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Zika – The Conversation
2022-11-17T17:26:53Z
tag:theconversation.com,2011:article/192881
2022-11-17T17:26:53Z
2022-11-17T17:26:53Z
Lutte contre les moustiques : améliorer l’efficacité des insecticides tout en réduisant leurs doses
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/495900/original/file-20221117-21-16mv6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C2%2C1597%2C1053&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Moustique Aedes aegypti, vecteur de la dengue.</span> <span class="attribution"><span class="source"> James Gathany, CDC/Wikipedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les maladies humaines provoquées par des parasites, des virus ou des bactéries transmis par des vecteurs (moustiques ou tiques par exemple) encore appelées maladies à transmission vectorielle représentent, au niveau mondial, environ 17 % des maladies infectieuses.</p>
<p>Certaines de ces maladies sont transmises par des insectes hématophages comme les moustiques. Elles peuvent infecter l’homme par l’intermédiaire de virus (arbovirus), c’est le cas de la dengue, du chikungunya et de Zika ou de parasites (plasmodium) pour le paludisme.</p>
<p>Dans ce cas, le <a href="https://cdn.who.int/media/docs/default-source/malaria/world-malaria-reports/world-malaria-report-2021-global-briefing-kit-fre.pdf">dernier rapport de l’OMS</a> fait état d’un nombre de décès dus au paludisme estimé à 627 000 en 2020. Ce qui correspond à 69 000 décès de plus que l’année précédente. Les régions d’Afrique sont les plus impactées avec 96 % de tous les décès dus au paludisme en 2020, les enfants de moins de 5 ans sont les principales victimes (80 % des décès).</p>
<p>De plus, <a href="https://www.who.int/fr/news/item/19-05-2021-who-issues-new-guidance-for-research-on-genetically-modified-mosquitoes-to-fight-malaria-and-other-vector-borne-diseases">l’incidence de la dengue</a>, par exemple, continue d’augmenter et la maladie touche désormais les populations de plus de 129 pays d’après la Dre Mwele Malecela, Directrice du Département de l’OMS de lutte contre les maladies tropicales négligées.</p>
<p>Au niveau national et dans plusieurs régions françaises, en particulier dans les territoires ultra-marins (Martinique, Guadeloupe, Guyane, Mayotte, La Réunion) et les collectivités d’outre-mer (Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Wallis et Futuna, le contrôle des populations moustiques vecteurs des genres <em>Aedes</em>, <em>Anopheles</em> et <em>Culex</em> pose un réel problème en matière de santé publique. De plus, des <a href="https://www.codes06.org/actualites/actualites-a-la-une/chikungunya-dengue-et-zika-donnees-de-la-surveillance-renforcee-en-france-metropolitaine-en-2022/">cas autochtones</a> de dengue en France métropolitaine ont été rapportés avec 9 foyers de transmission de dengue qui représentent 65 cas autochtones identifiés au 16 octobre 2022 en région Occitanie, Paca et Corse.</p>
<p>Enfin, l’émergence et la réémergence de ces maladies vectorielles transmises par les moustiques, dues aux changements climatiques et à la globalisation des échanges au niveau mondial renforcent l’urgence de développer de nouvelles stratégies essentielles pour gérer et contrôler ces populations de moustiques vecteurs d’agents pathogènes.</p>
<h2>Des moyens de lutte variés mais imparfaits</h2>
<p>Aujourd’hui, les objectifs de la lutte antivectorielle (LAV) sont de diminuer mais aussi de contrôler les populations de moustiques vecteurs. Parmi les moyens de lutte utilisés (biologiques, mécaniques et/ou génétiques), la lutte chimique par l’utilisation de biocides comme les insecticides,reste une stratégie largement utilisée.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-lachers-de-moustiques-modifies-pour-lutter-contre-la-dengue-le-chikungunya-ou-la-fievre-jaune-189573">Les lâchers de moustiques modifiés pour lutter contre la dengue, le chikungunya ou la fièvre jaune</a>
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<p>Cependant, le développement des mécanismes de résistance aux insecticides classiques par les moustiques et d’autres mécanismes physiologiques de compensation (surexpressions de récepteurs cibles spécifiques) qui limitent le coût biologique généré par le développement de ces résistances par ces mêmes moustiques modifie l’effet insecticide et rend les traitements de <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/BIOCIDES2020SA0029Ra.pdf">moins en moins efficaces</a>.</p>
<p>Dans ce contexte, pour limiter l’apparition de résistances chez les moustiques vecteurs d’agents pathogènes et diminuer la concentration d’insecticide utilisée afin d’éviter les effets secondaires sur les organismes non-cibles (comme des insectes auxiliaires ou des mammifères), nous avons développé au sein du laboratoire SiFCIR de l’Université d’Angers en collaboration avec l’IRD de Montpellier (F. Chandre) et la SATT-Ouest valorisation de Rennes, une stratégie innovante de lutte contre les moustiques sensibles et résistants aux insecticides.</p>
<h2>L’agent synergisant</h2>
<p>Cette stratégie est basée sur l’utilisation d’une association de deux composés de familles chimiques différentes ayant des modes d’action indépendants, à savoir un agent synergisant et un insecticide. L’agent synergisant, défini aujourd’hui dans le cadre du <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/BIOCIDES2020SA0029Ra.pdf">rapport d’expertise collective de l’Anses</a> (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), est un composé chimique de synthèse ou naturel qui ne possède pas lui-même de propriétés insecticides, mais qui, lorsqu’il est associé et appliqué avec un insecticide renforce considérablement son activité tout en réduisant les concentrations utilisées. L’avantage majeur de cette association qui agit sur des cibles différentes rompt le cycle de développement de résistance observé pour un insecticide.</p>
<p><a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2214574518300890?via%3Dihub">Cette stratégie</a>, permet d’intensifier l’effet d’un insecticide donné, qui s’il avait été utilisé seul n’aurait pas eu une action aussi importante.</p>
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<p>Dans ces conditions et parce que l’agent synergisant est utilisé à très faible concentration, il n’occasionne pas d’actions néfastes sur les organismes vivants et l’environnement. Il a pour effet d’activer des voies de signalisation intracellulaire impliquées dans l’augmentation de la sensibilité des cibles membranaires aux insecticides. Ces voies de signalisation, lorsqu’elles sont sollicitées, sont responsables d’un changement de conformation de la cible. Cet effet augmente l’action de l’insecticide tout en réduisant les concentrations utilisées et permet de contourner des phénomènes de résistance aux insecticides.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/495903/original/file-20221117-17-600cgk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Représentation schématique du principe de l’utilisation d’un agent synergisant associé à un insecticide. Ce « tandem » permet de changer la conformation de la cible à l’insecticide via des mécanismes intracellulaires dépendants du calcium. Dans ces conditions, l’effet insecticide est potentialisé à plus faible concentration (vert) par rapport au traitement classique sans agent synergisant (rouge)" src="https://images.theconversation.com/files/495903/original/file-20221117-17-600cgk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/495903/original/file-20221117-17-600cgk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/495903/original/file-20221117-17-600cgk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/495903/original/file-20221117-17-600cgk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/495903/original/file-20221117-17-600cgk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/495903/original/file-20221117-17-600cgk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/495903/original/file-20221117-17-600cgk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Ce nouveau concept basé sur l’utilisation d’un agent synergisant a fait l’objet de brevets. Il a retenu récemment l’intérêt d’industriels dans les domaines d’applications liés à l’utilisation des produits phytosanitaires. Cet intérêt s’inscrit dans le cadre des nouvelles procédures d’homologations concernant l’utilisation des biocides à plus faibles concentrations dans un contexte à la fois de santé environnementale mais aussi de santé publique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/192881/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bruno Lapied a reçu des financements de la SATT-Ouest Valorisation, de la Région Pays de la Loire et de la Direction Générale de l’Armement, l’Agence de l’Innovation de Défense (Ministère des Armées).
Il travaille en tant qu'expert pour l'Anses.
Le travail de recherche a été réalisé en collaboration avec C. Deshayes, E. Moreau, S. Perrier (laboratoire SiFCIR, Université d'Angers), F. Chandre (IRD de Montpellier), la SATT-Ouest Valorisation, le Vectopole Sud Network (Montpellier) du LabEx CeMEB (ANR-10-LABX-04-01) et W. Nowak, Institute of Physics, Faculty of Physics, Astronomy and Informatics, N. Copernicus University, Torun, Poland.</span></em></p>
Les moustiques vecteurs de pathogènes sont un problème de santé publique, une nouvelle approche basée sur la chimie permettrait de rendre les traitements plus efficaces.
Bruno Lapied, Professeur de Neurophysiologie, Université d'Angers
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/190571
2022-09-16T09:09:34Z
2022-09-16T09:09:34Z
Traque des moustiques invasifs : au cœur d’une enquête sanitaire inédite à Marseille
<p>Les espèces invasives, animales et végétales, sont devenues un problème majeur au niveau mondial – écologique, économique, mais aussi de santé publique.</p>
<p>Le moustique tigre (<em>Aedes albopictus</em>) en est un exemple malheureusement fameux : venu d’Asie du Sud-Est, il a gagné la majeure partie de la planète et se répand désormais dans le sud de la France. Il y propage des <a href="https://theconversation.com/virus-exotiques-en-france-un-sujet-plus-que-jamais-dactualite-186324">virus responsables de graves maladies comme la dengue, le Zika ou le chikungunya</a>.</p>
<p>D’où l’importance d’un suivi rigoureux de ce risque, notamment aux points d’entrée que constituent les grands ports et aéroports internationaux, pour bloquer à la source tout risque de dissémination de nouveaux vecteurs ou pathogènes…</p>
<p>Le réseau de surveillance national est assez fin pour parfois réussir à réagir à un unique insecte – c’est ce qui s’est passé il y a quatre ans. Nous venons de publier l’<a href="https://doi.org/10.1051/parasite/2022043">enquête menée au sujet d’un moustique dans la revue <em>Parasite</em></a>.</p>
<h2>Une enquête unique</h2>
<p>Tout débute en juillet 2018 par une observation surprenante dans le Grand port maritime de Marseille lors d’une opération de routine de l’EID-Méditerranée (<a href="https://www.eid-med.org/">Entente interdépartementale pour la démoustication du littoral méditerranéen</a>), chargée de la surveillance entomologique dans la lutte contre les espèces invasives…</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="Un piège installé en plein air dans une zone herbeuse à surveiller" src="https://images.theconversation.com/files/484299/original/file-20220913-12-q0dwnp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484299/original/file-20220913-12-q0dwnp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=753&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484299/original/file-20220913-12-q0dwnp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=753&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484299/original/file-20220913-12-q0dwnp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=753&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484299/original/file-20220913-12-q0dwnp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=946&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484299/original/file-20220913-12-q0dwnp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=946&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484299/original/file-20220913-12-q0dwnp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=946&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Différents types de pièges à moustiques sont dispersés dans les zones à surveiller. Attirés par exemple par de la chaleur, du gaz carbonique, etc., les moustiques sont ensuite aspirés et coincés dans une nasse.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Charles Jeannin/EID-Méditerranée</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>En pratique, sont installés dans ce secteur stratégique des pièges à moustiques de différents types – basés sur divers attractifs tels que la chaleur, le gaz carbonique, des odeurs mimant celles d’une proie à piquer, etc. Les moustiques attirés sont ensuite aspirés par un ventilateur et aboutissent dans un filet nasse où ils meurent rapidement.</p>
<p>Les pièges sont relevés toutes les deux ou quatre semaines et leurs contenus examinés.</p>
<p>Cette observation aurait pu passer inaperçue, puisqu’il s’agissait de celle d’un unique moustique mort, une femelle en l’occurrence, au milieu de nombreux autres moustiques pris au piège. Mais sa morphologie a d’emblée titillé les spécialistes : le spécimen, quoiqu’abîmé par son séjour dans le filet du piège, présentait en effet des taches argentées caractéristiques sur ses pattes et semblait être un <em>Aedes aegypti</em>.</p>
<p>Le problème est que cette espèce, largement distribuée dans les zones tropicales, ne devrait pas être présente à Marseille. La dernière fois qu’elle a été observée dans la capitale phocéenne, c’était le 22 novembre 1907 ; et là encore, un seul spécimen femelle avait été collecté à proximité du Vieux-Port, dans le Parc du Pharo.</p>
<p>Elle a été éliminée d’Europe et du pourtour méditerranéen dans les années 1950 en utilisant largement des insecticides chimiques tels que le DDT. La faible occurrence de ces observations suggère un faible flux invasif d’<em>Aedes aegypti</em> par bateau, de port à port – ce qui est rassurant, nous verrons pourquoi.</p>
<p>Or la confirmation de la préidentification de l’espèce est vite arrivée grâce à des analyses de biologie moléculaire de type « code-barres » (portant sur l’ADN extrait de l’abdomen du moustique) réalisées par les spécialistes de l’unité Mivegec (Université de Montpellier, CNRS, IRD, Montpellier).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Trois vues du moustique récupéré dans le piège, en mauvais état" src="https://images.theconversation.com/files/484303/original/file-20220913-16-qzgn5o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484303/original/file-20220913-16-qzgn5o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=174&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484303/original/file-20220913-16-qzgn5o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=174&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484303/original/file-20220913-16-qzgn5o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=174&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484303/original/file-20220913-16-qzgn5o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=218&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484303/original/file-20220913-16-qzgn5o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=218&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484303/original/file-20220913-16-qzgn5o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=218&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’identification du spécimen découvert dans le piège, en mauvais état, a été complexe : abîmé, il a nécessité une analyse génétique en plus de l’étude morphologique (<em>Ae. aegypti</em> se distingue normalement par les taches argentées sur ses pattes et par un dessin en lyre, ici absent, sur le dos du thorax).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Vincent Robert/IRD</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<h2><em>Ae. aegypti</em>, le vecteur de virus dangereux</h2>
<p><em>Aedes aegypti</em> était donc de retour, et il est bien connu pour être un redoutable vecteur pour de nombreux virus hautement pathogènes tels que les virus de la fièvre jaune, dengue, chikungunya, Zika, etc. L’installation de populations pérennes d’<em>Aedes aegypti</em> dans un grand port méditerranéen est donc redoutée pour les risques sanitaires associés – outre le grave problème de nuisance à cause des piqûres.</p>
<p>Restait à savoir s’il s’agissait ici d’un retour avorté, ou du début d’une nouvelle infestation.</p>
<p>Le cas ne serait pas inédit. Depuis quelques années, le sud de la France doit déjà faire face au moustique tigre <em>Aedes albopictus</em> qui, lui, a parfaitement réussi son introduction et son implantation sur la quasi-totalité du pourtour méditerranéen. Cette dernière espèce est désormais régulièrement à l’origine de cas de maladies considérées hier comme « exotiques » en France avec maintenant des cas autochtones – c’est-à-dire contractés localement. À ce jour, <a href="https://www.paca.ars.sante.fr/point-de-situation-cas-autochtones-de-dengue-dans-les-alpes-maritimes">21 cas autochtones de dengue ont déjà été comptabilisés</a> en région PACA pour la seule année 2022.</p>
<p>À ce stade, des enquêtes entomologiques complémentaires sont diligentées par l’EID-Méditerranée dans le port de Marseille et alentour pour savoir si ce moustique provient d’une petite population qui se maintiendrait à Marseille, suffisamment discrètement pour passer sous le seuil de détection de la surveillance.</p>
<p>Cette question est importante car y répondre positivement déclencherait aussitôt d’importantes et coûteuses opérations de lutte anti-vectorielle afin de l’éliminer.</p>
<p>La réponse est négative. Le surcroît d’échantillonnage réalisé au cours de l’été 2018 (~5 600 moustiques collectés) n’a pas permis de collecter un seul autre spécimen de cette espèce : de quoi conclure que le moustique identifié dans le port a été introduit à Marseille, et qu’il n’est donc pas nécessaire de mettre en place des actions exceptionnelles de lutte anti-vectorielle.</p>
<p>L’enquête aurait pu s’arrêter là, sur cette issue heureuse pour nous, avec le piégeage de ce dangereux moustique vecteur et l’échec de son installation à Marseille…</p>
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<h2>Une recherche pour en inspirer d’autres</h2>
<p>Toutefois, pour aller plus avant dans la connaissance des routes suivies par les individus pionniers des espèces envahissantes, des investigations complémentaires ont été menées sur les restes du moustique, pour retrouver sa provenance puis son itinéraire.</p>
<p>Des collaborateurs sollicités à l’Université de Yale (New Haven, Connecticut, USA) ont extrait de l’ADN de ce qu’il restait du moustique et l’ont testé sur une puce (<em>chip</em>) analysant en une fois quelque 23 000 marqueurs génétiques (de type SNP <em>Single Nucleotid Polymorphism</em>, des variations au niveau d’une seule lettre de l’ADN) répartis dans tout le génome. En reportant ces caractéristiques dans une base mondiale de données génétiques, ils ont établi que ce moustique appartient à une population d’Afrique tropicale, Cameroun (probablement) ou Burkina Faso (moins probablement, d’autant que ce pays est enclavé, sans ouverture maritime).</p>
<p>L’EID-Méditerranée a poursuivi sa recherche pour tenter d’identifier le navire par lequel le moustique est arrivé.</p>
<p>La première étape fut la consultation du registre des bateaux en provenance d’Afrique Centrale ayant accosté à Marseille dans les semaines qui ont précédé la capture du moustique <em>Aedes aegypti</em>. Le croisement de ces informations avec la date de collecte du moustique dans le piège a suggéré que le spécimen avait voyagé dans un navire de commerce identifié, un transporteur de véhicules reliant Douala (Cameroun) à Marseille. Ce navire avait quitté Douala le 25 juin 2018 pour arriver à Marseille le 15 juillet, 20 jours plus tard, après avoir parcouru près de 6000 km.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Vue du Grand port maritime de Marseille, zone est, avec les bateaux et conteneurs" src="https://images.theconversation.com/files/484309/original/file-20220913-18-nmbi3y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484309/original/file-20220913-18-nmbi3y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484309/original/file-20220913-18-nmbi3y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484309/original/file-20220913-18-nmbi3y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484309/original/file-20220913-18-nmbi3y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484309/original/file-20220913-18-nmbi3y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484309/original/file-20220913-18-nmbi3y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les grands ports internationaux reçoivent des marchandises du monde entier. Peuvent s’y trouver des vecteurs d’agents de maladies, tels les moustiques. Ce qui illustre le côté néfaste de la mondialisation des transports (Grand port maritime de Marseille, zone est, où a été menée l’enquête relative à cet article).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Gildas Le Cunff de Kagnac/Mer et Marine</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La distance entre le dock et le piège à moustique était de 350 m, une distance que le moustique a aisément pu franchir en volant.</p>
<p>L’interception d’un individu introduit relevant d’une espèce invasive est un évènement exceptionnel, particulièrement bien documenté ici. À notre connaissance, c’est la <strong>première fois qu’un tel cheminement est retracé si précisément</strong>, au point d’identifier par quel navire, par quelle route, et à quelles dates un spécimen a été embarqué d’un continent et débarqué sur un autre.</p>
<p>Mais cet exemple illustre surtout un effet néfaste de la mondialisation des transports qui facilite la dissémination de vecteurs de pathogènes d’un environnement à un autre.</p>
<p>Il est sûr que des moustiques voyagent en permanence comme passagers clandestins dans tous les types de transport (maritime, aérien, routier), mais il est difficile d’avoir une estimation de la fréquence de tels évènements, au moins sur longue distance. D’où l’importance du développement des moyens de surveillance tels ceux déployés ici, et de leur permettre de fonctionner dans de bonnes conditions pour le bénéfice de tous.</p>
<hr>
<p><em>Charles Jeannin, entomologiste médical et chargé de projets à l’Entente interdépartementale pour la démoustication du littoral méditerranéen (Montpellier) a participé à la conception et à la rédaction de cet article.</em></p>
<p><em><strong>Référence de l’article scientifique :</strong>
Ch. Jeannin, Y. Perrin, S. Cornelie, A. Gloria-Soria, J.-D. Gauchet, V. Robert – <a href="https://doi.org/10.1051/parasite/2022043">An alien in Marseille : investigations on a single Aedes aegypti mosquito likely introduced by a merchant ship from tropical Africa to Europe</a>. Parasite, 2022, vol 29.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190571/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Vincent Robert ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
L’arrivée du moustique tigre a montré le danger des espèces invasives. Comment les traquer pour empêcher leur installation ? Réponse avec cette enquête unique en son genre sur un moustique A. aegypti.
Vincent Robert, Directeur de recherche, Institut de recherche pour le développement (IRD)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/189573
2022-09-07T18:02:06Z
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Les lâchers de moustiques modifiés pour lutter contre la dengue, le chikungunya ou la fièvre jaune
<p>Les maladies à transmission vectorielle, dont la plupart sont transmises par les moustiques (paludisme, dengue, Zika, chikungunya…), sont responsables de plus de 17 % des maladies infectieuses humaines et provoquent plus <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/vector-borne-diseases">d’un million de décès chaque année dans le monde</a>.</p>
<p>Malgré les progrès réalisés dans la prévention de ces maladies, on ne dispose ni de traitement médical efficace ni de vaccins adaptés. La lutte antivectorielle (LAV) reste donc une priorité.</p>
<p>Parallèlement à la recherche de traitements médicaux et à l’amélioration des moyens classiques de LAV (insecticides, <a href="https://theconversation.com/les-pieges-a-moustiques-sont-ils-vraiment-efficaces-182239">pièges</a>…), de nouveaux modes d’action ont émergé depuis une quinzaine d’années. Parmi les options possibles se trouvent les moustiques génétiquement modifiés et d’autres types de moustiques modifiés, rendus stériles par irradiation ou par la technique de l’insecte incompatible (TII). Ces techniques visent à réduire une population de moustiques par des lâchers récurrents et massifs de moustiques stérilisants.</p>
<p>Quelles sont les <a href="http://www.hautconseildesbiotechnologies.fr/sites/www.hautconseildesbiotechnologies.fr/files/file_fields/2020/01/24/aviscshcbmoustiques170607rev180228erratum191007.pdf">différentes techniques</a> pour obtenir des moustiques modifiés ? Où en sont les essais en cours en France ? Et quels sont les enjeux environnementaux et sanitaires liés à ces lâchers ?</p>
<h2>Les moustiques génétiquement modifiés</h2>
<p>À ce jour, une seule technique basée sur des moustiques génétiquement modifiés est développée à un niveau opérationnel, il s’agit de la technique RIDL (<em>release of insects carrying a dominant lethal gene</em>, ou lâcher d’insectes porteurs d’un gène de létalité dominant). Des moustiques mâles qui, contrairement aux femelles, ne piquent pas, sont génétiquement modifiés. Leur descendance meurt avant d’atteindre l’âge adulte.</p>
<p>Cette technique a reçu une <a href="https://beyondpesticides.org/dailynewsblog/2022/03/epa-permits-experimental-release-of-2-5-billion-genetically-engineered-mosquitoes-in-california-and-florida/">autorisation</a> de l’Agence américaine de protection de l’environnement. Au printemps dernier, la société privée Oxitec a débuté un essai en Floride consistant à disséminer des œufs de moustiques <em>Aedes aegypti</em> (connu pour être vecteur de nombreux virus tels que ceux de la dengue, de la fièvre jaune, du chikungunya et du Zika) génétiquement modifiés dans la nature pendant trois mois.</p>
<p>Il s’agit de la première étude relâchant des moustiques transgéniques aux États-Unis, ce qui n’a pas été sans soulever <a href="https://www.lefigaro.fr/sciences/en-floride-les-moustiques-genetiquement-modifies-font-polemique-20210505">quelques inquiétudes</a> chez certains habitants. Reste à savoir quels seront les résultats de cet essai et s’ils seront plus concluants que le précédent réalisé entre 2013 et 2015 au Brésil, qui a conduit à la <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-019-49660-6">diffusion de gènes</a> de la souche mutante dans les populations naturelles d’<em>Aedes aegytpi</em>.</p>
<p>D’autres techniques de moustiques génétiquement modifiés en sont à un stade plus précoce de recherche et de développement et reposent sur la technique du forçage génétique, qui vise à propager un caractère génétique dans une population naturelle, soit pour rendre les moustiques incapables de transmettre des agents pathogènes, soit pour éliminer cette population par propagation d’un gène de stérilité femelle.</p>
<h2>La technique de l’insecte stérile (TIS)</h2>
<p>C’est une méthode de lutte contre les moustiques qui consiste à élever des moustiques mâles, à les stériliser par irradiation aux rayons X et à les lâcher sur le terrain où ils vont s’accoupler avec les femelles sauvages. Ces dernières ne s’accouplant qu’une seule fois, elles n’auront pas de descendance (voir Figure 1).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/482482/original/file-20220902-21-z6ue34.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/482482/original/file-20220902-21-z6ue34.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1003&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/482482/original/file-20220902-21-z6ue34.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1003&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/482482/original/file-20220902-21-z6ue34.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1003&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/482482/original/file-20220902-21-z6ue34.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1261&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/482482/original/file-20220902-21-z6ue34.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1261&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/482482/original/file-20220902-21-z6ue34.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1261&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Figure 1 : Technique de l’insecte stérile.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Collectif TIS</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La TIS est un outil de gestion des populations d’insectes largement diffusés dans de nombreux pays, notamment en agriculture. Son utilisation en est à ses prémices en France.</p>
<p>Depuis 2009, l’IRD (Institut de recherche pour le développement) conduit des recherches visant à étudier la faisabilité de la TIS pour lutter contre le moustique tigre (<em>Aedes albopictus</em>), responsable de plus de 30 000 cas de dengue à La Réunion depuis 2018. Des <a href="https://www.reunion.gouv.fr/autorisation-du-1er-lacher-de-moustiques-steriles-a5365.html">lâchers hebdomadaires</a> de mâles stériles ont débuté dans une zone pilote en 2021. Ces lâchers sont suivis par des indicateurs entomologiques, environnementaux et socio-économiques permettant d’évaluer l’efficacité et l’impact des interventions par la TIS.</p>
<p>D’autres essais pilotes sont à l’étude en France métropolitaine, dans la région montpelliéraine.</p>
<h2>Les techniques utilisant la bactérie Wolbachia</h2>
<p>Une autre technique, dite de l’insecte incompatible (TII) repose sur l’utilisation de la bactérie Wolbachia. Cette bactérie infecte naturellement 60 % des arthropodes et est transmise de la mère aux descendants via les cellules sexuelles femelles. Si des moustiques mâles porteurs de Wolbachia sont libérés dans l’environnement et qu’ils s’accouplent avec des femelles n’ayant pas la bactérie ou ayant une bactérie différente, les œufs n’écloront pas. Relâcher en grande quantité des mâles porteurs de la bactérie Wolbachia permet ainsi de réduire très fortement des populations d’<em>Aedes aegypti</em> (stratégie de « suppression » sur la Figure 2).</p>
<p>Par ailleurs, des scientifiques ont observé que la présence de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2848556/">certaines Wolbachia</a> empêchait la transmission des virus de la dengue, de Zika ou du chikungunya. Une seconde stratégie consiste à relâcher en masse des femelles porteuses de Wolbachia. Celles-ci vont pondre des œufs et transmettre la bactérie à toute leur descendance, peu importe que le mâle soit lui-même porteur ou non (stratégie de « remplacement » sur la Figure 2). Les femelles porteuses de Wolbachia ont un avantage sélectif sur celles non infectées, car leurs descendants sont viables avec les deux types de mâles, contrairement aux femelles sans Wolbachia, qui n’auront une descendance qu’avec les mâles non infectés.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/482484/original/file-20220902-21-e0i2ua.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/482484/original/file-20220902-21-e0i2ua.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=256&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/482484/original/file-20220902-21-e0i2ua.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=256&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/482484/original/file-20220902-21-e0i2ua.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=256&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/482484/original/file-20220902-21-e0i2ua.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=322&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/482484/original/file-20220902-21-e0i2ua.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=322&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/482484/original/file-20220902-21-e0i2ua.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=322&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Figure 2 : Technique de l’Insecte Incompatible (TII).</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Fite, Anses</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>A Nouméa, en Nouvelle-Calédonie, des moustiques porteurs de Wolbachia ont été lâchés en 2019. L’essai est toujours en cours et depuis début 2022, un <a href="https://la1ere.francetvinfo.fr/nouvellecaledonie/province-sud/les-moustiques-porteurs-de-la-wolbachia-s-imposent-a-noumea-a-dumbea-et-au-mont-dore-1289520.html">seul cas de dengue</a> a été confirmé, contre plus de 1 500 par an au lancement du programme.</p>
<h2>Questions soulevées par les lâchers de moustiques modifiés</h2>
<p>Les lâchers de moustiques modifiés permettent de limiter l’usage des insecticides, qui constituent encore l’outil de lutte principal en cas d’épidémie. Or, on a atteint les limites de leur utilisation : d’une part parce que ces molécules toxiques pour les autres insectes finissent dans l’environnement et les chaînes alimentaires, d’autre part parce que les moustiques développent rapidement des résistances. Les techniques mentionnées dans l’article sont spécifiques des espèces de moustiques relâchées et n’ont pas d’impact sur d’autres espèces non cibles.</p>
<p>Les méthodes basées sur la TIS, la TII ou le RIDL d’Oxitec, nécessitent des infrastructures lourdes sur le long terme pour l’élevage de masse des mâles qui sont relâchés régulièrement et en continu sur le terrain (environ quelques dizaines ou centaines de milliers par semaine). Elles présentent toutefois l’avantage d’être ajustables en fonction des données de surveillance entomologique.</p>
<p>D’autres techniques comme celles basées sur le forçage génétique ou la stratégie de remplacement avec la bactérie Wolbachia nécessitent moins de ressources pour la production de moustiques, mais présentent l’inconvénient, du fait du caractère héréditaire de la modification induite (transgène, bactérie), de modifier irréversiblement les populations de moustiques (<a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/VECTEURS2020SA0044.pdf">voir avis de l’Anses sur le forçage génétique</a>) et d’être moins contrôlables, soulevant la question de leur transfert potentiel à d’autres espèces.</p>
<p>Par ailleurs, ces techniques sont d’autant plus efficaces que la densité de moustiques est faible (Figure 3). Si les moustiques modifiés devaient s’inscrire dans une perspective de prévention ou de contrôle, ce serait sur le long terme après des lâchers répétés sur plusieurs semaines et non comme un outil d’urgence en cas d’épidémie, situation dans laquelle les lâchers de moustiques se révèleraient à eux seuls inefficaces.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/482485/original/file-20220902-19-ixmx6f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/482485/original/file-20220902-19-ixmx6f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/482485/original/file-20220902-19-ixmx6f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/482485/original/file-20220902-19-ixmx6f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/482485/original/file-20220902-19-ixmx6f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/482485/original/file-20220902-19-ixmx6f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/482485/original/file-20220902-19-ixmx6f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Figure 3 : Optimisation de l’efficacité d’une intervention de lutte antivectorielle par la combinaison de la technique de l’insecte stérile avec des techniques classiques de lutte.</span>
<span class="attribution"><span class="source">D’après Feldmann and Hendrichs, 2001</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>La Lutte anti vectorielle exige de s’appuyer sur une palette de solutions variées</h2>
<p>Au final, la LAV exige de s’appuyer sur une palette de solutions variées combinant différentes approches complémentaires – y compris les mesures qui impliquent activement les populations – et sans bâtir une stratégie de lutte qui ne reposerait que sur l’une d’entre elles.</p>
<p>Aussi, il est nécessaire que les pouvoirs publics analysent l’ensemble des options de LAV, y compris celles qui font appel à des solutions biotechnologiques, pour réduire la résistance des populations de moustiques aux insecticides, minimiser l’utilisation de molécules délétères pour l’environnement, contrôler l’aire de répartition des moustiques vecteurs de pathogènes et prévenir l’émergence de nouveaux virus dans des territoires pour l’instant indemnes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/189573/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>
Les maladies transmises par les moustiques causent un million de décès chaque année dans le monde.
Johanna Fite, Chef de projets scientifiques, Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)
Fabrice CHANDRE, Directeur de Recherche en Entomologie médicale, Institut de recherche pour le développement (IRD)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/186324
2022-08-21T16:20:26Z
2022-08-21T16:20:26Z
Virus « exotiques » en France : un sujet plus que jamais d'actualité
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/480163/original/file-20220820-3756-j9djhi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">shutterstock</span> </figcaption></figure><p>Virus <a href="https://theconversation.com/en-france-les-moustiques-transmettent-aussi-le-virus-usutu-97944">Usutu</a>, virus Zika, virus du chikungunya ou de la dengue… Au cours des dernières années, ces noms aux consonances exotiques se sont fait une place dans les médias français.</p>
<p>Et pour cause : responsables de maladies qui ne sévissaient jusqu’à présent que dans des régions éloignées, ces virus sont en train de s’extraire des régions où ils ont longtemps été endémiques pour partir à la conquête de notre planète. La France n’est pas à l’abri de cette menace, ni dans les outre-mer ni dans les régions métropolitaines, comme en témoignent les implantations en cours de certains de ces virus autour de l’arc méditerranéen.</p>
<p>Alors que l’année 2022 a vu <a href="https://theconversation.com/virus-de-la-dengue-en-france-metropolitaine-a-quoi-faut-il-sattendre-cette-annee-209339">exploser en France métropolitaine les infections de dengue « autochtones »</a> (autrement dit contractée en métropole), et que 8 cas d’infection par le virus du Nil occidental - elles aussi autochtones - <a href="https://www.sudouest.fr/sante/virus-du-nil-occidental-un-premier-cas-d-infection-en-gironde-d-autres-cas-en-cours-d-investigation-16140799.php">ont été détectés pour la première fois en Nouvelle-Aquitaine</a> (ainsi que 3 cas d’infection par le virus Usutu), où en est la situation ? Quels sont les virus à surveiller en priorité ? </p>
<p>Voici ce que les travaux des réseaux de surveillance et des laboratoires de recherche qui étudient ces virus nous ont appris ces dernières années.</p>
<h2>Des maladies transmises de l’animal à l’humain</h2>
<p>Bon nombre de maladies infectieuses émergentes sont transmises à l’être humain par l’intermédiaire d’un animal « vecteur », souvent un arthropode suceur de sang tels que les moustiques, les moucherons culicoides, les phlébotomes ou encore les <a href="https://theconversation.com/au-dela-de-lyme-les-autres-maladies-transmises-par-les-tiques-116313">tiques</a>.</p>
<p>Dans un tel cas, si la maladie est causée par un virus, on parle d’« arbovirose », et le virus impliqué est décrit comme un « arbovirus » (de l’anglais « arthropod-borne virus », « virus transmis par les arthropodes »).</p>
<p>Dans la <a href="https://www.who.int/activities/prioritizing-diseases-for-research-and-development-in-emergency-contexts">liste des maladies prioritaires</a> que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) établit chaque année depuis 2015, ne figurent que des maladies virales, parmi lesquelles trois arboviroses (sur neuf maladies recensées) : maladie à virus Zika, fièvre hémorragique de Crimée-Congo et fièvre de la vallée du Rift.</p>
<p>Un point important à souligner concernant les arboviroses est qu’il s’agit pour la plupart de zoonoses. Autrement dit, elles proviennent initialement d’animaux domestiques ou sauvages porteurs de l’agent de la maladie. Celui-ci est transmis dans un second temps à l’être humain, lorsque ce dernier est piqué par un arthropode vecteur qui a auparavant prélevé le sang d’un animal infecté. Ce qui se passe ensuite dépend notamment de l’arbovirus transmis.</p>
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<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-les-moustiques-nous-piquent-et-les-consequences-186325">Comment les moustiques nous piquent (et les conséquences)</a>
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<p>Certains peuvent passer d’un être humain à l’autre, toujours par l’intermédiaire d’un vecteur. D’autres pourront aussi se propager en parallèle grâce à d’autres modes de transmission (le virus Zika peut être transmis par les moustiques et par voie sexuelle, par exemple). Il arrive aussi que certains arbovirus ne se transmettent pas entre êtres humains : on dit alors que l’humain est une « impasse épidémiologique ». C’est le cas par exemple du virus West Nile ou du virus de la vallée du Rift.</p>
<p>Parmi les principaux acteurs de la propagation des arboviroses figurent les moustiques, en particulier le moustique tigre (<em>Aedes albopictus</em>). Parti récemment à l’assaut de notre territoire, il s’y est rapidement installé. Or, à lui seul, il est en mesure de propager plusieurs virus « exotiques ».</p>
<h2>Le moustique tigre poursuit sa fulgurante expansion</h2>
<p>Catalysée par le commerce international, l’expansion du <a href="https://www.anses.fr/fr/content/le-moustique-tigre">moustique tigre (<em>Aedes albopictus</em>)</a>, vecteur de plusieurs virus « exotiques » s’est avérée très rapide.</p>
<p>Originaire d’Asie, ce petit moustique noir au corps et aux pattes rayés de blanc à été détecté pour la première fois dans le sud de la France en 2004, à Menton. Moins de vingt ans plus tard, <a href="https://solidarites-sante.gouv.fr/sante-et-environnement/risques-microbiologiques-physiques-et-chimiques/especes-nuisibles-et-parasites/article/cartes-de-presence-du-moustique-tigre-aedes-albopictus-en-france-metropolitaine">il est présent dans 71 départements métropolitains</a> sur 96 (contre 64 en 2021 et <a href="https://www.pasteur.fr/fr/journal-recherche/actualites/moustique-tigre-france-58-departements-vigilance-rouge">58 en 2020</a>). Dans les années à venir, l’extension de son territoire sera inexorable.</p>
<p>En moins de deux décennies, le moustique tigre a envahi la majeure partie du territoire français métropolitain. <a href="https://solidarites-sante.gouv.fr/sante-et-environnement/risques-microbiologiques-physiques-et-chimiques/especes-nuisibles-et-parasites/article/cartes-de-presence-du-moustique-tigre-aedes-albopictus-en-france-metropolitaine">Ministère des Solidarités et de la Santé – Direction générale de la Santé</a></p>
<p>Une des particularités de ce moustique est sa capacité à transmettre divers virus responsables de maladies, dont les plus connus sont probablement le virus Zika, celui du chikungunya, ou encore celui de la dengue.</p>
<h2>La dengue : une tendance à la hausse des cas autochtones</h2>
<p>Le virus de la dengue semble avoir trouvé dans les régions du sud de notre pays un terrain de jeu propice. En effet, si le nombre de cas de dengue reste limité en France métropolitaine, estimé à moins d’une trentaine ces dernières années, la tendance à la hausse se confirme néanmoins.</p>
<p>En témoigne la multiplication des cas dits « autochtones », ce qui signifie que la maladie a été contractée sur notre territoire, contrairement aux infections importées, qui se déclarent en France mais ont été contractés à l’étranger, lors d’un voyage. Les départements du sud et du sud-est de la France tels que l’Hérault, le Gard, le Var ou les Alpes-Maritimes sont les plus exposés à la maladie notamment en raison de la conjonction d’une forte densité de moustiques tigres et de zones fortement urbanisées.</p>
<p>L’année 2022 a été exceptionnelle en termes de circulation de la dengue dans l’hexagone : 66 cas ont été identifiés au cours de neuf épisodes de transmission autochtone ayant touché 6 départements.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Photo du moustique tigre Aedes albopictus" src="https://images.theconversation.com/files/480184/original/file-20220821-16-sl08bo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/480184/original/file-20220821-16-sl08bo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/480184/original/file-20220821-16-sl08bo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/480184/original/file-20220821-16-sl08bo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/480184/original/file-20220821-16-sl08bo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/480184/original/file-20220821-16-sl08bo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/480184/original/file-20220821-16-sl08bo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le moustique tigre Aedes albopictus est reconnaissable aux bandes blanches qui strient ses pattes. Il est notamment le vecteur des virus de la dengue et du chikungunya ainsi que du virus Zika.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Aedes_Albopictus.jpg">Wikimedia Commons / Centers for Disease Control and Prevention</a></span>
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</figure>
<p>Mais ce nombre de cas est certainement largement sous-estimé, car la dengue est largement asymptomatique (dans 50 % à 90 % des cas selon les épidémies). Par ailleurs, chez les personnes symptomatiques, les symptômes de la maladie (fièvre, maux de tête, douleurs musculaires…) peuvent facilement être confondus avec ceux de la grippe ou plus récemment du Covid.</p>
<p>Si l’affection provoquée par le virus de la dengue est le plus souvent bénigne, celui-ci peut néanmoins entraîner une forme potentiellement mortelle, dans environ 1 % des cas. Cette forme de dengue est dite « hémorragique », car s’accompagnant de saignements au niveau de multiples organes. Par ailleurs, certaines atteintes neurologiques ont également été rapportées.</p>
<h2>Le chikungunya se fait discret</h2>
<p>Identifié pour la première fois en Tanzanie en 1952, le virus du chikungunya a circulé pendant plusieurs décennies en Afrique, en Inde et en Asie, ainsi que dans l’océan Indien. C’est d’ailleurs l’épidémie qui a frappé la Réunion, l’Île Maurice, Mayotte et les Seychelles en 2005 qui a participé à le faire connaître du public français.</p>
<p>La <a href="https://www.inserm.fr/dossier/chikungunya-maladie-homme-courbe/">« maladie de l’homme courbé »</a> (traduction possible de « chikungunya », un terme issu du Makondé, langue bantoue parlée en Tanzanie) se caractérise notamment par l’apparition de fièvre et de douleurs articulaires sévères. Très invalidantes, ces dernières touchent souvent les mains, les poignets, les chevilles ou les pieds. <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/chikungunya">Des maux de tête et des douleurs musculaires, ainsi que des saignements des gencives ou du nez ont été fréquemment décrits</a>. La convalescence peut durer plusieurs semaines, et les douleurs peuvent persister parfois pendant plusieurs années.</p>
<p>Les deux premiers cas autochtones de chikungunya ont été détectés en France en 2010, dans le Var. Depuis, une trentaine de cas autochtones ont été répertoriés dont deux foyers importants, un dans la ville de Montpellier en 2014 (11 cas confirmés et 1 cas probable) et le second dans le var en 2017 avec 17 cas répertoriés.</p>
<p>Le virus du chikungunya se fait discret en France ces dernières années, avec <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-a-transmission-vectorielle/chikungunya/articles/donnees-en-france-metropolitaine/chikungunya-dengue-et-zika-donnees-de-la-surveillance-renforcee-en-france-metropolitaine-en-2021">3 cas importés en 2021</a> et <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-a-transmission-vectorielle/chikungunya/articles/donnees-en-france-metropolitaine/chikungunya-dengue-et-zika-donnees-de-la-surveillance-renforcee-en-france-metropolitaine-en-2022">5 pour l’année en cours</a>, selon le décompte de Santé publique France. Cependant, ce virus reste très surveillé, notamment parce que sa dissémination par le moustique tigre dans les régions européennes tempérées n’est pas à exclure.</p>
<h2>Dans l’attente d’une réémergence du virus Zika</h2>
<p>Le <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/zika">virus Zika</a> avait quant à lui a défrayé la chronique en 2015-2016. Il avait été à l’origine d’une épidémie de très grande ampleur, principalement en Amérique latine. Plus d’un million de personnes avaient été infectées. L’atteinte la plus grave associée à ce virus est le développement d’une microcéphalie (réduction du périmètre crânien du fœtus) chez les femmes enceintes infectées.</p>
<p>En France <a href="https://theconversation.com/virus-zika-premiers-cas-de-transmission-en-france-metropolitaine-par-le-moustique-tigre-125675">deux cas autochtones avaient été identifiés en 2019</a>, dans le département du Var, sans que les chaînes de transmission, notamment vectorielles, n’aient pu être clairement établies.</p>
<p>Figurant toujours sur la liste des 10 maladies les plus à risque établie par l’Organisation mondiale de la santé, ce virus a cependant mystérieusement quasiment disparu des radars depuis quelques années. Son retour sur le devant de la scène virale est toutefois très loin d’être exclu : il a notamment fait à nouveau parler de lui très récemment en Thaïlande, et <a href="https://promedmail.org/promed-post/?id=8704233">5 voyageurs ont développé la maladie</a> en Allemagne, Royaume-Uni et Israël, après avoir visité ce pays d’Asie du Sud-Est.</p>
<p>Même si les mécanismes favorisant l’émergence du virus Zika sont peu connus, des études de séroprévalence (présence d’anticorps dans le sang) montrent qu’il circule toujours activement dans certains territoires (<a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/35889987/">notamment sur le continent africain</a>).</p>
<p>Sa surveillance nécessite une vigilance particulière de la communauté scientifique, afin de se préparer à une réapparition potentielle.</p>
<h2>Le bon vieux Culex n’est pas en reste</h2>
<p>Un de nos moustiques « traditionnels », <em>Culex pipiens</em>, présent sur l’ensemble du territoire français, est également capable de nous transmettre des virus « exotiques ». C’est notamment le cas des virus <a href="https://theconversation.com/virus-west-nile-et-usutu-vont-ils-senraciner-en-france-114488">West Nile (virus du Nil occidental) et Usutu</a>, deux virus très proches pouvant occasionnellement engendrer des atteintes neurologiques sévères telles qu’encéphalites (inflammation du cerveau), méningites (inflammation des méninges) ou encore méningo-encéphalites (inflammation des méninges et du cerveau) chez l’humain.</p>
<p>Une étude menée par notre équipe et publiée en 2022, en collaboration avec l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), a montré que ces deux virus <a href="https://agritrop.cirad.fr/601300/7/601300.pdf">sont en train de s’installer durablement sur certaines zones de notre territoire</a>, plus particulièrement dans la grande région camarguaise.</p>
<p>On les retrouve en effet de façon régulière non seulement dans des échantillons de sang humain, mais aussi chez des animaux tels que les oiseaux (leurs réservoirs naturels), les chiens, les chevaux et les moustiques.</p>
<p>Jusqu’à présent, leur impact sur la santé humaine demeure faible : deux infections par le virus Usutu ont été identifiées en France, à Montpellier en 2016 et dans les Landes en 2022, à quoi s’ajoutent trois nouveaux cas identifiés en 2023 en Nouvelle-Aquitaine, tandis qu’une trentaine de cas de West Nile ont été dénombrés sur les cinq dernières années.</p>
<p>Il est néanmoins important de surveiller la dynamique de propagation de ces virus, car plusieurs lignées possédant des degrés de virulence plus ou moins importants circulent actuellement, ce qui incite à la prudence. D’autant plus qu’une épidémie importante a frappé l’Europe en 2018, <a href="https://www.ecdc.europa.eu/en/news-events/epidemiological-update-west-nile-virus-transmission-season-europe-2018">avec plus de 2 000 cas identifiés et plus de 180 décès rapportés</a>. En 2022 le sud de l’Europe a été à nouveau touché : l’Italie a notamment répertorié 723 cas et 51 décès associés.</p>
<p>En France, fin août 2023, huit cas d’infection par le virus West Nile ont été détectés en Nouvelle-Aquitaine, ce qui témoigne d’une tendance à la propagation de ce virus plus au nord de l’Hexagone. En effet, les précédents cas d’infection de ce virus avaient été détectés uniquement sur le pourtour méditerranéen (en régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie).</p>
<h2>Activités humaines et émergences</h2>
<p>Le passage d’une maladie de l’animal à l’être humain n’est pas forcément synonyme de flambée épidémique, ni d’épidémie à large échelle, de pandémie ou d’implantation dans de nouveaux territoires. Pour que cela se produise, de nombreux événements doivent entrer en conjonction.</p>
<p>Le problème est que les échanges commerciaux ou <a href="https://theconversation.com/faire-du-tourisme-vert-et-nourrir-les-animaux-quels-risques-pour-notre-sante-et-la-leur-181277">touristiques</a>, qui progressent de façon exponentielle dans notre monde hyperconnecté, peuvent faciliter la dissémination de certains vecteurs et donc le risque de propagation des maladies.</p>
<p>Ce risque est encore <a href="https://theconversation.com/comment-les-changements-environnementaux-font-emerger-de-nouvelles-maladies-130967">augmenté par les changements environnementaux et climatiques</a>. Les conditions météorologiques, en particulier la température, l’humidité de l’air et les précipitations, affectent la répartition géographique, l’activité, le taux de reproduction et la survie de ces vecteurs, notamment des moustiques.</p>
<p>Par ailleurs les modifications du climat et l’impact de l’être humain sur son environnement influencent parfois le comportement animal, en modifiant par exemple l’aire de répartition de certaines espèces, ce qui peut <a href="https://theconversation.com/les-echinococcoses-des-maladies-parasitaires-en-expansion-181276">favoriser les interactions entre animaux et humains</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-echinococcoses-des-maladies-parasitaires-en-expansion-181276">Les échinococcoses, des maladies parasitaires en expansion</a>
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<p>De tels changements environnementaux ont été à l’origine d’épidémies de fièvre hémorragique argentine, due au virus Junin. Dans les années 1950, pour intensifier la culture du maïs, des défrichages massifs ont été effectués grâce, notamment à l’emploi d’herbicides. Ce changement d’environnement a entraîné une prolifération de rongeurs dont certains étaient porteurs du virus, <a href="https://books.openedition.org/irdeditions/3360?lang=fr">faisant passer la maladie au stade épidémique, notamment parmi les travailleurs agricoles</a>. Des milliers de personnes ont alors été contaminées. Une situation similaire a aussi été observée en Asie de l’Est <a href="https://books.openedition.org/irdeditions/3360?lang=fr">lors de la conversion de terres pour la culture du riz, avec le virus Hantaan responsable de la « fièvre hémorragique de Corée »</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/faire-du-tourisme-vert-et-nourrir-les-animaux-quels-risques-pour-notre-sante-et-la-leur-181277">Faire du tourisme vert et nourrir les animaux : quels risques pour notre santé… et la leur ?</a>
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<p>Parmi les autres facteurs favorisant les émergences de nouvelles maladies, citons notamment les facteurs socio-économiques, tels que l’augmentation des transports de bien et de personnes, notamment via le transport aérien intercontinental, ou encore l’essor toujours croissant des zones urbaines. Les fortes densités de population, qui favorisent la transmission rapide de maladies, ainsi que les difficultés d’adduction d’eau liées à l’urbanisation rapide, <a href="https://theconversation.com/laugmentation-de-la-population-mondiale-responsable-des-crises-sanitaires-174983">contribuent notamment à la prolifération de moustiques potentiellement porteurs de virus</a>.</p>
<p>Preuve de l’importance de ces facteurs, durant la pandémie de Covid-19, le nombre de cas d’infections « exotiques » importés (autrement dit, rapportées de voyage) a considérablement diminué, essentiellement en raison de la baisse drastique du transport aérien international. Avec la nette reprise dudit trafic, une hausse de ces cas est en revanche attendue en 2023.</p>
<p>Cette situation pourrait avoir un impact sur l’apparition de foyers de cas en France, car une personne infectée arrivant sur notre territoire peut en effet transmettre à son tour la maladie à d’autres personnes, notamment si les vecteurs transmetteurs de la maladie sont présents.</p>
<h2>La prévention, première arme contre les virus « exotiques »</h2>
<p>En l’absence d’antiviral efficace ou de vaccin, comme dans le cas du chikungunya ou du Zika, ou lorsque le vaccin présente certaines limites (comme dans le cas de la dengue, contre laquelle le seul vaccin actuellement homologué présente l’inconvénient <a href="https://www.mesvaccins.net/web/diseases/31-dengue">d’augmenter le risque d’hospitalisation et de dengue grave chez les personnes non antérieurement infectées par le virus de la dengue</a>), la seule solution est d’anticiper l’émergence de ces pathogènes.</p>
<p>Le meilleur moyen d’y parvenir est de mettre en place des réseaux adaptés et réactifs, au plus près du terrain, afin d’étudier efficacement les interactions entre les animaux, les humains et leurs divers environnements, selon une approche qualifiée de <a href="https://theconversation.com/le-concept-one-health-doit-simposer-pour-permettre-lanticipation-des-pandemies-139549">One Health (« Une seule santé », humaine et environnementale)</a>.</p>
<p>Depuis la pandémie de Covid-19, les réseaux de surveillance des maladies virales nationaux et internationaux se sont développés. Leurs capacités restent malheureusement bien en deçà de ce qui est nécessaire pour effectuer un suivi efficace de la circulation des virus à risque, non seulement dans les pays endémiques, mais aussi dans les pays où ils émergent.</p>
<p>L’émergence, puis la propagation rapide en 2020, du coronavirus SARS-CoV-2, responsable de la pandémie de Covid-19, a eu un impact majeur sur notre santé, nos comportements et nos vies quotidiennes. Cette situation nous a fait brutalement prendre conscience de l’importance de surveiller et d’étudier les « nouveaux » virus.</p>
<p>Au-delà de ces virus jusque-là « inédits », il est aussi essentiel de se pencher sur les virus « négligés » car responsables de maladies sévissant loin de nos territoires. La propagation <a href="https://theconversation.com/variole-du-singe-cette-circulation-de-la-maladie-est-completement-nouvelle-183517">hors du continent africain</a>, et en particulier en Europe, du virus <em>Mpox</em>, anciennement appelé variole du singe, est venu nous rappeler les enjeux liés à une telle surveillance…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/186324/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yannick Simonin a reçu des financements de REACTing, de l'ANR, de l'Université de Montpellier, de la Kim RIVE.</span></em></p>
Des virus qui circulaient dans des régions éloignées sévissent désormais de plus en plus souvent en France métropolitaine. Avec à la clé un risque d’implantation de certaines maladies « exotiques » ?
Yannick Simonin, Virologiste spécialiste en surveillance et étude des maladies virales émergentes. Professeur des Universités, Université de Montpellier
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/182239
2022-05-19T19:26:57Z
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Les pièges à moustiques sont-ils vraiment efficaces ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/464351/original/file-20220519-7016-2vmpx5.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C3%2C731%2C532&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Femelle d'Aedes albopictus</span> <span class="attribution"><span class="source">Antoine Franck, Cirad</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Avec le retour des beaux jours, la nuisance liée aux moustiques constitue une préoccupation grandissante pour de nombreuses personnes et collectivités à la recherche de moyens de lutte efficaces pour se protéger des piqûres et des maladies susceptibles d’être transmises par ces insectes. Rappelons qu’en métropole, le moustique tigre (Aedes albopictus) est le seul capable de transmettre les virus responsables de la dengue, du chikungunya et du Zika. Arrivé en métropole en 2004 dans les Alpes Maritimes, il est remonté vers le nord et a colonisé 67 départements. </p>
<p>Depuis le <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000038318199/">décret du 29 mars 2019</a>, les maires ont des responsabilités nouvelles en matière de vecteurs, puisqu'il entre désormais dans leurs compétences «d'agir aux fins de prévenir l'implantation et le développement d'insectes vecteurs sur (leur) commune». À ce titre, ils peuvent notamment informer la population sur les mesures préventives nécessaires et mettre en place des actions de sensibilisation du public, voire un programme de repérage, de traitement et de contrôle des sites publics susceptibles de faciliter le développement des insectes vecteurs.</p>
<p>Dans ce cadre, certaines collectivités, à l'exemple de <a href="https://www.sudouest.fr/gironde/libourne/libourne-contre-les-moustiques-la-ville-passe-a-l-offensive-1746920.php?msclkid=ffa118dfc53411ec962ffc2a22c74110">Libourne</a> ou de la commune de <a href="https://id-territoriale.fr/n/borne-anti-moustique?msclkid=ffa0fff5c53411ec83895005c12542e3">Sambuc, en Camargue</a>, ont décidé de déployer des «pièges à moustiques» ou «bornes à moustiques» électriques placés en extérieur afin de réduire la présence des moustiques et diminuer la nuisance due aux piqûres.</p>
<p>Cependant, ces dispositifs sont chers (quelques centaines à plus de 2 000 € l'unité), exigeants en termes d'entretien (remplacement des consommables : bouteille de CO<sub>2</sub>, leurre olfactif, filet de capture…) et <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/BIOCIDES2020SA0150Ra.pdf">leur efficacité est relative</a>. </p>
<p>L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a publié un avis et un rapport d'expertise <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/BIOCIDES2020SA0150Ra.pdf">sur l'efficacité des pièges utilisés contre les moustiques <em>Aedes</em> vecteurs d'arboviroses</a> en septembre 2021 auquel nous avons contribué. </p>
<p>Elle a également émis des recommandations pour que des études destinées à évaluer les méthodes de piégeage en termes de coût-efficacité et de faisabilité suivant un protocole scientifique d'évaluation rigoureux soient menées.</p>
<h2>Plusieurs types de pièges existent</h2>
<p>Il existe deux principaux types de pièges utilisés pour lutter contre les moustiques femelles, qui sont les seules à piquer : les pièges pondoirs létaux ciblant les femelles en recherche d'un gîte pour pondre leurs œufs et les pièges ciblant les femelles à jeun en recherche d'hôte (car elles ont besoin d'un repas sanguin pour porter leurs œufs à maturité).</p>
<p>Les premiers, imitant un lieu de ponte, sont constitués d'un récipient rempli d'eau stagnante et permettent de piéger par divers moyens (support de ponte imprégné ou traité avec un insecticide ou bandes collantes à l'intérieur du piège) les femelles cherchant à pondre. Ces pièges visent à réduire le nombre de moustiques femelles adultes et celui de leur future progéniture (les larves pouvant également être tuées dans le piège par les résidus d'insecticides ou à l'aide d'un grillage qui empêche l'émergence des adultes). Cependant, si ces pièges ne sont pas entretenus (changement d'eau régulier), ils peuvent eux-mêmes devenir des gîtes productifs en moustiques adultes.</p>
<p>Le second type de pièges attire les moustiques femelles en recherche d'hôte en simulant la respiration d'un être vivant par la diffusion de gaz carbonique (CO<sub>2</sub>) et/ou à l'aide de lumière et/ou d'un leurre olfactif (par exemple en simulant l'odeur corporelle humaine avec de l'acide lactique).</p>
<p>Les moustiques attirés dans le piège sont alors aspirés par une ventilation électrique et précipités dans un filet de capture. Contrairement aux pièges pondoirs dits «passifs», ceux-là sont dits «actifs» car ils ont besoin d'électricité pour fonctionner et utilisent un leurre.</p>
<h2>Les pièges commercialisés doivent apporter la preuve de leur efficacité</h2>
<p>D'après les données disponibles dans la littérature scientifique (qui concernent les modèles de pièges BG GAT, CDC AGO, BG sentinelle, MosquiTRAP, et BioBelt Anti-Moustiques), les pièges passifs et actifs peuvent contribuer à <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/BIOCIDES2020SA0150Ra.pdf">diminuer significativement les populations de moustiques</a> du genre <em>Aedes</em> à moyen et long termes (sur plusieurs semaines, mois, voire années), à condition qu'ils soient bien entretenus et qu'il y ait un nombre de pièges suffisant dans la zone à protéger.</p>
<p>L'efficacité des autres pièges commercialisés en France pour réduire la densité de moustiques n'est, quant à elle, pas encore documentée.</p>
<p>En attendant d'avoir ces données, les allégations publicitaires employées par certains fabricants, du type «zéro nuisance» ou «maison sans moustique» paraissent abusives. De telles allégations ne devraient pas être avancées sans que la preuve de ce qu'elles revendiquent soit établie et seulement pour des produits répondant par ailleurs pleinement aux exigences réglementaires applicables.</p>
<p>Dans le cadre de notre revue de la littérature scientifique, aucune donnée probante n'a par ailleurs été trouvée concernant l'efficacité des pièges à moustiques pour limiter rapidement la propagation des maladies vectorielles lorsque des virus sont déjà en circulation. La transmission de virus par les moustiques est un phénomène multifactoriel, et la densité de moustiques n'est que l'un des facteurs qui permettent d'expliquer la circulation de virus parmi d'autres (tels que des facteurs socio-économiques, comportementaux, environnementaux et de gestion des cas).</p>
<p>Si certains pièges peuvent avoir une efficacité pour réduire les populations de moustique, leur efficacité pour diminuer la propagation des maladies vectorielles n’est pas démontrée Nous recommandons donc de mener des recherches pour collecter de telles données et déterminer les conditions de déploiement optimales de ces pièges. En attendant ces données complémentaires, les pièges à moustiques ne devraient être utilisés que lorsqu'il n'est pas possible de recourir aux traitements insecticides actuellement recommandés autour des cas, par exemple lorsque la zone à traiter est proche d'un cours d'eau ou inaccessible ou, en complément d'autres mesures préventives.</p>
<h2>Certains pièges commercialisés sont soumis à une autorisation de mise sur le marché</h2>
<p>Le CO<sub>2</sub>, l'acide lactique et les autres substances utilisées pour attirer les moustiques femelles sont des substances «biocides». Les pièges les utilisant doivent donc être conformes à la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32012R0528">réglementation européenne sur les biocides</a> et bénéficier d'une autorisation de mise sur le marché (AMM). L'instruction du <a href="https://www.anses.fr/fr/content/l%C3%A9valuation-des-produits-biocides-comment-%C3%A7a-marche">dossier de demande d'AMM</a> d'un produit permet d'évaluer l'efficacité du produit, ainsi que les risques pour l'être humain et l'environnement.</p>
<p>À ce jour, aucun des pièges à moustiques utilisant du CO<sub>2</sub> commercialisés en France ne dispose d'AMM. La commercialisation des pièges à base de CO<sub>2</sub> produit par combustion de butane/propane est autorisée selon un régime transitoire jusqu'au 1<sup>er</sup> juillet 2022. Après cette date, les pièges n'ayant pas d'AMM ne pourront plus être commercialisés en France.</p>
<h2>Les pièges doivent être utilisés en complément d'autres mesures préventives</h2>
<p>Les pièges ne constituent pas une solution miracle. Pour être plus efficaces, ils doivent être utilisés en complément d'autres moyens de lutte, à commencer par le traitement du problème à la source et l'élimination des gîtes larvaires. En effet, l'élimination efficace des dépôts d'eau stagnante est le principal moyen de lutter contre la propagation des moustiques. Pour cela, chaque geste compte (vider les coupelles sous les pots de fleurs, veiller au bon écoulement des gouttières, ramasser les déchets pour qu'ils ne se transforment en réceptacle d'eau de pluie…) et il est indispensable que chaque citoyen s'implique dans la lutte contre les gîtes larvaires. </p>
<p>Pour en savoir plus sur les mesures que peuvent prendre les maires dans ce domaine, il existe un <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/CNEV-Ft-Juin2016-Guide_collectivites_lutte_antivectorielle_versioncourte.pdf">Guide à l'attention des collectivités souhaitant mettre en œuvre une lutte contre les moustiques urbains vecteurs de dengue, de chikungunya et de Zika</a> publié en 2016 par le Centre national d'expertise sur les vecteurs. Même si ce guide n'est plus à jour sur les questions réglementaires, il est riche de conseils et de recommandations pour mener une lutte intégrée combinant des mesures biologiques, physiques, chimiques et de mobilisation sociale, dans un double objectif d'efficacité pour lutter contre la population de moustique ciblée et de respect de l'environnement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/182239/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pour ses travaux de recherche en lutte antivectorielle, Thierry Baldet a reçu des financements UE ERC, ANSES France, DGS Ministère français de la santé et des Fonds européens structurants FEADER et FEDER INTERREG</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Ali JAFFAL et Johanna Fite ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>
Si certains pièges permettent de réduire les populations de moustiques, leur efficacité pour lutter contre les maladies qu'ils portent n'est pas démontrée.
Johanna Fite, Chef de projets scientifiques, Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)
Ali JAFFAL, Coordinateur scientifique, Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)
Thierry Baldet, Chercheur, Cirad
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/174983
2022-02-24T18:49:32Z
2022-02-24T18:49:32Z
L’augmentation de la population mondiale responsable des crises sanitaires ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/446467/original/file-20220215-21-h6a5xt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=24%2C8%2C5439%2C3628&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Densité de l'habitat urbain de Ngor, Dakar (Sénégal). </span> <span class="attribution"><span class="source">© IRD - Seydina Ousmane Boye </span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Ebola, chikungunya mais aussi sida ou grippes aviaires… Les risques et enjeux liés aux maladies infectieuses émergentes ou ré-émergentes sont désormais bien établis pour l’homme. Avec l’accélération depuis les années 1940 des épidémies, qui ont connu une multiplication par dix, anticiper l’essor de nouveaux pathogènes zoonotiques (provenant des animaux) à travers le monde est devenu le principal défi de santé publique actuel.</p>
<p>Ce qui est moins mis en avant, c’est comment les transformations de l’environnement que nous provoquons les favorisent.</p>
<p>De nombreuses études montrent pourtant que l’émergence de maladies infectieuses zoonotiques est étroitement liée à la modification des paysages par notre espèce.</p>
<p>Ainsi, les altérations du paysage, en particulier la déforestation et le développement agricole, la déstructuration des écosystèmes aquatiques ou encore la fragmentation des forêts périurbaines qui perturbe l’interface homme-animal-environnement, tout comme les changements climatiques, sont les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29770047/">principaux moteurs de l’émergence des maladies infectieuses (MIE)</a>.</p>
<p>Il existe en effet une « géographie » des pathogènes : les attributs naturels du paysage, comme l’altitude ou la présence de plans d’eau, influent sur leur localisation et leur diffusion – par exemple en jouant un rôle de barrières géographiques, empêchant le déplacement des hôtes.</p>
<p>Des modifications rapides des territoires (déforestation, agriculture, expansion agricole…) peuvent donc bouleverser l’étendue spatiale initiale des hôtes et des réservoirs de pathogènes. Avec pour conséquence la possibilité d’<a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22681449/">augmenter la probabilité de contact entre l’homme et un hôte ou un réservoir</a>, et ainsi favoriser le passage de micro-organismes potentiellement infectieux encore inconnus de l’animal à l’être humain (zoonose).</p>
<p>Développer des approches paysagères pour détecter le risque d’émergence de maladies nécessite d’intégrer plusieurs types de données spatiales :</p>
<ul>
<li><p>La complexité du paysage, en utilisant des systèmes d’information géographique (SIG),</p></li>
<li><p>Des données de télédétection,</p></li>
<li><p>La distribution des maladies infectieuses émergentes,</p></li>
<li><p>La distribution des environnements immédiats de ces MIEs.</p></li>
</ul>
<p>Les modèles mathématiques aident à intégrer ces données afin de prédire les zones les plus à risque.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/445954/original/file-20220211-17-ointc1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/445954/original/file-20220211-17-ointc1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=491&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/445954/original/file-20220211-17-ointc1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=491&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/445954/original/file-20220211-17-ointc1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=491&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/445954/original/file-20220211-17-ointc1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=617&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/445954/original/file-20220211-17-ointc1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=617&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/445954/original/file-20220211-17-ointc1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=617&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Représentation des liens entre les différentes crises environnementale, climatique et sanitaire sur fond de forte croissance démographique au niveau.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Gauthier Dobigny et Geneviève Michon, IRD ; Angela Jimu, Cirad ; Jean-Louis Duprey, projet CAZCOM</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Comment prédire de façon réaliste les futures épidémies ?</h2>
<p>Les <a href="https://www.nature.com/articles/nature06536">maladies infectieuses d’origine animale (zoonoses) représentent plus de 70 % des MIEs</a> de ces dernières décennies. L’identification de leurs zones à risque d’émergence à travers le monde est donc primordiale… mais difficile puisqu’elles dépendent tant de la distribution spatiale des hôtes et réservoirs de pathogènes que de leur interaction avec l’homme. Ce n’est toutefois pas impossible.</p>
<p>Dans une étude récente, nous montrons qu’en incluant les facteurs écologiques, climatiques et paysagers (avec les modifications induites par l’homme), il est possible d’identifier ces potentielles zones à risque et de prédire les futurs points chauds d’émergence. Une telle approche pourrait servir de référence à des systèmes de surveillance et d’alerte précoce.</p>
<p>Pour trois groupes de maladies zoonotiques virales majeures (filovirus, hénipavirus et coronavirus), nous avons pu cartographier les zones à haut risque d’émergence en nous basant sur la distribution spatiale des réservoirs et des hôtes ainsi que sur les données de l’OMS sur leur distribution. Et à chaque fois, nous avons constaté que la croissance démographique au sein de paysages modifiés par l’homme était un facteur prédictif commun à leur émergence. Ce que nous développons ci-dessous.</p>
<p>Il est à noter que malgré les questionnements mondiaux actuels liés à l’origine du Covid-19, le déplacement des empreintes géographiques des agents pathogènes et/ou des hôtes infectés par ces derniers suite à la perturbation des écosystèmes conduit toujours à des émergences de maladies infectieuses.</p>
<h2>Des spécificités liées à chaque famille de virus</h2>
<p>Nos <a href="https://assets.researchsquare.com/files/rs-1104482/v1/7a773300-0666-441c-8ea2-071d1661a071.pdf">travaux</a> montrent que les précipitations et l’augmentation de la température minimale nocturne favoriseraient l’émergence des épidémies liées aux Filovirus (Ebola, virus de Marburg…).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/445716/original/file-20220210-26283-zknz1d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/445716/original/file-20220210-26283-zknz1d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=537&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/445716/original/file-20220210-26283-zknz1d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=537&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/445716/original/file-20220210-26283-zknz1d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=537&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/445716/original/file-20220210-26283-zknz1d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=675&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/445716/original/file-20220210-26283-zknz1d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=675&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/445716/original/file-20220210-26283-zknz1d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=675&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Risque prédictif de l’émergence de maladies à Filovirus, Jagadesh et coll. 2021.</span>
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</figure>
<p>Cependant, nous avons aussi constaté que 69 % des points chauds d’émergence détectés à travers le monde dépendaient non seulement de ces facteurs climatiques (température et précipitation) mais aussi de facteurs humains tels que l’augmentation de la population sur un paysage modifié.</p>
<p>De même, outre les facteurs climatiques et de modification des sols, les points chauds d’émergence des hénipavirus (Virus Nipah) sont dépendants, eux, d’une faible altitude et d’une faible pluviométrie.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/445719/original/file-20220210-46662-1937avp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/445719/original/file-20220210-46662-1937avp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/445719/original/file-20220210-46662-1937avp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/445719/original/file-20220210-46662-1937avp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/445719/original/file-20220210-46662-1937avp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/445719/original/file-20220210-46662-1937avp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/445719/original/file-20220210-46662-1937avp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Risque prédictif de l’émergence de maladies à Henipavirus (en rouge) modélisé avec la distribution spatiale des réservoirs mammaliens (en gris).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jagadesh et coll. 2021</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>On a également constaté que les émergences de maladies dues au virus Ebola et aux coronavirus sont associées aux paysages impactés par l’homme.</p>
<p>Pour les <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-019-12499-6">épidémies d’Ebola, il semble qu’elles ne seraient pas directement liées à la densité de population</a>, comme précédemment proposé. Seraient plutôt prépondérants des effets de l’augmentation de la population sur le paysage : urbanisation, déforestation, exploitation minière, fragmentation des terres et chasse.</p>
<p>En revanche, la densité de population semble être significativement et directement liée aux points chauds d’émergence des coronavirus (SARS et MERS). Des études mettent en avant le rôle de l’exposition aux fluides corporels de mammifères infectés élevés dans des espaces confinés pour la viande de brousse et les activités récréatives, respectivement.</p>
<p>Les <a href="https://kilpatrick.eeb.ucsc.edu/wp-content/uploads/2013/04/Wolfe-et-al-2005-EID.pdf">restaurants et marchés de viande de brousse</a> « saveur sauvage » sont souvent situés dans des villes densément peuplées, où la demande en protéines exotiques est élevée et où les cas de maladies sont donc plus susceptibles d’être signalés.</p>
<p>Qu’il soit direct ou indirect, l’effet de la densité de population reste crucial dans la propagation des épidémies et représente donc un facteur important à prendre en compte.</p>
<h2>Les effets du changement climatique</h2>
<p>Des données récentes montrent que l’augmentation de la température et les précipitations saisonnières imprévisibles dues au changement climatique ont également un <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11356-020-08896-w">effet indirect sur l’émergence des maladies</a> : via de soudains changements écologiques de leur réservoir, la perte de biodiversité et la migration des petits mammifères hôtes.</p>
<p>Par exemple, la température minimale est le facteur limitant pour le développement des parasites et la distribution des vecteurs dans la transmission du paludisme, mais aussi pour d’autres épidémies comme la fièvre hémorragique de Crimée-Congo et le Zika. Cette dépendance spatiale directe aux températures minimales est inquiétante…</p>
<p>En effet, avec le changement climatique, l’<a href="https://www.researchgate.net/publication/255982715_Observed_Climate_Variability_and_Change">augmentation des températures minimales nocturnes allongent les périodes sans gel dans la plupart des régions de moyenne et haute latitude</a>. Ce qui pourrait potentiellement augmenter l’étendue latitudinale des zones à risque d’émergence.</p>
<h2>Des spécificités régionales : le cas de l’Inde</h2>
<p>Il est intéressant de noter que les zones à risque d’émergence de maladies à coronavirus, principalement situées en Inde, dépendraient de l’augmentation de la température minimale nocturne, du changement de la couverture terrestre induit par l’homme… et seraient les seules à être directement positivement impactées par la densité de population.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/445957/original/file-20220211-17-we2vhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/445957/original/file-20220211-17-we2vhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=357&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/445957/original/file-20220211-17-we2vhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=357&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/445957/original/file-20220211-17-we2vhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=357&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/445957/original/file-20220211-17-we2vhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=449&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/445957/original/file-20220211-17-we2vhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=449&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/445957/original/file-20220211-17-we2vhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=449&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Risque prédictif d’émergence de maladies Coronaviridae (en rouge) modélisé avec la distribution spatiale des réservoirs mammaliens (en gris).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jagadesh et coll. 2021</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Compte tenu de la densité de population et de la connectivité dans un pays comme l’Inde, l’émergence d’un coronavirus pourrait donc conduire à une épidémie comme celle du SARS. Ces résultats soulignent la nécessité d’une surveillance active des pathogènes zoonotiques dans les régions à haut risque.</p>
<p>Des études ont émis l’hypothèse que la déforestation et les inondations, dans les plaines du bas Gange et les marais de faible altitude, causant la destruction des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S187603411930084X?via%3Dihub">habitats de chauves-souris frugivores (famille des Pteropodidae) réservoirs du virus Nipah</a>, pourrait être à l’origine de l’émergence du virus.</p>
<p>L’engrenage est implacable. Les rapides changements de leurs habitats entraînent la famine des chauves-souris. Elles vont donc migrer vers des arbres fruitiers, se trouvant le plus souvent à proximité d’habitations humaines, entraînant leur contamination et donc une exposition accrue à l’agent pathogène.</p>
<p>Nos résultats soutiennent cette hypothèse d’un risque accru d’épidémies de virus Nipah associées aux plaines de basse altitude, aux inondations et aux changements rapides d’habitat induits par l’homme.</p>
<h2>Quelles solutions ?</h2>
<p>Les solutions pourraient résider dans des mesures dissuasives strictes à l’égard de l’exploitation forestière et de la déforestation conduisant à la fragmentation du paysage. Elles dissuaderaient les chasseurs en leur coupant l’accès aux forêts tropicales et en réglementant le commerce de la viande de brousse.</p>
<p>Plus important encore, un engagement mondial pour limiter la monoculture extensive et le pâturage du bétail est nécessaire. Une surveillance active est également essentielle dans les régions à haut risque pour détecter les événements épidémiques humains sous-déclarés. Enfin, une surveillance active ciblée de l’émergence de pathogènes zoonotiques, tenant compte de l’influence des paysages modifiés par l’homme et du climat, pourrait prévenir les futures épidémies et pandémies.</p>
<p>Mais, finalement, la question fondamentale de la démographie humaine mondiale et sa répartition spatiale reste le point central de toutes ces crises environnementale, climatique et sanitaire.</p>
<h2>Les futures initiatives internationales seront OneHealth</h2>
<p>L’ancienne directrice générale de l’OMS, Margaret Chan, déclarait que des <a href="https://www.nature.com/articles/s41591-021-01259-z">leçons avaient été apprises lors de son passage à l’OMS</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Les acteurs de la santé publique doivent élargir leur vision de la sécurité sanitaire au-delà des maladies infectieuses et reconnaître l’importance cruciale de la santé animale, de l’approche “OneHealth”, de la sécurité alimentaire et d’une relation harmonieuse avec la nature. »</p>
</blockquote>
<p>Depuis le début de la crise du Covid-19, un foisonnement d’initiatives OneHealth a vu le jour afin de mieux comprendre les relations entre les crises climatiques, de biodiversité et sanitaire.</p>
<p>En France, <a href="https://prezode.org/">PREZODE</a> (<em>Preventing zoonotic disease emergence</em>) est une initiative internationale annoncée par le président de la République française lors du One Planet Summit en janvier 2021, impliquant l’Inrae, le Cirad et l’IRD. En cours de construction, elle a pour but de mieux comprendre et prévenir l’émergence et la propagation des zoonoses.</p>
<p>L’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) et le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) ont également annoncé la création d’un panel d’experts de haut niveau sur l’approche <a href="https://www.who.int/fr/news-room/questions-and-answers/item/one-health">« Une seule santé » (OneHealth)</a>.</p>
<p>Ce panel va alimenter en mars la tripartite (OMS, FAO, OIE) et le PNUE avec une feuille de route sur la <a href="https://extranet.who.int/sph/sites/default/files/document-library/document/French.pdf">gouvernance des zoonoses</a> et des futures épidémies. Le tout selon une approche globale de la santé pour éviter les impacts de pandémies éventuelles, tout en garantissant la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance des communautés les plus vulnérables.</p>
<p>Pour autant, la question de la démographique humaine reste très souvent étonnamment absente de ces approches OneHealth malgré son rôle central, direct ou indirect, dans les futures crises sanitaires.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174983/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Rodolphe Gozlan a reçu des financements de Université de Guyane. Bourse de thèse pour Mlle Soushieta Jagadesh</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Marine Combe et Soushieta Jagadesh ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>
Les changements des paysages et du climat sont les principaux moteurs du passage de virus de l’animal à l’homme. Alors que la population humaine va croissant, comment identifier les zones à risque ?
Rodolphe Gozlan, Directeur de recherche, Institut de recherche pour le développement (IRD)
Marine Combe, Chargée de recherche, Institut de recherche pour le développement (IRD)
Soushieta Jagadesh, Doctoral Student, Institut de recherche pour le développement (IRD)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/169047
2021-10-03T17:05:06Z
2021-10-03T17:05:06Z
De Zika au SARS-CoV-2, récits et défis de chercheurs en Polynésie française
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science, qui a lieu du 1<sup>er</sup> au 11 octobre 2021 en métropole et du 5 au 22 novembre 2021 en outre-mer et à l’international, et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition a pour thème : « Eureka ! L'émotion de la découverte ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>Voilà 15 ans que je travaille sur l’émergence des virus dans le Pacifique. Virus de la dengue, chikungunya, Zika, SARS-CoV-2 aujourd’hui… avec mon équipe du <a href="https://www.ilm.pf/recherche/maladie-infectieuses/">laboratoire de recherche sur les maladies infectieuses à transmission vectorielle</a>, à l’Institut Louis Malardé (à Papeete, Tahiti), nous les avons tous vus arriver. Mais le plus marquant pour nous a été cette succession de deux événements épidémiologiques exceptionnels en moins de dix ans : l’arrivée du virus Zika et du nouveau coronavirus. Un 100 m émotionnel où surprises, exaltation, doutes, angoisse et soulagement se sont enchaînés à un rythme effréné…</p>
<p>Comment réagit-on quand la situation devient hors-norme ? Comment fait-on pour comprendre ce qui est en train de se passer ? Comment construit-on de nouvelles procédures de travail ? Cette tranche de vie, que nous avons vécue avec mon équipe rodée à la surveillance de tel phénomène d’émergence de nouveaux pathogènes, je vais la partager ici.</p>
<p>Le premier choc eut lieu en octobre 2013. Cela fait alors quelques semaines que le réseau de médecins sentinelles de Polynésie française rapporte une recrudescence des consultations pour des symptômes évoquant une infection par le virus de la dengue. Rien de surprenant, la saison des pluies vient de commencer et le contexte est favorable aux deux espèces de moustiques capables de transmettre cet agent pathogène en Polynésie française, <em>Aedes aegypti</em> et <em>Ae. polynesiensis</em>.</p>
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<img alt="Vue au microscope de moustiques A. aegypti gorgés de sang" src="https://images.theconversation.com/files/424152/original/file-20211001-25-31r9za.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/424152/original/file-20211001-25-31r9za.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/424152/original/file-20211001-25-31r9za.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/424152/original/file-20211001-25-31r9za.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/424152/original/file-20211001-25-31r9za.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/424152/original/file-20211001-25-31r9za.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/424152/original/file-20211001-25-31r9za.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les femelles <em>Aedes aegypti</em> gorgées de sang sont les vecteurs de transmission du virus Zika.</span>
<span class="attribution"><span class="source">ILM Photo</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Toutefois, quelque chose ne colle pas. Les symptômes décrits par les patients diffèrent de ceux d’une phase aiguë classique de dengue : l’épisode fébrile est modéré voire inexistant, l’éruption cutanée est particulièrement forte, les démangeaisons sont persistantes, etc. Autre anomalie, nous voyons arriver des patients natifs ou résidents de longue date qui devraient être immunisés.</p>
<p>Bientôt, le doute n’est plus permis : un nouveau pathogène est en train de s’installer. Tout juste pouvons-nous estimer qu’il s’agit d’un arbovirus (virus transmis par des arthropodes se nourrissant de sang, souvent des insectes comme le moustique). Nous décidons alors de reprendre les échantillons des patients testés négatifs par RT-PCR pour la dengue afin d’y rechercher d’autres arbovirus : celui du chikungunya (un bon candidat, car détecté dans plusieurs îles du Pacifique depuis un peu plus d’un an), le virus de la Ross River (à l’origine d’épidémies saisonnières en Australie), le virus du Nil occidental (ou West-Nile virus, régulièrement détecté sur le continent nord-américain)… mais nos tentatives sont vaines.</p>
<h2>Le précédent Zika</h2>
<p>Reste une dernière hypothèse. Le virus Zika, qui a été à l’origine d’une épidémie sur l’île de Yap dans les États fédérés de Micronésie (nord-ouest du Pacifique).</p>
<p>Classée « maladie tropicale négligée », l’infection par Zika est à cette époque peu étudiée, donc peu connue. <a href="https://wwwnc.cdc.gov/eid/article/20/6/14-0138_article">Un cluster familial va nous donner l’occasion d’en avoir le cœur net</a>.</p>
<p>Les analyses RT-PCR révèlent bien la présence de l’ARN du virus chez un patient. Sur les deux décennies écoulées, soit depuis que les techniques de biologie moléculaire sont utilisées dans notre laboratoire, c’est la première fois qu’une infection par un arbovirus autre que celui de la dengue est détectée en Polynésie française…</p>
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<img alt="Une scientifique procède à un séquençage d’ADN pour identifier un virus (Zika)" src="https://images.theconversation.com/files/424153/original/file-20211001-27-erektk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/424153/original/file-20211001-27-erektk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/424153/original/file-20211001-27-erektk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/424153/original/file-20211001-27-erektk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/424153/original/file-20211001-27-erektk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/424153/original/file-20211001-27-erektk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/424153/original/file-20211001-27-erektk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dans le cadre du Zika comme du SARS-CoV-2, la confirmation de l’émergence d’un nouveau pathogène en Polynésie française s’est faite à l’appui du séquençage génomique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">ILM Photo</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>L’enjeu est énorme, l’erreur inenvisageable. Nous devons donc consolider notre résultat. Je contacte le Dr Amadou Sall, de l’Institut Pasteur de Dakar, qui est scientifique référent sur Zika. Il nous fait parvenir en urgence des échantillons de contrôle, une séquence de l’ARN du virus stabilisée permettant comparaison et identification – elle correspondra bien au fragment de génome du virus suspect que nous séquençons. Nous pouvons donc confirmer, en une dizaine de jours, qu’il s’agit bien du Zika. Quelques jours après notre identification du premier cas, d’autres sont découverts. L’épidémie de Zika sera déclarée deux semaines plus tard.</p>
<p>En Polynésie française, l’épidémie de Zika durera cinq mois. Mais pour notre équipe, ce n’est que le début d’un marathon scientifique de trois ans… Durée pendant laquelle l’équipe s’attellera à améliorer le test de diagnostic (RT-PCR), documenter les <a href="https://journals.plos.org/plosntds/article?id=10.1371/journal.pntd.0005024">caractéristiques de transmission vectorielle (moustiques)</a> et non-vectorielle (transmission par voie sexuelle, materno-fœtale) et décrire la survenue de formes cliniques sévères. En particulier, nous passerons avec nos collaborateurs, dont l’équipe du Pr. Arnaud Fontanet de l’Institut Pasteur, deux années à compléter les données et réaliser les analyses qui conduiront à <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(16)00562-6/fulltext">démontrer pour la 1<sup>ère</sup> fois le lien entre infection Zika et syndrome de Guillain Barré</a>.</p>
<p>Lorsque nous sommes prêts à publier nos résultats, l’épidémie de Zika <a href="https://theconversation.com/lhistoire-de-zika-virus-emergent-transmis-par-les-moustiques-53774">explose au Brésil entre 2015 et 2016</a>. La portée de nos travaux se mesurera pleinement lorsque, après s’être étendue à toute l’Amérique latine, cette maladie est qualifiée par l’OMS d’« urgence de santé publique de portée internationale ».</p>
<h2>SARS-CoV-2, la nouvelle menace</h2>
<p>Comme les autres pays du globe, sept ans plus tard, la Polynésie française allait être frappée – quoique plus tardivement – par le SARS-CoV-2, agent de la Covid-19.</p>
<p>Fin juin 2020. Cela fait maintenant 3 mois que les frontières internationales sont fermées. Un mois s’est écoulé depuis la détection du dernier des 62 cas de Covid-19 rapportés depuis mars. Alors que l’épidémie flambe partout ailleurs, la Polynésie française fait partie des quelques oasis exemptes du fléau. Pour relancer l’économie, primordiale pour la région, il est décidé qu’à partir du 15 juillet il serait à nouveau possible d’entrer et de circuler librement.</p>
<p>Devant le risque élevé d’importation de nouveaux cas d’infection par le SARS-CoV-2, un protocole de surveillance des voyageurs est mis en place. Une plate-forme numérique de suivi de l’itinéraire des arrivants est créée, en outre, les adultes et enfants de plus de 11 ans devront présenter un résultat négatif à un <a href="https://theconversation.com/covid-19-comment-fonctionnent-les-tests-et-quelles-sont-leurs-utilites-135398">test RT-PCR de détection du SARS-CoV-2</a> réalisé dans les 72 heures qui précèdent l’embarquement.</p>
<p>Mais quid des personnes en phase d’incubation au moment de la réalisation du test ? Des risques d’infection lors des trois jours qui précèdent ou durant le voyage ? Avec la levée du dispositif de quarantaine, comment détecter et isoler ces cas potentiels ?</p>
<p>Pour anticiper, nous proposons un dispositif de dépistage inédit (CoV-Check Porinetia) prenant en compte les contraintes de la reprise touristique (libre circulation dans les archipels de la Polynésie française) et les ressources locales limitées en termes de personnel de soin, de capacité d’accueil des centres médicaux et de capacité technique des laboratoires.</p>
<h2>Un choix audacieux</h2>
<p>Nous optons pour l’<a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0256877">autoprélèvement et le groupage d’échantillons</a>. De quoi s’agit-il ? Afin de pallier aux ressources limitées, nous remettons à chaque voyageur, à son arrivée à l’aéroport, un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1477893921001393?via%3Dihub">kit contenant le matériel nécessaire à la réalisation d’un autoprélèvement 4 jours plus tard</a> (soit le délai moyen d’incubation du SARS-CoV-2, entre le moment où une personne se contamine et où elle peut à son tour contaminer les autres – données disponibles en juillet 2020).</p>
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<img alt="Kit d’autotest pour le suivi de virus de la Covid, contenant le matériel et la notice d’utilisation" src="https://images.theconversation.com/files/424157/original/file-20211001-19-115cahx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/424157/original/file-20211001-19-115cahx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/424157/original/file-20211001-19-115cahx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/424157/original/file-20211001-19-115cahx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/424157/original/file-20211001-19-115cahx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/424157/original/file-20211001-19-115cahx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/424157/original/file-20211001-19-115cahx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dans le cadre de la détection précoce du SARS-CoV-2, et le suivi de l’introduction éventuelle de nouveaux variants, un kit d’autotest remis aux voyageurs à leur arrivée en Polynésie française.</span>
<span class="attribution"><span class="source">ILM Photo</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Chaque kit est identifié par un code-barres unique et relié au numéro d’enregistrement du voyageur sur la plate-forme en ligne où a été déclaré son itinéraire. Il contient deux écouvillons (pour les prélèvements en fosse nasale et buccal), un tube de milieu de conservation pour les stocker, un sac de transport d’échantillon biologique et une notice d’utilisation (français-anglais).</p>
<p>Une fois les autoprélèvements réalisés, le kit doit être remis par le voyageur à la réception de son hébergement ou déposé dans un centre de santé. Il est ensuite acheminé vers le laboratoire, où les échantillons sont organisés en groupes (pool) de dix puis testés par RT-PCR. Lorsqu’un pool est détecté positif pour le SARS-CoV-2, les 10 échantillons sont retestés individuellement et le code-barres du (ou des) positif(s) est communiqué au bureau de veille sanitaire du ministère de la Santé. Le bureau se charge de contacter le voyageur pour un test de confirmation.</p>
<h2>Innover pour gagner du temps</h2>
<p>Les critiques pleuvent : « Ce n’est pas fiable ! Ce n’est pas publié ! Ça ne marchera pas ! »… jusqu’à la détection du premier cas.</p>
<p>Si nous savions que nous n’avions pas la maîtrise des autoprélèvements (qualité, réalisation, etc.), nous n’avions pas de doute sur la traçabilité des échantillons ni sur la sensibilité du protocole de RT-PCR en groupage d’échantillons. Nous utilisons déjà le système de code-barres et l’appairage numérique dans le cadre de nos enquêtes de terrain, quant au protocole de groupage cela faisait déjà trois mois que nous travaillions à la question, pour anticiper toute rupture d’approvisionnement en réactifs ou flambée de cas dépassant la capacité technique de nos laboratoires.</p>
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<img alt="Une scientifique fait un prélèvement dans un échantillon pour lancer la PCR" src="https://images.theconversation.com/files/424158/original/file-20211001-15-1mjeo1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/424158/original/file-20211001-15-1mjeo1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/424158/original/file-20211001-15-1mjeo1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/424158/original/file-20211001-15-1mjeo1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/424158/original/file-20211001-15-1mjeo1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/424158/original/file-20211001-15-1mjeo1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/424158/original/file-20211001-15-1mjeo1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Préparation des pools des échantillons remis par les voyageurs avant extraction et RT-PCR suivant le protocole de surveillance du SARS-CoV-2.</span>
<span class="attribution"><span class="source">ILM Photo</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Le premier cas de Covid-19 est détecté le samedi 1<sup>er</sup> août 2020, en fin d’après-midi, et nous transmettons nos données (avec numéro de code-barres du prélèvement) au bureau de veille sanitaire. Je découvre le lendemain que l’information fait les gros titres… Il s’agit d’une touriste sur un bateau de croisière, lequel vient de faire demi-tour pour rejoindre le port de Papeete chargé de ces 340 passagers et membres d’équipage.</p>
<p>Dans les mois qui suivront, plusieurs centaines de voyageurs positifs pour le SARS-CoV-2 seront ainsi identifiés. Si le dispositif CoV-Check Porinetia n’a pas suffi à empêcher la réintroduction du virus puis sa diffusion, il aura néanmoins permis la détection des premiers clusters (groupes de personnes exposées) sur l’île principale Tahiti, permettant aux autorités de santé de se préparer à la première vague épidémique et de tenter de limiter sa diffusion aux 71 autres îles habitées de Polynésie française.</p>
<p>Dès février 2021, nous complétons le dispositif pour être capables de détecter les variants. À bon escient, puisque nous en trouvons rapidement, d’abord essentiellement Alpha (variant un temps dit « britannique ») puis de plus en plus de Delta (identifié en Inde pour la première fois). Nous savons que ce n’est qu’une question de temps avant qu’un cas importé n’échappe au dispositif de surveillance. Début juillet, le variant Delta est en effet détecté dans la population. Le tout premier cluster est lié à un voyageur non vacciné, qui n’avait respecté aucune des mesures de quarantaine.</p>
<h2>Comprendre le rôle de la recherche</h2>
<p>Dans les semaines qui suivent, l’augmentation fulgurante des cas submerge les capacités d’accueil des structures hospitalières et des unités de soins intensifs et de réanimation. Un couvre-feu rapidement renforcé d’une période de confinement sont mis en place. L’effort de vaccination s’accélère, la réserve sanitaire vient en renfort.</p>
<p>Au plus fort de l’épidémie, la Polynésie compte 426 hospitalisations, dont 48 en réanimation. Au total, de <a href="https://www.service-public.pf/dsp/wp-content/uploads/sites/12/2021/09/BEH-N63.pdf">mi-juillet (début de la vague) à fin septembre 2021, 461 décès liés à la Covid-19 sont survenus en milieu hospitalier</a>.</p>
<p>Ces évènements nous ramènent à la réalité et aux limites de notre contribution en tant que chercheurs, à notre rôle : celui de donner de la connaissance, des outils et un délai de préparation aux soignants et à tous ceux qui travaillent en support. Bref, à celles et ceux sur qui nous comptons pour sauver des vies, et accompagner celles qui s’éteignent…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169047/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Van-Mai Cao-Lormeau a reçu des financements pour un contrat de projets Etat-Polynésie française (2017, 2018) ; Fonds Pacifique/Ministère de l’Europe et des Affaires Etrangères (2016-2020).
Van-Mai Cao-Lormeau est membre du panel d’experts du réseau Arbo-France (<a href="https://arbo-france.fr/">https://arbo-france.fr/</a>)</span></em></p>
Découvrez, avec les équipes de recherche en première ligne, comment la Polynésie française traque les virus. Zika hier, SARS-CoV-2 aujourd’hui… Un témoignage entre défi, rigueur et passion.
Van-Mai CAO-LORMEAU, Director of the Laboratory of research on Infectious Vector-borne diseases (LIV), Institut Louis Malardé (ILM), Institut Louis Malardé
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/165077
2021-09-12T16:33:36Z
2021-09-12T16:33:36Z
Pesticide pyriproxyfène–virus Zika : découverte d’une alliance tragique pour le développement cérébral
<p>L’épidémie de Covid-19 a été, et est encore, dévastatrice. Tout le monde a été touché, et le bilan humain est énorme. Mais si, pour beaucoup, l’épidémie semble sans précédent, les maladies infectieuses propagées par les virus ont toujours représenté un danger pour la santé.</p>
<p>Au-delà de ce danger immémorial, une question fondamentale en science est de savoir comment les virus (et les maladies associées) sont affectés par les différentes inventions humaines. </p>
<p>Dans notre dernière étude, nous montrons comment un pesticide, le pyriproxyfène, peut <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0269749121012367?via%3Dihub">aggraver les effets du virus Zika sur le développement cérébral d’un fœtus</a>.</p>
<h2>L’impact inattendu de l’alliance Zika-pyriproxyfène</h2>
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<img alt="Affiche présentant, en anglais, les conséquences possibles d’une infection par le virus Zika" src="https://images.theconversation.com/files/418481/original/file-20210830-17-1xv2v6o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/418481/original/file-20210830-17-1xv2v6o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1095&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/418481/original/file-20210830-17-1xv2v6o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1095&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/418481/original/file-20210830-17-1xv2v6o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1095&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/418481/original/file-20210830-17-1xv2v6o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1376&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/418481/original/file-20210830-17-1xv2v6o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1376&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/418481/original/file-20210830-17-1xv2v6o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1376&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des campagnes d’information ont été lancées pour avertir des dangers du virus Zika sur le développement du cerveau.</span>
<span class="attribution"><span class="source">National Institute of Child Health and Human Development (NIH)</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
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<p>Nous sommes remontés six ans en arrière au Brésil, en 2015, lorsque le nombre de bébés nés avec une petite tête et un petit cerveau a brutalement explosé. Ces graves déformations les ont laissés handicapés à vie, et ont suscité une inquiétude mondiale. Ces cas de « microcéphalie » ont rapidement été associés au fait que les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1473309916303188?via%3Dihub">mères enceintes avaient été infectées par le virus Zika</a>. Ce virus pénètre et tue les cellules qui forment le cerveau, ce qui entrave son bon développement.</p>
<p>Étonnamment, certaines régions du nord-est du Brésil ont connu <a href="https://www.nature.com/articles/nature.2016.20309">bien plus de cas de microcéphalies que les autres</a>. De quoi se demander si d’autres facteurs n’étaient pas à l’œuvre pour intensifier localement l’épidémie. Peu de temps après, l’attention s’est portée sur le pyriproxyfène, un insecticide approuvé dans le monde entier pour <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5760164/">lutter contre les insectes en agriculture et dans les habitations - il est notamment utilisé dans les colliers pour animaux</a>. Il se trouvait que le pyriproxyfène était utilisé intensivement dans les régions où ont été enregistrés le plus grand nombre de cas.</p>
<p>Fin 2014, le pyriproxyfène a été introduit dans l’eau potable pour tenter de contrôler la population du moustique <em>Aedes aegypti</em> responsable de la propagation des virus de la Dengue et de la Zika. Malheureusement, l’insecticide s’est accumulé dans l’environnement pendant des années, jusqu’à se retrouver dans le corps humain.</p>
<p>Contre les effets secondaires potentiels, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a recommandé de <a href="https://www.who.int/water_sanitation_health/dwq/chemicals/pyriproxyfenvector.pdf">limiter l’absorption quotidienne de pyriproxyfène</a> à 0,3 mg/l pour un adulte, et que les concentrations dans l’eau potable soient inférieures à 0,01 mg/l. Comme les bébés et les enfants à naître absorbent ou accumulent généralement davantage que les adultes, ils peuvent se trouver plus exposés.</p>
<p>Du fait du fort chevauchement géographique entre l’utilisation de l’insecticide et les cas de microcéphalie, même ces petites doses ont soulevé des questions sur son innocuité. Cependant, les résultats des études <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1473309917307272?via%3Dihub">épidémiologiques</a> et <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11356-020-10517-5">expérimentales</a> destinées à déterminer l’implication du pyriproxyfène dans les cas de microcéphalie observés ont donné des résultats contradictoires : il n’est toujours pas clairement établi si, et comment, ce pesticide pourrait être impliqué…</p>
<p>Notre groupe de recherche de l’UMR PhyMA à Paris (département Adaptations du Vivant – Muséum national d’histoire naturelle/CNRS) a tenté de faire la lumière sur cette question. Nos travaux, dont les résultats ont été récemment publiés, révèlent que le pyriproxyfène perturbe la signalisation des hormones thyroïdiennes, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0269749121012367#bib54">modifiant au passage des processus cruciaux pour le bon développement cérébral</a>.</p>
<h2>Identification comme perturbateur endocrinien</h2>
<p>L’hormone thyroïdienne est une molécule essentielle à la croissance et au développement du corps en général, et du cerveau chez les fœtus en particulier. Sans elle, le cerveau ne se développe pas normalement, laissant les enfants touchés avec un faible quotient intellectuel et d’importants handicaps mentaux. Ce terrible ensemble de troubles (identifié sous le terme de crétinisme) est presque éradiqué dans les pays occidentaux, mais reste courant dans les pays en développement. Comment savoir s’il existe un lien entre ces atteintes et le pyriproxyfène ?</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/414332/original/file-20210803-25-14b0hxc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/414332/original/file-20210803-25-14b0hxc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/414332/original/file-20210803-25-14b0hxc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/414332/original/file-20210803-25-14b0hxc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/414332/original/file-20210803-25-14b0hxc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/414332/original/file-20210803-25-14b0hxc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/414332/original/file-20210803-25-14b0hxc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Nos tétards génétiquement modifiés émettent une lumière verte en présence d’hormone thyroïdienne (T3 sur cette image). En présence de pyriproxifène (4’-OH-PPF), la fluorescence chute, prouvant que l’insecticide bloque l’action de l’hormone.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Petra Spirhanzlova/.MNHN</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nous élevons, dans notre laboratoire, des têtards de xénope (<a href="https://inpn.mnhn.fr/espece/cd_nom/79265/tab/fiche"><em>Xenopus laevis</em></a>) génétiquement modifiés qui émettent une fluorescence verte lorsqu’ils sont exposés à l’hormone thyroïdienne. Plus la couleur verte est intense, plus l’hormone est présente et active… Or, lorsque nous avons exposé nos têtards au pyriproxyfène, le signal vert a chuté de façon spectaculaire. Ce résultat prouve que le pesticide bloque l’action de l’hormone thyroïdienne. Avec pour conséquence, chez ces animaux, de mener à un développement cérébral et des comportements anormaux. Ces changements semblent dus au fait qu’un certain nombre de gènes ne s’expriment pas comme à l’accoutumée chez les tétards exposés au pesticide.</p>
<p>Restait à élucider les raisons de son effet néfaste lors du développement embryonnaire. Pour rappel, l’un des rôles les plus importants de l’hormone thyroïdienne est d’assurer, durant cette étape, un équilibre entre nombre de neurones et nombre de cellules gliales (leurs cellules de soutien). Comme le pesticide bloque l’action normale de l’hormone, nous avons pensé qu’il pourrait également affecter la production de ces cellules constitutives essentielles du cerveau.</p>
<p>Pour étayer notre hypothèse, nous avons cultivé des cellules souches (issues de cerveaux de souris) et les avons exposées à des doses croissantes de pyriproxyfène. Les résultats ont été clairs : plus la dose était élevée, moins étaient générées de cellules gliales et plus ces dernières mouraient. Le ratio entre cellules nerveuses et cellules gliales s’en trouvait donc déséquilibré.</p>
<h2>Comment le pyriproxyfène pourrait exacerber le Zika</h2>
<p>Pour aller plus loin dans l’explication, nous avons vérifié le niveau d’expression des gènes dans les cellules souches exposées à l’insecticide. Nous avons observé qu’un certain nombre n’étaient pas exprimés normalement. Parmi les gènes affectés figure le gène <em>Msi1</em>, à l’origine de la protéine Musaschi-1 utilisée par le virus Zika <a href="https://doi.org/10.1126/science.aam9243">pour se répliquer et infecter d’autres cellules</a>. </p>
<p>Nous savions, grâce à des études antérieures, qu’une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1934590912001737?via%3Dihub">augmentation de l’hormone thyroïdienne entraînait une diminution de Musaschi-1</a>. Étant donné que le pyriproxyfène bloque l’action de l’hormone, la protéine Musaschi-1 est présente en plus grande quantité au sein des cellules qui sont exposées à ce pesticide. C’est pourquoi nous avons envisagé qu’en augmentant la concentration de Musaschi-1, le pyriproxyfène pourrait permettre au virus de se répliquer plus rapidement. Pour le vérifier, nous avons infecté nos cultures de cellules souches (exposées à l’insecticide et non exposées) avec le virus Zika. </p>
<p>Si nous n’avons pas observé d’augmentation du taux d’infection par le virus, dans les cellules exposées au pyriproxyfène, le fonctionnement de gènes clés a bien été altéré, ce qui n’a pas été observé dans les cellules non exposées. L’exposition aux pesticides pourrait donc altérer le développement cérébral, ajoutant à l’impact du virus Zika sur les capacités intellectuelles de l’enfant à naître. Étant donné l’importance des enjeux, il sera nécessaire d’approfondir les recherches sur cette question.</p>
<h2>Il faut mener plus de recherches sur les interactions pesticide-virus</h2>
<p>Ce n’est pas la première fois qu’il est soupçonné qu’un pesticide peut avoir une influence sur l’évolution d’une maladie. Des travaux ont notamment révélé l’existence d’une association entre des taux sanguins élevés d’acide perfluorobutanoïque (un perturbateur endocrinien très répandu) <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0244815">et un risque accru de développer une forme plus grave de la Covid-19</a>. Or, nous n’avons aucune idée de la manière dont de nombreux pesticides omniprésents dans notre quotidien nous affectent, ou interagissent avec les maladies virales.</p>
<p>Pour cette raison, les pesticides doivent faire l’objet de protocoles de tests améliorés, qui permettront d’obtenir des données plus solides, utilisables par les décideurs pour étayer leurs politiques de santé. Soulignons que l’Europe a récemment réautorisé le pyriproxyfène, bien qu’à des concentrations différentes de celles de l’OMS.</p>
<p>Notre étude souligne, une fois de plus, combien nous en savons peu sur les effets néfastes des pesticides sur notre santé – sur notre développement cérébral, sur notre environnement, etc. Dans le contexte de risque d’épidémies émergentes en lien avec le changement climatique, ce type de données doit nous alerter quant à l’importance de cet enjeu pour la protection des générations futures.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/165077/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pieter Vancamp a reçu des financements de la Fondation pour la recherche médicale et le European Thyroid Association.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Barbara Demeneix ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
L’explosion au Brésil des cas de bébés frappés de microcéphalie a choqué le monde. Le virus Zika a vite été incriminé, à raison. Mais le rôle aggravant du pesticide pyriproxyfène était passé inaperçu…
Pieter Vancamp, Post-doctorant, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
Barbara Demeneix, Professor Physiology, Endocrinology, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/156525
2021-03-05T21:31:30Z
2021-03-05T21:31:30Z
« Retour sur… » : Comment expliquer l’émergence accrue des « nouvelles maladies » ?
<p><em><strong>« Retour sur… »</strong>, un podcast pour décrypter l’actualité avec les expert·e·s.</em></p>
<hr>
<p>Encore inconnue il y a quelques mois, la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/covid-19-82467">Covid-19</a> polarise depuis l’hiver 2020 toute notre attention. Pas un jour sans que les scientifiques découvrent quelque chose à son sujet ou qu’on se désole de ne pouvoir s’en débarrasser plus vite. Si ses conséquences sur la santé mondiale lui donnent un retentissement inédit, la Covid-19 est toutefois une maladie émergente parmi d’autres.</p>
<p>Ces dernières années, d’autres maladies infectieuses ont en effet suscité la peur – <a href="https://theconversation.com/la-mysterieuse-disparition-du-premier-virus-sras-et-pourquoi-il-nous-faudra-un-vaccin-pour-nous-debarrasser-du-deuxieme-137957">SRAS</a>, <a href="https://theconversation.com/mers-comment-ce-virus-a-emerge-et-ce-que-lon-peut-faire-56374">MERS</a>, <a href="https://theconversation.com/zika-dengue-west-nile-ces-virus-exotiques-qui-nous-menacent-120683">Zika</a>, <a href="https://theconversation.com/fr/topics/ebola-24917">Ebola</a>, etc. Pour mieux comprendre comment apparaissent ces « nouvelles maladies » et ce que l’on sait de leurs causes – notamment en lien avec les perturbations environnementales (changement climatique, atteintes à la biodiversité) –, nous accueillons pour ce nouvel épisode Marisa Peyre, épidémiologiste au Cirad et spécialiste des maladies émergentes.</p>
<iframe src="https://embed.acast.com/601af1d942a1b65a0f451f54/6041f0571e60fa0a6a35516c?cover=true&ga=false" frameborder="0" allow="autoplay" width="100%" height="110"></iframe>
<p><a href="https://soundcloud.com/theconversationfrance/covid-19-comment-expliquer-l"><img src="https://images.theconversation.com/files/359064/original/file-20200921-24-prmcs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=218&fit=crop&dpr=2" alt="Listen on SoundCloud" width="268" height="70"></a></p>
<p><a href="https://open.spotify.com/episode/5wthUs3iFD4KhjcdjRnqX8"><img src="https://images.theconversation.com/files/321535/original/file-20200319-22606-1l4copl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=183&fit=crop&dpr=1" width="268" height="70"></a></p>
<p><a href="https://podcasts.apple.com/us/podcast/covid-19-comment-expliquer-l%C3%A9mergence-accrue-nouvelles/id1552192504?i=1000511685911"><img src="https://images.theconversation.com/files/321534/original/file-20200319-22606-q84y3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=182&fit=crop&dpr=1" alt="Listen on Apple Podcasts" width="268" height="68"></a></p>
<hr>
<p><em>Conception, Jennifer Gallé. Production, Romain Pollet</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/156525/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
Entretien avec l’épidémiologiste Marisa Peyre pour mieux comprendre comment apparaissent les nouvelles maladies et en identifier les causes.
Jennifer Gallé, Cheffe de rubrique Environnement + Énergie, The Conversation France
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/144470
2020-11-03T19:48:44Z
2020-11-03T19:48:44Z
« Les gens sont mon habitat » : un chercheur se met dans la peau du coronavirus pour mieux l’expliquer
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/356812/original/file-20200907-20-tf3f7j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Micrographie électronique en transmission de particules du virus SRAS-CoV-2. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/niaid/49645402917/in/album-72157712914621487/">NIAID</a></span></figcaption></figure><p><em>Depuis des mois, on ne parle que de lui… sans jamais cependant entendre son point de vue ! Franck Courchamp, directeur de recherche au CNRS et titulaire de la Chaire Axa sur la biologie des invasions (Université Paris-Saclay), s’est glissé le temps d’une interview imaginaire dans la peau de ce coronavirus SARS-CoV-2 qui affole la planète. Au-delà de l’aspect ludique de cette « rencontre », c’est aussi une façon pour le scientifique de nous faire changer de perspective sur les enjeux de la pandémie et des enseignements qu’il serait heureux d’en tirer.</em></p>
<hr>
<p><strong>Qui êtes-vous, coronavirus ?</strong></p>
<p>Je commencerais par dire, modestement, que je suis le King. Le roi. Après tout, <em>corona</em> en latin signifie « couronne », vous le reconnaissez donc vous-même en me donnant ce nom. Je suis un petit bijou de l’évolution, pourtant, je suis resté assez simple. Paradoxalement, cette simplicité est une source d’incompréhension pour vous. Vous avez déjà du mal à vous décider sur un point aussi basique que de savoir si je suis ou non vivant… À votre décharge, vous vous posez la même question <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/fondamental/biologie-cellulaire/question-de-la-semaine-peut-on-considerer-les-virus-comme-des-etres-vivants_111864">pour tous mes autres confrères virus</a>.</p>
<p>Personnellement, cela m’importe peu de savoir où vous me classez. Il est vrai que mon fonctionnement diffère sensiblement de celui des êtres vivants. Vous pouvez voir en moi une sorte de machine biologique microscopique. Mon programme est très simple : survivre et me reproduire pour perdurer d’une génération à l’autre. En cela, j’ai exactement le même objectif que toutes les espèces vivantes.</p>
<p>La différence est sûrement que n’ai pour cela besoin que du strict minimum : je m’introduis dans les cellules de mon hôte, et j’y emprunte tout ce qu’il faut pour fonctionner. En détournant la machinerie des cellules que j’infecte, je fabrique des copies de moi-même, je me réplique autant que je peux. Mes semblables, des particules virales toutes neuves, sont ensuite relâchées partout autour, et partent à l’assaut d’autres cellules. Nous, les <a href="https://theconversation.com/ce-que-les-coronavirus-font-a-notre-corps-130898">coronavirus</a>, produisons 1 000 virus par cellule infectée, en à peine dix heures !</p>
<p>Et pourtant, je ne suis pas grand. Mon diamètre est de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7224694/">l’ordre de la centaine de nanomètres</a>, soit un dix-millième de millimètre.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1314996537898885121"}"></div></p>
<p>Je suis donc mille fois plus petit que les bactéries, elles-mêmes 10 à 100 fois plus petites qu’une cellule humaine. 50 000 milliards de fois plus petit qu’une goutte d’eau. À mon échelle, vos cellules sont bien plus grandes pour moi que ne le sont vos villes pour vous.</p>
<p><strong>Pourquoi infectez-vous les gens ?</strong></p>
<p>C’est une question étrange. Les gens sont mon habitat, mon écosystème, et mes ressources. C’est comme si je vous demandais pourquoi vous vivez dans cette plaine ou sur cette montagne.</p>
<p>Cependant, contrairement à vous, je n’ai pas une vie facile de sédentaire. Je suis un nomade, car mon vaisseau (vous, ou les animaux que j’infecte) n’est pas immortel. Afin de me perpétuer, je dois donc sans cesse passer à un autre hôte avant que le premier ne disparaisse. Il faut reconnaître que parfois, nous y sommes un peu pour quelque chose : certains de nos hôtes ne supportent pas nos proliférations, qui peuvent avoir tendance à abîmer leurs organes. Mais il arrive aussi que nos hôtes soient victimes de la guerre que nous livre leur système immunitaire, <a href="https://theconversation.com/conversation-avec-frederic-altare-lobesite-facteur-tres-aggravant-du-covid-19-137920">qui finit parfois hors de contrôle</a>.</p>
<p><strong>Comment nous infectez-vous ?</strong></p>
<p>En ce qui me concerne, mes moyens sont simples et vous avez déjà percé certains de mes secrets, comme celui qui consiste à voyager dans les gouttelettes de postillons, d’éternuement, et à rester sur les mains ou les objets manipulés par les gens qui ont touché leur salive ou leur morve.</p>
<p>Je peux caser <a href="https://www.adioscorona.org/questions-reponses/2020-04-21-chiffres-sars-covid.html">100 milliards de mes congénères par millilitre dans un crachat</a> et je peux tenir <a href="https://www.adioscorona.org/questions-reponses/2020-04-23-combien-de-temps-le-virus-est-il-infectieux.html">cinq jours sur du plastique ou sept jours sur un masque chirurgical</a>. Je ne suis pas très sophistiqué, mais efficace. Comme tous les autres virus en fait. L’efficacité, ça nous connaît, nos adaptations n’ont pas de limites.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/coronavirus-sars-cov-2-qua-t-on-appris-jusquici-146545">Coronavirus SARS-CoV-2 : qu’a-t-on appris jusqu’ici ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Prenons, par exemple, la difficulté majeure de la transmission à un autre hôte. Pourquoi croyez-vous que lorsque vous êtes infectés, vous éternuez ? Une fois contaminé, vous voilà transformé en puissant spray capable de nous transporter à plus de 50 km/h dans un nuage de dizaines de milliers de gouttelettes vers nos nouvelles victimes (ou dans vos mains, que vous mettez ensuite un peu partout).</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/piCWFgwysu0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">L’éternuement est un moyen très efficace de diffusion des pathogènes respiratoires….</span></figcaption>
</figure>
<p>Autre exemple : pas facile de bouger quand on n’a pas de pied. Heureusement, vous avez de la morve, et vous en produisez d’autant plus quand nous vous infectons, nous les virus respiratoires. Pas étonnant : c’est un moyen de transport bien pratique pour nous transmettre plus facilement… Certains autres virus choisissent des fluides différents, liquéfient vos selles et vous donnent la diarrhée. Résultat : une transmission de masse très efficace également… Aucun contact avec personne ? Qu’à cela ne tienne : nous pouvons nous loger dans vos fluides séminaux et nous transmettre lors des rapports sexuels. Vous pouvez vous isoler tant que vous voudrez, en tant qu’espèce, vous êtes bien obligés de passer par la reproduction à un moment où à un autre…</p>
<p>Quant aux virus qui font changer les comportements pour permettre une transmission plus facile, comme la rage, qui désoriente et rend agressif, prêt à mordre, difficile de lutter contre ça, n’est-ce pas…</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/356802/original/file-20200907-24-1rfijqt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/356802/original/file-20200907-24-1rfijqt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/356802/original/file-20200907-24-1rfijqt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/356802/original/file-20200907-24-1rfijqt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/356802/original/file-20200907-24-1rfijqt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/356802/original/file-20200907-24-1rfijqt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/356802/original/file-20200907-24-1rfijqt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Micrographie électronique à balayage d’une cellule fortement infectée par des particules du virus du SARS-CoV-2 (en jaune), isolée à partir d’un échantillon prélevé sur un patient.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nihgov/50098153461/in/photolist-2jynB5V-2jk2hum-2jk18mh-2iTjLFU-2iEP3MV-2iH8Kxi-2iERQ6u-2jcerea-2jfwmb2-2jfwm7p-2iCRVSJ-2jk18Cz-2jfwm3X-2iTjLJQ-2iH8KzC-2jk18s4-2iDVeRk-2ivWYAQ-2iYmxva-2j4dFiW-2iLBJKi-2iCRVRX-2inuGL9-2iCUCv6-2ivY9Xk-2iETgaX-2jciuth-2iERQ8d-2iERQiZ-2itfPmQ-2iCUCvw-2iG5wqt-2ivY9VB-2jfzdMX-2iLBJK3-2iDSu3E-2iDVeUX-2iDSu77-2iDWFNp-2iDVeVt-WwL7yT-2iERQmQ-2iNeJNB-2iG5wss-2iCUCvr-wewpg4-2ivUoUn-2ivUoW6-2ivUoVj-2itgZyx/">NIAID/NIH</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><strong>Pourquoi vous, virus, en voulez-vous ainsi aux humains ?</strong></p>
<p>Il ne faut pas être si nombriliste. Nous ne vous en voulons pas, nous n’éprouvons aucun sentiment, ni bon ni mauvais, envers vous. Vous êtes juste des vaisseaux de choix.</p>
<p>Car il faut dire qu’en tant qu’hôtes, les humains sont parfaits. Ils nous facilitent les choses à de nombreux points de vue. Déjà, ils vivent souvent dans des lieux très denses, et leur population globale est interconnectée. Ce qui nous donne à nous autres virus presque systématiquement accès à la totalité des hôtes disponible, d’un bout à l’autre de la planète !</p>
<p>Je l’ai bien démontré ces derniers mois : parti d’une région quelconque de Chine, j’ai très rapidement (et sans petites pattes), réussi à m’inviter sur tous les continents, et jusque dans les coins les plus reculés du globe. Les autres populations animales sont généralement fragmentées, ce qui limite notre potentiel de dispersion et nous cantonne à de petites régions. On y tourne un peu en rond. Mais avec les humains, c’est autre chose ! Plus une mer, plus une montagne ne nous arrête. Nous voyageons d’un hôte à l’autre par bateau, par avion : des perspectives sans frontières, sans limites ! En théorie, en moins d’une semaine, je peux créer des foyers d’infection sur tous les continents.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1323194990382796800"}"></div></p>
<p>En outre, vous nous facilitez les choses : les êtres humains maintiennent une grande partie de leur population dans des conditions sanitaires assez déplorables, ce qui facilite grandement notre transmission. Sans parler des comportements de certains de vos dirigeants, qui n’ont soit pas la moralité soit pas l’intelligence d’agir avec responsabilité. Tout cela crée pour nous des opportunités incroyables dans certains coins du monde, où l’épidémie est officiellement minimisée pour ne pas avoir à être contrôlée…</p>
<p><strong>Mais, à la base, vous n’infectiez pas les humains…</strong></p>
<p>Effectivement, j’étais <a href="https://theconversation.com/covid-19-lanalyse-des-genomes-revelerait-une-origine-double-du-virus-133797">à l’origine inféodé à d’autres espèces animales</a>. Mais pour toutes les raisons que je viens d’expliquer, nous, les <a href="https://theconversation.com/maladies-emergentes-dorigine-animale-dou-viendra-la-prochaine-menace-136208">virus qui infectent d’autres animaux</a> que l’être humain, avons de quoi être jaloux de ceux qui ont su s’adapter à un tel hôte ! Toutefois, à force de nous copier et nous recopier au sein des cellules que nous infectons, il se trouve que de temps à autre, une de nos répliques mute, et devient légèrement différente des autres. Et, de temps en temps, un de ces mutants tire le gros lot : sa mutation le rend capable de survivre dans – et de se transmettre via – d’autres animaux que ceux que ses congénères infectent habituellement. Cette nouvelle souche de virus est alors prête à changer d’hôte.</p>
<p>Mais cette situation est très rare. D’autant plus rare qu’il ne s’agit pas seulement d’acquérir la capacité à infecter une nouvelle espèce animale : encore faut-il en être assez proche pour pouvoir l’infecter ! La probabilité que ces événements coïncident est assez infime, mais deux facteurs jouent pour nous.</p>
<p>D’une part, nous sommes très, très nombreux. Vous êtes environ 5 000 espèces de mammifères ? Nous avons environ 320 000 virus différents infectant les mammifères ! Une bien belle panoplie de possibilités, puisque plus il y a de virus, plus il y a de mutations.</p>
<p>D’autre part, vous les humains nous facilitez la chose en multipliant les contacts avec les autres espèces, et donc les chances que l’on a de vous rencontrer, et de passer chez vous. Entre toutes ces incursions brutales que vous effectuez dans les territoires fragilisés d’espèces déjà stressées par la chasse, le manque d’habitat et de ressources, la pollution ou le climat, et toutes les espèces sauvages que vous chassez, encagez, entassez sur vos marchés, mangez plus ou moins bien cuites, à raison de millions de tonnes par an, les opportunités de vous infecter sont de plus en plus fréquentes. C’est ainsi que le <a href="https://www.ird.fr/layout/set/print/la-mediatheque/fiches-d-actualite-scientifique/465-l-origine-geographique-du-sida-a-present-connue">VIH</a>, le <a href="http://www.ipubli.inserm.fr/handle/10608/4817">SARS</a>, l’<a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/ebola">Ebola</a>, le <a href="https://theconversation.com/virus-zika-premiers-cas-de-transmission-en-france-metropolitaine-par-le-moustique-tigre-125675">Zika</a> ou le <a href="https://theconversation.com/mers-comment-ce-virus-a-emerge-et-ce-que-lon-peut-faire-56374">MERS</a> sont passés chez vous ces dernières années.</p>
<p>On peut d’ailleurs ajouter que lorsqu’un virus ne tombe pas sur l’humain, mais sur une de ses espèces domestiques, le résultat est assez similaire. Lorsque vous grignotez le territoire des chauves-souris et installez aux pieds de leurs habitats dévastés des élevages intensifs de porcs, vous augmentez les chances qu’un virus de chauve-souris (au hasard, le <a href="https://www.who.int/csr/disease/nipah/fr/#:%7E:text=Le%20virus%20Nipah%20a%20%C3%A9t%C3%A9,avait%20pas%20d%E2%80%99h%C3%B4te%20interm%C3%A9diaire.">Nipah</a>) passe au porc lorsque celui-ci entre en contact avec leur salive ou leurs déjections (dans lesquels les virus sont présents). Comme ces porcs vivent en très grande densité et en conditions sanitaires appauvries, les chances de transmissions augmentent et rien ne nous arrête.</p>
<p>Imaginez des hôtes côte à côte, à perte de vue, affaiblis, stressés, vivants dans leurs déjections et parmi les cadavres déjà tombés, pour un virus, c’est buffet à volonté ! C’est ainsi que les copains de la <a href="https://theconversation.com/grippe-aviaire-comment-le-virus-h5n1-a-contamine-les-elevages-francais-1-53601">grippe aviaire H5N1</a> et de la grippe porcine ont pris d’assaut les élevages de volailles et de porcs il y a quelques années. Ces concentrations d’hôtes en mauvaise santé mènent à des concentrations extraordinaires de virus. Cela augmente nos chances de passer ensuite de l’animal domestique à l’humain. Comme le Nipah (qui entraîne de 40 à 75 % de mortalité chez vous), ou le H5N1.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1228391003519934471"}"></div></p>
<p>Et comme je l’ai dit plus haut, la difficulté (toute relative maintenant) est d’infecter le premier humain. Après, votre système de mondialisation fait le reste. À croire que vous avez créé tout cela pour la libre circulation des virus ! Donc, merci beaucoup, thank you very much, danke schöne, 衷心感谢, muchas gracias, большое спасибо, etc.</p>
<p><strong>Avez-vous conscience du mal que vous faites ?</strong></p>
<p>Nous ne vous voulons pas plus de mal qu’un mouton ne voudrait du mal à une touffe d’herbe. Si l’on avait le choix, évidemment on préférerait que nos humains infectés ne meurent jamais et continuent à nous abriter indéfiniment. Ça nous faciliterait grandement la vie, croyez-moi. Mais leur caractère mortel nous pousse parfois à nous répliquer rapidement pour pouvoir infecter un autre humain avant que le premier ne meure. Cette réplication intense crée des symptômes qui leur sont parfois nocifs, voire même fatals. Un des problèmes est que si l’on reste tranquille et faisons profil bas, nos faibles effectifs de départ risquent d’être rapidement submergés par vos défenses immunitaires, si nous ne parvenons pas à nous cacher assez bien dans votre corps. Entre survivre sans trop nuire et être éliminé, l’équilibre n’est pas facile à trouver !</p>
<p>Quoi qu’il en soit, nous les virus et les espèces que nous infectons sommes la plupart du temps liés par des centaines de milliers d’années de coévolution, si bien qu’au final nous sommes généralement bien « adaptés » les uns aux autres, avec dans la grande majorité des cas, peu de dégâts d’un côté ou de l’autre.</p>
<p>Surtout, il ne faut pas oublier que nous autres virus jouons un rôle régulateur important sur les populations des autres êtres vivants (des micro-organismes aux plantes en passant par les animaux). Si nous disparaissions tous du jour au lendemain, il est possible que celles-ci finissent par être en surpopulation, risquant de mourir de faim après avoir tellement augmenté qu’elles en épuiseraient leurs ressources… D’ailleurs, on dit que nous sommes d’une importance majeure pour l’<a href="https://lejournal.cnrs.fr/articles/les-virus-sont-une-des-forces-majeures-qui-faconnent-la-biosphere">écologie et l’évolution</a> du monde vivant.</p>
<p>Et puis, nombre de virus sont bénéfiques pour vous, par exemple parce qu’ils tuent des bactéries que vous n’appréciez pas non plus vraiment. Certains envisagent même de les <a href="https://www.vidal.fr/actualites/24064/la_phagotherapie_la_renaissance_d_un_vieux_traitement/">utiliser pour suppléer aux antibiotiques !</a>. Par ailleurs, n’oublions pas que les virus peuvent avoir un effet qu’on pourrait qualifier de « neutre ». Chez l’humain, toujours, puisqu’il n’y a que cela qui vous intéresse, on recense environ 5 000 virus différents, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Virus">mais moins de 3 % d’entre eux provoquent une maladie</a>, autrement dit sont « pathogènes ». Ce n’est finalement pas tant que ça…</p>
<p>Enfin, il y a tous les virus qui s’intéressent tellement peu à vous que vous ne vous y intéressez pas non plus. Présents dans le sol, en suspension dans l’air, flottant dans l’eau, ils infectent les plantes, les insectes ou les étoiles de mer… On trouve par exemple un million de virus en suspension dans un litre d’eau de mer. En fait, il y a tellement de virus en <a href="https://www.nature.com/articles/nrmicro1750">suspension dans les océans</a> que, mis bout à bout et malgré leur taille ridiculement minuscule, la longueur obtenue représenterait une distance dépassant les galaxies voisines de la nôtre.</p>
<p>Encore une fois, les virus sont partout, même si vous ne les voyez pas… Et parfois, ils sont sous vos yeux, et vous ne les reconnaissez pas, comme ces <a href="http://www.cnrs.fr/fr/pandoravirus-des-virus-geants-qui-inventent-leurs-propres-genes">extraordinaires virus géants</a>, plus gros que certaines bactéries, avec qui <a href="https://www.pourlascience.fr/sd/microbiologie/les-virus-geants-6759.php">on les a initialement confondus</a>…</p>
<p><strong>D’ailleurs, d’où venez-vous, vous autres virus ?</strong></p>
<p>J’imagine que vous voulez dire de quand venons-nous ? En fait, nous avons toujours été là. En tout cas depuis que les humains existent, et même bien avant vos premiers ancêtres animaux. Certains disent que nous sommes plus anciens que les bactéries les plus anciennes.</p>
<p>Déjà présents à l’origine du vivant, nous avons joué un rôle essentiel dans l’évolution, notamment en permettant des transferts de gènes non pas d’une génération à l’autre, mais bien entre les espèces. Nous sommes tellement anciens que certains d’entre nous se sont intégrés dans vos génomes ici et là, pour finalement faire partie intégrante de vous.</p>
<p>Au total, <a href="https://www.lemonde.fr/passeurdesciences/article/2012/05/28/les-humains-sont-apparentes-aux-virus_5986230_5470970.html">pas loin de 10 % de votre génome est de l’ADN de virus</a> assimilé dans vos chromosomes. Et de tous ces nouveaux gènes que nous vous avons offerts, certains sont importants, voire essentiels. Chez les mammifères par exemple, l’embryon n’est accepté par le système immunitaire de la mère malgré son caractère étranger (c’est un hybride entre le père et la mère), que par l’existence du placenta, dont l’origine est due à un virus intégré dans votre génome. Alors, merci qui ?</p>
<p><strong>Et vous-même, d’où venez-vous, coronavirus SARS-CoV-2 ?</strong></p>
<p>Quelle espèce mes ancêtres infectaient avant de passer chez vous ? Je ne le sais pas. Mais chauve-souris, pangolin, singe, ou autre, qu’importe ? Que feriez-vous si vous le découvriez ? Vous arrêteriez de braconner et dévorer cette espèce ? Vous l’extermineriez ? Feriez-vous pareil pour toutes les espèces dont vous risqueriez d’attraper les virus ? Impossible évidemment, il s’agirait de pratiquement tous les animaux…</p>
<p>Et pourquoi cherchez-vous des coupables quand ils sont tout désignés ? Les coupables ne sont-ils pas plutôt ceux qui « vont chercher » les virus en perturbant des systèmes virus-animal relativement hermétiques depuis des millions d’années ? Si vous vous faites griffer par un chat que vous embêtez, vous allez éliminer tous les chats ? Ne devriez-vous pas plutôt apprendre à cesser de leur tirer la queue ?</p>
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<p><strong>Comment se débarrasser de vous ?</strong></p>
<p>En théorie c’est assez simple. Il suffit de concevoir les épidémies comme des incendies de forêt. L’un et l’autre sont des phénomènes naturels, mais lorsque vous jouez avec les lois de la nature, ils peuvent devenir hors de contrôle.</p>
<p>Les incendies sont, par exemple, favorisés par une accumulation de conditions favorables (comme du bois mort qui s’entasse). Après une flambée rapide, ils disparaissent généralement : soit parce qu’ils arrivent dans des zones où les arbres sont trop éloignés pour que les flammes passent de l’un à l’autre (l’équivalent de votre distanciation sociale), soit parce qu’ils arrivent dans des zones où les espèces d’arbres sont moins inflammables (ils sont immunisés contre le feu).</p>
<p>Dans le cas des épidémies naturelles, la situation est relativement similaire. Elles émergent puis se propagent jusqu’à ce que la contagion soit freinée parce que la plupart des infectés échouent à contaminer d’autres personnes. Cela peut être dû au fait qu’ils n’en rencontrent plus (à cause de la mise en place de mesures de distanciation sociale, de quarantaine…), ou parce que ceux qu’ils rencontrent sont immunisés (immunité acquise lors d’une infection passée, ou grâce à la vaccination). Si le rythme des infections diminue, alors l’épidémie s’atténue, jusqu’à disparaître.</p>
<p><strong>La question importante est donc plutôt de savoir comment ne pas attraper le prochain de vos congénères virus ?</strong></p>
<p>Effectivement, car il ne s’agit pas de savoir « si » un nouveau virus dangereux pour l’être humain émergera à partir d’une autre espèce, mais « quand ».</p>
<p>Serez-vous prêts ? Mieux vaut être capable répondre rapidement, car les épidémies venant d’animaux sauvages <a href="https://theconversation.com/lemergence-des-nouvelles-epidemies-saccelere-comment-y-faire-face-140568">se multiplient depuis quelques années</a>, et vos sociétés ont déjà goûté à mes cousins virus sur plusieurs continents…</p>
<p>Nous les virus émergents avons tué des millions des vôtres, frappant parfois vos congénères au hasard, ou nous attaquant à des catégories très ciblées (comme ici les plus vulnérables physiquement). Nous avons mis à mal vos systèmes économiques et politiques, nous vous avons enfermé chez vous, terrorisés, <a href="https://theconversation.com/covid-19-entre-remedes-miracles-et-theses-complotistes-retour-sur-la-vague-infodemique-137099">fait naître les théories complotistes</a> les plus absurdes… Qu’en avez-vous retenu ?</p>
<p><strong>Et vous, que nous réservez-vous dans le futur ?</strong></p>
<p>Je serais bien en peine de vous le dire : moi et ma prolifique descendance nous allons au hasard des infections et des mutations.</p>
<p>Si vous survivez à mon passage dans votre organisme, serez-vous immunisés contre mon retour, une fois guéris ? Je ne sais pas, et ce n’est pas mon problème. Serez-vous capables de me maintenir à distance à coup de masques et de distanciation physique lors de la seconde vague hivernale ? Nous allons le découvrir ensemble.</p>
<p>Une chose est sûre : je ne resterai pas absolument identique d’une année sur l’autre. Rappelez-vous, nous les virus, nous mutons. Et si nous sommes très nombreux – comme, par exemple, quand des millions d’humains sont infectés, ce qui est le cas actuellement – alors ces mutations sont plus nombreuses aussi.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/coronavirus-sars-cov-2-qua-t-on-appris-jusquici-146545">Coronavirus SARS-CoV-2 : qu’a-t-on appris jusqu’ici ?</a>
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<p>Parmi elles, la plupart des mutations donne des souches moins viables, moins contagieuses ou moins virulentes. Celles-ci disparaîtront vite. Plus rarement, des mutations donnent des souches plus contagieuses ou plus mortelles. Même si ces mutations plus dangereuses sont moins fréquentes chez les coronavirus, plus vous avez du mal à nous tenir en échec, plus nous sommes nombreux, et donc mathématiquement plus vous augmentez les chances qu’une souche plus dangereuse apparaisse…</p>
<p>Rassurez-vous cependant : un virus qui devient tellement dangereux qu’il détruit totalement sa population hôte, cela n’existe pas. Tout simplement parce qu’il détruirait en même temps ses ressources, son écosystème et son environnement. Il disparaîtrait donc du même coup. Et même si je ne suis pas intelligent, je ne suis pas assez bête pour détruire mon propre environnement. Qui le serait ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/144470/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Franck Courchamp ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Un dix-millième de millimètre, c’est la taille du SARS-CoV-2 à l’origine de la pandémie de Covid-19. Comment cet organisme peut-il avoir de tels effets sur la santé mondiale ? Rencontre imaginaire.
Franck Courchamp, Directeur de recherche CNRS, Université Paris-Saclay
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/141298
2020-09-15T20:44:35Z
2020-09-15T20:44:35Z
La pandémie de Covid-19 ne doit pas nous faire oublier la dengue
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/354661/original/file-20200825-18-2437gy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le moustique de la fièvre jaune Aedes aegypti prenant un repas de sang.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Aedes_aegypti_bloodfeeding_CDC_Gathany.jpg">James Gathany/Wikimedia</a></span></figcaption></figure><p>En mobilisant aujourd’hui, à juste titre, l’attention du monde entier, la pandémie de Covid-19 liée au nouveau virus SARS-CoV-2 éclipse d’autres maladies infectieuses. Or cette situation est d’autant plus alarmante qu’en détournant l’attention des gestionnaires, des décideurs et du public sur ces maladies, elle peut aggraver leur impact.</p>
<p>Dans de nombreux pays – en Afrique, en Asie et en Amérique latine – la pandémie de Covid-19 pourrait ainsi nuire aux campagnes de lutte et de prévention contre la <a href="https://www.theglobalfund.org/fr/news/2020-06-24-global-fund-covid-19-report-deaths-from-hiv-tb-and-malaria-could-almost-double-in-12-months-unless-urgent-action-is-taken/">tuberculose, le Sida et le paludisme (principales cibles du Fonds mondial)</a>, ainsi qu’<a href="https://www.who.int/news-room/detail/22-05-2020-at-least-80-million-children-under-one-at-risk-of-diseases-such-as-diphtheria-measles-and-polio-as-covid-19-disrupts-routine-vaccination-efforts-warn-gavi-who-and-unicef">aux campagnes de vaccination contre la diphtérie, la polio et la rougeole</a>.</p>
<p>Les maladies virales transmises par les moustiques <em>Aedes</em> – comme la dengue, le Zika, le chikungunya et la fièvre jaune – sont elles aussi concernées.</p>
<p>La situation est d’autant plus inquiétante que leurs incidences ont augmenté de façon spectaculaire <a href="https://gh.bmj.com/content/3/Suppl_1/e000530">au cours de la dernière décennie</a>, et qu’elles sont responsables de graves épidémies touchant actuellement l’<a href="https://www.paho.org/data/index.php/en/mnu-topics/indicadores-dengue-en/dengue-nacional-en/252-dengue-pais-ano-en.html">Amérique latine</a>, l’<a href="https://www.theguardian.com/global-development/2019/dec/30/asias-hardest-year-for-dengue-fever-in-pictures">Asie du Sud-Est</a> et l’<a href="https://www.anses.fr/fr/content/la-lutte-contre-le-covid-19-ne-doit-pas-occulter-les-risques-li%C3%A9s-aux-%C3%A9pid%C3%A9mies-de-dengue">océan Indien</a>.</p>
<h2>Des épidémies de dengue en série</h2>
<p>L’Amérique latine connaît cette année l’une des plus importantes épidémies de dengue jamais enregistrée dans la région. Le Brésil, très affecté par l’épidémie de <a href="https://covid19.who.int/region/amro/country/br">Covid-19</a>, a par exemple recensé plus d’un million de cas et environ 400 décès <a href="https://www.paho.org/data/index.php/en/mnu-topics/indicadores-dengue-en/dengue-nacional-en/252-dengue-pais-ano-en.html">imputés à la dengue entre janvier et juin 2020</a>. Les départements de <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/regions/ocean-indien/documents/bulletin-regional/2020/covid-19-point-epidemiologique-a-mayotte-du-25-juin-2020">Mayotte</a> et de la <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/regions/guyane/documents/bulletin-regional/2020/covid-19-point-epidemiologique-en-guyane-du-2-juillet-2020">Guyane</a> – qui font toujours face à une circulation importante de SARS-CoV-2 – sont également dans une situation préoccupante.</p>
<p>Plus largement, les territoires français d’outre-mer connaissent des <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/recherche/#search=dengue&regions=Antilles%7CGuyane%7COc%C3%A9an%20Indien">épidémies de dengue importantes</a>, avec plus de 30 000 cas signalés dans les îles de l’océan Indien depuis 2017 (<a href="https://www.santepubliquefrance.fr/regions/ocean-indien/documents/bulletin-regional/2020/surveillance-de-la-dengue-a-mayotte.-point-au-25-mai-2020">Mayotte</a> et <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/regions/ocean-indien/documents/bulletin-regional/2020/surveillance-de-la-dengue-a-la-reunion.-point-au-7-juillet-2020">La Réunion</a>) et plus de 15 000 cas dans les îles des Caraïbes (<a href="https://www.santepubliquefrance.fr/regions/antilles/documents/bulletin-regional/2020/surveillance-de-la-dengue-en-guadeloupe-et-les-iles-du-nord.-point-au-26-juin-2020">Guadeloupe, Saint-Martin, Saint-Barthélemy</a> et <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/regions/antilles/documents/bulletin-regional/2020/surveillance-de-la-dengue-en-martinique.-point-au-26-juin-2020">Martinique</a>) depuis la fin de l’année 2019.</p>
<p>Les régions tempérées de l’hémisphère nord (États-Unis et Europe), particulièrement touchées par la pandémie de Covid-19, sont aussi à risque pour ces <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Arbovirose#:%7E:text=Les%20arboviroses%20sont%20des%20maladies,anglais%20%3A%20ARthropod%2DBOrne%20virus.">arboviroses</a> durant l’été, dans les zones où les moustiques vecteurs <a href="https://www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/aedes-aegypti-current-known-distribution-may-2020"><em>Aedes aegypti</em></a> et/ou <a href="https://www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/aedes-albopictus-current-known-distribution-may-2020"><em>Aedes albopictus</em></a> sont établis. Une transmission autochtone de dengue a par exemple été détectée cet été en France, dans le <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-a-transmission-vectorielle/chikungunya/articles/donnees-en-france-metropolitaine/chikungunya-dengue-et-zika-donnees-de-la-surveillance-renforcee-en-france-metropolitaine-en-2020">département de l’Hérault</a>. Aux États-Unis, une vingtaine de cas ont été recensés en <a href="https://www.cdc.gov/dengue/statistics-maps/2020.html">Floride</a>.</p>
<p>Dans ce contexte, en avril 2020, le ministère français de la Santé a saisi l’Agence nationale de sécurité sanitaire des aliments, de l’environnement et du travail (ANSES) pour évaluer d’une part l’impact potentiel de la pandémie de Covid-19 et du confinement sur la surveillance et la lutte contre la dengue, et d’autre part la balance bénéfices/risques de l’arrêt ou de la poursuite de certaines actions de lutte antivectorielle. Ce travail d’évaluation a fait l’objet d’un rapport disponible en 3 langues (français, anglais et espagnol) sur le <a href="https://www.anses.fr/fr/content/la-lutte-contre-le-covid-19-ne-doit-pas-occulter-les-risques-li%C3%A9s-aux-%C3%A9pid%C3%A9mies-de-dengue">site de l’ANSES</a>, dont nous vous présentons ici une courte synthèse.</p>
<h2>Covid-19 et dengue dans le même temps</h2>
<p>La circulation simultanée de la Covid-19 et de la dengue peut entraîner un retard de diagnostic, et donc impacter les soins et les mesures spécifiques à chacune de ces deux maladies.</p>
<p>Les deux infections partageant certaines <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7195023/">caractéristiques cliniques</a> (fièvre, fatigue, maux de tête…), un diagnostic différentiel est nécessaire. Par ailleurs, la mise en évidence de résultats sérologiques de dengue <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7128937/">faussement positifs</a> chez des personnes atteintes de Covid-19 suscite des inquiétudes. Il faut tout faire pour éviter les erreurs de diagnostic ou d’interprétation des tests, aux conséquences dramatiques tant pour les patients que pour les interventions de santé publique (par exemple, le traçage et le dépistage des contacts pour la Covid-19, et la lutte contre les insectes vecteurs pour la dengue).</p>
<p>Ces co-infections ne sont naturellement à redouter que dans les pays où les deux virus circulent. Pour l’heure, la Guyane a déclaré le décès d’un adolescent atteint de <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/sante/guyane-deces-d-un-adolescent-atteint-du-covid-19-et-de-la-fievre-jaune_146167">Covid-19 et de fièvre jaune</a>. La co-infection par le virus de la dengue et le SARS-CoV-2 n’a pour l’instant été documentée que sporadiquement, notamment en <a href="https://www.channelnewsasia.com/news/asia/thailand-records-first-covid-19-death-coronavirus-12487738">Thaïlande</a>, à <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7128937/">Singapour</a> et à <a href="https://journals.plos.org/plosntds/article?id=10.1371/journal.pntd.0008476">La Réunion</a>. On peut néanmoins la redouter dans les pays les plus touchés par la dengue, en <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7218187/">Asie du Sud-Est</a> et en <a href="https://www.scidev.net/america-latina/salud/noticias/dengue-avanza-en-america-latina-en-plena-pandemia-de-covid-19.html">Amérique du Sud</a>.</p>
<p>Cette co-circulation des virus augmente en effet les risques sanitaires. Et dans des pays comme le <a href="https://www.mdpi.com/2414-6366/5/2/75">Brésil</a>, où les services de santé sont encore perturbés, voire débordés par la pandémie de Covid-19, la <a href="https://reliefweb.int/report/world/dengue-cases-americas-top-16-million-highlighting-need-mosquito-control-during-covid-19">coexistence des deux maladies</a> aggrave la situation. Sans compter que plusieurs sérotypes de dengue peuvent circuler en même temps, comme c’est le cas en <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/regions/guyane/documents/bulletin-regional/2020/situation-epidemiologique-de-la-dengue-en-guyane.-point-au-19-juin-2020">Guyane</a> ou <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/regions/ocean-indien/documents/bulletin-regional/2020/surveillance-de-la-dengue-a-la-reunion.-point-au-15-juin-2020">à La Réunion</a>, d’où la possibilité d’infections secondaires ou même tertiaires et donc de cas cliniques graves.</p>
<h2>Les impacts sur la surveillance de la dengue</h2>
<p>La surveillance épidémiologique de la dengue est également affectée par la mobilisation autour de la Covid-19. On l’a constaté dans tous les territoires français d’outre-mer, où une baisse des cas de dengue notifiés et déclarés juste après le démarrage du confinement a été décrite, alors même que le nombre de cas avait nettement <a href="https://www.anses.fr/fr/content/la-lutte-contre-le-covid-19-ne-doit-pas-occulter-les-risques-li %C3 %A9s-aux- %C3 %A9pid %C3 %A9mies-de-dengue">augmenté au cours des semaines précédentes</a>.</p>
<p>Cette sous-déclaration des cas de dengue, notamment pour les cas qui, sans signes cliniques de gravité, contribuent de manière importante à la transmission du virus, s’explique non seulement par le confinement et les difficultés de déplacements, mais aussi par l’inquiétude du public quant au risque d’être infecté par la Covid-19 dans les établissements de santé, ou encore par la fermeture de certains dispensaires et un accès au diagnostic rendu difficile.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/revenez-vous-faire-soigner-137748">Revenez vous faire soigner !</a>
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<h2>Lutte contre les moustiques et directives Covid-19</h2>
<p>Dernier constat alarmant : les interventions de lutte antivectorielle, et particulièrement celles concernant l’espèce <em>Aedes</em>, ont été considérablement affectées par la mobilisation de l’attention sur la Covid-19. <a href="https://www.anses.fr/fr/content/la-lutte-contre-le-covid-19-ne-doit-pas-occulter-les-risques-li %C3 %A9s-aux- %C3 %A9pid %C3 %A9mies-de-dengue">À titre d’exemple</a>, pendant le confinement, ces interventions ont été réduites <a href="https://www.naccho.org/blog/articles/the-impact-of-covid-19-on-local-vector-control-response">aux États-Unis</a> et dans tous les <a href="https://www.anses.fr/fr/content/la-lutte-contre-le-covid-19-ne-doit-pas-occulter-les-risques-li %C3 %A9s-aux- %C3 %A9pid %C3 %A9mies-de-dengue">territoires français d’outre-mer</a>.</p>
<p>De fait, nombre d’interventions contre les moustiques s’opposent a priori aux directives de prévention et de contrôle de la Covid-19, en requérant parfois un contact étroit entre les agents qui en sont chargés et la population : c’est le cas notamment lors des campagnes de sensibilisation ou les pulvérisations d’insecticides au sein de domiciles. Or en l’absence de vaccins et de traitements, la prévention et le contrôle de la dengue et d’autres maladies virales transmises par les <em>Aedes</em> <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/dengue-and-severe-dengue">reposent largement</a> sur le contrôle des populations de moustiques vecteurs, à travers une lutte antivectorielle durable, synergique et proactive – son efficacité <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6283470/">pouvant se trouver réduite</a> faute d’une mise en œuvre appropriée et intégrée.</p>
<p>Dans ces conditions, il est crucial de renforcer la communication autour de l’importance et de la nécessité des interventions de lutte antivectorielle : nous devons pour ce faire nous appuyer sur Internet et les réseaux sociaux, en diffusant conjointement des informations sur la Covid-19 et sur la prévention des maladies virales transmises par des moustiques (par exemple, l’élimination de leurs gîtes de reproduction en restant chez soi). Enfin il est nécessaire d’adapter les directives existantes pour les agents en charge de la lutte antivectorielle, notamment par des gestes barrières et une distanciation physique, pour prévenir toute transmission de Covid-19.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/demoustication-comment-larrivee-du-moustique-tigre-a-change-la-donne-100467">Démoustication : comment l’arrivée du moustique tigre a changé la donne</a>
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<p>L’impact négatif de la crise induite par la Covid-19 sur la surveillance et le contrôle de la dengue est évident dans les zones tropicales touchées par la dengue. Quant aux régions tempérées, les restrictions de voyage limitent en théorie les possibilités d’importation d’arbovirus. Le risque est néanmoins présent, comme en témoignent les <a href="https://www.anses.fr/fr/content/la-lutte-contre-le-covid-19-ne-doit-pas-occulter-les-risques-li %C3 %A9s-aux- %C3 %A9pid %C3 %A9mies-de-dengue">quatorze cas de dengue</a> observés dans l’Hexagone pendant le confinement, nonobstant le très faible nombre de vols provenant de zones touchées.</p>
<p>La reprise du transport aérien, même si elle est partielle, pourrait accroître ce risque dans les régions d’Europe <a href="https://www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/aedes-albopictus-current-known-distribution-may-2020">où <em>Aedes albopictus</em> est installé</a>. Entre le 1<sup>er</sup> mai et le 21 août 2020, <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-a-transmission-vectorielle/chikungunya/articles/donnees-en-france-metropolitaine/chikungunya-dengue-et-zika-donnees-de-la-surveillance-renforcee-en-france-metropolitaine-en-2020">Santé publique France</a> a enregistré 155 cas importés de dengue et 4 cas importés de chikungunya.</p>
<p>Notons au passage que la circulation simultanée de ces maladies a nécessairement des effets délétères sur les plans économique et social. Les inégalités sociales liées à la dengue et à d’autres arbovirus, tel que le Zika, <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/17441692.2018.1532528">ont déjà été mises en évidence</a>. On sait aussi que la pandémie de Covid-19 exacerbe ces inégalités, comme on a pu le constater à La Réunion ou aux <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/1090198120922942">États-Unis</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/a-la-reunion-la-pandemie-aggrave-les-inegalites-sociales-133809">À la Réunion, la pandémie aggrave les inégalités sociales</a>
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<p>Dans un tel contexte, nous devons souligner l’importance de la mobilisation sociale et du maintien, voire du renforcement de la gestion intégrée des maladies transmises par les moustiques. Et nous recommandons par ailleurs d’améliorer les pratiques pour réduire au minimum l’exposition au SARS-CoV-2 dans le cadre de la lutte antivectorielle.</p>
<p>Partout dans le monde, et en particulier dans la zone intertropicale, la menace représentée par les maladies que peuvent transmettre les moustiques – à l’instar de la dengue, du chikungunya, de la maladie à virus Zika et de la fièvre jaune – pourrait être accentuée en raison d’une détérioration de la surveillance et de la lutte contre les moustiques. Or ce risque est susceptible d’aggraver la situation due à la seule pandémie de Covid-19.</p>
<p>En somme, il y a donc urgence pour les acteurs de santé publique et les décideurs politiques d’élaborer des politiques proactives, et d’allouer les ressources adéquates pour prévenir et gérer la dissémination de ces maladies en période de crise sanitaire. D’autant plus que dans les décennies à venir, on craint de voir surgir d’autres nouvelles maladies à fort potentiel épidémique et pandémique…</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lemergence-des-nouvelles-epidemies-saccelere-comment-y-faire-face-140568">L’émergence des nouvelles épidémies s’accélère, comment y faire face ?</a>
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<p><em>L’évaluation a été menée par le « Groupe d’expertise collective dans l’urgence sur l’impact de la pandémie de Covid-19 et du confinement sur la surveillance de la dengue et les interventions de lutte antivectorielle » de l’ANSES. Ce groupe a été présidé par Thierry BALDET (CIRAD), coordonné par Johanna FITE (ANSES) et Elsa QUILLERY (ANSES), et il était composé de James DEVILLERS (CTIS), Marie-Marie OLIVE (IRD), Marie-Claire PATY (Santé publique France), Christophe PAUPY (IRD), Philippe QUENEL (EHESP), Jocelyn RAUDE (EHESP), David ROIZ (IRD), Jean‑Paul STAHL (CHU Grenoble Alpes), Marie THIANN-BO-MOREL (Université de La Réunion), toutes ces personnes ayant contribué à la rédaction de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/141298/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>
La co-circulation des virus de la dengue et du SARS-CoV-2 peut avoir nombre d’effets pervers : retard dans la prise en charge, sous-déclaration des cas, détérioration de la lutte anti-moustiques…
Marie-Marie Olive, Post-doctorante, Institut de recherche pour le développement (IRD)
David Roiz, Investigador en ecologia de enfermedaes emergentes transmitidas por mosquitos, Institut de recherche pour le développement (IRD)
Johanna Fite, Chef de projets scientifiques, Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)
Thierry Baldet, Chercheur, Cirad
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/130967
2020-02-12T19:23:00Z
2020-02-12T19:23:00Z
Comment les changements environnementaux font émerger de nouvelles maladies
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/314988/original/file-20200212-61929-706ziq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C2%2C1397%2C928&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Région de Lambaréné, Gabon : à la recherche du réservoir du virus Ebola, des scientifiques autopsient des chauves-souris et recueillent des échantillons biologiques qui seront analysés au Centre de Recherches Médicales de Franceville.</span> <span class="attribution"><span class="source">Jean-Jacques Lemasson / IRD</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>L’épidémie de coronavirus Covid-19 en cours, qui a débuté à Wuhan à la fin de l’année dernière, illustre bien la menace que représentent les maladies infectieuses émergentes, non seulement pour la santé humaine et animale, mais aussi pour la stabilité sociale, le commerce et l’économie mondiale.</p>
<p>Or de nombreux indices portent à croire que la fréquence des émergences de nouveaux agents infectieux pourrait augmenter dans les décennies à venir, faisant craindre une crise épidémiologique mondiale imminente. En effet, les activités humaines entraînent de profondes modifications de l’utilisation des terres ainsi que d’importants bouleversements de la biodiversité, en de nombreux endroits de la planète.</p>
<p>Ces perturbations se produisent dans un contexte de connectivité internationale accrue par les déplacements humains et les échanges commerciaux, le tout sur fond de changement climatique.</p>
<p>Il s’agit là des conditions optimales pour favoriser le passage à l’être humain de micro-organismes pathogènes provenant des animaux. Or, selon l’OMS, les maladies qui résultent de telles transmissions comptent parmi les plus dangereuses qui soient.</p>
<h2>Identifier les nouvelles menaces</h2>
<p>Fièvre hémorragique de Crimée-Congo, virus Ebola et maladie du virus de Marburg, fièvre de Lassa, coronavirus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS-CoV) et syndrome respiratoire aiguë sévère (SRAS), Nipah et maladies hénipavirales, fièvre de la vallée du Rift, Zika…</p>
<p>Toutes ces maladies ont en commun de figurer sur la liste <a href="http://origin.who.int/blueprint/priority-diseases/en/">« Blueprint des maladie prioritaires »</a>, établie par l’OMS en 2018.</p>
<p>Les maladies listées ici sont considérées comme des urgences sur lesquelles doivent se concentrer les recherches. Elles présentent en effet un risque de santé publique à grande échelle, en raison de leur potentiel épidémique et de l’absence ou du nombre limité de mesures de traitement et de contrôle actuellement disponibles.</p>
<p>Cette liste comporte également une « maladie X » : ce terme énigmatique désigne la maladie qui sera responsable d’une épidémie internationale d’ampleur, causée par un pathogène actuellement inconnu. L’OMS ne doute pas qu’elle puisse survenir, et demande donc à la communauté internationale de se préparer en prévision d’un tel scénario catastrophe.</p>
<p>Actuellement, la réponse des autorités de santé publique face à ces maladies infectieuses émergentes consiste à « prendre de l’avance sur la courbe », c’est-à-dire à identifier les facteurs environnementaux susceptibles de déclencher l’émergence. Malheureusement, notre compréhension de la façon dont font surface les nouvelles menaces infectieuses demeure encore limitée.</p>
<p>Mais une chose est sûre, les animaux seront très probablement impliqués dans les prochaines épidémies. Car c’est un autre point commun des maladies de cette liste dressée par l’OMS : toutes peuvent être classées comme des infections virales zoonotique.</p>
<h2>Les animaux largement impliqués dans les nouvelles épidémies</h2>
<p>Au cours des quatre dernières décennies, <a href="http://dx.doi.org/10.1038/nature06536">plus de 70 % des infections émergentes</a> <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/11516376">se sont avérées être des zoonoses</a>, autrement dit des maladies infectieuses animales transmissibles à l’être humain.</p>
<p>Au plus simple, ces maladies incluent un seul hôte et un seul agent infectieux. Cependant, souvent <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2992712/">plusieurs espèces sont impliquées</a>, ce qui signifie que les changements de biodiversité ont le potentiel de modifier les risques d’exposition à ces maladies infectieuses liées aux animaux et aux plantes.</p>
<p>On pourrait à ce titre penser que la biodiversité représente une menace : puisqu’elle recèle de nombreux pathogènes potentiels, elle accroît le risque d’apparition de nouvelles maladies.</p>
<p>Pourtant, curieusement, la biodiversité joue également un rôle protecteur vis-à-vis de l’émergence des agents infectieux. En effet, l’existence d’une grande diversité d’espèces hôtes peut <a href="https://esajournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1890/08-0942.1">limiter leur transmission</a>, par un <a href="https://jeb.biologists.org/content/213/6/961">effet de dilution</a> ou par <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16519242">effet tampon</a>.</p>
<h2>La perte de biodiversité augmente la transmission des agents pathogènes</h2>
<p>Si toutes les espèces avaient le même effet sur la transmission des agents infectieux, on pourrait s’attendre à ce qu’une baisse de la biodiversité entraîne de façon similaire une baisse de la transmission des agents pathogènes. Or il n’en est rien : ces dernières années, les études montrent de façon concordante que les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18959321">pertes de biodiversité ont tendance à augmenter la transmission des agents pathogènes</a>, et la fréquence des maladies associées.</p>
<p>Cette tendance a été mise en évidence dans un grand nombre de systèmes écologiques, <a href="https://www.researchgate.net/publication/23191519_Multiple_causes_of_variable_tick_burdens_on_small-mammal_hosts">avec des types hôtes-agents</a> <a href="https://www.researchgate.net/publication/226343190_Invaders_interfere_with_native_parasite-host_interactions">et des modes de transmission très différents</a>. Comment s’explique cette situation ? La perte de biodiversité peut modifier la transmission des maladies de plusieurs façons :</p>
<p>1) En changeant l’abondance de l’hôte ou du vecteur. Dans certains cas, une plus grande diversité d’hôtes peut augmenter la transmission des agents, en augmentant l’abondance des vecteurs ;</p>
<p>2) En modifiant le comportement de l’hôte, vecteur ou parasite. En principe, une plus grande diversité peut influencer le comportement des hôtes, ce qui peut avoir différentes conséquences, qu’il s’agisse d’une augmentation de la transmission ou de l’altération de l’évolution des dynamiques de virulence ou des voies de transmission. Par exemple, dans une communauté plus diverse, le ver parasitaire qui est <a href="https://www.who.int/topics/schistosomiasis/fr/">responsable de la bilharziose</a> (maladie qui affecte plus de 200 millions de personnes dans le monde) a plus de chance de se retrouver <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2660983/">dans un hôte intermédiaire inadéquat</a>. Ceci peut réduire la probabilité de transmission future à l’humain de 25 à 99 % ;</p>
<p>3) En modifiant la condition de l’hôte ou du vecteur. Dans certains cas, dans des hôtes à fortes diversités génétiques, les infections peuvent être réduites, voire induire des résistances, ce qui limite de fait la transmission. Si la diversité génétique se réduit parce que les populations diminuent, la probabilité qu’apparaissent des résistances diminue également.</p>
<p>Dans ce contexte, la perte de biodiversité en cours est d’autant plus inquiétante. Les estimations actuelles suggèrent par exemple qu’<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/14645837">au moins 10 000 à 20 000 espèces d’eaux douces</a> ont disparu <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20882010">ou sont à risque de disparaître</a>. Les taux de déclins observés actuellement rivalisent avec ceux des grandes crises du passé, telles que celle qui a marqué la transition entre Pléistocène et Holocène, voici 12 000 ans, et qui s’est accompagné de la disparition de la mégafaune, dont le mammouth laineux était un des représentants emblématiques.</p>
<p>Mais la perte de biodiversité n’est pas le seul facteur influant sur l’émergence de nouvelles maladies.</p>
<h2>Le changement climatique et les activités humaines</h2>
<p>C’est le déplacement de l’empreinte géographique des pathogènes et/ou de l’hôte qu’ils infectent qui conduit <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29770047">à l’émergence de nouvelles maladies infectieuses</a>. À ce titre, l’imprévisibilité croissante du climat mondial et les interactions locales homme-animal-écosystème, de plus en plus étroites dans certains endroits de la planète, jouent un rôle majeur dans l’émergence de nouvelles infections au sein des populations humaines.</p>
<p>Ainsi, l’augmentation des températures moyennes aurait eu un effet significatif sur <a href="https://bmcpublichealth.biomedcentral.com/articles/10.1186/1471-2458-12-1116">l’incidence de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo</a>, causée par un virus transmis par les tiques, ainsi que sur la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/30111605">durabilité du virus Zika</a>, transmis par les moustiques dans les régions subtropicales et tempérées.</p>
<p>La <a href="https://wwwnc.cdc.gov/eid/article/11/12/04-0789_article">consommation de viande de brousse</a> et le commerce d’animaux, résultant de la demande croissante en protéines animales, provoquent aussi des changements importants dans les contacts entre les êtres humains et les animaux. Des études ont démontré que les <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0029505">flambées de SRAS</a> et <a href="http://doi.wiley.com/10.2903/j.efsa.2014.3884">d’Ebola</a> étaient directement liées à la consommation de viande de brousse infectée. En outre, la fièvre de Lassa et les maladies dues aux virus Marburg et Ebola prospèrent en Afrique de l’Ouest et du Centre, où la consommation de viande de brousse <a href="http://doi.wiley.com/10.1046/j.1523-1739.1995.951107.x">est quatre fois supérieure à celle de l’Amazonie</a>, pourtant plus riche en biodiversité.</p>
<p>Autre risque : l’expansion de l’agriculture et de l’élevage. Afin de répondre à la demande toujours croissante des populations humaines, de nouveaux espaces doivent être conquis, en déforestant et en défrichant. Or on sait que cette réaffectation des terres <a href="https://jeb.biologists.org/content/213/6/955">peut déclencher l’émergence des maladies infectieuses</a>, en favorisant les contacts avec des organismes jusqu’ici rarement rencontrés. Ainsi, dans les îles de Sumatra, la migration des chauves-souris fruitières causée par la déforestation dû aux incendies de forêt a conduit à l’émergence de la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18835214">maladie de Nipah</a> chez les éleveurs et les personnels des abattoirs en <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3586606/">Malaisie</a>.</p>
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<h2>Des émergences inévitables</h2>
<p>Les relations entre la biodiversité des espèces hôtes et celle des parasites et microbes pathogènes sont complexes. En modifiant la structure des communautés, tous ces changements environnementaux risquent d’entraîner une modification des schémas épidémiologiques existants.</p>
<p>Dans ce contexte, les populations humaines peuvent se retrouver au contact d’un animal porteur d’un virus capable de les contaminer. Un cycle d’infections peut alors se mettre en place. Il débute par des cas sporadiques de transmission de l’animal à l’être humain, appelé « virus chatter » (« bavardage viral »). Ensuite, à mesure que les cycles se multiplient, l’émergence de la transmission interhumaine devient inévitable.</p>
<p>Une fois l’épidémie déclenchée, la rapidité de réaction est primordiale. Outre les mesures sanitaires de rigueur, lorsque le temps manque pour mener des études épidémiologiques appropriées les modélisations mathématiques peuvent être d’un grand secours pour évaluer rapidement l’efficacité de la prévention, et anticiper l’évolution de la maladie.</p>
<p>Mais appréhender la complexité des interactions entre réservoir naturel, agent pathogène et hôte(s) intermédiaire(s) reste un défi de taille lorsqu’il s’agit d’intervenir rapidement pour arrêter la transmission de la maladie. L’exemple du COVID-19 l’illustre une nouvelle fois : plus de deux mois après les premières infections, <a href="https://theconversation.com/fact-check-le-pangolin-a-t-il-pu-servir-de-vecteur-au-covid-19-131726">les divers maillons animaux</a> de la chaîne de transmission de l’épidémie restent à identifier.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/130967/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Rodolphe Gozlan a reçu des financements publiques de l'Université de Guyane et du Labex CEBA au cours des 5 dernières années. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Soushieta Jagadesh a reçu des financements de Universuté de Guyane. </span></em></p>
Ebola, Nipah, SRAS, fièvre de Lassa, Covid-19, Zika… Transmises par les animaux, ces dangereuses maladies ont toutes émergé récemment. Pourquoi ? Une future épidémie d’ampleur est-elle à craindre ?
Rodolphe Gozlan, Directeur de recherche, Institut de recherche pour le développement (IRD)
Soushieta Jagadesh, Doctoral Student, Institut de recherche pour le développement (IRD)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/128451
2019-12-16T19:49:31Z
2019-12-16T19:49:31Z
La vie étrange, secrète – et très écolos – des moustiques dévoilée
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/307246/original/file-20191216-124036-t1yarm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les moustiques jouent un rôle très important en tant que pollinisateurs.</span> <span class="attribution"><span class="source">shutterstock </span></span></figcaption></figure><p>Les moustiques. Des hordes de moustiques qui bourdonnent dans nos oreilles et nous piquent, comme c’est pénible ! Et c’est sans compter les effets dévastateurs sur la santé causés par le paludisme, le virus Zika et d’autres agents pathogènes qu’ils propagent.</p>
<p>Les moustiques ont également tout un pan de leur vie qui n’a rien à voir avec les piqûres, mais plutôt avec leurs interactions avec les plantes. Nous considérons souvent les moustiques comme des suceurs de sang qui ne font que nous pourrir l’existence. Cependant, ils ont aussi des rôles écologiques. La vie secrète des moustiques est parfois bizarre, mais aussi très importante sur le plan environnemental.</p>
<p>Les moustiques remplissent de nombreuses fonctions dans l’écosystème dont on parle peu. L’élimination de masse des moustiques aurait des répercussions dans beaucoup de domaines, de la pollinisation au transfert de biomasse en passant par les réseaux alimentaires.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/303297/original/file-20191123-74599-1swlhld.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/303297/original/file-20191123-74599-1swlhld.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/303297/original/file-20191123-74599-1swlhld.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/303297/original/file-20191123-74599-1swlhld.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/303297/original/file-20191123-74599-1swlhld.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/303297/original/file-20191123-74599-1swlhld.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/303297/original/file-20191123-74599-1swlhld.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un maringouin domestique, Culex pipiens, couvert de pollen de tanaisie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Mike Hrabar)</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>La pollinisation par les moustiques</h2>
<p>Il existe environ <a href="http://www.humanite-biodiversite.fr/article/les-moustiques">3 500 espèces de moustiques</a>, dont beaucoup ne sont pas du tout intéressées par le sang des humains ou de tout autre animal. Même chez celles qui piquent, ce sont seulement les femelles qui le font dans le but de permettre à leurs œufs de se développer.</p>
<p>La nourriture de base de tous les moustiques adultes est le <a href="https://www.annualreviews.org/doi/10.1146/annurev.en.40.010195.002303">sucre végétal et les nutriments qu’il contient, le plus souvent sous forme de nectar floral</a>. En cherchant du nectar, les moustiques pollinisent les fleurs qu’ils visitent, remplissant ainsi une des <a href="https://doi.org/10.1111/eea.12852">fonctions écologiques des moustiques qu’on a tendance à oublier</a>.</p>
<p>La pollinisation par les moustiques est probablement beaucoup plus fréquente qu’on ne le pense. Il est prouvé que les moustiques jouent le rôle de <a href="https://doi.org/10.1007/s11829-016-9445-9">pollinisateurs généralistes</a> pour certaines familles de plantes, et il existe de <a href="https://doi.org/10.5061/dryad.63xsj3tz5">nombreux cas de pollinisation qui sont très peu étudiés</a>.</p>
<p>La pollinisation par les moustiques <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Moustique">a été constatée dès le 19e siècle</a>. Elle est difficile à observer, car la plupart des moustiques visitent les fleurs au crépuscule ou un peu après, et la présence humaine les fait fuir. Pendant la courte période de végétation de l’Arctique, les <a href="https://www.nationalgeographic.com/news/2015/09/150915-Arctic-mosquito-warming-caribou-Greenland-climate-CO2/">plantes utilisent les vastes hordes de moustiques avides de nectar pour se polliniser</a>.</p>
<h2>Évolution des moustiques</h2>
<p>Le lien entre les fleurs et les moustiques est ancien et a probablement eu une forte influence sur l’évolution de ce type d’insectes. Des preuves génétiques confirment une <a href="https://doi.org/10.1186/1471-2148-9-298">augmentation rapide de leur diversité qui correspond à l’apparition des plantes à fleurs</a>. Des écailles de moustiques ont été trouvées dans des <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rsbl.2011.0696">fossiles de fleurs datant du Crétacé moyen</a>.</p>
<p>Les moustiques repèrent les fleurs grâce à divers indices, dont l’odeur et l’information visuelle, et des recherches récentes ont permis de découvrir que des <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-019-39748-4">constituants olfactifs de certaines fleurs dont se nourrissent les moustiques (et qu’ils pollinisent) sont présents chez les humains</a>. On pourrait en conclure que les moustiques confondent l’odeur de certaines fleurs avec celle des humains, révélant possiblement les origines évolutives de leur attrait pour le sang.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/303303/original/file-20191124-74599-1qu1wap.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/303303/original/file-20191124-74599-1qu1wap.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/303303/original/file-20191124-74599-1qu1wap.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=504&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/303303/original/file-20191124-74599-1qu1wap.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=504&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/303303/original/file-20191124-74599-1qu1wap.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=504&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/303303/original/file-20191124-74599-1qu1wap.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=633&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/303303/original/file-20191124-74599-1qu1wap.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=633&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/303303/original/file-20191124-74599-1qu1wap.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=633&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Un moustique Aedes qui se nourrit du sang de l’auteur du texte. L’alimentation des moustiques par le sang peut avoir évolué à partir d’une alimentation au nectar floral en raison des constituants odorants partagés entre les vertébrés et les fleurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Dan Peach)</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Un repas de miellat</h2>
<p>Bien que ce soit moins important sur le plan écologique que la pollinisation, les moustiques consomment également du sucre végétal transformé par d’autres insectes.</p>
<p>Les insectes suceurs de plantes comme les pucerons excrètent un déchet sucré appelé miellat, qui sert de nourriture pour de <a href="https://www.annualreviews.org/doi/10.1146/annurev.en.40.010195.002303">nombreux insectes, dont les moustiques</a>. Mais le miellat est difficile à trouver dans l’environnement. Les moustiques ont résolu ce problème en utilisant les <a href="https://doi.org/10.3390/insects10020043">odeurs émises par les microbes qui vivent dans le miellat pour le localiser</a>.</p>
<p>Le miellat est aussi consommé par différentes sortes de fourmis, qui élèvent des pucerons pour en recueillir. Une fourmi peut, par des coups d’antennes, inciter une compatriote qui a récemment mangé du miellat à régurgiter et à partager une partie de son repas. Certaines espèces de moustiques ont appris à exploiter ce système <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/eea.12852">à leur profit</a>.</p>
<p>Un moustique peut insérer ses pièces buccales dans la bouche d’une fourmi et lui caresser la tête avec ses antennes afin de provoquer un vomissement.</p>
<h2>Transferts de biomasse</h2>
<p>Les larves de moustiques se développent en consommant des microorganismes comme les algues et les microbes qui décomposent les matières végétales. Ces larves contribuent aux chaînes alimentaires aquatiques en servant de nourriture à différents prédateurs, comme les poissons et les oiseaux.</p>
<p>Si un moustique survit jusqu’à l’âge adulte, il quitte son habitat aquatique, transférant ainsi sa biomasse (le poids de sa matière) à l’écosystème terrestre.</p>
<p>De nombreux animaux, comme les oiseaux, les chauves-souris, les grenouilles et d’autres insectes, se nourrissent de moustiques adultes. Lorsque ceux-ci meurent (ou qu’ils sont mangés et excrétés), ils se décomposent. Les microbes qu’ils avaient consommés sous forme de larves se transforment alors en nutriments pour les plantes, ce qui constitue une autre fonction écologique des moustiques.</p>
<p>On a évalué la biomasse des moustiques <a href="http://www.newsminer.com/features/sundays/alaska_science_forum/how-many-mosquitoes-are-in-alaska-trillion-biologist-estimates/article_dd5903d2-fc15-11e4-ba74-834fc2525d20.html">à 43 500 tonnes en Alaska</a> seulement. Bien que la contribution du cycle des nutriments des moustiques à la croissance des plantes et à d’autres fonctions de l’écosystème n’ait pas encore été étudiée, la quantité de leurs biomasses laisse entendre qu’elle pourrait être importante.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/303560/original/file-20191125-74576-1u9vu3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/303560/original/file-20191125-74576-1u9vu3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/303560/original/file-20191125-74576-1u9vu3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/303560/original/file-20191125-74576-1u9vu3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/303560/original/file-20191125-74576-1u9vu3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/303560/original/file-20191125-74576-1u9vu3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/303560/original/file-20191125-74576-1u9vu3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/303560/original/file-20191125-74576-1u9vu3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">On trouve des larves de moustiques dans divers habitats où l’eau s’accumule, notamment dans les terriers des crabes, à l’intérieur des sarracénies et entre les feuilles des plantes des forêts tropicales humides.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Des habitats uniques</h2>
<p>Les larves de moustiques sont présentes dans la plupart des types d’eau douce, que ce soient des lacs ou des mares temporaires causées par la fonte des neiges. On peut même les trouver dans quelques habitats d’eau salée comme les <a href="http://entnemdept.ufl.edu/creatures/aquatic/crabhole_mosquito.htm">terriers de crabe</a>.</p>
<p>L’un des habitats les plus intéressants où l’on découvre des larves de moustiques sont les urnes de la plante carnivore Sarracenia purpurea. Ces urnes sont remplies <a href="https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/botanique-plante-carnivore-renferme-t-elle-secret-ecosystemes-45655/">d’eau et d’insectes en décomposition qui fournissent de la nourriture à la plante et aux moustiques</a>. Les enzymes digestives de la sarracénie sont <a href="https://theindependent.ca/2013/04/24/a-pitcher-worth-a-thousand-words/">trop faibles pour dissoudre les larves des moustiques</a>.</p>
<p>Plusieurs espèces de moustiques pondent leurs œufs dans l’<a href="https://doi.org/10.1093/aesa/sav040">eau qui s’accumule entre les feuilles des plantes tropicales de la forêt atlantique brésilienne</a>, et les larves d’autres moustiques se fixent aux racines de plantes aquatiques pour respirer.</p>
<h2>Réduction des maladies, préservation des écosystèmes</h2>
<p>Le moustique, qui est l’animal le <a href="https://la1ere.francetvinfo.fr/2014/04/30/l-animal-le-plus-meurtrier-au-monde-estle-moustique-147903.html">plus meurtrier pour les humains</a>, cause aussi d’immenses souffrances. Idéalement, on devrait protéger les fonctions écosystémiques des moustiques tout en réduisant leur charge de morbidité.</p>
<p>Ce ne sont pas toutes les espèces de moustiques qui sont responsables de la propagation des agents pathogènes. Cibler des espèces précises ou <a href="https://siecledigital.fr/2019/11/25/une-bacterie-pour-lutter-contre-le-virus-de-la-dengue-au-bresil/">immuniser celles-ci contre les agents pathogènes</a> protégerait les humains tout en maintenant les fonctions écosystémiques des moustiques.</p>
<p>Dans un monde où les <a href="https://www.eurotopics.net/fr/215021/un-effondrement-global-des-ecosystmes">écosystèmes s’effondrent</a> et où les <a href="https://www.agrireseau.net/apiculture/documents/D%C3%A9clin%20poll_FR_MC3_M_Chagnon.pdf">populations de pollinisateurs déclinent</a>, nous avons besoin de toute l’aide possible. On doit reconnaître la vie secrète des moustiques et mettre au point des stratégies plus sophistiquées de lutte contre eux afin de préserver leur rôle écologique.</p>
<p>[<em>Vous aimez ce que vous avez lu ? Vous en voulez plus ?</em> <a href="https://theconversation.com/ca-fr/newsletters">Abonnez-vous à notre infolettre hebdomadaire</a>. ]</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/128451/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Daniel A.H. Peach est administrateur de l'Entomological Society of British Columbia et membre de l'Entomological Society of Canada, de l'Entomological Society of America, de la Society for Vector Ecology et de la Biological Survey of Canada. Daniel a reçu des fonds du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, de Scotts Canada Ltd. et de l'Université Simon Fraser. Il reçoit actuellement des fonds de l'Université de la Colombie-Britannique.
</span></em></p>
Les moustiques ont des relations complexes et essentielles avec les plantes. Comprendre leur travail en tant que pollinisateurs aiderait à comprendre leur rôle dans les différents écosystèmes.
Daniel A.H. Peach, Postdoctoral Fellow, Department of Zoology, University of British Columbia
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/125675
2019-10-24T16:52:25Z
2019-10-24T16:52:25Z
Virus Zika : premiers cas de transmission en France métropolitaine par le moustique tigre
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/298559/original/file-20191024-170467-1keg7l4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C69%2C1781%2C1313&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des particules de virus Zika (en rouge) à l’intérieur de cellules de rein de singe vert africain.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nihgov/36823418614/in/album-72157669514848324/">NIH</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span></figcaption></figure><p>Pour la première fois, des cas d’infections par le <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/zika">virus Zika</a> transmises localement par des moustiques (à partir de cas importés par des voyageurs de retour de l’étranger ou des départements d’outre-mer) <a href="https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/221019_-_dgs_-_cp_arboviroses.pdf">ont été détectés en France métropolitaine</a>. Ces deux infections « autochtones » auraient eu lieu courant août 2019 à Hyères, dans le département du Var. Le moustique impliqué est <em>Aedes albopictus</em>, également connu sous le nom de <a href="https://theconversation.com/ce-que-chacun-peut-faire-pour-surveiller-le-moustique-tigre-77284">moustique tigre</a>.</p>
<p>Repéré pour la première fois en France en 2004, à Menton, le moustique tigre est désormais implanté dans 51 départements de la moitié sud du pays, et au-delà. On le savait à l’origine de foyers limités de transmission locale de virus, comme ceux de la dengue ou du chikungunya, à partir de cas importés, c’est-à-dire contractés hors de France métropolitaine. Cependant il n’avait pas encore été incriminé dans des cas de transmission locale du virus Zika.</p>
<p>Cette nouvelle n’est pas vraiment une surprise pour les spécialistes, car des expérimentations en laboratoire avaient révélé que le moustique tigre était un vecteur compétent pour la transmission du virus Zika. Il est cependant moins efficace que son cousin des régions tropicales, le moustique <em>Aedes aegypti</em>, qui lui n’a pas encore été repéré en métropole.</p>
<h2>Une infection généralement bénigne</h2>
<p>Dans la très grande majorité des cas, les infections par le virus Zika sont sans gravité. Les deux tiers d’entre elles sont asymptomatiques, et lorsque des symptômes se manifestent, ils sont bénins. Ils se traduisent par une éruption cutanée, une fièvre modérée, des douleurs articulaires, et parfois une conjonctivite. Leur durée dépasse rarement une semaine. Le diagnostic est possible en phase aiguë, grâce à une prise de sang ou un prélèvement d’urine, dans laquelle on pourra mettre en évidence le génome du virus. La recherche d’anticorps dans le sang permettra aussi de documenter une infection récente. Il existe cependant un risque de réaction croisée avec les anticorps de la dengue.</p>
<p>Les complications liées à l’infection par le virus Zika sont rares, mais peuvent néanmoins survenir. Il s’agit <a href="https://www.pasteur.fr/fr/journal-recherche/actualites/consequences-neurologiques-du-virus-zika-enfin-devoilees-0">d’atteintes neurologiques</a> telles que les syndromes de Guillain-Barré. La fréquence de ces <a href="https://www.orpha.net/data/patho/Pub/fr/GuillainBarre-FRfrPub834.pdf">formes sévères de paralysie des membres périphériques</a> est heureusement limitée à 2 cas pour 10 000 infections.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/298560/original/file-20191024-170458-1bz4edo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/298560/original/file-20191024-170458-1bz4edo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/298560/original/file-20191024-170458-1bz4edo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=678&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/298560/original/file-20191024-170458-1bz4edo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=678&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/298560/original/file-20191024-170458-1bz4edo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=678&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/298560/original/file-20191024-170458-1bz4edo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=852&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/298560/original/file-20191024-170458-1bz4edo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=852&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/298560/original/file-20191024-170458-1bz4edo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=852&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Image au microscope électronique à transmission de particules du virus Zika (en rouge, fausses couleurs), souche Fortaleza, isolées à partir d’échantillons provenant d’un cas de microcéphalie au Brésil.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nihgov/27385281096/in/album-72157669514848324/">NIH</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Mais ce qui fait surtout la gravité de la maladie, ce sont les anomalies neurologiques congénitales dont sont atteints les enfants nés de mères infectées pendant la grossesse. Il s’agit notamment de microcéphalies, liées à un retard du développement du cerveau, et d’atteintes à type de crises d’épilepsie, de contractures musculaires, d’irritabilité des enfants, ainsi que d’atteintes oculaires ou auditives.</p>
<p>Ces complications, regroupées sous le terme de « syndrome congénital lié au virus Zika », surviennent chez moins de 5 % des enfants nés de mères infectées alors qu’elles étaient enceintes, pour la plupart quand l’infection a eu lieu durant le premier trimestre de la grossesse.</p>
<h2>Remonter à la source de l’infection</h2>
<p>En 2015 et 2016, lors des épidémies qui ont affecté l’Amérique latine, l’Amérique Centrale, les Antilles et l’Asie du Sud-Est, aucun cas autochtone de Zika n’avait été relevé en France, malgré les centaines de cas importés recensés à l’issue des vacances d’été.</p>
<p>Les deux cas avérés révélés fin octobre confirment cependant la capacité du moustique tigre à transmettre le virus Zika à partir de cas importés, et ce, alors même que la situation actuelle est bien différente de celle d’il y a quelques années. En effet, aujourd’hui la circulation du virus Zika est moins intense : on ne l’observe plus que dans quelques foyers en Amérique. Il faut toutefois souligner que le virus Zika circule également de façon endémique en Afrique, où des cas sporadiques sont régulièrement identifiés.</p>
<p>Pour comprendre comment les contaminations françaises ont pu se produire dans ce contexte, il faudra attendre les résultats des enquêtes épidémiologiques, qui permettront de remonter à leurs sources. Le séquençage des génomes des virus responsables de ces deux cas autochtones permettra quant à lui d’identifier le génotype du virus Zika, et donc son origine géographique.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/298561/original/file-20191024-170493-1uovn8f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/298561/original/file-20191024-170493-1uovn8f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/298561/original/file-20191024-170493-1uovn8f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/298561/original/file-20191024-170493-1uovn8f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/298561/original/file-20191024-170493-1uovn8f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/298561/original/file-20191024-170493-1uovn8f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/298561/original/file-20191024-170493-1uovn8f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/298561/original/file-20191024-170493-1uovn8f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le moustique <em>Aedes albopictus</em> transmet plus efficacement les souches d’origine africaine du virus Zika que les autres.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://phil.cdc.gov/details.aspx?pid=2168">James Gathany/CDC</a></span>
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</figure>
<p>Il est important de déterminer quelle souche du virus a été impliquée dans les infections, car celle-ci influe notamment sur sa transmission. En infectant le moustique tigre en laboratoire avec des virus de différentes origines géographiques, les chercheurs ont découvert qu’il était dix fois plus efficace pour transmettre les virus d’Afrique de l’Ouest que pour transmettre ceux isolés lors des épidémies qui ont touché les Amériques.</p>
<h2>Que faire pour se protéger du virus ?</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/298552/original/file-20191024-170471-n9zht0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/298552/original/file-20191024-170471-n9zht0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/298552/original/file-20191024-170471-n9zht0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/298552/original/file-20191024-170471-n9zht0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/298552/original/file-20191024-170471-n9zht0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/298552/original/file-20191024-170471-n9zht0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/298552/original/file-20191024-170471-n9zht0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/298552/original/file-20191024-170471-n9zht0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Niveau de classement moustique tigre (Aedes albopictus) dans les départements de France métropolitaine.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://solidarites-sante.gouv.fr/sante-et-environnement/risques-microbiologiques-physiques-et-chimiques/especes-nuisibles-et-parasites/article/cartes-de-presence-du-moustique-tigre-aedes-albopictus-en-france-metropolitaine">Ministère des Solidarités et de la Santé</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il n’existe aujourd’hui ni traitement, ni vaccin spécifique pour lutter contre le virus Zika. Le seul moyen de se protéger est d’éviter les piqûres de moustiques. Ceux-ci sont actifs de mai à novembre, et plus particulièrement en août-septembre. Ils attaquent plutôt le matin et en fin d’après-midi, mais mieux vaut être vigilant toute la journée. Pour se préserver, il est nécessaire de porter des vêtements couvrants, de mettre en place des moustiquaires et d’utiliser des produits répulsifs.</p>
<p>En parallèle de ces mesures de protection individuelles, lutter contre la maladie requiert aussi d’empêcher la prolifération des moustiques. Pour cela, tous les gîtes potentiels pour le développement des larves de moustiques doivent être éliminés. Celles-ci vivent dans les eaux stagnantes, il faut donc vider les pots de fleurs, vérifier l’écoulement des gouttières, se débarrasser des pneus usagés ou les mettre à l’abri, etc. Il est en particulier recommandé de vider les rétentions d’eau qui peuvent se trouver autour de chez soi après chaque averse.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/125675/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>
Dans le Var, deux cas autochtones d’infections par le virus Zika ont été confirmés par les autorités sanitaires. La transmission de ce virus par le moustique tigre est donc désormais avérée en Europe.
Anna-Bella Failloux, Directrice de Recherche, Institut Pasteur
Arnaud Fontanet, Médecin, directeur de l’Unité d’épidémiologie des maladies émergentes à l’Institut Pasteur de Paris, professeur de santé publique, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/118301
2019-06-20T14:18:29Z
2019-06-20T14:18:29Z
Nourrir les moustiques avec du sucre les rend moins susceptibles de vous piquer– mais attendez avant de laisser traîner des friandises!
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/280316/original/file-20190619-171258-2jhldk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">file v v</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>La tentation de manger une friandise sucrée peut souvent avoir raison de notre volonté. Mais ne vous inquiétez pas, nous ne sommes pas les seuls. Car cette substance saccharinée à laquelle notre bec sucré ne sait résister séduit tout aussi fortement les moustiques. </p>
<p>Et selon de <a href="https://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.3000238">nouvelles recherches</a>, il se peut que le sucre puisse être bénéfique pour la santé en éloignant les parasites de nos parties corporelles riches en sang.</p>
<p>Mais ne commencez pas tout de suite à préparer de l’eau sucrée et à l'installer sur la véranda du chalet- car certaines données démontrent des effets contraires à ceux recherchés.</p>
<p>Nous savons depuis longtemps que le sucre est une source énergétique importante pour les moustiques. De fait, il est <a href="https://www.annualreviews.org/doi/abs/10.1146/annurev.en.40.010195.002303">meilleur </a> que le sang en tant que carburant pour le vol et des processus de survie fondamentaux. Seules les moustiques femelles se nourrissent au sang, car il fournit les éléments nutritifs essentiels à la production de leurs œufs.</p>
<p>Bien sûr, cette soif de sang est à la source de maladies terribles <a href="https://www.who.int/vector-control/en/">sur la planète</a>, souvent dans les pays les moins outillés pour y faire face. Parmi les centaines de recherches qui se consacrent à réduire la menace présentée par les moustiques, une avenue prometteuse s’ouvre sur l’interaction entre leurs envies de sucre et de sang.</p>
<h2>Cibler un gêne</h2>
<p>Une nouvelle étude, publiée dans « Plos Biology », s’est donnée pour tâche d’enquêter précisément sur cela. Elle se concentre sur le moustique tigre asiatique (Aedes albopictus), une espèce envahissante infiltrée sur tous les continents, qui s’attaque de très près aux humains et est très difficile à éliminer, ce qui en fait un <a href="https://ecdc.europa.eu/en/disease-vectors/facts/mosquito-factsheets/aedes-albopictus">transmetteur </a> particulièrement dangereux de maladies comme la fièvre de dengue, la fièvre jaune et le virus du Zika.</p>
<p>L’équipe de chercheurs <a href="https://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.3000238">a découvert</a> que nourrir de jeunes moustiques tigre des solutions à base de sucre déclenchait une réaction physiologique identique à celle provoquée par l’ingestion de sang. De façon importante, cela a retardé leur quête de sang humain.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/277677/original/file-20190603-69071-10ut0oi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/277677/original/file-20190603-69071-10ut0oi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/277677/original/file-20190603-69071-10ut0oi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/277677/original/file-20190603-69071-10ut0oi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/277677/original/file-20190603-69071-10ut0oi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/277677/original/file-20190603-69071-10ut0oi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/277677/original/file-20190603-69071-10ut0oi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Fabriquer des œufs de moustique donne soif.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/close-dried-mosquito-eggs-hatch-isolated-135540473?src=PC3YTZKEq_UwaG86Udmi1Q-1-31">7th Son Studio/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Fait intéressant, les chercheurs se sont aperçus que le sucre augmentait la teneur en une protéine, la vitellogénine. Il s'agit d'une composante importante qui fournit les éléments nutritifs à la progéniture en gestation. Normalement, la vitellogénine est fabriquée lorsque les récepteurs détectent des substances nutritives sanguines récoltées par les moustiques.</p>
<p>En appliquant des tests d’interférence génétique, les chercheurs ont réussi à identifier un gêne spécifique associé à la vitellogénine, qui, lorsque éliminé, rétablit l’attirance des moustiques pour les humains. C’est excitant, car cela met en lumière la possibilité de cibler ce gêne afin de réduire la recherche d’un hôte, et de ce fait éviter la transmission d’infections mortelles à des millions d’individus… et des piqûres désagréables à des millions d'autres.</p>
<h2>Tous les moustiques ne réagissent pas de la même façon</h2>
<p>Ces travaux représentent une percée significative dans la compréhension des mécanismes physiologiques qui influencent le comportement alimentaire des moustiques. Il reste cependant beaucoup à faire. Comme le reconnaissent les auteurs eux-mêmes, nourrir les moustiques au sucre ne suffit pas à contrôler les épidémies en situation réelle.</p>
<p>Il y a bien des raisons à cela, mais la plus importante concerne la diversité des réactions des moustiques au sucre, car elle peut diverger de manière significative, même au sein d’une espèce unique. Par exemple, l’attirance envers les humains chez les jeunes moustiques adultes a décru lorsqu’on les a alimentés en sucre, mais chez les femelles plus âgées, cela a augmenté leurs réserves nutritives et elles sont demeurées fortement attirées par l’espèce humaine. </p>
<p>Ce n’est pas un résultat souhaitable. L’état de santé, la façon dont les larves de moustiques ont été nourries, le fait qu’il se soient accouplés ou non, et qu’ils se soient reproduits ou pas, sont autant de facteurs qui font varier l’effet du sucre sur leur <a href="https://academic.oup.com/jme/article-abstract/33/4/608/2221578">comportement alimentaire</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/277675/original/file-20190603-69055-p0vn98.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/277675/original/file-20190603-69055-p0vn98.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/277675/original/file-20190603-69055-p0vn98.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/277675/original/file-20190603-69055-p0vn98.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/277675/original/file-20190603-69055-p0vn98.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/277675/original/file-20190603-69055-p0vn98.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/277675/original/file-20190603-69055-p0vn98.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Nourrir le moustique Anophèle au sucre n'est pas une bonne idée.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/mosquito-feeding-anopheles-gambiae-transmits-malaria-242818555?src=hdgjv1lZNiAvbTslnN-gFQ-1-52">Everett Historical/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les choses se compliquent encore davantage lorsqu’on tient compte d’autres espèces. Par exemple, un taux élevé de vitellogénine <a href="https://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.1000434">affaiblit </a> le système immunitaire du moustique africain porteur de la malaria (Anophèle gambiae) et de ce fait, le rend plus susceptible de contracter le virus et de transmettre la maladie. L’augmentation du taux de vitellogénine n’est donc évidemment pas une bonne idée.</p>
<p>Laisser traîner du sucre pour les moustiques peut repousser la piqûre des moustiques les plus jeunes, tout en rendant les plus âgés plus robustes et en affaiblissant les moyens de défense d’autres espèces. On peut cependant arriver à modifier génétiquement ou à soigner les moustiques tigres en utilisant des <a href="https://www.pnas.org/content/105/50/19631.short">hormones </a> qui augmentent le niveau de vitellogénine sans utiliser de sucre, ce qui permet d’éviter d’avoir à faire ce compromis. </p>
<p>Étant donné que dans la majorité des cas, ces moustiques contractent le pathogène de la maladie durant leur premier repas à base de sang, cette méthode de contrôle pourrait fortement retarder la première ingestion de sang, réduisant ainsi la durée de leur contagiosité.</p>
<p>Il est trop tôt pour évaluer l’efficacité de ces mesures de contrôle par la vitellogénine. Nous sommes encore loin d’apporter une réponse définitive. D’ici là, continuez à suivre les <a href="https://www.bug-off.org/">conseils de prudence</a> lorsque vous voyagez. Et mettez votre chasse-moustiques lorsque vous allez au chalet.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/118301/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Richard Halfpenny ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Les moustiques adorent le sucre -ce qui peut leur faire délaisser notre sang et donc, réduire les piqûres. Leur dent sucrée a peut-être révélé une arme génétique importante.
Richard Halfpenny, Lecturer in Biological Sciences, Staffordshire University
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/100467
2018-07-26T22:18:05Z
2018-07-26T22:18:05Z
Démoustication : comment l’arrivée du moustique tigre a changé la donne
<p>Depuis une dizaine d’années, une nouvelle espèce de moustique s’implante dans le <a href="https://ecdc.europa.eu/en/publications-data/aedes-albopictus-current-known-distribution-january-2018">Sud de l’Europe</a> et en <a href="http://solidarites-sante.gouv.fr/sante-et-environnement/risques-microbiologiques-physiques-et-chimiques/especes-nuisibles-et-parasites/article/cartes-de-presence-du-moustique-tigre-aedes-albopictus-en-france-metropolitaine">France métropolitaine</a>.</p>
<p>Il s’agit d’<em>Aedes albopictus</em>, le « moustique tigre ». Il est appelé ainsi du fait des zébrures noires et blanches qui ornent son abdomen et ses pattes. Reconnu comme l’une <a href="https://be.anses.fr/sites/default/files/BEP-mg-BE66-art9_0.pdf">des cent espèces les plus invasives au monde</a>, il prolifère dans les espaces (péri)urbains où il génère parfois de très fortes nuisances.</p>
<p>Contrairement aux autres moustiques urbains – comme les <em>Culex pipiens molestus</em>, présents dans toutes les agglomérations –, le moustique tigre pique au début du jour et en fin d’après-midi. Aux nuisances nocturnes que l’on subissait déjà s’ajoute ainsi une nuisance diurne dont on se serait bien passé.</p>
<p>Mais ce n’est pas tout ! <em>Aedes albopictus</em> est une espèce potentiellement vectrice de virus tels que la dengue, le chikungunya ou le zika. Ces virus ne circulent pas dans nos zones tempérées mais peuvent être importés par les voyageurs en provenance des zones tropicales. Entre 2010 et 2017, <a href="http://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/cas_autochtones_cartes_2010_-_2017.pdf">39 personnes</a> ont ainsi contracté les virus de la dengue ou du chikungunya sur le territoire métropolitain.</p>
<h2>« Monsieur le maire, démoustiquez ! »</h2>
<p>Le sentiment de subir une nuisance excessive ajouté aux compétences vectorielles du moustique tigre, responsables d’épidémies d’ampleur à l’échelle internationale ces dernières années, entraînent des réactions d’inquiétude et de mécontentement auprès d’une partie de la population.</p>
<p>L’été dernier, un habitant de Toulouse interpellait ainsi à l’aide d’une <a href="https://www.change.org/p/jl-moudenc-maire-de-toulouse-mr-jl-moudenc-d%C3%A9moustiquez-avant-que-le-moustique-tigre-n-infeste-et-n-infecte-toulouse">pétition en ligne</a> le maire de la ville.</p>
<p>Cette pétition, signée par plus de 7 500 personnes et <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/haute-garonne/toulouse/toulouse-pas-demoustication-massive-contre-moustique-tigre-1493437.html">relayée par les médias</a> locaux et nationaux, a créé un véritable buzz. Cet élan traduisait le ras-le-bol d’habitants excédés par une nuisance jugée « envahissante » et face à laquelle une réaction des autorités locales était espérée. Appuyée par des arguments sanitaires (« insalubrité », « problème de santé publique »), la plainte des Toulousains se doublait d’une demande explicite de démoustication mettant en œuvre des « solutions écoresponsables ».</p>
<p>L’exemple toulousain illustre bien les représentations collectives ambivalentes qui existent autour du principe de démoustication.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"997353545501376513"}"></div></p>
<h2>Quand démoustiquer = pulvériser</h2>
<p>Pensée comme une solution réflexe, la démoustication est souvent perçue comme un moyen radical de venir à bout des moustiques. En France, les politiques d’aménagement du territoire ont contribué à inscrire cette idée dans l’imaginaire collectif.</p>
<p>Dans les années 1960, le développement du littoral méditerranéen et la création des stations balnéaires du Languedoc-Roussillon ont appelé à d’importants travaux d’infrastructures et les opérations de démoustication de ces espaces infestés sont apparues comme un prérequis à l’accueil du tourisme de masse qui caractériserait bientôt les lieux.</p>
<p>À cette époque, la démoustication participait d’une logique d’embellissement. Avec elle s’érigeait la promesse de domestiquer des zones humides et lacustres pour offrir des espaces urbanisés dédiés aux loisirs ; autant de valeurs positives auxquelles se rapportait le principe de démoustication.</p>
<p>Jusqu’aux années 2000, qui marquent l’arrivée du moustique tigre sur le territoire métropolitain, les efforts à entreprendre pour lutter contre les moustiques sont relégués à la puissance publique. La démoustication par pulvérisation constitue alors aux yeux de la population une démonstration visible de la <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=GbW3DQAAQBAJ&oi=fnd&pg=PA187&dq=Duret+Reilhes,+2016&ots=inDmlrOpB6&sig=X4DG8qi7y7KU9XpvcuZgSkfjG7M">réactivité des autorités</a>.</p>
<p>Ce procédé est ancré dans la mémoire collective, au point parfois de résumer à lui seul le principe de démoustication. Les épandages aériens ont, par exemple, particulièrement marqué les esprits des populations d’outre-mer et du sud de la France.</p>
<p>Jusqu’en 2006, en périodes épidémiques, des pulvérisations aériennes d’adulticide étaient systématiquement réalisées dans les îles outre-marines. Autour du bassin méditerranéen, l’<a href="http://www.eid-med.org/">EID Méditerranée</a> recourt à l’épandage aérien pour 70 % des traitements réalisés sur sa zone d’action (de l’étang de Berre dans les Bouches-du-Rhône à Cerbère dans les Pyrénées-Orientales). En Camargue, une <a href="http://old.tourduvalat.org/fr/documentation/dossiers_thematiques/la_demoustication_de_la_camargue">démoustication expérimentale</a> est menée sur une petite partie du territoire, par voie aérienne et terrestre.</p>
<p>Enfin, de nombreuses villes mandatent des entreprises prestataires pour réaliser des traitements insecticides par pulvérisation terrestre. Aussi, ces traitements laisseraient-ils penser que la démoustication est l’affaire de grands moyens…</p>
<h2>Des collectivités locales en retrait</h2>
<p>L’introduction du moustique tigre en France métropolitaine bouscule cette vision de la démoustication. Elle invite à se défaire de l’association « démoustication = pulvérisation » et à réintégrer l’individu à l’effort de lutte contre cette nuisance.</p>
<p>Toute surface d’eau stagnante située dans l’environnement de l’Homme (espaces verts, voiries, jardins, terrasses et balcons arborés) constitue un possible habitat pour le moustique tigre. Ses lieux de ponte sont donc essentiellement urbains, multiples, diverses, souvent temporaires et difficiles d’accès. Des traitements de démoustication systématiques s’avéreraient peu efficaces et non soutenables. Ils accentueraient le risque de résistance de l’espèce aux insecticides et impacteraient l’écosystème du fait de la non-sélectivité des substances utilisées dans les traitements.</p>
<p>De plus, avec la visibilité croissante des préoccupations environnementales dans le débat public, l’<a href="https://journals.openedition.org/vertigo/16940">acceptabilité sociale</a> de telles mesures serait probablement de plus en plus <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/pyrenees-orientales/banyuls-des-viticulteurs-s-opposent-une-operation-de-demoustication-492797.html">discutée</a> par l’opinion. Enfin, le coût financier des produits et matériels nécessaires à de telles mesures explique, entre autres raisons, l’absence d’actions « visibles » initiées par les collectivités locales dont les dotations globales de financement ont régulièrement <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2017/07/17/les-reformes-qui-ont-bouleverse-les-collectivites-territoriales-en-dix-ans_5161711_823448.html">baissé depuis 2013</a>.</p>
<p>L’implantation du moustique tigre a achevé d’instituer une distinction nette entre la démoustication de confort et la lutte antivectorielle. Si cette différence est depuis longtemps admise par les experts et autorités publiques, elle semble moins évidente aux yeux de la population.</p>
<h2>Des solutions à portée de main</h2>
<p>L’efficacité limitée à très court terme de la démoustication classique (basée sur des pulvérisations d’adulticide) contre le moustique tigre a été <a href="https://www.nouvelle-aquitaine.ars.sante.fr/system/files/2018-05/Guide_Moustiques_Collectivites.pdf">mise en évidence</a> dans le cadre de la lutte de confort. Elle demeure toutefois le principal recours en cas de suspicion de cas de dengue, chikungunya ou zika.</p>
<p>Depuis 2006, un <a href="http://circulaires.legifrance.gouv.fr/pdf/2018/04/cir_43264.pdf">plan national</a> prévoit que face à une suspicion de cas, et si des moustiques tigres (larves ou adultes) sont repérés autour de la personne malade, des mesures antivectorielles, au premier rang desquelles des traitements de démoustication par pulvérisations d’insecticides, soient mis en œuvre pour éviter toute transmission locale du virus. En clair, les traitements chimiques contre le moustique tigre sont réservés à des situations sanitaires exceptionnelles.</p>
<p>Cela signifie-t-il qu’une démoustication de confort est impossible à l’encontre du moustique tigre ? Aucunement.</p>
<p>Des moyens de lutte existent, 100 % « écoresponsables ». La traque des eaux stagnantes, lieux de reproduction du moustique, constitue en effet le meilleur moyen de contrôler leur présence et de limiter son exposition à leurs piqûres. Cela suppose de rompre avec les représentations de la démoustication qui ont longtemps prévalu et de reconsidérer la <a href="https://theconversation.com/ce-que-chacun-peut-faire-pour-surveiller-le-moustique-tigre-77284">participation individuelle</a> comme un moyen de démoustication.</p>
<p>Cela doit-il dédouaner les institutions locales d’engager des mesures ? Pas davantage !</p>
<p>L’exemple toulousain illustre bien l’importance pour les autorités locales, souvent interpellées par la population, de diffuser une information claire sur les enjeux (sanitaires, environnementaux, de démoustication) liés à la présence du moustique tigre… sachant que les gîtes larvaires ne concernent pas uniquement les environnements privés des personnes. La lutte intégrée apparaît ainsi comme l’élément central de la redéfinition du principe de démoustication à l’égard du moustique tigre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/100467/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marion Le Tyrant a reçu des financements du programme « Investissement d’avenir » Labex DRIIHM (ANR-11-LABX-0010), CNRS. </span></em></p>
Si la pulvérisation d’insecticides est envisagée par beaucoup comme la solution la plus efficace pour venir à bout des moustiques, Aedes albopictus oblige à repenser les stratégies de démoustication.
Marion Le Tyrant, Doctorante en anthropologie, Aix-Marseille Université (AMU)
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tag:theconversation.com,2011:article/87880
2018-06-25T20:51:20Z
2018-06-25T20:51:20Z
Virus du Nil occidental : avec l’été, peut-il revenir en France ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/222652/original/file-20180611-191962-vsm0fr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C22%2C4906%2C2254&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Chevaux en Camargue, dans le sud de la France. Une région à risque, pour le virus du Nil Occidental. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/white-horses-camargue-france-1101379118?src=0_kDH6j3FDq_hWK3a-uzxw-3-25">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>L’an dernier, deux cas de fièvre du Nil occidental <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/alpes-maritimes/nice/cas-fievre-du-nil-occidental-detecte-nice-1353451.html">ont été déclarés dans le sud-est de la France</a>, près de Nice. Cette maladie transmise par des moustiques frappe régulièrement dans les pays du pourtour méditerranéen et ceux d’Europe de l’Est, en été et à l’automne. Cette année, la surveillance est de mise avec l’arrivée des fortes chaleurs. </p>
<p>Le virus du Nil occidental est moins connu que les virus proches de la dengue, de Zika, ou encore <a href="https://theconversation.com/en-france-les-moustiques-transmettent-aussi-le-virus-usutu-97944">d’Usutu</a>, également transmis par des moustiques. Jusqu’ici, il n’a entraîné que rarement des formes sévère de la maladie chez l’homme en France, raison pour laquelle il est moins redouté. Les précautions pour s’en protéger sont cependant communes et consistent pour l’essentiel… à tenir les moustiques à distance. </p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/un-second-cas-autochtone-dinfection-par-le-virus-usutu-detecte-en-france-que-faut-il-savoir-97944">Un second cas autochtone d’infection par le virus Usutu détecté en France : que faut-il savoir ?</a>
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<p>Les conditions climatiques et environnementales laissent penser que le virus du Nil occidental ne va pas disparaître de si tôt. Aussi il est bon de connaître ses particularités, pour savoir comment réagir si un nouvel épisode de la maladie se présentait. </p>
<h2>Un virus transmis par le moustique commun, du genre <em>Culex</em></h2>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/224128/original/file-20180620-137741-1s9wpmk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/224128/original/file-20180620-137741-1s9wpmk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/224128/original/file-20180620-137741-1s9wpmk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/224128/original/file-20180620-137741-1s9wpmk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/224128/original/file-20180620-137741-1s9wpmk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/224128/original/file-20180620-137741-1s9wpmk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/224128/original/file-20180620-137741-1s9wpmk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un moustique du genre Culex.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sylvie Lecollinet</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>La fièvre du Nil occidental est une maladie causée par le virus du même nom, ou <em>West Nile</em> pour les anglophones. La transmission de ce virus est assurée par des moustiques « communs », appartenant principalement au genre <em>Culex</em>. Les virus Zika et celui de la dengue, par contre, sont transmis en France par un moustique plus récemment implanté, le moustique tigre reconnaissable à ses rayures, <em>Aedes albopictus</em>. </p>
<p>La fièvre du Nil occidental est une maladie ancienne en France, déjà repérée en Camargue dans les années 1960. A l’époque, elle a été décrite à plusieurs reprises chez l’homme. Les scientifiques ont aussi observé des difficultés à se mouvoir chez des chevaux infectés par le virus, ce qui a valu le nom de « lourdige » à cette pathologie du cheval. </p>
<p>Les plus sensibles à cette pathologie sont les humains et les équidés, c’est à dire les chevaux, les ânes ou les poneys. Elle est transmise principalement par piqûre, par un moustique infecté après avoir piqué un oiseau lui-même infecté. Cependant, des cas de transmission d’humain à humain ont été décrits <a href="https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa030969">après une transfusion sanguine</a> ou une greffe d’organes - parce que le sang transféré ou les organes transplantés étaient porteurs du virus. </p>
<p>Ce risque de transmission par le sang explique les précautions prises dans les pays de l’Union Européenne lors d’épisodes de fièvre du Nil occidental. Les donneurs de sang rentrant d’une région où un épisode est en cours sont refusés pendant les 28 jours suivant leur séjour. Une recherche du virus avec résultat négatif peut être imposée avant tout transfert de sang ou greffe d’organe. </p>
<h2>Une maladie qui peut déclencher une « grippe estivale »</h2>
<p>L’infection passe le plus souvent inaperçue. Elle peut aussi être responsable de ce qu’on appelle une « grippe estivale », par opposition à la grippe classique qui se déclare l’hiver. Celle-ci se caractérise par une fièvre, de la fatigue, des faiblesses musculaires. Elle se déclare lorsque les moustiques pullulent, à la fin de l’été et au début de l’automne - les mois d’août, septembre et octobre étant les plus à risque. </p>
<p>Dans de rares cas, la fièvre du Nil occidental peut évoluer vers une forme nerveuse, comme une encéphalite ou une méningite, associée par exemple à des difficultés à se mouvoir, une modification du comportement ou à des maux de tête. Cela concerne <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0025712508000965">moins d’une infection sur cent chez l’humain</a> - chez le cheval, la fréquence est dix fois plus importante. </p>
<p>La forme nerveuse de la maladie peut conduire à la mort du patient infecté - ou celle du cheval. Plusieurs facteurs sont décrits comme <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4939899/">pouvant contribuer au développement de cette forme sévère</a>, comme l’âge plus avancé (au-delà de 65 ans), l’existence d’une immunodépression ou de pathologies sous-jacentes comme une hypertension artérielle ou un diabète. </p>
<h2>Eliminer l’eau stagnante dans les soucoupes sous les pots de fleurs</h2>
<p>Que se passera-t-il si, en France, un épisode de fièvre Nil occidental se déclare cet été ou cet automne ? Des opérations de communication seront organisées à destination des médecins et des personnes résidant dans les zones à risque, pour les aider à mieux s’en protéger. </p>
<p>Plusieurs mesures pourront être préconisées pour éviter l’infection chez l’humain, comme chez le cheval. Parmi les plus efficaces, il y a l’élimination régulière, tous les 3 à 4 jours maximum, de l’eau stagnante dans les soucoupes sous les pots de fleur, dans les piscines non entretenues, dans les gouttières bouchées ou tout autre endroit creux à proximité des habitations ou des bâtiments d’élevage. Une telle inspection vise à empêcher le développement des larves de moustiques.</p>
<p>Autre mesure efficace, le port de vêtements longs est recommandé, tout particulièrement au lever et coucher du soleil, moments de la journée les plus favorables aux piqûres par les moustiques transmettant le virus. On peut aussi utiliser des produits répulsifs sur les vêtements.</p>
<p>Des opérations de démoustication pourront également être déployées par les autorités afin de détruire les larves de moustiques et d’empêcher le développement de nouveaux spécimens adultes. Ces opérations, par contre, auront une efficacité retardée dans le temps.</p>
<h2>Un épisode récent en Camargue, près d’Arles</h2>
<p>L’histoire de la fièvre du Nil occidental montre qu’elle a été identifiée en Afrique de l’Est dès 1937. Elle semblait, jusqu’en 2008, se limiter à un nombre restreint de pays d’Europe orientale (en particulier la Roumanie le long du delta du Danube, et la Hongrie), mais elle semble s’être désormais installée durablement en Europe du Sud. Elle est régulièrement décrite dans les pays du pourtour méditerranéen, depuis le Portugal jusqu’à la Grèce. </p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/222260/original/file-20180607-137309-i86h8a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/222260/original/file-20180607-137309-i86h8a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/222260/original/file-20180607-137309-i86h8a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/222260/original/file-20180607-137309-i86h8a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/222260/original/file-20180607-137309-i86h8a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/222260/original/file-20180607-137309-i86h8a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/222260/original/file-20180607-137309-i86h8a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Carte des zones avec des cas répertoriés de fièvre du Nil occidental en Europe. Source : Organisation Mondiale de la Santé Animale et publications scientifiques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sylvie Lecollinet</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>En France, deux épisodes récents ont été détectés. Le premier en 2015, en Camargue, autour de la ville d’Arles, dans les départements du Gard et des Bouches-du-Rhône. Le second en 2017, dans les Alpes Maritimes, près de Nice. Ces deux épisodes n’ont été responsables que de formes grippales chez un faible nombre de patients. Cependant, dans l’épisode camarguais, une quarantaine de formes nerveuses sont survenues chez les équidés de la région. </p>
<p>Par ailleurs, plusieurs épisodes sans conséquence ni pour l’humain ni pour le cheval, ont été identifiés aux Antilles, en Guadeloupe, cette dernière décennie. </p>
<h2>Un virus qui circulerait « silencieusement » des oiseaux aux moustiques</h2>
<p>En France métropolitaine, les épisodes de fièvre du Nil occidental antérieurs à celui de 2015 remontent aux années 2000 à 2006. On a donc observé une période de presque 10 ans sans cas identifié. Cependant, les données accumulées par les chercheurs sur cette maladie en France semblent indiquer que le virus <a href="https://www.liebertpub.com/doi/10.1089/vbz.2012.1166">pourrait circuler « silencieusement »</a>, c’est à dire sans être repéré. Il pourrait en effet se transmettre entre des oiseaux sauvages et des moustiques dans les régions du pourtour méditerranéen à risque, <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01606855">en particulier en Camargue</a>. </p>
<p>Heureusement, ni l’humain ni le cheval infecté ne peuvent transmettre le virus à des moustiques qui les piqueraient à nouveau. L’humain, comme le cheval, constitue ce qu’on appelle une « impasse » pour le virus (en dehors des dons du sang ou des greffes d’organe évoqués plus haut). Il s’agit d’une situation très différente de celles de la dengue et de Zika, pour lesquelles il est crucial d’identifier rapidement les patients infectés afin d’éviter de nouvelles chaînes de transmission entre humains. </p>
<p>On peut s’attendre à une augmentation des cas de fièvre du Nil occidental en France à l’avenir, comme pour <a href="http://www.snjmg.org/blog/post/arboviroses-et-moustique-tigre/1065">d’autres pathologies transmises par les moustiques</a>, par exemple le Chikungunya, la dengue, Zika ou Usutu. L’émergence de ces maladies tient à la combinaison de facteurs climatiques et environnementaux, comme <a href="https://theconversation.com/lyme-fievre-du-nil-ebola-comment-lerosion-de-la-biodiversite-favorise-virus-et-bacteries-54320">l’érosion de la biodiversité</a>. Elle est liée aussi à <a href="https://theconversation.com/grippes-sida-ebola-la-pandemie-face-sombre-de-la-mondialisation-73383">l’intensification des échanges commerciaux et de la circulation des personnes</a>, favorisant l’implantation de différentes espèces de moustiques dans de nouvelles régions du globe. </p>
<p>Les <em>Culex</em>, les moustiques transmettant la fièvre du Nil occidental, sont déjà répartis sur tout le territoire français. Il est donc important de maintenir une surveillance efficace et réactive de cette pathologie à la fois chez l’humain, les chevaux et le moustique. Cette mission de surveillance est assurée par <a href="http://www.respe.net/node/3067">des instituts d’origines très diverses</a> comme Santé Publique France, les Agences Régionales de Santé, l’Institut de recherche biomédicale des armées (IRBA), l’Entente Interdépartementale de démoustication-Méditeranée, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation de l’environnement et du travail (ANSES), le Réseau d’épidémio-surveillance en pathologie équine (RESPE), ou encore les Directions Départementales de la Protection des Populations. Sur le terrain, elle s’appuie sur la vigilance des praticiens dans les hôpitaux ainsi que des vétérinaires, qui sont souvent les premiers à donner l’alerte.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/87880/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sylvie Lecollinet a reçu des financements des Fonds Eperon et de l'institut Français du Cheval pour la réalisation de projets de recherche.</span></em></p>
L'an dernier deux cas de fièvre du Nil Occidental étaient déclarés en France. La menace de cette maladie, transmise par le moustique le plus commun, persiste cet été et cet automne.
Sylvie Lecollinet, Virologue et vétérinaire, Inrae
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/97944
2018-06-17T20:21:02Z
2018-06-17T20:21:02Z
Un second cas autochtone d’infection par le virus Usutu détecté en France : que faut-il savoir ?
<p>Le 10 novembre 2022, <a href="https://www.nouvelle-aquitaine.ars.sante.fr/communique-de-presse-confirmation-dune-infection-autochtone-virus-usutu-secteurs-des-landes-et-de">un cas d’infection par le virus Usutu a été confirmé dans le département des Landes</a>, en Nouvelle-Aquitaine. Il s’agit du premier cas d’arbovirose (virus transmis par des insectes hématophages - autrement dit, se nourrissant de sang - tels que les moustiques) identifié dans cette région. C’est aussi seulement le second cas d’infection au virus Usutu répertorié en France. </p>
<p>Après avoir développé des symptômes pseudogrippaux (fièvre, maux de tête, courbatures), <a href="https://www.nouvelle-aquitaine.ars.sante.fr/communique-de-presse-un-premier-cas-darbovirose-autochtone-detecte-en-nouvelle-aqutaine">la patiente a totalement récupéré de l’infection</a>.</p>
<p>Avec le virus du <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/chikungunya">chikungunya</a>, celui de la <a href="https://theconversation.com/les-cas-de-dengue-explosent-en-france-metropolitaine-que-faut-il-savoir-190729">dengue</a>, le virus <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/zika">Zika</a> et celui du <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/west-nile">Nil occidental</a>, Usutu fait désormais partie des virus transmis par les moustiques ayant provoqué au moins un cas autochtone en France – c’est-à-dire chez une personne n’ayant pas voyagé dans un pays étranger. </p>
<p>Si Usutu n’est pas le plus redoutable de ces virus que les Français doivent apprendre à côtoyer, il mérite cependant l’attention des scientifiques et des autorités sanitaires.</p>
<h2>Un virus déjà à l’origine d’une infection en 2016</h2>
<p>Un premier cas d’infection au virus Usutu en France avait déjà été identifié en 2016, mais les études ne l’ont mis en évidence que 2 ans plus tard. Le 10 novembre 2016, un homme de 39 ans avait été hospitalisé trois jours en neurologie au CHU de Montpellier en raison d’une paralysie soudaine de la moitié de son visage. Le patient a récupéré toutes ses facultés en quelques semaines, sans séquelle. Des analyses menées par la suite ont montré qu’il avait été infecté par ce Usutu.</p>
<p>Ce sont les travaux réalisés par <a href="https://www.umontpellier.fr/recherche/unites-de-recherche/pathogenese-et-controle-des-infections-chroniques-pcci">notre équipe</a> de biologistes de l’université de Montpellier, de l’Inserm et du CHU de Montpellier, qui avaient permis de comprendre l’origine des troubles présentés par ce patient. Nous avions alors analysé 666 prélèvements de liquide céphalo-rachidien réalisés (puis congelés) chez des patients hospitalisés en 2016 à Montpellier et à Nîmes. Un seul a révélé la présence du virus Usutu : le sien.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-les-moustiques-nous-piquent-et-les-consequences-186325">Comment les moustiques nous piquent (et les conséquences)</a>
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<p>Le scénario le plus probable est que cet homme, comme la patiente identifiée dans les Landes, a été infecté par un moustique, après que celui-ci a piqué un oiseau, réservoir de ce virus. Transmis à l’humain principalement par le moustique <em>Culex</em>, commun en France, ce virus circule activement dans notre pays depuis au moins 2015, selon une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/pmid/27869608/">étude de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail</a> (Anses). </p>
<h2>Du Swaziland à la France métropolitaine</h2>
<p>Le virus Usutu était un illustre inconnu jusqu’à peu, mais il a récemment retenu l’attention de la communauté scientifique en raison de sa propagation importante en Europe. Cet arbovirus appartient à la famille des <em>Flaviviridae</em> et au genre <em>flavivirus</em>, composé de plus de 70 membres. </p>
<p>Parmi ceux-ci, on retrouve quelques-uns d<a href="https://theconversation.com/virus-exotiques-en-france-un-sujet-plus-que-jamais-dactualite-186324">es arbovirus les plus dangereux pour l’être humain</a>, comme le virus Zika, ou celui de la dengue, de la fièvre jaune, ou de la fièvre du Nil occidental (<em>West Nile virus</em>). </p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/223399/original/file-20180615-85849-pbpknf.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/223399/original/file-20180615-85849-pbpknf.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=373&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/223399/original/file-20180615-85849-pbpknf.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=373&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/223399/original/file-20180615-85849-pbpknf.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=373&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/223399/original/file-20180615-85849-pbpknf.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=469&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/223399/original/file-20180615-85849-pbpknf.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=469&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/223399/original/file-20180615-85849-pbpknf.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=469&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Figure 1.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Clé et coll. Médecine et Sciences.</span></span>
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<p>Usutu a été baptisé d’après la rivière du même nom, située dans le Swaziland, petit pays d’Afrique ayant une frontière commune avec l’Afrique du Sud. Il y a été́ identifié pour la première fois en 1959.</p>
<p>Peu de choses sont connues concernant les cellules cibles d’Usutu. Néanmoins notre équipe <a href="http://journals.plos.org/plosntds/article?id=10.1371/journal.pntd.0005913">a décrit récemment</a> sa capacité, comme d’autres flavivirus, à infecter <em>in vitro</em> (dans des cultures en laboratoire) non seulement des cellules du système nerveux, mais aussi le système nerveux de rongeurs.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/223402/original/file-20180615-85825-dct6p6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/223402/original/file-20180615-85825-dct6p6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=227&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/223402/original/file-20180615-85825-dct6p6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=227&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/223402/original/file-20180615-85825-dct6p6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=227&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/223402/original/file-20180615-85825-dct6p6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=285&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/223402/original/file-20180615-85825-dct6p6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=285&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/223402/original/file-20180615-85825-dct6p6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=285&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Figure 2.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Salinas et coll., PLoS Negl Trop Dis., 2017 sep 5 ;11(9) :e0005913.</span></span>
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</figure>
<h2>Des oiseaux pour hôtes, des moustiques pour vecteurs</h2>
<p>Le cycle naturel de transmission d’Usutu est un cycle enzootique, c’est-à-dire localisé dans une zone donnée. Il implique principalement les oiseaux passériformes (par exemple les merles ou les pies) et strigiformes (par exemple, les chouettes laponnes) comme hôtes « amplificateurs », c’est-à-dire permettant la multiplication active du virus. </p>
<p>Ce sont les moustiques ornithophiles (piquant les oiseaux) qui lui servent de vecteurs lors de la transmission à l’humain. Différents travaux ont démontré l’implication de plusieurs espèces de moustiques dans l’entretien du cycle d’Usutu au sein de l’avifaune, c’est-à-dire les oiseaux occupant un même lieu. </p>
<figure class="align-center ">
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<span class="caption">Figure 3.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Clé et coll. Médecine et Sciences.</span></span>
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<p>Le virus ainsi été isolé chez les moustiques <em>Aedes albopictus</em> (plus connu sous le nom de moustique tigre), <em>Aedes caspiuis</em>, <em>Anopheles maculipennis</em>, <em>Culex quinquefasciatus</em>, <em>Culex perexiguus</em>, <em>Culex perfuscus</em>, <em>Coquillettidia aurites</em>, <em>Mansonia Africana</em> et <em>Culex pipiens</em>. Ces différentes espèces sont ornithophiles, mais piquent aussi l’humain.</p>
<p>Les moustiques transmettent également le virus aux chevaux. Mais cet animal, comme l’être humain, est considéré comme un hôte accidentel : ces espèces sont sensibles à Usutu, mais considérées comme des « impasses » épidémiologiques – c’est-à-dire qu’ils ne peuvent pas transmettre le virus à un congénère.</p>
<h2>Une mortalité importante chez les oiseaux</h2>
<p>Usutu a été mis en évidence chez de nombreuses espèces d’oiseaux, et plusieurs espèces migratrices seraient responsables de l’introduction de ce virus en Europe. D’autres seraient plutôt responsables de sa propagation. Au nombre des espèces sensibles à l’infection par Usutu figure le merle noir (<em>Turdus merula</em>), qui présente le taux de mortalité le plus élevé connu.</p>
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<p>Chez les oiseaux contaminés par Usutu, l’infection se traduit par des troubles nerveux centraux. Ils se manifestent par une prostration, une désorientation, une incoordination motrice et une perte de poids. L’autopsie révèle fréquemment une inflammation du foie (hépatomégalie) et de la rate (splénomégalie).</p>
<p>Des lésions ont également été signalées dans le cœur, le foie, les reins, la rate et le cerveau des oiseaux infectés. La virulence d’Usutu le rend hautement pathogène pour l’avifaune, en raison notamment de sa réplication dans un grand nombre de tissus et d’organes. Usutu est à l’origine d’une mortalité aviaire importante dans différentes régions d’Europe.</p>
<h2>Un virus découvert pour la première fois en Europe en 2001</h2>
<p>Le virus Usutu <a href="https://www.cdc.gov/ncidod/EID/vol8no7/02-0094.htm">a été repéré pour la première fois</a> en Europe en 2001, en Autriche, sur des cadavres d’oiseaux. Ensuite il a été signalé dans de nombreux pays européens, dans des moustiques ou des oiseaux.</p>
<p>L’augmentation, en 2015, de la mortalité des merles noirs communs dans les départements du Haut-Rhin et du Rhône avait alerté les autorités. Les investigations de l’Anses et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) ont alors permis d’identifier le virus Usutu. </p>
<p>Durant l’été 2016, une grande épizootie d’Usutu touchant les oiseaux a été enregistrée en Europe, avec une large activité du virus en Belgique, Allemagne, France et pour la première fois aux Pays-Bas. Ce phénomène révèle non seulement une propagation géographique continue d’Usutu, mais aussi l’apparition de nouvelles niches écologiques.</p>
<p>Par ailleurs <a href="https://linkinghub.elsevier.com/retrieve/pii/S1567-1348(18)30120-5">il a été depuis établi</a> que le virus Usutu circule <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2018/08/msc180154/msc180154.html">chez les moustiques <em>Culex pipiens</em> de Camargue depuis au moins 2015</a>.</p>
<p>La récurrence de l’infection à Usutu dans différents pays européens suggère un cycle de transmission persistant dans les zones affectées. Ce constat peut s’expliquer soit par l’existence de moustiques hivernants infectés (le froid ralenti leur organisme et ils ne bougent plus jusqu’au printemps), soit par une réintroduction multiple du virus, par le biais d’oiseaux migrateurs en provenance d’Afrique.</p>
<h2>Des symptômes à mieux caractériser</h2>
<p>Le risque de transmission du virus Usutu de l’animal à l’être humain a initialement été décrit en Afrique. Le premier cas humain fut rapporté en République centrafricaine dans les années 1980, le second au Burkina Faso en 2004. Pour ces deux cas, les symptômes étaient modérés, avec notamment une éruption cutanée et une légère atteinte du foie.</p>
<p>En Europe, on dénombre à ce jour un peu moins de 80 cas d’infection humaine aiguë par Usutu, principalement en Italie. Par ailleurs, plus de 100 personnes présentant des anticorps contre ce virus ont été répertoriées, démontrant que ces individus ont été exposés au pathogène. </p>
<p>L’infection humaine est probablement le plus souvent sans symptôme, ou présentant une expression clinique bénigne. Toutefois des complications neurologiques de type encéphalites (inflammation de l’encéphale, partie du cerveau logée dans la boîte crânienne) ou méningo-encéphalites (inflammation de l’encéphale et des méninges,les membranes qui l’enveloppent), ont été décrites, totalisant une trentaine de cas en Europe. </p>
<p>À noter que la plupart de ces atteintes neurologiques sont liées à une seule lignée d’Usutu, appelée Europe 2 (sur les 8 lignées existantes). Une attention toute particulière devant être apportée au risque spécifique que pourrait provoquer cette lignée qui, pour le moment, n’a pas encore été identifiée en France.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/496016/original/file-20221117-21-al6fkk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/496016/original/file-20221117-21-al6fkk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=517&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/496016/original/file-20221117-21-al6fkk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=517&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/496016/original/file-20221117-21-al6fkk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=517&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/496016/original/file-20221117-21-al6fkk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=650&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/496016/original/file-20221117-21-al6fkk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=650&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/496016/original/file-20221117-21-al6fkk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=650&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Tableau récapitulant le nombre de cas d’Infection aiguë d’Usutu identifiés chez l’être humain (LCR : liquide céphalorachidien ; Encéphalite : Inflammation de l’encéphale ; Méningo-encéphalite : inflammation de l’encéphale et des méninges ; Ictère fébrile : jaunisse (atteinte du foie) associé à une fièvre).
Paralysie a frigire : paralysie faciale péripherique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">DR</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>La description par notre équipe de la présence atypique d’une paralysie faciale, apparue chez le premier cas français, suggère que l’étendue des symptômes des infections dues au virus Usutu n’est pas complètement connue.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/O224fpwkxGc?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<h2>Un virus dont l’aire de répartition s’étend</h2>
<p>L’histoire récente de flambées épidémiques impliquant d’autres arbovirus invite la communauté scientifique à la plus grande vigilance concernant le virus Usutu. Son aire de répartition s’étend désormais en effet à un grand nombre de pays européens. Les épizooties de mortalité aviaire dues à ce virus sont fréquentes, et des souches très différentes sur le plan génétique circulent au même moment. Autant de signes qui doivent alerter.</p>
<p>Bien que trop rares, quelques études de séroprévalence (présence dans le sang d’anticorps dirigés contre le virus) viennent étayer l’hypothèse que l’être humain est davantage exposé au risque d’infection par Usutu qu’on ne l’imagine.</p>
<p>Les connaissances concernant la physiopathologie de ce virus émergent sont pour l’heure très sommaires. Les travaux en cours visent notamment à mieux appréhender sa biologie et les mécanismes associés aux atteintes neurologiques. Dans ce contexte, des travaux de recherche accompagnés de mesures de surveillance et de <a href="http://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/epidemie-dengue-chikungunya-zika-france-metropolitaine.pdf">prévention</a> devraient être mises en place en France, en particulier dans les zones les plus à risque.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/97944/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yannick Simonin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
En France, des moustiques ont déjà transmis le Zika, et ceux de la dengue, du chikungunya ou du Nil occidental. La liste s’allonge, avec la découverte du premier cas autochtone d’infection par Usutu.
Yannick Simonin, Virologiste, maître de conférences en surveillance et étude des maladies émergentes, Université de Montpellier
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/97274
2018-06-07T21:56:26Z
2018-06-07T21:56:26Z
Face à l’épidémie d’Ebola, la question des traitements expérimentaux
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/221821/original/file-20180605-119856-deoxpl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4928%2C3061&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des traitements expérimentaux sont envisagés pour faire face à la nouvelle épidémie d'Ebola qui s'est déclarée en République démocratique du Congo. Un vaccin lui aussi expérimental est déjà en cours d'administration.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/download/confirm/1007424544?src=HaZoCbIaKcZj3NAIzv_VhA-1-53&size=huge_jpg">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p><a href="https://theconversation.com/fr/topics/ebola-24917">Ebola</a>, Lassa, <a href="https://theconversation.com/fr/topics/zika-24576">Zika</a>, Nipah, <a href="https://theconversation.com/la-peste-une-menace-pour-lensemble-du-monde-86245">peste</a> : ces noms effraient, à juste titre. L’émergence – ou la réémergence – de ces pathogènes infectieux menace nos sociétés. Plus encore dans les pays du Sud, où les populations sont davantage vulnérables. Ils peuvent entraîner des crises sanitaires à l’échelle d’un pays ou de la planète.</p>
<p>La répétition des épidémies interpelle aujourd’hui les États, les organisations régionales et internationales, les agences sanitaires, les organisations non gouvernementales et l’industrie pharmaceutique. Il n’existe que très peu de vaccins préventifs, et pas beaucoup plus de traitements curatifs, pour les personnes touchées. La plupart de ces pathogènes sont hautement virulents, entraînant une mortalité élevée – de l’ordre de <a href="http://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/ebola-virus-disease">50 % pour Ebola</a>. Le besoin crucial de vaccins et de traitements appelle de nouvelles réponses, à hauteur des défis à relever dans l’urgence d’une épidémie.</p>
<p>Un mois s’est écoulé depuis qu’une nouvelle épidémie d’Ebola s’est déclarée en République Démocratique du Congo (RDC) dans le district sanitaire de Bikoro (province d’Équateur), à 600 km de la capitale Kinshasa. Elle s’est ensuite propagée à la ville de Mbandaka, peuplée de 1,2 million d’habitants, ainsi que dans d’autres villages très isolés de la même province. Le dernier bilan, le 3 juin, faisait état de 53 cas, dont 25 décès dans trois districts sanitaires (Bikoro, Iboko et Wangata). L’évolution de l’épidémie est encore très incertaine, aussi bien en zone urbaine qu’en zone rurale. L’issue dépendra de l’efficacité <a href="http://afrique.lepoint.fr/actualites/rd-congo-la-vaccination-pour-ralentir-la-course-du-virus-ebola-04-06-2018-2224024_2365.php">des différentes interventions</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1001835236764934144"}"></div></p>
<h2>Un vaccin expérimental contre Ebola en RDC</h2>
<p>Pour lutter contre cette nouvelle épidémie d’Ebola, une des interventions proposées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et les autorités sanitaires de la RDC, en collaboration avec Médecins sans frontières, est la mise en place d’une stratégie reposant <a href="https://www.la-croix.com/Monde/Afrique/Le-vaccin-nouvelle-arme-contre-Ebola-RD-Congo-2018-06-06-1200944910">sur un vaccin dit expérimental</a>, qui n’est pas encore homologué. En conséquence, celui-ci est déployé dans le cadre <a href="http://www.who.int/ebola/drc-2018/faq-vaccine/fr/">d’un « accès élargi »</a> impliquant le consentement éclairé des personnes et la conformité avec les bonnes pratiques cliniques.</p>
<p>La vaccination est pratiquée en anneau. <a href="https://www.letemps.ch/sciences/cette-y-un-vaccin-contre-virus-ebola">Le vaccin</a> est d’abord proposé aux contacts des cas confirmés, soit le premier anneau autour de chaque cas. Il est aussi proposé aux contacts de ces contacts, soit le deuxième anneau. Viennent s’ajouter les soignants et les travailleurs en lien avec l’épidémie. Depuis le lancement de la vaccination le 21 mai (soit 13 jours après la déclaration de l’épidémie), 1 112 personnes ont été vaccinées <a href="https://mailchi.mp/223c1e97a4a4/ebola_rdc_3juin?e=892a63cca2">selon le ministère de la santé de RDC</a>.</p>
<p>L’efficacité clinique de ce vaccin, appelé rVSVG-ZEBOV-GP, avait pu être évalué chez l’homme à large échelle par l’OMS en 2015 pendant l’épidémie d’Ebola en Guinée, comme rapporté <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(16)32621-6/abstract">dans la revue <em>The Lancet</em></a>. Ce vaccin est constitué du virus de la stomatite vésiculeuse (VSV), un virus animal causant des syndromes de type grippal chez les humains. Le VSV a été génétiquement modifié pour contenir une protéine du virus Ebola Zaïre, de sorte qu’il est capable de provoquer une réponse immunitaire contre le virus Ebola.</p>
<h2>La durée de persistance des anticorps est en cours d’étude</h2>
<p>La tolérance de ce vaccin chez l’adulte et les enfants de plus de 6 ans a été jugée bonne – plus de 16 000 volontaires ont reçu ce vaccin dans le cadre d’essais cliniques à ce jour. Il a été considéré par les responsables de l’étude comme protecteur de la maladie après l’exposition au virus chez l’adulte.</p>
<p>Néanmoins, son efficacité clinique dans certains groupes de population comme les enfants en bas âge (moins de 6 ans), les femmes enceintes, les personnes immunodéprimées (par exemple celles vivant avec le VIH), n’est pas encore bien connue. Par ailleurs, la vitesse à laquelle sont produits les anticorps et leur durée de persistance dans l’organisme sont en cours d’étude, de même que la tolérance chez les petits enfants.</p>
<p>Un essai clinique <a href="https://www.inserm.fr/actualites-et-evenements/actualites/ebola-plus-2-000-personnes-deja-incluses-dans-essai-vaccinal-prevac">baptisé PREVAC</a> se déroule actuellement en Afrique de l’Ouest. Promu notamment par l’Inserm en Guinée, il devrait permettre de répondre en grande partie à ces questions. L’utilisation de ce vaccin pendant l’épidémie en cours en RDC va également permettre de réunir de nouvelles données sur sa tolérance et son efficacité à prévenir la maladie.</p>
<h2>Des traitements expérimentaux bientôt administrés en RDC</h2>
<p>En plus du vaccin, l’OMS a annoncé que des traitements expérimentaux contre Ebola pourraient bientôt être administrés à des malades en RDC. Il s’agit de molécules antivirales et d’anticorps monoclonaux (ZMapp, Remdesivir GS-5734, REGN3470-3471-3479, Favipiravir et mAb 114) encore non homologués.</p>
<p>Les anticorps monoclonaux agissent en ciblant une protéine présente à la surface du virus Ebola. En se fixant au virus présent dans l’organisme des patients infectés, ils empêchent l’infection de nouvelles cellules. Les chercheurs supposent que ces anticorps, s’ils sont administrés au plus vite, diminuent l’expansion de l’agent infectieux, laissant ainsi un délai au système immunitaire du patient pour produire une réponse efficace.</p>
<p>Ces traitements sont disponibles. Pour l’instant, ils ont démontré leur efficacité in vitro (c’est-à-dire dans un milieu artificiel comme une éprouvette) ou sur des modèles animaux. Trois d’entre eux (ZMapp, Remdesivir GS-5734, Favipiravir) ont cependant été administré à des patients lors de la précédente épidémie en Afrique de l’Ouest entre 2013 et 2016, dans le cadre d’essais cliniques ou <a href="https://www.eurordis.org/fr/usage-compassionnel">à usage compassionnel</a> (c’est-à-dire pour des malades qui n’ont aucun autre recours et pas non plus le temps d’attendre la fin des essais cliniques et du processus d’autorisation). De telles molécules ont également été administrées, toujours à titre compassionnel, à des soignants occidentaux comme, en 2014, une <a href="https://www.vidal.fr/actualites/18612/ebola_l_infirmiere_ecossaise_qui_avait_rechute_est_guerie_son_cas_merite_une_attention_particuliere/">infirmière écossaise</a> et un <a href="https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa1500306#t=article">médecin américain</a>, tous deux rapatriés depuis le Sierra Leone dans leur pays d’origine.</p>
<h2>Des thérapeutiques expérimentales pour répondre à l’urgence sanitaire</h2>
<p>Pour ces traitements non homologués, tout comme le vaccin, l’OMS propose que l’utilisation se fasse <a href="http://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/250580/9789241549837-eng.pdf">dans le cadre d’une surveillance rapprochée</a> ou MEURI (pour <em>monitored emergency use of unregistered interventions</em>) avec le consentement des patients, ou encore dans le cadre d’essais cliniques. L’institution des Nations unies a annoncé que, dans ce contexte épidémique, ces traitements seront administrés à tous les malades et ne seront pas comparés à un placebo. Cependant des comparaisons d’efficacité entre plusieurs molécules ou association de molécules resteraient possibles, même dans de telles circonstances.</p>
<p>Cette nouvelle approche utilisant des thérapeutiques expérimentales pour répondre à une urgence sanitaire a fait la preuve de sa faisabilité lors de l’épidémie d’Ebola qui a sévit en Afrique de l’Ouest de 2013 à 2016, causant <a href="https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMsr1513109">11 000 morts sur 28 000 cas</a>. Cet épisode, dramatique, a dans le même temps considérablement accéléré la recherche biomédicale sur le virus.</p>
<p>En effet, il a permis de mettre en œuvre des essais cliniques d’envergure grâce à une collaboration entre les ministères de la Santé des trois pays concernés (Guinée, Libéria, Sierra Leone), des instituts de recherche internationaux, des laboratoires pharmaceutiques, des organisations non gouvernementales et surtout grâce à l’engagement des populations.</p>
<h2>Des avis rendus par les comités d’éthique dans des délais raccourcis</h2>
<p>Les comités d’éthique de Guinée, du Libéria et de Sierra Leone ont fait preuve d’une adaptation remarquable, face à l’urgence de la situation, pour rendre des avis dans des délais largement raccourcis. Ainsi, 40 ans après la découverte du virus Ebola, des thérapies expérimentales ont pour la première fois été administrées à des patients infectés. L’explosion de l’épidémie a provoqué un impératif éthique pour évaluer de nouvelles thérapies, permettant la réalisation de progrès médicaux considérables. Ce qui se dessine à présent en RDC n’est que la continuité, potentiellement en plus efficace, de cette première expérience en Afrique de l’Ouest.</p>
<p>Deux questions pourraient se poser, du même coup, avec plus d’acuité encore : est-il conforme à l’éthique d’utiliser des produits non homologués dont les effets indésirables ne sont pas encore tous connus, sachant que l’efficacité clinique pour les traitements curatifs n’est pas démontrée chez l’homme ? Inversement, serait-il éthique de ne pas proposer de telles interventions encadrées par une surveillance ou un essai clinique, sachant que celles-ci pourraient améliorer la survie des malades, face à un virus actuellement mortel dans la moitié des cas ?</p>
<p>Dans de telles circonstances d’utilisation, le respect des principes éthiques applicables à tous les essais de médicaments reste indispensable. Cela inclut une information claire et adaptée, le consentement éclairé du patient, sa liberté de choix, la confidentialité, le respect de sa personne, la transparence. S’y ajoute, aussi, l’implication de la communauté autour du patient – une dimension qui a parfois été oubliée lors des précédentes épidémies. Les populations concernées vivent parfois dans des zones isolées rendant ce type d’intervention encore plus complexe, sans compter la barrière de la langue ou d’un contexte socioculturel différent.</p>
<p>En France, ces réflexions sont menées notamment dans le cadre <a href="https://reacting.inserm.fr/.">du projet REACTing</a> (pour <em>REsearch and ACTion targeting emerging infectious diseases</em>) de l’Inserm, en collaboration avec les instituts de recherche regroupés dans l’<a href="https://aviesan.fr/">Alliance pour les sciences de la vie et de la santé</a>. Créé dès 2013, REACTing rassemble les équipes et laboratoires français spécialisés afin de coordonner la recherche face aux menaces épidémiques. Son domaine d’action est large, de la recherche fondamentale aux sciences humaines et sociales en passant par les sciences de l’environnement, la recherche clinique, l’éthique, l’épidémiologie, la modélisation et la santé publique.</p>
<p>Ainsi, cette nouvelle épidémie d’Ebola doit amener les scientifiques à progresser quant à l’application des principes éthiques, en sollicitant efficacement l’avis des populations concernées. C’est une condition essentielle pour mieux lutter contre les maladies infectieuses émergentes. Par ailleurs, les réflexions provoquées par cette crise font prendre conscience à la communauté scientifique de l’obligation de moyens - si toutefois l’on veut rendre possible l’innovation médicale. La réalité qui se fait jour est que la seule chance de démontrer l’efficacité clinique de vaccins et de traitements contre Ebola est de les évaluer pendant une épidémie. Face à l’urgence en République démocratique du Congo, l’éthique dicte de proposer des médicaments même s’ils ne sont pas encore homologués.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/97274/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Eric D'Ortenzio est le coordinateur scientifique de REACTing. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Yazdan Yazdanpanah est l'un des coordinateurs de REACTing. Il dirige l'un des instituts d'Aviesan. Il a reçu ces trois dernières années des financements (rémunérations pour des travaux de recherche ou de formation, ou invitations à des réunions scientifiques) des laboratoires pharmaceutiques MSD France, ViiV Healthcare, Janssen-Cilag, Pfizer, Abbvie, Gilead Sciences, PPD France, Bristol Myers Squibb, Intercept Pharma France et de l'organisateur de congrès Live by GL events. </span></em></p>
La République démocratique du Congo connaît une nouvelle épidémie causée par le virus Ebola. L’urgence de la situation a poussé l’OMS à proposer des médicaments non homologués.
Eric D'Ortenzio, Docteur en médecine, spécialiste en santé publique, épidemiologiste, Inserm
Yazdan Yazdanpanah, Professeur de médecine, spécialiste des maladies infectieuses et tropicales, Université Paris Cité
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tag:theconversation.com,2011:article/79636
2017-06-20T19:11:45Z
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Avec quels médicaments faut-il partir en voyage ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/174270/original/file-20170617-1205-1wrkgse.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C216%2C3072%2C2087&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Trousse d'une jeune femme préparant son voyage pour la Nouvelle-Zélande. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nataliedowne/2250387160/in/photolist-4qRPGC-iYXt5H-9ovudD-cjL17C-cXhJ31-edmX2J-5yFLsQ-8sswjQ-qsufvJ-8VYGY3-4sfEau-u1SP7-8fQ7H1-hyB3Q-5PmrBr-8spwd6-dqVWdk-8spxRt-bUnfxp-dqVW5i-ED52A-6PAMRX-5WN7DA-7CGq5L-edghPz-75GAhy-bUnfv2-9FufXu-bUnfz6-dqVWsv-5iGSe-9ovvUg-dRVca-u7KS9-eicLjx-8ePN69-5L94bA-55WjWv-4aUPEq-8sMsx-cdcz8U-9oyx3E-edgitp-edgiBx-7wG9Us-bYALr-dqW6wE-bWQDTF-cbJtdJ-2TV3S">Natalie Downe/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p><em>Dans l’extrait du livre <a href="https://www.tallandier.com/livre-9791021020856.htm">« Les médicaments en 100 questions »</a> (éditions Tallandier) que nous publions ici, l’auteur, professeur de pharmacie, recense ceux qui sont utiles à emporter lors d’un départ en vacances, en fonction de la destination. Et fait le point sur les vaccinations nécessaires.</em></p>
<hr>
<p>Quels sont les médicaments à prendre avec soi lorsqu’on part en voyage ? La bonne réponse est… ça dépend où ! Partir en Allemagne visiter la Bavière ou descendre le Niger en pinasse – la pirogue traditionnelle – ne comporte pas les mêmes enjeux pour qui veut préserver sa santé.</p>
<p>La première question à régler est la mise à jour des vaccinations, qu’il faut anticiper un à deux mois avant le départ. Quelles que soient la destination et les conditions du séjour, il faut mettre à jour les vaccinations obligatoires ou recommandées pour les enfants et les adultes, notamment diphtérie, tétanos, poliomyélite, coqueluche et rougeole. Le calendrier des vaccinations est consultable <a href="http://inpes.santepubliquefrance.fr/CFESBases/catalogue/pdf/1175.pdf">sur Santé publique France</a>.</p>
<p>La vaccination contre la fièvre jaune, une maladie transmise par un moustique, est obligatoire pour entrer dans certains pays de zone intertropicale d’Afrique ou d’Amérique du Sud, ainsi qu’en Guyane. Ce vaccin est disponible uniquement dans les centres de vaccination contre la fièvre jaune, dont la liste est consultable <a href="http://solidarites-sante.gouv.fr/prevention-en-sante/preserver-sa-sante/vaccination-fievre-jaune">sur le site du ministère de la Santé</a>.</p>
<h2>Des vaccinations recommandées en fonction de la destination</h2>
<p>D’autres vaccinations peuvent être recommandées <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/preparer-son-voyage">en fonction des zones visitées et des conditions du séjour</a>, contre l’encéphalite japonaise, l’encéphalite à tiques, la fièvre typhoïde, la grippe, les hépatites A et B, les infections invasives à méningocoques, la rage, la tuberculose. Ces informations figurent dans les <a href="https://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=659">Recommandations sanitaires 2018 pour les voyageurs</a>, publiées par le Haut conseil de la santé publique.</p>
<p>La seconde question est celle de la prévention du paludisme, si l’on se rend dans une zone dans laquelle il sévit. Elle doit s’organiser à deux niveaux. Premier niveau : éviter de se faire piquer par des moustiques. Car sans piqûre, pas de risque de paludisme !</p>
<p>Les moustiques qui transmettent le paludisme piquent habituellement la nuit. Pour s’en prémunir, il faut :</p>
<ul>
<li><p>porter des vêtements couvrants et, si nécessaire, imprégnés d’insecticide ;</p></li>
<li><p>appliquer un répulsif sur toutes les parties du corps non couvertes, visage compris (sauf les yeux et la bouche), à l’exception des mains pour les enfants (pour éviter qu’ils ingèrent le produit). Pour les jeunes enfants et les femmes enceintes, s’assurer que le répulsif leur est adapté en lisant attentivement la notice et respecter les précautions d’emploi. Utiliser des répulsifs permet également de se protéger des moustiques qui transmettent d’autres maladies comme le chikungunya, la dengue ou <a href="http://invs.santepubliquefrance.fr/fr/Publications-et-outils/Bulletin-de-veille-sanitaire/Tous-les-numeros/Antilles-Guyane/Bulletin-de-veille-sanitaire-Antilles-Guyane.-n-4-Decembre-2016">Zika</a>. Pour ces trois pathologies, le guide <a href="http://www.cespharm.fr/prevention-sante/catalogue/chikungunya-dengue-zika-voyagez-en-adoptant-les-bons-gestes-brochure"><em>Voyagez en adoptant les bons gestes</em></a> donne toutes les informations utiles ;</p></li>
<li><p>dormir sous une moustiquaire imprégnée d’insecticide ;</p></li>
<li><p>utiliser des insecticides à l’intérieur des habitations (bombes, diffuseurs électriques).</p></li>
</ul>
<h2>Un traitement préventif contre le palu</h2>
<p>Second niveau de protection : comme on n’est jamais sûr de ne pas être piqué sans s’en apercevoir, un ou deux mois de traitement préventif par les médicaments, appelé chimioprophylaxie, valent mieux que… vingt ans de paludisme. Les traitements préventifs obtenus sur prescription médicale varient en fonction des zones visitées, de la durée du voyage et de l’âge de la personne. Les médecins les connaissent et choisiront celui adapté à votre cas. Certains doivent être pris avant le départ.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/174268/original/file-20170617-17634-1g2kkn6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/174268/original/file-20170617-17634-1g2kkn6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=506&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/174268/original/file-20170617-17634-1g2kkn6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=506&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/174268/original/file-20170617-17634-1g2kkn6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=506&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/174268/original/file-20170617-17634-1g2kkn6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=636&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/174268/original/file-20170617-17634-1g2kkn6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=636&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/174268/original/file-20170617-17634-1g2kkn6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=636&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Certains traitements préventifs contre le paludisme nécessitent de s’organiser bien avant le départ.</span>
<span class="attribution"><span class="source">François Chast</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Quelle que soit la destination, il convient d’emporter avec soi une trousse contenant quelques médicaments « passe-partout » : paracétamol, antidiarrhéique type lopéramide (Imodium), antiallergique (antihistaminique H1), antiseptique cutané (PVP iodée c'est à dire Bétadine), collyre antiseptique (monodose), <a href="https://voyage.gc.ca/voyager/sante-securite/rehydratation">sachets de réhydratation orale</a>, sérum physiologique, crème pour les brûlures, pansements stériles, bande de contention, gel ou solution hydroalcoolique pour l’hygiène des mains, produit de désinfection de l’eau de boisson ou de rinçage des dents.</p>
<p>Pour préparer votre trousse, vous pouvez consulter également les <a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/bons-gestes/quotidien/preparer-trousse-medicaments-voyage">recommandations de l’assurance maladie</a>, ou <a href="https://voyage.gc.ca/voyager/sante-securite/trousse">celles du gouvernement canadien</a>.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/137915/original/image-20160915-30600-1a5af2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/137915/original/image-20160915-30600-1a5af2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=923&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/137915/original/image-20160915-30600-1a5af2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=923&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/137915/original/image-20160915-30600-1a5af2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=923&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/137915/original/image-20160915-30600-1a5af2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1160&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/137915/original/image-20160915-30600-1a5af2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1160&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/137915/original/image-20160915-30600-1a5af2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1160&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Couverture du livre, paru le 15 septembre 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Tallandier</span></span>
</figcaption>
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<p>Il faut emporter ses médicaments habituels en quantité suffisante pour couvrir la durée du séjour. Après le départ, il faudra les prendre en tenant compte du décalage horaire pour certains médicaments comme l’insuline, les anticoagulants, les antihypertenseurs ou les contraceptifs oraux. Il peut être utile, avant de partir, se faire préciser par son médecin ou son pharmacien le nom de ses médicaments en dénomination commune internationale (DCI), si possible en les faisant noter sur l’ordonnance. Demander à son pharmacien d’éditer <a href="http://www.ordre.pharmacien.fr/Le-Dossier-Pharmaceutique/Qu-est-ce-que-le-DP">son dossier pharmaceutique</a> (DP) peut également se révéler utile. Si vous avez donné votre accord pour qu’un tel dossier soit ouvert, celui-ci contient l’historique de tous les médicaments qui vous ont été délivrés au cours des quatre derniers mois dans différentes officines.</p>
<p>Enfin, un voyageur averti en vaut deux : les préservatifs, seule prévention efficace contre les infections sexuellement transmissibles, ne sont pas encombrants et peuvent se révéler utiles selon les circonstances. On n’est jamais à l’abri d’une belle rencontre !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/79636/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François Chast ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Avec le paludisme ou Zika, il est utile de savoir quoi emporter dans sa trousse à pharmacie selon sa destination de vacances. Et d’anticiper, bien avant le départ, sur les vaccinations nécessaires.
François Chast, Professeur de pharmacie, Université Paris Cité
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/77284
2017-05-11T22:40:36Z
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Ce que chacun peut faire pour surveiller le moustique tigre
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/168628/original/file-20170509-11023-138lzuf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><span class="source">Michel Dukhan/IRD</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le dispositif de lutte contre le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/moustiques-24430">moustique</a> tigre, dit <em>Aedes Albopictus</em>, est activé depuis le 1<sup>er</sup> mai en France métropolitaine. Il restera en place jusqu’au 30 novembre. Dès à présent, les scientifiques et les autorités sanitaires comptent sur les citoyens pour vérifier si cet insecte, susceptible de transmettre les virus de la dengue, du chikungunya ou encore <a href="https://theconversation.com/lhistoire-de-zika-virus-emergent-transmis-par-les-moustiques-53774">Zika</a>, est présent près de chez eux. Et chacun peut aider.</p>
<p>L’observation par les habitants est devenue un outil essentiel pour détecter le moustique tigre dans des zones nouvellement colonisées. Les informations transmises via le portail national de signalement, <a href="http://www.signalement-moustique.fr/">signalement-moustique.fr</a>, permettent en effet de suivre la progression de l’insecte à la trace depuis trois ans.</p>
<p>Au cours des deux premières années, 2014 et 2015, plus de 10 000 personnes ont fait un signalement sur le portail. 1 764 d’entre elles se trouvaient dans une zone qui n’était pas considérée comme colonisée. Et parmi leurs signalements, 438 ont été identifiés comme correspondant bel et bien à des <em>Aedes albopictus</em>, après vérification par les opérateurs publics en charge de la surveillance. Ainsi, en seulement deux ans, la vigilance des habitants a révélé la présence de l’espèce dans 254 communes supplémentaires. Un bel exemple de sciences dites participatives, où l’avancée des connaissances repose sur la collaboration entre les chercheurs et les citoyens.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/168944/original/file-20170511-32624-whgedv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/168944/original/file-20170511-32624-whgedv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=739&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/168944/original/file-20170511-32624-whgedv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=739&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/168944/original/file-20170511-32624-whgedv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=739&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/168944/original/file-20170511-32624-whgedv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=928&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/168944/original/file-20170511-32624-whgedv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=928&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/168944/original/file-20170511-32624-whgedv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=928&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les signalements du moustique tigre sur le portail national durant l’année 2015.</span>
<span class="attribution"><span class="source">CNEV</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le moustique tigre dispose de quelques atouts pour étendre ainsi régulièrement son territoire. Originaire du sud-est asiatique, <em>Aedes albopictus</em> est une espèce particulièrement invasive du fait de certains avantages biologiques. Ses œufs présentent la particularité de résister au dessèchement (dessiccation), ce qui augmente leur durée de vie et leur permet de survivre durant le transport, en particulier maritime via les porte-conteneurs.</p>
<p>De plus, l’espèce est capable de diapause, c’est-à-dire que le développement de l’insecte s’arrête en réponse à des variations défavorables de l’environnement. Cela permet à ses œufs de survivre durant l’hiver dans les zones tempérées comme la métropole. Le moustique tigre s’est ainsi implanté dans plus de 80 pays sur les cinq continents au cours des 30 dernières années et ceci à la faveur du développement du commerce international, en particulier celui des pneus usagés.</p>
<h2>Des Alpes-Maritimes jusqu’à l’Aisne</h2>
<p>La première implantation de l’espèce en France métropolitaine a été mise en évidence en 2004 à Menton (Alpes-Maritimes). Depuis, son aire de répartition n’a cessé de s’accroître, avec 42 départements colonisés <a href="http://solidarites-sante.gouv.fr/sante-et-environnement/risques-microbiologiques-physiques-et-chimiques/especes-nuisibles-et-parasites/article/cartes-de-presence-du-moustique-tigre-aedes-albopictus-en-france-metropolitaine">lors du dernier relevé au 1er janvier 2018</a>, selon la direction générale de la Santé. L'espèce s'est installée dans l'Aveyron, le Gers et le Haut-Rhin en 2016, et dans l'Aisne, l'Ariège, la Corrèze, les Hautes-Alpes, les Hauts-de-Seine, les Hautes-Pyrénées, l'Indre, la Lozère et le Maine-et-Loire en 2017.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"990162815196549121"}"></div></p>
<p>Connaître cette aire aussi précisément que possible est important. Cela permet aux autorités sanitaires de mettre en place les mesures appropriées de gestion des risques : démoustiquer certaines zones, informer les habitants des <a href="https://theconversation.com/pourquoi-les-moustiques-ciblent-certaines-personnes-et-pas-dautres-62712">gestes de prévention</a>, surveiller les cas de <a href="http://social-sante.gouv.fr/sante-et-environnement/risques-microbiologiques-physiques-et-chimiques/especes-nuisibles-et-parasites/moustiques-vecteurs-de-maladies">maladies transmises par ce vecteur</a> pour contenir d’éventuelles épidémies. Rappelons, à cet égard, qu’un unique spécimen n’est pas forcément dangereux pour la santé. La plupart ne sont pas porteurs de virus. C’est seulement <a href="https://theconversation.com/piqures-dinsectes-attention-a-linflammation-61931">s’ils ont piqué d’abord un individu infecté</a> qu’ils sont susceptibles de transmettre une maladie.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/xGWr81gqfgg?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Pas si facile de reconnaître un moustique tigre ! L’insecte ne fait pas plus de 5 millimètres. Une fois posé, cependant, on peut voir ses rayures blanches sur son corps noir, caractéristiques. Si vous pensez tenir un suspect, le premier réflexe doit être de le prendre en photo avec votre téléphone ou mieux, un appareil photo. L’idéal étant de l’immortaliser de dos et de profil. Des conseils pour obtenir une photo exploitable <a href="http://www.signalement-moustique.fr/signalement_albopictus/sinformer/reussirphoto">sont dispensés sur le portail</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/168637/original/file-20170509-10994-194ulzx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/168637/original/file-20170509-10994-194ulzx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/168637/original/file-20170509-10994-194ulzx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/168637/original/file-20170509-10994-194ulzx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/168637/original/file-20170509-10994-194ulzx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/168637/original/file-20170509-10994-194ulzx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/168637/original/file-20170509-10994-194ulzx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le moustique tigre, un insecte de petite taille.</span>
<span class="attribution"><span class="source">IRD</span></span>
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<p>C’est encore mieux si vous réussissez à capturer un spécimen. S’il est vivant, vous pourrez le placer au congélateur pour le tuer. Ensuite, vous pourrez l’envoyer par la poste à l’opérateur public territorialement compétent (celui-ci vous sera indiqué lors de votre signalement sur le portail). Afin que le moustique reste dans le meilleur état de conservation possible, il convient de le placer soit dans une boîte incassable en plastique ou en carton, soit dans une feuille de papier ou de carton repliée. Il ne faut pas le scotcher directement sur une feuille de papier, cela risquerait de l’abîmer.</p>
<h2>Trois questions pour chaque signalement</h2>
<p>Une fois sur le portail de signalement, vous devrez répondre à trois questions destinées à limiter la confusion avec d’autres espèces. La première porte sur la taille du spécimen observé ; la deuxième, sur sa couleur ; et la troisième, sur la présence d’un appareil piqueur (un long appendice en prolongement de la tête) qui permet au moustique de se nourrir.</p>
<p>Le déclarant est invité à laisser ses coordonnées et à préciser la localisation de l’observation. Si le signalement porte sur une zone où la présence de l’espèce n’est pas encore connue, une enquête plus poussée sera menée par les scientifiques.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/168630/original/file-20170509-10997-9ozbwx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/168630/original/file-20170509-10997-9ozbwx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/168630/original/file-20170509-10997-9ozbwx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/168630/original/file-20170509-10997-9ozbwx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/168630/original/file-20170509-10997-9ozbwx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/168630/original/file-20170509-10997-9ozbwx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/168630/original/file-20170509-10997-9ozbwx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un piège pondoir destiné à repérer le moustique tigre.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Thibault Vergoz/IRD</span></span>
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<p>Hormis les citoyens, le système de surveillance du moustique tigre repose également sur un réseau de pièges pondoirs. Il s’agit de petits seaux noirs contenant de l’eau ainsi qu’un morceau de polystyrène flottant (support de ponte), offrant un site de ponte attractif pour l’espèce. Ces pièges pondoirs sont installés à proximité des zones colonisées et le long des principaux axes de communication comme les autoroutes et les voies de chemin de fer. Par ailleurs, les importateurs de pneus usagés, principale voie d’introduction du moustique tigre dans un nouveau territoire, font l’objet d’une surveillance ciblée.</p>
<h2>Un suivi quartier par quartier dans les agglomérations</h2>
<p>Complémentaires au réseau de pièges pondoirs, les signalements des citoyens permettent un suivi plus fin de l’extension de l’aire d’implantation de ce vecteur de maladies, par exemple à l’échelle de tel ou tel quartier dans une agglomération. Dans l’est de la France, le portail de signalement a même permis de rapporter à plusieurs reprises la présence d’une autre espèce invasive de moustique, <em>Aedes japonicus</em>.</p>
<p>Ainsi, les habitants jouent un rôle déterminant dans le suivi de la progression d’<em>Aedes albopictus</em>. Pour des raisons logistiques et économiques, il n’est pas possible de couvrir l’ensemble du territoire métropolitain avec des pièges. La vigilance citoyenne se révèle particulièrement utile dans les zones où la présence de l’homme est forte, comme les zones urbaines et périurbaines. Dans ces territoires, les pièges pondoirs fonctionnent moins bien car ils se retrouvent en compétition avec une multitude d’autres gîtes potentiels. Des bidons de récupération d’eau de pluie, par exemple, des soucoupes sous des pots de fleurs, ou encore le réseau pluvial où l’eau peut stagner.</p>
<p>Surtout, les habitants avertis se révèlent indispensables pour traquer le moustique tigre là où on ne l’attend pas. Quand l’espèce s’introduit dans un nouveau territoire, à une grande distance des zones déjà colonisées, c’est-à-dire à plus de 50 km, celui-ci n’est pas forcément couvert par le réseau de pièges. Citoyens, ouvrez l’œil !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/77284/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Jourdain travaille pour l'Institut de recherche pour le développement. Il a reçu des financements des ministères chargés de la santé et de l'agriculture.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Yvon Perrin travaille pour l'Institut de Recherche pour le Développement. Il a reçu des financements du Ministère de la Santé et du ministère de l'Agriculture. </span></em></p>
En signalant la présence d’Aedes albopictus, l’espèce susceptible de transmettre le chikungunya ou la dengue, les citoyens apportent une aide précieuse aux chercheurs.
Frederic Jourdain, Ingénieur d'études, Centre national d'expertise sur les vecteurs, Institut de recherche pour le développement (IRD)
Yvon Perrin, Ingénieur d'études, Centre national d'expertise sur les vecteurs, Institut de recherche pour le développement (IRD)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/73383
2017-03-07T20:51:51Z
2017-03-07T20:51:51Z
Les grippes comme le covid-19 indiquent les phases sombres de la mondialisation
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/159318/original/image-20170303-29002-ncjzhs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Apollon et Artemis décochent leurs flèches porteuses du fléau aux enfants de Niobe, peinture d'Abraham Bloemaert, 1591.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://de.wikipedia.org/wiki/Geschichte_der_Pest#/media/File:Abraham_Bloemaert_-_Niobe_beweent_haar_kinderen.jpg">Dedden/Wikimedia</a></span></figcaption></figure><p>Le Covid-19 a été officiellement déclaré «pandémie» par <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/03/14/pour-l-oms-l-europe-est-devenue-l-epicentre-de-la-pandemie-de-covid-19_6033078_3244.html">l'Organisation mondiale de la santé</a> qui désigne désormais l'Europe comme «son épicentre», après avoir longtemps hésité à déclarer la pandémie tant que l’épicentre se situait en Chine. </p>
<p>Précédemment, les virus de grippe aviaire H5N1, H7N9 et H5N8 ont été attentivement surveillés par les autorités sanitaires mondiales qui craignaient leur potentiel pandémique lorsqu’ils se transmettaient de Chine vers le reste du monde. </p>
<p>La notion de « pandémie » permet de discerner, parmi l’ensemble des maladies qui affectent les vivants, celles qui constituent une <a href="http://www.who.int/csr/disease/swineflu/frequently_asked_questions/pandemic/fr/">menace pour l’humanité</a> tout entière et celles qui peuvent faire l’objet d’une gestion plus locale.</p>
<p>Il faut en effet distinguer l’<a href="https://www.cairn.info/revue-histoire-et-societes-rurales-2001-1-page-67.htm">épizootie</a>, qui affecte une espèce animale (non-humaine), de l’épidémie, qui affecte une population humaine à partir d’un foyer, et de la pandémie, qui affecte potentiellement l’humanité dans son ensemble.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/R1v0uFms68U?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Dans la série à succès «The Walking Dead» (2010), une pandémie transforme les humains en zombies déchaînés…</span></figcaption>
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<p>Comment cette idée est-elle apparue, selon laquelle une maladie pourrait affecter l’humanité tout entière et, à la limite, l’amener à disparaître de la planète ?</p>
<h2>Fins du monde</h2>
<p>Selon l’<a href="https://www.amazon.co.uk/Routledge-History-Disease-Histories-x/dp/041572001X">historien Mark Harrison</a>, le terme <em>pan-demos</em> <a href="https://rhr.revues.org/7543?lang=en">désignait chez Platon</a> un amour pour les corps au hasard des rencontres, par distinction avec un amour céleste tourné vers les idées. C’est seulement au dix-huitième siècle, lorsque les Européens se sont installés durablement sur les autres continents, que le mot en est venu à désigner des épidémies comme la fièvre jaune en Afrique ou aux Antilles. Il était alors lié à l’explication des maladies par le climat : « pan » désignait tous les éléments de l’environnement dont les mauvaises « influences » faisaient mourir les hommes peu « acclimatés ».</p>
<p>Au dix-neuvième siècle, deux maladies se diffusent à travers le monde, bouleversant les formes de gouvernement colonial que les Européens mettent alors en place. Le choléra affecte les villes en pleine expansion à travers les systèmes de circulation de l’eau, tandis que la peste se répand depuis les ports à travers les rongeurs transportés par les bateaux. Koch isole la bactérie causant le choléra lors d <a href="http://www.biusante.parisdescartes.fr/sfhm/hsm/HSMx2006x040x001/HSMx2006x040x001x0037.pdf">‘une expédition en Égypte</a> en 1883, et Yersin, élève de Pasteur, <a href="http://www.bibnum.education.fr/sciencesdelavie/medecine-clinique/la-mise-en-evidence-du-bacille-de-la-peste-hongkong-1894">découvre le bacille de la peste</a> à Hong Kong en 1894. La révolution bactériologique en Allemagne et en France permet d’espérer un contrôle des épidémies en éradiquant les foyers pathogènes par l’abattage des animaux infectés et la vaccination de la population humaine et animale.</p>
<p>La pandémie de <a href="http://www.biusante.parisdescartes.fr/sfhm/hsm/HSMx2004x038x002/HSMx2004x038x002x0165.pdf">grippe « espagnole »</a>, en 1918, déjoue cet espoir. D’abord parce qu’elle n’est pas causée par une bactérie mais par ce qui sera identifié dans les années 1930 comme un virus : impossible, à l’époque, de fabriquer des vaccins ou d’identifier un réservoir animal – cela se produira bien plus tard, à partir des années 1950.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/159316/original/image-20170303-29012-1tarfin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/159316/original/image-20170303-29012-1tarfin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=452&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/159316/original/image-20170303-29012-1tarfin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=452&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/159316/original/image-20170303-29012-1tarfin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=452&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/159316/original/image-20170303-29012-1tarfin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=568&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/159316/original/image-20170303-29012-1tarfin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=568&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/159316/original/image-20170303-29012-1tarfin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=568&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Urgences durant l’épidémie de grippe « espagnole » aux États-Unis, Camp Funston, Kansas.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/27337026@N03/3202015761">Otis Historical Archives National Museum of Health and Medicine/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ensuite parce que la grippe « espagnole » se répand si vite dans les corps fragilisés par la guerre qu’il s’avère difficile de lui assigner une origine géographique précise. On suppose aujourd’hui qu’elle a commencé aux États-Unis, et son qualificatif d’« espagnole » vient du fait que l’Espagne, pays neutre, déclarait tous ses cas, tandis que les autres pays occidentaux ne le faisaient pas… de peur de démoraliser les troupes.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/159315/original/image-20170303-29046-89hdem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/159315/original/image-20170303-29046-89hdem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=457&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/159315/original/image-20170303-29046-89hdem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=457&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/159315/original/image-20170303-29046-89hdem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=457&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/159315/original/image-20170303-29046-89hdem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=575&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/159315/original/image-20170303-29046-89hdem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=575&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/159315/original/image-20170303-29046-89hdem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=575&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La courbe de mortalité durant l’épidémie de grippe « espagnole » de 1918 aux États-Unis et en Europe.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://zh.wikipedia.org/wiki/1918%E5%B9%B4%E6%B5%81%E6%84%9F%E5%A4%A7%E6%B5%81%E8%A1%8C#/media/File:Spanish_flu_death_chart.png">National Museum of Health and Medicine/Wikimedia</a></span>
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</figure>
<p>La pandémie de 1918 est le spectre qui va hanter le vingtième siècle, accompagnant <a href="http://www.socanco.org/article374.html">comme sa face sombre</a> les avancées de la mondialisation. Lorsque les États-Unis entrent dans la Seconde Guerre mondiale en 1941, ils créent une commission sur la grippe qui accélère dramatiquement les recherches sur le virus. À la fin des années 1970, alors que le gouvernement américain se remet difficilement de la guerre du Vietnam, une <a href="http://www.lexpress.fr/actualite/societe/sante/lazare-un-mutant-ancetre-de-la-grippe-a_781360.html">épidémie de grippe</a> tue un militaire à Fort Dix, et des vaccins sont commandés pour toute la population. La campagne est arrêtée lorsqu’on découvre plus d’un millier de syndromes de Guillain-Barré, une dégénérescence nerveuse qui peut résulter de la vaccination.</p>
<p>À partir des années 1970, les États-Unis lancent l’alerte, via l’Organisation mondiale de la santé, sur les maladies infectieuses qui émergent dans les pays du Sud et se diffusent rapidement vers ceux du Nord, comme les fièvres hémorragiques Ebola ou Lassa venues d’Afrique Centrale et Occidentale. <a href="https://theconversation.com/aids-how-far-the-world-has-come-and-how-far-it-needs-to-go-to-get-to-zero-54393">La pandémie de sida</a> dans les années 1980, dont les origines liées à des singes d’Afrique Centrale sont découvertes dix ans plus tard, renforce l’alerte. Tout comme les foyers de grippe aviaire H5N1 en 1997 et de SRAS (infection respiratoire) en 2003 dans le sud de la Chine.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/ebola-has-been-contained-but-we-must-prepare-for-the-next-pandemic-53708">La pandémie est alors considérée comme un risque</a> contre lequel doivent être mis en place de nouveaux dispositifs de sécurité, reposant notamment sur l’<a href="https://www.ted.com/talks/nathan_wolfe_hunts_for_the_next_aids?language=fr">anticipation</a> à partir de la détection des premiers cas – les patients « zéro » – et de la surveillance des populations sensibles, dites « sentinelles ».</p>
<h2>L’expansion de l’humanité : une suite de pandémies</h2>
<p>C’est aussi dans les années 1970 que des historiens de l’environnement comme <a href="https://www.amazon.com/Plagues-Peoples-William-H-McNeill/dp/0385121229">William McNeill</a>, <a href="http://www.cambridge.org/catalogue/catalogue.asp?isbn=9781107299542">Alfred Crosby</a>, ou <a href="https://www.abebooks.fr/rechercher-livre/titre/un-concept-l'unification-microbienne-du-monde-xive-xvii3-siecles/auteur/le-roy-ladurie-emmanuel/">Emmanuel Le Roy Ladurie</a> en France décrivent l’<a href="https://traces.revues.org/5227">expansion de l’humanité comme une suite de pandémies</a> : la peste d’Athènes décrite par Thucydide, la peste de Justinien à la fin de l’Antiquité, la peste du Moyen-Âge décrite par Boccace, la variole décrite par Las Casas chez les populations américaines récemment conquises…</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/159423/original/image-20170305-29032-pje8zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/159423/original/image-20170305-29032-pje8zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/159423/original/image-20170305-29032-pje8zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/159423/original/image-20170305-29032-pje8zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/159423/original/image-20170305-29032-pje8zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/159423/original/image-20170305-29032-pje8zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/159423/original/image-20170305-29032-pje8zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Scène de la peste de 1720 à la Tourette (Marseille). L’inhumation des cadavres à la Tourette par le chevalier Roze.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Peste_de_Marseille_(1720)">Michel Serre/Wikimedia</a></span>
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<p>Ces épidémies n’ont pourtant pas été vécues comme pandémiques par les sociétés touchées, même si chacune pouvait avoir le sentiment que c’était la fin de son monde. Car ces communautés n’avaient pas les moyens de montrer que la maladie en question affectait l’humanité tout entière.</p>
<p>Ce qui est nouveau, depuis trente ans, c’est la <a href="https://www.cdc.gov/flu/pandemic-resources/national-strategy/risk-assessment.htm">capacité des systèmes de détection</a> à suivre les mutations des pathogènes sur toute la planète et à anticiper leur potentiel pandémique. <a href="http://www.who.int/bulletin/volumes/89/7/11-086173/en/">L’OMS a pu ainsi couvrir en 2009</a> une pandémie « en temps réel ». L’institution a même modifié sa définition du terme « pandémie » lorsque le virus de grippe H1N1 s’est déplacé sur trois continents, en affirmant qu’il n’était plus nécessaire qu’un pathogène soit particulièrement virulent pour être considéré comme pandémique. La pandémie de grippe H1N1 de 2009 a ainsi fait moins de victimes que la grippe « saisonnière ».</p>
<p>Mais la nouveauté, c’est aussi et surtout le sentiment d’une vulnérabilité partagée entre l’humanité et les espèces animales constituant les réservoirs de ces pathogènes. Certaines, comme les volailles domestiques, deviennent malades de nos techniques d’élevage industriel, tandis que d’autres, comme les chauve-souris et les pangolins sauvages, sont menacées d’extinction du fait des transformations que nous imposons à leur environnement. La pandémie de grippe ou de coronavirus est le signe que l’espèce humaine peut disparaître, et que les autres animaux, alliés aux microbes qu’ils partagent avec nous, « se vengent » des <a href="http://www.azquotes.com/quote/563265.">mauvais traitements que nous leur imposons</a>.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=121&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=121&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=121&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=152&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=152&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=152&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Créé en 2007, Axa Research Fund soutient plus de 500 projets à travers le monde portés par des chercheurs de 51 nationalités. Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site du <a href="https://www.axa-research.org">Axa Research Fund</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/73383/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fréderic Keck
musée du quai Branly
Fonds Axa pour la recherche
Canadian Institute for Advanced Research</span></em></p>
Comment cette idée selon laquelle une maladie pourrait affecter l’humanité tout entière et l’amener à disparaître de la planète est-elle apparue?
Frédéric Keck, Directeur du laboratoire d'anthropologie sociale, Collège de France
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/69583
2016-12-21T22:16:55Z
2016-12-21T22:16:55Z
Demain, un médicament unique pour combattre les hépatites B, C et le sida ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/151237/original/image-20161221-3370-10dvqhq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C11%2C4000%2C2766&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Echantillons de sang prélevés pour examen auprès de patients bénéficiant d'un traitement par antiviraux contre le VIH au Malawi, en 2011, dans un programme de Médecins sans frontières. </span> <span class="attribution"><span class="source">Isabelle Merny/MSF</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a annoncé, le 21 avril, que les hépatites virales <a href="http://www.who.int/mediacentre/news/releases/2017/global-hepatitis-report/fr/">ont tué 1,34 million de personnes dans le monde en 2015</a>. Un bilan dépassant désormais celui du virus de l’immunodéficience humaine (VIH), déjà responsable de 1,1 million de morts. C'est dire si les besoins sont importants, aujourd'hui, en matière de traitements antiviraux. </p>
<p>Et si un seul médicament permettait de lutter à la fois contre les virus des hépatites B et C, les coronavirus comme le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) et bien d’autres ? Ce traitement n’existe pas encore, mais les chercheurs avancent dans cette voie prometteuse. Tout comme la médecine dispose d’antibiotiques dits « à spectre large », capables de combattre un grand nombre de bactéries à la fois, des antiviraux « à spectre large » devraient venir compléter, un jour, l’arsenal thérapeutique.</p>
<p>La liste est longue, des maladies <a href="https://theconversation.com/fr/topics/virus-24217">causées par des virus</a>. En plus des pathologies citées plus haut, on peut ajouter la grippe, le chikungunya, <a href="https://theconversation.com/lhistoire-de-zika-virus-emergent-transmis-par-les-moustiques-53774">ou encore Zika</a>. En dépit de la crainte qu’ils suscitent, les virus sont <a href="https://theconversation.com/connaissez-vos-microbes-sur-le-bout-des-doigts-virus-bacterie-parasite-57157">des agents infectieux très rudimentaires</a>. Ils sont formés d’un génome bien plus petit que le nôtre (contenant leur patrimoine génétique sous la forme d’un petit ADN ou d’un ARN) contenu dans une boîte faite de protéines, qu’on appelle une capside. Ils ne peuvent survivre seuls et doivent impérativement parasiter des cellules d’un organisme vivant, dont ils détournent la machinerie à leur profit. Cela leur permet de proliférer et entraîne, le plus souvent, des problèmes de santé chez la personne infectée.</p>
<h2>Des antiviraux à « large spectre »</h2>
<p>Les armes dont la médecine dispose pour lutter contre les virus atteignent aujourd’hui leurs limites. Chaque médicament ne permet de soigner qu’une seule maladie virale, et pour nombre d’entre elles, il n’existe tout simplement pas de traitement. Pour les scientifiques, la solution d’avenir consiste à chercher des molécules dites « à spectre large », c’est à dire actives contre plusieurs familles de virus à la fois. C’est la voie dans laquelle s’est engagée l’équipe Inserm que je dirige à l’Hôpital Henri Mondor de Créteil (Val-de-Marne), au sein de l’Institut Mondor de recherche biomédicale. <a href="http://www.u-pec.fr/enseignant-chercheur/actualites/une-nouvelle-voie-pour-contrer-les-virus-744547.kjsp?RH=REC">Nos travaux sur ce sujet ont été publiés</a> fin septembre 2016 dans la prestigieuse revue <em>Nature Communications</em>. Pour en saisir la portée, un tour d’horizon des virus et de leurs mœurs parasites s’impose.</p>
<p>Hommes et virus coexistent depuis les origines de l’humanité. Certains virus sont présents chez beaucoup d’entre nous, sans provoquer pour autant de symptômes, comme ceux du groupe herpès. Ils peuvent cependant être réactivés, notamment dans les périodes où la personne voit son immunité baisser – lors d’un épisode de fort stress, à l’occasion d’une autre maladie ou lors de la prise de certains médicaments. Ils entraînent alors des pathologies sévères.</p>
<h2>Des maladies fulgurantes</h2>
<p>D’autres virus peuvent provoquer des épidémies saisonnières, qui ne durent – comme leur nom l’indique – qu’une saison. Elles sont souvent bénignes, par exemple celles de rhumes et de gastroentérites. Parfois plus sévères, <a href="https://theconversation.com/faut-il-prendre-des-medicaments-quand-on-est-grippe-70018">comme celle de la grippe</a>. Il existe aussi des infections virales survenant de façon imprévisible, sous la forme de maladies fulgurantes qui peuvent être fatales, avec des épidémies généralement circonscrites dans le temps et l’espace. C’est le cas d’Ebola, des virus du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) qu’on a appelé la « grippe de Hong Kong » et <a href="https://theconversation.com/mers-comment-ce-virus-a-emerge-et-ce-que-lon-peut-faire-56374">du syndrome respiratoire du Moyen-Orient</a> (MERS), responsables de défaillances respiratoires mortelles.</p>
<p>D’autres, encore, provoquent des maladies relativement bénignes, mais des épidémies plus étendues, comme le chikungunya ou le <a href="https://theconversation.com/zika-le-virus-globe-trotter-va-t-il-bientot-arriver-en-europe-54314">virus Zika</a>.</p>
<p>Enfin, l’<a href="https://theconversation.com/comment-lerosion-de-la-biodiversite-favorise-lemergence-de-virus-et-bacteries-54320">histoire récente a vu s’installer des virus</a> provoquant des infections chroniques qui peuvent être très sévères, voire mortelles, comme le sida ou les hépatites virales B ou C.</p>
<h2>L’effet de l’arrivée du sida</h2>
<p>De quelles armes disposons-nous face à ces microbes ? Les tout premiers médicaments antiviraux avaient été inventés pour lutter contre le virus de l’herpès et certains virus apparentés. C’est seulement avec l’épidémie de sida et la découverte, en 1983, du VIH, que l’exigence d’une recherche plus pointue s’est imposée. La progression rapide du nombre de cas, la mort comme seule issue au bout d’une certaine durée d’infection, ont suscité un effort colossal de financement. Il fallait comprendre les mécanismes de multiplication du VIH et identifier des molécules capables de bloquer le cycle de vie du virus dans les cellules infectées à l’une de ses étapes clés.</p>
<p>C’est ainsi que le tout premier médicament contre le VIH, l’AZT, a fait son apparition. Ce traitement a été bientôt suivi d’autres molécules, toujours plus efficaces, de mieux en mieux tolérées, qui ont abouti aux tri-thérapies actuelles, permettant aux patients de vivre dans d’excellentes conditions avec leur infection.</p>
<p>Parce que le virus de l’hépatite B utilise des mécanismes voisins de ceux du VIH, certaines de ces molécules ont été recyclées et permettent aujourd’hui de contrôler cette maladie du foie, à condition d’être prises toute la vie. De la même façon, la compréhension des mécanismes intimes de multiplication du virus de l’hépatite C a permis le développement de médicaments antiviraux spécifiques de cette maladie, c’est-à-dire actifs exclusivement contre ce virus. Ils permettent, lorsqu’on les combine, <a href="https://theconversation.com/hepatite-c-jose-prononcer-le-mot-guerison-65810">d’obtenir la guérison définitive de l’infection chez plus de 95 % des malades</a>.</p>
<h2>Des infections sans solution thérapeutique</h2>
<p>Cependant, de très nombreuses infections virales, certaines grevées de complications sévères ou d’une mortalité lourde, restent sans solution thérapeutique. Des infections respiratoires, des diarrhées, des maladies transmises par les insectes, des fièvres hémorragiques… La médecine reste également démunie lorsque de nouveaux virus émergent, Zika étant le dernier en date.</p>
<p>Malheureusement, le développement jusqu’à la commercialisation de médicaments antiviraux spécifiques d’une seule infection coûte extrêmement cher, jusqu’à plusieurs milliards d’euros. Et les marchés représentés par la plupart de ces infections orphelines de traitement sont trop petits pour garantir un retour sur investissement suffisant aux industriels du médicament. Dans ces conditions, le développement de nouveaux antiviraux spécifiques est plus qu’improbable. Et de nombreuses infections risquent de rester sans traitement.</p>
<p>La seule option apparaissant économiquement viable, désormais, consiste à développer des médicaments antiviraux « à spectre large ». L’enjeu est de pouvoir identifier une cible dans les cellules infectées, un composant particulier indispensable à toute une série de virus pour leur multiplication. En bloquant cette cible cellulaire grâce à un médicament, on pourra ainsi empêcher tous les virus qui l’utilisent de se multiplier.</p>
<h2>Eviter des effets secondaires trop importants</h2>
<p>Cette stratégie a cependant un désavantage majeur. Le médicament risque d’avoir des effets toxiques chez les patients, si la cible cellulaire bloquée pour limiter l’infection est aussi nécessaire au bon fonctionnement de la cellule. Il faut donc choisir soigneusement les cibles, parmi celles qui peuvent être bloquées sans danger d’effets secondaires majeurs.</p>
<p>Le défi est donc double. Il s’agit d’identifier d’abord les bonnes cibles cellulaires, puis les familles de molécules susceptibles de bloquer ces cibles et aptes à être développées sous la forme de médicaments bien tolérés.</p>
<p>C’est ce défi qu’a relevé notre équipe, en collaboration avec celle du docteur Jean-François Guichou, chimiste au Centre de biochimie structurale, à l’université de Montpellier. Ces travaux communs nous ont permis d’identifier une cible privilégiée, les cyclophilines. Ce sont des protéines présentes dans toutes les cellules de l’organisme. Elles sont impliquées à la fois dans la maturation des protéines cellulaires et dans le cycle de multiplication de différentes familles de virus.</p>
<h2>Un couteau suisse contre les virus</h2>
<p>Nos deux équipes ont ensuite trouvé le moyen d’agir sur cette cible. Nous avons créé, par une approche chimique originale dite « par fragments », une toute nouvelle famille de petites molécules non peptidiques capables d’inhiber puissamment l’activité de différentes cyclophilines dans des cultures de cellules en laboratoire. Nos résultats montrent également que ces composés sont capables de bloquer la multiplication de virus appartenant à des familles aussi différentes que celles du virus de l’hépatite B et C, du VIH et des coronavirus. Un couteau suisse contre les virus, en quelque sorte.</p>
<p>Ces travaux, objet de notre publication dans <em>Nature Communications</em>, confirment que le développement de médicaments antiviraux « à spectre large » est une <a href="http://www.agence-nationale-recherche.fr/?Projet=ANR-10-BLAN-1307">voie pertinente de recherche</a>. Ils démontrent que les cyclophilines sont une cible intéressante pour un tel développement, et ouvrent la perspective du développement de cette nouvelle famille de composés pour des applications en virologie.</p>
<p>La prochaine étape sera de trouver la formulation chimique optimale de cette famille de composés. Il faudra ensuite arrêter le choix sur l’un d’entre eux pour le développement à un stade pré-clinique, qui permettra de tester son efficacité sur des modèles cellulaires et animaux et de vérifier l’absence d’effets indésirables. L’étape ultime consistera à mettre en place des études cliniques chez l’homme, pour apporter la preuve du concept de l’efficacité antivirale dans un certain nombre d’infections d’importance.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/69583/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Michel Pawlotsky a reçu des financements (rémunération pour des conseils scientifiques ou des prises de parole à des réunions scientifiques) des firmes Abbvie, Bristol-Myers Squibb, Gilead, Janssen, Abbott France et Merck-Sharp & Dohme. Les recherches de son laboratoire sont financées par l'INSERM, l'Université Paris-Est-Créteil-Val-de-Marne (UPEC), l'Agence Nationale de Recherche sur le SIDA et les Hépatites Virales (ANRS) et la Fondation pour la Recherche Médicale (FRM).</span></em></p>
Alors que le bilan des morts par hépatite B et C s'alourdit dans le monde, la découverte d'une équipe française ouvre la voie à un médicament antiviral à « large spectre ».
Jean-Michel Pawlotsky, Professeur de médecine, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)
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tag:theconversation.com,2011:article/69527
2016-11-30T22:07:09Z
2016-11-30T22:07:09Z
L’épidémie de Zika, une occasion de promouvoir les droits des femmes ?
<p>L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré que la concentration de cas de bébés nés avec un crâne anormalement petit, ou microcéphalie, rapportée dans les régions où l’<a href="http://www.pasteur.fr/fr/institut-pasteur/presse/fiches-info/zika">épidémie de Zika</a> flambe actuellement est « une urgence de santé publique de portée internationale ». Il est important de s’interroger aujourd’hui sur ce que cette crise sanitaire nous révèle au sujet des fondamentaux anthropologiques de la santé, des droits sexuels et reproductifs, et plus largement, sur les enjeux d’égalité entre les femmes et les hommes dans le domaine sanitaire.</p>
<h2>Troubles neurologiques et malformations néonatales</h2>
<p>La <a href="http://www.who.int/mediacentre/news/statements/2016/emergency-committee-zika-microcephaly/fr/">très forte suspicion</a> de liens entre l’infection à virus Zika et l’apparition de conséquences neurologiques (comme le <a href="http://www.who.int/mediacentre/factsheets/guillain-barre-syndrome/fr/">syndrome de Guillain-Barré</a>) et obstétricales (<a href="http://www.who.int/mediacentre/news/statements/2016/emergency-committee-zika/fr/">enfants nés sans vie et malformations néonatales</a>), le potentiel de propagation géographique du fait du caractère « commun » du moustique vecteur et enfin l’absence de vaccin et de <a href="https://fr.Wikimedia.org/wiki/%C3%89tiologie">traitement étiologique</a> constituent les données objectives du moment.</p>
<p>Cependant, pour la directrice générale de l’OMS, Margaret Chan, « l’augmentation de l’incidence de la microcéphalie est particulièrement préoccupante car elle pèse de manière dramatique <a href="http://www.who.int/mediacentre/news/statements/2016/emergency-committee-zika-microcephaly/fr/">sur les familles et les communautés</a> ». Tout en rappelant ses conséquences en termes de santé publique, elle souligne aussi l’impact social de la maladie. En effet, l’augmentation des microcéphalies incite à en repenser les conséquences en terme de comportements au sein des structures sociales : familles, communautés, mais aussi institutions nationales.</p>
<h2>Un révélateur d’inégalités entre hommes et femmes</h2>
<p>La question soulevée par la maladie Zika n’est donc pas, a priori, celle de la vie et de la mort qui concernerait potentiellement toutes les personnes, car en définitive les taux de mortalité liés à l’infection à virus Zika sont relativement faibles comparés à des pandémies comme le paludisme, la tuberculose ou le VIH. Ce sont les enjeux sociétaux de la reproduction qui sont ici convoqués.</p>
<p>En révélant la place différente et structurellement inégalitaire occupée par les deux sexes sur leurs échelles de valeurs, Françoise Héritier nous a familiarisé(e)s avec ce que toutes les sociétés ont toujours organisé, justifié et codifié : le contrôle et la maîtrise du corps des femmes dans son lieu d’origine à la fois réel et fantasmé, c’est-à-dire la reproduction sexuée. <a href="https://mauvaiseherbe.wordpress.com/2007/11/29/entretien-avec-francoise-heritier-%C2%AB-la-domination-masculine-est-encore-partout-%C2%BB/">Elle écrit ainsi</a> : « Cette capacité de produire du différent, des corps masculins, s’est retournée contre les femmes. Elles sont devenues une ressource nécessaire à se partager. Les hommes doivent socialement se les approprier sur la longue durée pour avoir des fils… Dans cette double appropriation, en esprit et en corps, naît la hiérarchie. Elle s’inscrit déjà dans les catégories binaires qui caractérisent les deux sexes, car elles s’accompagnent nécessairement de dénigrement, de dépossession de la liberté et de confinement dans la fonction reproductive. »</p>
<p>L’infection à virus Zika questionne donc bien plus que d’autres pandémies les enjeux, les postulats, les représentations, les assignations et, in fine les relations de pouvoir entre les sexes.</p>
<p>En posant ouvertement la question des conséquences des microcéphalies sur les familles et les communautés, se pose celle de la capacité de contrôle des femmes sur la reproduction et les injonctions qui leur sont faites par rapport au fœtus qu’elles peuvent porter ou refuser de porter lors d’une infection à Zika. La liberté des femmes en matière de choix reproductifs est en cause. Il n’est donc pas surprenant que cette question mobilise les courants de pensées et les activismes de tous bords.</p>
<h2>Droit à la contraception et droit à l’ avortement</h2>
<p>Le programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement, au paragraphe 7.3, indique :</p>
<blockquote>
<p>« Les droits reproductifs ressortent du droit fondamental de toutes les personnes, célibataires ou en couple de décider librement, sans coercition et de manière responsable d’avoir ou non un/des enfants, du nombre, du moment et du rythme pour le/les avoir.[…] Les droits en matière de procréation correspondent à certains droits de l’homme déjà reconnus dans des législations nationales, des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et d’autres documents pertinents des Nations unies qui sont le fruit d’un consensus. Ces droits reposent sur la reconnaissance du droit fondamental de tous les couples et des individus de décider librement et avec discernement du nombre de leurs enfants et de l’espacement de leurs naissances et de disposer des informations nécessaires pour ce faire, et du droit de tous d’accéder à la meilleure santé sexuelle et de la reproduction possible. Ce droit repose aussi sur le droit de tous de prendre des décisions en matière de procréation sans être en butte à la discrimination, à la coercition ou à la violence, tel qu’exprimé dans des documents relatifs aux droits de l’homme. »</p>
</blockquote>
<p>Ce paragraphe renforce l’article 16.e. de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (1979) où, sur la base de l’égalité de l’homme et de la femme, ce sont bien « les mêmes droits de décider librement et en toute connaissance de cause du nombre et de l’espacement des naissances et d’avoir accès aux informations, à l’éducation et aux moyens nécessaires pour leur permettre d’exercer ces droits » qui sont visés.</p>
<p>La contraception et l’avortement sont les symboles le plus fondamentaux et les plus représentatifs de ces droits, celui de la liberté des femmes à disposer de leur corps.</p>
<p>Les développements dramatiques récents de la maladie à virus Zika en Amérique latine sont apparus dans des pays où le poids et l’influence des valeurs religieuses de l’Église catholique (40 % des catholiques dans le monde vivent en Amérique latine) mais aussi des divers mouvements évangélistes – très souvent encore plus radicaux dans leurs enseignements – sont bien ancrés et déterminent très fortement les conduites ou les assignations à conduites des personnes.</p>
<p>Les doctrines officielles et/ou dominantes y limitent et y proscrivent les droits à la contraception et à l’avortement, relayées par des corpus juridiques répressifs.
Ainsi, au Brésil, alors que l’accès à la planification familiale est un droit constitutionnel mais peu appliqué en raison de la pauvreté et du manque d’information, le droit à l’avortement est extrêmement restreint : il est légal exclusivement dans les cas de complications mettant en danger la vie de la mère, de viol, ou de présence d’un fœtus anencéphale (avec absence partielle ou totale de crâne et de cerveau).</p>
<p>Dans la réalité, une <a href="http://www.scielo.br/scielo.php?script=sci_arttext&pid=S1413-81232012000700002">étude récente</a> a montré qu’une Brésilienne sur cinq de moins de 40 ans a eu recours au moins une fois à un avortement, dans la très grande majorité des cas en totale illégalité et de ce fait, dans des conditions sanitaires non sécurisées ayant comme conséquence d’accroître la mortalité et la morbidité maternelles. Seules les femmes riches pouvant prendre en charge les coûts d’un avortement sécurisé. Or, l’écrasante majorité des femmes confrontées aux avortements à risques sont des femmes de couleur, jeunes et pauvres, vivant dans les régions les moins développées du pays et confrontées à des violences sexuelles récurrentes.</p>
<p>Dans de telles conditions de pauvreté, de violence sexuelle rampante, de déni d’accès ou de criminalisation des soins de santé en matière de reproduction, il apparaît que la crise sanitaire ne saurait être résolue par les conseils donnés aux femmes « d’éviter une grossesse ou de la différer », tant ces conseils ignorent – ou veulent ignorer ? – une réalité : les femmes et les filles ne sont pas en mesure de décider si, quand et dans quelles circonstances elles veulent être enceintes.</p>
<h2>Les droits humains au cœur des enjeux de santé globale</h2>
<p>L’infection à virus Zika agit comme le révélateur des inégalités sociales et des inégalités femmes/hommes, voire des inégalités climatiques amplifiées par les dégradations de l’environnement sur le vecteur pathogène (El Niño, déforestations massives) à l’œuvre dans les sociétés des pays en développement d’Amérique latine, d’Asie, d’Océanie et d’Afrique orientale.</p>
<p>Mais la pandémie, dans ses spécificités « genrées » est aussi un moment nécessaire pour rappeler qu’une réponse globale à ces enjeux de santé publique ne pourra ignorer la nécessité et l’urgence de <a href="http://www.un.org/womenwatch/daw/beijing/pdf/Beijing%20full%20report%20F.pdf">rendre effectifs</a> les droits humains par l’intégration des produits et services de santé sexuelle et reproductive, de l’éducation à la sexualité, de la santé maternelle et de l’avortement sécurisé <a href="http://www.unfpa.org/fr/conf%C3%A9rence-internationale-sur-la-population-et-le-d%C3%A9veloppement">dans les cadres juridiques nationaux</a>.</p>
<p>La crise sanitaire actuelle doit amener à des solutions dans le champ de la médecine (recherche d’un vaccin et d’un traitement, amélioration des systèmes de soins et de santé en matière de prévention et de traitement), c’est là une évidence. Ce qui l’est moins, c’est que cette crise sanitaire, tout comme celle du VIH, devra trouver d’autres solutions dans la complexité même du monde et des forces qui le constituent, c’est-à-dire des rapports de pouvoirs politiques, économiques, sociaux et de genre qui ont favorisé des systèmes d’assignations et d’exclusions.</p>
<p>Or il n’est pas d’assignation et d’exclusion plus manifestes et plus insupportables que celles qui refusent à tous, et en particulier à toutes dans le cas présent, le droit de réaliser toutes les potentialités de leur esprit et de leur corps.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/69527/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Serge Rabier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Dangereux pour les fœtus, le virus Zika agit comme un révélateur des enjeux sociétaux de la reproduction, en particulier sur les questions de l’accès à la contraception et au droit à l’avortement.
Serge Rabier, Chercheur associé en socio-démographie, Université Paris Cité
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2016-08-04T19:26:16Z
2016-08-04T19:26:16Z
JO, sexe et performance
<p>Les Jeux olympiques de Rio vont commencer et les organisateurs sont déjà en action. Ils ont annoncé que 450 000 préservatifs seront distribués pendant la compétition, soit 42 par athlètes et ce pour 15 jours de festivités. Déjà, à Londres, en 2012, 150 000 préservatifs avaient été donnés aux sportifs contre 90 000 aux JO de Pékin et d’Athènes, en 2008 et 2004, et 70 000 aux JO de Sydney, en 2000. L’évolution est constante et nous autorise à penser qu’il y a beaucoup de sexe pendant la compétition.</p>
<h2>« Un lieu de débauche et de beuverie »</h2>
<p>En 2012, la gardienne de la sélection américaine de football, Hope Solo, avait déclaré que « le sexe fait partie intégrante des Jeux olympiques. C’est 75 % de la quinzaine. On ne vit ça qu’une fois dans sa carrière. Vous voulez garder des souvenirs, que ce soit sur le plan sportif ou sexuel. J’ai vu des gens faire l’amour en plein air, sur les pelouses, entre des bâtiments ».</p>
<p><a href="http://www.thedailybeast.com/articles/2016/07/16/olympics-2016-triple-the-condoms.html">Pour le tireur américain Joshua Lakatos</a>, « les JO sont un lieu de débauche et de beuverie. […] Il m’est arrivé plusieurs fois de tomber sur des orgies organisées… ». Effectivement, les jeux regroupent un nombre important de jeunes sportifs, pas toujours professionnels et concentrés uniquement à 100 % sur la réussite sportive, qui veulent surtout en profiter et vivre un moment unique.</p>
<p>Il y a quatre ans, à Londres, les applications de rencontre Tinder et Grindr avaient implosé dans le village sportif, dès le début des Olympiades, face à l’afflux des connexions. </p>
<blockquote>
<p>« Grindr n’a pas su anticiper la croissance exponentielle des connexions et il a fallu 24 heures pour que l’application se remette à jour et répare son système, pour le grand bonheur des utilisateurs. » </p>
</blockquote>
<p>déclara le responsable communication du <a href="http://www.mirror.co.uk/news/world-news/gay-app-grindr-crashes-as-olympic-1678206">site de rencontre homosexuel</a> . </p>
<p>Au JO de Sotchi, en 2014, la <a href="http://www.thedailybeast.com/articles/2016/07/16/olympics-2016-triple-the-condoms.html">snowboardeuse américaine Jamie Anderson</a> déclara que :</p>
<blockquote>
<p>« Tinder était la principale application utilisée et, au village olympique, elle a monté en grade. […] Il n’y a que des sportifs présents, tous plus mignons les uns que les autres. […] Au bout d’un moment, j’ai dû supprimer l’application de mon téléphone pour me concentrer uniquement sur la compétition. »</p>
</blockquote>
<h2>Une baignoire remplie de glaçons</h2>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/132051/original/image-20160726-7058-8mwzdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/132051/original/image-20160726-7058-8mwzdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=818&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/132051/original/image-20160726-7058-8mwzdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=818&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/132051/original/image-20160726-7058-8mwzdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=818&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/132051/original/image-20160726-7058-8mwzdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1028&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/132051/original/image-20160726-7058-8mwzdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1028&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/132051/original/image-20160726-7058-8mwzdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1028&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un bon bain de glaçons.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.google.com/search?tbm=isch&q=Raging%20Bull&gws_rd=ssl#tbm=isch&q=Raging+Bull+Allo+Cin%C3%A9&imgrc=gZL31rR8YhahLM%3A">AlloCiné/DR</a></span>
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<p>Sexe et sport font donc bon ménage, et Rio s’y est bien préparé, avec sa distribution astronomique de préservatifs. Mais qu’en dit la science à ce sujet ? N’y a-t-il pas de risque de fatigue et de méforme en cas de consommation abusive de sexe, avant une rencontre importante ? Dans le film <em>Raging Bull</em>, avec Robert de Niro, le boxeur Jack LaMotta préférait se tremper dans une baignoire remplie de glaçons plutôt que de coucher avec sa femme, avant un match.</p>
<p>Mohamed Ali, avant de conquérir le titre de champion du monde de boxe, en 1964, avait expliqué à la presse qu’il avait cessé toute activité sexuelle « six semaines avant le combat. […] Même la masturbation. »</p>
<p>Lors de la Coupe du monde de football, en 2014, le sélectionneur de la Bosnie-Herzégovine, <a href="http://www.lexpress.fr/actualite/sport/football/mondial-2014-les-bosniens-auront-droit-a-la-masturbation-mais-pas-au-sexe_1510876.html">Safet Susic</a> avait clairement posé les choses :</p>
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<p>« Il n’y aura pas de sexe. Ils peuvent trouver une autre solution, ils peuvent se masturber s’ils veulent. […] Mais ce ne sont pas des vacances, nous sommes là pour jouer la Coupe du monde. »</p>
</blockquote>
<p>D’après lui, faire l’amour signifie fatigue et penser à autre chose que l’objectif sportif, ce n’est pas professionnel.</p>
<h2>Se donner à fond</h2>
<p>Vraiment ? Deux chercheurs canadiens, Samantha McGlone et Ian Shrier ont souhaité discuter de cette affirmation et vérifier si réellement le sexe agissait sur les performances sportives. Dans leur article <a href="http://journals.lww.com/cjsportsmed/Fulltext/2000/10000/Does_Sex_the_Night_Before_Competition_Decrease.1.aspx">« Does sex the night before competition decrease performance ? »</a>, ils ont suivi une centaine de sportifs professionnels et amateurs, dans de nombreuses disciplines différentes, allant du tennis à la course à pied en passant par le football et le basket, pendant plusieurs années. Ils se sont surtout focalisés sur leur consommation de sexe avant, pendant et après un tournoi ou une compétition importante. Leur idée était d’étudier la corrélation entre performance sportive et relation sexuelle.</p>
<p>Résultat : faire l’amour une nuit avant une compétition n’altère en rien l’endurance et la force physique. En matière de consommation énergétique, cela tourne entre 25 et 50 calories, soit l’équivalent de deux étages montés à l’escalier, avec plus ou moins d’effort.</p>
<p>Cependant, l’impact est variable s’il s’agit du partenaire habituel ou d’un nouveau partenaire. McGlone et Shrier constatent que lorsqu’on a à faire à une relation connue, avec sa femme, son mari ou sa petite amie, les choses se font normalement et à intensité moyenne. Or, si le sportif se met à fréquenter un(e) inconnu(e), les rapports sexuels seront plus passionnés et dureront plus longtemps. Il y a une volonté de briller et une contrainte sociale. On veut montrer, inconsciemment ou consciemment, à quelqu’un qu’on ne connaît pas, qu’on est compétent à ce niveau-là et on se donne à fond. Et dans ce cas, la fatigue se fait sentir.</p>
<h2>La menace du virus Zika</h2>
<p>Ainsi, aux JO, c’est peut-être ici le risque, fréquenter des gens nouveaux, des inconnus d’un soir. Comme cette anecdote, <a href="http://www.lefigaro.fr/international/2012/07/17/01003-20120717ARTFIG00447-alcool-et-sexe-l-autre-visage-des-jeux-olympiques.php">racontée par Joshua Lakatos</a>, qui aurait vu, à Atlanta, en 1996, l’ensemble du relais féminin suédois au 4X100, monter dans une chambre avec des sportifs américains. « Voir des gens nouveaux, c’est tout autant grisant que fatigant sur le plan physique », affirment McGlone et Shrier.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/132053/original/image-20160726-7028-1qzw5pe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/132053/original/image-20160726-7028-1qzw5pe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/132053/original/image-20160726-7028-1qzw5pe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/132053/original/image-20160726-7028-1qzw5pe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/132053/original/image-20160726-7028-1qzw5pe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/132053/original/image-20160726-7028-1qzw5pe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/132053/original/image-20160726-7028-1qzw5pe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Il y a vingt ans, aux États-Unis.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/sangre-la/3011432239/in/photolist-5A7nTv-6WrRf5-f2qPYN-64hFVa-f2byXz-2e4qgg-f2qQah-6WnMH2-eA6ZNM-eAabJj-k36zt-9SJrmM-eAwntb-bruiE3-eFbHBK-eAa5M9-eAreN6-eAupUo-eAup31-eCnMAE-743zVz-adnuwt-f2bxT8-5hhsaw-eA6Yxe-5dH1R3-akrVHS-eAa7dE-EB6nt-9ZWbAa-EB6qz-ezxJq7-eAa67L-eAaaxy-eA6XpH-f2qQJ9-eAa9G7-eA71Bn-f2byrt-eCkBu1-eAuon7-eAuo5f-eNsnD5-eB8yck-eAa84d-eBcXtS-eA6YPK-JCdE5-EB6fW-eZipxJ">Mark Goebel/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Mais ce n’est pas le seul problème. Au-delà de la performance, la question des maladies se pose évidemment. Si Rio a décidé de multiplier par trois la distribution de préservatifs, c’est aussi en vue d’éviter la propagation du <a href="https://theconversation.com/lhistoire-de-zika-virus-emergent-transmis-par-les-moustiques-53774">virus Zika</a>, sexuellement transmissible. <a href="http://www.slate.fr/story/121193/zika-sexe-jo-rio-peur-cio">D’après Camille Malnory</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Personne ne sait dire précisément combien de temps la personne infectée reste contagieuse. Or une transmission en cas de grossesse est également crainte étant donné que le virus provoque de graves troubles chez le fœtus : de nombreux cas de microcéphalie ont été découverts dans la zone à risque qu’est l’Amérique du Sud. »</p>
</blockquote>
<p>Alors, il n’y a pas de risque à prendre. Pendant les JO, il faut viser la gloire sportive sans oublier de se protéger…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/62915/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre Rondeau ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Il n’y a pas que la compétition dans la vie d'un athlète. Sexe et sport font bon ménage, et Rio s’y est bien préparé. Mais qu’en est-il de l’impact sur la performance sportive ?
Pierre Rondeau, Professeur d'économie et doctorant, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
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