tag:theconversation.com,2011:/ca-fr/topics/energie-21195/articlesénergie – La Conversation2024-03-21T09:06:45Ztag:theconversation.com,2011:article/2238752024-03-21T09:06:45Z2024-03-21T09:06:45ZGéothermie et transports, un potentiel inexploité ? L’exemple du métro de Rennes<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/582153/original/file-20240315-18-xaqu1i.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un ouvrier équipe en tubes échangeurs thermiques les parois en béton lors de la construction du métro de Rennes.</span> <span class="attribution"><span class="source">Aquassys / JF Gobichon</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Et si l’on profitait de la chaleur du sous-sol dans le métro pour chauffer des logements par géothermie ? C’est ce que fait la métropole de Rennes : lors de la construction de la ligne B du métro, celle-ci a décidé d’équiper d’échangeurs géothermiques les parois moulées et radiers (les plates-formes maçonnées qui supportent les infrastructures) des stations Sainte-Anne, Jules Ferry, Saint-Germain et Cleunay.</p>
<p>Une première en France – et même au monde, au vu de la surface équipée – qui permet aujourd’hui de chauffer <a href="https://www.francebleu.fr/infos/transports/rennes-la-ligne-b-du-metro-chauffe-112-logements-2981422">112 logements et 1 000 mètres carrés de bureau</a>. Le potentiel des échangeurs déjà en place permettrait même d’en chauffer davantage.</p>
<p>Cette solution avantageuse tant au plan économique qu’environnemental reste pourtant, aujourd’hui encore, sous-exploitée. Des retours d’expérience tels que celui de la métropole de Rennes seront donc précieux pour ouvrir la voie.</p>
<p>Car l’exemple du métro de la capitale bretonne montre que les obstacles ne sont pas tant techniques qu’organisationnels, avec des pratiques à faire évoluer, et surtout des collectivités territoriales à convaincre et impliquer en amont des grands projets de génie civil.</p>
<h2>Géostructures énergétiques, mode d’emploi</h2>
<p>Commençons par rappeler ce qu’est la <a href="https://theconversation.com/il-existe-plusieurs-types-de-geothermie-comment-marchent-ils-et-quels-sont-les-risques-153923">« géothermie »</a>. Les amateurs de vin le savent, la température d’une cave varie peu au cours de l’année. La géothermie consiste donc à tirer parti de la température du sous-sol, moins sujette aux variations qu’en surface, pour échanger de la chaleur et chauffer – ou refroidir – nos bâtiments.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-geothermie-enjeu-majeur-pour-la-neutralite-carbone-des-zones-urbaines-207994">La géothermie, enjeu majeur pour la neutralité carbone des zones urbaines</a>
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<p>Les géostructures énergétiques – aussi appelées thermoactives – font ainsi partie de la grande famille des dispositifs géothermiques dits « de surface », c’est-à-dire installés dans le proche sous-sol, jusqu’à quelques dizaines de mètres de profondeur. Concrètement, ces géostructures sont équipées de pompes à chaleur, qui leur permettent de chauffer – ou <a href="https://theconversation.com/la-geothermie-une-solution-a-la-hausse-des-temperatures-144246">refroidir</a> – les bâtiments avoisinants.</p>
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<p>Le principe consiste à utiliser les fondations de bâtiments ou les ouvrages de génie civil (fondations par pieux, tunnels, stations de métro…) comme <a href="https://www.cfms-sols.org/sites/default/files/recommandations/Recommandations_Geostructures_Thermiques_CFMS_SYNTEC_Version_1_Janvier_2017.pdf">échangeurs géothermiques, en y installant des tubes échangeurs de chaleur au moment de leur construction</a>. Lorsque ce sont les pieux de fondations qui sont équipés, on parle de pieux géothermiques.</p>
<p>Ces éléments nécessaires sur le plan structural se voient alors conférer une seconde fonction énergétique, qui permet de faire l’économie de forages dédiés à la géothermie. Le <a href="https://iris.polito.it/handle/11583/2695393">surcoût associé est très faible</a> par rapport aux bénéfices qui en sont tirés. Cela permet également d’améliorer le bilan carbone de l’ouvrage.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/582154/original/file-20240315-28-i7w9vl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/582154/original/file-20240315-28-i7w9vl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/582154/original/file-20240315-28-i7w9vl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/582154/original/file-20240315-28-i7w9vl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/582154/original/file-20240315-28-i7w9vl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/582154/original/file-20240315-28-i7w9vl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/582154/original/file-20240315-28-i7w9vl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/582154/original/file-20240315-28-i7w9vl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Installation d'échangeurs thermiques sur les radiers du métro à Rennes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Aquasys / JF Gobichon</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1364032122000028">développements scientifiques récents</a> ont également permis de lever la plupart des questions relatives au <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0960148118312588">comportement mécaniques des géostructures énergétiques</a>, notamment lors de fluctuations de température, et <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0886779822005430">confirment leur intérêt en milieu urbain</a>.</p>
<p>Cette technologie est <a href="https://www.icevirtuallibrary.com/doi/abs/10.1680/geot.2006.56.2.81">connue et développée depuis les années 1980</a>. Pourtant, le développement à grande échelle de cette source d’énergie non-intermittente (contrairement au solaire ou à l’éolien par exemple), renouvelable, à faible risque, locale et décarbonée, est encore bien inférieur à son potentiel.</p>
<h2>Le métro, un cas d’usage intéressant</h2>
<p>Dans cette affaire, la métropole de Rennes fait office de pionnière. C’est la première fois qu’une surface aussi vaste est équipée (près de 4000 m<sup>2</sup> de radiers et 3600 m<sup>2</sup> de parois moulés) et que la chaleur produite est destinée à des bâtiments de surface, n’ayant rien à voir avec l’infrastructure du métro en elle-même.</p>
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<span class="caption">Schéma explicatif de la façon dont la chaleur du métro apporte chauffage et eau chaude à des immeubles situés à proximité.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Esther Lann-Binoist</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Pour faire aboutir le projet, la métropole de Rennes a pourtant du surmonter des difficultés. Elles ne sont pas tant d’ordre technique qu’administratif. En effet, malgré leur bonne volonté pour intégrer des sources d’énergie renouvelable locales, les maîtres d’ouvrages d’infrastructures de transports en commun ont souvent du mal à estimer le potentiel des projets, par manque de retour d’expérience.</p>
<p>Dans ces conditions, la réussite de la métropole de Rennes peut-elle ouvrir la voie en démontrant l’intérêt de la technologie et inspirer d’autres collectivités locales ? C’est pour identifier les verrous qui pèsent sur son développement et tirer le maximum d’enseignement de l’expérience rennaise qu’a été monté le projet de recherche <a href="https://sigesbre.brgm.fr/THERMETRENNES-Suivi-et-analyse-du-comportement-energetique.html#nb1">THERMETRENNES</a>, soutenu par l’ADEME.</p>
<p>Il regroupe tous les acteurs de la conception et de l’installation des échangeurs dans les stations : la métropole de Rennes, KEOLIS, EGIS (bureau d’études maitre d’œuvre de la partie géothermie) et AQUASSYS, l’installateur.</p>
<p>A ces acteurs opérationnels sont également associés deux laboratoires de recherche.</p>
<ul>
<li><p>Le LGCGM, de l’université de Rennes, chargé des expérimentations sur la tenue thermomécanique du béton soumis à des cycles thermiques,</p></li>
<li><p>et le 3SR de l’université Grenoble-Alpes, chargé de la <a href="https://matheo.uliege.be/handle/2268.2/17716">modélisation énergétique précise de la station</a>.</p></li>
<li><p>L’ensemble est coordonné par le BRGM, service géologique national, ayant une expertise en géothermie de surface et développement de méthode de dimensionnement des échangeurs géothermiques.</p></li>
</ul>
<p>Concrètement, le terrain autour de la station Cleunay a été équipé en instruments de mesure. Des tests en laboratoire sont également menés, ainsi que des modélisations numériques du transfert thermique. Le projet de recherche vise à apporter aux futurs maîtres d’ouvrages de géostructures des arguments quantitatifs quant à leurs performances énergétiques et thermomécaniques.</p>
<h2>De la construction au contrôle, des freins organisationnels à dépasser</h2>
<p>Le principal frein au développement des géostructures énergétiques réside probablement dans le besoin d’interaction entre les différents acteurs du secteur de la construction.</p>
<p>En effet, dans le cadre d’un projet classique de construction, les bureaux d’études (BE) géotechniques, en charge des fondations, interviennent au tout début du chantier pour le dimensionnement structurel de l’ouvrage. Les bureaux d’études thermiques, en charge du dimensionnement énergétique des mêmes ouvrages ou des bâtiments à la surface, interviennent plus tardivement, voire parfois dans le cadre de projets différents.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/582156/original/file-20240315-30-2wzxb4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/582156/original/file-20240315-30-2wzxb4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/582156/original/file-20240315-30-2wzxb4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/582156/original/file-20240315-30-2wzxb4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/582156/original/file-20240315-30-2wzxb4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/582156/original/file-20240315-30-2wzxb4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/582156/original/file-20240315-30-2wzxb4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/582156/original/file-20240315-30-2wzxb4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Installation des tubes échangeurs thermiques sur le chantier du métro de Rennes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Aquassys / JF Gobichon</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Or, la mise en place de géostructures énergétiques nécessite des échanges poussés entre le BE géotechnique et le BE thermique, en charge chacun dans leur domaine de la définition de ce qui sera réalisé lors de la construction. Elle ne peut donc réussir que si l’architecte et/ou le maître d’ouvrage prévoient explicitement cette phase d’échanges dès le début du projet. Sans cette coordination, le risque serait de voir, par exemple, des tubes échangeurs de chaleur certes installés, mais débouchant trop loin du local réservé à la pompe à chaleur.</p>
<p>Ce qui est vrai pour la phase de conception l’est également pour les phases d’exécution et de mise en service. En effet, des ouvrages tels que les tunnels ou les stations de métro ont très peu de besoins en chauffage ou en refroidissement, mais permettent d’extraire de grandes quantités d’énergie qu’il est alors nécessaire de distribuer ou revendre.</p>
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<p>Il s’agit là d’un rôle inhabituel pour un opérateur de transport, et la réussite d’une telle entreprise repose alors sur les aménageurs. A Rennes, la réussite du projet a largement tenu à la persévérance de la métropole, qui a joué le rôle de coordinatrice au cours des dix années qui se sont écoulées entre les premières études de faisabilité et la mise en service des bâtiments à la surface.</p>
<p>Enfin, la méconnaissance de cette technologie génère de la frilosité chez les contrôleurs techniques. Ces derniers sont chargés d’homologuer les installations, et généralement inquiets que les cycles de chauffage et de refroidissement n’affectent la résistance de l’ouvrage, même si des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0960148118312588">études récentes</a> montrent que ce n’est en général pas le cas. Cette frilosité se propage naturellement aux investisseurs ou aux compagnies d’assurance.</p>
<p>C’est à cet égard que les résultats du projet <a href="https://sigesbre.brgm.fr/THERMETRENNES-Suivi-et-analyse-du-comportement-energetique.html#nb1">ThermetRennes</a> sont attendus avec intérêt. Le projet est en court et devraient se terminer dans le courant de l’année 2026.</p>
<h2>Une technologie qui pourrait aussi équiper tunnels et parkings</h2>
<p>L’objectif du projet est d’obtenir un retour d’expérience complet à même d’éclairer les futurs projets, à la fois concernant le dimensionnement thermomécanique des géostructures et le dimensionnement énergétique des échangeurs pour adapter la production d’énergie à la surface.</p>
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<span class="caption">Les parkings souterrains pourraient, grâce à la géothermie, chauffer des logements.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Lee/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Les domaines d’application ne sont pas limités aux stations de métro. Les résultats du projet de recherche pourraient également se transposer aux tunnels ferroviaires ou routiers, aux fondations profondes de grands bâtiments, ou aux parkings souterrains.</p>
<p><a href="https://pressemitteilungen.pr.uni-halle.de/index.php?modus=pmanzeige&pm_id=5658">Une étude allemande de 2023</a> a ainsi estimé que l’énergie apporté par les parkings souterrains de Berlin aux eaux souterraines permettraient théoriquement de chauffer près de 15 000 logements.</p>
<p>La principale limite actuelle, qui consiste en le besoin d’équiper les bâtiments lors de leur construction, pourrait même être contournée. En 2021, une <a href="https://www.researchgate.net/publication/352982126_Development_and_testing_of_a_novel_geothermal_wall_system">autre étude, italienne</a>, proposait ainsi un système géothermique proche de la surface (d’une profondeur inférieure à cinq mètres) pouvant être installé même sur des bâtiments existants.</p>
<p>Pour un projet collectif usuel, le gain généré par l’utilisation de pieux énergétiques en lieu et place de sondes géothermiques classiques est souvent trop faible en regard des complications organisationnelles que cela représente pendant le chantier.</p>
<p>On peut citer quelques exemples comme la Cité du Design de Saint-Etienne (42), fondée sur une centaine de pieux géothermiques ou la <a href="https://librairie.ademe.fr/energies-renouvelables-reseaux-et-stockage/2137-chauffer-et-rafraichir-avec-une-energie-renouvelable-geothermie-tres-basse-energie.html">Salle pour les Musiques actuelles d’Auxerre</a> (89), fondée sur 24 pieux géothermiques, mais ce développement reste timide. Toutefois, l'équipement de géostructures plus importantes (Métros, parkings souterrains, …) génère un gain substantiel permettant de “rentabiliser” les complications organisationnelles mentionnées.</p>
<h2>Lutter contre l’effet îlot de chaleur urbain</h2>
<p>Ces ouvrages contribuent actuellement aux <a href="https://theconversation.com/pourquoi-les-temperatures-grimpent-elles-en-ville-62786">îlots de chaleur urbains</a> de nos villes en faisant grimper la température du sous-sol. Mais équipés d’échangeurs géothermiques, ils pourraient aider à chauffer d’autre bâtiments et accélérer leur décarbonation.</p>
<p>L’utilisation du <a href="https://www.geothermies.fr/le-geocooling">geocooling</a> ou de pompes à chaleur réversibles, capables de chauffer ou de refroidir en fonction des besoins, permettrait également de réduire la consommation des climatiseurs, et là aussi, l’effet l’îlot de chaleur urbain.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-geothermie-une-solution-a-la-hausse-des-temperatures-144246">La géothermie, une solution à la hausse des températures</a>
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<p>L’urbanisation croissante de nos sociétés ainsi que les impératifs d’adaptation et d’atténuation du réchauffement climatique devraient contribuer au développement d’infrastructures de transport décarboné dans nos métropoles. Dans le même temps, elles rendent cruciale la recherche de sources d’énergie renouvelable.</p>
<p>Dans cette quête, les géostructures énergétiques ne sont pas une solution miracle. L’énergie exploitable ne suffirait pas à couvrir l’ensemble des besoins. Mais elles permettraient de fournir un fond d’énergie <a href="https://www.cairn.info/revue-responsabilite-et-environnement-2019-1-page-25.htm">non intermittente</a>, que les énergies intermittentes viendraient compléter. De plus, elles ne représentent qu’un faible surcoût pour les infrastructures dont elles font partie.</p>
<p>Un développement à large échelle semble donc souhaitable. Mais il ne peut avoir lieu que s’il est porté par des collectivités territoriales motivées, et intégré par toutes leurs parties prenantes en amont des projets de construction et d’aménagement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223875/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean de Sauvage a reçu un financement de l'Agence Nationale de la Recherche pour un projet de recherche dédié aux pieux géothermiques. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Antoine Voirand a reçu un financement de l'ADEME pour le projet THERMETRENNES sur le suivi des stations de métro thermoactives de Rennes. Il a aussi reçu un financement de la région Centre-Val-de-Loire pour un projet de recherche sur le géocooling. </span></em></p>Tirer parti de la stabilité thermique du sous-sol pour chauffer des bâtiments en surface : c’est le principe de la géothermie. À Rennes, une ligne de métro a été équipée. Les retours sont prometteurs.Jean de Sauvage, Chercheur, Université Gustave EiffelAntoine Voirand, Ingénieur Chercheur - Responsable Plateforme Géothermie, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2261592024-03-21T09:06:32Z2024-03-21T09:06:32ZBientôt, de l’énergie géothermique illimitée ? En Islande, le projet fou d’un tunnel creusé dans un volcan<p>Le projet <a href="https://kmt.is/">Krafla Magma Testbed</a> (KMT) a débuté en 2017, mais c’est l’annonce de la première mission de forage à venir en 2026 qui l’a rendu célèbre. Ce n’est pas surprenant, car le tunnel dont la construction est prévue pour accéder à la chambre magmatique du <a href="https://es.wikipedia.org/wiki/Krafla">volcan Krafla</a> est un aspect marquant du projet.</p>
<p>L’intérêt du tunnel est d’obtenir un accès sûr et fiable à la <a href="https://www.ign.es/web/vlc-teoria-general">chambre souterraine où est stocké le magma du volcan</a>. Il sera ainsi possible de prélever des échantillons du magma et de mener des recherches expérimentales. Et cela, avec deux objectifs principaux :</p>
<ul>
<li><p>prévoir les catastrophes volcaniques,</p></li>
<li><p>et explorer de nouveaux moyens plus efficaces d’exploiter l’énergie géothermique.</p></li>
</ul>
<p>Ce premier forage sera suivi d’un autre, prévu en 2028. Les installations de mesure et d’analyse devraient être opérationnelles d’ici 2030.</p>
<h2>L’énergie de la Terre</h2>
<p>La <a href="https://theconversation.com/fr/topics/geothermie-22950">géothermie</a> est l’énergie naturelle stockée à l’intérieur de la Terre. En effet, la température de la croûte terrestre augmente avec la profondeur et l’énergie stockée se manifeste souvent directement par des éruptions volcaniques à la surface. C’est pourquoi des <a href="https://billiken.lat/interesante/cuales-son-los-paises-con-mayor-cantidad-de-volcanes-activos/">pays comme l’Islande et le Japon, où l’activité volcanique est élevée</a>, ont un plus grand potentiel pour exploiter ce type d’énergie.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Il s’agit d’une source d’énergie très polyvalente, car la chaleur peut être utilisée de façon directe (dans les piscines et les spas, dans les systèmes de chauffage urbain, etc.), ou encore être utilisée pour produire de l’électricité.</p>
<p>Les conditions requises pour l’utilisation directe de l’énergie géothermique sont assez simples à remplir, et elle peut être exploitée presque partout sur la planète.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/il-existe-plusieurs-types-de-geothermie-comment-marchent-ils-et-quels-sont-les-risques-153923">Il existe plusieurs types de géothermie – comment marchent-ils, et quels sont les risques ?</a>
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<h2>Gisements géothermiques</h2>
<p>Pour produire de l’électricité avec une source d’énergie géothermique, il est nécessaire d’avoir accès à un <a href="https://www.geosoc.fr/liens-docman/reunions-scientifiques-et-techniques/geothermie-de-nouveaux-developpements/879-nouveaux-developpements-en-geothermie-profonde/file.html">gisement géothermique</a>.</p>
<p>Il est difficile d’en trouver de satisfaisants. Il ne suffit pas qu’ils soient intéressants au plan géologique, il faut aussi qu’il y ait suffisamment de ressources dans la région pour pouvoir les exploiter.</p>
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<p>Les gisements géothermiques peuvent être classés en fonction de leur niveau d’énergie (ou <a href="https://uved.univ-nantes.fr/GRCPB/sequence2/html/chap3_part9_1.html">enthalpie</a>). Ceux qui ont une <a href="https://involcan.org/2925-2/">enthalpie élevée</a> peuvent être utilisés pour produire de l’électricité, comme dans le cas du volcan islandais que l’on veut forer.</p>
<p>Ce type de réservoir atteint des températures de plus de 150 °C, suffisantes pour générer de la vapeur d’eau et enclencher un cycle thermodynamique similaire à celui qui survient dans une centrale thermique ou nucléaire pour actionner une turbine.</p>
<p>Le rendement de ce processus est lié à la température de la source. De sorte que plus la température est élevée, plus la production d’électricité est importante. C’est ce qui intéresse le plus le projet KMT, car la chambre magmatique du volcan Krafla atteint des températures de plus de 900 °C.</p>
<p>Mais il y a une limite : pour exploiter cette source d’énergie, il faut développer de nouveaux matériaux et capteurs capables de résister à des températures aussi extrêmes.</p>
<h2>L’Islande, pays du feu et de la glace</h2>
<p>L’Islande bénéficie d’une situation privilégiée pour le développement de la géothermie. <a href="https://www.visiticeland.com/es/article/energias-renevovables">Plus de 70 % de l’énergie consommée dans le pays est d’origine géothermique</a>.</p>
<p>Les Islandais ont même atteint l’autosuffisance en matière de production d’électricité en combinant plusieurs sources, dont principalement la géothermie et l’hydroélectricité. Leur capitale, Reykjavík, dispose d’un système de chauffage fonctionnant avec de l’eau chauffée par l’énergie géothermique. Une fois utilisée pour chauffer les maisons, elle circule dans les rues pour faire fondre la neige.</p>
<p>Toutefois, la politique adoptée par le gouvernement islandais pour encourager l’utilisation de la géothermie est relativement récente.</p>
<h2>Sortir des énergies fossiles</h2>
<p>Jusqu’au début des années 1970, l’Islande basait sa politique énergétique sur les énergies fossiles. Mais en <a href="https://www.bloomberglinea.com/2023/03/05/islandia-muestra-al-mundo-como-funcionar-con-energia-limpia-y-fiable/">1973, le gouvernement a commencé à élaborer un plan stratégique pour l’utilisation de l’énergie géothermique</a>, à la suite d’une grave crise provoquée par la hausse des prix du pétrole. Depuis lors, l’Islande s’est engagée simultanément sur la voie de l’indépendance énergétique et de la décarbonisation.</p>
<p>Le plan du gouvernement a été articulé en deux phases :</p>
<ul>
<li><p>la première entre 1999 et 2003 pour collecter des données,</p></li>
<li><p>et la seconde entre 2004 et 2009, consacrée à l’étude et à l’évaluation des ressources géothermiques.</p></li>
</ul>
<p>L’année 2009 a marqué un tournant pour la recherche en géothermie, lorsque la chambre magmatique du volcan Krafla a été forée pour la première fois.</p>
<p>Le forage faisait partie d’un projet précurseur du KMT, le <a href="https://www.piensageotermia.com/iceland-deep-drilling-project-un-proyecto-de-ciencia-ficcion/">Iceland Deep Drilling Project</a> (IDDP), bien que le forage de la chambre magmatique du volcan n’avait pas été prévu au départ.</p>
<p>L’IDDP et le KMT témoignent de l’engagement du gouvernement islandais, qui a valu à l’Islande le titre bien mérité de <a href="https://theconversation.com/pourquoi-leruption-volcanique-en-islande-na-rien-dune-surprise-les-explications-dun-geologue-220292">« terre de feu et de glace »</a>.</p>
<h2>La géothermie ailleurs dans le monde</h2>
<p>Le Japon est un autre pays qui bénéficie d’une situation avantageuse pour le développement de la géothermie. Le gouvernement japonais a lancé des projets visant à combiner l’énergie géothermique et l’énergie marémotrice.</p>
<p>L’idée de base est d’utiliser une turbine flottante ou immergée pour capter l’énergie des marées, tout en captant l’énergie géothermique des fonds marins.</p>
<p>Le gouvernement chilien, en plus d’être plongé dans l’exploitation de ses <a href="https://theconversation.com/vehicules-electriques-la-geothermie-future-source-dapprovisionnement-en-lithium-205072">réserves de lithium</a>, utilise la fracturation hydraulique (<em>fracking</em>) pour <a href="https://www.scientificamerican.com/article/fracking-for-renewable-power-geothermal/">réutiliser les anciens puits de pétrole</a> et exploiter les sources d’énergie géothermique.</p>
<p><a href="https://www.igme.es/geotermia/presentacion2.htm">En Espagne</a>, les gisements de haute enthalpie ne sont pas très courants et il y a peu de précédents en termes de projets géothermiques. Cependant, une région d’Espagne pourrait être notre Islande. Il s’agit des <a href="https://www3.gobiernodecanarias.org/ceic/energia/oecan/images/Documentos/Estudios/D5_Estrategia_Geotermia_Canarias.pdf">îles Canaries</a>, qui présentent une activité volcanique récente – rappelez-vous <a href="https://theconversation.com/la-palma-2021-el-ano-del-volcan-174238">l’éruption du volcan La Palma</a> en 2021 – et des ressources géothermiques susceptibles d’être exploitées.</p>
<p>L’<a href="https://www.idae.es/">Institut pour la diversification et les économies d’énergie (en espagnol, Instituto para la Diversificación y Ahorro de la Energía, ou IDAE)</a> a récemment publié une proposition d’aide pour ces projets, avec un budget de 49 millions d’euros.</p>
<p>Creuser un tunnel dans un volcan est un moyen scientifique et rentable d’extraire du sol de l’énergie propre et bon marché dont nous avons besoin. Cette fois, la réalité dépasse la fiction.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/226159/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Javier Sánchez Prieto ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’Islande va creuser un tunnel jusqu’à la chambre souterraine où est stocké le magma d’un volcan. De quoi mieux prévoir les éruptions, et peut-être exploiter l’énergie géothermique du lieu.Javier Sánchez Prieto, Director Académico Máster Universitario en Energías Renovables UNIR, UNIR - Universidad Internacional de La Rioja Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2224252024-02-22T08:35:28Z2024-02-22T08:35:28ZLa méthanisation est-elle vraiment un levier
pour l’agroécologie ?<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/574464/original/file-20240208-26-qytx19.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/574464/original/file-20240208-26-qytx19.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1036&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/574464/original/file-20240208-26-qytx19.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1036&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/574464/original/file-20240208-26-qytx19.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1036&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/574464/original/file-20240208-26-qytx19.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1302&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/574464/original/file-20240208-26-qytx19.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1302&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/574464/original/file-20240208-26-qytx19.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1302&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Couverture de l’ouvrage Idées reçues sur la méthanisation agricoles, paru le 12 octobre 2023.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Le Cavalier Bleu Editions</span></span>
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<p><em>C’est l’un des débouchés industriels de la <a href="https://theconversation.com/dechets-alimentaires-a-quoi-va-servir-le-nouveau-tri-a-la-source-221052">collecte des biodéchets</a> obligatoire depuis le 1er janvier 2024. Ce sont les agriculteurs qui ont été les premiers pionniers de la méthanisation, qui constitue aujourd’hui un enjeu sociétal, à la croisée de l’économie, du social et de l’environnemental.</em></p>
<p><em>L’ouvrage <a href="http://www.lecavalierbleu.com/livre/idees-recues-methanisation-agricole/">« Idées reçues sur la méthanisation agricole »</a>, paru en octobre 2023 au Cavalier Bleu Éditions et dirigé par Aude Dziebowski, Emmanuel Guillon et Philippe Hamman, entreprend de démystifier les idées reçues véhiculées tant par les pro que par les anti méthanisation.</em></p>
<p><em>Nous en reproduisons ci-dessous un chapitre. Malgré son intérêt, la méthanisation agricole ne se résume pas à une « énergie verte » et questionne les évolutions des mondes ruraux dans leur globalité. C’est notamment le cas pour l’agroécologie, où la méthanisation est généralement vue comme levier. La réalité, comme souvent, est plus complexe.</em></p>
<p><em>L’ouvrage a également fait l’objet d’une présentation lors d’une journée d’étude dédiée, dont une captation est <a href="https://www.youtube.com/live/D5PLwpAwKsE?si=x_a7M1vQOrqi3aAy">accessible en ligne</a>.</em></p>
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<p>Les articles scellant l’union de la méthanisation avec l’agroécologie se multiplient dans les médias professionnels agricoles (par exemple <a href="https://www.entraid.com/articles/methanisation-agroecologie-engie">ici</a> ou <a href="https://www.agrosolutions.com/agroecologie-developpement-methanisation/">là</a>), en même temps que le sujet s’immisce dans les canaux grand public <a href="https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/la-terre-au-carre/agroecologie-les-limites-de-la-methanisation-8324437">comme la radio</a> et justifie l’émergence de programmes de recherche dédiés, à l’instar de <a href="https://solagro.org/images/imagesCK/files/methalae_10_pages.pdf">MéthaLAE</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lobligation-de-tri-des-biodechets-va-t-elle-enfin-faire-decoller-la-methanisation-en-france-221272">L’obligation de tri des biodéchets va-t-elle enfin faire décoller la méthanisation en France ?</a>
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<h2>Agroécologie : de quoi parle-t-on ?</h2>
<p>D’importants débats épistémologiques demeurent sur la polysémie de l’agroécologie et les conditions de sa mise en œuvre, a fortiori puisque la notion n’embarque pas les mêmes implications selon l’échelle de gouvernance considérée. Au niveau international, la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) <a href="https://www.fao.org/family-farming/detail/fr/c/1263888/">décrit l’agroécologie comme</a> :</p>
<ul>
<li><p>« une solution qui peut contribuer à transformer les systèmes alimentaires en appliquant les principes écologiques à l’agriculture et en veillant à une utilisation régénérative des ressources naturelles et des services écosystémiques, tout en répondant au besoin de systèmes alimentaires socialement équitables. »</p></li>
<li><p>« L’agroécologie réunit une science, un ensemble de pratiques et un mouvement social : elle se présente maintenant comme un domaine transdisciplinaire qui couvre l’ensemble des dimensions écologique, socio-culturelle, technologique, économique et politique des systèmes alimentaires. »</p></li>
<li><p>« Les pratiques agroécologiques mettent à profit, préservent et améliorent les processus biologiques et écologiques dans la production agricole, afin de réduire l’utilisation d’intrants commerciaux (combustibles fossiles…) et de constituer des écosystèmes agricoles plus diversifiés, plus résilients et plus productifs »</p></li>
</ul>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Tout en concluant qu’« il n’existe pas de limite claire universellement admise quant à ce qui est agroécologique et ce qui ne l’est pas », la FAO précise ce qu’elle considère comme 13 principes agroécologiques : le recyclage, la réduction des intrants, la santé du sol, la santé et le bien-être animal, la biodiversité, les effets de synergie, la diversification économique, la production conjointe de connaissances autochtones et scientifiques, les valeurs sociales, l’équité, la connectivité, la gouvernance des terres et ressources naturelles, et enfin la participation.</p>
<h2>D’abord un cas d’étude pour pays émergents</h2>
<p>En France, la définition proposée par le ministère de l’Agriculture et de la souveraineté alimentaire converge. Pour les deux instances, l’agroécologie consiste aussi, au-delà de l’intensification des systèmes naturels, à l’intégration de nouvelles technologies innovantes… une orientation high-tech bien loin du modèle de développement socio-économique promu à la genèse de l’agroécologie, dès les années 1970.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/une-vraie-souverainete-alimentaire-pour-la-france-220560">Une vraie souveraineté alimentaire pour la France</a>
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<p>En effet, c’est à cette période qu’émergent les premières recherches (par exemple en <a href="https://portals.iucn.org/library/node/21358">France en 1983</a> ou au <a href="https://books.google.fr/books/about/A_Handbook_on_Appropriate_Technology.html?id=ZwYoAAAAMAAJ&redir_esc=y">Canada en 1979</a>) de synergies entre agroécologie et méthanisation. On retrouve plusieurs cas d’études dans les pays en voie de développement, qui sont à la recherche de nouveaux modèles pour s’assurer une autosuffisance alimentaire de qualité et adaptée aux milieux, tout en cherchant à produire leurs propres énergies dans un monde où les pays développés imposent leurs dépendances au pétrole, au charbon et au nucléaire.</p>
<p>À présent, l’agriculteur issu de pays développés s’engage dans cette voie, particulièrement en France. Il se retrouve ainsi au cœur de la transition écologique en cherchant à dégager un équilibre entre ses intérêts économiques et la préservation du milieu naturel.</p>
<h2>Le développement d’une filière européenne</h2>
<p>En Europe, le recours à la méthanisation répond d’abord à la volonté de produire de l’énergie « verte » et, ensuite, de réduire les émissions de gaz à effet de serre, en particulier pour les méthanisations à base d’effluents. L’usage de l’agroécologie convoque d’autres critères, comme la gestion des adventices (mauvaises herbes) sans produits phytosanitaires, le bouclage des cycles de l’azote et du phosphore, ainsi que l’impact sur la biodiversité. Bien qu’important, ce dernier point reste encore mal compris.</p>
<p>Les synergies requièrent inévitablement de l’espace pour se déployer, tout en reposant sur de nouveaux itinéraires techniques qui peuvent modifier les rotations, à l’image de l’introduction des cultures intermédiaires à vocation énergétique (CIVE), des dates de semis et de récolte, ainsi que les traitements phytosanitaires et fertilisations associés. Une modification spatio-temporelle s’observe sur les paysages, qui affecte la disponibilité des ressources pour la faune et la flore (par exemple, types et périodes de couvert, d’alimentation).</p>
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<p>De fait, le vivant s’adapte plus ou moins facilement à ces nouvelles modalités d’exploitation de l’espace au risque d’influencer les dynamiques des populations (par exemple, répartition, attractivité/ répulsion spécifique, risques de mortalité issue de dates précoces de fauche).</p>
<p>Au-delà de l’aspect écologique, trois opportunités de compétitivité apparaissent, qui instaurent un nouvel équilibre en matière de création de profits, de rentes et de filières face aux pressions exercées par les filières puissantes et stabilisées, comme les coopératives dominantes multinationales financiarisées.</p>
<p>– Premièrement, comme l’a démontré le <a href="https://shs.hal.science/halshs-02886217/document">projet de recherche Métha’Revenus</a>, la production énergétique accorde un complément de revenu et un gain d’autonomie à l’agriculteur. Avec la cogénération, il obtient en plus de la chaleur qui lui permet de sécher sa biomasse à faible coût sur son exploitation (exemple des céréales).</p>
<p>– Deuxièmement, les économies d’intrant se perçoivent aussi en récupérant du digestat (soit la matière obtenue après digestion anaérobie dans un méthaniseur). Les rendements sont améliorés de 20 à 25 % sur les cultures en agriculture biologique (AB) (céréales, prairies), ainsi que la fertilité des sols (davantage de vers de terre et de matières organiques). Elles permettent d’assurer la transition vers l’AB, dont l’objectif est d’atteindre les 25 % de surface agricole si l’on se réfère à la stratégie européenne Farm to Fork. Cependant, son usage se heurte au potentiel de fertilisation en azote et en phosphore qui peut limiter fortement les rendements des sols.</p>
<p>– Troisièmement, les certifications environnementales qui se rattachent à ces initiatives constituent une nouvelle forme de segmentation du marché permettant de capter de nouvelles sources de profit et de gagner en indépendance financière. Il conviendra tout de même de rester prudent car tous ces avantages peuvent inciter à l’intensification de l’agroécologie et engendrer des effets pervers.</p>
<p>Pour bénéficier de ces opportunités, l’agriculteur se doit de complexifier considérablement la gestion de son exploitation <a href="https://www.cairn.info/l-agriculture-francaise-une-diva-a-reveiller--9782759222391.htm">à partir de nouvelles compétences </a> : l’expérimentation et l’apprentissage, individuels ou « de paysans à paysans », deviennent des <a href="https://www.cairn.info/revue-pour-2018-2-page-193.htm">facteurs clés de réussite</a>.</p>
<p>Ils permettent une résilience singulière de chaque exploitation, qui devient plus agile pour faire face aux anticipations et répondre aux pressions systémiques subies. Cela n’est possible que grâce à une réorganisation du travail de l’agriculteur qui aspire à une meilleure qualité de vie. Certes, mais à quel prix ?</p>
<h2>Une méthanisation chronophage</h2>
<p>Deux craintes omniprésentes dans la culture agricole peuvent s’objectiver avec la mise en œuvre et le suivi d’un projet de méthanisation agricole individuel : le coût et la disponibilité de la main d’œuvre, et la difficulté à se libérer du temps. Si elle peut permettre de gagner du temps sur la conduite de certaines activités (par exemple, la manutention du fumier et du lisier), voire même alléger considérablement la charge de travail des agriculteurs insérés dans des projets collectifs, la méthanisation peut au contraire se révéler chronophage dans le cas de projets individuels, a fortiori s’agissant des éleveurs, puisque sa mise en œuvre exige une vigilance et une disponibilité de tous les instants.</p>
<p>Pris en étau entre la gestion de leur ferme et la maintenance de leur unité de méthanisation, il n’est pas rare que les agriculteurs doivent engager un nouveau salarié à plein temps, dans une dynamique de supervision constante ; ici, la mobilisation du temps de gestion peut être conséquente, alors que certains des bénéfices attendus n’arriveront qu’à moyen/long terme. Cette forme d’agriculture articulée autour des compétences des agriculteurs est <a href="https://www.cairn.info/revue-projet-2013-4-page-76.htm">« intensive en main d’œuvre »</a> : encore faut-il trouver du personnel qui soit à la fois formé et compétent en matière de méthanisation, un obstacle couramment rencontré dans l’activité agricole.</p>
<p>D’où la nécessité d’apprendre également à s’organiser et travailler en collectif afin d’avoir accès à certaines ressources cruciales, parmi lesquelles l’insertion dans des réseaux d’agriculteurs pour la circulation de connaissances et l’accompagnement rigoureux d’interlocuteurs qualifiés – on pense à la création d’un <a href="https://www.cairn.info/revue-economie-rurale-2018-2-page-73.htm">réseau national de fermes de référence avec l’Association des méthaniseurs de France</a>.</p>
<p>En résumé, ce nouveau modèle de développement se heurte à celui, dominant, qui souhaite conserver ses propres standards en matière de financement, d’assurance, de taille critique acceptable selon le droit de l’environnement. Les enjeux en matière d’innovation sont importants. L’alliance méthanisation et agroécologie, reposant sur des techniques d’expérimentation singulières, de partage d’information communautaire et des innovations sur mesure – incluant high- et low-tech –, se confronte aux institutions financières et juridiques qui prônent la standardisation.</p>
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<figcaption><span class="caption">Une approche sociologique de la méthanisation agricole (Aude Dziebowski/Youtube, 2023)</span></figcaption>
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<h2>De l’agriculture à l’énergiculture</h2>
<p>Il existe cependant un large spectre de profils d’agriculteurs qui évoluent entre deux paradigmes opposés, des modèles alternatifs – non productivistes – jusqu’au modèle d’énergiculture. Dès lors, certains modèles privilégiés en France sont là pour contribuer à la transition énergétique, mais non forcément écologique.</p>
<p>Dans de telles conditions, ceux souhaitant profiter de ces synergies sont à l’heure actuelle en minorité et leurs faibles revenus <a href="https://www.cairn.info/revue-projet-2013-4-page-76.htm">les rendent inaudibles</a> pour ces institutions. Se pose alors la question de l’intervention des politiques publiques pour contrer cette vision monolithique de la transition.</p>
<p>En effet, le tandem méthanisation-agroécologie porte à la fois des enjeux identitaires, culturels et de territorialité, interrogeant la sphère démocratique. Ce faisant, il s’agit de penser de nouvelles structures de gouvernance décentralisées laissant une place de choix à chacun dans la réappropriation des outils techniques et dans la prise de décision collective en matière de « bonnes trajectoires » de gestion des ressources.</p>
<p>Un cadre multiscalaire permettrait à l’agriculteur de restaurer son image professionnelle et sa relation à la société civile par le biais de son engagement dans la transition écologique.</p>
<h2>Le risque de contestation locale</h2>
<p>Pour autant, son intégration à échelle micro-locale peut s’avérer à double tranchant : cette visibilité renouvelée peut, dans le cas où son projet de méthanisation devient un <a href="https://www.cairn.info/revue-economie-rurale-2022-3-page-21.htm">objet de politisation contestataire locale</a>, l’exposer à de vives critiques au sein du tissu territorial de proximité, entraîner sa mise au ban et renforcer une solitude professionnelle, une pression réglementaire et socio-environnementale et une défection populaire <a href="https://hal.science/hal-03449707">déjà largement déplorées au sein du monde agricole</a>.</p>
<p>En butte à l’hostilité de certains de leurs pairs et/ou à la contestation citoyenne puisqu’ils façonnent un paysage des énergies renouvelables déjà en proie à une acceptabilité sociale fragile, les agriculteurs engagés dans la méthanisation courent également un risque social.</p>
<p>Des verrous sociotechniques demeurent, qui nous rappellent l’importance de penser toute l’intrication des différentes échelles de gouvernance des pratiques agroécologiques, de l’exploitation au territoire, sans oublier le rôle prégnant des organismes professionnels agricoles (négoces, coopératives, syndicats agricoles, Chambres d’agriculture) et des systèmes alimentaires et énergétiques.</p>
<p>Devant de telles tensions, on assiste à une montée en puissance du lobbying de la part des agriculteurs minoritaires pour faire face aux décisions politiques : des communautés d’intérêt s’organisent en syndicats et réseaux d’agriculteurs (par exemple, le <a href="https://www.civam.org/civam-oasis/">CIVAM de l’Oasis</a>) de manière à créer leurs propres standards et références, et proposer un encadrement technique conforme aux règles de l’agroécologie autour d’un système d’échange adapté (par exemple, approvisionnement contre digestat) pour pallier la hausse des coûts des coproduits et renforcer l’autonomie.</p>
<p>Finalement, cette réappropriation du pouvoir d’agir permet aux agriculteurs investis dans l’agroécologie de renforcer leur modèle productif, de monter en qualité et de trouver une symbiose entre leur environnement et leur activité économique, facilitant leur conversion à une activité plus intégrée (la méthanisation, l’agriculture biologique, etc.) dans laquelle ils sont autonomes et maîtrisent tous les outils… à l’inverse de l’énergiculteur qui, bien qu’initialement animé par une recherche d’autonomie, devient un prestataire de services.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222425/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La méthanisation agricole ne se résume pas à une « énergie verte ». Parfois vue comme un levier pour l'agroécologie, la réalité est, comme souvent, est plus complexe.Aude Dziebowski, Doctorante en sociologie des mondes ruraux, Université de StrasbourgEmmanuel Guillon, Université de Reims Champagne-Ardenne (URCA)Romain Debref, Maître de conférences, Université de Reims Champagne Ardenne, Université de Reims Champagne-Ardenne (URCA)Yves Leroux, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2228282024-02-19T14:55:29Z2024-02-19T14:55:29ZPeut-on promouvoir le chauffage au bois au nom de l’environnement ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/574117/original/file-20240207-22-10exmi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C3%2C1278%2C820&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption"></span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/bois-industrie-du-bois-for%C3%AAt-5311293/">RitaE/Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>C’est un mode de chauffage qui jouit d’une bonne image : réputé convivial, peu coûteux et bon pour l’environnement, le chauffage au bois a de multiples atouts pour plaire. En 2021, <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/consommation-denergie-par-usage-du-residentiel">plus d’un foyer français sur dix</a> avait choisi le bois comme principale source de chauffage, chiffre qui a sans doute du grimper depuis, du fait de l’augmentation des prix des autres sources d’énergies, couplées aux incitations de sobriété énergétique et aux aides de l’État.</p>
<p>À l’échelle gouvernementale, le chauffage au bois est d’ailleurs présenté comme une piste prometteuse pour répondre à plusieurs objectifs nationaux : augmentation de la part d’énergie renouvelable dans le mix énergétique, réduction de la consommation d’énergie ou encore réduction des émissions de gaz à effet de serre.</p>
<p>Chez les particuliers, ce mode de chauffage est également perçu comme une option à favoriser pour la planète. Dans l’enquête que nous avons réalisée auprès de 1319 individus, le bois était perçu comme l’énergie de chauffage qui générait le moins de dommages à l’environnement, devant l’électricité, le gaz et le fioul.</p>
<p>Mais qu’en est-il vraiment ? N’y-a-t-il pas des risques à percevoir et promouvoir le chauffage au bois comme une source d’énergie ?</p>
<h2>Des chauffages au bois plus ou moins émetteurs de particules fines</h2>
<p>Pourvu qu’il soit issu d’une forêt gérée durablement, le bois de chauffage peut être considéré comme une énergie renouvelable, neutre en carbone, la quantité de CO<sub>2</sub> émise lors de la combustion est équivalente à celle absorbée par les arbres pendant leur croissance. Cette condition n’est malheureusement pas toujours respectée comme le montre par exemple la <a href="https://reporterre.net/Bois-de-chauffage-de-plus-en-plus-de-coupes-illegales">recrudescence de coupes illégales</a> constatée l’hiver dernier en France.</p>
<p>Si l’on exclut cependant ces cas alarmants, le principal inconvénient du chauffage au bois réside dans les émissions de particules fines qu’il génère (PM<sub>2,5</sub> et PM<sub>10</sub>), et l’impact néfaste de celles-ci sur la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1352231009007389">qualité de l’air et sur la santé</a>. Le chauffage au bois est d’ailleurs le premier contributeur de cette pollution en France puisqu’il représente respectivement près de 28 % et 43 % des <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Plan%20d%27action%20chauffage%20au%20bois.pdf">émissions nationales de PM¹⁰ et de PM₂⋅₅</a></p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/574125/original/file-20240207-20-63o3zj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/574125/original/file-20240207-20-63o3zj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/574125/original/file-20240207-20-63o3zj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/574125/original/file-20240207-20-63o3zj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/574125/original/file-20240207-20-63o3zj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/574125/original/file-20240207-20-63o3zj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/574125/original/file-20240207-20-63o3zj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le chauffage au bois, première source de particules fines.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/aerial-view-over-basilique-du-de-668307289">Davit Khutsishvili/Shutterstock</a></span>
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<p>Face à cette réalité, cependant, tous les types de chauffage au bois ne se valent pas. Les cheminées anciennes générations <a href="https://librairie.ademe.fr/air-et-bruit/4045-impact-de-l-usage-d-appareils-domestiques-de-chauffage-au-bois-sur-la-qualite-de-l-air-interieur-cab-qai-1-et-cab-qai-2.html">émettent en effet davantage</a> de particules fines que les chaudières ou poêles à granulés plus récents. Ainsi pour inciter les ménages à remplacer leur vieil appareil par un nouveau plus performant, certaines métropoles ont mis en place des subventions pour l’achat de ces nouveaux appareils (l’aide du Fonds Air Bois par exemple). En plus des bénéfices collectifs sur l’environnement, l’utilisation d’un appareil de chauffage au bois plus performant doit permettre à son utilisateur de réduire sa consommation d’énergie et donc de générer des économies sur sa facture de chauffage.</p>
<p>Le problème de ces aides et plus généralement de toutes les mesures d’efficacité énergétique c’est qu’elles ne sont pas à l’abri d’une réalité qui pourrait compromettre leurs atouts : l’effet rebond.</p>
<h2>L’effet rebond : un mécanisme d’abord économique</h2>
<p>L’effet rebond survient lorsque l’adoption d’une technologie plus performante aboutit à des bénéfices inférieurs aux bénéfices attendus. Généralement, les bénéfices évoqués concernent la réduction de la consommation d’énergie, mais cela peut également s’appliquer sous le même principe pour la réduction d’émission de particules fines. Alors comment expliquer cet effet ?</p>
<p>En devenant plus efficace, la technologie devient également moins chère, ce qui incite les individus à l’utiliser davantage. Ce changement de comportement génère alors une consommation supplémentaire d’énergie, d’avantage de particules fines émises, qui compense une partie des bénéfices qu’il y à d’utiliser cette nouvelle technologie.</p>
<p>L’explication de l’effet rebond par une variation de prix a permis aux économistes de fournir des premières estimations sur l’amplitude de cet effet. Sans détailler la méthode employée, leurs travaux révèlent deux éléments intéressants sur l’effet rebond. Le premier est que l’effet rebond pour le chauffage <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0301421508007131">semble être compris entre 10 et 30 %</a>. Concrètement, cela signifie qu’entre 10 et 30 % des bénéfices liées à l’utilisation d’un chauffage plus performant sont perdus, car les individus se chauffent davantage. Le second élément est que le chauffage n’est pas un cas isolé puisqu’un effet rebond a été estimé pour une majorité de services énergétiques (voiture, éclairage, climatisation, etc.).</p>
<p>L’effet rebond relève finalement d’un comportement assez rationnel : si le prix d’un service diminue, il est logique que les gens l’utilisent davantage. Ce mécanisme économique a longtemps constitué l’unique explication à l’effet rebond. Or aujourd’hui des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0921800917306511">recherches récentes</a> avancent l’idée que des mécanismes, autre qu’économique, peuvent aussi être source d’effet rebond. Parmi eux, des mécanismes psychologiques comme l’effet de compensation morale. Face à cet effet également, le chauffage au bois pourrait ne pas être à l’abri.</p>
<h2>L’effet de compensation morale comme ressort de l’effet rebond</h2>
<p>L’effet de compensation morale décrit le comportement, généralement inconscient, d’un individu qui va compenser une bonne action initiale par une <a href="https://compass.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/j.1751-9004.2010.00263.x">seconde action moins souhaitable</a>. L’exemple souvent cité pour illustrer l’effet de compensation morale est celui du fast-food qu’on s’autorise à manger après avoir accompli une séance de sport intensive. Cet effet peut également advenir dans le domaine de l’environnement, à la suite de <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=2056047">comportement de recyclage</a> ou après <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/0956797610363538">l’achat de produits écologiques</a> par exemple.</p>
<p>L’effet de compensation morale est considéré comme un biais cognitif car il amène un individu à atténuer les bénéfices d’une première action vertueuse par une seconde action qui génère un résultat opposé.</p>
<p>Pour le moment, l’intégration de l’effet de compensation morale à la littérature sur l’effet rebond reste théorique. Aucune étude n’a encore montré que l’investissement dans une technologie plus écologique pouvait déculpabiliser un individu à l’utiliser davantage. Cela s’explique par la difficulté d’isoler un facteur responsable du changement de comportement des individus. Par exemple, si une personne remplace sa vieille chaudière au fioul par une nouvelle chaudière à granulés de bois plus performante et qu’ensuite elle se chauffe davantage, comment savoir si c’est parce que sa nouvelle chaudière lui coûte moins cher à utiliser ou si c’est parce qu’elle a diminué sa culpabilité à l’utiliser ?</p>
<p>Avant de savoir si l’investissement dans un chauffage au bois peut accroître l’utilisation de chauffage, il est donc essentiel de déterminer si cet acte d’investissement satisfait les conditions nécessaires à la manifestation d’un effet de compensation morale. Selon <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/11474723/">Monin et Miller (2001)</a>, pour qu’un premier acte engendre un tel effet, il doit réunir deux conditions : que cet acte soit jugé comme moralement bon par l’individu qui le réalise mais également par la société. Le chauffage en bois semble remplir ces deux critères.</p>
<p>Notre enquête montre que la majeure partie des individus que nous avons interrogés considère non seulement ce mode de chauffage comme vertueux, mais pense que la société dans son ensemble est également de cet avis. Bien que ces deux conditions ne garantissent pas à elles seules l’apparition d’un effet de compensation morale, cela suggère tout de même que cet effet pourrait se produire lorsqu’un individu décide d’investir dans un chauffage au bois. D’autant plus si c’est dans un poêle ou une chaudière à granulés qui sont les systèmes de chauffage au bois perçu par les individus de notre enquête comme étant à la fois ceux générant le moins d’émission de gaz à effet de serre et ayant l’impact le plus faible sur la pollution de l’air.</p>
<h2>Effet rebond et chauffage au bois, quelle conclusion en tirer ?</h2>
<p>Pour conclure, il semble indéniable que cette énergie de chauffage soit sujette à un effet rebond, au moins d’ordre économique. En effet, il est presque certain que si les coûts de chauffage baissent, les individus en profiteront pour davantage se chauffer.</p>
<p>Par rapport à l’effet de compensation morale, notre enquête révèle que le chauffage au bois semble satisfaire les deux conditions susceptibles de le déclencher puisqu’il est perçu individuellement et collectivement comme un chauffage bon pour l’environnement. La présence de cet effet suggère alors un effet rebond supplémentaire qui vient s’ajouter à celui déjà causé par les mécanismes économiques et qui atténue encore plus les bénéfices de se chauffer au bois.</p>
<p>Tout l’enjeu maintenant est d’estimer l’amplitude de l’effet rebond associé au chauffage au bois afin de savoir à quel point les mécanismes économiques et psychologiques atténuent les bénéfices attendus. L’objectif étant in fine d’éclairer les décideurs publics sur l’intérêt ou non de subventionner ce type de chauffage.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222828/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mathex Simon a reçu des financements de l'Agence De l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie (ADEME). </span></em></p>Peu coûteux, renouvelable, le chauffage au bois est de plus en plus plébiscité, et même subventionné. Mais sa généralisation n’est pas sans risque : émissions de particules fines et effets rebond.Mathex Simon, Doctorant en économie de l'environnement et en économie comportementale, CEE-M, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2235162024-02-15T14:11:18Z2024-02-15T14:11:18ZLa filière pétrolière française que tout le monde avait oubliée<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/575419/original/file-20240213-22-zxjsbw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C7%2C1594%2C1048&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Chevalets de pompage de pétrole a Jouy-le-Châtel </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Chevalets_de_pompage_(pumpjack)_-_Puit_de_p%C3%A9trole_%C3%A0_Jouy-le-Ch%C3%A2tel_-_panoramio_(3).jpg?uselang=fr">Paul Fleury</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>L’annonce de huit nouveaux forages dans le bassin d’Arcachon a mis en lumière l’existence d’une filière nationale du pétrole qui produit 1 % de notre consommation. Pourtant, des activités pétrolières et gazières ont été développées en France depuis la Seconde Guerre mondiale. Retour sur une activité industrielle confidentielle.</p>
<h2>Des hydrocarbures pour reconstruire la France</h2>
<p>C’est un fait peu connu mais un des plus vieux sites d’exploitation pétrolière en Europe se situe en France, à Pechelbronn en Alsace, où, dès la Renaissance, le pétrole était extrait du sous-sol, à l’époque surtout pour graisser des outils et produire des remèdes.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/575408/original/file-20240213-22-g1v5sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/575408/original/file-20240213-22-g1v5sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/575408/original/file-20240213-22-g1v5sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/575408/original/file-20240213-22-g1v5sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/575408/original/file-20240213-22-g1v5sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/575408/original/file-20240213-22-g1v5sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/575408/original/file-20240213-22-g1v5sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Carte postale ancienne de l’exploitation de pétrole de Pechelbronn.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://jenikirbyhistory.getarchive.net/media/pechelbronn-xxe-02-be6a4c">Domaine public</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<p>Il faut cependant attendre le XX<sup>e</sup> siècle et le cadre du code minier renouvelé de 1956 pour que l’essentiel de l’activité d’exploration et d’exploitation des hydrocarbures en France soit développé. La Seconde Guerre mondiale a mis en lumière la dépendance française en pétrole et il s’agit pour la France de sécuriser ses approvisionnements dans une filière dominée par les entreprises américaines, anglaises et hollandaises. C’est le <a href="https://www.nss-journal.org/articles/nss/full_html/2021/03/nss210049/nss210049.html">service de conservation des gisements d’hydrocarbures</a> qui organise alors le suivi et le contrôle de l’activité pétrolière sur le territoire mais aussi les activités des sociétés pétrolières françaises à l’étranger notamment dans les colonies africaines. Au-delà de la seule exploitation sur le sol national, la particularité de la filière française est d’avoir su développer une expertise et une industrie parapétrolière sans commune mesure avec les volumes extraits sur le sol national. Les entreprises Schlumberger et Technip par exemple fournissent des outils de prospection, d’ingénierie et de forage.</p>
<p>Le <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/ressources-en-hydrocarbures-france">ministère de la Transition écologique</a> indique que plus de 600 concessions ont été octroyées depuis 1956. Deux zones sont principalement exploitées : les bassins parisien et aquitain. En Seine-et-Marne, le pétrole est découvert en 1958 et plus de 2000 puits sont forés (Chaunoy, Itteville, Villeperdue), produisant un total de 285 millions de barils. En Aquitaine, c’est principalement autour des lacs côtiers que la production se concentre (Cazaux, Sanguinet, Parentis) pour atteindre 220 millions de barils (en comparaison, la France importe environ 300 millions de barils par an aujourd’hui <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-energie-2023/13-petrole">soit 42 millions de tonnes équivalent pétrole</a>). Plus au Sud, dans les Pyrénées-Atlantiques, du gaz est également produit à Lacq et à Meillon, à partir de la fin des années 1960. Depuis lors, ces exploitations ont permis une extraction totale de plus de 300 milliards de m<sup>3</sup> de gaz (soit 31 TWh au total en comparaison d’une consommation nationale annuelle d’une centaine de TWh en 1970 et de <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-energie-2023/14-gaz-naturel">640 TWh en 2022</a>), et de développer une industrie chimique locale. Ces projets font cependant l’objet d’oppositions locales, notamment autour de Lacq dont le <a href="https://journals.openedition.org/histoirepolitique/475">complexe industriel génère d’importantes pollutions</a>, mais qui sont balayées au nom de l’intérêt général. Le monde agricole qui est la première victime ne possède pas les ressources suffisantes pour s’opposer au récit modernisateur dominant durant les « 30 Glorieuses ».</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/575410/original/file-20240213-26-rrfojw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/575410/original/file-20240213-26-rrfojw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/575410/original/file-20240213-26-rrfojw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/575410/original/file-20240213-26-rrfojw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/575410/original/file-20240213-26-rrfojw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/575410/original/file-20240213-26-rrfojw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/575410/original/file-20240213-26-rrfojw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Station de pompage lac de Parentis.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Station_de_pompage_lac_de_Parentis.JPG">Plbcr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Le déclin des gisements et de l’intérêt politique</h2>
<p>Jusque dans les années 1990, l’exploitation pétrolière est opérée par des compagnies publiques comme ERAP-Elf/Elf Aquitaine – qui deviendra Total, et privées comme Esso. Mais les gisements sont en déclin et ces grandes compagnies vont progressivement transférer leurs concessions à de plus petites compagnies qui vont les optimiser. <a href="https://www.vermilionenergy.com/fr/about-us/notre-histoire-en-france/">Vermilion</a> est un bon exemple de ce processus. La compagnie canadienne entre sur le marché français en 1997 en reprenant les actifs d’Exxon, puis de Total en 2012. Elle « réactive » les puits avec succès et permet de relancer la production. La compagnie est aujourd’hui la première productrice de pétrole en France avec plus de 12000 barils par jour.</p>
<p>Malgré tout, le départ des grandes compagnies signe le déclin de l’intérêt politique pour cette filière de l’exploration-production dans un monde de plus en plus globalisé. La réactivation des anciens puits ne relance pas l’exploration. Les services de l’État en charge des permis sont progressivement marginalisés au sein de l’administration tandis que l’agenda de l’Union française de l’industrie pétrolière se déplace vers les enjeux de l’aval (raffinerie/station-service) et que la chambre syndicale voit ses ressources se réduire.</p>
<h2>De l’échec des hydrocarbures non conventionnels à la Loi Hulot</h2>
<p>Une tentative de renouveau se déploie malgré tout dans les années 2000 autour des hydrocarbures non conventionnels comme le <a href="https://theconversation.com/la-guerre-du-gaz-de-schiste-naura-sans-doute-pas-lieu-181535">gaz et le pétrole de schiste</a> qui nécessitent l’emploi de techniques particulières car ils sont emprisonnés dans des réservoirs non conventionnels, peu perméables ou poreux. C’est le cas du forage dévié (déjà mis en œuvre en Aquitaine) et de la fracturation hydraulique (également utilisée pour stimuler les réservoirs en fin de vie). En France, plusieurs <a href="https://basta.media/Permis-d-exploration-les">permis d’exploration</a> sont octroyés entre 2009 et 2010 qui ciblent du gaz de schiste entre le Larzac et la Drôme et du pétrole de schiste en Seine-et-Marne. De nouvelles compagnies apparaissent alors pour faire de l’exploration comme Schuepbach, ce qui irrite les compagnies déjà présentes qui les voient comme des start-up spéculatives qui pourraient mettre en danger leurs activités conventionnelles. <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/en-france-vermilion-produit-un-baril-de-petrole-de-schiste-par-jour.N206077">Vermilion ne soutient pas directement cette vague vers les non conventionnels. Pourtant, c’est la seule compagnie à avoir produit du pétrole de schiste grâce à un test de fracturation hydraulique</a> sur un de ses anciens puits parisiens avant que celle-ci ne soit interdite.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/575417/original/file-20240213-18-4siif1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/575417/original/file-20240213-18-4siif1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=461&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/575417/original/file-20240213-18-4siif1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=461&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/575417/original/file-20240213-18-4siif1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=461&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/575417/original/file-20240213-18-4siif1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=579&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/575417/original/file-20240213-18-4siif1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=579&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/575417/original/file-20240213-18-4siif1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=579&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Gaz_schiste.jpg">Roman Alther</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Mais ces nouveaux permis déclenchent finalement une mobilisation sociale dont le porte-parole José Bové parvient assez rapidement à mettre à l’agenda un problème environnemental. En moins de six mois, les opposants parviennent à obtenir <a href="https://www.cairn.info/l-etat-sous-pression--9782724627657.htm">l’interdiction de la fracturation hydraulique</a> (Loi Jacob, 2011) et les permis ciblant du gaz et du pétrole de schiste sont annulés. Entre-temps, le site de Lacq dans les Pyrénées-Atlantiques est arrivé en fin de vie (un champ gazier ou pétrolier permet en moyenne cinquante ans d’exploitation). L’activité est arrêtée en 2013, et seule une production résiduelle continue à fournir les sites de l’industrie de la chimie qui subsistent à Lacq.</p>
<p>Dans les années qui suivent, les mobilisations continuent notamment autour de l’exploration du gaz de couche en Lorraine par la Française de l’Énergie, jusqu’à ce que la Loi Hulot de 2017 vienne mettre fin à toute utilisation de procédés de stimulation, à la délivrance de nouveaux permis d’exploration et cible la fin des concessions en 2040. La loi a depuis vu ses ambitions limitées, notamment sous les coups de boutoir de la filière organisée autour du député des Pyrénées-Atlantiques <a href="https://www.sudouest.fr/pyrenees-atlantiques/pau/exploitation-petroliere-et-gaziere-les-deputes-bearnais-vainqueurs-contre-le-lobby-ecologiste-2043876.php">David Habib</a> (Parti socialiste puis Parti radical de gauche) qui permet de sauvegarder une production fossile lorsque celle-ci est considérée comme nécessaire au bon fonctionnement d’un site industriel.</p>
<p>Aujourd’hui, ces huit nouveaux puits viennent réactiver, comme le gaz de schiste en son temps, la politisation de cette filière nationale oubliée. Face à la mobilisation de figure emblématique du militantisme environnemental, comme Greta Thunberg, les tentatives de Vermilion pour apparaître comme vertueux en matière de transition, avec par exemple le chauffage de l’éco-quartier de la Teste-de-Buch grâce aux calories récupérées dans les fluides pétroliers, semblent dérisoires.</p>
<p>Mais au-delà de ces gisements de pétrole, la fin des hydrocarbures ne signera pas celle des activités d’extraction de ressources du sous-sol : la start-up française 45-8 Energy prévoit l’extraction d’hélium dans la Nièvre tandis que la Française de l’Énergie cible la production d’hydrogène natif en Lorraine. Les débats sur le sous-sol français ne font que commencer.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223516/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sébastien Chailleux a reçu des financements de l'ANR et de France 2030. </span></em></p>« En France, on n’a pas de pétrole… » assurait une campagne publicitaire du gouvernement en 1976. En fait ce n’est pas tout à fait vrai, même si la production de pétrole française est fort modeste.Sébastien Chailleux, Maître de conférences en science politique, Sciences Po BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2185462023-11-27T17:15:00Z2023-11-27T17:15:00ZComment échapper à la malédiction de la rente fossile ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/561826/original/file-20231127-26-tpyzgi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pour les économies qui en dépendent, les ressources fossiles représentent à la fois une manne financière et une malédiction.</span> <span class="attribution"><span class="source">Unsplash / Robin Sommer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p><em>Dans son ouvrage <a href="https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Hors-serie-Connaissance/Carbone-fossile-carbone-vivant">« Carbone fossile, carbone vivant : vers une nouvelle économie du climat »</a>, paru en octobre 2023 aux éditions Gallimard, l’économiste du climat Christian de Perthuis revisite l’abondance et la rareté. Il nous invite à dépasser le paradigme économique fondé sur l’exploitation d’une nature perçue comme un stock de ressources où l’on puise des matières premières. Les dérèglements environnementaux globaux sont des crises de l’abondance. L’empreinte des activités humaines sur des matières premières trop abondantes dérègle les systèmes de régulation naturelle comme le climat ou la biodiversité.</em></p>
<p><em>À l’occasion de la COP28 sur le climat, qui se tient du 30 novembre au 12 décembre à Dubaï, aux Émirats arabes unis, The Conversation France publie un extrait du chapitre IV consacré aux stratégies de sortie de la dépendance aux énergies fossiles. Le désinvestissement requis est particulièrement lourd pour les économies du G17, les plus dépendantes de la rente énergétique. Dans cet extrait, l’auteur explore les stratégies permettant d’échapper à la malédiction de la rente fossile.</em>_</p>
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<p>Connaissez-vous le G17 ? Probablement pas encore. Il s’agit de l’Afrique du Sud, l’Algérie, l’Arabie saoudite, l’Australie, les Émirats arabes unis, l’Indonésie, l’Irak, l’Iran, le Kazakhstan, le Koweït, la Libye, le Nigeria, la Norvège, le Qatar, la Russie, le Turkménistan, et le Venezuela. C’est le groupe des dix-sept pays les plus dépendants de leurs exportations de carbone fossile en 2021. […]</p>
<p>Regroupant un milliard d’habitants en 2021, le G17 fournit plus des trois quarts de l’énergie fossile transitant par le marché mondial. […] Pour le G17, la transition bas carbone représente un coût exorbitant. Le poids des actifs à retirer du système productif ou à reconvertir est considérable. La rente fossile alimente l’économie via les recettes d’exportation, le budget de l’État, les revenus distribués aux ménages et les prix, souvent bradés, de l’énergie fossile consommée localement. Rester sous l’emprise de la rente fossile est pourtant suicidaire à long terme. […]</p>
<p>Le positionnement des rentiers du fossile face à la transition énergétique est comme un miroir déformant.</p>
<p>Le miroir reflète, de façon amplifiée, une question qui se pose à tous : comment coupler la vague d’investissement dans le bas carbone au désinvestissement massif des énergies fossiles imposé par les objectifs climatiques ? Au cœur de la transition énergétique, ce double mouvement a des impacts bien différents sur les régimes de croissance suivant la structure des économies considérées.</p>
<h2>La malédiction de la rente fossile</h2>
<p>Avec un peu plus de 2,2 Gt de CO<sub>2</sub>, la <a href="https://theconversation.com/le-scepticisme-de-la-russie-vis-a-vis-du-changement-climatique-explique-par-son-histoire-scientifique-142743">Russie</a> a exporté en 2021 l’équivalent de sept fois les émissions territoriales de la France. […] Cette rente fossile est au cœur du fonctionnement de son économie, qui s’écroulerait en cas de brusque disparition. Elle est recyclée pour une partie au bénéfice des oligarques privés, pour une autre par un appareil d’État qui l’a utilisée depuis des lustres pour éteindre par la violence bien des formes de contestation. En février 2022, l’utilisation de la violence a changé d’échelle avec le déclenchement de la guerre d’invasion en Ukraine.</p>
<p>L’économiste n’a pas d’outil pour analyser les dénouements possibles de ce type de situation où peut conduire la malédiction de la rente fossile. Il peut juste constater que le système énergétique russe n’a entamé aucun investissement sérieux dans les équipements et les infrastructures de la transition énergétique. Ses seuls actifs bas carbone se trouvent dans de grands barrages hydrauliques datant de l’ère soviétique et dans la filière nucléaire, également lancée à cette époque, dont <a href="https://theconversation.com/plus-de-trois-decennies-apres-tchernobyl-la-russie-joue-cranement-la-carte-nucleaire-159574">l’opérateur public Rosatom est devenu l’un des leaders mondiaux</a>.</p>
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<p>Toutes les rentes fossiles ne conduisent pas à la guerre, et toutes les économies ne sont pas affectées de façon aussi extrême par la malédiction. Au sein du G17, j’en ai détecté cinq autres qui semblent lourdement touchées.</p>
<p>Les trois cas les plus graves sont l’Iran, le Venezuela et la Libye. Le premier présente d’inquiétantes similitudes avec la Russie : usage croissant de la rente pour réprimer la contestation du régime ; atrophie de l’appareil productif en dehors des secteurs transformant les hydrocarbures ou produisant du matériel militaire ; absence d’investissement dans le bas carbone, à l’exception du nucléaire.</p>
<p>Libye et Venezuela donnent un avant-goût assez dramatique de l’évolution d’une économie rentière brutalement privée de son carburant principal. Examinons le cas du second. Entre 2015 et 2021, la production de pétrole du <a href="https://theconversation.com/cette-crise-de-leau-qui-met-le-venezuela-en-danger-61095">Venezuela</a> a été divisée par quatre et les recettes d’exportation par plus de dix. […]</p>
<p>À un degré qui n’est pas comparable, la malédiction touche également le Nigeria et l’<a href="https://theconversation.com/50-ans-apres-la-nationalisation-du-petrole-algerien-reste-au-coeur-du-conflit-memoriel-156047">Algérie</a>, où la rente est plus utilisée pour éteindre les crises sociales à court terme que pour créer les fondements d’une économie résiliente. Ces deux pays ont également fait face à des situations de violence interne que les moyens fournis par la rente permettent de réprimer avec plus d’efficacité.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-geographie-de-la-malediction-des-ressources-naturelles-vue-du-ciel-bresilien-181903">La géographie de la malédiction des ressources naturelles vue du ciel brésilien</a>
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<p>Au Nigeria, la rente n’a pas été redistribuée au-delà de classes urbaines minoritaires dans la société. Près de la moitié de la population n’avait pas accès à l’électricité en 2020. En Algérie, elle l’a été de façon moins inégalitaire. Mais elle est utilisée pour payer la paix sociale à court terme et n’est guère mobilisée pour diversifier le tissu économique. Elle n’est que marginalement réinvestie dans la ressource solaire dont le pays est pourtant l’un des plus richement dotés au monde, alors que ses réserves de pétrole et de gaz déclinent.</p>
<p>Le tableau est assez négatif, mais il ne concerne qu’un tiers des membres du G17. Chez les 11 autres on discerne des dynamiques, plus ou moins fortes, de réinvestissement de la rente fossile au profit de sources énergétiques décarbonées.</p>
<h2>Les sratégies de sortie de la rente</h2>
<p>La guerre en Ukraine <a href="https://theconversation.com/guerre-en-ukraine-50-ans-apres-un-choc-energetique-de-lampleur-des-chocs-petroliers-178627">a provoqué d’importants mouvements de prix sur les trois énergies fossiles</a>. Celui du gaz s’est envolé en Europe. Le cours mondial du pétrole s’est tendu sans rejoindre les sommets atteints au début de la décennie 2010. Le prix du <a href="https://theconversation.com/vers-la-fin-du-king-coal-quel-avenir-pour-le-charbon-et-lextraction-miniere-151951">charbon</a> a crevé tous ses plafonds historiques sous l’impact d’une reprise non anticipée de la demande de l’Union européenne.</p>
<p>L’inflation des prix de l’énergie a brutalement élargi le montant total de la rente fossile. En l’absence de tarification carbone, cela a gonflé les profits des compagnies extrayant cette rente et élargi les moyens financiers des pays rentiers. […]</p>
<p>Le conflit ukrainien a entraîné un regain d’investissement dans les filières gazières pour approvisionner l’Europe de l’Ouest. La Russie amplifie de son côté ceux permettant de rediriger le gaz, si abondant dans le cercle arctique, vers les consommateurs asiatiques, dont la demande semble insatiable. In fine, cela risque de faire beaucoup plus de gaz fossile injecté dans le système énergétique en 2030. Ce n’est compatible avec aucun scénario net-zéro à l’horizon 2050. […]</p>
<p>Le Qatar, la Norvège, Australie sont les trois plus gros exportateurs de gaz du G17 après la Russie. Ils continuent tous à investir dans l’élargissement des capacités de production et d’exportation de gaz naturel. La contribution déposée en 2021 par le Qatar auprès des Nations unies au titre de ses engagements climatiques est muette sur le rôle des énergies renouvelables mais prolixe sur les bienfaits du gaz. La Norvège, championne des électrons verts et du véhicule électrique, investit une partie de la rente gazière dans l’énergie bas carbone. Mais elle exporte déjà treize fois plus de CO<sub>2</sub>, avec son gaz qu’elle n’en émet sur son territoire et continue d’accorder de nouveaux permis en mer du Nord pour maintenir ses capacités. L’Australie, abondamment pourvue en soleil et en vent, a commencé d’investir dans l’exportation d’électricité et d’hydrogène vert à destination du marché asiatique. Elle n’a pas encore renoncé à élargir ses capacités de production et d’exportation de gaz naturel.</p>
<p>Examinons maintenant le cas du pétrole, à partir de la stratégie des pays du Golfe, les principaux exportateurs du G17 en dehors de la Russie et du Nigeria. La prise de contrôle de la rente pétrolière par ces pays date des années 1970. Elle a donné lieu à des stratégies de sortie de la rente à long terme basées sur la bonne vieille loi de la rente différentielle de Ricardo. Le coût du baril de brut extrait des bons gisements de la région est inférieur à 10 dollars quand il cote sept à dix fois plus sur le marché. Les stratégies de sortie de la rente consistent logiquement à prendre son temps car beaucoup de compétiteurs moins favorisés par la nature seront contraints de plier bagage plus tôt.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/561832/original/file-20231127-23-f816p3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561832/original/file-20231127-23-f816p3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561832/original/file-20231127-23-f816p3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561832/original/file-20231127-23-f816p3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561832/original/file-20231127-23-f816p3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561832/original/file-20231127-23-f816p3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561832/original/file-20231127-23-f816p3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La raffinerie de Jubail, en Arabie saoudite.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jon Rawlinson/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Prenons l’exemple des Émirats arabes unis (EAU). Dans un premier temps, leur stratégie de sortie de la rente a consisté à investir quelque 25 milliards de dollars dans la centrale nucléaire de Barakah, dont la dernière tranche a été raccordée au réseau en 2023. Durant la décennie 2010, le renouvelable, plus récemment l’hydrogène vert et les carburants de synthèse, a pris le relais via une entreprise publique dénommée Masdar.</p>
<p>D’après le site de l’entreprise, Masdar avait investi fin 2022 environ 30 milliards de dollars pour installer des capacités de 20 GW en solaire et éolien. Il ne fait guère de doute que le rythme de ces investissements va continuer de s’accélérer. Le pays n’a cependant pas amorcé la phase de désinvestissement de ses capacités d’extraction et d’exportation de pétrole permettant de s’affranchir de la rente. […]</p>
<h2>Négociation climatique et sortie des énergies fossiles</h2>
<p>Constitué pour les besoins de notre chapitre, le G17 n’a pas d’existence institutionnelle. En particulier, le G17 ne négocie pas en tant que groupe dans les COP. De façon informelle, les négociateurs de ces pays ont pourtant acquis un grand savoir-faire pour jouer la montre, ralentir la négociation pour des questions de procédure, enterrer toute proposition susceptible de déboucher sur des engagements contraignants pour les exportateurs de carbone fossile. La COP tenue en 2012 à Doha (Qatar) a par exemple été un modèle du genre : on y a parlé de tout, sauf d’énergie !</p>
<p>La nomination du Sultan Ahmed Al Jaber, ministre de l’Industrie des Émirats arabes unis, à la présidence de la COP28 programmée en décembre 2023 dans les émirats a provoqué quelques remous : <a href="https://theconversation.com/comment-le-magnat-du-petrole-qui-preside-la-cop28-compte-porter-les-ambitions-des-pays-du-sud-216655">Al Jaber est également le patron de la compagnie nationale pétrolière</a> (Adnoc).</p>
<p>N’y a-t-il pas un conflit d’intérêts majeur ? Mais l’homme est aussi cofondateur et président de l’entreprise Masdar, investie dans le renouvelable et l’hydrogène vert. Le contexte de la négociation climatique a beaucoup changé depuis la COP de Doha. L’accord de Paris (2015) est passé par là. Depuis la COP de Glasgow (2021), la question de la sortie des énergies fossiles, longtemps un non-dit de la négociation, s’est imposée dans les discussions. La COP28 offre ainsi une opportunité de faire de réelles avancées en la matière.</p>
<p>Engager le désinvestissement des énergies fossiles aura un coût élevé, difficile à anticiper, sur l’activité et la croissance des économies rentières. Ce coût intervient quasi instantanément alors que les bénéfices de l’investissement sont plus longs à apparaître.</p>
<p>Trois raisons de fond devraient néanmoins pousser les dirigeants de ces pays à l’assumer.</p>
<ul>
<li><p>Primo, la résilience. Les stratégies actuelles de prolongation de la rente prennent le risque de l’effondrement de l’économie en cas d’interruption de la rente dans le futur. Plus les dirigeants repoussent dans le temps le désinvestissement, plus celui-ci aura un impact violent sur leur activité et le régime de croissance. […]</p></li>
<li><p>Secundo, les rentiers du fossile ont souvent des possibilités majeures de déplacer les actifs carbonés vers ceux de la transition énergétique : disponibilités en flux solaires et éoliens, hydrogène vert, métaux de la transition énergétique. […]</p></li>
<li><p>Tertio, la perte de croissance peut être largement compensée, et même surcompensée, au plan socio-économique si le désinvestissement s’accompagne d’une redistribution des revenus que la rente a généralement concentrés sur des minorités en bloquant ses retombées potentielles sur les conditions de vie de la majorité. Sans compter les gains additionnels sur la qualité de vie résultant du recul des pollutions locales.</p></li>
</ul><img src="https://counter.theconversation.com/content/218546/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian de Perthuis ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>À l’occasion la COP28, The Conversation France publie un extrait du livre de Christian de Perthuis, « Carbone fossile, carbone vivant » (Gallimard) consacré aux stratégies de sortie de la rente fossile.Christian de Perthuis, Professeur d’économie, fondateur de la chaire « Économie du climat », Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2177062023-11-15T21:17:49Z2023-11-15T21:17:49ZQui paye l’inflation importée ?<p>Le <a href="https://www.ofce.fr/pdf/revue/13-180OFCE.pdf">retour de l’inflation</a> en France depuis deux ans, dont l’origine vient principalement d’un choc de prix d’<a href="https://theconversation.com/topics/importations-114407">importations</a> lié à la hausse vertigineuse de la facture énergétique, pose la question centrale de la répartition de ce choc au sein des agents économiques. Qui en a principalement subit les effets ?</p>
<p>Sous l’effet, d’abord de la forte reprise postCovid, puis de la guerre en Ukraine, le prix des composants industriels et des matières premières, notamment énergétiques et agricoles, a fortement augmenté. Le prix des importations s’est ainsi accru de 20 % en l’espace d’un an, conduisant à un choc de grande ampleur sur l’économie française.</p>
<p>Une part de cette <a href="https://theconversation.com/topics/inflation-28219">inflation</a> importée s’est diffusé dans l’économie domestique, à travers la hausse du prix des intrants, des <a href="https://theconversation.com/topics/salaires-26163">revenus du travail</a> et du capital. Entre septembre 2021 et 2023, l’indice des prix à la consommation a crû de près de 11 %. Sur la même période, les seuls prix de l’énergie ont augmenté de 32 % et ceux de l’alimentaire de 21 %. Ces deux composantes, qui représentent environ un quart de la consommation totale des ménages, ont contribué à près de 60 % à l’inflation au cours des deux dernières années.</p>
<p>En parallèle le besoin de financement de l’économie nationale vis-à-vis de l’extérieur est passé de 1 point à 2 points de PIB entre le second semestre 2021 et la mi-2023… mais celui-ci a atteint jusque 4,6 points de PIB au 3<sup>e</sup> trimestre 2022. Si le reflux des prix de l’énergie et des matières premières à partir de la fin 2022 a conduit à réduire le besoin de financement extérieur, celui-ci a donc connu une hausse de plus de 3 points de PIB en un an, soit l’équivalent du premier choc pétrolier de 1973.</p>
<p>Deux après le début de l’épisode inflationniste, il est possible de tirer un premier bilan sur la diffusion d’un tel choc dans l’économie et d’avoir une idée de qui paye cette inflation importée.</p>
<h2>Une inflation différenciée selon les ménages</h2>
<p>En raison du recours plus important des déplacements en voiture et d’une facture énergétique liée au logement plus élevée, la hausse des prix de l’énergie a frappé en premier lieu les habitants des communes rurales et périurbaines, et dans une moindre mesure ceux des grandes agglomérations. Alors que les ménages vivant en dehors des unités urbaines ont vu le coût de la vie augmenter de 9 % entre la mi-2021 et la fin 2022, ceux résidant en agglomération parisienne ont subi un choc inflationniste plus modéré, de l’ordre de 6 %.</p>
<p>Au cours des douze derniers mois, l’inflation a cependant changé de nature, la contribution de l’énergie à la hausse de l’indice des prix à la consommation s’est réduite au profit de l’alimentaire. Depuis un an, les ménages les plus impactés par l’inflation sont ainsi les plus modestes car la part de l’alimentaire dans la consommation est d’autant plus élevée que le niveau de vie est faible. L’inflation actuelle du premier quintile de niveau de vie (les 20 % des messages les plus modestes) est près de 1 % supérieure à celui du dernier quintile (les 20 % les plus aisés).</p>
<p><iframe id="GBXoi" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/GBXoi/3/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>L’analyse du choc inflationniste ne peut cependant pas s’arrêter là. Il est nécessaire également de comprendre la réaction des revenus à cette hausse brutale des prix. Salaires, prestations sociales et revenus du capital se sont-ils élevés d’autant ?</p>
<h2>Un tassement des salaires vers le bas</h2>
<p>Du côté des revenus du travail, le salaire mensuel de base a crû de près de 8 % entre la mi-2021 et la mi-2023. Certes, une telle hausse n’a jamais été vue depuis plus de trente ans mais elle reste insuffisante pour compenser l’inflation. Autrement dit, le salaire réel a diminué de près de 3 % en deux ans.</p>
<p>Le smic, avec une hausse de 12 % depuis octobre 2021, a connu, lui, une progression plus rapide que la moyenne en raison de son mécanisme d’indexation sur l’inflation. Si ce mécanisme permet de protéger les travailleurs les plus modestes de l’inflation, rien ne garantit que cette hausse dynamique du smic bénéficie également aux salaires juste au-dessus. De fait, la proportion de salariés touchant ce salaire minimum est passée de 12 % en 2021 à près de 15 % en 2022. Cela confirme l’idée d’un tassement de la grille des salaires vers le bas, de même que la forte hausse des exonérations de cotisations sociales patronales, bien supérieure à la croissance de la masse salariale.</p>
<p>Les prestations sociales, elles, augmentent pour faire face à la hausse des prix. Cela se fait néanmoins avec retard en raison d’une réévaluation annuelle, en janvier ou en avril, calculée sur l’inflation passée. Ainsi, depuis fin 2021, les pensions de retraite n’ont crû que de 6 % mais celles-ci seront revalorisées de 5,2 % en janvier 2024. Pour les autres prestations, elles ont augmenté significativement seulement à partir d’août 2022 avec une augmentation globale de 7,3 % au cours des deux dernières années. Une nouvelle revalorisation de 4,8 % est attendue au 1<sup>er</sup> avril 2024.</p>
<p>Les revenus du patrimoine financier ont, de leur côté, fortement grimpé, de 35 % entre la mi-2021 et la mi-2023. Cela s’est fait sous l’impulsion de la remontée des taux d’intérêt et de la forte hausse des dividendes versés. Si le pouvoir d’achat par unité de consommation a crû de 0,5 % entre la mi-2021 et la mi-2023, résistant au choc inflationniste, c’est d’ailleurs en partie dû au fort dynamisme des revenus du capital et à la baisse de fiscalité. L’analyse macroéconomique du pouvoir d’achat, bien qu’indispensable, n’est cependant pas suffisante pour comprendre celle par niveau de vie, avec des ménages dont les revenus ont évolué très différemment sur la période récente.</p>
<h2>Les entreprises tirent leur épingle du jeu</h2>
<p>Au cours des huit derniers trimestres, les entreprises ont vu leur revenu réel (déflaté des prix de valeur ajoutée) s’accroitre de 4,3 % et le taux de marge des sociétés non financières a augmenté de 1,2 point de valeur ajoutée pour atteindre 33 % de la valeur ajoutée, son plus haut niveau depuis 2008 si l’on exclut les années exceptionnelles (2019 l’année du double CICE ou la période Covid marquée par des aides exceptionnelles).</p>
<p>Enfin les administrations publiques, en mettant en place des dispositifs pour limiter la hausse des prix de l’énergie (boucliers tarifaires…) ont vu leur déficit se dégrader malgré la fin des mesures d’urgence liées à la crise Covid. Il est ainsi passé de 4,5 % du PIB fin 2021 à 5,9 % fin 2022, avant de se réduire à 4,6 % à la mi-2023 avec la fin du bouclier tarifaire du gaz et de la remise carburant.</p>
<p>Pour résumer, face à l’inflation importée, les entreprises ont jusqu’à présent bien tiré leur épingle du jeu même si les situations sont très hétérogènes selon les secteurs et les entreprises. Les ménages ont vu leur pouvoir d’achat résister mais cela masque des dynamiques très différentes entre les revenus du travail et du capital. Enfin, les administrations publiques en absorbant une partie du choc inflationniste ont vu leur situation financière se dégrader.</p>
<hr>
<p><em>Cette contribution à The Conversation France est publiée en lien avec les Jéco 2023 qui se tiennent à Lyon du 14 au 16 novembre 2023. Retrouvez ici le <a href="https://www.journeeseconomie.org/affiche-conference2023">programme complet</a> de l’événement.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/217706/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mathieu Plane ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ménages, entreprises et administrations publiques ont encaissé le choc lié à des produits importés de plus en plus coûteux de façon très hétérogène.Mathieu Plane, Economiste - Directeur adjoint au Département Analyse et Prévision OFCE, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2176922023-11-14T18:56:18Z2023-11-14T18:56:18ZPourquoi l’atmosphère du Soleil est-elle beaucoup (beaucoup) plus chaude que sa surface ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/559279/original/file-20210831-27-tb99cz.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=41%2C41%2C3952%2C2616&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Représentation du champ magnétique du Soleil.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>La température à la surface du soleil est d’environ 6 000 °C, alors que son atmosphère atteint le million de degrés ! On aurait tendance à imaginer, comme sur Terre, que l’on perd de la chaleur en montant dans l’atmosphère. Comment expliquer ce paradoxe ?</p>
<p>Beaucoup de scientifiques étudient cette question. Si la réponse n’est pas encore tranchée, plusieurs hypothèses existent sur l’origine de l’énergie qui chauffe l’atmosphère du Soleil, et cela pourrait à voir avec le champ magnétique due notre étoile.</p>
<h2>La température du Soleil</h2>
<p>La chaleur est créée au centre même du Soleil, en son cœur, où la température atteint 27 millions de degrés Celsius. Et comme lorsqu’on s’éloigne d’un feu de camp, la température diminue au fur et à mesure que l’on s’éloigne du noyau.</p>
<p>La température de la surface du Soleil est d’environ 6 000 °C, ce qui signifie qu’elle est beaucoup plus froide que le noyau. De plus, le refroidissement se poursuit sur une courte distance au-dessus de la surface.</p>
<p>Mais plus haut, dans l’atmosphère, la température grimpe soudainement à plus d’un million de degrés ! Il doit donc y avoir quelque chose qui chauffe l’atmosphère du Soleil. Mais il est difficile de savoir de quoi il s’agit.</p>
<h2>Le champ magnétique du Soleil</h2>
<p>L’hypothèse la plus répandue parmi les experts est que le champ magnétique de notre étoile fait remonter l’énergie de l’intérieur du Soleil à travers sa surface et dans son atmosphère.</p>
<p>Comme la Terre, le Soleil possède un champ magnétique. Imaginons le champ magnétique comme étant des lignes invisibles reliant les pôles nord et sud d’une étoile ou d’une planète.</p>
<p>Nous ne pouvons pas voir les champs magnétiques, mais nous savons qu’ils existent parce que nous avons des objets qui y réagissent. Par exemple, une aiguille de boussole sur Terre pointera toujours vers le pôle Nord parce qu’elle s’aligne sur le champ magnétique terrestre.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/418590/original/file-20210831-17-5npyka.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/418590/original/file-20210831-17-5npyka.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/418590/original/file-20210831-17-5npyka.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/418590/original/file-20210831-17-5npyka.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/418590/original/file-20210831-17-5npyka.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/418590/original/file-20210831-17-5npyka.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/418590/original/file-20210831-17-5npyka.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/418590/original/file-20210831-17-5npyka.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Ici, vous pouvez voir comment le champ magnétique terrestre s’étend dans l’espace et revient en boucle. L’extrémité rouge est le pôle magnétique nord et l’extrémité blanche est le pôle sud.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le Soleil possède un pôle Nord et un pôle Sud mais son champ magnétique se comporte différemment de celui de la Terre et semble beaucoup plus désordonné. À la surface du Soleil, les lignes du champ magnétique ressemblent à de nombreuses boucles qui s’élèvent de la surface vers l’atmosphère, et ces boucles changent en permanence.</p>
<p>Si les boucles se touchent, elles peuvent provoquer des explosions soudaines d’énormes quantités d’énergie qui réchauffent l’atmosphère. Nous savons également que des ondes se déplacent le long des lignes de champ magnétique et apportent de l’énergie. Pourraient-elles être responsables du réchauffement de l’atmosphère ?</p>
<p>S’agit-il d’une combinaison d’ondes et d’explosions, ou de toute autre chose ? Pouvoir mesurer le champ magnétique du Soleil nous aiderait vraiment à comprendre ce qui se passe.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/418540/original/file-20210831-21-1yq3sxq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/418540/original/file-20210831-21-1yq3sxq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/418540/original/file-20210831-21-1yq3sxq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/418540/original/file-20210831-21-1yq3sxq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/418540/original/file-20210831-21-1yq3sxq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/418540/original/file-20210831-21-1yq3sxq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/418540/original/file-20210831-21-1yq3sxq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/418540/original/file-20210831-21-1yq3sxq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Voici à quoi pourraient ressembler les lignes du champ magnétique du Soleil si nous pouvions les voir remonter de sa surface.</span>
<span class="attribution"><span class="source">NASA</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Mesurer le champ magnétique</h2>
<p>Les champs magnétiques sont invisibles, mais nous pouvons les mesurer, car ils modifient légèrement la lumière provenant du Soleil. Sa surface est très brillante, il est donc facile de voir les changements dans sa lumière provenant et de mesurer le champ magnétique à cet endroit.</p>
<p>Mais l’atmosphère du Soleil est si chaude que la lumière n’y est plus visible. Elle produit plutôt des rayons X, un type de lumière que nous ne pouvons pas voir. Même si nous utilisons des télescopes à rayons X spéciaux, les rayons X provenant de l’atmosphère du Soleil sont trop faibles pour que nous puissions déterminer à quoi ressemble le champ magnétique dans l’atmosphère.</p>
<p>La bonne nouvelle, c’est qu’une sonde, <a href="https://www.nasa.gov/content/goddard/parker-solar-probe">Parker Solar Probe</a> de la NASA, est actuellement en orbite près du Soleil (mais pas trop près) et traverse le champ magnétique pour le mesurer. Nous devrions recevoir de nombreuses informations passionnantes au cours des années à venir.</p>
<p>Ces mesures du champ magnétique nous permettront de mieux comprendre ce qui rend l’atmosphère du Soleil et d’autres étoiles beaucoup plus chaude que leur surface.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/418541/original/file-20210831-23-1uyhx5y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/418541/original/file-20210831-23-1uyhx5y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/418541/original/file-20210831-23-1uyhx5y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=427&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/418541/original/file-20210831-23-1uyhx5y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=427&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/418541/original/file-20210831-23-1uyhx5y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=427&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/418541/original/file-20210831-23-1uyhx5y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/418541/original/file-20210831-23-1uyhx5y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/418541/original/file-20210831-23-1uyhx5y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La sonde Solar Parker Probe de la NASA est à peu près de la taille d’une voiture.</span>
<span class="attribution"><span class="source">NASA</span></span>
</figcaption>
</figure>
<hr>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dianerottner.com/">Diane Rottner</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : <a href="mailto:tcjunior@theconversation.fr">tcjunior@theconversation.fr</a>. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre. En attendant, tu peux lire tous les articles <a href="https://theconversation.com/fr/topics/the-conversation-junior-64356">« The Conversation Junior »</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/217692/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La température à la surface du Soleil est d’environ 6 000 °C. Mais plus haut, dans l’atmosphère, elle grimpe soudain à plus d’un million de degrés !Hannah Schunker, Lecturer of Physics, University of NewcastleDavid Pontin, Associate Professor of Physics, University of NewcastleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2163692023-11-08T20:45:07Z2023-11-08T20:45:07ZPrix de l’énergie en hausse, rénovation qui stagne : comment expliquer ce paradoxe ?<p>Avec une hausse des prix de l’électricité de 26 % et du gaz de 50,6 % entre janvier 2018 et décembre 2022 en France, nous aurions pu nous attendre à une progression significative de la rénovation dans le résidentiel.</p>
<p>En France, ce dernier compte pourtant <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/le-parc-de-logements-par-classe-de-performance-energetique-au-1er-janvier-2022-0">encore 36 % de chaudières au gaz et 26 % au fioul</a>. Seuls 5 % des résidences principales sont classées en étiquette A ou B en 2022, et le <a href="https://theconversation.com/le-diagnostic-de-performance-energetique-dpe-utile-mais-pas-miraculeux-pour-inciter-a-la-renovation-du-parc-locatif-prive-215906">nombre de logements mal isolés demeure considérable</a> (39 % des logements en étiquettes E, F et G).</p>
<p>Au cours de l’hiver 2021-2022, « 22 % des Français ont déclaré avoir <a href="https://theconversation.com/confinements-et-hausse-des-factures-denergie-le-risque-de-lautorestriction-151488">souffert</a> du froid pendant au moins 24h et 11,9 % des Français les plus modestes ont dépensé plus de 8 % de leurs revenus <a href="https://onpe.org/chiffres_cles/les_chiffres_cles_de_la_precarite_energetique_edition_mars_2023">pour payer les factures énergétiques de leur logement en 2021</a> ».</p>
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<p>Le secteur résidentiel reste ainsi un gisement important d’économie d’énergie, en particulier en matière de <a href="https://theconversation.com/renovation-energetique-en-france-des-obstacles-a-tous-les-etages-147978">rénovations</a> en efficacité énergétique. Et pourtant, les ménages semblent faire abstraction d’opportunités d’investissement apparemment rentables : c’est ce que l’on appelle <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/0928765594900019;https://journals.openedition.org/rei/5985;https://www.cairn.info/revue-economique-2018-2-page-335.htm">« le paradoxe énergétique »</a>.</p>
<p>Comment l’expliquer, alors que le prix de l’énergie devrait au contraire, à première vue, donner un coup de pouce à la rénovation ?</p>
<h2>Prix de l’énergie, un incitateur ?</h2>
<p>En réalité, la demande d’énergie est peu sensible au prix à court terme : pour une hausse de 100 % des prix de l’énergie en moyenne, les ménages les plus pauvres réduisent leur consommation de chauffage <a href="https://theconversation.com/chauffage-les-plus-aises-sont-aussi-ceux-qui-realisent-le-moins-deconomies-denergie-190582">entre 6 % et 11 % en fonction de leur revenu</a>.</p>
<p>Il est en effet plus facile de réduire sa consommation tant qu’une marge de manœuvre est possible et qu’il existe des solutions substituables sur le marché : pour le chauffage, par exemple, l’électricité peut se substituer au gaz dans de nombreux cas. A contrario, il n’existe pas de substitut à l’électricité pour l’éclairage ou les appareils électroménagers.</p>
<p>La réaction en revanche s’observera avec plus de force à long terme : la chute de la demande est alors bien plus importante que l’augmentation du prix. C’est le concept d’élasticité-prix de la demande : à la suite d’un choc sur les prix, les ménages n’ont pas le temps, ni d’ajuster instantanément leur comportement ni de changer leurs équipements. En revanche, ces chocs de prix influenceront leur processus de décision et de consommation à long terme. Ainsi, quand bien même on n’observe pas d’effet à court terme de la hausse des prix de l’énergie, les effets pourraient se faire sentir dans un horizon plus lointain.</p>
<h2>Un paradoxe analysé par les économistes</h2>
<p>La question du prix de l’énergie, si elle est cruciale, n’est pas le seul argument à peser dans la décision, pour les ménages, de changer ou non leurs équipements.</p>
<p>Rappelons également que pour bénéficier de la plupart des aides de l’État, les ménages doivent faire appel à un professionnel du bâtiment agréé. Dans certaines régions, la tension sur l’offre est importante et il s’avère parfois difficile de trouver un professionnel compétent rapidement disponible…</p>
<p>Pour tenter d’expliquer néanmoins ce paradoxe de la diffusion très progressive d’équipements énergétiques apparemment rentables, de nombreux économistes ont analysé la nature et l’occurrence des barrières à l’investissement. Ces dernières sont nombreuses.</p>
<h2>De multiples freins à l’adoption</h2>
<p>Parmi elles, le statut d’occupation joue un rôle : rappelons qu’en France le pourcentage de locataires <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/cache/digpub/housing/bloc-1a.html">s’établit à 35,3 % en 2021</a>. Citons également les <a href="https://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vie-economique-2007-4-page-49.htm?ref=doi">difficultés d’accès au crédit</a>, ou bien l’hétérogénéité de revenus, de préférence et de sensibilité environnementale qui existent entre les individus.</p>
<p>Les dépenses d’investissement dans des nouvelles technologies sont en outre affectées par la combinaison entre différentes sortes d’incertitudes (incertitude sur les gains énergétiques, sur les prix de l’énergie, sur les politiques publiques ou encore sur les prix des futurs produits et des coûts d’installation) et de leur irréversibilité (car les coûts sont irrécouvrables). Ce qui pousse les ménages à retarder autant que possible les investissements, en attendant d’obtenir de nouvelles informations.</p>
<p>D’autres freins à l’adoption interviennent, tels que les coûts associés à la recherche d’information sur les technologies ou encore ceux engendrés par la gêne occasionnée durant les travaux. Tous ces éléments, non pris en compte dans la plupart des analyses coûts-bénéfices, rendent des investissements profitables à première vue, moins rentables que ce qu’ils semblent être en réalité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216369/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dorothée Charlier est membre de SOLAR ACADEMY, FAERE et FAEE.
</span></em></p>Malgré des prix qui bondissent, la rénovation énergétique reste lente en France. D’abord car les effets de la hausse ne sont pas immédiats, mais aussi car d’autres freins interviennent.Dorothée Charlier, Maîtresse de conférences en économie de l’énergie et de l’environnement, IAE Savoie Mont BlancLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2158452023-11-01T17:16:27Z2023-11-01T17:16:27ZLes réseaux électriques de futures générations permettront-ils d’ajuster offre et demande ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/554294/original/file-20231017-27-pxpvuv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2397%2C1473&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un réseau électrique intelligent articule infrastructures traditionnelles et télécommunications.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Pok Rie / Pexels</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le <a href="https://theconversation.com/topics/electricite-23762">secteur électrique</a> constitue un des secteurs énergétiques les plus polluants, responsable de <a href="https://www.planete-energies.com/fr/media/article/production-delectricite-ses-emissions-co2#:%7E:text=Electricit%C3%A9%20et%20gaz%20%C3%A0%20effet,une%20centrale%20au%20gaz3.">42,5 % des émissions mondiales de CO₂</a>. S’il doit travailler à devenir plus propre et à faire face à la précarité énergétique, il se voit également confronté à de nouvelles contraintes, telles qu’une demande croissante, particulièrement en période de pointe, mais aussi en raison de nouveaux usages comme les véhicules électriques. Il lui faut aussi composer avec le vieillissement des infrastructures des réseaux.</p>
<p>Les acteurs du secteur se tournent donc désormais vers le déploiement des <a href="https://theconversation.com/topics/energies-renouvelables-22981">ressources renouvelables</a>. Néanmoins, certains inconvénients inhérents à ces ressources, comme leur <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/11/24/si-les-energies-renouvelables-intermittentes-etaient-soumises-aux-lois-du-marche-ni-eoliennes-ni-centrales-solaires-ne-verraient-le-jour_6103382_3232.html">caractère intermittent</a> et les problématiques d’occupation spatiale, requièrent le développement d’un mécanisme efficace de gestion de l’énergie. De <a href="https://www.revolution-energetique.com/voici-la-carte-des-6-futurs-reacteurs-nucleaires-epr-prevus-en-france/">nouveaux réacteurs nucléaires EPR</a> doivent également sortir de terre en France pour renouveler le parc existant mais, hormis Flamanville sur le Cotentin, ne sont pas attendus avant 2035. C’est pourquoi les ingénieurs travaillent d’autre part à développer des technologies de pointe pour rendre la demande d’électricité plus flexible.</p>
<p>Actuellement, la demande en électricité est considérée comme <a href="https://www.connaissancedesenergies.org/fiche-pedagogique/tarification-de-lelectricite">aléatoire</a> : c’est à l’offre de s’adapter pour trouver un équilibre. Dans le réseau de demain, l’intermittence des énergies renouvelables déplacera vraisemblablement le caractère aléatoire de la consommation vers la production. La demande devra donc être flexible et maitrisée grâce à des programmes de gestion spécifiques.</p>
<p>En remodelant la demande, le parc de production pourrait être géré efficacement, et les coûts lissés. En outre, le dimensionnement du parc s’ajustant à la demande maximale d’électricité, la capacité totale et le coût d’investissement seront atténués en réduisant cette demande maximale.</p>
<h2>Lisser les pics</h2>
<p>Des <a href="https://pastel.hal.science/pastel-00959266">recherches</a> ont montré que les programmes de pilotage de demande agissent sur l’allure de la courbe de charge d’électricité de trois manières : en décalant les charges (<em>Load shifting</em>), en écrêtant les pointes (<em>peak clipping</em>) et en remplissant les creux (<em>valley filling</em>). Le déplacement de la demande décale l’usage d’un appareil électrique, c’est-à-dire reporte ou avance une demande d’une tranche horaire à une autre. La réduction du pic de demande électrique est atteinte grâce à la diminution ou la coupure ponctuelle d’un usage électrique. Cette solution réduit la puissance électrique en période de pointe et induit ainsi une baisse de consommation. C’est par exemple inciter les consommateurs à diminuer la température de leur chauffage.</p>
<p>Tandis que ces deux premières techniques visent à égaliser la courbe de charge en s’intéressant aux pics de demande, le « valley filling » s’applique, lui, à augmenter la charge durant les périodes où elle est moins importante. C’est programmer son lave-linge ou son lave-vaisselle en période creuse par exemple.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1686465752373612545"}"></div></p>
<p>Il convient de noter que ces programmes énergétiques contribuent aux baisses des pics de consommation. On parle parfois d’« effacement de consommation ». Ils pèsent actuellement pour environ <a href="https://www.eqinov.com/eqilibreblogenergie/appel-offres-effacement-aoe/">3 900 MW mobilisables en France en 2023</a>, encore loin de l’objectif de 6 500 MW inscrit dans la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) à horizon 2028. 6 500 MW, c’est à peu près l’équivalent de ce que peuvent fournir <a href="https://www.edf.fr/la-centrale-nucleaire-de-flamanville-3-epr/les-actualites-de-la-centrale-nucleaire-de-flamanville-3-epr/lepr-de-flamanville-debute-ses-essais-de-requalification-densemble">quatre réacteurs nucléaires de type EPR</a> comme celui actuellement en phase d’essai à Flamanville.</p>
<p>Dans ce contexte, nos <a href="https://ieeexplore.ieee.org/document/8923214">recherches</a> soulèvent deux problématiques inhérentes à la gestion énergétique dans le réseau électrique intelligent. Comment aider le propriétaire d’une maison à prendre une décision d’adhésion à un programme énergétique dans le but de réduire sa consommation énergétique ? Et comment répartir l’énergie d’une manière équitable entre les consommateurs tout en prenant en compte les contraintes d’énergie des sources renouvelables et en répondant aux besoins énergétiques variés des consommateurs ?</p>
<h2>Au carrefour des systèmes électriques et des télécommunications</h2>
<p>Une des pistes pour pouvoir répondre à ces nouvelles problématiques est de développer les technologies de réseaux électriques intelligents de future génération (<em>Next Generation Smart Grids, NGSG</em>). Il s’agit des systèmes énergétiques qui évoluent d’une structure monodirectionnelle des flux énergétiques et informationnels (de la production vers la consommation), à une structure fondée sur des interactions bidirectionnelles.</p>
<p>L’objectif des NGSG est de fusionner les technologies de télécommunication et le système électrique géré par les opérateurs de production énergétique. Il est judicieux de noter qu’ils ne visent pas une conversion radicale des technologies mais une évolution des réseaux actuels dans le but d’assurer une communication entre les différents acteurs.</p>
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<p>Bien que des éléments rendant le réseau intelligent existent déjà, la différence entre les NGSG et les réseaux électriques actuels se situe dans leur <a href="https://ieeexplore.ieee.org/document/6690098">capacité à gérer plus de complexité</a>. En effet, ces réseaux intelligents devraient évoluer pour permettre une gestion en temps réel de la consommation électrique : prédiction, équilibrage de charge, détection, surveillance des pannes et aide à la prise de décision du programme énergétique.</p>
<p>Avec les NGSG, tous les appareils électriques devraient être connectés et contrôlés dans le but de gérer et surveiller la consommation électrique et afin de remonter des informations et recevoir des commandes de contrôle. La prolifération significative d’objets connectés localisés dans les maisons requiert en effet un mécanisme de gestion efficace.</p>
<p>Ce dernier peut prendre appui sur les réseaux mobiles 5G avec notamment la <a href="https://www.redhat.com/fr/topics/hyperconverged-infrastructure/what-is-software-defined-networking">technique SDN</a> (Software Defined Network). Cette dernière s’avère particulièrement prometteuse. Elle prodigue une architecture qui sépare les fonctions de transport des fonctions de contrôle du réseau. Elle fournira ainsi l’équilibrage de charge, le déplacement de charge électrique, l’ajustement dynamique des chemins de routage suite aux commandes de contrôle, la détection rapide des pannes, l’autoréparation et la surveillance et la planification des flux de trafic électriques critiques.</p>
<p>Par ailleurs, les objets connectés dans les NGSG sont capables de générer, collecter et traiter des quantités massives de données. Ces sources de données ouvrent de nouvelles pistes pour concevoir de façon fiable et efficace les réseaux électriques. Les réseaux futurs proposeront en effet l’intégration des techniques d’apprentissage automatique pour le traitement en temps réel des données et la prise de décision du meilleur programme énergétique. Celles-ci seraient puisées tant du côté de l’offre que de la demande.</p>
<p>Dans ce contexte, l’utilisation d’un algorithme d’apprentissage automatique contribuera à l’optimisation de la consommation énergétique. Celui-ci prendra en considération les diverses variables impliquées dans la distribution d’énergie renouvelable et la consommation d’énergie, afin de maximiser l’énergie de production durant les jours nuageux et sans vent. Cet algorithme interprète les fluctuations de la demande et l’évolution des conditions météorologiques afin de prévoir l’énergie demandée, et d’anticiper les problèmes inhérents aux réseaux électriques avec pour objectif de mettre en place des moyens d’amélioration des lignes de distribution.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/215845/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Rola Naja ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La transition énergétique nécessite des modes de production propre de l’électricité mais aussi de mieux maîtriser la demande.Rola Naja, Enseignante chercheuse dans le domaine de l'informatique et réseaux, ECE ParisLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2166552023-10-30T19:06:42Z2023-10-30T19:06:42ZComment le magnat du pétrole qui préside la COP28 compte porter les ambitions des pays du Sud<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/556583/original/file-20231012-21-7d5266.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5472%2C3637&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le sultan Ahmed al Jaber, PDG de la compagnie pétrolière nationale des Émirats arabes unis, dirigera la conférence des Nations unies sur le climat COP28.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/news-photo/sultan-al-jaber-chief-executive-of-the-uaes-abu-dhabi-news-photo/1529645349">Francois Walschaerts/AFP via Getty Images</a></span></figcaption></figure><p>En décembre 2023, les négociateurs des pays du monde entier se réuniront aux Émirats arabes unis pour le prochain cycle de <a href="https://treaties.un.org/Pages/ViewDetailsIII.aspx?src=TREATY&mtdsg_no=XXVII-7&chapter=27&Temp=mtdsg3&clang=_en">négociations internationales sur le climat</a>. Alors que ces négociations sont <a href="https://theconversation.com/solidarite-nord-sud-financements-debats-sur-le-1-5-c-methane-ce-quil-faut-retenir-de-la-cop27-194988">considérées comme essentielles pour obtenir les accords mondiaux nécessaires</a> pour éviter d’atteindre un changement climatique dangereux, la <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2023-06-15/climate-talks-ahead-of-cop28-raise-concerns-of-weak-outcome">confiance dans le sommet, connu sous le nom de COP28, est au plus bas</a>. L’une des raisons tient à la personne qui est aux commandes.</p>
<p>Les Émirats arabes unis ont mis le feu aux poudres en janvier 2023 en annonçant que le sultan Ahmed al Jaber, PDG de l’entreprise publique Abu Dhabi National Oil Company (Adnoc), serait le président désigné du sommet sur le climat, ce qui lui donnerait un large contrôle sur l’ordre du jour de la réunion.</p>
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<p><a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2023-05-23/us-eu-lawmakers-want-al-jaber-out-as-cop28-president?leadSource=uverify%20wall">Des hommes politiques américains et européens</a> ont exigé la démission de M. al-Jaber. L’ancien vice-président américain Al Gore <a href="https://www.ft.com/content/65423811-7c7e-4ae5-876d-ffbed29cefcf">a affirmé</a> que les intérêts des industries fossiles avaient « capturé le processus des Nations unies à un degré inquiétant, allant jusqu’à nommer le PDG de l’une des plus grandes compagnies pétrolières du monde à la présidence de la COP28 ».</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="John Kerry à côté de Ahmed al Jaber" src="https://images.theconversation.com/files/553512/original/file-20231012-25-d9xkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/553512/original/file-20231012-25-d9xkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/553512/original/file-20231012-25-d9xkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/553512/original/file-20231012-25-d9xkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/553512/original/file-20231012-25-d9xkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/553512/original/file-20231012-25-d9xkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/553512/original/file-20231012-25-d9xkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’envoyé présidentiel des États-Unis pour le climat, John Kerry, a échangé avec le sultan Ahmed al Jaber lors du Forum mondial de l’énergie de l’Atlantic Council à Abu Dhabi le 14 janvier 2023. John Kerry a apporté son soutien à M. al-Jaber lorsqu’il a été choisi pour diriger la COP28.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/news-photo/united-arab-emirates-minister-of-state-and-ceo-of-the-abu-news-photo/1246218348?adppopup=true">Karim Sahib/AFP</a></span>
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<p>Les inquiétudes quant à l’obstruction des politiques proclimat par les industries fossiles sont tout à fait légitimes, à mon avis. Il existe de <a href="https://doi.org/10.1002/wcc.809">nombreuses preuves</a> que les plus grandes industries fossiles savaient déjà depuis des décennies que leurs produits provoqueraient le changement climatique, et qu’elles ont délibérément tenté de nier les sciences du climat et de s’opposer à l’évolution des politiques climatiques.</p>
<p>Cependant, je pense que les appels à <a href="https://www.lemonde.fr/en/opinion/article/2023/09/30/boycott-cop28-holding-a-climate-conference-in-dubai-is-absurd-and-dangerous_6142129_23.html">boycotter la COP28</a> et à bannir le choix de la région pour la diriger sapent la crédibilité des négociations des Nations unies et négligent le potentiel du programme de la COP28.</p>
<p>J’ai été conseiller du <a href="https://www.unep.org/">Programme des Nations unies pour l’environnement</a> et je suis <a href="https://www.clarku.edu/faculty/profiles/ibrahim-ozdemir/">spécialiste de l’éthique environnementale</a>. Mes propres préoccupations sur cette question m’ont amené à faire équipe avec six collègues du Sud pour mener une <a href="https://cdn.uha.com.tr/content/files/cop-presidencies-comparative-analysis-tracked7073-230927011708.pdf">analyse comparative détaillée</a> des objectifs et du comportement des cinq dernières présidences de la COP sur le climat.</p>
<p>Nous avons conclu, à notre grande surprise, que le programme politique promu par la présidence des Émirats arabes unis à la COP28 pourrait largement contribuer à accélérer la transition vers la sortie des énergies fossiles. Nous avons également constaté que de nombreuses critiques formulées à l’encontre de la présidence des Émirats arabes unis étaient infondées.</p>
<h2>Comment Ahmed al Jaber a été choisi</h2>
<p>Tout d’abord, il est utile de comprendre comment les présidents des COP sont choisis.</p>
<p>Le choix du pays qui accueille le sommet de la COP est géré par un <a href="https://unfccc.int/process-and-meetings/conferences/the-big-picture/what-are-united-nations-climate-change-conferences/how-cops-are-organized-questions-and-answers#Host-country-and-presidency">processus des Nations unies</a> qui fait l’objet d’une alternance démocratique <a href="https://unfccc.int/process-and-meetings/conferences/the-big-picture/what-are-united-nations-climate-change-conferences/how-cops-are-organized-questions-and-answers#Host-country-and-presidency">entre six régions</a>. Les pays de chaque région se consultent pour savoir qui représentera leur région, et ce pays fait une proposition, qui est évaluée et finalisée par le secrétariat qui gère la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.</p>
<p>Pour la COP28, la région Asie-Pacifique, qui se compose d’un ensemble diversifié de pays en développement, a choisi les Émirats arabes unis et Ahmed al Jaber.</p>
<h2>Les préoccupations énergétiques des pays du Sud</h2>
<p>Pour certains pays du Sud, la perspective d’une <a href="https://theconversation.com/cop-27-une-decision-historique-et-un-terrible-statu-quo-194151">élimination progressive des énergies fossiles</a> – demandée par de nombreux groupes militants et pays à l’approche de la COP28 – semble non seulement décourageante, mais aussi une <a href="https://documents1.worldbank.org/curated/en/312441468197382126/pdf/104866-v1-REVISED-PUBLIC-Main-report.pdf">menace pour le développement économique</a>.</p>
<p>Sur les dizaines de pays producteurs de pétrole dans le monde, environ la <a href="https://www.wri.org/insights/just-transition-developing-countries-shift-oil-gas">moitié sont des pays en développement à revenu intermédiaire</a> dont les économies sont très vulnérables face à la volatilité des prix du pétrole et du gaz. Des études ont suggéré qu’une élimination rapide des énergies fossiles pourrait entraîner des <a href="https://doi.org/10.1038/s41558-018-0182-1">milliers de milliards de dollars de pertes</a> dues aux investissements dans les infrastructures des pays producteurs de pétrole, s’ils n’y sont pas préparés.</p>
<p><iframe id="m97kW" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/m97kW/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>En même temps, de nombreux États du Sud sont confrontés aux <a href="https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg2/">conséquences démesurées du changement climatique</a>, qu’il s’agisse de phénomènes météorologiques extrêmes ou de l’élévation du niveau de la mer qui peuvent <a href="https://www.pbs.org/newshour/world/amid-rising-seas-island-nations-push-for-legal-protection">menacer l’existence même</a> de leurs communautés.</p>
<p>Ahmed Al Jaber a qualifié l’élimination progressive des combustibles fossiles d’<a href="https://www.theguardian.com/environment/2023/jul/13/phase-down-of-fossil-fuel-inevitable-and-essential-says-cop28-president">« inévitable » et d’« essentielle »</a>, mais il a aussi déclaré que le système énergétique et les pays du Sud <a href="https://www.aljazeera.com/news/2023/5/10/world-not-ready-to-switch-off-fossil-fuels-uae-says">n’étaient pas prêts pour une élimination rapide du fossile</a> tant que les énergies renouvelables n’augmenteront pas, et que le sommet devrait <a href="https://www.argusmedia.com/en//news/2496902-uaes-aljaber-says-cop-28-must-focus-on-adaptation">se concentrer sur l’adaptation</a>. Ce point de vue, bien que soutenu par certains pays du Sud, a suscité de vives critiques.</p>
<h2>Al Jaber, Masdar et l’Adnoc</h2>
<p>La présidence de la COP28 par Ahmed Al-Jaber a été décrite par certains comme une <a href="https://www.cnn.com/2023/07/18/middleeast/cop-28-dubai-greenwashing-climate/index.html">tentative des Émirats arabes unis de « verdir »</a> les plans d’expansion pétrolière et gazière d’Adnoc, l’une des plus grandes compagnies pétrolières au monde.</p>
<p>Bien que je sois sensible à cette préoccupation, mes collègues et moi-même l’avons trouvée beaucoup trop simpliste. <a href="https://www.theguardian.com/environment/2023/oct/07/meet-the-oil-man-tasked-with-saving-the-planet-cop28">Al-Jaber</a> a passé l’essentiel de sa carrière dans le secteur des énergies renouvelables. En 2006, il a <a href="https://masdar.ae/en/About-Us/Management/History-and-Legacy">fondé et dirigé</a> la société d’État des Émirats arabes unis spécialisée dans les énergies renouvelables, Masdar, qu’il a aidée à devenir le <a href="https://www.energyglobal.com/wind/07062023/uae-and-egypt-advance-development-of-africas-biggest-wind-farm/">plus grand opérateur d’énergies renouvelables en Afrique</a>.</p>
<p>Il a été nommé PDG de l’Adnoc en 2016, dans le cadre du lancement officiel par les Émirats arabes unis d’une <a href="https://doi.org/10.1111/polp.12457">stratégie nationale pour l’après-pétrole</a>. L’année précédente, le prince héritier Mohammed bin Zayed avait prononcé un discours <a href="https://www.thenationalnews.com/uae/abu-dhabi-s-journey-towards-celebrating-the-last-barrel-of-oil-gathers-pace-1.737529">déclarant</a> que les Émirats arabes unis célébreraient « le dernier baril de pétrole » d’ici le milieu du siècle.</p>
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<img alt="Trois hommes en train de discuter." src="https://images.theconversation.com/files/553513/original/file-20231012-23-fxf8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/553513/original/file-20231012-23-fxf8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/553513/original/file-20231012-23-fxf8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/553513/original/file-20231012-23-fxf8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/553513/original/file-20231012-23-fxf8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/553513/original/file-20231012-23-fxf8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/553513/original/file-20231012-23-fxf8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le sultan Ahmed al-Jaber a rencontré les responsables de plusieurs pays en développement, dont le ministre indien de l’environnement, des forêts et du changement climatique, Bhupender Yadav (à droite).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/news-photo/bhupender-yadav-indias-minister-for-environment-forest-and-news-photo/1559090143">R.Satish Babu/AFP</a></span>
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<p>L’Adnoc a été fortement critiquée pour avoir prévu d’investir 150 milliards de dollars dans l’expansion de ses capacités pétrolières et gazières au cours de cette décennie. Je partage ces inquiétudes. Pour rester dans les limites de 1,5 °C de réchauffement climatique adoptées dans le cadre de l’accord de Paris, le monde pourrait devoir <a href="https://climatechangenews.com/2023/09/27/new-iea-net-zero-report-leaves-big-polluters-less-room-to-hide/">cesser les nouveaux investissements dans les combustibles fossiles</a>, comme l’a préconisé l’Agence internationale de l’énergie, et aussi <a href="https://doi.org/10.1088/1748-9326/ac6228">déclasser quelque 40 %</a> des réserves de combustibles fossiles déjà exploitées.</p>
<p>Cependant, je pense également qu’il faut replacer cette question dans un contexte mondial lorsque l’on discute de la présidence de la COP28 : des <a href="https://www.theguardian.com/environment/2023/sep/12/us-behind-more-than-a-third-of-global-oil-and-gas-expansion-plans-report-finds">plans de croissance des énergies fossiles bien plus importants</a> que ceux des Émirats arabes unis sont menés par les États-Unis, le Canada, la Russie, l’Iran, la Chine et le Brésil. La majeure partie du financement des énergies fossiles dans le monde provient de <a href="https://reclaimfinance.org/site/wp-content/uploads/2023/04/2023.04.13_Report_Banking-On-Climate-Chaos-2023.pdf">banques des États-Unis, du Canada et du Japon</a>. Et depuis 2015, les banques européennes ont <a href="https://reclaimfinance.org/site/en/2023/04/13/european-banks-are-among-the-biggest-drivers-of-fossil-fuel-expansion/">versé un montant colossal de 1,3 billion de dollars dans les combustibles fossiles</a>, dont 130 milliards de dollars pour la seule année 2022.</p>
<h2>Le programme de la COP28</h2>
<p>Dans notre évaluation, nous avons constaté que les Émirats arabes unis font déjà preuve d’un leadership qui va au-delà des présidences précédentes de la COP.</p>
<p><a href="https://cdn.uha.com.tr/content/files/cop-presidencies-comparative-analysis-tracked7073-230927011708.pdf">Notre rapport</a> a révélé que la valeur totale des projets d’énergie renouvelable prévus par les Émirats arabes unis avec divers partenaires au cours de la décennie s’élève à plus de 300 milliards de dollars. Selon notre analyse, ce montant est considérablement plus élevé que les investissements dans les énergies propres mobilisés par les présidences précédentes de la COP.</p>
<p>Le programme de la COP28 que les <a href="https://www.theguardian.com/environment/2023/jul/13/what-is-the-uae-cop28-plan-of-climate-action">Émirats arabes unis promeuvent</a> offre également une voie prometteuse pour accélérer la transition vers l’abandon des énergies fossiles.</p>
<p>Il prévoit de tripler la capacité des énergies renouvelables au cours des sept prochaines années, en réduisant encore les coûts pour <a href="https://www.smithschool.ox.ac.uk/sites/default/files/2023-05/Impact-on-solar-energy-costs-of-tripling-renewables-capacity-by-2030.pdf?ref=ageoftransformation.org">concurrencer rapidement les combustibles fossiles</a>, potentiellement au cours des <a href="https://doi.org/10.1016/j.joule.2022.08.009">20 prochaines années</a>.</p>
<p>Il demande également aux pays d’accepter de cesser la production d’énergies fossiles lorsque les émissions de CO<sub>2</sub> ne sont pas capturées d’ici au milieu du siècle, ce qui pourrait accélérer le développement <a href="https://theconversation.com/la-capture-et-le-stockage-du-carbone-comment-ca-marche-192673">de la capture, de l'utilisation et du stockage du CO2</a> à des fins commerciales.</p>
<p>Enfin, la restructuration du financement de la lutte contre le changement climatique pour le rendre moins coûteux et réduire le fardeau de la dette, comme le propose la présidence des Émirats arabes unis, pourrait <a href="https://fortune.com/2023/09/19/cop28-president-unga-transform-climate-finance-bridge-trillion-gap-environment-politics-sultan-al-jaber/">débloquer les milliers de milliards de dollars</a> dont le monde en développement a désespérément besoin pour soutenir ses transitions énergétiques tout en s’industrialisant. Étant donné que le manque de financement est le <a href="https://doi.org/10.1016/j.joule.2021.06.024">principal obstacle à la transition énergétique dans les pays en développement</a>, il est essentiel que la COP28 se concentre sur ce point.</p>
<p>Certes, le fait qu’un PDG du secteur pétrolier dirige un sommet sur le climat est inquiétant pour tous ceux qui prônent une réduction progressive et rapide des combustibles fossiles, et il reste à voir dans quelle mesure les Émirats arabes unis sont attachés à ces politiques. Mais mes coauteurs et moi-même <a href="https://cdn.uha.com.tr/content/files/cop-presidencies-comparative-analysis-tracked7073-230927011708.pdf">avons conclu</a> que si le sommet de la COP28 parvient à conclure des accords historiques sur les questions susmentionnées, il s’agira d’une avancée significative dans l’accélération d’une transition juste vers l’abandon des énergies fossiles. Mais aussi d’une amélioration considérable par rapport à ce qui a été proposé lors des précédents sommets de la COP.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216655/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>İbrahim Özdemir a précédemment été directeur général du département des affaires étrangères au sein du ministère de l'Éducation nationale en Turquie. Il a également été membre du Conseil de la Commission turque de l'UNESCO entre 2005 et 2010, de Turk Felsefe Dernegi (Association philosophique turque) entre 2001 et 2009, et de la Fondation turque pour la lutte contre l'érosion des sols, le reboisement et la protection des habitats naturels entre 2000 et 2004.</span></em></p>Une analyse des précédentes présidences des COP suggère que le programme des Émirats arabes unis pourrait apporter une contribution inédite à la sortie des énergies fossiles.Ibrahim Ozdemir, Professor of Philosophy, Uskudar University; Visiting Professor, Clark UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2152242023-10-18T17:03:13Z2023-10-18T17:03:13ZComment réduire le risque incendie posé par les batteries lithium-ion ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/552621/original/file-20231007-27-fz8jzx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Voiture électrique en charge</span> <span class="attribution"><span class="source">Mike Bird / Pexels</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Dans notre monde peuplé d’appareils électroniques, les batteries rechargeables lithium-ion sont partout. Par rapport aux batteries au plomb, qui ont dominé le marché pendant des décennies, elles présentent plusieurs avantages, comme une charge plus rapide et une densité énergétique plus élevée à poids égal.</p>
<p>De quoi rendre nos gadgets électroniques et nos voitures électriques plus légers et plus durables, au prix de quelques inconvénients. Car ces batteries contiennent plus d’énergie : si elles prennent feu, elles brûlent jusqu’à ce que toute l’énergie stockée soit libérée. Sauf qu’une telle libération soudaine d’énergie peut occasionner des explosions graves, sources de dégâts matériels et humains.</p>
<p>En tant que scientifiques spécialistes de la <a href="https://scholar.google.com/citations?user=jCXInTYAAAAJ&hl=en">production d’énergie</a>, de son <a href="https://scholar.google.com/citations?user=KsW8rMMAAAAJ&hl=en">stockage</a>, de sa <a href="https://scholar.google.com/citations?user=z7C3_h8AAAAJ&hl=en">conversion</a>, ainsi que l’<a href="https://scholar.google.com/citations?user=4WwXknoAAAAJ&hl=en">ingénierie automobile</a>, nous nous intéressons de près au développement de batteries à la fois de forte densité énergétique et sûres. Or, nous voyons des signes encourageants montrant que les fabricants de batteries progressent vers la résolution de ce problème technique important.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/yRPW8zN_c0E?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Éviter de surcharger ses appareils est un bon moyen pour réduire le risque d’incendie des batteries lithium-ion.</span></figcaption>
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<h2>Un nouveau type de risque incendie</h2>
<p>Le transport urbain est en train de subir une transformation majeure vers l’électrification. Alors que les villes du monde entier se préoccupent de plus en plus du changement climatique et de la qualité de l’air, les <a href="https://theconversation.com/boosting-ev-market-share-to-67-of-us-car-sales-is-a-huge-leap-but-automakers-can-meet-epas-tough-new-standards-203663">véhicules électriques</a> sont désormais sur le devant de la scène.</p>
<p><em>[Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</em></p>
<p>Dans le même temps, les vélos et scooters électriques transforment eux aussi les transports urbains en offrant des moyens pratiques et à faible émission de carbone pour naviguer dans les rues encombrées et réduire les embouteillages. Entre 2010 et 2022, les vélos et scooters électriques partagés (ceux appartenant à des réseaux de location) ont représenté <a href="https://nacto.org/2022/12/01/half-a-billion-rides-on-shared-bikes-and-scooters/">plus d’un demi-milliard de trajets</a> dans les villes américaines. Les vélos électriques privés viennent s’ajouter à ce total : en 2021, <a href="https://www.nationalgeographic.com/environment/article/electric-bike-sustainable-transportation">plus de 880 000 vélos électriques ont été vendus aux États-Unis</a>, contre 608 000 voitures et camions électriques.</p>
<p>Les véhicules électriques (VE) représentent une <a href="https://www.vox.com/the-highlight/2023/1/17/23470878/tesla-fires-evs-florida-hurricane-batteries-lithium-ion">petite partie</a> des incendies de voitures, mais <a href="https://www.cbsnews.com/news/lithium-ion-battery-fires-electric-cars-bikes-scooters-firefighters/">il est difficile pour les pompiers de contrôler les incendies de VE</a>. En règle générale, un incendie de VE brûle à environ 2 760 °C, alors qu’un véhicule à essence en feu brûle à 815 °C. Il faut environ 2 000 gallons d’eau – soit environ 7,5 mètres cubes d’eau – pour éteindre un véhicule à essence en feu. Dans certains cas, le contrôle d’un feu de VE peut demander <a href="https://www.bostonglobe.com/2023/01/20/metro/tesla-fire-takes-over-two-hours-20000-gallons-water-extinguish-after-wakefield-crash-police-say/">10 fois plus d’eau</a>.</p>
<p>Il s’agit d’une préoccupation majeure dans les grandes villes où les véhicules électriques sont populaires. Les services d’incendie de New York et de San Francisco déclarent ainsi avoir traité <a href="https://www.cbsnews.com/news/lithium-ion-battery-fires-electric-cars-bikes-scooters-firefighters/">plus de 660 incendies</a> impliquant des batteries lithium-ion depuis 2019. À New York, ces incendies ont causé <a href="https://www.nyc.gov/office-of-the-mayor/news/195-23/mayor-adams-plan-combat-lithium-ion-battery-fires-promote-safe-electric-micromobility#/0">12 décès et plus de 260 blessés</a> de 2021 à début 2023. Il y a un besoin clair d’améliorer les pratiques de manipulation et de charge des batteries, ainsi que de mettre en œuvre des améliorations techniques.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/549854/original/file-20230924-27-qr7gss.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Un vélo électrique avec un sac Uber Eats accroché au guidon à côté d’un bâtiment." src="https://images.theconversation.com/files/549854/original/file-20230924-27-qr7gss.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/549854/original/file-20230924-27-qr7gss.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/549854/original/file-20230924-27-qr7gss.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/549854/original/file-20230924-27-qr7gss.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/549854/original/file-20230924-27-qr7gss.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/549854/original/file-20230924-27-qr7gss.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/549854/original/file-20230924-27-qr7gss.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les vélos électriques sont populaires pour les services de livraison urbaine, ce qui signifie que de nombreux utilisateurs en dépendent pour leurs revenus.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/news-photo/uber-eats-electric-bike-parked-on-sidewalk-manhattan-new-news-photo/1428511600">Lindsey Nicholson/UCG/Universal Images Group via Getty Images</a></span>
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</figure>
<h2>Plusieurs batteries électriques par voiture électrique</h2>
<p>Pour comprendre les incendies de batteries lithium-ion, il est important de rappeler quelques principes de base. Une batterie contient des produits chimiques qui contiennent de l’énergie, avec une séparation entre ses deux électrodes. Elle fonctionne en <a href="https://engineering.mit.edu/engage/ask-an-engineer/how-does-a-battery-work/">convertissant cette énergie chimique en électricité</a>.</p>
<p>Les deux électrodes d’une batterie sont entourées d’un électrolyte, une substance qui permet à une charge électrique de circuler entre les deux bornes. Dans une batterie lithium-ion, ce sont les ions lithium qui portent la charge électrique. Lorsqu’un appareil est connecté à une batterie, des réactions chimiques se produisent aux électrodes et créent un flux d’électrons dans le circuit électrique externe qui alimente l’appareil.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/549855/original/file-20230924-27-91vn7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Infographie montrant les éléments d’une batterie lithium-ion" src="https://images.theconversation.com/files/549855/original/file-20230924-27-91vn7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/549855/original/file-20230924-27-91vn7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=564&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/549855/original/file-20230924-27-91vn7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=564&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/549855/original/file-20230924-27-91vn7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=564&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/549855/original/file-20230924-27-91vn7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=708&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/549855/original/file-20230924-27-91vn7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=708&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/549855/original/file-20230924-27-91vn7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=708&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Lorsqu’une batterie lithium-ion fournit de l’énergie à un appareil, les ions lithium (atomes porteurs d’une charge électrique) se déplacent de l’anode à la cathode. Les ions se déplacent en sens inverse lors de la recharge.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://flic.kr/p/8Erh2x">Argonne National Laboratory/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>Les téléphones portables et les appareils photo numériques peuvent fonctionner avec une seule batterie, mais une voiture électrique a besoin de beaucoup plus d’énergie et de puissance. En fonction de sa conception, un véhicule électrique peut contenir des <a href="https://www.samsungsdi.com/column/all/detail/54344.html">dizaines, voire des milliers de petites batteries individuelles</a>, appelées cellules. Les cellules sont regroupées en ensembles appelés modules, qui sont à leur tour assemblés en packs. Un véhicule électrique standard contient un grand bloc-batterie avec de nombreuses cellules à l’intérieur.</p>
<h2>Ce qui cause le départ de feu</h2>
<p>Généralement, un incendie de batterie <a href="https://doi.org/10.1038/s41557-023-01254-6">commence dans une seule cellule</a> au sein d’un bloc-batterie. Une batterie peut s’enflammer pour trois raisons principales :</p>
<ul>
<li><p>un dommage mécanique, tel qu’un écrasement ou un percement lors d’une collision entre véhicules,</p></li>
<li><p>un dommage électrique dû à un <a href="https://www.thespruce.com/what-causes-short-circuits-4118973">court-circuit</a> externe ou interne,</p></li>
<li><p>ou encore une surchauffe.</p></li>
</ul>
<p>Les courts-circuits des batteries peuvent être causés par une mauvaise manipulation ou par des réactions chimiques indésirables à l’intérieur de la cellule. Lorsque les batteries lithium-ion sont chargées trop rapidement, les réactions chimiques peuvent produire des aiguilles de lithium très pointues appelées dendrites sur l’anode (l’électrode avec une charge négative). Elles finissent par pénétrer le séparateur et atteindre l’autre électrode, ce qui provoque un court-circuit interne de la batterie.</p>
<p>De tels courts-circuits chauffent la cellule de la batterie à plus de 100 °C (212°F). La température de la batterie augmente d’abord lentement, puis d’un seul coup, atteignant sa température maximale en une seconde environ.</p>
<p>Un autre facteur qui rend les incendies de batteries lithium-ion difficiles à gérer est la production d’oxygène. Lorsque les oxydes métalliques de la cathode d’une batterie, ou une électrode chargée positivement sont chauffés, ils <a href="https://www.osti.gov/servlets/purl/1526722">se décomposent et libèrent de l’oxygène gazeux</a>. Les incendies ont besoin d’oxygène pour brûler, de sorte qu’une batterie capable de produire de l’oxygène peut entretenir un incendie.</p>
<p>En raison de la nature de l’électrolyte, une augmentation de 20 % de la température d’une batterie lithium-ion va aussi accélérer certaines réactions chimiques indésirables, ce qui va en retour dégager un excès de chaleur. Cette chaleur va faire augmenter la température de la batterie, ce qui accélère encore davantage les réactions. L’augmentation de la température de la batterie accroît le taux de réaction, créant un processus appelé <a href="https://spectrum.ieee.org/first-xray-views-into-overheating-lithiumion-batteries">emballement thermique</a>. Lorsque ce phénomène se produit, la température d’une pile peut passer de 100 °C à 1000 °C en une seconde.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/kHTlVmBbnPA?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">En cas d’emballement thermique, une batterie lithium-ion entre dans un état d’autoéchauffement incontrôlable qui peut conduire à un incendie ou à une explosion.</span></figcaption>
</figure>
<h2>Comment limiter l’emballement thermique</h2>
<p>Les méthodes pour assurer la sécurité des batteries peuvent se concentrer sur le suivi des conditions extérieures ou intérieures de la batterie. La protection extérieure implique en général l’utilisation de dispositifs électroniques tels que des capteurs de température et des soupapes de pression pour s’assurer que la batterie n’est pas soumise à une chaleur ou à une contrainte susceptible de provoquer un accident.</p>
<p>Cependant, ces mécanismes vont augmenter la taille et le poids des batteries, ce qui peut réduire les performances de l’appareil qu’elle alimente (<em>si le véhicule doit déplacer un poids de batterie plus élevé, ndlt</em>). De plus, ils ne sont pas toujours fiables en cas de températures ou de pressions extrêmes, comme celles produites lors d’un accident de voiture.</p>
<p>Les stratégies de protection interne, de leur côté, se concentrent sur l’utilisation d’équipements à sécurité intrinsèque. Cette approche permet de traiter les risques à la source.</p>
<p>Pour réduire l’intensité de l’emballement thermique d’une batterie, il faut une donc une <a href="https://doi.org/10.1016/j.ensm.2017.05.013">combinaison d’améliorations logicielles et matérielles</a>. Les scientifiques travaillent à la mise au point de cathodes qui libèrent moins d’oxygène lorsqu’elles se décomposent, d’électrolytes non inflammables, <a href="https://doi.org/10.1007/s40820-023-01178-3">d’électrolytes à l’état solide</a> qui ne s’enflamment pas et peuvent également contribuer à réduire la croissance des dendrites, et enfin de séparateurs qui peuvent <a href="https://doi.org/10.1002/adma.202302280">résister à des températures élevées sans fondre</a>.</p>
<p>Une autre solution est déjà utilisée : les <a href="https://www.synopsys.com/glossary/what-is-a-battery-management-system.html">systèmes de gestion des batteries, ou BMS (Battery Management System)</a>. Il s’agit d’équipements matériels et de logiciels intégrés dans les batteries qui peuvent surveiller les paramètres vitaux de la batterie, tels que l’état de charge, la pression interne et la température des cellules de la batterie.</p>
<p>Tout comme un médecin se base sur les symptômes d’un patient pour diagnostiquer et traiter sa maladie, les BMS peuvent diagnostiquer les problèmes au sein du bloc-batterie et prendre des décisions autonomes pour éteindre les batteries présentant des points chauds, ou pour modifier la répartition de la charge afin qu’aucune batterie individuelle ne devienne trop chaude.</p>
<p>La composition chimique des batteries évolue rapidement, de sorte que les conceptions les plus récentes vont demander le développement de nouveaux BMS. De nombreux producteurs de batteries <a href="https://www.graphene-info.com/nanotech-energy-soteria-battery-innovation-group-and-voltaplex-energy-join">forment des partenariats</a> qui rassemblent des fabricants ayant des compétences complémentaires afin de relever ce défi.</p>
<p>Les utilisateurs peuvent également prendre des mesures pour <a href="https://www.usfa.fema.gov/prevention/vehicle-fires/electric-vehicles/">maximiser la sécurité</a> de leurs équipements, par exemple :</p>
<ul>
<li><p>Utiliser l’équipement de charge et les prises recommandés par le fabricant, et évitez de surcharger ou de laisser un VE branché pendant la nuit.</p></li>
<li><p>Inspecter régulièrement la batterie pour détecter tout signe de dommage ou de surchauffe.</p></li>
<li><p>Garer le véhicule <a href="https://www.latimes.com/business/story/2023-07-13/how-a-heat-wave-will-hurt-your-ev-battery">loin d’un environnement trop chaud ou trop froid</a> – par exemple, garez-vous à l’ombre pendant les vagues de chaleur – pour éviter que la batterie ne subisse un stress thermique.</p></li>
<li><p>Enfin, en cas de collision ou d’accident impliquant un VE, suivez les protocoles de sécurité du fabricant et débrancher la batterie si possible afin de minimiser les risques d’incendie ou d’électrocution.</p></li>
</ul><img src="https://counter.theconversation.com/content/215224/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les batteries au lithium-ion sont partout, des vélos aux voitures électriques. Et posent de nouveaux risques d’incendie, voire d’explosion, en cas de dommage ou de surchauffe. Comment y faire face ?Apparao Rao, Professor of Physics, Clemson UniversityBingan Lu, Associate Professor of Physics and Electronics, Hunan UniversityMihir Parekh, Postdoctoral Fellow in Physics and Astronomy, Clemson UniversityMorteza Sabet, Research Assistant Professor of Automotive Engineering, Clemson UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2132652023-09-12T21:50:34Z2023-09-12T21:50:34ZSanctions occidentales contre la Russie : l’Asie à la rescousse de Moscou<p>Avant d’envahir l’Ukraine en février 2022, la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/russie-21217">Russie</a> avait, semble-t-il, anticipé les sanctions financières occidentales. Malgré celles-ci, et celles qui ont ciblé son commerce, l’économie russe a en effet affiché une relative solidité dans les mois qui ont suivi le début de la guerre. Ce résultat reflète la réallocation géographique rapide de son <a href="https://theconversation.com/fr/topics/commerce-exterieur-61077">commerce extérieur</a> et sa préparation aux sanctions, avec la mise en place de nombreux circuits de contournements et un pivot manifeste vers l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/inde-23095">Inde</a>, la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/turquie-21579">Turquie</a>, et surtout la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/chine-20235">Chine</a>.</p>
<p>En 2022, la Russie a enregistré un excédent commercial de 284 milliards de dollars vis-à-vis de ses principaux partenaires commerciaux. Cet excédent considérable, plus du double de celui de 2019, masque néanmoins les tendances du commerce russe depuis le déclenchement du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/conflit-russo-ukrainien-117340">conflit</a>. En effet, l’excédent commercial qui atteignait près de 33 milliards de dollars en mars et avril 2022 s’est considérablement réduit depuis – 14 milliards en décembre (graphique 1a) –, mais reste toutefois supérieur à ce qu’il était en moyenne mensuelle entre 2019 et 2021 (10 milliards de dollars).</p>
<p>Sous les effets cumulés de la hausse des prix de l’énergie et de la montée en puissance progressive des sanctions, les exportations russes, après avoir progressé en début d’année, ont entamé une baisse graduelle à partir d’avril 2022 (graphique 1b). Mais, grâce à la réorientation de ses échanges vers les pays non alignés – ceux qui n’ont pas pris de sanctions à son encontre à la suite de l’invasion de l’Ukraine – la Russie a pu préserver des recettes plus élevées que celles enregistrées en moyenne entre 2019 et 2021.</p>
<h2>Un tournant commercial vers l’Asie</h2>
<p>Du côté des importations, la chute massive, dans la foulée de l’invasion de l’Ukraine, de 18 milliards à 8,5 milliards de dollars entre février et avril 2022, a été suivie d’une reprise lente jusqu’à un retour, au dernier trimestre 2022, au niveau mensuel moyen observé sur la période 2019-2021, essentiellement grâce à la Chine (graphique 1c).</p>
<h2>Graphique 1 : Une réallocation du commerce extérieur russe vers les pays non alignés</h2>
<p><iframe id="9iHlZ" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/9iHlZ/4/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p><iframe id="I3Cfi" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/I3Cfi/6/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p><iframe id="oNQWA" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/oNQWA/5/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>En décembre 2022, cette dernière fournissait en effet 52 % des importations russes, contre 27,6 % en moyenne sur la période 2019- 2021, de quoi compenser la baisse des importations en provenance des pays alignés, essentiellement de l’Union européenne (UE) dont la part dans les importations russes n’était plus que de 24 % en décembre 2022 contre 48 % en moyenne sur la période 2019-2021. En définitive, l’Inde, la Chine et la Turquie ont offert des débouchés aux exportations russes tandis que, côté importations, la Chine a remplacé les pays alignés.</p>
<h2>De nouvelles destinations pour le pétrole russe</h2>
<p>Représentant 52 % de ses exportations en 2022, les produits pétroliers ont permis à la Russie d’engranger 238 milliards de dollars (exportations nettes) au cours de l’année. Malgré les restrictions croissantes visant ces produits, dans le but d’affaiblir ses recettes d’exportations et de rendre l’effort de guerre plus difficile, la Russie a profité de la hausse des prix de l’énergie, dans un contexte de reprise post-crise sanitaire, et de la fragmentation internationale quant aux sanctions à adopter en réponse à son agression pour maintenir, voire accroître sa rente pétrolière (graphique 2).</p>
<p>Alors qu’à partir de mars 2022, du fait des embargos mis en place rapidement, les flux à destination des États-Unis et du Royaume-Uni déclinent et atteignent, dès le mois de mai des quantités négligeables, que l’UE – un peu plus lentement – réduit ses importations (passant d’environ 12 milliards de dollars en mars à 6 milliards en décembre 2022), la Chine, et surtout l’Inde ont vu leurs importations augmenter (graphique 2).</p>
<h2>Graphique 2 : Les exportations de produits pétroliers déroutées vers l’Inde et la Chine</h2>
<p><iframe id="g2jzx" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/g2jzx/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<h2>Une relative résilience des importations</h2>
<p>Si, grâce à la Chine, les importations russes ont fait preuve de résilience, cela ne signifie pas pour autant qu’elle s’est substituée à l’Europe sur les produits sanctionnés. La Chine peut en effet avoir accru ses exportations sur les produits non sanctionnés ou les avoir augmentées au-delà de la baisse des exportations européennes vers la Russie sur certains produits sanctionnés, et peu sur d’autres, de telle sorte que l’on observe une variation des exportations chinoises d’une ampleur qui ne reflète pas la réalité de la substitution.</p>
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<p>Et c’est, d’une certaine manière, ce que l’on constate : sur plus de 2 milliards de dollars de baisses d’importations en provenance de l’UE, la compensation a été de moins de 10 %, tandis qu’elle n’a été supérieure à 80 % que pour 515 millions de dollars de baisses d’importations.</p>
<p>Ainsi, alors que la Chine est le principal pays qui a compensé les baisses d’importations en provenance d’Europe du fait des sanctions, moins de 24 % l’ont été ; le cas le plus flagrant étant celui des importations de matériel de transport en provenance d’Europe pour lesquelles plus des 75 % de la baisse – très forte – n’ont pas été compensées.</p>
<h2>Une dédollarisation en faveur du yuan</h2>
<p>En revanche, la Chine a offert à la Russie des moyens de contourner les sanctions financières. Il faut dire que depuis les sanctions liées à l’annexion de la Crimée en 2014, la banque centrale russe a non seulement fortement accumulé des réserves, mais aussi diversifié ses avoirs étrangers. Alors que la part du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/dollar-85009">dollar</a> dans les réserves s’élevait à 44 % 2014, celle-ci n’était plus que de 11 % en 2022, une partie importante des réserves ayant été transférée vers le yuan et l’or : le yuan représentait 17 % des réserves et 22 % d’entre elles étaient détenues en or fin 2022 (graphique 4a).</p>
<p>Contrairement à 2014, la banque centrale s’était donc préparée aux restrictions avant l’invasion de l’Ukraine, en « dédollarisant » ses réserves de change, ce qui a permis au rouble, après s’être fortement déprécié face au dollar à la suite du déclenchement du conflit et des sanctions de février 2022, de rapidement revenir à son niveau d’avant-guerre, atteignant le taux de 54,5 roubles pour un dollar en juin 2022, niveau jamais connu depuis 2015 – en moyenne mensuelle.</p>
<p>En autorisant en septembre 2022 la Chine à payer ses achats de gaz russe en yuans et en roubles, Moscou a aussi, par ce biais, accentué la dédollarisation de l’économie russe. Cette inflexion concerne l’ensemble des exportations : ainsi, avant l’invasion de l’Ukraine, plus de 80 % des exportations étaient libellées en monnaies des pays alignés comme le dollar et l’euro, contre 12 % pour le yuan ; ce dernier atteint fin 2022 plus de 35 % dans le paiement des exportations, la part du dollar et de l’euro étant quant à elle passée sous la barre des 50 % (graphique 4b).</p>
<h2>Graphique 3 : La diversification des réserves internationales et la dédollarisation de l’économie russe en 2022</h2>
<p><iframe id="lwdtg" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/lwdtg/5/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p><iframe id="KI0BL" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/KI0BL/3/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Au total, l’évolution des échanges commerciaux et du rouble montre qu’il ne fallait pas attendre des sanctions occidentales un effondrement <em>immédiat</em> de l’économie russe. Leurs effets devront être appréhendés à plus longue échéance puisqu’en rendant l’effort de guerre plus difficile pour la Russie, elles devraient peser à terme sur les plans économique, financier et technologique. Ces effets commencent d’ailleurs à se faire sentir avec une dépréciation du rouble de l’ordre de 30 % depuis le début de l’année 2023 – particulièrement marquée depuis la fin du printemps – en raison notamment du poids financier de la guerre, couplé à la baisse des recettes pétrolières du fait des sanctions entrées en vigueur fin 2022.</p>
<hr>
<p><em>Cet article reprend des extraits de la lettre du Cepii de juillet-août 2023 intitulée <a href="http://www.cepii.fr/CEPII/fr/publications/lettre/abstract.asp?NoDoc=13860">« Russie : sanctions occidentales et échappatoires orientales »</a> et accessible gratuitement en version intégrale sur le site du Cepii</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213265/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Mignon est conseiller scientifique au CEPII, membre du Cercle des économistes, présidente de la section 05 (sciences économiques) du CNU et secrétaire générale l'AFSE.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Carl Grekou et Lionel Ragot ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>La relative résistance de l’économie russe s’explique notamment par la place grandissante du yuan chinois dans ses échanges financiers extérieurs.Carl Grekou, Économiste, CEPIILionel Ragot, Conseiller scientifique au CEPII, professeur d'économie, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresValérie Mignon, Professeure en économie, Chercheure à EconomiX-CNRS, Conseiller scientifique au CEPII, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2079942023-07-31T16:18:18Z2023-07-31T16:18:18ZLa géothermie, enjeu majeur pour la neutralité carbone des zones urbaines<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/535148/original/file-20230701-38457-wue7l3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C0%2C955%2C633&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Depuis début 2023, les villes de Grigny et Viry-Châtillon mettent en place un réseau de chaleur par géothermie profonde.</span> <span class="attribution"><span class="source">Thibaut Faussabry</span></span></figcaption></figure><p>Afin de limiter le réchauffement climatique à +1,5 °C depuis l’ère préindustrielle, il est indispensable d’atteindre la <a href="https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/sites/2/2019/09/IPCC-Special-Report-1.5-SPM_fr.pdf">neutralité carbone en 2050</a>.</p>
<p>En France, un objectif de réduction d’émission de gaz à effet de serre de 55 % entre 1990 et 2030 est actuellement discuté, et implique de <a href="https://theconversation.com/climat-le-casse-tete-de-la-strategie-nationale-bas-carbone-208069">tripler le rythme de nos efforts de baisse des émissions annuelles</a>. Pour cela, il convient de réduire fortement toutes dépendances aux énergies fossiles : charbon, pétrole et gaz.</p>
<p>En France, le secteur des bâtiments (résidentiel et tertiaire) reste très dépendant <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-%20energie-2021/pdf/chiffres-cles-de-l-energie-edition-2021.pdf">du gaz (30 %)</a>. Ainsi, plus des deux tiers de la population française vit dans des <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/5039853?sommaire=5040030">territoires urbains de plus de 5 000 habitants</a>, qui sont chauffés à <a href="https://franceurbaine.org/sites/franceurbaine.org/files/documents/franceurbaine_org/fu-panorama_energetique_des_territoires_urbains-v23082019.pdf">51 % par le gaz du réseau public</a>.</p>
<p>Travailler sur l’empreinte énergétique de ces territoires est donc un enjeu de taille, et il devient urgent de s’orienter vers des sources d’énergie moins carbonées. Pour cela, le déploiement de la géothermie (tant profonde que de surface) pour chauffer ou refroidir les bâtis semble indispensable.</p>
<h2>Qu’est-ce que la géothermie ?</h2>
<p>La <a href="https://theconversation.com/il-existe-plusieurs-types-de-geothermie-comment-marchent-ils-et-quels-sont-les-risques-153923">géothermie</a>, c’est-à-dire la mobilisation de la chaleur contenue dans le sous-sol, est l’une des méthodes permettant de réaliser la transition énergétique.</p>
<p>Cette énergie est présente partout à la surface de la Terre, avec en moyenne, une augmentation de la température en fonction de la profondeur d’environ 3,5 °C tous les 100 m. En plus d’être abondante, elle est bas carbone, renouvelable, non intermittente et elle peut être produite localement !</p>
<p>En France, <a href="http://www.afpg.asso.fr/nos-2-filieres/">deux types de géothermie</a> sont utilisés : la géothermie de surface et la géothermie profonde.</p>
<p>La géothermie de surface (ou de faible profondeur, ou de minime importance selon la loi française) exploite la chaleur à une profondeur superficielle du sous-sol, inférieure à 200 m, et avec une température d’environ 15 °C.</p>
<p>Elle permet de chauffer, alimenter en eau chaude sanitaire, ou fournir de la fraîcheur, et est particulièrement adaptée pour des besoins individuels, ou pour les besoins collectifs et tertiaires de petite taille, comme les écoles ou les hôpitaux.</p>
<p>Pour cela, elle utilise <a href="https://infoterre.brgm.fr/rapports//RP-71139-FR.pdf">deux systèmes différents</a>. Le premier (appelé pompe à chaleur géothermique sur nappe) est un système en boucle ouverte réalisé par deux forages (on parle de doublet géothermique). L’eau chaude est pompée par le premier forage, amenée en surface où une pompe à chaleur permet l’échange calorifique, puis réinjectée, avec quelques degrés de moins, à la même profondeur par le second forage.</p>
<p>Ce système présente de très bonnes performances tout au long de l’année, et est le <a href="https://infoterre.brgm.fr/rapports//RP-71139-FR.pdf">plus avantageux d’un point de vue économique</a>. Cependant, son installation dépend beaucoup de la présence d’une nappe exploitable et nécessite un terrain suffisamment grand pour installer les deux forages, qui doivent être séparés de <a href="https://www.geothermies.fr/accompagner-votre-projet#installer">plusieurs dizaines de mètres</a> au moins.</p>
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<p>Le deuxième système utilisé en géothermie de surface est un système en boucle fermée, principalement constitué de sondes géothermiques verticales en U dans lequel circule un fluide conducteur de chaleur. Ce système peut être dimensionné selon la taille du bâtiment, en allant de la maison individuelle (sonde unique) aux bâtiments plus grands comme des bureaux, résidences, hôtels, hôpitaux (champs de sonde).</p>
<p>Il est particulièrement efficace en cas d’utilisation alternée refroidissement/chauffage : la chaleur rejetée dans le sol en été (lors du fonctionnement de la pompe à chaleur en mode climatisation) peut être utilisée l’hiver pour le chauffage.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Puit géothermique, ressemblant à un haut assemblage de tuyaux maintenus par un échafaudage, avec un bâtiment en préfabriqué entourant le tout à un tier de hauteur" src="https://images.theconversation.com/files/535147/original/file-20230701-19-zn1tw7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/535147/original/file-20230701-19-zn1tw7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/535147/original/file-20230701-19-zn1tw7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/535147/original/file-20230701-19-zn1tw7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/535147/original/file-20230701-19-zn1tw7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1006&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/535147/original/file-20230701-19-zn1tw7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1006&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/535147/original/file-20230701-19-zn1tw7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1006&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Forage de géothermie profonde sur le site d’Évry.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://rapport-activite.brgm.fr/fr/cfg-2022-2023-periode-charniere">CGF/BRGM</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La géothermie profonde, quant à elle, peut exploiter la chaleur de l’eau géothermale présente entre 500 m et 2 500 m de profondeur, avec des températures comprises entre 30 °C et 90 °C, pour alimenter des réseaux de chaleur urbains.</p>
<p>Elle est adaptée à de gros réseaux de distribution, par exemple pour des habitats collectifs de quartiers entiers, pouvant typiquement alimenter 5 000 à 6 000 logements.</p>
<p>Son fonctionnement est assez similaire à celui de la géothermie de surface sur nappe : il utilise un doublet géothermique qui pompe le fluide chaud par un forage et le renvoie par un autre. En revanche, au vu des températures élevées, la pompe à chaleur est remplacée par une centrale géothermique qui assure l’échange de chaleur.</p>
<h2>L’exemple de la région Île-de-France</h2>
<p>L’Île-de-France regroupe environ 20 % de la population française. En conséquence, ses besoins en énergie thermique (chaleur, eau chaude sanitaire et climatisation) sont énormes : environ <a href="https://hal.science/hal-03871752">90 TWh par an</a>.</p>
<p>Les réseaux de chaleur du territoire francilien fournissent 14,5 TWh d’énergie, dont <a href="https://www.arec-idf.fr/fileadmin/DataStorageKit/AREC/Etudes/pdf/bilan_consommations_productions__2_.pdf">51 % (7,4 TWh) proviennent d’énergies renouvelables</a>. Plus spécifiquement, 27 % de l’énergie totale est produite par les réseaux de chaleur fatale (c’est-à-dire la chaleur produite comme effet secondaire d’une autre production ; par exemple, celle provenant des incinérateurs de déchèteries), 11 % par la géothermie et 10 % par la biomasse.</p>
<p>En 2020, l’Île-de-France comptait ainsi 50 installations de géothermie en exploitation, plaçant l’Île-de-France comme l’une des régions du monde concentrant le <a href="https://doi.org/10.1016/j.geothermics.2020.101915">plus d’unités de production géothermique</a> alimentant des réseaux de chaleur.</p>
<p>La majeure partie de ces installations sont des installations de géothermie profonde, qui produisent environ 1,7 TWh, soit 11 % des 14,5 TWh délivrés par la totalité des réseaux de chaleur de la région.</p>
<p>La chaleur est extraite essentiellement depuis l’aquifère du Dogger, une couche géologique constituée de calcaires d’âge jurassique moyen et présente à environ 1 500 m de profondeur. Ces calcaires ont de bonnes propriétés réservoirs, c’est-à-dire une bonne porosité et perméabilité, et contiennent une nappe d’eau chaude, à environ 70 °C.</p>
<p>L’aquifère du Dogger étant exploité de manière intensive dans certaines parties de la région, l’objectif d’augmenter la production passe par une très bonne connaissance géologique du réservoir géothermique pour une meilleure gestion. Cela implique également de cibler et prospecter de nouvelles zones ou d’autres aquifères.</p>
<h2>Pour un développement de la géothermie de surface</h2>
<p>À l’inverse de la géothermie profonde, la ressource géothermique de surface exploitée par pompe à chaleur est très largement sous-utilisée en Île-de-France, et ne couvre qu’une part négligeable de l’énergie nécessaire en chaleur ou production de fraîcheur de la région.</p>
<p>Or, elle possède un avantage considérable : elle permet également de facilement <a href="https://theconversation.com/la-geothermie-une-solution-a-la-hausse-des-temperatures-144246">fournir du froid</a> durant l’été. Ce rafraîchissement peut passer par les pompes à chaleur, mais également par le géocooling, qui utilise la température faible du sous-sol (12 °C) pour rafraîchir directement et naturellement des bâtiments.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/535523/original/file-20230704-15-4w7clz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Schéma des différents modes de géothermie et de leur fonctionnement" src="https://images.theconversation.com/files/535523/original/file-20230704-15-4w7clz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/535523/original/file-20230704-15-4w7clz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=502&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/535523/original/file-20230704-15-4w7clz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=502&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/535523/original/file-20230704-15-4w7clz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=502&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/535523/original/file-20230704-15-4w7clz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=631&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/535523/original/file-20230704-15-4w7clz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=631&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/535523/original/file-20230704-15-4w7clz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=631&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Exemple d’utilisation de chaleur ou froid en milieu urbain. En géothermie profonde, la chaleur est exploitée par un doublet, alimentant un réseau de chaleur urbain collectif. En géothermie de surface, une pompe à chaleur (PAC) exploite l’énergie du sous-sol avec des sondes ou des doublets sur nappe pour chauffer les bâtiments en hiver. Cette PAC peut être réversible, utilisée en mode climatisation l’été, ou encore en pause. En l’absence de PAC, les sondes peuvent rafraîchir les bâtiments par géocooling.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Benjamin Brigaud</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Or, cette possibilité de refroidissement est d’autant plus cruciale qu’une ou deux canicules par année sont prédites sur la région à la fin du siècle, avec des températures maximales qui <a href="https://hal.science/hal-03871752">pourront frôler les 50 °C</a> (période 2070-2100). À titre de comparaison, seulement 9 périodes de canicules ont été observées sur la période 1960-1990, avec une température maximum de 38 °C…</p>
<p>Le développement de la géothermie de surface suscite donc un intérêt croissant. Il s’agit d’un enjeu crucial, comme l’avait <a href="https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2022/10/hcp_ouverture-n12-geothermiesurface.pdf">récemment souligné le Haut-Commissaire au Plan</a> François Bayrou fin 2022.</p>
<p>Le développement intensif de la géothermie de surface et profonde sur l’ensemble de la région Île-de-France semble donc indispensable pour que les zones urbaines atteignent une neutralité carbone en termes de chauffage et de refroidissement des bâtiments. Améliorer nos connaissances géologiques du sous-sol des zones urbaines et former de jeunes géologues, experts des descriptions des roches ou des techniques de forage géothermique, sera un enjeu important si nous voulons prendre le virage de la géothermie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207994/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Benjamin Brigaud ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour atteindre la neutralité carbone, il est nécessaire de diminuer l’empreinte énergétique des zones urbaines. Le recours accru à la géothermie de surface est une piste qui doit être explorée.Benjamin Brigaud, Professeur en géologie et géothermie, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2094672023-07-12T15:39:04Z2023-07-12T15:39:04ZFrance-Allemagne, frères ennemis de la transition énergétique<p>Si le couple franco-allemand est fréquemment décrit comme le « moteur de l’Europe », il y a un domaine dans lequel il peut être qualifié de dysfonctionnel : celui de l’énergie.</p>
<p>Une situation d’autant plus inquiétante que chacun des modèles énergétiques portés par l’un et l’autre pays sont aujourd’hui en difficulté ; un différend persistant qui déstabilise de manière récurrente <a href="https://www.cairn.info/revue-l-economie-politique-2023-1-page-8.htm">l’ensemble de l’édifice du <em>Fit for 55</em></a>, le <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/fit-55-nouveau-cycle-politiques-europeennes-climat">« paquet climat » de l’Union européenne</a>.</p>
<p>À partir d’une note approfondie <a href="https://confrontations.org/geopolitique-de-lenergie-en-europe-comment-reconcilier-une-union-desunie/">publiée en juin 2023 dans <em>Confrontations Europe</em></a> – et qui s’appuie notamment sur les analyses en politique comparative de <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-de-politique-comparee-2017-1-page-17.htm">Stefan Aykut et Aurélien Evrard</a> –, nous proposons ici de retracer une brève « histoire longue » des trajectoires énergétiques de la France et de l’Allemagne.</p>
<p>Il s’agit de mettre en lumière les fractures principales et d’identifier ce que pourraient être des principes d’action commune.</p>
<h2>Des années 1950 aux crises du charbon et du pétrole</h2>
<p>En Allemagne, après la Seconde Guerre mondiale, alors que le pays est exclu du nucléaire militaire, le charbon et le lignite vont, du fait de ressources très importantes, jouer un rôle essentiel dans la reconstruction.</p>
<p>Le secteur énergétique est originellement au cœur du corporatisme à l’allemande, s’appuyant sur le rôle des syndicats et des <em>Stadtwerke</em>, régies locales pour la gestion des services industriels et de l’énergie. Les crises du charbon des années 1950 et 1960, puis la crise du pétrole des années 1970, vont marquer une plus forte intervention de l’État fédéral, avec un plan de soutien au charbon national et le lancement d’un programme nucléaire.</p>
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<p>À la fin des années 1970, la part du charbon dans l’énergie primaire est stabilisée à 30 % et celle du nucléaire à 40 % pour l’électricité. Mais les transformations engagées le sont dans une géopolitique régionale de l’énergie avec, au Nord-Ouest, des régions historiquement charbonnières et bastions du SPD (Parti social-démocrate) et, au Sud-Est, des Länder conservateurs (CDU et CSU) soutenant le développement du nucléaire sur leur territoire. Cette dichotomie dans la « communauté de politique publique » sera mise à profit par le mouvement antinucléaire.</p>
<p>En France, à l’inverse, la première caractéristique du système énergétique est sans doute sa centralisation extrême, consacrée par la loi de nationalisation de 1946, qui ne laisse qu’exceptionnellement une place aux régies et entreprises locales.</p>
<p>Dans cette perspective, les intérêts d’EDF et ceux de l’État, représenté notamment par la puissante Direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP), sont considérés par la technocratie d’État comme ne faisant qu’un. C’est au sein de cette communauté de vues qu’est élaboré le programme nucléaire français.</p>
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<figcaption><span class="caption">1974, la France lance son programme nucléaire civil. (Ina Sciences).</span></figcaption>
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<p>Comme en Allemagne, le choc pétrolier de 1973 déclenchera des politiques publiques volontaristes pour l’indépendance énergétique. La mise en application de la vision « tout électrique, tout nucléaire » se traduira par un programme très ambitieux, le plan Messmer, calibré en fonction de prévisions de demande généreuses et des capacités de l’industrie à produire des centrales nucléaires en série. Cela au service de l’indépendance énergétique et de la « grandeur de la France ».</p>
<h2>Après les chocs pétroliers et avec la crise climatique, deux récits de la transition</h2>
<p>En Allemagne, le récit de la transition, <em>Energiewende</em>, se forge dans les années 1980, à partir des analyses d’intellectuels publics sur la crise écologique (Robert Jungk, Carl Friedrich von Weizsäcker), de la contestation anti-nucléaire, portée par le parti écologiste <em>Die Grünen</em>, et de travaux d’experts de l’énergie, comme ceux de <a href="https://www.oeko.de/en/up-to-date/final-storage-the-search-gathers-pace">l’Öko-Institut</a>.</p>
<p>Mais, progressivement, la remise en cause initiale du modèle de croissance laisse place à une vision plus consensuelle, défendant l’idée de « croissance et prospérité sans pétrole ni uranium ». Cette perspective diffuse progressivement au sein du SPD dans des alliances « rouge vert » au niveau local, puis fédéral dans les coalitions de 1998 et 2002.</p>
<p>Alors que les partis conservateurs sont sur la réserve, la coalition qui porte Angela Merkel au pouvoir en 2005 plaide pour un maintien du nucléaire comme « énergie de transition ». L’accident de Fukushima fera basculer la perspective et entraînera la décision pour une sortie en 2022.</p>
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<figcaption><span class="caption">Suite à la catastrophe de Fukushima, Angela Merkel annonce la sortie du nucléaire pour Allemagne à l’horizon 2022. (Euronews, 2011).</span></figcaption>
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<p>En France, la « communauté de politique publique » soutenant le nucléaire reste solide et stable. Ni la catastrophe de Tchernobyl en 1986 ni le retour au pouvoir de la « gauche plurielle » en 1997 ne changeront la donne. En revanche, après la signature la même année du Protocole de Kyoto, on assiste à un regain d’intérêt pour les questions énergétiques : <a href="https://negawatt.org/">l’association négaWatt</a> publie régulièrement depuis 2006 des scénarios de sobriété et forte proportion d’énergies renouvelables.</p>
<p>Après l’élection de François Hollande, le Débat national sur la transition énergétique constitue, en 2013, un temps fort de la construction des récits et conduit à identifier quatre trajectoires de transition, selon le niveau de réduction de la demande et la contribution respective du nucléaire et des énergies renouvelables.</p>
<p>Ces quatre trajectoires – allant de la très grande sobriété avec sortie du nucléaire, au maintien du modèle actuel fortement nucléarisé –, reflètent fidèlement les <a href="https://theconversation.com/quatre-scenarios-pour-comprendre-les-programmes-des-candidats-en-matiere-denergie-72308">positionnements des grands courants politiques</a> en France.</p>
<p>Depuis lors, dans la paralysie tenant aux enjeux électoraux, les documents de référence de la politique énergétique française (<a href="https://outil2amenagement.cerema.fr/la-programmation-pluriannuelle-de-l-energie-ppe-r1625.html">PPE</a>, <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/strategie-nationale-bas-carbone-snbc">SNBC</a>) ont laissé dans un brouillard épais la <a href="https://theconversation.com/50-de-nucleaire-dans-le-mix-electrique-pour-2035-et-apres-104521">question de la part du nucléaire à long terme</a>.</p>
<p>Cela jusqu’aux dernières décisions de <a href="https://www.actu-environnement.com/ae/news/nucleaire-macron-relance-EPR-39086.php4">redéveloppement de nouveaux réacteurs</a> prises par Emmanuel Macron, juste avant les présidentielles de 2022.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/536649/original/file-20230710-17-qjfszb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/536649/original/file-20230710-17-qjfszb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/536649/original/file-20230710-17-qjfszb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/536649/original/file-20230710-17-qjfszb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/536649/original/file-20230710-17-qjfszb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/536649/original/file-20230710-17-qjfszb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/536649/original/file-20230710-17-qjfszb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/536649/original/file-20230710-17-qjfszb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Conversion des énergies selon la convention 1 MWh d’électricité primaire (renouvelable ou nucléaire) = 0,21 tep (voir à ce propos l’article publié sur The Conversation, <em>Le nucléaire 40 ou 20 % de l’approvisionnement énergétique en France ?</em>).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs, données Enerdata</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Cinquante ans après le premier choc pétrolier et trente ans après la signature de la <a href="https://unfccc.int/fr/processus-et-reunions/qu-est-ce-que-la-ccnucc-la-convention-cadre-des-nations-unies-sur-les-changements-climatiques">Convention Cadre des Nations unies sur le changement climatique</a>, les résultats en termes de mix énergétique sont extrêmement contrastés. Force est de constater que la France a aujourd’hui un bouquet énergétique deux fois plus décarboné que celui de l’Allemagne (52 % contre 26 %), même si la part des énergies renouvelables y est légèrement plus faible (18 % contre 22 %). Mais les deux modèles sont en crise.</p>
<h2>Aujourd’hui, deux modèles en crise</h2>
<p>Dans les bouleversements consécutifs à la guerre en Ukraine, la crise du modèle énergétique français, fondé sur une forte contribution du nucléaire, est manifeste et a abouti à une réduction de 30 % de la production nucléaire en 2022 <a href="https://www.rte-france.com/actualites/bilan-electrique-2022">par rapport à la moyenne de ces vingt dernières années</a>, dans une période par ailleurs critique pour le système électrique européen.</p>
<p>Le rétablissement de niveaux de production stables à long terme dans le contexte du « grand carénage » des centrales existantes, comme le financement du redémarrage de la filière pour la construction de six unités supplémentaires au moins, sont possibles, mais ne sont pas garantis. À ces incertitudes s’ajoutent évidemment celles tenant à l’incontournable accélération du déploiement des renouvelables, <a href="https://www.rte-france.com/analyses-tendances-et-prospectives/bilan-previsionnel-2050-futurs-energetiques">dans toutes les hypothèses des scénarios RTE</a>.</p>
<p>Quant à l’Allemagne, l’<em>Energiewende</em> doit faire face aujourd’hui à de nouveaux défis, dans un contexte périlleux et incertain. Le schéma premier de l’<a href="https://theconversation.com/une-allemagne-sans-charbon-en-2040-cest-mal-parti-pour-linstant-66648"><em>Energiewende</em> était bien celui d’une « fusée à trois étages »</a>, comprenant le développement des renouvelables, la sortie du nucléaire puis celle du charbon.</p>
<p>On peut considérer qu’au début des années 2020, les deux premières phases ont été menées ; la sortie du charbon était, elle, encore loin d’être achevée en 2022, avec encore 31 % de la production d’électricité venant du charbon <a href="https://www.agora-energiewende.de/veroeffentlichungen/bilanz-des-energiejahres-2022-und-ausblick-auf-2023/">et une augmentation de cette production de 11 % par rapport à l’année 2021</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/140719/original/image-20161006-14719-pwlonq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/140719/original/image-20161006-14719-pwlonq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/140719/original/image-20161006-14719-pwlonq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/140719/original/image-20161006-14719-pwlonq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/140719/original/image-20161006-14719-pwlonq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/140719/original/image-20161006-14719-pwlonq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/140719/original/image-20161006-14719-pwlonq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La centrale thermique allemande de Jänschwalde, l’une des plus grandes d’Europe et aussi l’une des plus polluantes.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/uncloned/5700491446/in/photolist-9FFwEr-9FJvvh-9FFyFn-63EQ6S-aj7sc9-9G7s3E-9G4xcT-9G4wPa-9G4wmv-8LsHPo-5mm2Vj-5mgGEP-5mkXYh-5mgHiR-5mkYrW-5mm27j-8Losf8-5mgGnH-5mm2cu-5mgJTv-5mm111-5mgHwa-5mgKSg-5mgHqV-5mgGgP-5mm2v1-5mkYKC-5mgGcM-5mm16o-8LrvDW-5mgGzz-5mm1ru-5mgFX4-5mgJr4-5mgJHD-5zRjc3-5mm2i3-5zRjc7-5mm2ou-8LrvpY-5mm1hb-5mm1H5-5mkY4y-5mgJYi-5mm1Zf-5mgHe2-5mm1x9-8LosVK-5mkZHu-5mkZ7f/">Tobias Scheck/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Dans une tradition politique, fortement ancrée en Allemagne, de construction des interdépendances économiques avec la Russie (<a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Wandel_durch_Handel"><em>Wandel durch Handel</em></a>, le changement par le commerce), c’était bien le gaz, russe, qui devait assurer une passerelle entre le charbon et l’hydrogène vert à venir. D’où l’importance des infrastructures gazières de type Nordstream. Cette stratégie est aujourd’hui mise à bas par l’invasion de l’Ukraine.</p>
<p>Mais ce qui est également problématique pour l’Allemagne, c’est que la révision de l’<em>Energiewende</em> impose une nouvelle accélération dans l’installation des renouvelables, à des rythmes encore jamais atteints par le passé. Cela, alors même que la faisabilité d’un système électrique reposant essentiellement sur des énergies renouvelables variables (solaire, éolien) n’est pas encore démontrée.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/536653/original/file-20230710-36093-bkplhu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/536653/original/file-20230710-36093-bkplhu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/536653/original/file-20230710-36093-bkplhu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=521&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/536653/original/file-20230710-36093-bkplhu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=521&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/536653/original/file-20230710-36093-bkplhu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=521&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/536653/original/file-20230710-36093-bkplhu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=655&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/536653/original/file-20230710-36093-bkplhu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=655&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/536653/original/file-20230710-36093-bkplhu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=655&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Agora Energiewende</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>Un impératif pour l’Europe : réconcilier les politiques énergétiques, en respectant les choix nationaux</h2>
<p>Alors même que les pays de l’UE sont capables d’initier des actions communes fortes, avec notamment le <em>Green Deal</em> ou encore le plan <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/03/24/l-economie-politique-quatre-scenarios-pour-la-transition-energetique_6166765_3232.html"><em>Repower EU</em></a>, une fracture s’opère aujourd’hui entre des États aux modèles énergétiques et aux stratégies de décarbonation très différents, voire antagonistes.</p>
<p>De fait, la montée de ces conflits est essentiellement structurée autour de la divergence entre la France – <a href="https://www.lepoint.fr/politique/emmanuel-berretta/transition-energetique-la-france-organise-un-club-nucleaire-en-europe-01-03-2023-2510447_1897.php">qui mène « l’alliance du nucléaire »</a> avec les Pays-Bas, la Finlande, la Pologne, la Bulgarie, la Croatie, la République tchèque, la Hongrie, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie — et l’Allemagne, membre clé du <a href="https://www.euractiv.fr/section/energie/news/nucleaire-contre-renouvelables-deux-camps-saffrontent-a-bruxelles/">groupe des « amis des renouvelables »</a>, emmené par l’Autriche et suivi par l’Espagne, le Danemark, l’Irlande, le Luxembourg, le Portugal, la Lettonie, la Lituanie et l’Estonie.</p>
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<figcaption><span class="caption">Emmanuel Macron annonce six nouveaux réacteurs EPR en France. (Euronews, février 2022).</span></figcaption>
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<p>Ces deux coalitions se déchirent sur presque tous les grands chantiers de la transition énergétique, dont la taxonomie européenne, la réforme du marché de l’électricité, la définition de l’hydrogène vert…</p>
<p>Ces trois chantiers révèlent la profondeur des conflits qui trouvent leur origine dans la polémique autour du classement du nucléaire comme énergie verte, et qui ont abouti, après de longs mois de tensions, à des compromis entre les deux camps (le nucléaire sera par exemple inclus dans la taxonomie, à la condition que le gaz naturel soit également considéré <a href="https://theconversation.com/nucleaire-retour-sur-le-debat-autour-de-la-nouvelle-taxonomie-europeenne-176733">comme une énergie de transition</a>).</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/nucleaire-retour-sur-le-debat-autour-de-la-nouvelle-taxonomie-europeenne-176733">Nucléaire : retour sur le débat autour de la nouvelle taxonomie européenne</a>
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<p>Il ne s’agit donc pas de débats techniques, mais d’oppositions de fond dont le déploiement reflète bien les rapports de force entre des pays défendant leurs intérêts nationaux et leur vision de la transition.</p>
<p>Les États membres semblent incapables de construire les compromis structurels qui permettraient de sortir de la paralysie actuelle sur plusieurs politiques communes de transition.</p>
<p>S’il est exclu de dégager un modèle unique de transition bas carbone « à l’européenne », on peut toutefois tenter d’identifier les conditions de principe pour que, dans le respect des stratégies nationales, le système énergétique européen évolue rapidement, et de manière coordonnée, vers une neutralité carbone collective à l’horizon 2050.</p>
<p>Dans cette perspective, trois principes devraient être structurants.</p>
<p>Tout d’abord, que le primat soit donné à la lutte contre le changement climatique, et donc à la décarbonation des systèmes énergétiques ; que soit reconnue ensuite et acceptée la diversité des options décarbonées susceptibles d’être mises en œuvre en Europe ; enfin, que les actions ou dispositifs portés par les États membres dans l’élaboration des actions communes ne conduisent pas à empêcher celles entreprises par d’autres États membres dans leur trajectoire de décarbonation.</p>
<p>Primat du climat, subsidiarité des politiques et principe de non-nuisance. La formulation est à ce stade trop générale, mais on peut souhaiter qu’un effort à la fois de compréhension réciproque des représentants des États membres et de définition juridico-administrative au niveau de la Commission puisse permettre des progrès rapides dans la mise en cohérence de la politique européenne de transition énergie-climat.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209467/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Alors que les pays de l’UE sont capables d’initier des actions communes fortes, une fracture s’opère entre des États aux stratégies de décarbonation très différents, voire antagonistes.Patrick Criqui, Directeur de recherche émérite au CNRS, économiste de l’énergie, Université Grenoble Alpes (UGA)Carine Sebi, Professeure associée et coordinatrice de la chaire « Energy for Society », Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2042032023-06-19T17:51:18Z2023-06-19T17:51:18ZPourquoi la science des fluides est au cœur des défis du 21e siècle<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/532166/original/file-20230615-25-8vdv7u.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=10%2C25%2C1694%2C1252&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le sillage des éoliennes du parc offshore Horns Rev 1, à 14 km de la côte ouest du Danemark, en 2008.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://group.vattenfall.com/press-and-media/media-bank/wind-solar-and-energy-storage">Christian Steiness pour Vattenfall</a></span></figcaption></figure><p>Le monde dans lequel nous vivons, à commencer par l’air et l’eau qui nous entourent et le soleil qui nous éclaire et nous réchauffe, ainsi que l’écrasante majorité de la matière de l’univers sont fluides. La science des fluides permet d’y voir plus clair dans la plupart des phénomènes naturels ou vivants à la surface de la Terre, mais aussi dans la quasi-totalité des activités humaines, de la santé à l’industrie en passant par les transports et l’énergie… et de leur impact sur le climat et l’environnement.</p>
<p>Ainsi, une étude britannique réalisée en 2021 estime par exemple l’impact des avancées de la recherche sur la science des fluides à <a href="https://fluids.ac.uk/files/HARLd4988_single_page.1632404743.pdf">16 milliards d’euros et 45 000 emplois directs et plus de 500 000 emplois indirects</a>, dans plus de 2000 entreprises du Royaume-Uni.</p>
<p>Mais, alors que les équations qui gouvernent la dynamique des fluides sont connues depuis 200 ans, cette science achoppe encore sur leur complexité mathématique phénoménale. À ces équations très générales, on ne sait donner de solutions générales et on résout actuellement les problèmes au cas par cas. Mais les avancées en informatique et en imagerie ultra-résolue pourraient changer la donne dans la prochaine décennie.</p>
<h2>La traînée aérodynamique, ou pourquoi rouler moins vite permet de faire des économies d’énergie (même si on roule plus longtemps)</h2>
<p>Un exemple emblématique et quotidien de l’importance de la science des fluides est la traînée aérodynamique. Cette force qu’exerce un fluide sur tout objet s’y déplaçant, nous la ressentons pleinement lorsque nous sortons la main en roulant sur une route de campagne, ou lorsque nous pédalons face au vent. Elle s’oppose au mouvement : l’air « résiste » à notre passage. Elle représente l’une des principales causes de la <a href="https://theconversation.com/oui-rouler-a-110-km-h-plutot-que-130-pourrait-vraiment-limiter-notre-impact-sur-le-climat-144605">consommation énergétique de nos véhicules</a>, qu’ils soient terrestres, aériens ou maritimes.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/532701/original/file-20230619-29-5q1l5s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="schéma du corps d’un cycliste et de la trainée aérodynamique correspondante" src="https://images.theconversation.com/files/532701/original/file-20230619-29-5q1l5s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/532701/original/file-20230619-29-5q1l5s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=438&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/532701/original/file-20230619-29-5q1l5s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=438&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/532701/original/file-20230619-29-5q1l5s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=438&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/532701/original/file-20230619-29-5q1l5s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=551&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/532701/original/file-20230619-29-5q1l5s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=551&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/532701/original/file-20230619-29-5q1l5s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=551&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le sillage aérodynamique est un élément clef pour améliorer le rendement des moyens de transport. Les nouvelles techniques d'imagerie à haute résolution permettent aujourd’hui de visualiser la dynamique des écoulements tridimensionnelles complexes se développant dans les sillages.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00348-018-2524-1#Fig15">Constantin Jux, Andrea Sciacchitano, Jan F. G. Schneiders et Fulvio Scarano dans la revue Experiments in Fluids, 2018</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>En effet, un résultat majeur de la science des fluides dicte que la puissance instantanée dissipée par cette résistance aérodynamique (l’énergie que l’on doit dépenser à tout instant pour combattre la résistance de l’air) augmente <em>très fortement</em> avec la vitesse. Techniquement, elle augmente avec le cube de la vitesse. Donc réduire sa vitesse de moitié permet d’abaisser d’un facteur huit la consommation instantanée du véhicule. Ainsi, bien que rouler deux fois moins vite implique de rouler deux fois plus longtemps pour parcourir la même distance, la consommation totale intégrée sur la durée du trajet sera alors réduite d’un facteur quatre. Le simple fait de réduire de 10 % sa vitesse (par exemple en roulant à 117 km/h eu lieu de 130 km/h) permet de diminuer de 30 % les pertes aérodynamiques instantanées et de 20 % les pertes intégrées sur la totalité d’un trajet.</p>
<p>Les conséquences énergétiques (et donc écologiques et économiques) de cette simple « loi cubique » de l’aérodynamique sont sans appel : rouler moins vite permet de faire des économies d’énergie même si on roule plus longtemps.</p>
<p>La relation cubique entre la vitesse et la puissance est également à la base de l’efficacité de la production d’énergie éolienne et hydrolienne qui croît également comme le cube de la vitesse du vent ou du courant.</p>
<h2>La turbulence des fluides : une mise en abîme tourbillonnaire</h2>
<p>Cette loi cubique n’est qu’une des manifestations des écoulements dits <em>turbulents</em>. Bien qu’elle soit le plus souvent invisible, la turbulence est omniprésente, à cause de la très faible viscosité des fluides qui nous sont les plus familiers : l’eau et l’air.</p>
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<img alt="imagerie de fluorescente de volutes" src="https://images.theconversation.com/files/532704/original/file-20230619-1900-6i78fv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/532704/original/file-20230619-1900-6i78fv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=520&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/532704/original/file-20230619-1900-6i78fv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=520&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/532704/original/file-20230619-1900-6i78fv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=520&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/532704/original/file-20230619-1900-6i78fv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=653&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/532704/original/file-20230619-1900-6i78fv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=653&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/532704/original/file-20230619-1900-6i78fv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=653&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le mélange de deux fluides implique des tourbillons d'échelles très différentes - comme avec volutes de fumée de tabac par exemple. Ici, grâce à l'imagerie de fluorescence, on ne visualise qu'une tranche laser d’un processus 3D, ce qui permet de mieux appréhender les structures imbriquées de la cascade.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Mickael Bourgoin, ENS Lyon</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Qui ne s’est jamais émerveillé devant des volutes de fumée, en observant les remous d’une rivière, en mélangeant des colorants en cuisine ou en contemplant les images des <a href="https://theconversation.com/jupiter-et-ses-90-lunes-sous-le-feu-des-projecteurs-203019">tourbillons à la surface de Jupiter</a> ?</p>
<p>La prochaine fois que vous observerez l’un de ces phénomènes, soyez attentifs à la façon dont les tourbillons s’imbriquent les uns dans autres : les grands tourbillons transportent les plus petits tourbillons, dans une sorte de mise en abîme que les scientifiques appellent <em>cascade turbulente</em>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/530107/original/file-20230605-23-3rydnw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="chute d’eau dessinée par Léonard de Vinci" src="https://images.theconversation.com/files/530107/original/file-20230605-23-3rydnw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/530107/original/file-20230605-23-3rydnw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=408&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/530107/original/file-20230605-23-3rydnw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=408&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/530107/original/file-20230605-23-3rydnw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=408&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/530107/original/file-20230605-23-3rydnw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/530107/original/file-20230605-23-3rydnw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/530107/original/file-20230605-23-3rydnw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Études sur l’eau de Léonard de Vinci au début XVIᵉ siècle. Dessin de la chute d’eau d’une écluse dans un bassin, illustrant la cascade turbulente et l’imbrication des petits tourbillons dans les grands.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.nationalgeographic.fr/photographe/sa-majeste-la-reine-elizabeth-ii">Royal Collection Trust Copyright Sa Majesté la Reine Elizabeth II 2018</a></span>
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<p>Léonard de Vinci avait déjà remarqué l’universalité de cette organisation dans les écoulements turbulents, mais 500 ans plus tard, la compréhension de cette dynamique multiéchelle et aléatoire (mais non complètement désordonnée) de la turbulence reste l’un des plus grands mystères et l’un des principaux défis de la science contemporaine.</p>
<p>Malgré la complexité des phénomènes physiques sous-jacents, nous acquérons dès le plus jeune âge un savoir empirique nous incitant à « touiller » pour mélanger. Sans le savoir, nous déclenchons ainsi la turbulence. Nous lui devons aussi la dispersion et la dilution des polluants et des aérosols anthropiques dans l’atmosphère, sans lesquelles nos villes seraient irrespirables.</p>
<p>Nous ne sommes en revanche toujours pas capables de prédire comment les mouvements très intermittents de la turbulence (qu’elle soit atmosphérique, océanique, industrielle, etc.) sont capables de déclencher des événements extrêmes et des changements drastiques du comportement à grande échelle des écoulements.</p>
<p>Le détournement spontané du Gulf Stream (scénario du film <em>Le Jour d’après</em>), la modification du mouvement du noyau externe de la Terre (scénario du film <em>Fusion</em>), <a href="https://www.ouest-france.fr/europe/suisse/video-une-impressionnante-trombe-marine-se-forme-a-la-surface-dun-lac-en-suisse-289b3ea0-0068-11ee-a862-833baf100525">l’apparition soudaine d’une tornade</a>, la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=BNrR0ZjpoMs">perte soudaine de la portance d’une aile trop inclinée</a> sont des exemples de ces transitions brutales et extrêmes, que les scientifiques observent également dans leurs expériences et simulations numériques, mais que nous n’arrivons pas à prédire.</p>
<p>Les enjeux liés à la compréhension de la turbulence sont donc de taille et conditionnent notre capacité à espérer un jour être en mesure de prédire l’imprévisible, d’anticiper plus finement le dérèglement climatique et ses conséquences, d’améliorer la sécurité de nos installations industrielles et énergétiques, et plus généralement d’innover dans tous les secteurs d’activités où interviennent les fluides, depuis les biotechnologies jusqu’au développement des industries, des énergies et des transports verts de demain.</p>
<h2>Les nanofluides : un immense potentiel aux plus petites échelles</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/532179/original/file-20230615-23-rcs5d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="flux expérimental" src="https://images.theconversation.com/files/532179/original/file-20230615-23-rcs5d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/532179/original/file-20230615-23-rcs5d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/532179/original/file-20230615-23-rcs5d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/532179/original/file-20230615-23-rcs5d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/532179/original/file-20230615-23-rcs5d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/532179/original/file-20230615-23-rcs5d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/532179/original/file-20230615-23-rcs5d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Expérience imitant le flux de fluide dans un sol avec des grains de tailles très différentes. Le flux est visualisé grâce à des particules fluorescentes.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/snsf_image_competition/50956880006/in/photolist-PmrGiB-buojvP-jR9gc-KeYvrT-MQqA6Q-2kCTjCP-2kCTk7E-ELSo1b-HTPJfw-24Tuegc-2kCTSfH-ceqTSC-24XSoxv-2ettJej-2kCTKbH-2kCTczA-2e5MzEt-2e79N7z-2iytrWA-2kCTrxr">Dorothee Luise Kurz, ETH Zurich</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>La science des fluides est cruciale aussi pour maîtriser des écoulements confinés à très petite échelle, comme ceux qu’on rencontre dans nos vaisseaux sanguins, dans nos cellules, ou dans le sol.</p>
<p>La « microfluidique » a connu un essor fulgurant au tournant du XXI<sup>e</sup> siècle, révolutionnant la technologie des <a href="https://theconversation.com/les-organes-sur-puce-vers-une-medecine-personnalisable-133471">laboratoires sur puce</a>, et de leurs applications à la chimie analytique, la biologie et la médecine, <a href="https://www.cea.fr/drf/Pages/Actualites/En-direct-des-labos/2021/la-microfluidique-booste-letude-des-mutations-de-ladn-.aspx">telle que l’étude de l’ADN et ses mutations par exemple</a>.</p>
<p>L’heure est à présent à la <a href="https://pubs.aip.org/aip/jcp/article/158/16/160901/2884974">« nanofluidique », étudiant les écoulements à l’échelle du millionième de millimètre</a>. La maîtrise de ces écoulements est complexe, car la nanofluidique se trouve à la frontière d’une description continue des fluides et de la nature moléculaire et atomique, voire quantique, de la matière. Elle ouvre pourtant aujourd’hui des perspectives technologiques très prometteuses, par exemple vers des applications à la <a href="https://www.nature.com/articles/s41563-020-0625-8">production d’énergie renouvelable par des flux osmotiques, entre des réservoirs d’eau douce et d’eau salée, à travers des nanopores dans des membranes spécialement conçues</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="microscopie de flux à l’échelle micrométrique" src="https://images.theconversation.com/files/532672/original/file-20230619-20-8018e8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/532672/original/file-20230619-20-8018e8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=280&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/532672/original/file-20230619-20-8018e8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=280&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/532672/original/file-20230619-20-8018e8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=280&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/532672/original/file-20230619-20-8018e8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=351&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/532672/original/file-20230619-20-8018e8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=351&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/532672/original/file-20230619-20-8018e8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=351&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le fluide rouge est utilisé pour focaliser le flux de fluide vert (qui coule de droite à gauche), jusqu’à une épaisseur d’environ 20 micromètres.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Hydrodynamic_flow_focusing_in_a_microfluidic_device.png">Ihor Panas, Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>Le paradoxe de la théorie des fluides</h2>
<p>Mais malgré ce rôle central des fluides dans notre vie et notre univers, et alors que nous célébrons cette année le bicentenaire de l’établissement des équations maîtresses de la dynamique des fluides (dites « de Navier-Stokes »), leur utilisation reste encore limitée en pratique. Pour certains fluides, comme les nanofluides ou les fluides dits <em>complexes</em> (rhéoépaississants, rhéofluidifiants, etc.), la théorie doit notamment être complétée par une compréhension raffinée de leurs propriétés physiques particulières (souvent passionnantes). Mais les limitations de la théorie des écoulements fluides sont avant tout mathématiques, même pour les fluides simples les plus courants comme l’eau et l’air.</p>
<p>En effet, les équations de Navier-Stokes sont réputées exactes pour décrire de manière très générale les écoulements des fluides simples dans presque toutes les situations, mais leur complexité mathématique est telle que leur résolution mathématique n’est possible en pratique que dans un nombre très restreint de situations. À tel point que les scientifiques se posent encore des <a href="https://www.claymath.org/millennium/navier-stokes-equation">questions profondes sur l’existence et la nature même de leurs solutions</a>.</p>
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<img alt="simulation numérique d’écoulement turbulent" src="https://images.theconversation.com/files/530141/original/file-20230605-17-qxrs26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/530141/original/file-20230605-17-qxrs26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/530141/original/file-20230605-17-qxrs26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/530141/original/file-20230605-17-qxrs26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/530141/original/file-20230605-17-qxrs26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/530141/original/file-20230605-17-qxrs26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/530141/original/file-20230605-17-qxrs26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Simulation numérique à toute petite échelle et dans des conditions idéalisées d’un écoulement turbulent de deux fluides de viscosité différente (bleu et rouge). Cette simulation, avec une précision d’environ 100 milliards de nœuds de maille, a nécessité l’utilisation de 80 millions de cœurs de CPU pendant 7 jours en continu, afin de simuler l’équivalent de quelques secondes d’écoulement.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-fluid-mechanics/article/selfsimilarity-of-turbulent-jet-flows-with-internal-and-external-intermittency/170B9415870F47A94D041FEE7E904840">M. Gauding</a></span>
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<p>On pourrait croire que, disposant aujourd’hui d’ordinateurs ultra-puissants, nous sommes capables de résoudre numériquement ces équations à défaut de pouvoir la résoudre analytiquement. Mais on se heurte en fait à deux difficultés quasiment insurmontables, liées à deux propriétés fondamentales des équations de Navier-Stokes : leur nature non locale et non linéaire.</p>
<p>La <strong>non-localité</strong> implique qu’il n’est pas possible de connaître l’état d’un fluide à un endroit donné sans connaître sa dynamique partout ailleurs (du moins sur une étendue suffisamment vaste autour de la zone d’intérêt) : la météo au-dessus de l’hexagone est ainsi affectée par l’anticyclone des Açores. Prédire un écoulement à un endroit donné d’un système requiert donc de résoudre les équations sur l’ensemble du système.</p>
<p>La <strong>non-linéarité</strong> est à l’origine de la turbulence et de la formation de tourbillons erratiques de toute taille, la <em>cascade turbulente</em>. La gamme d’échelles entre les plus petits et les plus grands tourbillons peut s’avérer pharaonique : dans l’atmosphère par exemple, des tourbillons existent depuis les échelles millimétriques, jusqu’à des cyclones et anticyclones pouvant atteindre de milliers de kilomètres.</p>
<p>Pour ces raisons, pour simuler de nombreux écoulements (industriels et naturels) de façon réaliste, il faudrait des ordinateurs bien plus gros que ceux disponibles de nos jours. À titre d’exemple, une simulation directe de la basse atmosphère nécessiterait 5 milliards de milliards de milliards de nœuds de maille alors que les plus gros calculateurs au monde, comme le <a href="https://www.genci.fr/fr/node/1069">supercalculateur Jean Zay en France</a>, ne sont capables de résoudre raisonnablement les équations de Navier-Stokes « que » sur un maillage comprenant de l’ordre de mille milliards de nœuds de maille).</p>
<p>Ainsi, bien qu’elle soit connue depuis deux siècles, la théorie du mouvement des fluides est en pratique difficilement exploitable en l’état.</p>
<h2>Une science amenée à se renouveler en permanence</h2>
<p>Des approches alternatives sont donc indispensables. Elles sont basées sur l’expérimentation, sur l’observation, et plus récemment sur les méthodes d’intelligence artificielle.</p>
<p>Le développement d’outils prédictifs et préventifs, tractables sur nos calculateurs, passe par la mise au point de « modélisations réduites » pour lesquelles le nombre de points de maille nécessaires est considérablement réduit par rapport à ceux requis pour une simulation numérique directe des équations de Navier-Stokes. Ces modèles s’appuient sur ces équations maîtresses, mais ne résolvent explicitement que les plus grandes échelles de la cascade turbulente. La contribution des plus petites échelles est décrite de manière globale par à un nombre restreint de paramètres (par exemple sous la forme d’une viscosité, d’une diffusivité, d’un forçage… effectifs) qu’il s’agit de déterminer au cas par cas par des recherches approfondies sur les phénomènes physiques sous-mailles et de leur impact à grande échelle.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/532168/original/file-20230615-15-h20bv5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="une modélisation des océans terrestres" src="https://images.theconversation.com/files/532168/original/file-20230615-15-h20bv5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/532168/original/file-20230615-15-h20bv5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=412&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/532168/original/file-20230615-15-h20bv5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=412&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/532168/original/file-20230615-15-h20bv5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=412&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/532168/original/file-20230615-15-h20bv5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=518&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/532168/original/file-20230615-15-h20bv5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=518&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/532168/original/file-20230615-15-h20bv5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=518&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les modélisations du climat doivent inclure des échelles très différentes pour prendre en compte les mécanismes pertinents à la surface de la Terre – ici la température des océans et leur vorticité sont modélisées, mais seules les échelles supérieures à 100 kilomètres sont vraiment résolues et l’ensemble des processus se déroulant à une échelle plus fine sont décrits par des modèles approchés – convection, nuages, vagues, couplage avec le relief, couplage océan/atmosphère, etc.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/losalamosnatlab/16376102935/in/photostream/">Los Alamos National Lab</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>Ces modélisations, par essence parcellaires, sont en permanence ajustées et améliorées à mesure que les besoins évoluent et que notre capacité à tester les modèles et décrire les phénomènes des petites échelles à partir de données expérimentales, observationnelles et numériques se perfectionne.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/de-nouvelles-technologies-pour-recycler-les-dechets-electroniques-132530">De nouvelles technologies pour recycler les déchets électroniques</a>
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<p>La <a href="https://www.annualreviews.org/doi/pdf/10.1146/annurev-fluid-031822-041721">révolution de l’imagerie numérique à haute cadence et à haute résolution de la dernière décennie</a>, des technologies neuromorphiques, l’<a href="https://www.cnrs.fr/fr/jean-zay-le-supercalculateur-le-plus-puissant-de-france-pour-la-recherche">évolution constante des supercalculateurs</a> (y compris la révolution attendue de l’ordinateur quantique) et les <a href="https://ivado.ca/mecanique-des-fluides-numeriques-acceleree-par-lintelligence-artificielle/">méthodes novatrices basées sur l’apprentissage et l’intelligence artificielle</a> laissent entrevoir des avancées spectaculaires quant à nos capacités à mesurer, modéliser et prédire la dynamique des fluides, indispensables aux ruptures requises pour affronter les grands enjeux sociétaux du moment : la transition écologique et énergétique, le climat et la santé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204203/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mickael Bourgoin est directeur du Groupement de Recherche du CNRS "Navier-Stokes 2.00" (<a href="https://gdr-turbulence.universite-lyon.fr">https://gdr-turbulence.universite-lyon.fr</a>)</span></em></p>Deux cents ans après la découverte de ses équations maîtresses, la dynamique des fluides a encore de beaux jours devant elle en sciences fondamentales et appliquées.Mickael Bourgoin, Directeur de recherche CNRS en hydrodynamique au Laboratoire de Physique à l'ENS de Lyon, ENS de LyonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2075252023-06-12T10:28:41Z2023-06-12T10:28:41ZQuand le greenwashing débouche sur une véritable démarche RSE<p>Beaucoup d’entreprises mettent en œuvre des politiques de <a href="https://theconversation.com/topics/responsabilite-societale-des-entreprises-rse-21111">responsabilité sociale et environnementale (RSE)</a> afin de se présenter sous une belle image et de gagner ainsi en légitimité aux yeux de leurs parties prenantes. Certaines ne sont toutefois pas à la hauteur de leurs prétentions.</p>
<p>Beaucoup n’entreprennent des projets écologiques qu’à des fins de marketing ou pour donner une image de marque à leurs produits. Ou bien ne font-elles que ce que la législation et la pression des parties prenantes les obligent à faire. D’autres utilisent la RSE pour obtenir des avantages concurrentiels à long terme. Elles considèrent ces « stratégies durables » comme un élément essentiel de leur stratégie d’entreprise globale. Les engagements sociaux sont alors alignés sur les objectifs commerciaux.</p>
<p>Pour mieux comprendre la responsabilité sociale stratégique des entreprises, nous avons <a href="https://www.intechopen.com/chapters/83782">analysé</a> les études et théories pertinentes sur les <a href="https://theconversation.com/topics/strategie-21680">stratégies</a> de RSE. Il en ressort deux types de stratégies de RSE : celles introduites pour faire face à la législation environnementale et sociale et à la pression des parties prenantes (ou RSE réactive) ; et celles considérant la RSE comme un processus de différenciation organisant les performances sociales, environnementales et financières.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Nous avons ainsi examiné comment de grandes entreprises dans le secteur de l’énergie semblent utiliser la RSE pour légitimer de mauvaises pratiques. Des <a href="https://www.globalwitness.org/en/campaigns/greenwashing/fossil-fuel-greenwash-since-launch-of-green-claims-code/#:%7E:text=The%20fossil%20fuel%20industry%E2%80%99s%20insidious%20record%20of%20greenwashing&text=A%202021%20study%20found%20that,action%20over%20misleading%20environmental%20claims.">messages trompeurs</a> ont pu être observés sur les médias sociaux concernant l’investissement dans des projets à faible émission de carbone, l’<a href="https://www.euronews.com/green/2022/09/23/shell-bp-exxon-seized-emails-reveal-deceptive-climate-tactics-and-greenwashing">exploration des gisements augmentant</a> en parallèle. Le secteur de l’énergie est l’un des plus grands pollueurs au monde. Il a produit <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-du-climat-2022/7-repartition-sectorielle-des-emissions-de#:%7E:text=En%202019%2C%20la%20production%20d,%2C%20y%20compris%20la%20construction">47 % des émissions mondiales</a>.) de gaz à effet de serre dans le monde en 2019. À partir de scandales d’« <a href="https://theconversation.com/topics/greenwashing-27714">écoblanchiment</a> » (c’est-à-dire de tromperie du public sur les réalisations environnementales ou « greenwashing »), nos <a href="https://www.intechopen.com/chapters/83415">travaux</a> expliquent également pourquoi et comment la société civile peut jouer un rôle actif dans la promotion de pratiques durables.</p>
<h2>Une RSE purement stratégique ?</h2>
<p>Sur la base d’une analyse de la littérature qui passe en revue les différentes méthodologies de plus de 100 études, nous concluons qu’il est fréquent que les entreprises de différents secteurs utilisent des stratégies élémentaires pour se conformer aux réglementations sociales et environnementales. Elles cherchent à gagner en légitimité aux yeux des parties prenantes sans faire de la responsabilité sociale des entreprises une pierre angulaire de leur stratégie globale.</p>
<p>Les entreprises énergétiques de 55 pays se sont engagées à respecter l’accord de Paris et un monde à émissions nettes nulles, visant à maintenir le réchauffement climatique sous la barre des 1,5 °C. Mais une <a href="https://oversightdemocrats.house.gov/news/press-releases/oversight-committee-releases-new-documents-showing-big-oil-s-greenwashing">enquête du Congrès américain</a> qui a analysé 200 pages de notes internes d’entreprises a révélé que les <a href="https://www.euronews.com/green/2022/09/23/shell-bp-exxon-seized-emails-reveal-deceptive-climate-tactics-and-greenwashing#:%7E:text=A%20US%20congressional%20investigation%20into,and%20joke%20about%20climate%20collapse%5D">géants du pétrole</a> tels que Shell, Chevron et ExxonMobil se contentaient d’une adhésion de pure forme à l’accord.</p>
<p>On peut lire, par exemple :</p>
<blockquote>
<p>« Shell ne prévoit pas dans l’immédiat de passer à un portefeuille d’émissions nettes nulles sur notre horizon d’investissement de 10 à 20 ans. »</p>
</blockquote>
<p>Selon Richard Wiles, président du <em>Centre for Climate Integrity</em>, ces révélations constituent « la dernière preuve que les géants pétroliers continuent de mentir sur leurs engagements à résoudre la crise climatique et que les décideurs politiques ne devraient jamais leur faire confiance ».</p>
<p>Des affirmations ambiguës, des euphémismes sophistiqués ou des mensonges purs et simples semblent être devenus fréquents dans la communication des entreprises, en particulier en ce qui concerne les activités liées à la responsabilité sociale des entreprises et au développement durable.</p>
<p>Quand cela soulève des accusations d’écoblanchiment, il y a néanmoins matière pour les entreprises à repenser leurs stratégies sociales et environnementales et <a href="https://www.euronews.com/green/2022/09/23/shell-bp-exxon-seized-emails-reveal-deceptive-climate-tactics-and-greenwashing#:%7E:text=A%20US%20congressional%20investigation%20into,and%20joke%20about%20climate%20collapse%5D">introduire des changements efficaces</a>.</p>
<h2>Des retombées parfois positives au <em>greenwashing</em></h2>
<p>Les <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/JCM-06-2019-3257/full/html">effets négatifs</a> de l’écoblanchiment, tels que la tromperie et la manipulation des consommateurs, l’évitement d’actions concrètes et le blocage de la transition écologique, peuvent être importants. De cette situation peuvent cependant aussi naître des changements positifs. C’est notamment le cas lorsque les parties prenantes, les décideurs politiques et commerciaux et les chercheurs sensibilisent à ces pratiques. Les consommateurs peuvent réclamer plus de <a href="https://www.intechopen.com/online-first/83782">transparence</a> et demander des comptes aux entreprises lorsqu’elles se comportent mal.</p>
<p>L’affaire Volkswagen de 2015 est instructive. Le gouvernement américain avait découvert des « irrégularités » dans les tests mesurant les niveaux d’émissions de dioxyde de carbone affectant des milliers de voitures produites par l’entreprise allemande. L’<a href="https://www.epa.gov/enforcement/volkswagen-clean-air-act-civil-settlement">accord</a> conclu avec l’Agence américaine de protection de l’environnement a poussé l’entreprise à investir dans l’infrastructure et la technologie des véhicules électriques. Par la suite, Volkswagen est devenu un acteur clé sur le <a href="https://www.volkswagen-newsroom.com/en/press-releases/new-auto-volkswagen-group-set-to-unleash-value-in-battery-electric-autonomous-mobility-world-7313">marché des véhicules électriques</a>.</p>
<p>L’engagement public pris par les entreprises peut également inciter les employés à travailler à la réalisation de ces objectifs et contribuer à établir une norme de durabilité pour les entreprises.</p>
<h2>La société civile, motrice de changements</h2>
<p>Autre exemple, en février 2023, l’ONG internationale Global Witness a par exemple accusé l’une des plus grandes compagnies pétrolières, Shell, d’avoir <a href="https://www.globalwitness.org/en/campaigns/fossil-gas/shell-faces-groundbreaking-complaint-misleading-us-authorities-and-investors-its-energy-transition-efforts/">trompé les autorités américaines</a> et les investisseurs sur sa transition écologique.</p>
<p>Shell a révélé dans son rapport annuel 2021 que 12 % de ses dépenses d’investissement étaient consacrées au développement de solutions énergétiques renouvelables et vertes. Cependant, seulement 1,5 % a été utilisé pour développer des sources et des centrales solaires et éoliennes. Global Witness a constaté que l’entreprise entreprenait en fait des projets gaziers nuisibles au climat. L’ONG a déposé une <a href="https://www.sec.gov/newsroom/sec-stories/chair-gary-gensler-marks-2nd-year-sec">plainte</a> auprès de la <em>Securities and Exchange Commission</em> aux États-Unis pour qu’elle enquête sur les affirmations du géant mondial de l’énergie.</p>
<p>Ce n’est pas le seul scandale dans lequel Shell s’est retrouvée impliquée. En 2021, un tribunal néerlandais a jugé la filiale de Shell responsable des déversements de pétrole survenus entre 2004 et 2007 au Nigeria. Il a ordonné à l’entreprise de verser des indemnités aux quatre agriculteurs nigérians qui ont intenté le procès. La réputation de Shell a été gravement entachée. La société s’est engagée à <a href="https://corpaccountabilitylab.org/calblog/2023/2/8/shell-agrees-to-pay-15-million-euros-to-nigerian-farmers-and-fishermen#:%7E:text=A%20historic%20settlement,compensation%20for%20the%20harm%20caused.">dédommager les agriculteurs nigérians</a> à hauteur de 15 millions d’euros et à installer un système de détection des fuites.</p>
<p>Shell s’est également <a href="https://www.britishcycling.org.uk/about/article/20221017-about-bc-static-SHELL-UK-0">associée à un groupe de réflexion</a> militant pour l’environnement, <em>British Cycling</em>, afin de donner une image verte et d’améliorer l’acceptation et la désirabilité de ses produits et services. Mais très vite, British Cycling a été <a href="https://www.independent.co.uk/sport/british-cycling-cycling-shell-british-friends-of-the-earth-b2199756.html">accusée</a> d’écoblanchiment.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1287449139559661569"}"></div></p>
<p>Comme nous le montrons dans notre <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/JCM-06-2019-3257/full/html">étude</a>, lorsque les consommateurs prennent conscience d’un comportement socialement irresponsable, leur identification positive à l’entreprise est interrompue. Des citoyens ordinaires ont ainsi participé à la prise de conscience de cas d’écoblanchiment au travers de campagnes de dénonciation. En juillet 2020, une communication trompeuse d’Air France sur ses vols neutres en CO<sub>2</sub> a par exemple été <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/transports/greve-a-air-france/vol-neutre-en-co2-la-petite-mention-d-air-france-qui-fait-tiquer-des-scientifiques_4058309.html">largement retweetée</a>.</p>
<h2>Des annonces abritées par une certaine complexité</h2>
<p>L’empreinte carbone ne peut être évaluée que si les conséquences et les émissions associées à une série de technologies sont prises en compte. Celles-ci vont de l’extraction des matières premières à l’élimination ou au recyclage. Or, de nombreuses technologies liées aux énergies renouvelables dépendent encore, dans une certaine mesure, des combustibles fossiles. De nombreuses entreprises profitent de cette complexité et du marketing pour écologiser leurs modèles d’entreprise sans procéder à des changements significatifs.</p>
<p>Pour lutter contre ce phénomène, il s’agirait alors, pour les pouvoirs publics, d’imposer une certaine transparence, d’implémenter une réglementation efficace et de développer des mécanismes de contrôle.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207525/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les annonces RSE ne semblent parfois qu’une vitrine ou un moyen de répondre à quelque obligation légale. La société civile peut néanmoins s’en servir pour contraindre les entreprises à agir.Ouidad Yousfi, Associate Professor of Finance, Université de MontpellierMaha El Kateb, Ph.D candidate, Université de MontpellierLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2049702023-06-04T16:05:59Z2023-06-04T16:05:59ZSécheresse, crise énergétique et nucléaire en France, quels liens ?<p>L’année 2022 a été marquée par des records de canicule sans précédent en France depuis 1947, et d’un <a href="https://meteofrance.com/actualites-et-dossiers/actualites/2022-annee-la-plus-chaude-en-france">déficit pluviométrique de 25 %</a>. Les flammes ont ravagé plus de <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/gironde/bordeaux/incendies-en-gironde-l-inquietude-en-gironde-apres-l-absence-de-mesures-pour-lutter-contre-le-feu-2715066.html">72 000 hectares de forêts</a>, dévastant la biodiversité et entraînant une <a href="https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/incendies-en-gironde/incendies-en-gironde-quelles-sont-les-consequences-pour-lenvironnement-et-le-tourisme_5262052.html">chute drastique des revenus touristiques estivaux</a>.</p>
<p>Le secteur énergétique n’a pas été épargné par la sécheresse exceptionnelle, qui a considérablement réduit la production d’hydroélectricité. Les contraintes dues au manque d’eau ont également affecté la production nucléaire, déjà limitée par la fermeture pour maintenance de 65 % des centrales nucléaires en activité.</p>
<p>La France, exportateur net d’électricité depuis 40 ans, a ainsi dû l’importer d’Allemagne, d’Espagne, de Belgique et de Grande-Bretagne. 60 % des 16,5 TWh importés ont été utilisés entre juillet et septembre, quand les réserves pour alimenter les centrales hydroélectriques étaient au plus bas.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=228&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=228&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=228&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=286&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=286&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=286&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution saisonnière de la production mensuelle d’électricité (TWh) en France par filière.</span>
<span class="attribution"><span class="source">RTE</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>L’impact de la sécheresse sur la production d’énergie nucléaire est plutôt structurel, imposant des limitations à la fois sur la prise d’eau des bassins environnants et sur le moment de leur restitution dans l’environnement : d’une part, le faible niveau d’eau et le besoin de garantir un débit minimal pour assurer la vie des écosystèmes naturels empêchent la prise des débits nécessaires pour le refroidissement des réacteurs ; d’autre part, une température plus élevée des eaux prélevées réduit l’efficacité du processus de refroidissement.</p>
<h2>Restrictions légales</h2>
<p>Ainsi, la <a href="https://www.eaurmc.fr/jcms/pro_118205/fr/une-etude-sur-les-debits-du-rhone-pour-anticiper-leur-evolution">puissance produite doit être potentiellement réduite</a> pour respecter les contraintes. Dans le cas des systèmes de refroidissement à circuit ouvert, des limitations s’ajoutent à la température des eaux restituées à l’environnement, afin de garantir la protection et la qualité écologique du fleuve récepteur.</p>
<p>L’écart de température maximale est défini par la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32006L0044&from=EN">directive 2006/44/CE du Parlement européen</a>, qui prévoit toutefois que les États membres peuvent s’écarter des paramètres de la loi lors de circonstances météorologiques exceptionnelles ou dans le cas de conditions géographiques spéciales.</p>
<h2>Coûts économique et environnemental</h2>
<p>Au cours de l’été 2022, cette dernière stratégie a été nécessaire pour cinq centrales françaises (Bugey, Saint Alban, Tricastin, Blayais et Golfech) afin d’assurer la fourniture du service sans affecter les réserves de gaz et d’eau requises pour l’hiver. Tout en fonctionnant en dérogation, certains réacteurs ont malgré tout dû subir un arrêt forcé en raison des faibles débits fluviaux.</p>
<p>L’ensemble de ces conditions défavorables a considérablement réduit l’approvisionnement en énergie nucléaire par rapport à la moyenne des années précédentes. Bien qu’il n’y ait pas eu d’interruptions significatives de <a href="https://analysesetdonnees.rte-france.com/bilan-electrique-synthese">l’approvisionnement des utilisateurs</a>, les limitations constatées ont accentué une crise d’ordre économique, faisant monter le prix de l’énergie pour inclure également une prime de risque.</p>
<p>À cela s’ajoute le coût environnemental lié à l’utilisation excessive des centrales thermiques, entraînant une augmentation des <a href="https://analysesetdonnees.rte-france.com/bilan-electrique-synthese">émissions de CO2eq d’environ 3,5 Mt par rapport à 2021</a>. L’hiver particulièrement sec de début 2023 a <a href="https://www.cleanenergywire.org/news/catastrophic-winter-drought-france-bodes-ill-europes-power-production-2023">exacerbé les préoccupations pour l’été à venir</a>.</p>
<h2>Petites centrales et circuit fermé</h2>
<p>D’ici à 2030, la nouvelle stratégie France 2030 proposée par le gouvernement français prévoit une augmentation significative de <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-eco/nucleaire-macron-veut-investir-un-milliard-d-euros-d-ici-a-2030-et-developper-des-petits-reacteurs-20211012">petites centrales nucléaires d’une capacité installée inférieure à 300 MW</a>. Conformément à la réglementation en vigueur, celles-ci seront obligatoirement équipées d’un <a href="https://www.rte-france.com/analyses-tendances-et-prospectives/bilan-previsionnel-2050-futurs-energetiques#Lesdocuments">système de refroidissement à circuit fermé avec tour d’évaporation</a>.</p>
<p>Ce choix reflète la nécessité d’une meilleure gestion du risque climatique : les besoins de refroidissement des centrales sont en effet proportionnels à la capacité installée, une taille plus petite garantirait donc la réduction de la consommation d’eau des centrales elles-mêmes.</p>
<p>Les petites installations sont en outre généralement de conception plus simple et répondent à des contraintes techniques moins importantes, ce qui facilite l’identification de zones appropriées pour leur implantation et leur distribution sur le territoire national.</p>
<p>Mais, à très court terme, que peut faire la France pour gérer l’urgence énergétique dans un climat de plus en plus chaud et sec ?</p>
<h2>Nécessaire rénovation du parc</h2>
<p>En suivant l’exemple de l’Espagne voisine, qui compte sur le nucléaire pour plus d’un cinquième de sa production d’électricité malgré un climat beaucoup plus aride, la France devra probablement faire davantage appel aux dérogations accordées <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32006L0044&from=EN">par la directive 2006/44/CE</a> sur la température maximale autorisée pour les eaux de rejet.</p>
<p>Cette solution ne minimiserait toutefois que les pertes d’efficacité dues aux vagues de chaleur et non celles dues à une pénurie de ressources en eau. Dans ce dernier cas, il sera nécessaire de procéder à une rénovation de la partie du parc nucléaire qui repose actuellement sur des systèmes de refroidissement à cycle ouvert (qui tendent à prélever plus d’eau), en se dotant des systèmes de refroidissement hybrides avec une tour supplémentaire avant le rejet des eaux dans l’environnement.</p>
<p>C’est précisément le cas de la centrale espagnole d’Ascó qui a été la première au monde à suivre ce type de reconversion après sa mise en service en 1986, afin de mieux faire face aux périodes de faible débit de la rivière Èbre et d’éviter le rejet d’eaux trop chaudes.</p>
<h2>Accélération du nucléaire</h2>
<p>Ces réflexions s’inscrivent dans le contexte du <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/examen-du-projet-loi-sur-lacceleration-du-nucleaire-au-senat">projet de loi</a> relatif à l’accélération des procédures liées à la <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/23006_Nucleaire-DP-3.pdf">construction de nouvelles installations nucléaires</a> à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.</p>
<p>Développé sur 3 axes, il est fondé sur la réduction de la consommation d’énergie par la sobriété et l’efficacité énergétique, l’accélération des énergies renouvelables afin de garantir une électricité abordable et décarbonée et la relance du programme nucléaire.</p>
<p>Cette dernière prévoit la construction de six nouveaux réacteurs pressurisés européens (EPR2, chacun d’une puissance électrique générée de 1 670 MW) en 25 ans avec un investissement de 51,7 milliards, et la prolongation des réacteurs en service – la durée de vie utile des réacteurs existants est d’environ de 40 ans, mais ils atteindront une moyenne d’âge de 45 ans en 2030.</p>
<p>Un choix critiqué par les opposants au nucléaire, qui <a href="https://www.cbsnews.com/news/france-nuclear-reactor-edf-penly-1-pipe-crack-maintenance-issues-aging-plants/">soulignent la détérioration déjà existante du parc</a>, alors que le texte ne modifie ni le processus d’autorisation environnementale ni le niveau d’appréciation du cadre de sûreté.</p>
<h2>L’énergie, 51 % des prélèvements en eau</h2>
<p>Cette situation montre la nécessité d’un plan de gestion intégré qui prenne en compte les synergies complexes entre environnement, système énergétique et disponibilité saisonnière et de long terme des ressources en eau. Un enjeu qui concerne aussi la production hydroélectrique.</p>
<p>Lors de sa présentation du nouveau « plan eau » qui prévoit 10 % d’économie dans tous les secteurs, le <a href="https://www.elysee.fr/front/pdf/elysee-module-21030-fr.pdf">3 mars 2023</a>, Emmanuel Macron a annoncé un programme d’investissements pour réaliser des économies dans le secteur énergétique, notamment en faisant passer les centrales en circuit fermé.</p>
<p>Avec le nucléaire et l’hydroélectricité, l’énergie <a href="https://www.elysee.fr/front/pdf/elysee-module-21030-fr.pdf">représente 51 % des prélèvements et 12 % de la consommation</a> ; et des 4,1 milliards de m<sup>3</sup> d’eau prélevés chaque année en France, le refroidissement des centrales constitue le <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/leau-en-france-ressource-et-utilisation-synthese-des-connaissances-en-2022">3ᵉ consommateur</a> (12 %) après l’agriculture (58 %) et l’eau potable (26 %).</p>
<h2>Changements de débits à anticiper</h2>
<p>Ainsi, bien que la France ne connaisse pas encore de déficit chronique mais seulement saisonnier, l’efficience en matière d’usage de l’eau pour la production d’énergie reste une priorité pour lutter contre le changement climatique. Cette stratégie requiert aussi une planification locale des ressources, notamment <a href="https://www.elysee.fr/front/pdf/elysee-module-21030-fr.pdf">du rythme des barrages, pour répondre aux enjeux du climat</a> – mais en accord avec les différents usages d’eau prédominants dans chaque territoire.</p>
<p>Des études à l’échelle du bassin hydrologique seront essentielles pour anticiper les débits fluviaux et leur évolution à long terme : une <a href="https://www.eaurmc.fr/jcms/pro_118205/fr/une-etude-sur-les-debits-du-rhone-pour-anticiper-leur-evolution">première étude est en cours sur le bassin du Rhône</a> où est générée ¼ de la production électrique nationale (nucléaire et hydroélectrique).</p>
<p>En ce qui concerne la production nucléaire, le changement de débit du fleuve pourrait forcer à une réduction de puissance théorique, qui pourrait aller jusqu’à <a href="https://www.eaurmc.fr/jcms/pro_118205/fr/une-etude-sur-les-debits-du-rhone-pour-anticiper-leur-evolution">20 %-25 % en saison estivale</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=408&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=408&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=408&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Projection des baisses de production électrique sous l’effet du changement climatique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">EARRMC</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<h2>Fin de l’abondance</h2>
<p>La production annuelle d’hydroélectrique estimée, qui dans le bassin s’élève à plus de 17 000 GWh et couvre 3,4 % de la demande nationale, serait en revanche globalement stable. Avec des écarts saisonniers marqués par une tendance à la hausse des débits disponibles pour la production d’hydroélectricité en automne, mais à la baisse entre juillet et octobre.</p>
<p>Ces analyses ne concernent que le Rhône, qui est caractérisé pour des installations au fil de l’eau, et ne prennent pas en compte ses affluents. Aussi, que ce soit pour l’hydroélectrique ou pour le nucléaire, ils ne considèrent pas l’évolution de la demande en électricité à laquelle l’offre répond.</p>
<p>La planification intégrée à long terme et saisonnière entre secteurs serait donc la seule solution pour un futur durable. C’est véritablement <a href="https://www.youtube.com/watch?v=fOAc2RmeAHU">« la fin de l’abondance »</a>, comme le disait Macron en août 2022.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204970/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Giulia Vaglietti est membre de la Chaire économie du climat (CEC) et Inrae. Elle a reçu des financements de CEC et Inrae dans le cadre de son doctorat. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Anna Creti ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La sécheresse de l’été 2022 a fortement affecté la production énergétique nucléaire et hydroélectrique. Quelles conclusions en tirer ?Giulia Vaglietti, Doctorante, InraeAnna Creti, Professeur, Directrice de la Chaire Economie du Climat, Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2053682023-05-23T17:51:39Z2023-05-23T17:51:39ZLe nucléaire, 40 % ou 20 % de l’approvisionnement énergétique en France ?<p>S’il est un domaine dans lequel l’appareil statistique et les outils d’observation sont développés depuis longtemps, et apparaissent très robustes, c’est bien celui de l’énergie.</p>
<p>Les chocs énergétiques des années 1970 ont motivé des efforts importants en matière de définition des unités et d’élaboration d’une comptabilité énergétique – à l’image du <a href="https://www.encyclopedie-energie.org/le-bilan-energetique/">bilan énergétique national</a>. Ce bilan représente en colonnes les différentes formes d’énergie utilisées et en lignes les opérations de conversion et de consommation de ces énergies, sur un territoire donné et pendant une année. C’est un outil essentiel pour la quantification rigoureuse et fiable des éléments d’un système énergétique.</p>
<p>Et pourtant ! Certains se souviendront de ce moment, lors du <a href="https://www.challenges.fr/entreprise/debat-sarkozy-royal-les-vrais-chiffres-sur-la-part-du-nucleaire-dans-l-energie_387286">débat présidentiel de 2007</a> entre Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy, lorsque la candidate PS interpella son concurrent en lui posant la question de la part du nucléaire dans la consommation d’électricité en France. </p>
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<figcaption><span class="caption">La question du nucléaire abordée lors du débat présidentiel de 2007 entre Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy (Archives Ina/Youtube)</span></figcaption>
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<p>Le candidat UMP répond : « la moitié ». « C’est faux ! » rétorque Ségolène Royal, « ce n’est que 17 % ». Qui a raison, qui a tort ? « Les deux ont tort » affirment alors la plupart des commentateurs. En fait, aux approximations près, les deux pouvaient avoir raison s’ils avaient parlé d’énergie et non d’électricité (la part du nucléaire pour l’électricité était de 78% en 2006). </p>
<p>Il faut tenter de comprendre pourquoi, car l’interprétation des chiffres n’est pas neutre pour l’élaboration, la discussion et la mise en œuvre des stratégies énergétiques. En particulier la question de la composition actuelle et future du « bouquet énergétique » (<em>energy mix</em>, en anglais) est au centre des débats sur les voies de la transition énergétique.</p>
<h2>Ne pas confondre énergies de combustion et électricité</h2>
<p>Ces différences de comptabilité s’expliquent par la structure du système énergétique et les conventions à retenir pour convertir les différentes énergies en une unité commune. En particulier, il faut savoir comment rendre compte des flux physiques lorsque les conversions, notamment pour la production d’électricité, entraînent des pertes importantes, au sein même des industries énergétiques.</p>
<p>Pour les énergies de combustion (comme celle du bois pour se chauffer, du gaz pour faire cuire ses aliments ou encore de l’essence pour faire tourner un moteur), pas de problème, ou presque : il suffit de comptabiliser la chaleur théoriquement produite par leur combustion. Et l’on ramène tout à une unité commune : ce fut longtemps la tonne équivalente pétrole (tep), plus récemment on utilise les kWh, mais de plus en plus à l’international les Joules (ou Exajoules pour les grandes quantités).</p>
<p>Les choses se corsent pour l’électricité. Car celle-ci peut être produite directement par conversion de l’énergie mécanique dans des centrales hydrauliques et éoliennes, ou lumineuse pour l’énergie solaire. Mais elle peut aussi être produite dans des centrales thermiques, indirectement à partir de la chaleur initialement issue de la fission nucléaire ou de la combustion (charbon, pétrole, gaz, biomasse).</p>
<p>Pour la catégorie des centrales thermiques à combustion, de nouveau peu de problèmes : il faut prendre en compte l’énergie thermique des combustibles à l’entrée de la centrale. Mais pour l’électricité nucléaire, comment faire alors que, pour l’heure, la chaleur nucléaire n’est pas utilisée à d’autres fins.</p>
<p>Deux solutions sont ici possibles : ou bien on comptabilise l’énergie qui sera disponible sous forme d’électricité en sortie, c’est « l’équivalence à la consommation » ; ou bien on comptabilise l’énergie qu’il aurait fallu introduire dans une centrale thermique pour produire la même quantité d’électricité, c’est « l’équivalence à la production ».</p>
<p>En fonction de la centrale de référence, c’est deux fois et demie à trois fois plus d’énergie.</p>
<h2>Une querelle de spécialistes ?</h2>
<p>Équivalence à la production ou équivalence à la consommation de l’électricité, cela ressemble fort à une querelle de spécialistes ! Elle est en fait de la plus haute importance pour juger du poids des différentes énergies dans le fameux bouquet énergétique et donc de leur contribution relative à l’approvisionnement national.</p>
<p>Mais revenons au débat Royal-Sarkozy de 2007 : la première se référait au poids de l’électricité d’origine nucléaire dans la consommation des secteurs, dite consommation finale : on est alors en équivalence à la consommation (1 MWh = 0,086 tep) et le poids du nucléaire est assez limité. Le second pensait plutôt au poids du nucléaire dans la totalité de l’énergie entrant dans le système, y compris la chaleur nucléaire : avec l’équivalence à la production (1 MWh = 0,21 à 0,26 tep), ce poids est alors considérable, même si, jusqu’à aujourd’hui, cette chaleur est irrémédiablement perdue. Tout s’explique !</p>
<p>Les conventions de comptabilisation de l’électricité renouvelable et de l’électricité nucléaire peuvent finalement conduire à trois types de systèmes comptables.</p>
<p><strong>Convention 1 :</strong> équivalence à la production pour le nucléaire, afin de garder trace de la chaleur perdue, mais équivalence à la consommation pour l’électricité renouvelable, car il n’y a pas dans ce cas de pertes à la production ; c’est en particulier la règle adoptée dans les <a href="https://www.iea.org/data-and-statistics">statistiques internationales de l’Agence internationale de l’énergie</a> avec, pour le nucléaire, l’hypothèse d’un rendement de 33 % entre la chaleur en entrée et l’électricité en sortie (1 MWh = 0,26 tep).</p>
<p><strong>Convention 2 :</strong> une règle identique pour le nucléaire et pour l’électricité primaire renouvelable, en équivalence à la production avec un rendement de référence hypothétique de 40 % (1 MWh = 0,21 tep) ; c’est l’option retenue dans le <a href="https://www.bp.com/en/global/corporate/energy-economics/statistical-review-of-world-energy.html"><em>BP Statistical Review of World Energy</em></a>, qui constitue une des sources de référence, pour les statistiques énergétiques internationales, publié chaque année.</p>
<p><strong>Convention 3 :</strong> une règle identique pour le nucléaire et l’électricité primaire renouvelable, mais en équivalence à la consommation (1 MWh = 0,086 tep) ; cette règle ne correspond à aucune institution, mais elle permettrait au moins, à partir du système AIE, d’éviter un déséquilibre flagrant dans le traitement de l’électricité nucléaire et celle issue des renouvelables : on éviterait ainsi la surpondération de l’énergie nucléaire, par le facteur 3 évoqué plus haut.</p>
<h2>Quelles conséquences pour l’observation des systèmes énergétiques ?</h2>
<p>L’application de ces conventions comptables à l’analyse des systèmes énergétiques pour les cas de la France, de l’Allemagne, de l’Europe et du monde donne des résultats très contrastés avec des différences importantes selon le système comptable adopté.</p>
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<img alt="Ensemble de graphiques sur la consommation énergétique en France et en Europe" src="https://images.theconversation.com/files/525347/original/file-20230510-15-rp5h5c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/525347/original/file-20230510-15-rp5h5c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=540&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/525347/original/file-20230510-15-rp5h5c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=540&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/525347/original/file-20230510-15-rp5h5c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=540&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/525347/original/file-20230510-15-rp5h5c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=679&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/525347/original/file-20230510-15-rp5h5c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=679&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/525347/original/file-20230510-15-rp5h5c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=679&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.enerdata.fr/">Patrick Criqui à partir des données Enerdata (2023)</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>C’est évidemment le cas pour la France, en situation exceptionnelle du fait de l’importance de sa production nucléaire. Et l’on retrouve les évaluations des candidats à la présidentielle de 2007 : 42 % de nucléaire avec la Convention 1 et seulement 19 % avec la Convention 3 !</p>
<p>Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy auraient donc presque eu raison s’ils avaient parlé d’énergie et non pas d’électricité ; il suffisait (outre la confusion entre énergie et électricité) de bien préciser les conventions.</p>
<p>Mais l’examen de l’approvisionnement en énergie primaire est porteur d’autres enseignements. On notera ainsi :</p>
<ul>
<li><p>la très faible part de l’énergie nucléaire, quel que soit le système comptable, à l’échelle mondiale (entre 1,7 et 5 %), ainsi qu’en Europe (entre 5 et 14 %) ;</p></li>
<li><p>mais également la très faible part des énergies renouvelables « électriques », même en Allemagne (selon la convention retenue, entre 5 et 12 %, contre 4-10 % en France grâce à l’hydraulique, 6-14 % en Europe et 4-10 % dans le monde) ;</p></li>
<li><p>la contribution en revanche assez significative et stable de la biomasse, autour de 10 % dans tous les cas étudiés.</p></li>
</ul>
<p>Les regroupements des différentes sources identifiant d’abord les renouvelables, puis les énergies décarbonées, catégorie essentielle du point de vue de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, sont également très instructifs.</p>
<p>Si l’on retient la convention 2 (système BP), l’Europe apparaît mobiliser plus de renouvelables que la moyenne mondiale (25 % contre 20 %) et si l’on ajoute le nucléaire pour avoir le total des énergies décarbonées, l’écart se creuse (36 % contre 23 %). De même entre la France et l’Allemagne, pour les renouvelables, la France vient derrière (18 % contre 22 %), mais loin devant pour le total des énergies décarbonées (53 % contre 27 %).</p>
<h2>Les avantages de la « convention BP »</h2>
<p>Difficile à l’issue de cette exploration de la comptabilité énergétique d’identifier quel serait le meilleur système : à l’évidence aucun ne s’impose de manière indiscutable.</p>
<p>Une solution serait d’ignorer le problème en se plaçant du point de vue de l’énergie finale consommée. C’est pertinent quand on s’intéresse à la structure des consommations d’énergie pour le bâtiment, les transports, l’industrie. Mais si l’on se préoccupe, comme c’est particulièrement le cas depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, des questions de dépendance et de stratégie énergétique, alors il faut bien regarder l’énergie primaire, celle qui rentre dans le système énergétique.</p>
<p>Et, dans ce cas, il faut être informé des pièges posés par les conventions des systèmes de comptabilité et du fait qu’ils peuvent parfois entraîner des écarts très importants pour l’évaluation de la contribution des différentes énergies.</p>
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<p>De ce point de vue, la convention utilisée par BP, pour imparfaite qu’elle soit, évite, en adoptant une convention identique pour le nucléaire et l’électricité renouvelable, le traitement déséquilibré qui surpondère l’énergie nucléaire dans le système de l’AIE. Et, par ailleurs, l’équivalence commune retenue est simple.</p>
<p>Cette convention rend compte également des caractéristiques supérieures de l’électricité par rapport aux autres vecteurs énergétiques, en termes de rendement d’usage : par exemple, le rendement d’un moteur automobile électrique est de 90 %, contre 40 % pour un moteur thermique.</p>
<p>S’il fallait choisir du point de vue d’un analyste des stratégies énergétiques – et non de celui du physicien ou du pur comptable de l’énergie – la Convention 2, ou « convention BP », apparaîtrait alors probablement comme la moins mauvaise.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205368/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Patrick Criqui ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Comprendre comment s’élaborent les différentes manières de comptabiliser la part du nucléaire dans le bouquet énergétique de la France et les conséquences de cette comptabilité.Patrick Criqui, Directeur de recherche émérite au CNRS, économiste de l’énergie, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2050722023-05-21T15:05:27Z2023-05-21T15:05:27ZVéhicules électriques : la géothermie, future source d’approvisionnement en lithium ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/524671/original/file-20230505-17-wkjukb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=57%2C32%2C1166%2C707&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’un des plus importants gisements de lithium mondial se trouve dans le salar d’Uyuni, en Bolivie. Il est extrait en siphonnant les eaux des bassins d’évaporation, visible sur cette vue satellite.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Lithium_brine_extraction_in_the_Salar_de_Uyuni_salt_flat,_Potos%C3%AD,_Bolivia_-_3_January_2023_(52616752619).jpg">Pierre Markuse / Copernicus Sentinel program / Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Le Parlement européen a voté le 14 février 2023 la <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/automobile/automobile-le-parlement-europeen-approuve-la-fin-des-moteurs-thermiques-en-2035_5658587.html">fin de la production de véhicules thermiques à l’horizon 2035</a> pour les habitants des pays membres de l’Union européenne. En pratique, cela revient à l’arrêt des ventes de voitures et véhicules utilitaires légers neufs à essence et diesel dans l’UE à cette date, ainsi que des hybrides (essence-électrique), au profit de <a href="https://theconversation.com/automobile-les-trois-etapes-qui-ont-conduit-lue-a-mettre-fin-aux-vehicules-thermiques-dici-2035-186248">véhicules 100 % électriques</a>.</p>
<p>Cette décision s’inscrit dans un schéma plus large de recours aux véhicules électriques. Ainsi, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), environ <a href="https://www.iea.org/news/demand-for-electric-cars-is-booming-with-sales-expected-to-leap-35-this-year-after-a-record-breaking-2022">2 milliards de véhicules électriques</a> seront en circulation d’ici 2050, alors que les ventes n’étaient que de 10 millions en 2022 (avec une projection de +35 % en 2023 pour atteindre 14 millions).</p>
<p>Cette augmentation du nombre de véhicules électriques va très logiquement s’accompagner de besoins de plus en plus importants en batteries, et donc en leurs composants, comme le <a href="https://theconversation.com/les-materiaux-de-la-transition-energetique-le-lithium-105429">lithium</a>. Les exploitations habituelles étant déjà sous tension, les saumures géothermiques pourraient-elles devenir une source essentielle d’approvisionnement de la filière lithium européenne ?</p>
<h2>Le lithium, enjeu économique en voie de pénurie</h2>
<p>Le lithium est l’un des <a href="https://theconversation.com/energie-comment-vont-evoluer-les-batteries-lithium-ion-tres-consommatrices-de-metaux-en-tension-183161">composants clés des batteries de véhicules électriques</a>. En 2022, le lithium était présent dans près de 90 % des batteries : les batteries lithium-nickel-manganèse-cobalt (LNMC) représentaient 60 % de part de marché, suivies des batteries lithium-fer-phosphate (LFP) avec une part d’un peu moins de 30 %. Environ 60 % de la demande en lithium concernait ainsi les batteries de véhicules électriques, contre environ 15 % en 2017.</p>
<p>Face à cette demande croissante, l’approvisionnement mondial en lithium est mis à rude épreuve. En 2021 et 2022, la demande a ainsi dépassé l’offre, malgré l’augmentation de 180 % de la production depuis 2017. Selon l’<a href="https://www.iea.org/reports/global-ev-outlook-2023">AIE</a>, le monde pourrait donc faire face à des pénuries de lithium d’ici 2025.</p>
<p>En réaction à ces changements, le <a href="https://www.transitionsenergies.com/monde-dependant-batteries-lithium-ion-materiaux-permettent-de-les-fabriquer/">marché mondial du lithium</a> fait l’objet de toutes les attentions de la part des spéculateurs, des constructeurs automobiles et des fabricants de batteries, qui tentent de sécuriser leurs approvisionnements ainsi que leurs marges.</p>
<p>Les <a href="https://www.reuters.com/markets/commodities/lithium-price-slide-deepens-china-battery-giant-bets-cheaper-inputs-2023-02-28/">cours</a> du carbonate de lithium (lithium raffiné) ont ainsi été multipliés par six entre août 2021 et novembre 2022, et ceux des cristaux de spodumène (minéral contenant du lithium) ont encore plus progressé dans le même temps.</p>
<p>La <a href="https://www.transitionsenergies.com/krach-du-lithium/">consommation mondiale</a> a quant à elle augmenté de plus de 280 % entre 2010 et 2021. Le prix de la tonne est quant à lui passé de moins de 5 000 euros en 2012 à plus de 85 000 euros en novembre 2022, avant de redescendre depuis mars à un peu plus de 50 000 euros.</p>
<p>Le lithium fait ainsi partie des métaux dits stratégiques. La France en a même fait une priorité en matière de souveraineté économique.</p>
<h2>Les défis de l’approvisionnement en lithium</h2>
<p>L’exploitation du lithium a lieu principalement sur des gisements de types saumures, tels les salars du plateau andin dans le <a href="https://www.insu.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/le-triangle-du-lithium-quand-la-taille-compte">triangle du lithium</a>, ou par excavation minière conventionnelle dans les pegmatites riches en spodumène, comme en Australie.</p>
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<img alt="Une très grande mine à ciel ouvert, avec un lac au fond" src="https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La mine de Greenbushes, en Australie, représente un important gisement de lithium.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Open_pit_of_the_Greenbushes_mine,_January_2023_07.jpg">Calistemon/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Ainsi, la <a href="https://pubs.usgs.gov/periodicals/mcs2022/mcs2022.pdf">majeure partie des réserves mondiales de lithium</a> se trouvent en Bolivie (21 millions de tonnes), Argentine (19 millions de tonnes), Chili (9,8 millions de tonnes), Australie (7,3 millions de tonnes), et en Chine (5,1 millions de tonnes).</p>
<p>Cette concentration de la ressource en quelques points du globe rend l’<a href="https://theconversation.com/relocaliser-lextraction-des-ressources-minerales-en-europe-les-defis-du-lithium-138581">Europe dépendante des pays producteurs</a>, tant au niveau de l’approvisionnement que du coût de revient de cette matière première.</p>
<p>Outre cet aspect économique, il est important de noter que l’exploitation des salars est une <a href="https://ecoinfo.cnrs.fr/2011/06/01/le-lithium-impacts-de-la-production/">aberration écologique</a>, qui nécessite de pomper de l’eau en profondeur et de la laisser s’évaporer. Et ce, dans des régions qui subissent déjà un fort stress hydrique. Le pompage, l’ajout d’additifs chimiques ainsi que les terrassements nécessaires aux bassins de décantation défigurent durablement les paysages à fort potentiel d’attraction touristique, et détruisent des écosystèmes particulièrement vulnérables et uniques au monde.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/batteries-electriques-une-meilleure-tracabilite-pour-un-lithium-plus-durable-190080">Batteries électriques : une meilleure traçabilité pour un lithium plus durable</a>
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<p>L’impact de <a href="https://www.france24.com/fr/europe/20221024-l-une-des-plus-grandes-mines-de-lithium-d-europe-sera-exploit%C3%A9e-en-france-d-ici-2027">l’exploitation en carrière</a> est lui aussi très important, et peut s’accompagner de <a href="https://theconversation.com/en-chine-lexploitation-des-terres-rares-saccompagne-dune-pollution-massive-183676">pollutions majeures</a>, comme c’est aussi le cas pour d’autres métaux.</p>
<p>L’approvisionnement européen en lithium est ainsi confronté à de nombreux défis. Certains sont liés à la forte progression de la demande, d’autres à des contraintes écologiques et sanitaires, et d’autres enfin à la concentration des ressources hors de l’Europe.</p>
<h2>La géothermie, nouvelle source d’approvisionnement en lithium</h2>
<p>Or, des <a href="https://www.egec.org/wp-content/uploads/2023/01/Geothermal-minerals-for-the-EU-critical-raw-materials-act.pdf">concentrations élevées en lithium</a> ont récemment été découvertes dans certaines saumures provenant d’exploitations géothermiques européennes, laissant augurer une nouvelle source d’approvisionnement.</p>
<p>La <a href="https://theconversation.com/il-existe-plusieurs-types-de-geothermie-comment-marchent-ils-et-quels-sont-les-risques-153923">géothermie</a> consiste à capter la chaleur terrestre pour l’exploiter directement. Elle peut ainsi fournir de la chaleur à différentes échelles, des habitations individuelles jusqu’aux réseaux de chaleur d’une agglomération, en passant par l’industrie agroalimentaire. Lorsque la température et le débit sont suffisants, la chaleur peut également être convertie en énergie électrique et injectée sur le réseau national.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une usine dans les cheminées fument ; la photo est prise au crépuscule ou à l’aube, avec des montagnes en fond" src="https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’usine géothermique de Golemo Selo, en Bulgarie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/lAcYPEiau0U">Viktor Kiryanov/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Parmi les différentes techniques d’exploitation géothermiques possibles, la géothermie par stimulation de réservoir (EGS, Enhanced Geothermal Systems) permet de remonter à la surface des fluides naturellement surchauffés, présents à grande profondeur, grâce à un premier forage (appelé puits producteur). Ces fluides sont ensuite injectés dans leur niveau d’origine grâce à un deuxième forage (appelé puits injecteur).</p>
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<p>Ces fameux fluides sont des saumures, dont on ne modifie en rien la chimie, mais dont on prélève aujourd’hui uniquement la chaleur. Or, selon le terrain géologique dans lequel ils sont captés, ils peuvent contenir du lithium dissous. Le fluide ayant déjà été ramené en surface pour les besoins géothermiques, il ne reste qu’à extraire le précieux métal : d’une pierre deux coups, chaleur et lithium.</p>
<p>De plus, l’Europe est riche en terrains géologiques favorables à ces saumures riches en lithium, ce qui pourrait conduire à une production et un approvisionnement plus local, et moins dépendant de pays ou de sociétés étrangères.</p>
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<img alt="On trouve des zones vertes et jaune en suède/norvège/finlande, au nord de l’angleterre et en grèce ; des zones orange et rouge au portugal, au centre de la france et en europe centrale" src="https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Carte de favorabilité d’exploitation du lithium en Europe, de nulle (blanc) à très favorable (rouge).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://data.geus.dk/egdi/?mapname=egdi_geoera_frame#baslay=baseMapGEUS&extent=-2616900,592270,11121880,5873110&layers=frame_cba_scores_lithium_v01">FRAME project/Geological Survey of Sweden</a></span>
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</figure>
<p>Enfin, la technologie EGS a l’avantage de fonctionner en circuit fermé : il n’y a nul besoin ni de puiser de l’eau pour la faire évaporer ni de défigurer le paysage sur des centaines de kilomètres carrés, comme pour les salars ou les mines.</p>
<h2>Vers un développement de la géothermie ?</h2>
<p>La découverte de saumures géothermiques riches en lithium pourrait accroître l’intérêt des investisseurs et des pouvoirs politiques dans le développement de la géothermie. La demande en lithium est telle que la production de chaleur pourrait même, à terme, devenir un effet secondaire de l’extraction, et non plus la ressource principalement recherchée.</p>
<p>Durant la dernière décennie, la Commission européenne a montré un intérêt particulier pour le développement de la géothermie à grande profondeur, notamment la géothermie par stimulation de réservoir. L’exploration et le développement de systèmes EGS ont été étudiés en détail par différents projets de recherche et de démonstration tels <a href="https://cordis.europa.eu/project/id/608553">IMAGE</a>, <a href="https://cordis.europa.eu/project/id/691728">DESTRESS</a>, <a href="https://cordis.europa.eu/project/id/727550/fr">GEMEX</a> et <a href="https://www.meet-h2020.com/">MEET</a>.</p>
<p>Des <a href="https://www.brgm.fr/fr/actualite/actualite/coupler-production-lithium-geothermie-succes-projet-eugeli">projets préliminaires</a> visant à coproduire lithium et énergie géothermale sur réservoirs stimulés ont démontré la faisabilité technique du processus d’extraction, ainsi que son potentiel économique.</p>
<p>De nombreuses recherches sont à présent nécessaires afin de développer à l’échelle européenne cette nouvelle activité. Une approche multidisciplinaire est indispensable afin de cartographier la ressource en fonction du contexte géologique, déterminer les propriétés mécaniques et pétrophysiques des différents types de réservoir, comprendre les processus d’altération de la roche réservoir et les mécanismes de transport et concentration du lithium, et développer de nouvelles techniques d’extraction à haut rendement et respectueuses de l’environnement.</p>
<p>Mais au-delà de ces considérations économiques, les batteries lithium-ion <a href="https://theconversation.com/energie-comment-vont-evoluer-les-batteries-lithium-ion-tres-consommatrices-de-metaux-en-tension-183161">méritent-elles vraiment une telle place</a> dans une société sans carburant ? Qu’elles aient changé notre société est indéniable, mais si rien n’est fait concernant le coût environnemental de l’extraction des métaux bruts, du recyclage et de la réutilisation, les batteries pourraient bien devenir la prochaine grande crise environnementale après l’effet de serre. Avec ou sans exploitation géothermique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205072/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Largement utilisé dans les batteries, le lithium est une ressource très demandée. Une nouvelle voie d’extraction est envisagée ici, basée sur les fluides extraits des exploitations géothermiques.Olivier Pourret, Enseignant-chercheur en géochimie et responsable intégrité scientifique et science ouverte, UniLaSalleGhislain Trullenque, Enseignant Chercheur Géologie structurale et géothermie, UniLaSalleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2030142023-04-04T17:35:39Z2023-04-04T17:35:39ZTaxation des superprofits : un outil de redistribution des gagnants vers les perdants des crises ?<p>Les événements géopolitiques récents ont montré qu’une crise pour certains peut représenter une opportunité pour d’autres. Avec des entreprises affichant des résultats exceptionnels quand d’autres ont souffert de la pandémie puis du contexte inflationniste, des appels ont été émis pour redistribuer les bénéfices des « gagnants » vers les « perdants ».</p>
<p>En septembre 2022, la Commission européenne a ainsi mis en place une <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=COM%3A2022%3A473%3AFIN">contribution de solidarité</a> des entreprises de combustibles fossiles, qui correspond peu ou prou à une taxe sur les <a href="https://theconversation.com/topics/profit-33648">superprofits</a>. L’<a href="https://www.taxobservatory.eu/wp-content/uploads/2022/09/EUTO_WP5_A_Modern_Excess_Profit_Tax-1.pdf">Observatoire fiscal de l’Union européenne (UE)</a> a également proposé de taxer l’augmentation de la capitalisation boursière des entreprises énergétiques.</p>
<p>Lors de son interview télévisée, aux 13 heures de TF1 et France 2, le mercredi 22 mars, le président de la République, Emmanuel Macron a, lui, émis l’idée d’un mécanisme qui aille en direction des salariés :</p>
<blockquote>
<p>« On a de grandes entreprises qui font des revenus tellement exceptionnels qu’elles en arrivent à utiliser cet argent pour <a href="https://theconversation.com/rachats-dactions-face-aux-exces-des-marches-une-regulation-encore-trop-timide-191179">racheter leurs propres actions</a> ; je vais demander au gouvernement de travailler à une contribution exceptionnelle pour que leurs travailleurs puissent en profiter ».</p>
</blockquote>
<p>Il s’agirait, selon les précisions apportées ensuite par Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, de <a href="https://www.sudouest.fr/economie/partage-des-superprofits-les-syndicats-sauf-la-cgt-prets-a-signer-un-accord-sur-la-repartition-des-benefices-14635358.php">renforcer les dispositifs d’intéressement</a>, non pas de consolider la taxation des superprofits en l’élargissant à d’autres firmes que celles du secteur de l’énergie. Le gouvernement s’est d’ailleurs souvent montré réticent à cette proposition, craignant que de grands groupes ne partent à l’étranger bénéficier d’une fiscalité plus avantageuse.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1638516806808641538"}"></div></p>
<p>Nos <a href="https://doi.org/10.1111/jpet.12589">recherches</a> suggèrent néanmoins que l’idée ne semble pas à abandonner.</p>
<h2>Concurrence imparfaite</h2>
<p>Notre <a href="https://doi.org/10.1111/jpet.12589">article</a> publié dans le <em>Journal of Public Economic Theory</em>, étudie les gains et les pertes encourues lors de la pandémie liée au coronavirus. L’épisode sanitaire et les mesures prises pour ralentir sa propagation ont eu un impact majeur sur l’activité économique.</p>
<p>La production mondiale a diminué de <a href="https://www.imf.org/en/Publications/WEO/Issues/2021/03/23/world-economic-outlook-april-2021">3,3 % en 2020</a>, avec une baisse supérieure à 8 % pour des pays comme la France, le Royaume-Uni, l’Espagne, l’Inde et l’Afrique du Sud. De nombreux gouvernements ont réagi rapidement pour soutenir les entreprises avec des initiatives englobant le report du paiement de l’impôt, des exonérations fiscales, des subventions salariales versées aux employeurs ainsi que des subventions non remboursables.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Certaines ont tout de même profité du contexte, engrangeant des profits plus importants qu’en temps ordinaire. Elles ont pu bénéficier d’un changement de consommation causé par la pandémie, avec par exemple une demande accrue pour les produits d’hygiène. D’autres, opérant « en numérique », ont profité de la fermeture temporaire « physique » de leurs concurrents.</p>
<p>En utilisant les données de <em>S&P Compustat North America</em>, qui incluent environ 11 000 entreprises au cours de la période 2017-2020, nous avons pu mettre en évidence les effets économiques hétérogènes de la période d’un secteur à l’autre.</p>
<p>Des branches ont été clairement et globalement perdantes comme le transport aérien. À l’intérieur d’un même secteur, des hétérogénéités restent néanmoins visibles. Les entreprises les plus performantes dans les secteurs des produits chimiques, magasins de marchandises ou d’alimentation, ou encore des services aux entreprises ont amélioré, parfois considérablement, leur marge bénéficiaire pendant la pandémie. D’autres enregistraient des pertes dans le même temps. Cela suggère que les premières ont pu exploiter le contexte pour accroître leur pouvoir de marché et augmenter les prix.</p>
<p><iframe id="QKqzZ" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/QKqzZ/3/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Grâce à un modèle théorique de concurrence imparfaite dans un cadre d’équilibre partiel, nous montrons que les superprofits réalisés par quelques entreprises au cours de cette période auraient pu être taxés pour compenser au moins une partie des pertes subies par la majorité.</p>
<p>Considérons par exemple deux types d’entreprises : les entreprises en ligne (ou actives) et les entreprises hors ligne. Pendant le confinement, seules celles en ligne pouvaient vendre. Lorsque le nombre d’entreprises actives est faible, ces dernières peuvent exercer plus de pouvoir sur le marché, augmenter les prix et obtenir des bénéfices plus élevés. Ainsi, il devient possible de compenser les pertes par les gains générés par le confinement.</p>
<p>Même lorsque les entreprises en ligne sont en proportion telle que leur pouvoir de marché reste assez modéré (et par là même leur « surprofit »), on peut imaginer compenser les pertes de celles à l’arrêt par les gains des premières. Cela est rendu possible si la demande des consommateurs augmente avec le choc de manière significative.</p>
<h2>Une étape nécessaire</h2>
<p>À la pandémie a succédé le choc de l’invasion de l’Ukraine qui a bouleversé une économie mondiale encore convalescente. Elle a notamment entraîné une envolée des prix du pétrole et du gaz, pénalisant les consommateurs tout en profitant largement au secteur de l’énergie (Shell et Total ont triplé leurs bénéfices en 2022 par rapport à l’avant-guerre).</p>
<p>C’est pourquoi la Commission européenne a introduit sa <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=COM%3A2022%3A473%3AFIN">taxe sur les superprofits</a>, nommée contribution de solidarité. Elle correspond à un prélèvement supplémentaire de 33 % pour les entreprises des secteurs du pétrole, du gaz, du charbon et de la raffinerie situées dans l’UE dont les bénéfices en 2022 sont supérieurs de 20 % à la moyenne des bénéfices générés au cours des trois exercices précédents.</p>
<p>Jusqu’à présent, lorsqu’elle est mise en place, une taxe sur les superprofits est considérée comme une mesure temporaire et ne concerne que les entreprises du secteur énergétique et bancaire (dans le cas de l’Espagne par exemple). Ces dernières ne sont pourtant pas les seules à générer des superprofits, posant un problème d’inégalité de traitement des contribuables.</p>
<p>La difficulté est, en particulier, de tracer l’origine des superprofits. Elle pourrait être ignorée pour taxer tout superprofit s’apparentant à une rente économique, c’est-à-dire non lié à l’investissement, à l’innovation ou au risque pris par l’entreprise mais dû à des événements extérieurs inattendus. C’est d’ailleurs ce qui était effectué pendant les <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2022/09/01/d-ou-vient-la-notion-de-superprofit-et-que-signifie-t-elle-vraiment_6139741_4355770.html">Première et Seconde Guerres mondiales</a> : une taxe sur les superprofits était adoptée dans une douzaine de pays et pour tous les secteurs de l’économie.</p>
<p>Le mécanisme reposait sur une comparaison entre les profits « normaux » avant choc externe, avec ceux réalisés pendant ce choc ; la différence entre les deux correspondant à des superprofits. Une autre possibilité est de considérer tous les profits supérieurs à un certain taux de rendement du capital comme des superprofits.</p>
<p>Le changement climatique, avec un risque accru de conflits, de maladies infectieuses zoonotiques, de sécheresse et d’autres catastrophes naturelles, entraînera des opportunités conséquentes pour certains et des pertes pour d’autres. Une étape nécessaire pour aller vers une croissance inclusive et une transition écologique serait d’adopter une taxe permanente sur les superprofits dans tous les secteurs de l’économie. C’est <a href="https://www.imf.org/-/media/Files/Publications/WP/2022/English/wpiea2022187-print-pdf.ashx">ce que suggèrent d’ailleurs des chercheurs</a> du <a href="https://www.econpol.eu/sites/default/files/2023-03/EconPol-PolicyBrief_49.pdf">Fonds monétaire international</a> (FMI). Pour répondre aux problèmes de transferts de revenus vers des pays à faible imposition, cette taxe pourrait être calculée à partir du compte consolidé des entreprises multinationales en proportion des ventes par destination.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/203014/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le président de la République a écarté l’idée de taxer les résultats records des entreprises malgré les atouts d’une telle mesure mais évoque un mécanisme de redistribution à l'intention des salariés.Rodolphe Desbordes, Professeur d'Economie, SKEMA Business SchoolCeline Azemar, Professeur d'économie et Doyenne Académique, Rennes School of BusinessJean-Philippe Nicolaï, Professeur des Universités, Institut polytechnique de Grenoble (Grenoble INP)Paolo Melindi-Ghidi, Associate professor en Economie, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2014122023-03-16T11:24:52Z2023-03-16T11:24:52ZLa sobriété énergétique, tellement plus qu’une collection d’écogestes !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/515719/original/file-20230316-14-oh3wlb.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C0%2C2263%2C1175&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Préparation du repas à l’aide d’un four solaire. </span> <span class="attribution"><span class="source">Violeta Ramirez</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Si la notion de « sobriété énergétique » était encore récemment réservée aux prospectivistes, aux bureaux d’étude et conseil, et aux chercheurs et partisans de la décroissance, ce terme est aujourd’hui utilisé partout. Y compris dans les directives managériales des institutions les plus engagées sur le terrain de la croissance économique, qui demandent à présent aux employés de réduire la consommation énergétique liée à leurs déplacements, à leur confort thermique, etc.</p>
<p>La vitesse à laquelle la notion s’est vulgarisée et banalisée ne laisse de surprendre ceux qui travaillent depuis des années sur la question.</p>
<p>Si la diffusion du terme et des recommandations à la frugalité et l’anti-gaspillage sont antérieurs, le grand « décollage » de la sobriété énergétique a eu lieu très récemment, en 2022, suite au déclenchement de la guerre en Ukraine. Pour montrer la solidarité avec ce pays et, en même temps, pouvoir passer l’hiver, les dirigeants européens ont fait un appel à la réduction de la consommation d’énergie, permettant de pallier la réduction des importations énergétiques.</p>
<h2>Régulation de la consommation d’énergie et innovation technique</h2>
<p>En France, le gouvernement d’Élisabeth Borne a <a href="https://www.vie-publique.fr/discours/286643-elisabeth-borne-06102022-plan-de-sobriete-energetique">annoncé en octobre 2022 son plan de sobriété énergétique</a>, demandant aux Français de réduire leur consommation d’énergie pour éviter au gouvernement d’imposer des mesures de rationnement et des coupures électriques.</p>
<p>Dans les communiqués officiels – reproduits ensuite par les collectivités, les entreprises et les institutions –, la sobriété énergétique fait désormais référence à un ensemble de technologies de fabrication et de gestes du quotidien tels que la réduction de la consommation électrique individuelle et publique, la limitation du chauffage et de l’autosolisme, la rénovation thermique des bâtiments, l’équipement en technologies plus efficaces (thermostats intelligents, ampoules LED)… </p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/xelzTI8j0TE?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Sobriété énergétique : annonce des premières mesures par le gouvernement. (France 24/Youtube, octobre 2022)</span></figcaption>
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<p>On rassemble ainsi dans cette définition de la sobriété énergétique des solutions relevant tantôt du changement de comportement des consommateurs, tantôt de l’innovation technique des industriels permettant de maintenir le même niveau de confort avec une moindre consommation d’énergie.</p>
<h2>Écarter les dimensions transformatrices</h2>
<p>Si la diffusion de la notion au-delà du cercle d’experts est une bonne chose, son acception institutionnalisée pose de nombreuses questions.</p>
<p>Premièrement, la confusion, volontairement entretenue par le gouvernement entre « sobriété » et « efficacité » énergétiques, lui permet de faire cohabiter de manière fallacieuse, dans un seul et même discours, des orientations opposées : la sobriété et la croissance.</p>
<p>Deuxièmement, l’utilisation de cette notion à fort potentiel contestataire, pour faire référence à une somme de gestes – présentés comme provisoires et relevant en partie de l’innovation technique –, permet d’éviter la remise en question de la trajectoire de la société contemporaine et ses conséquences dévastatrices pour l’habitabilité de la planète.</p>
<p>On le comprend, l’enjeu majeur de cette institutionnalisation réside dans la dépossession des catégories pouvant nommer et aider à construire des alternatives sociales.</p>
<h2>Sobriété énergétique : de quoi parle-t-on exactement ?</h2>
<p>En tant que modération ou autolimitation des besoins et des désirs, la sobriété est une vertu reconnue dans les civilisations anciennes – Aristote fait ainsi l’éloge de la modération en tant que pratique de la juste mesure –, ayant intégré de nombreuses philosophies, religions et systèmes de croyances.</p>
<p>Dès le XVIII<sup>e</sup> siècle, l’avènement du capitalisme industriel s’accompagne de multiples formes de dissidence à l’égard de la société productiviste, qui contestent l’objectif de croissance et réclament une modération de la production et de la consommation.</p>
<p>Rappelons que cet objectif de croissance trouve notamment son origine dans le fait que les grandes machines industrielles n’étaient rentables que si de grandes quantités de biens étaient produites, conduisant au primat de l’offre sur la demande.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/redecouvrir-la-pensee-de-jacques-ellul-pionnier-de-la-decroissance-80624">Redécouvrir la pensée de Jacques Ellul, pionnier de la décroissance</a>
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<p>Des mouvements sociaux, toujours marginalisés, se sont opposés au règne de la machine (à l’image des briseurs de machines), à l’augmentation de la productivité et à la séparation du travailleur et du consommateur.</p>
<p>D’autres ont opté pour prendre leurs distances par rapport à l’économie industrielle et expérimenter un mode de vie à contre-courant où les besoins reconnus se limitent au « nécessaire de vie », selon l’expression du philosophe Henry David Thoreau.</p>
<h2>Pauvreté volontaire, simplicité, frugalité, décroissance</h2>
<p>Les multiples discours sociaux revendiquant une modération de la production et de la consommation qui se sont succédé depuis le XVIII<sup>e</sup> siècle n’ont pas toujours utilisé le terme de sobriété.</p>
<p>Parfois, d’autres termes traduisant le principe d’autolimitation volontaire et de suffisance ont été utilisés : « pauvreté volontaire », « simplicité volontaire », « frugalité » ou « décroissance ».</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une personne se prépare à planter" src="https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Faire pousser ses futurs aliments.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Violeta Ramirez</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un enfant tient une matière compostée dans ses mains" src="https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Composter ses déchets.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Violeta Ramirez</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces discours ont contesté l’objectif de croissance (produire et consommer toujours plus) avec des arguments écologiques, politiques, moraux et mathématiques. Ils ont non seulement critiqué cette orientation productiviste de la société moderne, mais ont également proposé des alternatives sociotechniques : produire localement avec des technologies simples et des énergies renouvelables, respecter les cycles de recyclage de la matière, etc.</p>
<h2>Un changement durable chez les individus</h2>
<p>Au XXI<sup>e</sup> siècle, juste avant son institutionnalisation, la notion de sobriété énergétique était utilisée pour désigner des stratégies et choix de réduction de la consommation matérielle et énergétique en vue de l’adaptation des modes de vie aux limites planétaires. </p>
<p>Elle nommait ainsi un processus réflexif, réalisé individuellement et/ou collectivement, consistant à interroger les besoins et à réévaluer les consommations selon un critère énergétique et environnemental, et pas seulement économique.</p>
<p>À la différence de son acception institutionnalisée, qui appelle à des comportements provisoires résultant d’un contexte conjoncturel, le processus d’apprentissage et d’adoption des valeurs et pratiques qu’implique l’engagement dans la sobriété énergétique transforme durablement l’individu, peu enclin par la suite à retomber dans une « ébriété » énergétique.</p>
<h2>Quoi au bout de la spirale de descente énergétique ?</h2>
<p>Les démarches de sobriété énergétique peuvent être portées collectivement, mais elles relèvent, d’abord, d’un engagement et d’un questionnement individuel. Par quels moyens et avec quels résultats les personnes parviennent-elles à l’objectif de réduire leur consommation énergétique ?</p>
<p>L’étude ethnographique d’initiatives de sobriété volontaire montre que le souci de réduire son impact environnemental donne lieu à un processus de transformation qui commence par le questionnement, la limitation et la redéfinition de ses besoins ; il peut aller jusqu’à la remise en question et la [transformation des formes de travail].</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une femme découpe une planche de bois" src="https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">S’affranchir du « travail professionnel » pour prendre le temps de bricoler, par exemple, permet de gagner en autonomie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Violeta Ramirez</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>Pour une bonne partie des personnes engagées dans la sobriété énergétique, l’objectif vise à réduire les coûts environnementaux liés aux modes de vie ; cette réduction a des effets sur la manière de satisfaire les besoins concernant le logement (construire et bricoler son habitat), l’alimentation (produire sa nourriture ou la glaner), l’équipement (fabriquer, récupérer et réparer des objets, vêtements et outils), l’énergie et les ressources (produire son énergie et collecter son eau, traiter et transformer ses déchets).</p>
<p>« Faire soi-même » apparaît comme la meilleure façon de contrôler les conditions et les conséquences de son mode de vie. Certaines personnes décident ainsi de réduire leur temps de travail professionnel et augmenter le temps de travail « pour soi », afin de produire elles-mêmes ce dont elles ont besoin.</p>
<p>Consommer autrement amène ainsi à travailler autrement et vice-versa, dans une spirale par laquelle le sujet gagne en autonomie : il acquiert des connaissances qui lui permettent de se passer du marché de biens, de services et du travail.</p>
<p>On le comprend, ces différents enjeux associés à la définition de la sobriété énergétique défendue ici (en récupérant et en élaborant des connaissances pour s’émanciper du marché capitaliste et de sa culture consumériste), diffèrent significativement de ceux associés à la notion désormais institutionnalisée.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/201412/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Violeta Ramirez ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le processus d’apprentissage et d’adoption des valeurs et pratiques qu’implique l’engagement dans la sobriété énergétique transforme durablement les individus.Violeta Ramirez, Anthropologue, chercheur postdoctoral sur la transition et la sobriété énergétiques, Université Savoie Mont BlancLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2011212023-03-08T19:06:12Z2023-03-08T19:06:12ZEffets du bruit des éoliennes sur la santé : mythe ou réalité ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/513771/original/file-20230306-24-qm1nt2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C16%2C5455%2C2563&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/maison-en-beton-blanc-entouree-d-arbres-414911/">Pexels.com</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le bruit représente un problème majeur pour la santé publique. Il constitue selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) le <a href="https://cdn.theconversation.com/static_files/files/2547/9789289002295-eng.pdf">deuxième facteur de risque environnemental en Europe en termes de morbidité</a>, derrière la pollution de l’air.</p>
<p>Ainsi, en Europe occidentale plus d’un million d’années de vie vécues avec de l’incapacité sont comptabilisées chaque année <a href="https://cdn.theconversation.com/static_files/files/2547/9789289002295-eng.pdf">à cause du bruit des transports</a>, dont les effets avérés avec suffisamment d’éléments de preuve sont les perturbations du sommeil, la gêne, les <a href="https://www.euro.who.int/__data/assets/pdf_file/0008/383921/noise-guidelines-eng.pdf#page=31">risques cardiovasculaires accrus, et les difficultés d’apprentissage</a>.</p>
<p>Si les impacts sanitaires du bruit des transports ont été abondamment étudiés, il n’en va cependant pas de même pour d’autres sources de bruit environnemental. C’est notamment le cas des parcs éoliens, qui connaissent un développement important en France et dans de nombreux autres pays. Avec l’impact sur le paysage, les nuisances sonores des éoliennes sont l’un des arguments le plus souvent mis en avant par les opposants à ces installations.</p>
<p>Néanmoins, les informations véhiculées dans la sphère publique, en particulier sur Internet, concernant la réalité des impacts de ce type de bruit et de ses effets apparaissent souvent en décalage par rapport aux connaissances qui font consensus dans la communauté scientifique. Mais quelles sont-elles ?</p>
<h2>Le bruit éolien : un bruit spécifique</h2>
<p>Comparativement à de nombreuses autres sources de bruit environnemental, d’origine humaine ou naturelle, les niveaux de bruit générés par un parc éolien sont très modérés. À l’extérieur du logement d’un riverain, ils dépassent rarement <a href="https://doi.org/10.3390/ijerph19010023">40 dBA</a>, soit l’équivalent <a href="https://sstie.ineris.fr/consultation_document/20477">du niveau de bruit dans un bureau calme</a>.</p>
<p>À titre de comparaison, le niveau de bruit des transports en façade du logement d’un riverain peut aller au-delà de 70 dBA (niveau sonore seuil d’un <a href="https://www.bruit.fr/bruit-des-transports/bruit-routier">Point Noir Bruit</a> routier le jour).</p>
<p>En dépit de ces niveaux très modérés, les riverains expriment parfois une gêne due au bruit des éoliennes. Plusieurs raisons peuvent l’expliquer.</p>
<p>Rappelons tout d’abord que l’échelle des décibels est une échelle logarithmique, ce qui signifie que 3 décibels supplémentaires équivalent à un doublement de l’énergie sonore, et que 10 décibels supplémentaires multiplient celle-ci par 10. Cependant, si la gêne due au bruit augmente avec le niveau d’exposition sonore, son évolution ne suit généralement pas de loi simple et dépend de chaque source de bruit et de ses caractéristiques (bruit permanent, bruit impulsionnel, bruit grave/aigu, etc.).</p>
<p>Dans le cas du bruit généré par les éoliennes, les parcs éoliens sont situés dans des environnements essentiellement ruraux. Le bruit de fond local relativement bas de ces sites peut donc favoriser la perception du bruit émis.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Photos d’éoliennes" src="https://images.theconversation.com/files/514186/original/file-20230308-16-jbgl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514186/original/file-20230308-16-jbgl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514186/original/file-20230308-16-jbgl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514186/original/file-20230308-16-jbgl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514186/original/file-20230308-16-jbgl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514186/original/file-20230308-16-jbgl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514186/original/file-20230308-16-jbgl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les éoliennes sont généralement situées dans des zones rurales.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/JRUVbgJJTBM">Thomas Reaubourg/Unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La gêne rapportée pourrait aussi en partie résulter des caractéristiques particulières du signal sonore généré par les éoliennes. Il s’agit en effet d’un bruit continu, pouvant parfois présenter des tonalités marquées (bruit mécanique dans la nacelle, état de surface dégradé des pales). Ces dernières sont cependant généralement le signe d’un dysfonctionnement de l’éolienne, qui peut être corrigé.</p>
<p>Lorsque les pales des éoliennes sont en fonctionnement, des phénomènes de « modulation d’amplitude » peuvent aussi se produire et être à l’origine d’une gêne. Ces modulations se traduisent par des fluctuations du niveau sonore au cours du temps (de l’ordre de la seconde), dont l’origine n’est pas encore clairement établie. Plusieurs pistes d’explication sont avancées et font l’objet de recherches.</p>
<p>Elles pourraient provenir par exemple de phénomènes de décrochage de l’écoulement de l’air autour des pales, de conditions météorologiques particulières influençant la propagation sonore, d’une directivité sonore spécifique des sources de bruit au niveau des pales en mouvement, ou encore d’interactions entre le son provenant de ces dernières et le sol.</p>
<p>Enfin, le bruit éolien comporte également des composantes basses fréquences (20-200 Hz, audibles) ou infrasonores (fréquences inférieures à 20 Hz, généralement considérées comme inaudibles) qui se propagent sur des distances plus importantes que des sons de fréquences supérieures. Bien que prédominants dans le spectre éolien, les infrasons générés par un parc éolien restent cependant <a href="https://www.anses.fr/fr/content/exposition-aux-basses-fr%C3%A9quences-et-infrasons-des-parcs-%C3%A9oliens-renforcer-l%E2%80%99information-des">très en deçà des seuils de perception humains connus</a>.</p>
<p>Si l’existence de ces divers phénomènes est bien connue, les scientifiques s’interrogent actuellement sur la façon de les modéliser et de les intégrer dans les méthodes de prévision du bruit existantes.</p>
<p>Ainsi, pour progresser vers une meilleure connaissance des phénomènes physiques et mieux maîtriser le bruit émis par les éoliennes, le <a href="https://www.anr-pibe.com">projet de recherche PIBE a été mis en place</a>. Il se déploie selon <a href="https://www.anr-pibe.com/projet/organisation">trois axes</a> : caractériser et modéliser les phénomènes de modulation d’amplitude, estimer la variabilité des niveaux sonores (en évaluant notamment l’influence de la micrométéorologie locale sur l’émission sonore au niveau des pales et sur la propagation du son), et concevoir des systèmes pour minimiser le bruit produit par les pales.</p>
<h2>Un nombre limité de personnes exposées au bruit éolien</h2>
<p>Afin d’évaluer les enjeux de santé publique que représente l’exposition aux émissions sonores des éoliennes, deux paramètres doivent être pris en compte : le nombre de personnes concernées, et la sévérité de l’effet du bruit des éoliennes sur la santé s’ils sont démontrés.</p>
<p>Une étude récente de l’exposition de la population de France métropolitaine au bruit éolien indique que <a href="https://doi.org/10.3390/ijerph19010023">plus de 80 % de la population exposée</a> l’est à des niveaux <a href="https://doi.org/10.1684/ers.2022.1675">inférieurs à 40 dBA</a>.</p>
<p>En 2017, année de référence de l’étude, la part de la population de France métropolitaine exposée au-delà de cette valeur variait de 0,08 % (conditions nocturnes) à 0,18 % (conditions diurnes), en fonction des conditions de propagation.</p>
<p>À titre de comparaison, pour cette même année, la part de population de France métropolitaine exposée à plus de 40 dBA en condition nocturne était de <a href="https://www.eea.europa.eu/data-and-maps/data/data-on-noise-exposure-8">15 % pour le bruit routier, 7 % pour le bruit ferroviaire et de 0,7 % pour le bruit aérien</a>.</p>
<h2>Des effets sur la santé non démontrés</h2>
<p>Des articles récents synthétisant les connaissances actuelles font état d’une <a href="https://doi.org/10.3390/ijerph18179133">absence de preuves d’effets du bruit éolien sur la santé humaine</a>, hormis en ce qui concerne la <a href="https://www.who.int/europe/publications/i/item/9789289053563">gêne</a>.</p>
<p>La plupart des études disponibles ont trouvé une association positive significative entre les niveaux de bruit émis par les éoliennes et le pourcentage de personnes très gênées. En outre, à niveau sonore équivalent, le bruit engendré par les éoliennes peut être perçu comme plus gênant que celui provenant d’autres sources de bruit (de transports notamment), en raison de certaines caractéristiques acoustiques du signal sonore décrites précédemment, notamment l’existence possible d’une modulation de l’amplitude du signal.</p>
<p>Cependant, les seules propriétés acoustiques du bruit émis par les éoliennes n’expliquent pas l’intégralité de la gêne. En effet, celle-ci peut également dépendre <a href="https://www.anses.fr/fr/content/exposition-aux-basses-fr%C3%A9quences-et-infrasons-des-parcs-%C3%A9oliens-renforcer-l%E2%80%99information-des">d’autres facteurs non acoustiques</a> comme la visibilité du parc éolien, l’attitude des personnes exposées envers celui-ci, ou un lien d’intérêt particulier qu’entretiendrait un riverain avec le parc (intérêt pécuniaire par exemple).</p>
<p>Très peu d’études ont examiné les effets du bruit éolien sur les perturbations du sommeil, les maladies cardiovasculaires, les systèmes métaboliques ou endocriniens, la cognition ou la santé mentale. L’OMS souligne donc que les preuves concernant les effets du bruit éolien sur la santé sont soit inexistantes, soit de faible qualité.</p>
<p>Les émissions de bruit basses fréquences ou infrasonores provenant des éoliennes sont souvent évoquées comme source potentielle de risque sur la santé humaine ou animale.</p>
<p>Cependant, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), <a href="https://www.anses.fr/fr/content/exposition-aux-basses-fr%C3%A9quences-et-infrasons-des-parcs-%C3%A9oliens-renforcer-l%E2%80%99information-des">dans un avis de 2017</a>, ainsi que des <a href="https://doi.org/10.3390/ijerph18179133">travaux internationaux</a> plus récents concluent à l’absence d’argument scientifique suffisant en faveur de l’existence d’effets sanitaires liés à ces émissions et au manque d’études sur le sujet.</p>
<p>Cet avis indique toutefois que de réelles situations de mal-être peuvent être rapportées par des riverains, mais que leur imputabilité au bruit des éoliennes est complexe et reste très souvent difficile à établir.</p>
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<p>Si certaines théories relayées par des opposants (« Syndrome éolien » et « Vibro Acoustic Disease ») ont été jugées peu crédibles par cet avis, d’autres mécanismes d’effets restent à explorer, comme ceux qui pourraient concerner le système cochléo-vestibulaire et être à l’origine d’effets physiopathologiques. Situé dans l’oreille interne, ce système sensoriel contribue à la sensation de mouvement et à l’équilibre. On sait qu’il a une <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/AP2013SA0115Ra.pdf#page=11">sensibilité particulière aux basses fréquences et aux infrasons</a>.</p>
<p>Toutefois, si certains effets cellulaires ont été observés sur des animaux de laboratoire via des sons purs et intenses (mais n’équivalant pas forcément à un son de très basse fréquence chez l’être humain), <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/AP2013SA0115Ra.pdf#page=12">leur existence reste à démontrer dans le cas humain et pour des expositions sonores similaires à celles des éoliennes</a> (sons complexes, de moindre intensité sonore, mais de durée prolongée).</p>
<p>De tels effets pourraient apporter une explication à la gêne exprimée, qui serait parfois plus sévère que ne le laisseraient prévoir les estimations et mesures du champ acoustique, ou les connaissances établies concernant la sensibilité aux infrasons ou sons basses fréquences.</p>
<h2>Comprendre les effets sur la santé du bruit des éoliennes, notamment des infrasons</h2>
<p>Afin de pallier le manque actuel de connaissances, l’Organisation mondiale de la santé et, en France, l’Anses, ont recommandé la mise en œuvre d’études épidémiologiques portant sur un nombre important d’individus, utilisant des mesures objectives de l’état de santé des participants, et mesurant l’exposition au bruit des éoliennes de manière objective et standardisée pour un large éventail de niveaux sonores et de fréquences (en incluant les sons de basse fréquence et les infrasons).</p>
<p><a href="https://ribeolh.univ-gustave-eiffel.fr/">Le projet de recherche français « RIBEolH »</a> (Recherche des Impacts du Bruit EOLien sur l’Humain : son, perception, santé) a été mis en place pour répondre à ce besoin. En cours de réalisation, il a plusieurs objectifs :</p>
<ul>
<li><p>Évaluer les effets sur la santé du bruit audible, des sons de basse fréquence ou des infrasons, émis par les éoliennes, et de mieux comprendre la gêne exprimée par certains riverains ;</p></li>
<li><p>Identifier les mécanismes auditifs associés à la perception des infrasons et des sons de basse fréquence émis par les éoliennes ;</p></li>
<li><p>Mieux connaître les effets des infrasons sur l’oreille interne ou le système nerveux central humains.</p></li>
</ul>
<p>Pour y parvenir, le projet s’appuie sur deux volets complémentaires : une étude épidémiologique menée auprès de 1200 riverains de parcs éoliens en France et une étude psychoacoustique et physiologique.</p>
<p>Cette seconde étude consistera en la réalisation en laboratoire de mesures psychoacoustiques et physiologiques dans un environnement maîtrisé à l’aide de sons d’éoliennes mesurés ou synthétisés par un modèle physique pour différentes conditions de fonctionnement de ces éoliennes. Elle permettra de déterminer les paramètres qui ont un rôle important dans les effets du bruit émis par les éoliennes sur la sensation auditive et la gêne.</p>
<h2>Évaluer les conséquences du bruit des éoliennes sur le sommeil</h2>
<p>Un autre projet, appelé « EOLSOMnie » est destiné à mieux comprendre les effets du bruit des éoliennes sur le sommeil. Il consiste à mener une étude spécifique portant sur le sommeil auprès d’un sous-échantillon d’une centaine de participants à l’étude épidémiologique incluse dans le projet RIBEolH.</p>
<p>L’objectif est d’évaluer les effets du bruit audible émis par les éoliennes sur les paramètres individuels de sommeil et de déterminer si les sons de basse fréquence et les infrasons produits par les éoliennes modifient la physiologie du sommeil.</p>
<p>Les résultats de ces deux projets permettront d’alimenter de futurs travaux qui pourraient porter sur la préconisation de seuils de bruit applicables dans le cadre du développement éolien, et pour lequel les connaissances font actuellement défaut.</p>
<p>Mieux connaître les impacts du bruit émis par les éoliennes permettra de mieux les maîtriser, et de fournir un meilleur accompagnement du développement de l’énergie éolienne dans le respect de tous. Une étape importante pour pouvoir développer dans les meilleures conditions cette énergie renouvelable, dans le cadre de l’indispensable transition énergétique en cours.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/201121/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Anne-Sophie Evrard a reçu des financements de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>David Ecotière a reçu des financements de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES)
</span></em></p>Le développement des parcs éoliens au cours des dernières années s’est accompagné d’un débat au sujet des potentielles nuisances sonores causées par ces installations. Que sait-on à ce sujet ?Anne-Sophie Evrard, Chargée de recherche en épidémiologie, Université Gustave EiffelDavid Ecotière, Chercheur en acoustique environnementale - Directeur adjoint de l’Unité Mixte de Recherche en Acoustique Environnementale (UMRAE), CeremaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2004722023-02-23T11:38:46Z2023-02-23T11:38:46ZImaginaires du nucléaire : le mythe d’un monde affranchi de toutes contraintes naturelles<p><em>En plein débat sur la relance de la filière du nucléaire civil en France, nous vous proposons de découvrir un extrait du récent ouvrage du géographe Teva Meyer (Université de Haute-Alsace), <a href="http://www.lecavalierbleu.com/livre/geopolitique-du-nucleaire/">« Géopolitique du nucléaire »</a>, paru le 16 février 2023 aux éditions du Cavalier bleu. L’auteur y questionne et explore l’importance croissante du nucléaire dans les relations internationales. Dans le passage choisi ci-dessous, il est question des imaginaires qui soutiennent le développement des industries civile et militaire de l’atome.</em></p>
<hr>
<p>Aux racines géopolitiques du nucléaire se trouvent deux mythes, l’avènement de l’Humanité à l’âge de l’abondance et la soumission de la nature, fondés sur les propriétés physiques de l’uranium et du plutonium. Comprendre les fondamentaux géopolitiques du nucléaire demande de s’arrêter sur cette matérialité. Plus précisément, il faut prendre au sérieux la manière dont celle-ci a été convoquée par des acteurs scientifiques, politiques et économiques pour soutenir l’idée d’un nucléaire a-spatial par nature, d’une technologie permettant à l’Humanité de se défaire des contraintes que la géographie avait fait peser sur son développement.</p>
<p>L’exploitation de la densité énergétique, c’est-à-dire la quantité d’énergie stockée dans une masse donnée, de l’uranium et du plutonium constitue une rupture technologique. Un kilogramme d’uranium préparé pour un réacteur commercial libère 3 900 000 mégajoules d’énergie, contre 55 mégajoules pour le gaz naturel, 50 pour le pétrole et moins de 25 pour la houille. Un réacteur standard, de la taille de ceux en fonction en France, consomme environ un mètre cube d’uranium enrichi par an, soit 20 tonnes de combustible. Pour le produire, il faut approximativement dix fois plus d’uranium naturel. La même énergie fournie par une centrale à charbon demanderait 3 millions de tonnes de houille. Les volumes sont si faibles que le combustible peut être expédié par avion, limitant les risques de rupture d’approvisionnement qu’imposeraient des conflits sur le chemin.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1498750129838465025"}"></div></p>
<p>Face aux restrictions de transports terrestres, la Russie a ainsi alimenté par les airs les centrales hongroises, tchèques et slovaques pendant les guerres en Ukraine de 2014 et 2022, chaque vol contenant presque deux années de combustibles d’une centrale. Du côté militaire, la rupture d’ordre de grandeur est tout aussi vertigineuse. La plus grande bombe conventionnelle larguée pendant la Seconde Guerre mondiale, la <em>Grand Slam</em>, avait une puissance équivalente à 10 tonnes de TNT, soit 1 500 fois moins que <em>Little Boy</em> lancée sur Hiroshima le 6 août 1945.</p>
<h2>Le nucléaire : outil de conquête de <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/ecoumene">l’œkoumène</a></h2>
<p>Dès les années 1950, chercheurs et politiques s’enthousiasment. Grâce aux quantités dérisoires de combustibles nécessaires et la facilité à le transporter, le nucléaire s’affranchirait de la géographie des ressources. On pourrait, pensait-on, placer des réacteurs n’importe où, sans impératifs de proximité avec une mine ou des infrastructures de transports. Plus encore, l’énergie ne serait plus tributaire des gisements de main-d’œuvre. Seule reste la contrainte de l’eau, indispensable – sauf rupture technologique – pour refroidir les centrales, qu’elle vienne des fleuves, de l’océan ou des égouts des villes, comme c’est le cas à Palo Verde en Arizona. Les possibilités semblent sans limite. Le nucléaire devient un outil géopolitique servant à aménager les derniers espaces qui échappaient à la présence humaine, repoussant les frontières de <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/ecoumene">l’œkoumène</a>.</p>
<hr>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<hr>
<p>Les années 1950-1960 voient se multiplier dans les <em>comics</em> et dans la littérature nord-américaine des images de villes sous cloche, projets urbains nucléarisés protégés par des dômes. Ces utopies atomiques forment des habitats hermétiques, entièrement alimentés par l’énergie nucléaire, autorisant la conquête par l’humanité des derniers milieux extrêmes et la colonisation des déserts, des pôles, voire d’autres planètes. Ces productions sont promues, parfois même commandées, par l’administration états-unienne. <em>Soft power</em> avant l’heure, il faut prouver la supériorité du modèle américain face aux soviétiques. Les villes sous cloche doivent également laisser envisager au public américain que des solutions existent pour perpétuer la vie après une éventuelle attaque nucléaire. Cette stratégie répond aussi aux rumeurs venant de l’autre côté du rideau de fer qui prêtaient à Moscou le projet de construire des dômes nucléarisés comme socle de l’urbanisation de l’Arctique pour assurer son contrôle militaire et faciliter l’exploitation de ressources naturelles.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/511692/original/file-20230222-20-t0pmon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/511692/original/file-20230222-20-t0pmon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/511692/original/file-20230222-20-t0pmon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/511692/original/file-20230222-20-t0pmon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/511692/original/file-20230222-20-t0pmon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/511692/original/file-20230222-20-t0pmon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/511692/original/file-20230222-20-t0pmon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La Ford Nucleon, concept car développé par le constructeur automobile états-unien en 1958. Un petit réacteur nucléaire situé à l’arrière devait assurer sa propulsion.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/Ford_Nucleon#/media/File:Ford_Nucleon-en.jpg">Ford Motor Company/Wikipedia</a></span>
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<p>De la fiction, ces utopies percolent dans les milieux scientifiques et militaires. Les appétits se portent sur l’Antarctique, terres hostiles que le nucléaire ouvrirait à une colonisation durable. Le déploiement d’un réacteur pour soutenir la présence permanente d’une station de recherche états-unienne à McMurdo sur l’île de Ross devait damer le pion aux ambitions soviétiques dans la région. Côté militaire, cette colonisation par l’uranium était vue comme l’occasion d’arrimer une tête de pont logistique et transformer l’Antarctique en terrain d’entraînement pour des combats futurs en Arctique. L’expérience est catastrophique. Installé en 1962, le réacteur subit 438 incidents avant sa mise à l’arrêt dix années plus tard. Au Groenland, l’expérience du réacteur PM-2A, acheminé par avion en 1960 pour alimenter la base militaro-scientifique de Camp Century à la pointe nord-ouest de l’île, est aussi un échec, ne fonctionnant que pendant deux ans. Les espoirs de colonisation nucléaire s’amenuisent. Les années 2010 voient cependant se raviver l’idée d’un nucléaire a-spatial avec le retour en grâce des petits réacteurs modulaires. Qu’ils soient publics ou privés, militaires ou civils, leurs promoteurs remobilisent l’image d’une technologie pilotable à distance capable d’atteindre les espaces les plus isolés et d’y soutenir la vie. Les projets ciblent les communautés arctiques, les déserts arides, les fronts pionniers des forêts tropicales, voire l’espace et les corps célestes. S’ils s’appuient sur un discours climatique, ils se nourrissent aussi d’ambitions géopolitiques. Ces réacteurs doivent assurer une présence permanente dans des territoires stratégiques, qu’il s’agisse de l’Arctique pour la Russie, ou des archipels contestés des Spratleys et Paracels pour Pékin en mer de Chine méridionale. L’atome redevient l’outil de la conquête de la géographie.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"831907225652363265"}"></div></p>
<h2>Explosions atomiques et géo-ingénierie</h2>
<p>Dès le début des années 1950, on envisage l’utilisation d’explosions atomiques pour changer la topographie : construction de canaux, ouverture de mines, inversion de cours de rivière, fracturation d’icebergs pour produire de l’eau potable ou terrassement de montagnes. La Commission de l’énergie atomique des États-Unis lance en 1957 le programme <em>Plowshare</em> pour évaluer ces nouveaux débouchés. L’URSS ne suivra que 8 années plus tard. L’empressement américain s’explique par l’expérience de la crise de Suez en 1956. Le blocage du canal amène Washington à envisager de créer une nouvelle voie pour le pétrole du Golfe à coup d’explosions atomiques. De l’autre côté de l’Atlantique, le risque d’une thrombose du canal du Panama entraîne les mêmes plans. L’<em>Atlantic-Pacific Inter-oceanic Canal Study Commission</em> propose en 1970 d’ouvrir un chemin, au Costa Rica, Nicaragua ou en Colombie, par 250 explosions nucléaires quasi simultanées. L’atome doit assurer la fluidité du trafic mondial et garantir un sauf-conduit océanique à la Navy. La construction de ports artificiels dans des localisations stratégiques, au nord de l’Alaska, au Chili et aux îles Christmas dans le Pacifique, est étudiée. Ce programme sert également de justifications aux scientifiques pour pérenniser leur budget, alors même que les débats s’intensifient aux États-Unis comme à l’étranger pour la mise en place d’un moratoire global sur les essais nucléaires. <em>Plowshare</em> ne sera jamais mis en phase opérationnelle. Il est abandonné en 1977, après une douzaine d’essais, plombé par des doutes quant à la rationalité économique et l’acceptabilité sociale de cette géo-ingénierie nucléaire.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/industrie-nucleaire-le-grand-jeu-geopolitique-175901">Industrie nucléaire : le grand jeu géopolitique</a>
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<p>Le programme soviétique débute plus tardivement, et n’est arrêté qu’en 1989. Comme pour les États-Unis, il s’agit de dompter l’espace à coup d’explosions nucléaires. On envisage de former des cratères atomiques pour construire des réservoirs en Sibérie afin d’y développer l’agriculture ainsi que de creuser un canal entre les rivières Kama et Pechora, déroutant les eaux de l’Arctique vers l’Asie centrale et la Caspienne. C’est dans l’industrie des hydrocarbures que l’ingénierie nucléaire soviétique est mise en pratique. De 1965 à 1987, douze explosions sont utilisées pour stimuler la production de puits pétroliers, non sans critiques des raffineries qui refuseront à plusieurs reprises de transformer les hydrocarbures extraits par cette technique, de crainte que la matière ne soit radioactive. Dans le secteur gazier, cinq détonations permettent d’éteindre des puits dont l’industrie avait perdu le contrôle, à Maïski dans le Caucase et Narian-Mar dans l’Arctique russe ainsi qu’en Ouzbékistan et en Ukraine près de Kharkiv.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/511707/original/file-20230222-22-1gitx8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Couverture de l’ouvrage « Géopolitique du nucléaire »" src="https://images.theconversation.com/files/511707/original/file-20230222-22-1gitx8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/511707/original/file-20230222-22-1gitx8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=942&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/511707/original/file-20230222-22-1gitx8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=942&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/511707/original/file-20230222-22-1gitx8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=942&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/511707/original/file-20230222-22-1gitx8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1184&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/511707/original/file-20230222-22-1gitx8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1184&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/511707/original/file-20230222-22-1gitx8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1184&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Paru le 16 février 2023.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.lecavalierbleu.com/livre/geopolitique-du-nucleaire/">Éditions du Cavalier bleu</a></span>
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<p>La géopolitique du nucléaire se nourrit ainsi de la représentation d’un atome a-spatial par essence, d’une technologie presque entièrement décorrélée des besoins en ressources et permettant à l’Homme de se développer sans contrainte naturelle, de coloniser les derniers espaces résistant à sa présence et de reconfigurer la géographie à sa volonté. L’atome doit assurer le contrôle militaire de points stratégiques isolés et l’exploitation de ressources pour asseoir sa puissance économique et prouver la supériorité de son modèle. Ces discours reposent sur une interprétation des caractéristiques physiques des matières nucléaires. Mais derrière ces imaginaires, la réalité est bien plus complexe.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/200472/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Teva Meyer ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>À partir des années 1950, le nucléaire est envisagé comme une technologie permettant aux humains de se défaire des contraintes que la géographie avait fait peser sur leur développement.Teva Meyer, Maître de conférences en géopolitique et géographie, Université de Haute-Alsace (UHA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1987492023-02-23T11:38:42Z2023-02-23T11:38:42ZCéréales, élevage ou énergie ? Les terres agricoles attisent les appétits<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/511233/original/file-20230220-22-5c73zx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Troupeau de jeunes vaches limousines dans une prairie permanente du Nord de la Lozère. </span> <span class="attribution"><span class="source">Marc Benoit </span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>La place de l’élevage dans notre société est aujourd’hui largement débattue. Au-delà de la <a href="https://theconversation.com/parlons-nous-trop-du-bien-etre-animal-180166">question désormais centrale du bien-être animal</a>, deux arguments très forts reviennent également dans le débat. </p>
<p>Tout d’abord, les émissions de gaz à effet de serre, en <a href="https://theconversation.com/changement-climatique-comment-expliquer-la-forte-hausse-des-concentrations-de-methane-dans-latmosphere-70793">particulier le méthane</a>, majoritairement issu de la digestion des fourrages par les ruminants. Ensuite, la compétition de l’élevage pour la culture et l’utilisation de céréales, que les humains pourraient consommer directement et de façon beaucoup plus efficace. Rappelons que, pour une même quantité, les céréales nourrissent <a href="https://productions-animales.org/article/view/2355">jusqu’à 10 fois plus de personnes que la viande</a>. </p>
<p>Depuis début 2022, l’impact de la guerre en Ukraine sur le coût de l’énergie entraîne également de fortes tensions sur le secteur de l’agriculture, relançant l’intérêt des surfaces agricoles pour la production d’énergie. </p>
<p>L’élevage pourrait bien <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308521X22002219">être le grand perdant de cette concurrence</a>.</p>
<h2>Un fort impact du prix de l’énergie</h2>
<p>Les activités d’élevage des pays les plus développés sur le plan économique font appel à grandes quantités d’énergie. Ainsi, pour 1 mégajoule d’énergie consommée, l’élevage produit entre 0,5 et 1 mégajoule sous forme de lait ou de viande, alors que les grandes cultures (céréales, oléoprotéagineux) en <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0308521X22002219">produisent plus de six</a>. </p>
<p>Cela signifie que, ramenée à l’énergie produite sous forme de diverses denrées agricoles, une augmentation du prix de l’énergie a une incidence six à dix fois plus grande, en moyenne, sur les produits issus de l’élevage, par rapport aux produits issus des grandes cultures. Cette forte répercussion du prix de l’énergie peut ainsi rendre ces produits difficilement accessibles au consommateur. Le constat peut d’ailleurs déjà être fait d’un fort recul des achats des produits d’origine animale de la <a href="https://www.kantar.com/fr/inspirations/consommateurs-acheteurs-et-distributeurs/2022-kantar-inflation-juin-2022">part des ménages modestes</a> du fait de la très forte inflation.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/511234/original/file-20230220-20-rb44de.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/511234/original/file-20230220-20-rb44de.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=288&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/511234/original/file-20230220-20-rb44de.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=288&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/511234/original/file-20230220-20-rb44de.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=288&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/511234/original/file-20230220-20-rb44de.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=362&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/511234/original/file-20230220-20-rb44de.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=362&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/511234/original/file-20230220-20-rb44de.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=362&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’écopaturage, mis en œuvre le plus souvent avec les ovins, est la pratique retenue pour entretenir les champs de panneaux photovoltaïques positionnés au sol, comme ici dans le Gers.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marc Benoît</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<h2>Pourquoi l’activité d’élevage nécessite-t-elle autant d’énergie ?</h2>
<p>Au niveau des fermes d’élevage – en 2020, on en comptait <a href="https://agreste.agriculture.gouv.fr/agreste-web/download/publication/publie/Pri2213/Primeur%202022-13_RA2020_%20VersionD%C3%A9finitive.pdf">150 000</a> spécialisées dans cette activité sur les 416 000 exploitations agricoles françaises –, on peut considérer qu’en moyenne <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308521X22002219">75 % de la consommation d’énergie</a> sont liés à l’alimentation des animaux. Cela comprend la mise en culture et l’utilisation des céréales et des prairies (labour, semis, récolte, transport, stockage, distribution), ainsi que la fertilisation des terres, qui repose en grande partie sur de l’azote de synthèse, très énergivore durant sa fabrication (il faut par exemple <a href="http://www.itab.asso.fr/downloads/cts/jtpole06bilanse.pdf">1,8 équivalent litre de fuel pour 1 kg d’azote</a>). </p>
<p>On le comprend aisément, limiter l’impact de l’augmentation du coût de l’énergie sur le prix des produits issus de l’élevage passe donc avant tout par des changements drastiques dans la manière d’alimenter les animaux.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Pour suivre au plus près les questions environnementales, retrouvez chaque jeudi notre newsletter thématique « Ici la Terre ». Au programme, un mini-dossier, une sélection de nos articles les plus récents, des extraits d’ouvrages et des contenus en provenance de notre réseau international. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-environnement-150/">Abonnez-vous dès aujourd’hui</a>.</em></p>
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<p>L’augmentation très forte du prix des produits issus de l’élevage, combinée à la chute du pouvoir d’achat des ménages, pourrait conduire à une baisse importante de cette activité agricole. Une compensation du revenu des éleveurs par l’État parait difficilement envisageable, compte tenu du niveau déjà très élevé du soutien actuel. La part des aides publiques représente <a href="https://www.inrae.fr/sites/default/files/pdf/INRAE%202021-La%20r%C3%A9orientation%20des%20aides%20dans%20le%20cadre%20de%20la%20future%20PAC%20post-2023.pdf">87 % du revenu des éleveurs de vaches laitières et 195 % du revenu des éleveurs de vaches allaitantes</a>… </p>
<p>Par ailleurs, les éleveurs ne pourront pas augmenter les prix de vente de leurs produits à la hauteur des surcoûts qu’ils subissent. Ils devront donc soit changer de production s’ils disposent de surfaces labourables, pour produire des cultures destinées à la consommation humaine ou à des fins énergétiques ; soit alimenter leurs animaux avec des ressources alternatives peu soumises à la concurrence d’autres usages.</p>
<h2>Quel avenir pour l’élevage ?</h2>
<p>Nous voyons ainsi se dessiner deux situations pour l’avenir de l’élevage. </p>
<p>Dans la première, il utilisera des ressources alimentaires disponibles dans les fermes de grandes cultures ou de cultures pérennes (arboriculture, viticultures) : coproduits divers et au sens large, c’est-à-dire non seulement ceux issus de la transformation des cultures (son, tourteaux, etc.), mais aussi toute la biomasse disponible et non valorisée, comme les cultures intermédiaires de fourrage visant à capter l’azote atmosphérique et à limiter la diffusion des maladies et des ravageurs sur les cultures suivantes ; ou encore, l’herbe poussant entre les rangs en cultures pérennes (et les fruits au sol, vecteurs de maladies). </p>
<p>L’élevage permettrait dans une telle configuration de limiter l’utilisation du matériel (pour la destruction de ces couverts végétaux), des herbicides, voire des fongicides (avec moins de maladies végétales). </p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/511235/original/file-20230220-22-6mjwg4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/511235/original/file-20230220-22-6mjwg4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/511235/original/file-20230220-22-6mjwg4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/511235/original/file-20230220-22-6mjwg4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/511235/original/file-20230220-22-6mjwg4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=489&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/511235/original/file-20230220-22-6mjwg4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=489&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/511235/original/file-20230220-22-6mjwg4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=489&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Troupeau de brebis romanes sur le site expérimental de l’Inrae sur le plateau du Larzac. La présence des ovins permet de valoriser les territoires à faible potentiel fourrager, mais à risque d’enfrichement et d’incendies.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marc Benoît</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>La seconde situation concerne les zones historiquement dédiées à l’élevage, avec de fortes contraintes agronomiques. Il s’agit surtout de surfaces non labourables, par exemple les prairies naturelles des zones d’altitude du Massif central ou les landes et parcours de l’arrière-pays méditerranéen. Dans ces zones, l’élevage permet de maintenir des milieux ouverts, une diversité et une mosaïque paysagères favorables à la biodiversité, contribuant notamment à limiter les risques d’incendie.</p>
<h2>Une nouvelle cartographie</h2>
<p>Limiter les activités d’élevage à ces deux grands types de situations et de stratégie d’alimentation reviendrait à baisser fortement sa part dans la production agricole française et européenne, accompagnant une évolution importante de nos régimes alimentaires (une consommation moindre de produits d’origine animale).</p>
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<p>L’impact d’une telle évolution serait majeur sur l’activité actuelle de certains territoires. Un impact très négatif en termes d’activité économique et d’emploi dans les territoires affichant une très forte densité animale (on pense à la Bretagne). Un impact positif dans les territoires où cette activité a quasiment disparu depuis des décennies, comme dans les zones céréalières de la Beauce, de la Champagne ou du Berry. </p>
<p>Dans ces zones, sa réintroduction pourrait générer de nouvelles activités économiques, avec les services nécessaires à l’élevage et à la mise en marché des produits (abattoirs, unité des conditionnements, etc.). Par ailleurs, cette redistribution de l’élevage sur l’ensemble des territoires accroîtrait leur autonomie alimentaire.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/512291/original/file-20230226-4598-7jtilj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Carte de la France montrant les différentes activités agricoles" src="https://images.theconversation.com/files/512291/original/file-20230226-4598-7jtilj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/512291/original/file-20230226-4598-7jtilj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=432&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/512291/original/file-20230226-4598-7jtilj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=432&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/512291/original/file-20230226-4598-7jtilj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=432&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/512291/original/file-20230226-4598-7jtilj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=543&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/512291/original/file-20230226-4598-7jtilj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=543&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/512291/original/file-20230226-4598-7jtilj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=543&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Carte de la France présentant les spécialisations agricoles par communes.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://stats.agriculture.gouv.fr/cartostat/#c=indicator&i=otex_2020_1.otefdd20&t=A02&view=map11">Agreste (2020)</a></span>
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<h2>Une transition illusoire ?</h2>
<p>Le changement d’usage des surfaces de cultures actuellement utilisées par l’élevage est potentiellement très important ; pour rappel, ces surfaces représentent environ 500 millions d’hectares à l’échelle de la planète, à rapprocher des 26,7 millions d’hectares de surfaces agricoles françaises, prairies comprises. </p>
<p>Cependant, ces surfaces « libérées » pourraient avoir d’autres usages et être rapidement dédiées à la production de biocarburants. On pense notamment aux perspectives du secteur aéronautique qui vise la neutralité carbone à l’échéance 2050, en s’appuyant majoritairement sur les <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Feuille%20de%20route%20fran%C3%A7aise%20pour%20le%20d%C3%A9ploiement%20des%20biocarburants%20a%C3%A9ronautiques%20durables.pdf">biocarburants</a>. </p>
<p>Face aux tensions importantes entre les différents secteurs économiques et à long terme sur le secteur énergétique, il est ainsi peu probable que l’utilisation des terres à des fins de production alimentaire soit compétitive, en particulier pour les activités d’élevage.</p>
<h2>Rémunérer les services rendus à la collectivité</h2>
<p>Face à la concurrence très probable de l’usage des terres dans les décennies à venir, associée à la difficulté d’accès aux produits d’origine animale pour une part croissante des consommateurs, les politiques publiques auront un rôle majeur à jouer : à la fois pour arbitrer l’usage des terres agricoles et renforcer la compétitivité de l’élevage, en particulier celui qui représente la seule activité agricole possible dans les zones difficiles où il fournit de multiples services, comme en <a href="https://productions-animales.org/article/view/2265">Provence ou dans le Marais poitevin</a>.</p>
<p>Il s’agirait donc moins d’accompagner les activités d’élevage grâce à des compensations de coûts de production, que par une reconnaissance et une rémunération de services rendus à la collectivité, comme l’entretien et l’ouverture des paysages, le maintien de la biodiversité et d’activités socio-économiques (tourisme) ou encore la prévention des incendies.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198749/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc Benoit ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Face aux tensions entre les différents secteurs économiques et au coût de l’énergie, l’utilisation des terres arables pour l’élevage va subir une concurrence de plus en plus intense.Marc Benoit, Ingénieur de recherches, agroéconomiste, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.