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Des livres de jeunesse pour parler de harcèlement scolaire

La littérature de jeunesse peut être un médium intéressant pour aider les élèves à dialoguer et prendre du recul sur des situations. Shutterstock

Un enfant qui perd le sourire, fait des cauchemars, a des colères plus fréquentes, devient susceptible, se plaint de douleurs inexpliquées… Un écolier, un collégien, un lycéen dont le niveau scolaire baisse, a une capacité d’attention diminuée, manifeste parfois une attitude provocante vis-à-vis de ses camarades. Ou, au contraire, s’isole. Voilà des signes qui peuvent alerter sur une situation de harcèlement et qu’il ne faut pas minimiser en tant que parent, enseignant ou professionnel de l’enfance.


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Alors, comment lutter contre ce fléau qui touche un élève sur dix ? Comment sensibiliser les classes, prévenir les risques mais aussi prendre en charge les victimes, comme l’annexe de la loi du 8 juillet 2013 nous y invite ?

La littérature de jeunesse peut être un médium intéressant et précieux pour échanger et amener les jeunes à prendre conscience de faits perçus ou vécus. Albums, bandes dessinées et romans permettent de mettre des mots et des images sur ce qui se passe et développer de l’empathie pour les autres.

Du côté des albums

Le lien entre littérature de jeunesse et harcèlement scolaire est présent dès le premier titre qu’on peut rattacher au genre du roman scolaire, Tom Brown’s Schooldays, publié en 1857. Le personnage principal, envoyé en pensionnat pour ses années de collège et lycée, se confronte rapidement au harcèlement à travers la figure de Flashman qui tyrannise physiquement et émotionnellement les jeunes élèves.

Depuis ce temps, de nombreux romans scolaires et ouvrages jeunesse ont exploré ce sujet, aidant les jeunes lecteurs à prendre du recul et à exprimer leur propre vécu.


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Dan Olweus, professeur de psychologie à l’université de Bergen, explique qu’un élève est victime de harcèlement lorsqu’il est « soumis de façon répétée et à long terme à des comportements agressifs visant à lui porter préjudice, le blesser ou le mettre en difficulté de la part d’un ou plusieurs élèves »

Tyranono. Ed. La Bagnole

Un cas de figure qui structure par exemple l’album Tyranono de Gilles Chouinard. Dans la cour de récréation, un jeune théropode endure les moqueries, intimidations et bousculades à répétition de ses camarades. Il devient triste, incompris de ses parents et s’emmure dans le silence. Mais en deuxième partie, l’histoire bascule car, malgré les humiliations subies, le jeune tyrannosaure, n’écoutant que son courage, n’hésite pas à sauver celui qui le maltraite, au péril de sa vie. Tyran devient alors son ami et le sauve à son tour.

Ce récit porté par des couleurs vives et des personnages expressifs met bien en avant le ressenti des protagonistes. Il offre aux plus jeunes la possibilité de prendre conscience de ce processus de harcèlement qui s’amplifie parfois très vite. Il peut aussi aider la victime à trouver en lui la force, la solution pour que les choses s’arrêtent. Des séquences pédagogiques peuvent aussi être mises en place par les enseignant.es en Grande Section de maternelle autour de cet album.

éd. Didier Jeunesse

Autre lecture qui peut susciter la parole, cette fois avec des élèves de primaire : Rouge de Jan de Tinder, qui raconte l’histoire d’Arthur, un garçon timide qui rougit facilement. Cet album expose à la fois les faits mais aussi le ressenti de la narratrice, mettant bien en avant le rôle que joue souvent le leader de la classe que personne n’ose affronter.

L’auteur joue à la fois avec les techniques graphiques très nombreuses (fusain, aquarelle, papiers collés) mais aussi une palette de couleurs, réduite pour évoquer les émotions des personnages. Il utilise le hors cadre afin de stimuler l’imaginaire du lecteur mais également pour accentuer certains effets comme la méchanceté de Paul.

Rouge est un magnifique album qui s’adresse à la fois aux victimes, aux harceleurs mais aussi aux témoins, invitant chacun à réfléchir à ses paroles, ses actes et leurs conséquences.

BD et romans graphiques

Du côté des bandes dessinées, dans la collection des Max et Lili de Dominique de Saint Mars et Serge Bloch, le numéro 67 porte sur le harcèlement scolaire. Après avoir fait une bêtise en classe, Max se retrouve insulté, bousculé et exclu pendant les récréations. La solution au calvaire que vit Max arrive quand celui-ci en parle à sa sœur puis en classe grâce au « conseil » où tous les élèves discutent ensemble pour résoudre des conflits. Dans la série des Ariol d’Emmanuel Guibert et Marc Boutavant, on peut lire aussi L’affaire Pouyastruc, qui pose la question de l’intervention des parents.

Seule à la récré d’Ana Bloz et Noémya Grohan dépeint avec humour des situations compliquées avec la famille ainsi que l’institution scolaire qui peine à trouver une solution convenable et explicite le triangle victime-bourreau-témoin.

Jane le renard et moi. Editions de La Pastèque

L’adolescence est une période de transition, de changements physiques, de mutation, où le passage de l’enfance vers l’âge adulte n’est pas sans complexité et vécu de façon différente par chacun. S’accepter, se retrouver, reconnaître l’autre dans sa différence, autant de questions que nous invite à nous poser un très beau roman graphique : Jane le renard et moi d’Isabelle Arsenault et Fanny Britt.

Accessible dès le CM2, l’ouvrage met en scène l’histoire d’Hélène, une jeune fille qui subit les insultes et les moqueries, orales et écrites, de ses camarades à cause de son aspect physique. Son unique refuge : la littérature et plus précisément le roman Jane Eyre, de Charlotte Brontë. Par la suite, lors d’un séjour avec sa classe, en extérieur, elle fera deux rencontres qui vont redonner des couleurs à sa vie : celle d’un renard dont le regard la bouleverse et celle de Géraldine pour qui elle a le sentiment d’exister et qui deviendra son amie.

La plume de Fanny Britt transcrit de manière subtile les tourments de l’adolescence et développe la réflexion autour de l’acceptation de soi. La mise en page, avec un jeu de cadrage et décadrage, permet de donner un effet cinétique que nous retrouvons aussi dans le choix de la taille et le rythme des images qui varient, d’une page à l’autre selon ce que l’auteur veut mettre en avant dans le récit. Le livre existe aussi en version audio.

Didier Jeunesse

Des Bleus au cartable de Muriel Zürcher est un roman pour jeunes adolescents qui a l’intérêt de montrer le harcèlement à travers trois points de vue : Lana, la victime, Ralph, le bourreau et Zélie, la témoin. La focalisation interne change à chaque chapitre, permettant au lecteur de s’identifier aux trois personnages tour à tour.

Ce livre permet donc non seulement de comprendre la situation de harcèlement du point de vue de la victime et du témoin mais aussi, et ceci est plus rare, du point de vue du bourreau. En effet, toute situation de harcèlement comporte au moins un bourreau et il est intéressant d’analyser les raisons qui poussent un enfant à devenir le bourreau d’un autre et quelles solutions existent pour faire cesser ce cercle vicieux.

Pour aller plus loin sur la question du harcèlement scolaire, de nombreuses vidéos sont disponibles sur la plate-forme éducative Lumni. Des ouvrages tels que Le Harcèlement scolaire en 100 questions permettent aussi d’apporter des réponses aux questions les plus fréquemment posées sur le harcèlement, et d’apporter des solutions.

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