Au-delà de la performance fonctionnelle, les espaces de travail doivent désormais favoriser une expérience collaborateurs qui répond à leurs attentes de bien-être et de resocialisation. Car la période Covid les a dispersés, comme l’a notamment révélé le récent mouvement de limitation des possibilités de télétravail. Les espaces de travail constituent donc de plus en plus des leviers d’engagement, d’attraction et de rétention.
En parallèle, l’acoustique est aujourd’hui davantage considérée comme un élément important du bien-être individuel et de qualité de la vie collective au travail. Dans un contexte de prise de conscience généralisée de la dégradation de notre environnement et de ses impacts pour l’homme, la pollution sonore fait plus largement partie des nouvelles nuisances, multipliée par 10 depuis les années 1980 dans les pays développés.
Un actif sur deux concerné
En conséquence, près de 10 millions d’individus en France sont exposés en moyenne sur l’ensemble de la journée à un très fort niveau de bruit. Les conséquences sociales du bruit, toutes origines confondues, sont aujourd’hui évaluées à plus de 147 milliards d’euros par an par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), qui alerte dans son rapport sur le sujet publié en 2021 :
« Au-delà de l’idée que le confort sonore apporte un plus, il s’agit de comprendre que la pollution sonore est un problème de santé publique ».
En plus de formes de surdités ou d’apparition d’acouphènes, une exposition sonore trop forte et/ou trop longue peut entraîner une perturbation du sommeil, du stress, de l’anxiété, des maux de tête ou même du retard dans les apprentissages.
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Le monde de l’entreprise n’est évidemment pas épargné par ce phénomène. Aujourd’hui, environ un actif sur deux se déclare personnellement gêné par le bruit sur son lieu de travail, un chiffre stable depuis plusieurs années. Selon les personnes concernées, les nuisances sonores engendrent de la fatigue (pour 66 % d’entre eux), du stress (56 %) ou encore des problèmes de compréhension dans la communication (48 %).
Pourtant, ces effets désirables ne sont pas une fatalité. Par exemple, une étude clinique menée en milieu hospitalier auprès d’un échantillon de patients dialysés a montré que, dans un espace traité par des solutions acoustiques adaptées, la gêne sonore est divisée par deux et les maux de tête par dix.
Évaluer puis corriger
Quelles sont ces solutions ? Tout d’abord, il est important de prendre conscience des enjeux au travers de systèmes de mesure de la nuisance sonore. Comme le montre l’étude menée auprès des dialysés, au-delà des tests de validation classiques des temps de réverbération ou des niveaux sonores moyens, il est aujourd’hui possible de quantifier l’impact de solutions acoustiques au regard de notions plus proches de la qualité de vie que du respect de normes souvent minimalistes dans leurs seuils.
Ces solutions logicielles vont quantifier la gêne et la fatigue auditive de l’ouïe d’un individu en tenant compte au mieux de sa vulnérabilité individuelle, de son environnement en usage, de son activité du moment et de sa durée d’exposition.
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Ensuite, après la mesure vient la correction. De nombreuses solutions techniques de parois, panneaux muraux et plafonds, claustra et cloisonnettes mobiles ou fixes sont désormais disponibles. Les innovations récentes concernent notamment des technologies qui prennent en compte les basses et très basses fréquences, particulièrement insidieuses et nocives pour la santé auditive. L’amélioration de la perception sonore porte ainsi sur tout le spectre auditif.
De même, des « phones box » (cabines pour passer des appels) sont apparues avec la multiplication des visioconférences, y compris au bureau. Ce terme générique englobe tous les mobiliers acoustiques qui permettent de s’isoler des autres pour passer ses appels téléphoniques, des visios, seul ou même à plusieurs. Du simple fauteuil à la « bulle » de travail, ces espaces d’isolation deviennent entièrement équipés au niveau du mobilier, de l’éclairage, de la connectique, de l’aération et bien sûr de l’isolation sonore. Certains sont même autoportants, modulaires et déplaçables !
Enfin, apparaissent depuis peu des solutions d’alerte et de régulation sonore dans un milieu professionnel. Des dispositifs simples et légers, à l’image de celui proposé par la société danoise Jabra JN, indiquent en temps réel le niveau sonore et signalent visuellement si les seuils de tolérance sont dépassés, au travers d’indicateurs de couleur (vert, orange rouges). Ces nouveaux outils ont un impact pédagogique, et visent à influencer le comportement humain.
Une responsabilisation individuelle et collective
En effet, on observe qu’au-delà de la sensibilisation et de la prise de conscience, les collaborateurs se corrigent de manière autonome en cas de niveau sonore trop élevé et adoptent progressivement des comportements plus respectueux dans un espace collectif. C’est en tout cas ce que prouvent les récentes installations en open space faites chez Orange Innovation et Orange France à Meylan (Isère).
Les messages sonores restent indispensables à notre activité cognitive. Cela dit, ils doivent véhiculer l’information au cerveau avec un minimum d’interférence avec des bruits parasites. Au-delà des quelques outils qui se déploient actuellement, à nous de nous responsabiliser, individuellement et collectivement pour respecter les équilibres naturels et en particulier celui de l’équilibre sonore, garant d’un confort acoustique qui améliore la qualité de la cognition, réduit l’irritabilité et améliore donc le rapport aux autres.
En réduisant la gêne sonore, c’est l’équilibre humain, l’état émotionnel, l’empathie, l’attention aux autres, la qualité de la relation et donc le mieux vivre ensemble qui en bénéficient. Un cercle vertueux d’épanouissement individuel et donc de performance collective dans l’entreprise.
Franck Fumey, CEO chez Continuum, entreprise spécialisée dans les solutions acoustiques, a participé à la rédaction de cet article.