tag:theconversation.com,2011:/es/topics/elections-americaines-90249/articlesélections américaines – The Conversation2024-02-12T16:11:20Ztag:theconversation.com,2011:article/2229162024-02-12T16:11:20Z2024-02-12T16:11:20ZPourquoi tant d’Américains croient-ils que la présidentielle a été « volée » à Donald Trump en 2020 ?<p>La campagne présidentielle américaine 2024, qui a débuté avec les <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2024/02/04/presidentielle-americaine-2024-joe-biden-remporte-aisement-la-primaire-democrate-de-caroline-du-sud_6214634_3210.html">primaires démocrates</a> et, surtout, <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2024/02/06/dans-le-nevada-primaires-et-caucus-en-ordre-disperse-chez-les-republicains_6215004_3210.html">républicaines</a>, est déjà historique à plus d’un titre.</p>
<p>Pour la première fois de l’histoire des États-Unis, un candidat, Donald Trump, de surcroît ancien président, brigue la Maison Blanche alors même qu’il est visé par de <a href="https://www.ledevoir.com/monde/etats-unis/804860/etats-unis-91-chefs-accusation-dessus-presidentielle-singuliere">multiples inculpations</a> et a été reconnu coupable d’<a href="https://fr.euronews.com/2023/05/10/donald-trump-reconnu-coupable-dagression-sexuelle">agression sexuelle</a> (un <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/2023/07/19/trump-carroll-judge-rape/">viol</a> en réalité).</p>
<p>Plus grave encore : après sa défaite de novembre 2020, Trump a tenté d’empêcher le transfert démocratique du pouvoir en <a href="https://www.rfi.fr/fr/am%C3%A9riques/20220610-l-assaut-du-capitole-%C3%A9tait-une-tentative-de-coup-d-%C3%A9tat-et-encourag%C3%A9e-par-trump-dit-une-enqu%C3%AAte">encourageant ses partisans à s’opposer par la violence à l’investiture de son successeur</a>, et continue à ce jour <a href="https://www.france24.com/fr/am%C3%A9riques/20220613-d%C3%A9tach%C3%A9-de-la-r%C3%A9alit%C3%A9-donald-trump-s-est-accroch%C3%A9-au-mythe-de-l-%C3%A9lection-vol%C3%A9e">d’affirmer qu’il a, de fait, remporté l’élection</a>.</p>
<p>Il n’y a <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2103619118">aucune preuve</a> de fraudes dont l’existence aurait pu changer le résultat, et tous les recours légaux de l’ancien président ont <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Post-election_lawsuits_related_to_the_2020_U.S._presidential_election">été rejetés, car sans objet, ou perdus, après des audiences sur le fond</a>. Pourtant, <a href="https://www.washingtonpost.com/dc-md-va/2024/01/02/jan-6-poll-post-trump/">près de 3 Américains sur 10 – et deux tiers des sympathisants républicains</a> – continuent de croire que l’élection <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=4318153">a bel et bien été volée à Trump</a>. Selon eux, des fraudes massives auraient été mises en œuvre dans certains États (faux électeurs, machines à voter truquées, etc.) avec la bénédiction des fonctionnaires chargés du bon déroulement des élections et de juges peu scrupuleux.</p>
<h2>L’obsession du complot</h2>
<p>Pour ses partisans, Trump est une nouvelle fois <a href="https://www.politico.com/news/2023/03/31/donald-trump-indictment-00090001">victime d’une « chasse aux sorcières »</a> (tout comme lors des <a href="https://www.france24.com/fr/am%C3%A9riques/20210113-en-direct-la-chambre-des-repr%C3%A9sentants-vote-une-proc%C3%A9dure-de-destitution-du-pr%C3%A9sident-donald-trump">deux procédures de destitution</a> auxquelles il a été confronté à la fin de son mandat), parce qu’il s’est attaqué à un système corrompu.</p>
<p>Loin de lui nuire, ses ennuis judiciaires lui ont, en fait, permis de <a href="https://time.com/6555904/donald-trump-gop-primary-2024/">récolter des millions de dollars</a> pour financer sa campagne et <a href="https://www.pbs.org/newshour/politics/trump-political-committee-has-spent-more-than-40-million-on-lawyers-fees-as-his-legal-peril-mounts">payer ses avocats</a>, et de <a href="https://projects.fivethirtyeight.com/polls/president-primary-r/2024/national/">monter dans les sondages</a> dans le cadre des primaires républicaines. Aujourd’hui, il est en passe de devenir le candidat du parti républicain à l’élection de novembre 2024.</p>
<p>Comment expliquer que plusieurs dizaines de millions d’Américains continuent d’adhérer à ce récit de l’élection volée, alors que <a href="https://www.brennancenter.org/sites/default/files/analysis/Briefing_Memo_Debunking_Voter_Fraud_Myth.pdf">toutes les études</a> en ont démontré le caractère mensonger ?</p>
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<p>Il s’agit là d’une croyance de masse de <a href="https://www.researchgate.net/publication/355068117_The_Rise_of_Presidential_Eschatology_Conspiracy_Theories_Religion_and_the_January_6th_Insurrection">type complotiste</a>, à savoir un contre-récit non vérifié qui remet en question l’explication officielle et s’appuie sur l’idée qu’il existe des acteurs puissants et malveillants qui agissent dans l’ombre. Ce qui caractérise les États-Unis n’est pas forcément que leur population croit davantage aux théories du complot que d’autres peuples (on peut le constater <a href="https://www.researchgate.net/publication/352490730_Why_are_conspiracy_theories_more_successful_in_some_countries_than_in_others_An_exploratory_study_on_Internet_users_from_22_Western_and_non-Western_countries">ici</a>, ou <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/0032321720972616">ici</a>), mais plutôt qu’une grande partie de leur classe politique et médiatique est prête à accepter, exploiter et organiser la pensée complotiste pour en tirer bénéfice.</p>
<p>En 1964 déjà, l’historien Richard Hofstadter ciblait, dans un <a href="https://harpers.org/archive/1964/11/the-paranoid-style-in-american-politics/">article devenu célèbre</a>, l’obsession de la droite américaine pour le complot communiste pendant le maccarthysme. Le christianisme a alors fusionné avec le nationalisme, devenant un élément central de l’identité américaine par opposition à celle d’un bloc communiste athée. Ce fut l’un des facteurs de l’émergence de la droite chrétienne dans les années 1970. Le récit politique d’une lutte universelle entre le Bien et le Mal devient alors un <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1460-2466.2006.00021.x">thème incontournable des discours présidentiels</a>.</p>
<h2>La suspicion au cœur de la guerre culturelle</h2>
<p>Au début des années 1990, avec la fin de la guerre froide, ce récit binaire, <a href="https://www.vox.com/policy-and-politics/2020/7/9/21291493/donald-trump-evangelical-christians-kristin-kobes-du-mez">rappelle l’historienne Kristin Kobes Du Mez</a>, a été adapté à la <a href="https://iasculture.org/research/publications/culture-wars-struggle-define-america">« guerre culturelle »</a> opposant progressistes et fondamentalistes religieux sur les questions morales et sociétales comme l’avortement ou la sexualité.</p>
<p>Il s’agit d'un récit de décadence qui identifie toute opposition politique à un « ennemi » mettant en péril les fondements moraux de la nation. Il a été alimenté par un sentiment d'impuissance et d'humiliation à la suite des attaques du 11 septembre 2001, de la crise financière de 2008 et de 20 ans de « guerre contre la terreur » sans victoire tangible. Le <a href="https://academic.oup.com/socrel/article/81/3/272/5836966">ressentiment racial</a>, lié à l’évolution démographique et illustré par le <a href="https://www.prri.org/spotlight/replacement-theory-is-not-a-fringe-theory/">récit du Grand Remplacement</a>, et la crise du Covid, ont accentué la défiance envers l’État (le <a href="https://theconversation.com/demons-of-the-deep-state-how-evangelicals-and-conspiracy-theories-combine-in-trumps-america-144898"><em>Deep State</em>, perçu comme démoniaque</a>).</p>
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<p>La politisation de la religion a atteint son paroxysme avec Donald Trump, qui a utilisé le langage religieux <a href="https://www.researchgate.net/publication/331071656_The_God_Card_Strategic_Employment_of_Religious_Language_in_US_Presidential_Discourse">davantage que n’importe quel autre président</a>. À la différence de ses prédécesseurs, il a explicitement <a href="https://www.researchgate.net/publication/344337560_Thou_Art_in_a_Deal_The_Evolution_of_Religious_Language_in_the_Public_Communications_of_Donald_Trump">associé l’américanité au christianisme</a>. Il a ainsi décliné des thèmes du nationalisme chrétien, très populaires chez les évangéliques blancs qu’il courtisait. C’est, du reste, dans ce groupe religieux, que l’adhésion au mythe de l’élection volée est la <a href="https://www.prri.org/spotlight/after-three-years-and-many-indictments-the-big-lie-that-led-to-the-january-6th-insurrection-is-still-believed-by-most-republicans/">plus forte</a>.</p>
<h2>Donald Trump : Un sauveur sans foi, ni loi</h2>
<p>L’ironie est que Trump lui-même est loin d’être religieux. Ses moqueries à l’égard d’un journaliste handicapé, ses calomnies xénophobes envers les immigrés, ses appels à la violence contre ses opposants politiques et son <a href="https://edition.cnn.com/2016/10/21/politics/trump-religion-gospel/index.html">manque patent de culture religieuse</a> semblent difficilement compatibles avec l’éthique chrétienne.</p>
<p>Il n’a pas non plus hésité à mettre <a href="https://www.youtube.com/watch?v=qIHhB1ZMV_o">sur le devant de la scène</a> des groupes extrémistes, comme les <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Proud_Boys"><em>Proud Boys</em></a>, et <a href="https://www.youtube.com/watch?v=GNI553Np__k">complotistes</a>, comme Q-anon. Ce dernier mouvement diffuse notamment un <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/QAnon">récit empreint de tropes évangéliques</a> liés à la fin du monde.</p>
<p>Le lien entre complotisme et nationalisme chrétien blanc est bien documenté (<a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/00027642211046557">ici</a>, <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=4318153">ici</a> ou <a href="https://theconversation.com/evangelical-leaders-like-billy-graham-and-jerry-falwell-sr-have-long-talked-of-conspiracies-against-gods-chosen-those-ideas-are-finding-resonance-today-132241">ici</a>), y compris au <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/2378023120977727">sujet des vaccins</a>, ou du <a href="https://journals.sagepub.com/doi/pdf/10.1177/0096340215599789">changement climatique</a>. Les évangéliques « rationalisent » tout cela en <a href="https://www.vox.com/identities/2018/3/5/16796892/trump-cyrus-christian-right-bible-cbn-evangelical-propaganda">comparant Trump à Cyrus</a>, un roi perse historique qui, dans l’Ancien Testament, ne vénérait pas le Dieu d’Israël, mais est dépeint dans Isaïe comme un instrument utilisé par Dieu pour délivrer le peuple juif.</p>
<p>Ces croyances sont le fruit d’une vision littéraliste (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Mill%C3%A9narisme">« pré-millénariste »</a>) du livre de l’Apocalypse, adoptée par une majorité d’évangéliques (<a href="https://www.pewresearch.org/short-reads/2022/12/08/about-four-in-ten-u-s-adults-believe-humanity-is-living-in-the-end-times/">63 %</a>) qui pensent que l’humanité vit actuellement « la fin des temps ». </p>
<p>Cette vision du monde s’est parfaitement incarnée dans l’attaque du Capitole du 6 janvier 2021. Le leadership républicain avait là une occasion unique de condamner Donald Trump dans un procès en destitution qui aurait mis fin à toutes ses ambitions politiques. Or, malgré l’enjeu, ni le président de la Chambre des Représentants, Kevin McCarthy, ni l’influent chef des Républicains au Sénat, Mitch McConnell, n’ont voté la destitution, tout en <a href="https://www.npr.org/sections/trump-impeachment-trial-live-updates/2021/02/13/">déclarant</a> que Trump était bien <a href="https://www.npr.org/sections/trump-impeachment-effort-live-updates/2021/01/13/956452691/gop-leader-mccarthy-trump-bears-responsibility-for-violence-wont-vote-to-impeach">responsable moralement</a>. Tout comme lors du premier procès en destitution, ou des <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/False_or_misleading_statements_by_Donald_Trump">nombreux mensonges</a> de Donald Trump, y compris pendant la <a href="https://www.vox.com/2020-presidential-conventions/2020/8/25/21400657/trump-rnc-2020-coronavirus-Covid-19-pandemic">crise du Covid</a>, ils ont ainsi sacrifié une nouvelle fois la démocratie sur l’autel de leurs ambitions.</p>
<p>Résultat : le mensonge triomphe au sein du parti et devient un test de loyauté. Une <a href="https://www.nytimes.com/interactive/2022/11/09/us/politics/election-misinformation-midterms-results.html">très large majorité des nouveaux élus au Congrès en 2022</a> mettent en doute les résultats de 2020. Kevin McCarthy a été remplacé par Mike Johnson, un <a href="https://slate.com/news-and-politics/2024/01/january-6-insurrection-mike-johnson-evangelical-christian-apostolic-reformation.html">nationaliste chrétien des plus radicaux</a> et l’un des <a href="https://www.brennancenter.org/our-work/analysis-opinion/mike-johnson-now-most-powerful-election-denier-washington">architectes de la tentative d’annulation de l’élection de 2020</a>.</p>
<h2>Un mensonge généralisé et financé par de puissants intérêts</h2>
<p>Mais ce mensonge n’est pas l’expression démocratique et populiste d’un anti-élitisme de la base. Il est alimenté par des organisations nationales puissantes et bien <a href="https://www.newyorker.com/magazine/2021/08/09/the-big-money-behind-the-big-lie">financées par certains des conservateurs les plus riches du pays</a>. Le <a href="https://www.brennancenter.org/our-work/research-reports/big-donors-working-overturn-2020-election-are-backing-election-denial"><em>Brennan Center for Justice</em></a> de la faculté de droit de l’université de New York a identifié plusieurs de ces groupes tels que l’<a href="https://www.eip-ca.com/"><em>Election Integrity Project California</em></a>, <a href="https://www.freedomworks.org/issue/election-protection/"><em>FreedomWorks</em></a>, ou le <a href="https://www.honestelections.org/"><em>Honest Elections Project</em></a>.</p>
<p>Parmi ces groupes, on peut souligner le poids de la <a href="https://fedsoc.org/commentary/publications/voter-fraud-in-our-republic"><em>Federalist Society</em></a>, qui s’attaque au <a href="https://www.motherjones.com/politics/2023/12/how-leonard-leos-dark-money-network-orchestrated-a-new-attack-on-the-voting-rights-act/"><em>Voting Rights Act</em></a> (une loi de 1965 interdisant les discriminations raciales dans l’exercice du droit de vote) et a favorisé la nomination des membres les plus conservateurs de la Cour suprême.</p>
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<p>On note aussi le rôle de la <a href="https://www.heritage.org/voterfraud"><em>Heritage Foundation</em></a>, l’une des organisations conservatrices les plus puissantes et influentes, dont l’un des buts est d’utiliser le doute et la peur de la fraude électorale comme prétexte pour supprimer des électeurs sur les listes. L’un de ses fondateurs, Paul Weyrich, <a href="https://www.youtube.com/watch?v=8GBAsFwPglw">déclarait en 1980</a> : ¡ Je ne veux pas que tout le monde vote. En fait, notre influence sur les élections augmente franchement au fur et à mesure que le nombre de votants diminue. »</p>
<p>Il faut ajouter à cela une <a href="https://time.com/6334985/trump-fox-news-lies-brian-stelter-essay/">stratégie médiatique de désinformation</a> utilisée par Trump et ses alliés, parfaitement résumée par Steve Bannon, l’ancien dirigeant de Breitbart News et ancien conseiller de Donald Trump : <a href="https://www.vox.com/policy-and-politics/2020/1/16/20991816/impeachment-trial-trump-bannon-misinformation">« Flood the zone with shit »</a> – littéralement, « inonder la zone de merde ». Il s’agit tout simplement de submerger la presse et le public avec tant de fausses informations et de désinformation que distinguer le vrai du faux devient cognitivement éprouvant, voire impossible.</p>
<p>Tout cela est bien sûr amplifié par l’extrême <a href="https://press.uchicago.edu/ucp/books/book/chicago/U/bo27527354.html">polarisation politique, enracinée dans l’identité sociale</a>, qui se manifeste <a href="https://www.theatlantic.com/ideas/archive/2018/11/why-are-americans-so-geographically-polarized/575881/">géographiquement par des préférences partisanes</a> corrélées à la densité de la population (urbain vs rural pour schématiser).</p>
<p>Impossible pour ces Républicains de croire que Joe Biden a pu être élu par une majorité : personne, autour d’eux, n’a voté démocrate. Cette polarisation physique est renforcée par une <a href="https://www.pewresearch.org/journalism/2020/01/24/u-s-media-polarization-and-the-2020-election-a-nation-divided/">polarisation médiatique</a> qui constitue une véritable bulle informationnelle. Ainsi, une majorité des Républicains ne font confiance qu’à <em>Fox News</em>, et à des journaux télévisés d’extrême droite (comme <a href="https://edition.cnn.com/2023/09/05/media/dominion-exec-oan-lawsuit-settlement/index.html"><em>One American News</em></a>) dont les animateurs sans scrupules, comme <a href="https://abcnews.go.com/Politics/fox-news-hosts-allegedly-privately-versus-air-false/story?id=97662551">Tucker Carlson</a>, ont <a href="https://www.nytimes.com/2023/02/27/business/media/fox-news-dominion-rupert-murdoch.html">cautionné les mensonges sur la fraude électorale</a>, mensonges ensuite <a href="https://www.axios.com/2022/09/19/election-misinformation-social-media-big-lie-report">amplifiés par les réseaux sociaux</a>.</p>
<h2>Bis repetita en novembre prochain ?</h2>
<p>La remise en question des résultats électoraux est une constante chez Donald Trump. Déjà, en 2012, il <a href="https://abcnews.go.com/Politics/donald-trumps-2012-election-tweetstorm-resurfaces-popular-electoral/story?id=43431536">avait qualifié la ré-élection</a> de Barack Obama de <a href="https://twitter.com/realdonaldtrump/status/266035509162303492">« véritable simulacre et parodie_ »</a>, ajoutant que « nous ne sommes pas une démocratie » et qu’il faudrait « marcher sur Washington et mettre fin à cette mascarade. »</p>
<p>Même en 2016, il avait contesté, toujours sans preuve, les résultats du caucus de l’Iowa, puis celui du vote populaire gagné par Hillary Clinton grâce, <a href="https://www.bbc.com/news/world-us-canada-38126438">selon lui</a>, à « des millions de voix illégales ». La différence entre 2020 et aujourd’hui est que Donald Trump est suivi par des millions de citoyens chauffés à blanc par une élite que le pouvoir a corrompue. Ainsi, presque un quart des citoyens (<a href="https://www.prri.org/spotlight/after-three-years-and-many-indictments-the-big-lie-that-led-to-the-january-6th-insurrection-is-still-believed-by-most-republicans/">23 %</a>) est aujourd’hui prêt à recourir à la violence pour « sauver le pays ». Quelle que soit l’issue de l’élection, on peut donc s’inquiéter de ce qui s’ensuivra, sachant que, comme à son habitude, Donald Trump <a href="https://thehill.com/homenews/campaign/3998962-trump-wont-commit-to-accepting-2024-election-results/">refuse de s’engager à reconnaître</a> le résultat de l’élection de novembre 2024 si celui-ci ne lui est pas favorable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222916/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jérôme Viala-Gaudefroy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>30 % des Américains pensent que Donald Trump a été le vrai vainqueur de la dernière élection ; Ce ratio est doublé chez les électeurs républicains.Jérôme Viala-Gaudefroy, Assistant lecturer, CY Cergy Paris UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2209012024-01-10T18:58:39Z2024-01-10T18:58:39ZVote musulman : ces voix qui pourraient manquer à Joe Biden<p>En cette année d’élection présidentielle, la plupart des électeurs américains <a href="https://www.statista.com/statistics/1362236/most-important-voter-issues-us/#">érigent les questions intérieures au premier rang de leurs priorités</a>. Mais <a href="https://theconversation.com/fr/topics/conflit-israelo-palestinien-147107">la guerre en cours au Moyen-Orient</a> pourrait être le principal sujet de préoccupation d’un groupe électoral dont l’importance est souvent sous-estimée : les <a href="https://www.pbs.org/newshour/show/arab-and-muslim-americans-on-how-u-s-support-for-israel-could-affect-their-votes-in-2024">Américains musulmans et originaires du Moyen-Orient</a>.</p>
<p>Une proportion considérable de ces Américains d’origine arabo-musulmane – qui ont <a href="https://www.npr.org/2023/11/17/1213668804/arab-americans-michigan-voters-biden-israel-hamas-palestinians">massivement voté en faveur de Joe Biden</a> lors de l’élection présidentielle de 2020 – déplorent le soutien que l’administration actuelle accorde au gouvernement de Benyamin Nétanyahou dans la guerre qui oppose Israël au Hamas. Si bien que de nombreux responsables américains musulmans ont appelé leurs communautés à <a href="https://www.reuters.com/world/us/muslim-americans-face-abandon-biden-dilemma-then-who-2023-12-02/">« abandonner Biden »</a> lors de la prochaine élection présidentielle.</p>
<p>Ces défections annoncées pourraient-elles avoir un impact significatif sur les chances de réélection du président sortant ?</p>
<p>Soulignons d’abord que le nombre d’Américains originaires du Moyen-Orient ou musulmans est assez faible. Lors du recensement de 2020 – la première année où de telles données ont été enregistrées – <a href="https://www.census.gov/library/stories/2023/09/2020-census-dhc-a-mena-population.html">3,5 millions</a> d’Américains ont déclaré être d’origine moyen-orientale ou nord-africaine, ce qui représente environ 1 % de la population totale des États-Unis, qui compte près de <a href="https://www.census.gov/quickfacts/">335 millions de citoyens</a>.</p>
<p>Toutefois, l’issue de l’élection présidentielle de 2024 pourrait dépendre des résultats obtenus dans quelques États clés où se concentrent les Américains d’origine musulmane et du Moyen-Orient, comme le Michigan, la Virginie, la Géorgie, la Pennsylvanie et l’Arizona.</p>
<p>Lors de l’élection de 2020, par exemple, Joe Biden a <a href="https://www.npr.org/2020/11/03/928191195/michigan-live-election-results-2020">remporté l’État du Michigan</a> avec 154 000 voix d’avance. Dans cet État, <a href="https://emgageusa.org/wp-content/uploads/2022/06/Emgage-ImpactReport-2020-v2.4-lr-1.pdf">plus de 200 000 électeurs inscrits</a> sont musulmans et <a href="https://www.census.gov/library/stories/2023/09/2020-census-dhc-a-mena-population.html">300 000</a> sont originaires du Moyen-Orient ou d’Afrique du Nord.</p>
<h2>Une communauté difficile à identifier statistiquement</h2>
<p>Dans <a href="https://scholar.google.com/citations?user=J4rDIpUAAAAJ&hl=en">mes travaux</a>, je me spécialise dans l’analyse statistique pour comprendre la façon dont la race, l’ethnicité et la religion influencent les résultats politiques aux États-Unis. Je sais d’expérience que tout effort visant à évaluer les attitudes et les comportements des Américains d’origine musulmane et originaires du Moyen-Orient nécessite un peu de gymnastique analytique.</p>
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<p>Tout d’abord, soulignons que depuis 1977, le gouvernement américain classe les personnes ayant des liens ancestraux avec les « peuples originels d’Europe, d’Afrique du Nord ou du Moyen-Orient » dans la catégorie des « Blancs », selon <a href="https://wonder.cdc.gov/wonder/help/populations/bridged-race/directive15.html">l’Office américain de la gestion et du budget (U.S. Office of Management and Budget)</a>).</p>
<p>Cette disposition figure dans les « Normes raciales et ethniques pour les statistiques fédérales et les rapports administratifs » (Race and Ethnic Standards for Federal Statistics and Administrative Reporting) établies par cette agence et est utilisée dans les <a href="https://www.census.gov/quickfacts/fact/note/US/RHI625222">recensements effectués aux États-Unis</a>.</p>
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<p>Les membres de cette communauté sont donc englobés dans le très vaste groupe des « Blancs », ce qui les rend indiscernables dans la quasi-totalité des données administratives et des sondages d’opinion.</p>
<p>De même, les musulmans ne sont pas pris en compte dans les données officielles, car les États-Unis <a href="https://ask.census.gov/prweb/PRServletCustom/app/ECORRAsk2/YACFBFye-rFIz_FoGtyvDRUGg1Uzu5Mn*/!STANDARD?pzuiactionzzz=CXtpbn0rTEpMcGRYOG1vS0tqTFAwaENUZWpvM1NNWEMzZ3p5aFpnWUxzVmw0TjJndno5ZkJPc24xNWYvcCtNbVjWk5Z">n’enregistrent pas</a> l’appartenance religieuse des citoyens.</p>
<p>Même les sondages d’opinion qui enregistrent les confessions religieuses n’offrent généralement que peu ou pas d’informations sur cette communauté, à la différence des groupes religieux les plus répandus – <a href="https://www.pewresearch.org/religion/religious-landscape-study/religious-tradition/catholic/party-affiliation/">catholiques</a>, <a href="https://news.gallup.com/opinion/polling-matters/324410/religious-group-voting-2020-election.aspx">protestants</a>, <a href="https://www.nbcnews.com/meet-the-press/meetthepressblog/white-evangelicals-likely-side-gop-donald-trump-rcna47593">évangéliques blancs</a> – dont les opinions sont fréquemment rapportées et font l’objet de nombreuses enquêtes.</p>
<p>Mais les musulmans sont presque toujours relégués dans la catégorie des « autres religions non chrétiennes », au même titre que d’autres petites communautés religieuses.</p>
<p>Il ne faudrait pas pour autant en conclure qu’il n’existe pas de données pertinentes sur les musulmans et les personnes originaires du Moyen-Orient aux États-Unis. Par exemple, <a href="https://emgageusa.org/">Emgage</a>, une ONG de défense des droits des musulmans, a recueilli des données sur les électeurs et le taux de participation dans une douzaine d’États lors de l’élection présidentielle de 2020.</p>
<p>En combinant les <a href="https://emgageusa.org/wp-content/uploads/2022/06/Emgage-ImpactReport-2020-v2.4-lr-1.pdf">données récoltées par Emgage</a> avec celles collectées par <a href="https://apnorc.org/projects/ap-votecast-2022/">l’Associated Press</a>, par le l’étude <a href="https://cces.gov.harvard.edu/">Cooperative Election Study</a> de Harvard et par le <a href="https://www.cair.com/">Council on American-Islamic Relations</a>, il est possible de tirer quelques conclusions générales sur ces communautés.</p>
<h2>Impact des défections sur la campagne présidentielle de 2024</h2>
<p>Le Arab American Institute, un groupe de défense des droits des Arabes américains, affirme que depuis le début du conflit entre Israël et le Hamas, le soutien des membres de ce grope au Parti démocrate s’est effondré, passant de <a href="https://www.aaiusa.org/library/arab-americans-special-poll-domestic-implications-of-the-most-recent-outbreak-of-violence-in-palestineisrael">59 % en 2020 à seulement 17 %</a>.</p>
<p>Parmi les <a href="https://emgageusa.org/press-release/emgage-releases-survey-findings-about-muslim-americans-current-2024-election-predictions/">Américains musulmans</a>, la baisse est encore plus importante, leur soutien aux Démocrates étant passé de 70 % en 2020 à environ 10 % fin 2023.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1731114222715601021"}"></div></p>
<p>Cela ne signifie pas nécessairement que ces électeurs sont prêts à se tourner vers le Parti républicain. En 2020, le président sortant Donald Trump avait réalisé un score très bas auprès des électeurs arabes et musulmans, en grande partie à cause de son fameux <a href="https://www.theguardian.com/us-news/2023/oct/17/trump-muslim-ban-gaza-refugees">décret 13 769</a>, surnommé <a href="https://www.amnesty.be/infos/actualites/article/etats-unis-decret-anti-musulmans-nouvelles-initiatives">« décret anti-musulmans »</a>.</p>
<p>Signé le 27 janvier 2017, ce décret avait interdit l’entrée sur le territoire américain d’immigrants en provenance d’Iran, d’Irak, de Libye, de Somalie, du Soudan, de Syrie et du Yémen. Bien que le décret ait résisté à de nombreuses contestations judiciaires, il a été <a href="https://www.npr.org/2021/03/06/974339586/biden-has-overturned-trumps-muslim-travel-ban-activists-say-thats-not-enough">annulé</a> par Joe Biden peu après sa prise de fonction en janvier 2021. Trump a déjà promis, lors de ses déplacements de campagne, de <a href="https://www.reuters.com/world/us/trump-pledges-expel-immigrants-who-support-hamas-ban-muslims-us-2023-10-16/">rétablir ce décret controversé</a>.</p>
<p>Dans ce contexte, il n’est pas exclu que les votes des musulmans et des citoyens originaires du Moyen-Orient en faveur des candidats républicain et démocrate à la présidence en 2024 chutent de 50 % par rapport à 2020, ces électeurs décidant de rester chez eux ou de voter pour un candidat tiers.</p>
<p>Dans le Michigan, par exemple, cela pourrait signifier que <a href="https://docs.google.com/spreadsheets/d/1Eky2iFW98vrdC4Oe53ssjEesvkNZh-oYDbE02NJmN-c/edit?usp=sharing">Biden perdrait environ 55 000 voix</a>, soit environ un tiers de la marge de victoire de 154 000 voix qu’il avait obtenue face à Trump en 2020.</p>
<p>Le Michigan n’est pas le seul État où les voix manquantes dans ces communautés pourraient compromettre les chances de victoire de Joe Biden.</p>
<p>Une baisse du taux de participation des Américains musulmans et issus du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord suffirait à elle seule à effacer la <a href="https://www.npr.org/2020/12/02/940689086/narrow-wins-in-these-key-states-powered-biden-to-the-presidency">marge de victoire de Biden en 2020 en Arizona</a> – 10 457 voix – et peu-être en Géorgie, où Biden a gagné par 12 670 voix.</p>
<p>Bien entendu, les Arabo-Américains ne sont pas les seuls électeurs susceptibles de pénaliser Joe Biden dans les urnes en novembre prochain pour sa <a href="https://www.politico.eu/article/joe-biden-united-states-foreign-policy-ukraine-israel-hamas-war-taiwan/">politique étrangère</a>. Mais même si c’était le cas, les chiffres montrent qu’une élection présidentielle peut basculer du fait de l’action – ou de l’inaction – de ce bloc électoral peu connu mais potentiellement crucial.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220901/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Youssef Chouhoud ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les Américains musulmans ont voté à une écrasante majorité pour Joe Biden en 2020. Ce ne sera très probablement pas le cas en novembre prochain.Youssef Chouhoud, Assistant Professor, Christopher Newport UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2033722023-04-06T13:46:06Z2023-04-06T13:46:06ZOubliez Stormy Daniels et Michael Cohen – ce sont les comptables qui auront la tête de Donald Trump<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/519689/original/file-20230405-16-35dlbz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1920%2C1281&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’ex-président Donald Trump avec ses avocats dans un tribunal de Manhattan. Premier président américain inculpé au criminel, il est accusé d’avoir falsifié des registres d’entreprise dans le cadre d’une enquête sur des pots-de-vin. </span> <span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Seth Wenig)</span></span></figcaption></figure><p>Donald Trump est formellement <a href="https://www.ledevoir.com/depeches/787950/donald-trump-s-est-rendu-aux-autorites-a-new-york-pour-sa-mise-en-accusation">inculpé de 34 chefs d’accusation pour falsification de registres d’entreprises</a> à la suite d’une enquête sur des paiements occultes à trois personnes, dont une actrice porno.</p>
<p>L’ancien président américain a <a href="https://ici.radio-canada.ca/info/en-direct/1009620/donald-trump-accusation-inculpation-new-york">plaidé non coupable</a>.</p>
<p>Les <a href="https://thehill.com/homenews/3933605-read-trump-indictment-and-statement-of-facts/">procureurs allèguent</a> que Donald Trump « a falsifié à plusieurs reprises et frauduleusement des registres d’entreprise de New York pour dissimuler une conduite criminelle qui contenait des informations préjudiciables aux électeurs lors de l’élection présidentielle de 2016 ».</p>
<p>Il s’agit notamment d’informations sur les paiements effectués à la star de films pornos Stephanie Clifford alias Stormy Daniels, à la mannequin de Playboy Karen McDougal et à un ex-portier affirmant que son ancien patron de la Trump Tower avait eu un enfant hors mariage avec une femme de ménage.</p>
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<img alt="L’arrière de la tête d’un homme aux cheveux blonds est vue à l’entrée d’un tribunal" src="https://images.theconversation.com/files/519381/original/file-20230404-20-tpbne3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/519381/original/file-20230404-20-tpbne3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/519381/original/file-20230404-20-tpbne3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/519381/original/file-20230404-20-tpbne3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/519381/original/file-20230404-20-tpbne3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/519381/original/file-20230404-20-tpbne3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/519381/original/file-20230404-20-tpbne3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Donald Trump arrivant au bureau du procureur de Manhattan.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/John Minchillo)</span></span>
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<p>Donald Trump est par ailleurs menacé pour d’autres affaires — pour avoir prétendument caché des documents gouvernementaux classifiés dans sa propriété en Floride, pour avoir tenté de manipuler le vote en Géorgie après l’élection présidentielle de 2020 et pour avoir encouragé l’insurrection du 6 janvier 2021.</p>
<p>Mais maintenant que des accusations formelles ont été déposées à New York, les procureurs suivent la piste comptable du paiement effectué à Stormy Daniels par l’homme de confiance de l’ex-président, Michael Cohen, l’ex-avocat déjà condamné pour crime et témoin clé de l’accusation.</p>
<p>Depuis 2016, ce paiement — effectué juste avant l’élection présidentielle — soulève des questions juridiques et éthiques. Y a-t-il eu violation des lois fédérales sur le financement des campagnes électorales, soit parce qu’il n’a pas été divulgué en tant que contribution à la campagne, soit parce que des fonds de la campagne auraient été utilisés pour régler une affaire privée ?</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="Un homme en costume sombre marche le soir dans une rue" src="https://images.theconversation.com/files/519136/original/file-20230403-24-5kqu35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/519136/original/file-20230403-24-5kqu35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/519136/original/file-20230403-24-5kqu35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/519136/original/file-20230403-24-5kqu35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/519136/original/file-20230403-24-5kqu35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/519136/original/file-20230403-24-5kqu35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/519136/original/file-20230403-24-5kqu35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Michael Cohen quittant le bureau du procureur de New York après son témoignage devant un grand jury en mars 2023. (AP Photo/Yuki Iwamura).</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Yuki Iwamura)</span></span>
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<p>En 2018, Michael Cohen <a href="https://www.justice.gov/usao-sdny/pr/michael-cohen-pleads-guilty-manhattan-federal-court-eight-counts-including-criminal-tax">a finalement plaidé coupable sur huit chefs d’accusation</a> pour lesquelles il a <a href="https://www.lapresse.ca/international/etats-unis/201812/12/01-5207769-lex-avocat-de-trump-michael-cohen-condamne-a-trois-ans-de-prison.php">écopé de trois ans de prison</a>.</p>
<p>Mais compte tenu de son dossier criminel, sa parole ne constitue pas le témoignage le plus solide. Les avocats de Donald Trump se feront un malin plaisir à attaquer la crédibilité d’un parjure, radié du barreau et qui sort de prison.</p>
<p>Cela signifie-t-il que Trump n’a rien à craindre ? Pas vraiment. Parce que cette fois, au vu de la nature des charges qui pèsent sur lui, il devra désormais composer avec des témoins autrement plus redoutables :les <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/01900692.2021.2009855">comptables</a>.</p>
<h2>La piste de l’argent</h2>
<p>Dans les années 1920, <a href="https://www.thedailybeast.com/the-bean-counter-who-put-al-capone-in-the-slammer">c’est un comptable tenace qui a provoqué la chute du gangster Al Capone</a>. Et dans les années 1970, c’est aussi en <a href="https://www.lefigaro.fr/elections-americaines-2008/2008/06/13/01017-20080613ARTFIG00331-suivez-l-argent.php">« suivant l’argent »</a> que les journalistes ont révélé le scandale du Watergate.</p>
<p>Comment les comptables peuvent-ils <a href="https://www.thenation.com/article/archive/could-an-army-of-accountants-bring-down-trump/">décider du destin de Donald Trump</a> ?</p>
<p>D’abord, grâce à un fait démontrable : l’ancien président est réputé ne pas payer ses factures. En 2016, <em>USA Today</em> rapportait que Donald Trump <a href="https://www.usatoday.com/story/news/politics/elections/2016/06/09/donald-trump-unpaid-bills-republican-president-laswuits/85297274/">« a été impliqué dans plus de 3 500 procès » concernant des allégations de factures impayées</a> sur trois décennies.</p>
<p>Selon le quotidien, ces accusations impressionnent par leur variété : une entreprise verrière, un marchand de tapis, des agents immobiliers, 48 serveurs, des barmans à la dizaine, des petits entrepreneurs et du personnel de ses hôtels.</p>
<p>Plus grave : Donald Trump aurait escroqué « plusieurs cabinets d’avocats l’ayant représenté dans ses procès », selon <em>USA Today</em>.</p>
<p>En outre, le journal indique que toutes ces allégations et ces affaires judiciaires suggèrent que « soit ses entreprises ont de mauvais antécédents en matière d’embauche de travailleurs et d’évaluation des entrepreneurs, soit elles ne respectent pas leurs contrats ».</p>
<p>Aujourd’hui encore, de nombreuses factures demeurent impayées — et continuent de s’accumuler.</p>
<p>Par exemple, <a href="https://www.ctvnews.ca/world/cities-angry-with-trump-over-millions-in-unpaid-rally-expenses-1.5269495">certaines villes américaines — dont la ville de Wildwood, au New Jersey — affirment que Donald Trump leur doit toujours près de 2 millions de dollars pour des rassemblements remontant à 2016</a>. Selon <a href="https://www.foxbusiness.com/features/trump-social-media-app-facing-financial-fallout"><em>Fox Business</em></a>, sa plate-forme de médias sociaux, Truth Social, aurait également <a href="https://www.salon.com/2022/08/26/trump-never-pays-his-bills-truth-social-reportedly-stiffs-contractor-amid-financial-disarray/">arnaqué un entrepreneur</a>, ce qui constitue un nouveau signe du désarroi financier de ce réseau censé rivaliser avec Twitter.</p>
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<img alt="Un homme corpulent aux bras levés s’exprime dans un micro sur un podium portant le sceau présidentiel" src="https://images.theconversation.com/files/519135/original/file-20230403-1441-zmvvtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/519135/original/file-20230403-1441-zmvvtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/519135/original/file-20230403-1441-zmvvtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/519135/original/file-20230403-1441-zmvvtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/519135/original/file-20230403-1441-zmvvtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/519135/original/file-20230403-1441-zmvvtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/519135/original/file-20230403-1441-zmvvtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Donald Trump en campagne dans le New Jersey en janvier 2020. La ville de Wildwood attend toujours le remboursement des dizaines de milliers de dollars en heures supplémentaires pour les services de police et de sécurité.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Evan Vucci)</span></span>
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<h2>Le chèque à Michael Cohen</h2>
<p>Lors du procès de Donald Trump à New York, les comptables n’auront qu’à poser la question qui tue. Étant donné que l’accusé refuse constamment d’acquitter ses factures et qu’il arnaque systématiquement ceux avec qui il fait affaire, comment se fait-il qu’il ait immédiatement envoyé un chèque de 130 000 dollars à Cohen sans même demander une facture détaillée ?</p>
<p>Dans ses premiers commentaires publics sur le scandale en 2018, Trump avait <a href="https://www.cbsnews.com/news/trump-says-he-was-unaware-of-stormy-daniels-payment/">nié avoir eu connaissance du paiement à Stormy Daniels</a>. Peu de temps après, il changeait son fusil d’épaule en admettant en avoir été informé, invoquant un accord de confidentialité pour mettre fin aux « accusations mensongères » visant à « l’extorquer ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"991992302267785216"}"></div></p>
<p>Ce qui importe ici, ce n’est ni ces louvoiements, ni même le témoignage de Michael Cohen sur l’objet du versement de 130 000 dollars. Ce qui sera déterminant pour l’affaire, c’est le fait que Donald Trump n’ait demandé ni preuve ni justificatif pour ce versement.</p>
<p>Pour accumuler 130 000 dollars d’honoraires facturables, Michael Cohen aurait dû travailler des centaines d’heures. Il est difficile de croire qu’un grippe-sou aussi notoire que Donald Trump n’ait posé aucune question, ni exigé aucun détail, ni ventilation et ni justificatif concernant une facture d’honoraire de 130 000 dollars et d’autres paiements onéreux.</p>
<p>Au cours des procédures judiciaires à venir, les comptables soulèveront cette question potentiellement accablante : pourquoi Donald Trump a-t-il acquitté une facture de 130 000 dollars si rapidement pour être ensuite la déclarée, dans les termes les plus vagues possibles, comme de simples honoraires d’avocat ?</p>
<p>Oubliez Stormy Daniels. Oubliez Michael Cohen. Voilà la question à laquelle Donald Trump ne veut pas répondre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/203372/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jerry Paul Sheppard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les comptables ont provoqué la chute d’Al Capone et le scandale du Watergate a été révélé lorsque les journalistes ont « suivi l’argent ». Vont-ils aussi faire tomber Donald Trump ?Jerry Paul Sheppard, Associate Professor of Business Administration, Simon Fraser UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1984332023-02-26T17:08:08Z2023-02-26T17:08:08ZLa Cour suprême américaine à l’assaut du droit de vote<p>Aux États-Unis, voilà des années que le mouvement conservateur a élaboré une <a href="https://press.princeton.edu/books/paperback/9780691146256/the-rise-of-the-conservative-legal-movement">stratégie de long terme</a> visant à placer à tous les niveaux du système judiciaire américain, et spécialement à la Cour suprême, des juges appartenant à son camp.</p>
<p>Ce projet a particulièrement progressé <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/27/presidentielle-americaine-a-une-semaine-de-l-election-trump-savoure-sa-victoire-a-la-cour-supreme_6057469_3210.html">lors du mandat de Donald Trump</a>. Trois des neuf juges nommés à vie à la Cour suprême ont rejoint cette instance au cours de cette période : Neil Gorsuch, Brett Kavanaugh et Amy Coney Barrett. Aujourd’hui, sur les neuf juges, six, dont le président de la Cour, John Roberts, <a href="https://www.7sur7.be/monde/qui-sont-les-juges-conservateurs-de-la-cour-supreme-quelle-est-leur-vision%7Eafdaea31/">sont des conservateurs</a>.</p>
<p>L’un des premiers objectifs de la très influente <a href="https://fedsoc.org/"><em>Federalist Society</em></a>, ce lobby qui <a href="https://www.nytimes.com/2020/05/20/opinion/trump-judges-federalist-society.html">murmure aux oreilles des présidents républicains</a> des noms de juges activistes et conservateurs, était de revenir sur le droit à l’avortement. Ce qui a été accompli avec <a href="https://journals.openedition.org/revdh/14777">l’arrêt <em>Dobbs</em> en 2022</a>.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/fin-du-droit-a-lavortement-aux-etats-unis-moins-de-democratie-plus-de-religion-184914">Fin du droit à l’avortement aux États-Unis : moins de démocratie, plus de religion</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Le second objectif est assurément de changer les règles électorales, afin d’accroître les chances des candidats républicains de l’emporter, aussi bien lors des scrutins locaux qu’aux élections fédérales, présidentielle comprise. Le démantèlement jurisprudentiel de la <a href="https://www.archives.gov/milestone-documents/voting-rights-act">loi sur le vote de 1965 (<em>Voting Rights Act</em>)</a>, accomplissement majeur du mouvement pour les droits civiques, <a href="https://journals.openedition.org/lisa/8938">déjà en cours depuis longtemps</a>, risque encore de s’accélérer dans les prochaines années, notamment en 2023.</p>
<h2>Une attaque au long cours</h2>
<p>Arrêt après arrêt, la Cour suprême favorise les intérêts du Parti républicain en se prononçant sur le droit électoral. On peut citer l’arrêt <a href="https://supreme.justia.com/cases/federal/us/549/1/"><em>Purcell c. Gonzalez</em></a> de 2006, par lequel la Cour, déjà dominée par les conservateurs à l’époque, déclare que les changements des règles électorales ne peuvent être opérés trop proche de la tenue d’élections. Ce qui, en principe, tombe sous le sens. Mais la Cour s’est bien gardée de définir un calendrier « raisonnable ». Par conséquent, c’est à la Cour qu’il revient de décider quel délai est acceptable, ce qui lui permet de « jouer la montre » quand les intérêts républicains sont menacés. Comme l’ont illustré les arrêts <a href="https://www.justice.gov/crt/case-document/veasey-v-perry-court-appeals-decision"><em>Veasy c. Perry</em></a> en 2015 ou <a href="https://supreme.justia.com/cases/federal/us/589/19a1016/"><em>RNC c. DNC</em></a> en 2020, le principe <em>Purcell</em> est neutre en théorie mais est toujours utilisé pour desservir les Démocrates.</p>
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<p>Par l’arrêt <a href="https://www.law.cornell.edu/supct/html/07-21.ZS.html"><em>Crawford c. Marion County Election Board</em></a> de 2008, adopté au nom de la lutte contre la fraude électorale (un problème dont l’existence réelle n’est pas avérée), la Cour autorise les États à demander des pièces d’identité pour autoriser les citoyens à voter. Or les électeurs les plus pauvres ne possèdent souvent pas de carte d’identité et se contentent, pour voter, de présenter par exemple leur permis de conduire. Pour se procurer une carte d’identité, ils doivent effectuer une démarche administrative et/ou financière qui peut avoir pour effet de décourager certaines franges de l’électorat, notamment les plus démunies, de voter. L’impact de ces mesures sur l’abstention est difficile à mesurer. Mais le message est clair : les <a href="https://www.cairn.info/revue-politique-americaine-2017-1-page-23.htm">Républicains cherchent à rendre la procédure de vote plus contraignante</a>.</p>
<p>L’attaque la plus frontale à ce jour est assurément l’arrêt <a href="https://www.law.cornell.edu/supct/cert/12-96"><em>Shelby County c. Holder</em></a> de 2013 qui rend la Section 5 de la loi de 1965 inopérante. <a href="https://journals.openedition.org/revdh/15649">La Section 5 avait un effet préventif</a> car elle empêchait la mise en place de procédures électorales discriminatoires. Sans elle, il ne reste plus que la Section 2, qui permet de porter plainte lorsque l’on est victime de mesures discriminatoires lors du vote, mais qui s’applique a posteriori et est donc plus coûteuse et plus longue. Le Congrès étant incapable de répondre à la Cour en passant une loi rétablissant la Section 5, la loi sur le droit de vote se retrouve hémiplégique.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-reformes-electorales-menacent-elles-la-democratie-des-etats-unis-159077">Les réformes électorales menacent-elles la démocratie des États-Unis ?</a>
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<p>Arrêt après arrêt, la Cour facilite le redécoupage électoral à visée partisane, une pratique <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2021/12/RECOQUILLON/64164">qui peut réduire l’impact du vote des minorités ethno-raciales</a>, lesquelles ont très majoritairement tendance à voter pour les Démocrates. Dans un pays où <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-monde-est-a-nous/elections-americaines-le-vote-afro-americain-profite-aussi-a-donald-trump_4151475.html">entre 80 et 90 % des Africains-Américains votent Démocrate</a>, il est aisé de comprendre comment l’affiliation ethno-raciale devient une approximation de l’affiliation partisane. Les Républicains peuvent donc réduire l’impact du vote démocrate en visant les Africains-Américains.</p>
<p>Tous les dix ans, suite au recensement, les États redécoupent leurs circonscriptions électorales. Dans la plupart des cas, ce sont les législatures des États qui sont chargées de cette tâche. Pour éviter un conflit d’intérêts, certains États font appel à des commissions plus ou moins indépendantes. Les deux grands partis cherchent toujours à maximiser leur avantage partisan. Mais le découpage électoral fut utilisé, avant les années 1960, pour rendre le droit de vote des Africains-Americains inopérant en le noyant dans des circonscriptions à majorité blanche. En effet, dans un scrutin majoritaire, si les « Blancs » votent pour les « Blancs » et les « Noirs » votent pour les « Noirs », alors le vote de ces derniers, moins nombreux, est dit <a href="https://www.cairn.info/revue-herodote-2013-2-page-129.html">« dilué »</a>. Ils votent mais n’ont pas d’impact sur l’issu du scrutin. La polarisation du vote est donc double aux États-Unis : elle est fonction de l’affiliation partisane et l’affiliation ethno-raciale. En refusant de réguler le charcutage à visée partisane, les cours laissent la porte ouverte à certaines formes de dilution du vote des minorités ethno-raciales.</p>
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<p>En 2018, <a href="https://www.brennancenter.org/our-work/court-cases/abbott-v-perez"><em>Abbott c. Perez</em></a> rend la dilution du vote minoritaire plus difficile à prouver.</p>
<p>En 2019, dans l’arrêt <a href="https://www.commoncause.org/redistricting-litigation/common-cause-v-rucho/"><em>Rucho c. Common Cause</em></a>, la Cour refuse encore une fois de statuer sur le charcutage électoral à visée partisane sous prétexte que ce serait une question de nature politique et non juridique.</p>
<p>Enfin, l’arrêt <a href="https://www.supremecourt.gov/opinions/20pdf/19-1257_g204.pdf"><em>Brnovich c. DNC</em></a> de 2021, sous couvert là encore de lutte contre la fraude électorale, continue de vider la Section 2 de sa substance juridique et politique.</p>
<h2>Les décisions de la Cour attendues pour 2023</h2>
<p>2023 ne sera pas une exception. Le premier arrêt sur lequel la Cour va statuer, <a href="https://www.supremecourt.gov/search.aspx?filename=/docket/docketfiles/html/public/21-1086.html"><em>Merrill c. Milligan</em></a>, concerne le redécoupage électoral à visée ethno-raciale en Louisiane et dans l’Alabama. Les Républicains expliquent qu’il s’agit d’un redécoupage partisan. Les opposants affirment qu’il s’agit d’une forme de dilution du vote africain-américain.</p>
<p>La Cour devrait à cette occasion affaiblir encore un peu plus la Section 2 de la loi de 1965 en validant un redécoupage dans l’Alabama qui crée une seule circonscription (sur 7) dans laquelle les Africains-Américains représentent une majorité de la population, alors qu’il est possible d’en créer deux. Par conséquent, un seul Africain-Américain (et donc un seul Démocrate) pourra être élu à la Chambre des Représentants. En effet, concentrer dans une seule circonscription le vote africain-américain (donc largement Démocrate) permet d’accroître la proportion du vote conservateur dans les circonscriptions adjacentes.</p>
<p>Mais la révolution jurisprudentielle attendue par le mouvement conservateur pourrait surtout venir de l’arrêt <a href="https://www.supremecourt.gov/docket/docketfiles/html/public/21-1271.html"><em>Moore c. Harper</em></a>, qui porte sur le redécoupage des circonscriptions électorales de la Caroline du Nord.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1542752759967105024"}"></div></p>
<p>La Cour suprême de cet État a rejeté en 2022 la nouvelle carte électorale établie par la législature de l’État, qui donne un avantage disproportionné au Parti républicain. En effet, la constitution de l’État interdit le charcutage électoral à visée partisane. Les avocats républicains contestent ce rejet en avançant une théorie pour le moins discutable : celle de l’indépendance des législatures d’État, c’est-à-dire des deux Chambres du Parlement dont dispose chaque État des États-Unis.</p>
<p>D’après eux, l’expression « législature » contenue dans la Constitution des États-Unis, <a href="https://mjp.univ-perp.fr/constit/us1787.htm">dans sa clause sur les élections</a>, est à prendre littéralement (les deux Chambres) et non au sens large comme cela se fait depuis plusieurs siècles (à savoir le processus législatif dans son ensemble). C’est-à-dire que les deux Chambres législatives de chaque État pourraient passer les lois électorales qu’elles souhaitent, sans que le gouverneur ou les cours de l’État ne puissent les remettre en cause. En théorie, donc, les Chambres de chaque État pourraient enfreindre la Constitution de leur propre État sans freins ni contrepoids. Trois des juges conservateurs de la Cour suprême – Samuel Alito, Clarence Thomas et Neil Gorsuch – ont indiqué précédemment qu’ils étaient prêts à considérer cette théorie. Et Kavanaugh semble sensible à ces arguments.</p>
<h2>La Cour, nouveau gouvernement des États-Unis ?</h2>
<p>La Cour suprême sait pertinemment que si elle devait ouvrir la boite de Pandore de la « théorie de la législature indépendante », elle mettrait à mal tout le système électoral du pays.</p>
<p>Premièrement, les cours des États et les gouverneurs n’auraient plus prise sur les lois. Deuxièmement, que deviendraient les lois électorales passées par les États en ce qui concerne la tenue des élections fédérales ? Créerait-on un système à deux vitesses entre les États et l’échelon fédéral ? Troisièmement, que ferait-on des commissions indépendantes pour le redécoupage électoral dans les 9 États qui y ont recours ? Si les juges sont prêts à envisager une telle situation de chaos électoral, c’est parce que cette théorie permettrait aux législatures d’État de nommer les grands électeurs qui élisent le président des États-Unis. Ces derniers sont pour l’instant choisis par le vote des électeurs de chaque État. Ils pourraient désormais être désignés par les législatures d’État comme c’était le cas à l’origine du pays. De plus, les grands électeurs ne sont pas tous contraints de voter comme indiqué par le vote populaire (on les appelle en anglais les « faithless electors »).</p>
<p>Or, les Républicains, grâce notamment au redécoupage électoral, contrôlent un grand nombre de législatures. L’arrêt <a href="https://www.supremecourt.gov/docket/docketfiles/html/public/21-1271.html">Moore v. Harper</a> pourrait donc assurer aux Républicains de décider du résultat de l’élection présidentielle. Et la réforme de l’Electoral Count Act votée en 2022 ne répond pas à tous les problèmes posés ce système extrêmement décentralisé dont les Républicains entendent profiter.</p>
<p>La Cour suprême décidera peut-être de ne pas statuer sur le fond dans l’arrêt <em>Moore</em>. <em>Moore</em> ne sera peut-être pas l’équivalent pour le droit électoral de ce que l’arrêt <em>Dobbs</em> a été pour le droit à l’avortement. Toutefois, l’évolution de la jurisprudence en matière électorale au cours des 20 dernières années n’est allée que dans une seule direction, celle des restrictions électorales favorisant le Parti républicain. Et la nouvelle majorité conservatrice a démontré qu’elle n’avait pas peur de politiser la Cour ou de perdre de sa légitimité en poussant toujours plus loin « le gouvernement des juges »…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198433/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Olivier Richomme ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dominée par les conservateurs, la Cour suprême emploie de plus en plus ses prérogatives pour favoriser le Parti républicain lors des élections, locales comme nationales.Olivier Richomme, Professeur d'histoire politique des États-Unis, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1965242023-01-01T16:24:49Z2023-01-01T16:24:49ZÉtats-Unis : la démocratie en sursis ?<p>L’année 2022 a été marquée par des résultats d’élections de mi-mandat historiques aux États-Unis. La <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/12/07/etats-unis-le-senateur-democrate-de-georgie-reelu-une-victoire-pour-joe-biden_6153269_3210.html">victoire du Démocrate Raphael Warnock</a> à l’élection sénatoriale de Géorgie a clos un cycle électoral dont l’un des enjeux principaux était <a href="https://theconversation.com/etats-unis-la-survie-de-la-democratie-est-elle-en-jeu-dans-les-elections-de-mi-mandat-191751">l’avenir de la démocratie</a>. Il s’agissait, en effet, du premier scrutin après l’insurrection du 6 janvier 2021, <a href="https://www.lalibre.be/international/amerique/2022/06/10/assaut-de-capitole-donald-trump-a-manigance-un-veritable-coup-detat-YDHHF6KS6ZA4DFRKWMPWENDWGA/">fomentée par un président</a> que les élus de son parti ont <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/12/07/etats-unis-le-senateur-democrate-de-georgie-reelu-une-victoire-pour-joe-biden_6153269_3210.html">refusé de désavouer</a>.</p>
<p>Pour la première fois également, de <a href="https://www.washingtonpost.com/nation/2022/10/06/elections-deniers-midterm-elections-2022/">nombreux candidats</a> de ce même Parti républicain faisaient campagne en relayant la <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/06/03/avec-trump-le-grand-mensonge-est-devenu-la-verite-du-parti-republicain_6082621_3232.html">théorie du Grand Mensonge</a> selon laquelle l’élection présidentielle de 2020 aurait été volée à Donald Trump.</p>
<p>C’était aussi la première fois que les électeurs pouvaient s’exprimer après la décision controversée et impopulaire d’une Cour suprême très politisée qui a <a href="https://www.actu-juridique.fr/administratif/libertes-publiques-ddh/la-fin-de-roe-v-wade/">mis fin au droit constitutionnel à l’avortement</a>.</p>
<p>Enfin, jamais un ancien président des États-Unis, largement <a href="https://projects.fivethirtyeight.com/polls/favorability/donald-trump/">impopulaire</a>, n’avait tenté de transformer les élections qui suivent sa défaite en un « match retour » contre un président au pouvoir presque aussi <a href="https://projects.fivethirtyeight.com/biden-approval-rating/">impopulaire</a> que lui, dont il nie la légitimité.</p>
<h2>Des midterms décevantes pour Donald Trump</h2>
<p>Les résultats montrent que si les <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/american-political-science-review/article/what-happens-when-extremists-win-primaries/ECAC69648AE0DF91D93103E18342B9D2">primaires se sont jouées aux extrêmes</a>, les élections générales, elles, se sont, comme souvent, décidées au centre.</p>
<p>Dans les États dits « pivots », où les Républicains avaient une chance de gagner, les candidats républicains « négateurs » (<em>deniers</em> en anglais), c’est-à-dire ceux qui remettaient en cause le résultat de la présidentielle de 2020, <a href="https://www.americanprogress.org/article/election-deniers-lost-key-races-for-federal-and-state-offices-in-the-2022-midterm-elections/">ont ainsi perdu les élections à des postes clés</a> (gouverneurs ou secrétaires d’État) comme en Arizona ou au Nevada. À l’image d’Herschel Walker en Géorgie, ils ont <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/2022/11/09/election-deniers-midterms-democracy/">presque tous concédé leur défaite</a>, alors même que la remise en cause du processus électoral était au cœur de leur campagne. Et il n’y a eu ni violence, ni insurrection, comme <a href="https://www.npr.org/2022/11/02/1132822805/election-violence-concerns-voting-threats">on pouvait le craindre</a>. Le <a href="https://19thnews.org/2022/11/abortion-rights-ballot-initiatives-election-2022/">droit à l’avortement a également gagné</a>, là où la question était posée aux électeurs, y compris dans des États conservateurs, comme le Kentucky ou le Montana, venant confirmer le résultat enregistré au <a href="https://www.france24.com/fr/am%C3%A9riques/20220803-%C3%A9tats-unis-le-kansas-maintient-la-garantie-constitutionnelle-sur-le-droit-%C3%A0-l-avortement">Kansas cet été</a>.</p>
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<p>À la Chambre des Représentants, les Républicains ont certes gagné la majorité des sièges (et du <a href="https://www.cookpolitical.com/charts/house-charts/national-house-vote-tracker/2022">vote populaire</a>), mais avec une marge historiquement faible. Les Démocrates n’ont perdu <a href="https://www.270towin.com/2022-election-results-live/house/">que 9 sièges</a>, alors que <a href="https://www.presidency.ucsb.edu/analyses/the-2022-midterm-elections-what-the-historical-data-suggest">depuis 1934, le parti du président au pouvoir perd, en moyenne, une trentaine de sièges</a> aux élections de mi-mandat, et jamais moins d’une dizaine, surtout avec une cote de popularité équivalente à celle de Joe Biden (entre 40 et 45 %). La seule anomalie était 2002, mais le parti de George W. Bush avait alors bénéficié du ralliement du pays au président, à la suite des attentats du 11 septembre 2001.</p>
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<p>Au Sénat, les Démocrates ont, avec les indépendants, renforcé leur contrôle, en gagnant un siège après avoir fait <a href="https://ballotpedia.org/United_States_Senate_election_in_Pennsylvania,_2022">basculer la Pennsylvanie</a>. Cette victoire, tout comme celle de Warnock, est un nouveau coup porté à l’ancien président Donald Trump dont les candidats qu’il soutenait ont <a href="https://www.nytimes.com/2022/12/06/us/politics/trump-candidate-endorsement-georgia.html">presque tous perdu</a> dans les États où il y avait des enjeux.</p>
<h2>Une décision majeure de la Cour suprême à venir</h2>
<p>Il convient toutefois de nuancer. Les résultats ont été souvent serrés, même là où il y avait des candidats extrémistes comme <a href="https://www.nytimes.com/interactive/2022/12/06/us/elections/results-georgia-us-senate-runoff.html">Walker en Géorgie</a>, ou <a href="https://www.nbcnews.com/politics/2022-elections/arizona-governor-results">Kari Lake en Arizona</a>. De plus, les élections locales, elles, ont donné un <a href="https://apnews.com/article/2022-midterm-elections-donald-trump-race-and-ethnicity-only-on-ap-congress-a15f6d6ebd6f629c6e92531a0c7172e6">patchwork de résultats divers</a>, parfois très favorables aux Républicains : au final, une majorité de leurs candidats extrémistes et négateurs ont été élus.</p>
<p>Les Républicains ont <a href="https://www.cookpolitical.com/analysis/national/national-politics/gop-won-votes-not-seats">amélioré leurs scores</a> principalement dans les États qui leur sont déjà acquis, mais ils ont subi des défaites majeures dans ceux où les sièges étaient potentiellement en jeu. Or, aux États-Unis, les élections se décident dans un petit nombre d’États pivots qui représentent <a href="https://ballotpedia.org/U.S._House_battlegrounds,_2022">moins de 10 % des sièges</a> à la Chambre. Pour les quelque 90 % autres, les électeurs n’ont qu’une très faible chance d’élire un représentant du parti adverse.</p>
<p>Ce scrutin, comme les précédents, pose plus généralement la question de la représentativité démocratique du système électoral des États-Unis. Le choix restreint pour les électeurs est dû à plusieurs facteurs, comme la <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10708-018-9955-3">polarisation géographique</a>, mais c’est aussi le résultat du redécoupage électoral partisan (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gerrymandering"><em>gerrymandering</em></a> en anglais), pratiqué par les deux partis dans les États qu’ils contrôlent, dont une <a href="https://ballotpedia.org/Partisan_composition_of_state_legislatures">majorité est aux mains des Républicains</a>. Seules des <a href="https://ballotpedia.org/Redistricting_commissions">commissions bipartisanes</a>, ou les <a href="https://www.brennancenter.org/issues/gerrymandering-fair-representation/redistricting/redistricting-courts">Cours suprêmes des États</a>, peuvent, comme c’est parfois le cas, garantir ou imposer un redécoupage des circonscriptions juste et représentatif.</p>
<p>Or la Cour suprême fédérale, elle-même très <a href="https://theconversation.com/politisation-de-la-cour-supreme-la-democratie-americaine-en-peril-173281">politisée</a>, devra décider (<a href="https://www.oyez.org/cases/2022/21-1271"><em>Moore v. Harper</em></a>) si les Chambres des États sont seules habilitées par la Constitution à réglementer les élections fédérales et sans contrôle des tribunaux des États. Ce sont les procédures de contrôle et de contrepoids au pouvoir de la branche législative des États qui sont en jeu, ainsi que la possibilité légale des législateurs des États d’adopter des lois restrictives de votes, sans aucun contrôle ni remise en cause de la part des tribunaux des États (ou même du veto du gouverneur). Selon un <a href="https://apnews.com/article/us-supreme-court-north-carolina-legislature-50f99679939b5d69d321858066a94639">ancien juge fédéral conservateur éminent</a>, il s’agira de la décision « la plus importante pour la démocratie américaine de toute l’histoire du pays ».</p>
<h2>Le trumpisme, même sans Trump ?</h2>
<p>Par ailleurs, la démocratie pourrait à nouveau être un enjeu central des élections de 2024. Même si Donald Trump sort affaibli de ces dernières élections, il a déjà <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/11/16/etats-unis-donald-trump-annonce-sa-candidature-a-la-presidentielle-de-2024_6150035_3210.html">annoncé sa candidature</a> à la prochaine présidentielle, <a href="https://edition.cnn.com/2022/12/05/politics/donald-trump-constitution-analysis/index.html">se radicalisant</a> toujours plus. Ce ne sont pas ses attaques contre la démocratie qui entament le soutien de certains Républicains, mais plutôt la prise de conscience qu’il est une <a href="https://www.nytimes.com/2022/11/16/upshot/trump-effect-midterm-election.html">machine à perdre</a> pour le parti, comme en <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/2022/11/16/trump-underperform-elections-2024/">2018 et 2020</a>. Sa victoire à la présidentielle de 2016 ne doit d’ailleurs pas faire oublier qu’il avait alors perdu le vote populaire <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/List_of_United_States_presidential_elections_by_popular_vote_margin">plus qu’aucun autre président élu</a>.</p>
<p>Il est également le premier président, depuis la Grande Dépression, à <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/2021/01/06/trump-set-be-first-president-since-1932-lose-reelection-house-senate/">avoir perdu la Chambre, le Sénat et la présidence en un seul mandat</a>. Le résultat en Géorgie est emblématique : le gouverneur républicain, qui avait résisté aux pressions de Trump pour annuler l’élection, a été confortablement réélu. Ceci alors que le candidat extrémiste négateur aux sénatoriales, soutenu par l’ancien président a, lui, nous l’avons dit, perdu. Comme l’a montré la question de l’avortement, la radicalité reste minoritaire mais mobilise fortement ceux qui y adhèrent.</p>
<p>Or, malgré un léger effritement, Donald Trump demeure encore <a href="https://poll.qu.edu/poll-release ?releaseid=3863">très populaire au sein de sa base</a> et pourrait bien gagner les primaires pour 2024. Et, même si Trump disparaissait, le <a href="https://nymag.com/intelligencer/article/ron-desantis-trumpism.html">trumpisme</a> pourrait lui survivre. Son <a href="https://apnews.com/article/2022-midterm-elections-ron-desantis-donald-trump-c8a3a7e58d35061f8662ead819861005">rival le plus sérieux</a> à ce stade, le gouverneur Ron DeSantis, bien que plus stratège, est tout aussi radical, avec un style de gouvernance basé sur l’autoritarisme, le <a href="https://americasvoice.org/press_releases/reminder-that-nativist-politics-of-ron-desantis-and-gop-relies-on-falsehoods-and-stereotypes/">nativisme</a> et le <a href="https://www.businessinsider.com/florida-miami-herald-warns-of-gov-desantis-christian-nationalism-2022-9 ?r=US&IR=T">nationalisme populiste chrétien</a>, pour lequel il a été <a href="https://www.vox.com/policy-and-politics/2022/4/28/23037788/ron-desantis-florida-viktor-orban-hungary-right-authoritarian">comparé à Viktor Orban</a>.</p>
<p>Il a gagné en popularité en menant la bataille contre les protocoles de santé publique pendant la crise du Covid et a été <a href="https://www.theguardian.com/us-news/2022/nov/09/ron-desantis-trump-2024-florida-midterms">très confortablement réélu</a> (59 %), avec, pour la première fois, une <a href="https://www.nbcnews.com/news/latino/florida-latinos-turned-favor-republicans-rcna57167">majorité de votes latinos</a>. Il est à l’avant-garde du combat dans la <a href="https://www.theguardian.com/us-news/2022/nov/09/ron-desantis-trump-2024-florida-midterms">guerre culturelle</a>, multipliant les projets de loi visant à éliminer les discours sur les identités minoritaires <a href="https://tetu.com/2022/03/29/le-gouverneur-de-floride-enterine-la-loi-homophobe-dont-say-gay/">sexuelles</a> ou <a href="https://www.nytimes.com/2022/09/28/opinion/ron-desantiss-racism.html">raciales</a>, au détriment même de la liberté d’expression. Il a également imposé un <a href="https://fivethirtyeight.com/videos/ron-desantis-drew-florida-an-extreme-gerrymander/">redécoupage électoral extrêmement partisan</a>.</p>
<h2>La campagne de 2024 est déjà lancée</h2>
<p>Les prochains mois risquent ainsi d’être violents : une <a href="https://www.axios.com/2022/11/15/republican-civil-war-trump-mcconnell-scott">guerre interne</a> pour le contrôle du Parti républicain, une autre intense avec les Démocrates et l’administration Biden, sans compter les <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2022/12/09/complotistes-homophobes-neonazis-dix-comptes-emblematiques-de-la-derive-de-twitter-sous-elon-musk_6153754_4355770.html">effets des dérives de Twitter</a>.</p>
<p>Les Républicains de la Chambre ont déjà annoncé vouloir utiliser les pouvoirs d’investigation de la Chambre pour enquêter sur tout le monde : du <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/2022/12/09/meet-congressman-planning-house-republicans-hunter-biden-investigation/">fils du président</a> au FBI du <a href="https://www.npr.org/2022/11/04/1134449665/republicans-investigation-fbi-doj-midterms">département de la Justice</a> à la <a href="https://edition.cnn.com/2022/07/15/politics/house-republicans-investigation-plans-trump/index.html">Commission chargée de faire la lumière sur l’assaut lancé contre le Capitole le 6 janvier 2021</a>, et même jusqu’à l’immunologue <a href="https://abcnews.go.com/Politics/republicans-vow-investigate-fauci-steps-december/story ?id=88741486">Anthony Fauci</a>, jugé responsable d’une gestion prétendument trop stricte de la pandémie de Covid-19.</p>
<p>Se profile également une confrontation sur deux autres questions très sensibles : <a href="https://www.lexpress.fr/monde/amerique/apres-une-decision-de-la-cour-supreme-les-etats-unis-se-dechirent-sur-la-politique-migratoire-GZHKO2OZTVCWJHQQD3TCBSI4JM/">l’immigration</a> – avec, là encore, une décision très attendue de la Cour suprême ; et le <a href="https://edition.cnn.com/2022/12/05/economy/debt-ceiling-fight-goldman-sachs/index.html">plafond de la dette</a>, car le GOP pourrait utiliser la menace d’un défaut de paiement sur la dette du gouvernement américain afin de forcer des réductions de dépenses, ce qui aurait de <a href="https://www.cbpp.org/blog/debt-limit-threats-would-put-the-global-economy-at-risk">lourdes conséquences pour l’économie mondiale</a>, dans un contexte déjà très volatil.</p>
<p>On l’aura compris : le résultat mitigé enregistré aux midterms par Donald Trump et ses affidés ne signifie nullement que les craintes relatives à l’avenir de la démocratie américaine ont été dissipées…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196524/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jérôme Viala-Gaudefroy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Quel que soit son candidat en 2024, le Parti républicain fera sans doute campagne sur une ligne ultra-radicale, à même d’ébranler les fondements mêmes de la démocratie américaine.Jérôme Viala-Gaudefroy, Assistant lecturer, CY Cergy Paris UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1947642022-11-16T17:08:05Z2022-11-16T17:08:05ZTrump 2024 : une candidature vouée à l’échec ?<p>C’est donc à Mar-a-Lago, dans un environnement qui convient à l’ancien président, avec ses dorures, ses volumes impressionnants, son luxe, et devant quelques invités triés sur le volet et tout acquis à sa cause, que <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-actu/trump-a-depose-sa-candidature-formelle-a-l-election-presidentielle-de-2024-20221116">Donald Trump a annoncé sa candidature</a> à l’élection présidentielle américaine de 2024.</p>
<p>Cette annonce, présentée par l’intéressé comme <a href="https://www.france24.com/en/live-news/20221114-trump-set-to-officially-launch-2024-comeback-bid">« le plus grand discours de toute l’histoire des États-Unis »</a>, a pourtant le goût d’amertume de certains produits périmés.</p>
<p>Le 45<sup>e</sup> POTUS a eu beau affirmer qu’il allait rendre l’Amérique de nouveau grande et glorieuse, lançant à cette occasion le <a href="https://www.huffingtonpost.fr/international/article/trump-et-son-nouveau-slogan-magaga-pour-2024-ont-inspire-les-internautes_210309.html">curieux slogan MAGAGA</a> (Make America Great and Glorious Again), et affirmer que sa victoire « sera construite sur de grandes idées, des ambitions audacieuses et des rêves audacieux pour l’avenir de l’Amérique », il semblait le savoir lui-même : tout cela ne le mènera nulle part. Pour plusieurs raisons, qui ont trait à la fois au timing de cette déclaration, à son âge, à son isolement au sein du Parti républicain ou encore à l’émergence d’adversaires qui paraissent bien placés pour le devancer.</p>
<h2>Le timing désastreux de l’annonce d’un candidat âgé et isolé</h2>
<p>Comment aurait-il pu choisir un pire moment pour faire son annonce ? La bonne stratégie est de se présenter le dernier au départ de la course, en laissant les adversaires s’épuiser et en se posant en recours, après avoir bien observé les autres et relevé toutes leurs faiblesses. C’est <a href="https://www.cairn.info/revue-etudes-2016-11-page-7.htm">ce qu’il avait fait en 2015</a>, avec le succès que l’on sait.</p>
<p>Cette fois-ci, en se décidant deux ans avant le scrutin, Donald Trump a donné l’avantage à ses adversaires pour les primaires républicaines, qui ne vont pas manquer de prendre leur temps et de lui compliquer la tâche, l’air de rien. L’entrée en lice des uns et des autres diminuera d’autant, chaque fois, l’impact de la candidature Trump, qui cédera un point par-ci, trois points par-là, jusqu’à ce qu’un de ses concurrents apparaisse comme plus crédible pour la victoire.</p>
<p>En outre, le Trump de 2022, et ce sera encore plus vrai pour celui de 2024, n’est plus « The Donald » de 2015. Le <a href="https://tyt.com/reports/7015be31e708f973a/7b852d7f677784d59">discours moribond</a>, prononcé d’une voix monocorde à la lecture pénible d’un prompteur a fait bondir cette évidence au premier plan : Donald Trump a vieilli. Il est même aussi vieux que l’était Joe Biden lorsqu’il avait annoncé sa candidature pour 2020. Trump l’avait alors <a href="https://www.businessinsider.com/trump-joke-joe-biden-age-young-vibrant-man-2019-4?r=US&IR=T">moqué pour son âge</a>, une idée largement reprise par ses supporters à coups de « Sleepy Joe », qui s’est décliné en « sénile » depuis la défaite de 2020.</p>
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<figcaption><span class="caption">Donald Trump : « J’annonce ma candidature à l’élection présidentielle », Les Échos, 16 juin 2022.</span></figcaption>
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<p>Enfin, Trump ne peut aujourd’hui guère compter sur l’appui de la machinerie nationale du Parti républicain. C’est un point que l’on pourrait penser sans importance, puisqu’il n’était soutenu par personne en 2015, ce qui ne l’avait pas empêché de triompher.</p>
<p>Pourtant, il se présente cette fois-ci comme un ancien président et l’absence de soutien n’est plus synonyme d’une défiance face à un inconnu : elle révèle qu’il a été incapable de créer un réseau solide derrière lui, qui croit en sa victoire au point de faire campagne à ses côtés. Or c’est bien ce dont il a besoin pour vaincre le camp démocrate, qui a repris les rênes.</p>
<p>Même problème avec ses supporters : on avait déjà remarqué que les <a href="https://www.telegraph.co.uk/world-news/2021/12/12/donald-trumps-florida-roadshow-greeted-rows-empty-seats/">rangs s’étaient clairsemés</a>. Bien entendu, les fans « MAGA », les plus impliqués, les plus engagés, sont toujours là. Mais ce n’est pas suffisant pour faire un gagnant. La force de Trump avait été de faire revenir devant les urnes une <a href="https://www.propublica.org/article/revenge-of-the-forgotten-class">population qui ne votait plus</a>. Ceux-là rêvaient d’un champion capable de renverser la table et doté d’une poigne de fer pour faire face à leurs « ennemis » – car ils imputent au camp d’en face toutes les difficultés qu’ils traversent, au point de finir par croire qu’ils sont effectivement dans une guerre totale.</p>
<p>Mais les meetings de Donald Trump se sont vidés : de 30 000 il y a deux ans, l’ancien président ne pouvait guère plus réunir plus de 2 000 à 3 000 personnes ces derniers mois.</p>
<p>Pis encore : les sondages ne cessent d’indiquer qu’ils ne sont plus que 30 à 34 % au sein de parti républicain à souhaiter son retour et la <a href="https://www.nytimes.com/2022/07/12/us/politics/trump-approval-polling-2024.html">moitié d’entre eux ne le souhaite pas</a>. Cela ne veut pas dire qu’ils ne l’aiment plus ; juste qu’ils attendent autre chose.</p>
<h2>Un bilan, pas de programme</h2>
<p>C’est une difficulté majeure pour le candidat Trump : il a cette fois un bilan. Bon ou mauvais, on trouvera les deux avis et la discussion tournera en rond.</p>
<p>Mais ce qui est indubitable, c’est que ce bilan l’emprisonne. En 2016, il était un homme totalement neuf et rien ne pouvait lui être opposé, car il répondait invariablement qu’il allait réussir. Les fantasmes et les projections ont donc fait leur œuvre : ses futurs électeurs y croyaient. Et ils en rajoutaient même par rapport à ce qu’il disait, annonçait ou promettait.</p>
<p>Et s’il a un bilan, dans lequel ses concurrents ne manqueront pas de piocher pour le mettre en difficulté, il n’a en revanche pas de programme. C’est bien un des points qui pose un problème réel et de fond. Au cours des deux dernières années, Donald Trump n’a eu qu’un seul élément de programme : « Je suis le meilleur, réélisez-moi. »</p>
<p>Or la <a href="https://www.ladepeche.fr/2022/11/10/entretien-midterms-2022-aux-etats-unis-pourquoi-le-raz-de-maree-republicain-tant-annonce-na-t-il-pas-eu-lieu-10791819.php">contreperformance du camp républicain aux midterms</a> est principalement due à cette absence de perspective concrète : en ancrant cette stratégie dans l’esprit de ses sympathisants, Trumps les a coupés de ceux qui attendent des politiciens qu’ils apportent des réponses à leurs problèmes. Fort de ce constat, le programme a semble-t-il été rajouté au dernier moment à sa déclaration de candidature : c’est un copié-collé de celui de 2016. Mais on n’est plus en 2016.</p>
<h2>L’épée de Damoclès de la justice</h2>
<p>Il a beau tenter de faire l’impasse sur cette maudite journée du 6 janvier 2021, Donald Trump sera <a href="https://theconversation.com/lenquete-sur-lemeute-du-capitole-le-watergate-de-donald-trump-191025">rattrapé par elle sans arrêt</a>. Il est déjà dans les livres d’histoire pour une tentative d’insurrection, après avoir affronté <a href="https://www.cairn.info/revue-civitas-europa-2021-1-page-413.htm">deux procédures d’impeachment</a>. Ces taches sont indélébiles et vont teinter sa campagne, qu’il le veuille ou non. Il sera donc contraint de se poser encore et encore en victime et ne pourra jamais décoller.</p>
<p>Il est évident aussi que <a href="https://www.levif.be/international/usa-les-liens-entre-trump-et-lextreme-droite-au-coeur-dune-enquete-parlementaire/">ses liens avec les groupes d’extrême droite</a> – les Proud Boys, les Oath Keepers, le Ku Klux Klan et d’autres encore – vont hanter les prochains mois. Sa <a href="https://www.ledevoir.com/monde/etats-unis/757562/sous-pression-donald-trump-ressuscite-le-complotisme-qanon">proximité avec le groupe QAnon</a>, dont il ne peut plus désormais se passer, clouera son positionnement dans la droite la plus dure et la plus dangereuse, repoussant les indépendants à l’opposé de lui.</p>
<p>Tout le monde, enfin, a compris que la raison de sa déclaration de candidature très prématurée est d’hystériser le débat et d’allumer un contre-feu puissant lorsque le glaive de la justice s’abattra sur lui. <a href="https://www.france24.com/fr/am%C3%A9riques/20220921-donald-trump-et-ses-enfants-poursuivis-%C3%A0-new-york-pour-fraude-fiscale">Poursuites</a> à New York pour fraude fiscale, <a href="https://www.lepoint.fr/monde/une-enquete-dans-l-etat-de-georgie-pourrait-etre-fatale-a-trump-30-08-2022-2487738_24.php">enquêtes</a> pour ingérence électorale en Georgie, <a href="https://confluencedesdroits-larevue.com/?p=1892">menaces d’inculpation</a> au niveau fédéral pour l’émeute du Capitole, les ennuis judiciaires de Donald Trump sont colossaux et on voit mal comment il pourrait désormais échapper à une sanction, qui n’exclut pas une peine de prison.</p>
<p>Son évident est de fédérer ses plus fidèles pour qu’ils descendent dans les rues lorsque le pire arrivera. Rien ne dit que cette stratégie fonctionnera, car les électeurs ont déjà rejeté son jusqu’au-boutisme lors des midterms 2022 en <a href="https://www.marianne.net/monde/ameriques/midterms-aux-etats-unis-le-gros-flop-des-candidats-trumpistes">se détournant largement des candidats qu’il avait ouvertement soutenus</a>.</p>
<h2>Des adversaires dangereux</h2>
<p>La donnée nouvelle, à laquelle Donald Trump ne s’attendait pas, c’est que le désamour à son égard se traduit par la recherche de remplaçants : la brusque mise sous les projecteurs de <a href="https://www.lepoint.fr/monde/ron-desantis-l-homme-qui-menace-donald-trump-16-11-2022-2497967_24.php">Ron DeSantis</a>, dès le lendemain des midterms, a fait éclater la bulle Trump.</p>
<p>Aussitôt, ils ont été nombreux à chercher à prendre la lumière à leur tour : <a href="https://www.politico.com/news/2022/09/20/ted-cruz-campaign-2024-00057668">Ted Cruz</a>, <a href="https://www.politico.com/news/2022/11/14/pence-2024-run-prayerful-consideration-00066877">Mike Pence</a>, <a href="https://slate.com/news-and-politics/2022/09/lindsey-graham-abortion-ban-2022-midterm-2024-election.html">Lindsey Graham</a>, <a href="https://edition.cnn.com/2022/04/06/politics/kristi-noem-biden-ukraine-russia/index.html">Kristi Noem</a>, <a href="https://thehill.com/homenews/sunday-talk-shows/3679988-youngkin-declines-to-say-if-he-will-run-for-president-2024-is-a-long-way-away/">Glenn Youngkin</a>, <a href="https://eu.desmoinesregister.com/story/news/politics/2022/06/30/iowa-caucus-2024-nikki-haley-will-run-president-if-theres-place-me/7747121001/">Nikki Haley</a>, <a href="https://thehill.com/homenews/campaign/3596528-tim-scott-dodges-questions-about-whether-he-wants-trump-to-run-in-2024/">Tim Scott</a>, pour ne citer que les plus en vue, qui ne veulent pas laisser le champ libre aux autres et qui se cherchent encore une stratégie et un chemin pour se lancer.</p>
<p>En 2016, lors des primaires républicaines, Donald Trump était le chasseur. En 2024, en sa qualité d’ancien président, il sera le puissant à abattre. Difficile de parier un dollar sur sa victoire…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/194764/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Éric Branaa ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Donald Trump vient d’annoncer sa candidature à l’élection présidentielle de 2024. De nombreux aspects indiquent qu’elle ne sera sans doute pas couronnée de succès.Jean-Éric Branaa, Maître de conférences politique et société américaines (Paris 2 Panthéon-Assas), Université Paris-Panthéon-AssasLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1944642022-11-11T12:42:30Z2022-11-11T12:42:30ZAprès les élections de mi-mandat, qu’attendre de la présidence Biden ?<p>Les « midterms » de 2022 étaient le premier scrutin aux États-Unis depuis la tentative d’insurrection au Capitole, le 6 janvier 2021.</p>
<p>C’était un test pour la démocratie : autant la présidentielle de 2020 avait été marquée par une <a href="https://www.census.gov/newsroom/press-releases/2021/2020-presidential-election-voting-and-registration-tables-now-available.html">participation record</a> (66,8 %), autant l’incertitude planait cette année. Or, l’électorat s’est fortement mobilisé : il s’éleverait à environ 48 %, soit un peu moins des 51,8 % de participation aux midterms de 2018, <a href="https://www.pewresearch.org/fact-tank/2022/11/01/turnout-in-u-s-has-soared-in-recent-elections-but-by-some-measures-still-trails-that-of-many-other-countries/">ce qui était très élevé pour ce type de scrutin</a> – rappelons qu’aux États-Unis le taux de participation est calculé par rapport au nombre de personnes ayant le droit de vote et non par rapport au nombre d’inscrits sur les listes électorales.</p>
<p>Le deuxième test portait sur la résistance des Démocrates, et celle-ci fut inattendue : même si, à ce stade, les résultats définitifs <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/11/10/midterms-2022-deux-jours-apres-les-elections-les-etats-unis-toujours-dans-l-attente_6149397_3210.html">ne sont pas encore connus</a>, Joe Biden <a href="https://www.arte.tv/fr/videos/112110-000-A/midterms-les-democrates-limitent-la-casse/">n’a pas été la victime du vote sanction qu’on lui prédisait</a>. Les Démocrates conservent même leur majorité au Sénat après <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/11/13/midterms-2022-les-democrates-sauvent-leur-majorite-au-senat-en-remportant-le-siege-decisif-du-nevada_6149621_3210.html">leur victoire dans le Nevada</a>. </p>
<p>Fin limier de la politique américaine, Biden dispose d’une très bonne connaissance des rouages électoraux et des attentes de son électorat. Il demeure sous-estimé, y compris dans son propre camp. L’inflation n’a pas eu raison de lui et il est probable également que les <a href="https://theconversation.com/reformer-leconomie-americaine-pour-joe-biden-le-temps-presse-171039">énormes réformes qu’il a engagées</a>, par la voie législative, en faveur des <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-eco/biden-ratifie-son-gigantesque-plan-sur-les-infrastructures-20211115">infrastructures</a>, des <a href="https://www.jean-jaures.org/publication/la-politique-industrielle-sous-biden-une-nouvelle-doctrine-economique-pour-le-parti-democrate/">emplois verts</a> ou de la <a href="https://www.france24.com/fr/am%C3%A9riques/20210306-le-s%C3%A9nat-am%C3%A9ricain-approuve-le-plan-de-relance-%C3%A9conomique-de-joe-biden">relance économique post-Covid</a>, auxquelles il faut ajouter la décision d’<a href="https://lvsl.fr/annulation-de-la-dette-etudiante-aux-etats-unis-la-fin-dun-totem-neoliberal/">annuler en partie la dette étudiante</a> pour plus de quarante millions d’Américains, ont été plus récompensées que prévu.</p>
<h2>Une fois encore, la démocratie a résisté aux attaques</h2>
<p>À droite, force est de constater que le trumpisme marque le pas.</p>
<p>C’était le troisième test. Il est loin d’avoir disparu puisqu’il persiste sous les traits du plus grand rival de Donald Trump à ce jour, le <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/2022/11/09/trump-presidential-announcement-delay/">gouverneur de Floride Ron DeSantis</a>, triomphalement réélu et tout aussi extrémiste que Trump sur le fond, et puisque des dizaines de <a href="https://projects.fivethirtyeight.com/republicans-trump-election-fraud/">« deniers »</a> – ceux et celles qui nient le résultat de la présidentielle de 2020 – ont gagné.</p>
<p>Ils et elles sont cependant <a href="https://time.com/6231852/election-deniers-2022-midterms-results/">beaucoup moins nombreux qu’on le redoutait</a>. Trump ne serait-il donc pas le faiseur de rois (et de reines) que beaucoup pensaient ? Dans les meetings qu’il a tenus aux côtés de candidates et candidats qu’il avait choisi de soutenir – plus en raison de leur flagornerie et leurs excès que pour leur compétence –, il a surtout parlé de lui-même et de <a href="https://www.propublica.org/article/big-lie-trump-stolen-election-inside-creation">son obsession de « l’élection volée »</a> (selon lui) il y a deux ans. Mais gagner une primaire républicaine, où c’est surtout la base la plus fervente qui vote, n’est pas la même affaire que remporter une élection face à une ou un adversaire démocrate. La leçon de l’extrémisme du Tea Party de 2010, qui avait déjà <a href="https://blogcritics.org/how-the-tea-party-helped-obama/">plombé les Républicains deux ans plus tard</a> avec la réélection de Barack Obama, n’a, semble-t-il, pas été retenue, <a href="https://www.nytimes.com/2022/11/10/us/politics/trump-grass-roots-midterms.html">tant le culte de la personnalité de Trump l’a emporté</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1590443351538647041"}"></div></p>
<p>Le rejet de Trump et du trumpisme et du danger que l’ancien président fait courir à la démocratie (<a href="https://time.com/5902729/black-voter-suppression-2020/">limitation de l’accès au vote des minorités</a>, <a href="https://www.lepoint.fr/monde/trump-renvoie-un-responsable-qui-contestait-les-accusations-de-fraudes-18-11-2020-2401633_24.php">refus de certifier des élections si elles sont perdues</a>, etc.) a, ainsi, mobilisé les Démocrates, et notamment les <a href="https://eu.usatoday.com/story/news/nation/2022/11/09/2022-midterms-women-and-suburban-voters-help-democrats-avoid-disaster/8318080001/">femmes</a> – sans doute aussi les <a href="https://www.npr.org/2022/11/10/1135810302/turnout-among-young-voters-was-the-second-highest-for-a-midterm-in-past-30-years">jeunes</a>, à l’échelle nationale.</p>
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<p>Depuis <a href="https://theconversation.com/donnees-de-sante-de-fertilite-de-localisation-les-craintes-post-roe-inedites-et-legitimes-des-americaines-191046">l’annulation de l’arrêt Roe vs Wade par la Cour suprême</a> le 24 juin dernier, plusieurs États fédérés (<a href="https://www.usnews.com/news/best-states/california/articles/2022-11-09/californians-vote-to-protect-abortion-in-state-constitution">Californie</a>, <a href="https://www.bbc.com/news/world-us-canada-63564062">Kentucky</a>, <a href="https://www.npr.org/2022/11/09/1134832172/vermont-votes-abortion-constitution-midterms-results">Vermont</a>, <a href="https://www.bridgemi.com/michigan-government/michigan-proposal-3-supporting-abortion-rights-wins-big">Michigan</a>) ont mis au vote, le 8 novembre, des référendums pour inscrire, ou au contraire supprimer le droit à l’avortement dans la loi ou leur Constitution. Chaque fois, c’est le camp des <em>pro choice</em> qui l’a emporté.</p>
<p>Au-delà des référendums, les <a href="https://www.nytimes.com/2022/11/10/us/politics/abortion-midterm-elections-democrats-republicans.html">sondages de sortie des urnes</a> indiquent que la préservation de ce droit a très largement motivé les Démocrates à voter pour un ou une candidate qui garantirait aux femmes cette liberté. « Les femmes ne sont pas sans pouvoir politique ou électoral », écrivait (ironiquement ?) le juge ultra-conservateur à la Cour suprême Samuel Alito dans l’arrêt <a href="https://www.supremecourt.gov/opinions/21pdf/19-1392_6j37.pdf">« Dobbs v. Jackson Women’s Health Organization »</a> en juin dernier. Il ne croyait pas si bien dire.</p>
<h2>Biden appelle à renforcer le compromis avec les Républicains</h2>
<p>Si les Républicains remportent la Chambre (les Démocrates conservent le Sénat, leur marge sera bien moindre qu’attendu.</p>
<p>Le président Biden, qui a profité des deux premières années de son mandat pour faire voter une série de grandes réformes, aura toutefois beaucoup plus de difficultés désormais parce qu’il est peu probable que les nouveaux élus républicains – qui prendront leurs fonctions en janvier 2023 – lui facilitent la tâche, à un peu plus d’un an de la prochaine campagne présidentielle.</p>
<p>C’est pourtant bien le sens de <a href="https://www.whitehouse.gov/briefing-room/speeches-remarks/2022/11/09/remarks-by-president-biden-in-press-conference-8/">l’appel que Biden leur a lancé</a>, le 9 novembre au soir : il estime que le compromis politique est une attente de la société, et a toujours dit faire du combat contre la polarisation politique du pays une priorité. Comme pour conjurer la perspective de deux années de paralysie institutionnelle, voire celle de possibles <a href="https://www.france24.com/fr/info-en-continu/20210930-%C3%A9tats-unis-le-shutdown-%C3%A9vit%C3%A9-apr%C3%A8s-le-vote-d-une-loi-de-finances-par-le-congr%C3%A8s"><em>shutdowns</em></a> (blocage du fonctionnement de plusieurs administrations fédérales) si jamais le plafond de la dette ne pouvait être relevé en cas de besoin ou si le budget de la nation ne parvenait pas à être voté en 2023 et 2024. En effet, c’est la Chambre des représentants qui donne le « la » sur les dépenses.</p>
<p>Le président devra encore renforcer ses efforts en matière de négociations et de tractations avec l’opposition parlementaire pour poursuivre la mise en œuvre de son programme – non seulement sur le plan socio-économique, mais aussi, et ce sera plus difficile, en matière de protection environnementale. Les Républicains le contraindront, de leur côté, à faire des compromis sur la fiscalité.</p>
<p>Selon le <em>New York Times</em>, il est cependant <a href="https://www.nytimes.com/2022/11/10/us/politics/biden-economy-midterms.html">peu probable que Biden modifie son cap économique</a> : la transition énergétique, qui nécessite de renoncer progressivement aux énergies fossiles, l’effort de réindustrialisation du pays dans la course avec la Chine sur les hautes technologies, la création d’emplois durables, la défense du pouvoir d’achat, la préservation des acquis de l’Obamacare, la lutte contre l’augmentation des prix des médicaments, le combat contre les inégalités sont sur sa feuille de route, surtout dans la perspective d’une possible récession l’an prochain. En revanche, plusieurs grandes lois fédérales promises à l’électorat démocrate pour, notamment, pallier les vides juridiques sur l’immigration, réguler la vente et la circulation d’armes à feu, combattre les discriminations raciales dans l’accès au vote, n’ont aucune chance d’aboutir d’ici fin 2024.</p>
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<figcaption><span class="caption">Midterms : le républicain Kevin McCarthy rêve de présider la Chambre des représentants, France 24 9 novembre 2022.</span></figcaption>
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<p>Il est un autre chantier délicat : celui de <a href="https://www.atlanticcouncil.org/blogs/ukrainealert/will-next-weeks-midterm-elections-impact-us-support-for-ukraine/">l’aide militaire à l’Ukraine</a>. Sur le papier, un Congrès en partie républicain peut s’opposer à de nouvelles dépenses décidées par la Maison Blanche, ou voter des coupes (mais le président possède un droit de veto sur les lois). Dans les faits, le scénario le plus probable à ce stade est que les Républicains exigent davantage de transparence sur l’utilisation des moyens débloqués. Il n’empêche qu’en matière de dépenses militaires en général, la cohérence gagnerait à s’imposer dans les deux partis, démocrate et républicain : avec un budget de plus de 800 milliards de dollars, il est légitime de s’interroger sur le poids que ces dépenses font peser sur le contribuable dans une période inflationniste comme aujourd’hui.</p>
<h2>Et 2024 ?</h2>
<p>Une fois les derniers résultats des midterms connus (cela peut prendre encore quelques jours pour la Chambre), la course sera lancée pour la présidentielle de 2024. Même s’il <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2022-11-09/biden-says-he-plans-to-run-in-2024-may-decide-early-next-year">laisse entendre le contraire</a>, il est peu probable que Joe Biden, qui aura alors alors 82 ans, se représente. Qui, alors, pour lui succéder ?</p>
<p>Plusieurs leaders démocrates émergeront après leur élection ou réélection de la semaine dernière, sans oublier la vice-présidente Kamala Harris, qui devront continuer à composer entre une <a href="https://thehill.com/homenews/campaign/3726475-squad-members-cruise-to-re-election/">aile gauche</a> et son électorat impatient (les jeunes en particulier) mais mobilisé donc incontournable, d’une part, et une culture de parti plus modérée d’autre part.</p>
<p>Chez les Républicains, le trumpisme nouvelle formule de Ron DeSantis s’imposera-t-il ou bien la doctrine plus traditionnelle l’emportera-t-elle, par pragmatisme ? À la Chambre, les Républicains mettront, dès janvier 2023, un terme à <a href="https://theconversation.com/lenquete-sur-lemeute-du-capitole-le-watergate-de-donald-trump-191025">l’enquête parlementaire sur l’attaque du Capitole</a>, comme si rien ne s’était passé. Mettront-ils <a href="https://www.politico.com/news/2022/07/19/hunter-biden-gop-2023-00046419">leurs menaces</a> à exécution en lançant de nouvelles enquêtes, sur les conditions du retrait de l’Afghanistan, et sur le business du fils de Joe Biden, <a href="https://www.liberation.fr/checknews/fisc-armes-sexe-et-drogue-que-sait-on-des-accusations-visant-hunter-biden-fils-du-president-americain-20221105_DSLB7CY6CJD5ROLT4B5MUNW7OI/">Hunter</a> ? Cela ne parviendra pas à masquer le fait que, lors de ces midterms, les Républicains ont raté leur coup et que pour espérer l’emporter en 2024, ils doivent également se concentrer sur une question majeure : avec ou sans Trump ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/194464/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marie-Cécile Naves est directrice de recherches à l'IRIS.</span></em></p>Si les résultats des midterms sont encore partiels, quelques dynamiques fortes se dégagent et permettent de tirer plusieurs enseignements pour les deux dernières années du mandat de Joe Biden.Marie-Cécile Naves, Docteure en science politique, chercheuse associée au CRI Paris, Learning Planet Institute (LPI)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1917512022-10-20T15:09:59Z2022-10-20T15:09:59ZÉtats-Unis : la survie de la démocratie est-elle en jeu dans les élections de mi-mandat ?<p>À l’approche des élections de mi-mandat du 8 novembre prochain, dans un <a href="https://www.npr.org/2022/09/02/1120690193/bidens-speech-walks-a-fine-line-in-its-attack-on-maga-republicans">discours controversé</a>, le président Joe Biden a accusé les Républicains MAGA (acronyme de « Make America Great Again », le slogan de Donald Trump et de ses partisans) de « détruire la démocratie américaine » et d’être « une menace pour ce pays » et pour « les fondements mêmes de notre république ». Quelques jours auparavant, il <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/08/26/joe-biden-en-campagne-denonce-le-semi-fascisme-au-sein-du-parti-republicain_6139075_3210.html">avait déclaré</a> que la philosophie de ces Républicains pro-Trump était « presque du semi-fascisme ».</p>
<p>Ces mots forts constituent une véritable rupture chez un président qui avait fait de la réconciliation nationale le cœur de sa rhétorique, répétant inlassablement sa volonté d’unifier et non de diviser le peuple <a href="https://www.npr.org/sections/live-updates-2020-election-results/2020/11/07/932104693/biden-to-make-victory-speech-as-president-elect-at-8-p-m-et">dès l’annonce de sa victoire</a>, puis dans son <a href="https://www.brookings.edu/blog/fixgov/2021/01/20/bidens-inaugural-address-unity-and-truth/">discours d’investiture</a>.</p>
<p>Toutefois, il n’est pas le premier président à dénoncer d’autres Américains comme une menace existentielle pour la nation. Son prédécesseur, Donald Trump, avait ainsi désigné les journalistes qui le critiquaient comme des <a href="https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/les-80-de/ennemis-du-peuple-donald-trump-et-les-journalistes-4559445">« ennemis du peuple »</a>. Trump n’a d’ailleurs pas tardé à répliquer aux attaques de Biden en le qualifiant d’« <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/09/04/etats-unis-donald-trump-replique-aux-attaques-de-joe-biden-en-le-qualifiant-d-ennemi-de-l-etat_6140125_3210.html">ennemi de l’État</a>. Quant au chef du groupe républicain à la Chambre des Représentants, Kevin McCarthy, il a <a href="https://twitter.com/kevinomccarthy/status/1565507390061035521?ref_src=twsrc%5Etfw">déclaré</a> que Biden avait raison de dire que « la démocratie est en jeu en novembre »… mais que c’étaient « Joe Biden et la gauche radicale à Washington [qui] sont en train de [la] démanteler ».</p>
<p>Qu’en est-il vraiment ? Ces propos des uns et des autres relèvent-ils d’une simple stratégie électoraliste visant à mobiliser les électeurs, ou bien la démocratie est-elle vraiment en jeu en novembre ?</p>
<h2>Une opinion publique inquiète mais divisée sur la question de la démocratie</h2>
<p>Il semble en tout cas qu’une majorité d’États-Uniens (69 %), Républicains comme Démocrates, considèrent que la démocratie est « en danger d’effondrement », selon un <a href="https://poll.qu.edu/poll-release?releaseid=3831">récent sondage de l’université Quinnipiac</a>.</p>
<p>Il faut dire que, pour la première fois de l’histoire des États-Unis, un président sortant n’a toujours pas reconnu sa défaite, affirmant même avoir obtenu une <a href="https://www.politifact.com/factchecks/2021/jan/07/donald-trump/trump-clings-fantasy-landslide-victory-egging-supp/">« victoire écrasante »</a>, et n’exprime aucun regret pour avoir incité ses partisans à <a href="https://theconversation.com/lenquete-sur-lemeute-du-capitole-le-watergate-de-donald-trump-191025">l’insurrection</a> en se lançant à l’assaut du Capitole afin de bloquer la certification des résultats du vote du collège électoral.</p>
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<p>L’inquiétude commune du pays cache cependant de profondes divisions : d’après un <a href="https://www.cbsnews.com/news/cbs-news-poll-americans-democracy-is-under-threat-opinion-poll-2022-09-01/">sondage réalisé par CBS</a>, si une majorité des sondés citent comme menace majeure les « personnes qui tentent de renverser les élections », aux yeux des Républicains ce sont les « personnes qui votent illégalement » qui représentent l’une des menaces les plus graves.</p>
<p>En outre, alors même que <a href="https://www.brennancenter.org/issues/ensure-every-american-can-vote/vote-suppression/myth-voter-fraud">nombre d’analyses</a> sérieuses, y compris <a href="https://lbaole17.github.io/methods-reading-group/files/pnas.pdf">universitaires</a>, ont clairement démontré qu’il n’y avait aucune preuve de fraude électorale qui aurait pu changer le résultat de la présidentielle de 2020, force est de constater que, <a href="https://www.poynter.org/fact-checking/2022/70-percent-republicans-falsely-believe-stolen-election-trump/">sondage après sondage</a>, une large majorité de Républicains (70 %) continuent de contester la légitimité de Joe Biden, refusant de croire qu’il a réellement remporté cette élection.</p>
<p>Cette remise en cause de la légitimité d’un président n’est pas entièrement nouvelle : en 2016, <a href="https://www.nbcnews.com/politics/2016-election/poll-persistent-partisan-divide-over-birther-question-n627446">72 % des électeurs républicains</a> doutaient toujours de la citoyenneté du président Obama (en 2000, les Démocrates étaient <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/2021/05/17/voters-have-seen-past-presidents-illegitimate-this-time-is-different/">sceptiques quant à l’élection de George W. Bush</a>, mais la situation était bien différente, et surtout, Al Gore avait, lui, reconnu sa défaite).</p>
<p>De plus, la remise en cause du résultat des élections – un principe de base de la démocratie – a été soutenue par une majorité d’élus républicains. Au lendemain de l’attaque du Capitole, près des <a href="https://www.nytimes.com/interactive/2021/01/07/us/elections/electoral-college-biden-objectors.html">deux tiers des Représentants républicains</a> à la Chambre avaient refusé de valider les résultats de l’élection présidentielle. Une majorité des sénateurs républicains ont, quant à eux, <a href="https://www.cairn.info/revue-civitas-europa-2021-1-page-413.htm">refusé pour la seconde fois</a> de voter en faveur de la destitution de Donald Trump, cette fois pour « incitation à l’insurrection » après l’assaut du Capitole, ce qui aurait empêché l’ancien président de se présenter aux présidentielles de 2024.</p>
<h2>Le vote : une affaire très locale</h2>
<p>Alors que les élections de mi-mandat sont traditionnellement un scrutin sur le bilan, notamment économique, de l’administration élue deux ans plus tôt, la campagne de 2022 prend une tournure tout à fait inédite.</p>
<p>Tout d’abord parce que jamais un ancien président n’a dominé les primaires d’une élection de mi-mandat comme l’a fait Donald Trump. Il a ainsi soutenu plus de 200 candidats, non seulement au niveau fédéral mais également au niveau local. Car si le scrutin intermédiaire de novembre 2022 renouvelle l’ensemble des 435 sièges de la Chambre des Représentants, ainsi qu’un tiers des 100 sièges du Sénat au niveau fédéral, il concerne également des centaines d’élections locales : seront mis en jeu des <a href="https://ballotpedia.org/Gubernatorial_elections,_2022">postes de gouverneurs</a>, de <a href="https://ballotpedia.org/Secretary_of_State_elections,_2022">secrétaires d’État</a>, de <a href="https://ballotpedia.org/Attorney_General_elections,_2022">procureurs généraux locaux</a>, et la plus grande partie des <a href="https://ballotpedia.org/State_legislative_elections,_2022">assemblées législatives locales</a>. Or, il ne faut pas oublier que dans le système fédéral des États-Unis, ce sont les États, et non le pouvoir fédéral, qui sont en charge de l’organisation des élections.</p>
<p>Selon la Constitution de chaque État, les gouverneurs et les secrétaires d’État peuvent avoir un pouvoir de contrôle plus ou moins important sur les élections, même s’ils ne peuvent, à eux seuls, renverser les résultats d’une élection. On se souvient que, le 2 janvier 2021, après la présidentielle, Donald Trump avait demandé au secrétaire d’État de Géorgie, Brad Raffensperger, de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=QvwOEHMO23s">« trouver 11 780 voix »</a> afin de modifier le résultat final en sa faveur (en Géorgie, Trump accusait un retard de 11 779 voix sur Biden), transformant ainsi instantanément un poste de second plan, non partisan et administratif, en une fonction politique, partisane et très médiatisée.</p>
<p>Cette année, lors des primaires républicaines, Trump a fait du déni du résultat de l’élection présidentielle de 2020 un test de loyauté essentiel au sein du Parti républicain. Les résultats vont dans son sens : aux midterms, <a href="https://projects.fivethirtyeight.com/republicans-trump-election-fraud/">60 % des Américains</a> auront la possibilité de voter en faveur d’un candidat qui nie le résultat des élections de 2020. Il s’agit non seulement de faire du 8 novembre une revanche de la présidentielle 2020, mais aussi de préparer la présidentielle de 2024. Et, en cas de défaite en 2024, si ce n’est dès 2022, de pouvoir contester, bloquer, voire confisquer l’appareil électoral, ce qui pourrait potentiellement conduire à une crise constitutionnelle.</p>
<h2>L’extrémisme, une stratégie risquée qui ne paie pas forcément</h2>
<p>Historiquement, les candidats les plus extrémistes qui gagnent les primaires <a href="http://www.andrewbenjaminhall.com/Hall_APSR.pdf">réduisent les chances</a> de leur parti de gagner les élections générales.</p>
<p>Ce constat a poussé les Démocrates de certains États à mettre en œuvre une stratégie risquée et quelque peu cynique : financer des <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/interactive/2022/democrat-ad-spending-republican-trump/?itid=lk_interstitial_manual_9">campagnes publicitaires</a> visant à mettre en avant les candidates républicains les plus extrêmes dans les primaires, en les liant à Donald Trump par exemple, dans l’espoir de les battre plus facilement dans les élections générales.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1550539922980933632"}"></div></p>
<p>Si cette stratégie a <a href="https://www.politico.com/magazine/story/2015/08/todd-akin-missouri-claire-mccaskill-2012-121262/">fonctionné par le passé</a>, elle pourrait se retourner contre eux dans un environnement hautement polarisé où l’appartenance à un parti se confond de plus en plus avec un sentiment d’identité.</p>
<p>L’autre espoir des Démocrates est la question du droit à l’avortement. Elle est devenue un <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/06/24/droit-a-l-avortement-la-cour-supreme-des-etats-unis-revient-sur-l-arret-roe-vs-wade-et-laisse-les-etats-americains-libres-d-interdire-l-ivg_6131955_3210.html">enjeu local</a> démocratique majeur depuis que ce droit n’est plus garanti au niveau fédéral, suite à <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dobbs_v._Jackson_Women%27s_Health_Organization">l’arrêt <em>Dobbs</em></a> de la Cour suprême en juin dernier.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/fin-du-droit-a-lavortement-aux-etats-unis-moins-de-democratie-plus-de-religion-184914">Fin du droit à l’avortement aux États-Unis : moins de démocratie, plus de religion</a>
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<p>À en croire le <a href="https://www.huffingtonpost.fr/international/article/ivg-les-electeurs-du-kansas-se-positionnent-en-faveur-de-l-avortement_206169.html">vote test du Kansas</a> cet été, même les électeurs d’un État très conservateur restent largement favorables au maintien de la garantie constitutionnelle sur l’avortement. En outre, <a href="https://www.npr.org/2022/09/07/1121427463/more-women-are-registering-to-vote-how-could-that-affect-midterms">l’augmentation conséquente</a> du nombre de femmes inscrites sur les listes électorales pour ce scrutin pourrait indiquer qu’il s’agit là d’un sujet mobilisateur.</p>
<p>L’ironie de l’histoire est que ce sont, désormais, les Démocrates qui mettent en avant des questions morales et sociétales et livrent aux Républicains, à leur tour, une guerre dite « culturelle ». Ces derniers, de leur côté, et même si <a href="https://www.youtube.com/watch ?v=khuwYOo2dDM">l’immigration et la criminalité</a> restent pour eux des sujets de prédilection, cherchent avant tout à maintenir l’attention sur les questions économiques comme l’inflation, actuellement <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/10/14/etats-unis-l-inflation-galope-la-part-publique-de-la-pension-des-retraites-va-augmenter-de-8-7_6145721_3234.html">galopante</a> – ce qui, en temps normal, suffirait probablement à leur assurer une victoire écrasante.</p>
<h2>Un scrutin essentiel</h2>
<p>Ainsi, la transformation d’un scrutin intermédiaire en « match retour » de la présidentielle de 2020 (entre un président <a href="https://projects.fivethirtyeight.com/biden-approval-rating/">relativement impopulaire</a> et un ex-président <a href="https://projects.fivethirtyeight.com/polls/favorability/donald-trump/">encore plus impopulaire</a> et <a href="https://apnews.com/article/technology-donald-trump-conspiracy-theories-government-and-politics-db50c6f709b1706886a876ae6ac298e2">radicalisé</a>, à l’image des candidats qu’il soutient) rend les <a href="https://projects.fivethirtyeight.com/2022-election-forecast/">pronostics</a> bien incertains.</p>
<p>Si la question de l’avenir de la démocratie est donc bien l’un des enjeux de ces élections, c’est aussi parce que, au-delà de Trump lui-même, ce qui s’y joue, c’est l’emprise du trumpisme et du négationnisme de la réalité sur un Parti républicain en <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/2022/09/27/mccarthy-midterms-gop/">guerre avec lui-même</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/191751/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jérôme Viala-Gaudefroy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Démocrates et Républicains affirment que la victoire du camp adverse aux midterms représentera tout simplement la fin de la démocratie américaine. Qu’est-ce qui explique un tel maximalisme ?Jérôme Viala-Gaudefroy, Assistant lecturer, CY Cergy Paris UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1770362022-02-17T20:50:18Z2022-02-17T20:50:18ZRussie-Ukraine : la cyberguerre est-elle déclarée ?<p>Alors que des troupes russes se <a href="https://france24.com/fr/europe/20220206-ukraine-la-russie-pr%C3%A9pare-une-invasion-de-grande-ampleur-selon-le-renseignement-am%C3%A9ricain">massent aux frontières ukrainiennes</a> et que la Fédération de Russie maintient ses <a href="https://www.npr.org/2021/12/23/1067188698/putin-urges-west-to-act-quickly-to-offer-security-guarantees">demandes de garanties</a> de non-extension de l’OTAN, de transparence sur le déploiement des systèmes d’armes et de retour aux clauses de l’<a href="https://nato.int/cps/fr/natohq/official_texts_25468.htm">Acte Fondateur de 1997</a>, l’Ukraine vient d’être visée par une <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/01/17/une-cyberattaque-en-ukraine-alimente-les-tensions-avec-moscou_6109784_3210.html">puissante cyberattaque</a>. Bien qu’il soit difficile d’identifier le ou les auteurs de cette agression, un certain nombre d’observateurs n’hésitent à l’attribuer à Moscou et à son alliée la Biélorussie.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/russie-ukraine-la-guerre-est-elle-inevitable-175774">Russie-Ukraine : la guerre est-elle inévitable ?</a>
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<p>L’Ukraine apparaît depuis le début de la crise qui l’oppose à la Russie comme un véritable <a href="https://wired.com/story/russian-hackers-attack-ukraine/">laboratoire à ciel ouvert</a> pour les opérations cyber. Les attaques qu’elle a subies au cours de ces dernières années ont contribué à la prise de conscience globale concernant les « risques cyber » et l’impérieuse nécessité d’en tenir compte dans l’analyse des conflits, notamment en amont du déclenchement cinétique. Ainsi, le cyber est désormais perçu comme pouvant être un nouveau théâtre de conflictualité, qualifié par les militaires de <a href="https://cairn.info/revue-les-champs-de-mars-ldm-2013-1-page-71.htm">cinquième dimension</a> – après la terre, la mer, l’air, et l’espace.</p>
<h2>Un « laboratoire à ciel ouvert »</h2>
<p>De nombreuses attaques cyber et informationnelles, aux cibles et formes variées, ont été observées depuis le début du conflit dans l'est de l’Ukraine. Certaines y ont émergé avant de se propager à d’autres pays.</p>
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<p>Une des premières survenues après le déclenchement du conflit a <a href="https://www.kyivpost.com/article/content/may-25-presidential-election/authorities-hackers-foiled-in-bid-to-rig-ukraine-presidential-election-results-349288.html">ciblé la Commission électorale centrale (CEC)</a> lors de l’élection présidentielle de 2014, premier scrutin postérieur à la <a href="https://www.france24.com/fr/billet-retour/20181123-ukraine-bilan-revolte-maidan-kiev-corruption-russie-ianoukovitch">révolution du Maïdan</a>.</p>
<p>On se souvient également de l’attaque sur la centrale électrique d’Ivano-Frankivsk en 2015, qui avait <a href="https://wired.com/2016/03/inside-cunning-unprecedented-hack-ukraines-power-grid/">privé une partie de la région d’électricité</a> en plein mois de décembre. Les auteurs avaient réussi à accéder aux <a href="https://www.factoryfuture.fr/tout-savoir-systemes-scada/">réseaux SCADA (Système de Contrôle et d’Acquisition de Données)</a>, ce qui a rappelé aux observateurs <a href="https://www.lemondeinformatique.fr/actualites/lire-un-malware-semblable-a-stuxnet-pret-a-cibler-les-systemes-scada-65036.html">l’attaque du virus Stuxnet</a> qui avait ciblé la <a href="https://www.numerama.com/cyberguerre/763181-stuxnet-lespion-qui-voulait-saboter-le-nucleaire-iranien.html">centrale nucléaire iranienne de Natanz en 2009</a>. Cette agression sur les systèmes électriques fait écho à <a href="https://www.controleng.com/articles/throwback-attack-lessons-from-the-aurora-vulnerability/">l’expérience Aurora</a>, réalisée en 2007 par une équipe de l’Idaho National Lab : il avait alors été démontré que le piratage d’infrastructures électriques pouvait détruire définitivement un générateur diesel de 2,25 mégawatts.</p>
<p>Un an plus tard, en 2016, une nouvelle attaque <a href="https://www.lemondeinformatique.fr/actualites/lire-une-cyberattaque-suspectee-de-causer-un-black-out-en-ukraine-66852.html">visant des systèmes électriques</a> a impacté Kiev pendant plusieurs heures.</p>
<p>En 2017, <a href="https://www.cyber-cover.fr/cyber-documentation/cyber-criminalite/cybercriminalite-notpetya-le-malware-a-10-milliards-de-dollars">NotPetya</a> d’abord et <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/monde/vague-internationale-de-cyberattaques_1907798.html">WannaCry</a> ensuite ont défrayé la chronique. En détruisant les données, ces malwares (logiciels malveillants) déguisés en ransomwares (rançongiciels) ont semé le chaos <a href="https://www.cnet.com/tech/services-and-software/uk-said-russia-is-behind-destructive-2017-cyberattack-in-ukraine/">bien au-delà des frontière ukrainienne</a> et ont affecté des entreprises dans <a href="https://www.bbc.com/future/article/20170704-the-day-a-mysterious-cyber-attack-crippled-ukraine">plus d’une centaine pays</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1493670967264133128"}"></div></p>
<p>Si ces cyberattaques ont marqué les esprits par leur ampleur, leur originalité ou à cause du contexte dans lequel elles ont émergé, bien d’autres ont suivi. S’y sont ajoutées de nombreuses <a href="https://www.cairn.info/revue-herodote-2017-1-page-123.htm">attaques informationnelles</a>, notamment conduites via les réseaux sociaux afin d’influencer les populations, que ce soit par la diffusion de fake news et de contenus propagandistes ou en utilisant des <a href="https://www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/visite-guidee-dune-ferme-a-trolls-russe-142088">réseaux de « trolls »</a>.</p>
<h2>Un regain de tension accompagné de nouvelles cyberattaques</h2>
<p>La <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/01/17/une-cyberattaque-en-ukraine-alimente-les-tensions-avec-moscou_6109784_3210.html">cyberattaque de la mi-janvier 2022</a> n’a pas totalement été une surprise pour l’Ukraine : le SBU, le service de renseignement ukrainien, <a href="https://www.ukrinform.net/rubric-society/3396245-sbu-blocks-over-120-cyber-attacks-on-ukrainian-govt-agencies-in-jan.html">dit avoir détecté</a> au cours de ces derniers mois de très nombreux incidents et tentatives d’attaques – y compris des tentatives de connexion à des serveurs de commande et de contrôle pour obtenir des accès non autorisés, des attaques visant des applications web et l’utilisation de malwares.</p>
<p>L’attaque de janvier, qui n’a pas pu être interceptée, a notamment visé des entités gouvernementales impliquées dans la gestion logistique des forces armées, ce qui aurait pu nuire à l’efficience opérationnelle de Kiev en cas de conflit ouvert. Bien que l’attribution de telles opérations soit toujours une affaire délicate et sensible, les <a href="https://www.reuters.com/world/europe/exclusive-ukraine-suspects-group-linked-belarus-intelligence-over-cyberattack-2022-01-15/">regards se tournent</a> vers un groupe de hackers connu sous le qualificatif de UNC 1151, que le haut responsable du Conseil national de sécurité et de défense ukrainien associe <a href="https://www.rfi.fr/fr/europe/20220116-cyberattaque-en-ukraine-kiev-met-en-cause-la-bi%C3%A9lorussie">aux services de renseignement militaire biélorusses</a>, tout en notant des similitudes du malware utilisé avec ceux employés par des hackers présumés russes.</p>
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<p>Le 18 janvier, l’Agence américaine pour la cybersécurité et la sécurité des infrastructures (CISA) <a href="https://www.cisa.gov/sites/default/files/publications/CISA_Insights-Implement_Cybersecurity_Measures_Now_to_Protect_Against_Critical_Threats_508C.pdf">a fortement conseillé</a> aux opérateurs étatsuniens d’infrastructures critiques et vitales de prendre toutes les « mesures urgentes » possibles contre les cybermenaces. Dans cette mise en garde, l’Agence a fait référence aux récentes attaques contre l’Ukraine, susceptibles de préfigurer d’éventuelles menaces à l’encontre des États-Unis, et rappelé les précédents NotPetya et WannaCry, tous deux attribués à la Russie.</p>
<p>Dans le même temps, l’OTAN a prévenu qu’elle <a href="https://www.france24.com/fr/europe/20220114-l-otan-soutient-l-ukraine-contre-les-cyberattaques-apr%C3%A8s-un-piratage-informatique-massif">soutiendrait l’Ukraine face aux cyberattaques</a>. On l’aura compris : le domaine cyber est devenu un champ de conflictualité à part entière. Si besoin était de renforcer cette prise de conscience, une <a href="https://siecledigital.fr/2022/02/16/le-ministere-de-la-defense-ukrainienne-victime-dune-cyberattaque/">attaque par DDoS</a> visant le code du site lui-même vient de frapper le ministère de la Défense ukrainien et deux banques, dont le géant PrivatBank.</p>
<h2>Des attaques qui bénéficient du brouillard de la guerre</h2>
<p>Il est toujours difficile, voire impossible, de rattacher rapidement et avec certitude une attaque à une structure clairement identifiée, qu’il s’agisse d’un groupe de hackers ou d’un État. Les équipes de threat intelligence remontent les traces des attaques pour y relever des marqueurs permettant d’en repérer les initiateurs ; mais l’efficacité de leur travail dépend de nombreux facteurs mouvants, et il est difficile d’identifier avec une absolue certitude des individus qui agissent masqués, qui peuvent imiter des signatures et dont les liens potentiels avec des États sont soigneusement camouflés.</p>
<p>Ainsi, s’agissant d’opérations supposées avoir été commanditées ou opérées par des États, attribuer une cyberattaque représente un geste politique fort. La plus grande prudence reste le plus souvent de mise. C’est pourquoi, en juin 2021, la <a href="https://www.lemonde.fr/pixels/article/2021/01/06/les-etats-unis-estiment-la-russie-probablement-a-l-origine-de-la-cyberattaque-dont-ils-ont-ete-victimes_6065309_4408996.html">réaction de Joe Biden</a> à <a href="https://www.lemonde.fr/blog/binaire/2021/06/18/on-vous-explique-les-attaques-supply-chain/">l’attaque par _supply chain</a>_ connue sous le nom de <a href="https://www.francetvinfo.fr/internet/securite-sur-internet/cyberattaques/solarwinds-ce-que-l-on-sait-sur-la-cyberattaque-massive-qui-touche-notamment-microsoft-et-des-agences-federales-americaines_4223253.html">Solar Gate</a>, qui a affecté de nombreuses institutions américaines, a surpris.</p>
<p>Estimant que l’opération avait été effectuée par la Russie et qu’elle constituait une menace sérieuse pour les États-Unis, Joe Biden a <a href="https://www.whitehouse.gov/briefing-room/presidential-actions/2021/04/15/executive-order-on-blocking-property-with-respect-to-specified-harmful-foreign-activities-of-the-government-of-the-russian-federation/">ordonné des sanctions</a>, créant notamment une liste noire d’entreprises russes du secteur des technologies de l’information (ERA Technopolis, Pasit, SVA, Neobit, AST et Positive Technologies) interdisant aux entreprises et institutions financières américaines de travailler avec ces dernières.</p>
<p>Si les cyberattaques ont modifié le déroulement des conflits en épaississant encore davantage le « brouillard de la guerre », elles ont aussi permis l’apparition de nouveaux acteurs. Dans le cas ukrainien, alors que du matériel militaire russe transite par la Biélorussie pour être acheminé vers les frontières ukrainiennes, un groupe de hackers biélorusses et pro-ukrainiens a opéré un ransomware d’un genre particulier. Alors que ce type d’outil a généralement pour but de chiffrer les données de la cible pour obtenir de l’argent (souvent demandée en cryptomonnaies) en échange de la clé de déchiffrement, les hackers ont, en l’espèce, <a href="https://www.rfi.fr/fr/europe/20220127-cyberattaque-en-bi %c3 %a9lorussie-des-hackers-lancent-un-ran %c3 %a7ongiciel- %c3 %a0-caract %c3 %a8re-politique">conféré une portée politique</a> à leur logiciel : au lieu de demander une rançon à l’Agence biélorusse des chemins de fer, ils ont exigé la libération de prisonniers politiques détenus par Minsk et la fin du transport par voie ferroviaire du matériel militaire russe vers l’Ukraine.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1485615555017117700"}"></div></p>
<h2>L’avantage de la cybercoercition</h2>
<p>Si les États, notamment occidentaux, ont depuis longtemps pris conscience de l’importance de la cyberdéfense, ils peinent encore à développer une approche offensive, notamment en incluant la « cybercoercition ».</p>
<p>Pour mémoire, la <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/01/28/cybercoercition-un-nouveau-defi-strategique_6027444_3232.html">cybercoercition</a> consiste à attaquer des infrastructures critiques d’un État afin de l’empêcher de fonctionner normalement pouvant influencer ses prises de décision. Dans ce cas, la cybercoercition recouvrera les actions engagées par un État pour influencer et affaiblir le gouvernement d’un adversaire. L’objet sera, tout en bénéficiant de la difficulté d’attribution, de <a href="https://www.france24.com/fr/ %C3 %A9co-tech/20200220-la-cybercoercition-un-concept-offensif-de-cyberd %C3 %A9fense">démontrer de manière implicite</a> sa capacité à provoquer des perturbations importantes, tant dans les services de l’État visé que dans ces activités industrielles cruciales voire vitales.</p>
<p>Par exemple, les attaques qui, début février 2022, ont visé des <a href="https://www.leparisien.fr/high-tech/cyberattaque-les-terminaux-petroliers-de-plusieurs-ports-vises-en-allemagne-pays-bas-et-belgique-03-02-2022-PU3Q76DZMNA3VLSZ64P2IFMBJ4.php">ports européens</a> et retardé la distribution de produits énergétiques vers plusieurs pays d’Europe, pourraient apparaître comme relevant de cette cybercoercition. La dépendance de l’Europe envers le gaz russe constituant un point clé des négociations dans la crise ukrainienne, ce retard est loin d’être anodin. S’il est avéré que ces attaques sont imputables à la Russie, il pourrait alors s’agir d’une démonstration de cybercoercition de la part de Moscou, qui marquerait une prise en compte avancée de cet axe par le Kremlin dans sa stratégie cyber…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/177036/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christine Dugoin-Clément ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’Ukraine a dernièrement subi plusieurs cyberattaques de grande ampleur. L’un des avantages que présente le recours à ce type d’agression, c’est qu’il est très difficile de remonter à sa source…Christine Dugoin-Clément, Analyste en géopolitique, membre associé au Laboratoire de Recherche IAE Paris - Sorbonne Business School, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, chaire « normes et risques », IAE Paris – Sorbonne Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1629522021-06-17T17:04:06Z2021-06-17T17:04:06ZSommet Biden-Poutine : quels progrès en matière de cybersécurité ?<p>Le mercredi 16 juin 2021 à Genève, en réponse à un journaliste de CNN, Vladimir Poutine a <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ISVt2E7sdzY">nié</a> toute implication de la Russie dans les cyberattaques visant les États-Unis et toute ingérence dans les élections américaines. Il soutient que les cyberattaques dans le monde proviennent d’abord des États-Unis mêmes, puis du Canada, de l’Amérique latine et du Royaume-Uni.</p>
<p>Le président russe conclut que son pays est lui aussi menacé par les cyberattaques et qu’à la suite de ce sommet, la Maison Blanche et le Kremlin <a href="https://www.aljazeera.com/news/2021/6/16/biden-putin-conclude-geneva-summit-after-hours-of-talks">collaboreront</a> afin de garantir la cybersécurité.</p>
<h2>Les Russes et les élections américaines de ces dernières années</h2>
<p>Concernant l’ingérence dans les élections américaines, rappelons que depuis la campagne électorale de 2016, différentes organisations américaines ne cessent de rapporter une implication russe grandissante, notamment via l’entremise des réseaux sociaux. Un total de <a href="https://blog.twitter.com/en_us/topics/company/2018/2016-election-update">50 258</a> comptes Twitter ont été reliés à des bots russes pendant la période électorale de 2016. Peu de temps avant les élections de mi-mandat en 2018, <a href="https://blog.twitter.com/content/dam/blog-twitter/official/en_us/company/2019/2018-retrospective-review.pdf">4 000</a> comptes Twitter supplémentaires qui étaient en réalité des bots russes ont été suspendus.</p>
<p>Parallèlement, entre 2015 et 2017, l’<em>Internet Research Agency</em> – une entreprise russe – a acheté <a href="https://www.govinfo.gov/content/pkg/CHRG-115shrg27398/pdf/CHRG-115shrg27398.pdf">3 517</a> annonces Facebook (ces informations qui apparaissent dans le fil de nouvelles sur mobile et dans la colonne de droite sur un ordinateur), qui ont par la suite atteint plus de 126 millions d’Américains. Ces mêmes annonces ont été partagées par plus de 30 millions d’Américains dans la même période. Ces annonces représentent un investissement d’environ <a href="https://intelligence.house.gov/calendar/eventsingle.aspx?EventID=583">100 000</a> USD. Les annonces encourageaient notamment les <a href="https://journals.library.columbia.edu/index.php/cjrl/article/view/3409">Afro-Américains</a> à boycotter l’élection et les conservateurs blancs à <a href="https://digitalcommons.unl.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1004&context=senatedocs">chercher la confrontation</a> avec les Démocrates ainsi qu’avec les groupes se revendiquant de Black Lives Matter ou encore avec les organisations de défense des droits des personnes LGBT.</p>
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<p>En outre, la plate-forme <a href="https://www.engadget.com/2019-02-04-russia-spam-account-problem-reddit-propaganda.html">Reddit</a> a supprimé près de 1 000 comptes à la suite des élections de 2016. Ses responsables estiment que la campagne russe conduite sur leur plate-forme a touché plusieurs millions d’Américains. De son côté, <a href="https://www.nytimes.com/2017/10/09/technology/google-russian-ads.html">Google</a> a publié un communiqué affirmant que la Russie avait acheté pour environ 60 000 USD de publicités et d’annonces sur les différentes plates-formes de l’entreprise pendant la campagne électorale de 2016.</p>
<p>En 2018, avant les élections de mi-mandat, plusieurs milliers d’annonces et de publicités ont encore été achetées par l’<em>Internet Research Agency</em> afin d’enflammer plusieurs <a href="https://meduza.io/en/feature/2017/10/15/an-ex-st-petersburg-troll-speaks-out">débats</a>, notamment ceux concernant les violences policières, l’immigration, les droits des communautés LGBTQ+, et le Second Amendement (qui autorise le port d’armes). En 2018 et 2019, Facebook a supprimé <a href="https://www.bostonglobe.com/2021/03/21/opinion/divisive-demoralizing-bots-are-winning-so-big-tech-needs-think-bigger/">9 milliards</a> de faux comptes. L’entreprise estime qu’environ 5 % des comptes actuels sont faux. Parmi ces 9 milliards de faux comptes supprimés, <a href="https://www.cnn.com/2019/11/13/tech/facebook-fake-accounts/index.html">3,3 milliards</a> ont été supprimés juste avant l’élection de mi-mandat en 2018. La proportion de ces comptes liés à la Russie n’a pas été divulguée.</p>
<p>En 2020, en plus de favoriser la réélection de Donald Trump et de dénigrer le candidat Joe Biden et le Parti démocrate, l’objectif était aussi de miner la confiance des Américains en leur propre système et de créer du mécontentement, voire des soulèvements de la population. Les bots ont œuvré à amplifier considérablement le <a href="https://misinforeview.hks.harvard.edu/article/engaging-ira-coordinated-information-operation/">« Big Lie »</a> de Donald Trump. Ils ont soutenu – et soutiennent encore – que l’élection était truquée. En revanche, selon le rapport du <a href="https://www.dni.gov/files/ODNI/documents/assessments/ICA-declass-16MAR21.pdf">National Intelligence Council</a>, en 2020, la Russie n’a pas tenté d’accéder aux infrastructures électorales comme elle l’avait tenté à plusieurs reprises en 2016.</p>
<h2>Une multiplicité de cyberattaques visant des organisations américaines</h2>
<p>Pour ce qui a trait aux cyberattaques, la <a href="https://us-cert.cisa.gov/ncas/alerts/TA18-074A"><em>CyberSecurity et Infrastructure Security Agency</em></a> soutient que depuis au moins 2016, des entités œuvrant pour le gouvernement russe ont ciblé de nombreuses infrastructures américaines, notamment dans les secteurs de l’énergie, du nucléaire, des installations commerciales, de l’eau, de l’aviation et dans le secteur manufacturier. Selon l’enquête de la compagnie américaine <a href="https://symantec-enterprise-blogs.security.com/blogs/threat-intelligence/dragonfly-energy-sector-cyber-attacks">Symantec</a>, les <em>hackers</em> utilisent plusieurs techniques afin d’atteindre et d’accéder à leurs cibles. Des courriels comportant un Cheval de Troie sont utilisés afin d’accéder et de voler les informations personnelles des employés des secteurs clés de l’industrie américaine. Des sites web périphériques sont également créés pour attirer ces employés et mettre la main sur leurs informations et leurs codes d’accès.</p>
<p>Une autre technique utilisée consiste à tenter d’infecter l’entreprise visée par l’entremise de ses <a href="https://us-cert.cisa.gov/ncas/alerts/TA18-074A">partenaires</a>. Si l’entreprise ou l’industrie visée est extrêmement bien sécurisée, les <em>hackers</em> peuvent tenter d’infecter un maximum de ses partenaires en espérant que l’organisation ciblée soit, à terme, contaminée par l’un d’eux.</p>
<p>L’une des plus grosses cyberattaques – le <a href="https://www.microsoft.com/security/blog/2020/12/18/analyzing-solorigate-the-compromised-dll-file-that-started-a-sophisticated-cyberattack-and-how-microsoft-defender-helps-protect/"><em>Solorigate</em></a> – s’est d’ailleurs déroulée sur un principe semblable, sur plus d’un an, entre septembre 2019 et décembre 2020. Elle visait la compagnie américaine <em>SolarWinds</em>, qui développe et fournit des logiciels de gestion de réseaux et d’infrastructures informatiques. Selon le gouvernement américain, la Russie est derrière cette attaque qualifiée d’« attaque la plus importante et la plus sophistiquée de tous les temps » par le président de Microsoft Corporation <a href="https://www.reuters.com/article/us-cyber-solarwinds-microsoft-idUSKBN2AF03R">Brad Smith</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1361617319408111618"}"></div></p>
<p>Les logiciels de <em>SolarWinds</em> étant utilisés par des milliers d’entreprises et d’entités gouvernementales, l’attaque aurait potentiellement contaminé jusqu’à <a href="https://www.reuters.com/article/us-cyber-solarwinds-microsoft-idUSKBN2AF03R">18 000</a> clients aux États-Unis. Les <em>hackers</em> ont glissé une <em>backdoor</em> dans la mise à jour Orion du mois de mars 2020, permettant ainsi d’espionner les utilisateurs et d’accéder à leurs données. À la suite de la découverte de cette attaque, <em>le National Security Council</em> a créé le <a href="https://www.cisa.gov/news/2021/01/05/joint-statement-federal-bureau-investigation-fbi-cybersecurity-and-infrastructure"><em>Cyber Unified Coordination Group</em></a>, rassemblant le FBI, la <a href="https://www.cisa.gov/">CISA</a>, l’<a href="https://www.dni.gov/">ODNI</a> et la <a href="https://www.nsa.gov/">NSA</a> afin d’enquêter sur les failles de sécurité et les conséquences potentielles. Les cibles touchées incluent Le Pentagone, le département de l’Énergie, le département d’État, le département de la Sécurité intérieure, <a href="https://blog.truesec.com/2020/12/17/the-solarwinds-orion-sunburst-supply-chain-attack/">Microsoft</a>, des entités du secteur de la santé, des entreprises informatiques, des universités, etc.</p>
<p>D’autres attaques ont eu lieu depuis, notamment celle contre le <a href="https://www.reuters.com/technology/microsoft-says-group-behind-solarwinds-hack-now-targetting-government-agencies-2021-05-28/"><em>Colonial Pipeline</em></a> le 7 mai 2021.</p>
<p>L’attaque venait d’un groupe de <em>hackers</em> russes, mais n’a pas été jusqu’ici reliée au gouvernement russe en tant que tel, et a coûté plus de 4,4 millions dollars, versés en <a href="https://www.cnn.com/2021/06/07/politics/colonial-pipeline-ransomware-recovered/index.html">bitcoins</a>, à l’entreprise <em>Colonial Pipeline Co</em>. Le 27 mai dernier, une autre attaque russe, <a href="https://blogs.microsoft.com/on-the-issues/2021/05/27/nobelium-cyberattack-nativezone-solarwinds/"><em>Nobelium</em></a>, a visé des agences gouvernementales, des ONG, des <em>think tanks</em> et de nombreuses entreprises de consulting. Plus de <a href="https://blogs.microsoft.com/on-the-issues/2021/05/27/nobelium-cyberattack-nativezone-solarwinds/">3 000</a> comptes mails provenant de 24 pays différents ont été atteints. En pleine pandémie, d’autres attaques venant du groupe de <em>hackers</em> russe <a href="https://blogs.microsoft.com/on-the-issues/2020/11/13/health-care-cyberattacks-covid-19-paris-peace-forum/">Strontium</a> ont également visé des compagnies pharmaceutiques et d’autres entités du secteur de la santé, notamment l’<a href="https://www.reuters.com/article/us-health-coronavirus-who-hack-exclusive/exclusive-elite-hackers-target-who-as-coronavirus-cyberattacks-spike-idUSKBN21A3BN">OMS</a>, des cliniques au Texas et en Illinois, le système des hôpitaux de <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2020-03-23/paris-hospitals-target-of-failed-cyber-attack-authority-says">Paris</a>, le système informatique des hôpitaux d’<a href="https://www.straitstimes.com/world/europe/british-hospitals-spanish-firms-hit-by-cyber-attacks">Espagne</a>, etc.</p>
<h2>Et maintenant ?</h2>
<p>Ces nombreuses attaques, de plus en plus sophistiquées, ont pour effet de miner la confiance générale vis-à-vis de l’environnement technologique puisque, selon Microsoft, les <em>hackers</em> responsables de <em>Solorigate</em> ont réussi à mener à bien cette large opération en laissant un minimum de <a href="https://www.microsoft.com/security/blog/2021/01/20/deep-dive-into-the-solorigate-second-stage-activation-from-sunburst-to-teardrop-and-raindrop/">traces</a>. C’est en raison d’attaques comme <em>Solorigate</em> que Joe Biden a souligné à Genève le 16 juin qu’il avait donné à son homologue russe une liste de <a href="https://www.aljazeera.com/news/2021/6/16/biden-putin-conclude-geneva-summit-after-hours-of-talks">16</a> types d’infrastructures qui ne devraient jamais faire l’objet de cyberattaques, incluant les secteurs de l’énergie et de l’eau.</p>
<p>Les discussions sur la cybersécurité qui, comme l’ont annoncé les deux présidents, doivent découler de ce sommet, vont-elles aboutir à la fin d’opérations de ce type ? Il est permis d’en douter, comme le fait le chercheur <a href="https://www.wjla.com/news/nation-world/biden-putin-to-start-cybersecurity-talks-after-long-anticipated-geneva-summit">Cyrus Newlin</a>, du Center for Strategic and International Studies à Washington, qui estime, dans un entretien avec ABC, qu’il est peu probable que ces déclarations d’intention assez floues changent quoi que ce soit…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/162952/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sophie Marineau ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La Russie est souvent accusée d’être derrière les cyberattaques visant des entreprises et des infrastructures américaines. Ce sujet a été l’un des grands thèmes de la récente rencontre Biden-Poutine.Sophie Marineau, Doctorante en histoire des relations internationales / phD candidate History, International relations, Université catholique de Louvain (UCLouvain)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1570602021-03-17T19:20:15Z2021-03-17T19:20:15ZÉtats-Unis : l’avenir du parti républicain, un enjeu de démocratie<p>Depuis le départ de Donald Trump de la Maison Blanche, le parti républicain au Congrès est tiraillé entre trois factions de taille inégale.</p>
<p>D’une part, on retrouve les quelques « courageux » qui, au péril de leur survie politique, ont voté la mise en accusation de l’ex-président à la Chambre (ces représentants sont au nombre de dix, dont les plus emblématiques sont <a href="https://www.lexpress.fr/actualites/1/monde/liz-cheney-porte-voix-des-republicains-anti-trump_2144454.html">Liz Cheney</a> et <a href="https://www.courrierinternational.com/article/lettre-tu-rejoint-larmee-du-diable-adam-kinzinger-republicain-anti-trump-renie-par-sa">Adam Kinzinger</a>.</p>
<p>De l’autre, l’aile « légitimiste », caractérisée par l’ambiguïté dont le leader du parti au Sénat, Mitch McConnell, est l’incarnation : il a <a href="https://www.journaldemontreal.com/2021/02/13/bien-quacquitte-trump-responsable-de-lassaut-du-capitole-dit-mcconnell-1">voté l’acquittement puis immédiatement dénoncé</a> la responsabilité morale et politique (à défaut de juridique, difficile à prouver) de Donald Trump dans l’assaut contre le Capitole le 6 janvier. McConnell sait qu’il est urgent de sortir le parti de la dangereuse emprise de l’ancien président, mais il a besoin des électeurs de ce dernier.</p>
<p>La troisième faction est constituée des inconditionnels de Trump comme le sénateur Lindsay Graham (Caroline du Sud) et le leader républicain à la Chambre Kevin McCarthy, qui estiment qu’ils doivent faire allégeance à l’ex-président pour garder ses électeurs, lesquels ont été, et sont encore, abreuvés de mensonges, notamment sur l’élection présidentielle qui aurait été « volée » à leur champion. D’ailleurs, Graham et McCarthy vont <a href="https://edition.cnn.com/2021/02/19/politics/lindsey-graham-mar-a-lago-trump-gop-feud/index.html">l’un</a> et <a href="https://www.thedenverchannel.com/news/national-politics/rep-house-leader-mccarthy-meets-with-trump-at-mar-a-lago-to-discuss-2022-strategy">l’autre</a> régulièrement baiser l’anneau du grand leader à Mar-a-Lago, Floride, où il réside désormais.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1355131187979685891"}"></div></p>
<p>Convaincue que le salut passe par Trump, cette aile rassemble tous ceux qui ont voté <a href="https://www.nytimes.com/interactive/2021/01/07/us/elections/electoral-college-biden-objectors.html">contre la reconnaissance de la certification de la victoire de Joe Biden</a> le 6 janvier, après l’attaque du Capitole, soit <a href="https://ballotpedia.org/Impeachment_of_Donald_Trump">139 représentants et 7 sénateurs</a>, ainsi que, au plan local, les antennes du parti qui ont censuré les rares Républicains ayant voté la mise en accusation ou la culpabilité. En outre, on retrouve dans ce groupe certains médias comme Fox News, désormais doublée sur sa droite par America News Network (OANN) et News Max. Quant aux organisateurs de la conférence annuelle des conservateurs, la CPAC, ils ont spécialement choisi de l’organiser en 2021 en <a href="https://www.miamiherald.com/news/politics-government/article249511905.html">Floride</a>, fin février. Dans le calcul de ces politiques, la peur des représailles et le risque d’être confrontés à un extrémiste pro-Trump à la primaire de 2024 jouent un rôle central. L’alignement qui en résulte comporte des risques pour le parti et pour le pays.</p>
<p>En effet, la direction qui sera choisie par le parti (ou imposée de l’extérieur) concerne non seulement le parti républicain mais aussi, ainsi que l’histoire nous l’apprend, l’avenir démocratique des États-Unis.</p>
<p>Le dilemme du parti républicain est évident : il représente les nantis et une catégorie d’électeurs en voie de devenir la minorité démographique, les Blancs de la classe moyenne. Les Républicains ont compris que la <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/la-question-du-jour/armes-a-feu-pourquoi-chicago-est-elle-toujours-lune-des-villes-les-plus-dangereuses-des-etats-unis">démographie joue contre eux</a> ; en conséquence, ils ont <a href="https://www.lefigaro.fr/elections-americaines/guerre-culturelle-en-amerique-la-derniere-chance-des-conservateurs-20201030">instrumentalisé la guerre culturelle</a> (avortement, immigration, port d’armes) afin d’amener les cols bleus et la classe moyenne à voter contre leurs intérêts économiques.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1369444163075325955"}"></div></p>
<h2>La domination républicaine dans les États</h2>
<p>Pour cela, ils mobilisent pleinement les armes constitutionnelles, à commencer par la règle des deux sénateurs par État qui permet aux sénateurs républicains de tout bloquer par le <a href="https://theconversation.com/fact-check-us-lobstruction-parlementaire-lun-des-obstacles-majeurs-a-venir-pour-joe-biden-153902">filibuster</a> alors qu’ils représentent 44 % des électeurs. C’est ainsi qu’ils ont bloqué toutes les initiatives de Barack Obama, la loi santé ayant été adoptée en vertu de la procédure de réconciliation qui ne requiert pas de super majorité et échappe au piège du filibuster. </p>
<p>En outre, depuis des années, ils n’hésitent pas à <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/10/30/midterms-comment-le-gerrymandering-ou-charcutage-electoral-pese-sur-l-election-americaine_5376458_4355770.html">changer les règles de la compétition électorale</a> afin que les électeurs qui ont tendance à voter démocrate aient des difficultés à exercer leur droit. C’est facile pour eux car la Constitution confie aux législatures des États fédérés le soin de définir les règles du jeu électoral. Or, alors que les Démocrates ont remporté le suffrage populaire lors de six des sept dernières élections présidentielles, les Républicains <a href="https://www.washingtonpost.com/opinions/2021/02/18/republicans-now-enjoy-unmatched-power-states-it-was-40-year-effort/?arc404=tru">ont la mainmise</a> sur les législatures dans 30 États sur 50.</p>
<p>En 40 ans, les Républicains ont renversé la domination des Démocrates qui, en 1980, détenaient la majorité dans les législatures de 29 États contre 15 aux Républicains). En 2020, les Républicains sont majoritaires dans 30 États et les Démocrates dans seulement 16. Or, c’est là que se décident les règles du droit électoral que la Constitution confie aux États fédérés. Ainsi la possibilité ou non de voter par correspondance, le nombre de jours de vote anticipé ou l’exigence d’une carte d’identité bien particulière pour pouvoir voter.</p>
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<p>Ce sont aussi les législatures, sauf s’il existe une commission indépendante dans l’État, qui vont procéder au découpage électoral après le recensement décennal de 2020.</p>
<p>Dès la défaite de Trump, plusieurs États aux mains des Républicains ont encore durci les conditions d’exercice du droit de vote : <a href="https://www.brennancenter.org/our-work/research-reports/voting-laws-roundup-january-2021">406 mesures dans 35 États</a> selon le Brennan Center. Ils ont bon espoir que ces modifications ne seront pas censurées car ils comptent sur une Cour suprême où siège une <a href="https://theconversation.com/la-legitimite-de-la-cour-supreme-americaine-a-lepreuve-de-son-conservatisme-150154">majorité de six conservateurs</a> pour valider leurs modifications du droit électoral. Celles-ci sont toujours présentées comme des moyens de lutter contre la fraude électorale – en réalité <a href="https://www.brennancenter.org/our-work/analysis-opinion/false-narrative-vote-mail-fraud">inexistante</a> – alors qu’elles visent à rendre le vote plus difficile – ce qu’on appelle la <a href="https://www.aclu.org/issues/voting-rights/fighting-voter-suppression">« voter suppression »</a>.</p>
<h2>Quelle orientation pour le parti républicain ?</h2>
<p>Sans entrer dans les détails que développe Daniel Ziblatt dans son ouvrage, <a href="https://www.cambridge.org/core/books/conservative-parties-and-the-birth-of-democracy/919E566A69893DA8E25F845349D5C161"><em>Conservative Parties and the Birth of Democracy</em></a>, où il compare les cas britannique et allemand durant les années 1930, il apparaît que le centre-droit joue un rôle central dans la survie des démocraties libérales : soit il comprend la nécessité d’ostraciser l’extrême droite et de la priver d’oxygène, soit il signe un pacte faustien avec les extrémistes dans l’espoir de les contrôler tout en profitant de leur attrait populiste. Mais l’histoire montre que lorsque de tels pactes sont signés, c’est le parti lui-même qui se retrouve « kidnappé » par l’extrême droite. Au sein des partis conservateurs, la relation entre la base et la direction a des répercussions sur le système politique dans son ensemble ; et de l’organisation des partis dépend la survie de la démocratie.</p>
<p>Si l’on suit cette grille d’analyse, plusieurs voies s’ouvrent au parti républicain après Trump : prendre ses distances avec l’ex-président ou s’allier avec lui et, donc, avec l’extrême droite. Une troisième voie, plus difficile, consisterait à proposer des politiques et arguments susceptibles de convaincre de nouveaux électeurs. En 2012 déjà, les Républicains avaient compris qu’ils étaient minoritaires et que s’ils voulaient atteindre de nouveaux groupes – notamment les jeunes et les non-Blancs –, ils devaient tendre la main à ceux-ci et faire évoluer leurs positions ; or c’est pratiquement impossible car leur message fondamental, hostile à l’« assistanat » et favorable à l’orthodoxie budgétaire (surtout lorsque les Démocrates sont au pouvoir), est aux antipodes de ce que souhaite la majeure partie de ces électeurs.</p>
<p>Illustration : le <a href="https://www.lesechos.fr/monde/etats-unis/lutte-contre-le-covid-joe-biden-prend-des-mesures-fortes-des-son-investiture-1283097">plan anti-Covid de l’administration Biden</a>, adopté le 10 mars dernier, jouit du soutien de <a href="https://www.cnbc.com/2021/02/03/biden-1point9-trillion-covid-relief-plan-has-wide-support-poll-finds.html">70 % de la population</a>, donc d’une partie de ceux qui ont voté républicain. Le président a eu le courage de le faire passer en force, malgré l’<a href="https://www.lesechos.fr/monde/etats-unis/covid-joe-biden-maintient-sa-position-pour-son-plan-de-sauvetage-de-leconomie-1286579">obstruction</a> des Républicains, déguisée en effort de coopération bi-partisane. </p>
<p>Et cela, pour deux raisons au moins. La première est que son coût, près de 2 000 milliards de dollars, est à peine supérieur (en termes d’augmentation du déficit budgétaire), à celui dû à la <a href="http://www.ires.fr/index.php/publications/chronique-internationale-de-l-ires/item/5677-etats-unis-une-reforme-fiscale-au-profit-des-entreprises-et-des-particuliers-les-plus-riches">baisse d’impôts voulue et obtenue par Donald Trump en 2017 (TJCA)</a>, qui aurait coûté entre 1 000 et 1 400 milliards de dollars, selon les sources. La seconde est que ce plan aide les États, mais aussi les familles, les menacés d’éviction et les enfants. En d’autres termes, il s’agit pour les Démocrates de livrer une vraie « guerre contre la pauvreté », laquelle a crû considérablement à cause de la pandémie, et de se différencier ainsi des Républicains, accusés par les progressistes d’avoir livré une guerre non pas à la pauvreté mais <a href="https://republicansexposed.org/republicans-war-on-the-poor/">aux pauvres</a>.</p>
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<p>Dans ce contexte, le parti républicain est condamné à s’enfermer dans un message fondé sur le ressentiment éprouvé par les « makers » (ceux qui estiment qu’ils travaillent et produisent la richesse du pays) envers les « takers » (tous ceux qui, dans cette vision des choses, profitent indûment du filet social financé par les premiers). Et comme il est numériquement minoritaire, le parti républicain est voué, pour gagner, à empêcher autant que possible le camp d’en face de voter (la <em>voter suppression</em> évoquée ci-dessus) et/ou à succomber à la tentation extrémiste pour mobiliser toujours davantage son propre camp.</p>
<h2>Tentation extrémiste et faiblesse du parti républicain</h2>
<p>La tentation extrémiste consiste à se reposer sur une base activiste qui tend à se montrer plus extrémiste que la direction du parti. Se pose alors la question de savoir qui contrôle le parti. Autrement dit, existe-t-il des pare-feux organisationnels susceptibles de mobiliser les électeurs et les activistes tout en permettant aux dirigeants de garder le contrôle du parti ? S’il y en a, la démocratie est protégée. Mais si le parti est faible et composé de groupes divers comme c’est le cas du parti républicain actuel, il est difficile aux dirigeants de garder le contrôle. Or, il existe au sein du parti de l’éléphant des factions très différentes : la classe des donateurs (qui correspond à l’aile économique et financière attachée à la déréglementation et à la baisse des impôts), la droite religieuse, mais aussi tous les électeurs animés par le ressentiment cultivé par Trump.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1366341647617908736"}"></div></p>
<p>De plus, le parti subit l’influence des médias de droite qui imposent les messages et lui ont fait perdre sa fonction de contrôle à l’entrée de la classe politique. Il est devenu dépendant du « complexe média industriel » qui lui souffle idées et interdits, et de forces extérieures qui façonnent le message du parti et font pression sur lui.</p>
<p>En raison de la dérégulation des financements électoraux par la Cour suprême des États-Unis (décision <a href="https://www.brennancenter.org/our-work/research-reports/citizens-united-explained">Citizens United</a> de 2010), les groupes d’intérêts puissants et riches et des organisations comme <a href="https://www.alec.org/">ALEC</a> (piloté par les <a href="https://www.lapresse.ca/international/etats-unis/2019-08-26/l-heritage-des-freres-koch">frères Koch</a>) au niveau des États peuvent dépenser des millions de dollars et noyer le message des candidats et du parti sous un barrage de publicités politiques. Dès lors, le parti républicain n’est plus qu’une maison vide (d’idées) et si la machine gagne encore des élections, ce n’est pas sur un programme et des idées, mais seulement sur l’émotion et le charisme d’un leader populiste.</p>
<h2>Le problème de l’argent opaque</h2>
<p>C’est l’argent opaque (<em><a href="https://www.cnbc.com/2021/01/13/dark-money-gop-fund-funneled-millions-groups-that-pushed-voter-fraud-claims.html">dark money</a></em>) qui a mené à la radicalisation du parti républicain au niveau des primaires présidentielles.</p>
<p>Au fil des années, on a vu émerger une série d’individus qui, sans cet argent extérieur, n’auraient eu aucune chance de gagner la nomination ou même de se maintenir dans la compétition pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois. Avec la dérégulation du financement des élections par la Cour suprême, les partis ont perdu leur monopole sur le financement des campagnes et donc ce sont des groupes extérieurs qui façonnent l’agenda. L’argent est désormais déversé par les groupes « opaques », combinaison de <a href="https://www.opensecrets.org/political-action-committees-pacs/super-pacs/2020">superPacs</a> et de <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/495104/financement-etats-unis">groupes 501 (c)</a>, qui peuvent collecter et dépenser sans limite depuis la décision Citizens de la Cour suprême en 2010. </p>
<p>Ceux-ci bénéficient d’un statut fiscal favorable et de surcroît ne sont pas soumis à l’obligation de divulguer le nom de leurs (riches) donateurs. Ils alimentent de façon opaque les superPacs qui ensuite dépensent des sommes illimitées en publicités politiques (à 80 % négatives) en faveur des candidats de leur choix et contre des adversaires choisis par eux et non par le parti, alors qu’ils ne jouissent d’aucune légitimité. L’argent sous le contrôle des partis politiques et des candidats est noyé sous les dépenses dites indépendantes (dont il est quasi impossible de tracer la source) faites par des groupes et individus qui ne sont pas responsables devant les électeurs.</p>
<p>De surcroît, le parti républicain risque d’avoir de plus en plus de difficultés à collecter des fonds car l’ancien président a <a href="https://www.thedenverchannel.com/news/national-politics/republican-national-committee-defends-right-to-use-trump-name-after-cease-and-desist-letter">interdit</a> aux comités républicains (RNC) au plan national, l’un pour les élections sénatoriales et l’autre pour les élections à la chambre, d’utiliser son nom dans leurs collectes de fonds. Comme toujours, Donald Trump est plus attaché à son pouvoir et à son désir de vengeance contre ceux qui ont osé voter contre lui (qu’il souhaite torpiller lors des élections primaires de 2022) en leur opposant des extrémistes qui lui sont « 100 % loyaux » qu’à la bonne santé du parti. Les deux comités ont rétorqué en affirmant leur droit (en vertu du premier amendement qui garantit la liberté d’expression) à utiliser le nom et l’image de Trump car c’est un personnage public. Le combat pour les électeurs de Trump et pour l’argent des donateurs ne fait que commencer.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/157060/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Anne E. Deysine ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Otage de la guerre que se livrent en son sein les pro-Trump et ceux qui veulent se démarquer de l’héritage de l’ex-président, le parti républicain semble voué à sombrer dans une surenchère droitière.Anne E. Deysine, Professeur émérite juriste et américaniste, spécialiste Etats-Unis, questions politiques, sociales et juridiques (Cour suprême), Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1560732021-02-25T21:00:31Z2021-02-25T21:00:31ZÀ quoi s’occupent les ex-présidents ? Trump et la vie après la Maison-Blanche<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/386554/original/file-20210225-19-2dsnia.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=40%2C0%2C4489%2C2970&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Sur cette photo datant de juillet 2020, l'ancien président Donald Trump se tient devant une image du Mont Rushmore, dans le Dakota du Sud, où ont été sculptés dans la pierre les visages des présidents Theodore Roosevelt, Thomas Jefferson, George Washington et Abraham Lincoln. </span> <span class="attribution"><span class="source">Photo AP/Alex Brandon</span></span></figcaption></figure><p>Dans son roman, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_G%C3%A9n%C3%A9ral_dans_son_labyrinthe"><em>Le Général dans son labyrinthe</em></a>, l’auteur Gabriel Garcia Marquez, raconte les derniers jours de Simon Bolivar, premier président de la Colombie, qui a fui Bogota en 1830 après avoir renoncé au pouvoir.</p>
<p>Malade et mourant, le « libertador » sud-américain est décrit dans le livre comme un homme secoué par sa fin imminente et celle de sa course effrénée pour réaliser ses ambitions. « Comment vais-je me sortir de ce labyrinthe ? », soupira-t-il un jour…</p>
<p>Donald Trump est-il le <a href="https://www.britannica.com/biography/Simon-Bolivar">Simon Bolivar</a> des temps modernes ?</p>
<p>L’ex-président est certainement confronté à ses démons depuis son départ. Il a subi de multiples humiliations, dont celle d’avoir connu <a href="https://www.bbc.com/news/av/world-us-canada-55656219">deux procès en destitution</a>, d’avoir perdu les élections, <a href="https://www.pbs.org/newshour/politics/riot-lawsuit-just-part-of-trumps-post-impeachment-problems">d’être maintenant la cible de poursuites</a> et de <a href="https://www.forbes.com/sites/danalexander/2020/10/19/trump-will-have-900-million-of-loans-coming-due-in-his-second-term-if-hes-reelected/">devoir rembourser des millions en prêts</a>. Ces malheurs pourraient bien ébranler les entreprises de Trump et transformer la Trump Tower en tour infernale.</p>
<p>Que fera-t-il de sa vie après la Maison-Blanche ?</p>
<p><a href="https://www.cnn.com/2021/02/20/politics/trump-cpac-republican-party/index.html">Nous le saurons peut-être bientôt lorsque qu’il prendra la parole lors de la Conservative Political Action Conference, connue sous le nom de CPAC, ce week-end</a>. Il y parlera probablement de l’avenir du parti républicain — et de son rôle dans celui-ci.</p>
<h2>Des retraites productives</h2>
<p>Comment tous les autres anciens présidents ont-ils occupé leur temps ?</p>
<p>Même si les connaissances de Trump en histoire sont limitées (il a parlé de l’abolitionniste Frederick Douglass, décédé en 1895, comme s’il <a href="https://www.cnn.com/2017/02/02/politics/donald-trump-frederick-douglass">était toujours vivant</a> et a suggéré que l’armée continentale avait envahi des aéroports pendant la <a href="https://time.com/5620936/donald-trump-revolutionary-war-airports/">révolution américaine</a>), les leçons du passé pourraient néanmoins l’aider à réfléchir de manière productive au prochain chapitre de sa vie.</p>
<p>Les présidents fondateurs — George Washington, John Adams et Thomas Jefferson — ont tous eu une vie active après avoir quitté leurs fonctions en s’occupant de leurs plantations et de la gestion de leur ferme ; Trump pourrait aussi retourner à ses activités commerciales.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/385578/original/file-20210222-19-14bmk3n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Une pancarte sur une remise à claques blanche indique Adams Homestead, Erected 1717" src="https://images.theconversation.com/files/385578/original/file-20210222-19-14bmk3n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/385578/original/file-20210222-19-14bmk3n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/385578/original/file-20210222-19-14bmk3n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/385578/original/file-20210222-19-14bmk3n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/385578/original/file-20210222-19-14bmk3n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/385578/original/file-20210222-19-14bmk3n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/385578/original/file-20210222-19-14bmk3n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Une pancarte sur une remise commémore la maison de ferme de John Adams, vieux de 304 ans, à Newington, N.H.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AP Photo/Robert F. Bukaty</span></span>
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</figure>
<p>Adams et Jefferson ont également profité de leur nouveau temps libre pour étudier la philosophie, la religion et l’histoire. Jefferson a transposé son intérêt pour la science dans les cultures de sa <a href="https://www.monticello.org/slavery-at-monticello/life-monticello-plantation/living-monticello-plantation">plantation de Monticello en Virginie</a> — et <a href="https://www.virginia.edu/aboutuva">a fondé l’Université de Virginie</a>.</p>
<p>Adams et Jefferson ont entretenu une <a href="http://nationalhumanitiescenter.org/pds/livingrev/religion/text3/adamsjeffersoncor.pdf">vaste correspondance</a> entre eux. Les lettres du second président pouvaient être très critiques vis-à-vis de ses semblables ou encore d’une charmante autodérision.</p>
<p>Le fils du second président, John Quincy Adams, a choisi une autre voie après avoir perdu l’élection de 1828, âprement disputée, contre Andrew Jackson. Refusant de prendre sa retraite au Massachusetts, il a accompli neuf mandats à la Chambre des représentants. <a href="https://history.house.gov/Historical-Highlights/1800-1850/The-death-of-Representative-John-Quincy-Adams-of-Massachusetts/">Il est même mort dans la salle des orateurs</a> après s’être effondré au cours d’un débat, mettant ainsi fin à une carrière post Maison-Blanche dans laquelle il fut l’une des plus importantes voix abolitionnistes au pays.</p>
<p>Ulysses S. Grant a également suivi son propre chemin… littéralement.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/385576/original/file-20210222-13-1p5pjbh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Une statue grandeur nature du Général Ulysses S. Grant" src="https://images.theconversation.com/files/385576/original/file-20210222-13-1p5pjbh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/385576/original/file-20210222-13-1p5pjbh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=880&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/385576/original/file-20210222-13-1p5pjbh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=880&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/385576/original/file-20210222-13-1p5pjbh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=880&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/385576/original/file-20210222-13-1p5pjbh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1106&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/385576/original/file-20210222-13-1p5pjbh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1106&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/385576/original/file-20210222-13-1p5pjbh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1106&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Une statue grandeur nature du Général Ulysses S. Grant, stylisée d’après une photographie, dans la bibliothèque présidentielle Ulysses S. Grant au Mississippi.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AP Photo/Rogelio V. Solis</span></span>
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</figure>
<p>Lui et sa femme, Julia Grant, ont pris deux ans <a href="https://www.pbs.org/wgbh/americanexperience/features/grant-tour/">pour faire le tour du monde</a>. Héros de la guerre civile, Grant était célébré partout sur son passage. Le couple a pris le thé au Château de Windsor (où la reine Victoria a trouvé Mme Grant « courtoise et sympathique à sa manière ») et discuté pendant des <a href="https://www.historynet.com/encounter-ulysses-s-grant-talks-war-otto-von-bismarck.htm">heures avec Otto von Bismarck</a> après que le Général Grant eut simplement frappé à sa porte.</p>
<p>De retour chez lui, l’ancien président s’est présenté pour la troisième fois à la Maison Blanche — <a href="https://www.nps.gov/articles/000/-if-any-outsider-is-taken-i-hope-it-will-be-garfield-the-1880-republican-convention.htm">mais il a été devancé à la convention républicaine de 1880 par James A. Garfield</a>. Les dernières années de Grant ont ensuite été consacrées à la lutte contre les difficultés financières et le cancer, avec Samuel Clemens — plus connu sous le nom de Mark Twain — qui l’a incité à écrire ses mémoires <a href="https://www.gutenberg.org/files/4367/4367-h/4367-h.htm">considérées comme un chef-d’œuvre</a>.</p>
<h2>Anciens présidents modernes</h2>
<p>Le XX<sup>e</sup> siècle offre plus de variété.</p>
<p>La carrière post-présidentielle de Theodore Roosevelt se distingue par son caractère épique. Après l’inauguration de son successeur, William Howard Taft, Roosevelt a dirigé une expédition de chasse au gros gibier en Afrique pour la Smithsonian Institution et le Musée d’histoire naturelle de New York. <a href="https://www.smithsonianmag.com/smithsonian-institution/teddy-roosevelts-epic-strangely-altruistic-hunt-white-rhino-180958626/">Les chasseurs ont tué 11 400 bêtes, dont six rhinocéros blancs</a></p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Trump se tient devant un tableau de Theodore Roosevelt" src="https://images.theconversation.com/files/385581/original/file-20210222-13-yrbjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/385581/original/file-20210222-13-yrbjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/385581/original/file-20210222-13-yrbjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/385581/original/file-20210222-13-yrbjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/385581/original/file-20210222-13-yrbjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/385581/original/file-20210222-13-yrbjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/385581/original/file-20210222-13-yrbjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Sur cette photo datant de décembre 2018, Trump se tient devant un tableau de l’ancien président américain Theodore Roosevelt dans la salle Roosevelt de la Maison Blanche.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AP Photo/Jacquelyn Martin</span></span>
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<p>Comme Grant avant lui, <a href="https://millercenter.org/president/roosevelt/life-after-the-presidency">Roosevelt a continué de voyager</a>, pendant des mois en Europe pour rencontrer les monarques et les chefs de gouvernement. Et comme Grant, l’accueil triomphal par les siens à son retour a ravivé son appétit politique. Mais comme pour Grant, sa tentative a échoué.</p>
<p>Se présentant comme un « orignal mâle » progressiste, <a href="https://www.history.com/this-day-in-history/teddy-roosevelt-nominated-as-bull-moose-candidate">Roosevelt a décidé de créer un troisième parti</a> lorsque la convention républicaine de 1912 a <a href="https://rmc.library.cornell.edu/vote/1912/index.html">plutôt reconduit Taft</a> à la tête du parti et que Woodrow Wilson a gagné la Maison Blanche avec 42 % des votes populaires.</p>
<p>Taft a ensuite eu un avenir semblable à celui de John Quincy Adams. Après avoir été professeur de droit à Yale, il a été nommé <a href="https://www.biography.com/us-president/william-howard-taft">président de la Cour suprême en 1921</a>.</p>
<h2>Mémoires et bibliothèques</h2>
<p>Au milieu du XX<sup>e</sup> siècle, la vie après la Maison Blanche a eu ses constantes. À commencer par Harry Truman, chaque président — à l’exception tragique de John F. Kennedy — a écrit ses mémoires et contribué à construire les bibliothèques présidentielles, réprimant ainsi sans doute leurs envies de revenir à la politique.</p>
<p>Certains ont profité de cette période d’écriture pour se détendre. Dwight Eisenhower, par exemple, a joué au golf, est allé pêcher et a joué au bridge (ce qu’il faisait déjà régulièrement lorsqu’il était à la Maison-Blanche).</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/vglwPqaDFVo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Eisenhower s’est mis au golf après avoir quitté la Maison Blanche. Avec l’aimable autorisation du World Golf Hall of Fame.</span></figcaption>
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<p>Certains ex-présidents ont été limités dans leur projet en raison de leur état de santé (<a href="https://www.theatlantic.com/magazine/archive/1973/07/the-last-days-of-the-president/376281/">Lyndon Johnson avait des problèmes cardiaques</a> et <a href="https://www.today.com/health/25-years-ago-president-ronald-reagan-announced-his-alzheimer-s-t166960">Ronald Reagan a souffert de la maladie d’Alzheimer</a>). L’un d’entre eux — Richard Nixon — a travaillé d’arrache-pied pour rétablir sa réputation en <a href="https://geraldrfordfoundation.org/kasey-pipes-the-resurrection-of-richard-nixon-our-elder-statesman/">devant une éminence grise auprès d’autres présidents</a>.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/385597/original/file-20210222-13-wojd5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Jimmy Carter sourit" src="https://images.theconversation.com/files/385597/original/file-20210222-13-wojd5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/385597/original/file-20210222-13-wojd5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/385597/original/file-20210222-13-wojd5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/385597/original/file-20210222-13-wojd5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/385597/original/file-20210222-13-wojd5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/385597/original/file-20210222-13-wojd5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/385597/original/file-20210222-13-wojd5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Sur cette photo de novembre 2019, l’ancien président Jimmy Carter enseigne à l’école du dimanche à l’église baptiste Maranatha de Plains, Ga.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AP Photo/John Amis</span></span>
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</figure>
<p>Plusieurs d’entre eux ont consacré leur énergie et leur renommée à la création de nouveaux services publics — par exemple, le <a href="https://www.cartercenter.org/peace/conflict_resolution/index.html">programme de résolution des conflits</a> de Jimmy Carter, son travail pour <a href="https://www.habitat.org/volunteer/build-events/carter-work-project">Habitat pour l’humanité</a> et la <a href="https://www.clintonfoundation.org/">Fondation Clinton</a> fondée par Bill Clinton.</p>
<p>Donal Trump aura sa propre carrière post-présidentielle — probablement aussi peu conventionnelle et peut-être aussi troublante que ses années à la Maison-Blanche, mais l’ancien président cherchera certainement une échappatoire — ce que Bolivar n’a pas su trouver — dans son propre <a href="https://www.cnn.com/2021/01/24/business/mar-a-lago-donald-trump-guests/index.html">labyrinthe de Mar-a-Lago</a>.</p>
<p>Il y aura du golf, bien sûr, à la Eisenhower, et probablement une autobiographie, même si l’on imagine le pauvre rédacteur anonyme anéanti par des tête-à-tête avec Trump ponctués de commentaires enflammés de la taille d’un gazouillis.</p>
<p>Plus important encore, Trump tentera sûrement de s’immiscer dans les élections de 2024, à la Roosevelt, en se pavanant lors des rassemblements ou <a href="https://www.axios.com/trump-fox-news-digital-media-competitor-25afddee-144d-4820-8ed4-9eb0ffa42420.html">peut-être en créant un nouveau média pour concurrencer Fox News</a>.</p>
<p>Quelle que soit la voie que choisira Trump, on y trouvera des relents du malheur de Simon Bolivar, illustrés par Garcia Marquez : « Une nuit étrange… lourde de pleurs d’orphelins et d’odeur de putréfaction. »</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/156073/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ronald W. Pruessen ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ils ont écrit leurs mémoires, fondé des œuvres charitables, construit des bibliothèques… voici ce qu’ont fait d’anciens présidents après leur départ de la Maison Blanche. À quoi s’occupera Trump ?Ronald W. Pruessen, Professor of History, University of TorontoLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1539972021-01-26T20:38:15Z2021-01-26T20:38:15ZLe discours d’investiture de Joe Biden : un retour à la normale ?<p>Au-delà des circonstances extraordinaires dans lesquelles s’est déroulée l’inauguration de Joe Biden, en l’absence de son prédécesseur et de la foule (remplacée symboliquement par 200 000 drapeaux), et en présence de 26 000 membres de la Garde nationale dans une capitale qui semblait assiégée, le <a href="https://www.whitehouse.gov/briefing-room/speeches-remarks/2021/01/20/inaugural-address-by-president-joseph-r-biden-jr/">discours d’investiture</a> du 46<sup>e</sup> président des États-Unis constitue-t-il un « retour à la normale », comme le <a href="https://www.washingtonpost.com/opinions/2021/01/20/bidens-inauguration-offered-what-america-needs-return-normalcy/">suggère l’intellectuel Max Boot</a> ? Bien sûr, tout dépend de ce que l’on entend par « normalité ».</p>
<p>Le discours d’investiture qui suit le serment a une fonction cruciale dans le rituel de transition du pouvoir. Comme l’ont montré les <a href="https://press.uchicago.edu/ucp/books/book/chicago/P/bo5759249.html">chercheuses américaines Karlyn Kohrs Campbell et Kathleen Hall Jamieson</a>, la fonction d’un « bon discours inaugural » est double : premièrement, unifier le peuple après les divisions politiques de la campagne ; et, deuxièmement, rappeler aux citoyens leur identité en tant que peuple, à savoir ce qui les unit et leur communauté de destin – en d’autres termes, expliquer pourquoi la nation demeure une nécessité.</p>
<h2>L’unité dans la religion civile</h2>
<p>Le discours de Joe Biden peut être qualifié de « normal » par son thème principal, qui était clairement l’unité. À cet égard, il contrastait fortement avec le discours prononcé quatre ans plus tôt par Donald Trump sur le « carnage américain » qui opposait l’<em>establishment</em> au « peuple » et ne mentionnait l’État qu’en termes négatifs.</p>
<p>Alors que Trump n’avait fait aucune mention de la citoyenneté ou de la responsabilité collective, le discours de Joe Biden est particulièrement remarquable par <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/2021/01/20/unique-words-biden-inauguration-speech/?arc404=true">son importante utilisation de termes liés à la collectivité</a>, à la <a href="https://www.newstatesman.com/world/2021/01/joe-biden-s-inauguration-speech-was-angriest-ever-according-sentiment-analysis">gouvernance et à la responsabilité citoyenne</a>. On trouve par exemple dans son discours la plus grande récurrence du pronom sujet « nous » depuis l’investiture de Calvin Coolidge en 1925.</p>
<p>Afin d’unir le peuple, Joe Biden a également tenté de re-sacraliser les principes de la religion civile américaine. Par exemple, le Capitole, parfois appelé « le temple de la démocratie américaine », a été désigné comme « terre sacrée ». Ainsi, le nouveau président a rappelé à son auditoire que « la foule d’émeutiers pensait pouvoir utiliser la violence pour faire taire la volonté du peuple, pour arrêter le travail de notre démocratie et pour nous chasser de ce lieu sacré ». Il a également récité les premiers mots de la Constitution, « Nous, le peuple, en vue de former une union plus parfaite », notant la « résilience » de ce document fondateur qu’il a liée à « la force de notre nation ».</p>
<p>Plus encore que les autres présidents, Joe Biden a invoqué l’esprit d’Abraham Lincoln, citant les mots de son illustre prédécesseur qui déclarait que « toute son âme » se trouvait dans la Proclamation d’émancipation des esclaves, et promettant que lui aussi mettait aujourd’hui « toute son âme » dans le rassemblement et l’union de l’Amérique. Bien entendu, invoquer une telle figure symbolique liée à la victoire contre l’esclavage dans la guerre de Sécession, qui s’apparente à un saint national, est particulièrement pertinent alors que la nation est en proie à ce que Biden appelle une « guerre incivile », face à un risque de « désunion ».</p>
<h2>Le prêtre en chef : La foi plus que l’espérance</h2>
<p>Pour tenter de rassembler le peuple, Joe Biden a endossé le rôle traditionnel des présidents américains en cas de crise : celui de Prêtre-en-chef national, mais dans une plus large mesure encore que ses prédécesseurs. Comme l’a montré une <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/2021/01/20/unique-words-biden-inauguration-speech/?arc404=true">analyse du <em>Washington Post</em></a>, son discours inaugural contenait plus de mots liés à la religion que tout autre discours inaugural depuis Dwight Eisenhower en 1957.</p>
<p>Il a conduit la nation dans un moment de prière silencieuse en l’honneur des victimes de la pandémie, a invoqué Saint Augustin et a cité les Écritures. Son discours ne portait pas tant sur la religion que sur la foi, une foi qui, avec la raison, montrera la « voie de l’unité », et une foi qui « soutient » dans les moments difficiles, comme l’illustre sa citation du psaume 30 :5 « le soir arrivent les pleurs et le matin l’allégresse ».</p>
<p>Il offre une vision très différente de celle de Donald Trump qui, en <a href="https://www.politico.com/story/2017/01/full-text-donald-trump-inauguration-speech-transcript-233907">2017</a>, parlait d’un Dieu qui protège l’Amérique pour la rendre toute-puissante (« totalement invincible »). Tout comme il l’a fait avec succès pendant la campagne, Joe Biden exprime ses convictions religieuses non pas en termes politiques, mais en termes émotionnels et personnels, y compris à travers son propre chagrin, afin d’établir un lien d’empathie avec le peuple américain.</p>
<h2>L’histoire de l’Amérique</h2>
<p>Un moyen important d’unifier le peuple est de lui raconter à nouveau l’histoire de la nation. Le mot « récit » (<em>story</em>) est mentionné neuf fois. C’est l’une des métaphores les plus efficaces : il rappelle le passé (« l’appel de l’histoire »), tout en se concentrant sur l’action du présent pour façonner l’avenir des « enfants de nos enfants » :</p>
<blockquote>
<p>« Le récit ne dépend pas de l’un d’entre nous, ni de certains d’entre nous, mais de nous tous. […] Et lorsque ce sera le cas, nous écrirons le prochain chapitre du récit américain. […] C’est un récit qui pourrait ressembler à une chanson qui signifie beaucoup pour moi, le récit qui nous inspire. […] Ajoutons notre propre travail et nos prières au récit de notre nation qui se déroule. […] Et ensemble, nous allons écrire un récit américain d’espoir, et non de peur. […] Un récit américain de décence et de dignité, d’amour et de guérison, de grandeur et de bonté. […] Que ce récit soit celui qui nous guide, celui qui nous inspire. Le récit qui raconte les siècles à venir où nous avons répondu à l’appel de l’histoire. »</p>
</blockquote>
<p>L’histoire de l’Amérique est essentiellement un récit d’héroïsme : comment la nation a surmonté des épreuves dans le passé, telles que « la guerre civile, la Grande Dépression, la guerre mondiale, le 11 Septembre, par la lutte, le sacrifice et les revers » et comment « nos meilleurs anges », une expression bien connue de Lincoln utilisée dans son premier discours d’investiture, ont toujours fini par l’emporter. L’évocation des épreuves passées assure aux Américains que leur nation a un avenir. Mais pour être héroïque, le présent doit aussi être exceptionnel :</p>
<blockquote>
<p>« Peu de périodes de l’histoire de notre nation ont été plus difficiles ou plus éprouvantes que celle dans laquelle nous nous trouvons actuellement. »</p>
</blockquote>
<p>Contrairement à ses prédécesseurs, Joe Biden se concentre presque exclusivement sur les périls intérieurs. Et contrairement à Donald Trump, il ne présente pas ces périls comme étant un groupe de personnes (les politiciens) mais comme des idéologies telles que l’« extrémisme » et le « suprémacisme blanc », des actions telles que « l’anarchie, la violence », des émotions telles que « la colère, le ressentiment, la haine » et des fléaux tels que « la maladie, le chômage, le désespoir, l’inégalité croissante, le racisme systémique » ou la « pandémie » – autant de maux susceptibles de conduire à « la désunion et à la guerre incivile ».</p>
<p>En fait, dans son discours d'investiture, la politique étrangère occupe une place <a href="https://www.newstatesman.com/world/2021/01/joe-biden-s-inauguration-speech-was-angriest-ever-according-sentiment-analysis">nettement moins importante</a> que dans ceux de ses deux derniers prédécesseurs. S’en prenant indirectement à Donald Trump, et de façon remarquable, il a également fait le lien entre l’attaque contre la démocratie et l’attaque contre la vérité, dénonçant les « mensonges proférés pour le pouvoir et le profit » et appelant tous les citoyens américains à la bataille « pour défendre la vérité et vaincre les mensonges ».</p>
<p>Mais c'est aussi un récit optimiste. Joe Biden souligne l'espoir du changement en rappelant le combat politique et historique des minorités, évoquant Martin Luther King, ainsi que celui des femmes, faisant le lien entre leurs luttes passées et l'élection de Kamala Harris, première femme au poste de vice-président.</p>
<h2>La nécessité d’une action héroïque</h2>
<p>Le récit mythique de l’Amérique présentée par Biden est celui d’une lutte héroïque « perpétuelle » entre le bien (« lumière et unité ») et le mal (« ténèbres et division »), entre l’idéalisme (« ce que nous devons être ») et la « dure réalité », parfois « laide, qui a longtemps déchiré le pays ».</p>
<p>Les États-Unis se trouvent à nouveau dans une « période d’épreuve », un « moment historique de crise et de défi », qui offre au pays une chance d’en « ressortir plus fort ».</p>
<p>Immédiatement après les mentions de menaces intérieures, le président propose une série d’actions à travers l’anaphore « Nous pouvons » (répété sept fois). Mais l’héroïsme américain ne se définit pas seulement par la force et la puissance, <a href="https://theconversation.com/trump-et-le-fantasme-du-heros-143106">comme le faisait son prédécesseur</a>, mais aussi par la vertu, afin que l’Amérique puisse être « une fois de plus le phare du monde » :</p>
<p>« Nous ne dirigerons pas seulement par l’exemple de notre puissance », dit ainsi Joe Biden, « mais par la force de notre exemple ».</p>
<p>À travers cette histoire héroïque, les Américains peuvent ainsi révéler leur caractère (« actifs, audacieux et optimistes ») et redéfinir leurs valeurs (« dignité, respect et honneur »).</p>
<h2>Plus Biden-esque que « normal »</h2>
<p>Comme le <a href="https://www.theatlantic.com/ideas/archive/2021/01/why-bidens-inaugural-address-succeeded/617779/">conclut James Fallows</a>, ancien écrivain de discours présidentiels, le discours inaugural de Joe Biden est peut-être remarquable non pas tant par son éloquence que par son authenticité, son « optimisme conditionnel » et son plan d’action pour l’avenir.</p>
<p>Son langage clair et direct, ses expressions familières comme « I get it » ou « folks » et sa foi pleine d'empathie bien connue rendent sa proximité avec le peuple plus plausible que pour tout autre politicien blanc de sa génération. Sa collaboration avec un écrivain de discours jeune et d'origine indienne, <a href="https://www.cnbctv18.com/india/who-is-vinay-reddy-first-indian-american-in-charge-of-presidential-speechwriting-8055531.htm">Vinay Reddy</a>, achève le contraste symbolique avec Donald Trump dont le discours d'investiture avait été écrit par un homme, Stephen Miller connu pour ses <a href="https://www.splcenter.org/hatewatch/2019/11/12/stephen-millers-affinity-white-nationalism-revealed-leaked-emails">liens idéologiques avec le nationalisme blanc</a>. C'est peut-être de ce changement de ton et de vision qu'une bonne partie du peuple américain avait besoin en cette période de grands bouleversements et d’incertitude.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153997/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jérôme Viala-Gaudefroy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’analyse textuelle du discours d’investiture de Joe Biden révèle les principaux axes de sa communication à venir, qui sera marquée par une nette rupture avec celle de son prédécesseur.Jérôme Viala-Gaudefroy, Assistant lecturer, CY Cergy Paris UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1537542021-01-21T18:20:06Z2021-01-21T18:20:06ZBiden à la Maison-Blanche : un retour à la normale après des années de chaos<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/380015/original/file-20210121-21-1obex8c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=47%2C6%2C4512%2C3028&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Joe Biden est assermenté comme 46e président des États-Unis par le juge en chef John Roberts alors que Jill Biden tient la Bible, lors de la 59e cérémonie d'investiture au Capitole, à Washington, le 20 janvier 2021.</span> <span class="attribution"><span class="source">Saul Loeb/Pool Photo via AP</span></span></figcaption></figure><p>La fin du mandat chaotique de Donald Trump à la Maison-Blanche et l’assermentation de Joe Biden marquent le début d’une présidence relativement « normale » aux États-Unis. Mais qu’est-ce que la normalité après quatre ans de règne d’un président qui était tout sauf « normal » ?</p>
<p>Joe Biden <a href="https://www.nytimes.com/live/2021/01/20/us/biden-inauguration">a souligné l’importance de l’unité dans son discours inaugural</a> pour faire face à la pandémie de Covid-19, au fléau de la désinformation et aux divisions partisanes.</p>
<blockquote>
<p>« Pour surmonter ces défis, restaurer l’âme et assurer l’avenir de l’Amérique, il faut bien plus que des mots et il faut la chose la plus insaisissable dans une démocratie : l’unité. »</p>
</blockquote>
<p>Le succès de sa <a href="https://thefederal.com/from-the-wires/bidens-long-political-evolution-leads-to-his-biggest-test/">longue carrière politique</a> est attribuable à des réformes progressistes, à la création de coalitions et à la recherche de compromis bipartites plutôt qu’à la conduite d’une révolution.</p>
<p>C’est un contraste frappant avec Trump, un novice de la politique, dont les succès de la courte carrière politique s’expliquent par des gestes impulsifs qui ont provoqué des réactions intempestives de la part de ses partisans et de ses opposants.</p>
<h2>Une politique plus discrète</h2>
<p>Les loyautés partisanes continueront de sévir à Washington, mais les flammes de la division entre les Républicains et les Démocrates ne seront pas attisées par Biden, <a href="https://www.nbcnews.com/politics/2020-election/accountability-lies-lawbreaking-biden-s-bipartisanship-will-be-tested-n1254427">qui a répété à plusieurs reprises</a> qu’il agira avec beaucoup plus de civilité que son prédécesseur.</p>
<p>Des décrets seront toujours signés, mais sans tambour ni trompette, et sans une horde de partisans entourant le président dans le bureau ovale. Les premiers mois seront sans doute sous le signe d’une politique plus discrète.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Trump est entouré de fabricants et de caméras dans le Bureau ovale ». source=" src="https://images.theconversation.com/files/379766/original/file-20210120-13-4qye08.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/379766/original/file-20210120-13-4qye08.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/379766/original/file-20210120-13-4qye08.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/379766/original/file-20210120-13-4qye08.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/379766/original/file-20210120-13-4qye08.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=482&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/379766/original/file-20210120-13-4qye08.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=482&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/379766/original/file-20210120-13-4qye08.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=482&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Trump s’exprime lors d’une réunion avec des fabricants américains dans le Bureau ovale de la Maison-Blanche en janvier 2019 après avoir signé un décret poussant ceux qui reçoivent des fonds fédéraux à « acheter américain.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Jacquelyn Martin)</span></span>
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<p>Les tweets présidentiels mettront probablement l’accent sur l’unité plutôt que sur la diffusion de petits griefs présidentiels. M. Biden n’utilisera pas la présidence pour encourager la division, mais comme un outil pour nourrir la cohésion sociale.</p>
<p>La vice-présidente, Kamala Harris, les <a href="https://nptelegraph.com/news/national/govt-and-politics/what-biden-can-and-cant-get-from-an-evenly-divided-senate/collection_31aa102b-0a17-50a4-ab67-da2f1ab5e7f9.html">membres du cabinet</a> et les fonctionnaires de la Maison-Blanche joueront un rôle important dans la communication du programme de Joe Biden, contrairement à Donald Trump, qui attirait l’attention sur lui.</p>
<p>Les orientations politiques seront probablement signalées bien avant que des décisions ne soient prises, ou du moins avant qu’elles ne soient annoncées. En tant que politicien d’expérience, Joe Biden connaît l’importance de préparer le terrain pour réussir l’implantation de nouvelles politiques. Il sait qu’ignorer les parties prenantes est un moyen sûr d’enflammer l’opposition. En pratique, cela suppose un processus décisionnel plus lent et moins centralisé.</p>
<h2>Travailler avec le Congrès</h2>
<p><a href="https://www.theguardian.com/us-news/2020/dec/20/joe-biden-mitch-mcconnell-history-senate">Travailler en étroite collaboration avec le Congrès</a> – la branche législative du gouvernement composée du Sénat et de la Chambre des représentants – est un objectif majeur de la nouvelle administration. Joe Biden a invité Mitch McConnell, aujourd’hui leader de la minorité au Sénat, à l’accompagner à l’église le jour de l’inauguration – <a href="https://nypost.com/2021/01/20/biden-meets-mcconnell-and-pelosi-at-church-before-inauguration/">et le politicien du Kentucky a accepté l’invitation</a> au lieu d’assister au départ de Trump à la base aérienne d’Andrews, à quelques kilomètres de là. Voilà un signe d’espoir de réconciliation entre les deux partis.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Le leader de la minorité au Sénat Mitch McConnell et sa femme Elaine Chao, masqués, se tiennent derrière un banc d’église" src="https://images.theconversation.com/files/379771/original/file-20210120-21-wf1jv9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/379771/original/file-20210120-21-wf1jv9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/379771/original/file-20210120-21-wf1jv9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/379771/original/file-20210120-21-wf1jv9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/379771/original/file-20210120-21-wf1jv9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/379771/original/file-20210120-21-wf1jv9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/379771/original/file-20210120-21-wf1jv9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le leader de la minorité au Sénat Mitch McConnell et sa femme Elaine Chao assistent à la messe à la cathédrale de St. Matthew the Apostle lors des cérémonies du jour de l’inauguration à Washington.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AP Photo/Evan Vucci</span></span>
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</figure>
<p>Biden a été élu au Sénat il y a 48 ans, en 1972, lorsque Richard Nixon a remporté son deuxième mandat de président. Moins de la moitié des électeurs américains actuels étaient encore en vie lorsqu’il s’est rendu à Washington pour la première fois.</p>
<p>Aucun président n’a passé plus de temps au Congrès que Joe Biden, qui y a siégé pendant 36 ans, soit trois fois plus longtemps que <a href="https://www.usatoday.com/story/opinion/2020/04/24/lesson-lyndon-johnson-joe-biden-progressives-bernie-sanders-column/2999880001/">Lyndon B. Johnson</a>, le sénateur le plus expérimenté à s’être rendu à la Maison-Blanche.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/379774/original/file-20210120-13-v5tkq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Joe Biden parle en 1972" src="https://images.theconversation.com/files/379774/original/file-20210120-13-v5tkq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/379774/original/file-20210120-13-v5tkq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/379774/original/file-20210120-13-v5tkq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/379774/original/file-20210120-13-v5tkq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/379774/original/file-20210120-13-v5tkq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/379774/original/file-20210120-13-v5tkq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/379774/original/file-20210120-13-v5tkq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Joe Biden, vu ici comme le sénateur démocrate nouvellement élu du Delaware, parle à Washington en décembre 1972.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AP Photo/Henry Griffin</span></span>
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</figure>
<p>Le Congrès, où sont votées les lois, est la voix des électeurs et des 50 États à Washington. Il a le pouvoir d’enquêter sur le pouvoir exécutif. Entretenir des relations orageuses avec les législateurs n’est donc pas une bonne chose et n’apporte rien de bon – Trump l’a appris à ses dépens.</p>
<p>Bien que les démocrates soient actuellement majoritaires dans les deux chambres, la <a href="https://www.theguardian.com/us-news/2021/jan/17/joe-manchin-democrat-split-senate-leverage">majorité au Sénat est mince comme un fil</a>. En raison de la faible discipline de parti, M. Biden devra passer du temps à courtiser les sénateurs individuellement afin d’obtenir leur soutien pour les politiques et les priorités de son administration. En même temps, il doit se préparer à la possibilité que des élections de mi-mandat, en 2022, <a href="https://www.politico.com/news/2021/01/12/joe-biden-plan-midterms-shellacking-458316">rétablissent une majorité républicaine au Sénat</a></p>
<h2>Politique étrangère</h2>
<p>La politique étrangère des États-Unis sera à l’image de son statut de superpuissance mondiale et de ses responsabilités particulières dans la géopolitique mondiale. Il est peu probable que Biden s’écarte des objectifs de politique étrangère qui ont explicitement ou implicitement guidé les hommes politiques du pays depuis 1776.</p>
<p>En fin de compte, les chefs de gouvernement – que ce soit à Washington, à Pékin ou à Berlin – doivent protéger et promouvoir les intérêts de leur pays et de leurs électeurs. Mais l’application de ces principes sera plus nuancée dorénavant à la Maison-Blanche. L’intérêt national n’occupera plus l’avant-plan sous Biden comme c’était le cas avec Trump.</p>
<p>L’accord de Paris sur le climat est un exemple d’accord largement symbolique qui gagne en légitimité lorsque les États-Unis y participent. Les États-Unis ne perdent rien en rejoignant l’accord, comme <a href="https://www.theguardian.com/us-news/2021/jan/19/biden-environment-paris-climate-agreement-keystone-xl-pipeline">l’a fait Biden</a> dès son entrée en fonction.</p>
<p>L’administration Biden devrait <a href="https://foreignpolicy.com/2021/01/15/joe-biden-foreign-policy-relationships-united-states/">accorder plus d’attention aux alliés américains</a> et à ceux qu’elle cherche à influencer, y compris le Canada. Des négociations difficiles sur le commerce, la présence des troupes armées en Corée du Sud et au Moyen-Orient, ainsi que sur le rôle de la Chine, feront partie des discussions quotidiennes de M. Biden.</p>
<p>Mais il est peu probable que le président commente publiquement ou en twitte les détails. Des voyages symboliques comme la <a href="https://www.npr.org/sections/thetwo-way/2016/05/27/479691439/president-obama-arrives-in-hiroshima-the-first-sitting-commander-in-chief-to-vis">visite qu’avait fait Barack Obama</a> à Hiroshima, au Japon, pourraient faire partie de l’itinéraire du président pour démontrer la bonne volonté des États-Unis et consolider les alliances.</p>
<p>Le retour à une présidence « normale » avec des objectifs et des stratégies clairs semble facile dans l’euphorie des premières semaines d’une nouvelle administration. Puis, arrive un imprévu, les événements deviennent incontrôlables et des crises s’en suivent. C’est à ce moment que nous pourrons voir le véritable caractère de Biden et de sa présidence se révéler.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153754/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Klassen ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Après avoir vécu quatre années tumultueuses sous Donald Trump, les États-Unis ont maintenant un président qui s’engage à plaider pour l’unité et la guérison.Thomas Klassen, Professor, School of Public Policy and Administration, York University, CanadaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1535092021-01-19T16:15:43Z2021-01-19T16:15:43ZAlors que Joe Biden devient président, voici comment réformer le collège électoral<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/379372/original/file-20210118-13-1b3e2al.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le Président élu Joe Biden parle de la pandémie COVID-19 à Wilmington, au Delaware, le 14 janvier 2021.</span> <span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Matt Slocum)</span></span></figcaption></figure><p>La route a été semée d’embûches, mais un nouveau président américain a été investi ce 20 janvier.</p>
<p>Plusieurs sont ravis de passer à l’ère post-Donald Trump, en <a href="https://theconversation.com/capitole-voici-comment-le-tissu-social-americain-est-en-train-de-se-desagreger-152724">particulier après le raid sur le Capitole américain par ses partisans en colère</a>. Mais quoi qu’il en soit, il pourrait être utile de réfléchir à l’un des facteurs qui a provoqué beaucoup d’anxiété lors de la campagne électorale présidentielle de 2020 : la façon dont les votes sont attribués au sein du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Coll%C3%A8ge_%C3%A9lectoral_des_%C3%89tats-Unis">collège électoral</a>, soit le processus par lequel les grands électeurs de chaque État déterminent qui a gagné l’élection présidentielle.</p>
<p>Tous les quatre ans, des commentateurs majoritairement libéraux affirment <a href="https://www.brookings.edu/policy2020/bigideas/its-time-to-abolish-the-electoral-college/">qu’il est profondément injuste que les votes dans les États peu peuplés comptent plus que ceux des États densément peuplés</a></p>
<p>Le débat tend à opposer ceux qui pensent que le président devrait être choisi sur la base du vote populaire à ceux qui soutiennent que le collège électoral est nécessaire pour équilibrer les intérêts des petits et des grands États.</p>
<p>Mais peut-être y a-t-il une troisième voie ?</p>
<h2>Viser le compromis</h2>
<p>Comme le prévoit la Constitution américaine, le collège électoral a pour objectif de trouver un compromis entre les intérêts divergents des différents types d’États (urbain contre rural, côtier contre intérieur, plus ou moins peuplé).</p>
<p>Le problème n’est pas le collège électoral en tant que tel, mais le principe du « winner-takes-all » (le gagnant remporte tout) que la plupart des États utilisent pour répartir leurs voix électorales. Des arguments solides peuvent être avancés — <a href="https://www.constitutionfacts.com/us-constitution-amendments/the-constitutional-convention/#:%7E:text=The%20Constitutional%20Convention%20took%20place,delegates%20had%20much%20bigger%20plans">et ont été présentés lors de la Convention constitutionnelle de 1787</a> — pour expliquer que, dans un système fédéral, il est juste que le petit Delaware ait un impact par habitant plus important lors des élections présidentielles que la ville de New York, très peuplée. C’est le même compromis qui a établi une représentation égale des États au Sénat et leur représentation proportionnelle basée sur la population à la Chambre des représentants.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/379074/original/file-20210115-17-mwtbcy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/379074/original/file-20210115-17-mwtbcy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/379074/original/file-20210115-17-mwtbcy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/379074/original/file-20210115-17-mwtbcy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/379074/original/file-20210115-17-mwtbcy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/379074/original/file-20210115-17-mwtbcy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/379074/original/file-20210115-17-mwtbcy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une peinture représentant la Convention constitutionnelle de 1787.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Library of Congress</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ce qui est clairement moins juste, c’est qu’un État répartisse tous ses électeurs à un candidat qui n’a peut-être même pas remporté la moitié des voix populaires de cet État.</p>
<p><a href="https://www.desmoinesregister.com/story/news/politics/2020/12/14/iowa-republicans-grassley-ernst-acknowledge-joe-biden-electoral-college-victory/6549680002/">« Je sais que c’est décevant pour les électeurs de l’Iowa »</a>, a déclaré la sénatrice Joni Ernst lorsqu’elle a reconnu la victoire de Joe Biden. Mais en vérité, ce n’est décevant que pour les 53 % de citoyens de l’Iowa qui ont voté pour Trump. Près de la moitié de la population de l’État a été soulagée.</p>
<p>Ne serait-il pas plus juste que les États divisent leurs votes pour refléter la division de l’opinion de leurs électeurs ?</p>
<h2>Un autre moyen</h2>
<p>Il ne s’agit pas d’une référence à la <a href="https://www.270towin.com/content/split-electoral-votes-maine-and-nebraska/">méthode utilisée par le Maine et le Nebraska</a>, qui consiste à attribuer deux électeurs, le vainqueur remportant l’ensemble, sur la base du vote populaire de l’État et un électeur sur la base du vote dans chaque circonscription du Congrès. Pourquoi ne pas plutôt éliminer complètement le principe du « winner-takes-all » et répartir simplement les électeurs de chaque État proportionnellement au vote populaire dans cet État ?</p>
<p>Si cette pratique était appliquée à l’échelle nationale, Biden aurait encore gagné en 2020, Barack Obama aurait encore gagné en 2008 et 2012, et George W. Bush aurait encore gagné en 2004. Mais les choses deviennent plus intéressantes lors des deux récentes élections présidentielles où le vainqueur du collège électoral n’a pas remporté le vote populaire.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/379068/original/file-20210115-17-19mozja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/379068/original/file-20210115-17-19mozja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/379068/original/file-20210115-17-19mozja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=697&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/379068/original/file-20210115-17-19mozja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=697&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/379068/original/file-20210115-17-19mozja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=697&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/379068/original/file-20210115-17-19mozja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=875&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/379068/original/file-20210115-17-19mozja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=875&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/379068/original/file-20210115-17-19mozja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=875&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Bush et Gore à la mairie du Missouri en Octobre 2000.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AP Photo/Ron Edmonds</span></span>
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<p><a href="https://www.brookings.edu/articles/reflections-on-the-2000-u-s-presidential-election/">En 2000</a>, la Floride aurait réparti ses voix 12-12 entre Bush et Al Gore sans qu’aucun tribunal n’ait à intervenir, et aurait attribué un 25<sup>e</sup> électeur à Ralph Nader. Bush aurait battu Gore 263 à 262 au Collège électoral, avec 13 électeurs pour Nader.</p>
<p><a href="https://www.270towin.com/2016_Election/">En 2016</a>, Trump et Hillary Clinton auraient été à égalité avec 261 électeurs chacun, dont 14 pour Gary Johnson et un pour Evan McMullin et Jill Stein.</p>
<p>La Constitution américaine prévoit bien sûr le cas d’une égalité au sein du collège électoral. Mais si les États avaient permis aux électeurs des partis tiers de voter pour l’un des deux principaux candidats, selon la décision de ces électeurs ou des organisations des partis de leur État, les élections de 2000 et 2016 auraient pu produire des résultats plus proches du vote populaire national tout en maintenant l’équité entre les petits et les grands États.</p>
<h2>Tous les États en bénéficient</h2>
<p>L’équité fonctionnerait dans les deux sens. Les républicains de Californie et de New York auraient une voix, aux côtés des démocrates de l’Iowa et de l’Arkansas. Les votes pour les candidats de tiers partis ne seraient pas nécessairement gaspillés, du moins dans les États où le nombre d’électeurs est suffisant pour que les petits pourcentages aient de l’importance. La plupart des votes compteraient plus, aucun ne compterait moins.</p>
<p>Parfois, un grand électeur plus ou moins en faveur d’un candidat pourrait encore dépendre d’un petit nombre de votes, ce qui rendrait les recomptages nécessaires, mais les enjeux seraient moindres — un seul grand électeur, pas la liste de tout un État.</p>
<p>Les propositions visant à abolir le collège électoral sont finalement irréalisables. Il n’est tout simplement pas dans l’intérêt d’un nombre suffisant d’États de voter pour l’amendement constitutionnel nécessaire. Le <a href="https://www.npr.org/2020/11/06/931891674/as-presidency-hinges-on-a-handful-of-states-some-have-made-a-popular-vote-pact">National Popular Vote Compact</a> — par lequel les États signataires affecteraient tous leurs électeurs au vainqueur du vote populaire national — se heurte au même obstacle impossible.</p>
<p>Mais qui peut s’opposer au principe selon lequel chaque vote devrait compter ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153509/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>James Krapfl ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le débat sur le collège électoral oppose ceux qui souhaitent un président choisi selon le vote populaire à ceux qui pensent que les intérêts des petits et des grands États doivent être équilibrés.James Krapfl, Associate Professor of History, McGill UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1525392020-12-28T18:56:57Z2020-12-28T18:56:57ZFact check US : L’élection sénatoriale en Géorgie va-t-elle déterminer la présidence Biden ?<p>Toute l'Amérique a les yeux tournés vers la Géorgie. Ce week end, le <a href="https://www.washingtonpost.com/"><em>Washington Post</em></a> a révélé que Donald Trump avait tenté de faire pression sur le secrétaire d’État Brad Raffensperger afin de modifier le résultat du scrutin du 3 novembre 2020 et de lui «trouver 11 780 voix». L'affaire fait scandale Outre-Atlantique. </p>
<p>Et ce mardi 5 janvier, des élections décisives ont donc lieu en Géorgie. Elles détermineront la majorité au Sénat pour les années à venir. Si la victoire de Joe Biden et de Kamala Harris est actée au scrutin présidentiel et si les démocrates sont assurés de garder leur majorité à la Chambre des représentants, la bataille n'est en effet pas tout à fait terminée au Sénat. </p>
<p>Lors des élections de novembre, sur les 100 sièges de sénateurs, les républicains en ont remporté 50 et les démocrates 48, deux sièges de l’État de Géorgie restant à pourvoir. Cette situation, pour le moins inhabituelle, vient du fait qu’aucun candidat en Géorgie n’avait obtenu plus de 50 % des voix. La loi électorale géorgienne, <a href="https://theconversation.com/a-brief-history-of-georgias-runoff-voting-and-its-racist-roots-150356">legs de la résistance à la déségrégation</a> des années 1960, prévoit un second tour avec les deux candidats en tête dans chaque course.</p>
<p>Dans l’hypothèse où les démocrates gagnent ces deux sièges au Sénat, ils atteindront alors l’égalité des voix (50). Mais ils auront effectivement la majorité, puisqu’en cas d’égalité des votes, le vice-président, en la personne de Kamala D. Harris, a le droit de vote.</p>
<p>L’enjeu est donc de taille. Mais cette élection peut-elle, à elle seule, également déterminer la capacité de Joe Biden et des démocrates à gouverner ?</p>
<p>C’est l’impression que donne la couverture médiatique de ce nouveau scrutin. Le <a href="https://www.nytimes.com/2020/12/20/us/politics/georgia-senate-runoffs-ads.html"><em>New York Times</em></a> la qualifie ainsi d’« élection spéciale la plus exceptionnelle de l’histoire de l’Amérique ». La réalité est plus complexe et nuancée : le fonctionnement institutionnel des États-Unis laisse une marge de manœuvre, certes étroite mais réelle, au président, avec ou sans majorité parlementaire, et donne un rôle non négligeable à la minorité au Sénat.</p>
<p>Pour le comprendre, il faut regarder de plus près le pouvoir très particulier du Sénat américain. La Constitution américaine, basée sur le principe de la séparation des pouvoirs, définit un système fédéraliste de freins et contrepoids qui donne au Sénat un rôle majeur. En plus de sa fonction législative, il a ainsi le pouvoir de donner (ou non) son « consentement » aux nominations par le président des membres de son cabinet (postes ministériels, secrétaires adjoints, ou sous-secrétaires) ou des juges fédéraux (<a href="https://www.senate.gov/reference/reference_index_subjects/Judicial_Branch_vrd.htm">à la Cour suprême, dans les cours d’appel et dans les tribunaux de district</a>.)</p>
<h2>La confirmation des candidats aux postes ministériels</h2>
<p>Historiquement, les candidats aux postes les plus importants de la branche exécutive du gouvernement fédéral, du cabinet ou de la haute administration sont très majoritairement approuvés par le Sénat au début du premier mandat d’un président, avec un <a href="https://www.politifact.com/article/2020/dec/14/how-hard-will-it-be-joe-biden-get-his-cabinet-conf/">taux de confirmation de 95 % au cours des 28 dernières années</a>. Il y a, toutefois, peu de précédents historiques à un premier mandat présidentiel avec un Sénat dominé par l’autre parti. Pour cela, il faut remonter à 1989 avec l’élection de George H. Bush où, pour la première fois, un <a href="https://www.senate.gov/artandhistory/history/common/briefing/Nominations.htm">candidat au cabinet d’un futur président a été rejeté</a>. Or nous sommes, désormais, dans un contexte hyperpartisan.</p>
<p>D’ores et déjà, certains républicains ont exprimé leur <a href="https://www.npr.org/sections/biden-transition-updates/2020/12/03/941597232/why-biden-budget-pick-neera-tanden-already-faces-republican-opposition">opposition à certaines nominations</a>. Cependant, un simple vote majoritaire suffit à confirmer un candidat et le chef des républicains, Mitch McConnell, a envoyé <a href="https://www.politico.com/news/2020/12/22/mitch-mcconnell-biden-cabinet-nominees-449805">quelques signaux positifs</a>. On peut penser que même s’ils conservent le contrôle du Sénat, la plupart des sénateurs républicains ne s’opposeront qu’aux candidats qu’ils jugent réellement répréhensibles. Et, dans le pire des scénarios, Joe Biden pourrait éventuellement suivre l’exemple de Donald Trump et installer des membres de cabinet « intérimaires » (<em>acting secretaries</em>) qui n’ont pas besoin de confirmation.</p>
<h2>La confirmation des juges</h2>
<p>En revanche, un Sénat majoritairement républicain réduirait considérablement la marge de manœuvre pour la confirmation des juges. Au mieux, quelques juges modérés dans les tribunaux inférieurs pourraient alors être nommés. Cela ne permettrait donc pas de contrebalancer les nombreuses <a href="https://projects.propublica.org/trump-young-judges/">nominations de juges</a> effectuées par Donald Trump (près d’un <a href="https://www.pewresearch.org/fact-tank/2020/07/15/how-trump-compares-with-other-recent-presidents-in-appointing-federal-judges/">quart de tous les juges fédéraux en activité</a> et trois juges à la Cour suprême), souvent <a href="https://www.ft.com/content/032b3101-9b8b-4566-ace4-67b86f42370b">jeunes et très conservateurs</a>. Or le système de freins et contrepoids confère un grand pouvoir aux tribunaux fédéraux et à la Cour suprême.</p>
<p>Ainsi, quelle que soit la majorité au Sénat, la capacité des démocrates à mettre en œuvre des lois dans certains domaines (réglementation électorale, contrôle des armes à feu, extension des soins de santé, changement climatique, voire les mesures sanitaires contre le <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1752506/etats-unis-liberte-culte-juge-barrett-andrew-cuomo">coronavirus</a>), risque d’être sérieusement contrainte par ces juges conservateurs. Même avec une majorité démocrate au Sénat, les démocrates seront limités dans leur capacité de nomination de juges par le fait même qu’il y a beaucoup moins de postes de juges vacants.</p>
<p>Par ailleurs, une <a href="https://www.politico.com/news/2020/10/22/joe-biden-court-packing-judicial-reforms-commission-431157">réforme judiciaire d’ampleur</a> est peu susceptible de voir le jour faute, pour le président, d’un soutien de démocrates centristes, <a href="https://www.rollcall.com/2020/11/09/joe-manchin-kills-dreams-of-expanding-supreme-court-eliminating-the-filibuster/">comme Joe Manchin</a>, qui n’y seront pas favorables. Et, bien évidemment, si le contrôle du Sénat revient aux républicains, aucune réforme ne saurait être envisagée.</p>
<h2>Gouverner avec un Sénat du même bord politique</h2>
<p>Du point de vue législatif, une simple majorité de 51 voix suffit, en théorie, pour faire adopter une loi par le Sénat et le chef de la majorité a le pouvoir de décider si la Chambre se saisit d'une question ou d'un projet de loi. En réalité, en dehors de quelques législations spécifiques liées aux règles budgétaires, tout sénateur peut bloquer une loi en faisant de l’obstruction (<a href="https://www.senate.gov/artandhistory/history/common/briefing/Filibuster_Cloture.htm"><em>filibuster</em></a>). Il faut alors un vote de motion dit de « clôture » avec une super majorité de 60 voix pour lever cette obstruction, une procédure <a href="https://www.brookings.edu/policy2020/votervital/what-is-the-senate-filibuster-and-what-would-it-take-to-eliminate-it/">largement utilisée dans les dernières décennies</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/376612/original/file-20201224-57963-19jge75.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/376612/original/file-20201224-57963-19jge75.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/376612/original/file-20201224-57963-19jge75.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=516&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/376612/original/file-20201224-57963-19jge75.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=516&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/376612/original/file-20201224-57963-19jge75.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=516&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/376612/original/file-20201224-57963-19jge75.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=648&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/376612/original/file-20201224-57963-19jge75.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=648&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/376612/original/file-20201224-57963-19jge75.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=648&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La forte augmentation des méthodes d’obstruction parlementaire, empêchant le passage de lois au Sénat.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Brookings Institution</span></span>
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<p>Les règles procédurales du Sénat peuvent être modifiées par une majorité simple, comme en <a href="https://www.cairn.info/revue-civitas-europa-2017-2-page-235.htm">2013 et 2017</a>. Mais, avec un président démocrate, les républicains n’auront aucun intérêt à la faire et certains sénateurs démocrates plus conservateurs, tels que le sénateur <a href="https://www.nytimes.com/2020/11/30/us/politics/joe-manchin-interview.html">Joe Manchin</a>, ont déjà annoncé leur opposition à un vote mettant fin à l’obstruction parlementaire, même en cas de majorité démocrate.</p>
<p>Quelle que soit la majorité au Sénat, l’ambition affichée des démocrates pendant la campagne devra donc être revue à la baisse. Ils devront tenir compte d’un certain nombre de membres conservateurs dans leur propre camp, comme <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Joe_Manchin">Joe Manchin</a> ou la sénatrice <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Kyrsten_Sinema">Kyrsten Sinema</a>. D’un autre côté, ce sont ces mêmes sénateurs qui seront plus à même de coopérer avec les républicains les plus modérés. Le système législatif américain fait qu’en réalité très peu de lois sont adoptées sans le soutien des deux partis. <a href="https://press.uchicago.edu/ucp/books/book/chicago/L/bo51795068.html">L’analyse de deux chercheurs américains</a> en sciences politiques, James M. Curry and Frances E. Lee, remet en cause l’idée reçue selon laquelle une <a href="https://www.nytimes.com/2020/11/18/opinion/joe-biden-mitch-mcconnell-congress.html">majorité au Sénat est cruciale pour gouverner</a>.</p>
<h2>Le duo Mitch et Joe</h2>
<p>Comme souvent en politique, les relations interpersonnelles jouent un rôle majeur. La longue et bonne relation, <a href="https://www.npr.org/2020/11/08/932744275/how-biden-and-mcconnell-will-work-together">souvent qualifiée d’amitié</a>, qu’entretiennent Joe Biden et Mitch McConnell, est de bon augure pour que des compromis aient lieu sur un certain nombre de sujets, comme l’immigration (sur la <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/01/11/comprendre-la-situation-des-dreamers-jeunes-immigres-aux-etats-unis_5240502_4355770.html">régularisation des Dreamers</a> notamment). Mais il ne faut pas oublier que McConnell est déterminé à maintenir l’influence des républicains : il sera d’autant plus enclin à faire des compromis s’il ne contrôle pas le Sénat et n'a pas la majorité dans les puissantes commissions sénatoriales.</p>
<p>Tout ce que nous avons évoqué ici pourrait être suspendu au pouvoir de nuisance de Donald Trump. Si, en général, les présidents perdent rapidement leur influence lorsqu’ils quittent leurs fonctions, Trump est atypique. Il est impossible de savoir ce qu’il en sera après le 20 janvier, surtout s’il laisse planer l’idée qu’il se représentera en 2024 (et ce même s’il y a peu de chances qu’il se concentre sur les procédures législatives).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/376667/original/file-20201228-15-svztqu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/376667/original/file-20201228-15-svztqu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/376667/original/file-20201228-15-svztqu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/376667/original/file-20201228-15-svztqu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/376667/original/file-20201228-15-svztqu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/376667/original/file-20201228-15-svztqu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=407&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/376667/original/file-20201228-15-svztqu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=407&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/376667/original/file-20201228-15-svztqu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=407&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
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<p>Les élections du 5 janvier en Géorgie seront un premier test : gagner les deux sièges dans cet État, qui demeure <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/interactive/2020/georgia-senate-runoff-guide/">conservateur malgré une démographie changeante</a>, est un défi pour les démocrates mais pas impossible à atteindre. En effet, les fausses affirmations de Trump selon lesquelles l’élection a été truquée pourraient <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2020/12/14/etats-unis-comprendre-les-elections-en-georgie-qui-pourraient-faire-basculer-le-senat_6063273_3210.html">dissuader certains républicains de voter</a>, et ce d’autant qu’il tire à boulets rouges sur le gouverneur et le secrétaire d’État de Géorgie, tous deux républicains.</p>
<p>Mais Donald Trump est avant tout focalisé sur la confirmation officielle du résultat des élections du Collège électoral par les deux chambres du Congrès le 6 janvier, jusqu’ici une simple formalité. Si l’élection est contestée par des membres des deux Chambres, il faut en effet procéder à un nouveau vote dans chacune d’entre elles. Et c'est la voie que semblent vouloir emprunter certains élus républicains : quelques dizaines de représentants (jusqu’à <a href="https://edition.cnn.com/2020/12/31/politics/electoral-college-house-republicans/index.html">140 selon CNN</a>) et <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/senators-challenge-election/2021/01/02/81a4e5c4-4c7d-11eb-a9d9-1e3ec4a928b9_story.html">une douzaine de sénateurs, dont les très ambitieux Ted Cruz et Josh Hawley</a>. Ils n’auront pas la majorité pour remettre en cause le résultat final. Mais ce vote forcera chaque élu républicain à se positionner. Cela pourrait diviser et affaiblir le parti, ce que ne voulait pas McConnell.</p>
<p>Pour Donald Trump, c’est un véritable <a href="https://www.nytimes.com/2020/12/13/us/politics/trump-allies-election-overturn-congress-pence.html">test de loyauté</a>, y compris pour son vice-président <a href="https://www.nytimes.com/2021/01/02/us/politics/gop-senators-josh-hawley-election.html">Mike Pence</a> qui doit faire l’annonce officielle des résultats de chaque État. Le président n’hésite pas à menacer publiquement de <a href="https://twitter.com/realDonaldTrump/status/1341547750710800385">mettre fin à la carrière politique</a> des membres de son parti qui ont déjà reconnu le résultat de l’élection présidentielle, en leur opposant d’autres candidats aux prochaines primaires en 2022. Il <a href="https://twitter.com/realDonaldTrump/status/1340185773220515840?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1340185773220515840%7Ctwgr%5E%7Ctwcon%5Es1_&ref_url=https%3A%2F%2Fwww.thetrumparchive.com%2F%3Fsearchbox%3D22wild22">en appelle même à la rue</a>, en demandant à ses partisans de venir manifester à Washington DC. Certains groupes extrémistes, comme <a href="https://www.washingtonpost.com/local/for-dc-protests-proud-boys-settle-in-at-citys-oldest-hotel-and-its-bar/2020/12/27/0eb6afcc-3fb0-11eb-8bc0-ae155bee4aff_story.html">les Proud Boys</a>, ont promis d’être présents et d’aucuns <a href="https://www.washingtonpost.com/local/washington-dc-protests/2021/01/01/da743c20-4a68-11eb-839a-cf4ba7b7c48c_story.html">craignent des violences</a>. Reste à savoir si les républicains se déplaceront en masse.</p>
<p>La difficulté principale pour Joe Biden pourrait ne pas venir de la couleur de la majorité au Sénat, mais plutôt de la remise en cause du processus démocratique par le président sortant. Une bonne partie des américains verront l’administration Biden comme illégitime : <a href="https://www.npr.org/2020/12/09/944385798/poll-just-a-quarter-of-republicans-accept-election-outcome">trois quarts des républicains, soit 60 millions d’Américains</a>, continuent de croire que les élections ont été truquées ou leur ont été volées.</p>
<hr>
<p><em>La rubrique Fact check US a reçu le soutien de <a href="https://craignewmarkphilanthropies.org/">Craig Newmark Philanthropies</a>, une fondation américaine qui lutte contre la désinformation</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152539/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jérôme Viala-Gaudefroy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>On lit souvent que la capacité de Joe Biden à gouverner dépendra de l’issue de la double élection à venir en Géorgie, qui déterminera la couleur politique du Sénat. La réalité est plus nuancée.Jérôme Viala-Gaudefroy, Assistant lecturer, CY Cergy Paris UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1521642020-12-16T19:16:46Z2020-12-16T19:16:46ZFact check US : Donald Trump a-t-il vraiment effectué une percée dans l’électorat latino ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/375504/original/file-20201216-19-1umefa5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C0%2C1019%2C705&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des partisans de Donald Trump contestent sa défaite à Las Vegas, le 7 novrembre 2020.</span> <span class="attribution"><span class="source">Ethan Miller/Getty Images North America/Getty Images via AFP</span></span></figcaption></figure><p>Le 3 novembre dernier, le scrutin américain offrait son lot de surprises. Si les résultats affinés jour après jour donnaient bel et bien Donald Trump perdant, ce dernier enregistrait dans le même temps de nouvelles victoires. Plus de <a href="https://edition.cnn.com/election/2020/results/president">74 millions d’électeurs</a> ont porté leur voix sur le candidat républicain, contre quelque 63 millions en 2016. La marge de progression se situe dans diverses catégories d’électeurs dont les ruraux, les petites classes moyennes ou encore l’électorat hispanique – et ce, malgré les attaques du président sortant à l’encontre des Latino-Américains. Ce phénomène a suscité l’étonnement de nombreux observateurs. Un mois et demi plus tard, de quelles données dispose-t-on et quelle analyse pouvons-nous faire du comportement électoral des Américains d’origine hispanique ?</p>
<p>Revenons d’abord sur les chiffres. Nous ne disposons à ce jour que des <a href="https://www.nytimes.com/interactive/2020/11/03/us/elections/exit-polls-president.html">sondages de sortie des urnes</a> commandés par les médias américains, des outils intéressants tant à l’échelle locale que nationale. Ces derniers indiquent qu’il n’y a pas eu depuis 2016 de réelle percée de Donald Trump auprès de l’électorat hispanique. En 2016 comme en 2020, les deux tiers de cet électorat soutiennent d’abord le parti démocrate : à 63 % pour Hillary Clinton puis à 65 % pour Joe Biden. En outre, si l’on se réfère à l’<a href="https://electionstudies.org/">American National Election Studies</a>, on constate que ce soutien est assez stable depuis la fin des années 80 : 76 % pour Al Gore en 2000, 76 % pour Barack Obama en 2008 et 73 % en 2012. Le candidat républicain ayant enregistré les meilleurs scores est George W. Bush (autour de 40 %), probablement parce qu’il disposait d’un ancrage fort au Texas, dont la population est composée à 23 % de Latino-Américains.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/375417/original/file-20201216-21-1y9amr2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/375417/original/file-20201216-21-1y9amr2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/375417/original/file-20201216-21-1y9amr2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/375417/original/file-20201216-21-1y9amr2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/375417/original/file-20201216-21-1y9amr2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/375417/original/file-20201216-21-1y9amr2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/375417/original/file-20201216-21-1y9amr2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Source : American National Election Studies.</span>
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<h2>Distinguer la minorité afro-américaine de la minorité latino</h2>
<p>Mais le fait que le candidat Trump recueille 32 % du vote hispanique a surpris, d’une part parce que le président sortant a <a href="https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2017/02/07/donald-trump-reveille-le-nationalisme-des-mexicains_5075644_3222.html">stigmatisé à plusieurs reprises les Hispaniques</a> (traitant les Mexicains d’assassins et de violeurs dès 2016) ; d’autre part parce qu’on a tendance à imaginer que les Hispaniques vont avoir le même comportement électoral que l’autre grande minorité, les Afro-Américains. Or ce ne sont pas les mêmes logiques à l’œuvre, le groupe latino étant beaucoup plus hétérogène : il inclut des migrants récents et de deuxième génération, des migrants économiques et des réfugiés, certains sont « visibles », d’autres non. Le détour par le vote afro-américain est donc utile pour appréhender le vote latino.</p>
<p>Les Afro-Américains votent en effet à plus de 90 % pour le parti démocrate depuis les années 1960. Cette stabilité est frappante quand on sait, comme le montrent les travaux du politiste <a href="https://press.princeton.edu/books/paperback/9780691025438/behind-the-mule">Michael Dawson</a>, que c’est un groupe hétérogène socialement depuis les années 1980. Ce chercheur met en évidence la notion d’un « destin lié » malgré cette hétérogénéité, à la différence des dynamiques à l’œuvre au sein de groupes historiquement issus de l’immigration. </p>
<p>En effet, les spécificités sociopolitiques de ces groupes s’estompent généralement au fur et à mesure que l’insertion dans la société américaine se produit, notamment parce que les préjugés à l’encontre des nouveaux venus sont transitoires (voir sur ce sujet les travaux de <a href="https://www.britannica.com/topic/Who-Governs-Democracy-and-Power-in-an-American-City">Robert Dahl</a>). Mais ce destin lié se maintient pour les Afro-Américains parce que la société américaine continue de discriminer. Et ces préjugés perdurent notamment parce que la « visibilisation », via la couleur de peau, joue à plein. <a href="https://www.cambridge.org/core/books/afrocaribbean-immigrants-and-the-politics-of-incorporation/81C4C0E89F50DE6C03D0A28D72BC5F32">Reuel Rogers</a> a ainsi montré que ces préjugés « s’imposaient » également aux Afro-Caribéens récemment arrivés aux États-Unis, alors qu’ils ne partageaient pas la même histoire.</p>
<p>Au sein de l’électorat hispanique, c’est plutôt la théorie du « pluralisme à plusieurs vitesses » développée par le politiste <a href="http://tupress.temple.edu/book/3295">Rodney Hero</a> qui s’applique. Celle-ci permet de montrer qu’une partie du groupe latino va se vivre comme latino, se sentir discriminée pour cette raison, et suivre les mêmes logiques de vote que les Afro-Américains. C’est le cas dans les États de New York ou de la Californie par exemple, qui sont fortement structurés par la lutte contre les inégalités raciales. Cela peut expliquer pourquoi, selon <a href="https://www.jstor.org/stable/pdf/30044225.pdf">David L. Leal, Matt A. Barreto et al</a>, l’appartenance au groupe des Hispaniques inhibe alors d’autres logiques sociales du vote, selon le revenu, l’âge, le diplôme ou la religion.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/375418/original/file-20201216-17-1u84zd7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/375418/original/file-20201216-17-1u84zd7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/375418/original/file-20201216-17-1u84zd7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/375418/original/file-20201216-17-1u84zd7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/375418/original/file-20201216-17-1u84zd7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/375418/original/file-20201216-17-1u84zd7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/375418/original/file-20201216-17-1u84zd7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/375418/original/file-20201216-17-1u84zd7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Source : The latino vote in the 2004 election, David Leal, Matt Barreto et al.</span>
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<h2>La spécificité cubaine</h2>
<p>D’autres Hispaniques en revanche vont s’intégrer à la société américaine sans problème parce que leur couleur de peau ne les singularise pas outre mesure, parce qu’ils ne sont pas renvoyés à leurs origines dans leurs interactions quotidiennes. Progressivement, leur solidarité avec le « groupe latino » va baisser, le destin lié s’effacer. Et d’autres logiques de vote vont alors se matérialiser. Les électeurs vont faire parler des choses différentes en fonction de leur histoire : leurs valeurs à l’égard de l’État social (qu’ils ne soutiennent pas forcément) ou leurs valeurs religieuses par exemple. Il y a ensuite l’exception cubaine, repérée par les chercheurs dès les années 1990. Les Cubains votent très majoritairement républicain (80 % en 2004) alors que les Latinos d’origine mexicaine votent démocrate (66 % en 2004).</p>
<p>Le poids des Cubains est devenu particulièrement important lors des élections présidentielles à cause de la Floride, un État tangent depuis plus de vingt ans. En 2020, parmi les électeurs d’origine cubaine, 56 % ont ainsi voté Trump contre 31 % des électeurs d’origine portoricaine. 2020 s’inscrit donc dans une dynamique connue. Plusieurs travaux analysent cette spécificité depuis 2004 et l’expliquent par le rapport conflictuel au régime castriste (ce qu’il inspire en matière de socialisme, de propriété privée, d’oppression, etc.). À noter que nous l’observons également chez les boat people vietnamiens arrivés aux États-Unis et en France : ce groupe se retrouve parfois plus à droite que l’ensemble de la population du pays d’accueil. En France, l’enquête <a href="https://www.ined.fr/fr/publications/editions/grandes-enquetes/trajectoires-et-origines/">Trajectoires et Origines</a> de l’INED et de l’Insee nous éclaire ainsi sur le positionnement plus à droite des immigrés venant du Laos, du Vietnam ou du Cambodge (ce qui n’est plus le cas de leurs descendants). Leur point commun est d’avoir quitté un régime communiste.</p>
<p>En conclusion, ces dynamiques ne sont pas en faveur du vote républicain. Si Donald Trump réussit, en usant d’une rhétorique très clivante et hostile aux immigrés, à mobiliser les Latino-Américains qui se sentent les « moins latinos » et les moins discriminés, la montée en puissance de l’électorat hispanique à l’échelle globale est plutôt en train de faire basculer des États républicains dans le camp démocrate. Ce fut le cas au Nouveau-Mexique sous Barack Obama. Cette année c’est l’Arizona, à 19 % hispanique, qui a basculé, et le Texas, à 23 %, n’est pas loin de devenir bleu.</p>
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<p><em>La rubrique Fact check US a reçu le soutien de <a href="https://craignewmarkphilanthropies.org/">Craig Newmark Philanthropies</a>, une fondation américaine qui lutte contre la désinformation</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152164/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Vincent Tiberj a reçu des financements de l'INJEP, de l'ANR, de la Région Nouvelle-Aquiatine. </span></em></p>Donald Trump a récolté plus de 30 % du vote latino lors de la dernière présidentielle. Un score important qui ne constitue pas pour autant une percée spectaculaire et s’explique par plusieurs facteurs.Vincent Tiberj, Professeur des universités, délégué recherche de Sciences Po Bordeaux, Sciences Po BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1514662020-12-15T18:03:12Z2020-12-15T18:03:12ZDu pape Grégoire XIII à Joe Biden, les stratégies politiques se répètent<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/373382/original/file-20201207-23-wye4c3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=33%2C50%2C5606%2C3703&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le président-élu Joe Biden quitte l'église catholique romaine St. Joseph, le samedi 5 décembre 2020, à Wilmington, au Delaware.</span> <span class="attribution"><span class="source">Photo AP/Andrew Harnik</span></span></figcaption></figure><p>Le matin du 2 novembre dernier, jour d’élections aux États-Unis, Joe Biden s’est rendu à l’église Saint-Joseph de Wilmington, au Delaware, ainsi qu’au cimetière, pour se recueillir sur les tombes de sa première femme et de deux de ses enfants.</p>
<p>Ce programme aux allures de pèlerinage constitue peut-être sa prière ultime pour la victoire électorale qu’il espérait ce jour-là. Si sa foi est bien réelle – et l’objectif n’est pas d’en discuter ici – on ne peut nier qu’elle a été savamment orchestrée pour draper le candidat démocrate d’une aura positive durant la campagne.</p>
<p>Plusieurs vidéos publicitaires ont souligné la piété du chef démocrate. Dans <a href="https://www.youtube.com/watch?v=KZFnTb225uc"><em>Principles</em></a>, on le montre en compagnie du pape François ou discourant dans une église ; dans <a href="https://www.youtube.com/watch?v=-A2Z0ZQKQWs"><em>A Man Guided by Faith</em></a>, une paroissienne de son village natal le décrit comme un dévot modèle. Joe Biden a d’ailleurs souligné sa ferveur religieuse dans son discours de victoire, le 7 novembre, où il cite la Bible sans ambages.</p>
<p>Rappelons que le <a href="https://theconversation.com/the-underappreciated-yet-critical-catholic-vote-in-the-2020-us-presidential-election-147150">vote catholique</a> a valu à Donald Trump les trois États-clés des Grands Lacs (Michigan, Pennsylvanie et Wisconsin) à l’élection de 2016, ce qui expliquerait une telle mise en avant de sa foi. Si Trump ne semble pas faire preuve d’une grande piété, <a href="https://www.nytimes.com/2020/09/25/us/politics/catholic-voters-trump-biden.html">il insiste beaucoup sur la position antiavortement du Parti républicain pour rallier lui aussi cette portion de l’électorat</a>.</p>
<h2>De Grégoire XIII à Joe Biden</h2>
<p>De nombreux politiciens et hommes d’église de haut rang ont usé de la foi à des fins démagogiques à l’instar de l’actuel président élu. Mes recherches sur le mécénat des cardinaux dans la Rome du XVI<sup>e</sup> siècle m’ont permis d’examiner fréquemment ce type de comportement, notamment chez le pape Grégoire XIII, qui a régné de 1572 à 1585.</p>
<p>Dans sa biographie du pontife publiée en 1596, l’auteur Marcantonio Ciappi soutient qu’il récitait des litanies dès son réveil et se rendait ensuite dans sa chapelle privée pour assister à la messe et faire des oraisons. Même si le pape était réellement un fervent dévot, l’ostentation de sa piété, qui s’explique par le contexte religieux contemporain, permet de replacer la conduite de Joe Biden dans un spectre historique plus large.</p>
<h2>Réforme et Contre-Réforme</h2>
<p>En 1517, le frère augustinien allemand Martin Luther proclame son opposition aux abus perpétrés par l’Église avec la publication des <a href="https://philosophie.cegeptr.qc.ca/2017/10/500e-anniversaire-de-laffichage-des-95-theses-de-luther-2017/">95 Thèses</a>, ce qui marque le début de la Réforme protestante. Ses idées se propagent rapidement dans le nord de l’Europe, encourageant les caricatures qui dénigrent l’office papal.</p>
<p>Lucas Cranach l’Ancien représente par exemple, en 1545, le <a href="https://pennrare.wordpress.com/2012/09/17/woodcut-sauritt-des-papsts-after-lucas-cranach-the-elder-used-by-christian-rodinger-the-elder-of-magdeburg-of-the-pope-riding-a-sow-holding-steaming-excrement/">pontife chevauchant une truie et bénissant des excréments</a> alors que Melchior Lorch le transforme peu de temps après en <a href="https://artsandculture.google.com/asset/the-pope-as-wild-man-melchior-lorch/WgF9GhARkcrWFw">monstre sanguinaire recouvert d’une toison hideuse et crachant du feu</a>.</p>
<p>En réaction, le clergé catholique émet des directives en ce qui concerne le comportement des prélats lors du concile de Trente (débuté en 1545 et terminé en 1563). La nouvelle image de l’Église passe par la démonstration que ses membres faisaient preuve des vertus qu’elle enjoint de respecter. La piété devient un critère de sélection des candidats à la tiare pontificale et plusieurs cardinaux aspirant au titre entreprennent de faire valoir la leur par les arts. En résultent de nombreux décors destinés à des institutions religieuses, mais aussi des fresques à même les murs de leurs palais.</p>
<h2>Une lignée de papes exemplaires</h2>
<p>Pour respecter les recommandations concernant l’ostentation de la richesse, Grégoire XIII visite la villa de campagne du cardinal Marco Sittico Altemps plutôt que de se faire construire sa propre résidence d’été comme ses contemporains.</p>
<p>Toutefois, il faut se détromper : la villa, localisée dans le haut lieu de retraite du clergé à Frascati et nommée « Mondragone » en l’honneur du pontife dont l’emblème est le dragon, devient en fait une véritable villa papale. Des activités administratives y sont tenues – c’est d’ailleurs là qu’est scellé l’établissement du calendrier grégorien – et des invités de marque y sont reçus.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/373658/original/file-20201208-22-98fn3z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/373658/original/file-20201208-22-98fn3z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/373658/original/file-20201208-22-98fn3z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/373658/original/file-20201208-22-98fn3z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/373658/original/file-20201208-22-98fn3z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/373658/original/file-20201208-22-98fn3z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/373658/original/file-20201208-22-98fn3z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La Villa Mondragone, à Frascati, en Italie, où le pape Grégoire XIII se rendait pour recevoir des invités de marque et remplir diverses tâches administratives.</span>
<span class="attribution"><span class="source">de l’auteure</span></span>
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<p>L’édifice détient ainsi des fonctions promotionnelles, tout comme ses décors. Ceux de la chapelle, peints par Guidonio Guelfi, en 1576, sont consacrés à saint Grégoire le Grand (pape de 540 à 604). Tel que démontré dans le troisième chapitre de <a href="https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/handle/1866/13773">mon mémoire de maîtrise</a>, c’est grâce à la représentation du récit de son homonyme, mais aussi grâce à la substitution du portrait de son prédécesseur par celui de Grégoire XIII dans les épisodes dépeints sur les murs, que l’artiste suggère l’association de Grégoire XIII avec ce pape précurseur exemplaire.</p>
<p>Fréquent dans les cycles décoratifs de la Renaissance – pensons simplement aux <a href="http://www.museivaticani.va/content/museivaticani/fr/collezioni/musei/stanze-di-raffaello.html">Chambres de Raphaël au Vatican</a> – ce procédé permet à Grégoire XIII de se présenter, à l’instar de Grégoire le Grand, comme un pontife idéal dont le règne restaurera l’âge d’or du christianisme.</p>
<p>Joe Biden a utilisé une stratégie similaire dans <a href="https://www.youtube.com/watch?v=xiLR4sCgvnc">son tout premier discours en tant que président élu</a>, affirmant que sa présidence s’inscrirait dans la suite de celles de Franklin D. Roosevelt, John F. Kennedy et Barack Obama. Reculant jusqu’au New Deal de 1932 à titre de comparaison pour valoriser ses projets de loi à venir, il rejoue le stratagème grégorien.</p>
<h2>L’humilité du Sauveur</h2>
<p>Dans la chapelle de la villa Mondragone, Grégoire XIII est aussi représenté, priant le Christ nouveau-né dans <em>L’adoration des bergers</em> qui figure au-dessus de l’autel. Si ce procédé illustre la piété que le prélat s’attribue, il met aussi en scène son humilité.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/373436/original/file-20201207-23-4jt90z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/373436/original/file-20201207-23-4jt90z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/373436/original/file-20201207-23-4jt90z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/373436/original/file-20201207-23-4jt90z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/373436/original/file-20201207-23-4jt90z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/373436/original/file-20201207-23-4jt90z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/373436/original/file-20201207-23-4jt90z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/373436/original/file-20201207-23-4jt90z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">L’œuvre « L’adoration des bergers », dans laquelle Grégoire XIII est représenté priant le Christ nouveau-né.</span>
<span class="attribution"><span class="source">de l’auteure</span></span>
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<p>Plus fréquemment associés aux rois mages dans l’iconographie de l’adoration de l’enfant – comme dans la <a href="https://journals.openedition.org/cem/13519#tocto1n3">Chapelle des mages du Palais Médicis à Florence</a>, les mécènes affichent leur humilité par le choix de s’identifier aux bergers. Cette prise de position constitue un outil de valorisation évident dans le contexte suivant le concile de Trente. Grégoire XIII se montre ainsi au service de son peuple et contrecarre les critiques d’abus intentées au clergé lors de la Réforme.</p>
<p>« Et maintenant, ensemble – sur les ailes de l’aigle – nous entamons l’œuvre que Dieu et l’histoire nous ont demandé d’accomplir », a clamé Joe Biden à la fin de son discours de victoire. Même si la formule ne paraît de prime abord pas très humble, Joe Biden emboîte le pas à Grégoire XIII en s’identifiant comme l’élu divin (et non seulement le gagnant d’un vote électoral).</p>
<p>Il se positionne également tel un messie (« Nous devons restaurer l’âme de l’Amérique ! ») dont l’action extirpera les États-Unis de la noirceur dans laquelle Donald Trump les a plongés. La mise en scène de la foi de Joe Biden aura-t-elle fait oublier aux fervents catholiques la position démocrate proavortement qu’ils n’appuient pas ?</p>
<p>On ne peut que penser que la stratégie a été gagnante : près de 500 ans après son utilisation par Grégoire XIII, Joe Biden arrache peut-être grâce à elle les Grands Lacs à son adversaire républicain et devient le sauveur attendu des États-Unis. <em>God bless America</em> !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/151466/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fannie Caron-Roy a reçu des financements du Conseil de recherches en sciences humaines du Gouvernement du Canada et de l'Université de Montréal. </span></em></p>Durant la campagne présidentielle, Joe Biden a usé de sa foi à des fins électoralistes. Cette stratégie n’est pas nouvelle. Elle remonte aussi loin qu’au pape Grégoire XIII !Fannie Caron-Roy, Doctorante en histoire de l'art, Université de MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1502202020-11-16T18:19:18Z2020-11-16T18:19:18ZJoe Biden et l’espace : les plans américains d’exploration spatiale pourraient-ils changer ?<p>Donald Trump a fixé des objectifs audacieux en matière d’exploration spatiale pendant son mandat – des missions habitées <a href="https://theconversation.com/a-qui-appartiennent-mars-la-lune-et-leurs-ressources-naturelles-141406">vers la Lune</a> et <a href="https://theconversation.com/mars-2020-lance-la-formidable-quete-dechantillons-martiens-143585">vers Mars</a>, ainsi qu’une <a href="https://www.lesechos.fr/monde/etats-unis/defense-le-projet-space-force-de-trump-avance-992731">« Space Force »</a>. En revanche, son successeur Joe Biden a été <a href="https://joebiden.com/joes-vision/">relativement discret sur la politique spatiale</a>. Comment l’exploration spatiale est-elle susceptible de changer à l’avenir ?</p>
<p>Il est clair qu’il y aura des changements. Le chef actuel de la NASA, Jim Bridenstine, <a href="https://www.cieletespace.fr/actualites/sous-la-presidence-biden-jim-bridenstine-demissionnera-de-la-tete-de-la-nasa">a déjà annoncé son départ</a>. Et nous savons que la politique américaine en matière de vols spatiaux habités survit rarement à un changement à la présidence.</p>
<p>Cela dit, l’incroyable succès de la <a href="https://www.lemonde.fr/sciences/article/2020/08/02/spacex-amerissage-attendu-de-la-capsule-transportant-deux-astronautes-americains_6047971_1650684.html">mission de démonstration de SpaceX</a> vers la Station spatiale internationale (ou « ISS ») signifie que le programme d’équipages commerciaux va probablement se poursuivre, soulageant ainsi la NASA de ce fardeau. De fait, le premier vol opérationnel du « Crew Dragon » de la société commerciale SpaceX est parti le <a href="https://www.ouest-france.fr/sciences/espace/nasa/decollage-d-une-fusee-spacex-avec-quatre-astronautes-en-direction-de-la-station-spatiale-7052445">16 novembre</a> à destination de l’ISS, avec quatre astronautes à bord.</p>
<h2>Des hommes à nouveau sur la Lune</h2>
<p>Pendant l’administration Trump, la NASA s’est également engagée à ce que des astronautes retournent sur la Lune en 2024 dans le cadre du <a href="https://www.nasa.gov/specials/artemis/">« programme Artemis »</a>. Le premier lancement d’essai – sans équipage – est prévu dès l’année prochaine, avec <a href="https://www.nasa.gov/artemis-1/">Artemis-1</a>. Le programme Artemis s’appuie sur le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Programme_Constellation">« programme Constellation »</a>, d’abord mis en œuvre par le président républicain George W. Bush en 2005, puis annulé par le président démocrate Barack Obama en raison de son coût élevé et de sa difficulté.</p>
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<img alt="Concept d’artiste d’Artemis-1" src="https://images.theconversation.com/files/368834/original/file-20201111-21-p3osk2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/368834/original/file-20201111-21-p3osk2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/368834/original/file-20201111-21-p3osk2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/368834/original/file-20201111-21-p3osk2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/368834/original/file-20201111-21-p3osk2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/368834/original/file-20201111-21-p3osk2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/368834/original/file-20201111-21-p3osk2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Concept d’artiste d’Artemis-1.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.nasaspaceflight.com/2019/07/waiting-artemis-1-schedule-decision-sls-green-run/">NASA</a></span>
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<p>Le seul indice substantiel sur l’orientation de la présidence Biden en ce qui concerne les vols d’astronautes vers la Lune se trouve dans un document du Parti démocrate intitulé <a href="https://democrats.org/where-we-stand/party-platform/building-a-stronger-fairer-economy/">« Construire une économie plus forte et plus juste »</a>. Dans un paragraphe, les démocrates déclarent qu’ils « soutiennent le travail de la NASA pour ramener les Américains sur la Lune et aller au-delà, sur Mars, une nouvelle étape dans l’exploration de notre système solaire ».</p>
<p>Il n’y a pas de détails sûrs quand cela pourrait arriver. Mais étant donné que la <a href="https://www.nasa.gov/press-release/nasa-international-partners-advance-cooperation-with-first-signings-of-artemis-accords">coopération internationale</a> est désormais une caractéristique majeure du <a href="https://theconversation.com/a-qui-appartiennent-mars-la-lune-et-leurs-ressources-naturelles-141406">programme Artemis</a>, il serait difficile pour une jeune administration Biden de se retirer unilatéralement du projet. Par exemple, le Canada, l’Agence spatiale européenne (ESA) et le Japon sont tous des partenaires officiels dans la construction du <a href="https://www.numerama.com/sciences/611409-lunar-gateway-le-projet-de-future-station-spatiale-lunaire-pourrait-etre-repousse-par-la-nasa.html"><em>Lunar Gateway</em></a> – une station en orbite autour de la Lune (comme l’ISS l’est autour de la Terre), conçue comme un avant-poste de multiples expéditions sur le sol lunaire.</p>
<p>Le programme fait également avancer les recherches rapidement, notamment en ce qui concerne les matériaux de construction, l’alimentation électrique et la production alimentaire. Cette semaine, l’Agence spatiale européenne a <a href="https://www.theguardian.com/science/2020/nov/09/uk-firm-to-turn-moon-rock-into-oxygen-and-building-materials">attribué un contrat</a> à la société britannique Metalysis pour développer des techniques permettant d’extraire simultanément de l’oxygène et des métaux du sol lunaire.</p>
<h2>La longue route vers Mars</h2>
<p>L’administration Trump a également fait pression pour une <a href="https://theconversation.com/us-wants-a-crewed-mission-to-the-moon-in-five-years-but-can-and-should-that-be-done-114951">première mission vers Mars avec équipage</a> dans les années 2030, une expédition bien plus délicate en raison des distances à parcourir. En effet, un tel voyage exposerait encore davantage les astronautes aux radiations et à des difficultés psychologiques. D’autres défis importants sont les restrictions de poids et les temps de communication limités.</p>
<p>Dans un rapport indépendant de 2019, le <a href="https://www.ida.org/en/ida-ffrdcs/science-and-technology-policy-institute"><em>Science and Technology Policy Institute</em></a> a déclaré qu’une mission habitée vers Mars dans les années 2030 est <a href="https://spacenews.com/independent-report-concludes-2033-human-mars-mission-is-not-feasible/">actuellement impossible</a>. Il est peu probable que Biden réitère cette proposition d’échéance dans un avenir proche.</p>
<h2>La « Space Force », sixième branche des forces armées américaines… dans l’espace</h2>
<p>L’administration Trump a créé la « Space Force » au sein de l’<em>Air Force</em>, l’armée de l’air américaine. Cette initiative souligne le fait que les États-Unis considèrent l’espace comme une <a href="https://theconversation.com/space-may-soon-become-a-war-zone-heres-how-that-would-work-125460">zone de guerre potentielle</a> plutôt que comme une zone d’exploration purement scientifique. Mais nombre de citoyens américains ne sont pas convaincus. Le programme bénéficie d’un <a href="https://medium.com/westeastspace/nasa-space-exploration-and-american-public-opinion-139cbc1c6cce">taux d’approbation du public de 31 % seulement</a> et son <a href="https://www.washingtonpost.com/national-security/2020/01/25/space-force-logo/">logo</a> comme ses <a href="https://www.bbc.co.uk/news/world-us-canada-51160547">uniformes</a> sont l’objet de moqueries.</p>
<p>La <em>Space Force</em> survivra-t-elle ? Le démantèlement d’une branche des forces armées n’a jamais été effectué aux États-Unis auparavant et la réintégration de cette branche dans l’armée de l’air américaine pose sans aucun doute de nombreuses difficultés. Il est donc probable qu’elle restera, peut-être avec une attention réduite.</p>
<h2>Un nouveau départ pour la NASA ?</h2>
<p>Peut-on s’attendre à quelque chose de nouveau ? Biden s’est déjà engagé à signer des décrets qui annuleront la plupart des travaux de l’administration Trump – de la même manière que <a href="https://science.thewire.in/environment/climate-action-trump-undid-obamas-work-now-biden-plans-to-undo-trumps/">Trump a annulé la plupart des initiatives d’Obama</a>.</p>
<p>Le plus grand signe de changement est le départ de Bridenstine. Lorsqu’il a été nommé en 2018, <a href="https://www.vox.com/2018/4/18/17253560/nasa-administrator-jim-bridenstine-confirmation">ce fut une surprise pour la communauté scientifique</a> – il n’a pas de qualification scientifique, et avait déjà indiqué qu’il avait des doutes sur le changement climatique (ce sur quoi il a changé d’avis, en acceptant le poste). Pourtant, il a prouvé qu’il était un <a href="https://www.forbes.com/sites/jonathanocallaghan/2020/10/30/the-one-thing-trump-got-right-is-nasa-chief-jim-bridenstine-should-he-stay-if-biden-wins/?sh=777257c122ba">leader compétent</a> de la NASA.</p>
<p>Lorsqu’il a quitté ses fonctions, il a déclaré qu’il voulait laisser la place à quelqu’un ayant une <a href="https://www.space.com/nasa-chief-bridenstine-step-aside-president-biden">« relation étroite avec le président »</a>. La question de savoir qui cela pourrait être est toujours d’actualité et dépendra en grande partie du nouveau président lui-même. La plupart des dirigeants de la NASA ont au moins un diplôme en ingénierie ou en physique et, dans le passé, ont dirigé un centre spatial. Dans les candidats potentiels, nous comptons <a href="https://www.nasa.gov/centers/marshall/jody-singer-bio.html">Jody Singer</a>, directrice du <em>Marshall Space Flight Center</em>, <a href="https://www.nasa.gov/centers/johnson/about/people/orgs/bios/geyer.html">Mark Geyer</a>, directeur du <em>Johnson Space Center</em>, ou <a href="https://www.nasa.gov/content/goddard/2020/center-director-dennis-andrucyk">Dennis Andrucyk</a>, directeur du <em>Goddard Space Flight Center</em>, et l’actuel administrateur adjoint de la NASA, <a href="https://www.nasa.gov/about/highlights/morhard_bio.html">James Morhard</a> – mais le champ des possibles reste grand ouvert.</p>
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<img alt="Image de Joe Biden" src="https://images.theconversation.com/files/368835/original/file-20201111-13-1suntlr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/368835/original/file-20201111-13-1suntlr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/368835/original/file-20201111-13-1suntlr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/368835/original/file-20201111-13-1suntlr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/368835/original/file-20201111-13-1suntlr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/368835/original/file-20201111-13-1suntlr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/368835/original/file-20201111-13-1suntlr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Biden veut s’attaquer au changement climatique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Gage Skidmore/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Joe Biden a clairement dit que l’urgence climatique est une priorité. Il est probable que la lutte se concentre sur la limitation de la pollution industrielle et le développement de sources d’énergie renouvelables, mais cela suggère peut – être aussi une politique spatiale davantage axée sur les missions d’observation de la Terre, comme le programme de satellites géostationnaires pour l’environnement <a href="https://www.nasa.gov/content/goes">« GOES »</a>. D’autres satellites pour surveiller les marées noires, la déforestation ou encore les émissions de carbone sont envisageables.</p>
<p>Toutes ces possibilités sont bien sûr éclipsées par la crise financière provoquée par la Covid-19. Les projets à long terme comme le programme Artemis ont besoin d’un financement régulier et stable – il faudra probablement juger une fois les engagements pris.</p>
<p>Quels que soient les changements, il semble probable que le financement des missions spatiales sera moins important. Malgré cela, de nombreux scientifiques <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-020-03158-8">pousseront un soupir de soulagement</a> de ne plus avoir à lutter contre les tweets anti-science de <a href="https://www.sciencemag.org/news/2020/10/trump-has-shown-little-respect-us-science-so-why-are-some-parts-thriving">Trump</a>, sur des sujets allant de la Covid-19 aux vaccins en passant par le changement climatique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/150220/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Un nouveau président va arriver à la Maison Blanche et un nouvel administrateur à la NASA. Quels changements peut-on anticiper dans la politique spatiale américaine ?Ian Whittaker, Senior Lecturer in Physics, Nottingham Trent UniversityGareth Dorrian, Post Doctoral Research Fellow in Space Science, University of BirminghamLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1498672020-11-11T17:32:30Z2020-11-11T17:32:30ZAvant Kamala Harris : ces femmes noires qui ont visé la Maison Blanche<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/368669/original/file-20201110-17-14ctao6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C3574%2C2395&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Kamala Harris, d'origine jamaïcaine et indienne, deviendra la 20 janvier 2021 la vice-présidente des États-Unis.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Pavlo Conchar/SOPA Images/LightRocket via Getty Images</span></span></figcaption></figure><p>La future vice-présidente des États-Unis est la <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/i-am-who-i-am-kamala-harris-daughter-of-indian-and-jamaican-immigrants-defines-herself-simply-as-american/2019/02/02/0b278536-24b7-11e9-ad53-824486280311_story.html">fille américaine d’immigrés jamaïcains et indiens</a>.</p>
<p>La <a href="https://www.nytimes.com/video/us/politics/100000007442400/biden-trump-presidential-election.html">victoire annoncée de Joe Biden sur Donald Trump</a> signifie que la sénatrice Kamala Harris s’apprête à devenir la première femme vice-présidente du pays et la première personne noire à occuper le poste de vice-président. Harris est <a href="https://theconversation.com/with-kamala-harris-americans-yet-again-have-trouble-understanding-what-multiracial-means-145233">également d’origine indienne</a>, ce qui fait de l’élection de 2020 un véritable jalon pour deux communautés « de couleur ».</p>
<p>Harris n’est pas la première femme noire à avoir aspiré à la vice-présidence dans l’histoire américaine. La journaliste afro-américaine et militante politique californienne Charlotta Bass s’est présentée à la vice-présidence en 1948 <a href="https://www.aaihs.org/charlotta-bass-for-vice-president-americas-two-parties-and-the-black-vote/">sur le ticket du Parti progressiste</a>.</p>
<p>Avant de devenir la colistière de Biden, Harris a été son adversaire lors des primaires présidentielles démocrates. Elle est l’une des nombreuses femmes noires américaines à avoir <a href="https://www.thoughtco.com/black-women-who-have-run-for-president-4068508">brigué la plus haute fonction du pays</a> en dépit des nombreux obstacles qu’elles eurent à surmonter.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/368171/original/file-20201109-13-tq4ith.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C253%2C3600%2C2139&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/368171/original/file-20201109-13-tq4ith.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/368171/original/file-20201109-13-tq4ith.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/368171/original/file-20201109-13-tq4ith.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/368171/original/file-20201109-13-tq4ith.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/368171/original/file-20201109-13-tq4ith.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/368171/original/file-20201109-13-tq4ith.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Pendant le premier discours de Kamala Harris en tant que 49e vice-président élu des États-Unis, le 7 novembre 2020 à Miami, en Floride.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/news-photo/haitian-american-supporters-of-the-democratic-party-listen-news-photo/1229530998?adppopup=true">Johnny Louis/Getty Images</a></span>
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<h2>Des mains qui autrefois cueillaient le coton…</h2>
<p>Dans l’histoire des États-Unis, les Afro-Américains ont longtemps été dans l’impossibilité de s’approcher du pouvoir politique, du fait de l’esclavage d’abord, puis des <a href="http://jumelage.org/francais/les-lois-jim-crow/">lois Jim Crow</a> et de diverses mesures visant à empêcher les Noirs d’exercer pleinement leurs droits civiques et, spécialement, le droit de vote.</p>
<p>La tâche a été particulièrement ardue pour les femmes noires. Les femmes n’ont obtenu le droit de vote aux États-Unis qu’en <a href="https://www.nps.gov/articles/african-american-women-and-the-nineteenth-amendment.htm">1920</a>, et même à cette époque, les Noirs – y compris bien sûr les femmes – ne pouvaient toujours pas voter dans la plupart des États du Sud. Dans les années 1960, les femmes noires ont largement <a href="https://theconversation.com/the-hidden-history-of-black-nationalist-womens-political-activism-89695">contribué à la création du mouvement des droits civiques</a>, mais elles ont été tenues à l’écart des postes de direction.</p>
<p>J’aborde ces questions lors des cours de politique gouvernementale et de politique des minorités que j’enseigne en tant que <a href="https://scholar.google.com/citations?user=V8VhlpAAAAAJ&hl=en">professeur de sciences politiques</a>. Mais j’explique dans le même temps à mes étudiants que, malgré tout, les femmes noires des générations passées ont été nombreuses à caresser des ambitions politiques et même à obtenir certains succès dans ce domaine. Comme l’a dit le révérend Jesse Jackson en 1984 à propos de la montée en puissance des <a href="https://www.nytimes.com/1984/02/10/us/jackson-tells-alabama-it-will-never-be-the-same.html">électeurs noirs au siècle dernier</a>, « des mains qui autrefois cueillaient le coton élisent désormais le président du pays ».</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351166/original/file-20200804-16-zpao3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351166/original/file-20200804-16-zpao3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351166/original/file-20200804-16-zpao3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351166/original/file-20200804-16-zpao3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351166/original/file-20200804-16-zpao3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351166/original/file-20200804-16-zpao3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351166/original/file-20200804-16-zpao3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Joe Biden, lui-même ancien vice-président, a pleinement conscience de l’importance de cette fonction.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/news-photo/presumptive-democratic-presidential-nominee-former-vice-news-photo/1227818356?adppopup=true">Mark Makela/Getty Images</a></span>
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<p>Aujourd’hui, des <a href="https://theconversation.com/americas-black-female-mayors-face-dual-crises-of-covid-19-and-protests-but-these-women-are-used-to-uphill-battles-140415">maires noires</a> dirigent plusieurs des plus grandes villes américaines, dont Atlanta, Chicago et San Francisco. Des femmes noires sont <a href="https://www.latimes.com/nation/la-na-seattle-portland-chiefs-20180816-story.html">chefs de police</a>, <a href="https://www.nbcwashington.com/news/local/virginia-democrat-runs-to-become-first-black-woman-governor-in-us/2336934/">candidates au poste de gouverneur</a> et, de plus en plus souvent, <a href="https://www.cawp.rutgers.edu/women-color-elective-office-2019">élues au Congrès</a>.</p>
<p>Aujourd’hui, les femmes noires – qui, longtemps, n’étaient pas autorisées à voter pour élire le président, sans même parler de concourir à la fonction suprême du pays – voient l’une des leurs à un pas du Bureau ovale.</p>
<h2>« Inaptes » pour le poste ?</h2>
<p>Kamala Harris est une Démocrate qui a été procureur général de Californie, puis sénatrice. Son appartenance partisane tend plutôt à faire d’elle une exception : historiquement, la plupart des candidates noires à la présidence se sont présentées en tant qu’indépendantes.</p>
<p>En 1968, Charlene Mitchell, 38 ans, originaire de l’Ohio, est devenue la première femme noire à se présenter à la présidence, en tant que communiste. Comme de nombreux autres Afro-Américains nés dans les années 1930, elle a rejoint le parti communiste en raison de <a href="https://www.thecrimson.com/article/1968/11/5/charlene-mitchell-pbtbhe-frederick-douglas-book/">l’importance que celui-ci accorde à l’égalité des races et des sexes</a>. Les femmes noires communistes ont <a href="https://www.peoplesworld.org/article/communists-and-the-long-struggle-for-african-american-equality/">dénoncé</a> les lois Jim Crow, les lynchages et les pratiques injustes dans le monde du travail affectant les hommes et les femmes de toutes les couleurs de peau.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/352378/original/file-20200811-13-1chj8s8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt=" Charlene Mitchell" src="https://images.theconversation.com/files/352378/original/file-20200811-13-1chj8s8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/352378/original/file-20200811-13-1chj8s8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=818&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/352378/original/file-20200811-13-1chj8s8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=818&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/352378/original/file-20200811-13-1chj8s8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=818&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/352378/original/file-20200811-13-1chj8s8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1028&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/352378/original/file-20200811-13-1chj8s8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1028&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/352378/original/file-20200811-13-1chj8s8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1028&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Charlene Mitchell, première candidate noire à la présidence des États-Unis.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/4/4c/Charlene_Mitchell.jpg/176px-Charlene_Mitchell.jpg">Wikimedia</a></span>
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<p>La campagne présidentielle de Mitchell, qui était axée sur les <a href="https://www.aaihs.org/a-black-woman-communist-candidate-charlene-mitchells-1968-presidential-campaign/">droits civiques et la lutte contre la pauvreté</a>, était probablement vouée à l’échec dès le départ. En 1968, de nombreux États n’ont <a href="https://diva.sfsu.edu/collections/sfbatv/bundles/220770">pas autorisé les communistes à voter</a>. Les médias, du <a href="https://www.aaihs.org/a-black-woman-communist-candidate-charlene-mitchells-1968-presidential-campaign/"><em>Boston Globe</em> au <em>Chicago Tribune</em></a>, ont été nombreux à juger Mitchell inadaptée au poste qu’elle briguait <a href="https://www.aaihs.org/a-black-woman-communist-candidate-charlene-mitchells-1968-presidential-campaign/">parce qu’elle était à la fois noire et femme</a>. Mitchell n’a finalement récolté que <a href="https://www.jofreeman.com/politics/womprez.htm">1 075 voix</a>.</p>
<p>Parmi les autres candidates noires indépendantes à la présidence figurent l’activiste communautaire <a href="https://nursingclio.org/2016/11/08/rosie-the-riveter-for-president-margaret-wright-the-peoples-party-and-black-feminism/">Margaret Wright</a>, qui s’est présentée sous l’étiquette du Parti populaire en 1976, et <a href="https://www.telegraph.co.uk/news/obituaries/politics-obituaries/8788002/Isabell-Masters.html">Isabell Masters</a>, une enseignante qui a créé son propre parti, appelé Looking Back, et qui s’est présentée en 1984, 1992 et 2004.</p>
<p>En 1988, la psychologue Lenora Fulani est devenue la première femme et la première Afro-Américaine à se présenter à la présidence dans chacun des 50 États. Se présentant comme indépendante, elle a récolté <a href="https://awpc.cattcenter.iastate.edu/directory/lenora-b-fulani/">plus de votes lors d’une élection présidentielle américaine que toute autre femme candidate avant elle</a>. L’enseignante Monica Moorehead, du <a href="https://www.ourcampaigns.com/CandidateDetail.html?CandidateID=4227">Workers World ticket</a>, a concouru à la présidence en 1996, 2000 et 2016.</p>
<p>En 2008, l’année où Barack Obama a été élu président, Cynthia McKinney, une ancienne représentante américaine de Géorgie, était candidate du <a href="https://www.gp.org/">Parti Vert</a>. Et en 2012, Peta Lindsay s’est présentée avec un programme plus à gauche que celui du président Obama, sur le ticket du <a href="https://www.pslweb.org/about">Parti pour le socialisme et la libération</a>.</p>
<p>Une seule femme noire a brigué l’investiture républicaine : Angel Joy Charvis, une conservatrice religieuse de Floride, qui a expliqué, en présentant sa candidature en 1999, vouloir « <a href="https://www.orlandosentinel.com/news/os-xpm-1999-03-24-9903240069-story.html">recruter une nouvelle espèce de Républicains</a> ».</p>
<h2>Incorruptible et indépendante</h2>
<p>Toutes ces candidates noires à la présidence étaient peu connues. Mais en tant que première femme noire membre du Congrès, Shirley Chisholm avait derrière elle des années d’expérience dans la fonction publique et bénéficiait d’une notoriété nationale lorsqu’elle est devenue la première Noire américaine et la première femme à briguer l’investiture démocrate à la présidence en 1972. Le slogan de sa campagne était <a href="https://theundefeated.com/features/shirley-chisholm-unbought-and-unbossed-presidential-campaign-poster-cover-stories/">« Unbought and Unbossed »</a> (que l’on pourrait traduire par « Incorruptible et indépendante »).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351167/original/file-20200804-20-1gcru4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351167/original/file-20200804-20-1gcru4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351167/original/file-20200804-20-1gcru4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351167/original/file-20200804-20-1gcru4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351167/original/file-20200804-20-1gcru4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351167/original/file-20200804-20-1gcru4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351167/original/file-20200804-20-1gcru4z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Shirley Chisholm annonce sa candidature à l’investiture démocrate à la présidentielle de 1972.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/news-photo/representative-shirley-chisholm-of-brooklyn-announces-her-news-photo/3240579?adppopup=true">Don Hogan Charles/New York Times Co. via Getty Images</a></span>
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<p>Shirley Chisholm, qui a <a href="https://theundefeated.com/features/shirley-chisholm-unbought-and-unbossed-presidential-campaign-poster-cover-stories/">financé elle-même l’essentiel de sa campagne</a>, s’est concentrée sur les <a href="https://www.nytimes.com/2019/07/06/sunday-review/shirley-chisholm-monument-film.html">droits civiques et la lutte contre la pauvreté</a>.</p>
<p>Elle a rapidement fait l’objet d’attaques sexistes véhémentes. Un <a href="https://www.nytimes.com/1972/06/25/archives/the-short-unhappy-life-of-black-presidential-politics-1972-black.html">article du New York Times de juin 1972</a> la qualifie ainsi :</p>
<blockquote>
<p>« [Elle n’est] pas belle. Son visage est osseux et anguleux, son nez large et plat, ses yeux petits presque comme des perles, son cou et ses membres décharnés. Ses dents saillantes expliquent probablement en partie son zézaiement perceptible. »</p>
</blockquote>
<p>Chisholm n’a guère été soutenue par les électeurs noirs et les femmes, et n’a <a href="https://web.archive.org/web/20141111182057/http://www.uic.edu/orgs/cwluherstory/jofreeman/polhistory/chisholm.htm">remporté aucune primaire</a>.</p>
<p>Les femmes noires qui ont suivi les traces de Chisholm, du Congrès aux primaires présidentielles démocrates, y compris <a href="https://www.haverford.edu/college-communications/news/carol-moseley-braun-presents-views-government-democratic-party">Carol Moseley Braun, sénatrice de l’Illinois</a> et Harris elle-même, n’ont guère connu plus de succès. Harris a compté parmi les premiers candidats démocrates aux primaires de 2020 à <a href="https://www.cnn.com/2019/12/03/politics/kamala-harris-ends-presidential-bid/index.html">se retirer de la course, en décembre 2019</a>.</p>
<h2>Les défis auxquels sont confrontées les femmes noires</h2>
<p>Pourquoi ces candidatures, et celles des <a href="https://www.washingtonpost.com/nation/2020/08/12/bass-kamala-first-black-vp/">autres femmes noires</a> qui visaient de hautes fonctions, ont-elles échoué ?</p>
<p>Dans la plupart des cas, les candidates noires à la présidence n’ont pas pu aller jusqu’au bout de leurs campagnes électorales. Et celles qui l’ont fait ont éprouvé des difficultés à récolter des fonds.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/368361/original/file-20201109-17-g989hu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/368361/original/file-20201109-17-g989hu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/368361/original/file-20201109-17-g989hu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/368361/original/file-20201109-17-g989hu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/368361/original/file-20201109-17-g989hu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/368361/original/file-20201109-17-g989hu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/368361/original/file-20201109-17-g989hu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/368361/original/file-20201109-17-g989hu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Fresque murale, œuvre de l’artiste Danielle Mastrion, au Shirley Chisholm State Park, ouvert en 2019 à Brooklyn, New York.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Catesby Holmes</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Leurs candidatures n’ayant <a href="https://www.washingtonpost.com/outlook/2020/03/03/losing-primary-candidates-still-influence-race/">pas été prises au sérieux</a> par les médias, elles ont eu du mal à faire entendre leur message. Historiquement, les candidates noires à la présidence n’ont reçu <a href="https://theconversation.com/how-strategic-bias-keeps-americans-from-voting-for-women-and-candidates-of-color-145906">aucun soutien réel de la part d’un segment quelconque des électeurs américains</a>, y compris les Afro-Américains et les femmes. En général, les gens – même ceux qui auraient pu être encouragés par l’idée que quelqu’un qui leur ressemblait puisse aspirer à la Maison-Blanche – <a href="https://www.smithsonianmag.com/smithsonian-institution/unbought-and-unbossed-when-black-woman-ran-for-the-white-house-180958699/">pensaient qu’elles ne pouvaient pas gagner</a>.</p>
<p>En tant que vice-président ayant joué un rôle majeur durant les deux mandats de Baracj Obama, Joe Biden sait ce que cette fonction implique. En Kamala Harris, il a choisi une femme qui non seulement l’a aidé à remporter l’élection, mais qui est également prête à gouverner.</p>
<p>2020 restera comme une année charnière pour les Afro-Américains, les Américains d’origine asiatique et les femmes – autant de catégories qui ont été si longtemps exclues de tant d’aspects de la vie politique américaine.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/149867/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sharon D. Wright Austin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Avant Kamala Harris, d’autres femmes de couleur se sont portées candidates aux plus hautes fonctions aux États-Unis. Coup de projecteur sur les plus remarquables de ces pionnières.Sharon D. Wright Austin, Professor of Political Science, University of FloridaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1497822020-11-11T17:32:29Z2020-11-11T17:32:29ZL’Arizona, laboratoire et antidote du trumpisme<p>Dans les journées d’incertitude sur les résultats de l’élection présidentielle, l’État d’Arizona est l’un de ceux qui ont le plus tenu les commentateurs en haleine. Malgré un écart de voix serré, et une longue durée de dépouillement dans le comté autour de Phoenix, l’Arizona semble en passe d’attribuer ses onze grands électeurs à un candidat démocrate, une première depuis 1996.</p>
<p>Cet État du Sud-Ouest offre un témoignage éloquent de la division de l’Amérique contemporaine. Traditionnel bastion républicain, il fut un laboratoire de contrôle migratoire répressif, précurseur du trumpisme en la matière. Aujourd’hui, il apparaît comme un État « violet » grâce à l’activisme débuté au tournant des années 2010 de collectifs de citoyens hispaniques et migrants contre ces mesures répressives, au profit des Démocrates. L’Arizona apparaît donc à la fois comme le laboratoire et l’antidote du trumpisme.</p>
<h2>Une évolution démographique favorable aux Démocrates</h2>
<p><a href="https://eu.azcentral.com/story/news/politics/elections/2020/11/07/sinema-mccains-others-react-joe-bidens-presidential-victory/6202984002/">Côté républicain</a>, ni Doug Ducey, le gouverneur de l’État et soutien du président, ni Martha McSally, candidate malheureuse au deuxième poste de sénateur, ne se sont exprimés depuis l’annonce de la victoire de Joe Biden samedi, se limitant à demander l’achèvement du dépouillement. Il faut dire que l’écart de voix est minime : <a href="https://www.270towin.com/2020-election-results-live/state/arizona">49,5 % des voix pour Joe Biden, 49 % pour Donald Trump le 10 novembre, sur 99 % des bulletins comptés</a>. Ce qui est sûr, c’est que l’écart en faveur de Joe Biden sera au final beaucoup plus faible que celui enregistré en 2016 entre Hillary Clinton et Donald Trump, qui l’avait emporté avec un avantage de 4 % des voix. De plus, les deux sénateurs de l’Arizona sont désormais démocrates, ainsi que cinq des neuf représentants à la Chambre.</p>
<p>Plusieurs explications de ce basculement peuvent être avancées. Premièrement, cet État de 7,3 millions d’habitants a connu, ces dernières années, une des <a href="https://thehill.com/homenews/campaign/517701-how-fast-population-growth-made-arizona-a-swing-state">plus fortes croissances démographiques du pays</a>. Il accueille désormais moins de retraités que dans les années 2000 mais davantage de jeunes, souvent diplômés et cadres supérieurs, qui s’installent notamment dans les banlieues de Phoenix ou de Tucson.</p>
<p>Deuxièmement, le candidat démocrate a sans doute bénéficié du soutien affiché de Républicains modérés bien ancrés dans les territoires ruraux, dans la lignée de l’ex-sénateur John McCain, dont la veuve et la fille ont <a href="https://www.foxnews.com/politics/mccain-family-throw-support-behind-biden-harris-win">applaudi l’élection de Joe Biden</a>.</p>
<p>Troisièmement, le renforcement du poids politique des électeurs hispaniques a été encore plus sensible que lors des élections précédentes. <a href="https://morrisoninstitute.asu.edu/content/latino-vote-larger-simply-votes-cast-latinos">La population dite « latino »</a>, issue pour une large part de l’immigration mexicaine de ces vingt dernières années, est plutôt jeune : 26 ans en moyenne contre 43 pour les non Hispaniques. Elle représente désormais un tiers de la population de l’Arizona, et un quart de l’électorat, contribuant à faire évoluer l’Arizona vers un État de « majorité de minorités » à l’horizon 2030. Cette population, pauvre et peu éduquée, est particulièrement affectée par la pandémie de coronavirus car elle compte en son sein beaucoup de travailleurs exposés et ne disposant que d’une faible protection sociale.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1323970118414749697"}"></div></p>
<p>La mobilisation de ces électeurs lors de la campagne et lors du vote a été déterminante. Cette mobilisation des Hispaniques en faveur des Démocrates a une longue histoire. Elle s’est forgée contre les lois migratoires restrictives adoptées par des institutions contrôlées par les Républicains depuis les années 2000.</p>
<h2>L’Arizona, État-barrière, précurseur du trumpisme</h2>
<p>On connaît aujourd’hui le « <a href="https://theconversation.com/le-trumpisme-un-courant-qui-est-la-pour-durer-dans-le-paysage-politique-americain-149506">trumpisme</a> » : un mélange de conceptions conservatrices du système fédéral et des valeurs morales, de nationalisme exacerbé, de fierté blanche et, surtout, de recherche de boucs émissaires, immigrants en tête. La politique migratoire de l’administration Trump en atteste, à l’image du projet de « mur » dont est contesté le nombre de <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2020-09-01/the-border-wall-that-u-s-not-mexico-is-paying-for-quicktake"><em>miles</em> supplémentaires</a> effectivement en chantier.</p>
<p>Certes, l’attention s’est focalisée sur le mur et sur des mesures chocs (le « <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/monde/amerique-nord/muslim-ban-le-decret-anti-immigration-de-trump-entre-en-vigueur_1923009.html">Muslim Ban</a> » ou la séparation des familles de migrants arrêtées à la frontière). Néanmoins, l’administration Trump a surtout refaçonné le système migratoire par près de 400 <a href="https://www.migrationpolicy.org/research/us-immigration-system-changes-trump-presidency"><em>executive orders</em></a>. Par exemple, le <em>Migrant Protection Protocol</em> a réduit l’éligibilité à l’asile des personnes qui n’ont pas demandé ou se sont vu refuser cette protection dans un pays de transit comme le Mexique.</p>
<p>Ces mesures aux frontières se sont ajoutées à des raids contre des entreprises employant sans autorisation des migrants, à des menaces de renvois et à une absence de régularisation des 700 000 « <a href="https://www.lefigaro.fr/international/2018/04/01/01003-20180401ARTFIG00140-trump-ne-veut-plus-d-accord-protegeant-les-dreamers.php">Dreamers</a> », ces non-citoyens arrivés dans la clandestinité alors qu’ils étaient enfants. Donald Trump tenta de mettre fin à la protection qui leur avait été octroyée sous Barack Obama. Toutes ces mesures ont gouverné avec effroi le quotidien de familles d’Hispaniques, particulièrement en Arizona.</p>
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<p>Ces mesures répressives ne sont pas sorties du chapeau de l’administration Trump. Depuis les années 2000, l’État d’Arizona s’est construit une réputation d’État-barrière en légiférant dans ce sens. En 2010 notamment, une loi a été symptomatique de cela : SB 1070 (<em><a href="https://www.law.cornell.edu/wex/support_our_law_enforcement_and_safe_neighborhoods_act_of_2010">Support Our Law Enforcement and Safe Neighborhoods Act</a></em>). L’un des articles de ce texte autorise la police, lors d’arrestations ou de contrôles, à vérifier les documents d’identité et d’immigration de la personne si celle-ci est « raisonnablement suspectée » d’être « illégale ». Pour les opposants à la loi, cette disposition constitue ni plus ni moins que l’autorisation d’une discrimination raciale visant en premier lieu les immigrants et les citoyens hispaniques. L’administration Obama a <a href="https://www.reuters.com/article/us-obama-immigration-lawsuit-idUSTRE6653Q320100707">tenté de bloquer l’application de cette loi en justice</a> permettant ainsi, au fur et à mesure des jugements de la détricoter.</p>
<p>Pour les Républicains de l’Arizona, cette loi controversée s’inscrit dans une stratégie de pression sur le gouvernement fédéral. SB 1070 a contribué à faire de l’Arizona le laboratoire du projet républicain porté par Mitt Romney lors du cycle électoral de 2012. Ce type de loi a aussi fait des <a href="https://www.motherjones.com/politics/2012/03/anti-immigration-law-database/">émules dans d’autres États</a> (Alabama, Géorgie, Indiana, Caroline du Sud, Utah) et s’inscrit dans un processus où se multiplient les législations locales en faveur du contrôle migratoire, parallèlement au <a href="https://journals.openedition.org/alhim/4049">blocage du Congrès sur une réforme du système migratoire</a> d’envergure nationale.</p>
<p>Ces mesures ont donc circulé au sein du parti républicain au cours de la dernière décennie et ont constitué l’armature des mesures reprises et amplifiées nationalement par l’administration Trump. L’architecte de SB 1070, l’avocat Kris Kobach, a fait partie de l’équipe de campagne puis de transition de Donald Trump en 2016. Certains auteurs ont évoqué à cet égard un processus d’<a href="https://campaignstops.blogs.nytimes.com/2012/10/15/the-arizonification-of-america/">« arizonification de l’Amérique »</a>.</p>
<p>Face à ce climat répressif, la mobilisation visant à défendre les droits des Hispaniques s’est structurée sur le terrain et a permis de mobiliser le vote en faveur de candidats démocrates, tout en portant l’espoir d’une rhétorique et de réformes davantage inclusives.</p>
<h2>L’anti-trumpisme : résistances et activisme</h2>
<p>L’adoption de la loi SB 1070 a contribué à la constitution de groupes de défense des citoyens hispaniques comme <a href="https://luchaaz.org/">LUCHA (Living United for Change in Arizona)</a>, <a href="https://mijente.net/">Mijente</a>, <a href="https://chispaaz.org/">Chispa AZ</a>, <a href="https://puenteaz.org/">Puente Arizona</a>, <a href="https://www.mifamiliavota.org/">Mi Familia Vota</a> ou encore les associations de Dreamers comme l’<a href="https://www.facebook.com/theadac/">Arizona Dream Act Coalition</a>. Aujourd’hui, ces 23 associations sont regroupées en une coalition pour la cause des citoyens et migrants hispaniques : <a href="https://onearizona.org/member-organizations/">One Arizona</a>, en lien avec des syndicats comme la Fédération américaine du travail – Congrès des organisations industrielles (<a href="https://aflcio.org/">AFL-CIO</a>).</p>
<p>LUCHA par exemple, s’est formé dans la foulée de l’adoption de la loi et s’est renforcé lors des campagnes de lutte contre <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2017/08/22/qui-est-joe-arpaio-le-sherif-anti-immigres-soutenu-par-donald-trump_5175251_3210.html">Joe Arpaio</a>, le shérif du comté de Maricopa autour de Phoenix en poste depuis 1995. Figure de proue nationale du combat anti-migrants, il incarnait le tournant répressif des Républicains. Il a été connu pour avoir lancé dès 2006 des programmes d’arrestations massives sur les lieux de travail et dans les quartiers hispaniques, ce qui lui valut d’être condamné en juillet 2017 à six mois de prison, suite à un procès pour discrimination raciale intenté sous l’ère Obama par le ministère de la Justice fédéral. <a href="https://edition.cnn.com/2017/08/25/politics/sheriff-joe-arpaio-donald-trump-pardon/index.html">Gracié par Donald Trump en août 2017</a>, il n’a pas été réélu en 2016 (à 43,5 % des voix contre 56,4 % pour le shérif démocrate), en bonne partie grâce à l’inscription sur les listes électorales de nombreux citoyens hispaniques.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1323986418880794628"}"></div></p>
<p>Cette tactique gagnante du <a href="https://theintercept.com/2020/11/04/arizona-democratic-latino-election/?utm_medium=social&utm_source=facebook&utm_campaign=theintercept&fbclid=IwAR1iBuO4zUETjWKNTDGSS5Bsii8V1TEpK8RawEEYTo-P4NMkthgLA4smS0o">« get out the vote »</a> a été renouvelée en 2018 et en 2020. One Arizona inscrivit 190 000 votants en 2018, contribuant à augmenter le taux de participation et favorisant la victoire à l’élection sénatoriale de la Démocrate <a href="https://www.sinema.senate.gov/">Kyrsten Sinema</a>. <a href="https://www.mifamiliavota.org/wp-content/uploads/2019/06/AZ-year-end-report-4.pdf">Mi familia vota</a> estimait qu’en Arizona 1,2 millions de « Latinos » pouvaient voter mais que la moitié seulement était inscrite – entre les citoyens et naturalisés mal inscrits, les jeunes qui venaient juste d’atteindre leur majorité, et les peurs d’intimidation le jour même du vote.</p>
<p>Cette année, contrairement aux soutiens du président, l’équipe Biden-Harris a peu fait de porte-à-porte, par peur du coronavirus. Kamala Harris s’est rendue en Arizona, tout comme Donald Trump et son équipe venus à 11 reprises. Chaque camp a dépensé des dizaines de millions de dollars en <a href="https://www.nbcnews.com/politics/meet-the-press/blog/meet-press-blog-latest-news-analysis-data-driving-political-discussion-n988541/ncrd1236033">publicités télévisées</a>. Les activistes hispaniques ont donc occupé le terrain en effectuant des appels téléphoniques, en frappant aux portes, en accompagnant les électeurs lors des inscriptions et lors du vote. Certains de ses activistes se sont même portés candidats, comme <a href="https://raquelteran.com/meet-raquel/">Raquel Teran</a>, élue au parlement de l’Arizona depuis un district frontalier.</p>
<p>Le succès démocrate en Arizona est donc aussi le fruit d’un activisme de terrain important, et ce malgré la pandémie. Il témoigne de la transformation socio-ethnique de la société états-unienne mais aussi des conséquences et réactions au trumpisme au cours de cette dernière décennie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/149782/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Damien Simonneau ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’Arizona, bastion républicain, a basculé cette année côté démocrate. L’explication tient largement à la montée en puissance des électeurs latinos, longtemps ciblés par les leaders républicains.Damien Simonneau, Chercheur postdoctoral en science politique, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1497172020-11-08T17:30:30Z2020-11-08T17:30:30ZJoe Biden saura-t-il réconcilier les Américains ?<p>Les analystes de la vie politique ont souvent tendance à chercher « la » meilleure explication pour expliquer le résultat de chaque élection majeure.</p>
<p>En 2008, cette explication tenait à la volonté de « changement » des Américains qui, en élisant Barack Obama face à John McCain, auraient souhaité porter à la Maison Blanche le candidat le plus éloigné du président sortant George W. Bush. En 2012, Mitt Romney aurait été trop « élitiste » pour séduire la majorité des électeurs. En 2016, Hillary Clinton, trop confiante en ses chances, aurait négligé « l'Amérique d'en bas ».</p>
<p>La justesse de toutes ces interprétations continue à ce jour de faire l'objet d'âpres débats. Et il en ira sans doute de même pour les commentaires accompagnant l'élection de Joe Biden à la présidence, qui vient d'être officialisée.</p>
<p>L'une des analyses qui seront probablement mises en avant insistera sur le fait que Biden a conduit une campagne <a href="https://www.politico.com/news/magazine/2020/10/23/joe-biden-slow-and-steady-campaign-432042">peu spectaculaire</a>, ce qui correspondait exactement à la demande d'une population lassée de quatre ans de politique-spectacle. Après avoir observé au quotidien un président tout sauf conventionnel, les Américains désiraient peut-être un peu de normalité.</p>
<p>Autre argument qui ne manquera pas d'être avancé : le très lourd bilan humain dû à la pandémie de Covid-19, qui a causé la mort de quelque 250 000 personnes aux États-Unis, aura coûté très cher au président sortant. La majorité des Américains <a href="https://apnews.com/article/virus-outbreak-donald-trump-health-united-states-china-89f3f568802f32e6bafdbeee1c53abe2">reprochent</a> au gouvernement de Donald Trump d'avoir mal géré cette pandémie qui ne cesse de prendre de l'ampleur (un <a href="https://www.abc.net.au/news/2020-11-05/us-sets-new-record-for-increase-in-covid-19-cases/12854110">nouveau record de contaminations</a> est enregistré chaque jour) ; pas étonnant, dès lors, que les électeurs aient décidé de ne pas reconduire l'équipe sortante.</p>
<p>Mais l'analyse la plus répandue attribue le résultat de l'élection à la peur et au doute qui se sont emparés d'un pays par ailleurs polarisé comme il l'a rarement été dans son histoire. Si les États-Unis sont déjà passés par des périodes comparables, <a href="https://news.gallup.com/poll/197828/record-high-americans-perceive-nation-divided.aspx">l'intensification constante</a> de ces sentiments est sans précédent.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/joe-biden-une-victoire-dans-une-democratie-americaine-fragilisee-149695">Joe Biden, une victoire dans une démocratie américaine fragilisée</a>
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<h2>Des électeurs passionnés, polarisés… et armés</h2>
<p>Avec 70 millions de suffrages, Donald Trump a récolté plus de voix que tout autre candidat à la présidentielle américaine dans l'Histoire — à l'exception de Joe Biden, qui en a recueilli plus de 74 millions (ces chiffres vont sans doute encore augmenter à mesure que les derniers bulletins seront comptabilisés). </p>
<p>Cette mobilisation record constitue bien sûr un signe positif pour la vitalité de la démocratie américaine ; mais certaines des passions qui sont à l'origine de ce taux de participation jamais vu suscitent l'inquiétude.</p>
<p>Un récent sondage a révélé qu’<a href="https://www.ussc.edu.au/analysis/free-and-fair-american-attitudes-towards-electoral-integrity-and-legitimacy">une majorité d'Américains</a> n'étaient pas disposés à accepter la victoire du camp opposé à l'élection présidentielle.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/368094/original/file-20201107-13-90097y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/368094/original/file-20201107-13-90097y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/368094/original/file-20201107-13-90097y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/368094/original/file-20201107-13-90097y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/368094/original/file-20201107-13-90097y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/368094/original/file-20201107-13-90097y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/368094/original/file-20201107-13-90097y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des partisans de Biden célèbrent sa victoire devant la Maison Blanche à Washington.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AAP/AP/Pablo Martinez Monsivais</span></span>
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<p>En outre, il ressort de ce même sondage que les Américains de chaque camp étaient conscients que leurs adversaires refuseraient d'accepter la défaite : seuls <a href="https://www.ussc.edu.au/analysis/free-and-fair-american-attitudes-towards-electoral-integrity-and-legitimacy">16 %</a> des électeurs de Trump estimaient que les Démocrates accepteraient une réélection du président sortant ; et seuls 26 % des partisans de Biden pensaient que les Républicains admettraient une victoire de l'ancien sénateur du Delaware.</p>
<p>De façon alarmante, un autre sondage a révélé qu'environ <a href="https://www.politico.com/news/magazine/2020/10/01/political-violence-424157">un tiers des Américains</a> considéraient que la violence pouvait être justifiée pour soutenir les objectifs de leurs partis politiques, tandis que 21 % des personnes ayant une forte affiliation politique étaient « tout à fait disposées à approuver la violence si l'autre parti remporte la présidence ».</p>
<p>Plus des trois quarts des Américains ayant déclaré qu'ils <a href="https://news.yahoo.com/final-yahoo-news-you-gov-poll-biden-leads-trump-by-10-as-voters-fear-a-chaotic-election-day-132235742.html">s'attendaient à des violences</a> au lendemain de l'élection, l'année 2020 a vu un nombre record d'entre eux <a href="https://www.theguardian.com/us-news/2020/oct/29/coronavirus-pandemic-americans-gun-sales">décider de s'armer</a>.</p>
<p>Voilà déjà plus de dix ans qu'aux États-Unis, <a href="https://www.washingtonpost.com/news/wonk/wp/2018/06/19/there-are-more-guns-than-people-in-the-united-states-according-to-a-new-study-of-global-firearm-ownership/">le nombre d'armes en circulation est supérieur au nombre d'habitants</a>. Mais l'année 2020 a <a href="https://thehill.com/blogs/blog-briefing-room/news/524120-2020-breaks-annual-gun-sale-records-october-sees-60-percent">battu tous les records en matière de ventes d'armes</a>. Au cours des années précédentes, les sympathisants républicains avaient <a href="https://www.pewsocialtrends.org/2017/06/22/the-demographics-of-gun-ownership/">plus de deux fois plus de chances</a> de posséder une arme à feu que les partisans des Démocrates, mais certains éléments indiquent qu'en 2020, l'augmentation de la possession d'armes à feu a été <a href="https://www.nytimes.com/2020/10/27/us/guns-2020-election.html">aussi bien le fait des seconds que des premiers</a>.</p>
<p>Le mois dernier encore, le département de la sécurité intérieure de l'administration Trump — une entité créée à la suite des attentats terroristes du 11 septembre 2001 — a déclaré que ce sont les Américains, et avant tout les tenants de la suprématie blanche, qui <a href="https://www.nytimes.com/2020/10/06/us/politics/homeland-security-white-supremacists-russia.html">représentaient</a> « la menace la plus persistante et la plus mortelle dans le pays ».</p>
<p>Au vu des rapports faisant état d'un complot (déjoué) visant à attaquer un <a href="https://6abc.com/philly-police-investigating-pa-convention-center-attack-plot/7689932/">centre de comptage des votes à Philadelphie</a> et des innombrables propos incendiaires qui se multiplient dans l'espace public, il y a hélas certaines raisons de craindre des violences consécutives à cette élection.</p>
<h2>Et maintenant ?</h2>
<p>Donald Trump restera président pendant encore 73 jours : Joe Biden ne sera investi que le 20 janvier 2021.</p>
<p>Jusqu'à présent, Trump a refusé de reconnaître sa défaite — il martèle au contraire qu'il a <a href="https://twitter.com/realDonaldTrump/status/1325194709443080192">gagné</a>, sans en apporter la moindre preuve — et a lancé une série de recours judiciaires. Nombre de ces recours <a href="https://www.nbcnews.com/politics/2020-election/trump-campaign-presses-legal-challenges-count-continues-swing-states-n1246593">ont déjà été rejetés</a>.</p>
<p>Parallèlement à la bataille qu'il livre pour contester sa défaite électorale, Trump va sans doute voir affluer sur son bureau de nombreuses demandes d'utiliser son pouvoir de « pardon présidentiel ». La Constitution américaine offre en effet au président le privilège unique de gracier des personnes ayant commis des crimes contre les États-Unis, ou de réduire leur condamnation.</p>
<p>Traditionnellement, les présidents américains se préoccupent de la façon dont l'Histoire jugera leur utilisation de ce <a href="https://www.nytimes.com/2020/02/21/us/politics/presidential-pardons.html">droit de grâce</a>. Mais Trump n'a rien d'un président conventionnel. <a href="https://twitter.com/realDonaldTrump/status/1003616210922147841?ref_src=twsrc%5Etfw">Tout au long de son mandat</a>, il a souvent <a href="https://www.justice.gov/pardon/pardons-granted-president-donald-trump">employé</a> son droit de grâce et <a href="https://www.axios.com/miles-taylor-immigration-trump-343f9d38-a375-419a-9f99-73c3b101dc24.html">proposé de le faire</a>.</p>
<p>Trump finira par quitter la Maison Blanche. Mais il est difficile de voir sa base loyale se détourner de lui de sitôt. Il ne respectera probablement pas la norme selon laquelle les anciens présidents américains se retirent de la vie politique après avoir quitté la Maison Blanche — ce ne sera qu'une tradition de plus à laquelle il ne se sera pas plié.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/368097/original/file-20201107-17-18q89kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/368097/original/file-20201107-17-18q89kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/368097/original/file-20201107-17-18q89kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/368097/original/file-20201107-17-18q89kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/368097/original/file-20201107-17-18q89kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/368097/original/file-20201107-17-18q89kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/368097/original/file-20201107-17-18q89kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Donald Trump quittera la Maison Blanche en janvier, mais il a encore de nombreux partisans, ce qui laisse ouverte la possibilité qu'il se présente à nouveau en 2024.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AAP/AP/Julio Cortez</span></span>
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<p>Le fait que Trump soit toujours éligible pour un autre mandat pourrait lui permettre de suivre les traces du président Grover Cleveland qui, après avoir été évincé de la Maison Blanche par Benjamin Harrison en 1888, a été réélu quatre ans plus tard en battant ce même Harrison.</p>
<p>Certains dirigeants républicains ont <a href="https://www.news.com.au/world/north-america/us-politics/us-election-2020-republicans-distance-themselves-from-donald-trump/news-story/ab7942cd695853d32d60a1c5f5e66d6b">pris leurs distances</a> avec le président sortant, mais il bénéficie toujours d'un <a href="https://news.gallup.com/poll/203198/presidential-approval-ratings-donald-trump.aspx">taux d'approbation de 95 % parmi les sympathisants républicains</a>, ce qui fait indéniablement de lui l'un des grands favoris à l'investiture républicaine à la présidence de 2024.</p>
<p>Quant à Joe Biden, il devra, durant son mandat, gérer de multiples crises : pandémie, ralentissement économique, polarisation extrême de la population… Si le Sénat américain reste sous contrôle républicain, sa tâche sera encore plus ardue, puisque ce sont ses <a href="https://www.politico.com/news/2020/11/05/biden-mcconnell-relationship-434524">anciens collègues républicains du Sénat</a> qui auraient le dernier mot sur la composition de son cabinet et sur l'approbation de son programme législatif.</p>
<p>De l’<a href="https://www.washingtonpost.com/archive/politics/1998/05/01/senate-approves-expansion-of-nato/38dded71-978c-475a-8852-58f5e285e572/">élargissement de l'OTAN</a> à la <a href="https://www.politico.com/magazine/story/2019/04/30/biden-bipartisan-dealmaking-backfire-226758">loi de relance économique de 2009</a>, Biden arrive à la Maison Blanche fort de plus de réalisations bipartisanes que n'importe quel président depuis un demi-siècle. La question est de savoir s'il saura surmonter les dangereuses divisions qui affaiblissent l'Amérique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/149717/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jared Mondschein ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La victoire de Joe Biden ne suffit évidemment pas, à elle seule, à mettre fin aux profondes divisions de la société américaine.Jared Mondschein, Senior Advisor, US Studies Centre, University of SydneyLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1496652020-11-07T05:31:09Z2020-11-07T05:31:09ZFact check US : La Cour suprême peut-elle vraiment sauver Donald Trump ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/367977/original/file-20201106-15-1u66370.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1022%2C682&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La Cour suprême américaine, à Washington DC. </span> <span class="attribution"><span class="source">Al Drago/AFP</span></span></figcaption></figure><p>Les résultats de l’élection présidentielle américaine ont été extrêmement serrés jusqu’à la victoire annoncée de Joe Biden samedi 7 novembre, quatre jours après le scrutin.</p>
<p>Au début, alors que les États les moins disputés avaient rendu leurs résultats, le dépouillement avait tout d’abord été favorable à Donald Trump, dans les États clés de Pennsylvanie, Michigan et Wisconsin, qui lui avaient permis de devenir président en 2016.</p>
<p>Puis, au fur et à mesure que les bulletins par correspondance ont été dépouillés, le candidat démocrate a rattrapé son retard apparent et l’écart s’est réduit.</p>
<p>Dès que la tendance a commencé à s’inverser, Donald Trump a parlé haut et fort de fraude et de triche, répété que les <a href="https://www.youtube.com/watch?v=4g6NgoqEDOI&ab_channel=SkyNews">démocrates voulaient lui voler l’élection et annoncé</a> qu’il allait saisir la Cour suprême.</p>
<p>L’attitude du président sortant témoigne ainsi de sa méconnaissance de l’organisation judiciaire aux États-Unis et de son refus d’accepter l’existence de contre-pouvoirs, en l’occurrence le pouvoir judiciaire.</p>
<p>Donald Trump n’en a jamais fait mystère. S’il a poussé pour que la très conservatrice candidate <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/revue-de-presse-internationale/la-revue-de-presse-internationale-emission-du-mardi-27-octobre-2020">Amy C. Barrett</a> soit confirmée en un temps record, en violation du principe édicté par les républicains eux-mêmes en 2016 (à savoir, d’attendre le résultat des prochaines élections avant de nommer un nouveau juge à vie afin que les électeurs puissent faire entendre leur voix), c’est parce qu’il voulait compter sur une Cour suprême comptant six juges conservateurs. Une cour ainsi susceptible de lui donner la présidence comme elle l’avait accordée à George W. Bush en 2000 dans la très contestée décision <a href="https://www.law.cornell.edu/supremecourt/text/00-949"><em>Bush v. Gore</em></a>.</p>
<h2>La Cour suprême n’est pas le bras armé de Trump</h2>
<p>Sauf pour les litiges entre États ou mettant en jeu un ambassadeur, la Cour suprême n’est pas une juridiction de premier ressort. Donald Trump ne peut donc la saisir directement, contrairement à ce qu’il laisse entendre. La Cour suprême est une cour d’appel qui statue en dernier ressort sur des litiges qui ont cheminé au sein des juridictions fédérales ou étatiques avant d’être renvoyés devant elle. La Constitution des États-Unis confie aux États le soin d’organiser leurs élections : ce sont eux qui déterminent le nombre de bureaux de vote, éventuellement le nombre de jours durant lesquels le vote anticipé est possible et le seuil à partir duquel il est possible de demander un nouveau décompte des bulletins de vote. En d’autres termes, le droit électoral est un droit qui relève des États fédérés et qui diffère selon que l’on se trouve en Pennsylvanie, en Géorgie, au Michigan ou au Wisconsin.</p>
<p>En principe, les litiges et contentieux électoraux commencent devant les juridictions de l’État, d’abord en première instance, puis au niveau de la cour d’appel et le cas échéant devant la Cour suprême de l’État. Mais ils peuvent commencer ou être renvoyés devant les juridictions fédérales dès lors que se pose une « question fédérale ».</p>
<h2>Il faut une « question fédérale »</h2>
<p>Pour qu’une affaire relève des juridictions fédérales, il faut qu’existe une « question fédérale », touchant à la Constitution ou au droit fédéral, puis il faut que la Cour accepte l’affaire. Or, le mode de saisine (<em>writ of certiorari</em>) de la Cour suprême lui donne toute latitude pour accepter ou refuser les demandes de réexamen. Quatre <em>justices</em> au moins doivent être d’accord pour que l’affaire soit examinée. En 2000, elle a accepté et il lui a été reproché de s’être <a href="https://www.nytimes.com/2001/02/20/us/bush-v-gore-a-special-report-election-case-a-test-and-a-trauma-for-justices.html">jetée dans le « maquis politique »</a> (<em>political thicket</em>) et d’avoir statué alors qu’elle pouvait très bien se tenir à l’écart et laisser s’appliquer les règles du jeu électoral prévues par la Constitution. Les juges majoritaires ont invoqué l’insécurité juridique et politique résultant du long contentieux en Floride mais les juges minoritaires dans leur opinion dissidente ont violemment critiqué cette décision « qui sera à jamais un coup porté à la légitimité de la Cour ». En 2000, la Cour a statué sur la base d’une violation du principe d’égalité devant la loi, l’« égale protection de la loi » du 14<sup>e</sup> amendement, pour faire droit à la demande de l’équipe républicaine que cesse le recompte des voix car les méthodes différaient selon les comtés.</p>
<p>En 2020, le président de la Cour, le Chief Justice John Roberts est tout à fait conscient que si à l’issue d’un long processus juridictionnel, la Cour suprême devait se saisir de l’affaire et remettre les clés de la Maison Blanche à Donald Trump pour un deuxième mandat, par une majorité de six conservateurs contre trois progressistes, la décision, quelle que soit sa base juridique, apparaîtrait comme partisane et idéologique et porterait un coup supplémentaire à la crédibilité et à la légitimité de la Cour. Or depuis que la juge Barrett a été confirmée quelques jours avant l’élection, Roberts n’est plus en position de juge pivot et ne pourra pas nécessairement empêcher quatre de ses collègues conservateurs de se saisir d’une affaire et cinq d’entre eux de statuer dans le sens du président en place.</p>
<h2>Donald Trump manque d’une base légale solide</h2>
<p>Le président Trump a annoncé qu’il allait contester tous azimuts dans les États qui peuvent faire basculer l’élection, demander l’interruption du dépouillement, « afin d’envoyer des observateurs » alors qu’il y a déjà des observateurs républicains dans les bureaux de vote, dans le Michigan par exemple. Dans un comté de Clark, Nevada, il voulait avoir accès au logiciel des machines à voter et a été <a href="https://eu.usatoday.com/story/news/politics/elections/2020/11/05/trump-election-lawsuits-recounts-pennsylvania-michigan-nevada-georgia/6172803002/">débouté deux fois</a>. Car pour agir en justice, il faut des faits avérés (erreur humaine, logiciel défaillant) et une base légale solide. Or, dans les diverses actions en justice que D. Trump a déjà intentées (se reporter, à cet égard, à <a href="https://theconversation.com/la-guerre-des-recours-de-donald-trump-149662">cette excellente mise au point</a>) ou menace d’intenter, celle-ci est inexistante ou « frivole » ; en conséquence, il n’a guère de chances d’obtenir satisfaction. </p>
<p>De même, lorsqu’il demande un nouveau décompte dans le Wisconsin ou en Géorgie et sans doute en Pennsylvanie, il sait que ce ne sera possible que lorsque les résultats seront certifiés. Il y a en outre très peu de chances que cela change les résultats finaux : les recomptages du passé, fréquents mais moins médiatisés, montrent que les erreurs sont rares, portent sur quelques centaines de voix au plus et <a href="https://www.nbcnews.com/politics/2020-election/could-recount-flip-key-battleground-history-says-don-t-count-n1246596">n’affectent jamais les résultats finaux</a>.</p>
<p>Mais ce qui compte est l’effet d’annonce afin de mobiliser ses troupes.</p>
<h2>Quid de la Pennsylvanie ?</h2>
<p>Il y a malgré tout une <a href="https://www.forbes.com/sites/alisondurkee/2020/11/05/pennsylvania-court-orders-state-to-segregate-some-mail-in-ballots-in-response-to-trump-challenge/?sh=4e138be530b6">affaire en Pennsylvanie</a> qui a déjà accompli le cheminement devant les juridictions étatiques : la question du sort réservé aux bulletins reçus trois jours après l’élection mais postés en temps voulu. La Cour suprême de l’État s’était prononcée en faveur de cet assouplissement afin de protéger le droit de vote des citoyens en période de pandémie, mais les républicains ont demandé à la Cour suprême des États-Unis d’intervenir en procédure d’urgence. Celle-ci a accepté l’affaire et s’est partagée à quatre voix contre quatre, laissant de fait la décision de la Cour suprême de l’État s’appliquer. Dès le 4 novembre, Donald Trump a de nouveau saisi la Cour suprême sur cette même question avec l’espoir que la Cour se prononce différemment. Mais ce n’est pas si simple.</p>
<p>Tout d’abord, cette affaire n’est importante que si Joe Biden a besoin de la Pennsylvanie pour l’emporter. Ensuite, il n’est pas certain qu’une Cour, même composée de six conservateurs et trois « libéraux », accepte d’entrer dans ce « maquis politique » et envisage de revenir sur une décision de la Cour suprême de Pennsylvanie alors que le droit électoral relève du droit étatique et que cette décision vise d’abord à protéger le droit de vote. Pourtant, le juge Alito, saisi en procédure d’urgence par les républicains, a pris une <a href="https://nypost.com/2020/11/06/justice-alito-orders-pennsylvania-officials-divide-late-ballots/">ordonnance de référé</a> ordonnant aux bureaux de vote de classer à part les bulletins arrivés après le jour de l’élection. C’est déjà ce que font les bureaux de vote et d’après le service postal, l’USPS, cela concernerait 4 900 bulletins. C’est donc négligeable mais un signal fort que les juges conservateurs (Alito, Gorsuch et Thomas), qui n’ont pas pu invalider ce délai supplémentaire, ne sont pas prêts à baisser les bras.</p>
<p>Si in fine la Cour suprême décidait de prendre l’affaire et d’invalider la décision de la Cour suprême de Pennsylvanie, elle jugerait sans doute que le pouvoir judiciaire (en accordait ce délai supplémentaire) a outrepassé ses pouvoirs et violé la Constitution fédérale qui confie aux Législatures des États le soin d’organiser les élections. Ce serait spécieux et en violation du principe de « reliance ». Alors que plusieurs centaines de milliers d’électeurs ont voté en se fiant (reliance) aux règles en vigueur, la décision les priverait de leur vote a posteriori. Même si certains des juges, dont Samuel Alito, seraient tentés d’aller dans ce sens, le Chief Justice leur expliquerait sans doute les dangers d’une décision de ce type pour la crédibilité et la légitimité de la juridiction suprême.</p>
<p>En conclusion, l’attitude d’un <a href="https://theconversation.com/fact-check-us-donald-trump-peut-il-saccrocher-au-pouvoir-148040">président déterminé à s’accrocher au pouvoir</a> en utilisant tous les moyens, y compris l’instrumentalisation des recours en justice, fragilise la présidence et la démocratie états-uniennes. Mais Donald Trump se semble pas s'en soucier. Ses annonces de contestations tous azimuts, qui ont donc peu de chances d’aboutir, associées à ses tweets mensongers repris dans la bulle médiatique de droite, ont un seul but : lui permettre de consolider son récit d’une élection truquée. Sa priorité est de sortir vainqueur de la bataille devant la cour de l’opinion publique. Avec, à la clé, des dommages considérables causés aux institutions américaines et un risque réel de violence.</p>
<hr>
<p><em>La rubrique Fact check US a reçu le soutien de <a href="https://craignewmarkphilanthropies.org/">Craig Newmark Philanthropies</a>, une fondation américaine qui lutte contre la désinformation</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/149665/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Anne E. Deysine ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Donald Trump menace de saisir la Cour suprême et d’utiliser tous les recours légaux possibles pour remporter l’élection. Sauf que la justice américaine n’est pas l’arbitre dont il rêve.Anne E. Deysine, Professeur émérite juriste et américaniste, spécialiste Etats-Unis, questions politiques, sociales et juridiques (Cour suprême), Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1496952020-11-07T05:31:06Z2020-11-07T05:31:06ZJoe Biden, une victoire dans une démocratie américaine fragilisée<p>Comme dans les meilleures (ou pires ?) séries américaines, les jours qui ont suivi l’élection présidentielle de 2020 auront été marqués par un suspense éreintant et de nombreux retournements de situation, notamment en raison d’un dépouillement plus long dû au volume de <a href="https://theconversation.com/fact-check-us-le-vote-par-correspondance-peut-il-faire-capoter-le-scrutin-americain-145341">votes par correspondance</a>.</p>
<p>Mais samedi soir, à 17h30 heure française, les media américains ont annoncé la victoire du démocrate Joe Biden, qui devient ainsi le 46ème président des États-Unis d’Amérique, après avoir gagné l'État de Pennsylvanie. </p>
<p>Même s'il est encore trop tôt pour effectuer une analyse complète des résultats, on dispose déjà d’un certain nombre de données intéressantes et marquantes dans ce scrutin singulier. On sait d’ores et déjà, par exemple, que le taux de participation est bien plus élevé qu’en 2016. Selon les <a href="https://www.washingtonpost.com/graphics/2020/elections/voter-turnout/">projections publiées dans le <em>Washington Post</em></a>, il pourrait même être le plus élevé depuis plus d’un siècle.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/368040/original/file-20201106-15-1vdx7lo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/368040/original/file-20201106-15-1vdx7lo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=304&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/368040/original/file-20201106-15-1vdx7lo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=304&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/368040/original/file-20201106-15-1vdx7lo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=304&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/368040/original/file-20201106-15-1vdx7lo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=382&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/368040/original/file-20201106-15-1vdx7lo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=382&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/368040/original/file-20201106-15-1vdx7lo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=382&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Edison Research, Washington Post</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Avec presque plus de 69 millions de voix, Donald Trump a étendu sa base à presque 7 millions de nouveaux électeurs. Ces élections ne sont donc en rien une répudiation du <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/11/05/elections-americaines-2020-le-trumpisme-heritage-durable-de-la-politique-des-etats-unis_6058609_3232.html">Trumpisme</a>, qui semble être <a href="https://theconversation.com/le-trumpisme-un-courant-qui-est-la-pour-durer-dans-le-paysage-politique-americain-149506">là pour durer</a>.</p>
<p>Mais les Démocrates se sont eux aussi fortement mobilisés : près de 8 millions de nouveaux votants ont soutenu le candidat du « parti de l’âne » cette année par rapport à 2016. Alors qu’en 2016 Hillary Clinton avait gagné le vote populaire avec 2,8 millions de voix de plus que Donald Trump, Joe Biden, lui, devrait obtenir une avance de quelque 4 millions de suffrages.</p>
<p>Et avec près de 74 millions de voix, aucun président n’aura été élu par autant d’Américains que lui.</p>
<p>On pourrait, à première vue, considérer ces chiffres comme les signes d’une grande victoire de la démocratie. Mais il faut, pour en être certain, regarder les résultats des autres élections, notamment celles de la Chambre, du Sénat (dont un tiers des sièges était renouvelés), et des législatures des États…</p>
<h2>De nombreux leviers aux mains des Républicains</h2>
<p>Si les Démocrates semblent pouvoir garder le contrôle de la Chambre des Représentants, ils y ont toutefois <a href="https://www.latimes.com/politics/story/2020-11-05/despite-pelosis-confident-predictions-house-democrats-lost-seats-what-happened">perdu des sièges</a>. Mais c’est la chambre haute du Congrès, le Sénat, qui a le plus de pouvoir. Non seulement il doit donner son approbation pour qu’une loi soit ratifiée, mais il doit également donner son accord aux nominations décidées par le président pour les juges fédéraux, les ambassadeurs et même pour les membres de son propre Cabinet.</p>
<p>Or, les Républicains <a href="https://eu.usatoday.com/story/news/politics/2020/11/04/senate-races-2020-contests-tighten-gop-fends-off-dem-challenges/6158009002/">devraient à priori conserver le contrôle du Sénat</a>. Les Démocrates ont pourtant battu des candidats républicains dans le Colorado et l’Arizona, mais ils ont perdu un siège dans l’Alabama.</p>
<p>Avec deux sénateurs par État, soit 100 sénateurs au total, il faut donc 51 sièges pour atteindre la majorité. Toutefois, 50 sièges peuvent suffire aux Démocrates, puisque c’est Kamala Harris, la vice-présidente, qui présidera le Sénat et aura le droit de vote pour départager en cas d’égalité.</p>
<p>À ce stade, on se trouve à 48 sièges pour chaque parti, et tout pourrait, en fait, se jouer en janvier, lors du second tour de deux <a href="https://www.politico.com/news/2020/11/05/georgia-runoff-senate-majority-434532">élections sénatoriales partielles dans l’État de Géorgie</a>. L’attente va donc se prolonger, et ce sera l’occasion de mettre en exergue la question de la représentativité démocratique des institutions américaines.</p>
<h2>Une représentativité discutable</h2>
<p>Le fait même que la Constitution confère deux sénateurs à chaque État, et ce quelle que soit sa population, pose en effet un problème de légitimité démocratique. Les États les plus ruraux, qui sont aussi les <a href="https://www.governing.com/topics/politics/gov-rural-voters-governors-races.html">plus républicains</a>, y disposent en effet d’un poids supérieur à la proportion de la population qu’ils représentent. On estime ainsi que même s’ils devaient perdre les deux sièges en Géorgie en janvier, et, donc, rester minoritaires en sièges, les Démocrates représenteraient <a href="https://www.vox.com/2020/11/6/21550979/senate-malapportionment-20-million-democrats-republicans-supreme-court">au moins 20 millions d’Américains de plus que les Républicains</a>. Et le différentiel serait de 41 millions en cas de victoire démocrate en Géorgie, avec un Sénat à 50/50.</p>
<p>Il est d’ailleurs tout à fait remarquable de se dire qu’un président et une chambre minoritaires en voix ont pu nommer <a href="https://www.lesechos.fr/monde/etats-unis/donald-trump-engrange-une-troisieme-nomination-conservatrice-a-la-cour-supreme-1249315">trois juges à la Cour suprême</a>… En cas de victoire des Républicains, le président Biden va devoir composer avec Mitch McConnell, un <a href="https://www.politico.com/news/2020/11/05/biden-mcconnell-relationship-434524">chef de la majorité avec qui il s’entend bien</a>, mais qui ne fait pas de cadeaux.</p>
<p>Un autre vote absolument crucial qui avait lieu lors de ces élections était le vote pour les législatures des États. En effet, et pour mémoire, dans le système fédéral américain, chaque État a son propre système de gouvernement local composé d’une branche exécutive (avec le gouverneur), d’une branche législative appelée généralement « Législature de l’État » (<em>State Legislature</em>) ou « Assemblée générale ou législative » (<em>General or Legislative Assembly</em>) et d’une branche judiciaire (incluant une Cour suprême locale). Ces gouvernements locaux décident de sujets majeurs tels que l’avortement, les armes à feu, l’environnement ou la réforme de la police, pour ne citer que quelques sujets d’actualité.</p>
<p>L’enjeu était cette année particulièrement critique : suite au <a href="https://www.census.gov/">recensement décennal de la population</a> exigé par l’Article I de la Constitution, qui doit être réalisé d’ici la fin de l’année, ces gouvernements locaux vont pouvoir procéder au redécoupage des cartes électorales. Or les Démocrates n’ont pas réussi à reprendre le contrôle d’une seule législature. <a href="https://www.ncsl.org/research/elections-and-campaigns/ncsl-state-elections-2020.aspx">Sur les 44 États où des élections législatives locales ont eu lieu</a>, un seul (le New Hampshire) a vu ses chambres changer de majorité… et elles sont allées aux Républicains. Le Minnesota est la seule législature dont les deux chambres sont divisées entre Démocrates et Républicains. Selon les calculs de la <a href="https://www.ncsl.org/research/elections-and-campaigns/ncsl-state-elections-2020.aspx"><em>National Conference of State Legislatures</em></a>, sur 98 chambres (le Nebraska ayant une seule chambre non partisane), 37 sont tenues par des Démocrates et 59 par des Républicains.</p>
<h2>L’impact du « Gerrymandering »</h2>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/368045/original/file-20201106-23-1qfv7mm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/368045/original/file-20201106-23-1qfv7mm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/368045/original/file-20201106-23-1qfv7mm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=629&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/368045/original/file-20201106-23-1qfv7mm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=629&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/368045/original/file-20201106-23-1qfv7mm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=629&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/368045/original/file-20201106-23-1qfv7mm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=790&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/368045/original/file-20201106-23-1qfv7mm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=790&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/368045/original/file-20201106-23-1qfv7mm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=790&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le Gerrymandering, caricature d’Elkanah Tisdale (1771-1835) publiée pour la première fois dans the Boston Centinel en 1812.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikipedia</span></span>
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</figure>
<p><em>Gerrymandering</em> est un mot valise composé du nom d’un gouverneur du Massachusetts du 19e siècle (Gerry) qui s’était fait une spécialité du redécoupage électoral, à tel point qu’une de ses circonscriptions ressemblait à une salamandre (<em>Salamander</em>). Il s’agit donc d’un procédé anti-démocratique de remaniement du découpage des circonscriptions électorales à des fins partisanes. Et c’est ce processus, mis en place depuis plus de dix ans par de nombreuses législatures républicaines, qui explique cette défaite des démocrates. Le Wisconsin illustre parfaitement cette stratégie. Comme on le voit dans la carte ci-dessous, un découpage électoral partisan permet à un parti minoritaire en voix de gagner une majorité de sièges dans une chambre. Ainsi en 2012, les Républicains ont obtenu 21 sièges de plus, alors qu’ils avaient récolté 168 000 voix de moins.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/368047/original/file-20201106-23-jvj3d5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/368047/original/file-20201106-23-jvj3d5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/368047/original/file-20201106-23-jvj3d5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/368047/original/file-20201106-23-jvj3d5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/368047/original/file-20201106-23-jvj3d5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/368047/original/file-20201106-23-jvj3d5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/368047/original/file-20201106-23-jvj3d5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le Gerrymandering dans le Wisconsin en 2008, 2010 et 2012.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Reuters</span></span>
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<p>Bien que très critiqué en raison de son iniquité bien visible, ce procédé n’a pas été condamné par la Cour suprême des États-Unis. Dans deux arrêts (Lamone v. Benisek et Rucho v. Common Cause) en 2019, la majorité conservatrice a déclaré ne pas être compétente pour entendre les contestations relatives au remaniement partisan. À l’été 2018, elle avait déjà écarté, pour des raisons de procédure, l’examen de contestations intentées par des électeurs du Wisconsin et du Maryland. Seules des Cours suprêmes d’État peuvent éventuellement prendre ces décisions comme cela a été le cas en Pennsylvanie :</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/368048/original/file-20201106-21-6m282n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/368048/original/file-20201106-21-6m282n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/368048/original/file-20201106-21-6m282n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/368048/original/file-20201106-21-6m282n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/368048/original/file-20201106-21-6m282n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/368048/original/file-20201106-21-6m282n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/368048/original/file-20201106-21-6m282n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Résultats des élections en Pennsylvanie en 2016 et en 2018.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Source à préciser ?</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>On le voit bien, si les Démocrates n’ont pas pu gagner une majorité dans d’autres branches du gouvernement, et dans les législatures, c’est bien que la carte et le système sont contre eux. Il leur faudrait un raz-de-marée gigantesque pour faire bouger les lignes et obtenir une majorité pour gouverner.</p>
<p>Le parti républicain fait tout pour conserver un maximum de pouvoir, même au détriment de sa crédibilité démocratique. Il n’est donc pas étonnant que ses membres restent passifs quand leur président, Donald Trump, <a href="https://www.latimes.com/politics/story/2020-11-05/trumps-mixed-message-stop-the-count-or-keep-counting">appelle à arrêter le dépouillement dans les États où il perd et à continuer de compter là où il gagne</a>, au mépris des normes démocratiques. Ce que révèle cette élection n’est donc pas une victoire de la démocratie américaine, mais, au contraire, la faiblesse et la vulnérabilité de ses institutions dans une société fracturée par la polarisation idéologique et identitaire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/149695/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jérôme Viala-Gaudefroy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Joe Biden a été annoncé vainqueur des élections présidentielles américaines mais il devra potentiellement faire face à un Sénat et des gouvernements locaux qui ne lui seront pas acquis.Jérôme Viala-Gaudefroy, Assistant lecturer, CY Cergy Paris UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1495942020-11-05T21:39:25Z2020-11-05T21:39:25ZCraignant la défaite, Trump tente sa chance devant les tribunaux<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/367841/original/file-20201105-15-dbuv2u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Voyant la victoire lui échapper, Donald Trump se lance dans une bataille judiciaire.</span> <span class="attribution"><span class="source">Evan Vucci/AP</span></span></figcaption></figure><p>Devant l’érosion progressive de l’avance de Trump dans plusieurs États décisifs — ce qui rend sa défaite à la présidence de plus en plus probable —, son équipe de campagne lance une attaque juridique bien planifiée pour contester la validité de certains bulletins de vote et le processus de décompte des voix.</p>
<p>L’équipe de Biden répond par une défense juridique tout aussi bien coordonnée et la campagne de collecte de fonds « <a href="https://www.foxnews.com/politics/joe-biden-announces-fight-fund-for-vote-count-battle">Biden Fight Fund »</a>.</p>
<p>Une fois de plus, les tribunaux devront se prononcer sur une élection présidentielle américaine, bien qu’il soit peu probable qu’un jugement modifie les résultats de manière significative — à moins que l’élection ne se résume à des marges particulièrement étroites en Pennsylvanie ou en Géorgie.</p>
<h2>Donald Trump cible les votes anticipés et par correspondance</h2>
<p>La nature exceptionnelle de l’élection de 2020 — avec un record de <a href="https://www.nytimes.com/live/2020/11/02/us/trump-biden-election">100 millions de votes par anticipation</a> — a donné lieu à une soirée électorale déconcertante. Le problème a été aggravé par l’importante division partisane dans la manière dont les gens ont voté, les démocrates étant plus enclins à voter par anticipation et par correspondance et les républicains préférant le vote en personne le jour du scrutin.</p>
<p>De nombreux États ont rapidement communiqué les résultats des votes en personne le soir des élections, ce qui a permis à Trump de prendre une avance considérable dans plusieurs États clés. Ces résultats se sont transformés quand les votes anticipés et par la poste ont été ajoutés au décompte.</p>
<p>Trump a encouragé ses partisans à remettre en question ces changements, en <a href="https://thehill.com/homenews/campaign/524404-trump-says-hell-go-to-supreme-court-to-stop-votes-from-being-counted">affirmant</a> :</p>
<blockquote>
<p>C’est une fraude majeure contre notre nation. Nous voulons que la loi soit utilisée de manière appropriée. Nous allons aller devant la Cour suprême des États-Unis. Nous voulons que le vote cesse.</p>
</blockquote>
<p>Pour l’instant, Trump a indiqué qu’il souhaitait que la justice intervienne dans quatre États. C’est ce qu’il affirme et il est possible qu’il y parvienne.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1324162287691833346"}"></div></p>
<h2>Wisconsin : Trump demande un recomptage</h2>
<p>Dans le Wisconsin, où Biden mène par moins d’un point de pourcentage, l’équipe de Trump a annoncé <a href="https://www.lapresse.ca/international/etats-unis/2020-11-04/joe-biden-se-rapproche-de-la-maison-blanche.php">qu’elle va demander un recomptage</a>. Il s’agit là d’un événement relativement courant lorsque les résultats sont serrés. En effet, des marges étroites entraînent des <a href="https://www.ncsl.org/research/elections-and-campaigns/automatic-recount-thresholds.aspx#AR">recomptages automatiques</a> dans de nombreux États.</p>
<p>En 2016, après la défaite de Hillary Clinton contre Trump par <a href="https://www.axios.com/hillary-clinton-2016-election-votes-supreme-court-liberal-justice-1b4bc4fc-9fad-44b4-ab54-9ef86aa9c1f1.html">moins de 80 000 voix au total</a> dans le Michigan, la Pennsylvanie et le Wisconsin, la candidate du Parti vert, Jill Stein, <a href="https://www.parismatch.com/Actu/International/Election-americaine-Jill-Stein-appelle-au-recomptage-des-voix-1127333">a demandé un recomptage</a>. Les tribunaux ont rejeté la requête en Pennsylvanie, mais des recomptages partiels ont été effectués dans le Michigan et le Wisconsin.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/367666/original/file-20201105-14-185780.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367666/original/file-20201105-14-185780.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367666/original/file-20201105-14-185780.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367666/original/file-20201105-14-185780.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367666/original/file-20201105-14-185780.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367666/original/file-20201105-14-185780.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367666/original/file-20201105-14-185780.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des scrutateurs trient les votes anticipés et par procuration à Kenosha, dans le Wisconsin.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wong Maye-E/AP</span></span>
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</figure>
<p>Comme l’a souligné le site WebFiveThirtyEighten 2016, les recomptages modifient rarement les résultats des élections, sauf lorsque les marges sont extrêmement étroites.</p>
<p>Il est peu probable que <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1747014/election-presidentielle-americaine-depouillement-contestation-recomptage">l’avance actuelle de 20 000 voix</a> de Biden dans le Wisconsin soit compromise par un recomptage.</p>
<h2>Michigan : Trump demande une suspension du décompte</h2>
<p>Dans le Michigan, l’équipe de campagne de Trump <a href="https://www.courthousenews.com/wp-content/uploads/2020/11/trump-mich-complaint.pdf">a déposé une plainte</a> visant à suspendre le décompte des voix sous prétexte que les « inspecteurs électoraux » du Parti républicain (c’est-à-dire les scrutateurs) n’avaient pas accès aux lieux où se déroule le décompte.</p>
<p>Aux États-Unis, il n’est pas rare que les scrutateurs <a href="https://www.eac.gov/voters/become-poll-worker">soient affiliés à un parti politique</a>. De nombreux États, dont le Michigan, exigent que des membres des deux partis <a href="https://www.michigan.gov/documents/sos/Managing_Your_Precinct_on_Election_Day_391790_7.pdf">soient présents lors du dépouillement des votes</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/367664/original/file-20201105-23-38rhnv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367664/original/file-20201105-23-38rhnv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367664/original/file-20201105-23-38rhnv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367664/original/file-20201105-23-38rhnv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367664/original/file-20201105-23-38rhnv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367664/original/file-20201105-23-38rhnv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367664/original/file-20201105-23-38rhnv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les candidats aux élections observent le dépouillement des bulletins de vote par correspondance à Détroit.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Carlos Osorio/AP</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cependant, les plaignants n’ont fourni aucune preuve que des employés républicains des bureaux de vote se soient vu refuser l’accès au dépouillement. De plus, le fondement juridique de la requête paraît faible.</p>
<p>Dans la poursuite, on allègue que le Michigan viole la Clause de protection égale de la Constitution américaine parce qu’il traite certains électeurs différemment des autres. Il semble que ce soit lié au fait qu’à certains endroits, les scrutateurs démocrates auraient eu accès au décompte, mais pas les républicains.</p>
<p>La plainte demande une « audience rapide », ce que la Cour des réclamations ne lui a pas encore accordé. Si elle le fait, l’équipe de Trump et le secrétaire d’État du Michigan devront fournir des preuves de l’accès offert aux scrutateurs des différents partis.</p>
<h2>Pennsylvanie : en route vers la Cour suprême</h2>
<p>En Pennsylvanie, l’équipe de Trump <a href="http://www.pacourts.us/assets/files/setting-7731/file-10372.pdf">a engagé des procédures judiciaires</a> pour arrêter le décompte des votes.</p>
<p>La première partie de la plainte est similaire à celle déposée dans le Michigan : on souhaite suspendre le décompte jusqu’à ce que les observateurs de scrutin républicains aient accès aux dépouillements.</p>
<p>Justin Clark, directeur adjoint de la campagne de Trump, affirme que les observateurs républicains n’ont pas pu s’approcher suffisamment pour bien voir le dépouillement — une allégation qui ne se trouve pas dans la requête au Michigan.</p>
<p>La deuxième partie du recours en Pennsylvanie vise à rejeter les bulletins envoyés par la poste par des électeurs qui votaient pour la première fois et qui n’ont pas fourni de preuve d’identité lors de leur inscription.</p>
<p>L’équipe de Trump prétend que la secrétaire d’État de Pennsylvanie n’a pas suivi la procédure appropriée en acceptant les bulletins de ces électeurs, ce qui constitue une violation de la loi fédérale. Cependant, l’équipe de campagne n’a pas encore fourni de preuve qu’un nombre important de nouveaux électeurs n’avaient pas établi leur identité.</p>
<p>C’est peut-être l’argument juridique le plus intéressant. La loi fédérale <a href="https://www.congress.gov/107/plaws/publ252/PLAW-107publ252.pdf">Help America Vote Act</a> de 2002, adoptée en réponse à l’élection contestée de 2000 où George W. Bush et Al Gore se sont affrontés, exige que les <a href="https://civilrights.findlaw.com/other-constitutional-rights/federal-voter-id-requirements-the-help-america-vote-act-hava.html">nouveaux électeurs présentent une pièce d’identité pour</a> s’inscrire sur les listes électorales.</p>
<p>Si l’action en justice de l’équipe de Trump est couronnée de succès, cela pourrait entraîner le retrait de certains bulletins de vote par correspondance du résultat final en Pennsylvanie.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/367668/original/file-20201105-21-8uakwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367668/original/file-20201105-21-8uakwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367668/original/file-20201105-21-8uakwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367668/original/file-20201105-21-8uakwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367668/original/file-20201105-21-8uakwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367668/original/file-20201105-21-8uakwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367668/original/file-20201105-21-8uakwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La campagne Trump annonce ses contestations judiciaires du comptage des votes en Pennsylvanie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Matt Slocum/AP</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Géorgie : les tribunaux ont causé de la confusio</h2>
<p>Finalement, en Géorgie, l<a href="https://cdn.donaldjtrump.com/public-files/press_assets/petition-for-enforcement-of-election-law.pdf">’équipe de campagne Trump a déposé une requête </a>pour empêcher tout décompte des bulletins de vote par correspondance arrivés en retard.</p>
<p>D’un côté, on peut dire que cette requête est la plus évidente. Elle vise à faire appliquer une loi existante : tous les bulletins de vote par correspondance arrivant après 19 heures le jour de l'élection sont exclus du décompte.</p>
<p>Cependant, la date limite pour les votes par correspondance en Géorgie a également fait l'objet de contestations judiciaires préélectorales - ce qui signifie que les règles n’étaient peut-être pas claires pour les électeurs.</p>
<p>Un tribunal a d'abord décidé que ces bulletins pouvaient être comptés <a href="https://apnews.com/article/election-2020-virus-outbreak-georgia-general-elections-voting-rights-f7ef69c7f79ddc036a14f76a00a4870d">jusqu'à trois jours après l'élection</a>, mais cette décision a ensuite été annulée par un tribunal supérieur.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1324192142097461248"}"></div></p>
<h2>Il est peu probable que Trump remporte les élections par la voie judiciaire</h2>
<p>Pour l’instant, la campagne Trump n’a lancé aucune attaque juridique dans les deux autres États aux résultats serrés, soit le Nevada et l’Arizona.</p>
<p>Tous les litiges doivent être résolus ou arrêtés d’ici le <a href="https://www.ncsl.org/research/elections-and-campaigns/the-electoral-college.aspx">8 décembre</a> afin que les résultats des élections puissent être certifiés et que le processus du Collège électoral puisse se poursuivre. Ce processus culminera avec le vote qui permettra de choisir légalement le prochain président le 6 janvier.</p>
<p>Il est peu probable que la campagne Trump change le résultat de l’élection.</p>
<p>Si Biden est déclaré vainqueur cette semaine et que les contestations échouent, cela pourrait cependant miner davantage la confiance dans le processus électoral — une stratégie que Donald Trump a employée, avec plus ou moins de succès, tout au long de la course.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/149594/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sarah John a reçu un financement pour un projet financé par la National Endowment for the Humanities sur les élections américaines du 19e siècle. Elle a également travaillé sur des projets liés aux élections financés par le Democracy Fund, la Fondation Hewlett, la Fondation Laura et John Arnold et le Centre de ressources RCV.</span></em></p>Trump conteste les résultats dans quatre États clés. Voici ce qu’il revendique – et ses chances de succès pour arrêter le décompte des voix ou renverser les résultats.Sarah John, College of Business, Government and Law, Flinders UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.