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Le logo du quiz conçu par trois doctorantes afin de convaincre les 18-30 ans, les plus récalcitrants, de se faire vacciner. Marion Cossin, Author provided

Comment convaincre les 18-30 ans de se faire vacciner ? Avec un quiz !

Désinformation oblige, fournir des données scientifiques fiables sur la Covid-19 aujourd’hui à travers les réseaux sociaux n’est pas une mince affaire.

Le danger est d’autant plus grand quand on sait que les jeunes de 18 à 29 ans s’abreuvent principalement à travers ces sources. Or, depuis le début de la campagne de vaccination, ils représentent la tranche d’âge la moins vaccinée au Québec. En date du 17 septembre 2021, 72,9 % d’entre eux avaient reçu leur deux doses, contre 89 % des 50-59 ans et 73,8 % des 12-17 ans.

Pour répondre à l’inquiétude de cette population sur la vaccination, il fallait trouver un outil efficace pour les rejoindre et réagir à leurs interrogations.

C’est ainsi que QuelVirusEsTu.com a vu le jour. Notre site web qui vulgarise les informations sur la Covid-19 de façon interactive et ludique avec l’aide d’experts, a vu sa popularité exploser en quelques semaines. Voici comment tout à commencé.

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Quand les Fonds de Recherche du Québec ont lancé leur appel à projet intitulé « Jeunes dans la lutte contre la Covid-19 », les férues de communication scientifique que nous sommes ont immédiatement pensé à soumettre une idée. Ce concours visait à stimuler des projets de communication numérique innovants et créatifs conçus par des étudiants pour aborder les préoccupations liées à la Covid-19 des jeunes entre 18 et 30 ans.

Déjà aux manettes d’initiatives de communication scientifique comme ComSciCon-QC, les idées ont rapidement fusé dans notre petite équipe de doctorantes : je suis étudiante en génie biomédical à l’Université de Montréal, Alexia Ostrolenk, étudiante en sciences psychiatriques à l’Université de Montréal, et Alexandra Gellé, étudiante en chimie à l’Université McGill.

Nous nous sommes rapidement rendu compte que de nombreuses sources d’information étaient déjà disponibles au sujet de la Covid-19, mais qu’il manquait un outil attirant pour les jeunes qui leur permettrait aussi de s’exprimer et d’échanger. Pour rendre notre projet visuellement attrayant, nous avons ajouté à notre trio une quatrième personne au double profil scientifique et graphiste : Émilie Dubois, fondatrice de l’agence IMPAKT Scientifik.

Une communication à double sens

Dès le début, nous voulions « penser interactif » pour sortir du carcan de l’imprimé ou du traditionnel cours magistral et intégrer activement l’utilisateur ; c’est dans cette optique que nous avons généré plusieurs idées de projet. L’autre principe qui nous tenait à cœur était d’avoir une communication à double sens, c’est-à-dire de proposer une forme d’écoute, et pas seulement fournir de l’information. Nous sentions que les approches de communication traditionnelles autour de la Covid-19 manquaient de réciprocité.


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Mais comment recueillir les sentiments des jeunes sans générer une quantité de données impossible à gérer ? Un forum ouvert demanderait des heures de modération et pourrait laisser la place à des dérives. Une interaction virtuelle avec des experts ne pourrait qu’être ponctuelle et limitée.

L’idée d’un quiz à réponses multiples nous est venue après quelques heures de remue-méninges. Un quiz est à la fois divertissant et ludique, et la plupart des gens aiment tester leurs connaissances ou donner leur avis. Il est en effet difficile de résister à un quiz du type « Quelle princesse Disney es-tu ? » ou « À quelle maison Poudlard appartiens-tu ? »A

Quatre avatars-virus

Le plan était donc clair : concevoir un questions-réponses aboutissant à un « avatar-virus » qui représente les sentiments de l’utilisateur par rapport à la pandémie de Covid-19. La difficulté ensuite était de construire des personnages qui représentaient la diversité des personnes qui passent le quiz, en s’abstenant de tout jugement. Après une recherche préliminaire dans les médias, nos expériences personnelles et celles de nos familles et amis, nous sommes arrivées à quatre « comportements » face à la pandémie représentés par nos avatars : le super-informé, l’inquiet, le sceptique, et le détaché.

En plus du quiz, il s’agissait aussi de fournir des informations de qualité à notre public. Pour cela, il a fallu nous entourer d’expertes et d’experts des sujets scientifiques que nous voulions traiter. Chapeautée par la professeure Nathalie Grandvaux, directrice du Laboratoire de recherche sur la réponse de l’hôte aux infections virales au CRCHUM, notre équipe d’experts a rédigé le matériel de base que nous voulions communiquer et nous a fourni des sources fiables et récentes.


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Pour transformer ces informations en fiches infographiques accessibles, nous avons fait un travail important de synthèse et de vulgarisation, avant de laisser opérer la magie d’Impakt Scientifik pour concevoir 10 fiches info sur les questions qui nous semblaient les plus essentielles. Pour chacun des avatars présentés à la fin du quiz, nous suggérons trois fiches à consulter qui pourraient répondre aux questions que se pose l’utilisateur. L’idée était donc d’utiliser le quiz comme un outil ludique pour amener les jeunes sur le site, mais ensuite leur proposer d’en savoir plus en explorant le reste du contenu.

Exemple d’avatar : le super informé.

Ouvrir le dialogue sur la vaccination

Une fois notre site web conçu le 16 juillet 2021, nous avons mis en place une stratégie de diffusion sur les réseaux sociaux afin de rejoindre un public plus large, aux opinions plus éloignées des nôtres. Pour rejoindre les jeunes, nous devions utiliser leurs codes et les outils qu’ils utilisent. Nos réseaux sociaux ont été très actifs tout l’été avec des publications tous les jours, et nous ne nous attendions pas à recevoir autant de commentaires sur chacune d’entre elles.

Les publications ont suscité plus de 20 000 interactions (réactions, partages et commentaires) – des personnes questionnant nos contenus et d’autres lecteurs s’engageant dans la discussion pour défendre nos propos. La page Facebook a également attiré certains commentaires plus agressifs ou comportant de fausses informations provenant de sources douteuses, ce qui a demandé un travail de modération.

La plate-forme a donc permis l’ouverture de conversations sur les vaccins entre individus avec des visions opposées et le partage d’information entre des populations qui n’interagissent pas habituellement, ce qui nous a convaincu du succès de notre démarche.

Exemple de questions des 10 fiches info : Comment est ce possible de créer un vaccin efficace et sécuritaire aussi vite ?

Une formule qui fonctionne

À ce jour, notre projet a touché plus de 265 000 personnes en combinant les différents réseaux sociaux (Twitter, Instagram et Facebook) et notre site Internet. La majorité était âgée de 18 à 34 ans et localisée au Québec. Notre portée géographique a été très large, touchant également les autres provinces canadiennes, l’Europe et l’Afrique francophone. Nous avons également reçu de très bons retours de professionnels de la communication scientifique et bénéficié du soutien d’institutions importantes pour diffuser notre projet.

Alors que l’accès à l’information scientifique est une condition essentielle à l’adoption de comportements recommandés par la santé publique, la désinformation sévit sur les réseaux sociaux, semant la confusion dans les esprits. Il est donc essentiel de fournir des informations scientifiques de qualité dans un format accessible et attrayant. Ainsi, nous pourrons stimuler l’intérêt des jeunes pour les sciences et réduire la trop grande distance qui existe encore entre les experts et le public.

C’est en instaurant un climat de confiance et d’écoute mutuelle qu’on peut communiquer des messages importants, donnant aux jeunes les outils requis pour prendre de bonnes décisions et devenir les citoyens de la société de demain. La question qui demeure est la suivante : comment encourager les scientifiques à s’investir dans ces nouvelles formes de communication et leur donner les outils nécessaires pour le faire ?


Vous avez une question sur les vaccins Covid-19 ? Envoyez-nous un courriel à l’adresse ca-vaccination@theconversation.com et des experts répondront à vos questions dans les prochains articles.

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