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Une jeune femme en tenue de sport, yeux baissés, se fait prendre la température en salle
Si avoir une bonne condition est un plus indéniable, il ne garantit pas d'éviter ni l'infection ni les effets secondaires du Covid. Kamil Macniak / Shutterstock

Covid : les sportifs sont-ils plus à risque ou protégés ?

Le sport est bon pour la santé, qui ne l’a pas entendu dire ? Il est effectivement établi qu’une activité physique suffisante et régulière n’apporte quasiment que des bienfaits… y compris en termes d’immunité. Des vertus protectrices qui s’étendent jusqu’au Covid ?

Un niveau d’activité physique au moins modéré (telle la marche régulière) permet en général d’améliorer l’immunité comme la réponse aux vaccins et de diminuer le risque d’infections. Dans le cas du Covid, il a été suggéré que les personnes sédentaires présentaient des formes plus sévères de la maladie, tandis que celles en meilleure condition physique étaient moins hospitalisées.

Pourquoi ? Du fait des bienfaits de l’activité physique sur les paramètres inflammatoires, des auteurs suggèrent qu’une bonne condition physique aérobie pourrait protéger de la tempête inflammatoire observée chez certains patients atteints du Covid-19. Si cette hypothèse est tentante, et parait presque évidente, elle n’est pour l’heure démontrée clairement par aucune étude.

Quand un effort trop intense crée une baisse immunitaire

Comme souvent, le mieux est l’ennemi du bien. Une pratique « trop » intense pourrait créer des périodes temporaires de baisse immunitaire et de plus grandes susceptibilités aux infections – même si cette théorie est controversée.

Pas d’alerte, toutefois : une étude américaine semble montrer qu’il n’y a pas plus de risques d’attraper le SARS-CoV-2 chez les jeunes sportifs universitaires que chez leurs pairs non-sportifs, voire peut-être moins. Mais là encore, pour le moment, nous ne disposons pas de preuves incontournables.

Reste que cette baisse immunitaire peut bien être constatée. D’où vient-elle ? La théorie de la « fenêtre ouverte » stipule que la mobilisation importante des cellules inflammatoires après une épreuve longue et intense, comme un marathon, conduirait à une diminution de leur efficacité (de leur capacité de phagocytose) quelques heures après la fin de l’effort. Ce qui entraîne une susceptibilité accrue aux infections. Sont donc essentiellement concernés les sportifs d’endurance.

Une groupe de marathoniens est en plein effort
Une pratique sportive trop intense peut entraîner, temporairement, une baisse de l’immunité. Un phénomène qui s’observe notamment chez les athlètes d’endurance (ici, marathon de Londres). IR Stone/Shutterstock

Il n’y a pas de seuil fixé établi concernant le volume ou l’intensité d’entraînement à partir desquels cette diminution transitoire de l’immunité peut être effective. Ce phénomène s’observe toutefois chez des sportifs s’entraînant plus de 10h par semaine avec des efforts prolongés (sachant que certains s’entraînent 30h/semaine), ou après la réalisation d’efforts trop intenses pour un sportif de loisirs.

En conséquence, l’augmentation potentielle du risque de contamination au SARS-CoV-2 à cause d’une baisse d’immunité après un entraînement de haute intensité est une préoccupation réelle, mais principalement chez les athlètes non élites. Pendant le Covid, les athlètes de haut niveau, bien suivis, ont pu poursuivre leurs entraînements sans risque accru de contamination à condition qu’il n’y ait pas d’augmentation soudaine de la charge de l’effort.

Moment charnière, la sortie de confinement fut par contre particulièrement sensible, avec des consignes de reprise progressive pour éviter ce risque.

Bien sûr, d’autres facteurs comme la nutrition, le sommeil, le stress, la vaccination, les voyages long-courriers, la présence d’infections ou la génétique jouent également un rôle dans l’efficacité des défenses immunitaires du sportif – comme chez tout un chacun. Il est difficile de dissocier leurs rôles respectifs.

Impact du SARS-CoV-2 chez les sportifs

Une bonne pratique sportive a donc des atouts, mais elle ne garantit pas de passer entre les mailles du Covid, ni de « bénéficier » de facto d’une forme asymptomatique en cas de contamination du fait de sa bonne condition physique.

Une étude menée chez 147 sportifs anglais olympiens ou paralympiens positifs au Covid (environ 6 % de l’équipe de Grande-Bretagne) montre tout de même que leurs symptômes étaient généralement légers (95 % d’entre eux). Aucun n’a été hospitalisé. La durée moyenne entre le début de ces derniers et leur résolution était de dix jours. Ces données sont similaires à celles obtenues chez des sportifs d’Afrique du Sud.

La fatigue excessive est en général le principal symptôme (chez 57 à 75 % des sportifs) ; c’est elle qui détermine très souvent le moment où la reprise du sport devient possible.

Se faire vacciner ou pas ?

Au vu de ces bons chiffres, cette question a préoccupé beaucoup d’athlètes. Du fait notamment des potentiels effets secondaires associés aux vaccins sur leur capacité à s’entraîner et performer en compétition. Une étude menée par la même équipe de recherche s’est donc intéressée à ces effets chez 127 sportifs olympiques et paralympiques qui ont reçu leurs deux doses entre mai et septembre 2021 (Pfizer-BioNTech).

Le principal effet secondaire ressenti par 94 % de sportifs a été une douleur au bras qui a duré en moyenne 2 jours (de 1 à 3 jours). Un constat qui a conduit à proposer aux athlètes paraplégiques ou qui utilisent majoritairement leur membre supérieur de changer le site d’injection. C’est alors un membre inférieur ou un endroit moins crucial qui était sélectionné.

Une fatigue généralisée a été observée chez 28 % des sportifs après la première vaccination, sur un à deux jours le plus souvent ; et chez 37 % des sportifs après la seconde vaccination, durant un à trois jours cette fois.

Plusieurs effets secondaires ont été plus fréquemment signalés après la deuxième vaccination : fièvre ou frissons (2 % après la première vaccination contre 18 % après la seconde), douleurs musculaires (7 % contre 33 %), et maux de tête (16 % contre 34 %).

Pour 73 % des sportifs (soit 93 d’entre eux), la vaccination n’a pas eu d’effet sur leur capacité à s’entraîner. 6 % (huit) des athlètes se sont par contre sentis complètement incapables de s’entraîner pendant toute une journée, mais sept d’entre eux avaient repris l’entraînement le lendemain.

Ceci confirme qu’une pratique sportive est le plus souvent possible après vaccination, sans interrompre l’entraînement. Cependant, des études sont nécessaires pour savoir si la charge de travail peut être conservée ou doit être réduite brièvement post-vaccination. Actuellement, ce sont surtout les symptômes perçus qui dictent, de manière empirique, la modulation de l’intensité post-vaccination d’un sportif.

L’efficacité du vaccin chez les sportifs contre les différents variants de SARS-CoV-2 n’est pas répertoriée. Ainsi, si on perd a priori en moyenne moins de jours d’entraînement en étant vacciné qu’en ayant le Covid, la recherche ne permet pas encore de savoir si un athlète vacciné qui contracterait le SARS-CoV-2 aurait moins de symptômes et un retour à l’entraînement plus rapide que s’il avait évité le vaccin.

La sprinteuse brésilienne Rosangela Santos reçoit une injection
Se faire vacciner ou risquer l’infection a interrogé beaucoup de sportifs de haut niveau. Toutes les équipes nationales ont fait vacciner leurs athlètes (ici, la sprinteuse brésilienne Rosangela Santos, avant les Jeux de Tokyo). Salty View/Shutterstock

Un rappel toutefois sur les confinements stricts qui ont précédé les mises sur le marché des vaccins… La santé mentale des sportifs, élites et professionnels, a aussi été touchée et étudiée, essentiellement en lien avec ces périodes d’isolement forcé. Pandémie et confinements ont favorisé le stress, la fatigue et la dépression, et détérioré la qualité du sommeil.

Les changements de condition physique inhérents aux confinements ont également eu un impact sur les évaluations des sportifs de leur bien-être général, les femmes étant plus vulnérables. Toutefois, continuer à faire du sport pendant le confinement (en intérieur) a permis de limiter stress et anxiété.

Quand les conséquences de l’infection sont lourdes

Nous n’avons jusqu’à présent abordé que les effets les plus légers du Covid. Or ces effets ne sont pas toujours aussi anecdotiques, surtout pour un athlète de haut niveau. Ce qui amène à considérer différemment la vaccination.

Le spectre du Covid long, également observé chez ce public, reste déjà un risque majeur pouvant réduire à néant des mois d’entraînement. Au mieux. Une étude montrait ainsi qu’un quart des 147 sportifs suivis n’avaient toujours pas repris un entraînement complet un mois après le début des symptômes. La perte de temps (et donc d’entraînement) estimée était en moyenne de 28 jours… et pouvait monter jusqu’à 275 jours pour les symptomatologies les plus longues ! Elle était de plus de 17 jours chez 51 % des sportifs.

Il n’y a malheureusement pas de données dissociant les disciplines sportives. Mais a priori, il n’y a pas de raison de trouver des différences de récupération entre elles.

Le délai de récupération du Covid a un impact majeur pour les athlètes – notamment pour ceux ayant préparé les JO de Tokyo et Pékin. Une perte de 28 jours et plus d’entraînement est très lourdement préjudiciable pour ces compétitions emblématiques, où la préparation est planifiée sur des mois, des années afin d’arriver à son meilleur niveau au jour J.

Il existe également une préoccupation de longue date concernant le risque potentiel, pour les athlètes souffrant d’une infection des voies respiratoires, de développer d’autres complications lors de leur reprise : le SARS-CoV-2 étant en effet connu pour sa capacité de toucher de nombreux organes. Les atteintes cardiaques (myocardites, péricardites, troubles du rythme, etc.) sont les plus étudiées chez les sportifs touchés.

Chez les sportifs élites, en général, la prévalence des troubles cardiaques post-Covid est faible, atteignant à peine les 3 %. De plus, les atteintes sont généralement légères et transitoires.

Quelques études observent toutefois des prévalences plus élevées, avec 19 à 33 % d’anomalies cardiaques post-Covid chez des sportifs légèrement symptomatiques ou asymptomatiques. Lorsque les sportifs ne sont pas régulièrement suivis pour leur santé cardiaque, contrairement aux sportifs de haut niveau, il est difficile de conclure sur l’origine des modifications cardiaques : adaptations dues aux entraînements, liées au Covid ? Ainsi cela pourrait expliquer les différences de prévalence.

Pierre-Emerick Aubameyang sur le terrain
Le Covid peut avoir un lourd impact sur la carrière d’un athlète de haut niveau. Testé positif et diminué physiquement, le footballeur Pierre-Emerick Aubameyang a du quitter la coupe d’Afrique des Nations en début d’année (ici avec son club, le FC Barcelone). rosdemora/Shutterstock

Cela soulève l’importance de s’assurer que les sportifs positifs au Covid, indépendamment de leurs symptômes, n’aient pas de contre-indication cardiaque à la reprise de l’entraînement.

L’étonnant manque de suivi sur les risques respiratoires

Étonnamment, il existe peu d’études sur les effets du Covid sur le système respiratoire des sportifs, en dehors des symptômes, alors que l’on connaît les effets potentiellement destructeurs du SARS-CoV-2 sur les poumons.

Il est probable que les conséquences sont similaires à celles observées au sein de la population non sportive. Mais on ne sait pas si, suite au Covid, certains ont développé de l’asthme ou d’autres pathologies. Le sujet n’est pas anecdotique.

Dans certains sports d’endurance, les sportifs présentent en effet des bronches ressemblant à celles d’asthmatiques légers, avec de l’inflammation et de la fibrose – sans que cela ne soit forcément symptomatique. La fréquence des pathologies respiratoires, dont l’« asthme d’effort » est la plus célèbre, est également plus élevée chez eux (en dehors de toute considération de dopage) que dans la population non sportive du fait des effets physiologiques de leur pratique intense sur leur système respiratoire.

Malgré cette vulnérabilité, ce n’est que si les symptômes comme la toux persistent après un Covid qu’il est aujourd’hui conseillé d’investiguer le système respiratoire des sportifs.

Un Covid… et après ?

Cette pandémie a soulevé la question du suivi post-infection chez les athlètes, de manière générale, et du délai à respecter avant la reprise d’activité. Se baser sur des symptômes est insuffisant, puisque même chez des sportifs asymptomatiques il a pu être observé des anomalies cardiaques transitoires notamment. Il serait donc plus sûr de pratiquer des examens sanguins, cardiaques et respiratoires attestant que tout est effectivement redevenu normal.

Chez les sportifs de haut niveau, ceux atteints par des douleurs thoraciques ou des symptômes touchant les voies aériennes inférieures (bronches, poumon) ont connu les absences les plus prolongées et les retours à l’entraînement les plus tardifs. Par comparaison, les athlètes ayant rapporté des symptômes nasaux ou pharyngés ont pu reprendre l’entraînement plus rapidement. Une reprise du travail qui, on le verra, doit se faire dans de bonnes conditions !

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