tag:theconversation.com,2011:/es/topics/la-tete-au-carre-53262/articlesLa tête au carré – The Conversation2019-01-24T20:21:50Ztag:theconversation.com,2011:article/1101092019-01-24T20:21:50Z2019-01-24T20:21:50ZLes tortues marines se féminisent avec la hausse des températures. Est-ce grave ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/255034/original/file-20190122-100267-1f3lrr7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Tortue marine.</span> <span class="attribution"><span class="source">HiroakiHome/Pixabay</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Nous vous proposons cet article en partenariat avec l’émission de vulgarisation scientifique quotidienne <a href="https://www.franceinter.fr/emissions/la-tete-au-carre">« La Tête au carré »</a>, présentée et produite par Mathieu Vidard sur France Inter. L’auteur de ce texte évoquera ses recherches dans l’émission du 25 janvier 2019 en compagnie d’Aline Richard, éditrice science et technologie pour The Conversation France.</em></p>
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<p>Mâle ou femelle ? Pour nombre d’espèces, le sexe est déterminé par la température ambiante. Entre autres bouleversements, les changements climatiques et la hausse prévues des températures ont – et auront – donc un fort impact sur l’évolution de la biodiversité. Intéressons-nous ici à la situation de tortues marines confrontées à une planète qui se réchauffe, à l’occasion d’une <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/gcb.14520">récente publication sur le sujet</a> dans le journal <em>Global Change Biology</em>.</p>
<p>Si, chez l’humain, le sexe est déterminé génétiquement, c’est loin d’être le cas pour l’ensemble des espèces. Chez certaines d’entre elles, la détermination du sexe se fonde sur la température que les jeunes subissent au cours de leur développement. Pour un certain nombre d’espèces de tortues, par exemple, un œuf incubé dans un environnement chaud donnera plutôt une femelle.</p>
<p>Ce facteur est source d’inquiétude : qu’arrivera-t-il à ces espèces avec les hausses de température prévues pour les années à venir ? Le prédire n’est pas si simple. Plusieurs éléments doivent être pris en compte, ce qui rend toute conclusion délicate à formuler.</p>
<p>Prenons le cas des tortues marines vertes dont parle l’article scientifique cité plus haut. On y lit que le <em>sex ratio</em> des tortues est actuellement de 52 % en faveur des femelles. Et que, en suivant les prédictions climatiques du GIEC, la hausse de la part des femelles dans les naissances globales s’échelonnerait de 76 à 93 %.</p>
<p>Pour commencer, soulignons l’hétérogénéité des chiffres, très différents selon les sites de pontes, les lieux, l’âge des tortues étudiées (éclosion, jeunes adultes, adultes reproducteurs…). Mais globalement, il semble se dégager une tendance : le sex ratio serait biaisé en faveur des femelles, voire très fortement pour certaines populations aux stades les plus jeunes.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/255393/original/file-20190124-135151-1drjij7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/255393/original/file-20190124-135151-1drjij7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/255393/original/file-20190124-135151-1drjij7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/255393/original/file-20190124-135151-1drjij7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/255393/original/file-20190124-135151-1drjij7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/255393/original/file-20190124-135151-1drjij7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/255393/original/file-20190124-135151-1drjij7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une tortue marine dépose ses oeufs sur une plage du Costa Rica.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Public.resource.org/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Est-ce là un effet du changement climatique déjà visible ? <em>A priori</em> non : cela serait plutôt lié au comportement de reproduction et de ponte des tortues marines : une femelle peut s’accoupler avec plusieurs mâles et vice-versa, et pondre plusieurs fois dans la même année. Si l’on s’interroge sur l’impact réel d’un fort taux de femelles au sein d’une population de tortues, une proportion plus importante n’est donc pas forcément une catastrophe, au contraire !</p>
<p>D’autres éléments du comportement de ponte sont à prendre en compte : choix des sites de ponte, profondeur des nids, température locale du nid due à l’ombrage ou le relief local, etc.. Dans un contexte global où les températures augmentent, les choix locaux et individuels des femelles lors de la ponte peuvent donc grandement modifier la température réellement subie par les œufs.</p>
<p>Un autre phénomène observé chez les tortues marines a une grande importance et doit aussi être prise en compte : la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Philopatrie">philopatrie</a>. Là-encore, les recherches sont en cours, mais il est communément admis que les tortues ont plutôt tendance à pondre ou à s’accoupler avec des femelles qui pondent sur la plage où ils sont nés. Si nous simplifions un peu, un site produisant un <em>sex ratio</em> trop déséquilibré et qui ne permettrait plus une reproduction suffisante verrait donc le nombre de pontes qu’il accueille diminuer du fait de la philopatrie, jusqu’à l’abandon du site de ponte. Au contraire, un site dont les conditions locales conduiraient à un <em>sex ratio</em> plus équilibré verrait le nombre de pontes accueillies se maintenir ou augmenter.</p>
<p>Enfin, la température à partir de laquelle un œuf produit une femelle n’est pas la même selon les espèces, et au sein d’une espèce selon les populations et les individus. Cette température « pivot » peut donc elle aussi évoluer, par sélection naturelle, et permettre aux populations de s’adapter aux hausses de températures.</p>
<p>En somme, plusieurs éléments peuvent venir atténuer voire contrecarrer les effets <em>a priori</em> négatifs du réchauffement climatique. Mais… si ces éléments d’atténuation disparaissaient ? Ou s’ils devenaient inefficaces du fait de changements trop importants ?</p>
<p>Il y a lieu de s’inquiéter, selon certaines études. Ainsi, si un <em>sex ratio</em> déséquilibré en faveur des femelles n’avait pas forcément d’effet négatif sur la population de tortues marines, cela n’est évidemment plus vrai s’il devient beaucoup trop déséquilibré et pendant longtemps. De même, l’ensemble des comportements décrits ci-dessus peuvent être totalement remis en cause si le nombre potentiel de sites de ponte diminue. Or, à cause de la hausse du niveau des mers ou encore de l’urbanisation des littoraux, les sites de ponte potentiels ont tendance à diminuer en nombre ou en qualité. Et pour finir, l’évolution des températures pivots que l’on pourrait imaginer n’est pas un phénomène rapide, et pourrait donc ne pas permettre une adaptation suffisante au regard de la vitesse du changement climatique.</p>
<p>La situation est complexe : il est bien difficile de prévoir ce qui peut se passer dans les prochaines années. Dans l’article cité, les chercheurs ont proposé un modèle prédictif concluant que les tortues marines se maintiendraient malgré le changement climatique jusqu’en 2100. Rien n’empêche cependant, et dès maintenant, de prendre des mesures en faveur des tortues marines : préservation des sites de ponte, lutte contre les causes de mortalité en mer (filets de pêche, déchets plastiques en mer…). Une action nécessaire si l’on veut protéger ces magnifiques reptiles marins vieux de millions d’années.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/110109/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Vincent HULIN est membre de Europe Ecologie Les Verts (parti politique), Terra Nova 91 (think tank).</span></em></p>Entre autres bouleversements, les changements climatiques et la hausse prévues des températures ont – et auront – un fort impact sur l’évolution de la biodiversité. Exemple avec les tortues marines.Vincent Hulin, Directeur adjoint de l'expertise, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1041142018-10-11T19:02:08Z2018-10-11T19:02:08ZUn scientifique ne peut pas se tromper, il le doit !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/239769/original/file-20181008-72117-15nx3g3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Cahier d'expériences</span> <span class="attribution"><span class="source">José Alejandro Cuffia on Unsplash</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Nous vous proposons cet article en partenariat avec l’émission de vulgarisation scientifique quotidienne <a href="https://www.franceinter.fr/emissions/la-tete-au-carre">« La Tête au carré »</a>, présentée et produite par Mathieu Vidard sur France Inter. L’auteur de ce texte évoquera ses recherches dans l’émission du 12 octobre 2018 en compagnie d’Aline Richard Zivohlava, éditrice sciences et technologie pour The Conversation France.</em></p>
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<p>Il y a quelques semaines de cela, j’ai quitté le confort de mon bureau pour aller à la rencontre de collégiens. J’y allais pour parler de mon travail de chercheur avec des élèves de 6<sup>e</sup>. J’avoue avoir été plus stressé à la perspective de cette rencontre que lorsqu’il s’agit de présenter mes travaux à un parterre de scientifiques. Les élèves ont été à la hauteur de mon appréhension. Ils m’avaient concocté un assortiment de questions toutes aussi pertinentes que déstabilisantes. Déstabilisantes parce que dans la course du quotidien, entre rapports, expérimentations, travail avec les étudiants et autres joies administratives, je ne prends pas le temps de me les poser. À tort.</p>
<p>Je passe sur les questions qui m’ont pris au dépourvu (« Pouvez-vous décrire votre travail en seulement quatre mots ? » – Je ne pensais pas rencontrer un responsable RH !). Je vais n’en retenir qu’une qui m’a fait cogiter plus que les autres : « Est-ce que ça vous arrive souvent de rejeter vos hypothèses ? »</p>
<p>Dans l’esprit d’un élève de sixième (et de beaucoup, beaucoup de monde), la science est un processus linéaire : observation → hypothèse → expérimentation → interprétation → conclusion. Ce schéma idéal(iste) est bien loin de la réalité, mais ce qui est important ici, c’est bien de voir que pour cet élève, si l’expérimentation ne permet pas de vérifier l’hypothèse, alors c’est que l’on s’est trompé. D’où la phrase que tous les enseignants de biologie ou de physique ont entendu un jour : « Hé m’dame (m’sieur) ! Ça marche pas ! »</p>
<h2>« Ça marche pas »</h2>
<p>Il y a plusieurs raisons pour lesquelles une expérience peut échouer à vérifier l’hypothèse de départ. D’abord, si l’hypothèse est formulée en dehors de tout cadre théorique initial, il y a peu de chances que l’expérience marche. Si je fais l’hypothèse que le ciel est bleu parce qu’il existe un drap géant au-dessus de nos têtes, j’aurais beau expérimenter tous les projectiles et toutes les fusées au monde, je n’arriverai pas à déchirer ce drap. « Ça marche pas ». Cet exemple est certes quelque peu absurde, mais il me permet de rappeler qu’il n’y a pas d’observation sans cadre théorique sous-jacent. Je ne vois que ce que j’ai été préparé à voir. Comme chercheur, pour éviter que les expériences que je réalise ne « marchent pas », je ne peux donc pas me permettre de partir à l’aveugle. Je m’appuie au contraire sur les résultats qu’ont obtenus mes collègues avant moi et qu’ils ont rapportés dans des articles scientifiques.</p>
<p>Ensuite, l’expérience peut « ne pas marcher » parce que l’on ne s’est pas donné les moyens de la mettre en œuvre correctement. Soit que l’on a utilisé un matériel non adapté, soit que l’on a manqué de rigueur, soit que l’on n’a pas répété l’expérience un nombre suffisant de fois pour réduire le poids des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89v%C3%A9nement_(probabilit%C3%A9s)">événements aléatoires</a> dans les observations. On touche alors à la question des statistiques. Même la plus rigoureuse des expérimentations ne peut pas tout contrôler (c’est particulièrement vrai en biologie ou en écologie).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/239772/original/file-20181008-72127-133sd95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/239772/original/file-20181008-72127-133sd95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/239772/original/file-20181008-72127-133sd95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/239772/original/file-20181008-72127-133sd95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/239772/original/file-20181008-72127-133sd95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/239772/original/file-20181008-72127-133sd95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/239772/original/file-20181008-72127-133sd95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Néon.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Josh Couch/Unsplash</span></span>
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<p>Récemment, je me suis intéressé aux effets de la sécheresse sur la manière dont les arbres se défendent contre les insectes herbivores. Sur la base de la littérature scientifique, je m’attendais à ce que les arbres stressés soient plus sensibles aux insectes herbivores que les arbres disposant d’assez d’eau. Pour le vérifier, j’ai comparé les dégâts causés par les insectes herbivores sur les feuilles de bouleau selon que ces arbres étaient soumis à la sécheresse (le témoin) ou au contraire bien arrosés (la condition expérimentale).</p>
<p>Pour cela, j’ai estimé la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Indice_de_surface_foliaire">surface foliaire</a> consommée par les herbivores. J’ai travaillé sur plus de quarante arbres dans chacune des deux modalités. J’ai constaté que les insectes causaient effectivement plus de dégâts aux arbres stressés qu’aux arbres irrigués. Mais si je m’étais contenté de comparer un seul arbre dans chaque modalité, j’aurais pu tomber par hasard sur un arbre irrigué très sensible aux herbivores, ou sur un arbre non irrigué dont les racines plongeaient directement dans la nappe phréatique. Et là, j’aurais conclu que « ça ne marche pas ».</p>
<h2>Répéter les observations</h2>
<p>C’est pour s’affranchir des petites différences incontrôlables qu’il est important de répéter les observations avant de conclure qu’une expérience « n’a pas marché ». En transposant cette situation au collège, on pourrait suggérer de consigner et de comparer les résultats obtenus par tous les élèves ayant réalisé la même expérimentation (et les inciter à comparer leurs résultats propres à la moyenne des résultats obtenus par l’ensemble des élèves).</p>
<p>Il existe un troisième cas de figure pour lequel l’expérience ne « marche pas » parce qu’elle ne peut pas marcher. Il y a quelques années, dans un travail réalisé dans la forêt des Landes, mes collègues avaient montré que la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Processionnaire_du_pin">chenille processionnaire du pin</a> se concentre en lisière des plantations de pins. Ils avaient également aussi montré que lorsque ces lisières étaient bordées par des feuillus, les pins étaient moins attaqués par la chenille processionnaire. Par la suite, en nous appuyant sur la littérature scientifique, nous avions formulé l’hypothèse selon laquelle la différence dans le niveau d’infestation des pins par la processionnaire en présence ou non de feuillus était due à une plus grande <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pr%C3%A9dateur">pression de prédation</a> sur les œufs de processionnaire derrière les essences feuillues : s’il y a plus de prédation, alors il y a moins de chenilles, et donc moins de dégâts.</p>
<p>Nous avons testé cette hypothèse en exposant des œufs de processionnaires dans 40 pins en lisière de 10 peuplements dont la moitié de la lisière était bordée par des essences feuillues. Nous avons dénombré le nombre d’œufs consommés par les prédateurs de la processionnaire et… nous n’avons constaté aucune différence dans le taux de prédation dans les lisières en présence ou non d’essences feuillues. Ça n’avait pas marché. Hypothèse rejetée. Et pourtant nous nous avions rempli les deux critères que j’évoquais plus haut, à savoir :</p>
<ul>
<li><p>Formuler une hypothèse cohérente par rapport à l’état des connaissances scientifiques</p></li>
<li><p>Réaliser un nombre suffisant de répétitions.</p></li>
</ul>
<h2>La science est faite d’échecs</h2>
<p>Ce qui pourrait apparaître comme un échec était pourtant une petite avancée scientifique : nous n’avions pas montré ce qui était, mais nous avions montré ce qui n’était pas. Si ce ne sont pas les prédateurs qui expliquent les différences d’infestation des pins par la processionnaire en présence ou non d’essences feuillues, alors c’était probablement autre chose (le microclimat ? l’accessibilité des arbres ?). Avec notre échec, nous avons restreint le champ des possibles. Ce n’est pas une révolution scientifique, loin s’en faut, mais la science se construit aussi, et peut-être surtout, par l’accumulation de petites avancées non révolutionnaires qui viennent renforcer les théories et préciser leurs contours.</p>
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<span class="caption">Nid de chenille processionnaire du pin.</span>
<span class="attribution"><span class="source">JPS68</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>À la question « Vous est-il déjà arrivé de ne pas vérifier des hypothèses » je réponds donc sans complexe que oui ! J’ajouterais que c’est normal et même extrêmement sain pour la science en général. Aux élèves qui me liraient, je dis donc « Trompez-vous ! ». À leurs enseignants : « Aidez vos élèves à se tromper ». À ceux-là et à tous les autres : « Les scientifiques se trompent, et c’est aussi ce qu’on leur demande ».</p>
<h2>Et maintenant, le point de vue du prof</h2>
<p>À la différence du chercheur qui ne connaît pas la réponse au problème qu’il cherche à résoudre et donc qui ne sait pas si son hypothèse sera vérifiée ou pas, un enseignant doit faire construire à ses élèves un savoir déjà établi et connu par lui. Seuls les élèves sont dans la recherche d’une réponse inconnue d’eux mais détenue par d’autres. C’est une différence de taille ! Car même si la démarche se veut analogue, l’objet d’étude est fondamentalement différent. Aussi, les enseignants ont tendance à sélectionner « l’hypothèse » qui va permettre d’arriver à la construction du savoir établi – même si dans le meilleur des cas ils laissent aux élèves le soin de formuler plusieurs hypothèses. Rares sont ceux qui laissent les élèves « se fourvoyer » à tester une hypothèse qu’ils savent non valide. Et pourtant l’erreur est un sacré moteur de l’apprentissage. Pour un élève, échafauder une hypothèse qu’il va pouvoir mettre à l’épreuve d’une expérience et la réfuter, est un apprentissage sûrement plus formateur pour l’esprit scientifique que de suivre un chemin tracé par d’autre.</p>
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<p><em>Mauricette Mesguich, professeure de SVT et coordinatrice régionale en Nouvelle-Aquitaine du projet des <a href="http://www.maisons-pour-la-science.org/aquitaine/colleges-pilotes">collèges pilotes La main à la pâte</a>, a rédigé le point de vue du prof dans cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/104114/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bastien Castagneyrol a reçu des financements publics (GIP-ECOFOR, LABEX COTE) dans le cadre de ses travaux de recherche. </span></em></p>L’erreur en sciences est non seulement riche d’enseignements, mais fructueuse en soi. Voici pourquoi les chercheurs devraient apprécier de se tromper.Bastien Castagneyrol, Chercheur en écologie, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/956252018-05-03T20:53:57Z2018-05-03T20:53:57ZBattre le record du monde du 100 mètres : science-fiction ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/217293/original/file-20180502-153891-u0mr9f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C3235%2C2153&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Usain Bolt, l'homme le plus rapide du monde sur 100 mètres</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://hu.wikipedia.org/wiki/Usain_Bolt#/media/File:Usain_Bolt_Rio_100m_final_2016.jpg">Wikipedia</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Nous vous proposons cet article en partenariat avec l’émission de vulgarisation scientifique quotidienne <a href="https://www.franceinter.fr/emissions/la-tete-au-carre">« La Tête au carré »</a>, présentée et produite par Mathieu Vidard sur France Inter. L’auteur de ce texte évoquera ses recherches dans l’émission du 04 mai 2018 en compagnie d’Aline Richard, éditrice science et technologie pour The Conversation France.</em></p>
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<p>Quelle meilleure illustration de la haute performance que le <a href="https://www.youtube.com/watch?v=X9isSTi-PIM">record d’Usain Bolt en 2009 à Berlin</a> en regard de sa blessure lors de la dernière ligne droite de la finale du <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ZNXv41J7Lfg">relais 4 x 100 mètres à Rio</a> sept ans plus tard ?</p>
<p>Cette image sonne comme un rappel de la fragilité du succès lorsqu’il confine aux limites de la performance humaine. Mais elle constitue aussi une réelle invitation à mieux comprendre les raisons qui conduisent à un tel niveau d’excellence. Ceci afin d’être capable de se rapprocher à nouveau un jour de cette marque de 9 s 58 sur 100 m, voire de l’abaisser, tout en préservant l’intégrité physique des athlètes. C’est à ce défi que nombre d’équipes de scientifiques se sont attaquées depuis des décennies, comme l’illustre cette vidéo qui décortique la course de Bolt comparée à celle de Tyson Gay en 2009.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/_VX2gbN8pik?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Analyse de la course d’Usain Bolt en 2009 à Berlin.</span></figcaption>
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<h2>La performance se cache dans les détails</h2>
<p>Ces données reflètent parfaitement à quel point la performance sportive se construit sur des détails techniques, physiques, qui ne s’improvisent pas, afin de produire le mouvement le plus efficace.</p>
<p>Elles révèlent également que l’épreuve reine des Jeux olympiques sollicite des propriétés musculaires fines, comme la force musculaire maximale qui s’exprime principalement au départ dans les <em>starting blocks</em>, mais pas seulement !</p>
<p>Une <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/sms.12389">analyse récente</a> basée sur les temps mesurés tous les 10 mètres issus d’une base collectée par l’<a href="https://www.iaaf.org/home">IAAF</a> (association internationale des fédérations d’athlétisme) a ainsi mis en évidence qu’Usain Bolt n’était pas celui qui développait le plus de force parmi les meilleurs sprinters de ces dernières décennies.</p>
<p>En revanche, il est le seul à être capable d’atteindre 12,4 m/s (44,6 km/h) et surtout d’appliquer encore de la force à cette vitesse. Pour ce faire, les coordinations musculaires, les propriétés élastiques des muscles et des tendons, ou encore l’<a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/sms.12520">orientation des forces appliquées au sol</a> apparaissent manifestement déterminantes.</p>
<h2>No pain, no gain : la formule magique ?</h2>
<p>Il serait réducteur de considérer que cette performance est le seul résultat d’un entraînement intense et difficile, comme le résume le fameux leitmotiv « no pain no gain ». Cette approche y contribue car il est nécessaire de stimuler l’organisme à ces niveaux d’exigence pour progresser. Mais elle présente aussi des risques, notamment de sur-utilisation du corps en cas de récupération insuffisante. La blessure subie par Bolt (<a href="https://www.independent.co.uk/sport/general/athletics/usain-bolt-injury-fake-hamstring-tear-world-athletics-championships-relay-twitter-tweets-deleted-a7899396.html">lésion aux ischios-jambiers</a>) est ainsi celle la plus représentée dans les <a href="http://bjsm.bmj.com/content/52/7/460.long">relevés effectués lors des JO de Rio</a>.</p>
<p>Afin d’optimiser la performance de ces champions et les prémunir de ces évènements indésirables qui peuvent affecter significativement une saison voire une carrière, des paramètres très précis et individuels doivent être pris en considération.</p>
<p>Certains travaux s’intéressant à la performance en sprint ont ainsi souligné le rôle potentiel de facteurs anatomiques et pas uniquement la masse musculaire, comme les types de fibres (<a href="https://www.physiology.org/doi/abs/10.1152/japplphysiol.00037.2015?url_ver=Z39.88-2003&rfr_id=ori%3Arid%3Acrossref.org&rfr_dat=cr_pub%3Dpubmed">typologie musculaire</a>) qui constituent les muscles sollicités ou encore la distance entre la ligne d’action du muscle et l’axe de rotation de l’articulation (<a href="http://jeb.biologists.org/content/212/22/3700">bras de levier musculaire</a>). Ces paramètres ne peuvent être mesurés avec un chronomètre ou avec le seul œil de l’entraîneur.</p>
<h2>La science au service de la performance</h2>
<p>C’est alors qu’interviennent des ressources extérieures au staff technique : cliniciens, scientifiques et ingénieurs. Du point de vue de la prévention, certains tests utilisés par ces professionnels de l’accompagnement scientifique de la performance ont ainsi soulevé de possibles indicateurs du risque de blessure basés sur <a href="http://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0363546508316764?url_ver=Z39.88-2003&rfr_id=ori%3Arid%3Acrossref.org&rfr_dat=cr_pub%3Dpubmed&">des mesures de force</a>, ou de <a href="http://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/03635465030310011801?url_ver=Z39.88-2003&rfr_id=ori:rid:crossref.org&rfr_dat=cr_pub%3dpubmed">souplesse</a>.</p>
<p>Mais ces tests masquent souvent des compensations et ne permettent pas d’extraire les propriétés ou les limites des muscles utilisés, d’où leur <a href="http://bjsm.bmj.com/content/52/5/329.long">manque de fiabilité</a>, récemment très critiqué. Il est possible de faire appel à des techniques plus poussées comme les <a href="https://www.youtube.com/watch?v=j-mHQACvZfc">biopsies effectuées auprès de Colin Jackson</a> (spécialiste du 110 mètres haies) permettant de déterminer sa typologie musculaire et les liens avec la performance. Mais ces techniques sont invasives et peu adaptées au sportif en activité (la carrière sportive de Jackson était terminée au moment de l’étude).</p>
<h2>Quelles solutions pour continuer à progresser ?</h2>
<p>Dans ce contexte, les progrès récents de techniques non-invasives comme l’<a href="https://www.clearinghouseforsport.gov.au/Library/videos/smart_talk_seminar_series/2013_smart_talk_seminar_series/biomechanics_-_sources_of_mechanical_power_for_human_movement">échographie</a> ou l’<a href="https://motorimpairment.neura.edu.au/muscles-change-shape-when-passively-lengthened/">imagerie par résonnance magnétique</a> offrent l’accès à des informations nouvelles comme l’élasticité des tissus (muscle, tendon), à la manière dont les sportifs utilisent leurs muscles (coordinations), ou à la vitesse maximale de contraction (essentielle voire cruciale en sprint).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/217465/original/file-20180503-153884-2cv2c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/217465/original/file-20180503-153884-2cv2c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/217465/original/file-20180503-153884-2cv2c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/217465/original/file-20180503-153884-2cv2c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/217465/original/file-20180503-153884-2cv2c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/217465/original/file-20180503-153884-2cv2c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/217465/original/file-20180503-153884-2cv2c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Échographie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Gaël Guilhem</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p><a href="https://www.lequipe.fr/Medias/Actualites/Documentaire-inseption-dans-la-foulee-de-jimmy-vicaut/700841">Les staffs et les athlètes avec lesquels les scientifiques collaborent</a> disposent ainsi de paramètres très précis, très individuels, le tout sans passer la barrière cutanée ! Les derniers travaux, dont plusieurs réalisés par les <a href="https://fr.calameo.com/read/0032327400359bdd5f3b5">équipes de l’INSEP</a> et de l’<a href="https://www.physiology.org/doi/abs/10.1152/japplphysiol.00542.2015?url_ver=Z39.88-2003&rfr_id=ori%3Arid%3Acrossref.org&rfr_dat=cr_pub%3Dpubmed">Université de Nantes</a> ont permis de tester si certaines caractéristiques individuelles sont reliées à la performance ou au risque de blessure.</p>
<h2>Une échographie pour les sprinters</h2>
<p>Des échographes de dernière génération permettent d’enregistrer des images à très haute fréquence (jusqu’à 10 000 images par seconde). En plaçant une sonde à la surface de la peau, il devient possible de visualiser les vitesses de raccourcissement des muscles et des tendons lors de mouvements très rapides.</p>
<p>Ces outils incluent également la possibilité de mesurer l’élasticité du tissu, c’est-à-dire sa capacité à se déformer tout en stockant de l’énergie, propriété dont on sait aujourd’hui qu’elle joue un rôle fondamental dans le geste sportif.</p>
<p>Il est alors possible de déterminer les vitesses maximales et l’élasticité des muscles et des tendons du sprinter et d’en extraire ses points forts et ceux qu’il ou elle peut améliorer. Une fois ces mesures effectuées en laboratoire auprès des sportifs élites (de très haut niveau), ces informations sont transmises à l’entraîneur en vue d’identifier quelle capacité développer, renforcer, voire laisser de côté.</p>
<p>Ce travail est par exemple conduit en étroite collaboration entre la <a href="http://www.athle.fr/">Fédération française d’athlétisme</a> et le <a href="http://www.insep.fr/fr/actualites/pr%C3%A9sentation-du-laboratoire-sport-expertise-et-performance">Laboratoire sport, expertise et performance</a> de l’INSEP.</p>
<p>Les résultats permettent de dresser le profil des sprinters, de mettre le doigt sur des spécificités individuelles, qui permettent ensuite d’identifier des pistes prioritaires d’entraînement.</p>
<p>L’entraîneur peut alors privilégier des exercices qui vont cibler un muscle particulier (dont il serait souhaitable d’augmenter l’élasticité ou accroître la vitesse de raccourcissement), ou qui contribuent à rééquilibrer les niveaux de force produits par chaque muscle pour stabiliser une articulation. Les possibilités sont nombreuses. L’ultime étape consiste enfin à réévaluer les effets de ces stratégies afin d’ajuster si besoin l’entraînement et ainsi de suite.</p>
<h2>Il n’y a pas que le sport dans la vie…</h2>
<p>Si cette démarche est séduisante et s’inscrit de plus en plus dans la pratique, sa mise en œuvre n’est pas toujours évidente en raison des contraintes qui pèsent sur les sportifs de haut niveau et leur encadrement. Il reste donc beaucoup à faire pour être en mesure d’utiliser tout le potentiel de ces éclairages, et par conséquent des sources d’optimisation à exploiter.</p>
<p>Ces techniques conservent également des limites importantes. Elles sont encore surtout utilisées en laboratoire ou lors d’examens médicaux, et ne sont pas encore complètement adaptées aux conditions de terrain. Il est toutefois intéressant de noter que des échographes transportables voient le jour, ce qui laisse entrevoir des progrès futurs dans le développement d’outils de captation miniaturisés, d’objets connectés, comme ceux déjà intégrés dans le suivi des déplacements des joueurs en sport collectif par exemple.</p>
<p>L’objectif à terme n’est pas nécessairement de s’entraîner plus, mais de s’entraîner mieux, plus précisément, aller à l’essentiel, pour dégager du temps pour d’autres aspects de la vie : récupération, temps familial, formation, projet professionnel.</p>
<p>Cette problématique prend en effet de plus en plus de place dans la haute performance actuellement (par exemple le service <a href="http://www.eis2win.co.uk/expertise/performance-lifestyle/">Performance Lifestyle</a> proposé à l’English Institute of Sport, importance des conditions d’entraînement dans les universités américaines, enquête sur les <a href="https://en.calameo.com/read/003232740a67bb0f215cd?page=30">rythmes de vie des sportifs</a> en France). Pour continuer à viser l’excellence tout en assurant l’accomplissement personnel des champions de demain.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/95625/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gaël Guilhem a reçu des financements du Ministère des Sports, du Ministère de de l'Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l'Innovation, de l'Association Nationale Recherche Technologie. Ces travaux sont effectués en collaboration avec les sociétés Actech et Natural Grass, dans le cadre de projets de recherche et développement et de Conventions Industrielles de Formation par la REcherche (CIFRE).</span></em></p>En 2009, Usain Bolt atomisait le record du monde du 100 mètres. Pourra-t-on un jour effacer ce chrono historique ? L’imagerie médicale appliquée aux athlètes est une piste séduisante.Gaël Guilhem, Chercheur, Directeur du Laboratoire Sport, Expertise et Performance (EA 7370) , Institut national du sport de l'expertise et de la performance (INSEP)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/884572018-02-22T19:57:50Z2018-02-22T19:57:50ZToits potagers en ville, ce n’est pas que pour faire joli<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/207473/original/file-20180222-152363-eevm40.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Sur le toit d’AgroParisTech. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.paris.fr/actualites/un-toit-potager-au-sommet-de-l-ecole-agro-paris-tech-3845">François Grunberg/Mairie de Paris</a>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est republié dans le cadre du séminaire « Agro-écologie et systèmes alimentaires durables en Ile-de-France : Quels acquis et quels besoins pour la recherche ? », organisé par la Région IdF, l’INRA, l’Irstea et AgroParisTech et dont The Conversation France est partenaire. Cet événement aura lieu ce <a href="https://www.dim-astrea.fr/Accueil/Actualites/Seminaire-DIM-ASTREA-PSDR">mercredi 10 octobre 2018</a> à Paris.</em></p>
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<p>En ville, la gestion des déchets, les épisodes de canicule, les risques d’inondations et l’approvisionnement alimentaire sont autant de défis à relever pour soutenir un développement durable des centres urbains.</p>
<p>Face à ces défis, les scientifiques s’intéressent de près à la végétalisation des zones urbaines : celle-ci peut en effet contribuer à produire des ressources alimentaires et à retenir de l’eau. Ces dernières années, de tels espaces verts se sont multipliés, notamment sur les toits, compte tenu de l’espace urbain limité. Ces espaces peuvent-ils vraiment faire la différence ?</p>
<h2>Les promesses des toits urbains</h2>
<p>Pour répondre à cette question, nous avons mis à l’épreuve de la science la pratique innovante des potagers sur les toits. Nos résultats – <a href="https://link.springer.com/article/10.1007%2Fs13593-017-0474-2">publiés en décembre 2017</a> dans la revue <em>Agronomy for Sustainable Development</em> – tirent un bilan positif. Le niveau de récoltes sur l’espace testé, à savoir le toit potager de l’école AgroParisTech, est bon et certains <a href="http://www.fao.org/ecosystem-services-biodiversity/fr/">« services écosystémiques »</a> sont au rendez-vous : rétention d’eau de pluie, recyclage des biodéchets et stockage du carbone.</p>
<p>C’est la première fois qu’une équipe de recherche mesure les services écosystémiques rendus par ces potagers ; à noter que dans ce cas précis, le toit potager est alimenté uniquement par des déchets urbains. Au vu de ces résultats, l’agriculture urbaine sur les toits pourrait bien devenir plus qu’un phénomène marginal au cœur des mégapoles.</p>
<p>Les toits peuvent en effet représenter jusqu’à <a href="http://www.mit.edu/people/spirn/Public/Granite%20Garden%20Research/Plants/Oberndorfer%20et%20al%202007%20Green%20Roof%20Ecosystems.pdf">32 % des surfaces horizontales</a> des villes. Il faut également souligner que le phénomène de conquête agricole de ces lieux est aujourd’hui porté par de nombreuses collectivités ; ainsi de Paris, au travers des appels à projets <a href="http://www.parisculteurs.paris/">« Parisculteurs »</a> ou encore de l’<a href="http://www.parisculteurs.paris/fr/charte-100-hectares/">« Objectif 100 hectares »</a> d’espaces végétalisés dans la capitale d’ici à 2020. Ces expérimentations ont par ailleurs contribué à l’émergence de <a href="http://topager.com/">Topager</a> et <a href="http://culturesenville.fr/">Cultures en ville</a>, deux entreprises aujourd’hui bien implantées.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"950351029064912897"}"></div></p>
<h2>Compost, vers de terre et terreau</h2>
<p>C’est donc sur le toit de l’école AgroParisTech – baptisé « Bertrand Ney », du nom du professeur à l’origine de sa création – dans le V<sup>e</sup> arrondissement de Paris que notre équipe de recherche a mis en place un potager aérien. Trois objectifs pour ce projet : valoriser les ressources de la ville ; concevoir un système de culture low-tech simple à conduire ; ne pas recourir à l’utilisation d’intrants chimiques (pesticides ou engrais).</p>
<p><a href="https://link.springer.com/article/10.1007%2Fs13593-017-0474-2">Les résultats présentés</a> en décembre dans <em>Agronomy for Sustainable Development</em> correspondent à deux années (de mars 2013 à mars 2015) où ont été cultivées salades, tomates cerises et engrais verts dans 9 bacs en bois (type compostières de 90x90x40cm).</p>
<p>S’inspirant d’une technique utilisée dans les jardins depuis les années 1980 – la culture en lasagne –, les chercheurs ont comparé deux compositions de sol différentes à un sol témoin.</p>
<p>Le premier bac contient un « Technosol » (désignant un sol constitué de matériaux apportés par l’homme) ; il est composé à parts égales de compost de déchets verts et de bois broyé, issus de l’entretien des espaces verts. Le second bac est de même composition que le premier, mais avec l’ajout de trois différents types de vers de terre, en vue d’accélérer la biodégradation des résidus organiques. Le troisième bac contient un sol témoin, composé de terreau industriel disponible en jardinerie.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"937897941141983232"}"></div></p>
<h2>Quels services rendus ?</h2>
<p>L’équipe s’est concentrée sur quatre services écosystémiques : l’approvisionnement alimentaire (quantité et qualité des récoltes), le recyclage de déchets, la régulation des eaux de pluie (quantité d’eau de pluie retenue et qualité des eaux de drainage) et le stockage de carbone lié à l’utilisation de matériaux riches en matière organique.</p>
<p><strong>• Résultats pour l’approvisionnement alimentaire</strong></p>
<p>Les niveaux de production atteints sont supérieurs à ceux de jardins familiaux en plein sol et proches de ceux de maraîchers professionnels en agriculture biologique en Île-de-France. Les plus forts niveaux de rendement sont atteints dans les Technosols en présence de vers de terre (bac 2). La qualité est aussi au rendez-vous : aucune des récoltes ne dépasse les normes pour les métaux lourds mesurés et réglementés.</p>
<p><strong>• Résultats pour le recyclage des résidus urbains</strong></p>
<p>C’est au Technosol enrichi en vers de terre (bac 2) que revient encore la palme de l’efficacité, avec une diminution de 50 % de l’épaisseur du substrat sur la première année (par tassement et par consommation des éléments nutritifs du « sol » par les plantes). Le Technosol sans vers (bac 1) et le bac témoin (bac 3) montrent quant à eux une diminution de l’épaisseur du substrat de 36 et 31 % respectivement ; cela traduit une consommation annuelle moindre de déchets par le système de culture.</p>
<p><strong>• Résultats pour la régulation des eaux de pluies</strong></p>
<p>Les résultats sont ici semblables entre le témoin (bac 3) et les Technosols (bacs 1 et 2), avec de 74 à 84 % des eaux de pluies retenues. Par rapport à un toit nu, cette expérience montre tout l’intérêt d’installer des bacs de culture pour lutter contre le ruissellement des eaux de pluie.</p>
<p>En ce qui concerne l’impact de l’installation sur les eaux de drainage sortant des bacs, les Technosols (bacs 1 et 2) retiennent, sur les deux années d’expérimentation, plus de nitrates qu’ils n’en rejettent. À la différence du terreau (bac 3) et ce tout particulièrement en début d’expérimentation.</p>
<p>C’est en revanche l’inverse pour le carbone perdu sous forme dissoute (pouvant, en grande quantité, provoquer l’asphyxie d’un milieu aquatique) dans les eaux de drainage : le terreau (bac 3) en libère moins que le Technosol (bac 1) ; la présence de vers dans le bac 2 aboutissant au rejet le plus important.</p>
<p>Ces résultats montrent la nécessité d’optimiser la composition du Technosol et/ou du système de culture en place pour aboutir au rejet le plus faible possible de carbone et d'azote dans les eaux en sortie de toiture. Par ailleurs, l’analyse de deux types d’éléments (le carbone-élément constitutif des Technosols et l’azote-élément nutritif), met bien en évidence deux comportements différents vis-à-vis de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Lixiviation_(agriculture)">la lixiviation</a>.</p>
<h2>Agriculture urbaine et circuits courts</h2>
<p>À la lumière de ces résultats, on comprend qu’un équilibre reste encore à trouver entre un sol suffisamment riche pour assurer une bonne alimentation des plantes tout en limitant les pertes d'éléments (carbone en particulier) dans l’eau.</p>
<p>Le bilan de ces installations reste toutefois très positif : elles permettent de recycler des déchets organiques voués aujourd’hui majoritairement à l’enfouissement ou à l’incinération. La réutilisation des déchets des villes permet en outre d’éviter l’importation de terreau, l’utilisation de fertilisants minéraux de synthèse, ainsi que la prise en charge du traitement et du transport des ordures vers les décharges, au profit d’une valorisation locale.</p>
<p>La liste des autres bénéfices potentiels de cette agriculture sur les toits peut encore s’élargir : depuis la prévention des inondations (par la rétention d’une partie des écoulements) au rafraîchissement de la ville. Cette agriculture peut participer à la préservation de la biodiversité, favoriser la pollinisation, servir d’espace pédagogique où à visée sociale, tout en rompant avec la monotonie grisâtre des paysages urbains.</p>
<p>À l’heure où il est beaucoup question des circuits courts, l’agriculture urbaine représente une opportunité de transcrire cette logique au cœur des mégapoles.</p>
<hr>
<p><em>Pour plus d’informations, consultez la <a href="http://bit.ly/2oq6jPz">page dédiée au projet T4P</a> sur le site d’AgroParisTech</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/88457/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Le doctorat de Baptiste Grard a été financé par le DIM ASTREA (région Île-de-France, <a href="http://www.dim-astrea.fr">www.dim-astrea.fr</a>) et la Chaire ParisTech « Éco-conception des ensembles bâtis et des infrastructures » (<a href="http://www.chaire-eco-conception.org/fr/folders/30-un-partenariat-de-recherche-pour-une-ville-plus-durable">www.chaire-eco-conception.org/fr/folders/30-un-partenariat-de-recherche-pour-une-ville-plus-durable</a>).
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Christine Aubry a dirigé pendant quatre ans le programme régional DIM ASTREA de la Région Île-de-France qui a co-financé la thèse de Baptiste Grard.
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Nicolas Plantey travaille au sein de l’INRA en tant que chargé de projet DIM ASTREA, projet financé par la région Île-de-France.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Claire Chenu ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Végétaliser les toits des centres urbains présente de nombreux avantages, évalués pour la première fois par une équipe de chercheurs.Baptiste Grard, Chercheur postdoctoral, AgroParisTech – Université Paris-SaclayChristine Aubry, Responsable de l’équipe de recherche « Agricultures urbaines », AgroParisTech – Université Paris-SaclayClaire Chenu, Enseignante chercheure à AgroParisTech, science du sol, biogéochimie, matières organiques, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/851992017-10-26T19:48:19Z2017-10-26T19:48:19ZLes chats sont‑ils liquides ou comment j’ai obtenu le prix Ig Nobel<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/194024/original/file-20171109-13299-niocdp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un chat dont le corps se comporte comme un liquide.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/j_benson/4206463248/in/photolist-7pHdYq-TphdXQ-HgtyTX-aXArDt-9rQ3KJ-9ofZC4-6tg3b3-9jLjtQ-h6xBJb-84sa3-4Tyb2-6tbWGT-e3u2Px-6VjrY7-8jcb3T-atxGcW-7dshD7-22g3e-hvzey-qfDaV2-8jc9SF-4nPHXo-5kYukS-99CJQR-6tfYyL-4WKvfG-6frTkE-pVuAqV-f9e4EY-rdiXZp-Rarpkq-hxUCmA-6tbRNK-4z1kWs-8jcaBr-4tXJTN-a3Yim7-fJM42-54r77W-naNDAt-6tbLAV-9MCvAB-55FpqQ-Y6G7vb-pfWNvo-8jaCgi-7pTes-5ZDrqk-qcW5mp-defTAA">John Benson/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Traditionnellement, un liquide est défini comme étant un matériau qui modifie sa forme pour épouser celle du récipient qui le contient. Dans certaines conditions, les chats semblent en accord avec cette définition !</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/194020/original/file-20171109-13296-mmbjtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/194020/original/file-20171109-13296-mmbjtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/194020/original/file-20171109-13296-mmbjtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=464&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/194020/original/file-20171109-13296-mmbjtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=464&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/194020/original/file-20171109-13296-mmbjtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=464&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/194020/original/file-20171109-13296-mmbjtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=583&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/194020/original/file-20171109-13296-mmbjtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=583&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/194020/original/file-20171109-13296-mmbjtn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=583&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Chat dont le corps épouse parfaitement un évier, se comportant donc comme un liquide.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/mccamment/2210217312/in/photolist-4niWB3-9p3HS9-6tfX1b-5MasX1-7nvKjR-bi8ZT2-6VjsbA-e65ciR-7pHdYq-TphdXQ-HgtyTX-aXArDt-9rQ3KJ-9ofZC4-6tg3b3-9jLjtQ-h6xBJb-84sa3-4Tyb2-6tbWGT-e3u2Px-6VjrY7-8jcb3T-atxGcW-7dshD7-22g3e-hvzey-qfDaV2-8jc9SF-4nPHXo-5kYukS-99CJQR-6tfYyL-4WKvfG-6frTkE-pVuAqV-f9e4EY-rdiXZp-Rarpkq-hxUCmA-6tbRNK-4z1kWs-8jcaBr-4tXJTN-a3Yim7-fJM42-54r77W-naNDAt-6tbLAV-9MCvAB">William McCamment</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ce fait quelque peu paradoxal <a href="http://www.sadanduseless.com/2015/04/liquid-cats/">a émergé sur le web</a> il y a quelques années et a rejoint la longue liste des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A8me_Internet"><em>mèmes</em></a> impliquant nos amis félins. Lorsque j’ai vu cette question sur Internet, elle m’a d’abord fait rire, puis réfléchir. J’ai alors décidé de la reformuler pour illustrer certains problèmes au cœur de la <a href="http://eduscol.education.fr/rnchimie/phys/rheo/cours/rheo.htm"><em>rhéologie</em></a>, la discipline qui étudie les déformations et écoulements de la matière. Cette étude sur la rhéologie des chats m’a valu le <a href="https://www.improbable.com/ig/">prix Ig Nobel</a> de Physique 2017.</p>
<p>Les Ig Nobel sont décernés chaque année par le site scientifico-humoristique <a href="https://www.improbable.com/ig/">Improbable Research</a>. Le but est de mettre en avant des études scientifiques faisant d’abord rire, puis réfléchir. <a href="https://www.youtube.com/watch?v=J9Vp41OPLdo">Une cérémonie</a> est organisée chaque année à l’université Harvard.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/yNwLfRpNHhI?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Vidéo de remise des prix Ig Nobel 2017.</span></figcaption>
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<h2>Qu’est-ce qu’un liquide ?</h2>
<p>Derrière la définition d’un liquide se trouve une action : modifier sa forme pour épouser celle du récipient. Cette action se déroulant dans le temps doit avoir une durée caractéristique. En rhéologie cette durée est appelé le <a href="http://www.colas.com/fichiers/fckeditor/File/pdf/mesure_essai/01-colas.pdf"><em>temps de relaxation</em></a>. Déterminer si un matériau est liquide revient alors à savoir si on considère le matériau sur des temps plus petits ou plus grands que le temps de relaxation. Si on prend l’exemple des chats, ils peuvent adapter leur forme au récipient si on leur laisse suffisamment de temps.</p>
<p>Ils sont liquides si on leur laisse le temps de le devenir. En rhéologie, l’état d’un matériau n’est pas une propriété figée. Ce qu’il convient de mesurer, c’est le temps de relaxation. Quelle est sa valeur ? De quoi dépend-il ? Par exemple : le temps de relaxation d’un chat dépend-il de l’âge du chat ? (en rhéologie on parle de <a href="http://www.cnrtl.fr/definition/thixotrope">thixotropie</a>).</p>
<p>Le temps de relaxation dépend-il du stress du chat ? (on parle de <a href="https://fr.wiktionary.org/wiki/rh%C3%A9o%C3%A9paississant"><em>rhéo-épaississement</em></a> si le temps de relaxation augmente avec le stress, ou de <a href="https://fr.wiktionary.org/wiki/rh%C3%A9ofluidifiant"><em>rhéo-fluidification</em></a> si c’est le contraire). Le temps de relaxation dépend-il du type de récipient ? (en rhéologie on étudie ça dans les problèmes de « mouillage »). Vous l’aurez compris on ne parle pas ici de <em>stress</em> comme nous l’entendons dans le langage courant, et ce que l’on pourrait faire subir à ces braves bêtes. Le stress est le mot anglais qui désigne les contraintes mécaniques.</p>
<h2>Nombre de Déborah et liquidité des montagnes</h2>
<p>Ce que les chats illustrent bien, c’est que la détermination de l’état d’un matériau dépend en fait de la comparaison entre deux temps : le temps de relaxation et le temps de l’expérience.</p>
<p>En général, le temps de l’expérience est simplement la durée depuis le début de la déformation initiée par le récipient, par exemple, le temps depuis que le chat est placé dans le récipient. La comparaison entre les deux temps se fait en calculant leur rapport.</p>
<p>Par convention, on divise le temps de relaxation par le temps de l’expérience, ainsi si le résultat est plus grand que <em>1</em> le matériau est plutôt solide, et s’il est plus petit que <em>1</em> le matériau est plutôt liquide.</p>
<p>Ce nombre est appelé le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Nombre_de_Deborah"><em>nombre de Deborah</em></a>, du nom de la prêtresse biblique qui remarquait que sur des échelles de temps géologiques (« devant Dieu ») même les montagnes s’écoulent. Sur des échelles de temps un peu plus courtes on peut déjà observer les glaciers s’écouler progressivement le long des vallées.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/189522/original/file-20171010-17706-11v2bj1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/189522/original/file-20171010-17706-11v2bj1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/189522/original/file-20171010-17706-11v2bj1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/189522/original/file-20171010-17706-11v2bj1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/189522/original/file-20171010-17706-11v2bj1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/189522/original/file-20171010-17706-11v2bj1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/189522/original/file-20171010-17706-11v2bj1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">écoulement d’un glacier le long d’une vallée.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Même si le temps de relaxation est très long (des jours, des années) le comportement peut être celui d’un liquide si le nombre de Deborah est petit (par rapport à 1). Inversement, même si le temps de relaxation est très petit (millisecondes) le comportement peut être solide si le nombre de Deborah est grand (par rapport à 1). C’est par exemple le cas si on observe une bombe à eau à l’instant où l’on crève le ballon.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/194022/original/file-20171109-13308-2s0l48.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/194022/original/file-20171109-13308-2s0l48.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/194022/original/file-20171109-13308-2s0l48.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/194022/original/file-20171109-13308-2s0l48.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/194022/original/file-20171109-13308-2s0l48.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/194022/original/file-20171109-13308-2s0l48.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/194022/original/file-20171109-13308-2s0l48.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Bombe à eau au moment de son explosion : l’eau se comporte comme un solide pendant un temps très court.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/sunil_soundarapandian/7992200227/in/photolist-dbf7FD-ZA8cit-dbf7gZ-6VZSRx-2Pxjd-b45mak-9Pasg3-89TCDH-6jx2UZ-fr4jpj-bDFiER-9fqYAv-5i72j8-fFzheG-fFhFEP-dsTpdk-b5hQEF-fFhDvi-5i72jk-fFzggQ-dA27mp-fFzhAW-fFhEv8-fFzgwh-fFzfVW-fFzgp9-fFhFn2-6HL4rH-586cda-ajfZ73-89TCxn-JnQPjY-zcVUtT-v8eRGr-6Bi1Xs-fFhE28-fFhDFD-osJwFn-fLcMVE-23stbB-fKV5dX-cmi4R3-fFhEXK-fFhEP2-fFzgPY-PDhRw-4VBmi-24v1pY-24v1C5-24qyUk">Sunil Soundarapandian/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le nombre de Deborah est un exemple de <em>nombre sans dimension</em> : puisqu’on divise un temps par un autre, il n’a pas d’unité. En rhéologie, et plus généralement en science, il existe de nombreux nombres sans dimension qui permettent de déterminer dans quel état ou dans quel régime se trouve un matériau ou un système.</p>
<h2>Mesurer l’écoulement d’une pâte à tarte</h2>
<p>Pour les liquides un nombre sans dimension permet par exemple de déterminer si l’écoulement va présenter des tourbillons et être turbulent ou au contraire s’il va suivre calmement le dessin de son contenant (on dit que l’écoulement est laminaire).</p>
<p>Si l’écoulement à une vitesse V et que le récipient à une taille h dans les directions perpendiculaires à la direction de l’écoulement, on peut définir le gradient de vitesse V/h. L’inverse de ce gradient de vitesse a la dimension d’un temps.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/189536/original/file-20171010-17703-9s8bet.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/189536/original/file-20171010-17703-9s8bet.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=296&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/189536/original/file-20171010-17703-9s8bet.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=296&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/189536/original/file-20171010-17703-9s8bet.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=296&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/189536/original/file-20171010-17703-9s8bet.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=372&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/189536/original/file-20171010-17703-9s8bet.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=372&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/189536/original/file-20171010-17703-9s8bet.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=372&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Schéma de calcul du gradient de vitesse.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Taux_de_cisaillement">Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La comparaison entre ce temps et le temps de relaxation définit un nombre sans dimension qu’on appelle le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Nombre_de_Reynolds">nombre de Reynolds</a> dans le cas des fluides dominés par l’inertie (comme l’eau), ou le <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Weissenberg_number">nombre de Weissenberg</a> dans le cas des fluides dominés par l’élasticité (comme les pâtes pour gâteaux avant cuisson). Si ce nombre est grand par rapport à 1 l’écoulement a de grandes chances d’être turbulent. Si ce nombre est petit par rapport à 1 l’écoulement est probablement laminaire.</p>
<p>C’est l’usage de ces nombres sans dimension que la question de la fluidité des chats m’a permis d’aborder d’une manière qui j’espère pourra faire rire puis réfléchir, telle est la devise des prix Ig Nobel.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/85199/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc Antoine Fardin a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche, de l'European Research Concil, et de la Commission Fulbright. </span></em></p>Les prix Ig Nobel récompensent des recherches faisant d’abord rire puis réfléchir. Quoi de mieux que de se demander si les chats sont liquides ?Marc-Antoine Fardin, Chercheur en rhéologie, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/765632017-06-29T20:35:48Z2017-06-29T20:35:48ZPourquoi les Pygmées sont-ils petits ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/166468/original/file-20170424-12468-arsedp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une construction des pygmées Baka.</span> <span class="attribution"><span class="source">Aso bolo/Wikimedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Nous vous proposons cet article en partenariat avec l’émission de vulgarisation scientifique quotidienne <a href="https://www.franceinter.fr/emissions/la-tete-au-carre">« La Tête au carré »</a>, présentée et produite par Mathieu Vidard sur France Inter. L’un des auteurs de ce texte, Alain Froment, évoquera ses recherches dans l’émission du 30 juin 2017 en compagnie de Sonia Zannad, éditrice culture pour The Conversation France.</em></p>
<hr>
<p>L’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Anthropologie_physique">anthropologie biologique</a> est la science qui se préoccupe de l’origine et de l’évolution de notre espèce, Homo sapiens. Celle-ci se caractérise par une grande diversité, et les variations de la taille s’affichent comme une des différences les plus spectaculaires. On rencontre ainsi en Afrique sèche des peuples de très haute stature, et dans la forêt équatoriale, des populations réunies sous le nom de Pygmées, dont la taille varie chez les hommes de 1m48 à 1m58 selon les groupes : soit la plus petite taille de toute l’humanité.</p>
<p>Nos <a href="http://www.documentation.ird.fr/hor/fdi:010010004">études</a> l’ont bien montré : ni la malnutrition, ni le poids des maladies infectieuses et parasitaires ne sont responsables de ces mensurations. Alors pourquoi les Pygmées sont-ils petits ? Probablement du fait de processus génétiques et endocrinologiques sous-jacents mal connus dont la compréhension permettrait de contribuer à expliquer comment, d’un point de vue biologique, l’humain s’adapte à son environnement.</p>
<p>Pour entreprendre de répondre et mener l’enquête auprès de ces populations, il faudrait être à même de donner à chacune des personnes étudiées un âge déterminé. C’est en général impossible, faute d’état-civil dans ces régions délaissées. Mais au village de Moangué-Le Bosquet, dans la région de Lomié, dans l’est du Cameroun, un dispensaire missionnaire enregistre depuis des années la date de naissance des enfants Baka. Aussi, depuis 2007, une équipe conjointe IRD-CNRS-Inserm a-t-elle entrepris un suivi longitudinal de croissance d’une cohorte, notamment à travers un projet de recherche désigné sous le sigle <a href="http://www.agence-nationale-recherche.fr/suivi-bilan/editions-2013-et-anterieures/recherches-exploratoires-et-emergentes/blanc-generalite-et-contacts/blanc-presentation-synthetique-du-projet/?tx_lwmsuivibilan_pi2%5BCODE%5D=ANR-11-BSV7-0011">GrowinAP</a> (Growth in African Pygmies).</p>
<p>Environ 550 personnes de moins de 25 ans sont donc suivies depuis une dizaine d’années. Sont notés, lors de rendez-vous réguliers, leur taille, poids, proportions corporelles, le calendrier d’éruption dentaire et autres paramètres comme l’âge des premières règles, l’âge à la première grossesse ou les intervalles entre les naissances.</p>
<h2>Deux premières années cruciales</h2>
<p>Qu’a-t-on ainsi constaté ? Tout d’abord, que les enfants Baka naissent avec un poids et une taille conformes aux standards internationaux. Ensuite, qu’entre la naissance et l’âge de 2 ans, le rythme de croissance se réduit considérablement, ce qui induit un décalage marqué par rapport aux courbes de référence. À partir de 3 ans, la croissance reprend à un rythme comparable à celui qui est observé dans d’autres populations. Mais l’écart acquis précocement est conservé, de sorte qu’à tous les stades, les valeurs de taille et de poids des Pygmées restent basses.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/175883/original/file-20170627-24786-qwtu04.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/175883/original/file-20170627-24786-qwtu04.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/175883/original/file-20170627-24786-qwtu04.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=609&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/175883/original/file-20170627-24786-qwtu04.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=609&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/175883/original/file-20170627-24786-qwtu04.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=609&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/175883/original/file-20170627-24786-qwtu04.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=765&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/175883/original/file-20170627-24786-qwtu04.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=765&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/175883/original/file-20170627-24786-qwtu04.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=765&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Tailles en centimètres des garçons et filles Baka par rapport à des tailles de références.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Alain Froment (Nature Communications)</span></span>
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<p>Une fois terminée la poussée de croissance de l’adolescence, la taille adulte est atteinte vers 18 ans chez les femmes (taille moyenne = 146,7 cm ± 4,7) et vers 20 ans chez les hommes (taille moyenne = 153,5 cm ± 6,2). La maturité sexuelle, quant à elle, n’est nullement précoce, n’en déplaise à certaines théories : les règles apparaissent vers 14 ans et demi (moins de 12 ans en Europe), et la première grossesse ne survient jamais avant 16 ans. Toutes ces données ont fait l’objet d’une <a href="https://www.nature.com/articles/ncomms8672">modélisation</a> visant à mettre au point une nouvelle courbe de croissance, qui pourrait être utile pour déterminer l’âge d’enfants sans état-civil, ou repérer des troubles de la croissance et du développement.</p>
<p>Pour conclure, on notera qu’une autre enquête longitudinale menée chez des enfants pygmées de moins de 5 ans habitant à l’est de la République du Congo (Efé et Sua de l’Ituri) a obtenu des résultats tout autres. Chez eux, contrairement aux Baka, le poids et la taille se sont révélés réduits dès la naissance. Il semble donc que deux processus de croissance différents aient été retenus par la sélection naturelle à l’est et à l’ouest de la forêt équatoriale d’Afrique centrale, pour des groupes de Pygmées africains séparés depuis environ <a href="http://journals.plos.org/plosgenetics/article?id=10.1371/journal.pgen.1000448">20 000 ans</a>. Mais ces deux processus aboutissent au même résultat : une toute petite taille à l’âge adulte. Et ce phénomène qui porte le nom de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Convergence_%C3%A9volutive">convergence évolutive</a> nous montre bien que la petite taille représente un avantage biologique pour l’adaptation à la vie en forêt.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76563/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Alain Froment a reçu des financements de l'IRD</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Fernando Ramirez Rozzi a reçu des financements de Wenner-Gren Foundation, bourse Gr7810; National Geographic bourse #8863-10; ANR Blanc SVSE7-2011 ‘GrowinAP’ program</span></em></p>Tous les Pygmées ne sont pas petits de la même manière. À l’est et à l’ouest de la forêt d’Afrique centrale, deux processus conduisent au même résultat, cohérent du point de vue de l’évolution.Alain Froment, Directeur de recherches IRD et Professeur d'anthropologie biologique Musée de l'homme, Institut de recherche pour le développement (IRD)Fernando Ramirez Rozzi, Chercheur, spécialiste de la croissance chez l’homme moderne, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/760562017-04-27T20:27:29Z2017-04-27T20:27:29ZNotre exposition aux ondes électromagnétiques : attention aux idées reçues<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/165257/original/image-20170413-25882-1mjwpsv.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une station de base ou antenne relais GSM sur un toit de Paris.</span> <span class="attribution"><span class="source">Pyb/Wikimedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Nous vous proposons cet article en partenariat avec l’émission de vulgarisation scientifique quotidienne <a href="https://www.franceinter.fr/emissions/la-tete-au-carre">« La Tête au carré »</a>, présentée et produite par Mathieu Vidard sur France Inter. L’auteur de ce texte, Joe Wiart, évoquera ses recherches dans l’émission du 28 avril 2017 en compagnie d’Aline Richard, éditrice science et technologie pour The Conversation France.</em></p>
<hr>
<p>Depuis plus de dix ans, la maîtrise de l’exposition aux ondes électromagnétiques et en particulier aux <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Radio-fr%C3%A9quence">radiofréquences</a> alimente de nombreux débats, souvent passionnés. L’analyse des rapports et publications scientifiques parus sur le sujet montre que les chercheurs étudient surtout le possible impact des téléphones portables sur notre santé. Dans le même temps, d’après ce qui est publié dans la presse, le public se préoccupe essentiellement des antennes relais. Reste que le téléphone mobile et plus généralement les systèmes de communication sans fil sont utilisés en masse, et qu’ils ont bouleversé notre manière de communiquer et de travailler, dans le monde entier.</p>
<p>Aujourd’hui le nombre d’utilisateurs de téléphones mobiles sur le globe dépasse les 5 milliards. Et en France, selon les chiffres d’une enquête de l’<a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/1379756">Insee</a> le taux d’équipement de la tranche d’âge 18-25 ans est de… 100 % ! Il faut dire que l’usage de ce moyen de communication n’est plus réservé, loin s’en faut, au simple appel vocal. Tant et si bien qu’en 2020, on estime que le trafic mondial des données mobiles représentera quatre fois le trafic Internet de 2005. En France, selon l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (<a href="http://www.arcep.fr/index.php?id=13287">ARCEP</a>), plus de 7 % de la population se connectait sur Internet uniquement via un smartphone en 2016. Et l’explosion de l’utilisation des objets connectés va sans nul doute renforcer cette tendance.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/165258/original/image-20170413-25901-vdj0wr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/165258/original/image-20170413-25901-vdj0wr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=569&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/165258/original/image-20170413-25901-vdj0wr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=569&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/165258/original/image-20170413-25901-vdj0wr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=569&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/165258/original/image-20170413-25901-vdj0wr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=716&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/165258/original/image-20170413-25901-vdj0wr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=716&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/165258/original/image-20170413-25901-vdj0wr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=716&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Smartphone Zombies.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ccmsharma2/Wikimedia</span></span>
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<p>Les différences de perception quant aux risques liés aux émissions des téléphones portables et des antennes relais peuvent en partie s’expliquer. En effet, les unes et les autres ne sont pas considérées comme étant liées. Qui plus est, si l’exposition aux ondes électromagnétiques est jugée « volontaire » pour les mobiles, elle est souvent dite « subie » pour les antennes relais. Voilà pourquoi en dépit de l’engouement massif pour les « mobiles » et objets connectés, le déploiement des antennes relais suscite toujours de vives polémiques, souvent focalisées autour de la question des impacts sanitaires.</p>
<p>Dans les faits, les normes nationales qui limitent l’exposition aux ondes électromagnétiques s’inspirent des recommandations de la Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants (<a href="http://www.icnirp.org/">ICNIRP</a>) et des connaissances scientifiques. Nombre de recherches ont été menées sur les effets potentiels des ondes électromagnétiques sur notre santé. Bien sûr, les études se poursuivent, car les technologies sans fil et leurs usages sont en constante évolution. Et ce, d’autant plus que les radiofréquences des téléphones portables ont été classées « cancérogènes possibles pour l’homme » (groupe 2B), suite à l’expertise organisée par le <a href="https://www.iarc.fr/indexfr.php">Centre international de recherche sur le cancer</a>.</p>
<p>Étant donné le nombre important et croissant de jeunes utilisateurs de smartphones et autres mobiles, cette vigilance particulière est essentielle. En France, elle est assurée dans le cadre du Programme national de recherche Environnement-Santé-Travail (PNREST) de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (<a href="https://www.anses.fr/fr">Anses</a>). Et pour répondre aux préoccupations du public vis-à-vis des antennes relais (plus de cinquante mille sur l’ensemble du territoire français), de nombreuses communes ont discuté des chartes régissant leur installation. À l’image de la ville de Paris, qui a signé une telle charte dès 2003, en voulant faire figure de modèle pour la France et pour les grandes villes d’Europe : il s’agissait alors officiellement de limiter l’exposition induite par les antennes relais, à travers un accord signé avec les trois grands opérateurs.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/165259/original/image-20170413-25888-z942rx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/165259/original/image-20170413-25888-z942rx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=802&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/165259/original/image-20170413-25888-z942rx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=802&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/165259/original/image-20170413-25888-z942rx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=802&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/165259/original/image-20170413-25888-z942rx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1008&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/165259/original/image-20170413-25888-z942rx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1008&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/165259/original/image-20170413-25888-z942rx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1008&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Colline de Miramont Hautes Pyrenees France.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Florent Pécassou/Wikimedia</span></span>
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<p>Mise à jour en 2012, cette charte a été une nouvelle fois discutée au conseil de Paris en mars dernier, dans l’esprit de la loi <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000030212642&categorieLien=id">Abeille</a>, qui, proposée à l’Assemblée nationale en 2013 et promulguée en février 2015, met en exergue la recherche d’une sobriété de l’exposition aux champs électromagnétiques. Or il importe de le souligner. Cette initiative, comme tant d’autres, ne s’attache qu’aux antennes relais, alors que l’exposition aux ondes électromagnétiques et aux radiofréquences a bien d’autres sources. En se focalisant sur elles, on ne règle qu’une partie du problème. Il faudrait, entre autres, tenir compte également de l’exposition induite par le téléphone mobile de l’utilisateur ou de l’un de ses voisins…</p>
<p>En pratique, la part liée aux antennes relais dans l’exposition globale aux ondes électromagnétiques n’est pas prépondérante, loin s’en faut. Comme l’ont démontré plusieurs études, l’exposition induite par un mobile est largement plus significative. Fort heureusement, le déploiement de la 4G, puis de la 5G, va non seulement améliorer les débits mais aussi contribuer à réduire fortement les puissances émises par les mobiles. Une architecture du réseau en <a href="http://www.anfr.fr/fileadmin/mediatheque/documents/Communiques_Presse/2017-01-12_Dossier_de_presse_exp%C3%A9_Annecy_Vdef.pdf">petites cellules</a>, avec des petites antennes qui viendraient compléter les plus grosses, permettrait également de limiter les puissances émises. Il est important d’étudier des solutions de faible exposition aux radiofréquences à différents niveaux, depuis les dispositifs radio à l’architecture de réseaux ou à la gestion et à la fourniture des services. Ce qu’ont entrepris dès 2012 les partenaires du projet européen <a href="http://www.lexnet.fr/project-presentation-french.html">LEXNET</a> avec l’ambition de réduire de moitié l’exposition du public aux champs électromagnétiques des radiofréquences.</p>
<p>Dans un avenir proche, les réseaux de cinquième génération utiliseront, de manière dynamique, de nombreuses bandes de fréquences et des architectures variées, ce qui devrait leur permettre de supporter la montée en débit et le foisonnement des objets connectés. Et de facto, s’imposera alors de considérer le couple réseaux-terminaux, au lieu de les traiter séparément. Ce nouveau paradigme est devenu un axe de travail incontournable tant pour les chercheurs que pour les industriels et les pouvoirs publics. Et de ce point de vue, les toutes dernières discussions quant à l’implantation des antennes relais et au renouvellement de la charte de Paris se révèlent emblématiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76056/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Joe Wiart (Telecom ParisTech ) a reçu des financements de ANSES, ANFr, ANR et Europe pour mener des études relatives à l'évaluation de l'exposition aux ondes RF</span></em></p>La maîtrise de l’exposition aux ondes électromagnétiques passe-t-elle par la limitation des antennes relais ? Pas seulement.Joe Wiart, Titulaire de la Chaire C2M de l'institut Mines Telecom, Télécom Paris – Institut Mines-TélécomLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/667522016-10-10T19:14:19Z2016-10-10T19:14:19ZLa punaise diabolique, cette créature urbaine<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/141116/original/image-20161010-3889-1fal4bv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La punaise adulte Halyomorpha.</span> <span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p><em>Nous vous proposons cet article en partenariat avec l’émission de vulgarisation scientifique quotidienne <a href="https://www.franceinter.fr/emissions/la-tete-au-carre">« La Tête au carré »</a>, présentée et produite par Mathieu Vidard sur France Inter. L’auteur de ce texte évoquera ses recherches dans l’émission du 2 décembre 2016 en compagnie d’Aline Richard, éditrice science et technologie pour The Conversation France.</em> </p>
<p><em>La punaise diabolique est aujourd’hui bien installée à Paris et en Europe.
Petite chronique d’une invasion silencieuse, au cœur de Paris et dans plusieurs régions en France.</em></p>
<hr>
<p>En 2012, durant la rédaction d’un <a href="http://www.delachauxetniestle.com/ouvrage/hemipteres-de-france/9782603020722">ouvrage sur les Hémiptères de France</a> (des insectes qui sont pourvus d’un rostre piqueur : punaises et autres pucerons), je découvrais une <a href="https://www.researchgate.net/publication/272479443_Halyomorpha_halys_Stal_1855_en_Ile_de_France_Hemiptera_Pentatomidae_Pentatominae_surveillons_la_punaise_diabolique">nouvelle espèce invasive</a> en plein Paris, au cœur du Jardin des Plantes.</p>
<p><em>Halyomorpha halys</em>, est une grosse punaise <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pentatomidae">Hémiptère Pentatomide</a> grise (jusqu’à 1,7 cm) originaire d’Asie (Chine, Corée, Japon) qui est partie envahir le monde depuis une vingtaine d’années, via les transports et activités humaines.</p>
<p>En septembre 2016, je trouvais à nouveau cette espèce dans un square parisien du V<sup>e</sup> arrondissement : à l’état de larve, ce qui signifie qu’il y a reproduction. Il s’agit, à Paris, d’une invasion peu spectaculaire malgré la grosse taille de l’insecte et son manque de discrétion à l’automne, où elle cherche à rentrer dans les maisons. C’est ce comportement qui lui a donné son nom de « diabolique », également à cause de ses redoutables capacités de ravageur de cultures diverses. Il ne faut pas la confondre avec sa cousine, la punaise des lits <em>Cimex lectularius</em> elle aussi bien « diabolique » par d’autres aspects (hématophage, allergène et tenace…) ; mais c’est une autre histoire.</p>
<h2>À l’assaut des États-Unis et de l’Europe</h2>
<p>Après la découverte surprenante de cet insecte je découvrais qu’elle avait également était détectée à Strasbourg où elle semble également se plaire.
C’est d’abord en Suisse que cette espèce a été trouvée en Europe vers 2010. Depuis 2012 elle a été repérée dans plusieurs pays européens, notamment au sud (Italie, Grèce) puis en Hongrie. Elle commence à apparaître dans le sud de la France où je l’ai repéré pendant l’été 2015 (Var, Monaco, Menton). Cela, notamment, grâce à des initiatives de sciences participatives où le public s’investit. En automne 2015, des dizaines d’individus ont été observés au Jardin des Plantes, larves et adultes, puis dans les bâtiments.</p>
<p>Mais c’est aux États-Unis (depuis 2001, aujourd’hui dans 41 États) et maintenant au Canada que cette espèce a défrayé la chronique.
Ce sont les Américains de la côté Est qui ont qualifié de diabolique cette espèce (« wicked bug ») : elle y détruit des récoltes (pommes, poires, et cultures maraîchères comme tomates, poivrons, etc.). Elle horrifie les habitants quand elle cherche, à l’automne, à se réfugier dans les maisons. Parfois, il y a des milliers d’individus dans un bâtiment. Elle est heureusement inoffensive mais des images et vidéos inquiétantes circulent sur Internet, et une économie se développe pour <a href="http://www7.inra.fr/opie-insectes/pdf/i161fraval1.pdf">lutter contre elle</a>, dans les habitations ou dans les cultures.</p>
<h2>« City lover »</h2>
<p><em>Halyomorpha halys</em> est une grosse punaise très polyphage (plus de 120 plantes hôtes, dont un très grand nombre d’espèces cultivées et ornementales) : c’est donc un ravageur sérieux de nombreuses cultures, notamment fruitières. Elle s’attaque à tous les organes végétatifs et provoque des dégâts importants sur les fruits. L’une de ses caractéristiques est d’apprécier les zones urbaines, les jardins, et en hiver, de se réfugier dans les habitations, quelquefois en masse. Aux États-Unis c’est une véritable nuisance : en plus des dégâts aux cultures, des cas d’allergies ont été signalés. Des programmes de lutte biologique à l’aide de parasitoïdes sont à l’étude ou encore l’utilisation de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ph%C3%A9romone">phéromones</a> pour les attirer.</p>
<p>Nous n’en sommes pas encore là, mais la question se pose sur les moyens d’action contre cet insecte. D’ores et déjà, l’ANSES a émis quelques <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/SVEG2013sa0093Ra.pdf">préconisations</a>, relatives notamment à l’information. Quant à l’INRA, elle a <a href="http://ephytia.inra.fr/fr/P/128/Agiir">lancé</a> un programme d’inventaire participatif, de <a href="https://inpn.mnhn.fr/actualites/lire/5181/">même que</a> l’Inventaire national du patrimoine naturel avec le Museum national d’histoire naturelle (INPN/MNHN).</p>
<h2>Pendant que l’on tergiverse, l’invasion continue</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/141117/original/image-20161010-3864-1oyacxg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/141117/original/image-20161010-3864-1oyacxg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=498&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/141117/original/image-20161010-3864-1oyacxg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=498&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/141117/original/image-20161010-3864-1oyacxg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=498&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/141117/original/image-20161010-3864-1oyacxg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=626&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/141117/original/image-20161010-3864-1oyacxg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=626&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/141117/original/image-20161010-3864-1oyacxg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=626&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une larve halyomorpha.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Mais bien peu de publicité a été faite à cette invasion silencieuse. Il n’est probablement pas possible d’agir véritablement, mais au moins la vigilance et l’information doivent être de mise, comme le souligne le rapport de l’ANSES. En Italie, pas moins de 2 colloques réunissant scientifiques et agronomes ont été consacrés à cette espèce en 2015, avec une enquête participative en 2013, dès la détection de l’espèce.</p>
<p>Pourquoi est-ce si important ? Une espèce invasive est une espèce qui étend relativement brusquement son aire de répartition et qui s’ajoute à la faune locale, voire la remplace. À défaut d’un plan d’action (éradication ou contrôle) souvent difficile à mettre en œuvre, informer sur la progression est la meilleure solution. Elle implique une vigilance et une anticipation éventuelle des nuisances potentielles. Surtout, elle permet d’éviter de mauvaises décisions : mauvaises identifications, traitements pesticides intempestifs inutiles, etc.</p>
<p>Sans information, pas de détection, ou alors fortuite (mais qui chasse et étudie les insectes dans les villes ?). Il est alors difficile de connaître la répartition véritable de ces « aliens ». Il ne faut pas oublier non plus que les déplacements d’espèces sont aussi naturels, par exemple à la faveur de changements climatiques : la notion d’espèce invasive n’est pas toujours simple.</p>
<h2>Importance de la taxonomie</h2>
<p>L’histoire de la punaise diabolique permet de mettre l’accent sur l’histoire naturelle et la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Taxinomie">taxonomie</a>. La connaissance des organismes qui nous entourent ne doit pas être abandonnée. Que ce soit dans le milieu naturel, cultivé ou dans le cadre de la nouvelle écologie urbaine, elle est nécessaire pour rester vigilant, pour reconnaître des espèces d’intérêt médical ou agronomique (on parle de biosécurité). N’abandonnons pas la taxonomie et la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A9matique">systématique</a> au profit des approches strictement moléculaires où le biologiste passe plus de temps devant son ordinateur que sur le terrain…</p>
<hr>
<p><em><a href="https://inpn.mnhn.fr/actualites/lire/5181/">Appel à contributions</a> : nous cherchons des informations sur la répartition de la punaise diabolique, notamment dans Paris, ailleurs qu’au Jardin des Plantes : l’automne est la saison où cette espèce adore les murs ensoleillés, juste avant de chercher des abris pour l’hiver et entrer dans les maisons.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/66752/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Garrouste a reçu des financements de : MNHN, CNRS, LABEx BCDIv</span></em></p>La punaise diabolique, de son nom scientifique Halyomorpha halys, est aujourd’hui présente dans des jardins parisiens. Appel à la vigilance contre cette espèce invasive.Romain Garrouste, Chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (UMR 7205 MNHN-CNRS-UPMC-EPHE), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/611212016-06-17T04:35:47Z2016-06-17T04:35:47ZComment apprendre des erreurs des autres<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/126769/original/image-20160615-14022-9rwhrh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">« Lorsqu’il s’agit d’apprendre, voir les autres se tromper est plus bénéfique que de se tromper soi-même. »</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://i.ytimg.com/vi/rdvZgrdsedU/maxresdefault.jpg">YouTube</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>The Conversation France travaille en partenariat avec l'émission de vulgarisation scientifique quotidienne <a href="https://www.franceinter.fr/emissions/la-tete-au-carre">« La Tête au carré »</a>, présentée et produite par Mathieu Vidard sur France Inter. L'une des auteures de cet article, Martine Meunier, a parlé de ses recherches dans l'émission du 17 juin 2016 avec Aline Richard, journaliste science et technologie pour The Conversation France. <a href="https://www.franceinter.fr/emissions/la-tete-au-carre/la-tete-au-carre-17-juin-2016">Réécoutez leur intervention, à 15'35"</a>.</em></p>
<p>Les humains, comme la plupart des animaux, vivent en présence quasi constante de leurs congénères. L’un des avantages de cette vie en société, c’est la possibilité d’apprendre en observant les erreurs des autres. Cette méthode alternative d’apprentissage est d’autant plus importante qu’elle vient compenser un piètre talent à corriger nos propres erreurs.</p>
<p>Notre vie est un défilé incessant de choix : que prendre au petit-déjeuner, quel chemin adopter pour aller travailler, quel plat choisir au restaurant, quelle lessive acheter, quelle voiture choisir, pour qui voter, qui épouser, etc. Intuitivement, nous sommes convaincus que ces choix sont exclusivement déterminés par nos préférences, et que celles-ci reflètent des marqueurs stables de notre personnalité. On prend du café au petit-déjeuner parce qu’on préfère le café au thé depuis toujours. Ce qui est beaucoup moins intuitif, c’est que l’inverse arrive aussi. Nos choix modifient nos préférences.</p>
<h2>On se félicite d’avoir fait le bon choix</h2>
<p>Le psychologue <a href="http://www.foundationpsp.org/brehm.php">Jack Brehm</a> l’a découvert dès 1956. Cela arrive quand nous sommes contraints de choisir entre deux plats, deux voitures, ou deux partenaires, a priori équivalents. Dans ce cas, le choix déclenche une réévaluation inconsciente de nos valeurs. Le plat, la voiture ou le partenaire sélectionné prend de la valeur à nos yeux, alors que le plat, la voiture ou le partenaire rejeté en perd. On se met à aimer ce que l’on a choisi. Et ce changement est visible jusque dans notre cerveau dont la région du plaisir modifie sa réponse aux deux alternatives, immédiatement après le choix, comme l’a montré la <a href="http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3196841/">neuroscientifique Tali Sharot</a> et ses collègues en 2009.</p>
<p>Changer ses préférences pour les accorder à nos choix est un mécanisme très pratique qui nous permet de rester confortablement en accord avec nous-mêmes. Comme le renard de la fable de La Fontaine qui, immédiatement après avoir renoncé à atteindre de savoureux raisins, change brutalement d’avis et les juge trop verts :</p>
<blockquote>
<p>Certain Renard Gascon, d’autres disent Normand,<br>
Mourant presque de faim, vit au haut d’une treille<br>
Des Raisins mûrs apparemment,<br>
Et couverts d’une peau vermeille.<br>
Le galand en eût fait volontiers un repas ;<br>
Mais comme il n’y pouvait atteindre :<br>
« Ils sont trop verts, dit-il, et bons pour des goujats. »<br>
Fit-il pas mieux que de se plaindre ?</p>
</blockquote>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/126928/original/image-20160616-15117-1p0wyn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/126928/original/image-20160616-15117-1p0wyn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1025&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/126928/original/image-20160616-15117-1p0wyn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1025&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/126928/original/image-20160616-15117-1p0wyn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1025&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/126928/original/image-20160616-15117-1p0wyn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1289&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/126928/original/image-20160616-15117-1p0wyn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1289&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/126928/original/image-20160616-15117-1p0wyn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1289&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le renard et les raisins.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/The_Fox_and_the_Grapes#/media/File:The_Fox_and_the_Grapes_-_Project_Gutenberg_etext_19994.jpg">Milo Winter, 1919/Wikipédia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le revers de la médaille, cependant, c’est que ce mécanisme nous incite à persister dans nos erreurs. Si le renard avait, à l’inverse, réussi à atteindre des raisins trop verts, il se serait sûrement mis à les trouver fort savoureux. C’est ainsi que nous gardons une voiture malgré une succession de réparations ruineuses au lieu de la changer, que nous continuons un business qui ne tient pas ses promesses de rentabilité, ou que nous restons dans un couple qui ne marche plus.</p>
<h2>L’erreur du Concorde</h2>
<p>La faute en partie à cette préférence créée par notre choix initial. L’éthologiste de l’Université d’Oxford, <a href="https://fr.Wikim%C3%A9dia.org/wiki/Richard_Dawkins">Richard Dawkins</a>, a baptisé ce biais décisionnel « l’erreur de jugement du Concorde » en référence à l’entêtement avec lequel les gouvernements britannique et français ont continué à investir dans le supersonique malgré son échec commercial prévisible.</p>
<p>C’est là que le fait de vivre avec d’autres comme nous, et de pouvoir observer leurs erreurs, prend toute son importance. La France et le Royaume-Uni restent les seuls pays à s’être engagés dans un programme d’avion supersonique commercial. Pourvu que le choix soit fait par un autre, il semble que les nations, comme les individus, soient parfaitement capables de tirer toutes les conséquences d’une erreur. On ne voit pas la poutre dans notre œil, mais on voit la paille dans l’œil du voisin.</p>
<p>Quand il s’agit des autres, nous ne sommes plus aveuglés par la préférence créée par le choix initial. Nous avons démontré en 2012 que, lorsqu’il s’agit d’apprendre, voir les autres se tromper est plus bénéfique que de se tromper soi-même. Et qu’il s’agit là d’un mécanisme ancien, hérité de l’évolution, que nous partageons avec les animaux, en particulier avec nos lointains cousins, les singes macaques.</p>
<p>Dans notre étude, hommes et singes avaient deux essais pour découvrir lequel, parmi deux objets quelconques et équivalents, renfermait une récompense (une pièce de monnaie pour les uns, un bonbon pour les autres). Dans cette tâche simple qui utilise la mémoire automatique, hommes et singes sont assez intelligents pour déduire que si l’objet A ne dissimule pas de récompense, alors celle-ci est cachée sous l’objet B.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/126767/original/image-20160615-14051-2qloci.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/126767/original/image-20160615-14051-2qloci.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/126767/original/image-20160615-14051-2qloci.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/126767/original/image-20160615-14051-2qloci.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/126767/original/image-20160615-14051-2qloci.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=474&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/126767/original/image-20160615-14051-2qloci.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=474&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/126767/original/image-20160615-14051-2qloci.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=474&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Notre expérience sur les erreurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Elisabetta Monfardini et Martine Meunier</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au premier essai, soit les participants faisaient eux-mêmes une erreur, soit ils observaient l’erreur d’un compagnon familier. Après avoir observé un compagnon se tromper d’objet, les singes atteignent 67 % de réponses correctes, les hommes 78 %, bien mieux que le hasard dans les deux cas. La machine s’est grippée lorsqu’il s’est agi d’apprendre de sa propre erreur. Lorsque les sujets sont face à leurs propres erreurs et qu’ils tentent un deuxième essai, les performances chutent à 33 % de réponses correctes pour les singes, et les hommes font à peine mieux avec 51 %.</p>
<p>En d’autres termes, les singes répètent leur propre erreur deux fois sur trois, alors que les hommes la répètent une fois sur deux « seulement ». Le développement exceptionnel du cortex préfrontal chez l’homme, la région du cerveau qui prend les décisions, diminue donc l’impact de ce biais décisionnel ancien laissé par l’évolution. Mais il ne parvient pas à le supprimer. Ces résultats révèlent tout le poids que peut prendre la préférence créée par le choix, même chez les êtres intelligents et en général plutôt rationnels que sont les primates, qu’ils soient humains ou non humains.</p>
<p>Ces résultats nous encouragent à prendre conscience du pouvoir de nos choix à créer des préférences qui, si elles nous évitent d’être en désaccord avec nous-mêmes, ne sont pas toujours bonnes conseillères. Ce biais ancien hérité de l’évolution souligne que nous devrions considérer nos préférences avec circonspection quand elles ne concernent pas des choses très importantes dans notre vie et, en cas de doute, pratiquer une observation attentive des erreurs des autres pour voir nos choix sous un autre jour.</p>
<p>Appliquer cette règle dans le domaine de l’éducation est certainement prometteur : mis en condition d’observer et d’apprendre des erreurs du groupe, élèves et étudiants pourraient ainsi progresser. Une initiative récente dans cet esprit : la <a href="http://www.twictee.org/twictee/">« twictée »</a>, où les élèves échangent entre eux les corrections orthographiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/61121/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Martine Meunier a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche et de la fondation Neurodis.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Elisabetta Monfardini a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche et de la fondation Neurodis.</span></em></p>Nos choix sont-ils le reflet de nos préférences ? À l’inverse, nous accordons nos préférences à nos choix initiaux. Un biais trompeur, que l’on peut surmonter en regardant ce que font les autres.Martine Meunier, Directeure de Recherche au CNRS, membre de l'Equipe ImpAct, Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon, InsermElisabetta Monfardini, Chargée de Recherche à l'Institut de Médecine Environnementale et chercheure associée Equipe ImpAct du Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/596462016-05-19T20:31:00Z2016-05-19T20:31:00ZL’adolescent et les réseaux sociaux : quels impacts psychiques ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/123082/original/image-20160518-8717-1j59mv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Facebook relie les jeunes, mais a quel prix ? </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/ordinateur-portable-l-homme-facebook-958239/">kpgolfpro/Pixabay</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/123575/original/image-20160523-11010-17x91o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>The Conversation France travaille en partenariat avec l'émission de vulgarisation scientifique quotidienne « La Tête au carré », présentée et produite par Mathieu Vidard sur France Inter. L'auteure de cet article, Angélique Gozlan, a parlé de ses recherches dans l'émission du 20 mai 2016 avec Aline Richard, journaliste science et technologie pour The Conversation France. <a href="http://www.franceinter.fr/player/reecouter?play=1289027">Réécoutez leur intervention, à 15'30"</a>.</em></p>
<p>Il y a quelques jours, une jeune femme de 19 ans se suicidait en direct sur Périscope. De quoi s’interroger sur une question essentielle qui dépasse cet évènement : l’impact des réseaux sociaux sur l’adolescent. Le jeune homme ou la jeune femme d’aujourd’hui semble ne plus pouvoir se penser sans son écran. Il ou elle devient un(e) adolescent(e) connecté(e) en permanence à des milliers de personnes. En somme, un individu machinique. Dès lors, quels impacts psychiques pouvons-nous repérer de ces usages des réseaux sociaux sur l’adolescent ?</p>
<p>Le fait divers de Périscope tend à diaboliser les réseaux sociaux en pointant les effets néfastes de ceux-ci, tant du point de vue de l’acteur que du spectateur. Pourtant, il ne faut pas oublier qu’ils ne sont qu’un outil, et que cet outil sera utilisé pour répondre au besoin adolescent dans sa singularité. À partir de ce constat, deux enjeux majeurs émergent : l’un soutient la subjectivation et le processus adolescent ; l’autre se constitue comme entrave à la résolution de la crise identitaire adolescente. </p>
<p>Pour se construire, tout adolescent a besoin de se mettre en image au-devant de soi, de paraître et de se montrer. Dans ce processus, l’autre n’est jamais loin. Il est nécessaire pour le jeune individu d’être regardé et reconnu pour se reconnaître, même si, pour certains, ce regard de l’autre peut être très angoissant. Ici s’ancre, en partie, la construction identitaire de tout adolescent. Les <a href="http://www.cairn.info/revue-adolescence-2013-2-page-471.htm">réseaux sociaux</a> apparaissent comme une surface contenant des contenus psychiques et comme lieu vers lequel convergent les regards. L’adolescent trouvera donc dans ces espaces un lieu idéal pour étayer sa quête identitaire, et créer l’appel au regard de l’autre par le fait de se montrer et de se représenter.</p>
<h2>Expressionnisme adolescent</h2>
<p>Très souvent, la surface interactive de ces réseaux sera le support à « l’expressionnisme adolescent », pour reprendre <a href="https://www.cairn.info/publications-de-Gutton-Philippe--3737.htm">Philippe Gutton</a>. Il pourra y exprimer en images et en mots ses états d’âme, ses désespoirs amoureux, ses « délires » avec les copains, il pourra être connecté avec ses amis du quotidien, s’essayer à la séduction à travers l’écran, moins terrifiante qu’en face-à-face.</p>
<p>Quelle différence avec l’expression adolescente classique ? Elle naît de l’outil même des réseaux sociaux. L’adolescent ne se montre plus devant une dizaine de copains mais devant des milliers de personnes. Les réseaux sociaux ont inauguré une ère d’une intimité partagée à la vue de tous, une intimité interactive.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/123094/original/image-20160518-10540-16c1hk6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/123094/original/image-20160518-10540-16c1hk6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/123094/original/image-20160518-10540-16c1hk6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/123094/original/image-20160518-10540-16c1hk6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/123094/original/image-20160518-10540-16c1hk6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=520&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/123094/original/image-20160518-10540-16c1hk6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=520&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/123094/original/image-20160518-10540-16c1hk6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=520&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La vie en réseaux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">http://Shutterstock/</span></span>
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<p>Le fait de poster un élément de sa vie sur les réseaux dépossède le sujet de cette part d’intimité, en la rendant publique, interactive, accessible à un grand nombre. Il faut que l’individu s’inquiète de ce contenu pour le préserver, notamment en connaissant les paramétrages de son compte. J’ai nommé par le terme <a href="https://www.cairn.info/revue-recherches-en-psychanalyse-2013-2-page-185.htm"><em>désintimité</em></a>, ce moment de dépossession de l’intime à l’écran. Dans ce moment, la fonction de protection de l’intimité n’opère plus, le sujet devient en proie à de possibles intrusions et emprise de l’autre. À partir de ce moment, deux voies sont possibles.</p>
<p>Dans l’une, les assises narcissiques et objectales de l’adolescent sont suffisamment solides pour qu’il utilise les réseaux sociaux comme objet culturel étayant les processus adolescents. Les contenus publiés ont alors le statut d’images-miroirs, d’images-témoins, images qui rendent présent un moment de vie, celui de la transformation adolescente et la construction d’une identité dans le lien social. L’espace virtuel est, dans ce cas, un lieu de transposition de la crise créative, soutenant le remaniement pulsionnel et narcissique de l’adolescent. L’adolescent joue différentes facettes de son identité pour saisir son image, image étrange, à se réapproprier du fait des changements pubertaires, et pour se créer une <a href="http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=TOP_126_0051">face sociale</a>au regard de l’autre.</p>
<p>Le retour narcissique que l’adolescent trouve dans le regard que les autres portent sur ses publications soutient le processus de séparation qui a une place inédite à l’adolescence. En effet, il est essentiel de se séparer psychiquement de ses parents et de s’individuer. Les réseaux sociaux offrent alors des espaces d’expression de pensées intimes en dehors du regard parental, à travers lesquels œuvre le travail de désinvestissement parental et l’affirmation d’un « je suis ». En ce sens, les réseaux sociaux et leur interactivité peuvent se comprendre comme des objets culturels soutenant la subjectivation, le devenir sujet au sein d’un groupe de pairs.</p>
<p>L’autre voie induite par la désintimité est celle de la déperdition de l’adolescent. L’adolescence est un moment de grande fragilité du Moi. Si celui-ci n’a pas acquis pendant l’enfance des assises suffisamment sécures et contenantes, le remaniement pubertaire le fragilisera d’autant plus. L’adolescent pourra alors se trouver dans une quête avide d’une identité, d’une reconnaissance, mais aussi de limites pour éprouver les limites de soi, de son corps changeant et de son être intime.</p>
<p>Les réseaux sociaux seront utilisés par certains comme un moyen illusoire de trouver un regard sur soi susceptible de conforter leur sentiment de continuité d’existence. Malheureusement, même si l’écran peut parfois fonctionner comme un miroir reflétant sa propre image, il s’agit toujours d’un miroir sans tain au-delà duquel se trouvent d’autres individus connectés qui peuvent à tout moment interagir avec les contenus publiés. Ici se situe le risque des réseaux sociaux pour des adolescents fragiles ou des adolescents mal informés de ces risques : ils peuvent se retrouver face à une altérité virale, c’est-à-dire une contamination par l’autre par effet de viralité propre aux espaces virtuels.</p>
<h2>Comme un virus informatique</h2>
<p>L’autre, tout comme un virus informatique, s’approprie l’espace intime du sujet mis à vue sur le réseau, jusqu’à provoquer son aliénation. L’altérité virale crée une effraction associée à un sentiment de dépossession du sujet et ouvre sur une dimension de la violence. On peut citer des exemples : cas de capture d’images sur Snapchat rediffusée à grande échelle sur Facebook ; déferlements de haine sur le même Facebook ; harcèlement virtuel. Les limites entre soi et l’autre sont abolies et causent la perte du sujet en attaquant l’essence même de celui-ci : son intimité. L’altérité virale provoque alors l’échec de la tentative de figuration du Moi adolescent et de son image du corps, et se constitue comme entrave au processus adolescent.</p>
<p>Ainsi, les risques du virtuel prennent leur source dans une triple causalité : la singularité psychique du sujet associé à la qualité de l’internalisation des figures et des liens primaires, la viralité, et la pauvreté des informations sur l’usage des réseaux sociaux. Il est possible de réagir en faisant appel à des savoirs pluridisciplinaires : l’enjeu est de prévenir les risques encourus sur la toile. Il s’agit de créer l’écart nécessaire dans les discours entre monde réel et virtuel afin que le sujet puisse se créer son propre regard sur ces espaces virtuels au lieu de se laisser bercer par leur illusion, anéantissant toute pensée subjective et critique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/59646/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Angélique Gozlan est l’auteur de “L’adolescent face à Facebook. Enjeux de la virtualescence”, qui paraîtra prochainement aux éditions InPress.</span></em></p>La construction de son identité qui caractérise la période de l’adolescence passe aujourd’hui, immanquablement, par les réseaux sociaux. Les enjeux psychiques ne sont pas minces.Angélique Gozlan, Psychologue clinicienne et chercheur associé à l’Université Lumière Lyon 2 et à l’Université Paris 7-Diderot, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.