tag:theconversation.com,2011:/ca/topics/eau-21578/articleseau – The Conversation2024-03-22T12:30:46Ztag:theconversation.com,2011:article/2264052024-03-22T12:30:46Z2024-03-22T12:30:46ZDéshydratation : les causes, symptômes et mesures à prendre<p>_ <a href="https://www.elsan.care/fr/nos-actualites/deshydratation-symptomes-causes-et-prevention">La déshydratation </a> est un problème majeur en période de <a href="https://theconversation.com/kenyas-had-unusually-hot-weather-an-expert-unpacks-what-could-be-causing-it-224348">canicule</a> inhabituelle et d'épidémies telles que le <a href="https://theconversation.com/whats-behind-the-worldwide-shortage-of-cholera-vaccines-for-starters-theyre-only-made-by-one-company-224891">choléra</a>, qui provoquent des diarrhées pouvant mettre la vie en danger. Anastasia Ugwuanyi est médecin de famille et éducatrice clinique à l'université de Witwatersrand. Nous lui avons posé des questions sur comment éviter ou gérer la déshydratation.</p>
<h2>Quelles sont les causes de la déshydratation ?</h2>
<p>La déshydratation peut être définie comme une perte d'eau à l'intérieur des cellules. Pour en comprendre les causes, il est important de présenter quelques notions de base sur notre corps en ce qui concerne la physiologie de l'eau. L'eau représente 55 à 65 % de la masse corporelle totale. La majeure partie de cette eau se trouve dans la <a href="https://inbodycanada.ca/fr/la-composition-corporelle/masse-corporelle-maigre-et-masse-musculaire-quelle-est-la-difference/">masse maigre</a>. L'autre tiers est extracellulaire.</p>
<p>La <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/18519109/">déshydratation</a> peut être une perte d'eau ou une perte de sel et d'eau. L’“écosystème hydrique” du corps est régulé par des réponses aux niveaux de sel et d'eau. Des organes tels que le cerveau, la peau, le tractus gastro-intestinal et les reins sont impliqués dans la régulation de l'eau.</p>
<p>L'eau dans l'écosystème du corps est utile pour maintenir certaines fonctions, notamment : </p>
<ul>
<li><p>le transport des nutriments et des matières biologiques et chimiques autour de l'organisme</p></li>
<li><p>une partie du système de soutien des articulations, y compris la colonne vertébrale</p></li>
<li><p>un environnement permettant aux processus chimiques normaux de l'organisme de fonctionner.</p></li>
</ul>
<p>La déshydratation peut être causée par plusieurs facteurs qui font basculer les mécanismes de régulation vers un mode de perte d'eau. Ces facteurs peuvent être les suivants :</p>
<ul>
<li><p>des causes environnementales ou externes telles que les vagues de chaleur (facteurs de changement climatique) </p></li>
<li><p>les sécheresses et les privations d'eau de longue durée</p></li>
<li><p>la réduction de l'apport en liquides - chez les personnes âgées, les enfants ou les personnes souffrant de troubles mentaux</p></li>
<li><p>les pénuries municipales affectant la disponibilité ou l'accès à l'eau potable</p></li>
<li><p>la perte accrue de liquides par une miction excessive, comme dans le cas de maladies telles que le diabète</p></li>
<li><p>la perte accrue de fluides due à la diarrhée</p></li>
<li><p>une perte accrue de liquides due à la transpiration ou à l'hyperventilation.</p></li>
</ul>
<h2>Comment savoir si l'on est déshydraté ?</h2>
<p>Une perte de 5 à 10 % de l'eau corporelle est symptomatique, en particulier chez les personnes très âgées et très jeunes. Les signes à surveiller sont les suivants : maux de tête, fatigue ou lassitude, confusion inexplicable immédiatement, bouche sèche (inexplicable immédiatement), peau sèche lorsque vous la pincez et lente dans son retour élastique normal, yeux enfoncés et, chez les nourrissons, fontanelles enfoncées, absence de larmes en cas de pleurs, en particulier chez les enfants, urine concentrée - de couleur ambre foncé à sombre - et diminution de la fréquence des mictions à mesure que l'organisme passe à la conservation.</p>
<p>Parmi les autres signes à surveiller figurent les <a href="https://www.cdc.gov/disasters/extremeheat/warning.html#text">symptômes de l'épuisement par la chaleur</a>. Ils indiquent que le système cardiovasculaire est touché. Les signes peuvent être les suivants : peau froide et moite, transpiration inhabituellement abondante, pouls faible et rapide, vertiges, crampes musculaires, nausées. </p>
<h2>Que se passe-t-il dans notre organisme lorsque nous sommes déshydraté ?</h2>
<p>Plusieurs systèmes de notre corps sont affectés par la déshydratation. Les effets de la déshydratation dépendent de la quantité de liquide perdue et de la durée de la déshydratation.</p>
<p>Les effets varient en fonction du degré de déshydratation. <a href="https://www.msdmanuals.com/professional/pediatrics/dehydration-and-fluid-therapy-in-children/dehydration-in-children">La déshydratation est classée de légère à sévère selon la proportion d'eau perdue dans la masse corporelle</a>. Chez les enfants et les nourrissons, elle est particulièrement problématique car l'eau représente une part plus importante de leur masse corporelle. </p>
<p>En cas de perte importante, les symptômes peuvent comprendre une chute de la pression artérielle qui affecte la dynamique de la circulation sanguine et des signes de défaillance des organes qui ne peuvent plus fonctionner normalement les systèmes ne sont pas en mesure de faire face (comparable à un moteur de voiture en surchauffe).</p>
<p>Le système cardiovasculaire, le système gastro-intestinal, le système rénal, le système nerveux central, la peau et la couche externe du corps, le système musculo-squelettique sont tous affectés par la déshydratation en fonction du niveau de perte d'eau totale du corps.</p>
<p>Les effets de la déshydratation sur l'organisme peuvent inclure : perte de poids, constipation, délire, insuffisance rénale, plus grande prédisposition aux infections respiratoires et urinaires, crises cardiaques et convulsions <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/16248421/#:%7E:text=D%C3%A9shydratation%2C%20qui%20augmente%20la%20viscosit%C3%A9%20du%sang,cause%20une%20augmentation%20de%20la%20viscosit%C3%A9">en raison de l'épaississement du sang</a>.</p>
<p>Ces effets sont encore plus débilitants chez les personnes très âgées et celles qui souffrent de maladies préexistantes comme le diabète.</p>
<h2>Comment arrêter la déshydratation ?</h2>
<p>Pour enrayer la déshydratation, il est important de prendre en compte tous les aspects de la demande et de l'approvisionnement en eau.</p>
<p>L'environnement : l'accès à l'eau potable est toujours une responsabilité collective du gouvernement et de la communauté. Cela peut aller du signalement et de la réparation des fuites et des ruptures d'approvisionnement en eau de la municipalité à l'entretien des réseaux de purification de l'eau et de distribution de l'eau. </p>
<p>Personnellement : n'attendez pas d'avoir soif pour boire. La soif est le signe que votre corps est en train de se déshydrater. Pour chaque kilogramme de poids corporel, buvez environ 30-35 millilitres (3 cuillères à soupe) d'eau par jour, surtout en période de chaleur. </p>
<p>Soyez attentif aux signes de déshydratation chez vous ou chez les personnes âgées, les enfants, les membres de votre famille ou vos amis souffrant d'une incapacité. Contrôlez-les avec des mesures simples telles que les <a href="https://www.rehydrate.org/ors/made-at-home.htm">thérapies de remplacement</a> composées d'eau, de sel et de sucre. </p>
<p>Pensez à boire davantage d'eau lorsque vous faites de l'exercice ou lorsque vous êtes malade. Il y a du sel, du sucre et de l'eau dans chaque maison. Il est essentiel de savoir comment les préparer ou de disposer d'une thérapie de réhydratation orale préemballée à la maison. Il existe un certain nombre de bons guides sur <a href="https://www.cdc.gov/healthywater/pdf/global/posters/11_229310-j_ors_print-africa.pdf">la préparation d'une solution sel-sucre-eau maison </a> pour traiter la déshydratation avant de demander de l'aide médicale.</p>
<p>Prenez l'habitude de boire intentionnellement de l'eau plutôt que des boissons froides et des bières qui contiennent de l'eau mais sont riches en calories. Ces boissons aggravent la déshydratation.</p>
<p>Veillez à vous hydrater avant, pendant et après l'exercice afin de maintenir un bon équilibre entre l'eau et les sels pendant l'exercice.</p>
<p>Restez au frais en période de chaleur en portant des vêtements respirants, en nageant ou en prenant des douches rafraîchissantes s'il n'y a pas de restrictions d'eau. Des jets d'eau sont disponibles dans certains lieux publics pour aider à se rafraîchir particulièrement en période de chaleur.</p>
<p>Enfin, il existe plusieurs appareils intelligents dotés d'applications de santé qui peuvent aider à suivre la consommation d'eau.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/226405/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Anastasia Ugwuanyi est memebre de l'Association sud-africaine des médecins de famille.</span></em></p>Environ 60 % du corps humain est constitué d'eau. Une perte excessive d'eau peut être fatale.Anastasia Ugwuanyi, Senior clinical educator, department of family medicine, University of the WitwatersrandLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2231352024-03-05T16:03:12Z2024-03-05T16:03:12ZL’eau minérale naturelle en bouteille : traitements, filtration… ce que dit la réglementation<p>Fin janvier éclatait l’affaire des eaux minérales naturelles non conformes à la suite d’une <a href="https://www.francetvinfo.fr/enquetes-franceinfo/enquete-franceinfo-plusieurs-producteurs-d-eau-en-bouteille-ont-filtre-illegalement-leur-eau-pour-masquer-une-contamination_6333046.html">enquête menée par <em>Le Monde</em> et <em>Radio France</em></a>. Celle-ci épinglait plusieurs grandes marques d’eau minérale naturelle en bouteille (dont Vittel, Contrex) et d’eau de source (dont Cristalline).</p>
<p>Elles auraient eu recours à des traitements physiques non autorisés (comme une microfiltration inférieure aux seuils autorisés) afin de masquer une pollution anthropique (c’est-à-dire, imputable aux activités humaines).</p>
<p>L’occasion de faire le point sur ce que permet ou non la réglementation à la matière.</p>
<h2>Eau minérale naturelle, de quoi parle-t-on ?</h2>
<p>L’Eau minérale naturelle (EMN) est une appellation juridique spécifique. Elle se définit comme une eau d’origine souterraine, dont les composants physicochimiques (la teneur en minéraux) à l’émergence <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=celex%3A32009L0054">restent stables dans le temps, avec moins de 10 % de variation</a>.</p>
<p>Les usages économiques liés à l’EMN (usine d’embouteillage, établissement thermal) sont étroitement dépendant du maintien de cette <a href="https://sante.gouv.fr/sante-et-environnement/eaux/article/eaux-conditionnees">appellation octroyée par le ministère de la Santé sur avis de l’Académie de Médecine</a>).</p>
<p>Contrairement à l’eau du robinet, les traitements chimiques de désinfections sont interdits au regard des exigences réglementaires liées à aux appellations juridiques « Eau minérale naturelle » et « Eau de Source ».</p>
<h2>Des traitements qui ne doivent pas modifier la composition de l’eau</h2>
<p>Les seuls traitements aujourd’hui autorisés par la réglementation portent sur la séparation d’éléments instables ou indésirables, naturellement présents dans l’eau (fer, soufre, manganèse, arsenic, etc.). Ces traitements physiques (filtration, décantation, oxygénation, utilisation d’air enrichi en ozone) ne doivent pas modifier la composition de l’eau quant aux constituants essentiels qui lui confèrent ses propriétés.</p>
<p>Les traitements de désinfection par ultraviolets ou par filtres au charbon actif d’éléments indésirables liés à une <a href="https://theconversation.com/aliments-contamines-par-la-bacterie-e-coli-quels-effets-sur-la-sante-et-comment-prevenir-les-infections-185176">pollution anthropique d’origine agricole, industrielle ou accidentelle ne sont pas autorisés</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/mille-et-une-facons-de-consommer-leau-103173">Mille et une façons de consommer l’eau</a>
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<p>Or, ce que l’actualité récente nous montre, c’est que l’enjeu sur le recours à ces traitements, pourtant sans risques pour la consommation humaine, est avant tout un enjeu juridique liée à l’appellation d’eau minérale naturelle.</p>
<p>L’intervention du service de répression des fraudes dans le cadre de l’enquête menée par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes est donc au cœur de l’actualité. La perte de l’appellation EMN entraînerait de lourdes conséquences économiques pour les exploitants.</p>
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<p>Cet évènement récent rappelle celui sur <a href="https://hal.science/hal-01196931v1/file/C59Torny.pdf">l’eau de source Capes Dolé en Guadeloupe</a>. Afin d’éliminer les éléments indésirables de pollution anthropique d’origine agricole, identifiés en 1999, l’exploitant avait installé sur les lignes d’embouteillage un filtre à charbon et des membranes de filtration, sous le contrôle de l’ARS.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-on-traite-leau-pour-la-rendre-potable-195696">Comment on traite l’eau pour la rendre potable</a>
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<p>Le coupable ? Le <a href="https://theconversation.com/chlordecone-et-biodiversite-antillaise-une-contamination-aux-effets-encore-trop-meconnus-194705">chlordécone</a>, pesticide utilisé contre le charançon du bananier dans toutes les Antilles françaises de 1972 à 1993.</p>
<p>Ce traitement physique ne modifiait pas les caractéristiques microbiologiques de l’eau. Cependant, après plusieurs attaques en justice d’embouteilleurs concurrents (Fontaine Didier et West Indies Pack), la société a été condamnée en 2013 à supprimer l’appellation « eau de source » sur ses étiquettes pour la remplacer par « eau rendue potable par traitement ».</p>
<p>La réglementation sur la protection des gisements d’eau minérale naturelle s’inscrit donc dans un héritage historique ancien. Et peut-être, déjà obsolète ?</p>
<h2>Un héritage réglementaire de la « guerre des sources » à Vichy pour gérer le risque quantitatif</h2>
<p>L’appareil réglementaire actuel, de protection des gisements, a été construit de façon empirique et repose notamment sur la perception des risques au XIX<sup>e</sup> siècle.</p>
<p>À cette période, l’État avait légiféré pour protéger les gisements sur l’aspect quantitatif, à la suite de la <a href="https://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-53095-FR.pdf">« guerre des sources » à Vichy-Saint-Yorre de 1844 à 1930</a>. Devant le succès commercial de l’eau embouteillée sur le bassin de Vichy-Saint-Yorre, les entrepreneurs privés multipliaient les forages. En tant que propriétaire d’un vaste patrimoine thermal, l’État, ainsi que son fermier (la Compagnie de Vichy), avaient alors découvert que l’usage thermal principal était impacté par une baisse de débit des forages.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/577136/original/file-20240221-26-xzvoj3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/577136/original/file-20240221-26-xzvoj3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/577136/original/file-20240221-26-xzvoj3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/577136/original/file-20240221-26-xzvoj3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/577136/original/file-20240221-26-xzvoj3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=482&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/577136/original/file-20240221-26-xzvoj3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=482&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/577136/original/file-20240221-26-xzvoj3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=482&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’une des sources exploitées à Saint-Yorre, image d’époque.</span>
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<p>En 1939, la multiplication anarchique des forages se matérialisait par 230 sources sur le bassin de Vichy-Saint Yorre, 200 sources à Vals et 40 sources à Vittel-Contrex. L’État a donc agi pour sauvegarder les intérêts du secteur thermal, avec une première réglementation en 1848, afin d’imposer un <a href="https://outil2amenagement.cerema.fr/outils/les-perimetres-protection-captages-deau-potable">périmètre de protection fixe de 1000 mètres</a> autour de chaque source.</p>
<h2>Les obligations actuelles sur les captages</h2>
<p>Cet héritage réglementaire comporte aujourd’hui deux outils spécifiques, le premier obligatoire, et le second, facultatif.</p>
<p>De manière obligatoire, chaque émergence doit disposer d’un <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006072665/LEGISCTA000006198953/2020-10-05">périmètre sanitaire d’émergence</a> (PSE), et cela depuis 1937. Il est déterminé durant la demande d’autorisation d’exploitation d’un nouveau captage par arrêté ministériel.</p>
<p>La tête de forage doit être protégée par un abri fermé mis sous surveillance, et placé dans un périmètre grillagé d’une centaine de mètres carrés, en fonction du type de captage, sa profondeur, et l’environnement du site.</p>
<p>Ce foncier doit être détenu par le propriétaire du captage ou avoir une servitude d’accès. Au sein de ce PSE, la réglementation interdit toute activité, travaux, dépôt de déchets, épandage d’eaux usées, de <a href="https://theconversation.com/plan-ecophyto-tout-comprendre-aux-annonces-du-gouvernement-223571">produits phytosanitaires</a> ou d’engrais organique.</p>
<p>L’application du PSE peut toutefois être difficile si le captage est localisé en milieu urbain. Certains captages peuvent être situés dans le sous-sol de bâtiments, ou sous la voirie du centre-ville. Le PSE peut donc parfois se limiter à la chambre de captage, ou à un local de tête de captage.</p>
<p>En fonction des sites, les objectifs d’un PSE peuvent donc être différents.</p>
<ul>
<li><p>Si la ressource en eau est naturellement à l’abri des pollutions de surface, le PSE aura pour vocation d’assurer la sécurité physique du captage seulement.</p></li>
<li><p>En revanche, si la vulnérabilité sanitaire des abords immédiats de la ressource est plus grande, des compensations réglementaires devront être trouvées.</p></li>
</ul>
<p>Dans ce cas de figure, la réglementation peut par exemple, en milieu urbain, interdire le stationnement de véhicules sur la voirie à proximité du captage, de manipuler des substances polluantes ou encore prévoir une surveillance en cas de travaux de voirie.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/577126/original/file-20240221-22-fmpqix.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/577126/original/file-20240221-22-fmpqix.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/577126/original/file-20240221-22-fmpqix.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/577126/original/file-20240221-22-fmpqix.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/577126/original/file-20240221-22-fmpqix.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/577126/original/file-20240221-22-fmpqix.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/577126/original/file-20240221-22-fmpqix.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Lorsque la ressource en eau est naturellement peu protégée, la réglementation peut interdire le stationnement de véhicules sur la voirie à proximité du captage.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Frédéric Bisson/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Des aménagements spécifiques peuvent aussi être prévus, comme l’installation d’un système étanche de récupération des eaux pluviales sur la voirie pour se prémunir du risque de <a href="https://theconversation.com/quest-ce-qui-pollue-les-cours-deau-francais-116847">pollution aux hydrocarbures</a>, avec un système d’alerte d’étanchéité sur le captage.</p>
<p>La délimitation du PSE est donc toujours un compromis entre ce qui est techniquement souhaitable et ce qui est en réalité possible.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/quest-ce-qui-pollue-les-cours-deau-francais-116847">Qu’est-ce qui pollue les cours d’eau français ?</a>
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<h2>Une déclaration d’intérêt public et un périmètre de protection facultatifs</h2>
<p>Le second outil de protection est facultatif. Dès 1861, la réglementation donne la possibilité au propriétaire ou à l’exploitant de la ressource en eau minérale naturelle (EMN) de <a href="https://www.academie-medecine.fr/07-12-sur-la-demande-davis-relatif-a-lautorisation-dexploiter-en-tant-queau-minerale-naturelle-a-lemergence-leau-du-captage-font-caude/">demander une déclaration d’intérêt public et la création d’un périmètre de protection</a> (PP). Cette démarche est soumise à la validation du Conseil d’État <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006072665/LEGISCTA000006190298/">après une enquête publique</a>.</p>
<p>L’intérêt public est prononcé en fonction de la <a href="https://infoterre.brgm.fr/rapports/RR-40145-FR.pdf">valeur intrinsèque de la ressource</a> : qualité, débit, propriétés favorables à la santé, enjeux d’emploi… Il faut que le niveau de vulnérabilité de l’émergence justifie les contraintes à imposer aux tiers. En fonction des caractéristiques du site (contexte hydrogéologique, vulnérabilité, risques…), un périmètre de protection est défini.</p>
<p>Ce dernier peut varier de un à 15 600 hectares. Il s’agit d’un outil contraignant au plan réglementaire. Les tiers (habitants, entreprises…) sont soumis à une obligation de déclaration pour tous travaux de terrassement de deux à quatre mètres de profondeur, et doivent demander une autorisation préfectorale au-delà de quatre mètres.</p>
<p>Ils sont également soumis à des interdictions d’installation d’activités classées ICPE, de stockage de déchets, et d’épandage de boue de <a href="https://theconversation.com/podcast-donner-une-seconde-vie-aux-eaux-usees-208996">station d’épuration</a>. L’État exige toutefois, en contrepartie, que l’exploitant <a href="https://www.senat.fr/leg/ppl09-648.html">prenne en charge et indemnise certaines mesures imposées aux tiers</a>.</p>
<h2>Un cadre réglementaire vieillissant… et obsolète ?</h2>
<p>Ces deux outils réglementaires vieillissants sont cependant peu respectés et mobilisés. L’état des lieux des PSE obligatoires montre que les exploitants et propriétaires de la ressource s’écartent de la réglementation.</p>
<p>La cour des comptes <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i3811.asp">a ainsi relevé, dès 1995, qu’une partie des sources étaient en exploitation sans autorisation</a> ou reposant sur des autorisations fondées sur des paramètres obsolètes. En effet, la grande majorité des autorisations d’exploitation ont été délivrées au XIX<sup>e</sup> siècle ou au début du XX<sup>e</sup> siècle.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/574453/original/file-20240208-20-gpnjx4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/574453/original/file-20240208-20-gpnjx4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/574453/original/file-20240208-20-gpnjx4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/574453/original/file-20240208-20-gpnjx4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/574453/original/file-20240208-20-gpnjx4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/574453/original/file-20240208-20-gpnjx4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/574453/original/file-20240208-20-gpnjx4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Des visiteurs à Vichy-Célestins.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Yusaini Usulludin/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Or, les captages autorisés mais non renouvelés depuis 1937 n’ont pas de PSE, ce qui signifie que le risque sanitaire immédiat n’est pas pris en compte. En 2016, entre 17 % et 29 % seulement des captages alimentant un établissement thermal ont fait l’objet d’une autorisation conforme.</p>
<p>Pourtant, le fait d’exploiter une eau minérale naturelle sans autorisation est passible de sanctions administratives (fermeture partielle ou complète de l’établissement) ainsi que de sanctions pénales à hauteur d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende, <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000036511445">selon l’article L.1324-3 du code de la santé publique</a>.</p>
<p>La problématique de contrôle réglementaire des PSE se heurte donc à une absence de vision sur l’état actuel consolidé des émergences exploitées à l’échelle nationale.</p>
<h2>Comment en est-on arrivé là ?</h2>
<p>Cette situation résulte de la décentralisation par l’État des missions du BRGM vers les 18 Agences Régionale de Santé. Ces dernières ne disposant pas d’hydrogéologues, l’inventaire des captages de la banque du sous-sol est donc largement lacunaire. L’Assemblée nationale <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i3811.asp">soulignait encore en 2016 le manquement à cette mission des ARS</a>.</p>
<p>D’autre part, l’état des lieux des périmètres de protection (PP) montre que cet outil est très peu mobilisé. Seulement 99 émergences bénéficient d’un PP, dont 56 sont exploitées par un usage.</p>
<p>La plupart d’entre eux sont de surcroît anciens. Sur tous les PP, 96 % datent du XIX<sup>e</sup> siècle ou du début du XX<sup>e</sup> siècle. La mobilisation contemporaine du PP reste très limitée, et surtout autour des sites à fort enjeu économique (Vittel en 1971, Avène en 1992, Évian en 2006, Vals en 2012).</p>
<h2>Des risques qualitatifs identifiés en 1971, sans modification réglementaire</h2>
<p>Le risque de polluants anthropiques d’origine agricole a été identifié dès 1971 par les minéraliers sur le terrain, et <a href="https://side.developpement-durable.gouv.fr/CENT/doc/SYRACUSE/88217/rapport-du-groupe-de-travail-activites-agricoles-et-qualite-des-eaux-tome-1">confirmé par le rapport ministériel Hénin de 1979</a>, mais n’a pas été suivi d’évolution réglementaire pour la protection des gisements d’eau minérale naturelle.</p>
<p>On peut s’interroger sur la capacité d’un dispositif réglementaire vieillissant et peu mobilisé à protéger la ressource des risques qualitatifs anthropiques liés à notre société.</p>
<p>C’est en raison de cette carence réglementaire française que des politiques de protection partenariales de l’impluvium ont été créées par les minéraliers sur les sites de Vittel et d’Évian dès la fin dès 1989, afin de faire baisser les taux de nitrate de ces aquifères. <a href="https://theses.hal.science/tel-03669050">D’autres initiatives isolées et limitées émergent également à Saint Yorre, Aix-les-Bains ou Thonon</a>.</p>
<p>À titre de comparaison, le cadre réglementaire historique de la Région wallonne <a href="https://wallex.wallonie.be/contents/acts/3/3552/4.html">a évolué en 1991 afin d’actualiser le niveau de protection face aux risques qualitatifs</a>, avec quatre zones (prise d’eau, zone de prévention rapprochée/éloignée et zone de surveillance de l’impluvium) et des limitations plus strictes et plus précises notamment sur la limitation des produits phytosanitaires agricoles dans l’impluvium des gisements.</p>
<p>Qu’ils soient chroniques ou accidentels, les <a href="https://theconversation.com/dans-le-jura-le-rechauffement-climatique-aggrave-la-pollution-des-eaux-par-les-nitrates-206785">risques liés à l’agriculture intensive</a> (épandage de produits phytosanitaires et engrais organique surdosé), l’industrie ou à l’urbanisation (ruissellement d’hydrocarbure sur les voiries, fuite des citernes à fioul et du réseau d’assainissement…) sont un enjeu pour la pérennité des agréments eau minérale naturelle et de leurs usages.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223135/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Guillaume Pfund ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Début 2024, une enquête épinglait plusieurs marques d’eau minérale naturelle pour des traitements non conformes. L’occasion de faire le point sur ce qui est permis et interdit par la réglementation.Guillaume Pfund, Docteur en Géographie Economique associé au laboratoire de recherche EVS, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2209772024-02-04T15:35:29Z2024-02-04T15:35:29ZPourquoi il est si difficile de prévoir les orages d'été<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/572862/original/file-20240201-17-rw4i15.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C11%2C2640%2C1742&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les orages, des phénomènes imprévisibles ? </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/photo-de-lile-et-du-tonnerre-E-Zuyev2XWo">Johannes Plenio/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Les orages surviennent partout dans le monde et à tout moment de l’année, mais ils sont plus intenses et plus fréquents dans les régions tropicales, et, sous nos latitudes, en été. En effet, les orages et la canicule sont étroitement liés, car la chaleur accumulée pendant les périodes de beau temps est le carburant qui alimente les orages les plus intenses.</p>
<p>Néanmoins, pendant les vagues de chaleur, les modèles atmosphériques et les météorologues prévoient souvent des orages « dans les prochains jours »… mais ces tempêtes ne se produisent pas et semblent éternellement repoussées.</p>
<p>Alors, les météorologues souffrent-ils d’hallucinations ? Et bien non – il ne s’agit pas seulement d’une impression due à l’impatience du public qui aspire à un rafraîchissement. Il y a de vraies raisons scientifiques qui rendent particulièrement difficile de prévoir quand une vague de chaleur sera finalement interrompue par un épisode orageux, rafraîchissant mais parfois destructeur.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1671283528418435075"}"></div></p>
<h2>La recette des orages : chaleur, humidité… et complexité</h2>
<p>Pour comprendre ce qui se passe, il faut d’abord comprendre ce qu’est un orage. Les orages sont une valve utilisée par la nature pour dissiper l’énergie excessive accumulée près de la surface de la terre sous forme de chaleur et d’humidité. Cette énergie est stockée dans la « couche limite planétaire », dont l’épaisseur varie de quelques centaines de mètres à 2-4 kilomètres l’été.</p>
<p>On le voit très bien si l’on regarde un orage d’en haut en accéléré : il ressemble à des bulles émergeant du fond d’une casserole lorsque l’eau commence à bouillir et que la vapeur, plus légère que l’eau liquide, veut s’échapper vers la surface.</p>
<figure> <img src="https://www.weather.gov/images/dlh/StormSummaries/2020/July8/78satloop3.gif"><figcaption>Le 8 juillet 2020, de sévères orages frappent les États-Unis. Images du satellite GOES-East, prises à intervalles de une minute. Source : NOAA </figcaption></figure>
<p>En été, notamment pendant les vagues de chaleur, la température monte près de la surface de la Terre. Souvent une grande quantité d’humidité y est également piégée, qu’elle provienne de la mer toute proche ou qu’elle s’évapore de la végétation. Cet air chaud et humide est moins dense que l’air en altitude (donc plus léger), et il veut s’élever vers le sommet de l’atmosphère – une élévation qui libérerait l’énergie accumulée à basse altitude.</p>
<p>Mais les choses ne sont pas si simples : les vagues de chaleur sont liées à des systèmes de haute pression, également appelés « anticyclones ». Ces systèmes de haute pression compriment l’air vers le sol, supprimant tout mouvement ascendant et empêchant donc l’air de monter.</p>
<p>L’énergie dans la couche limite planétaire s’accumule… et se prépare à être libérée de manière explosive comme un pistolet chargé. « Loaded gun », c’est d’ailleurs le terme utilisé par les météorologues américains pour communiquer sur les situations météorologiques particulièrement dangereuses qui conduisent aux vagues d’orages extrêmes et de tornades, et qui affectent les États-Unis plus que toute autre région de la planète.</p>
<p>Un exemple emblématique est la <a href="https://www.nssl.noaa.gov/about/history/2011/">vague d’orages et de tornades</a> qui a frappé les États-Unis du 25 au 28 avril 2011 : ces jours-là, 200 tornades ont frappé cinq États du sud, causant plus de 300 morts. Des conséquences fatales, alors même que la tempête avait été bien prévue à l’avance, et que les météorologues avaient reconnu le terrible potentiel d’une atmosphère en « pistolet chargé » (<em>loaded gun</em>).</p>
<h2>Quels détonateurs pour les « pistolets chargés » atmosphériques</h2>
<p>De <a href="https://www.weather.gov/source/zhu/ZHU_Training_Page/thunderstorm_stuff/Thunderstorms/thunderstorms.htm">multiples phénomènes peuvent servir de détonateur pour libérer l’énergie et déclencher les orages</a>. Dans certains cas, la présence d’une montagne suffit : agissant comme un trampoline, la montagne oblige l’air à monter, parfois suffisamment pour atteindre des altitudes où il est alors capable de continuer seul, et enfin de libérer l’énergie. C’est la raison pour laquelle, dans des régions comme les Alpes et le Massif central, les orages estivaux se produisent souvent alors que le reste du pays est encore sous un temps très chaud et sec.</p>
<p>Parfois, l’anticyclone devient simplement très vieux et commence à se dégrader, ou bien il est remplacé par un système dépressionnaire : le premier jour où la pression a suffisamment baissé, le soleil de l’après-midi chauffe la surface au point que l’air sort enfin de sa prison anticyclonique.</p>
<p>Une autre cause fréquente de déclenchement d’orages est l’arrivée d’une masse d’air froid : beaucoup plus dense que l’air chaud sous le dôme anticyclonique, elle agit comme un coin pour fendre le bois, en soulevant abruptement l’air chaud près du sol.</p>
<p>Un autre élément déclencheur possible est le passage de forts courants de vent en altitude, dans lesquels la direction du vent diverge, comme une route à quatre voies qui se divise en deux routes à deux voies allant dans des directions légèrement différentes. Cela crée une sorte de vide dans la haute atmosphère, qui doit être compensé par une remontée d’air près du sol.</p>
<p>La plupart du temps, on observe une combinaison de phénomènes.</p>
<p>Par exemple, nous pouvons examiner la situation météorologique présente sur la France le 20 juin 2023, telle que vue par la <a href="https://www.ecmwf.int/en/forecasts/dataset/ecmwf-reanalysis-v5">réanalyse</a> du Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme (ECMWF). Ce jour-là, des <a href="https://www.keraunos.org/actualites/fil-infos/2023/juin/orages-grele-supercellules-vent-pays-basque-gers-tarn-et-garonne-20-juin-foudre">orages violents se sont développés sur la France</a>, produisant de gros grêlons, des tempêtes de vent, de nombreux éclairs et des nuages spectaculaires.</p>
<p>Ce jour-là, un fort anticyclone était encore présent sur l’Europe centrale, tandis que la France était approchée par un système de basse pression entre le Royaume-Uni et l’Islande. De plus, le gradient de pression sur la France était également lié à un couloir de vents divergents dans les niveaux supérieurs de l’atmosphère, tandis que de l’air plus chaud que la normale s’attardait encore sur le pays : une recette parfaite pour la formation d’orages.</p>
<h2>Pourquoi tant de difficultés à prévoir un phénomène tout à fait commun</h2>
<p>Les météorologues savent donc ce que sont les orages et comment ils fonctionnent. Alors, pourquoi avons-nous du mal à les prévoir ?</p>
<p>Parce que le fait que de multiples facteurs concourent à la formation des orages implique également de multiples sources d’erreur.</p>
<p>En effet, les modèles de prévision météorologique sont très fiables à un horizon de quelques jours, après quoi leurs performances tendent à diminuer. En cas d’anticyclone anormalement persistant, le modèle produit souvent une prévision erronée de son affaiblissement (avec orages associés), et cette prévision se voit corrigée au fur et à mesure, repoussant les prédictions d’orages plus loin dans le futur. Parfois, lorsque l’anticyclone s’affaiblit effectivement, les conditions ont changé par rapport à la prévision précédente, de sorte que la fin de la vague de chaleur n’est plus associée à des orages. C’est un peu un « effet mirage ».</p>
<p>Dans de nombreux cas, la situation est encore plus compliquée. Bien qu’ils soient puissants et spectaculaires, les orages sont assez petits en taille par rapport à l’ensemble d’un système de haute pression. Certains des éléments que nous avons évoqués et qui les produisent peuvent être affectés par des variations environnementales même minimes. Par exemple, le vent de haute altitude peut être un peu plus faible ou moins divergent, ou le ciel un peu plus nuageux le matin, ce qui suffit à consommer l’énergie avant que les orages ne se déclenchent.</p>
<p>Les orages ont toujours été considérés comme peu prévisibles et volatils, et ce pour de bonnes raisons. Les progrès scientifiques futurs, notamment les efforts continus pour améliorer la description de la physique de l’atmosphère, mais aussi l’<a href="https://www.ecmwf.int/en/about/media-centre/science-blog/2023/rise-machine-learning-weather-forecasting">essor de l’intelligence artificielle</a> dans le domaine des prévisions météorologiques permettront de les prévoir de mieux en mieux au fil du temps.</p>
<p>Cependant, les prévisions ne seront jamais parfaites, en raison de la <a href="https://theconversation.com/leffet-papillon-quest-ce-qui-se-cache-derriere-la-theorie-du-chaos-179878">nature chaotique de l’atmosphère</a>, qui amplifie même la plus petite (et inévitable) erreur affectant les conditions initiales de la prévision.</p>
<p>Les canicules interminables et les orages imprévus (ou mal prévus) sont ainsi une occasion de s’émerveiller encore de la nature… et d’être un peu indulgent envers votre météorologue favori !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220977/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Flavio Pons ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si la météorologie est capable de prévoir de plus en plus finement le temps qu’il fera, la prévision des orages est encore complexe.Flavio Pons, Post-doctorant au Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement (LSCE), CEA, CNRS, UVSQ, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2205652024-01-14T16:29:42Z2024-01-14T16:29:42ZLes dauphins ne peuvent pas boire l’eau dans laquelle ils nagent, alors comment s’hydratent-ils ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/568916/original/file-20240111-29-z4hwam.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5954%2C3347&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pour boire, les dauphins mangent des poissons.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/un-groupe-de-dauphins-nageant-au-dessus-dun-recif-corallien-hKURiUaSGsc">Oleksandr Sushko / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Pour tous les amoureux des animaux, le mois de septembre 2023 restera un mois noir. Sur les berges du lac Tefé, un affluent de l’Amazone au Brésil, 130 dauphins roses (<em>Inia geoffrensis</em>), 23 dauphins tucuxi (<em>Sotalia fluviatilis</em>), mais également des milliers de poissons ont été retrouvés sans vie.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/qvX1NvLDgGI?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Brésil : plus de 120 dauphins roses retrouvés morts (France 24).</span></figcaption>
</figure>
<p>Selon les propos des membres de l’Institut Mamirauá, un centre de recherche en partie financé par le ministère brésilien des Sciences, <a href="https://www.leparisien.fr/environnement/rechauffement-climatique-102-dauphins-roses-retrouves-morts-dans-le-fleuve-amazone-trop-chaud-01-10-2023-WDNWGDQWOJDMHCRV7WSDEKHQCM.php">recueillis par le <em>Parisien</em></a> : </p>
<blockquote>
<p>« Il est encore tôt pour déterminer la cause de cet événement extrême, mais selon nos experts, il est certainement lié à la période de sécheresse et aux températures élevées du lac Tefé, dont certains points dépassent les 39 °C. »</p>
</blockquote>
<p>Et si ces dauphins, véritables icônes de la faune brésilienne, étaient morts de soif ? Cela semble improbable, me diriez-vous, puisqu’ils ont accès à de l’eau en abondance. Mais, savez-vous comment les dauphins s’hydratent ? Boivent-ils réellement l’eau dans laquelle ils vivent ? La réponse est non, voyons donc comment ils maintiennent un niveau d’hydratation correcte.</p>
<h2>Les dauphins vivant dans les océans ne boivent pas l’eau de mer</h2>
<p>Pour les dauphins d’eau douce, c’est encore un mystère puisqu’aucune étude scientifique ne s’est, à l’heure actuelle, intéressée à la question. En revanche, nous possédons des informations précieuses sur la manière dont les dauphins vivant dans les océans s’hydratent.</p>
<p>Contrairement à ce que nous pourrions penser, les dauphins ne boivent pas l’eau salée dans laquelle ils vivent puisque pour eux, comme pour nous, un <a href="https://www.actiononsalt.org.uk/salthealth/">excès de sel peut être mortel</a>. <a href="https://doi.org/10.1242/jeb.245648">Dans notre étude récemment publiée</a> dans la revue scientifique <em>Journal of Experimental Biology</em>, nous avons confirmé que les dauphins ne boivent pas de l’eau de mer <a href="https://theconversation.com/torben-quand-les-poissons-ont-soif-est-ce-quils-boivent-de-leau-de-mer-141249">contrairement aux poissons osseux</a> (le thon, le hareng ou encore la sardine), aux tortues marines et aux oiseaux marins. En effet, boire de l’eau de mer nécessite de disposer d’un moyen de se débarrasser de l’excès de sel, et certains animaux marins disposent pour ce faire d’organes appelés <a href="https://doi.org/10.1007/978-3-662-00989-5_25">glandes à sels</a>.</p>
<p>Les dauphins en sont dépourvus, et leurs reins ne sont pas capables d’éliminer une quantité trop importante de sels. Mais alors, comment s’hydratent-ils ? Les dauphins ne boivent pas « volontairement » comme nous pourrions l’imaginer, ils s’hydratent de manière indirecte grâce à l’eau contenue au sein de leurs proies (entre 70 et 85 % de la masse totale chez les poissons) et de l’eau produite au niveau des mitochondries, des organites situés dans les cellules, qui produisent de l’eau, appelée eau métabolique, issue de la dégradation des molécules organiques ingérées par l’animal (glucides, protéines, lipides).</p>
<p>La question de l’hydratation chez les dauphins agitait l’esprit des scientifiques depuis près d’un siècle. <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/5452073/">Les premières études physiologiques</a> réalisées au milieu du vingtième siècle avaient montré qu’ils ne buvaient pas, mais les expériences se basaient uniquement sur des dauphins à jeun et donc privé d’une source d’eau : la nourriture.</p>
<p>Aujourd’hui, c’est l’eau des proies et l’eau métabolique qui sont considérées comme les <a href="https://doi.org/10.1007/s00227-019-3567-4">deux principales sources d’eau chez les dauphins</a>, mais leurs contributions respectives restent inconnues, en particulier chez les animaux nourris. Pour déterminer la proportion respective d’eau provenant des proies, de l’eau métabolique et de l’eau salée environnante chez les Odontocètes (les cétacés à dents tels que les dauphins, les orques ou encore les cachalots en opposition aux Mysticètes, les baleines à fanons), nous avons analysé la composition isotopique de l’oxygène (<sup>18</sup>O et <sup>16</sup>O, tous deux des atomes d’oxygène, mais dont la masse diffère par leur nombre de neutrons au sein de leur noyau) de l’eau contenue dans leur corps afin de déterminer son origine.</p>
<h2>Les isotopes de l’oxygène comme traceurs des sources d’eau</h2>
<p>Pour cela nous avons mesuré la composition isotopique de l’oxygène de l’eau contenue dans le plasma sanguin et de l’urine de quatre orques, <em>Orcinus orca</em>, et de neuf grands dauphins, <em>Tursiops truncatus</em>, nés et élevés en structure zoologique. Ces valeurs ont été comparées à celle de l’eau contenue dans leurs proies et celle de l’eau environnante (eau du bassin dans lequel ils vivent) et ceci pendant un an et à intervalles réguliers.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/568904/original/file-20240111-29-3katfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568904/original/file-20240111-29-3katfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568904/original/file-20240111-29-3katfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568904/original/file-20240111-29-3katfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568904/original/file-20240111-29-3katfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568904/original/file-20240111-29-3katfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568904/original/file-20240111-29-3katfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Prise de sang sur un grand dauphin, Tursiops truncatus.</span>
<span class="attribution"><span class="source">R.Amiot au Zoo Marineland</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Puis dans un second temps, ces données ont servi à alimenter un modèle mathématique permettant de prédire les contributions des différentes sources d’eau des cétacés.</p>
<p>Les résultats isotopiques obtenus et ceux de la modélisation indiquent que l’eau des proies constitue la source principale d’apport d’eau chez les orques et les grands dauphins (61–67 % des apports totaux), suivie par l’eau métabolique (28–35 % des apports totaux). La production d’eau métabolique étant <a href="https://doi.org/10.1139/y71-007">significativement plus élevée</a> chez les orques dont le régime alimentaire est plus riche en lipides. Le reste étant de l’eau de mer environnante ingérée accidentellement et de la vapeur d’eau inhalée lors de la respiration.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/568906/original/file-20240111-19-xc1crt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/568906/original/file-20240111-19-xc1crt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568906/original/file-20240111-19-xc1crt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568906/original/file-20240111-19-xc1crt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568906/original/file-20240111-19-xc1crt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568906/original/file-20240111-19-xc1crt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=369&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568906/original/file-20240111-19-xc1crt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=369&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568906/original/file-20240111-19-xc1crt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=369&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Contributions relatives de chacune des sources d’eau chez les orques et les grands dauphins.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Nicolas Séon</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Nos recherches apportent de nouvelles informations sur la physiologie des cétacés, avec des implications majeures concernant les problématiques de conservation concernant ces organismes. En raison du fait que ces animaux tirent de leur nourriture l’eau permettant de les maintenir hydratés, la surpêche dans certaines régions du monde et le réchauffement climatique actuel qui affecte la distribution des proies des cétacés s’affichent comme des défis majeurs pour la préservation de la biodiversité marine.</p>
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<p><em>Cet article a été coécrit par Isabelle Brasseur, Responsable Éducation – Recherche et Conservation à Marineland Côte d’Azur</em>.</p>
<p><em>Le projet <a href="https://anr.fr/Projet-ANR-18-CE31-0020">OXYMORE</a> est soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui finance en France la recherche sur projets. Elle a pour mission de soutenir et de promouvoir le développement de recherches fondamentales et finalisées dans toutes les disciplines, et de renforcer le dialogue entre science et société. Pour en savoir plus, consultez le site de l’ANR.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220565/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nicolas Séon, Peggy Vincent et Romain Amiot ont reçu des financements du CNRS sous le projet ANR OXYMORE. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Peggy Vincent et Romain Amiot ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Qu’ils vivent dans l’eau douce ou salée, les dauphins ne peuvent pas directement boire pour s’hydrater, mais se servent de leur nourriture.Nicolas Séon, Docteur en paléontologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Peggy Vincent, Chercheuse CNRS en paléontologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Romain Amiot, Chargé de Recherche, Université Claude Bernard Lyon 1Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2197472023-12-17T15:41:19Z2023-12-17T15:41:19ZDe l’eau propre grâce au soleil<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/566264/original/file-20231218-17-1rampl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">On peut dégrader les polluants organiques dans l'eau grâce à l'énergie du soleil et des photocatalyseurs.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/bulles-remontant-sur-un-plan-deau-79mNMAvSORg">Jong Marshes, Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>La contamination des ressources en eau par les micropolluants organiques constitue une préoccupation croissante à l’échelle mondiale, posant des défis significatifs pour la qualité de l’eau et la santé humaine.</p>
<p>Ces micropolluants organiques, tels que les pesticides, les produits pharmaceutiques et les composés organiques persistants, sont <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Plan_micropolluants_def_light.pdf">souvent détectés en concentrations infimes dans l’eau</a> (microgrammes, voir nanogrammes, par litre), mais même à ces concentrations leur impact sur les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2213343722004717">écosystèmes aquatiques</a> et sur la <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36583313/">santé publique</a> est avéré.</p>
<p>Le <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0160412009001494">réchauffement climatique aggrave la situation</a>, car les variations de température, les changements de régimes hydrologiques et les phénomènes météorologiques extrêmes peuvent affecter la mobilité de ces substances et entraîner une augmentation de leur concentration dans les réservoirs d’eau.</p>
<p>Les technologies conventionnelles de traitement des eaux usées utilisées dans les stations de traitement des eaux usées (STEU) peuvent se révéler insuffisantes pour éliminer ces substances. Les stations de traitement contribuent donc à la dispersion de ses substances dans l’environnement.</p>
<p>Face à cette réalité, il devient impératif de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28104517/">développer de nouveaux procédés de traitement de l’eau capables d’éliminer efficacement les micropolluants organiques</a>. Des approches innovantes – par exemple, l’utilisation de technologies d’oxydation avancée (TOA), d’adsorption sur charbon actif ou de séparation membranaire – sont nécessaires pour relever le défi croissant de la contamination par les micropolluants.</p>
<h2>Les technologies d’oxydation avancées</h2>
<p>Les TOA, tels que le procédé d’ozonation et les procédés de photo-oxydation, ont l’avantage d’une destruction non sélective des contaminants organiques, qu’ils soient biotiques (bactérie, agents pathogènes) ou abiotiques (pesticides, produits pharmaceutiques), et <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/rseau/2009-v22-n4-rseau3478/038330ar/">répondent donc parfaitement la problématique posée par les micropolluants</a>.</p>
<p>Elles consistent à produire des espèces chimiques extrêmement réactives (appelées « radicalaires » ou « radicaux hydroxyles »), qui sont capables de rompre les liaisons carbone-carbone qui constituent les différentes substances organiques. Ce processus mène à la dégradation des polluants sous forme de dioxyde de carbone, d’eau et de sels : on parle de minéralisation.</p>
<p>Parmi les TOA, certains procédés convertissent l’énergie lumineuse en énergie chimique pour oxyder et dégrader les molécules organiques – on dit que ce sont des <a href="https://new.societechimiquedefrance.fr/wp-content/uploads/2019/12/2015-397-398-juin-juillet-p78-hermann_hd.pdf">procédés photo-oxydatifs</a>. Dans le cas de la photocatalyse hétérogène, les photons sont captés par un matériau photosensible tel que les photocatalyseurs (dioxyde de titane, oxyde de zinc par exemple). Ils induisent la formation de charges à la surface du catalyseur, qui initient la production d’espèces radicalaires via des processus d’oxydo-réduction.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/eQbs6FVVRk4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Comment traiter nos eaux par voie solaire ? (UVED).</span></figcaption>
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<p>Les technologies de photo-oxydation devraient permettre d’exploiter la lumière du soleil pour dégrader des contaminants. Des installations de type « photo-réacteurs solaires » sont toujours en développement en laboratoire. Le but est d’optimiser les rendements, et aussi de voir comment obtenir des coûts environnementaux et énergétiques (en fonctionnement) les plus bas possibles.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/565733/original/file-20231214-27-9i9vp1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="photoréacteur avec des tubes transparents et une cuve" src="https://images.theconversation.com/files/565733/original/file-20231214-27-9i9vp1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/565733/original/file-20231214-27-9i9vp1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/565733/original/file-20231214-27-9i9vp1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/565733/original/file-20231214-27-9i9vp1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/565733/original/file-20231214-27-9i9vp1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=516&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/565733/original/file-20231214-27-9i9vp1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=516&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/565733/original/file-20231214-27-9i9vp1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=516&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Photo-réacteur solaire tubulaire de deux mètres carrés, couplé à une cuve de stockage de 300 litres, développé par le laboratoire PROMES.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.promes.cnrs.fr/wp-content/uploads/2021/04/IMGP3469.jpg">Promes, CNRS</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Par exemple, des recherches ont été conduites pour évaluer les capacités de photo-réacteurs solaires pour la décontamination des eaux usées issues d’établissements hospitaliers (<a href="https://interreg-sudoe.eu/fra/projets/les-projets-approuves/163-residus-medicamenteux-dans-les-rejets-d-etablissements-pour-personnes-agees-ehpad-et-residences-seniors-risques-outils-d-analyse-innovants-et-procedes-de-traitements-durables">produits pharmaceutiques</a>), des effluents agricoles (<a href="https://iwra.org/congress/2008/resource/authors/abs221_article.pdf">résidus de biocides</a>), la remédiation de nappe phréatique (<a href="https://theses.hal.science/tel-01236848v1/preview/These_Miguet_Marianne_2015.pdf">résidus de solvants comme le trichloroéthylène</a>), mais également le traitement des eaux usées pour des usages agricoles (irrigation) ou <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/35753265/">industriels</a>.</p>
<p>Pour envisager le déploiement de ces technologies, il est nécessaire d’intensifier les performances des photo-réacteurs solaires et d’optimiser l’utilisation de la ressource solaire.</p>
<h2>La ressource solaire disponible pour la photo-oxydation</h2>
<p>L’<a href="https://www.promes.cnrs.fr/promes/presentation-generale/">exploitation de la ressource solaire</a> constitue en effet un enjeu majeur dans le contexte climatique, énergétique et environnemental mondial actuel afin d’assurer la transition énergétique. Pour cela, on cherche à mettre en œuvre des technologies durables, à <a href="https://www.uved.fr/fileadmin/user_upload/Documents/pdf/Transcriptions/MOOC_UVED_ENR_Transcription_Blanc_Ressources-solaires.pdf">faible coût énergétique</a>, en fonctionnement, grâce à la ressource solaire.</p>
<p>Cette ressource solaire est variable (à cause des nuages, de l’alternance jour-nuit et des saisons…). Quand on cherche à produire de l’électricité (photovoltaïque), c’est un écueil, car il est coûteux de stocker l’électricité produite jusqu’au moment où on en a besoin.</p>
<p>En revanche, pour le traitement de l’eau, les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0920586107000478">contaminants peuvent être stockés</a> par adsorption sur des colonnes de charbons ou dans des bassins de rétention d’eau usée, en attendant que le soleil brille.</p>
<p>Ainsi, pour développer des installations solaires de dépollution de l’eau, on conçoit leur capacité de fonctionnement à l’échelle de l’année, ou on optimise leur capacité afin de répondre à des besoins ponctuels – saisonniers par exemple pour les zones touristiques.</p>
<p>Enfin, le rayonnement solaire se répartit en trois grandes familles de longueurs d’onde : le rayonnement ultraviolet, visible et infra rouge. Les photo-catalyseurs actuellement disponibles sur le marché présentent des limites en termes d’absorption du spectre solaire. Aujourd’hui, <a href="https://www.techniques-ingenieur.fr/base-documentaire/procedes-chimie-bio-agro-th2/gestion-durable-des-dechets-et-des-polluants-42495210/la-photocatalyse-depollution-de-l-eau-ou-de-l-air-et-materiaux-autonettoyants-j1270/principe-de-la-photocatalyse-j1270niv10001.html">seule la plage ultraviolette – qui représente seulement 5 % du spectre solaire – est exploitable pour la photocatalyse appliquée au traitement de l’eau</a>.</p>
<p>Depuis trois décennies, des <a href="https://www.techniques-ingenieur.fr/base-documentaire/procedes-chimie-bio-agro-th2/intensification-des-procedes-et-methodes-d-analyse-durable-42493210/photocatalyse-des-materiaux-nanostructures-aux-reacteurs-photocatalytiques-nm3600/catalyse-et-photocatalyse-nm3600niv10001.html">études</a> sont menées pour améliorer les performances des matériaux photosensibles, avec pour objectif d’augmenter les rendements de photo-conversion et leur capacité à absorber le rayonnement visible (45 % du spectre solaire).</p>
<p>Dans ce contexte, les défis sont désormais d’intensifier les capacités des filières existantes, d’améliorer la qualité sanitaire des eaux et de diminuer les coûts énergétiques des installations.</p>
<p>Pour cela, l’avenir des technologies d’oxydations avancées réside dans le couplage avec d’autres procédés : des procédés biologiques (pour éliminer les polluants « biorécalcitrants », c’est-à-dire non dégradables biologiquement), des procédés membranaires (éliminer les polluants de faibles tailles, non filtrés par membrane), ou encore avec le cycle thermodynamique solaire (pour activer thermiquement les catalyseurs).</p>
<h2>Le projet Aquireuse</h2>
<p>Notre projet Aquireuse explore une filière de traitement unique en France, qui repose sur une première étape de photocatalyse solaire, suivie d’une infiltration dans un sol riche en matière organique, qui contribue à dégrader la pollution.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/filtres-plantes-de-roseaux-comment-ils-epurent-les-eaux-usees-de-la-plupart-des-petites-collectivites-en-france-209651">Filtres plantés de roseaux : comment ils épurent les eaux usées de la plupart des petites collectivités en France</a>
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<p>En effet, pour certains usages, comme la recharge avec des eaux usées traitées d’une nappe phréatique qui servira de réserve pour la production d’eau potable, l’eau doit être exempte de micropolluants.</p>
<p>La recharge de nappe phréatique par des eaux usées traitées est une pratique encore inconnue en France mais est plus répandue, par exemple en <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0378377423002470">Australie</a> ou en <a href="https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1029/2020WR029292">Californie</a>. Elle permet notamment de lutter contre un phénomène qui se généralise sur les zones littorales, la <a href="https://www.brgm.fr/fr/reference-projet-acheve/simba-comprendre-phenomene-intrusion-saline-adapter-moyens-surveillance">« remontée du biseau salé »</a>. Lorsque le niveau des nappes phréatiques situées en bordure de littoral baisse du fait de prélèvements trop intensifs, l’eau de mer s’infiltre et contamine les ressources en eau douce, car l’eau rendue salée devient impropre à notre consommation.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/reutilisation-des-eaux-usees-quels-sont-les-pays-les-plus-en-pointe-112984">Réutilisation des eaux usées : quels sont les pays les plus en pointe ?</a>
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<p>Dans le projet Aquireuse, un <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-reportage-de-la-redaction/boire-nos-eaux-usees-traitees-on-y-vient-8671821">effluent issu d’une STEU est utilisé pour alimenter un dispositif pilote de photocatalyse solaire</a> où s’opère une première étape de dégradation totale ou partielle des micropolluants. L’effluent ainsi traité est ensuite envoyé pour une infiltration dans des sédiments où la matière organique du sol va contribuer à l’affinage du traitement en poursuivant la dégradation des micropolluants et des sous-produits issus de la photocatalyse solaire.</p>
<p>Les premiers résultats sont très prometteurs : une grande partie des micropolluants sont totalement dégradés après leur passage dans la filière de traitement. Ces résultats sont en cours de publication.</p>
<p>Une telle filière, associant un procédé durable et une solution fondée sur la nature, est un exemple d’économie circulaire pour le traitement de l’eau.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219747/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gael Plantard a reçu des financements de Projet Aquireuse, Labex Solstice, Projet Compaqui. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Julie Mendret a reçu des financements de Région Occitanie. </span></em></p>Les stations d’épuration ne permettent pas d’éliminer tous les polluants. Et si l’on se servait de l’énergie du Soleil pour rendre notre eau plus propre ?Gael Plantard, Professeur des universités en chimie des matériaux, Université de PerpignanJulie Mendret, Maître de conférences, HDR, Université de MontpellierLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2172232023-12-12T18:47:56Z2023-12-12T18:47:56ZLa vannerie, ou l’art de puiser de l’eau dans le désert sans métal ni plastique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/558044/original/file-20231107-17-l80lty.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=16%2C241%2C2159%2C2834&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Au ksar de Tamtert dans la vallée de la Saoura, dans le Sahara algérien, en 1990.</span> <span class="attribution"><span class="source">Tatiana Benfoughal</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Ce seau de puits a été photographié dans le Sahara algérien, dans la vallée de la Saoura. Oui, oui, il n’y a pas d’erreur, cette vannerie en fibres végétales est un <a href="https://sciencepress.mnhn.fr/fr/collections/natures-en-societes/les-palmes-du-savoir-faire">seau pour puiser de l’eau, connu dans les oasis du Sahara maghrébin sous le nom de « gnina »</a>.</p>
<p>De contenance moyenne d’une vingtaine de litres, les seaux tressés sont utilisés dans les puits dits puits à « balancier ». De profondeur maximum de 10 mètres, ces puits sont creusés là où la nappe phréatique est proche de la surface du sol, notamment au fond des vallées des oueds ou d’anciennes étendues lacustres (si la nappe est plus profonde, jusqu’à 20 ou 30 mètres, on optera pour des puits à poulie à traction animale, en utilisant alors un récipient en peau ou en caoutchouc).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/563905/original/file-20231206-21-e8vfgy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/563905/original/file-20231206-21-e8vfgy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/563905/original/file-20231206-21-e8vfgy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=901&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/563905/original/file-20231206-21-e8vfgy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=901&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/563905/original/file-20231206-21-e8vfgy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=901&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/563905/original/file-20231206-21-e8vfgy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1132&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/563905/original/file-20231206-21-e8vfgy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1132&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/563905/original/file-20231206-21-e8vfgy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1132&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les vanneries de seaux de puits sont réalisées par des femmes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Tatiana Benfoughal</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>L’eau puisée dans les puits à balancier sert à arroser de petites palmeraies de quelques dizaines de palmiers et surtout les plans de cultures sous-jacents de blé, d’orge, de sorgho ou de millet, ainsi que des légumes de première nécessité. Il s’agit d’un <a href="https://ulysse.univ-lorraine.fr/discovery/fulldisplay?docid=alma991000009339705596&context=L&vid=33UDL_INST:UDL">travail épuisant</a> car il demande un effort physique assez considérable pour abaisser la perche. Un homme ne peut dépasser le rythme de quelques seaux par minute et pas plus de trois heures d’affilée.</p>
<p>Dès la deuxième moitié du XX<sup>e</sup> siècle, avec l’arrivée dans les oasis des équipements hydrauliques modernes – motopompes, forages profonds, barrages – et l’agrandissement des parcelles de palmeraies à cultiver, les puits à balancier avec leurs seaux en vannerie sont de moins en moins utilisés et seulement pour les usages domestiques.</p>
<h2>Vous avec dit « étanche » ?</h2>
<p>L’étanchéité de ce seau est due à la fois aux fibres végétales et à la technique de tressage utilisées. C’est du palmier dattier (<em>Phoenix dactylifera L.</em>), plante reine dans les oasis du Sahara, du Proche et du Moyen-Orient, que l’on tire les matières pour réaliser les seaux de puits. Comme pour le tressage de l’ensemble des vanneries sont utilisés des folioles (petites feuilles fixées de part et d’autre de la palme), la hampe (branche qui tient le régime de dattes) et le fibrillum (bourre qui recouvre le stipe).</p>
<p>La technique de tressage est le « spiralé cousu » : le montant (tiges de hampe défibrée) forme l’âme de la vannerie en s’enroulant en spirale, et le brin (folioles) est un élément mobile et souple qui entoure le montant par des enroulements successifs et fixe les spires entre elles. Le fibrillum sert à tresser les cordes de suspension.</p>
<p>Cette technique, pratiquée <a href="https://www.cairn.info/les-objets-ont-ils-un-genre--9782200277130-page-207.htm">uniquement par les femmes, est utilisée pour fabriquer l’ensemble des vanneries dites « domestiques »</a> – plats, corbeilles, paniers, bols, seaux, couscoussières, etc. Les hommes, eux, sont spécialisés en technique du « tissée » utilisée pour les tressages des couffins, bissacs ou chapeaux indispensables pour le travail dans les palmeraies.</p>
<p>Quand le seau, au tressage toujours très serré, se remplit d’eau et que les fibres végétales gonflent, il devient encore plus étanche. Il est possible aussi, pour atteindre le niveau optimum d’étanchéité, de l’enduire de <a href="https://sciencepress.mnhn.fr/fr/collections/natures-en-societes/les-palmes-du-savoir-faire">goudron végétal</a> obtenu par distillation de morceaux de branches d’arbres (genévrier, sapin ou genêt). Ce goudron couvre la surface du seau (comme celle des bols pour boire), comme une sorte de résine épaisse et collante de couleur sombre qui, même après avoir durci, donne à l’eau un fort goût spécifique et bien apprécié. De plus, selon les croyances locales, le goudron protégerait l’eau de toute « souillure maléfique ».</p>
<p>Malgré l’ouverture des régions sahariennes vers le monde « moderne », malgré l’arrivée sur les marchés locaux des produits industriels et l’introduction de la matière plastique dans le tressage, la fabrication des seaux de puits comme d’autres vanneries se perpétue encore dans les oasis sahariennes. Les vanneries continuent à être utilisées dans leurs nombreuses fonctions quotidiennes, comme dans le contexte rituel, incarnant ainsi une tradition aussi valorisée que l’innovation.</p>
<p>Restant globalement une activité domestique, et même si le nombre d’hommes et de femmes qui pratiquent l’activité vannière a considérablement diminué aujourd’hui, le savoir-faire continue à se transmettre dans le cadre familial.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/217223/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tatiana Benfoughal ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La vannerie accompagne les oasiens depuis des millénaires. Ce qui peut paraître surprenant, c’est qu’elle permet de réaliser des seaux… étanches.Tatiana Benfoughal, Attachée honoraire au Museum National d'Histoire Naturelle, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2179652023-11-27T17:15:34Z2023-11-27T17:15:34ZCapturer l’eau des nuages pour lutter contre la pénurie d’eau dans les déserts<p>En 2022, 2,2 milliards de personnes n’ont toujours pas accès à des services d’eau potable. Avec le réchauffement climatique, la rareté de l’eau potable est devenue un <a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/water-and-sanitation/">défi majeur pour notre avenir</a>, et cette problématique s’intensifie bien sûr en premier lieu dans les régions arides et surpeuplées. Un <a href="https://www.unwater.org/publications/un-water-analytical-brief-on-unconventional-water-resources/">récent rapport des Nations unies</a> souligne l’importance cruciale d’explorer les sources d’eau « non conventionnelles » telle que l’eau atmosphérique, car les ressources actuelles sont surexploitées et insuffisantes.</p>
<p>Pour trouver des solutions originales, la nature peut être une incroyable source d’inspiration. En effet, au cours de l’évolution, certaines espèces d’arbres et d’insectes ont développé des moyens ingénieux pour capter l’eau qui se trouve dans l’atmosphère sous forme de vapeur ou de brouillard.</p>
<p>Citons par exemple les <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s004420050683">séquoias géants</a> de Californie, qui captent plus d’un tiers de l’eau qu’ils consomment grâce au brouillard intercepté par leurs aiguilles et égoutté à leur pied. Le <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00425-020-03433-y">Dragonnier de Socotra</a>, lui, capte et ingère l’eau du brouillard directement par ses feuilles en forme de rosette. Certains <a href="https://theconversation.com/images-de-science-sinspirer-des-cactus-pour-recolter-de-leau-douce-151318">cactus</a>, <a href="https://phys.org/news/2016-06-moss-ultimate-toolkit.html">mousses</a> et <a href="https://www.nature.com/articles/262284a0">coléoptères du désert</a> jouent sur leur structure, leur géométrie ou l’affinité de leur surface avec l’eau pour favoriser la collecte du brouillard.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un dragonnier de Socotra.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/un-arbre-etrange-au-milieu-dune-zone-rocheuse-siq3xkHUhSg">Andrew Svk/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>Des filets pour capturer le brouillard</h2>
<p>Face à ces solutions fascinantes, l’homme n’est pas en reste : des filets pour capturer le brouillard sont utilisés depuis le début des années 90 notamment par l’<a href="https://fogquest.org/project-information/projects/">ONG Fog Quest</a>. Nous cherchons à développer des manières frugales de fabriquer des filets qui soient à la fois plus efficaces, plus économes, et plus faciles à fabriquer que ceux qui existent actuellement.</p>
<p>Dans certaines zones désertiques telles qu’au Chili ou au Maroc, les populations font usage de « filets à brouillard » pour capturer les gouttelettes d’eau des <a href="https://cloudatlas.wmo.int/fr/advection-fog.html">« brouillards d’advection »</a> qui se forment et se déplacent au-dessus de certains déserts montagneux proches des côtes océaniques. Poussé par les vents dominants, l’air chaud et humide des océans se condense en petites gouttes d’eau lorsqu’il se refroidit au contact de l’atmosphère plus fraîche de ces régions montagneuses.</p>
<p>Depuis plusieurs décennies, les progrès scientifiques et techniques pour concevoir de grands filets à un coût abordable ont conduit de <a href="https://www.courrierinternational.com/article/innovation-au-maroc-la-collecte-du-brouillard-pour-pallier-les-penuries-d-eau">nombreuses communautés dans le besoin à déployer des filets pour capturer le brouillard transporté par le vent</a>. Ces filets « à nuages » ou « à brouillard » ressemblent à des filets de pêche tendus dans les airs. Pour les meilleurs filets, ils peuvent avoir une efficacité de collecte allant jusqu’à 15 % de la quantité d’eau contenue dans le brouillard. Dépendant du lieu où sont placés ces filets, ils peuvent récolter entre 10 et 100 litres d’eau par mètre carré et par jour.</p>
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<img alt="coléoptère récoltant de l’eau dans le désert" src="https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les <em>Onymacris unguicularis</em> se positionnent sur les crêtes des dunes, lèvent la face dorsale de l’abdomen face au vent et baissent la tête. Dans cette position presque verticale, ils attendent que le brouillard se dépose sur leurs élytres, dont les sillons canalisent les gouttelettes d’eau jusqu’à leur appareil buccal.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/jamesharrisanderson/5727784452">James Anderson/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>Dans les régions en stress hydrique qui sont propices aux brouillards d’advection, le véritable enjeu est de développer de filets à brouillard abordables, efficaces et durables. Les filets peu coûteux, tels que les filets « à patates » (ou <em>raschel mesh</em>) utilisés pour l’emballage alimentaire, sont certes accessibles, mais leur efficacité est limitée et ils ne résistent pas aux vents violents. Les filets plus robustes et performants, comme le <a href="https://www.aqualonis.com/">filet commercial Aqualonis FogCollector</a>, sont plus difficiles à produire et beaucoup plus coûteux.</p>
<p>Face à ces défis scientifiques et techniques, des chercheurs se mobilisent pour explorer ces solutions passives permettant d’améliorer les filets en travaillant sur leur efficacité, leur aérodynamisme ou encore sur la nature du matériau qui constitue le filet et son affinité avec l’eau. L’aspect « passif » signifie qu’il ne faut pas d’apport d’énergie supplémentaire (électrique ou d’origine fossile) à l'énergie fournie par le soleil pour faire évaporer l'eau et mettre les masses d'air en mouvement, contrairement à d’autres méthodes pour récolter de l’eau douce, souvent très énergivores comme <a href="https://theconversation.com/le-dessalement-des-eaux-quand-lutiliser-et-a-quel-prix-207232">certaines méthodes de dessalement de l’eau de mer</a>.</p>
<h2>Améliorer les filets à nuage en adaptant la géométrie de leurs fibres</h2>
<p><a href="https://www.nature.com/articles/s41545-023-00266-6">Nos récentes recherches</a> ont ainsi abouti à des filets à brouillard en kirigami, conçus par de simples découpage et pliage de feuilles plastique. Ce type de filet est peu coûteux, doté d’une géométrie simple, dont l’efficacité surpasse celle de la plupart des filets existants.</p>
<p>L’origine de cette efficacité vient de la géométrie de la fibre employée. Alors que la plupart des filets à brouillard emploient des fibres cylindriques, nous employons des fibres plates.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La mousse est passée maître dans l’art de collecter l’eau.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/mousse-gouttes-brins-dherbe-gazon-3021192/">susannp4/Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>Une goutte posée sur une surface va prendre une forme qui équilibre les pressions interne et externe de la goutte, ainsi que le surplus de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pression_de_Laplace">pression (de Laplace)</a> venant de la courbure de l’interface liquide de la goutte.</p>
<p>La fibre cylindrique présentant une courbure, une goutte ne pourra pas s’étaler, car pour compenser la courbure de la fibre, elle devra garder la forme d’une perle. Grâce à la géométrie plane des fibres employées dans nos filets, les gouttes de brouillards s’étalent complètement, forment rapidement un fin film liquide très stable sur toute la surface du filet, ce qui favorise la collecte d’eau.</p>
<p>Ainsi, nos tests ont démontré que, dans des conditions expérimentales équivalentes, notre filet à brouillard Kirigami avait collecté huit litres par mètre carré en une heure, tandis que les filets en harpe de fibres et en mailles <em>rashel mesh</em> couramment utilisés n’avaient récolté que trois et deux litres par mètre carré respectivement.</p>
<p>Comparé à l’un des meilleurs filets à brouillard du marché (l’<a href="https://www.aqualonis.com/">Aqualonis FogCollector 3D-2013</a>), notre filet Kirigami affiche une efficacité stationnaire comparable, mais se révèle nettement plus performant sur le plan dynamique, c’est-à-dire lors de brouillards de courte durée ou de faible intensité.</p>
<h2>Une approche conçue pour être aisée à mettre à l’échelle dans des conditions frugales</h2>
<p>La simplicité et la scalabilité du kirigami en font un candidat prometteur pour des applications à faible coût sur le terrain (il ne s’agit en effet que d’une feuille de plastique percée de découpes). Actuellement, nous testons des prototypes à grande échelle en collaboration avec l’<a href="https://darsihmad.org/fr/acceuil/">ONG marocaine Dar Si Hmad</a> qui possède le plus grand champ de filets à brouillard au monde, et les premiers résultats sont très encourageants.</p>
<p>En plus de cette nouvelle méthode de fabrication, nous avons aussi développé, en laboratoire, une méthode d’essai précise et bien contrôlée permettant de quantifier l’efficacité de notre filet à brouillard Kirigami et de le comparer à d’autres filets dans les mêmes conditions.</p>
<p>En effet, la mesure de l’efficacité d’un filet à brouillard est souvent subjective et n’est pas encore standardisée.</p>
<p>Notre banc d’essai consiste en une soufflerie produisant un écoulement d’air laminaire dans lequel un brouillard est généré et envoyé à l’aide de transducteurs piézoélectriques. Les échantillons de filets, placés dans l’écoulement sur des balances ultra-précises, nous permettent de mesurer l’efficacité de collecte en temps réel. Nous pouvons ainsi distinguer de manière dynamique les différentes contributions à l’efficacité.</p>
<h2>Une recherche sous contraintes créatives pour relever les défis sociétaux</h2>
<p>Afin de garantir l’accessibilité et l’évolutivité des solutions développées, nous avons travaillé sous contraintes : dans le contexte de la <a href="https://125.stanford.edu/frugal-science/">« science frugale »</a> (science qui vise à concevoir des solutions évolutives et créatives tout en prenant en compte le rapport coût/performance) <a href="https://fablab.ulb.be/">au sein d’un environnement « fab lab »</a> (un laboratoire de fabrication numérique).</p>
<p>Les fab labs, en favorisant la collaboration interdisciplinaire et le prototypage, jouent un rôle clé dans la création d’innovations pour relever des défis mondiaux, conformément aux <a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/objectifs-de-developpement-durable/">objectifs de développement durable des Nations unies</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/217965/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Denis Terwagne a reçu des financements belges du Fonds de la Recherche Scientifique - FNRS (Bourse n° PDR-WISD-12). </span></em></p>Avec des filets à brouillard, on peut capturer l’eau des nuages, comme le font certaines plantes. Une nouvelle méthode utilise maintenant la technique japonaise du « kirigami ».Denis Terwagne, Physicien et expérimentateur de l'interdisciplinaire, Professeur, Université Libre de Bruxelles (ULB)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2174012023-11-27T17:11:50Z2023-11-27T17:11:50ZÀ Mayotte, l’eau ne coule presque plus<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/558789/original/file-20231110-26-gwxav0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Inscription "Eau secours" sur les murs d'une maison de Mayotte. </span> <span class="attribution"><span class="source">Clémentine Lehuger</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Depuis plus de deux mois, le département de Mayotte fait face à une <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/09/30/avec-la-penurie-d-eau-mayotte-s-enfonce-dans-une-crise-hors-norme-ce-n-est-plus-vivable-les-nerfs-vont-lacher_6191776_823448.html">pénurie d’eau sans précédent</a>. Les conséquences pour la population sont extrêmement lourdes (restrictions dans les usages de l’eau, fermeture des écoles, non-potabilité de l’eau) – les habitants n’ont accès à l’eau potable que 16 heures tous les trois jours – et révèlent une nouvelle fois les inégalités d’accès aux services publics dont est victime ce territoire français de l’océan Indien.</p>
<h2>Une « crise de l’eau » aux facteurs multiples</h2>
<p>À Mayotte, le réseau d’eau potable dépend principalement de ce qu’on appelle « les eaux de surface » : venant des rivières et des deux retenues collinaires situées au nord et au centre de l’île. En temps normal, les pluies de la saison humide, qui s’étendent de novembre à avril, remplissent ces réserves et permettent d’assurer près de 80 % de la distribution d’eau. Les 20 % restants sont produits par l’usine de dessalement située en Petite-Terre.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/561564/original/file-20231124-27-hphlbz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Carte de Mayotte avec l’emplacement des deux retenues collinaires" src="https://images.theconversation.com/files/561564/original/file-20231124-27-hphlbz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561564/original/file-20231124-27-hphlbz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=798&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561564/original/file-20231124-27-hphlbz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=798&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561564/original/file-20231124-27-hphlbz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=798&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561564/original/file-20231124-27-hphlbz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1003&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561564/original/file-20231124-27-hphlbz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1003&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561564/original/file-20231124-27-hphlbz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1003&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Emplacement des deux retenues collinaires de Mayotte.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Avec le <a href="https://www.huffingtonpost.fr/environnement/video/a-mayotte-des-coupures-d-eau-deux-jours-sur-trois-la-secheresse-est-elle-la-seule-coupable-clx1_223038.html">dérèglement climatique</a>, les saisons des pluies raccourcissent, tandis que les phénomènes de sécheresse s’étendent et sont de plus en plus intenses. À l’heure actuelle les retenues sont presque vides : le dernier bulletin publié par les services de l’État indique un <a href="https://www.europe1.fr/societe/mayotte-les-ressources-en-eau-a-un-niveau-critique-4216252">taux de remplissage alarmant de 6 %</a>.</p>
<p>À ce facteur climatique qui fragilise déjà fortement les ressources en eau de ce territoire insulaire, s’ajoutent également les facteurs liés au développement de l’île. Ces dernières années, Mayotte a connu des transformations extrêmement rapides : développement des industries et des entreprises, <a href="https://old.lejournaldemayotte.fr/2014/12/08/consommation-mayotte-change-de-mode-vie/">changements des modes de vie et de consommation</a> qui ont fortement accentué les besoins en eau. Dans un département en pleine construction, le <a href="https://la1ere.francetvinfo.fr/mayotte/les-affaires-sont-en-bonne-sante-selon-l-iedom-1275084.html">développement du secteur du BTP</a>, qui consomme chaque jour 500 m<sup>3</sup> sur les 27 000 m<sup>3</sup> d’eau consommés par tout le territoire, pose aussi question dans ce contexte de raréfaction des ressources.</p>
<p>La <a href="https://www.ined.fr/fr/publications/editions/population-et-societes/mayotte-plus-un-adulte-sur-deux-n-est-pas-ne-sur-ile/">croissance démographique</a> explique également que les infrastructures liées à la distribution d’eau, qui datent de la fin des années 1990, ne puissent plus subvenir aux besoins de la population, <a href="https://theconversation.com/graphiquement-votre-a-mayotte-la-population-a-quintuple-en-moins-de-40-ans-142788">deux fois plus nombreuse aujourd’hui</a>. Aussi, si la situation est présentée comme exceptionnelle, ce n’est pas la première crise de l’eau à laquelle ont fait face les habitants de Mayotte ces dernières années.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1723632223075860619"}"></div></p>
<p>Depuis 2016, <a href="https://la1ere.francetvinfo.fr/crise-eau-mayotte-173-millions-euros-engages-2017-plan-eau-507031.html">année d’une crise de l’eau elle aussi mémorable</a>, les services de l’État émettent des restrictions dans les usages de l’eau à chaque saison sèche. Suite à cette crise, <a href="https://www.mayotte.gouv.fr/Actualites/Communiques-de-presse/Communiques-de-presse-2022/Usine-de-dessalement-de-Petite-Terre">l’État a investi</a> pour tenter d’augmenter la production en eau potable de l’usine de dessalement dans le cadre du plan urgence eau de 2017. Mais les travaux réalisés dans l’urgence sur des infrastructures déjà fragilisées n’ont pas permis d’augmenter le volume d’eau produit. De nouveaux travaux ont été programmés face à la crise actuelle, avec un investissement de 4 millions d’euros de l’État, mais il faudra du temps avant que la population en ressente les bénéfices concrets.</p>
<h2>Le quotidien des Mahorais face aux « tours d’eau » et leurs aléas</h2>
<p>Pour faire face au manque d’eau, la préfecture de Mayotte met en place des « tours d’eau » : le territoire a été découpé en quatre secteurs, et l’eau y coule dans les robinets durant 18 heures avant d’être coupée pour 54 heures, selon un <a href="https://lejournaldemayotte.yt/2023/11/11/nouveau-planning-de-tours-deau-dans-la-continuite-du-precedent/">planning communiqué chaque semaine par les services de l’État</a>. Ce dispositif a été mis en place dès le mois d’août dans certaines zones de l’île afin de diminuer la consommation et le débit global. Concrètement, cela se traduit par des coupures d’eau et une eau du robinet impropre à la consommation au moment de sa remise en service. En effet, l’arrêt de la distribution de l’eau pendant 48 heures favorise le développement de bactéries dans le réseau qui risque de contaminer l’eau. Toutefois, ces plannings ne sont pas toujours respectés selon les habitants, l’eau revient parfois au milieu de la nuit ou seulement pour quelques heures. Cette désorganisation conduit certains habitants à laisser ouverts leurs robinets pour être sûrs de ne pas rater le retour de l’eau, en dépit du gaspillage que cela occasionne.</p>
<p>Les Mahorais s’organisent ainsi selon une mécanique qui, si elle semble bien huilée, n’en demeure pas moins très contraignante et anxiogène. Les « jours d’eau », il faut remplir les contenants pour les jours de coupure à venir : bouteilles en plastiques, sceaux, bassines, cuves. Tous les foyers s’adaptent afin de subvenir aux besoins d’hygiène : toilette, douche, lavage des mains, vaisselle. Certains habitants racontent avec honte les conditions d’hygiène qui se dégradent dans les foyers après des mois de restrictions. Certains jours, la recherche d’eau en bouteille dans les magasins de l’île s’apparente à une véritable traque, il faut parfois visiter trois ou quatre magasins avant de trouver de l’eau en bouteille. Certains jours, aucune eau n’est disponible.</p>
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<img alt="Rayon vide d’un magasin de Mayotte" src="https://images.theconversation.com/files/558835/original/file-20231110-17-2jf6as.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/558835/original/file-20231110-17-2jf6as.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/558835/original/file-20231110-17-2jf6as.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/558835/original/file-20231110-17-2jf6as.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/558835/original/file-20231110-17-2jf6as.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/558835/original/file-20231110-17-2jf6as.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/558835/original/file-20231110-17-2jf6as.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Rayon vide d’un magasin de Mayotte.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Clémentine Lehuger</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>La préfecture de Mayotte et l’Agence régionale de santé <a href="https://www.mayotte.ars.sante.fr/faq-penurie-deau-2023">préconisent de faire bouillir l’eau</a> afin d’éliminer les bactéries et la rendre potable. Cette solution agace, d’autant plus qu’elle vise les personnes les plus défavorisées qui n’ont pas accès à l’eau en bouteille, ni les moyens de faire bouillir et stocker l’eau. Acheter des bouteilles d’eau (trois fois plus chères qu’en métropole malgré le plafonnement par l’État) est un luxe dans un territoire où près de <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/4632225">80 % de la population vit sous le seuil de pauvreté</a>.</p>
<p>Dans les quartiers qui concentrent les populations les plus précaires, des rampes d’eau potable ont été installées pour tenter d’endiguer le risque sanitaire qui plane sur cette crise de l’eau. Sur le bord des routes, de longues cohortes, généralement de femmes et d’enfants à pied, portent de lourds bidons d’eau.</p>
<h2>L’accès aux services publics à Mayotte : un enjeu qui ne date pas de la crise de l’eau</h2>
<p>L’accès aux soins et à l’éducation est un défi constant dans le <a href="https://www.alternatives-economiques.fr/mayotte-departement-norme-de-republique-4-autres-infographies/00106801">département le plus pauvre de France</a>. Depuis le début de la crise, des <a href="https://www.francetvinfo.fr/france/mayotte/reportage-je-suis-inquiet-pour-mes-enfants-a-mayotte-la-crise-de-l-eau-met-sous-pression-un-systeme-scolaire-deja-sature_6115035.html">écoles, collèges et lycées ont régulièrement dû fermer leurs portes</a>. Privés d’eau, les établissements scolaires ne pouvaient pas accueillir les élèves selon des conditions d’hygiène décentes. Dans le département qui accuse le <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/1291829">plus fort taux d’illettrisme</a> et le <a href="https://rers.depp.education.fr/data/commun/RERS.pdf">plus faible taux de réussite au baccalauréat</a>, la fermeture des établissements vient encore creuser ces inégalités.</p>
<p>Les services de santé étaient déjà <a href="https://la1ere.francetvinfo.fr/mayotte-des-soignants-en-renfort-face-a-un-manque-criant-de-medecins-1403518.html">à bout de souffle</a> avant la crise de l’eau du fait des difficultés de recrutement dans ce département qui peine à faire venir du personnel soignant qualifié malgré des besoins croissants. La concomitance de la crise de l’eau et de l’épidémie de gastro-entérite <a href="https://la1ere.francetvinfo.fr/crise-de-l-eau-a-mayotte-l-hopital-craint-une-vague-de-malades-1430057.html">a donné des sueurs froides aux services de santé du territoire</a>. D’après l’ARS, qui constate avec soulagement la décrue des cas de gastro-entérite, l’épidémie a été plus forte que les autres années du fait du manque d’accès à l’eau.</p>
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<figcaption><span class="caption">RFI, 20 septembre 2023.</span></figcaption>
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<h2>Quelle issue à cette crise ?</h2>
<p>Face à cette situation désastreuse en matière de santé publique, tout le monde craint le pire et se demande : dans le cas où les <a href="https://www.europe1.fr/societe/mayotte-les-ressources-en-eau-a-un-niveau-critique-4216252">perspectives météorologiques ne s’améliorent pas</a>, que se passera-t-il quand il n’y aura plus d’eau du tout ? Le ministre délégué aux Outre-mer a promis au début du mois de novembre que chaque habitant de Mayotte <a href="https://lejournaldemayotte.yt/2023/11/03/philippe-vigier-annonce-une-distribution-deau-en-bouteille-pour-tous-a-partir-du-20-novembre/">se verrait remettre une bouteille d’un litre d’eau par jour</a>, mais les services de l’État sur place s’interrogent quant à la faisabilité d’une distribution d’une telle ampleur.</p>
<p>Le port de Mayotte a une capacité d’accueil limitée pour recevoir les porte-conteneurs ; et avec quels véhicules seront acheminées ces millions de bouteilles d’eau ? Le concours de l’armée, s’il se révèle utile, tiendra les personnes en situation irrégulière <a href="https://www.unicef.fr/article/a-mayotte-lurgence-de-sanctuariser-un-acces-a-leau-potable-pour-tous-les-habitants/">éloignées de ces distributions, par crainte d’être contrôlées et expulsées</a>.</p>
<p>Quant aux conséquences de l’arrivée en masse de ces millions de bouteilles en plastique, les autorités ont bien conscience du désastre écologique que cela augure, dans cette île entourée d’un lagon fragile et déjà saturée par les ordures.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/217401/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Clémentine Lehuger a reçu des financements de :
Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche
Lab'ex TEPSIS</span></em></p>L’actuelle crise de l’eau à Mayotte révèle une fois de plus l’insuffisance du service public dans ce département d’outre-mer.Clémentine Lehuger, Docteure en science politique, Université de Picardie Jules Verne (UPJV)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2170522023-11-14T13:48:22Z2023-11-14T13:48:22ZComment fabrique-t-on le café décaféiné ? Et est-il vraiment sans caféine ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/557533/original/file-20231030-21-uurqzu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=133%2C47%2C6059%2C3540&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Extraire la caféine d’un grain de café tout en conservant son arôme n’est pas chose facile.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/gray-metal-tool-aaHwnxgBmHs">Volodymyr Proskurovskyi/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>Le café est une des boissons les plus prisées au monde, et sa forte teneur en caféine est un des facteurs de sa popularité. C’est un stimulant naturel qui procure un regain d’énergie, et les gens ne peuvent s’en passer.</p>
<p>Toutefois, certaines personnes préfèrent limiter la caféine pour des raisons de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/12684194/">santé</a> ou autres. On trouve du café décaféiné, ou déca, un peu partout, et sa consommation <a href="https://www.coffeebeanshop.com.au/coffee-blog/decaf-coffee-market-worth-2145-billion-by-2025-at-69">serait en hausse</a>.</p>
<p>Voici ce qu’il faut savoir sur le café déca : comment on le prépare, son goût, ses bienfaits… et aussi, si la caféine en est vraiment absente.</p>
<h2>Comment fabrique-t-on le café décaféiné ?</h2>
<p>Extraire la caféine d’un grain de café tout en conservant son arôme n’est pas chose facile. Pour y parvenir, on extrait la caféine des grains verts non torréfiés en se basant sur le fait que la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6318762/#:%7E:text=Caffeine%20(Figure%201a)%20being,(15%20g%2FL).">caféine se dissout</a> dans l’eau.</p>
<p>Il existe trois méthodes principales de décaféination : avec des solvants chimiques, du dioxyde de carbone (CO<sub>2</sub>) liquide ou de l’eau pure et des filtres spéciaux.</p>
<p>Les étapes requises pour toutes ces méthodes expliquent le prix souvent plus élevé du décaféiné.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/556561/original/file-20231030-27-ab4y1v.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="A close-up of a small branch with bright green berries on it" src="https://images.theconversation.com/files/556561/original/file-20231030-27-ab4y1v.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/556561/original/file-20231030-27-ab4y1v.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/556561/original/file-20231030-27-ab4y1v.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/556561/original/file-20231030-27-ab4y1v.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/556561/original/file-20231030-27-ab4y1v.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/556561/original/file-20231030-27-ab4y1v.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/556561/original/file-20231030-27-ab4y1v.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les grains de café sont en fait des graines dures qu’on trouve à l’intérieur du fruit du caféier.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/green-leaf-budded-during-daytime-VMJtKiREtMc">Marc Babin/Unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Méthodes à base de solvants</h2>
<p>La plupart des cafés décaféinés sont fabriqués à l’aide de méthodes <a href="https://www.tandfonline.com/doi/epdf/10.1080/10408699991279231?needAccess=true">à base de solvants</a>, car il s’agit du procédé le moins coûteux. Cette méthode se divise en deux types : <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/B9780123849472001835">directe et indirecte</a>.</p>
<p>La <strong>méthode directe</strong> consiste à passer les grains de café à la vapeur, puis à les tremper à plusieurs reprises dans un solvant chimique (généralement du chlorure de méthylène ou de l’acétate d’éthyle) qui se lie à la caféine et l’extrait des grains.</p>
<p>Une fois la caféine extraite, on passe de nouveau les grains de café à la vapeur pour éliminer tout solvant chimique résiduel.</p>
<p>La <strong>méthode indirecte</strong> recourt aussi à un solvant chimique, mais celui-ci n’entre pas en contact direct avec les grains de café. Les grains sont trempés dans de l’eau chaude, puis l’eau est séparée des grains et traitée avec le solvant chimique.</p>
<p>La caféine se lie au solvant contenu dans l’eau et s’évapore. On trempe ensuite de nouveau les grains sans caféine dans cette eau pour qu’ils réabsorbent les saveurs et les arômes du café.</p>
<p>Les solvants chimiques (en particulier le chlorure de méthylène) utilisés dans ces processus sont la cause d’une controverse concernant le café décaféiné. Le <a href="https://www.sciencedirect.com/topics/biochemistry-genetics-and-molecular-biology/dichloromethane">chlorure de méthylène</a> pourrait être cancérigène à fortes doses. Le chlorure de méthylène et l’acétate d’éthyle sont couramment utilisés dans les décapants, les dissolvants pour vernis à ongles et les dégraissants.</p>
<p>Toutefois, tant les <a href="https://www.foodstandards.gov.au/code/pages/default.aspx">normes alimentaires d’Australie/Nouvelle-Zélande</a> que <a href="https://www.accessdata.fda.gov/scripts/cdrh/cfdocs/cfcfr/cfrsearch.cfm?fr=173.255">l’Administration américaine des denrées alimentaires et des médicaments</a> (FDA) autorisent l’utilisation de ces solvants pour la décaféination. Ils imposent des limites strictes quant à la quantité de produits chimiques qui peuvent subsister sur les grains et, dans les faits, il ne reste essentiellement <a href="https://www.chemicals.co.uk/blog/how-dangerous-is-methylene-chloride">aucun solvant</a>.</p>
<h2>Méthodes sans solvant</h2>
<p>Les méthodes qui utilisent du dioxyde de carbone liquide ou de l’eau sont de plus en plus populaires, car elles évitent le recours aux solvants chimiques.</p>
<p>Pour la <a href="https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.1080/10408699991279231"><strong>méthode à base de CO₂</strong></a>, on fait circuler du dioxyde de carbone liquide dans une chambre à haute pression où se trouvent les grains. Le CO<sub>2</sub> se lie à la caféine et est ensuite retiré sous haute pression, laissant derrière lui des grains décaféinés.</p>
<p>La <strong>méthode à l’eau</strong> (également connue sous le nom de procédé à l’eau suisse) correspond à ce que son nom indique : <a href="http://publication.eiar.gov.et:8080/xmlui/bitstream/handle/123456789/3234/ECSS%20Proceeding%20Final.pdf">elle consiste à extraire la caféine</a> des grains avec de l’eau. Il existe des variantes de cette méthode, mais voici quelles en sont les étapes de base.</p>
<p>Un premier lot de grains de café verts est trempé dans de l’eau chaude, créant un extrait riche en caféine et en composés aromatiques (les grains sans saveur sont ensuite éliminés). Cet extrait de café vert est passé à travers des filtres de charbon actif, qui retiennent les molécules de caféine tout en laissant les arômes.</p>
<p>Une fois créé de cette manière, on utilise l’extrait sans caféine pour y tremper un nouveau lot de grains de café vert. Étant donné que les arômes saturent déjà l’extrait, seule la caféine sera dissoute des grains.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/8531vyP7Z5U?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<h2>Finie la caféine ?</h2>
<p>Si vous choisissez de boire du déca, cela ne signifie pas que vous ne consommerez plus du tout de caféine.</p>
<p>Il est peu probable que l’on parvienne <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/8603790/">à extraire 100 % de la caféine</a> des grains. Tout comme la teneur en caféine varie d’un café à un autre, de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/17132260/">petites quantités de caféine</a> demeurent présentes dans le déca.</p>
<p>Toutefois, le taux de caféine est très faible. Il faudrait plus de dix tasses de décaféiné pour obtenir le taux moyen <a href="https://academic.oup.com/jat/article/30/8/611/714415">d’une tasse de café</a>.</p>
<p>L’Australie <a href="https://www.foodstandards.gov.au/code/Documents/1.1.2%20Definitions%20v157.pdf">n’exige pas</a> des torréfacteurs ou des producteurs de café qu’ils précisent le processus de décaféination auxquels ils ont recours. Toutefois, on peut trouver cette information sur les sites web de certains producteurs s’ils ont choisi d’en faire la publicité.</p>
<h2>Le goût ?</h2>
<p>Certaines personnes considèrent que le déca n’a pas le même goût que le café normal. Selon la méthode utilisée, des éléments aromatiques peuvent être extraits en <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23745606/">même temps que la caféine</a>.</p>
<p>De plus, la caféine contribue à l’amertume du café, de sorte qu’on <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8948847/">perd un peu de cet aspect du goût</a> dans le processus de décaféination.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/556739/original/file-20231030-23-t3sdwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="A tub of partially roasted coffee beans in a pale tan colour" src="https://images.theconversation.com/files/556739/original/file-20231030-23-t3sdwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/556739/original/file-20231030-23-t3sdwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/556739/original/file-20231030-23-t3sdwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/556739/original/file-20231030-23-t3sdwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/556739/original/file-20231030-23-t3sdwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/556739/original/file-20231030-23-t3sdwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/556739/original/file-20231030-23-t3sdwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La caféine contribue à l’amertume du café, mais divers autres composés aromatiques se développent dans les grains verts lorsqu’on les torréfie jusqu’à l’obtention d’une couleur brune riche et foncée.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/person-holding-brown-seed-XpyD7z6AP4g">Joshua Newton/Unsplash</a></span>
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</figure>
<h2>Et les bienfaits pour la santé ?</h2>
<p>Les bienfaits pour la santé du déca sont similaires à ceux du caféiné, avec notamment une réduction du risque de diabète de type 2, de certains cancers et de la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5696634/">mortalité</a> globale. Plus récemment, le café a été associé à un meilleur contrôle du poids au fil du temps.</p>
<p>La plupart des bienfaits pour la santé ont été constatés avec une consommation de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5696634/">trois tasses</a> de décaféiné par jour.</p>
<p>N’oubliez pas l’importance de la modération et qu’un <a href="https://theconversation.com/what-is-a-balanced-diet-anyway-72432">régime équilibré</a> demeure la clé pour une bonne santé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/217052/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lauren Ball travaille pour l'Université du Queensland et reçoit des financements du Conseil national de la santé et de la recherche médicale, de Queensland Health et de Mater Misericordia. Elle est directrice de Dietitians Australia, directrice du Darling Downs and West Moreton Primary Health Network et membre associé de l'Australian Academy of Health and Medical Sciences.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Emily Burch travaille pour la Southern Cross University.
</span></em></p>Si vous préférez le café décaféiné, voici une explication scientifique de sa fabrication, des raisons pour lesquelles il coûte plus cher et de la quantité de caféine qui se retrouve dans votre tasse.Lauren Ball, Professor of Community Health and Wellbeing, The University of QueenslandEmily Burch, Dietitian, Researcher & Lecturer, Southern Cross UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2159372023-10-23T13:31:18Z2023-10-23T13:31:18ZLe stress induit par les changements climatiques modifie la reproduction des poissons<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/554536/original/file-20231012-25-y5pqrb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C11784%2C6723&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La hausse des températures n'est pas seulement directement mortelle pour les poissons, mais elle entraîne également des déséquilibres hormonaux qui menacent des populations entières.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Jonathan Munera L.)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>En <a href="https://doi.org/10.1126/science.213.4507.577">1981, des scientifiques ont découvert que les poissons femelles exposés à des températures élevées développaient des testicules au lieu d’ovaires</a>. Depuis, plus de 1 100 études sur différentes espèces animales, dont 400 sur des poissons d’eau douce, ont donné des résultats similaires.</p>
<p>Cela soulève plusieurs questions.</p>
<p>Pourquoi ce phénomène se produit-il ? Comment peut-on l’expliquer ? Est-ce que cela nuit aux populations de poissons à long terme ? Nos recherches ont montré qu’un facteur clé expliquant ce phénomène est la surproduction d’hormones de stress causée par des températures plus élevées.</p>
<h2>Pas le temps de s’adapter</h2>
<p>Les organes reproducteurs des poissons sont très malléables aux changements environnementaux, car contrairement aux mammifères, <a href="https://doi.org/10.1016/S0044-8486(02)00057-1">ils ont des structures plus simples</a>. Si bien que même de légers changements des conditions de l’eau peuvent avoir un impact direct et significatif sur le <a href="https://doi.org/10.1038/s41586-019-1132-4">métabolisme et la physiologie des poissons</a>.</p>
<p>Les poissons utilisent cette plasticité à leur avantage en utilisant les signaux environnementaux pour <a href="https://doi.org/10.1007/s00018-020-03532-9">modifier leur succès de reproduction selon les conditions saisonnières</a>. Par exemple, plusieurs espèces de poissons, comme <a href="https://www.alberta.ca/lake-sturgeon">l’esturgeon jaune, se reproduisent au printemps en raison des températures plus chaudes de l’eau</a>.</p>
<p>Cependant, des changements environnementaux soudains provoqués par le changement climatique, par exemple, affectent considérablement les populations de poissons et <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2880135/pdf/rstb20100055.pdf">poussent certaines d’entre elles à se déplacer vers des habitats de reproduction plus adaptés</a>.</p>
<h2>La température peut changer les poissons femelles en mâles</h2>
<p>L’étude de la façon dont les poissons femelles deviennent mâles (ou se masculinisent) en raison du changement de température a conduit à une avancée significative. Lorsque les poissons sont exposés à des températures en dehors de leur plage normale, ils deviennent stressés et présentent un niveau élevé de l’<a href="https://my.clevelandclinic.org/health/articles/22187-cortisol">hormone de stress appelée cortisol</a>. C’est le cas de plusieurs espèces de poissons, comme le <a href="https://doi.org/10.1111/j.1095-8649.2010.02780.x">Silverside argentin</a>, le <a href="https://doi.org/10.1159/000100035">medaka</a> et <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.1609411114">poisson-zèbre</a>.</p>
<p>Il est intéressant de noter que la même enzyme qui génère le cortisol est également responsable de la production l’hormone mâle la plus puissante chez le poisson, appelée la <a href="https://doi.org/10.1210/jc.2016-2311">11-cétotestostérone</a>. Le rôle de cette hormone mâle est de déclencher le développement des caractéristiques sexuelles masculines chez les poissons.</p>
<p>Si les poissons subissent un stress – c’est-à-dire une augmentation du cortisol – dû à des températures élevées, cela peut perturber l’équilibre hormonal des larves de poissons et entraîner le développement de testicules. La surproduction d’androgènes entraîne le développement d’un plus grand nombre de mâles que de femelles sous des températures élevées.</p>
<h2>Pas seulement le stress</h2>
<p>En <a href="https://doi.org/10.1242/dev.172866">2019</a>, notre groupe de recherche a démontré que le blocage des récepteurs de stress grâce à des <a href="https://www.nih.gov/news-events/gene-%C3%A9dition-dossier-de-presse-num%C3%A9rique">outils d’édition génétique</a> a complètement supprimé la masculinisation des poissons induite par les températures élevées. Ces résultats révèlent, pour la première fois, que le cerveau agit comme un moteur de la masculinisation induite par le stress thermique.</p>
<p>Dans notre nouvelle étude publiée dans <a href="https://doi.org/10.1007/s00018-023-04913-6"><em>Cellular and Molecular Life Sciences</em></a> en 2023, nous avons en outre démontré que les hormones thyroïdiennes, en plus des hormones de stress, sont impliquées dans la masculinisation des poissons. Une fois de plus, grâce à l’édition génétique, nous avons pu bloquer les récepteurs du stress et démontrer que la voie des hormones thyroïdiennes est affectée lorsque les poissons subissent un stress.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Deux larves de poisson vues en gros plan" src="https://images.theconversation.com/files/553544/original/file-20231012-25-xn0fir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/553544/original/file-20231012-25-xn0fir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/553544/original/file-20231012-25-xn0fir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/553544/original/file-20231012-25-xn0fir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/553544/original/file-20231012-25-xn0fir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/553544/original/file-20231012-25-xn0fir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/553544/original/file-20231012-25-xn0fir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les larves de l’espèce de poisson Centrarchid. Le réchauffement des températures amène les larves de poisson à développer de manière disproportionnée les organes sexuels mâles.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Wikimedia)</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il a été observé que lorsque la production de cortisol et des hormones thyroïdiennes était supprimée par l’utilisation combinée de certains médicaments chimiques, aucune femelle n’était masculinisée. Comprendre les mécanismes moléculaires qui expliquent la détermination du sexe des poissons permet de prédire comment la température induite par les changements climatiques peut affecter les populations de poissons à l’avenir.</p>
<h2>Le rôle de la pollution</h2>
<p>Plusieurs contaminants environnementaux, comme les pesticides et les plastifiants, sont connus pour <a href="https://doi.org/10.1016/j.envres.2022.112849">perturber l’équilibre hormonal chez les animaux</a>. Ces contaminants – connus sous le nom de perturbateurs endocriniens – <a href="https://doi.org/10.1016/j.envres.2021.112584">peuvent conduire au développement anormal des organes sexuels chez les poissons</a>.</p>
<p>Avec les changements climatiques, les facteurs environnementaux qui affectent le développement sexuel constituent désormais un enjeu majeur. Dernièrement, les températures ont fluctué considérablement dépassant la plage acceptable pour la plupart des espèces de poissons. De tels changements provoquent des températures élevées, une acidification et une hypoxie <a href="https://doi.org/10.1098/rspb.2011.0529">qui peuvent altérer les ratios naturels du sexe des poissons</a> en faveur des mâles, et même générer des populations de poissons exclusivement mâles.</p>
<p>Dans les rivières et les lacs, les événements interannuels tels qu’El Niño ou El Niña peuvent également être modifiés par les changements climatiques, ce qui peut provoquer d’importantes périodes d’inondation ou de sécheresse. Cela peut exacerber le stress exercé sur les poissons. De surcroît, un nombre trop faible de femelles dans une population de poissons peut provoquer son effondrement, avec des conséquences désastreuses sur la biodiversité pour tous.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/215937/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie S. Langlois a reçu des financements du Programme des Chaires de recherche du Canada pour mener ces travaux.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Diana Castañeda-Cortés a reçu un financement de la bourse de doctorat du CONICET, Conseil national de la recherche argentin, 2015-2020.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Juan Ignacio Fernandino a reçu un financement de l'Agence nationale argentine pour la promotion de la science et de la technologie (AGENCIA).</span></em></p>Les changements climatiques entraînent des niveaux de stress plus élevés chez les poissons, et les déséquilibres hormonaux qui en résultent peuvent modifier des populations entières.Valérie S. Langlois, Professor/Professeure titulaire, Institut national de la recherche scientifique (INRS)Diana Castañeda-Cortés, Postdoctoral, Institut national de la recherche scientifique (INRS)Juan Ignacio Fernandino, Associate research scientist, Developmental Biology Laboratory, Instituto Tecnológico de Chascomús (CONICET-UNSAM), Universidad Nacional de San MartínLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2148692023-10-03T16:35:22Z2023-10-03T16:35:22ZPourquoi l’eau des rivières et des lacs n’est-elle pas salée ?<p>S’il est une expérience que l’on a, toutes et tous, déjà faite très jeune, c’est celle de boire la tasse en apprenant à nager. On le remarque donc très vite, que l’on soit dans la mer ou dans une rivière le <a href="https://culturesciences.chimie.ens.fr/thematiques/chimie-du-vivant/la-chimie-du-gout">goût</a> est bien différent : salé ou non.</p>
<p>La raison en est toute simple : nous sommes capables de percevoir les différentes concentrations de sel dans l’eau. Si on prend un verre d’eau et que l’on met un peu de sel dedans, on ne le sentira pas. Si on en met un peu plus, on commencera à percevoir le goût salé et ainsi de suite, juste qu’à ce que l’eau devienne imbuvable. Et bien si dans un litre d’eau de mer, il y a en moyenne <a href="http://doc.lerm.fr/salinite-leau-mer/">35 grammes</a> de sel, on en trouve beaucoup moins dans l’eau des lacs et des rivières. Alors pourquoi cette différence ?</p>
<p>Pour comprendre, il faut suivre le cycle de l’eau. L’eau est présente dans l’atmosphère sous forme de vapeur d’eau. Quand cette vapeur se condense, elle forme des nuages et des précipitations, comme la pluie ou la neige. Puis l’eau coule sur la surface, s’infiltre dans le sol, interagit avec les roches. Les plantes en utilisent une partie, les nappes phréatiques en stockent une autre, et le reste s’écoule jusqu’à la mer en formant des rivières, parfois des lacs avant de continuer sous chemin.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourquoi-la-mer-et-les-oceans-sont-ils-sales-159374">Pourquoi la mer et les océans sont-ils salés ?</a>
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<p>Et lorsque l’eau arrive à la mer, elle va y passer un peu de temps. En moyenne une molécule d’eau passe <a href="http://eduterre.ens-lyon.fr/thematiques/hydro/cycleau/temps-de-residence">3 000 ans</a> dans l’océan avant de s’évaporer et de retourner à l’atmosphère. Et la boucle est bouclée.</p>
<h2>Et le sel dans tout ça ?</h2>
<p>D’abord, il faut répondre à cette première question : le sel, c’est quoi ? C’est le mélange entre deux éléments chimiques, le sodium (Na), et le chlore (Cl), ce qui forme du chlorure de sodium, NaCl. D’où viennent ces éléments ?</p>
<p>Il y a dans l’atmosphère différents gaz, dont le dioxyde de carbone (CO<sub>2</sub>). Le CO<sub>2</sub>, ce gaz à effet de serre responsable du réchauffement climatique, est émis par les volcans, depuis des milliards d’années, et par les activités humaines <a href="https://theconversation.com/le-co-une-histoire-au-long-cours-chamboulee-par-les-societes-industrielles-111715">depuis plus de 150 ans</a>. Dans l’eau de pluie par exemple, ce gaz forme un <a href="https://theconversation.com/lacidification-des-oceans-lautre-danger-du-co-114716">acide</a> que l’on appelle l’acide carbonique. Et quand l’eau acidifiée entre en contact avec les roches, elle les attaque, elle en dissout une partie et en enlève les sels minéraux, dont le sodium. Par ailleurs, les volcans libèrent aussi du chlore, qui retombe aussi dans l’eau de pluie et donc dans les rivières.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/551723/original/file-20231003-15-w3fw9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/551723/original/file-20231003-15-w3fw9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/551723/original/file-20231003-15-w3fw9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=317&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/551723/original/file-20231003-15-w3fw9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=317&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/551723/original/file-20231003-15-w3fw9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=317&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/551723/original/file-20231003-15-w3fw9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/551723/original/file-20231003-15-w3fw9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/551723/original/file-20231003-15-w3fw9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Schéma du cycle de l’eau.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Ces éléments chimiques coulent jusqu’à l’océan. Ensuite, lorsque l’océan s’évapore, seule l’eau part dans l’atmosphère, le sodium et le chlore restent, la vapeur d’eau n’est donc pas salée. La pluie qui tombe est donc de l’eau douce.</p>
<p>Ainsi, les lacs et rivières contiennent un tout petit peu de sel, qui coule avec l’eau jusqu’à l’océan. Et à chaque fois, les rivières apportent du sel qui reste dans l’océan, et de l’eau qui s’évapore de nouveau vers l’atmosphère, pour de nouveau retomber dans une rivière, un lac et ainsi de suite. C’est pour ça que l’océan est devenu beaucoup plus salé que les eaux de rivières et des lacs.</p>
<p>Tout ça dure depuis qu’il y a de <a href="https://theconversation.com/la-terre-a-t-elle-toujours-ete-bleue-148013">l’eau liquide</a> sur Terre, soit certainement au moins <a href="https://theconversation.com/mael-comment-se-sont-formes-les-oceans-156789">4 milliards d’années</a> ! Petit à petit, au cours de l’histoire de la Terre, l’eau de mer est devenue de plus en plus salée. D’ailleurs, le temps de résidence du sel dans l’océan est de <a href="https://ressources.uved.fr/Grains_Module2/Composition_eau_mer/site/html/Composition_eau_mer/Composition_eau_mer.html">100 millions d’années</a>, contre 3 000 ans pour l’eau. Comment le sel quitte-t-il l’océan ? Parfois, de grandes quantités d’eau de mer s’évaporent et il se forme des roches de sel, comme la halite ou le gypse, bien connues des géologues, mais aussi de tout le monde, puisqu’on les utilise parfois pour saler les routes ou comme sel de table.</p>
<p>C’est donc parce que l’évaporation, qui est un élément essentiel du cycle de l’eau, laisse le sel derrière elle que ce dernier s’accumule dans l’océan et que l’eau des continents comme les rivières et les lacs est douce. Bien sûr, il y a des exceptions, puisqu’il existe des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Lac_sal%C3%A9">lacs salés</a> où l’évaporation est plus rapide que les apports d’eau par les rivières qui les entourent, comme le Grand Lac Salé aux États-Unis. À l’inverse il existe des mers moins salées, comme la mer Baltique. Née de la fonte de la calotte glaciaire qui existait il y a 20 000 ans, cette mer était initialement un lac d’eau douce qui s’est peu à peu mélangée à l’eau de mer.</p>
<p>L’histoire du sel dans l’eau est donc longue et complexe !</p>
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<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dianerottner.com/">Diane Rottner</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p><em>Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : tcjunior@theconversation.fr. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214869/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Guillaume Paris a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche et du CNRS. </span></em></p>La différence entre eau douce et salée s’explique par le cycle de l’eau et par les minéraux qu’elle charrie.Guillaume Paris, Géochimiste, chargé de recherche CNRS au Centre de recherches pétrographiques et géochimiques de Nancy, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2117162023-08-22T16:39:54Z2023-08-22T16:39:54ZL’eau gazeuse est-elle bonne ou mauvaise pour la santé ? Voici ce qu’en dit la science<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/543075/original/file-20230614-27-44vde.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=30%2C0%2C6679%2C4476&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les eaux gazeuses ne sont rien de plus que de l'eau qui contient de l'acide carbonique dissous. Ce composé confère à l'eau pétillante son goût légèrement amer et son effervescence.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/image-photo/soda-water-ice-background-closeup-2109259715">(Shutterstock)</a></span></figcaption></figure><p>Au cours de la dernière décennie, le rejet des boissons gazeuses et des boissons sucrées en raison de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32977648">leurs effets négatifs sur la santé</a>, qui s’ajoutent au fait qu’elles favorisent l’obésité, a entraîné un changement dans la demande des consommateurs. Nous sommes désormais <a href="https://www.efsa.europa.eu/en/efsajournal/pub/1459">à la recherche d’eau aux saveurs nouvelles et de produits ayant une valeur nutritionnelle et des effets bénéfiques sur la santé</a>. Et ce, sans renoncer à l’aspect appétissant de ces boissons. </p>
<p>Parmi les différentes options sur le marché, il y a l’eau pétillante. Mais est-ce vraiment un bon choix ? Cette alternative aux boissons gazeuses et sucrées a certainement des avantages : elle est effervescente, est rafraîchissante – ce qui contribue à étancher la soif – et ne contient ni sucres ni calories.</p>
<p>Au Québec, les volumes vendus d’eau gazeuse ont connu une <a href="https://www.mapaq.gouv.qc.ca/SiteCollectionDocuments/Bioclips/BioClips2021/Volume_29_no10.pdf">croissance impressionnante de 97 %, entre 2012 et 2019</a>. En 2018-2019, la consommation d’eau gazeuse <a href="https://www.mapaq.gouv.qc.ca/SiteCollectionDocuments/Bioclips/BioClips2021/Volume_29_no10.pdf">représentait 6 % du marché des boissons non alcoolisées</a>.</p>
<h2>Riche en minéraux</h2>
<p>Les eaux gazeuses ne sont rien de plus que de l’eau qui contient de l’acide carbonique dissous. Ce composé confère à l’eau pétillante son goût légèrement amer et son effervescence. </p>
<p>Parmi ses caractéristiques distinctives, sa concentration en minéraux (calcium, magnésium) semble plus élevée que l’eau plate. Elle présente également une osmolarité (concentration totale des substances dissoutes dans un liquide) plus élevée et un pH basique (le pH de l’eau pure est neutre). La teneur en minéraux <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33976919/">varie principalement en fonction de la marque</a>.</p>
<p>Mais qu’en est-il de sa capacité à hydrater ? Bien que cet aspect n’ait pas été suffisamment étudié, il semble qu’elle soit aussi efficace que l’eau plate en bouteille ou l’eau du robinet. Voire même meilleure, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/9727819">grâce à son abondance de minéraux</a>. </p>
<p>En 2009, l’<a href="https://www.who.int/publications/i/item/9789241563550">Organisation mondiale de la santé a souligné</a> l’importance de la composition de l’eau que nous buvons. Plus spécifiquement, elle a insisté sur la nécessité consommer de l’eau à forte teneur en calcium et en magnésium. Puisque l’eau pétillante présente une haute concentration en ces minéraux, elle répond largement à la recommandation de l’OMS.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/543089/original/file-20230816-17-u304v0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="caisses de bubly en magasin" src="https://images.theconversation.com/files/543089/original/file-20230816-17-u304v0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/543089/original/file-20230816-17-u304v0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/543089/original/file-20230816-17-u304v0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/543089/original/file-20230816-17-u304v0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/543089/original/file-20230816-17-u304v0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/543089/original/file-20230816-17-u304v0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/543089/original/file-20230816-17-u304v0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Au Québec, les volumes vendus d’eau gazeuse ont connu une croissance impressionnante de 97 %, entre 2012 et 2019.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Quels effets sur la santé ?</h2>
<p>Ce n’est qu’au XX<sup>e</sup> siècle que sont apparues les premières données épidémiologiques établissant un lien entre la consommation d’eau pétillante et la (bonne) santé.</p>
<p>Ces effets positifs semblent liés à la quantité de minéraux qu’elles contiennent. Bien que des études supplémentaires soient nécessaires, il semble que les options à bulles présenteraient des avantages – avec quelques nuances : </p>
<p><strong>1. Fonction digestive ou gastro-intestinale.</strong> Plusieurs études suggèrent que l’eau pétillante <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/35175420/">améliore la déglutition</a> – y compris chez les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36648911/">patients souffrant de dysphagie</a> – et soulage la dyspepsie (inconfort gastrique). En outre, elle contribuerait à réduire la constipation et <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21999723/">produirait une sensation de satiété</a>, vertus qui pourraient <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26702122/">favoriser la réduction du poids corporel</a>. </p>
<p>Mais il existe aussi des preuves du contraire. Des études <em>in vitro</em> et sur des jeunes en bonne santé ont montré que boire de l’eau gazeuse augmente le <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21999723">taux de ghréline</a> (l’hormone responsable de l’augmentation de l’appétit). Elle peut également favoriser les ballonnements et l’inconfort gastrique, possiblement en raison de l’action de l’acide carbonique. </p>
<p><strong>2. Fonction urinaire et prévention des calculs rénaux</strong> Une étude australienne suggère que la consommation quotidienne d’eau gazeuse peut <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/35950043/">prévenir la formation de calculs rénaux</a>. La teneur en bicarbonate et l’augmentation de la charge alcaline et du pH urinaire préviendraient les agrégations d’oxalate de calcium. À long terme, l’eau riche en calcium, en magnésium et en bicarbonate présenterait des avantages à cet égard. Il est donc conseillé de lire attentivement les étiquettes des bouteilles pour en évaluer la composition en minéraux. </p>
<p>En revanche, un <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/12823386/">autre article</a> indique que la consommation de boissons gazeuses (dont celle présentée dans cet article) augmente le risque d’incontinence urinaire à l’effort ou d’hyperactivité de la vessie chez les femmes de plus de 40 ans.</p>
<p><strong>3. Diminution du risque cardiovasculaire</strong>. La <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31405195/">science confirme</a> l’importance d’une bonne hydratation pour maintenir la santé métabolique, réduire le risque cardiovasculaire et le syndrome métabolique, et prévenir l’hypertension. Plus précisément, des études indiquent que les eaux riches en minéraux – y compris celles qui contiennent de l’acide carbonique – sont bénéfiques pour la régulation de la tension artérielle. Cela est dû à l’effet alcalin et à l’apport de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22051430/">magnésium</a> ou de calcium, qui améliorent les mécanismes de vasoconstriction et le rythme cardiaque. </p>
<p>Parallèlement, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27367723/">certaines recherches</a> <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/15113945/">ont constaté</a> que la consommation d’un litre d’eau gazeuse par jour semble réduire les marqueurs de risque cardiométabolique (cholestérol et glucose). Cependant, l’eau pétillante n’aurait pas d’incidence sur les taux de triglycérides, le poids et l’indice de masse corporelle.</p>
<p><strong>4. Santé osseuse et dentaire</strong> Des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/15877873/">données probantes</a> indiquent que la consommation quotidienne d’un litre d’eau gazeuse n’affecte pas le remodelage osseux chez les femmes ménopausées. </p>
<p>En revanche, l’eau gazeuse semble <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32977648/">nuire au développement des dents</a> dès le plus jeune âge, car elle n’est pas fluorée. Toutefois, le potentiel d’érosion dentaire de l’eau gazeuse et non gazeuse <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/11556958/">est 100 fois inférieur à celui des boissons gazeuses</a>.</p>
<p>Il apparaît clair que des recherches supplémentaires sont nécessaires pour mieux comprendre les effets de l’eau gazeuse sur la santé, en fonction de la composition en minéraux. Néanmoins, elle peut être considérée comme une alternative plus saine à l’eau faiblement minéralisée. Et, bien sûr, aux boissons sucrées ou aux sodas.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/211716/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Irene Gracia Rubio est financée par l'Instituto de Salud Carlos III dans le cadre d'un contrat Sara Borrell.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Carmen Rodrigo Carbó, Itziar Lamiquiz Moneo, Rocío Mateo Gallego et Sofía Pérez Calahorra ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Davantage rafraîchissante que l’eau plate, l’eau gazeuse pourrait présenter certains avantages en raison de sa forte teneur en minéraux. Mais les recherches sont encore insuffisantes.Sofía Pérez Calahorra, Doctora en Ciencias de la salud. Profesora en Grado de Enfermería. Investigadora postdoctoral IIS Aragón y Universidad de Zaragoza., Universidad de ZaragozaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2105842023-08-17T20:55:24Z2023-08-17T20:55:24ZContamination des eaux de baignade et des coquillages par des matières fécales : comment identifier les sources<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/542341/original/file-20230811-4652-cuo4vf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C6627%2C3348&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Avant d'aller nager, assurez-vous de la qualité de l'eau.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/E9PJO_vL3E8">Todd Quackenbush/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Des micro-organismes tels que les bactéries et les virus sont présents dans les milieux aquatiques (eaux côtières, rivières, lacs…), en <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-022-18274-w">quantité et diversité variables</a>, <a href="https://www.science.org/doi/epdf/10.1126/science.1261359">parfois très élevées</a>.</p>
<p>Certains de ces micro-organismes peuvent être pathogènes pour l’Homme et donc rendre malades, non seulement, des baigneurs mais aussi les consommateurs de coquillages. En effet, les bivalves — huîtres, moules ou palourdes — se nourrissent de plancton : ils filtrent et concentrent ainsi les bactéries et les virus présents dans les eaux. </p>
<p>La majorité de ces micro-organismes pathogènes sont d’origine fécale. Ils sont issus du tube digestif de l’Homme et des animaux, à l’image des salmonelles, des Campylobacter, de certains <em>Escherichia coli</em> (<em>E. coli</em>) pouvant être pathogènes, ou des virus entériques humains tels que les norovirus qui sont connus pour être des agents responsables d’infections ou de <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/content/download/537274/document_file/tiac_donnees_2021.pdf">toxi-infections alimentaires</a>.</p>
<p>En 2021, 8,3 % des toxi-infections alimentaires collectives (TIAC) déclarées étaient dues à la consommation de coquillages. Les virus entériques ont été suspectés d’être responsables de <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/content/download/537274/document_file/tiac_donnees_2021.pdf">75 % de celles-ci</a>.</p>
<p>Ces micro-organismes pathogènes sont souvent apportés aux eaux côtières par les rejets anthropiques en amont. Ils ont été par exemple retrouvés dans des <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fmicb.2018.02443/full">zones côtières et leurs bassins versants en France</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/bacteries-virus-quels-sont-les-risques-a-nager-en-piscine-ou-en-eaux-vives-206624">Bactéries, virus… Quels sont les risques à nager en piscine ou en eaux vives ?</a>
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<p>Le risque de contamination des eaux côtières par ces micro-organismes pathogènes ne peut pas être estimé par leur recherche directe en raison de leur grande diversité, de leur présence souvent en faible nombre et du coût et du temps nécessaires pour ces analyses.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/543033/original/file-20230816-21-p6ihb3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/543033/original/file-20230816-21-p6ihb3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/543033/original/file-20230816-21-p6ihb3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/543033/original/file-20230816-21-p6ihb3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/543033/original/file-20230816-21-p6ihb3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/543033/original/file-20230816-21-p6ihb3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/543033/original/file-20230816-21-p6ihb3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/543033/original/file-20230816-21-p6ihb3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les sources d’apports bactériens en zone côtière.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ifremer</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>À la recherche des bactéries</h2>
<p>Aussi, au niveau international, une alternative a été retenue pour évaluer la qualité sanitaire des eaux de surface et des lots de coquillages. Elle consiste à rechercher et quantifier des indicateurs bactériens de contamination fécale : les <em>E. coli</em> et les entérocoques intestinaux par culture, qui signent la présence d’une pollution fécale, et donc la possible présence de micro-organismes pathogènes. </p>
<p>Pour préserver la santé humaine, selon la réglementation européenne, le classement des <a href="https://baignades.sante.gouv.fr/baignades/editorial/fr/controle/directive2006_7_CE.pdf">zones de baignade</a> (pendant la saison balnéaire), des <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:32004R0854#d1e32-300-1">zones conchylicoles</a> (<a href="https://www.atlas-sanitaire-coquillages.fr/">zones d’élevage des coquillages</a>, suivies toute l’année) et des <a href="https://www.pecheapied-responsable.fr/">zones de pêche à pied</a> repose sur la recherche et la quantification de ces indicateurs dans les eaux ou les coquillages. </p>
<p>Des concentrations élevées de ces indicateurs peuvent conduire à des déclassements ou fermetures de ces différentes zones et nécessiter une purification des coquillages des zones conchylicoles ou un reparcage de ceux-ci <a href="https://littoral.ifremer.fr/Reseaux-de-surveillance/Environnement/REMI-REseau-de-controle-MIcrobiologique">avant leur commercialisation</a>. </p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/542985/original/file-20230816-29-334n3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="pêche à pied devant une falaise" src="https://images.theconversation.com/files/542985/original/file-20230816-29-334n3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/542985/original/file-20230816-29-334n3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/542985/original/file-20230816-29-334n3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/542985/original/file-20230816-29-334n3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/542985/original/file-20230816-29-334n3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/542985/original/file-20230816-29-334n3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/542985/original/file-20230816-29-334n3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La pêche à pied peut être un vecteur de contamination, car les coquillages ingèrent et concentrent les microbes présents dans des eaux éventuellement contaminées.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/106274573@N04/51047351381/in/photolist-2ng35tL-JsJ6fy-JJpwyJ-2kLT26X-jDMBt-hswQrt-8rJp1b-jDMBr-EhZhPm-dwZip-5WbBVR-oVYwvx-RHpoKm-X1F3xk-nAExa-6hS1Tc-8rYhMZ-TnVZfT-UFqKum-NCWJSG-psm1pv-dbmR1w-XhZoot-N8kERc-NCWJKN-okhHgQ-5hcQyK-2egVcsQ-cEuLUS-ijk7kX-UxGs22-qg1tu5-iirP8z-2jh7PNw-Tgh31C-ikQWUX-i9LKmR-qfDgmF-fp4sNg-iudENr-o8u8gH-pfM9cY-2bnxy3Y-7Fvt3x-qMb4Ho-Q65kro-QALyw3-7S7Yp3-7S4M7p-qfwstJ/">Nicolas Torquet, Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le classement des eaux de baignade en 2022 en Europe montre que la <a href="https://www.eea.europa.eu/publications/european-bathing-water-quality-in-2022/">France est classée en 21ᵉ position si on prend en compte le paramètre « proportion des eaux classées en qualité excellente »</a>. Sur les 2074 zones de baignade en eau de mer et les 1296 en eau douce suivies en France, 77,9 % et 73,2 % des zones de baignade ont été respectivement classées en qualité excellente et 97,0 % et 89,3 % en qualité suffisante, avec une légère dégradation de la qualité sanitaire des eaux <a href="https://www.eea.europa.eu/publications/european-bathing-water-quality-in-2022/france/@@download/file/Bathing%20water%20country%20FR%20final.pdf">depuis 2019</a>.</p>
<h2>Identification des sources de contamination fécale</h2>
<p>Dans un objectif d’amélioration de la qualité sanitaire des eaux et des coquillages, il est nécessaire de mettre en place des actions préventives et curatives pour limiter les pollutions d’origine fécale. Aussi, la discrimination et la hiérarchisation des sources de contamination sont devenues prioritaires.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un parc à huîtres" src="https://images.theconversation.com/files/543187/original/file-20230817-25-qc11u7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/543187/original/file-20230817-25-qc11u7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=457&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/543187/original/file-20230817-25-qc11u7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=457&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/543187/original/file-20230817-25-qc11u7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=457&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/543187/original/file-20230817-25-qc11u7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=574&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/543187/original/file-20230817-25-qc11u7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=574&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/543187/original/file-20230817-25-qc11u7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=574&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Tables à huîtres dans une zone conchylicole.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Aourégan Terre-Terrillon, Ifremer</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Pour identifier une pollution microbiologique et son origine, la première étape consiste à évaluer la contamination en <em>E. coli</em> des eaux et des coquillages de la zone concernée mais également plus en amont au niveau des eaux de rivières des bassins versants pouvant les impacter. La deuxième étape consiste à identifier la provenance de cet indicateur de contamination fécale.</p>
<p>Pour identifier les sources de ces bactéries, on utilise des méthodes regroupées sous le terme de <a href="https://academic.oup.com/femsre/article/38/1/1/509509"><em>Microbial Source Tracking</em></a> (<em>MST</em> ou traçage des sources microbiennes, TSM). </p>
<p>On pourrait penser que l’approche la plus adaptée consisterait à isoler les E. coli dans les zones suivies et à les comparer à celles isolées dans des sources bien identifiées (humaines ou animales). Mais <a href="https://cdnsciencepub.com/doi/abs/10.1139/cjm-2020-0244?af=R">ceci n’est pas efficace</a> en raison des faibles taux de génotypes permettant de distinguer les sources et de classifications correctes en pratique.</p>
<p>À l’Ifremer, depuis 2005, nous avons retenu l’approche basée sur la recherche de marqueurs microbiologiques ciblant l’ADN de bactéries par amplification génique (la désormais célèbre PCR quantitative) et développé ou utilisé des marqueurs bactériens associés à une source de contamination précise : par exemple des marqueurs Porc, Ruminant (bovin et ovin), Oiseaux sauvages et même plus récemment Phoque. </p>
<p>À titre d’exemple, voici comment le <a href="https://journals.asm.org/doi/10.1128/AEM.02343-08">marqueur Porc</a>, dénommé Pig2Bac, a été développé. Il a été <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0043135413005496">validé au niveau international</a> et a été utilisé dans de nombreuses études aussi bien en France que dans d’autres pays.</p>
<p>Nous avons d’abord collecté un grand nombre de fèces et de lisiers de porcs dans des exploitations porcines en France. Nous en avons extrait l’ADN bactérien puis amplifié les séquences d’ADN correspondant aux bactéries de l’ordre des Bacteroidales, sélectionnées pour être des bactéries anaérobies majoritaires de la flore intestinale des animaux à sang chaud et des humains, pour certaines d’entre elles, spécifiques d’un hôte (ici, porcin) et ne se multipliant pas dans l’environnement. </p>
<p>Nous avons ensuite comparé ces séquences à d’autres séquences de bactéries du même ordre mais identifiées dans d’autres sources : humaines, bovines et aviaires.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/543028/original/file-20230816-29-1x3g2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="infographie décrivant la méthode : échantillonage, extraction d’ADN, amplification d’ADN et marqueurs bactériens, discrimination de sources" src="https://images.theconversation.com/files/543028/original/file-20230816-29-1x3g2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/543028/original/file-20230816-29-1x3g2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=872&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/543028/original/file-20230816-29-1x3g2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=872&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/543028/original/file-20230816-29-1x3g2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=872&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/543028/original/file-20230816-29-1x3g2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1095&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/543028/original/file-20230816-29-1x3g2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1095&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/543028/original/file-20230816-29-1x3g2e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1095&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Méthode d’identification des sources de matières fécales grâce à des marqueurs génétiques. Sur cette illustration, à titre d’exemple, les sources de matières fécales identifiées à la dernière étape sont humaine et porcine.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0043135417302877">Michèle Gourmelon et Elsa Couderc, inspiré de Nshimyimana et coll., Water Research 2017, créé avec Piktochart</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Des séquences de bactéries présentes spécifiquement chez les porcs ont ainsi été identifiées. Des amorces de PCR qui ciblent ces séquences ont ensuite été dessinées. Puis, nous avons vérifié que le marqueur Porc donnait des résultats positifs dans les échantillons d’origine porcine (évaluation de la sensibilité), et négatifs dans les échantillons d’autres origines (évaluation de la spécificité). Nous avons ainsi montré que ce marqueur avait une sensibilité de 100 % et une spécificité de 99 %. Ces très bons résultats ont donc permis de valider ce marqueur de contamination porcine.</p>
<p>Cependant, pour qu’un marqueur soit pertinent, il doit présenter une persistance dans les eaux, similaire à celle de l’indicateur <em>E. coli</em>. Nous avons donc suivi au laboratoire pendant plusieurs jours les concentrations du marqueur Pig2Bac et de <em>E. coli</em> dans une eau douce et une eau marine artificiellement contaminées par du lisier de porcs. Ce marqueur et d’autres que nous avons également testés persistaient généralement un peu moins longtemps dans les eaux <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0043135411003460?via%3Dihub">que <em>E. coli</em> dénombré par culture</a> : il ciblerait donc plutôt une contamination fécale récente. Toutefois, il est important de considérer que les conditions variables de température, salinité, oxygénation de l’eau ont une influence sur la persistance de ces bactéries et qu’il est difficile d’extrapoler ces résultats à une recherche dans l’environnement naturel.</p>
<p>Ce marqueur ainsi que ceux d’autres sources sont utilisés <a href="https://academic.oup.com/femsre/article/47/4/fuad028/7191838">dans des études scientifiques</a> et en routine par des laboratoires d’analyse des eaux pour répondre aux demandes des gestionnaires des eaux. </p>
<p>Pour être plus confiants dans les résultats d’identification des sources, on ne peut que recommander de rechercher en parallèle plusieurs cibles d’une même source et de différentes sources ; on parle dans ce cas de l’utilisation d’une « boite à outils TSM » ou <em>MST-toolbox</em>. Des marqueurs Bacteroidales et des composés chimiques, des stanols fécaux, ont ainsi donné des résultats intéressants <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0048969717319526">lors d’un suivi sur plusieurs sites</a>. </p>
<p>Les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2468584420300155">marqueurs mitochondriaux</a> qui ciblent directement l’ADN de l’hôte, les virus entériques et certains bactériophages ou virus de bactéries, ainsi que les composés chimiques ingérés tels que la caféine et les médicaments en santé humaine ou vétérinaire peuvent aussi être utilisés. </p>
<p>De plus, on peut <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fmicb.2021.697553/full">comparer des communautés bactériennes dans les sources</a> et les <a href="https://pubs.acs.org/doi/10.1021/es201118r">eaux</a> par des méthodes de séquençage haut débit.</p>
<p>L’approche <em>Microbial Source Tracking</em> continue à s’enrichir par la description et la validation de nouveaux marqueurs, ainsi que par l’intégration des derniers développements technologiques pour <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8660560/">mieux cibler les agents recherchés</a>. Ces développements et les intégrations de nouvelles méthodes ne peuvent qu’améliorer l’identification des sources de contamination fécale dans l’environnement et donc au final la qualité des eaux et des coquillages.</p>
<p>En conclusion, pour un bon usage des marqueurs et une identification correcte des sources, il est essentiel : de bien connaître la zone d’étude sur laquelle ils sont recherchés ; de prendre en compte l’influence des facteurs tels que la pluviométrie, qui peuvent aggraver les pollutions ; de remonter aux rivières identifiées comme pouvant impacter le site de baignade ou la zone conchylicole étudiés ; d’associer si possible plusieurs marqueurs complémentaires et de les rechercher dans plusieurs prélèvements d’un même site et dans les eaux en amont dans des conditions contrastées, plutôt que de réaliser une simple recherche ponctuelle peu discriminante.</p>
<hr>
<p><em>Je tiens vivement à remercier Anne-Marie Pourcher de l’Inrae pour la relecture de cet article ainsi que tous ceux qui ont participé aux études ayant permis de développer et de valider les marqueurs de contamination fécale présentés ici.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210584/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michèle Gourmelon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Afin de mieux assurer la qualité des eaux de baignade et des coquillages, il faut d’abord identifier les sources de contamination microbiologique, souvent d’origine fécale.Michèle Gourmelon, Chercheure en bactériologie et en écologie microbienne, principalement en zone côtière, IfremerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2091732023-08-08T17:03:57Z2023-08-08T17:03:57ZNappes phréatiques : pourquoi leur niveau baisse-t-il ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/541524/original/file-20230807-2559-dmmn8i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4928%2C3253&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">jouni rajala AIko FhE unsplash</span> </figcaption></figure><p>Le niveau des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/nappes-phreatiques-65780">nappes phréatiques</a> est un problème récurrent depuis quelques années en France où l’on constate une baisse notable des niveaux par rapport à la moyenne des relevés des dernières décennies. En juillet 2023, <a href="https://www.brgm.fr/fr/actualite/communique-presse/nappes-eau-souterraine-au-1er-juillet-2023">75 % des nappes phréatiques françaises sont à un niveau inférieur à la normale</a> à cette époque de l’année. Cela est dû en partie à des pluies hivernales très faibles qui n’ont pas permis une recharge suffisante permettant de soutenir les nappes au cours de leur vidange pendant la saison sèche.</p>
<p>Un aquifère phréatique ou libre est un réservoir rocheux perméable affleurant en surface dont une partie est remplie d’eau appelée communément la nappe ou zone saturée. Cette dernière repose sur une autre formation géologique, qui elle est imperméable, ce que l’on appelle le mur de l’aquifère. Ce dernier est alimenté directement par la pluie qui s’infiltre verticalement dans le sol.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/540817/original/file-20230802-17-72ivk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/540817/original/file-20230802-17-72ivk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/540817/original/file-20230802-17-72ivk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=296&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/540817/original/file-20230802-17-72ivk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=296&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/540817/original/file-20230802-17-72ivk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=296&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/540817/original/file-20230802-17-72ivk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=373&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/540817/original/file-20230802-17-72ivk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=373&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/540817/original/file-20230802-17-72ivk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=373&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Schéma de l’organisation d’un aquifère.</span>
<span class="attribution"><span class="source">COBAHMA</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les nappes d’eau douce constituent une <a href="https://planeteviable.org/repartition-eau-sur-terre/">ressource en eau importante</a> :</p>
<ul>
<li><p>En quantité, elles représentent 30 % du total des eaux douces sur la terre, les glaciers et neiges 69,6 % et les eaux de surface, rivières, lacs et zones humides seulement 0,34 %.</p></li>
<li><p>En répartition, même dans la plupart des zones semi-arides et arides où il y a peu ou pas d’écoulement de surface, on pourra en général trouver de l’eau souterraine dans les premiers 200 m de profondeur.</p></li>
<li><p>En qualité, puisqu’elles sont davantage protégées des contaminations que les eaux de surface.</p></li>
</ul>
<p>Les quantités d’eaux stockées peuvent être très importantes, non pas par le volume qu’elles occupent mais par la taille et l’épaisseur de la plupart des aquifères qui peuvent s’étendre sur des centaines voire des milliers de km<sup>2</sup> et qui peuvent avoir des épaisseurs de plusieurs centaines de mètres. C’est le cas des aquifères que l’on trouve dans les grands bassins sédimentaires parisien et aquitain, dont l’<a href="https://sigessn.brgm.fr/spip.php?article305">aquifère de la craie</a> dans le bassin parisien étendu sur environ 110 000 km<sup>2</sup> et qui affleure en Normandie et en Champagne.</p>
<h2>Comment l’eau circule-t-elle dans les aquifères ?</h2>
<p>Pour que l’eau circule dans le réservoir, il faut qu’il y ait des vides interconnectés, les aquifères les plus nombreux sont à porosité primaire, c’est-à-dire que la circulation se fait à travers les vides autour des grains de la roche. C’est le cas des formations géologiques sédimentaires par exemple les terrasses alluviales des fleuves.</p>
<p>La seconde catégorie d’aquifère recouvre ceux à porosité secondaire, en général ils ont une capacité de stockage de l’eau plus faible. Dans ce cas l’eau circule dans des fissures et fractures connectées dans une roche compacte. Ces fractures peuvent être dues à des phénomènes tectoniques par exemple.</p>
<p>La texture et la structure de la roche vont définir la quantité moyenne d’eau dans le réservoir et les conditions de circulation de cette eau. Ces paramètres vont dépendre principalement de la taille des pores ou des fissures, que cela soit dans le mouvement vertical c’est-à-dire l’infiltration de la pluie de la surface jusqu’à la nappe puis latérale dans la nappe. C’est un processus lent et les ressources en eau accumulées dans l’aquifère sont le résultat de dizaines, centaines, voire milliers d’années de fonctionnement.</p>
<p>Un aquifère phréatique à l’état naturel dans des conditions climatiques stables est en équilibre c’est-à-dire que ce qu’il reçoit en entrée : la pluie, ce que l’on appelle la recharge, il le restitue particulièrement sous forme d’eau de rivière tout le long de l’année.</p>
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<p>Ainsi, grâce aux aquifères les écosystèmes des rivières peuvent continuer à vivre sans être trop perturbés. Ce cycle annuel se matérialise dans l’aquifère par une petite variation du niveau d’eau de quelques cm à plusieurs mètres entre la fin de la saison des pluies (hautes eaux) et la fin de la saison sèche (basses eaux), c’est ce fonctionnement retardé qui permet d’avoir un écoulement dans les petites et moyennes rivières pendant les mois d’été en France.</p>
<p>Quand on parle de baisse de niveau anormale d’une nappe phréatique, cela veut dire que la part d’eau qui sort de l’aquifère est plus importante que la part qui rentre, c’est-à-dire que le stock d’eau à l’équilibre que constitue la réserve de plusieurs dizaines ou centaines d’années se réduit.</p>
<p>Quelles en sont les causes ? Contrairement à ce que l’on peut penser, ce n’est pas parce que l’on a une année peu pluvieuse que l’on va enregistrer des baisses importantes. L’aquifère est un système avec une grande inertie due à son stockage d’eau sur de nombreuses années et il faudrait beaucoup de sécheresses consécutives pour qu’il ressente ces effets et commence à amorcer une baisse de niveau inférieur à son niveau d’équilibre. Cependant l’exploitation souvent intensive de l’aquifère est un facteur aggravant qui peut accélérer les effets d’un déficit annuel de l’eau.</p>
<h2>Seuls 10 % de la pluie qui tombe alimente les nappes</h2>
<p>Cependant la quantité de la recharge d’un aquifère est plus complexe qu’une simple relation avec des années plus ou moins sèches ou humides. En premier lieu seule une petite partie de la pluie va alimenter l’aquifère. C’est ce que l’on appelle la pluie efficace, qui correspond en général à un maximum de 10 ou 15 % du total de la pluie.</p>
<blockquote>
<p>Si l’on regarde le bilan hydrologique, la pluie va se répartir suivant les termes :</p>
<p>– P= R+E+RU+G</p>
<p>– P=pluie, E= évaporation et transpiration des plantes, R=écoulement de surface, RU=réserve utile du sol, G= l’eau qui va à l’aquifère.</p>
</blockquote>
<p>Les deux termes les plus importants qui vont influer sur G sont l’évapotranspiration (évaporation directe de l’eau et respiration des plantes) et la réserve utile du sol. Ce dernier représente la capacité du sol à retenir l’eau, soit le taux d’humidité maximum du sol et c’est seulement quand il est dépassé que l’eau va pouvoir circuler dans le sol et atteindre la nappe. Pour l’évapotranspiration, plus il fera chaud plus l’eau de la pluie pourra s’évaporer dans les premiers cm du sol, et plus la végétation sera en période de croissance plus elle pompera de l’eau par ses racines dans les premiers mètres du sol.</p>
<p>De ce constat on voit bien que ce n’est pas obligatoirement la quantité totale de pluie dans l’année qui conduit à un déficit de la recharge mais une mauvaise répartition temporelle des pluies limitant une recharge efficace. En effet en France, les pluies se concentrent entre septembre et mars dans des conditions où il fait plus froid et où la végétation est en repos, ce qui limite l’évapotranspiration et permet de conserver une bonne humidité dans le sol et favorisant ainsi une bonne infiltration, d’autant plus que les pluies sont continues et peu intenses, privilégiant l’infiltration par rapport au ruissellement de surface qui lui rejoint la rivière puis s’écoule vers la mer. Un manque de pluie durant l’automne et l’hiver réduira la recharge même si avril, mai et juin montrent un excès de pluie par rapport à la normale.</p>
<p>Quelles sont donc les solutions pour tenter de remédier à cette baisse qui pourrait s’amplifier avec le changement climatique, matérialisée soit par une baisse des pluies, un déphasage des pluies dans le temps ou soit par des pluies dont l’intensité augmentera.</p>
<p>La plus simple mais qui ne peut être qu’à titre exceptionnel : restreindre l’utilisation de l’eau de la nappe. C’est ce que l’on fait en France en réduisant l’usage de l’eau aux particuliers ou aux agriculteurs certains étés.</p>
<p>Dans les pays semi-arides comme la Tunisie, l'une des solution est de <a href="https://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-61821-FR.pdf">stocker dans des barrages</a> les eaux de surface récoltées pendant la saison des pluies dans la partie nord du pays, plus humide. Une partie est transférée dans la région au sud plus sèche qui sera utilisée pour recharger certaines nappes par épandage de l’eau dans des zones favorables à l’infiltration.</p>
<p>Pour terminer, la baisse du niveau des nappes ne concerne pas que les nappes phréatiques. Un second type de nappe dite captive représente les réservoirs géologiques emprisonnés entre deux couches imperméables et qui sont alimentés par un ou plusieurs petits affleurements qui restent de petites zones par rapport à la taille du réservoir. C’est par exemple le cas des formations géologiques qui ont été plissées par des mouvements tectoniques. Dans ce cas de figure en dehors des zones d’affleurement qui sont les zones de recharge, les vitesses de circulation dans l’aquifère sont très faibles et le renouvellement assuré seulement par le flux latéral. Exploiter ce type d’aquifère conduit toujours à une réduction globale du volume d’eau dans le réservoir car le renouvellement de l’eau extraite va prendre des centaines voire des milliers d’années (eaux dites fossiles) car la recharge reste très limitée et peut être très éloignée du forage d’exploitation.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209173/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Denis Taupin a reçu dans le cadre de ses activités de recherche sur les aquifères des financements de son institut public de recherche (IRD-Institut de Recherche pour le Développement) ou sur des appels d'offres concernant cette thématique</span></em></p>Le niveau des nappes phréatiques en France est en baisse. Leur dynamique de remplissage est longue et complexe. Quelles solutions peuvent être mises en place ?Jean-Denis Taupin, Responsable Laboratoire des isotopes stables de l’eau, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2108552023-08-03T21:33:52Z2023-08-03T21:33:52ZCultiver sans eau ou presque : la technique du zaï au Sahel<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/541003/original/file-20230803-23-flfgk9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.raphaelbelminphotography.com/">Raphael Belmin / CIRAD</a>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>« À l’échelle cosmique, l’eau liquide est plus rare que l’or », écrivait le célèbre astrophysicien Hubert Reeves. Ce qui vaut pour l’univers est encore plus vrai au <a href="https://theconversation.com/fr/topics/sahel-20578">Sahel</a>, cette immense bande aride qui parcourt l’Afrique d’est en ouest, à la lisière du Sahara. Au Sahel, le premier des biens, c’est l’eau. Depuis le <a href="https://journals.openedition.org/afriques/1376">IIIᵉ millénaire av. J.-C.</a>, les peuples de la région ont réalisé des efforts considérables et déployé des trésors d’imagination pour capter et maîtriser cette ressource si rare. Face à une eau mal répartie dans l’espace et le temps, ils ont dû inventer des méthodes intelligentes et parcimonieuses pour tirer parti de la moindre goutte.</p>
<p>Autrefois ignorés, les secrets des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/la-caravane-de-lagroecologie-126986">paysans sahéliens</a> attirent aujourd’hui l’attention des chercheurs et des décideurs. Et pour cause, ils inspirent de nouvelles voies d’adaptation au changement climatique pour l’agriculture africaine, et au-delà.</p>
<h2>L’art de capturer la pluie</h2>
<p>Chaque année dans le Yatenga, au nord du Burkina Faso, les premières pluies de juin viennent apaiser les brûlures d’une interminable saison sèche. Les sols imbibés d’eau font alors renaître la vie dans les champs de brousse. Partout ou presque, des bouquets de mil et de sorgho jaillissent de terre, transformant les savanes arides en bocages verdoyants.</p>
<p>Mais dans certains villages, la période de grande sécheresse des années 1970-80 a bouleversé le fragile écosystème sahélien : avec l’amincissement de la couverture végétale, les sols instables et ferrugineux du Yatenga ont été décapés par l’érosion ; ils sont devenus si pauvres et encroûtés que les pluies torrentielles ne font que ruisseler sans pouvoir s’infiltrer. Au lieu d’apporter la vie, l’eau érode les terres et emporte les espoirs des paysans.</p>
<p>Dans ce paysage hostile, certains paysans tentent de s’adapter et d’innover. Yacouba Sawadogo est l’un d’eux. Dans un champ stérile du village de Gourga, Yacouba et sa famille s’affairent pour percer le sol encrouté avant l’arrivée des premières pluies. Armés de leur <em>daba</em> (pioche traditionnelle), ils creusent la terre rouge de latérite. Dans une chorégraphie vigoureuse, les paysans quadrillent ainsi la parcelle de ces trous réguliers. Ils y glissent une poignée de compost, quelques graines de sorgho, une pellicule de terre légère : et voilà, le champ est prêt pour accueillir la prochaine pluie d’orage !</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/540998/original/file-20230803-27-mxmjbn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/540998/original/file-20230803-27-mxmjbn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=739&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/540998/original/file-20230803-27-mxmjbn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=739&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/540998/original/file-20230803-27-mxmjbn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=739&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/540998/original/file-20230803-27-mxmjbn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=928&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/540998/original/file-20230803-27-mxmjbn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=928&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/540998/original/file-20230803-27-mxmjbn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=928&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Photos (a) : Yacouba Sawadogo dans sa parcelle de zaï en juin 2012, à Gourga, Burkina Faso ; (b) Fabrication des poquets de zaï dans la ferme de Yacouba ; (c) Expérimentation du zaï à Ndiob, au Sénégal ; (d) Germination du mil dans un poquet de zaï ; (e-f) Essais de mécanisation de la fabrique des poquets avec une dent attelée au Burkina Faso (gauche) et une tarière au Sénégal (droite).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Hamado Sawadougou/INERA ; Isidore Diouf/ENDA PRONAT et Michel Destres/Solibam</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Semer comme cela des graines en pleine saison sèche, dans un champ que l’on parsème de trous, l’idée peut sembler contre-intuitive à l’œil extérieur, mais elle relève en réalité d’une expertise séculaire des habitants du Yatenga : le zaï. Cette technique agricole révolutionnaire les a rendus maîtres dans l’art de capturer la pluie. L’histoire orale raconte que dans l’ancien temps, la technique était utilisée par les familles dotées de très petites surfaces et de terres pauvres, avant de tomber dans l’oubli dans les années de 1950, période marquée par des pluies abondantes.</p>
<p>Mais dans les décennies désespérément sèches de 1970-1980, face à l’avancée du désert, <a href="https://theconversation.com/lhomme-qui-arreta-le-desert-une-inspiration-pour-habiter-autrement-la-terre-191200">Yacouba Sawadogo</a> a fait un choix singulier : celui de ne pas fuir. Au lieu de cela, il a exhumé le zaï, technique grâce à laquelle il est parvenu à <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=D1wABAAAQBAJ">revitaliser et reboiser 27 hectares de terres dégradées</a>. Celui qu’on surnomme « l’homme qui a arrêté le désert » a ainsi redonné espoir à tout son village. Primé « champion de la Terre » par les Nations unies et rendu célèbre grâce à un livre, Yacouba Sawadogo est devenu le symbole d’une Afrique qui innove face à la désertification.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1414525440580931585"}"></div></p>
<h2>Ingénieux mais coûteux</h2>
<p>Juste un trou, vous me direz ? Derrière une simplicité apparente, le zaï se fonde en réalité sur des mécanismes écologiques complexes. La technique consiste à concentrer l’eau et le fumier afin de favoriser la croissance des cultures dans un contexte où la pluie est aussi rare qu’aléatoire. Pour ce faire, on prépare pendant la saison sèche des poquets, c’est-à-dire des trous de 10 à 15 cm de profondeur et de 20 à 40 cm de diamètre pour y déposer des engrais organiques et y semer des céréales (mil ou sorgho).</p>
<p>À l’arrivée des pluies, le poquet amendé se remplit d’eau et libère des nutriments qui <a href="https://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers10-09/010004781.pdf">attirent les termites</a> du genre <em>Trinervitermes</em>. Ces insectes creusent des galeries par lesquelles l’eau s’infiltre en profondeur, et via leurs déjections, ils transforment la matière organique qui devient alors assimilable par les plantes. Ce processus aboutit à la formation d’une poche humide et fertile où la plante développe ses racines. Certains auteurs affirment qu’avec le zaï, les rendements du mil et du sorgho peuvent atteindre <a href="https://journals.openedition.org/vertigo/7442?lang=pt">1500 kg de grain par hectare contre moins de 500 kg par hectare en condition normale</a>.</p>
<p>En plus d’être économe et d’amener de bons rendements, le zaï favorise également le retour des arbres dans les champs. Les poquets ont en effet tendance à piéger les graines de nombreuses espèces arborées, ces dernières étant transportées par le vent, les eaux de ruissellement et les déjections des animaux d’élevage. À l’arrivée des pluies, des arbustes se développent ainsi spontanément aux côtés des céréales, dans l’environnement riche et humide des trous de zaï.</p>
<p>Dans la région du Yatenga, certains paysans préservent et protègent ces jeunes arbres, source de fertilité naturelle et de fourrages en saison sèche. Au Sénégal, les chercheurs de l’Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA) et de l’Institut national de pédologie (INP) réalisent en ce moment des essais pour évaluer la quantité de carbone séquestrée dans le sol grâce au zaï. Leurs premiers résultats montrent que dans les parcelles traitées, le stock de carbone par hectare augmente de 52 % en comparaison des parcelles témoins. Promesse de récoltes généreuses et pourvoyeur de services écosystémiques, le zaï a décidément tout pour séduire.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/540990/original/file-20230803-21-afzs5w.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/540990/original/file-20230803-21-afzs5w.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=332&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/540990/original/file-20230803-21-afzs5w.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=332&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/540990/original/file-20230803-21-afzs5w.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=332&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/540990/original/file-20230803-21-afzs5w.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=417&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/540990/original/file-20230803-21-afzs5w.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=417&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/540990/original/file-20230803-21-afzs5w.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=417&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le processus de formation d’un poquet de zaï illustré.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marie-Liesse Vermeire, adapté de Roose et Rodriguez (1990)</span></span>
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<p>Seul hic, <a href="https://agritrop.cirad.fr/581994/1/AGRIDAPE%2032.%201%20mars%202016.pdf">cette technique exige une quantité importante de travail manuel et des investissements conséquents</a>. À raison de 4 heures par jour, un homme seul avec sa <em>daba</em> devra creuser pendant 3 mois pour aménager un hectare. Qui plus est, il sera nécessaire de fabriquer ou acheter 3 tonnes de fumier pour amender les poquets. Ça n’est pas pour rien qu’en langue mooré, zaï vient du mot « zaïégré » qui veut dire « se lever tôt et se hâter pour préparer sa terre ».</p>
<h2>Un zaï nomade et multiforme</h2>
<p>Mali, Sénégal, Niger, Kenya… une fois redécouvert au Burkina Faso, le zaï n’a pas tardé à se diffuser au-delà de son berceau d’origine. Dans les années 1980, l’aide au développement <a href="https://d-nb.info/1209059290/34">déploie des moyens importants</a> de lutte contre la désertification dans les territoires sahéliens fragilisés par la grande sécheresse. Présente dans la région du Yatenga depuis 1982, une <a href="https://agritrop.cirad.fr/437043/1/document_437043.pdf">équipe d’agronomes du CIRAD</a> y décrivait déjà la technique du zaï comme une voie prometteuse de restauration des terres.</p>
<p>Démarre ensuite un large faisceau de projets et programmes qui ont cherché à tester, diffuser et améliorer le zaï en Afrique subsaharienne. Au Burkina Faso, l’Institut de l’environnement et de recherches agricoles (INERA) et des ONG comme Solibam ont mécanisé la fabrication des poquets pour alléger la charge de travail. Au lieu de creuser manuellement, on réalise des passages croisés avec une dent attelée à un animal et on sème à l’intersection des sillons. Avec cette technique, le temps de travail <a href="https://journals.openedition.org/vertigo/7442?lang=pt#tocto2n1">passe de 380 à 50 heures par hectare</a>. Dans la commune rurale de Ndiob, au Sénégal, le Maire <a href="https://www.ipar.sn/Transition-agroecologique-au-Senegal-La-commune-de-Ndiob-un-creuset-d.html">Oumar Ba</a> est allé encore plus loin en distribuant des tarières mécaniques aux paysans, rendant la fabrication des poquets très facile et rapide.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/540996/original/file-20230803-17-rllzkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/540996/original/file-20230803-17-rllzkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/540996/original/file-20230803-17-rllzkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/540996/original/file-20230803-17-rllzkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/540996/original/file-20230803-17-rllzkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/540996/original/file-20230803-17-rllzkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/540996/original/file-20230803-17-rllzkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">À Saaba (Burkina Faso), Tiraogo tente de concevoir un « zaï amélioré ». Avec l’appui des chercheurs de l’INERA, il compare dans son champ expérimental plusieurs stratégies d’implantation (zaï mécanisé vs manuel) et d’amendement des poquets (fractionnement entre matière organique et minérale).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphael Belmin/CIRAD</span></span>
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</figure>
<p>Au Burkina Faso, dans le cadre du projet <a href="https://www.fair-sahel.org/">Fair Sahel</a>, les chercheurs de l’INERA réalisent des essais agronomiques visant à substituer une partie du fumier organique des poquets de zaï par des microdoses d’engrais minéral. Une manière d’améliorer les rendements du sorgho tout en faisant sauter un verrou majeur d’adoption : la cherté de la matière organique. Les agronomes travaillent également à associer dans les mêmes poquets des céréales comme le sorgho avec des légumineuses comme le niébé. Ils testent enfin le zaï sur de nouvelles cultures, à l’instar du maïs, du coton, de la pastèque et des cultures horticoles comme l’aubergine.</p>
<p>Dans les zones maraîchères du Sénégal, la technique du zaï s’est également diffusée en produisant de nombreux avatars. Lorsque l’eau devient rare et chère, les paysans cherchent par tous les moyens à économiser la ressource. À Fatick dans l’ouest, ils utilisent des pneus recyclés pour concentrer les apports de fumier et d’eau au niveau des racines des pieds de piment. Dans la région littorale de Mboro, ils sculptent les parcelles d’oignons de minuscules casiers qu’ils inondent au sceau. Au sud, à Kolda, ils repiquent les aubergines dans des poquets recouverts de paille. Ces innovations sont frugales et suivent toutes la même logique : concentrer l’eau et la fertilité dans de petites poches de vie, à l’abri d’un environnement extérieur hostile.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/540993/original/file-20230803-19-h5ifyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/540993/original/file-20230803-19-h5ifyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/540993/original/file-20230803-19-h5ifyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/540993/original/file-20230803-19-h5ifyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/540993/original/file-20230803-19-h5ifyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/540993/original/file-20230803-19-h5ifyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/540993/original/file-20230803-19-h5ifyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/540993/original/file-20230803-19-h5ifyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">(a) À Mboro (département de Méouane, Sénégal), Modou Fall a sculpté sa parcelle d’oignons de petites dépressions pour concentrer les apports de fumier et d’eau au niveau des racines ; (b) À Médina Yoro Foulah (département de Kolda, Sénégal), ce producteur a repiqué ses aubergines dans des poquets remplis de matière organique. L’arrosage se limite au remplissage de ces poquets, ce qui permet des économies d’eau considérables ; (c) Sur les plateaux ferralitiques de Kpomasse (Bénin), l’eau est une ressource rare et précieuse. François plante ses pieds de tomate dans des sacs de toile pour économiser l’eau et prévenir les maladies telluriques ; (d) À Ngouloul Sérère (département de Fatick, Sénégal), Diatta Diouf utilise des pneus recyclés pour concentrer les apports de fumier et d’eau au niveau des racines de ses piments.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphael Belmin/CIRAD</span></span>
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</figure>
<h2>Une « autre » voie d’adaptation</h2>
<p>En réponse au changement climatique, les États du monde entier se sont engagés dans une compétition pour augmenter la disponibilité de l’eau pour leur agriculture. Barrages, <a href="https://theconversation.com/changement-climatique-et-ressources-en-eau-ne-nous-cachons-pas-derriere-des-moyennes-205075">mégabassines</a>, périmètres irrigués… partout, la politique dominante consiste à étendre à tout prix les surfaces irriguées. </p>
<p>Mais ce choix, s’il répond à un besoin à court terme, s’accompagne d’un sérieux risque de <a href="https://theconversation.com/face-a-lurgence-climatique-ladaptation-cest-des-maintenant-159870">« mal-adaptation » </a> : dégradation des ressources en eau, injustices sociales et <a href="https://theconversation.com/920-millions-de-personnes-pourraient-etre-confrontees-a-des-conflits-lies-aux-cours-deau-dici-a-2050-ce-que-notre-etude-a-revele-en-afrique-208448">tensions géopolitiques</a> sont la contrepartie cachée des grands projets hydroagricoles. Le modèle agricole qui se dessine pour demain semble bien fragile et vulnérable, car dépendant d’une eau captée et acheminée à grand renfort d’énergie fossile.</p>
<hr>
<iframe name="Ausha Podcast Player" frameborder="0" loading="lazy" id="ausha-6ilQ" height="220" style="border: none; width:100%; height:220px" src="https://shows.acast.com/64c3b1758e16bd0011b77c44/episodes/64cb94de2e4c140011ed3ca1" width="100%"></iframe>
<p><em>L’article que vous parcourez vous est proposé en partenariat avec <a href="https://podcast.ausha.co/afpaudio-surlefil/bientot-sur-la-terre">« Sur la Terre »</a>, un podcast de l’AFP audio. Une création pour explorer des initiatives en faveur de la transition écologique, partout sur la planète. <a href="https://smartlink.ausha.co/sur-la-terre">Abonnez-vous !</a></em></p>
<hr>
<p>À contre-courant du régime d’innovation dominant, les paysans sahéliens ont choisi la voie de la sobriété. Confrontés depuis des siècles à d’importantes limitations sur la ressource en eau, ces millions de « chercheurs aux pieds nus » n’ont cessé d’innover en silence. Au « toujours plus d’eau, quoiqu’il en coûte », ils ont préféré un principe de parcimonie. Et le zaï, aussi médiatisé soit-il, n’est que la face émergée de l’iceberg : demi-lunes, cordons pierreux, cuvettes fruitières, mares, cultures stratifiées… Ces <a href="https://books.openedition.org/irdeditions/24435?lang=fr">techniques ancestrales</a> méritent toute notre attention car elles représentent des formes intelligentes d’adaptation à des conditions thermiques et hydriques extrêmes, proches de ce que vivront les pays méditerranéens en 2100 dans un scénario climatique à +4 °C.</p>
<p>Pour construire un nouveau récit sur l’avenir mondial de l’eau, tendons donc l’oreille et écoutons les secrets des paysans sahéliens.</p>
<hr>
<p><em>Cet article s’inscrit dans le cadre d’un projet associant The Conversation France et l’AFP audio. Il a bénéficié de l’appui financier du Centre européen de journalisme, dans le cadre du programme « Solutions Journalism Accelerator » soutenu par la Fondation Bill et Melinda Gates. L’AFP et The Conversation France ont conservé leur indépendance éditoriale à chaque étape du projet.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210855/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Cette technique invite à pratiquer des trous réguliers dans un champs, semer en saison sèche et utiliser le rôle fertilisant des insectes.Raphaël Belmin, Chercheur en agronomie, photographe, accueilli à l’Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA, Dakar), CiradHamado Sawadogo, Chercheur en agronomie , Institut de l'environnement et des recherches agricoles (INERA)Moussa N'Dienor, Chercheur en agronomie , Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2104222023-08-03T21:33:51Z2023-08-03T21:33:51ZCes pays qui recyclent les eaux usées en eau potable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/539339/original/file-20230725-19-ye3sg5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5780%2C3850&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Les <a href="https://www.theguardian.com/environment/2014/aug/07/california-drought-orange-county-toilet-to-tap-water">anglophones</a> aiment appeler cette eau de la « toilet-to-tap water ». Mot à mot : de l’eau passant de la cuvette de vos toilettes à votre robinet. Une expression peu engageante, qui passe sous silence les nombreux procédés chimiques, physiques et biologiques permettant de recycler des eaux usées en eau potable d’excellente qualité.</p>
<p>Si cette idée peut encore faire grimacer beaucoup, elle devient pourtant une piste sérieuse de réflexion pour de plus en plus de pays ou de municipalités à travers le globe qui s’inquiètent, à raison, de l’<a href="https://theconversation.com/secheresse-2022-un-manque-de-pluies-presque-ordinaire-aux-effets-exceptionnels-191323">amenuisement des ressources en eau</a> douce. La mégapole de <a href="https://timesofindia.indiatimes.com/city/bengaluru/bangalore-water-supply-and-sewerage-boards-aim-treat-100-wastewater-by-2025-for-reuse/articleshow/94275309.cms">Bangalore</a>, en Inde, planche ainsi sur un tel recyclage des eaux usées, tout comme <a href="https://www.cnbc.com/2022/08/19/direct-potable-reuse-why-drinking-water-could-include-recycled-sewage.html">Los Angeles</a>. </p>
<p>Aux États-Unis, les villes texanes de <a href="https://ikehata.wp.txstate.edu/2019/10/31/crmwd-big-spring-raw-water-production-facility/">Big Springs</a> et <a href="https://www.newschannel6now.com/2023/01/24/city-wichita-falls-water-program-hits-milestone/">Wichita Falls</a> pratiquent déjà cette technique appelée la <em>direct potable reuse</em> (en français, réutilisation pour la potabilisation directe), tout comme la ville de <a href="https://www.news24.com/news24/sewage-keeps-taps-running-in-beaufort-west-20180820">Beaufort</a> en Afrique du Sud, depuis 2011.</p>
<h2>La Namibie potabilise les eaux usées depuis 1968</h2>
<p>Mais en la matière, et cela reste fort peu connu, c’est un autre pays encore qui reste le pionnier incontesté : la Namibie. À la 139<sup>e</sup> place du classement des pays par niveau de développement, on pourrait s’étonner que cet état d’Afrique Australe soit autant à l’avant-garde, mais lorsqu’on se penche sur la quasi-absence de ressource en eau de sa capitale, Windhoek, il devient tout de suite moins surprenant que cette municipalité ait cherché à innover.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Vue aérienne de Windhoek, capitale née en plein désert" src="https://images.theconversation.com/files/539354/original/file-20230725-29-blc3gb.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/539354/original/file-20230725-29-blc3gb.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/539354/original/file-20230725-29-blc3gb.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/539354/original/file-20230725-29-blc3gb.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/539354/original/file-20230725-29-blc3gb.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/539354/original/file-20230725-29-blc3gb.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/539354/original/file-20230725-29-blc3gb.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Vue aérienne de Windhoek, capitale née en plein désert.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Windhoek_Luftaufnahme.jpg#/media/File:Windhoek_Luftaufnahme.jpg">H. Baumeler/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au milieu d’une plaine aride, à plus de 200 km du littoral, Windhoek (près de 500 000 habitants) ne peut ni récolter la rare eau de pluie, à cause d’une évaporation quasi immédiate sous ses latitudes désertiques, ni piocher dans les rivières ou les nappes phréatiques de ses alentours, qui se rechargent très peu quand elles ne sont pas asséchées.</p>
<hr>
<p><em>L’article que vous parcourez vous est proposé en partenariat avec <a href="https://podcast.ausha.co/afpaudio-surlefil/bientot-sur-la-terre">« Sur la Terre »</a>, un podcast de l’AFP audio. Une création pour explorer des initiatives en faveur de la transition écologique, partout sur la planète. <a href="https://smartlink.ausha.co/sur-la-terre">Abonnez-vous !</a></em></p>
<iframe name="Ausha Podcast Player" frameborder="0" loading="lazy" id="ausha-6ilQ" height="220" style="border: none; width:100%; height:220px" src="https://embed.acast.com/64c3b1758e16bd0011b77c44/64ca9a51fa1a87001150bfb3" width="100%"></iframe>
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<p>En 1968, la ville, alors sous domination sud-africaine, voyait de surcroît sa population grandir à un rythme impressionnant, quand elle a commencé à recycler ses eaux usées pour les transformer en eau potable. Cinquante-cinq ans plus tard, c’est <a href="https://www.afdb.org/en/news-and-events/press-releases/namibia-african-development-bank-approves-1217-million-loan-euro-3-million-grant-support-water-and-sanitation-sector-34727">30 % des eaux usées</a> qui sont ainsi recyclées en eau potable en moins de dix heures. Le reste de l’eau potable domestique provient de barrages et forages réalisés dans d’autres régions du pays.</p>
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<h2>Des eaux usées potabilisées en 10 étapes</h2>
<p>Afin de permettre le recyclage des eaux usées en eau potable, Windhoek a mis en place une séquence de procédés inédits qui compte aujourd’hui <a href="https://www.wingoc.com.na/water-reclamation-plant/10-steps-process-0">10 étapes</a>. Il comprend des processus physico-chimiques, comme la coagulation et la floculation (ajout d’un produit coagulant permettant de créer des flocs, c’est-à-dire des regroupements de matière en suspension qui vont ensuite chuter grâce à leur poids et être éliminés dans les boues.), mais aussi des processus chimiques comme l’ozonation.</p>
<p>Au contact de l’ozone, l’eau subit alors un processus d’oxydation qui permet de dégrader de nombreux micropolluants (pesticides, résidus de médicaments… ) et d’inactiver bactéries, virus et parasites.</p>
<p>Adviennent ensuite d’ultimes étapes de filtration biologique sur charbon actif en grain et de filtration physique (filtration sur charbon actif et ultrafiltration membranaire) permettant d’éliminer les restes de pollution soluble. Avant d’être envoyée dans le réseau, l’eau subit enfin des contrôles de qualité et une chloration, assurant un effet désinfectant qui dure dans le temps afin que la qualité de l’eau obtenue ne se détériore pas durant la distribution.</p>
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<p>Ces dernières années, l’usine de traitement des eaux usées de Windhoek a pu accueillir des <a href="https://www.awwa.org/AWWA-Articles/dpr-project-in-africa-cradle-of-water-reclamation">visiteurs</a> intrigués et intéressés venant d’<a href="https://twitter.com/stukhan/status/1184925300578107392?s=20">Australie</a>, d’Allemagne, des Émirats arabes unis… Et pour cause, les techniques développées en Namibie demeurent intéressantes à plus d’un titre.</p>
<h2>Une solution moins coûteuse que le dessalement</h2>
<p>Pour les pays en quête de nouvelles sources d’eau potable, le recyclage des eaux usées reste moins énergivore et plus respectueux de l’environnement que le <a href="https://theconversation.com/le-dessalement-des-eaux-quand-lutiliser-et-a-quel-prix-207232">dessalement</a> de l’eau de mer, technique pourtant plus répandue à travers le monde. Là où la potabilisation des eaux usées consomme entre 1 et 1,5 kWh par m<sup>3</sup>, le dessalement nécessite entre 3 et 4 kWh par m<sup>3</sup>. De plus, cette dernière technique produit d’encombrants déchets : des concentrats de sels et de polluants souvent rejetés directement dans les mers et océans où les écosystèmes s’en trouvent alors perturbés.</p>
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<img alt="Conférence organisée par la métropole de Barcelone sur le recyclage des eaux usées en eau potable en Namibie, avec comme intervenants Piet Du Pisani en charge de la gestion des eaux usées à Windhoek, et l’ASERA, une association espagnole cherchant à promou" src="https://images.theconversation.com/files/540730/original/file-20230802-23-5rdrex.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/540730/original/file-20230802-23-5rdrex.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=416&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/540730/original/file-20230802-23-5rdrex.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=416&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/540730/original/file-20230802-23-5rdrex.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=416&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/540730/original/file-20230802-23-5rdrex.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=523&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/540730/original/file-20230802-23-5rdrex.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=523&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/540730/original/file-20230802-23-5rdrex.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=523&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Conférence organisée par la métropole de Barcelone sur le recyclage des eaux usées en eau potable en Namibie, avec comme intervenants Piet Du Pisani en charge de la gestion des eaux usées à Windhoek, et l’ASERA, une association espagnole cherchant à promouvoir la réutilisation des eaux usées.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.youtube.com/watch?v=a-rm66HPZ7E">Capture d’écran/Chaine YouTube de l’Àrea Metropolitana de Barcelona</a></span>
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<p>Malgré tous ces avantages, et les résultats probants du cas namibien, la potabilisation des eaux usées est encore balbutiante à l’échelle du globe car son application implique de surmonter diverses barrières. D’abord celle du coût de son installation. Actuellement, seuls des pays développés ont pu financer de tels projets, soit sur leur sol (aux États-Unis, à Singapour…) ou bien à l’étranger, avec par exemple, derrière la modernisation de l’usine namibienne, un <a href="https://www.oecd.org/env/resources/42350657.pdf">partenariat public-privé</a> avec le français Véolia, de l’australo-indien Wabag et la ville de Berlin.</p>
<h2>Des freins financiers, législatifs et psychologiques</h2>
<p>Ensuite, car les législations des différents pays demeurent fort contraignantes. Ainsi, en Europe une telle usine ne serait actuellement pas autorisée, et le seul projet en cours de potabilisation d’eaux usées traitées, celui du <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/au-fil-de-l-eau/jourdain-un-projet-pilote-en-europe-pour-transformer-les-eaux-usees-en-eau-potable_5122858.html">Programme Jourdain</a>, en Vendée, rejettera l’eau dans une retenue utilisée comme réserve pour la production d’eau potable et non directement dans le circuit de distribution d’eau : c’est la potabilisation indirecte.</p>
<p>Et même quand les fonds et les lois sont là pour permettre l’utilisation directe d’eau potable issue d’eaux usées traitées, une ultime barrière demeure, et non des moindres : rendre acceptable auprès d’une population le fait de boire d’anciennes eaux usées traitées, et surmonter pour cela ce qui est appelé <a href="https://www.cairn.info/peurs-et-plaisirs-de-l-eau--9782705680503-page-353.htm">« l’effet beurk »</a>. En 2000, une usine de potabilisation des eaux usées d’un quartier de Los Angeles, dont la construction avait coûté 55 millions de dollars a ainsi <a href="https://www.latimes.com/opinion/la-op-haefele26aug26-story.html">dû fermer</a> quelques jours après son ouverture, car « ne jamais faire boire l’eau des chiottes » était devenue une <a href="https://www.cwea.org/news/from-the-archives-the-history-of-toilet-to-tap-in-los-angeles/">promesse électorale</a> du politicien briguant le siège de maire.</p>
<p>En Namibie, un tel problème ne s’est pas posé lors de l’introduction de la potabilisation des eaux usées car les habitants de Windhoek, alors sous régime d’Apartheid, ont été mis devant le fait accompli trois mois après la mise en fonctionnement de la première usine. Dans un article du <em>Sunday Tribune</em> de novembre 1968, le journaliste couvrant l’annonce de ce nouveau recyclage des eaux usées rapporte toutefois que le maire de Windhoek de l’époque, dans un test à l’aveugle, a préféré le goût de l’eau usée traitée, à celle de l’eau provenant de sources conventionnelles.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/540751/original/file-20230802-29-l3kp67.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Archive de l’édition du 24 novembre 1968 du journal sud-africain le _Sunday Tribune_, titrant « Windhoek boit l’eau des égoûts »" src="https://images.theconversation.com/files/540751/original/file-20230802-29-l3kp67.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/540751/original/file-20230802-29-l3kp67.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=492&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/540751/original/file-20230802-29-l3kp67.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=492&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/540751/original/file-20230802-29-l3kp67.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=492&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/540751/original/file-20230802-29-l3kp67.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=618&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/540751/original/file-20230802-29-l3kp67.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=618&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/540751/original/file-20230802-29-l3kp67.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=618&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Archive de l’édition du 24 novembre 1968 du journal sud-africain le <em>Sunday Tribune</em>, titrant « Windhoek boit l’eau des égoûts ».</span>
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<h2>L’exemple de Singapour</h2>
<p>Mais ne pas informer la population en amont reste une solution radicale peu recommandable, car le travail de sensibilisation de la population à la rareté des ressources en eau et à la nécessité d’alternatives plus durables reste la meilleure façon de lancer un tel projet. C’est ce qui a permis la réussite du projet de Singapour, qui a misé énormément sur la communication autour du projet de potabilisation des eaux usées traitées, en organisant par exemple des visites de l’usine de traitement, ou en montrant le premier ministre de l’époque boire sereinement un verre de cette nouvelle eau usée recyclée.</p>
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<p>Ainsi l’effet beurk s’est transformé en fierté nationale. Fierté de maîtriser une technologie de pointe et fierté de gagner <a href="https://enpc.hal.science/hal-00841542/document">plus d’indépendance vis-à-vis de la Malaisie voisine</a> qui demeurait son principal fournisseur d’eau potable et avec qui les relations diplomatiques pouvaient être tendues.</p>
<h2>Attention à « l’effet rebond »</h2>
<p>Mais pour tâcher d’être autonome sur le plan de ses ressources en eau, Singapour n’a pas mis tous ses œufs dans le même panier, et a également parié sur le dessalement de l’eau de mer, la récolte des eaux de pluie et la réduction des consommations d’eau de ses habitants (passée de <a href="https://www.pub.gov.sg/watersupply/singaporewaterstory">165 L par jour</a> et par habitant en 2000 à 141 L en 2018).</p>
<p>Pour tous les partisans d’une meilleure utilisation des ressources en eau, cette sobriété est capitale, en amont comme en parallèle du développement de projets de potabilisation des eaux usées, afin de lutter contre ce qui est désormais connu comme <a href="https://ayhoekstra.nl/pubs/Ercin-Hoekstra-2012.pdf">« l’effet rebond »</a>. Cette expression décrit l’utilisation décomplexée et croissante des ressources en eau suite à la mise en place de techniques de dessalement ou de réutilisation des eaux usées traitées. Ces nouvelles ressources en eau ne doivent en effet être considérées que comme un moyen de subvenir à des besoins et usages déjà existants et primordiaux, souvent en substitution d’eau potable, et non comme un appel à en créer de nouveau.</p>
<p>Afin de maximiser les ressources à notre disposition, les usines de recyclage des eaux usées du futur devront également valoriser les déchets produits par les procédés de traitement des eaux usées, en transformant par exemple le phosphore et l’azote en nutriments utiles à l’agriculture, ou encore en produisant de l’énergie par méthanisation avec comme intrants les déchets collectés lors du traitement.</p>
<hr>
<p><em>Cet article s’inscrit dans le cadre d’un projet associant The Conversation France et l’AFP audio. Il a bénéficié de l’appui financier du Centre européen de journalisme, dans le cadre du programme « Solutions Journalism Accelerator » soutenu par la Fondation Bill et Melinda Gates. L’AFP et The Conversation France ont conservé leur indépendance éditoriale à chaque étape du projet.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210422/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julie Mendret ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pays parmi les plus arides d’Afrique, la Namibie recycle ses eaux usées en eau potable depuis 1968. Pour pallier le manque d’eau, d’autres pays l’ont imité ou songent désormais à le faire.Julie Mendret, Maître de conférences, HDR, Université de MontpellierLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2096512023-07-30T15:07:36Z2023-07-30T15:07:36ZFiltres plantés de roseaux : comment ils épurent les eaux usées de la plupart des petites collectivités en France<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/538239/original/file-20230719-15-dhki4p.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=25%2C5%2C3366%2C2532&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Station d'épuration par filtre planté de roseaux de Marlieux dans le département de l'Ain au printemps 2023. L'intégration paysagère est notamment assurée par le développement des roseaux.</span> <span class="attribution"><span class="source">Mathieu Gautier</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Dans de nombreuses petites communes en France, les eaux usées sont traitées grâce à des techniques sobres, souvent des filtres plantés de roseaux. Loin de l’image d’une lubie d’écologistes isolés, ces techniques équipent plus de 5 000 stations d’épuration sur le territoire.</p>
<p>Les pénuries d’eau de plus en plus fréquentes – et sévères – qui nous alertent sur la disponibilité des ressources en eau accentuent leur vulnérabilité aux pollutions industrielles, agricoles et domestiques. Pour protéger ces ressources indispensables, il faut adapter nos systèmes de production sur le long terme, éviter le gaspillage et réduire à la source l’émission de polluants (nitrates, phosphates et résidus médicamenteux et cosmétiques notamment).</p>
<p>Mais il faut aussi à plus court terme traiter les effluents générés par les activités humaines, en particulier les eaux usées domestiques provenant de nos cuisines, salles de bain et toilettes. Ces traitements sont encadrés par la loi à l’échelle européenne et nationale, accompagnée d’arrêtés qui fixent les objectifs de traitement et les seuils de rejet. Ils sont mis en place dans des stations d’épuration mettant en œuvre, selon les caractéristiques du territoire, des procédés intensifs ou plus sobres (dits également <a href="https://theconversation.com/dans-le-cotentin-comment-agriculture-et-zones-humides-font-bon-menage-146138">« extensifs »</a> mais dont le principe de fonctionnement repose essentiellement sur l’activité de bactéries qui ingèrent de nombreux polluants.</p>
<p><iframe id="mnW4e" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/mnW4e/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>L’objectif du traitement des eaux usées est de les rendre moins polluantes, mais aussi de régénérer des ressources : lorsque la réglementation le permet, l’<a href="https://theconversation.com/manque-deau-comment-la-reutilisation-des-eaux-usees-est-devenue-une-priorite-193328">eau traitée peut être valorisée dans des usages domestiques ou pour l’irrigation par exemple</a>. D’autres ressources à haute valeur ajoutée peuvent être extraites, comme les nitrates et les phosphates, utilisables comme fertilisants.</p>
<h2>Filtres plantés de roseaux ou stations d’épuration intensives ?</h2>
<p>Les territoires urbains densément peuplés utilisent des <a href="https://www.assainissement.developpement-durable.gouv.fr/PortailAC/">stations d’épuration collectives intensives</a> de capacité de traitement élevée adaptée aux forts volumes d’eaux usées qu’ils génèrent. Leur efficacité tient à des consommations élevées en énergie, en réactifs, et en équipements compacts relativement sophistiqués. </p>
<p>Les territoires ruraux ou semi-ruraux ont des contraintes d’espace moindres et optent soit pour des techniques d’assainissement non collectives (fosses septiques notamment), soit pour des stations d’épuration collectives de capacité de traitement réduite adaptée au nombre d’habitations raccordées. Les stations d’épuration de capacité de traitement équivalent à 2 000 habitants ou moins, représentent plus de <a href="https://www.oryxeleven.com/assainissement/chiffres-clef">80 % du nombre total de stations</a>. Parmi celles-ci, plus de la moitié (59 %) sont des stations intensives basées sur les mêmes principes que leurs <a href="https://www.assainissement.developpement-durable.gouv.fr/PortailAC/">cousines des grandes villes</a>. Le reste est représenté par des stations dites extensives, moins sophistiquées que les stations intensives et avec des coûts d’investissement et d’exploitation plus faibles, mais qui garantissent des performances d’épuration poussée. Les filtres plantés de roseaux représentent plus de <a href="https://www.assainissement.developpement-durable.gouv.fr/PortailAC/">50 % du nombre de ces stations extensives</a>, le reste étant constitué par des lagunes ou autres types de techniques.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/538238/original/file-20230719-27-oobdly.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Station d’épuration par filtre plantés" src="https://images.theconversation.com/files/538238/original/file-20230719-27-oobdly.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/538238/original/file-20230719-27-oobdly.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=448&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/538238/original/file-20230719-27-oobdly.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=448&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/538238/original/file-20230719-27-oobdly.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=448&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/538238/original/file-20230719-27-oobdly.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=563&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/538238/original/file-20230719-27-oobdly.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=563&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/538238/original/file-20230719-27-oobdly.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=563&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les dessous des filtres plantés sont ici visibles alors que les roseaux sont encore petits, au tout début du fonctionnement de l’installation après la plantation. Cette station d’épuration est à « écoulement vertical » : au premier plan, le premier étage de filtration et à l’arrière-plan, le second étage. À la surface des filtres, le réseau d’aspersion des eaux usées.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Mathieu Gautier</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<h2>Les atouts des filtres plantés de roseaux</h2>
<p>Les systèmes d’épuration par filtres plantés de roseaux sont des <a href="https://theconversation.com/solutions-fondees-sur-la-nature-de-quoi-parle-t-on-exactement-166993">« solutions basées sur la nature »</a>, c’est-à-dire que leur principe de fonctionnement est inspiré de celui d’écosystèmes naturels : les marais. Ils présentent de <a href="https://hal.science/hal-00772874/document">nombreux atouts techniques</a> :</p>
<ul>
<li><p>De bonnes à très bonnes performances d’épuration, notamment vis-à-vis des matières en suspension, de la charge organique et azotée, et dans une moindre mesure du phosphore</p></li>
<li><p>Un niveau de technicité modéré dont la mise en œuvre et la maintenance sont compatibles avec les moyens humains, techniques et financiers mobilisables par les petites communes,</p></li>
<li><p>Une consommation énergétique et en réactifs faible que celle des stations intensives.</p></li>
<li><p>Une excellente intégration paysagère.</p></li>
</ul>
<p>Les filtres plantés de roseaux peuvent reproduire les <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Th%C3%A9ma%20-%20Les%20milieux%20humides%20et%20aquatiques%20continentaux.pdf">fonctions écosystémiques des zones humides naturelles</a> qu’ils émulent – marais, tourbières, mares, mangroves. En effet, grâce à leur position particulière à l’interface des trois milieux physiques de la planète (eau, terre, air), ils abritent une biodiversité considérable, régulent les transferts hydriques et la température grâce au phénomène d’évapotranspiration… et contribuent à l’épuration des eaux.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/538234/original/file-20230719-29-bubhbt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/538234/original/file-20230719-29-bubhbt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/538234/original/file-20230719-29-bubhbt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=448&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/538234/original/file-20230719-29-bubhbt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=448&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/538234/original/file-20230719-29-bubhbt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=448&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/538234/original/file-20230719-29-bubhbt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=563&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/538234/original/file-20230719-29-bubhbt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=563&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/538234/original/file-20230719-29-bubhbt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=563&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Couvert végétal des filtres plantés de roseaux aspergés d’eau à filtrer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Mathieu Gautier</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>Comment fonctionnent les filtres plantés ?</h2>
<p>Le système de traitement par filtres plantés de roseaux comporte des étapes successives simples, mais dont l’efficacité exige une ingénierie maitrisée.</p>
<p>Le système est constitué d’un ou plusieurs filtres en série, isolés du sol par une <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9omembrane">« géomembrane »</a> et remplis de couches de matériaux granulaires au travers desquels s’écoulent les eaux usées à traiter – la taille des grains augmente avec la profondeur. Les roseaux sont plantés à la surface des filtres. Ces végétaux à croissance rapide développent un réseau racinaire dense qui facilite l’écoulement hydraulique et le transfert d’oxygène, et crée des conditions favorables à l’activité des microorganismes responsables de l’épuration.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/538244/original/file-20230719-15-ygvhgh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Schéma de fonctionnement des systèmes à écoulement vertical" src="https://images.theconversation.com/files/538244/original/file-20230719-15-ygvhgh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/538244/original/file-20230719-15-ygvhgh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=197&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/538244/original/file-20230719-15-ygvhgh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=197&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/538244/original/file-20230719-15-ygvhgh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=197&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/538244/original/file-20230719-15-ygvhgh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=247&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/538244/original/file-20230719-15-ygvhgh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=247&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/538244/original/file-20230719-15-ygvhgh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=247&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Schéma de principe de fonctionnement des filtres à écoulement vertical, appelés « système français ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Rémy Gourdon</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Les eaux usées subissent d’abord un simple « dégrillage » afin de prévenir le colmatage des filtres et de protéger les pompes utilisées.</p>
<p>Le traitement se fait ensuite par filtration physique à la surface du massif poreux qui retient les matières en suspension et certains micropolluants, qui sont capturés à la surface des particules.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/538241/original/file-20230719-21-hxvrlv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="système racinaire et sol" src="https://images.theconversation.com/files/538241/original/file-20230719-21-hxvrlv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/538241/original/file-20230719-21-hxvrlv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=914&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/538241/original/file-20230719-21-hxvrlv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=914&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/538241/original/file-20230719-21-hxvrlv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=914&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/538241/original/file-20230719-21-hxvrlv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1149&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/538241/original/file-20230719-21-hxvrlv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1149&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/538241/original/file-20230719-21-hxvrlv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1149&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Système racinaire dans la profondeur du filtre planté. On voit la granularité en profondeur.Le cache d’appareil photo donne l’échelle.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Mathieu Gautier</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Une microflore très riche se développe dans le milieu filtrant, composée principalement de bactéries aérobies, c’est-à-dire de bactéries qui utilisent le dioxygène pour oxyder les matières des eaux usées et les minéraliser en dioxyde de carbone et en eau. Ces bactéries sont présentes naturellement dans les eaux usées ; les plus adaptées aux conditions au sein du filtre prédominent en consommant pour se multiplier la charge organique <a href="https://sswm.info/sites/default/files/reference_attachments/KADLEC%20WALLACE%202009%20Treatment%20Wetlands%202nd%20Edition_0.pdf">et les polluants présents dans l’eau. De cette manière, la pollution des eaux est transformée en de nouvelles cellules microbiennes qui sont retenues dans le milieu filtrant alors que l’eau épurée le traverse</a>.</p>
<p>Les systèmes dits « à écoulement vertical » sont les plus utilisés en France. Ils sont classiquement constitués de deux étages de filtration. Chaque étage de filtre est composé de plusieurs cellules indépendantes. On asperge régulièrement à la surface des filtres de la première cellule avec un volume donné d’eaux usées pendant quelques jours ou une semaine ; puis c’est la deuxième cellule qui est alimentée, et enfin la troisième. L’alternance saturation-désaturation en eau est particulièrement favorable aux microorganismes impliqués dans l’épuration. L’eau sortant du premier étage est collectée par des drains au fond des cellules, et traitée sur le second étage suivant le même protocole.</p>
<p>L’efficacité d’épuration des filtres plantés de roseaux, leur niveau modéré de sophistication technique, leur faible coût d’exploitation et d’investissement, et leur excellente intégration paysagère sont les atouts majeurs de ce système d’épuration extensif qui offre en outre d’autres fonctions écosystémiques au-delà de leur fonction épuratoire principale. Mais ces systèmes sont appelés à évoluer pour s’adapter aux pollutions émergentes et aux exigences croissantes d’épuration.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209651/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les petites collectivités n’ont pas forcément besoin de grandes stations d’épuration. Et si les filtres plantés de roseaux étaient la bonne solution ?Rémy Gourdon, Enseignant-chercheur, biophysicochimie environnementale, INSA Lyon – Université de LyonMathieu Gautier, Maître de conférences, HDR, INSA Lyon – Université de LyonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2094242023-07-16T15:29:12Z2023-07-16T15:29:12ZBarrage détruit en Ukraine : retour sur une tactique militaire ancienne<p>La destruction du <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/manifestations-en-ukraine/guerre-en-ukraine-un-mois-apres-la-destruction-du-barrage-de-kakhovka-la-pollution-atteint-la-partie-nord-ouest-de-la-mer-noire_5931797.html">barrage de Kakhovka</a> sur le fleuve Dniepr le 6 juin 2023 a <a href="https://theconversation.com/les-attaques-russes-contre-les-installations-energetiques-ukrainiennes-sont-elles-licites-au-regard-du-droit-international-humanitaire-199709">inondé une zone</a> de plus de 600 km<sup>2</sup> dans le sud de l’Ukraine, sur la rive droite (contrôlée par les Ukrainiens) comme sur la rive gauche (occupée par les Russes).</p>
<p>18 milliards de m<sup>3</sup> d’eau se sont ainsi déversés dans la région de Kherson récemment <a href="https://theconversation.com/contre-offensive-ukrainienne-comment-evaluer-son-succes-ou-son-echec-209342">reconquise</a> par les Ukrainiens, provoquant l’évacuation de milliers d’habitants. Pour les deux belligérants, le fleuve fait à présent obstacle à toute velléité d’offensive et de franchissement.</p>
<p>La <a href="https://theconversation.com/guerres-du-xx-si%C3%A8cle-une-histoire-de-rupture-entre-lhumain-et-son-environnement-208261">guerre d’Ukraine</a> remet ainsi sur le devant de la scène une tactique militaire ancienne : l’inondation artificielle. Par le passé, l’eau a déjà été sciemment exploitée par les militaires pour se protéger, faire obstacle et/ou gêner les manœuvres de l’adversaire.</p>
<h2>Une tradition militaire belge</h2>
<p>En août 1914, conformément aux prévisions du plan offensif Schlieffen, les troupes allemandes en Belgique progressent à une allure fulgurante. Comment barrer la route vers l’ouest à la déferlante germanique ? L’armée belge résiste malgré l’effet de surprise. Les Belges ont alors une idée puisée dans l’histoire de leur pays : l’usage des inondations volontaires à des fins militaires en Flandre.</p>
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<p>C’est en effet par ce stratagème que Louis XIV fut victorieux en 1647, 1658 et 1677. C’est de la même façon que la ville belge de Nieuport avait pu tenir cinq années de siège, mené par les Français, lors de la Guerre de succession d’Autriche, et qu’elle se protégea en 1793 des troupes de la Convention.</p>
<p>Après avoir hésité, sachant bien que la salinisation par l’eau de mer allait condamner pour des années la fertilité des sols agricoles submergés, les Belges ouvrent finalement les portes de l’écluse de la ville d’Yser entre le 21 et le 30 octobre 1914. Ils provoquaient ainsi l’entrée de l’eau de la mer du Nord dans une partie du polder.</p>
<h2>Succès militaire, dégâts environnementaux</h2>
<p>Ils poursuivirent en fermant l’écluse d’Ebbe, empêchant les eaux de s’évacuer alors que de fortes précipitations arrosèrent la région. Le 30 octobre, la manœuvre fut réitérée. Les Allemands ne se doutèrent toujours de rien.</p>
<p>Mais le 2 novembre, l’ordre fut donné aux troupes allemandes de se retirer. Dans une dépêche publiée dans le journal <em>Corriere del la Sera</em>, le journaliste italien Luigi Barzini décrit en ces termes la situation :</p>
<blockquote>
<p>« Le terrain a bu l’eau goulûment et s’est saturé. L’inondation prend place en profondeur, bien à l’abri des regards. L’eau mène une sorte de guerre des mines et s’avance secrètement sous les pieds de l’ennemi. Le sol des tranchées devint boueux. Puis la boue se transforma en bouillie, et progressivement en eau sale. Les soldats dans les tranchées s’efforcèrent de les maintenir au sec ; mais l’eau monta toujours, irrémédiablement. Bientôt, apparut, dans ce désert monotone de la plaine, çà et là, le miroir à l’éclat métallique des eaux stagnantes. »</p>
</blockquote>
<p>Les 50 km<sup>2</sup> de terrains inondés firent barrage à l’armée allemande, mais l’inondation provoqua aussi, par débordement <em>per ascensum</em> de la nappe, l’éboulement des premières tranchées, en les rendant aussi insalubres.</p>
<h2>Source d’inspiration pour les Allemands</h2>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/536562/original/file-20230710-6018-9bc3x8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/536562/original/file-20230710-6018-9bc3x8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/536562/original/file-20230710-6018-9bc3x8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=679&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/536562/original/file-20230710-6018-9bc3x8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=679&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/536562/original/file-20230710-6018-9bc3x8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=679&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/536562/original/file-20230710-6018-9bc3x8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=854&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/536562/original/file-20230710-6018-9bc3x8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=854&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/536562/original/file-20230710-6018-9bc3x8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=854&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Extrait de « Kriegsgeologie » de Walter Kranz, Bruxelles, le 15 janvier 1918.</span>
<span class="attribution"><span class="source">« Kriegsgeologie » de Walter Kranz</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>Les militaires allemands, soucieux de conserver la mémoire de l’usage – à leur encontre – de cette « sape aquatique », inscrivirent en 1918 cette tactique dans des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Walther_Kranz">manuels de géologie militaire</a> à l’attention des troupes combattantes. Le stratagème de l’inondation artificielle fut à nouveau utilisé par les Allemands en 1917 lors de leur repli stratégique sur la ligne Hindenburg – l’Oise inonda les plaines alentour.</p>
<p>Les Allemands se souvinrent de ces enseignements de la Grande Guerre dans la guerre qui suivit. C’est ainsi qu’ils inondèrent par débordement des canaux la zone côtière entre Calais et Nieuport en 1940. Au cours l’hiver 1939-1940, les Pays-Bas tentèrent pour se protéger, de rompre, par la remontée artificielle des niveaux d’eau, la couche de glace et les sols gelés. Ces derniers avaient une portance pouvant laisser passer des matériels et engins lourds.</p>
<p>Dans le cadre du Mur de l’Atlantique, les Allemands avaient inondé les marais du Cotentin en bloquant les portes à flots : l’eau entra dans les marais lors d’une pleine mer pour ne plus en ressortir. De nombreux parachutistes américains, tombés dans le marais et surtout dans les limes (fossés), ne survécurent pas. Les 6 et 7 juin 1944, les marais de Carentan furent inondés par ouverture de l’Écluse de la Barquette au cours des opérations de débarquements.</p>
<h2>Des antécédents en Allemagne et au Vietnam</h2>
<p>L’inondation artificielle par destruction de barrage en Ukraine à des fins tactiques et stratégiques n’est pas une première.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/536560/original/file-20230710-17-1c8qad.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/536560/original/file-20230710-17-1c8qad.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/536560/original/file-20230710-17-1c8qad.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/536560/original/file-20230710-17-1c8qad.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/536560/original/file-20230710-17-1c8qad.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/536560/original/file-20230710-17-1c8qad.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/536560/original/file-20230710-17-1c8qad.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/536560/original/file-20230710-17-1c8qad.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Inondation artificielle induite suite à la destruction du barrage de l’Eder (mai 1943).</span>
<span class="attribution"><span class="source">IWM cote CH9720</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Le 17 mai 1943, les Britanniques montèrent et menèrent une opération spéciale « Chastise » visant à détruire, par un raid par quadrimoteur Avro Lancaster à très basse altitude et une bombe à ricochet larguée à la surface de la retenue d’eau, le barrage de l’Eder dans la Ruhr. L’objectif était de noyer une partie de cet important bassin industriel et ses usines d’armes et munitions, mais aussi de les priver de leur alimentation électrique.</p>
<p>L’arme « aquatique » fut aussi exploitée par les Américains durant la Guerre du Vietnam (1955–1975). L’opération <em>Popeye</em> menée du 20 mars 1967 au 5 juillet 1972 par l’armée américaine consista à apporter aux nuages une charge d’iodure d’argent pour accentuer les pluies et prolonger artificiellement la mousson. Une action qui permit d’embourber les combattants Viet Cong et les matériels circulant sur la piste stratégique Hô Chi Minh au Vietnam, Laos et Cambodge, et qui généra un excédent de pluie de 30 %.</p>
<h2>Tactique de la « Terre inondée »</h2>
<p>Loin d’être uniquement une tactique de la « Terre brûlée » des armées en repli, cette tactique de la « Terre inondée » participe à la stratégie globale des forces engagées, en jouant par l’offensive sur le pouvoir destructeur de l’eau, par la défensive en faisant obstacle à la libre manœuvre de l’adversaire, pour le freiner ou endiguer sa marche.</p>
<p>Les tactiques militaires basées sur les modifications de l’environnement ont été prohibées par la <a href="https://treaties.un.org/Pages/ViewDetails.aspx?src=IND&mtdsg_no=XXVI-1&chapter=26&clang=_fr">Convention ENMOD (<em>ENvironment MODification</em>)</a> adoptée par la résolution 31/72 de l’assemblée des Nations unies, signée à Genève le 18 mai 1977 et entrée en vigueur le 5 octobre 1978.</p>
<p>Les signataires s’engagent à ne pas avoir recours, dans leurs engagements militaires, à « l’utilisation militaire ou toute utilisation hostile de techniques de modification de l’environnement ayant des effets étendus, durables ou graves en tant que moyen de destruction, de dommage ou de préjudice à l’encontre de tout autre État partie ». La France ne fut pas signataire, contrairement à l’ex-URSS.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209424/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Daniel Hubé ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’arme aquatique a été utilisée à plusieurs reprises par les armées européennes et américaine au siècle dernier.Daniel Hubé, Ingénieur environnementaliste, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2089962023-07-05T11:32:20Z2023-07-05T11:32:20ZPodcast : Donner une seconde vie aux eaux usées<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/535531/original/file-20230704-17-p8abtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’arrosage agricole, l’une des principales destinations des eaux usées traitées. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/siD6uufCyt8">Zoe Schaeffer/Unsplash</a></span></figcaption></figure><figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Découvrez le nouveau podcast de The Conversation France : « L’échappée Sciences ». Deux fois par mois, un sujet original traité par une interview de scientifique et une chronique de l’un·e de nos journalistes.</em></p>
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<iframe src="https://playerbeta.octopus.saooti.com/miniplayer/large/272008?distributorId=c3cfbac6-2183-4068-a688-866933d3b5a6&color=40a372&theme=ffffff" width="100%" height="180px" scrolling="no" frameborder="0"></iframe>
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<p><iframe id="tc-infographic-819" class="tc-infographic" height="100" src="https://cdn.theconversation.com/infographics/819/ead8432336c6ce4f706df8b24a22c635bc3dd209/site/index.html" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>En mars dernier, Emmanuel Macron présentait un vaste <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/plan-action-gestion-resiliente-et-concertee-eau">plan d’une cinquantaine de mesures</a> pour organiser la sobriété des usages de l’eau. Dans le contexte global du réchauffement climatique, les épisodes de sécheresse vont se multiplier et s’intensifier, privant la France d’une portion importante de cette ressource essentielle. Les effets de ce stress hydrique se font déjà sentir : à l’été 2022, les restrictions touchant l’irrigation agricole ont par exemple provoqué des baisses de rendements estimées entre 10 % et 40 %.</p>
<p>L’une de ces mesures concerne la réutilisation des eaux usées traitées, ou REUT. Dans ce domaine, la France fait figure de novice, avec moins de 1 % d’eaux utilisées provenant de ce processus. En Europe, ce sont <a href="https://theconversation.com/reutilisation-des-eaux-usees-quels-sont-les-pays-les-plus-en-pointe-112984">l’Espagne et l’Italie qui s’imposent</a> avec, respectivement, 14 % et 8 % de REUT. Le plan eau du printemps 2023 propose de porter la part française à 10 % à l’horizon 2030. Un « objectif ambitieux », souligne <a href="https://theconversation.com/profiles/julie-mendret-604894">Julie Mendret</a>, docteure en génie des procédés de l’environnement et maîtresse de conférences à l’Université de Montpellier, invitée du nouvel épisode du podcast « L’échappée Sciences ».</p>
<p>Quelles sont les raisons du retard français ? Quelles sont les étapes pour passer de la station d’épuration à la REUT ? Que fait-on avec ces eaux usées traitées ? Autant de questions auxquelles Julie Mendret nous apporte de précieuses réponses.</p>
<p>La chronique de ce nouvel épisode de « L’échappée Sciences » s’intéressera à la manière dont les arbres <a href="https://www.nature.com/articles/s41477-019-0580-z">récoltent l’eau du sol</a> et la distribuent à tous les étages pour assurer leur hydratation. Des stratégies de régulation dont les chercheurs et ingénieurs s’inspirent notamment pour <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.abd0966">développer des membranes de filtration et de dessalement</a>.</p>
<p>On y apprendra aussi qu’une grande partie de l’eau pompée par les arbres est restituée à l’atmosphère lors de l’évapotranspiration. Une eau « verte » essentielle au cycle de l’eau, mais encore assez mal connue et qui constitue aujourd’hui un <a href="https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1029/2021GL096579">sujet d’étude privilégié pour les hydrogéologues</a>.</p>
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<p><em>Animation et conception, Jennifer Gallé et Elsa Couderc. Réalisation, Romain Pollet. Musique du générique : « Chill Trap » de Aries Beats. Extraits : Reportage JT TF1 du 26 juin 2023, D. Sitbon, A. Cazabonne, A. Delabre ; « The Trees They Do Grow High« », Joan Baez/1961/UMG (au nom de EMI).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/208996/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Pour faire face au manque d’eau, de multiplies initiatives existent. Focus en podcast sur l’une d’entre elles, la réutilisation des eaux usées traitées.Jennifer Gallé, Cheffe de rubrique Environnement + Énergie, The Conversation FranceElsa Couderc, Cheffe de rubrique Science + Technologie, The Conversation FranceJulie Mendret, Maître de conférences, HDR, Université de MontpellierLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2072322023-06-15T10:39:45Z2023-06-15T10:39:45ZLe dessalement des eaux, quand l’utiliser et à quel prix ?<p>La tentation est grande de dessaler l’eau de mer pour disposer d’une eau douce utilisable pour les activités humaines, et notamment <a href="https://theconversation.com/fr/topics/eau-potable-62449">pour la boire</a>. En effet, les <a href="https://www.cnrseditions.fr/catalogue/ecologie-environnement-sciences-de-la-terre/l-ocean-a-decouvert/">eaux salines sont abondantes et accessibles</a> : elles couvrent 75 % de la planète, représentent plus de 97 % du volume des eaux sur Terre, et 11 % de la population mondiale habite à moins de 10 kilomètres d’une eau saline. </p>
<p>Les technologies de dessalement sont disponibles et utilisées depuis une cinquantaine d’années dans des régions souffrant d’un stress hydrique. Elles peuvent parfois être indispensables car la <a href="https://hal.science/hal-01690846v1">seule solution pour un accès à l’eau potable des populations, mais parfois leur usage est plus discutable</a>.</p>
<p>Aujourd’hui, dans un contexte à la fois de stress hydrique et de transition énergétique et environnementale, on peut s’interroger sur la place à donner au dessalement. Quand des eaux douces souterraines ou de surface sont disponibles, ce qui est encore largement le cas en France, il est préférable énergétiquement, économiquement et environnementalement de les utiliser pour <a href="https://theconversation.com/comment-on-traite-leau-pour-la-rendre-potable-195696">potabiliser l’eau</a>. Par contre, quand la seule ressource en eau disponible est une eau de mer, le dessalement permet un <a href="https://theconversation.com/inscrire-le-droit-a-leau-potable-dans-la-constitution-203583">accès à l’eau potable pour tous</a>.</p>
<h2>Comment sépare-t-on les sels de l’eau ?</h2>
<p>On dessale principalement des eaux de mer ou des eaux souterraines proches des côtes influencées par les eaux de mer et dites eaux saumâtres. Une eau de mer contient surtout des sels (et majoritairement NaCl, le sel de table), à une concentration qui peut varier selon la mer ou l’océan et le lieu de prélèvement et qu’on considère en moyenne à 35 grammes de sels par litre d’eau de mer. Elle contient aussi des fines particules, des matières organiques, des algues et microorganismes. Parmi les particules, on observe la présence croissante de micro et nanoparticules de plastiques due à l’activité humaine. </p>
<p>Pour transformer une eau de mer ou saumâtre en eau douce, il faut séparer les sels et les molécules d’eau. Quand un mètre cube d’eau de mer est dessalé on récupère environ 500 litres d’eau dessalée, et 500 litres d’un concentrat ou saumure enrichi en sels. Avant cette séparation, qui constitue l’opération de dessalement à proprement parler, il faut prétraiter l’eau de mer pour la débarrasser d’une grande partie des particules, matières organiques, algues et microorganismes, pour assurer la productivité de la séparation sel/eau. </p>
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<img alt="intérieur de l’usine de dessalement de Barcelone" src="https://images.theconversation.com/files/531686/original/file-20230613-21-25hrkv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/531686/original/file-20230613-21-25hrkv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/531686/original/file-20230613-21-25hrkv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/531686/original/file-20230613-21-25hrkv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/531686/original/file-20230613-21-25hrkv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/531686/original/file-20230613-21-25hrkv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/531686/original/file-20230613-21-25hrkv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La plus grande usine d’Europe de dessalement de l’eau de mer est installée près de Barcelone, en Espagne. Sa capacité quotidienne est de 200000 mètres cubes d’eau potable.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Fichier:Usine_de_dessalement_de_l%27eau_de_mer_%C3%A0_Barcelone.jpg">Le plombier du désert, Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Au global, une installation de dessalement comporte un pompage de l’eau saline pour approvisionner l’usine de dessalement, des prétraitements, une opération de dessalement, et une dispersion des saumures en mer, en utilisant des techniques appropriées pour ne pas perturber le milieu naturel. Si l’eau dessalée est destinée à la consommation humaine, une opération de reminéralisation est nécessaire. </p>
<p>Aujourd’hui on dispose de deux technologies principales pour dessaler l’eau de mer ou saumâtre : </p>
<ul>
<li><p>l’osmose inverse, qui est basée sur une séparation physique des sels et de l’eau grâce à une membrane qui laisse passer les molécules d’eau mais retient les sels. Pour faire passer l’eau au travers de la membrane, il faut des pompes pour appliquer une pression forte (50 à 70 bars ; la pression doit être plus importante quand la concentration en sels augmente en fonction du lieu de prélèvement) ;</p></li>
<li><p>la distillation, qui est basée sur un changement d’état de l’eau, que l’on vaporise en lui apportant de la chaleur. La vapeur d’eau ne contient pas de sels et est condensée sur des parois froides, ce qui permet de récupérer l’eau. </p></li>
</ul>
<h2>Où dessale-t-on de l’eau de mer aujourd’hui ?</h2>
<p>Techniquement on est donc capable de dessaler des eaux et le dessalement se développe. En 2020, près de 100 millions de mètres cubes (soit 100 milliards de litres) d’eau dessalée sont produits chaque jour dans le monde et le <a href="https://doi.org/10.1016/j.desal.2020.114633">dessalement est en plein développement, avec un taux de croissance annuel moyen de 7,5 % depuis 2010</a>. </p>
<p>Les plus grands utilisateurs sont des pays riches souffrant d’une pénurie d’eau douce et disposant de gaz ou pétrole pour faire marcher les installations, tels que l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Les USA dessalent depuis très longtemps des eaux souterraines côtières salées ou colorées. </p>
<p>En Europe, le pays le plus utilisateur du dessalement est l’Espagne, qui manque d’eau douce sur ses côtes méditerranéennes et compte un millier d’installations de dessalement (publiques ou privées). La ville de Barcelone est équipée d’une installation de dessalement des eaux de mer, qui peut délivrer 200000 mètres cubes d’eau potable chaque jour. Depuis la sécheresse de 2022, elle est <a href="https://www.youtube.com/watch?v=qQKfCqWBuiQ">poussée à sa capacité maximale pour alimenter, selon ses exploitants, jusqu’à 33 % des habitants de Barcelone et de la métropole</a>. Deux ans auparavant, 3 % seulement des eaux distribuées étaient produites par dessalement. Cette installation a été construite en 2009 après des périodes de sécheresse, qui avaient conduit la ville à s’approvisionner en eau par des containers en provenance de Marseille et à rationner les quantités d’eau distribuées. </p>
<h2>Le dessalement est énergivore et a de forts impacts environnementaux</h2>
<p>Le dessalement contribue aux émissions de gaz à effets de serre, notamment par son utilisation d’énergie. <a href="https://doi.org/10.1016/j.desal.2017.11.002">Au total dans le monde, on estime que le dessalement par osmose inverse utilise 100 TWh d’énergie électrique</a> et émettait <a href="https://www.iea.org/reports/world-energy-outlook-2014">76 millions de tonnes de CO₂ en 2014, avec une prévision de 400 millions de Tonnes de CO₂ estimées pour 2050</a>.</p>
<p>La seule opération de séparation sel/eau, que ce soit par osmose inverse ou par distillation, <a href="https://www.encyclopedie-energie.org/le-dessalement-deau-de-mer-et-des-eaux-saumatres/">nécessite une énergie théorique minimale de l’ordre de 1 kWh par mètre cube d’eau produite</a>. À cela, il faut ajouter sur chaque site les énergies nécessaires pour l’approvisionnement en eau, la distribution de l’eau traitée et la diffusion des saumures qui dépendent de l’emplacement de l’installation, et l’énergie nécessaire pour prétraiter et reminéraliser l’eau, qui dépendent de la qualité de l’eau de mer.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/531683/original/file-20230613-15-lpueve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="schéma indiquant la part de chaque étape du dessalement dans sa consommation énergétique" src="https://images.theconversation.com/files/531683/original/file-20230613-15-lpueve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/531683/original/file-20230613-15-lpueve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=248&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/531683/original/file-20230613-15-lpueve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=248&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/531683/original/file-20230613-15-lpueve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=248&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/531683/original/file-20230613-15-lpueve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=311&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/531683/original/file-20230613-15-lpueve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=311&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/531683/original/file-20230613-15-lpueve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=311&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Consommation énergétique d’une installation de dessalement d’eau de mer par osmose inverse.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0011916417321057">Corinne Cabassud, d’après les données de données de Voutchkov, in Desalination, 2018</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>En pratique, pour le dessalement, on dépasse encore largement la valeur théorique minimale. L’osmose inverse consomme actuellement 2 kWh à elle seule pour produire un mètre cube d’eau dessalée à partir d’eau de mer, et pour une installation complète de dessalement le coût énergétique total peut représenter jusqu’à 4 kWh par mètre cube. Néanmoins, l’osmose inverse consomme moins d’énergie que la distillation, c’est la raison pour laquelle elle se développe plus (notamment dans les pays non producteurs de gaz et de pétrole) et est actuellement la technologie de dessalement la plus utilisée dans le monde actuellement.</p>
<p>Il est encourageant de noter que dans les années 1970, le coût énergétique de l’osmose inverse était de 20 kWh par mètre cube et que la recherche et le développement de nouvelles membranes, et surtout d’équipements de récupération de l’énergie de pression, ont permis de réduire d’un facteur 10 les coûts énergétiques du dessalement par osmose inverse. </p>
<p>Des efforts de recherche et d’innovation sont en cours dans de nombreuses équipes de recherche internationales pour tenter de s’approcher mieux du minimum, par exemple en <a href="https://doi.org/10.1126/science.1200488,https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0255270116304329">développant de nouvelles membranes ou en améliorant le procédé d’osmose inverse ou les prétraitements</a>.</p>
<p>À noter, l’<a href="https://doi.org/10.1016/j.desal.2021.115035">utilisation d’énergie électrique d’origine renouvelable (éolien, solaire ou force marée-motrice) pour dessaler l’eau de mer par osmose inverse</a> a fait l’objet de travaux de recherches dans de nombreux laboratoires de par le monde. <a href="https://www.toulouse-biotechnology-institute.fr/poles/equipe-sophye/">Toulouse Biotechnology Institute Toulouse Biotechnology Institute</a> s’intéresse à l’<a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0011916417303934">utilisation d’énergie solaire pour le dessalement par osmose inverse</a> et par <a href="https://doi.org/10.1016/j.cej.2010.11.030">distillation</a>. De petites installations de dessalement autonomes sont commercialisées par des entreprises françaises, mais <a href="https://doi.org/10.1016/j.desal.2017.11.018">moins d’1 % des eaux dessalées dans le monde en 2018 étaient produites en utilisant des énergies renouvelables</a>. </p>
<h2>Quels usages pour le dessalement face à ces coûts énergétiques et environnementaux ?</h2>
<p>Une eau obtenue par dessalement est donc une eau chère et à fort impact environnemental : elle doit être produite après réflexion et utilisée avec parcimonie. Il faudrait donc réserver son usage à des besoins vitaux, comme l’eau potable des populations qui n’y ont pas accès. </p>
<p>À titre de comparaison, il est beaucoup moins énergivore et donc plus soutenable de produire une eau potable à partir d’une eau souterraine ou de surface. Là encore, la consommation énergétique dépend de la ressource : pour une eau souterraine très claire, 0,02 kWh par cube d’eau est nécessaire ; contre 0,75 kWh par cube d’eau pour une eau de surface polluée par des micropolluants (sans compter le transport d’eau vers l’usine et de distribution) — en d’autres termes, le coût énergétique est 2,5 à 100 fois moindre que pour un dessalement par osmose inverse (selon les sites). </p>
<p>Il faut se tourner vers le dessalement seulement quand d’autres alternatives moins énergivores ne sont pas envisageables. </p>
<h2>Les effets du changement climatique sur la disponibilité de l’eau douce</h2>
<p>Dans le futur, la montée du niveau des océans liée au changement climatique va amplifier les effets des marées en augmentant l’intrusion d’eau de mer dans les rivières à partir des estuaires. Cette intrusion et le mouvement ascendant et descendant des marées vont modifier la qualité des eaux de rivière, qui sera très variable dans le temps, d’autant que les eaux seront salines à marée haute. </p>
<p>Ainsi, la question du dessalement des eaux de rivières va se poser. C’est déjà le cas dans des pays déjà très affectés par le changement climatique, comme le Vietnam, pour lequel les <a href="https://cest2015.gnest.org/papers/cest2015_01382_oral_paper.pdf">eaux de surface du Fleuve rouge ou du Mékong sont trop salées jusqu’à 100 kilomètres de l’estuaire</a>. </p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/531689/original/file-20230613-29-c44ezs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/531689/original/file-20230613-29-c44ezs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/531689/original/file-20230613-29-c44ezs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=177&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/531689/original/file-20230613-29-c44ezs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=177&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/531689/original/file-20230613-29-c44ezs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=177&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/531689/original/file-20230613-29-c44ezs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=222&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/531689/original/file-20230613-29-c44ezs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=222&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/531689/original/file-20230613-29-c44ezs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=222&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les prétraitements de l’eau avant de la dessaler par osmose inverse peuvent dépendre de la source d’approvisionnement en eau.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Corinne Cabassud</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Les scientifiques ont une expertise sur le traitement des eaux de rivière ou des eaux salines, mais pas des eaux de rivière salines influencées par les marées, dont la composition et la concentration en sels et autres composants varient au cours du temps. Il est donc important pour <a href="https://www.toulouse-biotechnology-institute.fr/poles/equipe-sophye/">notre équipe à Toulouse Biotechnology Institute</a> de poursuivre des travaux de recherches sur ces sujets.</p>
<p>Quelle que soit la nature de l’eau utilisée pour produire de l’eau douce et potable, celle-ci doit être considérée avec beaucoup d’attention et de sobriété et la nature de ses usages repensée, au prisme des connaissances scientifiques, et des enjeux climatiques, économiques et sociétaux en associant les usagers de l’eau et les collectivités.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207232/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Corinne Cabassud ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dessaler l’eau de mer pour la rendre potable est cher et a un fort impact environnemental. Une technologie à utiliser donc avec parcimonie, pour répondre à des besoins vitaux.Corinne Cabassud, Professeure des Universités en Génie des Procédés et Environnement, INSA ToulouseLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2066402023-06-07T19:42:42Z2023-06-07T19:42:42Z3 millions de piscines privées en France : comment réduire le gaspillage d’eau ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/530395/original/file-20230606-29-3i9hzm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2689%2C2016&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La France compte de plus en plus de piscines privées.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/coastal-area-beach-front-houses-saint-1388849321">Rudmer Zwerver/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Le nombre de piscines privées en France est en forte progression, de l’ordre de 8 %, ces dernières années atteignant <a href="https://www.propiscines.fr/piscine-secteur/marche-piscine">3,2 millions en 2022</a> d’après la Fédération des Professionnels de la Piscine et du Spa. Cela place la France au deuxième rang mondial derrière les États-Unis en termes de marché. Les bassins actuels ont une capacité minimum de 10 m<sup>3</sup> et la moyenne est de 32 m<sup>3</sup> avec une tendance à la baisse ces dernières années.</p>
<p>L’eau des piscines doit être <a href="https://www.pays-de-la-loire.ars.sante.fr/media/7396/download?inline">constamment désinfectée</a>, car elle est en permanence contaminée par des bactéries, algues et champignons qui peuvent être pathogènes comme le rappelle l’ARS. Pour conserver une eau saine dans les piscines, les propriétaires privés ont trois solutions principales à leur disposition : le chlore (lent ou stabilisé), l’électrolyse au sel et l’ozone.</p>
<p>L’électrolyseur au sel et l’ozonateur sont des dispositifs assez coûteux qui peuvent être choisis lors de l’installation ou de la rénovation de la piscine. Ils ne représentaient en 2017 que, respectivement, <a href="https://www.propiscines.fr/sites/default/files/le_marche/dp_fpp_confpresse_15112022_val.pdf">27,9 % et 4,4 % des installations</a>. L’électrolyseur au sel est un dispositif introduit dans les canalisations de la piscine qui est capable par une réaction électrochimique de produire in situ de <a href="https://www.suezwaterhandbook.fr/eau-et-generalites/processus-elementaires-du-genie-physico-chimique-en-traitement-de-l-eau/electrolyse/applications-en-traitement-des-eaux">l’eau de javel à partir d’une eau légèrement salée (3 à 7 g/L de NaCl dans l’eau)</a>. L’eau de javel ainsi formée est produite en continu dans le bassin. L’ozonateur est un dispositif qui produit de l’ozone à partir de l’oxygène de l’air en utilisant une décharge corona ou une lampe UV. L’ozone est capable de désinfecter l’eau très efficacement.</p>
<p>Le chlore lent est la technique de décontamination très largement majoritaire dans les piscines privées françaises. Ce traitement chimique est basé sur la combinaison de 2 molécules. La première, l’eau de javel (contenant le chlore) est rapidement dégradée par les rayons UV du soleil. Il a été montré que <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/004313549290232S">cette photodégradation est totale en 37 minutes</a> seulement sous un ensoleillement de juin. La deuxième, l’acide isocyanurique est le stabilisant qui ralentit cette dégradation et permet à l’eau de javel de rester active. Ce chlore lent se présente sous forme de galets d’acide trichloroisocyanurique.</p>
<p>Le propriétaire de piscine place ces galets dans le skimmer de son installation. Les skimmers sont les orifices à hauteur de la ligne d’eau qui permettent son aspiration et sa filtration avant d’être réinjectée par le fond du bassin. La dissolution lente du galet libère le stabilisant et l’eau de javel nécessaire à la désinfection. L’efficacité du stabilisant est démontrée pour des <a href="https://ajph.aphapublications.org/doi/epdf/10.2105/AJPH.55.10.1629">concentrations de 25-50 mg/L</a> même si elle diminue dès 50 mg/L. En effet, une trop grande stabilisation provoque un effet néfaste de blocage de l’eau de javel qui perd son efficacité.</p>
<p>L’acide isocyanurique est une molécule <a href="https://www.merckmillipore.com/FR/fr/product/msds/MDA_CHEM-820358?Origin=PDP">stable chimiquement</a>. Cette concentration est donc atteinte très vite. En France, la concentration limite définie par la réglementation pour les piscines à usage collectif est <a href="https://www.occitanie.ars.sante.fr/media/86753/download?inline">fixée à 75 mg/L</a>, car pour cette concentration la stabilisation de l’acide hypochloreux est telle qu’il n’est plus efficace pour décontaminer le bassin.</p>
<p>À ce jour, la seule solution pour le propriétaire de piscine est donc de <a href="https://www.pays-de-la-loire.ars.sante.fr/media/7396/download?inline">vidanger au moins 25 % de l’eau du bassin</a>.</p>
<h2>90 millions de m³ d’eau utilisées uniquement pour l’entretien</h2>
<p>Pour une piscine utilisée classiquement cette opération est menée tous les 6 mois, c’est-à-dire au moins une fois par an. 25 % d’eau neuve sont donc ajoutées tous les 6 mois. Cela s’ajoute aux 50 L/baigneur/jour d’eau « neuve » à introduire dans le bassin <a href="https://www.pays-de-la-loire.ars.sante.fr/media/7396/download?inline">suivant l’ARS</a> quel que soit le mode de désinfection.</p>
<p>Un petit calcul permet de rapidement se faire une idée des quantités d’eau du réseau potable utilisée par les 3,2 millions de piscines. En effet, en moyenne 2 baigneurs/jour utilisent une piscine sur les 4 mois d’été, il faut donc ajouter 100 L d’eau/jour pendant 120 jours c’est-à-dire 12 m<sup>3</sup> par piscine et deux fois par an, faire la vidange d’un quart du bassin pour réduire la concentration d’acide isocyanurique c’est-à-dire 16 m<sup>3</sup> en moyenne. Chaque piscine nécessite donc 28 m<sup>3</sup> d’eau par an pour son entretien normal. Ce volume semble faible, mais <a href="https://www.cieau.com/le-metier-de-leau/ressource-en-eau-eau-potable-eaux-usees/quels-sont-les-usages-domestiques-de-leau/">correspond à 23 % de la consommation moyenne</a> annuelle d’un ménage en France. À l’échelle des 3,2 millions de piscines, ce volume devient 89,6 millions de m<sup>3</sup> d’eau potable consommés par an pour entretenir des piscines privées en France. Cela peut sembler faible (1,3 %) en regard des <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/leau-en-france-ressource-et-utilisation-synthese-des-connaissances-en-2021">7 milliards de m³ d’eau potable consommée en France chaque année</a>.</p>
<h2>Une nouvelle méthode pour réduire le gaspillage</h2>
<p>Pour réduire ce gaspillage en eau, des recherches sont menées depuis plusieurs années. Plusieurs approches sont suivies pour éviter d’avoir à vidanger un quart de l’eau comme c’est le cas actuellement. Une biodégradation enzymatique a été décrite qui <a href="https://pubs.rsc.org/en/content/articlelanding/1878/ct/ct8783300300">hydrolyse l’acide isocyanurique en biuret</a> qui, au contact de l’eau de javel à pH basique, peut être <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC9118981/">dégradé en diazote et en dioxyde de carbone</a>. À pH neutre, en revanche, le biuret n’est pas facilement dégradé dans le bassin. Cette voie ne semble donc pas très efficace, car l’eau du bassin doit être maintenue entre pH 7 et 7,4, c’est-à-dire à pH neutre.</p>
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<p>Un filtre à charbon actif <a href="https://patentimages.storage.googleapis.com/e9/39/b0/e1bfdbcb1be60d/US20140076814A1.pdf">a également été breveté</a> pour cette application en 2014, mais l’installation doit être adaptée pour insérer un tel filtre dans le circuit d’eau. Cette voie n’a alors jamais été développée. Le charbon actif a la propriété d’absorber à sa surface un très grand nombre de composés organiques.</p>
<p><a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0721957181800336">Un champignon, Sporothrix schenkii</a>, est connu pour se développer en dégradant l’acide isocyanurique, mais là encore, cette approche de laboratoire ne peut pas être mise en place réellement.</p>
<p>De notre côté, nous avons travaillé au cours de 2 thèses de doctorat au laboratoire sur une solution de chélation (adhésion d’une molécule à une autre) de l’acide isocyanurique sur un support moléculaire solide qui permettrait de le retirer du bassin par simple filtration. Nos molécules ont été brevetées et des tests de montée en échelle et d’industrialisation sont en cours. Le concept s’inspire des <a href="https://pubs.acs.org/doi/10.1021/ja00212a065">dérivés d’Hamilton</a> qui sont bien connus pour piéger les molécules de la famille des barbituriques dont la structure est assez voisine de celle de l’acide isocyanurique.</p>
<p>Nous avons simplifié au maximum le motif chélatant pour que le dispositif soit concurrentiel et commercialisable. Enfin, notre objectif était de pouvoir l’utiliser dans toutes les piscines privées sans changement d’installation. Les travaux se poursuivent et nous espérons que cette approche puisse résoudre le problème du gaspillage d’eau dans les piscines privées.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/206640/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Véronique Bonnet a reçu des financements du conseil Régional des Hauts-de-France, de l'ANR. Elle a reçu des financements de la société Ocedis qui a financé les travaux sur la décontamination des eaux de piscine. </span></em></p>L’eau des piscines doit être régulièrement désinfectée et changée. De nouvelles techniques existent pour limiter le gaspillage en eau.Véronique Bonnet, Professeur en chimie, Université de Picardie Jules Verne (UPJV)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2049702023-06-04T16:05:59Z2023-06-04T16:05:59ZSécheresse, crise énergétique et nucléaire en France, quels liens ?<p>L’année 2022 a été marquée par des records de canicule sans précédent en France depuis 1947, et d’un <a href="https://meteofrance.com/actualites-et-dossiers/actualites/2022-annee-la-plus-chaude-en-france">déficit pluviométrique de 25 %</a>. Les flammes ont ravagé plus de <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/gironde/bordeaux/incendies-en-gironde-l-inquietude-en-gironde-apres-l-absence-de-mesures-pour-lutter-contre-le-feu-2715066.html">72 000 hectares de forêts</a>, dévastant la biodiversité et entraînant une <a href="https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/incendies-en-gironde/incendies-en-gironde-quelles-sont-les-consequences-pour-lenvironnement-et-le-tourisme_5262052.html">chute drastique des revenus touristiques estivaux</a>.</p>
<p>Le secteur énergétique n’a pas été épargné par la sécheresse exceptionnelle, qui a considérablement réduit la production d’hydroélectricité. Les contraintes dues au manque d’eau ont également affecté la production nucléaire, déjà limitée par la fermeture pour maintenance de 65 % des centrales nucléaires en activité.</p>
<p>La France, exportateur net d’électricité depuis 40 ans, a ainsi dû l’importer d’Allemagne, d’Espagne, de Belgique et de Grande-Bretagne. 60 % des 16,5 TWh importés ont été utilisés entre juillet et septembre, quand les réserves pour alimenter les centrales hydroélectriques étaient au plus bas.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=228&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=228&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=228&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=286&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=286&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/524134/original/file-20230503-176-fc2tzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=286&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution saisonnière de la production mensuelle d’électricité (TWh) en France par filière.</span>
<span class="attribution"><span class="source">RTE</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>L’impact de la sécheresse sur la production d’énergie nucléaire est plutôt structurel, imposant des limitations à la fois sur la prise d’eau des bassins environnants et sur le moment de leur restitution dans l’environnement : d’une part, le faible niveau d’eau et le besoin de garantir un débit minimal pour assurer la vie des écosystèmes naturels empêchent la prise des débits nécessaires pour le refroidissement des réacteurs ; d’autre part, une température plus élevée des eaux prélevées réduit l’efficacité du processus de refroidissement.</p>
<h2>Restrictions légales</h2>
<p>Ainsi, la <a href="https://www.eaurmc.fr/jcms/pro_118205/fr/une-etude-sur-les-debits-du-rhone-pour-anticiper-leur-evolution">puissance produite doit être potentiellement réduite</a> pour respecter les contraintes. Dans le cas des systèmes de refroidissement à circuit ouvert, des limitations s’ajoutent à la température des eaux restituées à l’environnement, afin de garantir la protection et la qualité écologique du fleuve récepteur.</p>
<p>L’écart de température maximale est défini par la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32006L0044&from=EN">directive 2006/44/CE du Parlement européen</a>, qui prévoit toutefois que les États membres peuvent s’écarter des paramètres de la loi lors de circonstances météorologiques exceptionnelles ou dans le cas de conditions géographiques spéciales.</p>
<h2>Coûts économique et environnemental</h2>
<p>Au cours de l’été 2022, cette dernière stratégie a été nécessaire pour cinq centrales françaises (Bugey, Saint Alban, Tricastin, Blayais et Golfech) afin d’assurer la fourniture du service sans affecter les réserves de gaz et d’eau requises pour l’hiver. Tout en fonctionnant en dérogation, certains réacteurs ont malgré tout dû subir un arrêt forcé en raison des faibles débits fluviaux.</p>
<p>L’ensemble de ces conditions défavorables a considérablement réduit l’approvisionnement en énergie nucléaire par rapport à la moyenne des années précédentes. Bien qu’il n’y ait pas eu d’interruptions significatives de <a href="https://analysesetdonnees.rte-france.com/bilan-electrique-synthese">l’approvisionnement des utilisateurs</a>, les limitations constatées ont accentué une crise d’ordre économique, faisant monter le prix de l’énergie pour inclure également une prime de risque.</p>
<p>À cela s’ajoute le coût environnemental lié à l’utilisation excessive des centrales thermiques, entraînant une augmentation des <a href="https://analysesetdonnees.rte-france.com/bilan-electrique-synthese">émissions de CO2eq d’environ 3,5 Mt par rapport à 2021</a>. L’hiver particulièrement sec de début 2023 a <a href="https://www.cleanenergywire.org/news/catastrophic-winter-drought-france-bodes-ill-europes-power-production-2023">exacerbé les préoccupations pour l’été à venir</a>.</p>
<h2>Petites centrales et circuit fermé</h2>
<p>D’ici à 2030, la nouvelle stratégie France 2030 proposée par le gouvernement français prévoit une augmentation significative de <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-eco/nucleaire-macron-veut-investir-un-milliard-d-euros-d-ici-a-2030-et-developper-des-petits-reacteurs-20211012">petites centrales nucléaires d’une capacité installée inférieure à 300 MW</a>. Conformément à la réglementation en vigueur, celles-ci seront obligatoirement équipées d’un <a href="https://www.rte-france.com/analyses-tendances-et-prospectives/bilan-previsionnel-2050-futurs-energetiques#Lesdocuments">système de refroidissement à circuit fermé avec tour d’évaporation</a>.</p>
<p>Ce choix reflète la nécessité d’une meilleure gestion du risque climatique : les besoins de refroidissement des centrales sont en effet proportionnels à la capacité installée, une taille plus petite garantirait donc la réduction de la consommation d’eau des centrales elles-mêmes.</p>
<p>Les petites installations sont en outre généralement de conception plus simple et répondent à des contraintes techniques moins importantes, ce qui facilite l’identification de zones appropriées pour leur implantation et leur distribution sur le territoire national.</p>
<p>Mais, à très court terme, que peut faire la France pour gérer l’urgence énergétique dans un climat de plus en plus chaud et sec ?</p>
<h2>Nécessaire rénovation du parc</h2>
<p>En suivant l’exemple de l’Espagne voisine, qui compte sur le nucléaire pour plus d’un cinquième de sa production d’électricité malgré un climat beaucoup plus aride, la France devra probablement faire davantage appel aux dérogations accordées <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32006L0044&from=EN">par la directive 2006/44/CE</a> sur la température maximale autorisée pour les eaux de rejet.</p>
<p>Cette solution ne minimiserait toutefois que les pertes d’efficacité dues aux vagues de chaleur et non celles dues à une pénurie de ressources en eau. Dans ce dernier cas, il sera nécessaire de procéder à une rénovation de la partie du parc nucléaire qui repose actuellement sur des systèmes de refroidissement à cycle ouvert (qui tendent à prélever plus d’eau), en se dotant des systèmes de refroidissement hybrides avec une tour supplémentaire avant le rejet des eaux dans l’environnement.</p>
<p>C’est précisément le cas de la centrale espagnole d’Ascó qui a été la première au monde à suivre ce type de reconversion après sa mise en service en 1986, afin de mieux faire face aux périodes de faible débit de la rivière Èbre et d’éviter le rejet d’eaux trop chaudes.</p>
<h2>Accélération du nucléaire</h2>
<p>Ces réflexions s’inscrivent dans le contexte du <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/examen-du-projet-loi-sur-lacceleration-du-nucleaire-au-senat">projet de loi</a> relatif à l’accélération des procédures liées à la <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/23006_Nucleaire-DP-3.pdf">construction de nouvelles installations nucléaires</a> à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.</p>
<p>Développé sur 3 axes, il est fondé sur la réduction de la consommation d’énergie par la sobriété et l’efficacité énergétique, l’accélération des énergies renouvelables afin de garantir une électricité abordable et décarbonée et la relance du programme nucléaire.</p>
<p>Cette dernière prévoit la construction de six nouveaux réacteurs pressurisés européens (EPR2, chacun d’une puissance électrique générée de 1 670 MW) en 25 ans avec un investissement de 51,7 milliards, et la prolongation des réacteurs en service – la durée de vie utile des réacteurs existants est d’environ de 40 ans, mais ils atteindront une moyenne d’âge de 45 ans en 2030.</p>
<p>Un choix critiqué par les opposants au nucléaire, qui <a href="https://www.cbsnews.com/news/france-nuclear-reactor-edf-penly-1-pipe-crack-maintenance-issues-aging-plants/">soulignent la détérioration déjà existante du parc</a>, alors que le texte ne modifie ni le processus d’autorisation environnementale ni le niveau d’appréciation du cadre de sûreté.</p>
<h2>L’énergie, 51 % des prélèvements en eau</h2>
<p>Cette situation montre la nécessité d’un plan de gestion intégré qui prenne en compte les synergies complexes entre environnement, système énergétique et disponibilité saisonnière et de long terme des ressources en eau. Un enjeu qui concerne aussi la production hydroélectrique.</p>
<p>Lors de sa présentation du nouveau « plan eau » qui prévoit 10 % d’économie dans tous les secteurs, le <a href="https://www.elysee.fr/front/pdf/elysee-module-21030-fr.pdf">3 mars 2023</a>, Emmanuel Macron a annoncé un programme d’investissements pour réaliser des économies dans le secteur énergétique, notamment en faisant passer les centrales en circuit fermé.</p>
<p>Avec le nucléaire et l’hydroélectricité, l’énergie <a href="https://www.elysee.fr/front/pdf/elysee-module-21030-fr.pdf">représente 51 % des prélèvements et 12 % de la consommation</a> ; et des 4,1 milliards de m<sup>3</sup> d’eau prélevés chaque année en France, le refroidissement des centrales constitue le <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/leau-en-france-ressource-et-utilisation-synthese-des-connaissances-en-2022">3ᵉ consommateur</a> (12 %) après l’agriculture (58 %) et l’eau potable (26 %).</p>
<h2>Changements de débits à anticiper</h2>
<p>Ainsi, bien que la France ne connaisse pas encore de déficit chronique mais seulement saisonnier, l’efficience en matière d’usage de l’eau pour la production d’énergie reste une priorité pour lutter contre le changement climatique. Cette stratégie requiert aussi une planification locale des ressources, notamment <a href="https://www.elysee.fr/front/pdf/elysee-module-21030-fr.pdf">du rythme des barrages, pour répondre aux enjeux du climat</a> – mais en accord avec les différents usages d’eau prédominants dans chaque territoire.</p>
<p>Des études à l’échelle du bassin hydrologique seront essentielles pour anticiper les débits fluviaux et leur évolution à long terme : une <a href="https://www.eaurmc.fr/jcms/pro_118205/fr/une-etude-sur-les-debits-du-rhone-pour-anticiper-leur-evolution">première étude est en cours sur le bassin du Rhône</a> où est générée ¼ de la production électrique nationale (nucléaire et hydroélectrique).</p>
<p>En ce qui concerne la production nucléaire, le changement de débit du fleuve pourrait forcer à une réduction de puissance théorique, qui pourrait aller jusqu’à <a href="https://www.eaurmc.fr/jcms/pro_118205/fr/une-etude-sur-les-debits-du-rhone-pour-anticiper-leur-evolution">20 %-25 % en saison estivale</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=408&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=408&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/524138/original/file-20230503-23-pbi6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=408&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Projection des baisses de production électrique sous l’effet du changement climatique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">EARRMC</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<h2>Fin de l’abondance</h2>
<p>La production annuelle d’hydroélectrique estimée, qui dans le bassin s’élève à plus de 17 000 GWh et couvre 3,4 % de la demande nationale, serait en revanche globalement stable. Avec des écarts saisonniers marqués par une tendance à la hausse des débits disponibles pour la production d’hydroélectricité en automne, mais à la baisse entre juillet et octobre.</p>
<p>Ces analyses ne concernent que le Rhône, qui est caractérisé pour des installations au fil de l’eau, et ne prennent pas en compte ses affluents. Aussi, que ce soit pour l’hydroélectrique ou pour le nucléaire, ils ne considèrent pas l’évolution de la demande en électricité à laquelle l’offre répond.</p>
<p>La planification intégrée à long terme et saisonnière entre secteurs serait donc la seule solution pour un futur durable. C’est véritablement <a href="https://www.youtube.com/watch?v=fOAc2RmeAHU">« la fin de l’abondance »</a>, comme le disait Macron en août 2022.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204970/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Giulia Vaglietti est membre de la Chaire économie du climat (CEC) et Inrae. Elle a reçu des financements de CEC et Inrae dans le cadre de son doctorat. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Anna Creti ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La sécheresse de l’été 2022 a fortement affecté la production énergétique nucléaire et hydroélectrique. Quelles conclusions en tirer ?Giulia Vaglietti, Doctorante, InraeAnna Creti, Professeur, Directrice de la Chaire Economie du Climat, Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2057282023-06-01T13:13:31Z2023-06-01T13:13:31ZMoins de cours de natation et pénurie de sauveteurs : les risques liés à la baignade pourraient augmenter cet été<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/529453/original/file-20230531-23197-7g4mhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1920%2C1080&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La fermeture des piscines au début de la pandémie de Covid-19 a privé des millions de personnes au Canada de cours de natation.
</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Chaque année, des <a href="https://www.lifesavingsociety.com/media/370343/plancanadiendeprevention-fr-9eedition-20220520.pdf">centaines de personnes se noient</a> accidentellement au Canada. Le manque de cours de natation, la pénurie de sauveteurs et les changements climatiques pourraient rendre les activités aquatiques encore plus risquées cet été.</p>
<p>Bon nombre des facteurs de protection qui existaient auparavant — comme les cours de natation et les lieux de baignade surveillés — se font rares, alors que le temps chaud incite les gens à trouver de <a href="https://www.cbc.ca/news/canada/saskatchewan/drowning-calls-rise-1.6531663">nouveaux endroits, souvent peu connus et dangereux, pour se rafraîchir</a>.</p>
<p><a href="https://www.lapresse.ca/societe/famille/2021-10-01/des-cours-de-natation-tombent-a-l-eau.php">La fermeture des piscines</a> au début de la pandémie de Covid-19 a privé des millions de personnes au Canada de cours de natation. Maintenant que les installations sont ouvertes dans tout le pays, les parents <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1968069/piscine-nager-sauveteur-penurie-quebec">ont beaucoup de mal</a> à inscrire leurs enfants aux cours qui sont offerts.</p>
<p>En conséquence, de nombreux parents s’inquiètent, craignant que leurs enfants <a href="https://www.thewhig.com/news/parents-frustrated-by-lack-of-swim-lesson-spaces-in-kingston">n’acquièrent pas les compétences nécessaires</a> pour être en sécurité dans l’eau, sur l’eau ou près de l’eau. Bien que nous n’ayons pas de données similaires au Canada, il est intéressant de savoir qu’une enquête menée en Australie a révélé que 55 % des parents <a href="https://www.royallifesaving.com.au/about/news-and-updates/news/new-data-shows-more-work-needed-to-encourage-swimming-and-water-safety">ont signalé une baisse</a> des habiletés en natation de leurs enfants de 2019 à 2021.</p>
<h2>Cours et sauveteurs</h2>
<p>Certaines études indiquent que les cours de natation peuvent jouer un rôle important dans la protection des enfants contre la noyade. Cependant, les <a href="http://dx.doi.org/10.1136/injuryprev-2014-041216">données relatives à l’efficacité des cours</a> dans la prévention des noyades ne sont pas suffisamment solides. </p>
<p>Les personnes qui savent nager peuvent surestimer leurs aptitudes et s’aventurer dans des <a href="https://publications.aap.org/pediatrics/article-abstract/112/2/440/63350/Prevention-of-Drowning-in-Infants-Children-and?redirectedFrom=fulltext">endroits risqués</a>, s’exposant ainsi à des conditions dangereuses. Alors que l’on s’inquiète du manque de cours de natation au Canada, on a tendance à sous-estimer les risques de la baignade dans des zones sans surveillance.</p>
<p>Au Canada, moins d’un pour cent des noyades se produisent dans des endroits surveillés par des <a href="https://www.lifesavingsociety.com/media/343293/plancanadiendepreventiondelanoyade8e.pdf">moniteurs de natation ou des sauveteurs</a>. Cependant, ces lieux sont actuellement en quantité insuffisante. Lorsque la Covid-19 a contraint la fermeture des piscines et des plages, cela a entraîné l’arrêt des cours de formation et de certification des sauveteurs.</p>
<p>La <a href="https://ottawacitizen.com/opinion/sampson-and-white-fix-the-canada-wide-shortage-of-lifeguards-and-swim-instructors">Société de sauvetage canadienne</a> a indiqué que, en 2020, il y avait 60 % de candidats en moins pour les formations en sauvetage et en surveillance aquatique et un cinquième du nombre habituel de candidats à la formation de moniteur de natation.</p>
<p>Le manque de sauveteurs et de moniteurs de natation s’est répercuté sur les années suivantes. Il y a beaucoup moins de personnes qui travaillent dans le secteur aquatique qu’avant la pandémie. Dans l’ensemble du Canada, le ratio chômeurs-postes vacants est <a href="https://www.statcan.gc.ca/fr/sujets-debut/travail_/tendances-penurie-main-oeuvre-canada">à un niveau historiquement bas</a>, ce qui aggrave le déficit de sauveteurs et de moniteurs de natation.</p>
<p>Dans certaines régions, d’anciens travailleurs du secteur aquatique ont accepté d’autres emplois qui exigent moins de responsabilités et une <a href="https://www.caledonenterprise.com/news/town-of-caledon-launches-pilot-project-to-address-aquatic-staff-shortage/article_b2a8211c-b7b7-5ba8-ab80-b07f4b56fcca.html">formation moins coûteuse</a>.</p>
<p>La pénurie de personnel dans le secteur aquatique est telle que le gouvernement de l’Ontario envisage de réviser s aLoi sur la protection et la promotion de la santéafin d’abaisser <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1972154/piscine-natation-age-minimum-sauveteur">l’âge minimum des sauveteurs de 16 à 15 ans</a>. Certaines municipalités proposent de <a href="https://www.cbc.ca/news/canada/british-columbia/west-van-lifeguard-shortage-1.6471221">payer la formation pour devenir sauveteur</a> et offrent des incitations, comme des <a href="https://www.caledonenterprise.com/news/town-of-caledon-launches-pilot-project-to-address-aquatic-staff-shortage/article_b2a8211c-b7b7-5ba8-ab80-b07f4b56fcca.html">cartes-cadeaux de Starbucks</a>, aux personnes qui acceptent des quarts de travail.</p>
<h2>Baignade dangereuse</h2>
<p>Pendant qu’on réduit les heures de surveillance des <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/2022-06-07/penurie-de-sauveteurs/faute-de-recrutement-l-acces-a-la-baignade-sera-limite.php">plages</a> et des <a href="https://www.noovo.info/nouvelle/la-penurie-de-sauveteurs-a-des-repercussions-sur-les-piscines-dans-tout-le-canada.html">piscines</a> en raison du manque de personnel et que le <a href="https://www.noovo.info/nouvelle/nous-sommes-tout-simplement-en-feu-preparez-vous-a-un-autre-ete-chaud-previent-un-expert.html">climat se réchauffe</a>, de plus en plus de personnes se cherchent des endroits non surveillés où se rafraîchir. Cela pourrait avoir des <a href="https://www.ledevoir.com/societe/742290/augmentation-des-noyades-le-nombre-de-noyades-a-bondi-avec-la-pandemie">conséquences tragiques</a>.</p>
<p>Quand on se baigne dans un lieu qu’on ne connaît pas, on n’a souvent pas conscience des dangers cachés, tels que des tombants ou des rochers, ou encore des <a href="https://theconversation.com/rip-currents-are-a-natural-hazard-along-coasts-heres-how-to-spot-them-63081">courants d’arrachement</a>. Ces éléments ne sont pas toujours signalés dans les zones non surveillées. L’eau froide peut aussi constituer un risque, même pendant les vagues de chaleur estivales. </p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/525954/original/file-20230512-24221-skp3ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/525954/original/file-20230512-24221-skp3ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/525954/original/file-20230512-24221-skp3ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/525954/original/file-20230512-24221-skp3ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/525954/original/file-20230512-24221-skp3ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/525954/original/file-20230512-24221-skp3ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/525954/original/file-20230512-24221-skp3ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/525954/original/file-20230512-24221-skp3ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le secteur aquatique compte beaucoup moins de travailleurs qu’avant la pandémie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Même les bons nageurs auront du mal à nager dans de l’eau froide en raison de <a href="https://beyondcoldwaterbootcamp.com/4-phases-of-cold-water-immersion">réactions physiologiques</a>. Entrer dans de l’eau froide peut causer un état de choc, qui engendre de l’hyperventilation. Si les voies respiratoires sont sous l’eau au moment où on hyperventile, on risque d’inhaler de l’eau, ce qui peut entraîner la noyade. Il est donc extrêmement important de porter un gilet de sauvetage pour que les voies respiratoires restent hors de l’eau.</p>
<p>Si on survit à la phase de choc, on risque de souffrir d’une <a href="https://csbc.ca/fr/l-eau-froide">perte de motricité due au froid</a>, qui se déclare lorsque les muscles et les nerfs se refroidissent. Cela peut causer un <a href="https://www.aviva.ca/fr/outils/connecte/fr-4-sep-2019-surviving-in-cold-water/">épuisement à la nage</a>, lorsqu’il devient impossible de garder la tête hors de l’eau. Là encore, le port d’un gilet de sauvetage peut jouer un rôle déterminant dans la survie, car il permet de rester à flot et d’atteindre un endroit sûr.</p>
<p><a href="https://www.science-et-vie.com/questions-reponses/combien-de-temps-peut-on-survivre-dans-une-eau-glacee-73717.html">L’hypothermie</a> survient lorsque la température du corps descend en dessous de 35 °C, ce qui prend généralement au moins 30 minutes, mais cela dépend de la température de l’eau et de la masse corporelle. Une personne souffrant d’hypothermie peut perdre connaissance. Si elle porte un gilet de sauvetage, elle continuera à flotter.</p>
<p>Si les Canadiens sont confrontés à un risque accru d’accidents aquatiques, il existe des moyens de gérer ce risque. D’abord, il vaut mieux nager dans des zones surveillées. Il est aussi recommandé de porter un gilet de sauvetage en bateau, surtout dans des eaux froides ou qu’on ne connaît pas, ou encore, si on n’est pas un bon nageur. Ensuite, on devrait toujours nager avec quelqu’un. Finalement, on devrait s’assurer de rester à portée de main des enfants.</p>
<p>Si vous êtes l’adulte chargé de surveiller des personnes qui se baignent, rangez tout appareil qui pourrait vous distraire et concentrez-vous sur ce qui se passe dans l’eau. Le respect de ces pratiques vous aidera à assurer la sécurité de vos proches cet été.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205728/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Audrey R. Giles est financée par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada et par le Programme de contribution à la sécurité nautique de Transports Canada. Elle est membre de la Coalition canadienne pour la prévention des noyades.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sofia Pantano et Umerdad Khudadad ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Les cours de natation ont été suspendus et les piscines fermées durant la pandémie. À cela s’ajoute une pénurie de maîtres-nageurs, ce qui rendra les activités aquatiques plus risquées cet été.Audrey R. Giles, Professor in Human Kinetics, L’Université d’Ottawa/University of OttawaSofia Pantano, Masters Student, Human Kinetics, L’Université d’Ottawa/University of OttawaUmerdad Khudadad, PhD Student, School of Human Kinetics, L’Université d’Ottawa/University of OttawaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2042252023-05-23T17:51:35Z2023-05-23T17:51:35ZFaire décoller une goutte, ou comment utiliser des ultrasons pour sculpter de l’eau<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/525577/original/file-20230511-15-jniafg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C13%2C2986%2C1800&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La déformation de l'interface entre eau et air engendrée par l'énergie acoustique est ici haute de 4 millimètres. </span> <span class="attribution"><span class="source">Thibaut Devaux, Félix Sisombat</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Ceci n’est pas une goutte qui tombe, mais bien une goutte qui décolle… poussée par des ultrasons.</p>
<p>Pour la faire décoller, nous avons disposé sous la surface de l’eau un type de haut-parleur qui génère des ultrasons (un transducteur acoustique). Il est orienté vers l’interface entre deux fluides, par exemple ici entre l’eau et l’air, mais cela fonctionne aussi avec d’autres fluides. Quand les ultrasons atteignent une intensité suffisamment élevée, une <a href="https://theses.hal.science/tel-00283449/document">goutte d’eau peut se former, se soulever et même se détacher</a> de la surface. Ici, l’intensité est juste en dessous de ce seuil et la goutte reste « attachée ».</p>
<p>Si le signal acoustique continue, plusieurs gouttes d’eau sont successivement formées et éjectées. On parle de <em>fontaine acoustique</em>.</p>
<h2>Faire léviter des petits objets avec des ultrasons… et les déplacer</h2>
<p>En première approximation, la pression de radiation est un effet du second ordre, donc une grandeur nettement plus petite que la pression acoustique dont elle est la moyenne temporelle. La pression de radiation se manifeste comme une force mécanique lorsqu’elle s’applique sur une surface. Grâce à cette force acoustique, on peut manipuler de petits objets de l’ordre du millimètre tels que des gouttes d’eau, des composants électroniques et <a href="https://pubs.aip.org/aip/apl/article/89/21/214102/327898/Acoustic-method-for-levitation-of-small-living">même de petits insectes</a>. Dans ces cas, l’objet est directement poussé par le faisceau acoustique.</p>
<p>En orientant un transducteur vers l’objet et en dimensionnant judicieusement le système, il est possible d’avoir une force de radiation acoustique qui compense les effets de la gravité terrestre et permet alors à l’objet de léviter dans l’espace. En ajoutant des transducteurs acoustiques, des tourbillons (ou vortex) acoustiques peuvent être créés afin de manipuler de façon précise l’objet en lévitation : en modifiant le faisceau acoustique, on modifie l’<em>œil de la tornade</em> et on peut déplacer l’objet. On parle alors de <a href="https://theses.hal.science/tel-01165034">« pince acoustique »</a>.</p>
<p>Ce phénomène intéresse notamment pour les applications dans le domaine du biomédical où on recherche à <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2003569117">déplacer des médicaments</a>, contrôler à distance des dispositifs médicaux implantés dans le corps humain, ou <a href="https://pubs.aip.org/asa/jasa/article/118/5/2829/897018/Temporal-analysis-of-tissue-displacement-induced,https://pubs.aip.org/asa/jasa/article/118/5/2829/897018/Temporal-analysis-of-tissue-displacement-induced">effectuer des interventions chirurgicales très précises à l’échelle microscopique</a> – des recherches qui restent exploratoires pour le moment.</p>
<h2>Contrôler la forme de surfaces</h2>
<p>Pour contrôler précisément l’éjection de gouttes et le mouvement de la particule en lévitation, nous avons besoin de bien comprendre la force de radiation acoustique.</p>
<p>Les physiciens ont tendance dans ces cas à se pencher sur des systèmes relativement simples, par exemple une interface entre de l’eau et de l’air. En disposant un transducteur acoustique dans l’eau et en l’orientant vers la surface, quels vont être les paramètres ayant une influence sur la force de radiation acoustique ? Quelle déformation de l’interface en résulte ? Est-il possible de contrôler précisément dans le temps et dans l’espace cette déformation ?</p>
<p>Dans nos travaux, nous avons proposé un <a href="https://pubs.aip.org/aip/jap/article/132/17/174901/2837694/Water-air-interface-deformation-by-transient">nouveau dispositif de mesure de cette déformation</a>, qui utilise simultanément un laser confocal et un appareil photographique avec un objectif macroscopique. Ces mesures précises couplées à des simulations numériques montrent l’influence du transducteur (sa forme et sa puissance notamment).</p>
<p>Ces études ont révélé que selon l’excitation acoustique, la forme de la déformation change : sur la <em>bosse</em> d’eau se forme une tétine (ou une goutte) qui se détache si on augmente le temps d’excitation ou l’intensité acoustique générée par le transducteur – en d’autres termes, la goutte décolle.</p>
<h2>Sculpter des formes plus complexes</h2>
<p>Pour mieux comprendre l’interaction entre les ondes acoustiques et une interface, nous étudions aussi d’autres couples de fluides, comme l’eau et l’huile par exemple.</p>
<p>Mais nous cherchons également à obtenir des formes plus complexes sur une interface eau-air, en utilisant plusieurs transducteurs ultrasonores couplés entre eux. Nous aimerions ainsi un jour sculpter à façon la surface de l’eau grâce à l’énergie acoustique.</p>
<p>En effet, à plus long terme, les scientifiques aimeraient utiliser la pression de radiation sur des milieux plus complexes tels que les <a href="https://theconversation.com/ces-metamateriaux-qui-se-jouent-des-lois-de-propagation-des-ondes-85420">métamatériaux</a>. Un objectif serait par exemple de réaliser des dispositifs qui absorbent les ondes acoustiques venant dans l’air (des <em>absorbeurs acoustiques</em>), et que l’on peut contrôler en temps réel pour les adapter aux ondes à absorber.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204225/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thibaut DEVAUX a reçu des financements de l'agence nationale de la recherche (ANR) et de la région Centre-Val de Loire</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Félix Sisombat a reçu dans le cadre de cet article un financement de de la région Centre-Val-de-Loire (bourse de thèse).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Lionel Haumesser a reçu dans le cadre de cet article un financement de la région Centre-Val-de-Loire (bourse de thèse) et est membre de la société française d'acoustique (SFA).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Samuel Callé a reçu dans le cadre de cet article un financement de la région Centre-Val-de-Loire (bourse de thèse).</span></em></p>Les ondes acoustiques permettent de sculpter l’interface entre deux fluides, de l’eau et de l’air par exemple.Thibaut Devaux, Maître de Conférences en Acoustique, Université de ToursFélix Sisombat, Doctorant en acoustique physique, Université de ToursLionel Haumesser, Maitre de Conférences HdR en acoustique ultrasonore, Université de ToursSamuel Callé, Professeur des universités en acoustique, Université de ToursLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2050752023-05-21T14:59:58Z2023-05-21T14:59:58ZChangement climatique et ressources en eau : ne nous cachons pas derrière des moyennes<p><a href="https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-du-week-end/l-invite-du-week-end-du-samedi-25-mars-2023-8113897">Interrogé sur France Inter</a> au matin de la manifestation contre les mégabassines de Sainte-Soline, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau rappelait, le 25 mars 2023, les chiffres de la consommation d’eau en France. Il indiquait que 3 milliards de m<sup>3</sup> sont prélevés annuellement par l’agriculture sur les 200 milliards globalement disponibles.</p>
<p>Quelques jours plus tard, le président Emmanuel Macron déclarait lors de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=uqjSATKTxbk">sa présentation du plan « eau »</a> que l’eau renouvelable disponible devrait diminuer de 30 à 40 % d’ici à 2050. Si ces chiffres généraux des usages et la trajectoire climatique future sont tout à fait exacts, ils ne nous sont pas d’une grande utilité et induisent même un risque, celui de rester indifférent à ce qu’ils annoncent.</p>
<p>Leur globalité masque en effet des situations très variables dans l’espace et le temps. Ils ne disent rien des crises à venir ni des difficultés auxquelles les femmes, les hommes et les écosystèmes vont devoir faire face. Chacun affronte une situation locale à un moment donné, jamais la moyenne de tout le territoire durant toute une année.</p>
<h2>Des disparités locales cachées</h2>
<p>En moyenne, il pleut <a href="https://www.eaufrance.fr/repere-precipitations-et-pluies-efficaces">500 milliards de m³ d’eau en France chaque année</a>. La partie non consommée par les plantes et renvoyée vers l’atmosphère (non évapotranspirée) qui peut alimenter les lacs, les rivières et les nappes – et que le ministre considère comme « disponible » – <a href="https://www.eaufrance.fr/repere-precipitations-et-pluies-efficaces">est d’environ 200 milliards</a>. Les prélèvements pour les activités humaines représentent de leur côté 32 milliards, dont 3,2 pour l’agriculture, un chiffre qui peut paraître faible à première vue.</p>
<p>Les 200 milliards ne sont pourtant ni inutiles ni disponibles pour nos activités. Ils nourrissent les nappes, les rivières et l’ensemble des écosystèmes dont certains sont fragiles, primordiaux pour la biodiversité et critiques dans la régulation des cycles du carbone et autres gaz à effets de serre.</p>
<p>Si l’eau globalement disponible est importante, il n’empêche qu’elle se raréfie durant la période estivale. La majorité de l’eau consommée <a href="https://www.notre-environnement.gouv.fr/themes/economie/l-utilisation-des-ressources-naturelles-ressources/article/utilisation-mondiale-de-l-eau">est utilisée en été</a> où l’agriculture devient le premier usage et consomme <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/secheresse">jusqu’à 80 % de la ressource</a>. Ces chiffres illustrent qu’au-delà de valeurs globales, les tensions prennent une réalité critique sur les territoires durant l’été.</p>
<p>Si les mégabassines visent justement à prélever en hiver les besoins de l’été, la concurrence de cette utilisation avec les autres besoins des rivières et zones humides demeure à évaluer. Surtout, l’impact du changement climatique questionne le fonctionnement de ces retenues, sans aborder les questions relatives au type d’agriculture généralement intensive qu’elles soutiennent.</p>
<h2>Variabilité dans le temps</h2>
<p>Les chiffres avancés concernant l’évolution future de débit des cours d’eau sont des moyennes qui cachent des disparités temporelles et spatiales. Examinons d’abord les premières. Ces moyennes peuvent être calculées à l’échelle de l’année : elles incluent à la fois les faibles débits de l’été et les forts débits de l’hiver.</p>
<p>Elles masquent donc les périodes de fort stress hydrique qui peuvent être compensées par un hiver suivant pluvieux. Il existe aussi des moyennes par période, par exemple <a href="https://www.adaptation-changement-climatique.gouv.fr/centre-ressources/bilan-du-projet-explore-2070-eau-et-changement-climatique">sur l’horizon 2050-2070</a>. Là encore, elles ne rendent pas compte de la fréquence et de la durée des conditions extrêmes de débits critiques, qui devraient s’intensifier dans les périodes estivales à venir.</p>
<p>On mesure déjà en métropole l’élévation des températures depuis les années 1950, soit plus d’un degré en moyenne annuelle et une diminution des précipitations estivales.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/525427/original/file-20230510-18861-1agubm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Graphique montrant l’évolution du climat sur le bassin rennais depuis 1960" src="https://images.theconversation.com/files/525427/original/file-20230510-18861-1agubm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/525427/original/file-20230510-18861-1agubm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=532&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/525427/original/file-20230510-18861-1agubm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=532&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/525427/original/file-20230510-18861-1agubm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=532&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/525427/original/file-20230510-18861-1agubm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=669&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/525427/original/file-20230510-18861-1agubm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=669&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/525427/original/file-20230510-18861-1agubm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=669&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution du climat sur le bassin rennais depuis 1960, chaque rond représente la valeur moyenne d’avril à septembre pour chaque année sur le bassin rennais. Les données historiques montrent deux trajectoires : de 1960 aux années 2000, les hausses de température étaient accompagnées de précipitations estivales plus importantes. Depuis 2000, la progression se poursuit, avec une baisse des précipitations estivales.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs à partir des données SAFRAN-Météo France</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>La hausse des températures et l’élargissement de la saison estivale provoquent une augmentation de l’évapotranspiration et une diminution de l’infiltration et de la recharge vers les nappes phréatiques. Celles-ci, qui constituent le stock principal des bassins versants, voient en retour leur rôle du soutien à l’étiage des rivières dégradé : le débit des rivières baisse.</p>
<h2>Variabilité dans l’espace</h2>
<p>Les moyennes cachent aussi une variabilité spatiale. Selon les scénarios et modèles, les climats futurs montrent une variation faible du volume de précipitations dans le nord et l’ouest de la France, sans pouvoir déterminer si le volume annuel sera plus ou moins élevé que les moyennes annuelles actuelles.</p>
<p>Pour expliquer ces prévisions d’un bilan hydrique équivalent à ce qu’on mesure aujourd’hui, il faut donc envisager des hivers plus humides avec des précipitations plus intenses.</p>
<p>C’est un paradoxe difficile à admettre : le « réchauffement climatique » pourrait se matérialiser par des inondations et des précipitations majeures sur une partie nord du territoire. À l’inverse, dans le sud de la France, tous les modèles convergent vers de fortes diminutions globales des volumes précipités.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/525428/original/file-20230510-9174-tw7ct7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Graphique montrant la projection des variations de précipitations pour la période 2071-2100" src="https://images.theconversation.com/files/525428/original/file-20230510-9174-tw7ct7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/525428/original/file-20230510-9174-tw7ct7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/525428/original/file-20230510-9174-tw7ct7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/525428/original/file-20230510-9174-tw7ct7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/525428/original/file-20230510-9174-tw7ct7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/525428/original/file-20230510-9174-tw7ct7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/525428/original/file-20230510-9174-tw7ct7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Projection des variations de précipitations (en %) annuelles (gauche) et durant l’été (droite), pour la période 2071-2100 par rapport à la référence historique (période 1971-2000), pour le scénario du GIEC RCP 8.5.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.eea.europa.eu/data-and-maps/figures/projected-changes-in-annual-and-6">Agence européenne pour l’environnement</a></span>
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<h2>L’exemple local du bassin rennais</h2>
<p>Pour prendre conscience de l’impact du changement climatique et se rendre compte des tensions qui nous attendent, mais aussi évaluer à quelle échéance elles apparaîtront, il est primordial d’examiner les valeurs extrêmes, à savoir de débit estival.</p>
<p>La sécheresse de 1976 est restée dans les mémoires comme un événement tragique qui avait conduit à la levée d’un impôt sécheresse pour soutenir les agriculteurs français. L’année 2022 a montré des températures nettement supérieures à celles de 1976, avec un déficit en précipitations du même ordre.</p>
<p>Afin de répondre aux inquiétudes des gestionnaires de la ressource en eau dans le secteur, l’Université de Rennes (via la fondation Rennes 1) a lancé dès 2019, avec Eau du Bassin Rennais et Rennes Métropole, un <a href="https://fondation.univ-rennes.fr/chaire-eaux-et-territoires">programme de recherche sur l’impact du changement climatique sur la ressource en eau</a> à l’échelle du bassin rennais.</p>
<p>Nous avons développé dans ce cadre des modèles numériques capables de prédire l’évolution à venir des stocks d’eau souterraine et des débits des rivières en fonction des scénarios du GIEC. La tendance future émerge clairement de cette variabilité et met en évidence l’impact majeur du changement climatique.</p>
<h2>Des sécheresses bientôt systématiques</h2>
<p>Nous avons analysé la probabilité de trouver dans le futur des débits au moins aussi faibles que ceux de 1976 ou 2022. Dès la période 2020-2040, les débits typiques de ces années de sécheresse record pourraient se retrouver près d’une année sur deux et se succéder deux voire trois années de suite ! Les débits « 1976 ou 2022 » deviendront nos étés systématiques à partir de 2050. C’est donc à très court terme qu’il faut s’alarmer.</p>
<p>Si l’on utilise le même type de calcul reporté par le gouvernement, c’est-à-dire la comparaison des moyennes annuelles futures avec les moyennes annuelles actuelles, on obtient pourtant des baisses annuelles du même ordre (environ 30 % selon les projections) pour le cas de ce bassin versant étudié entre 2050 et 2070. Ce chiffre, pour exact qu’il soit, apparaît bien trop lisse au regard des prévisions estivales.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/525437/original/file-20230510-16363-45oq79.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/525437/original/file-20230510-16363-45oq79.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/525437/original/file-20230510-16363-45oq79.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=303&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/525437/original/file-20230510-16363-45oq79.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=303&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/525437/original/file-20230510-16363-45oq79.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=303&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/525437/original/file-20230510-16363-45oq79.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=380&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/525437/original/file-20230510-16363-45oq79.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=380&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/525437/original/file-20230510-16363-45oq79.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=380&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Nombre de jours chaque année, de 1975 à 2100, où le débit en amont du barrage de la Chèze (Ille-et-Vilaine) est inférieur au 10ᵉ quantile historique (1980-2010). En rouge au-dessus du graphique, probabilité de retrouver des années de type 1976 (au moins 60 jours : conditions historiques observées), et en vert, le nombre d’années consécutives.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://geosciences.univ-rennes.fr/actualites/prix-de-these-de-la-fondation-rennes-1-pour-ronan-abherve">Ronan Abhervé à partir des données de projections climatiques multi-modèles utilisées pour la simulation des débits futurs (EXPLORE2-2021-SIM2 », scénario RCP8.5)</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<h2>Un futur alarmant</h2>
<p>On comprend donc l’importance de ne pas se contenter des valeurs globales et moyennées pour avoir une idée des conditions extrêmes estivales qui nous attendent dans le futur.</p>
<p>Ces prédictions sont de toute façon incertaines, notamment en ce qui concerne les précipitations futures, et les modèles climatiques ont tendance à sous-estimer l’intensité et la fréquence de ces conditions extrêmes. Pour cette étude locale, nous avons utilisé le scénario du GIEC (RCP 8.5), considéré comme pessimiste (mais pas le plus pessimiste) à l’échelle de la fin du siècle – c’est en fait le scénario que nous suivons (voire dépassons) depuis plus de 20 ans ; et peu d’indices laissent présager une évolution positive majeure dans les prochains 10 ou 20 ans.</p>
<p>Ce schéma n’est pas une prévision exacte du futur, mais il donne une vision des tendances à venir en insistant sur l’un des points les plus fragiles des systèmes hydrologiques. Les évolutions ressortent clairement et dessinent un futur extrêmement alarmant pour la ressource en eau.</p>
<h2>Des crises climatiques et sociales</h2>
<p>À ce titre, le plan « eau » annoncé par le gouvernement – qui retarde les engagements déjà pris en matière d’économie d’eau et épargne l’agriculture – ne prend pas la mesure des tensions estivales extrêmes à venir.</p>
<p>L’intérêt de notre démarche est de décrire les crises climatiques à venir ou déjà en cours dans de nombreux pays. Il ne s’agit pas de l’effondrement généralisé prédit par certains, mais de crises extrêmement sévères, localisées dans l’espace et le temps. Ces crises toucheront en premier lieu certains services primordiaux (eau potable, agriculture, industries…) et surtout une partie de la population, accentuant les clivages entre les classes sociales.</p>
<p>Pour surmonter les crises sociales que seront aussi les crises climatiques, nous ne pouvons faire l’impasse ni sur la raréfaction, ni sur la répartition de la ressource en eau.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205075/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les données globalisantes sur la ressource en eau et les projections climatiques ne sont pas d’une grande utilité et induisent même le risque de nous rendre indifférents à ce qu’ils annoncent.Luc Aquilina, Professeur en sciences de l’environnement, Université de Rennes 1 - Université de RennesClément Roques, Chercheur en hydrologie, Université de NeuchâtelJean-Raynald de Dreuzy, Directeur de recherche au CNRS, hydrologie, École normale supérieure de RennesLaurent Longuevergne, Directeur de recherche, référent scientifique “Hydrologie de terrain, imagerie géophysique”, Université de RennesRonan Abhervé, Chercheur postdoctoral en hydrologie, Université de RennesLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.