tag:theconversation.com,2011:/us/topics/productivite-37011/articlesproductivité – The Conversation2024-02-06T14:39:21Ztag:theconversation.com,2011:article/2227802024-02-06T14:39:21Z2024-02-06T14:39:21ZLes producteurs, principaux perdants de la répartition des gains de productivité de l’agriculture depuis 1959<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/573407/original/file-20240205-15-nmkpfw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C26%2C1985%2C1353&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Manifestations d’agriculteurs à Agen (Lot-et-Garonne), le mercredi 24&nbsp;janvier.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Agriculteurs_bloquant_l%27autoroute_%C3%A0_Agen,_24_janvier_2024_%282%29.jpg">Wikimedia commons/Raymond Trencavel</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La crise actuelle du <a href="https://theconversation.com/topics/agriculture-20572">secteur agricole</a> et l’inflation récente qui pèse sur le pouvoir d’achat des ménages, en particulier pour les produits alimentaires, doivent être replacées dans une perspective historique de long terme pour mieux comprendre une réalité plus complexe : la manière dont les gains de <a href="https://theconversation.com/topics/productivite-37011">productivité</a> dans l’agriculture sont répartis entre les diverses parties prenantes.</p>
<p>Des gains annuels de productivité globale apparaissent lorsque l’ensemble des productions augmente plus rapidement que l’ensemble des volumes des coûts. Ils représentent une création de valeur supplémentaire. Par le jeu des mouvements de prix, celle-ci se distribue entre les producteurs, les fournisseurs, l’État, les propriétaires fonciers et les clients qui achètent les produits agricoles (industrie agroalimentaire, grande distribution, consommateur final).</p>
<p>Notre récente <a href="https://www.sfer.asso.fr/source/jrss2023/articles/C13_59_Boussemart_Kahindo_Parvulescu_L%E2%80%99impact%20de%20l%E2%80%99inflation%20dans%20la%20distribution%20des%20gains%20de%20productivit%C3%A9%20de%20l%E2%80%99agriculture%20fran%C3%A7aise.pdf">étude</a> reprend les <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/6675413?sommaire=6675425&q=comptes+de+l+agriculture+en+2022">données</a> de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) sur l’agriculture française de 1959 à 2022 pour révéler des tendances de fond très significatives dans la distribution de ces gains, qui restent globalement défavorables aux agriculteurs.</p>
<h2>Une valeur créée inégalement répartie</h2>
<p>Nous constatons une croissance moyenne annuelle de 1,26 % des gains de productivité dans l’agriculture française. Cette tendance a connu une accélération notable entre 1959 et 2009 (1,45 %), avant de ralentir sensiblement (0,22 %).</p>
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<p>L’évolution a suivi plusieurs étapes distinctes : d’abord une augmentation plus rapide de la production par rapport aux coûts (1959-1979), ensuite un développement continu de la production associé à un décrochage des coûts, et enfin, depuis 2004, une stabilisation de la production.</p>
<p><iframe id="leNQS" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/leNQS/3/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Au cours des soixante dernières années, ces gains de productivité ont participé pour 70 % à la création de valeur du secteur auxquels il faut ajouter les apports des partenaires ayant subi des évolutions de prix défavorables comme les fournisseurs de consommations intermédiaires (15 %), l’État par le jeu des taxes et des subventions (11 %) et les propriétaires fonciers (4 %).</p>
<p><iframe id="ZSInX" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/ZSInX/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Or, la valeur créée n’est pas uniformément répartie entre les parties prenantes. Ainsi, les clients se trouvent en tête des bénéficiaires, captant 51 % de la valeur créée, suivis par les agriculteurs (39 %). Les salariés et les fournisseurs d’équipement récoltent une part moindre, respectivement 8 % et 2 %.</p>
<p><iframe id="mGN3B" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/mGN3B/4/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Le partage de la valeur créée dans le secteur agricole français est fortement influencé par une baisse soutenue des prix réels à la production. De 1959 à 2009, cette baisse a atteint un rythme annuel moyen impressionnant de -3,3 %. Pour mettre cela en perspective, cela signifie que les prix agricoles ont été divisés par deux tous les 20 ans !</p>
<p>Cependant, cette diminution n’a été que partiellement répercutée sur les consommateurs. Durant la même période, les prix des produits agricoles et alimentaires vendus aux consommateurs finaux n’ont baissé qu’à un rythme annuel moyen de -0,4 %.</p>
<h2>Dynamiques spécifiques</h2>
<p>Depuis 2009, une inversion de cette tendance a été observée pour les prix à la production agricole, avec une augmentation moyenne de 1,1 % par an. Cette tendance s’est même accélérée au cours des deux dernières années, 2021 et 2022, avec une hausse remarquable de 11 %. Cette évolution a permis aux agriculteurs de retrouver des niveaux de prix similaires à ceux du début des années 1990 mais loin encore du niveau affiché au début de la période d'étude.</p>
<p><iframe id="Rphls" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/Rphls/5/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Bien sûr, des dynamiques spécifiques existent entre les différentes branches de production agricole, telles que les céréales, les élevages laitiers, les producteurs de viande, la viticulture, les fruits et légumes. Toutefois, en considérant l’agriculture française dans son ensemble, il apparaît donc un déséquilibre notable : malgré des avancées significatives en termes de productivité, les exploitants agricoles ne profitent pas pleinement des avantages de leur labeur.</p>
<h2>Fluctuations conjoncturelles aiguës</h2>
<p>Dans ce contexte, il est essentiel de comprendre l’évolution du revenu réel des agriculteurs français par rapport à celui de l’ensemble des salariés du pays. À long terme, les tendances sont remarquablement similaires, avec une croissance annuelle moyenne de 1,55 % pour les agriculteurs travaillant dans des exploitations familiales, comparée à 1,54 % pour l’ensemble des salariés français.</p>
<p>Néanmoins, les agriculteurs sont soumis à des fluctuations conjoncturelles aiguës dues à divers facteurs tels que les conditions climatiques et les instabilités des marchés. Ces variations entraînent une évolution très irrégulière de leur revenu. En conséquence, sur des périodes de court à moyen terme, les agriculteurs font face à une forte incertitude et à des difficultés significatives en termes de pouvoir d’achat.</p>
<p><iframe id="LQ22h" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/LQ22h/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>La comparaison du revenu réel des exploitants agricoles familiaux avec celui de l’ensemble des salariés français ne reflète pas convenablement les différences dans les dynamiques de productivité de travail de ces deux groupes. Depuis 1960, la productivité du travail dans le secteur agricole a connu une augmentation exponentielle impressionnante de 4,15 % par an, surpassant nettement la croissance de 1,8 % enregistrée pour l’économie française dans son ensemble.</p>
<h2>La responsabilité des consommateurs</h2>
<p>Ces taux de croissance impliquent que la valeur ajoutée par actif agricole a plus que doublé en moins de 18 ans, tandis que pour la moyenne nationale, un tel doublement de la productivité du travail prend environ 38 ans. Cette distinction souligne la progression rapide de l’efficacité dans le secteur agricole par rapport à l’ensemble de l’économie.</p>
<p><iframe id="28K98" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/28K98/4/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Il est donc impératif de repenser la structure du secteur pour garantir une distribution plus juste des gains de productivité, particulièrement entre les exploitants agricoles et leurs clients principaux, à savoir l’industrie agroalimentaire et la grande distribution qui n’ont pas significativement répercuté ces avantages par des baisses de prix aux consommateurs.</p>
<p>Par ailleurs, il est important de souligner la responsabilité des consommateurs qui doivent être prêts à payer un prix juste pour des produits alimentaires de qualité et respectueux de l’environnement. Ce constat appelle à une transformation significative des dynamiques de négociation au sein de la filière agroalimentaire, pour veiller à un avenir plus juste et soutenable pour les agriculteurs, qui sont au cœur de notre système alimentaire.</p>
<p>Une telle réforme est non seulement vitale pour les agriculteurs, mais également bénéfique pour l’ensemble de la chaîne de valeur alimentaire, en assurant une plus grande équité et transparence.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222780/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Philippe Boussemart ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La perspective historique montre que les exploitants agricoles n’ont pas profité pleinement des avantages de leur labeur.Jean-Philippe Boussemart, Professeur émérite à l’Université de Lille, Membre du LEM (Lille Économie Mangement, UMR CNRS 9221), Membre correspondant de l’Académie d’Agriculture de France, professeur d’économie, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2171232023-11-08T20:43:31Z2023-11-08T20:43:31ZUn effondrement de la productivité des salariés français en trompe-l’œil<p>Aujourd’hui, le secteur privé produit 2 % de plus qu’en 2019. Pourtant, pour produire ces 2 % supplémentaires, il a besoin de 6,5 % de salariés en plus.</p>
<p>Avant la crise sanitaire liée au coronavirus, le salarié était chaque année <a href="https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/revue/22-152.pdf">plus productif de 0,8 %</a> : à ce rythme, les salariés de 2019 produiraient près de 3 % de plus aujourd’hui. Autrement dit, puisque la production a été moindre, si la hausse de la <a href="https://theconversation.com/topics/productivite-37011">productivité</a> du travail avait suivi son rythme, il aurait fallu détruire autour de 180 000 <a href="https://theconversation.com/topics/emploi-20395">emplois</a> ; or, 1,13 million ont été créés.</p>
<p>Il y aurait ainsi 1,3 million d’emplois dont l’existence interroge : les travailleurs et travailleuses français seraient-ils donc devenus moins productifs ?</p>
<p><iframe id="HCeJp" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/HCeJp/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>On pourrait évoquer des facteurs comme la perte de sens ou l’émergence du télétravail. Avant d’émettre ces hypothèses néanmoins, d’autres pistes doivent être explorées.</p>
<h2>Non, le salarié n’est pas devenu beaucoup moins productif</h2>
<p>La première consiste à vérifier si la perte de productivité ne serait pas qu’apparente dans la mesure où le salarié, en moyenne, travaillerait moins longtemps. Le taux d’absence au travail, supérieur aujourd’hui à ce qu’il était avant crise (6,5 % contre 3,5 %), constitue un élément d’explication. En effet, même en arrêt de travail, un salarié reste comptabilisé dans l’emploi. Celui-ci ayant besoin d’être remplacé, il y aura mécaniquement plus de personnes comptabilisées pour produire autant. Au niveau macroéconomique, la productivité apparente diminue alors mathématiquement, mais cela ne revient pas à dire que l’individu en place est lui-même moins efficace à la tâche.</p>
<p>Un autre élément à prendre en considération est la forte croissance de l’<a href="https://theconversation.com/topics/apprentissage-21392">apprentissage</a>. De 350 000 avant la crise sanitaire, le nombre d’apprentis s’élève aujourd’hui à 900 000. Cela compte pour une bonne part des 1,13 million d’emplois créés. </p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/enseignement-superieur-lalternance-est-elle-en-train-de-simposer-comme-le-mode-de-formation-dominant-217143">Enseignement supérieur : l’alternance est-elle en train de s’imposer comme le mode de formation dominant ?</a>
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<p>Or, un salarié apprenti reste moins productif qu’un salarié non-apprenti. À nouveau, ce n’est peut-être pas le salarié en place qui est devenu moins productif mais la moyenne qui est tirée vers le bas en raison de l’arrivée de travailleurs qui ont encore besoin d’apprendre et qui ont généralement une durée du travail moins longue.</p>
<p>Il faut également garder en tête que le coût réel du travail a diminué depuis 2019 : le niveau des rémunérations s’est élevé moins rapidement que l’inflation. Si le travail est moins coûteux pour les entreprises, cela peut expliquer qu’elles aient recruté davantage.</p>
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<p>Enfin, la période récente a été marquée par les nombreuses aides apportées par l’État aux entreprises, avec notamment les prêts garantis par l’État. Elles ont peut-être été telles qu’ont été sauvées des entreprises qui auraient dû faire faillite même sans la crise sanitaire, et avec elles les emplois qu’elles abritent, c’est-à-dire les entreprises et les emplois les moins productifs. Des aides ont pu aussi être versées à des entreprises qui n’avaient pas particulièrement besoin de trésorerie et qui ont utilisé ce surplus pour embaucher.</p>
<p>D’après nos <a href="https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/revue/14-180OFCE.pdf">estimations</a>, ces quatre facteurs expliqueraient les deux tiers des créations d’emploi. Deux tiers de la baisse de productivité mesurée n’ont pas vraiment eu lieu donc.</p>
<h2>Quelles conséquences sur les salaires ?</h2>
<p>Quid du tiers restant ? Une analyse par secteur montre que ces quatre facteurs expliquent la totalité des créations d’emplois observées dans les services. En revanche, ils se montrent assez limités pour rendre compte des dynamiques dans les secteurs de l’industrie et de la construction. Le tiers inexpliqué réside ainsi dans ces secteurs.</p>
<p><iframe id="9qt70" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/9qt70/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>On peut ici formuler l’hypothèse que ce sont des phénomènes de rétention de main-d’œuvre qui s’exercent. L’emploi industriel est un emploi plutôt qualifié, et les qualifications requises deviennent des denrées rares. Aussi les entreprises du secteur sont-elles réticentes à licencier, même lorsqu’elles rencontrent des difficultés comme cela a été le cas ces dernières années avec les chocs consécutifs qu’ont été la pandémie et la crise énergétique liée à l’invasion de l’Ukraine : ce serait risquer de ne pas réussir à recruter au moment où l’activité repart à la hausse. Un retour de croissance dans l’industrie se ferait alors sans création d’emplois mais en utilisant à son plein potentiel une main-d’œuvre aujourd’hui comme un peu mise en veille.</p>
<p>Dire que tout ne s’explique pas par des baisses de productivité des salariés n’est pas chose anodine. Si les salariés étaient véritablement moins productifs, il faudrait que les salaires réels baissent d’autant pour que le partage de la valeur ajoutée entre travail et capital reste stable. Et donc que les salaires nominaux (ceux affichés sur la feuille de paie), augmentent bien moins vite que l’inflation. Autrement dit, on pourrait justifier des salaires qui augmentent moins vite que l’inflation par une efficacité au travail individuelle plus faible ; or, les pertes apparentes de productivité semblent majoritairement liées à d’autres éléments.</p>
<h2>Un rattrapage de la productivité attendu</h2>
<p>Ces quatre effets que nous mentionnons ne devraient en toute logique pas durer et la productivité va ainsi repartir à la hausse.</p>
<p>Les prêts garantis par l’État sont petit à petit en train d’être remboursés alors que l’échéance avait plusieurs fois été repoussée jusqu’à septembre 2022. Aujourd’hui, seulement 27 % des 143 milliards empruntés ont été remboursés. Les défaillances, les pertes d’emplois et par la même la productivité moyenne augmentent parallèlement aux remboursements.</p>
<p>L’effet lié à l’apprentissage lui aussi n’est vraisemblablement que transitoire. L’objectif gouvernemental est d’atteindre le million d’apprentis mais il ne semble pas tenable dans la mesure où une génération n’est composée que de 800 000 individus. Aujourd’hui, la hausse du nombre de contrats de ce type concerne plusieurs générations, mais à terme, il ne pourra logiquement pas dépasser le nombre d’individus d’une seule. Pour partie, de surcroît, la dynamique actuelle est liée à une prime exceptionnelle versée aux employeurs qui, comme son nom l’indique, n’est pas pérenne.</p>
<p>Il est plus délicat d’inférer ce qu’il adviendra de la durée du travail. Néanmoins, les dernières données montrent qu’elle se rapproche de son niveau d’avant crise. Les salaires, enfin, commencent aujourd’hui à augmenter légèrement plus vite que les prix.</p>
<h2>Hausse de la productivité, hausse du chômage ?</h2>
<p>Si la productivité est ainsi amenée à rattraper le cours qu’elle avait avant crise, alors sans doute que le <a href="https://theconversation.com/topics/chomage-20137">chômage</a> lui aussi devrait repartir à la hausse. C’est en tout cas l’<a href="https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/pbrief/2023/OFCEpbrief121.pdf#page=16">estimation</a> que fait l’Observatoire français de la conjoncture économique (OFCE). Mesuré à 7,2 % à la fin du deuxième trimestre 2023, le taux de chômage est estimé à 7,4 % pour la fin de l’année et 7,9 % pour la fin 2024.</p>
<p>Deux différences majeures existent ici avec les projections du gouvernement. Les perspectives de croissance en 2024 sont estimées à 1,4 % par ce dernier quand nous les envisageons plutôt à 0,8 %. Surtout, nous estimons, contrairement à Bercy, qu’une partie de la productivité perdue va être rattrapée car les pertes ne sont pas structurelles. Peu de croissance avec des gains de productivité conduit mathématiquement à des destructions d’emplois.</p>
<p><iframe id="wCAq9" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/wCAq9/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Pour anticiper le taux de chômage, il faut de plus formuler des hypothèses sur la population active. Nous avons, dans nos calculs, utilisé les projections de l’Insee, critiquées par la direction générale du Trésor (une croissance moindre de la population active est envisagée par cette dernière). Elles intègrent notamment les premiers effets de la réforme des retraites. Les <a href="https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/sites/default/files/2023-08/RETRAITES23MAJ2928.pdf">modèles de simulation</a> suggèrent que 80 % des actifs supplémentaires seront en emploi et 20 % au chômage. Nous expliquons ici 0,1 point de taux de chômage en plus. La hausse anticipée du chômage est ainsi majoritairement liée aux destructions d’emplois et aux rattrapages en matière de productivité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/217123/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Éric Heyer ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La baisse observée de la productivité du travail s’explique par d’autres facteurs qu’une efficacité moindre des salariés. Ces causes s’estompant, des destructions d’emplois sont à anticiper.Éric Heyer, Directeur à l'OFCE, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2072442023-06-13T17:58:25Z2023-06-13T17:58:25ZInde : l’humiliation, une technique de management malheureusement efficace<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/530578/original/file-20230607-28-u3x9em.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=28%2C0%2C1169%2C761&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En entreprise, l’humiliation n’a officiellement pas sa place dans une organisation bien gérée. Or, ce principe ne s’applique malheureusement pas dans tous les contextes…
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:2828320-intimidation-ou-humiliation-au-travail-jeune-femme-contrarieuse-victime-de-harcelement-doigts-pointant-vers-une-femme-illustrationle-dans-un-style-plat-vectoriel.jpg">Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le mot « humiliation » vient du latin <em>humus</em>, la terre. Métaphoriquement, humilier quelqu’un consiste à le faire tomber à terre, puis à lui frotter le visage dans la boue avant de l’y abandonner, impuissant, blessé, <a href="https://www.humiliationstudies.org/documents/evelin/HealingCyclesOfHumiliation.pdf">honteux et soumis à la risée de tous</a>. Cette métaphore étymologique est instructive car elle suggère un mécanisme psychosociologique basique, puissant et malheureusement courant.</p>
<p>En théorisant un peu, on pourrait dire que l’humiliation consiste à dégrader l’identité d’une personne au point que celle-ci <a href="https://www.researchgate.net/publication/366643457_Workplace_Humiliation_and_the_Organization_of_Domestic_Work">ne peut plus occuper une position à partir de laquelle elle pourrait faire valoir ses droits</a>. Poussée à son terme, l’humiliation peut même créer une <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/pouvoirs-de-l-horreur-essai-sur-l-abjection-julia-kristeva/9782020055390">« identité abjecte</a> » lorsque la personne humiliée finit par se voir elle-même comme un être vil et dégoutant qui mérite pleinement les traitements humiliants auxquels on la soumet.</p>
<p>Selon le discours officiel, l’humiliation n’a pas sa place dans une entreprise bien gérée. En effet, nous pensons savoir depuis les <a href="https://crf.wallonie.be/compasinfo/breve.phpid=38&rub-id=54.html">expériences de Hawthorne</a> menées dans la première moitié du XX<sup>e</sup> siècle que la productivité des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/employes-91481">employés</a> augmente lorsqu’on s’intéresse à eux en tant que personnes. Pourtant, ce principe ne s’applique malheureusement pas dans tous les contextes.</p>
<h2>Moins de 60 euros par mois</h2>
<p>Pour mieux comprendre le lien entre humiliation au travail et productivité, j’ai mené un projet de recherche collectif avec mes collègues Rohit Varman de l’Université de Birmingham et Per Skålén de la Karlstadt Universitet. Après de longs entretiens sociologiques menés auprès d’employées domestiques et de leurs employeurs dans la ville de Calcutta en <a href="https://theconversation.com/fr/topics/inde-23095">Inde</a>, nous avons documenté des cas d’humiliation particulièrement visibles et cherché à établir des liens entre humiliation et <a href="https://theconversation.com/fr/topics/productivite-37011">productivité</a>.</p>
<p>Les résultats de notre <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/01708406231157034">étude</a>, publiés récemment dans la revue de référence <em>Organization Studies</em>, sont accablants. Nous montrons comment les employées (en grande majorité des femmes de classes sociales inférieures) sont systématiquement soumises à des humiliations symboliques mais aussi physiques et sexuelles. Elles n’ont pas le droit d’utiliser les mêmes ustensiles que leurs maîtres et doivent s’asseoir sur le sol. Elles se font souvent frapper et insulter lorsque le travail n’est pas assez rapide. En cas de blessures graves, les médecins concluent à un accident plutôt qu’à une agression avec coups et blessures.</p>
<p>De nombreux témoignages, tout aussi troublants, font état d’attouchements et de viols – notamment sur les domestiques les plus jeunes (à partir de 11 ans). L’humiliation atteint souvent son comble lorsque la travailleuse violée cherche du soutien auprès de la famille de son employeur. Dans ce cas, sa parole est dénigrée et les membres de la famille veillent à ce que l’employée délatrice perde le peu de crédibilité qu’elle avait.</p>
<p>Pourtant, au bilan, les maisons de la classe moyenne sont nettoyées et les enfants sont gardés, 12 heures par jour et sept jours par semaine, pour des salaires largement inférieurs au salaire minimum du pays qui est pourtant inférieur à 60 euros par mois.</p>
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<p>Au-delà des spécificités liées au contexte indien, notre travail de recherche nous enseigne que l’humiliation des travailleurs peut malheureusement constituer une stratégie très rentable, dès lors que l’employeur bénéficie d’une main-d’œuvre abondante, précaire et peu organisée. En effet, même si la qualité du travail n’est pas optimale, un employé humilié devient docile, silencieux et craintif. Il travaille de longues heures et se contente du salaire qu’on veut bien lui verser.</p>
<h2>Le discours officiel a ses limites</h2>
<p>C’est donc sur cette base qu’il faut réfléchir aux meilleures manières de lutter contre l’humiliation au travail. S’il existe des configurations où l’humiliation est profitable sur le long terme comme en Inde, alors la solution ne viendra peut-être pas uniquement de l’entreprise mais plutôt du législateur et de la société civile qui devront faire en sorte que l’humiliation ne soit jamais une stratégie rentable. Par exemple en favorisant la création de groupes de discussion informels et de syndicats officiels, ou encore en sensibilisant les inspecteurs et médecins du travail sur la question, ou même en créant des conditions fiscales avantageuses lorsque des politiques en faveur des employés sont mises en place.</p>
<p>Certes, on pourrait se dire que le cas des employés de maison en Inde constitue un cas extrême. Cependant, plus proches de nous, les limites du discours officiel sur la non-rentabilité de l’humiliation comme technique de management éclatent dès que l’on prend le temps de parler avec des travailleurs de leurs conditions de travail. Peut-être par honte, les personnes ne se confient pas trop pendant la première demi-heure, puis, <a href="https://www.cairn.info/revue-societes-contemporaines-2008-2-page-25.htm">à un moment, arrivent les histoires troublantes</a>… Un jeune jardinier qui doit accourir aux sifflements du patron, un ouvrier du bâtiment non documenté qui se fait appeler « Mamadou » par les collègues rigolards, une professeure des écoles sommée par le principal de corriger une note qui aurait déplu aux parents…</p>
<p>L’humiliation peut donc apparaître partout, même dans des domaines où sa présence n’est pas soupçonnée. Raison de plus de réagir et d’enclencher les moyens de lutter contre dès les premières manifestations du phénomène.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207244/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ismael Al-Amoudi est Professeur à Grenoble Ecole de Management ; Senior Research Fellow à Cardiff University Business School ; Associate Editor de la revue Organization; Directeur du Centre d'Ontologie Sociale et Academic Advisory Board Member de l'Independent Social Research Foundation.
Les opinions exprimées dans cet article n'engagent aucune des organisations sus-mentionnées.</span></em></p>Une étude menée auprès d’employés de maison à Calcutta montre que les vexations infligées par les employeurs contribuent à l’efficacité de leur travail malgré un niveau de salaire très bas.Ismael Al-Amoudi, Professor of organisational theory & Director of the Centre for Social Ontology, Digital Chair., Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1988032023-01-31T19:32:15Z2023-01-31T19:32:15ZLe télétravail a renforcé le rôle des responsables du numérique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/507031/original/file-20230130-18-bi90es.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=28%2C7%2C1155%2C749&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les DSI exercent un pouvoir de validation des outils utilisables ou non par les collaborateurs.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pxhere.com/fr/photo/1585323">Mohamed Hassan/Pxere</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Les grèves actuelles face à la réforme des retraites vont-elles <a href="https://www.latribune.fr/economie/france/reforme-des-retraites-le-teletravail-va-t-il-attenuer-les-effets-de-la-greve-948243.html">ancrer encore plus le télétravail</a> dans nos pratiques quotidiennes ? En effet, le télétravail et plus généralement le travail à distance permettent à une grande partie des travailleurs « contourner » les perturbations liées à la grève. Ceci n’aurait peut-être pas été possible sans le tournant de la crise sanitaire qui a profondément modifié notre <a href="https://theconversation.com/fr/topics/travail-20134">rapport au travail</a>.</p>
<p>Comme à la sortie de toute crise, certains s’en sortent mieux que d’autres. Ainsi, alors que les managers sont au centre de la réflexion du rapport au travail et aux <a href="https://theconversation.com/teletravail-le-confinement-a-recentre-le-management-sur-lessentiel-139909">effets de la distance sur leurs pratiques</a>, les directeurs des systèmes d’information (DSI), qui dirigent les équipes de techniciens informatiques, semblent avoir acquis ces dernières années une place plus importante dans l’organisation. C’est le constat dressé à l’issue d’un <a href="https://cerege.iae.univ-poitiers.fr/soutenance-de-these-damien-de-carvalho-mercredi-7-decembre-2022-9h00/">travail doctoral</a> mené avant, pendant et après la crise du Covid auprès d’un panel de responsable des ressources humaines et des systèmes d’information.</p>
<p>Depuis le printemps 2020, l’essor du télétravail a renforcé la place des outils numériques et les réseaux dans les organisations. Peu à peu, les solutions numériques sont devenues la norme. Utiliser des outils collaboratifs comme Microsoft Teams ou les groupes WhatsApp ont pu devenir des obligations du quotidien.</p>
<h2>« Zoom ? Non, point barre »</h2>
<p>L’intensification de la présence des outils confère un pouvoir exacerbé aux DSI. Les outils du travail sont entrés au cœur des réflexions sur l’organisation du travail avec des plates-formes collaboratives de plus en plus complètes ou encore un renforcement de la cybersécurité. Par cette position centrale lors de la crise sanitaire les DSI vont alors en profiter pour réguler les pratiques des acteurs et ainsi asseoir leur nouvelle position. D’autant plus que, peu de règles restent explicites et encore moins écrites.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/entre-teletravail-et-presentiel-quel-management-post-crise-174170">Entre télétravail et présentiel, quel management post-crise ?</a>
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<p>Ce pouvoir renforcé des DSI se traduit notamment par la capacité de celui-ci à orienter non seulement le choix des outils mais aussi le comportement des différents acteurs de l’organisation, parfois avec autorité. Un DSI d’une entreprise internationale en témoigne :</p>
<blockquote>
<p>« Pour moi, Teams répond à 98 % des besoins, aucune raison d’utiliser autre chose. Quand quelqu’un me dit qu’il va organiser une réunion Zoom, [je lui réponds] non, point barre. Ce n’est pas une option. »</p>
</blockquote>
<p>En exerçant un pouvoir de validation des outils utilisables ou non par les collaborateurs, les DSI possèdent ainsi des ressources stratégiques qui pèsent dans les différentes situations de télétravail.</p>
<p>Les conséquences de cette place renforcée des outils numériques et des DSI sont multiples. Premièrement, en cas de flou sur le processus décisionnel peut apparaître <em>un shadow IT</em>, c’est-à-dire des pratiques inconnues ou non recensées par les DSI. Par exemple, l’utilisation de groupes WhatsApp parallèles aux messageries de l’entreprise.</p>
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<p>Deuxièmement, on voit émerger des injonctions comportementales avec des DSI qui ont le pouvoir de bloquer des applications ou des fonctionnalités et ainsi imposer de nouvelles manières de travailler ou de communiquer.</p>
<p>Troisièmement enfin, on a pu constater une déshumanisation et une désincarnation des espaces de communication en réaction à la standardisation des procédures de communication des échanges formels.</p>
<h2>Une heure avec un paper board</h2>
<p>Rien ne saurait alors a priori remplacer <a href="https://theconversation.com/cooperation-au-travail-la-machine-a-cafe-ne-fait-pas-tout-165915">l’espace machine à café</a> ou encore le fameux paper board en réunion. Même un DSI interrogé le souligne :</p>
<blockquote>
<p>« je fais une réunion avec deux personnes de mon équipe, je leur dis venez sur site, on a besoin de se poser, de prendre un paper board, d’écrire dessus et à la fin de l’heure j’ai envie d’avoir des réponses. Là où depuis 6 mois on tourne autour du pot. »</p>
</blockquote>
<p>Malgré leurs limites, les outils du travail à distance constituent globalement les formidables alliés d’un travail plus souple. Sur ce point aussi les DSI ont leur rôle à jouer : celui de la pédagogie. Par exemple, des formations internes aux différents outils peuvent favoriser un usage commun de ces derniers. Un DSI reconnaît l’existence de cette nouvelle exigence :</p>
<blockquote>
<p>« il faudrait déjà expliquer ce que peut apporter ce type de plate-forme, comment ça favorise la collaboration et la productivité. Quand on n’est pas en train de chercher la dernière version d’un document, on gagne du temps, on sait que l’on a forcément accès à la dernière version. »</p>
</blockquote>
<p>Gain de temps, de productivité, meilleure cohésion du collectif, le DSI se voit peu à peu conférer des tâches jusqu’alors réservées au responsable ou directeur des ressources humaines. Se dirigerait-on dès lors vers une place hybride des DSI au sein des organisations ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198803/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les décisions des directeurs des systèmes d'information prennent de plus en plus d’importance à mesure que les outils numériques se déploient dans les organisations.Jean-Christophe Vuattoux, Maître de Conférences en Sciences de Gestion, IAE de PoitiersDamien De Carvalho, Doctorant en sciences de gestion, IAE de PoitiersLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1674042021-09-08T19:35:33Z2021-09-08T19:35:33ZL’ancienneté professionnelle favorise-t-elle la productivité des entreprises ?<p>La compétitivité et la survie des entreprises sont actuellement mises à dure épreuve. L’évolution démographique, le dynamisme croissant de l’activité économique et le progrès technologique de plus en plus rapide devraient ainsi progressivement entraîner un <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php?title=Population_structure_and_ageing">vieillissement de la main-d’œuvre</a>, une obsolescence accélérée des compétences et une <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/sites/ef00d169-en/index.html?itemId=/content/component/ef00d169-en">rotation accrue des employés</a>.</p>
<p>En outre, les entreprises souhaitant plus de flexibilité sur le marché du travail font encore souvent face à des rigidités règlementaires qui peuvent freiner <a href="https://www.eurofound.europa.eu/publications/report/2015/labour-market/job-tenure-in-turbulent-times">leur dynamisme</a>. Parvenir à attirer de nouveaux talents, tout en retenant les meilleurs employés, semble donc de plus en plus essentiel à la réussite des entreprises.</p>
<h2>Niveau optimal</h2>
<p>L’ancienneté professionnelle reste souvent perçue comme un gage d’efficacité. Les travailleurs qui restent longtemps au sein de la même entreprise acquièrent un grand nombre de connaissances implicites et spécifiques à leur lieu de travail. L’ancienneté produit un sentiment de sécurité et de stabilité et tend à renforcer l’adéquation au milieu organisationnel, à ses valeurs, ses normes et ses procédures. Dès lors, l’ancienneté devrait également se traduire par une augmentation de l’engagement organisationnel, de l’implication et, en fin de compte, des performances des travailleurs.</p>
<p>Cependant, <a href="https://ftp.iza.org/dp14432.pdf">dans notre dernier article scientifique</a>, nous mettons en évidence que les gains d’efficacité liés à l’ancienneté ne persistent pas nécessairement dans le temps. Pour cela, nous avons analysé un riche ensemble de données concernant les entreprises du secteur privé belge et avons constaté qu’une fois qu’un niveau optimal d’ancienneté a été atteint, les années supplémentaires de service chez le même employeur deviennent progressivement moins bénéfiques pour la performance de l’entreprise.</p>
<p>Cela peut être dû au fait que les travailleurs rencontrent des obstacles liés à des connaissances qui deviennent insuffisantes (à la suite, par exemple, de l’introduction d’une nouvelle technologie, de l’atteinte du pic de la courbe d’apprentissage), au déclin des capacités cognitives et physiques, à l’augmentation du sentiment d’ennui, à la perte de motivation, ou à la diminution de l’engagement.</p>
<h2>Un effet variable selon les tâches et les métiers</h2>
<p>Notre étude met cependant en évidence que l’effet de l’ancienneté sur la productivité varie de façon significative en fonction des caractéristiques spécifiques de la main-d’œuvre et de l’entreprise. En particulier, nous avons constaté que les entreprises dont les tâches à réaliser sont plus routinières et les métiers sont moins complexes bénéficient généralement davantage de l’ancienneté accrue des employés. Des résultats similaires sont observés au sein des entreprises ayant des processus de production plus simples (par exemple, au sein des entreprises industrielles à faible intensité de connaissances).</p>
<p>En revanche, il s’avère que les aptitudes cognitives et manuelles jouent un rôle beaucoup plus important que l’ancienneté professionnelle en matière d’efficacité dans les entreprises se caractérisant par des environnements de production imprévisibles, changeant rapidement et complexes.</p>
<p>La première implication de notre étude est qu’une longue ancienneté professionnelle n’est pas forcément la panacée afin de maximiser la productivité des entreprises. En effet, nos résultats suggèrent que les stratégies de rétention du personnel devraient être conçues de manière à prendre en considération le type de tâche, le métier et le secteur de chaque travailleur.</p>
<p>Nous fournissons également des indications utiles pour les interlocuteurs sociaux et les décideurs politiques afin d’évaluer la pertinence actuelle des systèmes de rémunération basés sur l’ancienneté et, en particulier, leur capacité à refléter adéquatement le potentiel de performance des employés.</p>
<p>Ces indications sont importantes pour répondre aux préoccupations concernant les tendances actuelles du marché du travail, les besoins et les attentes des travailleurs, et les stratégies de réussite à long terme des entreprises. Pour définir des mesures incitatives appropriées, un vaste processus de concertation sociale, ainsi qu’une réforme du cadre juridique, seront probablement nécessaires.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/167404/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une étude menée en Belgique met en évidence un niveau optimal d’ancienneté au-delà duquel les liens entre longévité au sein d’une organisation et efficacité se desserrent.Nicola Gagliardi, PhD Candidate in Economics, Université Libre de Bruxelles (ULB)Elena Grinza, Assistant Professor, Politecnico di TorinoRycx François, Professor of Economics, Université Libre de Bruxelles (ULB)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1659152021-09-05T16:55:51Z2021-09-05T16:55:51ZCoopération au travail : la machine à café ne fait pas tout !<p>A-t-on réellement tiré toutes les leçons du télétravail « sanitaire » ? Malgré 18 mois d’expérimentation, les questions sur le travail à distance ne sont pas encore tranchées. Les représentations des employeurs, qui assimilaient plus le télétravail « à la télé qu’au travail », ont certes beaucoup changé. Mais de nombreuses idées reçues persistent. Parmi elles, celle d’une coopération qui serait <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/c-est-mon-boulot/teletravail-bon-pour-la-productivite-moins-pour-la-creativite-selon-plusieurs-etudes_4183043.html">plus performante sur site qu’à distance</a>, justifiant pour nombre d’employeurs le retour au bureau dans l’espoir de retrouver les pouvoirs magiques de la machine à café.</p>
<p>En juin 2020, un sondage de l’Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH) et du Boston Consulting Group (BCG) révélait ainsi que, en France, plus <a href="https://www.andrh.fr/actualites/1093/le-teletravail-post-Covid-vu-par-les-drh-resultats-enquete-andrh-bcg">d’un DRH sur deux</a> redoutait une moindre créativité dans l’entreprise. De même, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les « clusters » de type Silicon Valley, déclinés en France en pôles de compétitivité, « semblent clairement indiquer que partager le même espace physique est <a href="https://www.oecd.org/coronavirus/policy-responses/effets-positifs-potentiels-du-teletravail-sur-la-productivite-a-l-ere-post-Covid-19-quelles-politiques-publiques-peuvent-aider-a-leur-concretisation-a43c958f/">essentiel pour l’innovation</a> ».</p>
<p>Les recherches menées sur le travail à distance conduisent pourtant à des constats bien différents, et souvent contre-intuitifs. Nous les avons répertoriées dans l’ouvrage <a href="https://www.la-fabrique.fr/fr/publication/le-travail-a-distance-dessine-t-il-le-futur-du-travail-2/"><em>Le travail à distance dessine-t-il le futur du travail ?</em></a>, dont l’enjeu est précisément de tordre le cou à quelques préjugés qui entachent encore notre représentation du travail à distance.</p>
<h2>Co-présence et coopération, la confusion</h2>
<p>Une <a href="https://sloanreview.mit.edu/article/how-to-manage-virtual-teams/">étude</a> réalisée il y a plus de 10 ans auprès de 80 équipes de développement de logiciels réparties dans 28 laboratoires du monde entier a par exemple abouti à des résultats étonnants : les équipes situées dans un même bâtiment, mais à des étages différents, se révèlent moins performantes que les équipes dispersées dans une même ville, un même pays ou un même continent. Quant aux équipes localisées à un même étage, elles ne font guère mieux que celles dispersées dans un pays.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=410&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=410&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=410&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=515&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=515&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=515&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Performance des équipes de travail en fonction de leur localisation.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://sloanreview.mit.edu/article/how-to-manage-virtual-teams/">Siedbrat F., Hoegel M., Ernst H. ; « How to manage virutal team », MIT Sloan Management Review (2009).</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Selon les auteurs, cet étonnant constat trouve une explication simple : les équipes situées à un même étage ou dans un même bâtiment sous-estiment souvent les obstacles à la communication et à la collaboration, comme si la co-présence suffisait à assurer une harmonieuse coopération. Au contraire, les équipes dispersées sont beaucoup plus conscientes de ces obstacles et y remédient grâce à des processus structurés tant au niveau organisationnel (organisation et suivi des tâches, communication formelle) que socio-affectif (entraide et cohésion, communication informelle).</p>
<p>Bref, la coopération ne s’opère pas de manière magique par la simple présence physique, et les échanges informels à la machine à café ne suffiront pas à la garantir : d’autres mécanismes doivent être pensés pour la susciter et la maintenir dans la durée.</p>
<h2>La présence ne garantit pas le lien social</h2>
<p>La coopération à distance paraît donc tout à fait possible à deux conditions : structurer l’organisation du travail collectif et maintenir la cohésion du collectif de travail. Si la première renvoie aux compétences traditionnelles du manager, la seconde représente un défi que beaucoup semblent juger impossible à relever sans le concours de la machine à café, qui semble avoir volé la vedette au baby-foot.</p>
<p>Dans un <a href="https://www.la-fabrique.fr/fr/projet/le-travail-a-distance/">groupe de réflexion</a> mis en place par la Chaire Futurs de l’industrie et du travail de Mines ParisTech, un <a href="https://www.la-fabrique.fr/wp-content/uploads/2021/04/2021.03.15-Audition-4managers.pdf">manager de proximité</a> regrettait ainsi l’avant-crise :</p>
<blockquote>
<p>« Avant, les gens se racontaient leurs petites histoires en tête-à-tête près de la machine à café ».</p>
</blockquote>
<p>Pourtant, plusieurs <a href="https://www.cairn.info/revue-rimhe-2017-3-page-3.htm">recherches</a> indiquent que la co-présence physique ne garantit nullement la qualité et l’intensité du lien social, car le « manque de temps ou la focalisation sur la tâche de travail n’autorisent pas toujours l’échange d’informations informelles, personnelles ».</p>
<p>Inversement, la distance physique n’est pas antinomique avec le lien social, comme le souligne le témoignage de ce dirigeant d’une équipe de consultants, interrogé dans une <a href="https://www.cairn.info/revue-gestion-2009-2-page-10.htm">étude</a> menée en 2009 au Canada :</p>
<blockquote>
<p>« Je dirige des employés qui se trouvent à Paris et avec qui j’ai l’impression d’être beaucoup plus proche que d’autres qui se trouvent, tout comme moi, à Montréal. Il y a même des collègues avec qui je travaille qui se trouvent dans le même édifice que moi, que je vois régulièrement, de qui j’ai l’impression d’être plus éloigné que de mes employés qui sont à l’étranger. Le fait que nous soyons sur deux continents ne m’empêche pas d’avoir le sentiment qu’il y a très peu de distance entre nous. Parce que nous sommes proches, ça devient facile de communiquer, de travailler en équipe, d’échanger des informations, de nous entraider, etc. »</p>
</blockquote>
<p>En effet, être proche physiquement n’assure pas d’être automatiquement proche émotionnellement. Un voisin de palier exécrable en est souvent la preuve ! Et il en est de même au bureau, le télétravail permettant justement <a href="https://www.cairn.info/revue-gerer-et-comprendre-2021-2-page-38.htm">d’échapper aux situations conflictuelles</a> et <a href="https://journals.openedition.org/interventionseconomiques/706">d’atténuer les divergences</a> entre collègues.</p>
<h2>La distance, facteur de proximité</h2>
<p>La distance temporelle et géographique pourrait paradoxalement favoriser le développement <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/leadership-management/covid-visio-teletravail-distance-et-tutoiement-generalise-1292111">d’une forme de proximité</a>. Il semble donc tout à fait envisageable de creuser au travail une notion très fertile qui est la sociabilité numérique à distance. D’ailleurs, les fournisseurs de solutions informatiques ont communiqué des chiffres selon lesquels <a href="https://enterprise.verizon.com/resources/reports/recreating-work-as-a-blend-of-virtual-physical-experiences.pdf">52 % des personnes interrogées</a> avaient constaté une amélioration de la collaboration pendant le premier confinement dans le monde, ou encore que <a href="https://fr.insight.com/content/dam/insight-web/fr_FR/images/2020/10/655785_WW_21Q3_GLB_CONTSYND_MULTI_CTA_DW_FRW_ENGLISH_REG_20220918_UPDATED.pdf">72 % des salariés français interrogés</a> estimaient que leurs relations avec leurs collègues s’étaient améliorées.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=824&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=824&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=824&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1036&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1036&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1036&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le travail à distance dessine-t-il le futur du travail ?</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pressesdesmines.com/produit/le-travail-a-distance-dessine-t-il-le-futur-du-travail/">Presses des Mines.</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pourtant, au cours de ces 18 derniers mois, plutôt que des réviser des processus de travail parfois flous ou inefficients, les entreprises semblent s’être plutôt contentées de plaquer les routines propres au travail sur site dans le monde virtuel, en attendant que ça se termine. Ainsi en est-il des tunnels de visio censés reproduire les échanges face-à-face. Ces réunions virtuelles se sont révélées, sur le long terme, <a href="https://tmb.apaopen.org/pub/nonverbal-overload/release/1">éreintantes</a>, perturbant les tâches nécessitant une concentration individuelle, et donc, en bout de chaîne… la <a href="https://bfi.uchicago.edu/working-paper/2021-56/">productivité des équipes</a>.</p>
<p>Certes, les « synergies de la machine a café » restent précieuses pour la convivialité et la sérendipité, ces idées qui fusent dans la discussion, mais elles ne font pas tout. Actuellement, elles pourraient même se révéler un prétexte commode pour faire revenir les salariés au bureau et éviter ainsi aux entreprises de penser la révision des modes opératoires et des processus que l’adoption large du travail hybride suppose.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/165915/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Suzy Canivenc ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Plusieurs études montrent que le lien entre une collaboration efficace et le travail en présentiel, qui favorise les échanges informels, n’est pas aussi fort que les ressources humaines ne le pensent.Suzy Canivenc, Chercheure associée à la Chaire Futurs de l'Industrie et du Travai, Mines Paris - PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1642472021-07-18T16:47:12Z2021-07-18T16:47:12ZComment maintenir l’esprit d’équipe tout en travaillant à distance ?<p>Le gouvernement a décidé d’assouplir le recours au télétravail depuis le 9 juin 2021 et un <a href="https://www.service-public.fr/particuliers/actualites/A14410">nouveau protocole sanitaire</a> s’applique depuis le 1<sup>er</sup> juillet. Les entreprises doivent désormais créer les conditions d’un retour hybride en suivant deux principes. Il y a d’une part la progressivité (il ne faut pas débrancher les dispositifs brutalement) et d’autre part l’adaptabilité (faire du sur-mesure pour chaque situation).</p>
<p>Comment créer les <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02560409/document">conditions d’une coexistence vivable</a> sachant que l’équation « bien-être et productivité » en télétravail dépend de <a href="https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/le-teletravail-porte-lespoir-de-nouveaux-gains-de-productivite-1328935">l’adhésion des salariés</a> au projet qui leur est proposé ?</p>
<p>Pour sécuriser et accompagner les télétravailleurs, les managers se trouvent en première ligne. Fin 2020, ils étaient seulement <a href="https://newsroom.malakoffhumanis.com/actualites/barometre-annuel-teletravail-2021-de-malakoff-humanis-db57-63a59.html">50 % à être favorables au télétravail</a> et 40 % signalaient des difficultés majeures (+22 points depuis 2018).</p>
<p>Pourquoi cette défiance ? Le télé-management transforme les pratiques, bouleverse le rapport au temps et aux autres, tout en accélérant la transformation numérique. Dans ce contexte, l’enjeu reste de maintenir un sentiment de proximité au sein d’équipes dispersées.</p>
<p>Plusieurs enquêtes réalisées auprès de 38 entretiens de télé-managers et l’étude de 6 cas d’entreprises et administrations nous ont menés au constat suivant : adopter un <a href="https://www.cairn.info/revue-rimhe-2017-3-page-3.htm">management « capacitant »</a>, c’est-à-dire centré sur la capacité d’agir, permet à chacun d’y trouve son compte, en l’occurrence bien-être pour le salarié et amélioration de l’organisation du travail pour le dirigeant.</p>
<h2>Virage managérial</h2>
<p>Notre approche, empruntée aux <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01129397/">ergonomes</a>, s’enracine dans la pensée de l’économiste <a href="https://www.parisnanterre.fr/amartya-sen-950041.kjsp?RH=1562764138642">Indien Amartya Sen</a>, prix « Nobel » d’économie en 1998 notamment pour ses travaux autour du concept de « capabilité ». Celui-ci désigne le champ des possibles pour un individu et pour l’organisation qui en bénéficie. Élargir les « capabilités » suppose un environnement favorable, propice aux débats, à la co-construction de l’activité et au travail d’organisation.</p>
<p>Concrètement, dans l’entreprise, cela conduit à offrir la possibilité de participer à des groupes de travail, à des espaces de réflexion et de co-construction des pratiques, organisés à la fois en réel et en virtuel. L’environnement global de travail soutient alors le pouvoir d’agir de chacun, lui permettant d’exprimer ce qu’il est capable de faire.</p>
<p>Nous avons observé que le mode de management avait dans certains cas intégré cette dimension « capacitante » pour aborder le télétravail. Cela permet de mieux concilier bien-être des salariés et mutations du travail. Il s’agit d’un réel virage managérial, que nous avons observé à différents niveaux des organisations les plus novatrices.</p>
<h2>Co-construction des pratiques</h2>
<p>Au niveau politique, cette vision du management donne une capacité d’agir aux acteurs pour penser les transformations au service d’un projet collectif.</p>
<p>Dans le cas d’un bailleur social rennais par exemple, il s’agissait ainsi, déjà avant l’épidémie, d’aller vers plus de proximité, de bien-être, d’innovation et de développement durable. Comme nous l’a expliqué sa directrice des ressources humaines :</p>
<blockquote>
<p>« C’est quelque chose qui peut aussi être identifié pour la direction comme un facteur d’amélioration, différenciant, innovant, par rapport à ce qui peut se pratiquer de façon classique sur le télétravail ailleurs. »</p>
</blockquote>
<p>Le télétravail fait partie d’un vaste plan d’action portant sur l’aménagement de l’espace de travail, la digitalisation… Le tout en s’appuyant sur une responsabilisation des salariés :</p>
<blockquote>
<p>« Ce sont des adultes, nous leur faisons confiance. »</p>
</blockquote>
<p>Au niveau de la direction des ressources humaines (DRH), il s’agit ainsi de poser le travail comme un objet de co-construction des pratiques.</p>
<p>Autre exemple, pendant le premier confinement, une université a mis en place un groupe de travail réunissant différents membres du personnel, médecine du travail et membres de la DRH pour faire évoluer les procédures en place. Un questionnaire sur le télétravail et l’enseignement à distance a été adressé aux personnels ainsi qu’aux étudiants pour analyser la situation et les ressentis.</p>
<p>Les réponses ont montré la diversité des besoins, en fonction du niveau d’aisance avec le numérique, mais aussi des situations de travail et profils de répondants, appelant à mettre en place une réponse adaptée.</p>
<h2>Manque de soutien</h2>
<p>Une seconde <a href="https://static1.squarespace.com/static/56715a6c40667ae64c6875dc/t/606f673225e7942acedd85c1/1617913651305/LSM221_Avril+2021.pdf">enquête</a> que nous avons menée est venue confirmer le rôle central du manager. Le télé-management suppose une posture de facilitation, d’expérimentation, de maintien du lien à distance, et d’accompagnement des collaborateurs par une juste présence.</p>
<p>Un manager en témoigne :</p>
<blockquote>
<p>« L’agenda partagé et respectant la vie privée : ça aide ! On avait notamment bien vérifié avant qu’il n’y avait pas de problème pour les enfants, et que les salariés pouvaient faire leur travail normalement. »</p>
</blockquote>
<p>À présent, l’enjeu est d’élargir cette capacité d’agir en expérimentant et en co-construisant, par apprentissage continu, des pratiques cohérentes avec ce que les télétravailleurs font au quotidien.</p>
<p>Cependant, trop souvent, les télé-managers interrogés ont rapporté être empêchés, par manque de soutien, de marge de manœuvre, de formation, et des objectifs contradictoires. Un enquêté en témoigne :</p>
<blockquote>
<p>« C’était compliqué parce que ma hiérarchie me demandait de savoir exactement ce que faisaient mes équipes pour être sûr que le télétravail était vraiment du travail. On se situe entre la confiance qu’on met dans les gens et le besoin de savoir ce qu’ils font. C’est très compliqué à équilibrer. »</p>
</blockquote>
<p>Pourtant, le télétravail peut avoir un <a href="https://www.deboecksuperieur.com/ouvrage/9782807320789-management-humain">effet accélérateur</a> vers un management plus humain, au service de la reconnaissance des collectifs, du travail et des personnes.</p>
<p>Dans ce sens, le management « capacitant » suppose d’accompagner les différentes parties prenantes pour qu’elles osent élargir le champ des possibles. Il s’agit aussi de réinvestir le métier de manager : leur faire confiance et les équiper pour accompagner, soutenir et faciliter les pratiques d’hybridation.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/164247/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Damien Leduc exerce également une activité de conseil, sous statut privé. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Caroline Ruiller, Frédérique Chédotel et Sihem Mammar el Hadj ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Une organisation du télétravail co-construite avec les salariés permet de concilier bien-être et productivité. Cependant, des managers témoignent de certaines entraves à ce type de projet.Caroline Ruiller, Maître de conférences en gestion des ressources humaines, Université de Rennes 1 - Université de RennesDamien Leduc, Enseignant Management RH, Université de Rennes 1 - Université de RennesFrédérique Chédotel, Professeur des universités en Sciences du gestion, IAE Angers - Université d'AngersSihem Mammar el Hadj, Enseignant-chercheur en gestion des ressources humaines, Université catholique de l’Ouest Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1481312020-10-25T16:45:07Z2020-10-25T16:45:07ZPourquoi travaille-t-on plus et mieux en télétravail ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/364791/original/file-20201021-17-1m5rtzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=37%2C8%2C961%2C649&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le télétravail peut même avoir l’effet paradoxal de renforcer les collectifs.</span> <span class="attribution"><span class="source">Travelpixs </span></span></figcaption></figure><p>En France, jusqu’à l’actuelle crise sanitaire, le télétravail était relativement peu pratiqué en comparaison d’autres pays occidentaux. Pourtant, il est démontré que le <a href="http://www.oecd.org/coronavirus/policy-responses/effets-positifs-potentiels-du-teletravail-sur-la-productivite-a-l-ere-post-Covid-19-quelles-politiques-publiques-peuvent-aider-a-leur-concretisation-a43c958f/#section-d1e247">télétravail a un impact positif</a> non seulement sur les performances des entreprises et des organisations, mais aussi sur le développement durable et le bien-être. Le télétravail <a href="https://www.youtube.com/watch?v=USvO5-SnBj0">améliore le confort de travail</a>, ainsi que les conditions et les temps de déplacement.</p>
<p>Le télétravail est victime de beaucoup de <a href="https://www.mlcadvisory.com/10-mythes-sur-le-teletravail/">préjugés et de clichés</a>. Il isolerait des salariés démotivés, qui ne seraient plus joignables et qui feraient semblant d’exercer leur fonction alors qu’ils se consacrent à leur famille ou à leurs loisirs. S’ils font l’effort de travailler, c’est en pyjama, dans leur canapé, sans réel engagement ou ambition.</p>
<p>Cependant, une <a href="https://www.lefigaro.fr/decideurs/management/teletravail-les-salaries-a-distance-travaillent-en-moyenne-48-minutes-de-plus-par-jour-20201014">nouvelle étude</a> de chercheurs de la Harvard Business School et de l’Université de New York contredit cette vision négative et démontre que les salariés en télétravail consacrent 48,5 minutes de plus par jour à leur profession. Pendant le confinement, même les managers les plus perplexes ont constaté que le télétravail leur avait permis de maintenir leurs activités sans réel impact négatif.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1296919260418256896"}"></div></p>
<p>Beaucoup d’entreprises dont la culture était hostile au télétravail ont pu continuer à fonctionner tout à fait normalement pendant le confinement. Cette prise de conscience a changé en profondeur la perception de nombreux managers qui voient désormais le télétravail comme une solution d’avenir pour être plus efficace, faire des économies surtout en temps de crise, et <a href="https://www.marieclaire.fr/teletravail-les-drh-preconisent-un-modele-hybride-pour-faire-perdurer-la-cohesion-entre-salaries,1351699.asp">recruter de nouveaux talents</a> grâce une marque employeur plus attractive. C’est aussi un moyen de <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=5NPkDwAAQBAJ">gagner en agilité et de réduire les risques</a>.</p>
<h2>Des performances remarquables</h2>
<p>Bien que le télétravail ne soit adapté ni à tous les métiers, ni à tous les profils, et que certains y soient complètement réfractaires, <a href="https://www.revuegestion.ca/teletravail-entre-resistance-et-changement">il présente de nombreux avantages</a> et les personnes qui le pratiquent sont globalement plus performantes. Avec la crise de la Covid-19, cette contrainte est peut-être devenue une opportunité pour les entreprises qui réalisent le potentiel de création de valeur du télétravail.</p>
<p>Après avoir été forcées de l’expérimenter par des circonstances qu’elles ont subies, de nombreuses start-up, mais aussi de grands groupes comme Accenture ou <a href="https://www.20minutes.fr/societe/2774675-20200507-coronavirus-apres-crise-psa-veut-perenniser-teletravail-employes-hors-production">PSA, ont choisi de pérenniser le télétravail</a> sous des formes diverses.</p>
<p>Ces entreprises ont constaté des <a href="https://www.revuegestion.ca/teletravail-entre-resistance-et-changement">performances égales ou même supérieures</a>, pour des frais de déplacement et d’immobilier réduits, avec moins de congés maladie et une meilleure empreinte carbone. Le télétravail fidélise les employés qui expriment leur satisfaction et en attire de nouveau qui souhaitent en bénéficier. Il décentralise l’activité et produit des organisations plus horizontales, plus agiles et plus efficientes.</p>
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<figcaption><span class="caption">Le groupe PSA met en place le télétravail partout dans le monde et 80 000 salariés sont concernés (L’info du vrai, mai 2020).</span></figcaption>
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<p>Le télétravail a donc fait ses preuves pendant la crise sanitaire. C’est ce que l’entreprise Twitter a constaté au mois de mai dans un communiqué qui annonce que certains de ses salariés pourront <a href="https://www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/twitter-autorise-le-teletravail-a-vie-pour-certains-de-ses-employes-1202583">rester en télétravail indéfiniment</a> s’ils le souhaitent. Le groupe s’est montré très satisfait des premiers mois d’expérimentation et a décidé de faire tous les <a href="https://blog.twitter.com/en_us/topics/company/2020/covid-19.html">entretiens de recrutement par vidéo-conférence</a>.</p>
<p>Le 21 mai, Mark Zuckerberg a déclaré que <a href="https://www.zdnet.com/article/facebook-ceo-zuckerberg-announces-permanent-remote-work-option-for-employees/">50 % des employés de Facebook</a> pourront travailler chez eux en permanence d’ici 5 à 10 ans. Il précise que ce n’est pas un objectif, mais une possibilité qui est offerte au personnel. Comme pour Twitter, les entretiens à distance vont devenir la norme. En octobre, c’est <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/emploi-microsoft-autorise-le-teletravail-a-vie-sous-condition-1382764">Microsoft qui a annoncé</a> qu’une partie de ses salariés pourront continuer à travailler depuis leur domicile de manière partielle ou totale.</p>
<h2>De meilleurs conditions de travail à la maison</h2>
<p>Beaucoup de salariés arrivent sur leur lieu de travail en étant déjà fatigués, surtout dans les grandes agglomérations et en région parisienne, après un long trajet où ils ont dû affronter le froid, la <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/le-teletravail-est-efficace-pour-reduire-la-pollution_133785">pollution, les embouteillages</a> ou les transports en commun bondés, quand ce ne sont pas les grèves. Ils commencent leur journée de travail avec <a href="https://www.lexpress.fr/emploi/gestion-carriere/le-teletravail-une-economie-de-fatigue-et-de-stress_1744926.html">plus de stress et moins d’énergie</a> que quand ils ont quitté leur domicile, en ayant perdu un temps précieux qu’ils auraient préféré utiliser autrement.</p>
<p>En plus d’éviter les risques actuels de contamination, travailler chez soi permet de préserver son temps, son énergie et son calme, tout en faisant des économies. Le télétravail nécessite d’avoir à son domicile un <a href="https://fr.treated.com/blog/teletravail-conseils-ergonomie-travail-domicile">espace dédié</a> qui permette d’exercer sa profession dans de bonnes conditions. Ce lieu aménagé selon les goûts de chacun est propice à la concentration et évite les interruptions. Le télétravail permet alors de travailler dans des conditions plus confortables et plus agréables, donc de ressentir <a href="https://mba-rh.dauphine.fr/fileadmin/mediatheque/site/mba_rh/pdf/Travaux_anciens/Bien_etre_et_la_performance_au_travail.pdf">plus de plaisir et de facilité</a> dans la réalisation de ses missions.</p>
<p>L’entreprise fournit un budget annuel qui permet de s’équiper avec les matériels et logiciels les mieux adaptés aux pratiques individuelles et collectives. Le cadre de travail ne contraint plus le cadre de vie et le <a href="https://books.google.fr/books/about/Le_t%C3%A9l%C3%A9travail.html?id=n71qDwAAQBAJ&redir_esc=y">bien-être personnel se ressent sur les performances professionnelles</a>. Les salariés peuvent habiter où ils le souhaitent et les <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Q7OlauS_Gsc">entreprises déménagent dans des locaux</a> bien plus petits, moins coûteux et aménagés comme d’accueillants lieux de rencontre.</p>
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<figcaption><span class="caption">« Avec le télétravail, les entreprises comme les salariés déménagent » (BFM Lyon, septembre 2020).</span></figcaption>
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<p>Certaines <a href="https://www.myrhline.com/actualite-rh/pourquoi-les-jeunes-sont-ils-moins-a-laise-avec-le-teletravail.html">personnes réticentes au télétravail</a>, souvent sans jamais l’avoir essayé, considèrent que l’aspect social de leur métier serait menacé et ont peur de perdre tout contact avec leurs collègues. Cependant, ceux qui <a href="https://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/cns/ressources/Teletravail_Rapport_du_ministere_de_Mai2012.pdf">craignent un isolement</a> qui les rendrait moins efficaces sont parfois aussi ceux qui ne communiquent que par téléphone ou par mail avec des collègues qui sont dans des bureaux à quelques mètres du leur. Par ailleurs, le télétravail permet d’éviter les ambiances toxiques et les rapports de domination abusifs, et il favorise de nouvelles formes de solidarité entre collègues.</p>
<p>Avec les <a href="https://www.cairn.info/revue-rimhe-2017-3-page-3.htm">nouvelles technologies et les réseaux sociaux</a>, les jeunes générations ont l’habitude de créer des relations fortes et durables avec des personnes jamais rencontrées. Beaucoup d’entreprises utilisent des systèmes de messageries instantanées pour permettre des conversations impromptues entre les salariés. Le télétravail peut même avoir l’effet paradoxal de <a href="https://www.cairn.info/revue-questions-de-management-2020-2-page-159.htm">renforcer les collectifs de travail</a>. Même les pauses café réputées être des moments d’échanges informels, riches et créatifs, <a href="https://www.cairn.info/revue-questions-de-management-2020-2-page-159.htm">peuvent être recréées à distance</a>.</p>
<p>Il existe des solutions spatio-temporelles intermédiaires comme n’être en télétravail que quelques jours par semaine et/ou dans un télécentre proche du domicile de plusieurs collègues. Cependant, sous l’impulsion de la Covid-19, de <a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/coronavirus-ces-entreprises-ont-decide-de-deserter-leurs-bureaux-et-de-passer-au-teletravail-a-temps-plein_4101689.html">nombreuses entreprises françaises</a> suivent l’exemple des firmes américaines, brésiliennes ou suédoises où le télétravail constitue une pratique courante et ancienne.</p>
<p>Cependant, le télétravail n’est <a href="https://www.lefigaro.fr/decideurs/management/organisation-en-teletravail-ni-une-planque-ni-une-solution-miracle-20200531">pas une solution miracle</a>. Il peut engendrer un sentiment de solitude et limiter les opportunités de carrière chez ceux qui le pratiquent. Il peut également amplifier des dimensions négatives du poste occupé et si la relation est déjà mauvaise entre un salarié et son employeur, le télétravail risque d’aggraver le problème plutôt que de le résoudre. La puissance du lien entre employé et employeur apparaît plus faible, ce qui <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Jo0jHF0d6Pc">facilite les licenciements, eux aussi à distance</a>.</p>
<h2>Une approche différente du temps de travail</h2>
<p>La part des Français ayant expérimenté le télétravail est <a href="https://www.youtube.com/watch?v=hhwVcRD4f10">passé de 7 % à 40 %</a> depuis le début de la crise. Le retard de la France par rapport aux pays nordiques ou anglo-saxons s’explique non seulement par une approche très conservatrice du travail, fondée sur la hiérarchie et le contrôle, mais aussi par un plus faible niveau de transformation digitale des organisations.</p>
<p>En effet, un déploiement maîtrisé et à grande échelle du télétravail nécessite une certaine maturité numérique et une <a href="https://www.cairn.info/revue-questions-de-management-2020-2-page-159.htm">nouvelle approche du management</a> plus centrée sur le bien-être et l’épanouissement individuel.</p>
<p>Le télétravail présente de nombreux bienfaits en termes d’efficacité et de performance. <a href="https://www.journaldunet.com/management/direction-generale/1006146-employeurs-oubliez-les-idees-recues-sur-le-teletravail.amphtml/">Contrairement aux idées reçues</a>, les personnes en télétravail ne sont pas des personnes qui fuient le travail ou qui cherchent à travailler moins. Ce sont surtout des personnes qui travaillent quant il faut et qui font preuve de beaucoup plus de flexibilité. En particulier, elles peuvent travailler très tôt ou très tard pour se synchroniser avec des équipes en Asie ou en Amérique, et se libérer du temps dans la journée.</p>
<p>Sans horaire pour aller déjeuner ou pour rentrer à la maison, un salarié n’est pas obligé de s’interrompre au milieu d’une tâche et peut terminer ce qu’il a commencé sans avoir à se soucier de son repas ou des embouteillages. Les activités sont <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=5NPkDwAAQBAJ">mieux définies, priorisées et réparties</a>. Les réunions sont moins nombreuses, plus courtes et plus efficaces. Elles s’appuient sur un ordre du jour précis, font l’objet de moins d’interruptions ou interventions inopinées, et aboutissent à des décisions.</p>
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<figcaption><span class="caption">La France et le télétravail : une histoire compliquée (France 24, septembre 2020).</span></figcaption>
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<p>Les salariés ont <a href="https://www.youtube.com/watch ?v=hhwVcRD4f10">massivement exprimé leur satisfaction</a> et trois quarts d’entre eux souhaiteraient prolonger le télétravail au-delà de la crise au moins quelques jours par semaine. Certaines entreprises sont donc confrontées aux réticences d’un retour au bureau de leur personnel, non seulement en raison du contexte sanitaire, mais surtout du désir de rester travailler chez soi.</p>
<h2>Une forme de reconnaissance</h2>
<p>Le télétravail permet de rester proche de sa famille et d’avoir une vie sociale plus développée. L’équilibre entre vie professionnelle et vie privée est meilleur car le télétravail permet de sortir de la routine et du métro-boulot-dodo qui a un effet déprimant et démotivant. Le télétravail permet <a href="https://www.hbrfrance.fr/magazine/2015/01/5933-pour-augmenter-la-productivite-laissez-plus-de-salaries-travailler-de-chez-eux/">d’accorder plus de temps</a>, plus d’attention et plus de moyens à la gestion de ses problèmes privés. Il réduit donc les préoccupations parasites et diminue le stress pendant le temps où l’on travaille. C’est d’autant plus vrai pour les Parisiens qui partent en province en gardant le même niveau de salaire, ou les citadins qui partent à la campagne pour profiter du grand air.</p>
<p>Le télétravail permet aux salariés de gagner du temps et de l’argent : parfois plusieurs heures par jour et plusieurs centaines d’euros par mois, ce qui est une grande source de satisfaction. Or, une <a href="https://www.upslide.net/en/happiness-at-work-recipe/#_ftn1">étude menée conjointement par Harvard et le MIT</a> démontre que les salariés heureux sont deux fois moins malades, six fois moins absents, neuf fois plus loyaux, 31 % plus productifs et 55 % plus créatifs.</p>
<p>Être en télétravail, c’est <a href="https://www.cairn.info/revue-questions-de-management-2020-1-page-91.htm">être responsabilisé</a> par son entreprise, gagner en autonomie et avoir la confiance de son manager dans un contexte où le contrôle de la présence et des horaires n’est plus la garantie que les salariés accomplissent bien leurs missions. Ils se sentent privilégiés et valorisés, et ils expriment leur reconnaissance par un <a href="https://www.usine-digitale.fr/article/tribune-teletravail-et-productivite-vers-la-fin-du-presenteisme.N979176">engagement professionnel plus élevé et un fort attachement institutionnel</a>.</p>
<p>Managers et salariés semblent donc avoir <a href="https://www.lesechos.fr/economie-france/social/sondage-exclusif-les-francais-seduits-par-le-teletravail-1204045">adopté massivement et durablement le télétravail</a>. La pandémie aura au moins eu quelques effets positifs en réduisant les déplacements professionnels et en permettant à certains d’accéder à un meilleur confort de vie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/148131/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Oihab Allal-Chérif ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le télétravail produit des performances remarquables grâce à de meilleures conditions de travail, à une gestion du temps mieux adaptée, et au bien-être qui amène reconnaissance et loyauté.Oihab Allal-Chérif, Business Professor, Neoma Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1475122020-10-06T18:55:12Z2020-10-06T18:55:12ZSemaine de quatre jours : la France doit-elle s’inspirer de la Nouvelle-Zélande ?<p>En 2018, une entreprise néo-zélandaise spécialisée dans la sécurité, Perpetual Guardian, adopte définitivement la semaine de quatre jours de travail, en apportant, chiffres à l’appui des conclusions inattendues et un <a href="https://theconversation.com/working-four-day-weeks-for-five-days-pay-research-shows-it-pays-off-100375">bilan très positif</a>.</p>
<p>Cette expérience grandeur nature a inspiré le gouvernement néo-zélandais qui, par la voix de sa première ministre, Jacinda Ardern, a annoncé en mai dernier que ce modèle devrait être dupliqué à l’échelle du pays comme une <a href="https://www.theguardian.com/world/2020/may/20/jacinda-ardern-flags-four-day-working-week-as-way-to-rebuild-new-zealand-after-covid-19">solution pour sortir de la crise</a> économique post-Covid.</p>
<p>Dans le même temps, en France, le Medef prône une solution radicalement opposée en demandant au gouvernement, aux mêmes fins de relance économique, <a href="https://www.liberation.fr/france/2020/08/27/temps-de-travail-au-medef-un-pragmatisme-a-contre-courant_1797882">l’allongement du temps de travail</a>. Alors que de nombreux économistes estiment que la réduction du temps de travail constitue une <a href="https://theconversation.com/la-semaine-de-quatre-jours-nest-pas-un-luxe-elle-est-necessaire-au-progres-de-lhumanite-124478">progression logique</a> d’une société de plus en plus productive et où les loisirs tiennent une place primordiale, faut-il en conclure que les milieux patronaux français veulent nous renvoyer vers l’âge de pierre ?</p>
<h2>Moins de stress</h2>
<p>Andrew Barnes, le PDG de Perpetual Guardian, est parti d’une constatation simple : ses employés subissaient un stress permanent lié à la recherche d’un équilibre entre vie professionnelle et personnelle. L’entrepreneur a donc décidé, avec l’appui de l’Université d’Auckland, de réduire le nombre de jours de travail à quatre par semaine en maintenant le même salaire.</p>
<p>Les résultats de cette expérience se sont révélés édifiants : sur un échantillon de 240 salariés, la productivité hebdomadaire est restée la même, impliquant une meilleure productivité horaire. Le niveau de stress est passé de 45 % à 38 % et l’équilibre vie professionnelle/vie personnelle de 54 % à 78 %.</p>
<p>D’autres éléments ont également progressé considérablement comme la stimulation et l’engagement dans l’entreprise. Andrew Barnes explique ces chiffres par une meilleure concentration de ses employés et un stress et une fatigue moindres.</p>
<p>D’autres expériences ont également été concluantes comme celle de Microsoft au Japon. Les chiffres de la productivité et le « bonheur » des salariés ont <a href="https://www.japantimes.co.jp/news/2019/11/05/business/microsoft-japan-says-four-day-workweek-boosted-productivity-40/">augmenté considérablement</a>. L’entreprise a par ailleurs réalisé des économies non négligeables en papier, locaux, électricité, etc.</p>
<p>En macroéconomie, l’un des facteurs de production qui contribuent à la croissance d’un pays est le capital humain. On le mesure à l’échelle d’un pays par la performance au travail et les compétences des travailleurs. Si les compétences sont acquises par l’instruction et l’accumulation de l’expérience, la performance ou la productivité sont liées à plusieurs facteurs, notamment l’état de santé des travailleurs, mais aussi le repos (un des facteurs qui expliquent pourquoi la surcharge de travail au Japon réduit la productivité).</p>
<p>Autrement dit, un salarié en bonne santé, reposé, est plus performant qu’un salarié anxieux, malade ou fatigué. De nombreuses entreprises ont vu les performances de leurs salariés augmenter pendant le confinement, ce qui s’explique par des salariés moins stressés par les déplacements ou par les horaires de sorties d’école, moins fatigués (assez d’heures de sommeil, temps de déplacement accordé au repos, etc.), en meilleure santé car ayant une alimentation saine et équilibrée.</p>
<p>Aujourd’hui, un employé qui souhaite se rendre chez un médecin pour obtenir un certificat d’aptitude physique à l’exercice d’une activité sportive de son enfant, ou tout bonnement pour réceptionner une livraison, refaire sa carte d’identité ou autre, sera amené à poser un jour de congé, donc invariablement perturber le fonctionnement de son entreprise, modifier son planning, et générer du stress.</p>
<h2>Un coup de pouce au tourisme</h2>
<p>L’expérience néo-zélandaise a démontré qu’un jour de congé par semaine (choisi à la suite d’une concertation employé/employeur), souvent en milieu de semaine, permettait aux salariés de gérer leurs problèmes quotidiens, d’ajouter des activités sportives en journée, ce qui contribue au long terme à des employés moins malades et donc moins enclins à prendre des arrêts maladie et d’encombrer le système de soins.</p>
<p>On en revient à nouveau au capital humain. Les salariés se sentaient plus motivés et moins enclins à des distractions auxquelles les entreprises font la chasse comme les sites Internet et les réseaux sociaux. Mieux ! L’expérience a montré que les cadres de Perpetual Guardian se sont lancés dans des formations et dans la recherche pour augmenter leurs compétences et leur performance sur leurs postes de travail pendant leur jour libre, contribuant ainsi à l’amélioration de la performance des entreprises.</p>
<p>La première ministre Jacinda Ardern n’a pourtant pas évoqué cette expérience lorsqu’elle s’est adressée aux entreprises, même si le gouvernement néo-zélandais a reçu les conclusions des études et s’en est clairement inspiré. Ce pays, qui a relativement bien géré la crise de la Covid-19 avec peu de décès, en adoptant rapidement une stratégie de fermeture des frontières, a connu une baisse de son PIB liée à l’effondrement du secteur du tourisme.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/361643/original/file-20201005-20-cx9jw3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/361643/original/file-20201005-20-cx9jw3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=431&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/361643/original/file-20201005-20-cx9jw3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=431&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/361643/original/file-20201005-20-cx9jw3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=431&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/361643/original/file-20201005-20-cx9jw3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/361643/original/file-20201005-20-cx9jw3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/361643/original/file-20201005-20-cx9jw3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">En relançant le tourisme intérieur, la réduction du temps de travail constituerait un coup du pouce au secteur en Nouvelle-Zélande.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Yunsun Kim/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>C’est cet argument que la jeune première ministre a avancé, en soulignant que le <a href="https://theconversation.com/a-four-day-working-week-could-be-the-shot-in-the-arm-post-coronavirus-tourism-needs-139388">tourisme intérieur pourrait être développé</a> si les salariés travaillaient un jour de moins par semaine.</p>
<p>À l’échelle macroéconomique, l’augmentation de la demande dans le secteur du tourisme mènera invariablement à la création d’emplois (des emplois non« délocalisables » d’ailleurs). Une entreprise plus performante est également une entreprise qui embauche (à moyen terme, Perpetual Guardian a décidé d’augmenter sa masse salariale) et qui produit plus.</p>
<h2>À crise exceptionnelle, mesures exceptionnelles</h2>
<p>En France, la création de nouveaux emplois pèserait également positivement sur les comptes publics et donc sur le financement du système de protection sociale. Or, lors de son discours d’ouverture de l’université d’été du Medef en août, le patron du Medef Geoffroy Roux de Bézieux a déclaré que « la richesse d’un pays, c’est la quantité de travail par individu multipliée par le nombre de gens qui travaillent ».</p>
<p>Pourtant, si la richesse d’un pays se mesurait simplement aux nombres de personnes multipliées par leurs heures de travail, les pays très peuplés comme la Chine et l’Inde devraient avoir un PIB par habitant vertigineux !</p>
<p>Certes, la réduction du temps de travail pourrait être contre-productive dans certains secteurs industriels dont la performance se mesure par le temps et non pas par la productivité (agents de sécurité, d’accueil, techniciens, coiffeurs, etc.). Ce sont donc les professions intellectuelles qui devraient être visées en premier lieu par la réduction du temps de travail, car la performance intellectuelle n’est pas extensible et la fatigue baisse la productivité.</p>
<p>Si on veut relancer une économie après une crise exceptionnelle, il s’agit en effet d’envisager des mesures tout aussi exceptionnelles, ainsi qu’un consensus social où l’effort des salariés sera à la hauteur des efforts des entreprises. La réduction du temps de travail représenterait un progrès économique et social, ainsi qu’un coup de pouce inespéré pour le secteur des loisirs qui paie aujourd’hui le plus lourd tribut de la crise économique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/147512/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Linda Monborren ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La réduction du temps de travail produit des effets sur le capital humain, l’un des quatre facteurs de la croissance d’un pays.Linda Monborren, Enseignante en économie et commerce international, EM NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1426232020-07-20T18:21:47Z2020-07-20T18:21:47ZLa crise sanitaire brouille encore plus la mesure de la productivité<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/347665/original/file-20200715-21-mouds5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C8%2C5976%2C3963&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En généralisant le travail à distance, les entreprises ont reporté le poids du facteur capital (connexion Internet, formation aux outils, etc.) sur leurs salarié·e·s.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://image.shutterstock.com/image-photo/woman-holding-business-report-working-600w-1710815632.jpg">Jacob Lund / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Le confinement a bousculé notre rapport au travail. Les salarié·e·s pouvant continuer leurs activités ont dû, souvent dans la précipitation, adopter le télétravail et réorganiser aussi bien leurs taches professionnelles que l’articulation de ces dernières à leur vie personnelle.</p>
<p>Quel en est le bilan ? Si <a href="https://newsroom.malakoffhumanis.com/actualites/malakoff-humanis-decrypte-limpact-de-la-crise-sur-lorganisation-du-travail-et-la-sante-des-salaries-a-travers-les-resultats-de-ses-etudes-teletravail1-et-absenteisme2-realisees-en-mai-2020-40ce-63a59.html">84 % des salarié·e·s</a> voudraient continuer partiellement le télétravail, cette expérience a été diversement appréciée. Certain·e·s n’en retirent que des bénéfices alors que pour d’autres, cette pratique a été vécue comme un traumatisme.</p>
<p>Plus précisément, cette réorganisation du travail a amené à remettre en cause sa propre productivité. Les salarié·e·s ont alors exprimé deux positions apparemment contraires. Un grand nombre d’employé·e·s fraîchement métamorphosé·e·s en télétravailleur·se·s ont le sentiment de travailler plus, d’être plus productifs ou productives, que ce soit pour le meilleur ou pour le pire.</p>
<p>Pour le meilleur, car le télétravail permettrait une plus grande concentration (moins de parasitages, de sollicitations, etc.) et une meilleure qualité de vie (moins de temps de transport, la possibilité de se rapprocher des enfants, etc.).</p>
<p>Pour le pire, car le télétravail tend à rallonger les temps de travail et le confinement a été synonyme d’un <a href="https://www.anact.fr/1ers-resultats-du-questionnaire-teletravail-et-confinement-propose-par-le-reseau-anact-aract">surplus d’activités</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1279883108347756545"}"></div></p>
<p>En revanche, pour une bonne partie des salarié·e·s, le télétravail se conjugue mal avec certaines contraintes. Bien entendu, le confinement a mis en exergue les <a href="https://theconversation.com/emploi-teletravail-et-conditions-de-travail-les-femmes-ont-perdu-a-tous-les-niveaux-pendant-le-covid-19-141230">inégalités patrimoniales et familiales</a> passées sous silence jusque-là comme les problèmes de logement, du nombre d’enfants en bas âge ou du nombre d’ordinateurs disponibles par foyer.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/347669/original/file-20200715-17-1puh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/347669/original/file-20200715-17-1puh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/347669/original/file-20200715-17-1puh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=572&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/347669/original/file-20200715-17-1puh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=572&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/347669/original/file-20200715-17-1puh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=572&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/347669/original/file-20200715-17-1puh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=718&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/347669/original/file-20200715-17-1puh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=718&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/347669/original/file-20200715-17-1puh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=718&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ined.fr/fichier/s_rubrique/30315/579.population.societes.juillet.2020.covid.travail.france.fr.pdf">Institut national d’études démographiques</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le sentiment de ne pas pouvoir faire son travail se fonde sur des préoccupations concrètes. Le lieu de vie transformé en lieu de travail devient un obstacle à la bonne réalisation des tâches et peut faire baisser leur productivité.</p>
<p>Cette période de confinement nous ramène ainsi à des questions fondamentales des sciences économiques : que produisons-nous et comment ? Quelle est l’efficacité des processus productifs ? Car au-delà de la perception de chacun·e, le télétravail pousse à réévaluer les mesures de la productivité et l’articulation entre le travail des êtres humains et les outils qu’ils utilisent.</p>
<h2>La productivité, une donnée quantitative</h2>
<p>L’enjeu de la productivité est ancien pour les économistes. Déjà en 1768, l’économiste français Anne Robert Jacques Turgot s’interrogeait sur sa dynamique et son éventuelle diminution. Globalement, la productivité fait état du rendement des facteurs de production que sont le travail et le capital (machines, logiciels ou autres investissements).</p>
<p>Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), elle se définit comme un <a href="https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1452#:%7E:text=En%20%C3%A9conomie%2C%20la%20productivit%C3%A9%20est,et%2Fou%20les%20services%20produits.&text=Une%20mesure%20couramment%20utilis%C3%A9e%20est%20celle%20de%20productivit%C3%A9%20apparente%20du%20travail">rapport</a> entre la production d’un bien et les ressources mises en œuvre. Elle est calculée le plus souvent sur une période donnée (une heure, une journée) et a une portée quantitative uniquement.</p>
<p>Dans l’automobile par exemple, on obtient ainsi le nombre de voitures produites par heure et par personne. Pour un pays, la productivité se rapporte au ratio entre le produit intérieur brut (PIB) et le nombre d’heures travaillées.</p>
<p>Pourtant, la productivité se fait discrète dans les économies des pays avancés. Depuis les années 1970, les gains en la matière marquent le pas (expliquant pour certains le ralentissement de la croissance économique) et les nouvelles technologies ne semblent pas en générer davantage. L’économiste américain <a href="http://www.standupeconomist.com/pdf/misc/solow-computer-productivity.pdf">Robert Solow</a> s’en été étonné en 1987, avec sa fameuse citation « on voit des ordinateurs partout, sauf dans les statistiques de productivité » !</p>
<p>En France, le gouvernement a mis en place un Conseil national de productivité (CNP) en 2018 afin de tenter d’en identifier les déterminants, mais la question reste toujours en suspens. Comment obtenir des gains de productivité – surtout dans un pays où la productivité horaire par salarié·e a longtemps été <a href="http://www.oecd.org/fr/economie/etudes/France-2019-OCDE-etude-economique-synthese.pdf">parmi les plus fortes du monde</a> ?</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/347673/original/file-20200715-21-wi7nx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/347673/original/file-20200715-21-wi7nx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/347673/original/file-20200715-21-wi7nx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=301&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/347673/original/file-20200715-21-wi7nx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=301&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/347673/original/file-20200715-21-wi7nx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=301&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/347673/original/file-20200715-21-wi7nx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=378&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/347673/original/file-20200715-21-wi7nx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=378&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/347673/original/file-20200715-21-wi7nx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=378&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Niveau et croissance de la productivité française (en rouge) par rapport à des économies comparables.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.oecd.org/fr/economie/etudes/France-2019-OCDE-etude-economique-synthese.pdf">OCDE</a></span>
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</figure>
<p>Paradoxalement, c’est en période de crise que la productivité semble s’améliorer. D’une part, les entreprises fragiles disparaissent, améliorant la moyenne d’un secteur, et d’autre part, les salarié·e·s deviennent davantage mobilisé·e·s.</p>
<p>Or, alors que la productivité globale de l’entreprise progresse, peut-on en imputer uniquement le mérite aux salarié·e·s et au facteur travail ? L’usage étendu des technologies de l’information et de la communication (TIC), et donc le recours à plus de capital, ne contribue-t-il pas cette amélioration ?</p>
<h2>Comment comparer l’incomparable ?</h2>
<p>Les ressentis contradictoires des salarié·e·s s’expliquent aussi bien par la diversité des situations personnelles que par la complexité des mécanismes à l’œuvre.</p>
<p>Peut-on comparer notre productivité habituelle à celle de notre nouvelle situation de télétravail ? En effet, la nature du travail est fondamentale. Agriculture ou industrie ont souffert d’une chute de la productivité, car elles ne peuvent pas maintenir une activité à distance, et si l’activité persiste, les mesures sanitaires alourdissent les processus et l’organisation du travail.</p>
<p>Mais finalement, ne peut-on pas également se poser la question de la nature du travail en général, y compris pour les services ? Un·e enseignant·e ou un·e attaché·e commercial·e font-ils le même métier en distanciel et en présentiel ?</p>
<p>La nature de leur production est alors en jeu et peut expliquer les dissonances ressenties par les employé·e·s. Alors, on peut considérer que le service est maintenu, mais il est « différent » ; certains vont même parler de version « dégradée » du service rendu. En fait, les salarié·e·s produisent autrement un service différent.</p>
<p>Sont-ils plus productif·ve·s ? Cette adaptation est un effort en plus de l’activité habituelle, mais vouloir apprécier la productivité « avant » et « après » semble difficile puisque dans ce cas, la nature du métier a été modifiée rendant inopérantes les comparaisons.</p>
<p>Dans d’autres cas, la nature du travail change peu. C’est plutôt la façon de travailler et le contexte de travail qui sont remaniés. Dit autrement, la combinaison des facteurs de production – travail et capital – évolue.</p>
<p>De fait, les salarié·e·s étendent leur usage des TIC ; ils ou elles mobilisent de nouvelles compétences afin de s’approprier les outils. Le facteur capital – l’ordinateur, la plate-forme de visioconférence, les outils de partage de fichiers, etc.– est plus présent dans la production du service.</p>
<h2>Une reconfiguration des facteurs de production</h2>
<p>Or, au-delà des ressentis individuels, mesurer la productivité s’avère un exercice complexe à établir dans un cadre formel. Comment évalue-t-on les facteurs de production mobilisés et donc leur productivité ?</p>
<p>Le comptable, comme Solow, aurait du mal à trouver la productivité. Souvent, les outils relatifs au télétravail (messageries professionnelles, visioconférences, etc.) sont déjà présents au sein de l’entreprise et répertoriés au niveau des bilans… Seul le taux d’utilisation change.</p>
<p>En outre, les entreprises ont reporté le poids du facteur capital sur leurs salarié·e·s : les coûts liés au lieu de l’activité, à la connexion Internet, à la formation aux outils, etc. sont maintenant assumés par l’employé·e. Par ailleurs, l’absence physique de l’organisation (matérielle, managériale, etc.) a certainement un impact sur la productivité de l’individu positivement ou négativement.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/teletravail-les-employeurs-envahissent-nos-maisons-et-nous-refilent-les-couts-141097">Télétravail : les employeurs envahissent nos maisons et nous refilent les coûts</a>
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<p>Établir une hausse ou une baisse de la productivité dans un tel contexte semble un pari risqué. En revanche, les employé·e·s ont fait et font encore des <a href="https://www.anact.fr/1ers-resultats-du-questionnaire-teletravail-et-confinement-propose-par-le-reseau-anact-aract">efforts pour leur entreprise</a>. Mais en dehors de l’engagement conjoncturel et des gains de productivité temporaires dans certaines activités, il ressort que le passage au télétravail remet en jeu les compétences mobilisées, les <a href="https://www.liberation.fr/debats/2020/06/02/teletravail-l-enfer-sans-les-autres_1790067">relations sociales</a> telles qu’elles se tissent au travail et une nouvelle articulation entre travail et capital.</p>
<p>S’il est incontestable que la crise a transformé le vécu du travail, les gains de productivité liés au passage au télétravail restent encore à déterminer. Travaille-t-on plus ou mieux grâce à la crise du Covid-19 ? Et surtout pour quel sentiment d’accomplissement ? Pour quelle utilité sociale ? Alors que les cas d’épuisement professionnel (burn-out) <a href="http://www2.assemblee-nationale.fr/documents/notice/14/rap-info/i4487">ont augmenté</a> ces dernières années, ces questions méritent d’être examinées.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/142623/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Déjà contestée, la mesure de l’efficacité se complique en raison du passage au télétravail qui a provoqué une transformation des facteurs de production travail et capital.Virginie Monvoisin, Associate professor, Grenoble École de Management (GEM)Fiona Ottaviani, Enseignante-chercheuse en économie - Grenoble Ecole de Management, F-38000 Grenoble, France - Chaire Paix économique, Mindfulness, Bien-être au travail - Chaire Territoires en Transition - Chercheuse associée au CREG - Université Grenoble Alpes, Grenoble École de Management (GEM)Sandrine Ansart, Professeur associé, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1394942020-06-04T17:53:45Z2020-06-04T17:53:45ZConfinement : des télétravailleurs surchargés, mais globalement satisfaits<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/337956/original/file-20200527-20245-1ryd6uq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C8%2C5920%2C3934&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Parmi les travailleurs autonomes 83&nbsp;% sont satisfaits, voire très satisfaits à l’égard du télétravail.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/young-male-employee-working-home-1456773971">Elnur / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Malgré les conditions difficiles du confinement, la satisfaction à l’égard du télétravail apparaît élevée, en particulier pour les personnes travaillant en autonomie, même si elles notent une hausse de la quantité de travail. C’est ce qu’il ressort d’une enquête que nous avons conduite entre le 2 et le 16 avril auprès d’environ 1 220 salariés français. L’ensemble des répondants était en télétravail, pour la plupart contraint par leur employeur (à 77 %).</p>
<p>D’après notre étude, 80 % des répondants se déclarent en effet « satisfaits » ou « très satisfaits » en télétravail. En outre, contre toute attente, la perception d’une quantité de travail fournie plus élevée en télétravail est allée de pair avec une satisfaction plus élevée. Cela s’explique en grande partie par le fait que les télétravailleurs se sont sentis plus productifs quand des conditions propices à leur satisfaction étaient réunies.</p>
<h2>Des managers plus confiants</h2>
<p>L’autonomie est un facteur décisif dans la satisfaction à l’égard du télétravail. Parmi les travailleurs étant « tout à fait d’accord » avec le fait qu’ils disposent d’une « grande autonomie » pour faire leur travail, le pourcentage de satisfaits et très satisfaits est de 83 %, alors qu’il n’est que de 56 % de satisfaits et très satisfaits chez les salariés les moins autonomes.</p>
<p>Mais les salariés sont plus mitigés en ce qui concerne le sentiment d’être plus productif (partagé par 34 % des répondants seulement contre 29 % d’un avis inverse, 37 % étant neutres), ou encore le désir de continuer à télétravailler (38 % y sont favorables, mais 41 % défavorables, 21 % étant neutres).</p>
<p>Si une certaine méfiance à l’égard du télétravail pouvait être de mise avant la crise, ce n’est relativement plus le cas à la suite du confinement. Le sentiment de méfiance qui ressort de notre enquête est en effet faible : une minorité de salariés pensent que « les membres de leur équipe en télétravail passent du temps à faire autre chose que les tâches qui leur sont assignées. »</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1260374132358815744"}"></div></p>
<p>Le pourcentage de confiants est même plus élevé chez les managers que chez les non-managers, ce qui est pour le moins inattendu, les managers étant parfois présentés – avant la crise du coronavirus – comme un frein à la diffusion du télétravail du fait de leur sentiment de perte de contrôle. Or, 65 % des managers (contre 60 % des non-managers) affichent une confiance élevée à l’égard des membres de leur équipe. Seuls 10 % avouent être méfiants. Le reste affichant une confiance moyenne.</p>
<h2>Les femmes moins libres de gérer leur temps</h2>
<p>Il ressort également de notre étude que, en situation de travail au domicile contraint, les femmes restent plus exposées à des risques d’épuisement que les hommes. Le télétravail tel qu’il a été organisé a effet contraint les salariés à travailler en présence de personnes dépendantes, généralement des enfants.</p>
<p>Parmi les télétravailleurs, les femmes ont été plus accaparées par des personnes dépendantes, c’est-à-dire demandant « plus de 4 heures d’attention qui empiètent sur le temps de travail » chaque jour. Elles sont 10,3 % des répondantes, en France, à être dans ce cas extrême, contre 7 % des hommes. On observe également que les femmes sont nettement plus nombreuses à avoir recherché du soutien émotionnel que les hommes (48 % contre 26 %) pendant le confinement.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/337944/original/file-20200527-20229-1pj3wcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/337944/original/file-20200527-20229-1pj3wcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=275&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/337944/original/file-20200527-20229-1pj3wcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=275&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/337944/original/file-20200527-20229-1pj3wcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=275&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/337944/original/file-20200527-20229-1pj3wcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=346&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/337944/original/file-20200527-20229-1pj3wcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=346&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/337944/original/file-20200527-20229-1pj3wcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=346&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">En télétravail, les femmes restent plus sollicitées que les hommes par leurs enfants.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/mother-children-talking-on-video-call-1699753018">David Pereiras/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Enfin, elles sont significativement moins nombreuses que les hommes à penser que « les choses allaient comme elles le voulaient » (60 % et 71 % respectivement) lorsqu’elles ont répondu à l’enquête. Pour autant, leur niveau de satisfaction à l’égard du télétravail est sensiblement le même que celui des hommes. Seraient-elles moins exigeantes que les hommes et si oui, pourquoi ? Seule une nouvelle recherche permettrait de répondre à ces interrogations.</p>
<h2>Ne pas confondre autonomie et isolement</h2>
<p>Au bilan, nos résultats apparaissent comme encourageants quant à la diffusion de cette pratique dans le futur, notamment au vu du contexte difficile dans lequel le télétravail a été expérimenté (télétravail contraint, improvisé, souvent en présence de personnes dépendantes).</p>
<p>Il ressort en outre que, pour un développement du travail le plus satisfaisant possible pour tous, il existe de nombreux leviers d’action.</p>
<p>Cela passe par un certain nombre de conditions :</p>
<ul>
<li><p>accorder au salarié de l’autonomie dans l’exercice de ses activités</p></li>
<li><p>veiller à ce que le domicile soit aussi un lieu de travail confortable avec des technologies adaptées ; à défaut, proposer un tiers lieu proche du domicile du salarié et répondant à ces critères</p></li>
<li><p>mettre en place des mesures de conciliation entre vie privée et vie professionnelle (formules de garde d’enfants appropriées au télétravail par exemple) ;</p></li>
<li><p>former aux compétences digitales décisives dans ce mode d’organisation en gardant à l’esprit que la digitalisation doit être perçue comme ayant un sens par rapport à la qualité et à la quantité du travail à fournir, car il ne s’agit pas de faire de la digitalisation à tout crin ;</p></li>
<li><p>lutter contre l’isolement sur les plans formel (suivi du travail par le manager) et informel (contact informel et soutien émotionnel des collègues).</p></li>
</ul>
<p>Il convient d’insister sur ce dernier point, car si une grande autonomie permet de bien vivre le télétravail, c’est à condition que soient préservées des relations avec autrui. L’isolement est le facteur qui impacte le plus négativement les variables de satisfaction à l’égard du télétravail. Il doit donc être combattu à tout prix.</p>
<hr>
<p>Cet article s’inscrit dans le cadre d’une recherche internationale associant Kevin Carillo et Alain Klarsfeld (TBS Business School), Gaelle Cachat-Rosset et Tania Saba (Université de Montréal) et Josianne Marsan (Université Laval).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/139494/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Dans une étude, près de 4 répondants sur 5 tirent un bilan plutôt positif de la période malgré les conditions difficiles.Alain Klarsfeld, Professeur de gestion des ressources humaines, TBS EducationGaëlle Cachat-Rosset, Postdoctorante - RH et Diversité, Université de MontréalKevin Daniel André Carillo, Professeur associé en sciences de la donnée, TBS EducationLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1386602020-05-18T19:32:08Z2020-05-18T19:32:08ZLe stress est-il une condition de performance en entreprise ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/335134/original/file-20200514-77267-17gqal4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C1133%2C3756%2C2594&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les dirigeants responsables de la pérennité de l'entreprise sont en moyenne plus stressés que leurs salariés.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/mlVbMbxfWI4">Luis Villasmil/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>Dans un contexte économique turbulent à la fois <a href="https://www.forbes.fr/management/environnement-complexe-manager-son-organisation-en-mode-vuca/">volatile, incertain, complexe et ambigu</a> (VUCA), et plus largement un environnement bouleversé par les crises, les entreprises subissent de nombreux chocs.</p>
<p>Dans un <a href="https://hbr.org/2010/08/are-you-in-cahoots-with-comple.html">article</a> de la <em>Harvard Business Review</em>, le consultant Ron Ashkenas défend que face à une telle situation, les managers ont tendance à créer davantage de <a href="https://hbr.org/2009/12/take-complexity-out-of-your-co">complexité organisationnelle</a>. Ce paradoxe qui naît au cœur d’une société valorisant la performance à tout prix produit des niveaux de stress élevés.</p>
<p>Dans ce contexte, le mythe d’un stress bénéfique permettant aux individus d’affronter et de s’adapter à un nouveau contexte persiste. Mais mérite-t-il d’être banni ou au contraire cultivé ?</p>
<h2>Combattre le stress : le devoir de l’employeur</h2>
<p>La notion de stress positif s’est largement répandue dans le monde du travail depuis la fin des années 2000. Les chercheurs Gopal Kanji et Parvesh Chopra ont ouvert la voie en défendant l’existence d’un stress <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/14783360902875741">potentiellement « sain »</a> au travail (par opposition à un stress « malsain »).</p>
<p>Ce stress sain, d’une durée relativement courte, correspondrait à un niveau moyennement élevé associé à un bon niveau de maîtrise de la situation.</p>
<p>Les chercheurs Simon Dolan et André Arsenault ont conclu de leur côté que le stress <a href="https://www.puq.ca/catalogue/livres/stress-estime-soi-sante-travail-1784.html">stimulerait la créativité</a> et inciterait à dépasser les difficultés pour réussir.</p>
<p>Mais rapidement, l’<a href="http://www.inrs.fr/risques/psychosociaux/reglementation.html">accord national interprofessionnel sur le stress</a> est venu remettre en cause cette idéologie du stress positif au travail. Au-delà de rendre responsable tout employeur de déterminer les mesures appropriées, cet accord rappelle que tout problème de stress identifié doit faire l’objet d’une action pour le prévenir, l’éliminer ou, à défaut, le réduire.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1259635792152059904"}"></div></p>
<p>Le <a href="https://www.stress-info.org/blog/2009/03/25/stress-et-performance/">professeur Éric Gosselin</a>, spécialisé en psychologie du travail, a étudié les résultats de 52 études sur le thème. Selon lui, 75 % d’entre elles concluent que lorsque le stress augmente la performance baisse. Seulement 10 % des études observent que la performance s’accroît avec un peu de stress sachant qu’il diminue dès que la dose de stress augmente.</p>
<p>Le professeur Philippe Rodet, ancien urgentiste, rappelle que la raison est simplement hormonale, l’adrénaline produite par le stress provoque la baisse de l’acétylcholine indispensable à la motivation. Ainsi, dans un monde du travail assénant une performance régulière, considérer le stress comme nécessaire à la productivité peut se révéler un principe dangereux.</p>
<h2>Le stress, maladie ou remède ?</h2>
<p>Les études œuvrant à relever des <a href="https://actualitebienetre.kiway.co/le-stress-est-il-positif-ou-negatif/">mesures objectives du stress</a> sont sans équivoque sur ses conséquences sur la santé. Celui-ci engendre principalement des dysfonctionnements cardiaques divers et d’autres somatisations comme la perte d’appétit, les maux de tête ou divers troubles du sommeil.</p>
<p>Des situations de stress chronique conduisent au syndrome d’épuisement professionnel appelé communément burn-out. Les personnes atteintes de burn-out souffrent de divers symptômes psychologiques (irritabilité, démotivation, anxiété, déconcentration, etc.) et physiques (fatigue, trouble digestif et du sommeil, douleurs, etc.).</p>
<p>Le médecin du travail, Bernard Salengro, défend de longue date que considérer le stress comme potentiellement positif revienne à considérer une maladie comme potentiellement positive.</p>
<p>Mais qu’en est-il d’une faible dose de stress ?</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/335140/original/file-20200514-77247-ie7eh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/335140/original/file-20200514-77247-ie7eh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/335140/original/file-20200514-77247-ie7eh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/335140/original/file-20200514-77247-ie7eh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/335140/original/file-20200514-77247-ie7eh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=497&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/335140/original/file-20200514-77247-ie7eh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=497&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/335140/original/file-20200514-77247-ie7eh2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=497&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Graphique illustrant le mécanisme d’hormèse en biologie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Horm%C3%A8se#/media/Fichier:Hormesis_dose_response_graph.svg">Wikipedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En pharmacologie, l’hormèse désigne l’introduction d’une faible dose de substance nocive pour agir comme un remède grâce à la réaction excessive de l’organisme. Les travaux du toxicologue allemand Hugo Schultz montrèrent dès 1888 que de petites doses de poison stimulaient la croissance de levures alors que des doses plus importantes l’altéraient. Ainsi, l’exposition à de faibles doses de phénomènes générateurs de stress pourrait s’avérer salutaire.</p>
<p>D’après le philosophe des sciences du hasard Nassim Nicholas Taleb, l’<a href="https://www.nateliason.com/podcast/antifragile-profit-chaos">hormèse serait la norme</a> et son absence le problème. Il nomme « antifragilité » cette capacité des systèmes à se renforcer lorsqu’ils sont soumis à des stress externes comme des crises ou des phénomènes imprévisibles.</p>
<p>Selon Taleb, les entrepreneurs qui dirigent la plupart des petites et moyennes entreprises permettent aux systèmes de se renforcer. Par leur prise de risque à la création ou au lancement de nouveaux produits, ils perturbent leurs écosystèmes d’affaires et introduisent une « hormèse entrepreneuriale ».</p>
<p>Ainsi, l’arrivée de nouveaux concurrents, de nouvelles normes, d’innovations radicales, etc. sont autant de stress externes qui obligent les entreprises de l’écosystème à s’adapter et par conséquent à se renforcer.</p>
<p>Mais, in fine, ce sont les entrepreneurs, en moyenne <a href="https://actualitebienetre.kiway.co/pourquoi-les-dirigeants-sont-plus-stresses-que-leurs-salaries/">plus stressés que leurs salariés</a>, qui assument ce risque d’échec ou de faillite de l’entreprise.</p>
<h2>L’inévitable stress entrepreneurial</h2>
<p>Dans son « équation fondamentale de la santé du dirigeant », le professeur Olivier Torrès, fondateur du laboratoire Amarok, identifie le stress et la solitude comme <a href="https://www.carnetsdubusiness.com/Olivier-Torres-Le-capital-sante-des-dirigeants-est-le-premier-actif-immateriel-de-l-entreprise_a526.html">facteurs pathogènes de l’entrepreneuriat</a>. L’optimisme, la capacité à rebondir et la croyance en la maîtrise de son destin sont eux considérés comme facteurs « salutogènes » pour la santé de l’entrepreneur.</p>
<p>Les systèmes semblent tirer bénéfices du stress. Dans les écosystèmes d’affaires, l’hormèse entrepreneuriale oblige les entreprises à se renforcer pour ne pas disparaître. Mais, contrairement aux systèmes, le stress a des effets négatifs sur les individus au travail. Celui-ci altère leur performance et leur capacité d’adaptation aux bouleversements externes.</p>
<p>Ainsi, l’entrepreneur indispensable au renforcement du système est inévitablement exposé au stress.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-entrepreneurs-ne-percoivent-plus-le-risque-comme-avant-115870">Les entrepreneurs ne perçoivent plus le risque comme avant</a>
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<hr>
<p>Plus on monte dans la pyramide hiérarchique, plus les individus sont stressés et deviennent les principaux « agents stresseurs » à même de soumettre leurs collaborateurs au stress.</p>
<p>C’est peut-être dans la capacité des entrepreneurs à diminuer leur stress post création, et aux dirigeants à ne surtout pas le transmettre au reste de l’organisation, que résiderait la clé d’une performance durable.</p>
<p>À cet effet, le professeur Rodet rappelle qu’on ne peut pas agir sur les bouleversements externes imprévisibles mais qu’en revanche on peut agir sur les facteurs de protection interne par un management visant à agir sur les émotions positives et à bannir le stress.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/138660/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Granata ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>À l’échelle des organisations, le stress peut produire des effets positifs. Il incombe alors aux dirigeants d’apprendre à le canaliser et à mieux le gérer.Julien Granata, Directeur de l'Executive MBA de Montpellier Business School - Enseignant-chercheur - Coach Professionnel, Montpellier Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1383202020-05-11T19:29:59Z2020-05-11T19:29:59ZLe Covid-19 sonnera-t-il le glas du travail tel que nous le connaissons ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/334007/original/file-20200511-49584-io9gxz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C62%2C919%2C603&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La présence physique au travail restera-t-elle autant assimilée à de la fiabilité qu'avant la crise sanitaire ?</span> <span class="attribution"><span class="source">Fizkes / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Pas une semaine ne se passe sans que les médias ne prédisent la disparition des open spaces : <a href="https://usbeketrica.com/article/covid-19-open-space-va-t-il-enfin-disparaitre">« Covid-19 : l’open space va-t-il (enfin) disparaître ? »</a> (Usbek et Rica, le 7 mai) ; <a href="https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2020/05/01/materiaux-teletravail-espaces-modulables-le-bureau-a-l-heure-du-covid-19_6038358_4497916.html">« Haro sur les open spaces, ruée sur le plexiglas… le bureau à l’heure du Covid-19 »</a> (<em>Le Monde</em>, le 1<sup>er</sup> mai) ; <a href="https://www.lejdd.fr/Economie/voici-pourquoi-le-covid-19-va-tuer-les-open-spaces-3964531">« Voici pourquoi le Covid-10 va tuer les open spaces »</a> (le <em>JDD</em>, le 27 avril). Faut-il en conclure que la crise sanitaire sera l’occasion d’éliminer définitivement ces espaces de travail décriés <a href="https://www.alternatives-economiques.fr/lopen-space-tuer/00037515">depuis fort longtemps</a> ?</p>
<p>Or, la véritable interrogation semble être d’un autre ordre. La question n’est pas de savoir si l’open space va survivre ou disparaître : la question est de savoir si cette crise va nous donner – ou pas – une occasion unique de réinterroger notre <a href="https://www.pearson.fr/fr/book/?GCOI=27440100127590">rapport à l’espace et au temps de travail</a>, de repenser nos organisations et nos manières de travailler.</p>
<p>Nous pouvons identifier cinq transformations essentielles dans notre rapport à l’espace, au travail et au management.</p>
<h2>La présence remise en question</h2>
<p>D’une certaine manière, la crise du Covid-19 aura fait évoluer les référentiels dans nombre d’entreprises. Le monde industriel, dont l’entité emblématique est l’usine, s’est construit sur le respect du temps passé dans un lieu. Unité de temps, unité de lieu et unité d’action (la chaîne de montage) sont restées pour beaucoup les référentiels du « travail ». Ceci explique en partie les réticences à adopter le télétravail car, si un salarié échappe au temps et au lieu, il échappe, peu ou prou, à la discipline salariale.</p>
<p>Les chercheurs Kimberly Elsbach et Daniel Cable démontrent que la présence physique au travail est encore <a href="https://sloanreview.mit.edu/article/why-showing-your-face-at-work-matters/">assimilée à de la fiabilité</a>, et que la présence au-delà des heures de travail est perçue comme un signe d’engagement. Il est grand temps de distinguer présence et travail ! Le fait d’être à distance n’aura pas empêché nombre de salariés d’être productifs. Et tout un chacun sait que le fait d’être physiquement au bureau n’est pas toujours synonyme de travail et d’efficacité…</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/334009/original/file-20200511-49584-baajlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/334009/original/file-20200511-49584-baajlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/334009/original/file-20200511-49584-baajlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/334009/original/file-20200511-49584-baajlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/334009/original/file-20200511-49584-baajlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/334009/original/file-20200511-49584-baajlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/334009/original/file-20200511-49584-baajlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Unité de temps, unité de lieu et unité d’action sont restées pour beaucoup les référentiels du « travail ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Mike Dotta/Shutterstock</span></span>
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<p>La crise aura été, de ce point de vue là, un formidable accélérateur de la transformation vers le monde post-industriel, où les référentiels de temps et d’espace de travail sont <a href="https://books.google.fr/books/about/R%C3%A9inventer_le_management_des_ressources.html?id=CVbWoAEACAAJ&redir_esc=y">à réinventer</a>.</p>
<h2>Un télétravail décomplexé</h2>
<p>Nous venons de vivre une période étrange, où nous sommes tous devenus, en l’espace de 24h, des télétravailleurs à temps complet. Peut-on vraiment parler de télétravail d’ailleurs ? Il me semble qu’il s’agit davantage de la poursuite de l’activité à distance, car on est bien loin de projets de télétravail prévus, organisés et pilotés !</p>
<p>Pour autant, au fil des semaines, chacun a trouvé des ressources pour travailler à distance. Bien évidemment, être éloigné à temps complet de son lieu de travail, de sa hiérarchie et de ses collègues n’est pas bénéfique à long terme et les recherches sur le télétravail prônent de limiter ce dernier à <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/1529100615593273">deux ou trois jours semaine</a>, pour éviter les risques d’isolement et maintenir la cohésion au sein des équipes.</p>
<p>Il n’empêche que c’est sous la contrainte que s’opèrent le plus rapidement des changements aussi fondamentaux. Réaliser un véritable retour d’expérience sur ce travail à distance imposé, subi, à temps complet, est une belle opportunité pour construire les fondations d’un télétravail efficace à l’avenir.</p>
<h2>Une mise à distance du management</h2>
<p>Le travail à distance a eu pour corollaire le développement du management à distance. Longtemps réservé à certains niveaux hiérarchiques ou à certaines fonctions, ce dernier a été expérimenté par tous ceux qui avaient des équipes à gérer. Cependant, le management à distance exige des compétences spécifiques.</p>
<p>La distance ne tolère pas l’improvisation, la distance ne laisse que peu de place au charisme, la distance exige des <a href="https://www.agrh.fr/assets/actes/2008leon.pdf">postures adaptées</a> de la part des managers pour éviter que le management à distance ne se transforme en mise à distance du management. Imaginer que l’on peut faire à distance la même chose qu’à proximité, essayer coûte que coûte de reproduire la même organisation, le même nombre de réunions, le même type de reporting que dans un contexte de proximité sont autant de pièges à éviter.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1130235461774057473"}"></div></p>
<p>Aujourd’hui, la question qui va se poser aux managers est d’utiliser cette expérience pour embrasser et améliorer le télétravail au sein de leurs équipes. Il faut se saisir de cette expérience pour définir les normes de comportements (en présentiel et à distance), les modes de communication, le reporting, etc.</p>
<p>Cette crise aura permis à tous d’expérimenter le management à distance : espérons qu’elle aura aussi facilité l’identification des facteurs clés de succès, notamment en ce qui concerne les notions de confiance et de contrôle.</p>
<h2>Une segmentation différente des espaces</h2>
<p>Alors que l’open space visait à lisser les différences puisque tout le monde était logé à la même enseigne quelle que soit son statut, la nature de son activité, ou la taille de son équipe la crise a mis en exergue la nécessité de segmenter davantage les populations et leurs besoins en matière d’espaces de travail. Cette tendance, qui émergeait déjà dans certains projets immobiliers, va être accentuée par l’impossibilité de ramener tout le monde au bureau en même temps.</p>
<p>Il va falloir faire des choix, il va falloir évaluer les risques, et identifier quels sont les points de rassemblement critiques, pour quelles équipes, de quelle manière. En cela, la crise va nous conduire à repenser les espaces non pas uniquement en fonction des situations de travail (trop individuelles, trop fluctuantes) mais probablement en fonction des activités qui s’y opèrent, et ce au niveau des collectifs de travails.</p>
<p>Réflexion d’autant plus cruciale que nombre de salariés comprendraient mal, dans un tel contexte, qu’on leur impose de venir au bureau, pour y réaliser un travail qu’ils auraient pu faire en toute sécurité depuis leur domicile. Le télétravail deviendra-t-il de ce point de vue là la norme et le bureau l’exception ? C’est l’hypothèse posée par le <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/automobile/psa-fait-du-teletravail-la-regle-pas-lexception-1201054">constructeur automobile PSA</a>, qui en a décidé ainsi début mai.</p>
<h2>Réinventer la notion d’intimité</h2>
<p>La crise que nous venons de vivre a mis à mal la segmentation entre vie privée et vie professionnelle. Volontairement ou pas, nos collègues, nos managers ont eu accès à nos domiciles, même virtuellement. Nos logements se sont parfois retrouvés transformés en open spaces, pour peu que conjoints et enfants aient dû y travailler également. Or l’être humain a <a href="https://www.let.archi.fr/ressources/spip.php?article281">besoin d’intimité acoustique, verbale et visuelle</a>, comme le soulignent les psychologues de l’environnement.</p>
<p>Par intimité acoustique, il faut entendre le fait de pouvoir travailler dans un niveau de bruit acceptable (ni trop faible, ni trop élevé). L’open space était souvent jugé soit trop bruyant, empêchant toute concentration, soit trop silencieux, et générateur d’angoisse… L’intimité verbale consiste à pouvoir s’exprimer sur des sujets confidentiels sans être entendu par les autres. Et l’intimité visuelle consiste à pouvoir réaliser des tâches sans être vu.</p>
<p>L’open space avait mis à mal ces besoins d’intimité mais ces derniers sont également présents dans le cadre du travail à domicile. Et ce besoin d’intimité ne se limite pas à l’environnement physique : il est également présent dans le monde digital où nous évoluons.</p>
<p>Réfléchir à ces différentes questions et identifier des solutions acceptables par le corps social feront partie des défis à relever. Alors, et seulement alors, sera-t-il possible de statuer sur l’avenir des open spaces…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/138320/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuelle Léon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les débats liés à la disparition potentielle de l’open space dissimulent les véritables mutations en cours dans le monde du travail.Emmanuelle Léon, Professeur asssocié, Directrice scientifique de la Chaire Reinventing Work, ESCP Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1292712020-01-09T20:44:11Z2020-01-09T20:44:11ZComment la crise de 2008 a plombé la création d’entreprise pendant sept ans aux États-Unis et en France<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/308351/original/file-20200102-11914-1hnyvyo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C206%2C4891%2C2943&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'incertitude consécutive à une crise expliquerait près de la moitié des variations cycliques de la création d’entreprises.</span> <span class="attribution"><span class="source">Sue Smith / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>L’année 2019 s’est achevée avec une bonne nouvelle : un record absolu de la création d’entreprises en France au troisième trimestre, selon les derniers chiffres de l’Insee. Ce « cadeau de Noël » revêt en réalité un aspect bien plus morose. En effet, la création d’entreprises avait non seulement fortement chuté lors de la grande récession de 2007-2009 mais était également par la suite entrée dans une période d’atrophie durant sept longues années.</p>
<p>En France tout d’abord, le nombre d’entreprises individuelles a dégringolé avant d’entamer une très lente reprise, et ce malgré un fort succès du statut de micro-entrepreneur à sa création en 2009. Si les autres formes sociétaires semblent à première vue avoir été moins affectées, il n’en reste pas moins que leur taux de croissance moyen a, en réalité, nettement ralenti, passant de 9 % entre 2000 et 2007 à 2 % entre 2008 et 2017 (avec même une chute au cours des années 2009 et 2012).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/308345/original/file-20200102-11914-1he4gpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/308345/original/file-20200102-11914-1he4gpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/308345/original/file-20200102-11914-1he4gpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=547&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/308345/original/file-20200102-11914-1he4gpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=547&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/308345/original/file-20200102-11914-1he4gpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=547&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/308345/original/file-20200102-11914-1he4gpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=688&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/308345/original/file-20200102-11914-1he4gpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=688&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/308345/original/file-20200102-11914-1he4gpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=688&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Création d’entreprises en France par catégorie d’entreprises.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Insee et calculs des auteurs</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ce schéma est en réalité très proche de celui des États-Unis, avec un léger décalage temporel puisque la création d’entreprises y chute dès 2008 contre 2009 en France. Dans les deux cas, il aura fallu pas moins de sept années pour que chacun des deux pays ne retrouve son niveau d’avant-crise, soit en 2015 pour les États-Unis et en 2016 pour la France.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/308347/original/file-20200102-11904-ll1fk7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/308347/original/file-20200102-11904-ll1fk7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/308347/original/file-20200102-11904-ll1fk7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/308347/original/file-20200102-11904-ll1fk7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/308347/original/file-20200102-11904-ll1fk7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/308347/original/file-20200102-11904-ll1fk7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/308347/original/file-20200102-11904-ll1fk7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/308347/original/file-20200102-11904-ll1fk7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Création d’entreprises en France et aux États-Unis.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Insee, Bureau of Labor Statistics, calculs des auteurs</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au-delà de ces deux pays, les travaux de la Banque mondiale sur l’entrepreneuriat dans 95 pays montrent que seulement <a href="http://www.doingbusiness.org/en/data/exploretopics/entrepreneurship">20 % des pays</a> ont vu les créations d’entreprises s’accroître entre 2008 et 2009 contre 74 % des pays entre 2006 et 2007. Or, les pays à revenus les plus élevés, qui sont aussi les plus exposés à la crise en raison du fort développement de leur système financier, sont ceux qui ont connu la chute la plus forte de la création d’entreprises. Cela suggère donc un lien entre cycle financier et dynamisme de création d’entreprises.</p>
<p>De même, parmi les pays émergents, ceux les moins affectés par la crise financière, tels le Brésil ou le Maroc, sont aussi ceux dans lesquels la création d’entreprises n’a pas décliné, à la différence d’autres pays comme la Bulgarie et la Lituanie par exemple.</p>
<h2>Incertitude et accès au crédit</h2>
<p>Les retournements du cycle financier comme en 2007-2008 coïncident fréquemment avec ceux du cycle économique ; en fait, ils ont même tendance à provoquer ou aggraver les récessions économiques. Dès lors, non seulement la demande se tarit et l’incertitude augmente, mais <a href="https://publications.jrc.ec.europa.eu/repository/bitstream/JRC103350/jrc103350.pdf">l’accès au financement externe devient plus ardu</a>, affectant naturellement la création de nouvelles entreprises.</p>
<p>Une notion clé dans les problèmes de financement externe des entreprises est l’« asymétrie d’information » entre le prêteur et l’emprunteur. Considérons en effet une situation dans laquelle un prêteur, typiquement une banque, a affaire à une entreprise emprunteuse dont il ne connaît pas la productivité. Tant que l’entreprise est en mesure de rembourser ses emprunts, cette asymétrie n’est pas nuisible au prêteur. En revanche, en cas de défaut de l’entreprise, il devra réaliser un audit pour évaluer les actifs de l’entreprise et recouvrer tout ou partie de la valeur des emprunts. Or, d’une part, cette activité d’audit est coûteuse, et d’autre part, la revente des dits actifs peut entraîner une chute de leur valeur de marché, en particulier lorsque de nombreuses entreprises se retrouvent dans le même cas.</p>
<p>Dès lors, au niveau macroéconomique, toute crise s’accompagnant d’un risque d’augmentation des défauts se traduit par une hausse de la prime de risque exigée par les prêteurs. Cette dernière renchérit le coût de l’emprunt pour les entreprises, ce qui diminue l’investissement et donc, in fine, la production. Le ralentissement économique contribue alors à son tour au risque de défaut accru des emprunteurs, formant ainsi un cercle vicieux.</p>
<p>Si ce phénomène existe pour des entreprises déjà bien établies, il est naturellement d’autant plus fort pour la création de nouvelles entreprises qui n’ont encore, par définition, ni relation commerciale de long terme avec des banques (ou autres financeurs), donc une « asymétrie d’information » a priori plus forte, ni actifs à utiliser comme garantie ou valeur collatérale à cet emprunt. À cela s’ajoute l’incertitude liée à l’activité elle-même qui accroît encore davantage les primes de risque. Ainsi, la recherche de financement peut facilement s’avérer décourageante pour un créateur d’entreprise potentiel en temps de crise.</p>
<p>Dans une <a href="https://doi.org/10.1016/j.jedc.2018.11.003">étude récente</a>, nous montrons d’ailleurs que les variations de l’incertitude expliqueraient près de la moitié des variations cycliques de la création d’entreprises au cours du temps.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/308348/original/file-20200102-11900-1lqiajm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/308348/original/file-20200102-11900-1lqiajm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/308348/original/file-20200102-11900-1lqiajm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=463&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/308348/original/file-20200102-11900-1lqiajm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=463&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/308348/original/file-20200102-11900-1lqiajm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=463&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/308348/original/file-20200102-11900-1lqiajm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=582&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/308348/original/file-20200102-11900-1lqiajm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=582&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/308348/original/file-20200102-11900-1lqiajm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=582&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Contribution des chocs à la volatilité de la création d’entreprises et d’autres variables macro-financières (États-Unis 1980-2017).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.cepii.fr/PDF_PUB/lettre/2019/let401.pdf">Brand et coll. (2019) et calculs des auteurs</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Conséquences sur l’emploi et la productivité</h2>
<p>La grande récession s’est traduite par une dégradation forte et persistante du contexte économique, avec notamment des niveaux d’emploi et de productivité faibles durant près d’une décennie. Or, la chute de la création d’entreprises explique une <a href="https://econpapers.repec.org/article/aeaaecrev/v_3a106_3ay_3a2016_3ai_3a5_3ap_3a214-18.htm">partie substantielle de cette dégradation</a>, comme l’ont montré les économistes François Gourio, Todd Messer et Michael Siemer dès 2016 en comparant les dynamiques entre différents États américains.</p>
<p>L’un des résultats les plus marquants de cette étude empirique est que les effets de la création d’entreprise sur l’emploi et la productivité sont amplifiés au cours du temps, c’est-à-dire qu’ils sont les plus forts non pas au moment de la hausse de la création d’entreprises, mais plutôt 4 à 6 ans après. Cela s’explique par le cumul de « générations manquantes ». En effet, lors de la première année de crise, les nouvelles entreprises ne représentent qu’une part faible de l’ensemble des entreprises dans l’économie, et leur disparition est donc peu visible au niveau macroéconomique. En revanche, la deuxième année, une seconde génération manquante de nouvelles firmes vient s’ajouter à la première, et ainsi de suite de sorte qu’après sept années de ralentissement s’ensuivent naturellement des implications macroéconomiques très importantes et durables dans les économies concernées.</p>
<p>Dès lors se (re-)pose la question de l’accompagnement des créateurs d’entreprises comme enjeu essentiel des politiques économiques. Le gouvernement français s’est à nouveau saisi de cette question avec la loi Pacte présentée en 2019, qui contient des mesures de simplification de la création d’entreprise et de réorientation de l’épargne des Français vers les PME. Cependant, les mesures d’appui à la création d’entreprises ne sont pas nouvelles, la création du statut de micro-entrepreneur en constituant un autre exemple, avec un bilan qui reste <a href="https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-dispositifs-de-soutien-la-creation-dentreprises">pour le moment contrasté</a>. D’où l’importance de la bonne mise en œuvre et de l’évaluation systématique de ces politiques publiques.</p>
<hr>
<p><em>Cet article s’appuie sur l’étude des auteurs intitulée « La création d’entreprises dix ans après la grande récession : une perspective macroéconomique » et publiée dans la <a href="http://www.cepii.fr/PDF_PUB/lettre/2019/let401.pdf">Lettre du CEPII de juillet-août 2019</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/129271/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabien Tripier est conseiller scientifique au CEPII. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Marlène Isoré ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La faiblesse de l’activité économique et la hausse du coût du crédit ont découragé certains entrepreneurs dans leur projet, ce qui a pesé sur l’emploi et la productivité au niveau macroéconomique.Fabien Tripier, Professeur des Universités, Université d'Evry, CEPIIMarlène Isoré, Université d’Evry – Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1248282019-11-21T20:51:11Z2019-11-21T20:51:11ZLa recherche participative au Sénégal, une bonne recette pour booster l’agriculture<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/300232/original/file-20191105-88368-7m3vlz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1024%2C768&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Site pilote de production locale de biofertlisants à base de champignons mycorhiziens par les producteurs à Darou Mousty (Sénégal)</span> <span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>L’activité agricole de la région ouest-africaine est caractérisée par une production fluctuante. Elle est souvent limitée par l’effet combiné de différents facteurs. Il s’agit, en l’occurrence, de l’insuffisance et de l’irrégularité des pluies, de la pauvreté ou salinisation des sols, des faibles niveaux d’intrants, du parasitisme, etc. D’où des défis pressants à relever en matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle, de lutte contre la pauvreté rurale et de recherche d’une agriculture durable.</p>
<p>Pour faire face à de tels défis, la recherche recommande différentes pratiques culturales visant à accroître la productivité et à améliorer la production agricole et forestière. Parmi celles-ci figure en bonne place l’utilisation de <a href="https://www.aquaportail.com/definition-4138-organisme-symbiotique.html">micro-organismes symbiotiques</a> – en tant que <a href="http://www.biofertilisants.fr/comprendre-les-biofertilisants/biofertilisant-quest-ce-cest-ca-sert/">biofertilisants</a>. Ils vivent en association avec les plantes avec lesquelles ils développent une interaction mutuellement profitable.</p>
<h2>L’inoculation, une technique qui permet d’augmenter naturellement la productivité</h2>
<p>L’<a href="https://pfongue.org/IMG/pdf/fiche_inoculum-vf.pdf">inoculation</a> est une technique simple mais sous-exploitée au Sénégal. Elle consiste à apporter, en général au moment du semis, des champignons et/ou bactéries sélectionnés pour favoriser le développement des plantes associées. Ce procédé stabilise et améliore les rendements agricoles. En effet, il approvisionne les plantes en éléments nutritifs (azote, phosphore, minéraux) qui sont très souvent insuffisants dans les sols des régions arides et semi-arides.</p>
<p>L’inoculation est bien adaptée à l’agriculture familiale, notamment vivrière. Cela en raison de son faible coût et de sa relative facilité d’emploi. Les recherches menées au sein du <a href="http://www.lcm.ird.sn/">Laboratoire Commun en Microbiologie</a>, qui regroupe des chercheurs de l’<a href="https://senegal.ird.fr/l-ird-au-senegal/presentation">Institut de Recherche pour le Développement</a>, de l’<a href="https://www.isra.sn/">Institut sénégalais de recherches agricoles</a> et de l’<a href="https://www.ucad.sn/">Université Cheikh Anta Diop de Dakar</a>, ont été conduites en Afrique de l’Ouest, notamment, au Sénégal.</p>
<p>L’objectif est d’améliorer la connaissance des micro-organismes symbiotiques et d’exploiter pleinement leur potentiel dans les systèmes de culture.</p>
<p>En dépit des atouts de cette technologie, son usage ne s’est pas encore développé. Cela est dû notamment à la faible implication des producteurs dans les programmes de recherche appliquée. Il s’y ajoute l’indisponibilité de l’inoculum au niveau local et à un défaut de diffusion auprès des agriculteurs.</p>
<h2>Le partenariat avec les producteurs agricoles</h2>
<p>Sous l’impulsion du Laboratoire Commun de Microbiologie et du <a href="http://www.cncr.org/">Conseil National de Concertation et de Coopération des Ruraux du Sénégal</a>, une démarche de partenariat innovante et inclusive a été initiée entre les chercheurs et les organisations de producteurs. Cette approche s’est appuyée sur des ateliers de mise à niveau mutuelle et sur un travail collaboratif dans les champs des producteurs. L’appui et le conseil des techniciens agricoles de l’<a href="http://www.servicepublic.gouv.sn/index.php/demarche_administrative/services/2/386">Agence nationale du conseil agricole et rural</a> et de diverses ONG ont également contribué à intégrer les résultats de la recherche dans les pratiques culturales.</p>
<p>De plus, les chercheurs et les producteurs ont mis en place un réseau de parcelles expérimentales rassemblant agriculteurs, chercheurs et conseillers agricoles. Tous ces acteurs sont en train de construire un dispositif à distance d’échanges, de renforcement des capacités et de capitalisation par le développement d’une base de données. Les premières expérimentations ont été menées cet été par les producteurs du réseau sur 14 communes afin de tester le dispositif. Un atelier de restitution regroupant les différents acteurs a permis d’identifier collectivement les actions à mener afin de renforcer et d’améliorer le fonctionnement du réseau.</p>
<p>Avec ce dispositif, les micro-organismes les mieux adaptés aux spéculations sols et zones agro-écologiques seront sélectionnés. Il sera aussi mis à profit pour tester et promouvoir d’autres innovations ou pratiques, comme la lutte biologique.</p>
<p>Cette approche constructive basée sur la collaboration des acteurs concernés est inscrite dans la durée. Celle-ci permet aujourd’hui de confirmer l’effet positif de l’inoculation sur certaines spéculations et accroît la demande d’inoculum. La réflexion collective a débouché sur une solution innovante de production délocalisée d’<a href="https://www.supagro.fr/ress-pepites/sol/co/1_4_3mycorhizes.html">inoculum mycorhizien</a> par les agriculteurs sur une unité pilote à <a href="https://www.google.com/maps/d/embed?mid=1jNqlYUTEgNZ8lU7QrF7hXd5vvJY&ie=UTF8&hl=fr&msa=0&t=h&om=1&ll=15.046967600342276%2C-16.046604000000002&spn=0.031994%2C0.020555&output=embed&s=AARTsJo4fSpBrcxvwSeW6uFTDfrJbNPS1g&z=14">Darou Mousty</a> – une localité située dans une zone de production agricole.</p>
<p>Dans ce modèle, les champignons mycorhiziens « starters » sont produits et contrôlés au Laboratoire Commun de Microbiologie de Dakar. Ils seront ensuite fournis au producteur d’inoculum qui se charge de les multiplier localement sur des racines de maïs en utilisant un procédé valorisant la coque d’arachide, un résidu agricole sur lequel les plants de maïs symbiotiques sont cultivés. La production de bio-fertilisant est enfin contrôlée avant utilisation par les agriculteurs de la zone.</p>
<p>Ce projet a démontré qu’il était possible de produire ce type de bio-fertilisant localement. La mise en place de nouvelles unités de production est prévue dès cette année.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Équipe intersectorielle impliquée dans le développement du semoir « yookoutef » permettant semis et épandage du biofertilisant.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>La solution d’épandage : le semoir « yookoutef »</h2>
<p>Le deuxième frein majeur identifié collectivement est la méthode d’<a href="https://www.futura-sciences.com/planete/definitions/developpement-durable-epandage-6853/">épandage</a> du bio-fertilisant produit. L’implication d’acteurs de différents secteurs réunis a abouti au développement d’une machine adaptée dite « yookoutef ». Il s’agit d’un semoir classique intégrant une fonction de co-localisation d’inoculum et de semences (Brevet d’innovation OAPI). Elle est fabriquée par des artisans sénégalais de l’Association pour la Promotion des Artisans et Ouvriers (APRAO).</p>
<p>La machine est conçue pour réduire la pénibilité du travail agricole et promouvoir la technologie de l’inoculation. Elle a été testée pour la première fois sur de grandes surfaces cette année, d’où l’intérêt que cette innovation a suscité auprès de plusieurs organisations de producteurs.</p>
<p>Forts de ces réussites, les partenaires nourrissent une nouvelle ambition commune : la mise en place d’une filière de bio-fertilisants à base de micro-organismes symbiotiques certifiée « système participatif de garantie » (SPG). Ce sont des systèmes d’assurance qualité prenant en compte l’ensemble de la chaîne de valeur.</p>
<p>Celle-ci rassemble les producteurs agricoles, les producteurs et fournisseurs d’inoculum, les conseillers agricoles, les chercheurs, les partenaires du développement et les consommateurs. De tels systèmes permettent de placer les organisations paysannes au cœur du dispositif et favorisent une bonne appropriation locale des innovations.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/124828/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La région ouest-africaine connaît des défis pressants à relever en matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle, de lutte contre la pauvreté rurale et de recherche d’une agriculture durable.Antoine Le Quéré, Chercheur en écologie microbienne, Institut de recherche pour le développement (IRD)Tatiana Krasova Wade, Chercheur en biologie végétale, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1245302019-11-04T19:28:30Z2019-11-04T19:28:30ZEt si on laissait le smartphone à la porte de l’entreprise ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/295025/original/file-20191001-173347-1repv99.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C26%2C977%2C636&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La réunion n'est pas censée être un temps pour répondre à ses emails !</span> <span class="attribution"><span class="source">Jacob Lund / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Écoutez l’émission de RFI « <a href="http://www.rfi.fr/emission/20191219-internet-mobile-ecrans-on-deconnectait">7 milliards de voisins</a> » sur la déconnexion diffusée le 19 décembre dernier, en partenariat avec The Conversation France.</em></p>
<hr>
<p>L’utilisation des téléphones mobiles est interdite dans l’enceinte des écoles et des collèges. Cette mesure vise à sensibiliser les élèves à l’utilisation raisonnée des outils numériques et à leur faire pleinement bénéficier de la richesse de la vie collective. En effet, selon le ministère de l’Éducation nationale, « l’utilisation du téléphone portable peut nuire gravement à la qualité d’écoute et de concentration nécessaire aux activités d’enseignement ». En outre, « leur utilisation dans l’enceinte des établissements diminue la qualité de la vie collective pourtant indispensable à l’épanouissement des élèves ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1093088120835395584"}"></div></p>
<p>Or, si le smartphone perturbe la vie scolaire, son immixtion dans la vie professionnelle n’est pas non plus sans poser des questions dans la sphère personnelle et professionnelle des adultes.</p>
<h2>Tous perturbés</h2>
<p>Trop souvent, on subit la connexion plus qu’on ne la choisit. Dans l’entreprise, les salariés sont sollicités en permanence par leurs collègues via la messagerie interne, les appels téléphoniques, les SMS, mais aussi par leurs amis sur les messageries instantanées et toutes sortes d’alertes. Or, le cerveau humain n’est pas fait pour traiter autant d’informations et de sollicitations. Le « FOMO » (<em>fear of missing out</em>), soit l’angoisse de passer à côté d’une information, a grandi avec la sophistication des applications où tout est étudié avec soin pour que nous y revenions le plus souvent possible.</p>
<p>Nous vérifions ainsi en moyenne notre téléphone plus de <a href="https://www.tecmark.co.uk/blog/smartphone-usage-data-uk-2014">220 fois par jour</a>, selon une étude menée en 2014. À chaque fois qu’on est sollicité, le cerveau « reboot ». Pour repartir sur une tâche de fond, il faut plusieurs minutes pour se remettre dedans. En effet, le cerveau n’est pas en mesure de réaliser plusieurs tâches de manière strictement simultanée. En fait, plusieurs zones peuvent s’activer en même temps, mais le <a href="https://science.sciencemag.org/content/328/5976/360">cerveau ne traitera qu’une seule tâche à la fois</a>. Ce phénomène, comparable au clignement des yeux, interrompt temporairement, mais inconsciemment, notre attention. Ainsi, lorsque nous devons alterner rapidement entre deux tâches, nous risquons de <a href="https://www.researchgate.net/publication/7604990_Timing_of_the_brain_events_underlying_access_to_consciousness_during_the_attentional_blink">perdre le fil</a> de certaines informations.</p>
<p>C’est un vrai problème pour la productivité, mais aussi pour la santé. Les personnes qui souffrent de burn-out n’arrivent souvent plus à faire la part entre les <a href="https://www.cairn.info/revue-management-et-avenir-2010-2-page-254.htm#">informations qui sont importantes de celles qui ne le sont pas</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1036361884008632321"}"></div></p>
<h2>Se déconnecter… pendant le travail</h2>
<p>Quand on parle de déconnexion, on pense d’abord à ce qui se passe à la maison. C’est le fameux droit à la déconnexion, ou le droit au repos. Mais on devrait aussi parler de la déconnexion dans l’enceinte de l’entreprise. En effet, on pense spontanément aux mails professionnels traités pendant le temps de repos, mais plus rarement aux messages personnels pendant le temps de travail. Or, le cerveau ne fait pas la distinction entre une notification Facebook pour la cagnotte d’anniversaire de votre meilleur ami et un mail qui retrace le suivi d’un projet professionnel.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1147938687797407744"}"></div></p>
<p>Bien sûr, les salariés peuvent aller sur Facebook pour faire une pause. Mais attention à ne pas confondre pause « choisie » et pause « subie ». Autrement dit, « je vais faire ma pause Facebook car j’ai bossé suffisamment et mon cerveau a besoin de faire une pause », est très différent de « je vais sur mon smartphone car mon téléphone vient de vibrer ». Ce sont deux paradigmes très différents.</p>
<p>Le premier cas va me permettre d’être plus productif et de me remettre plus facilement au travail, de m’aérer l’esprit et de trouver plus facilement des idées nouvelles. Dans le deuxième cas c’est juste subi : « je fais des pauses Facebook, mais ce ne sont pas tellement des pauses car elles sont tellement nombreuses que, finalement, je n’arrive pas à bien faire mon travail, et à la fin de ma journée je ne suis pas satisfait, je vais devoir ramener du travail et des soucis professionnels à la maison car ma journée de travail a été mal organisée ».</p>
<h2>Des réunions où l’on s’écoute (enfin)</h2>
<p>L’entreprise a évidemment sa part de responsabilité dans ce phénomène et devrait accompagner les collaborateurs à mieux s’organiser. Le problème de fond ne vient pas des outils numériques, mais de la manière dont on organise les temps dans l’entreprise.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/262401/original/file-20190306-100784-1uk2far.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/262401/original/file-20190306-100784-1uk2far.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/262401/original/file-20190306-100784-1uk2far.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/262401/original/file-20190306-100784-1uk2far.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/262401/original/file-20190306-100784-1uk2far.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/262401/original/file-20190306-100784-1uk2far.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/262401/original/file-20190306-100784-1uk2far.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/262401/original/file-20190306-100784-1uk2far.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.blog-emploi.com/journee-travail-generations-x-y-z/">Blog-emploi.com</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Trop souvent, les salariés se retrouvent par exemple à accepter des réunions tout en se demandant ce qu’ils vont bien pouvoir y faire. Les outils numériques rendent alors ces réunions presque « soutenables ».</p>
<p>On organise des réunions et les gens ne disent rien, si la réunion leur semble utile ou non, ils s’y rendent alors même que certaines ne les concernent pas directement. Ils savent qu’ils vont pouvoir traiter leurs mails en réunion, et envoyer des messages, parfois même aux gens qui se trouvent dans la même salle de réunion qu’eux. Là, il y a un gros problème, car on mélange tout. Une réunion, c’est un moment où on se connecte avec les gens qui sont dans la même salle pour parler d’un sujet et d’un seul sujet.</p>
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<figcaption><span class="caption">« En France, les réunions sont mal pensées ». Témoignage de Michel Mondet, président du cabinet de conseil Akéance, sur Xerfi canal (2019).</span></figcaption>
</figure>
<p>Si on souhaite faire de la réunion un élément positif pour les organisations et ceux qui y travaillent, il faut prendre en compte une nouvelle concordance des temps professionnels et personnels rendue possible par les outils mobiles. On pourrait notamment raccourcir les réunions et couper les téléphones pour que les gens s’écoutent. Plutôt que d’instaurer un droit à la déconnexion, on ferait ainsi mieux de parler de bonne connexion, d’inventer de nouveaux équilibres et d’apprendre à se servir des technologies à bon escient pour réguler leurs usages plutôt que de vouloir compartimenter des espaces de vie qui ne le seront jamais !</p>
<h2>Une nouvelle concordance des temps</h2>
<p>Les réticences managériales face aux mesures en faveur d’une nouvelle articulation des temps de vie reposent sur une hypothèse tayloriste obsolète selon laquelle la création de valeur est proportionnelle au temps de présence. Contrairement à ce qui est établi, les horaires stricts ne favorisent pas la productivité au travail. Tout le monde n’est pas forcément au mieux de sa forme entre 9h et 18h. L’homme numérique est au centre de son monde, il doit se sentir libre et léger. Certaines personnes sont plus efficaces le matin, d’autres le soir et pourtant on continue de demander à tout le monde d’arriver à la même heure. Ce qui compte le plus, c’est la qualité des relations et la capacité à solliciter ces dernières au moment où leur attention est disponible.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1074453449478209537"}"></div></p>
<p>En définitive, il faut retrouver des moments pour le travail de fond, d’autres pour se synchroniser ou encore pour se détendre. Contrairement aux organisations du XX<sup>e</sup> siècle, ces moments n’ont plus systématiquement besoin d’être identiques pour tout le monde au même temps et sur les mêmes lieux. En revanche, nous ne pouvons pas physiquement faire perdurer ces moments… tous en même temps !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/124530/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yann-Mael Larher est co-fondateur de Okay Doc. </span></em></p>Aujourd’hui nous sommes bombardés d’informations, de push, de notifications… autant d’attaques contre notre productivité.Yann-Mael Larher, Professeur associé, spécialiste des relations numériques de travail, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1255022019-10-23T19:58:58Z2019-10-23T19:58:58ZParticipation aux résultats : des effets disparates sur la productivité des entreprises<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/298121/original/file-20191022-117981-g5dmg7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C32%2C973%2C604&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’introduction de dispositifs de participation conduirait à des gains de productivité de l’ordre de 2 % en moyenne.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Fizkes / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>En 2017, près de la moitié des salariés du secteur privé ont pu bénéficier de dispositifs de participation aux résultats des entreprises (cf. figure 1). Les derniers chiffres de la <a href="https://dares.travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/dares_resultats_participation_interessement_epargne_salariale_2017.pdf">Dares</a> montrent que l’exercice 2017 a permis de distribuer 19 milliards d’euros à 7,5 millions de salariés, soit une prime moyenne de 2 512 euros, ce qui est loin d’être négligeable.</p>
<p>Depuis 2012, le plan d’épargne entreprise (PEE) est le dispositif le plus répandu dans les entreprises françaises avec 42,8 % des salariés couverts, suivi de la participation aux résultats des entreprises (37,9 %) qui est obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés et de l’intéressement qui est facultatif mais qui concerne tout de même 32,9 % des salariés.</p>
<h2>Un contexte favorable à l’intéressement</h2>
<p>Ces dispositifs sont majoritairement présents dans les grandes entreprises mais la loi Pacte (<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichLoiPubliee.do?idDocument=JORFDOLE000037080861&type=general&legislature=15">Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises</a>), promulguée le 22 mai 2019, a levé plusieurs freins à son développement dans les PME en proposant de supprimer le forfait social sur l’intéressement et de simplifier la rédaction des accords. Cette réforme laisse donc augurer de nouvelles perspectives de développement de ces dispositifs, et en particulier de l’intéressement.</p>
<p><strong>Figure 1. Les dispositifs de participation, d’intéressement et d’épargne salariale dans les entreprises de 10 salariés ou plus de 2006 à 2017 en France</strong></p>
<figure class="align-center ">
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<span class="caption">Les dispositifs de participation, d’intéressement et d’épargne salariale dans les entreprises de 10 salariés ou plus de 2006 à 2017 en France.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Dares, enquêtes Acemo-Pipa 2007 à 2018</span></span>
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</figure>
<p>Au-delà d’un traitement fiscal de plus en plus favorable en France, le succès des dispositifs de partage des bénéfices auprès des entreprises tient au fait que ceux-ci sont réputés garantir la motivation et la fidélisation des salariés, et indirectement leur productivité. Mais qu’en est-il exactement ? Que nous apprennent les études récentes consacrées aux effets de ces dispositifs sur la productivité des salariés ?</p>
<h2>Le partage des profits encourage la productivité</h2>
<p>Avec mes collègues Chris Doucouliagos, Douglas L. Kruse et T.D. Stanley, nous avons réalisé une synthèse des études menées sur cette question qui vient d’être publiée dans le <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/bjir.12483"><em>British Journal of Industrial Relations</em></a>.</p>
<p>Notre méta-analyse suggère que les dispositifs de participation aux résultats (<em>profit-sharing</em>, <em>gain sharing</em> aux États-Unis, participation et intéressement en France) améliorent bien, en moyenne, la productivité des entreprises.</p>
<p>Le tableau 1 présente les différents résultats tirés des 56 études empiriques menées entre 1983 et 2015 sur le sujet dans différents pays. En général, ces enquêtes observent une relation positive entre les pratiques de partage des profits et la productivité du travail.</p>
<p><strong>Tableau 1. Partage des bénéfices et productivité</strong></p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/297729/original/file-20191018-56238-1lfb7i7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/297729/original/file-20191018-56238-1lfb7i7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=503&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/297729/original/file-20191018-56238-1lfb7i7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=503&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/297729/original/file-20191018-56238-1lfb7i7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=503&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/297729/original/file-20191018-56238-1lfb7i7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=632&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/297729/original/file-20191018-56238-1lfb7i7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=632&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/297729/original/file-20191018-56238-1lfb7i7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=632&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p>Cependant, on peut observer une dispersion des résultats assez importante, notamment en fonction des caractéristiques de chaque dispositif de participation. Les écarts observés s’expliquent aussi par la qualité des études réalisées (évaluée ici par la précision ou puissance statistique de l’étude, cf. figure 2) et par l’existence de cadres institutionnels différents d’un pays à l’autre qui peut affecter l’efficacité de ces dispositifs.</p>
<p><strong>Figure 2. Corrélations partielles entre dispositifs de partage de profits et productivité du travail selon le niveau de précision des études.</strong></p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/297690/original/file-20191018-56224-fosihu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/297690/original/file-20191018-56224-fosihu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=439&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/297690/original/file-20191018-56224-fosihu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=439&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/297690/original/file-20191018-56224-fosihu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=439&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/297690/original/file-20191018-56224-fosihu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=552&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/297690/original/file-20191018-56224-fosihu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=552&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/297690/original/file-20191018-56224-fosihu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=552&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Notes : La corrélation partielle est la corrélation restant entre deux variables après avoir contrôlé plusieurs autres variables comme le secteur d’activité, la taille de l’entreprise, etc.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Doucouliagos, Laroche, Kruse et Stanley (2019)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nos résultats mettent également en évidence l’importance du type d’actionnariat qui caractérise les organisations. Ainsi, les dispositifs de partage collectif des bénéfices sont plus souvent associés à des gains de productivité dans les entreprises coopératives, c’est-à-dire dans les organisations qui appartiennent à leur membre et sont contrôlées par eux (cf. tableau 1).</p>
<p>Ce constat renforce l’idée selon laquelle ce type de pratique de rémunération collective ne peut être efficace que si les individus disposent d’une forme de contrôle sur les décisions qui sont prises dans l’organisation.</p>
<h2>Le poids des syndicats</h2>
<p>En France, des travaux avaient déjà montré dès les années 1990 que l’introduction de dispositifs de participation conduisait à des gains de productivité de <a href="https://www.persee.fr/doc/estat_0336-1454_1992_num_257_1_5679">l’ordre de 2 % en moyenne</a>. Les effets sur la productivité semblent d’autant plus importants que le niveau des primes d’intéressement ou de participation est élevé, mais il apparaît aussi que d’autres facteurs rendent plus ou moins efficaces ces dispositifs.</p>
<p>Ainsi, notre étude indique que les dispositifs de participation aux résultats sont plus efficaces en présence de syndicats sur le lieu de travail. Ce constat est finalement compatible avec l’idée d’une complémentarité entre les dispositifs de partage des profits et ceux relatifs à la participation des salariés et au contrôle de l’entreprise. Ces dispositifs peuvent relever de pratiques participatives introduites par l’employeur (cercles de qualité, groupe autonome de travail, etc.) mais aussi relever de dispositifs de participation/consultation des représentants du personnel et des syndicats.</p>
<p>Des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/bjir.12135">études récentes</a> ont ainsi montré que les pratiques de <em>profit sharing</em> fonctionnent mieux si elles sont associées à des pratiques d’information et de consultation des salariés visant à renforcer la motivation et l’implication des salariés. En tant que forme d’expression collective, les syndicats pourraient au même titre que les pratiques d’information et de consultation contribuer à renforcer l’internalisation des objectifs de l’entreprise favorisant ainsi l’impact positif de ces dispositifs sur la productivité de l’entreprise.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/298122/original/file-20191022-28120-l1uj4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/298122/original/file-20191022-28120-l1uj4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/298122/original/file-20191022-28120-l1uj4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/298122/original/file-20191022-28120-l1uj4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/298122/original/file-20191022-28120-l1uj4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/298122/original/file-20191022-28120-l1uj4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/298122/original/file-20191022-28120-l1uj4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les syndicats, s’ils sont associés à des pratiques d’information et de consultation des salariés, jouent un rôle clé dans le dispositif de la participation aux résultats.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Matej Kastelic/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Or, comme l’a en effet montré la recherche, les effets positifs sur la productivité résultent d’une <a href="https://academic.oup.com/qje/article-abstract/102/1/23/1926194">meilleure coopération et information</a> au sein de l’entreprise qui provient de l’émergence d’un contrôle horizontal et informel. L’une des principales critiques formulées à l’égard des modes de rémunération collective est l’apparition du phénomène de « passager clandestin » (<em>free-rider</em>) dans la mesure où chaque individu peut espérer bénéficier du travail des autres sans lui-même fournir d’effort. Un climat de coopération et de contrôle informel entre les salariés peut donc atténuer cet effet et réduire le nombre de « resquilleurs ».</p>
<p>En définitive, les dispositifs de participation aux résultats ne peuvent donc à eux seuls assurer une véritable convergence d’intérêts entre employeurs et salariés. Pour que les dispositifs de partage du profit entraînent une hausse de productivité significative, il est crucial que les salariés comprennent en quoi l’augmentation de leur niveau d’effort aura une réelle influence sur leur rémunération. Il faut aussi qu’ils aient le sentiment de pouvoir influencer les décisions prises au sein de l’entreprise. Dès lors, les syndicats peuvent jouer un rôle essentiel dans le partage d’informations et la clarification des objectifs organisationnels, autant de facteurs permettant d’assurer le succès des pratiques de partage des profits.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/125502/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Patrice Laroche ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si leur impact reste globalement positif, l’efficacité des dispositifs partage des bénéfices dépend de paramètres comme le contexte institutionnel ou la présence de syndicats.Patrice Laroche, Professeur des Universités en sciences de gestion, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1244782019-10-03T17:41:53Z2019-10-03T17:41:53ZLa semaine de quatre jours n'est pas un luxe, elle est nécessaire au progrès de l'humanité!<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/295057/original/file-20191001-173347-1l752mk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C0%2C5455%2C3645&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La semaine réduite serait plus rentable car elle entraînerait une augmentation de la productivité du travail.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>« Nous devrions travailler pour vivre et non vivre pour travailler ».</p>
<p>Voilà ce qu'a déclaré <a href="https://www.bbc.co.uk/news/uk-politics-49798357">John McDonnell dans son discours à la Conférence du Parti travailliste britannique</a>, le 23 septembre dernier. </p>
<p>Le député travailliste s'est ensuite engagé à respecter l'engagement d'instaurer la semaine de travail de 32 heures ou de quatre jours. Cet objectif, a ajouté John McDonnell, serait atteint dans un délai de dix ans, et ce, sans perte de salaire.</p>
<p>La réduction de la semaine de travail à quatre jours serait une véritable révolution. Il s'agirait d'une rupture radicale avec la culture du travail inhérente à notre société capitaliste contemporaine.</p>
<p>Mais cette transformation radicale présente aussi des défis. Les entreprises accepteront-elles une réduction de la semaine de travail ? Quel type de législation sera nécessaire pour réaliser cette réduction ? Le système capitalisme peut-il s'adapter à une semaine de quatre jours ou nous faudra-t-il imaginer - et créer - un avenir au-delà du capitalisme ?</p>
<h2>Améliorer le bien-être</h2>
<p>Les arguments en faveur d'une réduction du temps de travail sont convaincants. Des semaines plus courtes nous permettraient d'avoir plus de temps pour se réaliser et exister en dehors du travail. Cela nous permettrait d'avoir une vie meilleure.</p>
<p>Les études montrent que les horaires de travail prolongés sont associés à diverses formes de maladies - à la fois <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22952309">physiques</a> et <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3266289">mentales</a>. La réduction des heures de travail, dans ces cas, pourrait aider à améliorer la santé et le bien-être des travailleurs.</p>
<p>Au-delà des avantages personnels, nous pourrions atténuer les effets des changements climatiques en travaillant moins. Le travail entraîne des déplacements et des dépenses de consommation qui <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959378013000472">ont un coût environnemental</a>. Cet impact pourrait être réduit en diminuant le temps consacré au travail.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/293778/original/file-20190924-54744-rmtiyh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/293778/original/file-20190924-54744-rmtiyh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/293778/original/file-20190924-54744-rmtiyh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/293778/original/file-20190924-54744-rmtiyh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/293778/original/file-20190924-54744-rmtiyh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/293778/original/file-20190924-54744-rmtiyh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/293778/original/file-20190924-54744-rmtiyh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Travailler de longues heures est devenu la norme.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/young-attractive-woman-sitting-desk-working-379805485">Shutterstock</a></span>
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</figure>
<p>La semaine réduite serait aussi plus rentable car elle entraînerait une <a href="https://theconversation.com/long-hours-at-the-office-could-be-killing-you-the-case-for-a-shorter-working-week-116369">augmentation de la productivité</a>. Des corps et des esprits reposés permettent de faire des heures plus productives et de produire ce dont nous avons besoin avec plus de temps libre.</p>
<p>Enfin, nous pourrions aussi <a href="https://blogs.lse.ac.uk/politicsandpolicy/the-case-for-working-less">mieux travailler</a>. La réduction du temps de travail oblige à prioriser les tâches qui comptent vraiment et à éliminer les heures inutiles. Écourter la semaine de travail, c'est améliorer la qualité du travail autant que réduire sa charge.</p>
<h2>Le règne du travail</h2>
<p>Par ailleurs, le système dans lequel nous vivons nous incite à travailler davantage. On a supposé dans le passé que l'évolution du capitalisme aboutirait à des semaines de travail plus courtes. En 1930, l'économiste John Maynard Keynes <a href="http://www.econ.yale.edu/smith/econ116a/keynes1.pdf">prévoyait la semaine de travail de 15 heures en 2030</a>. Il pensait que cela se ferait sans réforme fondamentale du capitalisme.</p>
<p>En réalité, cependant, les heures de travail dans les économies capitalistes sont restées obstinément élevées et ont même augmenté, <a href="https://www.ft.com/content/96c85ab8-77fc-11e5-a95a-27d368e1ddf7">surtout depuis la crise financière mondiale</a>. De grandes différences dans les heures de travail existent cependant entre les pays. <a href="https://www.nber.org/papers/w4808">Les ouvriers allemands travaillent moins d'heures que les ouvriers américains</a>, par exemple. </p>
<p>Mais aucun pays n'est en voie d'atteindre la semaine de travail de 15, voire de 30 heures au cours des dix prochaines années. Sur la base des tendances actuelles, la plupart des économies capitalistes semblent prêtes à avoir des semaines de travail moyennes de plus du double de la prévision de Keynes.</p>
<p>Les raisons de cette stagnation du nombre d'heures de travail sont variées. D'une part, il y a la question du pouvoir. Les travailleurs ne peuvent espérer obtenir des semaines plus courtes s'ils n'ont pas de <a href="https://theconversation.com/how-strengthening-the-bargaining-power-of-workers-could-boost-uk-productivity-54921">pouvoir de négociation</a>. </p>
<p>Le déclin des syndicats et le virage vers un modèle de gestion visant la création de valeur pour l'actionnaire, qui mesure le succès d'une entreprise en fonction du rendement qu'elle procure à ses actionnaires, a fait en sorte que les employés travaillent plus longtemps, ou les mêmes heures, pour un salaire moindre.</p>
<p>D'autre part, la pression constante du consumérisme a servi d'appui au règne du travail. La publicité et l'innovation en matière de produits ont créé une culture dans laquelle les horaires de travail prolongés ont été acceptés comme normaux, même s'ils entravent le bien-être et la liberté des travailleurs.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/293781/original/file-20190924-54804-18otyti.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/293781/original/file-20190924-54804-18otyti.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/293781/original/file-20190924-54804-18otyti.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/293781/original/file-20190924-54804-18otyti.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/293781/original/file-20190924-54804-18otyti.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/293781/original/file-20190924-54804-18otyti.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/293781/original/file-20190924-54804-18otyti.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le modèle de gestion axé sur la création de valeur pour l'actionnaire a fait en sorte que les travailleurs travaillent plus pour un salaire moindre.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/london-june-30-unidentified-members-trade-80226988?src=_eby8o4Dco5OBEV94cBOCA-1-23">Matt Gibson / Shutterstock.com</a></span>
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<h2>Pour le bien de la planète</h2>
<p>Le défi pour tout parti politique qui s'engage à adopter la semaine de travail réduite est de surmonter ces obstacles. </p>
<p>De manière générale, il semble qu'il y ait maintenant <a href="https://autonomy.work/portfolio/the-shorter-working-week-a-report-from-autonomy-in-collaboration-with-members-of-the-4-day-week-campaign/">une pression plus forte pour obtenir une semaine de travail de quatre jours ou même de trois jours</a>.</p>
<p>Pourtant, les obstacles au changement demeurent énormes. Comme on l'a vu dans l’<a href="https://www.theguardian.com/politics/2019/sep/23/john-mcdonnell-pledges-shorter-working-week-and-no-loss-of-pay">accueil réservé par l'industrie britannique à l'annonce des syndicats</a>, les entreprises devront être convaincues des avantages d'une semaine de travail écourtée.</p>
<p>Pour l'instant, leur scepticisme ne fait que montrer à quel point nous devons repenser l'économie et notre mode de vie en général. Si nous continuons à travailler autant que nous le faisons actuellement, non seulement nous continuerons à nous détruire, mais nous détruirons aussi notre planète. Travailler moins, en bref, n'est pas un luxe, mais une nécessité pour le progrès de l'humanité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/124478/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>David Spencer a reçu des fonds de l'Economic and Social Research Council (ESRC), de l'Union Européenne (UE) et de l'Engineering and Physical Sciences Research Council (EPSRC). </span></em></p>La réduction des heures de travail serait non seulement rentable grâce à l'augmentation de la productivité, mais elle serait nécessaire au bien-être de l'humain et de la planète.David Spencer, Professor of Economics and Political Economy, University of LeedsLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1232262019-09-11T20:54:18Z2019-09-11T20:54:18ZCette concurrence « par soustraction » qui renforce le pouvoir des grandes entreprises<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/291721/original/file-20190910-190012-1h7myhw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=976%2C269%2C3017%2C2425&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’indice de concentration de l’économie américaine, toutes activités confondues, a augmenté de près de 70% entre 1997 et 2014.</span> <span class="attribution"><span class="source">Axel Alvarez / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Il est nécessaire de distinguer la concurrence schumpétérienne entraînant la disparition des entreprises matures et souvent obsolètes et la concurrence qui provoque l’élimination d’entreprises en phase de démarrage. Ces dernières sont des start-up susceptibles, parce que fortement innovantes, plus rentables et plus productives, de franchir les seuils de croissance et de concurrencer les entreprises installées. Dans ce contexte, elles sont rachetées et absorbées par de grandes entreprises installées ou elles se heurtent à des restrictions administratives. C’est ce que nous appelons la concurrence par soustraction.</p>
<p>Les mécanismes sont profondément différents. La destruction créatrice signifie que l’innovation est d’abord un processus interne à l’entreprise qui transforme la structure économique en éliminant les entreprises faiblement productives, en déclassant les technologies dépassées et en créant des gains de productivité indispensables pour que les niveaux de vie s’améliorent. Depuis les années 2000, l’innovation assure mal sa fonction de recomposition du système productif. Le nouveau apparaît <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2016/02/20/robert-j-gordon-l-age-d-or-de-la-croissance-est-derriere-nous_4868845_3234.html">sans apporter de progrès notables</a> (thèse de l’économiste américain Robert J.Gordon), les entreprises peu productives se maintiennent grâce à des politiques monétaires accommodantes, la concentration des marchés augmente et favorise la constitution de rentes de monopole, le dynamisme entrepreneurial s’enraye.</p>
<p>Les États-Unis illustrent nettement le renforcement de la concentration des activités et ses effets macroéconomiques négatifs. En particulier, le déclin du dynamisme entrepreneurial se traduit par un déficit du nombre des start-up et l’effet durable de ce déficit représente un freinage des gains de productivité d’environ 0,5 % par an sur la période 2005-2018.</p>
<h2>Des activités plus concentrées</h2>
<p>L’évolution des niveaux de concentration aux États-Unis et en Europe sur la période 2000-2015 conduit au constat suivant, quelle que soit la méthode utilisée (considérer les marchés européens isolément ou traiter l’Europe comme un marché unique) : l’indice de concentration des 8 plus grandes entreprises pour chaque activité connaît une <a href="http://www.cae-eco.fr/IMG/pdf/cae-focus031.pdf">hausse significative</a> aux États-Unis, alors qu’il reste stable ou en légère diminution en Europe sur cette période.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/291517/original/file-20190909-109962-1p0swjl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291517/original/file-20190909-109962-1p0swjl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291517/original/file-20190909-109962-1p0swjl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291517/original/file-20190909-109962-1p0swjl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291517/original/file-20190909-109962-1p0swjl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291517/original/file-20190909-109962-1p0swjl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291517/original/file-20190909-109962-1p0swjl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291517/original/file-20190909-109962-1p0swjl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution des niveaux de concentration aux États‐Unis et en Union européenne (2000‐2015).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.cae-eco.fr/IMG/pdf/cae-focus031.pdf">Compustat et ORBIS cités par le Conseil d’analyse économique (CAE), mai 2019.</a></span>
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<p>Plus exactement, les calculs ont été réalisés pour les 10 pays européens pour lesquels l’information statistique sur les entreprises est de qualité : Autriche, Belgique, Allemagne, Espagne, Finlande, France, Royaume-Uni, Italie, Pays-Bas, Suède. Ce qui signifie que l’Europe est un espace concurrentiel que la Commission de la concurrence cherche à préserver à partir de l’idée que des structures plus concentrées conduisent inévitablement à des hausses de prix au détriment des consommateurs. En effet, sur la même période, les prix ont augmenté de 15 % de plus aux États-Unis qu’en Europe et la concentration des 4 plus grandes entreprises dans chaque industrie a augmenté de 5 points de pourcentage aux États-Unis par rapport à l’Union européenne.</p>
<p>Sur une période légèrement différente (1997-2014), les auteurs Grullon, Larkin et Michaely ont calculé que l’indice de concentration de l’économie américaine, toutes activités confondues, avait <a href="https://academic.oup.com/rof/article/23/4/697/5477414">augmenté de près de 70 %</a> et que ce phénomène pouvait s’observer dans un grand nombre d’industries. Une confirmation a été fournie en considérant l’autre facette de la concentration, c’est-à-dire le nombre de firmes cotées en bourse. On observe à la fois une forte diminution de ce nombre et une augmentation marquée de la taille de la firme moyenne qui est en 2014 trois fois plus importante en considérant les ventes réelles réalisées qu’elle ne l’était 20 ans auparavant. Si l’on s’attache aux entreprises non cotées, l’indice de concentration a augmenté de 76 % sur la période considérée.</p>
<p>Plusieurs facteurs sont à l’œuvre et notamment les rendements d’échelle et les effets de réseau qui caractérisent en particulier les activités numériques. Ainsi, en 2018, les deux entreprises les plus importantes représentaient 72 % de la consultation des médias sociaux (Facebook et YouTube), 70 % du marché des moteurs de recherche (Google et Microsoft), 69 % du marché de la téléphonie mobile (Verizon et ATT), 76 % du marché des services de livraison (Fedex et UPS), 75 % du marché des smartphones (Apple et Samsung), etc.</p>
<h2>« Acquisitions tueuses »</h2>
<p>L’effet de soustraction se manifeste d’abord par l’acquisition de start-up. Plus précisément, les grandes firmes installées déterminent leurs projets d’innovation et les comparent à ceux des start-up dans la même industrie. Les projets de ces dernières sont connus puisque la recherche de financements les conduit à déposer des brevets de façon à envoyer des signaux de qualité aux investisseurs et à les informer de leur potentiel de R&D. Si les projets sont estimés concurrents, les grandes entreprises, en absorbant les start-up, ont la capacité d’interrompre ces projets, c’est-à-dire de bloquer la concurrence future.</p>
<p>La préemption de la concurrence se manifeste notamment dans l’industrie pharmaceutique et, plus précisément, sur des médicaments potentiellement substituables appartenant à la même classe thérapeutique et possédant le même mécanisme d’action. Pour qualifier ce comportement, les auteurs ont utilisé l’expression d’<a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3241707">« acquisitions tueuses »</a>. Ce comportement se manifeste lorsque le pouvoir de marché de la grande entreprise est important et que ses brevets ont une date d’expiration éloignée, la concurrence des start-up pouvant provoquer dans l’intervalle un affaissement des parts de marché et du chiffre d’affaires.</p>
<p>6 % des acquisitions dans l’échantillon étudié sont des acquisitions tueuses. Le processus d’élimination des start-up est confirmé par le fait que, une fois l’acquisition réalisée, les projets de la grande entreprise sont rigoureusement semblables à ceux qu’ils étaient avant l’acquisition. L’hypothèse de redéploiement des technologies est donc écartée. N’est pas retenue non plus l’hypothèse de redéploiement du capital humain. 78 % des inventeurs des start-up absorbées quittent la grande entreprise et, pour ceux qui restent, le dépôt de brevets chute de 30 %.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291561/original/file-20190909-109939-1mojff7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291561/original/file-20190909-109939-1mojff7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291561/original/file-20190909-109939-1mojff7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291561/original/file-20190909-109939-1mojff7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291561/original/file-20190909-109939-1mojff7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291561/original/file-20190909-109939-1mojff7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291561/original/file-20190909-109939-1mojff7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dans plusieurs secteurs de l’économie numérique comme les smartphones, près des trois quarts du marché sont détenus par les deux principaux acteurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pieter Beens/Shutterstock</span></span>
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<p>Un autre mécanisme d’éviction des start-up réside dans l’influence des coûts d’entrée parmi lesquels les économistes Germán Gutierrez et Thierry Philippon soulignent l’<a href="https://www.nber.org/papers/w26001">importance des régulations</a>. Le déclencheur est ici encore la grande entreprise installée qui est capable d’activer deux leviers complémentaires : le lobbying vis-à-vis du pouvoir politique et l’influence exercée sur les régulateurs (le pouvoir administratif). </p>
<p>En particulier, les agences publiques peuvent être capturées par les intérêts privés qu’elles avaient la charge de réguler. Les régulations administratives représentent des barrières à l’entrée significatives pour les petites entreprises. Les auteurs ont calculé que, lorsque le nombre de régulations est multiplié par deux au sein d’une industrie, cela a pour effet de diminuer le taux de croissance annuel de 2,5 % du nombre de petites entreprises relativement aux grandes entreprises. En d’autres termes, le nombre d’entrées est inversement proportionnel au nombre de restrictions administratives.</p>
<h2>Des effets macroéconomiques négatifs</h2>
<p>L’entrave à la concurrence bloque l’apparition de produits innovants et conduit à restreindre le nombre de produits offerts et à fixer des prix plus élevés. Le constat établi pour l’industrie pharmaceutique pourrait être étendu à d’autres industries.</p>
<p>Les grandes entreprises disposent de deux moyens d’action : l’élimination des futurs concurrents et le pouvoir hors marché (blocage par les régulations) exercé sur les sphères politique et administrative. Cependant, l’exercice du pouvoir de marché a d’autres conséquences. Si on considère les taux de marge (profit/production) des firmes américaines cotées en bourse, en particulier les grandes entreprises qui représentent un tiers de l’emploi total et 41 % des ventes en 2014, on observe une stabilité de ces taux entre 1960 et 1980, puis une augmentation d’un coefficient de 3,6 jusqu’en 2015. Au sein de chaque industrie, on constate que l’augmentation est très forte pour les grandes entreprises.</p>
<p>Les taux de marge impliquent un pouvoir de marché accru et cela a un effet sur les revenus du capital, les dividendes et plus largement les profits. Ce mécanisme n’a rien à voir avec les progrès technologiques. Lorsque le taux de marge est multiplié par 3,6, la part des profits dans le PIB augmente d’un <a href="https://www.nber.org/papers/w23687">facteur égal à 2,34</a>. De plus, lorsque le taux de marge augmente, la hausse des dividendes conduit à une stagnation de l’investissement.</p>
<p>La concentration croissante des activités pose de redoutables problèmes. Un premier pas serait d’adapter les lois de la concurrence au contexte actuel, ce qui permettrait de renouveler l’approche des barrières à l’entrée et d’éviter que la part des entreprises nouvellement créées continue de baisser dans l’économie américaine.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/123226/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bernard Guilhon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans beaucoup d’industries, les firmes les plus puissantes rachètent les start-up et cherchent à élever les barrières à l’entrée du marché, ce qui freine le dynamisme entrepreneurial et l’innovation.Bernard Guilhon, Professeur de sciences économiques, SKEMA Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1200242019-07-14T19:02:00Z2019-07-14T19:02:00ZDans quelles conditions donnez-vous le meilleur de vous-même au travail ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/283083/original/file-20190708-51288-1ul7ycs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=64%2C59%2C718%2C500&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un simple « merci » pour le travail accompli contribue à renforcer l'efficacité des collaborateurs.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Fizkes / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Dans son film <a href="http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=1832.html">« Les temps modernes »</a> sorti en 1936, Charlie Chaplin dénonce les excès du capitalisme dans le monde de l’entreprise qui se caractérise alors par l’essor du taylorisme, l’organisation scientifique du travail. Sorti après la grande <a href="https://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/la_crise_de_1929/187370">crise de 1929</a>, cette œuvre s’inscrit dans un mouvement plus large de défiance du capitalisme qui verra par exemple en France l’arrivée au pouvoir du <a href="https://www.herodote.net/3_mai_1936-evenement-19360503.php">Front populaire</a> de Léon Blum.</p>
<p>C’est également à cette époque que naît aux États-Unis l’<a href="http://asl.univ-montp3.fr/L208-09/MCC4/E42SLMC1_OrgEntr/docs/L_ecole_des_relations_humaines.pdf">École des relations humaines</a>, mouvement qui émerge en réaction au taylorisme et à ses travers (surdivision au travail, absence de sens, négation de la place de l’individu dans l’entreprise). En développant une vision humanisée et humaniste du travail, ce mouvement de pensée donne ses lettres de noblesse à la sociologie au travail en s’interrogeant sur la question suivante : quelles sont les conditions de travail les plus favorables pour améliorer la rentabilité des ouvriers ?</p>
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<figcaption><span class="caption">Bande-annonce du film <em>Les Temps modernes</em> (1936).</span></figcaption>
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<p>Pour ce faire, ils s’appuient sur des études empiriques. Imaginez-vous dans une équipe de 10 salariés que l’on divise en deux. Dans l’une des deux équipes, les conditions de travail reposent uniquement sur la mise en place d’une organisation rationnelle et des processus très aboutis. Sans prise en contact du bien-être et des conditions de travail. Dans l’autre équipe, l’accent est mis sur des attentions pour les salariés : création d’une salle de pause (ce qui suppose que les salariés aient une pause), locaux propres et aménagés, capacité des salariés de s’exprimer sur leurs conditions de travail et à faire des propositions (à une époque où parler dans l’entreprise pouvait être interdit !). Voilà résumé en quelques mots l’expérience conduite par le psychologue et sociologue australien <a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/elton-mayo/">Elton Mayo</a> dans une usine de recherche et de fabrication de matériel électronique entre 1927 et 1932.</p>
<h2>L’importance des lieux de travail</h2>
<p>Il constate que la productivité du travail s’améliore de 30 % et que l’absentéisme diminue. Néanmoins, l’étude va plus loin et s’interroge sur les causes ayant permis ces résultats, afin de déterminer l'influence de l’environnement de travail matériel et de l’ambiance de travail. Nous pouvons faire là un parallèle avec la notion de « QVT » (Qualité de vie au travail) qui infuse le monde du travail depuis quelques années.</p>
<p>Aujourd’hui, de nombreuses entreprises investissent le champ de l’aménagement des locaux. Derrière le relooking des espaces de travail, d’autres enjeux interviennent qui cimentent la cohésion d’équipe et contribuent à améliorer l’<a href="https://www.myhappyjob.fr/9-conseils-pour-des-espaces-de-travail-conciliant-bien-etre-et-performance/">implication des salariés</a> dans la vie de l’entreprise. Ainsi, avec l’aménagement des locaux de travail, c’est toute la dynamique de l’entreprise qui est impactée : comment choisir l’ameublement, la couleur des bureaux et des espaces communs, comment choisir ses tenues de travail quand elles sont imposées par l’activité (cuisiniers, soignants, pompiers), quelles sont les règles de vie commune à adopter, comment adopter une démarche participative, comment recueillir l’avis des salariés. Des projets de réaménagement reposent alors sur la ligne managériale et les valeurs de l’entreprise : quelle place pour le bien-être, pour l’expression collective et individuelle, comment sont prises les décisions, etc.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/283077/original/file-20190708-51284-18mxsl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/283077/original/file-20190708-51284-18mxsl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/283077/original/file-20190708-51284-18mxsl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/283077/original/file-20190708-51284-18mxsl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/283077/original/file-20190708-51284-18mxsl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/283077/original/file-20190708-51284-18mxsl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/283077/original/file-20190708-51284-18mxsl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">De nombreuses entreprises repensent l’aménagement des locaux pour accroître le bien-être des équipes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Monkey Business Images/Shutterstock</span></span>
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<h2>Les collègues et les « neurones miroirs »</h2>
<p>Si l’environnement spatial de travail est un facteur important de bien-être, la qualité des relations entre collègues est également primordiale. Dans sa pièce « Huis Clos » écrite en 1943, Jean‑Paul Sartre conclut en indiquant que « l’enfer, c’est les autres ». Dans l’univers professionnel, notre entourage a bien un <a href="https://elandestalents.com/mieux-se-connaitre/importance-entourage-pour-etre-heureux-au-travail/">impact direct</a> sur notre humeur et notre ressenti dans l’entreprise.</p>
<p>En neurosciences, on parle de <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/sante/les-neurones-miroir-vous-connaissez-on-vous-explique_28744">« neurones miroirs »</a> qui ont été mis en évidence chez les singes, et dont on peut légitimement penser qu’ils existent dans l’espèce humaine. L’idée est simple : notre humeur agit en miroir de notre entourage. Ainsi, travailler dans une équipe bienveillante, à l’écoute et aidante agit de manière positive sur notre comportement. D’un point de vue plus prosaïque, on pourrait résumer cette réalité de la manière suivante : aller au travail le matin procure-t-il chez moi la joie d’aller retrouver les collègues ? Ou, au contraire, le climat de travail est-il pesant au point d’avoir une boule au ventre qui influe sur ma motivation et mon envie de retrouver les collègues ?</p>
<p>Dans une <a href="http://www.ivhm.fr/wp-content/uploads/2018/02/etude-deloitte.pdf">étude</a> réalisée en 2017 sous la direction de Marc Grassin, philosophe à la faculté de philosophie de l’Institut Catholique de Paris, une majorité des 1 024 personnes interrogées a indiqué que la qualité de vie au travail est liée à l’absence de stress et au bien-être. Il s’agit donc d’un élément essentiel. Le travail est un lieu de socialisation, de relations interpersonnelles dans lequel une vraie dynamique d’équipe, de l’entraide, de la bonne humeur, des collègues que l’on est heureux de rencontrer jouent sur le moral mais aussi sur la performance.</p>
<h2>La reconnaissance, un moteur puissant</h2>
<p>Le récent mouvement des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/gilets-jaunes-62467">« gilets jaunes »</a> a pointé une réalité essentielle que l’on retrouve dans le monde du travail : le besoin de reconnaissance et de considération. On a parlé, pour ce mouvement des « invisibles de la République », pour reprendre le titre du livre de <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/02/06/les-invisibles-de-la-republique-la-jeunesse-oubliee-de-la-france-peripherique_5419924_3232.html">Salomé Berlioux et Erkki Maillard</a>. Dans le monde du travail, c’est un peu la même chose. Le sentiment de reconnaissance et de considération, ou son absence, sont des moteurs puissants. Quelle est ma place dans l’entreprise si ce que je fais n’est pas reconnu ?</p>
<p>Le travail est le prolongement de soi-même. Valoriser ou contraire dénigrer un travail revient indirectement à flatter l’autre au sens positif du terme ou a contrario à le déconsidérer. Qui n’a jamais sur les bancs de l’école ressenti un moment de fierté (et bien-être) au moment d’une note reçue avec les félicitations du correcteur? Il en est de même dans le milieu professionnel.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/283081/original/file-20190708-51258-qrgl3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/283081/original/file-20190708-51258-qrgl3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/283081/original/file-20190708-51258-qrgl3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/283081/original/file-20190708-51258-qrgl3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/283081/original/file-20190708-51258-qrgl3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/283081/original/file-20190708-51258-qrgl3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/283081/original/file-20190708-51258-qrgl3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le manque de reconnaissance ferait partie des éléments qui ont participer au déclenchement du mouvement des « gilets jaunes ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Guillaume Louyot Onickz/Shutterstock</span></span>
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<p>Nous sommes tous, avec plus ou moins d’intensité, sensibles aux marques de reconnaissance quotidienne : un « merci », un « c’est parfait », un « bonjour », témoignent de notre existence au sein de l’entreprise. Il s’agit d’un besoin de reconnaissance qui varie selon les individus, et qui reste un facteur d’engagement très puissant. La considération peut prendre d’autres formes : le salaire, une augmentation, ou une promotion.</p>
<p>Mais surtout, c’est la sincérité du geste ou de la parole qui importe. Il s’agit d’une reconnaissance objective qui valorise la personne soit en tant qu’individu (bonjour, merci) soit son travail. Le rôle du manager est essentiel car c’est lui qui va donner le tempo et être dépositaire de la « ligne éditoriale » managériale de l’entreprise. Il doit veiller dans son attitude quotidienne mais aussi dans son style de management à développer son « empathie managériale ».</p>
<h2>Le sens du travail</h2>
<p>« Faire et défaire, c’est toujours travailler ». Derrière cette maxime populaire se cache une autre réalité du monde du travail : quel est le sens de mon travail ? À quoi sert-il ? Puis-je en être fier ? Quel est le sens de ce que je fais ? Comment concilier l’engagement dans ce que je fais avec le sens de mon travail ?</p>
<p>La notion de « métier » a énormément évolué ; son acception diffère de ce qu’elle aurait pu être il y a quelques dizaines années. Historiquement, un métier représentait à la fois un savoir-faire et la capacité à maîtriser l’ensemble de processus de production, on en tout cas une grande partie. On parlait du métier de boulanger, de paysan, d’ébéniste. Aujourd’hui, la notion de métier a évolué et le développement des projets transversaux, des organisations matricielles ou des démarches en mode projet rendent la réalité du métier beaucoup plus floue. On y a adjoint de nouveaux concepts comme celui de compétences (notamment celle du <a href="https://www.persee.fr/doc/forem_0759-6340_1999_num_67_1_2366_t1_0129_0000_7">« savoir-mobiliser »</a> décrit par le consultant Guy Le Boterf), ou encore la capacité à travailler dans un collectif où on ne maîtrisera plus l’ensemble de la chaîne de production, mais seulement une partie.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1146355355670274049"}"></div></p>
<p>Le sens du travail, c’est également pouvoir travailler dans un secteur d’activité porteur de sens : l’économie sociale et solidaire, l’éducation, la santé, le développement durable. Enfin, et c’est également une nouveauté, le sens au travail, c’est également parvenir à concilier vie personnelle et vie professionnelle. C’est l’addition de cet ensemble de conditions d’exercice qui donnera du sens au travail.</p>
<h2>Il y a encore du travail…</h2>
<p>On peut donc répondre avec certitude qu’un salarié heureux s’engagera plus facilement dans son travail et pour son entreprise. Il faut en conséquence miser sur les leviers qui permettent de le rendre heureux car c’est la combinaison de tous les facteurs cités qui permet aux salariés d’être épanouis au travail et de s’engager dans leurleur entreprise.</p>
<p>Et, il y a encore du… travail. D’après une <a href="https://www.ifop.com/wp-content/uploads/2018/03/2671-1-study_file.pdf">enquête</a> réalisée par l’IFOP en 2014, pour 56 % des Français, le travail est avant tout un moyen de subvenir à ses besoins. Pour 44 % seulement, c’est un moyen de s’épanouir dans la vie. Cela corrobore une autre <a href="https://www.lexpress.fr/emploi/gestion-carriere/qui-sont-les-salaries-europeens-les-plus-heureux-au-travail_1685395.html">étude comparative européenne</a> qui plaçait en 2015 les salariés français (41 %) juste au-dessus de la moyenne des salariés européens heureux (38 %), mais loin derrière les Néerlandais (63 %).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/120024/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hubert Jaspard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’environnement de travail, mais aussi la reconnaissance ou encore la notion de métier participent à l’épanouissement des équipes – et donc à leur performance.Hubert Jaspard, Enseignant vacataire, École des hautes études en santé publique (EHESP) Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1172192019-06-10T19:58:07Z2019-06-10T19:58:07ZDe belles perspectives économiques pour l’Afrique subsaharienne et cinq raisons d’y croire<p>L’idée centrale de cet article est de présenter cinq raisons qui incitent à croire en l’avenir de l’<a href="https://www.financialafrik.com/wp-content/uploads/2017/01/Afrique-subsaharienne.jpg">Afrique subsaharienne</a>, malgré les événements parfois violents et dramatiques dont elle peut être le théâtre.</p>
<p>Cet inventaire centré sur l’activité économique, les pratiques entrepreneuriales et les écosystèmes d’affaires est résolument optimiste. Notre approche n’est cependant ni angélique ni excessivement naïve. La complexité des défis économiques <a href="https://journalintegration.com/6-defis-de-lafrique-2019/">(dette, gouvernance, inclusion, investissement…)</a> et surtout géopolitiques, ethniques, <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/05/16/ebola-en-rdc-plus-de-1-100-morts-l-onu-denonce-le-delire-total-des-rumeurs_5462905_3212.html">sanitaires</a>, militaires, climatiques et démographiques auxquels cette région du monde doit – et devra – faire face n’est certes pas à sous-estimer !</p>
<p>Au regard de l’intense activité économico-managériale de l’Afrique subsaharienne et des bons résultats chiffrés récents – notamment ceux <a href="https://afrique.latribune.fr/economie/2018-10-28/croissance-le-fmi-applaudit-la-performance-de-l-economie-beninoise-795611.html">du Bénin</a> –, nous avons retenu cinq raisons à dimension essentiellement économique. Celles-ci sont classées ci-après de façon tout à fait subjective. Elles nous apparaissent, toutefois, d’importance croissante dans l’impressionnante dynamique africaine.</p>
<h2>1. Un numérique sobre et innovant</h2>
<p>La place du numérique est tout à fait originale et massive en Afrique. Le continent est, en effet, le <a href="http://ltemagazine.com/lemergence-dune-economie-numerique-en-afrique">second marché au monde en termes de demande</a> de technologies de l’information. La communication et la croissance du numérique y sont beaucoup plus fortes que celle de l’économie traditionnelle.</p>
<p>Malgré des infrastructures en qualité et en quantité insuffisantes, une couverture réseau fragmentaire à la <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/01/02/couper-Internet-la-nouvelle-tentation-des-regimes-africains_5404490_3212.html">merci de coupures contre-productives et épisodiques</a>, une lourde fracture numérique, une portabilité faible et un <a href="https://fr.allafrica.com/stories/201808300777.html">roaming coûteux</a>, et surtout, une alimentation électrique instable, l’économie numérique basée sur les réseaux Internet et/ou téléphonique a su se développer de façon sobre et inventive.</p>
<p>Autrement dit, elle se déploie remarquablement, massivement <a href="https://www.jeuneafrique.com/mag/591072/economie/lirresistible-acceleration-de-la-4g/">(cas de la 4G)</a> et de façon innovante avec une économie de moyens et une forte adaptabilité aux usages, pouvoirs d’achats et pratiques.</p>
<p>L’Afrique nous semble prête pour les défis du numérique. Les quatre dimensions usuelles de l’économie numérique sont en effet particulièrement actives en Afrique subsaharienne : la production (équipementiers, opérateurs, télécom, <a href="https://afrique.latribune.fr/africa-tech/telecoms/2019-04-17/telecoms-en-2018-la-telephonie-mobile-a-genere-50-milliards-de-dollars-en-afrique-de-l-ouest-rapport-814531.html">téléphonie mobile</a>), fournisseurs de services numériques (plate-forme, cloud computing, infogérance), l’offre aux ménages puis, les usagers et usages.</p>
<p>Depuis une dizaine d’années, cette dernière dimension a une incidence profonde sur moult secteurs. Il s’agit notamment du secteur bancaire avec les <a href="https://infoguerre.fr/2018/09/enjeux-affrontements-autour-mobile-money-afrique/">services financiers mobiles</a> et les <a href="https://www.afrik.com/cameroun-une-revolution-la-tontine-numerique">tontines numériques</a>. Il s’agit aussi du commerce et de la logistique avec un e-commerce en <a href="https://www.lepoint.fr/economie/e-commerce-l-afrique-entre-performances-et-defis-16-12-2018-2279638_28.php">net progrès</a>. Notons aussi la santé voire l’éducation et l’assurance fortement impactés. Enfin, il reste l’<a href="https://www.cairn.info/revue-afrique-contemporaine-2018-2-page-220.htm">administration (et les services publics)</a>, mais dans une moindre mesure, car les défis réglementaires sont nombreux.</p>
<p>Il ne faut, toutefois, pas négliger les risques liés à la cybercriminalité qui accompagnent la croissance numérique. Cela concerne l’Afrique en général et l’<a href="https://www.agenceecofin.com/operateur/2205-66344-rwanda-kapersky-veut-ouvrir-un-bureau-dans-le-pays-pour-lutter-contre-la-cybercriminalite-grandissante">Afrique de l’Est</a> en particulier (forte croissance oblige). Les efforts de sécurisation à la fois des réseaux et des pratiques et d’information des usagers doivent être soutenus.</p>
<h2>2. Une flexibilité qui allie informel et formel</h2>
<p>La place de formes organisationnelles clairement hybrides est fortement ancrée en Afrique subsaharienne. En général, l’activité économique repose essentiellement sur deux types d’acteurs, soit sur de très imposantes structures de type gouvernemental ou non-gouvernemental – les <a href="https://www.cairn.info/revue-afrique-contemporaine-2007-1-page-131.htm">ONG</a> ou les grands groupes internationaux –, soit sur de <a href="https://journals.openedition.org/communicationorganisation/380">très petites structures</a> de type familial, flexible, agile et opportuniste.</p>
<p>Face à cette diversité de cas, il semble illusoire de vouloir continuer à calquer, de façon un peu mécanique, les approches hypothético-déductives qui ont contribué à valider des théories économiques et managériales en provenance d’Europe ou Amérique du nord.</p>
<p>Sans vouloir invoquer l’<a href="http://mebene.over-blog.com/2015/05/theorie-economique-africaine-mythe-ou-realite.html">ambitieuse théorie économique africaine</a>, il convient à présent :</p>
<ul>
<li><p>de constater et de collecter ;</p></li>
<li><p>d’identifier, de [caractériser et de décrire] ;(http://www.assg.sn/index.php/aims/)</p></li>
<li><p>d’intégrer dans les <a href="https://rfg.revuesonline.com/actualites/276-appel-a-contributions-avant-le-1er-juillet-2019">travaux théoriques et les démarches empiriques ancrées</a>, à la fois les diverses formes d’organisations, les spécificités des pratiques et la richesse de l’action collective.</p></li>
</ul>
<p>Celles-ci s’adaptent, selon les défis du contexte local et des marchés internationaux, entre processus formels et pratiques informelles <a href="https://www.cairn.info/revue-flux1-2006-4-page-73.htm">symbolisées par la rue</a>. Ces organisations se connectent soit aux donneurs d’ordres pour s’adapter aux consommateurs potentiels, soit à la clientèle solvable. Cette flexibilité basée sur deux formes d’organisation apparaît comme un <a href="https://www.lepoint.fr/economie/afrique-le-secteur-informel-fait-sa-revolution-18-07-2017-2144068_28.php">formidable levier</a> de croissance que le FMI semble enfin valoriser.</p>
<h2>3. Une croissance économique forte et soutenue</h2>
<p>Il est fort probable qu’en 2050, l’Afrique sera à la fois le continent le plus peuplé et le plus « productif » du monde. En effet, rien que la population du Nigéria va <a href="https://www.lepoint.fr/economie/demographie-africaine-2050-le-nigeria-devant-les-etats-unis-12-08-2015-1956367_28.php">dépasser celle des États-Unis</a>. En outre, l’usine du monde va se déplacer de la Chine vers l’Afrique. Déjà, leurs destins économiques <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/05/22/la-chine-a-besoin-de-l-afrique-comme-l-afrique-a-besoin-de-la-chine_5302902_3232.html">semblent bien liés</a> autour de trois points stratégiques : <a href="https://www.cairn.info/revue-politique-etrangere-2006-2-page-361.htm3">aide, commerce et investissement</a>.</p>
<p>À court terme, il s’agit donc d’intégrer et d’analyser les leviers que mobiliseront le continent pour se nourrir et se développer en s’appuyant notamment sur une <a href="https://www.lepoint.fr/economie/plus-que-jamais-l-afrique-a-besoin-de-ces-jeunes-pour-moderniser-son-agriculture-24-12-2018-2281715_28.php">main-d’œuvre jeune et inventive</a> et sur l’<a href="https://www.laviesenegalaise.com/tag/une-exploitation-inclusive">exploitation inclusive</a> de ses <a href="https://www.aa.com.tr/fr/afrique/graphique-les-ressources-naturelles-source-despoir-pour-lavenir-de-lafrique/871406">ressources naturelles considérables</a>.</p>
<p>La zone subsaharienne est concernée au regard de l’originalité des pratiques collectives et des fortes <a href="https://recherche.inseec.com/lentrepreneuriat-relais-de-croissance-important-lafrique-subsaharienne/">actions entrepreneuriales</a> qui s’y passent. Celles-ci paraissent enfin accompagnées et légitimées par les politiques gouvernementales, par certains sommets autour de la <a href="https://www.lepoint.fr/economie/digital-marseille-deroule-le-tapis-rouge-aux-start-up-africaines-20-11-2018-2273031_28.php#">Tech for Good</a> et par quelques outils innovants tels que des incubateurs publics/privés autour des nombreuses start-up et scale-up.</p>
<p>Ce dynamisme a pour conséquences une <a href="https://www.huffpostmaghreb.com/entry/economie-africaine-etat-des-lieux-et-perspectives-selon-la-banque-africaine-de-developpement_mg_5c59845fe4b087104757705a">augmentation du PIB par habitant</a> un surendettement maîtrisé et une performance économique globalement encourageante, même si les fruits de cette croissance tardent à être largement distribués. Ces résultats positifs sont mis en avant par la BAD, l’<a href="https://www.agenceecofin.com/economie/0803-64528-la-bceao-table-sur-une-croissance-a-6-8-en-2019-pour-la-zone-uemoa">UEMOA</a> ou le FMI qui table notamment sur une croissance de 6,8 % à 8,3 % à l’instar du Ghana, de l’Éthiopie, de la Côte d’Ivoire, de Djibouti, du Sénégal et de la Tanzanie.</p>
<h2>4. Une percée démocratique et sécuritaire</h2>
<p>Autant il est paradoxal que les <a href="https://www.cairn.info/revue-economique-2010-2-page-263.htm">criminels n’aiment pas forcément le risque</a>, autant il est évident que les entrepreneurs aiment la sécurité. Pour investir quelque part, il faut croire, un tant soit peu, en son avenir et en sa prospérité économique, indique le <a href="https://www.afdb.org/fileadmin/uploads/afdb/Documents/Publications/2019AEO/AEO_2019-FR.pdf">rapport de la Banque africaine de Développement</a>.</p>
<p>Ainsi, la croissance actuelle de l’Afrique subsaharienne repose en partie sur un renouveau du sentiment de sécurité et de stabilité à moyen et long terme. Cette perception – supposée ou réelle – est globalement de plus en plus forte, même <a href="https://www.wathi.org/debat-id/wathinotes-paix-et-securite/la-deterioration-de-la-situation-securitaire-au-burkina-faso/">s’il existe toujours de vastes zones de troubles, de violences et de conflits</a>, comme en témoigne l’actualité.</p>
<p>Les <a href="https://www.wathi.org/laboratoire/tribune/lafrique-quid-des-alternances-forcees-ou-apaisees/">transitions démocratiques</a> (relativement) apaisées qui se multiplient y sont, en effet, pour beaucoup. Il est donc possible de changer de pouvoir autrement que par la violence. Le pouvoir, les initiatives citoyennes et les milieux économiques influents en seront d’autant plus rassurés.</p>
<p>Globalement, l’horizon temporel est aussi plus lisible et serein, ce qui est fondamental <a href="https://www.jeuneafrique.com/734604/economie/classement-ou-investir-en-afrique-en-2019/">pour accueillir à la fois les investisseurs</a> étrangers – notamment via les influentes diasporas –, mais également ceux du continent lui-même.</p>
<h2>5. Une féminisation significative de l’entrepreneuriat</h2>
<p>Comme le notait <a href="https://www.banquemondiale.org/fr/news/opinion/2018/11/29/women-entrepreneurs-the-future-of-africa">Diaretou Gaye, directrice de la stratégie et des opérations de la Banque mondiale)</a> en 2018 :</p>
<blockquote>
<p>« L’Afrique est la seule région au monde où plus de femmes que d’hommes choisissent la voie de l’entrepreneuriat, une réalité dont on ne parle pas assez ».</p>
</blockquote>
<p>Même si, en moyenne, les bénéfices des entreprises appartenant aux femmes restent inférieurs de 38 % aux bénéfices des entreprises appartenant aux hommes, cette réalité est à relativiser à la lumière des trois facteurs explicatifs soulignés par le sommet <a href="https://femmes3000.org/women-in-africa/">Women In Africa</a>.</p>
<p>Tout d’abord, le premier facteur est la nécessité de nourrir « la famille ». Environ 25 % des femmes actives <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/09/30/a-marrakech-les-femmes-font-les-affaires-de-l-afrique_5362431_3212.html">sont amenées à créer leur entreprise</a> et contribuent ainsi à environ 65 % de la richesse du continent.</p>
<p>Le second facteur est, comme nous l’avons souligné plus haut, l’émergence d’un secteur technologique et numérique offrant de nombreuses opportunités entrepreneuriales aux femmes et à leurs familles élargies. Ces nouveaux écosystèmes d’affaires (avec de puissantes <em>success stories</em> féminines telles que <a href="https://www.janngo.com/">Janngo</a> ou <a href="https://www.jumia.com.ng/">Jumia</a>) leur permettent à la fois de quitter leurs secteurs traditionnels d’activité (commerce de détail, textile, couture, alimentation, etc.) et de montrer leur solidarité, leur intégrité mais aussi leur efficacité une fois aux commandes. Ainsi, le rendement des entreprises dirigées par les femmes <a href="https://lexpansion.lexpress.fr/actualite-economique/les-africaines-championnes-du-monde-de-l-entrepreneuriat_2037453.html">serait de 34 % supérieur</a> à celles dirigées par les hommes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/277495/original/file-20190602-69079-14l1zvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/277495/original/file-20190602-69079-14l1zvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/277495/original/file-20190602-69079-14l1zvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/277495/original/file-20190602-69079-14l1zvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/277495/original/file-20190602-69079-14l1zvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/277495/original/file-20190602-69079-14l1zvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/277495/original/file-20190602-69079-14l1zvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un conducteur à Abidjan en train de livrer un produit de Jumia, un cite de e-commerce du Nigéria.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Issouf Sanogo/AFP</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Enfin, le dernier de ces trois facteurs est paradoxal car les difficultés classiques d’accès au financement, à la formation, à la compétence, aux marchés ont pour conséquences d’imposer aux femmes de monter de solides dossiers et de montrer leur détermination pour développer « leur business ».</p>
<h2>Entrepreneuses et mères de famille nombreuse</h2>
<p>Nous conclurons sur une donnée contre-intuitive et spectaculaire soulignée notamment par le <a href="https://www.gemconsortium.org/report/gem-2016-2017-global-report">rapport GEM2017</a> :</p>
<blockquote>
<p>« De manière presque inattendue, les femmes africaines entrepreneuses sont le plus souvent celles qui ont beaucoup d’enfants. Car elles doivent subvenir, non seulement à leurs besoins, mais à ceux de toute leur famille ».</p>
</blockquote>
<p>Cela dit, il ne s’agit pas de se réjouir trop vite, mais bien de montrer qu’à côté des drames et tragédies que traverse le continent, souvent <a href="https://www.jeuneafrique.com/235273/societe/lafrique-malade-de-ses-ressources-naturelles/">liés directement ou indirectement à ses immenses ressources naturelles</a>, s’installe au sud du Sahara une dynamique économique <a href="https://happyinafrica.com/">originale et inspirante</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/117219/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sabine Patricia Moungou Mbenda est Vice-Doyen en charge de la programmation et du suivi des activités académiques de la Faculté des Sciences Economiques et de Gestion (FSEG) de l'université de Yaoundé 2 au Cameroun
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Barnabé Thierry Godonou et Lucain Some ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Cinq raisons, listées ici en toute subjectivité, qui assoient l’avenir économique de l’Afrique subsaharienne malgré les événements violents et dramatiques dont elle est régulièrement le théâtre.Sabine Patricia Moungou Mbenda, Vice-Doyen, Université de Yaoundé IIBarnabé Thierry Godonou, Docteur en sciences de gestion, Université Aube NouvelleLucain Some, Docteur en Sciences de Gestion, Université Aube NouvelleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1175412019-05-28T23:44:27Z2019-05-28T23:44:27ZLes salariés français sont moins désengagés qu’on ne le dit<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/275714/original/file-20190521-23841-1nrrtkp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C11%2C997%2C742&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Selon une étude, près de 9 salariés sur 10 se sentent engagés dans leur travail.</span> <span class="attribution"><span class="source">Radu Razvan/Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>6 %, c’est la (maigre) proportion des employés français qui se déclarent engagés au travail, selon les résultats de la <a href="https://www.gallup.com/workplace/238079/state-global-workplace-2017.aspx">dernière étude</a> Gallup 2017 sur le travail dans le monde. Plus grave, cet engagement se dégraderait depuis quelques années, puisque ce taux était de 9 % deux ans plus tôt, ce qui freinerait en conséquence la <a href="https://www.fayard.fr/documents-temoignages/liberte-cie-9782213662817">performance des entreprises</a>.</p>
<p>Parce que ces chiffres ne correspondaient pas du tout à ce que nous constations au quotidien sur le terrain lors de nos études qualitatives conduites depuis plus de 10 ans, nous avons voulu les vérifier… quantitativement. Nous avons donc mené deux études quantitatives – administrées par l’institut de sondage BVA – auprès d’un échantillon représentatif de salariés (non-manager, non-cadre) et de dirigeants français.</p>
<p>Les résultats de la première de ces études montrent que, contrairement à ce qui est généralement affirmé, près de 9 salariés sur 10 (87 %) se sentent engagés dans leur travail, dont plus d’un quart (26 %) se disent très engagés. L’étude auprès des dirigeants français ne fait que corroborer ce résultat. En effet, quand on demande aux dirigeants français d’évaluer le niveau d’engagement des employés (les employés incluent ici tous les salariés qui ne sont pas managers) de leur entreprise, ils sont presque 9 sur 10 à juger qu’il est bon, voire très bon (88 % exactement dont 62 % qui estiment que les employés sont engagés et 26 % qui disent qu’ils sont très engagés). Nous sommes donc bien loin de la situation décrite par l’institut Gallup sur le niveau d’engagement des salariés !</p>
<h2>Une étude pas totalement désintéressée…</h2>
<p>L’enquête Gallup peut être questionnée, pas tant du point de vue de l’analyse statistique mais concernant son hypothèse de départ : en effet, ces enquêtes s’appuient sur l’idée qu’il existe une corrélation positive entre le niveau de satisfaction des salariés quant à leurs conditions de travail, leur niveau d’engagement, et la performance économique des entreprises, bref un model gagnant-gagnant a priori non discutable… que nous allons tout de même essayer de discuter !</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/275719/original/file-20190521-23832-zot1vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/275719/original/file-20190521-23832-zot1vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/275719/original/file-20190521-23832-zot1vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/275719/original/file-20190521-23832-zot1vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/275719/original/file-20190521-23832-zot1vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/275719/original/file-20190521-23832-zot1vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/275719/original/file-20190521-23832-zot1vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Il ne faut pas oublier que certains instituts de sondages vendent également des prestations de conseil…</span>
<span class="attribution"><span class="source">Motortion Films/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour établir ces scores d’engagement, Gallup s’est appuyé sur une douzaine de questions portant sur :</p>
<ul>
<li><p>les besoins de base des salariés pour réaliser leur travail ; </p></li>
<li><p>le soutien de leur hiérarchie ; </p></li>
<li><p>la qualité du travail fourni par leurs collègues et s’ils y ont des amis ; </p></li>
<li><p>la possibilité d’évoluer dans ses fonctions ou son entreprise. </p></li>
</ul>
<p>De la réponse à ces questions, Laragh Marchand, partner chez Gallup, affirme avoir « établi un lien clair entre ces critères et le niveau d’engagement, qui se traduit par une productivité individuelle plus ou moins accrue ».</p>
<p>À ce stade, deux critiques peuvent être formulées. D’une part, on peut constater que le score d’engagement est obtenu de façon très indirecte en mesurant la qualité de vie au travail – et non directement en interrogeant les intéressés et leur hiérarchie comme dans les études Audencia/BVA.</p>
<p>D’autre part, si les salariés français se montrent parmi les moins engagés au monde selon l’institut Gallup, plusieurs études rapportent que le travail est une dimension centrale de la vie des Français. Selon une étude Ipsos de 2016, 91 % d’entre eux estiment par exemple que la « valeur travail » évoque <a href="https://www.ipsos.com/fr-fr/les-francais-restent-attaches-la-valeur-du-travail">quelque chose de positif</a>. Dans le même sens, plusieurs études montrent également que les Français font partie des salariés les plus productifs… au monde ! Que l’on en juge : au Royaume-Uni, le taux d’engagés y est de 11 % soit près du double qu’en France (6 %)… mais les salariés français sont plus productifs que les Britanniques selon la dernière <a href="https://data.oecd.org/fr/lprdty/pib-par-heure-travaillee.htm">étude de 2017 de l’OCDE</a> : la France est ainsi 12<sup>e</sup> au monde avec une productivité horaire (PIB par habitant/heures travaillées) de 24,94€/heure travaillée, et le Royaume-Uni 16<sup>e</sup> avec un taux de 21,91€/heure travaillée.</p>
<p>De plus, affirmer que les employés ne sont actuellement pas engagés au service de l’entreprise tout en proposant des innovations managériales censées permettre de remédier à cette situation peut aussi être interprété comme un <a href="https://www.researchgate.net/publication/288675564_In_search_of_explanations_for_the_consulting_explosion">procédé marketing puissant</a>. Le jeu rhétorique consiste à faire parler des faits ou des chiffres pour construire une représentation de la réalité qui est censée être objective mais qui sert en fait des <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0018726709355658">intérêts privés</a>. À cet égard, il est bon de rappeler que l’institut Gallup est à la fois un institut de sondages américain <em>et</em> un cabinet vendant des prestations de conseil.</p>
<h2>Reposer la question du sens</h2>
<p>Ainsi, si les chiffres traduisent une réalité bien différente sur la question de l’engagement des salariés français, cela ne signifie pas pour autant que tout va bien au cœur des entreprises. Mais l’idée qu’un faible niveau d’engagement des salariés est un indicateur suffisant pour justifier de la mise en place de démarches d’<em>empowerment</em> (autonomisation) doit être questionnée. En particulier, on constate que certains salariés – qui peuvent d’ailleurs être très engagés dans leur travail – ne souhaitent tout simplement pas prendre plus de responsabilités dans l’entreprise.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"948346190789259264"}"></div></p>
<p>En effet, l’étude montre que 79 % des salariés français ne souhaitent pas devenir managers alors qu’il se disent très engagés au travail (à 87 %). De fait, prendre plus de responsabilités au travail peut générer du stress, remettre en cause des équilibres vie personnelle/vie professionnelle ou peut tout simplement ne pas apparaître comme intéressant… et n’est donc pas nécessairement un facteur d’engagement pour les salariés !</p>
<p>La question du sens que les individus donnent à leur travail est donc une affaire complexe qui ne peut pas se résumer en un chiffre, comme celui du niveau d’engagement des salariés. Le risque est très clair : mettre en place des nouvelles pratiques de management qui sont en décalage avec la façon dont les individus donnent du sens à leur travail et à leur place au sein de l’entreprise. Pour éviter cela, il est absolument nécessaire de remettre la question du sens au cœur de l’entreprise !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/117541/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thibaut Bardon a reçu des financements de la Fondation Audencia dans le cadre de la Chaire Innovations Managériales dont il est titulaire avec Nicolas Arnaud.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Nicolas Arnaud ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une étude menée par des professeurs d’Audencia avec l’institut BVA remet en cause ce qui est généralement affirmé lorsque l’on évoque le rapport au travail des Français.Nicolas Arnaud, Directeur du programme Grande école, Professeur de Management et Stratégie, AudenciaThibaut Bardon, Professeur, AudenciaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1119342019-05-19T20:02:02Z2019-05-19T20:02:02ZUn iPad à roulettes vaut-il un manager en chair et en os ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/270129/original/file-20190419-28100-1tsyfhy.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C10%2C1166%2C760&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La start-up américaine Double Robotics travaille depuis 2012 sur les solutions de téléprésence.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.doublerobotics.com">Double Robotics press kit</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/275295/original/file-20190519-69174-sfh58j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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</figure>
<p><em>Emmanuelle Léon, professeur de management à ESCP Europe, et Thibault Lieurade, chef de rubrique Économie + Entreprises, étaient les invités de l’émission <a href="http://www.rfi.fr/emission/20190520-teletravail-trouver-le-bon-equilibre">« 7 milliards de voisins »</a> sur RFI le lundi 20 mai de 12h à 13h.</em></p>
<hr>
<p>Le travail à distance est en plein essor : certains experts annoncent qu’il concernera près de <a href="https://hbr.org/webinar/2013/05/the-third-wave-of-virtual-work">1,3 milliard de travailleurs</a> dans un futur proche. Pour autant, les organisations sont de plus en plus conscientes que l’absence d’interactions informelles est susceptible de nuire à une forme de <a href="https://hbr.org/webinar/2013/05/the-third-wave-of-virtual-work">collaboration naturelle</a> et, de ce fait, pénalise l’innovation. Face à cette situation paradoxale, de nouvelles technologies sont aujourd’hui expérimentées au sein des entreprises, dont les robots de téléprésence. Certaines entreprises se sont spécialisées dans la commercialisation de ces solutions, à l’image de la start-up californienne Double Robotics. Pour autant, l’arrivée de tels outils suffira-t-elle à compenser la distance physique ?</p>
<h2>Le télétravail, une modalité encore controversée</h2>
<p>Une chose est sûre : il est de plus en plus facile de télétravailler en France. Les évolutions du cadre législatif, l’amélioration des infrastructures, la diffusion des technologies mobiles sont autant de facteurs qui favorisent le <a href="https://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vie-economique-2003-1-page-81.htm">déploiement de cette modalité de travail</a>. Ainsi, une récente étude fait état de <a href="https://zevillage.net/wp-content/uploads/2018/01/Malakoff-Mederic-Ifop-Etude-Teletravail.pdf">25 % de télétravailleurs</a> dans la population active.</p>
<figure>
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<figcaption><span class="caption">Vidéo de démonstration de la solution Double Robotics.</span></figcaption>
</figure>
<p>De nombreuses <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/1529100615593273">recherches</a> mettent en évidence les avantages liés au télétravail, tels qu’une augmentation de la productivité, une meilleure capacité de concentration, une diminution du stress lié notamment au temps de transport, etc. En outre, le télétravail est plébiscité par les <a href="https://www.ipsos.com/fr-fr/teletravail-les-francais-adherent">salariés</a> qui y voient un moyen d’équilibrer davantage leur vie privée et leur vie professionnelle.</p>
<p>Cependant, le télétravail demeure un sujet de controverse, ainsi qu’en témoignent les <a href="https://www.nbcnews.com/business/business-news/why-are-big-companies-calling-their-remote-workers-back-office-n787101">exemples d’entreprises</a> comme Yahoo! BestBuy, Aetna, Bank of America ou encore IBM aux États-Unis qui l’ont soit éliminé, soit réduit. Il présente un certain nombre de défis, tels que la capacité du manager à gérer ses équipes à distance, ou encore le risque d’isolement du télétravailleur, éloigné de son collectif de travail. Le télétravail rend impossibles les interactions informelles sur le lieu de travail et, de ce fait, prive les individus d’informations clés sur ce qui se passe dans leur entreprise.</p>
<h2>Filmé en continu</h2>
<p>Parmi les solutions testées à ce jour par les entreprises pour minimiser les risques liés au télétravail, nous avons récemment étudié le <a href="https://journals.aom.org/toc/amproc/2017/1?pageStart=198">cas d’un robot de téléprésence</a> dans une pépite française de haute technologie spécialisée notamment dans les objets connectés. L’introduction de ce robot était liée au déménagement d’un excellent manager que l’entreprise ne voulait pas perdre. Il a donc été convenu que ce dernier pourrait manager son équipe à distance quatre jours par semaine, et venir au bureau uniquement les mercredis. Ce cas est particulièrement intéressant puisque, d’une part, il est rare que les managers soient seuls en télétravail et, d’autre part, parce qu’il est également rare d’avoir des cas de télétravail de forte intensité, c’est-à-dire supérieurs à deux ou trois jours par semaine.</p>
<p>Qu’est-ce qu’un robot de téléprésence ? Il s’agit d’un outil assez simple composé d’un iPad positionné sur une tige rétractable montée sur roulette. Le robot de téléprésence est guidé par le télétravailleur depuis son domicile et lui permet de circuler à l’intérieur de l’entreprise. Le télétravailleur est filmé en continu depuis son poste de travail et son visage apparaît à l’écran. Il peut donc se déplacer dans les locaux de son entreprise et interagir avec ses collègues via cet outil. Mais est-ce suffisant pour compenser la distance physique ?</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/270132/original/file-20190419-28103-1tnndbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/270132/original/file-20190419-28103-1tnndbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/270132/original/file-20190419-28103-1tnndbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/270132/original/file-20190419-28103-1tnndbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/270132/original/file-20190419-28103-1tnndbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=414&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/270132/original/file-20190419-28103-1tnndbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=414&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/270132/original/file-20190419-28103-1tnndbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=414&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le robot de téléprésence limite l’absence d’interactions informelles dans le travail à distance.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.doublerobotics.com">Double Robotics</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Notre travail a permis d’identifier quatre conditions nécessaires à une implémentation réussie de tels outils dans un collectif de travail.</p>
<p><strong>1. Une relation de confiance préexistante</strong></p>
<p>L’existence, en amont, d’une relation de confiance entre le manager et son équipe est indispensable. Cette confiance est à la fois liée à la compétence de l’individu – à son expertise – mais également aux qualités interpersonnelles qui sont les siennes. Dans le cas que nous avons étudié, les membres de l’équipe préféraient continuer d’être managés, même à distance, par un manager de talent, plutôt que de changer. Ils valorisaient non seulement ses compétences techniques, indispensables chez un développeur, mais également sa capacité à animer le collectif, à donner du feedback et à suivre le travail de chacun. En bref, seul un excellent manager de proximité peut imaginer un jour utiliser un tel outil.</p>
<p><strong>2. Le maintien des routines</strong></p>
<p>Le robot de téléprésence permet de préserver certaines routines dans les relations interpersonnelles. Le manager le positionne à l’entrée de l’<em>open space</em>, afin de pouvoir saluer les membres de son équipe. Il peut ensuite le déplacer (en roulant) pour aller discuter avec une personne en particulier ou prendre part à des discussions en cours. Le reste du temps, le robot est positionné sur sa station de recharge, de manière à être facilement localisable pour les collaborateurs. Au cours des réunions, la possibilité de monter et descendre l’iPad permet au manager de conserver son rôle de leader puisqu’il est également positionné autour de la table. Comme auparavant, il projette son écran d’ordinateur dans la salle et la discussion peut avoir lieu.</p>
<p><strong>3. Une organisation spécifique du travail</strong></p>
<p>Travailler de manière efficace via un robot de téléprésence impose un certain nombre de règles. Par exemple, le manager va utiliser des écouteurs et couper le son pour indiquer qu’il n’est pas disponible – en général parce qu’il est en train de participer à une téléconférence. Le fait de déplacer le robot hors de sa localisation habituelle est également un indicateur d’indisponibilité. Le manager positionne son robot avec son équipe dans une salle de réunion, et gère à distance le déroulement des échanges. L’absence du robot de l’<em>open space</em> indique aux autres collaborateurs que le manager ne doit pas être dérangé.</p>
<p><strong>4. Anthropomorphisme</strong></p>
<p>La relation qui s’établit entre le manager et son robot de téléprésence n’est pas sans surprise. On pouvait s’attendre à une certaine forme d’identification qui, d’ailleurs, a été vérifiée sur le terrain, quand le manager dit « je » en parlant de son robot, ou quand l’équipe parle du robot en utilisant le prénom du manager. Les tours joués au robot (comme le soulever de terre, tourner autour de lui pour lui faire perdre la notion de l’espace ou encore le décorer) sont autant d’actions qui montrent l’assimilation entre le robot et son utilisateur. Les limitations du robot conduisent également les membres de l’équipe à s’occuper de lui, comme s’il était physiquement diminué, en lui ouvrant la porte, en le portant dans une salle de réunion, en le relevant quand il chute, etc.</p>
<p>Mais cela ne s’arrête pas là. Pour le manager, l’anthropomorphisme finit par engendrer une certaine dépendance à l’outil, puisqu’il se sent seul et s’ennuie quand il ne peut pas l’utiliser. Il semble donc que le robot de téléprésence répond à l’enjeu d’isolement du télétravailleur que nous avions identifié auparavant.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/270131/original/file-20190419-28090-vmb5wp.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/270131/original/file-20190419-28090-vmb5wp.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/270131/original/file-20190419-28090-vmb5wp.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/270131/original/file-20190419-28090-vmb5wp.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/270131/original/file-20190419-28090-vmb5wp.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/270131/original/file-20190419-28090-vmb5wp.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/270131/original/file-20190419-28090-vmb5wp.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les salariés décorent le robot – entre autres tours –, ce qui favorise leur assimilation de l’outil.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.doublerobotics.com">Double Robotics</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Et demain ?</h2>
<p>Cette recherche nous a permis de mettre en évidence les facteurs clés de succès quant à l’utilisation d’un robot de téléprésence dans une équipe. Cela étant, de nombreuses questions demeurent en suspens. Ainsi, on constate que, si l’équipe a adopté le robot, les autres collaborateurs de l’entreprise attendent le jour de présence du manager pour interagir avec lui. Par ailleurs, ce type d’outil fonctionne avec une équipe préexistante, mais qu’en serait-il avec une nouvelle équipe, ou tout simplement avec de nouveaux venus au sein d’une équipe ?</p>
<p>Enfin, si les discussions professionnelles sont facilitées en mode synchrone, il reste beaucoup plus compliqué d’interagir au niveau personnel. Un dernier axe de réflexion porte sur l’importance de la présence physique au bureau. À partir du moment où cette dernière reste un marqueur de fiabilité, voire d’engagement au travail, qu’en est-il lorsqu’un tel outil est utilisé ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/111934/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La réponse est oui, mais sous certaines conditions…Emmanuelle Léon, Professeur de management, ESCP Business SchoolMaral Muratbekova-Touron, Professeur de GRH, ESCP Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1149522019-04-05T15:17:29Z2019-04-05T15:17:29ZVous ne faites pas la sieste au bureau ? Vous devriez être viré !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/267667/original/file-20190404-123413-1r4l06.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les bienfaits de la sieste sont désormais établis. Les employés devraient être autorisés -et encouragés - à dormir au travail, comme ils le sont à rester connectés au bureau en tout temps.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Il n'y a pas si longtemps, lorsque notre économie était dominée par l'agriculture et la fabrication, la valeur d'un employé se mesurait à sa production. S'il se relâchait quelques minutes et ne plaçait pas un pare-chocs sur une voiture assez rapidement, il devenait improductif. Et s'il dormait au travail, il volait du temps à son employeur et risquait d'être licencié. </p>
<p>Aujourd'hui, cependant, nous vivons dans ce qui est en grande partie une <a href="https://www.annualreviews.org/doi/abs/10.1146/annurev.soc.29.010202.100037">économie du savoir</a> dans laquelle la valeur d'un employé est fondée sur ses extrants, pour parler en terme comptable, et non sur ses <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Intrant">intrants</a>. Cela signifie que sa performance est davantage axée sur les résultats finaux et moins sur les heures chronométrées.</p>
<p>Dans l'économie du savoir, nous voulons que les employés soient vigilants, pas seulement actifs, et engagés, pas seulement présents. Nous voulons que leur production soit de la meilleure qualité possible. </p>
<p>Dormir au travail peut aider à rendre cet objectif possible.</p>
<h2>Une épidémie d'épuisement</h2>
<p>Selon le <a href="https://www.nsc.org/in-the-newsroom/69-percent-of-employees-many-in-safety-critical-jobs-are-tired-at-work-says-nsc-report">National Safety Council</a>, près de 70 pour cent des employés américains sont fatigués au travail. </p>
<p>On estime que ce niveau de fatigue coûte 410 milliards de dollars US par année en dépenses sociales. Comme je le dis dans mon dernier livre <a href="https://www.infoagepub.com/products/Boost"><em>Boost : The science of recharging yourself in an age of unrelenting demands</em></a>, les adultes en bonne santé ont besoin d'entre <a href="http://jcsm.aasm.org/viewabstract.aspx?pid=30048">sept et neuf heures</a> de sommeil par nuit, mais plusieurs d'entre nous sont loin d'atteindre cet idéal dans les bras de Morphée. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/267383/original/file-20190403-177196-csa96y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/267383/original/file-20190403-177196-csa96y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/267383/original/file-20190403-177196-csa96y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/267383/original/file-20190403-177196-csa96y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/267383/original/file-20190403-177196-csa96y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/267383/original/file-20190403-177196-csa96y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/267383/original/file-20190403-177196-csa96y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Si les employés sont tenus d'être disponibles après les heures de travail, ils devraient également être autorisés à dormir au travail.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Trente-cinq pour cent de la population dort moins de sept heures chaque nuit. Entre 1985 et 2012, le pourcentage d'adultes américains qui dormaient moins de six heures par nuit <a href="https://doi.org/10.5665/sleep.4684">a augmenté de plus de 30 pour cent</a>. Et, par rapport à il y a 60 ans, les gens dorment <a href="https://doi.org/10.1016/S1389-9457(08)70013-3">une heure et demie à deux heures</a> de moins chaque nuit. </p>
<p>La somnolence qui s'ensuit entraîne des dangers potentiels tant au travail qu'à l'extérieur. Par exemple, environ <a href="https://www.cdc.gov/features/dsdrowsydriving/index.html">un conducteur sur 25 déclare s'être endormi au volant</a> au cours des 30 derniers jours ! </p>
<p>Le problème est si grave que les Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis considèrent <a href="https://www.sleepdr.com/the-sleep-blog/cdc-declares-sleep-disorders-a-public-health-epidemic/">le manque de sommeil comme une épidémie de santé publique</a>.</p>
<h2>Des espaces pour faire la sieste au travail</h2>
<p>Ce niveau de fatigue s'explique en partie par le fait que la frontière entre le travail et la maison s'estompe. <a href="https://www.pewinternet.org/fact-sheet/mobile/">Quatre-vingt-quinze pour cent des Américains </a> possèdent maintenant un téléphone cellulaire et 77 pour cent, un téléphone intelligent. </p>
<p>En raison de l'omniprésence des technologies de communication, les employés peuvent désormais être contactés à toute heure du jour ou de la nuit, au travail ou à l'extérieur. Les recherches montrent que 84 % des employés <a href="http://dx.doi.org/10.1037/str0000014">déclarent devoir être disponibles après les heures de travail</a> au moins une partie du temps. </p>
<p>Cela met essentiellement les employés « sur appel ». Et devinez ce qui se passe quand les gens sont de garde ? <a href="https://doi.org/10.1016/j.smrv.2016.06.001">Ils ne dorment pas aussi bien</a>. </p>
<p>Ainsi, non seulement les tendances sociales révèlent une réduction globale de la durée du sommeil, mais les tendances technologiques brouillent la frontière entre le travail et la maison et aggravent notre incapacité à dormir suffisamment. C'est tragique, parce que le travail nous fatigue et que le sommeil est <a href="https://doi.org/10.1080/13594320500513913">l'un des plus importants mécanismes de récupération</a> qui existent.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/OI8Cr7QYnsU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Arianna Huffington parle de l'importance du sommeil pour les entrepreneurs.</span></figcaption>
</figure></p>
<p>Pour lutter contre l'épidémie de somnolence, la frontière entre le travail et la maison devrait s'estomper dans les deux sens. Si les employés sont tenus d'être disponibles après les heures de travail, ils devraient également être autorisés à dormir au travail. </p>
<h2>Les siestes améliorent les performances</h2>
<p>La rentabilité de la sieste a fait l'objet de solides analyses. Des siestes aussi courtes que 10 à 30 minutes <a href="https://doi.org/10.1007/s004210050392">peuvent augmenter la vigilance</a>, réduire la fatigue et <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/12220317">améliorer la performance</a>. De plus, des recherches récentes suggèrent que la sieste <a href="https://www.medicalnewstoday.com/articles/324691.php">peut être aussi efficace que les médicaments</a> pour réduire la tension artérielle. Ainsi, les entreprises qui mettent en œuvre des politiques de sieste peuvent économiser sur le coût des soins de santé. </p>
<p><a href="https://www.sleep.org/articles/sleeping-work-companies-nap-rooms-snooze-friendly-policies/">De nombreuses compagnies</a>, comme Ben & Jerry’s, Zappos et Nike, permettent aux employés de faire la sieste au travail. Je crois que cette tendance en entreprise représente l'avenir.</p>
<p>La croyance que les employés ne devraient pas être autorisés à dormir au travail est un tabou dépassé. Il s'agit d'un vestige de l'époque où la valeur d'un employé dépendait uniquement du résultat de son travail manuel. </p>
<p>Dans une économie moderne, cependant, votre valeur en tant qu'employé, gestionnaire ou cadre supérieur repose sur votre capacité à atteindre les résultats escomptés. Les organisations progressistes reconnaissent que les employés fatigués ne peuvent pas donner le meilleur d'eux-mêmes. Ils affectent donc, essentiellement, le rendement de l'entreprise. </p>
<p>Bref, si vous êtes fatigué et ne dormez pas au travail, vous devriez être congédié !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/114952/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jamie Gruman ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si les employés sont tenus d'être disponibles et connectés après les heures de travail, ils devraient également être autorisés, voire encouragés, à dormir au travail.Jamie Gruman, Professor of Organizational Behaviour, University of GuelphLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1116722019-03-04T20:37:22Z2019-03-04T20:37:22ZComment les entreprises améliorent aujourd’hui leur performance grâce à l’IA<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/258514/original/file-20190212-174867-116kfxc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=104%2C523%2C6863%2C4526&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Chez Amazon, 1 employé sur 7 est un robot. </span> <span class="attribution"><span class="source">Chesky / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Aujourd’hui, les applications de l’intelligence artificielle (IA) dans l’entreprise s’appuient notamment sur les deux grands domaines où l’IA se développe et montre des capacités supérieures à d’autres solutions :</p>
<ul>
<li><p>Les fonctionnalités de perception et de communication (IA d’interface). A savoir la reconnaissance de langage (parole, texte, langage naturel, etc.) ou d’image (faciale, spatiale, etc.). L’IA permet d’observer, de détecter et d’interagir de plus en plus naturellement avec l’homme.</p></li>
<li><p>La modélisation : la résolution de problèmes complexes et l’analyse prédictive. L’IA est alors utilisée pour optimiser des processus existants, automatiser, détecter, ou prédire.</p></li>
</ul>
<p>Comme nous le montrent les exemples actuels de ces applications, tous les métiers de l’entreprise sont désormais concernés : production, supply chain, fonctions comptables et administratives, finance, ressources humaines, marketing.</p>
<h2>L’IA au cœur de la logistique</h2>
<p>En 2012, Amazon déclenche une révolution robotique en <a href="https://www.lemonde.fr/technologies/article/2012/03/20/amazon-rachete-une-entreprise-de-logistique-pour-775-millions-de-dollars_1672503_651865.html">rachetant Kiva System</a>, une entreprise spécialisée dans la fabrication de robots dédiés à la logistique d’expédition. Depuis, les entrepôts sont ultra-automatisés et un employé d’Amazon sur 7 est… un robot, soit 14 % des effectifs !</p>
<p>Nous invitons le lecteur à visionner la valse des robots, un véritable ballet où la coordination des robots est programmée par de l’IA. Équipé de laser, chacun est guidé par des QR codes placés sur le plancher. Au gré des commandes entrantes et sortantes, les robots se placent sous l’une des étagères chargées en articles aussi variés que des livres, bijoux ou appareils ménagers. Le stockage des produits semble irraisonné (vos placards sont mieux rangés !) et pourtant, des programmes sophistiqués d’optimisation de l’espace de stockage selon la rotation des produits et les prévisions de commandes permettent de résoudre l’équation de minimisation des coûts de stockage sous contrainte de centaines milliers de références et de milliers de commandes quotidiennes.</p>
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<figcaption><span class="caption">Le ballet des robots Kiva dans les entrepôts d’Amazon (YouTube).</span></figcaption>
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<p>Les gains sont nombreux : gain de temps lors de la préparation des commandes, gain de productivité grâce au flux des robots, 50 % d’espace supplémentaire gagné par rapport à un entrepôt classique. Pour les salariés en charge de la manutention, les <em>pickers</em>, ce sont moins de tâches lourdes et pénibles, une optimisation de leur parcours dans des entrepôts (qui peuvent atteindre la taille de 14 terrains de football), moins d’erreurs et donc plus de satisfaction pour le client final.</p>
<h2>Détecter la fraude avec justesse</h2>
<p>La digitalisation accrue des services bancaires a pour conséquence l’augmentation du <a href="https://www.ladepeche.fr/article/2018/05/16/2798925-le-nombre-d-escroqueries-bancaires-a-double-en-six-ans.html">nombre d’opérations de fraude</a>. Depuis longtemps, les banques ont développé des modèles prédictifs visant à détecter des fraudes lors d’un paiement par carte bancaire. L’enjeu consiste à détecter les fraudes le plus rapidement possible sans créer de fausses alertes qui conduiraient à informer un client d’une fraude alors que cela serait son usage personnel. Certains clients n’apprécient par cette intrusion abusive dans leur vie privée provoquant une forte insatisfaction et parfois la fermeture de leurs comptes bancaires.</p>
<p>C’est dans ce contexte qu’une banque danoise, Danske Bank, a développé avec succès un <a href="http://thebanquelab.com/la-danske-bank-detecte-la-fraude-bancaire-avec-une-solution-a-base-dintelligence-artificielle-developpee-par-teradata/">modèle d’IA en deux temps</a> : un premier modèle à base d’arbre de décision se concentre sur la détection de fraude par le « machine learning » en analysant de manière transparente les transactions entrantes en moins de 300 millisecondes, une seconde étape de « deep learning » analyse des dizaines de milliers de caractéristiques afin de fournir des informations concernant aussi bien les vraies que les fausses activités frauduleuses.</p>
<iframe src="https://players.brightcove.net/1222253929001/default_default/index.html?videoId=5514091494001" allowfullscreen="" frameborder="0" width="100%" height="400"></iframe>
<h2>Présélectionner les meilleurs profils</h2>
<p>Imaginez le nombre de candidatures reçues par e-mail par une entreprise telle que L’Oréal. Environ un million par an ! Certes les équipes RH de L’Oréal sont très efficaces, mais là, un million de candidatures, cela dépasse les capacités humaines ! Alors, comment traiter cette masse de candidatures et ne pas passer à côté de talentueux collaborateurs ? En septembre 2018, L’Oréal a déployé au Royaume-Uni, aux États-Unis, et en France, une plate-forme conversationnelle, un <a href="https://www.loreal.fr/media/news/2018/october/mya-systems">chatbot</a>, destiné aux candidats à la recherche de stages ou de postes de conseillers beauté.</p>
<p>Êtes-vous disponible à la date de début du stage et tout au long de la période du stage ? Quel est actuellement votre niveau d’étude et combien de temps dure votre formation ? Avez-vous besoin que nous fassions des aménagements particuliers afin de mener à bien votre candidature ? Avez-vous besoin d’informations plus précises sur le poste ? Avez-vous des questions au sujet de la culture d’entreprise ou du processus de recrutement ? Les réponses à ces questions sont traitées par une solution IA d’analyse de texte permettant de déterminer si le profil du postulant correspond aux attentes du poste. À l’issue de cette première étape, les candidats sélectionnés sont mis en relation avec des recruteurs qui peuvent ainsi se concentrer sur la dimension humaine et qualitative du recrutement.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1095334012749438976"}"></div></p>
<h2>Automatiser une tâche sans réelle valeur ajoutée</h2>
<p>Au Crédit Mutuel, c’est quotidiennement 90 000 e-mails envoyés par les clients à destination de leurs chargés de clientèle. Le traitement de l’e-mail (lecture, réponse) prend du temps, il interrompt les tâches en cours, la gestion des urgences n’est pas toujours optimale. Bref, en 2016, il a été décidé d’<a href="https://www.creditmutuel.com/fr/actualites/watson-nouvelle-solution-innovante-au-service-du-reseau-et-de-la-relation-client">assister les conseillers</a> dans le traitement des e-mails clients, et de développer, à partir de la technologie <em>Natural Language Processing</em> de Watson (IBM), un analyseur d’e-mails dont la finalité est triple : identifier automatiquement la demande exprimée dans l’e-mail, détecter l’urgence de la réponse et préparer un contenu de réponse.</p>
<p>Le projet a été une réussite, pour preuve la <a href="https://www.creditmutuel.fr/fr/vitrine/medias/docs/groupe/communiques-de-presse/2018-05-24-ibm-et-le-credit-mutuel-renforcent-leur-partenariat-strategique-pour-construire-la-banque-de-demain-fr.pdf">généralisation du projet</a> à l’ensemble des 20 000 chargés de clientèle. Selon le Crédit Mutuel, une des clés de succès a été l’entraînement initial, au cours duquel la solution est censée apprendre à résoudre le problème à partir d’exemples. Un échantillon de 10 000 e-mails anonymisés a servi à nourrir Watson. En parallèle, trois experts métiers ont été chargés de qualifier les 10 000 e-mails selon l’objet de la demande parmi les 33 objets principaux identifiés en amont (les 33 objets couvrent 70 % des demandes). Les demandes ont été décomposées en s’appuyant sur une description des motifs de langage : environ 1 000 concepts et 4 000 règles correspondant à des motifs de langage ont été fixés.</p>
<p>Ce gros travail réalisé « à la main » était indispensable pour initier l’apprentissage de l’IA de Watson et aboutir à un bon taux de reconnaissance sur les intentions de l’e-mail : de 40 % au démarrage, le taux reconnaissance est dorénavant supérieur à 90 % car l’IA continue à apprendre au fur et à mesure des e-mails traités et des ajustements réalisés par les conseillers.</p>
<p>En automatisant une tâche répétitive sans grande valeur ajoutée, l’intelligence artificielle permet au conseiller de dégager du temps commercial et du temps d’écoute, un équivalent de 200 000 jours homme dans le cas présent. L’IA ne remplace pas le conseiller, elle est mise au service du conseiller dont les performances sont augmentées.</p>
<h2>Une expérience client augmentée</h2>
<p>Le magasin du troisième type sera bardé d’IA ou ne sera pas ! Reconnaissance du produit au moment où il est pris en main et affichage des informations le concernant (prix, ingrédients, conseils d’utilisation, etc.) ; chariots autonomes qui suivent le client et font la queue si besoin ; promotions ultra-personnalisées (tenant compte de l’historique d’achat du client, ses activités de paiement, opérations financières, etc.) adressées au client en fonction de sa localisation dans le magasin ; reconnaissance faciale pour le paiement des clients de l’enseigne et référencés dans la base de clients, une application mobile permettant de valider la transaction bancaire ; livraison par drone ou robot autonome.</p>
<p>Les deux géants du e-commerce, Amazon et Alibaba, sont les plus avancés dans le secteur de la distribution. En s’appuyant sur une technologie nommée <em>Just Walk Out</em>, Amazon, a ouvert un premier magasin test, Amazon Go en janvier 2017 à Seattle. De son côté, Alibaba a beaucoup investi sur le paiement par reconnaissance faciale avec sa filiale Alipay et la technologie <a href="https://www.frenchweb.fr/alibaba-deploie-smile-to-pay-le-paiement-par-reconnaissance-faciale/301285"><em>Smile to pay</em></a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/_eTtCUZGDeY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Vidéo de présentation de la boutique Amazon Go, sans caisse ni file d’attente.</span></figcaption>
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<p>Les performances des sites de e-commerce sont elles aussi dopées à l’IA : traitement du langage naturel appliqué aux requêtes formulées par les clients, facilité dans la recherche d’informations ou de produits, filtre des réponses optimisé, recommandations adaptées car les images des articles ont été analysées par des réseaux de neurones profonds et classées en différentes catégories, etc. Une somme de petits détails qui facilitent la navigation des visiteurs et le passage à l’achat. Facilité, fluidité, sécurité, la technologie est mise à la disposition d’une expérience client enrichie.</p>
<h2>De l’IA à l’intelligence « augmentée »</h2>
<p>Ces exemples montrent qu’en intégrant des fonctionnalités d’IA, les entreprises améliorent leurs capacités et performances au quotidien, ainsi que celles de leurs collaborateurs, clients et partenaires. C’est en cela que certains préfèrent associer l’acronyme IA à intelligence augmentée.</p>
<p>Si les usages se multiplient, de nombreuses entreprises sont encore au stade des premières expérimentations dont il faut tirer les enseignements. Dépasser l’expérimentation et industrialiser l’usage est le point d’attention le plus délicat. Déployer à grande échelle implique de s’assurer que l’architecture technique peut supporter le programme. Cela implique aussi de lancer des projets internes de conduite du changement : démystifier les notions autour de l’IA et la transmission des compétences pour accélérer la compréhension et l’adoption en interne.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/111672/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sandrine Macé est directeur Scientifique de la Chaire Internet of Things, sponsorisée par Schneider Electric, Société Générale Insurance, Valeo</span></em></p>Des applications qui intègrent les fonctionnalités de l’intelligence artificielle permettent aux organisations de se doter de processus plus efficaces et de proposer de meilleurs services.Sandrine Macé, Professeur au département marketing de l'ESCP Europe - Directrice scientifique de la Chaire IoT (Internet of Things), ESCP Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.