tag:theconversation.com,2011:/es/topics/paix-et-securite-43344/articlespaix et sécurité – The Conversation2024-03-19T10:14:18Ztag:theconversation.com,2011:article/2247772024-03-19T10:14:18Z2024-03-19T10:14:18ZMali : la dénonciation de “l’accord d’Alger”, un tournant dans la résolution du conflit ?<p>A la surprise générale, dans un <a href="https://www.jeuneafrique.com/1530317/politique/le-mali-enterre-laccord-de-paix-dalger/">communiqué du 25 janvier 2024</a>, le gouvernement du Mali fait constater “l'inapplicabilité absolue de l'Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus <a href="https://peacemaker.un.org/sites/peacemaker.un.org/files/Accord%20pour%20la%20Paix%20et%20la%20R%C3%A9conciliation%20au%20Mali%20-%20Issu%20du%20Processus%20d%27Alger_0.pdf">d’Alger, signé en 2015</a>” et annonce sa fin “avec effet immédiat”. En outre, il souligne des “actes inamicaux” et d’ingérence de la part du médiateur algérien dans des affaires internes du Mali. </p>
<p>Cette décision intervient dans un contexte où le Mali réaffirme sa souveraineté et ses choix stratégiques. </p>
<p>Je suis chercheur en <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/ei/2022-v53-n1-ei07137/1090710ar.pdf">relations internationales</a>. Dans cet article, j'analyse les origines du conflit, les précédents accords de paix et les raisons de l'échec de l'accord de 2015. Je donne aussi des pistes de résolution future du conflit.</p>
<h2>La saga des accords non-appliqués</h2>
<p>Le conflit malien est, en partie, un héritage de la colonisation française. En effet, en 1957, dans la mouvance de l’indépendance des anciennes colonies françaises en Afrique - à travers une pétition- des leaders Touareg ont réclamé le rattachement de l’Organisation commune des régions sahariennes (OCRS) à l’Algérie voire son indépendance. Cette pétition portée par le Cadi de Tombouctou Mohamed Mahmoud Ould Cheikh avait pour objectif d’éviter le rattachement de <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/322">l’OCRS au Soudan français qui deviendra le Mali en 1960 </a>. La France du général Charles de Gaulle n’accèdera pas à cette requête, car elle était consciente de la volonté des leaders africains de l’époque de construire l’unité africaine et opposée à la balkanisation des frontières africaines. </p>
<p>Deux ans après l’indépendance du Mali (1962), des Touaregs ont enclenché le premier conflit sécessionniste. Cette rébellion a été aisément contenue par l’Etat malien sur le plan militaire. Le gouvernement de <a href="https://modibo-keita.site/qui-etait-modibo-keita-le-premier-president-du-mali/">Modibo Keïta</a>, en réaction à cette crise, prendra des politiques de cohésion nationale. Il s’agit, entre autres, de l’instauration du service civique pour assurer la formation politique et civique des populations rurales, la création des mouvements des pionniers pour développer leur esprit nationaliste, et la valorisation de la culture malienne en guise de ciment de la cohésion nationale. Plusieurs entreprises nationales sont créées pour <a href="https://www.amazon.fr/Modibo-Keita-Portrait-Inedit-President/dp/9995260425">promouvoir le développement économique du pays et réduire sa dépendance des puissances étrangères</a>.</p>
<p>Moins de 30 ans plus tard, <a href="https://www.rfi.fr/fr/hebdo/20160415-afrique-touareg-rebellions-niger-mali-algerie-burkina-faso-histoire">en 1991</a>, un second conflit avec les touaregs éclate. Ce conflit prend fin suite à une médiation algérienne. L’Etat malien et les groupes rebelles (Mouvements et Fronts unifiés de l’Azawad ) signent à cet effet <a href="https://www.cairn.info/les-touaregs-kel-adagh--9782811106355-page-445.htm">l’accord de Tamanrasset</a>, le 6 janvier 1991. Dans la foulée, en 1992, les parties signent <a href="https://peacemaker.un.org/sites/peacemaker.un.org/files/ML_920411_PacteNationalGouvMaliAzawad.pdf">le Pacte national pour le développement des régions du nord du pays</a>. Ces accords promettaient une décentralisation effective et une démilitarisation du nord. Dans l'opinion populaire, ces accords ouvraient la voie à une domination politique et économique des Touaregs qui constituent pourtant une minorité ethniques - <a href="https://www.cairn.info/revue-civitas-europa-2013-2-page-19.htm">5 à 6 % - dans les régions du nord du pays</a>. </p>
<p>Cette possible nouvelle domination annoncée de quelques tribus touaregs se fondait sur la prise des armes contre l’Etat. Elle suscita une réaction de résistance dans d’autres communautés (songhaï, peulh, etc.) En effet, la création des mouvement de résistance telle que le mouvement “Ganda Koi”, littéralement mouvement des “maîtres de la terre” et Ganda Izo (fils du terriroire) illustre bien cette volonté des communautés sédentaires (Songhaï,Bozo, Peulh, etc.) de résister à la domination touareg. </p>
<p>L’Etat et les signataires n’ont pas réussi à mettre en oeuvre ces accords de manière satisfaisante. Par manque de courage politique, les deux parties ont tourné dos à ces accords laissant un vide.</p>
<p><a href="https://www.thenewhumanitarian.org/fr/report/95263/mali-chronologie-du-conflit-dans-le-nord-du-pays">En 2006</a>, les rebelles reprennent les hostilités arguant la non-application des accords de Tamanrasset et le Pacte national signé en 1992 par le gouvernement malien et les Mouvements et Fronts Unifiés de l’Azawad. Un accord issu d’une médiation algérienne quelques mois plus tard mettra fin aux affrontements armés. Mais cet accord connaîtra lui aussi d’énormes difficultés d’application comme les précédents et justifiera, aux yeux des groupes touaregs, une nouvelle reprise du conflit en 2012.</p>
<h2>Le labyrinthe sur le chemin de la paix</h2>
<p>Sous la pression de la communauté internationale, mobilisée autour du gouvernement malien pour la restauration de la paix au Mali, les belligérants se sont finalement engagés dans une médiation conduite par l’Algérie de 2014 à 2015. </p>
<p>Suite à une sollicitation du président <a href="https://www.bbc.com/afrique/60016099">Ibrahim Boubacar KeÎta</a> (IBK), l’Algérie a porté la médiation entre le gouvernement et la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA). La CMA est composée de plusieurs regroupements : Mouvement de libération de l’Azawad (MLNA), Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), Mouvement arabe de l’Azawad (MAA). D’autres mouvements proches du gouvernement malien ont créé <a href="https://ecfr.eu/special/sahel_mapping/maa_pf">la plateforme des mouvements du 14 juin 2014 d'Alger</a>. </p>
<p>La médiation internationale porte alors sur trois sujets : la décentralisation, le développement et la sécurité. Elle se déroule en cinq sessions sur une période de neuf mois.</p>
<p>L’équipe de médiation était constituée d’organisations internationales engagées dans le recouvrement de la paix au Mali - CEDEAO, Union africaine, ONU, Union européenne, Organisation de la coopération islamique - et des États voisins du Mali dont le Burkina Faso, la Mauritanie, le Niger, le Nigeria et le Tchad. </p>
<h2>L’accord de la discorde</h2>
<p>Plusieurs facteurs expliquent la rupture de l’accord de 2015 à l’instar des accords précédents négociés par l’Algérie. </p>
<p>D’abord, l’accord ne touche pas aux racines du conflit, notamment la question épineuse de l’indépendance de l'Azawad. L'Azawad désigne une zone du nord du Mali, principalement habitée par les touaregs, qui aspirent depuis longtemps à l'autonomie ou à l'indépendance vis-à-vis du gouvernement central du Mali. En réalité, les groupes armés réclament l’indépendance de l’Azawad et à défaut une autonomie des régions du nord du Mali. Or, pour le gouvernement malien la forme républicaine, unitaire et laïque de l’Etat n’est pas négociable. </p>
<p>De toute évidence, le problème de fond n’étant pas traité, les acteurs se sont inscrits dans <a href="https://www.cairn.info/revue-critique-internationale-2020-3-page-9.htm">une logique d’instrumentalisation de l’accord</a>. On remarque que l’accord a permis à l’Etat malien de se réorganiser, d’acquérir des armes, d’étoffer l’effectif des FAMAs (Forces armées du Mali) et de nouer de nouvelles alliances stratégiques (Russie, Burkina Faso, Niger, etc.). </p>
<p>D’autre part, les groupes armés signataires de l’accord ont profité de la médiation et de l’accord qui en a découlé pour obtenir <a href="https://www.i24news.tv/fr/actu/international/1701636037-des-fuites-montrent-que-le-qatar-a-secretement-envoye-15-millions-de-dollars-a-des-mouvements-islamistes-dans-le-nord-du-mali#:%7E:text=nord%20du%20Mali-,Le%20Qatar%20a%20secr%C3%A8tement%20envoy%C3%A9%2015%20millions%20de%20dollars%20%C3%A0,dans%20le%20nord%20du%20Mali&text=Le%20r%C3%A9gime%20du%20Qatar%20a,%27objet%20d%27une%20fuite">la sympathie et le soutien du Qatar</a>. Par la même occasion, ils ont renforcé leur légitimité sur les territoires du nord du pays dont ils avaient le contrôle en raison de l’absence de l’Etat dans cette zone. Ces groupes armés distribuaient la justice à travers <a href="https://www.cnrtl.fr/definition/cadi">des cadis</a>. Ils ont construit à l’ombre des autorités d’Etat un système local de financement. Ils ont en outre accédé à de nouvelles ressources et intégré les sphères de décision (gouvernement, Assemblée nationale, Conseil de transition, etc.).</p>
<p>Ensuite, l’accord a souffert d’un <a href="https://searchworks.stanford.edu/view/13175446">manque de légitimité populaire </a>. Il n’y a pas eu une appropriation nationale de l’accord, car la grande majorité des acteurs nationaux (partis politiques, société civile, etc.) n’ont pas été largement inclus dans le processus de médiation internationale. En effet, l’accord n’a pas rencontré une volonté populaire au Mali exigeant son application, mais au contraire, il a été appréhendé comme le catalyseur de la division du pays. </p>
<p>Enfin, il semble que l'objectif de la médiation algérienne n'a jamais clairement été de parvenir à un accord considéré comme réaliste et potentiellement applicable. La stratégie de la médiation était de mettre fin aux affrontements armés entre le gouvernement et les groupes signataires (CMA) et de laisser les Maliens construire de nouveaux consensus à travers un dialogue inter-Maliens. L’échec de ce dialogue inter-Maliens est au cœur des <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/ei/2022-v53-n1-ei07137/1090710ar.pdf">difficultés de mise en œuvre des accords</a>.</p>
<h2>Dialogue inter-Maliens</h2>
<p>La dénonciation de l’accord par les autorités de la transition à Bamako laisse un vide qui traduit simplement les dynamiques en cours dans les régions du nord du pays. En effet, la reprise des affrontements armés entre l’Etat et les groupes armés pour l’occupation des camps cédés par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) montraient déjà un abandon de l’accord par les deux parties. </p>
<p>La reprise des hostilités appelle un nouveau dialogue entre Maliens pour trouver des solutions consensuelles à cette crise sécessionniste. Et, justement, les nouvelles autorités ont appelé à un <a href="https://sgg-mali.ml/JO/2024/mali-jo-2024-01-sp.pdf">dialogue inter-Maliens</a> dans un communiqué du 25 janvier 2024. Il s’agit d’expérimenter une approche endogène pour le règlement de la crise. </p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/GuO2KFm7iEA?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Communiqué gouvernement de la transition du 25 janvier 2024 mettant fin à l'accord d'Alger.</span></figcaption>
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<p>Ce changement de paradigme trouve ses fondements dans l’insuccès des multiples accords successifs signés par les groupes armés et le gouvernement, loin des regards du peuple.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/224777/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Abdoul Sogodogo does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>L’accord n’a pas rencontré une volonté populaire au Mali exigeant son application, mais au contraire, il a été appréhendé comme le catalyseur de la division du pays.Abdoul Sogodogo, Enseignant chercheur en sciences politiques, Université des sciences juridiques et politiques de BamakoLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2253912024-03-08T15:11:17Z2024-03-08T15:11:17ZLa côte de l'Afrique de l'Ouest était un paradis pour la piraterie et la pêche illégale : comment la technologie change la donne<p><a href="https://nemrod-ecds.com/?p=4193">Le golfe de Guinée</a> - une région côtière qui s'étend du Sénégal à l'Angola - est doté de vastes réserves d'hydrocarbures, de minéraux et de ressources halieutiques. Il s'agit également d'une voie importante pour le commerce international, ce qui le rend essentiel au développement des pays de la région.</p>
<p>Cependant, pendant longtemps, les pays du golfe de Guinée n'ont pas surveillé correctement ce qui se passait dans leurs eaux. Cela a permis aux <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2021/12/12/le-golfe-de-guinee-mer-de-tous-les-dangers-et-royaume-de-la-piraterie-mondiale_6105768_3212.html">menaces pour la sécurité en mer</a> de se développer. Parmi ces menaces, figurent la pêche illégale, non déclarée et non réglementée, le trafic de drogue, la piraterie et les vols à main armée, ainsi que le déversement de déchets toxiques.</p>
<p>Par exemple, en 2020, le <a href="https://www.icc-ccs.org/icc_test/index.php/1305-latest-gulf-of-guinea-piracy-attack-alarming-warns-imb#:%7E:text=IMB%20data%20shows%20that%20the,in%202019%20from%2017%20incidents.">Bureau maritime international</a> a signalé que la région avait connu le plus grand nombre d'enlèvements d'équipages jamais enregistré : 130 membres d'équipage enlevés lors de 22 incidents. En 2019, 121 membres d'équipage ont été enlevés lors de 17 incidents.</p>
<p>Des mesures régionales sont prises pour contrer ces menaces. En 2013, les chefs d'État ont signé le <a href="https://www.gouv.bj/article/2504/securite-maritime-dans-golfe-guinee-cmmc-celebre-anniversaire-code-conduite-yaounde/#:%7E:text=Le%20Code%20de%20conduite%20de%20Yaound%C3%A9%20est%20un%20processus%20dont,en%20mer%2C%20notamment%20la%20piraterie">code de conduite de Yaoundé</a> - une déclaration visant à travailler ensemble et à faire face aux menaces. Cela a également entraîné la mise en place d'un grand centre, connu sous le nom d’<a href="https://icc-gog.org/?page_id=1575">Architecture de Yaoundé</a> (composé de différentes divisions), qui coordonne et partage les informations sur ce qui se passe en mer. </p>
<p>Depuis la signature du code de conduite de Yaoundé en 2013, des progrès ont été réalisés. Comme nous l'avons constaté dans <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308597X23005092?ref=pdf_download&fr=RR-2&rr=848184a42c0160f6">une nouvelle étude</a>, les outils technologiques ont joué un rôle essentiel dans la lutte contre les menaces à la sécurité en mer dans les pays d'Afrique de l'Ouest et d'Afrique centrale. </p>
<p>Par exemple, le Nigeria a été désigné comme un foyer de la piraterie mais, en 2022, il a été <a href="https://www.vanguardngr.com/2022/05/nigeria-exits-nations-of-high-piracy-risks-robbery-in-international-waters-imu/#:%7E:text=For%20fighting%20Sea%20Piracy%20headlong%20through%20the%20Nigerian,has%20exited%20Nigeria%20from%20the%2020B%20Piracy%20List.">retiré de la liste</a> grâce, en grande partie, à l'utilisation de la <a href="https://guardian.ng/business-services/maritime/nigeria-delisted-from-sea-piracy-list-says-navy/">technologie</a>.</p>
<p>Les outils technologiques ont permis aux pays de gérer et de surveiller plus efficacement l'environnement marin. Ils favorisent également le partage d'informations entre les organismes chargés de l'application des lois. Cela a conduit à des opérations d'interception réussies et a permis de poursuivre des pirates dans la région.</p>
<h2>Les outils technologiques</h2>
<p>Les navires de <a href="https://www.imo.org/en/OurWork/Safety/Pages/AIS.aspx">cargaison</a> et de <a href="https://www.fao.org/3/w9633e/w9633e.pdf">pêche</a> sont tenus, en vertu du droit international, d'être équipés de systèmes qui transmettent des données indiquant où ils se trouvent. </p>
<p>Depuis la signature du code de conduite de Yaoundé, nous avons <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308597X23005092">découvert</a> que de nouvelles technologies utilisent désormais ces données de localisation pour aider les pays du golfe de Guinée à surveiller leurs eaux. </p>
<p>Des outils et des systèmes - tels que Radar, le système d'information régional de l'architecture de Yaoundé (<a href="https://www.gogin.eu/plateforme-yaris/">Yaris</a>), <a href="https://info.seavision.volpe.dot.gov/">Sea-Vision</a>, <a href="https://www.skylight.global/">Skylight</a> et <a href="https://globalfishingwatch.org/">Global Fishing Watch</a> - intègrent des informations provenant de divers systèmes de surveillance et de contrôle de la localisation, ainsi que des données satellitaires, afin d'identifier les comportements suspects. Cela a permis d'améliorer considérablement les efforts déployés pour lutter contre les menaces à la sécurité. </p>
<p>Les pays du Golfe de Guinée ont désormais une meilleure connaissance de l'activité des navires dans leurs eaux et sont en mesure de réagir en connaissance de cause dans les situations d'urgence, telles que la piraterie, les vols à main armée et les vols de pétrole. </p>
<p>Par exemple, en 2022, le <a href="https://shipsandports.com.ng/mt-heroic-idun-captain-issued-false-piracy-alert-says-gambo/">pétrolier Heroic Idun</a> a échappé à une arrestation au Nigeria pour comportement suspect, puis s'est rendu en Guinée équatoriale. Utilisant le système de l'architecture de Yaoundé, la Guinée équatoriale a retenu le navire à la demande du Nigeria et il a ensuite été <a href="https://www.reuters.com/world/africa/detained-oiltanker-equatorial-guinea-return-nigeria-officials-2022-11-11/">condamné à une amende</a>. </p>
<p>Sans le code de conduite de Yaoundé et les nouvelles technologies qu'il a introduites, le partage d'informations, la collecte de preuves et la coopération entre les pays n'auraient pas été possibles.</p>
<h2>Les avancées technologiques du Nigeria</h2>
<p>Le Nigeria est un exemple typique d'un pays où les investissements dans les infrastructures technologiques ont aidé à faire face aux menaces à la sécurité et au développement. </p>
<p>Au cours des trois dernières années, le Nigeria a déployé une série d'outils technologiques. Par exemple, la marine a déployé le <a href="https://www.defenceweb.co.za/sea/sea-sea/regional-maritime-awareness-capability-rmac-programme-rolling-out-across-africa/">Regional Maritime Awareness Capability facility</a>, qui reçoit, enregistre et distribue des données, ainsi que le système de surveillance de masse <a href="https://www.defenceweb.co.za/sea/sea-sea/nigeria-commissions-falcon-eye-maritime-domain-awareness-system/#:%7E:text=Nigeria%20has%20commissioned%20the%20Israeli-designed%20Falcon%20Eye%20maritime,July%20at%20the%20Nigerian%20Naval%20Headquarters%20in%20Abuja">Falcon Eye</a>.</p>
<p>L'Agence nigériane d'administration et de sécurité maritimes a également progressé grâce à son <a href="https://nimasa.gov.ng/president-buhari-launches-deep-blue-project-in-lagos/#:%7E:text=Le%20Projet%2C%20qui%20a%20%C3%A9t%C3%A9%20initi%C3%A9%20par%20le%20f%C3%A9d%C3%A9ral,les%20eaux%20nig%C3%A9rianes%20jusqu'au%20Golfe%20de%20Guin%C3%A9e.">projet Deep Blue</a>. Il s'agit notamment d'un centre de renseignements et de collecte de données qui travaille avec des navires de mission spéciale (comme des véhicules aériens sans pilote) pour prendre des mesures contre les menaces. </p>
<p>Depuis, le Nigeria a enregistré une <a href="https://www.icc-ccs.org/index.php/1342-new-imb-report-reveals-concerning-rise-in-maritime-piracy-incidents-in-2023#:%7E:text=Malgr%C3%A9%20la%20continuit%C3%A9%20de%20la%20restriction%20,deux%20%C3%A9quipes%20bless%C3%A9es%20en%2023">réduction</a> des actes de piraterie et des vols à main armée en mer. Autrefois désigné comme un point chaud de la piraterie, le pays a été <a href="https://nimasa.gov.ng/piracy-nigeria-removed-from-ibf-unsafe-waters-list/">retiré de la liste des points chauds</a> en 2022. </p>
<h2>Un optimisme prudent</h2>
<p>Il est évident que la technologie a un rôle important à jouer dans l'amélioration de la sûreté et de la sécurité en mer. Mais elle n'est pas sans poser des problèmes, comme nous l'avons identifié dans notre étude.</p>
<p>Tout d'abord, une dépendance excessive à l'égard des outils technologiques externes a entraîné un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308597X23005092?ref=pdf_download&fr=RR-2&rr=848184a42c0160f6#sec0035">manque d'appropriation</a> de la technologie. Cela affecte la durabilité des projets. Par exemple, lorsque le financement de l'UE pour YARIS expirera, les coûts d'exploitation seront transférés de l'UE aux États de l'architecture de Yaoundé. Mais les États régionaux n'ont toujours pas de plans clairs sur la manière de soutenir YARIS.</p>
<p>Deuxièmement, l'utilisation de la technologie nécessite des personnes disposant d'une expertise spécifique. Or, de nombreux pays n'ont pas les moyens de les embaucher ou ne produisent pas de ressources humaines dotées de cette expertise. Même lorsque le personnel a reçu une formation, il peut ne pas avoir accès aux outils (qui ne sont pas disponibles au niveau national) pour appliquer ce qu'il a appris. </p>
<p>Troisièmement, les systèmes de surveillance existants tels que le Système d'identification automatique (AIS) et le Système de surveillance des navires (VMS) peuvent être désactivés, une vulnérabilité que les criminels continuent d'exploiter. Les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC9286260/pdf/pone.0269490.pdf">systèmes radar</a> peuvent combler ces lacunes, mais la couverture RADAR est insuffisante le long des côtes. Dans le même ordre d'idées, la rareté des <a href="https://www.sciencedirect.com/topics/earth-and-planetary-sciences/data-center">centres de données</a> nationaux pour l'identification et le suivi des navires à longue distance (en raison d'un manque d'investissement) rend difficile l'utilisation de la technologie existante.</p>
<p>Cinquièmement, il existe des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308597X23005092?ref=pdf_download&fr=RR-2&rr=848184a42c0160f6#sec0025">défis</a> liés aux difficultés de communication, à l'absence de connexions internet à bord de certains navires ou à la faible vitesse de l'internet. </p>
<p>Enfin, les opérateurs privés comme l'industrie du transport maritime n'utilisent pas les services fournis par l'Architecture de Yaoundé. Cela semble lié à des considérations politiques et au manque de confiance dans les solutions régionales. </p>
<p>Les opérateurs de navires signalent plutôt les incidents à des agences extérieures à la région, telles que <a href="https://www.mica-center.org/en/agreements-supporting-the-action-of-the-mica-center/">Maritime Domain Awareness for Trade - Gulf of Guinea</a> (basée en France) ou le <a href="https://www.icc-ccs.org/icc/imb">Bureau maritime international</a> en Malaisie. Ces agences diffusent souvent des informations sans les confirmer auprès de l'architecture régionale, ce qui empêche les agences régionales de travailler efficacement.</p>
<p>Il est dans l'intérêt des pays de l'Atlantique de coopérer et de se coordonner pour relever les défis de la sécurité maritime. </p>
<p>La technologie peut jouer un rôle clé à cet égard. Mais il est essentiel que les pays améliorent leur savoir-faire technologique et veillent à ce que les partenaires extérieurs et les entreprises utilisent les services technologiques disponibles. Ce sera un grand pas vers un environnement maritime sûr et collaboratif.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225391/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ifesinachi Okafor-Yarwood reçoit des fonds du Scottish Funding Council et du PEW Charitable Trust.</span></em></p>Les technologies sont essentielles pour contrer les menaces à la sécurité en mer dans plusieurs pays d'Afrique de l'Ouest et du CentreIfesinachi Okafor-Yarwood, Lecturer, University of St AndrewsLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2226192024-02-15T15:50:36Z2024-02-15T15:50:36ZRetrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger de la Cedeao : décryptage des enjeux securitaires<p>_Le 28 janvier, le Burkina Faso, le Mali et le Niger <a href="https://www.bbc.com/afrique/articles/cx7l85qg5jpo">ont annoncé</a> leur retrait de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Environ quatre mois plus tôt, ces trois pays avaient créé <a href="https://www.aa.com.tr/fr/monde/l-alliance-des-%C3%A9tats-du-sahel-aes-un-tournant-d%C3%A9cisif-pour-l-afrique-de-l-ouest-/2998753">l’Alliance des États du Sahel </a>(AES), un pacte de défense mutuelle intervenu dans un contexte où la Cedeao menaçait de mener une opération militaire au Niger après le coup d’État de juillet 2023.</p>
<p>_Depuis quelques années, ces trois pays frontaliers et enclavés avec de larges superficies, font face à une grave crise humanitaire. En peu de temps, ils se sont retirés de deux organisations sous-régionales : la Cedeao et le <a href="https://www.aa.com.tr/fr/afrique/le-burkina-faso-et-le-niger-se-retirent-du-g5-sahel/3071342">G5 Sahel</a>. Moda Dieng est chercheur sur les questions de paix au Sahel et en Afrique de l'Ouest. Il explique à The Conversation Afrique les causes et les conséquences de ce retrait sur la paix et la sécurité dans la sous-région. _</p>
<h2>Quelles sont les raisons qui ont motivé la décision de retrait de la Cedeao?</h2>
<p>Le choix du Burkina Faso, du Mali et du Niger de se séparer de la Cedeao semble avoir été influencé par l’intérêt commun des régimes militaires de prolonger leur pouvoir. Selon <a href="https://wipolex-res.wipo.int/edocs/lexdocs/treaties/fr/ecowas/trt_ecowas.pdf#page=41">l’article 91 du Traité portant création de la Cedeao</a>, l’État membre qui a formalisé sa décision de se retirer de l’organisation par écrit dans un délai d’un an, est tenu de se conformer aux dispositions dudit traité et de s’acquitter des obligations qui lui incombent. </p>
<p>En annonçant leur retrait de la Cedeao, les pays de <a href="https://mjp.univ-perp.fr/constit/sahel2023.htm">l’Alliance des États du Sahel</a> ont pris le soin de préciser que la <a href="https://www.france24.com/fr/afrique/20240129-afrique-de-l-ouest-pourquoi-mali-niger-et-burkina-faso-divorcent-ils-de-la-c%C3%A9d%C3%A9ao">décision prend effet immédiatement</a>. En disant cela, les pouvoirs militaires veulent que les engagements pris avec l’organisation sous-régionale sur les délais des transitions ne tiennent plus et qu’ils ne sont plus obligés de faire des promesses sur l’organisation des élections. Ce qui leur donne la latitude de se maintenir au pouvoir. </p>
<p><a href="https://www.proquest.com/docview/1037273191?sourcetype=Scholarly%20Journals">Un État qui considère que le regroupement interétatique dont il est membre </a>ne répond pas à ses préoccupations, aura tendance à le contourner en agissant en dehors de l'architecture existante, ou en mettant en place un nouveau régime avec des objectifs, des règles et des structures. </p>
<p>La décision des pays de l’AES de se retirer de la Cedeao traduit une insatisfaction par rapport à l’organisation sous-régionale qui n’a pu répondre à leurs attentes dans la lutte contre les groupes terroristes. </p>
<p>En janvier 2013, la Cedeao avait déployé <a href="https://www.au-misahel.org/historique-de-loperation-misma/">la Mission internationale de soutien au Mali (Misma)</a> pour aider l’armée malienne à se reconstituer et combattre les groupes terroristes dans le nord du pays, mais l’opération n’a pas été un succès. Au mois de mars de la même année, la Misma passe sous l’autorité de l’Union africaine, avant d’être remplacée par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) à partir du 1er juillet.</p>
<p>Le <a href="https://issafrica.org/fr/iss-today/le-dernier-plan-de-lutte-contre-le-terrorisme-de-la-cedeao-pietine#:%7E:text=Ce%20plan%20permet%20%C3%A0%20la,du%20Sahel%20(G5%20Sahel).">Plan d’action de 2,3 milliards de dollars US sur quatre ans (2020-2024) </a>adopté par la Cedeao en 2019 pour prévenir et lutter contre le terrorisme et les conflits intercommunautaires au Sahel n’a pas non plus donné de résultats satisfaisants. Ce plan piétine du fait du manque de ressources et de la réticence des États sahéliens qui doutent de la pertinence d’une énième initiative régionale, mais aussi de la capacité de la Cedeao à combattre les menaces. </p>
<h2>La Cedeao est-elle une victime collatérale?</h2>
<p>Les <a href="https://www.france24.com/fr/afrique/20220326-la-c%C3%A9d%C3%A9ao-maintient-ses-lourdes-sanctions-sur-le-mali">lourdes sanctions de la Cedeao contre le Mali</a> à la suite du coup d’État de mai 2021 et plus récemment <a href="https://information.tv5monde.com/international/niger-la-cedeao-maintient-les-sanctions-et-reclame-la-liberation-de-mohamed-bazoum">contre le Niger </a>depuis le putsch de juillet 2023 semblent également avoir joué un rôle dans la décision de ces pays de cesser d’être membres de l’organisation. <a href="https://theconversation.com/burkina-faso-mali-et-niger-signent-un-pacte-de-defense-lalliance-des-etats-du-sahel-en-quete-dautonomie-strategique-215361">Les sanctions ainsi que la velléité</a> d'intervention militaire de la Cedeao au Niger ont considérablement contribué à la dégradation des relations entre les trois pays du Sahel central et l’organisation ouest-africaine. </p>
<p>Dans ces pays, il y aussi une opinion répandue selon laquelle la France était derrière ces sanctions, aidée en cela par ses partenaires clés comme la Côte d’Ivoire et le Sénégal. De ce point de vue, le retrait des pays de l’AES de la Cedeao s’avère être un dommage collatéral qui résulte à la fois des sanctions et de la détérioration de leurs relations avec la France, mais aussi entre certains membres de l’organisation – entre le Mali et la Côte d’Ivoire. </p>
<h2>Quels sont les impacts prévisibles en termes de sécurité et de stabilité ?</h2>
<p>La région du Sahel vit une situation paradoxale. Alors que les conditions sécuritaires se dégradent de jour en jour, la coopération à l’échelle régionale et internationale s’affaisse. À la différence d’autres acteurs, la Cedeao n’est pas engagée dans la lutte contre l’insécurité liée aux organisations terroristes dans la région. En mettant fin à leur participation à l’organisation en tant que membres, le Burkina Faso, le Mali et le Niger n’auront donc pas un vide à combler ou qui pourrait être exploité par les groupes armés. </p>
<p>En revanche, l’engagement de la Cedeao pour la stabilité politique a été crucial, parce qu’il participe indirectement à la lutte contre l’insécurité. Les changements abrupts de régimes politiques, et de manière anticonstitutionnelle de surcroît, fragilisent les institutions de l’État censées combattre l’insécurité. Au Sahel, l’insécurité devient croissante et finit par installer les pays dans un cercle vicieux : <a href="https://dandurand.uqam.ca/wp-content/uploads/2023/12/2023-12-05-rapport-.pdf">plus les conditions de sécurité se détériorent plus le risque de putsch devient élevé</a>. Les coups d’État deviennent plus attractifs, d’autant plus que les pays ne sont plus membres d’une organisation sous-régionale ayant des dispositifs importants contre les coups d’État. </p>
<h2>Avec quels mécanismes les trois pays peuvent-ils renforcer la lutte contre l'insécurité après leur retrait de la Cedeao?</h2>
<p>En raison de l’inertie de la Cedeao face à la menace terroriste et de l’échec du G5 Sahel et de sa force conjointe, les pays du Sahel central ne croient plus en la capacité de l’approche multilatérale traditionnelle à répondre aux défis sécuritaires dans la région. L’ampleur des menaces sécuritaires au Sahel et leur complexité nécessite un engagement substantiel des pays directement affectés, avec beaucoup de créativité et de flexibilité pour des réponses coordonnées.</p>
<p>Le Burkina Faso, le Mali et le Niger s’appuient de plus en plus sur <a href="https://dandurand.uqam.ca/wp-content/uploads/2023/12/2023-12-05-rapport-.pdf">des initiatives individuelles, bilatérales et trilatérales</a>, qu’ils considèrent plus pragmatiques et moins coûteuses en ressources financières. La collaboration croissante entre ces trois pays et entre certains d’entre eux (Burkina Faso et Niger) avec la Russie à travers des accord de coopération s’inscrivent dans cette perspective. </p>
<p>Les pouvoirs militaires dans les pays de l’AES devraient privilégier le long terme et avoir une vision plus large de la paix et de la sécurité. En dépit de ses faiblesses, la Cedeao demeure un indispensable outil de stabilisation, d’intégration et de développement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222619/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Moda Dieng does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Le choix du Burkina Faso, du Mali et du Niger de se séparer de la Cedeao semble avoir été influencé par l’intérêt commun des régimes militaires de prolonger leur pouvoir.Moda Dieng, Professor of Conflict Studies, School of Conflict Studies, Université Saint-Paul / Saint Paul UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2220152024-01-29T08:32:00Z2024-01-29T08:32:00ZLe procès pour génocide intenté contre Israël est le moment le plus glorieux de la politique étrangère de l'Afrique du Sud depuis trois décennies<p>Le 11 janvier 2024, l'Afrique du Sud a <a href="https://www.icj-cij.org/case/192">traduit</a> Israël devant la Cour internationale de justice (CIJ) pour violation de la <a href="https://www.un.org/fr/genocideprevention/genocide-convention.shtml">Convention sur le génocide de 1948</a>. Cette accusation porte sur les bombardements indiscriminés et le siège de Gaza par Israël à la suite de l'attaque meurtrière du 7 octobre contre Israël par le Hamas, qui a coûté la vie à 1 200 Israéliens.</p>
<p>Plus de 25 000 Palestiniens, dont au moins la moitié sont des enfants, <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2043356/gaza-plus-25000-morts-israel-poursuit-bombardements">auraient été tués</a> dans les attaques de représailles israéliennes. Le siège a provoqué une crise humanitaire, avec des civils ayant du mal à se procurer de la nourriture et n'ayant pas accès aux hôpitaux, qui ont été <a href="https://www.aa.com.tr/fr/monde/gouvernement-de-gaza-isra%C3%ABl-a-d%C3%A9truit-plus-de-61-des-maisons-dans-la-bande-de-gaza/3079004">presque totalement détruits</a>.</p>
<p>L'équipe d'avocats sud-africains a plaidé auprès de la Cour pour l'instauration de <a href="https://theconversation.com/south-africas-genocide-case-against-israel-expert-sets-out-what-to-expect-from-the-international-court-of-justice-220692">mesures provisoires</a> - des ordonnances temporaires visant à mettre fin à des dommages irréparables, incluant un cessez-le-feu immédiat - pendant que la Cour examine le bien-fondé de l'affaire.</p>
<p>En tant qu'observateurs des relations internationales de l'Afrique du Sud, nous considérons cette initiative comme le couronnement de la politique étrangère du pays depuis la fin de l'apartheid en 1994.</p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/south-africas-foreign-policy-under-ramaphosa-has-seen-diplomatic-tools-being-used-to-provide-leadership-as-global-power-relations-shift-218966">South Africa's foreign policy under Ramaphosa has seen diplomatic tools being used to provide leadership as global power relations shift</a>
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<p>La libération de l'Afrique du Sud est parfois présentée comme le <a href="https://global.oup.com/academic/product/postscripts-on-independence-9780199479641?cc=us&lang=en&%20;">dernier acte</a> de la décolonisation du XXe siècle : l'apogée de la solidarité du <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMDictionnaire/1517">tiers-monde</a>. La nouvelle approche du pays en matière de politique étrangère symbolisait les espoirs des pays qui luttaient pour la liberté. Le document de discussion de l'ANC (aujourd'hui au pouvoir) de 1994 <a href="https://www.anc1912.org.za/policy-documents-1994-foreign-policy-perspective-in-a-democratic-south-africa/">déclarait</a> : </p>
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<p>une Afrique du Sud démocratique sera solidaire de tous ceux dont la lutte se poursuit.</p>
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<h2>De Mandela à Ramaphosa</h2>
<p>Nelson Mandela, le premier président de l'Afrique du Sud démocratique, <a href="https://www.dakaractu.com/Les-combats-de-Mandela-pour-la-paix-et-la-justice-en-Afrique_a57484.html">plaidait en faveur des droits de l'homme</a>, parfois même aux dépens des <a href="https://www.icirnigeria.org/mandela-begged-abacha-not-to-execute-ken-saro-wiwa-and-companions/">partenaires africains</a>. Cette promesse initiale a été progressivement mise en veilleuse. </p>
<p>En 1995, par exemple, Mandela a supplié le chef d'État militaire nigérian de l'époque <a href="https://www.liberation.fr/planete/1998/06/09/nigeria-mort-brutale-du-dictateur-abacha-le-chef-d-etat-aurait-ete-victime-d-une-crise-cardiaque_240764/">Sani Abacha</a> d'épargner la vie de <a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/ken-saro-wiwa/">Ken Saro-Wiwa</a> et de huit autres militants Ogoni. Ils étaient des critiques de l'inaction du gouvernement nigérian à l'égard des compagnies pétrolières étrangères qui causent des dommages à l'environnement, ils furent accusés d'avoir assassiné des chefs ogoni. Les supplications de Mandela étaient restées lettre morte et ils furent <a href="https://www.hrw.org/legacy/french/reports/nigeria96/6.htm">exécutés</a>.</p>
<p>Dans sa <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1995/11/12/le-commonwealth-suspend-le-nigeria-apres-la-pendaison-d-opposants-l-ecrivain-ken-saro-wiwa-et-huit-autres-militants-de-la-cause-ogonie-ont-ete-executes-vendredi-10-novembre_3883656_1819218.html">réponse cinglante</a>, Mandela avait demandé que le Nigeria soit exclu du Mouvement des non-alignés et du Commonwealth jusqu'à ce qu'il établisse un régime démocratique. L'Afrique du Sud avait également rappelé son ambassadeur à Lagos pour consultations.</p>
<p>Depuis la fin des années 1990, sous les présidences successives de Thabo Mbeki, Jacob Zuma et Cyril Ramaphosa, le gouvernement sud-africain a souvent apporté son soutien à des régimes autoritaires dans le Sud, souvent au détriment des luttes populaires. Parmi les exemples, on peut citer la <a href="https://www.theguardian.com/world/2011/sep/27/dalai-lama-banned-south-africa">Chine</a>, la <a href="https://www.actionsa.org.za/human-rights-will-be-the-light-that-guides-actionsas-foreign-policy/">Russie</a>, le <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2017/07/07/arrestation-d-al-bachir-la-cpi-juge-que-l-afrique-du-sud-a-manque-a-son-devoir-mais-s-abstient-de-sanction_5157268_3212.html">Soudan</a> et le <a href="https://www.aljazeera.com/opinions/2023/6/8/south-africa-is-failing-and-its-failing-zimbabwe-too">Zimbabwe</a>. </p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/south-africa-and-russia-president-cyril-ramaphosas-foreign-policy-explained-198430">South Africa and Russia: President Cyril Ramaphosa's foreign policy explained</a>
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<p>La politique étrangère sud-africaine est souvent décrite comme <a href="https://open.uct.ac.za/items/9dbfd78a-e95b-469c-8131-f2bd263f385d">incohérente</a>, <a href="https://www.jstor.org/stable/10.18772/22010105027.14">peu claire et peu sincère</a>. </p>
<p>La Palestine demeure le seul dossier de libération d'un peuple sur lequel le soutien de l'Afrique du Sud a été indéniablement constant. </p>
<h2>Solidarité avec la Palestine</h2>
<p>Pendant la guerre froide, les États sud-africain de l'apartheid et israélien ont <a href="https://www.sahistory.org.za/archive/unspoken-alliance-israels-secret-relationship-apartheid-south-africa-sasha-polakow-suransky">collaboré</a> sur des questions militaires, diplomatiques et nucléaires. Les mouvements de libération de ces deux pays - à savoir l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) et le Congrès national africain (ANC) - pratiquaient une forme alternative d'internationalisme. Il s'agissait d'un internationalisme subversif, inspiré par la solidarité des peuples du tiers-monde. </p>
<p>En 1974, lorsque le chef de l'OLP, Yasser Arafat, <a href="https://www.un.org/unispal/wp-content/uploads/1974/11/a238ec7a3e13eed18525624a007697ec_French.pdf">s'est adressé</a> à l'Assemblée générale des Nations unies, devenant ainsi le premier dirigeant de mouvements de libération à le faire, il a demandé que ce droit soit étendu à d'autres mouvements de libération. Arafat avait profité de l'occasion pour dénoncer le régime d'apartheid avec la même véhémence que celle qu'il mettait à critiquer Israël.</p>
<p>Deux ans plus tard, le président de l'ANC de l'époque, <a href="https://theconversation.com/south-africas-anc-is-celebrating-the-year-of-or-tambo-who-was-he-85838">Oliver Tambo</a>, a pris la parole devant la même instance et a <a href="http://www.gutenberg-e.org/pohlandt-mccormick/pmh03i.html">salué</a> le leadership d'Arafat sur cette question tout en exprimant sa “solidarité inébranlable” avec les Palestiniens.</p>
<p>Outre le soutien diplomatique, les deux mouvements partageaient les mêmes tactiques de résistance.</p>
<p>La faction d'Arafat au sein de l'OLP, le Fatah, a aidé l'ANC et d'autres mouvements de résistance <a href="https://global.oup.com/academic/product/armed-struggle-and-the-search-for-state-9780198292654?lang=en&cc=gb">à acquérir des formations et des armes</a>. Il est important de noter que les relations entre Tambo et Arafat étaient basées sur la confiance. En 1988, Tambo a demandé à Arafat de l'aider à obtenir des fonds des pays du Moyen-Orient et a demandé à l'OLP de devenir l'administrateur financier des fonds provenant de cette région. </p>
<h2>Le pilier</h2>
<p>Cette cohérence d'approche et de soutien s'est reflétée dans le dossier de l'Afrique du Sud devant la Cour Internationale de Justice, ramenant ainsi la promesse de libération au coeur de la conscience nationale sud-africaine. Cette initiative illustre une clarté souvent négligée dans la politique étrangère du pays en raison de ses <a href="https://open.uct.ac.za/items/9dbfd78a-e95b-469c-8131-f2bd263f385d">incohérences</a> qui ont abouti à des choix contradictoires au 21e siècle. </p>
<p>Elle reste fidèle aux <a href="https://www.foreignaffairs.com/articles/south-africa/1993-12-01/south-africas-future-foreign-policy">principes fondateurs</a> de la politique post-apartheid. Non seulement cela était nécessaire dans l'approche du pays sur les questions internationales, mais cela revêt également une importance capitale pour la restauration de l'estime de soi. </p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/south-africas-foreign-policy-new-paper-sets-the-scene-but-falls-short-on-specifics-188253">South Africa's foreign policy: new paper sets the scene, but falls short on specifics</a>
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<p><a href="https://theconversation.com/south-africas-legal-team-in-the-genocide-case-against-israel-has-won-praise-who-are-they-221019">L'équipe sud-africaine</a> à La Haye comprenait des opposants au gouvernement de l'ANC. Alors que les membres de l'équipe exposaient les arguments juridiques et éthiques contre les ambitions génocidaires d'Israël, la nation les observait avec espoir. </p>
<p>Pouvait-on enfin s'attendre à ce que sa diplomatie soit à la hauteur des idéaux élevés que le pays s'était fixés à la fin de l'apartheid? </p>
<p>La comparution de l'Afrique du Sud devant la Cour internationale de Justice confirme le besoin de retrouver la boussole morale que le gouvernement de l'ANC a <a href="https://pari.org.za/new-book-state-capture-in-south-africa-how-and-why-it-happened/">perdue</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222015/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>The authors do not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and have disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>La uestions palestine demeure le seul dossier de libération d'un peuple sur lequel le soutien de l'Afrique du Sud a été indéniablement constant.Peter Vale, Senior Research Fellow, Centre for the Advancement of Scholarship, University of Pretoria., University of PretoriaVineet Thakur, Assistant Professor, International Relations, Leiden UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2208952024-01-21T07:06:47Z2024-01-21T07:06:47ZFin de parcours pour la Force conjointe du G5 Sahel : quels enseignements en tirer ?<p>Le 2 décembre 2023, le Burkina Faso et le Niger ont annoncé <a href="https://www.jeuneafrique.com/1510714/politique/apres-le-mali-le-burkina-faso-et-le-niger-quittent-le-g5-sahel/#:%7E:text=Apr%C3%A8s%20le%20Mali%20l'an,contre%20le%20jihadisme%20au%20Sahel">leur retrait du G5 Sahel</a> et de sa force conjointe. Ce qui porte à trois le nombre de pays membres ayant mis fin à leur participation à ces mécanismes, après le retrait du Mali en 2022. </p>
<p>Quatre jours plus tard, le 6 décembre, la Mauritanie et le Tchad, les deux derniers membres annoncent, à leur tour, la <a href="https://www.france24.com/fr/afrique/20231206-g5-sahel-mauritanie-tchad-dissolution-force-alliance-antijihadiste-mali-burkina-faso-niger">dissolution prochaine du G5 Sahel</a> et de ses mécanismes. Une décision en phase avec <a href="https://www.ohchr.org/sites/default/files/Documents/Countries/Africa/Convention_creation_G5_Sahel.pdf#page=8">l’article 20 de la Convention portant création du G5 Sahel</a> selon lequel “le G5 Sahel peut être dissous à la demande d’au moins trois États membres”. </p>
<p>Quels enseignements peut-on tirer de cette expérience de coopération contre le terrorisme, notamment pour les acteurs africains?</p>
<p>Je m’intéresse aux questions <a href="https://scholar.google.ca/scholar?hl=fr&as_sdt=0%2C5&q=Moda+Dieng&btnG=">de paix et de sécurité en Afrique</a>, avec un intérêt particulier pour les initiatives nationales et internationales visant à ramener la paix et la stabilité.</p>
<h2>Soutiens logistiques</h2>
<p>Le <a href="https://www.lesechos.fr/monde/afrique-moyen-orient/quest-ce-que-le-g5-sahel-1162497">G5 Sahel a été créé en 2014</a> avec une approche développement et sécurité. En 2017, les pays membres ont lancé la Force conjointe du G5 Sahel (FC-G5S) pour combattre le terrorisme et le crime organisé. La FC-G5S est une force ad hoc en ce sens qu’elle ne faisait pas partie des mécanismes et organisations de <a href="https://www.peaceau.org/fr/topic/the-african-peace-and-security-architecture-apsa">l’Architecture africaine de paix et de sécurité de l’Union africaine</a>. </p>
<p>Outre l’avantage d’éviter les lourdeurs bureaucratiques et les retards dûs à la recherche de consensus, les réponses de type ad hoc permettent de gagner en flexibilité et en autonomie dans la définition du champ d’intervention géographique. Elles permettent aussi aux États engagés de choisir leurs alliés, et <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/01436597.2020.1763171">d’accéder à des soutiens logistiques et financiers </a>.</p>
<p>Grâce à la coopération, les pays du G5 Sahel ont pu établir des projets de développement et renforcé <a href="https://www.g5sahel.org/le-president-de-la-republique-islamique-de-mauritanie-preside-le-g5-sahel/">les canaux d’échange et de coordination en matière de défense et de sécurité</a>. Le G5 Sahel et sa Force conjointe ont aussi permis d’ouvrir des voies de communication entre des pays qui avaient très peu d’interactions comme la Mauritanie et le Tchad.</p>
<h2>Dissensions entre pays membres</h2>
<p>En matière de lutte contre l’insécurité dans le cadre d’un regroupement étatique, l’engagement de tous les membres est essentiel, pour donner corps à la mutualisation des efforts. Dans le cadre de la Force conjointe-G5 Sahel, l’implication militaire était trop disproportionnée. La Mauritanie, qui n’a pas été affectée par le terrorisme de la même manière que les autres pays de la coalition, est restée à l’intérieur de ses frontières dans une posture défensive, en dépit de tirer beaucoup d’avantages de la coopération multilatérale en abritant le siège du Secrétariat permanent du G5 Sahel ainsi que le Collège de défense de l’organisation. Ce dernier est une <a href="https://www.cdg5s.org">école de guerre</a> dont la mission consiste à former et préparer les cadres militaires des pays membres.</p>
<p>À cela s’ajoutent les dissensions entre les pays membres. La Mauritanie a été accusée à tort ou à raison par le Mali d’avoir <a href="https://www.cairn.info/revue-defense-nationale-2021-2-page-115.htm">noué un pacte de non-agression avec les organisations terroristes</a>. Avant les coups d’État intervenus récemment au Mali et au Niger, Niamey reprochait aussi à Bamako de <a href="https://www.crisisgroup.org/fr/africa/west-africa/mali/261-frontiere-niger-mali-mettre-loutil-militaire-au-service-dune-approche-politique">n’être pas capable</a> d’empêcher les groupes terroristes d’ériger en sanctuaires les espaces proches de la frontière avec le Niger.</p>
<h2>Les limites de cette initiative</h2>
<p>Le leadership est présenté comme un facteur nécessaire en matière de coopération militaire multilatérale. Or, dans le cadre de la Force Conjointe-G5 Sahel, le leadership n’était pas assuré par les pays membres. La Force conjointe était vue tantôt comme un “projet français”, tantôt comme une initiative africaine accaparée par la France, une des principales sources d’influence diplomatique, politique et militaire de la task force. Au lieu de se mettre dans une posture d’appui aux États et à la Force Coinjointe-G5 Sahel, Paris a plutôt voulu agir de manière autonome,créant beaucoup de <a href="https://dandurand.uqam.ca/wp-content/uploads/2023/12/2023-12-05-rapport-.pdf">frustration du côté des forces de sécurité des États du Sahel et de leurs opinions publiques</a>.</p>
<p>L’expérience dans le cadre de la Force conjointe montre aussi que les pays peuvent certes solliciter une aide internationale, y compris financière, mais ils doivent éviter de tomber dans une dépendance forte ou totale. Sinon, les acteurs internationaux vont saisir l’opportunité d’instrumentaliser cette dépendance, en imposant leur agenda et des <a href="https://africacenter.org/wp-content/uploads/2022/08/ASB-41-FR_updated.pdf">solutions “prêtes à l’emploi” et peu pertinentes</a> par rapport aux réalités locales et nationales.</p>
<p>Dans le cadre du G5 Sahel, la prévalence écrasante de l’approche sécuritaire a été voulue et imposée par la France, l’Union européenne (UE) et leurs partenaires internationaux. La posture du <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-actu/l-etat-islamique-designe-ennemi-numero-1-au-sahel-20200115">président français, Emmanuel Macron, lors du sommet de Pau de janvier 2020</a> disant à ses homologues sahéliens qu’il fallait accentuer les opérations militaires, en désignant l’État islamique du Grand Sahara (EIGS) comme l’ennemi prioritaire au Sahel en est une illustration nette.</p>
<h2>Dépendance financière</h2>
<p>Une forte dépendance à l’aide financière extérieure a également l’inconvénient de créer beaucoup d’incertitudes du fait des retards dans l’exécution des promesses de financement. Celles-ci dépendent de l’agenda des acteurs dont les intérêts changent en fonction des circonstances géopolitiques. La Force conjointe avait reçu beaucoup de promesses de financements, mais peu d’entre elles ont été tenues. </p>
<p>Par ailleurs, <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/01436597.2020.1763171">les recherches</a> ont montré que lorsque les organisations régionales reçoivent beaucoup de financements directs de la part d’acteurs non africains, l’influence de l’UA a tendance à diminuer. L’essentiel des financements de la Force conjointe provenait de l’UE et ne passaient pas par l’UA. Cette réalité et la forte influence française sur la task force, ont joué un rôle important dans la posture de l’UA de ne pas soutenir la Force conjointe, comme elle l’a fait pour la Force multinationale mixte du Bassin du lac Tchad. <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-modern-african-studies/article/abs/au-task-forces-an-african-response-to-transnational-armed-groups/078D127A0CD09915059938CEBCC06B7A">Le soutien de l’UA est important</a>, notamment pour renforcer la légitimité des initiatives militaires et générer des ressources, même si c’est de manière limitée.</p>
<h2>L’importance de la stabilité politique</h2>
<p>L’expérience de la Force conjointe montre aussi qu’en matière de coalition militaire contre le terrorisme, la stabilité politique des pays engagés est importante. Les crises politiques fragilisent les institutions et les politiques de sécurité des États ainsi que la coopération régionale et internationale, du fait notamment des changements ou des ruptures dans les politiques des États. Les changements consécutifs aux coups d’État au Mali, au Niger et au Burkina Faso empêchent l’émergence d’une stratégie cohérente contre l’insécurité. Les coups d’État ont aussi tendance à fragiliser les forces de défense et de sécurité censées combattre l’insécurité. </p>
<p>Beaucoup d’espoirs ont été attachés à la Force conjointe au moment de son lancement en 2017. Les pays membres ne vont pas regretter sa dissolution, en raison de son <a href="https://press.un.org/fr/2022/cs15108.doc.htm">apport limité sur le terrain</a>. Son échec peut néanmoins servir d’enseignements pour des structures de coopération militaire encore embryonnaires comme l’<a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20221122-l-initiative-d-accra-un-forum-s%C3%A9curitaire-%C3%A0-la-crois%C3%A9e-des-chemins">Initiative d’Accra</a>et l’<a href="https://theconversation.com/burkina-faso-mali-et-niger-signent-un-pacte-de-defense-lalliance-des-etats-du-sahel-en-quete-dautonomie-strategique-215361">Alliance des États du Sahel</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220895/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Moda Dieng est financé par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. </span></em></p>Les changements consécutifs aux coups d’État au Mali, au Niger et au Burkina Faso empêchent l’émergence d’une stratégie cohérente contre l’insécurité.Moda Dieng, Professor of Conflict Studies, School of Conflict Studies, Université Saint-Paul / Saint Paul UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2205052024-01-15T08:30:26Z2024-01-15T08:30:26ZElection présidentielle en RD Congo : les clés de la victoire de Félix Tshisekedi<p>La Commission électorale nationale indépendante (CENI) a proclamé, le dimanche 31 décembre 2023, les résultats provisoires du scrutin présidentiel organisé le 20 du même mois. </p>
<p>Le président sortant, Félix Tshisekedi, a été déclaré vainqueur avec <a href="https://fr.africanews.com/2023/12/31/presidentielle-en-rdc-tshisekedi-declare-vainqueur-avec-73-des-voix/#:%7E:text=F%C3%A9lix%20Tshisekedi%20rempile%2C%20le%20pr%C3%A9sident,la%20commission%20%C3%A9lectorale%20nationale%20ind%C3%A9pendante.">73,34 % des votes exprimés, tandis que Moise Katumbi était crédité de 18,03 % et Martin Fayulu de 5,33 %</a>. Célébré par les partisans de Tshisekedi, ce plébiscite est taxé de frauduleux par <a href="https://www.france24.com/fr/%C3%A9missions/journal-de-l-afrique/20240102-rdc-tshisekedi-%C3%A9lu-pr%C3%A9sident-l-opposition-d%C3%A9nonce-des-fraudes-et-r%C3%A9clame-l-annulation-du-vote">une frange de l’opposition dont, notamment Moise Katumbi, Martin Fayulu et Denis Mukwege, qui en réclame son annulation</a>. Les protagonistes du recours en annulation des élections se présentent comme étant les victimes d’un complot ourdi entre la CENI et le président sortant pour favoriser ce dernier. Toutefois, la formulation de ce contentieux rend difficile l'analyse de leurs propres erreurs de campagne et de l'incidence de celles-ci sur le vote. Une analyse des stratégies de campagne de chacun des trois principaux candidats nous permettrait de voir sous un jour nouveaux le débat autour du plébiscite de Felix Tshisekedi. </p>
<p>Deux camps ont concouru au scrutin présidentiel du 20 décembre 2023 : l’opposition et la majorité sortante. Au-delà de l'expression de son intransigeance pour des élections inclusives, transparentes, apaisées et respectueuses du délai constitutionnel, l’opposition a brillé par ses divisions internes. <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20231118-rdc-%C3%A0-pretoria-l-opposition-ach%C3%A8ve-ses-discussions-en-adoptant-un-programme-commun">L’échec des pourparlers de Pretoria pour désigner son candidat commun</a> en est un révélateur. </p>
<p>Cet échec peut être considéré comme un prélude à sa déroute électorale. S’étant lancée en ordre dispersé à la conquête du pouvoir, l’opposition a émietté ses voix et compromis ses chances de succès dans un scrutin à tour unique. Dans ce mode de scrutin, toute voix engrangée ou perdue compte énormément. La multiplication des candidats de l'opposition ne peut avoir comme effet logique que l'affaiblissement de celle-ci, en principe au profit du président sortant. </p>
<h2>Une opposition divisée</h2>
<p>Moise Katumbi a difficilement négocié sa campagne. Hormis sa puissance financière dont il ne s’est pas privé de faire étalage, il a manqué de dresser un maillage socio-politique efficace du pays. L’absence des puissants relais locaux à même de répercuter son message auprès des couches profondes de la population et de forger une image de rassembleur a constitué un gros handicap pour lui. Ses alliés – dont Matata Ponyo,un ancien premier ministre de Joseph Kabila, Franck Diongo,député et président du Mouvement Lumumbiste progressiste, Seth Kikuni, businessman et président du parti Piste pour l'émergence, et Delly Sessanga, député et président du partipolitique Envol, se sont avérés très peu performants. </p>
<p>La rhétorique sécessionniste des faucons du Katanga dont, par exemple, <a href="https://www.mediacongo.net/article-actualite-120332_propos_secessionniste_l_irdh_condamne_le_discours_du_depute_national_christian_mwando_a_kalemie_communique.html">Christian Mwando Simba</a> a profondément desservi sa cause dans un pays qui, depuis trois décennies, fait face à une agression étrangère sous couvert d’un <a href="https://www.hrw.org/fr/news/2023/02/06/rd-congo-les-atrocites-de-la-rebellion-du-m23-soutenue-par-le-rwanda">mouvement rebelle (le M23)</a>, et qui lutte pour sauvegarder son intégrité. Le patriotisme a eu raison de la menace sécessionniste. Le leitmotiv de sa campagne consistant à critiquer le bilan du président sortant s’est révélé très peu productif, faute d’originalité. </p>
<h2>Contradiction récurrentes</h2>
<p>Candidat malheureux au scrutin présidentiel de 2018, Martin Fayulu est de nouveau récalé en 2023. Ses contradictions récurrentes lui ont valu l’image d’un leader instable et dépourvu de stratégie propre. Obnubilé par sa revendication de la <a href="https://www.jeuneafrique.com/736979/politique/rdc-lopposant-fayulu-en-campagne-pour-la-verite-des-urnes/">vérité des urnes</a>, il n’a pas pris la mesure des enjeux du scrutin du 20 décembre dernier. </p>
<p>Partant, Fayulu n’a pas préparé ses troupes pour une véritable <a href="https://www.la-croix.com/rdc-martin-fayulu-l-opposant-qui-veut-sa-revanche-20231213">revanche politique</a>. A l’occasion de cette dernière campagne, il a brillé par une improvisation politique fatale. Sa famille politique - Engagement pour la citoyenneté et le développement (Ecidé) avait décidé de ne pas participer au scrutin en préparation, dont il dénonçait le manque de transparence. Et donc, consigne avait été donnée aux militants de Ecidé de ne pas déposer leurs candidatures comme députés au national ou même provincial. Faisant fi de cette instruction, Fayulu fut le seul de son parti à déposer sa candidature pour l’élection présidentielle. </p>
<p>Il voyait en son geste une façon de répondre aux attentes de la <a href="https://www.voaafrique.com/a/lamuka-devient-une-plateforme-politique/4894112.html">plateforme Lamuka</a> qui l’avait soutenu au scrutin présidentiel de 2018. Seulement, Fayulu avait oublié que cette plateforme n’était plus la même qu’en 2018. Beaucoup d’alliés et pourvoyeurs des voix d'alors dont, par exemple, Jean-Pierre Bemba, Moise Katumbi, Adolphe Muzito, etc., avaient changé de camp et récupéré chacun sa mise. Ainsi Fayulu est-il allé, en solitaire, dans une bataille électorale exténuante et hasardeuse. Ce paradoxe peut expliquer sa déroute et sa chute comme leader de l’opposition.</p>
<h2>L'expérience de Félix Tshisekedi</h2>
<p>Instruit par sa longue expérience de lutte politique, Félix Tshisekedi <a href="https://fr.africanews.com/2023/11/08/rdc-felix-tshisekedi-entre-realisations-et-engagements-non-tenus//">avait préparé</a> sa campagne minutieusement. Aussitôt libéré de <a href="https://theconversation.com/qui-detient-les-renes-du-pouvoir-en-republique-democratique-du-congo-152462">l’étau du Front commun pour le Congo (FCC)</a>) de Joseph Kabila avec qui il avait signé un accord pour constituer la majorité parlementaire et gouverner ensemble, Tshisekedi a ratissé large recrutant les grandes figures politiques parmi lesquelles Jean-Pierre Bemba, Bahati Lukwebo, Vital Kamerhe, Christophe Mboso, de nombreux transfuges du FCC, réunis sous la bannière politique de l’Union sacrée de la nation. L’implication de ces acteurs dans sa campagne lui a servi de maillage territorial serré et de point d’ancrage sociologique dans différentes régions du pays.</p>
<p>Jouant sur la fibre patriotique en dénonçant l’agression de la RDC par le Rwanda au travers des groupes armés, Tshisekedi s’est attiré davantage de sympathie et d’adhésion des Congolais, malgré <a href="https://www.voaafrique.com/a/rdc-avant-les-%C3%A9lections-le-bilan-entre-engagements-non-tenus-et-r%C3%A9alisations/7346711.html">le bilan</a> plutôt mitigé de son premier mandat. Sans se voiler la face, notamment en ce qui concerne les déficits et les réalisations accomplies durant ce premier mandat, Tshisekedi a placé le peuple devant un choix entre l’amélioration des acquis, comme par exemple la construction des hôpitaux et des routes, la gratuité de l'enseignement primaire, la mise en route de la couverture santé universelle, etc., et la pénible tâche de reprendre tout à partir du néant. Le peuple lui a répondu par les urnes. </p>
<h2>Un processus de longue haleine</h2>
<p>Cheville ouvrière du processus électoral, la CENI a affronté des nombreuses contraintes dont, notamment, le respect du calendrier électoral, l’inclusion et l’égalité de traitement des candidats, la transparence, la logistique et la sécurité du système électoral, etc. Un éventail des défis qui ont mis en lumière les forces et les faiblesses de cette institution d'appui a la démocratie. <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20231221-rdc-plusieurs-missions-d-observations-d%C3%A9voilent-des-rapports-contrast%C3%A9s-sur-les-%C3%A9lections-g%C3%A9n%C3%A9rales">Les missions d’observation électorale</a> accréditées à l’occasion de ce scrutin ont salué le travail réalisé par la CENI. Leurs rapports convergent concernant non seulement les dysfonctionnements et actes d'incivisme constatés ici et là, mais aussi l'ordre d'arrivée des candidats au fauteuil présidentiel, avec provisoirement en tête le président sortant, Félix Tshisekedi. </p>
<p>Tout en déplorant les actes d’incivisme avérés ici et là, ces missions ont émis diverses recommandations pour l’amélioration du processus électoral. Mais elles ont toutes relativisé l’incidence des irrégularités constatées sur l’ordre d’arrivée des candidats. </p>
<h2>Tendre vers l'avenir</h2>
<p>Une frange des prétendants dont, par exemple, Constant Mutamba et Noël Tshianyi Muadiamvita, s’est inclinée devant le verdict provisoire de la CENI et a félicité le vainqueur proclamé. Certes, un autre groupe d’opposants dont Moise Katumbi, Martin Fayulu, Seth Kikuni, conteste ce résultat qu’il qualifie de frauduleux. En plus, ces derniers refusent d’aller devant les cours et tribunaux chargés des contentieux post-électoraux pour faire valoir leurs droits. Ce refus repose sur l'idée que la Cour constitutionnelle serait à la solde du régime sortant, pire encore sous l’emprise du groupe ethnique du président Tshisekedi. </p>
<p>En tout état de cause, il est à craindre que les protagonistes du refus de recours au profit des manifestations de rue ne soient en train de mal négocier le tournant démocratique en cours. La démocratie est un processus de longue haleine, qui évolue en dents de scie. Chaque peuple en pose les jalons au gré de son histoire. La RDC n’en est encore qu’à ses balbutiements. Apprendre des erreurs et tendre résolument vers l’avenir, et ce dans un esprit constructif, seraient la meilleure option. Une vigilance critique s’impose afin de prévenir les manipulations subséquentes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220505/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Albert Kasanda does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Il est à craindre que les protagonistes du refus de recours au profit des manifestations de rue ne soient en train de mal négocier le tournant démocratique en cours.Albert Kasanda, Researcher in Political Philosophy and social sciences, Center of Global studies, Institutes of Philosophy, Czech Academy of SciencesLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2160552023-10-23T11:48:19Z2023-10-23T11:48:19ZConflit Hamas-Israël : les enjeux pour l'Égypte<p><em>Alors que la crise entre Israël et le Hamas se poursuit, l'Égypte fait l'objet d'une attention toute particulière. L'Égypte a une frontière commune avec Israël et Gaza, l'étroite bande de territoire palestinien qui fait <a href="https://www.hrw.org/fr/news/2023/10/18/israel-le-blocus-illegal-de-gaza-est-meurtrier-pour-les-enfants">actuellement l'objet d'un blocus</a> à la suite de la violente attaque du Hamas contre Israël, une organisation islamiste radicale qui contrôle Gaza <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/proche-orient/israel-palestine/conflit-israel-gaza-qu-est-ce-que-le-hamas-l-organisation-terroriste-qui-a-attaque-l-etat-hebreu_6111897.html">depuis 2007</a>.
_
Moina Spooner, de The Conversation Africa, a demandé à Ofir Winter, <a href="https://www.inss.org.il/person/winterofir/">qui étudie</a> la politique égyptienne et le conflit israélo-arabe, de donner des éclairages sur ce que signifie cette nouvelle guerre pour l'Egypte et le rôle qu'elle joue.</em>_</p>
<h2>Quelles ont été les relations entre l'Égypte, Israël et la Palestine dans le passé ?</h2>
<p>L'Égypte joue un rôle d'équilibriste dans la gestion des relations entre Israël et la Palestine. </p>
<p>L'Égypte exprime ouvertement <a href="https://www.lefigaro.fr/international/l-egypte-s-engage-a-gaza-pour-se-rappeler-a-l-attention-de-washington-20210519">son engagement</a> en faveur de la cause palestinienne. En effet, la quête d'autodétermination de la Palestine est une cause arabe et islamique centrale. De plus, en raison de la proximité géographique, toute escalade à Gaza aura un impact direct sur les intérêts nationaux de l'Égypte.</p>
<p>Cette position se reflète dans sa réaction à la flambée de violence entre Israël et le Hamas. Après les meurtres et les enlèvements meurtriers de civils israéliens innocents par le Hamas <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/proche-orient/israel-palestine/attaque-du-hamas-contre-israel-des-nouveaux-documents-detaillent-l-offensive-contre-les-kibboutz_6132321.html">au début du mois</a>, les <a href="https://english.ahram.org.eg/NewsContent/1/1234/510287/Egypt/Foreign-Affairs/Egyptian-MPs-condemn-Israeli-aggression-on-Gaza,-s.aspx">membres du parlement</a> et les <a href="https://www.youtube.com/watch?v=W3sDlhRckI0">médias publics</a> égyptiens ont présenté Israël comme l'agresseur et le Hamas comme la victime.</p>
<p>Conformément aux <a href="https://www.la-croix.com/international/Entre-lEgypte-Gaza-relations-empreintes-mefiance-2023-10-12-1201286560">évènements précédents</a>, on peut s'attendre à ce que l'Égypte prenne plusieurs mesures pour manifester sa solidarité avec les Palestiniens. Il s'agit notamment de la fourniture d'une aide humanitaire à Gaza, de l'évacuation de certains blessés vers des hôpitaux égyptiens et d'un rôle accru dans les efforts de médiation en vue d'un cessez-le-feu. Ces mesures font de l'Égypte un acteur clé dans le conflit et contribueraient à renforcer sa position régionale et internationale.</p>
<p>Cependant, l'Égypte ne veut pas non plus s'aliéner Israël. En fin de compte, les deux pays ont un intérêt commun : ils ne veulent pas voir la résurgence de l'islam politique dans la région. Cela est lié à la propre expérience de l'Égypte en matière d'organisations islamistes.</p>
<p>Le régime actuel de l'Égypte <a href="https://lematin.ma/journal/2013/le-dialogue-pour-instaurer-la-democratie-en-egypte_pourquoi-les-freres-musulmans-ont-ils-ete-evinces-du-pouvoira/186860.html">a évincé</a> les Frères musulmans en 2013 et les a mis hors la loi. La confrérie est une organisation islamiste transnationale, <a href="https://www.cairn.info/revue-outre-terre1-2011-3-page-347.htm">fondée</a> en Égypte en 1928. Ses objectifs sont de promouvoir le changement social et politique dans les pays à majorité musulmane. Après le printemps arabe en 2011, la confrérie a détenu le pouvoir en Égypte pendant un an <a href="https://www.dw.com/fr/peine-de-mort-pour-des-membres-du-mouvement-des-fr%C3%A8res-musulmans/a-44881119">avant d'être évincée</a>. </p>
<p>Le Hamas est issu des Frères musulmans, c'est pourquoi l'Égypte le perçoit comme une menace.</p>
<p>Mais malgré la méfiance de l'Égypte à l'égard du Hamas, il existe depuis 2017 <a href="https://press.un.org/fr/2017/cs13035.doc.htm">un accord</a> entre les deux pays : la coopération du Hamas dans la lutte contre le terrorisme dans le Sinaï serait assortie d'un assouplissement du blocus égyptien sur la bande de Gaza.</p>
<p>Bien que la nature des relations entre l'Égypte et Israël soient conciliantes, elles ne sont pas chaleureuses. L'Égypte a signé un <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/124">un accord de paix</a> avec Israël en 1979. Au cours de la dernière décennie, Israël s'est positionné comme un partenaire politique, sécuritaire et économique clé de l'Égypte. </p>
<p>Ces dernières années, l'Égypte a joué un rôle de <a href="https://carnegieendowment.org/sada/85037">médiateur</a> entre Israël et le Hamas et dans les efforts de reconstruction de Gaza. Cela s'explique par sa proximité avec Gaza et par le fait qu'elle contrôle <a href="https://theconversation.com/le-poste-frontiere-de-rafah-pour-les-gazaouis-une-issue-de-secours-qui-reste-close-215849">le point de passage de Rafah</a>, la seule frontière avec la bande de Gaza qui ne soit pas sous contrôle israélien. </p>
<p>Mais l'implication de l'Égypte dans la bande de Gaza est soumise à certaines limites qui ne seront pas franchies. </p>
<p>Il n'y aura pas d'engagement militaire égyptien contre Israël au profit des Palestiniens, une politique qui découle <a href="https://www.state.gov/secretary-antony-j-blinken-and-egyptian-president-abdel-fattah-el-sisi-before-their-meeting/">principalement de l'engagement</a> de l'Égypte envers l'accord de paix de 1979 entre Israël et l'Égypte.</p>
<p>Ces dernières années, l'Égypte a joué un rôle de <a href="https://carnegieendowment.org/sada/85037">médiateur</a> entre Israël et le Hamas et dans les efforts de reconstruction de Gaza. Cela s'explique par sa proximité avec Gaza et par le fait qu'elle contrôle le point de passage de Rafah, la seule frontière avec la bande de Gaza qui ne soit pas sous contrôle israélien. </p>
<p>Il n'y aura pas non plus d'entrée massive de Gazaouis en Égypte, <a href="https://sis.gov.eg/Story/187293/Sisi-Palestinians-must-'remain-on-their-land'%2C-contacts-ongoing-for-de-escalation-in-Gaza-war?lang=en-us">selon</a> les déclarations du président Abdel Fattah el-Sisi et d'autres responsables égyptiens. </p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/le-poste-frontiere-de-rafah-pour-les-gazaouis-une-issue-de-secours-qui-reste-close-215849">Le poste-frontière de Rafah : pour les Gazaouis, une issue de secours qui reste close</a>
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<h2>Comment la crise actuelle affecte-t-elle l'Égypte ?</h2>
<p>L'Égypte a jusqu'à présent rejeté l'idée que des Palestiniens déplacés s'installent dans le Sinaï. Mais il est possible qu'un grand nombre de Gazaouis cherchent à entrer dans le pays. Cette situation est distincte de celle des habitants de Gaza de nationalité étrangère qui <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2023/10/11/rafah-poste-frontiere-strategique-entre-l-egypte-et-gaza_6193751_3210.html">attendent à la frontière</a> pour traverser. </p>
<p>L'Égypte s'oppose à ce que les habitants de Gaza franchissent la frontière en grand nombre, car elle s'oppose à tout empiètement sur sa souveraineté dans la péninsule du Sinaï. Elle craint surtout que les Palestiniens déplacés n'établissent une résidence permanente sur son territoire, ce qui risquerait de compromettre une situation sécuritaire et économique déjà délicate.</p>
<p>La situation représente également un risque important pour la sécurité de l'Égypte.</p>
<p>Tout d'abord, les violations de frontières par des réfugiés de Gaza, dont certains peuvent être des individus armés affiliés au Hamas ou à d'autres groupes radicaux, pourraient exporter l'instabilité dans le Sinaï. Pour l'Égypte, il existe un risque de voir se multiplier les attaques terroristes et l'instabilité, comme c'était le cas dans le Sinaï avant l'accord de 2017 avec le Hamas. Certains de ces attentats <a href="https://www.cairn.info/revue-confluences-mediterranee-2014-4-page-143.htm">ont été perpétrés</a> par des cellules militantes bien armées et entraînées basées à Gaza.</p>
<p>Deuxièmement, un coup dur porté au Hamas pourrait entraîner un manque de gouvernance, le chaos et l'instabilité à Gaza. Cette instabilité pourrait donner lieu à la contrebande d'armes et de combattants le long de la frontière entre l'Égypte et la bande de Gaza.</p>
<p>L'autre menace pour la sécurité est que des actes terroristes pourraient être lancés depuis le Sinaï vers Israël par des groupes militants palestiniens, ce qui mettrait en péril les relations délicates entre Israël et l'Égypte.</p>
<h2>Comment l'Égypte a-t-elle réagi et que doit-elle faire maintenant ?</h2>
<p>Depuis le début de la guerre, l'Égypte s'efforce de désamorcer la situation à Gaza et mène des pourparlers avec Israël, le Hamas, l'Autorité palestinienne, les États-Unis, l'Iran et d'autres acteurs régionaux et internationaux. </p>
<p>La Ligue arabe s'est déjà réunie au Caire et <a href="https://www.bfmtv.com/international/afrique/egypte/egypte-un-sommet-regional-et-international-sur-la-cause-palestinienne-aura-lieu-samedi_AD-202310161049.html">une conférence internationale</a> devrait avoir lieu en Égypte le 20 octobre. L'Egypte cherche également à établir un corridor humanitaire pour l'acheminement de nourriture et de médicaments vers la bande de Gaza. </p>
<p>À ce stade, l'Égypte a plus de contrôle que la plupart des autres acteurs internationaux régionaux sur l'issue du conflit, et a beaucoup d'intérêts à préserver. </p>
<p>L'issue du conflit pourrait apporter certains avantages. Par exemple, l'Égypte souhaite le <a href="https://press.un.org/fr/2017/cs13035.doc.htm">retour de l'Autorité palestinienne</a>, qui est plus disposée à s'engager dans la diplomatie et les négociations, en tant qu'autorité dirigeante à Gaza. Un scénario dans lequel le Hamas serait considérablement affaibli pourrait ouvrir la voie à de nouveaux développements, incluant éventuellement le retour progressif de l'Autorité palestinienne. Dans ce cas, l'Égypte et Israël pourraient trouver un voisin plus pragmatique de l'autre côté de leurs frontières. </p>
<p>Si le Hamas perd le pouvoir à la fin de la guerre, l'Égypte sera très probablement impliquée dans la phase de transition gouvernementale. Comme au cours des <a href="https://www.rfi.fr/fr/podcasts/invit%C3%A9-international/20231019-guerre-isra%C3%ABl-hamas-quel-r%C3%B4le-peut-jouer-l-%C3%A9gypte">dernières années</a>, l'Égypte devrait être le canal par lequel l'aide et les fonds des pays arabes et de la communauté internationale seront transférés à Gaza, participer à son processus de reconstruction et être un facteur d'influence dominant pour façonner son avenir.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216055/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ofir Winter does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>L'Égypte joue les équilibristes en gérant ses relations avec Israël et la Palestine.Ofir Winter, Senior Researcher, Institute for National Security Studies, Tel Aviv UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2112472023-08-09T10:34:10Z2023-08-09T10:34:10ZCoup d'État au Niger : pourquoi une intervention militaire de la Cedeao est improbable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/541782/original/file-20230808-25-yhmn9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les putschistes nigériens saluent une foule de partisans à Niamey, le 6 août 2023.</span> <span class="attribution"><span class="source">Balima Boureima/Anadolu Agency via Getty Images</span></span></figcaption></figure><p>L'espoir d'une résolution rapide du coup d'État au Niger ou d'un éventuel recours à la force par la <a href="https://ecowas.int/about-ecowas/">Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest</a> (Cedeao) pour libérer le président nigérien Mohammed Bazoum et le rétablir au pouvoir s'amenuise.</p>
<p>Les dirigeants de la Cedeao ont lancé <a href="https://www.eurotopics.net/fr/305493/niger-expiration-de-l-ultimatum-de-la-cedeao">un ultimatum à la junte militaire nigérienne</a> pour qu'elle cède le pouvoir dans les sept jours suivant le 30 juillet, sous peine d'une intervention militaire.</p>
<p>La date limite du 6 août est passée et sans que les putschistes ne bougent. La Cedeao se réunit à nouveau <a href="https://www.france24.com/fr/%C3%A9missions/journal-de-l-afrique/20230807-r%C3%A9union-de-la-cedeao-jeudi-sur-le-coup-au-niger-la-junte-ouverte-aux-dialogues">le 10 août</a> pour discuter de la situation au Niger. Cependant, les espoirs d'une intervention militaire de la Cedeao sous l'égide du Nigeria au Niger semblent aujourd'hui bien minces. </p>
<p>La première indication qu'il serait difficile de rétablir immédiatement la démocratie dans le pays est apparue lorsque les <a href="https://www.lanouvellerepublique.fr/a-la-une/coup-d-etat-au-niger-manifestation-devant-l-ambassade-de-france-la-tension-montre-entre-paris-et-niamey">manifestations</a> de soutien au coup d'État ont commencé. </p>
<p>Une <a href="https://www.bfmtv.com/international/afrique/ambassade-attaquee-pas-d-ordre-d-evacuation-les-francais-presents-au-niger-sont-ils-en-danger_AN-202307310275.html">attaque</a> contre l'ambassade de France à Niamey a été suivie de manifestations au quotidien en soutien au coup d'État. L'ampleur des manifestations s'est accrue de jour en jour. </p>
<p>Il y a aussi une montée du <a href="https://www.huffingtonpost.fr/international/video/au-niger-et-ailleurs-en-afrique-ce-n-est-pas-que-le-sentiment-anti-francais-qui-se-joue_221368.html">sentiment anti-francais</a>, avec de plus en plus de personnes soutenant la junte. </p>
<p>Le Niger partage une frontière avec <a href="https://www.worlddata.info/africa/niger/index.php">sept pays</a> de la région, dont quatre membres de la Cedeao. Parmi ces quatre pays, <a href="https://afrique.lalibre.be/75879/la-cedeao-maintient-les-sanctions-contre-le-mali-le-burkina-et-la-guinee/">le Mali et le Burkina Faso</a> ont été suspendus en raison de coups d'État similaires. </p>
<p>Ces deux pays ont <a href="https://www.letemps.ch/monde/face-a-la-menace-d-intervention-militaire-le-burkina-et-le-mali-affichent-leur-soutien-au-niger#:%7E:text=Niger%20%2D%20Le%20Temps-,Face%20%C3%A0%20la%20menace%20d'intervention%20militaire%2C%20le%20Burkina%20et,affichent%20leur%20soutien%20au%20Niger&text=Publi%C3%A9%20le%2001%20ao%C3%BBt%202023,pr%C3%A9sident%20renvers%C3%A9%20par%20un%20putsch.">menacé</a> de soutenir le Niger si la Cedeao tente de recourir à la force. Les deux autres pays de l'organisation régionale frontaliers du Niger sont le Nigeria et le Bénin. En dehors de la Cedeao, le Tchad et l'Algérie ont <a href="https://www.agenzianova.com/fr/news/le-niger-le-tchad-et-l%27algerie-oppos%C3%A9s-%C3%A0-une-intervention-militaire-aggraveraient-la-situation/">tous deux exclu</a> toute participation à une action militaire et la Libye est engluée dans ses propres défis à relever. </p>
<p>La probabilité d'une intervention militaire a encore diminué lorsque les sénateurs nigérians <a href="https://www.aa.com.tr/fr/afrique/nigeria-le-s%C3%A9nat-rejette-la-demande-du-pr%C3%A9sident-denvoyer-des-troupes-au-niger/2962448#:%7E:text=Le%20pr%C3%A9sident%20du%20S%C3%A9nat%20du,%C3%89tat%20militaire%20survenu%20au%20Niger.">ont rejeté</a> l'idée. Ils ont plaidé pour l'utilisation d’“autres moyens” que la force. Le Nigeria est le plus grand pays de la Cedeao et <a href="https://www.premiumtimesng.com/news/118585-nigeria-ecowas-largest-donor-continually-outsmarted-by-smaller-west-african-countries.html">le principal financier</a> de l'organisation régionale. </p>
<p>Il sera difficile pour la Cedeao de mener une intervention militaire sans le soutien total du Nigeria. En tant que spécialiste de <a href="https://www.leedsbeckett.ac.uk/staff/dr-olayinka-ajala/">la politique et des relations internationales</a>, j'ai <a href="https://www.researchgate.net/publication/329456894_US_Drone_Base_in_Agadez_A_Security_Threat_to_Niger">fait des recherches</a> sur les implications des bases militaires étrangères au Niger. J'ai également <a href="https://isij.eu/article/interorganizational-cooperation-and-fight-against-terrorism-west-africa-and-sahel">analysé le rôle joué par le Nigeria</a> dans des organisations régionales telles que la Cedeao et la <a href="https://mnjtffmm.org/">force multinationale mixte</a> dans la région. </p>
<p>Je pense que la réticence des hommes politiques nigérians à soutenir une intervention militaire, conjuguée au soutien local croissant à la junte nigérienne, rendra le recours à la force presque impossible. La CEDEAO n'a donc pas d'autre choix que de rechercher une solution diplomatique. </p>
<h2>Pourquoi une intervention militaire est improbable</h2>
<p>Il y a trois raisons principales qui font que le recours à la force devient de plus en plus improbable.</p>
<p>Tout d'abord, la popularité croissante des putschistes dans le pays est une source d'inquiétude. La multiplication des manifestations de soutien au coup d'État montre que celui-ci est plus largement accepté qu'on ne l'avait envisagé.</p>
<p>Des centaines de jeunes <a href="https://www.letemps.ch/monde/afrique/alors-que-la-pression-monte-sur-la-junte-nigerienne-des-brigades-de-veille-gardent-les-ronds-points-de-niamey">ont rejoint</a> le personnel militaire pour monter la garde à l'entrée de Niamey. Certains de ces jeunes ont promis de rejoindre l'armée pour lutter contre toute incursion.</p>
<p>Deuxièmement, les politiciens du Nigeria et du Ghana craignent que toute intervention militaire n'entraîne une catastrophe humanitaire, ce qui déstabiliserait davantage la région. Les politiciens du Nigeria <a href="https://north-africa.com/nigerian-president-tinubu-under-pressure-to-avoid-war-with-northern-neighbor-niger/">soutiennent</a> que toute guerre au Niger aura des conséquences graves sur le nord du Nigeria, une <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/01436597.2020.1811662">région déjà éprouvée</a> par une insurrection. </p>
<p>Outre l'organisation terroriste islamiste <a href="https://www.dni.gov/nctc/groups/boko_haram.html">Boko Haram</a>, qui a ravagé le nord-est du pays, les <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/01436597.2020.1811662">affrontements</a> entre agriculteurs et éleveurs ont également déstabilisé d'autres régions du nord du Nigeria. </p>
<p>Sept États nigérians ont des frontières communes avec le Niger. Une attaque contre le Niger entraînerait un afflux massif de réfugiés au Nigeria. Cela a <a href="https://www.bbc.co.uk/news/world-africa-66420693">créé de l'angoisse</a> dans le nord du Nigeria. Le président Bola Tinubu, qui n'a pris ses fonctions que récemment, aura du mal à ignorer les sénateurs de la région qui ont <a href="https://www.premiumtimesng.com/news/614494-niger-coup-nigerian-senators-reject-tinubus-request-for-troops-deployment.html">rejeté</a> toute intervention militaire.</p>
<p>Troisièmement, le Niger a combattu le terrorisme dans la région et a été un partenaire fiable. Le pays est membre de la <a href="https://mnjtffmm.org/">Force multinationale mixte</a> et du <a href="https://www.interpol.int/en/Crimes/Terrorism/Counter-terrorism-projects/G5-Sahel">G5 Sahel</a>, deux organisations clés chargées de lutter contre le terrorisme et les trafics dans la région. </p>
<p>Une intervention militaire au Niger, qui pourrait déboucher sur une guerre totale, renforcerait les groupes terroristes. Elle conduirait également à ce que des soldats qui combattaient auparavant côte à côte contre les groupes terroristes se retrouvent à se battre les uns contre les autres.</p>
<p>Avec la <a href="https://www.nationalsecurity.gov.au/what-australia-is-doing/terrorist-organisations/listed-terrorist-organisations/islamic-state-west-africa-province">province de l'Afrique de l'Ouest de l'État islamique</a>, affiliée à L'Etat islamique (EI), opérant déjà dans la région, une attaque contre le Niger pourrait créer une situation similaire à celle qui s'est produite en Syrie. L'EI a profité des combats en Syrie pour établir un califat en 2014.</p>
<h2>La voie à suivre</h2>
<p>Une intervention militaire pour rétablir la démocratie au Niger étant peu probable, la diplomatie reste la seule solution. </p>
<p>Le chef de facto, le général Abdourahamane Tiani, était <a href="https://www.theafricareport.com/318026/10-things-to-know-about-niger-coup-leader-general-abdourahamane-tiani/">sur le point d'être révoqué</a> en tant que chef de la garde présidentielle avant le coup d'État. De nombreux hauts gradés du pays sont impliqués dans la mutinerie et il est pratiquement impossible qu'ils puissent travailler à nouveau avec Bazoum. Ils pourraient être <a href="https://www.pgaction.org/ilhr/adp/ner.html">jugés pour trahison</a>, ce qui est passible de la peine de mort au Niger.</p>
<p>Comme je l'ai <a href="https://theconversation.com/what-caused-the-coup-in-niger-an-expert-outlines-three-driving-factors-210721#:%7E:text=En%20addition%20%C3%A0%20l'ins%C3%A9curit%C3%A9%20et,%C3%A9tiquet%C3%A9%20comme%20ayant%20desorigines%C3%A9trang%C3%A8res.">expliqué</a> ailleurs, la mutinerie a été en partie le résultat de la présence importante de troupes militaires étrangères dans le pays. Elle a encore affaibli les relations entre l'armée nigérienne et la France. </p>
<p>La junte militaire a <a href="https://www.wsj.com/articles/niger-coup-leaders-end-military-cooperation-with-france-deepening-concerns-over-anti-western-turn-e7fae57e">annulé</a> la coopération militaire avec la France. </p>
<p>Si Bazoum est libéré et rétabli dans ses fonctions de président, il devra écarter plusieurs chefs militaires qui ont participé au coup d'État ou renégocier l'alliance militaire du Niger avec la France. Ces deux options présentent de nombreuses difficultés. </p>
<p>L'option diplomatique la plus probable est que la Cedeao négocie une courte période de transition avec la junte militaire. Cela inclura un retour rapide à un régime démocratique. </p>
<p>Cela permettra d'apaiser les tensions et de rassurer les partenaires à l'intérieur et à l'extérieur de la région. Compte tenu du niveau de soutien que la junte a reçu de la part du public nigérien et de l'extérieur du pays, les négociateurs de la Cedeao doivent être ouverts à des concessions. </p>
<p>Des pays tiers ayant des intérêts moindres au Niger doivent mener ces négociations et la France doit être disposée à modifier sa relation avec le pays pour en faire une relation mutuellement bénéfique. À l'heure actuelle, les Nigériens considèrent que la France exploite leur pays et souhaitent mettre un terme à leur relation de longue date. </p>
<p>En définitive, il n'y a pas de solution facile à l'impasse dans laquelle se trouve le Niger.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/211247/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Olayinka Ajala does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Une combinaison de facteurs nigérians et nigériens réduit les perspectives d'intervention militaire de la Cedeao au Niger.Olayinka Ajala, Senior lecturer in Politics and International Relations, Leeds Beckett UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2108152023-08-04T11:49:22Z2023-08-04T11:49:22ZNiger : le coup d’État augure des lendemains incertains pour le pays<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/540970/original/file-20230803-29-7syi54.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le colonel-major Amadou Abdramane (centre), porte-parole du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) s'exprimant lors d'une déclaration télévisée, le 26 juillet 2023.</span> <span class="attribution"><span class="source">Télé Sahel/AFP via Getty Images</span></span></figcaption></figure><p>À la suite du Mali, du Tchad et du Burkina Faso, le Niger est le quatrième pays du <a href="https://www.g5sahel.org/">G5 Sahel</a> (un cadre de coordination et de suivi de la coopération en matière de politiques de développement et de sécurité regroupant les pays ci-nommés et la Mauritanie) en proie à une prise du pouvoir par l’armée. Des forces de défense et de sécurité réunies au sein du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) ont proclamé, le 26 juillet 2023 à la télévision nationale, la destitution du président Mohamed Bazoum élu démocratiquement en 2021. </p>
<p>Selon le président du CNSP, <a href="https://www.letemps.ch/monde/qui-est-abdourahamane-tchiani-nouvel-homme-fort-du-niger">Abdourahmane Tchiani</a> (à la tête de la garde présidentielle depuis 2011), ce coup d’État <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/niger/niger-le-general-abdourahamne-tchiani-s-autoproclame-president-du-conseil-national-apres-le-putsch_5976782.html">serait justifié</a> par « la dégradation sécuritaire » et « la mauvaise gouvernance économique ».</p>
<p><a href="https://www.lepoint.fr/afrique/niger-mouvement-d-humeur-a-la-garde-presidentielle-26-07-2023-2529655_3826.php">L’annonce des putschistes</a> est intervenue à la suite d’une journée de tension et de « confusion » qualifiée au départ, de « mouvement d’humeur » de la garde présidentielle. Cette dernière détient, depuis le 26 juillet, le président Bazoum et sa famille au palais présidentiel. L’échec des tentatives de <a href="https://afrique.lalibre.be/78153/tentative-de-coup-detat-au-niger-mediation-ouest-africaine/">négociations internes</a> et des <a href="https://fr.euronews.com/2023/07/29/niger-condamnation-du-coup-detat-en-attendant-des-sanctions">condamnations régionales et internationales</a> suivi du ralliement des forces armées nigériennes qui, au départ, soutenaient le régime en place, ont sonné le glas de la 7<sup>e</sup> République du Niger.</p>
<p><a href="https://www.usip.org/blog/2018/09/niger-security-requires-collaborative-strategy">Mes recherches</a> portent sur les questions de gouvernance sécuritaire en Afrique subsaharienne et les instruments régionaux africains contribuant au maintien de la paix et de la sécurité. Cet article explique d’abord comment les changements anticonstitutionnels de gouvernement sont loin d’être des phénomènes inhabituels au Niger. Il donne ensuite un aperçu des défis qui attendent les nouvelles autorités.</p>
<h2>Coups d’État insolites ?</h2>
<p>Depuis son indépendance, le 3 août 1960, le Niger a connu cinq coups d’État et d’innombrables tentatives de destitution des régimes en place dont les plus récentes datent de 2021 et 2022.</p>
<p>Les quatre premiers, que l’on pourrait qualifier de coups d’État « salvateurs », sont intervenus dans de contextes particuliers de crises alimentaire et sociopolitique graves.</p>
<p>Lors du premier <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/574">coup d’État en 1974</a>, les putschistes ont pris le pouvoir pour reprendre en main la gestion d’une crise alimentaire laissant les populations aux prises avec une faim aiguë, puis par la suite (<a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/804">1996</a>, <a href="https://www.cairn.info/revue-politique-africaine-1999-2-page-85.htm">1999</a>, <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2010/02/19/niger-coup-d-etat-militaire-dans-un-pays-en-crise-politique-depuis-des-mois_1308338_3212.html">2010</a>) pour dénouer des situations de crise sociopolitique qui paralysaient les institutions de l’État.</p>
<p>Le cinquième, en date du 26 juillet 2023, est un cas insolite dans l’histoire des coups d’État au Niger et s’apparente à un affront à la démocratie (elle-même en crise en Afrique du fait des mauvaises pratiques des élites politiques), facilitée par un contexte régional favorable aux coups d’État et l’impuissance des sanctions régionales et internationales à rétablir l’ordre constitutionnel comme ce fut le cas au Mali, en Guinée et au Burkina Faso.</p>
<p>Bazoum assumait la présence des bases militaires étrangères sur le territoire nigérien dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Il était décomplexé par rapport à la coopération militaire avec les Occidentaux qu’il jugeait nécessaire au regard des insuffisances humaines, matérielles et financières qui caractérisent le Niger et le Sahel en général.</p>
<h2>Des arguments incompréhensibles</h2>
<p>Assurément, l’opinion publique nigérienne est traversée par les courants idéologiques et les mouvements anti-français qui prévalent dans cette zone.</p>
<p>Par ailleurs, Bazoum avait affiché une certaine volonté d’initier une gouvernance inclusive et réformatrice. Dans ce cadre, il avait organisé des tournées inédites à l’intérieur du pays, des rencontres fréquentes avec les couches sociopolitiques et professionnelles. Il avait en outre tenté de régulariser les années universitaires et scolaires à travers le <a href="http://www.anp.ne/article/niger-vers-le-recrutement-de-171-enseignants-chercheurs-et-l-integration-de-plus-de-2500">recrutement</a> de 171 enseignants-chercheurs dans les universités publiques et de 2500 enseignants du secondaire.</p>
<p>À cela s’ajoutent, ces deux dernières années, des débuts de résultats sur le plan sécuritaire liés aux différents programmes de recrutement et de renforcement des capacités des forces de défense et de sécurité. Même si la gouvernance du pays présente encore d’importantes limites, ces initiatives avaient permis au Niger d’afficher non seulement, sur le plan sécuritaire, une certaine résilience par rapport au Burkina Faso et au Mali, mais aussi un climat sociopolitique apaisé.</p>
<p>Cela lui a valu une certaine mansuétude de la part des Nigériens pourtant extrêmement critiques vis-à-vis de son parti politique (le PNDS-Tarayya) et son prédécesseur Issoufou Mahamadou, au regard de l’exacerbation des mesures répressives contre la société civile, de l’affairisme, des pratiques corruptives et népotistes et la politisation à outrance de l’administration publique, sous son régime entre 2011 et 2021.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un homme tient une pancarte au milieu d’une foule" src="https://images.theconversation.com/files/540972/original/file-20230803-29-h5ifyj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/540972/original/file-20230803-29-h5ifyj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/540972/original/file-20230803-29-h5ifyj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/540972/original/file-20230803-29-h5ifyj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/540972/original/file-20230803-29-h5ifyj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/540972/original/file-20230803-29-h5ifyj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/540972/original/file-20230803-29-h5ifyj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un supporter tient une photo du général nigérien Abdourahamane Tchiani, le chef de la puissante garde présidentielle, alors que d’autres se rassemblent pour soutenir la junte nigérienne à Niamey le 30 juillet 2023.</span>
<span class="attribution"><span class="source"> : AFP</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Que vaut dès lors un coup d’État, au bout de deux ans d’exercice, venant de fidèles compagnons militaires du régime ? Ont-ils oublié leur affiliation de douze années au régime politique qu’il discrédite aujourd’hui ?</p>
<p>Si le CNSP a justifié son putsch par la « dégradation continue de la sécurité » et « la mauvaise gouvernance économique et sociale », il représente aussi des intérêts particuliers à l’intérieur des Forces de défense et de sécurité. Ce coup d’État intervient, en réalité, dans un contexte précis de mouvement à la tête des FDS. Au <a href="https://www.presidence.ne/actualites/conseils-des-ministres/2023-03-31/communique-du-conseil-des-ministres-du-vendredi-31-mars-2023-17">Conseil des ministres du 31 mars 2023</a>, Bazoum avait procédé à une nomination de nouveaux hauts responsables à la tête de l’état-major et du Haut commandement de la gendarmerie nationale, avec en perspective, d’autres changements principalement à la tête de la Garde présidentielle.</p>
<p>Le contexte d’avènement de ce putsch pose ainsi la question de la convergence de l’agenda des putschistes et celui des jeunes Nigériens qui fondent l’espoir sur un changement radical dans la gouvernance du pays. Malgré quelques acquis ces deux dernières années, celle-ci reste tout de même extrêmement délicate.</p>
<h2>Espoir incertain</h2>
<p>La légitimité populaire dont jouissent les juntes militaires, un peu partout en Afrique, est, en réalité, basée sur le rejet de la classe politique précédente et l’espoir d’un lendemain meilleur d’une population constamment éprouvée. En outre, aux yeux de certains, l’alternance par des moyens anticonstitutionnels (putsch, révolution, etc.) offre la perspective de changement plus rapide puisqu’elle peut favoriser une transformation révolutionnaire.</p>
<p>Dès lors, il n’est pas simplement question, pour les nouvelles autorités et celles qui suivront, d’attribuer quelques portefeuilles ministériels et emplois accessibles qu’à une catégorie restreinte de jeunes Nigériens. Il ne s’agit pas non plus de réponses essentiellement militaires à des préoccupations multidimensionnelles. Les liens de causalité entre l’insécurité et le désœuvrement des jeunes à grande échelle au Niger et au Sahel en général ont été largement <a href="https://www.ndi.org/sites/default/files/Rapport%20de%20l%27e%CC%81tude%20sur%20les%20facteurs%20de%20radicalisation_%20CNESS%20%281%29.pdf">documentés</a>.</p>
<p>Il s’agit, pour les nouvelles autorités, de s’inscrire dans des initiatives de long terme favorables à l’émergence d’une nouvelle élite politique, de repenser la gouvernance du pays à travers une transformation profonde des politiques alimentaires, de santé, d’éducation, d’emploi, de lutte contre la corruption, le trafic d’influence et la politisation à outrance de l’administration publique, etc. Or, dans le contexte nigérien, rien ne laisse présager, pour l’instant, une telle dynamique.</p>
<h2>Des élites discréditées</h2>
<p>D’une part, les principaux auteurs du coup d’État sont issus de la vieille hiérarchie militaire aux pratiques douteuses (corruption, maladministration, etc.). Ils ont été longtemps au service d’élites politiques issues de la <a href="https://www.jeuneafrique.com/73442/archives-thematique/ouverture-de-la-conf-rence-nationale-au-niger-2/">Conférence nationale souveraine de 1991</a>. Ces élites sont aujourd’hui discréditées et rejetées au regard de leur faillite interne (série de crises politiques, népotisme, corruption, mauvaise administration, etc.) et leur position de dépendance accrue à l’égard de l’Occident.</p>
<p>D’autre part, les expériences ont aussi mis au jour les limites transformationnelles des régimes issus de changements anticonstitutionnels (Guinée, Mali, Soudan), à quelques exceptions près à l’instar du régime militaire de <a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/seyni-kountche/">Seyni Kountché</a> au Niger ou encore celui de <a href="https://www.universalis.fr/index/thomas-sankara/">Thomas Sankara</a> au Burkina Faso. </p>
<p>L’avenir nous dira si ce nouveau régime militaire peut véritablement être le tremplin de la « rupture » avec « les modèles de gouvernance » qu’il prétend incarner. Et s’il fait preuve de transformations structurelles que la population lui attribue. Mais, faute de changement radical et éclairé dans la gouvernance, il est à craindre que la situation sociopolitique, économique et sécuritaire du Niger se dégrade davantage sous le regard impuissant d’une société civile peu outillée, une opposition politique quasi inexistante et un paysage politique profondément fragmenté (avec plus de 160 partis politiques au Niger).</p>
<p>Ces différents acteurs se sont illustrés ces dernières années par leur incapacité à exercer un contre-pouvoir et à contribuer à l’impulsion d’un renouveau de la politique de gouvernance au Niger.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210815/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Adamou Gado Ramatou is affiliated with Institut Nigérien des Études Stratégiques et Internationales. </span></em></p>L’avenir nous dira si ce nouveau régime militaire sera le tremplin de la « rupture » avec les « modèles de gouvernance » qu’il prétend incarner.Adamou Gado Ramatou, Dr. en Science Politique, Université Toulouse 1 CapitoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2107492023-08-01T10:58:34Z2023-08-01T10:58:34ZQu'est-ce qui a été à l'origine du coup d'Etat au Niger? Un expert énumère trois facteurs déterminants<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/540390/original/file-20230801-15-xj7o8h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le général Abdourahamane Tchiani, du Niger, se déclare chef de l'État le 28 juillet 2023.</span> <span class="attribution"><span class="source">ORTN-Télé Sahel/AFP via Getty Images</span></span></figcaption></figure><p>Lors d'une réunion d'urgence à Abuja le 30 juillet, la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) a <a href="https://www.reuters.com/world/africa/pro-coup-protests-niger-west-african-leaders-meet-2023-07-30/">exigé</a> la “libération immédiate et le rétablissement” du président élu du Niger, Mohamed Bazoum, détenu par les militaires depuis le 19 juillet.</p>
<p>L'organisation régionale a donné aux militaires nigériens un <a href="https://www.aljazeera.com/news/2023/7/30/west-african-govts-give-niger-coup-leaders-a-week-to-cede-power">ultimatum d'une semaine</a> pour s'y conformer et a averti qu'il prendrait toutes les mesures nécessaires, y compris la force, pour rétablir l'ordre constitutionnel. </p>
<p>Le 28 juillet, le chef de la garde présidentielle du Niger, le général Abdourahamane Tchiani, s'est <a href="https://www.ft.com/content/f3cfd0d7-84fc-4773-b681-67bdac7d997f">autoproclamé</a> chef de l'État après la prise du pouvoir par les militaires. </p>
<p>Au-delà de la mise en garde contre toute intervention régionale ou étrangère, les chefs militaires nigériens n'ont donné aucune indication sur la voie à suivre. </p>
<p>Ce coup d'État aura une incidence significative sur la paix et la stabilité au Niger et dans toute la région du Sahel. </p>
<p>Bien que le Niger ait récemment connu son plus long régime démocratique depuis l'indépendance, la menace d'un coup d'État a toujours été présente. Lorsque Bazoum a été élu président en 2021, une <a href="https://www.bbc.co.uk/news/world-africa-56589168">tentative de coup d'État</a> a eu lieu environ 48 heures avant son investiture. Elle a échoué car la garde présidentielle a repoussé les putschistes. </p>
<p>Comme je l'ai <a href="https://theconversation.com/botched-coup-in-niger-points-to-deep-fissures-in-the-country-158330">expliqué</a> à l'époque, la tentative de coup d'État a révélé de profondes divisions dans le pays. Je soulignais que les militaires n'avaient pas pleinement adhéré à la démocratie. </p>
<p>Les putschistes actuels pour se justifier ont invoqué le prétexte de l'insécurité grandissante et l'absence de croissance économique. Ils <a href="https://www.reuters.com/world/africa/soldiers-nigers-presidential-guard-blockade-presidents-office-security-sources-2023-07-26/">ont déclaré</a> que l'intervention était nécessaire pour éviter “la destruction progressive et inévitable” du pays. Je pense toutefois que d'autres facteurs ont précipité le dernier coup d'État. Il s'agit de la question ethnique, de la présence de forces étrangères et de la faiblesse des organismes régionaux.</p>
<h2>Quels sont les facteurs qui ont conduit au coup d'État ?</h2>
<p>Il ne fait aucun doute que la montée de l'insécurité et <a href="https://www.worldbank.org/en/country/niger/overview">la dégradation des perspectives économiques</a> ont contribué à fragiliser le pays. </p>
<p>Malgré l'augmentation de l'effectif des forces étrangères, en particulier des <a href="https://theintercept.com/2023/02/20/niger-military-base-contractor/">États-Unis</a>, de la <a href="https://www.reuters.com/world/africa/which-western-countries-have-foreign-forces-niger-2023-07-28/#:%7E:text=FRANCE,en%2021%20et%2022%2C%20respectivement.">France</a> et des bases militaires au Niger, les dirigeants n'ont pas été en mesure de mettre fin aux attaques des insurgés. </p>
<p>Plusieurs groupes d'insurgés, tels que les affiliés d’<a href="https://www.britannica.com/topic/al-Qaeda">Al-Qaïda</a> et de <a href="https://www.bbc.co.uk/news/world-middle-east-29052144">l'État islamique</a>, ainsi que <a href="https://www.dni.gov/nctc/groups/boko_haram.html#:%7E:text=Boko%20Haram%2C%20qui%20fait%20r%C3%A9f%C3%A9rence%20%C3%A0,remplace%20il%20par%20un%20r%C3%A9gime">Boko Haram</a>, opèrent dans le pays. </p>
<p>Ces attaques ont fait <a href="https://www.cfr.org/global-conflict-tracker/conflict/violent-extremism-sahel">des milliers de morts et de déplacés</a> au cours de la dernière décennie. Dans la capitale, Niamey, des centaines de jeunes se sont <a href="https://www.aljazeera.com/news/2023/7/28/power-impasse-continues-in-niger-48-hours-after-coup">rassemblés pour célébrer</a> le coup d'État de juillet, en brandissant des drapeaux russes et en scandant “Wagner”. Cela suggère que certains Nigériens pensent que l'armée, soutenue par la Russie et la société militaire privée, <a href="https://www.bbc.co.uk/news/world-60947877">le groupe Wagner</a>, serait plus efficace dans la lutte contre les insurgés.</p>
<p>Outre l'insécurité et la stagnation économique, trois autres facteurs permettent d'expliquer le récent coup d'État.</p>
<p>Tout d'abord, le débat sur l'ethnicité et la légitimité de Bazoum a été un enjeu lors de la dernière campagne électorale. Bazoum appartient à la minorité ethnique arabe du Niger et a toujours été <a href="https://www.africanews.com/2021/02/19/who-is-nigerien-presidential-candidate-mohamed-bazoum/">étiqueté</a> comme ayant des origines étrangères. </p>
<p>Cela n'a pas été accepté au sein de l'armée, qui est principalement composée d'autres groupes ethniques plus importants, même si Bazoum a obtenu <a href="https://www.aljazeera.com/news/2021/3/22/nigers-top-court-confirms-mohamed-bazoums-election-win">environ 56 %</a> des voix et qu'il appartient au même parti que l'ancien président Issoufou. </p>
<p>On accorde beaucoup d'importance à la composition ethnique de l'armée dans le pays, ce qui a permis à Issoufou de terminer ses deux mandats de président. Les nominations dans l'armée se font <a href="https://theconversation.com/botched-coup-in-niger-points-to-deep-fissures-in-the-country-158330">selon des critères ethniques</a>. </p>
<p>Deuxièmement, le grand nombre de troupes et de bases militaires étrangères dans le pays n'a pas été bien accueilli par les militaires. Ils pensent que cela les affaiblit. Le Niger est un allié clé des pays occidentaux dans la lutte contre l'insurrection dans la région. Les <a href="https://www.africanleadershipmagazine.co.uk/france-eyes-africas-mining-industry-with-550m-investment/">énormes investissements</a> de la France dans le secteur minier du Niger sont une raison supplémentaire de son intérêt pour la sécurité. </p>
<p>En 2019, les États-Unis ont ouvert une <a href="https://theintercept.com/2023/02/20/niger-military-base-contractor/">base de drones</a> au Niger malgré les protestations. Comme je l'ai déjà <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/03071847.2018.1552452">souligné</a>, la base de drones pourrait faire du Niger une cible pour les terroristes et accroître l'instabilité. </p>
<p>En 2022, la France et d'autres alliés européens ont retiré leurs forces du Mali voisin. Bazoum s'est empressé de les inviter au Niger. Le <a href="https://www.aljazeera.com/news/2022/2/18/after-mali-exit-niger-accepts-foreign-forces-to-secure-border">commandement militaire nigérien</a> et certaines personnes influentes dans le pays ont dénoncé l'augmentation des forces étrangères. </p>
<p>Troisièmement, je pense que l'échec des organisations régionales telles que la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'OUest (CEDEAO) et l'Union africaine à prendre une position ferme contre les prises de pouvoir militaires en Guinée, au Burkina Faso et au Mali a donné des ailes aux militaires nigériens. Les dirigeants de la CEDEAO ont <a href="https://www.africanews.com/2023/07/31/ecowas-leaders-give-niger-one-week-ultimatum-to-restore-president/">menacé de recourir à la force</a> pour rétablir Bazoum si les auteurs du coup d'État ne le rétablissent pas dans ses fonctions. </p>
<p>Au cours des quatre dernières années, il y a eu <a href="https://theconversation.com/why-west-africa-has-had-so-many-coups-and-how-to-prevent-more-176577">sept coups d'État</a> dans la région. Trois d'entre eux ont été couronnés de succès. Les dirigeants de la CEDEAO et de l'Union africaine ont menacé ces trois pays de sanctions, mais rien n'a été fait pour dissuader d'autres chefs militaires opportunistes. </p>
<p>Lors d'une table ronde organisée par le groupe de réflexion Chatham House London sur l'impact des interventions militaires en Afrique de l'Ouest, l'un des dirigeants de la région a déclaré qu'il avait gardé les voies de communication ouvertes avec les trois présidents militaires par courtoisie. Cela laisse penser qu'il n'y a pas de dissuasion pour coups d'Etat militaires. </p>
<h2>Les conséquences pour le Niger et la région</h2>
<p>Le dernier coup d'État a de graves conséquences pour le Niger et l'ensemble de la région du Sahel. Le Niger est un allié solide des pays occidentaux, en particulier de la France, les États-Unis et de l'Union européenne, dans la lutte contre l'insurrection et la réduction de l'immigration clandestine vers l'Europe. </p>
<p>Les efforts déployés pour résoudre ces problèmes en seront affectés. Et les nouveaux chefs militaires voudront utiliser ces questions comme levier dans les négociations et pour imposer l'acceptation du nouveau régime. </p>
<p>Les nouveaux dirigeants du Niger pourraient également collaborer avec le groupe Wagner pour lutter contre l'insurrection islamiste. Le chef du groupe les a déjà <a href="https://www.reuters.com/world/europe/exiled-russian-mercenary-boss-prigozhin-hails-niger-coup-touts-services-2023-07-28/">félicités</a> d'avoir pris le pouvoir. L'influence de la Russie et de Wagner dans la région pourrait s'accroître. </p>
<p>Pourtant, Wagner n'a pas été en mesure d'arrêter la progression du terrorisme au Mali et au Burkina Faso. </p>
<p>Enfin, une prise de pouvoir militaire réussie au Niger serait un sérieux revers pour la démocratie dans la région et en Afrique dans son ensemble. Les régimes militaires de Guinée, du Mali et du Burkina Faso envisagent déjà <a href="https://www.reuters.com/world/africa/burkina-faso-guinea-mali-juntas-plan-three-way-partnership-2023-02-10/">de former une “alliance militaire”</a>, censée lutter contre l'insécurité. </p>
<p>Les dirigeants africains doivent faire davantage pour prouver qu'ils travaillent pour les populations.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210749/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Olayinka Ajala does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>La politique ethnique, la présence de troupes étrangères et les faiblesses des réponses aux coups d'État précédentes ont encouragé la récente prise du pouvoir par les militaires.Olayinka Ajala, Senior lecturer in Politics and International Relations, Leeds Beckett UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2083352023-06-26T06:24:05Z2023-06-26T06:24:05ZElections en Sierra Leone : une enquête révèle ce qui intéresse le plus les électeurs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/533778/original/file-20230623-21-3izgt9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un homme vote dans un bureau de vote à Freetown lors des élections générales de 2018.</span> <span class="attribution"><span class="source">Issouf Sanogo/AFP via Getty Images</span></span></figcaption></figure><p>Les Sierra-Léonais se rendront à nouveau aux urnes le <a href="https://abcnews.go.com/International/wireStory/sierra-leone-gears-presidential-election-amid-economic-crisis-100176174">24 juin</a>, pour la cinquième élection post-conflit du pays.</p>
<p>Depuis plus de deux décennies après la <a href="https://www.blackpast.org/global-african-history/sierra-leone-civil-war-1991-2002/">guerre civile</a>, la Sierra Leone a connu des élections multipartites relativement libres et équitables. </p>
<p>La course à la présidence de 2023 est une revanche de 2018 qui va opposer le <a href="https://slembassy-germany.org/?page_id=140">président sortant Julius Maada Bio</a> du <a href="https://slpp.sl/">Sierra Leone People’s Party</a> et <a href="https://twitter.com/samurakamara201?lang=en">Samura Kamara</a> du <a href="https://www.britannica.com/topic/All-Peoples-Congress">All People’s Congress</a>. Les 132 sièges de députés et de conseillers locaux sont également en jeu. </p>
<p>Nous nous sommes appuyés sur des <a href="https://www.afrobarometer.org/">données d'Afrobaromètre</a> récemment collectées pour donner un aperçu de la façon dont les Sierra-Léonais perçoivent la démocratie et les performances du gouvernement, ainsi que les principaux enjeux des élections. </p>
<p>Il semble qu'il y ait un large consensus, quel que soit l'âge, sur le fait que la gestion économique, les pénuries alimentaires, les services de santé, les infrastructures et l'éducation sont les questions les plus urgentes. </p>
<p>Le pays a été confronté à des <a href="https://www.wfp.org/countries/sierra-leone">pénuries alimentaires</a>, à une <a href="https://www.worldbank.org/en/country/sierraleone/overview#:%7E:text=Headline%20inflation%20moyaged%2027%25%20in,tightened%20its%20monetary%20policy%20.">forte inflation</a> et à un <a href="https://data.worldbank.org/indicator/SL.UEM.1524.ZS?locations=SL">chômage élevé</a>. </p>
<p>Le président Bio a <a href="https://www.aljazeera.com/features/2023/6/1/familiar-faces-concerns-linger-ahead-of-sierra-leones-june-vote">promis</a> un programme de création d'emplois visant à améliorer l'emploi des jeunes. L'opposant Kamara s'est fait l'écho de cette promesse et a critiqué le parti au pouvoir pour sa mauvaise gestion économique. </p>
<h2>Une nouvelle génération d'électeurs</h2>
<p>Afrobaromètre mène des enquêtes d'opinion sur la démocratie, la gouvernance, l'économie et la société par le biais d'entretiens en tête-à-tête avec 1 200 citoyens dans près de 40 pays africains. </p>
<p>Pour cette analyse, nous nous appuyons principalement sur les <a href="https://www.afrobarometer.org/">données Afrobaromètre</a> collectées en juin et juillet 2022 en Sierra Leone. Nous utilisons également des données remontant à 2012 pour décrire les tendances longitudinales.</p>
<p>Les élections de 2023 en Sierra Leone sont particulièrement intéressantes car une grande partie de la génération d'après-guerre votera pour la première fois depuis le retour du pays à des élections multipartites en 2002. </p>
<p>Nous avons accordé une attention particulière aux différences entre les citoyens qui sont devenus adultes après la fin de la guerre civile (18-35 ans) et les plus âgés;</p>
<p>Le tableau X ci-dessous montre le problème le plus important auquel sont confrontés les Sierra-Léonais, selon les différentes tranches d'âge.** </p>
<p>Par rapport aux autres groupes d'âge, la jeune génération semble être légèrement plus préoccupée par la gestion économique et moins préoccupée par la qualité des services de santé. </p>
<p>L'une des lacunes des données d'Afrobaromètre est que nous ne sommes pas en mesure de préciser les opinions des personnes âgées de 21 ans et moins. L'enquête les a placées dans un groupe avec les personnes âgées de 35 ans et moins. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/532803/original/file-20230620-19-lvp5er.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/532803/original/file-20230620-19-lvp5er.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=470&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/532803/original/file-20230620-19-lvp5er.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=470&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/532803/original/file-20230620-19-lvp5er.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=470&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/532803/original/file-20230620-19-lvp5er.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=591&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/532803/original/file-20230620-19-lvp5er.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=591&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/532803/original/file-20230620-19-lvp5er.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=591&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Figure X.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Soutien à la démocratie, aux élections et à la concurrence multipartite</h2>
<p>Les Sierra-Léonais ont fait preuve d'un niveau d'engagement démocratique (tableau 1) : 84 % soutiennent la démocratie, affirmant qu'elle est toujours préférable à d'autres formes de gouvernement. </p>
<p>Le recul de la démocratie s'est produit dans de nombreux pays à travers le monde. Cependant, au cours de la dernière décennie, 89 % des personnes interrogées en Sierra Leone ont préféré choisir leurs dirigeants lors d'élections régulières, ouvertes et sincères. </p>
<p>En ce qui concerne le choix entre les différents partis en lice, les résultats sont plus mitigés. La proportion de citoyens favorable à la compétition entre partis varie dans le temps, passant de seulement 54 % en 2012 à 64 % en 2015. Elle est retombée légèrement au-dessus de la moitié du pays (54 %) en 2022. Cependant, les jeunes sont plus nombreux à être favorables à la compétition entre les partis (59 %) par rapport aux citoyens plus âgés (41 %). </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/532388/original/file-20230616-17-5b29pm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/532388/original/file-20230616-17-5b29pm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=297&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/532388/original/file-20230616-17-5b29pm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=297&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/532388/original/file-20230616-17-5b29pm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=297&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/532388/original/file-20230616-17-5b29pm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=373&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/532388/original/file-20230616-17-5b29pm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=373&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/532388/original/file-20230616-17-5b29pm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=373&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Table.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Tableau 1. Perception de la demande et de l'offre démocratiques en Sierra Leone</p>
<p>Environ huit personnes sur dix ont déclaré que les dernières élections nationales avaient été “libres et équitables” ou “avaient des problèmes mineurs seulement”. </p>
<p>En revanche, seulement un peu plus de la moitié des personnes interrogées ont déclaré être “assez” ou “très” satisfaites de la façon dont la démocratie fonctionne pour elles en 2022. Ce sentiment est pratiquement le même pour toutes les tranches d'âge. </p>
<h2>Quelles sont les performances du gouvernement?</h2>
<p>Les décisions de vote sont souvent liées aux performances du gouvernement, en particulier par rapport à la gestion économique et aux services de base.</p>
<p>En ce qui concerne les évaluations populaires par rapport aux performances du gouvernement au cours des dernières années, le tableau 2 montre que les résultats sont résolument mitigés. Une majorité de Sierra-Léonais ont déclaré que le gouvernement avait fait moins bien qu'il y a dix ans en matière de gestion de l'économie ou de gestion de l'approvisionnement en eau. En revanche, ils semblent plus positifs en ce qui concerne la gestion de l'éducation par le gouvernement.</p>
<p>Depuis l'arrivée au pouvoir du Sierra Leone People’s Party en 2018, trois citoyens sur quatre sont satisfaits des performances du gouvernement dans ce secteur. Leur évaluation des services de santé est également devenue plus positive, mais la différence est moins marquée.</p>
<p>Les Sierra-Léonais sont partagés sur la gestion par le gouvernement des infrastructures physiques telles que les routes et les ponts (49 % d'opinions positives, 50 % d'opinions négatives). Ces évaluations étaient très cohérentes entre les groupes d'âge (résultats non illustrés ici).</p>
<p>Tableau 2. Gestion par le gouvernement des questions suivantes :</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/532389/original/file-20230616-15-xp61v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/532389/original/file-20230616-15-xp61v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=635&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/532389/original/file-20230616-15-xp61v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=635&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/532389/original/file-20230616-15-xp61v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=635&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/532389/original/file-20230616-15-xp61v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=798&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/532389/original/file-20230616-15-xp61v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=798&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/532389/original/file-20230616-15-xp61v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=798&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Table.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Quelles sont les questions qui intéressent le plus les Sierra-Léonais ?</h2>
<p>Les élections ne sont pas seulement une évaluation des performances du gouvernement actuel, mais aussi un vote sur la capacité des candidats à s'attaquer aux problèmes les plus urgents du pays. </p>
<p>Selon les données d'Afrobaromètre, les questions économiques sont en tête des préoccupations de la plupart des Sierra-Léonais. (Tableaux 1 et 2 ci-dessous) </p>
<p>En 2022, 38 % des citoyens ont connu des périodes sans nourriture au moins plusieurs fois au cours de l'année précédente. Le Programme alimentaire mondial estime que <a href="https://www.wfp.org/countries/sierra-leone">57 %</a> des habitants de la Sierra Leone tombent dans l'insécurité alimentaire. </p>
<p>Bien que les soins de santé (31 %), les infrastructures (27 %) et l'éducation (23 %) demeurent les principaux sujets de préoccupation des citoyens, ils ont tous perdu en importance au cours des dernières années (Figure 2). Les jeunes adultes sont largement d'accord avec leurs aînés sur les questions les plus urgentes (à l'exception en partie des soins de santé).</p>
<p>Figure 1. Problème le plus important auquel le gouvernement devrait s'attaquer (3 principales réponses)</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/532390/original/file-20230616-29-5osyxg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/532390/original/file-20230616-29-5osyxg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/532390/original/file-20230616-29-5osyxg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/532390/original/file-20230616-29-5osyxg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/532390/original/file-20230616-29-5osyxg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/532390/original/file-20230616-29-5osyxg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/532390/original/file-20230616-29-5osyxg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Top responses.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Problèmes de campagne</h2>
<p>D'après son <a href="https://twitter.com/PresidentBio">profil Twitter</a>, M. Bio a fait campagne dans tout le pays, organisant des rassemblements dans les quatre provinces et dans les districts ruraux et urbains de la région de l'Ouest. </p>
<p>Il a promis une transformation économique durable, une éducation de qualité gratuite et un quota de représentation des femmes de 30 % en vertu de la loi. Il a mis l'accent sur la productivité agricole, les normes sanitaires et de santé, l'emploi des jeunes et des femmes, et les infrastructures. </p>
<p>Les <a href="https://www.aljazeera.com/news/2023/5/3/sierra-leone-ratifies-candidacy-of-president-opposition-leader">propos de campagne de M. Kamara </a> ont largement porté sur les questions économiques. Il a mis en avant un message politique inclusif et a attaqué certaines institutions politiques pour leur incompétence.</p>
<p>Son <a href="https://twitter.com/samurakamara201">activité sur Twitter</a> a été beaucoup plus sporadique, mais il a également fait campagne dans les districts ruraux et urbains de la région de l'Ouest. </p>
<p>Figure 2. Évolution sur les la question les plus importantes, de 2020 à 2022</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/532407/original/file-20230616-19-r0m0kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/532407/original/file-20230616-19-r0m0kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=508&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/532407/original/file-20230616-19-r0m0kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=508&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/532407/original/file-20230616-19-r0m0kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=508&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/532407/original/file-20230616-19-r0m0kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=638&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/532407/original/file-20230616-19-r0m0kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=638&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/532407/original/file-20230616-19-r0m0kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=638&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Change in important issues.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Conclusion</h2>
<p>L'une des questions en suspens sera le procès pour corruption auquel Kamara est confronté. Des <a href="https://www.reuters.com/world/africa/sierra-leone-indicts-opposition-front-runner-alleged-corruption-2021-11-26/">accusations</a> ont été portées contre lui en novembre 2021 pour des malversations présumées alors qu'il était <a href="https://allafrica.com/stories/202203140715.html">ministre des Affaires étrangères</a> en 2016. </p>
<p>L'affaire a été <a href="https://www.barrons.com/news/opposition-candidate-in-sierra-leone-clears-hurdle-for-election-bid-40edd911">ajournée</a> jusqu'après les élections, ce qui lui permet de rester en lice. </p>
<p>Relativement, la corruption n'est pas un problème majeur, pour la plupart des Sierra-Léonais. </p>
<p>Dans l'ensemble, si tous les groupes d'âge sont attachés à la démocratie, et si les jeunes citoyens en particulier semblent être en faveur d'un paysage composé de partis compétitifs, seule la moitié du pays est satisfaite du fonctionnement de la démocratie. </p>
<p>Il sera donc particulièrement important que les prochaines élections soient libres et équitables et que les vainqueurs renforcent la démocratie dans le pays.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/208335/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Isbell travaille pour Afrobarometer.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Matthias Krönke and Robert Nyenhuis do not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and have disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>La gestion économique, les pénuries alimentaires, les services de santé, les infrastructures et l'éducation sont des questions clés qui pourraient influencer le vote des Sierra-Léonais le 24 juin.Robert Nyenhuis, Associate Professor, Department of Political Science, California State Polytechnic University, PomonaMatthias Krönke, PhD student in the Department of Political Studies, University of Cape TownThomas Isbell, Post-doctoral research fellow, University of Cape TownLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2044642023-05-15T09:53:10Z2023-05-15T09:53:10ZCameroun : la liberté de la presse mise à mal - voici comment y remédier<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/525882/original/file-20230512-27-28dwi7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une cérémonie d'hommage au journaliste Martinez Zogo.</span> <span class="attribution"><span class="source">Daniel Beloumou/AFP via Getty Images</span></span></figcaption></figure><p>Le journaliste camerounais <a href="https://www.france24.com/fr/%C3%A9missions/focus/20230503-au-cameroun-les-journalistes-vivent-dans-la-peur-depuis-l-assassinat-de-martinez-zogo">Martinez Zogo a été retrouvé mort</a> le 22 janvier, après avoir été enlevé le 17 janvier 2023, à Yaoundé. L'enquête de la police a abouti à l’<a href="https://rsf.org/fr/assassinat-de-martinez-zogo-au-cameroun-r%C3%A9cit-de-l-arrestation-de-l-un-des-commanditaires-pr%C3%A9sum%C3%A9s">arrestation</a> de plusieurs personnes de haut rang fortement soupçonnées d'être liées ou impliquées dans ce crime odieux. D'après le gouvernement, Martinez Zogo a subi <a href="https://www.aa.com.tr/fr/afrique/cameroun-assassinat-du-journaliste-martinez-zogo-le-gouvernement-annonce-l-ouverture-d-une-enqu%C3%AAte/2794972">“d'importants sévices”</a> au moment de sa mort. </p>
<p>Cet assassinat a suscité une <a href="https://www.hrw.org/fr/news/2023/01/27/cameroun-meurtre-dun-eminent-journaliste-dinvestigation">condamnation générale</a> de la part des organisations de défense des droits humains et des militants de la liberté de la presse qui sont très préoccupés par la situation.</p>
<p>La liberté d'expression et la libre circulation de l'information sont des éléments essentiels au développement d'une société démocratique. Dans une telle société, les journalistes et les médias contribuent à la transparence et la responsabilité des autorités publiques et gouvernementales. </p>
<p>Les médias constituent également un forum de discussion et de débat, contribuent à l'élaboration d'un consensus social et donnent une voix à ceux qui n'en ont pas. Pour travailler efficacement, les journalistes ont donc besoin de <a href="https://uni.oslomet.no/mekk/conferences/safety-of-journalists-digital-safety-2019/paper-sessions/">sûreté et de sécurité, ainsi que d'un environnement de travail favorable</a>. </p>
<p>Or, de plus en plus de journalistes sont tués dans des pays qui ne sont pas en guerre, et de plus en plus souvent alors qu'ils enquêtent sur des questions sensibles telles que la corruption débridée, <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/23743670.2020.1725777?journalCode=recq21">les détournements de fonds, le crime organisé et la mauvaise gouvernance</a>. </p>
<p>L'une des choses les plus dangereuses et les plus périlleuses que les journalistes puissent faire est de couvrir ou de rapporter les conflits, les abus de pouvoir et la corruption débridée dans leur pays d'origine. </p>
<p>Martinez Zogo a été délibérément pris pour cible pour avoir utilisé son émission de radio afin de dénoncer la corruption et les pratiques illégales impliquant des personnalités publiques. Martinez <a href="https://www.hrw.org/news/2023/01/27/cameroon-prominent-investigative-journalist-killed">a cité les noms de toutes les personnes soupçonnées</a> d'avoir commis des actes répréhensibles. Ce qui lui a valu la fureur et le marteau répressif de ceux qu'il a démasqués. </p>
<p>Dans cet article, j'analyse les obligations internationales contraignantes auxquelles le Cameroun a souscrit en matière de liberté d'expression et de presse. J'examine également les mesures pouvant atténuer les risques et la violence auxquels les journalistes sont confrontés, en tirant les leçons de l'assassinat de Martinez Zogo. </p>
<h2>Les médias comme chien de garde</h2>
<p>Martinez Zogo animait <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20230121-cameroun-le-gouvernement-r%C3%A9agit-%C3%A0-la-disparition-du-journaliste-martinez-zogo">l'émission d'actualité “Embouteillage”</a> sur la radio <em>Amplitude</em>, où il abordait des sujets sensibles, notamment la corruption débridée et les pratiques illégales impliquant des personnalités publiques. Afin de préserver la contribution des médias au débat public, les journalistes sont censés travailler sans menace et devraient pouvoir compter sur un niveau élevé de protection et de sécurité. </p>
<p>Les médias camerounais sont l'un des moyens par lesquels les dirigeants politiques, les milieux d'affaires et l'opinion publique peuvent vérifier que les ressources de l'État sont dépensées conformément aux principes de transparence et de responsabilité, et ne sont pas utilisées pour enrichir certains individus. Ainsi, l'enlèvement et l'assassinat de Martinez pour ses critiques, les révélations concernant des agents publics ou l'exposition d'actes répréhensibles ou de corruption demeurent une violation flagrante et une ingérence dans la liberté d'expression et de la presse. Ils ont <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/23743670.2019.1703776?src=recsys">un dangereux effet paralysant</a>, qui tend à dissuader les médias et leurs professionnels, les dénonciateurs et d'autres personnes de prendre part à la discussion sur des questions d'intérêt public. </p>
<h2>Marteau repressif de l'Etat</h2>
<p>Le cas de Martinez n'est pas nouveau. De nombreux journalistes camerounais ont subi la fureur et le marteau répressif de l'État pour avoir pratiqué un journalisme de surveillance ou utilisé les médias pour critiquer les institutions de l'État et leurs activités. Par exemple, en 2019, <a href="https://rsf.org/fr/cameroun-le-journaliste-samuel-wazizi-est-bien-mort-pendant-sa-d%C3%A9tention">Samuel Wazizi est mort </a>en détention à Yaoundé. Le 22 avril 2010, le rédacteur en chef de <em>Cameroon Expression</em>,<a href="https://www.jeuneafrique.com/154952/politique/le-journaliste-bibi-ngota-serait-il-d-c-d-suite-des-tortures/"> Ngota Ngota Germain</a>, est mort à la prison centrale de Kondengui. </p>
<p>De nombreux journalistes camerounais dont Mimi Mefo, Ahmed Abba et Mancho Bibix ont été arrêtés et détenus en vertu de la <a href="http://www.minjustice.gov.cm/index.php/fr/textes-lois/lois/382-loi-n-2014-28-du-23-decembre-2014-portant-repression-des-actes-de-terrorisme">loi antiterroriste de 2014</a> et de <a href="https://2019.landhumanrights.org/ponencia/the-trumping-effect-of-anti-terrorism-legislations-the-case-of-cameroon/">l'éclatement du conflit anglophone au Cameroun en 2016</a>. Le Cameroun est <a href="https://panafricanvisions.com/2023/01/cameroon-third-worse-jailer-of-african-journalists-in-2022-cpj/">le troisième pays d'Afrique qui emprisonne le plus de journalistes</a>, après l'Égypte et l'Érythrée. Le Cameroun est actuellement classé 135e sur 180 pays <a href="https://rsf.org/fr/pays-cameroun">classé 138e sur 180</a>. </p>
<p>Même dans les sociétés hautement démocratiques comme en Europe, les journalistes d'investigation comme du type Martinez Zogo sont attaqués. <a href="https://fr.euronews.com/2021/07/15/le-journaliste-neerlandais-peter-r-de-vries-a-succombe-a-ses-blessures-par-balles">Peter R. De Vries</a>, célèbre journaliste d'investigation et chroniqueur judiciaire néerlandais, a été abattu d'une balle dans la tête à Amsterdam. Il a succombé à ses blessures le 15 juillet 2021. Le journaliste grec spécialisé dans le crime organisé, <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2021/04/09/george-karaivaz-journaliste-grec-specialise-dans-les-affaires-criminelles-abattu-a-athenes_6076237_3210.html">Giorgos Karaivaz, a été abattu en plein jour à Athènes le 9 avril 2021</a>. Daphné Caruana Galizia, écrivain, blogueuse, journaliste et militante anticorruption maltaise, <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/07/05/assassinat-de-daphne-caruana-galizia-george-degiorgio-principal-suspect-affirme-avoir-tue-la-journaliste-maltaise_6133508_3210.html">est décédée </a>près de son domicile lorsqu'une voiture piégée a explosé. Une <a href="https://rsf.org/en/dutch-crime-reporter-fourth-journalist-murdered-many-years-european-union">vingtaine de journalistes</a> vivent actuellement sous protection policière permanente en Italie. </p>
<h2>Respect des obligations internationales</h2>
<p>Compte tenu de la pertinence et de l'importance de la liberté d'expression et de presse en tant qu'exigence et condition préalable au fonctionnement de la démocratie camerounaise, l'exercice de ces libertés ne dépend pas uniquement de l'impartialité de l'Etat. Elle <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/23743670.2019.1703776?src=recsys">peut nécessiter</a> des mesures positives de protection formalisées dans un <a href="https://www.eods.eu/library/UN_ICCPR_1966_FR.pdf">cadre juridique</a>.</p>
<p>Le Cameroun a ratifié <a href="https://tbinternet.ohchr.org/_layouts/15/TreatyBodyExternal/Treaty.aspx?CountryID=30&Lang=en">ce pacte le 27 juin 1984</a>. Il est donc tenu de remplir une série d'obligations positives, autrement dit de respecter des mesures juridiques, administratives et pratiques visant à assurer la sécurité des journalistes. En outre, le Cameroun, a ratifié la <a href="https://au.int/sites/default/files/treaties/36390-treaty-0011_-_african_charter_on_human_and_peoples_rights_f.pdf">Charte africaine des droits de l'homme et des peuples</a>, le <a href="https://achpr.au.int/en/state-reports/concluding-observations-and-recommendations-cameroon-2nd-periodic-report-200">20 juin 1989 </a>. Il est donc obligé de se conformer à la <a href="https://agp.africanlii.org/akn/aa-au/statement/resolution/achpr/2020/468/eng@2020-12-03">Résolution sur la sécurité des journalistes et des professionnels des média</a>. </p>
<p>Ainsi, le Cameroun a des obligations contraignantes en vertu du droit national (Constitution) et du droit international en ce qui concerne la sécurité et la protection des journalistes. Les États parties à ces traités doivent veiller à ce que leurs principes soient maintenus et respectés, non seulement au niveau national, mais aussi au niveau universel. </p>
<h2>Comment atténuer les risques?</h2>
<p>Pour inverser cette tendance et en vertu de ses engagements, le Cameroun doit : </p>
<ul>
<li><p>respecter ses obligations internationales en matière de sécurité et de protection des journalistes;</p></li>
<li><p>renforcer les mesures de protection des journalistes et des autres professionnels des médias, en particulier ceux qui travaillent sur des questions liées au crime organisé et à la corruption. </p></li>
<li><p>mener des enquêtes approfondies sur les crimes commis à l'encontre de journalistes victimes du crime organisé, afin de s'assurer que les responsables soient traduits en justice.</p></li>
</ul>
<p>Des programmes intensifs de formation à la sécurité sont également nécessaires pour assurer la sécurité des journalistes lors des manifestations, des conflits et des guerres. Les organisations de médias, les ONG et les agences gouvernementales doivent veiller à ce que des programmes de formation réguliers sur la sécurité soient disponibles. Par exemple, les employeurs et les salles de rédaction peuvent proposer une formation à la sécurité pour les reporters et les équipes de journalistes, notamment en ce qui concerne les manœuvres d'évitement et l'élaboration d'un plan d'intervention standard en matière de sécurité. </p>
<p>Il est également essentiel d'aborder la formation à la sécurité psychologique (reconnaissance des traumatismes et techniques d'auto-assistance).</p>
<p>Les journalistes doivent être constamment assurés et bénéficier d'une sécurité physique, c'est-à-dire d'équipements tels que des gilets pare-balles, des casques, des trousses de premiers secours, etc. Le gouvernement, les employeurs et les salles de presse devraient fournir aux équipes de journalistes et aux journalistes une sécurité privée, une police permanente ou une protection.</p>
<p>Il convient d'insister sur la nécessité de renforcer la solidarité pour assurer la sécurité des journalistes au-delà des frontières nationales. La coopération et la collaboration transfrontalières, y compris le partage d'informations, de techniques et de stratégies de prévention, de bonnes pratiques avec les journalistes d'investigation et les salles de rédaction, pourraient contribuer à combattre ou à atténuer la culture de l'impunité à l'égard des journalistes au Cameroun.</p>
<p>Il faut mettre en place un comité national pour la protection et la sécurité des journalistes. Ce comité devrait être composé de représentants du gouvernement, des journalistes, des forces de l'ordre, du pouvoir judiciaire et de la société civile. Le comité devrait avoir pour objectif principal de travailler ensemble pour s'assurer que les journalistes du Cameroun travaillent dans un environnement exempt de menaces et de violence.</p>
<h2>Conclusion</h2>
<p>Les risques auxquels sont confrontés les journalistes d'Afrique subsaharienne dans l'exercice de leur profession ne se limitent pas à ceux qui apparaissent dans les classements des organisations internationales. Si les mécanismes coercitifs de l'État ou des fonctionnaires sont indéniables, une meilleure sécurité et protection des journalistes africains, <a href="https://intellectdiscover.com/content/journals/10.1386/jams.6.2.181_1">confrontés à des risques professionnels quotidiens</a>, nécessite une approche plus holistique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204464/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Peter Tiako Ngangum does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Des programmes intensifs de formation à la sécurité sont nécessaires pour assurer la sécurité des journalistes lors des manifestations, des conflits et des guerres.Peter Tiako Ngangum, Chercheur en information et communication, Université Libre de Bruxelles (ULB)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1841142022-05-31T18:59:09Z2022-05-31T18:59:09ZLe métier de diplomate aujourd’hui<p>Les diplomates du Quai d’Orsay sont en émoi. Un décret publié au <em>Journal officiel</em> le 17 avril 2022 fixe la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045592729">« mise en extinction »</a> progressive de deux corps historiques de la diplomatie française : celui des ministres plénipotentiaires et celui des conseillers des Affaires étrangères. Jusqu’ici, c’est au sein de ces deux corps qu’étaient choisis les ambassadeurs et les consuls généraux.</p>
<p>Désormais, les diplomates rejoindront un nouveau corps des administrateurs de l’État, où l’on retrouvera tous les hauts fonctionnaires. C’est la fin des <a href="https://journals.openedition.org/sociologies/2936?lang=en">diplomates de carrière</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1515617277621768192"}"></div></p>
<p>Place à l’interchangeabilité. Un directeur des services fiscaux d’un département pourra devenir ambassadeur à Lima, et un diplomate en poste à Pretoria pourra se retrouver directeur des douanes à Marseille. Or la diplomatie est un métier et ce métier exige un long apprentissage. Cette réforme fait craindre des parachutages et autres nominations politiques. La perspective d’une carrière diplomatique au long cours est compromise, voire impossible.</p>
<p>À la suite de cette annonce, un appel à la grève a été lancé par les diplomates français, pour la première fois depuis vingt ans. La nouvelle ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna aura donc à gérer, le 2 juin 2022, la fronde des agents du Quai d’Orsay, qui expliquent dans une <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/05/25/reforme-du-quai-d-orsay-nous-faisons-face-a-un-risque-de-disparition-de-notre-diplomatie-professionnelle_6127641_3232.html">tribune publiée par <em>le Monde</em></a> que « c’est l’existence même du ministère qui est désormais remise en question ».</p>
<p>Sur les réseaux sociaux, c’est le hashtag <a href="https://twitter.com/search?q=%23diplo2m%C3%A9tie">#diplo2métier</a> qui porte l’idée qu’on ne s’improvise pas diplomate, un métier au contraire exceptionnel : formation, expérience, fonctions spécifiques, conditions de travail parfois difficiles…</p>
<p>Mais quelle est vraiment la nature du métier de diplomate aujourd’hui ?</p>
<h2>Des relations diplomatiques bilatérales…</h2>
<p>Tout au long du XX<sup>e</sup> siècle, la diplomatie a connu des transformations considérables. Au début, comme on le sait, la diplomatie était l’art de mener des relations bilatérales entre États comme alternative à la guerre (quand les hommes se parlent, ils ne se font pas la guerre, dit la sagesse populaire). Les diplomates appartenaient à la <a href="https://www.pur-editions.fr/product/5948/le-diplomate-en-representation-xvie-XXe-si%C3%A8cle">bonne société de leur pays</a> et, souvent, s’entendaient mieux avec leurs collègues des autres pays qu’ils ne communiquaient avec leurs compatriotes appartenant à d’autres milieux sociaux.</p>
<p>On <a href="https://ehne.fr/fr/encyclopedie/th%C3%A9matiques/relations-internationales/cultures-de-paix/diplomates-et-diplomatie">naissait diplomate en quelque sorte</a> (il y avait des traditions familiales, des filiations) et les capacités professionnelles se résumaient, le plus souvent (comme dans l’ensemble de la bourgeoisie qui assumait diverses fonctions dirigeantes à l’époque) à la culture générale, aux bonnes manières, à l’élégance vestimentaire et à la maîtrise du français, qui était la seule langue de la diplomatie.</p>
<p>La Première Guerre mondiale a provoqué la première grande révolution dans le métier de diplomate. La <a href="https://ehne.fr/fr/encyclopedie/th%C3%A9matiques/relations-internationales/pratiques-diplomatiques-contemporaines/la-conf%C3%A9rence-de-la-paix-de-1919">Conférence de la Paix en 1919 à Versailles</a> marque le début de la diplomatie multilatérale de haut niveau et le diplomate dut dès lors tout à la fois maîtriser l’anglais – les Américains ne négociaient pas en français – et une série de matières techniques comme le désarmement, les compensations financières, les transports internationaux, etc.</p>
<p>Par conséquent, le recrutement des diplomates a mis davantage l’accent sur les compétences professionnelles que sur le milieu social, suivant le processus de démocratisation général de nos sociétés. L’usage de la force pour la conduite des relations extérieures d’un pays fut sévèrement restreint, même prohibé, et la diplomatie se vit reconnaître une forme de prééminence dans les relations internationales, avec la création de la <a href="https://www.un.org/fr/about-us/history-of-the-un/predecessor">Société des Nations</a>.</p>
<h2>… aux relations diplomatiques multilatérales</h2>
<p>Le bilatéralisme céda progressivement la place au multilatéralisme et les relations multilatérales se sont déployées <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-fabrique-de-l-histoire/multilateralisme-et-politique-qu-est-ce-qui-a-change-depuis-la-sdn-4253898">dans le cadre d’organisations internationales</a> dotées de compétences générales ou spécialisées. Dans ce dernier cas, on vit apparaître des <a href="https://www.un.org/fr/observances/delegates-day">délégués auprès des organisations internationales</a>, qui n’étaient pas nécessairement des diplomates mais bien des experts détachés par leur administration.</p>
<p>Les dernières décennies du XX<sup>e</sup> siècle ont vu une transformation encore plus profonde de la diplomatie. La barrière de la souveraineté, qui protégeait les États contre les interférences dans leurs affaires intérieures, a commencé à se déliter. La diplomatie, naguère confinée aux salons et salles de réunion, s’est progressivement étendue <a href="https://www.cairn.info/revue-mondes1-2014-1-page-6.htm">aux domaines économique, culturel, universitaire</a>…</p>
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<figcaption><span class="caption">Diplomates en action – sur tous les terrains en Ukraine (ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, 30 avril 2020).</span></figcaption>
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<p>La technologie de l’information surmonte l’obstacle des distances et permet une communication rapide entre le diplomate et ses autorités. Internet <a href="https://www.cairn.info/la-guerre-de-l-information-aura-t-elle-lieu--9782100759729-page-150.htm">décuple</a> les capacités du diplomate à communiquer, tout en lui donnant la possibilité de se concentrer sur son travail principal : établir et nourrir des relations avec un vaste éventail de représentants de la société du pays où il se trouve.</p>
<p>À une époque de compétition croissante sur la scène internationale – multinationales, ONG, médias –, les diplomates se sentent parfois « assiégés ». Ont-ils encore un rôle à jouer et quel devrait être ce rôle ?</p>
<h2>La diplomatie en question</h2>
<p>Posons quelques constats : l’ambassade classique, la plus répandue, est l’<a href="https://www.cairn.info/manuel-de-diplomatie--9782724622904-page-23.htm">ambassade bilatérale</a>. Aujourd’hui encore, beaucoup de pays perçoivent leurs relations extérieures en termes bilatéraux. L’ambassadeur Bernard Destrémau <a href="https://bibliotheques.paris.fr/cinema/doc/SYRACUSE/289312/quai-d-orsay-derriere-la-facade?_lg=fr-FR">écrit à ce propos</a> : « Les relations bilatérales restent le sel historique de la diplomatie. »</p>
<p>Pour nourrir les relations bilatérales, une diplomatie publique consistante est nécessaire, interagissant avec l’administration et la société civile du pays hôte. Le travail consulaire et culturel <a href="https://www.diplomatie.gouv.fr/IMG/pdf/rapportfianl_sociologue.pdf">demeure largement bilatéral</a>. Même si l’accès à l’information a été bouleversé par les moyens modernes de communication et les médias, une ambassade demeure un lieu de référence pour évaluer la <a href="https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2018-2-page-23.htm">qualité d’une information</a>.</p>
<p>Même si les ministres de différents pays se voient et se téléphonent à diverses occasions, l’avis de leur ambassadeur sur un dossier spécifique est souvent apprécié. Le diplomate peut injecter une dose de réalité (le « reality check ») dans un <em>briefing</em> ministériel ; il peut dire ce qui constitue un impératif politique pour l’État avec lequel on traite et indiquer les « lignes rouges » de la négociation en cours. Bien que les décisions politiques soient arrêtées dans les capitales, l’ambassadeur peut souvent contribuer à affiner une posture, à préparer un choix.</p>
<h2>La diplomatie au défi</h2>
<p>On doit bien reconnaître que le métier de diplomate s’est adapté à l’<a href="https://www.diploweb.com/Quelles-sont-les-facettes-du-metier-de-diplomate-aujourd-hui.html">évolution du monde et des relations interpersonnelles</a>. La figure aristocratique d’antan a laissé place à celle du diplomate ouvert sur la société et à son écoute.</p>
<p>Dans son ouvrage intitulé <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/ei/2010-v41-n1-ei3710/039620ar/"><em>Guerilla Diplomacy</em></a>, Daryl Copeland décrit le diplomate de terrain, qui préfère se mêler à la population du pays où il se trouve que fréquenter ses collègues dans les murs d’une ambassade ou les salons d’un club huppé. Selon le même auteur, les rencontres diplomatiques aujourd’hui se passent dans les lieux publics, marqués par l’hybridation culturelle : dans un <em>bario</em> ou dans un <em>souk</em>, dans la blogosphère, sur l’avenue principale d’une ville ou dans une hutte à proximité d’une zone de guerre. C’est une approche fondée sur l’<a href="https://www.researchgate.net/publication/341488510_Repenser_la_puissance_par_les_hybridations_culturelles_au_XXIe_si%C3%A8cle_Les_nouvelles_strategies_dynamiques_et_spheres_de_la_geopolitique_de_la_culture">hybridation culturelle</a> et le contact de terrain.</p>
<p>La réalité paraît un peu plus complexe. La figure classique du diplomate n’a pas disparu mais s’est estompée. Il y a plusieurs explications à cela, à commencer par le <a href="https://www.fonction-publique.gouv.fr/files/domaine_3.pdf">processus de recrutement et de promotion</a> : ils mettent davantage l’accent sur l’adaptabilité, une plus grande interpénétration des métiers (le diplomate est appelé, tout au long de sa carrière, à s’occuper des questions commerciales, d’affaires consulaires ou d’aide au développement), une plus grande autonomie aussi. Par conséquent, la perception du métier a changé, à mesure qu’il se professionnalise. L’image du diplomate mondain et oisif est évidemment incompatible avec cette diplomatie de terrain qui est maintenant mise en exergue.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"170519407511093248"}"></div></p>
<p>Le métier requiert un dévouement de tous les instants. On oublie trop souvent les contraintes familiales, les risques physiques, les <a href="https://www.jstor.org/stable/48605514?seq=1">situations de guerre</a> (Syrie, Afghanistan, Libye) qui constituent parfois la toile de fond de la vie quotidienne du diplomate.</p>
<h2>La diplomatie en chantier</h2>
<p>Venons-en plutôt aux fondamentaux. Les diplomates acceptent-ils toujours que leur seul objectif soit de faire avancer les intérêts de leurs États ? Beaucoup s’en contentent, il est vrai. Mais certains se voient comme œuvrant et, par conséquent, représentant l’idée de paix. On constate en effet que bien que défenseur des intérêts exclusifs de son pays, le diplomate est capable de vouloir défendre aussi des intérêts universels.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/timor-oriental-une-democratie-tenace-20-ans-apres-lindependance-182729">Timor oriental : une démocratie tenace, 20 ans après l’indépendance</a>
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<p>Pensons, par exemple, à <a href="https://www.ohchr.org/fr/about-us/high-commissioner/past/sergio-viera-de-mello">Sergio Vieira de Mello</a>, qui accompagna le processus de paix au Timor oriental puis œuvra en Irak (où il perdit malheureusement la vie) ou encore à Richard Holbrooke, l’artisan de la paix en Bosnie, « <a href="https://www.hks.harvard.edu/publications/unquiet-american-richard-holbrooke-world">the unquiet American</a> » pour reprendre le titre d’un article qui lui fut consacré. Cette évolution de la diplomatie est heureuse : les diplomates ont pris conscience d’un universalisme qui est dans le droit fil de leur cosmopolitisme antérieur.</p>
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<figcaption><span class="caption">Décès de Richard Holbrooke, figure de la diplomatie américaine (France 24, 14 décembre 2010).</span></figcaption>
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<p>Tentons de jeter un regard normatif. On peut épingler deux valeurs fondamentales qui constituent la trame du travail diplomatique. La première consiste à faire prévaloir la justice sur la force car la force est la mère de l’anarchie et de la violence. Le diplomate intervient par la discussion, la négociation, la patience. Pensons à <a href="https://www.humanite.fr/medias/guerre-du-vietnam/le-duc-tho-et-kissinger-nouveau-face-face-563132">Henry Kissinger et Le Duc Tho</a> durant la guerre du Vietnam ou encore à <a href="https://www.nobelprize.org/prizes/peace/2008/ahtisaari/facts/">Martti Ahtisaari</a>, qui organisa la transition vers l’indépendance de la Namibie et négocia la fin des hostilités entre ce pays et ses deux voisins, l’Angola et l’Afrique du Sud.</p>
<p>L’autre valeur essentielle est celle de la diversité. Même si on peut s’accorder sur des idéaux communs en matière de fonctionnement des États (démocratie) et de respect des droits des individus, il faut aussi prendre en compte la diversité des modèles, qui reflète des contraintes spécifiques ou une histoire différente. La perception du temps et de l’espace n’est pas la même chez tous les peuples, du fait de l’influence de l’histoire et de la géographie sur la conduite de la politique étrangère. Le diplomate est celui qui est le mieux à même de pouvoir utiliser ces différences entre les nations pour enrichir les relations entre les États.</p>
<h2>La diplomatie, ou la compréhension de l’autre</h2>
<p>Beaucoup de choses ont changé dans le monde depuis l’époque où l’on a institué le métier de diplomate et créé le corps diplomatique. Mais le travail de diplomate n’a pas fondamentalement varié.</p>
<p>Le diplomate a la relation humaine pour principal terreau et la parole comme outil. Au fond, l’essence de la diplomatie, c’est la compréhension de « l’autre ». Qu’il soit partenaire commercial, adversaire stratégique ou allié idéologique, c’est toujours et chaque fois de « l’autre » dont il s’agit. Qu’il négocie, exerce des pressions, menace, qu’il échange ou qu’il fasse la guerre, l’État est toujours dans une relation à « l’autre ». L’instrument privilégié de la rencontre de « l’autre » est, sur la scène internationale, la négociation diplomatique. On a fait remarquer que la guerre se décide seul, alors que la paix, comme tout accord commercial, se négocie.</p>
<p>« L’autre », sous quelque forme qu’il se présente, est bien au cœur de la vie internationale et donc de la diplomatie. Que ce soit depuis Varsovie, Kinshasa, Tokyo ou Paris, le diplomate est celui qui a le souci de « l’autre » et qui fait le premier pas vers lui. Le monde n’en deviendra, à chaque fois, que plus humain.</p>
<p>La mise en extinction progressive de deux corps du ministère des Affaires étrangères s’inscrit donc dans ce contexte. Cette réforme, en ouvrant notamment les postes d’ambassadeurs et de consuls généraux à d’autres profils, pourrait avoir des conséquences sur le métier de diplomate, qui n’avait jusqu’ici jamais changé sa nature profonde.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/184114/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raoul Delcorde ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La disparition des deux corps historiques de la diplomatie française annonce-t-elle un changement radical des pratiques diplomatiques ?Raoul Delcorde, Ambassadeur honoraire de Belgique, Professeur invité UCLouvain, Université catholique de Louvain (UCLouvain)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1821882022-05-04T18:42:19Z2022-05-04T18:42:19ZDerrière la « guerre économique totale à la Russie », l’avenir du projet de paix par le commerce<p>« Un nouveau monde naît sous nos yeux » : si c’est ce qu’annonçait le 26 février dernier une dépêche prématurément publiée par l’agence russe RIA Novosti suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, force est de constater que la prophétie pourrait malgré tout bien être en train de se réaliser sous la conjonction des évènements et des réponses qui y sont apportées.</p>
<p>Alors que l’Union européenne vient de présenter un sixième paquet de sanctions contre la Russie, avec notamment l’arrêt d’ici six mois des importations européennes de pétrole russe et l’exclusion de la banque russe Sberbank du système financier international Swift, la question des liens entre commerce et paix se pose en effet avec force.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1521791755024097281"}"></div></p>
<p>Pour le comprendre, il faut savoir que la mondialisation n’est que la traduction juridico-économique d’un projet politique vieux de cinq siècles : celui de paix par le commerce, le « <em>Wandel durch Handel</em> » au cœur de la politique étrangère d’Angela Merkel vis-à-vis de la Russie.</p>
<h2>À l’origine de la mondialisation, le projet de paix par le commerce</h2>
<p>Ce projet est fondé sur un certain souvenir de la pax <a href="https://www.unige.ch/campus/numeros/120/dossier5/">romana</a>, la paix romaine de l’Antiquité. Esquissé en 1623 par Emeric de la Croix dans <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6496h.texteImage"><em>Le nouveau Cynée</em></a>, il tend depuis lors à faire de l’interdépendance économique des Nations le moyen de prévenir les guerres entre États.</p>
<p>C’est ce projet qui conduisait Montesquieu à vanter en 1748 les vertus du doux commerce dans <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9737646k?rk=21459;2"><em>L’Esprit des lois</em></a> ; et Victor Hugo à se réjouir, en 1849, devant le Congrès des amis de la paix universelle, qu’« un jour viendra où il n’y aura plus d’autres champs de bataille que les marchés s’ouvrant au <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62737z.image">commerce</a> » ; avant que le 14 août 1941, la <a href="https://www.nato.int/cps/fr/natohq/official_texts_16912.htm">Charte de l’Atlantique</a>, cosignée par Franklin Roosevelt et Winston Churchill, ne propose de le mettre en œuvre à l’issue du conflit de 1939-1945, pour éviter une troisième guerre mondiale.</p>
<p>Il a ainsi par la suite <a href="https://books.openedition.org/putc/176?lang=en">inspiré</a> le lancement de la <a href="https://www.touteleurope.eu/histoire/histoire-de-l-union-europeenne/">construction européenne dans les années 1950</a> et la création de <a href="https://www.wto.org/french/thewto_f/history_f/history_f.htm">l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT)</a> en 1947.</p>
<p>En 1979-1980 les <a href="https://www.cairn.info/une-histoire-du-royaume-uni--9782262044275-page-403.htm">révolutions thatchérienne</a> en Angleterre et <a href="https://journals.openedition.org/chrhc/1795">reaganienne</a> aux États-Unis peuvent également y être rattachées, puisqu’elles reposent sur cette conviction que « l’État n’est pas la solution » mais « le problème » ; et que seule la libéralisation des échanges entre les pays pourrait à l’avenir assurer la prospérité de tous et, à travers elle, le progrès social.</p>
<h2>La dépendance volontaire au gaz russe</h2>
<p>Au lendemain de la chute du mur de Berlin en 1989, le politologue américain Francis Fukuyama s’est de ce fait interrogé sur <a href="https://www.lemonde.fr/festival/article/2017/08/16/la-democratie-liberale-une-histoire-sans-fin_5173064_4415198.html">« La fin de l’histoire ? »</a>. Dix ans plus tard, Alain Minc vantait les mérites de « La mondialisation heureuse ». Car l’économie de marché et la démocratie libérale apparaissaient alors comme deux horizons indépassables après l’échec du socialisme soviétique et du parti unique.</p>
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<figcaption><span class="caption">« La mondialisation heureuse relève chez nous de la schizophrénie » Alain Minc – Les Échos.</span></figcaption>
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<p>Ce n’est ainsi pas un hasard si la <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2022/03/11/quel-est-le-niveau-de-dependance-des-pays-europeens-au-gaz-et-au-petrole-russe_6117070_4355770.html">dépendance européenne vis-à-vis du gaz russe</a> a commencé à la même époque, puisque cette dépendance était alors pensée comme un moyen d’enchâsser le pays dans le grand marché mondial, en le plaçant dans une situation d’interdépendance économique dont il n’aurait, pensait-on, aucun intérêt à sortir.</p>
<p>Il est vrai que les guerres « asymétriques » (telles que celles en ex-Yougoslavie ou en Afghanistan) et les crises sécuritaires (« 11 septembre, » « 13 novembre »), sociales (« bonnets rouges », « gilets jaunes »), financières (crise asiatique, de la bulle Internet, puis des subprimes), sanitaires (« H1N1 », « Covid-19 ») et économiques ont depuis mis ce projet à rude épreuve.</p>
<p>Mais c’est justement dans leur contexte que la rhétorique du monde nouveau a commencé à émerger. Bien avant que la dépêche de l’agence russe RIA Novosti ne soit publiée et que le Président Biden n’évoque le 21 mars dernier un « new world order », le Président Emmanuel Macron avait déjà fait part, le 16 mars 2020 au cœur de la crise sanitaire, de sa volonté de « projeter la France dans “le monde d’après” ».</p>
<h2>Les sanctions économiques contre la Russie, un test pour le projet de paix par le commerce</h2>
<p>Une décennie auparavant, le 25 septembre 2008, le président <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2008/09/25/le-discours-de-nicolas-sarkozy-a-toulon_1099795_823448.html">Nicolas Sarkozy</a> avait également estimé qu’avec la crise économique liée aux subprimes, « une certaine idée de la mondialisation s’achève ». Loin de marquer une rupture avec le projet de paix par le commerce, ces deux dernières déclarations visaient toutefois en réalité à l’approfondir : en comblant les zones de non-droit qui compromettaient le bon fonctionnement du marché mondial pour lui permettre d’atteindre son optimum. De crise en crise, le projet avançait.</p>
<p>C’est toute la différence avec la guerre de haute intensité menée en Ukraine aujourd’hui. Car celle-ci traduit le rejet, aussi brutal que soudain, par la Russie – un État continental, onzième puissance économique de la planète – des règles du jeu international… avec le risque que la deuxième puissance mondiale, la Chine, lui emboîte le pas.</p>
<p>On comprend dès lors mieux les enjeux de cette <a href="https://www.lesechos.fr/economie-france/budget-fiscalite/ukraine-bruno-le-maire-declare-une-guerre-economique-et-financiere-totale-a-la-russie-1390357">« guerre économique totale »</a> que l’Union européenne et les États-Unis mènent contre la Russie et le durcissement continu des sanctions économiques qui en découlent à mesure que le conflit s’éternise : les 8,5 % de PIB qu’elles devraient, <a href="https://www.bfmtv.com/economie/international/le-pib-de-la-russie-devrait-se-contracter-de-8-5-en-2022-celui-de-l-ukraine-de-35_AD-202204190390.html">à en croire le FMI</a>, coûter au pays en 2022, constituent un test grandeur nature de l’efficacité du projet de paix par le commerce.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1516604817413615618"}"></div></p>
<p>De leur succès ou de leur échec dépendra une nouvelle avancée de la mondialisation dans un sens plus conforme au projet originel des promoteurs de la paix par le commerce ou non.</p>
<h2>Apprendre des échecs de la paix par le commerce</h2>
<p>Pour Larry Fink, le dirigeant du plus grand fonds d’investissement au monde, BlackRock, le constat s’impose toutefois : <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/la-fin-de-la-mondialisation-1398362">« Nous sommes à la fin de la globalisation économique telle que nous l’avons vécue depuis trente ans »</a>.</p>
<p>Le politologue américain <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/05/02/guerre-en-ukraine-nous-avons-quitte-l-ancien-monde-dans-lequel-l-economie-a-pendant-trente-ans-domine-le-politique_6124404_3232.html">Fareed Zakaria</a> opine : la guerre en Ukraine marque la <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-et-strategique-2008-4-page-141.htm">fin de la pax americana</a> telle qu’elle s’est progressivement imposée depuis la fin de la seconde guerre mondiale et le tournant des années 1980. Car la redirection actuellement en cours des flux commerciaux semble annoncer un monde coupé en deux ou trois blocs régionaux ayant leurs intérêts propres, seul celui formé des États-Unis et de l’UE restant attaché aux vertus de l’interdépendance économique des Nations sur la durée avec leurs alliés.</p>
<p>Que ces prédictions se réalisent ou non, il conviendra dans tous les cas de revoir les modalités de cette paix par le commerce qui, à un siècle d’intervalle, aura échoué à deux reprises : lors de la crise économique de 1929, précédant la seconde guerre mondiale ; et lors de la crise économique de 2008, débouchant sur la guerre en Ukraine dont chacun espère qu’elle ne dégénérera pas en un nouveau conflit planétaire. Car l’histoire semble se répéter, les mêmes causes – les crises économiques – produisant les mêmes effets : des conflits fratricides entre États.</p>
<p>L’insuffisance – sinon l’absence – de régulation efficace du marché mondial, en n’empêchant pas la prédation de certains pays sur d’autres, a sans doute favorisé un accroissement des <a href="http://archives.strategie.gouv.fr/cas/system/files/mondialisation_et_inegalites.pdf">inégalités entre nations</a>.</p>
<p>Si ces dernières ont été source de tensions au niveau mondial, celles-ci se sont trouvées aggravées au sein même des États par le phénomène de concentration des richesses entre les mains des « premiers de cordée » au détriment des « premiers de <a href="https://www.melchior.fr/note-de-lecture/la-mondialisation-de-l-inegalite">corvées</a> », ce phénomène ayant lui-même nourri le populisme à l’intérieur de différents <a href="https://nouvelles.umontreal.ca/article/2019/05/01/les-inegalites-alimentent-le-populisme-et-les-crises-sociales-joseph-e.-stiglitz">pays</a>.</p>
<p>Alors que le concept de marché était destiné à substituer la logique d’un jeu à somme positive (le commerce) à la logique d’un jeu à somme nulle (la puissance), la façon dont il a été organisé depuis le tournant des années 1980 a conduit à lui faire produire le contraire : elle en a fait un jeu à somme nulle. En effet, pour des États comme la Russie, seule la puissance paraît un jeu à somme <a href="https://www.lgdj.fr/essai-sur-la-construction-juridique-de-la-categorie-de-marche-9782275021836.html">positive</a>.</p>
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<figcaption><span class="caption">Débat : Quels sont les gains et les risques du commerce international ? – Cité de l’Économie.</span></figcaption>
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<h2>Refaire du commerce entre États un jeu à somme positive et non à somme nulle</h2>
<p>Briser la spirale de la violence entre États et remédier aux nouvelles inégalités induites par le défi climatique suppose de revenir au <a href="https://www.alternatives-economiques.fr/colloque-lippmann-aux-origines-neoliberalisme/00037138">projet du colloque Lippmann de 1938</a>, à l’origine de la naissance du néolibéralisme, dès lors que, loin des caricatures qui en sont souvent faites, ses auteurs insistaient sur l’importance de permettre à l’État d’assurer ses « tâches sociales ».</p>
<p>Walter Lippmann le disait en ouvrant le colloque :</p>
<blockquote>
<p>« Ce que nous recherchons, ce n’est pas à ressusciter une théorie [celle du libéralisme classique], mais à découvrir les idées qui permettent à l’élan vers la liberté et la civilisation de triompher de tous les obstacles dus à la nature humaine, aux circonstances historiques, aux conditions de la vie sur cette terre ».</p>
</blockquote>
<p>Le philosophe Louis Rougier, à l’origine de ce colloque, insistait pour sa part sur <a href="https://www.editionsbdl.com/produit/le-colloque-lippmann-aux-origines-du-neo-liberalisme/">cette erreur historique</a> :</p>
<blockquote>
<p>« C’est plus tard et par un véritable contresens [que la doctrine du laissez-faire] est devenue une théorie du conformisme social et de l’abstention de l’État ».</p>
</blockquote>
<p>Il convient donc de renouer avec l’ambition de refonder le projet de paix par le commerce en identifiant les choix politiques qui l’ont fait dérailler depuis 1938, en évitant les erreurs du passé, et en intégrant les nouveaux défis de notre siècle – à commencer par le défi climatique. Vaste programme s’il en est.</p>
<hr>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/366083/original/file-20201028-23-1264rn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/366083/original/file-20201028-23-1264rn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/366083/original/file-20201028-23-1264rn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/366083/original/file-20201028-23-1264rn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/366083/original/file-20201028-23-1264rn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/366083/original/file-20201028-23-1264rn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/366083/original/file-20201028-23-1264rn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/366083/original/file-20201028-23-1264rn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Cette contribution s’appuie sur les travaux du livre « <a href="https://www.legitech.lu/shop/product/l-action-economique-des-collectivites-publiques-153#attr=150,282,12786">L’action économique des collectivités publiques</a> : ses enjeux, son droit, ses acteurs » co-édité par les éditions IFDJ-Legitech et publié en juin 2020</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/182188/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabien Bottini est chargé de mission pour la Fondafip, le think-thank des Finances publiques, membre de l'Observatoire de l'éthique publique (OEP), du Themis-UM et de la MSH Ange Guépin. Il a perçu ou perçoit des subventions de la part du LexFEIM, laboratoire de recherche en droit, et de la Mission de recherche Droit & Justice.
Il est par ailleurs titulaire de la chaire "Innovation" de l'Institut Universitaire de France et de la chaire "Neutralité Carbone 2040" de Le Mans Université qui financent également en partie ses travaux.</span></em></p>À l’ère de la mondialisation, les sanctions économiques décidées contre la Russie par les États-Unis, l’Union européenne et ses alliés sont un test pour le projet de paix par le commerce.Fabien Bottini, Professeur des Universités en droit public, Le Mans UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1678462021-09-26T16:33:21Z2021-09-26T16:33:21Z2001-2021 : vingt ans de renforcement stratégique et économique pour la Chine<p>Après le 11 septembre 2001, les États-Unis, traumatisés, s’engagèrent, sous l’influence des néoconservateurs, dans un interventionnisme militaire exacerbé au Moyen-Orient, motivés par <a href="https://www.institutmontaigne.org/blog/2001-2021-comment-le-11-septembre-transforme-les-etats-unis">l’idéologie de changement de régime par la force et les théories de la « paix démocratique »</a>. Pékin envoya un message de soutien à Washington dans la foulée des attaques terroristes ; mais les relations diplomatiques avaient été marquées, en avril de la même année, par un épisode extrêmement tendu. </p>
<p>Au-dessus de la mer de Chine méridionale, un avion-espion EP-3 américain était entré en collision avec un appareil chinois, provoquant la mort du pilote de celui-ci. L’avion américain finit par être intercepté et par <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/2001/07/20/la-facture-chinoise-pour-l-avion-espion-americain-ep-3_4197702_1819218.html">atterrir en urgence sur l’île chinoise de Hainan</a> où l’équipage, humilié, subit pendant près de trois semaines les quolibets de la presse chinoise avant d’être piteusement relâché.</p>
<p>Ces deux événements allaient, chacun à sa manière, permettre à Pékin d’obtenir des autorités américaines un blanc-seing pour mener une répression accrue contre la minorité musulmane et ouïgoure du Xinjiang. La création en juin 2001 de <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/organisation-de-cooperation-de-shanghai-ocs">l’Organisation de Coopération de Shanghai (OCS)</a> allait par ailleurs donner à la Chine des moyens inédits de surveillance, au-delà de son territoire et, plus particulièrement, en Asie centrale.</p>
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<figcaption><span class="caption">Le dessous des cartes : Organisation de coopération de Shanghai, 11 juin 2016.</span></figcaption>
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<p>Last but not least, en novembre, la Chine obtenait enfin, malgré des réticences évidentes (de certains) à Washington à son égard, la possibilité d’<a href="https://www.senat.fr/ue/pac/E1837.html">intégrer l’OMC</a>, après quinze ans de négociations. Une adhésion qui transformera puissamment l’économie et le commerce mondial, au bénéfice premier (pour un temps ?) de Pékin.</p>
<h2>Recompositions stratégiques de l’ordre international</h2>
<p>Le 11 Septembre aura permis à Pékin de <a href="https://hal-sciencespo.archives-ouvertes.fr/hal-01065008/document">nouer de meilleures relations avec Washington</a>, dans le cadre apparent d’une mobilisation multilatérale de la « guerre contre le terrorisme », sans pour autant que la Chine ne participe aux opérations militaires en Afghanistan. Surtout, la RPC multipliera les consultations, les rapports et les analyses sur les conséquences du <a href="https://www.persee.fr/doc/perch_1021-9013_2001_num_67_1_2664">11 Septembre et de l’intervention de l’OTAN dans les équilibres régionaux</a>. Ce qui intéresse les autorités chinoises au premier chef, ce n’est pas tant le djihadisme qui attaque l’Occident que la géopolitique régionale recomposée aux portes d’une région, le Xinjiang, perçue comme subversive pour l’unité de la Chine.</p>
<p>Le 11 Septembre aura pour conséquences d’accélérer la systématisation des discours officiels sur la lutte contre les « trois forces » (<em>san gu shili</em>) (terrorisme, séparatisme, extrémisme) – des discours qui insistent sur la prétendue collusion entre la minorité ouïgoure et le terrorisme islamiste international. Le Conseil des Affaires d’État (merci d’expliquer ce qu’est cette instance) s’attachera à montrer les liens étroits existant entre Al Qaida et deux groupuscules ouïgours jusqu’alors méconnus, le <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03078827/document">Parti d’Allah du Turkestan oriental et le Mouvement islamique du Turkestan Oriental</a> (MITO). Si Pékin avait négocié avec les talibans dès 1996 pour s’assurer que ces derniers ne soutiendraient pas les Ouïgours, la présence de l’OTAN, et spécialement des États-Unis dans la région (Asie centrale, Pakistan…) va bousculer, un temps, l’action diplomatique chinoise.</p>
<p>Le Parti-État s’inquiétait à ce moment de <a href="https://www.cairn.info/revue-relations-internationales-2009-2-page-111.htm">l’installation dans la durée des États-Unis</a>, alors que l’OCS prenait une ampleur nouvelle, traduisant la montée en puissance de l’influence chinoise en Asie centrale et d’un certain dessein stratégique eurasien, <a href="https://theconversation.com/asie-du-sud-est-et-asie-centrale-deux-laboratoires-strategiques-de-lexpansion-chinoise-137295">centré sur l’approvisionnement en ressources</a> (hydrocarbures, minerais, terres arables, ressources agricoles) et sur la proximité diplomatico-politique plus forte avec les régimes en place.</p>
<p>C’est aussi le prolongement de la politique dit du « développement de l’ouest » (<em>xibu dakaifa</em>), à savoir de la sinisation des terres lointaines du centre, dont les habitants ne sont pas des Han et qui sont importantes pour l’équilibre territorial chinois (à la fois du point de vue des ressources dont elles disposent, de l’espace qu’elles offrent, et des enjeux sécuritaires qui s’y déploient). Ainsi, le facteur afghano-taliban et la longue guerre de l’OTAN de 2001 à 2014 (année du retrait de l’ISAF) – voire jusqu’en 2021, <a href="https://www.capitmuscas.com/produit/la-chine-face-au-monde-une-puissance-resistible/">sont perçus par Pékin</a> comme des facteurs influant à la fois sur sa politique intérieure (la sinisation du Xinjiang et, aussi, du Tibet) et sur sa politique extérieure (la stabilisation des pays situés à l’ouest de la Chine), particulièrement l’Asie centrale et le triangle conflictuel Chine-Inde-Pakistan.</p>
<p>Pékin mettra systématiquement en avant les réseaux terroristes locaux et la déstabilisation du Xinjiang pour mieux légitimer la politique du « développement de l’ouest » puis la répression stricto sensu contre les Ouïgours, laquelle sera accentuée après, d’une part, la <a href="https://www.sciencespo.fr/ceri/fr/oir/la-lutte-contre-le-terrorisme-et-l-extremisme-au-xinjiang-quelles-methodes-pour-quels-resultats-">multiplication des attentats dans le monde</a>, avec notamment l’émergence de Daech et, d’autre part, ceux commis sur le territoire chinois (Kunming, Canton, Pékin, Urumqi, etc.).</p>
<p>D’un côté, un nouvel arsenal législatif est institutionnalisé (loi anti-terroriste), de l’autre la répression sur l’ensemble du territoire (moins connue) et plus particulièrement au Xinjiang seront deux paramètres majeurs des politiques sécuritaires à partir de 2015. Ainsi, depuis vingt ans, la politique chinoise de contrôle de l’islam a évolué. Si à l’époque il s’agissait avant tout d’éviter que ce dernier <a href="https://www.canal-u.tv/video/fmsh/djihadisme_et_radicalites_en_asie.43999">ne devienne un canal d’expression du mécontentement ouïgour au Xinjiang</a> ou qu’il se radicalise sous l’influence de mouvements fondamentalistes étrangers, aujourd’hui la RPC met en place envers les Ouïgours un contrôle humain et technologique totalitaire.</p>
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<figcaption><span class="caption">Chine : Ouïgours, un peuple en danger (Arte, 2019).</span></figcaption>
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<h2>Le Xinjiang et l’Afpak (Afghanistan-Pakistan) : un champ de forces</h2>
<p>Cet étranger proche, situé dans le prolongement du Xinjiang, représente un <a href="http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/La-Suite-des-temps/Demain-la-Chine-guerre-ou-paix">terrain d’affrontement indirect avec l’Inde</a>. En ce sens, le Pakistan, à la fois soutien des talibans et partie d’un continuum stratégico-diplomatique avec Pékin, est la clef de ce Grand Jeu.</p>
<p>Les guérillas actives dans cette zone sont autant d’épines dans le pied du Gulliver chinois. Leur existence exprime la manifestation de frustrations identitaires, religieuses et économiques de peuples malmenés par la mondialisation, l’instabilité chronique et de longue durée (guerre en Afghanistan depuis plus de 40 ans) ou par une sinisation brutale comme celle subie par les Ouïgours. Leur opposition aux projets de Pékin, qu’elle se traduise par de simples tensions ou par des actions terroristes, obère les chances de l’<a href="https://www.senat.fr/rap/r05-400/r05-400.html">« émergence pacifique » (<em>heping jueqi</em>)</a> à laquelle la Chine prétend.</p>
<p>Sur le temps long, et dans les régions tampons que sont le Turkestan mais aussi les zones pachtoune, baloutche et cachemirie, ces heurts manifestent l’opposition irréductible entre deux systèmes politiques : l’un marqué par une culture voire un culte de l’État, l’autre s’en affranchissant et érigeant en principe cardinal le <a href="https://laviedesidees.fr/Zomia-la-ou-l-%C3%89tat-n-est-pas.html">fait même de ne pas être gouverné</a>. Et certainement pas par la Chine. Un autre « Grand Jeu » se joue dans ces différentes parties du monde. Il ne dépend pas des seules relations conflictuelles entre puissances. Car à travers lui, se redécouvre l’expérience faite hier par l’URSS, aujourd’hui par la Chine, dans leur rapport antagoniste à un islam des maquis.</p>
<p>« Redécouverte » car Al Qaida et les organisations terroristes centrasiatiques ont recours à une <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/cultures-monde/culturesmonde-emission-du-mardi-31-aout-2021">guerre asymétrique</a> déjà pratiquée au début du siècle dernier par des indépendantistes en pays ouïgour. Vue des oasis, du désert du Taklamakan ou de l’arrière-pays que forment les Pamirs, cette vaste région minérale s’apparente à une mer intérieure. Vue de Pékin, elle constitue davantage un front pionnier.</p>
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<figcaption><span class="caption">China’s Hidden War On Terror : Special Report, 10 mai 2019.</span></figcaption>
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<p>Les visées de la RPC butent aussi sur des précédents historiques que les populations locales n’ont guère oubliés. Nombre de Basmatchis (peuples musulmans, notamment turcs opposés à la domination russe et soviétique) se sont réfugiés, dans les années 1930, en Afghanistan et dans le nord-ouest de la Chine. Une <a href="https://www.persee.fr/doc/outre_0300-9513_1991_num_78_292_4801_t1_0454_0000_2">éphémère République du Turkestan voit même le jour</a>. Son gouvernement provisoire, dirigé par l’émir auto-proclamé Abdullah Bughra ( ?-1934), s’établit dans <a href="https://theconversation.com/tadjikistan-et-kirghizistan-deux-foyers-dincertitude-aux-portes-de-la-chine-148362">l’oasis de Khotan</a> (<em>Hetian</em> en chinois), à l’est de Kachgar. Soutenue par le roi d’Afghanistan, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Mohammad_Zaher_Shah">Mohammed Zahir Shah</a> (1914-2007), qui lui fournit des armes, et bien qu’aidée par des rebelles kirghizes qui la rejoignent, celle-ci sera âprement combattue puis défaite par l’armée des nationalistes chinois avec l’aide financière de Staline.</p>
<p>La diplomatie chinoise n’hésitera pas non plus, en pleine guerre froide, à s’associer avec les services secrets pakistanais (ISI) et la CIA pour soutenir les <a href="https://theconversation.com/la-question-ou-goure-au-coeur-des-enjeux-entre-pekin-et-kaboul-150051">moudjahidines dans leur lutte contre les Soviétiques</a>. Aujourd’hui encore, la région reste redoutée par Pékin.</p>
<h2>À l’ouest, rien (de trop) nouveau…</h2>
<p>Dans sa recherche constante d’une sanctuarisation territoriale, <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/cultures-monde/episode-1-4-pakistan-la-strategie-de-l-ambiguite">Pékin cherche à s’appuyer non seulement sur le Pakistan</a> mais aussi, et dans son prolongement, sur l’Iran, pour dynamiser l’ensemble de la région dont l’Afghanistan est le centre.</p>
<p>Le fait que le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, ait assisté d’une part à la <a href="http://french.xinhuanet.com/2015-12/04/c_134886105.htm">5ᵉ conférence ministérielle du Processus d’Istanbul – Cœur de l’Asie sur l’Afghanistan</a>, qui s’est déroulée en 2015 à Islamabad, et que la Chine n’ait jamais écarté les talibans des négociations, cherchant au contraire à les associer aux <a href="https://www.letemps.ch/monde/situation-afghanistan-provoque-desarroi-inde-attentisme-chine">discussions organisées à Tianjin</a>, va dans le même sens. Pour l’essentiel, hormis <a href="https://asia.nikkei.com/Opinion/The-myth-of-Chinese-investment-in-Afghanistan2">l’hypothétique exploitation des immenses richesses</a> du pays (lithium, fer, or, cuivre – notamment la <a href="https://thediplomat.com/2017/01/the-story-behind-chinas-long-stalled-mine-in-afghanistan/">mine de cuivre de Mes Aynak</a>), c’est pour avoir l’assurance d’une stabilité régionale et pour anticiper ou éviter des attaques terroristes ouïgoures sur le territoire chinois que la RPC s’affiche aux côtés des talibans.</p>
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<figcaption><span class="caption">Afghanistan : la Chine souhaite des « relations amicales » avec les talibans • France 24, 16 août 2021.</span></figcaption>
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<p>La presse chinoise a abondamment évoqué tout au long du mois d’août dernier « l’échec » de l’Occident et, en particulier, des États-Unis dans l’entreprise de « Nation building » en Afghanistan depuis 2001. Si le bilan de l’intervention américaine, et plus largement de celle de l’OTAN, est <a href="https://www.marianne.net/monde/asie/afghanistan-nous-assistons-a-une-deroute-de-loccident-et-de-lotan">à nuancer</a>, et s’il ne faut pas oublier que cette intervention militaire s’est doublée d’une <a href="https://www.lefigaro.fr/economie/les-americains-ont-ils-depense-plus-de-1000-milliards-de-dollars-en-afghanistan-20210817">perfusion de dollars et de projets de développement</a>), le traitement médiatique de Pékin ne laisse pas de doute sur sa volonté d’incarner une alternative diplomatique et un modèle de développement pour la région.</p>
<p>Pour autant, les États-Unis se sont retirés massivement tout en conservant des relais locaux, la récurrence des attaques terroristes contre des intérêts ou individus chinois, notamment au Pakistan, ne tarira probablement pas. Le régime de Pékin le sait. La nouvelle donne entraînera probablement une montée en gamme (diplomatique, technique et militaire) des politiques anti-terroristes en Chine à l’intérieur et à l’extérieur de ses frontières, s’appuyant sur le Pakistan, l’Asie centrale et une partie du Moyen-Orient.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/167846/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuel Véron est délégué général du FDBDA.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Emmanuel Lincot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour Pékin, la « guerre contre le terrorisme » lancée par Washington après le 11 Septembre a été l’occasion de s’imposer comme un acteur sécuritaire et diplomatique alternatif pour l’Asie centrale.Emmanuel Véron, Enseignant-chercheur - Ecole navale, Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco)Emmanuel Lincot, Spécialiste de l'histoire politique et culturelle de la Chine contemporaine, Institut catholique de Paris (ICP)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1539952021-02-08T20:14:21Z2021-02-08T20:14:21ZVers une mise au ban de la bombe nucléaire ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/382633/original/file-20210204-24-1ewomqh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=36%2C14%2C4852%2C2975&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Neuf pays possèdent aujourd'hui l'arme nucléaire. Aucun d'entre eux n'a ratifié le Traité l'interdisant, qui vient d'entrer en vigueur.</span> <span class="attribution"><span class="source">Razvan Ionut Dragomirescu/shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Le 22 janvier 2021 est entré en vigueur le <a href="https://treaties.un.org/Pages/ViewDetails.aspx?src=TREATY&mtdsg_no=XXVI-9&chapter=26&clang=_fr">Traité sur l’interdiction des armes nucléaires</a> (TIAN), élaboré sous l’égide de l’ONU. Ce nouveau traité vise à interdire purement et simplement les armes nucléaires dans le monde. Il a donc une optique différente et plus radicale que le <a href="https://www.un.org/fr/conf/npt/2015/pdf/text%20of%20the%20treaty_fr.pdf">Traité de non-prolifération</a> (TNP) de 1968. Son entrée en vigueur a été permise par la ratification d’un minimum de 50 États (51 l’ont ratifié).</p>
<p>Est-ce à dire que les armes nucléaires vont disparaître ? Non, car aucune des neuf puissances nucléaires (États-Unis, Russie, Royaume-Uni, France, Chine, Inde, Pakistan, Corée du Nord, Israël) ne l’a ratifié pour l’instant. Sa portée est donc essentiellement symbolique. Mais le TIAN – obtenu grâce à l’implication de nombreuses ONG et associations de la société civile, comme l’ICAN (<a href="https://www.icanw.org/leaders_voice_support_for_nuclear_ban_treaty">Campagne pour l’interdiction des armes nucléaires</a>, un groupement d’associations comprenant notamment <a href="https://pugwash.org/">Pugwash</a> et le <a href="http://www.mvtpaix.org/">Mouvement de la Paix</a>, et qui a obtenu le prix Nobel de la paix en 2017) et le <a href="https://www.icrc.org/fr">Comité international de la Croix-Rouge</a> (CICR) – représente tout de même un grand pas en avant.</p>
<h2>Satisfaction des abolitionnistes</h2>
<p>Le traité a été progressivement élaboré au cours de trois grandes conférences intergouvernementales en 2013 et 2014 sur « l’impact humanitaire des armes nucléaires », en Norvège, au Mexique et en Autriche, conférences auxquelles de nombreuses ONG pacifistes ont été associées.</p>
<p>Dominique Lalanne, physicien nucléaire, membre du conseil d’administration de Pugwash France, et du collectif « Abolition des armes nucléaires », a été associé à l’élaboration du TIAN. Il rappelle qu’à l’origine, l’idée du TIAN a été lancée par des médecins, en particulier par l’<a href="https://www.ippnw.eu/fr/accueil.html">Association internationale des médecins pour la prévention de la guerre nucléaire</a> (lIPPNW) :</p>
<blockquote>
<p>« Les médecins ont mis l’accent sur les conséquences dramatiques pour la santé humaine de l’explosion d’armes nucléaires, ils ont insisté sur le fait que ce serait catastrophique sur le plan humanitaire. Ils ont lancé l’idée d’un traité légalement contraignant, qui irait plus loin que le TNP de 1968. En effet le TNP induit une inégalité entre pays nucléaires et pays non nucléaires. »</p>
</blockquote>
<p>Dominique Lalanne insiste sur l’atmosphère « enthousiasmante » lors de l’élaboration du TIAN à l’ONU :</p>
<blockquote>
<p>« C’était très enthousiasmant car les associations ont eu le même droit de parole que les ambassadeurs des États, c’était une dynamique extraordinaire ; ainsi, le TIAN reflète à la fois la position des États et celle des peuples eux-mêmes, dans l’esprit de la Charte de l’ONU de 1945 qui commence par “Nous, les peuples”. Cela a été une grande victoire pour les peuples. Cette élaboration a été très différente de celle des autres traités onusiens comme le TNP, c’était plus démocratique. »</p>
</blockquote>
<p>Pour Dominique Lalanne, même si le TIAN n’est pas ratifié par les puissances nucléaires, et si aucun pays nucléaire ne va adhérer au TIAN dans les prochaines années, « le TIAN va populariser l’idée que les armes nucléaires sont illégales, il stigmatise l’arme nucléaire, et va donc faire évoluer les mentalités. »</p>
<p>Édith Boulanger, membre du Bureau national du Mouvement de la Paix, confirme cette analyse : elle relate que la conférence d’élaboration du TIAN à laquelle elle a participé à New York s’est tenue dans « une ambiance extraordinaire » et affirme que le TIAN va exercer une « pression morale » sur les puissances nucléaires.</p>
<p>Cette opinion est partagée par Annick Suzor-Weiner, physicienne, professeure émérite, vice-présidente de Pugwash-France :</p>
<blockquote>
<p>« L’ONU a vraiment joué le jeu et fait participer la société civile à l’élaboration du TIAN. Il m’a semblé, quand j’étais à New York en juillet 2017, que les Hibakusha de Hiroshima et Nagasaki jouaient un rôle important, mis en avant par l’ICAN. D’ailleurs, une Hibakusha était à Stockholm pour la remise du prix Nobel de la Paix à l’ICAN en 2017. »</p>
</blockquote>
<p>Les <a href="https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2015/08/05/hiroshima-le-combat-des-hibakusha-contre-l-oubli_4712659_3216.html">Hibakusha</a> sont les survivants japonais irradiés, victimes des bombes atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki. Ils sont engagés depuis longtemps en faveur du désarmement nucléaire et exercent une pression morale importante pour condamner l’usage de la bombe.</p>
<h2>L’abolition, une exigence aussi ancienne que l’arme nucléaire</h2>
<p>De fait, le <a href="https://www.un.org/disarmament/wp-content/uploads/2017/10/tpnw-info-kit-v2.pdf">préambule du TIAN</a> évoque la souffrance des Hibakusha et des victimes des essais nucléaires, déplore la « lenteur du désarmement nucléaire et l’importance que continuent de prendre les armes nucléaires dans les doctrines militaires » et appelle au respect du droit international existant : la Charte de l’ONU, le droit international humanitaire, le TNP – qualifié de « pierre angulaire du régime de non-prolifération et de désarmement nucléaires », ainsi que le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE). Le préambule souligne que tout emploi d’armes nucléaires serait contraire aux règles du droit international, et serait inadmissible par rapport aux principes de l’humanité. Il conclut en insistant sur « le rôle de la conscience publique dans l’avancement des principes de l’humanité »,</p>
<p>Annick Suzor-Weiner souligne la continuité entre le TNP et le TIAN : en effet, « l’article 6 du TNP fait – depuis un demi-siècle – obligation de négocier en vue de “la cessation de la course aux armements nucléaires à une date rapprochée” et d’un “traité de désarmement général et complet” ! C’est devant le non-respect prolongé de cet article que la pression s’est organisée dans la société civile. » Selon elle, le progrès, avec l’entrée en vigueur du TIAN, « est surtout de remettre la question bien en vue, et d’instituer une sorte de “norme” morale qui fera pression sur les états détenteurs, via leur opinion publique et les pays exposés. La période de menaces multiformes (pandémies, changement climatique) est propice à : 1. éliminer un danger qui est entre nos mains (ou sous nos doigts pour neuf chefs d’État !) ; 2. économiser des milliards dont on a bien besoin ailleurs. »</p>
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<p>Ghislaine Doucet, conseillère juridique principale au CICR, analyse pour sa part :</p>
<blockquote>
<p>« Au CICR, on n’a pas attendu le XXI<sup>e</sup> siècle pour dire qu’il faut renoncer aux armes nucléaires : dès 1945, on avait déjà des délégués du CICR à Hiroshima, et un délégué, Fritz Bilfinger, avait envoyé un télégramme pour attirer l’attention de la communauté mondiale sur la gravité de l’arme atomique. Et en septembre 1945, le Dr Marcel Junot, chef de la délégation du CICR au Japon, avait adressé une circulaire à toutes les sociétés nationales de la Croix-Rouge sur les dangers de l’arme atomique. En 1946, la Conférence des sociétés nationales de la Croix-Rouge avait recommandé l’interdiction de l’emploi de l’arme atomique pour des buts de guerre. »</p>
</blockquote>
<p>Elle rappelle le rôle clé du CICR dans la lutte contre la bombe nucléaire : « Lors de la préparation du TIAN, le CICR s’est prononcé pour, car les soignants, les aidants ne peuvent pas intervenir pour venir en aide aux populations en cas d’attaque nucléaire. Le CICR a toujours mis en avant les considérations humanitaires. Au CICR, on a fait valoir qu’en cas d’explosion d’une bombe nucléaire, on ne peut pas envoyer de soignants, de travailleurs humanitaires. »</p>
<h2>La lente évolution des consciences</h2>
<p>La France, puissance nucléaire depuis 1960, considère officiellement que le TIAN est « un <a href="https://www.vie-publique.fr/en-bref/276902-traite-sur-linterdiction-des-armes-nucleaires-entre-en-vigueur-en-2021">texte inadapté au contexte sécuritaire international</a> marqué par la résurgence des menaces d’emploi de la force » ; qu’il s’adresse exclusivement aux démocraties occidentales et « ne servira donc pas la cause du désarmement, puisqu’aucun État disposant de l’arme nucléaire ne le signera » ; et qu’il « fragilise une approche réaliste d’un désarmement s’effectuant étape par étape ». </p>
<p>Le ministre des Affaires étrangères français, Jean‑Yves Le Drian, a fait valoir en avril 2019 devant le Conseil de sécurité de l’ONU que « <a href="https://www.vie-publique.fr/discours/271272-jean-yves-le-drian-1042019-respect-du-droit-international-humanitaire">l’interdiction des armes nucléaires, alors que le désarmement ne se décrète pas ; n’est pas une approche réaliste</a>, seule une démarche progressive par étapes pouvant selon lui permettre d’atteindre cet objectif. Les États-Unis n’ont pas réagi officiellement suite à l’entrée en vigueur du TIAN, mais à New York, des <a href="https://www.npr.org/2021/01/22/959583731/u-n-treaty-banning-nuclear-weapons-takes-effect-without-the-u-s-and-others?t=1612513172884">militants contre l’arme nucléaire ont manifesté en faveur de sa ratification</a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/7l0ezopoDAQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Ainsi, des conceptions opposées se font face. Mais insensiblement, le TIAN influence même les puissances nucléaires, comme l’analyse Annick Suzor-Weiner, qui estime que le Traité pourra avoir des effets bien réels : pour preuve, « même les discours de Macron et Le Drian ont évolué : après nous avoir traités de bisounours (Védrine) ou d’illuminés, ils commencent à dire qu’ils respectent les convictions et les efforts de ces associations et de ces pays » qui ont signé le TIAN. Le TIAN pourra « forcer les États à commencer à planifier les étapes du démantèlement », amorcer « le désinvestissement des banques et des grandes entreprises », et « mettre des scientifiques sur le démantèlement au lieu de les mettre sur la modernisation des armes ». Édith Boulanger confirme que le TIAN pourra permettre aux opposants à l’arme nucléaire de faire pression sur les grandes entreprises et sur les grandes banques pour qu’elles cessent d’investir dans l’armement nucléaire. Ce que <a href="https://www.latribune.fr/opinions/droit-international-et-armes-nucleaires-quels-enjeux-pour-les-institutions-financieres-873940.html">confirme Jean‑Marie Collin</a>, co-porte-parole de ICAN France. Peu à peu, une évolution est en cours.</p>
<p>Autre point positif : un autre traité de désarmement, le traité START de réduction des armes stratégiques, conclu initialement en 1991 entre les États-Unis et la Russie, a été, début février 2021, <a href="https://information.tv5monde.com/info/le-traite-new-start-prolonge-les-defis-russes-commencent-pour-biden-394727">prolongé pour cinq ans</a>, jusqu’en 2026, prolongation entérinée par la Russie et par l’administration Biden.</p>
<p>Un bémol de taille, cependant : comme l’observent Édith Boulanger et Dominique Lalanne, les jeunes d’aujourd’hui, qui sont conscients des dégâts causés par la pollution et des risques climatiques, sont peu sensibles à la question de l’arme nucléaire. L’enjeu est donc pour les associations anti-nucléaires de toucher ce public pour faire évoluer le rapport de forces au sein des puissances disposant de l’arme ultime.</p>
<hr>
<p><em>Nous proposons cet article dans le cadre du Forum mondial Normandie pour la Paix organisé par la Région Normandie le 30 septembre et le 1er octobre 2021 et dont The Conversation France est partenaire. Pour en savoir plus, visiter le site du <a href="https://normandiepourlapaix.fr/">Forum mondial Normandie pour la Paix</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153995/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Chloé Maurel ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’entrée en vigueur du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, élaboré sous l’égide de l’ONU et ratifié par 52 États, est une victoire pour les tenants de l’abolition de l’arme nucléaire.Chloé Maurel, SIRICE (Université Paris 1/Paris IV), Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1538962021-02-04T21:30:30Z2021-02-04T21:30:30ZLe Mali peut-il se passer de l’opération Barkhane ?<p>Le 20 janvier 2021, une manifestation était annoncée sur l’emblématique Place de l’indépendance de la capitale malienne, Bamako, pour exiger le départ des troupes françaises du Mali.</p>
<p>Ses initiateurs ? Des éléments d’un <a href="http://news.abamako.com/h/246182.html">collectif dénommé « Yèrèwolo »</a>, dont certains sont aussi membres du Conseil national de transition – <a href="https://www.voaafrique.com/a/mali-le-colonel-malick-diaw-hausse-le-ton-contre-les-propos-anti-barkhane/5739309.html">CNT (l’organe législatif de la transition en cours au Mali)</a> ; ainsi que des activistes maliens très actifs sur Facebook. Ces derniers, pour la plupart, résident en dehors du Mali, notamment en France et aux États-Unis, mais avaient fait le déplacement pour assister à la manifestation.</p>
<p>L’activiste franco-béninois <a href="https://afrique.lalibre.be/45286/kemi-seba-de-pharaon-a-gourou-anti-francais/">Kémi Séba</a>, qui s’est fait connaître par ses prises de position contre les politiques africaines de la France, s’était aussi déplacé à Bamako pour apporter son soutien aux organisateurs de la manifestation. On savait pourtant très bien, dès l’annonce de celle-ci, qu’elle <a href="https://www.leparisien.fr/international/mali-les-forces-de-l-ordre-dispersent-des-opposants-a-la-presence-militaire-francaise-20-01-2021-8420268.php">ne recevrait pas l’autorisation des pouvoirs public</a>s, qui n’hésitent désormais pas à évoquer le <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2020/12/21/l-etat-a-failli-le-mali-demuni-face-a-la-deuxieme-vague-de-covid-19_6064138_3212.html">contexte sanitaire lié à la Covid-19</a>, ainsi que <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20201219-mali-les-libert%C3%A9s-publiques-restreintes-par-l-%C3%A9tat-d-urgence">l’état d’urgence en vigueur</a>, pour interdire tout rassemblement public ne recueillant pas leur assentiment.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1351867226199089152"}"></div></p>
<p>Des manifestations semblables s’étaient auparavant sporadiquement tenues <a href="https://theconversation.com/pourquoi-lopinion-publique-malienne-a-une-vision-negative-de-loperation-barkhane-130640">au Mali</a> et dans d’autres pays sahéliens, poussant le président français Emmanuel Macron à exiger une clarification de la part de ses pairs du G5 Sahel sur leur volonté de maintenir ou non la force Barkhane dans leurs pays respectifs. Cette « convocation » des présidents sahéliens par Macron, dans le cadre du <a href="https://www.lefigaro.fr/international/emmanuel-macron-convoque-un-sommet-du-g5-sahel-a-pau-20200112">sommet de Pau du 13 janvier 2020</a>, était certainement due au fait que certains parmi eux avaient semblé laisser prospérer les critiques anti-françaises, une manière de masquer leurs propres insuffisances dans la gouvernance sécuritaire de leurs pays. La réponse des présidents africains fut toutefois, sans aucune ambiguïté, <a href="https://rfi.fr/fr/afrique/20200113-sommet-pau-paris-le-g5-sahel-resserrent-rangs-contre-jihadistes">favorable au maintien de Barkhane</a>.</p>
<p>Dès sa prise du pouvoir lors du <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2020/10/ROBERT/62316">coup d’État du 18 août 2020</a>, la junte actuellement aux affaires à Bamako avait, dans sa première allocution télévisée, rassuré les partenaires internationaux du Mali – au premier plan desquels la France – sur le respect de tous les accords militaires conclus avec le régime déchu. Le soutien des autorités de la transition à la présence militaire française était d’autant plus prévisible que l’actuel président de la transition, <a href="https://www.jeuneafrique.com/1048748/politique/mali-qui-est-bah-ndaw-lancien-militaire-propulse-a-la-tete-de-la-transition/">Bah N’Daw</a>, avait signé les <a href="https://opex360.com/2014/07/17/la-france-le-mali-signent-traite-de-cooperation-militaire/">accords de coopération militaire franco-maliens</a> en tant que ministre de la Défense du président déchu, Ibrahim Boubacar Kéita, en 2014. Dans son allocution du 20 janvier, à l’occasion du 60<sup>e</sup> anniversaire de l’armée malienne, sa position était clairement réaffirmée :</p>
<blockquote>
<p>« Je voudrais renouveler la gratitude de notre pays envers la communauté internationale dont les armées sont à nos côtés et dont les soldats risquent leur vie pour la libération de notre pays. »</p>
</blockquote>
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<h2>Les raisons de la persistance des critiques visant Barkhane</h2>
<p>La question du maintien ou non de Barkhane nous semble beaucoup moins importante que celle concernant le comblement du vide qu’un départ prématuré créerait. L’exigence de son départ ne devrait pas précéder les débats sur les différentes possibilités de son remplacement ; et c’est en premier lieu aux Maliens qu’il revient de tenir ces débats.</p>
<p>De ce point de vue, certaines des positions de la France quant à la stratégie à maintenir ont renforcé les réticences et nourri les critiques contre l’opération Barkhane. Paris a très certainement sa propre vision et ses propres calculs, souvent différents de ceux des autorités maliennes. Une de ces questions polémiques concerne l’établissement d’un dialogue avec les groupes djihadistes, <a href="https://www.lepoint.fr/afrique/la-france-et-le-mali-en-desaccord-sur-le-dialogue-avec-les-djihadistes-26-10-2020-2398101_3826.php">voulu par les autorités maliennes, mais rejeté par la France</a>. Cette dernière a toutefois fini par faire <a href="https://www.lepoint.fr/afrique/dialogue-avec-les-djihadistes-au-mali-paris-fait-evoluer-sa-position-21-12-2020-2406739_3826.php">évoluer sa position</a> sur la question en ouvrant la voie à des discussions avec des groupes armés – mais uniquement avec des groupes locaux, et non avec ceux à dimension internationale que sont Al-Qaïda et l’État islamique.</p>
<p>En outre, les analyses semblent converger sur la relative inefficacité de l’ensemble des forces armées, nationales et étrangères, dans la sécurisation du Mali et du Sahel ouest-africain en général. Barkhane apparaîtrait de ce point de vue inutile aux yeux de nombreux habitants du Mali. Mais c’est oublier que sa présence, aussi inefficace qu’elle puisse paraître, permet sans doute d’annihiler dans une certaine mesure la capacité d’expansion des groupes armés terroristes qui écument le nord du Mali.</p>
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<p>Une grande partie des arguments mobilisés contre Barkhane par ses détracteurs repose également sur des <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/12/05/ces-folles-rumeurs-qui-courent-sur-l-armee-francaise-au-sahel_6021779_3212.html">rumeurs</a>. Les soldats français sont tantôt accusés de se livrer à du trafic d’or malien ; de ne pas assister délibérément les Forces armées maliennes (un propos relayé par certains officiels) ; de fournir des motos aux djihadistes ; ou encore de simuler des morts dans leurs rangs.</p>
<p>Le succès des mobilisations contre la présence de Barkhane tient à deux points essentiels : (1) au fait que ses initiateurs ont réussi à faire passer la France, auprès d’une partie de la population, pour responsable de la crise malienne, en occultant totalement les responsabilités des acteurs maliens. Et (2) à leur capacité à diffuser massivement ces rumeurs auprès d’une partie importante de la population via les réseaux sociaux. Ces pratiques sont devenues le « fonds de commerce » de plusieurs activistes maliens présents notamment sur Facebook, et qui communiquent dans la langue locale pour une plus importante audience.</p>
<h2>Quels risques en cas de départ prématuré de Barkhane ?</h2>
<p>Le contexte qui prévaut au Mali fait qu’il est souvent difficile de soutenir la présence militaire française dans ce pays sans apparaître comme étant à la solde de la France. C’est encore plus le cas pour ceux parmi les intellectuels maliens connus pour avoir (ou pour avoir eu) des liens avec la France.</p>
<p>La réalité est que ceux qui exigent le départ immédiat de Barkhane semblent ne pas connaître la réalité des théâtres d’opérations, et l’extrême complexité de la crise malienne. Ils ne semblent pas non plus s’apercevoir que les forces armées maliennes (FAMa) ne sont pas immédiatement aptes à assurer la relève. Les programmes de formation ainsi que la loi de programmation militaire (un ambitieux investissement de 1 230 milliards de francs CFA, soit 1,8 milliard d’€) n’ont pas abouti aux résultats escomptés, <a href="https://www.studiotamani.org/index.php/themes/politique/21895-mali-l-opposition-exige-des-enquetes-sur-l-utilisation-des-fonds-alloues-a-l-armee">faute d’une utilisation adéquate et transparente</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1190724834944331783"}"></div></p>
<p>Les appels à manifester à Bamako pour exiger le départ des troupes françaises du Mali relèvent essentiellement du « populisme » pour qui connaît un tant soit peu la condition réelle des FAMa, lesquelles manquent de tout : de leadership ; de ressources humaines (un effectif de 20 000 soldats prévus par la <a href="http://ultimaratio-blog.org/archives/8417">loi de programmation militaire (2019)</a> pour un territoire d’1 240 000 km<sup>2</sup>) ; de formation adéquate ; des matériels nécessaires et adaptés aux théâtres d’opérations ; et même d’eau et de nourriture. Autant de lacunes qui ont un effet négatif sur le moral des troupes déployées sur les théâtres d’opérations, et dont les primes ont longtemps été <a href="http://djeliba24.com/administration-militaire-au-mali-au-moins-44-milliards-de-primes-de-soldats-detournes/">détournées par leur hiérarchie</a>.</p>
<h2>La condition des forces armées maliennes et la nécessité d’un appui de Barkhane</h2>
<p>Le 21 novembre 2019, Ibrahima Dahirou Dembélé, à l’époque ministre de la Défense et ex-chef d’état-major des armées, interpellé par des parlementaires, a donné une <a href="http://rfi.fr/fr/afrique/20191121-mali-ministre-defense-dembele-situation-militaire">réponse très instructive</a> sur l’état réel de l’armée malienne ainsi que sur l’apport de Barkhane dans la sécurisation du Mali :</p>
<blockquote>
<p>« À ce jour, les forces spéciales n’avaient aucun moyen. Quand je suis allé les voir avec les rescapés [lors de l’attaque de Boulikessi le 6 octobre 2019], ils m’ont dit : “On n’a que ces deux bouteilles-là, comment est-ce que vous allez nous donner à boire et à manger ?” ».</p>
</blockquote>
<p>Au député de la dernière législature Moussa Diarra, connu pour son hostilité à la présence militaire française au Mali, qui s’étonnait de l’inaction de Barkhane lors des attaques contre les FAMa, Ibrahima Dahirou Dembélé répondit que Barkhane avait pour seul but de soutenir les forces armées maliennes et non pas de les remplacer. Et le ministre Dembélé de <a href="http://maliweb.net/politique/assemblee-nationale/le-ministre-ibrahima-dahirou-dembele-aux-deputes-ce-nest-pas-en-restant-a-bamako-que-vous-allez-jouer-votre-role-de-parlementaires-2849208.html">lancer au parlementaire</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Ce n’est pas en restant à Bamako, en recueillant des rumeurs, que vous allez jouer votre rôle de parlementaire. »</p>
</blockquote>
<p>Des infléchissements méritent certainement d’être opérés dans la stratégie actuellement maintenue. Mais, contrairement à ce qu’affirment les détracteurs de Barkhane, le départ précipité de celle-ci ne résoudra pas les problèmes sécuritaires du Mali (d’ailleurs, les autorités politiques et militaires semblent en être bien conscientes). Au contraire, le risque serait que des groupes armés terroristes s’empressent de combler le vide qui se créerait alors, d’autant qu’on peut d’ores et déjà avoir la certitude que les FAMa ne sauraient le faire pour les multiples raisons susmentionnées.</p>
<p>Une autre alternative à la force Barkhane est le G5-Sahel qui avait justement été mis en place dans cette optique. Créé en février 2014, en vue d’être déployé à la fin 2017, à l’initiative des chefs d’État de la région, le G5 Sahel apparaît toujours, comme nous l’avions déjà <a href="http://lamenparle.hypotheses.org/669">présenté</a> au moment de son déploiement, comme « un machin mort-né ».</p>
<p>Une des options crédibles qui semble exister est une profonde réorientation (perceptible) de l’approche militaire, visant à prendre réellement en compte la complexité des territoires sur lesquels se déploient les forces armées. Des individus et membres de groupes considérés comme terroristes, qui sont recherchés et appréhendés par les forces armées maliennes et françaises, sont des fils et frères qui, dans certains cas, ont tout le soutien de la communauté locale. Ce constat laisse apparaître une profonde porosité sociale et économique entre populations et membres de groupes armés terroristes, rendant ainsi le dialogue à certains endroits indispensable. Car il semble difficile, voire impossible, de combattre des éléments hostiles bénéficiant de la protection et du soutien de la communauté.</p>
<p>En outre, la formation des militaires maliens, et un usage transparent des fonds alloués à l’armée (pour l’équipement et les primes) doivent demeurer un impératif qui garantirait leur autonomie. Mais la politisation des militaires dans le cadre de la transition en cours (à travers une forte militarisation du pouvoir politique à tous les niveaux de la sphère étatique) pourrait avoir l’effet contraire, et aboutir à une perte de vue progressive de l’impératif sécuritaire au profit de l’exercice politique. Cette situation est plus problématique pour l’armée malienne que l’objectif de construction (ou reconstruction) d’une armée professionnelle – avec l’aide des partenaires internationaux du Mali, notamment à travers le <a href="https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2020/03/23/eutm-mali-council-extends-training-mission-with-broadened-mandate-and-increased-budget/">programme EUTM</a> – se heurte ici à un objectif différent, à savoir la volonté d’exercice de fonctions éminemment politiques par les militaires.</p>
<p>En l’état actuel de la situation sécuritaire, et compte tenu des capacités insuffisantes des forces armées maliennes et des forces régionales du G5 Sahel, le Mali ne semble pas prêt – dans une perspective à court terme – à se passer de l’opération Barkhane. Celle-ci est certes appelée à prendre fin, mais selon un agenda maîtrisé.</p>
<hr>
<p><em>Nous proposons cet article dans le cadre du Forum mondial Normandie pour la Paix organisé par la Région Normandie le 30 septembre et le 1er octobre 2021 et dont The Conversation France est partenaire. Pour en savoir plus, visiter le site du <a href="https://normandiepourlapaix.fr/">Forum mondial Normandie pour la Paix</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153896/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Boubacar Haidara ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Mettre fin à l’opération Barkhane ne résoudra pas les problèmes sécuritaires du Mali. L’armée française est évidemment vouée à quitter le pays un jour, mais sa présence est pour l’instant nécessaire.Boubacar Haidara, Chercheur associé au laboratoire Les Afriques dans le Monde (LAM), Sciences-Po Bordeaux., Université Bordeaux MontaigneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1529542021-01-13T18:14:31Z2021-01-13T18:14:31ZLa France dans la tourmente au Sahel<p>Au bout de huit ans, l’intervention militaire de la France dans cinq pays francophones du Sahel n’a pas permis d’éradiquer la menace djihadiste. La poursuite de l’opération Barkhane soulève en conséquence de nombreux doutes. </p>
<p>L’Élysée n’a annoncé aucun calendrier de retrait et certains posent la question très crûment : l’ancienne puissance coloniale est-elle vraiment la mieux placée pour stabiliser la zone ?</p>
<h2>Défiance des populations locales</h2>
<p>À l’international, en l’occurrence, on estime souvent que la France a la capacité d’agir en Afrique car elle connaît bien le terrain et pourrait donc mieux répondre aux attentes de ses alliés au sein de l’Union européenne et du G5 Sahel, le « Groupe des Cinq » que forment le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad. Le problème est que ses atouts sont aussi des faiblesses.</p>
<p>Sur le plan tactique, d’abord, la France a effectivement maintenu au Tchad et au Niger des coopérations militaires de façon quasiment ininterrompue depuis la période des indépendances. Mais les relations ont été beaucoup plus erratiques avec la République islamique de Mauritanie, ou encore avec le Mali et le Burkina Faso, qui étaient proches de Moscou et de Tripoli du temps de la guerre froide. C’est en fait la « guerre globale contre le terrorisme » qui a amené l’armée française à renouer des contacts et à rebâtir des relations de partenariat dans ces trois pays.</p>
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<p>Le statut d’ancienne puissance coloniale nourrit par ailleurs de nombreux procès d’intention au Sahel. Toujours suspectée de faire et défaire les gouvernements de la région, la France n’est pas perçue comme neutre. Au contraire, elle est régulièrement accusée de chercher à promouvoir un agenda caché, par exemple pour mettre la main sur des ressources naturelles plus ou moins imaginaires.</p>
<p>Historiquement marqués par une forte tradition anti-impérialiste, le Mali et le Burkina Faso le montrent bien. Les opinions exprimées sur les réseaux sociaux et par certains de leurs dirigeants laissent en effet entendre que la France soutiendrait les groupes djihadistes afin de déstabiliser des États souverains et de profiter de leur faiblesse pour recoloniser le Sahel. Au Mali, en particulier, la population ne cache pas sa défiance à l’égard de la force Barkhane. En revanche, elle a une très bonne opinion de son armée. Si l’on en croit de <a href="https://afrobarometer.org/fr/publications/resume-des-resultats-enquete-afrobarometer-round-8-au-mali-2020">récents sondages</a> réalisés auprès de 1 200 adultes, plus de quatre Maliens sur cinq font confiance à leurs soldats pour défendre le pays.</p>
<p>Un tel résultat paraît assez surprenant car les militaires qui se sont récemment emparés du pouvoir à Bamako se sont avérés incapables d’endiguer la menace djihadiste au nord. De plus, ils se sont surtout fait connaître pour leurs exactions et par des putschs qui ont profondément déstabilisé la région en 2012 puis 2020. En réalité, le capital de sympathie dont bénéficie l’armée malienne témoigne surtout de l’impopularité du régime précédent et du nationalisme exacerbé de Sahéliens profondément humiliés de devoir s’en remettre à l’ancienne puissance coloniale pour assurer leur sécurité, plus d’un demi-siècle après les indépendances – à moins qu’il faille plutôt y voir la crainte de déplaire aux autorités, sachant qu’un tiers des sondés pensaient que les enquêteurs étaient envoyés par le gouvernement.</p>
<h2>Des contentieux anciens</h2>
<p>Au Mali, il est vrai que la suspicion à l’égard de la France puise aussi ses racines dans des contentieux plus anciens liés à l’expulsion de migrants clandestins et d’un supposé soutien aux rebelles touarègues dans le nord.</p>
<p>Deux ans avant son départ en 1960, le colonisateur avait en effet tenté, en vain, de créer une sorte d’État tampon sous la forme d’une <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1956/08/02/une-organisation-commune-des-regions-sahariennes-a-ete-approuvee-par-le-gouvernement_2245910_1819218.html">« Organisation commune aux régions du Sahara »</a> qui aurait soustrait les zones septentrionales du Soudan français et les puits de pétrole du sud de l’Algérie à l’influence, respectivement, de Bamako et des indépendantistes du FLN. Les Maliens ne l’ont pas oublié et, depuis lors, Paris a souvent été suspecté d’appuyer en sous-main les séparatistes touarègues afin de modifier une frontière qui paraissait d’autant plus artificielle qu’elle avait été tirée au cordeau.</p>
<p>Qui plus est, quand les djihadistes venus d’Algérie sont montés en puissance dans le nord du Mali, les services secrets français ont effectivement <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2013/08/14/l-avenir-du-mali-suspendu-a-la-question-touareg_3461280_3212.html">armé les mouvements indépendantistes « laïques »</a> pour combattre les groupes terroristes. Ils ont ainsi reproduit les erreurs commises à la même époque en Libye, où Paris a soutenu le soulèvement contre la dictature de Kadhafi en livrant des cargaisons d’armes qui, pour certaines d’entre elles, sont réputées avoir <a href="https://www.cairn.info/revue-politique-etrangere-2013-3-page-147.htm">échoué entre les mains d’Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI)</a> en juin 2011. Dans le nord du Mali, la proclamation d’indépendance de l’Azawad en mai 2012 a certes respecté le tracé des frontières héritées de la colonisation, sans doute pour ménager les susceptibilités de la communauté internationale. Mais elle a aussi permis aux djihadistes de s’emparer du pouvoir à Gao et Tombouctou, situation qui devait finalement conduire au débarquement des troupes françaises en janvier 2013.</p>
<p>La suite des événements a alors révélé toute l’étendue des désaccords possibles sur les priorités stratégiques de l’action militaire. Pour Bamako, les séparatistes touarègues constituaient le principal ennemi à abattre ; pour Paris, en revanche, il s’agissait d’abord des djihadistes venus d’Algérie. Jusqu’en 2020, plus précisément, l’armée française a surtout ciblé AQMI. Dans le même temps, le Burkina Faso, le Mali et le Niger se sont davantage préoccupés de la montée en puissance de l’État islamique dans la zone dite des « trois frontières ».</p>
<p>Il est certes fréquent que des alliés ne parviennent pas à se mettre d’accord sur les priorités des cibles à éliminer et sur les listes des groupes désignés comme terroristes. Mais, en pratique, le G5 Sahel peine à être opérationnel et ses dysfonctionnements interrogent directement le rôle de leadership et de coordination de la France. Le contraste est particulièrement saisissant avec l’autre coalition antiterroriste de la région, la <a href="https://www.crisisgroup.org/africa/west-africa/291-what-role-multinational-joint-task-force-fighting-boko-haram">Force multinationale conjointe</a>, qui fonctionne quasiment sans soutien extérieur et qui regroupe le Nigeria, le Cameroun, le Niger et le Tchad pour combattre Boko Haram.</p>
<h2>Quel rôle pour la France dans la recherche d’une solution politique ?</h2>
<p>À y regarder de plus près, les ratés de la lutte contre les groupes djihadistes au Sahel mettent en évidence les limites de coopérations militaires que les décideurs apprécient au nombre d’heures dispensées au lieu de les évaluer en termes de performance au combat et de respect du droit humanitaire. Le fond du problème est pourtant bien là. Indisciplinées et très corrompues, les armées africaines de la région entretiennent les conflits <a href="https://www.fidh.org/IMG/pdf/fidh_centre_du_mali_les_populations_prises_au_pie_ge_du_terrorisme_et_contre_terrorisme.pdf">par leurs rackets incessants et leurs violations massives des droits de l’homme</a>. Dans les zones de combat, notamment, elles ont perdu la confiance de bon nombre de civils qu’elles s’avèrent incapables de protéger. Par contrecoup, leurs exactions ont aussi légitimé des djihadistes qui se présentent maintenant comme des hérauts de la résistance face à des troupes impies au service de l’impérialisme occidental.</p>
<p>Ainsi, il y a peu de chances de gagner la « guerre contre le terrorisme » si les forces de sécurité continuent de commettre des abus en toute impunité. La solution à la crise du Sahel est d’abord politique et nécessite une profonde réforme des États de la région, entre autres pour répondre aux exigences de justice de la population. Il n’est pas évident que la France puisse jouer un rôle déterminant à cet égard, sachant qu’elle serait aussitôt accusée de néocolonialisme si elle s’avisait de critiquer publiquement les errements de ses alliés africains au Sahel…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152954/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc-Antoine Pérouse de Montclos ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Après huit ans d’intervention française au Sahel, le bilan est plus que mitigé. La France est souvent mal vue par les populations locales et la sécurité est loin d’être rétablie dans la région.Marc-Antoine Pérouse de Montclos, directeur de recherches, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1469942020-09-26T16:54:13Z2020-09-26T16:54:13ZPrévenir la guerre : répondre aux nouvelles menaces<p>L'édition 2020 du <a href="https://normandiepourlapaix.fr/">Forum mondial Normandie sur la Paix</a>, les 1er et 2 octobre 2020, à Caen, dont The Conversation France est partenaire, a pour thème « Prévenir la guerre : répondre aux nouvelles menaces ». Nous vous proposons ici une sélection d'articles parus sur notre site qui permettent d'éclairer les thèmes abordés lors des trois conférences plénières et des quinze débats spécifiques organisés à cette occasion. Une sélection plus vaste d'articles est à retrouver dans la rubrique <a href="https://normandiepourlapaix.fr/ressources">« Centre de ressources »</a> du Forum.</p>
<p><strong><em>CONFÉRENCE 1</em> Les raisons de la colère : Enjeux sociaux, démocratiques et environnementaux pour la paix</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/lamerique-du-sud-en-ebullition-les-raisons-de-la-colere-126825">L’Amérique du Sud en ébullition : les raisons de la colère</a></li>
</ul>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/301314/original/file-20191112-178520-5ki7p9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/301314/original/file-20191112-178520-5ki7p9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/301314/original/file-20191112-178520-5ki7p9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/301314/original/file-20191112-178520-5ki7p9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/301314/original/file-20191112-178520-5ki7p9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/301314/original/file-20191112-178520-5ki7p9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/301314/original/file-20191112-178520-5ki7p9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des manifestants visés par un canon à eau de la police lors d'une récente manifestation anti-gouvernementale à Santiago, au Chili.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AP Photo/Esteban Felix</span></span>
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<p><strong><em>CONFÉRENCE 2</em> Les Femmes et la construction de la paix</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/les-femmes-peuvent-etre-la-cle-du-developpement-durable-au-moyen-orient-et-en-afrique-du-nord-130405">Les femmes peuvent être la clé du développement durable au Moyen-Orient et en Afrique du Nord</a></li>
</ul>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/311374/original/file-20200122-117911-1ifnnlw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=18%2C0%2C2008%2C1298&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/311374/original/file-20200122-117911-1ifnnlw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/311374/original/file-20200122-117911-1ifnnlw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/311374/original/file-20200122-117911-1ifnnlw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/311374/original/file-20200122-117911-1ifnnlw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/311374/original/file-20200122-117911-1ifnnlw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/311374/original/file-20200122-117911-1ifnnlw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Mary Nazzal-Batayneh, avocate et entrepreneure sociale libanaise, invitée du Forum économique mondial sur la région MENA organisé en Jordanie en avril 2019.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/worldeconomicforum/33678546828/in/photolist-Tj4mCu-2fnC9Vy-2e4oxgn-2emkG8o-2emkFqw-Tj4mp3-2e4ovJV-2e4oxJg-2e4owA4-24QJ2bv">World Economic Forum / Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><strong><em>CONFÉRENCE 3</em> Révolutions technologiques : pour le meilleur ou pour la guerre?</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/robots-armes-autonomes-lart-de-la-guerre-en-mutation-81460">Robots armés autonomes : l'art de la guerre en mutation</a></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/180069/original/file-20170727-8525-1w790em.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/180069/original/file-20170727-8525-1w790em.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/180069/original/file-20170727-8525-1w790em.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/180069/original/file-20170727-8525-1w790em.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/180069/original/file-20170727-8525-1w790em.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=506&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/180069/original/file-20170727-8525-1w790em.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=506&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/180069/original/file-20170727-8525-1w790em.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=506&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Volk-2 russe piloté à distance.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Crédit : Vitaly V. Kouzmin / Wikipedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><strong><em>DÉBAT 1</em> L'UE sur la scène internationale : quels résultats ?</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/lavenement-de-letat-europeen-un-etat-baroque-unique-au-monde-143328">L'avènement de l'État européen : un État baroque unique au monde</a></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/349226/original/file-20200723-29-8h3o0m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C12%2C4268%2C2818&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/349226/original/file-20200723-29-8h3o0m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/349226/original/file-20200723-29-8h3o0m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/349226/original/file-20200723-29-8h3o0m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/349226/original/file-20200723-29-8h3o0m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/349226/original/file-20200723-29-8h3o0m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/349226/original/file-20200723-29-8h3o0m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le drapeau de l'UE parmi celui de ses membres.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Markus Pfaff/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p><strong><em>DÉBAT 2</em> Diplomatie de l'eau : partager l'or bleu</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/au-mexique-les-enjeux-de-la-bataille-pour-leau-133459">Au Mexique, les enjeux de la bataille pour l'eau</a></li>
</ul>
<p><strong><em>DÉBAT 3</em> Après la crise : quel monde post Covid-19 ?</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/penser-lapres-la-reconstruction-plutot-que-la-reprise-137042">Penser l’après : La reconstruction plutôt que la reprise</a></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/330303/original/file-20200424-163077-dmx89s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/330303/original/file-20200424-163077-dmx89s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=494&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/330303/original/file-20200424-163077-dmx89s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=494&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/330303/original/file-20200424-163077-dmx89s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=494&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/330303/original/file-20200424-163077-dmx89s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=620&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/330303/original/file-20200424-163077-dmx89s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=620&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/330303/original/file-20200424-163077-dmx89s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=620&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/g/jamesbin">Jamesbin/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><strong><em>DÉBAT 4</em> Restaurer la confiance ?</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/retablir-la-confiance-dans-le-debat-public-et-le-respect-du-citoyen-par-le-debat-numerique-110379">Rétablir la confiance dans le débat public et le respect du citoyen par le débat numérique</a></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/258534/original/file-20190212-174861-b6f3yj.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1194%2C847&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/258534/original/file-20190212-174861-b6f3yj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/258534/original/file-20190212-174861-b6f3yj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/258534/original/file-20190212-174861-b6f3yj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/258534/original/file-20190212-174861-b6f3yj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/258534/original/file-20190212-174861-b6f3yj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/258534/original/file-20190212-174861-b6f3yj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Comment faire en sorte que le débat permette de produire des propositions concrètes au service de tous ?</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sylvaine Jenny/DR</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p><strong><em>DÉBAT 5</em> Amazonie : enjeu planétaire</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/declarer-la-foret-amazonienne-bien-commun-de-lhumanite-une-idee-pas-si-neuve-127085">Déclarer la forêt amazonienne bien commun de l'humanité, une idée pas si neuve</a></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/302498/original/file-20191119-111686-1n3e6kv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=94%2C33%2C4257%2C2802&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/302498/original/file-20191119-111686-1n3e6kv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/302498/original/file-20191119-111686-1n3e6kv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/302498/original/file-20191119-111686-1n3e6kv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/302498/original/file-20191119-111686-1n3e6kv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/302498/original/file-20191119-111686-1n3e6kv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/302498/original/file-20191119-111686-1n3e6kv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’idée d’internationaliser la forêt amazonienne n’est pas nouvelle.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/download/success?u=http%3A%2F%2Fdownload.shutterstock.com%2Fgatekeeper%2FW3siZSI6MTU3NDIwNjIzNiwiYyI6Il9waG90b19zZXNzaW9uX2lkIiwiZGMiOiJpZGxfNzA0NjcxNzYyIiwiayI6InBob3RvLzcwNDY3MTc2Mi9odWdlLmpwZyIsIm0iOjEsImQiOiJzaHV0dGVyc3RvY2stbWVkaWEifSwiNUlic05aT05Rdk1Pb25YR0ZvQmF3U0JObGRjIl0%2Fshutterstock_704671762.jpg&ir=true&pi=33421636&m=704671762&src=07c6773d-81aa-41e4-a99b-297b79d5b9c1-1-0">Gustavo Frazao / Shutterstock</a></span>
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<p><strong><em>DÉBAT 6</em> Éthiopie, souffle d'espoir pour l'Afrique?</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/ethiopie-erythree-la-proclamation-inattendue-dune-paix-importee-103853">Éthiopie-Érythrée, la proclamation inattendue d'une paix importée</a></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/237946/original/file-20180925-149961-1xapsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C26%2C1198%2C768&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/237946/original/file-20180925-149961-1xapsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/237946/original/file-20180925-149961-1xapsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/237946/original/file-20180925-149961-1xapsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/237946/original/file-20180925-149961-1xapsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/237946/original/file-20180925-149961-1xapsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/237946/original/file-20180925-149961-1xapsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Deux femmes venues d'Erythrée célèbrent la réouverture de la frontière avec l'Ethiopie, le 11 septembre 2018.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Stringer/AFP</span></span>
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<p><strong><em>DÉBAT 7</em> Quel futur pour le multilatéralisme et l'ONU ?</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/organisations-internationales-le-spectre-dune-hegemonie-chinoise-se-concretise-136706">Organisations internationales : le spectre d'une hégémonie chinoise se concrétise</a></li>
</ul>
<p><strong><em>DÉBAT 8</em> Les libertés face à la crise</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/sortir-de-la-pandemie-mais-au-prix-de-quels-renoncements-ethiques-et-juridiques-134928">Sortir de la pandémie, mais au prix de quels renoncements éthiques et juridiques ?</a></li>
</ul>
<p><strong><em>DÉBAT 9</em> Les dynamiques asiatiques à l'épreuve de la crise</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/chine-inde-mefiance-par-temps-de-pandemie-136149">Chine-Inde : méfiance par temps de pandémie</a></li>
</ul>
<p><strong><em>DÉBAT 10</em> Défis globaux, réponses locales: quelles solutions pour le climat ?</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/pour-lutter-contre-le-changement-climatique-inspirons-nous-de-linux-107857">Pour lutter contre le changement climatique, inspirons-nous de Linux !</a></li>
</ul>
<p><strong><em>DÉBAT 11</em> Sahel: quelles initiatives régionales pour la paix et la sécurité?</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/la-securite-collective-en-afrique-une-cooperation-a-geometrie-variable-128042">La sécurité collective en Afrique : une coopération à géométrie variable</a></li>
</ul>
<p><strong>DÉBAT 12 Que vaut une alliance aujourd'hui ?</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/du-multilateralisme-aux-coalitions-heteroclites-122152">Du multilatéralisme aux coalitions hétéroclites</a></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/288758/original/file-20190820-170956-x6isb6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=248%2C58%2C750%2C517&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/288758/original/file-20190820-170956-x6isb6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=347&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/288758/original/file-20190820-170956-x6isb6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=347&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/288758/original/file-20190820-170956-x6isb6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=347&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/288758/original/file-20190820-170956-x6isb6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=436&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/288758/original/file-20190820-170956-x6isb6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=436&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/288758/original/file-20190820-170956-x6isb6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=436&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La coopération entre acteurs divers, nouvelle réponse aux défis contemporains ?</span>
<span class="attribution"><span class="source">REDPIXEL.PL / Shutterstock</span></span>
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<p><strong><em>DÉBAT 13</em> (Dés)Equilibres économiques mondiaux</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/changement-climatique-comment-limiter-les-degats-pour-leconomie-mondiale-96240">Changement climatique : comment limiter les dégâts pour l'économie mondiale ?</a></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/219099/original/file-20180515-195315-2eg3vq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C50%2C2400%2C1422&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/219099/original/file-20180515-195315-2eg3vq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/219099/original/file-20180515-195315-2eg3vq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/219099/original/file-20180515-195315-2eg3vq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/219099/original/file-20180515-195315-2eg3vq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/219099/original/file-20180515-195315-2eg3vq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/219099/original/file-20180515-195315-2eg3vq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/financial-crisis-323559347?src=w3dyoOaSB6IESd6MaTjWIA-1-1">Shutterstock</a></span>
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<p><strong><em>DÉBAT 14</em> Moyen-Orient : Se reconstruire dans un contexte incertain</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/les-palestiniens-face-au-deal-du-siecle-le-temps-de-la-reconciliation-131244">Les Palestiniens face au «deal du siècle» : le temps de la réconciliation ?</a></li>
</ul>
<p><strong><em>DÉBAT 15</em> L'enfance dans les conflits</strong></p>
<ul>
<li><a href="https://theconversation.com/pays-en-crise-et-education-quels-roles-pour-laide-internationale-97654">Pays en crise et éducation : quels rôles pour l'aide internationale ?</a></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/223008/original/file-20180613-32316-1ee4z55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/223008/original/file-20180613-32316-1ee4z55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/223008/original/file-20180613-32316-1ee4z55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/223008/original/file-20180613-32316-1ee4z55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/223008/original/file-20180613-32316-1ee4z55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/223008/original/file-20180613-32316-1ee4z55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/223008/original/file-20180613-32316-1ee4z55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des agents des Nations Unies organisant des sensibilisations à l'éducation sexuelle dans une école de Bangui.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/un_photo/37643827780/in/photolist-2MiuYU-4NH1tq-4NCN2B-4RDrcE-4NCQmM-iYzAki-ZEUnhh-Zmsszf-iYAsUq-6gXAJ7-dLx6jh-iYAsDA-Zmssvs-iYyjSP-4RDvEw-PpCtM-2CzyWB-Pp3k3-PpCKM-Ps2cv-8FszJu-iYCdAU-Zmssyo-ZEUnfo-ZEUnky-ZmsstJ-ZmsszW-ZmssD3-38o1Uz-6gYAwU-2cBiMi-2iP6MN-fnv2go-38nYEX-38nWar-6gUnRK-6gYzm9-6gUsq8-6gTnRi-6gUqXV-JcSg5J-r6Nrzo-eRo7G8-qPVekp-oL8F1m-8FszV9-J6XUzq-LeQ3HQ-JfShz8-J6XUh1">UN Police (UNPOL) </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
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</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/146994/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
L'édition 2020 du Forum mondial Normandie sur la Paix a pour thème « Prévenir la guerre : répondre aux nouvelles menaces ».Grégory Rayko, Chef de rubrique International, The Conversation FranceKina Vujanic Beck, Editor, The Conversation France Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1448252020-08-27T18:51:51Z2020-08-27T18:51:51ZLimitation du nombre de mandats présidentiels en Afrique : la route est encore longue<p>Le président ivoirien Alassane Ouattara (78 ans) a finalement <a href="https://www.jeuneafrique.com/1026412/politique/candidature-a-un-troisieme-mandat-le-pari-risque-dalassane-ouattara/">confirmé le 20 août dernier</a> qu’il briguerait un troisième mandat en octobre. Quelques jours plus tard, le parti au pouvoir en Guinée <a href="https://www.france24.com/fr/20200806-en-guin%C3%A9e-le-parti-au-pouvoir-d%C3%A9signe-alpha-cond%C3%A9-comme-candidat-%C3%A0-un-troisi%C3%A8me-mandat">a demandé</a> au président Alpha Condé (82 ans) de se présenter pour la troisième fois.</p>
<p>De tels agissements montrent que l’Afrique est loin d’en avoir fini avec <a href="https://digitalscholarship.tsu.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1056&context=assr">l’ère désastreuse des présidents à vie</a>. Amorcée dans la foulée des indépendances, celle-ci s’est prolongée jusqu’à la fin des années 1990, avec des effets délétères sur la stabilité, la démocratie et le <a href="https://africacenter.org/spotlight/term-limits-for-african-leaders-linked-to-stability/">développement socio-économique du continent</a>.</p>
<p>Au cours des vingt dernières années, l’Union africaine (UA) a mis au point des moyens relativement efficaces pour lutter contre les coups d’État anticonstitutionnels contre les gouvernements. En revanche, l’UA n’a toujours pas réussi à régler le problème des présidences impériales. Du fait de cette inaction, l’organisation se voit traitée de club privé des dirigeants en place.</p>
<p>Sept des dix présidents en exercice depuis le plus longtemps sur la planète sont africains. Parmi ceux-ci figurent le Camerounais Paul Biya, <a href="https://www.prc.cm/fr/le-president/biographie">qui dirige le pays depuis 1982</a>, et Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, aux commandes de la Guinée équatoriale <a href="https://www.jeuneafrique.com/personnalites/teodoro-obiang-nguema-mbasogo/">depuis 1979</a>.</p>
<p>Leurs régimes sont <a href="https://africacenter.org/fr/spotlight/limites-et-duree-de-mandat-des-dirigeants-africains-lies-a-la-stabilite/">souvent définis</a> par l’instabilité, l’absence de libertés civiles comme politiques, ainsi qu’un patrimonialisme et une corruption étendus.</p>
<h2>Là où persistent les limites aux mandats</h2>
<p>Issu des rangs de l’opposition, Alpha Condé a pris le pouvoir en 2010 après avoir remporté les premières élections pluralistes organisées en Guinée à la <a href="https://www.jeuneafrique.com/163006/politique/le-pr-sident-lansana-cont-est-mort/">mort, en 2008, de Lansana Conté</a>, lui-même arrivé à la tête du pays au moyen d’un coup d’État 24 ans auparavant.</p>
<p>Un gouvernement de transition, mis en place en <a href="https://www.dw.com/fr/guin%C3%A9e-formation-du-gouvernement-de-transition/a-5254368">2010</a>, a été suivi de l’adoption d’une <a href="https://mjp.univ-perp.fr/constit/gn2010.htm">nouvelle Constitution</a> et de nouvelles élections.</p>
<p>Farouche adversaire de Lansana Conté, Alpha Condé s’est notamment opposé à <a href="https://www.liberation.fr/planete/2003/12/20/conte-candidat-eternel-en-guinee_456003">l’amendement constitutionnel de 2003</a> autorisant son adversaire à briguer un troisième mandat.</p>
<p>Une fois aux commandes, en 2010, Condé a rapidement consolidé son pouvoir grâce à l’hégémonie de son parti, le <a href="http://www.rpg-arc-en-ciel.org.gn/index.php/en/">Rassemblement du peuple de Guinée</a>, avant d’être réélu en 2015. En 2019, son gouvernement <a href="https://www.jeuneafrique.com/872558/politique/guinee-que-contient-le-projet-de-nouvelle-constitution-propose-par-alpha-conde/">a annoncé</a> son intention d’adopter une nouvelle Constitution visant à contourner une disposition interdisant de modifier la limite de deux mandats présidentiels.</p>
<p>L’opposition <a href="https://www.france24.com/en/20200806-guinea-s-ruling-party-asks-alpha-cond%C3%A9-to-run-for-third-presidential-term">a critiqué</a> cette initiative, jugeant qu’elle bafouait l’esprit de la Constitution de 2010, laquelle s’opposait aux mandats illimités. Dès le mois d’octobre, des <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/11/05/en-guinee-nouvelle-manifestation-sanglante-contre-le-president-alpha-conde_6018063_3212.html">manifestations</a> ont eu lieu à Conakry et dans le reste du pays.</p>
<p>Elles ont contraint les autorités à reporter le référendum constitutionnel, qui s’est finalement tenu le 31 mars 2020 et <a href="https://www.dw.com/fr/que-dit-la-nouvelle-constitution-en-guin%C3%A9e/a-53053248">a abouti à l’adoption</a> de la nouvelle Constitution. Si cette dernière conserve la limite des deux mandats, elle ne dit rien de ceux déjà exercés avant son entrée en vigueur, ce qui laisse à Condé la possibilité de solliciter deux nouveaux mandats et de rester à la tête du pays jusqu’en 2032.</p>
<p>Malgré les restrictions dues au Covid-19, les manifestations <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/12/11/en-guinee-nouvelle-grande-manifestation-contre-le-president-alpha-conde_6022461_3212.html">perdurent</a> et plusieurs personnes ont été tuées par les forces de sécurité.</p>
<p>Les élections sont censées <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2020/08/12/en-guinee-l-election-presidentielle-fixee-au-18-octobre_6048771_3212.html">se dérouler</a> le 18 octobre. Alpha Condé n’a pas encore confirmé son investiture pour un troisième mandat et les groupes d’opposition n’ont pas encore présenté leurs candidats.</p>
<p>Au vu de la mainmise du président sur la commission électorale, les ressources de l’État, l’administration et les forces de sécurité, ainsi que les limites imposées aux groupes d’opposition, il est fort probable que les élections ne seront ni libres ni équitables et lui assureront la victoire. L’opposition risque de les boycotter, comme elle l’a fait pour le référendum et les élections législatives en <a href="https://www.aljazeera.com/news/2020/02/guinea-hold-contested-polls-boycotted-opposition-200224080737553.html">mars</a>.</p>
<h2>Ce qui fonctionne et ce qui reste à faire</h2>
<p>La législation sur la limitation des mandats a conduit les dirigeants africains à opérer quelques changements démocratiques. Parmi les exemples les plus récents figurent la République démocratique du Congo (2019), la Sierra Leone (2018) et le Libéria (2017). Dans ces trois pays, les élections, marquées par une forte compétition, ont été remportées par l’opposition.</p>
<p>Mais beaucoup d’autres présidents ont modifié la Constitution de leur pays pour <a href="https://africacenter.org/fr/spotlight/limites-et-duree-de-mandat-des-dirigeants-africains-lies-a-la-stabilite/">prolonger leur mandat</a>. On retrouve dans cette liste le Togo (2002), le Gabon (2003) et, plus récemment, la Côte d’Ivoire et la Guinée.</p>
<p>Les derniers abus de pouvoir prouvent qu’il reste du chemin à parcourir avant que cette pratique soit éradiquée. Un certain nombre de mesures doivent être prises d’urgence.</p>
<p>D’abord, combler les lacunes, notamment en veillant à ce que les Constitutions nouvellement adoptées tiennent compte des mandats déjà effectués. En Gambie, le <a href="https://www.constituteproject.org/constitution/Gambia_2019D.pdf">projet de Constitution</a>, qui fixe non seulement la limite à deux mandats mais comptabilise ceux effectués avant son adoption, fait figure de modèle pour le continent.</p>
<p>L’Union africaine doit, en outre, relancer ses efforts pour imposer à l’échelle du continent une limite de deux mandats présidentiels. Une disposition du projet de charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, qui prévoyait de le faire en 2007, a été <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-african-law/article/presidential-term-limits-and-the-african-union/1F134034E67D93524560D31A067779B7/core-reader">abandonnée</a> après que l’Ouganda a mené campagne contre son adoption. Le président ougandais Yoweri Museveni avait déjà supprimé cette limite dans son pays en <a href="https://www.lepoint.fr/afrique/ouganda-que-dit-la-nouvelle-reforme-de-la-constitution-05-01-2018-2184343_3826.php">2005</a>.</p>
<p>De même, la volonté affichée par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) de mettre en place une limite à deux mandats <a href="https://www.bbc.com/afrique/region/2015/05/150520_ecowas_mandate">s’est heurtée</a> en 2015 à l’opposition de la Gambie, alors sous la dictature de Yahya Jammeh, et du Togo, dont les Constitutions ne contenaient aucune limite de mandat.</p>
<p>Il faut que l’Union africaine, la Cédéao et les organisations régionales redoublent d’efforts pour instaurer cette limite des deux mandats. Ce n’est qu’au moyen d’une interdiction continentale qu’il sera possible d’empêcher les manœuvres juridiques nationales et d’enterrer le spectre des présidents à vie. Une fois cette limitation entérinée, l’Union africaine sera en mesure de sanctionner, voire d’exclure, les pays réfractaires.</p>
<p>Les organisations ne feront de toute manière qu’enfoncer une porte ouverte. Sur le continent, seuls cinq pays possédant un système présidentiel n’ont pas de limites du nombre de mandats : l’Érythrée, la Somalie, le Cameroun, le Soudan du Sud et Djibouti. La plupart de ceux qui l’avaient supprimée ont fait machine arrière, à l’instar de l’Ouganda, dont le Parlement <a href="https://www.independent.co.ug/uganda-presidential-term-limits-reinstated-age-limit-lifted-7-years-mps/">a rétabli la limitation des mandats présidentiels</a> en 2017. Toutefois, Yoweri Museveni, qui est au pouvoir <a href="https://theconversation.com/how-museveni-has-twisted-ugandas-constitution-to-cling-to-power-118933">depuis 34 ans</a>, peut encore se présenter.</p>
<p>Le Togo en a fait de même <a href="https://www.bbc.com/afrique/region-48210673">l’an dernier</a>. Malgré tout, le président sortant, Faure Gnassingbe, à la tête du pays depuis 2005, pourra se présenter aux prochaines élections. Il pourrait rester en poste jusqu’en 2030.</p>
<p>Sans un effort concerté à l’échelle du continent, l’Afrique risque d’être condamnée à vivre avec le spectre des présidents à vie.</p>
<hr>
<p><em>Traduit de l’anglais par Catherine Biros pour <a href="http://www.fastforword.fr">Fast ForWord</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/144825/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Adem K Abebe ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>À l’instar de la Côte d’Ivoire, le spectre des présidences à vie plane sur beaucoup de pays africains. Aussi l’Union africaine devrait-elle imposer la limitation du nombre de mandats à deux.Adem K Abebe, Extraordinary Lecturer and editor of ConstitutionNet, International Institute for Democracy and Electoral Assistance, University of PretoriaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1367902020-04-21T16:32:11Z2020-04-21T16:32:11ZGuerres et coronavirus : les trêves en temps de crise ne suffisent pas à rétablir la paix<p>Alors que la pandémie de coronavirus se poursuit, <a href="https://www.un.org/press/en/2020/sgsm20018.doc.htm">l’ONU</a> appelle à un cessez-le-feu mondial afin de protéger les populations des zones de conflit.</p>
<p>Les groupes armés au <a href="https://www.crisisgroup.org/middle-east-north-africa/gulf-and-arabian-peninsula/yemen/coronavirus-ceasefire-offers-way-out-war-torn-yemen">Yémen</a> et en <a href="https://www.middleeastmonitor.com/20200331-35000-syrians-return-to-idlib-following-ceasefire">Syrie</a> ont immédiatement donné leur accord. Pour eux, c’est une question de survie. Car dans ces pays ravagés par la guerre où les infrastructures sanitaires sont complètement détruites, l’arrivée du virus est particulièrement dangereuse.</p>
<p>Les hostilités ont également cessé dans des pays où les infrastructures et les perspectives sanitaires sont bien meilleures. Fin mars, la Nouvelle armée du peuple (NPA), la branche armée du Parti communiste aux Philippines, <a href="https://www.rappler.com/nation/255767-cpp-npa-declares-ceasefire-coronavirus-march-2020">a proposé un cessez-le-feu dans une guerre qui dure depuis 50 ans</a> pour permettre à l’ensemble de la population d’accéder aux tests et traitements. En Colombie, l’Armée de libération nationale (ELN), la plus ancienne guérilla active dans le pays, <a href="https://www.bbc.com/news/world-latin-america-52090169">a accepté un cessez-le-feu d’un mois</a> à compter du 1<sup>er</sup> avril.</p>
<p>Si la suspension des hostilités peut être un tremplin pour la paix, la résolution des conflits n’est pas aussi simple. <a href="https://global.oup.com/ushe/product/ripe-for-resolution-9780195059311?cc=fr&lang=en&">Des études montrent</a> que la paix repose sur un agencement complexe de facteurs. Bien que les <a href="https://www.who.int/hac/techguidance/hbp/cease_fires/en/">cessez-le-feu pour des raisons sanitaires</a> ne soient pas nouveaux (ils ont été utilisés lors de campagnes de vaccination contre la polio, par exemple), ils ne conduisent pas nécessairement à la paix.</p>
<p>Il est peu probable que les gouvernements signent des accords de paix en pleine crise sanitaire, étant donné qu’ils peuvent y voir l’occasion de fragiliser l’ennemi. Un choc extérieur tel que le coronavirus suspend le conflit mais n’en change nullement les structures sous-jacentes, telles que le contrôle des territoires, l’accès aux armes et aux sources de financement, et le soutien des diasporas.</p>
<p>Il importe donc de savoir si le coronavirus peut changer la dynamique du conflit de façon à ce que la paix devienne envisageable.</p>
<h2>L’exemple d’Aceh</h2>
<p>Le 26 décembre 2004, un tsunami frappait la côte d’Aceh, une petite province du nord-est de l’Indonésie, tuant <a href="https://www.eastwestcenter.org/publications/supporting-peace-aceh-development-agencies-and-international-involvement">plus de 150 000 personnes</a>, faisant des centaines de milliers de sans-abri et détruisant une grande partie des zones côtières. À l’époque, le gouvernement indonésien menait une campagne sanglante contre le Mouvement pour un Aceh libre (GAM) ; l’année précédente, l’armée indonésienne avait tué <a href="https://web.archive.org/web/20081028190213/http://www.kairoscanada.org/e/countries/indonesia/background.asp">quelque 2 000 personnes, principalement des civils</a>. Toute la région était soumise à la loi martiale et complètement coupée du monde.</p>
<p>Dans les jours qui ont suivi le tsunami, l’armée indonésienne a intensifié ses attaques contre les combattants du GAM à Aceh. <a href="https://www.asiabookroom.com/pages/books/160589/damien-kingsbury/peace-in-aceh-a-personal-account-of-the-helsinki-peace-process">Selon ses propres déclarations</a>, son offensive a fait plus de 220 morts.</p>
<h2>Reconnaissance internationale</h2>
<p>Le facteur principal dans le changement de stratégie du gouvernement indonésien n’a pas été le tsunami mais l’arrivée des médias étrangers, envoyés pour couvrir la catastrophe et rapidement suivis par la communauté internationale venue apporter son aide à la reconstruction de la province. Les projecteurs internationaux ont été braqués sur cette région jusque-là méconnue, et sur un conflit dont personne ne parlait.</p>
<p>Les organisations humanitaires et les Nations unies s’inquiétaient de la poursuite des combats car elle constituait un véritable obstacle <a href="https://www.asiabookroom.com/pages/books/160589/damien-kingsbury/peace-in-aceh-a-personal-account-of-the-helsinki-peace-process">à la mise en place des aides</a>. Le Mouvement pour un Aceh libre, quant à lui, <a href="https://reliefweb.int/report/indonesia/indonesia-aceh-rebels-want-peace-talks">appelait à un cessez-le-feu</a> et entamait des négociations en étant <a href="https://www.eastwestcenter.org/publications/supporting-peace-aceh-development-agencies-and-international-involvement">reconnu par la communauté internationale</a>, une condition sine qua non qu’il recherchait depuis deux ans pour entamer des pourparlers. En neuf mois, les différents camps sont parvenus à un accord de paix qui perdure aujourd’hui.</p>
<p>Ce n’est pas le tsunami lui-même mais les <a href="https://www.theguardian.com/commentisfree/2014/dec/29/2004-indian-ocean-tsunami-how-aceh-recovered-and-sri-lanka-declined">conséquences de la catastrophe</a> qui ont rendu cette paix possible. L’arrivée de la communauté internationale a changé la dynamique du conflit, encourageant le gouvernement indonésien à légitimer le GAM et à négocier avec lui.</p>
<h2>Le problème de l’engagement</h2>
<p>Ce qui dissuade surtout les groupes rebelles de faire la paix, c’est l’incertitude quant à leur sécurité une fois le conflit terminé. Comme souvent dans ces situations, ils hésitent à rendre les armes car si le gouvernement renie ses engagements, ils seront incapables de se défendre. On appelle cela le <a href="https://press.princeton.edu/books/paperback/9780691089317/committing-to-peace">problème d’engagement</a>. Les combattants ont du mal à croire aux promesses des autorités et sont donc extrêmement réticents à l’idée d’entamer des <a href="https://www.annualreviews.org/doi/abs/10.1146/annurev.polisci.10.101405.135301">négociations</a>.</p>
<p><a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0022002720909884">L’étude</a> que j’ai menée sur les amnisties accordées par les gouvernements durant un conflit a montré que les groupes rebelles redoutent par-dessus tout l’annulation des amnisties et le risque de poursuites. Des amnisties plus contraignantes, sous forme de loi, sont plus susceptibles d’aboutir à des accords réussis. Celle de 1999 en Algérie, par exemple, a été approuvée par référendum par 98 % de la population. Le caractère contraignant est l’expression de l’engagement gouvernemental envers le processus de paix.</p>
<p>Le problème de l’engagement explique pourquoi les groupes rebelles les mieux armés acceptent davantage de négocier. Parce qu’ils sont à même <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/0022343313486281">d’employer les grands moyens</a> contre le gouvernement, ils retardent au maximum le moment de rendre les armes, dans l’hypothèse d’un échec à un stade ultérieur. En cas de nouvelle menace, <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0022343313491587">ils sont ainsi en capacité</a> de se regrouper rapidement et de mobiliser combattants et financements.</p>
<p>Une menace telle que le coronavirus ne modifie pas en soi les forces des différents camps et n’aide pas un groupe déjà affaibli à exiger quoi que ce soit. Mais elle l’isole davantage et le rend, de fait, insignifiant. Face à l’impossibilité de combattre et à la contamination qui les rendrait vulnérables, certains groupes armés voient dans un cessez-le-feu un moyen de survivre.</p>
<h2>Maintien de la paix internationale</h2>
<p>Un important corpus de recherches a montré que les processus de paix sont plus efficaces lorsqu’ils se déroulent sous la <a href="https://www.prio.org/Publications/Publication/?x=11189">surveillance de représentants de la communauté internationale</a>, tels que les <a href="https://assets.cambridge.org/97805218/81388/frontmatter/9780521881388_frontmatter.pdf">Casques bleus</a> ou les <a href="https://econpapers.repec.org/article/blapstrev/v_3a12_3ay_3a2014_3ai_3a3_3ap21.htm">médiateurs internationaux</a>. Pour les groupes armés, leur présence garantit que la communauté internationale tiendra le gouvernement national responsable s’il trahit les termes de l’accord.</p>
<p>Bien que l’ONU fasse pression pour instaurer des cessez-le-feu partout dans le monde, il n’est pas certain que la communauté internationale ait actuellement la capacité de s’engager pleinement dans la mise en œuvre de nombreux processus de paix. Elle est souvent défaillante, même en des temps moins troublés, et sa priorité actuelle est de lutter contre le coronavirus. Par ailleurs, de nombreux pays se détournent des solutions internationales en <a href="https://theconversation.com/coronavirus-reveals-how-important-the-nation-is-to-our-daily-lives-135125">prenant des décisions nationales contre le coronavirus</a>, comme la fermeture des frontières et la sécurisation nationale du matériel indispensable pour lutter contre la pandémie.</p>
<p>Si la menace que représente le coronavirus peut conduire certains combattants et gouvernements à un revirement, elle ne suffira pas en l’absence des conditions essentielles à un retour à la paix : la volonté de négocier et la surveillance internationale.</p>
<hr>
<p><em>Traduit de l’anglais par Karine Degliame-O’Keeffe pour <a href="http://www.fastforword.fr">Fast ForWord</a>.</em>`</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/308798/original/file-20200107-123373-wmivra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/308798/original/file-20200107-123373-wmivra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/308798/original/file-20200107-123373-wmivra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/308798/original/file-20200107-123373-wmivra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/308798/original/file-20200107-123373-wmivra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/308798/original/file-20200107-123373-wmivra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/308798/original/file-20200107-123373-wmivra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Créé en 2007 pour accélérer les connaissances scientifiques et leur partage, le Axa Research Fund a apporté son soutien à environ 650 projets dans le monde conduits par des chercheurs de 55 pays. Pour en savoir plus, visiter le site <a href="https://www.axa-research.org/en">Axa Research Fund</a> ou suivre sur Twitter @AXAResearchFund.</em></p>
<hr>
<p><em>Nous proposons cet article dans le cadre du Forum mondial Normandie pour la Paix organisé par la Région Normandie le 30 septembre et le 1er octobre 2021 et dont The Conversation France est partenaire. Pour en savoir plus, visiter le site du <a href="https://normandiepourlapaix.fr/">Forum mondial Normandie pour la Paix</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/136790/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lesley-Ann Daniels a reçu le soutien du Fonds Axa pour la Recherche.</span></em></p>Un choc externe tel que la pandémie de Covid-19 ne fait que mettre les conflits sur pause et offre peu d'espoir de solutions durables.Lesley-Ann Daniels, Research Fellow, Institut Barcelona Estudis InternacionalsLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1340602020-03-19T20:19:16Z2020-03-19T20:19:16ZL’accord entre les États-Unis et les talibans : un jeu de dupes ?<p>D’abord, en revenir aux mots. La version officielle en anglais de <a href="https://www.state.gov/wp-content/uploads/2020/02/Agreement-For-Bringing-Peace-to-Afghanistan-02.29.20.pdf">l’accord signé à Doha le 29 février 2020</a> entre le négociateur américain Zalmay Khalilzad et le bureau politique des talibans dirigé par le mollah Baradar définit le document comme un « accord visant à apporter la paix en Afghanistan ». Pour les talibans, en revanche, ce qui fut signé est un « accord sur la fin de l’occupation ». On peut certes mettre la formule sur le compte de la propagande, externe et interne : des combattants talibans avaient mal vu l’ouverture de pourparlers à Washington, et certains avaient rejoint l’<a href="https://www.csis.org/programs/transnational-threats-project/terrorism-backgrounders/islamic-state-khorasan-k">État islamique wilayat Khorassan</a>, la franchise régionale de Daech.</p>
<p>Au-delà de ces divergences formelles, il convient de souligner les différences notables entre les deux textes signés par les Américains : tandis que Khalilzad signait avec les talibans ce qui fut un peu vite qualifié d’« accord de paix » par la presse internationale, le secrétaire américain à la Défense Mark Esper signait le même jour à Kaboul, avec le gouvernement du président afghan Ashraf Ghani, une <a href="https://reliefweb.int/report/afghanistan/joint-declaration-between-islamic-republic-afghanistan-and-united-states-america">« déclaration conjointe pour apporter la paix en Afghanistan »</a>.</p>
<h2>Les principaux aspects de l’« accord de la paix »</h2>
<p>L’accord signé avec les talibans repose sur deux ensembles majeurs, chacun comportant deux points. Dans le premier ensemble, les États-Unis définissent un calendrier de retrait de leur troupes et de celles de l’OTAN en 14 mois, tandis que les talibans s’engagent « à ce que le territoire afghan ne soit pas utilisé contre la sécurité des États-Unis et de leurs alliés » – en clair, que le pays ne soit plus une base opérationnelle pour les mouvements terroristes, Al-Qaïda au premier chef, mais aussi Daech. D’ici juillet, les forces américaines en Afghanistan passeront de quelque 13 000 hommes à 8 600. Le retrait complet s’opérera jusqu’en avril 2021, si les talibans respectent leur engagement sur la sécurité des États-Unis et de leurs alliés. Les modalités de ce contrôle semblent faire l’objet de clauses confidentielles.</p>
<p>Le second ensemble, dans une seconde phase, concerne les relations entre les talibans et les autorités afghanes : elle pose le principe de l’ouverture de négociations « intra-afghanes » dès le 10 mars (un délai évidemment non tenu), pour aboutir aux deux objectifs attendus : un cessez-le-feu permanent et un accord qui définira « l’agenda de l’avenir politique de l’Afghanistan ». Dans l’accord signé avec les talibans, les États-Unis ne se préoccupent pas de la nature du futur « gouvernement islamique afghan ». C’est hors de cet accord, dans des <a href="https://www.state.gov/joint-statement-on-the-signing-of-the-u-s-taliban-agreement/">déclarations conjointes</a> (avec la Russie d’une part, avec l’ONU, l’Union européenne, le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne, l’Italie, la Norvège d’autre part) qu’il est mentionné que « la communauté internationale n’acceptera pas la restauration de l’Émirat islamique d’Afghanistan », c’est-à-dire un État purement taliban. Le soutien promis à l’Afghanistan de demain impliquera que le régime négocié entre Afghans « préserve et respecte les droits internationalement reconnus de tous les Afghans, tels que la Constitution les reflète, y compris pour les femmes, la jeunesse et les minorités, et réponde au désir des Afghans de construire sur la base des gains acquis depuis 2001 », date de la chute des talibans.</p>
<p>On a donc avancé, mais pour ce faire – et pour respecter la volonté de Donald Trump d’engager le retrait des troupes avant la prochaine élection présidentielle –, Zalmay Khalilzad a mis de côté le principe majeur affiché au départ : « Rien n’est conclu si tout n’est conclu. » Mais qui conclut quoi ? Le grand absent de l’accord de Doha est le gouvernement afghan. Certes, l’émissaire américain a régulièrement rendu compte à Kaboul des avancées de ses pourparlers, engagés en octobre 2018, alors même que la posture traditionnelle des talibans est de ne pas parler avec les « marionnettes » de Kaboul (leur définition de l’appareil d’État afghan). La déclaration signée le même 29 février entre les Américains et Kaboul est censée rééquilibrer les choses. La diplomatie n’étant que l’art du possible, nous en sommes encore loin.</p>
<p>Certes, les talibans s’engagent, à Doha, à ouvrir le dialogue avec leurs interlocuteurs afghans, mais ceux-ci ne peuvent se réduire à l’appareil d’État, comme le mollah Baradar <a href="https://activist1.blog/2020/03/02/transcript-of-speech-by-political-deputy-of-islamic-emirate-to-participants-at-ceremony-of-termination-of-occupation-agreement-between-the-islamic-emirate-and-us/">l’a exposé</a> devant les représentants de la communauté internationale invités à la signature de l’accord avec Washington : « J’appelle <em>toutes les parties</em> (je souligne) afghanes à venir de bonne foi à la table de négociation pour établir un gouvernement islamique puissant et souverain et pour se réunir autour de nos valeurs islamiques et de nos intérêts nationaux. »</p>
<h2>Quand les talibans parlent à tout le monde</h2>
<p>La stratégie de communication des talibans est remarquable, et vise plusieurs cibles.</p>
<p>Baradar, chef des négociateurs, tient un discours de diplomate, à destination des États. Quant à l’opinion internationale, c’est de façon inattendue Sirajuddin Haqqani qui s’en charge, même s’il est toujours inscrit sur la liste du FBI (section « most wanted ») et sur celle des individus classés terroristes par l’ONU.</p>
<p>Commandant militaire du réseau Haqqani (lié à Al-Qaïda) replié dans les zones tribales pakistanaises après la chute des talibans en 2001, Haqqani est depuis 2015 le numéro 2 des talibans. Huit jours avant l’accord de Doha, il publie dans le <em>New York Times</em> un <a href="https://www.nytimes.com/2020/02/20/opinion/taliban-afghanistan-war-haqqani.html">article</a> qui se veut rassurant sur l’avenir de l’Afghanistan :</p>
<blockquote>
<p>« Nous nous engageons à travailler avec les autres parties, de façon consultative et respectueuse, pour se mettre d’accord sur un nouveau système politique inclusif. […] Libérés de la domination et de l’interférence étrangères, nous trouverons ensemble le chemin pour construire un système islamique dans lequel tous les Afghans auront les mêmes droits, où les droits des femmes accordés par l’Islam – du droit à l’éducation au droit au travail – seront protégés. »</p>
</blockquote>
<p>Évoquant les « groupes disruptifs qui menacent la sécurité régionale et mondiale », dont le poids est « délibérément exagéré », il assure que « toutes les mesures seront prises en partenariat avec les autres Afghans pour que le nouvel Afghanistan soit un bastion de sécurité et que nul ne se sente menacé sur son sol ». Le 14 mars, les talibans publiaient un communiqué confirmant leur « ferme volonté » d’éliminer « le groupe malveillant de Daech ».</p>
<p>Dernier volet et non le moindre, à destination des combattants talibans : la <a href="http://alemarahenglish.com/?p=33121">déclaration vidéo</a> de l’émir des talibans, Hibatullah Akhunzada, diffusée dès le 29 février, appelle les moujahidins à respecter sans arrogance les termes de l’accord, tout en gardant des capacités de riposte si la partie adverse violait ses engagements. Puis l’émir en appelle à tous les Afghans : « Nous sommes prêts pour une solution juste et rationnelle. Venez ! Trouvons une solution à notre problème à la lumière des valeurs religieuses et nationales de notre peuple, et faisons que l’Administration de Kaboul en termine avec son opposition à notre nation. » Les opposants à l’émirat sont pardonnés, au nom de la « fraternité islamique » et de l’unité nationale.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1230452370150129669"}"></div></p>
<h2>Quid du gouvernement afghan ?</h2>
<p>Mais qu’en est-il, précisément, du gouvernement afghan ? Affaibli par sa non-participation aux négociations de Doha, le pouvoir de Kaboul l’est plus encore par la crise qu’a ouverte l’élection présidentielle de septembre 2019, dont les résultats n’ont été annoncés que le 18 février 2020, le président sortant Ashraf Ghani étant déclaré vainqueur avec 50,64 % des voix, un résultat contesté par tous les partis d’opposition, en particulier par Abdullah Abdullah, arrivé second avec 39,52 %. Dénonçant des élections frauduleuses, Abdullah, numéro deux du régime sous la première présidence Ghani, s’est intronisé président le 9 mars, le <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2020/03/09/en-afghanistan-ashraf-ghani-et-abdullah-abdullah-se-declarent-tous-les-deux-presidents_6032361_3210.html">jour même où Ghani officialisait sa propre prise de fonctions</a> avec l’appui de l’administration américaine, dénonçant le « gouvernement parallèle » d’Abdullah.</p>
<p>Cette division affichée donne lieu à des initiatives différentes pour établir les équipes censées ouvrir le dialogue avec les talibans, le Haut Conseil pour la paix, mis en place en 2010 par Hamid Karzai, étant marginalisé par Ghani. Tandis qu’Ashraf Ghani prend du retard pour établir sa délégation, l’opposition, au-delà des seuls partisans d’Abdullah, a annoncé vouloir établir un « Conseil pour le processus de paix ».</p>
<p>Cette désastreuse cacophonie s’ajoute aux importantes divergences entre les deux textes signés le 29 février, en particulier sur le sort des prisonniers des deux camps. L’accord signé à Doha prévoyait que « jusqu’à 5 000 » prisonniers talibans et jusqu’à 1 000 prisonniers « de l’autre camp » seraient libérés avant le 10 mars, censé être le premier jour des négociations intra-afghanes. Problème : la déclaration conjointe entre Américains et gouvernement afghan ne parle que de « déterminer la faisabilité de libérer un nombre significatif de prisonniers des deux camps ». Pas étonnant qu’Ashraf Ghani ait refusé d’engager la libération de 5 000 talibans, qui était pour lui un objet de négociation, alors qu’elle est, selon l’accord de Doha, un préalable. La réponse des talibans a été immédiate : dès le 2 mars, ils ont <a href="https://www.la-croix.com/Monde/Afghanistan-moins-27-morts-premier-attentat-Kaboul-accord-USA-talibans-2020-03-06-1301082492">repris leurs attaques</a> contre les forces afghanes à travers le pays. Sous pression américaine, Ashraf Ghani annonce le 11 mars qu’un premier contingent de 1 500 talibans sera libéré avant l’ouverture des pourparlers intra-afghans.</p>
<h2>Quels pourparlers intra-afghans ?</h2>
<p>On imagine l’asymétrie des pourparlers éventuels. Si le peuple afghan aspire à la paix, de quelle paix s’agirait-il ? L’accord entre les États-Unis et les talibans a fait l’objet de vives critiques. En Afghanistan, où Rahmatullah Nabil, ancien chef des services secrets, a jugé que la libération des prisonniers talibans, conséquence d’un <a href="http://www.afghanistantimes.af/prisoners-release-beyond-a-shameful-deal-ex-spy-chief/">« accord honteux »</a>, est une insulte aux quelque 50 000 hommes des forces afghanes tués ces dernières années ; mais aussi aux États-Unis, où l’un des grands think tanks de Washington, entre autres, voit dans l’accord de Doha une <a href="https://www.brookings.edu/blog/order-from-chaos/2020/03/05/the-us-taliban-peace-deal-a-road-to-nowhere/">impasse</a>.</p>
<p>En replaçant cet accord dans le cadre du Grand jeu que les pays de la région et les grandes puissances déploient en Afghanistan, et dans lequel s’impliquent les pays, comme le Qatar, l’Allemagne et la Norvège, prêts à accueillir sur leur sol les pourparlers intra-afghans, laissons au président de l’Afghan Institute of Strategic Studies le mot de la fin, en citant sa <a href="https://theprint.in/opinion/us-afghan-peace-deal-relies-on-old-flaws-dated-assumptions-taliban-of-2020-has-changed/375018/">métaphore culinaire</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Le menu a été choisi par le Pakistan, il a été cuisiné par un chef américain dans une cuisine allemande pour un restaurant norvégien. La facture a été payée par le Qatar. Les talibans auront les entrées, le plat principal étant partagé entre le Pakistan et la campagne électorale de Trump. Le gouvernement afghan aura une part du dessert. Les mouvements démocratiques afghans, y compris ceux de défense des droits des femmes, auront les restes, s’il y en a. »</p>
</blockquote>
<p>D’autres analystes sont moins tristement désabusés, mais tous reconnaissent qu’après l’accord de Doha, le plus dur reste à faire, alors que la légitimité internationale des talibans n’a jamais autant été reconnue…</p>
<hr>
<p><em>Nous proposons cet article dans le cadre du Forum mondial Normandie pour la Paix organisé par la Région Normandie le 30 septembre et le 1er octobre 2021 et dont The Conversation France est partenaire. Pour en savoir plus, visiter le site du <a href="https://normandiepourlapaix.fr/">Forum mondial Normandie pour la Paix</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/134060/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Luc Racine est chercheur senior au Think Thank Asia Centre. </span></em></p>Le 29 février, un accord supposément historique a été signé entre les États-Unis et les talibans. Pour autant, la paix en Afghanistan est encore loin d’être assurée…Jean-Luc Racine, Directeur de recherches émérite, CEIAS, CNRS, Fondation Maison des Sciences de l'Homme (FMSH)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1280422019-12-12T17:23:41Z2019-12-12T17:23:41ZLa sécurité collective en Afrique : une coopération à géométrie variable<p>Créée en 2002, l’Union africaine (UA) a pour ambition de réactualiser et de consolider un système de sécurité collective continentale hérité de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), tout en prenant en compte les évolutions des organisations régionales.</p>
<p>Face à des menaces sécuritaires transnationales – criminalité, djihadisme ou piraterie –, les dirigeants africains ont aussi fait le choix de recourir à des coalitions ad hoc (comme le <a href="https://www.g5sahel.org/qui-sommes-nous/le-g5-sahel">G5 Sahel</a> ou la <a href="https://www.africa-eu-partnership.org/fr/projects/force-multinationale-mixte-fmm-de-lutte-contre-boko-haram">Force multinationale mixte, FMM</a> pour lutter contre Boko Haram). Si ces stratégies politiques, censées contourner les contraintes institutionnelles, visent à favoriser la flexibilité, la multiplication des cadres de coopération fragilise la relation entre l’UA et les Communautés économiques régionales (CERs) et complexifie le paysage sécuritaire africain.</p>
<h2>Un bref rappel historique du régionalisme africain</h2>
<p>L’évolution de la coopération entre l’OUA (1963-2001), puis l’UA, et les Communautés économiques régionales est marquée par cinq étapes. Celles-ci permettent de mieux comprendre la spécificité du régionalisme africain, à savoir une sécurité collective à deux niveaux (continental et régional).</p>
<p>Bien avant les indépendances, la coopération et l’intégration régionales sont reconnues comme indispensables à toute stratégie de développement des pays africains. Lorsque l’OUA est créée en 1963, les regroupements économiques sont déjà nombreux. Selon un rapport d’experts, il existe plus de <a href="https://archives.au.int/bitstream/handle/123456789/3458/EX%20CL%20278%20%28IX%29%20_F.PDF">200 organisations intergouvernementales en Afrique</a>.</p>
<p>En 1976, le premier jalon de la coopération entre les organisations continentales et régionales est posé par l’OUA avec la division du continent en cinq régions.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/305296/original/file-20191205-70155-a0607.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/305296/original/file-20191205-70155-a0607.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=567&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/305296/original/file-20191205-70155-a0607.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=567&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/305296/original/file-20191205-70155-a0607.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=567&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/305296/original/file-20191205-70155-a0607.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=712&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/305296/original/file-20191205-70155-a0607.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=712&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/305296/original/file-20191205-70155-a0607.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=712&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’Organisation de l’unité africaine a découpé le continent en cinq régions.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Amandine Gnanguênon, Eric Gaba</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Ce découpage institutionnel instaure un système de rotation entre les régions pour désigner les États africains siégeant au Conseil de sécurité des Nations unies. Il sert aussi de référence pour choisir les quinze membres du <a href="https://au.int/fr/cps">Conseil de paix et de sécurité</a> (CPS) et les cinq personnalités du Groupe des Sages – deux composantes de l’<a href="http://www.peaceau.org/fr/topic/the-african-peace-and-security-architecture-apsa">Architecture africaine de paix et de sécurité</a>, plus connue sous l’acronyme anglais APSA, où chaque région est représentée.</p>
<p>Le Plan d’action de Lagos et de l’Acte final de Lagos (1980) ont notamment pour objectif de limiter le chevauchement institutionnel, la dispersion des ressources et les querelles de légitimité entre les institutions régionales. Ce processus de rationalisation n’aboutira pas. Afin de relancer l’unité du continent, les chefs d’État signent le Traité d’Abuja (1991) qui inaugure la Communauté économique africaine (CEA), inspirée du modèle européen.</p>
<p>L’intégration régionale du continent repose sur la coordination, l’harmonisation et l’intégration progressive entre les CERs, entités nouvellement créés pour servir de piliers à la CEA. Ce statut est accordé à 14 organisations régionales et sous-régionales existantes qui restent indépendantes et régies par des textes spécifiques. Si leur nombre, depuis 2006, est limité à huit, leur insertion dans le dispositif continental n’en reste pas moins compliquée.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/306165/original/file-20191210-95138-1dkhkrm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/306165/original/file-20191210-95138-1dkhkrm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=606&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/306165/original/file-20191210-95138-1dkhkrm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=606&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/306165/original/file-20191210-95138-1dkhkrm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=606&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/306165/original/file-20191210-95138-1dkhkrm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=762&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/306165/original/file-20191210-95138-1dkhkrm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=762&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/306165/original/file-20191210-95138-1dkhkrm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=762&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les organisations régionales en Afrique et leurs chevauchements.</span>
<span class="attribution"><span class="source">_A New Emerging Rural World in Africa_, NEPAD/CIRAD, 2016.</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Trouver le juste équilibre entre des réalités régionales et une ambition continentale</h2>
<p>Les conflits au Liberia (1989), en Somalie (1990) et au Rwanda (1993) sont une première mise à l’épreuve pour les États africains. Confrontées à une intensification des conflits et aux risques de propagation aux États frontaliers, les CERs, telles que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), sont en première ligne pour pallier les défaillances de l’OUA. En allant au-delà du cadre initialement fixé, à savoir favoriser l’intégration économique régionale, les CERs élargissent leur mandat aux questions sécuritaires et s’autonomisent. Étant donné leur rôle dans la gestion des conflits dans les années 1990, l’UA reconnaît une place privilégiée à l’échelon régional dans son nouveau dispositif continental, l’APSA.</p>
<p>L’APSA, en tant que système de sécurité collective, se compose :</p>
<ul>
<li><p>du Conseil de paix et sécurité (CPS), organe politique créé sur le modèle du Conseil de sécurité des Nations unies qui se réunit au moins tous les mois ;</p></li>
<li><p>d’une Force africaine en attente (FAA) qui se décline en cinq forces régionales prépositionnées ;</p></li>
<li><p>du système continental d’alerte précoce chargé de la collecte et de l’analyse des données ;</p></li>
<li><p>d’un Groupe des sages doté d’un rôle en matière de prévention et médiation ;</p></li>
<li><p>d’un comité d’état-major qui conseille le CPS sur les questions militaires ;</p></li>
<li><p>et d’un Fonds pour la paix.</p></li>
</ul>
<p>Dispositif inédit en Afrique, l’APSA a semble-t-il été victime de sa notoriété. En raison des espoirs sans doute démesurés qu’elle a suscités, elle fait l’objet d’un soutien inégalé de la part de nombreux partenaires techniques et financiers. L’Union européenne, parmi ses principaux bailleurs, a versé près de <a href="https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/IP_19_3432">2,7 milliards d’euros</a> depuis la création de la Facilité pour la paix en Afrique en 2004.</p>
<p>Même si des progrès considérables ont été réalisés dans son opérationnalisation – recrutement de personnels, achat de matériels, réforme des procédures administratives et financières –, la feuille de route de <a href="http://www.peaceau.org/uploads/french-maputo-work-plan.pdf">l’APSA (2016-2020)</a> rappelle que le manque de coordination entre l’UA et les Communautés économiques régionales nuit à l’efficacité de l’ensemble du dispositif en matière de prévention et gestion des conflits.</p>
<h2>La relation UA/organismes régionaux : entre coopération et compétition</h2>
<p>Trois facteurs permettent de mieux comprendre les raisons pour lesquelles la relation UA/CERs, censée reposer sur une coopération, donne parfois lieu à une compétition.</p>
<p>Tout d’abord, la relation UA(OUA)/CER est d’autant plus difficile qu’elle est régie par une multitude de textes, du Plan de Lagos au <a href="http://www.peaceau.org/uploads/mou-au-recs-fr.pdf">Protocole d’accord de coopération signé en 2008</a>. Aucun d’entre eux ne propose une définition claire des principes (subsidiarité, avantage comparatif, complémentarité) censés régir la nature de la coopération. En pratique, leur interprétation varie même selon les parties concernées.</p>
<p>La coopération se heurte à un deuxième obstacle lié au mimétisme institutionnel entre les structures politiques, militaires et diplomatiques. En effet, chacune des CERs dispose d’un organe politique, équivalent du CPS de l’UA. Par exemple, l’<a href="https://www.jeuneafrique.com/mag/455385/politique/union-africaine-mode-demploi-troika-va-fonctionner/">Organe de la troïka</a> au niveau des chefs d’État, chargé de la coopération en matière de politique, de défense et de sécurité (SADC) ; le Conseil de médiation et de sécurité (CEDEAO) ; ou le Conseil de paix et de sécurité de l’Afrique centrale (CEEAC). Si elles existent, les coopérations sont sporadiques, sachant que la tendance est plutôt au chevauchement des compétences et des activités.</p>
<p>La coordination est confrontée à une troisième difficulté : la mise en concurrence entre les dispositifs sécuritaires. Ainsi, trois acteurs ont cherché à se positionner avec des mécanismes différents pour résoudre la crise au Sahel : la Force en attente de la CEDEAO (FAC), la <a href="http://www.peaceau.org/fr/article/declaration-capacite-africaine-de-reponse-immediate-aux-crises-caric-deuxieme-sommet-extraordinaire-09-nov-2016">Capacité africaine de réponse immédiate aux crises (CARIC)</a> de l’UA et la force conjointe du G5 Sahel.</p>
<p>Le choix de placer en première en ligne l’UA, une organisation régionale ou une coalition ad hoc apparaît finalement moins comme le résultat d’une stratégie claire que comme le reflet de l’opportunisme de certains États qui veulent jouer leur carte au plan régional et/ou continental.</p>
<h2>Remplir le vide opérationnel par des coopérations ad hoc</h2>
<p>Bien qu’engagés dans le cadre de la FAC, le Burkina Faso, le Niger et le Mali privilégient le G5 Sahel comme cadre de coopération militaire. Étant donné les moyens que requiert la gestion des conflits africains, le recours aux coalitions ad hoc contribue à créer une surenchère humaine (recrutement et financement de postes par les partenaires techniques et financiers) logistique (achat de matériels), politique (recherche de visibilité) et financières, qui alimente la compétition entre les États et les institutions.</p>
<p>Le recours aux coalitions ad hoc a également relancé la pratique du Forum shopping – une pratique qui consiste pour les acteurs étatiques à choisir l’institution qui sert le mieux leur agenda politique et qui affecte le moins leurs intérêts. Ce qui illustre une conception du régionalisme sécuritaire qui repose sur une appréciation en termes de coûts-avantages par les États. Malgré leurs faibles capacités et leur léthargie, certaines organisations, à l’image de la <a href="https://www.ird.fr/les-partenariats/principaux-partenaires-scientifiques/afrique-de-l-ouest-et-centrale/niger/cblt">Commission du Bassin du Lac Tchad (CBLT)</a>, ont bénéficié d’une impulsion politique suffisante pour servir de cadre au déploiement d’une opération militaire, en l’occurrence la FMM. Loin d’être considérés comme de simples « coquilles vides », les regroupements régionaux sont autant d’outils parmi lesquels les États choisissent le meilleur levier à activer.</p>
<p>Même si le cadre de coopération varie, toutes les initiatives africaines ont finalement un point commun. L’enjeu est de trouver un compromis entre une réponse nationale, inefficace si elle se cantonne aux frontières d’un État, et des solutions régionales ou continentales dont la synergie fait encore défaut.</p>
<p>Vouloir faire correspondre le périmètre géographique d’une organisation avec celui de la menace n’en reste pas moins une lutte institutionnelle sans fin. En effet, il n’existe pas de définition établie et internationalement partagée du Sahel ou de toute autre région d’Afrique (centrale, australe, etc.). Les partenaires techniques et financiers, les chefs d’État africains ou les organisations (régionales et internationales) ont pourtant essayé d’en définir les contours. Or chaque acteur conçoit les limites de l’espace régional différemment en fonction de ses besoins, de ses intérêts et de ses perceptions.</p>
<hr>
<p><em>Ce texte est issu de <a href="http://library.fes.de/pdf-files/iez/15631.pdf">« Une coopération à géométrie variable : l’Union Africaine et les Communautés économiques régionales »</a>, Perspektive, Friedrich Ebert Stiftung, Département Afrique, août 2019. Il en existe également une <a href="http://library.fes.de/pdf-files/iez/15632.pdf">version en anglais</a>.</em></p>
<hr>
<p><em>Cet article est republié dans le cadre du Forum mondial Normandie pour la Paix organisé par la Région Normandie et dont The Conversation France est partenaire. Pour en savoir plus, visiter le site du <a href="https://normandiepourlapaix.fr/">Forum mondial Normandie pour la Paix</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/128042/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Amandine Gnanguênon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Trois facteurs permettent de cerner les raisons pour lesquelles la relation Union africaine / organismes régionaux, censée reposer sur une coopération, donne parfois lieu à une compétition.Amandine Gnanguênon, Chercheur rattachée au Centre Michel de l'Hospital (Université d'Auvergne), Université Clermont Auvergne (UCA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1251742019-10-15T18:57:18Z2019-10-15T18:57:18ZAbiy Ahmed a remporté le prix Nobel de la paix, mais de grands défis attendent encore l'Éthiopie<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/296695/original/file-20191011-96212-g2o52g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C98%2C5472%2C3325&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed.</span> <span class="attribution"><span class="source">Alexandros Michailidis/Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Abiy Ahmed, le premier ministre de l’Éthiopie, <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2019/10/11/le-premier-ministre-ethiopien-abiy-ahmed-prix-nobel-de-la-paix-2019_6015102_3210.html">vient de recevoir</a> le 100<sup>e</sup> Prix Nobel de la Paix. Il est le premier Éthiopien à obtenir cette distinction.</p>
<p>M. Ahmed est aussi la 12<sup>e</sup> personnalité africaine à obtenir le Nobel de la Paix. L’an dernier, la récompense avait été attribuée au gynécologue Denis Mukwege, originaire de la République démocratique du Congo. Les autres lauréats africains sont Albert Luthuli (1960), Anouar el-Sadate (1978), Desmond Tutu (1984), Nelson Mandela et Frederik de Klerk (1993), Kofi Annan (2001), Wangari Maathai (2004), Mohamed el-Baradei (2005), Leymah Gbowee et Ellen Johnson Sirleaf (2011). En 2015, le quartet du Dialogue national tunisien avait été distingué.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/296674/original/file-20191011-96235-1a2hug9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/296674/original/file-20191011-96235-1a2hug9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=420&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/296674/original/file-20191011-96235-1a2hug9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=420&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/296674/original/file-20191011-96235-1a2hug9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=420&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/296674/original/file-20191011-96235-1a2hug9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=528&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/296674/original/file-20191011-96235-1a2hug9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=528&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/296674/original/file-20191011-96235-1a2hug9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=528&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le cabinet du premier ministre réagit sur Twitter à l’annonce du comité Nobel.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le Prix Nobel de la Paix, l’un des cinq prix créés en 1895 selon les dernières volontés de l’industriel suédois Alfred Nobel, est attribué à la <a href="https://www.nobelprize.org/prizes/facts/facts-on-the-nobel-peace-prize/">personnalité qui, au cours de l’année précédente, a</a></p>
<blockquote>
<p>« le plus ou le mieux contribué au rapprochement des peuples, à la suppression ou à la réduction des armées permanentes, à la réunion ou à la propagation des congrès pacifistes ».</p>
</blockquote>
<p>Dans son <a href="https://www.nobelprize.org/prizes/peace/2019/press-release/">communiqué officiel</a>, le comité déclare avoir choisi Abiy Ahmed pour saluer</p>
<blockquote>
<p>« l’importance de ses actions en faveur de la réconciliation, de la solidarité et de la justice sociale. Le prix vise aussi à reconnaître les efforts de tous ceux qui ont œuvré pour la paix et la réconciliation en Éthiopie et dans les régions d’Afrique de l’Est et du Nord-Est […] [et ceux que M. Ahmed] a déployés pour parvenir à la paix et pour la coopération internationale, et tout particulièrement son initiative déterminante visant à résoudre le conflit frontalier avec l’Érythrée voisine ».</p>
</blockquote>
<p>Mais qui est Abiy Ahmed ? Mérite-t-il cette reconnaissance internationale ? Quels sont les défis auxquels son pays est encore confronté ?</p>
<p>Dans son discours, la présidente du comité norvégien, Mme Berit Reiss-Andersen, a souligné que</p>
<blockquote>
<p>« de nombreux défis restent à relever. Les conflits ethniques continuent de s’aggraver, et nous en avons vu des exemples préoccupants dans les mois et les semaines passés ».</p>
</blockquote>
<h2>Une arrivée au pouvoir inattendue</h2>
<p>Il y a deux ans à peine, Abiy Ahmed était encore un quasi-inconnu. Début 2017, quelques <a href="https://www.youtube.com/watch?v=d6NkiTpyRSs">vidéos YouTube</a> dans lesquelles on le voyait aux côtés de plusieurs cadors lors d’un meeting politique ont commencé à circuler. Il est arrivé sur le devant de la scène avec un message simple mais fort, appelant au rassemblement.</p>
<p>À l’époque, il occupait déjà des fonctions politiques au niveau régional et ministériel mais il avait l’air différent, remarquablement sincère, et son approche détonnait. À une période où la nation éthiopienne semblait sur le point de se désintégrer, son message constituait un antidote à l’angoisse de la population face à la possibilité d’un conflit.</p>
<p>Contrairement aux politiciens éthiopiens des quatre décennies précédentes, son discours ne cherchait pas à imiter le marxisme à l’albanaise ou le maoïsme. Il ancrait son propos dans la culture et les sensibilités religieuses locales.</p>
<h2>Des manœuvres délicates</h2>
<p>Son extraordinaire ascension, ainsi que ses efforts pour engager l’Éthiopie sur une voie plus pacifique, sont remarquables compte tenu des tensions à l’œuvre et de la complexité du système politique du pays.</p>
<p>Le premier ministre s’est éloigné de la vieille garde décriée de son parti. Il a dû manœuvrer avec beaucoup de prudence pour ne pas s’aliéner les différentes factions de la coalition qui dirige l’Éthiopie depuis plus de trente ans, le Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (FDRPE). Les élites du FDRPE n’ont jamais toléré la dissidence. Elles ont été <a href="https://www.amnesty.org/en/documents/afr25/4178/2016/en/">accusées à plusieurs reprises</a> d’avoir violé les droits humains et fait emprisonner des journalistes qui avaient critiqué le régime.</p>
<p>Au lieu de démanteler le système existant, Abiy Ahmed a choisi de le réformer de l’intérieur.</p>
<p>Il lui a fallu un immense courage pour s’affranchir d’une puissante machine politique tout en continuant à faire partie du système. Mais il a su rester fidèle à ses valeurs et est même parvenu à promouvoir le concept de « medemer » (synergie et rassemblement) à l’intérieur du parti.</p>
<h2>Une lueur d’espoir</h2>
<p>Le premier ministre a hérité d’une nation en plein chaos politique. Au moment de son arrivée au pouvoir, des centaines de personnes <a href="https://www.bbc.com/news/world-africa-43073285">avaient été tuées</a> en trois ans de manifestations antigouvernementales.</p>
<p>Peu de temps après avoir succédé à Hailemariam Desalegn, en avril 2018, M. Ahmed a lancé un important programme de réformes. Il a fait libérer des prisonniers politiques, ainsi que des journalistes et des activistes qui avaient été incarcérés arbitrairement. Il a tendu la main aux dissidents.</p>
<p>Son message était le suivant : le pays devait triompher grâce à ses idées audacieuses, et non par la violence. Le nouveau dirigeant a aussi montré son intention de renforcer les institutions, en nommant par exemple l’opposant politique bien connu <a href="https://www.bbc.com/news/world-africa-46301112">Birtukan Mideksa</a> à la tête de la commission électorale.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/how-ethiopias-progressive-premier-is-levelling-the-gender-playing-field-106365">M. Ahmed soutient</a> également la cause des femmes, y compris leur implication en politique. Il a nommé des femmes aux fonctions de présidente, de juge en chef de la Cour suprême et de porte-parole. La moitié des membres de son cabinet sont des femmes.</p>
<h2>Diplomatie internationale</h2>
<p>Toutefois, c’est sans conteste en matière de diplomatie internationale que le nouveau lauréat du Nobel a remporté ses plus grandes victoires. L’Éthiopie et l’Érythrée voisine partagent une culture, une langue et des modes de vie communs. Pourtant, les deux pays se sont combattus pendant des décennies, générant d’immenses souffrances pour les populations des zones frontalières, y compris au sein même des familles, déchirées par les affrontements.</p>
<p>M. Ahmed a mis un <a href="https://www.un.org/africarenewal/magazine/december-2018-march-2019/after-making-peace-ethiopia-and-eritrea-now-focus-development">terme au conflit avec l’Érythrée</a>. Un traité officiel a ouvert une nouvelle ère de paix, d’amitié et de coopération systématique. Malgré tout, il reste encore beaucoup de choses à régler.</p>
<p>Le premier ministre a aussi joué un rôle politique crucial à l’échelle régionale. Son intervention a été essentielle pour convaincre les <a href="https://www.jeuneafrique.com/785742/politique/soudan-abiy-ahmed-a-khartoum-pour-trouver-une-solution-a-la-crise/">dirigeants du Soudan et du Soudan du Sud</a> de s’asseoir à la table des négociations, et il a <a href="http://www.rfi.fr/afrique/20190306-kenya-somalie-desescalade-abiy-ahmed-pacificateur">aidé le Kenya et la Somalie à régler un conflit maritime</a>.</p>
<p>La popularité d’Abiy Ahmed dans cette région du monde et à l’international est clairement perceptible lorsqu’il voyage. Il est souvent accueilli en <a href="https://www.youtube.com/watch?v=IHSRxVNcj5o">rock star</a> plutôt qu’en chef de gouvernement. Néanmoins, maintenir cette image positive dans son propre pays s’avère compliqué.</p>
<h2>Les défis à venir</h2>
<p>Le Prix Nobel est une façon de reconnaître le travail accompli par le dirigeant éthiopien ces deux dernières années. Cette distinction ne garantit pas pour autant son succès futur.</p>
<p>Prenons le cas d’<a href="https://www.theatlantic.com/magazine/archive/2019/09/what-happened-to-aung-san-suu-kyi/594781/">Aung San Suu kyi</a> au Myanmar. Après avoir subi de longues années d’assignation à résidence et échappé à une tentative d’assassinat fomentée par la junte militaire au pouvoir, elle a reçu le Prix Nobel de la Paix en 1991. Mais le regard porté sur elle a changé quand son parti a remporté les élections nationales. Sa formation est aujourd’hui accusée d’avoir perpétré ce que le Haut Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme a qualifié de « cas d’école d’épuration ethnique » à l’encontre des musulmans rohingyas.</p>
<p>Il reste un grand nombre de problèmes préoccupants à résoudre en Éthiopie, et les élections prévues l’an prochain vont susciter des tensions. Abiy Ahmed a beaucoup d’ennemis, dont des agitateurs qui cherchent à utiliser les fractures ethniques pour servir leurs visées politiques, d’influents militants ethno-nationalistes qui ont intérêt à diviser la population et des opportunistes qui ne voient la politique que comme un moyen de s’enrichir. Tous œuvrent sans relâche à exploiter la situation fragile du pays. Dans ce contexte tendu, le premier ministre doit au minimum faire en sorte de garantir la sécurité des citoyens.</p>
<p>De mon point de vue, M. Ahmed devrait considérer ce prix Nobel comme la reconnaissance de ce qu’il a déjà accompli, et comme le symbole d’un contrat moral par lequel il s’engage à continuer de défendre l’égalité, la justice et une unité durable en Éthiopie.</p>
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<p><em>Traduit de l’anglais par Iris Le Guinio pour <a href="http://www.fastforword.fr/">Fast ForWord</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/125174/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mohammed Girma est affilié à l'International Bible Advocacy Centre (IBAC).</span></em></p>Le Prix Nobel de la Paix accordé au premier ministre éthiopien Abiy Ahmed constitue autant une reconnaissance de son action qu'une incitation à poursuivre ses efforts.Mohammed Girma, Research associate, University of PretoriaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1204792019-08-01T21:56:45Z2019-08-01T21:56:45ZLes défis de la Zone de libre-échange africaine sont aussi sécuritaires<p>L’engagement dans la Zone de libre-échange continentale africaine implique pour les États de renoncer à une partie importante de leur souveraineté. Pourtant, dans un contexte de violences généralisées, les souverainetés étatiques n’ont jamais été autant défiées. Les acteurs contestataires de l’État sont des mouvements rebelles, des groupes terroristes, djihadistes, des milices d’autodéfense, des criminels transnationaux, etc. Ces acteurs sont principalement caractérisés par leurs capacités de mobilité. Ils se jouent des frontières et de la souveraineté territoriale des États.</p>
<p>A l’heure où il est exigé de certains États de renforcer leur présence dans les zones frontières et périphériques, le libre-échange continental des biens et des personnes ne constituera-t-il pas une véritable préoccupation ?</p>
<h2>Le casse-tête de la sécurisation des frontières</h2>
<p>A l’intérieur du continent, <a href="https://www.fes-pscc.org/fileadmin/user_upload/documents/publications/Rapport_de_synthe__se_des_e__tudes-pays.pdf">des milliers de kilomètres de frontières sont autant d’espaces de violences</a>. Les États en situation de conflit armé – par exemple la Libye, le Mali, le Niger, le Nigéria, le Burkina Faso, la Centrafrique, le Soudan, la République démocratique du Congo, la Somalie – ont en partage des milliers de kilomètres avec d’autres États. </p>
<p>Cela explique que les conflits au Mali, en République démocratique du Congo finissent par affecter toute la communauté régionale, avec comme conséquence des millions de déplacés et de réfugiés. La bande sahélo-saharienne, le golfe de Guinée, les Grands lacs, la Corne d’Afrique sont autant d’espaces de conflictualité. </p>
<p>Par conséquent, les problèmes de circulation des biens et des personnes dans ces zones sont moins liés au problème infrastructurel qu’à des questions de gouvernance, de paix et de sécurité. Ces zones frontières et périphériques parce qu’elles sont vulnérables, du fait à la fois de la faible présence de l’État, mais aussi et surtout, par le fait qu’elles constituent <a href="https://reliefweb.int/report/world/conseil-de-s-curit-de-nouvelles-tendances-alarmantes-dans-le-trafic-de-stup-fiants-sont">des espaces de transit et de trafic en tout genre</a> (tel le Sahel), sont demeurées très conflictogènes. Un libre-échange inclusif devra éviter de limiter les échanges commerciaux aux capitales régionales.</p>
<h2>Le défi des grands foyers de tension</h2>
<p>Ces questions sécuritaires se posent dans le cyberespace. Avec une Afrique <a href="https://theconversation.com/de-belles-perspectives-economiques-pour-lafrique-subsaharienne-et-cinq-raisons-dy-croire-117219">en plein processus de digitalisation et de numérisation</a>, l’assurance de la cybersécurité dans le commerce électronique – une affaire des entreprises mais encore plus des États - doit inciter à l’investissement. </p>
<p>Mais, pour l’essentiel, les préoccupations sécuritaires sont d’ordre physique avec une économie de la guerre encore à l’ordre du jour. Les anciens foyers de tensions – <a href="https://www.bbc.com/afrique/region-46861704">Tchad</a>, Golfe de Guinée – sont encore des espaces du métier des armes où les comportements de mercenariat, de banditisme, de criminalité transnationale se mêlent, dans des contextes où des milliers de jeunes sont faciles à recruter, sur des terrains où l’abondance de ressources minières exportables. La <a href="https://www.cairn.info/revue-afrique-contemporaine-2016-4-page-27.htm">fragilité des armées nationales</a>, le faible revenu économique par habitant sont des conditions permissives au recours à la violence pour obtenir des biens économiques et politiques.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/esclavagisme-razzia-tueries-les-inspirations-locales-de-boko-haram-112547">Esclavagisme, razzia, tueries : les inspirations locales de Boko Haram</a>
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<p>Depuis le début des années 2000, le terrorisme se nourrit des conflictualités internes aux États sous-tendues par des frustrations relatives, du déni de reconnaissance des identités de certains groupes, du manque de redistribution des richesses nationales. Son intensification ces dernières années exclut, dans une bonne partie de ces États, des opportunités que pourrait offrir la Zone de libre échange continentale. </p>
<p>La lutte contre le terrorisme a conduit à la militarisation de grands espaces. Les violences dites terroristes s’ajoutant aux guerres civiles classiques liées aux violences communautaires, aux violences post-électorales, aux violences sécessionnistes, constituent de véritables défis à relever pour aspirer à une égalité de circulation des biens et des personnes au sein de la ZLEC. </p>
<p>Dans un continent où tout est presque priorité, la sécurité des personnes et des biens ne saurait attendre encore. L’intégration doit <a href="https://www.ecowas.int/adapter-larchitecture-de-securite-ouest-africaine-aux-nouvelles-menaces-terroristes/?lang=fr">s’accompagner de mécanismes de pacification</a> des régions soumis au péril des conflictualités. L’intégration doit contribuer à renforcer la puissance des États. Mais la ZLEC est-elle réellement l’outil pertinent pour transformer l’Afrique en un grand espace de libre circulation ?</p>
<h2>La ZLEC peut-elle pacifier le continent ?</h2>
<p>En attendant de voir les résultats qu’engendrera la Zone de libre-échange, les expériences d’intégration dans d’autres espaces continentaux – Union européenne, <a href="http://publications.gc.ca/Collection-R/LoPBdP/BP/bp327-f.htm">Accord de libre-échange nord-américain</a> ( par ailleurs remplacé par l’Accord États-Unis-Mexique-Canada), Association des nations de l’Asie du Sud-Est – ont eu comme résultat la pacification des relations inter-étatiques. </p>
<p>Les échanges commerciaux favorisent-ils la paix ? L’atteinte de l’objectif de l’Union africaine contenu dans l’Agenda 2063 « une Afrique vivant dans la paix et dans la sécurité » peut-elle être facilitée par l’opérationnalisation de la ZLEC. Sur les 54 États africains qui ont signé l’accord, pas moins d’une vingtaine sont concernés directement ou indirectement par des violences politiques (terroristes, communautaires, sécessionnistes). </p>
<p>L’objectif de « faire taire les armes d’ici 2020 » ne sera sans doute pas atteint. C’est en cela que les questions sécuritaires, tout en posant des défis à la zone de libre-échange, pourraient trouver leur solution en celle-ci. Face aux interventionnismes sécuritaires et développementalistes des partenaires extérieurs, la ZLEC peut être considérée comme un renouveau paradigmatique dans les processus de pacification du continent pour plusieurs raisons. </p>
<p>D’abord, l’accroissement des échanges entre les États et les peuples aura pour avantage de créer des intérêts mutuels et des biens communs. Ensuite, les interdépendances encourageront les acteurs à régler leurs différends à l’aide des lois, des normes du marché et de la concurrence – ce qui crée des perceptions et relations de rivalité et non d’inimitié. L’atmosphère des affaires par la culture des contrats et des règles d’échanges sera hostile aux comportements de pillage des ressources naturelles auquel s’adonnent des acteurs illégaux – souvent en lien avec des États. </p>
<p>Enfin, tout ceci (les règles de jeu, les normes, les interdépendances, les intérêts mutuels) contribuera à la consolidation des institutions qui protègent les biens et les personnes, même s’il faudra que les futures richesses générées par ces échanges profitent aux populations. La paix par le commerce sera-t-elle enfin expérimentée en Afrique ?</p>
<p>Les questions sécuritaires doivent pouvoir être considérées de manière globale. La sécurité humaine recouvre à la fois les dimensions militaires, économiques, sociétales et environnementales. Le libre-échange a toujours posé des défis sécuritaires qu’il ne serait pas prudent d’ignorer dans le cadre du plus grand marché continental du monde. Cependant, développer l’Afrique par le commerce intra-africain sera peut-être – qui sait ? – l’autre nom de la paix en Afrique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/120479/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian Abadioko Sambou ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les problématiques sur la ZLEC ne se posent pas seulement en termes économiques et commerciaux. Elles comportent également des enjeux et des défis sécuritaires qui requièrent beaucoup de diligence.Christian Abadioko Sambou, ATER Sciences politiques, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.