tag:theconversation.com,2011:/africa/topics/dakar-45338/articlesDakar – The Conversation2020-03-24T19:19:24Ztag:theconversation.com,2011:article/1345922020-03-24T19:19:24Z2020-03-24T19:19:24ZRepenser l’aménagement du territoire au Sénégal<p>La croissance démographique, le changement climatique, les mobilités, la gouvernance : autant de domaines où il est impératif d’agir d’une manière intelligible et raisonnée afin de faire face aux défis de la ville de demain. Dans un contexte de métropolisation marqué par une « mobilité généralisée », d’indétermination des limites urbaines, et d’ambition affichée des grandes villes d’accroître leur attractivité et leur compétitivité et de devenir des <a href="https://www.researchgate.net/publication/254394880_Worlding_Cities_Asian_Experiments_and_the_Art_of_Being_Global_-_By_Ananya_Roy_Aihwa_Ong">« villes de classe mondiale »</a>, l’objectif consistant à <a href="https://www.lequotidien.sn/session-ordinaire-2020-du-hcct-aminata-mbengue-ndiaye-pour-un-statut-particulier-pour-dakar/">doter Dakar d’un statut spécial</a>, avancé par la présidente du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT) Aminata Mbengue Ndiaye, relève-t-il réellement d’une stratégie pertinente et efficiente ?</p>
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<h2>L’État et les collectivités ne sont d’accord que sur leur désaccord</h2>
<p>Les différends politiques voire politiciens entre l’État et la Ville de Dakar – et, plus largement, les collectivités locales – ne datent pas d’hier. À titre d’exemple, rappelons qu’en <a href="http://journals.openedition.org/cybergeo/27845;DOI:https://doi.org/10.4000/cybergeo.27845">octobre 2015</a>, « arguant de la situation insoutenable d’insalubrité dans la capitale, l’État, en contradiction avec les textes qui accordent la compétence de ce service à la Ville et à la commune (art. 170/305 CGCL), soustrait par décret « la gestion des déchets et la lutte contre l’insalubrité » à l’Entente CADAK-CAR (Communauté d’agglomération de Dakar – Communauté d’agglomération de Rufisque), présidée par le maire de Dakar, pour la confier à l’Unité de coordination et de la gestion des déchets solides (UCG), suscitant un nouveau conflit avec les autorités de la Ville ».</p>
<p>La même année, le gouvernement <a href="https://www.jeuneafrique.com/227446/economie/senegal-imbroglio-autour-de-lemprunt-de-la-ville-de-dakar/">n’a pas approuvé l’emprunt obligataire</a> contracté par la Ville de Dakar pour la construction du nouveau centre commercial Félix Eboué dans la commune du Plateau. Si des « objections techniques » avaient été avancées à l’époque par le ministère des Finances, il n’en reste pas moins que la recrudescence de ce type de conflits par la suite rend perplexe l’observateur averti.</p>
<p>Plus récemment, le feuilleton judiciaire sur <a href="https://www.lepoint.fr/afrique/senegal-l-ancien-maire-de-dakar-khalifa-sall-a-ete-gracie-29-09-2019-2338431_3826.php">l’affaire de la caisse d’avance</a> ayant opposé pratiquement les mêmes protagonistes (État-Ville) s’est conclu par une grâce présidentielle accordée à l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall.</p>
<h2>Statut spécial pour Dakar : un faux débat</h2>
<p>L’urgence, aujourd’hui, n’est pas à l’élaboration d’un statut spécial pour Dakar. Les priorités sont ailleurs. Ce qui s’impose, aujourd’hui, même si cela ne sera pas simple, est la dissolution d’institutions budgétivores comme le HCCT. Sur les 150 membres composant l’institution, <a href="https://www.pressafrik.com/%E2%80%8BAppel-au-boycott-Le-HCCT-est-inutile-et-budgetivore--Madieye-Mbodji_a153194.html">70 sont nommés par décision discrétionnaire du Président de la République</a>. En outre, la mise sur pied d’un gouvernement métropolitain dont l’architecture institutionnelle veillera à empêcher dans la mesure du possible les querelles d’égos politiques s’avère nécessaire.</p>
<p>Aujourd’hui, l’échelle fonctionnelle de l’aire métropolitaine dakaroise dépasse largement celle des limites administratives régionales. Le dynamisme de la périphérie et la résurgence de petites villes en témoignent au travers de l’implantation de grands équipements comme <a href="https://www.jeuneafrique.com/591537/economie/senegal-laeroport-international-blaise-diagne-veut-etre-le-plus-important-dafrique-de-louest/">l’aéroport international Blaise Diagne (AIBD)</a> à Diass, à une cinquantaine de kilomètres de Dakar, et des <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/cgq/2017-v61-n172-cgq03339/1042714ar.pdf">industries agroalimentaires dans la région de Thiès</a>.</p>
<p>Dès lors, l’action publique ne doit-elle pas aujourd’hui s’ajuster à la bonne échelle ? Ou comme le suggère le docteur Maurice Soudieck Dione, enseignant-chercheur en sciences politiques à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis du Sénégal, plus spécifiquement, ne s’agit-il pas aujourd’hui de procéder à un recentrage du politique (consolidation des perspectives relatives à l’intérêt général) et à un décentrage de l’économique (cadre structurel favorable au développement de l’économie des villes de l’intérieur) ?</p>
<p>L’installation d’équipements d’envergure dans la périphérie de Dakar indique que l’État du Sénégal est doté d’une volonté planificatrice ; mais il poursuit ses « Grands travaux » sans assumer institutionnellement la transition métropolitaine. Au-delà de la question institutionnelle, la seule urgence qui vaille est de se « défaire » de l’assistance technique étrangère et s’approprier davantage l’expertise locale. « Défaire » non au sens d’abandonner radicalement mais plutôt d’apprendre à s’en servir au mieux, en évitant de mettre en œuvre des stratégies qui ne collent pas forcément à la réalité pratique.</p>
<p>La stratégie doit donc procéder d’une articulation logique et cohérente de l’ici et de l’ailleurs, et non de « fantasmes urbains » pour reprendre le terme de Vanessa Watson. Comment comprendre le fait que 60 ans après les indépendances certains documents d’urbanisme, à l’instar du <a href="http://www.cetud.sn/index.php/mobilite/pdudakar">Plan directeur d’urbanisme de Dakar Horizon 2035</a>, soient <a href="https://openjicareport.jica.go.jp/pdf/12250023.pdf">produits</a> par l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA) ?</p>
<h2>Une expertise au service des territoires et une nouvelle approche des solidarités territoriales s’imposent</h2>
<p>Bien que la constante fondamentale en urbanisme ait toujours été la circulation d’idées, de bonnes pratiques et de modèles, la logique impose toutefois de savoir les réinterpréter et les adapter au contexte local. Et cette variable passe inévitablement par la connaissance du terrain dans ses plis et replis. Mais pas seulement ! La saisie des modes d’« habiter » et d’occuper l’espace est primordiale pour ancrer les stratégies dans la profondeur des réalités locales. Sous ce rapport, il est préconisé de créer une expertise au service des territoires, en priorité consacrée à l’aire métropolitaine dakaroise, sur laquelle portent les principaux grands investissements du <a href="https://www.sec.gouv.sn/dossiers/plan-s%C3%A9n%C3%A9gal-emergent-pse">Plan Sénégal émergent</a> (PSE).</p>
<p>Sans doute certains vont penser directement à <a href="http://www.anat.sn/">l’Agence nationale de l’aménagement du Territoire</a> (ANAT) ou à la <a href="http://www.servicepublic.gouv.sn/index.php/demarche_administrative/services/1/37">Direction de l’Urbanisme et de l’Architecture</a> (DUA). Si la première a une approche plutôt techniciste de l’aménagement du territoire, la seconde adopte une posture de l’ordre de l’informationnel voire du déclaratif. Aujourd’hui plus que jamais s’impose sur le triangle métropolitain une nouvelle approche des solidarités territoriales. Pourtant, le <a href="http://www.anat.sn/triangle-dtm/images/TelechargerLeSchema.pdf">schéma directeur d’aménagement et de développement territorial de la zone Dakar-Thiès-Mbour</a> préconise « la mise en place d’un dispositif incitatif et réglementaire qui va encadrer et promouvoir l’intercommunalité ». Si l’initiative est encore très pertinente, sa validation dans les formes et dans la pratique reste problématique.</p>
<p>La territorialisation des politiques publiques a été mal engagée. Il existe certes une stratégie de développement des solidarités territoriales dans la nouvelle réforme à travers la création de l’échelon « Ville ». Il reste néanmoins que sa portée et son contenu méritent d’être clarifiés, particulièrement les modalités contractuelles entre élus dans l’optique de l’évitement des conflits.</p>
<p>Un retour sur l’année 2015 permet de se remettre en mémoire les dissidences malencontreuses qui ont présidé à la <a href="https://www.seneweb.com/news/Politique/dissolution-de-l-entente-cadak-car-le-ps_n_167558.html">dissolution de l’Entente CADAK-CAR</a>, pourtant réputée être à l’époque un dispositif innovant dans la prise en charge de missions de service public. Aujourd’hui, le paysage institutionnel est morcelé et caractérisé par l’émiettement des responsabilités et des moyens. Le pluralisme gestionnaire est porteur de logiques plurielles qui ne vont pas dans le sens d’une cohérence d’ensemble de l’aire métropolitaine et donc de la gouvernabilité de la métropolisation.</p>
<p>En guise de participation au débat public dans un contexte de « dialogue national », nous apportons notre modeste contribution en invitant les acteurs à engager une double réflexion : d’une part, sur l’adéquation entre territoire institutionnel et territoire fonctionnel en évitant de privilégier les compromis politiques au détriment des considérations théoriques et techniques ; et, d’autre part, sur la création d’une agence de développement et d’urbanisme qui serait dotée d’un statut original et d’une mission de préparation des projets d’agglomération – métropolitains et territoriaux – et de veille scientifique et territoriale contribuant à la diffusion de l’innovation et des bonnes pratiques en termes de développement urbain durable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/134592/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mamadou Dit Papa Dieng ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La ville de Dakar ne doit pas être dotée d’un statut spécial, comme le souhaite le gouvernement. Au-delà de la ville, il convient de doter toute l’agglomération d’un gouvernement métropolitain.Mamadou Dit Papa Dieng, Doctorant en Aménagement de l'espace et urbanisme, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1269052019-11-20T22:40:00Z2019-11-20T22:40:00ZLe fait religieux dans l’entrepreneuriat féminin au Sénégal<p>Au Sénégal, les <a href="https://www.researchgate.net/publication/332890631_LES_TRAJECTOIRES_FAMILIALES_ET_LES_DYNAMIQUES_DE_RESEAUX_SOCIAUX_D%E2%80%99ENTREPRENEURES_A_SAINT-LOUIS_DU_SENEGAL">rapports de genre</a> sont encore souvent envisagés d’un point de vue relativement binaire : les femmes seraient largement confinées à l’espace domestique tandis que l’espace public, de même que les responsabilités économiques, seraient essentiellement réservés aux hommes. Mais depuis les années 1980, suite aux plans d’ajustement structurel, la crise et le chômage de masse ont <a href="https://www.jstor.org/stable/43658328">poussé de nombreuses femmes à entreprendre</a> – notamment dans l’économie informelle – afin de subvenir aux charges de leur famille. Une évolution qui conduit à une renégociation des <a href="https://www.ined.fr/fichier/s_rubrique/19331/presentation.fr.pdf">rapports de pouvoir au sein du couple</a> et à une <a href="https://www.cairn.info/revue-travail-genre-et-societes-2008-2-page-5.htm">certaine redéfinition des statuts</a>.</p>
<p>À Dakar, particulièrement, les femmes jouent un <a href="https://www.researchgate.net/publication/4874683_Etre_femme_autonome_dans_les_capitales_africaines_les_cas_de_Dakar_et_Lome">rôle économique de plus en plus important</a>. Elles se mettent à intégrer des réseaux d’affaires influents, notamment dans leurs <a href="http://www.theses.fr/2010AMIE0004">stratégies de contournement fiscal</a> et en entrant en union maritale avec des acteurs confrériques influents et des hommes d’affaires, et mobilisent des <a href="https://www.jstor.org/stable/j.ctvggx3tg?turn_away=true">liens familiaux dans leurs parcours professionnels</a>. Ces nouveaux statuts sociaux leur permettent de bénéficier d’un meilleur traitement fiscal ou d’une protection en cas de violation de la loi.</p>
<p>Si les entrepreneurs sénégalais sont à 68,7 % des hommes, les femmes sont aujourd’hui majoritaires dans les secteurs de la restauration (72,8 %) et très présentes dans les activités de coiffure et de commerce (38,9 %) <a href="http://www.ansd.sn/ressources/rapports/Rapport%20global-05-07-2017.pdf">selon le rapport 2017 sur le recensement général des entreprises</a></p>
<p>Dans la littérature existante les rares travaux socio-anthropologiques existants ont mis l’accent sur les <a href="https://books.google.sn/books/about/L_%C3%A9thique_CEDDO_Et_la_Soci%C3%A9t%C3%A9_D_accap.html?id=_n4dmgEACAAJ&redir_esc=y">usages de la religion par les hommes d’affaires dans l’informel</a> et <a href="https://openaccess.leidenuniv.nl/bitstream/handle/1887/30962/ASC-075287668-3066-01.pdf?sequence=1">différents secteurs de l’économie sénégalaise</a>. Face au faible intérêt accordé à l’entrepreneuriat féminin, il convient d’explorer si la religion est vécue par les femmes qui entreprennent, comme une contrainte, voire un moyen de soumission et d’asservissement.</p>
<p>Notre analyse s’appuie sur les entretiens biographiques réalisés dans le cadre de l’enquête Femmes, Réseaux religieux et entrepreneuriat au Sénégal (FRES) (en cours de publication dans la revue <a href="https://www.cairn.info/revue-sociologies-pratiques.htm"><em>Sociologies Pratiques</em></a>, 2019, n°39). Des entretiens qualitatifs ont été réalisés auprès d’une vingtaine d’informateurs clés (ministères, ONG, entreprises, associations, etc.) et des entretiens individuels avec 100 cheffes d’entreprises, toutes confessions confondues et réparties dans trois régions du Sénégal (Saint-Louis, Dakar et Ziguinchor).</p>
<h2>La religion, une ressource importante pour l’entrepreneuriat</h2>
<p>Il ressort de nos travaux que l’appartenance religieuse et la proximité avec un guide religieux représentent un préalable pour un parcours d’entrepreneure. Ces éléments permettent de construire des relations de confiance, de fonder une légitimité et d’entretenir les relations de clientèle nécessaires aux échanges économiques. En effet, les ressources offertes par la clientèle religieuse sont plurielles.</p>
<p>Une première distinction peut être établie entre les entrepreneures musulmanes et chrétiennes (rappelons que les <a href="https://africa.la-croix.com/statistiques/senegal/">musulmans représentent 96 % de la population et les chrétiens un peu moins de 4 %</a>). Pour les musulmanes, le clientélisme implique une proximité relationnelle personnalisée avec les chefs religieux. Cette relation est mise en scène lors des événements religieux et à travers des rapports financiers. Les dépenses alors consenties à titre individuel ou collectif, ainsi que les services rendus à ces figures religieuses, sont vécus comme un investissement social.</p>
<p>À travers ces dons, les femmes sollicitent auprès des chefs religieux des <a href="http://www.sietmanagement.fr/theorie-du-doncontre-don-donnerrecevoirrendre-m-mauss/">contre-dons</a> sous forme de prières de bénédiction, censées constituer un gage de réussite économique et sociale. La médiation des marabouts facilite l’accès des entrepreneures musulmanes à des opportunités et à des réseaux d’affaires. En effet, ces marabouts peuvent user de leur position centrale au sein de la communauté religieuse pour mettre les entrepreneures en relation avec des personnalités influentes.</p>
<p>Pour les entrepreneures chrétiennes, le rapport avec la hiérarchie religieuse est moins direct. La construction d’une clientèle religieuse dépend principalement du niveau d’implantation sur le territoire de la paroisse ou du diocèse (prières, liturgie, chorale, organisation d’événements religieux) et des services (entretien des édifices religieux, vente, préparation des repas, nettoiement, etc.). En contrepartie, elles peuvent bénéficier des faveurs de l’autorité religieuse centrale, l’évêque. Celui-ci, par son soutien, garantit la fiabilité des entrepreneures (demande de crédit, mise en réseaux, logistique, distribution d’intrants, prêt de terrain, etc.).</p>
<p>Le clientélisme donne accès à des marchés grâce aux liens tissés au sein de la communauté religieuse (groupes de prière, associations, mariages, etc.). Les entrepreneures peuvent profiter des événements culturels (sorties de messe, kermesses, retraites, ordinations, pèlerinages, etc.) et des rapports interpersonnels liés aux activités religieuses pour écouler leurs produits. Tout cela en bénéficiant du soutien des figures masculines religieuses (pasteurs protestants, curés catholiques, etc.).</p>
<p>En définitive, ce positionnement religieux procure aux entrepreneures musulmanes des ressources symboliques – bénédictions, prières et reconnaissance par les autorités religieuses – et relationnelles alors que chez les chrétiennes, les choses se passent plutôt au niveau institutionnel et matériel.</p>
<h2>La religion, moyen d’émancipation des femmes</h2>
<p>Les entrepreneures ne sont pas exclusivement tributaires des espaces religieux. Elles tendent à s’en émanciper, particulièrement lorsqu’elles se tournent vers l’économie de marché. Elles s’orientent alors vers des réseaux d’affaires sécularisés au niveau institutionnel (partenaires techniques, banques, etc.). La prise de distance avec l’espace religieux se traduit par leur insertion dans des réseaux influents sans exclusivité confessionnelle.</p>
<p>Il peut ainsi arriver que des musulmanes déclinent les faveurs d’acteurs confrériques. Elles peuvent, par exemple, refuser des billets pour La Mecque ou renoncer à des postes électifs religieux – dans des fondations ou associations religieuses – pour privilégier une collaboration institutionnalisée.</p>
<p>De même, des entrepreneures chrétiennes n’hésitent pas à coopter des musulmanes dans leurs entreprises associatives, en se basant sur des liens de confiance préexistants (parenté, amitié) pour accéder à des financements.</p>
<p>Ce clientélisme religieux est parfois traversé par des conflits. À l’image des mobilisations féminines internationales, ces conflits remettent en cause l’<a href="https://www.researchgate.net/publication/281660230_Reseaux_catholiques_feminins_Une_perspective_de_genre_sur_une_mobilisation_transnationale">organisation centralisée et pyramidale et le fonctionnement genré de l’Église</a>.</p>
<p>Conserver les clients religieux demeure néanmoins important pour toutes les entrepreneures. Pour elles, tout l’enjeu est de les fidéliser tout en s’ouvrant sur d’autres réseaux. À travers des concertations ponctuelles et ciblées pour des prières, les entrepreneures gardent ainsi un lien religieux bien ancré… mais en même temps détaché. L’aspect le plus important à ce stade traduit un changement dans les rapports clientélistes avec les acteurs religieux. Ces derniers passent d’une fonction d’intermédiaires à des postures partisanes plus directes, en utilisant l’image des entrepreneures, présentées comme des figures de réussite pour consolider leur pouvoir.</p>
<p>En clair, notre étude révèle que la religion légitime et vient en appoint au travail des femmes (dans les parcours professionnels des entrepreneures chrétiennes plus que dans ceux des musulmanes, pourtant plus clientélistes). Elle apparaît comme un engagement, mais aussi et surtout comme un levier pour entreprendre et s’émanciper. Contrairement aux hommes qui utilisent le clientélisme religieux pour consolider leur domination économique. Mais cette émancipation n’est assumée que sous couvert d’une certaine protection religieuse, censée procurer des ressources multiples.</p>
<p>Aussi bien relationnelles que matérielles, ces ressources permettent de soutenir et de sécuriser les investissements sociaux et économiques des entrepreneures, notamment de celles qui disposent d’un réseau familial et associatif confessionnel bien établi. Le jeu des réseaux sociaux favorise l’ouverture des entrepreneures (musulmanes comme chrétiennes) à des espaces relationnels non confessionnels. En l’occurrence, les ressources religieuses deviennent plus symboliques (prières) et permettent aux entrepreneures de tracer, sur le plan individuel, leur propre voie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/126905/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sadio Ba Gning ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Au Sénégal l’appartenance religieuse apparaît comme un préalable au parcours d’entrepreneure. Elle permet de construire les relations de confiance et de clientèle nécessaires aux échanges économiques.Sadio Ba Gning, enseignante-chercheure en sociologie, Université Gaston BergerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1229292019-09-22T17:58:35Z2019-09-22T17:58:35ZAu Sénégal, les manœuvres politiciennes autour du dialogue politique<p>Le dialogue politique, une composante du dialogue national annoncé par le président de la République Macky Sall après la confirmation de son élection en 2019, suscite une grande controverse au Sénégal.</p>
<p>En théorie, le dialogue politique est évidemment une pratique essentielle. Mais dans la pratique et dans son format actuel, il semble, à bien des égards, une instance de manipulation de l’opinion permettant au pouvoir actuel, critiqué pour ses pratiques autoritaires, de reprendre son souffle.</p>
<p>En effet, il tend à couvrir les multiples atteintes à la démocratie sénégalaise, que ce soit le <a href="https://www.jeuneafrique.com/791019/politique/senegal-controverse-apres-le-desaveu-de-lue-sur-le-systeme-des-parrainages/">tripatouillage des règles du jeu politique</a> ou les violations constantes <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/04/19/au-senegal-une-manifestation-reprimee-l-ancien-premier-ministre-idrissa-seck-interpelle_5287772_3212.html">des droits et libertés de l’opposition et des opposants au pouvoir</a>.</p>
<p>Pour s’en convaincre, il suffit d’analyser les différentes étapes de la mise en place de ce processus de dialogue depuis son instauration.</p>
<h2>Les promesses enterrées du président</h2>
<p>Une fois arrivé au pouvoir en 2012, le président a mis de côté la <a href="http://www.assisesnationales.org/?ans=doc">Charte des Assises nationales</a> qu’il avait pourtant signée. Celle-ci proposait des réformes structurelles sur la gouvernance du pays. Ensuite, il a mis en place une <a href="http://www.cnrisenegal.org/">Commission nationale de réforme des institutions</a> dont les travaux ont coûté <a href="https://fr.allafrica.com/stories/201711220787.html">700 millions de francs CFA</a> aux contribuables sénégalais.</p>
<p>Après avoir <a href="https://www.voaafrique.com/a/senegal-president-senegalais-renonce-a-reduire-son-mandat-en-cours/3193669.html">renoncé à son engagement de réduire son mandat</a> de 7 à 5 ans réitéré <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2016/02/17/macky-sall-ira-finalement-jusqu-au-bout-de-son-mandat-de-sept-ans_4866925_3212.html">plusieurs fois</a>, le président Sall avait par ailleurs organisé, dans des délais très courts et dans la division, le <a href="https://www.pressafrik.com/Referendum-du-20-mars-C-est-parti-pour-sept-jours-de-campagne_a147321.html">référendum du 20 mars 2016</a> qui proposait aux Sénégalais plusieurs <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2016/03/18/senegal-que-disent-les-15-points-soumis-a-referendum_4886000_3212.html">réformes institutionnelles</a>.</p>
<p>Cette consultation populaire fut une occasion manquée de bâtir un consensus fort autour des institutions et d’équilibrer la distribution du pouvoir, afin de rationaliser un <a href="https://www.financialafrik.com/2018/08/03/senegal-une-exception-democratique-a-lepreuve-de-lhyper-presidentialisme/">système politique hyperprésidentialisé</a>. En effet, aucune réforme sérieuse <a href="https://fr.allafrica.com/stories/201711220787.html">n’a été effectuée</a> finalement pour tempérer la suprématie politique, juridique et institutionnelle du président de la République sur le législatif et le judiciaire.</p>
<h2>La persécution de l’opposition en dépit de l’appel au dialogue</h2>
<p>Le dialogue politique fut lancé le 28 mai 2016, au lendemain du référendum. Une partie de l’opposition s’y était alors engagée de bonne foi.</p>
<p>Ce dialogue avait abouti très vite à la libération <a href="https://www.jeuneafrique.com/336456/politique/senegal-gracie-macky-sall-karim-wade-parti-qatar/">par grâce présidentielle</a> de Karim Wade, fils et ancien ministre de l’ancien président Abdoulaye Wade. Ce dernier avait été <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/03/23/senegal-karim-wade-condamne-a-six-ans-de-prison_4599445_3212.html">condamné à 6 ans de prison ferme</a> un an plus tôt pour enrichissement illicite, par la Cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI). Créée en 1981 et réactivée par Macky Sall en 2012, après une longue période de léthargie, cette juridiction d’exception qu’est la CREI a fait l’objet de <a href="https://www.fidh.org/fr/regions/afrique/senegal/15499-senegal-la-crei-une-juridiction-d-exception-qui-ne-garantit-pas-le-droit-a">vives critiques de la part des organisations des droits de l’homme</a>.</p>
<p>Le <a href="https://www.ohchr.org/FR/Issues/Detention/Pages/WGADIndex.aspx">Groupe de travail des des Nations unies sur la détention arbitraire</a> avait affirmé que l’<a href="https://www.ohchr.org/FR/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=16997&LangID=F">emprisonnement de Karim Wade était arbitraire</a>. De son côté, La Cour de justice de la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest avait estimé que <a href="https://www.jeuneafrique.com/172087/politique/enrichissement-illicite-la-cedeao-recadre-dakar/">ses droits avaient été violés</a>, car en tant qu’ancien ministre, il devait être jugé par la Haute cour de justice conformément à la Constitution.</p>
<p>Des pressions de plus en plus fortes s’étaient alors exercées sur le pouvoir, pour dénoncer la « traque des biens mal acquis », terme usuel pour qualifier les procédures initiées par la Cour des répressions de l’enrichissement illicite.</p>
<p>Le président Sall n’avait donc pas d’autre solution que de libérer Karim Wade mais il a saisi l’occasion pour clairement instrumentaliser le dialogue politique afin de précipiter l’<a href="http://www.rfi.fr/afrique/20180114-senegal-avenir-s-assombrit-karim-wade">exil</a> de Karim Wade au Qatar. Ce dernier, candidat du Parti démocratique sénégalais était l’un de ses principaux adversaires dans la course à sa réélection à la présidence.</p>
<p>Dans la foulée, il en a profité pour écarter un autre concurrent, Khalifa Sall, alors maire de Dakar, en déclenchant des poursuites contre lui au sujet de l’<a href="https://www.jeuneafrique.com/546930/societe/affaire-khalifa-sall-le-maire-de-dakar-condamne-a-5-ans-de-prison/">affaire politico-judiciaire de la caisse d’avance de la mairie de Dakar</a>. Il <a href="https://www.bbc.com/afrique/region-43596354">croupit toujours en prison</a>.</p>
<p>Autant de procédures qui ont entraîné de vives protestations tant elles semblaient politiquement motivées.</p>
<p>D’autant que les pratiques autoritaires du régime du Président Sall se sont poursuivies avec l’<a href="http://www.rfi.fr/afrique/20140420-senegal-interdictions-manifestations-multiplient-dakar-libert%C3%A9s-publiques-macky-sall">interdiction systématique des manifestations de l’opposition</a>.</p>
<p>La marche du 14 octobre 2016 fut ainsi <a href="https://www.bbc.com/afrique/region-37661972">durement réprimée</a>, quelques mois seulement après la cérémonie du dialogue politique tenue. La promesse du Président Sall d’institutionnaliser le dialogue politique n’a pas été respectée, car il n’a eu lieu qu’une seule fois durant son premier mandat.</p>
<h2>L’instrumentalisation de la cour de répression de l’enrichissement illicite</h2>
<p>La principale accusation portée à l’encontre de la Cour de répression de l’enrichissement illicite est donc que cette <a href="https://www.sec.gouv.sn/juridiction-speciale">juridiction d’exception</a> est manipulée par le pouvoir et qu’elle va à l’encontre <a href="https://www.fidh.org/fr/regions/afrique/senegal/15499-senegal-la-crei-une-juridiction-d-exception-qui-ne-garantit-pas-le-droit-a">des principes de base du procès pénal</a> en substituant la présomption de culpabilité à la présomption d’innocence.</p>
<p>En effet, il incombe aux accusés d’apporter la preuve de leur innocence en prouvant l’origine licite de leurs biens et de leur train de vie. S’ils n’y parviennent pas, le délit d’enrichissement illicite est automatiquement constitué un mois après la mise en demeure du Procureur spécial. Ainsi, la constitution de l’infraction relève-t-elle d’un détournement de procédure et non d’une <a href="https://www.dakaractu.com/Enrichissement-illicite-le-droit-penal-a-l-epreuve-des-autres-branches-du-droit-de-la-finance-de-la-fiducie-de-la_a87016.html">définition précise</a>.</p>
<p>De surcroît, la Cour introduit une rupture d’égalité entre les parties, car seul le Procureur spécial peut interjeter appel.</p>
<h2>Les législatives accentuent la crise de confiance</h2>
<p>En 2017, les législatives qui se tiennent le 30 juillet sont organisées avec des <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2017/07/30/au-senegal-les-elections-legislatives-se-sont-deroulees-dans-une-relative-confusion_5166696_3212.html">dysfonctionnements majeurs</a> qui ramènent le Sénégal <a href="https://www.reuters.com/article/us-senegal-politics/senegal-parliamentary-elections-marred-by-voting-problems-idUSKBN1AF0P3?il=0">près de vingt ans en arrière</a>.</p>
<p>À l’époque, à la suite des élections locales catastrophiques de 1996, le Président Abdou Diouf avait accepté de créer l’Observatoire national des élections et de nommer en 1998 un ministre de l’Intérieur sans coloration partisane, le <a href="https://www.lequotidien.sn/deces-du-general-lamine-cisse-fin-de-mission-dun-soldat/">Général Lamine Cissé</a>.</p>
<p>Mais après les élections législatives chaotiques du 30 juillet 2017, le Président Sall <a href="https://fr.allafrica.com/stories/201901020554.html">refuse</a> catégoriquement d’accéder à la requête de l’opposition de nommer un ministre de l’Intérieur non affilié à un parti.</p>
<p>C’est dans ce contexte de rupture de confiance entre les différents acteurs politiques que le Président Sall <a href="https://www.jeuneafrique.com/mag/560940/politique/senegal-les-parrainages-de-la-discorde/">impose le parrainage sans concertation</a>, qui durcit les conditions pour pouvoir concourir aux différentes élections.</p>
<p>La loi est votée sans débat, les <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/04/19/senegal-la-loi-sur-le-parrainage-votee-dans-un-climat-de-forte-contestation_5287952_3212.html">manifestations de l’opposition sont réprimées</a>, et les leaders arrêtés.</p>
<h2>Le parrainage, un coup de grâce pour passer au premier tour</h2>
<p>Cette nouvelle loi sur le parrainage va bien servir le pouvoir pour la présidentielle de 2019.
Il faut d’abord rappeler que lors des Législatives du 30 juillet 2017, le régime avait tiré profit du scrutin majoritaire à un tour au niveau départemental où sont élus 105 députés sur 165, en obtenant 140 députés sur 165 avec 48,49 % des voix.</p>
<p>La dispersion des voix liée à la pluralité des listes en compétition, soit 47, lors des élections législatives, pouvait donc être fatale à la coalition au pouvoir dans le cadre l’élection présidentielle, organisée à travers un scrutin majoritaire à deux tours. C’est ce qui explique la mise en avant de la loi sur le parrainage pour limiter les candidatures.</p>
<p>Selon la nouvelle loi, les candidats à la candidature <a href="https://www.sec.gouv.sn/loi-n%C2%B0-2018-22-du-04-juillet-2018-portant-r%C3%A9vision-du-code-%C3%A9lectoral">devaient obtenir entre 0,8 et 1 %</a> de signatures de citoyens inscrits sur le fichier électoral général, le tout dans un minimum de 7 régions et à raison de 2000 électeurs au moins par région. </p>
<p>Mais les candidats <a href="https://www.lepoint.fr/afrique/senegal-nous-voulons-des-elections-fiables-30-12-2018-2282538_3826.php">ne disposaient pas du fichier électoral</a> pour vérifier la validité de leurs parrainages. Les <a href="https://www.jeuneafrique.com/698797/politique/presidentielle-au-senegal-pourquoi-19-dossiers-de-parrainage-ont-ete-ecartes/">candidatures de 19 prétendants ont été donc rejetées</a> sur cette base par le Conseil constitutionnel.</p>
<p>Des milliers de parrainages de citoyens ont été annulés au motif fallacieux qu’ils n’étaient pas inscrits sur le fichier électoral, alors même qu’ils disposaient de leurs carte d’identité CEDEAO et de leur carte d’électeur. Finalement, <a href="https://www.bbc.com/afrique/monde-46863956">cinq candidats seulement ont pu concourir</a>.</p>
<p>Après avoir <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/02/28/au-senegal-le-president-macky-sall-reelu-au-premier-tour_5429513_3212.html">été réélu le 24 février 2019 avec 58,27 % des voix</a>, à la suite de ces nombreuses péripéties, le dialogue national fut convoqué par le Président Sall, alors même que les <a href="http://www.rfi.fr/afrique/20190228-senegal-opposition-rejette-fermement-resultats-election-presidentielle">quatre autres candidats à la présidentielle ont rejeté les résultats</a>.</p>
<p>Aujourd’hui, ces manipulations déloyales des règles du jeu électoral et les atteintes aux droits et libertés de l’opposition empêchent de poser les vrais problèmes du pays et d’aller au fond des confrontations d’idées, de projets et de programmes.</p>
<p>En ce sens, le dialogue national renseigne sur les défaillances de la régulation non seulement normative mais aussi discursive de la démocratie sénégalaise, à travers la <a href="https://www.lequotidien.sn/dossier-derapages-verbaux-dans-lespace-public-la-deterioration-des-termes-de-lechange/">pauvreté du débat politique dans l’espace public</a>.</p>
<p>On assiste de plus en plus au développement des violences physiques, à la montée des invectives, des calomnies, des incivilités et des attaques crypto-personnelles. Ces dérives verbales font peser de véritables risques à la cohésion nationale, car, de manière récurrente, ces propos malencontreux, irréfléchis et injurieux tenus dans les médias et sur les réseaux sociaux visent les ethnies, les religions, les confréries ou encore les marabouts.</p>
<p>Le style du Président Sall, qui semble privilégier le rapport de force à outrance, pourrait-il permettre de désamorcer les tensions entretenues par les situations de Karim Wade et de Khalifa Sall ? Pour l’instant, le premier reste exilé au Qatar et le second est toujours en prison. Le dialogue national piétine, et son volet politique reste miné par toutes ces manœuvres politiciennes.</p>
<p>Quel résultat peut-on en attendre, quand on sait que le <a href="http://www.rfi.fr/afrique/20190528-senegal-dialogue-national-pds-conditions-macky-sall">Parti démocratique sénégalais</a>, l’ex-parti au pouvoir, et les partisans de Khalifa Sall n’y participent pas ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/122929/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Maurice Soudieck Dione ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le dialogue politique dans son format actuel semble, à bien des égards une instance de manipulation de l’opinion.Maurice Soudieck Dione, Enseignant-chercheur en sciences politiques, Université Gaston BergerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1219962019-09-12T22:26:15Z2019-09-12T22:26:15ZMultilinguisme au Sénégal : dans quelle(s) langue(s) informer et impliquer les populations ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/291492/original/file-20190909-109915-sylq6k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C10%2C1016%2C628&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption"></span> </figcaption></figure><p>En mai 2019, The Conversation a publié un article sur la polémique suscitée par la traduction en français publiée par Wikisource du dernier rapport en anglais du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat : <a href="https://theconversation.com/une-traduction-citoyenne-pour-enfin-lire-le-dernier-rapport-du-giec-sur-le-climat-116185">« Une traduction citoyenne pour (enfin) lire le dernier rapport du GIEC sur le climat »</a>.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/profiles/valerie-masson-delmotte-272012">Valérie Masson-Delmotte</a> et <a href="https://theconversation.com/profiles/youba-sokona-735487">Youba Sokona</a> y saluent l’initiative citoyenne, puis la diffusion massive, par les réseaux sociaux, d’une traduction en français de ce rapport, alors que <a href="https://www.ipcc.ch/">sur le site Internet du GIEC</a>, les traductions dans les autres langues de l’ONU (russe, espagnol, chinois, arabe et français) sont annoncées mais, à ce jour, encore en cours de relecture. Les auteurs notent : </p>
<blockquote>
<p>« Ce délai de six mois entre la publication du rapport, sa couverture médiatique et son accessibilité dans d’autres langues est un frein majeur à son appropriation par les citoyens non anglophones. »</p>
</blockquote>
<p>Cette question de la non-appropriation par des citoyens non anglophones est encore plus brûlante pour des citoyens francophones dans des pays où, au quotidien, l’on a aussi recours à de multiples autres langues.</p>
<h2>Des langues locales massivement parlées mais exclues du système éducatif</h2>
<p>Dans un pays comme le Sénégal, – où il existe 22 langues locales codifiées : wolof, pulaar, sereer, joola, màndienka, sóninké, hasaniya, balant, mànkaañ, noon, mànjaku, mënik, oniyan, saafi-saafi, guñuun, laalaa, kanjad, jalunga, ndut, bayot, paloor et womey –, l’arrivée de textes internationaux et la diffusion de l’information posent la question de savoir dans quelle(s) langue(s) les populations doivent être informées.</p>
<p>Tandis que le français, langue officielle, de l’administration, des systèmes éducatif et judiciaire, n’est compris <a href="http://www.slateafrique.com/21377/linguistique-senegal-est-il-encore-un-pays-francophone">que par</a> environ 20 % de la population, le wolof, comme véhiculaire principal, pratiqué et compris par plus de <a href="http://www.sudlangues.sn/IMG/pdf/doc-109.pdf">70 % de la population</a>, ne bénéficie d’aucun statut officiel dans la gestion du quotidien des populations. D’où les revendications pour le développement d’un multilinguisme langues locales/langues étrangères dans le système éducatif qui se font aujourd’hui de plus en plus pressantes.</p>
<p>Pour rappel, en 2015, les Nations unies ont adopté 17 Objectifs de développement durable (ODD), dans le but de « transformer notre monde [et de l’emmener] vers un développement durable à l’horizon 2030 », avec pour ambition de ne laisser personne de côté dans cette quête.</p>
<p>Ces objectifs ont été traduits en wolof et diffusés en juillet 2016. Nous avons ainsi pu observer cette campagne d’affichage, en français et en wolof, à l’<a href="https://www.ucad.sn/">Université Cheikh Anta Diop de Dakar</a> (UCAD), l’université publique la plus importante du pays, avec près de 90 000 étudiant·e·s. Elle offre la particularité d’être ouverte aux populations et de constituer un lieu de passage. Il y avait donc là une volonté manifeste d’informer, d’éduquer et d’impliquer les étudiant·e·s, et au-delà.</p>
<p>C’est ce même souci d’appropriation par les populations de textes officiels qui avait prévalu en 2008-2009 à la traduction en wolof et à la diffusion de la <a href="http://www.assisesnationales.org/?ans=doc">« Charte de gouvernance démocratique</a> » issue des <a href="http://www.assisesnationales.org/?ans=his">assises nationales</a>.</p>
<h2>Relever le défi des traductions approximatives en langues locales</h2>
<p>À travers des exemples tirés des ODD et de la « Charte de gouvernance démocratique », le but ici est d’observer le possible décalage entre l’idée véhiculée par le texte en français et celle exprimée par la traduction en wolof, ainsi que la réception des messages auprès des populations.</p>
<p>Sur le campus de l’Université, l’affichage en français exposait ainsi les 17 objectifs accompagnés de pictogrammes et de slogans.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291271/original/file-20190906-175696-1jpajxl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291271/original/file-20190906-175696-1jpajxl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291271/original/file-20190906-175696-1jpajxl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291271/original/file-20190906-175696-1jpajxl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291271/original/file-20190906-175696-1jpajxl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291271/original/file-20190906-175696-1jpajxl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291271/original/file-20190906-175696-1jpajxl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Chaque objectif était accompagné d’une photo, d’une glose et d’un slogan :</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291124/original/file-20190905-175682-1mowjzy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291124/original/file-20190905-175682-1mowjzy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1119&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291124/original/file-20190905-175682-1mowjzy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1119&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291124/original/file-20190905-175682-1mowjzy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1119&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291124/original/file-20190905-175682-1mowjzy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1406&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291124/original/file-20190905-175682-1mowjzy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1406&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291124/original/file-20190905-175682-1mowjzy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1406&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En revanche, pour le wolof, seuls les 17 pictogrammes et slogans avaient été affichés.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291273/original/file-20190906-175663-1cwnp7u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291273/original/file-20190906-175663-1cwnp7u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291273/original/file-20190906-175663-1cwnp7u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291273/original/file-20190906-175663-1cwnp7u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291273/original/file-20190906-175663-1cwnp7u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291273/original/file-20190906-175663-1cwnp7u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291273/original/file-20190906-175663-1cwnp7u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Si l’on examine l’objectif 1, on perçoit d’emblée un décalage entre l’information donnée dans les deux langues.</p>
<p>En français, on dispose d’une glose – « Éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde »– et d’un slogan : « Pas de pauvreté ». En wolof, seul le slogan « Amul ñàkk » accompagne le pictogramme. La traduction en wolof respecte bien la construction nominale française dans le slogan : « pas de » est traduit par « Amul » qui signifie ici « il n’existe pas » ; « pauvreté » est rendu par « ñàkk ». Cette traduction mot à mot du slogan français est peut-être compréhensible, mais en wolof elle finit par nier la pauvreté. L’expression « Amul ñàkk » ne fixe pas un objectif à atteindre, comme indiqué dans la glose en français, mais elle exprime une simple négation de la pauvreté. Si la traduction en wolof avait été faite avec l’objectif « d’éliminer la pauvreté… », il n’aurait pas fallu utiliser « Amul », mais un verbe impliquant « une action allant <em>contre</em>… ».</p>
<p>De la même façon, pour l’objectif 2, la glose dit : « Éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l’agriculture durable » ; et le slogan retient : « Faim “zéro” ».</p>
<p>En wolof, le slogan dit : « Xiif dëddu », littéralement « la faim (<em>xiif</em>) s’en va (<em>dëddu</em>) ». Ainsi, la construction en wolof ne rend pas compte de la volonté manifestée par le slogan, à savoir lutter pour « éliminer la faim… », avec la collaboration et l’implication des populations.</p>
<p>Dans ces deux exemples, en se fondant sur le texte en wolof, la compréhension que l’on peut avoir des objectifs est très différente du contenu en français : même si l’initiative est à saluer, on observe que dans le passage au wolof, l’information est tronquée, dénaturée, voire incompréhensible.</p>
<h2>Multilinguisme des échanges, unilinguisme de la rédaction</h2>
<p>En 2008-2009, dans un contexte de dialogue politique bloqué, l’opposition sénégalaise et la société civile ont initié des consultations citoyennes dénommées <a href="http://www.assisesnationales.org/?ans=his">« les Assises nationales du Sénégal »</a>, qui ont duré une année entière. La « Charte de gouvernance démocratique », qui en a <a href="http://www.assisesnationales.org/?ans=doc">découlé</a> a été rédigée en français et traduite dans plusieurs langues nationales, dont le wolof.</p>
<p>Arrêtons-nous sur la première phrase du préambule et le premier principe de la charte.</p>
<p>En français : « Pour un Sénégal nouveau »</p>
<p>En wolof : « Ngir taxawal Senegaal bu bees »</p>
<p>Littéralement : « Pour ériger un Sénégal qui est nouveau »</p>
<p>En français, la formule inaugurale comprend à la fois le pays concret mais aussi la Nation avec tout ce que cela comporte d’abstrait : culture, valeurs, langues, liberté ou sens de l’appartenance, etc. En wolof, le choix du terme « taxawal » focalise sur les aspects concrets (à l’exemple d’un monument, d’une statue, d’un quartier ou d’une maison à ériger ou à bâtir), en excluant toute la dimension abstraite.</p>
<p>En français, ce qui est à renouveler, c’est – entre autres choses – la démocratie, la politique linguistique, la gestion des deniers publics, le statut de l’opposition ou la politique industrielle, etc., tout ce qui a fait le Sénégal et qui est en train de disparaître, ou d’être perdu. En wolof, il s’agit simplement d’une construction nouvelle.</p>
<p>Autre exemple :</p>
<p>En français : « Le Sénégal est une République laïque et démocratique »</p>
<p>En wolof : « Senegaal réewu demokaraasi la, mu teqale doxalinu nguur ak mbiru diine » ;</p>
<p>Littéralement : « Le Sénégal est un pays de démocratie, il sépare la gestion du pouvoir des affaires religieuses ».</p>
<p>La liberté d’intervertir l’ordre des adjectifs « laïque » et « démocratique » pour les besoins de la construction en wolof est à saluer. La traduction dit d’abord que le Sénégal est une démocratie avant de proposer une explicitation du terme « laïque » (« sépare la gestion du pouvoir des affaires religieuses »). La traduction participe ainsi à l’éducation des populations susceptibles de penser, comme bon nombre de femmes et d’hommes publics (du milieu politique ou des médias…), que les termes « laïque » ou « laïcité » renvoient à la non-croyance en Dieu, à la négation de Dieu.</p>
<p>Ces « consultations citoyennes » se sont déroulées, la plupart du temps, en langues nationales mais aussi en français. Il est curieux de constater que La Charte a été rédigée en français, puis traduite en langues locales. On était plutôt en droit d’attendre qu’au multilinguisme des échanges corresponde un multilinguisme dans la rédaction de la charte.</p>
<p>Les arguments aujourd’hui avancés, au Sénégal, en faveur d’un français qui serait « unificateur » au sein d’une variété linguistique conçue comme « complexe » ne peuvent pas tout justifier.</p>
<h2>La nécessité de réhabiliter les langues nationales</h2>
<p>Comme l’avait dit Arame Fall en 1990 (“Les politiques linguistiques africaines : tendances générales et perspectives” in <em>Des langues et des villes</em>, Didier érudition, p. 71), il est certainement temps pour nos États, indépendants depuis plus d’une cinquantaine d’années, de :</p>
<blockquote>
<p>« […] choisir, avec tout ce que cela peut comporter de douloureux […] la mise en œuvre d’une politique linguistique qui donne aux langues nationales la place qui leur revient dans la gestion de la chose publique… Chaque État [devra] donner un statut officiel à la (ou aux) langue(s) qu’il s’est choisie(s) souverainement et définir le statut des langues retenues entre elles – en cas de plurilinguisme – et par rapport au français dans l’espace francophone, [par exemple…] ».</p>
</blockquote>
<p>Déjà, en 1981, les <a href="https://www.seneplus.com/article/des-etats-g%C3%A9n%C3%A9raux-aux-assises-nationales-sur-l%E2%80%99%C3%A9ducation">États généraux de l’Éducation et de la Formation</a> avaient mis l’accent sur la nécessité de réhabiliter les langues nationales. Depuis lors, des efforts importants ont été fournis dans le sens de la codification de toutes les langues du pays par la Direction de l’Alphabétisation et des Langues nationales. À l’Université, des recherches importantes ont aussi permis l’<a href="https://www.sec.gouv.sn/sites/default/files/Strat%C3%A9gie%20S%C3%A9n%C3%A9gal%20Num%C3%A9rique%202016-2025.pdf">utilisation des avancées de l’informatique</a> pour la graphisation et la <a href="https://www.defuwaxu.com/">présence sur Internet des langues locales</a>. Par ailleurs, des initiatives ont été développées en faveur de l’exploitation des méthodologies et technologies développées ces dernières années en matière de constitution de dictionnaires, de bases de données lexicales et terminologiques.</p>
<p>Tout ce processus inévitable de promotion des langues locales sénégalaises jouera pleinement son rôle quand il aidera à outiller ces langues afin de leur permettre notamment d’intégrer le système éducatif formel et d’avoir une participation plus active aux échanges politico-administratifs officiels. Il est certain que la mise en place d’une institution d’enrichissement et de régulation terminologique serait indispensable…</p>
<p>Au-delà du problème de traduction, c’est bien une question de souveraineté nationale et de droit à l’information qui est soulevée ici.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/121996/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Au Sénégal avec 22 langues locales codifiées, la diffusion des textes internationaux pose la question de savoir dans quelle(s) langue(s) les populations doivent être informées.Mame Thierno Cissé, Enseignant-chercheur, Université Cheikh Anta Diop de DakarGabrielle Le Tallec, Enseignante-chercheuse, Université Sorbonne Paris NordLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1173582019-06-10T03:28:51Z2019-06-10T03:28:51ZUne brève histoire des dockers au Sénégal<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/275747/original/file-20190521-23820-1dpkp8x.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C19%2C1194%2C777&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Au Sénégal les dockers ont été dotés d'un statut en 1970</span> <span class="attribution"><span class="source">Daniel Castillo-Hidalgo</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Plus de 90 % du commerce international se fait actuellement par voie maritime. Le rôle des ports dans la structure économique des pays est un des éléments stratégiques, expliquant l’attention accordée à la communauté portuaire (travailleurs, entreprises, institutions) par les autorités.</p>
<p>Malgré la sophistication croissante du secteur – avec les processus de numérisation et de <a href="https://theconversation.com/leconomie-globale-du-conteneur-de-20-pieds-59194">standardisation des cargaisons (conteneurs)</a> –, induit par les transformations de la navigation internationale, le rôle des travailleurs portuaires (les dockers) demeure un facteur essentiel pour le développement du commerce et de l’activité générale du pays.</p>
<h2>Les premiers jalons du statut juridique des dockers</h2>
<p>Au Sénégal, le travail portuaire dit « formel » apparaît à partir de la construction du port de Dakar dans la deuxième moitié du XIX<sup>e</sup> siècle, du fait de la précarisation des conditions de travail. Les ouvriers du port étaient des chargeurs engagés au jour le jour sans contrat ni protection sociale. Ils venaient de l’intérieur du pays pour trouver un emploi à Dakar. Répartis en équipe de cinq ou six membres, ils étaient placés sous la supervision d’un chef, lequel exerçait une forme de contrôle social.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/275751/original/file-20190521-23832-b9hekd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/275751/original/file-20190521-23832-b9hekd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/275751/original/file-20190521-23832-b9hekd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/275751/original/file-20190521-23832-b9hekd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/275751/original/file-20190521-23832-b9hekd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/275751/original/file-20190521-23832-b9hekd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/275751/original/file-20190521-23832-b9hekd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Manipulation des arachides sur les quais de Dakar.</span>
<span class="attribution"><span class="source">DR</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La pénurie de main-d’œuvre au Sénégal au cours des deux guerres mondiales et la création d’organisations syndicales transforma leurs conditions du travail. Le statut juridique des dockers, doté de caractéristiques spécifiques, constituait un élément important. L’émergence militaire du pays et l’importance du port de Dakar comme pilier de l’économie coloniale engendrèrent de nombreuses opérations de manutention des marchandises et la livraison de houille et de mazout.</p>
<p>Les premiers projets de codification du statut docker furent explorés au cours des deux guerres mondiales, à l’instar de ce qui se passait dans la métropole. La mobilisation des syndicats et des partis politiques locaux renforcèrent la position des travailleurs en vue de la reconnaissance de leurs droits essentiels. Néanmoins, ces derniers ne devaient obtenir le statut de dockers que dix ans après l’indépendance du Sénégal (en 1960).</p>
<h2>1970, la consécration d’un statut</h2>
<p>En février 1970, le décret 70-181 leur conférait le statut docker et définissaient les conditions spéciales du travail portuaire au Sénégal. Ce décret reflétait l’existence d’un collectif de travailleurs différencié qui permettait de protéger leurs droits sociaux, tout en leur assurant des conditions de manutention des marchandises correctes.</p>
<p>Ce décret donna aussi naissance au Bureau de manutention de la main-d’œuvre portuaire (BMOP) qui drainait les travailleurs vers les compagnies portuaires. Certes des listes de travailleurs existaient depuis 1925, mais le BMOP permettait de réguler l’accès à différentes catégories professionnelles, et notamment à celle de docker professionnel permanent.</p>
<p>Le nombre des dockers professionnels tournait autour de 850 entre 1970 et 1990, renforcés par les dockers occasionnels et les journaliers engagés, selon les besoins. Tandis que les dockers professionnels étaient engagés prioritairement par les compagnies, les occasionnels et journaliers n’avaient pas de travail assuré.</p>
<p>À la fin XX<sup>e</sup> siècle, des changements institutionnels et des transformations technologiques majeures sont intervenus dans l’<a href="https://theconversation.com/leconomie-glamour-du-transport-maritime-de-ligne-reguliere-62297">industrie maritime internationale</a>. En 1994, dans le contexte des plans d’ajustement structurel mis en œuvre au Sénégal, le secteur de la manutention portuaire fut libéralisé. Au nom de la compétitivité, cette réforme (décret 98-814) réorganisa et libéralisa le secteur au détriment des droits acquis.</p>
<p>La loi supprimait ainsi le monopole de l’embauche du BMOP et donnait l’opportunité de créer d’autres bureaux privés administrés par les entrepreneurs. Ainsi, une autre structure, le <a href="https://www.au-senegal.com/sats-syndicats-des-auxilliaires-de-transports-du-senegal,4964.html">Syndicat auxiliaire des transports du Sénégal, SATS</a> fut créé.</p>
<h2>Le docker à l’épreuve des mutations</h2>
<p>À l’heure actuelle, il y a moins de 500 dockers (professionnels et occasionnels) à la disposition des compagnies portuaires au Sénégal. Selon les représentants du SATS, environ 2 000 journaliers cherchent un emploi à proximité du port de Dakar. Ce bureau compte 53 dockers permanents et 80 occasionnels, embauchant 1 600 journaliers chaque mois.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/275753/original/file-20190521-23838-wsn5bq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/275753/original/file-20190521-23838-wsn5bq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/275753/original/file-20190521-23838-wsn5bq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/275753/original/file-20190521-23838-wsn5bq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/275753/original/file-20190521-23838-wsn5bq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/275753/original/file-20190521-23838-wsn5bq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/275753/original/file-20190521-23838-wsn5bq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les bureaux du SATS à Dakar.</span>
<span class="attribution"><span class="source">DR</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le SATS s’occupe de la manutention des marchandises du trafic international (terminal conteneur inclus), tandis que le BMOP s’occupe des compagnies sénégalaises. La création des deux bureaux a divisé les syndicats à Dakar. Alors que les dockers du SATS ont rallié le <a href="http://www.idcdockworkers.org/fr/">International Dockers Council (IDC)</a> en tant que partie intégrante d’un syndicalisme corporatif, c’est-à-dire globalisé, le BMOP fait toujours de la résistance au Sénégal.</p>
<p>Au cours du XX<sup>e</sup> siècle, le secteur portuaire au Sénégal a donc connu des mutations profondes. Il a su s’adapter aux dynamiques globales. À cet égard, les conditions et l’organisation du travail, les stratégies économiques familiales des ouvriers, l’adaptation au nouvel environnement institutionnel ou la contribution des dockers aux mouvements sociaux mériteraient des études spécifiques et approfondies.</p>
<hr>
<p><em>Cette contribution est un extrait adapté de l’article : Castillo Hidalgo D. & Wélé, M. (2018), « Les dockers dakarois. L’organisation du travail dans un port ouest-africain, 1910-1990s », Canadian Journal of African Studies, 52 (2), pp. 183-203.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/117358/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Daniel Castillo Hidalgo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’émergence militaire du Sénégal et l’importance du port de Dakar engendrèrent de nombreuses opérations de manutention des marchandises. Les dockers ont joué un rôle central dans ce processus.Daniel Castillo Hidalgo, Maître de conférences, Universidad de Las Palmas de Gran CanariaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/935392018-03-21T00:29:48Z2018-03-21T00:29:48ZPartenariats public-privé dans le secteur de l’eau : retour sur le cas sénégalais<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/210853/original/file-20180316-104676-13b3b8c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1300%2C838&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">À Dakar, le taux d’accès à l’eau potable est de 98 %. </span> <span class="attribution"><span class="source">AFD</span></span></figcaption></figure><p>Le secteur de l’eau urbaine est historiquement une affaire de gestion publique des services, que ce soit à l’échelle municipale, régionale ou nationale.</p>
<p>Un rapide panorama international des services urbains de l’eau potable confirme que la gestion privée y joue, même aujourd’hui, une partition très modeste (environ <a href="https://ppiaf.org/documents/3163/download">7 % de la population</a> des villes en développement est desservie par un opérateur privé).</p>
<p>Pourtant, les années 1990 et 2000 ont été marquées par un très fort engouement pour les schémas de partenariats public-privé (PPP) qui promettaient, en théorie, une amélioration de l’efficacité technique et commerciale des services, et des ressources financières complémentaires pour financer les investissements massifs de services en pleine croissance.</p>
<h2>Débats passionnés</h2>
<p>La décennie 1990-2000 a également été marquée par des débats passionnés sur les <a href="http://ibread.org/bread/sites/default/files/020703_Conference/Water_for_Life_January_6_2003.pdf">vertus</a> ou les <a href="https://www.world-psi.org/sites/default/files/documents/research/rapport_fr_56pages_a4_lr.pdf">dangers</a> d’une gestion privée des services essentiels. De même, les années 2000 et 2010 ont été à l’origine d’une importante production de <a href="https://www.cairn.info/revue-i2d-information-donnees-et-documents-2015-1-page-30.htm">littérature grise</a> sur la question des PPP : foisonnement d’analyses ou de recommandations largement portées par les institutions de financement de l’aide (Banque mondiale et banques régionales notamment). <em>Toolkits</em>, <em>guidelines</em>, <em>handbooks</em> et autres <em>lessons learned</em> ont vu le jour, produisant de la connaissance normative, certes nécessaire aux acteurs du secteur, mais très peu à la compréhension des véritables mécanismes à l’œuvre.</p>
<p>Il faut enfin noter l’existence d’autres analyses plus <a href="http://journals.openedition.org/rei/5474">critiques</a> ou plus soucieuses de s’extraire des débats sur le déterminisme institutionnel, par exemple les <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00176869/document">travaux portant sur les réformes en Afrique anglophone</a> qui étudient les enjeux de la durabilité des services indépendamment des modes de gestion, de même que des recherches plus attachées à comprendre les processus et à les replacer <a href="https://www.afd.fr/fr/services-deau-et-secteur-prive-dans-les-ped-dynamique-des-reflexions-et-perceptions-croisees-des-acteurs-du-secteur">dans une perspective historique</a>.</p>
<p>Toutefois, ces analyses collectives qui ont cherché à réfléchir sur les PPP sans posture idéologique et à identifier « les ingrédients » prometteurs (ou non) des réformes des années 2000 sont maintenant anciennes et se sont, pour la plupart, penchées sur des contrats alors récents qui offraient encore peu de recul.</p>
<p>Or, dans la pratique, les contrats de PPP sont confrontés, pour une ou plusieurs décennies, aux réalités techniques, sociales et politiques des territoires de service. Il est nécessaire de les analyser sur le temps long et d’emprunter aux travaux d’économie politique, de management et de sociologie pour comprendre les ressorts de leurs évolutions.</p>
<h2>Le cas sénégalais</h2>
<p>Le Sénégal est actuellement engagé dans une seconde réforme de son secteur de l’eau urbaine, plus de 20 ans après la première.</p>
<p>D’ici l’été prochain, l’identité de l’opérateur privé qui exploitera les services d’eau potable de la capitale et de 66 villes du Sénégal (pour les quinze prochaines années), devrait être connu à l’issue d’un processus d’appel d’offres international.</p>
<p>La réforme en cours vise, non pas à remettre en cause le principe du PPP, mais à en renouveler les termes et à rétablir les équilibres entre partenaires qui avaient été définis lors de la réforme de 1995.</p>
<p>Si personne aujourd’hui au Sénégal n’affirme que la première réforme fut un échec, les objectifs initiaux d’autonomie financière du secteur et d’inclusion vertueuse d’un partenaire privé ont fait long feu. À l’issue de cette première réforme, l’État est redevenu le premier créancier du secteur, le PPP a accouché d’un monopole privé très profitable et l’urgence préside à nouveau aux destinées de l’hydraulique urbaine. En atteste notamment la crise majeure des services en 2013 où, suite à une rupture de canalisation, la ville de <a href="http://www.rfi.fr/afrique/20130928-le-manque-eau-potable-fait-monter-colere-dakar">Dakar a été privée d’eau</a> potable pendant plusieurs semaines.</p>
<p>Pourtant, le choix du modèle mis en place et la qualité du processus de réforme avaient été unanimement salués par les différents acteurs et étaient porteurs de grands espoirs pour le pays et pour la sous-région. De même, plusieurs auteurs avaient souligné le caractère innovant du PPP et qualifié l’<a href="http://ppp.worldbank.org/public-private-partnership/sites/ppp.worldbank.org/files/ppp_testdumb/documents/Innovative%20Contracts%2C%20Sound%20Relationships%20Urban%20Water%20Sector%20Reform%20in%20Senegal.pdf">expérience sénégalaise</a> de « réussite », dans les premiers temps de son développement.</p>
<p>Alors comment comprendre ces évolutions ?</p>
<h2>La nécessité du temps long</h2>
<p>Revenons aux premières ambitions portées par la réforme de 1995. Le Sénégal cherche alors à améliorer significativement l’efficacité des services d’eau urbains et à amener progressivement le secteur vers l’autonomie financière. Il engage une réforme séparant l’eau potable des eaux usées et pluviales, et met en place un schéma tripartite de PPP pour l’eau potable.</p>
<p>D’une part, l’État s’engage dans un contrat de concession pour 30 ans avec la Société nationale des eaux du Sénégal (SONES), société publique de patrimoine nouvellement créée, en charge des investissements neufs et d’une part substantielle du renouvellement du patrimoine. D’autre part, l’État et la SONES s’engagent ensemble dans un contrat d’affermage avec une société d’exploitation privée, la <a href="http://www.sde.sn/Pages/home.aspx">Sénégalaise des eaux</a> (SDE), en charge de la gestion technique et commerciale des services, et du financement d’une part limitée du renouvellement du patrimoine. Initialement d’une durée de 10 ans, cet affermage s’est finalement prolongé jusqu’à ce jour.</p>
<p>Pour analyser le PPP de l’eau urbaine du Sénégal, une <a href="https://www.afd.fr/fr/analyse-retrospective-du-secteur-urbain-de-leau-potable-au-senegal-un-partenariat-public-prive-lepreuve-du-temps">récente étude</a> a opté pour une démarche rétrospective portant sur toute la période de la réforme de première génération.</p>
<h2>Quels enseignements ?</h2>
<p><a href="https://www.afd.fr/fr/analyse-retrospective-du-secteur-urbain-de-leau-potable-au-senegal-un-partenariat-public-prive-lepreuve-du-temps">Cette analyse</a> sur le temps long a permis de séquencer les dérives du PPP et d’identifier les vecteurs qui ont, principalement à l’occasion des avenants contractuels, remis en cause l’esprit du partenariat d’origine ; à savoir, un partage des risques et des responsabilités entre les trois entités : État, société de patrimoine et société d’exploitation.</p>
<p>À défaut d’englober toute la période de la réforme, on manquerait le début de ce processus, amorcé dès 2002, soit six ans seulement après le début du contrat d’affermage, pour n’en constater que l’aboutissement : une société d’exploitation en position de force pour obtenir un nouveau contrat, détentrice d’une créance de 10 à 12 milliards FCFA sur l’opérateur à venir.</p>
<p>De la même façon, on s’expliquerait mal l’inadéquation patente entre des règles tarifaires qui supposent un suivi serré des charges supportées par la société d’exploitation, et des modalités de contrôle axées sur la qualité du service fourni. Ce décalage provient d’un changement inachevé des règles du jeu en 2006, date depuis laquelle le secteur n’est de fait plus régulé.</p>
<p>Enfin, une analyse limitée aux dernières années du contrat conclurait que la composante patrimoniale du tarif ne reflète plus la valeur du patrimoine hydraulique, mais passerait sous silence qu’un pareil décrochage entre le tarif d’exploitation et les coûts d’exploitation est à l’œuvre depuis 2002, et qu’en conséquence le tarif moyen en vigueur est devenu un indicateur largement défaillant pour apprécier l’efficacité du PPP.</p>
<h2>Une méthodologie utile pour d’autres services</h2>
<p>Combiner analyse des instruments formels du PPP et entretiens avec des acteurs majeurs du secteur s’est montré particulièrement fécond. Car les acteurs historiques, ceux qui ont conçu la réforme de 1995 et le premier PPP, sont pour la plupart toujours actifs dans le secteur. Ils sont dépositaires d’une mémoire institutionnelle précieuse pour une analyse sur le temps long, et en capacité de partager leurs réflexions sur les changements et dérives que le PPP a connus en plus de 20 ans.</p>
<p>Finalement, cette analyse du PPP sénégalais permet d’en comprendre de manière précise l’évolution, selon une méthodologie facilement réplicable pour d’autres services publics.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/93539/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Alors que le Sénégal doit décider qui exploitera ses services d’eau potable à Dakar et dans 66 villes sénégalaises, une récente étude revient sur les réformes du secteur de l’eau urbaine du pays.Sarah Botton, Sociologue PhD, chargée de recherche, Agence française de développement (AFD)Christelle K. Pezon, Maître de conférences en sciences de gestion, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/862612017-10-26T19:49:19Z2017-10-26T19:49:19ZObjets de plaisir : les armes des femmes à Dakar<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/191668/original/file-20171024-30577-vc639c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Ceinture de hanches, 2016. A Dakar, plaisir et injonctions franches vont de pair avec objets et images romantiques.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Ismaël Moya</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p><em>Billet publié en collaboration avec le blog de la revue Terrain. Dans le numéro 67 de la revue intitulé « Jouir », le lecteur pouvait découvrir <a href="http://terrain.revues.org/16204">« Perles de hanches et fumée d’encens. L’économie domestique du plaisir à Dakar »</a> une enquête d’Ismaël Moya.</em></p>
<hr>
<p>Dakar. Une femme mariée de 48 ans : </p>
<blockquote>
<p>« Le sexe, ça se prévoit. Le matin, quand mon mari se réveille, je lui tapote le pénis puis je lui dis, en faisant comme ça [l’index pointé vers son sexe, menaçant], “ce soir, t’es mort”. Ici, les femmes doivent savoir provoquer leur mari. Tu fais ça dès le matin, et toute la journée, quand il sera au travail, il ne pensera qu’à toi et à ce qui l’attend. Il saura que ce soir, c’est le grand combat. Et la nuit venue, il sait que je vais le clouer. »</p>
</blockquote>
<p>En wolof, la lutte sénégalaise est la métaphore de la sexualité. Dans les deux, l’essentiel est moins le combat proprement dit que les longs préliminaires (<em>léewtoo</em>) qui y conduisent.</p>
<h2>« Quand la porte de la chambre est fermée, tu fais ce que tu veux »</h2>
<p>Pour cela, les femmes ont à leur disposition un véritable arsenal féminin de la séduction destiné à provoquer leur mari, vendu au vu et au su de tous dans les marchés.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/191663/original/file-20171024-30605-cdno50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/191663/original/file-20171024-30605-cdno50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/191663/original/file-20171024-30605-cdno50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/191663/original/file-20171024-30605-cdno50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/191663/original/file-20171024-30605-cdno50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/191663/original/file-20171024-30605-cdno50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/191663/original/file-20171024-30605-cdno50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Perles de hanches, draps et produits parfumés, Dakar, 2016.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://terrain.revues.org/16204">Ismaël Moya</a>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Dans cette société musulmane où la <a href="https://www.cairn.info/revue-mondes-en-developpement-2015-3-page-31.htm">polygamie</a> est largement répandue, il est entendu que les épouses doivent maîtriser l’art féminin de la séduction et de la provocation (<em>jongué</em>) pour retenir leur mari de prendre une autre femme ou s’attirer ses faveurs, notamment dans le cadre d’une lutte sourde entre co-épouses (en <a href="https://dhsprogram.com/pubs/pdf/FR320/FR320.pdf">milieu urbain, près d’une femme sur quatre a des co-épouses</a>).</p>
<p>La sexualité, tout comme l’art de la séduction et de la provocation, n’a rien de transgressif dans un couple marié. Si un registre moral est attaché au sexe dès lors qu’il est licite, c’est plutôt celui de la pudeur (<em>kersa</em>) et de la discrétion (<em>sutura</em>), qui organise les relations sociales en général et en particulier celles entre époux, qu’il s’agisse de sexe ou d’économie domestique. Une femme mariée, la soixantaine : « Tout ce que tu fais avec ton mari, l’islam interdit d’en parler. Mais quand la porte de la chambre est fermée, tu fais ce que tu veux ».</p>
<h2>L’encens</h2>
<p>Le corps comme l’espace de la chambre à coucher doivent être préparés en vue du combat. Les deux sont nettoyés, parfumés et apprêtés avec soin. Dans le registre religieux, les ablutions purificatrices prescrites par l’islam se doublent à Dakar de pratiques surérogatoires : les bonnes odeurs sont recommandées, si bien qu’il est souhaitable de parfumer son corps ou la maison.</p>
<p>Aux parfums pour le corps, dont les hommes comme les femmes sont friands, répond une multitude de parfums de chambre et, surtout, d’encens (<em>cuuraay</em>). Il ne s’agit pas seulement de se débarrasser des odeurs corporelles, mais d’en acquérir de nouvelles, dont certaines provoquent le désir sexuel.</p>
<figure class="align-left ">
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<span class="caption">Magasin d’encens. Dakar, 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ismaël Moya</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans les marchés, les boutiques d’encens offrent un choix immense.</p>
<p>Les encens à l’odeur la plus forte et la plus lourde, les plus efficaces pour susciter le désir, sont réservés à l’usage intime. Les femmes ont dans leurs placards de véritables collections. Les noms sont évocateurs et se renouvellent constamment : <em>Nemmali</em> (achever de tuer), <em>Doggali</em> (fermer les yeux du défunt), <em>ser Bou Tass</em> (pagne défait), <em>Dadjima</em> (enfonce-moi), <em>Kumay Teul</em> (fais-moi rebondir), <em>Naif</em> (cravacher), <em>Tojj Xuur</em> (écrase couilles), <em>Sauce u Kani</em> (sauce pimentée), etc.</p>
<p>Ces appellations indiquent une force, une modalité d’action spécifique.</p>
<h2>Parures de lit</h2>
<figure class="align-right zoomable">
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<figcaption>
<span class="caption">Drap de lit peint. Dakar, 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Vanessa Manceron.</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Faire l’amour demande aussi du linge dédié. Il existe depuis plusieurs décennies des assortiments de draps, taies d’oreiller et torchons (pour essuyer le sexe après l’amour) sur lesquels des artistes peignent en noir et rouge des sexes en érection, des vagins ouverts et représentent des couples (l’homme en noir et la femme en rouge) dans toutes sortes de positions : missionnaire, levrette, fellation…</p>
<p>Ces images sont accompagnées d’inscriptions, généralement en français : mon amour ; mon cœur, c’est bon ; c’est chaud.</p>
<p>Plus récemment sont apparus des draps et des taies d’oreiller blancs sur lesquels sont sérigraphiés en rouge des motifs en forme de cœurs et de fleurs, accompagnés de mots doux : I love you, je n’aime que toi, mon amour, ma raison de vivre…</p>
<figure class="align-left ">
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<figcaption>
<span class="caption">Taie d’oreiller. Dakar, 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ismaël Moya</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Sur les modèles les plus coquins, des images pornographiques prises sur Internet sont imprimées entre les motifs.</p>
<p>La juxtaposition de scènes pornographiques (sexualité restreinte à l’acte sexuel) et des lieux communs du romantisme fleur bleue (qui révoque la sexualité) peut surprendre tant est elle parait éloignée de la conception occidentale de l’érotisme, qui distingue ces deux pôles. À l’inverse, à Dakar, c’est leur combinaison qui éveille et stimule le plaisir sexuel.</p>
<h2>Fer et petits pagnes</h2>
<figure class="align-right ">
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<figcaption>
<span class="caption">Perles de hanches. Dakar. 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ismaël Moya</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les perles de hanche (<em>fer</em>) sont un des accessoires essentiels de l’arsenal féminin. Leurs cliquetis, lorsque les femmes ondulent des hanches et des fesses de manière suggestive. Les plus grosses, appelées « écrase-testicule », sont portées par les femmes plus âgées quand les jeunes préfèrent des perles moins lourdes, mais aux noms tout aussi suggestifs : poivre de minuit (<em>poobar minuit</em>), crème glacée, connexion, etc. Le son semble moins important pour les plus jeunes qui portent des perles de petite taille (<em>bine bine</em>) ou des chaînettes dorées.</p>
<figure class="align-left ">
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<figcaption>
<span class="caption">Ceinture « mon cœur ». Dakar, 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ismaël Moya</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>D’autres ceintures de hanche, comprennent des lettres qui composent des messages explicites : en français : je t’aime, baise-moi, mon cœur, pénètre-moi, papa chéri ou en wolof : <em>kat ma</em> (baise-moi), <em>ya saf badio</em> (ton vagin est savoureux), etc. Les femmes les achètent déjà préparées ou commandent directement aux vendeuses des inscriptions particulières.</p>
<p>La couleur des sous-vêtements doit être assortie à celle des perles de hanche. L’accessoire féminin de lingerie coquine traditionnel est le petit pagne (<em>beeco</em>).</p>
<p>Aux modèles anciens, en tissus brodés de motifs colorés ou peints à la manière des draps, a succédé dans les années 90 le <em>baraz</em> (barrage), un pagne de couleur vivre, composé d’une bande de tissu plein qui cache le sexe et les fesses, que prolonge un tissu ajouré ou un rideau de fils qui laissent voir les jambes.</p>
<figure class="align-center ">
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<figcaption>
<span class="caption">Trois générations de petits pagnes. De gauche à droite : beeco, baraz, dentelle. Dakar. 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ismaël Moya</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au fil du temps, la bande de tissu occultant a progressivement disparu. Les modèles « dentelle » se contentent ainsi de jeter sur le bas du corps un simple filet coloré. Les femmes portent aussi des ensembles deux pièces (appelés nuisettes ou aller-retour), composés d’un string et d’un soutien-gorge en tissu fin et transparent, ou tricotés en gros fils agrémenté de perles ou encore fabriqués en perles lumineuses.</p>
<figure class="align-right zoomable">
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<figcaption>
<span class="caption">Débardeur et culotte « Délicieux pénis. Viens me baiser. Tu baises délicieusement », Dakar, 2016.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://terrain.revues.org/16204#bodyftn1">Vanessa Manceron</a>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>On trouve enfin des débardeurs et des slips où sont sérigraphiés des cœurs, des positions sexuelles et des expressions crues comme « Amour, viens me réchauffer la chatte avec ta grosse bite ». A nouveau, la conception occidentale de l’érotisme est heurtée : les petits cœurs ou la provocation subtile (le tintement des perles) sont conjugués aux expressions salaces dans un accord harmonieux au cœur de l’érotisme wolof.</p>
<h2>Vers le combat</h2>
<p>Les provocations commencent souvent dès le matin, parfois au réveil. L’épouse peut ensuite, par exemple, servir à son époux le petit déjeuner en mettant des perles de hanche, dont le mari devine la présence par le soin que prend sa femme à les faire tinter par ses poses et sa démarche.</p>
<p>Ces provocations peuvent se poursuivre au téléphone durant la journée. Le soir venu, comme le suggère une femme mariée, la cinquantaine : « il faut lui offrir un diner bien poivré, pour éveiller les sens ».</p>
<p>À l’intérieur de la chambre, saturée d’odeur d’encens, l’épouse apprêtée plaisante avec son mari, le taquine et déambule de manière lascive, se penchant pour montrer ostensiblement ses perles de hanches et ses fesses. Certains jouent aux cartes avec un jeu composé d’images pornographiques. Un autre jeu érotique consiste à tourner une petite plume dans l’oreille de l’homme.</p>
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<span class="caption">Feuilles de menthe. Dakar, 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ismaël Moya</span></span>
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<p>Peu à peu, le couple se dévêt, se provoque mutuellement et se caresse. Les préliminaires sexuels débutent. La fellation et le cunnilingus se pratiquent en général en utilisant des feuilles ou des bonbons mentholés qui éradiquent les odeurs biologiques et provoquent une sensation forte sur le partenaire. Il existe d’autres produits : une femme peut prendre dans sa bouche un peu de « cristal » (apparemment des cristaux de sucre mentholé), connu comme un aphrodisiaque puissant qu’une épouse peut aussi mélanger à la boisson de l’homme le matin ; du miel ou encore du lait concentré mentholé vendu dans de petits flacons. Puis vient alors, après une journée entière de préliminaires, le moment du véritable combat.</p>
<h2>L’issue du combat : discours et sexualité</h2>
<p>Une statistique de 2008 a longtemps circulé dans la presse du Sénégal et de l’étranger : <a href="http://www.slateafrique.com/90007/senegal-la-tyrannie-du-sexe-erotisme-seduction-aphrodisiaques-sex-toys">97 % des femmes au Sénégal connaîtraient l’orgasme</a>. Un tel pourcentage laisse perplexe et songeur : l’arsenal des femmes sénégalaises serait-il la solution miracle à une question qui colonise les pages des magazines occidentaux ? Hélas, comme souvent, l’anthropologie ne peut que décevoir. Les épouses proclament de manière tout aussi systématique leur soumission à l’autorité de leur mari et leur obéissance.</p>
<p>En effet, il s’agit de belles paroles (<em>wax bu rafet)</em>, un genre de discours consistant à dire publiquement des choses positives et valorisées sur une personne, un acte ou une situation que l’on se doit d’enjoliver afin de se conformer à la norme.</p>
<h2>Course aux armements</h2>
<p>Cependant, la position des hommes n’est pas si favorable qu’elle paraît. Si l’arsenal érotique des femmes est impressionnant et que la course aux armements fait rage, la gamme des produits luttant contre les dysfonctionnements sexuels est tout aussi fournie.</p>
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<span class="caption">Comptoir Pharmacie.</span>
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<span class="caption">Un coup démarreur. Dakar, 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ismaël Moya</span></span>
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<p>L’immense majorité de la pharmacopée, omniprésente sur les comptoirs des pharmacies, dans les marchés ou dans la rue, a pour objet la virilité masculine. La gamme semble infinie : écorces et racines de la pharmacopée traditionnelle, <em>coup démarreur</em> ou poudre Takadari du Niger, sirop Bazooka du Nigeria, Ajanta’s Stamina indien, Yang Chun (100 % naturel), viagra officiel ou contrefait, pilules Atomix au Gingembre (bio), etc.</p>
<p>Comme si ces produits étaient à disposition afin de parer l’angoissant arsenal féminin, synonyme de course à la performance.</p>
<h2>Pouvoir de femmes</h2>
<p>Le désir et le plaisir de l’homme sont au cœur de ce dispositif, mais ne sont pourtant pas l’aboutissement d’une relation sexuelle.</p>
<p>Elle se traduit souvent, le soir ou le lendemain par un cadeau à l’épouse : des tissus, un parfum ou fréquemment, de l’argent. Rendre le contre-don (<em>dello njukkal</em>), remerciement (<em>sargale</em>), décoration… les noms donnés à ces cadeaux sont explicites : le mari honore son épouse par un don en raison du plaisir qu’elle lui a procuré.</p>
<p>Deux registres se mélangent et donnent l’illusion d’une transaction. Il serait pourtant dérisoire de vouloir réduire la sexualité conjugale à l’attente d’un cadeau. A Dakar, l’argent est le revers de toutes les relations sociales, qu’il s’agisse du commerce, de la parenté ou de la sexualité.</p>
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<span class="caption">Encens compte bancaire. Dakar, 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ismaël Moya</span></span>
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<p>Si la relation entre mari et femme est asymétrique et l’égalité exclue, l’arsenal féminin du plaisir a d’autres effets que d’extraire un orgasme aux hommes.</p>
<p>Il donne à l’épouse une capacité d’agir, c’est-à-dire une forme de maîtrise, sur son mari. Ce n’est sans doute pas un hasard, d’ailleurs si certains encens érotiques sont nommés Compte bancaire, <em>Sama Junni</em> (mon billet de 5 000 francs CFA) ou <em>Keytou Keurgui</em> (titre foncier).</p>
<p>La sexualité, comme le mariage, est un combat. Et les femmes ne sont pas sans armes – humour compris.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/86261/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ismaël Moya ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>À Dakar, les femmes disposent d’un véritable arsenal d’objets érotiques mêlant odeurs, sons, romantisme et expressions salaces au cœur de la sexualité maritale, décrite comme un véritable combat.Ismaël Moya, Anthropologue, CNRS, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.