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cosmologie – The Conversation
2023-08-20T20:13:53Z
tag:theconversation.com,2011:article/209904
2023-08-20T20:13:53Z
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À la recherche de la matière noire galactique depuis les profondeurs de la Terre
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/541960/original/file-20230809-23-o0toe7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C5%2C1800%2C1191&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">CRESST (Cryogenic Rare Event Search using Superconducting Thermometers) est une expérience de recherche de particules de matière noire au LNGS (laboratoire souterrain du Gran Sasso, Italie)</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://cresst-experiment.org/fileadmin/_processed_/e/4/csm_Run36_Mounting_6d38a6968a.jpg">CREEST</a></span></figcaption></figure><p>Euclid, une mission de l’Agence spatiale européenne (ESA) a quitté la Terre le 1<sup>er</sup> juillet 2023 et tentera, en particulier, de mettre en évidence la matière noire galactique. </p>
<p>Ce n’est que dans les années 1970 que la question de l’existence de la matière noire suscite de l’intérêt. À ce propos, Matière Noire est une mauvaise traduction française de « Dark Matter » en anglais qui veut plutôt dire matière « invisible » ou « non observée/cachée ». Si la matière avait été « noire », on aurait écrit en anglais « black ».</p>
<p>L’astronome américaine <a href="https://blogs.futura-sciences.com/feldmann/2021/07/23/vera-rubin-lastronome-invisible-qui-nous-a-revele-la-matiere-noire/">Vera Rubin</a>, doctorante dans les années 1970, étudie la rotation des galaxies spirales (il y a trois types de galaxies : spirale, elliptique et irrégulière ; notre galaxie, la Voie lactée, est de type spirale). L’étude de Vera Rubin s’attelle à la question de savoir si la « masse lumineuse », c’est-à-dire la masse visible – qui est déduite de la présence des étoiles – est bien égale à la masse dynamique (masse totale en étudiant la dispersion des vitesses).</p>
<p>En décrivant la vitesse de rotation de la galaxie en fonction de la distance au centre de la même galaxie, on fait une mesure directe de la distribution globale de matière dans la galaxie. La vitesse maximale de rotation d’une galaxie spirale se trouve à quelques kiloparsecs du centre (le parsec est une unité de longueur astronomique qui équivaut à 3,26 années de lumière, 206 265 unités astronomiques ou 30 900 milliards de km environ), puis elle est censée décroître. En effet, les étoiles à la périphérie de la galaxie sont en orbite autour du centre, de la même manière que les planètes sont en orbite autour du Soleil. Les étoiles en périphérie de la galaxie ont une vitesse orbitale inférieure à celles qui sont situées plus près de son centre. </p>
<p>Or, Vera Rubin observe que les étoiles situées à la périphérie de la galaxie d’Andromède – comme pour d’autres galaxies spirales – semblent tourner trop vite (les vitesses restaient pratiquement constantes au fur et à mesure que l’on s’éloignait du centre). Elle arrive à la conclusion qu’il manque de la masse pour expliquer ces vitesses de rotation. De nombreuses autres observations similaires sont effectuées dans les années 1980, venant renforcer celles de Vera Rubin. La quête de la matière noire est dès lors un objectif de recherche intense en astrophysique, en astroparticules et en physique des particules. </p>
<p>Depuis l’observation du fond diffus cosmologique ou rayonnement fossile (résidu d’un rayonnement émis par l’Univers lorsqu’il était dans une phase très chaude et dense, au tout début, juste 380 000 ans après le Big Bang) par des satellites tel que <a href="https://planck.cnes.fr/fr">Planck</a>, la matière noire semble représenter une masse environ six fois supérieure à celle de la matière visible ; elle devrait constituer environ 26 % de l’Univers et donc la matière que nous connaissons et qui constitue toutes les étoiles et les galaxies ne représente que 5 % du contenu de l’Univers. La matière noire n’interagit pas, ou extrêmement peu, avec la matière « ordinaire » (notre monde connu) rendant sa détection et sa caractérisation très difficiles. Sa présence n’est détectée que par son influence gravitationnelle.</p>
<p>Les recherches se déroulent également en grande partie sur Terre, et je dirai même plus précisément sous Terre par exemple à l’accélérateur LHC du CERN. </p>
<h2>Une recherche souterraine</h2>
<p>L’avantage des expériences sous terre est de combiner la détection directe avec la détection indirecte de matière noire à partir des relevés astronomiques. Par conséquent, la forte synergie entre les sondes astrophysiques (indirectes) et les laboratoires souterrains (sonde directe) peut permettre de mesurer et limiter conjointement l’effet de la matière noire. Onze laboratoires souterrains pour la recherche de la matière noire et d’autres objets astrophysiques sont opérationnels dans l’hémisphère nord.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/541218/original/file-20230804-25-24i2a7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/541218/original/file-20230804-25-24i2a7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541218/original/file-20230804-25-24i2a7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=332&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541218/original/file-20230804-25-24i2a7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=332&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541218/original/file-20230804-25-24i2a7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=332&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541218/original/file-20230804-25-24i2a7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=417&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541218/original/file-20230804-25-24i2a7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=417&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541218/original/file-20230804-25-24i2a7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=417&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La carte du monde des laboratoires souterrains. Onze laboratoires sont opérationnels, ils se trouvent tous dans l’hémisphère Nord (point vert). Le laboratoire australien est en cours de mise en route (point orange). Les trois autres sites dont deux dans l’hémisphère Sud (point rouge) sont encore des projets.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En France, on trouve par exemple le laboratoire souterrain de Modane, près de la frontière italienne où l’expérience <a href="https://theconversation.com/lexperience-edelweiss-ou-comment-sonder-lunivers-sous-les-montagnes-156259">EDELWEISS</a> sonde cette hypothèse de l’existence de la matière noire sous la montagne depuis quinze ans.</p>
<p>Les laboratoires souterrains sont plus ou moins profonds. Les plus profonds sont installés dans des anciennes mines comme SNOLAB au Canada (2 000 m) ou CJPL en Chine (2 400 m). Les laboratoires souterrains de Modane (LSM, France) et Gran Sasso (LNGS, Italie) se trouvent respectivement à environ 1 700 m et 1 400 m sous la roche de la montagne et dans un tunnel (Frejus/Gran Sasso).</p>
<p>L’emplacement souterrain garantit naturellement une suppression élevée des particules de rayons cosmiques produits dans l’atmosphère et, par conséquent, de sous-produits cosmogéniques (comme les noyaux <a href="https://theconversation.com/quand-les-boissons-energisantes-etaient-chargees-en-radioactivite-209535?utm_term=Autofeed&utm_medium=Social&utm_source=Twitter#Echobox=1690292220">radioactifs</a>)</p>
<h2>Comment détecte-t-on la matière noire sous Terre ?</h2>
<p>Cette matière noire, présente dans notre galaxie, est considérée comme une sorte de gaz de particules « exotiques » dans lequel nous baignerions. La Terre se déplaçant dans la galaxie, elle rencontre directement ces particules, il n’est donc pas nécessaire d’aller la chercher bien loin. Mais pour pouvoir l’observer directement, il est nécessaire qu’elle interagisse avec la matière ordinaire.</p>
<p>Lorsqu’une particule de matière noire frappe un noyau de matière ordinaire, elle pourrait provoquer un recul de celui-ci. Détecter cet infime mouvement permettrait de signer son passage.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/541220/original/file-20230804-19-p7nvgb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541220/original/file-20230804-19-p7nvgb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=488&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541220/original/file-20230804-19-p7nvgb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=488&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541220/original/file-20230804-19-p7nvgb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=488&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541220/original/file-20230804-19-p7nvgb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=613&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541220/original/file-20230804-19-p7nvgb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=613&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541220/original/file-20230804-19-p7nvgb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=613&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Principe de la détection directe de matière noire appelée WIMPs par scintillateur (expérience DAMA) au LNGS (Laboratoire souterrain du Gran Sasso).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Blog ça se passe là-haut</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour être sûrs de capter des événements si rares et peu expressifs, les détecteurs doivent être conçus dans un matériau très peu radioactif et protégé des radiations parasites afin de minimiser le bruit de fond qui cacherait le signal recherché. D’où l’intérêt d’installer les observatoires dans des laboratoires souterrains, pour éviter, comme déjà évoqué, un maximum de rayonnements (cosmiques et radioactifs) qui pourraient perturber les mesures.</p>
<p>Les recherches engagées dans les laboratoires souterrains construits dans les années 1980/1990 ont été entreprises dans le but d’étudier des phénomènes liés à la physique des hautes énergies et astroparticules (durée de vie du proton, physique des neutrinos, etc.). Le XXI<sup>e</sup> siècle a vu la mise en route d’expériences plus ambitieuses pour explorer la matière noire du cosmos. </p>
<p>Cependant, avec le progrès technologique et les savoir-faire sous-jacents, les laboratoires souterrains se sont vite vu très utiles à d’autres disciplines. D’où l’intérêt des pays émergents de s’engager à leur tour pour participer à développer ces infrastructures, comme les projets ANDES (Argentine/Chile) et PAUL (Afrique du Sud). Ces laboratoires sont à la pointe de la recherche en astroparticules mais aussi d’autres activités liées aux mesures de basses radioactivités pour la biologie. </p>
<p>Il y a aussi des opportunités immenses pour des recherches en séismologie, climatologie, glaciologie et astrobiologie. La possibilité de contrôler les conditions d’éclairage et d’autres paramètres environnementaux rend les laboratoires souterrains des lieux idéaux pour expérimenter l’agriculture hydroponique, comme pour les champignons. Ils fournissent d’autres opportunités comme de déterminer la capacité d’utiliser le sous-sol comme environnement de travail et même d’aménager les tunnels comme des environnements habitables. </p>
<p>D’autres hypothèses alternatives viennent expliquer le phénomène observé par Vera Rubin. La matière noire pourrait ne pas exister, et l’hypothèse de son existence peut être due à une méconnaissance partielle des lois de la gravité. D’autres théories postulent l’existence d’antigravité ou encore <a href="https://lejournal.cnrs.fr/articles/un-univers-sans-matiere-noire-0">l’existence de masses négatives dans notre Univers</a>, tout comme il existe des charges électriques positives et négatives. Ceci permet d’envisager un Univers sans matière noire.</p>
<p>En attendant les résultats des recherches, on pourra se délecter de quelques voyages dans le monde de la Science-Fiction comme avec la série TV <em>Dark</em> où une boule de matière noire créée par une centrale nucléaire permet de voyager dans le temps. Plus relaxant, la série <em>Futurama</em> où lorsque <a href="https://lejournal.cnrs.fr/articles/un-univers-sans-matiere-noire-0">« les Nibbloniens »</a>, petites créatures méchantes, digèrent leur nourriture sous forme de boules noires denses constituées de matière noire, boules de caca qui servent aussi de carburant pour les vaisseaux spatiaux.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209904/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fairouz Malek est chercheuse au CNRS, membre de l'association Parité Science pour la promotion et le soutien des femmes en science. Fairouz Malek a reçu des financements du CNRS pour effectuer ses recherches. </span></em></p>
La matière noire est encore mystérieuse ; pourtant, elle serait six fois plus présente que la matière « ordinaire ». Plusieurs laboratoires dans le monde cherchent à percer ce mystère.
Fairouz Malek, Physicienne, Directrice de recherches au CNRS, Université Grenoble Alpes (UGA)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/208126
2023-07-11T19:23:45Z
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Un feu d’artifice de galaxies pour mieux comprendre l’univers
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/532903/original/file-20230620-5944-b5ym4j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C5%2C1819%2C1108&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les trajectoires de galaxies au fil de l'évolution de l'univers semblent dessiner un feu d'artifice (ici, il s'agit d'un modèle numérique avec des données artificielles).</span> <span class="attribution"><span class="source">Bruno Lévy, Inria</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Ceci n’est pas une photo des traditionnels feux d’artifice du mois de juillet, mais celle d’un autre « bang », autrement spectaculaire. Vous voyez des galaxies et la manière dont elles se sont déplacées dans le ciel au fil du temps cosmique, depuis leur formation.</p>
<p>Si, longtemps après les feux d’artifice, toutes les lumières éteintes, vous observez le ciel et êtes pris par un sentiment d’immensité, vous vous posez sans doute des questions : à quoi ressemblait l’univers il y a très très longtemps ? Est-ce que ces étoiles et galaxies ont toujours occupé ces mêmes positions dans le ciel ? Elles se déplacent, mais comment ?</p>
<p>Nous avons développé un <a href="https://www.inria.fr/fr/univers-cosmologie-matiere-noire-mathematique-algorithmes">nouvel outil</a> pour voyager dans le temps et le passé de l’univers, en combinant des avancées en cosmologie, en mathématiques et en informatique.</p>
<p>Cet outil est susceptible d’apporter des éléments de réponse à nos questions métaphysiques nocturnes : à partir d’une carte en 3D de l’univers, obtenue grâce aux données de télescopes, tels que <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sloan_Digital_Sky_Survey">SDSS</a>, <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Dark_Energy_Spectroscopic_Instrument">DESI</a>, ou le futur <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Observatoire_Vera-C.-Rubin">LSST</a>, nous pouvons reconstruire les trajectoires des galaxies à rebours dans le temps, jusqu’au Big Bang ou presque.</p>
<h2>Des mystères dans le ciel : énergie sombre et matière noire</h2>
<p>Les observations du ciel nous ont appris beaucoup de choses sur l’histoire de l’univers. Par exemple, on sait <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%82ge_de_l%E2%80%99univers">estimer son âge, 13,7 milliards d’années</a>, et on sait qu’à ses débuts, il était beaucoup plus chaud et beaucoup plus dense que maintenant, pour connaître ensuite une violente phase d’expansion. C’est la <a href="https://theconversation.com/capucine-si-avant-le-big-bang-il-ny-avait-rien-comment-et-pourquoi-le-big-bang-sest-il-produit-152541">fameuse théorie du Big Bang</a>, élaborée en 1927, qui semble confirmée par de nombreuses observations.</p>
<p>Toutefois, certaines observations restent inexpliquées : par exemple, on sait depuis la fin des années 90 que <a href="https://theconversation.com/la-quete-de-lorigine-de-lacceleration-cosmique-116974">l’expansion de l’univers s’accélère</a>. On a donné le nom d’<a href="https://theconversation.com/de-lorigine-de-lunivers-a-lenergie-noire-conversation-avec-francoise-combes-medaille-dor-cnrs-2020-146123">« énergie sombre »</a> à la cause de ce phénomène, mais sa nature réelle reste inconnue.</p>
<p>D’autre part, dans les années 60, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Vera_Rubin">Vera Rubin</a> a mesuré la vitesse de rotation des étoiles autour des galaxies, <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Galaxy_rotation_curve">vitesse anormalement élevée quand on s’éloigne du centre galactique</a>, ce qui pourrait être expliqué par la présence de matière supplémentaire, qui n’a jamais été détectée, et qui a été nommée <a href="https://www.cea.fr/comprendre/Pages/matiere-univers/essentiel-sur-matiere-noire.aspx">« matière noire »</a>. Là aussi, sa nature réelle reste inconnue… et on ne sait toujours pas à l’heure actuelle s’il s’agit réellement de matière. Il pourrait très bien s’agir d’un comportement particulier de la <a href="https://www.pourlascience.fr/sd/cosmologie/matiere-noire-la-piste-de-la-gravite-modifiee-passe-un-test-crucial-23353.php">gravité, qui obéirait à une loi différente</a> de celle qu’on connaît.</p>
<h2>Tester différentes théories en connectant le présent avec le passé</h2>
<p>Différentes théories de l’énergie sombre et de la matière noire ont été proposées. Ces théories décrivent l’évolution de l’univers dans le temps, sous forme d’un ensemble d’équations. Pour départager ces théories, il faut les confronter à l’observation de l’univers, et analyser si les données d’observation et la théorie restent cohérentes.</p>
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<p>Les observations que l’on peut réaliser pour départager ces théories sont essentiellement de deux natures. D'une part, des observations de télescopes permettent de produire une carte en 3D de l’univers, c'est-à-dire la position dans l’espace de plusieurs millions de galaxies. D’autre part, des mesures d’un rayonnement qui a été émis aux tous premiers âges de l’univers, quelque 380 000 ans après le Big Bang, appelé le <a href="https://theconversation.com/voyage-en-galaxies-2-planck-la-machine-a-sonder-le-cosmos-48867">« fond de rayonnement cosmologique »</a>, contiennent beaucoup d’informations sur les premiers âges de l’univers.</p>
<p>En particulier, on peut y mesurer un <a href="https://irfu.cea.fr/Phocea/Vie_des_labos/Ast/ast.php?t=fait_marquant&id_ast=4561">signal, des ondes de pression qui se sont propagées dans l’univers primordial à la manière d’ondes sonores</a> et portent le nom un peu barbare d’« oscillations acoustiques des baryons ». On pense qu’elles ont à l’époque formé des zones légèrement plus denses, des « germes » qui ont ensuite évolué pour devenir dans un premier temps des galaxies puis des structures beaucoup plus grandes – des amas de galaxies et filaments qui forment la <a href="https://theconversation.com/vers-une-simulation-de-lunivers-sur-un-telephone-portable-137421">« toile cosmique »</a>.</p>
<h2>Un nouvel outil à l’assaut du « Rubik’s cube cosmique »</h2>
<p>En faisant remonter le temps aux galaxies suivant les lois décrites dans différentes théories, le nouvel outil permettra de tester ces théories en comparant le profil d’ondes obtenu numériquement (avec notre outil numérique, qui utilise en entrée la carte des positions des galaxies) avec le profil d’« ondes baryoniques » réellement mesuré dans le fond de rayonnement cosmologique.</p>
<p>À première vue, ce « voyage dans le temps à l’envers » semble un problème très compliqué : en effet, la carte 3D de l’univers a été brouillée par 13,7 milliards d’années d’évolution, et il faut parvenir à retrouver pour chaque galaxie la région de l’espace depuis laquelle la matière qui la compose a voyagé.</p>
<p>Résoudre ce problème nécessite les points de vue combinés de la physique, des mathématiques et de l’informatique.</p>
<p>Au tout début du cheminement, le <a href="https://webinet.cafe-sciences.org/articles/le-principe-de-moindre-action-un-bijou-de-la-physique/">principe physique de moindre action</a>, nous guide parmi l’infinité de solutions possibles. On retrouve ce principe de moindre action avec les paratonnerres, qui fournissent à la foudre un chemin direct vers le sol – et l’électricité parcourt ainsi le chemin le plus facile. D’une certaine manière, les galaxies parcourent elles aussi leur « chemin le plus court », en suivant un élastique tendu dans l’espace et dans le temps.</p>
<p>Ensuite, un outil mathématique (<a href="https://interstices.info/la-brouette-de-monge-ou-le-transport-optimal/">« le transport optimal »</a>) permet de modéliser ce chemin le plus court.</p>
<p>Enfin, des algorithmes informatiques permettent de traduire ces équations mathématiques et de les résoudre.</p>
<p>Nous avons tout d’abord <a href="https://physics.aps.org/articles/v15/75">testé notre méthode</a> en l’appliquant à des données purement fictives, obtenues en simulant un « big-bang numérique » dans l’ordinateur, en partant d’une configuration initiale comportant un modèle numérique des fameuses oscillations des baryons. À partir de l’état final de la simulation, nous avons bien pu remonter à l’état initial (et y trouver le <a href="https://journals.aps.org/prl/abstract/10.1103/PhysRevLett.128.201302">profil d’ondes baryoniques primordiales</a>). Nous avons réalisé ces calculs <a href="https://journals.aps.org/prl/abstract/10.1103/PhysRevLett.128.201302">pour différents modèles de répartition de la matière noire dans l’univers</a>. L’étape suivante va consister à appliquer la méthode à des données réelles.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/208126/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bruno Lévy a reçu des financements d'Inria (AeX EXPLORAGRAM) et de l'ERC (GOODSHAPE: ERC-StG-205693 et VORPALINE: ERC-PoC-334829)</span></em></p>
Et si on pouvait rembobiner l’évolution de l’univers depuis l’époque actuelle, jusqu’au big bang.
Bruno Lévy, Directeur de recherche Inria, chercheur en physique numérique, Inria
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/170662
2021-10-27T20:42:06Z
2021-10-27T20:42:06Z
Découverte d’une nouvelle superstructure de galaxies lointaines : les dessous d’une enquête de 10 ans
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/428622/original/file-20211026-19-oye62k.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=168%2C0%2C717%2C358&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Amas de galaxies A370 vu par Hubble</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://esahubble.org/images/heic1711a/">NASA, ESA/Hubble, HST Frontier Fields</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Qu’est-ce qu’une découverte en astrophysique ? Les premiers résultats préliminaires, ou la confirmation finale ? Tout cela à la fois ?</p>
<p>Cas pratique : nous venons de découvrir une nouvelle structure de galaxies lointaines avec des observations de télescopes à Hawaii et en Arizona.</p>
<p>Cet ensemble de galaxies jeunes est observé lorsque l’univers n’était âgé que de 3 milliards d’années. Nos calculs montrent qu’elle est destinée à évoluer vers une superstructure très massive. Plus surprenant, cette structure de galaxies questionne nos modèles puisque les taux de formation d’étoiles observés n’étaient pas prédits à ce niveau…</p>
<p>Cette enquête scientifique presque sous forme d’une aventure a commencé il y a plus d’une décennie avec des observations depuis l’espace.</p>
<h2>Histoire de l’univers en deux paragraphes</h2>
<p>Les grandes lignes de l’histoire de l’univers semblent globalement comprises par les scientifiques qui ont développé le « modèle cosmologique de concordance » (ou modèle du Big Bang en simplifié) qui est en accord avec de très nombreuses observations et a un fort pouvoir prédictif ; cependant de nombreuses questions demeurent, comme la nature (et l’existence même) de la matière noire ou de l’énergie sombre, les mécanismes physiques à l’œuvre lors des premiers instants, l’origine des toutes premières étoiles et galaxies, les propriétés de la gravitation, ou encore la persistance de certaines tensions entre des mesures qui ne s’accordent pas complètement. Ainsi, de nouvelles observations plus précises et des développements théoriques plus poussés sont nécessaires pour faire progresser ces questions.</p>
<p>Dans ce cadre de pensée conforté par des mesures précises, l’univers est en expansion depuis <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%82ge_de_l%27Univers">13,8 milliards d’années</a> en se refroidissant, l’hydrogène a été synthétisé durant les trois premières minutes, la lumière s’est découplée de la matière ordinaire (dite <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Mati%C3%A8re_baryonique">baryonique</a>) vers 370 000 ans en produisant la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fond_diffus_cosmologique">lumière fossile</a>, les premières étoiles et galaxies sont probablement apparues avant 400 millions d’années, et depuis les grandes structures se sont formées et ont évolué pour donner aujourd’hui des galaxies complexes situées pour la plupart dans d’immenses amas de galaxies eux-mêmes situés dans des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Superamas_de_galaxies">super-amas de galaxies</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428621/original/file-20211026-19-yr5z0z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428621/original/file-20211026-19-yr5z0z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=668&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428621/original/file-20211026-19-yr5z0z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=668&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428621/original/file-20211026-19-yr5z0z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=668&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428621/original/file-20211026-19-yr5z0z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=839&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428621/original/file-20211026-19-yr5z0z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=839&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428621/original/file-20211026-19-yr5z0z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=839&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">l’amas de galaxies A370.</span>
<span class="attribution"><span class="source">NASA, ESA/Hubble, HST Frontier Fields</span></span>
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</figure>
<p>Parmi les nombreuses manières de mieux retracer l’histoire de la structuration de l’univers, suivre l’évolution des galaxies depuis l’univers très lointain en les observant est une piste explorée depuis longtemps, toujours riche et fructueuse en résultats. Depuis peu se dessine un champ d’études assez proche et émergent, celui d’essayer de comprendre comment se forment et évoluent non pas les galaxies, mais ici les amas de galaxies qui sont devenues les plus grandes structures de l’univers.</p>
<h2>Les amas de galaxies</h2>
<p>Les <a href="https://theconversation.com/dans-le-chaudron-de-lunivers-les-amas-de-galaxies-66187">amas de galaxies</a> sont un ensemble de milliers de galaxies, de gaz chaud et… de 80 % de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Mati%C3%A8re_noire">matière noire</a> (cette matière qui gravite mais n’est pas observable, actuellement <a href="https://theconversation.com/de-lorigine-de-lunivers-a-lenergie-noire-conversation-avec-francoise-combes-medaille-dor-cnrs-2020-146123">hypothétique</a> mais dont la présence est cohérente en astrophysique), pesant environ 10<sup>14</sup> masses solaires au total. Ce sont des structures passionnantes à comprendre, puisqu’elles peuvent nous renseigner sur les valeurs de certains <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Param%C3%A8tre_cosmologique">paramètres cosmologiques</a> (comme la densité de matière noire dans l’Univers) ainsi que sur de nombreux processus physiques comme l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Effondrement_gravitationnel">effondrement gravitationnel</a> (le fait que la matière soit attirée par une zone plus dense par attraction gravitationnelle) dans les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Halo_de_mati%C3%A8re_noire">halos les plus massifs</a>, le lien entre matières noire et baryonique, les échanges d’énergie aux grandes échelles, ou l’évolution des galaxies en milieu dense.</p>
<p>Or les « parents » de ces amas (les progéniteurs) sont quasiment inobservés dans le passé, car très difficilement détectables, alors que l’on souhaiterait pouvoir retracer leur parenté, leur passé et ainsi comparer les données aux prédictions des modèles et des simulations. Dès lors, les équipes d’astrophysiciens redoublent d’efforts et de ruses pour observer et essayer d’identifier ces élusifs amas de galaxies lointains, que l’on appelle protoamas de galaxies.</p>
<p>Pourquoi les protoamas de galaxies sont-ils difficilement détectables ? À moins d’avoir un relevé spectroscopique qui donne précisément les distances et vitesses des galaxies, ou d’utiliser une méthode détectant le gaz chaud (en rayons X ou dans le millimétrique), les images du ciel seules, quoique précises, ne permettent pas de différencier les galaxies appartenant à un amas ou protoamas des galaxies en avant-plan ou arrière-plan : les images montrent de nombreuses galaxies sans qu’il soit aisé de déterminer avec précision s’il existe un protoamas ou – s’il existe – quelles en sont les galaxies membres.</p>
<h2>Que croit-on savoir et que sait-on des protoamas de galaxies ?</h2>
<p>Les protoamas constituent donc les pièces manquantes du puzzle permettant de reconstituer avec précision la formation des grandes structures de l’univers.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428623/original/file-20211026-17-ga537d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428623/original/file-20211026-17-ga537d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=221&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428623/original/file-20211026-17-ga537d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=221&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428623/original/file-20211026-17-ga537d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=221&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428623/original/file-20211026-17-ga537d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=277&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428623/original/file-20211026-17-ga537d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=277&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428623/original/file-20211026-17-ga537d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=277&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Exemple d’un modèle d’évolution d’un protoamas de galaxies (à droite) vers un amas de galaxies (à g) (fig 13 de Shimakawa et coll., 2018).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shimakawa et coll., 2018</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Puisque les modèles de formation des amas de galaxies proches semblent assez précis quand on les compare aux données disponibles, la communauté scientifique les utilise logiquement pour prédire ce que pourraient être les protoamas de galaxies dans l’univers jeune. On croit donc savoir que les protoamas de galaxies pourraient se former assez tôt (avant le premier milliard d’années) et abriter déjà les galaxies les plus massives de leur génération. Cependant, plusieurs protoamas au final formeront un amas de galaxies par fusions successives. Il n’y a donc pas un seul protoamas progéniteur d’un amas de galaxies, mais bien plusieurs, ce qui rendrait leur détection encore plus difficile. Nous pensons également que les galaxies des protoamas subissent une phase de formation d’étoiles très intense et assez limitée dans le temps. Concomitamment, de grands réservoirs de gaz baryonique froid devraient être présents dans ces protoamas entre les galaxies afin d’alimenter cette formation stellaire très soutenue.</p>
<figure class="align-left ">
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<span class="caption">un protoamas de galaxies détecté en 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wang et coll., 2016, A&A</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p><a href="https://arxiv.org/abs/1610.05201">Plusieurs protoamas de galaxies</a> ont déjà été détectés et confirmés comme tels. L’un des plus lointains se situe lorsque l’univers avait environ 800 millions d’années et <a href="https://arxiv.org/abs/1912.01625">quelques</a> dizaines correspondent à des époques entre 1,2 et 3,3 milliards d’années. La plupart contiennent des galaxies déjà très massives et « sèches » (ne formant plus d’étoiles), pas vraiment en accord avec les prédictions. Une équipe en <a href="https://arxiv.org/abs/1809.08755">2018</a> a élaboré un scénario de formation des amas sur la base de 3 protoamas de galaxies. Bien que ce modèle soit pertinent, il apparaît que le petit nombre de protoamas et le manque de diversité limitent actuellement notre compréhension.</p>
<h2>La découverte du protoamas de galaxies G237</h2>
<p>C’est dans ce contexte que « notre » protoamas de galaxies, répondant au doux nom raccourci de G237 (image ci-dessous), apporte une nouveauté. D’abord, il est confirmé par de belles observations effectuées à <a href="https://subarutelescope.org/en/results/2021/10/26/3001.html">Hawaii</a> et en <a href="https://www.lbto.org/G237.html">Arizona</a> pour être à une époque où l’Univers avait 3 milliards d’années (redshift z=2,16). C’est un imposant travail d’arriver à cette confirmation avec plusieurs dizaines de galaxies scrutées, dirigé par mes chers collègues <a href="https://arxiv.org/abs/2008.13614">Dr Yusei Koyama (Japon et Hawaii)</a> et <a href="https://arxiv.org/abs/2109.04396">Dr Mari Polletta (Italie et France)</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428612/original/file-20211026-25-iddo3z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428612/original/file-20211026-25-iddo3z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428612/original/file-20211026-25-iddo3z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428612/original/file-20211026-25-iddo3z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428612/original/file-20211026-25-iddo3z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428612/original/file-20211026-25-iddo3z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428612/original/file-20211026-25-iddo3z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Région du ciel montrant le proto-amas de galaxies G237 lorsque l’Univers était âgé d’environ 3 milliards d’années.</span>
<span class="attribution"><span class="source">ESA/Herschel and XMM-Newton ; NASA/Spitzer ; NAOJ/Subaru ; ESO/VISTA ; Polletta et coll., Koyama et coll.</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette époque cosmique correspond au maximum de densité de formation d’étoiles dans l’Univers. Ensuite, des observations spatiales précédentes nous permettent de mesurer le taux de formation d’étoiles. Surprise : le taux est extrême, plusieurs milliers de masses solaires par an : les galaxies forment tellement d’étoiles que nos modèles et simulations peinent à expliquer ce rythme effréné. Enfin, en prédisant la masse qu’il acquerra lorsque G237 sera devenu un « vrai » grand amas de galaxies, nous avons calculé qu’il pèserait 5 ou 6 fois 10<sup>14</sup> masses solaires, soit l’équivalent du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Superamas_de_la_Vierge">superamas de galaxies</a> auquel notre Galaxie, la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Voie_lact%C3%A9e">Voie lactée</a>, appartient. Tant d’informations dans un protoamas a priori standard !</p>
<h2>Qu’a t-on vraiment découvert ?</h2>
<p>Les deux articles scientifiques que nous venons de publier en <a href="https://arxiv.org/abs/2008.13614">2020</a> et <a href="https://arxiv.org/abs/2109.04396">2021</a> relatant cette découverte, concernent la confirmation que G237 est bien un protoamas de galaxies. Mais comment avons-nous choisi cet endroit pour pointer les plus grands télescopes du monde ? Pas par hasard, évidemment.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428627/original/file-20211026-21-x79tkx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428627/original/file-20211026-21-x79tkx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=416&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428627/original/file-20211026-21-x79tkx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=416&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428627/original/file-20211026-21-x79tkx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=416&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428627/original/file-20211026-21-x79tkx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=523&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428627/original/file-20211026-21-x79tkx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=523&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428627/original/file-20211026-21-x79tkx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=523&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">les candidats protoamas de galaxies découverts par Planck puis Herschel.</span>
<span class="attribution"><span class="source">ESA and the Planck Collaboration/H. Dole, D. Guéry & G. Hurier, IAS/University Paris-Sud/CNRS/CNES</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’histoire commence en 2009, avec le lancement des missions spatiales européennes <a href="https://theconversation.com/voyage-en-galaxies-ce-que-herschel-et-planck-nous-ont-appris-1-48622">Planck et Herschel</a>. Avec Planck, nous avions découvert <a href="https://www.esa.int/Science_Exploration/Space_Science/Herschel_and_Planck_find_missing_clue_to_galaxy_cluster_formation">environ 2000 candidats protoamas</a> de galaxies réparties sur tout le ciel, et avec Herschel et <a href="https://www.nasa.gov/mission_pages/spitzer/main/index.html">Spitzer</a> (de la NASA), j’ai moi-même dirigé le programme de premières études plus poussées <a href="https://www.esa.int/ESA_Multimedia/Images/2020/05/Looking_back_in_time_with_Herschel_and_Planck">sur environ 200 de ces candidats en infrarouge</a>. Leur particularité : ils devraient former des quantités impressionnantes d’étoiles, vus leurs flux intenses en infrarouge. De sorte qu’en 2015, si nous n’avions pas de confirmation, nous avions de très forts soupçons argumentés quant à la nature de protoamas de la majorité de ces candidats. Mais cela restait au stade d’hypothèse.</p>
<p>De nombreuses observations depuis l’espace en infrarouge et au sol avec des télescopes dans plusieurs longueurs d’ondes, plusieurs thèses de doctorat, de nombreux stages d’étudiants, pas mal d’interrogations, de reculs parfois, de propositions de télescopes et d’<a href="https://anr.fr/fr/actualites-de-lanr/details/news/publication-des-resultats-definitifs-de-laapg-2020-1-229-projets-de-recherche-selectionnes/">ANR</a> soumises (et rarement acceptées), de tentatives infructueuses, de discussions et d’analyses plus tard, nous voici avec cette première confirmation en main, avec à la clef une surprise quant au désaccord entre observations et modèles. </p>
<p>La découverte est donc un long processus, commencé bien avant le lancement de Planck et de Herschel puisqu’il y avait eu des prévisions de détectabilité en amont, durant une ou plusieurs décennies. Il n’est pas terminé car il faut résoudre ce désaccord, obtenir d’autres confirmations, en préparant la venue de données exquises qui viendront des missions spatiales <a href="https://www.esa.int/Science_Exploration/Space_Science/Webb">Webb</a> (lancé en décembre 2021) et <a href="https://theconversation.com/bonnes-feuilles-le-cote-obscur-de-lunivers-147791">Euclid</a> (<a href="https://www.esa.int/Space_in_Member_States/France/Le_telescope_spatial_Euclid_est_en_bonne_voie">lancé en 2023, mission ESA</a>). Une belle aventure haletante !</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428628/original/file-20211026-25-uoxrea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428628/original/file-20211026-25-uoxrea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428628/original/file-20211026-25-uoxrea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428628/original/file-20211026-25-uoxrea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428628/original/file-20211026-25-uoxrea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428628/original/file-20211026-25-uoxrea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428628/original/file-20211026-25-uoxrea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Plusieurs centaines de candidats protoamas de galaxies observés par Herschel.</span>
<span class="attribution"><span class="source">ESA/Herschel/SPIRE/Planck consortia and H. Dole, D. Guéry, IAS, CNRS, Université Paris-Saclay</span></span>
</figcaption>
</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/170662/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hervé Dole ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Ces galaxies sont observées lorsque l’univers n’était âgé que de 3 milliards d’années. Récit de l’intérieur d’une découverte, qui est une confirmation d’un travail commencé il y a une décennie.
Hervé Dole, Professeur (astrophysique et physique) - Institut d'Astrophysique Spatiale (CNRS & Univ. Paris-Saclay), Université Paris-Saclay
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/169379
2021-10-19T18:36:33Z
2021-10-19T18:36:33Z
Manon : « Qui a découvert le Big Bang ? »
<p>Tout a commencé il y a un peu plus d’un siècle. Un astronome américain, Vesto Slipher, prenait des photos des spectres des galaxies.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427241/original/file-20211019-28-vvbqh6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427241/original/file-20211019-28-vvbqh6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1060&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427241/original/file-20211019-28-vvbqh6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1060&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427241/original/file-20211019-28-vvbqh6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1060&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427241/original/file-20211019-28-vvbqh6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1332&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427241/original/file-20211019-28-vvbqh6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1332&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427241/original/file-20211019-28-vvbqh6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1332&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">A gauche, le spectre du soleil, et à droite celui d’une galaxie lointaine. Chaque trait correspond à un élément chimique. On voit les traits sont décalés vers le rouge.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/Redshift#/media/File:Redshift.svg">Georg Wiora (Dr Schorsch)/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<p>Un spectre, c’est un arc-en-ciel : il donne la distribution de la lumière en fonction de sa couleur. Et dans les spectres, on peut repérer certains éléments chimiques – en quelque sorte, le spectre est un code-barre qui te donne non pas le prix mais la composition de l’étoile quand tu le scannes. Normalement, ces signatures apparaissent à un endroit bien précis de l’arc-en-ciel mais Vesto, lui, remarque un truc étrange : il y a un décalage, un décalage vers le côté rouge.</p>
<p>Cela peut se produire quand une source lumineuse bouge, c’est ce qu’on appelle l’effet Doppler. Tu ne l’as peut-être jamais vu, mais tu l’as certainement entendu : c’est le niiiiiiiiaooooon des voitures qui te dépassent. La voiture qui approche a un son plus aigu, mais c’est plus grave quand elle s’éloigne – pour la lumière, « plus aigu » équivaut à « plus bleu », « plus grave » à « plus rouge ». Si ces galaxies présentent des décalages vers le rouge, c’est qu’elles s’éloignent toutes de la Terre.</p>
<p>En parallèle, Albert Einstein finalisait sa grande théorie de relativité générale. Des astronomes et physiciens ont alors appliqué sa théorie à l’univers entier. Mais ils ont trouvé quelque chose d’étrange : l’univers n’est pas stable, il doit gonfler, bref il est « en expansion ».</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427242/original/file-20211019-13-4yco3x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427242/original/file-20211019-13-4yco3x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=897&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427242/original/file-20211019-13-4yco3x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=897&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427242/original/file-20211019-13-4yco3x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=897&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427242/original/file-20211019-13-4yco3x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1128&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427242/original/file-20211019-13-4yco3x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1128&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427242/original/file-20211019-13-4yco3x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1128&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Georges Lemaître.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/Georges_Lema%C3%AEtre">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Parmi ceux qui ont trouvé cela, il y avait un prêtre belge, Georges Lemaître. Lui s’est dit que, si c’était vrai, ça devrait se voir. Il est alors tombé sur les décalages de Vesto Slipher. Et avec quelques calculs supplémentaires, il a montré que la théorie d’Einstein prédisait que les galaxies devaient s’éloigner avec une vitesse proportionnelle à leur distance, c’est-à-dire que plus les galaxies sont distantes, plus elles s’éloignent vite. Il a publié tout cela en 1927.</p>
<p>Deux ans plus tard, Edwin Hubble retrouvait la même proportionnalité entre vitesse et distance dans ses données, mais il ne fit pas le lien avec la théorie d’Einstein. Dans les années qui suivirent, lui et son assistant Milton Humason accumulèrent les données qui vinrent confirmer cette proportionnalité : on l’appelle aujourd’hui « loi de Hubble-Lemaître ».</p>
<p>Lemaître ne s’est pas arrêté là. Il a continué son raisonnement et s’est dit que, si ça gonflait aujourd’hui, l’univers avait être très petit autrefois. Mathématiquement, la théorie indique même un rayon nul à un moment : l’univers aurait alors un début ! En réfléchissant à la matière, à l’énergie et à leur comportement avec le temps, Lemaître imagine l’instant où il n’y en avait qu’un seul, qu’il appela « atome primitif ». Et c’est de là que part l’expansion de l’univers. Il publie cette idée en 1931.</p>
<p>Cette idée, cependant, ne plut pas à beaucoup de monde. Dès le départ en 1927, Lemaître parle de son raisonnement avec Einstein lors d’un congrès à Bruxelles et ce dernier ne se montre pas enthousiaste : « vos mathématiques sont correctes mais votre physique est abominable » lui lance-t-il… Einstein, en fait, <a href="https://theconversation.com/les-deux-erreurs-deinstein-136062">ne pouvait imaginer l’univers que statique</a>, et c’était le cas de nombreux astronomes alors !</p>
<p>Certains pensaient même qu’en fixant un début à l’univers, Lemaître ne faisait que « démontrer" la Genèse telle qu’expliquée dans la Bible et qu’il ne faisait cela que parce qu’il était catholique. Au fil du temps, certains se moquèrent même ouvertement de son idée. Un astronome anglais, Fred Hoyle, tourna un jour la chose en dérision à la radio en rebaptisant l’atome primitif « Big Bang ».</p>
<p>Lemaître, lui, séparait entièrement son travail scientifique de ses croyances – il appelait cela « les deux voies » : pour lui, son idée n’avait rien à voir avec la Bible !</p>
<p>Mais avec les moqueries, il s’est éloigné de l’astronomie, passant à d’autres recherches. Au fil du temps, différentes preuves d’un état dense de l’univers jeune ont été découvertes comme la présence d’un rayonnement fossile (une lumière émise 380 000 ans après le Big Bang) en 1965 ou l’importante abondance de l’hélium (un élément construit en grande partie peu après le Big Bang) dans les années 1950.</p>
<p>Mais si aujourd’hui l’idée de Lemaître est acceptée des astronomes, le nom initialement moqueur est resté : « Big Bang », c’était plus frappant qu’« atome primitif »…</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dianerottner.com/">Diane Rottner</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p><em>Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : <a href="mailto:tcjunior@theconversation.fr">tcjunior@theconversation.fr</a>. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169379/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yaël Nazé ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Le Big Bang est une théorie scientifique basée sur l’observation que l’univers est en expansion, et que si on remonte dans le temps il devait être extrêmement petit et dense.
Yaël Nazé, Astronome FNRS à l'Institut d'astrophysique et de géophysique, Université de Liège
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/166444
2021-09-20T20:44:04Z
2021-09-20T20:44:04Z
WEAVE : tisser des fibres optiques pour explorer le cosmos
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/421055/original/file-20210914-21-1abwpdi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C11%2C2556%2C1904&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le télescope William Herschel accueille un nouvel instrument qui permet d’étudier des milliers d’objets simultanément grâce à ses fibres optiques robotisées.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.esa.int/ESA_Multimedia/Images/2019/03/William_Herschel_telescope">2©pem/Wikimedia Commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Au sommet du Roque de Los Muchachos sur l’île de La Palma aux Canaries, le télescope William Herschel vient d’accueillir son nouveau spectrographe multi-objets. Celui-ci va permettre d’analyser simultanément la lumière d’environ 1000 objets cosmiques répartis à différents endroits du ciel.</p>
<p>Un des huit objectifs de WEAVE est d’étudier les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Quasar">« quasi-stellar objects »</a>, des noyaux de galaxies qui abritent un trou noir et sont de puissantes sources de rayonnement électromagnétique. Ces objets, observables à de très grandes distances, sont utilisés pour sonder la structure de l’univers à grande échelle, les propriétés des galaxies, et celles du milieu intergalactique dans les premiers trois milliards d’années à partir du Big Bang.</p>
<p>Un autre objectif est d’étudier des objets très proches comme les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Naine_blanche">naines blanches</a>, des étoiles extrêmement denses. Avec les spectres WEAVE, nous déterminerons les masses et les températures de plus de 100 000 naines blanches, et donc leurs âges grâce à la loi de refroidissement des naines blanches.</p>
<p>Mais c’est le relevé d’« archéologie galactique » qui occupera la majeure partie du temps d’observation de WEAVE : les spectres des étoiles observés nous permettront de mieux comprendre la structure de la Galaxie, sa formation et son évolution au cours des longs 13,5 milliards d’années de son histoire.</p>
<h2>La spectroscopie, ou comment décomposer la lumière des étoiles nous en apprend plus sur le cosmos</h2>
<p>À la fin du XIX<sup>e</sup> siècle, des astronomes tels que <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jules_Janssen">Jules Janssen</a> (1824-1907) et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Angelo_Secchi">Angelo Secchi</a> (1818-1878) ont commencé à étudier systématiquement la lumière du Soleil, des planètes et des étoiles. Ils ont dispersé la lumière provenant de ces astres grâce à des « prismes », et en analysant les couleurs obtenues, ont étudié les propriétés physiques d’astres distants de millions de kilomètres de la Terre.</p>
<p>La spectroscopie a marqué la naissance de l’astrophysique. Depuis, c’est notre outil principal pour étudier le cosmos, car on peut à partir du spectre d’un objet cosmique déterminer sa <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_Doppler#Astronomie">vitesse radiale</a> (s’il s’approche ou s’éloigne de nous), sa <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Raie_spectrale">composition chimique</a> et son état physique (température, densité, pression électronique, etc.).</p>
<h2>Analyser plusieurs astres simultanément</h2>
<p>Au cours des trente dernières années sont apparus les spectrographes multi-objets, capables d’étudier simultanément les propriétés individuelles d’objets très distants. Ces spectrographes permettent de sélectionner différents objets dans le champ de vue du télescope et d’envoyer leur lumière dans l’analyseur pour produire des spectres séparés.</p>
<p>Ils sont particulièrement importants pour les études qui nécessitent de très nombreuses mesures, par exemple l’étude de notre galaxie, celle des amas de galaxies ou des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Oscillations_acoustiques_des_baryons">oscillations de la matière baryonique</a>. Ces dernières sont des fluctuations de densité de matière (protons et neutrons) qui étaient déjà présentes dans l’univers primordial, juste après le Big Bang. Les galaxies notamment se sont formées à partir de ces inhomogénéités et la mesure est complémentaire de l’étude des anisotropies du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fond_diffus_cosmologique">fond diffus cosmologique</a>, dont l’observation occasionna notamment le Prix Nobel de physique 2006.</p>
<h2>Répondre aux besoins scientifiques des astronomes</h2>
<p>Il y a une douzaine d’années, la communauté astronomique européenne <a href="https://www.astronet-eu.org/sites/default/files/astronet_ir_final_word_doc_for_printing_with_logo.pdf">a identifié comme besoin prioritaire</a> un instrument à grand champ de vue (un à trois degrés de diamètre, soit plusieurs fois la taille de la pleine lune) capable d’acquérir simultanément les spectres de plusieurs milliers d’objets sur un télescope de l’ordre de 4 mètres de diamètre. En effet, un tel instrument permet d’aborder plusieurs domaines de recherche en astrophysique, notamment la structure et l’évolution de la Voie lactée, la structure et l’évolution des amas de galaxies, la structure à grande échelle de l’univers et la cosmologie.</p>
<p>WEAVE, pour « WHT Enhanced Area Velocity Explorer », est né. Il est le produit d’une collaboration internationale à laquelle participent les pays propriétaires du télescope (Royaume-Uni, Pays-Bas, Espagne), mais aussi la France, l’Italie et le Mexique, ainsi que plusieurs organismes et chercheurs.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/417880/original/file-20210825-15-h6lo6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/417880/original/file-20210825-15-h6lo6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=441&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/417880/original/file-20210825-15-h6lo6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=441&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/417880/original/file-20210825-15-h6lo6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=441&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/417880/original/file-20210825-15-h6lo6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=555&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/417880/original/file-20210825-15-h6lo6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=555&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/417880/original/file-20210825-15-h6lo6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=555&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Schéma de WEAVE et son implantation sur le télescope William Herschel.</span>
<span class="attribution"><span class="source">WEAVE consortium</span></span>
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<h2>Une des plus grandes lentilles jamais fabriquées</h2>
<p>D’un point de vue technologique, WEAVE a été un défi à la limite des technologies actuelles. Notamment, il nécessite un système optique composé de six lentilles. La plus grande de ces six lentilles a un diamètre de 1,1 mètre – c’est une des plus grandes lentilles jamais fabriquées.</p>
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<figcaption><span class="caption">La danse des robots-positionneurs.</span></figcaption>
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<p>Nous avons aussi conçu et développé deux « robots positionneurs » qui déplacent jusqu’à 960 fibres optiques vers les positions nécessaires sur le plan focal du télescope pour analyser les astres. Les robots tissent ainsi (« to weave », en anglais) un véritable entrelacs de fibres, qu’il est prévu de faire et défaire des milliers de fois, dans une danse qui ne manque pas de charme.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/417607/original/file-20210824-25-f6fhpe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/417607/original/file-20210824-25-f6fhpe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/417607/original/file-20210824-25-f6fhpe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/417607/original/file-20210824-25-f6fhpe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/417607/original/file-20210824-25-f6fhpe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/417607/original/file-20210824-25-f6fhpe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/417607/original/file-20210824-25-f6fhpe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un champ WEAVE entièrement configuré, avec 700 des 950 fibres environ placées par deux robots (hors du cadre), sur place dans le télescope William Herschel.</span>
<span class="attribution"><span class="source">WEAVE consortium</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Les fibres optiques acheminent ensuite la lumière sur 32 mètres, le long de la structure du télescope, jusqu’au spectrographe. WEAVE dispose de plusieurs types de connexions par fibres optiques, qui lui permettent d’imager différemment pour étudier différents types d’objets. Par exemple, on peut utiliser 960 fibres individuelles destinées chacune à recueillir la lumière d’un objet ponctuel. Autre option : un assemblage de plus de cinq cents fibres couvrant un large champ de vision pour l’observation d’objets étendus de grande taille. Enfin, avec 20 assemblages de 37 fibres, on peut étudier plusieurs objets étendus, comme des galaxies, et en étudier les propriétés, tel que leur courbe de rotation, leur composition chimique et les différences de composition chimique, et ce dans les différentes parties de la galaxie.</p>
<h2>Une collaboration internationale aux compétences multiples</h2>
<p>Nous avons eu recours à un large réseau de compétences pour la fabrication des pièces et leur assemblage. Par exemple, le collimateur et les quatorze lentilles sphériques des caméras ont été polis au Mexique après que les disques de verre aient été fabriques en Europe, Japon et aux États-Unis. Ces composants conçus et réalisés spécifiquement pour WEAVE ont ensuite été envoyés aux Pays-Bas où a eu lieu l’intégration des éléments optiques et mécaniques du spectrographe. L’assemblage des liens par fibres optiques s’est appuyé sur les contributions de trois industriels différents en France, au Canada et aux États-Unis. Les liens fibrés ont enfin été testés à l’Observatoire de Paris, avant d’être envoyés à Oxford pour être intégrés au positionneur.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/418056/original/file-20210826-4994-ih1rpi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/418056/original/file-20210826-4994-ih1rpi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/418056/original/file-20210826-4994-ih1rpi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=387&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/418056/original/file-20210826-4994-ih1rpi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=387&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/418056/original/file-20210826-4994-ih1rpi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=387&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/418056/original/file-20210826-4994-ih1rpi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=486&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/418056/original/file-20210826-4994-ih1rpi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=486&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/418056/original/file-20210826-4994-ih1rpi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=486&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La galaxie spirale Messier 74 observé avec une caméra de test pour vérifier la qualité optique du correcteur de champ. Une fois en opération, WEAVE ne prendra pas d’images, mais seulement des spectres.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Darío González Picos, Lara Monteagudo, Chris Benn and Ovidiu Vaduvescu (Isaac Newton Group of Telescopes, Roque de Los Muchachos Observatory, La Palma, Espagne)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Après un travail de plus de dix ans qui a impliqué une centaine de personnes dans une dizaine de pays, les composantes de WEAVE sont maintenant arrivées sur le site du télescope William Herschel. Le système optique a été testé sur le télescope et a démontré une excellente qualité d’image. Encore en cours d’intégration, WEAVE devrait faire ses premières observations – des spectres et non des images – en décembre 2021.</p>
<hr>
<p><em>En France, la construction de WEAVE a été financée par le CNRS, l’Observatoire de Paris-PSL, les régions Île-de-France et Franche-Comté ; ont également participé le Royaume-Uni (STFC), les Pays-Bas (NOVA et NWO), l’Espagne (IAC, Groupe international de télescopes Isaac Newton, ministère des Affaires économiques et de la Transformation numérique), l’Italie (INAF), le Mexique (INAOE), la Suède (Observatoire de Lund, Université d’Uppsala), l’Allemagne (AIP, MPIA), les États-Unis (Université de Pennsylvanie) et la Hongrie (Observatoire Konkoly)</em>.</p>
<p><em>La Région Île-de-France finance des projets de recherche relevant de Domaines d’intérêt majeur et s’engage à travers le dispositif Paris Région Phd pour le développement du doctorat et de la formation par la recherche en cofinançant 100 contrats doctoraux d’ici 2022. Pour en savoir plus, visitez <a href="http://www.iledefrance.fr/education-recherche">iledefrance.fr/education-recherche</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/166444/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Piercarlo Bonifacio est membre de l'Observatoire de Paris, l'Université Paris Sciences et Lettres, le CNRS. Il a reçu des financements de CNRS-INSU, Observatoire de Paris, Région Ile de France, Région Franche Comté, European Research Council, Agence National de la Recherce, CNES. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Elisabetta Caffau est membre de GEPI, Observatoire de Paris, Universite PSL, CNRS.
Elle a reçu des financements de ANR (Agence National de la Recherche), Observatoire de Paris, CNRS-INSU, Fondation MERAC. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Esperanza Carrasco est membre de la Union Astronomique Internationale, de la Sociedad Mexicana de Física et de l'Instituto de Estudios para la Transición Democrática. Elle a reçu financement du Consejo Nacional de Ciencia y Tecnología du Mexique.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Gavin Dalton is Professor of Astrophysics at the University of Oxford, an Individual Merit fellow at RALSpace, Science and Technology Facilities Council (STFC), a part of UK Research Infrastructure (UKRI). He is a Fellow of St. Cross College, Oxford and a Fellow of the Royal Astronomical Society. He has received research funding from the Science and Technology Facilities Council and the University of Oxford.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Shan Mignot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Sonder la structure de l’univers et faire de l’« archéologie galactique » – quelques uns des objectifs du nouvel instrument astronomique WEAVE.
Piercarlo Bonifacio, Directeur de Recherche CNRS et Observatoire de Paris, investigateur principal côté français de l'instrument WEAVE, cofinancé par la Région Île-de-France dans le cadre des Domaines d’Intérêt Majeur, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
Elisabetta Caffau, Directeur de Recherche CNRS, Observatoire de Paris
Esperanza Carrasco, Chercheuse, Instituto Nacional de Astrofísica, Óptica y Electrónica (INAOE)
Gavin Dalton, Professor of Astrophysics, University of Oxford
Shan Mignot, Project manager, Observatoire de Paris
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/151433
2020-12-28T18:59:09Z
2020-12-28T18:59:09Z
« À la reconquête de l’espace » : un débat à revoir en ligne
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/372887/original/file-20201203-17-1b8zq2b.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1278%2C712&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pour son cinquième anniversaire, The&nbsp;Conversation France a organisé une série de webinaires.</span> </figcaption></figure><p>Pour ses cinq ans, The Conversation a programmé cinq événements-débats entre septembre et novembre 2020. Après deux premiers événements maintenus en présentiel à <a href="https://www.youtube.com/watch?v=DoD0VGQS3oM">Paris</a> et à <a href="https://www.youtube.com/watch?v=fcXoikdLZXY">Grenoble</a>, la suite des rencontres s’est faite virtuellement, chaque jeudi du mois de novembre.</p>
<p><a href="https://www.youtube.com/watch?v=ppTDVAi1l34">« Les mystères du cerveau »</a> ont marqué le début de cette série d’événements en ligne. La semaine suivante, c’est avec <a href="https://www.youtube.com/watch?v=WcHyHHkPpp8">« La vie des arbres »</a> que nous avons rassemblé plus de 2 000 spectateurs.</p>
<p>La série de webinaires s’est terminée le 26 novembre, avec « À la reconquête de l’espace », un événement initialement prévu à Bordeaux. Cette dernière table ronde en ligne a réuni :</p>
<ul>
<li><p><a href="https://theconversation.com/profiles/jacques-arnould-1156994">Jacques Arnould</a>, Expert éthique au CNES ;</p></li>
<li><p><a href="http://perso.astrophy.u-bordeaux.fr/%7Ejleconte/">Jérémy Leconte</a>, Chercheur au Laboratoire d’astrophysique de Bordeaux (CNRS/Université de Bordeaux) ;</p></li>
<li><p>et Chloé Duffort, Doctorante – Droit international public – Droit des conflits armés à Sciences Po Bordeaux/Université Laval.</p></li>
</ul>
<p>Les humains explorent et utilisent leur connaissance du cosmos depuis la nuit des temps. Du ciel étoilé qui servait autrefois à naviguer, on explore désormais les origines et les limites à travers la <a href="https://theconversation.com/quy-a-t-il-entre-les-galaxies-ou-pourquoi-etudier-les-vides-cosmiques-146235">cosmologie</a>. On l’étudie également pour mieux comprendre un phénomène qui nous intéresse de près : la <a href="https://theconversation.com/comment-cherche-t-on-des-traces-de-vie-sur-mars-136720">vie</a>. Aux grandes puissances traditionnelles de l’exploration de l’espace s’ajoutent désormais d’autres pays, comme les Émirats Arabes Unis, qui ont lancé une <a href="https://theconversation.com/a-qui-appartiennent-mars-la-lune-et-leurs-ressources-naturelles-141406">mission vers Mars</a> à l’été 2020, ou la Chine, dont la <a href="https://theconversation.com/objectif-lune-le-temps-de-la-reconquete-150153">mission Chang’e 5</a> doit atterrir sur la Lune et en ramener des échantillons. Des <a href="https://theconversation.com/spacex-vers-une-nouvelle-ere-de-la-conquete-spatiale-139591">acteurs privés</a> entrent dans la danse, en forte coopération avec les agences spatiales comme la NASA ou l’ESA.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/eQ1lvfItp9g?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Replay de la table ronde en ligne « À la reconquête de l’espace » organisée le 26 novembre dernier, dans le cadre du cinquième anniversaire de The Conversation France.</span></figcaption>
</figure>
<p>Ces évolutions concrétisent les enjeux éthiques et juridiques de la reconquête de l’espace, et la période actuelle marque un changement d’ère dans l’aventure spatiale.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/151433/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
Entre sciences, éthique et droit, retrouvez notre rencontre sur la reconquête de l’espace.
Fabrice Rousselot, Directeur de la rédaction, The Conversation France
Lou Biasutto, Editor
Grégory Rayko, Chef de rubrique International, The Conversation France
Elsa Couderc, Cheffe de rubrique Science + Technologie, The Conversation France
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/147791
2020-10-19T19:25:49Z
2020-10-19T19:25:49Z
Comment la mission Euclid imagera le « côté obscur » de l’univers
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/362922/original/file-20201012-21-y96zz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C55%2C1272%2C1105&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'effet de lentille gravitationnelle «fort»: l'amas de galaxies au centre de l'image (SDSS J1038+4849) est tellement massif qu'il déforme l'espace temps et courbe les trajectoires de la lumière: les objets situés derrière l'amas nous semblent déformés.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.nasa.gov/content/hubble-sees-a-smiling-lens">NASA / ESA</a></span></figcaption></figure><p><em>La cosmologie étudie la formation des grandes structures de l’univers : depuis le passé le plus lointain que nous puissions distinguer – le fonds diffus cosmologique – jusqu’au contenu de l’univers actuel en matière noire et en énergie sombre.</em></p>
<p><em>Hervé Dole est professeur à l’Université Paris-Saclay, à l’Institut d’astrophysique spatiale. Dans son livre <a href="https://www.dunod.com/sciences-techniques/cote-obscur-univers-preface-pierre-lena-0">« Le côté obscur de l’univers »</a> sorti aux Éditions Dunod, il nous emmène à la découverte des recherches récentes en cosmologie, entre les enseignements de la mission spatiale européenne Planck et les quêtes de la future mission Euclid, dont le lancement est prévu pour 2022.</em></p>
<hr>
<p>Après <a href="http://public.planck.fr/">Planck</a> dans les années 2010, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Euclid_(t%C3%A9lescope_spatial)">Euclid</a> sera la mission spatiale majeure de la décennie 2020 en cosmologie. Ce satellite européen – avec une dominante française en termes de contributions scientifique et technique – aura pour but de démasquer comme jamais auparavant le comportement de la matière noire et de l’énergie sombre. En route pour le futur !</p>
<h2>Y voir clair dans le secteur sombre de l’univers</h2>
<p>Euclid sera la seconde mission spatiale européenne à visée cosmologique et, comme avec Planck, le poids de la communauté scientifique française s’avère déterminant. Depuis plusieurs années déjà, les chercheurs et ingénieurs des organismes de recherche nationaux (CNRS et <a href="https://www.cea.fr/drf/Pages/Actualites/Vie-de-la-DRF/2020/euclid--lrfu-livre-le-plan-focal-de-la-camera-vis-.aspx">CEA</a>), des universités et de leurs laboratoires, avec le soutien de l’agence spatiale française (<a href="https://euclid.cnes.fr/fr/">CNES</a>), se démènent pour concevoir et tester cette extraordinaire machine, avant son lancement prévu à l’horizon 2022.</p>
<p>Le principal but d’Euclid sera de comprendre le « secteur sombre » de l’univers, à savoir la matière noire et l’énergie sombre. Il va donc s’attaquer aux deux problématiques phares de la cosmologie contemporaine. Ses deux principales sondes cosmologiques (les deux types de mesures qu’il effectuera) seront le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Lentille_gravitationnelle_faible">lentillage gravitationnel faible</a> (ou <em>weak lensing</em>) et l’agrégation des galaxies (ou <em>clustering</em>).</p>
<h2>Tracer la matière noire par lentillage gravitationnel</h2>
<p>Le lentillage faible permet de mesurer précisément la quantité et la distribution de matière noire, et de reconstituer finement l’évolution de la formation des structures selon la distance cosmologique, ou l’époque cosmique, mesurée par le <em>redshift</em> (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9calage_vers_le_rouge">décalage spectral cosmologique vers le rouge</a>), afin de déceler les effets de l’énergie sombre.</p>
<p>Pour effectuer de telles mesures, Euclid prendra des milliers d’images ultra-précises du ciel en lumière visible, qui permettront de mesurer les formes et les orientations des galaxies. En ne considérant qu’une seule galaxie ou un petit nombre d’entre elles, leurs orientations sont presque entièrement aléatoires. Mais s’il existe une grande quantité de matière noire entre ces galaxies lointaines et nous, leur orientation collective est affectée… et Euclid pourra le détecter ! Cet effet de lentillage gravitationnel faible permet de tracer sur les images des sortes de lignes, indiquant les changements d’orientation des galaxies d’arrière-plan. Ces lignes sont directement reliées à la « masse déflectrice » (celle de la matière noire) que l’on peut alors mesurer précisément.</p>
<p>Cette technique – qui existe depuis des années – avait été évoquée en détail dans le chapitre 7 du livre. Euclid va introduire une première grande nouveauté : l’ampleur et la précision des mesures effectuées, grâce à une image géante couvrant quasiment la totalité du ciel.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/362926/original/file-20201012-19-1iyboiz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/362926/original/file-20201012-19-1iyboiz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/362926/original/file-20201012-19-1iyboiz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/362926/original/file-20201012-19-1iyboiz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/362926/original/file-20201012-19-1iyboiz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/362926/original/file-20201012-19-1iyboiz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/362926/original/file-20201012-19-1iyboiz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les champs d’observation d’Euclid : le champ large, en bleu, pour observer une grande partie du ciel – portions trop lumineuses exceptées ; et les trois zones en <em>champ profond</em>, en jaune, sélectionnées car elles sont particulièrement sombres.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.jpl.nasa.gov/images/euclid/20190612/esa20190612c-16.jpg">Euclid Consortium, ESA/Gaia/DPAC</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Deuxième grande nouveauté : nous disposerons d’images en infrarouge proche, qui faciliteront énormément l’estimation de la distance cosmologique des galaxies (donnée par leur <em>redshift</em>). Nous pourrons ainsi sélectionner des galaxies de plus en plus lointaines, et mesurer la quantité de matière noire en fonction de la distance (donc de l’époque cosmique).</p>
<h2>Révéler l’énergie sombre grâce au <em>clustering</em></h2>
<p>Deuxième sonde cosmologique : l’agrégation des galaxies (ou <em>clustering</em>). Le principe consiste à mesurer les distances entre galaxies sur de grands volumes, afin de calculer une sorte de « distance moyenne entre galaxies ». Du point de vue mathématique, on calcule une « <a href="https://ned.ipac.caltech.edu/level5/March04/Jones/Jones5_2.html">fonction de corrélation à deux points</a> » qui représente, pour une distance donnée, l’excès de galaxies par rapport à une distribution aléatoire dans l’espace. La fonction de corrélation mesure ainsi le degré d’agrégation des galaxies ; on peut ensuite la comparer aux prédictions du modèle cosmologique.</p>
<p>En 2005, deux équipes de chercheurs ont découvert une échelle particulière de corrélation entre galaxies, qui n’est détectable qu’en observant l’univers à grande échelle (environ 200 Mpc, soit plusieurs centaines de millions d’années-lumière). Elle est associée aux <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Oscillations_acoustiques_des_baryons">oscillations baryoniques acoustiques</a> (BAO), qui traduisent au fond « l’appétence » des galaxies à se distribuer dans l’espace selon une échelle privilégiée. Celle-ci est due aux modes de vibration du plasma primordial, que l’on observe dans les « pics acoustiques » des <a href="https://www.refletsdelaphysique.fr/articles/refdp/pdf/2020/01/refdp202064p4.pdf">fluctuations du fond cosmologique</a>.</p>
<p>Euclid détectera les BAO avec une précision remarquable, et il pourra même les mesurer sur un volume correspondant aux 8 derniers milliards d’années de l’Univers ! Comme vu précédemment dans le livre, ces BAO constituent une sonde importante pour caractériser précisément <a href="https://cosmology.education/bigbang-vs-eternel/equations-friedmann/#!">l’équation d’état</a> de l’énergie sombre (la relation entre sa densité et sa pression).</p>
<p>De nombreuses autres mesures seront effectuées (statistiques d’ordre supérieur notamment, mais aussi utilisation des amas de galaxies) en vue de mieux contraindre le modèle cosmologique ainsi que les lois de la gravitation et l’évolution des galaxies.</p>
<h2>Une majestueuse image de la voûte céleste</h2>
<p>Afin d’utiliser ces deux sondes cosmologiques, Euclid effectuera un gigantesque relevé de galaxies, couvrant rien de moins que la moitié du ciel avec une impressionnante qualité d’image. Il s’agira en réalité de la quasi-totalité du ciel dit « extragalactique », l’autre moitié de la voûte étant déjà « contaminée » par notre Voie lactée… Imaginez une qualité comparable à celle du télescope spatial Hubble, sur des images qui ne couvriront pas de « petits champs » visuels, mais quasiment tout le ciel profond observable ! Une vraie révolution.</p>
<p>Durant ses cinq à six années d’opération, Euclid devrait ainsi détecter, dans les domaines du visible et du proche infrarouge, des milliards de galaxies jusqu’à un <em>redshift</em> d’environ 2, et des milliers d’autres à des <em>redshifts</em> compris entre 2 et 8.</p>
<h2>Des caméras extraordinaires… et des défis !</h2>
<p>Parlons maintenant des « yeux » d’Euclid, deux instruments installés au foyer d’un télescope d’1,2 m de diamètre. Le premier (appelé <a href="http://irfu.cea.fr/dap/Phocea/Vie_des_labos/Ast/ast.php?t=fait_marquant&id_ast=4735">VIS</a>) sera sensible à la lumière visible (avec une belle <a href="https://www.ias.u-psud.fr/fr/activites-techniques/service-optique/euclid">lampe d’étalonnage</a> « made in Orsay » !), tandis que le second (appelé <a href="http://www.cnrs.fr/fr/la-france-livre-le-spectrophotometre-infrarouge-nisp-pour-la-mission-spatiale-europeenne-euclid">NISP</a>, conçu et réalisé sous responsabilité marseillaise) observera dans l’infrarouge proche.</p>
<p>Ces instruments cumuleront un tel nombre de détecteurs que le plan focal – la zone sensible à la lumière située au foyer – sera couvert par 64 millions de pixels pour l’infrarouge (16 détecteurs de 2 000 × 2 000 pixels) et par environ 604 millions de pixels pour le visible (36 détecteurs de 4 096 × 4 096 pixels). Un record pour l’imagerie dans le secteur spatial (le satellite européen <a href="https://sci.esa.int/web/gaia">Gaia</a> a embarqué plus de pixels, mais utilisés différemment, notamment en spectroscopie) ! Les deux instruments auront un champ visuel instantané exceptionnellement large : de l’ordre de 0,5 degré carré, à peu près équivalent à la surface angulaire couverte par deux pleines Lune… et environ 160 fois plus grand que le champ visuel de Hubble !</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/362923/original/file-20201012-19-pwnetm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/362923/original/file-20201012-19-pwnetm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/362923/original/file-20201012-19-pwnetm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/362923/original/file-20201012-19-pwnetm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/362923/original/file-20201012-19-pwnetm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/362923/original/file-20201012-19-pwnetm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/362923/original/file-20201012-19-pwnetm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un modèle du satellite Euclid, construit pour passer des tests thermiques et mécaniques sur le site de Thalès Alenia Space, à Cannes, début 2020.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.esa.int/ESA_Multimedia/Images/2019/09/Structural_and_thermal_model_of_the_Euclid_satellite4#.X4QcGbkHg68.link">S. Corvaja/ESA</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>NISP est développé sous responsabilité française, et notre pays contribue aussi largement à VIS. Dans les deux cas, l’agence spatiale française (CNES) joue un rôle majeur aux côtés des organismes nationaux, que sont le CNRS et le CEA, et des universités, pour mener à terme la complexe tâche de concevoir, tester et utiliser ces instruments uniques – un travail appelé « segment vol ».</p>
<p>Le traitement des données d’Euclid représentera un défi plus grand encore que celui de Planck. À tel point que le centre de calcul du CNRS de Lyon – principalement utilisé en physique des particules pour le LHC, le grand accélérateur du CERN – a été sélectionné. Ce centre (appelé « <a href="https://cc.in2p3.fr/">CC-IN2P3</a> », ou « centre de calcul de l’Institut national de physique nucléaire et de physique des particules ») décuple actuellement ses capacités de traitement et de stockage, afin d’être paré à recevoir les données et les programmes de traitement d’Euclid.</p>
<p>En 2017, soit à l’époque environ cinq ans avant le lancement prévu, nous avions testé la première version du traitement complet des données, lors de ce qu’on appelle des « défis scientifiques » (<em>scientific challenges</em>). Plus précisément, nous testons l’ensemble de la chaîne de programmes informatiques (le <em>pipeline</em>). Cette suite fort complexe de programmes reçoit (à son entrée) les données des instruments, et doit délivrer (à sa sortie) des images étalonnées, exemptes d’effets instrumentaux, ainsi que des catalogues de galaxies incluant la photométrie (flux lumineux dans plusieurs couleurs simultanément), l’identification des étoiles et des galaxies, l’estimation du <em>redshift</em> et celle du cisaillement gravitationnel, la mesure des fonctions de corrélation des galaxies.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/364223/original/file-20201019-13-1vke8be.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/364223/original/file-20201019-13-1vke8be.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=483&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/364223/original/file-20201019-13-1vke8be.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=483&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/364223/original/file-20201019-13-1vke8be.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=483&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/364223/original/file-20201019-13-1vke8be.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=607&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/364223/original/file-20201019-13-1vke8be.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=607&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/364223/original/file-20201019-13-1vke8be.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=607&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La caméra VIS de Euclid : modèle de vol au CEA Saclay, avec ses 36 détecteurs géants.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Michel Berthé/CEA</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Bien entendu, nous ne disposons pas encore des données « réelles », celles des instruments observant depuis l’espace. Nous utilisons donc en attendant des simulations numériques dernier cri de notre Univers : galaxies, étoiles, matière noire, énergie sombre, tout y est (ou presque) ! Ce ciel numérique est alors passé dans un simulateur d’instrument, un programme informatique faisant « comme si » on effectuait une observation. Du bruit, des parasites, des effets instrumentaux (optiques, électroniques, environnement spatial) sont donc ajoutés de façon réaliste. Enfin, ces données simulées sont présentées à notre <em>pipeline</em>, et nous regardons s’il réagit comme nous l’attendions (s’il ne plante pas, évidemment…).</p>
<p>Ce traitement ultra-poussé des données – appelé <a href="https://euclid-france.fr/segment-sol-2/">« segment sol »</a> – mobilise quasiment autant de ressources humaines et matérielles que la construction des instruments eux-mêmes. En cosmologie de précision, la recherche des très faibles biais ou effets indésirables dans les données – primordiale si l’on veut obtenir des résultats robustes – est en effet devenue un « sport international ». L’Europe en général, et la France en particulier, s’y révèlent brillantes.</p>
<p>En tant que responsables d’une part importante du <a href="https://www.euclid-ec.org/?page_id=2625">traitement</a> (pour ce qui me concerne : la fusion des données des instruments VIS et NISP, pour extraire les flux de milliards de galaxies et séparer les étoiles des galaxies), nous accompagnons ces tests avec une excitation mêlée de crainte. De l’excitation, car, depuis des mois, nous voyons s’échafauder une grande complexité et nous observons pour la première fois son fonctionnement complet. De la crainte, car nous redoutons des blocages, des cafouillages, des bugs, de mauvaises interfaces… qui ne manquent pas de se manifester, malgré les procédures exigeantes mises en place.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/362927/original/file-20201012-13-1aulbhu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/362927/original/file-20201012-13-1aulbhu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=968&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/362927/original/file-20201012-13-1aulbhu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=968&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/362927/original/file-20201012-13-1aulbhu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=968&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/362927/original/file-20201012-13-1aulbhu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1216&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/362927/original/file-20201012-13-1aulbhu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1216&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/362927/original/file-20201012-13-1aulbhu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1216&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’ouvrage est paru aux Éditions Dunod.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dunod.com/sciences-techniques/cote-obscur-univers-preface-pierre-lena-0">Éditions Dunod</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Un exemple de problème « bête » découvert alors : notre programme « plantait » (s’interrompait à cause d’erreurs) car l’un des fichiers en entrée (fourni par d’autres collègues) n’avait pas du tout le format attendu. Malgré nos tests, nous n’avions pas anticipé que l’information que nous attendions dans ce fichier était au final dupliquée… des dizaines de fois (nous n’avions prévu qu’une courte série de valeurs) ! Avec ce genre de préparation, nous serons prêts à recevoir la déferlante du flot de données, une fois Euclid en vol. En 2019, nous avons pour la première fois réalisé un test complet à partir des simulations de l’univers parmi les plus précises, intégrées dans les simulateurs d’instruments. Ces données brutes simulées ont traversé avec succès toute la série de programmes. Le chemin vers le <em>pipeline</em> final est encore long, jalonné de bilans réguliers – appelés « revues », une sorte d’examen critique de nos productions par de nombreux experts – de <a href="https://www.ias.u-psud.fr/fr/content/euclid-la-collaboration-fran%C3%A7aise-se-r%C3%A9unit-%C3%A0-orsay-3-ans-avant-le-lancement">réunions</a>, et de sueurs froides, mais aussi de joies !</p>
<p>Donnons-nous rendez-vous pour le lancement d’Euclid en 2022, puis quasiment chaque année ensuite pour des résultats intermédiaires, et vers 2028 pour découvrir les résultats finaux d’Euclid sur le secteur sombre de l’Univers !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/147791/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hervé Dole est l'un des Vice-Présidents de l'université Paris-Saclay, chargé de « art, culture, science et société" (il s'exprime ici à titre personnel). Il est auteur du livre "le coté obscur de l'univers" (Dunod). Il est / a été membre des collaborations Euclid et Planck.</span></em></p>
Comment la future mission européenne Euclid étudiera-t-elle matière noire et énergie sombre dans l’univers ?
Hervé Dole, Astrophysicien, Professeur, Vice-président, art, culture, science et société, Université Paris-Saclay
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/146235
2020-09-29T21:06:59Z
2020-09-29T21:06:59Z
Qu’y a-t-il entre les galaxies, ou pourquoi étudier les « vides » cosmiques ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/360250/original/file-20200928-24-11bc13x.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=527%2C0%2C2690%2C2435&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un vide cosmique, de forme allongée et irrégulière, identifié par le logiciel VIDE. Les points rouges correspondent à des galaxies du relevé de galaxie Sloan DR7.</span> <span class="attribution"><span class="source">Guilhem Lavaux</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>L’univers est composé de nombreuses structures cosmiques visibles à travers l’agencement spatial des galaxies. Ces structures font apparaître de nombreux vides, c’est-à-dire des régions quasiment inoccupées par les galaxies. De nombreux scientifiques s’intéressent particulièrement à ces vides cosmiques. Comment et pourquoi les étudie-t-on ?</p>
<h2>Des vides entre les grandes structures cosmologiques</h2>
<p>Les vides cosmiques sont des régions de l’univers apparemment dépourvues de galaxies. Ils sont aussi supposés pauvres en matière d’où leur nom de « vide cosmique ». Ces régions ont des tailles caractéristiques de l’ordre de quelques millions d’années-lumière pour les plus « petites » d’entre elles. La Voie lactée, notre galaxie, avec un diamètre de l’ordre de cent mille années-lumière, est au moins dix fois plus petite.</p>
<p>Les premiers vides cosmiques ont en fait été observés à la fin des années 1970 avec les <a href="http://articles.adsabs.harvard.edu/pdf/1978ApJ...222..784G">premiers relevés systématiques de galaxies</a>. À cette époque, il n’y avait pas encore de modèles scientifiquement établis de la cosmologie, c’est-à-dire fondés sur un ensemble convergent d’observations astronomiques. En particulier, les observations de la distribution des galaxies étaient encore relativement insuffisantes. Par exemple, il était impossible de voir si les galaxies avaient une organisation spatiale structurée ou bien si elles étaient distribuées de manière homogène.</p>
<p>Ce débat, qui durait depuis 1938, avait été lancé par <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Harlow_Shapley">Harlow Shapley</a>. Il aura fallu <a href="https://press.princeton.edu/books/paperback/9780691209838/the-large-scale-structure-of-the-universe">attendre les années 1970 pour avoir de premiers arguments physiques</a> sur la structuration spatiale des galaxies, lesquels ont été rapidement étayés par de véritables campagnes d’observation.</p>
<p>L’observation des grandes structures formées par les galaxies a entraîné de nombreux travaux théoriques afin de comprendre leur formation. Ces grandes structures ont été dénommées « toile cosmique » par référence à la toile d’araignée. Les vides correspondent aux trous de cette toile.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/358920/original/file-20200920-20-s50zsn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/358920/original/file-20200920-20-s50zsn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/358920/original/file-20200920-20-s50zsn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=413&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/358920/original/file-20200920-20-s50zsn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=413&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/358920/original/file-20200920-20-s50zsn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=413&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/358920/original/file-20200920-20-s50zsn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=520&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/358920/original/file-20200920-20-s50zsn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=520&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/358920/original/file-20200920-20-s50zsn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=520&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Contraste de densité inféré à partir de relevé de galaxies. Les amas de galaxies sont indiqués en lettres orangées. Les noms de quelques vides notables ont été repérés en lettres violettes. Les noms de ces structures, amas et vides, sont reliés aux constellations majeures visibles à la même position dans le ciel (Com=Coma/Chevelure de Bérénice, Boo=Böötes, UMa=Ursa Major/Grande Ourse).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Florent Leclercq, Guilhem Lavaux</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Néanmoins l’étude de ces vides est restée limitée, car ils souffrent de deux défauts. D’abord ils sont de grande taille, ce qui nécessite des relevés de galaxies très grands et profonds afin de les détecter et de les caractériser. Ensuite, le modèle mathématique de l’évolution du vide est plus complexe que celui utilisé pour rendre compte des petits écarts à l’homogénéité de la distribution des galaxies aux échelles de l’univers.</p>
<h2>Les vides cosmiques sont vides de matière… et sont dominés par l’énergie noire</h2>
<p>Les vides cosmiques présentent un intérêt scientifique pour l’étude de l’univers : ces régions, par définition, contiennent moins de matière que le reste de l’univers. Mais quand on enlève toute la matière, il reste quand même quelque chose : l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89nergie_noire">énergie noire</a>.</p>
<p>Celle-ci n’a jamais été observée directement – mais son existence, soit sous forme de constante cosmologique, soit sous forme d’un objet physique à part entière, n’est pas interdite par la relativité générale et elle est maintenant nécessaire pour interpréter les observations. En particulier, elle est requise pour expliquer l’accélération de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Expansion_de_l%27Univers">expansion cosmologique</a>.</p>
<p>L’hypothèse de l’énergie noire admet plusieurs variantes. L’énergie noire la plus « simple » ne formerait pas d’agrégats. Les vides cosmiques ne contenant quasiment pas de matière, ils seraient donc dominés par l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89nergie_noire">énergie noire</a>. Des laboratoires privilégiés pour tester de nouvelles hypothèses sur l’énergie noire à travers son effet sur la dynamique des petites galaxies les peuplant, en somme.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/de-lorigine-de-lunivers-a-lenergie-noire-conversation-avec-francoise-combes-medaille-dor-cnrs-2020-146123">De l’origine de l’univers à l’énergie noire : conversation avec Françoise Combes, médaille d’or CNRS 2020</a>
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<p>L’étude de cette dynamique requiert des relevés de galaxie à des luminosités extrêmement faibles, afin de voir ces petites galaxies. Ces relevés sont en cours de développement, par exemple le relevé <a href="https://www.lsst.org/about">« Legacy Survey of Space and Time »</a> ou <a href="https://www.euclid-ec.org">Euclid</a>.</p>
<h2>Expansion de l’univers et vides cosmiques</h2>
<p>Les vides cosmiques permettent non seulement de tester les hypothèses sur l’énergie noire, mais aussi de mesurer l’évolution de l’expansion de l’univers.</p>
<p>En effet, le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Principe_cosmologique">« principe cosmologique »</a>, très important dans la discipline, dit que les propriétés physiques de base de l’univers ne dépendent ni de la position de l’observateur ni de sa direction d’observation.</p>
<p>Suivant ce principe, les vides cosmiques doivent ressembler en moyenne à des boules, quel que soit l’instant. Cette propriété est importante, car elle permet de comparer l’étendue <em>apparente</em> d’un vide en profondeur, fournie par la vitesse d’éloignement des galaxies qui le délimitent, à son étendue sur le ciel, donnée par la distance sur le ciel entre ces mêmes galaxies. Selon le principe cosmologique, ces deux quantités sont égales <em>en moyenne</em>. Imposer cette égalité nous informe en retour sur la vitesse d’expansion à l’instant où la lumière a été émise par les galaxies délimitant ce vide cosmique, et ainsi au contenu de l’univers à cette même époque.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/359845/original/file-20200924-20-1pf749k.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/359845/original/file-20200924-20-1pf749k.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=505&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/359845/original/file-20200924-20-1pf749k.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=505&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/359845/original/file-20200924-20-1pf749k.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=505&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/359845/original/file-20200924-20-1pf749k.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=634&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/359845/original/file-20200924-20-1pf749k.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=634&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/359845/original/file-20200924-20-1pf749k.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=634&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Illustration du profil obtenu lors de l’empilement de nombreux vides cosmiques de formes très différentes : le « vide moyen » a essentiellement la forme d’une boule (l’axe horizontal donne la taille sur le ciel, alors que l’axe vertical donne la taille dans la direction de la profondeur). Il reste une petite déformation due à la vitesse d’échappement du vide des galaxies.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Nico Hamaus</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>D’autres types de structures peuvent servir pour réaliser ce même test de l’expansion – par exemple les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Oscillations_acoustiques_des_baryons">oscillations acoustiques du plasma primordial</a>, qui sont des structures de tailles bien plus importantes que celles des vides.</p>
<h2>Un tournant dans l’utilisation des vides</h2>
<p>Comme indiqué ci-dessus, bien que la forme des vides cosmiques soit en moyenne une boule, leur forme individuelle peut être très variée – l’image de tête de l’article montre une forme très complexe – et cette variabilité rend leur identification systématique compliquée.</p>
<p>La publication simultanée, mais séparée, de <a href="https://arxiv.org/abs/astro-ph/0602628">deux</a> <a href="https://arxiv.org/abs/0712.3049">algorithmes</a>, s’appuyant sur les mêmes <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_de_Morse">principes</a>, a permis une percée significative en 2007. La publication ouverte de leurs codes sources <a href="http://www2.iap.fr/users/sousbie/web/html/indexd41d.html">DISPERSE</a> et <a href="http://skysrv.pha.jhu.edu/%7Eneyrinck/voboz/">ZOBOV</a> a permis de les utiliser pour de nombreuses applications. Par exemple, il a été possible de suivre les propriétés des galaxies suivant le type de la toile (un vide, un amas ou un filament). DISPERSE a aussi été utilisé pour trouver des filaments de galaxies dans des images obtenues avec un détecteur dans le domaine des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Rayon_X">rayons X</a>, et à beaucoup plus petite échelle, pour analyser la structuration des nuages moléculaires.</p>
<p>Ces algorithmes s’appuient sur des concepts mathématiques de topologie différentielle, qui permet par exemple d’étudier les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ligne_de_partage_des_eaux">lignes de partage des eaux</a> en géographie. Ils sont plus robustes que les méthodes précédentes, et ils permettent d’identifier les vides même s’il y a de petites déformations de la distribution spatiale des galaxies, c’est-à-dire si on déplace globalement les galaxies dans n’importe quelle direction (si la déformation n’est pas trop grande).</p>
<p>Avec des collaborateurs, nous avons élaboré la chaîne d’analyse <a href="https://bitbucket.org/cosmicvoids/vide_public/">« VIDE »</a>, qui a notamment permis de construire des <a href="https://www.cosmicvoids.net">bases de données ouvertes de vides cosmiques</a> à partir du <a href="https://www.sdss.org">relevé du ciel « Sloan »</a>. D’autres catalogues de vides cosmiques ont par la suite été construits à partir d’autres relevés comme DES (<a href="https://www.darkenergysurvey.org/">Dark Energy Survey</a>).</p>
<p>Ces analyses des vides cosmiques ont abouti à de <a href="http://www.iap.fr/actualites/laune/2016/Vides/VidesCosmiques.html">nouvelles contraintes sur l’expansion de l’univers</a>.</p>
<h2>Les derniers résultats</h2>
<p>Les manières d’étudier et de caractériser les vides cosmiques <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/la-methode-scientifique/la-methode-scientifique-emission-du-mardi-28-janvier-2020">continuent d’évoluer</a> et font toujours plus appel aux logiciels ouverts. Deux évolutions significatives sont en cours. D’abord, l’évolution des ordinateurs et des algorithmes permet des analyses toujours plus fines des données : il est maintenant possible de détecter plus de vides et de reconstruire la toile cosmique avec toujours plus de fidélité à partir des relevés de galaxie.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/358919/original/file-20200920-20-114et2d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/358919/original/file-20200920-20-114et2d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/358919/original/file-20200920-20-114et2d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=340&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/358919/original/file-20200920-20-114et2d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=340&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/358919/original/file-20200920-20-114et2d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=340&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/358919/original/file-20200920-20-114et2d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=427&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/358919/original/file-20200920-20-114et2d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=427&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/358919/original/file-20200920-20-114et2d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=427&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les nouvelles techniques d’analyse des relevés de galaxies s’appuyant sur une modélisation dynamique permettent d’obtenir une carte tridimensionnelle de la matière dans l’univers : bleu pour les régions peu denses et rouge pour très denses. Les vides cosmiques sont en blanc.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Guilhem Lavaux</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Par ailleurs, les relevés de galaxies deviennent toujours plus grands. Un nouvel article vient tout juste d’être <a href="http://arxiv.org/abs/2007.07895">soumis</a> pour évaluation par les pairs, et, comme c’est habituel en astrophysique, mis à disposition de la communauté sur un serveur ouvert de prépublication. Cette étude démontre que les vides cosmiques permettent des contraintes meilleures sur le contenu matériel de l’univers que les techniques utilisées classiquement, en utilisant les <em>mêmes</em> données. Aucune déviation significative n’a été relevée par rapport à la relativité générale ou aux paramètres cosmologiques tels que contraints par la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Planck_(t%C3%A9lescope_spatial)">mission Planck</a>.</p>
<p>Le prochain défi majeur proviendra de l’exploitation des données de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Euclid_(t%C3%A9lescope_spatial)">mission Euclid</a> qui devraient permettre d’obtenir des contraintes inégalées sur l’énergie noire.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
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</figure>
<p><em>Cet article fait partie de la série « Les belles histoires de la science ouverte » publiée avec le soutien du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Pour en savoir plus, visitez le site <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/">Ouvrirlascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/146235/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Guilhem Lavaux a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche, du CNRS et de la région Île-de-France. Il est membre de la Société Francaise d'Astronomie et d'Astrophysique (SF2A), de l'Union Astronomique Internationale (IAU/UAI), du consortium Euclid.</span></em></p>
Plongez dans le vide cosmique, source d’information inestimable sur l’expansion de l’univers.
Guilhem Lavaux, Chargé de recherche à l'IAP, labellisé Domaine d’Intérêt Majeur par la Région Île-de-France, Institut d'Astrophysique de Paris
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/137421
2020-05-26T21:53:10Z
2020-05-26T21:53:10Z
Vers une simulation de l’Univers sur un téléphone portable
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/336793/original/file-20200521-102678-1v1yutg.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C101%2C2815%2C1156&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une simulation cosmologique, montrant la structure filamentaire de la matière noire dans la toile cosmique.</span> <span class="attribution"><span class="source">F. Leclercq (Imperial College), G. Lavaux (IAP)</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Il y a environ deux mille milliards de galaxies <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/espace/univers/dix-fois-plus-de-galaxies-dans-l-univers-observable_107518">observables dans l’Univers</a>, et l’évolution de chacune est sensible à la présence de toutes les autres. Face à un tel gigantisme, comment comprendre et calculer l’évolution de l’Univers ?</p>
<p>Outre les étoiles et galaxies, ces objets que nous pouvons voir, l’Univers est rempli d’objets invisibles à l’œil nu, par exemple les <a href="https://www.pourlascience.fr/sd/astrophysique/pulsars-vers-des-horloges-astronomiques-plus-precises-10608.php">pulsars</a> qui émettent dans des domaines de fréquences invisibles. Il y a aussi des objets qui, par définition, n’émettent et n’absorbent pas de lumière, et qu’il est donc difficile d’observer – ce sont la matière noire et l’énergie noire. Ces objets visibles et invisibles créent des amas dans l’espace qui évoluent avec le temps, formant une gigantesque structure filamentaire appelée la <a href="https://www.pourlascience.fr/sd/astronomie/cartographier-lunivers-6366.php">« toile cosmique »</a>.</p>
<h2>Les défis physiques</h2>
<p>Relier notre connaissance de la physique – notamment les équations qui gouvernent l’évolution de la matière noire et de l’énergie noire – aux données sur les positions et les spectres lumineux des galaxies requiert des ressources en calcul considérables. Les observations les plus récentes couvrent des volumes absolument gigantesques : de l’ordre de celui d’un cube de 12 milliards d’années-lumière de côté. Comme la distance typique entre deux galaxies est seulement de quelques millions d’années-lumière, cela nous conduit à simuler environ mille milliards de galaxies pour reproduire les observations. Dans les dix prochaines années, la mission <a href="https://www.euclid-ec.org/">Euclid</a> et l’observatoire <a href="https://www.lsst.org/">Vera Rubin</a> permettront d’obtenir des informations sur plusieurs milliards de galaxies.</p>
<p>Pour pouvoir suivre la physique de la formation de ces galaxies, la résolution spatiale devrait être de l’ordre d’une dizaine d’années-lumière. Idéalement, les simulations devraient donc avoir un « rapport d’échelle », proche d’un milliard – c’est-à-dire que la plus grande échelle physique du problème est un milliard de fois plus grande que la plus petite échelle physique du problème. Aucun ordinateur existant ou même en construction ne peut atteindre un tel but.</p>
<p>En pratique, il faut donc avoir recours à des techniques approximatives, consistant à « peupler » les simulations avec des galaxies fictives mais réalistes. Cette approximation est d’autant plus justifiée que le calcul de l’évolution des composantes d’une galaxie, par exemple les étoiles et le gaz interstellaire, met en jeu des phénomènes très rapide par rapport à l’évolution globale du cosmos. L’utilisation de galaxies fictives requiert malgré tout de simuler la dynamique de l’univers avec un rapport d’échelle de l’ordre de 4 000, ce que les super-calculateurs actuels permettent tout juste d’effectuer.</p>
<h2>Les développements algorithmiques et matériels ont permis d’améliorer drastiquement les simulations cosmologiques</h2>
<p>Simuler la dynamique gravitationnelle de l’Univers est ce que les physiciens appellent un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Probl%C3%A8me_%C3%A0_N_corps"><em>problème à 𝑁 corps</em></a>. Bien que les équations à résoudre soient toutes analytiques comme dans la plupart des cas en physique, les solutions n’ont, elles, pas d’expression simple et nécessitent des techniques numériques dès que 𝑁 est supérieur à quatre. La solution numérique directe consiste à calculer explicitement les interactions entre toutes les paires de « particules », appelées aussi « corps » (d’où le nom de problème à 𝑁 corps).</p>
<p>Pour résoudre ce problème, le calcul des forces « par sommation directe » était privilégié en cosmologie au début du développement des simulations numériques, dans les années 1970. Avec cette méthode, le nombre d’opérations nécessaires augmente comme 𝑁<sup>2</sup>, le carré du nombre de corps, ce qui contrebalance les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Acc%C3%A9l%C3%A9ration_mat%C3%A9rielle">progrès matériels</a>, comme l’utilisation de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Processeur_graphique">cartes graphiques</a> pour le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Parall%C3%A9lisme_(informatique)">calcul parallèle</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/336311/original/file-20200520-152320-sv3ydp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/336311/original/file-20200520-152320-sv3ydp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/336311/original/file-20200520-152320-sv3ydp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/336311/original/file-20200520-152320-sv3ydp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/336311/original/file-20200520-152320-sv3ydp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/336311/original/file-20200520-152320-sv3ydp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/336311/original/file-20200520-152320-sv3ydp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Figure 1 : Évolution du nombre de particules utilisé dans les simulations à 𝑁 corps en fonction de l’année de publication. Les différents symboles et couleurs correspondent à différentes méthodes utilisées pour résoudre la dynamique gravitationnelle (sommation directe en vert, algorithmes avancés en orange). Pour comparaison, la loi de Moore concernant la puissance des calculateurs est représentée par la ligne pointillée noire.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Afin de réduire le coût numérique des simulations, l’essentiel du travail en cosmologie numérique depuis 1980 a consisté à améliorer les algorithmes. Le but recherché était de s’affranchir du calcul explicite de toutes les interactions gravitationnelles entre particules, notamment pour les paires qui sont les plus éloignées dans le volume à simuler. Ces développements algorithmiques ont permis une augmentation gigantesque du nombre de particules utilisées dans les simulations cosmologiques, en orange sur la figure 1. Et de fait, depuis 1990, l’augmentation des capacités de calcul en cosmologie a été <em>plus rapide</em> que la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_de_Moore">loi de Moore</a>, les améliorations logicielles s’ajoutant à l’augmentation de la performance des ordinateurs !</p>
<h2>La limite actuelle : la lenteur des communications entre processeurs</h2>
<p>En 2020, avec les <a href="https://www.pourlascience.fr/sd/informatique/calculer-plus-vite-plus-haut-plus-fort-10020.php">architectures des super-calculateurs actuels</a>, les calculs ne sont plus limités comme avant par le nombre d’opérations que les processeurs peuvent effectuer en un temps donné, mais par la lenteur intrinsèque des communications entre les différents processeurs impliqués dans les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Parall%C3%A9lisme_(informatique)">calculs dits « parallèles »</a>.</p>
<p>Dans ces techniques de calcul, un grand nombre de processeurs travaillent ensemble et de manière synchrone pour réaliser un calcul beaucoup trop complexe pour être réalisé sur un ordinateur classique. Le plafonnement des performances dû aux latences dans les communications entre processeurs a été théorisé dès 1967 dans la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_d%27Amdahl">« loi d’Amdahl »</a>, du nom de l’informaticien qui l’a formulée. L’amélioration du « parallélisme » des algorithmes représente maintenant le principal défi à relever pour les simulations cosmologiques.</p>
<h2>L’approche sCOLA : mieux diviser pour régner</h2>
<p>Revenons au problème physique à résoudre : il s’agit de simuler la dynamique gravitationnelle de l’Univers à différentes échelles. À « petite » échelle, il y a de nombreux objets qui interagissent entre eux : les simulations numériques sont indispensables. Aux « grandes » échelles spatiales, c’est-à-dire si on regarde la figure 2 de très loin, il ne se passe pas grand-chose lors de l’évolution (si ce n’est une augmentation linéaire de l’amplitude des inhomogénéités). Malgré cela, avec un algorithme de simulation traditionnelle, l’effet gravitationnel de toutes les particules les unes sur les autres doit être calculé, même si elles sont très éloignées. C’est coûteux et presque inutile, car l’essentiel de l’évolution gravitationnelle est correctement décrite par des équations simples, dont la résolution peut se faire sans ordinateur.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/336312/original/file-20200520-152349-1nd84in.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/336312/original/file-20200520-152349-1nd84in.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/336312/original/file-20200520-152349-1nd84in.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/336312/original/file-20200520-152349-1nd84in.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/336312/original/file-20200520-152349-1nd84in.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=384&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/336312/original/file-20200520-152349-1nd84in.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=384&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/336312/original/file-20200520-152349-1nd84in.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=384&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Figure 2 : Comparaison entre une simulation traditionnelle (à gauche) et une simulation utilisant notre nouvel algorithme (à droite). Dans notre approche, le volume de la simulation est une mosaïque constituée de « carreaux » calculés indépendamment et dont les bords sont représentés par les lignes pointillées.</span>
<span class="attribution"><span class="source">F. Leclercq</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Afin de minimiser les calculs numériques inutiles, nous utilisons un algorithme de simulation hybride (<a href="https://arxiv.org/abs/1502.07751">sCOLA</a>) : analytique aux grandes échelles et numérique aux petites échelles, où les interactions à 𝑁 corps sont importantes. L’idée sous-jacente est habituelle en physique, il s’agit d’un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9f%C3%A9rentiel_galil%C3%A9en#Changement_de_r%C3%A9f%C3%A9rentiel_et_transformation_de_Galil%C3%A9e">« changement de référentiel »</a> : la dynamique à grande échelle est prise en compte par le nouveau référentiel, tandis que la dynamique à petite échelle est confiée à l’ordinateur qui la résout par des calculs classiques du champ de gravité.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/336314/original/file-20200520-152327-tip3p8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/336314/original/file-20200520-152327-tip3p8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/336314/original/file-20200520-152327-tip3p8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=797&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/336314/original/file-20200520-152327-tip3p8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=797&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/336314/original/file-20200520-152327-tip3p8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=797&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/336314/original/file-20200520-152327-tip3p8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1002&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/336314/original/file-20200520-152327-tip3p8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1002&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/336314/original/file-20200520-152327-tip3p8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1002&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Un calculateur à base de cartes graphiques (GPUs) comme on peut en trouver à l’Institut d’Astrophysique de Paris. Il ne représente qu’un centième du coût d’un supercalculateur national.</span>
<span class="attribution"><span class="source">G. Lavaux</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Par ailleurs, ce concept permet de « diviser pour mieux régner », en simulant des sous-volumes de taille réduite de manière indépendante, sans communication avec les sous-volumes voisins. <a href="https://arxiv.org/abs/2003.04925">Notre approche</a> permet donc de représenter l’Univers comme une grande mosaïque : chacun des « carreaux » est une petite simulation qu’un ordinateur modeste peut résoudre, et l’assemblage de tous les carreaux donne le tableau d’ensemble. C’est la première fois que des simulations cosmologiques sont parfaitement parallèles, et nous avons ainsi obtenu des simulations de taille comparable à celle de l’Univers observable, à une résolution satisfaisante, tout en restant sur un centre de calcul de laboratoire.</p>
<h2>De nouveaux calculateurs pour simuler l’Univers</h2>
<p>Ce nouvel algorithme permet d’envisager de nouvelles manières d’exploiter les ordinateurs : chacun des « carreaux » pourrait être suffisamment petit pour tenir dans la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9moire_cache">« mémoire cache »</a> de nos calculateurs, la partie de la mémoire à laquelle les processeurs peuvent accéder le plus rapidement, ce qui permettrait d’augmenter la vitesse de calcul et de simuler le volume entier de l’Univers extrêmement rapidement, ou à une résolution encore jamais atteinte.</p>
<p>On peut finalement imaginer que chacune des simulations correspondant à un « carreau » soit suffisamment petite pour être exécutée sur un téléphone portable, permettant de réaliser du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Calcul_distribu%C3%A9">calcul distribué</a> collaboratif comme avec la plate-forme <a href="https://www.cosmologyathome.org/">Cosmology@Home</a>.</p>
<hr>
<p><em>La Région Ile-de-France finance des projets de recherche relevant de Domaines d’intérêt majeur et s’engage à travers le dispositif Paris Région Phd pour le développement du doctorat et de la formation par la recherche en cofinançant 100 contrats doctoraux d’ici 2022. Pour en savoir plus, visitez <a href="https://www.iledefrance.fr/des-aides-la-recherche-pour-13-domaines-dinteret-majeur">iledefrance.fr/education-recherche</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/137421/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Florent Leclercq a reçu des financements d'Imperial College London. Il est membre de la Royal Astronomical Society (RAS), de la Société Française d'Astronomie et d'Astrophysique (SF2A) et du consortium Euclid.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Guilhem Lavaux a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche, du CNRS et de la région Île-de-France. Il est membre de la Société Francaise d'Astronomie et d'Astrophysique (SF2A), de l'Union Astronomique Internationale (IAU/UAI), du consortium Euclid.</span></em></p>
Les structures visibles et invisibles de l’Univers forment la « toile cosmique », une gigantesque structure filamentaire. Les dernières avancées pour calculer et comprendre l’évolution de ce grand réseau.
Florent Leclercq, Imperial College Research Fellow, Imperial College London
Guilhem Lavaux, Chargé de recherche à l'IAP, labellisé Domaine d’Intérêt Majeur par la Région Île-de-France, Institut d'Astrophysique de Paris
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/136062
2020-05-06T18:46:34Z
2020-05-06T18:46:34Z
Les deux erreurs d’Einstein
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/329419/original/file-20200421-82641-7dllrt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=166%2C714%2C2694%2C1603&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La gravure sur bois dite "de Flammarion" est anonyme, publiée en 1888, dans le livre de Camille Flammarion « L'Atmosphère : météorologie populaire ». Dans le livre de Flammarion, l'image comporte une légende : « Un missionnaire du Moyen Âge raconte qu'il avait trouvé le point où le ciel et la Terre se touchent […] ». En regard, le texte suivant accompagne l'image : « Qu'y a-t-il, alors, dans ce ciel bleu, qui existe certainement, et qui nous voile les étoiles durant le jour ? ». </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gravure_sur_bois_de_Flammarion#/media/Fichier:Flammarion.jpg">Wikipedia</a></span></figcaption></figure><p>La recherche scientifique repose sur la correspondance entre la réalité de la nature – qui est appréhendée par des observations – et une représentation de cette réalité – formulée par une théorie en langage mathématique. Si toutes les conséquences qui découlent de la théorie sont expérimentalement vérifiées, elle est validée. Cette démarche suivie depuis près de quatre siècles a construit un ensemble cohérent de connaissances. Mais ces avancées se réalisent grâce à l’intelligence humaine, qui garde malgré tout ses croyances, voire ses préjugés. Ceci peut affecter la marche de la science même parmi les plus grands savants.</p>
<h2>La première erreur</h2>
<p>Dans son grand œuvre que représente la relativité générale, Einstein écrit l’équation décrivant l’<a href="https://astronomia.fr/6eme_partie/cosmologie.php">évolution de l’univers</a> en fonction du temps. La solution de cette équation indique un Univers instable : l’Univers ne serait pas une grosse sphère à volume constant sur laquelle glissent les étoiles, comme on le croyait alors.</p>
<p>Au début du XX<sup>e</sup> siècle, tous vivaient avec l’idée bien ancrée d’un Univers statique où le passage des astres se répète inlassablement. C’est une probable conséquence de l’enseignement d’Aristote : le firmament est immuable, au contraire de la Terre périssable. Une anomalie historique en découla : alors qu’en l’an 1054, les Chinois <a href="https://blogs.futura-sciences.com/luminet/2015/10/12/la-nebuleuse-du-crabe-hier-et-aujourdhui/">notèrent l’apparition d’une nouvelle lumière dans le ciel</a>, aucun document européen ne la mentionne. Et pourtant elle se voyait en plein jour et dura plusieurs semaines. C’était une <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Supernova">supernova</a>, c’est-à-dire la fin d’une étoile, dont il reste la nébuleuse du Crabe, toujours visible. La pensée prédominante en Europe empêchait d’accepter un phénomène si contraire à un ciel immuable. Une supernova est un événement très rare, on en observe un par siècle à l’œil nu la dernière remontant à 1987 – Aristote avait <em>presque</em> raison de penser le ciel immuable, à l’échelle d’une vie humaine du moins.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/332650/original/file-20200505-83730-p9trq1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/332650/original/file-20200505-83730-p9trq1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/332650/original/file-20200505-83730-p9trq1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=139&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/332650/original/file-20200505-83730-p9trq1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=139&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/332650/original/file-20200505-83730-p9trq1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=139&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/332650/original/file-20200505-83730-p9trq1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=175&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/332650/original/file-20200505-83730-p9trq1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=175&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/332650/original/file-20200505-83730-p9trq1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=175&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La nébuleuse du Crabe, observée aujourd’hui dans différentes longueurs d’onde, n’a pas été consignée par les Européens lors de son apparition en 1054.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Crab_Nebula_in_Multiple_Wavelengths.png">Torres997/Wikimedia, image radio : NRAO/AUI et M. Bietenholz, J.M. Uson, T.J. Cornwell ; infrarouge : NASA/JPL-Caltech/R. Gehrz, University of Minnesota ; visible : NASA, ESA, J. Hester et A. Loll, Arizona State University ; ultraviolet : NASA/Swift/E. Hoversten, PSU ; rayons X : NASA/CXC/SAO/F.Seward et collaborateurs ; rayons gamma : NASA/DOE/Fermi LAT/R. Buehler.</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour rester en accord avec un Univers statique, Einstein introduisit dans ses équations une <a href="https://www.pourlascience.fr/sd/cosmologie/indispensable-constante-cosmologique-18617.php"><em>constante cosmologique</em></a> qui gelait l’état de l’Univers. Manque d’intuition : quand Hubble en 1929 démontra que l’Univers grossissait, Einstein <a href="https://editions.flammarion.com/Catalogue/champs-sciences/einstein">admit</a> avoir fait « sa plus grosse erreur ».</p>
<h2>Le hasard quantique</h2>
<p>En parallèle avec la relativité se développa la mécanique quantique, qui décrit la physique de l’infiniment petit. Einstein y contribua fortement en interprétant dès 1905 l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_photo%C3%A9lectrique">effet photoélectrique</a> comme étant une collision entre électrons et photons, c’est-à-dire d’infinitésimaux grains d’énergie. En d’autres termes, la lumière, que l’on décrit traditionnellement comme une onde, se comporte comme un flux de particules. C’est cette avancée, et non la théorie de la relativité, qui vaudra à Einstein le Prix Nobel en 1921.</p>
<p>Mais malgré cette <a href="http://culturesciencesphysique.ens-lyon.fr/ressource/conference-udppc-Einstein-lumiere-Jech.xml">contribution essentielle</a>, il s’obstina à refuser la leçon majeure de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9canique_quantique">mécanique quantique</a> : le monde des particules ne se soumet pas au <a href="https://la-philosophie.com/determinisme">déterminisme</a> strict de la physique classique. Le monde quantique est probabiliste : on ne sait que prédire une probabilité de réalisation parmi un ensemble de possibles.</p>
<p>Dans l’aveuglement d’Eintein, on peut à nouveau invoquer l’influence de la philosophie grecque : Platon enseignait que la pensée devait rester idéale, libre des contingences de la réalité. Une noble idée mais qui ne suit pas les préceptes de la science - une connaissance demande une concordance parfaite avec tous les faits prédits tandis qu'une croyance se fonde sur une vraisemblance, fruit d’observations partielles. Einstein lui-même était convaincu que la pensée pure est capable de saisir tout le réel, or le hasard quantique contredit cette hypothèse.</p>
<p>En pratique, ce hasard n’est pas quelconque, il est contraint par les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Principe_d%27incertitude">relations d’incertitudes de Heisenberg</a>, qui imposent un déterminisme collectif aux populations de particules : un électron est libre individuellement puisqu’on ne sait pas calculer sa trajectoire à la sortie d’un trou, mais un million d’électrons dessinent une figure de diffraction montrant des franges sombres et lumineuses qu’on sait calculer.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/332652/original/file-20200505-83764-h8qfu5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/332652/original/file-20200505-83764-h8qfu5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=441&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/332652/original/file-20200505-83764-h8qfu5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=441&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/332652/original/file-20200505-83764-h8qfu5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=441&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/332652/original/file-20200505-83764-h8qfu5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=554&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/332652/original/file-20200505-83764-h8qfu5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=554&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/332652/original/file-20200505-83764-h8qfu5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=554&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Résultat d’une expérience d’interférences dites de « Young » : le motif se forme au fur et à mesure de l’arrivée des électrons : 8 électrons sur la photo a, 270 sur la photo b, 2000 sur la photo c, et 60 000 sur la photo d, pour finalement former des franges verticales appelées franges d’interférence.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/7/79/Doubleslitexperiment_results_Tanamura_1.gif">Dr Tonomura/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Einstein ne voulait pas admettre cet indéterminisme élémentaire, ce qu’il résuma <a href="https://editions.flammarion.com/Catalogue/champs-sciences/einstein">dans un provocant verdict</a> : « Je refuse de croire en un Dieu qui joue aux dés avec le monde. » Il invoqua l’existence de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Variable_cach%C3%A9e">variables cachées</a>, c’est-à-dire des grandeurs encore à découvrir au-delà des masse, charge et spin dont les physiciens se servent pour donner une description des particules. Mais l’expérience ne lui donna pas raison. Il faut accepter l’existence d’une réalité qui transcende notre compréhension : on ne peut pas tout savoir du monde infiniment petit.</p>
<h2>Les caprices fortuits de l’imagination</h2>
<p>Dans le processus de la démarche scientifique, il demeure une étape qui n’est pas totalement objective, c’est celle qui amène à la conceptualisation d’une théorie et Einstein avec ses <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Exp%C3%A9rience_de_pens%C3%A9e">expériences de pensée</a> en donne un illustre exemple. Lui-même <a href="https://editions.flammarion.com/Catalogue/champs-sciences/einstein">déclara</a> : « L’imagination est plus importante que le savoir. » En effet, un physicien doit, à partir d’observations disparates, imaginer une loi sous-jacente. Parfois plusieurs modèles théoriques sont proposés parmi lesquelles il faut choisir, c’est seulement à cette étape que la logique reprend le pouvoir.</p>
<blockquote>
<p>« L’intelligence n’a rien à trouver, elle a à déblayer. Elle n’est bonne qu’aux tâches serviles. » (Simone Weil, « La pesanteur et la grâce »)</p>
</blockquote>
<p>Ainsi le progrès des idées est tributaire de ce qu’on appelle l’intuition. C’est une sorte de saut dans la connaissance qui dépasse la pure rationalité. La frontière entre objectif et subjectif n’est plus complètement étanche. Les pensées prennent leur source au niveau des neurones sous l’effet d’impulsions électromagnétiques et parmi elles certaines sont particulièrement fécondes comme si un court-circuit naissait entre cellules, le hasard est à la manœuvre.</p>
<p>Mais ce ne sont pas les mêmes intuitions, ces « fleurs » de l’esprit humain, qui apparaissent dans le cerveau d’Einstein et dans celui de Proust. L’un engendrera E=mc<sup>2</sup> et l’autre une admirable métaphore. L’intuition s’invite aléatoirement mais ce hasard est contraint par l’expérience, la culture, le savoir de chacun.</p>
<h2>Les bénéfices du hasard</h2>
<p>Qu’il y ait une réalité au-delà de notre seule intelligence ne devrait pas nous choquer. Sans hasard, nous sommes menés par nos instincts, nos habitudes, par tout ce qui nous rend prédictibles. Notre action est confinée presque exclusivement dans ce premier niveau de réalité avec ses soucis ordinaires et ses occupations obligatoires. Mais il existe un autre niveau, celui dont le hasard apparent est la marque.</p>
<blockquote>
<p>« Jamais aucun effort administratif ou scolaire ne remplacera les miracles du hasard auquel on doit les grands hommes. » (Honoré de Balzac, « Le cousin Pons »)</p>
</blockquote>
<p>Einstein donne l’exemple d’un esprit inventif et libre, et pourtant il garde ses préjugés. Sa « première erreur » peut se résumer en « Je refuse de croire en un commencement de l’Univers ». Pourtant, l’expérience lui donna tort. Son verdict sur Dieu jouant aux dés signifie : « Je refuse de croire au hasard ». Pourtant la mécanique quantique implique un hasard obligatoire. On peut d’ailleurs se demander s’il croirait en Dieu dans un monde sans hasard, ce qui ôterait beaucoup à notre liberté puisqu’alors nous serions confinés dans un déterminisme absolu. Einstein s’obstine dans son refus car, pour lui, le cerveau humain doit être capable de savoir ce qu’est l’Univers. Beaucoup plus modestement, Heisenberg lui répond : la physique se limite à décrire comment la Nature réagit dans des circonstances définies.</p>
<p>La théorie quantique démontre que la compréhension totale ne nous est pas permise. En retour elle nous offre le hasard avec ses frustrations, ses dangers mais aussi ses bienfaits.</p>
<blockquote>
<p>« L’homme n’échappe aux lois de ce monde que la durée d’un éclair. Instants d’arrêt, de contemplation, d’intuition pure… c’est par ces instants qu’il est capable de surnaturel. » (Simone Weil, « La pesanteur et la grâce »)</p>
</blockquote>
<p>Le légendaire physicien est l’exemple de l’être imaginatif par excellence. Son refus du hasard est donc un paradoxe puisque c’est lui qui rend possible l’intuition, amorce du processus de création tant dans les sciences que dans les arts.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/136062/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François Vannucci ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Albert Einstein, exemple par excellence du génie visionnaire, s’est tout de même égaré par deux fois à cause de convictions qui sortaient peut-être du champ scientifique.
François Vannucci, Professeur émérite, chercheur en physique des particules, spécialiste des neutrinos, Université Paris Cité
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/127556
2019-12-01T19:30:44Z
2019-12-01T19:30:44Z
L’évolution : un principe universel
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/304098/original/file-20191127-112526-tjc7ml.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">chuttersnap eH ftJYhaTY unsplash</span> </figcaption></figure><p>De tout temps, des modifications ont été observées dans le milieu naturel. Pour <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Aristote">Aristote</a>, il s’agissait d’une caractéristique du monde sublunaire, c’est-à-dire du monde terrestre changeant et constamment soumis à la corruption et à l’altération. Mais cette particularité n’en était pas moins sérieusement limitée par l’idéologie du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fixisme">fixisme</a>, lequel, s’appuyant sur les textes sacrés, postulait en effet l’invariance absolue des espèces vivantes et du monde céleste, ou supralunaire – l’ensemble étant supposé immuable.</p>
<h2>Un dogme fixiste longtemps maintenu</h2>
<p>Il faudra attendre le tournant du XVIII<sup>e</sup> siècle, avec les essais de classification des invertébrés du naturaliste français <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean%E2%80%91Baptiste_de_Lamarck">Jean‑Baptiste de Lamarck</a> et sa théorie du transformisme, pour que surgissent les premiers doutes sur l’absolue invariabilité des espèces vivantes. Et le dogme fixiste du vivant ne sera finalement réfuté de manière irrémédiable qu’au siècle suivant, avec les travaux du naturaliste britannique <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Darwin">Charles Darwin</a>.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/304305/original/file-20191128-178062-ed1rmh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/304305/original/file-20191128-178062-ed1rmh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=823&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/304305/original/file-20191128-178062-ed1rmh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=823&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/304305/original/file-20191128-178062-ed1rmh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=823&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/304305/original/file-20191128-178062-ed1rmh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1034&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/304305/original/file-20191128-178062-ed1rmh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1034&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/304305/original/file-20191128-178062-ed1rmh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1034&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Charles Darwin en 1881.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Charles_Darwin_1880.jpg">Elliott et Fry</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Selon sa théorie, les espèces animales et végétales constituent une longue chaîne évolutive issue d’un ancêtre commun, aujourd’hui désigné sous l’acronyme <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dernier_anc%C3%AAtre_commun_universel">LUCA</a> (Last Universal Common Ancestor). Ces espèces se déduisent les unes des autres par des mécanismes de diversification évolutive. Des mécanismes de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sp%C3%A9ciation">spéciation</a> dont Darwin et ses successeurs parvinrent à expliciter les termes, et qui ont mis un terme à l’idéologie fixiste pour le monde des espèces vivantes. Restait à se préoccuper du monde céleste. Et dans ce domaine, ce sont les résultats du physicien allemand/suisse/américain <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Einstein">Albert Einstein</a> qui ont été décisifs.</p>
<p>Par ses recherches, l’inventeur de la relativité générale a permis d’établir que l’univers est un objet physique qui, de ce fait, est régi par les lois des objets matériels, celles de la mécanique relativiste et de la physique quantique. Peu après, en observant le décalage de la lumière émise par des galaxies lointaines, et en prouvant qu’elles s’éloignaient les unes des autres, l’astronome américain <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Edwin_Hubble">Edwin Hubble</a> a confirmé en 1929 l’expansion de l’univers. L’univers semblait donc posséder une histoire et une origine. Ce que vint confirmer en 1965 la découverte du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fond_diffus_cosmologique">fond diffus cosmologique</a> par les physiciens américains Arno Penzias et Robert Woodrow Wilson. Découverte marquant la fin du fixisme du monde supralunaire et du dogme religieux de sa transcendance.</p>
<h2>Un vaste spectre temporel</h2>
<p><a href="https://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=58852">Ensemble</a>, les travaux de Charles Darwin et d’Albert Einstein prouvent donc l’inexactitude du dogme fixiste aristotélicien. Les développements scientifiques ultérieurs, et les multiples techniques d’analyses, n’ont fait que confirmer le caractère évolutif des différents phénomènes naturels observables. La convergence de tous ces résultats conduit à supposer qu’il existerait un principe fondamental d’évolution de l’univers, inhérent au temps : le premier caractérise les transformations, le second les déplacements. Il s’agirait là d’une propriété générale de l’univers, s’appliquant à son ensemble comme à ses détails, et qui serait propre aux structures matérielles quelle qu’en soient les formes, inerte ou vivante.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/304307/original/file-20191128-178135-1d7bjah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/304307/original/file-20191128-178135-1d7bjah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1002&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/304307/original/file-20191128-178135-1d7bjah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1002&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/304307/original/file-20191128-178135-1d7bjah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1002&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/304307/original/file-20191128-178135-1d7bjah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1259&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/304307/original/file-20191128-178135-1d7bjah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1259&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/304307/original/file-20191128-178135-1d7bjah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1259&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Albert Einstein.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Bundesarchiv_Bild_183-19000-1918,_Albert_Einstein.jpg">Bundesarchiv, Bild 183-19000-1918</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les applications de ce principe étant multifactorielles, leurs mises en évidence concernent chacune des composantes des phénomènes étudiés, compte tenu de l’énormité du spectre temporel des effets possibles. Ainsi, des milliards d’années sont nécessaires pour des transformations galactiques ou géologiques. Et à l’opposé, certains phénomènes microscopiques sont quasi instantanés. Voilà pourquoi c’est d’abord le temps qui a retenu l’attention. Ce qui n’est pas sans conséquence.</p>
<h2>Une sélection devenue technologique</h2>
<p>Si l’homme ne peut pas agir directement sur les effets de ce principe fondamental d’évolution, il a néanmoins trouvé des moyens d’agir indirectement. À titre d’illustration, force est de constater que nous sommes parvenus à créer un monde que gouverne de plus en plus l’information à travers les ordinateurs, mais aussi la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cybern%C3%A9tique">cybernétique</a> et la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Robotique">robotique</a>, ou encore l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Intelligence_artificielle">intelligence artificielle</a> dont on annonce pour bientôt une puissance décuplée par la révolution de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Calculateur_quantique">ordinateur quantique</a>. Et dans un tout autre domaine, on notera que le considérable accroissement des performances et la diversification des moyens de transport vont de pair avec une contraction géographique de la planète, mais aussi avec l’acquisition d’une dimension spatiale aux potentialités imprévisibles.</p>
<p>Ces exemples, et d’autres, montrent qu’un nouveau type de sélection interfère avec le principe d’évolution. Devenue technologique, elle a changé de niveau, avec des conséquences multiples, tant économiques que sociologiques et politiques, c’est-à-dire culturelles. La somme de tous ces effets pourrait conduire à des transitions porteuses de mutations pour nos civilisations, aux impacts aussi incertains qu’imprévisibles – et pas nécessairement favorables aux développements futurs de sociétés devenues technologiquement hypertéliques. Car l’évolution, par essence, a nécessairement d’autres répercussions.</p>
<h2>Il ne peut y avoir d’évolution orientée</h2>
<p>Comme en attestent les travaux de Charles Darwin et de ses successeurs, l’évolution obéit à la fois au hasard et aux contingences. Ce fait est confirmé par la place qu’occupent les phénomènes quanto-relativistes tels que les nucléosynthèses stellaires ou les transformations corpusculaires et le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_du_chaos">chaos</a> non déterministe créateur de nouveauté (effet papillon) dans le fonctionnement de l’univers. Et il montre bien qu’il ne saurait y avoir d’évolution orientée. Or il en résulte qu’à long terme, le devenir de toute structure matérielle, qu’il s’agisse de l’univers matériel ou du monde vivant, ne peut pas être prédit : il nous faut renoncer à toute finalité, toute téléologie.</p>
<p>Notons encore que l’évolution, en tant que process us<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Thermodynamique">thermodynamique</a>, n’a aucun rapport avec la notion de progrès – lequel est un concept humain. Même si au XVIII<sup>e</sup> siècle, les philosophes des Lumières au premier chef desquels le philosophe, homme politique et éditeur français <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Nicolas_de_Condorcet">Nicolas de Condorcet</a>, ont malheureusement <a href="https://gallica.bnf.fr/essentiels/condorcet/esquisse-tableau-historique-progres-esprit-humain">confondu</a> les deux.</p>
<p>De fait, étant inhérent au temps, le principe d’évolution en définit le sens d’écoulement, et caractérise ainsi son irréversibilité – c’est-à-dire la création de désordre que mesure l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Entropie">entropie</a>, concept de base de la thermodynamique. Ainsi, il n’y aurait pas d’évolution sans irréversibilité. Or celle-ci modifie l’entropie, et des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_dissipatif">structures dissipatives</a>. D’où des déséquilibres thermodynamiques, qui sont à l’origine de processus d’auto-organisation : voilà pourquoi l’évolution de l’univers se traduit par une complexification croissante.</p>
<h2>Dans le désordre, un ordre s’accroissant</h2>
<p>La temporalisation effective de l’entropie étant liée à la dissipation d’énergie, il y a création d’information. Mais l’irréversibilité liée au principe d’évolution ne contraint pas le paradoxe de la vie : alors que, selon l’entropie, le désordre général ne fait que croître, le phénomène vivant, lui, accroît son ordre propre. Cet accroissement se fait cependant au prix d’une augmentation du désordre général, processus qui exige un échange de matière et d’énergie, mais aussi une hausse de la quantité d’information créée. In fine, comme l’ont montré au début du XX<sup>e</sup> siècle les mathématiciens <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_James_Lotka">Alfred James Lotka</a> et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Vito_Volterra">Vito Volterra</a>, le processus de sélection naturelle s’apparente à une conséquence des lois de la thermodynamique, et donc du principe d’évolution.</p>
<p>Au niveau terrestre, ce principe est consubstantiel à l’humanité, à travers son histoire. Mais ses effets dépendent de l’échelle temporelle considérée. Et il se trouve que sur le plan historique, ils ne sont pas indépendants des acquis et des savoirs d’une population concernée. On peut conclure que sans principe d’évolution, il n’y aurait pas d’irréversibilité, donc pas de vie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/127556/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marceau Felden ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Mises bout à bout, les recherches de Charles Darwin et d’Albert Einstein ont mis un terme à un dogme vieux de deux mille ans : celui de l’invariance absolue des mondes vivant et céleste.
Marceau Felden, Physicien, professeur honoraire de l’Université de Paris XI, Université Paris-Saclay
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2019-10-10T15:35:47Z
2019-10-10T15:35:47Z
Prix Nobel de physique : le Canadien James Peebles, est-il le plus grand cosmologiste vivant ?
<p>Au cours de la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ISKY4T-38cI">conférence de presse</a> dans laquelle il a été révélé <a href="https://www.nobelprize.org/prizes/physics/2019/summary/">comme l'un des lauréats du prix Nobel de physique 2019</a>, James (Jim) Peebles a été invité à indiquer une seule découverte ou percée de sa longue carrière qui mettrait le prix en contexte. Peebles a alors répondu : « C'est le travail d'une vie. »</p>
<p>C'est une description parfaite de sa contribution à notre compréhension de l'univers. Sa carrière est si influente qu'il est largement reconnu comme l'un des principaux architectes du domaine de la cosmologie physique, l'étude de l'origine, de la structure et de l'évolution de l'univers. Je ne suis pas le seul à considérer Peebles comme le plus grand cosmologiste vivant.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-prix-nobel-de-physique-2019-recompense-une-nouvelle-vision-de-lunivers-124925">Le Prix Nobel de physique 2019 récompense une nouvelle vision de l’univers</a>
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<p>La carrière de chercheur de Peebles a débuté au début des années 1960. Ce scientifique d'origine canadienne a obtenu son baccalauréat à l'Université du Manitoba, puis son doctorat avec le groupe de Robert Dicke à l'Université Princeton, au New Jersey, en 1962. Il y est resté depuis. M. Peebles détient maintenant le titre de professeur de sciences Albert Einstein à Princeton. </p>
<p>Dans les années 1960, le groupe de Dicke travaillait sur des prédictions théoriques - et les conséquences observationnelles correspondantes - pour l'état de l'univers « primordial », la phase qui suit immédiatement le Big Bang pendant quelques centaines de milliers d'années. À cette époque, la théorie du Big Bang pour la formation de l'univers n'était pas encore pleinement acceptée, malgré les preuves d'observation que les galaxies s'éloignaient les unes des autres.</p>
<p>Le groupe de Dicke travaillait sur la théorie que si l'univers était en expansion, alors il devait être beaucoup plus petit, plus chaud et plus dense dans le passé. La prédiction était que le rayonnement thermique de cette époque pourrait être encore observable aujourd'hui comme le <a href="https://theconversation.com/the-cmb-how-an-accidental-discovery-became-the-key-to-understanding-the-universe-45126">rayonnement de fond</a> pénétrant l'univers. Le groupe de Princeton concevait également des instruments pour tenter de le détecter.</p>
<p>Entre-temps, Arno Penzias et Robert Wilson, travaillant pour Bell Labs (également au New Jersey), avaient détecté un bruit de fond persistant inhabituel dans leur expérience. Ils étudiaient l'utilisation de ballons « écho » de haute altitude, une sorte de communication par satellite précoce.</p>
<p>Lorsque Penzias et Wilson ont demandé conseil au groupe de Dicke, il est devenu clair qu'ils avaient effectivement détecté <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fond_diffus_cosmologique">ce qu'on appelle le fonds diffus cosmologique</a> (l'acronyme en anglais est CMB). C'est le nom donné à un rayonnement électromagnétique très homogène. </p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/296065/original/file-20191008-128648-rcicsd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/296065/original/file-20191008-128648-rcicsd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/296065/original/file-20191008-128648-rcicsd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/296065/original/file-20191008-128648-rcicsd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/296065/original/file-20191008-128648-rcicsd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/296065/original/file-20191008-128648-rcicsd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/296065/original/file-20191008-128648-rcicsd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une carte du rayonnement de fond des micro-ondes cosmiques de l'univers.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://wmap.gsfc.nasa.gov/media/101080/">NASA</a></span>
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<p>Le <a href="http://articles.adsabs.harvard.edu/cgi-bin/nph-iarticle_query?1965ApJ...142..414D&data_type=PDF_HIGH&whole_paper=YES&type=PRINTER&filetype=.pdf">résultat</a> a sans doute été la naissance du champ de la cosmologie observationnelle, une branche de la physique qui a révolutionné notre vision du cosmos et de la place que nous y occupons. Peebles a joué un rôle central dans notre compréhension théorique de l'univers primordial et de son évolution. Il a également reconnu que le CMB était un trésor d'informations qui pouvait être pillé. En particulier, il contient des indices sur la formation des structures cosmiques - les galaxies - et des indices sur la nature fondamentale de l'univers lui-même. </p>
<p>Une grande partie du travail de Peebles s'est concentrée sur la compréhension de l'émergence et de la croissance de la structure dans l'univers à partir des conditions primordiales codées dans le CMB. Ce faisant, il a contribué à définir tout un champ d'études.</p>
<p>Par exemple, au début des années 1970, il a été l'un des premiers à effectuer des simulations informatiques de la formation de structures cosmiques, une pratique qui est aujourd'hui une branche entière de la recherche, où les cosmologistes <a href="https://theconversation.com/we-discovered-that-life-may-be-billions-of-times-more-common-in-the-multiverse-96565">explorent ce qu'on appelle des « univers de jouets » (toy universes)</a>.</p>
<h2>Matière noire</h2>
<p>Peebles a aidé à introduire la « zone d'ombre » dans notre modèle de l'univers, en devenant un pionnier de ce que l'on appelle maintenant le <a href="https://ned.ipac.caltech.edu/level5/Peebles1/frames.html">modèle standard de la cosmologie</a>. Dans ce modèle, l'univers est dominé par des <a href="https://theconversation.com/from-dark-gravity-to-phantom-energy-whats-driving-the-expansion-of-the-universe-60433">formes mystérieuses de matière et d'énergie</a> que nous ne comprenons pas encore pleinement, mais dont l'existence est étayée par des observations. La matière normale a maintenant une pertinence cosmique presque négligeable par rapport à cette matière noire et à cette énergie noire.</p>
<p>Peebles a produit un tel corpus d'œuvres qu'il est impossible de rendre justice à tout cela dans ce court article. Dans l'un de ses articles les plus influents,<a href="http://articles.adsabs.harvard.edu/pdf/1982ApJ...263L...1P">il a lié</a> les fluctuations subtiles de la température du CMB - qui reflètent les ondulations de la densité de la matière peu après le Big Bang - avec la façon dont la matière est distribuée à grande échelle dans l'univers actuel. Le lien existe parce que toute la structure que nous voyons autour de nous aujourd'hui doit avoir grandi à travers l'évolution de ces semences primordiales.</p>
<p>Peebles a fait avancer le concept d'une composante de matière noire dans l'univers et ses implications pour l'évolution de la structure. Grâce à ce travail et à d'autres, il a aidé à établir le cadre théorique de la façon dont les galaxies se sont formées et ont évolué. Et il a démontré comment les observations du CMB et la distribution des galaxies pourraient être utilisées comme preuves pour aider à mesurer les paramètres cosmologiques clés, les nombres qui figurent dans les équations que nous utilisons pour décrire la nature de l'univers. </p>
<p>L'influence de Peebles ne s'arrête pas là. Outre ses contributions monumentales à la recherche fondamentale, couvrant le CMB, la matière noire, l'énergie noire, l'inflation, la <a href="https://www.universetoday.com/51797/nucleosynthesis/">nucléosynthèse</a>, la formation des structures et l'évolution des galaxies, ses manuels ont formé des générations de cosmologues. Ils seront pertinents pour les années à venir. Ses principes de cosmologie physique se retrouvent sur mon bureau en ce moment. </p>
<p>Lors de la conférence de presse du prix Nobel, Peebles a tenu à souligner qu'il ne travaillait pas seul. Mais dire qu'il a largement contribué à façonner notre compréhension de l'univers est un euphémisme cosmique.</p>
<p>[ <em>Ne manquez aucun de nos articles écrits par nos experts universitaires.</em> <a href="https://theconversation.com/ca-fr/newsletters?utm_source=TCCA-FR&utm_medium=inline-link&utm_campaign=newsletter-text&utm_content=expert">Abonnez-vous à notre infolettre hebdomadaire</a>. ]</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/125055/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>James Geach reçoit des fonds de la Société royale et du Conseil des installations scientifiques et technologiques.</span></em></p>
Le cosmologiste de Princeton nous a aidés à mettre au point notre modèle actuel de l'univers et a commencé une toute nouvelle branche de la physique.
James Geach, Professor of Astrophysics and Royal Society University Research Fellow, University of Hertfordshire
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tag:theconversation.com,2011:article/120545
2019-08-21T20:07:42Z
2019-08-21T20:07:42Z
À la montagne ou à la mer, en colloque, en conférence ou en rencontre : les pérégrinations des physiciens
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/288540/original/file-20190819-123745-1umo9nk.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C1%2C1171%2C544&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Poster de présentation lors des rencontres de Moriond 2019</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://moriond.in2p3.fr/2019/Gravitation/">Photo par J. P. - Rencontres de Moriond</a></span></figcaption></figure><p>Chaque communauté a ses rois, ses reines et ses manants. Ainsi, celle des physiciens élève au rang d’Altesses Royales les Prix Nobel de la spécialité. Juste en dessous évoluent les princes et les ducs, c’est-à-dire les directeurs des grands laboratoires internationaux. On aura du mal à aborder ces personnages lors d’une assemblée car ils sont entourés à chaque instant par une foule de collaborateurs, éventuellement de journalistes et surtout d’intrigants. Il faut être soi-même un peu de la parenthèse pour pouvoir les approcher</p>
<p>Ainsi va l’étiquette en vigueur dans la communauté, particulièrement visible au moment des conférences qui rythment la vie du physicien. Mais apparaît alors un autre personnage-clé : l’organisateur de la manifestation. Une sorte de « shogun » qui exerce une influence considérable. C’est lui, en effet, qui décide, pour l’essentiel, de qui parlera, ce qui constitue le but ultime de tout chercheur. Réunir des physiciens ne s’improvise pas, cela requiert un maître de cérémonie aux multiples qualités alliant doigté, patience et entregent pour mettre en scène la grand’messe où des intervenants pas toujours accommodants veulent briller de tout leur éclat.</p>
<h2>Des conférences très convoitées</h2>
<p>Le besoin de se rencontrer est dans la nature humaine. On garde en mémoire le salon de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Madame_du_Deffand">marquise du Deffand</a> où se donnaient rendez-vous les notabilités d’alors, notamment Voltaire. Sous la Restauration, celui de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Juliette_R%C3%A9camier">Mme Récamier</a> s’illustra en attirant les cercles politiques et littéraires avec Chateaubriand en vedette américaine.</p>
<p>Les physiciens, eux aussi, raffolent des réunions. Les conférences sont des passages obligés où il faut se montrer pour asseoir sa réputation. L’histoire de ces rencontres est ancienne. On cite encore aujourd’hui les vénérables <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Congr%C3%A8s_Solvay">Congrès Solvay</a>. Sur de vieilles photos en noir et blanc, on y contemple les prestigieux participants d’alors.</p>
<p>Le premier des « Solvay » eut lieu en 1911 à l’hôtel Métropole de Bruxelles. 30 physiciens s’y réunirent, dont Mme Curie, Einstein, Poincaré… Par la suite, en 1930 à Tübingen, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Wolfgang_Pauli">Wolfgang Pauli</a> déclina l’invitation préférant rester à Zürich pour ne pas manquer un bal à son université. Mais il se rappela au bon souvenir de ses collègues par une lettre restée fameuse qui inventait le neutrino. En 1933, à nouveau à Bruxelles, Mme Marie Curie est toujours présente, cette fois accompagnée de sa fille Irène au milieu de 41 hommes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/288542/original/file-20190819-123710-1a9nleo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/288542/original/file-20190819-123710-1a9nleo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=434&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/288542/original/file-20190819-123710-1a9nleo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=434&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/288542/original/file-20190819-123710-1a9nleo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=434&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/288542/original/file-20190819-123710-1a9nleo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=546&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/288542/original/file-20190819-123710-1a9nleo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=546&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/288542/original/file-20190819-123710-1a9nleo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=546&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le Congrès Solvay en 1927. Du derrière au devant, et de gauche à droite : Auguste Piccard, Émile Henriot, Paul Ehrenfest, Édouard Herzen, Théophile de Donder, Erwin Schrödinger, Jules-Émile Verschaffelt, Wolfgang Pauli, Werner Heisenberg, Ralph Howard Fowler, Léon Brillouin, Peter Debye, Martin Knudsen, William Lawrence Bragg, Hendrik Anthony Kramers, Paul Dirac, Arthur Compton, Louis de Broglie, Max Born, Niels Bohr, Irving Langmuir, Max Planck, Marie Skłodowska Curie, Hendrik Lorentz, Albert Einstein, Paul Langevin, Charles-Eugène Guye, Charles Thomson Rees Wilson, Owen Willans Richardson.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://9gag.com/gag/axNKG8Y/imagine-the-collective-iq-and-knowledge-solvay-conference-1927">Wikipedia</a></span>
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<p>Le Congrès Solvay se réunit toujours aujourd’hui. Mais la foule préfère se presser dans des cycles de grandes conférences qui chacune attire jusqu’à mille physiciens. Elles se tiennent en plein été, prenant avantage des vacances universitaires en se transportant de ville en ville. L’équilibre souhaité par la communauté se traduit par le choix, à tour de rôle, de tel ou tel continent. Le schéma est bien rodé et le cérémonial est immuable : discours de bienvenue déclamé par le représentant de la ville-hôte aux visiteurs de tous horizons ; discours de clôture où s’exprime la personnalité la plus en vue. Les organisateurs sont des physiciens locaux et leur charge est éphémère.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/288551/original/file-20190819-123749-1vouw4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/288551/original/file-20190819-123749-1vouw4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/288551/original/file-20190819-123749-1vouw4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/288551/original/file-20190819-123749-1vouw4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/288551/original/file-20190819-123749-1vouw4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/288551/original/file-20190819-123749-1vouw4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/288551/original/file-20190819-123749-1vouw4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jean Trân Thanh Vân.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://rencontresduvietnam.org/conferences/2016/search-for-life/committee/">Rencontres du Viêtnam</a></span>
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</figure>
<p>Dans cet univers, un personnage est particulièrement remarquable. Il a gagné ses titres de noblesse en organisant des conférences. Il s’appelle <a href="https://www.aip.org/aip/awards/tate-medal/jean-tr%C3%A2n-thanh-v%C3%A2n">Jean Trân Thanh Vân</a> mais tout le monde l’appelle Tran ou plus familièrement Van. Cet attachant personnage est devenu plus influent que beaucoup de Prix Nobel ! Il dure depuis plus de 50 ans au sommet de l’empyrée. Les Prix Nobel, eux, sont par construction d’un âge avancé, quand aux directeurs de laboratoires, ils ne restent en fonction qu’un maigre quinquennat. Exemple de longévité, Tran porte durablement l’organisation de une, puis deux, et maintenant trois cycles annuels.</p>
<h2>Physique aux sommets</h2>
<p>Jadis, notre chercheur franco-vietnamien eut l’idée de réunir une vingtaine de jeunes collègues, tous à peine diplômés, dans un gîte des Alpes, pour échanger sur la physique du moment. C’était en janvier 1966 dans la localité de Moriond. Il loua un chalet bon marché, et ce fut le début d’une rencontre digne d’une colonie de vacances. Tous aidaient aux tâches domestiques, certains cuisinaient quand d’autres faisaient la vaisselle. Le ski n’étant qu’une occupation secondaire entre deux expertes discussions puisque la rencontre était labelisée séminaire de travail. Le terme Rencontre était novateur pour l’époque, un vocable dans l’air du temps, il restera une marque de fabrique et les « Rencontres de Moriond » furent pérennisées. Elles prirent la forme d’un rendez-vous annuel en mars, qui devint rapidement l’une des principales occasions d’échanges entre physiciens d’abord des particules, puis astrophysiciens et cosmologistes. Depuis 53 ans, les Rencontres réunissent chaque année de l’ordre de 450 participants. Le lieu a évolué. Tran, négociateur avisé, sélectionne le meilleur rapport qualité/prix de la prestation. Ainsi les Rencontres voyagèrent pour visiter les Arcs, la Plagne, Méribel… et maintenant la Thuile dans le Val d’Aoste.</p>
<h2>Sous les auspices de François 1<sup>er</sup></h2>
<p>Après avoir réussi à métisser la physique et le ski, Tran décida d’allier la science à la culture. Par un heureux hasard, il réussit à greffer une conférence de physique à l’intérieur même du Château Royal de Blois. C’était un cadre prestigieux pour des physiciens parfois mal dégrossis, résidence de 7 rois et de 10 reines de France. Entre deux exposés de cosmologie, on a pu se perdre dans le musée adjacent en empruntant l’escalier Renaissance. Une telle immersion permet de tout apprendre sur la généalogie des Valois, sans trop s’éloigner du boson de Higgs.</p>
<p>La première « Rencontre de Blois » eut lieu en 1989, célébrant les 25 ans de la découverte de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sym%C3%A9trie_CP">violation de symétrie CP</a>, phénomène fondamental qui tente d’expliquer la disparition de l’antimatière. Quatre Prix Nobel y participèrent.</p>
<p>Les <a href="http://blois.in2p3.fr/">« Rencontres de Blois »</a> fêtent cette année leur 31ème épisode sur le thème : « Physique des Particules et Cosmologie ». Les présentations se tiennent dans l’aile Gaston d’Orléans, où Louis XIII tentait de retenir son encombrant frère qui, à Paris, aimait comploter.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/288546/original/file-20190819-123741-121sbu9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/288546/original/file-20190819-123741-121sbu9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=500&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/288546/original/file-20190819-123741-121sbu9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=500&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/288546/original/file-20190819-123741-121sbu9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=500&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/288546/original/file-20190819-123741-121sbu9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=628&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/288546/original/file-20190819-123741-121sbu9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=628&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/288546/original/file-20190819-123741-121sbu9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=628&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’illustration des Rencontres de Blois, 2015.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://blois.in2p3.fr/2015/">Rencontres de Blois</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La manifestation est « un don du ciel » selon un ancien maire, et la conférence paye tribut à la ville royale en offrant aux Blésois une conférence grand public très suivie. Le faste de la Renaissance demeure, bien que le banquet, cérémonie obligatoire d’une telle manifestation, n’ait plus lieu comme auparavant dans le Château de Chambord. Là, une sonnerie de cors de chasse annonçait l’heure des agapes, et tous pouvaient alors discuter de l’âge de l’Univers au détour de l’escalier à double hélice, une coupe de champagne à la main.</p>
<h2>Retour aux sources</h2>
<p>Venu en France encore tout jeune pour passer une thèse de physique théorique à l’ENS, Tran s’est bâti un imbattable réseau d’amitiés dans toute la communauté et au-delà. L’âge avançant, il voulut œuvrer pour son pays natal. Avec sa femme Kim toujours à ses côtés, il créa d’abord une fondation en faveur des enfants orphelins de son pays d’origine. Mais bientôt, la physique reprit l’ascendant et il lança les <a href="https://rencontresduvietnam.org/?lang=fr">« Rencontres du Vietnam »</a>. La première édition eut lieu en 1993 à Hanoi. C’était une entreprise risquée mais les relations solides de Tran développées aux quatre coins du monde permirent de convaincre de nombreux physiciens de venir découvrir le Vietnam. Une seconde édition eut lieu à Ho Chi Minh ville à l’occasion d’une éclipse totale de Soleil. La machine était enclenchée, et la Rencontre s’est stabilisée depuis quelques années dans une ville située sur la côte au milieu du pays : Quy Nhon. Tran y a réussi à construire un centre pérenne de Congrès nommé ICISE doté d’une plage privée, qui favorise les contacts avec les chercheurs vietnamiens autrement très isolés. Cette année 21 colloques sont programmés, et cela fait progresser la cause de la physique fondamentale dans un pays qui a d’autres priorités.</p>
<p>Moriond, puis Blois, puis le Vietnam… Quoi d’autre à l’avenir ? Il ne reste plus à Tran qu’à organiser, dans 20 ou 30 ans d’aujourd’hui, un centre de rencontres au Paradis où les physiciens pourront échanger en toute connaissance de cause sur l’âge de l’Univers, et comprendre enfin ce que faisait le temps au moment du big bang.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/120545/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François Vannucci ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Un physicien, ça voyage. Ski, bains de mer… Les colloques, rencontres et conférences servent aussi à travailler. Les exemples sont anciens.
François Vannucci, Professeur émérite, chercheur en physique des particules, spécialiste des neutrinos, Université Paris Cité
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
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2019-05-21T07:08:00Z
2019-05-21T07:08:00Z
Horizon, ombres et lumière : secrets de trous noirs
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/275260/original/file-20190518-69174-19g7nea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le disque d'accrétion du trou noir M87* imagé par l'Event Horizon Telescope.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Trou_noir#/media/File:Black_hole_-_Messier_87.jpg">Event Horizon Telescope</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>L’année 2019 sera, pour l’histoire, marquée… d’un trou noir. En avril dernier, en effet, la première image de cet objet céleste très mystérieux a été révélée. Réaction logique : ne pas y croire. Car un trou noir, par définition, n’émet pas de lumière. Alors comment peut-on imaginer en observer une image ? Passons ensemble en revue cinq questions qui nous permettront de mieux comprendre ce que cette fameuse image signifie : qu’est-ce qui caractérise un trou noir ? Comment se forment et où se trouvent les trous noirs dans l’univers ? Qu’est-ce qui émet de la lumière près d’un trou noir ? Comment la présence du trou noir se traduit-elle sur l’image obtenue ? Et enfin : comment observer cette image ?</p>
<p>Parmi les innombrables membres du bestiaire astronomique, le trou noir est un objet très particulier. Il n’est pas constitué de matière. Pour le définir, les scientifiques utilisent la géométrie. Un trou noir est un lieu géométrique défini par la présence d’une frontière mathématique appelée l’horizon des événements. Rien ni personne ne peut s’en échapper, pas même la lumière qui est pourtant la particule messagère la plus véloce de l’Univers. D’où la justification de l’épithète : un trou noir est, effectivement, noir, vu qu’aucune lumière ne peut s’en échapper.</p>
<h2>Trous noirs stellaires et supermassifs</h2>
<p>Si la définition du trou noir est purement géométrique, il est possible de « créer » un trou noir à partir de matière normale, en la compressant dans un espace suffisamment petit. Ainsi, je peux moi-même être transformé en trou noir pour peu qu’on prenne la peine de me comprimer dans une sphère de rayon égale au dix milliardième de la taille d’un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Proton">proton</a>. Il faut donc des conditions extrêmes pour former des trous noirs, ce qui explique leur absence de notre quotidien.</p>
<p>Les étoiles massives, lorsqu’elles terminent leur vie en explosant sous forme de supernova, peuvent donner naissance à un trou noir dont la masse est de l’ordre de 10 fois la masse du Soleil. On parle alors de trous noirs stellaires, pour garder en mémoire le processus de fabrication. Notre Galaxie abrite ainsi des millions de trous noirs stellaires, qui ne sont autres que des cadavres d’étoiles massives.</p>
<p>Durant le processus de formation d’une galaxie, du gaz peut s’effondrer en son centre pour former un trou noir qui grossira avec le temps pour former aujourd’hui un trou noir supermassif, affichant jusqu’à 10 milliards de fois la masse du Soleil.</p>
<p>Notre Galaxie abrite un tel monstre en son centre : <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sagittaire_A*">Sagittarius A*</a>, qui est un poids plume de 4 millions de fois la masse du Soleil. Il est probable que chacune des centaines de milliards des grandes galaxies de l’Univers abrite un tel trou noir supermassif. C’est en tout cas le cas pour la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/M87">galaxie M87</a>, sujet de la fameuse image publiée le 10 avril dernier : elle abrite en son sein un poids lourd de 6 milliards de fois la masse du soleil, que les astronomes ont décidé, dans un élan remarquable de créativité linguistique, de nommer M87*.</p>
<h2>Émission lumineuse à proximité d’un trou noir</h2>
<p>Si un trou noir n’émet pas de lumière par lui-même, il est fréquent de rencontrer des trous noirs sociables, qui aiment à s’entourer de matière normale, susceptible d’émettre un rayonnement. Un trou noir n’est pas seulement le grand aspirateur cosmique que l’on s’imagine généralement. De la matière (des électrons et des protons) peut se maintenir en orbite autour du trou noir, et « spiraler » lentement vers l’horizon des événements, laissant amplement le temps à l’émission de lumière pendant ce trajet.</p>
<p>C’est le cas du trou noir M87*. Il est accompagné d’un flot de gaz qui l’entoure à la manière d’un <em>doughnut</em>, tournant et s’échauffant de plus en plus au fur et à mesure que l’on s’approche de l’horizon des événements. Aux abords mêmes du trou noir, l’interaction complexe entre ce flot de matière, le trou noir et le champ magnétique ambiant crée les conditions voulues pour donner naissance à un puissant jet de matière qui s’échappe sur des distances considérables. On comprend qu’on est vraiment très loin du trou noir-aspirateur !</p>
<h2>Effet du trou noir sur la lumière émise</h2>
<p>La lumière émise par le flot de gaz entourant M87* ne se déplace pas en ligne droite comme le ferait de la lumière émise par un phare de voiture. Les trajectoires lumineuses sont violemment courbées par la présence du trou noir, ce qui distord considérablement l’image obtenue. Regardez l’image, ci-dessous, de la Halle aux draps de Cracovie : imagée au naturel dans l’encart du haut, et en ajoutant un trou noir dans l’encart du bas. On constate en particulier que certains éléments de la Halle apparaissent plusieurs fois à des endroits différents de l’image. On comprend ainsi la grande difficulté d’interprétation lorsque le sujet photographié (les environs de M87*) est très mal connu.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/275258/original/file-20190518-69209-tccdov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/275258/original/file-20190518-69209-tccdov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=543&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/275258/original/file-20190518-69209-tccdov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=543&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/275258/original/file-20190518-69209-tccdov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=543&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/275258/original/file-20190518-69209-tccdov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=682&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/275258/original/file-20190518-69209-tccdov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=682&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/275258/original/file-20190518-69209-tccdov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=682&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Halle aux draps de Cracovie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans la région la plus interne, tout près de l’horizon des événements, la lumière peut s’enrouler autour du trou noir avant de s’échapper pour rejoindre l’observateur sur Terre. Ce processus crée une structure brillante de forme annulaire dans l’image obtenue, que l’on appelle anneau de photons (rappelons que les photons sont les corpuscules élémentaires formant la lumière). Elle entoure une région sombre, appelée ombre du trou noir. Cette diminution d’intensité est due à la présence du trou noir qui capture la lumière s’approchant trop près de son horizon des événements. Considérons un <em>doughnut</em> de matière chaude entourant un trou noir. Une photographie de cet objet montrera une structure en anneau qui correspond à ce que l’on appelle l’image primaire du <em>doughnut</em>, qui est relativement peu déformée. Au centre de la photo, une structure circulaire apparaîtra : l’anneau de photons, image hautement déformée du <em>doughnut</em>. La région entourée par cet anneau de photon est sombre, c’est l’ombre du trou noir. Ces différents éléments sont représentés dans l’image ci-dessous, qui est le résultat d’un calcul.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/275259/original/file-20190518-69174-ccd9jp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/275259/original/file-20190518-69174-ccd9jp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=361&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/275259/original/file-20190518-69174-ccd9jp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=361&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/275259/original/file-20190518-69174-ccd9jp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=361&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/275259/original/file-20190518-69174-ccd9jp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=454&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/275259/original/file-20190518-69174-ccd9jp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=454&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/275259/original/file-20190518-69174-ccd9jp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=454&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Image d’un trou noir.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une harmonique de l’image du trou noir</h2>
<p>Pour observer réellement une telle image, un appareil photo n’est forcement pas suffisant. La collaboration internationale <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Event_Horizon_Telescope">Event Horizon Telescope</a> a travaillé pendant plus de 10 ans pour réussir à mettre au point l’instrument nécessaire à l’obtention d’une image de trou noir. L’énorme difficulté de l’opération vient du fait que même les plus gros trous noirs ont une taille apparente (telle que vue depuis la Terre) extrêmement petite (parce qu’ils sont très loin). De l’ordre de la taille d’un pamplemousse sur la Lune vu depuis la Terre !</p>
<p>Pour observer un objet si ridiculement petit, il est nécessaire d’utiliser plusieurs télescopes répartis sur l’ensemble de la planète et mis en réseau. Ces différents télescopes permettent chacun d’avoir accès à une (petite) partie de l’information contenue dans l’image. Utilisons une comparaison dans le domaine acoustique. Un son réel (par exemple une cloche qui sonne) peut se décomposer en une superposition de sons purs, simples, qu’on appelle des harmoniques. Il en va de même pour une image. Chaque couple de télescopes de l’Event Horizon Telescope permet d’accéder à une harmonique de l’image du trou noir. À partir du petit nombre d’harmoniques observées par le réseau, il a fallu utiliser des algorithmes sophistiqués pour retrouver l’image complète sous-jacente. Le résultat final est l’image en tête de cet article, qui a abondamment circulé depuis le 10 avril (et qui n’a donc rien à voir avec une photographie au sens usuel du terme).</p>
<p>On reconnaît sur l’image les traits caractéristiques évoqués plus haut : la zone sombre centrale (l’ombre du trou noir), entourée d’une structure annulaire. Cette structure est la superposition de l’anneau de photon et de l’image primaire du flot de gaz entourant le trou noir, que la résolution de l’Event Horizon Telescope ne permet pas de séparer, au contraire de l’image calculée plus haut.</p>
<p>Cette image est un résultat majeur pour la physique des trous noirs. Elle est en parfait accord avec les prédictions de la théorie de la relativité générale d’Einstein. Pour les scientifiques, prendre en défaut cette fameuse théorie est le Graal de l’<a href="https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Astrophysique">astrophysique relativiste</a> : il faudra encore attendre pour y parvenir !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/116111/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Vincent ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
La publication d’une « photo » d’un trou noir en avril dernier a fait grand bruit. Mais qu’il y a-t-il derrière cette image ?
Frédéric Vincent, Chercheur CNRS à l'Observatoire de Paris, Observatoire de Paris
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/116974
2019-05-19T20:12:10Z
2019-05-19T20:12:10Z
La quête de l’origine de l’accélération cosmique
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/273927/original/file-20190512-183096-u5puom.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C104%2C5823%2C3617&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Observation de la Voie lactée, Espagne.</span> <span class="attribution"><span class="source">Photo by Evgeni Tcherkasski on Unsplash</span></span></figcaption></figure><p>Déterminer la cause de l’accélération cosmique est l’un des grands défis de la cosmologie. S’agit-il d’une constante (ΛCDM) ou d’un nouveau fluide (énergie noire, DE) ? Existe-t-il une nouvelle force qui modifie la gravité telle que décrite par Einstein (gravité modifiée, MG) ?</p>
<p>Le CEA travaille sur l’analyse de l’énergie noire et de la gravité modifiée dans le cadre de la mission Planck de l’Agence spatiale européenne (ESA) qui a mesuré le rayonnement du fond diffus cosmologique (CMB), la lumière émise 380 000 ans après le big bang. Dans la <a href="https://arxiv.org/abs/1807.06209">publication finale des données</a>, nous avons <a href="https://arxiv.org/abs/1502.01590">actualisé</a> et testé différents scénarios combinant les résultats de Planck à d’autres jeux de données.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/273921/original/file-20190512-183080-k6c37d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/273921/original/file-20190512-183080-k6c37d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=416&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/273921/original/file-20190512-183080-k6c37d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=416&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/273921/original/file-20190512-183080-k6c37d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=416&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/273921/original/file-20190512-183080-k6c37d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/273921/original/file-20190512-183080-k6c37d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/273921/original/file-20190512-183080-k6c37d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Résultat de l’analyse finale de Planck testant les fonctions mu et êta : les deux sont de 1 dans le modèle CDM (intersection des lignes pointillées). Toute détection d’une déviation par rapport à 1 indiquerait un écart par rapport à la théorie standard de la gravité. Les contours colorés représentent une probabilité de 95 % des valeurs des paramètres pour cadrer avec l’ensemble de données correspondant. Les résultats sont conformes au modèle CDM.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteure</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Cisaillement cosmique</h2>
<p>Le trajet de la lumière issue d’une galaxie lointaine est dévié par la présence de matière noire : ce phénomène provoque une distorsion (cisaillement cosmique) de l’image de la galaxie observée. Mesurer ce cisaillement peut permettre de reconstruire la matière noire, c’est-à-dire la lentille qui dévie la lumière. Cet effet de « lentille gravitationnelle » est étudié statistiquement, car la déflexion est généralement infime (effet gravitationnel faible, WL). De leur côté, l’énergie noire et la MG affectent la lentille gravitationnelle et la forme de son potentiel gravitationnel.</p>
<p>Cet effet gravitationnel faible est donc également une puissante sonde pour tester l’énergie noire et la gravité modifiée. Le CEA joue un rôle majeur dans les études galactiques destinées à mesurer le WL – du développement d’instruments à la reconstruction d’images de formes galactiques, en passant par l’interprétation de données. <a href="https://arxiv.org/abs/1708.06356">Il a participé</a> au télescope Canada-France-Hawaii (TCFH) en fabriquant la caméra MegaCam, qui a <a href="https://academic.oup.com/mnras/article/430/3/2200/981767">permis de déterminer</a> la fraction de matière noire et d’énergie noire remontant jusqu’à 8,8 milliards d’années dans le passé. Nous apportons une contribution essentielle au télescope spatial Euclid de l’ESA qui sera lancé en 2022 – du développement technologique à l’exploitation scientifique des données. La combinaison du WL et d’autres sondes, comme les amas de galaxies et le CMB, constitue également un défi : à ce titre, le CEA dirige le groupe de travail chargé de cette combinaison dans le cadre de la mission Euclid.</p>
<h2>Apprentissage machine en cosmologie</h2>
<p>Nous avons notamment extrait des informations à partir de données de WL, indécelables dans les analyses classiques. En voici quelques exemples représentatifs. Nous avons démontré à l’aide d’un nouvel algorithme, que nous avons rendu public, que l’existence proposée d’une concentration de matière noire dans l’amas Abell 520 n’était pas réelle. Si elle avait été confirmée, cette concentration aurait été incompatible avec l’hypothèse classique de matière non collisionnelle. Nous avons également <a href="https://arxiv.org/abs/1805.05146">abordé la question suivante</a> : les cartes de cisaillement gravitationnel nous permettent-elles de distinguer les effets d’une constante cosmologique de ceux de la gravité modifiée ? Nous avons réussi à identifier la signature la plus efficace pour réaliser cette distinction entre les différents modèles théoriques, visualisés sur ce schéma de comptage de pics.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/273925/original/file-20190512-183080-164sk19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/273925/original/file-20190512-183080-164sk19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/273925/original/file-20190512-183080-164sk19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/273925/original/file-20190512-183080-164sk19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/273925/original/file-20190512-183080-164sk19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/273925/original/file-20190512-183080-164sk19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/273925/original/file-20190512-183080-164sk19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">auteure</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/273926/original/file-20190512-183109-15m3zhz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/273926/original/file-20190512-183109-15m3zhz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=409&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/273926/original/file-20190512-183109-15m3zhz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=409&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/273926/original/file-20190512-183109-15m3zhz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=409&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/273926/original/file-20190512-183109-15m3zhz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=513&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/273926/original/file-20190512-183109-15m3zhz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=513&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/273926/original/file-20190512-183109-15m3zhz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=513&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">En haut, l’analyse WL standard ne permet pas de distinguer ΛCDM (en gris) et MG (différents modèles en couleur). En bas, nous avons identifié une observable WL différente (pics) pouvant convenir.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteure</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nous avons en outre montré que les réseaux neuronaux convolutifs améliorent notre capacité à distinguer une constante cosmologique des théories de gravité modifiée, mettant en évidence une nouvelle application du <a href="https://arxiv.org/abs/1805.05146"><em>machine learning</em> en cosmologie</a>.</p>
<p>Ces résultats montrent combien le choix de la bonne observable statistique joue un rôle crucial dans l’interprétation des données et dans l’obtention, avec les mêmes données, d’une découverte ou non. Enfin, le CEA codirige le programme Canada-France</p>
<p>Imaging Survey (CFIS), lancé en 2017, nécessaire pour dériver les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9calage_vers_le_rouge_photom%C3%A9trique">redshifts photométriques</a> dans le cadre de la mission Euclid, c’est-à-dire déterminer la distance des galaxies observées et reconstruire l’expansion de l’Univers.</p>
<hr>
<p><em>Cet article est publié en partenariat avec le CEA, qui consacre le numéro 68 de son magazine Clefs aux « dernières nouvelles du cosmos ».</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/116974/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valeria Pettorino ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Déterminer la cause de l’accélération cosmique est l’un des grands défis de la cosmologie. Une chercheuse explique ses méthodes.
Valeria Pettorino, Astrophysicienne au Département d’astrophysique (DAp-AIM), Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/113261
2019-03-19T21:18:10Z
2019-03-19T21:18:10Z
Mais où est passée l’antimatière ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/264633/original/file-20190319-60964-fwl3tz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C229%2C5447%2C3293&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Peut être en bas à gauche, ou en haut à droite. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/9wH624ALFQA">Denis Degioanni/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le premier endroit connu, pour répondre à cette question, c’est bien dans le cerveau du physicien anglais Paul Dirac qui, en 1929, obtient une solution « bizarre » de l’équation (qui porte son nom maintenant) qu’il avait élaborée. Il cherchait à rendre compatible la toute nouvelle mécanique quantique et la relativité restreinte d’Einstein, et pour cela avait bâti une équation décrivant le comportement d’un électron ; et cette équation avait une autre solution, qui correspondait à un électron avec une énergie négative, ce qui ne pouvait être admis. Mais l’équation était si belle « que ça ne pouvait être faux », et Dirac a fini par proposer l’existence d’un électron positif (l’électron de la matière ordinaire a une charge électrique négative).</p>
<p>Bingo ! Trois ans plus tard, l’américain Anderson observait, dans les rayons cosmiques, un tel électron positif et le baptisait positron (que l’on traduisit positon en français). C’est donc dans les rayons cosmiques que l’on a trouvé les premières particules d’antimatière. Pourquoi « antimatière » ? Car ces particules sont les alter ego des particules composant notre matière, mais avec des charges opposées, de sorte que la réunion d’une particule et de son antiparticule voit toutes les charges s’annuler et peut se fondre en une particule de pure énergie comme les photons. L’antimatière est un ingrédient obligatoire pour transformer de l’énergie en matière, ou pour l’opération inverse, selon la formule d’Einstein. Mais plutôt que de parler de particules « opposées » ou « miroir », il est plus juste de parler de particules « complémentaires ».</p>
<p>On trouve donc des particules d’antimatière dans le rayonnement cosmique ; mais d’où viennent-elles ? La théorie du big bang, où tout serait créé à partir d’une « bulle d’énergie », implique qu’il s’est créé autant de matière que d’antimatière.</p>
<p>Y aurait-il des mondes, des galaxies d’antimatière ? Les observations du cosmos infirment cette idée, de sorte que la grande question de la cosmologie est en fait : où est passée l’antimatière ? Le peu d’antimatière observée dans les rayons cosmiques provient de l’interaction de particules de matière dans des accélérateurs cosmiques résultant, par exemple, de la chute vertigineuse de matière vers des trous noirs supermassifs, ou d’autres phénomènes cosmiques violents. Ce peu d’antimatière dans les rayons cosmiques continue à être scruté, par exemple dans l’expérience AMS installée dans la station spatiale ISS.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/264636/original/file-20190319-60986-hk9kyp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/264636/original/file-20190319-60986-hk9kyp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/264636/original/file-20190319-60986-hk9kyp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/264636/original/file-20190319-60986-hk9kyp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/264636/original/file-20190319-60986-hk9kyp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/264636/original/file-20190319-60986-hk9kyp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/264636/original/file-20190319-60986-hk9kyp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le détecteur AMS dans l’ISS.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://home.cern/news/news/experiments/samuel-ting-present-latest-results-ams">NASA</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Quand les physiciens créent de l’antimatière</h2>
<p>Dès que les accélérateurs des physiciens l’ont permis, de l’antimatière a été créée dans les laboratoires, afin de l’étudier et la comprendre. Et ces accélérateurs ont permis, en bombardant des éléments avec des protons (qui sont le noyau de l’atome d’hydrogène) ou des neutrons, de créer des atomes radioactifs d’un type spécial, la radioactivité bêta-plus (β+). Ces atomes ont un noyau très riche en protons, et lors de leur désintégration émettent un positon : ils émettent de l’antimatière !</p>
<p>On a donc à disposition (mais à condition de les fabriquer) des sources de positons. Ces sources ont des durées de vie courtes, mais suffisantes pour envisager des applications. La première, développée dès les années 1960, est la tomographie par émission de positons, TEP, maintenant très utilisée dans l’imagerie médicale : les TEP-scan. C’est donc à l’hôpital que vous avez le plus de probabilités de trouver de l’antimatière !</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/264638/original/file-20190319-60964-1ep16lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/264638/original/file-20190319-60964-1ep16lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=482&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/264638/original/file-20190319-60964-1ep16lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=482&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/264638/original/file-20190319-60964-1ep16lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=482&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/264638/original/file-20190319-60964-1ep16lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=606&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/264638/original/file-20190319-60964-1ep16lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=606&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/264638/original/file-20190319-60964-1ep16lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=606&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">PET scan.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/calliope/15665197689">Liz West/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans cet examen, des atomes radioactifs de fluor-18 sont intégrés dans des molécules de sucre, qui sont injectées en solution au patient. Lorsque le fluor se désintègre, il émet un positon qui aussitôt s’annihile en donnant deux photons gamma que les détecteurs enregistrent. On peut ainsi visualiser où se concentre le sucre dans l’organisme : or les organes les plus consommateurs de cette énergie se trouvent être en particulier les cellules cancéreuses. L’oncologie est ainsi devenue le plus important utilisateur d’antimatière. Il faut aussi citer l’utilisation d’un autre élément radioactif β+, le sodium-22, mais cette fois pour des besoins plus industriels : l’analyse des rayonnements gamma émis lorsque les positons pénètrent dans certains matériaux (silicium, métaux, verres…) permet de déterminer le taux de porosité des surfaces à l’échelle nanométrique, ainsi que des connexions entre ces pores. C’est donc dans ces laboratoires d’analyses que l’on peut également trouver des positons.</p>
<p>Et bien entendu, les grands laboratoires de recherche continuent de fabriquer de l’antimatière, pour l’étudier. Dans la recherche sur les particules élémentaires, les expériences du grand accélérateur LHC du Cern à Genève étudient les propriétés de toutes les antiparticules et tentent de vérifier s’il n’y a pas des anomalies dans leur « complémentarité ». Par ailleurs le Cern dispose d’un anneau unique au monde destiné à ralentir des antiprotons créés à haute énergie. Ces antiprotons sont envoyés dans des expériences qui peuvent en faire des atomes d’antihydrogène, en leur associant un positon (produit séparément à l’aide de source de sodium-22). L’étude des niveaux atomiques de l’antihydrogène permet de tester l’universalité de l’interaction électromagnétique, prédite par les modèles actuels de la physique. Et depuis quelques années, trois expériences se sont lancées dans la mesure de l’effet de la gravitation terrestre sur ces antiatomes : une différence, même faible, violerait le principe d’équivalence d’Einstein, une des bases de la relativité, qui énonce que dans un champ gravitationnel la trajectoire d’un corps ne dépend pas de sa composition.</p>
<p>Les résultats à venir sont là aussi d’un intérêt cosmologique.</p>
<p>Enfin, l’antimatière fait rêver, et on la retrouve – de manière virtuelle – dans un certain nombre d’œuvres de science-fiction. Il est vrai qu’elle représente la forme la plus dense de stockage d’énergie que l’on puisse imaginer, mille fois plus dense que l’énergie de fission, elle-même déjà quelques millions de fois plus dense que nos énergies fossiles. En effet dans l’annihilation de l’antimatière avec la matière, toute la masse est transformée en énergie, sans résidus, déchets ou cendres.</p>
<p>D’où son intérêt pour propulser une mission spatiale lointaine, ou comme arme de destruction massive. Mais ne rêvons pas trop : toute l’antimatière jamais créée au Cern, si elle avait pu être conservée, n’aurait permis que de chauffer une tasse de café !</p>
<hr>
<p><em>Si vous voulez en apprendre encore plus sur l’antimatière, rendez-vous à la <a href="http://www.cnrs.fr/fr/evenement/nuit-de-lantimatiere">Nuit de l’Antimatière</a>, le 1<sup>er</sup> avril partout en France</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/113261/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yves Sacquin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
L’antimatière est un ingrédient obligatoire pour transformer de l’énergie en matière selon la formule d’Einstein. Elle est finalement moins éloignée de nous que vous ne le pensez.
Yves Sacquin, physicien expérimentateur, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/109195
2018-12-30T17:47:43Z
2018-12-30T17:47:43Z
Célébrons la beauté et la profondeur de l’Univers : une conversation inspirante avec Trinh Xuan Thuan
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/252094/original/file-20181229-47313-1yelazc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Gaz interstellaire et regroupement de jeunes étoiles, image du télescope spatial Hubble. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.nasa.gov/image-feature/burst-of-celestial-fireworks">NASA, ESA, R. O'Connell (University of Virginia), F. Paresce (National Institute for Astrophysics, Bologna, Italy), E. Young (Universities Space Research Association/Ames Research Center), the WFC3 Science Oversight Committee, and the Hubble Heritage Team</a></span></figcaption></figure><p><em>Pour bien commencer l’année 2019, en prenant de la hauteur, la rubrique Science et Technologies vous propose de goûter aux splendeurs du cosmos : l’astrophysicien Hervé Dole, auteur de l’ouvrage <a href="https://www.dunod.com/sciences-techniques/cote-obscur-univers-preface-pierre-lena">Le côté obscur de l’univers</a> converse avec son confrère Trinh Xuan Thuan (astrophysicien et professeur à l’université de Virginie) à l’occasion de la sortie de son <a href="https://www.lisez.com/livre-cartonne/dictionnaire-amoureux-illustre-du-ciel-et-des-etoiles/9782324022319">Dictionnaire amoureux illustré du ciel et des étoiles</a>.</em></p>
<hr>
<p><strong>En feuilletant votre dictionnaire illustré, je repère les entrées Planck, Ondes gravitationnelles, Toile cosmique… Les résultats les plus récents de la cosmologie sont présents. Comment avez-vous fait votre sélection ?</strong></p>
<p>L’astronomie contemporaine a multiplié les découvertes et il fallait que ce livre reflète la science la plus actuelle. Les exoplanètes, par exemple, dont la quête a débuté dans les années 1940. En 1995, on découvre la première d’entre elle en orbite autour de l’étoile 51 Pégase. Les astronomes se mettent alors au travail et s’ensuit une avalanche de découvertes de planètes extra-solaires ! La recherche dans le domaine est des plus active : nous savons désormais que notre système planétaire n’est pas le seul dans l’Univers et qu’il possède certaines propriétés uniques.</p>
<p><strong>Vous, qui êtes spécialiste des galaxies naines et des premières étoiles, avez-vous d’autres domaines de prédilection que vous aimez évoquer ?</strong></p>
<p>J’aime écrire sur la relativité, la déformation du temps et de l’espace, et cette notion d’absolu qui fonde la théorie à travers l’invariance de la vitesse de la lumière. Je suis aussi en train d’écrire un ouvrage sur l’histoire de l’astronomie. Au début, les humains regardaient le ciel sacré, puis l’espace est devenu profane grâce à la science. Aujourd’hui, je veux évoquer l’interaction entre ces deux univers. Emerveillés, nous avons redécouvert le sens du sacré.</p>
<p><strong>Quelle est la place de la spiritualité, dans votre démarche de scientifique et de vulgarisateur ?</strong></p>
<p>La science et la spiritualité constituent, de mon point de vue, deux magistères différents. Les lois physiques et mathématiques sur lesquelles la communauté des chercheurs se sont accordées au cours de l’Histoire fondent la science. Quand elle s’arrête, commence le pari pascalien :</p>
<blockquote>
<p><em>Car enfin, qu’est-ce que l’homme dans la nature ? Un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard du néant, un milieu entre rien et tout.</em></p>
</blockquote>
<p>C’est mon pari métaphysique. La science m’éclaire, mais elle ne s’applique pas au spirituel. Aucune équation mathématique ne démontrera l’existence d’un Créateur et, moi astronome, je ne découvrirai aucun Dieu barbu au bout de ma lorgnette. Je suis un bouddhiste, adhérant à une pensée qui existe depuis 2500 ans et qui n’a pas besoin de preuve scientifique. Mais j’ai la conviction que ces deux domaines, qui décrivent le réel chacun à leur manière, doivent se rencontrer quelque part. La cosmologie est une science qui pose des questions d’ordre métaphysique : d’où vient l’Univers ? Ou va-t-il ? Il y a cette impermanence des choses, tout change, tout bouge, tout évolue, pour le vivant et pour l’univers. De même, tout est interdépendant, tout est connecté. L’astrophysique l’a montré : nous sommes tous des poussières d’étoiles.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/252093/original/file-20181229-47313-rqq6pb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/252093/original/file-20181229-47313-rqq6pb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=498&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/252093/original/file-20181229-47313-rqq6pb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=498&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/252093/original/file-20181229-47313-rqq6pb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=498&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/252093/original/file-20181229-47313-rqq6pb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=625&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/252093/original/file-20181229-47313-rqq6pb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=625&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/252093/original/file-20181229-47313-rqq6pb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=625&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Trinh Xuan Thuan à son domicile parisien, avec Hervé Dole en décembre 2018.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Aline Richard Zivohlava</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><strong>Votre Dictionnaire déploie aussi tout un éventail de beautés astrophysiques et cosmologiques, mais pas seulement…</strong></p>
<p>Les artistes et les poètes ont leurs propres points de vue sur le réel. Ils ouvrent pour nous des fenêtres, complémentaires de celles de la science, sur la beauté et l’unité de l’Univers. Art et science nous éclairent ensemble sur le concept du big bang : l’entrée du dictionnaire qui lui est consacré est illustrée par l’image d’une rosace de l’église Saint-Bonaventure, à Lyon. Il n’y a pas de centre et les anges semblent se fuir les uns les autres comme des galaxies emportées par l’expansion de l’univers. Autre œuvre, les Nymphéas, de Claude Monet, apprennent beaucoup sur la lumière, autant que bien des leçons d’astronomie. Dans l’ouvrage, il y a de très belles photos, certaines impressionnantes comme celle de ce trou noir qui absorbe la lumière, d’autres encore qui ont forgé notre vision du monde. Je pense à la photo de la Terre prise à l’Hasselblad par l’équipage d’Apollo 17 le 7 décembre 1972 au cours de leur voyage vers la Lune. Avec ce célèbre cliché, c’était la première fois que l’humain a pu contempler sa « bille bleue » dans un luxe de détails.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/252119/original/file-20181229-47325-lem2r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/252119/original/file-20181229-47325-lem2r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/252119/original/file-20181229-47325-lem2r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/252119/original/file-20181229-47325-lem2r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/252119/original/file-20181229-47325-lem2r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=755&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/252119/original/file-20181229-47325-lem2r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=755&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/252119/original/file-20181229-47325-lem2r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=755&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Photo de l’Afrique, de l’Antarctique et de la péninsule Arabique prise en route pour la lune lors de la mission Apollo 17 le 7 décembre 1972.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Bille_bleue#/media/File:The_Earth_seen_from_Apollo_17.jpg">NASA/Apollo 17 crew ; taken by either Harrison Schmitt or Ron Evans</a></span>
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<p><strong>Comment parler de l’Univers aujourd’hui ? Que transmettre ?</strong></p>
<p>Nous avons de la chance : l’astronomie passionne le public. Son « zoo » galactique fascine : pulsars, quasars, trous noirs, autant d’objets encore mystérieux. Que dire aussi de l’évolution des étoiles, de notre soleil, de cet infiniment petit qui a accouché de l’infiniment grand… De toutes ces questions ouvertes qui nous échappent encore, la matière noire, l’énergie noire. Et tout cela n’est pas abstrait. Il y a des personnages qui ont fait vivre cette histoire de 13,8 milliards d’années. Galilée, Newton, Einstein sont les plus célèbres, mais il y en a tant d’autres. Cela devrait nous obliger, en tant qu’humains dépendants les uns des autres, à prendre soin de notre planète commune, et à trouver des solutions au réchauffement global qui la menace. De passage à Paris ces jours-ci, j’entends parler d’une pétition citoyenne signée par plus d’un million de personnes pour obliger les Etats à s’engager plus pour le climat : c’est une belle initiative, et un symbole très fort.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/109195/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hervé Dole est l'un des Vice-Présidents de l'université Paris-Sud, chargé de "médiation scientifique, art, culture, société". Il a reçu des financements du CNES, de la Région Ile-de-France (DIM-ACAV), du CNRS (PNCG) de l'IUF, et de l'ANR. Il est en outre auteur du livre "le coté obscur de l'univers" (2017, Dunod).</span></em></p>
Trinh Xuan Thuan, astrophysicien, professeur à l'université de Virginie et grand vulgarisateur nous parle du grand souffle de l'Univers.
Hervé Dole, Professeur (astrophysique et physique) - Institut d'Astrophysique Spatiale (CNRS & Univ. Paris-Sud), Université Paris-Saclay
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/105899
2018-11-07T21:49:01Z
2018-11-07T21:49:01Z
Ondes et autres histoires ondulatoires
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/243949/original/file-20181105-83638-1mr2kz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Claude Monet, _Nymphéas avec reflet de hautes herbes_.</span> <span class="attribution"><span class="source">Claude Monet</span></span></figcaption></figure><p><em>Nous publions ici un extrait de l’ouvrage « Le monde a des racines carrées » qui paraît ce jour aux Éditions de l’Homme.</em></p>
<hr>
<h2>L’entrechoc des trous noirs</h2>
<p>Il y a des voisins dont on se passerait bien volontiers et d’autres que l’on cherche, au contraire, désespérément à joindre. À un point tel que l’on construit des machines extrêmement complexes pour détecter leur présence. Ces voisins ne sont pas humains, ils se trouvent à des milliards d’années-lumière de nous et ils détiennent des informations primordiales sur l’origine de notre univers. De quoi nous donner envie de les écouter avec une extrême attention…</p>
<p>Rainer Weiss, Barry C. Barish et Kip S. Thorne sont les prix Nobel de physique 2017. Ces trois physiciens sont à l’origine de la mesure des ondes gravitationnelles dont la notion avait été théorisée il y a plus d’un siècle par l’illustre Albert Einstein. Tout comme les ondes sonores ou électromagnétiques, les ondes gravitationnelles sont des déplacements d’énergie, mais qui se font par le biais de déformations du milieu dans lequel baignent tous les astres : l’espace-temps.</p>
<p>Illustrons ce que sont ces ondes par un exemple simple. Lorsque nous nous asseyons sur un canapé, nous déformons le coussin qui nous supporte du fait de notre poids (certains moins que d’autres d’ailleurs). Que cela soit nous ou n’importe quel objet sur le canapé, chaque élément déforme le coussin de façon proportionnelle à sa masse. Par exemple, un téléphone induit une déformation quasi imperceptible (à moins que l’on parle d’un téléphone fixe des années 1930…). Elle est si faible que, si celui-ci se trouve à proximité de nous, il glissera vers notre fessier. Dans cette analogie, nous représentons une étoile ou un trou noir, le canapé représente l’espace-temps, sa déformation représente la gravité de notre fessier ou du téléphone et le téléphone correspond à n’importe quel autre objet céleste moins massif (tel qu’une planète, des débris, une petite étoile).</p>
<p>Maintenant, si, au lieu de nous asseoir, nous nous laissons tomber sur le canapé, cette fois-ci le téléphone sera propulsé dans les airs… alors même que nous ne l’avions pas touché en tombant. Le contact de notre fessier avec le canapé a été si vif qu’il a créé une onde qui s’est propagée dans le canapé et que le téléphone a ressentie. Les ondes gravitationnelles sont similaires à nos ondes de canapé, à la différence près qu’elles ne proviennent pas d’un fessier, mais d’un événement intense et soudain impliquant un ou plusieurs objets massifs célestes – par exemple une étoile qui implose, deux trous noirs qui entrent en collision… Les ondes qui en résultent voyagent dans l’espace-temps jusqu’à ce que nous en captions les ondulations sur Terre, comme le téléphone sur le canapé, à la différence près que ces ondes sont tellement lointaines qu’elles sont devenues à peine perceptibles sur notre planète !</p>
<h2>Interférences</h2>
<p>Pour mesurer de telles oscillations, des appareils immenses appelés interféromètres ont été installés dans les États de Washington et de Louisiane, aux États-Unis, mais aussi en Europe. Bien que les détections qu’ils permettent soient l’objet d’une collaboration internationale, nous nous focaliserons ici sur les détecteurs localisés en Amérique du Nord, les premiers à avoir détecté la toute première onde gravitationnelle.</p>
<p>Les interféromètres mesurent des interférences. Ces dernières peuvent se représenter par le fait de jeter deux cailloux à une certaine distance l’un de l’autre, chacun produira des vagues dont la forme changera au moment de leur rencontre : elles interféreront. En regardant simplement les interférences des ondes, on peut déduire les propriétés des ondes à l’origine de celles-ci. Les interféromètres utilisés pour les ondes gravitationnelles sont composés de deux lasers de 4 km de long, perpendiculaires, qui interfèrent optiquement entre eux. Sur une telle distance, si l’espace-temps est déformé, l’onde lumineuse du laser le sera aussi et on pourra voir un nouveau diagramme d’interférence dans l’appareil de mesure. « Voir » est un bien grand terme, car le déplacement qui a été observé est minuscule : de l’ordre d’un millième du diamètre d’un proton (10-18 m).</p>
<p>Toutes les mesures sont effectuées simultanément par les interféromètres de Washington et de Louisiane. En ayant deux appareils de mesure aussi éloignés l’un de l’autre, on s’assure que les vibrations mesurées proviennent bien d’une source extraterrestre et non d’un séisme local ou simplement de la circulation routière. Car les vibrations, ce n’est pas ce qui manque autour de nous. En permanence, les capteurs détectent les tremblements terriens (le passage d’un avion, des mouvements géologiques, etc.) et cosmiques. Tout se confond, les ondes se mélangent. Il y en a tellement que c’est une cacophonie ! Même si ces oscillations ne sont pas sonores, c’est ce que l’on appelle du bruit : des informations de vibration qui se confondent et qui, a priori, ne nous intéressent pas.</p>
<p>Un signal se distingue du bruit par son intensité, qui est beaucoup plus forte. La notion de rapport signal/bruit est cruciale. Quand, par exemple, vous êtes dans une foule avec un brouhaha ambiant et que, subitement, vous vous retournez parce que quelqu’un commence à parler au micro, c’est parce que le rapport signal/bruit vous a permis de détecter qu’il y avait un son beaucoup plus fort (et sans doute plus important) que le reste. Mais comme vos cris vains pour attirer de loin l’attention de quelqu’un dans une foule bruyante, les signaux à détecter se fondent parfois dans la cacophonie ambiante, ce qui complique la tâche des scientifiques pour les détecter.</p>
<p>Le 14 septembre 2015 à 4 h du matin, alors que les détecteurs étaient en phase finale de test, un signal beaucoup plus fort que les autres et d’une durée de 0,15 seconde est apparu sur les instruments de mesure. C’était le premier signal d’une onde gravitationnelle. Un signal d’onde pareil, visible à l’œil nu (ce qui est exceptionnel), correspondait forcément à un événement cosmique majeur.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/243950/original/file-20181105-83635-8eg301.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/243950/original/file-20181105-83635-8eg301.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=280&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/243950/original/file-20181105-83635-8eg301.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=280&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/243950/original/file-20181105-83635-8eg301.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=280&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/243950/original/file-20181105-83635-8eg301.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=352&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/243950/original/file-20181105-83635-8eg301.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=352&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/243950/original/file-20181105-83635-8eg301.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=352&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les ondes captées, gravitationnelles, sonores ou lumineuses, se définissent ainsi : la fréquence représente le nombre de fois que l’onde réalise un cycle complet en une seconde (son unité de mesure est le Hertz, noté Hz). La longueur d’onde représente la distance (en mètres) entre deux pics de l’onde et la période représente le temps qu’il faut à l’onde pour faire un cycle complet. L’amplitude représente à quel point l’onde est forte (son unité est le décibel pour le son, le mètre pour des vagues, le lux pour de la lumière, etc.). Enfin, la phase représente le point de départ de l’onde.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Viviane Lalande</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>À partir du signal détecté, on dispose de deux types d’information : la fréquence et l’amplitude des ondes. C’est tout. Avec si peu, il est impossible de deviner quel événement est à l’origine de l’émission de ces ondes. Il faut alors avoir recours à des modèles numériques. Par exemple, sachant comment se forme un trou noir, les physiciens simulent informatiquement, selon tous les scénarios imaginables, ce à quoi pourrait ressembler une onde gravitationnelle résultant de la formation d’un trou noir que l’on capterait sur Terre. Ils ont ainsi construit numériquement une bibliothèque de signaux d’ondes gravitationnelles qu’ils comparent avec les mesures qu’ils prennent. Quand cette comparaison est positive, ils savent que leur simulation est représentative de la réalité.</p>
<h2>Ondulation de l’espace-temps</h2>
<p>Après de longues analyses, les chercheurs ont découvert que cette ondulation de l’espace-temps résultait de la fusion, appelée coalescence, d’un trou noir de 29 masses solaires avec un autre de 36 masses solaires. Ce fut un choc dans le monde de l’astrophysique. Comme les physiciens n’avaient pas prévu l’existence d’aussi gros trous noirs, peu de simulations comparatives étaient disponibles. Ils ont donc dû enrichir leur bibliothèque d’ondes pour trouver quel avait été le scénario originel.</p>
<p>La fusion qui a été captée a donné lieu à un trou noir énorme de 62 masses solaires. Or, si l’on additionne les masses des deux trous noirs, 29 + 36, on obtient 65 et non 62. La conservation de la masse et de l’énergie (voir chapitre 8 du livre) s’applique également à des « objets » aussi étranges que les trous noirs. Les trois masses solaires manquantes ne peuvent pas avoir disparu : elles correspondent à l’énergie qui s’est dissipée sous forme d’ondes gravitationnelles pour parvenir sur Terre, 1,3 milliard d’années plus tard. Les ondes captées avaient des fréquences entre 30 et 500 Hz, ce qui correspond à des fréquences qui, une fois converties en ondes sonores, sont audibles pour nous, humains. Les chercheurs ont alors réalisé cette conversion : au lieu de faire osciller l’espace-temps, ils ont fait vibrer une membrane de haut-parleur à la même fréquence que les ondes détectées. Le tout peut s’écouter sur Internet, je vous le recommande. Ce que vous entendrez, c’est l’équivalent d’une vague de l’espace-temps qui a voyagé pendant 1,3 milliard d’années, à travers l’espace. Quand elles ont été émises, l’Homme n’existait pas encore…</p>
<p>Mais revenons aux ondes. Non seulement la détection elle-même était un événement scientifique majeur qui a soulevé de nouvelles questions, mais la nature de la détection constituait elle aussi une grande avancée dans la compréhension de la formation des trous noirs et de la composition de l’univers au moment de leur formation. Les trous noirs se forment à partir d’une très grosse étoile. Au cours de sa vie, l’étoile n’est pas inerte et elle produit des « vents ». Nos vents terrestres sont composés d’air et restent autour de notre planète. Mais les vents stellaires, eux, sont composés de matière provenant de l’étoile et s’échappent de celle-ci, comme si elle s’effritait avec le temps. Ainsi, à la fin de sa vie, quand elle se prépare à s’effondrer sur elle-même pour devenir un trou noir, elle aura beaucoup minci par rapport à ses origines et ne présentera plus qu’un certain pourcentage de sa masse originale.</p>
<p>Lorsque les physiciens lèvent les yeux au ciel et font des prédictions, ils se basent sur la composition de l’univers qu’ils connaissent, celle d’aujourd’hui : « Avec un univers tel que celui que nous connaissons, une étoile composée de tels éléments peut faire telle masse ; au bout de X années, elle se transformera en un trou noir qui aura une taille entre Y et Z. » Même si ce raisonnement est extrêmement simplifié, il illustre bien que la prédiction de la taille des trous noirs part de la connaissance des éléments qui composent actuellement notre univers.</p>
<p>Les trous noirs détectés le 14 septembre 2015 sont beaucoup trop gros par rapport aux prédictions qui avaient cours jusque-là. Cela veut donc dire que l’univers avait une composition très différente lors de leur formation, il y a 4 à 8 milliards d’années. Voilà une découverte qui a de quoi chambouler le monde de l’astrophysique !</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/243942/original/file-20181105-83641-17egcfy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/243942/original/file-20181105-83641-17egcfy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=820&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/243942/original/file-20181105-83641-17egcfy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=820&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/243942/original/file-20181105-83641-17egcfy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=820&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/243942/original/file-20181105-83641-17egcfy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1031&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/243942/original/file-20181105-83641-17egcfy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1031&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/243942/original/file-20181105-83641-17egcfy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1031&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le monde a des racines carrées.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Éditions de l’Homme</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Ondes fascinantes</h2>
<p>Les ondes sont, pour moi, un des sujets les plus fascinants de la physique. Nous sommes bercés et émotionnellement touchés par la musique, cette collection de fréquences bien agencées. Nous nous réchauffons auprès d’un feu émetteur de précieuses ondes infrarouges, nous mangeons des plats réchauffés au micro-ondes et racontons à nos amis, via notre réseau d’ondes téléphoniques, comment nous avons joué dans les grandes ondes mécaniques que sont les vagues de la mer. Nous nous divertissons devant la télé (ou YouTube) et transmettons notre savoir de génération en génération en faisant osciller nos cordes vocales. Nous nous émerveillons devant les couleurs vives d’un champ de coquelicots et sommes rebutés par un choix vestimentaire douteux, lorsque les ondes du spectre visible ne sont pas assemblées à notre goût. Les médecins nous auscultent avec leur stéthoscope qui capte les vibrations du sang dans nos veines, ils nous font passer des examens médicaux avec des rayons X ou bien écoutent le futur bébé avec des ultrasons, alors que ce même bébé se rassure avec les battements du cœur et la voix de sa mère. Nous rentrons chez nous grâce au GPS qui nous guide depuis l’espace, lui-même scruté par les astrophysiciens à l’écoute des ondulations de l’espace-temps pour, simplement, comprendre l’origine de l’univers…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/105899/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Viviane Lalande ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Des vagues de l’océan aux ondulations de l’espace-temps, les ondes sont l’un des sujets les plus fascinants de la physique.
Viviane Lalande, Doctorante en génie mécanique à Polytechnique Montréal, animatrice de la chaîne de vulgarisation Scilabus , Polytechnique Montréal
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/103059
2018-10-02T15:47:03Z
2018-10-02T15:47:03Z
Pourquoi le cosmos me fascine
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/238927/original/file-20181002-85635-8xktt1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=293%2C0%2C2790%2C1083&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Vue du ciel au dessus de l'observatoire ESO.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.eso.org/public/images/potw1119a/">Y. Beletsky/ESO</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la Science 2018 dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a></em></p>
<hr>
<p>Je suis astrophysicienne à l’<a href="https://www.eso.org/public/">European Southern Observatory</a> (Observatoire européen austral, en bref ESO) de Munich, en Allemagne. Mon domaine de recherche est l’astrophysique extragalactique observationnelle. Cette discipline étudie les phénomènes astronomiques au dehors de notre galaxie, la Voie lactée, à partir de données obtenues grâce aux télescopes terrestres et spatiaux. J’étudie les galaxies lointaines pour comprendre comment elles se sont formées et comment elles évoluent au cours du temps. Je suis intéressée par les questions suivantes : comment naissent les étoiles à l’intérieur des galaxies ? Pourquoi certaines galaxies continuent à former des étoiles et d’autres s’arrêtent ? Pourquoi les galaxies ont certaines formes et comment est-ce qu’elles changent au cours du temps ?</p>
<h2>La naissance de ma passion pour l’astronomie</h2>
<p>Après un lycée d’enseignement général privilégiant les sciences humaines et la littérature, j’ai décidé d’étudier l’astronomie à l’Université. Je me sentais poussée par la curiosité de percevoir le monde naturel avec un point de vue scientifique, une perspective qui manquait à mon éducation jusqu’alors. J’étais guidée par le désir d’en savoir plus sur la beauté de l’Univers et en particulier sur le monde fascinant des trous noirs, j’étais inspirée par des questions philosophiques et par la volonté de participer activement à la compréhension des mystères du cosmos. J’ai étudié l’astronomie à l’Observatoire historique de Padoue.</p>
<h2>Mes premiers pas dans la recherche</h2>
<p>Ma première expérience dans le monde de la recherche a eu lieu pendant mon Master lors d’un stage effectué entre l’Université de Padoue et l’Université du Minnesota (États-Unis). Pendant cette expérience enrichissante, j’ai étudié des galaxies lointaines dans lesquelles la formation des étoiles a été brutalement interrompue.</p>
<p>L’expérience constructive de mon stage au Minnesota m’a montré l’importance d’être exposée à différentes méthodes pour appréhender la recherche et m’a fait comprendre les avantages d’échanger des idées avec des personnes ayant une éducation très différente de la mienne. Ce sont les raisons principales pour lesquelles j’ai décidé de quitter mon pays et de commencer un doctorat dans l’environnement international et dynamique du CEA, à Saclay (Essonne), où j’ai poursuivi l’étude des galaxies lointaines.</p>
<h2>La science au pas de course : l’Observatoire européen austral</h2>
<p>Actuellement je travaille comme chercheuse à l’ESO où, pendant trois années, je pourrai poursuivre ma recherche de manière indépendante. L’ESO est l’une des principales organisations pour l’astronomie en Europe. Elle mène une recherche de très haut niveau et fournit aux astronomes des équipements de pointe : il s’occupe en effet de la construction et de la gestion des télescopes situés au Chili, où les conditions climatiques optimales garantissent des observations de très haute qualité. Les objets de ma recherche actuelle sont des galaxies lointaines qui forment encore des étoiles. Quand l’Univers n’avait que quelques milliards d’années, les galaxies avaient des caractéristiques très différentes de celles qu’elles montrent aujourd’hui : leurs formes étaient plus irrégulières et elles formaient leurs étoiles au sein d’énormes concentrations de gaz. La compréhension de la formation de ces grands berceaux gazeux où naissent les jeunes étoiles, de leur évolution avec le temps cosmique et de leur impact sur la vie de l’entière galaxie est crucial et très débattue.</p>
<p>Au-delà de mon travail de recherche, trois fois par an je séjourne à l’<a href="https://www.eso.org/public/france/teles-instr/paranal-observatory/vlt/">observatoire de Cerro Paranal,</a> pour un total de 40 nuits chaque année. L’observatoire de Paranal est situé à 2 600 mètres d’altitude au milieu du désert d’Atacama au Chili, le plus aride sur Terre, où la pollution lumineuse est minimum.</p>
<p>Là j’observe le ciel de l’hémisphère sud avec un des plus grands télescopes du monde, le Very Large Telescope (Très Grand Télescope), conçu et construit par l’ESO. Regarder le ciel de ce lieu complètement isolé, entourée par le silence le plus total, est une expérience émouvante et je suis toujours fascinée par le nombre d’étoiles visibles et la beauté de la Voie lactée !</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/238879/original/file-20181002-85623-1vrm44c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/238879/original/file-20181002-85623-1vrm44c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=193&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/238879/original/file-20181002-85623-1vrm44c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=193&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/238879/original/file-20181002-85623-1vrm44c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=193&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/238879/original/file-20181002-85623-1vrm44c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=242&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/238879/original/file-20181002-85623-1vrm44c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=242&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/238879/original/file-20181002-85623-1vrm44c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=242&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’Observatoire du Cerro Paranal.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Observatoire_du_Cerro_Paranal#/media/File:Paranal_camp.jpg">Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>La communication scientifique, ou comment partager ma passion</h2>
<p>En parallèle de ma passion pour la recherche j’ai aussi développé une fascination croissante pour la vulgarisation : partager avec les autres les belles images de l’univers, faire part des dernières découvertes des chercheurs, débattre des implications de la recherche scientifique dans la vie et la pensée de chacun, et narrer l’immensité de l’inconnu me procurent un véritable engouement. C’est aussi une façon pour moi de m’éloigner de ma propre recherche et me forcer à adopter un point de vue différent : cela m’aide souvent à trouver une meilleure façon d’expliquer ce que je fais, cela m’est utile aussi pour mes conférences, mes propositions de temps d’observations et mes articles, et pour obtenir des nouvelles idées. Il est toujours encourageant de sentir que l’audience est fascinée par l’astronomie !</p>
<p>C’est donc avec enthousiasme que j’ai accepté de participer au <a href="http://www.atmospheresfestival.com/">Festival atmosphère</a>, dans le contexte de la Fête des Sciences, du 11 au 14 octobre 2018. Je vais notamment animer des ateliers par petits groupes, pour les enfants et le grand public, autour du fonctionnement d’un télescope et des différentes sources de lumière. Trois ateliers sont proposés.</p>
<p>Pendent le premier, « Voir l’invisible », les participants découvriront comment explorer l’univers avec l’aide des télescopes submillimétriques, millimétriques et radio.</p>
<p>Pendent le deuxième, « Attraper la lumière des étoiles », les participants construiront des appareils optiques simples pour reproduire les différents modèles de télescopes et ils utiliseront des lasers pour suivre le chemin de la lumière à travers le système optique. Ils comprendront la physique de base des appareils optiques et les différents défis techniques rencontrés dans la création des télescopes modernes.</p>
<p>Finalement, pendent le troisième atelier, « L’astronomie à travers du spectre », les participants exploreront les propriétés de la lumière infrarouge et la compareront avec celles de la lumière optique. Les trois ateliers incluront des activités pratiques pendant lesquelles les participants pourront toucher les outils et construire des maquettes. La pratique est un formidable outil d’apprentissage : on se souvient mieux de ce qu’on a expérimenté personnellement ! Il y auront aussi des affiches et des vidéos qui montreront des merveilleuses images de l’univers et des observatoires d’ESO d’où elles ont été prises. J’invite le public à se laisser surprendre et inspirer par la beauté de l’univers. Ce sera l’occasion de nous émerveiller devant la splendeur fascinante du cosmos !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/103059/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Anita Zanella ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Une astrophysicienne vous raconte sa passion pour sa matière et le bonheur qu’elle ressent à le vulgariser et le partager au plus grand nombre.
Anita Zanella, Research fellow, Observatoire Européen Austral
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/102233
2018-09-25T13:10:22Z
2018-09-25T13:10:22Z
Exposition/expédition en Chine
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/237780/original/file-20180924-85758-ai8feo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C3865%2C2478&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une région étoilée dans le Grand Nuage de Magellan.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/Star#/media/File:Starsinthesky.jpg">ESA/Hubble</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Au commencement, l’espace-temps est en tempête. Les caravelles altières de la cosmologie sont perdues dans la brume du temps. 10 puissance 43 secondes plus tard, le temps se calme et s’engage la procession cosmologique et la formation des galaxies dans un espace qui s’écartèle.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/237911/original/file-20180925-149970-vdqx22.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/237911/original/file-20180925-149970-vdqx22.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=344&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/237911/original/file-20180925-149970-vdqx22.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=344&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/237911/original/file-20180925-149970-vdqx22.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=344&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/237911/original/file-20180925-149970-vdqx22.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/237911/original/file-20180925-149970-vdqx22.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/237911/original/file-20180925-149970-vdqx22.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La spirale barrée est la galaxie, le point, le Soleil. Nous ne sommes même pas au centre de notre système d’étoiles.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Author provided</span></span>
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<p>Sur la terrasse du musée <a href="http://powerstationofart.com/en/">Power Station of Art</a> de Shanghaï, 13,8 milliards d’années après, parmi tous les drapeaux du monde artistique éventés à l’insistance de Christian Boltanski, flotte une galaxie stylisée, qui par sa présence est censée racheter l’amnésie cosmique de l’humanité.</p>
<p>L’univers gémit de se voir séparé en individus. L’art a été inventé pour le consoler. Et ses temples sont toujours pleins : Power Station of Art à Shanghaï et Fondation Cartier pour l’art contemporain, sous l’égide de Gong Yan et Hervé Chandès.</p>
<p>Les institutions artistiques sont un bonheur pour la science rêveuse.</p>
<blockquote>
<p>« Lorsqu’il fait grand jour, les mathématiciens vérifient leurs équations et leurs preuves, retournant chaque pierre dans leur quête de rigueur. Mais quand vient la nuit, flottant parmi les étoiles et s’émerveillant au miracle des cieux, c’est là qu’ils sont inspirés. Il n’y a sans rêve ni art, ni mathématique ni vie ». (Sir Michael Atiyah)</p>
</blockquote>
<p>Elles permettent que la mer du dehors rejoigne le ciel du dedans.</p>
<p>L’astrophysicien présente ses respects au marin : </p>
<blockquote>
<p>« Sans le savoir nous labourons la poussière des étoiles qui nous a été apportée par le vent et buvons l’univers dans une goutte d’eau de pluie, car H2O serre dans sa petite main l’hydrogène cendre de l’explosion originelle appelée big-bang et l’oxygène exhalé par les étoiles explosives, dites supernovæ. »</p>
</blockquote>
<p>Les étoiles sont les mères des atomes et les nuages entre elles (interstellaires) leurs pères ou mères ; je n’ai jamais su discerner le sexe des nuages. Les nuages accouchent de lignées d’étoiles qui font banc de poissons, galaxies. Le nuage est donc notre grand-père. Quel est son antécédent ? Le nuage descend de la lumière, qui s’est en quelque sorte incarnée. Mais dans notre genèse la lumière n’est pas première. Elle est précédée par le Vide, faux vide car plein d’énergie que caressent les physiciens quantiques. La lumière est fille du vide.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/237912/original/file-20180925-149952-lkfz8b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/237912/original/file-20180925-149952-lkfz8b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/237912/original/file-20180925-149952-lkfz8b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/237912/original/file-20180925-149952-lkfz8b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/237912/original/file-20180925-149952-lkfz8b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/237912/original/file-20180925-149952-lkfz8b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/237912/original/file-20180925-149952-lkfz8b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le drapeau qui porte le nom de Franz Kafka s’appelle en réalité l’étoile du berger. Celle qui plane dans le ciel contradictoire de la Chine nouvelle.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jean Michel Alberola</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Quelle est cette mer dont la lumière est le rivage ? Quel est ce temps où il n’y a personne ? Les choses singulières, vous, les étoiles et moi sont promises au déclin, un immense atelier les reconstruit. Pourquoi ?</p>
<p>Courage matelot devant le temps zéro et le ciel en tempête créatrice. N’ayez pas peur. Ne vous laissez pas effrayer par le silence éternel des espaces infinis. Assourdissez Pascals. Attendrissez les infinis. Jouissez du vacarme sporadique des cabines de bateau et maintenez en fleur le cœur de la recherche en mer et ciel. Soyez patients soyez harengs.</p>
<p>Démonstration est faite : toute clarté se paie d’un mystère et vive l’eau qui nous lave et nous rend beaux !</p>
<p>Sur notre île paradisiaque, lancée dans le cosmos, cette eau est pourtant presque exclusivement salée, seule une infime proportion s’échappe de l’Océan en vapeur, pluie, neige et glace pour effectivement faire de nous de beaux vivants…</p>
<p>Je lis ce matin que l’on a tracé une carte du cosmos contenant 1,6 milliard d’objets cosmiques, j’aimerais pouvoir en dire autant de notre bel Océan, ce bel inconnu. Au hasard d’une rencontre sur une terrasse d’un musée en Chine, nous voilà en train de débattre de l’infiniment grand du cosmos versus l’infiniment petit plancton à la dérive dans l’Océan. Deux infinis tout aussi foisonnants, sans cesse redécouverts, surprenants souvent, toujours imprévisibles. Deux complexités, l’une physique de cet espace-temps dit infini, l’autre biologique de ce qu’on appelle la vie semblant pouvoir évoluer à l’infini aussi.</p>
<p>Aujourd’hui, les expéditions scientifiques océaniques <em>Tara</em> avec à leur bord scientifiques et artistes tentent de réconcilier la Science et l’Art, là où la Fondation Cartier excelle à réconcilier l’Art et la Science.</p>
<p>L’Artiste et le Scientifique, le Scientifique et l’Artiste, où commence l’un où finit l’autre ?</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/237913/original/file-20180925-149967-13vihh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/237913/original/file-20180925-149967-13vihh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/237913/original/file-20180925-149967-13vihh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/237913/original/file-20180925-149967-13vihh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/237913/original/file-20180925-149967-13vihh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/237913/original/file-20180925-149967-13vihh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/237913/original/file-20180925-149967-13vihh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Scanner d’une feuille d’<em>Aucuba japonicus</em> qui est pour l’artiste la forme du végétal et du sidéral.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marc Couturier</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Jadis, ils ne faisaient qu’un… curiosité, créativité, sensibilité d’une seule et même personne… « Inventer, c’est penser à côté » dit Einstein. C’est créer toujours.</p>
<p>Sur notre terrasse, bien qu’attablés avec 100 autres convives, nous voilà donc à divaguer dans le Temps, l’Océan et l’Espace. Connaîtrons-nous un jour le Cosmos, connaîtrons-nous un jour la Vie sur Terre dans son intimité… peu importe le but, seul compte le chemin disait l’autre.</p>
<p>En avant, et trinquons en buvant cette goutte d’univers, passée par la Bourgogne !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/102233/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Cassé ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Quand un grand astrophysicien converse avec Romain Troublé, navigateur et directeur de la fondation Tara, il est – forcément – question de cosmos et d’océans.
Michel Cassé, Astrophysicien et écrivain, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/97269
2018-05-29T20:06:24Z
2018-05-29T20:06:24Z
Comment déterminer la taille et l’équipage des vaisseaux spatiaux qui partiront coloniser l’espace
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/220552/original/file-20180527-51141-1ptkqm3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'espace reste à coloniser.</span> <span class="attribution"><span class="source">author</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est publié dans le cadre du <a href="http://www.transmission.unistra.fr/">colloque « Transmission »</a> organisé par l’Université de Strasbourg et l’IUF, qui se tiendra les 28, 29 et 30 mai prochains, et dont nous sommes partenaires.</em></p>
<hr>
<p>En 1995, les astrophysiciens Michel Mayor et Didier Quelozm découvraient la toute première exoplanète orbitant autour d’une étoile autre que notre Soleil : 51 Pegasi b. La découverte de ce monde extraterrestre inaugura dès lors la quête d’un monde habitable pouvant abriter la vie. Vingt-trois ans plus tard, le nombre d’exoplanètes à l’existence confirmée dépasse les 3700 : ainsi, la possibilité de trouver un monde semblable au nôtre se rapproche.</p>
<p>La détection récente de <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Proxima_Centauri_b">Proxima Centauri b</a>, l’exoplanète la plus proche de la Terre que nous puissions trouver puisqu’elle orbite autour de l’étoile la plus limitrophe de notre Soleil, ouvre une autre possibilité intéressante, pour nous autres, habitants de la planète Terre… Ce corps céleste très probablement rocheux et ayant une masse proche de celle de notre planète, est d’un très grand intérêt car sa température d’équilibre implique que l’eau pourrait être liquide à sa surface. Située à 1 295 parsecs (40 000 milliards de kilomètres), Proxima Centauri b est donc une destination idéale. Un court voyage interstellaire ayant pour but l’exploration et la colonisation est théoriquement possible : nous pourrions ainsi implanter l’espèce humaine sur une autre planète.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/220548/original/file-20180527-51130-16gumbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/220548/original/file-20180527-51130-16gumbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/220548/original/file-20180527-51130-16gumbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/220548/original/file-20180527-51130-16gumbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/220548/original/file-20180527-51130-16gumbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/220548/original/file-20180527-51130-16gumbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/220548/original/file-20180527-51130-16gumbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Proxima Centauri b, vue d’artiste.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/Proxima_Centauri_b#/media/File:Artist%27s_impression_of_the_planet_orbiting_Proxima_Centauri.jpg">ESO/M.</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Toutefois, même si une fusée pouvait se propulser à un pour cent de la vitesse de la lumière, vitesse bien plus rapide que celle de nos engins spatiaux habités actuels, le voyage vers Proxima Centauri b durerait tout de même plus de 423 ans… Dans ces conditions, pas de voyage vers les exoplanètes possibles dans le temps d’une vie humaine. Comment faire ? Les chercheurs doivent trouver une solution pour que l’équipage survive des centaines d’années dans l’espace lointain. Pourrait-on, par exemple, congeler les corps ? Malgré les avancées dans le domaine, les technologies de cryogénie ne sont pas encore viables car une fois les cellules congelées, des cristaux de glace se forment au niveau des parois cellulaires (vitrification), menant à la destruction du corps une fois qu’il est réchauffé.</p>
<p>Alors, une hibernation ? Des scénarios d’animation suspendue, où les fonctions physiologiques des membres d’équipage sont ralenties jusqu’à l’arrivée du vaisseau, doivent encore être explorées. Ou bien une maternité volante, où des embryons humains en phase précoce chouchoutés par des robots mûriraient tranquillement jusqu’à destination ? Le problème majeur est l’absence de parents humains pour élever les enfants. De plus, il n’y a jamais eu de population entièrement issue de la fécondation in vitro. Il n’est peut-être donc pas souhaitable que la mission s’appuie sur cette méthode…</p>
<p>La meilleure option pourrait être de compter sur des navires géants autonomes qui voyageraient dans l’espace pendant que leur population serait active. On vivrait et on mourrait à bord jusqu’à arriver à destination. Plusieurs idées de structures et de conceptions ont été présentées dans le recueil de textes <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Islands_in_the_Sky:_Bold_New_Ideas_for_Colonizing_Space"><em>Islands in the Sky : Bold New Ideas for Colonizing Space</em></a> » en 1996 mais leurs hypothèses mathématiques et statistiques ne sont plus adaptées à notre technologie actuelle.</p>
<p>L’anthropologue John Moore a été le premier à utiliser un <a href="https://anthrosource.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1525/aa.2001.103.2.395">outil ethnographique dénommé Ethnopop</a> pour estimer numériquement le nombre minimum de colons pour un voyage multi-générationnel. Ethnopop simule la situation matrimoniale et démographique de petits groupes de colons et utilise des modules externes pour créer épisodiquement des épidémies et des catastrophes. Mais ces modules n’ont jamais été utilisés dans le contexte d’un vol spatial puisque ce programme a été conçu pour calculer et analyser les migrations historiques des premiers groupes humains.</p>
<h2>Eviter la consanguinité</h2>
<p>Considérant un voyage spatial où l’immigration et l’émigration ne sont pas possibles, Moore a conclu qu’une mission de 200 ans devrait avoir un équipage initial de 150 à 180 personnes. Selon lui, l’équipage devrait être jeune et autorisé à ne procréer que tardivement durant le cycle de reproduction des femmes afin de retarder l’apparition de la première génération aussi longtemps que possible. Ces conditions permettent d’éviter une surpopulation
ainsi qu’un taux élevé de consanguinité.</p>
<p>Des calculs plus récents réalisés par l’anthropologue <a href="https://www.pdx.edu/anthropology/cameron-smith">Cameron Smith</a> tendent à réviser ces chiffres à la hausse. Selon lui un équipage initial de 14 000 à 44 000 membres est bien mieux optimisé pour assurer une transmission saine du patrimoine génétique humain. Selon son étude, un équipage de 150 personnes serait toujours au bord de l’extinction dans le cas d’une catastrophe de grande ampleur. Smith préconise un échantillon génétique initial beaucoup plus important, ce qui se traduit par de plus grands équipages. La variation importante de l’estimation de la taille minimale est due aux hypothèses sous-jacentes utilisées par l’auteur, qui a calculé le nombre de colons arrivant à destination en utilisant une approche statistique simple. Ainsi, il semble que l’estimation d’un nombre optimal pour la population initiale est difficile, même si nous ne tenons pas compte des effets psychologiques que la perte de la planète mère peut avoir sur l’équipage.</p>
<h2>Le projet Heritage</h2>
<p>C’est dans ce contexte qu’en 2017, j’ai créé Heritage, qui est un nouvel outil statistique de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9thode_de_Monte-Carlo">simulation de type Monte-Carlo</a>. La physicienne des particules Camille Beluffi, l’astrophysicien Rhys Taylor et l’ingénieur en R&D Loïc Grau sont aujourd’hui associés à cette initiative qui vise à fournir des simulations réalistes en vue de l’exploration spatiale future. Notre projet est multidisciplinaire, il utilise l’expertise de physiciens, astronomes, anthropologues, ingénieurs en aéronautique, sociologues, médecins et de bien d’autres. Heritage est le premier code entièrement dédié au calcul de l’évolution probabiliste d’un équipage à bord d’un navire interstellaire. Il doit permettre, entre autres, de savoir si un équipage avec une taille proposée peut survivre plusieurs générations sans aucun stock artificiel de matériel génétique supplémentaire.</p>
<p>La détermination de la taille minimale de l’équipage est, on l’a compris, une étape essentielle dans la préparation de toute mission multigénérationnelle, affectant les ressources et le budget requis pour une telle entreprise mais ayant aussi des implications sociologiques, éthiques et politiques. Ces éléments sont essentiels pour étudier la création d’une colonie autosuffisante afin que des humains puissent établir des implantations planétaires.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/220549/original/file-20180527-90281-1k3z7m2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/220549/original/file-20180527-90281-1k3z7m2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=475&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/220549/original/file-20180527-90281-1k3z7m2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=475&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/220549/original/file-20180527-90281-1k3z7m2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=475&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/220549/original/file-20180527-90281-1k3z7m2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=597&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/220549/original/file-20180527-90281-1k3z7m2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=597&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/220549/original/file-20180527-90281-1k3z7m2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=597&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Stanford Torus : vue d’artiste d’un habitat spatial.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Donald Davis/NASA</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les premiers résultats de notre collaboration ont été publiés dans le journal du <a href="https://www.bis-space.com/">British Interplanetary Society</a> et un autre article est sous presse. Une présentation publique de nos travaux sera proposée durant le colloque Transmission : on y montrera que les chiffres d’équipages proposées par Moore et Smith ne peuvent être viables sur des voyages de très longue durée. Il s’agit de déterminer les principes et règles de vie nécessaires à ce qu’un équipage de la plus petite taille possible puisse assurer une mission multigénérationnelle viable et résistante à l’apparition de catastrophes et maladies graves. Le code est actuellement en train d’être développé pour pouvoir prédire les besoins nutritionnels de l’équipage et déterminer ainsi la surface nécessaire à réserver à une agriculture spatiale à l’intérieur même du vaisseau. Pour ce faire les serres hydroponiques sont probablement les meilleures options actuelles et de tels calculs donneront bientôt des contraintes sur la taille minimale d’un vaisseau.</p>
<p>Ainsi les premières études étayées d’exploration spatiale commencent à voir le jour. Le sujet est encore vaste et de nombreux facteurs humains, spatiaux, culturels, psychologiques ou sociaux doivent être inclus dans le code informatique. La minutie est indispensable si nous voulons que notre espèce puisse investir de nouveaux mondes extrasolaires.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/97269/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Marin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Avant de quitter le système solaire afin de pérenniser l’espèce humaine dans le cosmos, il faut soigneusement préparer la mission interstellaire.
Frédéric Marin, Post-doc à l'Observatoire astronomique de Strasbourg, Université de Strasbourg
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/93969
2018-04-13T04:23:04Z
2018-04-13T04:23:04Z
Au croisement des univers parallèles
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/212973/original/file-20180403-189827-1onxr7j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C7%2C1280%2C791&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Univers.</span> <span class="attribution"><span class="source">Fourni par l'auteur.</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Triomphante, la physique quantique exhibe ses trophées : lasers, aimants supraconducteurs, mais aussi, dans le cosmos, naines blanches, étoiles à neutrons, vide doté d’énergie et non des moindres. Le Soleil lui-même est un astre quantique, les réactions nucléaires dans l’univers âgé d’une seconde procèdent à travers lui, et plus avant encore l’inflation cosmologique, motorisée par un champ quantique à gravité répulsive dit <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Inflaton">inflaton</a>, dont les frissons, la chair de poule ou fluctuations quantiques sont espérances de galaxies.</p>
<h2>Les premières frissons du monde</h2>
<p>Les taches de rousseur sur le visage de jeune fille de l’Univers suggèrent des variations de densité dans son enfance. Elles peuvent expliquer la formation des premières structures cosmiques. Grâce à l’image que les scientifiques ont créée – le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fond_diffus_cosmologique">fonds diffus cosmologique</a> – on peut voir s’extraire les premières formes d’un substrat indifférencié. Elles émanent des fluctuations quantiques d’une entité primordiale transparente que l’on peut appeler (faux) Vide : faux, parce que regorgeant d’énergie.</p>
<p>La mécanique quantique a, de toute évidence, valeur universelle. Aussi, il est naturel de pousser ses conséquences jusqu’au bout. « Grand gossier » : qui l’avale ingurgite par la même occasion la notion de <a href="http://sibyllephilo.canalblog.com/archives/2017/09/13/35671454.html">Plurivers</a> : comprendre que l’on voit poindre à l’horizon cosmologique une foule d’Univers. En effet, l’unicité n’est pas de mise en pays quantique. L’unité de base est probabilité, exprimée par Ψ2 (le module carré de la fonction d’onde). Le grand défi est alors, pour les physiciens quantiques, d’écrire la fonction d’onde de l’Univers et son évolution. Il y a donc probabilité d’Univers et donc distribution de probabilité de cosmos : en vérité, création hasardeuse de multiples cosmos.</p>
<h2>Le faux vide, élément créateur</h2>
<p>Le cosmologue penche tout naturellement du côté d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_d%27Everett">Everett</a>, de sa vision des mondes multiples et de sa division du sujet observant (autant de « je » que de branches de Ψ), en autant de copies que d’alternative de choix. À chaque événement quantique dichotomique (oui/non) la fonction d’onde se divise en deux et l’univers un en deux univers parallèles, un qui dit oui, l’autre qui dit non. Ainsi l’histoire se ramifie.</p>
<p>La théorie d’Everett est dispendieuse en Univers, mais elle est économe en équations. Elle efface la laideur du « collapsus » (en anglais, <em>wave function collapse</em>, ou réduction de l’onde) et son caractère arbitraire, instantané et incompréhensible et inadmissible par les adeptes de la relativité restreinte, qui nient l’interaction instantanée à distance : <em>spooky</em>, dixit Einstein.</p>
<p>La seule équation qui vaille est celle de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Erwin_Schr%C3%B6dinger">Schrödinger</a>, intégralement déterministe.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213174/original/file-20180404-189824-13kqpd5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213174/original/file-20180404-189824-13kqpd5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=161&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213174/original/file-20180404-189824-13kqpd5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=161&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213174/original/file-20180404-189824-13kqpd5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=161&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213174/original/file-20180404-189824-13kqpd5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=202&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213174/original/file-20180404-189824-13kqpd5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=202&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213174/original/file-20180404-189824-13kqpd5.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=202&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikipedia</span></span>
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</figure>
<p>Ainsi Everett balaie d’un revers de main l’indéterminisme, l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Acosmisme">acosmisme</a> (il n’y a pas de monde quantique, selon <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Niels_Bohr">Niels Bohr</a>) et la laideur du collapsus de Ψ reprochés à l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89cole_de_Copenhague_(physique)">école de Copenhague</a>.</p>
<p>Mais la théorie des mondes multiples (parallèles en l’occurrence) sachant que tout se produit avec certitude, une chose et son contraire, est en délicatesse avec les probabilités. La notion même devient subtile : l’incertitude provient du fait qu’on n’est pas très sûr de savoir sur quelle branche de l’histoire on est. C’est un point délicat que je ne suis pas sûr, moi-même et mes avatars, d’avoir bien compris.</p>
<p>Allez consulter <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/David_Deutsch">Deutsch</a> et <a href="http://philosophiedessciences.blogspot.fr/2014/06/linterpretation-de-la-mecanique.html">Wallace</a>, ils vous en diront bien d’avantage, mais armez-vous de courage, le chemin vers le Plurivers est pentu et chaotique.</p>
<p>Ainsi est-on enclin à ouvrir la porte à la cosmologie quantique, quelque peu hésitante, mais qui voit résolument d’un mauvais œil l’école de Copenhague avec sa propension à surestimer l’observateur, déclencheur du collapsus de la fonction d’onde. En vérité, le monde fut longtemps sans personne pour l’observer, ni le moindre animal et le soleil brille la nuit sur l’autre face de la terre et ne cesse d’exister quand on ne l’observe pas.</p>
<p>L’aspirant cosmologue quantique souscrit donc à la vision d’Everett qui se prête à merveille à l’univers dans son ensemble, avec un recul d’effroi cependant, lorsqu’il voit les Univers se multiplier comme des lapins.</p>
<p>Mais à peine Everett célébré, il faut déjà le quitter : ses univers parallèles ne sont que des vues de l’esprit, car Ψ, la fonction d’onde est dans la tête. Les univers parallèles fourmillent dans l’espace abstrait des fonctions d’onde (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Espace_de_Hilbert">espace de Hilbert</a>). Le Plurivers demande plus de matérialité.</p>
<h2>L’Univers est mort, vive le Plurivers !</h2>
<p>Le cosmologue souscrit donc une alliance avec le cordelier (adepte de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_des_supercordes">théorie des supercordes</a>) et le philanthrope (zélateur du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Principe_anthropique">Principe Anthropique</a>. Armées de leurs formules, ces ouvriers ont construit un décor en trompe-l’œil qu’ils ont appelé <em>superstring landscape</em> avec des univers variés (avec et sans vie). Inspirés par les biologues et leur manière de représenter les modes de repliement des molécules, les peintres paysagistes du Plurivers dessinent un paysage accidenté, pour y disposer les Univers. L’altitude des vallées perchées mesure la fameuse constante cosmologique d’Einstein (dite aussi <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89nergie_noire">énergie noire</a>).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213172/original/file-20180404-189830-x5fipd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213172/original/file-20180404-189830-x5fipd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213172/original/file-20180404-189830-x5fipd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213172/original/file-20180404-189830-x5fipd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213172/original/file-20180404-189830-x5fipd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213172/original/file-20180404-189830-x5fipd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213172/original/file-20180404-189830-x5fipd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Maquillage cosmique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">http://www.rouge-aux-ongles.fr/la-palette-energy-noir-de-tarte/</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Many worlds, many yours</em>. L’Univers est mort ! vive le Plurivers ! le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Monisme">monisme</a> y perd, mais la démocratie cosmique y gagne ainsi que la schizophrénie. C’est la fin de l’Univers-Parti-unique. L’altérité est tirée jusqu’à sa tension de rupture. Les Univers naissent capricieusement, sans intention aucune, au hasard quantique d’une conversion locale de l’énergie du vide en chaleur laquelle engendre la lumière et celle-ci matière et antimatière. À peines éclos, ils brisent leurs chaînes et se fuient les uns les autres ; emportés par l’expansion folle de l’espace. Nous vivons dans un champagne généralisé dont nous n’occupons qu’une bulle causale.</p>
<h2>« Bon pour la vie »</h2>
<p>Dans la multitude des univers, un au moins peut être estampillé « bon pour la vie ». Cette vision éclatée et déchaînée de la cosmologie et du savoir permet d’expliquer de manière (quasi) rationnelle le réglage fin des paramètres de la physique, (constantes de la physique c, h, G, k, masses des quarks et de l’électron, intensité de l’interaction électromagnétique…) qui semble, a priori miraculeux. C’est là son principal intérêt. Les théistes ne baissent pas pour autant les bras et ils travaillent à une théologie du Plurivers… mais ceci est une autre histoire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/93969/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Cassé ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
L’Univers est mort, vive le Plurivers ! Plongée cosmique au sein des mondes parallèles postulés par la physique quantique.
Michel Cassé, Astrophysicien et écrivain, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/91278
2018-03-25T19:28:49Z
2018-03-25T19:28:49Z
Café au lait, ondes gravitationnelles et univers primordial
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/207252/original/file-20180221-132647-199ekgx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=43%2C271%2C4898%2C2764&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Comme une goutte d'eau venant perturber une surface lisse, les ondes gravitationnelles sont des rides de l'espace-temps.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/Q5QspluNZmM">Linus Nylund/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le 11 février 2016 est une date qui restera gravée dans l’histoire de l’astronomie avec l’<a href="http://www2.cnrs.fr/presse/communique/4409.htm">annonce officielle</a> par les laboratoires <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Laser_Interferometer_Gravitational-Wave_Observatory">LIGO</a> et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Virgo_(interf%C3%A9rom%C3%A8tre)">Virgo</a> de la première observation directe d’une onde gravitationnelle. <a href="https://journals.aps.org/prl/abstract/10.1103/PhysRevLett.116.061102">L’article</a> publié dans la prestigieuse revue américaine Physical Review Letters présente la détection qui a été faite en septembre 2015 sur les deux sites américains jumeaux LIGO distants de 3 000 km.</p>
<p>Il s’agit de la fusion de deux trous noirs en un plus gros trou noir de masse toutefois inférieure à la somme des deux masses initiales. La différence – environ trois fois la masse du Soleil – a été transformée en rayonnement d’ondes gravitationnelles.</p>
<p>À l’instar des rides concentriques produites sur une étendue d’eau lorsqu’un élément extérieur, par exemple un caillou que l’on jette, vient perturber ce milieu, une onde gravitationnelle est une ride de l’espace-temps qui se propage à la vitesse de la lumière, soit environ 300 000 km/s. Le concept d’espace-temps a été introduit pour rendre compte de l’indissociabilité de l’espace et du temps. Par exemple, le temps s’écoule plus rapidement dans l’espace que sur Terre où la gravitation est plus forte. Le système GPS ne serait pas aussi précis sans la prise en compte de cette différence.</p>
<p>En 1915 <a href="http://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Albert_Einstein/117783">Albert Einstein</a> propose une nouvelle conception de l’espace, du temps et de la gravité : c’est la <a href="http://www.lemonde.fr/sciences/video/2014/10/27/comprendre-la-theorie-de-la-relativite-generale-d-einstein_4510085_1650684.html">théorie de la relativité générale</a>. Pour Einstein, le mouvement d’un corps n’est pas déterminé par des forces, mais par la géométrie de l’espace-temps qui constitue le tissu de l’univers.</p>
<p>Tout ce qui se déplace traverse l’espace-temps et tout ce qui possède une masse le déforme ; plus la masse est importante, plus la déformation est prononcée. Ainsi le Soleil courbe l’espace-temps telle une balle créant une dépression sur un tissu élastique. En se propageant, l’énergie de l’onde gravitationnelle se dilue et par conséquent son amplitude décroît. Aussi, lorsqu’en septembre 2015 LIGO parvient à détecter une onde gravitationnelle produite il y a un peu plus d’un milliard d’années, c’est un signal extrêmement ténu qui est mesuré !</p>
<h2>Une nouvelle astronomie</h2>
<p>Cette nouvelle astronomie, qualifiée de gravitationnelle, est révolutionnaire car en principe elle peut nous permettre de sonder les tout premiers instants de l’univers. La densité de matière y étant trop forte pour libérer les ondes électromagnétiques (la lumière originelle), l’univers primordial reste totalement opaque aux plus puissants télescopes.</p>
<p>Les ondes gravitationnelles n’ont pas cette contrainte et ont pu <em>s’échapper</em> emportant avec elles une empreinte de la physique du Big Bang. Cette physique reste très spéculative car les expériences de laboratoire comme celles du <a href="https://home.cern/fr">CERN</a> à Genève ne peuvent atteindre que des conditions équivalentes à environ 10<sup>-11</sup>s(et une température de 10<sup>15</sup>°C), ce qui est infiniment loin des conditions de l’univers lorsque celui-ci n’avait qu’environ 10<sup>-35</sup>s(et 10<sup>28</sup>°C).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/207245/original/file-20180221-132654-dnnxij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/207245/original/file-20180221-132654-dnnxij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/207245/original/file-20180221-132654-dnnxij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/207245/original/file-20180221-132654-dnnxij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/207245/original/file-20180221-132654-dnnxij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/207245/original/file-20180221-132654-dnnxij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/207245/original/file-20180221-132654-dnnxij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/207245/original/file-20180221-132654-dnnxij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Vue d’artiste de deux trous noirs massifs spiralant l’un vers l’autre jusqu’à fusionner en un seul.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.lemonde.fr/cosmos/article/2017/06/01/la-fusion-de-deux-trous-noirs-fait-trembler-a-nouveau-la-terre_5137280_1650695.html">Aurore Simonnet/LIGO)</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>À cet instant, un phénomène d’une extrême violence se serait produit : une expansion fulgurante de l’univers appelée inflation lui aurait permis de grossir d’un facteur astronomique (au moins 10<sup>30)</sup> en une infime fraction de seconde (moins que 10<sup>-32</sup>s). Ce scénario proposé au début des années 1980 permet d’expliquer les propriétés du rayonnement fossile – la première lumière de l’univers émise environ 400 000 ans après le Big Bang quand celui-ci, moins dense à cause de son expansion, perd son caractère opaque.</p>
<p>En effet, ce rayonnement fossile est d’une très grande homogénéité sur tout le ciel. Comment deux régions éloignées du ciel qui n’ont pas eu le temps de communiquer entre elles peuvent présenter une telle similitude ? La théorie de l’inflation répond à cette question en proposant que deux points initialement très proches et donc ayant pu échanger de l’information (s’homogénéiser) se seraient retrouvés très éloignés après une expansion de l’univers à des vitesses supérieures à la vitesse de la lumière. Une question demeure : quel est le mécanisme physique à l’origine de l’homogénéisation de l’univers primordial ?</p>
<h2>L’univers primordial</h2>
<p>C’est en se posant une question en apparence anodine, « que se passe-t-il lorsque deux ondes gravitationnelles se rencontrent ? », qu’une réponse inattendue surgit : la turbulence produite par les ondes gravitationnelles a la propriété d’homogénéiser efficacement l’univers.</p>
<p>La question posée peut sembler a priori peu intéressante car les ondes détectées depuis 2016 sont infiniment faibles. Dans ce cas, la physique est dite linéaire et les deux ondes se traversent sans se voir. La situation est bien différente pour l’univers primordial.</p>
<p>À l’image de l’eau qui, en se refroidissant, passe de l’état liquide à l’état solide à 0 °C (on parle d’une transition de phase), l’univers primordial subit aussi une transition de phase après environ 10<sup>-35</sup>s. À cet instant, certaines forces de la nature se séparent. Il s’agit de l’interaction forte et de l’interaction électrofaible : la première régit la physique à l’intérieur des noyaux atomiques et la seconde celle de la radioactivité et de l’électromagnétisme (qui sont en fait deux interactions différentes mais encore unies à ces températures).</p>
<p>Cette transition de phase s’accompagne d’un phénomène très violent : des bulles de vide sont créées, grossissent et rentrent en collision, générant de puissantes ondes gravitationnelles. C’est aussi pendant cette période que l’univers subit une inflation. Un traitement non linéaire est alors nécessaire pour comprendre ce qui se passe lorsque deux ondes – ou une multitude d’ondes – se rencontrent.</p>
<h2>Cascade d’équations</h2>
<p>C’est le sujet de l’<a href="https://journals.aps.org/prl/abstract/10.1103/PhysRevLett.119.221101">article théorique</a> présenté fin 2017 dans la revue <em>Physical Review Letters</em>. Ce travail s’appuie sur des méthodes mathématiques rigoureuses appliquées aux équations de la relativité générale afin de comprendre la réaction de l’espace-temps à une excitation initialement produite à une échelle spatiale Lf.</p>
<p>Dans ce scénario, Lf correspond à la longueur d’onde typique des ondes gravitationnelles produites par les collisions des bulles de vide. On peut montrer dans cette situation que des fluctuations de l’espace-temps sont générées à la fois à des échelles de plus en plus petites et à des échelles de plus en plus grandes que Lf.</p>
<p>Dans le premier cas, on parle de cascade directe vers les petites échelles ; celle-ci est limitée par l’échelle de Planck (10<sup>-35</sup>m) sous laquelle la gravité quantique domine. Dans le deuxième cas, c’est une cascade inverse qui a la propriété remarquable d’être explosive, avec en principe la possibilité d’exciter des fluctuations jusqu’à une échelle infinie en un temps fini.</p>
<p>Le mécanisme décrit s’arrête, cependant, à l’échelle où la turbulence change de régime pour devenir forte. Le phénomène de cascade est bien connu des mécaniciens des fluides : à l’image de l’eau d’une rivière qui rencontre un obstacle, par exemple un rocher, des tourbillons de tailles variées, plus petites que l’obstacle, sont créés en aval ; il s’agit alors d’une cascade directe.</p>
<p>Le pouvoir de mélange de la turbulence est bien connu : si vous déposez un nuage de lait dans votre café, la couleur café au lait n’apparaîtra qu’après plusieurs minutes, alors qu’un coup de cuillère suffira pour mélanger les liquides quasiment instantanément. À l’instar du café au lait, le mécanisme de turbulence d’ondes gravitationnelles a le pouvoir d’homogénéiser efficacement les fluctuations primordiales de l’univers. Cette propriété est importante car elle offre un mécanisme original qui ne nécessite pas l’introduction de nouveaux concepts comme dans le scénario d’inflation. Par ailleurs les solutions obtenues sont analytiques, c’est-à-dire non entachées d’approximation.</p>
<p>À l’heure où de nombreuses questions cosmologiques restent ouvertes (origines de l’énergie sombre, de la matière sombre ou de l’inflation ; nature de la turbulence autour des trous noirs), la physique non linéaire pourrait apporter des réponses originales et surprenantes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/91278/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sébastien Galtier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Remonter au plus près dans l’histoire cosmologique pour s’approcher toujours plus du Big Bang. Les ondes gravitationnelles pourraient avoir joué un rôle majeur dans la construction de l’univers.
Sébastien Galtier, Professeur de physique à l'Université Paris-Sud, École polytechnique
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tag:theconversation.com,2011:article/93391
2018-03-14T23:38:44Z
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Stephen de Cambridge, visionnaire de l’infini
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/210322/original/file-20180314-113472-1gex9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=23%2C35%2C3948%2C2592&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Stephen Hawking en apesanteur.</span> <span class="attribution"><span class="source">Nasa/Wikimedia</span></span></figcaption></figure><p>Un visionnaire de l’infini vient de mourir. Stephen Hawking était révéré en raison de ses contributions révolutionnaires à la compréhension du cosmos, de son origine, de sa géométrie et de son évolution : de la fin et du début des temps, de l’infiniment dense (trous noirs et Big bang) et de l’infiniment jeune (naissance de l’univers).</p>
<p>De ses mathématiques et de son verbe, ont émergé le temps imaginaire et les trous noirs rayonnants. Il a marié la relativité générale (école du dehors) à la mécanique quantique et à la thermodynamique (école du dedans). Lisons une phrase de l’<a href="https://www.theguardian.com/science/2018/mar/14/stephen-hawking-obituary">éloge funèbre</a> que vient de lui consacrer son ami et collègue, le mathématicien Roger Penrose :</p>
<blockquote>
<p>« Physical impairment seemed compensated by almost supernatural gifts, which allowed his mind to roam the universe freely, upon occasion enigmatically revealing some of its secrets hidden from ordinary mortal view. »</p>
</blockquote>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/utNQe7ZPH0Y?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« A brief history of Stephen Hawking ».</span></figcaption>
</figure>
<p>Stephen Hawking est un mythe mais c’est comme éminent théoricien que je veux, à l’heure de sa mort, le célébrer. Il fut l’annonciateur de la triple alliance entre gravitation, physique quantique et thermodynamique : insufflez dans les trous noirs l’incertitude afférente, ils auront la fièvre et se mettront à luire. Cette idée brillante a suscité quantité de travaux autour de ces objets déroutants.</p>
<p>Sous sa plume, trop précis pour être quantique, le trou noir est trop noir, trop radicalement sombre : Stephen l’a conçu, ni trou, ni noir, mais gris sur les bords. Il a fait un premier pas vers la théorie quantique de la gravitation en adoucissant, édulcorant et rendant aimable les infinis ou en allongeant le zéro.</p>
<h2>Les trous noirs ont de la température</h2>
<p>Les faits, les affreux faits qui tuent les belles théories, s’agissant des trous noirs, sont plus étranges que leur fiction. Hawking leur a redonné le sourire. Ce ne sont plus des images de la mort dans le ciel. Ils ont de la température et en conséquence ils s’évaporent et brillent dans l’invisible (pas les gros, à toute fin pratique, mais les petits). Contrairement aux étoiles, plus ils sont légers, plus ils brillent. Les trous noirs primordiaux, de la masse d’une montagne, nés tout juste après le Big bang, sont recherchés dans le ciel dans le registre des rayons gamma, car ce sont les plus généreux en brillance. Leur découverte aurait valu le prix Nobel à Stephen mais le ciel n’en a pas voulu ainsi.</p>
<p>Stephen Hawking s’est longtemps interrogé sur la perte d’information induite par la chute dans un trou noir, interdite par la physique quantique. Il a raisonné, en double, sur la manière dont le trou noir tout à la fois efface l’information et la conserve. L’article qui s’en est suivi publié sur le serveur ArXiv en janvier 2016, a défrayé la chronique : selon la relativité générale d’Einstein, tout ce qui franchit la frontière (horizon) d’un trou noir est perdu a jamais, y compris la lumière. C’est la raison pour laquelle le trou est noir. Mais dans les années 1970, comme nous l’avons esquissé, Stephen de Cambridge, héritier de la chaire de Newton, a fait valoir que du rayonnement s’en échappait selon la mécanique quantique car le sombre absolu qui se confond avec l’ignorance totale n’est point de mise en vertu du principe d’incertitude.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/210321/original/file-20180314-113455-1ttporz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/210321/original/file-20180314-113455-1ttporz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/210321/original/file-20180314-113455-1ttporz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/210321/original/file-20180314-113455-1ttporz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/210321/original/file-20180314-113455-1ttporz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/210321/original/file-20180314-113455-1ttporz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/210321/original/file-20180314-113455-1ttporz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">À propos des trous noirs : « Can you hear me ? »</span>
<span class="attribution"><span class="source">Stephen Hawking</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>De ce fait, le trou noir maigrit jusqu’à disparaître et ne subsiste de ce fait que son rayonnement. Le problème est que celui-ci ne contient aucune information pertinente sur ce qu’a avalé le trou : elle est perdue à jamais et ceci contrevient à la physique moderne, et notamment à la mécanique quantique qui énonce que les processus dans l’univers sont réversibles. Pour circonvenir la difficulté, Hawking a proposé que les trous noirs soient couronnés par une sorte de halo, où se grave la signature de ce qui tombe. Pour mieux visualiser, voici ce que Dennis Overbye, journaliste scientifique éminent en dit : « Ce motif, comme les pixels de votre iPhone ou les rainures ondulées d’un disque vinyle, contient des informations sur ce qui a traversé l’horizon et disparu. »</p>
<p>On mesure l’audace iconoclaste de Stephen. L’existence du « rayonnement de Hawking » a stupéfié la communauté scientifique qui ne s’en est toujours pas vraiment remise. Son dernier tour de passe-passe va lui ôter le sommeil. Edward Witten, théoricien de l’Institut d’Études avancées de Princeton, confesse : </p>
<blockquote>
<p>« Essayer de mieux comprendre la découverte de Hawking a été une source vive de réflexion pendant près de 40 ans maintenant, et nous sommes probablement encore loin de l’appréhender complètement. On est toujours devant quelque chose de nouveau. »</p>
</blockquote>
<h2>Cosmologie d’origine démente</h2>
<p>Dans son autre domaine de prédilection, la cosmologie, ses recherches se situent à la limite des connaissances. En 1970, Roger Penrose et Stephen Hawking ont énoncé un théorème énonçant que la pure théorie d’Einstein conduisait sans appel à la conclusion que notre univers émanait d’un point de densité infinie, une singularité mathématique euphémisme d’aberration. La cosmologie d’alors se donnait une origine démente et une évolution licite et tout le monde était content. Mais c’était sans compter la mécanique quantique qui abhorre la précision fatale du point (l’onde amène son flou et la particule sa ponctualité) et dénie en vérité leur existence réelle, tout comme la nature, dit-on, a horreur du vide. Il fallait donc transcender la théorie de la relativité générale.</p>
<p>En transposant les techniques qui avaient fait leur preuve en physique des particules à la cosmologie, James Hartle et Stephen Hawking, ont tenté de résoudre l’héroïque équation de la cosmologie quantique de Wheeler-DeWitt de manière moins approchée que leurs prédécesseurs, ceci dans des cas simples à l’aide de l’intégrale de chemin de Feynman. Les deux pionniers de la gravité quantique ont émis une proposition en 1983 qui allait faire grand bruit. Dans leur équation cosmologique, le temps, au lieu d’être décrit par un nombre réel, l’est par un nombre imaginaire (au sens mathématique du terme) ce qui revenait à dire que l’espace-temps à 4 dimensions était, avant son début, espace à 4 dimensions.</p>
<p>L’état pré-temporel du monde ne serait pas un point de densité infini et le cosmos aurait émergé d’une géométrie quantique aussi floue que les trajectoires des particules dans un atome. On en frémit encore dans les cénacles bibliques. On mesure l’audace métaphysique et même religieuse de cette perspective.</p>
<p>Mais il faut encore la prendre avec un grain de sel. La proposition d’un univers sans frontière avec temps imaginaire fascine car elle propose une solution au problème de la naissance du temps, mais ce n’est pas la seule. Le physicien Alexandre Vilenkin suggère pour sa partque l’univers s’est infiltré comme une onde à partir d’un état qui n’est ni espace ni temps abusivement appelé « néant » puisqu’il suppose l’existence préalable des lois de la physique. Bref le secret originel n’est pas levé mais la physique ose s’y confronter. Courage devant le temps zéro qui est un instant dans un temps qui n’existe pas encore !</p>
<h2>Humain et cosmique</h2>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"973853959587852288"}"></div></p>
<p>Mais revenons à l’homme. Hawking n’a cessé de partager sa science. Le phénoménal succès de <em>Une brève histoire du temps</em> (25 millions d’exemplaires) témoigne de son talent de divulgateur. Il a clairement joui de sa notoriété, visité le pôle Sud et vécu un moment en apesanteur. Il restera comme le promoteur des idées scientifiques des siècles XX et XXI. Ses visions scientifiques et sa lutte spectaculaire pour survivre ont fait de lui un véritable héros moderne. Humain et Céleste, on l’a vu financer un projet de mini voiles solaires et s’ériger en humaniste dans de nombreuses questions de société.</p>
<p>Souvenez-vous de sa maxime, quand vous tomberez comme lui dans la mort :</p>
<blockquote>
<p>« [Black holes] are not the eternal prisons they were once thought. If you feel you are trapped in a black hole, don’t give up. There is a way out. »</p>
</blockquote><img src="https://counter.theconversation.com/content/93391/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Cassé ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Le physicien Stephen Hawking a révolutionné notre compréhension du cosmos et de ses icônes, les trous noirs.
Michel Cassé, Astrophysicien et écrivain, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)
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tag:theconversation.com,2011:article/93396
2018-03-14T23:38:42Z
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Le rayonnement de Monsieur Hawking
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/210374/original/file-20180314-113472-t0l6rf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C81%2C1682%2C926&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Stephen Hawking au Gonville & Caius College, Cambridge.</span> <span class="attribution"><span class="source">Lwp Kommunikáció/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Même achevée, toute vie se prolonge hors d’elle-même, dans le ciel qu’elle devient pour d’autres vies. Même si Stephen Hawking vient de disparaître, son « rayonnement » demeure, le mot étant ici à prendre à tous les sens du terme.</p>
<p>Ses premiers travaux concernaient les trous noirs et, justement, leur « rayonnement ». L’histoire commence au début des années 1970 lorsqu’un jeune physicien, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacob_Bekenstein">Jacob Bekenstein</a>, découvre un aspect surprenant de la gravitation. On avait déjà remarqué que les lois d’évolution des trous noirs s’expriment de façon curieusement semblable aux lois de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Thermodynamique">thermodynamique</a>. Par exemple, la surface d’un trou noir s’accroît de façon irréversible lorsqu’il absorbe de la matière ou du rayonnement. En outre, la rencontre de deux trous noirs aboutit à la formation d’un nouveau trou noir, dont la surface est plus grande que la somme des surfaces des deux trous noirs présents au départ.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/210382/original/file-20180314-113472-r6f9zf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/210382/original/file-20180314-113472-r6f9zf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=312&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/210382/original/file-20180314-113472-r6f9zf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=312&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/210382/original/file-20180314-113472-r6f9zf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=312&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/210382/original/file-20180314-113472-r6f9zf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=393&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/210382/original/file-20180314-113472-r6f9zf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=393&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/210382/original/file-20180314-113472-r6f9zf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=393&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Entropie d’un trou noir formule de Bekenstein-Hawking.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikipedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces propriétés suggéreraient un rapprochement possible entre la surface d’un trou noir et le concept d’entropie, auquel est associé le deuxième principe de la thermodynamique (qui indique que tout système isolé a une entropie qui ne peut que croître). Jacob Bekenstein associa donc à tout trou noir une entropie, donc une température. Mais comment parler de la température d’un trou noir, qui suppose que de la chaleur est émise par lui, dès lors que rien n’est censé pouvoir en sortir ?</p>
<h2>Une perte radicale d’information</h2>
<p>Cette contradiction apparente fut remarquée par Stephen Hawking. Sachant qu’un trou noir s’installe rapidement dans un état stationnaire, il en tira la conclusion que la formation d’un trou noir équivaut à une perte radicale d’information : « Le trou noir, écrit Hawking, est indépendant de la composition du corps, matière ou antimatière, ainsi que de sa forme, qu’elle soit sphérique ou très irrégulière ». Il ne garde donc aucune trace de son origine, ni de son histoire.</p>
<p>On peut donc en principe se débarrasser dans un trou noir de tout ce que l’on veut, qu’il s’agisse de matière ou d’antimatière, et ce que l’on peut ensuite observer depuis l’extérieur ne permet plus de « remonter » au contenu même du trou noir. Ses seules propriétés observables sont sa charge électrique, son moment cinétique et sa masse, tous les autres détails de sa composition et de son histoire préalable nous demeurant parfaitement inaccessibles.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/210380/original/file-20180314-113455-1jqexb8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/210380/original/file-20180314-113455-1jqexb8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/210380/original/file-20180314-113455-1jqexb8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/210380/original/file-20180314-113455-1jqexb8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/210380/original/file-20180314-113455-1jqexb8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/210380/original/file-20180314-113455-1jqexb8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/210380/original/file-20180314-113455-1jqexb8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Vue d’artiste du trou noir Cygnus X-1 qui aspire la matière de l’étoile bleue proche.</span>
<span class="attribution"><span class="source">NASA</span></span>
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<p>Stephen Hawking en conclut que tout trou noir pouvait être mis en équilibre avec un rayonnement thermique de température non nulle, donc qu’effectivement les trous noirs émettent de l’énergie, comme s’il s’agissait de corps chauds ordinaires. Autrement dit, ils « s’évaporent », même si c’est à un rythme très faible. C’est la physique quantique, dont les principes ne sont guère compatibles avec ceux de la théorie de la relativité générale, qui rend compte de ce phénomène : le vide quantique est plein de paires de particules et d’antiparticules virtuelles qui sans cesse se matérialisent puis s’annihilent ; dans un trou noir, au bord de sa surface, un des membres d’une telle paire peut retomber dans le trou noir, tandis que l’autre, sans partenaire avec lequel s’annihiler, peut s’échapper dans l’infini. Elle apparaît ainsi comme un rayonnement émis par le trou noir, bien sûr appelé « rayonnement de Hawking ».</p>
<h2>L’univers sans bord</h2>
<p>Dans le prolongement de ces travaux menés aux frontières de la théorie de la relativité générale et de la physique quantique, Stephen Hawking s’intéressa bien sûr au commencement de l’univers, dont la physique présente certaines similarités avec celle d’un trou noir. Il explora certaines pistes, notamment celles qui aboutissent à l’idée que le concept même d’origine de l’univers se perd dans les brumes quantiques de l’espace-temps, où les histoires s’enchevêtrent et se superposent, et où le concept de condition initiale devient lui-même problématique. Les concepts d’espace et de temps que nous utilisons pour situer et penser l’origine de l’univers ne seraient en somme que des concepts émergents qui n’ont surgi qu’à partir d’un certain moment de l’histoire de l’univers. Parler d’une origine temporelle de l’univers n’aurait donc aucun sens. Stephen Hawking a proposé une conjecture, celle d’un « univers sans bord », selon laquelle l’univers est de volume fini mais n’a pas de limite, ce qui implique qu’il n’a pas eu de commencement.</p>
<h2>Rencontre à Ajaccio</h2>
<p>Mais Stephen Hawking n’était pas qu’un physicien. C’était aussi un homme, d’un courage extrême et dont l’humour pouvait être ravageur. J’ai eu la chance de pouvoir le rencontrer en 2008 à Ajaccio, en compagnie d’un autre physicien, Jean Iliopoulos, à l’occasion des rencontres « Science et humanisme ». Le voyant pour la première fois, je fus frappé par la gravité de son handicap : il était dans son fauteuil roulant, tout recroquevillé, semblant presque inconscient. Mais quelle vie à l’intérieur ! Nous pûmes lui poser plusieurs questions, auxquelles il répondait en actionnant l’une de ses paupières, ce qui lui permettait de sélectionner certains des mots qui défilaient sur l’écran de son ordinateur, puis son synthétiseur vocal faisait entendre sa réponse. Mais au bout de quelques minutes, son handicap nous sembla s’être relativisé, voire évaporé, comme si notre conversation avait permis que nous transpercions les apparences, que nous accédions directement à ce que son corps déformé nous avait d’abord masqué. À notre grande surprise, il nous dit qu’il ne pensait pas que le LHC permettrait de détecter le boson de Higgs, ce qu’il fit pourtant en 2012. La réponse à notre dernière question étant plus longue à venir que les autres, nous crûmes qu’elle devait être plus complexe que les autres. Mais elle tomba, nette : « I don’t understand your question ! ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/93396/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Etienne Klein ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Parler d’une origine temporelle n’aurait aucun sens. L’univers serait sans bord, selon la fascinante physique de Stephen Hawking.
Etienne Klein, Directeur de recherches au CEA, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)
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