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Effet JO : l’engouement des jeunes pour le sport peut-il durer ?

Façade de l'Arena Champ de Mars, Paris, août 2024
Façade de l'Arena Champ de Mars, Paris, août 2024. Shutterstock

Enthousiasmé par les exploits des champions olympiques français, un nouveau public se presse aux portes des clubs de sport. Mais pour que l’engouement se mue en pratique durable de la natation, du tennis de table ou encore de l’athlétisme, les clubs doivent poursuivre leurs efforts d’accessibilité et s’adapter aux attentes d’une jeune génération tentée par le zapping.


La réussite des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de Paris a été décrite comme une « parenthèse enchantée ». Spectaculaire, iconique, historique… les superlatifs employés ont été nombreux pour décrire la ferveur des enceintes sportives et des fan-zones en France.

L’organisation des JO permet de mettre à l’agenda politique et médiatique les enjeux associés au sport (l’éducation, la santé, l’inclusion, la mixité ou encore la durabilité). En France, la pratique du sport a été décrétée « Grande cause nationale en 2024 » et, suite au succès des Jeux, le président de la République Emmanuel Macron a dit vouloir instaurer « une Fête nationale du sport » tous les ans, le 14 septembre, à l’image de la Fête de la musique.

Les retombées d’un tel événement sont surtout évaluées à travers son impact social. Parmi les effets positifs attendus, il y a celui d’une plus grande pratique sportive et d’un engouement des jeunes pour les activités représentées dans les épreuves.

En cette rentrée post-JO, les demandes d’inscriptions devraient affluer dans les clubs et les associations sportives. Mais ces derniers ont-ils les moyens d’accueillir et d’accompagner les nouveaux licenciés ? Et les résolutions de rentrée peuvent-elles tenir dans le temps ?

Accueillir de nouveaux publics

« La révolution paralympique est lancée » et les Jeux vont contribuer à « changer (favorablement) notre regard sur le handicap », a assuré Tony Estanguet, président du comité organisateur des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. L’héritage des Jeux paralympiques en matière d’inclusion sociale des personnes en situation de handicap est en effet un enjeu primordial.

Malgré de réelles avancées dans le domaine du sport adapté, d’importantes inégalités perdurent et mettent à mal l’idéal d’inclusion. L’intégration des personnes en situation de handicap est en effet conditionnée à une politique d’accessibilité devant permettre à tous de gagner en autonomie.

Les Jeux paralympiques 2024, un espoir pour l’essor du parasport en France (Le Huffington Post, 2023).

Le manque de personnels qualifiés à l’encadrement des pratiques sportives adaptées est également un facteur limitant.

De nombreux obstacles limitent encore la pratique d’une activité physique ou sportive pour les personnes en situation de handicap. Celles-ci évoquent notamment la fatigue et les douleurs physiques liées à leur handicap, le manque d’informations sur les équipements sportifs et les offres adaptées, l’éloignement des lieux de pratiques de leur domicile et le coût jugé trop élevé de la pratique encadrée.

Par ailleurs, l’accès au plaisir dans le sport n’a rien d’automatique et suppose une expérience positive renouvelée dans le temps. Les enseignants en activité physique adaptée (APA) exerçant en milieu associatif et ceux d’éducation physique et sportive (EPS) travaillant en milieu scolaire ont donc un rôle capital à jouer dans l’accompagnement et la recherche d’émotions plaisantes, pour garantir une pratique régulière.

Diversifier l’offre sportive

Les jeunes ne sont plus prioritairement motivés par la compétition dans le sport. À la recherche du bien-être individuel et des bienfaits pour la santé, ils se tournent de plus en plus vers une pratique non encadrée et autonome, ce qui leur offre plus de flexibilité.

Ils privilégient la multi-pratique et le zapping sportif, passant d’une activité à une autre en fonction de leurs envies et de leurs aspirations. Ils peuvent très vite se lasser d’un sport. Tout se consomme et se vit en « mode Netflix ».


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Ces phénomènes d’abandon sont à comprendre plus largement dans une société de l’immédiateté et en perpétuelle accélération. Les jeunes aiment le sport, mais de préférence sans contraintes.

À mesure que la société s’ouvre à la sphère des loisirs, les structures fédérales sont amenées à repenser leur offre sportive. Leurs orientations politiques sont influencées par la dimension ludo-sportive actuelle. Les fédérations intègrent de nouvelles modalités : sport santé, sport inclusif, sport loisir, sport mixte… Les pratiques sportives s’accordent désormais au pluriel.

Enfin, n’oublions pas que des freins à la pratique sportive subsistent : une santé fragile, des difficultés de sociabilité, le cumul des contraintes professionnelles, scolaires et familiales, le désintérêt pour le sport, ou encore le coût et l’inadéquation de l’offre sportive.

Éviter le décrochage de l’activité sportive

Les jeunes pratiquent davantage un sport de façon autonome, en dehors de toute structure. Pour la plupart des fédérations sportives, on observe une baisse significative du nombre de licenciés autour de 11-12 ans. Le décrochage de l’activité physique est plus important à l’adolescence et concerne plus particulièrement les jeunes filles.

JO 2024 : les frères Lebrun et l’engouement pour le tennis de table (France 24, juillet 2024)

Les clubs sportifs font face au défi de la fidélisation du public. Elles se voient contraintes de réinventer et de proposer aux adhérents un autre modèle que la compétition.

Les collectivités doivent aussi repenser la nature des équipements sportifs proposés. Par exemple, des activités comme le football ou le basket-ball ne se pratiquent plus seulement dans des structures sportives classiques, mais dans la rue ou dans les city stades.

Dans le champ des loisirs sportifs marchands se développent une diversité de pratiques sportives. Par exemple, le « foot à 5 » fait partie des plus répandues, avec près de 2 millions de joueurs. Le football indoor apparait comme le lien idéal entre le « sérieux compétitif et le loisir ludique ». Il parvient à trouver un équilibre entre les cultures sportives existantes.

À travers ces pratiques urbaines et conviviales, nous assistons à une forme d’hybridation du football appréciée par les jeunes (et les moins jeunes !).

Le padel (adaptation du tennis) est également une activité en plein essor. Il se distingue des autres sports de raquette par son accessibilité technique et sa dimension ludique. Le développement de ce sport est lié à sa spécificité qui en fait une activité spectaculaire et intense. La pratique en double permet notamment de partager ce plaisir.

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Les jeunes sportifs sont en attente d’espaces sportifs diversifiés en adéquation avec leurs envies. La tendance à la spécialisation des équipements est désormais révolue puisqu’elle peut entraîner une séparation des pratiquants.

Il s’agit de penser les espaces pour toutes et tous, favorisant la mixité, la pratique intergénérationnelle, la cohésion sociale : le vivre-ensemble. L’objectif est de concevoir des espaces sportifs pouvant être mutualisés. Les équipements partagés devraient permettre tout autant la pratique auto-organisée (libre et accessible) qu’encadrée (puisque structurants pour les écoles et les clubs), pour les filles comme les garçons, les « valides » comme les personnes en situation de handicap, les jeunes comme les seniors.

Le développement de la pratique sportive intergénérationnelle invite les territoires à s’adapter aux nouveaux enjeux de société : l’accessibilité, la sociabilité, ou encore l’écologie.

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