tag:theconversation.com,2011:/ca-fr/topics/cac-40-53816/articlesCAC 40 – La Conversation2023-09-10T14:54:41Ztag:theconversation.com,2011:article/2128832023-09-10T14:54:41Z2023-09-10T14:54:41ZLes multiples crises affectent les stratégies d’acquisitions des multinationales françaises<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/546344/original/file-20230905-24-76zl2n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=43%2C0%2C1113%2C722&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En 2020, 23 multinationales françaises ont réalisé 64 acquisitions, contre 121 rachats opérés par 30 groupes l’année précédente.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/iceninejon/16277774798">Flickr/Jonathan</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>La pandémie de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/Covid-19-82467">Covid-19</a> ou encore la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/conflit-russo-ukrainien-117340">guerre en Ukraine</a> ont constitué des crises d’ampleur mondiale qui ont remis en cause la politique d’investissement des multinationales. Ces chocs exogènes, par nature imprévisibles, ont en effet provoqué un fort climat d’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/incertitude-23726">incertitude</a> et contraignent les entreprises à s’interroger sur leur politique d’acquisition.</p>
<p>Ces rachats d’entreprises permettent aux multinationales d’accélérer leur croissance et de saisir de nouvelles opportunités de développement. Elles comportent cependant de nombreux risques liés à leurs complexités financières et organisationnelles, qui sont accentuées <a href="https://theconversation.com/ces-frictions-culturelles-qui-menent-a-lechec-des-fusions-acquisitions-internationales-117059">lorsque les cibles sont localisées dans des pays éloignés</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1131278602014736384"}"></div></p>
<p>Les chocs exogènes récents ont particulièrement affecté les stratégies des multinationales du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/cac-40-53816">CAC 40</a> qui avaient multiplié leurs investissements dans les économies matures et émergentes avant 2020. C’est l’une des conclusions d’un <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2023-4-page-53.htm?u=077cc613-8848-437b-a211-fcf958b89dee&WT.tsrc=email&WT.mc_id=crn-ar-RFG_311">travail de recherche</a> récent, qui a pris la forme d’une étude qualitative fondée sur l’examen systématique des rapports annuels d’activité, des sites Internet et des communiqués de presse des 40 plus grandes <a href="https://theconversation.com/fr/topics/multinationales-22485">multinationales</a> cotées à la bourse de Paris ainsi que sur les articles de presse publiés sur Factiva (plate-forme de recherche d’actualités et de données mondiales).</p>
<h2>Nouveau recul en 2022</h2>
<p>L’analyse des données collectées met en relief la chute des acquisitions face au choc exogène de la pandémie : seulement 23 multinationales ont réalisé 64 acquisitions en 2020, contre 30 multinationales ayant réalisé 121 acquisitions en 2019. 17 multinationales du CAC 40 ont ainsi renoncé à une stratégie d’acquisition face au choc exogène de la pandémie. </p>
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<p>Parmi celles-ci figurent des entreprises comme Publicis Groupe qui avait expliqué ce choix par le fort climat d’incertitude lié à la crise mondiale du Covid-19. Après la chute observée en 2020, les acquisitions <a href="https://www.lesechos.fr/finance-marches/ma/nouvelle-donne-dans-les-fusions-acquisitions-mondiales-1893108">reprennent fortement en 2021</a> avant de connaître une nouvelle chute en 2022 suite au déclenchement de la guerre en Ukraine. <a href="https://www.pwc.fr/fr/publications/fusions-acquisitions/global-manda-tendances-et-perspectives-2023.html">Le ralentissement se confirme</a> au premier semestre 2023.</p>
<p>Cependant, dans des secteurs d’activité favorisés par la pandémie, comme la santé, les télécommunications ou le conseil en transformation digitale, les entreprises ont multiplié les acquisitions en 2020 pour saisir de nouvelles opportunités de croissance, diversifier leurs activités ou acquérir de nouvelles compétences.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1257512720821256193"}"></div></p>
<p>Par exemple, <a href="https://atos.net/fr/2021/communiques-de-presse_2021_02_18/resultats-annuels-2020">Atos a réalisé dix acquisitions en 2020</a> afin de se développer dans les domaines du numérique et de la cybersécurité. L’objectif est de répondre aux besoins de digitalisation de la relation client et de la protection des données, renforcés par la crise sanitaire liée au Covid-19. Le directeur général du groupe Atos explique dans le rapport annuel :</p>
<blockquote>
<p>« En 2020, nous avons réalisé 10 acquisitions pour accélérer notre stratégie. Nous avons également renforcé nos partenariats et élargi notre écosystème, non seulement avec des acteurs majeurs, mais aussi avec des start-up qui stimulent l’innovation. »</p>
</blockquote>
<p>Depuis la pandémie, les multinationales du CAC 40 privilégient les <a href="https://www.tradingsat.com/cac-40-FR0003500008/actualites/cac-40-pourquoi-le-cac-40-fait-tres-largement-ses-emplettes-a-l-etranger-pour-racheter-des-start-up-1071951.html">acquisitions d’entreprises innovantes</a>, notamment de start-up, afin de renforcer leurs activités digitales. Par exemple, Publicis Groupe annonce <a href="https://www.businesswire.com/news/home/20230719132025/fr/">plusieurs acquisitions dans le domaine digital</a> (Practia, Yieldify, Profitero et Corra) en 2023.</p>
<p>Notre étude révèle en outre que les multinationales ayant réalisé des acquisitions pendant la pandémie ont globalement privilégié des cibles dans les pays matures, notamment en Europe et en Amérique du Nord. Parmi les 64 acquisitions effectuées en 2020, 23 opérations concernent des cibles localisées en France, 14 des cibles localisées aux États-Unis et respectivement 3 opérations des cibles localisées au Canada, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni.</p>
<h2>Des cibles plus petites</h2>
<p>Les chocs exogènes semblent ainsi influencer la localisation des cibles qui sont choisies. En effet, la pandémie a été marquée par la fermeture de nombreuses frontières et les restrictions en matière de mobilité, qui rendent les rencontres entre équipes dirigeantes plus difficiles, notamment dans les pays éloignés. Les acquisitions internationales ont connu un rebond en 2021 avant d’enregistrer un nouveau ralentissement en 2022 et 2023, qui est lié au conflit en Ukraine et à la crainte d’une récession économique mondiale.</p>
<p>Notre travail met en relief que le ralentissement du mouvement des acquisitions concerne aussi la valeur des opérations effectuées. Dans un contexte de crise mondiale, la plupart des multinationales du CAC 40 ciblent des entreprises de plus petite taille aux activités complémentaires, et en particulier des start-up, afin de limiter les risques liés aux investissements effectués.</p>
<p>La dégradation de l’environnement économique mondial et la forte remontée des taux d’intérêt qui s’expliquent par la multiplication des crises semblent marquer la <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/fusions-et-dacquisitions-recul-des-mega-deals-1473948">fin des « méga-deals</a> ». Les multinationales du CAC 40 continuent de favoriser des opérations moins risquées <a href="https://www.lesechos.fr/start-up/ecosysteme/le-cac40-achete-plus-de-start-up-etrangeres-que-francaises-1949746">et des cibles de plus petite taille</a>.</p>
<p>Dans ces périodes de forte turbulence, les multinationales françaises affichent ainsi une volonté de réduire leur exposition au fort degré d’incertitude qui caractérise les crises d’ampleur mondiale. Les comportements observés soulignent par ailleurs la tendance à une plus forte proximité des investissements réalisés et à une reconfiguration davantage régionalisée de la mondialisation.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/212883/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La pandémie avait entraîné un ralentissement des rachats d’entreprises. Depuis, les groupes du CAC 40 ont repris le mouvement mais en sélectionnant plus finement leurs cibles.Ludivine Chalencon, Maître de conférences, finance et comptabilité, iaelyon School of Management – Université Jean Moulin Lyon 3Manon Meschi, Doctorante contractuelle à Université Côte d'Azur, IAE Nice, GRM et Professeure Assistante, ESSCA School of ManagementUlrike Mayrhofer, Professeur des Universités à l'IAE Nice et Directrice du Laboratoire GRM, Université Côte d’AzurLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1945842022-11-16T14:37:43Z2022-11-16T14:37:43ZEn France, le partage de la valeur ajoutée reste plus favorable aux salariés qu’aux actionnaires<p>Le partage de la valeur ajoutée des entreprises entre revenus du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/travail-20134">travail</a> et du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/capital-29595">capital</a> est une problématique qui concentre aujourd’hui énormément d’attention, dans un contexte de tensions sur le pouvoir d’achat en raison de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/inflation-28219">l’inflation</a> et de <a href="https://cdn.janushenderson.com/webdocs/H050642_0822_Issue+35_ENGLISH.pdf">montants record des dividendes</a> versés aux actionnaires des sociétés du CAC 40. Début novembre, le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, a ainsi fait part de sa volonté d’organiser une <a href="https://www.leparisien.fr/politique/bruno-le-maire-il-ny-a-pas-eu-de-profiteurs-de-linflation-05-11-2022-GCIQ7WXZ5VEUDBUW6JFWDSFLKA.php">convention</a> sur le sujet au sein du parti de la majorité.</p>
<p>Mais comment mesurer ce partage, et quelle a été son évolution dans le temps ? Comment se compare-t-il avec celui des autres pays ? C’est ce à quoi notre dernière recherche qui se concentre sur les sociétés hors secteur financier, <a href="https://www.researchgate.net/publication/365360455_Le_partage_de_la_valeur_ajoutee_des_entreprises_francaises_entre_salaires_et_profits">dont tous les détails et graphiques sont disponibles ici</a>, s’est attelée.</p>
<h2>Plus de 80 % pour les salariés</h2>
<p>La production de richesse de ces sociétés est mesurée par la <a href="https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1950">valeur ajoutée</a>. Ce qui peut être partagé est la valeur ajoutée nette : il s’agit de la valeur ajoutée brute, soit la différence entre ce <a href="https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1816">qu’une entreprise a produit</a>, en euros, et ses <a href="https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1052">achats de biens et services</a>, de laquelle on retranche l’amortissement du capital physique.</p>
<p>En France, hors secteur financier, cette valeur ajoutée nette a été répartie en 2021 entre les travailleurs salariés pour 82,56 %, les actionnaires pour 8,03 %, les administrations publiques pour 6,31 % et d’autres bénéficiaires pour 3,11 %. La part réservée aux actionnaires a été allouée sous forme de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/dividendes-46099">dividendes</a> pour 5 % et de bénéfices épargnés pour 3 %.</p>
<p><iframe id="HKaPQ" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/HKaPQ/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>En réalité, après la forte baisse enregistrée de 1982 à 1987, la rémunération des salariés a augmenté tendanciellement de 1988 à 2021 en pourcentage de la valeur ajoutée nette. Elle a atteint 82,56 % en 2021, depuis 75,02 % en 1988. Au premier semestre 2022, elle a un peu diminué pour se retrouver à 81,81 %.</p>
<p><iframe id="riW5r" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/riW5r/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>En pourcentage de la valeur ajoutée nette, le profit net distribué ou épargné des activités productives nationales oscille autour d’une moyenne constante depuis 1988 mais avec une forte dispersion. Il a baissé de 1988 à 2012, d’une performance initiale de 9,2 % pour arriver à 2,6 %. Il est ensuite remonté jusqu’à 8 % en 2021 avant de redescendre à 6,34 % au premier semestre 2022.</p>
<p><iframe id="uJ1Zb" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/uJ1Zb/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Cette remontée de la part des profits de 2012 à 2021 a donc été réalisée sans que ce soit au préjudice de celle des salaires. La part des salaires, en pourcentage de la valeur ajoutée nette, a en effet augmenté aussi très légèrement pendant cette période.</p>
<p>La hausse de la part des profits a été permise d’abord par la baisse des intérêts nets, loyers nets et autres versements nets à des tiers, de 6 % à 3,1 %. Elle a aussi été favorisée par la diminution de la part des impôts de production nets de subventions et sur les bénéfices, respectivement de 9,1 % à 6,3 %. La baisse de la part des profits au premier semestre 2022 est corrélative à la hausse de celle des impôts ainsi que des intérêts et loyers nets.</p>
<h2>Interprétations erronées</h2>
<p>La répartition de la valeur ajoutée nette des entreprises est donc particulièrement favorable aux travailleurs en France. En effet, la part des salaires, en pourcentage de la valeur ajoutée nette, est supérieure en France à celle de tous les autres pays de l’Union européenne (UE), à l’exception de la Slovénie.</p>
<p><iframe id="l6NN0" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/l6NN0/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Le corollaire est que le partage de la valeur ajoutée des entreprises dégagée en France apparaît nettement en défaveur des actionnaires. La part des profits nets distribués ou épargnés des sociétés situées en France, hors secteur financier, reste en effet inférieure à celle de tous les autres pays de l’UE, à l’exception de Chypre.</p>
<p><iframe id="9iBx5" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/9iBx5/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Dans cette part de la valeur ajoutée nette qui est allouée aux actionnaires, sous forme de dividendes nets ou de bénéfices réservés, ce sont bien sûr les dividendes nets (ceux payés moins ceux reçus des filiales) qui constituent une distribution prélevée sur la valeur ajoutée nette dégagée par les activités des sociétés sur le territoire de la France.</p>
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<p>Notre recherche souligne à ce sujet que ces dividendes nets payés par les entreprises situées en France restent eux aussi inférieurs à ceux de leurs concurrentes situées dans la plupart des autres pays de l’UE. Les importants dividendes payés en 2021 par les grandes entreprises françaises, dont les actions cotées sont intégrées à l’indice <a href="https://theconversation.com/fr/topics/cac-40-53816">CAC 40</a>, prêtent donc souvent à confusion : il ne s’agit pas d’un prélèvement sur la valeur ajoutée dégagée en France par ces sociétés au détriment des salariés français, contrairement à ce qu’avancent certaines interprétations erronées. </p>
<p>En réalité, une grande partie de ces dividendes payés par les multinationales françaises sont une simple redistribution à leurs actionnaires des dividendes qu’elles ont reçus de leurs filiales localisées à l’étranger, et qui sont donc issus du partage de la valeur ajoutée dans ces autres pays. Les dividendes de ces multinationales sont donc en grande partie indépendants du partage de la valeur ajoutée dégagée par leurs activités situées en France.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/194584/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Eric Dor ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La part de la redistribution des entreprises françaises aux salariés, nettement supérieure à celle observée ailleurs en Europe, n’a que très peu diminué début 2022 après plusieurs décennies de hausse.Eric Dor, Director of Economic Studies, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1615062021-05-25T18:07:54Z2021-05-25T18:07:54ZBernard Arnault vs François Pinault, quand les rivalités deviennent facteur de réussite<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/402565/original/file-20210525-23-19zykzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C960%2C711&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Bernard Arnault (à gauche) et François Pinault (à droite), alliés malgré eux&nbsp;?
</span> <span class="attribution"><span class="source">Guillaume Souvant & Loïc Venance / AFP</span></span></figcaption></figure><p>Le lundi 24 mai, Bernard Arnault a été, pendant quelques heures, <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/bourse/le-francais-bernard-arnault-a-ete-pendant-quelques-heures-l-homme-le-plus-riche-du-monde_4636247.html">l’homme le plus riche du monde</a>. Avec près de 187 milliards de dollars (152 milliards d’euros), le PDG du groupe de luxe LVMH a en effet détrôné le fondateur d’Amazon, Jeff Bezos, à la faveur de mouvements boursiers impactant le <a href="https://www.forbes.com/real-time-billionaires/#49a838443d78">classement Forbes en temps réel</a> des plus grandes fortunes.</p>
<p>Un peu plus bas dans ce même classement, à la 23<sup>e</sup> place, on trouve François Pinault, PDG du groupe Kering, (environ 55 milliards de dollars, soit 45 milliards d’euros), dont le parcours est étroitement lié à celui de Bernard Arnault depuis trois décennies.</p>
<p>Actuellement, les groupes LVMH et Kering occupent les <a href="https://thegoodlife.thegoodhub.com/2021/04/29/lvmh-et-kering-les-deux-geants-francais-du-luxe/">deux premières places mondiales</a> des plus grandes entreprises du secteur du luxe. Les deux leaders, qui possèdent chacun un portefeuille de dizaines de marques prestigieuses dans la mode, la maroquinerie, ou encore la bijouterie, ont pourtant bâti leurs positions actuelles sur des bases bien différentes. LVMH (Vuitton, Dior, Chaumet, etc.) et Kering (Gucci, Yves Saint-Laurent, etc.) ont toutefois en commun d’avoir suivi un parcours stratégique émaillé d’actions parfois perçues comme irrationnelles (mais pas forcément insensées).</p>
<p>Bernard Arnault et François Pinault apparaissent dans le paysage économique national au début des années 1980. Le plus âgé, Pinault (né en 1936), a commencé sa carrière en tant que repreneur d’affaires et spéculateur (les profits servant aux acquisitions). Son groupe entre en bourse en 1988 et devient, sous le nom de PPR (rebaptisé Kering en 2013), un acteur majeur du commerce de gros interentreprises spécialisé dans les composants industriels, les matériaux de construction et le matériel électrique.</p>
<p>Diplômé de Polytechnique, Arnault (né en 1949) reprend l’entreprise immobilière paternelle (Férinel) puis, après un intermède états-unien (1981-1984), acquiert le groupe textile Boussac, qu’il démantèle rapidement : les activités en déclin sont cédées tandis que Christian Dior, Conforama et Le Bon Marché sont conservés et complétés par d’autres marques. En 1988, Arnault lance une OPA sur LVMH (issu de la fusion de Louis Vuitton et Moët Hennessy).</p>
<p>Ces parcours parallèles se croisent en 1991 : Arnault vend l’enseigne de distribution Conforama à Pinault. La cession est rationnelle économiquement (LVMH est un groupe de luxe, secteur dont Conforama est très éloigné) et l’acquisition l’est tout autant (la distribution est au cœur du portefeuille d’activités de PPR).</p>
<h2>Déconnexion de la rationalité économique</h2>
<p>Par la suite, les acquisitions et les cessions vont se succéder et, en parallèle, des manœuvres d’une autre nature vont commencer à apparaître, traduisant la conscience aiguë qu’ont les deux hommes de l’existence de l’autre dans leur sphère sociale et non dans leur périmètre économique – leurs groupes n’ont a priori aucune relation et n’entretiennent pas de frictions compétitives, ni en amont (ressources), ni en aval (marché).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/402567/original/file-20210525-13-tc0q6c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/402567/original/file-20210525-13-tc0q6c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/402567/original/file-20210525-13-tc0q6c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/402567/original/file-20210525-13-tc0q6c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/402567/original/file-20210525-13-tc0q6c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/402567/original/file-20210525-13-tc0q6c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/402567/original/file-20210525-13-tc0q6c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/402567/original/file-20210525-13-tc0q6c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">En 1999, en une journée, François Pinault acquiert au nez et à la barbe de Bernard Arnault 40 % de Gucci et 100 % de Sanofi Beauté, propriétaire d’Yves-Saint-Laurent : PPR se pose en rival de LVMH.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dès que la rivalité entre Pinault et Arnault s’est déclarée, les manœuvres analysables en termes de logique stratégique – c’est-à-dire maximisant la rentabilité, minimisant le risque et optimisant les synergies, selon les canons de l’efficacité entérinés par le contrôle de gestion et attendus par les analystes financiers de tous horizons – sont devenues plus rares, en faveur de mouvements impossibles à déchiffrer avec les outils de diagnostic traditionnels.</p>
<p>Ces initiatives se démarquent en effet sur quelques points :</p>
<ul>
<li><p>l’imitation (acquisitions symétriques de <a href="https://www.lemonde.fr/festival/article/2015/08/21/francois-pinault-bernard-arnault-l-art-de-la-surenchere_4732188_4415198.html">maisons d’enchères</a>, de grands magasins parisiens, de <a href="https://thegoodlife.thegoodhub.com/2020/01/31/business-les-patrons-de-la-presse-francaise/">titres de la presse économique</a> ou de vignobles, création de fondations artistiques, etc.) ;</p></li>
<li><p>l’absence de rationalité économique (décisions coûteuses, avec forte exposition au risque, menées en dépit de la cohérence des diversifications antérieures, comme, en 2002, la <a href="https://www.liberation.fr/futurs/2002/10/22/finaref-le-credit-a-la-consommation-a-la-cote_419302/">cession de l’organisme de crédit Finaref</a>, dont la forte rentabilité et les synergies avec les activités de PPR en faisaient pourtant une pépite lucrative, adossée à une montagne de données commerciales, ressource majeure pour s’imposer sur le marché) ;</p></li>
<li><p>la mise en scène (le duel est incarné dans des choix d’investissement et des lieux géographiques : on achète le <a href="https://www.challenges.fr/immobilier/pinault-arnault-quand-les-milliardaires-raffolent-des-vignobles-bourguignons_599412">vignoble mitoyen</a>, ou encore on présente ses résultats annuels dans une salle réservée pour l’occasion juste en face du siège social du rival).</p></li>
</ul>
<p>Les groupes LVMH et PPR semblent ainsi entrer dans une compétition qui s’inscrit hors du champ de l’analyse économique et stratégique. Leurs actions et réactions, pour la plupart, résistent aux outils traditionnels et infirment toutes les hypothèses.</p>
<p>Face à une telle situation, la clé de lecture se situe sans doute à un autre niveau : il devient nécessaire de compléter la palette des modèles enseignés en MBA par des éléments sociologiques et d’intégrer aux grilles explicatives focalisées sur les relations interentreprises leurs équivalences interpersonnelles.</p>
<h2>Des conflits individuels mis en scène</h2>
<p>Ainsi, constitués progressivement par des hommes d’affaires faisant, à de multiples reprises, la preuve de leur sagacité et de leur aptitude à saisir les opportunités lucratives, deux groupes diversifiés français coexistent pendant de nombreuses années dans le paysage national.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/402575/original/file-20210525-17-1990zrb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/402575/original/file-20210525-17-1990zrb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=416&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/402575/original/file-20210525-17-1990zrb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=416&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/402575/original/file-20210525-17-1990zrb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=416&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/402575/original/file-20210525-17-1990zrb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=523&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/402575/original/file-20210525-17-1990zrb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=523&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/402575/original/file-20210525-17-1990zrb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=523&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">François Pinault pose ici en 1998 devant sa propriété viticole de Château Latour.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Patrick Bernard/AFP</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Différentes, leurs activités ne requièrent ni les mêmes moyens, ni les mêmes savoir-faire ; leurs développements se poursuivent avec dynamisme, salués identiquement par les analystes pour leur équilibre stratégique et leurs performances économiques. La probabilité que ces deux lignes parallèles se croisent était, par définition, nulle.</p>
<p>Pourtant, la bifurcation majeure entreprise par PPR en mars 1999 va faire mentir ce pronostic. Pinault s’empare alors de 34 % des actions de la maison italienne Gucci, alors convoitée par Arnault, prenant de court les commentateurs mais aussi ses propres équipes. La manœuvre ne souscrit en effet à aucune considération sensée avec le parcours stratégique de l’entreprise et s’inscrit en faux par rapport aux ambitions affichées peu de temps auparavant.</p>
<p>L’antagonisme entre Arnault et Pinault va ensuite franchir un cran se voyant explicité par les deux adversaires eux-mêmes, qui vont constamment et nommément désigner leur rival et préciser que leurs intentions sont de le provoquer ou de lui riposter.</p>
<p>Par exemple, dans le <a href="https://www.fayard.fr/documents-temoignages/les-guerres-du-luxe-9782213609539">livre</a> <em>Les guerres du luxe</em> publié en 2001 par le journaliste Stéphane Marchand, François Pinault confie :</p>
<blockquote>
<p>« Franchement, cette animosité me sidère. Quand il (Bernard Arnault) a eu Sephora (que LVMH a racheté en 1997), alors que je le convoitais aussi, je n’en ai pas fait une maladie ».</p>
</blockquote>
<p>Ce à quoi Arnault rétorquait :</p>
<blockquote>
<p>« La différence, c’est que Sephora, je l’ai eu à la loyale ».</p>
</blockquote>
<p>Improvisée ou pas, cette déclaration participe à une stratégie médiatique plus large, un domaine dans lequel les patrons du luxe sont très bien conseillés.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/402573/original/file-20210525-19-1p4ugw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/402573/original/file-20210525-19-1p4ugw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/402573/original/file-20210525-19-1p4ugw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/402573/original/file-20210525-19-1p4ugw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/402573/original/file-20210525-19-1p4ugw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/402573/original/file-20210525-19-1p4ugw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/402573/original/file-20210525-19-1p4ugw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">C’est au cours d’un déjeuner chez le milliardaire belge Albert Frère que les deux hommes d’affaires auraient entériné leur réconciliation.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Laurie Dieffembacq/AFP</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En 2009, la « fuite » dans le <a href="https://www.lefigaro.fr/societes/2009/01/23/04015-20090123ARTFIG00292-arnault-pinault-les-retrouvailles-.php">Figaro</a> des retrouvailles (supposées secrètes…) pour sceller la paix lors d’un déjeuner chez l’homme d’affaires milliardaire belge Albert Frère, en est un exemple symptomatique. Ce qui est dit, publiquement, à tous les acteurs économiques concernés, est clair : le conflit interpersonnel s’arrête aussi soudainement qu’il est apparu et de façon aussi déconnectée de la stratégie des deux groupes. Or, que fait-on quand on ne fait pas la guerre ? D’ennemis, Bernard Arnault et François Pinault sont devenus amis ; d’adversaires, les voilà alliés.</p>
<h2>Variables psychologiques et sociales</h2>
<p>La rivalité de deux des plus grands groupes français sur la période 1991-2009 montre que la considération des manœuvres stratégiques demeurera donc incomplète si la dimension psychologique et sociologique n’est pas intégrée. En effet, difficile de saisir l’opposition entre Arnault et Pinault sans la compréhension du fonctionnement du pouvoir en France, de la formation des élites, des groupes dominants, des liens entre pouvoir et industrie, des relations quasi incestueuses des médias et organisations économiques en certaines occasions, du poids dominant de grandes écoles, etc.</p>
<p>Le contexte culturel influe également. Il n’est en effet pas possible de comprendre la rivalité sans tenir compte des facteurs très français tels que l’amour/haine des réussites personnelles des entrepreneurs ; l’idiosyncrasie supposée du management ; la place singulière qu’occupe le luxe dans l’imaginaire national, etc.</p>
<p>Les stratégies des firmes peuvent donc être commandées par des logiques qui ne sont pas forcément les plus pertinentes économiquement. Cela conduit à mettre en avant l’importance des variables explicatives de nature psychologique et sociale, ainsi qu’à souligner que cette intrication de l’économique, du sociologique, voire de l’émotionnel, mène à concevoir la stratégie comme pure gestion de l’information, où s’articulent discours, signaux et construction de sens.</p>
<p>De quoi mieux comprendre, sans doute, l’intérêt d’Arnault pour le <a href="https://www.challenges.fr/media/lvmh-prend-40-de-challenges_764376">magazine économique Challenges</a> dont il détient depuis quelques jours 40 % du capital, et l’inauguration par Pinault de <a href="https://www.nouvelobs.com/culture/20210522.OBS44344/on-a-parcouru-le-nouveau-musee-parisien-de-francois-pinault.html">son nouveau musée d’art contemporain</a> qui ouvre au public le 22 mai…</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/402574/original/file-20210525-13-mar5vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/402574/original/file-20210525-13-mar5vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=931&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/402574/original/file-20210525-13-mar5vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=931&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/402574/original/file-20210525-13-mar5vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=931&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/402574/original/file-20210525-13-mar5vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1170&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/402574/original/file-20210525-13-mar5vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1170&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/402574/original/file-20210525-13-mar5vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1170&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cette contribution est tirée du chapitre intitulé « Les fondements interpersonnels de l’interaction stratégique : la compétition PPR-LVMH comme modèle d’affrontement construit par les acteurs », publié par les auteurs dans l’ouvrage <a href="https://www.editions-ems.fr/livres-2/collections/gestion-en-liberte/ouvrage/614-la-dynamique-concurrentielle-acteurs-singuliers,-strat%C3%A9gies-plurielles.html">« La dynamique concurrentielle : acteurs singuliers, stratégies plurielles »</a> dirigé par Faouzi Bensebaa et publié aux Éditions EMS en 2021</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/161506/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Depuis plus de 30 ans, les patrons de LVMH et Kering prennent des décisions dont les motivations économiques restent parfois secondaires. Retour sur un duel au sommet du luxe français.Joan Le Goff, Professeur des universités en sciences de gestion, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Faouzi Bensebaa, Professeur de sciences de gestion, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1598242021-04-29T19:40:40Z2021-04-29T19:40:40ZX, ENA… La puissance du réseau, un obstacle au contrôle du dirigeant aux effets délétères<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/397372/original/file-20210427-13-11k7e75.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=141%2C22%2C863%2C659&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un tiers des patrons du CAC&nbsp;40 sont aujourd’hui issus de deux écoles seulement, l’X et l’ENA (photo).
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Les_élèves_de_l%27Ecole_polytechnique_(26855463710).jpg">J. Barande/École Polytechnique</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Chacun sait l’importance des réseaux dans le monde des affaires. La puissance de celui des anciens élèves de l’X (École Polytechnique) ou de l’ENA (École Nationale d’Administration) n’est plus à démontrer. Rigoureusement sélectionnés et formés aux frais du contribuable pour servir l’intérêt public, ces diplômés ont largement envahi la direction des grandes entreprises privées.</p>
<p>L’implication de l’État dans les secteurs clés de l’économie n’y est pas étrangère. Elle crée des passerelles permettant à ceux qui le souhaitent de monnayer une expérience dans la haute administration, et notamment au sein de cabinets ministériels, en même temps qu’un carnet d’adresses fort utile.</p>
<p>Le résultat est une surreprésentation des diplômés de l’X ou de l’ENA à la tête des grandes entreprises françaises. Cette situation est quasiment sans égal dans le monde. À titre de comparaison, seules <a href="https://www.forbes.com/sites/kimberlywhitler/2019/09/07/a-new-study-on-fortune-100-ceos-what-undergraduate-institutions-did-they-attend/?sh=1d8f577c3308">11 des 100 plus grandes sociétés cotées américaines</a> sont dirigées par un diplômé de la Ivy League, ce groupe de huit universités prestigieuses qui compte Harvard, Yale et Princeton parmi ses membres.</p>
<p>Pour rappel, <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/quelle-formation-faut-il-suivre-pour-devenir-un-patron-du-cac-40.N723539">13 des patrons du CAC 40</a> (soit un tiers) sont issus de deux écoles seulement, l’X et l’ENA. Comme la plupart des administrateurs sont aussi des dirigeants, les conseils d’administration comportent souvent des membres partageant la même formation que le dirigeant et qui font donc partie de son réseau.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/jyuNIBCMRy4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Quel diplôme pour devenir un grand patron ? » (Xerfi Canal, 2019).</span></figcaption>
</figure>
<p>A priori, on pourrait penser que cette concentration de talent est un atout pour l’entreprise. Mais en y réfléchissant bien, l’équipe des meilleurs est-elle vraiment la meilleure des équipes ? En sport, on sait que ce n’est pas toujours vrai.</p>
<p>Le Réal Madrid en a donné la preuve en 2004 avec une équipe de stars mondiales rassemblée à grands frais qui n’a pourtant remporté aucun trophée au terme de la saison. Au-delà du talent individuel, il s’agit de ne pas négliger l’importance du collectif. La qualité du groupe ne se résume pas à l’addition des qualités de chacun de ses membres.</p>
<h2>Effets pervers</h2>
<p>L’arithmétique des équipes recèle une autre surprise. Des chercheurs de Harvard ont ainsi analysé la <a href="https://doi.org/10.1016/j.jfineco.2016.01.013">performance des co-investissements en capital-risque</a>. Comme on pouvait s’y attendre, les gérants diplômés des meilleures universités sont associés à de meilleures performances. C’est plutôt rassurant pour les universités en question.</p>
<p>Mais fait plus curieux, lorsque les deux co-gérants sont issus de la même université, aussi prestigieuse soit-elle, la performance est beaucoup moins bonne. Les auteurs ne s’étendent pas sur les raisons de cette contre-performance, mais il est probable que l’absence de regard critique à l’égard de celui qui nous ressemble joue un rôle primordial.</p>
<p>Partant de là, on peut se demander si la présence d’administrateurs ayant la même formation que le dirigeant ne conduit pas à des résultats tout aussi dommageables. Le risque qui guette l’entreprise est que le conseil d’administration ne pousse pas assez le dirigeant à questionner, voire à remettre en cause, le bien-fondé de sa stratégie. Le danger est alors que l’entreprise fasse fausse route et finisse dans une impasse.</p>
<p>Les déboires de certaines entreprises hexagonales peuvent être mis sur le compte d’erreurs qui auraient pu être évitées si les administrateurs avaient été plus critiques par rapport aux décisions prises par le dirigeant. Parmi les plus grosses pertes essuyées par des sociétés françaises, plusieurs proviennent d’entreprises dont le conseil d’administration était composé de membres faisant partie du même réseau d’anciens élèves que le dirigeant.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/397305/original/file-20210427-19-tbfx3b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/397305/original/file-20210427-19-tbfx3b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/397305/original/file-20210427-19-tbfx3b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/397305/original/file-20210427-19-tbfx3b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/397305/original/file-20210427-19-tbfx3b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/397305/original/file-20210427-19-tbfx3b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/397305/original/file-20210427-19-tbfx3b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des administrateurs provenant de la même école que leur dirigeant semblent être moins aptes à contrôler ce dernier.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/successful-group-business-people-working-on-144231154">Shutterstock</a></span>
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</figure>
<p>Au premier rang, Vivendi se distingue par une perte de 23,3 milliards d’euros en 2002. L’entreprise était alors dirigée par Jean‑Marie Messier dont le parcourt scolaire brillant mêle l’X et l’ENA. Le seul problème est que le conseil d’administration de Vivendi comptait également 3 diplômés de l’X et 4 anciens élèves de l’ENA, qui plus est, inspecteurs des finances comme Messier lui-même. Il est ainsi vraisemblable que <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2002/06/25/vivendi-universal-la-chute_282306_3234.html">l’indulgence des administrateurs à l’égard du plus brillant d’entre eux</a> n’a pas permis de détecter les problèmes suffisamment tôt et de corriger le tir avant qu’il ne soit trop tard.</p>
<h2>Des conséquences préjudiciables</h2>
<p>Lorsque des administrateurs entretiennent des liens étroits avec le dirigeant, la capacité du conseil d’administration à demander des comptes au dirigeant est nécessairement compromise. Cette réalité est admise dans le <a href="http://afep.com/themes/gouvernance/">code de gouvernance Afep-Medef</a>, dans le cas des liens financiers ou familiaux, pour définir l’indépendance des administrateurs. En revanche, les liens sociaux, comme ceux qui résultent du passage par la même école, sont totalement ignorés. Or ces liens affectent tout autant la capacité des administrateurs à contrôler le dirigeant.</p>
<p>En l’absence d’un contrôle approprié, le dirigeant peut se contenter de gérer tranquillement les affaires de la société <a href="https://www.journals.uchicago.edu/doi/abs/10.1086/376950">sans avoir à faire trop d’efforts</a> ou à <a href="https://doi.org/10.1016/j.jfineco.2016.08.002">prendre trop de risques</a>. Cette conclusion qu’on pourrait croire exagérée a en fait été démontrée de manière convaincante dans le cas des sociétés américaines. Dès lors, il faut s’attendre à une moins bonne performance de l’entreprise. Francis Kramarz (directeur de recherche ENSAE-ENSAI) et David Thesmar (professeur d’économie au MIT) le <a href="https://academic.oup.com/jeea/article-abstract/11/4/780/2300849">prouvent dans le cadre français</a>.</p>
<p>À plus long terme, il en résulte une perte de compétitivité de l’entreprise. Un indicateur de cette fragilité est la plus grande sensibilité de l’entreprise aux fluctuations de la conjoncture. Notre article à paraître ce mois-ci dans la <a href="https://www.cairn.info/revue-d-economie-politique.htm"><em>Revue d’Économie Politique</em></a> montre plus précisément que les entreprises dont le conseil d’administration comporte des membres liés au dirigeant par leur formation ont des rendements boursiers plus fortement corrélés au marché. Quand l’économie va moins bien, le marché recule et la valeur de ces entreprises baisse encore plus.</p>
<p>Les études montrent aussi que lorsque le dirigeant est enraciné, autrement dit lorsqu’il n’a pas à craindre de perdre son poste, l’entreprise a tendance à moins investir en recherche et développement dont on sait que l’issue est très incertaine. Elle est ainsi moins innovante. Les résultats que nous obtenons vont dans le même sens, ce qui suggère que la présence de réseaux au sein du conseil d’administration participe à l’enracinement du dirigeant.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/397311/original/file-20210427-21-wxqz7l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/397311/original/file-20210427-21-wxqz7l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=490&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/397311/original/file-20210427-21-wxqz7l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=490&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/397311/original/file-20210427-21-wxqz7l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=490&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/397311/original/file-20210427-21-wxqz7l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=616&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/397311/original/file-20210427-21-wxqz7l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=616&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/397311/original/file-20210427-21-wxqz7l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=616&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Lorsque les administrateurs proviennent de la même école que le dirigeant, ce dernier tend à s’enraciner à ce poste.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/relaxed-businessman-sitting-office-154366205">Shutterstock</a></span>
</figcaption>
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<p>Deux autres conséquences découlent de cette situation. La première est que l’entreprise a tendance à être moins transparente. Elle divulgue moins d’informations pertinentes. Jean‑Marie Messier ne déclara-t-il pas <a href="https://www.liberation.fr/futurs/2002/03/06/un-vrai-compte-de-fees_396037/">« Vivendi va mieux que bien »</a> avant d’annoncer des pertes fracassantes ? Les investisseurs ont ainsi des raisons d’être méfiants et d’exiger une prime de risque plus importante.</p>
<p>Nous avons ainsi pu mettre en évidence dans un <a href="https://www.cairn.info/revue-comptabilite-controle-audit-2021-1-page-111.htm">article</a> publié cette année dans la revue <em>Comptabilité Contrôle Audit</em> que les liens sociaux entre le dirigeant et les administrateurs se traduisent par un coût des fonds propres plus élevé. Le taux de croissance de l’entreprise est également plus faible.</p>
<h2>Facteurs aggravants et remèdes possibles</h2>
<p>Tous ces problèmes sont amplifiés par la concentration des pouvoirs entre les mains du dirigeant comme c’est le cas lorsque ce dernier est en poste depuis un certain nombre d’années et qu’il cumule les fonctions de directeur général et de président du conseil d’administration. L’exemple typique est celui de Carlos Ghosn dont les décisions n’ont <a href="https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/renault-nissan-les-trois-erreurs-strategiques-qui-expliquent-la-chute-de-carlos-ghosn-837612.html">jamais été remises en cause</a> par les administrateurs de Renault jusqu’à son arrestation spectaculaire par la police japonaise.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/397312/original/file-20210427-17-12shyvd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/397312/original/file-20210427-17-12shyvd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/397312/original/file-20210427-17-12shyvd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/397312/original/file-20210427-17-12shyvd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/397312/original/file-20210427-17-12shyvd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/397312/original/file-20210427-17-12shyvd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/397312/original/file-20210427-17-12shyvd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Conférence de Carlos Ghosn en tant que président-directeur général de l’alliance Renault-Nissan à l’école Polytechnique.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Conf%C3%A9rence_de_Carlos_Ghosn_(X_1974),Pr%C3%A9sident-Directeur_G%C3%A9n%C3%A9ral_de_l%E2%80%99alliance_Renault-Nissan_%C3%A0_l%27Ecole_polytechnique_(18739078575).jpg">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Plusieurs mécanismes de gouvernance externes peuvent toutefois pallier la faiblesse du contrôle exercé par le conseil d’administration. Les détenteurs de blocs d’actions ont les moyens de se faire entendre et devraient se manifester d’autant plus bruyamment qu’ils ont des intérêts financiers à défendre. Ils peuvent aussi menacer de vendre leurs actions, ce qui constituerait un désaveu cinglant du dirigeant à même de ternir durablement sa réputation.</p>
<p>Le suivi par les analystes financiers permet également d’empêcher que des administrateurs proches du dirigeant n’apportent à ce dernier un soutien trop complaisant. En mettant en relief la stratégie de l’entreprise et en soulignant ses implications financières, les analystes atténuent le risque d’un dysfonctionnement du conseil d’administration. Les effets pernicieux des liens sociaux évoqués plus haut sont ainsi mieux maîtrisés.</p>
<p>D’autres facteurs pourraient jouer un rôle bénéfique. On peut supposer que la poursuite de <a href="https://start.lesechos.fr/apprendre/universites-ecoles/la-domination-du-trio-x-hec-ena-sur-les-postes-de-direction-du-cac-40-menacee-par-linternationalisation-1259115">l’internationalisation des entreprises françaises</a> favorisera une plus grande mixité des profils ce qui devrait réduire l’influence des réseaux. De grandes entreprises nationales comme Axa ou Air France-KLM sont désormais dirigées par des hommes (Thomas Buberl et Ben Smith) qui ont fait toutes leurs études et l’essentiel de leur carrière à l’étranger.</p>
<p>La part plus importante de femmes depuis la loi Copé-Zimmermann est un autre élément susceptible de conduire à un meilleur fonctionnement des conseils d’administration. On sait par exemple que la présence d’administratrices réduit sensiblement le <a href="https://hbr.org/2021/05/banks-with-more-women-on-their-boards-commit-less-fraud">risque de fraude</a> et de manipulations comptables.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/JuEl4xG4ayQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Féminisation des conseils d’administration : où en est-on vraiment ? » (Xerfi Canal, 2018).</span></figcaption>
</figure>
<p>Enfin, l’intensification de la concurrence avec l’ouverture des marchés, comme celui du transport ferroviaire ou de la fourniture de gaz et d’électricité, pourrait également imposer une plus grande discipline et atténuer ainsi l’attrait des entreprises pour les anciens hauts fonctionnaires et le réseau qui leur est associé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/159824/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Lorsque les administrateurs d’une entreprise sont diplômés de la même école que le dirigeant, leur capacité à demander des comptes sur ses décisions devient compromise.Pascal Nguyen, Professeur de finance, Université de MontpellierCédric Van Appelghem, Maître de conférences en sciences de gestion - Chercheur au LITEM, Université d’Evry – Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1493972020-11-08T17:31:14Z2020-11-08T17:31:14ZConseils d’administration du CAC 40 : l’éviction des polytechniciens (mais pas des HEC Paris), l’autre effet de la loi Copé-Zimmermann<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/367280/original/file-20201103-21-riq01c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C7%2C5265%2C3496&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En 2017, il y avait 43,3&nbsp;% d’administratrices au sein des entreprises du CAC 40, selon les chiffres de l’Observatoire Skema de la féminisation des entreprises.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/serious-woman-boss-scolding-employees-bad-1085354171">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p><em>À l'occasion du 10e anniversaire de la loi Copé-Zimmermann, nous vous proposons de (re)découvrir les derniers enseignements de l’Observatoire Skema de la féminisation des entreprises.</em></p>
<hr>
<p>Les entreprises du CAC 40 sont des lieux centraux du pouvoir économique dans lesquels prédomine une présence masculine, souvent diplômée de très grandes écoles (TGE) : ENA, ENS Ulm, HEC Paris et Polytechnique. En 1989, dans <em>La Noblesse d’État, Grandes écoles et esprits de corps</em>, le sociologue français Pierre Bourdieu montra comment ces institutions constituent des écoles du pouvoir et garantissent un accès privilégié aux instances de gouvernance des grandes entreprises.</p>
<p>En 2008, les conseils d’administration du CAC 40 sont composés à 88 % d’administrateurs (12 % d’administratrices) et à 36,36 % de diplômé·e·s de TGE.</p>
<p>Or, cette <em>Noblesse d’État</em> dans la sphère économique des grandes entreprises connaît actuellement une perte d’influence, notamment en raison des bouleversements dans la composition des conseils d’administration liés à l’instauration, par la loi Copé-Zimmermann en 2011, d’un quota de 40 % de femmes.</p>
<p>Le pourcentage d’administratrices au sein du CAC 40 a ainsi fortement augmenté pour passer de moins de 10 % au début des années 2000 à 43,3 % en 2017, selon les chiffres de <a href="https://www.skema-bs.fr/facultes-et-recherche/recherche/observatoire-de-la-feminisation">l’Observatoire Skema de la féminisation des entreprises</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/367263/original/file-20201103-15-1qa9sst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/367263/original/file-20201103-15-1qa9sst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367263/original/file-20201103-15-1qa9sst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367263/original/file-20201103-15-1qa9sst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367263/original/file-20201103-15-1qa9sst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367263/original/file-20201103-15-1qa9sst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367263/original/file-20201103-15-1qa9sst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367263/original/file-20201103-15-1qa9sst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Figure 1 : Pourcentage d’administratrices au sein du CAC 40.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les administrateur.rice.s du CAC 40 étaient 550 en 2008 et 552 en 2017. Il n’y a donc pas eu une augmentation du nombre de postes d’administrateur.rice.s qui aurait permis aux hommes de garder leurs positions tout en atteignant le quota par l’ajout d’administratrices. L’accroissement de la proportion d’administratrices s’est effectivement fait au détriment des hommes dont le nombre a baissé de 35,12 % passant de 484 à 314 (- 170) alors que celui des femmes a augmenté de 260,61 % en passant de 66 à 238 (+ 172).</p>
<p>Mais ce n’est pas le seul effet de la loi Copé-Zimmermann, puisque son application s’est également accompagnée d’une diminution des diplômé·e·s de TGE (ENA, ENS Ulm, HEC Paris et Polytechnique). En 2008, il y avait 200 diplômé·e·s de TGE qui représentaient 36,36 % des 550 administrateur.rice.s du CAC 40. Parmi ces diplômé·e·s, 95 % étaient des hommes (190 hommes et 10 femmes). En 2017, ils n’étaient plus que 149 (- 51), soient 26,99 % des 552 administrateur.rice.s.</p>
<p>En ce qui concerne les hommes, en 2017, il ne restait plus que 97 administrateurs issus des TGE contre 190 en 2008 (- 48,95 %). La disparition des 170 hommes administrateurs des conseils d’administration du CAC 40 s’explique en partie par l’éviction de 93 diplômés de TGE ; soit plus de la moitié (54,70 %) de la diminution du nombre d’administrateurs. En 2008, les hommes diplômés de TGE représentaient 34,26 % des administrateur.rice.s et seulement 26,99 % en 2017.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/367264/original/file-20201103-13-1kn5o7r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/367264/original/file-20201103-13-1kn5o7r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367264/original/file-20201103-13-1kn5o7r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=156&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367264/original/file-20201103-13-1kn5o7r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=156&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367264/original/file-20201103-13-1kn5o7r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=156&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367264/original/file-20201103-13-1kn5o7r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=196&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367264/original/file-20201103-13-1kn5o7r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=196&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367264/original/file-20201103-13-1kn5o7r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=196&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Figure 2 : Répartition des diplômé·e·s de TGE au sein des conseils d’administration des entreprises du CAC 40.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En revanche, le nombre d’administratrices diplômées de TGE a fortement augmenté en passant de 10 en 2008 à 52 en 2017 (+ 420 %). Ces diplômées représentent 24,41 % de l’augmentation du nombre d’administratrices. Si en 2008, les diplômées de TGE ne représentaient que 15,15 % des 66 administratrices, elles représentaient 21,85 % des 238 en 2017. Les diplômées de TGE ont constitué un vivier de recrutement d’administratrices.</p>
<p>La baisse du nombre d’hommes administrateurs diplômés de TGE (- 48,95 %) a été plus forte que ceux non-issus de TGE (- 26.19 %). En revanche, la hausse du nombre d’administratrices provenant de TGE (+ 420 %) est supérieure à celle des administratrices qui n’en sont pas issues (+ 232 %).</p>
<p>La réduction du nombre de diplômé·e·s de TGE est donc liée à la forte diminution des hommes qui en sont issus. Cette diminution n’a été que partiellement compensée par l’accroissement du nombre d’administratrices diplômées de ces écoles.</p>
<h2>Moins de 10 % de polytechnicien·ne·s</h2>
<p>La comparaison de Polytechnique et d’HEC Paris explique et illustre les enjeux auxquels font face les grandes écoles pour maintenir leur présence dans les conseils d’administration du CAC 40 lorsque ceux-ci sont soumis à des quotas de femmes.</p>
<p>Entre 2008 et 2017, le nombre de polytechnicien·ne·s dans les conseils d’administration du CAC 40 est passé de 90 à 54 (- 40 %). En 2017, ils ne représentaient plus que 9,78 % des administrateur.rice.s, contre 16,36 % en 2008. Cette diminution a concerné exclusivement les hommes.</p>
<p>En 2008, les 89 polytechniciens représentaient 99 % des polytechnicien·ne·s administrateur.rice.s ; une seule polytechnicienne était présente dans les conseils d’administration du CAC 40. En 2017, le nombre de polytechniciennes avait fortement augmenté en passant de 1 à 13 (+ 1200 %).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/367266/original/file-20201103-15-hf7no1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/367266/original/file-20201103-15-hf7no1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367266/original/file-20201103-15-hf7no1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=96&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367266/original/file-20201103-15-hf7no1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=96&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367266/original/file-20201103-15-hf7no1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=96&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367266/original/file-20201103-15-hf7no1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=121&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367266/original/file-20201103-15-hf7no1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=121&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367266/original/file-20201103-15-hf7no1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=121&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Figure 3 : Répartition des diplômé·e·s de l’École polytechnique dans les conseils d’administration des entreprises du CAC 40.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En revanche, les diplômé·e·s. d’HEC Paris ont quasiment maintenu leur présence dans les conseils d’administration du CAC 40 entre 2008 (43) et 2017 (40), soit une baisse limitée de 6,98 %. En 2008, les diplômés d’HEC Paris prédominaient sur les diplômées (95,35 % contre 4,65 %). Si le nombre d’hommes administrateurs issu de cette école a baissé (- 12) il a quasiment été compensé par l’augmentation des administratrices diplômées de l’école (+ 9).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/367267/original/file-20201103-13-1t370e9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/367267/original/file-20201103-13-1t370e9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367267/original/file-20201103-13-1t370e9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=96&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367267/original/file-20201103-13-1t370e9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=96&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367267/original/file-20201103-13-1t370e9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=96&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367267/original/file-20201103-13-1t370e9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=121&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367267/original/file-20201103-13-1t370e9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=121&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367267/original/file-20201103-13-1t370e9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=121&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Figure 4 : Répartition des diplômé·e·s d’HEC Paris dans les conseils d’administration des entreprises du CAC 40.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La capacité d’HEC Paris à remplacer ses diplômés par des diplômées lui a permis de maintenir sa présence dans les conseils d’administration du CAC 40. En revanche, c’est l’incapacité de Polytechnique à permettre un tel remplacement qui explique l’éviction de ses diplômé·e·s.</p>
<p>La mixité des étudiants au sein des TGE détermine à terme la capacité de ces institutions à fournir des administrateur.rice.s. Moins les effectifs étudiants sont féminisés et moins une TGE est en capacité de fournir des administratrices au marché du travail.</p>
<p>Or, historiquement, l’École polytechnique est peu féminisée. Elle s’est ouverte aux femmes en 1972 et en 2012, les filles ne représentaient encore que 13,4 % des étudiant·e·s. HEC Paris s’est ouverte aux femmes en 1973 et en 2012, les effectifs étudiant·e·s étaient proches de la parité avec 44,5 % de filles.</p>
<h2>Des effectifs à féminiser dans les TGE</h2>
<p>Au-delà de la mixité, la mise en œuvre de la loi Copé-Zimmermann a donc modifié l’origine éducative des administrateur.rice.s en entraînant une éviction des diplômé·e·s de TGE. La faible féminisation des effectifs étudiants réduit le vivier de potentielles administratrices que ces écoles peuvent offrir.</p>
<p>La promotion de la mixité par les grandes écoles, notamment d’ingénieurs, ne concerne pas uniquement leur responsabilité sociale de lutte contre les discriminations mais également leur capacité à maintenir leur présence au sein des lieux de pouvoir que sont les conseils d’administration des grandes entreprises.</p>
<p>L’exemple des conseils d’administration montre que trois facteurs influencent la mixité : la contrainte économique du marché du travail qui fournit des administrateur.rice.s qualifié·e·s des deux sexes, la contrainte sociétale qui impose une norme sociale en faveur de plus de diversité et, la contrainte légale qui promeut par la loi l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Les trois mécanismes sont nécessaires et complémentaires.</p>
<p>Pierre Bourdieu aurait sûrement apprécié à sa juste valeur que la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes se traduise par une forte diminution des membres de la <em>Noblesse d’État</em> au sein des conseils d’administration du CAC 40 et, corollairement, une plus grande diversité des origines éducatives des administrateur.rice.s.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/149397/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Ferrary est membre du Haut Conseil à l'Egalité entre les Femmes et les Hommes </span></em></p>L’entrée en vigueur des quotas de femmes a modifié l’origine éducative des administrateur.rice.s en entrainant une éviction des diplômé·e·s de certaines écoles.Michel Ferrary, Professeur de Management à l'Université de Genève, Chercheur-affilié, SKEMA Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1417952020-07-02T19:43:44Z2020-07-02T19:43:44ZQuel sens donner à la chute des cours de bourse pendant la crise du Covid-19 ?<p>En à peine un mois, et avant même le début du confinement, l’indice boursier CAC 40 a perdu 40 % de sa valeur. Cette baisse fulgurante a d’ailleurs posé la question de la <a href="https://theconversation.com/faut-il-fermer-les-bourses-134373">fermeture de la bourse</a>.</p>
<p>Il est difficile d’établir quelle part de cette baisse est attribuable à une surréaction et quelle part relève d’anticipations rationnelles à savoir moins de bénéfices attendus et plus de risque du fait de l’incertitude sur la durée et la gravité de la pandémie.</p>
<p>Des <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3616734">travaux de recherche</a> menés récemment se sont intéressés à l’évolution du cours de bourse de 437 entreprises françaises sur la période du 20 février au 16 mars 2020. L’objectif : examiner le lien entre la chute du cours de bourse des entreprises dans la crise et un grand nombre de caractéristiques : leur situation financière, la structure de leur actionnariat, leur gouvernance et leur responsabilité sociale et environnementale.</p>
<h2>Des évolutions hétérogènes</h2>
<p>Alors que la chute globale du CAC 40 a été conséquente, les cours de bourse des entreprises françaises n’ont pas baissé de manière uniforme. Quels sont les facteurs permettant d’expliquer ces différences ?</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/344999/original/file-20200701-159789-we9wdp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/344999/original/file-20200701-159789-we9wdp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/344999/original/file-20200701-159789-we9wdp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/344999/original/file-20200701-159789-we9wdp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/344999/original/file-20200701-159789-we9wdp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/344999/original/file-20200701-159789-we9wdp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/344999/original/file-20200701-159789-we9wdp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/344999/original/file-20200701-159789-we9wdp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Valeur quotidienne en clôture du CAC 40 (échelle de gauche) et du Dow Jones Industrial (échelle de droite) du 2 janvier au 9 avril 2020.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Krach_2020_CAC40_%26_Dow_Jones.jpg">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette question est d’autant plus importante que, comme l’ont montré des études académiques, le cours de bourse a des effets réels sur les <a href="https://www.annualreviews.org/doi/abs/10.1146/annurev-financial-110311-101826">décisions des entreprises</a>.</p>
<p>Par exemple, la baisse du cours de bourse liée à la crise du Covid-19 a d’ores et déjà poussé de nombreuses entreprises dans différents pays à opérer des changements importants de gouvernance via l’adoption de <a href="https://corpgov.law.harvard.edu/2020/05/06/the-return-of-poison-pills-a-first-look-at-crisis-pills/">« pilules empoisonnées »</a> (c’est-à-dire un instrument de défense contre une offre d’achat hostile).</p>
<p>Les résultats de nos travaux permettent de mieux comprendre les baisses de cours inégales observées.</p>
<h2>Des facteurs structurels ?</h2>
<p>Premièrement, au niveau sectoriel, les entreprises de l’énergie, du service à la personne et de l’automobile ont subi les pertes de valeur les plus importantes alors que les entreprises des télécommunications et de distribution de produits alimentaires ou de boissons s’en sortent relativement mieux.</p>
<p>Ces différences sectorielles reflètent, en lien avec la théorie financière, des différences de sensibilité aux fluctuations du marché (c’est-à-dire le « <a href="https://www.abcbourse.com/apprendre/19_beta.html">beta</a> », coefficient de risque de l’action). Elles reflètent également des anticipations rationnelles divergentes concernant la capacité des entreprises à maintenir leur activité dans la crise du Covid-19.</p>
<p>Deuxièmement, les entreprises françaises ayant des niveaux élevés de dette et des niveaux faibles de profitabilité ont connu une chute plus importante de leur cours de bourse.</p>
<p>Si les <a href="https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwjxs5bUzqvqAhWK2BQKHaXKCfYQFjABegQIXhAE&url=https%3A%2F%2Ffiches-pratiques.chefdentreprise.com%2FThematique%2Ffiscalite-1100%2FFichePratique%2FComprendre-endettement-257160.htm&usg=AOvVaw1Uj4dJv2tLSyZq_0rdWupn">avantages fiscaux</a> liés à la dette sont souvent mis en avant (les charges d’intérêt étant déductibles), ces résultats rappellent que l’impact de chocs économiques est <a href="https://www.sudouest.fr/2019/01/10/crise-financiere-la-dette-elevee-des-entreprises-une-bombe-a-retardement-5720709-705.php">amplifié</a> pour les entreprises plus endettées, comme ce fut déjà le cas lors de la crise financière de 2008.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1242904321529991168"}"></div></p>
<p>Troisièmement, la structure de l’actionnariat a joué un rôle prépondérant. Les entreprises ayant une part importante d’investisseurs de court terme (ou d’investisseurs actifs) ont connu une chute de leur cours de bourse beaucoup plus forte.</p>
<p>Les investisseurs de court terme, qui ont tendance à vendre massivement leurs actions en périodes de crise, contribuent à accentuer la chute des cours, comme c’était, là encore, déjà le cas lors de la crise financière de 2008.</p>
<p>La présence d’une base actionnariale composée d’investisseurs avec une orientation et un engagement de long terme permet au cours de mieux résister en temps de crise. Ces derniers voient en général plus loin que le sentiment temporaire du marché et valorisent le potentiel de long terme de l’entreprise.</p>
<p>Difficile de dire si le marché a surréagi ou non face à l’incertitude autour de la situation sanitaire et économique liée à la pandémie de Covid-19.</p>
<p>En revanche, les résultats montrent que les chutes des cours de bourse des entreprises s’expliquent par certains facteurs dont l’importance est établie par de nombreux travaux académiques. En effet, si la crise du Covid-19 est sans précédent, les facteurs qui contribuent à amplifier son effet sur les entreprises sont en grande partie les mêmes que lors des crises financières précédentes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/141795/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le secteur d’activité, le niveau de dette ou encore la structure de l’actionnariat ont constitué des facteurs déterminants de l’évolution des cours au début de la crise sanitaire.Alexandre Garel, Chercheur en Finance, AudenciaArthur Petit-Romec, Professeur Assistant de Finance, SKEMA Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1404522020-06-11T17:19:51Z2020-06-11T17:19:51ZConseils d’administration : plus de femmes, mais toujours aussi peu de jeunes<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/340888/original/file-20200610-34670-jhmnhx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=21%2C140%2C3573%2C2252&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La diversité d’âge s’avère pourtant bénéfique, notamment pour accompagner les transformations numériques au sein des entreprises.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Bizi88 / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p><em>À l'occasion du 10e anniversaire de la loi Copé-Zimmermann, nous vous proposons de revenir sur les derniers résultats du baromètre de la diversité dans les conseils d’administration, publié chaque année depuis 2014 Burgundy School of Business.</em></p>
<hr>
<p>La diversité de genre est devenue naturelle dans les conseils d’administration du SBF 120, mais la diversité en matière d’âge reste limitée et l’ouverture des conseils d’administration aux 40 ans et moins demeure une exception (10 % des élus).</p>
<p>C’est ce qui ressort des statistiques établies après les assemblées générales 2020 du baromètre de la diversité dans les conseils d’administration publié chaque année depuis 2014 par Burgundy School of Business (BSB).</p>
<h2>Une diversité de genre entrée dans les pratiques</h2>
<p>Trois ans après la mise en place du quota de 40 % prévu par la <a href="https://www.egalite-femmes-hommes.gouv.fr/dossiers/egalite-professionnelle/la-mixite-dans-les-conseils-dadministration/vous-etes-une-entreprise-a-la-recherche-dadministratrices/loi-de-2011-votre-entreprise-est-elle-concernee/">loi Copé-Zimmermann</a>, pratiquement la moitié des administrateurs nommés dans les sociétés françaises du SBF 120 aux AG 2020 sont en effet des femmes. Le SBF 120 est composé des 40 valeurs du CAC 40 et de 80 valeurs parmi les 200 premières capitalisations boursières françaises. Même si la proportion est moindre, les recrutements ont également été féminins pour 36 % dans les sociétés étrangères du SBF 120.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/340835/original/file-20200610-34710-z65x2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/340835/original/file-20200610-34710-z65x2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/340835/original/file-20200610-34710-z65x2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/340835/original/file-20200610-34710-z65x2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/340835/original/file-20200610-34710-z65x2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/340835/original/file-20200610-34710-z65x2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/340835/original/file-20200610-34710-z65x2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/340835/original/file-20200610-34710-z65x2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Évolution du % de femmes dans les conseils d’administration depuis la promulgation de la loi Copé-Zimmermann.</span>
<span class="attribution"><span class="source">baromètre BSB</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La part des femmes dans les conseils d’administration se stabilise à 45,2 %.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/340836/original/file-20200610-34666-10kuqfj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/340836/original/file-20200610-34666-10kuqfj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/340836/original/file-20200610-34666-10kuqfj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/340836/original/file-20200610-34666-10kuqfj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/340836/original/file-20200610-34666-10kuqfj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/340836/original/file-20200610-34666-10kuqfj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/340836/original/file-20200610-34666-10kuqfj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/340836/original/file-20200610-34666-10kuqfj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Profils des femmes et hommes nommés en 2020 au sein des conseils d’administration.</span>
<span class="attribution"><span class="source">baromètre BSB</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les résultats confirment en outre la convergence des profils entre hommes et femmes que nous avions relevée en 2019. Les caractéristiques dominantes sont les mêmes chez les hommes et chez les femmes nouvellement nommés : formation en gestion (65 %), expérience de direction (directeurs, membres du comité exécutif : 66 %), expérience internationale (66 %), expérience en finance (53 %) et expérience comme administrateur(trice) d’autres sociétés cotées (60 %).</p>
<p>Par ailleurs, l’influence des réseaux sur le recrutement se renforce. Les administrateurs nommés aux assemblées générales de 2020 sont pour 44 % d’entre eux diplômés d’une école d’élite (contre 40 % en 2019), et 21 % ont une expérience en ministère (18 % en 2019). Après avoir connu une baisse de 2014 à 2017, les statistiques sont en augmentation pour les femmes comme pour les hommes. Les réseaux d’administrateurs sont également très influents avec 60 % des nouveaux nommés ayant ou ayant eu au moins un mandat dans une autre société cotée.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/340840/original/file-20200610-34696-peveez.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/340840/original/file-20200610-34696-peveez.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/340840/original/file-20200610-34696-peveez.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/340840/original/file-20200610-34696-peveez.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/340840/original/file-20200610-34696-peveez.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/340840/original/file-20200610-34696-peveez.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/340840/original/file-20200610-34696-peveez.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/340840/original/file-20200610-34696-peveez.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Évolution de la part des administrateurs et administratrices nouvellement nommés dont le recrutement est lié à l’influence des réseaux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">baromètre BSB</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Alors que les réseaux d’administrateurs étaient très masculins, ils se sont ouverts aux femmes avec la loi Copé-Zimmermann et les nouvelles administratrices sont même plus nombreuses en proportion à avoir cette expérience : 63 % contre 58 % pour les hommes.</p>
<h2>Un âge moyen qui reste à 54 ans</h2>
<p>En revanche, la diversité en matière d’âge reste limitée et l’ouverture des conseils d’administration aux 40 ans et moins reste une exception (10 % des élus).</p>
<p>Le code de gouvernement des entreprises cotées de l’Afep-Medef, actualisé en janvier 2020, suggère pourtant aux conseils « de s’interroger sur l’équilibre souhaitable de sa composition en matière de diversité (représentation des femmes et des hommes, nationalités, âge, qualifications et expériences professionnelles, etc.) ».</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/340842/original/file-20200610-34688-1vy8lej.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/340842/original/file-20200610-34688-1vy8lej.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/340842/original/file-20200610-34688-1vy8lej.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/340842/original/file-20200610-34688-1vy8lej.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/340842/original/file-20200610-34688-1vy8lej.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/340842/original/file-20200610-34688-1vy8lej.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/340842/original/file-20200610-34688-1vy8lej.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Répartition des nouveaux administrateurs (hommes et femmes) en fonction de l’âge.</span>
<span class="attribution"><span class="source">BSB</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Plusieurs freins ont été identifiés : influence des réseaux d’administrateurs, les jeunes n’étant pas encore dans ces réseaux, crainte du manque de connaissances et d’expériences des candidats plus jeunes, d’une intégration et d’une cohésion avec le groupe qui seraient plus délicates.</p>
<p>Les <a href="https://www.weforum.org/agenda/2018/12/boards-of-directors-need-youngsters-millennials/">études</a> montrent pourtant que leurs apports pourraient être multiples : représentants d’une partie des consommateurs et au fait des enjeux de la société de demain, notamment ceux liés à la transformation numérique, ils favoriseraient l’innovation grâce à l’élargissement de la gamme des choix et des solutions lors des décisions stratégiques. La mixité d’âge faciliterait en outre la transmission de savoir entre les générations.</p>
<p>Peut-être faudra-t-il légiférer comme au Québec pour que le recrutement des administrateurs évolue en matière d’âge. Avec la <a href="http://m.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/projets-loi/projet-loi-693-41-1.html">loi 693</a> adoptée en 2016, les sociétés d’État québécoises devront, à compter de 2021, avoir une personne âgée de moins de 35 ans au sein de leur conseil d’administration.</p>
<p>D’autres pistes peuvent être suggérées pour plus de mixité d’âge : davantage informer et former aux mandats d’administrateurs dans l’enseignement supérieur, ou encore mettre en place des interfaces entre jeunes cadres et conseils d’administration telles que des plates-formes de recrutement et de candidatures.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/140452/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Isabelle Allemand a reçu des financements du Conseil Régional de Bourgogne Franche Comté. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Bénédicte Brullebaut a reçu des financements de Conseil Régional de Bourgogne Franche-Comté. </span></em></p>Selon le dernier baromètre de Burgundy School of Business, autant de femmes que d’hommes ont été nommées lors des assemblées générales 2020, mais la moyenne d’âge reste élevée.Isabelle Allemand, Enseignant chercheur en finance et gouvernance, Burgundy School of Business Bénédicte Brullebaut, Enseignant - Chercheur en gouvernance d'entreprises, Burgundy School of Business Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1371672020-04-26T18:53:34Z2020-04-26T18:53:34ZCrise : les plans des grandes entreprises françaises risquent de durcir la spirale dépressive<p>Au niveau macroéconomique, les prévisions sont sombres et le premier ministre, Édouard Philippe, a annoncé une <a href="https://www.lefigaro.fr/economie/coronavirus-la-croissance-sera-negative-de-8-en-2020-selon-philippe-20200419">baisse de 8 % du PIB français en 2020</a> en raison de la pandémie et des mesures de confinement. Une <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/04/14/coronavirus-le-fmi-predit-une-recession-mondiale-historique-avec-un-recul-de-la-croissance-estime-a-3-en-2020_6036559_3234.html">recul de la croissance mondiale de 3 %</a> est anticipée par le FMI, dont 7,5 % pour la zone euro, 5,9 % pour les États-Unis et une maigre hausse de 1,2 % seulement pour la Chine.</p>
<p>Notre propos est d’adopter une posture micro-économique en appréciant l’impact de la crise sur les grandes entreprises françaises sur la base de la publication des résultats du premier trimestre 2020 (toujours en cours) et des mesures d’urgence annoncées par celles-ci pour y faire face.</p>
<p>Certes, le confinement français n’a démarré que le 17 mars, soit à la fin de la période trimestrielle janvier-mars, mais d’une part certaines d’entre elles sont fortement implantées en Chine où le confinement a démarré dès janvier et, d’autre part, les comportements des consommateurs ont commencé a évolué au cours du trimestre du fait de pratiques de réduction des dépenses et d’un engouement pour le stockage de denrées de base.</p>
<h2>Une crise qui ne fait que commencer</h2>
<p>Le graphique ci-dessous montre que les entreprises sont déjà très majoritairement impactées négativement par la crise du coronavirus, alors même que celle-ci n’est encore que très partiellement prise en compte. Certaines d’entre elles s’en sortent bien – et sans surprise –, comme celles des secteurs de la santé (humaine, bioMérieux et Ipsen, mais aussi animale, Virbac), de l’agroalimentaire (Danone), des solutions de paiement pour les salariés (Edenred) et du divertissement (Vivendi).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/330283/original/file-20200424-126808-1omwoyt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/330283/original/file-20200424-126808-1omwoyt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/330283/original/file-20200424-126808-1omwoyt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/330283/original/file-20200424-126808-1omwoyt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/330283/original/file-20200424-126808-1omwoyt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/330283/original/file-20200424-126808-1omwoyt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/330283/original/file-20200424-126808-1omwoyt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/330283/original/file-20200424-126808-1omwoyt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Communiqué des sociétés chiffre d’affaires premier trimestre 2020. Les variations retenues dans la plupart des cas sont hors variations de change et changements de périmètre (croissance organique) pour apprécier plus finement l’impact de la crise</span></span>
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</figure>
<p>Cela remet en lumière la <a href="https://theconversation.com/comment-le-coronavirus-rehabilite-la-pyramide-des-besoins-de-maslow-132779">pyramide des besoins de Maslow</a> où les besoins physiologiques sont prioritaires avec une actualisation par le divertissement et les services de paiement digitaux en cette période de confinement.</p>
<p>Plus surprenant, Technip, fournisseur des secteurs pétroliers et gaziers, est pour l’instant relativement épargné, mais la prise de nouvelles commandes est en chute libre (-66 %). D’autres secteurs sont touchés de façon modérée, certaines activités de ces entreprises prospérant tandis que d’autres souffrent comme Atos (services numériques) ou la Française des jeux (jeux d’argent), ou encore partiellement épargnés par la crise comme Publicis (communication).</p>
<p>À l’autre extrême, des sociétés sont durement touchées comme GL events (événementiel), le secteur automobile (Faurecia, PSA, Renault), le luxe (Hermès, Kering, LVMH et dans une moindre mesure L’Oréal dont la gamme relève également des produits de consommation courante), l’hôtellerie (Accor) et les produits de consommation courante non essentiels (Damartex dans le textile, Pernod-Ricard dans les boissons alcoolisées, Bic dans les stylos, rasoirs et briquets, etc.).</p>
<p>On note également que certaines entreprises annoncent une augmentation spectaculaire de leur activité en e-commerce (Kering, +21, 1 %, L’Oréal, +52,6 %, Schneider Electric, +25 %).</p>
<p>L’impact de la crise est d’autant plus fort que ces entreprises réalisent une forte part de leur activité en Asie et en particulier en Chine touchée en premier par la pandémie.</p>
<p>Par exemple, Schneider Electric (solutions énergétiques) a enregistré une baisse de 6,4 % de son chiffre d’affaires total, mais de 19,3 % en Asie-Pacifique (vs -2,8 % en Europe de l’Ouest et +0,6 % en Amérique du Nord), Kering une baisse totale de 16,4 % pour 30 % en Asie-Pacifique (vs. -14 % en Europe de l’Ouest et -7 % en Amérique du Nord).</p>
<p>Compte tenu du déplacement de la pandémie d’Asie vers l’Europe puis les États-Unis, cela montre que les mois à venir seront encore plus durs pour l’ensemble des entreprises et que nous n’en sommes qu’au début de la contraction de l’activité, même si la reprise progressive en Asie permettra de la compenser partiellement.</p>
<h2>Réductions massives des dépenses</h2>
<p>La lecture des plans d’actions présentées par les entreprises pour faire face à la réduction de l’activité est instructive : elle permet de dégager des lignes de force qui, si elles ne sont pas originales du point de vue de la gestion financière, restent instructives et semblent dans certains cas lourdes de conséquences.</p>
<p>En premier lieu, les entreprises engagent des plans de réduction des dépenses. Cela prend la forme classique de plans d’économies concernant les charges de sous-traitance, de conseil, le gel des embauches et des salaires (il n’est pas <a href="https://www.lefigaro.fr/social/pourquoi-un-tsunami-de-licenciements-est-inevitable-20200422">encore</a> question de licenciements), le recours parfois et partiellement au chômage partiel, même si les grandes entreprises ont souvent <a href="https://www.lci.fr/emploi/chomage-partiel-coronavirus-annulation-des-dividendes-les-grandes-entreprises-francaises-font-des-choix-differents-loreal-hermes-2149836.html">renoncé à y recourir</a>…</p>
<p>Par exemple, Publicis annonce un plan d’économie de 500 millions d’euros, tandis qu’Edenred évoque 100 millions. Cela comprend également une réduction des dépenses d’investissement. Ainsi, Faurecia va les réduire de 30 % (685 millions d’euros), Bic de 20 à 30 millions d’euros, Accor de 60 millions et Atos pour 400 millions.</p>
<p>Ces plans de réduction des dépenses, s’ils sont totalement légitimes du point de vue des entreprises concernées, constituent toutefois un sujet d’inquiétude majeur, car ils peuvent enclencher un cercle vicieux dépressif sur l’ensemble de l’économie, avec en première ligne les fournisseurs (dont beaucoup de PME) de ces grandes entreprises. Le risque de passer d’une récession à une réelle dépression économique est donc bien réel. Comme l’exprimait le président des États-Unis Harry Truman, « La récession c’est quand votre voisin perd son emploi ; la dépression c’est quand vous perdez le vôtre ».</p>
<p>De façon plus anecdotique, mais relevant de l’exemplarité, l’Afep (Association françaises des entreprises privées, qui réunit 113 grandes entreprises françaises) a demandé à ses adhérents de <a href="https://afep.com/wp-content/uploads/2020/03/Communiqu%C3%A9-de-presse-Afep_29-mars-2020-1.pdf">réduire la rémunération de leurs dirigeants</a> de 25 % si elles recouraient au chômage partiel. Et de fait, de nombreuses entreprises (comme Publicis ou LVMH) ont mis en œuvre cette recommandation pour des réductions de 20 à 30 %, même parfois en l’absence de recours au chômage partiel.</p>
<p>En deuxième lieu, il est souvent mentionné la volonté de renforcer la gestion du besoin en fonds de roulement des entreprises : c’est-à-dire réduire les stocks, surveiller les délais de paiement de clients (les réduire), et utiliser (augmenter) les délais de paiement aux fournisseurs, ce qui pourrait encore durcir la spirale dépressive.</p>
<p>En dernier lieu, les entreprises cherchent à garantir leur liquidité dans cette période de sous-activité où les dépenses courent sans que le chiffre d’affaires ne rentre. Pour ce faire, de nombreuses entreprises ont annoncé réduire (comme Edenred ou Technip) voire supprimer (comme Accor ou Renault) la distribution de dividendes.</p>
<h2>« C’est le client qui paie les salaires »</h2>
<p>De surcroît, des entreprises ont fait appel à l’endettement via de nouvelles obligations (comme Pernod-Ricard pour 1,5 milliard d’euros), de nouvelles dettes bancaires (comme Faurecia pour 800 millions d’euros), des lignes de crédit existantes non tirées (comme Publicis pour 2 milliards d’euros), voire comme Fnac-Darty obtenu un prêt bancaire garanti par l’État (à hauteur de 500 millions d’euros).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1251895730400145410"}"></div></p>
<p>Si ces mesures sont de nature à renforcer la position de liquidité des entreprises, il convient de souligner que cela se traduit par une augmentation de leur endettement et qu’il faudra un jour le rembourser. Sinon, le problème aura simplement été repoussé dans le temps.</p>
<p>La forte sous-activité enregistrée apparaît donc d’autant plus inquiétante que nous n’en sommes qu’au début de l’observation du phénomène. Les mesures mises en œuvre restent pour l’instant supportables, mais pourraient entraîner une dépression généralisée si elles perdurent, avec le cortège de chômeurs et les drames sociaux qui s’y attacheraient.</p>
<p>Ce n’est que par un retour à un niveau d’activité raisonnable que la crise économique pourra être surmontée. Comme le disait Henry Ford, « ce n’est pas l’employeur qui paie les salaires, c’est le client ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/137167/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jérôme Caby ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Réduction des dépenses, allongement des délais de paiement, appel à l’endettement… Autant de mesures aux conséquences lourdes qui pourraient enclencher un cercle vicieux.Jérôme Caby, Professeur des Universités, IAE Paris – Sorbonne Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1346772020-03-25T19:25:13Z2020-03-25T19:25:13ZEffondrement des marchés financiers : le coronavirus n’explique pas tout<p>Le lundi 9 mars 2020, après l’échec du <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/la-chine-tousse-et-le-petrole-se-grippe-1183587">sommet exceptionnel de l’OPEP+</a> visant à enrayer l’effondrement des prix du pétrole, toutes les places financières dévissent, affichant des records à la baisse. Paris enregistre alors sa plus forte chute depuis 2008 perdant 8,4 %, Francfort accuse une diminution de 7,9 % – du jamais vu depuis le 11 septembre 2001 – et Milan dégringole de 11,2 % en une journée.</p>
<p>Depuis, les indices boursiers ne cessent de cumuler les « plus bas ». Une telle chute des cours était-elle prévisible ? Comment l’expliquer ? Deux facteurs sont à l’œuvre, l’un prévisible, l’autre non.</p>
<h2>Un retour attendu aux fondamentaux</h2>
<p>La correction à la baisse des marchés financiers était à attendre, indépendamment de la crise sanitaire actuelle. Certes, son ampleur ne l’était pas, mais la chute ne constitue pas, en soi, une surprise. Il en est de même pour l’effondrement du prix du pétrole, considéré comme un baromètre de l’économie.</p>
<p>Pour comprendre la situation actuelle, revenons brièvement sur le contexte qui est, à la sortie de 2019, proche d’une certaine euphorie ou bulle financière. L’année 2019 a en effet été marquée par des performances exceptionnelles sur les marchés : +32 % pour le Nasdaq, +29 % pour le S&P500, +26 % pour le CAC 40.</p>
<p>Cette dynamique à l’œuvre en 2019 reflétait-elle la situation économique ? En d’autres termes, de telles performances étaient-elles « normales » eu égard à la conjoncture économique ?</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/322859/original/file-20200325-168876-1vvrh1u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/322859/original/file-20200325-168876-1vvrh1u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/322859/original/file-20200325-168876-1vvrh1u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=409&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/322859/original/file-20200325-168876-1vvrh1u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=409&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/322859/original/file-20200325-168876-1vvrh1u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=409&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/322859/original/file-20200325-168876-1vvrh1u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=514&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/322859/original/file-20200325-168876-1vvrh1u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=514&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/322859/original/file-20200325-168876-1vvrh1u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=514&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution des principaux indices boursiers depuis mai 2019.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.zonebourse.com/AEX-7959/graphiques-indices/">Zone bourse</a></span>
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</figure>
<p>Ces questions se posent avec d’autant plus d’acuité que le contexte qui prévalait l’an dernier était bien incertain : ralentissement économique latent, érosion de la croissance des pays émergents, mouvement des « gilets jaunes » en France, interrogations sur le devenir de l’Union européenne suite au Brexit, craintes liées à la soutenabilité de la zone euro, tensions commerciales entre la Chine et les États-Unis, début de nouvelles tensions géopolitiques entre les États-Unis et l’Iran… ; autant de facteurs qui contribuent à nourrir l’incertitude au niveau économique.</p>
<p>Le caractère accommodant des politiques monétaires menées par les banques centrales renforce ce constat, au sens où de telles politiques sont généralement plutôt observées en période de récession économique.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1240665219833135104"}"></div></p>
<p>Au total, 2019 apparaît comme une année où les cours boursiers étaient déconnectés des fondamentaux économiques. En d’autres termes, les marchés financiers et l’économie réelle n’étaient pas en phase et si une situation doit être considérée comme « anormale », c’est bien celle-ci.</p>
<p>Ce bref retour sur 2019 permet de saisir et comprendre les mouvements que l’on observe actuellement sur les places financières internationales. Aujourd’hui, on assiste en effet à une correction, c’est-à-dire à un retour aux fondamentaux économiques.</p>
<p>Indépendamment de l’incertitude liée à la crise sanitaire en elle-même, l’incertitude économique est toujours très importante. Pour ne citer que quelques exemples, malgré une légère accalmie, le conflit commercial sino-américain reste d’actualité, de même que les tensions géopolitiques au niveau mondial – en particulier, autour du pétrole. De façon similaire, les interrogations liées aux conséquences du Brexit subsistent, la crise migratoire ne cesse d’être d’actualité, etc.</p>
<p>Cette incertitude économique, majeure, se manifeste et s’illustre par une très forte volatilité sur les marchés financiers qui font le « yoyo » et reviennent ainsi vers les fondamentaux économiques.</p>
<p>À cet égard, il ne faut pas oublier que le cours d’une action que l’on observe sur les marchés financiers est censé refléter la <a href="https://www.cairn.info/l-efficience-informationnelle-des-marches-financie--9782707148605.htm">valeur fondamentale</a>, c’est-à-dire « réelle », définie comme la somme actualisée des anticipations de dividendes versés par les entreprises. La santé des entreprises étant mise à mal, les anticipations sont en berne, et la correction à la baisse des marchés n’est en conséquence pas surprenante.</p>
<h2>Un facteur imprévu : le coronavirus</h2>
<p>C’est dans ce contexte économique déjà bien fragile qu’est venue se greffer la pandémie. La <a href="https://www.arcgis.com/apps/opsdashboard/index.html#/bda7594740fd40299423467b48e9ecf6">propagation du coronavirus</a> ne cesse de freiner l’activité économique à l’échelle internationale. La Chine a été la première à voir son économie tourner au ralenti, avec des répercussions majeures sur l’ensemble de l’activité économique au niveau mondial.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1234359319480717312"}"></div></p>
<p>De multiples entreprises dans le monde sont dépendantes de la Chine, leur activité est directement impactée et les perspectives économiques mondiales ont alors été revues très fortement à la baisse. L’Italie s’est ensuite vue confinée, puis, petit à petit, l’ensemble des pays du globe. Les répercussions économiques sont et seront très lourdes et le spectre d’une récession mondiale est désormais, à l’évidence, une réalité.</p>
<p>La chute des cours boursiers et l’extrême volatilité que l’on observe aujourd’hui sur les marchés reflètent cette situation économique très incertaine. L’incertitude économique est très fortement amplifiée par la crise sanitaire en elle-même et les multiples inquiétudes, légitimes, qu’elle suscite. Elle est aussi renforcée par la dégringolade des cours du pétrole ; cette dernière ayant fait prendre conscience aux marchés de la gravité de la situation économique qui s’annonçait.</p>
<p>Si le coronavirus a certes d’abord impacté la sphère réelle, avec le ralentissement de l’activité économique mondiale, et a ensuite affecté les marchés financiers, il n’en reste pas moins que la crise financière était latente. La pandémie a accéléré son déclenchement.</p>
<p>Par ailleurs, un effet boomerang est à attendre, avec le risque d’entrer dans un « cercle vicieux ». Le très fort ralentissement économique auquel nous assistons pousse en effet nombre d’investisseurs à vendre leurs actions. En procédant de la sorte, ceux-ci alimentent et renforcent la baisse sur les marchés, créant à nouveau des répercussions sur l’économie réelle en affaiblissant encore plus les entreprises. Ces phénomènes, bien connus en finance, renvoient à ce que les économistes qualifient de prophéties autoréalisatrices.</p>
<p>La récession économique est inévitable et la question de la sévérité de la crise financière est évidemment liée au risque de défaut sur la dette des entreprises. La crise majeure sera encore plus désastreuse si les banques suspendent leurs crédits aux entreprises et si elles interrompent les prêts interbancaires.</p>
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<figcaption><span class="caption">Avec le coronavirus, une dépression économique inéluctable ? (ARTE, 9 mars 2020).</span></figcaption>
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<p>Les faillites, et en conséquence les pertes d’emplois massives associées, seront alors inéluctables avec un enchaînement des défauts à même de produire un risque systémique. S’il est évidemment bien trop tôt pour savoir quelles seront la durée et l’ampleur de la récession attendue, tous les moyens doivent être mis en œuvre pour relancer la croissance et l’investissement des entreprises, tant de la part des autorités monétaires qu’au niveau des mesures gouvernementales.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/134677/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie MIGNON est conseiller scientifique au CEPII, membre du Cercle des économistes et vice-présidente de l'AFSE.</span></em></p>Avant l’irruption de la crise sanitaire, les cours boursiers étaient déconnectés des fondamentaux économiques.Valérie Mignon, Conseiller scientifique au CEPII, chercheure à EconomiX-CNRS, professeure en économie, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1343732020-03-23T18:43:32Z2020-03-23T18:43:32ZFaut-il fermer les bourses ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/322160/original/file-20200322-22610-1glao6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C16%2C992%2C564&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les marchés boursiers ont tendance à surréagir, qu’il s’agisse de bonnes ou de mauvaises nouvelles d’ailleurs</span> <span class="attribution"><span class="source">Corlaffra / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>En l’espace d’un mois, l’indice phare de la bourse de Paris, le CAC 40, a perdu près de 40 % de sa valeur. Cette baisse n’est pas (encore) aussi importante, mais bien plus fulgurante que lors de la crise des subprimes (–58 % entre juin 2007 et mars 2009) ou l’éclatement de la bulle Internet (–65 % entre septembre 2000 et mars 2003). Se pose alors la même question un peu partout : <a href="https://www.alternatives-economiques.fr/coronavirus-faut-fermer-bourses/00092215">faut-il fermer les bourses ?</a></p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/322156/original/file-20200322-22632-12i1o84.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/322156/original/file-20200322-22632-12i1o84.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/322156/original/file-20200322-22632-12i1o84.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/322156/original/file-20200322-22632-12i1o84.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/322156/original/file-20200322-22632-12i1o84.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/322156/original/file-20200322-22632-12i1o84.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/322156/original/file-20200322-22632-12i1o84.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/322156/original/file-20200322-22632-12i1o84.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">L’indice CAC 40 a perdu près de 40 % de sa valeur entre le 19 février et le 18 mars 2020.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur</span></span>
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<p>L’épidémie de Covid-19 va avoir de très sérieuses répercussions économiques, c’est certain. Ce n’est plus seulement le <a href="https://theconversation.com/coronavirus-et-autres-maux-2020-annee-noire-pour-le-tourisme-mondial-133852">secteur du tourisme</a> qui est touché de plein fouet. Toute l’économie mondiale se grippe et, dans ce contexte, même si les <a href="https://voxeu.org/article/what-stock-market-tells-us-about-consequences-covid-19">marchés boursiers ont mis un peu de temps à réagir</a>, il est logique que les actions en bourse perdent autant de leur valeur et que les <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2020-03-16/stock-market-volatility-tops-financial-crisis-with-vix-at-record">marchés soient si volatils</a>.</p>
<h2>Surréaction des marchés</h2>
<p>L’ampleur de la baisse reste toutefois impossible à estimer précisément, tant les inconnues sont nombreuses. Mais l’expérience montre que les marchés boursiers ont tendance à surréagir, qu’il s’agisse de bonnes ou de mauvaises nouvelles d’ailleurs.</p>
<p>L’objectif d’une éventuelle fermeture des bourses n’est donc pas d’empêcher la baisse, mais d’essayer de contenir la chute et de réduire la volatilité excessive.</p>
<p>La dernière fois que la bourse de Paris a dû fermer, c’était en mai 1968, du fait de la contestation étudiante, mais surtout en <a href="https://www.lepoint.fr/societe/mai-68-vu-par-l-afp-a-la-bourse-allez-y-les-gars-cassez-tout-29-03-2018-2206481_23.php">raison d’un incendie</a> qui a ravagé le 24 mai 1968 le Palais Brongniart.</p>
<p>Auparavant, il faut remonter à la Seconde Guerre mondiale pour que la bourse de Paris soit fermée. Mais tout cela, c’était avant la création du CAC 40 et la mutation financière. D’autres exemples plus récents peuvent toutefois nous éclairer.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"979425711642566661"}"></div></p>
<p>En septembre 2001, à la suite des attentats, la bourse de New York ferme ses portes pour une semaine, alors que les bourses asiatiques et européennes continuent leur activité.</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1016/j.ejpoleco.2003.12.005">Un article académique</a> publié en 2004 a comparé la réaction des dix principaux marchés boursiers dans le monde. Or, c’est sur les marchés nord-américains que la baisse a été la plus faible.</p>
<p>Est-ce directement lié à la fermeture de la bourse ? Possible, mais on ne peut exclure d’autres explications. Pour les auteurs, la taille du marché américain, de loin le plus important au monde, a été un facteur de résilience, et l’élan patriotique qui a suivi le drame aurait limité les ventes des investisseurs aux États-Unis.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/322161/original/file-20200322-22606-6zgwv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/322161/original/file-20200322-22606-6zgwv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/322161/original/file-20200322-22606-6zgwv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/322161/original/file-20200322-22606-6zgwv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/322161/original/file-20200322-22606-6zgwv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/322161/original/file-20200322-22606-6zgwv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/322161/original/file-20200322-22606-6zgwv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Wall Street, qui est resté fermée pendant une semaine, fut la place boursière qui résista le mieux au dévissage des bourses après les attentats du 11 septembre 2001.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Photo.ua/Shutterstock</span></span>
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<p>De tels cas sont rares (fort heureusement) et nos connaissances sur l’impact de la fermeture des marchés boursiers sont limitées.</p>
<p>Une façon d’approcher la question consiste à examiner le cas d’interruption programmée. Que se passe-t-il quand le marché est fermé pour la <a href="https://doi.org/10.1016/0304-405X(86)90004-8">nuit</a>, le week-end, les vacances ou la <a href="https://doi.org/10.1016/0165-1765(92)90106-9">pause déjeuner</a> ? Les études semblent montrer que les variations des cours boursiers sont moindres, sans toutefois pouvoir exclure que ce soit simplement lié à une activité économique elle-même ralentie durant ces périodes. Quelques articles se sont également intéressés aux rares épisodes de fermeture exceptionnelle du marché boursier, par exemple en raison des <a href="https://doi.org/10.1002/fut.21632">interruptions des communications par satellite</a> en Inde, fréquentes jusqu’en 2008. Là encore, il semblerait que les marchés soient globalement moins volatiles, mais ces résultats sont difficiles à généraliser.</p>
<h2>Des mécanismes de coupe-circuit</h2>
<p>On peut enfin s’intéresser non pas à la fermeture du marché boursier dans son ensemble, mais aux interruptions de cotation. Depuis le krach d’octobre 1987 (Wall Street avait alors perdu plus de 20 % en une seule séance, entraînant dans son sillage la plupart des marchés mondiaux), les bourses ont toutes mis en place des mécanismes de coupe-circuit avec une interruption temporaire, de l’ordre d’une dizaine de minutes, en cas de hausse ou de baisse brutale du prix d’une action.</p>
<p>L’objectif reste bien de limiter la panique et d’éviter que les logiciels automatiques de trading ne s’emballent. Globalement, <a href="https://doi.org/10.1111/j.1540-6261.1993.tb05133.x">ces coupe-circuits semblent plutôt efficaces</a> pour limiter la surréaction des marchés, à condition toutefois de pouvoir être déclenchés <a href="https://doi.org/10.1016/j.jfi.2011.03.001">simultanément sur toutes les plates-formes</a> de trading.</p>
<p>Alors, faut-il fermer les bourses dans le cas de la pandémie de Covid-19 ? Les expériences passées montre que la suspension temporaire des marchés peut être un outil efficace. Mais cela suppose une action coordonnée.</p>
<p>Surtout, nous n’avons aucune expérience d’une interruption qui pourrait durer plusieurs semaines. À imaginer que les autorités décident conjointement de fermer les bourses, l’évolution incertaine de la pandémie ne nous permet pas de savoir combien de temps.</p>
<p>En plus des mécanismes de coupe-circuit, <a href="https://www.amf-france.org/fr/actualites-publications/communiques/communiques-de-lamf/lamf-annonce-une-interdiction-temporaire-sur-les-ventes-decouvert-portant-sur-certaines-actions-pour">l’interdiction temporaire des ventes à découvert</a> décidée par l’Autorité des marchés financiers (AMF) limitent, pour le moment, la spéculation et les plus fortes chutes. Et en cas de baisse plus violente encore, il est toujours possible d’étendre la durée des coupe-circuits de quelques minutes à quelques heures, voire de <a href="https://www.la-croix.com/Debats/Forum-et-debats/Faut-fermer-temporairement-marches-boursiers-2020-03-18-1201084732">limiter les séances de bourse à une ou deux cotations par jour</a>.</p>
<p>La baisse brutale des marchés boursiers observée ces dernières semaines est le reflet des craintes liées à la situation sanitaire et du ralentissement économique. En soi, la fermeture complète des bourses ne serait qu’un pansement sur une jambe de bois.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/134373/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gunther Capelle-Blancard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans le passé, les suspensions temporaires ont permis de limiter la chute des indices.Gunther Capelle-Blancard, Professeur d'économie (Centre d'Economie de la Sorbonne et Paris School of Business), Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1234732019-10-22T18:43:40Z2019-10-22T18:43:40ZAcademic All-Star Game, épisode VIII : Innovation financière et recherche en finance<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/292209/original/file-20190912-190021-istvr1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=26%2C393%2C776%2C440&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Laurent Deville et Fabrice Riva.</span> <span class="attribution"><span class="source">Capture d'écran.</span></span></figcaption></figure><p><em>Ce texte de Marine Stampfli et Louis Choisnet (élèves normaliens de l’ENS Paris-Saclay et étudiants en <a href="https://www.universite-paris-saclay.fr/fr/formation/master/management-strategique#mention">master Management stratégique de l’Université Paris-Saclay</a>) est publié dans le cadre d’un partenariat entre The Conversation France et l’Academic All-Star Game, cycle de conférences débats organisés par les étudiants de licence économie-gestion de l’<a href="http://ens-paris-saclay.fr">ENS Paris-Saclay</a> et de la <a href="http://www.jm.u-psud.fr/fr/index.html">faculté Jean‑Monnet</a> (droit, économie, gestion) de l’<a href="http://www.u-psud.fr/fr/index.html">Université Paris-Sud</a>. Ce cycle est soutenu par la <a href="http://msh-paris-saclay.fr">MSH Paris-Saclay</a>.</em></p>
<hr>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/260852/original/file-20190225-26168-15hq8mh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/260852/original/file-20190225-26168-15hq8mh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/260852/original/file-20190225-26168-15hq8mh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/260852/original/file-20190225-26168-15hq8mh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/260852/original/file-20190225-26168-15hq8mh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/260852/original/file-20190225-26168-15hq8mh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1006&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/260852/original/file-20190225-26168-15hq8mh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1006&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/260852/original/file-20190225-26168-15hq8mh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1006&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Programme complet de l’Academic All-Star Game.</span>
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<p>La huitième conférence de l’Academic All-Star Game a pris place le jeudi 11 avril. À peine cet épisode clos que déjà nous voyons apparaître un brin de nostalgie à la sortie d’une salle à l’ambiance intacte.</p>
<p>Cet acte 8 du cycle de conférences a engagé un tournant radical dans les sujets traités. En effet, ce nouvel épisode a été porté par Laurent Deville et Fabrice Riva, tous deux chercheurs en finance. Jusque-là, aucun des invités n’avait traité de cette thématique.</p>
<p>Laurent Deville est professeur à l’EDHEC et chercheur au CNRS. Il est spécialiste de finance et des marchés financiers. Fabrice Riva est professeur à l’Université Paris-Dauphine et dirige actuellement le Master « Finance d’Entreprise et Ingénierie Financière ». Il est spécialiste des marchés financiers et de la modélisation financière.</p>
<p>Prenant notamment appui sur <a href="https://www.cairn.info/revue-finance-2019-1-page-53.htm">leurs travaux communs</a>, Laurent Deville et Fabrice Riva ont donc décidé de nous éclairer sur les innovations financières et les enjeux liés à ces dernières. Mission difficile pour les deux chercheurs car à peine la conférence commencée qu’une question un brin « politique » était posée : « finalement, les marchés financiers sont-ils efficients ? ».</p>
<h2>L’innovation financière : l’exemple des ETF</h2>
<p>Le fil rouge de cette conférence fût les ETF : des raisons de leur apparition à leurs conséquences en passant par la recherche qui y est associée. En effet, ces derniers mettent en lumière bon nombre d’interrogations que les marchés financiers ont soulevé ces dernières décennies auprès du grand public, des régulateurs mais aussi dans une moindre mesure des chercheurs.</p>
<p>N’étant pas tous des aficionados de la finance, revenir sur ce que sont les ETF est une nécessité. Le terme d’abord : ETF, comprendre <em>Exchange Traded Fund</em>, qui se traduit en français par fond indiciel coté. Leur principe est simple, à comprendre tout du moins, puisqu’il s’agit de construire un fond d’investissement dont la valeur va tenter de répliquer celle d’un indice boursier préalablement choisi. Pour cela, le fond indiciel va en reproduire la composition. Fabrice Riva prend l’exemple d’un ETF qui voulant répliquer l’indice CAC 40 va acheter des titres de l’ensemble de 40 entreprises qui constituent cet indice. La grande différence avec un fond classique réside dans le fait qu’un ETF est lui-même coté.</p>
<p>Comme toute innovation, qu’elle soit financière ou non, les ETF sont une réponse à un besoin, issu des imperfections du marché : friction, manque de liquidité, incomplétude des instruments financiers… Ainsi la promesse des ETF est-elle, au-delà d’offrir aux investisseurs un placement liquide, de permettre d’acheter une part d’un fond relativement diversifié, et donc de détenir un titre dont le risque est plus ou moins égal au risque de marché. Reprenant l’exemple de CAC 40, Fabrice Riva résume : « en une seule action vous avez une exposition au risque égale à celle de CAC 40 ». Et ce à moindre frais, d’autant plus qu’il s’agit d’une gestion de portefeuille passive. Il faut par ailleurs noter que les frais de gestion des ETF sont relativement faibles puisque les gestionnaires de ces fonds se rémunèrent principalement via le prêt des titres qui constituent leurs fonds.</p>
<p>Les ETF sont le reflet, d’une certaine manière, de la complexification des instruments financiers. Apparus outre-Atlantique dans les années 1990 et introduit en Europe au début des années 2000, les ETF se sont davantage complexifiés avec le développement des ETF synthétiques. Cette fois pour répliquer un indice, le fond indiciel ne va pas chercher à en reproduire la constitution, mais va par un jeu d’assurance se couvrir sur l’écart, positif ou négatif, entre le rendement du fond réel et celui de l’indice.</p>
<p>Laurent Deville a fortement insisté sur l’absence de compréhension, de maîtrise des conséquences dues à l’introduction d’une innovation, notamment financière. Car si l’on sait pourquoi on introduit un changement, il reste difficile d’en prévoit pleinement la portée. Ainsi, prenant l’exemple des stratégies d’assurance de portefeuille développées dans les années 1980, il rappelle que celles-ci sont soupçonnées d’être en partie responsable de la crise de 1987.</p>
<p>Pour ce qui est des ETF, Fabrice Riva et Laurent Deville ont observé que les ETF, s’ils ont bien permis un gain d’efficience et une diminution des frictions pour leurs détenteurs, ont aussi provoqué une dégradation de la qualité de l’information des titres qui leurs sont sous-jacents, ainsi qu’une baisse de leur liquidité.</p>
<p>Se pose donc la question du rôle des régulateurs face aux innovations financières. Face aux risques qu’ils font planer, à tort ou à raison, les ETF synthétiques ont été interdits aux États-Unis en 2011, mais toujours pas en Europe. De manière globale, les régulateurs semblent être toujours à la traîne en ce qui concerne les innovations financières et leurs actions régulièrement contournées par de nouveaux instruments… Alors, à quoi bon ?</p>
<h2>Publication… et manipulation ?</h2>
<p>Après avoir présenté l’innovation financière via l’exemple des ETF, Laurent Deville et Fabrice Riva ont décidé de porter notre attention sur ce qu’est la recherche en finance.</p>
<p>Tout d’abord, Laurent Deville rappelle que faire de la recherche, notamment en finance, bien au-delà de l’objet d’étude, c’est faire porter l’attention sur les conséquences d’un phénomène. Toute la difficulté de la recherche s’inscrit donc dans l’étude de ces conséquences et plus exactement dans l’anticipation de ces dernières. Et en effet, il apparaît extrêmement compliqué de prévoir tous les effets et toutes les dérives émanant des innovations financières.</p>
<p>Le second point présenté par le chercheur, et que l’on a très souvent retrouvé tout au long de l’Academic All-Star Game, est celui de la transdisciplinarité. L’idée est toujours la même : faire de la recherche en gestion suppose d’opter pour un regard transdisciplinaire afin de tirer profit des apports d’autres sciences. Toutefois, cette fois-ci les chercheurs vont plus loin dans leur démarche.</p>
<p>En effet, au-delà de la pétition de principe selon laquelle il est important d’adopter une approche transdisciplinaire, Laurent Deville et Fabrice Riva ont par exemple mis en pratique ces recommandations en utilisant une méthode issue de la biologie : l’<a href="https://academic.oup.com/rof/article-abstract/11/3/497/1597929">« accelerated failure time »</a>. Laurent Deville a par ailleurs étudié les ETF d’un <a href="https://www.cairn.info/revue-gerer-et-comprendre-2015-1-page-22.htm">point de vue sociologique</a> avec Mohamed Oubenal.</p>
<p>Enfin, les chercheurs ont souhaité nous indiquer que la recherche concernant les ETF n’avait rien d’évidente dans la communauté des chercheurs en finance. En effet, pour certains il ne s’agit pas d’une innovation financière : les ETF n’impliquent pas un changement de paradigme. Cela induit de fortes difficultés en ce qui concerne la publication d’articles sur les ETF.</p>
<p>Néanmoins, Laurent Deville et Fabrice Riva insistent sur le fait que l’étude des ETF engendre l’émergence de nouvelles approches et méthodologies ; nous pouvons alors nous demander si l’objectif de publication (induisant nécessairement la notion de création) inhérent au métier de chercheur ne peut pas conduire parfois à des formes de manipulation des objets de recherche afin d’en faire des sujets d’étude pertinents. Nous retrouvons donc ici une forme de performativité de la recherche en finance, telle qu’elle a pu être étudiée lors d’une <a href="https://theconversation.com/academic-all-star-game-episode-vii-la-geopolitique-nouvelle-frontiere-des-sciences-de-gestion-123471">précédente conférence</a>…</p>
<h2>Redorer le blason de la finance</h2>
<p>Après la logistique, l’idéologie néoclassique, les discours de stratégie ou encore l’intelligence économique, place a donc été donnée à la finance, un pan des sciences de gestion quasiment absent de ces conférences jusqu’alors. Un point intéressant y a été soulevé : l’éthique des innovations financières, dont les ETF. Ce qui ne manque pas d’être un enjeu majeur dans l’acceptation du système financier par le grand public et les questions posées aux intervenant s’en sont faites l’écho.</p>
<p>Cette question semble parfois se résumer à un simple calcul coûts/avantages pour le système financier : est éthique, en finance, ce qui permet globalement d’améliorer l’allocation des ressources. En toute naïveté peut-être, on peut alors se demander si l’éthique ne serait pas justement une invitation à sortir des modèles de maximisation purement économique puisque, par essence, elle n’est pas mathématisable, ni même quantifiable…</p>
<p>« L’éthique » ce n’est pas « le mieux », ni même « le bien », c’est finalement définir une grille de lecture pour analyser une action. Introduire l’éthique en finance conduirait alors à s’interroger moins sur les stricts bénéfices en termes d’allocation des ressources que sur une meilleure compréhension du rôle de la finance. Cela reviendrait potentiellement à redéfinir son rôle et donc à changer de modèle mental, comme diraient peut-être certains autres intervenants de cet Academic-All Star Game…</p>
<p>Le débat est donc ouvert… Qu’il aurait été passionnant qu’il se poursuive avec une rencontre, en direct, de l’ensemble des intervenants !</p>
<hr>
<p><strong>À visionner, l’intégralité de l’épisode 8 de l’Academic All-Star Game avec Laurent Deville et Fabrice Riva.</strong></p>
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<p><strong>À voir également, l’interview de Laurent Deville et Fabrice Riva.</strong></p>
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</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/123473/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<h4 class="border">Disclosure</h4><p class="fine-print"><em><span>Le cycle de conférences Academic All-Star Game est soutenu par la MSH Paris-Saclay.</span></em></p>Les conséquences de la recherche en finance et de l’innovation financière, un sujet essentiel à l’affiche de ce nouvel épisode du cycle de conférences-débats.Jean-Philippe Denis, Professeur de gestion, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1195592019-07-04T21:31:00Z2019-07-04T21:31:00ZConseils d’administration : les profils des hommes et des femmes se ressemblent de plus en plus<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/281595/original/file-20190627-76743-5g92jc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C5%2C997%2C640&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le taux de féminisation des conseils d’administration des 110 sociétés françaises de l’échantillon de l'étude BSB s’élève à 45,1% en 2019.</span> <span class="attribution"><span class="source">Wavebreakmedia / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Le taux de féminisation des conseils d’administration des sociétés du SBF 120, qui regroupe les entreprises du CAC 40 et 80 autres dont la valeur est cotée à Paris, continue de progresser, selon le dernier Baromètre de la diversité dans les conseils d’administration, publié chaque année depuis 2014 par Burgundy School of Business (BSB). Après la tenue des assemblées générales de 2019, ce taux s’élève à 45,1 % contre 44 % en 2018 dans l’échantillon mesuré, soit 110 entreprises. Premier fait à noter : toutes les sociétés ont aujourd’hui atteint le seuil de 40 % exigé par la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000023487662">loi Copé-Zimmermann</a> et pour 30 % d’entre elles, la part des femmes est entre 50 % et 60 %.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/282456/original/file-20190703-126364-p6j5d6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/282456/original/file-20190703-126364-p6j5d6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/282456/original/file-20190703-126364-p6j5d6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/282456/original/file-20190703-126364-p6j5d6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/282456/original/file-20190703-126364-p6j5d6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/282456/original/file-20190703-126364-p6j5d6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=453&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/282456/original/file-20190703-126364-p6j5d6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=453&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/282456/original/file-20190703-126364-p6j5d6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=453&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><span class="source">Burgundy School of Business</span></span>
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<p>Mais l’enseignement principal de cette dernière vague statistique reste que les profils des hommes et des femmes qui siègent sont de plus en plus semblables. Si l’on trouve encore une différence d’âge significative entre les nouveaux administrateurs hommes (56 ans) et femmes (52 ans), les formations et les parcours professionnels convergent.</p>
<h2>De plus en plus de profils techniques féminins</h2>
<p>La formation en gestion, même si sa part est en recul, reste la formation la plus représentée chez les nouveaux administrateurs et sans différence en termes de genre (64,1 % en moyenne, 61,9 % chez les hommes et 66,7 % chez les femmes), suivie par les formations de type technique (école ingénieur, mathématique, informatique, etc. : 24,8 % en global) ou administration (17 %, il s’agit de l’IEP par exemple). Sur le plan de la formation technique, les profils par genre semblent se rapprocher, avec une forte augmentation chez les femmes (20 % contre 14 %) et une importante baisse chez les hommes (29 % contre 41 %). Si le recrutement de profils juridiques a tendance à augmenter, ils restent cependant rares parmi les nouvelles recrues (10,5 %). La formation internationale représente également une caractéristique importante et en augmentation dans le profil des nouveaux administrateurs (52,3 % contre 44,2 % en 2018) et est davantage présente chez les nouvelles femmes élues (56,5 % contre 48,8 % chez les hommes).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/282457/original/file-20190703-126345-vi8ehr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/282457/original/file-20190703-126345-vi8ehr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/282457/original/file-20190703-126345-vi8ehr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=357&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/282457/original/file-20190703-126345-vi8ehr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=357&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/282457/original/file-20190703-126345-vi8ehr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=357&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/282457/original/file-20190703-126345-vi8ehr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=449&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/282457/original/file-20190703-126345-vi8ehr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=449&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/282457/original/file-20190703-126345-vi8ehr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=449&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><span class="source">Burgundy School of Business</span></span>
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<p>En ce qui concerne le parcours professionnel, avoir exercé la fonction de directeur général semble toujours être un critère important dans le recrutement des administrateurs. Ce critère est à la hausse chez les hommes et chez les femmes, même si cette caractéristique est moins présente chez ces dernières : 4 femmes sur 10 seulement disposent de cette expérience chez les nouveaux administrateurs, contre 6,4 hommes sur 10. </p>
<p>L’expérience en ministère reste stable pour les 2 populations, et est toujours bien supérieure chez les hommes nouvellement élus. La surreprésentation des hommes dans les fonctions de direction et au sein des postes ministériels explique la différence significative entre les deux genres relative à ces deux critères, qui se maintient en 2019. Elle ne pourra évoluer qu’au fur et à mesure que les femmes accèderont aux hautes fonctions publiques ou en entreprises.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/282458/original/file-20190703-126364-1kdfh3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/282458/original/file-20190703-126364-1kdfh3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/282458/original/file-20190703-126364-1kdfh3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=357&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/282458/original/file-20190703-126364-1kdfh3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=357&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/282458/original/file-20190703-126364-1kdfh3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=357&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/282458/original/file-20190703-126364-1kdfh3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=449&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/282458/original/file-20190703-126364-1kdfh3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=449&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/282458/original/file-20190703-126364-1kdfh3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=449&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><span class="source">Burgundy School of Business.</span></span>
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<h2>Les hommes cumulent moins de mandats</h2>
<p>Parmi les nouveaux administrateurs, l’expérience en finance est toujours très importante, sans différence majeure selon le genre. De manière cohérente avec la formation technique, l’expérience en production a augmenté chez les nouvelles administratrices tandis que celle des hommes a diminué : les critères convergent. Disposer d’une expérience internationale semble être un atout pour devenir administrateur : plus de 70 % des nouveaux administrateurs ont en effet une expérience internationale et ce critère est en forte hausse (70 % contre 54 % en 2018 pour les femmes, 74 % contre 63 % en 2018 pour les hommes).</p>
<p>64 % des nouveaux administrateurs siègent ou ont déjà siégé dans un conseil d’administration d’une société cotée, française ou étrangère, avant leur élection lors des dernières assemblées générales : 58 % pour les femmes (contre 50 % en 2018) et 69 % pour les hommes (contre 78 % en 2018). L’écart se restreint donc entre les hommes et les femmes : progressivement les administratrices ont également plusieurs mandats et simultanément les hommes cumulent moins de mandats, étant remplacés par des femmes.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/282459/original/file-20190703-126376-63lq7u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/282459/original/file-20190703-126376-63lq7u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/282459/original/file-20190703-126376-63lq7u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/282459/original/file-20190703-126376-63lq7u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/282459/original/file-20190703-126376-63lq7u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/282459/original/file-20190703-126376-63lq7u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=520&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/282459/original/file-20190703-126376-63lq7u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=520&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/282459/original/file-20190703-126376-63lq7u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=520&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><span class="source">Burgundy School of Business</span></span>
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<p class="fine-print"><em><span>Isabelle Allemand a reçu des financements de Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Bénédicte Brullebaut a reçu des financements de Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mohamedou Bouasria a reçu des financements de Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté. </span></em></p>Le Baromètre 2019 de la diversité dans les conseils d’administration relève une convergence des parcours et des formations.Isabelle Allemand, Enseignant chercheur en finance et gouvernance, Burgundy School of Business Bénédicte Brullebaut, Enseignant - Chercheur en gouvernance d'entreprises, Burgundy School of Business Mohamedou Bouasria, Assistant de recherche, Burgundy School of Business Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1184102019-06-11T19:10:51Z2019-06-11T19:10:51ZLes salaires des footballeurs se justifient mieux économiquement que ceux des grands patrons<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/278299/original/file-20190606-98003-14p7kix.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C883%2C649&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Kylian Mbappé touche à peu près autant que les patrons du CAC 40. </span> <span class="attribution"><span class="source">Vlad1988/Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Quoi de commun entre les footballeurs et les PDGs ? Pas grand-chose si ce n’est le salaire. Au bas de l’échelle, on voit bien, sans avoir besoin de mobiliser de lourdes statistiques, que l’entrepreneur individuel soumis à la faillite n’a pas un sort bien différent du footballeur professionnel à la limite de l’amateur, qui est durement exposé au chômage : les deux ont souvent du mal à joindre les deux bouts.</p>
<p>Mais c’est surtout en haut de l’échelle que la similitude est frappante. Il suffit de consulter rapidement Internet pour le voir : jusqu’à <a href="https://www.programme-tv.net/news/evenement/coupe-du-monde-de-football-2018/210147-coupe-du-monde-2018-decouvrez-le-classement-des-salaires-exorbitants-des-joueurs-de-lequipe-de-france/">21 millions d’euros par an</a> pour nos champions du monde, des sommes proches de celles touchées pour les <a href="https://www.lerevenu.com/bourse/exclusif-les-vrais-salaires-des-patrons-du-cac-40-en-2018">patrons du CAC 40</a>. Carlos Ghosn, au temps de sa splendeur, ne dépassait guère le Kylian Mbappé d’aujourd’hui. Il en est de même au niveau international : <a href="https://www.europe1.fr/sport/revenus-des-footballeurs-messi-depasse-cristiano-ronaldo-3633494">Cristiano Ronaldo et Lionel Messi</a> tournent autour de 100 millions d’euros par an, cinq à six fois plus que les patrons de <a href="https://www.lecho.be/tech-media/technologie/jackpot-pour-reed-hastings-a-la-tete-de-netflix/9968524.html">Netflix</a> ou d’<a href="https://www.huffingtonpost.fr/2019/01/09/tom-cook-a-un-salaire-15-millions-de-fois-plus-eleve-que-celui-de-steve-jobs_a_23637849/">Apple</a>. On ne peut qu’être frappé par ces montants extravagants quand on les compare par exemple au revenu moyen national, de l’ordre de <a href="http://premium.lefigaro.fr/conjoncture/2018/02/27/20002-20180227ARTFIG00294-en-france-le-salaire-mensuel-net-moyen-s-eleve-a-2250-euros.php">25 000 euros</a>.</p>
<p>Qu’en dira l’économiste, au-delà de l’évidence que la comparaison est sommaire, et qu’il faut la raffiner ? Il ne portera pas de jugement moral sur les niveaux de rémunération, il recherchera s’ils concourent à l’efficacité de l’économie, et pour cela, examinera la manière dont ces revenus se forment, le fonctionnement des marchés qui y conduisent.</p>
<h2>Asymétrie d’information</h2>
<p>Du côté des footballeurs, il verra jouer un mécanisme, le fameux mercato, un système d’enchères non sans analogie avec celui qui régit la cote des peintres ou la vente de biens immobiliers. Le bon footballeur remplit les stades, donc les caisses de son club, qui en déduit le gain que son acquisition lui procurera et donc le prix qu’il peut payer pour l’avoir. Ajoutons qu’en fixant cette enchère, il a une information quasi parfaite sur la qualité du produit qu’il achète – le footballeur : même le non-spécialiste, devant sa télé, voit bien que Griezmann marque beaucoup de buts, fait de belles passes. En termes d’analyse économique, il n’y a guère d’asymétrie d’information. Finalement, sous réserve de manœuvres du ressort de l’autorité de la concurrence, on n’est pas loin, au moins en principe, d’une <a href="https://www.cairn.info/microeconomie--9782130729983-page-271.htm?contenu=resume">situation Pareto optimale</a>, comme le disent les économistes, représentant les vertus bien connues de la concurrence parfaite.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1101311165731348482"}"></div></p>
<p>Ces vertus ne se retrouvent pas aussi clairement dans le marché des PDG, beaucoup plus opaque. Les mécanismes qui régissent le fonctionnement, et donc le succès, d’une équipe de football ne sont pas simples, mais ceux commandant celui des entreprises sont autrement plus complexes. L’opinion publique, et même le milieu professionnel, mesurent moins bien la qualité de leur gestion. Si elle est couronnée de succès, n’est-ce pas le résultat d’une heureuse adéquation entre la personnalité du dirigeant et un vent porteur extérieur ?</p>
<p>À l’inverse, des résultats décevants ne signifient pas forcément des erreurs de gestion. Tel qui a connu une suite de succès se met à faillir et enchaîner les échecs pour des raisons difficiles à démêler surtout sur l’instant, au moment où on a le plus besoin de les discerner – car avec le recul, on pourra trouver les causes de l’échec, mais il sera trop tard. Par ailleurs, un soupçon plane sur le mode de fixation des rémunérations : les intéressés ne sont-ils pas partie prenante à la décision les concernant ?</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"730710976165744640"}"></div></p>
<p>Finalement, en théorie au moins, l’économiste jugera plus favorablement le cas des footballeurs, il y trouvera davantage d’adhérence avec les principes d’organisation qu’il prône pour assurer l’efficacité et l’optimalité de l’économie de marché, et il sera plus circonspect sur le cas des PDG.</p>
<h2>« Le peuple » et « les élites »</h2>
<p>Est-ce à la suite de raisonnements techniques analogues à ceux qui précédent que l’opinion publique, telle qu’on la perçoit dans les médias ou dans les débats politiques, n’est guère émue par les salaires des footballeurs mais se trouve choqué par les rémunérations des PDG ? On se <a href="https://www.challenges.fr/france/salaires-des-grands-patrons-des-polemiques-recurrentes-en-france_607421">scandalise</a> sur leurs salaires excessifs, on parle périodiquement d’en limiter le montant ; quant à ceux des footballeurs, on s’en étonne toujours, on les envie peut-être, on est souvent proche de les admirer au même titre que leurs exploits sportifs, mais personne n’a demandé de les plafonner.</p>
<p>Faut-il en conclure que les Français ont la fibre de l’économie ? Il y a trop d’indices allant en <a href="http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2018/08/06/20002-20180806ARTFIG00220-entre-les-francais-et-l-economie-l-incomprehension8230.php">sens contraire</a> pour ne pas chercher une autre explication à ces opinions différenciées sur les footballeurs et les PDG, du côté de la sociologie cette fois. Au regard des troublantes analogies en matière de rémunération qui ont constitué le point de départ de cette réflexion, n’y a-t-il pas aussi des différences majeures dans les profils des deux catégories en cause, à la fois dans les origines sociales et dans le niveau d’éducation ?</p>
<p>Les footballeurs, au moins professionnels, viennent majoritairement des classes défavorisées et peu d’entre eux ont dépassé le bac, à l’inverse des PDG. On pourrait symboliser ces différences par des expressions vagues mais parlantes : « le peuple » et « les élites », « l’école de la rue » et « les grandes écoles » et qui recouvrent surtout des différences dans les origines sociales et dans les niveaux d’éducation ; et n’est-ce pas dans ces différences qu’il faut trouver les divergences d’appréciation de l’opinion publique, où les élites sont minoritaires ?</p>
<p>Même sans aller plus avant dans la vérification de cette hypothèse, n’y a-t-il pas là des constatations qui devraient remplir l’économiste d’humilité, en lui faisant voir que les analyses tirées de sa discipline doivent souvent, si on veut les appliquer au réel, être complétées par le regard d’autres disciplines, comme la sociologie ou la psychologie ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/118410/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emile Quinet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En théorie, les niveaux de rémunération des joueurs se fixent sur un marché moins opaque que celui des PDG.Emile Quinet, Professeur émérite Ecole des Ponts-ParisTech et membre associé de Paris School of Economics, École des Ponts ParisTech (ENPC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1138632019-03-31T19:10:33Z2019-03-31T19:10:33ZLes grandes entreprises, un rôle de locomotive à assumer pour l’économie française<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/265892/original/file-20190326-36276-sp2mje.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C1268%2C866&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">A la bourse de Paris , plus de la moitié des entreprises du CAC 40 prévoient des profits pour 2018 supérieurs à leurs attentes.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/2/20/Paris_metro3_-_Bourse_-_entrance.jpg/1280px-Paris_metro3_-_Bourse_-_entrance.jpg">Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>C’est en s’appuyant sur les « risques multiples » qui pèsent sur la conjoncture que Mario Draghi a justifié, début mars, le report de la hausse des taux d’intérêt de la BCE, ainsi que la mise en œuvre d’autres mesures de soutien à l’<a href="http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2019/03/07/20002-20190307ARTFIG00256-la-bce-degaine-des-mesures-de-soutien-a-la-zone-euro.php">activité économique</a>.</p>
<p>Ces <a href="https://theconversation.com/linstabilite-politique-et-economique-mondiale-sonne-t-elle-le-glas-de-la-strategie-dentreprise-98614">risques</a> prennent la forme de tensions protectionnistes, d’incertitudes géopolitiques ou encore celle de l’instabilité croissante qui caractérise l’économie des pays émergents. Difficile dans un tel contexte, marqué par une incertitude grandissante, d’opérer les bons choix, que l’on soit en charge des politiques économiques ou à la tête d’entreprises ou d’organisations, quelle que soit la taille de ces dernières.</p>
<p>Si la stratégie de la BCE semble désormais claire et de plus en plus lisible, prenant la forme d’un soutien affirmé à l’activité économique, celles des grandes entreprises se caractérisent par une prise en compte modérée de leur rôle de « locomotives » pour nombre d’entreprises de taille intermédiaire (ETI), de PME et de TPE, voire de start-up, qui ne profitent que trop peu des retombées de la bonne santé du CAC (pour ne citer que les plus grandes entreprises cotées).</p>
<h2>Le choix de la BCE en soutien de l’économie</h2>
<p>La BCE, en affirmant sa volonté de contribuer au renforcement d’une croissance limitée, alors même que des hausses de taux étaient attendues, témoigne de l’importance qu’elle accorde à des risques prenant les formes les plus diverses. Elle se base sans doute également sur ses révisions à la baisse des perspectives de croissance anticipée pour les années à venir : 1,1 % en 2019 et 1,6 % en 2020 contre 1,7 % pour ces deux années tel qu’envisagé jusqu’ici. Une nouvelle vague de prêts bon marché aux banques a ainsi été annoncée en vue de maintenir des conditions de crédit favorables et un soutien massif à l’activité économique. Loin semble désormais le temps de l’orthodoxie monétaire qui amenait la BCE à privilégier, comme cela est mentionné dans ses statuts, la lutte farouche contre tout risque d’inflation. Les enseignements des politiques passées ont bien été tirés et la BCE dispose aujourd’hui, par la force des choses, d’une expérience solide et précieuse des politiques à mener en période compliquée.</p>
<p>De leur côté, les <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/03/08/le-cac-40-comment-ca-marche_5267820_4355770.html.">entreprises du CAC 40</a> semblent, depuis plusieurs années maintenant, défier les prévisions en même temps que les conditions négatives qu’elles doivent affronter. Pourtant largement dépendantes du commerce international et de sa vitalité, elles sont parvenues à augmenter leur chiffre d’affaires cumulé de 7,5 % en 2018.</p>
<p>La chute de la bourse en fin d’année s’expliquait donc bien plus par la peur des investisseurs, anticipant les conséquences de la guerre commerce entre la Chine et les États-Unis ou le ralentissement de la croissance chinoise que par la réalité des chiffres. Les investisseurs ne sont pas les seuls surpris : plus de la moitié des entreprises du CAC 40 viennent d’annoncer pour 2018 des profits supérieurs à leurs propres attentes. Airbus a ainsi vu son bénéfice net progresser de 30 %, quand Total voyait le sien augmenter de 28 % par rapport à 2017.</p>
<p>Les hausses de chiffre d’affaires ne se sont donc pas faites, comme ça peut parfois être le cas, au détriment des bénéfices. En d’autres termes, nos grandes entreprises continuent de vendre beaucoup, mais aussi de vendre bien, sans avoir besoin de rogner sur leurs marges pour défendre leurs parts de marché.</p>
<h2>Un rôle de locomotive</h2>
<p>De tels résultats constituent d’indéniables bonnes nouvelles économiques. Le contraste apparaît toutefois saisissant entre la santé de nos grandes entreprises et celle des PME qui reste fragile. Au-delà de la contraction parfois forte de leurs bénéfices, les PME souffrent surtout aujourd’hui en raison de la dégradation de leurs <a href="https://www.meilleurtauxpro.com/besoin-de-tresorerie/actualites/2018-mai/la-tresorerie-des-pme-tend-a-se-degrader.html">trésoreries</a>.</p>
<p>Une telle situation appelle naturellement un questionnement sur le rôle de « locomotive » des grandes entreprises. Bien sûr il est difficile de reprocher à la plupart d’entre elles d’aller chercher les perspectives de croissance où elles sont capables de les trouver : loin de la France et, souvent, de l’Europe. Pour autant, elles demeurent des acteurs économiques majeurs sur le territoire national et sur celui que nous partageons avec nos voisins européens.</p>
<p>Les effets d’entraînement de l’économie qui découlent des choix des grandes entreprises ne sont plus à démontrer (qualité des relations avec leurs fournisseurs, souvent des PME ; capacité à réduire ou à respecter, les délais de paiement ; partage intelligent de la propriété intellectuelle quand on innove avec des start-up). À l’heure où l’économie française apparaît davantage sous perfusion monétaire que caractérisée par une grande confiance entre les entreprises, il est légitime d’attendre davantage des plus grandes d’entre elles.</p>
<h2>Quelques bonnes pratiques à diffuser</h2>
<p>Plusieurs indicateurs témoignent d’une amélioration des relations, historiquement tendues, entre grandes entreprises et PME : les litiges qui les opposent ont tendance à diminuer, les délais de paiement des premières ont également tendance à se réduire. Au-delà, il est possible d’envisager un véritable accompagnement des PME qui constituent l’essentiel du réseau de fournisseurs des grandes entreprises. Un triple accompagnement peut être proposé :</p>
<ul>
<li><p>Un accompagnement commercial : pour la conquête de nouveaux marchés par le fournisseur, marchés qu’il est possible d’explorer ensemble comme le font les « entreprises étendues », ces entreprises qui choisissent de se considérer comme les maillons d’une chaîne de valeur qui les dépasse et qui intègre leurs principaux partenaires économiques (clients et fournisseurs notamment) dans une logique collaborative.</p></li>
<li><p>Un accompagnement industriel : en dépit des problématiques juridiques, finalement tout à fait gérables, certaines entreprises n’hésitent plus à investir chez leurs fournisseurs pour bénéficier de la qualité de leur production sur des produits spécifiques. Au-delà, le fait de lisser les achats sur l’année permet de dé-précariser le travail chez le fournisseur, dont la meilleure santé se révélera un atout pour son client ;</p></li>
<li><p>Un accompagnement financier : un travail important reste à accomplir pour rendre confiance aux fournisseurs parfois trop facilement considérés comme des banquiers qui leur permettent d’optimiser leur trésorerie.</p></li>
</ul>
<p>C’est en s’appuyant sur ce type de bonnes idées que les grandes entreprises pourront dynamiser une activité nationale qui leur offrira en retour de nouvelles opportunités de croissance, moins dépendantes du commerce international, tout en contribuant à pacifier l’économie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/113863/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hugues Poissonnier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les « risques multiples » qui pèsent sur l’économie française fragilisent plus les PME que les grands groupes. À eux de jouer leur rôle de « locomotive » pour l’ensemble de l’économie.Hugues Poissonnier, Professeur d'économie et de management, Directeur de la Recherche de l’IRIMA, Membre de la Chaire Mindfulness, Bien-Etre au travail et Paix Economique, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1103712019-01-28T20:38:44Z2019-01-28T20:38:44ZQui sont ces grands groupes français qui financent les entreprises innovantes ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/255143/original/file-20190123-135151-55747b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C0%2C986%2C667&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En 2016, l’investissement dans le capital-risque industriel a atteint 2,7 milliards d’euros.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Frank_peters / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p><em>Cet article s’appuie sur le travail de recherche de Souad Brinette et Sabrina Khemiri « Identifying the determinants of corporate venture capital strategy : evidence from French firms », à paraître dans la revue <a href="https://www.researchgate.net/journal/1476-1297_International_Journal_of_Entrepreneurship_and_Small_Business">« International Journal of entrepreneurship and Small business »</a> (2019).</em></p>
<hr>
<p>Dans un environnement de plus en plus compétitif, les grands groups se tournent vers le financement des startups de leur écosystème pour renforcer leur capacité d’innovation. Cette démarche connue sous le nom de capital risque industriel (CRI), ou <em>corporate venture capital</em> (CVC) en anglais, est une stratégie entrepreneuriale, menée à l’extérieur des grands groupes, qui consiste à créer des fonds d’investissement pour financer des startups innovantes.</p>
<p>Aujourd’hui, cet engagement dans le capital-risque ne cesse d’augmenter. En 2015, 40 % des entreprises du CAC 40 possédaient des fonds de capital-risque. En 2016, l’investissement dans le CRI a atteint <a href="http://blog.sowefund.com/04156/corporate-venture-chiffres-de-2016-france">2,7 milliards d’euros</a> contre 1,5 milliard d’euros en 2015 et seulement 289 millions d’euros en 2013. Cette augmentation a été favorisée par le <a href="https://www.economie.gouv.fr/corporate-venture-financer-innovation">dispositif d’incitation fiscale</a> adopté en septembre 2016 qui permet notamment aux grands groupes d’amortir sur une durée de cinq ans le montant de leurs prises de participation au capital de startups et de réduire par conséquent leur impôt.</p>
<p>Dans cette même optique, Marc Rennard, CEO d’Orange Digital Ventures, le fonds créé par Orange, a déclaré que :</p>
<blockquote>
<p>« L’année 2017 avait confirmé le dynamisme des CVCs européens, et français en particulier, avec une <a href="https://www2.deloitte.com/fr/fr/pages/presse/2018/barometre-annuel-sur-les-cvc-en-france.html">croissance de 38 %</a> du nombre de transactions. C’est une manifestation claire de l’intérêt soutenu que portent les grands groupes aux startups, acteurs clefs de l’innovation ».</p>
</blockquote>
<p>Il faut également souligner que le capital risque industriel est plus générateur d’innovations que les modèles traditionnels de joint-venture (partenariat) (<a href="https://doi.org/10.1093/rfs/hhu033">Chemmanur et coll., 2014</a>). De nombreux groupes français l’ont bien compris, à l’image de Bouygues, Total, Airbus, Engie, ou encore Air Liquide, qui ont tous créé leur fonds de capital-risque.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/255406/original/file-20190124-135160-rxrgco.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/255406/original/file-20190124-135160-rxrgco.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/255406/original/file-20190124-135160-rxrgco.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/255406/original/file-20190124-135160-rxrgco.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/255406/original/file-20190124-135160-rxrgco.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/255406/original/file-20190124-135160-rxrgco.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/255406/original/file-20190124-135160-rxrgco.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/255406/original/file-20190124-135160-rxrgco.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://blog.lehub.bpifrance.fr/les-bonnes-pratiques-du-corporate-venture-capital/"> blog.lehub.bpifrance.fr</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Le CRI dépend des ressources spécifiques des entreprises</h2>
<p>Notre étude est menée sur un échantillon composé de toutes les entreprises françaises du <a href="https://www.abcbourse.com/apprendre/1_les_indices_boursiers1.html">SBF 120</a> qui ont mené une stratégie de capital risque industriel entre 2000 et 2017. L’échantillon a été constitué manuellement à partir des rapports d’activité, des rapports de <a href="https://www2.deloitte.com/fr/fr.html">Deloitte</a> et des sites Internet de <a href="https://www.chaussonfinance.com">Chausson Finance</a>, de <a href="https://www.bpifrance.fr">Bpifrance</a> et de l’Association française des investisseurs pour la croissance (<a href="http://www.franceinvest.eu">AFIC</a>). Les données financières ont été recueillies à partir des bases <a href="https://www.refinitiv.com/en/products/thomson-one-wealth-solutions?utm_content=Thomson%2520One%2520Flagship%253ePhrase&utm_medium=cpc&utm_source=google&utm_campaign=68832_RefinitivBAUPaidSearch&elqCampaignId=5916&utm_term=thomson%2520one%2520banker&gclid=Cj0KCQiAvqDiBRDAARIsADWh5Tftl3_I0Od2eNOwykshHmGJtjGlqiCz9jYmR-pJWJG4gsMGo7lgeK4aAh1GEALw_wcB">Thomson One Banker</a> et <a href="https://www.bloomberg.com/europe">Bloomberg</a>.</p>
<p>L’objectif de l’étude était de pouvoir identifier les caractéristiques des entreprises ayant mené une stratégie de capital risque industriel. Il en ressort notamment que les opérations de CRI dépendent des ressources spécifiques dont disposent les entreprises – - notamment cognitives –, de leur performance, de la disponibilité de leurs ressources, et de leur niveau d’endettement :</p>
<p><strong>Des entreprises disposant d’importantes ressources cognitives</strong></p>
<p>Les grands groupes qui se lancent dans des opérations disposent généralement d’importantes ressources cognitives telles que les compétences et les connaissances spécifiques, le savoir-faire des managers, la bonne réputation et l’image de marque de l’entreprise. Ces connaissances vont en effet leur permettre d’identifier la meilleure approche de création de valeur en investissant dans les startups soigneusement sélectionnées pour stimuler l’innovation et donc se forger des avantages concurrentiels.</p>
<p><strong>Des entreprises performantes</strong></p>
<p>Les entreprises qui mènent des stratégies de CRI sont généralement performantes car ce sont les plus capables à supporter les coûts liés au CRI. À noter aussi : investir dans des startups innovantes minimise les éventuels conflits d’intérêts entre les managers et les actionnaires au sujet des ressources excédentaires (<em>free cash-flow</em>, flux de trésorerie disponible).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/255144/original/file-20190123-135154-l9ro0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/255144/original/file-20190123-135154-l9ro0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/255144/original/file-20190123-135154-l9ro0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/255144/original/file-20190123-135154-l9ro0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/255144/original/file-20190123-135154-l9ro0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/255144/original/file-20190123-135154-l9ro0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/255144/original/file-20190123-135154-l9ro0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Investir dans une start-up innovante peut permettre d’apaiser d’éventuelles tensions entre managers et actionnaires.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bernad/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p><strong>Des entreprises peu endettées</strong></p>
<p>Nous avons également relevé que les grands groupes les moins endettés sont ceux qui investissent le plus dans les jeunes entreprises innovantes. Un niveau d’endettement faible signifie en effet que l’entreprise dispose d’une bonne flexibilité financière lui permettant d’investir dans l’innovation.</p>
<h2>Apprendre d’autres expériences</h2>
<p>Les résultats de notre étude constituent des orientations générales pour les managers ayant l’intention d’adopter une stratégie de CRI. Les managers peuvent, ainsi, observer si leurs entreprises ont les mêmes caractéristiques que leurs homologues et évaluer au préalable leur capacité à se lancer dans des opérations de CRI.</p>
<p>Il serait ainsi bénéfique pour les managers d’apprendre des <a href="https://theconversation.com/corporate-venture-capital-les-vrais-enjeux-pour-les-groupes-et-les-start-up-80450">expériences d’autres entreprises</a> ayant fait du CRI dans divers secteurs d’activité, notamment les secteurs de software (Dassault Systèmes), de la chimie (Solvay et Saint-Gobain), de l’énergie (Alstom, Suez Environnement, Total, et Veolia Environment), et de télécommunications (Bouygues Telecom, Orange, SFR, et Nokia).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/110371/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une étude relève qu’ils sont généralement performants, peu endettés, et disposent de ressources cognitives riches en interne.Sabrina Khemiri, Enseignant-Chercheur en Finance, Pôle Léonard de VinciSouad Brinette, Enseignant chercheur en Finance, EDC Paris Business School - OCRE, EDC Paris Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/969022018-05-21T21:57:15Z2018-05-21T21:57:15ZOxfam : les sept biais méthodologiques du rapport qui stigmatise les dividendes des actionnaires<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/219714/original/file-20180521-14950-pkhaey.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=46%2C7%2C5129%2C3406&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Regarder les chiffres de près.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/89228431@N06/11322953266/in/photolist-ifz6wb-hhKZrE-hMJnnU-68K5KU-8FKBCu-SbZNaG-pCqsvB-Q2mYcz-8vfmFJ-fFwC28-mHyHB1-pSKwjo-6HFJoU-6xYYaj-3eU45Z-fG2q1r-fGj16C-oDJmv7-MmYP8g-fG2pi2-fG2p6Z-fG2oCe-rNNK9T-fG2oXP-fGj1vU-fG2p16-fG2oNg-fGiZSm-FNLsEE-MmLcNg-fG2qjP-4s65zw-oFLgD4-a1v3ye-91pMJZ-fGiWK7-UNqxYo-85TzvQ-cJVNvA-7Cofgn-p4zjE2-21iDEBq-o7XgGQ-263AUmJ-nJXFx8-5LK2CJ-24sG8dC-chEmR1-79QPo1-uw1fxt">Reynermedia / Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>« Le CAC 40 : des profits sans partage » tel est le nom du <a href="https://bit.ly/2k9uFvg">rapport d’Oxfam</a> (mai 2018) qui s’efforce de montrer comment les grandes entreprises françaises <a href="https://bit.ly/2IhbbiB">alimentent la spirale des inégalités</a>. Ce rapport se compose de trois parties : CAC 40 : les actionnaires ont la cote ; le grand écart salarial : l’autre spirale infernale ; paradis fiscaux et niches fiscales : comment le CAC 40 échappe à l’impôt.</p>
<p>L’objet de cet article est de s’intéresser à la partie sur les dividendes et de montrer en quoi cette étude d’Oxfam comporte un certain nombre de biais méthodologiques qui sont de nature à déformer la réalité de la rémunération des actionnaires et à alimenter dans la population non informée un fort ressentiment à leur égard.</p>
<p>Nous avons identifié sept principaux biais :</p>
<ol>
<li><p>Le ratio de distribution (<em>payout ratio</em>) des dividendes n’est pas le meilleur indicateur de la politique de dividende des entreprises</p></li>
<li><p>Les dividendes et les rachats d’action n’enrichissent pas les actionnaires</p></li>
<li><p>On ne peut pas comparer les dividendes versés aux actionnaires à l’intéressement perçu par les salariés</p></li>
<li><p>La rémunération des actionnaires doit tenir compte des gains et des pertes en capital et pas seulement des dividendes</p></li>
<li><p>La politique d’investissement ne peut être appréciée par la part du bénéfice réinvesti mais par l’étude des tableaux de financement</p></li>
<li><p>La politique de dividende n’est pas l’ennemie de l’investissement et de la croissance des entreprises</p></li>
<li><p>Les dividendes et les rachats d’actions sont réinvestis dans l’économie et souvent dans les entreprises</p></li>
</ol>
<h2>1. Le ratio de distribution des dividendes n’est pas le meilleur indicateur de la politique de dividende des entreprises</h2>
<p>Le rapport d’Oxfam sur les dividendes se focalise sur le partage des profits des entreprises du CAC 40 :</p>
<blockquote>
<p>« Sur 100 euros de bénéfices, les entreprises du CAC 40 ont en moyenne reversé 67,4 euros de dividendes aux actionnaires, ne laissant plus que 27,3 euros pour le réinvestissement et 5,3 euros de primes pour les salariés. »</p>
</blockquote>
<p>Une telle présentation de la politique de dividendes des entreprises est trompeuse car elle ne se base que sur le <a href="https://bit.ly/2ICIBZp">taux de distribution</a> (<em>payout ratio</em>) calculé en rapportant le montant des dividendes aux bénéfices de l’entreprise.</p>
<p>Ce ratio, comme le montre l’étude d’Oxfam, varie d’une année à l’autre car les bénéfices fluctuent davantage que les dividendes. En effet, en général les entreprises adoptent une politique de dividende stable en maintenant le coupon au niveau antérieur et ne l’augmentent que prudemment. Lorsque le bénéfice chute, le maintien du coupon entraîne mécaniquement une hausse du taux de distribution. Cela explique pourquoi, certaines entreprises arrivent à des taux de distribution très élevés certaines années (comme Engie, Saint-Gobain, Carrefour, etc.)</p>
<p>Par ailleurs, pour un investisseur, le rendement se calcule en rapportant le dividende à la valeur de l’action, c’est-à-dire du capital investi. En moyenne, ce ratio est de 3 % pour les entreprises du CAC 40 (cf. M. Albouy, <a href="https://bit.ly/2AdBySh">Décisions financières et création de valeur</a>, 3<sup>e</sup> éd. <em>Economica</em>, 2017).</p>
<p>Ce chiffre, relativement stable dans le temps, relativise fortement l’affirmation d’Oxfam qui pointe « l’exceptionnelle générosité des entreprises françaises envers leurs actionnaires ». À noter qu’un tel ratio de rendement de 3 % est également proche, voire légèrement inférieur, au rendement de l’immobilier (loyer annuel/valeur de l’immeuble). Alors que personne ne conteste le fait que les bailleurs perçoivent des loyers, pourquoi en serait-il différemment pour les actionnaires ?</p>
<h2>2. Les dividendes et les rachats d’action n’enrichissent pas les actionnaires</h2>
<p>Selon Oxfam l’exceptionnelle générosité des entreprises à l’égard de leurs actionnaires contribue à la répartition inégale des richesses. Certes, la répartition des richesses dans le monde est fortement inégale, mais est-ce vraiment la faute aux dividendes ? La réponse à cette question est négative car contrairement à ce que l’on peut croire les <a href="https://bit.ly/2rHDRwV">dividendes et rachats d’action n’enrichissent pas les actionnaires</a>.</p>
<p>Tous ceux qui gèrent un portefeuille d’actions savent bien que lors du détachement du coupon, l’action baisse, toutes choses égales par ailleurs, du montant du dividende. En d’autres termes, c’est l’actionnaire qui finance ses dividendes. Le versement des dividendes a pour conséquence de réduire la trésorerie de l’entreprise et donc sa valeur globale. Comme la valeur des dettes n’est pas impactée par cette distribution, c’est donc la valeur de marché des fonds propres (la capitalisation boursière) qui diminue du montant des dividendes versés.</p>
<p>De même, les rachats d’actions n’enrichissent pas les actionnaires. Une façon simple de le comprendre est de considérer que le rachat d’actions (suivi de l’annulation des titres) est l’opération strictement inverse à l’augmentation de capital en numéraire. Lorsque les actionnaires participent à une augmentation de capital, ils apportent des fonds à l’entreprise et en échange ils reçoivent des actions. Si le rachat d’action enrichissait les actionnaires, il faudrait donc en déduire que les augmentations de capital les appauvrissent ; ce qui n’est bien évidemment pas le cas. Tout dépendra de la plus ou moins bonne utilisation des fonds apportés par les actionnaires.</p>
<p>De même, une entreprise ayant une trésorerie trop abondante et n’ayant pas d’opportunités d’investissement rentables utilisera le rachat d’actions pour rendre le capital à ses actionnaires qui à leur tour pourront le réinvestir dans d’autres entreprises.</p>
<h2>3. On ne peut pas comparer les dividendes versés aux actionnaires à l’intéressement perçu par les salariés</h2>
<p>Selon Oxfam,</p>
<blockquote>
<p>« En 2016, les entreprises du CAC 40 ont reversé près de 15 fois plus de bénéfices à leurs actionnaires (sous forme de dividendes) qu’à leurs salariés (sous forme d’intéressement et de participation). »</p>
</blockquote>
<p>Écrit comme cela, on est sûr de faire les gros titres et d’alimenter la haine des actionnaires qui saignent les travailleurs. Les experts d’Oxfam comparent donc directement les montants de dividendes versés à ceux de la participation des salariés.</p>
<p>Malheureusement cette comparaison n’est pas fondée car le statut de ces sommes n’est pas comparable. En tant que partie prenante de l’entreprise, ce que retirent les salariés ne se limite pas à l’intéressement et à la participation. Il faut tenir compte bien évidemment des salaires versés.</p>
<p>Une comparaison sérieuse entre ce que retirent les actionnaires et les salariés du fonctionnement de l’entreprise devrait donc mettre en regard le montant des dividendes versés et la somme des salaires, de l’intéressement et de la participation.</p>
<p>À titre d’illustration, prenons le cas d’Air Liquide qui a créé par sa croissance de nombreux emplois. En 2016, les charges de personnel se sont élevées à 3 659 millions d’euros et les dividendes versés à 947 millions. On est loin du rapport de 1 à 15 dénoncé par Oxfam. A noter que cette année Air Liquide a fait une augmentation de capital en numéraire de 3 361 millions d’euros pour financer une acquisition importante. Comme quoi les actionnaires ne font pas que recevoir des dividendes mais participent à l’investissement des entreprises via des augmentations de capital. Cet apport des actionnaires est totalement occulté par le rapport d’Oxfam.</p>
<p>Enfin, pour voir la contribution des entreprises à l’égard des salariés, il faudrait tenir compte des emplois crées sur la période d’observation. En effet, dans la conjoncture actuelle c’est bien la création d’emplois et la croissance des masses salariales qui sont importantes pour les salariés. Or, cette dimension est absente du rapport d’Oxfam.</p>
<h2>4. La rémunération des actionnaires doit tenir compte des gains et des pertes en capital et pas seulement des dividendes</h2>
<p>Considérer uniquement les dividendes pour mesurer la rémunération des actionnaires relève d’une grave erreur méthodologique. En effet, les cours des actions varient de façon importante selon les performances des entreprises et les facteurs macro-économiques.</p>
<p>La rentabilité d’un investissement en action est par conséquent issue de la combinaison du dividende et de la variation du cours de bourse. Ainsi une action achetée 100 € et versant un dividende de 3 € génèrera pour l’actionnaire une rentabilité positive (13 %) si son cours est monté à 110 € (augmentation de 10 %) un an après l’achat, mais de négative (-7 %) si le cours est de 90 € un an après l’acquisition (baisse de 10 %).</p>
<p>Or les actions sont des actifs à forte volatilité. Si, sur très long terme, les cours des actions tendent, en moyenne, à augmenter avec la croissance de l’économie, les baisses sont fréquentes. Depuis la création du CAC40 il y a 30 ans, cet indice, qui reflète la variation moyenne des cours des sociétés qui le composent, a connu 10 années de baisse et 20 années de hausse.</p>
<p>Une idée de la volatilité des cours est donnée par la baisse du CAC40 entre son record historique de 6 945 points (4 septembre 2000) et le point bas qui a suivi l’effondrement de la bulle Internet à 2 401 points le 12 mars 2003, soit un effondrement de 65 % en deux ans et demi. Notons qu’à son niveau actuel (environ 5 600 points) le CAC 40 est encore très inférieur à son record historique de 2000.</p>
<p>Ainsi, plutôt que de communiquer avec des slogans simplificateurs, tels que « Les actionnaires rois », Oxfam devrait préciser que l’investissement en actions présente des risques (il s’agit d’ailleurs de l’un des placements les plus risqués) et que sa rémunération ne doit pas être mesurée seulement par les dividendes.</p>
<h2>5. La politique d’investissement ne peut être appréciée par la part du bénéfice réinvesti mais par l’étude des tableaux de financement</h2>
<p>Selon Oxfam,</p>
<blockquote>
<p>« [La] primauté donnée à la rémunération des actionnaires a pour corollaire une baisse significative de l’investissement. »</p>
</blockquote>
<p>Cette affirmation, qui semble marquée au coin du bon sens, mais qui n’est ni démontrée ni étayée dans le rapport, nous semble fausse pour au moins deux raisons (la seconde est développée au point 6). En effet, la seule façon de comprendre la politique financière d’une entreprise est d’analyser sur le long terme ses tableaux de flux de trésorerie (ou tableaux de financement). Cet état financier rend compte des principaux flux de trésorerie générés ou consommés par une entreprise : flux relatifs à l’activité (autofinancement), aux investissements et aux financements externes.</p>
<p>Une entreprise mature et rentable (qui plus est lorsqu’elle fait partie des leaders mondiaux sur son marché, comme c’est le cas de la plupart des entreprises du CAC 40) génère, sauf accident, des flux d’activité positifs élevés. Elle peut également augmenter sa dette et avoir recours, parfois, à des augmentations de capital, c’est une des fonctions des marchés financiers.</p>
<p>L’ensemble de ces ressources financières est consacré pour l’essentiel à trois types d’emplois : l’investissement (de loin le plus important en général), le désendettement et la distribution de dividendes.</p>
<p>Il est donc logique qu’une entreprise rentable puisse à la fois investir pour préparer l’avenir, en fonction des opportunités qui s’offrent à elle, et distribuer des dividendes. Toute personne connaissant les entreprises peut constater que ce sont en général les opportunités d’investissement qui priment pour les dirigeants, car ils souhaitent développer leur entreprise. Selon les ressources disponibles et les fonds requis pour investir, ils sont à même de financer les investissements en utilisant tout ou partie de l’autofinancement complété, pour les investissements les plus importants, par une combinaison d’augmentation de capital et/ou d’endettement, tout en maintenant des distributions de dividendes. L’équation « plus de dividendes = moins d’investissements » est donc extrêmement simplificatrice et ne correspond pas à la réalité.</p>
<h2>6. La politique de dividende n’est pas l’ennemie de l’investissement et de la croissance des entreprises, ni de la responsabilité sociale et environnementale</h2>
<p>Une simple observation à long terme de la politique financière et des performances des entreprises permet d’illustrer que le versement de dividendes n’est pas de façon mécanique l’ennemi de l’investissement et de la croissance, ni même l’ennemi d’excellentes performances en termes de responsabilité sociale. Certes, il peut arriver qu’une politique financière court-termiste ou excessivement risquée conduise à un sous-investissement, voire à la faillite. Mais il s’agit d’exceptions, pas du tout d’une règle générale.</p>
<p>Peut-on sérieusement soutenir que des entreprises comme Air Liquide, Essilor, L’Oréal, Schneider Electric ou Total, qui versent des dividendes en croissance régulière à leurs actionnaires depuis des années, souffrent de sous-investissement ?</p>
<p>Si c’était le cas, comment expliquer qu’elles font partie des leaders mondiaux sur des marchés extrêmement concurrentiels, que leurs effectifs salariés s’accroissent ainsi que leurs chiffres d’affaires et leurs résultats, et qu’elles réalisent des investissements et des acquisitions majeures (acquisition d’Airgas par Air Liquide, fusion entre Essilor et Luxottica).</p>
<p>Enfin on peut remarquer que les entreprises du CAC 40, vilipendées par Oxfam pour leur court-termisme, accumulent les premières places en termes de responsabilité sociale et environnementale, comme le remarque Xavier Fontanet dans une chronique récente (<a href="https://bit.ly/2GAqDok"><em>Les Echos</em>, 17 mai 2018</a>). L’Oréal est le numéro un mondial du Green Ranking Global 500 de <em>Newsweek</em>, suivi de près par Schneider Electric. Essilor a reçu le premier prix du Sustainable Business Awards des Nations unies.</p>
<h2>7. Les dividendes et les rachats d’actions sont réinvestis dans l’économie et souvent dans les entreprises</h2>
<p>Le rapport d’Oxfam est focalisé sur les sociétés du CAC 40, qui sont de très grandes entreprises et qui distribuent, pour la plupart, des dividendes. Parmi ces entreprises nombreuses sont celles (comme dernièrement Total ou Danone) qui offrent la possibilité de recevoir des actions nouvelles au lieu de cash. Ce sont du reste souvent celles qui sont les plus généreuses avec leurs actionnaires en matière de dividendes. Ces opérations de paiement du dividende en action permettent un renforcement des fonds propres des entreprises.</p>
<p>Mais de très nombreuses entreprises cotées en bourse, plus jeunes ou plus petites, ainsi que la majorité des sociétés non cotées ne distribuent pas de dividendes. C’est en particulier le cas des entreprises en forte croissance et des startups. Ces entreprises ont pour caractéristiques d’avoir de fortes opportunités de croissance et des besoins élevés d’investissement, mais de souffrir d’un manque d’autofinancement du fait d’une rentabilité insuffisante ou négative (startups).</p>
<p>Comme le souligne le rapport d’Oxfam, les actifs financiers sont essentiellement détenus par les Français les plus riches (on peut d’ailleurs le déplorer !). On peut donc penser que l’essentiel des dividendes perçus ne se traduisent pas par un accroissement de la consommation de la part de ces ménages, mais sont plutôt réinvestis dans d’autres actifs, notamment financiers : actions cotées, actions non cotées (PME ou startups), obligations…</p>
<p>Par exemple, les <em>business angels</em> sont en majorité des créateurs, actionnaires ou dirigeants d’entreprises qui investissent une partie de leur patrimoine dans des sociétés non cotées. Les dividendes jouent donc, par le biais des marchés financiers, un rôle essentiel de réallocation des ressources entre les sociétés qui produisent des excédents de trésorerie (les plus grandes et les plus rentables) et les autres, qui ont besoin de lever des capitaux pour croître.</p>
<p>Ainsi, loin d’être un mécanisme qui enrichirait les actionnaires (point 2) et nuirait à l’investissement (point 6), les dividendes doivent plutôt être analysés comme un mécanisme vertueux de réallocation des bénéfices entre entreprises, via les marchés financiers.</p>
<p>Au total, la principale faiblesse méthodologique du rapport Oxfam est de se focaliser sur la seule répartition des profits des entreprises pour apprécier les politiques de rémunération des actionnaires et des salariés ainsi que celles de financement et d’investissement des entreprises.</p>
<p>Ces dernières ne peuvent se résumer à la part du résultat net non distribué et sont beaucoup plus complexes. Les entreprises cotées ne vivent pas en circuit fermé, celui de leur autofinancement, mais en relation avec les marchés financiers et les investisseurs. Les politiques de dividendes et de rachats d’actions ne nuisent pas à l’investissement et à la croissance et doivent être analysées dans cette perspective et dans une vision de réallocation globale des ressources dans l’économie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/96902/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Bonnet est membre du réseau de business angels Savoie Mont-Blanc Angels</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Michel Albouy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les dividendes doivent plutôt être analysés comme un mécanisme vertueux de réallocation des bénéfices entre entreprises, via les marchés financiers.Michel Albouy, Professeur senior de finance, Grenoble École de Management (GEM)Christophe Bonnet, Professeur de finance, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/966912018-05-16T21:00:49Z2018-05-16T21:00:49ZRapport d’Oxfam : donne-t-on vraiment trop aux actionnaires du CAC 40 ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/219218/original/file-20180516-155594-19fhbl4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C149%2C4529%2C2325&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le quartier de la Défense à Paris héberge plusieurs entreprises du CAC 40.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/la-defense-financial-district-paris-france-460013245?src=YhAB-cv2fF9v3ux4VFKw8Q-1-2">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Lundi 14 mai, l’ONG <a href="http://www.oxfamfrance.org/">Oxfam France</a> et la SCIC <a href="https://lebasic.com/">Basic</a> (Bureau d’analyse sociétale pour une information citoyenne) ont publié conjointement un rapport intitulé <a href="http://www.oxfamfrance.org/rapports/justice-fiscale/cac-40-des-profits-sans-partage">« CAC&NBSP;40 : Des profits sans partage, comment les grandes entreprises françaises alimentent la spirale des inégalités »</a>. Largement commenté, il n’est pas exempt de faiblesses. Décryptage critique d’un rapport aux interprétations discutables.</p>
<h2>Un biais culturel ?</h2>
<p>Immédiatement après sa publication, le rapport d’Oxfam a reçu un écho médiatique important. Plusieurs quotidiens nationaux ont consacré leur une à ses conclusions : « Les actionnaires, enfants de plus en plus gâtés du CAC 40 » (Le Monde), « CAC 40. Toujours plus pour les actionnaires » (Libération).</p>
<p>Dans un débat d’éditorialistes sur RTL, même le très droitier Yvan Riouffol (Le Figaro) se disait sans voix pour défendre l’indéfendable. Seuls quelques journalistes spécialisés, généralement classés dans le camp des libéraux, comme François Lenglet (France 2) ou Dominique Seux (Les Échos), ont tenté de faire entendre une voix dissonante et de souligner certains biais du rapport.</p>
<p>Il faut dire que le statut d’ONG « indépendante » vaut, dans de nombreux domaines, garantie d’objectivité dans l’opinion publique. Dans le cadre d’un habile plan de communication, elles sont quelques-unes à avoir installé leur rapport annuel comme des références incontournables, à l’instar du rapport de la Cour des comptes. Il suffit de lui donner, par quelques tableaux et références, les apparences d’une étude scientifique pour que les résultats soient parfois pris pour argent comptant, sans recul critique. Il ne s’agit pas ici de nier qu’Oxfam ait fait, pour quarante entreprises du CAC 40, un réel travail de collectes de données à partir de leurs rapports annuels. Mais il est nécessaire de montrer que la méthodologie et les interprétations sont très contestables.</p>
<p>D’ailleurs, si nous étions dans un pays où les profits financiers n’étaient pas perçus comme indécents, le rapport d’Oxfam pourrait être considéré comme un panégyrique des dirigeants du CAC 40, en soulignant à quel point ils ont bien rémunéré leurs actionnaires… Du coup, un autre résultat du rapport, l’explosion de leurs revenus, deviendrait légitime : des dirigeants qui servent si bien leurs actionnaires méritent en effet, dans la logique capitaliste, récompense !</p>
<p>Mais qu’en est-il vraiment ? Les actionnaires, petits ou gros, sont-ils si bien traités ?</p>
<h2>La « loi des trois tiers » est plus que respectée</h2>
<p>Oxfam s’appuie sur une seule donnée, la part des bénéfices consacrés à la distribution des dividendes entre 2009 et 2016. Passons sur le fait que le pourcentage global soit parfaitement stable aux deux dates (67 %), ce qui n’est pas commenté. Ce chiffre serait déjà beaucoup trop élevé selon Oxfam, car cette distribution des dividendes se ferait aux dépens du « réinvestissement » (27,3 %) ou des « primes pour les salariés » (5,3 %). L’ancien président Sarkozy est même convoqué par de nombreux commentateurs pour rappeler que la loi des trois tiers (un tiers pour l’investissement, un tiers pour les salariés, un tiers pour les actionnaires), <a href="http://www.lemonde.fr/economie/article/2018/05/14/profits-du-cac-40-la-priorite-aux-actionnaires-de-plus-en-plus-contestee_5298422_3234.html">qu’il avait défendue</a>, ne serait pas respectée.</p>
<p>C’est oublier que les investissements d’une entreprise ne se réduisent heureusement pas au réinvestissement sur les bénéfices. L’essentiel des investissements se font en amont et viennent justement d’autant, à court terme, réduire les bénéfices. Prenons le cas d’une entreprise particulièrement épinglée par Oxfam, Engie. Pour l’exercice 2016, si elle a distribué 2,4 milliards à ses actionnaires, elle affiche 7,6 milliards d’investissements bruts, dont 3,6 d’investissements de développement.</p>
<p>Quant aux salariés, Oxfam rappelle, juste en passant, qu’ils n’ont heureusement pas vocation à ne toucher que des revenus de participations et d’intéressements, par définition irréguliers, mais qu’ils sont d’abord et surtout rémunérés par les salaires versés, dont le montant n’est jamais rappelé pour le comparer à la rémunération des actionnaires. Pour Engie, les « charges de personnel » pour l’ensemble du groupe s’élèvent ainsi à 10,2 milliards. Qu’on se rassure, la « loi Sarkozy » est donc plus que respectée au profit des salariés et des investissements.</p>
<h2>Une distribution de dividendes pas si exceptionnelle</h2>
<p>Oxfam présente comme parfaitement irrationnel le fait qu’un certain nombre d’entreprises distribuent des dividendes très largement supérieurs aux bénéfices réalisés, jusqu’à 1 721 % pour ArcelorMittal en 2009 et 1 488 % pour Engie en 2016 ! Exprimé en pourcentage, le résultat paraît astronomique, mais cela veut juste dire que l’entreprise a continué de verser son dividende habituel une année où les bénéfices étaient exceptionnellement faibles. Lissé sur les huit années, le pourcentage devient beaucoup plus raisonnable, seules deux entreprises dépassant 100 %, Engie (333 %) et Veolia (112 %). Un dividende peut en effet être supérieur aux bénéfices annuels dans la mesure où il est peut-être prélevé sur les réserves.</p>
<p>Ainsi, pour Engie, si en 2016, le dividende représente effectivement 1 721 % du résultat net de la maison mère, Oxfam omet de préciser que celui de 2015, d’un même montant, n’en représentait que 47 %. Cette année-là, elle avait simplement préféré ne pas augmenter son dividende pour mettre plus de la moitié de ses bénéfices en réserves, ce qui lui a permis de maintenir sa distribution habituelle l’année suivante, malgré une chute des résultats. Par ailleurs, en 2016, Engie a vu son équipe dirigeante changer : Isabelle Kocher, nouvelle directrice générale du groupe, est arrivée en avril 2016. Or dans ce genre de situation, il est coutumier de ne pas afficher des résultats élevés, ce qui permet l’année suivante d’annoncer une amélioration… En 2017, année non prise en compte dans l’étude d’Oxfam, le pourcentage revient à 107 %, soit un quasi-équilibre entre dividendes et bénéfices. Oxfam oublie que le résultat affiché présente un caractère arbitraire, selon le montant, plus ou moins important, des provisions réalisées chaque année. D’une façon générale, les entreprises privilégient le versement d’un dividende régulier à leurs actionnaires.</p>
<h2>Le montant des dividendes ne reflète pas l’état du capital</h2>
<p>Plus gênant, pour évoquer les revenus des actionnaires, Oxfam omet de préciser que les dividendes ne s’entendent pas, comme les intérêts d’un compte sur livret, sur un portefeuille fixe, mais sur des actions dont le cours est fluctuant. Conséquence : un actionnaire peut gagner de l’argent avec les dividendes mais en perdre sur le capital.</p>
<p>Regardons, pour trois des entreprises les plus épinglées par Oxfam, le sort d’un modeste actionnaire qui aurait, au début de la période étudiée, placé ses économies dans une centaine d’actions. Au début 2009, il lui en aurait coûté respectivement chez ArcelorMittal, Engie et Veolia quelque 3 900, 3 500 et 2 250 euros. Mauvaise surprise, fin 2016, son capital ne serait plus que de 2 100, 1 200 et 1 600 euros. Et encore, cela pourrait être pire : au début 2009, on est à des cours bien plus bas qu’au sommet d’avant la crise de 2008.</p>
<p>Heureusement, entre-temps, selon Oxfam, il a été gavé de dividendes… Sauf que la somme de ceux-ci dans la même période ne représente que 286, 1 147 et 675 euros. Le bilan avant impôts (écart du cours boursier + dividendes reçus) est donc de –1 514 euros pour ArcelorMittal et de –1 153 euros pour Engie : l’actionnaire a perdu un tiers de sa mise. Il n’y a que pour Veolia que les dividendes parviennent tout juste à compenser la baisse des cours, pour ne laisser qu’un gain dérisoire de 25 euros.</p>
<p>Si l’on raisonne seulement sur la moitié de la période, avec un même achat effectué plus prudemment au début 2013, alors que les cours sont plus bas (prix respectif de 2 800, 1 600 et 900 euros), le bilan est à peine plus favorable. La perte est réduite à 660 euros pour Arcelor, tandis que le gain est très faible pour Engie (50 euros). Seule Veolia se révèle une très bonne affaire avec un gain supérieur à la mise (993 euros), qui repose à 70 % sur la hausse des cours.</p>
<p>Oxfam feint donc d’oublier qu’acheter des actions reste un investissement à risque et que les dividendes doivent souvent être d’autant plus copieux lorsque les cours sont en baisse. Ce qui n’est pas toujours suffisant pour compenser la perte pour les actionnaires. Investir en bourse peut certes permettre de gagner beaucoup d’argent, mais cela peut aussi faire fondre le capital de départ. Pour un épargnant prudent, un compte d’épargne ou même une assurance vie reste un placement plus sûr. Certes, on dira que les spéculateurs habiles, qui savent investir au bon moment, s’en sortent mieux. Mais même eux ne gagnent pas à tous les coups.</p>
<p>En définitive, il est paradoxal de constater que les entreprises les plus fortement épinglées par Oxfam sont plutôt celles qui ont le plus mal servi leurs actionnaires… D’autant plus que d’autres questions se posent avec acuité, telle que celle, plus globale, de la justice sociale, ou celle, clivante, des revenus des dirigeants, qui peuvent paraître indécents… Mais ceci est une autre histoire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/96691/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hervé Joly ne possède malheureusement aucune action d'une entreprise du CAC 40 ni d'une autre entreprise.</span></em></p>Le dernier rapport d’Oxfam France accuse les grandes entreprises du CAC 40 de creuser les inégalités au profit de leurs actionnaires. Et si les choses étaient moins simples qu’il n’y paraît ?Hervé Joly, Directeur de recherche histoire contemporaine, CNRS, Laboratoire Triangle, Université de Lyon, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.