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En Outre-mer comme en métropole, l'alimentation joue un rôle dans le développement du cancer (étal du Petit marché de Saint-Denis de La Réunion). Miwok / Flickr

Cancer : des outils pour améliorer la prévention

Internet est aujourd’hui une source majeure d’informations en santé et en nutrition. Beaucoup d’affirmations sur les liens entre des aliments ou leurs composants et le cancer circulent dans différents médias, allant jusqu’à alléguer des effets « anti-cancer » ou alertant sur des « effets cancérogènes », parfois de façon contradictoire. Les lecteurs et les patients ont en conséquence des difficultés à s’y retrouver, et à parvenir à se procurer une information fiable et validée. En France, le réseau National Alimentation Cancer Recherche (réseau NACRe) entend résoudre ce problème.

Plusieurs centaines d’experts en réseau

Le réseau NACRe rassemble une quarantaine d’équipes de recherche publique travaillant sur la thématique nutrition et cancer, soit près de 350 chercheurs et experts.

Une de ses missions est de transmettre des informations scientifiquement validées à divers publics : publics non spécialistes, patients, professionnels de santé, scientifiques, médias, agences de santé… Pour ce faire, le réseau NACRe met en avant les rapports issus de travaux d’expertise collective nationale ou internationale permettant d’actualiser la connaissance des relations entre facteurs nutritionnels et cancer (avant, pendant et après la maladie), d’évaluer leurs niveaux de preuve et, lorsque cela est possible, d’établir des recommandations.

Par exemple, le réseau NACRe produit et actualise des documents d’information sur la base des données scientifiques issues du rapport WCRF/AICR 2018. Publié en anglais, ce document constitue une référence à l’échelle internationale. Cette production est mise à disposition gratuitement. Depuis 2015, ce sont plus de 80 000 documents qui ont ainsi été diffusés, principalement en France métropolitaine.

Répondre au besoin d’information des populations d’outre-mer

Depuis quelques années, le réseau NACRe reçoit de plus en plus de demandes d’information sur la prévention nutritionnelle des cancers provenant d’habitants des départements et régions d’outre-mer (DROM). Or les documents sur cette thématique disponibles jusqu’à présent tenaient compte principalement de la situation nutritionnelle de la métropole. Ils n’étaient pas toujours adaptés aux publics d’outre-mer.

Le réseau NACRe a donc entrepris de créer des dépliants d’information sur la prévention nutritionnelle des cancers pour chaque DROM : Guadeloupe, Martinique, Guyane et La Réunion. Ce projet a été réalisé en partenariat avec l’Association Bien-être Santé Nutrition (B’San), qui dispose d’une expertise dans le champ de la nutrition-santé et des politiques nutritionnelles, avec notamment une spécificité pour les populations d’Outre-mer. Il a obtenu le soutien des Agences régionales de santé des DROM et de l’Institut National du Cancer (INCa).

Réseau NACRe.

Notre démarche a été la suivante : dans un premier temps, pour chacun des quatre territoires, nous avons réalisé un état des lieux de la situation nutritionnelle des habitants, de la situation du cancer (nombre de nouveaux cas de cancers par an) et des politiques régionales et nationales pour la prévention nutritionnelle des cancers.

Le cancer dans les DROM

Cet état des lieux montre que les cancers les plus fréquents dans les DROM sont le cancer de la prostate chez l’homme, le cancer du sein chez la femme et le cancer colorectal chez l’homme et la femme. La proportion de cancers de la prostate est environ deux fois plus élevée en Guadeloupe et Martinique (35 % et 28 %) que dans les deux autres DROM (15 % et 17 %) et qu’en métropole (14 %).


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Plusieurs facteurs nutritionnels méritent une attention particulière dans le cadre de la prévention des cancers, car ils présentent certaines spécificités dans les DROM : la surcharge pondérale (notamment dans les Antilles où elle touche près de 60 % des adultes), la consommation élevée de boissons alcoolisées (8 % des adultes martiniquais ont une consommation à risque chronique, la même proportion qu’en métropole), la consommation insuffisante de fruits et légumes (92 % des Réunionnais et 74 % des Antillais en consomment moins de 400 g par jour). La consommation d’aliments contenant des fibres tels que les produits céréaliers, légumes secs et fruits et légumes est également insuffisante pour 90 % des Guadeloupéens. On peut noter que la consommation de boissons sucrées est une problématique importante à la Réunion, puisqu’en environ un tiers des habitants en consomme trop fréquemment (4 fois par semaine et plus).

Enfin, environ 25 % des Antillais et Guyanais pratiquent rarement ou jamais une activité physique. En lien avec la prévention des cancers, et en accord avec la Stratégie nationale de santé définie en 2018, les politiques menées localement en outre-mer visent actuellement à renforcer tout particulièrement les actions de lutte contre la surcharge pondérale et l’inactivité physique.

À partir de ce constat, des dépliants adaptés à chaque DROM ont été créés afin de mettre l’accent sur les priorités pour la prévention nutritionnelle des cancers, donner des repères de consommation et apporter des réponses aux questions fréquemment posées. Ils ont été mis en ligne à la mi-octobre sur le site Web du réseau NACRe, et sont désormais disponibles à la commande.

Une démarche reproductible

D’après le Centre international de recherche sur le cancer, le fardeau mondial du cancer continue à augmenter, avec 18,1 millions de nouveaux cas de cancer dans le monde en 2018, contre 12,7 millions en 2008. Cette augmentation est liée à la croissance démographique et au vieillissement des populations, ainsi qu’à l’évolution de certaines causes de cancer associées au développement social et économique. Ainsi, dans les économies à croissance rapide, on observe que les cancers liés à la pauvreté et aux infections laissent progressivement place à des cancers associés aux modes de vie plus typiques des pays industrialisés.

Dans certains pays ou régions francophones, des initiatives émergent en terme de prévention des cancers. On peut en particulier saluer les actions de l’Alliance des ligues francophones africaines et méditerranéennes (ALIAM). L’équipe de coordination du réseau NACRe pourrait aider à reproduire la démarche mise en place dans les DROM dans les régions francophones où demeure un déficit d’information.

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