tag:theconversation.com,2011:/us/topics/ttip-20629/articlesTTIP – The Conversation2017-03-13T20:08:36Ztag:theconversation.com,2011:article/740152017-03-13T20:08:36Z2017-03-13T20:08:36ZConversation avec Jean Fouré : l’Union européenne doit-elle continuer de signer des accords de libre-échange ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/160388/original/image-20170311-19242-5ka694.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Manifestation des opposants au CETA devant le Parlement européen à Strasbourg le 15 février 2017.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/eci_ttip/32072100484/in/photolist-QS6U6J-S7veKs-S4ZcuC-RXodVp-RSfBV9-RXC916-QS6VCb-RVQEQR-S5ZRzQ-S5ZSPd-S5ZTi9-S5ZTFo-RUZb1q-RXC96r-RAsrab-RdM48G-QTyjRr-RU1a8h-RZ9RMX-QW5SCk-RUZ975-QaCmaU-QaCnDf-RdM3Wu-RdM2J9-RdM4W5-QaCmGq-RdM3gb-RdM4EJ-QaCn9N-RdM4po-QaCjdY-Rh31YX-R3KBGU-Q3nxFv-Q3nxDB-Q3nxHV-R3KBBd-RdM5bJ-Q3nxAF-Q3nxCe-RdyDof-RdM32y-QaCjZh-QaCkM9-QUz8DP-S9yhKX-RWwANo-S5ZSzW-QUz996">Stop TTIP/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est publié dans le cadre de la série du CEPII « L’économie internationale en campagne », un partenariat CEPII–La Tribune–The Conversation–Xerfi–Canal. Jean Fouré, économiste au CEPII, y est spécialiste de commerce international et mondialisation. Il répond aux questions d’Isabelle Bensidoun et Jézabel Couppey-Soubeyran</em>.</p>
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<p><strong>Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les droits de douane ont considérablement diminué, pour ne plus s’établir qu’à environ 2 % dans l’Union européenne. Sur quoi portent alors les négociations commerciales aujourd’hui ?</strong></p>
<p>Les négociations portent désormais principalement sur les mesures non-tarifaires, celles qui sans être des droits de douane ont un impact sur les flux commerciaux : normes sanitaires et techniques, obligations d’étiquetage, accès aux marchés publics, etc. Elles sont au cœur des accords dits de 2<sup>e</sup> génération, comme celui entre l’Union européenne et le Canada (le CETA, ratifié par le Parlement européen le 15 février 2017) ou entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis (le TAFTA, aussi appelé TTIP, en négociation jusque fin 2016).</p>
<p><strong>Pourquoi négocie-t-on ?</strong></p>
<p>Comme pour les droits de douane, l’objectif est de réduire les coûts au commerce, avec l’idée qu’une baisse de ces coûts devrait être profitable aux deux partenaires : les produits seront moins chers et les choix plus importants.</p>
<p>Les études économiques concluent à un impact positif mais modeste de ces accords pour l’UE (de l’ordre de 0,02 points de croissance annuelle supplémentaire sur 15 ans pour le TAFTA). Certains secteurs sont gagnants et d’autres perdants. Dans le cas du CETA, l’accord devrait favoriser les producteurs de fromage tout en mettant en difficulté les producteurs de viande bovine. Avec le TAFTA, c’est l’industrie dans son ensemble qui serait favorisée, mais pas l’agriculture.</p>
<p>Cela étant, ces accords ne se réduisent pas à une simple question de coût et concernent les règles sanitaires et sociales. Il faut donc y regarder de plus près pour déterminer si les gains économiques suffisent à établir la profitabilité de ces accords ou si le diable se cache dans les détails. A priori, il n’y a lieu ni de balayer les risques d’un revers de main, ni d’y opposer un refus de principe.</p>
<p><strong>Quel est l’enjeu des négociations sur les normes européennes ?</strong></p>
<p>L’enjeu est d’adopter de nouvelles normes sanitaires, techniques, sociales, en tenant compte des préférences collectives du partenaire. Par exemple, dans le CETA, un Forum de coopération en matière de réglementation prévoit la possibilité de consulter les représentants des entreprises et de la société civile canadiens, dans l’élaboration des normes européennes, et réciproquement. C’est dire si l’enjeu est clairement plus politique qu’économique, et susceptible de produire des réactions vives quand les nouvelles normes viennent à s’écarter des préférences collectives des citoyens européens.</p>
<p><strong>Cela veut-il dire que des normes peuvent être adoptées sans contrôle démocratique ?</strong></p>
<p>Non, les recommandations d’un tel Forum suivront les canaux habituels de décision et <em>a minima</em> le Parlement européen devra statuer. La Commission européenne n’est pas seul maître à bord. Ce sont les gouvernements de l’Union qui élaborent le mandat de négociation confié à la Commission, et certains domaines peuvent en être exclus, comme c’est souvent le cas pour l’audiovisuel. Ce mandat peut aussi être confirmé en cours de négociation s’il y a un doute quant à la légitimité des négociations, comme cela a été le cas pour le TAFTA en juin 2016, ou retiré.</p>
<p>Les négociations sont secrètes, mais, à la fin de la procédure, le Parlement européen doit approuver le texte. S’il contient des éléments qui dépassent les compétences de l’UE (accord mixte), les parlements nationaux doivent alors le ratifier. Ainsi, la responsabilité des accords de libre-échange incombe toujours à des représentants élus.</p>
<p><strong>Quoi d’autre dans ces accords ?</strong></p>
<p>Ils couvrent une grande diversité de sujets mais s’il ne fallait en mentionner que deux, je citerais le mécanisme de règlement des différends investisseur-État et la liste négative concernant la fourniture de services par un prestataire étranger, deux domaines qui ont fait couler beaucoup d’encre.</p>
<p>Le mécanisme de règlement des différends investisseur-État permet à une entreprise étrangère de poursuivre, devant un tribunal arbitral, un État lorsqu’elle estime que ce dernier a pris une mesure qui nuit à ses profits futurs. Ce mécanisme est très contesté en raison du pouvoir disproportionné qu’il accorderait aux intérêts privés et de l’affaiblissement des États qu’il provoquerait. Sa légitimité suscite d’autant plus d’interrogations que les entreprises ont déjà accès à des tribunaux nationaux dans l’UE.</p>
<p>Par ailleurs, ces accords permettent aux entreprises de services du partenaire d’opérer dans l’UE (et réciproquement) tout en listant un certain nombre de services exclus de cette disposition, comme certains services publics : on parle de liste négative. Or cette liste négative est figée (à moins de rouvrir des négociations) et cela pose un problème. Ainsi, pour un nouveau secteur ou un service qui viendrait à être considéré comme public, on imagine aisément la contestation que pourrait susciter toute protection vis-à-vis d’un partenaire à qui on aurait garanti par défaut l’ouverture dans le traité.</p>
<p><strong>Au final, faut-il accepter ces accords ?</strong></p>
<p>Au niveau strictement économique, il est aujourd’hui largement reconnu que ces accords font des gagnants et des perdants. Mais la réponse n’appartient pas qu’aux économistes ! Les accords de libre-échange sont une question d’arbitrage politique qui va au-delà de l’économie. Il reviendra ainsi au prochain Parlement de se prononcer sur le CETA. Il reviendra aussi au prochain gouvernement de déterminer, par le mandat de négociations qu’il confie à la Commission, le futur de tous les accords qui restent à négocier et de décider des compensations à accorder aux perdants.</p>
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<iframe src="https://player.vimeo.com/video/206061555" width="500" height="281" frameborder="0" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Entretien avec Jean Fouré.</span></figcaption>
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<p><em><strong>Pour aller plus loin</strong><br>
C. Bellora et J. Foure <a href="http://www.cepii.fr/BLOG/bi/post.asp?IDcommunique=482">« De quoi CETA est-il le nom ? »</a>, le blog du CEPII, 18 octobre 2016.<br>
C. Emlinger et J. Foure <a href="http://www.cepii.fr/BLOG/bi/post.asp?IDcommunique=331">« Risques et opportunités d’un accord transatlantique pour l’agroalimentaire européen »</a>, le blog du CEPII, 3 septembre 2014.<br>
L. Fontagne, J. Gourdon et S. Jean, <a href="http://www.cepii.fr/CEPII/fr/publications/lettre/abstract.asp?NoDoc=6159">« Les enjeux économiques du partenariat transatlantique »</a>, La Lettre du CEPII, n° 335, septembre 2013.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/74015/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Avec les accords commerciaux dits de deuxième génération on aborde des réglementations qui touchent davantage au politique qu’à l’économique pur.Isabelle Bensidoun, Économiste, CEPIIJean Fouré, Économiste, CEPIIJézabel Couppey-Soubeyran, Maître de conférences en économie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et conseillère éditoriale, CEPIILicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/709832017-01-15T21:43:03Z2017-01-15T21:43:03ZLes traités commerciaux favorisent-ils le commerce mondial ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/152373/original/image-20170111-16031-et0rl1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C3%2C2632%2C1833&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Navire porte-container (Seattle, Etat de Washington).</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/ruthanddave/4969155113/in/photolist-8z7dGa-fWrkwA-hD7Jqz-stZwhR-6Rzuzu-jxwpFn-cC9Dv3-kY4Le-bV7Xuz-9tktUm-5DgXw6-4Vahp5-rRNyES-69vGkH-oUDzz6-527bJc-pyXs4B-riL2Yr-ejB3cR-pz3WWC-6ZAnt6-527bFp-6gVcao-527bM4-ejB73M-5CGfwJ-rRXjbe-hD812L-77exzc-s9mfma-s9mkCn-6z6KY5-hD98Vr-2sWxP8-2sWxNB-8pfRP-527bTK-7SPiJp-8pfPz-aiQBk4-hD7Yfu-hD91V4-7SAL5L-hD81qb-hD99sZ-4Lrsav-9semb-dVMhB7-m9WhQw-aEp7Lm">Ruth Hartnup/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>L’ère de la « mondialisation heureuse » semble aujourd’hui s’achever. Certains interprètent le <a href="http://bit.ly/2jCBdnY">ralentissement actuel du commerce international</a> comme une fin de partie voire le signe d’un retour en arrière. Certains s’en inquiètent, d’autres s’en réjouissent. Encore doit-on s’interroger sur ce retournement qui rompt avec une loi que les économistes croyaient bien établie et selon laquelle le taux de croissance du commerce mondial amplifiait celui de la production mondiale.</p>
<h2>Ralentissement du commerce mondial</h2>
<p>Depuis 1950 le volume des exportations mondiales a ainsi été multiplié par 40, contre « seulement » 10 pour le PIB. Depuis deux ans, le commerce international stagne alors que la croissance mondiale se situerait, d’après le FMI, autour de 3 % en 2016.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/152377/original/image-20170111-16039-18ihj92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/152377/original/image-20170111-16039-18ihj92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/152377/original/image-20170111-16039-18ihj92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/152377/original/image-20170111-16039-18ihj92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/152377/original/image-20170111-16039-18ihj92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/152377/original/image-20170111-16039-18ihj92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=530&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/152377/original/image-20170111-16039-18ihj92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=530&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/152377/original/image-20170111-16039-18ihj92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=530&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Les explications ne manquent pas : ralentissement de l’économie mondiale, tensions protectionnistes, relocalisations… La mise en cause des accords commerciaux, censés étendre et diffuser le libre-échange peut sembler paradoxale. Mais ce serait oublier que le <a href="http://bit.ly/2icsqcb">GATT</a>, puis l’<a href="http://bit.ly/2j0MJq5">OMC</a>, se sont construits pour accompagner <strong>la libéralisation « multilatérale »</strong> des échanges.</p>
<p>Il s’agissait d’éviter les accords « bilatéraux » qui, dans les années 1930, avaient partitionné le monde en blocs protectionnistes amplifiant ainsi l’effondrement du commerce international.</p>
<p>Nous n’en sommes évidemment pas là. Néanmoins, la moitié des accords commerciaux notifiés à l’<a href="https://www.wto.org/indexfr.htm">Organisation mondiale du commerce</a> (OMC) ont été mis œuvre depuis moins de dix ans. Ils produisent leurs effets aujourd’hui. La pétition de principe selon laquelle les traités « bilatéraux » de libre-échange accroissent le commerce mondial, critiquable d’un point de vue théorique, pourrait être démentie dans les faits.</p>
<h2>Doutes sur les accords bilatéraux</h2>
<p>Trois effets entretiennent ces doutes.</p>
<p>Le premier, bien connu des économistes, est <strong>l’effet de détournement</strong>. Certes, un traité de libre-échange entre le Canada et la Corée éliminera les barrières aux échanges entre ces deux pays ce qui favorisera leur commerce réciproque. Mais ce surcroît se substituera en partie au commerce réalisé auparavant avec le reste du monde. Plus d’exportations automobiles coréennes vers le Canada impliqueront moins d’exportations japonaises. Le commerce mondial n’augmentera pas autant que le commerce bilatéral entre l’UE et la Corée.</p>
<p>Le second est un <strong>effet de protection</strong>. Les nouveaux accords ne se contentent pas de lever certaines barrières aux échanges. Ils incluent aussi une multitude de dispositions relatives, par exemple, à l’investissement, à la concurrence, à l’environnement, au droit du travail, à la liberté de circulation. Certaines de ces dispositions, comme l’ouverture des marchés publics, devraient favoriser le commerce. Mais d’autres pourraient le réduire, si elles imposent des contraintes, parfois coûteuses, en termes de droit du travail, de sécurité, de normes environnementales.</p>
<p>Certaines sont plus ambiguës. Les appellations d’origine permettraient certes aux producteurs français de vendre davantage de Chablis aux États-Unis, mais les producteurs américains qui utilisent abusivement l’appellation exporteraient moins. Le cas des investissements directs, dont la sécurisation est devenue un des objectifs majeurs des accords de la nouvelle génération, est lui aussi ambigu. Le traité sera défavorable au commerce mondial si la production sur place se substitue aux exportations. Il lui sera favorable s’il favorise la délocalisation d’une production destinée au marché national ou aux marchés tiers.</p>
<p>Mais il est vrai que ce type d’investissement a davantage été porté par la prolifération des zones franches d’exportations que par les traités commerciaux. Les effets nets de ces dispositions a-commerciales sur le commerce mondial sont donc incertains.</p>
<h2>Le poids des règles d’origine</h2>
<p>L’effet négatif le plus évident, mais aussi le plus négligé, est relatif <strong>aux règles d’origine</strong>. Le Canada est ainsi engagé dans un accord avec la <a href="http://bit.ly/2j0KTW0">Corée</a> et le <a href="http://bit.ly/2ifmrOP">Costa Rica</a>. Sans règles d’origine, les exportations du Costa Rica destinées à la Corée pourraient transiter par le Canada et échapper ainsi aux droits de douane coréens. Les traités fixent donc les critères que doivent respecter les importations pour être exonérées des droits de douane.</p>
<p>Il s’agit généralement d’une part minimale de composants ou de valeur ajoutée produite dans le pays partenaire. Ces règles encourageront donc les producteurs canadiens à incorporer davantage de composants produits au Canada, même s’ils sont moins compétitifs, que des composants importés. Les traités de libre-échange pèsent alors sur le commerce mondial des biens intermédiaires, la moitié du commerce mondial.</p>
<p>La multiplication des traités commerciaux, qui entremêlent les règles d’origine – le « bol de spaghetti » de l’<a href="http://bit.ly/2iiKAHq">économiste Jagdish Bhagwati</a> – est à ainsi à contre-courant de la dynamique commerciale des années 1990 et 2000. Celle-ci était en effet fondée sur la mondialisation des chaînes de valeurs et l’éparpillement dans le Monde des différentes étapes du processus de production.</p>
<p>Par ailleurs, les règles d’origine augmentent les coûts du commerce puisqu’il faut prouver leur respect aux services douaniers. Ce coût supplémentaire, véritable droit de douane implicite, est parfois supérieur au droit de douane que le traité commercial élimine. Or, beaucoup de pays à droits faibles, comme <a href="http://bit.ly/2ictI76">Singapour</a>, qui a des droits nuls, sont entrés dans de nombreux traités commerciaux.</p>
<p>Si les coûts associés ne sont pas compensés par l’exonération douanière, les entreprises potentiellement bénéficiaires peuvent alors être amenées à y renoncer.</p>
<h2>Des « méga-accords » en difficulté</h2>
<p>Les méga-accords de la « nouvelle génération » signés ou négociés comme le traité transpacifique (TPP), le traité entre l’UE et le Canada (CETA) ou le traité transatlantique (TIPP) sont aujourd’hui en difficulté. Ils se retrouvent coincés entre ceux, nombreux, qui les considèrent comme une nouvelle avancée vers une mondialisation indésirable, et d’autres, moins entendus, qui en soulignent les effets pervers. Avec souvent, des droits de douane pratiqués déjà très bas, l’élimination des droits de douane est un leurre. Mais si ces accords de la nouvelle génération sont accusés, non sans raison, de fragiliser l’OMC et son multilatéralisme, force est de reconnaître qu’ils traitent aussi des thèmes dont ils n’ont pas pu se saisir.</p>
<p>Ce sont d’ailleurs certains de ces nouveaux thèmes, plus ou moins liés au commerce, qui ont mobilisé les opinions publiques et qui imposeront aux futurs accords, si tant est qu’il y en est, un nouvel équilibre entre les mesures d’ouverture qui favorisent le commerce et les mesures de protection –normes sociales ou environnementales, appellations d’origine, etc.- qui le limitent. Mais l’expansion du commerce international n’est pas un but en soi s’il n’atteint pas ses objectifs : favoriser l’emploi et l’améliorer le bien-être des populations.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/70983/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Marc Siroën ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les accords commerciaux régionaux, qui ont proliféré depuis 10 ans pourraient paradoxalement être une des causes du ralentissement actuel du commerce mondial.Jean-Marc Siroën, Professeur d'économie internationale, Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/686052016-11-10T19:41:40Z2016-11-10T19:41:40ZTrump président : quel avenir pour les accords de libre-échange ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/145398/original/image-20161110-25066-vdjx9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=26%2C29%2C1746%2C1158&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Manifestation anti TTIP à Bristol, UK.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/wdm/17287915411/in/photolist-oZVza7-skF5X6-r58Nvh-o42b3r-nqeGra-qDfHFB-s48gyy-rTkxA8-rSEYDH-EJXtx9-zEDbgX-nqeGga-nGGoq7-roULCe-rkQ9xx-qiDCkR-rVd6sF-scE3Nk-rTkhH2-scBByn-rgrWNc-rV5MP9-rV6dkJ-rV5mqw-rVcZji-sanvUS-rV632Y-rfRCxF-rV6nRN-rfRzMF-sancbE-rfDPrE-rV5gqw-rV57od-H9WRn4-Hd3Zxs-rfS3GH-FfkVmm-FhDCXk-EQ5tPs-FfkV6G-EQ5tdh-EjWcPq-F6XsJS-EjWbCs-FhDE48-F6XtkG-F9ffJn-FfkVwm-F6Xsh9">Global Justice Now/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Donald Trump a gagné. La gauche européenne devrait-elle se réjouir ? C’est peut-être une question paradoxale, mais il est intéressant de noter que les positions du président élu Trump sur les accords de libre-échange, en particulier l’ALENA et le TTP, ont été très en ligne avec les positions populistes de la gauche européenne concernant le même sujet. Des camarades étranges, en effet, mais peut-être certains groupes en Europe, qui autrement ne se considéreraient jamais comme étant Pro-Trump, ont des raisons de se réjouir car il semble que les électeurs américains, à la suite de leurs homologues britanniques, ont en partie rejeté la marche vers la libéralisation des échanges.</p>
<h2>Étranges compagnons de route</h2>
<p>Dans la gauche européenne, on retrouvera de nombreux dirigeants, de Jeremy Corbyn au Royaume-Uni, aux dirigeants socialistes du Parlement wallon, à Jean-Luc Melenchon et à ses sympathisants en France, qui appellent à abandonner les accords de libre-échange tels que nous les connaissons. La rhétorique de Donald Trump a beau être différente, il vise essentiellement la même chose. Là où la gauche européenne et Trump sont susceptibles de différer, c’est à propos du remplacement des accords de libre-échange. Cependant, on ne peut pour le moment avoir cette discussion étant donné que Trump n’a pas réellement expliqué son programme en détail durant son interminable campagne.</p>
<p>Tout cela nous amène à réfléchir. Allons-nous entrer dans une nouvelle ère postmondialisation ? Premièrement, les électeurs britanniques ont appuyé le vote Brexit en juin. Maintenant, les électeurs américains dans certains États qui avaient précédemment fait partie du pare-feu électoral du parti démocratique, y compris le Michigan et la Pennsylvanie, ont voté pour Trump. Ces États font partie de la <em>rust belt</em> industrialisée et ces électeurs peuvent avoir été particulièrement réceptifs aux messages de Trump sur les questions de commerce international, y compris sur les accords de libre-échange.</p>
<p>Cela pourrait nous servir d’avertissement pour les prochaines élections dans les pays européens, en particulier l’élection présidentielle française l’année prochaine. Le mouvement anti-libre-échange prend de l’ampleur, autant à gauche qu’à droite, dans le monde entier. Cette réprimande du libre-échange est un coup au statu quo, mais en ce moment de grande incertitude, les défenseurs de la lutte contre le libre-échange, ni la gauche ni la droite, ont un monopole sur la question. Tout comme ses homologues de gauche mentionnés dans le paragraphe précédent, Marine Le Pen est également contre les accords de libre-échange.</p>
<h2>Des accords potentiellement menacés</h2>
<p>Alors, quid des accords de libre-échange actuellement en négociation ? Prenons tout d’abord l’accord économique et commercial global (AECG ou CETA) signé entre l’UE et le Canada. Alors que les États-Unis ne font pas partie de cet accord et que, par conséquent, il n’y a pas d’effet direct sur ces négociations, le traité doit encore être ratifié par le Parlement européen et par la suite par les législatures nationales de chaque État membre de l’UE. Le sentiment populaire croissant contre le libre-échange, qui a conduit à des résultats électoraux si surprenants au cours de l’année écoulée, at-il pour effet de bloquer la ratification finale de cet accord commercial ? Seul le temps nous le dira.</p>
<p>En ce qui concerne les principaux accords commerciaux impliquant les États-Unis, Donald Trump a été très explicite au cours de sa campagne concernant le l’accord de partenariat transpacifique (TPP). Il souhaite retirer les États-Unis de cet accord de libre-échange. Alors qu’en théorie le Congrès des États-Unis pourrait ratifier le TPP dans le temps entre maintenant et l’inauguration de Trump, c’est une possibilité extrêmement improbable. Il semble donc que le TPP ne survivra pas à l’élection de Trump. Cela laisse subsister un vide de libre-échange dans la région de l’Asie-Pacifique, qui peut finalement être comblé par le partenariat économique intégrale régional (RCEP), soutenu par la Chine, qui comprend de nombreux pays d’Asie-Pacifique qui ont également participé aux négociations du TPP, mais aucun des États de l’Amérique du Nord et du Sud.</p>
<p>Ce qui nous conduit au partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP). Lorsque le porte-parole du gouvernement allemand, Steffen Seibert, a été interrogé mercredi 9 novembre par les médias pour savoir si le TTIP était mort, il a répondu « non ». Pourtant, il est difficile de voir comment cette position peut actuellement être considérée comme réaliste compte tenu des attitudes actuelles qui semblent prévaloir dans les urnes dans le monde occidental. Il est difficile, et peut-être imprudent de s’asseoir derrière son ordinateur au lendemain d’une élection, en particulier une aussi controversée et complexe que l’élection présidentielle américaine de 2016 et de faire des prédictions sur ce qui va se passer ensuite.</p>
<p>Néanmoins, la position du Président élu sur les accords de libre-échange, du moins telle qu’elle est actuellement négociée, apparaît ferme. Il s’agit là d’une ligne de démarcation pour Trump et il semblerait que les ententes négociées ne seront pas signées à moins que Trump et ses négociateurs puissent obtenir des concessions diverses des autres parties de ces accords commerciaux. Selon toute vraisemblance, les partisans du libre-échange ont perdu ce tour de table et ceux qui s’opposent au libre-échange à la fois à gauche et à droite devraient être encouragés par ce résultat.</p>
<h2>Incertitude sur les marchés</h2>
<p>Cela ne signifie pas que l’ère du libre-échange est définitivement terminée. CETA, TPP, TTIP et le RCEP sont tous des efforts régionaux visant à poursuivre la libéralisation du commerce entre les États participant à chacune de ces négociations, et au moins deux de ces efforts semblent voués à l’échec. Cela ne change pas le statut des accords de libre-échange qui sont en place. L’Union européenne demeure un marché intérieur. Les accords de l’Organisation mondiale du commerce prévoient encore un régime mondial de libre-échange. Rien de tout cela ne change… sauf pour l’ALENA. Trump a déclaré qu’il avait l’intention de renégocier ou de retirer les États-Unis de l’accord de libre-échange nord-américain. Tous les regards seront portés sur le Président-élu dans les jours et les semaines à venir pour voir s’il donne une indication de ce que sera son plan, car cela pourrait avoir d’énormes effets sur le commerce dans le bloc nord-américain et ailleurs.</p>
<p>Lorsqu’ils ont appris l’élection du President-elu Trump, les marchés ont tout d’abord réagi négativement. Les marchés détestent l’incertitude et il est clair que l’élection de Trump à la Maison-Blanche marque une nouvelle ère d’incertitude dans le contexte des accords de libre-échange entre autres. Alors que les défenseurs du mouvement anti-libre-échange des deux côtés du spectre politique peuvent se réjouir aujourd’hui, la prudence abonde en un moment comme celui-ci.</p>
<p>Des élections sont prévues prochainement en France, aux Pays-Bas et en Allemagne, et il sera très intéressant de voir comment les électeurs continuent de réagir dans le climat actuel. Les électeurs continentaux feront-ils aussi des reproches sévères au système commercial mondial tel que nous le connaissons ? Si oui, pour qui voteront-ils ? Quelles seront les conséquences à long terme ? Nous entrons en terre inconnue.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/68605/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Theodore J. Gleason ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le nouveau président élu partage avec les groupes alter-mondialistes une méfiance et même un rejet des accords de libre-échange.Theodore J. Gleason, Professeur de droit international, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/625312016-07-28T20:18:08Z2016-07-28T20:18:08ZRéinventer l’Europe commerciale sans le Royaume-Uni<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/132340/original/image-20160728-12116-yzh638.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Qu’y a-t-il dans le cheval de Troie du TAFTA/TTIP ? (manifestation à Strasbourg en février 2015).</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/greensefa/16443610605/in/photolist-o6aE5H-r1LBxw-okCqUU-ono8qg-o6aRCw-opq98e-o6aDgQ-opqnmi-qLtXXj-onCL1U-qn5DLk-ogE5vq-qLtWZh-r3UH2z-onErhR-onEsGK-q5EN36-qLCWAT-okCun5-onCHjb-qmUx1c-r3UHWR-onCLxW-qLBe86-o6aP7E-r44NxF-q5wjf9-opqgMx-ons3E9-qn2faA-q5ENdX-scCAGS-rTrWa4-o6aLB9-q5Dp4e-onsbb1-sau8mS-rVbMaj-rVbP1J-scJ5NR-scJ5ep-scM4ba-rVbN6N-scM1Rk-rfYsk2-rWHLXu-uy8Kek-tBhCUr-ugFkx4-uvNxSJ">Greensefa/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Plus d’un mois après la victoire du « Leave » au Royaume-Uni, l’Europe reste sous le choc d’une décision qui la plonge collectivement et durablement dans l’inconnu. Si les partisans du Brexit, et en particulier leur figure de proue <a href="http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2016/07/22/97001-20160722FILWWW00352-il-ne-faut-pas-confondre-Brexit-et-isolationnisme-boris-johnson.php">Boris Johnson</a>, ont feint dans un premier temps que rien n’allait changer, les déflagrations à répétition dans la classe politique britannique et l’évidente complexité de la négociation des conditions du divorce ne laissent désormais aucun doute quant à la réalité du basculement brutal dans une nouvelle ère pour les relations entre le continent et son voisin insulaire.</p>
<h2>Des relations commerciales à repenser</h2>
<p>C’est peut-être dans le domaine commercial que les egos blessés des deux anciens partenaires souffriront le plus. Le commerce était à la fois le socle de cette interdépendance économique garante de paix dans la vision de Jean Monnet et Robert Schuman, et le canal privilégié par lequel le Royaume-Uni organisait son rapport à l’Europe et au reste du monde.</p>
<p>Le commerce, un terrain d’entente, un terrain neutre dans une relation compliquée, un terrain investi pleinement par les Britanniques : sur les 14 commissaires européens qu’ils envoyèrent successivement à Bruxelles, la moitié auront été en charge du commerce, des relations extérieures ou de l’union douanière.</p>
<p>C’est là tout le paradoxe du vote du 23 juin : la défiance des Britanniques à l’égard d’une mondialisation dont ils se considèrent comme les perdants fut un thème majeur de la campagne pour le Brexit, alors même que le Royaume-Uni a de tout temps été un acteur de premier plan dans la définition de la politique commerciale européenne.</p>
<h2>Le TTIP, initiative britannique en Europe</h2>
<p>Un dossier illustre particulièrement cette problématique, c’est celui du très polémique <a href="http://hikari-editions.com/products/pourquoi-bruxelles-brade-leurope-decrypter-l-accord-transatlantique">TAFTA ou TTIP</a>, l’accord de libre-échange actuellement en négociation entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis.</p>
<p>Ce projet est d’abord le fruit de la volonté d’un Britannique, <a href="http://www.bbc.com/news/uk-politics-30938755">Lord Leon Brittan</a>, commissaire européen en charge du commerce à partir de 1989 et atlantiste convaincu, qui parvient à faire du rapprochement économique et commercial entre les deux côtés de l’Atlantique une véritable priorité politique.</p>
<p>Celle-ci se trouve entérinée et formalisée par la signature en décembre <a href="https://eeas.europa.eu/us/docs/new_transatlantic_agenda_en.pdf">1995 à Madrid du Nouvel Agenda Transatlantique</a>, une déclaration commune du président américain Bill Clinton et de ses homologues européens qui pose les premières pierres du grand marché transatlantique tel qu’il se construit aujourd’hui.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Qjzl8UUm7SA?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Dire que la donne a changé en vingt ans serait un doux euphémisme. Car aujourd’hui plus rien ne convainc une majorité de Britanniques de l’intérêt de ce genre de super-accords commerciaux, pas même la visite à Londres fin avril 2016 d’un Barack Obama qui faute de convaincre brandit la menace ultime : aucun accord parallèle au TAFTA/TTIP ne sera négocié avec le Royaume-Uni s’il fait le choix de quitter l’UE. Acteur ou spectateur de la conclusion du plus important accord de libre-échange jamais négocié, couvrant la moitié du PIB mondial et près de 800 millions de consommateurs, à l’heure des choix la décision finale fut donc celle du « Leave ».</p>
<h2>Comment désormais négocier le TTIP ?</h2>
<p>Quelle attitude adoptera désormais le Royaume-Uni dont 45 % des exportations sont destinés au marché européen, et pour lequel le Commonwealth ne constitue plus depuis longtemps un débouché commercial suffisant ? Quelle politique proposeront les eurosceptiques Boris Johnson, désormais ministre des affaires étrangères, et David Davis, chargé de négocier le Brexit, à une population tout à la fois nostalgique de la grandeur d’antan de l’Empire britannique et déçue par une mondialisation que ses propres dirigeants ont contribué à façonner ?</p>
<p><strong>Premier scénario, la revanche du « Bremain »</strong></p>
<p>Il est le moins probable à court terme, surtout avec la nomination de Theresa May à la tête du gouvernement et son désormais célèbre « Brexit means Brexit », mais sa pertinence augmentera si les négociations sur les modalités de sortie de l’UE s’enlisent. Une <a href="http://cep.lse.ac.uk/pubs/download/brexit01.pdf">récente étude</a> de la London School of Economics souligne ainsi à quel point l’équation d’une sortie combinée à un maintien dans l’union douanière est techniquement difficile à résoudre et politiquement intenable.</p>
<p>Ainsi il n’est pas impossible que l’intérêt supérieur du Royaume-Uni à préserver son influence mondiale en matière commerciale et le lobbying intense des milieux d’affaires souhaitant profiter des perspectives offertes notamment par le futur TAFTA/TTIP achèveront de convaincre les responsables politiques de la nécessité de rester dans l’UE.</p>
<p>Boris Johnson soutiendra avoir négocié les garanties nécessaires pour satisfaire aux attentes du peuple britannique et clamera que c’est dans la continuité de l’appartenance à l’UE que les choses peuvent réellement changer…</p>
<p><strong>Second scénario, le retour vers l’ami américain</strong></p>
<p>La force des liens historiques entre États-Unis et le Royaume-Uni et leur convergence de vues en matière de politique commerciale, jusque dans les récents sursauts protectionnistes observés d’un côté de l’Atlantique sous l’effet de Donald Trump et de l’autre dans le contexte du Brexit, peuvent amener les deux partenaires à se rapprocher pour développer une stratégie commune.</p>
<p>Celle-ci ne prendra pas la forme d’un nouvel accord de libre-échange entre les deux pays (cela n’aurait pas de sens d’un point de vue économique) mais pourrait se traduire par la définition conjointe de nouvelles priorités, plus ciblées, secteur par secteur, et plus lisibles pour les citoyens.</p>
<h2>Le TAFTA est mort, vive le TISA</h2>
<p>En cas d’échec des négociations transatlantiques, voilà quelle pourrait être la première concrétisation de cette nouvelle stratégie. Le <a href="http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/07/09/tisa-quand-le-liberalisme-revient-par-la-porte-de-derriere_4452691_4355770.html">TISA</a> est un projet d’accord sur le commerce des services, négocié actuellement entre 23 pays membres de l’Organisation mondiale du commerce, dont les États-Unis et l’UE.</p>
<p>Il porte sur la libéralisation d’une série de secteurs tels que les services financiers ou les télécommunications, et rien n’empêche en théorie que le Royaume-Uni rejoigne la table des négociations après son divorce avec l’UE. Le pays pourrait bien assumer de claquer la porte du TAFTA/TTIP et d’aller faire valoir ses intérêts offensifs dans cette nouvelle enceinte, en manœuvrant avec les États-Unis pour imposer une vision anglo-saxonne de la libération des services.</p>
<h2>L’UE va devoir réviser sa politique commerciale</h2>
<p>De son côté, l’Europe s’affiche encore comme insensible au départ du Royaume-Uni dans le domaine commercial. La commissaire européenne en charge du commerce, Cecilia Malmström, répète incessamment que l’UE reste la première puissance commerciale du monde, avec ou sans Brexit.</p>
<p>Elle veut également croire que le TAFTA/TTIP verra le jour, avec ou sans le Royaume-Uni. Cela ne sera probablement pas le cas, et bientôt l’UE ne pourra plus faire l’économie d’une profonde révision de sa politique commerciale, afin que les citoyens s’en approprient les objectifs et les moyens et cessent de la voir comme une menace.</p>
<p>Si, comme le disait le général de Gaulle lorsqu’il refusa la première demande d’entrée du Royaume-Uni dans l’UE en 1963, « La nature, la structure, la conjoncture qui sont propres à l’Angleterre diffèrent profondément de celles des continentaux », alors l’UE devra acter que le départ du plus atlantiste de ses membres n’est pas neutre en termes de sens.</p>
<p>Les priorités et le choix des partenaires privilégiés devront être revus en conséquence. Une bonne chose serait que la priorité soit redonnée au niveau multilatéral, au sein de l’Organisation mondiale du commerce et en lien prioritaire avec les pays en développement, afin que soient édictées des règles permettant un commerce respectueux des besoins de chacun et favorisant un développement harmonieux à l’échelle de la planète. Si un tel revirement s’opère à l’avenir, le Brexit aura peut-être produit au moins une chose positive.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/62531/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Charlotte Dammane ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le Brexit, un choc politique et peut-être demain un choc commercial. À l’heure du célèbre TAFTA ou TTIP, comment l’Europe poursuivra-t-elle sa politique commerciale sans le Royaume-Uni ?Charlotte Dammane, Chargée de Cours, commerce international, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/467762015-09-20T14:04:22Z2015-09-20T14:04:22ZTraité transatlantique : l’UE et les USA accrochés à leur fromage<p>Jambon forêt-noire, Asiago, Gorgonzola, Gouda, et bien d’autres indications géographiques européennes pour les denrées alimentaires sont au centre d’une âpre bataille dans les négociations sur le Le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP). Ils sont tous protégés dans de nombreux pays du monde. Mais pas vraiment aux États-Unis. Alors que se discutent les <a href="http://www.liberation.fr/monde/2015/08/25/avec-le-traite-transatlantique-le-reglement-des-differends-sera-transparent_1369454">détails du TTIP</a>, l’UE veut absolument empêcher les fabricants américains d’utiliser des noms européens protégés à mauvais escient.</p>
<p>La base du <a href="http://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX:32012R1151">cadre juridique de l’UE</a> de protection des produits alimentaires régionaux vient du fait qu’ils ont acquis une solide réputation auprès des consommateurs dans le monde entier. Climats favorables et des techniques de fabrication séculaires enracinées dans leurs aires protégées ont contribué à construire cette renommée. Ce sont des droits de propriété intellectuelle qui identifient ces « produits avec une histoire ».</p>
<p>Les États-Unis jouent selon des règles différentes cependant. De nombreuses entreprises américaines utilisent des noms géographiques et traditionnels européens (y compris le parmesan ou la feta) pour nommer des produits qui n’ont pas été produits dans les sites européens concernés – et souvent ne disposent pas de la même qualité que les originaux. Ce manque de protection – les négociateurs européens insistent sur ce point – permet une exploitation inacceptable du patrimoine culturel de l’Europe, ainsi que des pertes de revenus pour des fabricants de l’UE.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/91037/original/image-20150806-5260-1w9kjfr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/91037/original/image-20150806-5260-1w9kjfr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/91037/original/image-20150806-5260-1w9kjfr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/91037/original/image-20150806-5260-1w9kjfr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/91037/original/image-20150806-5260-1w9kjfr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/91037/original/image-20150806-5260-1w9kjfr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/91037/original/image-20150806-5260-1w9kjfr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Feta : accepter aucune imitation non grecque.</span>
<span class="attribution"><span class="source">shutterstock.com</span></span>
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<p>Les États-Unis, cependant, résistent à ces revendications. Les négociateurs américains soutiennent que leurs producteurs agroalimentaires ont déposé et utilisent les marques de noms géographiques européens depuis de nombreuses décennies, et qu’il serait injuste de leur demander d’arrêter.</p>
<p>Les États-Unis allèguent également que la plupart des termes géographiques, comme Parmesan, Fontina, Feta, Gouda et Édam, sont devenus les noms génériques des produits concernés, et ne peuvent être monopolisés par quiconque, y compris les producteurs européens situés dans ces zones. En effet, la plupart des consommateurs américains <a href="http://www.commonfoodnames.com/the-issue/our-mission/">ne savent même pas</a> que ces termes sont en fait des noms géographiques. Pour eux, ils décrivent simplement les caractéristiques d’un produit.</p>
<p>Le système de protection juridique européen – selon les négociateurs américains – donnerait aux producteurs alimentaires européens un avantage compétitif déloyal sur le marché et serait anti-concurrentiel. Il reviendrait à un obstacle au commerce, ce qui obligerait de nombreux producteurs américains à chercher et de-déposer d’autres marques, ce qui augmenterait les prix finaux pour les consommateurs. Cela pèserait lourd sur le marché américain du fromage : on estime à $ 21 milliards la production de fromage américain qui <a href="http://www.foodmanufacturing.com/news/2015/02/us-dairy-industry-concerned-geographical-indications-and-common-food-name-issues">utilise les noms d'origine européenne</a>.</p>
<h2>Le modèle canadien</h2>
<p>Une situation similaire a surgi entre l’UE et le Canada dans les négociations sur leur traité, <a href="http://ec.europa.eu/trade/policy/in-focus/ceta/">l’Accord économique et commercial global</a> (AECG). Bien que non encore ratifié, les deux parties sont parvenues à un compromis l’année dernière, après plus de quatre années de négociations, compromis qui pourraient offrir une voie de sortie aux négociateurs du TTIP.</p>
<p>L’AECG ne donne pas aux producteurs de denrées alimentaires européennes protégées des droits exclusifs sur toutes leurs indications géographiques. Il laisse même à leurs concurrents canadiens un certain degré de liberté dans l’utilisation des appellations d’origines européennes. Par exemple, alors que ce traité protège fortement certains vins et spiritueux européens tels que Champagne, Bordeaux et Cognac, plusieurs autres noms ne bénéficient que d’une protection limitée. Les producteurs canadiens de produits alimentaires sont libres d’utiliser les dénominations locales ou traduites en anglais de certaines appellations européennes, tels que « St. George cheese », « Black Forest ham », « Tiroler bacon », ainsi que Munich beer ou « Bavarian beer ».</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/91053/original/image-20150806-5245-1ehr5vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/91053/original/image-20150806-5245-1ehr5vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=258&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/91053/original/image-20150806-5245-1ehr5vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=258&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/91053/original/image-20150806-5245-1ehr5vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=258&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/91053/original/image-20150806-5245-1ehr5vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=324&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/91053/original/image-20150806-5245-1ehr5vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=324&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/91053/original/image-20150806-5245-1ehr5vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=324&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Gouda : protégé, en quelque sorte.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Megan Clement</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>AECG permet également aux fromageries canadiennes créées après 2013 d’utiliser légalement des indications d’origines européennes, comme Fontina, Asiago, Feta, Gorgonzola et Münster, accompagnées des termes « style » (Feta style), « type » ou « kind ». De plus, l’AECG protège plusieurs noms géographiques de l’UE au Canada lorsque ce sont des noms composés (ce qui est aussi le cas en Europe). Ainsi, « Edam Holland » et « Gouda Holland » sont protégés (pas seulement Édam et Gouda), tout comme « Mortadella Bologna » et « Brie de Meaux » (et pas seulement la mortadelle ou brie).</p>
<p>Donc, même si l’AECG n’assure pas aux producteurs européens le même niveau de protection de leurs appellations d’origine qu’à l’intérieur de l’UE, il a été bien accueilli. Bénéficier d’une protection limitée semble préférable qu’aucune protection. Le traité permettra également d’éliminer largement les droits de douane pour l’agriculture et l’agroalimentaire européens : près de 92 % des produits agricoles et alimentaires de l’UE <a href="http://europa.eu/rapid/press-%20release_MEMO-14-542_en.htm">vont être exportés au Canada en franchise de droits</a>.</p>
<p>Alors que les négociateurs européens espèrent arriver à un résultat similaire dans les négociations sur TTIP, il n'est pas certain que leurs homologues américains sont prêts à accorder à l’agroalimentaire européen la même protection limitée qu’ils ont sous l’AECG. La résistance américaine aux indications d’origines européennes reste très forte. L’année dernière, 55 sénateurs américains ont <a href="http://www.commonfoodnames.com/senators-urge-negotiators-to-defend-common-names/">envoyé une lettre</a> au représentant américain chargé de conduire les négociations commerciales et au ministre de l'Agriculture des USA demandant qu’il soit clair pour l’UE que les États-Unis rejetteront toute proposition TTIP qui limiterait la capacité des producteurs américains à utiliser leurs marques et dénominations existantes. Y compris ceux qui utilisent des termes géographiques européens connus des consommateurs américains comme des noms communs des produits alimentaires, en particulier pour les fromages.</p>
<p>L’affrontement entre l’Europe et les États-Unis sur la protection de la dénomination géographique s’annonce encore long et compliqué…</p>
<p><em>La <a href="https://theconversation.com/why-europe-and-the-us-are-locked-in-a-food-fight-over-ttip-45279">version originale</a> de cet article a été publiée sur The Conversation UK.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/46776/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Enrico Bonadio ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans la négociation transatlantique en cours entre les Etats-Unis et l'UE, l'agro-alimentaire reste la pierre d'achoppement. L'accord Europe-Canada, pourrait offrir un modèle pour sortir de l'impasse.Enrico Bonadio, Senior Lecturer in Law, City, University of LondonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.