tag:theconversation.com,2011:/us/topics/pays-emergents-26780/articlespays émergents – The Conversation2023-07-19T19:12:07Ztag:theconversation.com,2011:article/2099832023-07-19T19:12:07Z2023-07-19T19:12:07ZLa Chine principal créancier mondial, une fragilité de plus pour les pays émergents et en développement<p>Au cours des deux dernières années, une <a href="https://www.fitchratings.com/research/sovereigns/sovereign-defaults-are-at-record-high-29-03-2023">nouvelle vague de défauts souverains</a> a vu le jour dans les économies émergentes et en développement (Argentine, Biélorussie, Équateur, Ghana, Liban, Sri Lanka, Suriname, Ukraine, Zambie). Avec <a href="https://www.imf.org/external/pubs/ft/ar/2022/in-focus/debt-dynamics/">25 % des économies émergentes et 60 % des économies en développement surendettées ou présentant un risque élevé de surendettement</a> pour l’année 2022, le risque d’une série de défauts dans les EMDE reste élevé.</p>
<p>Le <a href="https://theconversation.com/fed-et-bce-deux-rythmes-mais-une-meme-strategie-contre-linflation-185059">resserrement de la politique monétaire américaine</a>, la hausse des primes de risque sur les dettes souveraines, la réduction des perspectives de croissance mondiale, les tensions géopolitiques inhérentes à la guerre en Ukraine et un niveau d’endettement public élevé constituent autant de vulnérabilités augmentant le risque d’épisodes de tensions sur les dettes souveraines des EMDE.</p>
<p>L’émergence de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/chine-20235">Chine</a> comme créancier public de grande envergure constitue une vulnérabilité supplémentaire pour les EMDE. Depuis 2015, la Chine est en effet devenue le <a href="https://doi.org/10.1016/j.jinteco.2021.103539">principal créancier public des économies émergentes et en développement</a>.</p>
<p>Les prêts de la Chine s’opèrent par l’intermédiaire de différents créanciers, situés directement sous la supervision du conseil d’État chinois, dont les plus importants sont deux banques publiques : la Banque de développement de Chine et la Banque d’export-import de Chine. Ces deux banques ont, entre 2000 et 2017, réalisé à elles seules plus de 70 % des prêts transfrontaliers directs réalisés par la Chine à destination des EMDE dont plus de 90 % à destination d’États souverains ou d’entreprises d’État.</p>
<p>Alors qu’en 2000, la dette publique extérieure des EMDE détenue par les créanciers publics chinois s’élevait à moins d’un milliard de dollars, en 2017 c’est 355 milliards de dollars que les créanciers chinois détenaient (graphique 1).</p>
<p><iframe id="QKo06" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/QKo06/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>La politique de gestion des crises de la dette souveraine menée par la Chine dans les EMDE se fonde sur deux stratégies. La première consiste à restructurer la dette de ses débiteurs en la rééchelonnant s’ils sont proches du défaut ou en situation de défaut, tandis que la seconde repose sur l’octroi de « prêts de sauvetage » aux pays débiteurs en situation de grandes difficultés financières. Pour les EMDE, le fort endettement vis-à-vis des créanciers chinois les rend d’autant plus vulnérables que ces deux stratégies n’ont pas pour objectif de réduire le fardeau de leurs dettes.</p>
<h2>Des « prêts de secours » qui allongent la dette</h2>
<p>En effet, les créanciers publics chinois ont, sur la période 2000-2019, restructuré la dette publique extérieure de leurs débiteurs en recourant majoritairement, dans 92 % des cas, au rééchelonnement par extension de la maturité de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/dette-20647">dette</a> et/ou suspension temporaire des paiements (graphique 2).</p>
<p><iframe id="SYB4F" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/SYB4F/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Une politique similaire à celle suivie par le Club de Paris (groupe informel composé de 22 pays créanciers) sur la période 1970-1999 quand la quasi-intégralité des allègements de dette consistait en un rééchelonnement ayant pour objectif de <a href="https://doi.org/10.1016/j.worlddev.2018.07.003">garantir la valeur faciale des créances détenues</a> plutôt que restaurer la soutenabilité de la dette publique de ses débiteurs.</p>
<p>Ensuite, au cours des années 2000, le Club de Paris, ayant la volonté de restaurer la soutenabilité de ses débiteurs, a favorisé les rééchelonnements accompagnés d’une réduction de la valeur faciale de la dette (« haircut »), dans environ 70 % des restructurations. Une telle stratégie est plus favorable pour les économies en situation de défaut car, dans les années qui suivent, cette politique se traduit par une <a href="https://doi.org/10.1111/jeea.12166">croissance économique plus élevée, une amélioration de la notation de crédit</a> et une <a href="https://doi.org/10.1016/j.worlddev.2018.07.003">réduction de la pauvreté et des inégalités</a>, contrairement à une politique se fondant uniquement sur un rééchelonnement qui <a href="https://www.ifw-kiel.de/de/publikationen/journal-article/2023/debt-distress-on-chinas-belt-and-road-18013/">ne réduit pas le fardeau de la dette</a>.</p>
<p>[<em>Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>En revanche, pour les EMDE fortement endettées vis-à-vis de l’empire du Milieu et qui <a href="https://www.ifw-kiel.de/de/publikationen/journal-article/2023/debt-distress-on-chinas-belt-and-road-18013/">font face à des épisodes de « stress » sur leur dette</a>, la Chine leur vient en <a href="https://www.nber.org/papers/w31105">aide en leur fournissant des « prêts de secours »</a> afin d’éviter un défaut de paiement imminent. Du fait de leurs très courtes maturités, ces prêts sont très fréquemment réitérés ce qui se solde par un allongement de la dette.</p>
<p>Ces prêts sont également octroyés à des taux d’intérêt considérablement élevés par rapport à ceux pratiqués par les créanciers multilatéraux comme le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/fonds-monetaire-international-fmi-54333">Fonds monétaire international</a> (FMI) ou la Banque mondiale : en moyenne 5 %, un <a href="https://www.nber.org/papers/w31105">taux presque deux fois plus élevés que celui proposé par le FMI</a>, alourdissant ainsi considérablement le fardeau des dettes. Ces renflouements répétés rappellent les <a href="https://doi.org/10.1111/jeea.12166">pratiques de « prêts en série » du FMI</a> au cours des dernières décennies et, plus généralement, les restructurations en série et les crédits-relais accordés par les créanciers privés <a href="https://www.aeaweb.org/articles?id=10.1257/mac.5.3.85">pendant la crise de la dette des années 1980</a>.</p>
<p>La stratégie consistant à procéder à des rééchelonnements de dette concerne principalement les économies en développement, tandis que la Chine recourt à l’octroi de prêts de sauvetage surtout dans les économies émergentes. Cette différence d’approche peut s’expliquer, en partie, par le niveau d’exposition différent des créanciers chinois aux emprunteurs souverains dans les deux groupes de pays : seuls 20 % des créances chinoises concernent les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/pays-en-developpement-130323">pays en développement</a> (donc 80 % pour les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/pays-emergents-26780">pays émergents</a>), ce qui peut expliquer que la Chine recourt pour eux à des rééchelonnements <a href="https://doi.org/10.1257/pandp.20231004">car un défaut de leur</a> part n’a qu’un impact limité sur les bilans des créanciers chinois contrairement à un défaut des économies émergentes.</p>
<h2>Une approche chinoise unilatérale</h2>
<p>Au niveau international et face à l’incapacité des EMDE à servir leurs dettes à la suite de la crise sanitaire, une initiative de suspension du service de la dette (DSSI, pour <em>debt service suspension initiative</em> en anglais) avait vu le jour le 15 avril 2020, en pleine pandémie. Celle-ci a permis aux 73 pays éligibles, qui le souhaitaient, de suspendre temporairement (jusqu’à fin 2021) les remboursements d’intérêts et de principal sur les prêts bilatéraux du G20.</p>
<p>À la recherche de solutions plus pérennes, le G20 et les 22 membres du Club de Paris ont approuvé en novembre 2020 un nouveau « Cadre commun pour le traitement de la dette au-delà de la DSSI » pour permettre une remise permanente de dette aux pays éligibles. Ce nouveau cadre suppose une adhésion au principe d’égal traitement des créanciers formalisé par le Club de Paris.</p>
<p>Les EMDE pourraient donc être rassurés par la volonté <em>de jure</em> de la Chine de se coordonner avec les autres créanciers mais, <em>de facto</em>, elle a jusqu’il y a peu privilégié une approche unilatérale dans ses restructurations, en ne prenant pas part <a href="https://doi.org/10.1016/j.inteco.2021.02.004">aux négociations multilatérales</a> organisées par le Club de Paris. De plus, une grande partie des contrats signés avec les créanciers publics chinois contiennent une <a href="https://doi.org/10.1093/epolic/eiac054">clause « No Paris Club »</a> visant à garder leurs dettes hors des restructurations collectives pour obtenir un remboursement préférentiel par rapport aux autres créanciers.</p>
<p>Le durcissement toujours en cours de la politique monétaire dans les pays avancés et les mauvaises perspectives de croissance pour l’économie mondiale font craindre de nouveaux épisodes de « stress » et défauts des EMDE sur leur dette extérieure. La situation pourrait être plus délicate encore dans ces pays si la Chine décidait de poursuivre sa politique de gestion des crises de la dette.</p>
<p>En donnant son accord de principe sur « des pertes » sur ses créances lors de la restructuration de la dette souveraine du Ghana le 17 mai 2023, la Chine a fait un premier pas dans la bonne direction. Mais lors de la décision finale sur la restructuration de la dette souveraine de la Zambie, le 23 juin 2023, après presque trois ans de négociations, elle a à nouveau opté pour sa stratégie antérieure : rééchelonnement avec une <a href="https://www.ft.com/content/e3b66798-1c5c-4c0c-8339-83a76e1e2c34">période de grâce de 3 ans sur les paiements d’intérêt et extension de la maturité de la dette</a>. Le début d’une nouvelle stratégie, que l’accord de principe pour le Ghana pouvait laisser espérer, reste encore à concrétiser.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209983/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Contrairement à de nombreux prêteurs internationaux, Pékin prévoit des rééchelonnements de dette mais jamais de réduction faciale du montant à rembourser pour les pays en crise.Florian Morvillier, Économiste, CEPIIErica Perego, Économiste, CEPIILicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1820912022-05-01T16:44:20Z2022-05-01T16:44:20ZL’OMC face au défi du plurilatéralisme<p>L’<a href="https://docs.wto.org/dol2fe/Pages/SS/directdoc.aspx?filename=q:/WT/L/1129.pdf&Open=True">accord</a> signé en décembre dernier par 67 des 164 pays membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a fait la joie de João Aguiar Machado, représentant permanent de l’Union européenne auprès de l’organisme. La conclusion des négociations est venue comme une respiration pour un organisme qui n’était pas parvenu à un résultat significatif depuis 2013. Le texte vise à <a href="https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/omc-un-accord-pour-faire-decoller-le-commerce-des-services-1369512">simplifier les procédures administratives et réglementaires relatives aux échanges de services</a>, qui représentent aujourd’hui plus de 20 % du commerce mondial.</p>
<p>Une respiration, car l’OMC traverse aujourd’hui une <a href="https://www.cairn.info/revue-paysan-et-societe-2021-3-page-17.htm">crise profonde</a>, incapable de conclure le <a href="https://www.wto.org/french/tratop_f/dda_f/dda_f.htm">cycle de Doha</a>, ouvert en 2001, et de réguler le commerce mondial. Celle qui a pris le relais du <em>General agreement on tariffs and trade</em> (Gatt) au 1<sup>er</sup> janvier 1995 ne semble également plus en mesure de remplir sa fonction de règlement des conflits commerciaux. Les États-Unis, en particulier, se sont <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/12/10/l-organisation-mondiale-du-commerce-depose-les-armes_6022296_3234.html">opposés au renouvellement des juges</a> d’appel de son Organe de règlement des différends.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1466419495690453000"}"></div></p>
<p>De nombreux observateurs voient l’avenir de l’OMC dans le <a href="https://www.g20-insights.org/policy_briefs/boosting-g20-cooperation-for-wto-reform-leveraging-the-full-potential-of-plurilateral-initiatives/">développement du plurilatéralisme</a>. Par accord plurilatéral, on désigne un traité signé entre un nombre limité de pays en vue de libéraliser les échanges dans un secteur en particulier. Cette libéralisation peut se faire « à géométrie variable », étant donné que disparaît le besoin d’un <a href="https://www.wto.org/french/thewto_f/whatis_f/10thi_f/10thi07_f.htm">consensus</a> entre un panel très large de pays comme c’est le cas à l’OMC. La généralisation de ces accords mettrait également fin au principe de l’engagement unique, en vertu duquel aucun thème de négociation ne peut faire l’objet d’un accord séparé. C’est l’adage « rien n’est conclu tant que tout n’est pas conclu ».</p>
<p>Les accords plurilatéraux en vigueur reconnus par l’OMC sont à ce jour au nombre de quatre. Les <a href="https://www.wto.org/french/thewto_f/whatis_f/tif_f/agrm10_f.htm">deux premiers</a> sont entrés en vigueur au début des années 1980, à la suite du Tokyo round. Ils concernent le commerce des aéronefs civils et l’octroi de marché publics et unissent respectivement 33 et 48 parties. Le <a href="https://www.wto.org/french/tratop_f/inftec_f/inftec_f.htm">troisième</a>, signé à l’origine par 29 participants de la Conférence ministérielle de l’OMC qui s’est tenue à Singapour en décembre 1996, porte sur les technologies de l’information. Outre la signature de l’accord de décembre dernier, des négociations plurilatérales sont en cours sur le <a href="https://www.wto.org/french/tratop_f/ecom_f/joint_statement_f.htm">commerce électronique</a> (86 pays participants), les <a href="https://www.wto.org/french/tratop_f/envir_f/ega_f.htm">biens environnementaux</a> (46 pays participants), les <a href="https://www.lesechos.fr/2016/06/tisa-cet-accord-commercial-dont-on-ne-parle-pas-1111467">services</a> (50 pays participants) et la participation des <a href="https://www.wto.org/french/tratop_f/msmes_f/msmes_f.htm">Micro, petites et moyennes entreprises (MPME)</a> au commerce international (91 pays participants).</p>
<p>Avec la multiplication des accords plurilatéraux, l’OMC deviendrait alors un <a href="https://academic.oup.com/jiel/article/9/4/823/852466?login=true">« club de clubs »</a>, selon l’expression de Robert Z. Lawrence, professeur à Harvard et ancien conseiller économique du président Clinton. Cette dynamique de « petits pas » semble cependant conduire à une libéralisation globale des échanges autant qu’elle risque, au contraire, de déboucher sur une nouvelle fragmentation du multilatéralisme. Plusieurs arguments plaident en fait pour chacune des deux thèses.</p>
<h2>Préparer le terrain au multilatéralisme</h2>
<p>La première thèse est celle du <a href="https://www.wto.org/french/news_f/news18_f/trdev_17jul18_f.htm">« plurilatéralisme ouvert »</a> ou « plurilatéralisme inclusif ». Les accords plurilatéraux conclus dans le cadre de l’OMC ont, par définition, une vocation multilatérale : tout membre de l’OMC non-signataire d’un accord plurilatéral existant pourra y adhérer par la suite.</p>
<p>Par effet domino, un nombre croissant de pays ont donc adhéré aux différents accords plurilatéraux existants. Ainsi, l’Accord sur les Marchés Publics et surtout l’Accord sur les Technologies de l’Information ont exercé un effet d’attraction sur les pays tiers. Le second, signé au départ par 29 pays, comprend aujourd’hui 82 pays réalisant 97 % du commerce des produits des technologies de l’information.</p>
<p><iframe id="29D0q" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/29D0q/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Pareil accord peut, à titre expérimental, préparer le terrain au multilatéralisme. Il permet en effet de mesurer l’intérêt des pays membres de l’OMC pour un sujet que l’on envisage de mettre à l’ordre du jour de l’agenda. La « multilatéralisation » des accords plurilatéraux se trouve d’ailleurs facilitée lorsque la clause de la nation la plus favorisée est incorporée. Dans ce cas, les pays tiers ou non membres bénéficient en effet des avantages qui sont accordés aux pays membres.</p>
<h2>Logique d’exclusion</h2>
<p>Il y a cependant un revers à la médaille. La multiplication des accords plurilatéraux présente également des risques pour le multilatéralisme. Comme nous le soulignions dans une <a href="https://www.cairn.info/revue-politique-etrangere-2016-2-page-143.htm">recherche</a> récente, le danger principal est celui d’une fragmentation du système commercial mondial.</p>
<p>Coexisteraient en effet deux types de pays, les « insiders », c’est-à-dire les pays membres des accords plurilatéraux, et les « outsiders », ceux qui en seraient exclus. Parmi ces derniers, devraient figurer la plupart des pays les moins développés. Dans les premières expériences d’accords, il apparaît déjà que les sujets des négociations sont choisis par les pays ayant un poids important dans le commerce mondial. Les services, le commerce des produits des technologies de l’information, ou les marchés publics sont des sujets d’un grand intérêt pour ces pays mais qui restent peu pertinents pour la très grande majorité des pays les moins développés.</p>
<p>Les pays en développement les plus pauvres ne souhaitent d’ailleurs pas adhérer à l’accord sur les technologies de l’information, de crainte que leurs entreprises du secteur ne soient rapidement éliminées par la concurrence d’entreprises étrangères plus compétitives.</p>
<p><iframe id="oebEw" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/oebEw/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Autre symbole de cette logique d’exclusion, aucune proposition de négociation commerciale plurilatérale ne porte, à ce jour, sur les produits agricoles. Il s’agit pourtant là d’un secteur dans lequel bon nombre de pays en développement sont très compétitifs.</p>
<p>On pourrait objecter à l’argument selon lequel les accords plurilatéraux visent à marginaliser les pays les moins développés que ces derniers pays auront tout loisir d’y adhérer quand leurs économies se seront développées. Soulignons cependant qu’il est difficile de rejoindre après coup un accord commercial déjà négocié, car il devient alors difficile de faire prévaloir ses intérêts.</p>
<h2>Éviter le « bol de spaghettis »</h2>
<p>Une règle émergente tend également à dire qu’un accord plurilatéral ne peut être « multilatéralisé » que si une « masse critique » de pays en est partie prenante. Cette masse critique permet de se prémunir du risque de comportement de passager clandestin de la part des principaux acteurs.</p>
<p>Cela favorise la marginalisation et l’exclusion des pays les moins développés. En effet, en raison de leur faible poids dans les échanges mondiaux, ces pays ne sont pas en mesure de constituer de masse critique et sont donc exclus a priori des négociations en vue de conclure des accords plurilatéraux à vocation multilatérale.</p>
<p>En résumé, face à la crise de l’OMC et au risque de démantèlement du système multilatéral actuel, le cadre de négociation plurilatéral constitue une étape intermédiaire pouvant conduire à terme à un multilatéralisme consolidé et renforcé. Ce but ne peut cependant être atteint que si les pays en viennent à s’accorder sur un <a href="https://www.g20-insights.org/policy_briefs/boosting-g20-cooperation-for-wto-reform-leveraging-the-full-potential-of-plurilateral-initiatives/">certains nombres de principes</a>.</p>
<p>Les accords plurilatéraux semblent devoir être ouverts à tous les membres, y compris, et surtout, aux pays les moins développés. Ceux-ci doivent faire l’objet d’une attention particulière, participer aux négociations et pouvoir adhérer aux accords existants lorsqu’ils le souhaitent.</p>
<p>Par ailleurs, une coordination doit être établie entre les différents accords plurilatéraux afin d’éviter tout chevauchement pouvant déboucher sur l’adoption de règles divergentes sur des questions proches, voire identiques. On parle de « bol de spaghetti de règles ». Une place doit, pour cela, être réservée pour des études d’impacts <em>ex ante</em> et des évaluations <em>ex post</em> des accords plurilatéraux.</p>
<p>Il paraît, enfin, important que les négociations soient menées de manière transparente. Le succès de la dynamique plurilatérale en cours semble dépendre dans une large mesure de l’adoption et du respect de ces principes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/182091/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Dupuy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Des accords construits par un nombre limité de pays avec la vocation de s’élargir à tous ? Telle semble être la voie actuellement empruntée à l’OMC. Avec les risques d’exclusion qui lui sont liés.Michel Dupuy, Professeur d'économie internationale, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1789172022-03-16T21:02:31Z2022-03-16T21:02:31ZPays émergents : l’économie informelle, un avantage concurrentiel pour les exportateurs<p>La crise sanitaire a provoqué une réduction drastique du commerce international. Cependant, à y regarder de plus près, l’ampleur de cette réduction n’a pas été la même pour les pays avancés (-22 % entre janvier et avril 2020) et les émergents (-7 % sur la même période). Cette résilience des exportations des pays émergents face à la crise sanitaire s’inscrit dans une tendance plus large qui voit, au cours des années 2010, la croissance de leurs exportations rattraper puis dépasser celle des pays avancés.</p>
<p>Cette dynamique des exportations des pays émergents pourrait s’expliquer en partie par le rôle joué par l’économie informelle, qui leur confère un <a href="https://link.springer.com/article/10.1057/s42214-020-00059-5">avantage concurrentiel</a>.</p>
<p>L’économie informelle est composée d’entreprises non enregistrées auprès des autorités et de travailleurs sans contrat de travail. La production légale de biens et de services, cachée aux pouvoirs publics pour des raisons monétaires, réglementaires ou institutionnelles, participerait ainsi à la construction de l’avantage concurrentiel de certains exportateurs émergents.</p>
<p><iframe id="1rcV8" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/1rcV8/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Selon les dernières estimations du Bureau international du travail (BIT), l’économie informelle pèse significativement au niveau mondial : environ un tiers de la production de richesses et plus de deux tiers de l’emploi. Dans certains pays émergents, en Afrique subsaharienne notamment, les chiffres sont plus élevés ; l’économie informelle représentant <a href="https://www.ilo.org/global/publications/books/WCMS_626831/lang--en/index.htm">62 % du PIB officiel</a> et l’emploi informel 90 % de l’emploi total.</p>
<p>L’étude empirique que nous avons menée auprès d’une population de plusieurs milliers d’entreprises mexicaines, récemment publiée dans la revue <a href="https://doi.org/10.1093/icc/dtab068"><em>Industrial and Corporate Change</em></a>, confirme l’influence de l’économie informelle sur les performances à l’export.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1140411828616552448"}"></div></p>
<p>Le Mexique est relativement représentatif du phénomène, puisque c’est le principal <a href="https://wits.worldbank.org/CountryProfile/en/Compare/country/MEX/indicator/XPRT-TRD-VL/partner/WLD/product/Total/country/ATG;ARG;ABW;BHS;BRB;CRI;CUB;DMA;DOM;SLV;GRD;GTM;GUY;HND;NIC;PAN;KNA;VCT;SUR;TCA;URY;VEN;LCA;BLZ;PRY;BOL;JAM;TTO;ECU;PER;COL;CHL;BRA;/show/line">exportateur</a> d’Amérique latine, mais également un pays dans lequel plus de <a href="https://www.ilo.org/global/publications/books/WCMS_626831/lang--en/index.htm">50 % des travailleurs</a> opèrent de manière informelle.</p>
<h2>Coût et flexibilité</h2>
<p>Nos résultats montrent que plus les entreprises formelles s’approvisionnent auprès d’industries dans lesquelles le niveau d’informalité est élevé, plus elles sont susceptibles d’exporter et de générer des volumes d’export élevés. De fait, lorsqu’elles s’approvisionnent auprès de l’économie informelle, les entreprises formelles peuvent bénéficier d’un avantage concurrentiel en termes de coût et de flexibilité, et cela en activant plusieurs <a href="https://www.wiego.org/sites/default/files/publications/files/Chen_WIEGO_WP1.pdf">mécanismes</a>.</p>
<p>Premièrement, les entreprises formelles peuvent tirer un avantage direct dans leur coût de production des économies réalisées en s’approvisionnant auprès d’entreprises informelles, qui ne payent pas (ou peu) d’impôts et de charges sociales.</p>
<p>Deuxièmement, les entreprises formelles peuvent imposer leurs conditions tarifaires aux fournisseurs informels, du fait d’un pouvoir de négociation supérieur ; les fournisseurs informels dépendant souvent d’un seul client.</p>
<p>Troisièmement, la pression à la baisse des prix engendrée par la concurrence entre les nombreuses entreprises informelles contraint les fournisseurs formels des mêmes industries à baisser leurs prix. Cela peut même conduire ces derniers à recruter des travailleurs informels pour rester compétitifs face aux fournisseurs informels.</p>
<p>Quatrièmement, les transactions avec les fournisseurs de l’économie informelle sont moins coûteuses et plus flexibles, du fait de l’absence de contrats.</p>
<p>Cinquièmement, le recours à des fournisseurs informels permet une plus grande flexibilité en termes de volume de production ; ceux-ci ayant une plus grande facilité à accroître le nombre d’heures de travail de leurs employés ou à recruter de nouveaux employés pour faire face à une demande accrue et soudaine.</p>
<h2>Pressions réglementaires</h2>
<p>Ces mécanismes et les gains en termes de coût et de flexibilité liés au recours à l’économie informelle ont été documentés dans la plupart des pays émergents et pour plusieurs secteurs d’exportation. Il s’agit par exemple des secteurs des <a href="https://www.wiego.org/publications/chains-production-ladders-protection-social-protection-workers-informal-economy">fruits</a> au Chili et en Afrique du Sud, du <a href="https://doi.org/10.1093/jeg/lbab018">cuir</a> au Kenya, des <a href="https://doi.org/10.1017/9781316217382.016">téléphones portables</a> en Chine et en Inde, des <a href="https://www.wiego.org/publications/chains-production-ladders-protection-social-protection-workers-informal-economy">vêtements</a> en Thaïlande et aux Philippines, des <a href="https://doi.org/10.1111/j.1467-7660.2012.01798.x">ballons de football</a> et articles de sport en Chine, en Inde et au Pakistan.</p>
<p>Toutefois, au Mexique comme dans les autres pays émergents, dans un contexte international où les réglementations commerciales intègrent de plus en plus les dimensions sociales et environnementales, les exportateurs des pays émergents sont soumis à une pression accrue des organisations non gouvernementales, des clients, des régulateurs et des gouvernements, des pays avancés notamment.</p>
<p>Les exportations sont désormais souvent conditionnées au respect du droit du travail et à des mécanismes rigoureux de traçabilité de non-recours à l’économie informelle dans les pays d’origine des exportateurs. Cela modifie la relation économique entre les économies formelle et informelle dans ces pays et conduit progressivement à une réorganisation des chaînes de valeur mondiales, avec des conséquences pour les acteurs économiques des pays émergents, notamment les plus vulnérables.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/178917/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Selon une étude sur le Mexique, plus les entreprises s’approvisionnent auprès d’industries dans lesquelles le niveau d’informalité est élevé, plus elles atteignent des volumes d’export élevés.Olivier Lamotte, Professeur en économie et stratégie internationales - Professor of international economics and strategy, EM NormandieAna Colovic, Professeur de stratégie et de management international/ Professor of Strategy and International Business, Neoma Business SchoolOctavio Escobar, Professor of Economics, EM NormandiePierre-Xavier Meschi, Professeur des Universités, IAE Aix-Marseille Graduate School of Management – Aix-Marseille UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1724602021-12-14T19:54:02Z2021-12-14T19:54:02ZLuciole : « Pourquoi existe-t-il des pays riches et des pays pauvres ? »<p>Commençons par les pays les plus pauvres. Ils sont ravagés par des guerres parfois sans fin (Afghanistan, Soudan du Sud…). Du coup, tout est détruit. Personne ne peut travailler correctement. On manque de tout (eau potable, électricité, maisons, nourriture, médicaments…).</p>
<p>Il y a aussi des pays qui sont pauvres parce qu’ils n’ont rien de toute façon : le climat trop sec empêche de faire de belles récoltes (comme au Mali), il n’y a pas de mines, de pétrole ou de gaz, pas d’usines, pas de routes ou de trains. La majorité des enfants ne vont pas à l’école et n’auront pas de métier quand ils seront grands.</p>
<p>Beaucoup de gens vivent dans des villages isolés. L’argent est confisqué par des dictateurs, qui décident de tout tout seuls et qui gardent tout pour eux et pour leur famille. Alors, on ne sait pas comment démarrer pour créer des richesses : les gens n’ont pas d’argent à dépenser et il y a très peu de magasins.</p>
<p>Dans les pays riches, tout fonctionne à peu près correctement. Les impôts, très nombreux, servent à construire des routes, des écoles, des hôpitaux. Les gens sont éduqués et bien soignés. Les pays riches n’ont plus fait la guerre depuis très longtemps (Suède, Suisse) ou bien ils ne font pas la guerre chez eux (France). Les gens peuvent travailler et créer des richesses (agriculture, industrie, commerce, finances, et de plus en plus dans le commerce et le tourisme). La démocratie permet de punir les tricheurs et les voleurs.</p>
<p>Donc, les pays riches s’enrichissent et les pays pauvres s’appauvrissent. En plus, la population des pays pauvres augmente beaucoup (surtout en Afrique), il y a de plus en plus de bouches à nourrir, alors que celle des pays riches augmente à peine (Allemagne) ou même diminue (Japon).</p>
<p>Mais les choses bougent. Un pays peut s’appauvrir (Russie, Liban), un autre peut s’enrichir (Chine). Les pays pauvres qui s’enrichissent sont appelés pays émergents. Pour s’enrichir, il faut alors construire des usines. Les ouvriers et les ouvrières des pays pauvres sont mal payés et travaillent beaucoup trop, mais ils sont moins pauvres que s’ils restaient dans leurs villages. D’autres pays ont su utiliser l’argent du pétrole (Qatar, Émirats arabes unis) pour créer de nouvelles activités comme le tourisme. Malheureusement, l’argent est souvent mal réparti : le pays s’enrichit, mais beaucoup d’habitants restent pauvres (Brésil).</p>
<p>Ce qui bouge beaucoup, ce sont les gens qui changent de pays, les migrants. Ceux des pays pauvres cherchent du travail, même difficile et mal payé, dans les pays riches. Ils font peur à beaucoup de gens qui ne les connaissent pas. Il y a aussi des étudiants des pays pauvres qui vont à l’université dans les pays riches. Des habitants des pays riches vont parfois s’installer dans des pays émergents où ils travaillent dans le monde des affaires. Finalement, la circulation de l’argent, des marchandises, des hommes et des idées permet de lutter contre la pauvreté.</p>
<p>Aujourd’hui, on se pose beaucoup de questions à cause du réchauffement climatique qui provoque des sécheresses, des inondations et qui menace les habitants au bord des mers et des océans. On réfléchit un peu partout à de nouvelles créations de richesses avec l’idée de faire beaucoup avec peu de choses, d’arrêter le gaspillage des riches et de trouver de nouvelles manières de vivre.</p>
<hr>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dianerottner.com/">Diane Rottner</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : <a href="mailto:tcjunior@theconversation.fr">tcjunior@theconversation.fr</a>. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/172460/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raymond Woessner ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Il existe presque 200 pays dans le monde, des riches comme des pauvres. Certains pays deviennent plus pauvres, d’autres plus riches. Mais pourquoi et comment ?Raymond Woessner, Professeur honoraire de géographie, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1592602021-04-20T18:06:59Z2021-04-20T18:06:59ZPropriété intellectuelle et Covid-19 : comment accélérer mondialement la vaccination ?<p>L’écart entre le nombre de vaccins administrés dans les pays riches et dans le monde en développement « augmente chaque jour et devient chaque jour plus grotesque », déclarait Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS (Organisation mondiale de la santé), le 22 mars dernier. Ce constat amer accompagnait l’observation que seules 0,1 % des doses de vaccins distribuées dans le monde avaient été reçues par les 29 pays les plus pauvres, qui représentent <a href="https://news.un.org/en/story/2021/03/1087992">9 % de la population globale</a>.</p>
<p>Pourtant, dès avril 2020, l’OMS, la Fondation Bill & Melinda Gates, la Commission européenne et la France ont soutenu la mise en place du dispositif de solidarité internationale COVAX (abréviation de Covid-19 Vaccines Global Access). Piloté par GAVI (l’Alliance du vaccin) et la CEPI (Coalition for Epidemic Preparedness Innovations), en partenariat avec l’UNICEF et la PAHO (Pan-American Health Organization), COVAX a pour mission d’acheter des vaccins pour les distribuer équitablement dans 98 pays participants à revenu élevé, et <a href="https://www.who.int/news/item/18-12-2020-covax-announces-additional-deals-to-access-promising-covid-19-vaccine-candidates-plans-global-rollout-starting-q1-2021">92 autres à revenu faible ou intermédiaire</a>.</p>
<p>Fin février dernier, 504 000 et 600 000 premières doses ont été livrées respectivement à la Côte d’Ivoire et au Ghana. Début avril, ce sont déjà plus de <a href="https://www.gavi.org/news/media-room/covax-reaches-over-100-economies-42-days-after-first-international-delivery">38 millions de doses</a> qui ont été reçues par 100 pays, dont 61 bénéficiant de prix subventionnés par un fonds dédié. Dans les mois à venir, la montée en puissance attendue de COVAX est ambitieuse, avec un objectif affiché de 337 millions de doses distribuées à 145 pays fin juin, et au moins 2 milliards de doses à fin 2021, dont 1,3 milliard aux pays à faible revenu, afin d’y vacciner <a href="https://www.gavi.org/sites/default/files/covid/covax/COVAX-Interim-Distribution-Forecast.pdf">27 % de la population</a>.</p>
<p>Même si cet objectif est atteint, il ne permettra pas de contrôler durablement la pandémie. Pour y parvenir, un pourcentage bien supérieur de la population doit être immunisé. Une modélisation récente a permis d’estimer que, en disposant d’un vaccin qui empêche la transmission du virus dans 90 % des cas, alors il est nécessaire de vacciner <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-021-00396-2">près de 67 % de la population</a> pour atteindre – au moins temporairement – l’immunité collective, et retourner à une vie sociale et économique normale.</p>
<p>Un tel seuil, appliqué à une population mondiale de 7,7 milliards d’individus, conduit à un objectif de production compris entre de <a href="https://worldpopulationreview.com/">5,2 milliards de doses</a> dans la situation la plus favorable d’un vaccin monodose, et le double, soit 10,4 milliards, si la posologie prévoit deux injections.</p>
<h2>Vacciner rapidement et partout dans le monde</h2>
<p>À l’objectif de production extrêmement élevée s’ajoute l’impératif de vacciner partout dans le monde, dans les délais les plus courts, avant que de <a href="https://theconversation.com/new-covid-variants-have-changed-the-game-and-vaccines-will-not-be-enough-we-need-global-maximum-suppression-157870">nouveaux variants</a> ne viennent compromettre les premiers résultats.</p>
<p>Cet impératif est rappelé par <a href="https://www.gavi.org/vaccineswork/patient-zero-understanding-how-new-coronavirus-variants-emerge">GAVI</a> et la <a href="https://cepi.net/news_cepi/global-leaders-support-cepi-plan-to-tackle-risk-of-future-pandemics/">CEPI</a>, qui dirigent COVAX, comme par <a href="https://www.unicef.org/press-releases/we-need-speed-and-simplicity-remove-barriers-acquisition-manufacture-and">l’UNICEF</a> et la <a href="https://www.paho.org/en/news/17-3-2021-deliveries-covid-19-vaccines-procured-through-covax-accelerate">PAHO</a>, en charge des achats et de la logistique.</p>
<p>Comme le <a href="https://wellcome.org/news/why-we-need-share-vaccine-doses-now-and-why-covax-right-way-do-it">résume</a> Jeremy Farrar, le directeur du Wellcome Trust :</p>
<blockquote>
<p>« Si on laisse le virus se propager sans entrave dans de grandes parties du monde, alors le risque est de voir apparaître des mutations contre lesquelles les vaccins et traitements existants n’ont plus d’effet – nous laissant tous exposés. »</p>
</blockquote>
<p>Or, la répartition des vaccins est compliquée par des accords commerciaux conclus très tôt entre gouvernements et industriels, alors qu’aucun produit n’était encore approuvé. Les précommandes ont parfois visé des volumes très supérieurs à la taille de la population des pays concernés.</p>
<p>Par exemple, à la mi-novembre 2020, les précommandes de l’Australie, du Canada et du Japon dépassaient ensemble le <a href="https://www.bmj.com/content/371/bmj.m4750">milliard de doses</a>. Au total, les seuls pays à haut revenu, qui représentent 16% de la population mondiale, auraient réservé <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(21)00306-8/fulltext">4,2 milliards de doses pour 2021</a>, soit 70% de la production des 5 principaux vaccins prévue cette année.</p>
<p>Une solution partielle est apportée par COVAX, qui encourage les premiers pays disposant de vaccins à en reverser une partie au dispositif, pour réallocation. Mais la redistribution ne permet que de répartir des volumes dont le niveau reste limité par les capacités de production installées.</p>
<p>Celles-ci, contrôlées en interne ou en sous-traitance par les producteurs partenaires de COVAX, sont estimées à 8 milliards de doses pour 2021, dont 2 milliards relatives à un produit aux conditions de conservation peu compatibles avec le contexte de pays en développement.</p>
<p>Aussi les aléas industriels rencontrés ces derniers mois par <a href="https://www.ft.com/content/38fecae5-86d0-49a5-8a33-3bf4a64e57bb">BioNTech/Pfizer</a>, <a href="https://www.ft.com/content/316b77c1-e640-4d53-8dec-547b1b5651d8">Gamaleya</a>, <a href="https://www.ft.com/content/b5ba2702-3bad-4f10-9d80-00eb3d48d802">Johnson & Johnson</a> et <a href="https://www.ft.com/content/8e2e994e-9750-4de1-9cbc-31becd2ae0a8">Oxford/AstraZeneca</a> ont montré la difficulté d’élever la production à son niveau maximal. D’autres incidents pourraient compromettre la redistribution en amenant les gouvernements des pays développés à faire valoir les clauses de priorité prévues aux contrats de précommande.</p>
<h2>L’OMC saisie</h2>
<p>Des efforts déjà engagés visent à l’augmentation des capacités. Les fournisseurs de vaccins investissent dans leur outil industriel. D’autres entreprises développent de nouveaux produits qui pourraient prochainement s’ajouter aux volumes actuels.</p>
<p>Une démarche plus controversée a été initiée en octobre 2020 par l’Afrique du Sud et l’Inde, qui ont saisi l’Organisation mondiale du commerce (OMC) d’une demande de <a href="https://docs.wto.org/dol2fe/Pages/SS/directdoc.aspx?filename=q:/IP/C/W669.pdf&Open=True">suspension temporaire de droits de propriété intellectuelle</a> relative à la Covid-19. Soutenue par une centaine de pays, la démarche a pour objectif de <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-021-00727-3">faciliter la production de vaccins</a>, comme de traitements et produits de diagnostic, destinés aux pays en développement.</p>
<p>Mais l’initiative rencontre l’opposition de l’industrie pharmaceutique et de pays développés, qui voient dans les accords bilatéraux – entre une entreprise ayant développé un vaccin et une autre disposant de capacités de production – le moyen d’augmenter les volumes sans remettre en cause la propriété intellectuelle, et en particulier les brevets.</p>
<p>La suspension des brevets, comme le maintien du statu quo, ont en commun d’être vulnérables aux mesures unilatérales des gouvernements. Si les brevets sont suspendus, des mécanismes récemment renforcés de contrôle des exportations par des pays producteurs <a href="http://documents1.worldbank.org/curated/en/244291614991534306/pdf/The-Covid-19-Vaccine-Production-Club-Will-Value-Chains-Temper-Nationalism.pdf">pourraient freiner l’acheminement</a> d’ingrédients nécessaires à la production de vaccins.</p>
<p>Si au contraire les brevets sont maintenus, le recours aux licences obligatoires – qui autorisent un tiers à fabriquer le produit breveté sans le consentement du détenteur du brevet – pourrait se répandre parmi les pays en développement, comme dans les années 2000 <a href="https://journals.plos.org/plosmedicine/article?id=10.1371/journal.pmed.1001154">pour la production d’antirétroviraux</a> contre le VIH.</p>
<p>Dans les deux cas, suspension des brevets et licences obligatoires n’incitent guère les laboratoires à s’engager dans le transfert du savoir-faire essentiel à la production de vaccins, <a href="https://science.sciencemag.org/content/369/6506/912">que la propriété intellectuelle ne décrit pas</a>.</p>
<h2>La troisième voie du Medicines Patent Pool</h2>
<p>Une troisième voie consiste à encourager les industriels à <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-021-00759-9">signer des accords de licence</a> avec le MPP (Medicines Patent Pool), organisation intégrée au dispositif C-TAP (Covid-19 Technology Access Pool) de l’OMS.</p>
<p>La mission du MPP, soutenue par les Nations unies depuis sa création en 2010, est d’améliorer l’accès aux médicaments essentiels dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Son mandat a été élargi à la Covid-19 dès mars 2020. Dans le maintien des droits de propriété intellectuelle, cette fondation sollicite des licences volontaires pour ensuite agir comme un guichet unique de diffusion de (combinaisons de) ces licences aux producteurs de génériques ou biosimilaires.</p>
<p>La baisse des coûts de transaction qui en découle, ainsi que l’absence de superposition des marges des détenteurs de brevets, aboutissent à des prix de vente plus bas sur le marché final que si les licences faisaient l’objet de multiples accords bilatéraux. Pour autant, les incitations à investir en recherche et à transférer les savoir-faire <a href="https://ferdi.fr/en/publications/covid-19-doit-on-remettre-en-question-les-droits-de-propriete-intellectuelle">peuvent être préservées</a>, du fait des royalties reversées par le MPP aux détenteurs de brevets sans mobiliser leur outil industriel.</p>
<p>Quant aux activités de production couvertes par les licences, elles peuvent être limitées à quelques ingrédients critiques, ou à des étapes de production particulières, pour éliminer des goulets d’étranglement <a href="https://science.sciencemag.org/content/369/6506/912">sans transférer l’intégralité des compétences</a> industrielles.</p>
<p>La solution du MPP, dans le cadre du C-TAP initié par l’OMS, limite les risques politiques de nationalisme vaccinal comme de recours à des licences obligatoires, dans le respect de la propriété intellectuelle. Elle a l’avantage d’utiliser une structure déjà en place, afin d’accélérer immédiatement l’accès aux vaccins partout dans le monde.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/159260/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Etienne Billette de Villemeur est aussi associé à l'UQAM, Canada et travaille avec les "Chaires Universitaires Toussaint Louverture", en Haiti.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Bruno Versaevel est consultant auprès d'entreprises du domaine biopharmaceutique. Il est également chercheur à GATE (UMR #5824 CNRS).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Vianney Dequiedt est affilié à la FERDI (Fondation pour les études et recherches en développement international).</span></em></p>Des accords de licence entre les groupes pharmaceutiques et le Medicines Patent Pool, en coopération avec l’OMS, pourraient accélérer l’accès aux doses pour les pays les plus pauvres.Etienne Billette de Villemeur, Professor, Université de LilleBruno Versaevel, Professor of industrial economics, EM Lyon Business SchoolVianney Dequiedt, Professor of Economics, Université Clermont Auvergne (UCA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1541072021-01-28T18:09:11Z2021-01-28T18:09:11ZDes prothèses imprimées en 3D pour les pays frappés par des conflits ou des catastrophes naturelles<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/380954/original/file-20210127-19-p2iwq2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C22%2C5000%2C3300&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Prothèse fabriquée par impression 3D au Togo. </span> <span class="attribution"><span class="source">Handicap International.</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>100 millions de personnes dans le monde ont besoin d’un appareillage orthopédique. Cependant, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), seulement <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/assistive-technology">5 % à 15 % des personnes</a> qui ont besoin d’aides techniques et de technologies fonctionnelles y ont accès. La production est faible et la qualité est souvent limitée. Les techniques utilisées sont souvent et par nécessité simples, dictées par l’environnement dégradé de la plupart des terrains d’actions des ONG.</p>
<p>C’est, notamment, pour répondre à cette problématique que la Chaire de recherche et d’enseignement <a href="https://www.insa-lyon.fr/fr/actualites/innovation-humanity-innover-pour-reparer-l-humain"><em>Innovation for Humanity</em></a> vient d’être créée. Elle regroupe l’Alliance INSA et Handicap International. L’objectif étant de faire émerger des réponses techniques et scientifiques aux problématiques très concrètes rencontrées sur le terrain.</p>
<h2>Les promesses de l’impression 3D pour la fabrication de prothèses</h2>
<p>La fabrication de prothèses utilisées dans le domaine humanitaire a bien évolué : elles ont d’abord été réalisées en bambou tressé par les usagers, et côté techniciens avec le bois, ou même (et c’est une ironie de la situation) réalisées à partir d’emballages d’obus par les usagers. Les appareillages sont aujourd’hui souvent fabriqués en polymères thermoformés et réalisés à partir d’un moule en plâtre sculpté au plus proche de l’anatomie du membre manquant… Les prothèses deviennent de plus en plus légères, fonctionnelles et donc acceptées.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/381155/original/file-20210128-13-149dn08.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/381155/original/file-20210128-13-149dn08.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/381155/original/file-20210128-13-149dn08.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/381155/original/file-20210128-13-149dn08.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/381155/original/file-20210128-13-149dn08.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/381155/original/file-20210128-13-149dn08.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/381155/original/file-20210128-13-149dn08.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/381155/original/file-20210128-13-149dn08.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Anciennes prothèses (à gauche) et prothèse imprimée en 3D (à droite).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Handicap International</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Depuis 2016, Handicap International a mené plusieurs projets sur le potentiel de la télé-réadaptation et des technologies de fabrication additive dans des contextes divers (humanitaire, développement, camps de réfugiés) pour développer et renforcer les services de réhabilitation et améliorer l’accès, la qualité et le coût des services. Grâce au scanner, à l’impression 3D et à la visioconférence, on peut rééduquer des patients sans atelier spécifique sur place. Si l’impression 3D ne remplace pas complètement les méthodes traditionnelles d’appareillage, elle permettra que plus de personnes accèdent à la réadaptation fonctionnelle, par exemple dans des zones où les centres de rééducation sont trop éloignés et dans les zones de conflits. L’impression 3D s’est avérée prometteuse dans les premiers pays où elle a été déployée à titre expérimental, au Togo, à Madagascar et en Syrie.</p>
<h2>Des enjeux scientifiques et une acculturation nécessaire</h2>
<p>Si les prothèses 3D représentent un réel espoir et une alternative crédible aux prothèses classiques, s’adapter aux situations locales et permettre aux populations une appropriation est un véritable défi. Le moignon de la personne amputée est aujourd’hui scanné sur place à l’aide de petits scanners médicaux.</p>
<p>Les mesures sont alors transférées vers des centres d’expertise pour créer un modèle 3D de la prothèse, utilisé ensuite pour produire celle-ci sur place, sur des petites machines transportables et des filaments polymères commerciaux importés. Le coût de ces prothèses réalisées par fabrication additive est encore trop élevée (entre 3 et 5 fois plus cher qu’une prothèse classique). Elles posent aussi la question de la dépendance en matière première, celle de la durabilité des matériaux et celle de la formation de personnels aptes à utiliser ces technologies numériques.</p>
<p>Les enjeux des prothèses par impression 3D sont donc nombreux :</p>
<ul>
<li><p>Dans le domaine de la science des matériaux tout d’abord, avec l’utilisation de polymères qui pourraient être d’origines locales, renforcés par des fibres végétales pour les rendre plus résistants et durables. Le recyclage des déchets induits par la fabrication de prothèses et d’orthèses est un vrai sujet. L’impression 3D limiterait la production de déchets, voire permettrait de réutiliser certains déchets plastiques qui sont légion dans certains pays. Pourquoi ne pas utiliser des déchets en polymères thermoplastiques pour fabriquer sur place des fils ou des granulés pour l’impression ? Pourquoi ne pas essayer de fabriquer des fils imprimables à partir de polymères bio-sourcés ?</p></li>
<li><p>Dans le domaine de la conception, ensuite. L’impression 3D permet de créer des formes et des architectures que les technologies classiques ne permettent pas. C’est un comble de constater aujourd’hui que les prothèses 3D sont plus lourdes que les prothèses classiques, simplement parce que leur forme est identique et que les matériaux utilisés sont souvent trop fragiles. Il est nécessaire de travailler sur la qualité des polymères utilisés et sur l’optimisation des formes. L’impression 3D permet d’enlever de la matière aux endroits qui ne sont pas sollicités mécaniquement et donc de diminuer la masse et le coût sans compromettre la fonctionnalité. C’est un des objectifs qui sera poursuivi dans les travaux des laboratoires de l’INSA sur le sujet, pour gagner en masse et pour réduire des coûts.</p></li>
<li><p>Dans le domaine de l’imagerie et des sciences numériques, enfin. Nous pourrions imaginer prendre les mesures physiologiques sur place, directement avec l’appareil photo d’un téléphone portable au lieu d’un scanner. Quelques images prises à différents angles et des algorithmes de reconstruction 3D efficaces pourraient alors faire l’affaire. Reste à pouvoir alors créer le modèle directement sur place à partir de ces images.</p></li>
</ul>
<p>Jean‑Baptiste Richardier, co-fondateur de Handicap International, parlait de l’importance de « ne pas céder à la fièvre ou à l’ivresse de l’innovation, de toujours se situer dans le champ d’une innovation raisonnable, dans le champ du possible ». Établir le « champ du possible » requiert du temps, de la recherche et de l’expérimentation, de la retenue, voire des renoncements, afin de parvenir à un « métissage » de bon aloi, source de progrès.</p>
<p>Les sciences numériques, qui incluent l’impression 3D, bouleversent le métier de l’ingénieur : aide à la décision, analyse de masses de données, rapidité des calculs et des échanges, fabrication personnalisée, prothèses connectées…</p>
<p>L’appropriation de ces nouvelles technologies est primordiale et doit être intégrée dans les recherches. Le numérique crée des espoirs, mais aussi des angoisses, voire des fractures. Un des écueils serait de vouloir imposer nos savoirs technologiques et nos solutions dans des contextes où ils ne sont pas applicables. Nous devons donc nous éduquer et nous former, former nos étudiants à comprendre et intégrer des environnements dégradés. Il y a un enjeu d’ordre éthique à maintenir la dimension technologique à sa juste place, en analysant ce que l’on fait gagner, mais aussi ce que l’on fait perdre. L’impression 3D donne déjà un coup de main à des gens qui se débrouillent et qui s’approprient la technologie, en fabriquant des prothèses chez soi ou dans des fab labs. Dans les pays où HI intervient, elle ne doit pas être présentée comme une évolution substitutive, voire une révolution, mais comme une solution technique de plus dans la boite à outils, complémentaire à celles qui fonctionnent et structurent déjà le secteur.</p>
<p>Il est essentiel d’impliquer les étudiants en doctorat ou en projets d’étude d’ingénieur, d’une part car ils sont très demandeurs de ces sujets porteurs de sens et d’autre part parce qu’ils ont aussi de belles idées qui méritent d’être développées.</p>
<p>En plus des questions purement techniques, nous, porteurs de la chaire <em>Innovation for Humanity</em> et nos collègues, devrons alors nous poser les questions qui restent fondamentales :</p>
<ul>
<li><p>Comment établir le champ des possibles sur place, en termes de logistique, réseaux, d’environnement d’intervention et de capacité d’appropriation par les populations locales ?</p></li>
<li><p>Comment mobiliser les chercheurs, les élèves ingénieurs, les entreprises pour donner des clefs scientifiques à des défis humanitaires et comment intégrer les problématiques humanitaires dans nos formations ?</p></li>
</ul>
<h2>Aller plus loin : vers des drones de détection des mines plus intelligents</h2>
<p>L’un des enjeux majeurs des interventions de Handicap International est également de sécuriser à plus long terme les zones ayant connu des conflits, notamment via le déminage humanitaire afin de rendre des terres saines le plus rapidement possible aux populations. L’usage de drones permet déjà de cartographier les zones à risques. Nous avons débuté des travaux dont l’objectif est de les doter de capteurs et d’analyser les données récoltées grâce à des techniques d’intelligence artificielle et d’apprentissage automatique, afin de détecter les signes de présence de mines comme la présence des carcasses d’animaux, de voitures ou des signes d’explosion. L’utilisation d’autres types de capteurs comme les capteurs infrarouges est une piste prometteuse pour déceler la présence de mines enterrées dans certains environnements.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/381156/original/file-20210128-15-bbqrwp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/381156/original/file-20210128-15-bbqrwp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/381156/original/file-20210128-15-bbqrwp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/381156/original/file-20210128-15-bbqrwp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/381156/original/file-20210128-15-bbqrwp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/381156/original/file-20210128-15-bbqrwp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/381156/original/file-20210128-15-bbqrwp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un drone pour détecter des mines.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Handicap International</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Un autre enjeu est l’anticipation de la dynamique des crises humanitaires via la fouille, l’analyse automatique et la visualisation de données issues de sources très variées (réseaux sociaux, données socio-économiques, plans de villes ou réseaux d’axes routiers). On peut penser à la modélisation de mouvements de foule qui peuvent intervenir lors de catastrophes ou à la modélisation de la pandémie actuelle, les modèles classiques épidémiologiques comportant des limites pour prévoir la propagation d’une maladie. Un autre axe d’application majeure concernera la gestion des moyens à déployer sur le terrain, notamment l’optimisation de la logistique de livraison de matériel d’urgence dans le dernier kilomètre.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été co-écrit avec Abder Banoune (spécialiste réadaptation, chez Handicap International) et Pierre Gallien (directeur de l’Innovation, chez Handicap International).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/154107/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Chevalier Jérôme a reçu des financements de la part de la Fondation INSA.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Christophe Garcia a reçu des financements de la part de la Fondation INSA.</span></em></p>Seulement 5 % à 15 % des personnes ayant besoin d’une prothèse y ont accès. Et si la solution venait d’une production locale par impression 3D ?Jérôme Chevalier, Professeur des Universités, Adjoint à la direction de la recherche INSA de Lyon enjeu Santé et Bio-ingénierie, spécialiste en Science des Matériaux, Biomatériaux et dispositifs médicaux, INSA Lyon – Université de LyonChristophe Garcia, Professeur des Universités; VP Recherche délégué à l'enjeu "Information et Société Numérique"; Chercheur en Intelligence Artificielle et Apprentissage Automatique, INSA Lyon – Université de LyonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1535862021-01-21T18:14:23Z2021-01-21T18:14:23ZPourquoi les pays émergents et en développement émettent-ils encore de la dette en dollars et en euros ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/379547/original/file-20210119-20-155a3j4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=14%2C23%2C956%2C642&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En fin d’année, la Chine a émis de la dette souveraine en dollars et en euros plutôt qu’en renminbi.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Ryvius / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Dans un contexte de dette publique croissante des plus grands pays émergents ou en développement à la suite de la crise de la Covid-19, certains pays ont récemment émis massivement de la dette souveraine en devises fortes. Par exemple, la Chine a émis en octobre 2020 <a href="https://www.lesechos.fr/finance-marches/marches-financiers/demande-record-pour-la-premiere-emission-obligataire-de-la-chine-aux-etats-unis-1256094">six milliards de dollars d’obligations</a>, puis en novembre <a href="https://www.agefi.fr/financements-marches/actualites/quotidien/20201118/chine-emet-4-milliards-d-euros-d-obligations-a-5-310153">quatre milliards d’euros</a> d’obligations.</p>
<p>En parallèle, la Côte d’Ivoire a émis en novembre 2020 <a href="https://afrique.latribune.fr/economie/strategies/2020-12-04/cote-d-ivoire-un-nouvel-eurobond-d-un-milliard-d-euros-au-taux-inedit-de-5-864594.html">1 milliard d’euros d’obligations</a>. Quelques mois plus tôt, en juillet 2020, le <a href="https://www.lesechos.fr/2016/07/le-bresil-effectue-son-retour-sur-le-marche-obligataire-232617">Brésil émettait aussi des obligations en dollars</a> sur les marchés internationaux de capitaux.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1334905746996211714"}"></div></p>
<p>Pour ces pays, émettre de la dette en monnaie étrangère ou monnaie forte (US dollars, euros, yen, etc.) constitue une forme de <a href="https://www.nber.org/papers/w7418">« péché originel »</a> qui a été défini et problématisé dans la littérature par les économistes américains Barry Eichengreen et Ricardo Hausmann en 1999. Ce péché originel, dans sa dimension internationale, fait référence à l’incapacité des pays émergents et en développement à émettre de la dette dans leur propre monnaie sur les marchés internationaux.</p>
<h2>Une dépendance aux devises fortes</h2>
<p>Deux explications sont avancées pour expliquer ce phénomène. D’une part, l’incomplétude des marchés financiers internationaux caractérisée par un manque d’instruments de couverture contre le risque de change et par des coûts de transaction élevés n’incite pas les investisseurs étrangers à acheter des titres libellés en monnaie de pays émergents.</p>
<p>D’autre part, la faible qualité des institutions dans les pays émergents et en développement (lacunes dans le droit des contrats, dans le règlement de litiges, etc.), et l’instabilité macroéconomique souvent associée à une forte inflation et à des déséquilibres des comptes courants ne créent pas un contexte favorable à l’émission de dette souveraine en monnaie locale ni à l’achat par les investisseurs étrangers.</p>
<p>Cette dépendance aux devises fortes (le dollar par exemple) expose ces pays à une plus forte vulnérabilité financière. En situation de crise financière qui s’accompagne d’une dépréciation de leur monnaie, le service de la dette s’alourdit augmentant leur probabilité de défaut de paiement et rendant ces pays vulnérables aux brusques retournements de capitaux (<em>sudden stops</em>).</p>
<p>L’ajustement de l’économie réelle via le taux de change est également amoindri et cela augmente le coût de la crise. Émettre en dollars équivaut à un transfert du risque de change des investisseurs internationaux vers les pays émergents. La politique monétaire est enfin contrainte par les stratégies monétaires du pays émetteur de la devise forte, comme les États-Unis.</p>
<h2>Comment diminuer le péché originel ?</h2>
<p>Dans un <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1111/twec.13091">article</a> que nous avons publié récemment, nous montrons que, plus un pays est fort économiquement, intégré à la sphère commerciale mondiale et développé financièrement, plus il est à même d’émettre de la dette dans sa propre monnaie, et plus les investisseurs étrangers dont la confiance augmente sont enclins à acheter ce type de dette.</p>
<p>De plus, nous montrons qu’un stress financier mondial ou régional vient entraver l’émission et l’achat de dette libellée en monnaie de pays émergents. Enfin, plus une monnaie est internationalisée, c’est-à-dire utilisée pour les transactions commerciales ou sur le marché des changes par des investisseurs étrangers, plus un pays pourra émettre de la dette dans sa monnaie du fait des externalités positives et des effets de réseau que son utilisation large peut engendrer. En effet, plus une monnaie est utilisée par les investisseurs sur les marchés, plus cela justifie de continuer à l’utiliser.</p>
<p>Actuellement, la monnaie des pays émergents la plus internationalisée est la monnaie chinoise, le renminbi. Deux indicateurs notamment permettent de mesurer le degré d’internationalisation. La part dans le volume d’opérations sur le marché des changes (FX turnover) est de 8 % en 2019 (pour information, le réal brésilien ne compte que pour 2 % de ce volume), le renminbi est ainsi la monnaie des pays émergents la plus échangée sur ce marché. De plus, la monnaie chinoise compte pour 2 % des réserves de change des banques centrales dans le monde, ce qui en fait la 5<sup>e</sup> monnaie de composition la plus détenue en 2019 (après le dollar, l’euro, le yen et la livre sterling).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1337294963550384129"}"></div></p>
<p>La monnaie chinoise n’est toutefois que partiellement internationalisée comparativement au dollar qui est <em>la</em> monnaie internationale de référence (la part du dollar dans les réserves de change internationales des banques centrales est de 61 % en 2019, et la part dans le volume d’opérations sur le marché des changes est de 88 %).</p>
<p>C’est probablement pour cela, dans un contexte d’incertitudes lié à la crise de la Covid-19 et aux perspectives de croissance économique, que la Chine a fait le choix d’émettre de la dette en dollars et en euros. Ce qui compte aussi dans le choix de la monnaie d’émission est d’élargir la base des investisseurs pour une meilleure diversification des risques et d’émettre dans un format directement accessible aux investisseurs étrangers.</p>
<h2>Confiance dans la monnaie chinoise</h2>
<p>Pour avoir une vision complète de l’exposition au péché originel, il faut également envisager l’émission d’obligations par les investisseurs étrangers dans la monnaie des pays émergents (monnaie locale) sur les marchés internationaux. Les entreprises privées et les banques de développement régionales, telles que l’Asian Development Bank (ADB) pour la région Asie ou la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd) pour l’Europe, trouvent un intérêt dans l’émission de titres de dette en monnaie de pays émergents.</p>
<p>Pour les grandes entreprises et banques multinationales, cela participe en effet à attirer de nouveaux types d’investisseurs sur des titres plus rémunérateurs que des titres émis par des entités privées ou publiques de pays développés dans leur monnaie. Cela permet aussi de fournir à ces émetteurs de la liquidité en monnaie émergente pour financer l’expansion d’activités productives dans ces pays.</p>
<p>Pour les autres types d’acteurs comme les banques régionales de développement, cela contribue à promouvoir le développement de marchés obligataires en monnaie locale en augmentant la base des investisseurs domestiques et étrangers dans les régions émergentes. Le développement de ces marchés est nécessaire à une meilleure allocation des ressources et au financement d’une croissance stable et inclusive.</p>
<p>La Banque des règlements internationaux (BRI) produit des données relatives à ces émissions. Il en ressort notamment que le renminbi reste la monnaie privilégiée par les investisseurs dans ce contexte depuis dix ans.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/379544/original/file-20210119-17-1tmqq8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/379544/original/file-20210119-17-1tmqq8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/379544/original/file-20210119-17-1tmqq8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=91&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/379544/original/file-20210119-17-1tmqq8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=91&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/379544/original/file-20210119-17-1tmqq8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=91&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/379544/original/file-20210119-17-1tmqq8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=115&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/379544/original/file-20210119-17-1tmqq8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=115&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/379544/original/file-20210119-17-1tmqq8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=115&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs à partir des données de la BRI (en millions de dollars U.S.)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le volume d’émission d’obligations et l’encours de dette en monnaie chinoise restent élevés en dépit du contexte de crise de la Covid-19, ce qui montre la confiance des investisseurs étrangers dans cette monnaie et par extension dans les perspectives de croissance de l’économie chinoise.</p>
<p>Dans un contexte d’incertitudes sur la reprise épidémique, sur la reprise économique et sur l’augmentation des dettes publiques, la confiance des investisseurs étrangers peut être un élément déterminant pour l’utilisation des monnaies de pays émergents dans l’émission de dette privée et publique.</p>
<p>Toutefois, l’insertion de ces pays dans les transactions commerciales et financières internationales (internationalisation de la monnaie, chaînes de valeurs mondiales, etc.), mais également le cadre macroéconomique et institutionnel, restent des éléments d’appréciation indispensables au choix des investisseurs (exposition au cycle financier mondial, climat politique, etc.).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153586/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les périodes de stress financier mondial, comme celle liée à la crise actuelle, entravent l’émission et l’achat de dette libellée en monnaie locale. La Chine ne fait pas (encore) exception à la règle.Delphine Lahet, Enseignant-chercheur en économie au Larefi, Université de BordeauxStéphanie Prat, Enseignant-chercheur INSEEC Grande Ecole, Chercheur associée au LAREFI, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1395492020-06-24T21:18:52Z2020-06-24T21:18:52ZLe concept « One Health » doit s’imposer pour permettre l’anticipation des pandémies<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/342968/original/file-20200619-43187-1glecy5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C3180%2C2199&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Vente d'animaux sauvages, Möng La, Shan, Myanmar</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Myanmar_Illicit_Endangered_Wildlife_Market_04_(cropped).jpg">Dan Bennettd/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>C’est à la fois un concept, une stratégie et un objectif. <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/One_Health">« One Health »</a> (une santé) s’est progressivement imposé en sciences du vivant, en médecine vétérinaire et en sciences biomédicales. Il domine à présent la communication d’organisations internationales de santé publique comme l’<a href="https://www.oie.int/fr/pour-les-medias/une-seule-sante/">Organisation mondiale de la santé animale</a>, la <a href="http://www.fao.org/3/al868e/al868e00.pdf">Food and Agriculture Organization</a> (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), l’<a href="https://www.who.int/features/qa/one-health/fr/">Organisation mondiale de la Santé</a> et les <a href="https://www.cdc.gov/ncezid/what-we-do/2018-highlights/one-health.html">Centers for Disease Control and Prevention</a> (centres pour le contrôle et la prévention des maladies). Mais le concept « One Health » reste peu connu du grand public et rarement intégré dans les prises de décision des gouvernements. Alors même que, représentant un véritable changement de paradigme, il pourrait nous aider à mieux appréhender, anticiper et gérer l’irruption de nouvelles <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pand%C3%A9mie">pandémies</a>.</p>
<h2>L’évidente interconnexion du vivant</h2>
<p>Le terme « one medicine » (une médecine) fut <a href="https://books.google.fr/books/about/Veterinary_medicine_and_human_health.html?id=fJqFAAAAIAAJ&redir_esc=y">introduit en 1964</a> par Calvin Schwabe. L’épidémiologiste américain entendait alors souligner l’évidente interconnexion entre médecine animale et humaine. Mais il pointait également l’impérieuse nécessité d’une collaboration entre vétérinaires et médecins pour contrôler la dissémination des agents infectieux.</p>
<p>Sur les 1 407 agents pathogènes affectant l’humain, <a href="https://wwwnc.cdc.gov/eid/article/11/12/05-0997_article">58 % sont en effet d’origine animale</a>, dont un quart capable d’une transmission potentiellement source d’épidémie ou de pandémie, à l’instar des virus <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Grippe">Influenza</a> et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Maladie_%C3%A0_virus_Ebola">Ebola</a>. De plus, <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rstb.2001.0888">75 % des maladies infectieuses émergentes</a> sont d’origine animale. Une meilleure compréhension et gestion des réservoirs animaux d’agents infectieux, mais aussi de leurs voies de transmission et d’adaptation à l’humain, s’avère donc indispensable au contrôle des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Zoonose">zoonoses</a> et des épidémies futures. D’où l’intérêt croissant pour l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%A9co-%C3%A9pid%C3%A9miologie">éco-épidémiologie</a>, discipline émergente et transversale à l’écologie, à l’épidémiologie et aux sciences biomédicales.</p>
<p>Ce sont des perturbations de la dynamique des interactions entre les populations d’humains, d’agents infectieux, de réservoirs animaux, et parfois d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Insecte_vecteur">insectes vecteurs</a>, qui déclenchent en général les épidémies d’origine zoonotique. En faisant varier leur habitat ou leur abondance, des changements environnementaux, climatiques et socio-économiques peuvent par exemple modifier les probabilités d’interactions entre chaque population. Par ailleurs, les agents infectieux, et en particulier les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Virus_%C3%A0_ARN">virus à ARN</a>, évoluent très rapidement. Ils peuvent donc s’adapter à de nouveaux hôtes s’ils entrent fréquemment en contact avec eux, créant ainsi un nouveau réseau d’interactions.</p>
<h2>Chasse, déforestation, climat… et épidémies</h2>
<p>Le lien entre l’intrusion de l’humain dans un écosystème et l’apparition d’une épidémie est bien illustré par le cas du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Virus_de_l%27immunod%C3%A9ficience_humaine">virus de l’immunodéficience humaine</a> (VIH), qui a fait plus de 32 millions de morts entre 1981 et 2018. Son émergence est vraisemblablement due à une augmentation de la chasse et de la consommation de viande de chimpanzé dans la région de Kinshasa (République démocratique du Congo) <a href="https://science.sciencemag.org/content/346/6205/56">dans les années 1920-50</a> : les contacts alors accrus entre humains et primates infectés par le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Virus_de_l%27immunod%C3%A9ficience_simienne">virus de l’immunodéficience simienne</a> ont favorisé l’adaptation de cet agent pathogène à l’humain.</p>
<p>On peut également citer pour exemple la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Maladie_de_Lyme">maladie de Lyme</a>. Cette pathologie, qui témoigne des <a href="https://journals.plos.org/plosmedicine/article?id=10.1371/journal.pmed.0030231">liens</a> entre <a href="https://www.nature.com/articles/nature09575">altération de la biodiversité et épidémies</a>, est due à une bactérie, <em>Borrelia burgdorferi</em>, transmise par la morsure de tiques. Dans la nature, les tiques se nourrissent sur un grand nombre de vertébrés. Certains, comme les écureuils et les cervidés, sont assez résistants à l’infection. D’autres, telles les souris, y sont en revanche très susceptibles.</p>
<p>Suite à un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dilution_(%C3%A9co%C3%A9pid%C3%A9miologie)">effet de dilution</a>, on trouve ainsi peu de tiques infectées dans les forêts présentant une grande biodiversité. Mais là où elle est faible, dans de petites parcelles boisées où les prédateurs sont donc peu nombreux, les souris peuvent voir leur nombre augmenter, ce qui accroît la fréquence d’infection des tiques et le risque pour l’humain : dans le nord-est des États-Unis et en Europe, un cycle historique de déforestation, de reboisement et de fragmentation des zones boisées a ainsi favorisé la progression de la maladie.</p>
<p>Dernier exemple emblématique : le réchauffement climatique. Il est désormais bien établi qu’il change la donne pour un <a href="https://academic.oup.com/femsle/article/365/2/fnx244/4631076">large éventail de maladies à transmission vectorielle en Europe</a>, et continuera de le faire dans les décennies à venir. On sait par exemple que le moustique tigre d’origine asiatique (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Aedes_albopictus"><em>Aedes albopictus</em></a>), vecteur de maladies telles que <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Virus_Zika">Zika</a>, la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dengue">dengue</a> et le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Chikungunya">chikungunya</a>, ou encore la mouche des sables (<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Phlebotominae">phlébotome</a></em>), originaire du Bassin méditerranéen et de l’Afrique du Nord et qui transmet la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Leishmaniose">leishmaniose</a>, se sont désormais établis dans le sud de l’Europe.</p>
<h2>Une gestion tributaire du contexte sociétal</h2>
<p>Pour gérer au mieux une épidémie, il importe de prendre en considération les <a href="https://www.clinicalmicrobiologyandinfection.com/article/S1198-743X(14)63865-9/fulltext">réalités socio-économiques</a>, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0277953614007199">politiques, religieuses et culturelles</a> du pays concerné. Et l’adhésion des populations aux stratégies de santé publique est également indispensable. En somme, les stratégies de communication et d’éducation doivent s’adapter à chaque contexte sociétal.</p>
<p>Prenons le cas de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Brucellose">brucellose</a>. Cette maladie est due aux bactéries <em>Brucella</em>, dont plusieurs espèces infectent de manière chronique les ruminants domestiques. L’humain peut être infecté par contact direct avec les animaux touchés ou, le plus souvent, suite à la consommation d’aliments contaminés, mais la transmission entre humains est quasi inexistante. Agir sur le réservoir animal permet ainsi de réduire les coûts économiques liés à la perte du bétail et d’améliorer la santé humaine.</p>
<p>En Europe, la brucellose a été quasiment éradiquée par la vaccination et l’abattage systématique des troupeaux infectés. Cette approche, toutefois, n’a été permise que par l’harmonisation des politiques sanitaires des différents pays – notamment l’identification des animaux domestiques, leur testage et le contrôle de leurs mouvements – et l’indemnisation des éleveurs. Or on ne peut pas l’appliquer aux pays en voie de développement, où les ressources économiques comme les capacités opérationnelles des services vétérinaires sont limitées. Prenons le cas de l’Inde, <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11250-013-0362-y">où la brucellose reste endémique</a>. Le manque de compensation financière octroyée aux fermiers et l’interdiction d’abattage des bovins pour motifs religieux rendent impossibles le testage et l’élimination des animaux infectés. C’est pourquoi, dans ce pays, seule une stratégie basée sur la vaccination s’avère viable.</p>
<h2>Une approche multidimensionnelle et pluridisciplinaire</h2>
<p>Les <a href="http://www.oneworldonehealth.org/sept2004/owoh_sept04.html">“12 principes de Manhattan”</a> ont été présentés en 2004 à New York (États-Unis), lors d’une conférence organisée par la Société pour la conservation de la vie sauvage (Wildlife Conservation Society).</p>
<p>Le premier de ces principes insiste sur la nécessaire reconnaissance des liens entre santé humaine, santé animale et environnement. Mais est aussi pointée la nécessité d’approches holistiques et prospectives des maladies infectieuses émergentes tenant compte des interconnexions complexes entre espèces. Ou encore, celle d’une réduction du commerce d’animaux sauvages en raison de « la menace réelle qu’il représente pour la sécurité socioéconomique mondiale » ; d’une augmentation des investissements dans les infrastructures de santé et les réseaux de surveillance des maladies infectieuses ; d’un partage rapide et clair des informations ; d’une éducation et d’une sensibilisation des populations et des décideurs politiques à l’interconnexion du vivant.</p>
<p>La conclusion livrée dans le résumé du congrès est sans appel : « Résoudre les menaces d’aujourd’hui et les problèmes de demain ne peut être accompli avec les approches d’hier ». « Nous devons concevoir des solutions adaptatives, prospectives et multidisciplinaires aux défis qui nous attendent sans aucun doute. »</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/338091/original/file-20200527-20237-1103g3s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338091/original/file-20200527-20237-1103g3s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338091/original/file-20200527-20237-1103g3s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=454&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338091/original/file-20200527-20237-1103g3s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=454&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338091/original/file-20200527-20237-1103g3s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=454&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338091/original/file-20200527-20237-1103g3s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=570&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338091/original/file-20200527-20237-1103g3s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=570&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338091/original/file-20200527-20237-1103g3s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=570&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le « One Health Umbrella » développé par les réseaux One Health Sweden et One Health Initiative pour illustrer la portée du concept « One Health ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">One Health Initiative</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le <a href="https://www.oie.int/doc/ged/D5720.PDF">concept « One Health »</a> fut introduit en 2008 à Sharm el-Sheikh (Égypte), lors d’un symposium sur les risques infectieux liés aux contacts des écosystèmes humain et animal. Peu après, suite à la pandémie de grippe A due <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Grippe_A_(H1N1)_de_2009">au virus H1N1 de 2008-2009</a>, l’OMS adoptait un <a href="https://www.who.int/influenza/resources/pip_framework/fr/">programme mondial de lutte contre la grippe</a> impliquant une surveillance accrue des réservoirs animaux. Et dans le même temps, une première <a href="https://www.cdc.gov/onehealth/index.html">agence One Health</a> était créée aux États-Unis. Elle œuvre aujourd’hui à promouvoir un <a href="https://ghsagenda.org/">agenda mondial de la sécurité sanitaire</a>, en coopération avec de nombreuses autres organisations nationales et internationales, et implique une soixantaine de pays.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/338087/original/file-20200527-20260-1xl76xi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338087/original/file-20200527-20260-1xl76xi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338087/original/file-20200527-20260-1xl76xi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=574&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338087/original/file-20200527-20260-1xl76xi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=574&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338087/original/file-20200527-20260-1xl76xi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=574&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338087/original/file-20200527-20260-1xl76xi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=722&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338087/original/file-20200527-20260-1xl76xi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=722&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338087/original/file-20200527-20260-1xl76xi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=722&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Représentation graphique de « One Health. »</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikipedia</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Depuis l’émergence de « One Health », d’autres concepts <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fvets.2017.00163/full">s’en rapprochant plus ou moins</a> ont vu le jour, comme <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/EcoHealth">EcoHealth</a> et <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Planetary_health">Planetary Health</a>. Tenant compte de l’interconnexion du vivant, mais aussi du nécessaire abandon de toute réflexion linéaire et réductrice, et ayant en commun un décloisonnement des disciplines, ces nouveaux concepts devraient permettre de mieux appréhender et gérer les crises sanitaires.</p>
<h2>De l’importance d’anticiper</h2>
<p>Nous vivons tous dans le même monde, et notre santé comme notre économie dépendent étroitement de son état. Si nous voulons atteindre les <a href="https://www.un.org/millenniumgoals">objectifs du millénaire</a> pour le développement durable des Nations unies, il faut impérativement tenir compte des multiples interactions entre santé publique, économie, santé animale et environnement. Force est néanmoins de constater que la vision « One Health » est rarement adoptée par les décideurs politiques, comme l’a mis en lumière la <a href="https://www.rtbf.be/info/monde/detail_pour-l-oms-beaucoup-de-pays-n-en-font-pas-assez-pour-combattre-le-coronavirus %C2 %A0 ?id=10449010">gestion chaotique</a> de la pandémie de Covid-19.</p>
<p>Alors que l’émergence de nouvelles pandémies virales d’origine zoonotique avait été <a href="https://www.nature.com/articles/nature12711">maintes fois</a> <a href="https://www.nature.com/articles/nm.3985">prédite</a> par la <a href="https://www.pnas.org/content/113/11/3048">communauté scientifique</a>, les gouvernements se sont montrés <a href="https://www.lemonde.fr/sciences/article/2020/06/20/richard-horton-le-covid-19-montre-une-faillite-catastrophique-des-gouvernements-occidentaux_6043590_1650684.html">incapables d’anticiper</a>. Pire : ils ont mis en place des mesures nationales hétéroclites (et parfois contradictoires), alors qu’une pandémie est à l’évidence un problème global nécessitant une action concertée supranationale.</p>
<p>Bien entendu, nous devons en tirer des leçons. Dans la vision « One Health », la pandémie induite par le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/SARS-CoV-2">SARS-CoV-2</a> est la conséquence directe et prévisible de la mondialisation des systèmes de production animale, de la vente d’animaux sauvages vivants, mais aussi du tourisme de masse, du commerce international et de l’hypermobilité qui les accompagne. Et nonobstant ce <a href="https://theconversation.com/apprivoiser-les-cygnes-noirs-enseignements-de-la-crise-du-coronavirus-135481">que d’aucuns sous-entendent</a>, on ne peut pas l’interpréter comme un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_du_cygne_noir">cygne noir</a>, un événement inopiné qui a une cause externe à notre système économique libéral.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/139549/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Eric Muraille a reçu des financements de Fonds de la Recherche Scientifique (FNRS-FRS), Belgique.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jacques Godfroid ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour mieux anticiper et gérer l’irruption de nouvelles pandémies, il faut changer de paradigme et tenir compte des interactions complexes entre santé humaine, santé animale, environnement et économie.Eric Muraille, Biologiste, Immunologiste. Maître de recherches au FNRS, Université Libre de Bruxelles (ULB)Jacques Godfroid, Professor of Microbiology, University of TromsøLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1369892020-05-14T18:40:41Z2020-05-14T18:40:41ZReplacer les populations au centre de la réponse à la pandémie<p>Démographie et pandémie ont une racine grecque commune : <em>demos</em>, le peuple. Ces termes révèlent aussi des enjeux communs : ils mettent en avant l’importance des dynamiques collectives et des exercices de comptabilisation des populations, ce qui rend capitale la question de la collecte et de l’analyse des données. La pandémie du Covid-19 remet au centre de toutes les attentions à la fois la question de la connaissance par les États de leurs populations et celle des moyens financiers, humains et technologiques mis à disposition pour compter, connaître, prévenir, traiter et informer les populations.</p>
<p>Historiquement, les pandémies ont affecté les sociétés dans leur équilibre démographique et géographique, leur stratification, leur organisation sociale, culturelle, religieuse, leur vie économique et leurs institutions. Elles ont donné naissance à des modes nouveaux de production, de consommation et de gouvernance, lesquelles ont engendré à leur tour des formes nouvelles de comportements individuels et collectifs. La pandémie actuelle démontre aussi la nécessité, au-delà des connaissances statistiques, de définir et de développer des instruments de gouvernement et de gouvernance susceptibles de contribuer à une formulation intégrée des politiques publiques.</p>
<h2>Le défi démo-épidémiologique de la mondialisation des mobilités</h2>
<p>L’intensification des <strong>migrations temporaires du tourisme de masse</strong> a favorisé les contaminations transcontinentales humaines, animales et végétales. Ces enjeux seront au cœur de la réflexion sur les conditions de redéploiement de l’économie d’après-crise Covid-19. Avec la mondialisation des échanges et la spécialisation internationale dans les chaînes de valeur, les <strong>migrations économiques</strong> au niveau des pays, des ensembles régionaux et intercontinentaux sont également à prendre en compte dans l’analyse de la pandémie actuelle.</p>
<p>Les flux migratoires vers les régions/pays d’accueil aussi bien que les migrations de retour s’effectuent le plus souvent en l’absence de mesures de prévention et de planification, accélérant la dissémination du virus et la contagion.</p>
<p>Enfin, la prolifération des théâtres de guerre et d’affrontement provoque des <strong>migrations de conflit</strong> qui créent des concentrations humaines dans des conditions humanitaires et sanitaires empêchant toute prévention et prise en charge des épidémies et intensifiant leur expansion.</p>
<h2>Des risques démographiques différenciés</h2>
<p>Selon les études épidémiologiques les plus récentes, le Covid-19 affecte plus particulièrement les <a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/coronavirus-qui-sont-les-patients-les-plus-vulnerables-face-au-covid-19_3858491.html">personnes âgées, plus vulnérables aux pathologies pulmonaires</a>. Les pays les plus développés, où la proportion de personnes de plus de 65 ans oscille entre 18 et 23 %, semblent plus exposés que les pays africains à faible revenu où les moins de 25 ans représentent les deux tiers de la population.</p>
<p>Cela signifie-t-il pour autant qu’il y aurait une sorte d’immunisation « générationnelle » pour ces pays ? En fait, le niveau élevé de pauvreté ou de précarité, la quasi-absence de couverture sanitaire et de filets sociaux, de nombreux facteurs de comorbidité (paludisme, tuberculose, VIH, choléra, Ebola, expansion des maladies non transmissibles telles que le diabète et les maladies cardio-vasculaires) qui affaiblissent les défenses immunitaires peuvent être des accélérateurs de la pandémie que la jeunesse de la population ne suffirait pas vraiment à compenser.</p>
<p><strong>Dispositifs de connaissances démographiques et de surveillance épidémiologique : défis statistiques ou politiques ?</strong></p>
<p>La pandémie du Covid-19 révèle enfin l’importance des structures, des instruments et des méthodologies statistiques en démographiques et en épidémiologie. Elle en révèle aussi les défis, voire les impasses actuelles en matière de production, de capacité d’analyse et de diffusion des données démographiques pour beaucoup de pays en développement. La « révolution des données » est un défi spécifique supplémentaire pour ces pays, au niveau de la collecte ainsi que de la fiabilité/qualité, de la régularité, de la comparabilité, de l’accessibilité et de l’utilisation des données.</p>
<p>La pandémie met en évidence la très faible capacité institutionnelle des systèmes statistiques nationaux des pays pauvres à produire les données démographiques et épidémiologiques nécessaires : bien localiser les lieux de contagiosité et des décès, les délais de remontée des informations, la cause réelle des décès, les effets des comorbidités… L’enjeu est de développer une prise de conscience collective (populations, gouvernements, bailleurs internationaux) quant à la nécessité d’investir dans des moyens financiers, intellectuels et humains afin de mieux développer ces instruments de connaissance des dynamiques des populations.</p>
<h2>Distanciation sociale et confinement : des solutions universelles ?</h2>
<p>Les dynamiques de populations sont directement affectées par le Covid-19 : fermetures des frontières, suspension des transports aériens, mise à l’arrêt de pans entiers des économies, mobilisation prioritaire de systèmes de santé déjà fragilisés par des arbitrages budgétaires, contrôle social et sécurisation des personnes, précarisation accrue.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1252759232400719873"}"></div></p>
<p>Ces dispositions administratives et ces injonctions, en particulier la mise en place des mesures de distanciation sociale et de confinement, révèlent des fractures importantes entre pays développés et en développement. En effet, les facteurs de résistance qui rendent plus complexe la réalisation de ces mesures dans les pays du Sud sont nombreux : niveau de pauvreté et des inégalités, poids de l’économie informelle, pratiques de sociabilité spécifiques dans des villes déstructurées, surpeuplées et insalubres…</p>
<p>Les injonctions étatiques risquent d’être peu comprises, mal acceptées. Certains États estiment nécessaire d’avoir recours à l’armée (<a href="https://fr.africanews.com/2020/03/27/afrique-du-sud-l-armee-garantit-le-confinement//">Afrique du Sud</a>) et d’imposer l’état d’urgence (<a href="http://www.rfi.fr/fr/afrique/20200421-%C3%A9tat-durgence-sanitaire-en-rdc-le-pr%C3%A9sident-saisi-le-parlement">RDC</a>, <a href="http://www.gouv.ci/_actualite-article.php?recordID=11007&d=3">Côte d’Ivoire</a>). Les tensions sociales liées à la fermeture des commerces informels resteront-elles de simples résistances ou bien iront-elles jusqu’à une remise en cause des élites, voire des systèmes politiques ?</p>
<h2>Entre religions et idéologies</h2>
<p>Des expressions religieuses exacerbées renaissent : aux flagellants processionnaires et aux dénonciations violentes des boucs émissaires du Moyen Âge répondent la désinformation et le prosélytisme des mouvements évangéliques (Nigéria, RDC, Cameroun, Brésil, Texas), les cérémonies d’exorcisme (Inde), les réponses du vaudou (Bénin), les guérisseurs et les désenvoûteurs un peu partout, ainsi que la rhétorique du châtiment de Dieu comme arme eschatologique (djihadistes au Sahel).</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/quand-la-propagande-djihadiste-sempare-de-la-crise-sanitaire-135886">Quand la propagande djihadiste s’empare de la crise sanitaire</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Ces manifestations religieuses investissent la sphère publique et les États doivent les prendre en compte, quand ils ne les instrumentalisent pas.</p>
<h2>Invisibilisation des femmes : une constante universelle ?</h2>
<p>La pandémie du Covid-19 remet en lumière la répartition des rôles sociaux de genre et les rapports de domination hommes-femmes qui existent dans toutes les sociétés du monde.</p>
<p>Si les données actuelles montrent une <a href="https://www.santemagazine.fr/actualites/actualites-sante/coronavirus-une-etude-montre-que-les-hommes-ont-plus-du-double-du-taux-de-mortalite-des-femmes-439646">surmortalité masculine</a> variable de l’ordre de 1 à 3, les facteurs socioculturels ne doivent pas être minorés par rapport aux déterminants biologiques et génétiques. L’impact du Covid-19 peut varier significativement d’un pays à un autre en fonction de la combinaison spécifique des pratiques sociales, des inégalités socio-économiques et des normes de genre. Dans la majorité des pays en développement, les risques sont accrus pour la santé et la vie des femmes qui sont les <a href="https://www.wiego.org/sites/default/files/migrated/publications/files/Meagher_Gender.Empowerment.Trap_.pdf">piliers des économies informelles</a> et dans l’impossibilité vitale de pratiquer la distanciation sociale.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1257106805060186114"}"></div></p>
<p>Elles représentent la très grande majorité des soignant·e·s (sauf pour le haut de la pyramide sanitaire, très massivement masculin) dans des systèmes de santé très délabrés et peu sûrs. Elles sont au cœur du « care » pour leurs familles et leurs communautés, et ont payé un lourd tribut <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4812164/">lors d’autres épidémies (Ebola)</a>. Elles sont l’objet de <a href="https://euromedrights.org/wp-content/uploads/2015/03/EMHRN-VAWreport-FR-Final2.pdf">violences domestiques accrues</a> lorsque les hommes, du fait des conséquences sociales de la crise, sont fragilisés dans leur rôle traditionnel de pourvoyeur de la famille ; enfin, elles ne fréquentent plus les centres de santé pour le suivi des grossesses et les accouchements. Ajoutons que dans beaucoup de pays, la crise du Covid-19 est utilisée pour <a href="https://www.aljazeera.com/indepth/opinion/governments-coronavirus-restrict-women-rights-200412095859321.html">justifier et/ou renforcer des législations et des politiques contre l’avortement</a>.</p>
<h2>L’enchâssement des globalisations épidémiologique, économique et environnementale</h2>
<p>La récession de l’économie mondiale a un coût colossal pour les pays développés. Dans les pays en développement, les conséquences sont plus dramatiques encore. En Afrique, le <a href="https://www.jeuneafrique.com/927954/economie/coronavirus-le-fmi-prevoit-une-recession-historique-en-afrique/">FMI prévoit une récession de plus de 3 %</a> inaugurant une tendance inconnue depuis plus de 25 ans, la croissance économique ne permettant plus de compenser la croissance démographique du continent.</p>
<p>Face à cet effondrement de l’économie, les pays développés mettent en œuvre des politiques publiques massives et des plans de soutien budgétaires et financiers afin d’en compenser les effets dévastateurs sur le plan sanitaire mais surtout sur le plan économique (soutien aux entreprises) et social (compensation du chômage, total ou partiel). Les pays à revenu faible ou intermédiaire ne semblent <a href="https://news.un.org/en/story/2020/04/1061492">pas du tout en capacité</a>, sur tous ces fronts, de mettre en place des politiques publiques comparables.</p>
<p>La pandémie actuelle appelle à réfléchir au renforcement des politiques de santé publique qui affectent directement les droits fondamentaux des populations et à repenser les politiques publiques dans le cadre d’un reformatage de la mondialisation.</p>
<p>Enfin, c’est le cadre environnemental des populations, en particulier l’appauvrissement des espaces de biodiversité et les interactions accrues entre les humains et les animaux qu’il conviendra de questionner. En effet, sous l’effet des migrations et des échanges en constante augmentation, l’affaiblissement des barrières entre espèces avec la multiplication transnationale des marchés et des trafics et de la consommation d’animaux sauvages et la proximité de plus en plus grande des élevages industriels des zones périurbaines ont <a href="https://theconversation.com/virus-quand-les-activites-humaines-sement-la-pandemie-135907">accru les risques pandémiques de tous ordres</a>. C’est donc à l’échelle du monde que devraient être pensées et coordonnées les politiques publiques environnementales et de protection de la biodiversité sous peine de voir se démultiplier des opportunités infectieuses qui affecteront les dynamiques démographiques planétaires.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/136989/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Serge Rabier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La pandémie nous invite à repenser les politiques publiques au niveau international pour mieux prendre en compte les besoins des populations, spécialement dans les pays en voie de développement.Serge Rabier, Chargé de recherches Populations genre, Agence française de développement (AFD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1276702020-02-04T19:52:02Z2020-02-04T19:52:02ZQuand l’innovation se fait frugale<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/312533/original/file-20200129-92949-ndes3s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=86%2C37%2C8167%2C4170&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’innovation frugale vise à concevoir de façon ingénieuse et moins consommatrice d’énergie des biens répondant à des besoins vitaux.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/concept-idea-colorful-crumpled-paper-158445473">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p><a href="https://www.youtube.com/watch?v=un26lwsuNe8">ChotuKool</a> est un tout petit réfrigérateur utilisant le système de refroidissement des ordinateurs. Mis au point en Inde, il permet aux plus pauvres de pouvoir conserver leur nourriture. C’est ce que l’on appelle une « innovation frugale ». Ces dernières ont sans doute toujours existé, mais leurs réalisations à une échelle plus conséquente (en particulier en Inde) et leur diffusion de plus en plus globale, en font un type de <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rsta.2016.0372">renouvellement technologique</a> compatible avec l’amélioration de la durabilité des économies. Quelles sont les caractéristiques de ces initiatives ?</p>
<p>Leur principe consiste à produire des biens (voire des services) pour les individus aux revenus les plus faibles ; leur nature n’est pas radicalement nouvelle mais leur conception a été adaptée pour les rendre plus abordables ; ces créations doivent être adaptées à des <a href="https://books.google.fr/books/about/Frugal_Innovation_in_Scholarly_and_Socia.html?id=WxsRkAEACAAJ&redir_esc=y">contextes de faible confort</a> et peu complexes quant à leur structure technologique.</p>
<p>Ces objets sont donc pensés pour être moins chers, de meilleure qualité, tout en optimisant les ressources utilisées. Ils visent prioritairement les marchés des <a href="https://www.ted.com/talks/navi_radjou_creative_problem_solving_in_the_face_of_extreme_limits">pays émergents</a>, dans lesquels les populations à faibles niveaux de ressources sont nombreuses.</p>
<p>Le concept d’innovation frugale (« jugaad »), né en Inde, est attribué à l’économiste franco-indien Navi Radjou.</p>
<h2>Une « low-tech » inclusive</h2>
<p>Prenons quelques exemples. Une couveuse pour nourrisson vendue 3 000 dollars (GE Lullaby) – contre les 12 000 dollars que cet appareil médical vaut en moyenne – créée en Inde en 2006. La « gLink Base Station », qui collecte des informations météorologiques diffusées par wi-fi aux agriculteurs. Ou encore Kokono, un petit berceau écologique et totalement hygiénique pour bébés africains réalisé avec des matériaux locaux.</p>
<p>Tous ces produits sont durables, simples, efficaces, et disposent des fonctions essentielles. Le processus de recherche et de développement de ce type de produits s’appuie sur des ressources financières faibles. Il est fondé sur le savoir-faire, le bricolage intelligent, davantage sur l’ingéniosité que l’ingénierie.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/lA2WOgZcq_c?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">L’innovation frugale, qu’est-ce que c’est ?</span></figcaption>
</figure>
<p>Le produit frugal se distingue par une concentration sur les fonctionnalités essentielles, avec une faible complexité technologique, mais il présente un niveau de performance et de fiabilité élevé. La couveuse GE Lullaby évoquée précédemment est désormais en service dans les hôpitaux belges ou italiens. Il répond à des besoins vitaux, mais permet à des personnes du bas de la pyramide sociale d’élever leur niveau de consommation.</p>
<p>L’innovation frugale a été analysée comme une réelle opportunité pour les pays émergents. Ce qui n’empêche pas d’envisager son déploiement dans des économies développées, bien au contraire. Ses traits généraux, low-tech et low-cost, <a href="https://www.dunod.com/entreprise-economie/innover-envers-repenser-strategie-et-conception-dans-un-monde-frugal">y sont tout aussi pertinents</a> car elle recèle des propriétés qui la rendent compatible avec un développement durable.</p>
<h2>Des bien moins gourmands, plus réparables</h2>
<p>L’innovation frugale possède en général <a href="http://journals.openedition.org/rei/6617">d’importantes vertus environnementales</a>, du moins en comparaison avec le produit traditionnel équivalent. Les biens sont dans la grande majorité des cas plus petits, moins volumineux. Économisant donc des matériaux, ils imposent une pression moins forte sur les ressources naturelles.</p>
<p>Leur plus faible complexité technologique a deux conséquences notables. Possédant moins de composants, le produit frugal est plus facilement réparable. Ce potentiel recyclable renforce les mécanismes propres à l’économie circulaire. On peut également anticiper que sa durée de vie est plus élevée (et peu soumis à l’obsolescence programmée).</p>
<p>Autant d’effets bénéfiques pour l’environnement. Sa fabrication est aussi plus frugale et économise matériaux et énergie. Plus léger, le produit est plus facilement transportable (y compris dans les chaînes de fabrication globales), accentuant la capacité à rester sur un sentier de développement plus soutenable.</p>
<h2>Effet rebond et logique marchande</h2>
<p>Pour autant, ne nous y trompons pas. L’innovation frugale ne vise pas directement à contrecarrer des dommages environnementaux, ou à lutter contre le réchauffement climatique. Les produits frugaux provoquent d’ailleurs des émissions (notamment les outils de production d’énergie, comme un four très simple pour la cuisson de la nourriture, qui utilise des combustibles fossiles et libère donc des gaz à effets de serre).</p>
<p>Ce mode de production ne diminue pas en outre nécessairement les externalités négatives par rapport aux produits classiques, et ce pour deux raisons principales. L’effet rebond, en premier lieu : avec l’innovation frugale, le coût et le prix des produits diminuent, ce qui peut provoquer une hausse de la demande. Le risque existe que les gains positifs sur l’environnement d’une unité de produit soient annihilés par la croissance du nombre de biens produits issue de l’accroissement de la demande de ce même bien.</p>
<p>L’innovation frugale n’est pas non plus motivée par une préoccupation environnementale, mais bien commerciale. Le risque existe que les enjeux économiques prennent le dessus. Des politiques publiques appropriées pourraient sans aucun doute constituer un point d’appui à une diffusion pertinente de ce type d’innovation.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/127670/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian Le Bas ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Faire plus avec moins, c’est le mantra de l’innovation frugale. Une tendance prometteuse pour les personnes à faibles revenus, mais qui présente des limites sur le plan environnemental.Christian Le Bas, Professeur des universités en économie de l’innovation, ESDESLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1250272019-10-13T19:00:39Z2019-10-13T19:00:39ZQuelques pistes (provocantes) pour sortir le vin français de la crise<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/296256/original/file-20191009-3935-ugh0xk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=390%2C151%2C6823%2C4675&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les volumes récoltés en France devrait reculer de 12% cette année par rapport à 2018. </span> <span class="attribution"><span class="source">Daan Kloeg / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>La filière viticole française se porte mal. Certes, ce n’est pas la première fois, ni sans doute la dernière. Néanmoins, les facteurs de crise paraissent particulièrement nombreux et durables. Ils touchent aussi bien l’offre que la demande. Le mal semble profond. Sans doute que l’heure des conservatismes doit céder la place à une approche plus innovante et pragmatique dans la gestion de cette filière.</p>
<h2>Une offre volatile en perte de vitesse</h2>
<p>L’Agreste (ministère de l’Agriculture) prédit cette année une diminution de 12 % des volumes récoltés. Cette baisse s’inscrit dans une tendance globale de réduction des rendements du vignoble. L’origine en est multiple : augmentation des maladies de la vigne, pratiques viticoles peu soucieuses de l’environnement global de la plante, évolutions climatiques. Le climat joue en effet un rôle clé dans la quantité produite comme dans la qualité des vins et pose un défi considérable aux vignerons.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/296235/original/file-20191009-3935-1y0872g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/296235/original/file-20191009-3935-1y0872g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/296235/original/file-20191009-3935-1y0872g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=369&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/296235/original/file-20191009-3935-1y0872g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=369&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/296235/original/file-20191009-3935-1y0872g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=369&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/296235/original/file-20191009-3935-1y0872g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=464&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/296235/original/file-20191009-3935-1y0872g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=464&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/296235/original/file-20191009-3935-1y0872g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=464&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Selon les estimations établies au 19 août 2019, la production viticole s’établirait, en 2019, à 43,4 millions d’hectolitres, soit un niveau inférieur de 12 % à celui de 2018.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://agreste.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/2019_120inforapviticulture.pdf">Agreste.agriculture.gouv.fr/</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>À court terme, les évènements extrêmes (gel tardif, grêle, sécheresse) affectent les quantités et amènent une grande incertitude sur les récoltes. Cela impose de lisser les stocks et les ventes dans le temps et donc induit une hausse du besoin en fonds de roulement. Les petites exploitations, la norme dans notre pays, paraissent bien fragiles et démunies pour gérer cette incertitude. À long terme, le réchauffement pourrait affecter la typicité des vins, mais surtout condamner la récolte des zones les plus affectées. Le modèle productif français semble donc menacé.</p>
<h2>Un consommateur qui a profondément changé</h2>
<p>Les difficultés ne s’arrêtent cependant pas là. La demande de vin a fortement évolué depuis une vingtaine d’années. En France, elle a <a href="http://www.franceagrimer.fr/fam/content/download/49958/479392/file/Enqu%C3%AAte%20conso%20enqu%C3%AAte%202015.pdf">baissé de moitié</a> depuis les années 1960, selon FranceAgriMer.</p>
<p>Mais cette tendance s’accélère avec la désaffection croissante des Français pour le premier canal de distribution de vin : la grande distribution (<a href="https://www.franceagrimer.fr/Bibliotheque/INFORMATIONS-ECONOMIQUES/VIN-ET-CIDRICULTURE/VIN/CHIFFRES-ET-BILANS/2019/Achats-et-ventes-de-vin-tranquille-en-France-Bilan-2018">70 % des ventes</a>).</p>
<p>Les foires au vin ne font plus autant recette que naguère. L’exportation est également devenue plus difficile. Il y a 20 ans, les principaux marchés d’export, Allemagne, Belgique et Royaume-Uni, étaient tous dans l’Union européenne, accessibles sans droits de douane et avec des consommateurs comprenant les spécificités des appellations d’origine. La concurrence venait essentiellement de l’Italie et de l’Espagne.</p>
<p>Les principaux marchés sont maintenant les États-Unis et la Chine. Leurs marchés sont protégés et leurs consommateurs sont plus difficiles à séduire car ils comprennent moins nos étiquettes et nos spécificités. De plus, la liste des concurrents s’est considérablement allongée avec les pays dits du nouveau monde : Australie, Afrique du Sud, Chili, Argentine, Nouvelle-Zélande, États-Unis. Pour certains, le taux de croissance de leurs exportations est exceptionnel.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1176050630361849856"}"></div></p>
<p>Ces pays fonctionnent avec des marques fortes qui s’émancipent des règles propres aux appellations d’origine et ils maîtrisent les codes marketing modernes. L’espace disponible, des coûts moindres et la taille plus élevée de leurs exploitations leur confèrent un avantage compétitif. Sans même parler de la concurrence croissante des autres boissons ou du cannabis, vendre du vin est ainsi devenu nettement plus difficile pour les vignerons français.</p>
<h2>Imiter le champagne ?</h2>
<p>Pour sortir de cette crise, il faudra vraisemblablement briser les codes traditionnels de la profession. Dans le cadre de l’adaptation au réchauffement climatique, certaines appellations, dont Bordeaux, permettent d’introduire à hauteur de 5 % de nouvelles variétés plus résistantes au réchauffement. Bien que timide, c’est un pas qui va dans le bon sens. Mais à court terme, comment fait-on pour gérer la variabilité des récoltes et séduire le consommateur mondial ?</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1141955691093118976"}"></div></p>
<p>Sans prétendre qu’il existe des recettes miracles, trois pistes méritent d’être étudiées. La première concerne l’indication des millésimes sur les étiquettes. La France est attachée à cette indication pour les vins vendus en bouteille (hors vins de table, VSIG – vin sans indication géographique). Cette mention n’est pas obligatoire. Dès lors, pourquoi ne pas imaginer l’enlever afin de lisser sur deux à trois ans les volumes et la qualité des récoltes et d’éviter les effets de réputation négatifs sur les « mauvais » millésimes ? Rappelons que les vins de Champagne n’utilisent l’indication des millésimes qu’avec parcimonie, pour souligner la qualité d’une vendange exceptionnelle. Pourquoi ne pas répliquer ce modèle pour les vins tranquilles ? Le consommateur s’adapterait vraisemblablement et la gestion des stocks serait largement facilitée évitant des creux de trésorerie délétères pour les producteurs et des mouvements de vente brutaux pouvant déstabiliser les marchés.</p>
<p>Une autre piste pour faciliter la gestion de la filière serait de créer de véritables marchés à terme qui permettraient d’acheter et vendre à une échéance future des volumes de vin donnés à un prix fixé à l’avance. Il existe de nombreux marchés à terme sur les produits agricoles. Ils permettent aux opérateurs de gérer le risque de fluctuation des prix en fixant à l’avance prix et quantités. De tels marchés seraient plus efficients que les contrats de gré à gré pluriannuels qui existent aujourd’hui mais sont très régulièrement dénoncés par l’une ou l’autre des parties. Les conditions de réussite d’un marché à terme tiennent à l’homogénéité du produit traité et à la liquidité du marché (taille du marché).</p>
<p>Un marché à terme du vin n’est donc envisageable que pour les vins en vrac qui répondent aux critères d’homogénéité (qualité équivalente) et d’importance des volumes traités (liquidité). Les faiseurs de marché existent. Ce sont les courtiers, en capacité de sélectionner les produits de qualité équivalente de par leur suivi au quotidien des vignes. Un marché à terme des grands cépages (merlot, cabernet, syrah, pinot, etc.) et/ou des vins de grandes régions productrices (Bordeaux, Languedoc, Rhône, etc.) assurerait une meilleure gestion des risques de marché et conférerait plus d’efficience à la filière.</p>
<h2>Penser le vin de façon plurielle</h2>
<p>Enfin, pourquoi ne pas réduire le nombre des appellations d’origine pour gagner en lisibilité de l’offre face au consommateur mondial ? Un <a href="https://ideas.repec.org/a/eee/ecmode/v81y2019icp518-532.html">article académique récent</a> montre que les différentes appellations bordelaises se font concurrence et apparaissent substituables pour le consommateur sur une base sémantique (lorsque le nom des appellations se ressemble).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1112866175942361088"}"></div></p>
<p>La France compte environ 350 appellations d’origine dans le vin, quelle information cela véhicule-t-il pour le consommateur ? L’urgence n’est-elle pas plutôt de construire des marques sur le bas et moyen de gamme qui soit compétitives face à la concurrence du nouveau monde ? Il faudrait en effet penser le vin de façon plurielle. Les vins à forte différenciation représentés par les vins de vigneron, plein de personnalité, au cœur d’une appellation constitue un segment précieux.</p>
<p>Autre segment, celui des vins premium, qui renvoie au monde du luxe, constitue une locomotive pour notre pays. Mais tout le monde ne peut pas faire du premium ou avoir une signature reconnue. Il est primordial pour écouler notre production d’avoir une stratégie compétitive et ambitieuse sur les vins plus standardisés dans le bas et moyen de gamme. Ceux qui représentent la grande majorité du marché en volume. Construire des marques puissantes, visibles internationalement sur ces segments de gamme est sans doute une question de survie pour la viticulture française.</p>
<p>Ces trois pistes, qui peuvent sembler provocatrices car en rupture avec les pratiques usuelles, ne doivent pas constituer des tabous dans une filière qui a besoin de se réinventer pour affronter la nouvelle donne mondiale.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/125027/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Marie Cardebat ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Au-delà des mauvaises récoltes annoncées pour 2019, la filière est en proie à des problèmes structurels dont la résolution nécessite de rompre avec de vieilles habitudes.Jean-Marie Cardebat, Professeur d'économie à l'Université de Bordeaux et Prof. affilié à l'INSEEC School of Business and Economics, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1244652019-10-08T20:36:15Z2019-10-08T20:36:15ZLe découragement des emprunteurs, boulet des PME dans les pays en développement<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/295245/original/file-20191002-49365-12k40l6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C62%2C916%2C583&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Ce manque de financement représenterait l’équivalent du PIB japonais.</span> <span class="attribution"><span class="source">Atstock Productions / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>À la suite de l’engagement du président de la République Emmanuel Macron, la France a lancé début 2019 l’initiative <a href="https://www.afd.fr/fr/choose-africa-linitiative-francaise-pour-accelerer-la-croissance-des-petites-et-moyennes-entreprises-en-afrique">Choose Africa</a>. L’objectif est de consacrer 2,5 milliards d’euros au financement et à l’accompagnement de près de 10 000 start-up, très petites entreprises (TPE) et petites et moyennes entreprises (PME) africaines d’ici 2022. Le développement des PME et l’amélioration de l’accès aux financements constituent en effet un enjeu de développement structurel et de long terme, non seulement en Afrique mais dans la plupart des pays en développement. Les petites entreprises et les start-up sont au <a href="https://openknowledge.worldbank.org/bitstream/handle/10986/3397/WPS5631.pdf?sequence">cœur des créations d’emplois</a>. Or, dans le même temps, ces entreprises souffrent d’un manque de financement.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/CgQfV7kYw3g?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Choose Africa, l’initiative française pour accélérer la croissance des PME en Afrique » (AFD, mars 2019).</span></figcaption>
</figure>
<p>Selon les <a href="https://www.smefinanceforum.org/data-sites/msme-finance-gap">estimations du SME Finance Forum</a>, ce manque de financement représente plus de 4 800 milliards de dollars dans les pays en développement, soit l’équivalent du PIB japonais. Si cette estimation doit être prise avec précaution, elle soulève l’importance de cette question du financement des PME et start-up dans les pays en développement.</p>
<h2>Absence de demande</h2>
<p>Afin de mieux agir sur cet obstacle, il est important de comprendre les raisons de ce manque de financement. En utilisant des données d’enquêtes de la Banque mondiale sur plus de 130 000 entreprises à travers le monde (<a href="https://www.enterprisesurveys.org/">World Bank Enterprise Surveys</a>), nous étudions les raisons expliquant le non-accès au crédit. Il ressort qu’en moyenne seule une entreprise sur cinq a obtenu un crédit l’année avant l’enquête.</p>
<p>Ce manque de recours au crédit bancaire s’explique en premier lieu par une absence de demande. Près de 40 % des entreprises déclarent ne pas avoir besoin de crédit. Ce manque de demande s’explique par l’absence de projets d’investissements (toutes les entreprises n’ont pas vocation à croître), mais aussi par le recours à d’autres formes de financements moins contraignantes (fonds internes, recours à des proches).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/295269/original/file-20191002-49373-1aoczfc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/295269/original/file-20191002-49373-1aoczfc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/295269/original/file-20191002-49373-1aoczfc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/295269/original/file-20191002-49373-1aoczfc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/295269/original/file-20191002-49373-1aoczfc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/295269/original/file-20191002-49373-1aoczfc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/295269/original/file-20191002-49373-1aoczfc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">WBES, calculs de l’auteur.</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Parmi les entreprises ayant un besoin de crédit, seules 30 % d’entre elles en obtiennent un (cf. graphique ci-dessus). Ce manque de financement s’explique en priorité par une autolimitation des emprunteurs potentiels. En effet, plus de 50 % des entreprises ayant un besoin de financement ne postulent pas à un crédit bancaire.</p>
<p>Ce phénomène de découragement des emprunteurs (<a href="https://www.enterprisesurveys.org/">« borrower discouragement »</a>) est accentué pour les plus petites entreprises (comme l’illustre le graphique ci-dessus) et explique en grande partie l’accès difficile des petites entreprises au crédit bancaire. Autrement dit, plus de 80 % des petites entreprises qui ont un manque de financement n’ont pas postulé (et les 20 % restantes ont postulé mais leur demande a été rejetée). Ce ratio tombe à 50 % pour les grandes entreprises. Le taux de rejet des demandes par les créanciers varie peu selon la taille des entreprises (autour d’un tiers des demandes sont rejetées).</p>
<h2>Expliquer le découragement des emprunteurs</h2>
<p>Le non-recours aux crédits bancaires peut être dû à une exclusion volontaire pour des raisons culturelles ou religieuses. Ainsi, les promoteurs de la finance islamique ont souvent défendu que le développement de ce système allait favoriser l’accès aux crédits, sans que les résultats des études scientifiques ne soient très probants (<a href="https://www.researchgate.net/profile/Adolfo_Barajas/publication/274374492_Can_Islamic_Banking_Increase_Financial_Inclusion/links/551c5e040cf2fe6cbf791682.pdf">ici</a> ou <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0927538X17302299">ici</a>).</p>
<p>L’autre raison tient à une exclusion involontaire des emprunteurs potentiels. Pour schématiser, les emprunteurs potentiels peuvent refuser de postuler parce que : </p>
<ul>
<li><p>le coût (direct et indirect) est trop important ;</p></li>
<li><p>le risque pris est exagéré (en cas de nonremboursement) ;</p></li>
<li><p>les emprunteurs n’ont pas les moyens matériels (accès à une banque) ou immatériels (temps, connaissance) pour postuler.</p></li>
</ul>
<p>Les données de la Banque mondiale permettent une exploration de cette question en demandant aux managers d’expliquer pourquoi ils ont refusé de demander un crédit. Malheureusement, les réponses proposées dans le questionnaire sont limitées. Néanmoins, nous observons que les petites entreprises mettent davantage en avant la complexité des procédures et le recours au collatéral (garanties demandées en contrepartie du prêt) comme obstacle à leur demande de financement. Les grandes entreprises insistent davantage sur les modalités du crédit (coût, montant, durée). En revanche, il est rarement mis en avant (dans moins de 10 % des cas), l’idée selon laquelle les entreprises anticipent un rejet de la banque.</p>
<h2>La formation au cœur des solutions</h2>
<p>Partant de ce constat, il est utile de réfléchir aux outils à mettre en œuvre pour réduire le découragement des emprunteurs. Une littérature émergente, non seulement pour les pays en développement mais aussi les pays développés, insiste sur l’importance de l’<a href="https://www.aeaweb.org/articles?id=10.1257/jel.52.1.5">alphabétisation financière</a>. Comprendre les produits bancaires est un exercice difficile surtout pour des populations peu éduquées. Des actions en faveur de cette alphabétisation financière peuvent aider à familiariser les populations avec le fonctionnement du secteur bancaire. Cependant, une recherche a montré qu’un <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1540-6261.2011.01696.x">programme d’éducation financière en Inde</a> avait eu des effets limités sur la demande de crédit.</p>
<p>La réflexion doit se porter plus généralement sur la <a href="https://www.mitpressjournals.org/doi/abs/10.1162/REST_a_00074?casa_token=NF0iiUpthfsAAAAA:yEzvpkEtuPjF_PE6YnR0PLyP_HOp701WkA6s3jSiayrU0vVVbNejVUvzE6mC5ukE501Vtser">formation des gestionnaires d’entreprises</a>, au-delà de l’alphabétisation financière. Une demande de crédit implique de pouvoir construire un business plan et de maîtriser des principes comptables de bases. La simplification des procédures passe par d’autres actions comme le recours à des documents comptables et légaux simplifiés.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1049811338338492416"}"></div></p>
<p>La réponse portant sur le collatéral est plus complexe à interpréter. Ce refus de postuler peut s’expliquer par une difficulté à mettre en nantissement des biens immobiliers dans un contexte de droit de propriété limités.</p>
<p>Le poids donné au collatéral peut aussi se lire comme une crainte pour les emprunteurs de se voir déposséder de leurs biens en cas de non-remboursement. Accéder aux crédits oblige souvent à nantir l’outil de production avec un risque important en cas de saisie. Dans tous les cas, il est primordial de réfléchir au cadre actuel des contreparties afin de stimuler la demande (et l’offre) de crédits. La réglementation prudentielle peut parfois avoir des effets pervers en impliquant une collatéralisation trop importante des crédits.</p>
<p>Des réflexions existent sur ce point pour réduire le coût du collatéral. Des <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10693-015-0213-2">réformes portant sur l’utilisation de biens meubles dans sept pays</a> (Bosnie, Craotie, Guatemala, Pérou, Rwanda, Serbie et Ukraine) comme collatéral ont eu des effets positifs sur l’accès au crédit.</p>
<p>D’autres innovations existent, comme le crédit adossé sur les flux de trésorerie futurs, mais elles sont parfois bloquées pour des raisons réglementaires ou par un manque de compétences.</p>
<p>Enfin, bien qu’il s’agisse d’un effet de demande, les actions sur l’offre ne sont pas inutiles stimuler la demande. Par exemple, l’<a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0378426615000813">intensification de la concurrence</a> augmente l’accès au crédit, non seulement en changeant le comportement des banques en termes d’octroi de crédit mais aussi en stimulant la demande de crédits. Face à une concurrence accrue, les créanciers (principalement les banques) sont amenés à trouver de nouvelles niches et à cibler les PME (développement de nouveaux produits, simplification des procédures, etc.).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1064445349304127491"}"></div></p>
<h2>Une révolution numérique ?</h2>
<p>Une dernière réflexion, particulièrement prégnante pour l’Afrique, porte sur l’importance du numérique. Le développement des fintechs, en particulier dans les services bancaires sur mobile, a ouvert de nouvelles perspectives. La question est de savoir si cette révolution numérique va combler le manque de financement des entreprises. Les effets du m-banking sur la <a href="https://www.nber.org/papers/w22633.pdf">mobilisation de l’épargne, la facilitation des paiements ou le transfert des fonds</a> sont bien documentés. En revanche, les conséquences du développement du m-banking sur l’accès aux crédits est moins documenté.</p>
<p>Le développement du m-banking pourrait stimuler l’accès au crédit par plusieurs canaux. Tout d’abord, il permet une réduction des coûts de transaction et donc les coûts des crédits. L’accès à une banque à distance évite aux emprunteurs de devoir se rendre au guichet bancaire pour leur remboursement. Dans le même temps, l’utilisation des nouvelles technologies peut générer des gains de productivité pour les agents de crédit. Ensuite, l’enregistrement des transactions financières (dépôts, transfert, paiement) permet la création d’un historique financier utile au moment de constituer un dossier de crédit dans un univers marqué par un difficile accès à des données comptables. L’analyse de crédit s’en trouve ainsi facilitée. Enfin le développement des fintechs permet d’accroître la gamme des prêteurs potentiels grâce aux nouvelles plates-formes de crowdfunding ou de <em>peer-to-peer lending</em> (prêt entre pairs).</p>
<p>Un <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11187-017-9951-x">premier travail</a> sur le sujet tend à montrer un effet positif du m-banking sur l’investissement des PME. Cependant, il n’est pas certain que le m-banking soit l’outil miracle pour limiter le découragement des emprunteurs (collatéral, barrière culturelle avec le monde bancaire, etc.). En outre, le développement des financements numériques pose de nouvelles questions relatives à la protection des données, à la régulation du secteur ou aux effets à long terme sur la concurrence.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/124465/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Florian Léon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>D’après la Banque mondiale, plus de 80 % des petites entreprises qui ont un manque de financement n’ont pas fait de demande de crédit.Florian Léon, Post doctorant en économie à l'Université du Luxembourg, Research Fellow à la Ferdi, Agence Universitaire de la Francophonie (AUF)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1233842019-09-16T18:44:55Z2019-09-16T18:44:55ZDroits de l’homme : l’impact indirect des multinationales dans les pays émergents<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/291950/original/file-20190911-190065-1kzqnyb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=310%2C0%2C3449%2C2433&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Au Mexique, plus de la moitié des travailleurs des secteurs de l’industrie et des services non agricoles n’ont pas accès à la sécurité sociale.</span> <span class="attribution"><span class="source">Lunamarina / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Les entreprises multinationales font l’objet d’une pression croissante et d’une surveillance accrue de la part de la société civile. Dans ce contexte, le respect des droits de l’homme et de l’environnement par les multinationales investissant dans les pays émergents est une préoccupation majeure. En témoigne l’adoption en 2017 de la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000034290626&categorieLien=id">loi française</a> relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des sociétés donneuses d’ordres, qui oblige les entreprises à « identifier les risques et à prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l’environnement ».</p>
<p>Deux ans après l’adoption de cette loi, une première mondiale, le bilan dressé par les ONG est <a href="https://www.amisdelaterre.org/Rapport-Deux-ans-apres-l-adoption-de-la-loi-sur-le-devoir-de-vigilance-les.html">mitigé</a>. Celles-ci accusent notamment les multinationales de ne pas jouer le jeu et pointent du doigt l’insuffisance du contrôle interne des pratiques et des comportements de leurs filiales à l’international.</p>
<h2>Sortir d’une vision dichotomique</h2>
<p>De fait, les pratiques et les comportements des multinationales dans les pays émergents sont largement controversés. D’une part, les multinationales elles-mêmes et plusieurs études économiques mettent en avant leur rôle positif dans le développement économique, social et humain des pays dans lesquels elles investissent, notamment grâce aux effets de transfert et de diffusion de technologie, de savoir-faire et/ou de bonnes pratiques. Les multinationales contribueraient ainsi à améliorer les conditions de vie de la population locale.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/291944/original/file-20190911-190012-d3t7kq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291944/original/file-20190911-190012-d3t7kq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291944/original/file-20190911-190012-d3t7kq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291944/original/file-20190911-190012-d3t7kq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291944/original/file-20190911-190012-d3t7kq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291944/original/file-20190911-190012-d3t7kq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=376&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291944/original/file-20190911-190012-d3t7kq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=376&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291944/original/file-20190911-190012-d3t7kq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=376&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Extrait du bilan de la loi sur le devoir de vigilance, deux ans après son adoption, établi par un groupe d’ONG.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.amisdelaterre.org/IMG/pdf/2019-etude-interasso_devoir_de_vigilance.pdf">Amisdelaterre.org</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>D’autre part, des ONG et des universitaires avancent, souvent à partir d’études et d’observations de terrain, que les multinationales utilisent leur pouvoir de négociation à mauvais escient. Ainsi, elles tirent avantage d’autorités locales faibles et d’institutions défaillantes en maintenant ou en établissant de mauvaises conditions de travail (salaires faibles, durée de travail longues, conditions sanitaires mauvaises, recours au travail informel).</p>
<p>Dans une <a href="https://doi.org/10.1108/MBR-06-2017-0037">étude</a> récente publiée par la revue <em>Multinational Business Review</em>, nous dépassons cette vision dichotomique de l’impact social et humain des multinationales en étudiant cet impact au travers de l’analyse des interactions entre multinationales, entreprises locales et respect du droit dans les pays émergents.</p>
<p>L’étude porte spécifiquement sur le respect des droits de l’homme au sein de l’entreprise, et notamment sur l’accès des employés locaux à un contrat de travail et à un dispositif de sécurité sociale. Ces éléments relèvent en effet de la responsabilité directe des employeurs et figurent dans la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, selon laquelle :</p>
<blockquote>
<p>« Toute personne […], a droit à la sécurité sociale. » (article 22)</p>
<p>« Toute personne a droit […] à des conditions équitables et satisfaisantes de travail. » (article 23)</p>
<p>« Toute personne a droit au repos et aux loisirs et notamment à une limitation raisonnable de la durée du travail et à des congés payés périodiques. » (article 24)</p>
</blockquote>
<p>Notre étude empirique s’appuie sur une enquête conduite annuellement auprès de plus de 120 000 travailleurs mexicains sur une période de 10 ans (2005-2014). Les données d’enquête utilisées présentent l’avantage d’avoir été collectées directement auprès des employés locaux à leur domicile et de manière anonyme, ce qui élimine les biais évidents liés à une enquête sur le lieu de travail ou auprès des entreprises elles-mêmes.</p>
<h2>Des multinationales plus vigilantes</h2>
<p>Le choix du Mexique pour ce type d’étude est pertinent à plusieurs égards. Le pays est avec la Chine, l’Inde et le Brésil, l’un des pays émergents recevant le <a href="https://www.usinenouvelle.com/editorial/la-france-dans-le-top-cinq-des-pays-les-plus-attractifs-pour-les-investisseurs-etrangers.N841740">plus d’investissements étrangers</a>. En outre, les violations des droits de l’homme, notamment sur le lieu de travail, y sont fréquentes : plus de la moitié des travailleurs des secteurs de l’industrie et des services non agricoles ne bénéficient pas d’un contrat de travail et n’ont pas accès à la sécurité sociale, et opèrent ainsi dans le secteur informel. Enfin, le Mexique est composé de 32 régions caractérisées par des différences institutionnelles importantes.</p>
<p>Notre étude aboutit à trois résultats significatifs.</p>
<p>Tout d’abord, elle montre que les multinationales respectent en moyenne davantage les droits de l’homme que les entreprises locales. Ce résultat peut s’expliquer par la volonté des multinationales de gagner en légitimité et de protéger leur réputation au niveau local et international. La pression grandissante de la société civile (ONG, activistes, consommateurs) contraint en effet les multinationales, pour préserver leur réputation, à dissuader et contrôler les pratiques condamnables de leurs filiales. Les comportements exemplaires et les bonnes pratiques sociales des multinationales à forte visibilité peuvent également constituer une source de pression et d’imitation. L’adoption de codes de conduite globaux par quelques multinationales conduit souvent les autres à franchir le pas, dans une dynamique de mimétisme. Ces deux sources de pression sont évidemment beaucoup plus faibles pour les entreprises locales, pour lesquelles la réputation a moins d’importance, ce qui peut les amener à violer plus fréquemment les droits de l’homme.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1015154662087983104"}"></div></p>
<p>Notre étude montre ensuite que le respect des droits de l’homme par les entreprises locales est influencé par le respect du droit et la solidité des institutions dans la région où elles opèrent. En d’autres termes, elles violent davantage les droits de l’homme dans les régions où les autorités locales peinent à faire respecter le droit. En revanche, et de manière étonnante, notre étude montre que ce n’est pas le cas pour les multinationales : leurs pratiques en lien avec les droits de l’homme ne sont pas influencées par le cadre institutionnel dans lequel elles opèrent. Ce résultat confirme l’idée selon laquelle les multinationales sont très vigilantes pour leur réputation à l’échelle globale. Elles encadrent strictement les pratiques de leurs filiales pour qu’elles respectent les droits de l’homme de leurs salariés, même dans les régions où le droit est peu appliqué.</p>
<h2>Un impact négatif indirect</h2>
<p>Enfin, et c’est le résultat le plus intéressant de notre étude, il apparaît que la densité de multinationales dans une région a un impact négatif sur le respect des droits de l’homme par les entreprises locales. En d’autres termes, les entreprises locales violent davantage les droits de l’homme dans les régions où de nombreuses multinationales sont présentes. Les multinationales auraient donc de ce point de vue un impact négatif sur les entreprises locales.</p>
<p>Deux éléments peuvent expliquer ce phénomène paradoxal. Premièrement, la forte présence de multinationales pourrait renforcer la concurrence entre les entreprises sous-traitantes locales, notamment au niveau de la réduction des coûts. Cette concurrence accrue conduirait ainsi les entreprises locales à davantage violer les droits de l’homme de leurs employés en les privant de droits sociaux par exemple. Deuxièmement, les multinationales attirent les salariés les plus qualifiés, du fait de meilleures conditions de travail offertes par ces entreprises. Les entreprises locales emploient alors les moins qualifiés, qui sont également ceux auxquels il est possible d’imposer des conditions de travail défavorables.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1126750002020212739"}"></div></p>
<p>En conclusion, nos résultats montrent que l’impact des multinationales sur les pays émergents dans lesquels elles investissent n’est pas aussi simple que suggéré dans le débat public. Certes, elles respectent davantage les droits de l’homme de leurs employés que les entreprises locales, et ce quel que soit le cadre institutionnel dans lequel elles opèrent. Mais elles contribuent indirectement à la violation des droits de l’homme, en conduisant les entreprises locales à adopter des pratiques sociales condamnables.</p>
<p>En ce sens, la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des sociétés donneuses d’ordre est un outil juridique adapté, dans la mesure où elle inclut les activités des sous-traitants et des fournisseurs. La difficulté pour les multinationales réside alors dans l’identification et l’analyse des risques au sein de chaînes de valeurs extrêmement complexes. Cela nécessite de leur part une volonté ferme, un contrôle interne efficace et le déploiement de ressources spécifiques. C’est toutefois l’effort qu’elles doivent consentir pour faire face à leurs responsabilités sociales globales.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/123384/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le cas du Mexique nous enseigne que les multinationales sont de plus en plus vigilantes mais que leurs activités encouragent les violations dans les entreprises locales.Olivier Lamotte, Enseignant-chercheur en économie et stratégie internationales, EM NormandieAna Colovic, Professeur associée de stratégie et de management international, Neoma Business SchoolOctavio Escobar, Associate Professor of Economics, PSB Paris School of BusinessPierre-Xavier Meschi, Professeur des Universités, IAE Aix-Marseille Graduate School of Management – Aix-Marseille UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1124652019-04-08T19:58:46Z2019-04-08T19:58:46ZComprendre les liens entre politique de change et développement durable dans les pays à faible revenu<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/265283/original/file-20190322-36260-mhz60y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C13%2C992%2C652&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Au-delà des implications sur l’orientation économique, les politiques de change ont un effet sur l’environnement.</span> <span class="attribution"><span class="source">Suwicha/Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Le <a href="https://www.glossaire-international.com/pages/tous-les-termes/taux-de-change.html">taux de change</a> est une variable stratégique pour la stabilité économique et financière. Les politiques de change dans les pays pauvres et vulnérables sont souvent considérées comme des outils de stabilisation macroéconomique : ancres monétaires quand les conditions ne sont pas réunies pour un ciblage d’inflation « pur » et instrument d’ajustement à des chocs externes, notamment de fortes variations des termes de l’échange. Elles peuvent aussi être envisagées dans une optique de développement durable. C’est exactement cette perspective de long terme qui a été privilégiée lors de la <a href="https://www.banque-france.fr/politique-de-change-et-developpement-durable-dans-les-pays-faible-revenu">conférence du 14 février 2019</a> organisée par le partenariat Banque de France-FERDI, en collaboration avec l’Agence française de développement. L’objectif de ces débats était de mettre en lumière les impacts des politiques de change sur la croissance à long terme, la répartition des revenus et les inégalités ainsi que sur la protection de l’environnement.</p>
<p>S’agissant de l’impact de la politique de change sur la croissance à long terme, les échanges de cette conférence ont fait apparaître que de fortes variations du taux de change peuvent réduire le potentiel de croissance des pays à faible revenu. Ces pays sont souvent des économies de petite taille, ou enclavées, avec une forte dépendance aux échanges internationaux, notamment en raison de leur faible diversification et spécialisation dans les matières premières. Enfin, dans ces pays, l’action publique risque de se heurter aux inefficacités institutionnelles, à la faiblesse de la gouvernance, et aux aléas d’un climat des affaires défavorable. Le choix d’un régime de change (flexible, intermédiaire, fixe) doit prendre en compte ces contraintes.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/r2ahgb38F10?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Quelle politique de change au service du développement durable des pays à faible revenu ?</span></figcaption>
</figure>
<p>En dépit du succès dans le passé du « modèle de développement asiatique », répliquer les stratégies de développement par l’expansion des exportations grâce à une sous-évaluation continue du taux de change n’apparaît donc pas forcément comme une solution optimale. A contrario, une surévaluation continue du taux de change dans les pays exportateurs de matières premières peut altérer le processus de développement économique sous l’effet du <a href="https://www.alternatives-economiques.fr/matieres-premieres-syndrome-hollandais/00030858">« syndrome hollandais »</a>, bien décrit dans la littérature économique. </p>
<p>Dans les pays caractérisés par la prévalence de chocs externes (<em>balance of payments dominance</em>), en ligne avec ses travaux avec Guzman et Stiglitz, le professeur <a href="https://www.banque-france.fr/sites/default/files/session-inaugurale_ocampo.pdf">José Antonio Ocampo</a> a également souligné l’importance des politiques fiscales contra-cycliques. Plus précisément, dans les pays fortement dépendants des cours de matières premières, les marges de manœuvre budgétaires constituées pendant les périodes de boom permettraient de soutenir l’activité économique lorsque les conditions internationales deviennent défavorables.</p>
<h2>Effets redistributifs</h2>
<p>Les débats ont également souligné la nécessité de privilégier la stabilité des prix, qui apparaît comme une condition essentielle à la croissance économique à long terme. De ce fait, les politiques de change devraient s’attacher à réduire les effets déstabilisants d’une volatilité excessive du taux de change. Une mise en garde a aussi émergé de la conférence : depuis le début de la décennie, la montée des déséquilibres budgétaires et extérieurs a débouché sur un ré-endettement rapide des pays à faible revenu. Cet endettement, libellé de manière croissante en devises, constitue une contrainte de plus en plus forte à la fois sur la conduite des politiques de change et sur la soutenabilité de la croissance à long terme.</p>
<p>Dans les pays à faible revenu, la politique de change exerce en second lieu d’importants effets redistributifs, à travers son impact sur l’inflation et sur le chômage qui eux-mêmes augmentent l’inégalité des revenus. L’inflation frappe plus lourdement les populations les plus fragiles, et ainsi les régimes de change qui permettent un ancrage monétaire efficace sont à privilégier. Cependant une surévaluation du change avantage les couches les plus aisées de la population qui consomment plus de produits importés, ce qui tend à accroître les inégalités. Ce phénomène est toutefois à tempérer par le fait que beaucoup de produits de première nécessité, consommés par les populations les plus pauvres et les plus vulnérables, sont également importés à moindre coût. Les systèmes de change flexibles qui compensent les chocs externes réduisent pour leur part, toute choses égales par ailleurs, le chômage et ont de ce fait des effets redistributifs favorables aux pauvres.</p>
<p>Par ailleurs, la dépréciation du taux de change modifie les prix relatifs entre les secteurs. Elle entraîne une baisse des salaires réels des travailleurs non qualifiés qui sont majoritairement concentrés dans les secteurs non échangeables (services à faible valeur ajoutée tels que la restauration, l’hôtellerie, le commerce de détail et la construction). Elle favorise la production et les gains des secteurs de biens échangeables, l’industrie et l’agriculture. Elle est ainsi favorable aux paysans qui représentent souvent la partie la plus pauvre de la population. Si enfin la dépréciation du taux de change renchérit le patrimoine des populations les plus aisées (indexé sur le prix des devises) et inversement augmente la charge de la dette des plus défavorisés, elle aggrave les inégalités au sein de la société.</p>
<p>Finalement, les débats de la conférence ont mis l’accent sur les conséquences désastreuses sur la pauvreté des crises de change, assortis de longue période d’hyperinflation dans les pays émergents et pauvres. À titre d’illustration, lors de la crise de change en Argentine en 1999-2002 le PIB par tête du pays avait reculé à son niveau des années 1980. La pauvreté avait fortement augmenté avec, en 2002, <a href="https://data.worldbank.org/indicator/SI.POV.GINI?end=2017&locations=AR&start=2016">14 % de la population</a> vivant sous le seuil de pauvreté de 1,9 USD par jour, contre 4,1 % en 1997.</p>
<h2>Résilience face aux désastres naturels</h2>
<p>À court terme, les politiques de change peuvent être aussi déterminantes pour favoriser la résilience face aux désastres naturels. Les politiques de change ont un rôle bien connu dans l’atténuation des chocs réels. Les décideurs politiques doivent donc dans ce cadre considérer cette nouvelle source de fragilité dans de nombreux pays soumis à des catastrophes climatiques de plus en plus fortes et plus fréquentes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/265285/original/file-20190322-36283-1pzuj93.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/265285/original/file-20190322-36283-1pzuj93.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/265285/original/file-20190322-36283-1pzuj93.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/265285/original/file-20190322-36283-1pzuj93.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/265285/original/file-20190322-36283-1pzuj93.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/265285/original/file-20190322-36283-1pzuj93.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/265285/original/file-20190322-36283-1pzuj93.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une augmentation du taux de change réel induit une réduction des émissions de dioxyde de carbone.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Epic_images/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au-delà des effets d’atténuation à court terme, les politiques de change ont aussi un rôle à jouer sur le changement climatique à plus long terme. Une <a href="https://www.banque-france.fr/sites/default/files/session_3_arcand.pdf">recherche récente</a> présentée lors de la conférence montre qu’une appréciation du taux de change réel induit une réduction des émissions de dioxyde de carbone. En renchérissant le prix des biens échangeables, une appréciation du taux de change réel réduit leur part dans la production nationale au bénéfice des biens non échangeables. Dans la mesure où la production des biens non échangeables (commerce, service de proximité, hôtellerie) est moins polluante, le niveau total d’émissions de dioxyde de carbone est réduit. Cette relation est plus forte pour les économies en développement pour des raisons économiques (importance de la compétitivité prix pour les flux de commerce extérieur) et technologique (différentiel en termes d’émissions entre secteurs des biens échangeables et non-échangeables).</p>
<p>En conclusion, les choix de politiques de change pour les pays les plus pauvres sont tout à la fois fondamentaux et complexes car ils doivent intégrer des considérations de court terme (stabilisation financière, adaptation aux chocs externes), mais aussi de long terme en prenant en compte toutes les dimensions du développement durable (économique, sociale et environnementale). Dans ces pays, il convient d’être particulièrement vigilant aux effets défavorables des politiques de dépréciation systématique des taux de change sur la pauvreté, sur la productivité des travailleurs pauvres et sur les émissions de CO<sub>2</sub>. Les politiques de change peuvent finalement avoir un effet négatif sur la croissance si elles débouchent à une forte volatilité économique. Il n’existe donc pas de politique de change idéale. De ce fait, les autorités publiques devraient opter pour les politiques de change les mieux adaptées à la structure économique ainsi qu’aux défis économiques, sociaux et environnementaux de leur pays.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/112465/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les politiques de change dans les pays pauvres sont avant tout considérées comme un outil de stabilisation macroéconomique. Mais elles peuvent également être un levier de développement durable.Selin Ozyurt, Economist, Agence française de développement (AFD)Florian Léon, Post doctorant en économie à l'Université du Luxembourg, Research Fellow à la Ferdi, Agence Universitaire de la Francophonie (AUF)Luc Jacolin, Economiste, Banque de France, Fellow FERDI, Université Clermont Auvergne (UCA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1145402019-04-07T19:48:56Z2019-04-07T19:48:56ZLa nouvelle cartographie des galaxies du luxe<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/267323/original/file-20190403-177181-1nskm82.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C1%2C992%2C679&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les clients du luxe accessible, entre autres, obligent les marques à repenser leur stratégie. </span> <span class="attribution"><span class="source">View Apart/Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Les galaxies du luxe s’éloignent les unes des autres à la vitesse de la lumière. Le luxe expérientiel, fondé sur la gratification immédiate, s’élance loin du luxe classique basé sur la qualité extrême, la très longue durée, voire un sentiment d’éternité. La galaxie du luxe intermittent se gonfle de bataillons de « touristes du luxe » friands de brèves incursions dans le territoire du luxe et s’autorisant des escapades dans les ports francs de la contrefaçon que proposent les voyages en pays lointains.</p>
<p>La galaxie des <em>happy few</em> comprend deux groupes à l’effectif réduit mais aux dépenses en forte expansion. Le terme de « nouveaux riches » étant mal perçu, on nomme les premiers <em>high net worth individuals</em> (ils ne possèdent guère plus qu’un million de dollars et s’accroissent de 8 % par an) et les seconds les <em>ultra high net worth individuals</em>, dont la fortune dépasse plus de 30 millions et le nombre s’accroît de <a href="http://eprints.lancs.ac.uk/67513/1/Wealth_segmentation.pdf">10 % par an</a>).</p>
<figure>
<iframe src="https://player.vimeo.com/video/320447260" width="500" height="281" frameborder="0" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Les nouvelles planètes de la galaxie du luxe », Jean‑Louis Chandon, Inseec Business School (vidéo FNEGE Médias).</span></figcaption>
</figure>
<p>Ces galaxies, captives de l’attraction irrésistible des marques phares du luxe, ne perçoivent guère l’industrialisation et la délocalisation qui caractérisent la production du luxe contemporain. Cela car elles n’ont ni l’expertise et ni la longue pratique des aristocrates du luxe dont la planète entre en glaciation.</p>
<h2>La nouvelle carte du luxe</h2>
<p>Augmentons quelque peu le grossissement de notre télescope et penchons-nous sur les motivations et attitudes fort diverses qui dressent la carte du luxe.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/266554/original/file-20190329-70999-f0gxpl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/266554/original/file-20190329-70999-f0gxpl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/266554/original/file-20190329-70999-f0gxpl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=511&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/266554/original/file-20190329-70999-f0gxpl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=511&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/266554/original/file-20190329-70999-f0gxpl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=511&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/266554/original/file-20190329-70999-f0gxpl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=642&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/266554/original/file-20190329-70999-f0gxpl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=642&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/266554/original/file-20190329-70999-f0gxpl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=642&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La carte du luxe.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La première dimension oppose la durabilité et la permanence d’un contact possessif avec le luxe, au sud, au caractère intermittent et passager d’un contact expérientiel avec le luxe, au nord. La seconde dimension oppose les enthousiastes, novices et peu informés, à l’ouest, aux experts puristes ou connaisseurs, à l’est.</p>
<p>Dans le quadrant sud-est, on rencontre le « luxe classique », dont les amateurs sont des puristes recherchant avant tout l’exclusivité, le caractère unique et distinctif de produits de luxe que les autres n’auront pas. L’économiste et sociologue américain <a href="https://www.alternatives-economiques.fr/thorstein-veblen-un-economiste-heterodoxe/00022165">Thorstein Veblen</a> les qualifie de « snobs ». On pourrait aussi bien parler de luxe élitiste, composé de consommateurs plutôt âgés, ayant une culture du luxe approfondie, acquise depuis l’enfance et cherchant à préserver un statut établi de longue date.</p>
<p>Dans le quadrant nord-est, on trouve les « experts en gratification », connaisseurs certes, mais pas puristes et recherchant les émotions sociales davantage que la possession silencieuse. Veblen les définit comme étant ostentatoires (<em>conspicuous</em>), c’est-à-dire désireux de mettre en scène de manière publiquement visible leur richesse récemment acquise et d’acquérir ainsi un supplément de considération.</p>
<p>Dans le quadrant nord-ouest, vivent les touristes du « luxe post-moderne », plus novices et moins connaisseurs. Les membres de cette galaxie estiment davantage les expériences de luxe que la possession de produits luxueux. Ils recherchent les services luxueux pour le plaisir hédonique et la gratification immédiate qu’ils procurent. Ils préfèrent la croisière, le restaurant ou le palace étoilés, ou encore une chambre au château de Versailles plutôt que la possession d’un manoir hérité. Ils veulent des émotions, des sensations, vivre différemment du quotidien même si c’est seulement pour une brève parenthèse. Ils peuvent acheter du luxe contrefait si l’occasion se présente.</p>
<h2>Turbulences de la modernité</h2>
<p>Dans le quadrant sud-ouest se développent les adeptes du nouveau « luxe démocratique ». Matérialistes mais discrets, ils trouvent du plaisir à prêter ou échanger des produits de luxe en famille et avec leurs amis, voire à les acheter de seconde main. Ils sont les clients du luxe accessible pour qui l’affichage du prix n’a rien de sacrilège et qui n’hésitent pas à préparer leurs achats sur Internet avant de visiter les magasins de luxe. Pour eux la frontière prix du luxe est plus basse que pour les aristocratiques habitants de la galaxie du luxe classique.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/267317/original/file-20190403-177199-13cfbnr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/267317/original/file-20190403-177199-13cfbnr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/267317/original/file-20190403-177199-13cfbnr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/267317/original/file-20190403-177199-13cfbnr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/267317/original/file-20190403-177199-13cfbnr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/267317/original/file-20190403-177199-13cfbnr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/267317/original/file-20190403-177199-13cfbnr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les touristes du « luxe post-moderne » privilégient l’expérience à la possession.</span>
<span class="attribution"><span class="source">nd3000/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>On voit bien à la lecture de cette carte que les galaxies du luxe ne sont pas à l’abri des turbulences de la modernité. Comment les valeurs du luxe évoluent-elles ? Comment la frontière du prix minimum du luxe varie-t-elle selon les individus et les cultures ? Comment préserver la désirabilité du luxe quand la rareté s’efface avec la croissance des ventes et l’industrialisation de la production ? Quelles conséquences attendre de la greffe sur le luxe de l’achat de seconde main ? Pourquoi les individus qui centrent leur vie sur la possession jamais assouvie de produits de luxe ont-ils tendance à être moins heureux et plus dépressifs ? Comment marier luxe et développement durable ?</p>
<p>Sur ce dernier point, le solide classement de Stella McCartney en matière de développement durable donne un exemple d’interaction entre la personnalité de la fondatrice, son respect total pour les droits des animaux et la protection de l’environnement et son utilisation novatrice de matériaux nouveaux et alternatifs à la fourrure et au cuir. La mission de la marque depuis sa création inclut « de ne jamais utiliser de cuir ou de fourrure et d’inventer de nouveaux matériaux alternatifs à l’utilisation de technologies de pointe, poussant vers la circularité, protégeant les forêts anciennes et menacées et mesurant notre impact avec des outils révolutionnaires ».</p>
<h2>Le cas du champagne</h2>
<p>Le champagne a depuis longtemps un statut de produit de luxe, ce qui permet de mieux comprendre ce qui change en termes de signification du luxe. La production est dominée par les 320 grandes maisons et leurs marques globales telles que Moët et Chandon. En 2017, les grandes maisons ont vendu <a href="https://www.champagne.fr/fr/economie/chiffres-clef">72 % des 307 millions de bouteilles expédiés</a>, tandis que les 28 % restant ont été répartis entre 15 800 vignerons et coopératives, dont environ un tiers ont leurs propres marques. L’ampleur de la production, la démocratisation de l’accès et la dilution de l’exclusivité pourraient remettre en cause la légitimité du champagne en tant que produit de luxe. Face à ce risque, les grandes maisons, qui ne possèdent que 10 % des terres viticoles et les petits viticulteurs utilisent des tactiques différentes pour préserver l’authenticité, l’exclusivité et maintenir la perception de rareté.</p>
<p>Les grandes marques de champagne sponsorisent les sports prestigieux associés à de grands évènements publics tels que Mumm et la Formule 1, Moët et Chandon avec le tennis, Veuve Clicquot avec le polo, etc. Elles fondent leurs campagnes sur l’héritage et la tradition comme marqueur de l’exclusivité. Elles mettent en avant des acteurs célèbres, elles s’associent avec les restaurants étoilés, ciblant ainsi les connaisseurs et puristes du luxe classique.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/267316/original/file-20190403-177196-ovdh88.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/267316/original/file-20190403-177196-ovdh88.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/267316/original/file-20190403-177196-ovdh88.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/267316/original/file-20190403-177196-ovdh88.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/267316/original/file-20190403-177196-ovdh88.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/267316/original/file-20190403-177196-ovdh88.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/267316/original/file-20190403-177196-ovdh88.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La marque de champagne Mumm ancre son positionnement dans le luxe en s’associant à des compétitions prestigieuses comme la Formule 1.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ekaterina Minaeva/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les petits producteurs mettent l’accent sur leur petite taille, l’exploitation familiale, le terroir et l’authenticité. Ils revendiquent leur singularité, leur identité, et des valeurs fortes tels que l’artisanat, l’authenticité, la création de cuvées rares, uniques, élaborées par le vigneron sur son domaine. Ils tablent sur les avis d’experts renommés ou sur les sites Internet spécialisés dispensant des conseils tels que « le meilleur champagne n’est pas nécessairement le plus cher », et ils n’hésitent pas à mettre en avant leurs ventes aux consommateurs locaux (sous-entendu : les vrais experts).</p>
<p>Ainsi, les grandes marques de champagne qui mettent en avant l’exclusivité et l’héritage ciblent le segment du luxe classique tout en récupérant les experts en gratifications ostentatoires tandis que les petits producteurs, qui tablent sur l’authenticité à un prix accessible, ciblent le nouveau luxe démocratique tout en attirant les touristes du luxe post-moderne et hédonique. C’est également la stratégie du bijoutier Mauboussin qui développe avec succès le luxe accessible et le <a href="https://theconversation.com/le-plaisir-doffrir-un-cadeau-a-soi-meme-111125">cadeau que l’on fait à soi-même</a>.</p>
<p>Les fonctions sociales du luxe ne sont pas pour autant sur le point de disparaître, mais elles se renouvellent comme le montre l’apparition d’un désir croissant de luxe responsable, nouvelle source de gratification hédonique.</p>
<hr>
<p><em>Cette contribution s’appuie sur les articles de recherche publiés dans le « Journal of Business Research » suite aux trois dernières éditions du <a href="https://www.monaco-symposium-on-luxury.com/">Monaco Symposium on Luxury</a> (2014, 2016 et 2018).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/114540/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Louis Chandon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Même si les marques phares en restent le pivot central, l’univers du luxe est en train de se décomposer en plusieurs entités qui s’éloignent les unes des autres à toute vitesse.Jean-Louis Chandon, Directeur de la recherche, Marketing, INSEEC Grande ÉcoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1080292019-01-13T20:21:34Z2019-01-13T20:21:34ZFaute de voix commune, les pays des BRICS risquent une polarisation<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/253238/original/file-20190110-32151-9e8154.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C1%2C791%2C445&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Chefs d'état réunis en 2014 pour le sommet des BRICS. Une époque plus sereine? Brisbane, Australie.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/ac/BRICS_heads_of_state_and_government_hold_hands_ahead_of_the_2014_G-20_summit_in_Brisbane%2C_Australia_%28Agencia_Brasil%29.jpg?uselang=fr">Roberto Stuckert Filho/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p><em>Au moment où s'ouvre à Brasilia le onzième sommet des BRICS, nous republions cette analyse de janvier 2019 qui met en évidence les défis auxquels est confronté ce groupe dont le rôle exact fait souvent débat.</em></p>
<p>Une série d’événements récents a suscité des inquiétudes quant à la vitalité du plus grand groupe de pays émergents, communément appelé <a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/bresil-russie-inde-chine-afrique-du-sud-ex-b-r-i-c/">BRICS</a> et regroupant le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du sud.</p>
<p>Il s’agit notamment de l’élection récente de <a href="https://www.lequotidien.com/actualites/monde/jair-bolsonaro-de-lextreme-droite-elu-president-du-bresil-634b43c5894887aa4d35256b18f306b2">Jair Bolsonaro au Brésil</a>, de l’<a href="https://www.europe1.fr/economie/inquietudes-sur-les-marches-financiers-les-krachs-boursiers-on-ne-les-voit-pas-venir-3831476">instabilité des marchés financiers</a> internationaux, de l’<a href="https://www.france24.com/fr/20190108-focus-inde-elections-generales-legislatives-2019-bjp-modi-divisions-communautes">incertitude préélectorale</a> en Inde, de la <a href="http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2019/01/04/20002-20190104ARTFIG00011-des-parcs-nationaux-aux-tribunaux-les-consequences-du-shutdown-s-alourdissent.php">fermeture du gouvernement</a> aux États-Unis et, surtout, de la <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1145700/banque-mondiale-guerre-commerciale-chine-etats-unis-croissance-mondiale">guerre commerciale sino-américaine</a>.</p>
<p>Les pays membres ont un PIB combiné d’environ 15 000 milliards de dollars. Ils représentent 19,3 % du produit mondial brut ; 42,7 % de la population mondiale ; et ont représenté plus de 50 % de la <a href="http://www.brics2018.org.za/remarks-1">croissance économique</a> mondiale au cours des 10 dernières années.</p>
<p>Malheureusement, ils semblent de <a href="https://theconversation.com/brics-struggles-to-fashion-coherent-action-due-to-inconsistent-agendas-66997">plus en plus divisés</a> sur une série de problèmes géopolitiques et géoéconomiques. Leurs propres intérêts nationaux semblent <a href="https://theconversation.com/how-to-judge-the-success-of-the-brics-summit-three-questions-will-do-the-trick-99526">fondamentalement opposés</a> à ceux des autres membres. En conséquence, les BRICS semblent aujourd’hui manquer d’une <a href="https://www.straitstimes.com/asia/east-asia/china-to-give-s103-million-for-brics-cooperation-plan">« voix commune »</a> au nom des pays du Sud, et donc ils ne peuvent pas articuler les intérêts des pays en voie de développement avec autant de persuasion.</p>
<h2>Lignes de division sino-russes</h2>
<p>Les pays BRICS se livrent ainsi depuis quelques années à des exercices plutôt unilatéraux ou bilatéraux, loin des objectifs affichés de déterminer une politique commune pour les économies dites « émergentes ».</p>
<p>Cela tient à des considérations politiques propres à chaque pays. Par exemple, la Chine et la Russie ont adopté des positions communes au <a href="https://www.bfmtv.com/international/le-conseil-de-securite-de-l-onu-etale-a-nouveau-ses-divisions-sur-la-syrie-1416311.html">Conseil de sécurité des Nations unies</a> concernant la Syrie et l’Iran. Ils travaillent également ensemble sur une position commune <a href="https://www.20minutes.fr/monde/947881-20120606-chine-russie-renforcent-alliance-syrie-influence-afghanistan">sur l’Afghanistan</a> en attendant le retrait des États-Unis, ce qui va à l’encontre du désir de Washington de <a href="https://moderndiplomacy.eu/2018/04/29/why-does-india-want-more-presence-in-afghanistan/">promouvoir une présence indienne à Kaboul</a>, afin de mitiger le risque d’instabilité en Afghanistan lors du retrait américain.</p>
<p>La Chine et la Russie élargissent également <a href="https://brill.com/abstract/title/38740?rskey=QkWjYG&result=1">leurs relations avec le Pakistan</a>, au chagrin de l’Inde.</p>
<p>En ce qui concerne plus particulièrement les BRICS, la Chine et la Russie n’ont pas soutenu l’<a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2005/07/11/le-debat-sur-l-elargissement-du-conseil-de-securite-de-l-onu-s-annonce-houleux_671693_3210.html">élargissement du Conseil de sécurité des Nations unies</a> afin de donner un siège au Brésil, à l’Inde ou à l’Afrique du Sud, même si ces pays militent activement en faveur d’une telle position.</p>
<p>La Chine et la Russie développent également des <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2018-07-02/yuan-chases-loonie-s-share-as-bank-of-russia-adds-chinese-assets">mécanismes d’échange de devises</a> pour faciliter les <a href="https://www.scmp.com/news/china/diplomacy/article/2163793/chinas-xi-jinping-russias-vladimir-putin-agree-boost-ties-amid">échanges bilatéraux</a> plutôt qu’un mécanisme inter-BRIC pour un panier de devises.</p>
<p>En outre, lors de l’<a href="https://theconversation.com/brics-needs-a-new-approach-if-its-going-to-foster-a-more-equitable-global-order-84229">élargissement des récents droits de vote</a> à la Banque mondiale et au FMI, les gains en pouvoir de vote de la Chine, du Brésil et de l’Inde ont été défavorables aux autres pays en développement, notamment le Nigéria et l’Afrique du Sud. De plus, les BRICS n’ont pas <a href="https://theconversation.com/how-to-judge-the-success-of-the-brics-summit-three-questions-will-do-the-trick-99526">appuyé l’appel</a> lancé par l’Afrique du Sud pour un troisième siège africain au conseil d’administration du FMI. Cela a fait de l’Afrique la région la plus sous-représentée du conseil d’administration.</p>
<h2>Davantage de pays africains</h2>
<p>La Chine et la Russie ont également formé l’<a href="http://eng.sectsco.org/about_sco/">Organisation de coopération de Shanghai</a> (OCS), en partenariat avec six républiques d’Asie centrale. Créé en 2001, il traite des questions d’énergie et de sécurité et <a href="https://theconversation.com/russie-chine-une-alliance-de-facade-79964">constitue un contrepoids</a> à l’influence américaine en Asie centrale. De la même manière, l’Afrique du Sud, la Chine et la Russie préconisent le concept de <a href="https://theconversation.com/as-global-headwinds-batter-countries-in-brics-can-it-stay-the-course-100470">« BRICS Plus »</a> pour inclure davantage de pays africains dans les BRICS. Cela semble un avantage étant donné l’influence économique et politique de la <a href="http://www.lefigaro.fr/international/2018/09/03/01003-20180903ARTFIG00220-la-chine-etend-son-influence-en-afrique-a-coups-d-investissements.php">Chine</a> et la <a href="https://www.letemps.ch/monde/russie-etend-influence-afrique">Russie</a>.</p>
<p>L’Afrique du Sud avait lancé le partenariat <a href="https://theconversation.com/as-global-headwinds-batter-countries-in-brics-can-it-stay-the-course-100470">BRICS Outreach</a>, un canal d’inclusion pour plusieurs pays africains tels que le Sénégal, l’Éthiopie, le Rwanda et l’Angola. L’Afrique du Sud tente donc d’incorporer un plus grand pluralisme au sein des BRICS.</p>
<p>L’Inde semble cependant mal à l’aise avec le concept BRICS Plus, craignant qu’une telle reconfiguration <a href="https://theconversation.com/world-bank-watch-out-the-brics-bank-is-a-game-changer-29437">ne soit plus avantageuse</a> pour Beijing que pour eux, au vu de l’influence chinoise en Afrique ?</p>
<h2>La route de la soie et la guerre commerciale</h2>
<p>Le mégaprojet chinois sur la <a href="https://theconversation.com/la-nouvelle-route-de-la-soie-une-strategie-dinfluence-mondiale-de-la-chine-75084">nouvelle route de la soie</a> (NRS) est peut-être la plus importante force contrariante par rapport aux initiatives conjointes des BRICS. Alors que la <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2017/09/DETROY/57873">Russie appuie</a> ce projet, l’Inde s’y oppose farouchement car le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/China%D0Pakistan_Economic_Corridor">corridor économique sino-pakistanais</a> est un stimulant de 62 milliards de dollars US qui <a href="https://www.capital.fr/economie-politique/pakistan-la-chine-promet-a-khan-de-continuer-a-soutenir-le-corridor-economique-1314172">contrecarre le jeu politique</a> indien pour isoler le Pakistan.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/253246/original/file-20190110-43510-zy1ajr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/253246/original/file-20190110-43510-zy1ajr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/253246/original/file-20190110-43510-zy1ajr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/253246/original/file-20190110-43510-zy1ajr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/253246/original/file-20190110-43510-zy1ajr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/253246/original/file-20190110-43510-zy1ajr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/253246/original/file-20190110-43510-zy1ajr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/253246/original/file-20190110-43510-zy1ajr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La Chine en rouge, les membres de l’AIIB (Asian Infrastructure Investment Bank) en orange, les six corridors proposés en noir et en bleu. 2017.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Nouvelle_route_de_la_soie#/media/File:One-belt-one-road.svg">Lommes/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pourtant, la Chine préfère que le NRS fasse progresser ses intérêts <a href="https://www.capital.fr/economie-politique/pakistan-la-chine-promet-a-khan-de-continuer-a-soutenir-le-corridor-economique-1314172">géopolitiques et géoéconomiques</a> car il peut jouer un rôle de premier plan et exercer davantage de contrôle sur la route de la soie. Dans le partenariat BRICS, la Chine n’est que l’un des cinq égaux ; sur la route de la soie, <a href="https://www.asie21.com/tag/corridor-economique-chine-pakistan/">elle est clairement leader</a>.</p>
<h2>Contrer les États-Unis</h2>
<p>En même temps, deux pays BRICS, la Chine et la Russie, jouent un jeu <a href="http://www.rfi.fr/ameriques/20180924-guerre-commerciale-chine-etats-unis-acharnement-donald-trump">d’acrobatie économique</a> et <a href="https://www.capital.fr/economie-politique/les-sanctions-americaines-contre-la-russie-maintenues-en-letat-trump-1300789">politique</a> avec les États-Unis.</p>
<p>Or ces derniers se retirent actuellement des accords de gouvernance multilatéraux qu’ils ont créés. Par exemple, ils se sont retirés de la <a href="https://www.polemia.com/2018-onu-immigration-etats-pacte-mondial-migrations/">conférence des Nations unies sur les migrations</a> et du <a href="https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2018/06/19/les-etats-unis-quittent-le-conseil-des-droits-de-l-homme-de-l-onu_5317855_3222.html">Conseil des droits de l’homme</a> des Nations unies. Et Washington paralyse effectivement l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en refusant d’accepter la nomination de nouveaux juges à l’organe d’appel de l’OMC.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/253247/original/file-20190110-43514-wvvnk1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/253247/original/file-20190110-43514-wvvnk1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=370&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/253247/original/file-20190110-43514-wvvnk1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=370&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/253247/original/file-20190110-43514-wvvnk1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=370&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/253247/original/file-20190110-43514-wvvnk1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=465&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/253247/original/file-20190110-43514-wvvnk1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=465&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/253247/original/file-20190110-43514-wvvnk1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=465&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Rencontre entre Trump et Poutine au G20, 2017.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://en.kremlin.ru/events/president/news/55006">Kremlin/Service de presse</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les États-Unis sont sur le chemin de la <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/08/06/dans-la-guerre-commerciale-la-chine-hesite-a-monter-au-front_5339705_3234.html">guerre commerciale avec la Chine</a>, ce qui fomente les divisions entre les pays du groupe BRICS, alors que la Russie se tourne vers la Chine, tandis que l’<a href="https://www.latribune.fr/economie/international/l-inde-meilleure-amie-des-etats-unis-de-donald-trump-632709.html">Inde</a> et le <a href="http://www.lefigaro.fr/international/2018/10/29/01003-20181029ARTFIG00001-jair-bolsonaro-elu-president-du-bresil.php">Brésil</a> se rapprochent des États-Unis.</p>
<p>En raison de la guerre commerciale, les pays du groupe BRICS sont maintenant davantage contraints de prendre parti, soit pour les États-Unis soit pour la Chine, avec une marge de manœuvre réduite. Selon la Banque mondiale, une modération dans le commerce mondial <a href="http://www.worldbank.org/en/publication/global-economic-prospects">ralentira le taux de croissance</a> du PIB mondiale, de 4,5 % en 2018, à 4,7 % en 2019 et 2020.</p>
<h2>Une voix commune pour les Suds ?</h2>
<p>Il existe un présupposé sur la domination de l’Occident (G7) dans la gouvernance économique mondiale qui était <a href="https://www.emeraldinsight.com/doi/abs/10.1108/IJOEM-07-2012-0063">valable à la création du groupe</a> BRICS (2002), mais qui ne l’est plus.</p>
<p>Brexit, Trump, le populisme, le ralentissement de l’économie mondiale depuis la crise de 2008, et la montée en puissance de la Ligue en Italie sont autant de phénomènes qui montrent que la domination de l’Occident sur l’économie mondiale s’est estompée. Alors, quelle est la nécessité de présenter une résistance aux puissances dominantes si elles ne le sont plus ?</p>
<p>En parallèle, la moitié de la croissance actuelle du PIB mondial est génerée par les BRICS. Si ces derniers développaient de meilleurs mécanismes de coordination économique, ils seraient ainsi capables de maintenir un rythme de croissance élevé. Le cas échéant, la polarisation actuelle des BRICS risquerait de ralentir considérablement la croissance économique mondiale, avec des répercussions pour les écononomies émergentes hors BRICS, étant donné <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S156601411100046X">leur intégration dans l’économie mondiale</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/108029/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Usman W. Chohan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les pays membres des BRICS paraissent de plus en plus divisés et peinent à faire émerger une voix commune aux pays des Suds.Usman W. Chohan, Economist, UNSW SydneyLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/954862018-06-18T22:10:15Z2018-06-18T22:10:15ZLe monde affronte sa « quatrième » épidémie à VIH<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/221457/original/file-20180603-142086-16wo7q3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C78%2C4007%2C2933&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des médicaments antirétroviraux sont dispensés contre le VIH, ici au Centre Régional de Recherche et de Formation à la Prise en Charge Clinique de Fann (CRCF) à Dakar, au Sénégal, en 2018.</span> <span class="attribution"><span class="source">Bernard Taverne/IRD</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>La pandémie de sida a changé de visage au fil des décennies. Le monde affronte aujourd’hui ce qu’on pourrait désigner comme la « quatrième » épidémie à VIH. La mortalité liée au VIH connaît un recul spectaculaire dans les pays du Sud, grâce aux traitements antirétroviraux. Mais cette évolution favorable est menacée par la progression alarmante du nombre de patients en échec thérapeutique.</p>
<p>En 1987, dans un discours prononcé devant l’Assemblée générale des Nations unies, Jonathan Mann, alors directeur du Special Programme on AIDS de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), déclarait que la pandémie de sida était constituée de trois épidémies. La première était celle, constatée en 1981, de la diffusion planétaire d'un virus encore inconnu à l'époque. La seconde, celle de la maladie sida elle-même, survenant plusieurs années après la contamination. La troisième épidémie était celle des réactions sociales, économiques, culturelles et politiques aux deux premières épidémies – notamment l’épidémie de discrimination à l’égard des personnes infectées. Jonathan Mann affirmait, lors de ce discours devenu célèbre, que cette troisième épidémie venait tout juste de démarrer.</p>
<p>Près de 30 ans plus tard, l’accès généralisé aux médicaments antirétroviraux (ARV) et la baisse spectaculaire de la mortalité liée à la maladie sida permettent de limiter les deux premières épidémies, tandis que les programmes nationaux et internationaux sont encore aux prises avec la troisième.</p>
<p>On assiste aujourd’hui à une vague d’échecs thérapeutiques aux ARV dans les pays du Sud qui doit être considérée, selon nous, comme une quatrième épidémie. Celle-ci risque de compromettre les progrès réalisés contre le virus en trois décennies, comme montré dans l’article publié par notre équipe de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) en avril <a href="https://www.thelancet.com/journals/laninf/article/PIIS1473-3099(18)30167-1/fulltext?rss=yes">dans la revue <em>The Lancet Infectious Diseases</em></a>.</p>
<h2>Le développement des échecs thérapeutiques, un constat alarmant</h2>
<p>La généralisation de l’usage des ARV a stoppé la progression de l’épidémie de sida sur la planète. Depuis 2006, le nombre de décès liés au VIH diminue à l’échelle mondiale ; ce constat a conduit l’ONUSIDA à déclarer qu’il serait possible <a href="http://www.unaids.org/sites/default/files/media_asset/UNAIDS_FastTrack_highlights_en.pdf">d’éliminer l’épidémie à VIH d’ici 2030</a>. Le succès de cette stratégie est néanmoins conditionné par l’efficacité des antirétroviraux, dont le traitement devrait concerner, d’ici 2020, <a href="http://www.unaids.org/fr/resources/documents/2017/Global-AIDS-Monitoring">environ 30 millions de personnes</a>.</p>
<p>L’efficacité thérapeutique des ARV à long terme est variable. Les contraintes de ces traitements, qui <a href="https://theconversation.com/vih-bientot-la-fin-du-traitement-quotidien-pour-les-seropositifs-81576">doivent être pris de manière quotidienne</a>, à heure fixe, génèrent souvent, au fil du temps, des écarts d’observance et des interruptions, qui favorisent le développement de résistances du virus aux médicaments. Ces résistances diminuent l’efficacité des ARV et sont responsables des échecs thérapeutiques.</p>
<p>Le nombre de personnes en échec thérapeutique est en constante augmentation dans les pays du Sud. Les enfants, plus encore que les adultes y sont particulièrement exposés.</p>
<h2>En cause, les difficultés d’observance, le coût des soins</h2>
<p>Dans certains contextes africains, notamment ruraux, un tiers des adultes et près de deux tiers des enfants traités <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28272247">sont en échec thérapeutique</a>. Le Dr Charles Kouanfack, chef de service du Centre de traitement agréé (CTA) de l’Hôpital Central de Yaoundé, au Cameroun, précise :</p>
<blockquote>
<p>« L’une des principales causes d’échec thérapeutique en Afrique est le défaut d’observance aux médicaments, lié à différents facteurs : difficulté d’accepter le diagnostic, dépression, effets secondaires des ARV, coûts des soins des maladies associées à l’infection à VIH, crainte de la stigmatisation avec mise en place de stratégies pour cacher les prises de traitements… »</p>
</blockquote>
<p>En Afrique subsaharienne, notamment, les coûts des examens complémentaires, des consultations et même du transport vers l’hôpital, ainsi que les contraintes liées au fonctionnement des hôpitaux publics (nombre limité de médecins, attentes interminables, pénuries d’ARV…) entravent la prise en charge correcte des patients.</p>
<p>Lorsque l’observance aux médicaments n’est pas optimale, il existe un risque important d’échec thérapeutique, notamment pour les médicaments qui ont une « barrière génétique faible », c’est-à-dire qui prédisposent à l’apparition rapide de résistances. Or ces traitements sont ceux actuellement les plus utilisés dans les programmes nationaux.</p>
<h2>Détecter l’augmentation de la charge virale le plus tôt possible</h2>
<p>La détection de l’échec thérapeutique est réalisée par la mesure de la « charge virale » (la concentration de virus dans le sang), examen dont l’OMS recommande une fréquence annuelle pour chaque personne traitée par ARV. « La détection le plus tôt possible d’une augmentation de cette charge virale, suivie du contrôle de l’observance et si nécessaire, d’un changement rapide du traitement, conditionnent l’efficacité du nouveau traitement » rappelle la virologue Martine Peeters, directrice de recherche à l’IRD. Lorsqu’une personne poursuit la prise d’un médicament dont une molécule est inefficace, le virus devient de plus en plus résistant, risquant de compromettre l’efficacité du traitement ultérieur.</p>
<p>Or l’accès à l’examen mesurant la charge virale est limité dans les pays du Sud. « Cette mesure nécessite des équipements sophistiqués et du personnel qualifié, qui sont en encore nombre réduit en dehors des grandes villes », constate le Pr Cheikh Tidiane Ndour, chef de la Division de lutte contre le sida et les Infections sexuellement transmissibles du Ministère de la Santé et de l’Action sociale du Sénégal.</p>
<p>Les dysfonctionnements des systèmes de soins limitent l’efficacité de la prise en charge. Quand les consultations, les examens complémentaires, les médicaments hors ARV sont payants, ces coûts réduisent l’accès aux soins.</p>
<h2>Un révélateur des limites des systèmes de soins</h2>
<p>En l’état actuel des systèmes de soins, on ne peut espérer qu’ils aient les capacités de limiter l’ampleur des échecs thérapeutiques. De fait, <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/?term=debeaudrap+2013+risk+of+virological+failure">des études récentes</a> ont montré la survenue d’un nouvel échec thérapeutique pour près d’un quart des personnes qui avaient fait précédemment l’expérience d’un premier échec.</p>
<p>Or les options thérapeutiques sont limitées. Dans les pays en développement, les schémas thérapeutiques ont été standardisés pour permettre un accès large aux thérapies, une prescription et un suivi simplifié des patients, à un coût limité pour les programmes nationaux. Il s’agit de combinaisons de plusieurs molécules ARV, qui ont fait l’objet de recommandations par l’OMS. La prise en charge médicale de l’échec thérapeutique est assurée par le passage d’une « 1<sup>re</sup> ligne » d’ARV à une « 2<sup>e</sup> ligne ».</p>
<p>L’accès aux schémas de 1<sup>re</sup> et de 2<sup>e</sup> ligne d’ARV est à présent généralisé dans la plupart des pays. En revanche, en cas de nouvel échec, l’accès aux ARV de 3<sup>e</sup> ligne est quasiment inexistant dans un grand nombre de pays.</p>
<h2>Un révélateur des failles de la gouvernance mondiale de la santé et des inégalités économiques</h2>
<p>En Afrique subsaharienne, les schémas thérapeutiques de 2<sup>e</sup> ligne <a href="http://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/255883/9789241512848-eng.pdf;jsessionid=3C6B4A2A7BDA667723FB777C047B3A10?sequence=1">coûtent le double de ceux de 1ʳᵉ ligne</a>. Et pour ceux de 3<sup>e</sup> lignes, le coût peut être jusqu’à 14 fois plus élevé. Peu de pays en Afrique ont inscrit, dans les programmes nationaux, les antirétroviraux de 3<sup>e</sup> ligne, alors que ceux-ci sont utilisés en routine chez les patients en Europe et en Amérique du Nord.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/218331/original/file-20180509-34024-1ostttj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4064%2C2682&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/218331/original/file-20180509-34024-1ostttj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/218331/original/file-20180509-34024-1ostttj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/218331/original/file-20180509-34024-1ostttj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/218331/original/file-20180509-34024-1ostttj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/218331/original/file-20180509-34024-1ostttj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/218331/original/file-20180509-34024-1ostttj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Consultation HIV/sida au Kenya, dans les locaux de l’ONG Pepo La Tumaini Jangwani.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/january-2007-doctor-consults-mother-children-105711242">Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’épidémie d’échec thérapeutique frappe essentiellement les pays à ressources limitées. Eric Delaporte, professeur de maladies infectieuses à l’université de Montpellier, reconnaît que « dans les pays riches, où les patients bénéficient d’un suivi individualisé et de schémas thérapeutiques “sur mesure”, l’échec thérapeutique est moins fréquent et n’est pas assimilé à un problème de santé publique ». Cet échec révèle les inégalités économiques et sociales entre les pays.</p>
<p>Par ailleurs, aucune politique spécifique n’a été mise en place sur le plan international pour garantir l’exemption de paiements des soins pour les personnes vivant avec le VIH. Le développement des politiques de couverture maladie universelle sont encore débutantes en Afrique et souvent mal adaptées à la prise en charge des maladies chroniques.</p>
<h2>Une réponse spécifique à la quatrième épidémie</h2>
<p>En 2016, l’OMS a produit un <a href="http://www.who.int/hiv/pub/drugresistance/hivdr-report-2017/en/">rapport alarmant</a> sur le développement des échecs thérapeutiques liés aux résistances virales dans les pays du Sud.</p>
<p>La quatrième épidémie pourrait ainsi toucher 3 à 5 millions de personnes entre 2020 et 2030. Elle doit être considérée comme un phénomène à part entière, résultant des échecs ou des limites des stratégies de santé publique mises en œuvre jusqu’à présent.</p>
<p>« Pour surmonter la quatrième épidémie, il faut non seulement davantage de nouvelles molécules, mais aussi un engagement au niveau de chaque état, avec un soutien international pour les plans d'intervention de santé publique propres à chaque pays », selon le Dr Ibra Ndoye, ancien Secrétaire Executif du Comité national de lutte contre le sida du Sénégal. La réalisation de l’objectif ambitieux de l’ONUSIDA d’éradiquer l’épidémie de VIH dans le monde d’ici 2030 dépendra d’un contrôle efficace de cette quatrième épidémie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/95486/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le recul spectaculaire de la mortalité liée au VIH dans les pays du Sud, grâce aux traitements antirétroviraux, est menacé par la progression alarmante du nombre de patients en échec thérapeutique.Gabriele Laborde-Balen, Anthropologue, Centre Régional de Recherche et de Formation à la prise en charge Clinique de Fann (CRCF, Dakar), Institut de recherche pour le développement (IRD)Bernard Taverne, Anthropologue, médecin, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/968312018-05-20T23:26:50Z2018-05-20T23:26:50ZParmi les grands émergents, la Turquie affiche une dépendance énergétique record<p>Pour appréhender la <a href="http://www.cepii.fr/CEPII/fr/publications/em/abstract.asp?NoDoc=10382">multipolarité de l’économie planétaire</a>, la Banque mondiale met en regard depuis 2017 les performances du G7 et celles du EM7, groupe des sept grands pays émergents dont le PIB, en valeur, excède 1 % du PIB mondial (voir à ce propos les rapports de <a href="https://openknowledge.worldbank.org/bitstream/handle/10986/26800/9781464810244.pdf">2017</a> et de <a href="https://openknowledge.worldbank.org/bitstream/handle/10986/28932/9781464811630.pdf">2018</a> de la Banque mondiale).</p>
<p>Dans ce groupe des EM7, on retrouve la Chine, dont l’économie produit des effets d’entraînement significatifs <a href="http://documents.worldbank.org/curated/en/786391496863791206/How-important-are-spillovers-from-major-emerging-markets">sur l’économie globale</a>. Les autres pays de cet ensemble jouent, eux, des rôles moteurs dans leurs régions respectives : Brésil et Mexique en Amérique, Russie et <a href="http://visualdata.cepii.fr/panorama/fr/?country=Turquie">Turquie</a> en Eurasie, Inde et Indonésie en Asie.</p>
<h2>Un double rattrapage</h2>
<p>Les niveaux de revenu réel par habitant de ces sept pays ont connu des évolutions contrastées par rapport à la moyenne des pays avancés sur longue période (voir le panel A du graphique 1).</p>
<p>Entre 1960 et 2016, les grandes économies asiatiques et la Turquie ont réalisé un rattrapage (autrement dit, leurs revenus par habitant ont convergé vers la moyenne de ceux des pays avancés) : +5 points de pourcentage pour l’Inde (13 % en 2016 contre 8 % en 1960), +9 pour l’Indonésie, +11 pour la Turquie et +29 pour la Chine ; cependant, un recul est à observer au Mexique (-15 points) et au Brésil (-5), ainsi qu’en Russie (-13) où le sensible rattrapage depuis le début des années 2000 n’a pas encore comblé l’impact de l’effondrement consécutif à la chute du mur de Berlin en 1990.</p>
<p>Mais les sept grands émergents ont tous enregistré un fort et parfois très fort rattrapage quant à la consommation d’énergie par tête entre 1965 et 2016 : l’Inde (+9 points), l’Indonésie (+12), le Mexique (+15), la Russie (+16), le Brésil (+23), la Turquie (+31) et la Chine (+43) (voir le panel B du graphique 1).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/219649/original/file-20180520-42242-i2flgb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/219649/original/file-20180520-42242-i2flgb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/219649/original/file-20180520-42242-i2flgb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=274&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/219649/original/file-20180520-42242-i2flgb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=274&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/219649/original/file-20180520-42242-i2flgb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=274&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/219649/original/file-20180520-42242-i2flgb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=344&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/219649/original/file-20180520-42242-i2flgb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=344&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/219649/original/file-20180520-42242-i2flgb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=344&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Calculs de l’autrice à partir de CEPII (base de données CHELEM-PIB, mars 2018) et de BP, Statistical Review of World Energy (juin 2017)</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Note : l’échelle des graphiques est en logarithme ; les PIB sont en PPA, aux prix et taux de change constants 2011 ; l’énergie primaire, exprimée ici en millions de tonnes-équivalent pétrole, correspond à l’énergie « potentielle » des ressources naturelles (bois, charbon, gaz, pétrole, ainsi que ressources nucléaires, hydrauliques ou autres renouvelables) avant toute transformation ; les données russes sont rétropolées par les indices d’évolution de l’ex-URSS pour la période d’avant 1992 dans le panel A et d’avant 1985 dans le panel B ; le groupe des économies avancées se réfère à la classification retenue par le FMI : Australie, Canada, Corée du Sud, Etats-Unis, Hong-Kong, Islande, Israël, Japon, Macao, Norvège, Nouvelle- Zélande, Suisse, Taiwan, Singapour, Union européenne (sauf Bulgarie, Croatie, Hongrie, Pologne et Roumanie).</em></p>
<h2>Turquie : sobriété énergétique…</h2>
<p>L’intensité énergétique, qui résulte du rapport entre ces deux indicateurs (voir le panel C du graphique 1), varie sensiblement d’un pays à l’autre.</p>
<p>Ainsi, en 2016, la Russie consomme légèrement plus d’énergie par tête que la moyenne des pays avancés (102 %), alors que sa richesse par habitant n’équivaut qu’à 56 % de la leur. De plus, l’intensité énergétique relative russe a augmenté depuis 1965 de 1,26 à 1,82.</p>
<p>La Chine, au contraire, a réduit la sienne de 2,01 à 1,46 sur la même période. Le Brésil, l’Inde et le Mexique ont en 2016 des intensités proches de celle, moyenne, des économies avancées (respectivement 0,97, 0,88 et 0,83).</p>
<p>L’Indonésie, riche en matières premières mais relativement peu industrialisée, et la Turquie, quant à elle dépourvue de ressources naturelles mais très industrialisée, ont encore des intensités énergétiques bien plus faibles que les pays avancés (respectivement 0,59 et 0,71 en 2016).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/219622/original/file-20180519-42230-80d5cq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/219622/original/file-20180519-42230-80d5cq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/219622/original/file-20180519-42230-80d5cq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=273&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/219622/original/file-20180519-42230-80d5cq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=273&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/219622/original/file-20180519-42230-80d5cq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=273&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/219622/original/file-20180519-42230-80d5cq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=343&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/219622/original/file-20180519-42230-80d5cq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=343&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/219622/original/file-20180519-42230-80d5cq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=343&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Calculs de l’autrice à partir de EIA, US Energy Information Administration</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>L’échelle des graphiques est en logarithme ; la production et la consommation en énergie primaire sont ici calculées en BTU (_British thermal unit</em>, unité anglo-saxonne d’énergie définie par la quantité de chaleur nécessaire pour élever la température d’une livre anglaise d’eau d’un degré °F à la pression constante d’une atmosphère)._</p>
<p>Ces comparaisons révèlent que l’enrichissement par tête de la Turquie depuis les années 1960 a été moins énergivore que celui d’autres pays du groupe EM7.</p>
<h2>… mais dépendance accrue</h2>
<p>Cette performance est pourtant loin de lui garantir une croissance durable. En effet, si certains grands émergents consomment relativement plus d’énergie qu’elle par rapport à leur richesse par tête, ils en produisent, pour leur part, des volumes considérables.</p>
<p>La Chine est ainsi la première productrice de la planète en énergie primaire (19 % de la production mondiale en 2015) devant les États-Unis, tandis que la Russie occupe le 3<sup>e</sup> rang (10 %) avant l’Arabie saoudite. L’Inde est en 8<sup>e</sup> position, l’Indonésie en 9<sup>e</sup>, le Brésil en 10<sup>e</sup> et le Mexique en 15<sup>e</sup>, avec des parts variant de 2,6 à 1,4 % de la production mondiale (voir le panel A du graphique 2).</p>
<p>La Turquie arrive seulement au 48<sup>e</sup> rang avec 0,2 %. Sa <a href="https://webstore.iea.org/energy-policies-of-iea-countries-turkey-2016-review">production</a> domestique ne couvre qu’un quart de ses besoins. Elle est constituée pour moitié de combustibles fossiles (charbon, surtout), pour l’autre moitié d’énergies renouvelables (hydroélectricité notamment). Le pays importe la quasi-totalité du pétrole et du gaz qu’il consomme. Sa pauvreté en ressources fait d’elle, et de longue date, le pays du EM7 le plus dépendant de l’extérieur sur le plan énergétique ; depuis peu, elle l’est même davantage que les grands pays européens (voir le panel A du graphique 2).</p>
<p>Cette singularité n’est naturellement pas sans conséquence sur le plan géopolitique. Elle conduit à une dépendance accrue de la Turquie à l’égard de ses fournisseurs en gaz et en pétrole que sont principalement ses voisins russe et iranien.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/96831/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Deniz Unal ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le pays connaît une dépendance énergétique record et continue. Cela tient à la croissance soutenue de son économie et à la pauvreté de ses ressources énergétiques.Deniz Unal, Économiste, CEPIILicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/845452017-10-01T20:35:28Z2017-10-01T20:35:28ZL’Indonésie, ce géant invisible au cœur de l’Asean<p><a href="https://www.theguardian.com/cities/2016/nov/21/biggest-invisible-thing-on-earth-indonesia-waking-up">L’Indonésie est le plus grand géant invisible sur terre</a> : avec une population de plus de 260 millions d’habitants jeunes et connectés, un vaste territoire terrestre et maritime, et d’abondantes ressources naturelles, le pays est longtemps demeuré méconnu de la majorité du reste du monde.</p>
<p>L’archipel, <a href="http://s244543015.onlinehome.fr/ciworldwide/">à la croisée des chemins</a> géographiques, culturels, religieux, politiques, et économiques représente cependant un point pivot dans la région de l’est asiatique.</p>
<p><a href="http://www.rfi.fr/asie-pacifique/20170925-indonesie-bali-volcan-agung-evacuation-risque-eruption">Eruptions volcaniques à Bali</a>, menaces de <a href="http://www.bfmtv.com/international/indonesie-la-messagerie-telegram-partiellement-bloquee-pour-terrorisme-1217299.html">radicalisation islamiste</a>, brouille <a href="https://theconversation.com/indonesia-challenges-australias-anti-dumping-measures-at-the-wto-83723">économique avec l’Australie</a>, l’Indonésie focalise aujourd’hui toutes les attentions.</p>
<h2>Nouvel ordre mondial</h2>
<p>Après la disparition de l’ancien bloc communiste, la <a href="https://www.foreignaffairs.com/articles/united-states/1993-06-01/clash-civilizations">politique internationale sort de son confinement occidental</a>, et s’étend à l’interaction entre l’occident et l’orient, le nord et le sud, et de manière plus marquée, entre les pays non-occidentaux. Les interrelations mondiales sont reconfigurées, le nombre d’acteurs multiplié, et l’ancien monde bipolaire s’est déplacé vers un système multipolaire. Ceci nécessite le contrôle d’environnements politiques plutôt qu’une <a href="https://s3.amazonaws.com/academia.edu.documents/33300459/Soft_Power_Nye_1990.pdf?AWSAccessKeyId=AKIAIWOWYYGZ2Y53UL3A&Expires=1506240516&Signature=1VQQJjjP1tiGLrV%2BEyHoY6saq0w%3D&response-content-disposition=inline%3B%20filename%3DSoft_Power_Nye_1990.pdf">simple gestion des ressources</a>, dans le but de maintenir à la fois la prospérité économique et la sécurité.</p>
<p>Depuis les années 1990, le leadership mondial des États-Unis a été et est encore plus que jamais mis au défi. Ceci a permis à la Chine, en pleine expansion, de devenir un concurrent fort, soulignant ainsi l’importance des relations de pouvoir au sein même de l’Asie de l’Est. Ce nouvel ordre mondial a également déclenché la montée des moyennes puissances telles que le Japon, la Corée du Sud, ou bien encore les BRICs, nouveaux acteurs majeurs dans une <a href="http://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/09512749508719153">structure maintenant plus complexe</a>. Exerçant une influence considérable au niveau régional, ils sont donc en mesure de déplacer l’équilibre global.</p>
<h2>L’Asean</h2>
<p>L’Indonésie est l’une de ces puissances. Elle fait partie des cinq membres fondateurs de l’<a href="http://asean.org/">Association des nations de l’Asie du Sud-Est</a> créée en 1967 (Asean), et représente le plus grand pays de l’association en termes de population et de territoire. Elle est restée l’<a href="https://www.researchgate.net/profile/Mark_Beeson2/publication/275386649_The_changing_architecture_of_politics_in_the_Asia-Pacific_Australia%27s_middle_power_moment/links/569fb1d708ae4af52546c395/The-changing-architecture-of-politics-in-the-Asia-Pacific-Australias-middle-power-moment.pdf">actrice principale de la diplomatie dans la région de l’est asiatique</a>, notamment en ce qui concerne la sécurité dans le détroit de Malacca et les conflits en mer de Chine.</p>
<p>Pendant les quarante premières années de l’Asean, l’Indonésie a concentré ses efforts au sein de cet espace d’échanges privilégié.</p>
<p>Cependant, le pays a négligé la construction d’une image de marque nationale forte pour s’imposer sur l’ensemble de la scène internationale.</p>
<p>Aujourd’hui la célébration du cinquantenaire de l’Asean est l’occasion de renforcer l’intégration économique et les partenariats dans des domaines divers autour des <a href="http://www.suhakam.org.my/wp-content/uploads/2013/11/the-three-pillar.pdf">trois piliers de la communauté des pays membres</a> qui sont la Communauté de la politique et la sécurité (APSC), la Communauté socio-culturelle (ASCC), et la Communauté économique (AEC).</p>
<h2>Soft power</h2>
<p>Les difficultés de l’Asean peuvent en partie être attribuables à une <a href="https://muse.jhu.edu/article/508355/summary">culture diplomatique assez élitiste</a>, reposant sur des pratiques bureaucratiques et pyramidales qui ne peuvent pas être efficaces en l’absence d’une culture commune à l’ensemble des pays de la région, qui transcenderait les différences locales.</p>
<p>De nombreux observateurs suggèrent que les pays de la zone devraient promouvoir une <a href="https://books.google.fr/books?id=edH5Aeb-epgC&pg=PA91&lpg=PA91&dq=asian+cosmopolitan+culture&source=bl&ots=FjiHC1JKZA&sig=P9wUI42__EQjOEVxeouvCx9EoCE&hl=en&sa=X&ved=0ahUKEwjtg8OJ68DWAhUC1hQKHbCrA-0Q6AEIRTAF#v=onepage&q=asian%20cosmopolitan%20culture&f=false">culture cosmopolite régionale</a> par le biais des industries créatives et des nouvelles technologies.</p>
<p>En effet, ces secteurs – incluant les séries télévisées, la musique, les jeux vidéo, dont les contenus sont très largement relayés par les réseaux sociaux, sont des vecteurs essentiels de <a href="http://www.xerfi-precepta-strategiques-tv.com/ensavoirplus/Virginie-Vial-Le-softpower_i3628.html"><em>soft power</em></a>.</p>
<p>Les produits culturels qui ont d’ailleurs le plus de succès en Asie du Sud-est proviennent en particulier de Corée du Sud, avec des <a href="http://www.channelnewsasia.com/news/asiapacific/commentary-southeast-asia-s-romance-with-korean-drama-shows-9021166">séries télévisées telles que <em>Descendants of the Sun</em> »</a>, ou bien à travers la K-pop (pop musique coréenne) et ses <a href="https://www.fairobserver.com/region/asia_pacific/korean-wave-k-pop-culture-southeast-asia-news-45109/"><em>boy bands</em></a> tels que BTS. La K-pop propose ainsi des contenus dont les valeurs séduisent plusieurs cultures asiatiques.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/m8MfJg68oCs?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Un clip des sud-coréens BTS.</span></figcaption>
</figure>
<p>L’Indonésie possède dans ce domaine de nombreux atouts mais ces derniers demeurent encore trop peu exploités. La population est jeune – <a href="http://www.indexmundi.com/indonesia/age_structure.html">50 % des Indonésiens ont moins de 30 ans</a>, connectée – <a href="https://www.emarketer.com/Article/Facebook-Users-Indonesia-Have-Highest-Mobile-Usage-Rate-Worldwide/1011896">troisième audience Facebook</a> et Jakarta est la première ville la plus active sur <a href="https://www.forbes.com/sites/victorlipman/2012/12/30/the-worlds-most-active-Twitter-city-you-wont-guess-it/#356bfa4855c6">Twitter</a> au classement mondial.</p>
<p>Les industries créatives représentent près de <a href="http://www.globalindonesianvoices.com/14159/is-there-future-for-creative-industry-in-indonesia/">7 % du PNB</a> et sont en <a href="http://www.thejakartapost.com/news/2017/03/15/indonesia-expects-jump-in-creative-economy-by-2019.html">forte croissance</a>. Ce chiffre est juste en dessous de ceux des deux leaders mondiaux, les <a href="http://www.cisac.org/Newsroom/News-Releases/CISAC-Study-Highlights-the-Untapped-Potential-of-Creative-Industries-in-BRICs-Countries">États-Unis avec 11 % et la Corée du sud avec 10 %</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/187613/original/file-20170926-28228-b9k2qi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/187613/original/file-20170926-28228-b9k2qi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/187613/original/file-20170926-28228-b9k2qi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/187613/original/file-20170926-28228-b9k2qi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/187613/original/file-20170926-28228-b9k2qi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/187613/original/file-20170926-28228-b9k2qi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/187613/original/file-20170926-28228-b9k2qi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Peterpan, un groupe de musique pop-indonésienne.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/Indo_pop#/media/File:Peterpan_(Indo).jpg">I, Sry85/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Malgré ces chiffres encourageants, l’Indonésie doit mettre les bouchées doubles afin de concurrencer ses proches voisins tels la <a href="http://www.academia.edu/3527256/Thailand_s_Creative_Industries_Contribute_10_of_the_Nation_s_GDP">Thaïlande (10 % du PNB)</a> ou la <a href="http://www.theborneopost.com/2010/01/01/creative-industries-a-major-driver-of-economic-growth/">Malaisie (5,8 % du PNB)</a>.</p>
<p>En l’absence d’une coopération d’envergure régionale, maintenant les barrières institutionnelles et d’infrastructure, et <a href="http://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/01436597.2015.1133245?journalCode=ctwq20">laissant de côté les petites entreprises</a> – et donc les start-up, l’Indonésie reste confinée dans les industries traditionnelles au détriment du développement des secteurs innovants.</p>
<p>Les <a href="http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1877042812052159">effets d’entraînement directs et indirects notamment des industries créatives</a> pourraient accélérer le développement de l’économie des secteurs traditionnels et influencer positivement les exportations des produits manufacturiers indonésiens.</p>
<p>Le pays devra ainsi redoubler d’efforts s’il veut rattraper son <a href="http://www.thejakartapost.com/news/2014/11/05/indonesia-losing-race-soft-power-campaign.html">retard dans le domaine</a> et éventuellement prendre la tête afin de consolider sa position au sein de l’Asean et dans le monde.</p>
<h2>Difficulté d’intégration économique</h2>
<p>La concurrence et les différents niveaux de développement dans les secteurs innovants illustrent bien pourquoi les ambitions de l’Asean en termes de libéralisation économique entre les pays membres ne sont <a href="https://s3.amazonaws.com/academia.edu.documents/38051746/Explaining_the_Failure_of_the_AEC.pdf?AWSAccessKeyId=AKIAIWOWYYGZ2Y53UL3A&Expires=1506277143&Signature=YByMBg6UnryaMTcBfEbahJ19ZE8%3D&response-content-disposition=inline%3B%20filename%3DExplaining_the_Failure_of_the_ASEAN_Econ.pdf">pas forcément suivies d’effets concrets</a>.</p>
<p>L’effacement des barrières économiques implique en effet de redessiner les règles de gouvernance, avec de considérables enjeux de redistribution de ressources, de débouchés, et de pouvoir.</p>
<p>Or, chacun tend à privilégier sa politique économique nationale.</p>
<p>L’Indonésie représente un cas d’école en la matière. L’héritage de l’<a href="https://books.google.fr/books/about/Indonesia.html?id=woSrAZ13P2IC&hl=en">ère Suharto, ancien président (1965-1998)</a> a permis à certains <a href="https://www.ft.com/content/8aca935a-4a11-33b3-ab6f-cf522112c1e2">oligarques</a> – installés de longue date – de profiter de la politique de décentralisation pour construire un <a href="https://books.google.fr/books?id=o9oh45hmGzEC&printsec=frontcover&redir_esc=y#v=onepage&q&f=false">nouveau réseau de clientélisme et de corruption</a>.</p>
<h2>Milliardaires politiciens</h2>
<p>Ce clientélisme fleurit notamment en raison de la lourdeur et de la complexité des institutions indonésiennes qui favorisent l’<a href="http://www.xerfi-precepta-strategiques-tv.com/emission/Michel-Godet-Corruption-entrepreneuriat-et-creation-de-valeur_3651.html">économie de rente, et la corruption</a>.</p>
<p>Les oligarques indonésiens opèrent ainsi dans des <a href="http://www.insideindonesia.org/the-business-of-politics-in-indonesia-4">secteurs variés</a> comme le pétrole, le gaz ou bien encore l’agroalimentaire. Parmi eux, Aburizal Bakrie est à la tête d’un empire – le <a href="https://www.theguardian.com/world/2012/sep/25/bakrie-indonesia-nat-rothschild">groupe Bakrie</a>, de 2,4 milliards de dollars (2013), et chef du parti Golkar de 2009 à 2015.</p>
<p><a href="https://www.forbes.com/profile/hashim-djojohadikusumo/">Hashim Djojohadikusumo</a>, pesant 750 millions de dollars avec le groupe Arsari, fils de l’ancien ministre des Finances, a fondé de son côté le <em>Great Indonesia Movement Party</em> qui a présenté le Lieutenant General Prabowo Subianto contre <a href="http://www.lemonde.fr/international/article/2014/07/23/la-singuliere-trajectoire-de-jokowi-futur-president-d-indonesie_4461515_3210.html">Joko Widodo, vainqueur aux dernières élections présidentielles de 2014</a>.</p>
<h2>L’Indonésie, gardien de la paix</h2>
<p>L’un des domaines où l’Indonésie peut cependant briller est la sécurité. Les autres pays membres de l’Asean ont ainsi toujours compté sur l’Indonésie comme acteur de poids dans la région.</p>
<p>En 2003, Un an après la première attaque terroriste à Bali, la République prend l’initiative de soumettre une proposition <a href="https://www.rsis.edu.sg/rsis-publication/idss/590-towards-an-asean-security-comm/#.Wce4OMgjE2w">pour la création de l’APSC</a> à échéance 2020. La crise financière et économique qui a secoué la région en 1997 a engendré d’autres turbulences sociales et politiques qui ont ainsi requis une coordination régionale.</p>
<p>Aujourd’hui, l’archipel pourrait même avoir un rôle clef dans l’<a href="http://thediplomat.com/2017/08/fire-and-fury-aseans-role-in-cooling-us-north-korea-tensions/">apaisement des tensions entre les États-Unis et la Corée du Nord</a> par le biais du Forum regional de l’Asean (ARF).</p>
<p>Par ailleurs, la plus grande nation musulmane du monde est particulièrement attendue sur la question de la montée de l’islamisme, <a href="https://www.washingtonpost.com/world/asia_pacific/rise-of-hard-line-islamist-groups-alarms-moderate-indonesian-muslims/2017/05/05/0175c7e6-2f77-11e7-a335-fa0ae1940305_story.html?utm_term=.af0a307bc458">qui inquiète les observateurs internationaux</a>.</p>
<p>L’avènement de la démocratie en 1998 et le retour de l’islam dans la politique a forgé une <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1057/9780230118447_6">nouvelle identité nationale</a>, ce qui transpire aujourd’hui dans les décisions du pays au niveau international. L’Indonésie a récemment <a href="http://www.thejakartapost.com/academia/2016/07/14/qa-rethinking-indonesias-military-operation-in-southern-philippines.html">répondu favorablement à la demande d’appui militaire par les Philippines</a>, un membre de l’Asean, pour lutter contre un groupuscule se réclamant de l’État islamique ayant pris possession de la ville de Marawi. Cette participation active à la lutte contre le terrorisme devra s’accompagner de la <a href="http://www.thejakartapost.com/news/2017/06/28/govt-should-think-twice-about-military-aid-for-philippines-expert.html">gestion délicate des représailles éventuelles sur son propre sol et de l’opinion publique</a>.</p>
<p>Cependant, il apparaît plutôt que la <a href="http://www.internationalaffairs.org.au/australianoutlook/indonesian-oligarchys-islamic-turn/">religion soit instrumentalisée</a> afin de mobiliser les foules en vue des prochaines élections présidentielles de 2019. Il ne s’agirait ainsi <a href="https://theconversation.com/should-we-worry-about-islamism-in-indonesia-77480">pas d’une vraie volonté d’islamiser l’État</a>.</p>
<p>Si l’Indonésie parvenait à conserver une réalité et une image d’un islam modéré, tout en relevant nombre des défis auxquels l’Asean doit faire face – diversité ethnique, culturelle et religieuse, et collusion entre le pouvoir politique et le monde des affaires, elle serait en passe de devenir un modèle de <a href="https://qmro.qmul.ac.uk/xmlui/bitstream/handle/123456789/5839/JONESDemocratizationAnd2009POST.doc?sequence=4">démocratisation de la gouvernance de l’Asie du Sud-est</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/84545/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Virginie Vial ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’Indonésie, un pays clé pour le futur économique et sociétal de l’Asie de l’est, face à ses défis tandis que l’ASEAN fête ses 50 ans.Virginie Vial, Professeure d'Economie, Kedge Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/744002017-03-13T20:08:32Z2017-03-13T20:08:32ZLa démondialisation financière est-elle engagée ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/160414/original/image-20170312-19226-10tsxcp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dénonciation de la mondialisation :
« Apolitico », Wilfredo Prieto, place du Trocadéro, octobre 2010.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/groume/5047875382/in/photolist-9vGAgG-9ErNHa-4w2sek-oRBezf-Gepo7p-p96Y2x-oRAEvt-pkL5qB-btHx6k-bfXBYD-5eRduL-azJkt3-9art32-gteT6U-e1An4c-6jabY7-GfWjs2-az8Q5k-4d4Cbm-bX5E4c-H8jAuw-avNkut-8o9s5o-gRWw9E-8G4Fub-M1obTH-MXWW7z-MvQjzL-MvQi1o-MvQgYo-MQuyJK-MQuxKR-MMR4DN-MvQg5Q-MQuxWn-oRBKm6-8oyhSF-pYquvW-HaPdgJ-H8bs4E-GfLR1N-AVJpjb-DuvyY2-E1EMTj-GL5xfU-MQpqeP-Ma7aEB-GfCYs7-H57m5r">Groume/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est publié dans le cadre du partenariat de The Conversation avec le <a href="http://bit.ly/2kZixvy">Printemps de l’Économie 2017</a>. Son auteur, le professeur André Cartapanis participe à une rencontre sur le thème « Y a-t-il démondialisation ? » le 21 mars à 11h à la Mairie du III<sup>e</sup> à Paris.</em></p>
<hr>
<p>L’heure est-elle à la <a href="http://bit.ly/2ncSLc2">démondialisation</a> ? C’est une question à laquelle on apporte généralement une réponse positive à propos des <a href="http://bit.ly/2mPxBj6">échanges de biens et services</a>. Depuis les années quatre-vingt, la croissance du commerce mondial avait été nettement plus élevée que la croissance du PIB mondial, contribuant ainsi à une extraversion croissante des activités économiques.</p>
<p>Mais dans l’après-crise financière le commerce international a décroché et l’on observe même une croissance nulle des échanges depuis 2016. Nul ne peut dire, cependant, s’il s’agit là d’une tendance pérenne ou simplement la conséquence de la croissance molle qui caractérise l’économie mondiale et dont témoigne la faiblesse durable de l’investissement.</p>
<p>Qu’en est-il de la mondialisation financière ? Que l’on se réfère à la taille des flux internationaux de capitaux ou à celle des stocks de créances ou d’engagements financiers internationaux, rapportés à l’activité réelle, il y a, là aussi, un décrochage très net depuis 2007 : en stocks, les créances transfrontières représentaient un peu moins de 40 % du PIB mondial en 2016, contre près de 60 % en 2008.</p>
<p>Comment expliquer une <a href="http://bit.ly/2ncUspS">telle évolution</a> et doit-on considérer qu’il y a là un phénomène dont les effets sont positifs pour l’économie mondiale, en particulier parmi les émergents ?</p>
<h2>Une déglobalisation bancaire</h2>
<p>Tout d’abord, ce recul ne concerne pas de la même manière tous les types de transferts de capitaux, et moins encore toutes les zones de l’économie mondiale. C’est pour une très large part la conséquence d’un repli des activités bancaires internationales en Europe (zone euro, Royaume-Uni et Suisse) que l’on n’observe pas avec la même ampleur sur le continent américain ou en Asie.</p>
<p>Ce repli est largement lié au <a href="http://bit.ly/2mfgggw"><em>deleveraging</em></a> massif engagé par les <a href="http://bit.ly/2mzHFfJ">banques européennes</a> depuis la crise de la zone euro et à l’atonie de la croissance jusqu’ici, de nature à dégrader le climat des affaires et la perception du risque.</p>
<p>Dans le même temps, les opérations de marchés à l’échelle internationale, en dollars ou en euros, adossées principalement à des émissions obligataires, souveraines ou privées, se sont considérablement développées, parallèlement au maintien à un rythme soutenu des investissements directs à l’étranger.</p>
<p>Cela a évidemment été favorisé par les politiques monétaires non-conventionnelles, surtout par les injections de liquidités en dollars de la Fed. Plus que d’une tendance à la démondialisation financière, on doit donc plutôt faire état d’une déglobalisation bancaire à dominante européenne et d’une titrisation accrue des financements internationaux.</p>
<p>Au-delà du deleveraging et du processus d’ajustement de la qualité des actifs bancaire après le choc systémique de 2008 et en réponse à la crise de la zone euro, ce phénomène s’explique aussi par le durcissement des règles prudentielles qu’impose l’application encore partielle des accords de Bâle III. On peut également y voir un effet collatéral du repli du commerce mondial compte tenu des connexions entre ce commerce, en matière de biens d’investissement, de contrats militaires ou aéronautiques par exemple, et la demande de financements bancaires internationaux.</p>
<h2>La réduction des contagions vers les émergents ?</h2>
<p>Quels sont les effets réels de cette reconfiguration de la globalisation financière ? Les flux bancaires internationaux ont souvent été à l’origine des fragilités financières, voire des crises, qui ont touché les économies émergentes. Ces afflux ont provoqué une appréciation significative des taux de change nominaux et aussi, compte tenu des interventions des banques centrales pour limiter cette hausse, une accumulation de réserves de change en devises et une forte expansion de la liquidité domestique, favorisant une accélération de la dynamique du crédit et menaçant la stabilité financière.</p>
<p>D’où le lien, jusqu’ici, entre le volume des crédits internationaux et les booms sur le crédit domestique dans les pays émergents, soit directement, en dollars, soit par l’entremise des banques domestiques. Ce sont les flux bancaires internationaux et, donc, les stratégies d’intermédiation des banques globales, qui ont joué un rôle déterminant dans le cycle international du crédit et la diffusion vers la périphérie des booms du crédit issus des conditions monétaires prévalant aux États-Unis ou en Europe.</p>
<p>Le processus est symétrique et a conduit, en présence d’un <a href="http://bit.ly/2mzC60S"><em>sudden stop</em></a>, d’un reflux, à des situations de crise ou de tensions très marquées apparaissant d’abord sur le marché des changes. Cela a suscité, dans nombre de ces pays, une accentuation des <a href="http://bit.ly/2nt0oaB">phases de boom et de bust</a> en réponse aux inflexions, avérées ou anticipées, qu’apportait la Fed à la politique monétaire américaine.</p>
<p>Dans ces conditions, face à l’agenda de la normalisation monétaire et de la remontée des taux directeurs aux États-Unis, puis, sans doute, dans un second temps, en Europe, on doit légitimement se demander si cela pourra s’opérer sans heurts pour les économies émergentes, ou bien si cela provoquera de nouvelles tensions.</p>
<p>La déglobalisation bancaire, et donc la réduction récente de la part des financements bancaires internationaux, pourrait bien atténuer les effets déséquilibrants du retour à la normale des politiques monétaires aux États-Unis ou en Europe, et donc les conséquences systémiques d’une hausse des taux courts.</p>
<p>Mais dans un contexte de titrisation de la globalisation financière qui a alimenté des bulles sur les prix d’actifs plutôt qu’un boom du crédit, rien ne prouve que la remontée des taux longs, surtout si le déficit budgétaire américain se dégrade avec les nouvelles <a href="http://bit.ly/2eX2myr">orientations de l’Administration Trump</a>, ne produira pas à nouveau des effets systémiques vers les émergents, non pas sous la forme de tensions bancaires, mais avec un krach obligataire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/74400/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>André Cartapanis ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Tassement du commerce international, dérochage des créances transfrontalières : est-on entré dans une ère de démondialisation ?André Cartapanis, Professeur d'Économie à Sciences Po Aix, Doyen honoraire de la Faculté des sciences économiques, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/578912016-04-20T04:41:04Z2016-04-20T04:41:04ZPays « submergents » ? L’endettement périlleux des pays émergents<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/118991/original/image-20160416-11188-8xvaik.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'ère des pays émergents pourrait se conclure avant même d'avoir véritablement commencé.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://agenciabrasil.ebc.com.br/geral/foto/2015-03/manifestacao-em-sao-paulo">Agência Brasil</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Au cours des trois dernières décennies, l’intérêt mondial pour l’économie des « pays émergents » a grimpé en flèche. Lors de la crise financière de 2008, les experts ont estimé à maintes reprises que les marchés émergents seraient le prochain moteur de la croissance mondiale.</p>
<p>De façon générale, les pays émergents se <a href="https://www.credit-suisse.com/pwp/am/downloads/marketing/credit_suisse_lux_emerging_market_corporate_bond_fund_conference_call_may_2014.pdf">sont conformés</a> à cet espoir des investisseurs ; mais dans leur imitation économique des modèles des pays développés, ils ont aussi adopté un aspect très négatif : l’<a href="https://www.imf.org/external/pubs/ft/gfsr/2015/02/pdf/c3_v2.pdf">endettement</a> sévère de leurs grandes entreprises. Les sociétés géantes de ces pays ont émis une <a href="http://www.bloomberg.com/news/articles/2015-06-08/these-charts-show-the-astounding-growth-in-emerging-market-corporate-bonds">quantité énorme</a> d’obligations.</p>
<p>Les marchés émergents sont maintenant plus criblés de dettes que jamais, mais plus particulièrement, c’est la dette assumée par leurs plus grandes entreprises qui a gonflé à des niveaux imprévus.</p>
<p>Cette dérive pèse lourd dans la finance mondiale : en 2014 les obligations des entreprises des marchés émergents ont représenté plus de 1,6 milliard de dollars.</p>
<p>En 2016, la <a href="http://theconversation.com/ex-machina-faut-il-accuser-les-ordinateurs-pour-la-nervosite-du-marche-55167">volatilité</a> des bourses mondiales a affolé les investisseurs partout dans le monde, mais dans les pays émergents les bourses ont connu un déclin encore plus effréné que dans la dernière <a href="http://www.zerohedge.com/news/2016-01-20/emerging-markets-it-now-worse-asian-financial-crisis">crise financière asiatique</a> de 1997, ce qui a suscité de vives inquiétudes chez les investisseurs.</p>
<p>La proportion de la dette des marchés émergents engagée par des sociétés plutôt que par des gouvernements souverains a augmenté <a href="https://www.credit-suisse.com/pwp/am/downloads/marketing/credit_suisse_lux_emerging_market_corporate_bond_fund_conference_call_may_2014.pdf">à un rythme étonnant</a> de plus de 25 % par an. Par comparaison, l’ensemble des obligations souveraines (gouvernementales) des pays émergents n’a augmenté que de 10 %. En conséquence, bien que la composante de dette des entreprises n’était que de 15 % du total en 1998, en 2014 elle avait gonflé à plus de 70 % de la dette totale des pays émergents.</p>
<p>Plusieurs facteurs ont propulsé cet endettement de façon spectaculaire. Premièrement, la politique monétaire des pays développés a été très lâche, avec des taux d’intérêt extrêmement bas, ce qui forçait les banques centrales des pays émergents à réagir avec une politique monétaire aussi lâche, afin de minimiser la tendance d’appréciation de leurs monnaies. Deuxièmement, la politique monétaire accommodante dans les pays développés a conduit les investisseurs à placer de l’argent sur les marchés émergents dans la recherche de <a href="https://www.imf.org/external/pubs/ft/wp/2012/wp12198.pdf">rendements élevés</a>.</p>
<h2>Pays « submergents » ?</h2>
<p>La situation actuelle provoque <a href="http://i-mba.dmst.aueb.gr/html/det/HBS_Winning_in_the_Emerging_Markets__5954.pdf">des craintes importantes</a> chez les investisseurs : en adoptant les pratiques négatives en parallèle avec les positives – c’est-à-dire l’accroissement de la dette en parallèle avec les meilleures pratiques du commerce mondial – les nouvelles entreprises du marché sont <a href="http://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=2730622">extrêmement vulnérables</a> aux fuites de capitaux. Cette situation est aggravée par la Réserve fédérale lorsqu’elle augmente les <a href="https://theconversation.com/why-rising-interest-rates-are-bad-news-for-emerging-markets-51431">taux d’intérêt</a> américains.</p>
<p>Les firmes des marchés émergents ne peuvent pas courir les mêmes risques de bilan que celles des marchés développés. Elles doivent donc commencer à exercer une plus grande prudence vis-à-vis de leurs bilans.</p>
<p>Les principales mesures à mettre en œuvre pour limiter les risques sont d’une part la <a href="http://www.imf.org/external/pubs/ft/survey/so/2015/POL092915B.htm">surveillance</a> des entreprises vulnérables et d’importance systémique, d’autre part l’amélioration de la transparence des données sur les finances du secteur des entreprises en se tournant vers les <a href="http://www.dnb.nl/binaries/267%2520-%2520Macroprudential_tcm46-243120.pdf">politiques macro- et micro-prudentielles</a> et enfin la réforme des régimes d’insolvabilité.</p>
<p>Les économistes un peu plus pessimistes disent que les crises des bourses de cette année peuvent engendrer la <a href="http://www.cnbc.com/2015/10/12/is-em-turmoil-the-third-wave-of-the-financial-crisis-goldman-thinks-so.html">« troisième vague »</a> de la crise économique de 2008 (suivant les vagues américains et européens) et que l’ère des pays émergents pourrait se conclure avant même d’avoir <a href="https://theconversation.com/does-the-global-stock-market-sell-off-signal-the-bric-age-is-already-over-46550">véritablement commencé</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/57891/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Usman W. Chohan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les pays émergents, sur lesquels reposaient les espoirs de la croissance mondiale, n’ont jamais été aussi endettés, et surtout via leurs entreprises. Pourraient-il provoquer une crise ?Usman W. Chohan, Doctoral Candidate, Policy Reform and Economics, UNSW SydneyLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.