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Du Shanxi au Nord-Pas-de-Calais, des initiatives pour passer à l’après-charbon

Un mineur trie le charbon près d'une mine à Datong, dans le nord de la Chine, le 20 novembre 2015. Greg Baker/AFP

La ville de Datong, située dans la province du Shanxi au nord de la Chine, ne doit pas son surnom au hasard. Pendant plus de trente ans, à partir des années 1980 jusqu’à 2010-2015, elle a été la « capitale du charbon ». Dans un pays qui, encore récemment, dépendait essentiellement de l’énergie produite par le charbon pour se chauffer, ce bassin minier fournissait à lui seul près de 8 % de la production nationale.

Mais depuis le début de la décennie 2010, la volonté des autorités chinoises de lutter contre la pollution a provoqué une baisse de la demande. Les puits de mine de cette région ont alors fermé les uns après les autres, laissant une population à l’abandon et des campagnes en crise.

Des transitions précaires et difficiles

En France, le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais fermé à l’automne 1990, est depuis cette période à la recherche de projets de reconversion et de mise en valeur de son territoire. Une zone ruinée par une longue exploitation du charbon dont les responsables n’ont, à aucun moment, pris la mesure des ravages durables qu’elle provoquait sur l’environnement.

Certaines initiatives, telles que la création du musée du Louvre-Lens, constituent des réussites qui contribuent à la revitalisation du bassin. Reste que le sous-sol, tel un gruyère dont les cavités seraient remplies de grisou, ce gaz souterrain redouté des mineurs à l’origine de très nombreuses catastrophes houillères dans le monde, constitue une menace permanente.

La province du Shanxi est l’une de ces rust belts – littéralement « ceintures de rouille » – composant le paysage de nombreuses régions désertées par les industries, lorsque celles-ci ne pouvaient plus tirer profit des ressources locales minérales et/ou humaines. Dans l’optique d’aller vers une « Chine propre », on y a installé des champs entiers de panneaux solaires.

Les populations ont souvent été déplacées des villages miniers qui s’effondraient sous l’effet des galeries souterraines non remblayées et des terres agricoles polluées, vers des cités nouvellement construites où elles se sentent perdues et inutiles.

Vers la transformation du grisou

À Avion, en plein bassin minier non loin de Lens, une PME originaire de Forbach (Moselle) composée de huit personnes innove. Filiale de la Française de l’énergie, Gazonor vient d’installer le tout premier site d’exploitation en France d’électricité dite « verte », produite à partir du grisou.

Cette technique, bien connue en Allemagne, consiste à capter le gaz par le biais d’un convertisseur, puis à l’envoyer – avant qu’il ne se répande dans l’air et le pollue – dans un puissant moteur, pour ensuite le transformer en électricité. Très efficace et considéré comme écologique, ce procédé génère plus d’énergie que les éoliennes.

Gazonor prévoit de produire de quoi alimenter en électricité 9 000 personnes par an. Trois autres sites de la région sont à l’étude pour une rapide mise en route. Au total, il est estimé qu’une production de neuf mégawatts tous les douze mois – permettant de fournir 40 000 consommateurs – sera le rythme de croisière de Gazonor, et ceci pendant très longtemps, tant les réserves de grisou sont importantes.

Ce projet d’énergie « verte » a pourtant suscité la colère d’un certain nombre d’opposants, notamment en Lorraine. Ceux-ci protestaient contre toute exploitation de gaz « de couche » – houille et schiste –, redoutant l’injection de substances dangereuses dans la nappe phréatique. Mais, depuis la signature de l’accord tarifaire avec ERDF en octobre dernier, la production a démarré.

La réhabilitation par le tourisme

À Datong et ses alentours, la résignation domine chez les habitants qui se sentent oubliés par les autorités conduisant le pays à marche forcée sur le chemin de la modernité. Dans cette province réputée pour la cinquantaine de grottes bouddhistes de Yungang datant du Ve siècle et leurs quelque 50 000 statues gravées à même la roche, la manne touristique déjà très importante viendra, sans doute, combler en partie le vide laissé par l’industrie minière.

Le site de Yungang, tout comme le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, sont inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco. Si le premier attire énormément de visiteurs, il ne pourra jamais en être de même pour le second, en dépit de tous les efforts qui pourront être faits, y compris du Louvre-Lens et ses expositions. Néanmoins, malgré le chômage et la désindustrialisation qui le frappent, les habitants de cette région des Hauts-de-France sont très loin de la détresse qui règne, aujourd’hui, chez les travailleurs du Shanxi.

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