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Peaux de poissons séchées
De l'omble chevalier sèche au soleil à Gjoa Haven, au Nunavut. Des polluants persistants (PFAS) ont été retrouvés dans le sang des populations isolées du Nord canadien. La Presse Canadienne/Jason Franson

Des contaminants persistants détectés chez les populations du Nord canadien

Des chercheurs ont récemment découvert que plusieurs contaminants d’origine humaine, persistants dans l’environnement, s’accumulent dans les lacs arctiques, chez les ours polaires et phoques et chez d’autres animaux.

Ces contaminants appartiennent à une famille de produits chimiques appelés substances per — et polyfluoroalkylées (PFAS) et sont utilisés dans les emballages alimentaires, les vêtements imperméables et les mousses ininflammables. Le nombre réel de PFAS qui existent est difficile à cerner, mais les estimations suggèrent qu’il existe plus de 4700 types, car l’industrie continue d’en fabriquer de nouveaux.

Les chercheurs sont inquiets de cette classe de produits chimiques, car ils ne se dégradent pas dans l’environnement et peuvent comporter des risques pour la santé de la faune et des humains. Notre équipe de recherche a mesuré ces produits chimiques dans le sang de personnes vivant dans les communautés nordiques.

Exposition nordique aux PFAS

Bien que les niveaux de PFAS semblent diminuer dans le sud du Canada, probablement en raison de leur diminution dans les produits de consommation au cours des 20 dernières années, ils sont en hausse dans certaines parties de l’Arctique.

De 2016 à 2019, notre groupe de recherche, dirigé par le toxicologue Brian Laird, a invité des résidents du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest à participer à une étude pour mesurer les niveaux de PFAS, afin que nous puissions comprendre comment les personnes vivant dans des communautés autochtones éloignées étaient exposées à ces produits chimiques.

Les substances per — et polyfluoroalkylées (PFAS) sont un groupe de contaminants émergents.

Les résultats montrent que, de manière générale, les hommes présentaient des concentrations de PFAS plus élevées que les femmes, et les concentrations de PFAS avaient tendance à augmenter avec l’âge. Les niveaux de PFAS au sein de la population du Nord étaient similaires ou inférieurs à ceux de la population canadienne générale vivant sous le 60ᵉ parallèle et sous les concentrations d'autres populations des Premières Nations au Canada.

Il y avait cependant une exception. Les niveaux d’acide perfluorononanoïque (PFNA) étaient deux fois plus élevés chez les habitants du Nord que ceux observés dans la population canadienne en général. Cela concorde avec une autre étude estimant que les femmes inuites enceintes présentaient des niveaux plus élevés de PFNA que la population canadienne en général.

Risques pour la santé

Nous avons presque tous des PFAS dans notre corps, même si certains sont interdits à l’échelle internationale depuis 2000. L’exposition aux PFAS provient généralement des aliments, des produits de consommation et de l’eau contaminée.

Les populations les plus exposées aux PFAS ont tendance à avoir une plus grande incidence de cholestérol élevé, perturbation de la thyroïde, cancer, ménopause précoce et d’autres effets sur la santé.

un graphique montre comment l’exposition aux pfas peut affecter les humains
Effets des PFAS sur la santé. (European Environment Agency)

Cependant, les données scientifiques disponibles ne permettent pas de conclure quant aux effets prévisibles sur la santé: nous ne savons actuellement pas si le niveau de PFNA observé dans la présente étude est suffisamment élevé pour causer ou être associé à des effets sur la santé.

Il y a aussi un défi d’identifier les sources de PFAS et de PFNA, en particulier pour ces communautés nordiques. Le PFNA est utilisé comme revêtement de produit, par exemple sur les tapis résistants aux taches ou sur le revêtement antiadhésif des casseroles et poêles. Il peut également être produit lorsque d’autres substances chimiques se dégradent. Le PFNA peut également être transporté sur de longues distances, comme les autres PFAS.

Il existe peu de données disponibles dans le nord du Canada pour savoir si les niveaux chez les humains ont diminué ou augmenté au fil du temps. Cependant, étant donné que les concentrations de PFAS ont augmenté dans l’environnement arctique, les PFAS ont également augmenté dans les sources locales de nourriture telles que les poissons.

Trouver des PFAS dans le sang des personnes vivant dans ces communautés nordiques s’accompagne d’un enjeu supplémentaire: beaucoup ont une relation étroite avec la nourriture collectée localement et l’eau, et la contamination de l’environnement peut mettre en péril les modes de vie traditionnels des communautés nordiques et autochtones.

La vie des communautés Dénées et le lien avec l’environnement.

Politiques environnementales

Depuis 1991, un groupe d’experts internationaux sur les contaminants dans l’Arctique a régulièrement publié et mis à jour le rapport de l’Arctic Monitoring and Assessment Programme (AMAP) visant à documenter les tendances des substances chimiques et leurs effets sur les écosystèmes et la santé humaine. Un sous-objectif de ce rapport est d’éclairer les politiques et la prise de décision. La prochaine mise à jour est prévue pour cet automne.

Le Canada et les États-Unis ont élaboré des lois et règlements pour réduire l’émission de ces produits chimiques, y compris une législation qui interdit certains produits fabriqués avec des PFAS et l’établissement de normes de PFAS dans l’eau potable.

La découverte que des produits chimiques toxiques sont retrouvés dans le sang des habitants du nord à des niveaux plus élevés que ceux résidant dans le sud montre que les régions arctiques et subarctiques ne sont pas exemptes de contamination industrielle. Une surveillance et des réglementations supplémentaires devraient être mises en place pour diminuer l’exposition aux polluants persistants, afin d’assurer la santé de ceux qui y vivent.

This article was originally published in English

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