tag:theconversation.com,2011:/ca/topics/soja-36048/articlessoja – The Conversation2024-01-04T09:27:22Ztag:theconversation.com,2011:article/2204812024-01-04T09:27:22Z2024-01-04T09:27:22ZComment l’Argentine s’est entièrement façonnée autour des OGM<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/567661/original/file-20240103-15-lzuje7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C40%2C2977%2C2205&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Tracteur et semoir, ensemencement direct dans la pampa, Argentine</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/tractor-seeder-direct-sowing-pampa-argentina-1095766430">Foto 4440/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>L’histoire n’est pas banale : c’est celle d’une plante originaire d’Asie orientale, restée pendant des millénaires confidentielle avant de susciter un engouement mondial, de devenir alors l’objet d’expérimentation génomique américaine, puis d’arriver dans la pampa argentine où elle prospère depuis de façon irrésistible. Cette plante c’est le soja.</p>
<p>Son histoire argentine est celle d’une conquête fulgurante, puisqu’elle s’y est installée, en quelques décennies, jusque dans des régions montagneuses où personne n’était, avant cela, assez fou pour cultiver la terre.</p>
<p>Au-delà de séduire le secteur agricole, cette plante est aussi devenue, en Amérique latine, un maillon clef de l’équation financière liant cette région à l’économie mondialisée. Aujourd’hui, les principaux pays producteurs de soja en Amérique du Sud sont l’Argentine, le Brésil, le Paraguay, l’Uruguay et la Bolivie. Mais le premier à avoir autorisé la culture du soja transgénique a été l’Argentine : en 1996, la superficie du sol semé avec du soja GM était de 1 %, elle atteignait 90 % en 2000-2001. Alors, comment expliquer cette irrésistible conquête ? Quelles en sont les conséquences aujourd’hui ?</p>
<h2>Des lois très favorables au développement spectaculaire des OGM</h2>
<p>Lorsque les semences génétiquement modifiées arrivent dans la pampa argentine, au milieu des années 1990, elles trouvent un <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-socio-economie-2017-1-page-31.htm">pays où le secteur primaire est déjà roi</a>, avec un climat tempéré, des sols fertiles arrosés de pluie, et, déjà, une très bonne réputation sur le marché international des céréales et, plus récemment, des oléagineux.</p>
<p>Si ces conditions ont joué un rôle indéniable, le fer de lance des OGM est cependant plutôt à chercher du côté du droit, et du gouvernement néo-libéral au pouvoir. L’expansion du soja transgénique résistant au glyphosate a, de fait, grandement bénéficié de deux facteurs : d’abord le cadre juridique garantissant la libre circulation des biens, des services et des capitaux mais aussi la loi argentine sur les semences et les créations phylogénétiques de 1973 qui protège assez peu la propriété intellectuelle des semences car elle reconnait le droit des producteurs à replanter leurs propres cultivars.</p>
<p>Or le soja est une plante autogame c’est-à-dire capable de s’autoféconder, il est donc très facile de produire de nouvelles semences OGM à partir de graines achetées. De ce fait, un <a href="https://www.proglocode.unam.mx/system/files/Sztulwark%20Braude%20Desarrollo%20Economico%202010%20On%20Line_0.pdf">marché parallèle de semences de soja</a> transgénique non certifiées s’est peu à peu mis en place, ce qui a permis aux producteurs argentins de les acquérir à un prix bien inférieur à celui pratiqué par les grandes entreprises semencières.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Champ de soja sec prêt pour la récolte" src="https://images.theconversation.com/files/567660/original/file-20240103-25-8nbxbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/567660/original/file-20240103-25-8nbxbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/567660/original/file-20240103-25-8nbxbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/567660/original/file-20240103-25-8nbxbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/567660/original/file-20240103-25-8nbxbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/567660/original/file-20240103-25-8nbxbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/567660/original/file-20240103-25-8nbxbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Champ de soja sec prêt pour la récolte.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/dry-soybean-field-argentine-harvest-by-1965275329">patoouu pato/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>L’émergence d’un nouveau modèle social et économique agricole</h2>
<p>On pourrait ainsi penser que les multinationales produisant ces semences n’aient, de ce fait, pas eu grand intérêt à se développer en Argentine.</p>
<p>Mais les OGM n’arrivent pas seuls dans le pays : le modèle de culture du soja transgénique résistant au glyphosate s’accompagne tout logiquement d’une utilisation de cet herbicide, de matériels agricoles conséquents pour supporter cette nouvelle façon de faire de l’agriculture. Et là aussi, les lois argentines en vigueur font tout pour faciliter ce modèle d’agro-business, que ce soit avec l’élimination des taxes à l’export jusqu'en 2002 et de restriction au transport des grains, la réduction voire la suppression de tarifs douaniers sur le matériel agricole, les pesticides et engrais. Si les entreprises transnationales (Monsanto, Bayer, Syngenta, etc..) ne sont donc pas spécialement contentes de voir les graines transgéniques circuler à bas coût sur un marché parallèle, elles peuvent cependant prospérer en Argentine via le combo global de modèle agricole qui s’installe avec la vente d’intrant, de matériel agricole, de formations…</p>
<p>Une nouvelle classe entrepreneurial (l’agro-business) apparaît de ce fait, profitant des exploitations vacantes laissées par des producteurs victimes des effets des réformes libérales permettant la libre circulation des biens et des capitaux mais réduisant les aides aux petits et moyens agriculteurs, l’offre en crédit, et laissant libre cours aux mécanismes de l’hyperinflation et au surendettement</p>
<hr>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Pour suivre au plus près les questions environnementales, retrouvez chaque jeudi notre newsletter thématique « Ici la Terre ». <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-environnement-150/">Abonnez-vous dès aujourd’hui</a>.</em></p>
<hr>
<h2>Quelles promesses accompagnent l’arrivée fracassante des OGM ?</h2>
<p>Cet essor spectaculaire des OGM s’accompagne également d’un discours élogieux et parfois même messianique : grâce aux rendements spectaculaires, l’agro-business argentin va nourrir la planète, à la croissance démographique exponentielle.</p>
<p>Sur le plan technique, les OGM sont aussi promus comme un modèle d’efficacité, avec moins de main-d’œuvre nécessaire, et des gains de temps permis par la pratique du semi direct, qui consiste à semer les cultures sans que l’intégralité du champ n’ait été travaillée, ce qui peut permettre de mieux conserver les microorganismes du sol. Plus récemment en promouvant « l’agriculture de précision » les promoteurs de l’agro-business arguent aussi que leur modèle permet de réduire les intrants.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Champ de soja" src="https://images.theconversation.com/files/567675/original/file-20240103-23-xd8qs3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/567675/original/file-20240103-23-xd8qs3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/567675/original/file-20240103-23-xd8qs3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/567675/original/file-20240103-23-xd8qs3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/567675/original/file-20240103-23-xd8qs3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/567675/original/file-20240103-23-xd8qs3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/567675/original/file-20240103-23-xd8qs3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Champ de soja.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/amicor/3748184220">Javier/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un État devenu dépendant des OGM</h2>
<p>Depuis l’arrivée des premières semences OGM et l’essor de l’agro-business, tout retour en arrière semble incroyablement difficile à imaginer, tant le pays tout entier est devenu dépendant de cette activité. Ainsi, c’est la taxe à l’exportation de l’agriculture qui a, en grande partie, permis à l’état argentin de payer la lourde dette extérieure qui pesait sur lui, ou bien de conduire une politique d’aide sociale pour les populations les plus vulnérables. Aide grandement nécessaire avec un seuil de pauvreté qui a atteint<a href="https://docs.google.com/spreadsheets/d/1MR9elxAq-3yygif_0UYOxSqyCuAr6qDu_ft9Fg8j_t0/edit#gid=620671261"> 66 % de la population</a> en 2002.</p>
<p>Mais si l’agro-business a pu ainsi permettre d’aider les plus précaires, elle a aussi aggravé <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-socio-economie-2017-1-page-31.htm">leur sort</a>, avec l’éviction de nombreuses familles paysannes victimes du fait de la concentration de la production entre les mains d’un nombre restreint de producteurs et le chômage massif dans le secteur agricole.</p>
<hr>
<p><em>L’article que vous parcourez vous est proposé en partenariat avec <a href="https://shows.acast.com/64c3b1758e16bd0011b77c44/episodes/64f885b7b20f810011c5577f?">« Sur la Terre »</a>, un podcast de l’AFP audio. Une création pour explorer des initiatives en faveur de la transition écologique, partout sur la planète. <a href="https://smartlink.ausha.co/sur-la-terre">Abonnez-vous !</a></em></p>
<iframe src="https://embed.acast.com/$/64c3b1758e16bd0011b77c44/16-les-nouveaux-ogm-debats-sur-les-manipulations-du-vivant?feed=true" frameborder="0" width="100%" height="110px" allow="autoplay"></iframe>
<hr>
<h2>Les OGM ont-ils tenu leurs promesses ?</h2>
<p>Sur le plan économique, alimentaire et environnemental, le bilan des OGM est multiple. L’essor massif du soja transgénique a eu des effets radicaux sur la production, qui est passée de 10,8 millons tonnes en 1990 à 40 millons en 2006., de par l’industrialisation de l’agriculture mais également l’expansion de terres cultivées dans des régions autrefois non-agricoles, ou alors réservés à l’élevage ou d’autres cultures.</p>
<p>Si l’on compare l’Argentine à ses concurrents sur les marchés internationaux, sa progression est d’ailleurs spectaculaire : au milieu des années 1980, l’Argentine fournissait 10 % des exportations de tourteaux de soja. Elle est <a href="https://agriculture.gouv.fr/sites/default/files/1606-ci-resinter-fi-argentine-v3.pdf">aujourd’hui</a> le premier exportateur mondial d’huile et de tourteaux de soja.</p>
<p>Si l’on regarde maintenant du côté de l’environnement, les conséquences alarmantes de l’expansion des cultures d’OGM sont multiples, que ce soit l’intensification de l’usage de la terre, l’utilisation d’intrants chimiques contaminant les sols et l’air, la déforestation des zones de frontière agricole, la destruction des écosystèmes, l’appauvrissement de la biodiversité, la pollution des eaux et l’émergence de problèmes de santé consécutifs à l’utilisation intensive d’herbicides.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1019537653551849472"}"></div></p>
<p>Car entre 1996 et 2016, le taux d’application des pesticides par hectare moyen est passé de <a href="https://www.fao.org/faostat/fr/">1,93 kh/ha à 5,17 kh/ha</a> en Argentine.</p>
<p>Concernant, enfin, la capacité des OGM à « nourrir la planète », si l’on questionne cette ambition à l’échelle mondiale, on peut noter que <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/07/12/une-nouvelle-normalite-la-faim-dans-le-monde-se-maintient-a-un-niveau-tres-eleve_6181672_3244.html">près d’un humain sur dix</a> souffre toujours de faim chronique en 2023 et les cultures OGM ne semblent pas spécialement développées pour endiguer ce problème : si <a href="https://www.lemonde.fr/culture/article/2020/06/23/ogm-mensonges-et-verites-les-fausses-promesses-d-une-revolution-agricole_6043931_3246.html">11 %</a> des surfaces cultivées dans le monde sont des OGM, la majeure partie de ses cultures <a href="https://www.cite-sciences.fr/archives/science-actualites/home/webhost.cite-sciences.fr/fr/science-actualites/articledossier-as/wl/1248100522516/soja-mais-colza-coton-l-etat-des-cultures-ogm-d/packedargs/currentPos%26did/packedvals/1%261248100543763.html">ne sont pas destinée à nourrir les humains</a>. Et si l’on se recentre sur l’Argentine, il peut être également opportun de rappeler que après quasi 30 ans des records annuels de production de soja, ce pays conserve plus du 40 % de sa population en dessous de la ligne de pauvreté. Ce qui semble une mauvaise blague est une réalité : dans le pays surnommé le « grenier du monde » le gouvernement a dû lancer en 2019 le programme « Argentine contre la faim » visant à nourrir 1,5 million de ménages argentins. Au cours des dix dernières années, la population souffrant d’insécurité alimentaire est passée de <a href="https://www.fao.org/3/cc8514en/cc8514en.pdf">5,8 % a 13,1 %</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Manifestation contre l’utilisation d’OGM et d’herbicides agricoles toxiques, à Buenos Aires, Argentine ; le 21 mai 2022. On peut lire sur l’affiche « le développement du modèle transgénique signifie plus de pesticides, plus de cancer, plus de défrichement." src="https://images.theconversation.com/files/567658/original/file-20240103-15-7x43dr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/567658/original/file-20240103-15-7x43dr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/567658/original/file-20240103-15-7x43dr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/567658/original/file-20240103-15-7x43dr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/567658/original/file-20240103-15-7x43dr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/567658/original/file-20240103-15-7x43dr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/567658/original/file-20240103-15-7x43dr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Manifestation contre l’utilisation d’OGM et d’herbicides agricoles toxiques, à Buenos Aires, Argentine ; le 21 mai 2022. On peut lire sur l’affiche « le développement du modèle transgénique signifie plus de pesticides, plus de cancer, plus de défrichement. »</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/buenos-aires-argentina-may-21-2022-2161172943">Carolina Jaramillo/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un retour en arrière serait-il possible ?</h2>
<p>Économiquement, l’Argentine semble encore beaucoup trop dépendante des OGM pour transitionner vers un autre modèle agricole. Politiquement, pour qu’un tel scénario émerge, il faudrait également qu’il se mesure aux intérêts des classes agraires, aux pressions des pays dépendants du soja argentin, aux entreprises transnationales et les fonds d’investissement qui fondent leur chiffre d’affaires sur le commerce agricole.</p>
<p>Sur le plan environnemental, il demeure également bien difficile d’imaginer de nouvelles cultures pousser là où le soja GM règne en maître, du fait, notamment de l’appauvrissement des sols après des années de monocultures. L’agronome Walter Pengue estimait déjà en 2005 que 3,5 millions de tonnes de nutriments étaient annuellement puisées dans les sols argentins sans être remplacées. <a href="https://www.researchgate.net/profile/Eduardo-Trigo/publication/265193285_Fifteen_Years_of_Genetically_Modified_Crops_in_Argentine_Agriculture/links/551c1b530cf20d5fbde29457/Fifteen-Years-of-Genetically-Modified-Crops-in-Argentine-Agriculture.pdf">La diminution des rendements</a> du fait de ces sols appauvris a depuis été constatée dans certaines zones.</p>
<p>De plus, ces dernières années, l’agro-business argentin a pu prospérer au-delà des cultures de soja. Dans les années 2000, maïs et colza transgéniques ont commencé à essaimer dans les campagnes argentines provoquant une véritable ruée vers les terres vierges, et le pays autorise désormaisla <a href="https://reporterre.net/L-Argentine-donne-le-feu-vert-au-premier-ble-OGM">vente comme l’exportation</a> de blé génétiquement modifié.</p>
<p>L’Argentine semble également des plus intéressées par les nouvelles technologies d’édition du génome ou new breeding techniques (NBT), expression regroupant l’ensemble des innovations permettant d’intervenir sur des zones très ciblées du génome. À l’institut de technologie agricole d’Argentine, ont par exemple été développées des <a href="https://nph.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/nph.15627">pommes de terre</a> qui ne brunissent pas, <a href="https://www.lacapitalmdp.com/inta-y-dos-alimentos-del-futuro-superpapas-y-leche-no-alergenica/">du lait hypoallergénique</a>.</p>
<p>Le gouvernement récemment élu, autoproclamé « anarco-capitaliste » (libéralisme libertaire d’ultra droite), a envoyé au parlement les premiers « paquets » de lois et décrets qui modifient et ou dérogent à plus de 300 lois tout en en créant de dizaines d’autres. L’esprit de toutes ces initiatives reste toujours le même : changer le cadre juridique afin d’enlever à l’État toute capacité de fiscalisation et de régulation. Concernant le secteur agricole, plusieurs lois ont été supprimées : la loi 26.737, par exemple, qui fixait à 15 % le total de terres entre les mains d’étrangers ou la loi 27.604, qui luttait contre la stratégie de mettre le feu aux forêts pour y planter du soja ou y développer des projets immobiliers, entre autres. Toutes les régulations concernant la production, la commercialisation et, dans certains cas, le contrôle sanitaire du vin, du coton, du yerba mate et du sucre ont été modifiées.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/ne1ko8O11XQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>En somme, si ce nouveau cadre normatif est accepté par le parlement, il y aura un impact direct sur le secteur agro-productif, accentuant la tendance à la concentration de la production, à la présence d’acteurs transnationaux et financiers, à l’expansion du modèle agro-business spécialisé dans des produits primaires destinés à l’exportation.</p>
<p>Et comme le gouvernement de Milei cherche à « révolutionner » l’ensemble de la vie politique, sociale et économique des Argentins afin de créer la première véritable société libertaire au monde, ce décret ainsi que les autres mesures prises par son gouvernement, non seulement refaçonnent ce secteur mais ils touchent le cœur même du contrat social de la société argentine. Désormais, ce contrat est défini sur 5 principes « libertaires » appliqués sans concessions : propriété privée, marchés libres de l’intervention de l’État, libre concurrence, division du travail et coopération sociale.</p>
<p>L’expérience d’une société libérale libertaire dans laquelle s’est engagée l’Argentine constitue un laboratoire politique inédit qui compte déjà, sur la scène international, un certain nombre de supporters aussi hétérogènes que le milliardaire Elon Musk, le président Volodymyr Zelensky, les anciens présidents Jair Bolsonaro du Brésil et Donald Trump des USA. Il faudra donc désormais analyser les conséquences de ces ambitions à l’aune des défis posés par la crise argentine mais aussi par rapport à des enjeux globaux de soutenabilité auxquels l’Argentine s’est engagée vis-à-vis de la communauté internationale, comme l’Accord de Paris, les objectifs de développement durable des Nations unies, entre autres.</p>
<hr>
<p><em>Cet article s’inscrit dans le cadre d’un projet associant The Conversation France et l’AFP audio. Il a bénéficié de l’appui financier du Centre européen de journalisme, dans le cadre du programme « Solutions Journalism Accelerator » soutenu par la Fondation Bill et Melinda Gates. L’AFP et The Conversation France ont conservé leur indépendance éditoriale à chaque étape du projet.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220481/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valéria Hernández ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Rien ne prédestinait cette plante asiatique à conquérir la pampa argentine. Aujourd'hui, pourtant toute la politique, l'économie, les paysages et la société du pays sont devenus dépendant du soja OGM.Valéria Hernández, Anthropologue, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2148982023-12-20T19:55:02Z2023-12-20T19:55:02ZCertaines plantes peuvent se passer d’engrais azotés. D’où vient cette étonnante capacité ?<p>Les engrais azotés forment un des piliers de la révolution agricole du XX<sup>e</sup> siècle, et sont devenus indispensables pour maintenir les <a href="https://bioone.org/journals/ambio-a-journal-of-the-human-environment/volume-31/issue-2/0044-7447-31.2.126/Nitrogen-and-Food-Production-Proteins-for-Human-Diets/10.1579/0044-7447-31.2.126.full">forts rendements agricoles actuels</a>.</p>
<p>Ces engrais sont fabriqués en puisant de l’azote présent sous forme de gaz dans l’air. L’azote gazeux étant une molécule chimique très stable, sa transformation en engrais nécessite énormément d’énergie, qui est apportée par l’utilisation d’hydrocarbures et participe donc à la production de gaz à effet de serre. De plus, les engrais apportés dans le sol sont souvent lessivés par les fortes pluies et entraînés dans les cours d’eau où ils facilitent la croissance d’algues étouffant les autres organismes vivants (phénomène d’eutrophisation).</p>
<p>Ainsi, le coût environnemental des engrais azotés – qu’ils soient industriels ou sous forme de lisier – est donc important, faisant de la réduction de leur utilisation une <a href="https://www.nature.com/articles/472159a">priorité à l’horizon 2030 pour l’agriculture mondiale</a>.</p>
<p>Pourtant, certaines plantes peuvent se passer d’engrais azotés. Ces plantes appartiennent à quatre grands groupes botaniques, dont celui des légumineuses auquel appartiennent des plantes telles que les pois, haricots, lentilles, soja, arachide, mais aussi certains arbres (Acacia, Mimosa ou autres Robiniers). Comme lors du procédé chimique industriel, ces plantes puisent une grande partie de l’azote dont elles ont besoin directement dans l’air… grâce à la symbiose avec des bactéries qui vivent au niveau des racines.</p>
<p>Depuis de nombreuses années, les scientifiques se demandent comment cette association entre plantes et bactéries a pu évoluer. Si atteindre une telle compréhension pourrait peut-être, dans le futur, permettre de transférer à d’autres espèces la capacité à assimiler spontanément de l’azote – et ainsi limiter massivement l’utilisation d’engrais tout en maintenant des rendements élevés – la faisabilité d’une telle approche n’est pas aujourd’hui démontrée. </p>
<p>Dans <a href="https://www.nature.com/articles/s41477-023-01441-w">notre récente étude publiée dans <em>Nature Plants</em></a>, nous avons analysé la manière avec laquelle plusieurs plantes légumineuses interagissent avec leurs bactéries symbiotiques, afin de retracer l’histoire évolutive de ces interactions.</p>
<h2>Une symbiose au sein d’un organe dédié</h2>
<p>Chez les plantes légumineuses, ce sont des bactéries vivant en symbiose avec ces plantes qui transforment l’azote gazeux en ammonium utilisable par la plante. Ce type de symbiose, dite « mutualiste », se retrouve de manière générale dans tout le vivant, et résulte de l’interaction entre deux organismes qui améliore réciproquement leur croissance et leur développement.</p>
<p>Cette symbiose a lieu au sein d’un organe spécifique au niveau de la racine de la plante, appelé « nodule », où les bactéries sont hébergées et fournissent de l’ammonium. Les partenaires y échangent aussi des signaux chimiques complexes.</p>
<h2>Retracer l’origine des plantes symbiotiques nodulantes</h2>
<p>Devant la diversité des plantes symbiotiques actuelles, il est difficile de savoir quelles caractéristiques physiologiques et génétiques sont nécessaires et suffisantes à la symbiose fixatrice d’azote. Distinguer les traits ancestraux de ceux qui sont apparus plus récemment chez les plantes symbiotiques devrait permettre d’établir la « recette génétique » de cette association.</p>
<p>En comparant les génomes de multiples plantes capables ou pas de réaliser la symbiose fixatrice d’azote, des <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.aat1743">travaux antérieurs</a> ont montré que toutes les plantes symbiotiques possèdent un groupe de gènes communs, indispensables à cette association… Mais ces gènes sont aussi présents chez certaines plantes non-symbiotiques.</p>
<p>Lors de l’évolution, l’apparition de la symbiose ne serait donc pas liée à l’acquisition de nouveaux gènes mais plutôt à une modification de l’expression (ou activité) de ce groupe de gènes symbiotiques communs.</p>
<p>En effet, même si toutes les cellules d’un organisme possèdent les mêmes gènes, l’activité de ces derniers varie fortement d’une cellule à l’autre en réponse aux conditions environnementales (incluant, par exemple, la proximité de micro-organismes) et selon les stades de développement. Ainsi, les plantes légumineuses auraient acquis la capacité à réaliser la symbiose fixatrice d’azote en ré-utilisant des gènes impliqués dans différentes processus physiologiques (formation des racines latérales, interaction avec des champignons bénéfiques…) et en activant leur expression lors de l’interaction avec les bactéries symbiotiques.</p>
<p>C’est <a href="http://gompel.org/science-outreach/le-monde-le-bricolage-du-vivant">ce processus de « bricolage moléculaire », selon l’expression introduite par le biologiste François Jacob</a>, que nous avons essayé de retracer.</p>
<h2>Quand les plantes évoluent depuis un ancêtre commun grâce au « bricolage moléculaire »</h2>
<p>Nous avons donc décidé de comparer les gènes qui sont spécifiquement activés dans les nodules de neuf espèces de plantes capables de former cette symbiose.</p>
<p>Plus précisément, notre objectif était d’identifier les gènes communément exprimés chez toutes ces espèces lors de la symbiose.</p>
<p>Nous avons observé que près d’un millier de gènes étaient exprimés de manière partagée dans les nodules des neuf plantes symbiotiques étudiées. L’explication la plus probable d’une telle similarité est que ces différentes espèces ont hérité de leur ancêtre commun, un « ancêtre symbiotique » qui vivait sur terre il y a environ 90 millions d’années, ce programme génétique permettant la formation et le fonctionnement des nodules.</p>
<p>Grâce aux connaissances acquises par ailleurs sur ces symbioses, nous avons pu identifier, dans cette liste, de nombreux gènes végétaux permettant aux plantes de percevoir les signaux chimiques produits par leurs bactéries symbiotiques, d’accueillir ces dernières dans leurs tissus, et de réaliser les processus moléculaires permettant de puiser l’azote de l’air.</p>
<p>Ainsi, « l’ancêtre symbiotique » était certainement capable de réaliser ces trois étapes indispensables au fonctionnement de la symbiose, via des mécanismes moléculaires reposant sur l’activité de ce groupe de gènes communs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/561889/original/file-20231127-23-u6z9ps.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="arbre phylogénétique" src="https://images.theconversation.com/files/561889/original/file-20231127-23-u6z9ps.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561889/original/file-20231127-23-u6z9ps.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561889/original/file-20231127-23-u6z9ps.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561889/original/file-20231127-23-u6z9ps.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561889/original/file-20231127-23-u6z9ps.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=538&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561889/original/file-20231127-23-u6z9ps.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=538&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561889/original/file-20231127-23-u6z9ps.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=538&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Arbre phylogénétique simplifié représentant les évènements majeurs associés à l’évolution de la nodulation.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pierre-Marc Delaux</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Des améliorations apparues indépendamment au fil de l’évolution</h2>
<p>Mais l’évolution ne s’arrête jamais : certaines plantes descendant de cet ancêtre commun symbiotique ont perdu la capacité à réaliser cette symbiose. D’autres, au contraire, ont évolué des compétences symbiotiques particulières, des « ajustements » symbiotiques, leur permettant par exemple de réaliser la symbiose avec différents types de bactéries ou dans certaines conditions environnementales.</p>
<p>Nous nous sommes donc demandé si l’on pouvait déceler quand, dans l’évolution, avaient eut lieu ces ajustements.</p>
<p>Pour cela, nous nous sommes focalisés sur deux plantes (<em>Mimosa pudica</em> et <em>Medicago truncatula</em>) et avons étudié les gènes qui participent à la symbiose chez ces plantes sans toutefois être exprimés chez l’ancêtre commun. En effet, les plantes appartenant aux deux plus grandes familles de légumineuses (représentées par <em>M. pudica</em> et <em>M. truncatula</em>) ont très peu perdu leurs capacités symbiotiques et sont toujours capables de former des nodules aujourd’hui.</p>
<p>Il a <a href="https://nph.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/nph.18321">récemment été proposé</a> que la stabilité de cette capacité symbiotique au fil de l’évolution de ces plantes soit liée à la capacité de ces plantes à accueillir les bactéries à l’intérieur même des cellules végétales, au sein de structures appelées « symbiosomes ».</p>
<p>Nous disposons pour ces deux plantes d’une description précise de l’expression des gènes associée à chaque étape du processus de production des nodules, de formation des symbiosomes, et de fixation d’azote.</p>
<p>Nous nous sommes aperçu qu’un grand nombre de gènes associés à la formation des symbiosomes étaient spécifiques à chacune de ces deux espèces de plantes. En d’autres termes, ces gènes n’étaient pas présents dans le nodule de leur ancêtre commun, et la capacité à héberger les bactéries dans les cellules des nodules a donc émergé (évolué) indépendamment chez <em>M. pudica</em> et <em>M. truncatula</em>.</p>
<p>Ces « ajustements » symbiotiques auraient donc possiblement convergé vers un même mécanisme, le contrôle du symbiote, mais en utilisant différents processus moléculaires. Des travaux futurs devraient permettre de tester cette hypothèse.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214898/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Delphine Capela a reçu des financements de l'Institut National de recherche pour l'Agriculture, l'Alimentation et l'Environnement (INRAE). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Philippe Remigi a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche (ANR) et de l'Institut National de Recherche pour l'Agriculture, l'Alimentation et l'Environnement (INRAE). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pierre-Marc Delaux a reçu des financements du projet Engineering Nitrogen Symbiosis for Africa (ENSA) financé par une bourse
à l'université de Cambridge de la Fondation Bill & Melinda Gates (OPP1172165) et le "UK Foreign, Commonwealth and Development Office" (OPP1172165), ainsi que de l"European Research Council (ERC) dans le cadre du programme recherche et innovation de l'European Union’s Horizon 2020 (grant agreement No 101001675 - ORIGINS), de la Fondation Schlumberger pour l'Education et la Recherche, du CNRS, de l'agence nationale de la Recherche (ANR) et de l'European Molecular Biology Organization (EMBO). </span></em></p>Soja, cacahuète, mimosa : des scientifiques retracent l’évolution de la symbiose fixatrice d’azote chez les légumineuses et certaines espèces d’arbres.Delphine Capela, Directrice de Recherche CNRS au Laboratoire des interactions plantes - microbes - environnement, InraePhilippe Remigi, Chargé de recherche CNRS au Laboratoire des interactions plantes - microbes - environnement, InraePierre-Marc Delaux, Directeur de recherches CNRS au Laboratoire de Recherche en Sciences Végétales, Toulouse III, Toulouse INP, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1746582022-02-16T22:53:23Z2022-02-16T22:53:23ZQuel est le poids exact de la France dans la « déforestation importée » qui touche l’Amazonie ?<p>Chaque année, les feux de forêt en Amazonie brésilienne rappellent que la protection des forêts tropicales reste insuffisante pour endiguer les changements d’occupation des sols contribuant au changement climatique et à la réduction de la biodiversité.</p>
<p>Dans ce contexte, les importations de soja en Europe sont <a href="https://ec.europa.eu/environment/forests/impact_deforestation.htm">depuis longtemps</a> pointées du doigt et l’Union européenne a récemment proposé un <a href="https://ec.europa.eu/environment/publications/proposal-regulation-deforestation-free-products_en">projet de règlement</a> contre la « déforestation importée ».</p>
<p>Alors que la France a décidé d’en faire une priorité de sa présidence de l’UE, qui a démarré en janvier 2022, que savons-nous précisément du <a href="https://theconversation.com/deforestation-au-bresil-que-fait-vraiment-la-france-123031">rôle de notre pays</a> dans la déforestation en Amazonie ?</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Paysage du Mato Grosso, dans lequel les grandes cultures se sont considérablement étendues au détriment des écosystèmes naturels de savane ou de forêt amazonienne.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Martin Delaroche</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Qu’est-ce que la déforestation importée ?</h2>
<p>Chaque année au Brésil, l’activité agricole – principalement l’élevage bovin extensif et la culture du soja – gagne du terrain sur les forêts d’Amazonie et sur les savanes de son biome voisin, le Cerrado.</p>
<p>Cette expansion est stimulée par la <a href="http://www.fao.org/documents/card/en/c/ca8861en">demande croissante de viande (bovine, porcine, de volaille) et de produits dérivés (œufs, produits laitiers) au niveau mondial</a>. Le Brésil est le premier exportateur mondial de viande bovine et de soja, ce dernier étant principalement destiné à l’alimentation animale.</p>
<p>La <a href="https://www.deforestationimportee.fr/fr/la-sndi-2">déforestation importée</a> en question correspond à la quantité de végétation naturelle (forêts ou savanes) détruite, directement ou indirectement, afin de produire dans le pays exportateur un bien demandé par le pays importateur.</p>
<p>Presque toutes les chaînes d’approvisionnement de matières premières ou de produits transformés provenant de pays tropicaux sont concernées (bois, huile de palme, cacao, etc.) mais, dans le cas de la France, le soja est celle dont l’<a href="https://envol-vert.org/camp/l-empreinte-foret/">« empreinte forêt »</a> est la plus grande.</p>
<p><a href="https://www.deforestationimportee.fr/fr/ressources/mettre-fin-aux-importations-de-soja-issu-de-la-conversion-decosystemes-naturels">Près de 60 % du soja</a> que nous importons provient en effet du Brésil. Par contraste, la part des importations de viande bovine provenant du Brésil est bien inférieure (1 %), mais la possibilité qu’elles <a href="https://www.gouvernement.fr/partage/11746-rapport-de-la-commission-d-evaluation-du-projet-d-accord-ue-mercosur">augmentent considérablement</a> dans le cadre de l’accord de libre-échange UE/Mercosur suscite de vives inquiétudes. La France reste, pour l’instant, <a href="https://www.europe1.fr/politique/la-france-restera-opposee-a-laccord-ue-mercosur-assure-emmanuel-macron-4064911">opposée à sa signature</a>.</p>
<h2>Pointer les responsabilités : le défi de la traçabilité</h2>
<p>Contrairement à ce que certains reportages (comme <a href="https://www.youtube.com/watch?v=AIe6paNCCCc">celui-ci</a> par exemple) sur le terrain laissent penser, démontrer de manière précise le lien entre une quantité de soja ou de bœuf importée et la destruction de forêts est bien plus complexe que de pointer une poignée d’acteurs responsables de la déforestation en lien avec des entreprises françaises.</p>
<p>Il faut en effet considérer l’ensemble des flux d’importation en jeu.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=299&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=299&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=299&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=376&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=376&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=376&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Capture d’écran du site du projet TRASE, qui permet de retracer la municipalité d’origine de flux d’exportation.</span>
<span class="attribution"><a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Depuis 2015, le <a href="https://trase.earth/">projet Trase</a> s’attache à identifier les flux de soja et de bœuf exportés par chaque municipalité du Brésil et de faire le lien avec la présence éventuelle de déforestation. Cela permet d’estimer le risque que les produits importés en soient responsables. On parle bien ici de « risques », car dans les faits, la production peut aussi bien venir d’une ferme n’ayant pas pratiqué de déforestation depuis des décennies que d’une parcelle récemment défrichée…</p>
<p>Ainsi, tant que le traçage direct du bœuf ou des grains de soja depuis la parcelle où ils ont été produits ne sera pas possible au travers d’un système fiable et à l’abri des fraudes, il sera difficile de pointer les responsabilités avec certitude.</p>
<h2>Le soja vecteur de déforestation ? Pas si simple…</h2>
<p>Les mécanismes de la déforestation au Brésil sont complexes même si l’analyse des images satellites permet de localiser de mieux en mieux les parcelles défrichées et de préciser <a href="https://mapbiomas.org/en">l’utilisation des terres</a> qui est faite suite aux déboisements.</p>
<p>Dans le tableau ci-dessous, le soja n’est pas forcément un vecteur de déforestation directe, depuis que les agroindustriels ont signé un <a href="https://www.nature.com/articles/s43016-020-00194-5">« moratoire sur le soja »</a> qui vise à interdire la production sur des parcelles défrichées après 2008.</p>
<p>Valant pour l’Amazonie, cette règle laisse néanmoins le champ libre dans le Cerrado, où se réalise la plus grande partie de la production et où la pression sur les milieux naturels est la plus forte. On peut aussi souligner qu’un <a href="https://www.ibge.gov.br/estatisticas/economicas/agricultura-e-pecuaria/9117-producao-agricola-municipal-culturas-temporarias-e-permanentes.html">tiers de la production de soja du Brésil se réalise dans le Sud du pays</a>, loin des fronts de déforestation. Par ailleurs, en Amazonie,les fermiers peuvent <a href="https://www.theguardian.com/environment/2022/feb/10/loophole-allowing-for-deforestation-on-soya-farms-in-brazils-amazon">défricher de nouvelles terres pour d’autres cultures (coton, maïs) et réserver les terres anciennement déboisées pour le soja</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=873&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=873&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=873&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1097&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1097&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1097&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Cartes montrant l’expansion de la production de soja au Brésil, pour la période 1985-2015. On note la forte progression vers le nord et l’Amazonie, mais aussi la persistance de grands foyers de production dans le sud et le centre du Brésil.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Martin Delaroche, données IBGE Produção Agricola Municipal</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Mais si le soja brésilien n’est pas toujours associé à de la déforestation récente, au contraire, l’élevage bovin est (très) majoritairement responsable de la déforestation en Amazonie. Cependant, sa production approvisionne très peu le marché français.</p>
<h2>Peut-on changer la donne en sanctionnant la déforestation importée ?</h2>
<p>La Stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée (SNDI), lancée par le gouvernement français en 2018, vise à éliminer la participation « complice » (intentionnelle ou non) des importations à la déforestation dès 2030.</p>
<p>Pour cela, le gouvernement a proposé toute une série de mesures visant à financer des projets de gestion durable des forêts, influencer les accords commerciaux européens pour y intégrer des exigences environnementales et, enfin, sensibiliser les acteurs privés.</p>
<p>Les importations de viande brésilienne en France étant faibles, le levier potentiel réside dans celles de soja. Toutefois, le poids décroissant de l’Europe dans les exportations de soja brésilien et le rôle limité de celui-ci dans la déforestation font que même un boycott éventuel n’aurait sans doute pas grand effet pour l’Amazonie : la France pèse à peine 2 % des exportations de soja du Brésil.</p>
<p>Ce type de solution pourrait même amener le Brésil jouer sur deux tableaux : du soja non durable produit en Amazonie pourrait aller soit vers la Chine (qui <a href="https://abiove.org.br/estatisticas/">représente 60 % de ses exportations de soja</a>), soit rester dans le pays, tandis qu’une production durable et certifiée « zéro déforestation » irait vers l’Europe (16,7 % des exportations).</p>
<h2>Les Européens face à leurs contradictions</h2>
<p>La solution de n’importer que du soja durable, traçable à 100 % et garanti sans déforestation (avec une certification de type <a href="https://responsiblesoy.org/?lang=en">RTRS</a> ou <a href="https://www.proterrafoundation.org/">Proterra</a>) est souvent mise en avant.</p>
<p>Mais outre les questions de localisation évoquées ci-dessus, cette solution implique qu’il y ait des acheteurs prêts à payer plus cher que la production classique.</p>
<p>Or il existe déjà du soja certifié « sans déforestation », mais sa part dans les importations européennes <a href="https://www.idhsustainabletrade.com/publication/european-soy-monitor-report-2019/">n’était que de 25 %</a> en 2019 (<a href="https://www.idhsustainabletrade.com/publication/european-soy-monitor-2018/">contre 19 % en 2018</a>), reflétant une faible demande de la part des consommateurs européens.</p>
<p>Les situations diffèrent certes d’un pays à l’autre : la Norvège a importé 100 % de soja durable (mais à peine 244 000 tonnes au total) en 2019, la France 16 % (sur un total de 3,8 millions de tonnes) et l’Espagne 1 % (sur un total de 4,1 millions de tonnes).</p>
<p>Cet état de fait indique une chose : arrêter la déforestation a un prix et globalement les consommateurs européens ne semblent pas prêts à le payer tant la préférence pour les produits très bon marché est forte (on constate évidemment le même phénomène vis-à-vis du textile ou de <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2021/10/PITRON/63595">l’électronique</a>, produits dans des pays à bas coûts, avec des conséquences sociales et environnementales sévères, et pourtant achetés en masse en Europe).</p>
<p>Il serait toutefois injuste de n’attribuer la faute qu’au « consommateur » : l’étude des chaînes d’approvisionnement montre qu’il faut mobiliser un grand nombre d’acteurs – incluant fermiers, industriels, négociants, éleveurs et grande distribution – pour parvenir à un changement.</p>
<p>Lutter contre la déforestation importée est néanmoins important, car il en va de l’exemplarité écologique des pays européens.</p>
<p>Toutefois, plutôt qu’un contrôle de la déforestation à distance, la solution se trouve certainement beaucoup plus dans une politique que mettrait en place le Brésil lui-même, <a href="https://journals.openedition.org/cybergeo/27325">ce qu’il a fait avec succès entre 2004 et 2014</a>. De nombreuses ONG ont dénoncé le relâchement actuel, le pays ayant connu en 2021, son plus haut taux de déforestation depuis quinze ans.</p>
<p>Une alternative à l’interdiction de déforestation importée serait donc de collaborer avec le gouvernement brésilien et leurs organisations professionnelles locales afin de définir un objectif commun de préservation et un partage des coûts liés au changement de modèle de production.</p>
<p>Vaste programme, autrement plus complexe à mettre en œuvre qu’un boycott !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174658/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François-Michel Le Tourneau a reçu des financements de l’ANR.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Martin Delaroche a reçu des financements de l’Université d’Indiana–Bloomington et du Réseau français d’études brésiliennes (REFEB).</span></em></p>Le lien entre importations et déforestation n’est aujourd’hui pas clairement établi. Les boycotts n’ont ainsi qu’un impact limité sur la déforestation alors que d’autres solutions existent.François-Michel Le Tourneau, Géographe, directeur de recherche au CNRS, Université Paris 1 Panthéon-SorbonneMartin Delaroche, Géographe, chercheur associé au Center for the Analysis of Social-Ecological Landscapes (CASEL), Indiana UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1256532019-12-15T17:54:01Z2019-12-15T17:54:01ZSoja et cancer du sein : des relations ambiguës<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/306639/original/file-20191212-85397-1w7fww0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2755%2C1848&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le soja a envahi nos assiettes et les rayons de nos supermarchés.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/M4Tc7DbSpns">Unsplasch / Free To Use Sounds</a></span></figcaption></figure><p>Tofu, tempeh, miso, tonyu… Le soja <a href="https://www.quechoisir.org/enquete-soja-consommation-a-surveiller-n67071/">occupe une place de plus en plus grande dans nos assiettes</a>. D’après une enquête menée pour la filière soja en 2017, <a href="http://www.terresunivia.fr/sites/default/files/lettre-des-oleopro/la-lettre-des-oleopro-n2-100119.pdf">six Français sur dix déclarent consommer des produits au soja</a>, ce qui représente une hausse de près de 50 % en 3 ans. Avec l’évolution des modes de consommation, notamment le développement du végétalisme, on peut s’attendre à ce que la part des produits à base de soja, apparus très récemment dans l’alimentation des occidentaux, continue à s’accroître.</p>
<p>Or le soja fait l’objet de diverses controverses concernant ses effets sur la santé. En particulier, la question de ses effets sur le cancer du sein est débattue. Selon certains, il aurait un effet plutôt protecteur, tandis que d’autres considèrent que sa consommation serait plutôt défavorable. Que disent les travaux scientifiques sur ce sujet ?</p>
<h2>Le soja séduit l’Occident</h2>
<p>Utilisé depuis plus de deux millénaires dans les <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT-Ra-Phytoestrogenes.pdf">alimentations asiatiques</a> (principalement dans ses versions solides : tofu, tempeh, natto et miso), le soja est aujourd’hui consommé sous différentes formes en Europe et en Amérique, depuis les aliments traditionnels comme le tofu, jusqu’aux substituts végétaux de viande), en passant par les graines à apéritif, les crèmes desserts ou le tonyu, un jus de soja <a href="https://theconversation.com/ne-lappelez-plus-steak-vegetal-96586">improprement appelé « lait de soja »</a>.</p>
<p>Les graines de cette légumineuse sont également désormais transformées de manière industrielle et les ingrédients qui en sont dérivés sont ajoutés dans de nombreux produits alimentaires, par exemple les biscuits, les produits carnés ou les plats cuisinés. Une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/?term=31569435">étude française récente</a> a montré qu’un fournisseur de restaurants propose davantage de produits alimentaires contenant du soja que les supermarchés.</p>
<p>Cet engouement des fabricants industriels pour l’ingrédient soja est dirigé par des raisons économiques, nutritionnelles (source de protéines végétales) et technologiques (propriétés bénéfiques dans la texturisation, l’émulsification et le blanchiment des produits transformés).</p>
<p>Or cet aliment contient des molécules, les phyto-estrogènes (des isoflavones), capables de se fixer sur les récepteurs des <a href="https://www.chu-toulouse.fr/qu-est-ce-que-les-oestrogenes-et-a">estrogènes</a>, des hormones naturelles sécrétées par les ovaires. De ce fait, le soja est au centre d’une controverse santé chez la femme, en raison de ses effets potentiels sur l’organisme.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/consommation-de-viande-quelle-place-pour-les-substituts-vegetaux-113505">Consommation de viande : quelle place pour les substituts végétaux ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<h2>Un aliment riche en phyto-estrogènes</h2>
<p>Les estrogènes jouent un rôle important dans de nombreux tissus et organes, notamment les seins. En se fixant sur leurs récepteurs, les phyto-estrogènes peuvent perturber le fonctionnement des cellules, jouant un rôle inhibiteur ou activateur selon l’organe où ils se fixent et leur concentration.</p>
<p>Si la plupart des végétaux contiennent naturellement de faibles quantités de phyto-estrogènes, ceux-ci sont présents en abondance dans le soja et les aliments dérivés. Cette teneur est cependant <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed?term=31569435">très variable d’un aliment à l’autre</a> et entre les différentes familles de produits au soja disponibles sur le marché.</p>
<p>Par ailleurs, la façon dont est préparé le soja influe sur la teneur en phyto-estrogènes. Ainsi, en Asie, les <a href="https://www-ncbi-nlm-nih-gov.proxy.insermbiblio.inist.fr/pubmed/27749767">traitements traditionnels</a> des aliments à base de soja (essentiellement des fermentations) réduisent fortement la teneur des aliments en phyto-estrogènes. À l’inverse, dans les produits à base de soja issus de procédés industriels, les teneurs en phyto-estrogènes sont plus élevées et les apports des populations occidentales ont probablement fortement augmenté au cours des dernières années.</p>
<p>Par ailleurs, le soja est également utilisé pour fabriquer de nombreux compléments alimentaires, qui se présentent sous forme d’un extrait de la légumineuse réduit sous forme de poudre et encapsulé. Leur concentration en isoflavones est variable, allant en général de 1 à 40 %. Ces compléments alimentaires sont souvent présentés comme ayant des effets bénéfiques sur les bouffées de chaleur associées à la ménopause, ainsi que sur l’ostéoporose, la santé de la peau et des cheveux et l’hypercholestérolémie.</p>
<p>Les effets potentiels anti-estrogéniques des isoflavones sont également mis en avant pour suggérer un rôle protecteur du soja à l’égard des cancers estrogéno-dépendants, tels que le cancer du sein. Mais ces allégations santé ne sont pas toutes prouvées scientifiquement ou posent questions, en particulier concernant le cancer du sein.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/x_KFNvEaGGg?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<h2>Cancer du sein : des bénéfices non confirmés, des compléments à éviter</h2>
<p>Des études menées en Asie ont observé un risque plus faible de cancer du sein chez les femmes ayant une alimentation traditionnelle asiatique, riche en soja. Toutefois, l’éventuel bénéfice pour la prévention des cancers du sein n’est <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/?term=29277346">pas confirmé</a> par les grandes études de cohorte menées en Europe ou en Amérique du Nord.</p>
<p>Actuellement, un rapport d’expertise collective international publié en 2018 conclut que la <a href="https://www.wcrf.org/sites/default/files/Breast-cancer-report.pdf">relation entre soja et cancer du sein n’est pas prouvée</a>.</p>
<p>Concernant les compléments alimentaires à base de soja, une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/30831601">étude de cohorte française</a> a observé une association entre la consommation de ces compléments et une augmentation du risque de cancer du sein non sensible aux hormones, qui est de moins bon pronostic. Cette étude suggère aussi un risque plus élevé de cancer du sein, associé aux compléments au soja, chez les femmes qui ont déjà des cas de cancers du sein dans leur famille.</p>
<p>Les aliments à base de soja semblent donc pouvoir être consommés sans excès, c’est-à-dire en petite quantité et pas tous les jours, en évitant de recourir aux compléments alimentaires.</p>
<h2>Pendant ou après les traitements du cancer du sein, des précautions s’imposent</h2>
<p>Pendant les traitements d’un cancer du sein, une étude a suggéré que la consommation de soja améliorerait la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29230660">qualité de vie des patientes</a>. Cependant, ces résultats obtenus sur un échantillon de petite taille restent à confirmer. Il faudra aussi vérifier l’absence d’effets délétères. Les données scientifiques étant peu nombreuses, il semble raisonnable d’appliquer les mêmes précautions qu’en population générale.</p>
<p>En ce qui concerne les compléments alimentaires à base de soja, aucune étude n’a montré de bénéfice de leur consommation pendant les traitements du cancer du sein. À l’inverse, plusieurs études suggèrent des <a href="https://www.acadpharm.org/dos_public/Rapport_CAHH_21.01.2019_VF1.pdf">interactions délétères avec les traitements</a>, dus par exemple à la diminution de l’effet de certains traitements anticancéreux.</p>
<p>Chez les femmes en rémission, guéries du cancer du sein, des <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23725149">méta-analyses</a> ont montré, en combinant les résultats de plusieurs études, que la consommation alimentaire de soja diminuerait le risque de récidive et augmenterait peut-être la survie. Mais davantage d’études sont nécessaires pour conclure avec certitude. On ne peut pas à l’heure actuelle généraliser ces quelques résultats à toutes les femmes en rémission.</p>
<p>Toujours concernant les femmes en rémission, les travaux sur les effets des compléments alimentaires à base de soja manquent. L’absence de risques n’ayant pas été démontrée, le principe de précaution s’applique également.</p>
<p>En cas de cancer du sein, le soja peut donc être consommé dans l’alimentation, mais de façon modérée. Les précautions s’appliquent d’autant plus pendant les traitements du cancer du sein. Quant aux compléments alimentaires à base de soja, ils sont <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT-Ra-Phytoestrogenes.pdf">déconseillés par les instances de santé publique</a>.</p>
<h2>Comment bien consommer son soja ?</h2>
<p>Il faut rappeler que le soja est une source végétale de protéines de très bonne qualité, faible en graisse et qu’il peut s’inscrire dans une alimentation équilibrée et diversifiée. La consommation de soja est cependant déconseillée pour les <a href="https://www.mangerbouger.fr/Manger-mieux/Manger-mieux-a-tout-age/Futures-mamans/Pendant-la-grossesse/Les-aliments-a-limiter-ou-eviter">femmes enceintes</a>, <a href="http://www.sfpediatrie.com/sites/default/files/pdf/Recommandations__Bonnes_pratiques/S/CNSFP-Editorial-Phytoestrogenes-ArchPediatr-2006_01.pdf">nourrissons et jeunes enfants</a>.</p>
<p>D’une manière plus générale, le soja peut être consommé de façon modérée, sans pour autant le supprimer de son alimentation. En se basant sur des études biologiques, épidémiologiques et pharmacologiques, l’Agence de sécurité sanitaire des aliments (Anses) recommande de <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT-Ra-Phytoestrogenes.pdf">ne pas dépasser 1 mg d’isoflavones par kilo de poids corporel et par jour</a>. Ce qui signifie qu’une personne de 60 kg ne doit pas ingérer plus de 60 mg d’isoflavones par jour, sachant que 100 g d’aliments dérivés du soja (tofu, desserts au soja, etc.) en apportent entre 10 et 30 mg.</p>
<p>Il est cependant très difficile d’estimer sa consommation réelle en isoflavones, car de nombreux produits industriels contiennent du soja sans que cela soit mentionné sur l’étiquetage. Le risque lié à cette consommation d’isoflavones « cachées » a été pointé du doigt par l’<a href="https://www.efsa.europa.eu/fr/efsajournal/pub/4246">Autorité européenne de sécurité des aliments</a> et l’association de consommateurs <a href="https://www.quechoisir.org/enquete-soja-consommation-a-surveiller-n67071/">UFC Que Choisir</a>.</p>
<p>Les compléments alimentaires à base de soja sont quant à eux déconseillés, car leurs bénéfices n’ont pas été démontrés. De plus, leur activité biologique pourrait leur conférer des effets potentiellement délétères chez certaines femmes, comme celles ayant un <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/30831601">antécédent personnel ou familial de cancer du sein</a> ou une <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT-Ra-Phytoestrogenes.pdf">hypothyroïdie</a>.</p>
<h2>Soja et prévention nutritionnelle du cancer du sein</h2>
<p>Les effets du soja peuvent être bénéfiques ou délétères selon le contexte, c’est-à-dire l’état physiologique du consommateur, le tissu cible et la préparation (voire la transformation) du soja. Dans tous les cas, il ne faut pas négliger ses effets potentiellement perturbateurs du système endocrinien dans le cadre de l’alimentation ou lors d’une utilisation à visée thérapeutique.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/303728/original/file-20191126-112531-ah3sd4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/303728/original/file-20191126-112531-ah3sd4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/303728/original/file-20191126-112531-ah3sd4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/303728/original/file-20191126-112531-ah3sd4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/303728/original/file-20191126-112531-ah3sd4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/303728/original/file-20191126-112531-ah3sd4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/303728/original/file-20191126-112531-ah3sd4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/303728/original/file-20191126-112531-ah3sd4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Nutrition : comment réduire son risque de cancer du sein ?</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour mieux estimer les quantités totales consommées, il s’avère nécessaire de déterminer les teneurs réelles en isoflavones des produits à base de soja et de mettre en place un étiquetage adéquat pour informer les consommateurs. En outre, il est essentiel d’identifier les catégories de population à risque (femmes enceintes, jeunes enfants…) et d’adapter les recommandations.</p>
<p>Enfin, concernant la prévention nutritionnelle du cancer du sein, qui demeure en France le cancer le <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/cancers/cancer-du-sein">plus fréquent chez la femme</a>, il est plus sûr de s’en tenir aux facteurs de risque et de protection avérés. Exercer une activité physique régulière, avoir une alimentation riche en fibres ou de type méditerranéen, réduire la consommation de boissons alcoolisées et limiter la surcharge pondérale, sont des leviers dont l’efficacité a, elle, été scientifiquement démontrée.</p>
<hr>
<p><em>Pour en savoir plus, retrouvez la <a href="https://www6.inra.fr/nacre/Zoom-sur/decrypter-comprendre-soja-cancer-sein">bibliographie scientifique sur laquelle s’appuie ce dossier et le dépliant</a> sur le site du réseau <a href="https://www6.inra.fr/nacre/Rester-en-contact/S-abonner-aux-nouveautes">NACRe</a>. Cet article est adapté de la collection <a href="https://www6.inra.fr/nacre/Zoom-sur/decrypter-comprendre-soja-cancer-sein">Décrypter & Comprendre</a> du <a href="https://www.inra.fr/nacre">réseau NACRe</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/125653/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le soja colonise les assiettes occidentales, et de nouvelles formes de consommation émergent. Cet aliment riche en molécules mimant les hormones estrogènes est-il bon ou mauvais pour la santé ?Marina Touillaud, Épidémiologiste, Centre Léon-Bérard - Chef de projet Axe Nutrition UA8, InsermMathilde Touvier, Directrice de l'Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle, U1153 Inserm,Inra,Cnam, Université Paris 13, Alliance Sorbonne Paris Cité (ASPC)Mélanie Deschasaux, Chargée de Recherche, Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle, Université Sorbonne Paris NordPaule Latino-Martel, Directrice de recherche. Coordinatrice du Réseau National Alimentation Cancer Recherche (réseau NACRe), InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1230312019-09-11T20:53:37Z2019-09-11T20:53:37ZDéforestation au Brésil : que fait vraiment la France ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/291310/original/file-20190906-175673-16quzfe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=122%2C34%2C3049%2C2037&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">80 % du soja utilisé en France est importé, et 50 % de ces importations proviennent du Brésil, où ce produit constitue le premier facteur de déforestation. En France, il sert essentiellement à l'alimentation du bétail.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/download/success?u=http%3A%2F%2Fdownload.shutterstock.com%2Fgatekeeper%2FW3siZSI6MTU2NzgwOTExOSwiYyI6Il9waG90b19zZXNzaW9uX2lkIiwiZGMiOiJpZGxfMTAxMjYzNzE4OCIsImsiOiJwaG90by8xMDEyNjM3MTg4L2h1Z2UuanBnIiwibSI6MSwiZCI6InNodXR0ZXJzdG9jay1tZWRpYSJ9LCJtNWJNZ0xvUkJHM2NNa1JlclMzRW1CdldKc2ciXQ%2Fshutterstock_1012637188.jpg&pi=33421636&m=1012637188&src=-1-13">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Les incendies qui ravagent l’Amazonie (et l’<a href="https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/plantes-et-vegetaux/les-forets-d-afrique-brulent-aussi-mais-pas-comme-celles-en-amazonie_136665">Afrique</a>) depuis plusieurs semaines sont d’une intensité rare. Au-delà du <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/08/27/pourquoi-les-scientifiques-s-inquietent-des-incendies-de-l-amazonie_5503413_4355770.html">changement climatique</a> qui rend les forêts tropicales plus vulnérables, bon nombre de ces feux sont la conséquence directe de l’expansion agricole et des pratiques d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Agriculture_sur_br%C3%BBlis">abattis-brûlis</a>.</p>
<p>Publié le 8 août dernier, le <a href="https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/2019/08/4.-SPM_Approved_Microsite_FINAL.pdf">dernier rapport du GIEC</a> sur l’utilisation des terres a rappelé l’impact de l’agriculture sur les écosystèmes naturels et sur le climat. Chaque année, ce sont <a href="https://www.nationalgeographic.fr/environment/une-carte-pour-mieux-comprendre-les-causes-de-la-deforestation-mondiale">des millions d’hectares de terre et de forêt</a> qui disparaissent, convertis en vue de l’expansion agricole et de l’exploitation des ressources forestières.</p>
<p>Face à ce fléau, et à l’<a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2019/08/29/jair-bolsonaro-interdit-les-brulis-agricoles-pour-tenter-de-freiner-les-incendies-en-amazonie_5504132_3244.html">indifférence</a> affichée du président brésilien Bolsonaro, le G7 réuni à Biarritz le 26 août dernier a décidé l’octroi d’une <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2019/08/26/amazonie-le-g7-va-debloquer-une-aide-d-urgence-pour-envoyer-des-canadair_5502980_3210.html">aide d’urgence</a> de 20 millions de dollars pour favoriser la reforestation ; une aide à moyen terme est également prévue.</p>
<p>Ces réponses occultent cependant l’une des causes majeures de la déforestation : la production de matières premières destinées à alimenter les marchés internationaux. C’est elle qui contribue largement à la perte de couvert forestier et à la conversion d’écosystèmes naturels dans les pays producteurs – des pays en voie de développement le plus souvent.</p>
<p>Ces destructions entraînent non seulement des émissions importantes de gaz à effet de serre, mais représentent aussi la perte de puits majeurs de carbone, essentiels pour lutter contre le changement climatique. <a href="https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/2019/08/4.-SPM_Approved_Microsite_FINAL.pdf">Elles affectent</a> aussi la biodiversité, les services écosystémiques et l’habitat de nombreuses populations indigènes.</p>
<p>En novembre 2018, la France s’est dotée d’une stratégie de lutte contre cette « déforestation importée » <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/2018.11.14_SNDI_0.pdf">(SNDI)</a>. Rappelons que cette déforestation spécifique désigne :</p>
<blockquote>
<p>« L’importation de matières premières ou de produits transformés dont la production a contribué, directement ou indirectement, à la déforestation, à la dégradation des forêts ou à la conversion d’écosystèmes naturels en dehors du territoire national. »</p>
</blockquote>
<p>Mais la SNDI se donne-t-elle réellement les moyens de ses ambitions ?</p>
<h2>Huile de palme, cacao, bois, café, soja</h2>
<p>Parmi les produits que nous consommons en France, certains contribuent à la déforestation : en Indonésie et en Malaisie pour la production d’huile de palme (biscuits et pâtes à tartiner) ; en Afrique, pour les cultures de fève de cacao, par exemple.</p>
<p>Malheureusement, l’huile de palme et le cacao sont loin d’être les seuls produits concernés. L’importation et l’utilisation d’autres matières premières et ressources – dont l’impact est moins connu comme le bois, la pâte à papier, le café, l’hévéa, la viande de bœuf ou encore le soja –, posent tout autant problème.</p>
<p>Arrêtons-nous sur le soja, l’un des produits à la source de la <a href="https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2018-11/20181107_Rapport_Synthe%CC%80se_De%CC%81forestation_Importe%CC%81e_France_WWF-min.pdf">déforestation importée</a> en France. Dans l’Hexagone, il est principalement utilisé pour l’alimentation animale ; on le retrouve dans la chaîne d’approvisionnement de la viande, des œufs et des produits laitiers. <a href="http://www.fao.org/faostat/en/#data/TP/">Plus de 80 %</a> de celui utilisé en France est importé. Et environ 50 % des importations françaises – soit près de 2 millions de tonnes – proviennent du Brésil, où cette plante est cause majeure de <a href="http://resources.trase.earth/documents/TraseYearbook2018.pdf">destruction des forêts</a>.</p>
<h2>Les deux tiers de la production brésilienne exportée</h2>
<p>Le Brésil, aujourd’hui l’un des premiers producteurs et exportateurs mondiaux de soja, a vu sa production <a href="http://www.fao.org/faostat/en/">multipliée par plus de 4</a> sur ces vingt dernières années, et les surfaces récoltées par 25 depuis 1970. Une évolution portée par une forte augmentation de la consommation mondiale, intimement liée à celle de la demande en produits carnés et laitiers.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/291286/original/file-20190906-175682-1a67pob.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291286/original/file-20190906-175682-1a67pob.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291286/original/file-20190906-175682-1a67pob.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291286/original/file-20190906-175682-1a67pob.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291286/original/file-20190906-175682-1a67pob.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291286/original/file-20190906-175682-1a67pob.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291286/original/file-20190906-175682-1a67pob.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291286/original/file-20190906-175682-1a67pob.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Évolution des exportations de soja de 1960 à 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur/Données FAOSTAT.</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Or <a href="https://trase.earth/flows?selectedColumnsIds=0_1&selectedContextId=1&selectedYears%5B%5D=2003&selectedYears%5B%5D=2017">plus de deux tiers</a> de la production brésilienne de soja est destinée à l’exportation. Depuis l’affaire de la vache folle et l’interdiction des farines animales, l’Union européenne figure parmi les principales zones importatrices, même si elle reste loin derrière certains pays émergents comme la Chine.</p>
<p>Et la France dans tout ça ?</p>
<p>Ses importations <a href="https://trase.earth/">sont en baisse</a> depuis le début des années 2000, mais l’Hexagone reste parmi les plus gros importateurs de soja brésilien. La France a accueilli environ 5 % des exports de cette plante en provenance du Brésil entre 2003 et 2017. Et une part importante de la production à destination de la France provient du Cerrado, l’une des zones les plus riches en matière de biodiversité.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/291287/original/file-20190906-175682-1ylp99j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291287/original/file-20190906-175682-1ylp99j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291287/original/file-20190906-175682-1ylp99j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=284&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291287/original/file-20190906-175682-1ylp99j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=284&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291287/original/file-20190906-175682-1ylp99j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=284&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291287/original/file-20190906-175682-1ylp99j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=357&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291287/original/file-20190906-175682-1ylp99j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=357&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291287/original/file-20190906-175682-1ylp99j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=357&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Fronts d’expansion de la culture de soja au Brésil – 2010-2016, à gauche ; à droite, municipalités d’où la France importe entre 2006-2016, par quantité produite.</span>
<span class="attribution"><span class="source">TRASE Yearbook 2018</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Les intentions alarmantes de Bolsonaro</h2>
<p>D’après les projections du gouvernement brésilien, environ 10 millions d’hectares supplémentaires de terre pourraient être convertis pour augmenter la production de soja dans les dix prochaines années. Pourtant, des millions d’hectares de terre, certes dégradés mais toujours utilisables, pourraient être mis en culture pour produire du soja afin d’éviter de nouvelles conversions.</p>
<p>Le nouveau président brésilien, Jair Bolsonaro, a récemment <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2019/08/02/bresil-jair-bolsonaro-licencie-le-directeur-de-l-institut-divulguant-les-donnees-sur-la-deforestation_5496097_3210.html">licencié le directeur</a> de l’institut qui publie les données sur la déforestation dans le pays et affiché sa volonté de poursuivre le développement agricole et d’assouplir les réglementations environnementales dans ce sens. <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2019/08/08/deforestation-record-au-bresil-le-jeu-dangereux-de-jair-bolsonaro_5497563_3244.html">Les derniers chiffres</a> semblaient d’ailleurs déjà pointer une augmentation de plus de 100 % de la déforestation dans certaines régions du pays au regard de l’année passée.</p>
<p>Ces derniers mois, ce sont donc les effets combinés de la déforestation et des sécheresses qui ont fait <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2019/08/21/au-bresil-secheresse-et-deforestation-font-bondir-de-83-le-nombre-d-incendies_5501298_3244.html">« bondir de 83 % le nombre d’incendies »</a> par rapport à l’an passé. Dans ce contexte, la France doit s’assurer qu’elle ne contribue pas, par ces importations, à ce phénomène.</p>
<h2>Zéro déforestation</h2>
<p>La <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/2018.11.14_SNDI_0.pdf">stratégie de lutte contre la déforestation importée</a> initiée en 2018 (SNDI) ambitionne d’y mettre fin d’ici 2030.</p>
<p>Cet engagement – une première mondiale – fait suite à la <a href="https://ad-partnership.org/">Déclaration d’Amsterdam</a> de 2015 et à celle de <a href="https://nydfglobalplatform.org/declaration/">New York sur les forêts</a> de 2014. Elle concerne dans un premier temps les principaux produits et matières problématiques ; d’autres pourront être ajoutés lors de sa révision en 2020.</p>
<p>Afin d’atteindre l’objectif « zéro-déforestation » qu’elle s’est fixée, la France souhaite ouvrir le dialogue avec les pays consommateurs (importateurs) et les pays producteurs (exportateurs) ; il s’agit d’aligner sa politique d’aide au développement et ses politiques publiques en général avec les objectifs de la SNDI.</p>
<p>Ainsi, une politique d’achats publics « zéro déforestation » devrait être mise en place d’ici 2022. Du côté du secteur privé, l’accent est mis sur les politiques de responsabilité sociétale des entreprises (la RSE). Une plate-forme ouverte à tous les acteurs devrait prochainement voir le jour. Elle servira à publier et partager des informations sur les approvisionnements et les pratiques à risque des entreprises.</p>
<p>La question de la transparence des informations est ici cruciale et complexe, dans la mesure où les produits à risque de déforestation importée sont rarement consommés directement. Dans le cas du soja, il serait par exemple nécessaire de connaître non seulement l’origine des produits issus des animaux, mais également le mode d’alimentation de ces derniers et la provenance des intrants utilisés.</p>
<p>Un label est également prévu dans le cadre de la SNDI pour aiguiller les choix des consommateurs vers des produits à plus faible impact sur la déforestation. Il devra être clair et transparent, l’objectif étant de minimiser le temps et les efforts que ces derniers passeront à connaître la valeur environnementale du label. Pour être crédible, le label devra être décerné par un organisme certificateur indépendant et neutre. La participation au label étant par définition une démarche volontaire des entreprises, il est nécessaire qu’elle se fasse à un coût restreint, compensé par une volonté des consommateurs de payer un peu plus cher pour réduire leur empreinte environnementale.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1115087222926127109"}"></div></p>
<h2>Transformer la demande</h2>
<p>La stratégie française de lutte contre la déforestation importée va globalement dans le bon sens : elle est ambitieuse dans ses objectifs, mais malheureusement moins dans les moyens pour y parvenir.</p>
<p>Elle repose en effet trop sur les bonnes intentions des acteurs et les actions volontaires des entreprises et des consommateurs. Aucune interdiction ou mesure réglementaire, ni même d’incitation fiscale n’y sont intégrées. En particulier, la stratégie compte en très grande partie sur la pression exercée par les consommateurs sur les entreprises importatrices. Au travers d’une information claire et transparente, ils seraient suffisamment sensibles à la question de la déforestation pour modifier leurs comportements, et susceptibles de modifier les comportements des entreprises importatrices.</p>
<p>Cependant, aucun objectif de réduction de la consommation des produits sources de déforestation importée, ni aucun instrument incitatif pour atteindre ces objectifs, ne sont évoqués. Ainsi, pour reprendre le cas du soja brésilien, les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tourteau_de_soja">tourteaux</a> élaborés à partir de cette plante sont très largement utilisés pour l’alimentation animale. Or aucune piste n’est proposée par la SNDI pour contenir cette pression de la demande.</p>
<p>Nous proposons deux voies complémentaires pour améliorer l’efficacité des politiques publiques dans ce domaine.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pour-une-huile-de-palme-durable-soutenir-les-petits-producteurs-et-encadrer-les-grandes-plantations-75653">Pour une huile de palme durable, soutenir les petits producteurs et encadrer les grandes plantations</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<h2>Des pistes pour alléger la dépendance</h2>
<p>On pourra premièrement <a href="https://www.liberation.fr/debats/2019/09/01/peut-on-sauver-la-foret-en-continuant-a-manger-de-la-viande_1748662">diminuer la consommation de viande</a> pour alléger la pression sur les terres. L’utilisation des fourrages ou d’autres légumineuses produites localement pourrait également réduire la dépendance aux importations de soja, tout en offrant des <a href="https://www.chaireeconomieduclimat.org/wp-content/uploads/2015/06/12-10-03-Cahier-ID-n19-DequiedtFR.pdf">bénéfices climatiques</a> et une baisse du risque de fluctuation des prix internationaux des intrants – en dépit d’une augmentation possible du risque d’approvisionnement (la production de foin étant sensible aux aléas météorologiques). Ces changements de mode de consommation passeraient par des incitations via les prix, sur la base d’un principe proche du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Principe_pollueur-payeur">pollueur-payeur</a>, qu’affectionnent bon nombre d’économistes.</p>
<p>Avec le principe du label évoqué plus haut, on compte sur les consommateurs pour qu’ils acceptent de payer plus cher un produit qui n’engendre pas de déforestation ; si l’on se place dans le scénario d’une incitation par les prix, les consommateurs paieraient plus chers pour des produits qui génèrent de la déforestation. Par souci d’équité, il est essentiel de faciliter l’accès à des protéines non animales de bonne qualité à des coûts relativement bas coûts.</p>
<h2>Une gestion schizophrène</h2>
<p>Au-delà des questions de consommation, la SNDI française se heurte à l’incohérence qui caractérise la gestion publique des questions environnementales : d’un côté, la lutte contre la déforestation importée et la responsabilisation des entreprises importatrices ; de l’autre, des autorisations d’importation massives d’huile de palme pour la <a href="https://www.lemonde.fr/energies/article/2018/07/05/les-ong-attaquent-total-pour-ses-importations-d-huile-de-palme_5326391_1653054.html">production d’agro-carburants</a> et un projet, celui de la mine de la <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/05/27/montagne-d-or-en-guyane-l-executif-est-il-clair-sur-sa-position-comme-l-affirme-sibeth-ndiaye_5468217_4355770.html">Montagne d’or en Guyane</a> – finalement abandonné.</p>
<p>Il est difficile de lutter contre les incendies et la déforestation sans cibler les modes de consommation. Les pays riches ont un régime alimentaire plus carné et une responsabilité historique plus importante que les pays émergents dans les dynamiques de dégradation environnementale. Ils devraient donc jouer un rôle central dans la transformation des modes de consommation. La stratégie française contre la déforestation importée va donc dans le bon sens mais manque d’instruments incitatifs et de cohérence avec les politiques menées en parallèle.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/123031/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Delacote a reçu des financements de la Chaire Economie du Climat et du Labex ARBRE. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Antoine Leblois a reçu des financements du Labex ARBRE. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Julia Girard a reçu des financements de la Chaire Economie du Climat. </span></em></p>La stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée est ambitieuse, mais manque de moyens et de cohérence avec la politique menée.Philippe Delacote, Chargé de recherche en économie, InraeAntoine Leblois, Chargé de recherches, économie du développement, InraeJulia Girard, Chargée de recherche, Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1162402019-04-29T20:20:02Z2019-04-29T20:20:02ZLa léghémoglobine, cet ingrédient qui fait passer le steak végétal pour de la viande rouge<p>Les humains mangent des animaux qui mangent des végétaux. En supprimant cette étape intermédiaire pour manger directement des végétaux, nous pouvons diminuer notre empreinte carbone, réduire la superficie des terres agricoles, éliminer les risques sanitaires liés à la consommation de viande rouge et nous libérer d’une partie des dilemmes éthiques relatifs au bien-être animal.</p>
<p>Pour beaucoup de gens toutefois, reste un obstacle de taille : la viande, c’est bon. Très bon, même. Par contraste, un burger végétarien… a un goût de burger végétarien. Il ne satisfait pas l’envie carnivore dans la mesure où il n’a ni l’apparence, ni l’odeur, ni le goût, ni le côté saignant du bœuf.</p>
<p><a href="https://impossiblefoods.com/">Impossible Foods</a>, une entreprise californienne, propose de surmonter cet obstacle en ajoutant à son burger végétalien un extrait de plante doté de propriétés que les gens associent habituellement à la viande rouge ; il s’agit de donner au steak végétarien les caractéristiques du bœuf. L’Impossible Burger est vendu dans des restaurants californiens depuis 2016. Ses créateurs visent à présent le marché nord-américain en s’associant avec Burger King pour créer l’<a href="https://impossiblefoods.com/burgerking/">Impossible Whopper</a>. Ce sandwich est actuellement commercialisé à titre expérimental à Saint Louis, dans le Missouri. S’il y rencontre un succès suffisant, il sera proposé à la vente dans tout le pays.</p>
<p>En quoi consiste exactement cette mystérieuse substance ? Le burger qui en contient est-il encore vegan ? Est-elle fabriquée à base d’OGM ? Empêche-t-elle le produit de recevoir le label bio ?</p>
<p>Je suis biologiste moléculaire et étudie la façon dont les plantes et les bactéries interagissent et s’adaptent à leur environnement ; je m’intéresse également à l’impact potentiel de ces interactions sur la santé humaine. Et c’est bien ce savoir qui a été mis en application d’une manière que je n’avais pas envisagée pour créer l’Impossible Burger…</p>
<h2>La « léghémoglobine », qu’est-ce que c’est ?</h2>
<p>Ce sandwich contient un ingrédient extrait du soja : la léghémoglobine. Il s’agit d’une protéine liée chimiquement à une molécule non-protéique, l’hème, qui donne à la léghémoglobine <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC177968/">sa couleur rouge vif</a>. En fait, l’hème contient du fer, qui est aussi à l’origine de la couleur du sang et de la viande rouge. D’un point de vue évolutionnaire, la léghémoglobine se rapproche de la myoglobine animale, que l’on trouve dans les muscles, et de l’hémoglobine du sang. Elle sert à réguler l’approvisionnement des cellules en oxygène.</p>
<p>La léghémoglobine donne à l’Impossible Burger l’apparence, l’odeur à la cuisson et la saveur du bœuf. J’ai fait appel à un collègue scientifique de Saint Louis pour goûter l’Impossible Whopper, et il n’a pas pu le distinguer de la version contenant de la viande. Il a toutefois nuancé ce constat en indiquant que les ingrédients contenus dans cette préparation contribuaient peut-être à masquer la différence.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/268224/original/file-20190408-2901-1xkdicv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/268224/original/file-20190408-2901-1xkdicv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/268224/original/file-20190408-2901-1xkdicv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/268224/original/file-20190408-2901-1xkdicv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/268224/original/file-20190408-2901-1xkdicv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/268224/original/file-20190408-2901-1xkdicv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/268224/original/file-20190408-2901-1xkdicv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/268224/original/file-20190408-2901-1xkdicv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Coupe transversale d’un nodule de racine de soja. La couleur rouge est due à la léghémoglobine.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.microscopemaster.com/rhizobium.html#gallery[pageGallery]/0/">CSIRO</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>À ce stade émerge une première question : pourquoi les plants de soja ne sont-ils pas rouges ? On trouve également de la léghémoglobine dans de nombreuses légumineuses, d’où son nom. Elle est particulièrement abondante dans certaines structures spécifiques, les nodules, qui se développent sur les racines. Si vous fendez un de ces nodules avec l’ongle, vous verrez que l’intérieur est <a href="https://www.agronomy.org/science-news/fixing-soybeans-need-nitrogen">rouge vif, à cause de la léghémoglobine</a>. Les nodules du soja se forment en réaction à la présence de la bactérie symbiotique <em>Bradyrhizobium japonicum</em>.</p>
<p>J’imagine que le <a href="https://impossiblefoods.com/heme">site Internet</a> d’Impossible Foods montre du soja dépourvu de nodules parce que la plupart des gens sont dégoûtés par les bactéries, même si la <em>Bradyrhizobium</em> est bénéfique pour l’homme.</p>
<p>Dans <a href="https://medicine.buffalo.edu/faculty/profile.html?ubit=mrobrian">mon groupe de recherche</a>, nous nous intéressons à la relation symbiotique entre le soja et son alliée bactérienne, <em>Bradyrhizobium japonicum</em>, dans le but de réduire l’empreinte carbone de l’espèce humaine, mais pas en créant de délicieux burgers sans protéines animales.</p>
<p>En effet, les bactéries présentes dans les nodules des racines absorbent l’azote de l’air et le transforment en nutriment dont la plante se sert pour se développer. On appelle ce processus la fixation biologique de l’azote. La symbiose entre plantes et bactéries permet de se passer d’engrais chimiques azotés, qui consomment énormément d’énergie fossile et polluent l’eau.</p>
<p>Certains groupes de recherche étudient la possibilité d’étendre cette symbiose à des cultures comme le maïs ou le blé en <a href="https://doi.org/10.1128/AEM.01055-16">les modifiant génétiquement</a> pour obtenir les bénéfices de la fixation de l’azote dont seules certaines plantes, y compris les légumineuses, sont pour l’instant capables.</p>
<p>Je suis heureusement surpris et quelque peu amusé de constater que des termes de jargon aussi hermétiques qu’hème et léghémoglobine sont passés dans le langage courant et se retrouvent jusque sur l’emballage d’un sandwich !</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/268177/original/file-20190408-2905-1exxbes.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/268177/original/file-20190408-2905-1exxbes.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/268177/original/file-20190408-2905-1exxbes.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/268177/original/file-20190408-2905-1exxbes.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/268177/original/file-20190408-2905-1exxbes.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/268177/original/file-20190408-2905-1exxbes.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/268177/original/file-20190408-2905-1exxbes.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les nodules racinaires se trouvent sur les racines des légumineuses.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/nodules-soybean-346114349?src=MiMFs-Cw09sJ7EU3JaG86Q-1-7">Kelly Marken/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Bio ou pas bio ?</h2>
<p>La léghémoglobine est l’ingrédient phare de l’Impossible Burger, mais c’est aussi un additif dont les consommateurs avertis veulent s’assurer qu’il est bio, sans OGM ou encore vegan.</p>
<p>La léghémoglobine utilisée dans les burgers provient d’une levure génétiquement modifiée qui contient la séquence ADN permettant au soja de fabriquer la protéine. Or introduire le gène du soja dans la levure en fait un OGM. Selon la Food and Drug Administration, l’organisme américain chargé du contrôle des produits alimentaires, la <a href="https://www.fda.gov/downloads/Food/IngredientsPackagingLabeling/GRAS/NoticeInventory/UCM620362.pdf">léghémoglobine de soja</a> est « généralement considérée sans danger ». Néanmoins, le département de l’Agriculture <a href="https://www.ams.usda.gov/publications/content/can-gmos-be-used-organic-products">interdit d’accorder le label « biologique »</a> aux aliments contenant des OGM. Il est ironique de constater qu’une innovation qui pourrait être respectueuse de l’environnement et participer au développement durable est aussi rapidement mise au placard par des organisations qui déclarent partager ces objectifs.</p>
<p>Tous les vegans n’approuvent pas ce nouveau burger. Certains affirment qu’un produit contenant des OGM ne peut être vegan pour diverses raisons, dont les <a href="https://www.nongmoproject.org/blog/tag/vegan/">expériences menées sur des animaux</a> pour évaluer les effets de la léghémoglobine sur la santé. De mon point de vue, ce principe moral peut être contesté, car il ne prend pas en compte le bétail épargné. D’autres vegans voient dans les <a href="http://www.vegangmo.com/vegan-gmo-mission">OGM la solution à des problèmes</a> qui leur tiennent à cœur.</p>
<p>À en juger par son site Internet, <a href="https://impossiblefoods.com/heme">Impossible Foods</a> est pleinement conscient des différents groupes de consommateurs dont l’opinion sera déterminante pour le succès de son produit. Le site inclut un lien vers une publication décrivant la façon dont les <a href="https://medium.com/impossible-foods/how-gmos-can-save-civilization-and-probably-already-have-6e6366cb893">OGM vont nous permettre de sauver la planète</a>. Mais l’entreprise affirme aussi qu’elle utilise de l’hème « directement issu de plantes ». C’est faux. En réalité, cette molécule provient de la levure.</p>
<p>La commercialisation de la léghémoglobine est une conséquence imprévue de l’intérêt des chercheurs pour ce fascinant processus biologique. Les bénéfices potentiels d’une découverte scientifique ne sont souvent pas envisagés sur le moment. Que l’Impossible Burger soit ou non un succès commercial à grande échelle, la technologie alimentaire continuera d’évoluer pour s’adapter aux besoins de l’humanité, comme elle l’a toujours fait depuis les débuts de l’agriculture, il y a 10 000 ans.</p>
<hr>
<p><em>Traduit de l’anglais par Iris Le Guinio pour <a href="http://www.fastforword.fr/">Fast for Word</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/116240/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mark R. O’Brian a reçu des financements du National Institutes of Health.
</span></em></p>Proposer un burger végétal dont l’apparence, le goût et l’odeur ressemblent à s’y méprendre à du bœuf, tel est le défi qu’entend relever la start-up Impossible Foods.Mark R. O'Brian, Professor and Chair of Biochemistry, Jacobs School of Medicine and Biomedical Sciences, University at BuffaloLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1129192019-03-04T20:37:04Z2019-03-04T20:37:04ZPodcast : Qu’allons-nous manger demain ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/261934/original/file-20190304-92283-c60en3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C0%2C1285%2C684&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Fanny Parise (à gauche) et Samir Mezdour (à droite) dans les studios de Moustic the Audio Agency.</span> <span class="attribution"><span class="source">Moustic the Audio Agency</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La viande, c’est fini ? Oui et non. Pour parler de l’avenir des protéines que nous allons manger, des vers, des insectes, de la spiruline, des substituts et des « faux » steaks, trois experts nous éclairent.</p>
<ul>
<li><p><strong>Fanny Parise</strong> (anthropologue) sur les attitudes et comportements des consommateurs face aux « aliments disruptifs » (viande in vitro, poudres, spiruline, etc.) et à la tendance flexitarienne.</p></li>
<li><p><strong>Stephan Marette</strong> (économiste) sur l’avenir de la consommation de viande : les consommateurs semblent ouverts pour évoluer vers un régime plus flexitarien mais le presque abandon de la viande préconisé pour des raisons environnementales paraît encore loin.</p></li>
<li><p><strong>Samir Mezdour</strong> (chercheur en science des aliments et procédés agroalimentaires) sur la question des insectes dans la nourriture (vont-ils nourrir le monde ?), et la possibilité d’une filière biotech des insectes.</p></li>
</ul>
<hr>
<p><em>Animation : Thibaud de Saint-Maurice (<a href="https://www.moustictheaudioagency.com/">Moustic the Audio Agency</a>) et Didier Pourquery (The Conversation France). Réalisation : Joseph Carabalona et Thierry Imberty (Moustic the Audio Agency).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/112919/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’après-viande est déjà là, mais tout le monde ne veut pas forcément manger du soja, des insectes, des vers ou de la spiruline. Trois chercheurs sondent l’avenir des protéines que nous avalons.Fanny Parise, Chercheur associé, anthropologie, Institut lémanique de théologie pratique, Université de LausanneSamir Mezdour, chercheur en sciences des aliments et procédés agro-alimentaires, AgroParisTech – Université Paris-SaclayStephan Marette, Directeur de recherche à l’INRA, économiste, AgroParisTech – Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1054262018-10-24T21:21:26Z2018-10-24T21:21:26ZAvec Bolsonaro, l’agrobusiness contre l’Amazonie<p>La victoire, ce dimanche 28 octobre, de Jaïr Bolsonaro – le candidat du Parti social libéral qui a rallié les sympathisants de l’extrême droite – à la présidentielle brésilienne a de quoi donner des sueurs froides aux écologistes. </p>
<p>Défenseur de l’ultralibéralisme, Bolsonaro est associé au puissant lobby représentant les grands propriétaires terriens : <a href="https://congressoemfoco.uol.com.br/eleicoes/com-261-parlamentares-bancada-ruralista-declara-apoio-a-bolsonaro/"><em>la bancada ruralista</em></a> (littéralement le « banc rural », le terme <em>bancada</em> désignant ici les groupes de pression constitués par les élus à la Chambre des députés et au Sénat brésiliens).</p>
<p>Cette dernière appartient au <a href="https://theconversation.com/boeuf-balles-et-bible-ces-puissants-reseaux-qui-portent-le-candidat-bolsonaro-au-bresil-105017">BBB</a> (pour « bœuf, balles et Bible »), mouvement incontournable qui regroupe les <em>bancadas</em> représentant l’agrobusiness, les militaires et les églises évangélistes.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1052508730745675776"}"></div></p>
<h2>Contre « l’activisme environnemental »</h2>
<p>Les grands propriétaires terriens et éleveurs ont tout à gagner dans cette victoire de Bolsonaro. Notons que le qualificatif de « grand » est un euphémisme, quand on sait que 45 % de l’espace rural brésilien est occupé par <a href="https://www1.folha.uol.com.br/poder/2015/01/1571133-propriedades-de-mais-de-mil-hectares-ocupam-45-da-area-rural-do-brasil.shtml">seulement 1 % des propriétés</a>.</p>
<p><a href="https://www.oxfam.org.br/sites/default/files/arquivos/relatorio-terrenos_desigualdade-brasil.pdf">Les grandes familles</a> qui trustent la terre se réjouissent de la défaite cinglante du Parti des travailleurs aux législatives et à la présidentielle. Car ce parti soutenait l’engagement pris par le pays lors de l’Accord de Paris sur le climat de réduire ses émissions de gaz à effet de serre et de replanter 12 millions d’hectares de forêt amazonienne d’ici 2030 ; contrôlait l’application des lois et accords en faveur de la protection du territoire des Indiens d’Amazonie ; et <a href="https://www.la-croix.com/Monde/Ameriques/Lavenir-politique-Bresil-inquiete-sans-terre-2016-09-20-1200790275">menait une politique favorable</a> au demi-million de familles paysannes sans terre.</p>
<p>Bolsonaro, le PSL (nouveau parti fort de la Chambre des députés) et le BBB, <a href="https://www.cartacapital.com.br/revista/844/bbb-no-congresso-1092.html">lobby le plus puissant du congrès</a>, incarnent une position diamétralement opposée. Ainsi, si l’on ajoute à l’influence dominante du BBB sur le pouvoir législatif, un président qui clame sur les réseaux sociaux sa haine des populations indigènes, son mépris des paysans sans terre et sa volonté de mettre fin à ce qu’il qualifie d’activisme environnemental, on ne voit pas bien ce qui pourrait arrêter la fièvre expansionniste des éleveurs de bovins et des planteurs de soja et de canne à sucre.</p>
<p>En analysant les données produites par le ministère de l’Agriculture brésilien, on constate que la surface de culture du soja a augmenté de <a href="http://www.agricultura.gov.br/assuntos/politica-agricola/todas-publicacoes-de-politica-agricola/projecoes-do-agronegocio/projecoes-do-agronegocio-2017-a-2027-versao-preliminar-25-07-17.pdf/view">59 % au cours des dix dernières années</a>. Le soja constitue à lui seul près de la moitié de la production agricole du pays et 30 % de sa culture est concentrée dans l’État du Mato Grosso en Amazonie.</p>
<p>La culture de la canne à sucre a quant à elle <a href="http://www.unicadata.com.br/historico-de-area-ibge.php?idMn=33&tipoHistorico=5">augmenté de 60 %</a> sur la même période. L’expansion de l’élevage bovin est également phénoménale. Avec un cheptel de plus de <a href="https://agenciadenoticias.ibge.gov.br/agencia-noticias/2012-agencia-de-noticias/noticias/16994-rebanho-de-bovinos-tem-maior-expansao-da-serie-historica">215 millions de têtes</a>, le Brésil est le second producteur mondial. Près <a href="https://lesmarches.reussir.fr/bovins-le-bresil-davantage-present-lexport-en-2018">d’un steak sur cinq</a> consommés dans le monde provient d’un bœuf brésilien. Sur les dix États du pays qui ont connu la plus forte croissance de cheptel ces vingt dernières années, <a href="https://www.brasildefato.com.br/2018/08/02/criacao-de-gado-devasta-amazonia-e-abre-caminho-para-o-agronegocio/">huit se trouvent en Amazonie</a>.</p>
<p>Or ces trois activités sont considérées comme les <a href="http://grand-angle.lefigaro.fr/deforestation-anatomie-desastre-environnement-enquete">causes principales de la déforestation</a> au Brésil.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/97cl5yB69RA?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Au Brésil, le soja chasse les forêts. (Euronews/YouTube, 2018).</span></figcaption>
</figure>
<h2>Le bœuf avance, la forêt recule</h2>
<p>La forêt amazonienne couvre 5,5 millions de km<sup>2</sup>, ce qui représente la moitié des forêts tropicales de notre planète. Elle abrite la plus grande biodiversité du monde, concentre 15 % de l’eau douce, contribue à produire 20 % de l’oxygène de l’air que nous respirons et constitue un régulateur naturel du réchauffement climatique.</p>
<p>Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, l’Amazonie compte 33 millions d’habitants qui dépendent de ses ressources. Elle est également le territoire de plusieurs centaines de milliers d’Indiens. <a href="http://www.funai.gov.br/">La Fondation nationale de l’Indien</a> en recense <a href="http://www.brasil.gov.br/governo/2015/04/populacao-indigena-no-brasil-e-de-896-9-mil">900 000 au Brésil</a>, répartis en 305 ethnies et occupant 594 territoires représentant 12 % du pays. L’usage de certaines de ces terres déclarées inaliénables dans la constitution de 1988 peut toutefois être modifié par le Congrès.</p>
<p>Près de 65 % de la forêt amazonienne se situent au Brésil. Mais ce pays est le champion mondial de la déforestation de ces cinquante dernières années, avec une <a href="http://www.mma.gov.br/mma-em-numeros/desmatamento">destruction de près de 780 000 km²</a>, soit une superficie proche d’une fois et demi celle de la France métropolitaine. Dans cette période, l’Amazonie brésilienne a perdu 20 % de sa surface.</p>
<p>L’élevage, en particulier l’élevage bovin, est la principale cause de déforestation en Amazonie. Le grand projet d’étude menée pour le ministère brésilien de l’Agriculture au travers de l’Entreprise brésilienne d’études agronomiques sur l’occupation des surfaces résultant de la déforestation montre que <a href="https://www.embrapa.br/informatica-agropecuaria/busca-de-publicacoes/-/publicacao/1062992/terraclass-2004-a-2014-avaliacao-da-dinamica-do-uso-e-cobertura-da-terra-no-periodo-de-10-anos-nas-areas-desflorestadas-da-amazonia-legal-brasileira">65 % de celles-ci sont utilisées pour l’élevage</a>.</p>
<p>L’agriculture intensive, plus spécifiquement la culture du soja et de la canne à sucre, a également une part de responsabilité, mais celle-ci ne s’élèverait qu’à <a href="https://data.mongabay.com/brazil.html">environ 5 à 10 %</a>. Cependant, le cas du soja est à étudier avec plus d’attention. En effet, une large part de cette culture est dédiée à la production de tourteaux pour nourrir le bétail. Ainsi, le développement de la culture du soja et celui de l’élevage sont liés.</p>
<p>Par ailleurs, des <a href="http://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/5/2/024002/meta">études</a> ont montré qu’au Mato Grosso (sud de l’Amazonie), des surfaces auparavant utilisées pour l’élevage ont été reconverties pour la culture du soja, ce qui a contribué à repousser vers le nord les étendues dédiées aux bovins et a ainsi induit une nouvelle déforestation. La culture du soja se trouve donc être une cause sous-jacente de la déforestation que l’on attribue plus directement à l’élevage.</p>
<p>En outre, la culture du soja et de la canne à sucre sont également des causes de déforestation au travers du développement d’infrastructures routières que le transport des récoltes rend nécessaires. La construction de routes est directement responsable d’une faible part de la déforestation mais elle en est un formidable catalyseur car elle ouvre l’accès à la forêt, permet le développement des activités et favorise le déplacement de population.</p>
<p>Ainsi, 95 % de la déforestation se situe dans les <a href="https://journals.openedition.org/cybergeo/27325?lang=en">5 km bordant les routes</a>. Les deux principales autoroutes, celle de Belem-Brasilia, construite en 1958, et celle de Cuiaba-Porto-Velho, construite en 1968, sont au cœur de ce que l’on dénomme « l’arc de déforestation ». Seules quelques routes sont officielles, et la grande partie des <a href="https://www.la-croix.com/Actualite/Monde/La-foret-amazonienne-une-biodiversite-unique-au-monde-2011-09-29-740334">170 000 km de voies de communication sillonnant l’Amazonie</a> a été construite illégalement, en particulier par les exploitants forestiers.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1045636888323854336"}"></div></p>
<h2>L’Amazonie est-elle un bien commun ?</h2>
<p>L’Amazonie est essentielle à l’équilibre écologique de notre planète et à la survie de l’humanité. Elle ne doit pas appartenir à un État qui pourrait décider de son sort sans aucune consultation de la communauté internationale. Au-delà même du fait qu’elle est un territoire partagé entre neuf États, les deux tiers de sa surface situés au Brésil ne peuvent pas être considérés comme une propriété du pays.</p>
<p>Son existence transcende la notion même de nation. Et quelques frontières qui ont à peine plus de 500 ans d’histoire sont bien dérisoires au regard du rôle de la forêt amazonienne dans l’équilibre planétaire. La politique brésilienne en matière d’utilisation et de protection des richesses de l’Amazonie a des conséquences sur l’ensemble des peuples et, à ce titre, la communauté internationale a un devoir d’intervention dans les décisions qui sont prises.</p>
<p>Cependant, une telle ingérence est difficilement acceptable. En particulier pour un pays dont l’histoire a été marquée par l’esclavage et l’exploitation de ses richesses au profit de nations européennes. Et celles-ci sont bien peu légitimes dans le rôle de donneur de leçons alors qu’elles n’ont conservé que <a href="http://grand-angle.lefigaro.fr/deforestation-anatomie-desastre-environnement-enquete">0,3 % de leur massif forestier originel contre 69 % au Brésil</a>.</p>
<p>Le droit de regard que voudraient s’arroger des pays qui sont aujourd’hui dans une situation de développement que l’on ne peut décemment pas dissocier d’un passé émaillé de surexploitation de leurs propres ressources et de celles issues des périodes de colonisation pourrait être interprété comme une volonté de freiner l’émergence du Brésil sur la scène économique mondiale.</p>
<p>Cela nourrit l’un des principaux arguments populistes pour le rejet des institutions internationales.</p>
<h2>Au profit d’une minorité</h2>
<p>Cet argument reste toutefois assez fallacieux. Certes, le peuple brésilien dans son ensemble bénéficie du développement du secteur de l’agrobusiness, représentant plus d’un cinquième de l’économie du pays. Mais la déforestation profite avant tout à une minorité de grands propriétaires terriens à qui Bolsonaro propose dans une de <a href="https://canalrural.uol.com.br/noticias/quero-que-matem-esses-vagabundos-mst-diz-bolsonaro-69789/">ses déclarations</a> de chasser à coup de fusil les paysans sans terre qui oseraient s’aventurer sur leurs immenses propriétés. Mais ceux-ci sont plus de 500 000 ! Et ce ne sont certainement pas non plus les centaines de milliers d’Indiens qui se raviront du recul de la forêt.</p>
<p>Quant aux autres formes d’exploitation de celle-ci, telles que les mines ou l’extraction pétrolière, elles sont le plus souvent <a href="https://global.mongabay.com/fr/rainforests/0806.htm">orchestrées par des multinationales</a>.</p>
<p>Difficile dans ces circonstances de justifier l’intérêt de la déforestation pour la population brésilienne. Il nous faut donc compter sur le fonctionnement démocratique, dans lequel les contre-pouvoirs pourront s’exprimer face au tonitruant Bolsonaro et aux surpuissants lobbys sur lesquels il s’appuie.</p>
<p>La conscience de l’importance de la forêt amazonienne pour la planète doit pouvoir freiner les ardeurs des défenseurs de l’agrobusiness. Mais le ton populiste et nationaliste du slogan de campagne de Bolsonaro n’est pas de nature à rassurer : « Le Brésil au-dessus de tout, Dieu au-dessus de tous ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/105426/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Prévot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La victoire annoncée du candidat d’extrême droite risque d’alimenter la fièvre expansionniste des éleveurs de bovins et des planteurs de soja, menaçant toujours plus la forêt amazonienne.Frédéric Prévot, Professeur de Stratégie et Management International, Kedge Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/818652017-08-22T20:47:18Z2017-08-22T20:47:18ZDomestication des plantes sauvages : que savaient vraiment les premiers agriculteurs ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/180752/original/file-20170802-24116-1usvf3p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C248%2C1238%2C749&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Moisson des céréales en Égypte.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Egyptian_harvest.jpg">The Oxford Encyclopedia of Ancient Egypt/Wikimedia Commons</a></span></figcaption></figure><p>Les débuts de l’agriculture, qui marquent une <a href="https://theconversation.com/andrea-leadsom-is-wrong-about-the-history-of-farming-and-heres-why-it-matters-70923">véritable révolution</a> dans l’histoire de l’humanité, fascinent les scientifiques depuis des siècles. L’événement, vieux de quelque 10 000 ans, est pourtant difficile à étudier et un certain nombre d’énigmes restent à résoudre. Comment les chasseurs-cueilleurs ont-ils commencé à pratiquer l’agriculture ? Comment s’y sont-ils pris pour domestiquer les plantes ? Comment expliquer les différences qui existent entre plantes cultivées et plantes sauvages ?</p>
<p>Si l’on compare en effet les cultures domestiquées avec leurs apparentées sauvages, la différence est souvent impressionnante. L’exemple du maïs est à ce titre tout à fait significatif, comme en témoigne l’image ci-dessous.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=376&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=376&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=376&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">À gauche, le téosinte, que l’on trouve essentiellement au Mexique. À droite, sa version domestiquée, le maïs.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nsf_beta/3745571067">Nicolle Rager Fuller, National Science Foundation</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le processus de domestication qui explique ces transformations entre plantes sauvages et cultivées remonte pour l’essentiel aux premiers temps de l’agriculture, c’est-à-dire à l’âge de pierre. C’est à cette période que l’on a commencé à semer, cultiver et récolter à l’aide de faucilles en pierre.</p>
<p>Les populations de l’époque avaient-elles conscience que cette domestication entraînerait de tels effets sur les plantes ? Recherchaient-elles ces résultats ? La question reste entière…</p>
<p>Est-ce que quelqu’un a vraiment pu, 8000 av. J.-C., penser que des plants de téosinte pourraient donner un jour des <a href="http://learn.genetics.utah.edu/content/selection/corn/">épis de maïs</a> ou que le <a href="http://www.sciencemag.org/news/2015/11/study-argues-rice-was-domesticated-least-three-times">riz sauvage</a> pourrait donner à terme du riz basmati ou à long grain ? Beaucoup d’archéologues pensent que non, mais il semble difficile d’exclure définitivement cette piste.</p>
<h2>Le rôle des premiers agriculteurs</h2>
<p>Les premiers fermiers ont-ils domestiqué les plantes et cherché à les faire évoluer ? Ou les caractéristiques de ces plantes ont-elles tout simplement évolué à mesure que les agriculteurs les travaillaient et les récoltaient ?</p>
<p>L’article publié par notre équipe dans la revue <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/evl3.6/epdf"><em>Evolution Letters</em></a> se penche sur ces questions. Nous avons ainsi cherché à connaître et à comparer les tailles des grains des plantes sauvages avec ceux des plantes domestiquées. À noter que ces dernières – comme le blé, le riz ou le maïs – ont perdu la capacité de disperser naturellement leurs grains.</p>
<p>Au niveau de la taille, la différence s’avère importante : les grains de maïs sont 15 fois plus gros que ceux du téosinte, ceux du soja sept fois plus gros que ceux de son « cousin » sauvage. En ce qui concerne l’orge, la différence n’est que de 60 %, mais l’<a href="http://onlinelibrary.wiley.com/wol1/doi/10.1111/1365-2435.12760/abstract">écart de rendement</a> entre les deux variétés est énorme.</p>
<p>Bien sûr, il est possible que les fermiers qui cultivaient les versions primitives de ces cultures aient cherché à obtenir des grains de plus grande taille pour assurer un meilleur rendement. Pour y voir plus clair, nous avons décidé de comparer l’évolution de ces plantes à celle des légumes cultivés.</p>
<h2>Des grains plus gros avec la domestication</h2>
<p>En effet, dans le cas où les premiers fermiers auraient pratiqué la culture des légumes basée sur la sélection, les effets auraient été visibles sur les feuilles, les tiges ou les racines qui se consomment, mais pas directement sur la taille des grains. Il est ainsi probable que les changements intervenus au niveau de la taille des grains pour ces légumes n’aient pas de caractère intentionnel.</p>
<p>La sélection naturelle est une autre façon d’expliquer cet accroissement de la taille des grains, les plants les plus imposants ayant mieux survécu que les petits.</p>
<p>Ce phénomène peut aussi s’envisager comme une conséquence de transformations génétiques : les fermiers auraient pu produire des cultures de taille importante volontairement, en conservant et en replantant les grains issus des plantes les plus grandes, ou involontairement, en accordant plus d’attention, sans même le remarquer, aux plantes de grande taille, au détriment des plus petites. Mais il existe de nombreuses plantes qui, bien que grandes au moment de leur maturité, poussent à partir de petits grains.</p>
<p>Nous avons rassemblé des données renseignant la taille des grains de nombreuses cultures modernes, ainsi que d’espèces sauvages encore vivantes aujourd’hui qui leur sont apparentées. Nous avons trouvé, pour sept espèces de légumes, des preuves solides accréditant l’idée que la domestication a engendré une croissance générale des grains. C’est particulièrement frappant pour des cultures comme celle de la pomme de terre, du manioc ou de la patate douce, pour lesquelles les fermiers n’ont même pas besoin de semer. Dans ces cas, l’augmentation de la taille des grains s’est certainement produite sans que les hommes l’aient recherché.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le système racinaire d’un plant de patate douce. Les pommes de terre poussent généralement à partir de leurs semblables ou de boutures. Pourtant, les graines ont malgré tout grossi depuis la domestication du légume.</span>
<span class="attribution"><span class="source">saint1533/Pixabay</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Sélection naturelle et génétique</h2>
<p>Si, rien qu’en cultivant des légumes, les premiers fermiers ont fait grossir leurs grains, cela peut nous apprendre quelque chose sur les céréales. En effet, les effets liés à la domestication des légumes sont tout à fait comparables à celle qui intervient pour les céréales ou les légumineuses (lentilles ou haricots, par exemple). Il est donc tout à fait probable que la croissance des grains observée sur ces cultures se soit produite, au moins en partie, pendant la phase de domestication, sans qu’elle soit le fruit de la volonté des fermiers de l’âge de pierre. Ceux-ci n’avaient pas prévu de cultiver des céréales de plus grande taille : c’est la sélection naturelle ou la génétique qui ont fait leur travail.</p>
<p>Les travaux menés dans le cadre de notre étude contribuent à mieux comprendre l’évolution des cultures. Et la sélection « involontaire » décrite dans cet article constitue un phénomène probablement plus important que nous le pensions.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/81865/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Colin Osborne a reçu des financements du UK Natural Environment Research Council (NERC) et du European Research Council (ERC).</span></em></p>Les plantes que nous cultivons sont très différentes des espèces sauvages qui leur sont apparentées. Est-ce le fruit de la sélection naturelle ou d’une volonté délibérée des hommes ?Colin Osborne, Professor of Plant Biology, University of SheffieldLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/732472017-02-19T20:18:38Z2017-02-19T20:18:38ZAfrique : pourquoi la lutte contre la chenille légionnaire est si difficile<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/157422/original/image-20170219-10209-igmbyh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La chenille légionnaire d’automne a été repérée pour la première fois en Afrique début 2016. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/download/confirm/447052915?size=huge_jpg">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>L’aire de répartition de la chenille légionnaire d’automne (<em>Spodoptera frugiperda</em>) se situe en Amérique. Mais cette larve de papillon se propage actuellement à grande vitesse dans la partie sud de l’Afrique. Son apparition sur le continent a été détectée pour la première fois en janvier 2016 <a href="http://dx.doi.org/10.1371%2Fjournal.pone.0165632">au Nigeria</a>. En une année, elle s’est répandue pour <a href="http://ewn.co.za/2017/02/03/sa-confirms-presence-of-fall-armyworm">atteindre, en janvier dernier, l’Afrique du Sud</a>.</p>
<p>La présence de la chenille légionnaire d’automne ajoute aux dégâts déjà causés par sa cousine africaine, <a href="http://theconversation.com/armyworms-are-wreaking-havoc-in-southern-africa-why-its-a-big-deal-72822"><em>Spodoptera exempta</em></a>.</p>
<p>Cette situation a des répercussions considérables pour les populations touchées. Car ce papillon est un terrible ravageur du maïs et d’autres plantes cultivées, comme le sorgho. Il s’agit d’une menace sérieuse pour l’agriculture et par conséquent la sécurité alimentaire en Afrique ; c’est de même un problème pour le commerce international avec la mise en place de quarantaines. La situation est tout particulièrement préoccupante pour les cultures sud-africaines qui viennent tout juste de se remettre d’une <a href="http://www.unocha.org/el-nino-southern-africa">terrible sécheresse</a>.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/fjq6wL9p1AI?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Afrique australe : les chenilles détruisent dangereusement les cultures (France 24, 2017).</span></figcaption>
</figure>
<p>En Afrique subsaharienne, 208 millions de personnes <a href="https://www.afdb.org/fileadmin/uploads/afdb/Documents/Events/DakAgri2015/Cereal_Crops-_Rice__Maize__Millet__Sorghum__Wheat.pdf">dépendent du maïs</a> pour assurer leur alimentation. Ces cultures sont également essentielles aux petits agriculteurs de la région qui en tirent la majorité de leurs revenus.</p>
<p>Comprendre comment les chenilles légionnaires se reproduisent, se déplacent et se nourrissent est indispensable pour faire face à la menace qu’elles représentent. Ces insectes possèdent en effet des qualités qui les rendent particulièrement difficiles à contrôler : ils volent très bien, se reproduisent en masse et leurs larves peuvent se nourrir d’une grande variété de plantes. En outre, ils développent très rapidement des résistances aux pesticides.</p>
<h2>Des espèces venues d’ailleurs</h2>
<p>De telles invasions biologiques menacent la biodiversité, l’équilibre des écosystèmes naturels et agricoles et, à terme, la sécurité alimentaire. L’Afrique subsaharienne est considérée comme particulièrement vulnérable face à ces espèces invasives, en raison de sa grande dépendance à l’<a href="http://www.pnas.org/content/113/27/7575">égard de l’agriculture</a>.</p>
<p>En général, l’expansion de l’aire géographique de telles espèces est empêchée par des barrières naturelles, océans ou montagnes. Mais avec le développement des échanges commerciaux et des déplacements au niveau mondial, on a observé une multiplication ces dernières décennies de ces invasions biologiques. On peut citer, le grand capucin du maïs, <em>Prostephanus truncatus</em>, lui aussi originaire des Amériques, introduit par accident en <a href="http://www.cabi.org/isc/datasheet/44524">Tanzanie dans les années 1970</a>. Ce coléoptère s’est rapidement propagé via des lots de maïs et de manioc séché infestés. Cette espèce <a href="http://www.cabi.org/isc/datasheet/44524">s’est depuis propagée</a> à de nombreux pays d’Afrique.</p>
<p>Les avis divergent à propos de la chenille légionnaire d’automne en Afrique. Une piste possible avance que l’espèce est arrivée via des denrées alimentaires en <a href="http://theconversation.com/armyworms-are-wreaking-havoc-in-southern-africa-why-its-a-big-deal-72822">provenance d’Amérique</a>. Ceci est tout à fait envisageable : les insectes peuvent facilement traverser les frontières via des matières végétales infestées. Et ces espèces ont été à <a href="http://ec.europa.eu/food/plant/plant_health_biosecurity/europhyt/interceptions_en">maintes reprises</a> interceptées dans des envois destinés à l’Europe.</p>
<p>Il est également possible que cette chenille ait traversé l’Atlantique <a href="http://theconversation.com/armyworms-are-wreaking-havoc-in-southern-africa-why-its-a-big-deal-72822">grâce aux vents</a>, les insectes adultes pouvant être portés par les vents sur de très grandes distances. L’exemple le plus connu de ce phénomène concerne le papillon monarque, <em>Danaus plexippus</em>, qui a de cette façon traversé l’Atlantique des Amériques aux <a href="http://www.ukbutterflies.co.uk/species.php?species=plexippus">îles britanniques</a>.</p>
<p>Quelle que soit la façon dont la chenille légionnaire d’automne a atteint l’Afrique, sa progression rapide à travers le continent témoigne de sa grande capacité de dispersion. Le vol endurant des papillons adultes leur permet de passer facilement les frontières. Aux États-Unis, on sait depuis longtemps que ces espèces s’appuient sur les courants-jets pour la <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/international-journal-of-tropical-insect-science/article/div-classtitlemigration-and-the-life-history-strategy-of-the-fall-armyworm-span-classitalicspodoptera-frugiperdaspan-in-the-western-hemispherea-hreffn01-ref-typefnadiv/EB7A3F758E7F1436A2FECDE39278CB61">dispersion des adultes</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=369&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=369&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=369&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=463&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=463&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=463&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Au stade adulte, la chenille légionnaire d’automne peut passer les frontières grâce à son vol.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/wildreturn/14935803778/in/photolist-d3SNDY-6QqoXh-oDMjaL-gpfrtU-d3Uao7-d79a3h-oKPU7f-gpfpE3-6RGevB-gpfSJq-go4894-d8cJF5-6Vgc4Q-4SbUPG-fBJVZ2-bjeW4X-gpfGi4-go3K4K-fBJWmZ-go3LYr-go3AtY-jVVicb-kTMHYr-AvMn4p-jVSM8P-B9KERi-AvMsjz-yH2GUF-kTPkJ1-jVT77P-jVUMTG-jVSRpz-y3EsBr-go3Vmj-gpfHcD-aidc9j-bjeY2a-bjeXbR-vXH3Hz-w8WXXh-xeeuGH-d4uCF3-8SX6Kb-fmApcZ-ofsohw-wHoGwS-wHoG23-umzPC6-65nRGS-65ixHi">Andy Reago & Chrissy McClarren/Flickr</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>La biologie de la chenille légionnaire</h2>
<p>Son nom scientifique, <em>Spodoptera frugiperda</em>, fait référence aux ailes à motifs gris des papillons adultes et aux ravages qu’elles occasionnent sur les fruits. Son nom courant renvoie au fait que les chenilles se déplacent en masse à l’automne.</p>
<p>Plusieurs caractéristiques de cet insecte en font une espèce particulièrement difficile à contrôler : en plus de leur impressionnante endurance de vol, les femelles adultes sont extrêmement fertiles, avec plus de 1 000 œufs pondus durant leur vie.</p>
<p>Ces chenilles peuvent coloniser plus de 100 plantes appartenant à <a href="http://dx.doi.org/10.1371%2Fjournal.pone.0165632">27 espèces différentes</a>. Si elles sont polyphages – c’est-à-dire capables de se nourrir d’une grande variété de plantes –, leurs hôtes préférés demeurent le maïs, le sorgho, le millet, le riz et la cane à sucre.</p>
<p>Une autre raison de la difficulté à les appréhender réside dans leur capacité à <a href="http://dx.doi.org/10.1371%2Fjournal.pone.0165632">résister aux pesticides</a>. On a ainsi essayé d’éradiquer cette chenille à l’aide de maïs BT, mais ces plantations sont toujours très controversées dans de <a href="http://dx.doi.org/10.1371%2Fjournal.pone.0165632">nombreux pays africains</a>.</p>
<p>On a imputé à la chenille légionnaire d’automne des dégâts ayant occasionné des pertes annuelles de 600 millions de dollars <a href="http://dx.doi.org/10.1371%2Fjournal.pone.0165632">pour le seul Brésil</a>. Ces chenilles représentent également une menace pour d’autres cultures essentielles : le niébé, la pomme de terre et le soja.</p>
<p>À l’heure qu’il est, nous ne disposons pas d’informations suffisantes au sujet de son impact sur l’ensemble des cultures africaines. Mais l’inquiétude grandit.</p>
<h2>Agir vite</h2>
<p>Compte tenu de la forte menace économique, gouvernements et organisations internationales ont mis en place des plans d’urgence pour lutter contre cette invasion.</p>
<p>Ces mesures comprennent notamment une surveillance s’appuyant sur des pièges à la phéromone pour évaluer la progression de l’invasion, des campagnes itinérantes pour informer le public et l’<a href="http://reliefweb.int/report/south-africa/pest-alert-detection-spodoptera-frugiperda-fall-army-worm-first-time-south-0">homologation d’urgence</a> de pesticides.</p>
<p>L’éradication de la chenille légionnaire d’automne va prendre du temps. À l’heure qu’il est, le contrôle de ce ravageur doit d’abord passer par une coopération internationale avec les pays d’Afrique touchés.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/73247/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Kerstin Kruger ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’Afrique australe est touchée par une invasion de ravageurs qui détruit ses cultures. Mobiles, très fécondes et résistantes aux pesticides, ces chenilles sont difficilement contrôlables.Kerstin Kruger, Associate Professor in Zoology & Entomology, University of PretoriaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.