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Comment voir les symptômes sur une feuille de tomate avant qu’elle ne soit malade ? Scot Nelson

De nouvelles technologies pour mieux détecter les maladies des plantes

Cet article est publié dans le cadre de la prochaine Fête de la science qui aura lieu du 2 au 12 octobre prochain en métropole et du 6 au 16 novembre en outre-mer et à l’international et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition aura pour thème : « Planète Nature ? ».

Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site Fetedelascience.fr.


Augmenter la productivité agricole tout en conservant les ressources naturelles et la qualité de vie de l’agriculteur est le défi majeur de l’agriculture durable. Or, les maladies des plantes affectent la productivité des cultures et représentent une préoccupation constante pour les agriculteurs. Comment optimiser la gestion des cultures dans le contexte actuel, qui vise à limiter les apports d’engrais et de pesticides ?

Mieux détecter les maladies des plantes, et les détecter plus tôt, est un enjeu de recherche majeur pour améliorer l’efficacité des traitements des plantes.

Par exemple, la tomate et la pomme de terre sont sensibles au mildiou, la pomme de terre peut être atteinte par différentes maladies engendrant la pourriture des tubercules. Pour détecter les microorganismes phytopathogènes responsables de ces maladies, certains outils et certaines techniques sont déjà utilisés dans les champs, d’autres sont encore en développement.

Les biocapteurs utilisent des extraits des plantes à étudier

Parmi les outils déjà utilisés, les biocapteurs sont des technologies permettant de convertir des éléments physiques ou biologiques (anticorps, protéines ou ADN) en signaux mesurables.

Ceux destinés à la détection de protéines (anticorps) ou d’acide nucléique (ADN ou ARN) reposent principalement sur des techniques ELISA et PCR. La technique « ELISA » (pour Enzyme Linked Immuno Sorbent Assay) permet de détecter le phytopathogène à partir d’extraits broyés de plante malade en utilisant des anticorps dirigés contre ce pathogène. La technique de « PCR » (pour Polymerase Chain Reaction) consiste à amplifier, pour la quantifier plus facilement, une partie du génome du pathogène, à partir d’un extrait d’ADN du végétal malade.

Mais ces outils de diagnostic nécessitent d’avoir déjà identifié le pathogène et de disposer des anticorps qui permettront de le reconnaître, ou les amorces PCR qui permettent d’amplifier une partie de sa séquence ADN. De plus, ces techniques sont destructives puisque pour libérer le pathogène ou l’acide nucléique de celui-ci, il faut broyer un organe de la plante. Elles nécessitent également un matériel de laboratoire coûteux et de la main-d’œuvre.

Si ces analyses se font plutôt en laboratoire, il existe aussi des kits de détection commercialisés, utilisant ces marqueurs biologiques pour une utilisation au champ, notamment pour détecter des espèces de Phytophthora, ou mildiou, d’Erwinia amylovora, c’est-à-dire le feu bactérien, qui se révèle par des brûlures du feuillage, et du virus Y de la pomme de terre.

Un champ, c’est grand. Pas toujours facile d’observer chaque feuille. Guillemette Garry, Author provided

Ces techniques sont donc plus rapides qu’en laboratoire, moins coûteuses en matériel et peu consommatrices de main-d’œuvre. Une analyse fine au niveau du genre et de l’espèce du pathogène est même envisagé. La prise d’une photo à l’aide d’un smartphone pourrait permettre d’envoyer l’image du test de détection à une base de données pour réaliser cette détermination. Ce dispositif prometteur n’est toutefois pas encore appliqué à la détection des maladies des plantes.

« Sentir » les plantes malades

Le premier exemple de technologie en développement est la chromatographie en phase gazeuse (CPG), qui permet d’analyser des gaz, ou des mélanges de gaz, pour les différencier les uns des autres. Certaines maladies des plantes sécrètent des gaz caractéristiques, appelés composés organiques volatils, détectables par cette technique.

Par exemple, l’un des principaux problèmes concernant la santé des pommes de terre est le pourrissement. Celui-ci est causé, le plus souvent, par deux agents bactériens : Ralstonia solanacearum et Clavibacter michiganensis subsp. sepedonicus, classés dans la liste des pathogènes de quarantaine en Europe. Avant le pourrissement du tubercule de pomme de terre, elle dégage des composés organiques volatils, qui peuvent être captés grâce à des « nez électroniques ». Ces techniques permettent de détecter ces pathogènes avant même l’observation des symptômes de maladie.

Un nez électronique permet de discriminer, aussi bien en laboratoire qu’à l’échelle réelle, des pommes de terre saines de pommes de terre malades, en détectant les molécules volatiles diffusées par ces pommes de terre. Adrien Blum, Author provided

Cette technologie est encore à l’essai, mais est déjà utilisable dans les hangars de stockage des tubercules de pomme de terre. L’étape suivante serait d’utiliser des nez électroniques implantés directement dans le sol pour détecter, aux champs, ces maladies.

« Regarder » les plantes malades

La spectro-imagerie est une autre technologie permettant de détecter une maladie, et parfois même avant que les symptômes ne soient visibles à l’œil nu. Il existe plusieurs types de spectro-imagerie, mais la plus prometteuse, car la plus précise est certainement la technique d’imagerie hyperspectrale. L’idée est de prendre des photos des parties aériennes des plantes dans des bandes spectrales allant du visible au moyen infrarouge (donc certaines que l’on ne voit pas à l’œil nu).

Une plante stressée est différente d’une plante saine, car ses composants biochimiques et structuraux ont changé. Ceux-ci émettent des rayonnements spécifiques, différents de ceux d’une plante saine et qui peuvent être différenciés par l’imagerie hyperspectrale.

En pathologie végétale, on peut alors identifier des maladies de plantes sur la simple base des données spectrales. Une réelle avancée dans le diagnostic ! Un système hyperspectral est composé principalement d’une caméra et peut s’installer à bord d’appareils mobiles tels que les drones, ce qui permet d’analyser toutes les plantes d’une parcelle sans les détruire. Un avantage certain pour examiner à la loupe une parcelle agricole par rapport à des prélèvements aléatoires.

Certains champs sont surveillés par des drones. Wessex Archaeology, CC BY-NC

Une équipe américaine vient de développer une méthode en imagerie hyperspectrale permettant de détecter le mildiou et l’alternariose de la pomme de terre avant même que les symptômes ne soient visibles à l’œil. Une équipe chinoise a élaboré, grâce à l’imagerie hyperspectrale, une méthode pour distinguer deux maladies sur tomate, le mildiou et l’alternariose, indifférenciables à l’œil nu. Bien qu’assez proches visuellement parlant, les deux maladies engendrent des réponses différentes de la plante et ont en conséquence des caractéristiques spectrales bien distinctes en imagerie hyperspectrale. Aux Pays-Bas, une caméra d’imagerie hyperspectrale a été installée sur un tracteur pour détecter des plantes contaminées par le virus Y de la pomme de terre. Grâce à ces travaux de recherches, il devient possible de déceler rapidement, au champ, les plantes malades et de réagir précocement afin de limiter le développement de ces maladies.

Pour conclure – bien que les techniques ELISA et PCR soient aujourd’hui les outils de référence en matière de détection des agents phytopathogènes, les nouvelles technologies, ouvrent de belles perspectives d’avenir.

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