tag:theconversation.com,2011:/ca/topics/la-nina-20590/articlesLa Niña – The Conversation2023-08-10T21:17:07Ztag:theconversation.com,2011:article/2109352023-08-10T21:17:07Z2023-08-10T21:17:07ZPourquoi les températures pourraient battre des records au cours des prochains mois<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/541880/original/file-20230809-14-1w2bbr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Variations des températures à la surface de la terre (différence juin 2023 avec la moyenne des 15 années précédentes).</span> <span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Comme dit l’adage bien connu des climatologues « Climate is what you expect, weather is what you get » (« Le climat c’est ce que l’on attend, le temps c’est ce que l’on obtient »). </p>
<p>Les phénomènes météorologiques locaux sont difficiles à prévoir car ils fluctuent rapidement sous l’influence de processus non linéaires et chaotiques, tandis que l’évolution du climat global sur le plus long terme repose sur des phénomènes physiques bien connus qui sont généralement prévisibles. Les prochains 12-18 mois devraient être assez exceptionnels en termes de températures, suite à un alignement de phénomènes locaux et globaux qui se combinent.</p>
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<figcaption><span class="caption">Visualisation simplifiée des variations météorologiques sur la tendance de fond climatique (Ole Christoffer Haga/NRK).</span></figcaption>
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<p>Avec mon équipe dont la spécialité est l’étude par satellites de l’évolution de l’atmosphère, j’analyse chaque jour des <a href="https://youtu.be/daGzrgrpAYc">millions de données vues du ciel</a> pour surveiller les températures sur terre comme sur la mer, partout autour du globe terrestre, et pour mesurer les concentrations des gaz présents dans l’atmosphère. Ces dernières semaines à partir des cartes satellites, nous avons aussi pu observer les records de chaleur qui ont été battus dans de nombreux pays, <a href="https://www.noaa.gov/news/earth-just-had-its-hottest-june-on-record">comme rapportés par les agences météorologiques</a> et les médias.</p>
<p>Un marqueur important a fait les gros titres : il s’agit de l’augmentation de la température moyenne globale de 1,5 °C par rapport à l’époque préindustrielle. Une valeur repère dans l’accord de Paris sur le climat, qui a été <a href="https://climate.copernicus.eu/tracking-breaches-150c-global-warming-threshold">dépassée plusieurs jours cet été</a>. Serait-il possible que cette valeur soit également dépassée quand il s’agira de calculer la moyenne annuelle des températures globales pour l’année 2023 ? </p>
<h2>Forçages naturels et anthropiques</h2>
<p>Pour comprendre l’évolution des températures, il faut tenir compte du fait que notre climat est complexe : il dépend des interactions entre les activités humaines, l’atmosphère, la surface terrestre et la végétation, la neige et la glace, et les océans. Le système climatique évolue sous l’influence de sa propre dynamique interne, mais dépend également de facteurs externes, qu’on appelle les « forçages radiatifs », et qui sont exprimés en watts par mètres carrés (W/m<sup>2</sup>). </p>
<p>Le terme <em>forçage</em> est utilisé pour indiquer que l’équilibre radiatif de la Terre est déstabilisé, et le terme <em>radiatif</em> est lui convoqué car ces facteurs modifient l’équilibre entre le rayonnement solaire entrant et le rayonnement infrarouge sortant de l’atmosphère. Cet équilibre radiatif contrôle la température à différentes altitudes. Un forçage positif implique une augmentation de la température à la surface de la Terre, et à l’inverse un forçage négatif implique une diminution.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/540835/original/file-20230802-19-3uejph.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/540835/original/file-20230802-19-3uejph.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/540835/original/file-20230802-19-3uejph.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=204&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/540835/original/file-20230802-19-3uejph.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=204&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/540835/original/file-20230802-19-3uejph.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=204&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/540835/original/file-20230802-19-3uejph.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=256&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/540835/original/file-20230802-19-3uejph.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=256&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/540835/original/file-20230802-19-3uejph.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=256&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les quatre types de forçages radiatifs dont il faut tenir compte pour expliquer les variations du climat.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Les forçages externes sont à la fois causés par des phénomènes naturels tels que les <a href="https://theconversation.com/changement-climatique-quel-est-le-role-des-eruptions-volcaniques-91681">éruptions volcaniques</a> et les variations du rayonnement solaire, mais également par des modifications de la composition atmosphérique imputables à l’homme (les gaz à effet de serre et les particules liés aux activités humaines). Comprendre les changements climatiques observés depuis une trentaine d’années implique de pouvoir distinguer les modifications liées aux activités humaines de celles associées aux variations naturelles du climat. Les principaux forçages qui vont intervenir et s’additionner sont :</p>
<ul>
<li><p>Le forçage lié aux <a href="https://www.swpc.noaa.gov/products/solar-cycle-progression">variations de l’activité solaire</a>, qui entraîne des changements du rayonnement solaire qui atteint la Terre. Lorsque le Soleil est plus actif (maximum solaire), il émet davantage de rayonnement. Ce forçage est faible (de + à -0,3 W/m<sup>2</sup>) mais dure assez longtemps. Son cycle principal est d’environ 11 ans. Il trouve son origine dans les changements du champ magnétique solaire qui se caractérisent par des variations dans le nombre de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tache_solaire">taches solaires</a> et d’autres phénomènes solaires. </p></li>
<li><p>Le forçage lié aux <a href="https://theconversation.com/changement-climatique-quel-est-le-role-des-eruptions-volcaniques-91681">éruptions volcaniques</a>, qui peut être très intense et est en général négatif de -1 à -5 W/m<sup>2</sup>, mais de courte durée (un à deux ans). Les éruptions volcaniques peuvent avoir un impact significatif sur le climat en raison de l’injection de grandes quantités de cendres, de gaz et de particules dans l’atmosphère.<br>
Tous les volcans n’ont pas un impact sur le climat global, cela dépend de la taille et de la puissance de l’éruption, de l’altitude/de la latitude auxquelles les gaz et les cendres sont éjectés, ainsi que des conditions météorologiques locales. L’étude des éruptions volcaniques passées nous a appris que l’impact le plus significatif est associé à des éruptions proches de l’équateur qui injectent du SO<sub>2</sub> haut dans l’atmosphère, par exemple le Mont Pinatubo (Philippines) en 1991. Ce gaz se transforme en gouttelettes d’acide sulfurique (H<sub>2</sub>SO<sub>4</sub>) qui constituent un écran pour la radiation solaire traversant l’atmosphère. </p></li>
<li><p>Le forçage lié à l’excès de gaz à effet de serre, en particulier le <a href="https://climate.nasa.gov/vital-signs/carbon-dioxide/">dioxyde de carbone</a> (CO<sub>2</sub>), le <a href="https://climate.nasa.gov/vital-signs/methane/">méthane</a> (CH<sub>4</sub>), le protoxyde d’azote (N<sub>2</sub>O) et les chlorofluorocarbures (CFC), qui sont transparents à la lumière solaire mais absorbent une partie du rayonnement thermique émis par la surface terrestre. Au fil du temps, les activités humaines, telles que la combustion de combustibles fossiles, la déforestation et l’agriculture, ont entraîné une augmentation significative des concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.
L’accumulation de ces gaz à effet de serre, qui absorbent davantage de rayonnement thermique émis par la Terre et piègent plus de chaleur dans l’atmosphère, entraîne un forçage radiatif positif, estimé à +3 W/m<sup>2</sup>. Il s’agit donc du forçage le plus important car il n’est pas transitoire comme celui associé aux volcans.</p></li>
<li><p>Le forçage négatif lié aux <a href="https://www.climat-en-questions.fr/reponse/aerosols-et-climat-par-olivier-boucher/">aérosols d’origine anthropique et naturelle</a>. Les aérosols sont de petites particules en suspension dans l’atmosphère qui absorbent, diffusent ou réfléchissent la lumière solaire. Elles proviennent des écosystèmes (embruns marins, sables, poussières, cendres volcaniques, aérosols biogéniques) et d’activités humaines comme la combustion de fiouls fossiles, le brûlage de la biomasse et les feux de forêt, l’élevage des animaux et l’usage d’engrais.
Toutes ces particules font écran à l’insolation mais cette fois dans les basses couches de l’atmosphère. Même si les incertitudes sur le total du forçage radiatif lié à la présence d’aérosols restent élevées, les estimations actuelles indiquent un forçage radiatif total négatif de -0,5 W/m<sup>2</sup>. Sans la pollution par les aérosols, la Terre serait donc encore plus chaude qu’elle ne l’est déjà !</p></li>
</ul>
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<h2>L'influence d'El Niño sur les températures</h2>
<p>En plus des forçages radiatifs, il faut aussi tenir compte de la variabilité naturelle du système couplé océan-atmosphère, et en particulier du phénomène ENSO (El Niño Southern Oscillation), avec sa <a href="https://theconversation.com/el-nino-quest-ce-que-cest-47645">composante chaude El Niño</a> et sa composante froide La Niña. Ces phénomènes sont les principaux facteurs de variation d’une année sur l’autre, dont il faut tenir compte quand on analyse la tendance à long terme au réchauffement de la surface de la mer. </p>
<p>Ces événements climatiques périodiques sont des phénomènes naturels, qui se caractérisent par des fluctuations de température entre l’océan et l’atmosphère dans l’océan pacifique équatorial. En général, les vents alizés soufflent d’est en ouest le long de l’équateur, poussant les eaux chaudes de la surface de l’océan Pacifique vers l’ouest, où elles s’accumulent près de l’Indonésie et de l’Australie. L’eau froide remonte alors du fond de l’océan dans l’est du Pacifique, en remplaçant l’eau chaude, ce qui entraîne des eaux relativement fraîches à la surface des côtes sud-américaines. </p>
<p>Lorsque le phénomène <a href="https://theconversation.com/fr/topics/el-nino-20589">El Niño</a> survient, les alizés faiblissent ou s’inversent, ce qui réduit leur force ou les fait souffler d’ouest en est, ce qui permet à l’eau chaude accumulée dans l’ouest du Pacifique de se déplacer vers l’est en suivant l’équateur. Le réchauffement de la surface de la mer dans l’est du Pacifique provoque alors une augmentation de plusieurs degrés de la température de l’eau, avec de vastes répercussions sur les conditions météorologiques et climatiques à l’échelle mondiale.</p>
<p>Ces phénomènes peuvent durer plusieurs mois ou plusieurs années, et leur intensité est variable. Ils perturbent la météo localement (plus de pluies à certains endroits, plus de sécheresses à d’autres) et influencent le climat global, en particulier lors d’évènements El Niño intenses.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/541896/original/file-20230809-13146-hzx8dz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Evolution des phénomènes El Niño (en rouge) et La Niña (en bleu), en mesurant les températures de surface de la mer sur une zone rectangle définie dans le Pacifique." src="https://images.theconversation.com/files/541896/original/file-20230809-13146-hzx8dz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541896/original/file-20230809-13146-hzx8dz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=333&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541896/original/file-20230809-13146-hzx8dz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=333&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541896/original/file-20230809-13146-hzx8dz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=333&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541896/original/file-20230809-13146-hzx8dz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=419&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541896/original/file-20230809-13146-hzx8dz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=419&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541896/original/file-20230809-13146-hzx8dz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=419&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Evolution des phénomènes El Niño (en rouge) et La Niña (en bleu), en mesurant les températures de surface de la mer sur une zone rectangle définie dans le Pacifique.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Quelles températures pour les prochains mois ?</h2>
<p>Reprenons un à un les différents éléments décrits ci-dessus, et regardons ce qu’il en est en ce moment :</p>
<ul>
<li><p>L’activité solaire approche de son maximum, du coup l’effet de réchauffement causé par une augmentation du rayonnement solaire est plus prononcé. Ceci conduit à une légère augmentation des températures moyennes, estimée à +0,1 °C.</p></li>
<li><p>Au niveau de l’activité volcanique, il s’est passé un évènement complètement exceptionnel : le volcan sous-marin Hunga Tonga qui a <a href="https://youtu.be/NCyg9GLq61g">violemment érupté en janvier 2022</a> a envoyé environ 150 millions de tonnes (soit l’équivalent de 60 000 piscines olympiques…) de vapeur d’eau <a href="https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1029/2022GL099381">directement dans la stratosphère</a>, qui s’est depuis répartie tout autour de la terre. Les simulations numériques montrent que ceci contribuera à réchauffer légèrement la surface terrestre (l’eau étant un puissant gaz à effet de serre), bien qu’il soit encore difficile de dire de <a href="https://www.carbonbrief.org/tonga-volcano-eruption-raises-imminent-risk-of-temporary-1-5c-breach/">combien et sur quelle durée</a>.</p></li>
<li><p>Les gaz à effet de serre ont continué à s’accumuler, c’est le forçage radiatif qui domine tous les autres et conduirait déjà à une augmentation moyenne de +1,5 °C s’il n’y avait pas les aérosols pour tempérer un peu (-0,3 °C).</p></li>
<li><p>Depuis quelques années le contenu total en aérosol a tendance à diminuer, principalement car les véhicules polluent moins (ce qui est une bonne nouvelle !), c’est particulièrement le cas en Chine, en Europe de l’Ouest et aux États-Unis. Cette année, on observe aussi un moindre transport du sable du Sahara sur l’océan, qui d’habitude fait écran à la radiation solaire, ce qui explique en partie les températures élevées mesurées dans l’atlantique nord au début de l’été.</p></li>
<li><p>Après trois années en régime La Niña un évènement El Niño est en train de s’installer. À ce stade on ne sait pas encore s’il sera intense (comme en 2015-2017) ou modéré, et combien de temps il durera, mais on prévoit que les températures océaniques devraient être plus élevées pendant les 12-18 prochains mois par rapport aux trois années précédentes.</p></li>
</ul>
<h2>Tous les paramètres réunis pour des records de chaleur</h2>
<p>En conclusion, tous les paramètres sont réunis pour que nous battions des records de températures au cours des prochains 12-18 mois. Du coup, les 1,5 °C en moyenne globale, soit la limite la plus ambitieuse de l’accord de Paris sur le climat, pourrait être dépassés sans attendre 2030, avec les incidences sur les systèmes naturels et humains bien documentées dans le <a href="https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/sites/2/2019/09/SR15_Summary_Volume_french.pdf">rapport spécial du GIEC 2019</a>.</p>
<p>Une augmentation de 1,5 °C ne semble pas énorme, mais il faut se souvenir que 70 % de notre planète est couverte d’eau, qui a une inertie thermique supérieure à la terre et se réchauffe moins vite. De plus, le réchauffement est inégalement réparti et les hautes latitudes se réchauffent beaucoup plus vite que les tropiques, avec des pics de 4° attendus sur ces régions.</p>
<p>Est-on sûr que cela va se passer ? Non, mais la probabilité qu’on dépasse dès maintenant un seuil qu’on pensait atteindre <a href="https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg1/figures/summary-for-policymakers/figure-spm-8">entre 2025 et 2040</a> est importante. Comme les émissions de gaz à effet de serre ne diminuent pas, il faudrait que des phénomènes naturels soient à l’œuvre au cours des prochains mois pour contrecarrer la tendance prévue. </p>
<p>Par exemple si le phénomène El Niño s’avère moins puissant qu’envisagé, ou si un autre volcan envoyait du SO<sub>2</sub> massivement dans toute l’atmosphère, alors seulement dans ce cas de figure les records de températures pourraient ne pas être battus dès maintenant. À plus long terme, l’avenir nous dira quand les fluctuations naturelles domineront les contributions anthropiques pour expliquer les variations de température, selon l’efficacité des mesures prises dans le cadre des accords internationaux pour réguler le climat.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210935/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cathy Clerbaux a reçu des financements du CNES (Centre National d’Etudes Spatiales, France) et du programme européen H2020 (ERC-advanced IASI-FT) pour financer les travaux de recherche de son équipe.</span></em></p>Avec la conjonction de phénomènes solaires, volcaniques et climatiques couplée aux émissions de gaz à effet de serre, tous les paramètres sont réunis pour que des records de température soient battus ces prochains mois.Cathy Clerbaux, Directrice de recherche au CNRS (LATMOS/IPSL), professeure invitée Université libre de Bruxelles, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2094402023-07-12T21:11:59Z2023-07-12T21:11:59ZLes océans surchauffent, voici ce que cela signifie pour l’humain et les écosystèmes du monde entier<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/536655/original/file-20230710-34168-nnqgad.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C8%2C1805%2C1220&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les effets de la chaleur de l'océan indien sur les terres littorales. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://coralreefwatch.noaa.gov/product/5km/index_5km_sst.php">NOAA Coral Reef Watch</a></span></figcaption></figure><p>Depuis la mi-mars 2023, le mercure à la surface des océans <a href="https://climatereanalyzer.org/clim/sst_daily/">grimpe à des niveaux inégalés</a> en 40 ans de surveillance par satellite, et l’impact néfaste de cette surchauffe se ressent dans le monde entier.</p>
<p>La mer du Japon est plus chaude de 4 degrés Celsius par rapport à la moyenne. La mousson indienne, produit du fort contraste thermique entre les terres et les mers, a été bien <a href="https://www.aljazeera.com/news/2023/6/8/monsoon-reaches-indias-kerala-after-longest-delay-in-seven-years">plus tardive</a> que prévu.</p>
<p>L’Espagne, la France, l’Angleterre et l’ensemble de la péninsule scandinave ont enregistré des niveaux de précipitations <a href="https://joint-research-centre.ec.europa.eu/jrc-news-and-updates/severe-drought-western-mediterranean-faces-low-river-flows-and-crop-yields-earlier-ever-2023-06-13_fr">très inférieurs à la normale</a>, probablement en raison d’une vague de chaleur marine exceptionnelle dans l’est de l’Atlantique Nord. Les températures à la surface de la mer y ont été supérieures à la moyenne de 1 à 3 °C depuis la côte africaine jusqu’à l’Islande. </p>
<p>Et sur le continent européen, la vague de chaleur est actuellement insoutenable, tandis que l'on bat tous les records. </p>
<p>Que se passe-t-il donc ?</p>
<p><a href="https://theconversation.com/el-nino-quest-ce-que-cest-47645">El Niño</a> est en partie responsable. <a href="https://theconversation.com/el-nino-quest-ce-que-cest-47645">Ce phénomène climatique</a>, qui se développe actuellement dans l’océan Pacifique équatorial, se caractérise par des eaux chaudes dans le centre et l’est du Pacifique, ce qui atténue généralement l’alizé, un vent régulier des tropiques. Cet affaiblissement des vents peut affecter à son tour les océans et les terres du monde entier.</p>
<p><iframe id="AOdoU" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/AOdoU/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Mais d’autres forces agissent sur la température des océans.</p>
<p>À la base de tout, il y a le réchauffement climatique, et la <a href="https://climate.nasa.gov/">hausse des températures</a> à la surface des <a href="https://images.theconversation.com/files/533088/original/file-20230621-16119-v4sxij.png">continents comme des océans</a> depuis plusieurs décennies du fait des activités humaines augmentant les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/533018/original/file-20230620-27-zj3g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Le graphique montre les températures de surface de la mer ces 22 dernières années. L’année 2023 est nettement supérieure aux années précédentes" src="https://images.theconversation.com/files/533018/original/file-20230620-27-zj3g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/533018/original/file-20230620-27-zj3g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=382&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/533018/original/file-20230620-27-zj3g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=382&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/533018/original/file-20230620-27-zj3g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=382&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/533018/original/file-20230620-27-zj3g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=480&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/533018/original/file-20230620-27-zj3g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=480&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/533018/original/file-20230620-27-zj3g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=480&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les températures de surface de la mer sont nettement supérieures à la moyenne depuis le début de la surveillance par satellite. La ligne noire épaisse correspond à 2023. La ligne orange correspond à 2022. La moyenne 1982-2011 correspond à la ligne médiane en pointillés.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://climatereanalyzer.org/clim/sst_daily/">ClimateReanalyzer.org/NOAA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La planète sort également de <a href="https://meteofrance.com/comprendre-climat/monde/el-nino-et-la-nina">trois années</a> consécutives marquées par La Niña, le phénomène météorologique inverse d’El Niño, et donc caractérisé par des eaux plus froides qui remontent dans le Pacifique équatorial. La Niña a un effet refroidissant à l’échelle mondiale qui contribue à maintenir les températures de surface de la mer à un niveau raisonnable, mais qui peut aussi masquer le réchauffement climatique. Lorsque cet effet de refroidissement s’arrête, la chaleur devient alors de plus en plus évidente.</p>
<p>La banquise arctique était également <a href="https://nsidc.org/arcticseaicenews/">anormalement basse</a> en mai et au début du mois de juin, un autre facteur aggravant pour le mercure des océans. Car la fonte des glaces <a href="https://oceanservice.noaa.gov/facts/sea-ice-climate.html">peut augmenter</a> la température de l’eau, du fait des eaux profondes absorbant le rayonnement solaire que la glace blanche renvoyait jusque-là dans l’espace.</p>
<p>Tous ces phénomènes ont des effets cascades visibles dans le monde entier.</p>
<h2>Les effets de la chaleur hors norme de l’Atlantique</h2>
<p>Au début du mois de juin 2023, je me suis rendue pendant deux semaines au <a href="https://www.norceresearch.no/en">centre pour le climat NORCE</a> à Bergen, en Norvège, pour y rencontrer d’autres océanographes. Les courants chauds et les vents anormalement doux de l’est de l’Atlantique Nord rendaient anormalement chaude cette période de l’année, où l’on voit normalement des pluies abondantes deux jours sur trois.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/secheresses-historiques-que-nous-enseignent-les-archives-190503">Sécheresses historiques : que nous enseignent les archives ?</a>
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<p>L’ensemble du secteur agricole norvégien se prépare désormais à une sécheresse aussi grave que celle de 2018, où les rendements ont été inférieurs de <a href="https://bg.copernicus.org/articles/17/1655/2020/">40 % par rapport à la normale</a>. Notre train de Bergen à Oslo a eu un retard de deux heures car les freins d’un wagon avaient surchauffé et que les températures de 32 °C à l’approche de la capitale étaient trop élevées pour leur permettre de refroidir.</p>
<p>De nombreux scientifiques ont émis des hypothèses sur les causes des températures anormalement élevées dans l’est de l’Atlantique Nord, et plusieurs études sont en cours.</p>
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<p>L’affaiblissement des vents a rendu particulièrement faible l’<a href="https://www.rts.ch/meteo/chronique/14076926-un-anticyclone-des-acores-a-la-peine.html">anticyclone des Açores</a>, un système de haute pression semi-permanent au-dessus de l’Atlantique qui influe sur les conditions météorologiques en Europe. De ce fait, il y avait <a href="https://atmosphere.copernicus.eu/what-saharan-dust-and-how-does-it-change-atmosphere-and-air-we-breathe">moins de poussière du Sahara</a> au-dessus de l’océan au printemps, aggravant ainsi potentiellement la quantité de rayonnement solaire sur l’eau. Autre facteur possible aggravrant la chaleur des océans : la diminution des émissions d’origine humaine d’<a href="https://www.cnrs.fr/cw/dossiers/dosclim1/motscles/savoirPlus/aerosols.html">aérosols</a> (particules fines en suspension dans l’air) en Europe et aux États-Unis au cours des dernières années. Si cette baisse a permis d’améliorer la qualité de l’air, elle s’accompagne d’une réduction – encore peu documentée – de l’<a href="https://www.umr-cnrm.fr/spip.php?article924">effet de refroidissement</a> de ces aérosols.</p>
<h2>Une mousson tardive en Asie du Sud</h2>
<p>Dans l’océan Indien, El Niño a tendance à provoquer un réchauffement de l’eau en avril et en mai, ce qui peut <a href="https://hal.science/tel-01319603/">freiner la mousson indienne</a> dont l’importance est cruciale pour diverses activités.</p>
<p>C’est sans doute ce qui s’est passé avec une mousson <a href="https://www.reuters.com/world/india/indias-stalled-monsoon-gain-momentum-3-4-days-weather-officials-2023-06-20/">beaucoup plus faible</a> que la normale de la mi-mai à la mi-juin 2023. Ce phénomène risque de devenir un <a href="https://theconversation.com/inde-et-pakistan-se-preparer-a-des-canicules-encore-plus-intenses-183373">problème majeur</a> pour une grande partie de l’Asie du Sud, où la plupart des cultures sont encore irriguées par les eaux de pluie et donc fortement dépendantes de la mousson d’été.</p>
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<img alt="Un homme s’abritant sous un parapluie pour se protéger de la chaleur de Delhi" src="https://images.theconversation.com/files/537120/original/file-20230712-24-jemdvv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537120/original/file-20230712-24-jemdvv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537120/original/file-20230712-24-jemdvv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537120/original/file-20230712-24-jemdvv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537120/original/file-20230712-24-jemdvv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=538&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537120/original/file-20230712-24-jemdvv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=538&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537120/original/file-20230712-24-jemdvv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=538&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’Inde a connu des températures étouffantes en mai et juin 2023.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/new-delhi-india-may-9-2022-2167051459">Shutterstock</a></span>
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<p>L’océan Indien a également connu cette année un <a href="https://www.france24.com/fr/asie-pacifique/20230615-%C3%A0-l-approche-du-cyclone-biparjoy-plus-de-100-000-personnes-%C3%A9vacu%C3%A9es-en-inde-et-au-pakistan">cyclone intense</a> et lent dans la mer d’Oman, ce qui a privé les terres d’humidité et de précipitations pendant des semaines. Des études suggèrent que lorsque les eaux se réchauffent, les tempêtes ralentissent, gagnent en force et attirent ainsi l’humidité en leur cœur. Une série d’effets qui, à terme, peut priver d’eau les masses terrestres environnantes, et augmenter ainsi le risque de sécheresse, d’incendies de forêt comme de vagues de chaleur marines.</p>
<h2>En Amérique la saison des ouragans en suspens</h2>
<p>Dans <a href="https://theconversation.com/atlantic-hurricane-season-2023-el-nino-and-extreme-atlantic-ocean-heat-are-about-to-clash-204670">l’Atlantique</a>, l’affaiblissement des alizés dû à El Niño a tendance à freiner l’activité des ouragans, mais les températures chaudes de l’Atlantique peuvent contrebalancer cela en donnant un coup de fouet à ces tempêtes. Il reste donc à voir si, en persistant ou non l’automne, la chaleur océanique pourra l’emporter ou pas sur les effets d’El Niño.</p>
<p>Les <a href="https://theconversation.com/el-nino-is-coming-and-ocean-temps-are-already-at-record-highs-that-can-spell-disaster-for-fish-and-corals-202424">vagues de chaleur marine</a> peuvent également avoir des répercussions considérables sur les écosystèmes marins, en <a href="https://theconversation.com/comment-le-rechauffement-risque-de-tuer-le-corail-48217">blanchissant</a> les récifs coralliens et en provoquant ainsi la mort ou le déplacement des espèces entières qui y vivent. Or les poissons dépendant des écosystèmes coralliens nourrissent un milliard de personnes dans le monde.</p>
<p>Les récifs des îles Galápagos et ceux situés le long des côtes de la Colombie, du Panama et de l’Équateur, par exemple, <a href="https://coralreefwatch.noaa.gov/">sont déjà menacés de blanchiment et de disparition</a> par le phénomène El Niño de cette année. Sous d’autres latitudes, en mer du Japon et en Méditerranée on constate également une perte de biodiversité au profit d’espèces invasives (les <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10750-014-2046-7">méduses géantes</a> en Asie et les <a href="https://theconversation.com/en-mediterranee-linquietante-invasion-du-poisson-lion-predateur-redoutable-120782">poissons-lions</a> en Méditerranée) qui peuvent prospérer dans des eaux plus chaudes.</p>
<h2>Ces types de risques augmentent</h2>
<p>Le printemps 2023 a été hors norme, avec plusieurs événements météorologiques chaotiques accompagnant la formation d’El Niño et des températures exceptionnellement chaudes dans de nombreuses eaux du monde. Ce type de phénomènes et le réchauffement global des océans comme de l’atmosphère s’autoalimentent.</p>
<p>Pour diminuer ces risques, il faudrait mondialement réduire le réchauffement de base en limitant les émissions excessives de gaz à effet de serre, comme les combustibles fossiles, et <a href="https://biodiv.mnhn.fr/fr/news/rapport-de-synthese-du-giec-2023-resume-aux-decideurs">évoluer vers une planète neutre en carbone</a>. Les populations devront également <a href="https://www.un.org/fr/climatechange/climate-adaptation">s’adapter à un climat qui se réchauffe</a> et dans lequel les événements extrêmes sont plus probables, et apprendre à en atténuer l’impact.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209440/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Annalisa Bracco a reçu des financements de la National Science Foundation, la National Oceanic and Atmospheric Administration et du Department of Energy américain.
</span></em></p>Sécheresse en Europe, fonte des glaces, retardement de la mousson indienne, canicule océanique et réchauffement climatique. Tous ces phénomènes s’auto-alimentent.Annalisa Bracco, Professor of Ocean and Climate Dynamics, Georgia Institute of TechnologyLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1884682022-08-18T17:37:11Z2022-08-18T17:37:11ZLes journées sur Terre sont mystérieusement devenues plus longues, et les scientifiques ne savent pas (encore) pourquoi<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/478542/original/file-20220810-4757-f6ovoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C51%2C3788%2C1843&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les journées sur Terre deviennent-elles plus longues? </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixnio.com/fr/espace-fr/planete-terre-univers-galaxie">Pixnio</a></span></figcaption></figure><p>Des <a href="https://first-tf.fr/grand-public-scolaires/comment-ca-marche/les-horloges-atomiques/">horloges atomiques</a> associées à des mesures astronomiques précises ont récemment révélé que la durée d’un jour sur Terre s’allongeait soudainement. Ce phénomène a des répercussions critiques non seulement sur notre mesure du temps, mais aussi sur des éléments tels que les GPS et d’autres technologies qui régissent notre vie moderne.</p>
<p>Au cours des dernières décennies, la rotation de la Terre autour de son axe, qui détermine la durée d’une journée, s’est accélérée. Cette tendance a raccourci nos journées ; en fait, en juin 2022 <a href="https://www.timeanddate.com/news/astronomy/shortest-day-2022">nous avons atteint le record</a> du jour le <a href="https://www.lepoint.fr/astronomie/le-29-juin-2022-le-jour-le-plus-court-jamais-enregistre-sur-terre-03-08-2022-2485341_1925.php">plus court</a> depuis environ un demi-siècle.</p>
<p>Mais malgré ce record, depuis 2020, cette accélération constante s’est curieusement transformée en ralentissement : les jours rallongent à nouveau, et la raison en demeure pour le moment inconnue.</p>
<p>Si les horloges de nos téléphones indiquent qu’une journée compte exactement 24 heures, le temps réel nécessaire à la Terre pour effectuer une seule rotation varie très légèrement. Ces changements se produisent sur des périodes allant de millions d’années à presque instantanément – même les tremblements de terre et les tempêtes peuvent jouer un rôle. Ainsi il s’avère qu’un jour correspond très rarement au nombre magique de 86 400 secondes.</p>
<h2>La planète en perpétuel changement</h2>
<p>Depuis des millions d’années, la rotation de la Terre ralentit en raison des effets de friction associés aux marées provoquées par la Lune. Ce processus ajoute environ 2,3 millisecondes à la longueur de chaque jour chaque siècle. Il y a quelques milliards d’années, un jour terrestre ne durait que <a href="https://www.science.org/content/article/average-earth-day-used-be-less-19-hours-long">19 heures</a>.</p>
<p>Au cours des 20 000 dernières années, un autre processus a fonctionné en sens inverse, accélérant la rotation de la Terre. À la fin de la dernière période glaciaire, la <a href="https://interstices.info/modeliser-et-simuler-la-fonte-des-calottes-polaires/">fonte des calottes polaires</a> a réduit la pression à la surface, et le manteau terrestre a commencé à se déplacer régulièrement vers les pôles.</p>
<p>De même qu’un danseur de ballet tourne plus vite lorsqu’il rapproche ses bras de son corps – l’axe autour duquel il tourne –, la vitesse de rotation de notre planète augmente lorsque cette masse de manteau se rapproche de l’axe de la Terre. Et ce processus raccourcit chaque jour d’environ 0,6 milliseconde par siècle.</p>
<p>Sur des décennies et plus, le lien entre l’intérieur et la surface de la Terre entre également en jeu. Les grands tremblements de terre peuvent modifier la longueur du jour, bien que normalement par de petites quantités. Par exemple, le <a href="https://planet-terre.ens-lyon.fr/ressource/seisme-Sendai-Japon-2011.xml">grand tremblement de terre de Tōhoku</a> de 2011 au Japon, d’une magnitude de 8,9, aurait accéléré la rotation de la Terre d’une quantité relativement minime <a href="https://www.space.com/11115-japan-earthquake-shortened-earth-days.html">1,8 microseconde</a>.</p>
<p>En dehors de ces changements à grande échelle, sur des périodes plus courtes, le temps et le climat ont également des impacts importants sur la rotation de la Terre, provoquant des variations dans les deux sens.</p>
<p>Les cycles bimensuels et mensuels des marées déplacent la masse autour de la planète, entraînant des modifications de la durée du jour pouvant aller jusqu’à une milliseconde dans les deux sens. <a href="https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/2013JB010830">Nous pouvons observer les variations des marées</a> dans les enregistrements de la longueur du jour sur des périodes allant jusqu’à 18,6 ans. Le mouvement de notre atmosphère a un effet particulièrement fort, et les courants océaniques jouent également un rôle. La couverture neigeuse et les précipitations saisonnières, ou l’extraction des eaux souterraines, modifient encore les choses.</p>
<h2>Pourquoi la Terre ralentit-elle soudainement ?</h2>
<p>Depuis les années 1960, lorsque les opérateurs de radiotélescopes autour de la planète ont commencé à concevoir des techniques pour <a href="https://www.esa.int/Science_Exploration/Space_Science/Observations_Very_Long_Baseline_Interferometry_VLBI">observer simultanément des objets cosmiques comme les quasars</a>, nous disposons d’estimations très précises de la vitesse de rotation de la Terre.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/59Bl8cjNg-Y?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">L’utilisation de radiotélescopes pour mesurer la rotation de la Terre implique l’observation de sources radio comme les quasars. NASA Goddard.</span></figcaption>
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<p>Une comparaison entre ces estimations et une horloge atomique a révélé une longueur de jour apparemment toujours plus courte au cours des dernières années.</p>
<p>Mais il y a une révélation surprenante une fois que nous enlevons les fluctuations de la vitesse de rotation que nous savons se produire en raison des marées et des effets saisonniers. Bien que la Terre ait atteint son jour le plus court le 29 juin 2022, la trajectoire à long terme semble être passée du raccourcissement à l’allongement depuis 2020. Ce changement est sans précédent au cours des 50 dernières années.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/we-found-the-first-australian-evidence-of-a-major-shift-in-earths-magnetic-poles-it-may-help-us-predict-the-next-155040">We found the first Australian evidence of a major shift in Earth's magnetic poles. It may help us predict the next</a>
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<p>La raison de ce changement n’est pas claire. Il pourrait être dû à des changements dans les systèmes météorologiques, comme des <a href="https://www.futura-sciences.com/planete/definitions/climatologie-nina-10170/">phénomènes climatiques La Niña</a> consécutifs, bien que ceux-ci se soient déjà produits auparavant. Il pourrait s’agir d’une fonte accrue des calottes glaciaires, bien que celles-ci n’aient pas beaucoup dévié de leur rythme de fonte régulier ces dernières années. Pourrait-elle être liée à l’énorme explosion du volcan Tonga <a href="https://www.abc.net.au/news/2022-08-03/tonga-volcanic-eruption-could-temporarily-warm-the-earth/101297676">injectant d’énormes quantités d’eau dans l’atmosphère</a> ? Probablement pas, étant donné que cela s’est produit en janvier 2022.</p>
<p><a href="https://www.timeanddate.com/news/astronomy/shortest-day-2022">Les scientifiques ont émis l’hypothèse</a> que ce changement récent et mystérieux de la vitesse de rotation de la planète est lié à un phénomène appelé <a href="https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/astronomie-mars-premiere-detection-oscillation-chandler-85200/">« oscillation de Chandler »</a> – une petite déviation de l’axe de rotation de la Terre avec une période d’environ 430 jours. Les observations des radiotélescopes montrent également que l’oscillation a diminué ces dernières années ; les deux phénomènes pourraient être liés.</p>
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<p>Une dernière possibilité, qui nous semble plausible, est que rien de spécifique n’a changé à l’intérieur ou autour de la Terre. Il pourrait simplement s’agir d’effets de marée à long terme fonctionnant en parallèle avec d’autres processus périodiques pour produire un changement temporaire de la vitesse de rotation de la Terre.</p>
<h2>Avons-nous besoin d’une « seconde intercalaire négative » ?</h2>
<p>La connaissance précise de la vitesse de rotation de la Terre est cruciale pour une foule d’applications – les systèmes de navigation tels que le GPS ne fonctionneraient pas sans elle. De plus, tous les deux ou trois ans, les chronométreurs insèrent des <a href="http://michel.lalos.free.fr/cadrans_solaires/doc_cadrans/seconde_intercalaire/seconde_intercalaire.html">secondes intercalaires</a> dans nos échelles de temps officielles pour s’assurer qu’elles ne se désynchronisent pas avec notre planète.</p>
<p>Si la Terre devait passer à des jours encore plus longs, nous pourrions avoir besoin d’incorporer une « seconde intercalaire négative » – ce qui serait sans précédent et <a href="https://arstechnica.com/science/2022/08/record-short-days-could-speed-up-debate-on-leap-seconds/">pourrait briser l’internet</a>.</p>
<p>La nécessité de secondes intercalaires négatives est considérée comme peu probable pour le moment. Pour l’instant, nous pouvons nous réjouir de la nouvelle que – au moins pendant un certain temps – nous avons tous quelques millisecondes supplémentaires chaque jour.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/188468/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Matt King a reçu des financements du Australian Research Council, the Department of Climate Change, Energy, the Environment and Water, the Department of Industry, Science and Resources, and the Australian National Collaborative Research Infrastructure Strategy (NCRIS). Il a précédemment était financé par le Centre for Southern Hemisphere Oceans Research.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Christopher Watson a reçu des fonds du Australian National Collaborative Research Infrastructure Strategy (NCRIS) et du Australian Research Council.
</span></em></p>Bien que la Terre ait atteint son jour le plus court le 29 juin 2022, la trajectoire à long terme semble être passée du raccourcissement à l’allongement depuis 2020. Un mystère pour la recherche.Matt King, Director of the ARC Australian Centre for Excellence in Antarctic Science, University of TasmaniaChristopher Watson, Senior Lecturer, School of Geography, Planning, and Spatial Sciences, University of TasmaniaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1604252022-01-05T18:43:54Z2022-01-05T18:43:54ZLes océans bientôt dotés de jumeaux virtuels, pour quoi faire ?<p>De la bourrasque de vent ou de la vaguelette déferlante aux phénomènes climatiques globaux, l'océan et l'atmosphère sont en interaction à toutes les échelles. Ces échanges et rétroactions complexes et non linéaires sont depuis longtemps connus pour favoriser l'émergence de phénomènes téléconnectés et de désastres naturels – par exemple, l'influence de El Niño et La Niña sur des évènements météorologiques distribués sur l'ensemble de la planète. Ils jouent en permanence sur les aspects fondamentaux de la vie, l'évolution des espèces et l'écologie des systèmes.</p>
<p>En parallèle, l'activité humaine a crû au point de transformer directement le contenu et la redistribution thermique des océans avec des implications assez nettes sur sa capacité d'absorption du dioxyde de carbone et son acidification.</p>
<p>Cette modification du contenu et de la redistribution thermique des océans et son inertie pourront également affecter la fréquence des tempêtes, les distributions de leurs localisations et de leurs pistes privilégiées d'occurrence, leurs tailles, intensités et vitesses de déplacements.</p>
<p>Quoiqu’aux conséquences souvent observables et maintenant mieux quantifiées, ces variations demeurent difficiles à parfaitement modéliser et comprendre. S'il est admis que l'océan réagit et interagit en symbiose avec l'atmosphère, son avenir et l'évolution des équilibres du système climatique restent largement incertains. </p>
<p>Le lancement de <a href="https://fr.unesco.org/ocean-decade">la décennie de l'océan</a> en 2021 par les Nations unies, les espoirs fondés sur l'économie bleue et les volontés politiques de produire de l'innovation justifient donc le lancement de grandes initiatives nationales et internationales pour le développement de nouveaux outils, tels que la mise en place de jumeaux numériques.</p>
<h2>Modéliser et comprendre l'océan grâce au numérique</h2>
<p>Il est en effet tout naturel que le numérique tienne une place de choix dans ces nouvelles démarches. Les architectures futures doivent donner lieu à l'exploitation et la valorisation de toutes les sources potentielles d'observations, l'accès simplifié aux différents travaux de simulations numériques, et favoriser la mise en oeuvre de méthodes d'apprentissage profond et d'intelligence artificielle pour combiner données et modèles. Les jumeaux numériques futurs intégreront tous ces efforts, pour regrouper vite les informations sur l'état de l'océan, permettre visualisation et rapides évaluations, possiblement reconnaître des situations similaires dans les catalogues d'observations et/ou de simulations, afin de conforter et aider aux décisions.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1442414975549534212"}"></div></p>
<p>Ainsi, derrière ce mantra de « jumeaux numériques » se cachent des efforts variés de la part des producteurs de données, des chercheurs, des instances internationales… avec le développement d'outils plus ou moins sophistiqués visant à optimiser l'exploitation des capacités numériques croissantes, en matière de calculs intensifs ou de brassages de données. Combinés avec les masses d'observations et d'analyses déjà accumulées, les précisions et prévisions des modèles s'améliorent afin de mieux anticiper l'évolution de l'état de l'océan, c'est-à-dire des contenus en chaleur, sel et niveau d'oxygène ou du degré d'acidification.</p>
<p>Cela demeure toutefois souvent insuffisant, avec un horizon de prévisions fiables encore trop proche. Aujourd'hui, le vœu est de fournir la description de l'océan la plus cohérente possible et aux plus hautes résolutions spatio-temporelles nécessaires, pour des objectifs et applications en temps quasi réels jusqu'aux prédictions climatiques à long terme.</p>
<h2>Favoriser la coopération internationale sur les océans</h2>
<p>Il faut savoir qu'il y a encore peu d'années, les données marines étaient souvent difficiles à trouver, accessibles uniquement grâce à des conventions particulières et ne bénéficiant pas de protocoles d'accès garantis et de formats homogènes. Ces obstacles sont maintenant largement levés grâce à des protocoles qui assurent la diffusion et les échanges de données.</p>
<p>Cela permet d'homogénéiser la qualité et les méthodes, ce qui facilite la coopération entre les grands centres internationaux, couvrant à la fois la définition des instruments futurs, la définition optimale de nouveaux réseaux d'observations et l'intégration et la diffusion de données et analyses (entre les différents centres d'observation, CNES, ESA, NASA, JAXA, Météo-France, ECMWF, NOAA, JAMSTEC, Ifremer, etc.). </p>
<h2>Outils précieux pour les chercheurs et les citoyens</h2>
<p>Les jumeaux numériques doivent se consolider avec ces capacités accrues pour exploiter conjointement l'ensemble des jeux de données, et utiliser plus efficacement des ensembles de simulations numériques et l'assimilation des observations. Les plateformes jumeaux numériques favoriseront et renforceront les travaux des jeunes générations de chercheurs pour mieux répondre aux questions scientifiques majeures : en particulier, elles permettront d'améliorer l'horizon de prédiction des modèles pour construire des projections à plusieurs mois et années.</p>
<p>Cela doit également encourager des analyses et des prises de décisions plus locales, possiblement citoyennes, ou encore la définition de services mieux ciblés par l'utilisation de ces ensembles de données nationales, européennes et internationales. Tout cela s'articulant avec de grandes initiatives comme <a href="https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/policies/destination-earth">Destination Earth</a>, à l'échelle européenne, pour développer les nécessaires infrastructures numériques (calcul, stockage, réseaux…).</p>
<p>L'augmentation du réalisme et de la précision des simulations et prévisions numériques, fondées principalement sur la résolution de systèmes d'équations pouvant décrire les évolutions spatio-temporelles des variables sous l'influence de forçages divers, permettra les utilisations plus directes des observations et de méthodes d'intelligence artificielle. </p>
<p>Reconnaissance de récurrences et enchaînements dynamiques, évaluations d'analogies dans les situations passées, identification ou inférence de précurseurs, seront, en autre, les éléments essentiels pour construire et améliorer les nouveaux outils statistiques et contribuer à mieux exploiter les couples données-modèles. </p>
<h2>Appréhender des questions plus complexes</h2>
<p>Les méthodologies d'intelligence artificielle émergent effectivement rapidement pour améliorer largement les modes traditionnels de prévisions, corrections des biais et sensibilités aux conditions initiales.</p>
<p>Ainsi, ces jumeaux numériques doivent-ils contribuer à aborder conjointement des questions plus complexes, relatives aux évolutions jointes des propriétés physiques, chimiques, géologiques et biologiques des océans, sous les contraintes environnementales et socio-économiques des activités humaines.</p>
<p>On citera l'occurrence, l'intensité et la distribution des efflorescences algales d'origine naturelle ou amplifiées par des pollutions terrestres, restent des questions encore mal comprises et difficiles à résoudre. Pour exemple, l'extension et l'évolution de la grande ceinture des sargasses de l'Atlantique : des proliférations locales extrêmes sont aujourd'hui observées, empêchant la lumière de pénétrer et limitant l'oxygène disponible, affectant le développement des organismes marins et également les activités touristiques.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1112839651642015744"}"></div></p>
<p>À l'avenir, les jumeaux numériques auront donc pour vocation de servir les développements d'approches interdisciplinaires, incluant sciences dures, sociales, économiques et juridiques, facilitant les constructions des outils nécessaires aux aides aux décisions, par exemple sur les pollutions pétrochimiques ou encore les déchets plastiques, ou pour définir des sanctuaires marins.</p>
<p>Ouverts et partagés, ces jumeaux numériques seront les instruments capables d'identifier les altérations majeures, évaluer les causes et scénariser les conséquences. Cela contribuera à définir des stratégies pour contrer ou atténuer les dépassements de seuils les plus dévastateurs, afin d'assurer au mieux la pérennité des espaces maritimes.</p>
<h2>Jumelles numériques pour scruter l’océan</h2>
<p>Avec ces objectifs principaux, les jumeaux numériques Océan vont se constituer d'un ensemble de méthodes et de simulations pour que scientifiques ou citoyens puissent réaliser et tester divers scénarios, avec des retours d'expériences encore mieux pris en compte, telles les apparitions et évolutions de conditions environnementales inhabituelles ou amplifiées – comme les sargasses aux Antilles.</p>
<p>De manière collective et possiblement participative, les différents éléments de surveillance et suivi des habitats marins seront intégrés, intensifiant les échanges et retours d'expériences afin d'améliorer outils et méthodes d'analyse des impacts et augmenter les horizons des prévisions, principalement pour les évènements les plus extrêmes.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1351433243816550400"}"></div></p>
<p>Pour imager le propos, ce sont donc plutôt des jumelles numériques qui seront élaborées, disponibles pour tous et effectivement dédiées à mieux détecter et scruter certains effets locaux associés à un enchaînement de causes, pas forcément toutes d'origines locales. </p>
<p>Même avec le bénéfice des outils de simulations et de l'intégration de l'ensemble de données toujours de meilleures qualités, cela reste un pari, nécessaire, mais encore très ambitieux.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/160425/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bertrand Chapron ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Modéliser les mouvements océaniques avec toujours plus de précision nous permettra d’anticiper à court et plus long terme son avenir et les phénomènes associés.Bertrand Chapron, Docteur en mécanique des fluides, IfremerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/927572018-07-23T23:16:37Z2018-07-23T23:16:37ZSécheresse : pourquoi les épisodes se multiplient-ils sous les tropiques ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/228810/original/file-20180723-189338-o4lqvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C116%2C4320%2C2974&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Conifère souffrant de la sécheresse dans le nord de la Patagonie. </span> <span class="attribution"><span class="source">Projet Themes</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>La sécheresse fait partie des risques naturels <a href="http://emdat.be/sites/default/files/adsr_2016.pdf">qui menacent le plus gravement</a> la population mondiale. En termes d’impact, le phénomène est seulement devancé par les inondations.</p>
<p><a href="http://www.unisdr.org/we/inform/publications/46796">Entre 1995 et 2015</a>, ce sont ainsi 1,1 milliard de personnes qui ont subi les effets d’un grave épisode sec. À titre de comparaison, cela représente près de deux fois le bilan cumulé des ouragans.</p>
<p>Une équipe internationale de chercheurs a décidé de s’intéresser à l’<a href="https://group.bnpparibas/actualite/themes-percer-mystere-expansion-tropiques">intensification de ce phénomène en Amérique du Sud</a>, avec le double objectif de l’analyser et de mobiliser les autorités politiques locales pour s’adapter à cet aspect du changement climatique.</p>
<p>Une hausse de fréquence des sécheresses a en effet été observée, dans les 30 à 40 dernières années, en <a href="https://www.clim-past.net/11/1139/2015/">Amérique du Sud</a>, en <a href="https://www.csiro.au/en/Research/Environment/Extreme-Events/Drought/South-east-Australia">Australie</a>, en <a href="http://www.pnas.org/content/107/50/21256">Amérique du Nord</a> et <a href="https://www.nat-hazards-earth-syst-sci.net/11/33/2011/">dans la région méditerranéenne</a>.</p>
<p>À la mi-février 2018, le ministère de l’Économie argentin <a href="http://www.lefigaro.fr/flash-eco/2018/02/28/97002-20180228FILWWW00201-secheresse-en-argentine-de-lourdes-pertes-en-perspective.php">chiffrait ainsi à 3 milliards de dollars minimum</a> le manque à gagner sur les exportations agricoles, dû à la sécheresse en <a href="https://www.reuters.com/article/argentina-drought-debt/argentina-to-provide-debt-relief-to-drought-hit-farmers-idUSL1N1QV16P">cours dans le centre du pays</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution de la pluviosité dans les Andes entre 18°S et 42°S. Une tendance à la diminution de 65 mm/décennie est observée depuis les années 1980.</span>
<span class="attribution"><span class="source">V. Daux et R.Villalba</span></span>
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</figure>
<h2>Pister l’expansion des sécheresses</h2>
<p>La première campagne de terrain pour <a href="https://group.bnpparibas/actualite/themes-percer-mystere-expansion-tropiques">ce projet de recherche</a> appelé Themes (pour « The Mystery of the Expanding Tropics »), a été réalisée en février 2018 dans les Andes argentines.</p>
<p>Dix-neuf scientifiques (dont huit ingénieurs et techniciens et deux doctorants) français, argentins, chiliens, britanniques et étasuniens participent au projet. Une mission d’échantillonnage au Chili, visant les mêmes objectifs que la campagne argentine, a également eu lieu. Des campagnes de relevés des appareils de mesure seront programmées pendant les étés austraux des deux années à venir.</p>
<p>Dans la ligne de mire des scientifiques : l’élargissement de la circulation de Hadley, une composante de la circulation atmosphérique, dont la dynamique pourrait expliquer en partie la progression des sécheresses constatée dans les Andes centrales, et un peu partout sous les tropiques.</p>
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<figcaption><span class="caption">Les scientifiques Valérie Daux et Ricardo Villalba reviennent sur la naissance du projet de recherche Themes. (Alizée Guilhem et Nina Schretr/YouTube, 2018).</span></figcaption>
</figure>
<h2>La circulation de Hadley, qu’est-ce que c’est ?</h2>
<p>Cette bande atmosphérique – formée de cellules ressemblant à des « tapis roulants » de 15 km de haut et presque 3 000 km de large – assure les échanges de chaleur de l’équateur vers les tropiques en altitude.</p>
<p>Chaque cellule « tapis-roulant » commence son mouvement au niveau équatorial, là où l’air chauffé, moins dense, se met à monter. En altitude, la décompression le refroidit et la vapeur d’eau condense, ce qui donne de fortes précipitations. La mécanique des « cellules de Hadley » se met en place lorsque la colonne d’air sec se sépare en deux masses, poussées vers le nord ou le sud de part et d’autre de l’équateur, avant de plonger vers la surface à 30° de latitude environ.</p>
<p>Ces branches descendantes des cellules de Hadley apportent au sol de l’air chaud et sec : ce sont elles qui contrôlent le climat sec des régions subtropicales. C’est à leur latitude que se trouvent les plus grands déserts de la planète (comme le Sahara ou l’Atacama).</p>
<p>Mais au cours des dernières décennies, les cellules de Hadley se sont allongées en direction des pôles, ce qui a entraîné un élargissement des zones subtropicales où l’air sec plonge vers le sol. Cet effet, particulièrement marqué dans l’hémisphère sud, s’est manifesté par une augmentation de la fréquence et de l’intensité des sécheresses.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/226511/original/file-20180706-122271-5x09tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/226511/original/file-20180706-122271-5x09tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/226511/original/file-20180706-122271-5x09tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/226511/original/file-20180706-122271-5x09tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/226511/original/file-20180706-122271-5x09tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/226511/original/file-20180706-122271-5x09tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/226511/original/file-20180706-122271-5x09tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Représentation modélisée de la circulation de Hadley autour de l’équateur.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Climate Initiative/Fondation BNP Paribas</span></span>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=420&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=420&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=420&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Élargissement de la cellule de Hadley dans les Andes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">R. Villalba</span></span>
</figcaption>
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<p><a href="https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1029/2006GL028443">Plusieurs études</a> ont suggéré que cet élargissement pourrait <a href="https://www.nature.com/articles/ngeo.2007.38">être lié au changement climatique global</a>. Les auteurs formulent notamment l’hypothèse que le réchauffement de l’atmosphère, en réduisant les contrastes de pression autour de la tropopause (qui marque la limite supérieure de la cellule de Hadley), ait accru la stabilité des masses d’air et repoussé plus loin vers les pôles la descente d’air sec.</p>
<p>Les chercheurs estiment que l’expansion de la circulation de Hadley, constatée sur 1 à 3° de latitude dans chaque hémisphère au cours des 40 dernières années, <a href="https://www.nature.com/articles/nclimate1633">se poursuivra probablement tout au long du XXIᵉ siècle</a>.</p>
<p>Les conséquences sont déjà importantes en termes de baisse de pluviométrie dans le bassin méditerranéen, le sud-ouest des États-Unis, en Australie, en Afrique du Sud et au sud-ouest de l’Amérique du Sud. C’est précisément ce qui semble se produire dans les Andes sud-américaines, depuis l’Altiplano (à partir de 16° de latitude sud) jusqu’à la Patagonie du Nord (43° de latitude sud).</p>
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<figcaption><span class="caption">Les scientifiques Robert Wilson et Ingniaco A. Mundo détaillent leurs recherches sur l’impact de l’expansion de cellule de Hadley en Amérique du Sud. (Intissar El Hadj Mohamed, Émilie Groyer, Coraline Madec/Youtube, 2018).</span></figcaption>
</figure>
<h2>Des archives naturelles pour mieux comprendre</h2>
<p>Les scientifiques en exploration dans les Andes argentines ne sont pas partis d’une page blanche : <a href="https://www.nature.com/articles/srep00702">dès 2012</a> plusieurs travaux suggèrent un lien entre la progression des sécheresses et l’élargissement de la circulation de Hadley.</p>
<p>Cependant, les mécanismes, et l’amplitude à long terme du phénomène d’élargissement de la circulation de Hadley restent imparfaitement connus. Or comprendre précisément ces ressorts permettrait de mieux anticiper les sécheresses ; et de mobiliser la société civile et les décideurs des pays concernés afin de sécuriser l’approvisionnement en eau.</p>
<p>Ces lacunes dans nos connaissances sont, au moins en partie, imputables au manque de données historiques à grande échelle sur l’évolution de la circulation atmosphérique tropicale-subtropicale. Dans cette partie du monde, les séries de mesure directe des précipitations sont rares, et n’excèdent pas 50 ans d’ancienneté.</p>
<p>Pour y remédier, le projet de recherche Themes va s’appuyer sur la dendrochronologie, c’est-à-dire l’étude des informations enregistrées année après année dans les cernes des arbres. Ces archives naturelles, qui stockent de nombreux paramètres à chaque étape de croissance de l’arbre, pourraient permettre d’étendre à plusieurs siècles (au moins 400 ans) notre connaissance des variations de précipitation.</p>
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<figcaption><span class="caption">L’ingénieure de recherche Monique Pierre explique comment on « lit » les cernes des arbres pour explorer les climats du passé. (Salomé Gotreau, Benjamin Robert et Sarah Terrien/YouTube, 2018).</span></figcaption>
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<p>Dans cette optique, la situation géographique de l’Amérique du Sud lui confère un atout unique : on trouve dans la Cordillère des Andes des arbres portant des cernes annuels dans une bande de latitude étendue (courant de 20° à 60° sud).</p>
<p>Il existe d’ailleurs une collection importante de données et d’échantillons de bois de différentes espèces dans les collections des laboratoires de recherche argentins et chiliens. Ces collections seront examinées et d’autres échantillons seront encore prélevés pour compléter les archives.</p>
<p>Il s’agit d’actualiser et/ou de développer de nouvelles séries dendrochronologiques le long des Andes depuis l’Altiplano jusqu’au nord de la Patagonie, en passant par le Chili central.</p>
<h2>Les isotopes, un langage à décrypter</h2>
<p>Outre les données météorologiques, les équipes du projet Themes comptent combiner de nombreux indicateurs recueillis grâce aux cernes d’arbres afin de reconstruire l’évolution passée de la circulation de Hadley et sa localisation.</p>
<p>Ils s’appuieront notamment sur la composition des cernes en isotopes 18 de l’oxygène et 13 du carbone : ces variétés rares des deux atomes communs du monde vivant comportent, dans leur noyau, un nombre de particules neutres (neutrons) qui diffère de celui de l’atome majoritaire. Le noyau de l’oxygène 18 cache ainsi deux neutrons de plus que l’oxygène 16 ; le carbone 13 recèle un neutron de plus que le classique carbone 12. Les propriétés de ces différentes « versions » sont grossièrement similaires à celle de l’atome majoritaire, mais pas strictement identiques.</p>
<p>La différence se remarque notamment à la survenue de certains processus physico-chimiques : par exemple, quand de l’eau s’évapore, les isotopes d’oxygène qui contiennent 16 neutrons (appelés <sup>16</sup>O) ont tendance à aller plus facilement dans la vapeur que les isotopes qui contiennent 18 neutrons (<sup>18</sup>O). De même, l’isotope <sup>12</sup>C du carbone est privilégié par la plante pendant la photosynthèse, ce qui entraîne un appauvrissement des sucres formés en <sup>13</sup>C par rapport au carbone du CO<sub>2</sub> atmosphérique.</p>
<p>Dans l’arbre, on peut donc observer plusieurs réactions qui affectent la répartition des isotopes – depuis l’absorption d’eau (qui fournit les atomes d’oxygène) jusqu’à la fabrication de la cellulose. L’intensité de ces réactions dépend de plusieurs facteurs, tels que la température ou l’humidité de l’air.</p>
<p>Par voie de conséquence, les variations de composition isotopique de la cellulose, d’un cerne annuel à l’autre, reflètent les variations de l’environnement de croissance de l’arbre… On peut ainsi mettre en évidence des corrélations entre cette composition en isotopes et la température, l’humidité ou encore l’insolation.</p>
<p>L’exercice doit permettre de proposer une reconstruction solide et fiable des fluctuations des siècles passés. Ces données seront ensuite utilisées pour calibrer les modèles climatiques actuels, avant de tenter de prédire l’évolution future.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/HBZVqEu7PYY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">L’ingénieur de recherche Michel Stievenard explique comment on analyse en laboratoire les prélèvements effectués sur les arbres. (Salomé Gotreau, Benjamin Robert et Sarah Terrien/YouTube, 2018).</span></figcaption>
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<h2>Des modèles pour prédire le futur ?</h2>
<p>Les modèles climatiques constituent des programmes numériques qui intègrent les équations physiques régissant les flux de matière et d’énergie dans les océans et l’atmosphère. La puissance de calcul des ordinateurs n’étant pas infinie, ces modèles recourent à des représentations simplifiées du monde, basées sur des conditions de départ que les chercheurs espèrent cohérentes.</p>
<p>Pour tester leur validité, les spécialistes font tourner ces modèles sur des échelles de temps et d’espace dont on connaît à l’avance les caractéristiques. À l’arrivée, si les données calculées par le modèle virtuel ressemblent à celles des mesures réelles, on peut estimer que les paramètres du modèle sont corrects. Ce n’est qu’alors que les chercheurs pourront effectuer des simulations pour le futur.</p>
<p>In fine, si les hypothèses de calcul des modèles théoriques collent aux mesures de terrain, elles pourront servir de base pour proposer une évolution probable des changements hydroclimatiques qui attendent la région jusqu’en 2100.</p>
<p>Cette étape de validation par comparaison étant cruciale, les chercheurs ont besoin d’augmenter la longueur dans le temps des séries de mesures. Et c’est dans la réalisation de cet objectif que la dendrochronologie s’avère une précieuse alliée.</p>
<p>À la suite de la campagne de prélèvement de bois de plusieurs espèces (cyprès de Patagonie, cèdre du Chili et araucaria du Chili) qui a eu lieu en février dans les Andes, s’ouvre maintenant la période d’exploitation des échantillons récoltés. Une première étape vers la connaissance du futur ?</p>
<hr>
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<p><em>Le <a href="https://group.bnpparibas/actualite/themes-percer-mystere-expansion-tropiques">projet de recherche Themes</a> est soutenu par le programme <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Climate Initiative</a> de la Fondation BNP Paribas</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/92757/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Daux a reçu des financements de la Fondation BNP Paribas. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Olivier Aballain ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les épisodes secs se multiplient un peu partout sous les tropiques. Une équipe de chercheurs travaille sur les conifères d’Amérique du Sud pour mieux comprendre ce phénomène.Valérie Daux, Professeure en Sciences de la Terre, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Olivier Aballain, Responsable pédagogique, ESJ Lille (École supérieure de journalisme de Lille)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/684482017-01-17T21:10:03Z2017-01-17T21:10:03ZPrévoir les changements climatiques à 10 ans, le nouveau défi des climatologues<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/152939/original/image-20170116-22302-zgfzen.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le climat à la loupe. </span> <span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la Science 2017, qui se tient du 7 au 15 octobre, et dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr">Fetedelascience.fr</a>.</em> </p>
<hr>
<p>Un an après l’<a href="https://theconversation.com/laccord-de-paris-ou-le-choix-de-la-methode-douce-52597">Accord de Paris</a>, l’objectif est plus que jamais de mettre en œuvre la réduction drastique et rapide des émissions de <a href="https://theconversation.com/gaz-a-effet-de-serre-50156">gaz à effet de serre</a>, responsables du réchauffement du climat. L’urgence de l’action, enfin reconnue par tous les pays, vient de ce qu’au rythme actuel (plus de 45 milliards de tonnes de CO<sub>2</sub> par an), les émissions cumulées engendreraient un réchauffement de 2 °C dans 20 ans seulement.</p>
<p>Une telle action internationale demande d’abord des outils de suivi : mesure des émissions, mesure du CO<sub>2</sub> dans l’atmosphère, mesure des échanges avec les puits de carbone que sont l’océan et la biosphère continentale. Elle demande également de prévoir l’évolution du climat dans les prochaines décennies.</p>
<p>Ce dernier point est un véritable défi car les variations « naturelles » du climat se superposent à la tendance due aux émissions engendrées par les activités humaines. Et, de la même façon que l’arrivée du printemps n’est pas linéaire – elle se fait à travers une alternance de jours plus chauds (anticyclones) et plus froids (dépressions) de laquelle émerge peu à peu l’effet de l’ensoleillement qui augmente – le réchauffement du climat ne l’est pas non plus (voir la figure ci-dessous).</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/149844/original/image-20161213-1596-2rjybr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/149844/original/image-20161213-1596-2rjybr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/149844/original/image-20161213-1596-2rjybr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=466&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/149844/original/image-20161213-1596-2rjybr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=466&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/149844/original/image-20161213-1596-2rjybr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=466&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/149844/original/image-20161213-1596-2rjybr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=586&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/149844/original/image-20161213-1596-2rjybr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=586&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/149844/original/image-20161213-1596-2rjybr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=586&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution de la température moyenne annuelle de la Terre de 1880 à 2014. La courbe en rouge est une moyenne glissante de cinq ans et fait ressortir les variations décennales du climat.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Source NOAA</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Les variations décennales du climat</h2>
<p>Les climatologues connaissent de mieux en mieux l’origine de ces variations « naturelles » internes au climat : d’une année sur l’autre, ce peut être l’alternance des phénomènes <a href="https://theconversation.com/el-nino-quest-ce-que-cest-47645">El Niño/La Niña</a> dans l’océan Pacifique ou celle d’anomalies chaudes et froides de part et d’autre de l’océan Indien ; d’une décennie sur l’autre, cela peut être l’alternance entre une phase chaude et une phase froide de l’oscillation décennale de l’Atlantique Nord ou de celle du bassin Pacifique (voir la figure ci-dessous).</p>
<p>Une constante cependant : ces variations à l’échelle de quelques années à quelques décennies – les climatologues parlent de variations « décennales » – font intervenir l’océan. Grâce à son importante capacité calorifique – l’océan se réchauffe à la fois moins vite et plus longtemps que l’atmosphère par exemple – il peut stocker l’essentiel de la chaleur liée aux variations du climat.</p>
<p>À titre de comparaison, les 70 kilomètres de la colonne atmosphérique contiennent autant d’énergie que les deux premiers mètres de l’océan. Ce dernier faisant en moyenne 4000 mètres de profondeur, on comprend dès lors que 93 % de la chaleur additionnelle due aux activités humaines y soit stockée. De la même façon, cette gigantesque capacité calorifique joue un rôle tampon pour les variations du climat.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/149848/original/image-20161213-1594-16i8aim.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/149848/original/image-20161213-1594-16i8aim.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/149848/original/image-20161213-1594-16i8aim.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/149848/original/image-20161213-1594-16i8aim.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/149848/original/image-20161213-1594-16i8aim.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/149848/original/image-20161213-1594-16i8aim.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/149848/original/image-20161213-1594-16i8aim.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/149849/original/image-20161213-1594-1sacv8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/149849/original/image-20161213-1594-1sacv8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=246&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/149849/original/image-20161213-1594-1sacv8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=246&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/149849/original/image-20161213-1594-1sacv8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=246&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/149849/original/image-20161213-1594-1sacv8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=309&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/149849/original/image-20161213-1594-1sacv8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=309&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/149849/original/image-20161213-1594-1sacv8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=309&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’oscillation décennale de l’Atlantique Nord. a) Structure spatiale qui montre un maximum de variation au sud du Groenland. b) Évolution de l’indice de l’AMO de 1870 à 2010. La période d’indice négatif dans les années 1970-1980 correspond à une sécheresse marquée au Sahel.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<h2>Distinguer les types de variations</h2>
<p>Ces modulations décennales naturelles et internes au climat sont relativement faibles à l’échelle de la planète : elles se traduisent par quelques dixièmes de degré sur la température globale. Néanmoins, elles peuvent contrecarrer pour quelque temps (10-15 ans) le réchauffement dû aux émissions de gaz à effet de serre provoquées par les activités humaines.</p>
<p>C’est pourquoi les acteurs de la gouvernance climatique mondiale ont absolument besoin de connaître ces évolutions pour pouvoir ajuster leurs actions.</p>
<p>Prenons un exemple : si les oscillations naturelles du climat tendent vers un refroidissement, nous pourrons alors avoir l’impression que nos actions de limitation du réchauffement climatique portent leurs fruits plus rapidement que prévu et, du coup, relâcher nos efforts. Inversement, si les variations naturelles tendent vers un réchauffement, nous pourrons avoir l’impression que nos actions sont sans effet et, du coup, soit les abandonner, soit les intensifier inutilement.</p>
<h2>Des prévisions essentielles pour les sociétés</h2>
<p>Au-delà des négociations des <a href="https://theconversation.com/cop-50019">COP</a>, anticiper ces variations décennales du climat a un intérêt très marqué au niveau économique et social. On pense, par exemple, à la <a href="https://www.ird.fr/la-mediatheque/fiches-d-actualite-scientifique/178-sahel-une-secheresse-persistante">sécheresse persistante du Sahel</a> dans les années 1970-1980 qui a été attribuée à une phase froide l’oscillation décennale de l’Atlantique Nord (voir la figure ci-dessus). Anticiper la prochaine phase froide représente dès lors un enjeu fondamental pour que les sociétés concernées puissent s’organiser.</p>
<p>De la même façon, les producteurs d’énergie souhaitent connaître les investissements qu’ils pourront faire pour les 20 années à venir. Cela concerne, par exemple, la disponibilité en eau pour de futurs barrages, le débit des rivières pour le refroidissement des centrales nucléaires à implanter ou encore l’évolution des vents moyens pour l’énergie éolienne.</p>
<p>Pour répondre à ces attentes, le <a href="https://www.wcrp-climate.org/">Programme mondial de recherches sur le climat</a> a initié la mise en place de services climatiques, dont la faisabilité scientifique, technique et sociale est en cours d’exploration. Un <a href="http://misva.sedoo.fr">service pilote</a> dédié à l’agriculture a ainsi vu le jour en Afrique de l’Ouest.</p>
<p>Grâce à cette capacité d’anticipation plus fine que les projections basées sur le seul effet des émissions dues aux activités humaines, les prévisions décennales pourront aider à la prise de décision concernant l’adaptation au changement climatique. Elles pourront ainsi permettre d’identifier les régions qui auront besoin d’aide en premier pour affronter les changements climatiques.</p>
<p>Mais si ces besoins sociaux et économiques sont clairs, la prévision décennale n’est pas encore opérationnelle, au sens où le sont aujourd’hui les prévisions météorologiques et saisonnières.</p>
<p>Pour des prévisions climatiques à l’échelle de la décennie, les chercheurs doivent relever trois défis : comprendre les mécanismes à l’œuvre, les observer et les modéliser.</p>
<h2>Comprendre les variations internes et externes</h2>
<p>Le premier défi consiste donc à comprendre les origines de ces variations décennales du climat, qu’elles soient internes ou externes. Nous avons déjà décrit les sources de variabilité interne (comme l’oscillation décennale de l’Atlantique Nord ou du bassin Pacifique).</p>
<p>Si ces phénomènes internes sont difficiles à comprendre – ils font intervenir des processus physiques complexes, à grande échelle d’espace et de temps, pour lesquels les observations directes font souvent défaut –, ils sont néanmoins essentiels car potentiellement prévisibles, ce qui n’est pas le cas des sources externes.</p>
<p>Les variabilités naturelles externes sont dues aux éruptions volcaniques et aux variations du soleil. Lors d’une éruption volcanique, les poussières et gaz éjectés restent dans la haute atmosphère (la stratosphère) pendant plusieurs mois : cela provoque un « effet parasol » qui limite le rayonnement solaire, entraînant un refroidissement global mais temporaire du climat. En 1991, l’éruption du Pinatúbo avait ainsi <a href="http://www.insu.cnrs.fr/node/5428">entraîné un refroidissement</a> de près de 0,5 °C pendant 6 mois.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/150117/original/image-20161214-5942-101uml9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/150117/original/image-20161214-5942-101uml9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=529&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/150117/original/image-20161214-5942-101uml9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=529&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/150117/original/image-20161214-5942-101uml9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=529&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/150117/original/image-20161214-5942-101uml9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=665&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/150117/original/image-20161214-5942-101uml9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=665&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/150117/original/image-20161214-5942-101uml9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=665&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le Pinatubo, juste après l’explosion principale du 15 juin 1991.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pinatubo#/media/File:Pinatubo_ash_plume_910612.jpg">Wikimédia</a></span>
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<p>À l’échelle décennale, les variations du soleil sont essentiellement dues au cycle des taches solaires. Outre une fréquence observée de 11 ans relativement stable, il existe des périodes de plus faible activité solaire qui peuvent durer plusieurs décennies. Le <a href="https://www.unifr.ch/geoscience/geographie/ssgmfiches/glacier/2406.php">petit âge glaciaire</a> du XVII<sup>e</sup> siècle est, par exemple, probablement dû à la conjonction d’une forte activité volcanique et d’une absence de taches solaires.</p>
<p>L’autre source de variations externes du climat est liée à l’activité humaine et concerne notamment les émissions de gaz à effet de serre ; ces dernières sont continues, de même que leur effet climatique. Il y a aussi les émissions de poussières (en particulier celles générées par l’exploitation du charbon) qui ont, elles, connu d’importantes variations.</p>
<p>Au cours de l’après-guerre, par exemple, on a constaté une forte augmentation de l’utilisation du charbon et par conséquent des émissions de poussières entraînant « l’effet parasol » ; ce phénomène est ainsi venu contrecarrer le réchauffement lié aux émissions de gaz à effet de serre des années 1950-1960. À l’inverse, dans les années 1970, les lois sur la qualité de l’air instaurées aux États-Unis et en Europe ont contribué à l’accélération du réchauffement en limitant drastiquement ces émissions « refroidissantes » (voir la première figure).</p>
<h2>Observer et reconstruire</h2>
<p>Le second défi concerne les observations, essentielles pour comprendre ces variations. Or nous n’avons que peu d’observations avec le recul temporel suffisant, en particulier au niveau de l’océan dont le rôle est central.</p>
<p>La <a href="http://www.climat-en-questions.fr/reponse/observation-climat/connaitre-levolution-passee-climat-par-elsa-cortijo-valerie-masson-0">« reconstruction » du passé</a> est donc une activité de recherche très active. Le travail d’enquête des chercheurs va de l’utilisation d’indicateurs indirects du climat – comme les archives environnementales (stalagmites, cernes de croissance des arbres, coraux, coquillages…) et historiques – à l’utilisation de modèles numériques du climat contraints par les quelques observations dont nous disposons depuis 100 ans.</p>
<p>Les observations de l’océan, acteur clé du climat, sont également essentielles. Mais son opacité, qui fait qu’on ne peut pas observer ses profondeurs depuis la surface, oblige à mener ces observations in situ, soit en campagne en mer avec un bateau océanographe, soit en déployant des réseaux de bouées automatiques (on pense au réseau Argo) ; soit encore par satellite pour certaines mesures, comme la température de surface de la mer ou le niveau de la mer. Cette difficulté technique explique pourquoi nous avons peu de données, en particulier dans les régions éloignées comme le Pacifique sud ou l’océan circumpolaire Antarctique.</p>
<h2>Modéliser pour « simuler » le climat</h2>
<p>Le troisième défi concerne la modélisation du climat pour l’horizon décennal, qui s’appuie sur la compréhension des mécanismes et les observations.</p>
<p>La modélisation du climat représente une entreprise titanesque qui a commencé à la fin des années 1960 avec l’arrivée des premiers ordinateurs. Il s’agit en effet de résoudre les équations des écoulements fluides sur toute la planète, en 3 dimensions et avec le plus de détails possibles : le nombre d’opérations à réaliser est gigantesque et seuls les plus puissants supercalculateurs peuvent simuler le climat dans toute sa complexité.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/iP7hY9mgMHc?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">La modélisation du climat (csipsl, 2013).</span></figcaption>
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<p>Du fait des propriétés chaotiques de la circulation de l’atmosphère et de l’océan, il faut en outre de nombreuses simulations qui diffèrent très légèrement dans leur état initial pour explorer la distribution des futurs possibles. C’est pourquoi les prévisions décennales seront d’abord probabilistes comme le sont les prévisions saisonnières et météorologiques aujourd’hui. Il faut en effet se souvenir que quand Météo-France nous dit qu’il va pleuvoir demain, c’est que 80 simulations de prévision sur 100 le montrent. Mais il se peut qu’il ne pleuve pas !</p>
<p>Il apparaît donc aujourd’hui essentiel d’établir des ponts entre les scientifiques qui mettent au point les prévisions décennales (et qui en connaissent les limites) et les utilisateurs futurs (qui connaissent le risque que fait courir l’aléa climatique sur leur activité). C’est tout l’enjeu des services opérationnels en cours d’élaboration partout dans le monde ; ces derniers ont pour ambition de transformer ces prévisions en facteur de risque pour de nombreux secteurs et, in fine, en outil d’aide à la décision.</p>
<hr>
<p><em><a href="http://cerfacs.fr/annuaire/cassou/">Christophe Cassou</a> du <a href="https://theconversation.com/institutions/cerfacs-2810">Cerfacs</a> est co-auteur de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/68448/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Éric Guilyardi a reçu des financements du CNRS, de l’Union européenne, de l’Agence nationale de la recherche, du Belmont Forum, de l’Université de Reading et du NERC britannique. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Juliette Mignot a reçu des financements du CNRS, de l’Union européenne, de l’Agence nationale de la recherche et de l’IRD.
</span></em></p>Pour s’adapter aux changements climatiques à venir, des prévisions plus fines que les projections basées sur le seul effet des émissions générées par l’homme, sont aujourd’hui nécessaires.Éric Guilyardi, Directeur de recherches au CNRS et à l’Université de Reading (Grande-Bretagne), Laboratoire d’océanographie et du climat, Institut Pierre-Simon Laplace, Sorbonne UniversitéJuliette Mignot, Océanographe à l’IRD, membre du laboratoire LOCEAN, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/476452015-09-20T13:40:18Z2015-09-20T13:40:18ZEl Niño, qu’est-ce que c’est ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/476105/original/file-20220726-17-f4v2t0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La Terre vue de l’espace. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/24354425@N03/14212310726/">Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Les récentes données rendues publiques par la Nasa et la NOAA l’ont confirmé : 2015 aura bien été l’<a href="https://theconversation.com/2015-aura-bien-ete-lannee-la-plus-chaude-jamais-enregistree-53623">année la plus chaude</a> jamais observée par les scientifiques. Ce réchauffement global – dû à la concentration dans l’atmosphère de gaz à effet de serre imputable en majeure partie aux activités humaines –, est actuellement accompagné d’un épisode particulièrement puissant du phénomène El Niño, avec une température de la mer anormalement élevée dans le Pacifique tropical.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/109543/original/image-20160128-27140-euoey4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/109543/original/image-20160128-27140-euoey4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/109543/original/image-20160128-27140-euoey4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/109543/original/image-20160128-27140-euoey4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/109543/original/image-20160128-27140-euoey4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=462&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/109543/original/image-20160128-27140-euoey4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=462&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/109543/original/image-20160128-27140-euoey4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=462&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Anomalies de température de la mer dans le Pacifique tropical pendant les quatre dernières semaines (du 27 décembre 2015 au 23 janvier 2016). Les zones en rouge montrent des températures au-dessus de la moyenne atteignant 3 °C. Cette distribution d’anomalies chaudes le long de l’équateur et le long des côtes des continents américains est typique d’El Niño. Cette année, l’eau chaude s’étend particulièrement loin vers l’ouest du Pacifique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">NOAA</span></span>
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<p>Ses effets ont commencé à se faire sentir cet été pour s’intensifier au fil des semaines, provoquant des anomalies météorologiques, comme un trio inédit de cyclones simultanés dans le Pacifique, un <a href="https://megha-tropiques.cnes.fr/fr/alex-un-ouragan-rarissime-observe-depuis-lespace">événement rarissime</a> et des pluies abondantes au nord de la Californie, mais encore limitées au sud.</p>
<p>Quelle est l’origine d’El Niño ? Qu’en savent les scientifiques ? Connaît-il une évolution sous l’effet du réchauffement climatique ?</p>
<h2>Un phénomène à l’impact global</h2>
<p>El Niño constitue la fluctuation la plus importante du système climatique et perturbe la circulation de l’atmosphère à l’échelle globale. On se trouve en présence de ce phénomène lorsque la température de la partie orientale du Pacifique tropical dépasse une certaine valeur seuil au-dessus de la moyenne.</p>
<p>En temps normal, les vents alizés soufflent sur le Pacifique tropical, entraînant les courants sous-jacents vers l’ouest. Ces courants transportent l’eau chauffée par le soleil des basses latitudes ; cette eau finit alors par s’accumuler dans les couches supérieures de l’océan Pacifique ouest, provoquant une élévation du niveau de la mer.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/95379/original/image-20150918-17689-1y3al7h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/95379/original/image-20150918-17689-1y3al7h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=467&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/95379/original/image-20150918-17689-1y3al7h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=467&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/95379/original/image-20150918-17689-1y3al7h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=467&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/95379/original/image-20150918-17689-1y3al7h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=587&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/95379/original/image-20150918-17689-1y3al7h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=587&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/95379/original/image-20150918-17689-1y3al7h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=587&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">En temps normal, les vents alizés transportent l’eau chauffée d’est en ouest.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Michael McPhaden/NOAA</span></span>
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<p>L’eau chauffée s’évapore de la surface de l’océan, l’air humide et chaud (donc léger) s’élève. Une convection profonde sous forme d’énormes cumulonimbus s’ensuit et cause de fortes précipitations. Lorsque cet air ascendant atteint le sommet de la troposphère, il se trouve bloqué par la stratosphère, trop stable pour être pénétrée, et s’étale alors vers l’est, puis descend vers la surface plus froide du Pacifique est (dite « zone de subsidence »). Cette circulation est-ouest est appelée circulation de Walker.</p>
<h2>Ses effets sur l’atmosphère et l’océan</h2>
<p>La circulation de Walker est modifiée plusieurs fois par décennie, soit par un El Niño, soit par son phénomène opposé (froid), La Niña. Cette oscillation chaude-froide couplée à des variations de pression atmosphérique quasi périodiques est appelée ENSO (El Niño-Southern Oscillation).</p>
<p>Lors d’un El Niño typique, les alizés ralentissent et des coups de vent d’ouest soufflent épisodiquement sur le Pacifique ouest, générant le long de l’Équateur de larges ondes dans l’océan dont on peut voir la trace en surface grâce à des satellites qui mesurent l’élévation du niveau de la mer. Ces ondes déclenchent le transfert vers l’est du bassin de l’<a href="http://sealevel.jpl.nasa.gov/elnino2015/1997vs2015-latest-still.jpg">eau chaude accumulée à l’ouest</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/95381/original/image-20150918-17709-dc162v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/95381/original/image-20150918-17709-dc162v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=488&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/95381/original/image-20150918-17709-dc162v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=488&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/95381/original/image-20150918-17709-dc162v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=488&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/95381/original/image-20150918-17709-dc162v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=613&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/95381/original/image-20150918-17709-dc162v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=613&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/95381/original/image-20150918-17709-dc162v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=613&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Au cours d’un El Niño, la circulation de l’eau chauffée d’est en ouest se trouve modifiée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Michael McPhaden/NOAA</span></span>
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<p>Ce gigantesque transfert de chaleur induit en contrepartie une réduction des remontées d’eau froide des profondeurs (<em>“upwellings”</em>) à l’est, à l’Équateur et le long de la côte sud-américaine. Apparaissent alors de profondes anomalies de la température de la mer notamment le long de l’Équateur, de la ligne de changement de date jusqu’à la côte.</p>
<p>Lorsque la partie centrale du Pacifique s’échauffe au cours d’un El Niño, la convection atmosphérique, qui se trouve normalement au-dessus du Pacifique ouest dans la région des eaux chaudes, migre vers le centre du Pacifique. Le transfert de chaleur de l’océan à l’atmosphère associé à cette convection se traduit en précipitations inhabituelles dans la région normalement sèche du Pacifique tropical oriental. L’air se déplaçant d’ouest en est nourrit la convection, affaiblissant encore les alizés. Ce processus de rétroaction (<em>feedback</em>) amplifie le phénomène et assure le maintien de la convection atmosphérique profonde et des précipitations dans le Pacifique équatorial central. El Niño prend fin lorsque les changements océaniques causent une rétroaction négative qui renverse sa dynamique initiale.</p>
<h2>La météo perturbée aux États-Unis</h2>
<p>La redistribution de chaleur dans l’océan associée à El Niño crée une réorganisation majeure de la convection atmosphérique globale, perturbant fortement les conditions météorologiques, de l’Amérique du Nord à l’Amérique du Sud, de l’Australie à l’Inde, de l’Afrique du Sud au Brésil.</p>
<p>À l’origine des effets de ces phénomènes tropicaux sur les États-Unis, on trouve un type particulier de connexions, appelées téléconnexions extratropicales, entre l’échauffement généré par El Niño dans le centre du Pacifique et l’Amérique du Nord. Cet échauffement excite un train d’ondes qui se propagent vers le nord et relient ainsi le centre du Pacifique équatorial à l’Amérique du Nord. Il en résulte un déplacement vers le nord du jet subtropical. Ce ruban de vents très forts en altitude et soufflant d’ouest en est contribue à la formation des orages aux latitudes moyennes au cours de l’hiver, provoquant généralement une série d’orages sur la Californie et le Sud-ouest américain. L’augmentation des précipitations ne semble exister qu’au cours d’épisodes <a href="http://www.nature.com/nclimate/journal/v4/n2/full/nclimate2100.html">forts d’El Niño</a>.</p>
<p>Si les El Niño ont une signature assez typique dans les tropiques, leurs impacts sur l’Amérique du Nord varient beaucoup, car d’autres influences agissent de manière concomitante dans les latitudes tempérées. On peut cependant dire que les hivers qui suivent El Niño sont en général très doux dans l’ouest du Canada et le centre-nord des États-Unis, et <a href="http://www.pmel.noaa.gov/tao/elnino/impacts.html">particulièrement humides</a> dans le sud, de la Californie à la Floride en passant par le Texas.</p>
<h2>Et l’Europe ?</h2>
<p>Ici, les avis sont partagés et les conclusions restent mitigées. Bien que certaines études indiquent un impact d’El Niño sur le nord de l’Europe, les Îles britanniques et la Méditerranée, tout particulièrement pendant les mois de janvier et février qui suivent l’événement, ces effets sont relativement faibles. Surtout, ils <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1256/wea.248.04/abstract">varient</a> d’un événement à l’autre. Il n’existerait donc pas d’effet typique, à l’exception d’une grande variabilité météorologique hivernale. Quelques caractéristiques ont été cependant observées : des circulations cycloniques plus nombreuses en Europe centrale, un décalage vers le sud de la trajectoire des cyclones atlantiques, des situations de blocages dans le secteur Europe-Atlantique, ainsi que le déplacement vers le nord de la trajectoire des événements cycloniques de la région méditerranéenne influençant les précipitations dans cette région. Tous ces phénomènes restent cependant faibles et difficiles à détecter.</p>
<p>Cette absence d’effets majeurs, et surtout d’impacts typiques, s’explique en partie par le fait que d’autres facteurs entrent en compétition avec El Niño pour influencer l’évolution des situations météorologiques aux latitudes moyennes. Parmi ces facteurs, on retient les anomalies de température de la mer dans les régions extratropicales et l’Oscillation nord-atlantique (NAO). De plus, la grande distance entre la zone d’action énergétique d’El Niño dans le centre du Pacifique équatorial et l’Europe explique que les téléconnexions qui agissent sur l’Amérique du Nord (et du Sud de façon quasi symétrique), ne jouent pas pour l’Europe. Les seules <a href="http://www.mpimet.mpg.de/nc/en/communication/news/single-news/article/seasonal-predictability-over-europe-arising-from-el-nino-and-stratospheric-variability.html">connexions</a> constatées passent par la stratosphère et sont de fait assez lointaines.</p>
<h2>L’influence des gaz à effet de serre</h2>
<p>Après avoir pensé qu’il existait un El Niño canonique, voire deux, les scientifiques <a href="http://www.gfdl.noaa.gov/%7Eatw/yr/2015/capotondi_etal_variations2015.pd">s’intéressent</a> aujourd’hui à une variété de comportements récemment observés pour ce phénomène. De nombreuses années d’observation révèlent en effet une surprenante diversité d’El Niño : au niveau de son intensité, de sa longévité et surtout du déplacement des zones d’anomalie maximum de température. Ces variations sont-elles liées au changement climatique ? Il est <a href="http://www.cgd.ucar.edu/oce/markus/ENSOCLIV.pdf">encore trop tôt pour le dire</a>.</p>
<p>Il existe en effet une grande variabilité naturelle dans le Pacifique à l’échelle d’une décennie (appelée PDO – Pacific Decadal Oscillation), voire plus, qui peut <a href="https://theconversation.com/is-the-global-warming-hiatus-over-45995">masquer les variations</a> provoquées par le réchauffement du climat.</p>
<p>Les résultats des modèles climatiques suggèrent que les conditions moyennes du Pacifique vont évoluer vers un état plus chaud. Cela se traduira par une élévation de la température de la mer et une diminution des alizés, ce qui pourrait conduire à un El Niño quasi permanent ou à des épisodes plus intenses.</p>
<p>Certaines <a href="http://www.nature.com/nclimate/journal/v4/n2/full/nclimate2100.html">prédictions climatiques</a> ainsi que des <a href="http://www.nature.com/nclimate/journal/v3/n9/full/nclimate1936.html">reconstructions</a> d’El Niño passés ont fourni la preuve empirique que sous l’influence du réchauffement, les prochains El Niño pourraient être plus extrêmes. Elles suggèrent aussi un déplacement vers l’est de la zone où l’océan transfère de la chaleur à l’atmosphère. Cela impliquerait un déplacement des téléconnexions extratropicales vers l’est.</p>
<p>Mais les prédictions des modèles divergent quant aux variations d’intensité des téléconnexions : seront-elles différentes ? Plus marquées ? Il n’existe pas aujourd’hui de réponse simple à la question des variations des précipitations en Californie, par exemple, selon les changements prévisibles d’El Niño en liaison avec le réchauffement planétaire.</p>
<h2>Des prédictions toujours difficiles</h2>
<p>La sensibilité de l’atmosphère tropicale à la rétroaction entre les températures élevées de la mer et le ralentissement des alizés qui génère la convection atmosphérique dans le centre du Pacifique va-t-elle se poursuivre ?</p>
<p>Une telle rétroaction n’a pas eu lieu en 2014, alors même que les conditions favorables à un El Niño intense étaient réunies. La convection profonde n’a pas persisté dans le Pacifique central et les interactions entre l’atmosphère et l’océan normalement très fortes pendant El Niño n’ont pas joué leur rôle d’ancrage de la convection par l’intermédiaire des transferts de chaleur.</p>
<p>Ces résultats indiquent qu’il reste encore beaucoup à découvrir, même si des progrès scientifiques majeurs ont été accomplis ces dernières décennies à propos d’El Niño et du cycle de ENSO grâce à des programmes d’observations et de prédictions mis en place depuis le milieu des années 80 et poursuivis jusqu’à ce <a href="http://www.cpc.ncep.noaa.gov/products/analysis_monitoring/lanina/enso_evolution-status-fcsts-web.pdf">jour</a> </p>
<p>Notre capacité à prédire El Niño et l’existence de relations entre l’augmentation des gaz à effets de serre et ce phénomène météorologique reste encore limitée par la complexité de la dynamique de ce phénomène, comme l’a montré la prévision défaillante de 2014. Aux États-Unis l’hiver est en partie dominé par El Niño qui ne s’est pas encore développé en un « méga » El Niño comme certains le prédisent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/47645/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Catherine Gautier A reçu des financements de la NOAA, la NSF et le department de l'energie des Etats-Unis</span></em></p>El Niño constitue la fluctuation la plus importante du système climatique, perturbant la circulation de l’atmosphère à l’échelle globale.Catherine Gautier, Professor Emerita of Geography, University of California, Santa BarbaraLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.