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Les RH dans tous leurs états

Formation des cadres : comment l’innovation pédagogique influence le management des entreprises

Alper Çuğun/Flickr, CC BY

Longtemps l’enseignement supérieur était orienté vers la transmission de connaissances dites académiques. Le savoir était dispensé grâce à une communication essentiellement descendante. Le conformisme était de rigueur et peu importait que le message soit compris, pourvu qu’il soit délivré. Désormais, certains établissements innovent, laissant plus de place à la notion d’apprentissage par l’expérience et à l’auto-formation.

L’alternance comme alternative

La plupart des établissements d’enseignement supérieur proposent d’ailleurs des formations en alternance. Ces politiques sont encouragées par l’obligation d’emploi d’alternants, imposée aux entreprises sous forme de quotas. Les entreprises de plus de 250 salariés assujetties à la taxe d’apprentissage doivent désormais compter 5 % de salariés en alternance au sein de l’effectif annuel moyen.

La notion de formation et d’apprentissage se révèlent pertinentes dans le processus de reconnaissance de l’individu. Dans le domaine de la psychologie et de la philosophie, les références les plus significatives pour définir ce qu’est le processus d’une expérience, se trouvent chez Jean Piaget (1896-1980) et John Dewey (1859-1952).

Piaget développe une théorie constructiviste : la connaissance est élaborée par l’apprenant sur la base d’une activité mentale. Dewey, quant à lui fournit plusieurs définitions de la nature et du rôle de l’expérience. Il précise que l’expérience est une succession d’expériences et de leur continuité, chacune affectant la qualité de l’expérience future. L’éducation est donc cette

« reconstruction ou réorganisation de l’expérience qui accroît la signification de l’expérience et la capacité de diriger l’expérience future […] Chaque expérience faite modifie le sujet, et cette modification, à son tour, affecte, que nous le voulions ou non, la qualité des expériences suivantes ».

Les compétences relatives aux façons d’être et d’agir par rapport aux autres, relèvent de l’apprentissage social. La reprise a posteriori de ses expériences pour les analyser et comprendre la situation, prendre du recul, entrent dans un processus d’apprentissage.

L’innovation pédagogique pour susciter l’intérêt

Fini le cours magistral comme mode d’apprentissage central ! La pédagogie inversée par exemple, permet à l’élève de préparer le cours à la maison à l’aide de vidéos, de podcasts, de lectures conseillées par l’enseignant. La séance en classe est alors un grand _brainstorming _de ce qui a été construit ou pour le moins étudié. Les apprenants travaillent en groupe, élaborent un projet, s’entraînent autour de tâches complexes. Un immense bouleversement des pratiques enseignantes est donc en marche. Quelle plus-value apporte l’enseignant ?

Les étudiants d’aujourd’hui sont les décideurs de demain. Leur apprendre à restituer une information sans prise de recul les habitue à un certain conformisme. Rester dans le cadre limite toute innovation et toute prise de risque.

C’est ce que raconte un livre paru en 1993, L’auto qui n’existait pas écrit par Christophe Midler, directeur du Centre de Recherche en Gestion de l’École polytechnique et qui retrace l’histoire de la genèse et du déroulement du projet Twingo. L’auteur révèle que l’approche choisie est totalement nouvelle : l’entreprise adopte un mode projet, alors que jusque-là les voitures étaient conçues par étapes, avec une organisation fonctionnelle : bureau d’étude, fabrication, etc.

Avec la Twingo, un projet ad-hoc regroupe les compétences et est placé sous la direction d’un chef de projet rendant compte directement au plus haut niveau de l’entreprise. C’est l’ensemble de l’approche qui est complètement revue, désormais totalement intégrée. Ni livre de management, ni manuel universitaire, cet ouvrage est une « histoire conceptualisée ».

Les managers de demain acteurs de leur formation

Prenons l’exemple de Sciences Po qui est l’école diplômante de référence concernant les cadres du secteur politique et administratif, mais également du monde des médias. L’école se présente comme une passerelle entre « savoir académique et professionnalisation, entre culture générale et sens de l’action » et se veut généraliste. Son objectif est ainsi de former des cadres dans un « large éventail de métiers » L’école annonce ainsi sur son site Internet que :

« les élèves sont orientés vers la prise de responsabilités, grâce aux enseignements de plus de 4 000 praticiens venus du monde professionnel ».

Les grandes écoles sont investies dans l’innovation pédagogique : cas pratique, serious games, business game, vidéos interactives. L’objectif est de former des futurs managers autonomes, plein d’initiatives et créatifs. L’enseignement supérieur porte la lourde responsabilité de la formation des décideurs de demain.

L’innovation pédagogique doit pouvoir contribuer à sortir du conformisme intellectuel d’autrefois. Les étudiants d’aujourd’hui sont donc appelés à utiliser les nouvelles technologies et sont les acteurs de leur propre apprentissage. Il y a fort à parier que l’innovation pédagogique actuelle influence les comportements des managers de demain. L’enseignant serait donc moteur dans l’évolution des méthodes managériales des entreprises.

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