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Une adulte tient la main d’un enfant allongé sur un lit d’hôpital, avec un drain.
Une vague d’hépatites sévères dont l’origine n’est pas encore identifiée frappe les enfants. Beenicebeelove / Shutterstock

À quoi sont dues les hépatites aiguës qui affectent les enfants britanniques ?

Au cours des derniers mois, le nombre de cas d’hépatites sévères chez les enfants de moins de 10 ans a fortement augmenté au Royaume-Uni. Entre janvier et le 8 avril 2022, 74 cas ont été signalés à l’Agence britannique de sécurité sanitaire (UK Health Security Agency – UKHSA), dont 49 en Angleterre, 13 en Écosse et 12 autres répartis entre le Pays de Galles et l’Irlande du Nord.

D’autres cas isolés ont aussi été identifiés aux États-Unis, en Espagne et en Irlande.

(au 1er mai, l’Organisation mondiale de la Santé avait reçu 228 signalements de cas probables provenant de 20 pays. Plus de 50 autres cas étaient en cours d’investigation, dont deux en France, selon Santé publique France, ndlr)

L’hépatite sévère est très rare chez l’enfant, et la cause de cette augmentation des cas très inhabituelle n’a pas encore été identifiée. La théorie la plus vraisemblable est que ces hépatites résulteraient d’une infection virale. Pourraient-elles être liées à l’infection par le SARS-CoV-2, le coronavirus qui cause le Covid-19 ? Existe-t-il d’autres explications ?

Qu’appelle-t-on « hépatite » ?

Avant tout, rappelons ce qu’est l’hépatite, et en quoi elle est liée aux infections virales. Le terme « hépatite » décrit une inflammation du foie.

L’inflammation est une réaction immunitaire non spécifique qui se produit suite à une infection ou à une blessure. Elle est le signe que le corps essaie de combattre une cause de maladie potentielle. Chez les enfants, les symptômes comprennent généralement certains des éléments suivants (mais pas tous) : des urines foncées, des selles grises, un jaunissement de la peau et des yeux (appelé jaunisse) et une température élevée.

Grâce à des soins médicaux appropriés, l’hépatite peut généralement être guérie. Néanmoins, il arrive que l’état de certains patients requière de procéder à une transplantation du foie. À la mi-avril, six enfants britanniques avaient dû subir une telle greffe, selon l’Organisation mondiale de la Santé.


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Les causes de la maladie peuvent être diverses, mais chez les enfants, l’hépatite est généralement associée à des infections virales. Les virus les plus couramment impliqués sont les cinq virus de l’hépatite : A, B, C, D et E. D’autres virus, comme les adénovirus, peuvent aussi provoquer une hépatite, mais ils sont plus rarement impliqués.

Ce qui est inhabituel dans les cas d’hépatites pédiatriques qui nous préoccupent, c’est qu’aucun des cinq virus de l’hépatite n’a été détecté chez les jeunes patients touchés. Ce qui exclut donc de fait la cause la plus courante de la maladie, et laisse les autorités de santé publique en quête d’une explication…

Adénovirus et hépatites

Les adénovirus sont couramment responsables d’infections chez l’être humain, en particulier chez les enfants. Presque tous ont été infectés au moins une fois par un adénovirus avant l’âge de dix ans.

Habituellement, ces virus provoquent des infections des poumons et des voies respiratoires, ce qui se traduit généralement par des symptômes de rhume ou, parfois, par une pneumonie. Dans certains cas, principalement chez les enfants de cinq ans et plus, les adénovirus peuvent aussi provoquer une « fièvre pharyngo-conjonctivale » (« pool fever », littéralement « fièvre de la piscine »), qui se traduit par un mal de gorge, de la fièvre et une inflammation des yeux.

Cependant, il arrive que, chez les patients immunodéprimés (autrement dit chez toute personne dont le système immunitaire ne fonctionne pas correctement, comme les personnes ayant subi une greffe d’organe ou suivant un traitement contre le cancer), les adénovirus provoquent en de rares occasions une hépatite.

Mais il est extrêmement rare d’observer un tel nombre de cas, surtout chez des enfants qui ne semblent pas immunodéprimés. Si un adénovirus est bien à l’origine de ces cas, cela pourrait signifier qu’un nouveau variant a émergé, capable de provoquer plus facilement la maladie.

Illustration du virus de l’hépatite entourant le foie
L'hépatite désigne une inflammation du foie. Explode/Shutterstock

Autres causes potentielles

L’infection à adénovirus étant une infection courante chez les enfant, pouvant, de surcroît se traduire par une hépatite, il est tentant de considérer cette explication comme la plus probable. Mais d’autres scénarios doivent néanmoins être explorés.

Les cas observés pourraient par exemple résulter d’hépatites auto-immunes : dans cette maladie, ce n’est pas un virus ou un autre agent pathogène qui attaque le foie, mais l’organisme lui-même. Toutefois, ce type d’hépatite est rare, puisqu’il ne concerne que 10 000 personnes environ au Royaume-Uni. Qui plus est, les hépatites auto-immunes se manifestent généralement plutôt chez les femmes, aux environs de 45 ans. Compte tenu de ces éléments, il est très peu probable que cette maladie soit à l’origine de la flambée de cas observée chez les enfants.

Une autre hypothèse suggère que le Covid-19 pourrait être à l’origine de ces cas d’hépatite. En effet, le SARS-CoV-2 a été détecté chez certains des enfants affectés (des cas isolés d’hépatite ont également été signalés chez des patients atteints de Covid, mais ils sont encore plus rares que l’hépatite auto-immune et ont surtout été observés chez des adultes atteints de formes sévères de Covid).

À ce propos, il est important de noter qu’aucun des enfants chez qui une hépatite a été diagnostiquée au Royaume-Uni n’avait reçu de vaccin anti-SARS-CoV-2. Il n’y a donc aucune raison de penser que les vaccins destinés à lutter contre le Covid-19 ont un quelconque rapport avec ce pic d’hépatites.

Autre possibilité : ces hépatites pourraient résulter d’une interaction entre différents virus (par exemple, entre un adénovirus et un coronavirus qui infecteraient tous deux le même enfant, en même temps).

Enfin, un virus totalement différent, qui n’aurait pas encore été détecté, pourrait aussi être à l’origine de ces maladies.

Et maintenant ?

L’Agence britannique de sécurité sanitaire conseille aux parents et aux personnes qui s’occupent d’enfants d’être attentifs aux signes d’hépatite.

Bien que les adénovirus semblent pour le moment être les coupables les plus probables, des recherches plus approfondies seront nécessaires pour confirmer cette hypothèse, et exclure d’autres possibilités, telles qu’une infection par de nouveaux virus. Peut-être découvrira-t-on qu’il n’existe pas d’origine commune à ces hépatites, et que leur cause varie selon les enfants.


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Quoi qu’il en soit, face à un scénario médical inhabituel tel que celui-ci, et tandis que la pandémie de Covid-19 se poursuit, nous devons toujours garder à l’esprit que le coronavirus constitue un suspect possible. Il ne faut cependant pas systématiquement tout lui mettre sur le dos, car cela risquerait de fausser notre vision des choses.

Pour conclure, si un adénovirus s’avère être effectivement responsable de cette situation, comment nous en protéger et minimiser ainsi le risque de graves complications ?

Les adénovirus se propagent par l’air et par le toucher. La principale mesure préventive consiste donc, pour les adultes comme pour les enfants, à se laver correctement les mains et à adopter de bonnes pratiques en matière d’hygiène, en toussant par exemple dans son coude plutôt que dans sa main.

This article was originally published in English

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