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Économie bleue en Afrique : comment valoriser la richesse maritime

Les Seychelles, un des champions de l’économie bleue. flickr

Second temps de notre mini-série sur les enjeux de « l’économie bleue » pour les pays africains. Aujourd’hui, les différentes stratégies continentales et nationales développées autour des richesses maritimes.

Sur le plan continental, l’Union africaine a conçu dès 2012 une stratégie maritime intégrée qu’elle souhaite mettre en place d’ici à 2050. Concrètement, l’UA préconise la création d’un Centre africain pour l’économie bleue (ACBE) d’ici à 2023 et la création d’un guichet pour la promotion du secteur maritime au niveau de la Banque africaine d’investissement pour 2025.

L’Union africaine a également instauré lors de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de Johannesburg de juin 2015, une « Journée africaine des mers et des océans » à célébrer chaque 25 juillet.

La croissance bleue pourrait se matérialiser par le développement de l’énergie marine, l’écotourisme, la modernisation des installations et de la gestion portuaire, la mise en valeur via la collaboration avec les populations autochtones de services de transports locaux et de fret, ou encore la création d’entreprises de pêche.

Encadrer et protéger

D’autres organisations, comme la Commission de l’Océan Indien (COI) et la Zone de paix et coopération de l’Atlantique Sud (ZOPACAS) se sont également emparées du sujet. La COI a ainsi établi, en avril 2015 à la suite d’une conférence régionale à Madagascar, une note identifiant l’économie bleue à un « levier d’une croissance durable et innovante pour l’Indianocéanie ».

La ZOPACAS et ses 24 membres, dont 21 États africains, a élaboré diverses stratégies relatives à l’économie bleue afin d’encadrer juridiquement les ressources énergétiques marines et de protéger les écosystèmes fragiles, par la limitation de la pêche de fond par exemple. Il apparaît que le secteur de la pêche est plus productif de 26 % en Tanzanie, de 150 % en Ouganda et de plus de 500 % à Madagascar au regard de la moyenne observée sur le continent.

De retour de la pêche en Guinée. Julien Harneis/Flickr, CC BY-SA

Les stratégies des États sur le long terme devraient permettre l’insertion sociale de certaines catégories de populations vulnérables comme les jeunes et les femmes. En Afrique de l’Ouest, par exemple, ces dernières vendent près de 80 % des produits de la mer. La conférence de Luanda (Angola) en mars 2015 a été dans le même sens en s’intéressant à « l’emploi des femmes africaines dans le secteur maritime » ; il s’agit là d’une première pour le continent.

Des stratégies nationales

Les Seychelles se défissent comme les « pionniers de l’économie bleue en Afrique », avec un programme en six points concernant la pêche et l’aquaculture, le tourisme, les énergies renouvelables, le transport maritime, les ressources minérales et la sécurité maritime.

L’Afrique du Sud a pour sa part élaboré le projet « Phakisa » (« presser le pas » en sesotho) visant à libérer le potentiel économique des océans qui l’entourent en développant prioritairement : les activités de transports et de fabrications marines, l’exploration pétrolière et gazière en mer, l’aquaculture et les services de protection marine ainsi que la gouvernance maritime.

Mentionnons également des projets de « carbone bleu » (le dioxyde de carbone stocké dans les océans) à Madagascar et au Kenya. Le Kenya a d’ailleurs fait campagne en 2015 pour occuper le secrétariat général de l’Organisation maritime internationale (OMI), menant à cette occasion une forte promotion de sa politique économique bleue via l’écotourisme et la gestion des loisirs et de l’environnement en milieu marin et corallien.

Un exemple de projet de « carbone bleu » dans une mangrove malgache.

En Afrique de l’Ouest, des pays comme le Togo ou le Sénégal ont adopté des stratégies pour instaurer « une économie bleue durable, version marine de l’économie verte » ; le Togo accueillera le prochain Sommet de Lomé en octobre 2016 avec pour objectif l’adoption de la Charte africaine sur la sécurité marine ; pour le Sénégal, il s’agira de mettre sur pied une Haute Autorité » chargée de la coordination de la sécurité maritime, de la sûreté maritime et de la protection de l’environnement marin (HASSMAR). Madagascar se penche de son côté sur un projet d’extension du port de Toamasina.

Il est à souhaiter que le continent devienne bien plus qu’un simple exportateur de ressources naturelles ; il s’agit désormais d’être capable de produire des biens à valeur ajoutée et d’initier un développement qui dépasse des conceptions classiques en parvenant à conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable.

Dans une perspective africaine, il apparaît essentiel de « changer de paradigme » pour conserver les ressources marines à destination des générations futures en établissant des cadres de gestion et de transformation ; cela passe également, comme on l’a vu dans notre premier article, par le retrait des prédateurs internationaux.

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