Gevgelija-referendum-non-mine-montagne-Kozuf">Lors d’un référendum organisé en 2017</a>, les habitants de Gevgelija (Macédoine du Nord) ont voté contre l’ouverture d’une mine d’or et de cuivre à ciel ouvert de trois kilomètres de diamètre et de 700 mètres de profondeur sur le territoire de leur commune, par crainte des conséquences écologiques. Son exploitation aurait entraîné, comme à Salsigne, une <a href="https://www.courrierdesbalkans.fr/Macedoine-initiative-locale-projets-miniers-societes-etrangeres">pollution de longue durée à l’arsenic et au cyanure</a>, matières utilisées dans ce type de mine.</p>
<p>En Albanie, à Bulqizë, dans le nord du pays à 40 kilomètres de Tirana, des manifestations ont eu lieu <a href="https://www.labourstartcampaigns.net/show_campaign.cgi?c=4274">dans une mine de chrome</a> – substance hautement toxique – en 2011 et en 2019. Après le renvoi de leurs délégués syndicaux, les mineurs se sont mis en grève, y compris de la faim, pour de meilleurs salaires – les habitants de cette ville sont parmi les plus pauvres du pays – et de meilleures conditions de travail, les mineurs intervenant à 1400 mètres de profondeur. Des arrestations ont eu lieu et les informations sur ces conflits sont rares.</p>
<p>Le charbon a sans aucun doute un avenir, en particulier dans les pays qui ne peuvent se passer de son apport énergétique. La France n’a-t-elle pas, au mois de septembre dernier, <a href="https://www.lci.fr/planete/pourquoi-la-france-a-t-elle-rallume-ses-centrales-a-charbon-cette-semaine-2164968.html">relancé certaines de ses centrales thermiques</a> ? Ce recours à la houille n’empêche pas les dirigeants des pays concernés de multiplier les déclarations encourageantes au sujet du passage aux énergies renouvelables. Mais dans quel délai pourront-elles résoudre les problèmes posés par le réchauffement climatique et la pollution environnementale ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/151951/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si nombre de pays déclarent vouloir s’émanciper de cette énergie fossile polluante, le charbon reste encore bien présent et pose de multiples défis environnementaux et économiques.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1466412020-09-24T13:29:08Z2020-09-24T13:29:08ZFact check US : Joe Biden va-t-il « détruire » 10,3 millions d'emplois liés à l'industrie pétrolière et gazière ?<p>Le blog du compte de campagne de Donald Trump affirmait le 31 août que le plan pour une énergie propre de Joe Biden détruirait <a href="https://www.donaldjtrump.com/media/yes-joe-biden-will-eliminate-fracking-jobs/">10,3 millions d’emplois</a> liés à l’industrie pétrolière et gazière, soit <a href="https://www.bls.gov/news.release/archives/empsit_01102020.htm">6,5 % de l’emploi</a> total américain en décembre 2019. <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/02/12/petrole-de-schiste-comment-la-production-a-ete-decuplee-en-dix-ans-aux-etats-unis_5255531_4355770.html">L’extraction du pétrole de schiste</a> a certes permis aux États-Unis d’être en 2019 le <a href="https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/petrole-americain-ce-que-l-on-nous-fait-croire-837645.html">premier producteur</a> du monde devant l’Arabie saoudite, l’importance de ce chiffre a de quoi surprendre. Il supposerait en effet la disparition de l’ensemble de la filière pétrogazière comme de la totalité de l’activité qui peut lui être associée. Cet argumentaire est révélateur des excès de langage de la campagne présidentielle américaine.</p>
<h2>L’histoire de ce chiffre</h2>
<p>Ce chiffre de 10,3 millions d’emplois repose sur une <a href="https://www.api.org/%7E/media/Files/Policy/Jobs/Oil-and-Gas-2015-Economic-Impacts-Final-Cover-07-17-2017.p">étude de l’API</a> (American Petroleum Institute) qui évalue l’importance économique du secteur en 2015. Cette étude identifie près de 2,8 millions d’emplois directs dans la filière pétrogazière en incluant les travailleurs ayant statut d’autoentrepreneurs, nombreux dans le domaine de l’extraction. Le reste sont des emplois indirects et induits. Il s’agit de 5,3 millions d’emplois dans d’autres entreprises mais déterminés par les achats des entreprises pétrogazières (emplois indirects) ou par les dépenses réalisées par leurs travailleurs (emplois induits), ainsi que de 2,2 millions emplois permis par les investissements en capital des entreprises bénéficiant de ces activités.</p>
<p>Certains États seraient plus particulièrement affectés par la disparition de cette filière. Au Texas par exemple, près de 2 millions d’emplois y seraient liés de près ou de loin, soit 12,2 % de l’emploi total de cet État. En Oklahoma, c’est 16,6 % des emplois qui seraient concernés. Au terme de cette étude, chaque emploi dans le secteur pétrogazier serait à l’origine de 2,7 emplois dans le reste de l’économie. Ce ratio est cohérent avec les <a href="https://www.epi.org/publication/updated-employment-multipliers-for-the-u-s-economy/">résultats</a> obtenus par l’Economic Policy Institute qui évalue pour 2019 à 3,9 le nombre d’emplois supplémentaires pour chaque emploi dans les activités d’extraction.</p>
<p>Cela valide-t-il la prévision d’une destruction de 10,3 millions d’emplois liés à la filière pétrogazière en cas de victoire de Joe Biden ? En aucun cas, et ce pour au moins 2 raisons.</p>
<h2>Des emplois qui continueraient d’exister</h2>
<p>Le chiffre avancé suppose la disparition d’emplois qui continueront d’exister quelle que soit l’énergie du futur aux États-Unis. Parmi les 2,8 millions d’emplois directs, plus de 1 million sont liés à la seule distribution du gaz ou de l’essence, d’autres à la fabrication de mélanges de pavage et de blocs d’asphalte pour la construction de routes ou des lubrifiants. Or le passage aux énergies vertes ne signifie pas qu’il n’y aura plus de routes ni de stations d’énergie, mais que ces stations devront adapter leur offre aux besoins des consommateurs en proposant des bornes électriques ou de l’hydrogène. En considérant les activités associées, seuls 6 millions d’emplois sur les 10,3 évoqués seraient donc spécifiquement liés à la production pétrogazière.</p>
<h2>Une économie à zéro émission à l’horizon 2050</h2>
<p>Le programme de Joe Biden ne prévoit pas l’arrêt de l’extraction des énergies fossiles, ni de se passer immédiatement de la fracturation hydraulique, mais d’enclencher leur remplacement par des énergies renouvelables <a href="https://www.lesechos.fr/2017/01/les-energies-renouvelables-creent-elles-plus-demplois-que-le-nucleaire-comme-le-dit-hamon-159862">génératrices d’emploi</a>. Ce <a href="https://joebiden.com/clean-energy/">programme</a> pour une économie à zéro émission à l’horizon 2050 prévoit 2 000 milliards dollars de dépenses, avec pour objectifs une réorientation des choix technologiques de l’industrie automobile, un accroissement de la production électrique à partir d’énergies propres et la remise en état des écosystèmes abîmés par l’extraction des ressources, volet consacré notamment aux millions de puits de gaz et de pétrole abandonnés non bouchés. Selon le programme démocrate, la remise en état des écosystèmes se traduirait à elle seule par la création de 250 000 emplois directs. Cet objectif suppose un investissement fédéral important qu’il sera difficile de faire supporter entièrement aux entreprises responsables des dommages.</p>
<p>Les destructions d’emplois qui interviendraient inévitablement dans le secteur des énergies fossiles doivent être mis en balance avec ceux que créerait le développement des énergies renouvelables. On est donc très loin de la destruction de 10,3 ou même de 6 millions d’emplois.</p>
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<p><em>La rubrique Fact check US a reçu le soutien de <a href="https://craignewmarkphilanthropies.org/">Craig Newmark Philanthropies</a>, une fondation américaine qui lutte contre la désinformation.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/146641/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le programme énergétique démocrate prévoit-il la destruction de plus de 10 millions d'emplois liés au gaz et au pétrole ? Non, il parie sur une transition énergétique créatrice d'activité d'ici 2050.Thérèse Rebière, Maître de conférences en économie, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)Isabelle Lebon, Professeur des Universités, directrice adjointe du Centre de recherche en économie et management, Université de Caen NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1400142020-06-21T20:23:12Z2020-06-21T20:23:12ZEnseigner l’énergie au-delà de la civilisation thermo-industrielle, un défi de notre temps<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/342437/original/file-20200617-94054-174egtr.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C2%2C749%2C593&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Sadi Carnot en 1813, âgé de 17 ans, en uniforme de l'École Polytechnique. Gravure d'après le tableau de Léopold Boilly, parue en 1878 dans la réédition de _Réflexions sur la puissance motrice du feu_, Gauthier-Villars, Paris.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Sadi_Carnot_Boilly_1813.jpg">Wikipédia</a></span></figcaption></figure><p>Au cours de cette crise sanitaire, qui précède d’autres tempêtes bien plus terribles causées par le réchauffement climatique, je suis resté enseignant. Les cours eurent donc lieu en ligne et en faisant au mieux. Sujet : la thermodynamique, c.-à-d., la science de la chaleur, source de mouvement.</p>
<p>J’ai repris, un soir après le cours, les <em>Réflexions sur la puissance motrice du feu</em> que <a href="http://www.numdam.org/article/ASENS_1872_2_1__393_0.pdf">Sadi Carnot</a> a publié à 27 ans en 1824, 8 ans avant de mourir du choléra, et à l’aube de la Révolution industrielle. J’avais oublié. Je suis resté interdit devant les toutes premières pages.</p>
<p>Je fais de la physique depuis bientôt un demi-siècle. Je l’enseigne depuis un quart de siècle. Avec toujours un grand plaisir, malgré une interrogation, voire un doute, grandissant. J’enseigne, à l’entrée de l’université, des connaissances qui étaient disponibles bien avant ma naissance. Comme pratiquement tous les enseignants de physique sur Terre. Finalement je les enseigne comme je les ai apprises. Le premier principe de la thermodynamique, c’est la conservation de l’énergie. Elle est intemporelle et s’impose à tous. Alors d’où me viennent cette interrogation et ce doute quand je suis en cours avec des gens de 20 ans, acteurs du monde de demain, eux qui déjà vivront l’impact terrible des transitions irréversibles qui s’avancent, changement climatique et effondrement de la biodiversité en tête ?</p>
<h2>« Les Réflexions sur la puissance motrice du feu » de Sadi Carnot</h2>
<p>J’ai donc enseigné la thermodynamique en première année de Licence cette année encore, avec les machines thermiques et le cycle de Carnot au cœur de la transmission. En 1824, le jeune Sadi Carnot publie ses <em>Réflexions sur la puissance motrice du feu et sur les machines propres à développer cette puissance</em>. En une centaine de pages, il fonde ainsi ce qui deviendra la thermodynamique baptisée ainsi, 20 ans après sa mort, par <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/William_Thomson_(Lord_Kelvin)">William Thomson</a> et vient ainsi donner des bases théoriques à la machine à vapeur. Vingt ans plus tard aussi, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Rudolf_Clausius">Rudolf Clausius</a> introduira l’entropie qui complètera le tableau.</p>
<p>Au passage, Sadi Carnot rationalise et fonde en théorie les pratiques des ingénieurs, et prend la mesure des effets de l’ensemble sur les changements déjà en cours à son époque, sur leurs développements à venir et sur la transformation du monde qui en résultera. A posteriori on ne peut qu’admirer !</p>
<blockquote>
<p>« Si quelque jour les perfectionnements de la machine à feu s’étendent assez loin pour la rendre peu coûteuse en établissement et en combustible, elle réunira toutes les qualités désirables, et fera prendre aux arts industriels un essor dont il serait difficile de prévoir toute l’étendue. »</p>
<p>« Elles (les machines à feu) paraissent destinées à produire une grande révolution dans le monde civilisé. »</p>
</blockquote>
<p>Deux siècles plus tard, on peut mesurer toute l’étendue de cette grande révolution. La puissance motrice du feu, c’est-à-dire la maîtrise de la chaleur produite par la combustion des combustibles fossiles, charbon, pétrole et gaz, a radicalement changé le monde.</p>
<blockquote>
<p>« La navigation due aux machines à feu rapproche en quelque sorte les unes des autres les nations les plus lointaines. Elle tend à réunir entre eux les peuples de la terre comme s’ils habitaient tous une même contrée. Diminuer en effet le temps, les fatigues, les incertitudes et les dangers des voyages, n’est-ce pas abréger beaucoup les distances ? »</p>
</blockquote>
<p>Carnot avait anticipé l’explosion des voyages voire la mondialisation des échanges qui s’en suivirent en des termes toujours d’actualité. Déjà le village planétaire est là.</p>
<h2>Carnot et la civilisation thermo-industrielle</h2>
<p>L’approche scientifique de Carnot est d’une puissance incroyable. Elle part notamment des machines développées autour des mines de charbon. Avec cette analyse advient un saut conceptuel inouï :</p>
<blockquote>
<p>« Partout où il existe une différence de température, il peut y avoir production de puissance motrice. »</p>
</blockquote>
<p>Il faut disposer de deux températures : une chaude et une froide pour construire une machine thermique comme un moteur de voiture ou une centrale thermique. Plus le point chaud est chaud, mieux c’est. Plus le point froid est froid, mieux c’est. C’est toujours vrai, y compris pour le nucléaire.</p>
<p>Ce concept est au cœur de ce que l’on appelle de plus en plus aujourd’hui la civilisation thermo-industrielle (Voir les interventions de l’économiste <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ga%C3%ABl_Giraud#Prises_de_position">Gaël Giraud</a> par exemple). Une civilisation déjà décrite en 1824 par Sadi Carnot en introduction de son texte scientifique fondamental.</p>
<h2>L’humanité brûle toujours plus</h2>
<p>Ça aussi Sadi Carnot l’a écrit :</p>
<blockquote>
<p>« C’est dans cet immense réservoir que nous pouvons puiser la force mouvante nécessaire à nos besoins ; la nature, en nous offrant de toutes parts le combustible, nous a donné la faculté de faire naître en tous temps et en tous lieux la chaleur et la puissance motrice qui en est la suite. »</p>
</blockquote>
<p>Pour ce faire, nous avons brûlé d’abord des arbres, puis rapidement du charbon, enfin du gaz et du pétrole. Massivement. Pour faire fonctionner plus d’un milliard de véhicules à moteurs essence ou diesel, et pour produire encore aujourd’hui l’essentiel de l’électricité qu’utilise près de 90 % de l’humanité.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/339576/original/file-20200603-130923-rgposp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/339576/original/file-20200603-130923-rgposp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/339576/original/file-20200603-130923-rgposp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/339576/original/file-20200603-130923-rgposp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/339576/original/file-20200603-130923-rgposp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/339576/original/file-20200603-130923-rgposp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/339576/original/file-20200603-130923-rgposp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/339576/original/file-20200603-130923-rgposp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Consommation mondiale de l’énergie primaire par an. A l’époque de Sadi Carnot, la consommation de charbon, même si déjà essentielle par exemple en Angleterre, est encore insignifiante pour l’ensemble de l’humanité. Encore aucune consommation de gaz et de pétrole.</span>
<span class="attribution"><span class="source">//ourworldindata.org/energy</span></span>
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<p>L’article « Moteurs thermiques » de l’Encyclopédie Universalis écrit au XX<sup>e</sup> siècle démarre par une courte introduction sur les moteurs à essence et diesel, et cadre immédiatement son propos par le rendement de Carnot et ses deux températures. Enseigner cette partie de la thermodynamique ainsi, c’est se situer dans la droite ligne de l’introduction de Sadi Carnot.</p>
<p>Donc j’enseigne encore comme toujours, la puissance motrice du feu au cœur de la civilisation thermo-industrielle qui n’est ni durable, ni soutenable. Et pourtant je ne boude pas mon plaisir. J’enseigne aux étudiants ces machines thermiques idéales, le cycle de Carnot associé et son rendement, avec l’entropie à la clé.</p>
<p>C’est un morceau de physique d’une puissance, d’une subtilité et d’une élégance toujours fascinantes. Le faire découvrir à des étudiants est un privilège constant. Comme mes professeurs il y a 40 ans, dans le cadre du cours, je souligne que la maîtrise de ces connaissances est incontournable : « A savoir pour la vie ! Et même si la plupart d’entre vous ne fera rapidement plus de physique ! » Bien sûr, car il y a plus d’un milliard de moteurs à combustion dans le monde.</p>
<h2>Civilisation thermo-industrielle : fin de partie en vue</h2>
<p>Mais aujourd’hui, j’en ai peur, nous avons affaire à un <a href="https://www.europarl.europa.eu/news/fr/headlines/society/20190313STO31218/emissions-de-co2-des-voitures-faits-et-chiffres-infographie">problème méchant</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Les transports sont responsables de près de 30 % des émissions totales de CO<sub>2</sub> de l’Union européenne. Parmi ces émissions, 72 % proviennent du transport routier. »</p>
</blockquote>
<p>En son temps, Sadi Carnot a décrit clairement le potentiel de progrès pour l’humanité dans la maîtrise de la chaleur pour produire du mouvement. Deux siècles plus tard, la partie s’est jouée comme il l’a anticipé. Mais nous savons aujourd’hui qu’elle ne peut pas continuer ainsi. La brutalité des effets du réchauffement climatique dû au dioxyde de carbone relâché dans l’atmosphère est là comme un sous-produit inévitable de cet immense feu planétaire. Le programme de Sadi Carnot établi il y a 200 ans n’est plus un avenir possible pour l’humanité.</p>
<h2>L’énergie conditionne tout</h2>
<p>Les lignes écrites par Sadi Carnot se fondaient sur une vision scientifique et rationnelle du futur de son temps. Aujourd’hui on pourrait l’imaginer cherchant avec nous une autre voie. Sa vision serait certainement construite sur les remarques suivantes :</p>
<ul>
<li><p>les connaissances scientifiques fondamentales fondées expérimentalement ne se négocient pas,</p></li>
<li><p>leur utilisation rationnelle est nécessaire comme l’ont montré la variété des réponses et leur différence d’efficacité dans la crise sanitaire en cours,</p></li>
<li><p>il y a en conséquence des observations et des prévisions comme celles associées au réchauffement climatique qui sont aussi objectives et robustes que désagréables.</p></li>
</ul>
<p>Il ne s’arrêterait probablement pas là. Il a été un des chercheurs, qui ont fait émerger un nouveau paradigme pour le futur de l’humanité. On peut penser qu’il se situerait à nouveau à cette hauteur dans la réflexion :</p>
<blockquote>
<p>« C’est à la chaleur que doivent être attribués les grands mouvements qui frappent nos regards sur la terre ; c’est à elle que sont dues les agitations de l’atmosphère, l’ascension des nuages, la chute des pluies et des autres météores, les courants d’eau qui sillonnent la surface du globe et dont l’homme est parvenu à employer pour son usage une faible partie. »</p>
</blockquote>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/penser-lapres-les-limites-physiques-de-la-planete-138842">Penser l’après : Les limites physiques de la planète</a>
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</p>
<hr>
<p>Cette première phrase de son livre nous semble aujourd’hui évidente. L’était-elle aussi de son temps ? Je ne sais pas vraiment. Il souligne d’une part l’importance des mouvements naturels dus à la chaleur, induits par le rayonnement solaire qui frappe la Terre et d’autre part que nous n’accédons qu’à une faible partie de ces énergies, dites aujourd’hui renouvelables. Ça, ça reste vrai.</p>
<p>Cet article veut s’inscrire dans la transformation de l’université à laquelle nous appelle le climatologue <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Jouzel">Jean Jouzel</a> :</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourquoi-les-universites-doivent-declarer-letat-durgence-ecologique-et-climatique-126880">Pourquoi les universités doivent déclarer l’état d’urgence écologique et climatique</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<hr><img src="https://counter.theconversation.com/content/140014/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Joël Chevrier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Nous enseignons toujours l’énergie, cœur de la civilisation thermo-industrielle, dans les pas de Sadi Carnot. Comment s’en inspirer à présent pour explorer un autre avenir avec les étudiants ?Joël Chevrier, Professeur de physique, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1378542020-05-25T14:04:34Z2020-05-25T14:04:34ZLe travail en milieu confiné, une réalité contemporaine<p>Aujourd’hui encore à travers le monde, un certain nombre de métiers s’exercent quotidiennement dans un espace qualifié de « confiné », c’est-à-dire « creux et totalement ou partiellement fermé », tels les égouts, les tunnels, les silos, les citernes, les puits ou encore les mines.</p>
<p>Dans ces lieux contraints, les conditions de travail sont particulièrement difficiles et, le plus souvent, dangereuses.</p>
<p>Qu’ils soient souterrains ou situés en hauteur, comme les silos, l’atmosphère y est dite « confinée » et le milieu, dans son ensemble, considéré comme mal aéré.</p>
<h2>Des espaces particulièrement dangereux</h2>
<p>Si l’air y est rare et de médiocre qualité, l’espace dans lequel se déploient les travailleurs est lui-même très réduit et la sortie – disons plutôt la fuite –, en cas de problème, aléatoire. Les accidents y sont plus fréquents qu’ailleurs, <a href="https://www.20minutes.fr/societe/2092095-20170622-marne-ouvrier-21-ans-decede-enseveli-silo-cereales">comme en témoigne la mort d’un jeune cordiste dans un silo du département de la Marne en 2017</a>, et le sauvetage délicat et périlleux à mettre en œuvre.</p>
<p>Les tentatives désespérées menées pour sauver des mineurs ensevelis au fond d’un puits, sont légion. Il suffit de se souvenir des 69 jours vécus dans les galeries effondrées de la mine de cuivre et d’or de San José par 33 mineurs chiliens, entre août et octobre 2010. Malgré l’aide internationale, arrivée de partout, il fallut deux mois et demi pour réussir à remonter à la surface ces hommes qui travaillaient dans ce milieu « confiné », « partiellement ou totalement fermé ».</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/i1X5iTkbkYw?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>L’exercice de ces métiers est à l’origine d’un certain nombre de risques qu’ils partagent tous. L’air y est raréfié, le danger d’asphyxie beaucoup plus important qu’ailleurs et l’intoxication au gaz répandue. Dans certains de ces espaces, les incendies se développent plus rapidement et peuvent donner lieu à de graves explosions. Dans les mines, les éboulements et autres glissements de terrain sont pléthores ; dans les silos, les travailleurs peuvent, par exemple, être victimes d’un ensevelissement sous des tonnes de grains.</p>
<p>Enfin notons, que dans les puits et dans les mines, les ouvriers sont parfois victimes d’inondations imprévues et dévastatrices, comme celle que décrit Hector Malot dans <em>Sans famille</em> (1878). Les eaux de la Divonne envahissant la mine cévenole de La Truyère dans laquelle travaille Rémi – le jeune héros de ce roman populaire – constituent l’un des moments forts d’un récit réaliste :</p>
<blockquote>
<p>« […]l’eau, après avoir envahi toutes les galeries depuis le plancher jusqu’au toit, nous murait dans notre prison plus solidement, plus hermétiquement qu’un mur de pierre. Ce silence lourd, impénétrable, ce silence de mort était plus effrayant, plus stupéfiant que ne l’avait été l’effroyable vacarme que nous avions entendu au moment de l’irruption des eaux ; nous étions au tombeau, enterrés vifs, et trente au quarante mètres de terre pesaient sur nos cœurs. »</p>
</blockquote>
<p>Pour tous, dans toutes ces circonstances, le plus souvent dramatiques, la question qui se pose est celle de la fuite. Comment s’échapper de ce milieu de travail confiné, lorsque les rares voies pour sortir sont inatteignables, voire bouchées ?</p>
<h2>Descente aux enfers</h2>
<p>Le travail qui se déroule dans une mine, quelle qu’elle soit, est confiné dès le départ. Que la descente s’effectue <a href="https://www.akg-images.com/archive/Descente-aux-echelles-dans-le-mines-du-Harz-2UMEBMI9X4UW.html">au moyen d’une succession d’échelles glissantes</a>, dans des tonnes <a href="https://andredemarles.skyrock.com/2237132609-Equipe-d-abouts-en-cuffat.html">ou des « cuffats »</a>, voire plus tard, au milieu du XIX<sup>e</sup> siècle en Europe, dans des « cages » en bois, puis en fer, et enfin <a href="https://shop.strato.com/WebRoot/StoreFR/Shops/61441985/4E54/D2EF/648D/B4E2/EBED/C0A8/29BB/99BB/CP.FR.71.0068.jpg">à l’aide d’ascenseurs</a>, l’espace obscur et confiné qui permet d’accéder au travail du fond est particulièrement effrayant. Les mineurs ne parlent-ils pas d’une « descente aux enfers » ? Les mineurs polonais ne se signent-ils pas, religieusement, <a href="https://books.openedition.org/editionsmsh/3751?lang=fr">avant d’entrer dans le puits</a> ?</p>
<p>Le lieu même du labeur de l’abatteur – pourtant le roi des ouvriers du fond, chargé de l’abattage du charbon – n’a-t-il pas pendant très longtemps été le plus confiné de tous ? N’avons-nous pas tous en mémoire des images de ces hommes torse-nu, à demi-allongés, un pic à la main en train d’arracher à la paroi rocheuse, des « gaillettes » – morceaux de charbon –, <a href="https://histoire-image.org/fr/etudes/travailleurs-mine-abatteurs">dans une « taille » de moins d’un mètre de haut</a> ?</p>
<p>Que penser du double sentiment d’enfermement que pouvaient ressentir des mineurs chinois et coréens travaillant <a href="https://theconversation.com/une-plongee-dans-les-mines-de-charbon-sous-marines-95986">dans les mines sous-marines du Japon pendant la Seconde Guerre mondiale</a> ? Ces « gueules noires » qui ont extrait la houille à plusieurs centaines de mètres sous la mer – entre 300 et 900 –, en Angleterre (mine fermée en 1986), au Pays de Galles (en 1996), au sud du Chili (en 1997) et en Chine, ont œuvré dans un milieu dans lequel l’aération était difficile, le poids « mental » et physique de la mer au-dessus d’eux pesant et les conditions de travail particulièrement pénibles, l’essentiel de celui-ci se déroulant, en effet, dans la position allongée en raison de l’étroitesse des lieux.</p>
<h2>Travailler au péril de sa vie</h2>
<p>Si l’essentiel de l’exploitation humaine de minerais sous les océans est aujourd’hui à l’arrêt et que de moins en moins de mines fonctionnent en Europe, il n’en est pas de même en Afrique et en Chine, notamment, des régions du monde où le travail confiné, dans des galeries de tous les dangers, est encore et toujours à l’ordre du jour.</p>
<p>En République Démocratique du Congo, ce sont des enfants qui travaillent dans les petites mines illicites de cobalt, matière utilisée dans l’industrie automobile. Ils creusent eux-mêmes à la main, de manière totalement artisanale, de minuscules galeries qui ne présentent aucune garantie de sécurité, <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/760431/cobalt-mines-republique-congo-batteries-apple">dans lesquelles ils s’introduisent au péril de leur vie</a>. Petits, chétifs, ces enfants de la mine sont les seuls à pouvoir entrer dans ces espaces « confinés » à l’extrême. Au XIX<sup>e</sup> siècle, les patrons du textile anglais avaient eux aussi recours à des bambins pour s’introduire à l’intérieur des machines en marche – ce qui permettait un gain de temps – afin <a href="https://www.cairn.info/revue-le-mouvement-social-2014-4-page-91.htm">d’en démêler les fils ou pour les nettoyer</a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/r7_dWQEt8z8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>En Chine, une certaine réglementation en matière de prévention des risques a été, au fil des années, mise en place dans les mines gérées par l’État. Mais dans les mines privées, les conditions de travail sont toujours désastreuses, tant du point de vue du développement de maladies professionnelles, comme la <a href="https://sante.lefigaro.fr/sante/maladie/pneumoconiose/quest-ce-que-cest">pneumoconiose</a> causée par l’inhalation des poussières dégagées par l’abattage du charbon, que par la façon dont les galeries et les puits ont été creusés et sont entretenus, comme le montrent les <a href="https://books.openedition.org/septentrion/1820?lang=fr">travaux d’Irène Huang sur la santé des mineurs chinois</a>.</p>
<p>Souvenons-nous, après avoir vécu quelques semaines d’un confinement plus ou moins confortable, qu’il existe encore des lieux où des enfants et des adultes travaillent encore quotidiennement dans un espace confiné, dangereux et anxiogène.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/137854/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans les égouts, les tunnels, les silos, les citernes, les puits ou encore les mines, les travailleurs qui vivent le confinement au quotidien sont encore nombreux à travers le monde.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1328882020-03-08T18:01:40Z2020-03-08T18:01:40ZLa sortie du charbon amorcée (presque) partout dans le monde<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/318880/original/file-20200305-106616-lhp182.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=269%2C341%2C5528%2C3643&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans l’Union européenne, huit États-membres (dont la France) ont décidé de supprimer la production d’électricité à partir du charbon d’ici à 2030.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/worker-checking-coal-mine-power-plant-1045974793">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>En 2019, nous expliquions pourquoi la consommation de charbon dans le monde <a href="https://theconversation.com/comment-expliquer-la-hausse-de-la-consommation-de-charbon-dans-le-monde-110625">était à la hausse</a>. Les annonces récentes de plusieurs gouvernements sur leur plan de sortie du charbon, les fermetures avancées de vieilles centrales électriques ou encore le gel de certains projets en construction indiquent peut-être une inversion de tendance dans les années à venir. Ces signes encourageants annoncent-ils la fin du charbon dans le monde ?</p>
<p>À partir des différentes bases de données et informations centralisées par le bureau d’études spécialisé dans le domaine de l’énergie <a href="https://www.enerdata.fr/">Enerdata</a>, nous décryptons les grandes tendances mondiales du charbon à court et moyen terme.</p>
<h2>1,3 % en 2019, un tournant décisif</h2>
<p><a href="https://www.enerdata.net/publications/executive-briefing/2019-global-co2-emissions-estimates.html">Selon les dernières estimations d’Enerdata</a>, la consommation mondiale de charbon aurait diminué de 1,3 % en 2019 (alors qu’elle augmentait de 0,9 % en 2018). L’inversion de cette tendance est principalement due à une chute de son usage aux États-Unis (-9 %) et en Europe (-4 %).</p>
<p>Aux États-Unis, la consommation de charbon a en effet atteint son niveau le plus bas depuis 40 ans, s’expliquant par la fermeture de centrales électriques au charbon (15 GW de capacité fermée en 2018), des normes d’émissions plus strictes et la disponibilité de gaz naturel moins cher pour la production d’électricité. En Europe, elle a décliné pour la septième année consécutive, en raison des politiques climatiques, du développement d’autres énergies (renouvelables et gaz) et de l’augmentation du prix de la tonne de CO<sub>2</sub> au sein de l’Union européenne.</p>
<p>Ailleurs dans le monde et particulièrement en Asie, toutefois, le recours au charbon augmente. Sous l’impulsion de la production dans certains secteurs électro-intensifs (acier, ciment et produits chimiques), la Chine ne parvient pas à réduire sa dépense de charbon malgré le ralentissement de son économie.</p>
<p>Au moment où les pays industrialisés tentent d’atténuer leurs émissions de CO<sub>2</sub>, le Japon fait bande à part et prévoit la construction de <a href="https://www.nytimes.com/2020/02/03/climate/japan-coal-fukushima.html">22 nouvelles centrales à charbon</a>. Une conséquence involontaire de la catastrophe de Fukushima, qui a contraint le pays à mettre fin à son programme d’énergie nucléaire.</p>
<h2>D’ici 2030, 8 pays européens se détourneront du charbon</h2>
<p>Dans l’Union européenne, huit États membres (dont la France) ont décidé de supprimer la production d’électricité <a href="https://www.euractiv.com/section/climate-environment/news/only-eight-eu-countries-plan-to-phase-out-coal-by-2030/">à partir du charbon d’ici à 2030</a>.</p>
<p>Leur production d’électricité représente 22 % de la production totale d’électricité au charbon de l’UE. En outre, l’Allemagne qui produit un tiers de son électricité à partir du charbon (et contribue à 38 % de la production d’électricité au charbon de l’UE), a approuvé fin janvier 2020 un projet de loi visant à stopper ce type <a href="https://www.reuters.com/article/us-germany-energy-coal/germany-to-phase-out-coal-by-2038-in-move-away-from-fossil-fuels-idUSKCN1PK04L">d’électricité d’ici à 2038</a> et entend fermer 40 % de sa capacité charbon d’ici à 2030. Les autres pays de l’UE ne se sont pas engagés : la Pologne, notamment, qui produit aujourd’hui 78 % de son électricité à partir du charbon.</p>
<p>En dehors de l’Union, le gouvernement britannique a avancé d’un an la date de sortie du charbon prévue maintenant en octobre 2024.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/318370/original/file-20200303-66074-1yso2tn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/318370/original/file-20200303-66074-1yso2tn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/318370/original/file-20200303-66074-1yso2tn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=438&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/318370/original/file-20200303-66074-1yso2tn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=438&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/318370/original/file-20200303-66074-1yso2tn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=438&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/318370/original/file-20200303-66074-1yso2tn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=551&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/318370/original/file-20200303-66074-1yso2tn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=551&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/318370/original/file-20200303-66074-1yso2tn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=551&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Figure 1 : Plans de sortie de charbon et part du charbon dans le mix électrique par nation en 2018.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Carine Sebi (données Enerdata)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Engagement des secteurs énergétique et financier</h2>
<p>Au-delà de ces annonces gouvernementales, certaines entreprises clés du secteur envisagent également le retrait ou l’arrêt de centrales charbon. Le distributeur d’électricité et de gaz américain PSEG a présenté cet été <a href="https://www.spglobal.com/marketintelligence/en/news-insights/trending/NP8sMx0nyf6UJ04AGlJcpQ2">sa vision <em>Powering Progress</em></a>, dans laquelle il prévoit de fermer ou de vendre l’intégralité de son parc de centrales électriques au charbon d’ici 2021, soit un retrait d’une capacité équivalente à 2 400 MW. Son homologue espagnol, Endesa, a décidé de fermer toutes ses centrales au charbon en Espagne et au Portugal (<a href="https://www.greentechmedia.com/articles/read/enel-subsidiary-to-close-all-its-coal-capacity">soit 5 800 MW</a> ou l’équivalent de la consommation en électricité hors chauffage et eau chaude de 4,6 millions de ménages en France, dont 50 % d’ici 2022).</p>
<p>Les banques d’investissement publiques et privées dévoilent également leur stratégie en matière de climat et politique de prêts dans le secteur de l’énergie, qui exclut les financements de projets charbon, en raison de la pression exercée par les régulateurs de la finance et du risque d’entacher leur réputation.</p>
<p>C’est le cas par exemple de la <a href="https://www.scientificamerican.com/article/european-investment-bank-will-stop-lending-to-fossil-fuel-projects/">Banque européenne d’investissement</a> qui ne soutiendra plus les projets d’énergie fossiles (y compris du gaz naturel) d’ici à 2021. Au Japon, la <a href="https://www.reuters.com/article/us-japan-coal-financing/japanese-bank-mufg-rethinks-policy-on-coal-fired-power-projects-idUSKCN1SM1B4">banque d’investissement MUFG</a>, l’un des plus grands bailleurs de fonds au monde pour le charbon, s’est elle aussi engagée à cesser le financement de tels projets.</p>
<p>En regardant de plus près l’état d’avancement des projets en construction, on se rend compte du nombre grandissant d’annulations de centrales électriques au charbon. Sur la capacité mondiale additionnelle prévue d’ici à 2030 (soit ~300 GW), 21 % est gelée ou annulée, avec une part non négligeable en Asie (14 % pour la Chine et l’Inde par exemple).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/318323/original/file-20200303-66099-1jj644h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/318323/original/file-20200303-66099-1jj644h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/318323/original/file-20200303-66099-1jj644h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=333&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/318323/original/file-20200303-66099-1jj644h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=333&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/318323/original/file-20200303-66099-1jj644h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=333&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/318323/original/file-20200303-66099-1jj644h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=419&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/318323/original/file-20200303-66099-1jj644h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=419&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/318323/original/file-20200303-66099-1jj644h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=419&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Figure 2 : Capacités agrégées des futurs projets de centrales charbon prévus par région du monde.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.enerdata.net/expertise/energy-co2-data.html">Carine Sebi (données Power Plant Tracker, Enerdata)</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<h2>Réduire la dépendance des plus gros producteurs et consommateurs</h2>
<p>En plus d’annuler la construction de nouvelles centrales, de gros pays consommateurs de charbon se défont de cette énergie pour produire leur électricité. La Corée du Sud a adopté un moratoire pour la construction de nouvelles centrales charbon et a également prévu de <a href="https://www.reuters.com/article/us-southkorea-power-coal/south-korea-plans-to-shut-down-up-to-15-coal-fired-power-plants-for-winter-idUSKBN1Y205J">fermer jusqu’à 15 de ses centrales</a> cet hiver (soit 2600 MW, soit 2,2 % de sa capacité totale installée) pour limiter la pollution ambiante.</p>
<p>Les pays charbonniers ont également entamé une forte réduction de la part du charbon dans leur mix. L’Afrique du Sud, dont 73 % de la production d’électricité provient de cette source d’énergie, fermera près de 30 % de sa capacité d’ici à 2030 et <a href="https://averda.co.za/news/south-africas-sustainable-energy-plan-future/">réduira la part du charbon dans sa capacité installée à 45 % en 2030</a>. L’Indonésie (<a href="https://www.statista.com/statistics/993362/indonesia-energy-mix-for-power-generation-by-source/">60 % de charbon dans le mix électrique</a>) prévoit de fermer et de remplacer toutes les centrales charbon de plus de 20 ans par des centrales renouvelables, <a href="https://theoilandgasyear.com/news/indonesia-to-replace-coal-plants-with-renewables/">sans préciser d’échéance</a>.</p>
<p>De la même manière, l’Australie clora <a href="https://www.reuters.com/article/column-russell-electricity-coal-australi/rpt-column-australia-energy-market-operator-turns-scrooge-on-coal-lobby-russell-idUSL4N28M1MC">toutes les centrales au charbon (63 % du mix) d’ici à 2040</a>. Enfin l’Inde, dépendant à 72 %, souhaite <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2020-02-24/trump-says-u-s-to-sign-3-billion-in-defense-deals-with-india">réduire cette part à 50 % d’ici à 2030</a>.</p>
<h2>Les raisons du tournant</h2>
<p>Dans l’actualité « charbon », on note également que de plus en plus de vieilles centrales charbon (les plus polluantes) fermeront plus tôt que prévu, fermetures prématurées poussées par les alertes climatiques <a href="https://www.reuters.com/article/southkorea-pollution-coal/skorea-to-close-6-older-coal-fired-power-plants-by-2021-from-planned-2022-idUSL3N27H1EI">par exemple en Corée du Sud</a>, <a href="https://www.reuters.com/article/us-netherlands-energy/dutch-to-close-amsterdam-coal-fired-power-plant-four-years-early-rtl-idUSKCN1QO1JE">aux Pays-Bas</a>, mais aussi en Chine.</p>
<p>Malheureusement, les fermetures prévues ne compenseront pas les projets actuellement en cours dans le monde. Si l’on compare les capacités cumulées des centrales en construction avec celles qui vont fermer, on ne note une diminution nette des capacités charbon qu’en Europe, en Amérique Latine et en Amérique du Nord.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/318324/original/file-20200303-66099-jcaeoo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/318324/original/file-20200303-66099-jcaeoo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/318324/original/file-20200303-66099-jcaeoo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/318324/original/file-20200303-66099-jcaeoo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/318324/original/file-20200303-66099-jcaeoo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/318324/original/file-20200303-66099-jcaeoo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/318324/original/file-20200303-66099-jcaeoo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/318324/original/file-20200303-66099-jcaeoo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Figure 3 : Capacités agrégées des centrales charbon en fermeture et en construction par région dans le monde.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.enerdata.net/expertise/energy-co2-data.html">Carine Sebi (données Enerdata)</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>Dans d’autres régions du monde, la réduction de la consommation du charbon est plutôt due à la découverte et la substitution par d’autres ressources. Par exemple le Maroc ou l’Égypte, qui optent pour des importations de gaz, ou le Chili, qui prévoit une sortie d’ici 2040 avec une fermeture d’un tiers de sa capacité charbon <a href="https://www.gov.uk/government/news/end-of-coal-power-to-be-brought-forward-in-drive-towards-net-zero">d’ici à 2024</a>. Israël annonce également une sortie définitive du charbon à 2025 du fait de découvertes abondantes de gaz. Le recul du charbon observé aux États-Unis s’explique par le développement et l’abondance d’une autre énergie carbonée, à savoir le gaz de schiste.</p>
<p>Les alertes sur la pollution et le climat, ainsi que les plans nationaux énergétiques, sensibilisent les acteurs privés et les incitent à trouver de nouvelles solutions. La justice kényane a décidé de bloquer un projet contesté de construction d’une centrale de production électrique à charbon (981 MW), à Lamu, un <a href="https://www.jeuneafrique.com/794538/politique/kenya-la-justice-suspend-un-projet-de-centrale-a-charbon-sur-larchipel-de-lamu/">site classé au patrimoine mondial de l’Unesco</a>.</p>
<p>Même si les fermetures des vieilles centrales charbon ne compenseront pas les constructions à venir, ces engagements des plus gros pays consommateurs et producteurs de charbon amorcent la sortie du charbon dans le monde. Mais le déclin du recours au charbon actuellement observé est aussi lié à des phénomènes exogènes conjoncturels.</p>
<p>Le ralentissement de la <a href="https://www.enerdata.net/publications/daily-energy-news/indias-coal-fired-power-generation-fells-first-time-decade.html">croissance en Inde</a> a provoqué en 2019 la première baisse de production d’électricité à partir de charbon depuis dix ans (-2,5 %). De la même manière, l’épidémie actuelle de coronavirus fait déjà chuter les <a href="https://www.futura-sciences.com/planete/breves/pollution-coronavirus-fait-chuter-emissions-co2-chine-1995/">émissions de CO₂</a> de façon spectaculaire.</p>
<hr>
<p><em>Bruno Lapillonne, directeur scientifique d’<a href="https://www.enerdata.fr/">Enerdata</a>, bureau d’études spécialisé dans le domaine de l’énergie, a participé à la rédaction de cet article</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/132888/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Carine Sebi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’année 2019 a connu une baisse de 1,9 % de la consommation mondiale de charbon. Un tournant lié aux engagements de certains États ainsi qu’à des facteurs conjoncturels.Carine Sebi, Assistant professor and Coordinator of the "Energy for Society" Chair, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1305082020-02-17T18:13:59Z2020-02-17T18:13:59ZComment Song Chao, ancien mineur en Chine, est devenu un photographe de renom<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/315695/original/file-20200217-11011-1gsmqii.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C9%2C770%2C605&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le regard humaniste de Song Chao sur les mineurs, dans la série Miners II</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://500photographers.blogspot.com/2010/10/photographer-140-song-chao.html">500photographers</a></span></figcaption></figure><p>Song Chao est né dans le Shandong en 1979, une <a href="https://www.google.com/maps/@36.3056815,114.2763079,6z">province à 500 km à l’est de Pékin</a>. Son pays, la Chine, est le plus gros consommateur de charbon au monde, mais également un important producteur de ce minerai avec lequel il fabrique de l’électricité et grâce auquel une grande partie de la population se chauffe.</p>
<p>Dans cette région, les mines sont nombreuses et les réserves importantes. Les exploitations sont, comme partout dans l’Empire du Milieu en dépit des récents efforts faits par les autorités en matière de sécurité, très dangereuses. Les accidents y sont fréquents <a href="https://fr.hespress.com/25838-chine-21-morts-lors-dun-accident-dans-une-mine-de-charbon.html">à l’image de ceux qui ont lieu en octobre 2018</a> (21 morts) et en février 2019 (20 morts).</p>
<p>Song Chao, fils de paysans, est allé vivre avec son oncle dans le bassin minier à l’âge de 10 ans. Il a commencé à la mine en 1997 où, comme ses camarades, il travaillait 12 heures par jour, descente et remontée comprises. En 2001 il a la chance de rencontrer le désormais célèbre <a href="http://french.xinhuanet.com/2019-02/08/c_137807438.htm">photo-journaliste professionnel Hei Ming</a>, né en 1964 dans le Shanxi, qui a fait ses études à l’Académie de l’artisanat et des beaux-arts de Tianjin, venu cette année-là de la capitale faire un reportage sur les mines du Shandong.</p>
<p>Hei Ming sera la première source d’inspiration de Song Chao, qui décide d’ouvrir avec l’aide de son frère un studio éphémère en plein air, sur le carreau de la mine dans laquelle il descend chaque jour. Entre mars et septembre 2002, à l’heure où avec ses camarades il remonte du fond, il les prend en photo tels qu’ils sont dans leurs tenues de travail, le visage noirci, sur le vif, même si beaucoup d’entre eux tentent de prendre la pose. Avec l’aide de sa famille le photographe, encore amateur, acquiert un premier appareil 35 mm, puis après avoir étudié – sur les conseils de Hei Ming qui l’a pris sous son aile –, le travail de l’Américain Richard Avedon, porteur d’une forte conscience sociale et, notamment, <a href="https://www.pinterest.fr/pin/330592428870768286/?nic=1">auteur de clichés de cow-boys</a>, il se dote d’un appareil plus précis, un 4-5 inches, ce qui pour un mineur représente une dépense considérable, soit près d’un an de salaire.</p>
<h2>La naissance d’un grand artiste</h2>
<p>Hei Ming parle alors de son protégé à Alain Jullien, un photographe <a href="http://oeil.electrique.free.fr/article.php?numero=27&articleid=475">français qui travaille en Chine</a>. Jullien est à l’origine de plusieurs manifestations culturelles dans ce pays. Co-fondateur, en 2001, du Festival international de la photographie de Pingyao, devenu depuis un <a href="https://www.chinahighlights.com/festivals/pingyao-international-photography-festival.htm">évènement incontournable pour les amateurs et les professionnels</a>. Dans cette ville chinoise traditionnelle très bien conservée, classée au Patrimoine mondial par l’Unesco, ils sont de plus en plus nombreux à se réunir. Véritable vitrine de la création d’aujourd’hui, <a href="https://www.travelchinaguide.com/cityguides/shanxi/pingyao/">4 000 photographes originaires de 31 pays, y ont été accueillis en 2017</a>. C’est là, en 2003, que le jury décerne à Song Chao une récompense spéciale, dans le cadre du Prix l’Oréal de la photographie chinoise contemporaine, pour ses clichés de mineurs.</p>
<p>Aux 34<sup>e</sup> Rencontres de la photographie d’Arles qui se tiennent du 5 juillet au 12 octobre 2003, dix-huit photographes chinois sont présents, dont Song Chao. Âgé de 23 ans, il est le plus jeune et ne pratique la photo que depuis peu de temps. Alain Jullien, commissaire de l’une des 36 expositions, a reconnu dans ce jeune ouvrier, qui a travaillé à 430 mètres de fond dans les entrailles de la terre, dans cet autodidacte de la photo, un talent exceptionnel fait de réalisme et de mise en lumière de <a href="https://www.humanite.fr/node/288355">ces hommes qui travaillent dans les ténèbres</a>. Il décide de le faire connaître en France. C’est à cette occasion que le jeune mineur de houille prend l’avion pour la première fois et commence à exposer ses clichés à l’étranger. Ils sont ensuite montrés dans le cadre de l’Année de la Chine en France, lors de l’Exposition internationale de la photographie – « Pingyao à Paris » –, organisée dans les locaux du cinéma MK2 Bibliothèque nationale de France, situé dans l’emblématique arrondissement chinois de Paris, le XIII<sup>e</sup>, <a href="http://www.amb-chine.fr/fra/zfzj/whjw/t93677.htm">du 6 février au 28 mars 2004</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/315741/original/file-20200217-10980-118p7gi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/315741/original/file-20200217-10980-118p7gi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/315741/original/file-20200217-10980-118p7gi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/315741/original/file-20200217-10980-118p7gi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/315741/original/file-20200217-10980-118p7gi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/315741/original/file-20200217-10980-118p7gi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/315741/original/file-20200217-10980-118p7gi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/315741/original/file-20200217-10980-118p7gi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Un portrait de mineur par Song Chao.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Collection personnelle de Diana Cooper-Richet</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il expose de nouveau à Paris, huit ans plus tard, à la Galerie Paris-Beijing – rue du Vertbois (III<sup>e</sup>) – en 2012. « Back and Forth » est une rétrospective montrant <a href="https://slash-paris.com/fr/evenements/song-chao-back-and-forth">l’ampleur prise par son travail en dix ans</a>. En effet, à la suite des deux séries consacrées aux « gueules noires » : <a href="https://photographyofchina.com/blog-fr/?offset=1376860540598">« Mineurs I » et « Mineurs II »</a>, il a posé son objectif sur leurs familles – « Miners’ families » –, puis sur la communauté minière au sens large – « Coal-mine communities » –, ainsi que sur le paysage minier si particulier – « The landscape of coal-mines » –, plus noir que vert, pollué et enclavé, que crée l’exploitation – souterraine ou en « découverte », comme <a href="https://www.arte.tv/fr/videos/075226-010-A/dezoom-allemagne-exploiter-du-charbon-a-ciel-ouvert/">à Decazeville ou en Allemagne</a> encore aujourd’hui – du charbon. Les photos de Hei Ming ont, elles aussi, été exposées à Paris, à la Mairie du XIII<sup>e</sup> arrondissement, en février 2019 à l’occasion du Nouvel An chinois. « Capturer l’âme » comportait <a href="https://www.timeout.fr/paris/art/exposition-capturer-lame-de-ming-hei">plusieurs séries de portraits : d’anciens combattants, de moines…</a>.</p>
<h2>Réalisme et humanité</h2>
<p>Comme tous les mineurs de charbon qui s’adonnent à une activité artistique ou littéraire – qu’ils se muent en peintres, qu’ils se transforment en écrivains, en poètes ou en chansonniers –, leur seul sujet, quel que soit le pays d’où ils sont originaires, quel que soit la langue dans laquelle ils écrivent, quel que soit le genre ou la forme d’art à travers lequel ils choisissent de s’exprimer, est toujours la mine, ceux qui y travaillent et leur environnement.</p>
<p>De ce point de vue, Song Chao, comme Baldomero Lillo (1867-1923) au Chili <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Baldomero_Lillo">au début du XIXᵉ siècle</a>, les <a href="https://theconversation.com/the-pitmen-painters-of-england-and-japan-86344">Pitmen Painters d’Ashington (Grande-Bretagne) dans les années 1930</a> ou Sakubei Yamamoto (1892-1984) à Fukuoka <a href="http://www.tokyoartbeat.com/event/2013/49D0.en">au Japon dans les années 1950-1960</a>, ne déroge pas vraiment à la règle, même si plus récemment il s’est tourné vers les Mingong avec « Migrant workers », montrant ces Chinois qui migrent par centaines de milliers des campagnes vers les villes à la recherche d’une vie meilleure, laissant le plus souvent au village femmes et enfants, auxquels il a dédié sa série intitulée « Hold ».</p>
<p>La force de tous ces mineurs, artistes ou écrivains, réside dans le réalisme et l’humanité de leurs œuvres. Les portraits de Song Chao sont en noir et blanc, sur fond blanc. Les clichés qu’il a réalisé de ses camarades <a href="http://photographyofchina.com/blog/song-chao--3">l’ont été à la lumière du jour</a>. Lorsque ceux-ci prennent la pose, elle semble simple, presque naturelle, comme prise pour faire plaisir au photographe-amateur qui travaille tous les jours avec eux. Ses portraits, au cadrage et à la composition très épurés, sont extrêmement attachants.</p>
<p>Song Chao a quitté la mine. Il vit désormais à Pékin. Rares ont été, dans l’histoire des mineurs-artistes ou des gueules noires-écrivains, et ils ont été assez nombreux, ceux qui ont pu définitivement s’extraire de leur condition d’ouvrier, traverser le miroir, à avoir été connus et reconnus pour la qualité de leurs œuvres. Tel est, pourtant, le cas de Song Chao, dont les photos se disputent aujourd’hui sur le marché de l’art.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/130508/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La trajectoire de cet ancien mineur devenu un photographe reconnu à l’international est exceptionnelle à plus d’un titre.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1309932020-02-16T15:13:17Z2020-02-16T15:13:17ZL’empreinte environnementale de l’économie numérique menace la planète<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/315376/original/file-20200213-11011-3hq2av.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les centres de données du monde entier produisent à peu près la même quantité de dioxyde de carbone que le transport aérien mondial.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Au cours de la dernière décennie, la société moderne a porté beaucoup d’attention aux promesses de l’économie numérique. Par contre, son impact négatif sur l’environnement a très peu été mentionné.</p>
<p>Nos téléphones intelligents utilisent des <a href="https://www.acs.org/content/acs/en/education/resources/highschool/chemmatters/past-issues/archive-2014-2015/smartphones.html">métaux de terre rare</a> tandis que l’<a href="https://www.tech-pundit.com/wp-content/uploads/2013/07/Cloud_Begins_With_Coal.pdf">infonuagique, les centres de données, l’intelligence artificielle et les cryptomonnaies</a> consomment de grandes quantités d’électricité, <a href="https://www.iea.org/geco/electricity/">souvent produite par le charbon</a>.</p>
<p>Si l’on veut profiter du plein potentiel de l’économie numérique, ce sont là des questions qu’il faudra soulever. Sans intervention urgente sur l’ensemble de ce système, l’<a href="https://www.pgionline.com/wp-content/uploads/2019/11/PGI-The-Digital-Economy-and-the-Green-Economy-Compatible-Agendas-final..pdf">économie numérique sera incompatible avec une économie verte</a>, ce qui entrainera une augmentation des gaz à effet de serre et l’accélération des changements climatiques, présentant une menace sérieuse pour l’humanité.</p>
<p>Il n’existe pas de définition universellement reconnue de l’économie numérique, mais cela comprend les activités économiques qui résultent des milliards d’interactions électroniques quotidiennes entre les individus, les entreprises, les appareils, les données, les processus, depuis les opérations bancaires en ligne jusqu’aux voitures en partage et les médias sociaux.</p>
<p>On y réfère parfois sous le nom <a href="https://doi.org/10.1146/annurev.soc.29.010202.100037">d’économie du savoir</a>, de société de l’information ou de l’<a href="https://future.internetsociety.org/2017/introduction-drivers-of-change-areas-of-impact/drivers-of-change/the-internet-economy/">économie Internet</a>. L’économie numérique carbure aux données et procure de nombreux bénéfices à la société, <a href="https://www.thelancet.com/journals/landig/article/PIIS2589-7500(19)30123-2/fulltext">par exemple pour les diagnostics médicaux</a>.</p>
<h2>Le charbon est toujours roi</h2>
<p><a href="https://www.americangeosciences.org/critical-issues/faq/what-are-rare-earth-elements-and-why-are-they-important">Les éléments de terre rare</a> constituent la colonne vertébrale des technologies digitales modernes, depuis les tablettes et les téléphones intelligents jusqu’aux téléviseurs et aux voitures électriques.</p>
<p>La Chine est le plus grand producteur de minéraux de terre rare, <a href="https://www.nrcan.gc.ca/our-natural-resources/minerals-mining/minerals-metals-facts/rare-earth-elements-facts/20522">constituant près de 70 pour cent de la production annuelle mondiale</a>. Cette production à grande échelle soulève de graves inquiétudes <a href="https://e360.yale.edu/features/china-wrestles-with-the-toxic-aftermath-of-rare-earth-mining">quant à l’émission de métaux lourds et de matériel radioactif</a> dans l’eau, le sol et l’air près des sites d’extraction.</p>
<p>La recherche sur le cycle de vie des minéraux de terre rare a démontré <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fenrg.2014.00045/full">que la production de ces métaux est insoutenable du point de vue de l’environnement</a>, car elle consomme des quantités énormes d’énergie et émet de la radioactivité.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/304151/original/file-20191127-112539-162irh0.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/304151/original/file-20191127-112539-162irh0.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/304151/original/file-20191127-112539-162irh0.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/304151/original/file-20191127-112539-162irh0.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/304151/original/file-20191127-112539-162irh0.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/304151/original/file-20191127-112539-162irh0.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/304151/original/file-20191127-112539-162irh0.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Données préliminaires sur la production globale de terre rare 1988-2018. » source=</span>
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<p>On dit parfois <a href="https://www.tech-pundit.com/wp-content/uploads/2013/07/Cloud_Begins_With_Coal.pdf">que l’univers numérique (y compris le nuage) commence avec le charbon</a> parce que les communications digitales requièrent une infrastructure physique immense et répartie partout, qui consomme de l’électricité. <a href="https://www.usatoday.com/story/news/nation/2019/03/26/climate-change-coal-still-king-global-carbon-emissions-soar/3276401002/">Et le charbon est l’une des principales sources d’électricité</a> et l’un des principaux agents contributeurs aux changements climatiques. La Chine et les États-Unis <a href="https://www.weforum.org/agenda/2018/01/these-are-the-worlds-biggest-coal-producers/">sont les principaux producteurs de charbon</a>.</p>
<h2>Les dévoreurs d’énergie</h2>
<p>Les centres de données – ces entrepôts qui abritent d’énormes quantité d’information – <a href="https://www.independent.co.uk/environment/global-warming-data-centres-to-consume-three-times-as-much-energy-in-next-decade-experts-warn-a6830086.html">consomment environ trois pour cent de la production mondiale d’électricité</a>, soit plus que le Royaume-Uni au complet. Ces centres produisent deux pour cent des gaz à effet de serre, <a href="https://www.theguardian.com/environment/2015/sep/25/server-data-centre-emissions-air-travel-web-google-facebook-greenhouse-gas">soit l’équivalent de tout le trafic aérien à l’échelle mondiale</a>.</p>
<p>Un rapport de Greenpeace et du North China Electric Power University a découvert que les <a href="https://secured-static.greenpeace.org/eastasia/PageFiles/299371/Powering%20the%20Cloud%20_%20English%20Briefing.pdf">centres de données chinois ont produit, en 2018, 99 millions de tonnes de dioxyde de carbone</a>), soit l’équivalent de 21 millions de voitures conduites pendant un an.</p>
<p>Les gaz à effet de serre ne sont pas la seule forme de pollution qui doive nous inquiéter. Les déchets électroniques (e-déchets), un sous-produit de l’activité des centres de données, constituent deux pour cent des déchets solides et 70 pour cent des déchets toxiques aux États-Unis.</p>
<p>Globalement, le monde produit quelque 50 millions de tonnes de déchets électroniques par année, d’une valeur de 62,6 milliards de dollars américains, soit plus que le PIB de la plupart des pays. <a href="https://www.unenvironment.org/news-and-stories/press-release/un-report-time-seize-opportunity-tackle-challenge-e-waste">Seulement 20 pour cent de ces déchets sont recyclés</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/304828/original/file-20191202-66982-14irpwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/304828/original/file-20191202-66982-14irpwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/304828/original/file-20191202-66982-14irpwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/304828/original/file-20191202-66982-14irpwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/304828/original/file-20191202-66982-14irpwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/304828/original/file-20191202-66982-14irpwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/304828/original/file-20191202-66982-14irpwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une mine de Bitcoin.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>En ce qui concerne l’intelligence artificielle (IA), des <a href="https://arxiv.org/pdf/1906.02243.pdf">recherches récentes</a> ont démontré que l’entrainement d’un grand modèle d’IA, c’est-à-dire l’influx dans un ordinateur de grandes quantités de données et la demande de prédictions, peut émettre l’équivalent de 284 tonnes de dioxyde de carbone, soit cinq fois les émissions de la durée de vie d’une voiture américaine moyenne. L’empreinte numérique de l’IA constitue un problème croissant.</p>
<p>Le Bitcoin et les autres cryptomonnaies sont aussi un sujet d’inquiétude <a href="https://www.youtube.com/watch?v=r43LhSUUGTQ">puisqu’ils fonctionnent avec le blockchain</a>, un grand livre digital sans autorité centrale qui enregistre en continu les transactions entre de multiples ordinateurs. La quantité d’énergie requise pour produire l’équivalent d’un dollar en Bitcoin <a href="https://doi.org/10.1038/s41893-018-0152-7">est le double de celle nécessaire pour extraire du cuivre, de l’or ou du platine</a>. <a href="http://karlodwyer.com/publications/pdf/bitcoin_KJOD_2014.pdf">Une étude</a> datant de 2014 estimait que le Bitcoin consomme autant d’énergie que l’Irlande.</p>
<p>Ces technologies <a href="https://plu.mx/a/27i7NaFCNwoDgu_IpFXfLoEhqBfoHvH52iZJ_r9rRnY">sont inefficaces et posent une menace sérieuse à l’environnement</a>.</p>
<h2>Penser différemment</h2>
<p>L’économie numérique se développe plus vite que les mesures prises visant à en contrer les effets négatifs. Il est donc nécessaire de commencer à penser différemment.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/304829/original/file-20191202-67028-1he2qvu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/304829/original/file-20191202-67028-1he2qvu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/304829/original/file-20191202-67028-1he2qvu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/304829/original/file-20191202-67028-1he2qvu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/304829/original/file-20191202-67028-1he2qvu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/304829/original/file-20191202-67028-1he2qvu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/304829/original/file-20191202-67028-1he2qvu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Image satellite de la mine Bayan Obo en Chine, prise le 30 juin 2006. La végétation apparait en rouge, les prés en brun pâle, les rochers en noir et l’eau en vert.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(NASA Earth Observatory)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les problèmes ne se présentent pas de façon linéaire. Nous devons continuer d’alerter l’opinion, <a href="https://www.weforum.org/agenda/2019/09/systems-leadership-can-change-the-world-but-what-does-it-mean/">promouvoir un leadership</a> qui déborde les frontières <a href="https://www.ellenmacarthurfoundation.org/circular-economy/concept">ainsi qu’une économie circulaire</a> (dédoubler l’activité économique reliée à la consommation de ressources limitées) et une <a href="https://www.goodreads.com/book/show/416909.Eco_Economy">approche éco-économique</a> (une économie durable).</p>
<p>Nous devons également faire l’<a href="http://e-space.mmu.ac.uk/622932/">inventaire des dommages locaux et globaux</a> causés par les appareils et plates-formes électroniques ainsi que les systèmes de données.</p>
<p>Afin faire avancer la discussion, il nous faut placer le monde sur une trajectoire durable. On ne doit pas seulement se demander ce que l’économie numérique peut faire pour nous, mais ce que nous pouvons faire collectivement pour que l’économie numérique soit bonne pour l’environnement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/130993/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raynold Wonder Alorse a reçu un financement de Public Governance International (PGI) pour cette recherche, ainsi que du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) du Canada pour son programme de doctorat. Raynold est directeur du conseil d'administration et président du comité de défense des intérêts du Centre de ressources communautaires de Nepean, Rideau et Osgoode (NROCRC), un organisme sans but lucratif au service des populations vulnérables d'Ottawa, notamment les jeunes, les personnes âgées, les enfants et les nouveaux arrivants au Canada.</span></em></p>L'économie numérique est en train de décoller. Tout comme les émissions de gaz à effet de serre, les déchets électroniques et la pollution qui y sont associés.Raynold Wonder Alorse, PhD Candidate in International Relations (International Political Economy of Mining), Queen's University, OntarioLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1295752020-01-08T23:17:47Z2020-01-08T23:17:47ZIncendies en Australie : catastrophe naturelle, catastrophe politique<p>Les méga-feux qui ont consumé ces derniers mois d’énormes étendues du territoire australien ont provoqué une catastrophe naturelle sans précédent mais aussi un cuisant échec du gouvernement australien.</p>
<p>Si, dans un système fédéral, une grande part de la responsabilité quant aux services et aux urgences incombe aux différents États, les incendies ne connaissent eux pas de frontières.</p>
<p>Les chefs des pompiers avaient prévenu <a href="https://www.canberratimes.com.au/story/6014638/ex-emergency-chiefs-sound-climate-alarm/?cs=14231">dès avril 2019</a> qu’un tel drame guettait le pays. Il y a deux ans de cela, ils avaient plaidé pour une augmentation des ressources fédérales pour prévenir et répondre à la menace des feux. Mais leurs appels en faveur d’un leadership et d’une coordination au niveau national <a href="https://www.theguardian.com/australia-news/live/2020/jan/06/nsw-fires-live-updates-victoria-bushfires-south-australia-fire-sa-australian-bushfire-near-me-rfs-cfa-latest-news-morrison?page=with:block-5e12762b8f08c397226455b0">sont restés lettre morte</a>.</p>
<p>Maintenant que le cauchemar est devenu réalité, le premier ministre Scott Morrison et son équipe brillent <a href="https://www.theage.com.au/politics/federal/scott-morrison-starts-bushfire-repair-with-states-after-weekend-of-confusion-20200105-p53p0s.html">par leur incapacité à gérer la situation</a>. Ils se sont montrés lents à répondre, réactifs et non proactifs, plus occupés à soigner leur image et qu’à agir. En matière de communication, ils ont en outre répondu aux critiques de façon totalement inappropriée.</p>
<p>En conséquence de quoi, les commentateurs ont <a href="https://insidestory.org.au/the-summer-that-scott-morrisons-leadership-broke/">pointé</a> le manque d’autorité politique, de jugement et de sensibilité de Scott Morrison à l’égard l’opinion publique, et s’interrogent aujourd’hui : l’« homme miracle » de l’élection de 2019 peut-il reprendre pied ?</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1212720360078168065"}"></div></p>
<h2>Scott Morrison face aux autres dirigeants</h2>
<p>Comment un leadership national digne de ce nom devrait-il fonctionner dans des situations si dramatiques ?</p>
<p>Examinons la manière dont d’autres dirigeants ont pu réagir dans des situations complexes. À ce titre, la capacité de la première ministre néo-zélandaise, Jacinda Adern, à agir immédiatement, à faire preuve de compassion et à se montrer inclusive suite au massacre de Christchurch en 2019 fournit un <a href="https://www.newyorker.com/culture/culture-desk/what-jacinda-arderns-leadership-means-to-new-zealand-and-to-the-world">modèle</a> dont le premier ministre australien est aujourd’hui bien loin.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/308768/original/file-20200107-123399-1cr6mem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/308768/original/file-20200107-123399-1cr6mem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/308768/original/file-20200107-123399-1cr6mem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/308768/original/file-20200107-123399-1cr6mem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/308768/original/file-20200107-123399-1cr6mem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/308768/original/file-20200107-123399-1cr6mem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/308768/original/file-20200107-123399-1cr6mem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Fresque murale représentant Jacinda Ardern, la première ministre néo-zélandaise.</span>
<span class="attribution"><span class="source">James Ross/AAP</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Après la fusillade de Port Arthur en 1996 en Tasmanie, qui fit 35 victimes, l’ancien premier ministre <a href="https://www.theguardian.com/australia-news/2019/jan/01/john-howard-port-arthur-gun-control-1996-cabinet-papers">John Howard</a> s’était lui aussi montré exemplaire, renforçant courageusement le contrôle sur les armes malgré une forte opposition au sein de ses propres rangs.</p>
<p>Confronté ces dernières semaines aux représentants des petites villes et des régions en détresse – ceux-là même qui lui ont assuré <a href="https://www.themonthly.com.au/issue/2019/june/1559397600/george-megalogenis/2019-election-shock-new-normal">sa mince victoire électorale</a> en mai 2019 – Scott Morrisson n’aura pas trouvé l’humilité nécessaire pour écouter leurs demandes. En esquivant les questions des victimes de Cobargo, une localité de Nouvelle-Galles-du-Sud ravagée par le feu, il a provoqué l’indignation des habitants pourtant réputés tranquilles dans le pays comme à l’étranger.</p>
<p>L’obstination du premier ministre australien à mener des politiques de réduction des émissions de CO<sub>2</sub> manifestement inadéquates et son refus de faire face aux réalités des changements climatiques – pourtant présentées par les chefs des pompiers – ont également mis en lumière son manque de courage.</p>
<h2>Un échec de l’action collective</h2>
<p>L’aspect le plus significatif mis exergue par cette crise concerne l’incapacité de Morrison à encourager l’action collective.</p>
<p>Une crise nationale dans un État fédéral exige un leadership fort, une capacité à prendre des décisions. Mais elle exige aussi une action collective. Cela implique une volonté de rechercher et d’écouter les conseils avisés, ainsi qu’une capacité à créer un consensus bipartite pour relever des défis inédits. Cela requiert également une aptitude à orchestrer les différentes strates de gouvernement, une variété d’organismes, les ONG, les branches adéquates de la fonction publique et, dans le cas présent, l’armée australienne.</p>
<p>Nous savons que la Coalition au pouvoir, et le premier ministre lui-même, ont été informés depuis bien longtemps de la probabilité d’une aggravation des feux de brousse, et de leur lien inextricable avec le réchauffement de la planète.</p>
<p>Le changement climatique s’est ainsi invité dans le débat sur la <a href="https://www.theguardian.com/australia-news/2018/sep/08/scott-morrison-says-national-energy-guarantee-is-dead">garantie énergétique nationale</a>, un projet finalement abandonné. Et les facteurs de risque – comme les feux de brousse, les cyclones et les inondations – tout comme la nécessité de s’adapter au climat, ont été au cœur du <a href="https://www.homeaffairs.gov.au/emergency/files/national-disaster-risk-reduction-framework.pdf">Cadre national de réduction des risques de catastrophe</a> établi par le ministère de l’Intérieur australien en 2018.</p>
<p>Il est difficile de croire que <a href="https://www.canberratimes.com.au/story/6292467/plaudits-start-flowing-for-parkinsons-storied-aps-career/">Martin Parkinson</a>, le secrétaire ministériel de Scott Morrison jusqu’en août dernier, ne lui ait pas donné une évaluation honnête des orientations politiques nécessaires. Peu après avoir quitté son poste, il avait d’ailleurs exprimé ses regrets <a href="https://www.theguardian.com/australia-news/audio/2019/dec/19/martin-parkinson-on-australias-decade-of-climate-inaction-australian-politics-live-podcast">face à une décennie d’inaction</a> en matière de changement climatique.</p>
<p>Rappelons à nouveau que les experts en incendie avaient réclamé des ressources fédérales supplémentaires il y a deux ans et averti sur les risques dès avril dernier.</p>
<p>Scott Morrison n’a pas eu le courage de prendre les décisions difficiles qui s’imposaient ni de prendre le risque d’affronter les dissidents rancuniers de son camp. Sa victoire « miracle » lui conférait pourtant l’autorité nécessaire pour le faire.</p>
<h2>Des attaques partisanes plutôt qu’un vrai leadership</h2>
<p>Ces échecs sont aggravés par la tendance du gouvernement de la Coalition à traiter comme des questions « politiques » les urgences nationales, <a href="https://www.afr.com/politics/federal/in-the-line-of-fire-it-s-about-survival-not-politics-20200104-p53osz">alors que sur le terrain, on tente de survivre</a>.</p>
<p>Or c’est tout l’opposé qu’exige l’action collective. Dans cette crise, Scott Morrison a eu du mal à faire passer l’intérêt national avant les intérêts des partis. Trop souvent, la communication a prévalu sur l’action – jusqu’à ce que certains chefs d’État, à l’image de Gladys Berejiklian et Daniel Andrews, le <a href="https://www.theage.com.au/politics/federal/scott-morrison-starts-bushfire-repair-with-states-after-weekend-of-confusion-20200105-p53p0s.html">fassent remarquer</a>.</p>
<p>Ceux qui ont émis des critiques ont été dénigrés, <a href="https://www.theguardian.com/australia-news/2019/nov/12/is-there-really-a-green-conspiracy-to-stop-bushfire-hazard-reduction">taxés d’écolos conspirationnistes</a> qui auraient soi-disant entravé les stratégies de réduction des risques. Les spécialistes en matière d’incendie ont démonté ces rumeurs, suggérant qu’il s’agissait d’une façon de détourner l’attention du véritable problème, à savoir l’échec du gouvernement à faire face à la situation.</p>
<p>Par ailleurs, le choix du premier ministre de communiquer sur les réseaux sociaux à propos de sa décision de mobiliser l’armée, en utilisant un en-tête du Parti libéral, a été perçu comme un acte politique <a href="https://www.abc.net.au/news/2020-01-05/scott-morrison-criticised-for-political-ads-during-bushfires/11841458">très déplacé</a>. Traditionnellement, ce type d’information est diffusé par la radio nationale, ABC, vers laquelle la plupart des gens se tournent pour les alertes d’urgence.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1213330419044638722"}"></div></p>
<p>Dès le début de la crise, le gouvernement Morrison a négligé les moyens conventionnels de gestion de crise : consultation adéquate avec les organismes d’État, canaux prévus pour la diffusion de l’information et rassemblement efficace des acteurs pour travailler ensemble sur une action collective. Ce n’est qu’après avoir pris conscience de ses multiples faux pas que le dirigeant a consenti à financer des mesures qui auraient pu être prises bien avant la saison des feux.</p>
<p>On peut aujourd’hui espérer que le lancement (tardif) de <a href="https://www.pm.gov.au/media/national-bushfire-recovery-agency">l’Agence nationale de récupération des feux de brousse</a> constituera une initiative instructive, montrant la nécessité d’éloigner les réfractaires et de dépasser les clivages partisans pour soutenir l’action collective.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/129575/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>James Walter ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Du courage et de la préparation, voici ce qui aura manqué au premier ministre Scott Morrison pour répondre au défi des incendies hors norme qui ravagent l’Australie depuis des mois.James Walter, Professor of Political Science, Monash UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1257862019-11-03T18:03:18Z2019-11-03T18:03:18ZDe l’Afrique à l’Asie, le charbon a quelques belles décennies devant lui<p><em>Cet article est publié en partenariat avec le site <a href="https://www.encyclopedie-energie.org/">Encyclopédie de l’énergie</a>, une encyclopédie scientifique en libre accès pour mieux comprendre le monde de l’énergie.</em></p>
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<p><a href="https://www.bp.com/en/global/corporate/energy-economics/statistical-review-of-world-energy/coal.html">En 2018</a>, presque 8 milliards de tonnes (Gt) de charbon minéral ont été brûlées dans le monde : cela représente 27 % de la consommation totale d’énergie, derrière le pétrole (32 %) mais devant le gaz naturel (22 %) et toutes les autres sources (biomasse, nucléaire, hydraulique, éolienne ou solaire).</p>
<p>Cette combustion a émis <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/en-finir-energies-fossiles-et-sengager-vers-neutralite-carbone">plus du tiers des émissions</a> mondiales des gaz à effet de serre (GES).</p>
<h2>Une énergie fossile qui résiste</h2>
<p>Devenue, surtout depuis l’accord de Paris de 2015, une ardente obligation pour défendre le climat planétaire, la réduction de ces émissions a mis le charbon au banc des accusés. Dès lors, pas une semaine ne passe sans qu’un État n’annonce la fin prochaine de sa combustion sur le sol national, qu’une banque décide de ne plus financer d’activité liée au charbon ou qu’une entreprise ne vende ses actifs charbonniers.</p>
<p>En 2015 puis 2016, la cause avait semblé entendue. Pour la première fois depuis 1913, la consommation mondiale avait commencé à décroître (-2,0 % puis -3,3 %). Las, la rupture de trajectoire a été de courte durée, puisque suivie, en 2017, d’une reprise annuelle de presque 1 % qui pourrait durer encore <a href="https://www.iea.org/geco/coal/">quelques décennies</a>.</p>
<p>Même si sa place recule dans le bilan énergétique mondial, le charbon continuera de brûler dans les chaudières de nombreux pays du monde. D’où vient une telle résistance ? L’explication est à rechercher du côté de son offre et de sa demande.</p>
<p>L’offre est en effet abondante pour des raisons géologiques mais aussi économiques et politiques ; cela se traduit par la poursuite d’investissements charbonniers en dépit des appels au boycott.</p>
<p>Ces investissements sont, pour la plupart, le fait de nouveaux acteurs économiques, convaincus que la demande n’est pas prête de se tarir. En dépit de tous ses défauts, le charbon reste, dans les pays qui en sont pourvus, la source d’énergie la plus économique et la plus sûre pour produire l’électricité à laquelle aspirent des milliards d’êtres humains.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-long-chemin-de-lelectrification-de-lafrique-76904">Le long chemin de l’électrification de l’Afrique</a>
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<h2>Une offre abondante</h2>
<p>L’offre reste forte, d’abord, pour des raisons géologiques. Le « pic charbonnier » – qui désigne le moment où l’extraction de charbon aura atteint son maximum avant de décliner – n’est en effet pas pour demain. Selon les données du Bundesanstalt für Geowissenschaften und Rohstoffe, les <a href="https://www.encyclopedie-energie.org/charbon-geologie-ressources-et-reserves/">ressources sont estimées</a> à environ 22 000 Gt, dont au moins 1 000 sous forme de réserves.</p>
<p>Le coût de leur extraction, traitement et transport peut-il être affecté par un éloignement accru des mines, une plus grande profondeur des filons et une baisse de qualité des minerais ? Sans doute, mais sans conséquence significative sur les prix des marchés internationaux tant que ces effets seront compensés par des techniques minières (dans les exploitations à ciel ouvert notamment), des machines d’extraction et des moyens d’évacuation, terrestres et maritimes, <a href="https://www.encyclopedie-energie.org/economie-politique-du-charbon-mineral/">toujours plus performants</a>.</p>
<p>Ces conditions objectives ne suffiraient cependant pas à garantir l’offre si toutes les entreprises minières se détournaient d’une activité devenue trop risquée du fait d’investissements impossibles à recouvrer parce que les débouchés du charbon allaient se tarir.</p>
<p>C’est ce qu’ont pensé plusieurs compagnies, en commençant par les plus grandes (Rio Tinto ou Anglo American), mais toutes ont immédiatement trouvé des acquéreurs – soit filiales de grands groupes chinois ou indiens (Yancoal Australia ou Adani Group), soit formés par de jeunes entreprises locales (Exxaro Resources, MC Mining ou Wescoal en Afrique du Sud). Résultat, les 370 milliards de dollars (selon les données d’<a href="https://www.enerdata.fr/">Enerdata</a>) jugés nécessaires pour assurer la croissance de l’offre jusqu’en 2040 devraient être réunis sans grande difficulté au profit d’extensions minières en Chine, Inde, Indonésie, Australie, Russie, Mongolie, Colombie ou Afrique australe.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/plus-2-demissions-de-co-en-2018-une-tendance-qui-sinstalle-pour-2019-108516">Plus 2 % d’émissions de CO₂ en 2018, une tendance qui s’installe pour 2019</a>
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<h2>Une demande très résistante</h2>
<p>Derrière ces investissements charbonniers, on distingue l’anticipation d’usages sidérurgiques, chimiques et surtout thermiques qui s’inscrivent dans la durée.</p>
<p>Les usages sidérurgiques – soit 15 % des débouchés (données Enerdata) – tiennent à ce que ni la réduction directe ni les fours électriques ne remplaceront tous les hauts-fourneaux, surtout dans les économies émergentes encore peu riches en ferrailles, telles que la Chine ou l’Inde. À quoi s’ajoutent les <a href="https://theconversation.com/carburants-de-synthese-biocarburants-kerosene-vert-de-quoi-parle-t-on-exactement-125391">nouveaux débouchés</a> du charbon dans l’industrie chimique séduite par le <em>coal-to-gas</em>, le <em>coal-to liquid</em> ou la fabrication de fibres de carbone.</p>
<p>Beaucoup plus importants, les usages strictement thermiques sont et continueront d’être tirés par la croissance des cimenteries et surtout des centrales thermoélectriques charbon. Ces dernières, qui absorbent environ 65 % (données Enerdata) de la houille et du lignite brûlés dans le monde, ne résistent pas à la concurrence de la thermoélectricité gaz, de l’électronucléaire et des renouvelables en Europe occidentale depuis plusieurs décennies et en Amérique du Nord depuis le début des années 2010. En revanche, ces usages continuent à croître en Asie et en Afrique.</p>
<p>C’est le cas en Chine où, malgré une volonté certaine de faire reculer le charbon dans le bilan énergétique, les 200 GW en construction vont porter la <a href="https://www.encyclopedie-energie.org/lenergie-en-chine-la-construction-du-socialisme/">thermoélectricité charbon</a> à plus de 1 300 GW.</p>
<p>Même chose en Inde, où des besoins quasiment illimités d’électricité ne peuvent être satisfaits que par une production reposant à 75 % (données Enerdata) sur la combustion de charbon national et de plus en plus importé. En Corée du Sud et au Japon, on remarque d’autre part un regain d’intérêt pour le charbon depuis la catastrophe nucléaire de Fukushima de 2011.</p>
<p>Et que ce soit en Indonésie, au Vietnam, aux Philippines, au Bangladesh, en Thaïlande, au Pakistan ou en Turquie, on note que la thermoélectricité charbon se développe sur des bases technologiques et financières, souvent chinoises, notamment dans le cadre de la <a href="https://www.beltroad-initiative.com/belt-and-road/">Belt and Road Initiative</a>.</p>
<p><a href="https://www.encyclopedie-energie.org/les-industries-du-charbon-mineral-en-afrique-histoire-et-perspectives/">Sur le continent africain</a> enfin, l’industrie charbonnière affiche son dynamisme en Afrique du Sud, où s’achève la construction des deux centrales géantes (9,6 GW) de Kusile et Medupi mais aussi plus au nord, comme au Botswana ou au Kenya. Citons également l’Égypte où 6,6 GW de thermique charbon vont être construits en coopération avec des compagnies chinoises (données Enerdata).</p>
<p>Ces nouvelles capacités gonflent un parc de plus de 2 000 GW de thermique charbon, dont 50 % a moins de 20 ans, ce qui lui assure encore quelques décennies d’activité.</p>
<p>Comment expliquer un tel succès ? Pour des raisons politiques dans les pays asiatiques ou africains où le charbon extrait du sous-sol national est un gage de sécurité d’approvisionnement face aux incertitudes des marchés gaziers. Là mais aussi ailleurs pour des raisons économiques, lorsque la thermoélectricité charbon est moins chère que l’électronucléaire ou les renouvelables dont l’intermittence n’est pas encore compensée par des moyens de stockage performants de l’électricité.</p>
<p>D’où pourrait venir le changement ? D’un accord mondial sur une taxe carbone élevée ou de bouleversements technologiques au profit des concurrents du thermique charbon. Mais l’un comme les autres sont encore peu probables au cours des trois prochaines décennies…</p>
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<p><em>Pour aller plus loin, retrouvez également l’article de Jean‑Marie Martin-Amouroux, <a href="https://www.larevuedelenergie.com/charbon-mineral-pourquoi-est-il-si-difficile-de-lui-dire-adieu/">« Charbon minéral : pourquoi est-il si difficile de lui dire adieu ? »</a>, paru cet été dans <a href="https://www.larevuedelenergie.com/">La Revue de l’énergie</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/125786/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Marie Martin-Amouroux est responsable éditorial de l’Encyclopédie de l’énergie et membre de l’association des Encyclopédies de l’environnement et de l’énergie (A3E).</span></em></p>Si sa place recule dans le bilan énergétique mondial, le charbon continuera de brûler dans les chaudières de nombreux pays.Jean-Marie Martin-Amouroux, Économiste de l’énergie, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1187112019-06-27T21:22:45Z2019-06-27T21:22:45ZPrôner une écologie positive pour convaincre de l’urgence climatique<p>Les derniers résultats des élections européennes ont replacé, notamment en France, les questions environnementales au centre du jeu politique. L’urgence écologique va-t-elle enfin être prise en compte ? Est-ce le point de départ de changements structurels et positifs dans nos façons de vivre ? On ne peut que le souhaiter.</p>
<p>Ces dernières décennies, les appels de scientifiques de renom, de personnalités, politiques ou de la société civile, pour une prise de conscience écologique sont souvent restés lettre morte. Des premiers documents du Club de Rome, au début des années 1970, jusqu’aux récents rapports du GIEC, cela fait déjà 50 ans que certains tirent la sonnette d’alarme, sans résultats tangibles. Les émissions de gaz à effet de serre continuent à croître et la <a href="https://theconversation.com/rapport-de-lipbes-sur-la-biodiversite-lheure-nest-plus-aux-demi-mesures-116473">biodiversité s’effondre</a>.</p>
<p>Pourquoi tant d’inertie face à l’urgence environnementale ?</p>
<h2>Le long terme déresponsabilise</h2>
<p>Premier élément d’explication : les politiques environnementales sont trop souvent présentées comme relevant d’une dynamique de long terme. Les actions dans ce domaine suivent alors un calendrier de mise en œuvre qui dépasse très souvent le temps de la responsabilité de ceux qui les engagent. La fermeture des centrales nucléaires en France, repoussée à plusieurs reprises et <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/macron-annonce-la-fermeture-de-14-reacteurs-nucleaires_129734">centrée sur l’après 2030</a>, constitue un exemple de cette dérive.</p>
<p>On raisonne à 30 ans, à 50 ans, pour les générations futures… et l’écologie sort du champ habituel de la responsabilité. En en faisant une préoccupation pour l’action à long terme, les autorités politiques s’exonèrent d’être véritablement en responsabilité de mesures emblématiques et de véritables changements.</p>
<p>Décréter l’urgence écologique implique de situer l’action dans le court terme, dès maintenant.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1130987081143148544"}"></div></p>
<h2>Les paroles et les actes</h2>
<p>Entre les discours pour l’environnement des pays les plus avancés et les politiques réellement suivies, il existe par ailleurs un profond décalage.</p>
<p>Depuis la COP21 de 2015, la France ne cesse par exemple de faire preuve d’imagination, sans pour autant afficher des résultats à la hauteur de ses engagements. Si la <a href="https://www.ladocumentationfrancaise.fr/dossiers/developpement-durable/grenelle-environnement-2007.shtml">transition est bien engagée</a> pour aller vers une économie plus durable, elle s’établit toutefois à un rythme de sénateur. Les boues rouges, résidus polluants de l’extraction de l’alumine de l’usine Altéo de Gardanne, continuent à être rejetés dans la Méditerranée à proximité du Parc national des Calanques ; l’interdiction du glyphosate n’est pas encore inscrite dans la loi. Sur le plan international, la croissance des énergies renouvelables dans le <a href="http://www.ren21.net/gsr-2019/pages/foreword/foreword/">mix énergétique produisant de l’électricité</a> plafonne.</p>
<p>Même les grands pays industriels préoccupés par les questions environnementales, comme la France ou l’Allemagne, en restent finalement aux petits pas. Ils continuent à se soumettre au vieux modèle de croissance que nous connaissons, tiré par la consommation, censé donner de l’activité et des revenus au plus grand nombre. Cette « vieille » économie est dopée par des prix artificiellement bas, qui génèrent de <a href="https://www.alternatives-economiques.fr/externalites-negatives/00079503">fortes externalités négatives</a> sous forme de pollution et de dégradation des conditions de vie.</p>
<p>Concrètement, on préfère construire une centrale thermique (Congo) ou avoir recours au charbon (Chine, Allemagne) que de travailler à la <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/06/18/climat-alerte-mondiale-sur-les-energies-decarbonees_5477833_3234.html">montée en puissance rapide d’énergies propres</a> dont les soutiens publics s’essoufflent, comme dans le solaire et l’éolien. En 2018, La Chine a ainsi coupé dans ses subventions aux énergies renouvelables, entraînant une baisse des installations. L’Allemagne, de son côté, a modifié son mode de calcul du subventionnement à l’installation des énergies renouvelables, induisant en tendance sur 2019 une baisse drastique du rythme de la puissance installée.</p>
<p>Dans notre monde globalisé où règne la concurrence, chacun veut conserver sa place. Les transitions environnementales annoncées demeurent homéopathiques dans les faits. Elles s’établissent le plus souvent au rythme du marché qui dicte sa cadence : on peut citer la montée en puissance très relative des véhicules électriques en France, qui représentent <a href="http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2019/02/13/20002-20190213ARTFIG00008-voitures-electriques-les-ventes-ont-presque-double-en-france-en-janvier.php">moins de 1 % du marché des véhicules individuels</a>. Ou l’importance pour l’économie allemande des exportations de véhicules haut de gamme à moteur thermique.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1052477916511199232"}"></div></p>
<h2>La crainte de l’écologie punitive</h2>
<p>Dans un tel contexte, l’adhésion de la population est essentielle à la prise de conscience de l’urgence écologique. Or une partie de l’humanité n’y adhère pas ou plus. Là où il faudrait l’unité au sein d’une économie ouverte, les États-Unis de Donald Trump la rejettent, entraînant derrière eux des pays plus réticents à faire des efforts (Russie, Brésil, Indonésie). Ils sont accompagnés en cela par quelques climatosceptiques qui continuent à entretenir le doute.</p>
<p>Ceux qui profitent du système actuel ne veulent pas en changer, c’est le cas des États-Unis qui privilégient le charbon et le gaz de schiste. Ceux qui sont en train d’y accéder, ou rêvent d’y accéder, comme la Chine, ne veulent surtout pas y renoncer. Ceux qui annoncent la transition écologique, comme la France, l’Allemagne ou le Canada, sont anesthésiés par les forces du marché de la vieille économie. Il est toujours plus urgent de répondre à l’urgence sociale, de maintenir l’emploi d’une usine qui pollue et procure activité et emploi que de la fermer rapidement.</p>
<p>Alors, on préfère s’écarter d’une écologie présentée comme punitive, dénoncée par le mouvement des « gilets jaunes », qui ferme des usines comme les centrales à charbon, <a href="https://www.arthaud.fr/Catalogue/arthaud-poche/les-fondamentaux-de-lecologie/une-ethique-pour-la-nature">ne croit plus au progrès</a>, <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2003/11/LATOUCHE/10651">prône la décroissance</a>, et peut affecter les plus vulnérables.</p>
<h2>Pour une écologie positive</h2>
<p>Dans de telles conditions, tirer la sonnette d’alarme en permanence, crier à la catastrophe, apparaît comme contre-productif si rien ne se passe maintenant, à court terme. Parler d’urgence à 10 ans, à 20 ans ou à 30 ans ne relève-t-il pas de l’oxymore ? Nos sociétés fonctionnent déjà à l’urgence sociale et économique du jour, de la semaine ou du mois : pourquoi ne pas faire de l’urgence écologique une priorité quotidienne ?</p>
<p>Des mesures d’écologie positive existent déjà. Privilégier les circuits courts, modérer l’empreinte de nos consommations. Subventionner et inciter les citoyens à changer leurs habitudes sur le plan de la mobilité et du chauffage. Recycler et encourager la durabilité des biens et services. Promouvoir un développement pour tous par la mise en œuvre d’une meilleure <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/histoire-et-geopolitique/geographie/theorie-de-la-justice-spatiale_9782738145918.php">justice spatiale</a>, ce qui revient à mieux organiser notre bien-être dans l’espace en <a href="https://www.ses.unam.mx/docencia/2007II/Lecturas/Mod3_Samuelson.pdf">multipliant les biens publics</a> accessibles à tous.</p>
<p>Il s’agit aussi de <a href="http://sbisrvntweb.uqac.ca/archivage/13868093t1.pdf">réhabiliter le progrès technologique</a> qui permet d’optimiser l’utilisation des ressources finies de la planète. De privilégier de nouveaux modèles de développement durable, fondés sur une production de proximité, et non plus l’activité à tout prix qui exige une mobilité tous azimuts basée sur l’énergie fossile.</p>
<p>Pour cela, il faut construire des représentations collectives attractives et positives des changements à entreprendre. L’écologie n’est pas, ne peut plus être, une préoccupation à agir dans le long terme et de manière punitive. C’est plutôt se donner les moyens d’agir au présent et de manière positive.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/118711/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Stéphane Madaule ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour que l’urgence écologique résonne davantage, il faut ancrer l’action dans le présent et non dans un futur perçu comme inaccessible.Stéphane Madaule, Économiste, INSEEC Grande ÉcoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1094872019-02-26T20:59:05Z2019-02-26T20:59:05ZDu XIXᵉ siècle à aujourd’hui, des enfants dans l’enfer de la mine<p>En République démocratique du Congo (RDC), de nombreux enfants s’usent au travail dans les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cassit%C3%A9rite">mines de cassitérite</a> et de cobalt des régions du Nord Kivu et du Katanga. Dans ce pays aux ressources considérables, ces minerais rares et chers sont particulièrement prisés, comme en témoigne le journaliste Christophe Boltanski dans son livre enquête de 2014, <em><a href="http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Folio/Folio-actuel/Minerais-de-sang">Minerais de sang</a></em>. Leur extraction est en effet indispensable à la fabrication de nos appareils électroniques.</p>
<p>Nulle trace sur les cartes des exploitations où se cachent ces <a href="https://www.youtube.com/watch?v=geeYJegpzy4&feature=player_embedded">esclaves du monde moderne</a>. Localisés dans des zones réputées dangereuses où règnent des bandes armées, ces lieux accueillent pourtant à 200, voire 300, mètres de profondeur, des fillettes et des garçons âgés de 7 à 18 ans : l’Unicef estime qu’ils sont quelque 40 000 et qu’ils forment près de la moitié de la main-d’œuvre utilisée dans ces exploitations. Dans des conditions inhumaines, ces enfants travaillent à mains nues, pour des salaires qui n’excèdent pas un <a href="https://lesechos-congobrazza.com/le-monde/3456-rdc-plus-de-40-000-enfants-travaillent-dans-les-mines-l-unicef">ou deux euros</a> par jour.</p>
<p>Ces très jeunes travailleurs sont exposés quotidiennement, sans aucune protection et dans une obscurité quasi totale, aux poussières hautement toxiques qui envahissent les « galeries ». Source de maladies respiratoires, elles ne constituent pas les seuls dangers qui menacent ces enfants. Dans ces mines périlleuses, les éboulements sont fréquents et provoquent, au mieux, des blessures invalidantes.</p>
<p>Au cours des dernières années, de nombreux petits mineurs africains ont ainsi trouvé la mort dans des conditions qui n’ont rien à envier à celles des tout jeunes ouvriers des pays industrialisés, au XIX<sup>e</sup> siècle. Comme en France à cette époque, les autorités congolaises demeurent aujourd’hui réticentes, ou incapables, à faire voter puis respecter les lois protégeant les enfants au travail.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"908381808563294213"}"></div></p>
<h2>Des « moutards » de 8 à 10 ans</h2>
<p>En France, Jules Vallès est l’un des premiers journalistes à avoir osé s’aventurer dans les ténébreuses profondeurs d’une mine de charbon. À Saint-Étienne, à la fin de l’automne 1866 et à 300 pieds sous terre, là où règne une chaleur torride, celui qui n’a encore écrit ni <em>Le Bachelier</em> (1881), ni <em>L’Insurgé</em> (1886) aperçoit :</p>
<blockquote>
<p>« […] une quinzaine de gamins qui se relaient sur des échelles et portent jusqu’au bord du trou les sacs remplis par les débris de rocs ou du charbon qu’a fait tomber la pioche du mineur. »</p>
</blockquote>
<p>Son reportage, publié dans <em>Le Figaro</em> les 16 et 17 novembre, décrit certains des autres travaux effectués au fond par les « moutards de 8 ou 10 ans » qu’il a vus lors de sa <a href="https://macommunedeparis.com/2017/09/28/saint-etienne-1866-un-journaliste-descend-dans-une-mine-2/">« descente aux enfers »</a>.</p>
<p>Certains d’entre eux font tourner sans relâche le ventilateur qui permet d’aérer les galeries souterraines où l’oxygène est rare. Les « trappers », quant à eux, ouvrent et ferment 12 heures par jour les portes « pare-feu » au passage des chariots remplis du précieux minerai. Ils ont pour seule compagnie une chandelle et, de temps à autre, le salut des jeunes « éclaireurs » de leur âge qui précèdent les convois, ou un bref échange avec les « toucheurs » qui « mènent les chevaux » de trait derrière lesquels s’étire une longue succession de berlines.</p>
<h2>Petites porteuses de houille</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/258704/original/file-20190213-181619-znjwm4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/258704/original/file-20190213-181619-znjwm4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/258704/original/file-20190213-181619-znjwm4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=311&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/258704/original/file-20190213-181619-znjwm4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=311&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/258704/original/file-20190213-181619-znjwm4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=311&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/258704/original/file-20190213-181619-znjwm4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=391&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/258704/original/file-20190213-181619-znjwm4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=391&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/258704/original/file-20190213-181619-znjwm4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=391&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Des enfants poussant un chariot de charbon dans le couloir d’une mine (1842).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/Hurrying">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>En Angleterre, dans la première moitié du XIX<sup>e</sup>, il n’est pas rare que des enfants de 5 à 8 ans, traînent à quatre pattes, des heures durant, dans les boyaux les plus étroits, là où personne d’autre ne peut se glisser, d’énormes <a href="http://www.histo-libris.fr/d-40_enfants-travaillant-la-mine.htm">charges de houille</a>. Harnachés comme des bêtes, ils ne remontent au jour qu’occasionnellement.</p>
<p>Dans la première moitié du XIX<sup>e</sup> siècle, les garçons ne sont pas les seuls à travailler à la mine. De nombreuses filles effectuent des travaux « en surface », au « triage » et au « criblage » du charbon, mais aussi dans les galeries.</p>
<p>Louis Simonin, dans son célèbre ouvrage <em>La Vie souterraine. Mines et mineurs</em> (1867), cite l’exemple de mines écossaises dans lesquelles :</p>
<blockquote>
<p>« […] de pauvres petites filles […] portent sur leurs dos une hotte, que retient une courroie fixée autour de leur front. À cette courroie elles attachent aussi leur lampe, et, ainsi équipées, charrient péniblement la houille. Les mineurs ajoutent à la charge de la hotte de gros morceaux qu’ils entassent autour du cou des petites malheureuses, et elles s’avancent par bandes, courbées sous le faix, gravissant par de longues échelles toute la longueur des puits, qui dépassent quelques fois cent mètres. »</p>
</blockquote>
<p>Il s’agit pour elles d’amener le <a href="https://patrimoine.mines-paristech.fr/exhibits/show/mines_au_feminin/travail_femmes_mines/femmes_revolution_industrielle">charbon à la surface</a> ; et si l’une d’entre elles trébuche ou fait tomber tout ou partie de sa cargaison, elle entraîne dans sa chute toutes les petites porteuses qui la suivent dans la longue file d’esclaves.</p>
<h2>Une lente évolution législative</h2>
<p>Plusieurs catastrophes alertent l’opinion publique britannique sur la question du travail des enfants. À l’été 1838, dans le sud du comté de Yorkshire, des pluies torrentielles provoquent une inondation du fond qui cause la mort de 26 enfants, <a href="http://mineaccidents.com.au/mine-accident/202/huskar-colliery-1838">âgés de 8 à 17 ans</a>.</p>
<p>Certains patrons d’exploitations minières, comme Charles Vane, troisième marquis de Londonderry, s’obstinent à défendre à la Chambre des Lords, au nom de l’Association des propriétaires de mines du Yorkshire, le droit d’employer des « moutards » au fond.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/258549/original/file-20190212-174867-1ebwy4m.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C41%2C1146%2C774&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/258549/original/file-20190212-174867-1ebwy4m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=427&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/258549/original/file-20190212-174867-1ebwy4m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=427&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/258549/original/file-20190212-174867-1ebwy4m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=427&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/258549/original/file-20190212-174867-1ebwy4m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/258549/original/file-20190212-174867-1ebwy4m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/258549/original/file-20190212-174867-1ebwy4m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">En Angleterre, ce n’est qu’en 1842 qu’une loi a réglementé le travail des enfants.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:PD-NCLC">Library of Congress/Wikimedia Commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Une loi réglementant le travail des enfants dans les mines est finalement <a href="https://www.bl.uk/collection-items/report-on-child-labour-1842">votée en Angleterre</a> en 1842. L’enquête parlementaire menée en amont, dont les résultats forment les <em>Blue Papers</em>, est à l’origine d’autres « amendements » sur le même sujet en 1844 et en 1853. À cette date, le travail des filles et des garçons de moins de 10 ans est désormais interdit dans les houillères britanniques.</p>
<p>En France, différentes lois sont également votées et des décrets pris entre 1813 et la fin du XIX<sup>e</sup> siècle. Le 3 janvier 1813, un décret interdit aux enfants de moins de 10 ans de travailler au fond, mais ce n’est que soixante ans plus tard qu’un nouveau texte tente de s’attaquer aux abus des compagnies minières en la matière. La loi du <a href="https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/Loi_du_19_mai_1874.pdf">19 mai 1874</a>, ainsi que les décrets du 13 mai 1875 et du 31 octobre 1882, mettent un terme à l’emploi souterrain des garçons de moins de 12 ans.</p>
<p>Pour les 12-16 ans, le travail ne doit pas être physiquement trop pénible, et strictement limité dans sa durée. Après l’interdiction, en 1892, du travail de nuit pour les femmes et les enfants, les 16-18 ans voient leur présence au fond être fixée à cinq heures par jour. L’âge du recrutement des mineurs en herbe est quant à lui relevé à 13 ans. À la fin du siècle, le pourcentage de main-d’œuvre enfantine est en recul dans tous les bassins miniers.</p>
<h2>La persistance de nombreux abus</h2>
<p>Malgré ces textes, les compagnies ont souvent continué à faire travailler des enfants au mépris des lois dans certains bassins miniers.</p>
<p>Dans les mines de Saint-Étienne, Jules Vallès raconte comment les enfants portant des sacs de charbon sur leur dos sont « invités » à les poser et à s’asseoir lorsque des personnes étrangères visitent la mine, comme pour leur cacher des conditions de travail illégales.</p>
<p>André Lebon rappelle dans <a href="https://www.archivesdunord.com/3800--p-martin-du-tiss-mineur-en-1900-p-.html"><em>Martin du Tiss, mineur en 1900</em></a> que, dans le Nord dans les années 1880, le chef de gare allait prévenir le directeur de la mine quand arrivait l’inspecteur chargé de constater les irrégularités dans le fonctionnement de son établissement – notamment les conditions de travail des enfants.</p>
<p>Enfin, Augustin Viseux, dont son magnifique témoignage <em>Mineur de fond</em>, relate qu’un homme de sa famille a été embauché en 1880, par les mines de Lens, à l’<a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00018/presentation-d-augustin-viseux-a-propos-de-mineur-de-fond.html">âge de 9 ans</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/258554/original/file-20190212-174864-xc4unf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/258554/original/file-20190212-174864-xc4unf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/258554/original/file-20190212-174864-xc4unf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/258554/original/file-20190212-174864-xc4unf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/258554/original/file-20190212-174864-xc4unf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/258554/original/file-20190212-174864-xc4unf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/258554/original/file-20190212-174864-xc4unf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Malgré la législation, les compagnies minières ont pendant longtemps contourné les limitations au travail des enfants.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/27170796@N02/7902333466/in/photolist-d3iwqJ-8ry4g7-7mHDny-acSjPZ-6R386i-9ektUE-ow41tK-24Sp3x-4fhR9y-78nnGF-7MW9SD-oeTK7e-4u9hBy-8D5CE3-brtRKS-eMtHJv-puBac4-cqg71S-78nxdx-9gaGGg-q8aDGm-5Sfr8n-oweRRn-oYQhs-gXUAew-jC1Hbd-6XcxYR-VyfBSP-5ZVNq5-nsZAXN-nvfoHc-5mvQ7A-5ZUAsH-8hChYo-P3C49R-dMJgBa-bd2sxa-2ahnrq5-qWNmcg-drAguL-nMyyHq-absNyR-obZAdi-Kk5b2V-478fUb-fFT69X-2aLa1HL-zUNCgy-aobYSE-2csMJaA">Joe Shikspack/Flickr</a></span>
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<h2>Mineurs de père en fils</h2>
<p>Dans tous ces bassins miniers où règne la mono-industrie, la profession se transmet le plus souvent de père en fils. Les garçons les plus âgés sont généralement formés aux métiers du fond par un membre de la famille. Dès l’âge de 13 ans, le jeune est présenté par le <em>pater familias</em> à l’ingénieur, afin de s’assurer de son recrutement par l’unique employeur de la région.</p>
<p>Le futur mineur s’initie au travail souterrain : il commence par aider à l’entretien des voies sur lesquelles passent les convois, ou à la préparation et au raccommodage des bois qui étayent les galeries. Dans certains cas, les syndicats s’en mêlent en tentant d’obtenir de la direction de la compagnie, la préférence à l’embauche pour les enfants de gueules noires.</p>
<p>Car s’il y a bien chez ces hommes le sentiment d’être exploité, ils portent aussi la fierté d’exercer un métier dur, dangereux, mais indispensable au développement industriel et économique de la société.</p>
<p>Un sentiment qui n’est sans doute pas partagé par les jeunes mineurs congolais, dont l’essentiel de la production part directement pour la Chine. Pas plus que pour les quinze mineurs indiens prisonniers d’une mine isolée, située dans l’état du Meghalaya, en Inde et inondée depuis la mi-décembre. L’espoir de les retrouver vivants s’amenuise de <a href="https://www.huffingtonpost.fr/2018/12/30/en-inde-des-plongeurs-tentent-de-retrouver-15-mineurs-pieges-dans-une-mine-inondee_a_23629770/">jour en jour</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/109487/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les conditions que connaissent des milliers d’enfants africains exploités dans les mines n’ont rien à envier à celles des tout jeunes ouvriers des pays industrialisés au XIXᵉ siècle.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1113702019-02-11T20:54:12Z2019-02-11T20:54:12ZLe XIXᵉ siècle, premier moment de l’ère des pollutions<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/257929/original/file-20190208-174870-17y0ndb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C13%2C772%2C522&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">C'est en Angleterre que se généralise au XVIIIᵉ siècle l'utilisation du charbon : commence alors un peu partout en Europe puis dans le monde une exploitation industrielle de ses mines.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Coal_Miners-_Everyday_Life_in_a_Midlands_Colliery,_England,_UK,_1944_D18872.jpg">Ministry of Information/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>On débat depuis quelques décennies des ravages de la pollution industrielle et de ses effets néfastes sur l’environnement comme s’il s’agissait de phénomènes nouveaux.</p>
<p>Dans la seconde moitié de XIX<sup>e</sup> siècle, pourtant, à une époque où la France renforce son industrialisation, les Français des villes et des régions industrielles découvrent les méfaits des usines et des mines – qui les font vivre et, dans le même temps, les tuent à petit feu.</p>
<p>Les feuilletonistes, dont les récits peuplent le rez-de-chaussée d’une presse en plein développement, y consacrent des pages bien avant Zola. Ils y décrivent des villes « noires » baignant dans un bruit assourdissant, et des campagnes passées en quelques décennies du vert de la nature à la couleur du bitume et de la suie.</p>
<p>Personne ou presque ne peut alors ignorer les conséquences désastreuses de la modernisation économique sur l’environnement, même si la notion de pollution n’est pas encore au cœur des préoccupations de la population. Pas plus qu’elle ne le sera à Londres, dans la première moitié du XX<sup>e</sup> siècle, quand séviront les fameux « smog » ; ou dans les pays de l’Est dans les années 1970, où des régions entières, notamment en Roumanie, seront contaminées par les rejets de l’industrie chimique.</p>
<h2>Des arbres couverts de charbon</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/257768/original/file-20190207-174887-195d1no.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/257768/original/file-20190207-174887-195d1no.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/257768/original/file-20190207-174887-195d1no.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/257768/original/file-20190207-174887-195d1no.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/257768/original/file-20190207-174887-195d1no.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/257768/original/file-20190207-174887-195d1no.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/257768/original/file-20190207-174887-195d1no.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/257768/original/file-20190207-174887-195d1no.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Scène du film inspiré de <em>Germinal</em>, d’Emile Zola, qui décrit la vie des travailleurs dans les mines de charbon du Nord-Pas-de-Calais.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Germinal, Claude Berry</span></span>
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</figure>
<p>Si <em>Germinal</em> révèle en 1884-1885 les tragédies qui se jouent dans le <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b90129825.item">monde de la mine</a>, d’autres écrivains célèbres mettaient déjà en scène quelques années plus tôt la France industrielle dans toute sa noirceur.</p>
<p>George Sand dans <a href="https://ebooks-bnr.com/ebooks/pdf4/sand_la_ville_noire.pdf"><em>La Ville noire</em></a> (1880), n’hésite pas à évoquer un « enfer » de « toits de bois noircis par la fumée », de « trou noir et hideux » et « d’eau qui tombait en une nappe noire » dans cette ville du centre de la France – sans doute Thiers –, tout entière dédiée à la métallurgie, où règnent en maîtres le bruit et la fumée.</p>
<p>Dans <a href="https://ebooks-bnr.com/malot-hector-famille/"><em>Sans famille</em></a> (1878), le bourg de Varses imaginé par Malot est recouvert d’une poussière industrielle « bicolore ». La rouge provient du minerai de fer ; la noire, du charbon.</p>
<p>Élie Berthet, l’un des grands papes du feuilleton sous le Second Empire, va plus loin dans sa description de la pollution causée par la houille. Dans <a href="http://blog.bnf.fr/gallica/index.php/2014/03/27/elie-berthet-1815-1891-romancier-populaire-du-XIXe-siecle/"><em>Les Houillères de Polignies</em></a> (1866), il écrit que « le feuillage des arbres demeure couvert de poussière fine et brillante du charbon ».</p>
<p>On trouve aussi ces évocations chez Jules Verne, avec <a href="https://beq.ebooksgratuits.com/vents/Verne-Indes.pdf"><em>Les Indes noires</em></a> (1878), et chez d’autres écrivains aujourd’hui oubliés, tels Victor Cherbuliez de l’Académie française avec <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k663412/f9.image.texteImage"><em>Olivier Maugant</em></a> (1885) ou encore George Maisonneuve avec <a href="http://journauxdecette.agglopole.fr/2/OCR_PDF/FRB343016201_JC_1907/FRB343016201_JC_1907_0280.pdf"><em>Plébéienne</em></a> (1884).</p>
<p>Et pour Louis Simonin, auteur d’un ouvrage incontournable sur <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k96017994.texteImage"><em>La vie souterraine. La mine et les mineurs</em></a> (1867), la pollution s’infiltre partout, y compris à l’intérieur des maisons où le linge tourne rapidement au jais, tout comme les visages des hommes, des femmes et des enfants qui y vivent et qui, lorsqu’il pleut, pataugent dans une boue noire, épaisse selon les uns, liquide selon les autres. Les jours de grand vent, c’est un gros nuage couleur de suie qui tourbillonne au-dessus de ces bourgades.</p>
<p>Ces romans, qui circulent largement parmi les Français, diffusent chez leurs lecteurs l’image d’une pollution jusque-là inconnue, sans jamais la nommer ni en évoquer les conséquences possibles sur la santé des habitants de ces régions, ou sur les campagnes qui les environnent.</p>
<h2>Des marteaux-pilons qui ébranlent le sol</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/257756/original/file-20190207-174894-3sa5yg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/257756/original/file-20190207-174894-3sa5yg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/257756/original/file-20190207-174894-3sa5yg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=427&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/257756/original/file-20190207-174894-3sa5yg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=427&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/257756/original/file-20190207-174894-3sa5yg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=427&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/257756/original/file-20190207-174894-3sa5yg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/257756/original/file-20190207-174894-3sa5yg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/257756/original/file-20190207-174894-3sa5yg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Machine d’extraction à vapeur dans une mine.</span>
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<p>Les nuisances ne se limitent pas à cette forme de contamination, pourtant particulièrement agressive. À la noirceur de la ville s’agrège une pollution sonore assourdissante, que l’on mesurerait de nos jours en décibels.</p>
<p>Dans l’industrie métallurgique, on entend les marteaux pilons ébranler le sol de leurs <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Marteau-pilon">coups sourds</a>. Dans les mines, ce sont les allers-retours assurés par les chevalements, structures qui descendent et remontent les mineurs et leur production, ou le bruit incessant des puissantes machines d’extraction à vapeur qui trépident pour alimenter les galeries en air pur.</p>
<p>Hector Malot évoque les « puissants ronflements » des ventilateurs que les voyageurs entendent à une heure de marche de la ville. Sans oublier le <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k11773706.image">roulement des wagons</a> sur les rails.</p>
<p>Toutes ces régions ont longtemps été « bercées » par l’envahissante musique de l’industrie. Paradoxalement, le répit n’intervenait qu’en cas de grève générale !</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/257766/original/file-20190207-174887-rlspz2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/257766/original/file-20190207-174887-rlspz2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/257766/original/file-20190207-174887-rlspz2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/257766/original/file-20190207-174887-rlspz2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/257766/original/file-20190207-174887-rlspz2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/257766/original/file-20190207-174887-rlspz2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/257766/original/file-20190207-174887-rlspz2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un smog de pollution a envahi le ciel londonien le 10 avril 2015.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/zongo/16909776110/in/photolist-mMeDtr-rLg2iY-r72SFz-9iJwv6-9DNDSR-r6Q44d-s3LJpT-s3LNvt-r72R5Z-r72V7B-s3GtJE-R3xDJg-s3GxoU-rLeQGY-rLeW9j-njMnnV-nk6SWw-7UdkCu-mKy9b-6R7Vji-6R7UQn">David Holt</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un smog noir rouille</h2>
<p>Le « smog » – néologisme qui date du début du XX<sup>e</sup> siècle, formé à partir des mots « smoke » (fumée) et « fog » (brouillard) – londonien est quant à lui très présent dans les romans de Dickens, qui parle spécifiquement de « pollutions ».</p>
<p>Dans <a href="https://fr.wikisource.org/wiki/Bleak-House/Texte_entier"><em>Bleak House</em></a> (1853), ce brouillard industriel est décrit avec une précision quasi scientifique, quant à sa coloration. Plutôt jaune à proximité de la capitale, du fait des émanations sulfuriques que dégage le chauffage domestique au charbon, il prend dans les faubourgs une couleur de plus en plus brune.</p>
<p>Arrivé au cœur de la cité, Dickens le qualifie de « rusty black », noir rouille. Propice à la mise en scène des crimes les plus horribles, comme ceux de Jack l’Éventreur qui semèrent la panique parmi les Londoniens à la <a href="http://www.escapadesalondres.com/pages/les-musees-de-londres/dans-l-antre-du-mysterieux-jack-the-ripper-museum.html">fin des années 1880</a>, le « smog » est aussi cause de mortalité.</p>
<p>Durant la Première Guerre mondiale, nombreux ont été les Londoniens à rentrer chez eux, en plein jour et en file indienne, s’accrochant les uns aux autres. Ils parcouraient ainsi les rues de la ville, nimbée d’un « smog » si épais qu’ils ne distinguaient plus rien, guidés par des personnes qui connaissaient le parcours les yeux fermés et les escortaient chacun leur tour jusqu’à leur domicile.</p>
<p>Le dernier épisode de « smog » date de la <a href="https://www.history.com/news/the-killer-fog-that-blanketed-london-60-years-ago">fin de l’année 1952</a>. Entre le 5 et le 9 décembre, la capitale britannique fut complètement noyée dans un brouillard à couper au couteau. Au troisième jour, la visibilité était quasi nulle et l’air devenu irrespirable. Entre 4 000 et 12 000 personnes, selon les sources, auraient perdu la vie des suites de ce dramatique évènement.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"806565930218176512"}"></div></p>
<h2>Le village le plus pollué d’Europe</h2>
<p>À Copsa Mica (5 000 habitants) dans la vallée de la Tarnava en Transylvanie, région de Roumanie – pays hautement contaminé –, l’industrie chimique a connu une très forte activité sous Nicolas Ceausescu pendant la période communiste. Surnommé, à l’époque, le <a href="https://www.alamyimages.fr/photo-image-la-pollution-dans-copsa-mica-roumanie-28347316.html">« village noir »</a>, il était considéré comme l’un des lieux les plus pollués d’Europe.</p>
<p>Les usines abandonnées dominent encore aujourd’hui la <a href="https://alexharford.uk/photos/romania-copsa-mica-most-polluted-town-europe">petite cité</a> dont le sous-sol regorge de métaux lourds tels que le cadmium, ou le dioxyde de soufre.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/257764/original/file-20190207-174873-1sum3e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/257764/original/file-20190207-174873-1sum3e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/257764/original/file-20190207-174873-1sum3e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/257764/original/file-20190207-174873-1sum3e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/257764/original/file-20190207-174873-1sum3e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/257764/original/file-20190207-174873-1sum3e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/257764/original/file-20190207-174873-1sum3e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Copsa Mica Plant.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Copsa_Mica_Plant.jpg">Julian Nitzsche/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>Dans les villages allemands de cette partie de la Transylvanie, placés depuis le XII<sup>e</sup> siècle sous la protection de leurs imposantes <a href="https://fr.123rf.com/photo_67537477_biertan-roumanie-le-18-septembre-2016-village-saxon-avec-%C3%A9glise-fortifi%C3%A9e-en-transylvanie-ch%C3%A2teau-de-biert.html">églises fortifiées</a>, non loin de Copsa Mica, on tente de tourner la page de la pollution sans limites. Depuis la chute du régime communiste, l’objectif est de repasser « au vert », afin d’attirer les touristes, et de permettre à la population de vivre sur une terre saine.</p>
<p>Mais encore aujourd’hui, trente ans après la fermeture des entreprises polluantes, la production agricole de ces lieux, tout comme l’eau des environs, demeurent impropres à la consommation.</p>
<p>Partout où elle a eu lieu, quels que soient la période et le régime, l’industrialisation à marche forcée s’est d’abord installée aux abords des villes ou dans les campagnes. Dans un premier temps, le vert et le noir coexistent, avant que la pollution ne dévore le vert et finisse par ravager villes et campagnes en empoisonnant durablement leurs sols.</p>
<p>Si la prise de conscience vis-à-vis de la pollution industrielle a été relativement tardive, elle n’en reste pas moins un phénomène aussi ancien que l’industrie elle-même.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/111370/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si la pollution est devenue un enjeu conscient il y a quelques décennies seulement, ses conséquences sur les villes étaient déjà perçues pendant la révolution industrielle.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1099612019-02-07T22:05:47Z2019-02-07T22:05:47ZLes énergies renouvelables, un secteur aux contours trop flous<p>La COP24 en Pologne a déçu et inquiété, apparaissant bien loin de la gravité des enjeux climatiques. Le mouvement des gilets jaunes illustre de son côté combien la fiscalité sur l’énergie est politiquement et socialement sensible.</p>
<p>La transition énergétique dans laquelle sont engagées nos sociétés est pourtant indispensable. Il s’agit de sortir des énergies carbonées (pétrole, gaz, charbon) ou présentant de forts risques de catastrophes (nucléaire) pour aller vers des énergies renouvelables.</p>
<p>Mais qu’entend-on exactement par « énergies renouvelables » ? Le secteur englobe en effet des <a href="http://www.annales.org/gc/2018/gc134/2018-12-1.pdf">réalités très diverses</a>, aux effets parfois contradictoires.</p>
<h2>Une multiplicité de définitions</h2>
<p>Dès que l’on cherche à établir ce que recouvre exactement l’expression « énergies renouvelables », on bute sur une multiplicité de définitions.</p>
<p>Dans ses statuts, L’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) les <a href="https://irena.org/-/media/Files/IRENA/Agency/Publication/2018/May/IRENA_Corporate_sourcing_2018.pdf">définit par exemple</a> ainsi :</p>
<blockquote>
<p>« Toute forme d’énergie produite à partir de sources renouvelables et de manière durable. »</p>
</blockquote>
<p>Dans une telle définition, le bois constitue donc une énergie renouvelable. Encore faut-il qu’il soit exploité de manière durable, ce qui n’est pas forcément le cas. Plus problématique encore, le <a href="http://documents.irevues.inist.fr/bitstream/handle/2042/47204/LETURCQ.pdf?sequence=1">bois peut constituer une énergie carbonée</a>, puisque l’exploitation de cette ressource s’accompagne nécessairement d’émissions de gaz à effet de serre, réduisant le pouvoir « capteur de CO<sub>2</sub » des arbres de la forêt ainsi exploitée. Cela va donc à l’encontre des objectifs fixés dans le cadre de la transition énergétique, en l’occurrence la réduction des émissions de carbone.</sub></p>
<p>De son côté, l’Observatoire des énergies renouvelables (<a href="http://www.energies-renouvelables.org/accueil-observ-er.asp">Observ’ER</a>) désigne comme « renouvelables » les énergies qui :</p>
<blockquote>
<p>« […] n’engendrent pas ou peu de déchets ou d’émissions polluantes, participent à la lutte contre l’effet de serre et les rejets de CO<sub>2</sub> dans l’atmosphère, facilitent la gestion raisonnée des ressources locales, génèrent des emplois ».</p>
</blockquote>
<p>Le nucléaire émet peu de CO<sub>2</sub> et fournit un grand nombre d’emplois locaux : faut-il alors le placer dans la catégorie des énergies renouvelables ?</p>
<h2>Les impacts environnementaux</h2>
<p><a href="https://www.greenpeace.fr/energies-renouvelables-france/">Greenpeace</a> a introduit un nouvel aspect dans la définition de ces énergies : la dimension catastrophique (liée en partie à leur dimension locale). Celle-ci est incomparablement plus faible pour les renouvelables que pour les fossiles – on pense ici aux incendies de plates-formes pétrolières <em>offshore</em> par exemple – ou dans le nucléaire.</p>
<p>Nouveau cas problématique, celui de l’hydroélectricité ; car la construction de barrages modifie profondément – voire détruit – les écosystèmes locaux, pose des questions aux scientifiques quant à son <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11367-016-1039-3">impact sur la biodiversité</a>. Certains estiment donc que cette forme d’énergie, même si elle repose sur l’eau qui apparaît comme un facteur renouvelable, doit être <a href="https://www.fne.asso.fr/dossiers/barrages-hydrauliques-trop-d%E2%80%99obstacles-pour-la-vie-des-cours-d%E2%80%99eau">limitée dans la taille de ses exploitations</a>, voire être exclue de la liste.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"940125465859239936"}"></div></p>
<p>Un problème de nature similaire se pose avec la méthanisation, qui recouvre des aspects <a href="https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/fiche-technique-methanisation-201502.pdf">tant favorables que défavorables</a> pour l’environnement, puisqu’il s’agit d’une production d’énergie à partir de ressources renouvelables (les intrants étant composés de déchets organiques, agricoles ou issus de l’industrie alimentaire). Si elle permet la valorisation des déchets et la réduction des émissions, la méthanisation reste un procédé délicat, et l’installation ainsi que les aires de stockage des intrants et des digestats (c’est-à-dire ce qui reste une fois le processus achevé) doivent être éloignés des sources d’eau potable et des habitations.</p>
<p>D’un acteur à l’autre, la liste des énergies renouvelables pourra ainsi considérablement varier, à mesure qu’elle intégrera, ou non, l’hydroélectricité, le bois, la méthanisation et, surtout, le nucléaire. Et cela sans que l’on dispose de critères parfaitement clairs pour opérer ou non l’inclusion ou l’exclusion.</p>
<h2>Des acteurs et des technologies hétérogènes</h2>
<p>On peut donc douter de l’existence d’un secteur des renouvelables aux frontières bien définies.</p>
<p>Cette hétérogénéité en rejoint une autre, interne. Prenons, par exemple, le solaire qui se divise entre thermique (qui consiste à utiliser la chaleur du soleil pour réchauffer directement l’eau ou un gaz, ou pour produire indirectement de l’électricité par la condensation que l’échauffement du liquide ou du gaz provoque) et photovoltaïque (qui consiste à transformer les rayons du soleil en électricité grâce à des cellules composées d’un minerai spécial, majoritairement du silicium), et dont les technologies et les acteurs sont très différents. Il en va de même, à un degré moindre, des différences entre éolien terrestre et marin.</p>
<p>De plus, la taille des acteurs économiques impliqués dans ce secteur varie elle aussi fortement. On y trouve de grands groupes industriels internationaux (comme EDF-énergies nouvelles ou Vestas) et des PME (bureaux d’études, firmes de services, petits installateurs de panneaux solaires, etc.).</p>
<p>Les problèmes d’acceptabilité sociale créent une autre forme d’hétérogénéité entre énergies renouvelables. Ils se posent surtout pour l’hydraulique, pour des raisons de biodiversité́, et pour l’éolien (<em>onshore</em> comme <em>offshore</em>), notamment en raison de la protection des paysages et des effets possibles sur la faune, qu’elle soit aérienne ou marine.</p>
<h2>Un nouveau mix énergétique, mais lequel ?</h2>
<p>C’est dans ce contexte aux contours flous que les États doivent faire des choix en matière de transition énergétique.</p>
<p>La difficulté tient ici à ce que l’on connaît l’état de départ dont on veut se sortir – à savoir les énergies carbonées et à terme, probablement, le nucléaire – sans savoir vers quoi l’on se dirige exactement. Il s’agit d’élaborer un nouveau « mix énergétique » pour faire face aux défis du changement climatique. </p>
<p>En janvier 2019, le nucléaire représente ainsi plus de 70 % de la production d’électricité, l’hydraulique 12 %, le gaz (énergie fossile et importée) 10 %, contre environ 5 % pour l’éolien, le solaire, et les bioénergies, selon les chiffres publiés en direct <a href="https://www.rte-france.com/fr/eco2mix/eco2mix-mix-energetique">par RTE</a>. Engagé dans une transition écologique, notamment avec la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000031044385&categorieLien=id">(LTECV)</a> du 18 août 2015, le gouvernement français cherche à réduire les émissions de gaz à effet de serre et la consommation énergétique, et notamment la consommation d’énergies fossiles, et à lutter contre la précarité énergétique. </p>
<p>Concernant le mix énergétique, ces objectifs sont certes chiffrés : la part des énergies renouvelables doit atteindre 23 % en 2020 et 32 % en 2030, et celle du nucléaire, dont la position dans le mix et l’avenir sont toujours sujet à débat, à 50 % d’ici 2025. </p>
<p>Mais ce nouveau mix énergétique poserait plusieurs problèmes. D’une part, on ne sait pas comment ces besoins seront couverts, et notamment par quelles sources d’énergies renouvelables et dans quelle proportion. L’incertitude porte, d’autre part, sur les conséquences industrielles de cette transition. En effet, il n’existe plus de constructeur industriel français dans le secteur (les entreprises françaises font seulement de l’installation et de l’exploitation). Le soutien public en faveur d’une meilleure intégration des énergies renouvelables dans le mix énergétique s’opère donc au prix d’un déficit de la balance commerciale. </p>
<p>Enfin, le développement de l’autoconsommation en électricité fait émerger de nouveaux acteurs – les ménages, les quartiers, les collectivités locales, qui deviennent des producteurs-consommateurs.</p>
<p>Les États doivent donc composer avec de multiples composantes. La France présente de ce point de vue une originalité : s’est constitué depuis 1993 un <a href="http://www.enr.fr/">Syndicat des énergies renouvelables</a> (SER) sans qu’il soit possible de dire si ce syndicat « représente » le secteur ou si le secteur existe parce qu’un syndicat le constitue !</p>
<p>On retrouve au sein de cette structure la même diversité avec de multiples filières (bioénergies, énergie éolienne, solaire, du sous-sol, hydroélectricité, énergies marines renouvelables), chacune d’entre elles étant subdivisées en sous-secteurs. Certaines sont entrées dans le syndicat puis ont repris leur indépendance, comme l’éolien pour lequel il existe désormais une organisation syndicale indépendante, France Énergie Éolienne.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1057071286118158336"}"></div></p>
<h2>Une transition incertaine</h2>
<p>Le développement d’une filière industrielle ne s’est pour le moment pas vraiment réalisé. En effet, les objectifs environnementaux de réduction des émissions de CO<sub>2</sub> ont plaidé pour un développement des renouvelables tout en encourageant un maintien fort du nucléaire dans le mix énergétique hexagonal et la Chine s’est assurée un quasi-monopole sur les panneaux photovoltaïques. </p>
<p>Les politiques énergétiques locales se développent quant à elles à un rythme très modéré : en atteste le « cas d’école » de la ville de Loos-en-Gohelle, engagée dans un projet de ville durable depuis 2001. Cette évolution laborieuse des pratiques s’explique probablement par la lente évolution du cadre juridique, l’autoconsommation collective demeurant par exemple à ce jour très <a href="http://www.photovoltaique.info/L-autoconsommation-collective.html">encadrée</a> en France.</p>
<p>Organiser la transition énergétique suppose donc aujourd’hui de faire converger plusieurs logiques : la politique énergétique nationale, la défense de l’environnement et une politique industrielle territoriale associant l’État et les acteurs économiques. En pratique, cette convergence reste hautement problématique pour les énergies renouvelables en France.</p>
<p>La transition est un jeu collectif dont l’État est un élément important, mais sans doute pas le pilote au sens fort. Elle s’opérera plutôt sur la base d’une négociation entre les différents joueurs de cette transition définissant ensemble un cadre juridique novateur, créatif et réactif face aux évolutions en cours.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/109961/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’orientation vers un mix énergétique plus « vert » est compliquée par la définition délicate des « énergies renouvelables ».Hervé Dumez, Professeur à l’École polytechnique, directeur du Centre de recherche en gestion (École polytechnique) et de l’Institut interdisciplinaire de l’innovation, président de la Société Française de Management, École polytechniqueSandra Renou, Doctorante et chargée d'enseignement en sciences de gestion, École polytechniqueLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1106252019-01-29T20:49:31Z2019-01-29T20:49:31ZComment expliquer la hausse de la consommation de charbon dans le monde ?<p>Publié en décembre 2018, le récent rapport de l’Agence internationale de l’énergie indique que la consommation mondiale de charbon est repartie à la hausse (<a href="https://www.iea.org/coal2018/">+1 % par rapport à 2017</a>).</p>
<p>Cette tendance est inquiétante car malgré une prise de conscience globale sur les dangers du réchauffement climatique causé par l’accumulation des émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, certaines grandes économies ne parviennent pas à substituer leur électricité produite à partir du charbon par une énergie moins carbonée.</p>
<p>L’utilisation principale du charbon concerne en effet la production d’électricité, avec les <a href="https://www.enerdata.net/research/energy-market-data-co2-emissions-database.html">deux tiers</a> de la consommation mondiale destinés à cette fin ; cette proportion atteint les trois quarts si l’on exclut Chine et Inde qui ont des usages traditionnellement plus répandus ; le reste de la consommation va à l’industrie (sidérurgie principalement).</p>
<p>Le charbon reste la source d’énergie la plus polluante : elle émet généralement <a href="http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2015/07/28/20002-20150728ARTFIG00002-climat-pourquoi-le-charbon-est-pointe-du-doigt.php">deux fois plus de CO₂ que le gaz naturel</a>, son principal concurrent.</p>
<p>Comment expliquer la hausse de la consommation de charbon dans le contexte du changement climatique ? Nous nous appuierons sur les différentes bases de données émises par le bureau d’études spécialisé dans le domaine de l’énergie <a href="https://www.enerdata.fr/">Enerdata</a> pour décrypter les grandes tendances mondiales.</p>
<h2>La première énergie pour produire l’électricité</h2>
<p>Dans le monde, la consommation de charbon utilisée pour produire de l’électricité croît au même rythme que la consommation globale d’électricité (<a href="https://www.enerdata.net/research/energy-market-data-co2-emissions-database.html">2,8 %/an versus 3 %/an entre 2000 et 2017</a>). De ce fait, la part du charbon dans le mix électrique mondial est restée globalement stable autour de <a href="https://www.enerdata.net/research/energy-market-data-co2-emissions-database.html">40 % depuis vingt ans</a>. Même si l’on note une légère baisse de deux points depuis 2010, comme le montre la figure ci-dessous, cela n’empêche pas le charbon d’être la source d’énergie la plus utilisée pour produire de l’électricité dans le monde.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/256123/original/file-20190129-108351-14zjvv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/256123/original/file-20190129-108351-14zjvv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/256123/original/file-20190129-108351-14zjvv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/256123/original/file-20190129-108351-14zjvv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/256123/original/file-20190129-108351-14zjvv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/256123/original/file-20190129-108351-14zjvv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/256123/original/file-20190129-108351-14zjvv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/256123/original/file-20190129-108351-14zjvv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.enerdata.net/expertise/energy-co2-data.html">Carine Sebi (données Enerdata)</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Mais l’on observe des tendances opposées au sein des plus grandes économies : aujourd’hui, les efforts et les promesses de certaines régions pour renoncer à l’utilisation du charbon pour produire de l’électricité sont mis à mal par un lot de pays qui, au contraire, voient la part du charbon augmenter dans leur mix électrique.</p>
<p>C’est notamment le cas des gros pays producteurs de charbon : Indonésie (58 % d’électricité produite à partir du charbon en 2017, +18 points de progression entre 2010 et 2017- voir la figure ci-dessus), Turquie (33 %, +7 points) ou encore Inde (75 %, +7 points), le second producteur mondial derrière la Chine. Dans ce pays, le développement des énergies renouvelables et la construction de centrales au charbon plus performantes ne suffisent pas à absorber la hausse de la demande d’électricité qui croit en moyenne de <a href="https://www.enerdata.net/expertise/energy-co2-data.html">7 % par an depuis 2005</a>.</p>
<p>D’autres pays, cherchant à diversifier leur mix énergétique, ont un recours croissant au charbon pour produire leur électricité : c’est le cas de la Malaisie (45 %, +10 points), du Chili (37 %, +9 points), de la Corée du Sud (46 %, +2 points) ou encore du Japon (33 %, +6 points). Du fait d’un manque de ressources disponibles sur son territoire, ce pays est l’un des plus gros importateurs de pétrole, de gaz naturel et de charbon. Entre 2011 et 2015, la part du charbon dans la production d’électricité nippone a dû significativement augmenter pour faire face à la fermeture des centrales nucléaires suite à l’accident de Fukushima.</p>
<p>Enfin, certains pays disposant de réserves nationales de charbon, comme les Philippines (50 %, +15 points) ou le Vietnam (34 %, +14 points), mettent en valeur cette ressource pour produire leur électricité et améliorer leur indépendance énergétique.</p>
<h2>Recul en Chine, aux États-Unis et dans l’UE</h2>
<p>Inversement, la part du charbon dans le mix électrique a fortement baissé dans la plupart des pays de l’Union européenne, en Chine et aux États-Unis. Les pays de l’UE réduisent fortement l’utilisation de ce combustible pour lutter contre le changement climatique (21 %, -10 points depuis 2000). Le charbon garde encore un poids dominant dans certains pays charbonniers de l’UE, comme la Pologne (78 %), la République tchèque (49 %) ou l’Allemagne (39 %), quoiqu’en forte baisse.</p>
<p>La Chine, qui est de loin le pays qui consomme le plus de charbon dans le monde pour produire son électricité, met en place des politiques environnementales et énergétiques restrictives sur l’utilisation du charbon (68 %, -10 points) pour améliorer la qualité de l’air et contribuer aux efforts de lutte contre le changement climatique.</p>
<p>Les États-Unis qui, comme la Chine, sont un gros pays producteur de charbon, ont significativement réduit l’importance de cette source d’énergie dans leur mix électrique (31 %, -15 points), mais pour d’autres raisons. Ici, le recul du charbon s’explique par le développement et l’abondance d’une autre énergie carbonée, à savoir le gaz de schiste.</p>
<p>Au niveau mondial, la capacité des centrales électriques au charbon a progressé de 1 000 GW depuis 2000 et de <a href="https://www.enerdata.net/expertise/energy-co2-data.html">500 GW depuis 2010</a>. Cette augmentation est principalement due à la Chine (+850 GW depuis 2000, soit 80 % de la variation mondiale) et dans une moindre mesure l’Inde (+150 GW depuis 2000).</p>
<p>La baisse sensible aux États-Unis et dans l’Union européenne (de 40 GW chacun depuis 2000) est compensée par une progression au Japon, en Corée et en Turquie (+70 GW dont 40 GW au Japon).</p>
<h2>Les nouveaux pays du charbon</h2>
<p>Fait plus étonnant dans un contexte de lutte généralisée contre le changement climatique, une <a href="https://www.enerdata.net/research/power-plant-database.html">vingtaine de nouveaux pays</a> – dont neuf en Afrique (RDC, Égypte, Côte d’Ivoire, Kenya, Maroc, Mozambique, Niger, Sénégal et Tanzanie), trois en Amérique centrale (Panama, Salvador et République dominicaine), deux au Moyen-Orient (Émirats arabes unis et Jordanie) et trois en Asie (Bangladesh, Cambodge et Myanmar) se tournent vers le charbon.</p>
<p>D’ici 2025, plus de soixante-cinq centrales thermiques pourraient être mises en service dans ces pays, représentant une capacité de 50 GW (équivalente à plus de 2 % par rapport à la capacité mondiale de 2017). La plupart de ces pays n’ont même pas de ressources charbonnières, mis à part le Bangladesh et la Tanzanie. Le plus souvent, ils développent leurs projets avec des financements indiens ou chinois, depuis que les grands organismes de financement internationaux ne soutiennent plus ce type de projet. On peut citer ici le mégaprojet de centrale à charbon de Lamu, construite par la China Power Global, avec l’aide de la <a href="https://www.jeuneafrique.com/676683/economie/energie-en-afrique-les-financements-ne-sont-pas-au-rendez-vous/">Banque africaine du développement au Kenya</a>.</p>
<h2>Et à plus long terme ?</h2>
<p>Les projections du service de prévisions <a href="https://www.enerdata.net/research/forecast-enerfuture.html">Enerfuture</a> s’avèrent moyennement optimistes, indiquant que d’ici 2040, la part du charbon dans le mix électrique au niveau mondial ne devrait diminuer que de 10 points.</p>
<p>L’Union européenne – qui vise la neutralité carbone d’ici 2050 – semble <a href="https://ec.europa.eu/clima/policies/strategies/2050_fr">sur la bonne voie</a> malgré la réticence de la Pologne qui souhaiterait subventionner ses centrales charbon au-delà de 2030. La Chine, l’Inde et l’Indonésie, pour qui l’électricité est produite majoritairement à partir de cette énergie fossile, diminueront très fortement la part de charbon dans leur mix électrique, mais ne parviendront pas à réduire leur part au-delà de 35 %, du fait de l’abondance du combustible dans leur réserve nationale et son attractivité économique.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/255831/original/file-20190128-108364-vn22vl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/255831/original/file-20190128-108364-vn22vl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/255831/original/file-20190128-108364-vn22vl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/255831/original/file-20190128-108364-vn22vl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/255831/original/file-20190128-108364-vn22vl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/255831/original/file-20190128-108364-vn22vl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/255831/original/file-20190128-108364-vn22vl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/255831/original/file-20190128-108364-vn22vl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.enerdata.fr/publications/analyses-energetiques/2017-scenarios-energetiques.html"> Enerdata (Enerfuture, scénario Enerblue, janvier 2018)</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Avec l’augmentation du taux d’électrification poussée par le développement de certaines économies émergentes et le déploiement de nouveaux usages électriques partout dans le monde (on pense notamment à la mobilité électrique), la demande d’électricité continuera d’augmenter à court et moyen termes.</p>
<p>Si les pays et régions du monde ne mettent pas les moyens pour remplacer cette énergie très polluante par des modes de production « plus verts », maintenir le réchauffement climatique dans des mesures acceptables semble compromis. L’enjeu se joue principalement au niveau des gros pays, à la fois producteurs et consommateurs tels que la Chine ou l’Inde, qui essayent de réduire leur dépendance à ce minerai.</p>
<p>Mais ces efforts seront-ils suffisants face à l’engouement pour un charbon <a href="https://www.lemonde.fr/economie-mondiale/article/2018/02/11/charbon-le-retour-de-flamme_5255166_1656941.html">abondant, facile à transporter et peu cher</a> dans de nouveaux pays, comme au Bangladesh ; ou encore face à la mise en place de plans favorables au développement de cette énergie fossile, comme aux États-Unis, où les réserves de <a href="https://www.planete-energies.com/fr/medias/chiffres/reserves-mondiales-de-charbon">charbon sont conséquentes</a> ?</p>
<hr>
<p><em>Bruno Lapillonne, directeur scientifique d’<a href="https://www.enerdata.fr/">Enerdata</a>, bureau d’études spécialisé dans le domaine de l’énergie, a participé à la rédaction de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/110625/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Carine Sebi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si les pays reconnaissent l’urgence de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre en privilégiant des énergies plus vertes, la demande toujours plus forte en électricité consacre le charbon.Carine Sebi, Assistant Professor - Economics, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.