tag:theconversation.com,2011:/fr/topics/branding-36558/articlesbranding – The Conversation2023-12-03T16:28:14Ztag:theconversation.com,2011:article/2183632023-12-03T16:28:14Z2023-12-03T16:28:14ZLe plaisir de travailler pour une grande marque, une question de place dans l’organigramme<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/560999/original/file-20231122-27-sdjkuk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=34%2C60%2C1815%2C950&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En 2017, la compagnie américaine Southwest Airlines, qui a mis en place des politiques visant à renforcer l’image de marque en interne, enregistrait le taux moyen de rotation du personnel le plus bas du secteur aérien.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Southwest_Airlines#/media/Fichier:N8704Q_Southwest_Airlines_Boeing_737-8_MAX_s-n_36988_(25859981728).jpg">Tomás Del Coro/Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La recherche désigne par le terme de <a href="https://www.jstor.org/stable/1252054">« capital marque »</a> ce qui influence un consommateur à choisir un produit plutôt qu’un autre, à payer davantage, à lui rester fidèle, ou à vouloir l’essayer. Autrement dit, tout ce qui permet à une entreprise de récolter plus d’avantages qu’elle ne le ferait sans le nom de la marque. Grâce à ces mécanismes, le capital marque augmente le volume et les prix de vente. Les entreprises deviennent par ailleurs <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0148296319305399">plus attractives aux yeux des candidats</a> à l’emploi et la fidélisation des collaborateurs s’améliore.</p>
<p>C’est pourquoi les entreprises suivent de près l’évolution de la perception de leur marque aussi bien auprès du consommateur qu’en interne, <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/15332960802619082">au sein de leurs équipes</a>. Par exemple, la société de luxe française LVMH a récemment intensifié ses efforts sur les questions sociales et environnementales et a découvert que « le pourcentage de fierté d’appartenir au groupe LVMH a augmenté » suite à ces efforts.</p>
<p>S’il existe encore peu de recherches sur ce sujet, certains cas d’entreprises semblent suggérer que le capital marque a un impact positif sur la satisfaction des employés. Par exemple, Southwest Airlines est bien connue pour avoir utilisé la marque d’employeur afin de fidéliser les employés et d’augmenter leur niveau de motivation. En 2017, la compagnie aérienne américaine a enregistré un <a href="https://www.brunswickgroup.com/southwest-airlines-i6401/">taux moyen de rotation du personnel de 2,5 %</a>, soit le taux le plus bas du secteur aérien.</p>
<p>Faut-il en conclure que les employés sont généralement plus satisfaits lorsqu’ils travaillent pour des entreprises dont la marque est forte ? Dans une récente <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0263237322001232">recherche</a>, nous avons montré que ce niveau de satisfaction dépend en réalité du niveau de hiérarchie dans l’organigramme de l’entreprise : pour les salariés de haut rang, l’effet est quasi neutre alors qu’il est généralement positif pour les salariés de bas échelon, mais négatif pour les salariés de niveau intermédiaire.</p>
<h2>Gardiens de la marque</h2>
<p>Nos données sur l’expérience collaborateur envers une marque, issues d’un vaste échantillon intersectoriel, viennent appuyer l’hypothèse selon laquelle une marque forte ne facilite pas la tâche des salariés de niveau intermédiaire. En effet, ces derniers participent directement au renforcement et au maintien du capital marque. Ils planifient les actions de marketing externe et interne, rédigent les scripts des centres d’appels, évaluent les performances et, plus généralement, « incarnent la marque ». Or plus la marque est prestigieuse, plus les exigences envers le personnel de rang intermédiaire sont nombreuses.</p>
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<img alt="Vitrine Louis Vuitton, marque du groupe LVMH" src="https://images.theconversation.com/files/560998/original/file-20231122-23-mn9kzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/560998/original/file-20231122-23-mn9kzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/560998/original/file-20231122-23-mn9kzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/560998/original/file-20231122-23-mn9kzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/560998/original/file-20231122-23-mn9kzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/560998/original/file-20231122-23-mn9kzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/560998/original/file-20231122-23-mn9kzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le géant du luxe LVMH s’est réjoui de voir « le pourcentage de fierté d’appartenir au groupe » augmenter après une intensification des efforts sur les questions sociales et environnementales.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/sottolestelle/44586424454">Julien Chatelain/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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</figure>
<p>Si les salariés de niveau intermédiaire sont décrits comme des gardiens de la marque, leurs supérieurs hiérarchiques s’en soucient moins. En effet, les salariés de haut rang tirent profit d’une marque forte en termes d’avantages matériels et de réputation professionnelle, mais sont moins impliqués dans les activités qui contribuent à préserver le capital marque.</p>
<p>Il en va de même pour les salariés qui se situent dans les plus bas échelons de la hiérarchie : ces derniers occupent une fonction opérationnelle et non stratégique (à quelques exceptions près dans certains services ou dans les métiers d’assistance à la clientèle).</p>
<h2>Bienfaits émotionnels</h2>
<p>Cependant, le comportement d’un responsable influence, positivement ou négativement, celui de son équipe. Ainsi, les salariés de niveau intermédiaire exercent une forte influence sur les salariés qu’ils supervisent. De même, on observe que les salariés de niveau intermédiaire ne seront pas sans réagir s’ils remarquent une différence de traitement entre eux et leurs propres supérieurs.</p>
<p>Ces derniers doivent donc être considérés de la même manière que leurs supérieurs, à la fois en termes d’avantages socio-émotionnels (par exemple, mots de remerciements, ou événements d’équipe) qu’utilitaires (par exemple, l’intéressement au capital). Ils pourront alors à leur tour jouer un rôle clé en inspirant et en motivant le reste du personnel. Dans le cas contraire, ils risquent de faire « payer » aux salariés de moindre échelon ce traitement qui leur est défavorable.</p>
<p>En effet, comme le montre la <a href="https://www.researchgate.net/profile/Karen-Cook-12/publication/227109881_Social_Exchange_Theory/links/0deec51e95c0ff0d3c000000/Social-Exchange-Theory.pdf">théorie de l’échange social</a>, mieux une personne (ou une entité sociale comme une marque) vous traite, mieux vous la traiterez en retour, et pas seulement au niveau transactionnel, mais aussi en termes de bienfaits émotionnels (loyauté, respect…).</p>
<p>Le secteur tertiaire constitue un exemple particulièrement éloquent de détérioration du comportement des salariés de rang inférieur et intermédiaire à mesure que le capital marque s’accroît. Dans ce secteur, si le comportement des salariés de rang intermédiaire et élevé n’est pas le bon, il y a de fortes chances que celui des salariés de rang inférieur et intermédiaire aille à l’encontre de la marque.</p>
<p>Cela s’explique en partie parce qu’au sein des grandes marques de service, les collaborateurs de première ligne doivent impérativement représenter la marque auprès des clients, donc leur enthousiasme et la qualité de service dépendent encore plus du comportement de leurs responsables.</p>
<p>Nos recherches soulignent donc qu’une marque forte va de pair avec plus de responsabilités stratégiques. Lorsqu’une marque commence à se faire connaître, l’entreprise doit ainsi veiller à utiliser les bonnes méthodes de marketing interne pour préserver au mieux son organisation.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218363/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une marque reconnue, qui fidélise les clients et augmente les ventes, n’affecte pas tous les collaborateurs de la même manière au sein de l’entreprise qui la propose.Dominique Rouziès, Professeur de marketing, HEC Paris Business SchoolEmine Sarigollu, Associate Professor in Marketing, McGill UniversityMyriam Ertz, Professeure adjointe en marketing, responsable du LaboNFC, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2143302023-10-19T20:37:08Z2023-10-19T20:37:08ZLes appellations géographiques, un gage de qualité ? Le cas – ambigu – du whisky écossais<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/550080/original/file-20230925-24-o561bp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=137%2C106%2C1779%2C1161&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Comme dans le vin, l’influence du terroir sur les comportements de consommation est avérée dans le monde du whisky.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.rawpixel.com/image/5911843/photo-image-public-domain-shape-wooden">Rawpixel</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Bruichladdich, une distillerie écossaise de whisky renommée, arbore fièrement son slogan :</p>
<blockquote>
<p><a href="https://www.remy-cointreau.com/fr/nos-marques/bruichladdich-portcharlotte-octomore/">« We believe terroir matters »</a> (« Nous croyons en l’importance du terroir »).</p>
</blockquote>
<p>La marque suggère ainsi que sa situation géographique joue un rôle déterminant sur la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/qualite-46094">qualité</a> de son whisky.</p>
<p>Cette philosophie rappelle celle du monde du vin, où l’influence du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/terroir-30486">terroir</a> est avérée et reconnue : la qualité du vin est dépendante de la vigne dont il est issu
et les conditions de développement de la vigne sont intimement liées à la population microbienne de la terre du vignoble. Ce lien entre terre, vigne et vin explique la volonté des acteurs de la filière viticole de protéger la réputation de leur terroir via des réglementations et systèmes d’indications géographiques divers.</p>
<p>À l’instar du vin, le whisky écossais est soumis à plusieurs réglementations, notamment le <a href="https://www.legislation.gov.uk/ukpga/1988/22/enacted">Scotch Whisky Act</a> et les <a href="https://www.legislation.gov.uk/uksi/2009/2890/contents/made">Scotch Whisky Regulations</a>. Ces textes de loi définissent cinq appellations géographiques distinctes : Campbeltown, Highland, Islay, Lowland, et Speyside. Chacune de ces régions est réputée pour produire des styles de whisky uniques, se distinguant par des variations de saveur, de caractère et de méthode de production.</p>
<p>Par exemple, les whiskies de Speyside sont reconnus pour leur élégance, leur complexité et leur vaste palette de saveurs. Quant aux distilleries d’Islay, dont certaines comptent parmi les plus anciennes d’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/ecosse-28868">Écosse</a>, elles sont réputées pour des whiskies aux arômes marins, iodés et tourbés.</p>
<p>Ce type d’argument, qui ne manquera pas d’être mis en avant par les distilleries lors du <a href="https://www.whiskylive.fr/">Whisky Live Paris</a>, rendez-vous qui se déroulera cette année du 21 au 23 octobre à Paris, fait globalement mouche auprès des consommateurs.</p>
<p>En effet, nos recherches récentes sur la réputation collective des appellations géographiques, reposant sur l’analyse de plus de 80 000 ventes aux enchères de bouteilles de Scotch single malt, indiquent que les acheteurs attribuent une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0264999323001438">importance significative à l’origine géographique</a> du whisky, et ce même après avoir pris en compte d’autres facteurs que nous avons identifiés dans de <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-wine-economics/article/abs/should-you-invest-in-an-old-bottle-of-whisky-or-in-a-bottle-of-old-whisky-a-hedonic-analysis-of-vintage-single-malt-scotch-whisky-prices/6DC8DE57878E49FC2849C6F84E224877">précédentes recherches</a> : l’âge du whisky, le titrage alcoolique, la distillerie, l’embouteilleur, etc. </p>
<p>En l’occurrence, les whiskies en provenance d’Islay sont généralement échangés à des niveaux de prix plus élevés que les whiskies originaires des autres appellations, toutes choses égales par ailleurs.</p>
<h2>Garantie qualité</h2>
<p>Les appellations géographiques regroupent des systèmes de protection et de certification visant notamment à prévenir la contrefaçon et à promouvoir des produits spécifiques liés à une région géographique particulière. En garantissant l’origine du produit, une appellation géographique permet au producteur de garantir à ses acheteurs un certain niveau de qualité, qui dépend étroitement des caractéristiques géographiques du territoire de production que du respect de certaines règles de production.</p>
<p>En effet, les producteurs bénéficiant de la reconnaissance d’une appellation géographique s’engagent à respecter un cahier des charges strict, que ce soit en termes d’étapes de production que d’origines géographiques des matières premières. Les produits bénéficiant d’une appellation sont alors souvent perçus comme uniques et de haute qualité, ce qui permet de les différencier et justifier des prix plus élevés tout en renforçant la confiance des consommateurs.</p>
<p>Dans l’industrie française du vin, les appellations d’origine contrôlée (AOC) imposent aux producteurs-récoltants de cultiver des variétés de raisin particulières sur le terroir de l’appellation et garantissent que les raisins ont été cultivés sur ce terroir. Les AOC permettent ainsi de différencier les vins en termes de caractéristiques gustatives, du fait des propriétés inhérentes au terroir (sol, climat, population microbienne) ainsi que des variétés de raisin utilisées.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/550544/original/file-20230927-21-uowpqo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Carte des appellations écossaises" src="https://images.theconversation.com/files/550544/original/file-20230927-21-uowpqo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/550544/original/file-20230927-21-uowpqo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=567&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/550544/original/file-20230927-21-uowpqo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=567&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/550544/original/file-20230927-21-uowpqo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=567&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/550544/original/file-20230927-21-uowpqo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=712&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/550544/original/file-20230927-21-uowpqo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=712&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/550544/original/file-20230927-21-uowpqo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=712&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les cinq appellations géographiques des whiskies écossais : Campbeltown, Highland, Islay, Lowland, et Speyside. La zone « Island » est officiellement rattachée à la région du Highland mais certains considèrent qu’il s’agit d’une appellation à part.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Scotch_regions_blank.svg#/media/File:Scotch_regions.svg">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>En ce qui concerne le whisky écossais, la réglementation stipule que la seule et unique condition pour pouvoir utiliser une appellation géographique est de distiller et vieillir le whisky sur le territoire correspondant. En revanche, il n’existe aucune règle concernant le type de céréales pouvant être utilisé, l’origine géographique de ces céréales, ou encore des tonneaux, et il est fréquent que les distilleries importent ces intrants. Si les céréales proviennent du continent européen et que les tonneaux viennent de Bordeaux, on peut, <a href="https://thewhiskylady.net/2016/05/20/scotch-whisky-regions-classification-still-relevant/">à l’image de certains professionnels du secteur</a>, s’interroger sur l’impact de la géographie du territoire écossais sur la qualité des whiskies et sur le bien-fondé de leurs appellations géographiques.</p>
<p>Ces appellations garantiraient-elles des conditions de vieillissement spécifiques, en exposant les tonneaux à des conditions climatiques propres à chaque territoire d’appellation ? Une simple visualisation de la carte des appellations permet d’écarter cette piste. L’appellation Highland regroupe par exemple des distilleries s’étalant sur plusieurs latitudes, certaines bénéficiant d’un air iodé du fait de leur localisation sur une île ou en bord de mer tandis que d’autres sont situées en plein cœur des terres, bien loin de toute influence marine !</p>
<h2>L’enjeu des labels</h2>
<p>Nos recherches permettent déjà de montrer que les consommateurs peuvent accorder une valeur plus élevée à certaines appellations même lorsque celles-ci ne permettent finalement pas de différencier la qualité des produits. Au-delà de ce simple constat, nos résultats invitent à s’interroger sur le contenu informationnel des appellations géographiques et sur leur lisibilité pour l’acheteur.</p>
<p>Ces interrogations sont légitimes tant pour le secteur du whisky que pour d’autres produits bénéficiant de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/labels-33624">labels</a> de qualité mettant en avant le lien entre la qualité du produit et son territoire de production : vin, fromage, viande, etc.</p>
<p>Nous pouvons notamment déduire de l’analyse du cas du whisky écossais que des producteurs peuvent bénéficier de la réputation favorable d’une appellation, même lorsque celle-ci ne fournit que peu d’indications sur la qualité réelle des produits. En montrant que les consommateurs peuvent être sensibles à des labels ou signaux de qualité au contenu informationnel particulièrement limité, nos travaux corroborent <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0264999317315468">d’autres recherches</a> qui appellent à réduire le niveau de complexité de certains systèmes d’appellations.</p>
<hr>
<p><em>L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération. L’alcool ne doit pas être consommé par des femmes enceintes</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214330/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Selon une étude, le consommateur se montre particulièrement sensible à la localisation de la distillerie, bien que cette information donne peu d'indications sur la qualité réelle des produits.Bruno Pecchioli, Professeur associé, ICN Business SchoolDavid Moroz, Associate professor, EM NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2104242023-07-26T18:18:55Z2023-07-26T18:18:55ZTwitter devient « X » : un sabordage pour mieux relancer le réseau social ?<p>Depuis le début de la semaine, l’iconique oiseau bleu de <a href="https://theconversation.com/topics/twitter-22707">Twitter</a> s’en est allé. Place désormais à un « X » dont l’une des diagonales est constituée d’un parallélogramme non rempli. Un énième caprice d’<a href="https://theconversation.com/topics/elon-musk-30803">Elon Musk</a>, fantasque propriétaire du <a href="https://theconversation.com/topics/reseaux-sociaux-20567">réseau social</a> qui s’était déjà permis quelques heures durant de remplacer le logo de la plate-forme par un chien, emblème d’une cryptomonnaie dont il était accusé de manipuler le cours ?</p>
<p>Dans l’opération, de nombreux éléments donnent une impression d’impréparation, voire de <a href="https://www.20minutes.fr/high-tech/by-the-web/4046759-20230725-metamorphose-twitter-x-nouveau-changement-bacle-elon-musk">bâclé</a>, à commencer par ces ouvriers qui avaient pour mission de <a href="https://twitter.com/waynesutton/status/1683563753898668032">changer le logo</a> sur la façade du siège, interrompus par la police réclamant les autorisations administratives, ou le fait que Microsoft et Meta aient <a href="https://www.businessinsider.com/meta-holds-rights-to-x-twitter-rebrand-elon-musk-2023-7?r=US&IR=T">déjà déposé un logo en « X »</a>. Cependant, au-delà de ce qui relève d’anecdotes qui prêtent à sourire, de considérations juridiques ou de tout ce que le personnage d’Elon Musk présente de farfelu, on retrouve bien dans ce changement de nom des considérations hautement stratégiques.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1683378289031761920"}"></div></p>
<p>Des marques ou des entreprises qui changent de nom est plus courant qu’on ne le pense : les barres chocolatées Raider renommées « Twix » au début des années 1990, GDF Suez devenu Engie, Covoiturage.fr rebaptisé BlaBlaCar, France Télécom en Orange, etc. Mais, quand il s’agit d’enterrer une marque comme Twitter, dont le nom est même devenu un verbe appartenant au langage courant, un puissant ancrage dont beaucoup de firmes rêveraient, nous sommes face à une opération nettement plus rare – voire inédite. Indéniablement, il s’agit d’une preuve supplémentaire qu’Elon Musk n’a pas acheté le réseau social en octobre 2022 pour ce que l’oiseau bleu était, mais bien pour ce qu’il pourrait devenir.</p>
<p>En effet, si d’aucuns se focalisent sur un maelström de faits parasites (dont Elon Musk est, il est vrai, coutumier), propres à donner l’impression que le réseau social est devenu un bateau ivre, une analyse plus approfondie laisse à penser que ce n’est sans doute pas tout à fait le cas.</p>
<h2>Diversifier… au risque de détruire ?</h2>
<p>Dès le départ, Elon Musk a fait part de son intention de faire de Twitter « the everything app », à l’instar du « the everything store » qu’est Amazon. Jeff Bezos, le fondateur du géant du e-commerce, souhaitait que chaque objet que l’on peut imaginer consommer soit disponible sur sa plate-forme, ce qui s’est fait par étape avec, dans un premier temps, une activité centrée sur la vente de livres.</p>
<p>Twitter, depuis son lancement, n’a d’autre utilité que de faire du microblogging. Son nouveau propriétaire semble désormais vouloir diversifier suffisamment sa plate-forme pour que le service originel ne soit à terme qu’un élément parmi une galaxie de services centralisés sur une même application. Le modèle dont il s’inspire est celui de WeChat (développé par le géant Tencent), dont il est aujourd’hui bien difficile de se passer en Chine. Messagerie, microblogging mais aussi géolocalisation, marketplace, moyens de paiement… tout cela est disponible sur cette plate-forme dont le nombre d’utilisateurs quotidiens est estimé à plus de 1,67 milliard.</p>
<p>Racheter Twitter, c’était acquérir un levier d’<a href="https://blog.digimind.com/fr/tendances/twitter-chiffres-essentiels-france-monde-2020">environ de 300 millions d’utilisateurs</a>, aux profils plutôt <a href="https://etudiant.lefigaro.fr/les-news/actu/detail/article/les-utilisateurs-de-twitter-plus-jeunes-et-diplomes-que-les-autres-16581/">qualifiés</a>, pour les amener vers autre chose. Plutôt que de partir de zéro, il était plus simple de construire le projet global à partir d’une application solidement installée autour de laquelle greffer d’autres services monétisables.</p>
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<p>Il s’agissait notamment de répondre à une faiblesse structurelle de Twitter très tôt identifiée par Elon Musk : l’extrême dépendance des revenus aux annonceurs publicitaires (pour près de <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-eco/de-plus-en-plus-d-annonceurs-desertent-twitter-20221104">90 %</a>). Ce modèle conduisait l’entreprise à pâtir fortement des périodes de ralentissement de l’économie mondiale, comme c’est le cas actuellement. Dans ces phases, de nombreuses entreprises rognent en effet les budgets communication car ils sont parmi les plus faciles à réduire.</p>
<p>Avec la <a href="https://www.lemonde.fr/pixels/article/2023/04/03/twitter-met-fin-au-chaos-de-son-systeme-de-comptes-verifies_6168069_4408996.html">fin des comptes certifiés gratuits</a> en avril 2023, une première étape a été franchie en la matière. Amener les utilisateurs les plus assidus à payer, en leur réservant les fonctionnalités les plus avancées (dépassement du nombre de caractères, édition de tweets, priorisation des tweets par l’algorithme, etc.), c’est appliquer à Twitter un modèle de monétisation de type freemium/premium parmi les plus répandus dans les jeux vidéo ou les services numériques. Un modèle qui a fait ses preuves et participe à cette logique de diversification des sources de revenus.</p>
<p>Elon Musk n’en reste pas aux utilisateurs lambda. Son objectif est de monétiser encore davantage les entités qui utilisent la plate-forme de manière intensive. L’annonce de la monétisation des fonctionnalités « pro » (notamment Tweetdeck) et de la limitation du nombre de tweets pouvant être émis ou consultés quotidiennement vise, en réalité, à capter une partie de la valeur générée par deux types d’acteurs.</p>
<p>D’un côté, les « agences d’influence », qui mobilisent la formidable caisse de résonance qu’est Twitter pour relayer, via des armées de bots, des campagnes massives aux objectifs qui vont du pur militantisme, à la désinformation, en passant par divers combats idéologiques et autres ingérences économiques ou politiques. De l’autre, les entreprises d’intelligence artificielle, qui puisent sur ce réseau ouvert images et textes pour entraîner leurs algorithmes… à des fins de monétisation future. Les mettre à contribution, revient a minima à capter une partie de la valeur générée par ces entreprises, et à se donner une chance d’entraver suffisamment leur développement pour opérer un éventuel rattrapage.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1683053326097588224"}"></div></p>
<p>Au-delà de ces pures considérations économiques, pour créer une nouvelle super-application à partir de Twitter, deux options semblaient ouvertes en matière d’identité.</p>
<p>La première : garder un même nom et l’enrichir de nouveaux usages, quitte à ce que le réseau dans dix ans n’ait plus grand-chose à voir avec l’objet d’origine. La seconde : casser l’image historique et aller au bout de l’entreprise de destruction de Twitter, pour mieux reconstruire sur ses cendres.</p>
<p>Pablo Picasso disait bien :</p>
<blockquote>
<p>« Tout acte de création est d’abord un acte de destruction. »</p>
</blockquote>
<p>Néanmoins, pour comprendre la voie empruntée par Elon Musk, la littérature de science-fiction – dont il est friand – semble plus appropriée que la peinture. Sa passion dévorante pour ce genre narratif n’est probablement pas étrangère à la fascination qu’il semble avoir pour la lettre « X », ou plus précisément, pour l’imaginaire auquel elle renvoie, à la fois mystérieuse lorsqu’elle est mise en équation, mais véhiculant aussi modernité et puissance. C’est elle qui a ainsi vocation à unir les différentes pièces de son groupe ; on la retrouve déjà dans la Tesla X ou dans SpaceX.</p>
<h2>Threads, un véritable concurrent pour Twitter ?</h2>
<p>Qu’augurer pour l’avenir du projet d’Elon Musk, dont les manières de faire sont parfois déstabilisantes et bien souvent imprévisibles ? Il faut ici bien distinguer ce qui relève des utilisateurs de Twitter de ce qui concerne les annonceurs.</p>
<p>Côté utilisateurs, on s’interroge notamment sur l’émergence en parallèle de Threads, nouveau réseau mis en ligne par Meta aux fonctionnalités complémentaires avec celles d’Instagram. Il enregistrait déjà <a href="https://www.bfmtv.com/tech/actualites/reseaux-sociaux/threads-depasse-les-100-millions-d-utilisateurs-moins-d-une-semaine-apres-son-lancement_AD-202307100333.html">100 millions d’utilisateurs</a> une semaine après son lancement le 5 juillet. Sera-t-il véritablement un concurrent pour Twitter ?</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1683857105810341890"}"></div></p>
<p>Il est d’autant plus délicat de répondre à cette question qu’on ne peut présumer des véritables intentions stratégiques du groupe de Mark Zuckerberg avec ce nouveau réseau. Son lancement tombe, cependant, à point nommé, à l’heure où Twitter, en pleine reconfiguration, a un genou à terre. Deux hypothèses sont envisageables.</p>
<p>La première : Meta lance un concurrent pour récupérer tout ou partie du marché, affaiblissant, marginalisant, voire portant l’estocade au rival blessé. De fait, quand Elon Musk s’est mis à faire des choses assez discutables sur le fond comme sur la forme avec Twitter, beaucoup d’utilisateurs ont annoncé leur intention de fuir un réseau où disparaissait toute forme de modération et où des profils plus que controversés étaient de nouveau les bienvenus. On présentait hier Mastodon comme le prochain leader pour ces raisons, Threads aujourd’hui.</p>
<p>Quitter Twitter n’est cependant pas chose aisée. Pour retrouver l’intérêt de l’usage de Twitter sur une autre plate-forme, il s’agit de casser les « effets de réseau » sur lesquels capitalise la plate-forme déjà installée : en tant qu’utilisateur, l’utilité retirée d’un réseau dépend du nombre de personnes qui y sont inscrites et actives, à plus forte raison quand ces individus ont des centres d’intérêt proches. Selon cette logique, si je retrouve les mêmes fonctionnalités ailleurs mais pas la même profondeur et qualité de communauté, je vais subir une désutilité relative. Je ne suis donc pas incité à migrer d’une plate-forme à l’autre.</p>
<p>Pour tuer Twitter, il faudrait donc présenter une innovation susceptible de générer en très peu de temps une migration massive d’utilisateurs et, mieux encore, d’utilisateurs influents… Même si le nouveau réseau a su, pour l’instant, séduire des personnalités aussi diverses que la chanteuse Shakira, l’ancien joueur de basket-ball Shaquille O’Neal ou le gouverneur de Californie Gavin Newson, aucun des trois n’a cessé son activité sur Twitter. Et pour cause : Twitter reste un lieu d’influence incontournable où se côtoient quotidiennement intellectuels, politiques, journalistes, décideurs et autres personnalités du show-business. Autrement dit, le taux marginal de substitution entre les deux services ne semble pas (pour l’heure) très élevé.</p>
<p>Autre hypothèse, Meta ne s’intéresse qu’à lui-même et cherche à développer son modèle d’affaires. L’idée serait alors d’amener les utilisateurs d’Instagram à s’exprimer plus qu’ils ne le font en ajoutant des interactions textuelles à l’image et à la vidéo, données hautement monétisables. Dans cette optique, obtenir en quelques jours une centaine de millions d’utilisateurs constitue déjà un succès, et faire venir des utilisateurs de Twitter ne serait alors qu’un gain collatéral.</p>
<h2>Difficile de faire table rase</h2>
<p>Côté annonceurs, l’histoire n’est pas tout à fait la même : il n’existe pas que Twitter pour faire de la publicité digitale. Certes, tous les autres supports numériques n’ont pas nécessairement le profil d’audience de ce réseau ; il n’en demeure pas moins qu’une firme qui juge les services de Twitter insuffisamment efficaces ou qui, de près ou de loin, ne voudrait pas être associée à Elon Musk, peut arrêter sa collaboration avec le réseau social.</p>
<p>C’est aussi pour cela, outre les éléments de conjoncture susmentionnés, que Twitter a perdu <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-eco/de-plus-en-plus-d-annonceurs-desertent-twitter-20221104">plus de la moitié de ses annonceurs</a> depuis son rachat par Elon Musk. Pire encore : 60 % des plus gros annonceurs mondiaux lui auraient tourné le dos, à l’instar de General Motors ou Pfizer. Beaucoup ne voulaient pas prendre le risque de voir une publicité pour leur firme se trouver entre deux tweets non modérés, racistes, obscènes, sexistes ou complotistes. Ou quand le projet de Musk en faveur de la « libération de la liberté d’expression » se heurte au pragmatisme des entreprises.</p>
<p>Un tel fiasco suggère peut-être qu’Elon Musk, dans sa volonté de transformation, a pu quelque peu se précipiter. Or, tout Elon Musk qu’il est, il a des comptes à rendre. De puissants investisseurs restent extrêmement concernés par la santé de ses entreprises et la survie de l’écosystème Musk. Lorsqu’il a commencé à chambouler de manière discutable la politique générale de Twitter, des cours de bourse, et notamment celui de <a href="https://www.tradingsat.com/tesla-inc-US88160R1014/actualites/tesla-inc-victime-collaterale-des-derives-de-musk-avec-twitter-tesla-n-en-finit-plus-de-chuter-en-bourse-1049499.html">Tesla</a>, ont accusé le coup. Suffisamment pour tirer la sonnette d’alarme et opérer de nouveaux changements drastiques.</p>
<p>La nomination, le 12 mai 2023, de <a href="https://www.20minutes.fr/medias/4036774-20230513-linda-yaccarino-choisie-elon-musk-diriger-twitter">Linda Yaccarino</a> comme directrice générale de Twitter n’a ainsi rien d’anodin, elle qui a fait l’essentiel de sa carrière en charge de la publicité chez NBCUniversal. Après avoir voulu réduire la dépendance du réseau social à la publicité, après avoir voulu monétiser les utilisateurs, Elon Musk place à la tête de l’entreprise une des figures américaines les plus connues dans l’univers des annonceurs.</p>
<p>Un rétropédalage qui vise, certes, à inciter les annonceurs à de nouveau faire confiance à la plate-forme. Mais un rétropédalage qui rappelle également qu’une transformation stratégique reste une entreprise extrêmement risquée, de surcroît fortement consommatrice en ressources. Les revenus que tire Twitter de la publicité sont certes dérisoires au regard de l’empire financier que constitue l’écosystème Musk, mais apparaissent essentiels pour rassurer les marchés et pour alimenter les nombreux développements engagés et à venir de X.com. En stratégie comme dans la vie, les meilleures choses nécessitent souvent beaucoup de patience.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210424/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Pillot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La changement de nom s’inscrit dans une stratégie qui vise notamment à monétiser davantage les contenus et à endiguer la fuite d’annonceurs échaudés par les débuts d’Elon Musk à la tête de Twitter.Julien Pillot, Enseignant-Chercheur en Economie (Inseec) / Pr. associé (U. Paris Saclay) / Chercheur associé (CNRS), INSEEC Grande ÉcoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1825602022-05-11T18:37:39Z2022-05-11T18:37:39ZLuxe : comment inciter les clients à participer aux campagnes caritatives des marques ?<p>A priori, ceux qui s’offrent un sac de marque à 1 000 euros le font pour montrer qu’ils en ont les moyens, et non parce qu’une partie du montant de leur achat est reversé à l’Unicef. Pourtant des marques de luxe connues, telles Louis Vuitton et Gucci, se sont mises à lier directement leurs produits à de nobles causes. Dans le monde du marketing, on appelle cela le <em>cause-related marketing</em> (CRM, ou marketing lié à une cause).</p>
<p>Après tout, vu la pression généralisée sur le monde des affaires à contribuer au bien public, il n’y a pas de raison que les entreprises du luxe ne mettent pas en place des programmes RSE (responsabilité sociale et environnementale). Mais pourquoi leurs clients, qui sont, rappelons-le, du genre à se faire plaisir avec des stylos-plumes à 500 euros, auraient-ils envie de contribuer au bien sociétal ?</p>
<h2>La RSE, un paradoxe dans le luxe</h2>
<p>Quand on parle de consommation de produits de luxe, on parle d’excès, de plaisir personnel, de superficialité, d’ostentation, bref, de dépenses de prestige. La motivation première des clients du luxe est ce que les psychologues nomment « l’auto-valorisation », le <a href="https://www.researchgate.net/publication/342355916_Materialistic_cues_make_us_miserable_A_meta-analysis_of_the_experimental_evidence_for_the_effects_of_materialism_on_individual_and_societal_well-being">désir d’afficher son statut et sa richesse</a>, tant auprès des autres que de soi-même. En d’autres termes, les voitures de sport ou montres haut de gamme servent à faire étalage de son argent. De plus, il est facile de défendre l’idée que le marché du luxe cible les consommateurs les plus matérialistes. Ils ne sont pas particulièrement généreux ou intéressés par les initiatives de responsabilité sociale, du moins si l’on compare avec les consommateurs moins matérialistes.</p>
<p>Inversement, les comportements dits prosociaux restent typiquement motivés par un désir de dépassement de soi : le fait de transcender ses propres intérêts, avec des valeurs universelles. Autrement dit, les initiatives RSE seraient motivées par l’altruisme et la volonté des consommateurs d’assurer des revenus équitables aux producteurs de cacao ivoiriens ou de soutenir l’émancipation, par exemple, des femmes palestiniennes.</p>
<p>Les efforts en matière de RSE ont beau provenir en majorité des marques grand public, tels les fabricants de produits de grande consommation (Unilever) ou les entreprises de la tech (Apple), les marques de luxe ont rejoint le mouvement – et ont vu leurs efforts couronnés de succès.</p>
<p>Par exemple, Bulgari a depuis 2009 un partenariat avec l’ONG « Save the Children » pour lever des fonds <a href="https://www.bulgari.com/download/pdf/2017-save-the-children/BVLGARI-Brochure-SAVE-THE-CHILDREN-RAISE-YOUR-HAND-2017-FR.pdf">pour des programmes d’éducation</a>, et Montblanc a entamé un partenariat avec l’Unicef en 2004 <a href="https://www.puretrend.com/article/montblanc-et-l-unicef-s-engagent-avec-signature-for-good_a73938/1">pour soutenir des projets d’alphabétisation</a> des enfants. Ces campagnes génèrent a minima de la publicité favorable aux marques de luxe.</p>
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<figcaption><span class="caption">Bulgari et Save The Children célèbraient leur partenariat de 10 ans en 2019 (en anglais).</span></figcaption>
</figure>
<p>Ainsi, 250 célébrités ont pris part à la campagne de Bulgari en arborant des bijoux spécialement dessinés pour Save the Children et en faisant la promotion du slogan de la campagne « Stop, Think, Give » (« arrêtons-nous, pensons, donnons ») sur les réseaux sociaux. Résultat ? Bulgari a levé plus de <a href="https://www.lvmh.fr/actualites-documents/actualites/bvlgari-celebre-dix-ans-de-partenariat-solidaire-avec-save-the-children/">80 millions de dollars au travers de la vente de ses bijoux</a> « Save the Children » à plus de 500 000 clients de par le monde.</p>
<h2>Un risque pour leur image de marque ?</h2>
<p>Malgré ces exemples de campagnes réussies, les entreprises du luxe peuvent s’inquiéter de leur image, et de la performance qui en découle. De la même manière que l’intégration de matières recyclées pourrait nuire à la perception qu’ont les consommateurs de la qualité de produits de luxe, une <a href="https://www.researchgate.net/publication/347874519_Corporate_social_responsibility_in_luxury_contexts_potential_pitfalls_and_how_to_overcome_them">marque pourrait voir son image entachée</a> par du marketing relié à une cause. Ces effets négatifs s’expliquent par la friction entre le concept d’autovalorisation dans le luxe et de dépassement de soi porté par la cause soutenue.</p>
<p>Néanmoins, d’après <a href="https://www.researchgate.net/publication/303464658_Encouraging_Consumer_Charitable_Behavior_The_Impact_of_Charitable_Motivations_Gratitude_and_Materialism">d’autres travaux de recherche</a>, les campagnes marketing liées à une cause peuvent réussir, y compris pour les marques de luxe. Les effets positifs s’expliquent alors en termes d’atténuation de culpabilité : soutenir une telle campagne diminue la sensation de culpabilité associée à la consommation de produits de luxe, notamment pour les « luxes frivoles », tels le café gourmet ou le chocolat haut de gamme.</p>
<p>Donc plutôt que de diluer leur valeur en mettant l’idée de comportement prosocial au cœur de leur identité de marque (telle Rolex se décrivant comme engagé pour un monde meilleur), les entreprises de luxe ont tout intérêt à collaborer avec des marques sociales tout en restant des entités bien séparées. Pour cela, elles ont notamment tout intérêt à déployer des stratégies spécifiques sur le point de vente, comme nous le montrons dans un récent <a href="https://www.researchgate.net/publication/358688204_Cause-related_marketing_of_luxury_brands_Nudging_materialists_to_act_prosocially">article de recherche</a>.</p>
<h2>Motivations d’autovalorisation</h2>
<p>Nous avons étudié en particulier deux sortes de campagnes CRM fréquentes, et avons constaté qu’elles ont toutes les deux de fortes chances d’atteindre leur but. La première est ce que nous appelons une campagne liée aux dons. Dans ce type de campagne, très fréquent, la marque de luxe encourage les dons directs à son partenaire caritatif sur le point de vente.</p>
<p>Par exemple, lors de la campagne de <a href="https://equilibrium.gucci.com/fr/chime-for-change/">Gucci Chime for Change</a>, les clients qui achetaient le parfum emblématique de la maison étaient incités à rajouter 5 euros au montant, somme ensuite reversée à un partenaire œuvrant à l’émancipation des femmes et filles.</p>
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<figcaption><span class="caption">Gucci présente sa campagne 2013 avec l’Unicef et Chime for Change (en anglais).</span></figcaption>
</figure>
<p>Un deuxième type de campagne est lié au produit. L’entreprise de luxe peut lancer un produit à édition limitée, spécialement dessiné afin de promouvoir le partenaire caritatif, et promettre de reverser une partie du prix d’achat à ce partenaire pour chaque produit acheté au cours de la campagne. Ainsi, dans le cadre de son partenariat avec « Save the Children », Bulgari a levé des fonds en lançant une bague à édition limitée, avec une partie du montant des ventes reversée à l’ONG. Ce type de campagne a tendance à mieux fonctionner auprès des clients les plus matérialistes.</p>
<p>Le facteur clé, ici, est que le produit de luxe à édition limitée utilisé au cours de ces campagnes est habituellement marqué d’un slogan ou logo qui identifie la cause caritative. Ainsi, ces produits à édition limitée permettent non seulement aux consommateurs d’afficher leur statut social au travers du produit de luxe lui-même, mais aussi d’afficher leur comportement prosocial via le lien visible avec l’œuvre caritative.</p>
<p>En d’autres termes, le marketing ainsi conçu fait toujours appel aux motivations d’autovalorisation des consommateurs de produits de luxe : il leur permet non seulement d’envoyer le message qu’ils ont de l’argent mais aussi de montrer qu’ils le dépensent d’une manière socialement valorisée.</p>
<p>Dernier détail intéressant, il n’est pas nécessaire que l’élément de statut social soit cher en termes absolus, mais uniquement de manière relative par rapport aux options plus standards. Les campagnes pour des produits de luxe qui ne sont pas hors de portée mais synonymes de statut social (par exemple un café premium à 5 euros, dans une tasse spéciale qui indique la participation à une campagne « Sauvez les enfants d’Haïti ») produisent les mêmes effets que des biens de luxe haut de gamme.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/182560/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’altruisme lié au don reste éloigné du matérialisme, motivation première d’achat dans le luxe. Pour surmonter cet antagonisme, les marques doivent s’appuyer sur les points de vente, montre une étude.Sukhyun Kim, PhD in Marketing, HEC Paris Business SchoolL. J. Shrum, Professeur de marketing, HEC Paris Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1759922022-02-03T17:44:38Z2022-02-03T17:44:38ZUne étiquette originale sur une bouteille de vin ? Se différencier, mais ne pas en abuser…<p>Depuis quelques années, un vent de créativité semble souffler sur les rayons des cavistes. Du graphisme le plus discret aux visuels les plus complexes, les étiquettes de vin semblent, dans certains cas, évoluer vers des œuvres à part entière.</p>
<p>Il y a là ce que l’on appelle un processus d’« artification » d’un objet dont la vocation est à l’origine informative. Et cette démarche créative dans le monde vitivinicole n’est pas récente. Elle a simplement été, jusqu’à maintenant, l’apanage des grandes marques de vins de prestige.</p>
<p>En sciences de gestion, l’impact de l’étiquette sur le comportement du consommateur a souvent été appréhendé, mais très rares sont les recherches qui se sont intéressées aux vignerons, encore plus à ceux qui produisent des vins d’entrée ou de milieu de gamme. Or, la différenciation est plus que jamais un impératif pour les producteurs de vins français à l’heure où le marché connaît de grandes difficultés : <a href="https://www.lsa-conso.fr/le-marche-du-vin-francais-a-t-il-la-tete-qui-tourne,369928">baisse globale de la consommation</a> en 2020 par rapport à 2011, concurrence croissante des vins du Nouveau Monde, démultiplication de l’offre… Cet environnement complexe amène les différents acteurs du marché à repenser leur stratégie et à identifier de nouveaux leviers.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1447492296098951169"}"></div></p>
<p>Comme le montre notre <a href="https://muse.edu.umontpellier.fr/FILES/2021/11/WINEMARKETINGSYMPOSIUMPROGRAM.PDF">travail</a> de recherche, effectué auprès de vignerons, proposer des bouteilles avec des étiquettes atypiques représente un levier stratégique et commercial important puisque celles-ci vont attirer l’œil du client, l’aider à mémoriser le vin plus aisément et ainsi permettre aux professionnels de se différencier de la concurrence. À condition aussi d’avoir conscience des risques qu’engendre cette stratégie.</p>
<h2>Signature artistique</h2>
<p>Les perspectives en matière d’innovation demeurent limitées pour un produit tel que le vin. Législation contraignante, nature expérientielle du produit (il n’est possible de l’apprécier qu’une fois consommé), il ne reste principalement que l’emballage et l’étiquette pour se distinguer dans sa communication.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/444064/original/file-20220202-15-1gvcch.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/444064/original/file-20220202-15-1gvcch.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/444064/original/file-20220202-15-1gvcch.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1158&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/444064/original/file-20220202-15-1gvcch.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1158&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/444064/original/file-20220202-15-1gvcch.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1158&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/444064/original/file-20220202-15-1gvcch.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1455&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/444064/original/file-20220202-15-1gvcch.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1455&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/444064/original/file-20220202-15-1gvcch.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1455&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le vin Am Stram Gram du domaine Calmel Joseph est frappé d’une étiquette qui se veut originale.</span>
<span class="attribution"><span class="source">reproduction avec l’autorisation de l’Agence-S groupe Saguez</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En transformant l’étiquette de vin, <a href="https://www.persee.fr/doc/colan_0336-1500_1999_num_121_1_2949">objet infra-ordinaire</a>, un objet du quotidien supposé ordinaire, l’artification joue sur une <a href="https://journals.openedition.org/lectures/8155">substitution</a>. Les codes visuels classiques tels que les mentions obligatoires, un dessin de château ou le nom du domaine s’effacent pour laisser place à une œuvre originale apposée par un artiste ou un graphiste.</p>
<p>Le processus est instigué principalement par les vignerons. En confiant la création de l’étiquette à des artistes, graphistes ou illustrateurs, ils détournent l’étiquette de sa fonction informative et en font un support de création artistique. Un indice de cela est la présence sur l’étiquette de la <a href="https://www.cairn.info/journal-societes-et-representations-2008-1-page-97.htm">signature</a> de l’artiste. On en retrouve d’ailleurs parfois même les portraits sur les sites Internet des domaines viticoles. Ils contribuent ainsi à l’authentification de l’œuvre, et par la même, à légitimer l’artification de l’étiquette.</p>
<h2>Succès dans la grande distribution</h2>
<p>Notre étude qualitative a été réalisée auprès de treize professionnels aux profils variés en termes de genre, d’âge et de domaine (lieu, ancienneté et taille). Comme l’indique ce témoignage, l’étiquette n’est pas le dernier de leur souci :</p>
<blockquote>
<p>« Notre étiquette, c’est une couleur orange qui se voit assez bien chez les cavistes. Les gens aiment bien parce que ça sort du rang, les gens ne l’oublient pas. »</p>
</blockquote>
<p>Les bénéfices semblent en effet nombreux. Les vignerons considèrent ainsi que recourir à des étiquettes atypiques leur permet de pénétrer plus aisément certains marchés ou une cible précise (notamment les jeunes adultes et les femmes) qui serait moins attirée par des étiquettes comportant des codes visuels traditionnels. Un autre bénéfice est de rajeunir une image vieillissante du domaine en lui procurant une image décalée et plus moderne voire de transmettre un message.</p>
<blockquote>
<p>« Créer des étiquettes originales, c’est pour être dynamique sur le marché, et pour qu’on ait quelque chose à raconter à nos clients. C’est aussi pour ramener de la nouveauté. »</p>
</blockquote>
<p>La stratégie d’artification des étiquettes procurerait également un réel avantage lors des négociations auprès des distributeurs. La raison, selon les enquêtés, en est la suivante. Puisque les consommateurs ne bénéficient que rarement de la présence de conseillers dans les rayons des grandes surfaces, ils vont davantage être attirés par une jolie bouteille ou une étiquette atypique. Et les professionnels de la grande distribution en sont conscients au moment de sélectionner les producteurs. Réfléchir sur l’artification dépend donc en partie du canal de vente que l’on envisage.</p>
<blockquote>
<p>« Les gens qui dégustent mon vin sont conseillés par un caviste donc l’étiquette originale est moins importante que dans un supermarché. »</p>
</blockquote>
<p>Cependant, si les atouts d’une étiquette « œuvre d’art » semblent nombreux aux yeux des vignerons interrogés, la démarche ne semble pas sans risque.</p>
<h2>Cacher un mauvais vin ?</h2>
<p>Certains vignerons estiment, en effet, qu’une stratégie d’artification des étiquettes peut « décrédibiliser » le vin et qu’elle ne convient pas aux vins de terroir. Les éléments traditionnels rassurent le consommateur et il peut sembler risqué d’en modifier les codes. À l’inverse, nos vignerons estiment que cette stratégie convient aux vins blancs et rosés ainsi qu’aux vins entrée de gamme. L’un d’entre eux explique :</p>
<blockquote>
<p>« Pour les vins entrée de gamme, on peut vraiment y aller parce que les étiquettes changent souvent. Pour les vins haut de gamme, c’est plus compliqué de changer parce c’est souvent des vins dont les gens se rappellent grâce à l’étiquette. »</p>
</blockquote>
<p>Un autre risque de cette stratégie est celui de faire « disparaître » le vin, son goût, sa qualité, son renom, son image, derrière une étiquette atypique. Une telle démarche peut « éclipser le vin » voire altérer son identité. Certains pointent même le risque de recourir à une étiquette atypique afin de dissimuler un cépage de piètre qualité :</p>
<blockquote>
<p>« Vendre des jolies bouteilles, ça ne veut pas forcément dire que le vin est bon. »</p>
</blockquote>
<p>Enfin, le risque de lassitude des consommateurs face à une étiquette atypique a souvent été évoqué. Selon nos vignerons, les étiquettes traditionnelles perdurent plus longtemps alors que celles atypiques ont une durée de vie plus courte. De fait, il semble indispensable de renouveler fréquemment les étiquettes originales des bouteilles, ce qui engendre un coût important pour les vignerons. Ils préfèrent alors parfois proposer des modèles plus classiques.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1199233918681137153"}"></div></p>
<p>Nous pouvons donc préconiser aux vignerons d’adopter une stratégie d’artification des étiquettes de leurs vins entrée et milieu de gamme notamment afin de se démarquer et d’attirer de nouveaux profils de consommateurs. Nous recommandons également de limiter la fréquence des changements d’étiquettes et d’éviter les créations trop excentriques et totalement en rupture avec le graphisme habituel. Le risque est sinon de « décrédibiliser » le vin et de déstabiliser le consommateur.</p>
<p>L’étiquette est avant tout le vecteur de l’authenticité du produit, de son histoire et de celle du domaine concerné. Il est donc important de prendre en considération le fait que certaines appellations (certains Bordeaux ou Bourgogne par exemple) pourraient moins se prêter à la démarche d’artification.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/175992/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ghofrane Ghariani-Gaillard est membre du GIT-AFM Innovation et Marketing de la Culture et du Tourisme </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Corinne Chevalier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Remplacer les traditionnelles images de châteaux par une œuvre d’art ne garantit pas le succès pour tous les types de bouteilles auprès de tous les clients.Corinne Chevalier, Maître de Conférences en Sciences de Gestion, Université Paris-SaclayGhofrane Ghariani-Gaillard, Maître de conférence en sciences de gestion, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1753482022-01-30T19:06:11Z2022-01-30T19:06:11ZStromae : des frontières de plus en plus floues entre communication et journalisme<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/441967/original/file-20220121-27-vgfxd4.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Capture d'écran du JT de TF1 le 9 janvier 2022. </span> <span class="attribution"><span class="source">TF1</span></span></figcaption></figure><p>Face à des <a href="https://sproutsocial.com/insights/data/social-advertising-report/">consommateurs de plus en plus réticents devant une annonce publicitaire classique</a>, les entreprises, marques et artistes doivent rivaliser d’ingéniosité pour adapter leur publicité aux médias, et la publicité native, entendue comme toute publicité payée qui prend la forme et l’apparence spécifiques du contenu éditorial de la plate-forme qui l’accueille sur Internet, apparaît comme un nouveau moyen de capter l’attention du public en essayant de ne pas rompre leur expérience de lecture.</p>
<h2>Enfer journalistique ou paradis publicitaire ?</h2>
<p>Dimanche 9 janvier 2022, l’auteur-compositeur belge Stromae, invité au journal télévisé de 20h sur TF1 a surpris les téléspectateurs en répondant à la dernière question de la journaliste Anne-Claire Coudray… par une chanson. Si l’exercice peut paraître dans le fond assez ordinaire, c’est dans la forme que repose l’innovation (et la polémique), en soulignant les frontières poreuses entre la communication et le journalisme.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1481026455618428938"}"></div></p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/bGmH_V18zxQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le nouveau single de Stromae « L’enfer » dévoilé en exclusivité dans le JT 20H d’Anne-Claire Coudray.</span></figcaption>
</figure>
<p>En chantant ses pensées suicidaires, l’artiste réussit à donner une réponse claire et détaillée à la dernière question de la journaliste tout en ne rompant pas l’exercice de l’interview : il se coule dans le médiatique, mais se réapproprie en même temps l’espace journalistique en espace publicitaire/promotionnel.</p>
<p>Cette adaptation de la publicité au média renvoie à la notion de « publicitarisation » théorisée en 2014 par la chercheuse Valérie Patrin-Leclère, qui consiste à « scruter ce que la publicité fait aux médias, dans leur forme et dans leur contenu », « à s’immiscer dans le contenu éditorial, <a href="https://journals.openedition.org/lectures/15111?lang=en">par exemple dans le cadre d’un traitement journalistique</a> ou d’un placement de produit ».</p>
<p>Cette publicitarisation des médias englobe ainsi toutes les hybridations qui croisent production éditoriale et production publicitaire et peut prendre diverses formes : publirédactionnel, publi-information, publireportage, articles sponsorisés, etc.</p>
<h2>Ceci n’est pas une pub : le cas du <em>HuffPost</em></h2>
<p>Les articles sponsorisés par des marques s’insèrent ainsi de plus en plus dans les contenus des sites d’information en ligne, en suivant la même logique de gommage de la rupture sémiotique entre publicité et journalisme.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/442002/original/file-20220121-21-1pvweew.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/442002/original/file-20220121-21-1pvweew.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/442002/original/file-20220121-21-1pvweew.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/442002/original/file-20220121-21-1pvweew.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/442002/original/file-20220121-21-1pvweew.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/442002/original/file-20220121-21-1pvweew.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/442002/original/file-20220121-21-1pvweew.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/442002/original/file-20220121-21-1pvweew.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Contenu de marque sponsorisé par Suez Environnement dans la rubrique « Environnement » du <em>Huffington Post</em> France.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>En effet, ces contenus de marques permettent de financer les médias sans rompre l’expérience de lecture du journal, en épousant sa forme éditoriale, comme nous l’avions démontré dans une <a href="https://revistas.ufpr.br/acaomidiatica/article/view/48745/32774">étude de cas</a> portant sur le « pure player » (support numérique uniquement) international <em>Huffington Post</em>.</p>
<p>Les contenus de marque commandités par les annonceurs doivent être nettement distingués des autres articles par la mention « sponsored », comme l’explique la directrice des ventes commerciales chez Verizon Media pour le <em>Huffington Post</em> au Québec, Maude-Isabel Laferrière :</p>
<blockquote>
<p>« Pour le contenu de marque ou contenu commandité, nous avons une équipe qui crée le contenu pour l’annonceur. L’article est spécifiquement identifié comme étant commandité. Les sujets varient en fonction des annonceurs. Nous avons une équipe dédiée à la rédaction et la création des projets de contenus de marques. Les journalistes sont ouverts à ce type de contenu puisqu’il aide à financer la production de contenus rédactionnels ».</p>
</blockquote>
<p>De nombreux articles labellisés « contenus de marque » partagent ainsi les rubriques du <em>HuffPost</em> avec ceux de la rédaction.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/441998/original/file-20220121-13-6468y4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/441998/original/file-20220121-13-6468y4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/441998/original/file-20220121-13-6468y4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/441998/original/file-20220121-13-6468y4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/441998/original/file-20220121-13-6468y4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/441998/original/file-20220121-13-6468y4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/441998/original/file-20220121-13-6468y4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Exemple de format natif adopté par le <em>Huffington Post</em> Québec.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>En France, l’annonceur Suez Environnement a sponsorisé la rubrique « Environnement » du pure player par l’intermédiaire de l’agence ZenithOptimedia et de la régie publicitaire M Publicité. Suez Environnement s’est servi des articles tirés de son magazine sur les enjeux de la ressource et l’économie circulaire, <em>e-Mag Suez Environnement</em>, pour occuper la rubrique « Environnement ».</p>
<p>S’il s’agit d’un partenariat entre une marque et un média, la marque montre davantage son inscription dans une logique d’intégration organique : elle fait partie du média, au même titre que les autres articles éditoriaux du <em>Huffington Post</em> français, avec une absence de coupure sémiotique entre les thématiques de Suez et celles de la rubrique du <em>HuffPost</em>. Au niveau esthétique, nous ne pouvons pas dire non plus que les contenus de marque dissonent avec ceux de la rédaction : le dispositif déployé reste un espace publicitaire qui permet à l’annonceur de créer une rubrique sponsorisée au sein de l’arborescence du média.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/442508/original/file-20220125-25-1btw4v6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/442508/original/file-20220125-25-1btw4v6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/442508/original/file-20220125-25-1btw4v6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/442508/original/file-20220125-25-1btw4v6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/442508/original/file-20220125-25-1btw4v6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/442508/original/file-20220125-25-1btw4v6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/442508/original/file-20220125-25-1btw4v6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/442508/original/file-20220125-25-1btw4v6.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les contenus de Suez Environnement insérés dans la brand page du <em>Huffington Post</em> français.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans une <a href="http://frenchjournalformediaresearch.com/lodel-1.0/main/index.php?id=1095">autre recherche</a>, nous avions étudié le dispositif publicitaire de « Melty’ing Post », lancé en en 2015 par le <em>HuffPost</em> et le groupe média Melty. Ce dispositif se caractérise par un double espace dédié aux marques sur le web : le « content corner » (une rubrique de contenus de marques) sur le site Melty et la « brand page » (une page dédiée aux marques) sur celui du <em>HuffPost</em>.</p>
<p>Cette double publicitarisation présentait des contenus produits à la fois par la rédaction de Melty et celle du <em>HuffPost</em>, et du contenu de marque identifié en tant que tel, administré par une équipe dédiée. D’un côté, les annonceurs se servent des « pure players » de contenus comme écrins médiatiques, de l’autre, le <em>HuffPost</em> et Melty utilisent la publicité pour générer des revenus et évoluer au sein de l’espace numérique, tout en facilitant l’expérience de lecture pour leur public.</p>
<h2>La fausse interview de Lex Luthor dans <em>Fortune</em></h2>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"651093266926952448"}"></div></p>
<p>Aussi, la promotion autour du film opposant pour la première fois sur grand écran <em>Batman contre Superman</em> (2016) a également eu recours à une publicitarisation dans le magazine américain <em>Fortune</em>, avec un article consacré à Lex Luthor, l’un des protagonistes du film. En effet, Warner Bros et Wired Brand Lab ont imaginé une (fausse) interview de l’ennemi de Superman, sur un site consacré au film <em>Batman v Superman : Dawn of Justice</em>.</p>
<p>En publicisant un élément diégétique (c’est-à-dire faisant partie du récit) de cette nouvelle adaptation cinématographique dans un article journalistique, la stratégie promotionnelle amène la publicité à faire corps avec le média dans lequel elle s’insère, comme nous l’avions démontré dans une autre <a href="https://journals.openedition.org/communication/7376#ftn31">recherche</a>.</p>
<p>Du fictionnel (Lex Luthor) au réel (Stromae), en passant par des contenus de marque insérés dans des sites d’information, les frontières entre la communication et le journalisme semblent ainsi de plus en plus poreuses.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/175348/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Aubrun ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le 9 janvier 2022, Stromae transforme le dispositif du JT en espace de représentation pour promouvoir son album, témoignant des frontières poreuses entre communication et journalisme.Frédéric Aubrun, Enseignant-chercheur en Marketing digital & Communication au BBA INSEEC - École de Commerce Européenne, INSEEC Grande ÉcoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1706482021-11-04T19:19:37Z2021-11-04T19:19:37ZQue fait la police ? Le pouvoir d’influence insoupçonné de la typographie<p>Dans leur essai <em>Mille plateaux</em> publié en 1980, les philosophes français Gilles Deleuze et Félix Guattari montrent, de façon didactique, comment un langage apparemment creux peut, s’il s’insère dans des agencements complexes où les signes font sens, <a href="http://www.leseditionsdeminuit.fr/livre-Capitalisme_et_schizophr%C3%A9nie_2___Mille_plateaux-2015-1-1-0-1.html">transformer les êtres</a>.</p>
<p>L’appareillage conceptuel qu’ils élaborent offre ainsi une clé de compréhension de la manière dont la normalisation managériale se diffuse : leurs « mots d’ordre » forment le fil théorique qui permet d’échapper au labyrinthe qu’arpentent quotidiennement consommateurs fidèles et managers disciplinés, dédale hanté d’injonctions contradictoires, de simulacres, d’incitations hors d’atteinte et de discours soumis à un savant cryptage technique.</p>
<p>Sans autre objet qu’eux-mêmes et leur propre performativité, ils constituent l’instrument redoutablement efficace de la managérialisation de la société. L’ordre est contenu dans la règle (la mise en forme), et non dans le discours (l’information).</p>
<p>Les deux philosophes illustrent leur raisonnement avec les communiqués de la police, dont la vraisemblance importe peu et où seul compte ce qui doit être retenu. À ce stade, un autre exemple tout aussi parlant semble pouvoir être mobilisé : la police des communiqués, qui fait l’objet de nos <a href="https://hal-upec-upem.archives-ouvertes.fr/IRG/hal-02931023v1">dernières recherches</a>.</p>
<h2>La typographie, une histoire politique</h2>
<p>La typographie peut être identifiée comme la voix du texte, la manière dont il est entendu quand il est lu. L’histoire de la création, de la diffusion et, le cas échéant, de la disparition des caractères d’imprimerie est une chronique culturelle où se croisent politique, religion, arts et sciences, suicides et rivalités amoureuses.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/428475/original/file-20211026-23-xh8v7w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428475/original/file-20211026-23-xh8v7w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428475/original/file-20211026-23-xh8v7w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428475/original/file-20211026-23-xh8v7w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428475/original/file-20211026-23-xh8v7w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428475/original/file-20211026-23-xh8v7w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428475/original/file-20211026-23-xh8v7w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428475/original/file-20211026-23-xh8v7w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les caractères gothiques, instruments de la propagande nazie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Display_of_Copies_of_Hitlers_Mein_Kampf_-_Documentation_Center_in_Congress_Hall_-_Nuremberg-Nurnberg_-_Germany.jpg">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les extravagances (parfois meurtrières) des États sont connues : on sait comment l’Allemagne hitlérienne a imposé l’impression des livres et affiches en caractères gothiques, seul lettrage susceptible d’exprimer la pureté de la Nation, à l’inverse des caractères romains « dégénérés » (Mussolini ne partageait pas cet avis), allant jusqu’à <a href="http://www.slate.fr/story/172542/culture-histoire-typographie-futura-regime-nazi-gothique">arrêter Paul Renner</a> après une conférence où ce typographe fit l’éloge des polices romaines.</p>
<p>En 1941, de façon tout aussi nuancée, le Reich interdira le gothique (qualifié de « judaïque », mais dont on s’est surtout aperçu qu’il était incompréhensible pour les habitants des pays occupés) et imposera l’utilisation de Futura, caractère romain inventé par Paul Renner lui-même en 1927.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428476/original/file-20211026-17-1ucqtpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428476/original/file-20211026-17-1ucqtpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=794&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428476/original/file-20211026-17-1ucqtpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=794&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428476/original/file-20211026-17-1ucqtpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=794&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428476/original/file-20211026-17-1ucqtpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=997&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428476/original/file-20211026-17-1ucqtpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=997&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428476/original/file-20211026-17-1ucqtpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=997&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le typographe allemand Paul Renner, arrêté par les nazis pour avoir fait l’éloge des polices romaines.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Renner#/media/Fichier:Paul_Renner,_um_1927,_Fotografie_von_Eduard_Wasow.jpg">Wikimedia</a></span>
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</figure>
<p>En 1969, la plaque commémorative laissée sur la lune par les Américains est gravée en Futura, sans doute jugée plus lisible pour des yeux extraterrestres que Fraktur ou tout autre caractère gothique apprécié des quotidiens sérieux (du New York Times au Monde) et des tatoueurs modernes.</p>
<h2>Le grand bazar typographique du management</h2>
<p>Quel rapport avec la gestion et le monde de l’entreprise ? Les polices de caractères soulèvent des enjeux tout aussi passionnés pour le management contemporain, comme en témoignent de nombreux faits divers : par exemple, le « <a href="https://www.theguardian.com/artanddesign/2009/sep/02/ikea-verdana-font">verdanagate</a> » (pétitions, éditoriaux, polémique, excuses, etc.) que suscita en 2009 le changement par Ikea de sa police traditionnelle (une variante de Futura, utilisée depuis 50 ans) pour adopter Verdana, considérée plus adaptée au web et plus lisible sur petits écrans.</p>
<p>L’année suivante, c’est l’humiliation de l’État français qui dévoile le logo de son agence chargée de la protection des droits sur Internet et, donc, de la lutte contre la fraude (<a href="https://www.leparisien.fr/societe/hadopi-le-logo-qui-fait-desordre-12-01-2010-774062.php">Hadopi</a>), magnifiquement conçu avec la police Bienvenue, dont tout le monde (sauf Hadopi, visiblement…) savait qu’elle a été créée par le typographe Jean-François Porchez par et pour France Télécom, avec un contrat d’exclusivité.</p>
<p>En 2014, une controverse surgit à propos de la consommation d’encre lors d’impressions de documents et des <a href="https://www.theatlantic.com/national/archive/2014/03/14-year-old-figures-out-that-bad-fonts-cost-the-government-hundreds-of-millions-of-dollars/359842/">économies que le gouvernement américain pourrait réaliser</a> en utilisant Garamond ; ce sont ensuite des cabinets de conseils qui, pour optimiser le recrutement, proposent de l’analyse psychologique fondée sur la dissection des choix typographiques des curriculum vitæ des candidats.</p>
<p>Tout cela ne concerne que marginalement notre propos, même si la normalisation managériale resurgit toujours : certaines entreprises américaines imposent Verdana (une police « neutre », conçue par Matthew Carter pour Microsoft en 1996) pour éviter qu’un employé tente d’éblouir le patron avec une police atypique.</p>
<p>L’enjeu porte au-delà de ces usages plus ou moins adroits et renvoie directement à ce que permet la règle indépendamment des mots, pour reprendre la logique de Deleuze et Guattari. Une police de caractères dispose d’un pouvoir d’influence sur les comportements individuels qui est absolument indépendant des phrases et messages qu’elle contribue à mettre en forme. Pour le dire autrement, les choix typographiques contiennent la consigne à laquelle le destinataire va obéir.</p>
<h2>L’incomparable efficacité d’Helvetica</h2>
<p>En 1957, des typographes de la fonderie Haas créent une nouvelle police, Neue Haas Grotesk, qui va permettre d’illustrer ce pouvoir de la mise en forme du lettrage. Sous son nom commercial (Helvetica), elle devient l’une des polices de caractères les plus utilisées au monde, désormais incontournable.</p>
<p>Helvetica a rapidement séduit pour ses qualités objectives – équilibre, clarté, lisibilité, neutralité – qui en ont fait la police privilégiée des entreprises : American Airlines, 3M, Bell, BMW, Jeep, Lufthansa, Kawasaki, Agfa, BASF, Manpower, Caterpillar, Intel, Nestlé, Évian, Tupperware, Saab et de nombreuses autres marques vont habiller leur identité visuelle avec elle. Mais, pour les mêmes raisons, Helvetica est devenue la police des États et des administrations, pullulant sur l’affichage urbain, les formulaires fiscaux, les panneaux d’interdiction, les avertissements de sécurité, la signalétique aéroportuaire, les plans de réseaux de transport, les logos institutionnels. Sa prolifération et son apparente impartialité ont achevé de lui conférer une vertu absolue : l’autorité.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428733/original/file-20211027-17-16iu2o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428733/original/file-20211027-17-16iu2o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=940&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428733/original/file-20211027-17-16iu2o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=940&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428733/original/file-20211027-17-16iu2o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=940&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428733/original/file-20211027-17-16iu2o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1181&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428733/original/file-20211027-17-16iu2o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1181&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428733/original/file-20211027-17-16iu2o4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1181&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Helvetica, qui exprime l’équilibre, la clarté, la lisibilité, ou encore la neutralité, fait partie des polices privilégiées par les marques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur.</span></span>
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<p>La police utilisée par le ministère de la Culture et les Nations unies, celle qui nous indique les toilettes et les sorties de secours est devenue un symbole de l’efficacité pour administrer les hommes, c’est-à-dire non pas surveiller des identités mais provoquer des conduites. Lorsqu’un message apparaît en Helvetica, le passant sait qu’il doit s’y soumettre ; plus précisément, il le sent, sans même réfléchir, car la voix qui se soucie de sa sécurité (« cédez le passage »), qui lui donne des consignes formelles (« interdit au public ») est une voix qui peut punir si on ne lui obéit pas (amende, emprisonnement ou toute autre sanction).</p>
<p>Cette puissance résulte de la fusion de la légitimité du droit et de l’efficacité managériale. Peu importe alors ce qu’on écrit et même si cela est lu : l’obéissance est acquise.</p>
<p>Pour les entreprises, ce pouvoir de la typographie constitue un atout magistral : le contenu est indifférent, la consigne sera transmise par la police et suivie à la lettre par les employés ou les clients. Diverses expériences menées en marketing ont montré qu’en changeant simplement la police de caractères sur une affiche (sans modifier produit, prix et argumentaire), les consommateurs pouvaient juger ce produit moins cher, plus propre ou plus à la mode. Sur la devanture d’un magasin, le panneau « entrée libre » provoque plus de trafic s’il est rédigé en Helvetica.</p>
<h2>Un levier stratégique</h2>
<p>La manière dont Helvetica peut faire naître des conduites a été illustrée de façon concrète par un affrontement commercial dans lequel une victoire juridique est demeurée sans effet.</p>
<p>Sous la férule de Steve Jobs, l’apparition des premiers ordinateurs Apple a apporté de multiples changements majeurs pour l’informatique, notamment sur la manière même de concevoir l’interface avec l’utilisateur (les icônes, la souris, etc.). Parmi ces innovations figure le fait que les Macintosh offraient une large palette de choix de polices de caractères (Geneva, New York, Chicago, etc.), ce qui ne s’était encore jamais vu – la typographie passait pour la première fois aux mains de non-initiés.</p>
<p>La sensibilité de Steve Jobs sur cette question est notoire, ainsi que son érudition – il avait ainsi délibérément refusé que la police du système d’exploitation initial soit Helvetica, qui incarnait à ses yeux la guerre du Vietnam (car les entreprises finançant l’effort militaire l’employaient toutes).</p>
<p>Le système d’exploitation d’Apple utilise donc Lucida Grande comme police de base jusqu’à la naissance d’une nouvelle révolution Apple, l’iPhone, pour lequel la police principale a été modifiée, remplacée de façon inattendue par Helvetica. Cette décision a été prise avec l’assentiment de Steve Jobs.</p>
<p>Orange bénéficiera d’un contrat de distribution exclusive, garantissant au distributeur de téléphonie un chiffre d’affaires record. Ses concurrents ont contesté devant la justice l’accord d’exclusivité, avec succès. Pour autant, de façon incompréhensible pour Bouygues et SFR, leurs ventes sont restées très en deçà de celles de leur rival : sur l’écran de leur iPhone, les consommateurs voulaient le logo d’Orange et rien d’autre – ils ne le savaient pas, ne l’exprimaient pas, mais seule cette option leur apportait satisfaction.</p>
<p>Il s’avère que le logo d’Orange est dessiné en Helvetica maigre sur fond noir (comme la police système d’Apple) et qu’il était le seul à ne pas rompre l’esthétique d’un téléphone acheté d’abord et avant tout dans une logique d’ostentation. Helvetica criait à tous « achetez un iPhone chez Orange et nulle part ailleurs ! ». Dont acte, puisqu’en 2010, 60 % des utilisateurs d’iPhone étaient clients d’Orange.</p>
<p>L’ordre vient avant le langage, il est dans la règle de grammaire ; le message vient avant le texte, il est dans le choix de la police de caractères, qui charrie son histoire, son origine, ses usages et tous les messages antérieurs. La règle de grammaire dicte la conduite, la police gouverne le comportement de l’employé, du consommateur, du lecteur. Mais aussi celui de l’électeur : il faudra s’en souvenir dans les mois qui viennent, quand la campagne présidentielle couvrira les murs de nos villes d’affiches aux polices variées.</p>
<hr>
<p><em>Cette contribution est tirée du chapitre intitulé « Soumettre le sujet à la norme : les mots d’ordre du management », publié par l’auteur dans l’ouvrage « Deleuze face à la norme », paru en mai 2023, dirigé par Jacqueline Guittard, Émeric Nicolas et Cyril Sintez, aux <a href="https://www.mareetmartin.com/livre/deleuze-face-a-la-norme">éditions Mare et Martin</a>, avec leur aimable autorisation</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/170648/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Joan Le Goff ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ce que disent les entreprises compte parfois moins que comment elles le disent. Le choix de la police typographique est un redoutable facteur d’influence des comportements des employés et des clients.Joan Le Goff, Professeur des universités en sciences de gestion, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1687282021-09-27T20:43:33Z2021-09-27T20:43:33ZPSG–Manchester City : si loin du Golfe, si proche du Golfe<p>Dans l’arène du football européen, les affrontements entre le Paris Saint-Germain et Manchester City, comme ce mardi soir dans le cadre de la phase de poules de Ligue des Champions ou la saison dernière en demi-finales de cette même compétition, apparaissent désormais comme une sorte de marronnier.</p>
<p>Les rencontres opposant ces deux clubs, détenus respectivement par des fonds souverains du Qatar et d’Abu Dhabi, émirat moteur de la fédération des Émirats arabes unis, donnent systématiquement lieu à des rappels de la confrontation géopolitique de leurs puissants propriétaires. Cette mise en scène de l’événement mérite toutefois d’être questionnée.</p>
<h2>Le théâtre sportif, une mise en scène de la conflictualité</h2>
<p>« Le Qatar est arrivé, puis ils ont fui tête baissée » (« ils » sous-entendant ici les Émiriens) – <em>ḥaḍara al-qaṭary farḥāw waṭy</em> : en ce 30 janvier 2019, ces mots trônent en une de l’édition sportive d’un des principaux quotidiens qatariens, <em>Al-Waṭan</em>. Une photo où les joueurs d’<em>Al-’Annābi</em> – la bordeaux, surnom donné à la sélection du Qatar – laissent éclater leur joie illustre ce propos aux accents nationalistes.</p>
<p>Sur fond de <a href="https://orientxxi.info/va-comprendre/pourquoi-le-qatar-est-il-la-cible-d-une-offensive-de-ses-voisins-du-golfe,2322">crise diplomatique entre les Émirats arabes unis et le Qatar</a>, à Abu Dhabi, l’équipe qatarienne <a href="https://www.sofoot.com/le-qatar-rejoint-le-japon-en-finale-de-coupe-d-asie-465449.html">vient de battre 4-0 le pays hôte de la Coupe d’Asie des nations</a>. Disputée dans une ambiance électrique, que l’on peut même qualifier de délétère, marquée notamment par des jets de chaussures subis par les joueurs qatariens lors des célébrations de leurs buts, cette rencontre a marqué les esprits au-delà du Golfe. L’image est d’autant plus forte que le Qatar gagne dans une enceinte qui porte le nom de Mohammed bin Zayed Al-Nahyan, <a href="https://orientxxi.info/magazine/pour-mohamed-ben-zayed-l-autoritarisme-est-l-avenir-du-proche-orient,3578">prince héritier d’Abu Dhabi</a>, l’un des principaux artisans de l’embargo subi par Doha à partir de juin 2017.</p>
<p>Au mois d’avril 2021, loin du stade Mohammed bin Zayed, le PSG et Manchester City doivent se rencontrer lors d’une demi-finale de Ligue des champions. À travers cette rencontre, c’est en quelque sorte encore une demi-finale entre le Qatar et son rival historique Abu Dhabi qui se profile. Du moins, c’est le récit qu’en livrent une grande partie des médias européens, et c’est sous cette forme que ce match au sommet est présenté.</p>
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<p>Sur le papier, cette mise en récit de l’événement n’a rien de choquant : les deux structures participent pleinement de la politique d’influence des deux émirats. Cependant, lorsque l’on regarde la construction de cette politique au vu de la géopolitique du Golfe à l’échelle mondiale, une déclinaison du système s’opère autour des différentes échelles tant locale que régional ou mondiale.</p>
<p>L’analyse géographique permet de différencier les niveaux sportifs au service de la puissance ; cette focale aide à décrypter les temporalités de leur formation ainsi que leurs objectifs.</p>
<h2>Un mouvement sportif local, rouage du pouvoir</h2>
<p>Au cours des années 1970, dans le cadre de la consolidation des structures étatiques des monarchies du Golfe, dont la plupart ont accédé à leur indépendance entre 1961 et 1971, une période marquant la fin des protectorats britanniques, le domaine sportif local connaît une phase d’institutionnalisation.</p>
<p>Émanation des canaux de puissance économiques du pouvoir, des fédérations sportives et un réseau de clubs se forment sous la conduite de puissantes personnalités. Au Qatar, la réorganisation de cet espace se déroule sous la direction de l’influent ministre de l’Éducation et de la Jeunesse, cheikh Jassim bin Hamad bin Abdallah Al-Thani. À cette même période, dans l’ensemble de la région, les sélections nationales de football voient le jour. Les monarchies du Golfe perçoivent dans le sport un facteur de modernité <a href="https://docspike.com/embed/nation-identite-nationale-et-sport_pdf.html">qui favorise le sentiment d’unité</a> autour de la figure du souverain.</p>
<p>C’est dans ce contexte que la sélection espoirs du Qatar atteint la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=k_Hd_I1HK_s">finale de la Coupe du monde de football des moins de 20 ans</a>, à Sydney, en <a href="https://www.fifa.com/fr/tournaments/mens/u20worldcup/australia1981">1981</a>. Un an plus tard, c’est au tour du Koweït de participer à sa première Coupe du monde, en Espagne. En 1990, en Italie, les <em>Iyāl Zāyed</em> – les enfants de Zayed, surnom de la sélection émirienne en référence au « père fondateur » des EAU, Zayed Bin Sultan Al-Nahyan – prennent part pour la première, et à ce jour, unique fois de leur histoire à la Coupe du monde.</p>
<p>Héritage de cette période, les sélections et clubs restent des organes de l’appareil étatique. Ils apparaissent comme des manifestations du système d’État-providence vouées à donner de la visibilité au pouvoir. Ils sont rattachés de ce fait à des enjeux de pouvoir locaux, et ancrés dans le tissu social régional.</p>
<p>Cette contextualisation explique la <a href="https://orientxxi.info/magazine/le-football-dans-le-golfe-a-l-epreuve-de-la-crise-avec-le-qatar,2413">place que revêt le sport sur la scène golfienne tout au long de la récente crise diplomatique</a>. D’ailleurs, le 8 décembre 2020, à Doha, en signe d’un début d’apaisement avec les différents pays en conflit avec le Qatar, l’émir Tamim Bin Hamad Al-Thani <a href="https://staddoha.com/en/gulf-cup/amir-crowns-gulf-cup-champions-bahrain/">remet personnellement au capitaine de la sélection bahreïnienne le trophée de champion du Golfe arabe de football</a>.</p>
<h2>PSG et Manchester City : des clubs satellites fabriques d’une image apolitique, aux dessous politiques</h2>
<p>Loin de Doha et d’Abu Dhabi, le PSG et Manchester City, qui font depuis des années appel à de grands noms du football international pour donner vie à leur projet sportif, s’érigent comme des satellites vitrines de ces deux capitales et comme des rouages de leur politique étrangère. Ils sont présidés par des personnalités appartenant aux premiers cercles du pouvoir, respectivement Nasser Al-Khelaïfi et Khaldoon Al-Mubarak, en charge du développement du versant mondial de la stratégie sportive de leurs émirats respectifs. Pensés comme des leviers d’action, ils témoignent de la volonté de ces deux protagonistes d’accroître leur stature internationale. Outils d’influence, ils offrent au Qatar et à Abu Dhabi l’opportunité d’être maîtres de leur communication et participent de la fabrique marketing associée à leur nom.</p>
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<figcaption><span class="caption">Les joueurs du PSG sont fréquemment mis en scène au Qatar mais l’accent est surtout mis sur le tourisme.</span></figcaption>
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<p>Pour autant, ces objets de <em>branding</em>, bien qu’ils soient le résultat d’une équation géopolitique au sein de laquelle s’agrègent deux émirats de petite superficie, faibles démographiquement mais puissants grâce à leur production d’hydrocarbures, ancrés dans une région conflictuelle – quatre facteurs qui les conduisent à mener une politique d’influence ambitieuse –, sont déconnectés des dynamiques géopolitiques internes à cet espace régional. Derrière le flot d’images, ces institutions apparaissent avant tout centrées sur la diversification de leurs partenariats. Cependant, en arrière-plan des traits socio-culturels rattachés au Golfe émergent dans la gestion de ces deux entités telle une compétition entre cheikhs qui s’inscrit dans le système originel tribal.</p>
<p>Au travers de ces clubs, c’est une image apolitique qui est déclinée, comme si ces émirats se délestaient d’une partie de leur réalité socio-politique. Comme en témoignent la taille modeste de la boutique du PSG au <em>Villagio</em>, <em>mall</em> de la périphérie de Doha, ou le faible intérêt des presses qatarie et émiratie envers la demi-finale de Ligue des Champions entre Manchester City et le PSG, se limitant à de simples résumés de la rencontre, ces clubs ne sont pas investis par les palais comme des objets ayant trait au développement d’une quelconque fierté nationale.</p>
<p>De plus, les passionnés de football du Golfe possèdent souvent une équipe de cœur, parfois un joueur, qu’ils supportent sur la scène européenne en fonction de leur prestige. Leur appétence pour le football anglais ou espagnol les amène généralement à se tourner vers les grandes écuries de ces championnats qui possèdent un palmarès fourni.</p>
<p>Loin des divergences régionales décuplées par leurs postures adoptées lors de la récente séquence ouverte, en 2011, par les soulèvements arabes, le football européen ne représente pas un espace dans lequel les pouvoirs en présence expriment leurs oppositions.</p>
<p>Le Qatar cherche à être puissant au sein du sport mondial pour conforter la place de son <em>hub</em> sportif à l’échelle internationale, l’objectif étant pour lui de gagner en influence au-delà du sport. L’émirat d’Abu Dhabi aspire quant à lui, derrière l’image sportive, à accroître ses réseaux économiques. Le PSG ainsi que le City Football Group font pleinement partie de ces stratégies.</p>
<p>À partir de l’objet global qu’ils conçoivent à travers leur propriété européenne (PSG) et mondiale (City Football Group), le Qatar et Abu Dhabi s’adressent à un public international déconnecté des réalités géopolitiques ayant trait au Golfe. Il serait surtout bien trop risqué de porter atteinte à leurs outils de <em>branding</em>.</p>
<h2>Une lutte d’influence cantonnée aux coulisses</h2>
<p>Seul un épisode a eu le don d’exposer les divisions régionales au grand jour, au cœur de l’enceinte sportive européenne : les velléités de l’Arabie saoudite d’investir dans le football anglais. L’annonce de ce projet, puis l’approche de l’acquisition du Newcastle United Football Club par l’un de ses fonds souverains, le <em>Public Investment Fund (PIF)</em>, se sont entrechoquées avec <a href="https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2018/05/24/au-moyen-orient-la-chaine-qatarie-bein-sports-cible-d-un-piratage-geopolitique_5303870_3236.html">l’affaire BeOutQ</a>, du nom d’un bouquet de dix chaînes sportives retransmises dans le monde entier grâce au piratage de la chaîne sportive qatarienne <em>Bein sport</em>.</p>
<p>À la suite de cette manœuvre, les soupçons du Qatar se sont très vite dirigés vers Riyad. Plusieurs enquêtes conduites par Doha avec le concours de sociétés américaines menaient à Riyad et remontaient même jusqu’à des proches du prince héritier, Mohammed bin Salman Al-Saoud.</p>
<p>S’attaquer à <em>Bein Sport</em>, rouage financier majeur de la politique d’influence du Qatar, n’était pas anodin : cela représentait une offensive déstabilisatrice d’ampleur à l’encontre de Doha. Le royaume saoudien avait beau nier son implication, l’annonce de son arrivée éminente à la tête d’un club de <em>Premier League</em>, compétition dont <em>Bein Sport</em> possède une partie des droits télévisés, représentait pour Doha un levier d’action pour faire pression sur les décideurs de cette même <em>Premier League</em> qui devaient donner leur aval avant la reprise de Newcastle United FC par ces nouveaux actionnaires.</p>
<p>Un levier qui s’est avéré fructueux puisque les multiples tentatives de reprise menées par la femme d’affaires britannique Amanda Staveley, missionnée par le PIF, ont été rejetées, contraignant l’Arabie saoudite à revoir ses plans. Cette confrontation est ainsi restée cantonnée aux coulisses du football anglais et demeure, jusqu’à présent, la seule passe d’armes de ce type recensée au sein du football européen, centre du football mondial.</p>
<p>Du Golfe à l’arène européenne, le sport laisse apparaître une superposition des typologies de puissances. À la puissance horizontale qui structure les sociétés des pétromonarchies du Golfe, à partir des années 1970, comme une émanation de leurs systèmes d’État-providence, s’ajoute, dans les années 2000, l’édification d’une puissance verticale par l’intégration de circuits du sport mondial à leurs agendas politiques, dans le but d’étendre leur influence aux réseaux de la mondialisation. Au centre du jeu, les pouvoirs orchestrent cette partition ; ces deux niveaux n’influent toutefois pas l’un sur l’autre.</p>
<p>Cependant, plus les rouages composant la strate verticale de la puissance prennent corps au sein de l’espace golfien, plus la frontière entre ces deux niveaux est ténue. Les crispations suscitées par l’attribution de la Coupe du monde 2022 au Qatar en ont été un exemple au niveau régional. Loin du Golfe, au cœur de la vitrine européenne, la confrontation Manchester City-PSG demeure quant à elle épargnée par les rivalités opposant leurs propriétaires.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/168728/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raphaël Le Magoariec a reçu des financements de l'organisation.
-Bourse de soutien à la recherche de terrain de l'IHEDN, 2020.</span></em></p>Les affrontements PSG-Manchester City sont souvent vus comme un miroir de l’affrontement géopolitique de leurs propriétaires, le Qatar et Abu Dhabi. La réalité est plus complexe.Raphaël Le Magoariec, Chercheur doctorant en géopolitique, spécialiste des sociétés de la péninsule Arabique et du sport, CITERES-EMAM, Université de ToursLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1592782021-05-05T17:56:46Z2021-05-05T17:56:46ZDepuis quand note-t-on les vins ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/398902/original/file-20210505-21-1jnksya.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Steven Spurrier dans la cave de sa maison du Dorset, août 2020</span> <span class="attribution"><span class="source">Lucy Pope </span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Steven Spurrier est mort le 9 mars dernier. Son nom ne vous dit probablement rien, et pour cause : sa mort est passée presque inaperçue dans les médias hexagonaux. Alors que dans la presse anglophone, les hommages et les superlatifs pleuvent : <a href="https://www.forbes.com/sites/johnmariani/2021/03/09/steven-spurrier-international-wine-legend-dies-at-79-judgement-of-paris/">« légende »</a>, <a href="https://www.thedrinksbusiness.com/2021/03/great-man-of-wine-steven-spurrier-dies-at-home/">« Grand homme du vin »</a>, <a href="https://www.latimes.com/obituaries/story/2021-03-19/steven-spurrier-vintner-napa-valley-wines-blind-tasting-dies">« visionnaire »</a>. Si les médias français en ont si peu parlé, c’est parce que Steven Spurrier a été à l’origine d’un évènement qui a eu une répercussion plutôt négative pour notre industrie vitivinicole.</p>
<p>Steven Spurrier est un négociant en vins britannique venu s’établir à Paris en 1970. Alors âgé de 29 ans, il ouvre La Cave de la Madeleine. Trois ans plus tard, il fonde l’Académie du Vin (Wine Academy) avec l’aide de John Winroth (correspondant en vins pour le <em>International Herald Tribune</em>) et de Patricia Gallagher. Mais on retiendra surtout le nom de Steven Spurrier car il est à l’origine d’une dégustation à l’aveugle qui deviendra célèbre, au grand dam des producteurs de vin français.</p>
<h2>Le Jugement de Paris : la dégustation qui a changé le monde du vin</h2>
<p>En 1976, à l’occasion de la célébration du bicentenaire de l’indépendance américaine, Steven Spurrier organise une dégustation de vins californiens à l’Hôtel Intercontinental de Paris. Pour rendre la dégustation plus attractive, il a une idée qui va tout changer. Ses douze vins californiens seront en compétition, à l’aveugle, avec huit grands vins français – de Bordeaux pour les Cabernet Sauvignon et de Bourgogne pour les Chardonnays.</p>
<p>Les neuf juges présents sont tous des experts français reconnus : Odette Kahn, rédactrice en chef de la <a href="https://www.larvf.com/"><em>Revue du vin de France</em></a>, Aubert de Villaine, copropriétaire du <a href="http://www.romanee-conti.fr/">Domaine de la Romanée-Conti</a>, Pierre Tari, secrétaire général de l’association des Grands Crus Classés, Raymond Oliver, chef et propriétaire du restaurant le <a href="https://www.grand-vefour.com/">Grand Véfour</a>, Jean‑Claude Vrinat, propriétaire du restaurant le <a href="https://letaillevent.com/fr/">Taillevent</a>, Christian Vannequé, chef sommelier du restaurant <a href="https://tourdargent.com/">La Tour d’Argent</a>, Pierre Bréjoux, inspecteur général de l’<a href="https://www.inao.gouv.fr/">INAO</a>, Michel Dovaz, de l’Institut du Vin, Claude Dubois-Millot, directeur commercial du guide <a href="https://fr.gaultmillau.com/"><em>Gault & Millau</em></a>. Tous se prêtent au jeu, confiants de la supériorité des vins français sur les vins californiens. Chacun note les vins sur une échelle de 20 points selon 4 critères (couleur, nez, bouche, équilibre) établis à l’avance.</p>
<p>Quand Steven Spurrier révèle les résultats, à la surprise générale deux vins californiens arrivent en tête : <a href="https://www.stagsleap.com/">Stag’s Leap Wine Cellar</a> 1973 pour les rouges (devant les Châteaux Mouton Rothschild, Haut Brion et Montrose) et Chateau <a href="https://montelena.com/">Montelena</a> 1973 pour les blancs. Incompréhensible pour les jurés qui vivent le moment comme une humiliation.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/398887/original/file-20210505-21-bu11mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/398887/original/file-20210505-21-bu11mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=290&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/398887/original/file-20210505-21-bu11mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=290&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/398887/original/file-20210505-21-bu11mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=290&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/398887/original/file-20210505-21-bu11mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=364&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/398887/original/file-20210505-21-bu11mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=364&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/398887/original/file-20210505-21-bu11mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=364&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le Jugement de Paris, en 1976, a changé la donne en matière d’évaluation des vins.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bella Spurrier</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>La presse française ne relaie pas les résultats de la compétition. Le seul journaliste présent – américain qui plus est – ne publie qu’un court <a href="https://web.archive.org/web/20080213220351/http:/www.time.com/time/magazine/article/0%2C9171%2C947719%2C00.html">article</a> plus d’une semaine après la dégustation. Si les répercussions ne sont pas immédiates, le Jugement de Paris marque l’émergence des producteurs de vins hors du continent européen. Ces derniers se savent désormais capables de supplanter les vins français, alors considérés comme les meilleurs du monde. Le Jugement de Paris élève à la fois la conscience viticole, le patriotisme et la demande de vins américains. Le public américain souhaite s’initier au vin, mais comment choisir les meilleurs vins parmi les milliers de références disponibles en ne s’appuyant que sur d’obscurs commentaires d’experts ?</p>
<h2>L’innovation évaluative, clef de la démocratisation du vin</h2>
<p>La véritable innovation est souvent une question de format et de présentation permettant des évaluations plus intelligibles, plus décisives et plus critiques. Cela se fait fréquemment en complétant ou en remplaçant les descripteurs qualitatifs (commentaires de dégustations) par des évaluations chiffrées. Ce type de système de notation du vin est compréhensible quelle que soit la langue parlée, devenant le premier système d’évaluation véritablement international : aucun vocabulaire du vin n’est nécessaire pour comprendre instantanément et intuitivement la notation standardisée et identifiable, de 50 à 100. Il est également plus facile pour les détaillants en vin d’afficher des chiffres (entre 90 et 100) que des descriptions exhaustives des vins dans leurs magasins et en ligne.</p>
<p>À une époque où la plupart des notations utilisent le système d’étoiles inspiré du symbole de qualité du <a href="https://guide.michelin.com/fr/fr"><em>Guide Michelin</em></a>, le jeune critique Robert Parker est parmi les premiers à attribuer une note chiffrée aux vins à la fin des années 1970 dans son guide d’achat du vin : le <a href="https://www.robertparker.com/"><em>Wine Advocate</em></a>. Son évaluation performative de la qualité des vins sur une échelle de 100 points – copiée sur le système scolaire américain – vise à fournir aux non-initiés un moyen de comparer la valeur réelle d’un vin par rapport aux autres par un moyen autre que le prix. Dans le <a href="https://www.robertparker.com/about/ratings">système de notation de Parker</a>, les vins se voient attribuer des points pour les qualités qu’on leur trouve plutôt que de se voir retirer des points pour des défauts détectés. Robert Parker détaille de manière transparente la structure de l’échelle de 100 points comme une évaluation presque scientifique. Chaque vin a une base de 50 points, la couleur et l’aspect méritent jusqu’à 5 points, l’arôme et le bouquet méritent jusqu’à 15 points, la saveur et la longueur en bouche méritent jusqu’à 20 points et le niveau de qualité global ou le potentiel de vieillissement méritent jusqu’à 10 points.</p>
<p>Le système de notation à 100 points a été rapidement adopté d’abord par des publications américaines concurrentes comme le <a href="https://www.winespectator.com/"><em>Wine Spectator</em></a> – en 1980 – et finalement dans le monde entier par la plupart des critiques de vin influents, devenant une <a href="https://www.larvf.com/des-notes-de-degustation-sur-100,4705561.asp">norme mondiale</a> dans l’industrie du vin jusqu’à aujourd’hui. Il existe quelques exceptions, notamment au Royaume-Uni, où la critique <a href="https://www.jancisrobinson.com/how-we-score">Jancis Robinson</a> attribue des notes sur une échelle de 0 à 20 (copiée sur le système scolaire britannique). Mais le plus souvent des <a href="https://www.decanter.com/learn/how-to-read-decanter-wine-scores-the-100-point-scale-294338/">grilles de correspondances</a> sont fournies pour pouvoir les convertir sur une échelle de 100. Pour ses détracteurs ce système de notation ne permet pas de rendre compte de la complexité des vins et mènent droit à une homogénéisation des styles de vins.</p>
<h2>Le vin plaisir</h2>
<p>L’innovation évaluative des années 1970 a marqué le passage à une manière de parler du vin de plus en plus mondialisée, moins technique et plus axée sur le plaisir. Les informations sur la qualité des vins fins et leur évaluation professionnelle ont joué un rôle majeur dans la formation des tendances actuelles de consommation. À bien des égards, l’émergence de l’industrie vinicole américaine repose sur l’existence d’un système de classification généré par les critiques qui aide les nouveaux consommateurs à s’y retrouver dans la complexité des produits et à apprécier le vin. La transformation de l’industrie du vin, qui est passée d’une industrie axée sur la production à une industrie axée sur le marché, a accru la dépendance à l’égard des critiques. Le vin reste à ce jour le seul produit alimentaire dont l’évaluation de la qualité est chiffrée.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/159278/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Magalie Dubois ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’innovation évaluative des années 1970 a marqué le passage à une manière de parler du vin de plus en plus mondialisée, moins technique et plus axée sur le plaisir.Magalie Dubois, Doctorante en Economie du vin, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1522092020-12-20T21:53:03Z2020-12-20T21:53:03ZRupture du contrat entre Antoine Griezmann et Huawei : les célébrités sont aussi des marques<p>Le 10 décembre 2020, le footballeur français Antoine Griezmann a annoncé à sa communauté de 31,8 millions d’abonnés sur Instagram mettre fin à son engagement contractuel (de quatre ans, et en négociation pour être prolongé de deux années supplémentaires) avec la marque chinoise de smartphones Huawei, soupçonnée de participer à la surveillance de la communauté musulmane des Ouïgours en Chine.</p>
<p>Dans son post, signé et logoté, le champion du monde 2018 écrit :</p>
<blockquote>
<p>« Suite aux forts soupçons selon lesquels l’entreprise Huawei aurait contribué au développement d’une alerte Ouïgour grâce à un logiciel de reconnaissance faciale, j’annonce que je mets un terme immédiat à mon partenariat me liant à cette société. J’en profite pour inviter Huawei à ne pas se contenter de nier ces accusations mais à engager au plus vite des actions concrètes pour condamner cette répression de masse et user de son influence pour contribuer au respect des droits de l’homme et de la femme au sein de la société ».</p>
</blockquote>
<p>Si les exemples de résiliation sont légion, elles concernent généralement l’entreprise qui rompt le contrat en raison des agissements des personnalités, comme nous l’avions montré dans notre ouvrage <a href="https://www.dunod.com/entreprise-economie/marketing-et-celebrites-medaille-academie-sciences-2014"><em>Marketing et Célébrités</em></a> paru aux Éditions Dunod en 2014. Par exemple, le golfeur Tiger Woods a perdu plusieurs contrats à la suite des révélations de ses multiples adultères en 2009. En 2012, le cycliste Lance Armstrong était à son tour <a href="https://www.lemonde.fr/sport/article/2012/10/17/nike-lache-armstrong-qui-ne-preside-plus-sa-fondation-contre-le-cancer_1776861_3242.html">lâché par de nombreux sponsors</a> après que l’agence américaine d’anti-dopage l’ait convaincu de dopage.</p>
<h2>Une initiative rare chez les célébrités</h2>
<p>Les cas de célébrités qui renoncent à un contrat de sponsoring pour des raisons éthiques restent en revanche beaucoup plus rares. En général, les personnalités dénoncent plutôt des agissements d’entreprises auxquelles elles ne sont pas liées à travers des campagnes qui peuvent aller jusqu’au boycott.</p>
<p>Par exemple, en septembre 2020, plusieurs stars américaines (parmi lesquelles Kim Kardashian, Leonardo DiCaprio et Jennifer Lawrence) ont décidé de ne plus <a href="https://www.ouest-france.fr/high-tech/instagram/kim-kardashian-leonardo-dicaprio-et-d-autres-celebrites-appelle-au-boycott-d-instagram-6974650">rien publier sur Instagram et Facebook pendant 24 heures</a>, se faisant le relais d’associations accusant les réseaux sociaux de participer à la diffusion de contenus haineux et mensongers.</p>
<p>Dans le cas de « Grizou », rappelant celui du chanteur canadien The Weeknd, qui avait brusquement <a href="https://www.20minutes.fr/mode/2198731-20180109-the-weeknd-stoppe-collaboration-h-apres-polemique-raciste">stoppé sa collaboration</a> avec la marque de vêtements H&M, début 2019, après la mise en vente d’un sweat porté par un enfant sur lequel était inscrit « Coolest monkey in the jungle » (« le singe le plus cool de la jungle »), on peut néanmoins s’interroger sur l’intention du geste, entre engagement responsable et stratégie de communication.</p>
<p><div data-react-class="InstagramEmbed" data-react-props="{"url":"https://www.instagram.com/p/CInqQ5-ptdP","accessToken":"127105130696839|b4b75090c9688d81dfd245afe6052f20"}"></div></p>
<p>En effet, les célébrités deviennent aussi des marques en développant sur la base de leur notoriété et de leur image un « capital-marque », mais aussi du point de vue de la pratique et du business, en développant des entreprises portant leur nom, à l’instar du <a href="https://www.forbes.com/sites/steveolenski/2018/04/02/brands-branding-and%20celebrities/?sh=32e560724db9">basketteur Michael Jordan</a>.</p>
<p>De ce fait, en s’associant à une autre entité commerciale à travers la signature d’un contrat d’endossement, ces « marques-célébrités » sont susceptibles de bénéficier d’attributs reliés à son partenaire (être ambassadeur de Rolex apporte à la star un certain prestige). Et bien évidemment, ces associations d’images peuvent s’avérer négatives et donc nuire à la marque de la célébrité, soudain embarrassée d’être potentiellement associée à des accusations de racisme, de sexisme, d’espionnage ou autres frappant leur sponsor.</p>
<p>C’est ce qui était arrivé à l’acteur George Clooney, ambassadeur de Nespresso, qui avait <a href="https://www.bfmtv.com/people/clooney-surpris-et-attriste-par-un-reportage-accusant-nespresso-de-faire-travailler-des-enfants_AN-202002260074.html">manifesté son mécontentement</a> après la révélation, en février dernier, de certaines conditions de travail dans un documentaire de la chaîne britannique Channel 4 : Nespresso y était accusée d’avoir recruté de très jeunes enfants pour travailler six jours par semaine à raison de huit heures par jour dans des fermes au Guatemala.</p>
<p>Antoine Griezmann apparaît à la foi comme un sportif à la fois engagé et très « bankable », ce qui n’est pas forcément antinomique. Dans un sport très souvent critiqué en raison des mauvais comportements des joueurs, le joueur du FC Barcelone se situe dans la lignée d’une tendance, pas forcément nouvelle, de footballeurs engagés dont l’écho et la résonance des messages sur les réseaux sociaux sont puissants.</p>
<p>Du buteur ivoirien Didier Drogba, <a href="https://www.undp.org/content/undp/fr/home/goodwill-ambassadors/didier_drogba.html">ambassadeur de bonne volonté</a> du programme des Nations unies pour le développement et président d’une fondation portant son nom dont la santé, la femme, l’éducation et les enfants sont les priorités, au jeune <a href="https://www.elle.fr/Societe/News/Marcus-Rashford-le-footballeur-qui-lutte-contre-la-pauvrete-infantile-3890842">Marcus Rashford</a>, extrêmement investi pour la lutte contre la pauvreté et influent jusqu’au gouvernement britannique, en passant par la star Cristiano Ronaldo qui a fait <a href="https://sport24.lefigaro.fr/scan-sport/actualites/coronavirus-cristiano-ronaldo-et-son-agent-financent-trois-unites-de-soins-intensifs-997634">don de trois unités de soin</a> à des hôpitaux portugais pour les aider à faire face à la pandémie de coronavirus, les sportifs n’hésitent plus à s’engager en « offrant » aux différentes causes une visibilité médiatique et/ou des dotations financières ou matérielles. </p>
<h2>Une nouvelle crise pour Huawei</h2>
<p>Chez Antoine Griezmann, sans que cela soit une critique, tout semble toujours très marketé, de la moindre célébration de but (l’une d’entre elles reprenait les codes du jeu vidéo Fortnite), aux changements fréquents de coiffure (à l’image du Britannique David Beckham dont Griezmann s’est visiblement beaucoup inspiré), en passant par la communication de ses choix de carrière. Ainsi, la sortie du documentaire dans lequel il annonce qu’il resterait à l’Atlético de Madrid, en pleine Coupe du monde 2018, faisait écho à la mise en scène télévisée de la « Decision » du basketteur américain LeBron James quand il quitta la franchise des Cleveland Cavaliers en 2010.</p>
<p>Se séparer de Huawei peut donc tout à fait être interprété à la fois comme un engagement courageux et sincère pour contribuer à médiatiser une cause peu connue du grand public et une action de communication pouvant améliorer son propre branding.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"983685662040903681"}"></div></p>
<p>Mais s’il est certain que le message de Griezmann donne un écho important auprès du grand public à une affaire qui aurait été moins ébruitée et commentée sans ce message Instagram, la marque chinoise a déjà été confrontée à la gestion de nombreuses polémiques à l’international liées à des <a href="https://www.zdnet.fr/actualites/face-aux-sanctions-americaines-huawei-se-dit-touche-mais-pas-coule-39910085.htm">soupçons d’espionnage</a> pour le compte du gouvernement chinois, et plus particulièrement aux États-Unis, allant au-delà d’une simple question d’image pour représenter un véritable enjeu diplomatique.</p>
<p>Dans le cas de Griezmann, l’entreprise chinoise s’est défendu en déclarant :</p>
<blockquote>
<p>« Nous ne développons pas d’algorithmes ou d’applications dans le domaine de la reconnaissance faciale, mais uniquement des technologies à usage général qui se <a href="https://www.journaldugeek.com/2020/12/10/huawei-alerte-ou%C3%AFgour-antoine-griezmann/">fondent sur les normes internationales</a> en matière d’apprentissage automatique et d’intelligence artificielle ».</p>
</blockquote>
<p>Quelle que soit la vérité, cette déclaration sera-t-elle suffisante pour dissiper les doutes ? En effet, un représentant de Huawei avait déclaré en 2017, lorsque le footballeur français était devenu l’ambassadeur de la marque : « Antoine Griezmann a la capacité à faire réagir sa communauté, c’est quelqu’un de naturel et direct, c’est ça qui nous intéresse ». Un argument qui peut désormais se retourner contre sa stratégie de communication.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152209/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Philippe Danglade ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En annonçant ne plus vouloir être sponsorisé par le fabricant chinois de smartphones, le footballeur français affirme son engagement pour la cause des Ouïgours tout en soignant son image.Jean-Philippe Danglade, Head of department, Kedge Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1330092020-11-11T17:31:35Z2020-11-11T17:31:35ZMartin, Aston Martin<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/364708/original/file-20201021-23-1926jp7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=9%2C2%2C1588%2C1061&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">James Bond (Daniel Craig) au volant d'une Aston Martin dans 'Mourir peut attendre'.</span> </figcaption></figure><p>James Bond, personnage de romans de Ian Fleming est devenu héros de cinéma en 1962, dans une saga cinématographique qui pèse plus de 7 milliards de dollars depuis sa création.</p>
<p>En 26 longs-métrages, la saga James Bond a évolué, traversant les époques et répondant aux attentes des spectateurs. Les derniers films de la saga, avec l’introduction en 2006 de Daniel Craig dans le rôle-titre, marquent une rupture. Le personnage apparaît à la fois plus robuste et plus fragile – plus proche de la formule du personnage telle qu’esquissée dans le roman original ; la tonalité s’assombrit. L’action et l’espionnage subsistent quand la comédie s’efface au profit du drame. Les films présentent un archétype narratif différent en s’articulant désormais autour d’une intrigue, d’un fil rouge. Ainsi le personnage commence-t-il chaque film avec les stigmates (physiques et psychologiques) du précédent.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/364710/original/file-20201021-21-17gh2jy.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/364710/original/file-20201021-21-17gh2jy.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=272&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/364710/original/file-20201021-21-17gh2jy.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=272&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/364710/original/file-20201021-21-17gh2jy.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=272&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/364710/original/file-20201021-21-17gh2jy.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=341&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/364710/original/file-20201021-21-17gh2jy.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=341&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/364710/original/file-20201021-21-17gh2jy.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=341&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Craig-Bond marque une rupture dans la saga.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>En 2006, lorsque Daniel Craig est choisi pour incarner James Bond, certains fans lancent un site Internet appelant au boycott de <em>Casino Royale</em>. Cependant, le mandat des quatre (et supputons cinq) films de Daniel Craig en tant que 007 s’assimile à… une mission accomplie tant au niveau commercial (<em>Casino Royale</em> et <em>Skyfall</em> sont parmi les plus gros succès d’une franchise) que critique (les cinq nominations aux Oscars de <em>Skyfall</em> ont presque doublé le total de nominations de la série entière et l’ère Daniel Craig comptabilise 3 oscars sur les 6 au total pour la saga).</p>
<p>L’ère Daniel Craig a emmené le personnage de Fleming vers de nouveaux horizons. La sortie de <em>Mourir peut attendre</em>, programmée au printemps prochain, est l’occasion d’analyser le rôle de la marque Aston Martin et la manière dont elle participe à la construction du personnage dans sa nouvelle version. La marque légitime Daniel Craig en tant que James Bond, participe à la pérennité du personnage, et devient partie prenante du mythe 007.</p>
<h2>Bond-Craig gagne ses galons</h2>
<p>Pour la première fois en 1964 dans <em>Goldfinger</em> (Hamilton), James Bond conduit une Aston Martin – modèle DB5 – à l’instar de son alter ego littéraire (<em>Goldfinger</em>, Ian Fleming, 1959). La DB5 apparaît dans huit longs-métrages de la saga – <em>Goldfinger</em>, <em>Opération Tonnerre</em> (Young, 1965), <em>GoldenEye</em> (Campbell, 1995), <em>Demain ne meurt jamais</em> (Spottiswoode, 1997), <em>Casino Royale</em>, <em>Skyfall</em>, <em>Spectre</em> et <em>Mourir peut attendre</em> – ; elle est successivement conduite par Sean Connery, Pierce Brosnan et Daniel Craig. James Bond et son Aston Martin forment une alliance légendaire. James Bond n’est pas vraiment James Bond sans son Aston Martin, car James Bond sans son Aston Martin est un cow-boy sans son cheval.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/364696/original/file-20201021-17-woen08.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/364696/original/file-20201021-17-woen08.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=283&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/364696/original/file-20201021-17-woen08.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=283&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/364696/original/file-20201021-17-woen08.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=283&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/364696/original/file-20201021-17-woen08.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/364696/original/file-20201021-17-woen08.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/364696/original/file-20201021-17-woen08.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Sean Connery, <em>Goldfinger</em>, 1964.</span>
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</figure>
<p>Dans le prologue de <em>Casino Royale</em>, l’agent britannique s’introduit dans une pièce réservée au personnel du casino : l’espace de télésurveillance. Bond visionne les images des caméras de l’hôtel à la recherche du visage de son ennemi. Celui-ci sort de sa voiture, une Aston Martin DB5. Ce James Bond débutant aperçoit la voiture via un écran interposé.</p>
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<span class="caption">L’apparition de l’Aston Martin DB5 dans <em>Casino Royale</em>.</span>
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<p>En plaçant le personnage dans la même situation que le spectateur de cinéma, le réalisateur distancie Daniel Craig du personnage de James Bond. Une mise en abyme habile pour signifier que l’acteur n’est pas encore « dans la place ». Néanmoins, l’agent identifie le véhicule, une « magnifique Aston Martin de 1964 » appartenant à Dimitrios, un terroriste lié au Chiffre. Plus tard, James Bond dispute une partie de poker avec son ennemi. Dans sa main, Dimitrios a un brelan de rois. Pour suivre Bond, il mise son Aston Martin DB5. James Bond suit et remporte la partie avec un brelan d’as. En sortant du Casino, il monte alors dans sa nouvelle voiture. Bond-Craig prend possession de son Aston Martin.</p>
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<p>Dans cette scène, la voiture ne fait pas partie de la panoplie fournie par le MI6. James Bond doit se battre pour gagner le droit d’être au volant de l’Aston Martin, la voiture mythique de son personnage. C’est un combat stratégique : lorsque Daniel Craig a été dévoilé comme étant le prochain acteur à porter le costume de Bond, les médias ont insisté sur son physique, bien plus athlétique que ses prédécesseurs. Nous aurions pu nous attendre à une scène d’action musclée, mais Martin Campbell conçoit au contraire une scène de tension psychologique. Ce contre-pied représente l’enjeu de la scène ; le nouveau Bond a gagné son Aston Martin au jeu et acquiert en même temps, une certaine légitimité. Daniel Craig gagne ses premiers galons de James Bond en remportant l’Aston Martin de Dimitrios. Un coup de poker pour la production : imposer un acteur très différent des standards et de l’imaginaire bondien, mais aussi pour le nouveau héros qui devient peu à peu le personnage.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/364698/original/file-20201021-23-1psm3a4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/364698/original/file-20201021-23-1psm3a4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/364698/original/file-20201021-23-1psm3a4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/364698/original/file-20201021-23-1psm3a4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/364698/original/file-20201021-23-1psm3a4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/364698/original/file-20201021-23-1psm3a4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/364698/original/file-20201021-23-1psm3a4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Bond-Craig pour la première fois au volant de l’Aston Martin DB5 dans <em>Casino Royale</em>.</span>
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<p>Si la scène de prologue dévoile la façon dont le protagoniste devient un Double-0. Dans l’esprit du spectateur, il n’est pas encore établi en tant que James Bond. Et en s’installant au volant de la DB5 d’Aston Martin, Daniel Craig gravit une marche symbolique vers son personnage. Ce placement de produit <a href="https://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=39871">peut être qualifié de narratif</a>, car il constitue à lui seul un nœud dramatique majeur et lance l’intrigue. Il est également qualifiant, l’Aston Martin insérée représente un attribut primordial et fondamental à la construction identitaire de James Bond et de son univers codé.</p>
<h2>Aston Martin bat des records</h2>
<p>Pour preuve, plus tard dans sa mission, et ayant gagné la confiance de « M », le MI6 lui confie une nouvelle voiture : une Aston Martin DBS, dernière génération. Ce nouveau modèle de la marque est dévoilé dans le film. Et si le nouveau visage de Bond doit convaincre en se surpassant dans son rôle (et dans les revenus économiques qu’il doit engendrer), sa voiture semble en symbiose, car elle bat, elle aussi des records : l’Aston Martin DBS réalise sept tonneaux consécutifs à 120 km/h, record mondial du plus grand nombre de tonneaux (selon le Guiness Book). La voiture en sort pulvérisée, mais réussit l’exploit de protéger l’agent qui sort indemne de cette impressionnante cascade. Comme l’armure d’un chevalier des temps modernes, la voiture est inséparable de 007. La DBS intervient également dans la séquence d’ouverture de <em>Quantum Of Solace</em>. James Bond/Daniel Craig débute sa vengeance au volant de ce modèle puissant dans une course poursuite qui met en avant les performances de la voiture. L’agent interprété par Daniel Craig s’est lié à jamais à Aston Martin et continue son association, pour ne pas dire son partenariat, dans les opus suivants.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/364699/original/file-20201021-17-17u7h8g.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/364699/original/file-20201021-17-17u7h8g.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/364699/original/file-20201021-17-17u7h8g.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/364699/original/file-20201021-17-17u7h8g.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/364699/original/file-20201021-17-17u7h8g.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/364699/original/file-20201021-17-17u7h8g.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/364699/original/file-20201021-17-17u7h8g.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les quatre modèles d’Aston Martin dans le film <em>Mourir peut attendre</em> (sortie prévue en avril 2021).</span>
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<p>Prochainement en salle, <em>Mourir peut attendre</em> comporte quatre modèles d’Aston Martin : la mythique DB5, l’Aston Martin V8 (similaire à celle du film de 1987 <em>Tuer n’est pas jouer</em>), la DBS Supperleggera (pilotée par le nouvel agent féminin 00 Nomi) et la Valhalla (révolutionnaire à moteur central). Aston Martin renforce sa présence filmique et confirme ainsi sa filiation avec la saga Bond en exposant dans le film des « <a href="https://www.astonmartin.com/fr/our-world/no-time-to-die">Aston Martin emblématiques d’hier, d’aujourd’hui et de demain</a> ».</p>
<h2>De la rupture au retour à la tradition</h2>
<p>Si Bond-Craig conduit une Aston Martin, la mise en scène du produit est en rupture avec celle des films précédents : la voiture n’est qu’une voiture, elle n’est pour une fois pas assortie de gadgets innovants. Il faut attendre <em>Skyfall</em> pour que le responsable de la section « Q » du MI6 qui invente et fournit les célèbres gadgets à 007 soit de retour. <em>Skyfall</em> est le film des 50 ans de la franchise cinématographique. Il sonne comme un hommage à la saga : le film fait écho au passé tout en faisant table rase. <em>Skyfall</em> cristallise cette tension entre le retour aux fondamentaux et le changement d’époque. Néanmoins, <em>Skyfall</em> et les films suivants conservent les acquis des six années précédentes : esprit sérieux et tonalité sombre sans pour autant renier l’héritage de la saga. Le film marque le retour de certains des éléments traditionnels – tels que les placements de produits gadgets – qui avaient disparu des précédents films avec Daniel Craig.</p>
<p>Dans le film, « Q » prévient Bond – et les spectateurs : « Vous vous attendiez peut-être à un stylo explosif ? On ne fait plus trop ce genre de gadgets de nos jours… ». Pourtant, l’Aston Martin mise en scène dans <em>Skyfall</em> (re)dévoile tous ses atouts. Comme l’originale de <em>Goldfinger</em>, elle est équipée de gadgets : deux mitraillettes dans le pare-chocs avant, des vis crève-pneus dans les essieux arrière, un siège éjectable pour passager hostile, une plaque d’acier anti-balles qui se dresse derrière la lunette arrière et un dispositif qui disperse de l’huile glissante pour semer une voiture en cas de poursuite. Si le stylo n’explose plus, la voiture (re)devient une arme comme au temps des premiers James Bond.</p>
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<p>Dans la dernière partie du film, les hommes de Silva font littéralement exploser la légendaire voiture ce qui provoque la colère, presque irrationnelle, de 007. Cribler son Aston Martin revient à le toucher au plus profond de lui. L’Aston Martin à gadgets fera toujours partie de James Bond même si elle vole en éclat dans le film : une scène visuellement impressionnante pour célébrer les 50 ans de 007.</p>
<p>Dans le film suivant, <em>Spectre</em>, la DB5 n’est qu’une carcasse avant d’être remise à neuf dans l’atelier de « Q ». À la fin de l’histoire, Bond choisit de quitter le MI6 plutôt que Madeleine. Avant de tirer sa révérence avec son nouvel amour au bras, il récupère son Aston Martin de 1964, la « dernière chose » dont il a besoin. Et l’histoire entre Aston Martin et 007 n’est pas terminée car Bond-Craig et sa célèbre monture seront de nouveau de la partie dans <em>Mourir peur attendre</em>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/364700/original/file-20201021-19-1ditknx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/364700/original/file-20201021-19-1ditknx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/364700/original/file-20201021-19-1ditknx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/364700/original/file-20201021-19-1ditknx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/364700/original/file-20201021-19-1ditknx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/364700/original/file-20201021-19-1ditknx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/364700/original/file-20201021-19-1ditknx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’explosion qui détruit la mythique Aston Martin DB5 dans <em>Skyfall</em>.</span>
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<h2>L’effet performatif du placement de produit</h2>
<p>La marque est inhérente à l’univers et au personnage de 007 et il est difficile de cerner si ce sont les films qui font la promotion d’Aston Martin ou si la marque sert à construire le film. Les deux entités se répondent, s’enchevêtrent et s’emboîtent dans une forme de symbiose sémantique. Le fan de James Bond a attendu trois films avant de retrouver un attribut essentiel à la saga : les produits truqués notamment l’Aston Martin-gadget-arme. Du point de vue du placement publicitaire, la présence du produit dans le film fonctionne comme un teaser : film après film, une attente se créée jusqu’au climax qui révèle l’indispensabilité et la suprématie du produit.</p>
<p>Plus encore, la sortie du prochain opus s’accompagne d’une annonce importante de la marque. Aston Martin décide, après une jachère de près de 55 ans, de reprendre la production de la DB5. Vingt-cinq unités produites et vendues chacune trois millions d’euros. Il ne s’agit pas d’une DB5 ordinaire, mais de la DB5 <em>de James Bond</em>. Créée en partenariat avec les producteurs des films, EON Productions, la voiture porte la dénomination de « DB5 Goldfinger Continuation » et dispose de certains gadgets utilisés dans les films : le générateur de fumigène, les supports de plaque d’immatriculation rotatifs, les butoirs de pare-chocs escamotables et le téléphone dans la porte conducteur.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/364701/original/file-20201021-17-i2oln7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/364701/original/file-20201021-17-i2oln7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/364701/original/file-20201021-17-i2oln7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/364701/original/file-20201021-17-i2oln7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/364701/original/file-20201021-17-i2oln7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=416&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/364701/original/file-20201021-17-i2oln7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=416&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/364701/original/file-20201021-17-i2oln7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=416&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Aston Martin relance la fabrication de la DB5 de James Bond.</span>
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<p>Aston Martin a bâti une opération de storytelling sur plusieurs années en s’inscrivant au cœur de la saga cinématographique. La marque brouille ainsi la frontière entre la fiction et le réel, entre l’identité de l’acteur et celle du personnage (Comme dans le spot publicitaire <a href="http://www.culturepub.fr/videos/heineken-daniel-craig-vs-james-bond/">« Daniel Craig VS James Bond »</a>, produit par Heineken (États-Unis, 2020), entre la voiture fictive et celle vendue en concession.</p>
<p>La nouvelle « DB5 Goldfinger Continuation » donne l’illusion au consommateur d’être un super agent ou, à défaut, d’être un consom’acteur. Les films 007 ont besoin de la marque pour immortaliser le personnage bondien. La marque a besoin des films pour pérenniser son prestige et la fascination qu’elle inspire. James Bond et Aston Martin, ou comment un placement de produit façonne une alliance indéfectible.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/133009/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Delphine Le Nozach ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La sortie de « Mourir peut attendre », programmée au printemps prochain, est l’occasion d’analyser le rôle de la marque Aston Martin et la manière dont elle participe à la construction du personnage.Delphine Le Nozach, Maître de conférences en Sciences de l'information et de la communication, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1472782020-10-05T21:50:41Z2020-10-05T21:50:41ZSilver, gold ou platinum ? Les trois clés du succès des statuts dans les programmes de fidélité<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/361031/original/file-20201001-17-1k4rnle.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C8%2C5463%2C3628&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les programmes de fidélité statutaires, longtemps l’apanage du secteur des voyages et des loisirs, sont aujourd’hui mis en place par des entreprises de plus en plus diverses.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/146791570@N05/32570918024">Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Les programmes de fidélité statutaires, qui ont longtemps été l’apanage du secteur voyage & loisirs (compagnies aériennes, hôtellerie, location de voiture, etc.), séduisent de plus en plus d’acteurs, jusqu’aux géants de la grande distribution.</p>
<p>La chaîne de cosmétiques Sephora a été une des premières entreprises à surfer sur la vague, avec un programme articulé autour de trois statuts (<em>white</em>, <em>black</em> et <em>gold</em>), ainsi que l’enseigne de café Starbucks (statuts <em>welcome</em>, <em>green</em> et <em>gold</em>) ou encore les magasins Printemps avec leur programme « Printania » qui classe ses clients en 4 statuts (<em>silver</em>, <em>rubine</em>, <em>gold</em> et <em>platinum</em>).</p>
<p>Contrairement aux programmes de « cagnotage » classiques et linéaires, le fonctionnement d’un programme statutaire repose sur une structure hiérarchique : les clients collectent des points, généralement en fonction de leur fréquence et valeur d’achat, qui leur permettent d’accéder à un certain statut.</p>
<p>Chaque statut est caractérisé par son propre barème de calcul et surtout des avantages spécifiques. Ce type de fonctionnement s’écarte de la logique du « one size fits all » (taille unique) et permet d’envisager des contenus relationnels plus intéressants.</p>
<p>Les statuts les plus élevés bénéficient ainsi des avantages les plus prestigieux : salons et événements VIP, caisses coupe file, facilités de paiement ou encore des services personnalisés. En liant la récompense au niveau de dépense (plus on dépense, mieux on est récompensé) le programme peut sembler plus équitable : chaque client est récompensé à sa juste valeur.</p>
<p>Par conséquent, les responsables du programme peuvent mieux gérer l’allocation des ressources entre « gros » et « petits » clients et accroître plus efficacement leur activité commerciale.</p>
<p>Mais en dépit de ces avantages, les programmes statutaires possèdent certains écueils… qu’il faut savoir éviter pour mieux tirer parti de leurs bénéfices. Dans cet article, nous partageons les 3 points, issus de nos recherches, qui semblent essentiels au succès de tels programmes.</p>
<h2>En adéquation avec la marque</h2>
<p>Un programme de fidélité doit servir le positionnement de la marque. Il est alors légitime de s’interroger sur l’interaction possible entre le type de marque et la structure de son programme de fidélité. Toutes les marques bénéficient-elles de la même façon d’une structure hiérarchique ? Prenons l’exemple du secteur de l’horlogerie.</p>
<p>Le fabricant suisse Rolex peut y être considéré comme une marque « aspirationnelle », qui met en avant des associations symboliques et abstraites de réalisation de soi, de prestige et de domination.</p>
<p>L’américain Timex, a contrario, est plutôt perçu comme une marque « fonctionnelle », qui repose sur des éléments concrets comme la praticité, la simplicité et la facilité d’utilisation.</p>
<p>Faut-il alors faire coïncider la structure d’un programme de fidélité (linéaire vs. hiérarchique) avec les associations mises en avant par la marque (fonctionnelle vs aspirationnelle) ?</p>
<p>Nous répondons à cette question grâce à une <a href="https://www.researchgate.net/publication/317338177_Make_me_feel_special_Are_hierarchical_loyalty_programs_a_panacea_for_all_brands_The_role_of_brand_concept">expérimentation publiée en 2017</a> dans laquelle nous avons manipulé la structure du programme et la marque.</p>
<p>Les résultats montrent qu’un programme de fidélité à structure hiérarchique est plus efficace en termes d’influence positive sur la fidélité à la marque lorsqu’il est proposé par une marque aspirationnelle. En revanche, pour une marque fonctionnelle, le type de structure du programme a moins d’importance en termes d’impact sur la fidélité.</p>
<p>Ainsi, seules les marques symboliques/aspirationnelles sont encouragées à mettre en place un programme de fidélité avec une structure hiérarchique. Cette dernière est indispensable pour consolider la signification symbolique de la marque grâce aux notions de prestige et d’exclusivité (visibilité des statuts, différenciation des avantages en fonction des statuts, noms et couleurs associés aux statuts, etc.) auxquelles elle est associée. En revanche, les marques à image fonctionnelle peuvent tout se permettre !</p>
<h2>Une communication discrète</h2>
<p>Nous avons tous déjà assisté à des scènes à l’aéroport où des passagers, leurs cartes <em>Gold</em> ou <em>Platinum</em> accrochées à leurs valises, passent devant une longue file d’attente de passagers et accèdent au comptoir d’enregistrement avant tous les autres clients.</p>
<p>Que ressentons-nous ? Est-il plus juste que les clients avec les statuts les plus élevés soient tant gâtés par rapport aux autres ?</p>
<p>Nous répondons à cette question grâce à <a href="https://www.researchgate.net/publication/337546850_The_reward_gap_in_hierarchical_loyalty_programmes_how_to_enhance_bottom-tier_customers%E2%80%99_loyalty_without_alienating_top-tier_customers">deux expérimentations publiées en 2020</a>. Dans la première, nous avons fait varier le statut auquel appartient le client (<em>Bronze</em> vs <em>Gold</em>) et l’écart dans le nombre de récompenses proposées à chaque statut (1 récompense vs 6 récompenses).</p>
<p>Les résultats montrent qu’un écart de récompenses important est favorable aux clients avec les statuts les plus élevés (cela augmente leur sentiment d’équité et de contrôle perçu, ce qui augmente leur fidélité) mais cela nuit aux clients avec un statut faible en dégradant ses sentiments (ce qui nuit à la fidélité).</p>
<p>Alors que faire face à un tel dilemme ? Les résultats d’une deuxième expérimentation où nous avons mis en place un écart important (6) mais fait varier sa visibilité (visible vs invisible) montrent que lorsque les clients avec un statut faible ignorent ce à quoi les clients avec un statut élevé ont accès, les comparaisons sociales ne sont plus possibles.</p>
<p>Ils s’appuient alors uniquement sur un critère interne pour évaluer l’équité perçue du programme. Par conséquent, un écart important ne produit plus d’effets négatifs.</p>
<p>Face à ces résultats, les responsables de programmes de fidélité statutaires sont encouragés à mettre en place une communication discrète lors de la promotion des récompenses offertes. Ils peuvent rendre l’ensemble des avantages accessibles uniquement aux clients avec les statuts les plus élevés.</p>
<p>Ils peuvent aussi utiliser les outils de personnalisation digitale pour piloter la structure et le contenu du programme en fonction du comportement d’achat de chaque client.</p>
<h2>Motiver les clients… sans les pressuriser</h2>
<p>L’existence de différents niveaux de statuts que le client doit atteindre crée une pression : il faut augmenter ses dépenses ou les maintenir à un niveau élevé afin de bénéficier des avantages les plus intéressants.</p>
<p>Cette pression est souvent considérée comme positive, car elle encourage les achats. Mais est-ce vraiment le cas ? Ne risque-t-elle pas d’être contre-productive en dégradant le bien-être du client dans la relation ?</p>
<p>Pour répondre à ces questions, nous avons mené <a href="https://www.researchgate.net/publication/331544571_Le_cote_sombre_de_la_pression_exercee_sur_les_consommateurs_par_les_programmes_de_fidelite_enjeux_ethiques_et_pratiques">deux études publiées en 2017</a>. Nos résultats montrent que la pression ressentie prive le client de sa liberté et est vécue comme une contrainte. Elle engendre un regret post-achat et un inconfort dans la relation qui, à son tour, influence négativement le bien-être du client. La crainte de perdre son statut augmente ce sentiment de pression ressentie.</p>
<p>Les responsables de programmes de fidélité sont donc appelés à minimiser cette pression négative afin de maintenir la motivation des clients dans le programme et dans l’avancement dans les statuts.</p>
<p>Un moyen d’y parvenir pourrait consister en la possibilité pour le client de cumuler des points autrement que grâce au comportement d’achat. Le comportement d’engagement pourrait ainsi être privilégié, surtout lorsque le client est proche du seuil à maintenir : parrainage, participation active sur les réseaux sociaux de l’entreprise ou encore participation à des enquêtes et à des activités de co-création. Ces leviers pourraient générer une pression plus « saine » de nature à préserver le bien-être des clients.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/147278/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Aïda Mimouni - Chaabane est Secrétaire générale de l'association française du marketing. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Virginie Pez est vice-présidente de l'Association Française du Marketing en charge des évènements.</span></em></p>Les marques doivent notamment veiller à l’adéquation avec les valeurs qu’elles portent, à communiquer discrètement et à ne pas mettre la pression sur les clients.Aïda Mimouni - Chaabane, Maître de conférences, CY Cergy Paris UniversitéVirginie Pez, Maître de Conférences, Université Paris-Panthéon-AssasLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1420552020-07-08T21:45:49Z2020-07-08T21:45:49ZPour les marques, Black Lives Matter… vraiment ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/346075/original/file-20200707-194409-1oa0qve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C4%2C1011%2C608&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le groupe Mars, le fabricant du riz « Uncle Ben's » envisage un changement de logo, suite aux polémiques qui l'accusent de diffuser des stéréotypes racistes.</span> <span class="attribution"><span class="source">Justin Sullivan/AFP</span></span></figcaption></figure><p>Face à la pression de la société civile aux États-Unis, plusieurs grands groupes ont apporté leur soutien au mouvement « Black Lives Matter ». Des entreprises comme L’Oréal, Mars ou Unilever ont annoncé une refonte de leur image et de certains de leurs produits pour mieux correspondre à l’attente des « consomm’acteurs ».</p>
<p>Pourtant, ce phénomène est parfois perçu comme du marketing opportuniste afin de gagner la cause de leurs consommateurs, plutôt qu’un véritable engagement social.</p>
<h2>Aunt Jemima, Uncle Ben’s : ces marques qui diffusent des stéréotypes racistes</h2>
<p>Prenons quelques exemples nord-américains.</p>
<p>Début juin, le groupe Quaker Foods, qui détient la marque de produits pour le petit déjeuner, <em>Aunt Jemima</em> (<a href="https://www.washingtonpost.com/news/voraciously/wp/2020/06/17/quaker-is-dropping-the-aunt-jemima-image-and-name-after-recognizing-they-are-based-on-a-racial-stereotype/">Tante Jemima</a>), a décidé de retirer l’image de « mammy » (caricature de la nourrice noire) qui a inspiré son célèbre logo depuis 1989. Cette image reposait sur le récit de ces femmes esclaves noires représentées comme heureuses de leur condition et ravies de servir leurs propriétaires blancs. Ce nouveau logo devrait être présenté au public en <a href="https://www.theguardian.com/us-news/2020/jun/17/aunt-jemima-products-change-name-image-racial-stereotype">septembre 2020</a>.</p>
<p>Mi-juin, la multinationale <em>Mars</em> qui détient la <a href="https://www.lefigaro.fr/societes/uncle-ben-s-banania-quand-la-peur-guide-la-strategie-marketing-des-entreprises-20200625">marque emblématique de riz <em>Uncle Ben’s</em></a> a déclaré :</p>
<blockquote>
<p>« Alors que nous écoutons les voix des consommateurs, en particulier dans la communauté noire, et les voix de nos associés dans le monde entier, nous reconnaissons que le moment est venu de faire évoluer la marque Uncle Ben’s, y compris son identité visuelle, ce que nous ferons. »</p>
</blockquote>
<p>Mais la marque n’en dit pas plus sur le concept de ce prétendu « refashioning » (refonte). L’important semble être de se positionner du bon côté de la cause antiraciste, portée par leurs consommateurs.</p>
<h2>L’exemple du groupe L’Oréal</h2>
<p>Lors du mouvement mondial « Black Lives Matter », les crèmes « blanchissantes » ou « claires », du groupe L’Oréal ont à nouveau suscité la polémique. Ces crèmes diffusent en effet l’idée que les <a href="https://theconversation.com/bleached-girls-india-and-its-love-for-light-skin-80655">peaux blanches sont belles et propres</a>. Ce marché, qui <a href="https://www.theguardian.com/world/2018/apr/23/skin-lightening-creams-are-dangerous-yet-business-is-booming-can-the-trade-be-stopped">pesait</a> 4,8 milliards de dollars en 2017, devrait atteindre 8,9 milliards de dollars d’ici 2027.</p>
<p>Pourtant, ces produits de « dépigmentation » sont illégaux dans plusieurs pays car ils contribuent au <a href="https://information.tv5monde.com/terriennes/l-oreal-ne-dites-plus-creme-blanchissante-mais-qui-donne-de-l-eclat-365494">culte de la peau blanche</a>. Le groupe a alors déclaré <a href="https://www.rtl.fr/actu/economie-consommation/racisme-l-oreal-unilever-pourquoi-les-marques-s-engagent-7800637302">bannir tous ces termes aux connotations racistes</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1276874385132060672"}"></div></p>
<p>Les mouvements sociaux sont de plus en plus des « e-mouvements » où les réseaux sociaux deviennent le terrain d’affrontement entre les marques et leurs détracteurs. Beaucoup d’internautes ont ainsi jugé l’initiative du groupe L’Oréal comme un manque de sincérité de la part de la marque. Sur Twitter, le slogan <a href="https://twitter.com/hashtag/boycottloreal?ref_src=twsrc%5Egoogle%7Ctwcamp%5Eserp%7Ctwgr%5Ehashtag">#boycottloreal</a> est né en réaction à cette décision.</p>
<p>Comment comprendre ce phénomène de rejet lorsque des marques tentent d’épouser les causes sociales, notamment antiracistes ?</p>
<h2>Marques activistes</h2>
<p>« Le brand activism » (<a href="https://www.infopresse.com/opinion/francis-dumais/2018/9/5/l-activisme-de-marque-et-la-poursuite-d-une-raison-d-etre">activisme de marque</a>) consiste pour une entreprise, à donner son opinion ou militer pour une cause, en dehors de son cœur de compétences traditionnel.</p>
<p>Par exemple, certaines entreprises disent agir pour le climat en limitant leur empreinte carbone, imposer la parité en entreprise ou encore proposer des conférences sur la diversité ou les discriminations raciales.</p>
<p>Cet exercice devient alors une figure imposée du marketing au-delà des initiatives de Responsabilité sociale des entreprises (RSE). C’est-à-dire <a href="https://www.economie.gouv.fr/entreprises/responsabilite-societale-entreprises-rse">l’intégration volontaire par les entreprises</a> de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales.</p>
<p>Pour influencer le processus d’achat et créer de la fidélité, les marques essaient de s’éloigner d’un « marketing traditionnel », qui se base autour du produit ou service, et se rapprochent d’un « marketing activiste » autour de causes et convictions partagées par les consommateurs.</p>
<p>À titre d’exemple, lorsque les marques pratiquent le « green-washing » et « verdissent » leur communication pour épouser la cause environnementale, les consommateurs y voient un marketing opportuniste qui devient contre-productif.</p>
<p>Nous l’avions montré via l’analyse du discours de <a href="https://doi.org/10.1177/0276146714528335">marques post-Grenelle de l’environnement</a>. Les marques avaient alors utilisé les codes couleur et les stéréotypes de la cause environnementale, sans pour autant s’investir dans la notion de développement durable. Elles ont simplement communiqué en surface sans entrer en profondeur dans une réforme des représentations de la cause durable.</p>
<p>L’exigence d’engagement sociétal des marques s’est intensifiée, comme le montre <a href="https://www.edelman.com/earned-brand">l’étude Edelman Earned Brand</a> de 2018. Elle révèle que dans 36 pays :</p>
<blockquote>
<p>« près des 2/3 (64 %) des consommateurs achètent désormais des marques en fonction de leurs valeurs (+13 points par rapport à 2017). Ces acheteurs motivés par leurs croyances éliront, changeront, éviteront une marque en fonction de sa position sur les questions politiques ou sociales qui les intéressent. »</p>
</blockquote>
<p>Dès lors, pour les <a href="https://shots.net/news/view/for-purpose-or-profit-the-ethical-debate-behind-brand-activism">managers des marques</a>, nous entrons dans l’ère où l’activisme de marque <a href="https://www.revuepolitique.fr/aucun-champ-de-la-vie-sociale-nechappe-aujourdhui-au-marketing/">devient vecteur de <em>profitabilité</em></a>.</p>
<h2>Un exercice périlleux</h2>
<p>Au-delà des bonnes intentions, l’exercice du marketing militant ou du « brand activism » reste périlleux.</p>
<p>Il est difficile d’incorporer des problématiques sociétales complexes au sein de discours de marques qui n’ont pas de légitimité à le faire ni compétences sociologiques fines dédiées. Le cas du « bad buzz » #boycottloreal, nous fait entrevoir les risques d’actions contre-productives ou d’externalités négatives, lorsque les marques s’engagent dans des discours sociétaux de manière réactive.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/-q034kO_G8I?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Woke washing, quand l’engagement social des marques tourne à la dérive. IAE de Paris, le 30 janvier 2020.</span></figcaption>
</figure>
<p><a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0148296318306398">Notre récente étude</a> sur les <a href="https://doi.org/10.1016/j.jbusres.2018.12.031">enjeux de diversité et d’injustices</a> sociale liés au genre, à la race, l’ethnicité, la religion, l’âge, les handicaps, et les niveaux socio-économiques de marques, comme Google, Facebook ou Starbucks aux États-Unis nous enseigne plusieurs points.</p>
<p>Les marques admettent explicitement que leur réputation dépend de leur capacité à être plus inclusives : les consommateurs souhaitent voir cette dimension reflétée dans leurs actions.</p>
<p>Les marques sont souvent en position de réaction plutôt que de proaction sur ces sujets d’injustice sociale. À titre d’exemple, en mai 2018, ce sont les consommateurs de Starbucks qui ont filmé et « viralisé » l’appel à la police et l’arrestation de clients afro-américains souhaitant utiliser les toilettes avant de consommer. Craignant un risque pour son image, la <a href="https://www.independent.co.uk/news/world/americas/starbucks-stores-closed-diversity-training-racial-bias-philadelphia-arrests-racist-a8374426.html">marque a fermé 8000 points de vente</a> aux États-Unis et a annoncé consacrer une journée à la formation de ses employés aux enjeux de diversité.</p>
<p>Cette initiative, qui relève du « quick fix » (solution de facilité), impressionne en matière d’image mais ne va pas assez en profondeur. Le racisme systémique est un processus de longue haleine et ne se combat pas avec des solutions rapides ou faciles.</p>
<p>La controverse que subit actuellement le groupe L’Oréal est de même nature. Les mesures superficielles de censure de termes tels que « éclaircissant », sont jugées par les consommateurs comme de simples effets de langage face à une cause majeure. C’est donc plus une simplification du réel plutôt qu’un engagement à déconstruire les représentations de la beauté, souvent non inclusives et de facto discriminantes y compris non intentionnellement.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/346073/original/file-20200707-194427-tndw5g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/346073/original/file-20200707-194427-tndw5g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=365&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/346073/original/file-20200707-194427-tndw5g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=365&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/346073/original/file-20200707-194427-tndw5g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=365&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/346073/original/file-20200707-194427-tndw5g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=459&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/346073/original/file-20200707-194427-tndw5g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=459&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/346073/original/file-20200707-194427-tndw5g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=459&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le 26 février 2016,Mark Zuckerberg, le patron de Facebook, a dû rappeler à l’ordre ses employés qui rayaient les slogans « Black Lives Matter » pour les remplacer par le slogan controversé « All Lives Matter ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Justin Sullivan/Getty images North America/Getty images via AFP</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Chez Facebook, nous avions montré qu’en février 2016, lorsque les employés avaient écrit sur le mur Facebook au sein de l’entreprise le slogan #blacklivesmatter, il fut barré par des employés pour être remplacé par le slogan #alllivesmatter. Mark Zuckerberg avait qualifié à l’époque <a href="https://www.gizmodo.com.au/2016/02/mark-zuckerberg-asks-racist-facebook-employees-to-stop-crossing-out-black-lives-matter-slogans/">ces actions comme « décevantes »</a> et avait demandé à ces employés d’assister à des conférences pour comprendre le mouvement « Black Lives Matter ».</p>
<p>Ces cas montrent l’écart entre les attentes des consommateurs et la réponse parfois tardive des marques, qui semblent se préoccuper plus de l’impact sur leur image que du mouvement social dans sa complexité.</p>
<h2>La grande illusion du « woke washing »</h2>
<p>Mais ces formations à la diversité ne sont-elles pas vouées à l’échec ?</p>
<p>Prenons l’exemple de Google. Les chiffres montrent que sur plus de <a href="https://www.dailywire.com/news/epic-fail-google-spent-265-million-diversity-it-paul-bois">75 % d’employés concernés</a> et près de 265 millions de dollars dépensés entre 2014 et 2016 pour ces formations, le nombre d’employés d’origine latino-américaine, afro-américaine ou de femmes dans des postes à responsabilité reste faible.</p>
<p>Pourtant, au travers de ces formations, elles se positionnent comme des marques inspirantes qui donnent l’illusion d’une « bonne image ». Ces marques n’hésitent pas à communiquer massivement sur le sujet sans prouver le succès de ces actions pour pallier le manque de diversité.</p>
<p>Ces initiatives en trompe-l’œil contribuent donc au scepticisme des consommateurs et peuvent induire un « diversity washing » ou « woke washing » (<em>woke</em> : conscientisation). On parle de « diversity washing » lorsque les marques ont commencé à s’approprier les discours idéologiques progressistes – notamment celui de la diversité – à des fins de positionnement marketing, sans s’engager à changer leurs pratiques en profondeur.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1278784181624082432"}"></div></p>
<p>Nos travaux ont enfin montré une décrédibilisation des politiques de diversité en entreprise lorsque la composition de leurs conseils d’administration et gouvernance sont homogènes, suscitant alors un décalage entre leurs déclarations en matière de diversité et la réalité. À titre d’exemple, les internautes dénoncent le manque de diversité chez L’Oréal.</p>
<p>Ces marques qui se réapproprient ces questions de justice raciale aux États-Unis utilisent la même communication dans tous les pays où elles sont présentes, sans se soucier du contexte social, idéologique et historique de chaque nation. Pour pouvoir avoir un impact considérable sur les consommateurs, les marques font face à la difficulté de conjuguer subtilement universalisme et particularisme.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/142055/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nacima Ourahmoune ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’engagement social des marques oscille entre capitaliser sur une cause sociale, se donner une « bonne image » ou tenter d’amorcer un réel changement.Nacima Ourahmoune, Professeur Associé / Chercheur/ Consultant en marketing et culture de consommation, Kedge Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1360072020-04-16T17:17:37Z2020-04-16T17:17:37ZComment interpréter la générosité des personnalités en cette période de crise ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/328473/original/file-20200416-192762-16azu8n.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C0%2C2801%2C1493&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le collectif "Et demain" sur Youtube.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://youtu.be/eY803uik2BY">Capture d'écran Youtube</a></span></figcaption></figure><p>La crise du coronavirus touche un très grand nombre d’activités, certaines parfois sévèrement, et suscite de nombreuses manifestations de soutien de la part d’entreprises, de citoyens anonymes ou de célébrités. À titre d’exemple, l’actrice Angelina Jolie aurait donné 1 million de dollars à l’association américaine No Kid Hungry. Cette prolifération d’actes de générosité de la part des stars nous invite à nous poser un certain nombre de questions :</p>
<ul>
<li><p>Est-ce un phénomène nouveau et si non, quelle est la spécificité du coronavirus en comparaison des autres crises ? </p></li>
<li><p>Quelles sont les différentes formes d’engagement ?</p></li>
<li><p>Comment interpréter ces actions, entre philanthropie ? Don désintéressé ou opportunisme, pragmatisme ?</p></li>
</ul>
<p>En premier lieu, précisons qu’il ne s’agit pas d’une problématique nouvelle. La générosité ou la philanthropie sont très largement répandues depuis des siècles auprès des personnalités. Sans remonter forcément trop loin dans l’histoire, nous avons tous en mémoire l’importante mobilisation de stars américaines en faveur de la lutte contre la famine en Éthiopie avec USA for Africa (et la chanson <a href="https://www.youtube.com/watch?v=M9BNoNFKCBI">« We are the World »</a>) ou encore l’extraordinaire Live Aid organisé par Bob Geldof, et la création par Coluche des Restos du Cœur en France, relayée par le collectif des Enfoirés (encore d’actualité et d’utilité plus de 30 ans après !).</p>
<h2>Les spécificités de la crise actuelle</h2>
<p>La spécificité de cette crise réside en son caractère universel même si certains territoires sont davantage touchés que d’autres. Aucun statut ne permet d’y échapper et de nombreuses célébrités, souvent considérées comme des nantis, ont été infectées par le virus (Tom Hanks, Boris Johnson, le Prince Charles), certaines ayant perdu la vie (Manu Dibango, Pape Diouf, Patrick Devedjian), la majorité subissant (certes dans des conditions éloignées de celles du commun des mortels) une situation de confinement.</p>
<p>Le mouvement de mobilisation auquel nous sommes en train d’assister est sans précédent, et fortement relayé par la caisse de résonance de l’ensemble des réseaux sociaux et des médias.</p>
<h2>Différentes modalités d’engagement</h2>
<p>La palette des actions apparaît extrêmement large, d’un simple message de partage du quotidien, à un soutien militant, en passant par une création artistique, éducative ou sportive et des dons financiers. De manière simple et de façon apparemment sincère, de nombreuses personnalités communiquent sur leur quotidien durant le confinement, ce qui peut certes être considéré comme une simple occupation tout comme un moyen de montrer qu’elles sont des personnes comme les autres. Il s’agit de revenir à une forme de normalité et de proximité dans des sphères souvent jugées inaccessibles et privilégiées.</p>
<p>Certaines personnalités donnent de leur temps en proposant de communiquer directement avec des populations particulièrement touchées. Des stars du monde du cinéma comme Claude Lelouch, Elsa Zylberstein ou Gad Elmaleh vont appeler, en soutien de la soixantaine d’agents de la ville de Paris déjà mobilisés, des personnes âgées isolées.</p>
<p>D’autres, souvent des artistes, des sportifs ou des influenceurs, partagent humour et créativité par l’intermédiaire de « posts » créatifs, ludiques ou à des fins de sensibilisation (en montrant les bons gestes). De nombreux challenges, parfois simplistes, parfois très originaux, sont lancés par les célébrités à leurs communautés sur leurs réseaux sociaux : un bon moyen également pour booster les affiliations en engageant leurs communautés.</p>
<p>De nombreux artistes donnent des concerts privés ou improvisent des chansons afin de soutenir notamment le personnel soignant, comme Jean‑Jacques Goldman réinterprétant son « Changez la vie » en « Ils sauvent des vies ». L’impact a été d’autant plus fort que l’artiste se fait rare dans les médias.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/izi-25tdIUQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>De multiples dons financiers ont été constatés. Sans en faire une liste exhaustive, des montants allant de quelques milliers d’euros à plusieurs millions (jusqu’au milliard pour Jack Dorsey, le directeur de Twitter), au bénéfice d’associations ou de fondations luttant directement ou indirectement contre le coronavirus, ont été communiqués depuis le début de la crise.</p>
<p>Autre mécanisme assez classique, les participations à des levées de fonds pour lesquelles les personnalités peuvent mobiliser leurs réseaux et user de leur influence. À leurs échelles respectives, Lady Gaga a aidé à lever 35 millions de dollars tandis qu’en France les youtubeurs Mcfly et Carlito ont réussi à récolter 400 000 euros en <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/societe/des-youtubeurs-recoltent-400-000-euros-de-dons-pour-les-hopitaux-francais-et-les-ehpad_2122853.html">une journée au bénéfice du Fonds d’aide d’urgence Covid-19</a>.</p>
<p>Les appels au don, enfin, autour de collectifs de célébrités ou à l’initiative d’association comme Impulsion 75 (ayant reçu le soutien de 200 personnalités du monde sportif, artistique et médiatique au bénéfice de la Fondation de France) fleurissent également.</p>
<p>Citons aussi la collaboration artistique entre 350 chanteurs, acteurs, journalistes, sportifs, animateurs réunis pour un titre « Et demain » destiné à relayer un appel au don en faveur de la Fondation des Hôpitaux de Paris-Hôpitaux de France. Il s’agit d’une mosaïque, rappelant sur la forme les situations de confinement ou de communication via des outils visio comme Skype ou Zoom et rendant un vibrant hommage sur le fond aux personnels soignants tout en posant la question de l’après.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/eY803uik2BY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<h2>Jugements et critiques</h2>
<p>« La responsabilité est le prix à payer du succès » disait Churchill.</p>
<p>À une époque où les notions de développement durable et de responsabilité mobilisent l’ensemble des acteurs de la société civile, il apparaît légitime de s’interroger quant à l’engagement de ces personnalités publiques. L’engagement étant devenu une sorte de norme, il est même rare aujourd’hui de constater l’absence d’implication d’une célébrité en faveur d’une thématique responsable. La générosité est devenue une valeur très actuelle alors qu’inversement l’absence de générosité peut être rapidement dénoncée par l’opinion publique.</p>
<p>En ce qui concerne la crise du coronavirus, les actes de générosité, très largement appréciés par l’ensemble des parties prenantes, suscitent néanmoins quelques critiques quant à leurs montants jugés parfois faibles au regard des revenus colossaux des stars, quant au fait qu’ils soient en partie défiscalisés (Florent Pagny a dû se fendre d’un message sur Instagram afin d’expliquer qu’il paye bien 80 % de ses impôts en France), par rapport à des dons pouvant être interprétés comme des investissements futurs (Jack Dorsey, le directeur de Twitter qui vient d’annoncer qu’il donnerait 1 milliard de dollars pour la lutte contre le coronavirus est accusé par certains observateurs d’investir plutôt que de donner), car ces actions valorisent l’image de marque en participant à un personal branding – Nabilla se filmant et partageant sa conversation avec Brigitte Macron la remerciant pour sa générosité – ou bien parce que ces personnalités viennent couvrir des défaillances de l’appareil d’état et des choix politiques dont on paierait aujourd’hui les conséquences.</p>
<p>Soit.</p>
<p>Mais sans rentrer dans chacune de ces problématiques, l’ensemble de ces contributions vont bien permettre concrètement d’acheter du matériel utile au personnel soignant (donc de sauver des vies comme le chantait Goldman), d’aider les associations et fondations à financer des programmes afin de lutter au-delà de la crise de manière durable pour des causes universelles ou d’apporter plus simplement un moment de bonheur et de partage à des personnes isolées.</p>
<p>Tout cela compte et il faudra s’en souvenir au moment où l’on pointera du doigt des comportements « irresponsables » des stars, et notamment ceux des sportifs et plus particulièrement des footballeurs.</p>
<p>Ils auront agi quand d’autres auront parlé, critiqué et commenté. <a href="http://www.leparisien.fr/sports/coronavirus-mbappe-messi-federer-mcgregor-ces-sportifs-au-grand-coeur-28-03-2020-8289891.php">Cela fait toute la différence</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/136007/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Philippe Danglade ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La générosité des personnalités publiques s’exprime en cette période de crise. Philanthropie, dons désintéressés, opportunisme ou pragmatisme ?Jean-Philippe Danglade, Head of department, Kedge Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1327772020-03-12T18:09:06Z2020-03-12T18:09:06ZLes bonnes pratiques du « storytelling » dans la publicité<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/318389/original/file-20200303-66084-1xvvr7x.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=80%2C42%2C1984%2C1065&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Campagne de publicité Dove « La vraie beauté » comparant des portraits-robots de personnes selon leurs propres conceptions d'eux-même et celle d'un portraitiste professionnel</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dove.com/fr/stories/campaigns/real-beauty-sketches.html">Dove / Capture d’écran</a></span></figcaption></figure><p>Aujourd’hui, le contenu digital prolifère de façon exponentielle, au risque parfois de créer une <a href="https://www.lesechos.fr/1998/11/information-comment-gerer-la-surabondance-802162">surabondance d’information</a> ingérable pour les consommateurs. Comme l’annonçait l’écrivain italien Umberto Eco, « un excès d’informations rend insensible à l’information ». Sur la toile, nous sommes bombardés de contenu divers, y compris commercial. Bien que les entreprises débordent d’idées pour instiller des publicités de façon ingénieuse dans les pages web, il en faut maintenant plus pour réellement capter l’attention des consommateurs.</p>
<p>Créer des publicités riches en sens et qui activent l’imaginaire et les sens des consommateurs n’est pas chose aisée, mais la pratique du « storytelling » semble se démarquer comme grande tendance depuis quelques années.</p>
<p>Au-delà d’un simple message publicitaire, elle permet en effet aux marques d’affirmer leur héritage, leurs valeurs, voire même de se positionner comme icônes de changement culturel.</p>
<h2>Un procédé efficace</h2>
<p>À titre d’exemple, Gillette a lancé une campagne vidéo intitulée <a href="https://youtu.be/koPmuEyP3a0">« We believe : the best men can be »</a>, en réaction aux scandales de harcèlement qui ont secoué Hollywood et le monde entier en 2019, appelant les hommes à se comporter de façon honorable, à faire ce qui est juste et à présenter la meilleure version d’eux-mêmes.</p>
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<figcaption><span class="caption">We Believe : The Best Men Can Be (Gillette, janvier 2019).</span></figcaption>
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<p>La marque Renault propose aussi une <a href="https://youtu.be/MrNCVAqbCD0">vidéo</a> puissante, racontant l’histoire et deux jeunes filles, puis femmes, que la vie unit et désunit dans une histoire d’amitié, puis d’amour. La marque automobile se positionne ici comme partenaire des changements sociétaux et, plus précisément, de l’évolution des mentalités autour de la question de l’homosexualité. C’est le storytelling dans la publicité qui permet cette approche engagée, donnant un sens nouveau à la communication.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/MrNCVAqbCD0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">30 Years in the making (Renault UK, novembre 2019).</span></figcaption>
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<p>Des caractères auxquels nous pouvons nous identifier, une intrigue captivante, une morale et une certaine vraisemblance sont autant d’éléments qui constituent une histoire réussie.</p>
<p>Si l’on mesure le succès de ces vidéos en utilisant des données analytiques, les publicités narratives ont clairement la cote. Elles génèrent des milliers, voire des millions de vues sur la toile (Gillette recueille plus de 33 millions de vues sur YouTube et plus de 500 000 commentaires d’internautes).</p>
<p>Pourquoi ces publicités narratives créent-elles autant d’engouement chez les consommateurs, et comment en articuler correctement les éléments pour maximiser leur impact ?</p>
<p>Afin de comprendre comment les différents aspects et composantes du storytelling peuvent mobiliser les consommateurs et les faire réagir face à la publicité, j’ai mené une étude sur plusieurs vidéos de la marque de produits d’hygiène et de produits cosmétiques Dove, en collaboration avec <a href="https://researchportal.port.ac.uk/portal/en/persons/valentina-pitardi(0a733020-e9c8-4ea4-8f9c-7a5e8c72ccf4).html">Valentina Pitardi</a> de l’Université de Portsmouth.</p>
<h2>L’exemple Dove</h2>
<p>Dove est l’une des marques qui utilise le storytelling depuis de nombreuses années. Cette technique est au cœur de leur stratégie de communication, afin de transmettre leurs valeurs de beauté pour tous, et d’estime de soi. Leur site web contient même une catégorie <a href="https://www.dove.com/be/fr/stories/campaigns.html">« les histoires Dove »</a>, où l’on peut découvrir ses différentes campagnes basée sur le storytelling.</p>
<p>Notre étude se base sur trois vidéos Dove : <a href="https://youtu.be/R9wSFg8x1vA">« Dove la vraie beauté, portraits robots »</a> ; <a href="https://youtu.be/FuTPEN7-NdQ">« Dove l’estime de soi : le regard de nos amies »</a> ; <a href="https://youtu.be/i8E-wt9VgyA">« Dove, l’estime de soi : l’autocritique de la beauté »</a>.</p>
<p>Ces vidéos postées alors sur les chaînes officielles de la marque sur YouTube ont été analysées dans 4 langues : français, anglais, italien et espagnol. Au total, près de 1 000 commentaires postés par les internautes sur ces vidéos ont été analysés.</p>
<p>Les résultats qui en découlent démontrent que, à travers leurs commentaires, les internautes sont sensibles à différents aspects des histoires racontées par la marque, mais pas n’importe comment.</p>
<p>En effet, différents éléments du storytelling activent différentes réponses.</p>
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<figcaption><span class="caption">Dove la vraie beauté : les portraits robots (Dove, 2013).</span></figcaption>
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<p>Les éléments de l’intrigue, c’est-à-dire liés au déroulé de l’histoire, activent en priorité l’engagement cognitif des consommateurs. En d’autres mots, les différents faits liés au déroulé de l’histoire tendent à faire réfléchir les consommateurs, à attirer leur attention, à leur poser question. On veillera donc à bien articuler de façon logique le déroulé d’une histoire, afin qu’il y ait de clairs liens de cause à effet, et que l’on comprenne bien ce qui se passe. Lorsque l’on arrive au « climax » de l’histoire, par contre, les réactions sont plutôt émotionnelles – ce qui est logique vu que le climax est le point d’orgue de l’intensité émotionnelle d’une histoire.</p>
<p>Les campagnes Dove arrivaient généralement à attirer l’attention des audiences dès le début et à la maintenir jusqu’à la fin. Certains internautes admettent même, dans les commentaires, avoir continué de penser la publicité bien après l’avoir vue – dénotant une activation mentale forte.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/FuTPEN7-NdQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Dove l’estime de soi : le regard de nos amies (Dove, 2013).</span></figcaption>
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<p>Les personnages d’une histoire activent l’engagement émotionnel des consommateurs. Ce sont les personnages, à travers un processus d’identification, qui engagent les sentiments des audiences. Ce sont à travers eux que l’on ressent de la joie, de la fierté, de la tristesse ou du remords. En nous identifiant à leur histoire, nous construisons la nôtre et mettons en lumière nos propres expériences.</p>
<p>Beaucoup de commentaires dénotent l’empathie des consommateurs pour les personnages. « J’en ai pleuré ! », écrit l’un d’eux. Ces personnages nous renvoient à notre propre vie et à notre propre image. « Je me suis mise dans la peau de ces personnes tout au long de la vidéo », peut-on ainsi lire sous une vidéo. Certaines personnes partagent même en détail des situations de leur vie personnelle, générant souvent la sympathie d’autres internautes.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/i8E-wt9VgyA?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Dove L’estime de soi : l’autocritique de la beauté (Dove, 2013).</span></figcaption>
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<p>La vraisemblance d’une histoire, à quel point elle semble vraie ou réelle, est l’élément de l’histoire qui active les comportements des consommateurs. Autrement dit, il conviendra d’éviter dans de la publicité narrative à s’engager à outrance dans un projet de science-fiction ! C’est le caractère vraisemblable d’une histoire qui poussera les consommateurs à interagir au sujet de la publicité, à la partager, à en parler autour d’eux, à la faire vivre.</p>
<p>Les publicités Dove génèrent beaucoup de commentaires liés à la véracité de l’histoire : « c’est tellement vrai… ». Mais elles engagent parfois des débats sur les faits ou valeurs qu’elles évoquent.</p>
<p>Introduite il y a plus de 65 ans par Unilever, Dove a construit sa marque sur une série campagnes de storytelling largement réussites, mais avec également, parfois, des faux pas. Bien qu’il revienne aux gestionnaires de Dove de nous informer du succès exact des campagnes et de leur retour sur investissement, tout indique de l’extérieur que de nombreux aspects de leurs campagnes soient gagnants depuis l’introduction de « La Vraie beauté » en 2004.</p>
<p>La tendance du « storytelling » tire son épingle du jeu dans la marée de contenu digital. Les marques sont maintenant bien conscientes de la richesse que peut apporter ce type de stratégie, mais il convient de la mettre en œuvre de façon réfléchie.</p>
<p>Gillette et Renault l’ont bien compris. Le fabricant de rasoirs propose en effet dans la vidéo mentionnée en début d’article un contenu très riche en vraisemblance, car lié à des événements concrets récents, et avec des personnages – les hommes ! – auxquels beaucoup peuvent s’identifier. Quant au constructeur automobile, il propose aussi des personnages bouleversants, avec une intrigue particulièrement bien articulée.</p>
<p>Savoir que les éléments d’une histoire font réagir les audiences de différentes façons permettra d’adapter ceux-ci en fonction que l’on cherche à développer sa marque et ses valeurs, augmenter sa visibilité, générer des ventes ou encore créer des visites sur un site web.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/132777/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laurence Dessart ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les consommateurs se montrent particulièrement sensibles aux personnages ou encore à la vraisemblance de l’histoire racontée par une marque pour capter leur attention.Laurence Dessart, Professeur de marketing, Université de LiègeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1327832020-03-02T21:13:16Z2020-03-02T21:13:16ZCoronavirus : mais pourquoi les consommateurs ont-ils pris peur de la bière Corona ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/318015/original/file-20200302-18275-76l1lv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=790%2C0%2C5200%2C3997&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les intentions d'achat de la célèbre bière mexicaine ont plongé depuis le début de l'épidémie. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/girl-medical-mask-holding-corona-beer-1656878416">LinaOli / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Un slogan très connu de la bière Corona, « Miles away from ordinary » (« à mille lieues de l’ordinaire »), souligne que cette boisson est une bière extraordinaire qui « fait de vous un roi ». La stratégie de communication, autour de l’image du soleil et de la mer, associe la marque au sentiment d’évasion. D’ailleurs, les publicités de cette bière, dans les pays où il est possible de faire la publicité de boissons alcoolisées, sont généralement tournées sur une plage paradisiaque.</p>
<p>Il semble qu’aujourd’hui cette bière, fierté de l’industrie mexicaine, soit entrée dans une tempête qui fait chavirer dangereusement le navire. Comme le signale YouGov Ratings, une organisation spécialisée qui mesure la popularité et la notoriété de tout en se basant sur des millions de réponses du public américain, l’image de la bière Corona connaît une chute vertigineuse auprès des consommateurs. En cause : l’arrivée du coronavirus et la <a href="https://today.yougov.com/topics/food/articles-reports/2020/02/26/first-it-was-joke-corona-beer-really-suffering-cor">crainte globale qui l’accompagne</a> qui a fait chuter les intentions d’achat à un peu plus de 5 % des Américains, le pourcentage le plus bas depuis deux ans.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/318081/original/file-20200302-18303-bc8o26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/318081/original/file-20200302-18303-bc8o26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/318081/original/file-20200302-18303-bc8o26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/318081/original/file-20200302-18303-bc8o26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/318081/original/file-20200302-18303-bc8o26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/318081/original/file-20200302-18303-bc8o26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/318081/original/file-20200302-18303-bc8o26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/318081/original/file-20200302-18303-bc8o26.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les intentions d’achat de Corona n’ont jamais été aussi basses aux États-Unis.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://today.yougov.com/topics/food/articles-reports/2020/02/26/first-it-was-joke-corona-beer-really-suffering-cor">Yougov.com</a></span>
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<p>L’une des caractéristiques de notre civilisation reste la vitesse avec laquelle circulent non seulement les informations mais aussi les peurs et les tragédies. Parmi ces phénomènes, l’apparition d’un virus, d’un « tueur de masse », constitue l’une des craintes les plus terrifiantes. Cette frayeur globalisée se répercute non seulement sur la vie quotidienne de nous tous, mais aussi sur les affaires, la finance, la politique et même les relations internationales.</p>
<h2>Bière et image, un lien étroit</h2>
<p>En peu de temps, le monde entier a été plongé dans une forme de paranoïa globale, entraînant des <a href="https://www.lesechos.fr/monde/chine/coronavirus-les-bourses-chinoises-plongent-leconomie-a-larret-1168451">dégâts sur l’économie mondiale</a>. Les marchés financiers et les entreprises multinationales ont été frappés de plein fouet par cette crainte globale. Et l’une des victimes collatérales de cette crise a été le bateau insigne de l’industrie mexicaine à travers le monde, la bière Corona.</p>
<p>La bière est aujourd’hui la troisième boisson la plus populaire au monde après l’eau et le thé. Selon <a href="https://www.businessinsider.fr/us/most-popular-beers-in-the-world-2018-9"><em>Business Insider</em></a>, l’industrie de la bière a vendu pour 661 milliards de dollars de bière en 2017. Corona se classe parmi les dix bières les plus consommées au monde avec 28,8 millions d’hectolitres vendus à l’année.</p>
<p>Historiquement, l’industrie de la bière a fait de la publicité son fer de lance pour conquérir de nouveaux marchés ou consolider ses positions. Traditionnellement, l’industrie brassicole investit d’importantes sommes d’argent dans la communication. En 2018, les deux premiers annonceurs parmi les fabricants de bière aux États-Unis étaient Anheuser-Busch InBev (AB InBev) et Constellation Brands qui produit la Corona. Cette dernière a dépensé <a href="https://www.statista.com/statistics/264998/ad-spend-of-selected-beer-manufacturers-in-the-us/">368 millions de dollars pour sa communication</a> dans l’ensemble des médias.</p>
<p>La stratégie commerciale dans l’industrie brassicole repose en grande partie sur la publicité, car la consommation du produit reste étroitement liée à l’image créée par l’annonceur. Lorsqu’on boit une bière, on ne consomme pas uniquement une boisson, mais une forme de vie qui peut être associée à des représentations vastes et variées, passant par la fête, la convivialité, l’été, la plage, voire la santé ou l’engagement politique.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1220446385453129734"}"></div></p>
<p>Cette représentation de la bière dans l’inconscient collectif a eu, à force d’une stratégie marketing globale et assez agressive, rapidement des résultats positifs en créant une image claire et nette pour les consommateurs. Néanmoins, cette représentation peut se retourner contre le produit, comme on le constate actuellement pour Corona.</p>
<h2>La puissance d’un simple mot</h2>
<p>Dans un monde où la vitesse règle nos vies au quotidien, les mots ont acquis une importance capitale. De la même manière qu’un seul mot peut créer une représentation puissante d’une marque, il peut aussi l’entraîner vers la faillite. Une marque devient une icône à partir des représentations qu’elle génère autour d’elle.</p>
<p>Ainsi, pour créer une identité de marque forte afin d’implanter un produit durablement dans l’esprit du consommateur, il faut utiliser, parmi d’autres éléments, un seul mot, simple et à forte connotation symbolique. Le choix du mot jouera un rôle encore plus crucial pour l’avenir d’une entreprise lorsqu’il se prononce de la même manière partout dans le monde.</p>
<p>Dans nos cours de droit des marques, nous soulignons l’importance en termes de valeur de mot choisi par une entreprise pour communiquer sur un produit, ainsi que l’importance de construire une stratégie de protection légale autour du mot choisi.</p>
<p>Outre la contrefaçon, une marque doit en effet faire face à de nombreux dangers pouvant nuire à son image. Parmi les risques figure notamment le parasitisme, qui consiste à promouvoir un produit ou un service similaire à celui d’un autre fournisseur clairement identifié. L’objectif est là d’inciter délibérément le consommateur à penser que le produit ou le service provient de ce fournisseur alors que tel n’est pas le cas.</p>
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<figcaption><span class="caption">Spot publicitaire pour Corona (2010).</span></figcaption>
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<p>Afin de se prémunir contre toutes ces manœuvres, nombre d’entreprises, notamment dans le secteur du vin et spiritueux, ont mis en place des services spécialisés dans la veille et surveillance partout dans le monde. Les cas des <a href="https://www.winespectator.com/articles/how-big-is-chinas-counterfeit-wine-problem-french-report-calls-it-an-industry-52194">vins français protégeant leurs marques</a> sur le marché chinois ont par exemple été récurrents ces derniers temps.</p>
<p>Et le mot « corona » alors ? Dans ce cas, l’épidémie a entraîné une forme de « parasitisme inverse », c’est-à-dire que le nom de la marque s’est retourné contre elle-même, en abîmant son image, en détruisant sa <a href="https://today.yougov.com/topics/food/articles-reports/2020/02/26/first-it-was-joke-corona-beer-really-suffering-cor">représentation positive</a>, à cause d’un événement externe et global.</p>
<p>Face à cette crise de réputation, Corona devra donc sans doute engager de nouveaux efforts de communication. Pourquoi pas en expliquant que boire une bière bien fraîche dans un verre propre est si extraordinaire qu’on peut se passer d’embrasser ses amis… mais ça, c’est le boulot des marketeurs !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/132783/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Edwin Juno-Delgado ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les publicités pour les bières cherchent généralement à instaurer une représentation forte de la marque en un seul mot. Une stratégie à double tranchant, comme l’illustrent les déboires de Corona.Edwin Juno-Delgado, Professeur Chercheur, Burgundy School of Business Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1303282020-01-30T17:37:15Z2020-01-30T17:37:15ZCosmétiques : les actions qui séduisent les millennials en magasin<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/312003/original/file-20200127-81346-1oem1sj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=105%2C8%2C5284%2C3579&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Près des trois quarts des millenials seraient prêts à utiliser une bouteille consignée.</span> <span class="attribution"><span class="source">Iakov Filimonov / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Les « millennials », également appelés génération Y, sont les personnes nées entre 1980 et 2000. En France, selon <a href="https://blog.digimind.com/fr/insight-driven-marketing/marques-medias-reseaux-sociaux-millennials-francais-en-chiffres">Digimind</a>, il seraient environ 16 millions, soit un quart de la population active. Ce groupe de consommateurs adopte des comportements spécifiques qui présagent souvent des évolutions à venir d’autres tranches d’âges, telles que la génération X ou les personnes nées entre 1965 et 1980, en matière de consommation. Les millennials représentent donc un groupe de consommateurs particulièrement intéressant à étudier.</p>
<p>Le fait d’avoir grandi avec des technologies mobiles et connectées les rend en effet plus susceptibles d’adopter de nouveaux usages, de nouvelles pratiques. On appelle d’ailleurs également les millennials les « digital natives » ou la « génération Internet ». Selon une étude <a href="https://www.airofmelty.fr/combien-de-temps-par-jour-les-15-34-ans-passent-ils-a-surfer-sur-leur-mobile-a666477.html">Médiamétrie</a>, les 15-34 ans passent par jour 1h24 à surfer (consultation de sites ou d’applis) sur leur mobile (contre 46 minutes pour les français, toutes catégories d’âge confondues).</p>
<p>Pour les marques de <a href="https://www.cosmetiquemag.fr/">cosmétiques</a>, les millennials représentent un fort potentiel. Une <a href="https://books.audencia.com/index.php?lvl=notice_display&id=36153">étude quantitative</a> (via un questionnaire en ligne), réalisée dans le cadre du mastère spécialisé Stratégies marketing à l’ère digitale (SMED) d’Audencia, indique leurs réactions à différentes actions que les marques de cosmétiques vendues en grandes et moyennes surfaces (GMS) pourraient mettre en œuvre afin de conquérir et fidéliser ce segment de consommateurs spécifique. Mais avant, cette étude souligne que tous ne font pas leurs courses de la même façon au sein des rayons cosmétiques des GMS.</p>
<h2>Quatre approches différentes</h2>
<p>L’étude réalisée dans le cadre du SMED indique que 26 % des millennials interrogés prennent leur temps au sein des rayons cosmétiques en GMS et touchent les produits avant d’en choisir un (dont 91,2 % de femmes). De la même manière, 23,7 % flânent dans ces rayons sans liste d’achat et achètent leurs produits selon leur humeur et leurs envies (dont 67,7 % de femmes).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/311959/original/file-20200127-81346-mxvv6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/311959/original/file-20200127-81346-mxvv6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/311959/original/file-20200127-81346-mxvv6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=272&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/311959/original/file-20200127-81346-mxvv6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=272&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/311959/original/file-20200127-81346-mxvv6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=272&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/311959/original/file-20200127-81346-mxvv6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=341&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/311959/original/file-20200127-81346-mxvv6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=341&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/311959/original/file-20200127-81346-mxvv6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=341&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><span class="source">Audencia</span></span>
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<span class="attribution"><span class="source">Audencia</span></span>
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<p>Une <a href="https://observatoirecetelem.com/wp-content/themes/obs-cetelem-V3/publications/2018/observatoire-cetelem-consommation-2018.pdf">étude européenne de l’Observatoire Cetelem</a> corrobore ces premiers résultats en indiquant que pour 57 % des 18-35 ans, faire du shopping est un plaisir (contre 42 % des plus de 35 ans). Ils dépensent dès lors le plus, selon <a href="https://www.servicesmobiles.fr/comprendre-les-millennials-grace-a-la-donnee-de-paiement-50897/">Joko</a> (appli de cashback) dans les enseignes de grande distribution (Leclerc, Carrefour et Auchan ; 45 % de leur portefeuille de dépenses) et sur Amazon.</p>
<p>L’étude réalisée dans le cadre du SMED par Charlotte Cauro indique également qu’à l’inverse, 36,6 % des millennials ne perdent pas de temps et vont droit au but au sein des rayons cosmétiques en GMS (dont 45,8 % d’hommes). Enfin, seulement 13,7 % se laissent aller à quelques extras en termes d’achats en fonction des promotions (dont 88,9 % de femmes). Par la suite, une analyse en composante principale a divisé les 12 actions étudiées que les marques de cosmétiques pourraient mettre en place en GMS en 4 groupes d’actions.</p>
<h2>Améliorer la proximité perçue</h2>
<p>Le premier groupe est relatif aux actions que les marques de cosmétiques en GMS pourraient mettre en place pour améliorer leur relation de proximité avec les millennials. Ainsi, 74,8 % des millennials interrogés seraient prêts à flasher le code-barre du produit acheté et un code-barre sur le ticket de caisse, afin de collecter des points pour recevoir de la marque à laquelle ce produit appartient des échantillons ou des mini produits gratuits, pour découvrir ainsi un peu plus cette marque et ses produits. 62,6 % souhaiteraient disposer de conseils et astuces beauté des marques vendues en GMS via une application à télécharger. 51,1 % voudraient quant à eux découvrir le produit et ses composants, sa marque et son histoire, via une application de jeu.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/311961/original/file-20200127-81395-1j3u80d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/311961/original/file-20200127-81395-1j3u80d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/311961/original/file-20200127-81395-1j3u80d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=372&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/311961/original/file-20200127-81395-1j3u80d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=372&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/311961/original/file-20200127-81395-1j3u80d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=372&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/311961/original/file-20200127-81395-1j3u80d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=468&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/311961/original/file-20200127-81395-1j3u80d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=468&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/311961/original/file-20200127-81395-1j3u80d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=468&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><span class="source">Audencia</span></span>
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<p>Ces résultats vont dans le sens d’une étude précédente réalisée par <a href="https://www.lsa-conso.fr/m-commerce-pourquoi-le-millennials-est-un-consommateur-different,264347">ComScore</a> qui indique que les 18-34 ans aiment les applis fonctionnelles, telles que Amazon, Gmail et Google Maps, ainsi que celles qui leur permettent de se divertir, telles que Facebook et YouTube.</p>
<h2>Travailler le packaging</h2>
<p>Deux groupes d’actions suivants sont relatifs au packaging des produits mais leurs objectifs sont différents. En premier lieu, les millennials souhaiteraient que les marques mettent en place des actions afin de réduire l’empreinte écologique des packagings de leurs produits.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/311994/original/file-20200127-81395-isqnj2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/311994/original/file-20200127-81395-isqnj2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/311994/original/file-20200127-81395-isqnj2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/311994/original/file-20200127-81395-isqnj2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/311994/original/file-20200127-81395-isqnj2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/311994/original/file-20200127-81395-isqnj2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/311994/original/file-20200127-81395-isqnj2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Près de 3 millennials sur 4 souhaiteraient pouvoir flasher le code-barre du produit pour accéder à plus d’informations et recevoir des échantillons gratuits.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Iakov Filimonov/Shutterstock</span></span>
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<p>Ainsi, 71 % des millennials interrogés seraient prêts à utiliser une bouteille consignée et la remplir quand elle est vide directement en magasin, même si cela représente pour eux un coût en termes d’organisation et de logistique. 67,9 % seraient également enclins à rapporter leur flacon vide en magasin, afin que celui-ci s’occupe de son recyclage.</p>
<p>Dans une moindre mesure, les millennials souhaiteraient des actions relatives à la personnalisation des packagings. 55 % seraient prêts à acheter une bouteille collector, à un prix légèrement plus élevé, pour la remplir ensuite avec un système de berlingos. En revanche, seulement 30,5 % seraient prêts à participer à un atelier de cocréation avec la marque pour trouver le nouveau produit de l’année à venir ainsi que son packaging.</p>
<h2>Découvrir la marque et son univers</h2>
<p>Le troisième groupe d’actions est relatif à la découverte des marques de cosmétiques et de leur univers. 72,5 % des millennials interrogés voudraient découvrir les coulisses du développement d’un produit et 51,1 % les coulisses de sa commercialisation. <a href="http://mktforms.gtnexus.com/rs/979-MCL-531/images/GTNexus_millennials_Brand_Loyalty_Infographic_FR.pdf">L’étude menée par YouGov France pour GT Nexus</a> complète ce résultat en indiquant que 72 % des 18-34 n’hésitent pas à ne plus acheter leur marque préférée si celle-ci ne correspond plus à leurs valeurs : la qualité des produits, leur disponibilité, les conditions de travail des employés qui les produisent et la démarche éco-responsable de l’entreprise.</p>
<p>Les millennials accordent donc de plus en plus d’importance à ce qui se passe en amont, dans les coulisses de la marque, lors de la fabrication et l’acheminement des produits, ce qui influencent directement ces quatre raisons de non-achat. Les millennials souhaitent ainsi que les marques s’engagent en termes de qualité produit et de Responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE) et le montrent. Ils leur demandent de l’authenticité et de la transparence dans leurs démarches, engagements et actions. Ils souhaitent ainsi protéger leur santé et l’environnement. Une <a href="https://yuka.io/wp-content/uploads/social-impact/Mesure%20d%27impact%20-%20Yuka.pdf">étude menée par Yuka</a> a d’ailleurs souligné que 90 % des utilisateurs pensent que cette appli nutritionnelle peut pousser les marques et industriels à proposer de meilleurs produits.</p>
<h2>Créer de l’animation en et hors magasin</h2>
<p>Le quatrième groupe comprend des actions que les marques de cosmétiques pourraient mettre en œuvre afin de générer de l’animation en et hors magasin. 67,9 % souhaiteraient ainsi que ces marques proposent des pop-up stores (ou magasins éphémères) pour découvrir et essayer les produits et 59,5 % voudraient le faire dans un lieu plus insolite encore (lié par exemple au divertissement, à la culture ou à l’hôtellerie).</p>
<p>D’ailleurs, le <a href="http://www.topcom.fr/zoom/barometre-in-store-media-ipsos-comment-les-francais-font-leurs-courses-du-quotidien-par-quoi-sont-ils-influences/">baromètre Shopper d’In-Store Media avec Ipsos</a> a montré que les 18-34 ans sont plus influencés que la moyenne des Français par les animations réalisées par les marques et les informations données. Ils sont plus réceptifs au fait de pouvoir essayer un produit (64 % contre 56 %) et aux informations (écrans, affiches) délivrées (55 % contre 50 %).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/311997/original/file-20200127-81357-1ovr2qx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/311997/original/file-20200127-81357-1ovr2qx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/311997/original/file-20200127-81357-1ovr2qx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/311997/original/file-20200127-81357-1ovr2qx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/311997/original/file-20200127-81357-1ovr2qx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/311997/original/file-20200127-81357-1ovr2qx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/311997/original/file-20200127-81357-1ovr2qx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les 18-34 ans sont plus sensibles à la possibilité d’essayer un produit que leurs aînés.</span>
<span class="attribution"><span class="source">TRMK/Shutterstock</span></span>
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<p>Il s’agit donc de moments privilégiés pendant lesquels les consommateurs sont ouverts et attentifs. Les marques et distributeurs doivent impérativement les exploiter afin de collecter des datas sur leurs consommateurs pour leur proposer ensuite une expérience toujours plus personnalisée. Enfin, seulement 39,7 % seraient intéressés par un linéaire innovant et visible (par exemple avec un néon ou un design soigné). Les linéaires actuels en GMS leur semblent donc satisfaisants en l’état afin de créer de l’animation en rayon.</p>
<p>L’étude réalisée dans le cadre du SMED montre donc que les millennials sont des « consom’acteurs » engagés qui souhaitent voir des évolutions de la part des marques et industriels, tant sur les produits délivrés (formules et packagings) que dans leurs prises de paroles. Dans un monde toujours plus digital où les consommateurs sont toujours plus connectés, les résultats de cette étude soulignent qu’il faut engager les consommateurs et leur faire prendre part à l’histoire de la marque qui s’écrit.</p>
<hr>
<p><em>Charlotte Cauro, diplômée d’Audencia, a participé à la rédaction de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/130328/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les jeunes consommateurs hyperconnectés attendent notamment des marques qu'elles mettent à disposition plus d'informations sur l'empreinte écologique des produits.Anne Launois, Professeur associée, AudenciaCindy Lombart, Professeure de marketing, AudenciaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1287942020-01-05T18:43:26Z2020-01-05T18:43:26ZMarketing sur les réseaux sociaux : à chaque produit son influenceur…<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/307222/original/file-20191216-124009-1m2bdzj.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=46%2C18%2C1349%2C734&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Patricia Bright, youtubeuse à succès et membre de la « beauty squad » de L'Oréal Paris.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.youtube.com/watch?v=mPHYz-cqCew">YouTube.</a></span></figcaption></figure><p>Aujourd’hui, les consommateurs sont moins enclins à faire confiance aux messages des marques et rejettent les <a href="https://www.observatoire-fidelite.com/comprendre-les-comportements-de-rejet-de-certains-consommateurs-face-aux-programmes-de-fidelite-1857.html">tentatives de manipulation</a>.</p>
<p>Dès lors, au sein des réseaux sociaux, qui se veulent des espaces privés, non commerciaux, les utilisateurs ont tendance à ne pas vouloir que les marques s’introduisent avec des discours de vente. L’usage croissant des « ad blockers », estimé à <a href="https://www.statista.com/statistics/1004964/ad-blocking-use-france/">30 % en France</a> en 2019, illustre bien ce fait.</p>
<p>Les consommateurs se fient davantage aux recommandations d’autres consommateurs et prescripteurs auxquels ils peuvent s’identifier.</p>
<p>À la recherche de sources d’inspiration variées et de repères crédibles dans ce qui pourrait leur plaire, ils se tournent plus particulièrement vers les influenceurs. Les influenceurs sont des nouveaux leaders d’opinion (aussi appelés KOL : <em>Key Opinion Leader</em>), qui détrônent souvent les ambassadeurs de marques, jugés moins authentiques et motivés uniquement par leur rémunération, les journalistes perçus comme moins proches de leur quotidien, ou encore les experts de la marque qui font moins rêver.</p>
<p>Les influenceurs sont au départ des « consommateurs comme les autres », mais ils se distinguent par un style propre à eux, un goût affiné, une certaine créativité, un mode de prise de parole personnalisée, une passion ou une certaine expertise dans un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0148296318303229">domaine de prédilection qui donne du poids à leurs opinions</a>. Ils développent une certaine « aura » et ainsi une capacité à attirer rapidement de larges audiences grâce au développement des médias sociaux. Leur audience apprécie un discours personnalisé et authentique. Ce qu’ils achètent, ce qu’ils portent, où ils voyagent, où ils sortent intriguent et inspirent les followers.</p>
<h2>Un marketing proche du placement de produit</h2>
<p>Fort de leur crédibilité, les influenceurs attirent aussi les marques qui souhaitent tirer profit de leur attractivité pour parler à leur audience.</p>
<p>Les marques peuvent organiser un évènement où les influenceurs sont invités et encouragés ensuite à poster sur leurs plates-formes des commentaires sur leur participation et sur la marque sponsor. C’est notamment ce qu’avait organisé Yves Saint Laurent Beauté à l’occasion du dernier festival américain <a href="https://stellar.io/fr/blog/coachella-influencer-marketing">Coachella</a>.</p>
<p>Pour éviter le rejet d’un discours trop commercial, les marques utilisent souvent avec les influenceurs une stratégie organique d’insertion dans un contenu pré-existant. Elles insèrent ainsi des messages (publicitaires) dans le contenu diffusé sur les plates-formes des influenceurs, avec une démarche proche du placement de produit.</p>
<p>Le message introduit dans le contenu de l’influenceur peut être créé par la marque ou par l’influenceur, ou conjointement, à l’image de la <em>beauty squad</em> de L’Oréal Paris avec des YouTubeuses à succès. En effet, le <a href="https://hbr.org/2019/04/how-brands-can-build-successful-relationships-with-influencers">degré de contrôle</a> sur le contenu proposé sur la marque peut varier, en laissant soit une grande liberté à l’influenceur, soit en imposant un message délivré par la marque.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/6uV9YYLJ8f4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Our new beauty squad », Patricia Bright (L’Oréal, 2017).</span></figcaption>
</figure>
<p>Pour choisir le bon influenceur avec lequel collaborer, les marques doivent alors définir leur critère de choix et leur mode de collaboration.</p>
<p>Nous proposons la catégorie de produits comme étant un élément important dans la prise de décision. En effet, selon que la marque concerne des produits spécialisés, de commodité ou d’achat réfléchi, le rôle et le type d’influenceur concerné doivent être adaptés.</p>
<h2>Des stratégies à adapter</h2>
<p>Selon la catégorie de produits concernée, les objectifs de communication ne sont pas les mêmes car les mécanismes de <a href="http://documents.irevues.inist.fr/handle/2042/29428">persuasion</a> diffèrent. En particulier, on peut distinguer <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/002224295802300108">trois catégories de produits</a> : les <a href="https://www.e-marketing.fr/Definitions-Glossaire/Convenience-goods-241087.htm">produits de commodité</a>, les <a href="https://www.e-marketing.fr/Definitions-Glossaire/Shopping-goods-238868.htm">produits d’achat réfléchi</a>, et les <a href="https://www.e-marketing.fr/Definitions-Glossaire/Specialty-goods-speciality-goods-243201.htm">produits spécialisés</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/307404/original/file-20191217-58302-1nclvin.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/307404/original/file-20191217-58302-1nclvin.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/307404/original/file-20191217-58302-1nclvin.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/307404/original/file-20191217-58302-1nclvin.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/307404/original/file-20191217-58302-1nclvin.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/307404/original/file-20191217-58302-1nclvin.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=462&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/307404/original/file-20191217-58302-1nclvin.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=462&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/307404/original/file-20191217-58302-1nclvin.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=462&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
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<p>Le processus d’achat, qui varie donc selon la catégorie de produits, nécessite donc une adaptation de la stratégie de communication s’appliquant au marketing d’influence. En effet, nous avons pu repérer dans la pratique des exemples différenciés d’objectifs de communication selon les produits.</p>
<p>Des agences comme Webedia, spécialisées dans le marketing d’influence, font ainsi déjà appel à <a href="https://contentshaker.webedia-group.com/dossier-strategie-influence-macro-micro-nano">trois types d’utilisation des influenceurs</a> selon l’objectif de communication de la marque : les nano-influenceurs (moins de 5 000 followers) pour la recommandation produit ; les micro-influenceurs (moins de 100 000 followers) pour la crédibilité du message ; et les macro-influenceurs (plus de 100 000 followers) pour incarner la marque.</p>
<p>Pour les produits de commodité, pour lesquels l’objectif de communication prioritaire est de faire aimer et préférer sa marque auprès d’une large cible, un influenceur très en vue qui a beaucoup de followers peut emporter l’adhésion.</p>
<p>Ainsi, le spécialiste des boissons Oasis utilise un macro-influenceur pour incarner la marque, Maskey, qui compte plus d’1,5 million de followers sur YouTube.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/ttnLSh8e3m8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Et si les rappeurs étaient… (Maskey, 2017).</span></figcaption>
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<p>Pour les produits d’achat réfléchi, pour lesquels l’objectif est de faire connaître la marque et de convaincre que le produit est adapté au besoin de chaque client/utilisateur, une recommandation par des personnes qui sont considérées comme proches de soi et avec des habitudes similaires, est essentielle.</p>
<p>La marque de produits laitiers Vrai a sollicité 774 membres de la <a href="https://www.sampleo.com/fr/test-avis/765/VRAI/Fromages-Blancs-aux-trois-laits">plate-forme Sampleo</a>, et a proposé des échantillons gratuits en échange de commentaires des utilisateurs ayant testé le produit (ce sont là des nano-influenceurs), pour le lancement d’un nouveau produit. Ces derniers ont noté avec 98 % d’avis positifs 2 % d’avis négatifs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/306584/original/file-20191212-85397-1ef7zx5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/306584/original/file-20191212-85397-1ef7zx5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/306584/original/file-20191212-85397-1ef7zx5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=320&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/306584/original/file-20191212-85397-1ef7zx5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=320&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/306584/original/file-20191212-85397-1ef7zx5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=320&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/306584/original/file-20191212-85397-1ef7zx5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=402&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/306584/original/file-20191212-85397-1ef7zx5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=402&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/306584/original/file-20191212-85397-1ef7zx5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=402&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.sampleo.com/fr/test-avis/765/VRAI/Fromages-Blancs-aux-trois-laits">Capture d’écran</a></span>
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</figure>
<p>Enfin, pour les produits spécialisés, l’objectif de communication est transmettre une parole d’expert, qui puisse guider et inspirer afin de donner envie d’adopter le produit.</p>
<p>Evaneos, spécialiste du voyage sur-mesure, collabore ainsi avec des micro-influenceurs experts qui partagent leur expérience. Le voyagiste a par exemple cocréé une web-série avec la blogueuse Madame Oreille qui fait partager le quotidien de deux familles, en Indonésie, avec sa fille.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/FK6E7k4Ok-s?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">L’Indonésie en famille, immersion à Sumatra : le teaser (Evaneos, 2019).</span></figcaption>
</figure>
<h2>Accompagner les influenceurs</h2>
<p>La stratégie d’accompagnement de la marque, pour être efficace, doit respecter cette correspondance entre le type de produit et le profil de l’influenceur. Une attention particulière doit être portée à l’accompagnement de l’influenceur dans sa communication pour qu’il soutienne bien la stratégie. Par exemple, pour les produits spécialisés, il est essentiel que la marque encourage l’expert passionné, reconnu et légitime sur le domaine, à proposer des idées, partager les détails de son expérience et ajouter ses propres connaissances du sujet.</p>
<p>Dans le cas d’un produit plus expérientiel, comme les voyages ou la gastronomie, il semble aussi important d’aider l’influenceur à traduire en mots et images ses émotions et ressentis et à comprendre ce qui va capter l’intérêt de son audience en termes de mise en scène et de « story telling ». Cela peut nécessiter un accompagnement spécifique, avec des supports à la création de belles images ou de montages vidéo par exemple, tout en laissant une part de créativité personnelle.</p>
<p>Pour un produit de commodité, la marque pourra mettre des moyens techniques permettant à l’influenceur d’avoir une démarche de théâtralisation, avec des rendus d’images parfaites et une scénographie qui donnera envie de partager largement la communication.</p>
<p>Par ailleurs, selon le profil et l’objectif de communication, il est primordial que la marque trouve le bon équilibre entre un certain contrôle sur le discours de marque et une certaine liberté pour que l’influenceur puisse imprimer son style, dans l’incarnation, l’usage quotidien ou le regard d’expert. Il s’agit de laisser certaines libertés tout en guidant sur les thèmes à aborder selon l’audience et l’objectif de communication et en donnant des supports pour comprendre un produit ou une expérience (par exemple en donnant à l’influenceur une grille pour évaluer toutes les caractéristiques techniques d’un produit ou sensorielles d’une expérience).</p>
<p>Les marketers prennent alors un rôle d’éducation des influenceurs : ils doivent les aider à construire leur expertise et donc leur crédibilité, ils en sont d’autant plus percutants, influents et l’image en devient plus valorisante pour chacun.</p>
<h2>Une optimisation des moyens</h2>
<p>En synthèse nous proposons donc trois stratégies de marketing d’influence qui mettent en correspondance la catégorie de produits, l’objectif de communication, le type d’influenceurs ainsi que la stratégie d’accompagnement, ci-dessous présentées :</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/306585/original/file-20191212-85371-1xp08ek.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/306585/original/file-20191212-85371-1xp08ek.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/306585/original/file-20191212-85371-1xp08ek.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/306585/original/file-20191212-85371-1xp08ek.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/306585/original/file-20191212-85371-1xp08ek.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/306585/original/file-20191212-85371-1xp08ek.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/306585/original/file-20191212-85371-1xp08ek.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p>À l’heure où il est <a href="https://blog.hivency.com/fr/les-chiffres-du-marketing-dinfluence-en-2019">estimé</a> que les entreprises dépensent 21 % de leur budget de communication dans des dispositifs de marketing d’influence et que mesurer et améliorer le retour sur investissement est <a href="https://www.meltwater.com/fr/blog/chiffres-marketing-influence/">cité comme le défi n°1</a>, le besoin de mieux structurer sa stratégie de marketing d’influence paraît essentiel.</p>
<p>Ainsi notre proposition de structurer son approche autour du triptyque produit/influenceur/objectif de communication devrait aider les marketers dans leur recherche d’efficacité et d’optimisation des moyens marketing.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/128794/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Pour optimiser leur stratégie de communication, les marques doivent cibler leurs relais sur les réseaux sociaux en fonction du type de produit sur lequel elles communiquent.Pierrine Griffiths, Directrice académique Executive Mastère Spécialisé Direction marketing & digital, IÉSEG School of ManagementGwarlann De Kerviler, Associate Professor - Head of Marketing & Sales Department, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1284122019-12-19T17:51:14Z2019-12-19T17:51:14Z« Coca-Cola is coming to town », ou l'épopée publicitaire de Santa<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/305442/original/file-20191205-38988-t9dvkk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Images publicitaires de la marque Coca-Cola mettant en scène le personnage de Santa. </span> </figcaption></figure><blockquote>
<p>« Raconter une histoire c’est donner des repères, des bornes, avec suffisamment de force pour que l’imagination recrée les intervalles entre eux, avec infiniment plus de réalité que les mots, le dessin, ni même le film, n’en offriront jamais. Et cette histoire-là fonctionnait. D’un dessin à l’autre, il y avait tout un chapitre. »</p>
</blockquote>
<p>C’est ainsi que Ted Benoit, dessinateur et scénariste de bande dessinée, décrit l’histoire de Santa dans les publicités Coca-Cola. Les images du Père Noël peintes par Haddon H. Sundblom font historiquement partie du storytelling de la marque, en maniant avec dextérité une caractéristique de la BD, l’ellipse, qui consiste à laisser volontairement un intervalle vide entre deux scènes pour que le public puisse imaginer la scène manquante. C’est ce procédé que nous allons étudier dans les publicités Coca-Cola mettant en scène Santa Claus dans les années 30.</p>
<h2>The Night Before Christmas</h2>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/305449/original/file-20191205-39018-ft26dd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/305449/original/file-20191205-39018-ft26dd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/305449/original/file-20191205-39018-ft26dd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=758&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/305449/original/file-20191205-39018-ft26dd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=758&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/305449/original/file-20191205-39018-ft26dd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=758&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/305449/original/file-20191205-39018-ft26dd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=952&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/305449/original/file-20191205-39018-ft26dd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=952&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/305449/original/file-20191205-39018-ft26dd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=952&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">« A Visit from Saint Nicholas » par Clement C. Moore.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Avant de nous intéresser au rôle de Santa dans les publicités Coca-Cola, il convient de rappeler ses origines pour mieux en saisir la portée symbolique dans l’univers publicitaire de la marque. « Santa Claus » est la dénomination américanisée de « Saint-Nicolas » et ce serait le conte de Clément Moore publié en 1823 « A Visit from Saint Nicholas » qui aurait popularisé Saint-Nicolas aux États-Unis.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/305467/original/file-20191205-38988-b9r7ku.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/305467/original/file-20191205-38988-b9r7ku.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/305467/original/file-20191205-38988-b9r7ku.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=912&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/305467/original/file-20191205-38988-b9r7ku.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=912&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/305467/original/file-20191205-38988-b9r7ku.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=912&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/305467/original/file-20191205-38988-b9r7ku.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1146&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/305467/original/file-20191205-38988-b9r7ku.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1146&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/305467/original/file-20191205-38988-b9r7ku.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1146&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Illustration de T. Nast, Harper’s Weekly, 1863.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il a pour la première fois été dessiné sous les traits d’un homme rondouillard, barbu et vêtu de fourrure par l’illustrateur américain Thomas Nast, dans le journal <em>Harper’s Weekly</em> dès le 3 janvier 1863. C’est en décembre 1930 que le personnage de Santa tel qu’on le connaît aujourd’hui fait officiellement son apparition aux côtés de la boisson dans le <em>Saturday Evening Post</em>, peint par Fred Mitizen.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/305742/original/file-20191208-90592-v9hnko.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/305742/original/file-20191208-90592-v9hnko.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/305742/original/file-20191208-90592-v9hnko.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=594&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/305742/original/file-20191208-90592-v9hnko.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=594&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/305742/original/file-20191208-90592-v9hnko.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=594&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/305742/original/file-20191208-90592-v9hnko.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=747&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/305742/original/file-20191208-90592-v9hnko.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=747&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/305742/original/file-20191208-90592-v9hnko.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=747&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Annonce américaine publiée en 1930 dans le <em>Saturday Evening Post</em>.</span>
<span class="attribution"><span class="source">_Les plus belles affiches de Coca-Cola_, Denoël, 1986</span></span>
</figcaption>
</figure>
<figure class="align-right zoomable">
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<span class="caption">Présentoir de table de 1921. Pour donner à cette image une ambiance estivale, la jeune fille est installée sur des rochers près de planches de bois évoquant les restants d’une amarre.</span>
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<p>À cette époque, la plupart des gens considéraient encore Coca-Cola comme une boisson réservée aux périodes estivales. Les « bathing girls » de Coca-Cola étaient déjà devenues une tradition à l’intérieur même de la publicité de la marque. Dans les années 30, Coca-Cola poursuit sa stratégie de communication pour couvrir toutes les saisons après sa campagne « Thirst knows no season » pour rappeler aux gens que Coca-Cola peut étancher notre soif à n’importe quelle saison, surtout en hiver, avec une campagne associant Santa à la boisson pour chaque fin d’année.</p>
<h2>1931 : « My hat’s off to the pause that refreshes »</h2>
<figure class="align-left zoomable">
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<span class="caption">Annonce américaine publiée en 1931 dans le <em>Saturday Evening Post</em>.</span>
<span class="attribution"><span class="source">_Les plus belles affiches de Coca-Cola_, Denoël, 1986</span></span>
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</figure>
<p>C’est avec cette annonce parue en 1931 dans le même journal que l’on découvre le Père Noël de Haddon H. Sundblom, celui-là même qui sera mis en scène dans de nombreuses autres images publicitaires, faisant de Coca-Cola le créateur du plus célèbre Père Noël. Ce personnage rieur, rondouillard et complètement vêtu de rouge a en effet su traverser les années et devenir au fil du temps l’icône universelle de Noël. Santa Claus déclare : <em>J’enlève mon chapeau avant la pause qui rafraîchit.</em></p>
<p>Coca-Cola semble vouloir montrer que, pendant cette période de crise, nous sommes tous égaux, en représentant Santa en train de prendre sa pause Coca-Cola après avoir fait son travail. Le message qui accompagne cette image n’en est pas moins évocateur : « Vieux Santa, l’homme le plus occupé du monde, prend le temps pour la pause qui rafraîchit, avec le Coca-Cola glacé. Il sait même comment se montrer bon envers lui-même. Et donc il se montre toujours souriant. Alors pourquoi pas vous ? Où que vous fassiez des courses, vous trouverez une joyeuse « soda-fountain » avec du Coca-Cola glacé déjà prêt ». Ce message humoristique insiste sur la disponibilité de la boisson, présente n’importe où, et source de plaisir lors de la pause qui rafraîchit.</p>
<p>Cette image paraît également véhiculer une atmosphère heureuse à travers les rondeurs et le sourire de Santa. Nous voilà donc dans la symbolique de Noël, cette fête religieuse célébrée en… hiver. Un détail qui a toute son importance dans la stratégie de Coca-Cola puisque la firme semble ici revendiquer son intemporalité en montrant que même en période non estivale, la pause Coca-Cola a sa place. Santa est présenté ici comme une icône hivernale. Couleur emblématique de la marque, le rouge agit ici comme un important stimulus visuel qui force le regard du récepteur sur le Père Noël et sur le logo. Santa Claus et Coca-Cola ne font plus qu’un, unis par la couleur rouge.</p>
<h2>Coca-Cola, raconte-nous l’histoire de Santa !</h2>
<figure class="align-center zoomable">
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<span class="caption">Publicité de 1932.</span>
<span class="attribution"><span class="source">_Les plus belles affiches de Coca-Cola_, Denoël, 1986</span></span>
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</figure>
<p>En 1932, nous retrouvons le Père Noël de Sundblom dans une nouvelle publicité Coca-Cola, et cette fois-ci nous avons véritablement affaire à une histoire. En effet, Santa se trouve dans une situation inattendue et pour le moins surprenante : il lit le message laissé par un enfant (Jimmy) qui lui a écrit « Cher Santa, s’il te plaît repose-toi ici. Jimmy ». Sont accolés au message une bouteille de Coca-Cola, un verre, un ouvre-bouteille et une chaussette pour les cadeaux.</p>
<p>Cette scène semble donc se dérouler la veille de Noël, et Sundblom semble s’être inspiré de la légende de Saint-Nicolas, telle qu’elle est narrée dans le poème de Clément Moore (1823). Jimmy a pensé à Santa en lui laissant une bouteille de Coca-Cola près de sa chaussette la veille de Noël. Nous pourrions donc penser que sans sa « pause Coca-Cola », Santa Claus aurait du mal à se consacrer pleinement à sa tâche. Ce ne sont donc pas les qualités de la boisson qui sont mises en avant dans cette publicité, mais bien l’imaginaire qui est construit autour de Coca-Cola. On ne vend alors plus une boisson mais du rêve en associant son image à la légende de Saint-Nicolas, lui conférant par là même un caractère mythique.</p>
<p>Nous allons à présent étudier trois images qui se suivent dans le temps et qui racontent au final une grande histoire que seul le récepteur est à même de construire avec son imagination.</p>
<figure class="align-right zoomable">
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<figcaption>
<span class="caption">Publicité de 1936.</span>
<span class="attribution"><span class="source">_Les plus belles affiches de Coca-Cola_, Denoël, 1986</span></span>
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</figure>
<p>Pour Noël 1936 : Santa est présenté comme un « grand enfant » qui s’amuse « lui aussi » en profitant de la « pause qui rafraîchit » pour boire son Coca-Cola. Boire Coca-Cola la veille de Noël s’apparenterait à un moment d’évasion, à l’instar du petit garçon qui s’amuse avec son train électrique ou de la petite fille qui s’occupe de sa poupée.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/305752/original/file-20191208-90574-2xhbmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/305752/original/file-20191208-90574-2xhbmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/305752/original/file-20191208-90574-2xhbmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/305752/original/file-20191208-90574-2xhbmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/305752/original/file-20191208-90574-2xhbmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/305752/original/file-20191208-90574-2xhbmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/305752/original/file-20191208-90574-2xhbmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/305752/original/file-20191208-90574-2xhbmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Publicité de 1937.</span>
<span class="attribution"><span class="source">_Les plus belles affiches de Coca-Cola_, Denoël, 1986</span></span>
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</figure>
<p>Un an plus tard, pour Noël 1937 : « Donner et prendre » est désormais devenue la devise officielle du Père Noël de Sundblom. Alors que l’année d’avant il prenait fièrement sa pause au pied du sapin d’une demeure familiale, en 1937 Santa savoure avec allégresse une bouteille de Coca-Cola prise dans le frigidaire d’une autre demeure familiale (à moins que ce ne soit la même… et c’est tout l’enjeu de l’ellipse narrative de jouer avec notre interprétation).</p>
<figure class="align-right zoomable">
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<figcaption>
<span class="caption">Publicité de 1938.</span>
<span class="attribution"><span class="source">_Les plus belles affiches de Coca-Cola_, Denoël, 1986</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Enfin, nous voilà à Noël 1938 : Santa remercie la petite fille, et par là-même tous les enfants qui lui ont laissé une bouteille de Coca-Cola dans le frigidaire chaque veille de Noël pour qu’il puisse profiter de la « pause qui rafraîchit » et continuer de distribuer des cadeaux. La logique de gratification bat ici son plein : si tu veux que Santa vienne, il faut qu’il y ait du Coca-Cola à la maison. Comme le soulignent Gérard Cholot, Daniel Cuzon-Verrier et Pierre Lemaire dans leur ouvrage consacré aux plus belles affiches de Coca-Cola, Santa « apparaît sous le pinceau d’Haddon Sundblom comme le plus fantastique messager de la marque. Nous le voyons arriver dans un foyer, fatigué – on le serait à moins – et se diriger tout naturellement vers le réfrigérateur familial pour se servir un bon Coke bien frais. Raigaillardi, il peut se consacrer à sa sainte mission ! ».</p>
<p>Coca-Cola a su instaurer avec le personnage de Santa un lien unique et durable dans le temps. A travers cette image et cette histoire qui s’adresse à tous les foyers, chaque veille de Noël, Coca-Cola entretient une part du rêve américain.</p>
<hr>
<p><em>Cette contribution s'appuie sur l'article de recherche intitulé « <a href="http://frenchjournalformediaresearch.com/lodel-1.0/main/index.php?id=2079">L’imagerie publicitaire de Coca-Cola durant l’entre-deux-guerres : des artefacts publicitaires vecteurs du mythe de l’américanité ?</a> », publié en 2021 dans la revue French Journal For Media Research.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/128412/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Aubrun est membre du centre de recherche Marge (EA 3712), rattaché à l'Université Lyon 3 : <a href="https://marge.univ-lyon3.fr">https://marge.univ-lyon3.fr</a>. L’équipe, interdisciplinaire, regroupe des spécialistes de littératures et d’Info-com (sections 09, 14, 13 et 71 du CNU). </span></em></p>Lorsque la Coca-Cola Company s’empare de l’imaginaire de Santa Claus dans les années 30 sur fond de crise économique, elle signe le début d’un fort storytelling de marque qui repose sur l’ellipse.Frédéric Aubrun, Enseignant-chercheur en Marketing digital & Communication au BBA INSEEC - École de Commerce Européenne, INSEEC Grande ÉcoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1265492019-11-11T20:34:50Z2019-11-11T20:34:50Z« Moi, robot, je veux ce Gucci » : les nouveaux consommateurs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/300484/original/file-20191106-12450-4d9lmp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=14%2C53%2C983%2C670&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le robot-consommateur, un scénario désormais plus proche de la réalité que de la science-fiction...</span> <span class="attribution"><span class="source">Corona Borealis Studio / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Ces dernières années, plusieurs films sont sortis, tels que I, robot, Ex-Machina et Chappie, qui mettent en scène des robots humanoïdes capables de penser par eux-mêmes. En tant que chercheur, je suis curieux de savoir s’il s’agit uniquement de science-fiction ou si ces films illustrent de vrais problèmes qui auront une incidence sur la société et les marchés de consommation à venir. Plus précisément, je me demande si les robots humanoïdes conscients de leur nature pourront jouer un rôle actif dans la société, et s’il est possible qu’ils deviennent des consommateurs de produits et de marques.</p>
<p>Depuis les années 1950, la recherche en intelligence artificielle (IA) s’est concentrée sur la création de « machines pensantes ». Plus récemment, des entreprises de technologie telles que Google ont <a href="https://www.independent.co.uk/life-style/gadgets-and-tech/news/google-patents-robots-with-personalities-in-first-step-towards-the-singularity-10151817.html">beaucoup investi</a> dans les systèmes de développement de la personnalité des robots. Les prévisions des experts divergent. Cependant, plusieurs d’entre eux <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0040162510002106">suggèrent</a> qu’au cours des prochaines décennies, l’intelligence artificielle sera pleinement consciente.</p>
<p>Dans <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0016328717300617">mon récent article</a>, je soutiens que l’émergence de robots humanoïdes dotés d’intelligence artificielle aura des répercussions profondes pour la société et pour les entreprises. Je pense également que s’ils développent une conscience de soi similaire à celle de l’homme, la notion de consommateur doit s’étendre de la race humaine aux robots, car les robots dotés d’une intelligence artificielle peuvent également utiliser les marques comme moyen d’expression individuelle.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/v30z9i1fw_k?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Les robots, la société et le marché (ESCP Europe, septembre 2019).</span></figcaption>
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<h2>Le robot, bientôt proactif ?</h2>
<p>De <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0148296311002670">nombreux éléments</a> suggèrent que les consommateurs utilisent les attributs d’image associés à une marque pour exprimer leur estime de soi. <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/mar.20415/full">Par exemple</a>, un consommateur peut acheter un sac Gucci pour projeter sa richesse dans un contexte social. Il est intéressant de noter que des <a href="https://academic.oup.com/jcr/article-abstract/32/1/119/1796308">études montrent</a> que, vers l’âge de 7 ou 8 ans, la conscience de soi des enfants arrive à un stade de développement leur permettant d’associer des marques à des traits de personnalité et à un sens social. En conséquence, les enfants commencent à utiliser les marques comme moyen d’expression personnelle et deviennent des consommateurs proactifs.</p>
<p><a href="https://www.independent.co.uk/life-style/gadgets-and-tech/news/a-robot-has-passed-the-self-awareness-test-10395895.html">Les chercheurs</a> ont déjà mis au point des robots dotés d’une intelligence artificielle qui montrent des niveaux plus faibles de conscience et d’expression de soi. J’avancerais donc qu’une fois que les robots développent des niveaux de conscience de soi et de capacités d’expression similaires à ceux de l’homme, ils peuvent également devenir des consommateurs proactifs. Cela aura des implications dans bon nombre de domaines.</p>
<h2>Cibler les robots et leurs propriétaires</h2>
<p><a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007%2F978-3-319-13500-7_1">Des études</a> montrent que les robots peuvent améliorer leurs capacités d’apprentissage social grâce aux interactions humaines. Dans le secteur de la santé, on pourrait imaginer que les futurs robots utiliseront différentes voix et expressions pour améliorer leur interaction avec les patients.</p>
<p>De plus, une fois que les robots développent des capacités d’expression personnelle, ils peuvent même rechercher des vêtements ou des pièces mécaniques spécifiques au travail, afin de projeter l’image d’un professionnel de la santé.</p>
<p>Ceci constitue une opportunité pour les entreprises. En premier lieu, elles pourront cibler les propriétaires de ces robots, selon le même principe qui veut que les parents achètent des produits pour leurs jeunes enfants. Deuxièmement, les professionnels du marketing pourraient même cibler directement les robots avec leurs communications marketing numériques, car les robots peuvent demander activement sur Internet des produits spécifiques qui permettent de personnaliser leur apparence et qui contribuent à leur expression individuelle.</p>
<h2>Habillages et expressions faciales spécifiques</h2>
<p>De même, dans le secteur de l’éducation, les robots conscients vont probablement offrir aux étudiants une expérience d’apprentissage semblable à l’expérience humaine en raison de leur capacité à exprimer des traits distinctifs de personnalité. Par conséquent, les entreprises seront intéressées par la possession et la promotion de robots plus attrayants pour les étudiants potentiels.</p>
<p><a href="https://search.ieice.org/bin/summary.php?id=e87-d_6_1290">La recherche suggère</a> que, comme les humains, les robots peuvent apprendre des interactions sociales pour mettre à jour leur image de soi. Une fois que les robots humanoïdes auront pleinement conscience d’eux-mêmes, ils exprimeront leur désir d’équiper leur « corps » de robot en fonction de l’établissement d’enseignement.</p>
<p>Par exemple, les robots dotés d’une conscience de soi qui enseignent aux enfants peuvent essayer d’exprimer une image amicale et jeune, tandis que ceux qui enseignent aux dirigeants d’entreprise peuvent essayer de présenter une image plus formelle et professionnelle. Cela peut signifier que les robots demandent des habillages spécifiques ou même, adaptent leurs expressions faciales.</p>
<h2>Apprendre pour plaire socialement</h2>
<p>Dans le cadre d’une relation sentimentale, les êtres humains ont pour habitude de <a href="https://academic.oup.com/jcr/article/15/2/139/1841428">s’offrir des cadeaux</a>. De même, dans les interactions entre humains et robots, le propriétaire peut introduire des achats d’accessoires, car il peut souhaiter personnaliser la relation pour rendre le robot plus attrayant. On s’attend à ce que les robots conscients d’eux-mêmes et prenant part à une relation puissent demander aux produits et aux marques d’exprimer leur image personnelle. Selon l’occasion sociale, un rendez-vous par exemple, les robots peuvent essayer d’utiliser différents accessoires.</p>
<p>En outre, puisque les robots <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-319-13500-7_2">peuvent apprendre</a> des interactions sociales, ils sont susceptibles de connaître les préférences de leurs « partenaires », puis de rechercher des produits qui leur plaisent.</p>
<p>Dans leur forme actuelle, les opinions exprimées sont, de fait, futuristes. Cependant, si la recherche sur la conscience de soi du robot se déroule comme prévu, les robots ne seront peut-être pas uniquement des membres passifs de notre société. Ils pourront au contraire devenir des membres actifs et même être considérés comme des consommateurs. La société et les entreprises doivent être préparées à ce qui va arriver.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/126549/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Héctor González-Jiménez ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>À partir du moment où les robots pourront être dotés d’une conscience de soi, rien ne les empêchera de devenir des clients pour les entreprises.Héctor González-Jiménez, Associate Professor in Marketing, ESCP Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1247932019-10-20T19:40:32Z2019-10-20T19:40:32ZFaut-il accorder du crédit au projet « Alger Ville durable » ?<p>Sur le plan législatif, les autorités algériennes ont affirmé de longue date <a href="http://www.aps.dz/algerie/80052-l-onu-salue-les-effort-de-l-algerie-pour-atteindre-les-objectifs-de-developpement-durable">leur adhésion aux principes du développement durable</a>. Différents <a href="https://www.cairn.info/revue-droit-et-societe1-2009-3-page-687.htm">textes de lois et décrets exécutifs</a> ont été publiés dans ce sens. En 1994, un <a href="https://www.ecolex.org/details/legislation/decret-presidentiel-no-94-465-portant-creation-du-haut-conseil-de-lenvironnement-et-du-developpement-durable-et-fixant-ses-attributions-son-organisation-et-son-fonctionnement-lex-faoc029159/">Haut conseil de l’environnement et du développement durable</a> a même été créé suite aux recommandations de la <a href="https://www.un.org/french/events/rio92/rio-fp.htm">Conférence de Rio</a>. Mais ce n’est réellement qu’à partir des années 2001/2002, avec l’élaboration du <a href="http://www.algerianembassy.hu/images/stories/algerie-paned.pdf">Plan national d’action pour l’environnement et le développement durable</a> (PNAE-DD), que des actions concrètes ont été programmées pour l’amélioration du cadre et de la qualité de vie en ville.</p>
<h2>Projet Alger ville durable</h2>
<p>L’appel à projets lancé dans le cadre de la révision du Plan directeur d’aménagement et d’urbanisme (PDAU) d’Alger en 2006 a clairement énoncé que l’objectif principal de cette révision était de faire d’« Alger ville durable », un exemple en matière de préservation de la nature et de protection contre les risques naturels et technologiques. Les projets retenus ont donc été ceux qui ont su mettre en avant cette dimension environnementale.</p>
<p>En proposant de faire d’Alger une <a href="http://blog.lefigaro.fr/algerie/2013/04/alger-2030-les-projets-qui-transformeront-la-ville.html">« éco-métropole » méditerranéenne</a>, l’agence d’architectes <a href="http://www.arte-charpentier.com/fr/projet/la-baie-dalger/">Arte Charpentier</a> a su séduire les autorités algériennes, qui ont toujours rêvé d’un statut particulier pour la capitale.</p>
<p>Dans un contexte où l’image et le <em>branding</em> s’imposent de plus en plus dans les choix stratégiques d’aménagement, les autorités ont favorisé le recours aux grandes signatures dans le monde de l’architecture et l’urbanisme. En plus du groupement Arte Charpentier, le PDAU d’Alger à l’horizon 2035 a <a href="https://ruralm.hypotheses.org/972">été confié à Parque Expo</a>, une agence portugaise qui a contribué à redonner à Lisbonne une nouvelle image et à consolider son attractivité à l’échelle mondiale.</p>
<h2>Les sept ambitions d’Alger à l’horizon 2035</h2>
<p>Ces ambitions traduisent les aspirations et attentes du maître de l’ouvrage, en l’occurrence la Wilaya d’Alger. Elles se déclinent suivant une logique thématique et sectorielle correspondant à sept domaines considérés comme fondamentaux pour l’élaboration et la concrétisation de la vision stratégique du développement :</p>
<ul>
<li><p>Le positionnement : Alger, « ville emblématique »</p></li>
<li><p>La socioéconomie : Alger, « moteur du développement tertiaire de l’Algérie »</p></li>
<li><p>L’occupation du territoire : Alger, « ville belle qui maîtrise son étalement »</p></li>
<li><p>L’environnement : Alger, « éco-métropole de la Méditerranée et ville jardin »</p></li>
<li><p>La mobilité : Alger, « ville des mobilités et des proximités »</p></li>
<li><p>Les risques : Alger, « ville sûre »</p></li>
<li><p>La gouvernance : Alger, « ville empreinte de bonne gouvernance ».</p></li>
</ul>
<p>Différents plans thématiques ont été élaborés pour concrétiser ces ambitions. Ces plans détaillent la stratégie du plan directeur en termes de restauration des écosystèmes (Plan vert), de gestion de la ressource eau (Plan bleu), de réhabilitation du centre historique, création de nouvelles polarités et d’habitat (Plan blanc), de mobilité et d’économie et cohésion sociale.</p>
<p><strong>Le Plan vert</strong></p>
<p>Il a pour objectif de restaurer les écosystèmes de la capitale via la création de plusieurs « poumons verts », parcs urbains et autres agri-parcs, la réhabilitation des parcs et jardins existants du centre-ville et l’introduction un réseau vert continu entre ces différents espaces grâce à la plantation d’arbres d’alignement le long des artères principales de la ville et la création de transversales ou couloirs verts. Ces derniers serviraient de « fenêtres » vers la mer.</p>
<p>Certaines de ces actions ont été déjà concrétisées. Le paysagement des autoroutes a été finalisé, de nombreux parcs et jardins ont été réaménagés. La <a href="http://www.lesechosdalger.com/fermee-2006-decharge-doued-smar-transformee-parc-ecologique-urbain/">décharge d’Oued Smar a été fermée et plantée</a>. Le Plan vert porte également sur la gestion des déchets. L’enfouissement technique doit remplacer à terme toutes les décharges à ciel ouvert.</p>
<h3>Le Plan bleu</h3>
<p>Ce plan vise à préserver et à valoriser une ressource naturelle rare en Algérie : l’eau. Il propose des actions pour améliorer la distribution de l’eau potable, mais aussi pour gérer les eaux de pluie et atténuer les risques d’inondation. L’assainissement, avec un objectif de zéro rejet en mer, est aussi un objectif majeur. La dépollution de Oued el Harrach et l’<a href="https://www.elwatan.com/edition/actualite/amenagement-de-oued-el-harrach-un-reve-devenu-realite-23-08-2018">aménagement de ses berges</a> constituent l’un des projets structurants du plan stratégique d’aménagement d’Alger.</p>
<h3>Le Plan Blanc</h3>
<p><a href="https://www.econostrum.info/La-rehabilitation-d-Alger-est-en-route_a3222.html">Ce plan</a> a pour mission principale d’atténuer les dysfonctionnements et les incohérences spatiales générés par l’étalement urbain. Ce dernier a contribué à augmenter les disparités sociales et économiques et dévalorisé le centre historique qui se retrouve dans un état de délabrement avancé. Dans ce sens, le plan blanc privilégie la restructuration et la régénération urbaines. Il propose aussi une diversification de l’offre de logements pour atténuer le phénomène de l’habitat précaire et répertorie les équipements essentiels qui renforcent la fonction métropolitaine de la capitale.</p>
<h3>Le Plan Mobilité</h3>
<p>Ce <a href="https://www.jeuneafrique.com/mag/325340/economie/mobilite-urbaine-lalgerie-ouvre-voie/">plan</a> s’articule autour du principe du macromaillage. Les <a href="https://www.liberte-algerie.com/actualite/la-wilaya-dalger-devoile-ses-grands-projets-structurants-93413">grands équipements structurants</a> bénéficieront d’une accessibilité optimale par une implantation à l’intersection des axes du macromaillage et de différents moyens de transport collectif (métro, tramway, bus…). Les équipements secondaires seront quant à eux localisés selon une logique de « dissémination de proximité » et les implantations respectives seront accessibles à pied. Le plan propose aussi de repositionner la <a href="https://www.djazairess.com/fr/letemps/114825">gare centrale à El Harrach</a> afin de favoriser l’intermodalité (l’utilisation de plusieurs modes de transport au cours d’un même déplacement).</p>
<p>Des parkings relais et des couloirs réservés en site propre seront aussi réalisés. Le réseau de chemin de fer de banlieue sera consolidé et un tram-train introduit dans les emprises ferrées libérées. Le métro desservirait en priorité le milieu urbain, plus consolidé, de la ville d’Alger.</p>
<h3>Économie et cohésion sociale</h3>
<p>Renforcer l’attractivité de la capitale algérienne est plus que nécessaire dans un monde globalisé et très compétitif. Le plan directeur propose dans ce sens que les ressources disponibles soient concentrées sur des projets majeurs qui serviront à leur tour de leviers de développement pour l’ensemble du système. Ainsi, il s’agira de créer des infrastructures modernes dotées des commodités nécessaires à la mise en place de nouvelles activités dans le domaine de l’innovation, des services mais aussi du tourisme.</p>
<p>La reconversion du port d’Alger, la <a href="https://www.huffpostmaghreb.com/entry/port-sec-de-rouiba-une-base-logistique-pour-desengorger-le-port-dalger_mg_5b714c33e4b0530743cb534f">plateforme logistique Réghaia/Rouba</a> inaugurée en 2018 pou encore le <a href="https://www.huffpostmaghreb.com/entry/centre-commercial-babez_mg_9395228">centre d’affaires de Bab Ezzouar</a> seront à cet égard des atouts majeurs de la capitale.</p>
<p>Le plan propose aussi de valoriser les activités économiques de proximité et d’améliorer ainsi la cohésion sociale et territoriale. Il vise à renforcer l’attractivité de certaines communes défavorisées en menant une politique d’actions foncières à l’intention des investisseurs potentiels tout en diversifiant l’offre aussi bien en matière d’équipements que de logements.</p>
<h2>Premiers effets concrets</h2>
<p>Que ce soit du point de vue de son processus d’élaboration ou de son contenu, il est clair que le plan directeur d’aménagement et d’urbanisme d’Alger rompt avec les anciens plans d’urbanisme. Il place le « paradigme de développement durable » au cœur de sa stratégie de développement et s’articule autour de différents plans thématiques inspirés directement des injonctions générales du développement durable.</p>
<p>Ainsi, certaines actions relatives à la protection du littoral grâce à la reconstitution du trait de côte fortement érodé à cause des extractions sauvages de sable et de l’artificialisation du littoral peuvent être appréciées au quotidien par la population qui investit chaque jour le nouveau projet de « la promenade de la baie ».</p>
<p>Les visiteurs qui arrivent à Alger par la <a href="http://www.aps.dz/regions/89953-alger-livraison-de-la-penetrante-autoroute-de-l-est-rn-5-el-alia-fin-juin">RN5</a> peuvent eux aussi apprécier la nouvelle coulée verte qui a été créée pour transformer à terme cette autoroute en boulevard urbain. Ces visiteurs peuvent également remarquer que les anciennes odeurs nauséabondes qui caractérisaient un tronçon de cette autoroute au niveau d’Oued el Harrach ont disparu et que les berges de l’Oued sont en cours d’aménagement.</p>
<p>L’extension des systèmes de transport collectif doux tels que le tramway ou le métro ainsi que la mise à disposition des automobilistes de parkings relais de proximité a contribué à résoudre certains problèmes d’accessibilité et à diminuer l’intensité du trafic routier au centre-ville.</p>
<p>Il est en outre incontestable que de grands efforts ont été consentis en matière de résorption de l’habitat précaire et d’amélioration du cadre de vie. Cependant, depuis quelques mois, <a href="https://liberte-algerie.com/est/427-projets-en-cours-de-realisation-325930">certains projets</a> sont au ralenti. D’autres ont même été gelés à cause de la <a href="https://afrique.le360.ma/algerie/economie/2019/07/14/27109-algerie-autopsie-dune-tres-inquietante-crise-financiere-27109">crise économique</a> que traverse le pays. Beaucoup reste à faire.</p>
<hr>
<p><em>Ce texte s’inscrit dans une série d’articles autour de la thématique <a href="https://www.colloqueannuel.auf.org/">« Universités et ville durable »</a>, sujet du colloque de l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF) qui se tient les 21 et 22 octobre à Dakar avec plus de cent cinquante acteurs francophones : établissements universitaires, représentants gouvernementaux, maires, et experts en urbanisme dans le monde francophone.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/124793/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Naima Chabbi-Chemrouk est Présidente APERAU une Association pour la Promotion de l'Enseignement et de la Recherche en Aménagement et Urbanisme.</span></em></p>Le plan directeur d’aménagement et d’urbanisme d’Alger rompt avec les anciens plans. Et les changements déjà visibles confirment que les efforts consentis produisent des résultats probants.Naima Chabbi-Chemrouk, Professeure d'architecture, École polytechnique d'architecture et d'urbanisme d'AlgerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1230382019-09-22T17:57:39Z2019-09-22T17:57:39ZLes étiquettes de vin, c’est pas (toujours) du chinois !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/292385/original/file-20190913-2173-19s36gf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=134%2C71%2C1844%2C1257&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Certains signes restent intelligibles, quelle que soit la culture locale.</span> <span class="attribution"><span class="source">XiXinXing / Adobestock</span></span></figcaption></figure><p>La Chine demeure l’un des marchés les plus prometteurs pour la filière vin. Selon une <a href="https://www.lepoint.fr/economie/la-chine-va-tirer-la-consommation-mondiale-de-vin-etude-20-02-2018-2196512_28.php">étude récente</a>, ce pays devrait être le deuxième marché de consommation le plus important à l’échelle mondiale en 2021. Les principaux pays exportateurs doivent comprendre cette clientèle pour tenter de s’y imposer. Ils ont notamment besoin de réfléchir à la création de designs d’étiquettes les plus « parlants » possible.</p>
<p>En effet, il est généralement admis que les choix graphiques effectués en matière de design du packaging permettent de communiquer des valeurs, une promesse voire un <a href="https://theconversation.com/sous-le-design-des-etiquettes-de-vins-la-variete-des-storytellings-de-marque-79168">storytelling de marque</a> aux consommateurs. Cependant, une question demeure : comment ce langage visuel est-il compris lorsque le packaging s’exporte dans un pays culturellement différent, comme la Chine ?</p>
<h2>Des signes intelligibles à travers les cultures</h2>
<p>Pour répondre à cette question, nous avons mené une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0167811619300448">recherche</a> explorant l’interprétation de 8 designs d’étiquettes de vin par des consommateurs chinois. Ces 8 étiquettes, créées par un graphiste français, visent à communiquer 8 storytellings de marque fréquemment observés en Chine continentale : le vin « festif » (bouteille 1) ; « romantique » (bouteille 2), « ancestral » (bouteille 3) ; « libérateur » (bouteille 4) ; « naturel » (bouteille 5) ; « paysan » (bouteille 6) ; « poétique » (bouteille 7) ; et enfin, le vin « de château » (bouteille 8).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/291945/original/file-20190911-190026-4znw1x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291945/original/file-20190911-190026-4znw1x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291945/original/file-20190911-190026-4znw1x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=857&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291945/original/file-20190911-190026-4znw1x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=857&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291945/original/file-20190911-190026-4znw1x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=857&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291945/original/file-20190911-190026-4znw1x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1077&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291945/original/file-20190911-190026-4znw1x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1077&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291945/original/file-20190911-190026-4znw1x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1077&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Figure 1 : bouteilles de vin testées.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Deux études empiriques ont ensuite été réalisées auprès de consommateurs chinois pour vérifier la perception des bouteilles de vin selon une tâche de libre association de mots. La première étude a été réalisée auprès d’un échantillon de 1391 consommateurs de vins importés avec des étiquettes mentionnant l’origine « Bordeaux ». La seconde étude a été réalisée auprès d’un échantillon de 795 répondants incluant des non-consommateurs de vin, avec des étiquettes où l’origine du vin est masquée (cf. figure 2).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/291952/original/file-20190911-190012-1f228ln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291952/original/file-20190911-190012-1f228ln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291952/original/file-20190911-190012-1f228ln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291952/original/file-20190911-190012-1f228ln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291952/original/file-20190911-190012-1f228ln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291952/original/file-20190911-190012-1f228ln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291952/original/file-20190911-190012-1f228ln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291952/original/file-20190911-190012-1f228ln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Figure 2 : exemple de retouche pour rendre anonyme l’origine du vin.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour chaque étude, les répondants devaient évaluer 4 bouteilles présentées de façon aléatoire. Au total, 5564 et 3180 réponses en mandarin ont été collectées dans le cadre des 2 études. Les réponses ont été traduites du mandarin vers l’anglais puis ont été analysées avec le logiciel <a href="https://www.lesphinx-developpement.fr/logiciels/analyse-qualitative-sphinx-quali/">Sphinx quali</a> (cf. figure 3).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/291953/original/file-20190911-190050-v1kks2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291953/original/file-20190911-190050-v1kks2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291953/original/file-20190911-190050-v1kks2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=387&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291953/original/file-20190911-190050-v1kks2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=387&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291953/original/file-20190911-190050-v1kks2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=387&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291953/original/file-20190911-190050-v1kks2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291953/original/file-20190911-190050-v1kks2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291953/original/file-20190911-190050-v1kks2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Figure 3 : analyse des correspondances.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>La carte présentée figure 3 se lit comme suit : la position des différentes bouteilles est indiquée par des triangles et annotée B1 à B8. Les mots sur la carte indiquent les différentes associations d’idées générées par les différentes bouteilles. Lorsque les bouteilles sont éloignées les unes des autres sur la carte, cela signifie qu’elles génèrent des associations d’idées différentes et sont bien différenciées (par exemple B4 associée au thème « évasion » ou B2 associée au thème « romance »), lorsque les bouteilles sont proches les unes des autres sur la carte, cela signifie qu’elles partagent un certain nombre d’associations d’idées et communiquent des images de marque similaires (par exemple B3, B6 et B8 sont associées aux thèmes « tradition » et « ancienneté »).</p>
<h2>La motivation des signes</h2>
<p>Les résultats révèlent que, pour 7 des 8 bouteilles testées, les répondants chinois ont été capables de comprendre l’intention de communication du designer français, y compris chez des personnes qui ne sont familières ni de la culture du vin, ni de la culture occidentale.</p>
<p>L’explication réside dans le fait que les 7 bouteilles « comprises » utilisent des signes « motivés », tandis que la bouteille « non comprise » utilise des signes <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k314842j/f110.double">« arbitraires »</a>. Un signe motivé est un signe dont la signification repose sur une certaine logique. Il est donc possible d’en deviner le sens sans avoir appris sa signification au préalable. De tels signes peuvent rester intelligibles à travers les cultures. Inversement, un signe arbitraire relève d’une convention culturelle et n’est basé sur aucune forme de logique. Aussi, il n’est pas possible d’en deviner le sens pour une personne issue d’une autre culture.</p>
<p>Par exemple, la bouteille 3 (le vin « ancestral ») est associée spontanément à des thèmes tels qu’« ancienneté » et « tradition » (figure 3). Cette bouteille utilise un papier jauni pour son étiquette. Il s’agit d’un cas de signe motivé car le papier jaunit avec le temps. L’association entre le « papier jauni » et la notion d’« ancienneté » repose donc sur une forme de logique qui reste intelligible pour toute culture maîtrisant la production de papier.</p>
<p>Inversement, pour communiquer l’idée d’un vin « poétique » (bouteille 7), le designer a choisi de reproduire un poème sur l’étiquette dans une police de caractères scripte rapide pouvant évoquer l’écriture à la plume d’un artiste. Du point de vue de répondants chinois, ni la reproduction du poème, ni la police de caractères ne peuvent être considérées comme des cas de signes motivés. À l’exception de ceux ayant appris le français, les consommateurs chinois ne peuvent lire le contenu de l’étiquette et donc comprendre la nature poétique du texte reproduit. De même, qu’ils ne peuvent pas comprendre les significations associées aux différents styles de polices de caractères latines puisqu’ils utilisent un système d’écriture différent.</p>
<h2>Le packaging « localisé » remis en cause</h2>
<p>Ces résultats sont intéressants car ils remettent en question : <strong>(1)</strong> l’idée selon laquelle les signes visuels ont forcément des significations différentes d’une culture à une autre et <strong>(2)</strong> la recommandation induite selon laquelle il est indispensable de <a href="http://www.journalofadvertisingresearch.com/content/42/1/79">« localiser »</a> le packaging, c’est-à-dire adapter son design aux différentes cultures vers lesquelles il sera exporté.</p>
<p>Cette idée s’appuie généralement sur le célèbre exemple selon lequel le blanc aurait des significations positives dans les pays occidentaux (telle que la pureté) mais négatives dans les pays asiatiques (telle que la mort). S’il a le mérite d’être frappant et d’attirer l’attention sur la notion de différences culturelles, cet exemple est par ailleurs trop simpliste et produit donc une recommandation générale (localiser les packagings) qui n’est pas toujours pertinente.</p>
<p>Dans la plupart des cultures, les couleurs ont des significations positives ET négatives, qui pourront s’activer (ou pas) selon le contexte et leurs articulations avec d’autres signes. Ainsi, le blanc peut AUSSI renvoyer à la mort en Occident si l’on regarde par exemple la représentation visuelle des expériences de mort imminente (lumière blanche au bout du tunnel) ou des fantômes (linceul blanc). Par ailleurs, dans de nombreuses situations de marché, le consommateur (qu’il soit asiatique ou occidental) cherche à consommer des produits qu’il perçoit comme exotiques. Localiser le packaging dans de telles situations entraîne une perte d’authenticité perçue et vient diminuer l’attrait du produit.</p>
<p>Nos résultats montrent que le design d’un packaging peut rester intelligible auprès de cultures très différentes s’il utilise des signes motivés. Il est donc possible de concevoir un design qui reste typique de son origine et en même temps qui reste compréhensible sur ses marchés exports.</p>
<p>Par ailleurs, les résultats indiquent que les consommateurs chinois peuvent apprécier des styles d’étiquettes différents du classique vin « de château » (cf bouteille 8). En effet, toutes les étiquettes sont associées dans des proportions équivalentes aux thématiques « haut de gamme » et « bonne qualité » (au centre de la carte présentée figure 3). Il semble donc possible de diversifier les stratégies de positionnement des vins français en adoptant des designs d’étiquettes plus variés. Cela permettrait de mieux répondre à la diversification des segments de consommateurs chinois que différentes <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.2501/IJMR-2017-044">études</a> récentes ont pu révéler.</p>
<hr>
<p><em>Peiyao Cheng, chercheuse au département design de Harbin Institute of Technology, et Wenhua li, chercheuse à la Guangzhou Academy of Fine Art, ont participé à la rédaction de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/123038/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cette recherche a été financée par la FNEGE (Fondation Nationale pour l'Enseignement de la Gestion des Entreprises), Maison Sichel, Cheval Quancard et Grandissime.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span> </span></em></p>Un travail de recherche révèle que certains designs de packagings n’ont pas forcément besoin d’être adaptés à l’export.Franck Celhay, Associate professor, Montpellier Business SchoolJosselin Masson, Maître de conférences en marketing, Université de MontpellierLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1172842019-09-22T17:57:07Z2019-09-22T17:57:07ZPourquoi le « terroir » viticole est à la fois invisible et omniprésent<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/291963/original/file-20190911-190016-12bvw8i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4290%2C2856&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le terroir, une notion protéiforme.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/grapes-on-vineyard-during-daytime-39351/">Pexels</a></span></figcaption></figure><p>Bien que le terme de « terroir » soit employé fréquemment pour qualifier un vin, grand ou modeste, nous sommes encore bien loin d’avoir percé tous les mystères qui <a href="https://www.franceculture.fr/sciences/le-terroir-se-mondialise">entourent ce terme</a>. Les vins pour la plupart aspirent à être identifiés à un terroir. Celui-ci obtient sa reconnaissance réglementaire avec la création des Appellations d’origine contrôlée (AOC) dans les années trente. Chacun dans son rôle, le géographe, le sociologue, l’ethnologue, le géologue, l’agronome, le sémiologue, l’économiste, l’historien, le linguiste, mais également le professionnel – vigneron, viticulteur, caviste ou sommelier – parle du terroir. Il est considéré par les <a href="http://www.hypergeo.eu/spip.php?article505">géographes</a> comme « une étendue de terrain présentant certains caractères qui l’individualisent au point de vue agronomique ». Mais sa portée symbolique et marchande va bien au-delà de cette définition.</p>
<h2>Un imaginaire qualitatif</h2>
<p>Le terroir est profondément ancré dans le <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/terroir">paysage viticole</a>. Ce paysage est avant tout culturel, c’est-à-dire qu’il est né, non seulement d’une occupation du sol marquée par l’omniprésence de la vigne, mais aussi et surtout par les hommes qui font le vin, par leur savoir-faire et par leur histoire. En effet, le terroir est aujourd’hui l’un des vecteurs qui permettent d’étudier et de transmettre la représentation qualitative d’un vin, à travers les caractéristiques techniques de la vigne, du sol et du sous-sol, les éléments indépendants de l’aspect physique tel que le climat et les <a href="https://www.icomos.org/studies/paysages-viticoles.pdf">fondements patrimoniaux, naturels et culturels</a>,</p>
<p>Tous ces indicateurs liés à la présence du terroir forment un <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01180972/document">imaginaire qualitatif du vin</a>. Ils influencent les attentes des consommateurs car ils correspondent à une promesse marketing. Ils guident également la perception du consommateur par la marque, l’information, le signe de qualité officiel ou officieux, ou par le discours scientifique ou technique qui apporte une légitimité au lien « vin de terroir – vin de qualité ».</p>
<p><a href="https://www.persee.fr/doc/geo_0003-4010_2004_num_113_637_1625">D’autres éléments</a> permettent d’influencer le consommateur par exemple le type de culture et ses impacts environnementaux, le climat, la qualité des paysages, etc. Le terroir, qui croise toutes ces préoccupations, est donc au centre de la représentation qualitative du vin et des enjeux vitivinicoles et ce à toutes les échelles, du local au global. Le terroir et la culture œnologique associés forment un objet multifacette sur lequel se sont penchées de nombreuses recherches. </p>
<p>Parmi les plus récentes, en 2011, <a href="https://eud.u-bourgogne.fr/vigne-et-vin/179-territoires-et-terroirs-du-vin-du-xviiie-au-xxie-siecle-approche-internationale-dune-construction-historique-9782364410015.html">Serge Wolikow et Olivier Jacquet</a> proposent un regard croisé sur l’histoire des territoires vitivinicoles, en se fondant sur plus de dix de travaux menés au sein de la Maison des Sciences de l’Homme de Dijon, du Centre Georges Chevrier (Unité Mixte de Recherche CNRS et Université de Bourgogne) et de la chaire Unesco de l’Université de Bourgogne. Deux ans plus tard, <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01743379/">Sandrine Lavaud, Jean‑Michel Chevet et Jean‑Claude Hinnewinkel</a> décryptent les itinéraires de la qualité en coordonnant les actes d’un colloque. Ces travaux menés aussi bien en <a href="https://www.cairn.info/revue-histoire-et-societes-rurales-2011-1-page-99.htm">France</a> qu’à l’<a href="https://doi.org/10.1016/j.geodrs.2019.e00209">étranger</a>, sont autant de références scientifiques qui dessinent la recherche sur le terroir et la qualité en milieu viticole.</p>
<h2>La valeur marchande du terroir</h2>
<p>Le terroir n’est pas seulement une question de représentations, il revêt surtout, aujourd’hui, une <a href="https://doi.org/10.1016/j.foodpol.2018.10.003">valeur marchande</a>. Les critères de qualité d’une vigne sont définis par un cahier des charges d’AOC, comme par une délimitation territoriale. Le vigneron marque ainsi un espace et en défend l’identité par des techniques viticoles et des typicités vinicoles, autant d’apports révélateurs pour introduire l’esprit du terroir.</p>
<p>Le viticulteur, depuis ses rangs de vignes, le maître de chai face à ses cuves, l’œnologue lors de l’assemblage des cuvées, le sommelier effectuant l’accord avec le mets, se trouvent tous disposés, d’une façon quelquefois provisoire, à proposer des argumentaires valorisant le terroir, en y associant la qualité du vin. Le terroir viticole est appréhendé comme une scène sur laquelle se construit une manière de vivre – un <a href="http://blogs.epjt.fr/wp-epjt-2015/21507461t/2016/11/25/emmanuel-herve-la-gastronomie-un-art-de-vivre-a-la-francaise/">savoir-vivre à la française</a> – traduite par des discours autour du vin, de la région viticole, des crus parcellaires, de la profondeur historique et de l’hédonisme. Le terroir véhicule, dans ce cas de figure, un rapport affectif au vin.</p>
<p>Incontestablement, le terroir revêt aujourd’hui une <a href="https://journals.openedition.org/vertigo/14807">connotation positive</a>. C’est un synonyme subjectif de qualité, aussi bien pour les agriculteurs qui y voient entre autres, une reconnaissance dans leurs pratiques des valeurs environnementales et paysagères, pour les consommateurs qui y trouvent une authenticité et une proximité avec les lieux de production, dans un monde ou les déconnexions avec la ruralité sont nombreuses et profondes, mais aussi pour les territoires pour lesquels le terroir devient facteur de développement.</p>
<p>Mais on peut toutefois se demander d’où provient ce goût du terroir, cette attirance pour un sujet conceptuel et une saveur virtuelle ? Il est bien difficile de lui assigner une origine : ce goût est le fruit d’une longue stratification culturelle. Le terroir n’est pas qu’une réalité physique et mesurable. Il est aussi et surtout le produit d’une alchimie en perpétuelle évolution.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/117284/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Comment appréhender la portée symbolique et marchande de la notion de « terroir », au-delà de sa définition classique ?Jean Louis Yengue, Professeur des Universités, Géographe, IAE de PoitiersKilien Stengel, Enseignant spécialiste des discours gastronomiques et alimentaires, chercheur associé, Université de ToursLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1193212019-06-27T21:05:53Z2019-06-27T21:05:53Z« Toy Story 4 » est-il une publicité géante ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/281610/original/file-20190627-76713-1ynuwf6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=28%2C2%2C1568%2C665&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les personnages-jouets du film sont aussi de vrais jouets.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.allocine.fr/film/fichefilm-218956/photos/detail/?cmediafile=21632161">Allociné</a></span></figcaption></figure><p>Woody et Buzz sont de retour dans les cinémas ! <em>Toy Story 4</em> (Cooley, 2019) nous donne l’occasion de revenir sur les films de la saga et sur des héros à la personnalité unique. Des histoires qui racontent le destin de jouets plus humains que… les humains.</p>
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<h2>Des jouets comme personnages</h2>
<p>Dans le premier opus (<em>Toy Story</em>, Lasseter, 1996), le lieu principal de l’action est la chambre d’Andy, un garçon de 8 ans. Comme n’importe quelle chambre d’enfant, la pièce est remplie de jeux. S’y trouvent des jouets traditionnels sans marque tels que des cubes en bois, une toupie, un canard en plastique ou encore des ours en peluche. Ces produits génériques côtoient des objets commercialisés par des marques de jouets. Nous reconnaissons sans peine le jeu de société « Opération » d’Hasbro, « Mouse trap » édité par MB (filiale d’Hasbro) ou encore « Twister » toujours du géant Hasbro.</p>
<p>Placés sur une étagère murale ou encore sous le lit d’Andy, ces produits font de la figuration dans le film : ils apparaissant en arrière-plan de l’image et de l’histoire. Il s’agit de placements de produits dits classiques (Lehu, <a href="https://www.eyrolles.com/Entreprise/Livre/la-publicite-est-dans-le-film-9782708136434/"><em>La publicité est dans le film</em></a>, 2006) ; les marques sont simplement insérées dans le décor du film. L’horloge-montre Mickey, montrée furtivement, fonctionne comme un clin d’œil aux studios Disney tout en habillant les murs de la chambre. Pareillement, quelques produits jouent un rôle mineur à l’écran : citons la « Magic 8-ball » et le jeu « Farmer Says See N Say » de Mattel ou le camion de pompiers Little Tikes. À la marge du récit, ils font partie des figurants du film.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/280933/original/file-20190624-97785-3d5fys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/280933/original/file-20190624-97785-3d5fys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/280933/original/file-20190624-97785-3d5fys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/280933/original/file-20190624-97785-3d5fys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/280933/original/file-20190624-97785-3d5fys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/280933/original/file-20190624-97785-3d5fys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/280933/original/file-20190624-97785-3d5fys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Au premier plan, M. Patate, <em>Toy Story</em>.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au-delà des insertions publicitaires contextuelles (Le Nozach, <a href="http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=39871"><em>Les produits et les marques au cinéma</em></a>, 2013), certains produits placés se sont imposés en personnages récurrents. Parmi les plus populaires, « M. Patate », jouet distribué par Hasbro et sa filiale Playskool. Évoquons également, à partir de <em>Toy Story 2</em> (Lasseter, Brannon, Unkrich, 2000) la célèbre « Barbie » de Mattel accompagnée dans le 3<sup>e</sup> film de son compagnon « Ken » (et de toute la panoplie de leurs vêtements, accessoires, véhicules, villas, etc.).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/280934/original/file-20190624-97772-f7icmf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/280934/original/file-20190624-97772-f7icmf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/280934/original/file-20190624-97772-f7icmf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/280934/original/file-20190624-97772-f7icmf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/280934/original/file-20190624-97772-f7icmf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/280934/original/file-20190624-97772-f7icmf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/280934/original/file-20190624-97772-f7icmf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le rayon Barbie dans le magasin de jouets, Toy Story 2.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Comme la plupart des placements de produits filmiques, nous pourrions imaginer que les jouets placés dans <em>Toy Story</em> sont les dernières nouveautés à la vente. Or, les films intègrent des produits conçus dans les décennies précédentes. À titre d’exemple, le téléphone Fisher Price animé dans <em>Toy Story 3</em> (Unkrich, 2010) a été conçu en 1961. Ce jouet peut alors toucher une cible secondaire et inspirer de la nostalgie chez les parents spectateurs. Plus encore, cela offre l’opportunité à la marque de rééditer le jouet : estampillé « vintage », il revient sur le devant de la scène.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/280937/original/file-20190624-97799-14wscpw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/280937/original/file-20190624-97799-14wscpw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=326&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/280937/original/file-20190624-97799-14wscpw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=326&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/280937/original/file-20190624-97799-14wscpw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=326&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/280937/original/file-20190624-97799-14wscpw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=410&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/280937/original/file-20190624-97799-14wscpw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=410&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/280937/original/file-20190624-97799-14wscpw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=410&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le téléphone à tirer Fisher Price, Toy Story 3.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Finalement, <em>Toy Story</em> construit une galerie de jouets hétéroclite ; une famille originale composée de diverses marques mais aussi de produits appartenant à différentes époques. Rétro, nouveaux ou intemporels, ces jouets affichent des traits de caractère particuliers et possèdent des spécificités mises à profit dans les scénarios. Véritables protagonistes du film, les placements de produits prennent une réelle importance diégétique (dans le monde et le récit composés dans le film).</p>
<h2>Des personnages comme jouets</h2>
<p>À leurs côtés, il y a les jouets fictifs, créés pour le film : Rex le dinosaure, Bo la Bergère en porcelaine, le cochon tirelire, le chien Zigzag. Sans oublier les deux héros, Woody le shérif et Buzz l’éclair le ranger de l’espace. Ces personnages ont été inventés pour <em>Toy Story</em> et sont, depuis, des produits vendus par Disney, Hasbro et Lansay. L’effet performatif est total car Woody et Buzz existent sous forme de produits dérivés (Bahuaud, <a href="https://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=4579&razSqlClone=1"><em>Dessin-animé, jouet : des produits dérivés</em></a>, 2001), véritables figurines de collection mais également sous forme de jouets, poupées en plastique, articulées voire sonores.</p>
<p>Dans <em>Toy Story 4</em>, cela va même plus loin avec l’apparition d’un nouveau personnage, Fourchette (ou Forky en VO). Il est fabriqué par Bonnie lors de son premier jour de maternelle à l’aide d’éléments de récupération sortis d’une poubelle comme une fourchette en plastique, du cure-pipe, un bâtonnet. Bonnie inscrit son prénom sous les pieds du bonhomme ; ces quelques lettres suffisent pour que Fourchette passe du statut de détritus à celui de jouet. À la sortie du dessin animé, ce pantin de fortune devient un vrai jouet édité par Disney.</p>
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<span class="caption">Forchette et Woody, <em>Toy Story 4</em>.</span>
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<p>Plus encore, attardons-nous sur Duke Caboom, également nouvel arrivant dans <em>Toy Story 4</em>. Inspiré du plus grand cascadeur du Canada, il est toujours prêt à réaliser des figures acrobatiques au guidon de sa moto. Or, ce jouet a déçu l’enfant à qui il appartenait car il était incapable de reproduire les exploits montrés dans sa propre publicité télévisée. Le jouet s’en défend : « C’est une publicité ! Ce n’est pas réel ! Je ne peux pas sauter si haut ! ».</p>
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<span class="caption">Fourchette, le jouet.</span>
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<p>Pixar tient ici un double discours. D’une part, nous y voyons un acte de prévention sur la nécessaire distanciation entre fiction et réalité. Si ce message s’adresse d’abord aux adultes, les enfants peuvent le comprendre à leur niveau. On leur dit simplement que si on leur offre des jouets <em>Toy Story</em>, ils ne pourront pas réagir comme dans le film. Cette idée pourrait rompre tout enchantement mais elle est contrebalancée par la dernière scène du film. Fourchette fait la connaissance d’une potentielle compagne, couteau jetable transformé en personnage-jouet. Cette dernière s’interroge « Comment je suis devenue vivante ? » ce à quoi Fourchette répond « Alors là… aucune idée ! ». La magie opère encore. D’autre part, cette scène n’est-elle pas aussi un aveu du studio de production ? Ne nous dit-on pas que le film – et par extension toute la saga – est en réalité une publicité sur grand écran ? Cette déclaration explicite ne permettrait-elle pas de prendre les devants d’éventuelles critiques quant à la visée mercantile du film ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/281433/original/file-20190626-76705-1sgjmpe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/281433/original/file-20190626-76705-1sgjmpe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=312&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/281433/original/file-20190626-76705-1sgjmpe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=312&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/281433/original/file-20190626-76705-1sgjmpe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=312&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/281433/original/file-20190626-76705-1sgjmpe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=392&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/281433/original/file-20190626-76705-1sgjmpe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=392&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/281433/original/file-20190626-76705-1sgjmpe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=392&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Duke Caboom devant la télévision diffusant son spot publicitaire.</span>
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<p>Le placement de jouets à l’échelle d’un film entier n’est pas une spécificité de la saga <em>Toy Story</em>. <em>La grande aventure Lego</em> (Lord, Miller, 2014) propose un film d’animation entièrement composé en Lego et la sortie de <em>La grande aventure LEGO 2</em> (Mitchell, 2018) a été accompagnée de 46 références créées pour l’occasion dont une <a href="https://www.huffingtonpost.fr/2019/02/20/la-grande-aventure-lego-2-les-meilleures-boites-lego-issues-du-film_a_23671851/">vingtaine de nouvelles boîtes</a>. En août prochain, <em>Playmobil, le film</em> (DiSalvo, 2019) sort en salle. Le long-métrage met en scène les petits personnages en plastique coloré connus de tous et cet événement sera sans nul doute assorti de nouvelles gammes de jouets. Ce qui est spécifique à <em>Toy Story</em>, c’est de faire côtoyer des jouets de marques concurrentes. Les plus grandes entreprises de jouets s’associent le temps d’un film et contribuent ainsi à cette aventure cinématographique.</p>
<h2>Vers le réel et au-delà</h2>
<p>Si les héros de l’histoire filmique sont les jouets, ils progressent dans le monde réel – la chambre, la maison, le jardin d’Andy, la pizzeria, le magasin de jouets, l’aéroport, la crèche, la fête foraine – et évoluent aux côtés des hommes – Andy, Bonnie, les parents, le voisin, le collectionneur, les enfants de la garderie, etc. Les créateurs jouent la carte du réalisme en utilisant des jouets marketés. En revanche, ils gomment les autres marques de la vie quotidienne : celles des voitures (hormis la Corvette Barbie, un <a href="https://theconversation.com/transformers-une-forme-inedite-de-placement-de-produit-au-cinema-79508">placement de produits double</a>), des vêtements ou des chaussures, celles des sodas ou des téléviseurs. Dans la diégèse, le monde humain est aseptisé de marques alors que le monde des jouets est renforcé de réalité grâce aux placements de produits.</p>
<p>Dans <em>Toy Story 3</em>, on note pourtant deux exceptions. Tout d’abord, la marque Haribo est placée dans le film. La petite Bonnie, qui adopte Woody le temps de quelques scènes, joue à la dînette avec ses peluches et leur demande : « Vous avez faim ? J’ai un ingrédient secret… des Dragibus ! » Elle soulève le pain supérieur d’un faux hamburger : les bonbons sont placés au-dessus du steak. Elle en prend un et le mange goulûment. Ce placement de produit coïncide avec l’univers sémantique du film ; le bonbon étant un des produits adorés des enfants, bien qu’ils soient « pour les grands et les petits ». Par ce placement sonore et visuel, Haribo est le seul produit alimentaire présent dans le film.</p>
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<span class="caption">Bonnie dégustant des Dragibus, <em>Toy Story 3</em>.</span>
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</figure>
<p>Quelques séquences plus tard, Apple, une des marques les plus insérées dans les fictions cinématographiques, se fraye également un chemin dans la saga. Woody fait une recherche Internet afin de connaître l’adresse de la crèche dans laquelle se trouvent ses amis. Il utilise un ordinateur de bureau Apple et le navigateur utilisé est « Safari ». Le plan est court, à peine trois secondes, mais il fait partie de ceux choisis pour la bande-annonce officielle. Apple est la seule marque extérieure à l’univers des enfants placée dans la saga : une situation de monopole inédite. Comme ces « entorses » (Haribo et Apple) sont présentes dans le 3<sup>e</sup> film, nous aurions pu penser que <em>Toy Story 4</em> intensifierait le nombre de placements de produits. Or il n’en est rien : aucune autre marque dans le film que celles des jouets.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/280936/original/file-20190624-97808-1nkdtrb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/280936/original/file-20190624-97808-1nkdtrb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=335&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/280936/original/file-20190624-97808-1nkdtrb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=335&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/280936/original/file-20190624-97808-1nkdtrb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=335&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/280936/original/file-20190624-97808-1nkdtrb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=421&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/280936/original/file-20190624-97808-1nkdtrb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=421&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/280936/original/file-20190624-97808-1nkdtrb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=421&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Woody faisant des recherches sur un Mac, <em>Toy Story 3</em>.</span>
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<p>Communément, le placement de produit permet une meilleure contextualisation de l’histoire contée ; il apporte vraisemblance et crédibilité. Dans <em>Toy Story</em>, le parti-pris est de donner du réalisme au monde de Woody et Buzz qui, de ce fait, paraît plus vrai, plus tangible que toutes les séquences animées par les personnages humains. Ainsi les héros ne sont-ils plus de simples jouets mais bel et bien des « êtres vivants ». Les personnages créés pour le film et devenus placement de produits dès le deuxième dessin animé existent en tant que jouets dans nos magasins au même titre que les jouets markétés indépendants de la saga. Néanmoins, Pixar a réussi à leur conférer une propriété extraordinaire. Nous devons reconnaître qu’en faisant l’acquisition des jouets <em>Toy Story</em>, un doute subsiste dans notre esprit : s’animent-ils une fois la porte de la chambre fermée ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/119321/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Delphine Le Nozach ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La saga use d’une politique astucieuse de placements de produits, sans perdre pour autant de sa magie.Delphine Le Nozach, Maître de conférences en Sciences de l'information et de la communication, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1189572019-06-27T21:05:01Z2019-06-27T21:05:01ZComment les plates-formes mettent la main sur le développement touristique des territoires<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/280013/original/file-20190618-118501-rjis1y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C2%2C973%2C657&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La France espère dépasser la barre des 100 millions de visiteurs en 2020.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Paul Wishart / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>En 2018, la France était encore le pays le plus visité au monde, avec <a href="https://bfmbusiness.bfmtv.com/mediaplayer/video/nous-visons-100-millions-de-touristes-etrangers-et-60-milliards-d-euros-de-depenses-en-2020-jean-baptiste-lemoyne-2005-1162304.html">près de 90 millions de visiteurs</a> qui ont généré plus de 56 milliards de recettes, a annoncé le conseil interministériel du tourisme en mai dernier. La fréquentation a augmenté de 3 % en un an, ce qui rapproche l’hexagone de son objectif de 100 millions de visiteurs en 2020.</p>
<p>On peut se féliciter de ces chiffres et de cette place de numéro 1 mondial mais compter les têtes, ou bien calculer les recettes, restent les manières traditionnelles d’appréhender le tourisme, que ce soit au niveau régional ou national. À trop se focaliser sur ces indicateurs, les professionnels du tourisme comme les institutions risquent de passer à côté de certains éléments qui pourraient pourtant être décisifs à l’heure où la concurrence mondiale se renforce, en particulier une compréhension fine du comportement du visiteur à destination.</p>
<p>Aujourd’hui, les stratégies de nos instances officielles (offices de tourisme, agences départementales et comités régionaux) consistent principalement à communiquer pour attirer ou renforcer un flux de visiteurs vers leur destination, notamment au travers de <a href="https://www.streetpress.com/sujet/122514-city-branding-quand-les-villes-vendent-leur-image">campagnes de branding</a> (travail sur l’identité de la ville en tant que marque). Ces actions se situent dans le prolongement de leurs <a href="https://www.cairn.info/sociologie-du-tourisme--9782707152558.htm">missions historiques</a> de visibilité, d’information et d’accueil.</p>
<p>Mais ces initiatives concernent généralement des destinations aux délimitations administratives, sans grande signification : les pèlerins sur les chemins de Compostelle traversent communes, départements et frontières, et les touristes chinois visitent lors d’un même séjour châteaux du bordelais et chais de Cognac.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/280017/original/file-20190618-118539-90f6l4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/280017/original/file-20190618-118539-90f6l4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=370&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/280017/original/file-20190618-118539-90f6l4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=370&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/280017/original/file-20190618-118539-90f6l4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=370&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/280017/original/file-20190618-118539-90f6l4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=465&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/280017/original/file-20190618-118539-90f6l4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=465&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/280017/original/file-20190618-118539-90f6l4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=465&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">« Only Lyon », exemple de marque créée pour faire rayonner la deuxième ville française et attirer les visiteurs.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:ONLY_LYON_Place_Bellecour.JPG">Eigenes Werk/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Décisions libres et impromptues</h2>
<p>Si les institutionnels disposent d’informations riches sur leur offre (hébergement, restauration, transports, attractions, etc.), ils n’analysent que très rarement le processus de décision du touriste à destination. C’est pourtant un enjeu important, le touriste de loisirs se définissant par sa disposition à prendre <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0261517711001476?via%3Dihub">librement et de façon impromptue</a> des décisions quant à son séjour.</p>
<p>Pour renforcer cette connaissance, les chercheurs de l’Université de Saint-Gall (Suisse) ont développé une <a href="http://www.advances-destinationmanagement.com/sgdm">méthode</a> consistant à analyser les parcours des visiteurs à destination, en fonction de leurs goûts et de leurs contraintes. Discutant les actions des institutionnels du tourisme dont l’objectif reste avant tout le nombre de visiteurs, ces chercheurs s’attachent davantage à comprendre les <a href="https://www.alexandria.unisg.ch/253135/1/Beritelli%20et%20al%20(2018)%20How%20come%20you%20are%20here.pdf">raisons de leur présence</a> dans la zone touristique et ce qui va déterminer le choix de leurs étapes tout au long de leur circuit.</p>
<p>Le comportement du touriste est en effet un processus d’ajustement interactif et dynamique, qui dépend du contexte (situation vécue à destination, météo, transports, etc.) ou encore de stimulations émanant de sources multiples : référents (avis en ligne, résidents, etc.), personnels de contact (hôtel, restaurant), institutionnels (office de tourisme), enseignes (cinéma, musée), voire une éventuelle familiarité vis-à-vis de la destination…</p>
<p>Ainsi, pour un touriste de loisirs séjournant pendant 10 jours à destination avec un budget restreint, le processus décisionnel à destination peut être représenté comme suit :</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/279830/original/file-20190617-118543-li82a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/279830/original/file-20190617-118543-li82a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/279830/original/file-20190617-118543-li82a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=438&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/279830/original/file-20190617-118543-li82a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=438&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/279830/original/file-20190617-118543-li82a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=438&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/279830/original/file-20190617-118543-li82a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=550&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/279830/original/file-20190617-118543-li82a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=550&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/279830/original/file-20190617-118543-li82a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=550&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Modèle décisionnel en cascade.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0261517711001476?via%3Dihub">Adapté de Moore et coll., 2012</a></span>
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</figure>
<p>Dans ce schéma, si certaines décisions sont prises avant l’arrivée à destination (itinéraire, hébergement), celles prises à destination sont moins susceptibles d’être influencées par des recommandations via Tripadvisor ou un office de tourisme. En effet, le budget limité du touriste étudié dans cet exemple ne le rend que peu sensible aux stimulations sur place.</p>
<p>L’on mesure ici à quel point les enjeux de l’industrie touristique française semblent mal compris par nos gouvernants : il est plus commode de chercher année après année à dépasser son propre record de nombre de visiteurs, plutôt que de tenter de comprendre les mécanismes de choix et de comportements des touristes à destination.</p>
<h2>Le volume plus que le prix</h2>
<p>Cet aveuglement n’a pas échappé aux leaders mondiaux du commerce touristique, qu’il s’agisse d’agences de voyages en ligne (ou OTA, pour <em>online travel agency</em>, comme Booking.com et Expedia) ou de plates-formes communautaires (Airbnb) : ces acteurs majeurs de l’industrie, en champions de la donnée massive, compilent, agrègent, analysent et modélisent les préférences des touristiques, de manière à pouvoir leur proposer beaucoup plus qu’un hébergement : une <a href="https://theconversation.com/airbnb-ou-la-vie-revee-des-autres-83971">expérience</a>.</p>
<p>Ils agissent en quelque sorte comme un « cheval de Troie » sur les territoires. Certes, il y a la clé la promesse d’accroître considérablement la visibilité des destinations, donc le nombre de visiteurs (et incidemment le volume de commissions payables aux plates-formes), mais c’est un élément qui illustre bien leur volonté de s’investir (à moindre coût) dans les stratégies historiques de visibilité et d’information des institutionnels.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"912164745515606017"}"></div></p>
<p>Ces acteurs mondiaux, à la capitalisation boursière sans équivalent (ainsi, le groupe Booking Holdings, maison mère de Booking.com, valait en bourse 77 milliards de dollars le 11 juin 2019 ; Marriott International, le premier groupe hôtelier au monde, et détenteur de plusieurs milliers d’établissements, ne valait quant à lui à la même date, <em>que</em> 44 milliards de dollars.), suivent un modèle économique de distributeur, c’est-à-dire que leur revenu est une commission prélevée sur des flux d’échanges entre offreurs et demandeurs. Plutôt qu’un prix de vente élevé (d’une chambre, etc.), c’est le volume élevé d’échange qui leur est essentiel.</p>
<p>Dans cette optique, une plate-forme comme Booking va par exemple débourser des sommes considérables en publicité, près de <a href="https://www.artiref.com/commercialisation-hotel/les-chiffres-clefs-de-booking-pour-2018.html">30 % de son chiffre d’affaires</a>, dont une partie auprès de Google, ce qui permet à ses offres d’être aujourd’hui mieux référencées que celles des hôteliers eux-mêmes !</p>
<h2>L’intérêt des hôteliers n’est pas garanti</h2>
<p>Les indépendants (70 % des hôteliers en France) ont de leur côté tendance à s’accommoder de l’entrée des plates-formes dans le champ de leur activité car ils trouvent un intérêt à externaliser la stratégie de distribution, quitte à laisser le soin aux plates-formes de capter une partie de la valeur. Un hôtelier doit en effet décider à quel prix proposer ses chambres pour chaque date possible de réservation : il doit pour cela extrapoler dans le futur sa performance passée (prix moyen de vente et proportion des chambres non louées), observer le prix fixé par ses concurrents, et surveiller les réactions de la clientèle en réponse aux prix proposés… La charge cognitive que représente ce travail pour l’hôtelier est particulièrement lourde, d’autant plus qu’il préférera se concentrer dans son activité sur l’accueil client plus que sur sa stratégie numérique. Or, ces plates-formes vont mettre à disposition des indépendants des outils clés en main pour alléger justement cette charge cognitive.</p>
<p>Dans ce contexte, leur relation peut être éclairée par le cadre d’analyse initialement développé en finance, appelé <a href="https://www.jstor.org/stable/pdf/725105.pdf">« relation principal-agent »</a>. L’hôtelier – le principal – s’en remet à un agent pour la collecte et l’analyse de données relatives au marché, aux concurrents et à la destination. Dans le cas où l’agent est un distributeur, le fait qu’il dispose de plus d’informations que le principal – stratégies de prix des concurrents et sur le niveau de demande sur la destination – ne garantit pas qu’il agisse dans son intérêt. Autrement dit, dans le cas du tourisme, les plates-formes ne sont pas forcément les meilleurs alliés des hôteliers.</p>
<p>L’institutionnel a donc aujourd’hui l’opportunité de devenir un véritable <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/jtr.2072">arbitre « tiers de confiance »</a>, aux intérêts convergents avec ceux des acteurs économiques de la destination : fidélisation des visiteurs, optimisation du panier moyen, diffusion des flux sur l’ensemble de la destination, etc. C’est le chemin emboîté par exemple par l’agence départementale Charentes-Tourisme qui déploie depuis un an une initiative unique, appelée <a href="https://charentestourisme.com/Newsroom/Communiques-de-Presse/Programme-revenue-management-de-destination?p=-1">« Revenue management de destination »</a> (RMD).</p>
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<figcaption><span class="caption">Gallic Guyot, directeur exécutif de Charentes Tourisme, évoque le déploiement du Programme Revenue Management (C&L Associés, mai 2019).</span></figcaption>
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<p>Adossée à un logiciel d’aide à la décision déployé auprès des hébergeurs (campings, hôtels), il s’agit d’agréger à l’échelle de la destination de la donnée massive (taux d’occupation, prix moyen) pour fournir aux acteurs du tourisme des recommandations de stratégie servant véritablement leur intérêt… La donnée massive agrégée par l’institutionnel de la destination lui permet également de véritablement piloter la destination : ajouter des événements en période de faible fréquentation, optimiser l’offre d’infrastructures… et veiller à ce que les revenus du tourisme demeurent sur le territoire, plutôt que d’être captés par une plate-forme étrangère, pour permettre localement prospérité et emploi.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/118957/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Luc Béal est membre du CRIIM – Centre de Recherche en Intelligence et Innovation Managériale, Excelia Group</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mustafeed Zaman est membre du CA de l'AFMAT (Association Francophone de Management du Tourisme). </span></em></p>En proposant par exemple des outils d’aide à la décision aux hôteliers, les grandes agences en ligne capitalisent sur la connaissance client et capturent une partie de la valeur du tourisme local.Luc Béal, Directeur, Tourism Management Institute, ExceliaMustafeed Zaman, Enseignant-Chercheur en Marketing et en Marketing Digital, EM NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.