tag:theconversation.com,2011:/fr/topics/neuropsychologie-44485/articlesneuropsychologie – The Conversation2023-10-24T14:20:09Ztag:theconversation.com,2011:article/2136252023-10-24T14:20:09Z2023-10-24T14:20:09ZUne visite au musée, la nouvelle pilule bien-être ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/554090/original/file-20231016-28-1a079n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C1%2C986%2C655&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Est-ce que le simple fait d'être en contact avec de l'art a des effets spécifiques ?</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Nous sommes samedi matin. Tasse de café à la main, à peine réveillé, votre regard se perd vers l’horizon. Il pleut. Vous venez de vous décider. Cet après-midi, pour vous, ce sera le musée.</p>
<p>Et si, sans le savoir, vous veniez de prendre une bonne décision pour votre santé ?</p>
<p>C’est l’hypothèse qu’a émis l’association des <a href="https://www.medecinsfrancophones.ca/a-propos/lassociation/">Médecins francophones du Canada</a> en 2018, en lançant le <a href="https://www.mbam.qc.ca/fr/actualites/prescriptions-museales/">programme de prescriptions muséales</a> en partenariat avec le Musée des beaux-arts de Montréal. Aujourd’hui terminé, ce projet a permis à des milliers de patients de recevoir une ordonnance de leur médecin pour une visite au musée, en solo ou accompagné. La prescription visait à favoriser le rétablissement et le bien-être de patients pouvant, par exemple, être atteints de maladie chronique (hypertension, diabète), neurologique, ou encore de trouble cognitif ou de santé mentale. Le choix de prescrire était laissé à la discrétion du médecin.</p>
<p>Cinq ans plus tard, cette initiative pionnière a fait des petits, et nous voyons aujourd’hui fleurir de plus en plus d’activités muséales bien-être allant du <a href="https://www.mnbaq.org/en/activity/museo-yoga-1211">muséo-yoga</a> aux <a href="https://www.mam.paris.fr/fr/contempler-meditation-guidee-en-ligne">méditations guidées</a> avec les œuvres d’arts, en passant par la pratique de la <a href="https://www.beaux-arts.ca/magazine/votre-collection/lart-de-la-contemplation-lente-une-peinture-de-jean-paul-riopelle">contemplation lente</a> ou <em>slow looking</em>. </p>
<p>Les offres ne manquent pas et font grandir en chacun la même conviction : l’art nous fait du bien.</p>
<h2>Au-delà de la première impression</h2>
<p>Ces initiatives ont récemment fait la manchette dans des médiats nationaux des deux bords de l’Atlantique, tant en <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/museotherapie-je-crois-que-nous-sommes-dans-un-moment-de-bouillonnement-2414180">France</a> qu’au <a href="https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/gravel-le-matin/segments/entrevue/90530/visite-gratuite-musee-beaux-arts-montreal-ordonnance-medecin-sante">Canada</a>, et gagnent en visibilité auprès du grand public. Comme une conséquence de cette popularité, on peut lire de plus en plus d’affirmations parlant de la visite au musée comme un « antistress puissant », un « remède miracle contre le stress », ou encore comme ayant des « effets incroyables ».</p>
<p>Enthousiasmant !</p>
<p>En bonne neuroscientifique, je ne peux toutefois m’empêcher de me demander pourquoi, au vu des extraordinaires effets relaxants annoncés, les foules ne se bousculent pas aux portes de nos musées quotidiennement. </p>
<p>Autant de raisons pour aller jeter un œil aux rapports et études scientifiques récemment publiés sur le sujet.</p>
<h2>L’art fait du bien ? De l’intuition à l’observation</h2>
<p>En 2019, l’Organisation mondiale de la Santé publiait un épais rapport colligeant des éléments de preuve concernant le rôle des activités artistiques et culturelles <a href="https://apps.who.int/iris/handle/10665/329834">pour favoriser la santé et le bien-être</a>. De façon remarquable, les auteurs de ce rapport tentent de s’affranchir d’une vision unifiée des bienfaits de l’art qui, tel un remède de grand-mère, constituerait une solution universelle aux problèmes de santé. </p>
<p>A la place, ceux-ci encouragent de nouvelles approches plus précises et rigoureuses, orientées sur l’observation des réponses psychologiques, physiologiques ou encore comportementales induites par certaines composantes spécifiques de l’activité artistique (engagement esthétique, stimulation sensorielle, activité physique).</p>
<h2>Acteur ou spectateur ?</h2>
<p>La spécificité de la visite au musée est d’être une activité artistique dite réceptive – c’est-à-dire qu’il ne s’agit pas ici de produire de l’art (peindre, dessiner, composer). Elle présente toutefois l’avantage d’être accessible et déjà bien ancrée dans nos habitudes collectives, ce qui en fait une bonne candidate pour la prévention en santé.</p>
<p>La question est alors de savoir s’il suffit d’être exposé à de l’art pour bénéficier de ses bienfaits. Autrement dit, est-ce que le simple fait d’être en contact avec de l’art a des effets spécifiques ?</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="femme dans un musée" src="https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Être exposé à l’art permettrait de vieillir en meilleure santé ?</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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</figure>
<h2>Des consommateurs de culture en meilleure santé</h2>
<p>Des recherches ont été conduites en Angleterre sur des échantillons de plusieurs milliers d’individus dont on a suivi les indicateurs de santé à long terme, et à qui on a demandé pendant 10 ans de rapporter leurs habitudes en <a href="https://www.elsa-project.ac.uk">termes d’activités culturelles et artistiques</a>.</p>
<p>Ces travaux montrent que les individus fréquentant régulièrement (tous les deux, trois mois et plus) les lieux de culture (théâtres, opéras, musées, galeries) présentent un risque de <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/the-british-journal-of-psychiatry/article/cultural-engagement-and-cognitive-reserve-museum-attendance-and-dementia-incidence-over-a-10year-period/0D5F792DD1842E97AEFAD1274CCCC9B9">démence</a> et de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6429253/">dépression</a> divisé par deux, et un risque de développer un <a href="https://academic.oup.com/psychsocgerontology/article/75/3/571/5280637">syndrome de fragilité gériatrique</a> (phénomène de déclin de la santé lié au vieillissement et associé à une perte de l’indépendance fonctionnelle) réduit d’environ 40 %.</p>
<p>Être exposé à l’art permettrait donc de vieillir en meilleure santé ?</p>
<p>Peut-être, mais il reste à confirmer que l’engagement culturel est la cause de l’amélioration des indicateurs de santé observés dans ces travaux. Pour cela, des études de cohorte et <a href="https://cihr-irsc.gc.ca/f/48952.html">essais cliniques contrôlés randomisés</a> sont nécessaires. Or, ce type d’étude est encore rare dans le domaine.</p>
<h2>À la recherche des principes actifs</h2>
<p>Par ailleurs, il reste une question, et de taille ! Celle du pourquoi… </p>
<p>Pourquoi l’art, et notamment l’art visuel, me ferait du bien. Qu’est ce qui se passe dans mon corps lorsque j’entre en contact avec une œuvre, comment ce contact me transforme et contribue à me maintenir en meilleure santé. Si tel est le cas.</p>
<p>C’est la question que s’est posée Mikaela Law chercheuse en psychologie à Université d’Auckland en Nouvelle-Zélande, et ses collaborateurs en 2021. Ces chercheuses et chercheurs ont <a href="https://bmjopen.bmj.com/content/11/6/e043549.abstract">exploré la littérature scientifique</a> en quête d’études disponibles adressant la réponse physiologique aux arts visuels et son effet sur le stress rapporté par l’individu. </p>
<p>Certaines des études répertoriées dans ce travail montrent que le contact avec une œuvre est à même de diminuer la pression artérielle, la fréquence cardiaque et le cortisol sécrété dans la salive. De telles modifications traduisent une diminution de l’état de tension du corps, que l’on appelle aussi le stress. Un changement qui semble perçu par l’individu et se traduit par une diminution du stress dont il témoigne après l’exposition.</p>
<p>D’autres études, à l’inverse, n’observent rien. </p>
<p>Ainsi, si le contact avec l’art visuel est susceptible de provoquer la détente physique et psychologique du spectateur, celui-ci pourrait ne pas constituer une condition suffisante.</p>
<p>Cette conclusion nous invite donc à nuancer le discours et à approfondir la réflexion sur ce qui se passe au moment de la rencontre avec l’œuvre qui conditionne ses effets sur le psychisme de l’individu.</p>
<p>Aujourd’hui, nous sommes samedi…</p>
<p>Vous irez au musée c’est décidé. </p>
<p>Il est probable que cette décision soit une bonne décision pour votre santé. </p>
<p>Il est également probable que cela dépende du musée et de la façon dont vous visiterez. </p>
<p>Une chose est certaine par contre, c’est que vous augmentez fortement vos chances de passer une agréable journée !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213625/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emma DUPUY travaille en partenariat avec le musée des beaux-arts de Montréal et a reçu des financements de MITACs, de l'Université de Montréal, et des Fonds de Recherche du Québec.</span></em></p>Une visite au musée pour lutter contre la grisaille mentale ? Voici ce qu’en dit la science.Emma Dupuy, Postdoctoral researcher, Université de MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2139432023-09-22T13:53:46Z2023-09-22T13:53:46ZJamais-vu : ce que les recherches nous disent sur l’opposé du déjà-vu<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/549125/original/file-20230914-26-8pawc1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=457%2C46%2C5763%2C4100&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le « jamais-vu » survient lorsque quelque chose qu’on sait être familier semble tout à coup irréel ou nouveau. La principale explication scientifique du phénomène est la « satiation », qui consiste en une surcharge d’une représentation jusqu’à ce qu’elle en perde toute signification.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Notre esprit a un rapport particulier avec la répétition. Prenons l’expérience du déjà-vu, lorsque nous croyons à tort avoir vécu une situation dans le passé, ce qui nous laisse une sensation troublante de retour en arrière. Nous avons découvert que le déjà-vu propose en réalité une vue sur le fonctionnement de notre mémoire.</p>
<p>Nos recherches ont montré que le phénomène se produit lorsque la partie du cerveau qui détecte la familiarité se désynchronise de la réalité. Le déjà-vu constitue un signal qui nous avertit d’une bizarrerie : il s’agit d’une sorte de <a href="https://www.newscientist.com/article/2101089-mystery-of-deja-%20vu-explained-its-how-we-check-our-memories">« confrontation avec la réalité »</a> effectuée par le système de la mémoire.</p>
<p>La répétition peut avoir toutefois des effets encore plus troublants et inhabituels. Le contraire du déjà-vu est le « jamais-vu », lorsque quelque chose qu’on sait être familier semble tout à coup irréel ou nouveau. Dans le cadre de <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/09658211.2020.1727519">nos récentes recherches</a>, pour lesquelles nous venons de remporter le <a href="https://improbable.com/ig/winners/#ig2023">prix Ig Nobel de littérature</a>, nous avons étudié le mécanisme à l’origine de ce phénomène.</p>
<h2>Une expérience inhabituelle et troublante</h2>
<p>Le jamais-vu consiste, par exemple, à voir un visage connu et à le <a href="https://link.springer.com/referenceworkentry/10.1007/978-0-387-79948-3_1167">trouver soudain bizarre ou étranger</a>. Les musiciens peuvent avoir ce sentiment lorsqu’ils se perdent dans un passage de musique qu’ils connaissent très bien. On ressent aussi cet effet lorsqu’on arrive dans un endroit familier et qu’on s’y sent désorienté ou qu’on porte dessus un regard nouveau.</p>
<p>Il s’agit d’une expérience encore <a href="https://psycnet.apa.org/buy/2003-00782-006">plus rare que le déjà-vu</a> et peut-être encore plus inhabituelle et troublante. Lorsqu’on demande aux gens de la décrire dans des questionnaires sur des expériences de la vie quotidienne, on obtient des réponses telles que « Pendant un examen, j’écris correctement un mot comme “appétit”, mais je lis et relis le mot parce que je n’arrive pas à être sûr qu’il est bien écrit. »</p>
<p>Au quotidien, cela peut être provoqué par une répétition ou le fait de fixer son regard sur quelque chose, mais ce n’est pas toujours le cas. Akira, un membre de notre équipe, a déjà eu cette sensation en conduisant sur l’autoroute, ce qui l’a obligé à s’arrêter sur l’accotement pour que son sentiment de ne pas savoir quoi faire avec les pédales et le volant puisse se « réinitialiser ». Par chance, cela ne se produit pas souvent.</p>
<h2>Une expérience toute simple</h2>
<p>Nous ne savons pas grand-chose du jamais-vu. Mais nous avons présumé qu’il serait assez facile de l’induire en laboratoire. Quand on demande à quelqu’un de répéter quelque chose de nombreuses fois, cela perd souvent de son sens et devient déroutant.</p>
<p>C’est sur cette base que nous avons mené nos recherches sur le jamais-vu. Dans une première expérience, 94 étudiants de premier cycle ont eu comme tâche d’écrire plusieurs fois le même mot. Ils l’ont fait avec douze mots différents qui allaient du plus banal, comme « door » (porte), à d’autres moins courants, comme « sword » (un terme pour pelouse qui n’est pas usuel).</p>
<p>Nous avons dit aux participants qu’ils devaient recopier le mot le plus rapidement possible et qu’ils étaient autorisés à s’arrêter. Nous leur avons donné quelques raisons pour lesquelles ils pouvaient prendre une pause, comme le fait de se sentir bizarre, de s’ennuyer ou d’avoir la main endolorie. La raison la plus souvent invoquée était de sentir que les choses devenaient étranges, et environ 70 % des participants se sont arrêtés au moins une fois parce qu’ils ressentaient quelque chose qui s’apparentait au « jamais-vu ». Cela se produisait généralement au bout d’une minute (33 répétitions) – et surtout pour des mots familiers.</p>
<p>Lors d’une deuxième expérience, nous n’avons utilisé que le mot « the » (le ou la), estimant qu’il s’agissait du mot le plus courant de la langue anglaise. Cette fois, 55 % des personnes ont cessé d’écrire pour des raisons qui répondaient à notre définition du jamais-vu (après 27 répétitions en moyenne).</p>
<p>Voici comment les participants ont décrit leur expérience : « Ils perdent leur sens à mesure qu’on les regarde », « J’ai l’impression de perdre le contrôle de ma main » et, notre favori, « Cela ne semble pas normal, c’est presque comme s’il ne s’agissait pas d’un mot mais que quelqu’un m’avait trompé en me faisant croire que c’en était un ».</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Image of paper with the word « the » over and over" src="https://images.theconversation.com/files/548389/original/file-20230914-9125-llzb2a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/548389/original/file-20230914-9125-llzb2a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/548389/original/file-20230914-9125-llzb2a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/548389/original/file-20230914-9125-llzb2a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/548389/original/file-20230914-9125-llzb2a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/548389/original/file-20230914-9125-llzb2a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/548389/original/file-20230914-9125-llzb2a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Essayez d’écrire 33 fois le mot « the ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Christopher Moulin</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<h2>Une « perte du pouvoir associatif »</h2>
<p>Il nous a fallu environ 15 ans pour rédiger et publier nos résultats. En 2003, nous avons travaillé à partir de la présomption que les gens se sentaient bizarres en écrivant un mot de nombreuses fois de suite. Chris, un membre de notre équipe, avait remarqué que les phrases qu’on lui avait demandé d’écrire à plusieurs reprises en guise de punition à l’école secondaire lui donnaient une sensation étrange, comme si elles n’étaient pas réelles.</p>
<p>Cela a pris 15 ans parce que nous n’étions pas si futés et que notre idée n’était pas aussi novatrice que nous le croyions. En 1907, <a href="https://nospensees.fr/margaret-floy-washburn-la-premiere-femme-docteure-en-psychologie/">Margaret Floy Washburn</a>, une pionnière de la psychologie restée dans l’ombre, a publié une <a href="https://www.jstor.org/stable/1412411">expérience</a> menée avec un de ses étudiants qui montrait la « perte du pouvoir associatif » de mots que l’on fixait pendant trois minutes. Les mots devenaient étranges, perdaient leur sens et se fragmentaient au fil du temps.</p>
<p>Nous avions réinventé la roue. Ces méthodes et investigations introspectives n’avaient tout simplement plus la cote en psychologie.</p>
<h2>Et si on approfondissait un peu</h2>
<p>Notre unique contribution est d’avancer que les transformations et les pertes de sens liées à la répétition s’accompagnent d’un sentiment particulier : le jamais-vu. Il nous signale que quelque chose est devenu trop automatique, trop aisé, trop répétitif. Il nous permet d’émerger de notre fonctionnement actuel, et le sentiment d’étrangeté constitue une confrontation avec la réalité.</p>
<p>Il est logique que cela se produise. Nos systèmes cognitifs doivent rester flexibles, ce qui nous permet d’orienter notre attention là où c’est nécessaire plutôt que de nous égarer trop longtemps dans des tâches répétitives.</p>
<p>Nous n’en sommes qu’au début de notre compréhension du jamais-vu. La principale explication scientifique est la « satiation », qui consiste en une surcharge d’une représentation jusqu’à ce qu’elle en perde toute signification. Parmi les idées du même genre, citons <a href="https://psycnet.apa.org/record/1969-00199-001">« l’effet de transformation verbale »</a>, où la répétition d’un mot active des mots « voisins », de sorte que si des gens commencent par écouter en boucle le mot « tress », ils finissent par entendre « dress », « stress » ou « florist ».</p>
<p>Ce phénomène semble lié à la recherche sur les troubles obsessionnels compulsifs (TOC), où on s’est intéressé à <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19342006/">ce qui se passe</a> lorsque quelqu’un fixe de façon compulsive des objets, tels que des brûleurs de cuisinière allumés. Comme pour l’écriture répétitive, cela engendre une transformation de la réalité, ce qui peut nous aider à comprendre et à traiter les TOC. Si le fait de vérifier à plusieurs reprises si la porte est bien fermée à clé finit par faire perdre toute signification à la tâche, cela rend difficile de savoir si la porte est fermée ou pas, et un cercle vicieux s’enclenche.</p>
<p>Pour conclure, nous sommes flattés d’avoir reçu le prix Ig Nobel de littérature. Les lauréats de ces prix contribuent à des travaux scientifiques qui « vous font rire pour ensuite vous faire réfléchir ». Nous espérons que notre travail sur le jamais-vu inspirera d’autres recherches et permettra d’approfondir le sujet dans un proche avenir.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213943/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christopher Moulin reçoit actuellement un financement de l'Agence nationale de recherche française pour examiner la conscience de la mémoire chez les personnes âgées en bonne santé (projet AGEFOK). Il a été membre senior de l'Institut universitaire de France (IUF) entre 2016 et 2021. Il remercie l'IUF pour son soutien dans ses recherches sur le déjà vu et le jamais vu.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Akira O'Connor ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Vous est-il déjà arrivé de regarder un visage familier et de le trouver soudainement inhabituel ou inconnu ? Il s’agit peut-être d’un cas de « jamais vu ».Akira O'Connor, Senior Lecturer in Psychology, University of St AndrewsChristopher Moulin, Professor of cognitive neuropsychology, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1685282021-09-30T18:18:34Z2021-09-30T18:18:34ZCe que provoquent en nous les émotions d’une découverte, de la tête aux pieds<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/422645/original/file-20210922-13-149n72l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=30%2C56%2C2227%2C1225&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le philosophe grec Archimède dans son bain. Gravure du XVIᵉ siècle.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Archim%C3%A8de#/media/Fichier:Archimede_bain.jpg">Wikimedia Commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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</figure>
<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science, qui a lieu du 1<sup>er</sup> au 11 octobre 2021 en métropole et du 5 au 22 novembre 2021 en outre-mer et à l’international, et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition a pour thème : « Eureka ! L'émotion de la découverte ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>« Eurêka ! » s’écria Archimède en découvrant la fameuse poussée… d’Archimède. Cette fable, que nous avons tous en tête, ne reflète peut-être pas la véracité de la découverte du savant de l’Antiquité, mais elle illustre bien le fait que les émotions (positive, en l’occurrence) mettent en mouvement. Cette définition des émotions vient d’ailleurs du latin <em>e movere</em>.</p>
<p>Dans le cas du chercheur, les émotions permettent en effet de mettre en mouvement la suite d’une recherche, dans le cas de la joie de la découverte, ou bien de changer de sujet ou de point de vue si les résultats ne sont pas concluants.</p>
<p>Dans le cas d’Archimède, ce moment de joie intense a sans doute participé à mettre en mouvement le reste de sa recherche sur la flottabilité d’un corps, en lui permettant de savoir qu’il était sur la bonne voie.</p>
<h2>Qu’est-ce qu’une émotion ?</h2>
<p>Maintenant que nous avons un exemple d’un chercheur ressentant une émotion vive, il convient de se demander ce qu’est une émotion. Depuis que le naturaliste anglais Charles Darwin a publié son ouvrage intitulé <a href="https://www.franceculture.fr/oeuvre/lexpression-des-emotions-chez-lhomme-et-les-animaux-1872"><em>L’Expression des émotions chez l’homme et les animaux</em></a> en 1872, les chercheurs en psychologie se sont battus pour trouver une définition de ce qu’est une émotion.</p>
<p>En 1981, il existait <a href="https://www.cambridge.org/core/books/measurement-of-affect-mood-and-emotion/untangling-the-terminological-gordian-knot/DF2BE0D0F1E00C05DB80E37DE8D20C2E">92 définitions différentes</a> du concept d’émotion. Bien que tous les chercheurs ne se soient pas encore mis d’accord sur une définition commune, il existe un consensus sur la <a href="https://psycnet.apa.org/record/2009-16563-000">fonction des émotions</a>. Les émotions ont quatre buts majeurs :</p>
<ul>
<li><p>diriger notre attention vers un changement important pour notre bien-être (la présence ou l’absence d’un résultat important, pour un chercheur) ;</p></li>
<li><p>nous motiver à choisir l’action appropriée (continuer ou arrêter d’explorer une voie de recherche) ;</p></li>
<li><p>connecter notre perception et notre interprétation des événements à nos comportements (comprendre que c’est grâce à ma recherche que j’ai obtenu ou pas ce résultat) ;</p></li>
<li><p>et définir des priorités dans le cas où nous avons plusieurs actions possibles (choisir de continuer à travailler pour terminer un projet plutôt que d’en commencer un autre).</p></li>
</ul>
<p>Les émotions ont donc un rôle essentiel dans l’adaptation à notre environnement.</p>
<h2>Que se passe-t-il dans notre tête ?</h2>
<p>Selon les théories actuelles en psychologie, notre cerveau comprend ce qu’il se passe dans notre environnement en <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/behavioral-and-brain-sciences/article/whatever-next-predictive-brains-situated-agents-and-the-future-of-cognitive-science/33542C736E17E3D1D44E8D03BE5F4CD9">faisant des prédictions</a>. C’est-à-dire qu’il prédit la cause de nos ressentis corporels et de nos perceptions puis il compare ses prédictions à ce que nous ressentons et percevons réellement. Il obtient ainsi une différence entre sa prédiction et la réalité. C’est en minimisant cette différence par essais-erreurs qu’il arrive à faire sens de ce qui nous entoure.</p>
<p>Les dernières théories des émotions semblent indiquer que la fabrication des émotions dans le <a href="https://academic.oup.com/scan/article/12/11/1833/3788035">cerveau suivrait le même schéma</a>. Ainsi, notre cerveau construirait une expérience, que nous humains appelons émotion, basée sur nos ressentis corporels.</p>
<p>Lorsque nous ressentons une émotion, notre cerveau construit cette expérience comme toutes nos autres perceptions, sans attacher le mot <em>émotion</em> à cette perception. Ce sont en effet les humains qui ont développé ce terme, comme les humains ont développé le terme de « monnaie » pour faire référence aux billets ou aux pièces.</p>
<p>Au moment où un chercheur ressent la joie de la découverte, avant même d’associer le mot <em>joie</em> à ses ressentis, son cerveau cherche à trouver la prédiction qui explique pourquoi le cœur bat plus vite, pourquoi les pupilles se dilatent et quels sont les liens entre ces réactions physiologiques et un nouveau résultat de recherche, en se basant sur ce que le cerveau connaît déjà (les souvenirs ou la connaissance de la fable d’Archimède, par exemple).</p>
<h2>Et dans notre corps ?</h2>
<p>Pour construire l’expérience émotionnelle, le cerveau a donc besoin d’informations en provenance du corps. Il a besoin de savoir que le cœur bat plus vite, que la température du corps augmente ou que les pupilles se dilatent. L’on pourrait croire que l’on ressent une émotion puis que notre corps se met en action mais c’est probablement l’inverse qui se passe.</p>
<p>En 1884, le psychologue et philosophe américain William James proposa cette théorie en donnant un <a href="https://psychclassics.yorku.ca/James/emotion.htm">exemple très simple</a> : imaginez que vous marchiez dans la forêt et qu’au détour d’un buisson vous croisiez un ours affamé. Si votre cerveau avait besoin de construire l’expérience émotionnelle de peur avant de commencer à courir, alors vous ne seriez pas en mesure de raconter cette histoire. C’est bien parce que vous courez, que votre cœur bat plus vite et que vous voyez l’ours courir à votre poursuite que votre cerveau crée et enregistre en mémoire l’expérience émotionnelle de peur.</p>
<p>Le corps est un puissant vecteur émotionnel. Des chercheurs ont réussi à montrer que les humains sont capables de reconnaître les émotions d’une autre personne, simplement en <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1068/p5096">voyant le corps de cette personne se déplacer</a>. C’est en puisant dans sa mémoire et ses propres ressentis que le cerveau réussit le tour de force d’identifier l’émotion de la personne.</p>
<p>Tous les chercheurs en ont d’ailleurs déjà probablement fait l’expérience. Lorsqu’ils reçoivent un de leur doctorant, ils peuvent savoir si l’étudiant est plutôt heureux (marchant avec les épaules ouvertes et la tête haute) ou triste (marchant avec les épaules rentrées et la tête basse). La fonction des émotions étant de mettre en mouvement, il est essentiel de prendre en compte le corps et son mouvement lorsque l’on étudie les émotions.</p>
<p>C’est pourquoi, dans notre <a href="https://scalab.univ-lille.fr/laboratoire/">laboratoire SCALab</a> (CNRS 9193) rattaché à l’Université de Lille, nous utilisons des techniques de capture du mouvement pour enregistrer en 3D les mouvements de nos participants. Nous mobilisons également des odeurs et des musiques pour modifier l’état émotionnel des participants et ainsi pouvoir étudier les microvariations de la cinématique en fonction de l’émotion induite.</p>
<p>Pour donner sens à ces microvariations, nous utilisons des algorithmes d’apprentissage profond dans le but de mimer le fonctionnement d’une partie du cerveau : nous voulons pouvoir prédire l’état émotionnel de la personne, simplement en utilisant sa cinématique corporelle (sa façon de se déplacer).</p>
<h2>Pas des bugs</h2>
<p>Notre société ne cesse d’augmenter le nombre de systèmes automatiques pour nous aider à prendre des décisions, par exemple. Ces systèmes automatiques ne prennent pas encore en compte les émotions de leurs utilisateurs. Tout d’abord parce que les chercheurs en psychologie ne sont pas encore tous d’accord sur ce qu’est une émotion ou comment nous les ressentons. Mais également parce qu’ils sont souvent développés par des spécialistes en informatique, robotique, etc. sans collaborer avec des chercheurs en psychologie.</p>
<p>Finalement, pendant de nombreuses années les émotions ont été vues comme un grain de sable perturbant la machine parfaite de la cognition humaine, et les algorithmes ont été vus comme une solution rationnelle aux problèmes émotionnels humains. Grâce aux dernières recherches en psychologie des émotions, nous savons maintenant que les émotions ne sont pas des bugs que les programmes informatiques doivent corriger.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/168528/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Victor P. M. Brossard a reçu des financements de la fondation I-SITE ULNE (TEM-R-SUSTAIN-18-012). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Yvonne Delevoye-Turrell a reçu des financements de CNRS 80PRIME (2020) et I-Site (TEM-SUSTAIN 2018). Notre recherche est menée au sein de la plateforme EQUIPEX (FR 2052).</span></em></p>Lorsque le philosophe grec Archimède poussa son célèbre « Eurêka ! », la joie intense qu’il a ressentie lui indiquait qu’il était sur la bonne voie dans ses recherches sur la flottabilité.Victor P. M. Brossard, Doctorant en Psychologie, Université de LilleYvonne Delevoye, Professeure en Psychologie Cognitive, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1632202021-08-12T13:05:05Z2021-08-12T13:05:05ZTDAH chez l’adulte : le difficile diagnostic – et la vie avec ce trouble<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/407753/original/file-20210622-25-wfd4jv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4709%2C3135&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">On estime que plus de 1,3 millions d'adultes Canadiens sont atteints de TDAH.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Beaucoup d’entre nous pensent que le <a href="http://tdah.ca/">Trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité</a> (TDAH) est un trouble lié à l’enfance. Mais un nombre croissant d’adultes <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/652085/tdah-adulte-diagnostic">reçoivent un diagnostic de ce trouble</a> et partagent maintenant leur expérience.</p>
<p>Les médias sociaux ont joué un rôle à cet égard. Des gens se sont rendues chez leur médecin après avoir pris connaissance de vidéos de personnes parlant de leurs symptômes <a href="https://www.fr24news.com/fr/a/2021/05/les-createurs-du-tdah-repandent-la-prise-de-conscience.html">sur TikTok ou d'autres réseaux sociaux</a>. En fait, on estime que <a href="https://www.infotdah.ca/">plus de 1,3 million d’adultes canadiens</a> sont atteints de TDAH. Nous-mêmes souffrons de TDAH et avons eu un diagnostic à l’âge adulte.</p>
<p>Pourtant, malgré cette prise de conscience croissante, de nombreux adultes doivent encore se battre pour obtenir un diagnostic.</p>
<p>Le TDAH est un trouble génétique du développement neurologique, dans lequel le cerveau présente un déséquilibre dans la production des <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7880081/">substances chimiques spécifiques</a> impliquées dans le plaisir et la récompense.</p>
<p>Cela signifie que le cerveau des personnes atteintes du TDAH cherche souvent des moyens de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2626918/">stimuler ces substances chimiques</a>, ce qui explique pourquoi les personnes concernées peuvent être inattentives, hyperactives et impulsives.</p>
<p>Les <a href="https://www.nhs.uk/conditions/attention-deficit-hyperactivity-disorder-adhd/diagnosis/">traits communs du TDAH</a> sont :</p>
<ul>
<li><p>ne pas persévérer dans des tâches plus longues (ou ne pas les commencer) ;</p></li>
<li><p>se laisser distraire par d’autres tâches ou pensées ;</p></li>
<li><p>rechercher le risque ou les activités qui procurent une récompense immédiate ;</p></li>
<li><p>se sentir agité ou s’agiter ;</p></li>
<li><p>interrompre les autres involontairement.</p></li>
</ul>
<p>Les symptômes se ressemblent chez les adultes et les enfants, bien que certains éléments diffèrent ou changent avec l’âge. Par exemple, l’inattention est le symptôme le plus persistant chez les adultes.</p>
<p>Le TDAH peut être envahissant. Il affecte la qualité de vie et augmente les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33549739/">probabilités</a> d’avoir des problèmes de consommation d’alcool ou de drogues, de se retrouver au chômage ou de se blesser accidentellement. Les risques de suicide et de mort prématurée sont aussi plus élevés chez les adultes souffrant du TDAH. En outre, le TDAH peut coûter cher en traitements médicaux.</p>
<p>Le TDAH est également souvent associé à un large éventail de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21432612/">comorbidités</a> chez les adultes.</p>
<p>Par exemple, la dépression est presque <a href="https://chadd.org/about-adhd/co-occuring-conditions/">trois fois plus fréquente</a> chez les adultes atteints de TDAH. Et près de la moitié des adultes atteints de TDAH souffrent également de <a href="https://bmcpsychiatry.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12888-017-1463-3">trouble du spectre bipolaire</a>.</p>
<p>Environ 70 % des adultes atteints de TDAH souffrent également de <a href="https://bmcpsychiatry.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12888-017-1463-3#Sec1">dysrégulation émotionnelle</a>, ce qui peut rendre plus difficile le contrôle des réponses émotionnelles. On pense également que <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/dhe.31047">presque tous les adultes atteints de TDAH</a> présentent une <a href="https://www.webmd.com/add-adhd/rejection-sensitive-dysphoria">dysphorie de sensibilité au rejet</a>, un état dans lequel le rejet ou la critique perçus peuvent provoquer une douleur émotionnelle extrême.</p>
<p>En outre, les adultes atteints de TDAH peuvent avoir des problèmes de <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-020-64678-x">mémoire à court terme</a> – comme l’incapacité de se souvenir d’une courte liste de courses – et une <a href="https://chadd.org/adhd-in-the-news/what-is-time-blindness-and-do-you-have-it/#:%7E:text=Time%20blindness%20is%20un%20terme,ability%20to%20track%20its%20passing">incapacité à percevoir le temps</a>.</p>
<p>Certains peuvent également présenter un <a href="https://www.additudemag.com/oppositional-defiant-disorder-in-adults/#:%7E:text=Adultes%20avec%20un%20troubleoppositionnelavecprovocation,comply%20with%20rules%20and%20laws">trouble oppositionnel avec provocation</a>, ce qui signifie qu’ils réagissent souvent mal aux consignes ou aux règles.</p>
<p>Bien qu’aucune de ces comorbidités ne soit utilisée pour diagnostiquer le TDAH, elles peuvent rendre le TDAH d’autant plus difficile à vivre.</p>
<h2>Être diagnostiqué</h2>
<p>Obtenir un diagnostic de TDAH pour un adulte peut être difficile. Seul un spécialiste (<a href="https://cliniquepsychologiequebec.com/tdah-adulte/#diagnostic">neurologue ou psychologue spécialisé</a>) peut le faire. Mais même avec une référence à un spécialiste, une personne doit prouver qu’elle a tous les traits du TDAH, et ce depuis l’enfance, et que ceux-ci ont un impact sérieux sur sa vie (problèmes au travail ou dans ses relations personnelles).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Jeune femme attendant seule dans le bureau d’un médecin, tandis que deux médecins se consultent en arrière-plan" src="https://images.theconversation.com/files/407454/original/file-20210621-35622-1skaszi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/407454/original/file-20210621-35622-1skaszi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/407454/original/file-20210621-35622-1skaszi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/407454/original/file-20210621-35622-1skaszi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/407454/original/file-20210621-35622-1skaszi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/407454/original/file-20210621-35622-1skaszi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/407454/original/file-20210621-35622-1skaszi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La difficulté d’obtenir un diagnostic est chose courante pour les adultes atteints de TDAH.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/woman-patient-waiting-hospital-doctors-room-796833799">(Roman Kosolapov/Shutterstock)</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Notre propre expérience du diagnostic du TDAH n’est pas si différente de celle d’autres adultes…</p>
<p>Comme beaucoup de gens, j’ai (Alex) été diagnostiqué avec un TDAH « par accident », après avoir été orienté vers un psychiatre pour obtenir de l’aide pour (ce que je sais maintenant) une automédication par l’alcool. En raison de mon TDAH, mon cerveau exige des stimulations assez extrêmes la plupart du temps.</p>
<p>Ironiquement, j’ai <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/ajmg.b.30632">publié des articles scientifiques</a> <a href="https://link.springer.com/content/pdf/10.1007/s12402-010-0040-0.pdf">sur le TDAH</a> et – probablement en raison d’un manque de conscience de soi classique du TDAH – il ne m’est pas venu à l’esprit que je pouvais en être atteint. Cette « étiquette » m’a depuis aidé à comprendre mon comportement.</p>
<p>Mes principaux défis restent la hiérarchisation des tâches en fonction de leur importance (au lieu de leur caractère excitant) et un comportement anti-autorité assez extrême (parfois appelé défiance oppositionnelle). Je suis également un terrible spectateur, qui a du mal à assister à des conférences ou à rester assis au théâtre – cela peut même être ressenti comme une douleur physique.</p>
<p>De mon côté, j’ai (James) été diagnostiqué assez rapidement parce que j’ai eu recours à une clinique privée – bien qu’il y ait eu une longue attente pour les médicaments. Pourtant, je savais depuis cinq ans que j’avais probablement un TDAH, mais je m’en étais bien accommodé jusqu’à la pandémie. La pression supplémentaire de l’isolement et l’augmentation de la charge de travail ont eu un impact sur ma santé mentale, et j’ai donc consulté pour obtenir un diagnostic.</p>
<p>Maintenant que j’ai été diagnostiquée et que je suis sous traitement, la vie est de plus en plus facile, même si je dois encore relever de nombreux défis chaque jour. Je ressens souvent de l’anxiété pour des choses banales, comme parler à un ami, mais passer à la télévision ne pose aucun problème.</p>
<p>Au quotidien, j’oublie beaucoup de choses simples, comme l’endroit où j’ai laissé mes clés ou de fermer le robinet lorsque je remplis la baignoire. J’ai énormément de mal à contrôler mes émotions, et en particulier le rejet. Par exemple, lorsque personne n’a ri à une blague que j’ai faite sur mon TDAH dans un groupe de messagerie pour cadres supérieurs, j’ai voulu quitter mon emploi. Je suis tout à fait incapable de garder l’attention lors de réunions ou de séminaires et je fais des achats impulsifs.</p>
<p>Bien que le TDAH soit de plus en plus reconnu chez les adultes, de nombreuses personnes vivent encore avec ce trouble sans avoir été diagnostiquées parfois parce qu’elles ne sont même pas conscientes de ce qu’elles vivent.</p>
<p>Il est essentiel de comprendre ce trouble chez l’adulte, de le prendre plus au sérieux, de le faire connaître et d’investir dans des services permettant d’améliorer les délais de diagnostic. Le diagnostic ouvre la voie au traitement, qui peut avoir un <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/1087054719841129">impact considérable</a> sur la vie avec le TDAH, notamment en améliorant l’estime de soi, la productivité et la qualité de vie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/163220/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>James Brown est cofondateur de ADHDadultUK, un groupe de soutien dirigé par des pairs pour les adultes atteints de TDAH.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Alex Conner est cofondateur de ADHDadultUK, un groupe de soutien dirigé par des pairs pour les adultes atteints de TDAH.
</span></em></p>Les symptômes du TDAH se ressemblent chez les adultes et les enfants, mais certains éléments diffèrent ou changent avec l’âge. L’inattention est le symptôme le plus persistant chez les adultes.James Brown, Associate Professor in Biology and Biomedical Science, Aston UniversityAlex Conner, Reader in Biomedical Science Communication, University of BirminghamLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1622662021-07-07T19:07:18Z2021-07-07T19:07:18ZNez qui s’allonge et bras qui s’étirent : découvrez les illusions corporelles<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/410160/original/file-20210707-19-7n297f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=45%2C7%2C5120%2C3395&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Connaissez-vous l'illusion de Pinocchio ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/6lm1MI-UmpU">Milk Chan / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La manière dont on perçoit notre corps peut être altérée en quelques minutes, voire en quelques secondes, dans une simple expérience de laboratoire. Pourriez-vous sentir que <a href="https://academic.oup.com/brain/article-lookup/doi/10.1093/brain/111.2.281">votre nez s’est allongé</a> comme celui de Pinocchio ? Ou qu’une <a href="http://www.nature.com/articles/35784">main en caoutchouc</a> a remplacé votre propre main ? Ce genre d’illusions est la spécialité de certaines équipes de recherche en psychologie cognitive.</p>
<p>L’illusion Pinocchio peut être reproduite chez vous à l’aide de deux complices et d’un peu d’entraînement. L’expérimentateur doit faire bouger le doigt de la « victime » (bien qu’en recherche, on préfère généralement le terme de « participant ») pour qu’il touche le nez d’un acolyte assis devant lui. Simultanément – c’est là que ça se corse –, l’expérimentateur doit toucher le nez du participant à chaque fois que son doigt touche le nez du complice. Le participant doit garder les yeux fermés. Quelques secondes de stimulation peuvent suffire à produire l’illusion chez le participant que son nez s’est allongé : c’est l’<a href="https://academic.oup.com/brain/article/121/9/1603/283360?login=true">illusion du « nez fantôme »</a> (<a href="https://www.youtube.com/watch?v=7GgQeBznC4I">démonstration vidéo</a>).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/410166/original/file-20210707-27-1j2s6o1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/410166/original/file-20210707-27-1j2s6o1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=496&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/410166/original/file-20210707-27-1j2s6o1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=496&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/410166/original/file-20210707-27-1j2s6o1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=496&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/410166/original/file-20210707-27-1j2s6o1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=623&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/410166/original/file-20210707-27-1j2s6o1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=623&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/410166/original/file-20210707-27-1j2s6o1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=623&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’illusion du nez fantôme (variante de l’illusion Pinocchio) : l’expérimentateur (en vert) touche le nez du participant (en rouge) en même temps qu’il lui fait toucher le nez d’un complice (en bleu), produisant chez le participant l’illusion que son nez s’allonge.</span>
<span class="attribution"><span class="source">SAM</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p><a href="https://academic.oup.com/brain/article-lookup/doi/10.1093/brain/111.2.281">À l’origine</a>, cet effet a été montré avec un protocole légèrement plus complexe, basé sur une autre illusion : l’illusion de mouvement. Des vibrations au niveau des tendons du bras permettent de faire croire au participant que son bras est en extension alors qu’il reste figé. Si le participant touche son nez alors que l’illusion de mouvement est déclenchée, il sent son bras partir et son nez grandir d’autant.</p>
<p>De nombreuses <a href="https://academic.oup.com/brain/article-abstract/111/2/281/326825">autres parties du corps</a> sont sensibles à cette illusion. Dans une variante qu’on pourrait appeler l’illusion de la tante Marge, c’est le ventre du participant qui gonfle comme celui de l’<a href="https://www.youtube.com/watch?v=lQPooq-_AH8">imbuvable tante de Harry Potter</a>.</p>
<h2>Juste une illusion ?</h2>
<p>La portée théorique de ces effets est bien plus grande qu’il n’y paraît. L’illusion Pinocchio – ainsi que toute une famille d’illusions et d’effets appelés les <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fnhum.2015.00141/full">illusions corporelles</a> – participent à notre compréhension de la manière dont le cerveau se représente le corps.</p>
<p>D’abord, elles démontrent la grande flexibilité de la représentation du corps. Nous savons bien que notre nez ne dépasse pas quelques centimètres, mais l’illusion Pinocchio prouve qu’une stimulation rapide suffit à donner la perception faussée qu’il s’est allongé. Cette propriété est pourtant étonnante quand on constate l’apparente rigidité du cerveau face à d’autres phénomènes, comme le <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/B9780128026533000518">membre fantôme</a>.</p>
<p>Un membre fantôme est une sensation, douloureuse ou non, qui semble provenir d’un membre absent, amputé ou dont les nerfs ont été rompus. Les sensations fantômes peuvent perdurer plusieurs années après la perte du membre et attestent, eux, d’une certaine résistance du schéma corporel au changement.</p>
<p>Certains auteurs résolvent cette contradiction entre rigidité et flexibilité en proposant qu’il existerait un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/016622369090179E">plan du corps</a> inné mais modifié par l’expérience. L’idée ne fait cependant pas consensus, et ce thème de recherche reste central en psychologie du corps.</p>
<p>Les illusions corporelles confirment également de grands principes du traitement de l’information par le cerveau. Le cerveau aime la cohérence. Dans l’illusion Pinocchio, il est confronté à des informations opposées : d’une part, il sent le bras s’étendre, et d’autre part, il continue de sentir le doigt en contact avec le nez. Pour résoudre cette contradiction, le cerveau produit alors l’illusion que le nez s’est allongé. Dans cette situation, l’illusion vient résoudre une contradiction entre les informations que l’on reçoit de différentes sources : la cohérence est maintenue. C’est pour cela qu’il est essentiel que le participant garde les yeux fermés. En ouvrant les yeux, on voit que le bras est en fait resté immobile, ce qui résout la contradiction et dissipe l’illusion.</p>
<p><a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fnhum.2015.00141/full">Certains auteurs</a> interprètent aussi les illusions corporelles comme des preuves montrant l’existence d’un cerveau « statisticien ». Pour résoudre les problèmes qui se posent à lui, le cerveau doit en effet intégrer les informations à sa disposition (vision, toucher, proprioception…) de manière <a href="https://www.nature.com/articles/415429a">optimale</a> et en fonction de ses connaissances préalables. </p>
<p>Pour ce faire, il doit d’abord décider si deux informations proviennent d’une même source (mon nez propre) ou de deux sources différentes (mon nez <em>et</em> celui d’une autre personne). En l’absence d’informations visuelles contraires, le cerveau privilégierait l’interprétation selon laquelle le nez touché et le nez ressenti correspondent à une seule et même cause, le nez allongé. Ce processus serait la base de l’illusion Pinocchio, selon les partisans de cette théorie du <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0000943">cerveau « bayésien</a> » et optimisateur.</p>
<h2>Des illusions pour soigner</h2>
<p>Les illusions corporelles sont donc utiles à la recherche en psychologie et en neurosciences pour mieux comprendre comment le cerveau se représente le corps. Mais au-delà de la curiosité intellectuelle et scientifique que représentent ces illusions, elles pourraient s’avérer des outils inattendus dans la compréhension et la prise en charge de certains troubles psychiatriques.</p>
<p>Dans l’anorexie mentale, par exemple, les patientes (les femmes sont plus souvent touchées, même si les hommes peuvent aussi présenter cette pathologie) s’imposent des restrictions alimentaires notamment parce qu’elles s’estiment trop grosses. Cette distorsion de la représentation corporelle semble être un <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/1097-4679(199007)46:4%3C398::AID-JCLP2270460404%3E3.0.CO;2-5">facteur de risque</a> important pour cette pathologie. Elle s’exprime par exemple dans des questionnaires sur la satisfaction corporelle. Cependant, elle est ancrée encore plus profondément dans la manière dont les patientes se représentent leur corps. Par exemple, dans une <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0064602">étude</a> portant sur la marche, les patientes présentant une anorexie mentale se déplaçaient comme si leur corps était réellement plus large.</p>
<p>Les illusions corporelles pourraient être utilisées dans ce contexte psychiatrique comme <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0163921">techniques de remédiation</a> pour recalibrer la manière dont les patientes évaluent leurs corps. Après une session de réalité virtuelle où des patientes avec anorexie mentale étaient plongées dans un corps de corpulence moyenne, leurs erreurs d’estimation de leur propre corps diminuaient. Le niveau de preuve en faveur de l’efficacité de ce type de protocoles est <a href="https://www.liebertpub.com/doi/full/10.1089/cyber.2017.29099.gri">modéré, mais encourageant</a>. Ces illusions pourraient donc être des clés ouvrant une meilleure compréhension, mais aussi une meilleure prise en charge des troubles de la représentation corporelle.</p>
<p>L’illusion Pinocchio et les autres illusions corporelles se situent ainsi à la croisée de la recherche fondamentale sur le fonctionnement du cerveau et de la recherche appliquée en psychothérapie. Pour autant, les chercheurs doivent encore écarter les différentes limites des expérimentations précédentes avant de proposer une vraie prise en charge basée sur les illusions corporelles. Sur ce sujet, il faudra encore attendre : l’illusion Pinocchio ne nous a pas encore livré toute la vérité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/162266/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Chazelle est financé par un contrat doctoral par l'Université Grenoble Alpes.
Il est également vice-président de l'Association pour la Psychologie Scientifique à l'Université (APSU).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Richard Palluel-Germain ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La recherche en psychologie se sert beaucoup des illusions pour étudier les fonctions mentales. Parmi elles, découvrez l’illusion Pinocchio, qui vous fait croire que votre nez s’allonge.Thomas Chazelle, Doctorant en psychologie cognitive, Université Grenoble Alpes (UGA)Richard Palluel-Germain, Enseignant Chercheur en Psychologie, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1593882021-07-04T17:21:04Z2021-07-04T17:21:04ZLe jeu du cerveau et du hasard<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/407871/original/file-20210623-4659-5zalzc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=9%2C9%2C5997%2C3998&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le hasard nous fait-il croire à la chance&nbsp;?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/yG9pCqSOrAg">Naser Tamimi </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Dans la pièce de théâtre la plus célèbre de Marivaux <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Jeu_de_l%E2%80%99amour_et_du_hasard"><em>Le jeu de l’amour et du hasard</em></a>, l’auteur joue à inverser le rôle des personnages, et le hasard est invité à guider leurs destins. </p>
<p>De la même façon, notre cerveau est ballotté au gré du hasard, aussi bien dans une loterie que dans les incertitudes et ambiguïtés révélées dans la vision par les illusions d’optique. </p>
<p>Au point que l’on peut attribuer à un esprit malin le fait que la tartine tombe du côté de la confiture, ou que la fiche du câble USB soit toujours dans le mauvais sens. </p>
<p>Le hasard s’invite comme un personnage à part entière dans la cognition, et on peut s’interroger du rôle que celui-ci peut jouer dans le fonctionnement de notre cerveau.</p>
<h2>Les loteries jouent avec notre cerveau</h2>
<p>Entre pari sportif, jeu en ligne, carte à gratter et loterie multimillionnaire, les jeux de hasard ont toujours pris une part importante dans nos vies. Ceux-ci peuvent vite devenir addictifs et révèlent de façon étonnante la dépendance entre le hasard et des mécanismes ancestraux du fonctionnement de notre cerveau. Par exemple, nous sommes prêts dans une loterie à jouer un peu d’argent pour en gagner beaucoup, même si l’on sait pertinemment que comme il est très rare de gagner, on est assuré de perdre à presque tous les coups !</p>
<p>Pourtant, notre cerveau nous pousse à nous abandonner à ce plaisir irrationnel, une forme <a href="http://psydoc-fr.broca.inserm.fr/toxicomanies/textes/addictionssansdrogues.pdf">« d’addiction sans drogue »</a>. En théorie, les règles sont préétablies et on peut prédire les gains à long terme. Et avec un minimum de recul, on peut se rendre compte que certaines stratégies présentées par des revues spécialisées, par exemple la prétendue « loi des séries », n’ont aucun fondement en termes de logique pure. Dans le cas de la loterie nationale par exemple, tout est mis en œuvre pour que le tirage des boules un jour donné soit complètement indépendant de celui qui est fait le jour suivant. Même s’il est arrivé récemment qu’une loterie en Afrique du Sud donne la <a href="https://www.theguardian.com/world/2020/dec/02/six-in-a-row-winning-numbers-in-south-african-lottery-are-5-6-7-8-9-and-10">série des nombres consécutifs 5, 6, 7, 8, 9 et 10</a>, on peut justifier mathématiquement que de telles séries apparaissent : c’est extrêmement rare, mais aussi nécessaire car à la longue, tous les tirages sont possibles, y compris les plus surprenants.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-probabilites-nexistent-pas-mais-on-vous-explique-quand-meme-comment-vous-en-servir-160199">Les probabilités n’existent pas… mais on vous explique quand même comment vous en servir</a>
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<p>Le fait qu’on les trouve surprenants révèle en fait un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/0010028572900163">biais cognitif</a> sur notre <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Illusion_des_s%C3%A9ries">perception du hasard</a>, trace de croyances souvent inconscientes.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/407869/original/file-20210623-25-w41hra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/407869/original/file-20210623-25-w41hra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/407869/original/file-20210623-25-w41hra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/407869/original/file-20210623-25-w41hra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/407869/original/file-20210623-25-w41hra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/407869/original/file-20210623-25-w41hra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/407869/original/file-20210623-25-w41hra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/407869/original/file-20210623-25-w41hra.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Dans cette œuvre d’Étienne Rey, « Trames », créée en collaboration avec notre groupe de recherche, des points sont générés aléatoirement et reliés par des triangles. Trace de nos biais cognitifs et perceptifs, notre œil interprète les coïncidences et regroupements pour y retrouver des structures qui pourraient être interprétées – même si dans cet exemple, le hasard est total.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Étienne Rey</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Du hasard aux « croyances »</h2>
<p>Les biais cognitifs ne se révèlent pas seulement dans les statistiques sur des fréquences d’occurrence d’événements comme celles rencontrées dans la loterie, et le cerveau semble manipuler des formes de « croyances » complexes sur son environnement. Mais dans ce contexte, comment définir une telle « croyance » ?</p>
<p>Une contribution majeure d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Antoine-Augustin_Cournot">Antoine-Augustin Cournot</a> est d’avoir démystifié une origine du hasard qui permet de mieux comprendre cette notion. Économiste, il étudiait durant le XIX<sup>e</sup> siècle des processus d’établissement de monopoles économiques. S’interrogeant sur les aléas perturbant ses données expérimentales, il fit cette proposition simple : si l’impression de hasard, plutôt que d’être lié à des processus autonomes, venait de l’ignorance de l’observateur sur l’origine des données ?</p>
<p>Par exemple, si vous observez deux joueurs de go alors que vous ignorez tout des règles du jeu, vous aurez l’impression que les coups sont joués au hasard, alors que pour de joueurs expérimentés ce jeu ne fait aucunement intervenir la chance, mais un haut niveau de stratégie. Dans cette perspective, l’impression de hasard – et donc sa gestion par notre cerveau – peut être causée par des processus bien déterministes quand bien même l’observateur ignore les causes de leurs interactions. En miroir de l’impression de hasard, une « croyance » serait, dans ce contexte, une mesure d’un « degré d’évidence » de l’observateur sur ces connaissances.</p>
<p>Ainsi, au lieu d’être passif vis-à-vis du hasard, notre cerveau a dû évoluer pour manipuler ces « croyances », ou ces « interprétations a priori » de la situation à laquelle il fait face. Toutefois, les mécanismes biologiques qui sont en jeu sont mal connus et il existe encore une grande différence entre l’intelligence biologique révélée dans le cerveau et celle, artificielle, que l’on construit dans les automates ou robots, ou encore plus récemment avec les ordinateurs ou l’<a href="https://theconversation.com/intelligence-artificielle-les-defis-de-lapprentissage-profond-111522">apprentissage profond</a>. Il n’y a pour ces derniers pas de place pour le hasard alors qu’à l’opposé, notre cerveau utilise le hasard, et qu’il arrive que, par « <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/S%C3%A9rendipit%C3%A9">sérendipité</a> », des découvertes scientifiques soient dues au hasard.</p>
<p>Au niveau théorique, la théorie des probabilités, une branche des mathématiques, permet de définir une « croyance » comme un objet mathématique précis attribuant des probabilités aux différents événements possibles.</p>
<p>Par exemple, imaginons que vous cherchiez à déterminer l’orientation des arbres dans une forêt : les troncs sont principalement orientés verticalement, mais quelques-uns sont penchés ou tordus. Équipée de notre outil théorique, cette mesure physique peut être représentée par la probabilité de vraisemblance de chacune des orientations possibles. Souvent, on peut représenter cette distribution de probabilités par sa valeur la plus probable et par la dispersion autour de cette valeur. Ce type de formalisation permet en particulier de manipuler différents degrés de « croyance » par des règles dites d’« <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Inf%C3%A9rence_bay%C3%A9sienne">inférence</a> ».</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourquoi-sherlock-holmes-naurait-pas-pu-vivre-dans-les-annees-60-147763">Pourquoi Sherlock Holmes n’aurait pas pu vivre dans les années 60</a>
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<p>En pratique, cette notion permet d’affiner les algorithmes classiques d’intelligence artificielle et permet en particulier d’intégrer plusieurs distributions de probabilité de sources différentes. Par exemple, on peut inférer l’orientation d’un arbre à partir de fragments de son image, tout en donnant plus de poids à une information précise (par exemple l’image du bord de son tronc) par rapport à ce qui l’est moins (une vue du feuillage).</p>
<p>Est-ce qu’un tel mécanisme pourrait être à l’œuvre dans le cerveau ?</p>
<h2>Un processus dynamique</h2>
<p>Récemment, nous avons pu directement interroger des neurones biologiques sur cette hypothèse. Nous nous sommes concentrés sur le cortex visuel primaire, une région sur la surface du cerveau qui est essentielle pour la vision. Depuis les expériences de Hubel et Wiesel en <a href="https://physoc.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1113/jphysiol.1959.sp006308">1959</a>, on sait que les neurones de cette région répondent préférentiellement à l’orientation des contours dans l’image, par exemple celle d’une barre lumineuse qui serait présentée devant nos yeux.</p>
<p>Pour étendre la portée de ces expériences fondatrices des neurosciences de la vision, nous avons synthétisé des stimulations visuelles dans lesquelles nous manipulons explicitement la précision de cette orientation, comme sur les photos de l’image ci-dessous. Ainsi nous ajoutons aux images une nouvelle dimension qui représente le fait qu’un objet visuel peut être plus ou moins orienté en modifiant la précision de cette orientation. Celle-ci peut ainsi être transformée depuis une barre parfaitement orientée, à une orientation intermédiaire jusqu’à une texture totalement non orientée.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/407867/original/file-20210623-17-ai1gc3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/407867/original/file-20210623-17-ai1gc3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/407867/original/file-20210623-17-ai1gc3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=182&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/407867/original/file-20210623-17-ai1gc3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=182&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/407867/original/file-20210623-17-ai1gc3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=182&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/407867/original/file-20210623-17-ai1gc3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=229&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/407867/original/file-20210623-17-ai1gc3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=229&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/407867/original/file-20210623-17-ai1gc3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=229&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">L’orientation peut avoir différentes précisions dans différentes zones. Dans une image naturelle (Hugo Ladret), nous avons extrait une zone correspondant à une surface d’eau qui montre une distribution serrée des orientations autour d’une orientation principale proche de l’horizontale. Dans une autre zone correspondant à du feuillage, l’orientation principale est similaire mais beaucoup plus dispersée : l’orientation est moins précise.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Laurent Perrinet</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette nouvelle dimension permet par exemple de distinguer ce qui est dessiné par le contour net d’un objet visuel par rapport à la texture d’un objet pour laquelle la précision est moindre (comme la texture à droite de l’image). Ces <a href="https://www.biorxiv.org/content/10.1101/2021.03.30.437692v2">expériences de neurophysiologie</a> ont révélé que lorsque l’on présente ces stimulations, l’activité de la population de neurones construit graduellement une représentation de l’orientation, mais aussi de sa précision, donc du degré de croyance sur cette orientation. Nos résultats indiquent aussi que les neurones communiquent entre eux différentiellement en fonction de cette précision, notamment qu’une précision moins fine intègre son information plus lentement.</p>
<p>Pour comprendre intuitivement ce mécanisme dynamique, on peut imaginer qu’à la manière d’un peintre ajustant une touche de peinture sur son œuvre, la représentation globale de notre environnement visuel se construit progressivement à partir de ces fragments. Dans le futur, de nouvelles expériences sont nécessaires pour mieux comprendre ces mécanismes. Nous souhaitons en particulier comprendre comment nous intégrons les informations de manière dynamique, dans le flux incessant des stimuli que notre système sensoriel doit traiter.</p>
<h2>De l’utilité du hasard</h2>
<p>Pour conclure, nous avons invoqué le hasard pour mieux comprendre le cerveau. Même s’il peut être une source de confusion, c’est un mécanisme face auquel le cerveau ne reste pas passif, et il constitue une notion centrale pour donner du sens aux mécanismes complexes qui y ont lieu.</p>
<p>Ainsi, une meilleure connaissance du hasard permet l’intégration optimale des « bits » d’information distribués dans notre cerveau et conduisant éventuellement à une conscience unifiée du monde qui nous environne. En écho à la comédie de Marivaux, espérons que le hasard permette d’unir neurosciences et informatique pour mieux comprendre l’intelligence.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/159388/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laurent Perrinet a reçu des financements du CNRS et le l'Agence Nationale de la Recherche.</span></em></p>Le cerveau ne reste pas passif face au hasard. Des expériences récentes montrent que mesurer la précision du « hasard » constitue une notion centrale pour comprendre des mécanismes cognitifs complexes.Laurent Perrinet, Chercheur CNRS en Neurosciences computationnelles, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1629052021-06-25T13:58:22Z2021-06-25T13:58:22ZQuels types d’oublis sont les plus liés à la maladie d’Alzheimer ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/407702/original/file-20210622-14-159kued.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C10%2C6726%2C4694&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il y a différents types de mémoire et ils ne sont pas tous liés à la maladie d'Alzheimer. </span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>La maladie d’Alzheimer, cette démence neurodégénérative qui affecte la mémoire est malheureusement bien connue du grand public. Au Canada, <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5158126/">plus d’un demi-million de personnes</a> vivent avec cette démence, et on prévoit que ce nombre doublera d’ici les dix prochaines années, notamment en raison du vieillissement de la population.</p>
<p>La maladie d’Alzheimer est redoutée : on l’accuse – parfois à la blague – lorsqu’on oublie d’acheter un article à l’épicerie, on s’en inquiète lorsqu’on ne trouve plus le nom de l’acteur d’un film, on la reconnaît en voyant une personne âgée désorientée. Cependant, est-ce que l’on connaît vraiment les comportements qui permettent de diagnostiquer la maladie d’Alzheimer ?</p>
<p>Je termine ma deuxième année de doctorat en neuropsychologie clinique à l’Université de Montréal, au Laboratoire de Neuropsychologie du vieillissement du <a href="https://recherche.umontreal.ca/nos-chercheurs/repertoire-des-unites-de-recherche/unite/is/ur13690/">Centre de recherche de l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal</a> (CRIUGM). J'étudie cette question et la réponse n’est pas si simple. </p>
<p>On sait évidemment que la maladie d’Alzheimer affecte la mémoire. Sauf que, à tort, on imagine souvent la mémoire comme un grand tout, la considérant comme un même panier où s’entassent tous nos souvenirs. Il est donc d’abord important de comprendre qu’il y a différents types de mémoire, et jusqu’à quel point ils sont affectés dans la maladie d’Alzheimer.</p>
<h2>La mémoire épisodique</h2>
<p>Il y a plusieurs types de souvenirs. La première catégorie comprend les souvenirs personnels des évènements que nous avons vécus depuis le début de notre vie.</p>
<p>Un peu comme un album de photos, la <a href="https://www.cairn.info/revue-l-annee-psychologique1-2009-2-page-197.htm">mémoire épisodique</a> regroupe les souvenirs de notre enfance, de notre premier déménagement, de notre plus beau voyage, mais aussi de notre week-end dernier et de ce que l’on a mangé pour déjeuner ce matin.</p>
<p>Ce sont les souvenirs qui, pour être rappelés à la surface, nécessitent que l’on fasse une sorte de « voyage mental » dans le temps pour se replacer dans le contexte de l’évènement vécu (c’était quand ? où étions-nous ? avec qui ?).</p>
<h2>La mémoire sémantique</h2>
<p>Au contraire de la mémoire épisodique, la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1627483009000750?casa_token=uYg5a9MwqRMAAAAA:8WJrHn96on41GA9w-UZ9e2tpj1yRx9Q3lSHnxGXHEjIGB1qVy9CylYWAjRat3zwUxSyu5ORPWA">mémoire sémantique</a> regroupe les souvenirs qui n’ont pas besoin d’être réactivés en se replaçant dans le contexte. On parle ici des connaissances générales sur le monde extérieur, qui ne sont pas liées à un endroit ou à un moment précis.</p>
<p>Par exemple, si nous nous demandons quel animal possède une carapace, ou encore qui était le mari de Céline Dion, nous n’avons pas besoin de réfléchir à un moment précis de notre vie pour trouver la réponse. Nous ne nous rappelons pas spécifiquement du contexte dans lequel nous avons appris cela, mais ces connaissances générales sont ancrées dans notre mémoire.</p>
<h2>Des régions distinctes du cerveau</h2>
<p>Évidemment, ces deux types de mémoire sont étroitement liés dans notre quotidien. Nous utilisons constamment nos souvenirs épisodiques et sémantiques pour fonctionner, et, en même temps, nous encodons continuellement de nouveaux souvenirs épisodiques et sémantiques.</p>
<p>Malgré le fait qu’ils soient liés, ces deux types de mémoire <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0035378704709212">sont néanmoins sous-tendus par des régions partiellement distinctes dans le cerveau</a>. La fabrication des souvenirs d’évènements vécus (liés à la mémoire épisodique) implique les hippocampes, des structures du lobe temporal interne, situé au milieu du cerveau, ainsi que le lobe frontal qui sert mettre mettre tout cela en contexte.</p>
<p>Les souvenirs de connaissances générales (liés à la mémoire sémantique), quant à eux, impliquent davantage le fonctionnement des régions parahippocampiques, c’est-à-dire les structures situées juste autour des hippocampes et la partie antérieure des lobes temporaux (pôles temporaux).</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/407762/original/file-20210622-18-cbxv6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/407762/original/file-20210622-18-cbxv6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/407762/original/file-20210622-18-cbxv6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/407762/original/file-20210622-18-cbxv6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/407762/original/file-20210622-18-cbxv6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/407762/original/file-20210622-18-cbxv6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/407762/original/file-20210622-18-cbxv6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’hippocampe sous-tend la mémoire épisodique, alors que les régions parahippocampiques, comme le cortex périrhinal (ici en vert), sous-tendent la mémoire sémantique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">democritique.org/Cerveau/Cortex_perirhinal.svg.xhtml</span></span>
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<h2>Et dans la maladie d’Alzheimer ?</h2>
<p>Et alors, entre oublier le film regardé la veille ou mélanger les noms de chanteurs, qu’est-ce qui est le plus inquiétant ?</p>
<p>Typiquement, la maladie d’Alzheimer est associée à un déclin de la mémoire épisodique. Les patients vont se plaindre de ne plus se rappeler des évènements qu’ils ont vécus, des conversations qu’ils ont eues, des choses qu’ils ont faites. C’est ce type de mémoire qui est le plus souvent testé en neuropsychologie lors de l’évaluation de la démence, et c’est aussi ce type de mémoire qui est étudié dans la grande majorité des recherches portant sur la maladie d’Alzheimer.</p>
<p>Cependant, un nouveau paradigme est en train d’émerger en recherche clinique, particulièrement au laboratoire où nous menons nos recherches. </p>
<p><a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32815030/">Les récentes études démontrent</a> qu’en fait, ce serait la mémoire sémantique qui serait atteinte en premier dans l’évolution de la maladie d’Alzheimer. On constate qu’<a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03043913/document">avant même d’oublier leurs souvenirs d’évènements vécus, les patients montrent un déclin graduel de leurs connaissances générales</a>.</p>
<p>Par exemple, ils ont plus de difficultés que les personnes âgées en santé à nommer des célébrités, comme Albert Einstein, ou des logos très connus comme celui de Pepsi ou de Desjardins. Ils ont aussi du mal à répondre à des questions sur la biographie de ces célébrités (par exemple, si Maurice Richard était, oui ou non, un chanteur), à répondre à des questions précises sur des objets ou des animaux (est-ce que l’autruche court, vole ou nage ?) ou à reconnaître des objets comme un harmonica, un hélicoptère ou un igloo d’après un dessin.</p>
<h2>Des symptômes 12 ans avant</h2>
<p><a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/ana.21509">Selon une étude</a> ayant évalué plusieurs centaines de personnes âgées sur différentes fonctions cognitives, les individus qui vont développer une maladie d’Alzheimer commenceraient à avoir des déficits en mémoire sémantique jusqu’à 12 ans avant de recevoir le diagnostic de démence. Les difficultés de mémoire sémantique surviennent donc avant l’oubli des évènements vécus, la désorientation spatio-temporelle, la perte d’effets personnels ou les difficultés de la parole.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un professionnel de la santé présente des cartes avec des images d’objets à un patient" src="https://images.theconversation.com/files/407962/original/file-20210623-17-r97zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/407962/original/file-20210623-17-r97zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/407962/original/file-20210623-17-r97zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/407962/original/file-20210623-17-r97zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/407962/original/file-20210623-17-r97zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/407962/original/file-20210623-17-r97zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/407962/original/file-20210623-17-r97zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Différents tests peuvent être utilisés pour évaluer les fonctions cognitives, dont la reconnaissance des liens entre différents objets.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Ces déficits sont toutefois rarement rapportés par les patients lorsqu’ils se plaignent de leur mémoire, car ils trouvent généralement le moyen de compenser ces difficultés dans leur vie quotidienne. Ils vont utiliser des mots-valises, comme « chose » ou « truc » pour décrire des concepts qu’ils ne peuvent plus nommer. Cela explique notamment pourquoi la mémoire sémantique a été peu étudiée en lien avec la maladie d’Alzheimer.</p>
<h2>Surtout, ne pas s’alarmer</h2>
<p>Il est fréquent qu’en vieillissant, on s’inquiète de sa mémoire et on redoute la maladie d’Alzheimer. C’est tout à fait normal. En neuropsychologie clinique, on constate même que beaucoup de personnes âgées se plaignent de leur mémoire, même celles qui n’ont finalement aucune difficulté ! Il ne faut donc pas s’alarmer au moindre oubli, car les plaintes subjectives ne sont pas nécessairement liées à de réels déficits. Ces plaintes peuvent par exemple être associées à la présence de symptômes anxieux ou dépressifs ou à un sentiment de solitude.</p>
<p>Malgré tout, connaître les premiers signes de la maladie d’Alzheimer nous permet d’être à l’affût des premières manifestations chez nous-mêmes et nos proches. Lorsqu’on constate qu’on a de plus en plus souvent les mots « sur le bout de la langue », qu’on ne peut plus raconter des histoires aussi précisément qu’avant ou que l’on a de la difficulté à nommer ou à utiliser certains objets du quotidien – et que cela nous inquiète ou inquiète nos proches – il peut être pertinent de <a href="https://aqnp.ca/documentation/degeneratif/maladie-d-alzheimer/">planifier une visite chez le médecin ou le neuropsychologue</a>.</p>
<p>Heureusement, <a href="https://alzheimer.ca/fr/au-sujet-des-troubles-neurocognitifs/comment-prevenir-les-troubles-neurocognitifs/conseils-bons">certaines actions peuvent être prises pour favoriser notre santé cognitive</a>. D’abord, la stimulation intellectuelle est importante : lire des livres, faire des sudokus, des mots croisés ou des casse-tête, jouer à des jeux de société et faire des activités sociales sont des exemples d’activités qui peuvent améliorer notre résistance à développer des troubles cognitifs. Aussi, l’hygiène de vie compte pour beaucoup. Faire de l’activité physique régulièrement, avoir une bonne alimentation et maintenir de bonnes habitudes de sommeil est aussi bénéfique pour la santé physique que cognitive.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/162905/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Émilie Delage a reçu des financements des Instituts de Recherche en Santé du Canada, du Centre de Recherche de l'Institut Universitaire de Gériatrie de Montréal, ainsi que de Société Alzheimer Canada. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Dre Isabelle Rouleau a reçu une subvention de la Société Alzheimer pour un projet portant sur les troubles de la mémoire sémantique dans la phase prodromale de la maladie d'Alzheimer.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Le Dr Sven Joubert a reçu une subvention de la Société Alzheimer pour un projet portant sur les troubles de la mémoire sémantique dans la phase prodromale de la maladie d'Alzheimer.</span></em></p>Typiquement, la maladie d’Alzheimer est associée à un déclin de la mémoire épisodique. Les patients disent ne plus se rappeler d’évènements, de conversations ou des choses qu’ils ont faites.Émilie Delage, Doctorante en neuropsychologie, Université de MontréalIsabelle Rouleau, Professeure titulaire, Département de psychologie, section Neuropsychologie, Université du Québec à Montréal (UQAM)Sven Joubert, Professeur titulaire, Université de MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1575542021-03-19T21:39:18Z2021-03-19T21:39:18ZLa croissance du cerveau pourrait expliquer pourquoi de nombreux troubles mentaux émergent à l’adolescence<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/390679/original/file-20210319-21-1lzn220.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=312%2C0%2C8362%2C5774&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pendant des années, on a cru que le cerveau ne se développait que pendant l'enfance et ne changeait que très peu par la suite. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/beautiful-mixed-race-african-american-girl-551803330">Darren Baker / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>La plupart des <a href="https://jamanetwork.com/journals/jamapsychiatry/fullarticle/208678">problèmes de santé mentale</a> apparaissent à l’adolescence. Durant cette période de l’existence, les diagnostics de maladies psychiatriques augmentent, les adolescents souffrant non seulement de troubles de l'humeur comme la dépression, mais aussi de maladies psychiatriques telles que la schizophrénie ou les troubles obsessionnels compulsifs (TOC). </p>
<p>L'impact de ces maladies est considérable : le suicide est <a href="https://www.who.int/maternal_child_adolescent/data/causes-death-adolescents/en/">l'une des cinq causes les plus fréquentes de décès chez les adolescents</a>. </p>
<p>Les chercheurs en santé mentale sont depuis longtemps conscients de cet état de fait. Cependant, ils ont encore du mal à en comprendre l’origine. Les raisons de cette vulnérabilité adolescente demeurent inexpliquées. Le manque d'informations sur la façon dont le cerveau change à cette période de la vie pourrait expliquer ces lacunes. Pour tenter de les combler, mes collègues et moi-même avons récemment entrepris des recherches basées sur le suivi, sur plusieurs années, d’un groupe d'adolescents. Nous avons pu évaluer non seulement la façon dont leur cerveau s’est développé durant cette période de leur existence, mais aussi le lien entre ce développement et l'évolution de leur santé mentale. </p>
<h2>Changements cérébraux</h2>
<p>Voici encore quelques décennies, on pensait que le cerveau ne se développait que pendant l'enfance et qu'il ne <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/727739/">changeait plus beaucoup par la suite</a>. Cependant, <a href="https://doi.org/10.1016/j.tics.2004.12.008">de nouvelles études d'imagerie cérébrale</a> ont démontré que le cerveau poursuit sa maturation au-delà de l'enfance. Ces changements <a href="https://www.cell.com/neuron/pdf/S0896-6273(16)30809-1.pdf">se poursuivent en réalité jusqu'à la vingtaine, voire la trentaine</a>.</p>
<p>À l'adolescence, la matière grise du cerveau (constituée par les cellules nerveuses) rétrécit lentement, tandis que la matière blanche (le câblage entre les cellules nerveuses) poursuit son développement. Ces changements cérébraux sont le reflet de la réorganisation des réseaux neuronaux, qui affinent leurs fonctions et leurs connexions, se débarrassant de ce qui n'est pas pertinent et renforçant ce qui est important. </p>
<p>Les scientifiques pensent que la croissance de la myéline (la substance grasse qui assure l’isolation des connexions qu’établissent les cellules nerveuses entre elles et qui améliore la transmission des informations) constitue <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/15668098/">un facteur déterminant</a> de ces changements cérébraux.</p>
<p>Ces changements sont en effet plus importants dans certaines régions du cerveau que dans d’autres, en particulier dans celles qui hébergent les fonctions cognitives supérieures (comme le langage ou la conscience). Le cortex préfrontal, notamment, subit le plus long développement : celui-ci se poursuit jusque durant la vingtaine. C’est dans cette région du cerveau que sont localisées <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30252127/">les plus sophistiquées de nos compétences</a> – de la prise de décisions complexes à la prévision et au contrôle des pulsions indésirables. </p>
<p>Autrement dit, à l'adolescence, nombre de ces fonctions cérébrales sophistiquées sont encore en cours de développement. Cela pourrait expliquer pourquoi les adolescents ont parfois du mal à mettre en œuvre des capacités de raisonnement complexes, ou pourquoi ils agissent de façon impulsive, prenant des risques inutiles.</p>
<p>Le développement prolongé du cortex préfrontal pourrait également être à l'origine de la recrudescence des problèmes de santé mentale dans ces catégories d’âge. Lors de nos recherches, nous avons constaté que la myéline du cortex préfrontal <a href="https://www.nature.com/articles/s41593-019-0394-3">se développe plus lentement</a> chez les adolescents qui ont davantage de problèmes de santé mentale. Ceux qui étaient particulièrement impulsifs présentaient une croissance réduite de la myéline dans les zones cérébrales préfrontales souvent associées au <a href="https://www.nature.com/articles/s41593-019-0394-3">contrôle des impulsions</a>.</p>
<p>Qui plus est, nous avons constaté que cette croissance réduite de la myéline était directement liée à l'aggravation des symptômes de santé mentale au fil du temps. Au cours de notre étude, nous n'avons pas seulement examiné le degré moyen d'impulsivité des adolescents, mais aussi leur évolution spécifique sur la durée de ces recherches.</p>
<p>Nos résultats montrent que les adolescents présentant les taux de croissance de la myéline dans la zone préfrontale liée aux impulsions les plus faibles étaient aussi <a href="https://www.nature.com/articles/s41593-019-0394-3">ceux dont l'impulsivité s'est le plus aggravée à l'adolescence</a>. Ce constat suggère qu'il existe une association étroite et dynamique entre l'évolution de la santé mentale et la maturation du cerveau.</p>
<h2>Déficits cognitifs</h2>
<p>Il est intéressant de noter que les déficits du développement cérébral semblent différer selon le type de troubles de santé mentale considéré. Les adolescents atteints des symptômes de TOC importants, par exemple, présentaient également une croissance réduite de leur myéline, dans <a href="https://www.nature.com/articles/s41593-019-0394-3">diverses zones du cortex préfrontal</a> - principalement celles responsables des fonctions cognitives connues pour être altérées dans les TOC. Cela suggère que ces déficits cognitifs pourraient résulter d'une altération du développement du cerveau.</p>
<p>Il reste à déterminer dans quelle mesure ces résultats sont extrapolables à la population générale, et s’ils peuvent être utilisés pour prédire (voire, peut-être, prévenir) l'émergence des problèmes de santé mentale. </p>
<p>Dans cette optique, mes collègues et moi-même avons développé une application appelée <a href="https://brainexplorer.net/">Brain Explorer</a>. Intégrant les dernières avancées des recherches en neurosciences, elle nous permet d’aborder des questions auxquelles nous ne pouvions pas répondre à l'aide d'expériences traditionnelles en laboratoire.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/KnC8qBC9V-s?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>L'application propose une série de jeux destinés à sonder certaines fonctions cérébrales spécifiques, comme celles impliquées dans la façon dont nous prenons des décisions ou dans notre capacité à réfléchir sur nous-mêmes. Pour ce faire, elle cible les zones du cerveau les plus susceptibles d'être affectées par la réduction de la croissance cérébrale liée à la myéline. Cette appli questionne également l’utilisateur sur son comportement et ses sentiments, afin de suivre l'évolution de ces fonctions au cours du développement.</p>
<p>Grâce à ce projet de science citoyenne, nous espérons élargir notre compréhension de la façon dont la population dans son ensemble pense et se comporte, et dépasser les limites des expériences en laboratoire. Nous espérons notamment que ce nouvel outil de collecte de données basé sur le « crowd-sourcing » nous permettra d'atteindre des groupes de personnes trop souvent sous-représentées dans les recherches, mais présentant néanmoins des risques élevés de problèmes de santé mentale, en particulier les adolescents issus de communautés marginalisées.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/157554/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tobias Hauser bénéficie d'une bourse Sir Henry Dale (211155/Z/18/Z) de la part du Wellcome & Royal Society, d'une subvention de la Jacobs Foundation (2017-1261-04), du soutien de la Medical Research Foundation, et d'une subvention NARSAD 2018 pour jeunes chercheurs (27023) de la part de la Brain & Behavior Research Foundation. Il reçoit également un financement du Conseil européen de la recherche (CER) dans le cadre du programme de recherche et d'innovation Horizon 2020 de l'Union européenne (convention de subvention n° 946055).</span></em></p>De récentes recherches sur la croissance du cerveau pourraient contribuer à expliquer pourquoi les problèmes de santé mentale apparaissent souvent à l'adolescence.Tobias Hauser, Principal Research Fellow, Max Planck UCL Centre for Computational Psychiatry and Ageing Research, UCLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1432232020-07-24T09:43:07Z2020-07-24T09:43:07Z« Le temps dans tous ses états » : Mesurer notre perception du temps en confinement<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/348937/original/file-20200722-18-1to55ai.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5472%2C3637&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les aiguilles ont-elles bougé à la même vitesse pendant le confinement ? </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/Rw2-Y0nSIKQ">Brooke Campbell / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/346823/original/file-20200710-38-s0r4ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/346823/original/file-20200710-38-s0r4ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/346823/original/file-20200710-38-s0r4ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/346823/original/file-20200710-38-s0r4ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/346823/original/file-20200710-38-s0r4ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/346823/original/file-20200710-38-s0r4ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/346823/original/file-20200710-38-s0r4ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/346823/original/file-20200710-38-s0r4ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>L’année 2020 a vu notre planète s’arrêter, notre présent, bouleversé. Et si c’était le moment de réfléchir à nos futurs ? Le podcast « le temps dans tous ses états » a été pensé pour réfléchir à la notion de temps grâce aux scientifiques du CEA, entre philosophie, biologie, physique, psychologie et même science-fiction.</p>
<p>Dans ce troisième épisode, nous recevons Virginie van Wassenhove pour comprendre comment mesurer notre perception du temps totalement subjective, de façon objective.</p>
<iframe src="https://player.acast.com/5f080fddff961c57489d483b/episodes/mesurer-notre-perception-du-temps-en-confinement?theme=default&cover=1&latest=1" frameborder="0" width="100%" height="110px" allow="autoplay"></iframe>
<p><a href="https://open.spotify.com/episode/4KYi9eWWusRwyDlt2WlopE?si=MvYyAWyvQSe0chI6M8aXtw"><img src="https://images.theconversation.com/files/237984/original/file-20180925-149976-1ks72uy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=268&fit=clip" width="268" height="82"></a>
<a href="https://podcasts.apple.com/au/podcast/mesurer-notre-perception-du-temps-en-confinement/id1523077561?i=1000485945587"><img src="https://images.theconversation.com/files/233721/original/file-20180827-75984-1gfuvlr.png" alt="Listen on Apple Podcasts" width="268" height="68"></a></p>
<p>Elle nous explique comment elle a réussi à mettre en place une recherche pluridisciplinaire, mondiale, en plein confinement pour étudier comment les citoyens du monde ont vécu ces confinements dans des contextes très différents.</p>
<hr>
<p>_Un entretien mené par Benoît Tonson, chef de rubrique Science.</p>
<p>Musique : Reminiscor_</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143223/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Virginie van Wassenhove ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Il nous est très difficile de mesurer objectivement notre perception du temps, très relatif. Pourtant des techniques existent pour comprendre comment nous avons perçu les durées en confinement.Virginie van Wassenhove, Chercheuse en neurosciences de la cognition, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1392872020-06-02T15:55:35Z2020-06-02T15:55:35ZCe que la neuroéducation nous apprend sur les fausses croyances<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/338395/original/file-20200528-51509-1vqn515.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C29%2C5000%2C3166&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les idées fausses sont robustes. Elles résistent à l’enseignement, car elles sont inscrites dans de complexes réseaux de croyances qui se renforcent mutuellement.</span> <span class="attribution"><span class="source">shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Bien avant l’avènement des réseaux sociaux, les chercheurs en éducation s’intéressaient déjà aux idées non scientifiques auxquelles les étudiants adhèrent fréquemment et qui menacent leur réussite scolaire. « L’Homme descend du singe », « Les forces engendrent des mouvements », « Les plantes respirent du gaz carbonique », sont des croyances fausses (ou incomplètes) contre lesquelles les enseignants s’escriment.</p>
<p>De telles <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-981-10-3437-4_1">conceptions erronées (ou <em>misconceptions</em>)</a> sont des représentations de phénomènes naturels auxquelles les individus adhèrent et qui sont en contradiction avec les concepts reconnus par la science. Des <a href="https://editionsmultimondes.com/livre/tester-et-enrichir-sa-culture-scientifique-et-technologique/">répertoires</a> de ces conceptions ont été élaborés, et de <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/03057267.2020.1744796">nombreux modèles de changement conceptuel</a> ont été proposés.</p>
<p>Ces modèles décrivent les processus, les étapes ou les contraintes qui favorisent les modifications importantes dans ces représentations à l’échelle des individus. La recherche en changement conceptuel vise à faire évoluer les conceptions initiales des apprenants vers des formes plus proches des conceptions reconnues comme crédibles par la communauté scientifique. Il s’agit ici d’un problème éducatif somme toute « ordinaire ».</p>
<p>En tant que chercheurs de l’<a href="https://uqam.ca/">UQAM</a>, et membres de l’<a href="https://erest.uqam.ca/">Équipe de recherche en éducation scientifique et technologique</a>, nous nous intéressons depuis plus de 25 ans aux phénomènes de changement conceptuel. Nous constatons qu’à l’ère des fake news et de <a href="https://fr.wiktionary.org/wiki/infox">l’infox</a>, la prévalence de ces croyances atteint de nos jours un niveau sans précédent.</p>
<h2>La crédibilité des médias en question</h2>
<p>Les conceptions erronées ne sont aujourd’hui plus que de simples raccourcis maladroits : elles peuvent être générées par des groupuscules bien organisés, voire malintentionnés. Elles ne sont plus entretenues que par des conversations entre novices ; elles sont désormais partagées à vitesse exponentielle, nourries par les pièges à clic. La conséquence n’est plus que l’« inoffensif » échec scolaire, mais l’empoisonnement à l’hydroxychloroquine aquariophile, le sabotage de tours 5G, ou davantage de décès par la Covid-19.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/faut-il-avoir-peur-de-la-5g-138286">Faut-il avoir peur de la 5G ?</a>
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<p>Selon un sondage de l’Université Carleton, <a href="https://www.journaldemontreal.com/2020/05/21/pres-de-la-moitie-des-canadiens-croient-des-theories-du-complot?fbclid=IwAR2z5uuZmEWh3jmhybKWkrULTfZr439yPFd4G5iv_1w0BQdj_VR1cd-cvGs">près de la moitié des Canadiens croient en des théories du complot ou entretiennent des croyances trompeuses relativement au coronavirus</a>.</p>
<p>Alors que le journalisme nord-américain vit une crise de crédibilité, des vérificateurs de faits comme <a href="http://lepharmachien.com/conspirations/">Le Pharmachien</a>, et les <a href="https://ici.radio-canada.ca/decrypteurs">Décrypteurs</a> proposent des réfutations nuancées et bien référencées. Ils nous renseignent sur la <a href="http://lepharmachien.com/conspirations/">démarche conspirationniste</a> et formulent des conseils <a href="https://www.sciencepresse.qc.ca/actualite/covid-19-depister-desinfo/2020/05/07/6-astuces-pour-eviter-propager-desinfo-0">« d’autodéfense en temps de Covid-19 pour utilisateurs des réseaux sociaux »</a>.</p>
<p>Toutes ces solides ressources, bien que peu abondantes, font certes œuvre utile. Mais peut-être pourrions-nous aussi nous inspirer de ce que la recherche sur le <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/09500690305016?journalCode=tsed20">changement conceptuel</a> a pu apprendre depuis 50 ans.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/linfodemie-sur-la-covid-19-est-un-fleau-cinq-conseils-pour-eviter-de-la-propager-136127">L'infodémie sur la Covid-19 est un fléau : cinq conseils pour éviter de la propager</a>
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<h2>Qu’est-ce que la recherche en didactique peut nous apprendre ?</h2>
<p>Un premier constat : les conceptions erronées sont robustes. Elles résistent à l’enseignement, car elles sont <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/0140528810304004">inscrites dans de complexes réseaux de croyances qui se renforcent mutuellement</a>. Cette boucle de rétroaction positive est alimentée par des observations superficielles ou anecdotiques, ou auprès de nos proches. Ces <em>misconceptions</em> sont utiles à leurs détenteurs : elles offrent des explications satisfaisantes, des prédictions correctes, et attirent l’attention. Auto-renforcées par le biais de confirmation, elles résultent aussi d’un <a href="https://econtent.hogrefe.com/doi/pdf/10.1027/1864-9335/a000306?fbclid=IwAR2lq3Oj9DpcvPmzLVe-26_XaNXflpzr_zipZp6P6Bg0OqAPaG7OazygGRc&">besoin de se sentir unique</a>.</p>
<p>Une première hypothèse de travail a longtemps été discutée : celle selon laquelle la première phase d’un enseignement efficace consiste à mettre les <em>misconceptions</em> en échec, à les fragiliser ou à mettre en évidence leurs lacunes. Elle présumait que la perception d’une faille dans le raisonnement génère une envie de rectification, une motivation à résoudre le conflit logique détecté.</p>
<p>D’astucieux dispositifs pédagogiques visant à générer des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0959475200000372">conflits cognitifs</a> ont alors été développés : <a href="https://www.jstor.org/stable/23368317?seq=1">démonstrations scientifiques « pièges »</a> (durant lesquelles on demande aux apprenants de faire des prédictions qui souvent s’avèrent mauvaises), <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/0163853X.2014.913961">textes de réfutation</a> (qui expliquent en quoi il est préférable de renoncer à certaines idées défectueuses), <a href="https://aapt.scitation.org/doi/10.1119/1.2343497">tests diagnostiques</a> comprenant des leurres (qui permettent aux apprenants de réfléchir aux raisons pour lesquelles ils ont répondu incorrectement).</p>
<p>La recherche a identifié <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/(SICI)1098-2736(199808)%2035 :6 %3C623 : :AID-TEA3 %3E3.0.CO ;2-O">sept</a> réactions possibles des apprenants devant des informations contradictoires : indifférence, rejet, mise en doute, déclaration de non-pertinence, réinterprétations, mise en suspens, changements cosmétiques, et (enfin) changements conceptuels réels. L’issue positive des conflits cognitifs semble alors bien incertaine.</p>
<p>Stellan Ohlsson, professeur à l’Université de l’Illinois, parle du <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00461520802616267">paradoxe d’assimilation</a> : il n’est possible d’interpréter ce qui est présenté qu’à partir de ses conceptions premières. Donc, même si les données fournies contredisent le sens commun, elles pourraient être bloquées ou réinterprétées en fonction de ces conceptions initiales et leur fournir du carburant, voire même alimenter le désir de résistance.</p>
<p>Par exemple, les élèves croient souvent que les nuages sont faits de vapeur d’eau, alors qu’ils sont plutôt faits de minuscules gouttelettes d’eau en suspension. Pour désamorcer cette conception, l’enseignant devra proposer des explications très claires quant à cette distinction. S’il se contente de parler de « vapeur d’eau condensée », bien des élèves n’entendront que la partie réconfortante « vapeur d’eau », et le conflit ne sera pas perçu. Certains vont même jurer avoir entendu des choses qui n’ont jamais été dites !</p>
<p>Les chercheurs en éducation ont constaté que la seule mise en échec des conceptions initiales ne fonctionne pas très bien, ou alors qu’avec ceux chez qui les conceptions souhaitées sont déjà disponibles. Ohlsson est catégorique : <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00461520802616267">montrer aux apprenants les incohérences logiques de leurs idées, même à répétition, ne peut pas suffire</a> pour favoriser les conversions. Selon lui, il faut plutôt confronter systématiquement et explicitement la capacité relative des conceptions qui s’opposent à expliquer la réalité, plutôt que de simplement porter des attaques, perçues comme suspectes.</p>
<p>Cette hypothèse est confirmée par les travaux de notre <a href="https://erest.uqam.ca/">équipe</a>, qui ont mis en évidence, par <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10763-014-9520-6">l’étude des temps de réaction</a>, <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/mbe.12043">imagerie par résonnance magnétique</a> (IRM) et électroencéphalographie (EEG), la <a href="http://scimath.net/articles/51/515.pdf">coexistence</a> simultanée dans l’esprit des apprenants de multiples systèmes de pensée (parfois contradictoires) et ce, même chez les experts.</p>
<h2>Que la meilleure idée gagne !</h2>
<p>Changer d’idée ne serait donc pas une affaire de conversion, mais plutôt une course entre plusieurs idées. Dans celle-ci, jamais définitivement terminée, les conceptions initiales persistent même si elles ne prévalent plus et que les personnes semblent, par l’analyse de leur discours et de leurs performances, avoir échangé leur idée pour une autre. Les processus décisionnels seraient alors le résultat d’une sorte de délibération constante entre toutes les idées disponibles.</p>
<p>Par exemple, nous avons démontré que les experts qui résolvent des problèmes scientifiques d’électricité ou de flottabilité activent les régions cérébrales de l’inhibition, ou prennent plus de temps à répondre à des questions-piège impliquant des conceptions « enfantines » comme « un seul fil suffirait pour faire allumer une ampoule », ou « les objets plus lourds coulent davantage ». Ces conceptions naïves semblent donc continuer leur participation au processus décisionnel, même si elles ne prévalent plus, même si leur action est inhibée.</p>
<p>Selon <a href="https://static1.squarespace.com/static/520e383ee4b021a19fa28bf7/t/52a5d5a2e4b0525f9c3a952b/1386599842240/Potvin2013.pdf">ce modèle</a>, il ne serait pas possible d’oublier ou modifier une idée. Si elle est entrée dans le cerveau, on doit présumer qu’elle y restera. Il est toutefois possible de faire en sorte qu’elle ne s’exprime plus, par inhibition apprise.</p>
<h2>Repenser la lutte aux fake news</h2>
<p>Il apparait désormais évident que la <a href="http://faculty.bennington.edu/%7Esherman/alternative%20facts/Why%20Facts%20Don%E2%80%99t%20Change%20Our%20Minds%20-%20The%20New%20Yorker.pdf">seule présentation d’arguments factuels ou contradictoires ne fonctionne pas bien pour contrer les fausses idées</a>. Tout au plus, les <em>démythifications</em> parviennent-elles à conforter les déjà convertis. Lors d’une intervention éducative, il apparaît plutôt indispensable de rendre disponibles dès le départ les conceptions scientifiques à faire apprendre, pour ensuite seulement opposer leurs pouvoirs explicatif et prédicatif avec celui des mythes. Sans quoi, la course entre idées concurrentes n’a jamais vraiment lieu.</p>
<p>Actuellement, les efforts de la médiation scientifique, qui porte des attaques bien documentées, mais ponctuelles, ne semblent pas fonctionner. Et lorsque la démythification se met en marche, c’est généralement parce que le problème est devenu assez grave pour qu’on s’en occupe. Donc, le mal est déjà fait.</p>
<p>Nous suggérons plutôt que les médias engagés dans le redressement de la nouvelle scientifique abordent préventivement — lorsque c’est possible — la question de la valeur objective des propositions scientifiques et de leur adéquation avec les faits, pour ensuite assurer que tout discrédit d’une fausse nouvelle soit réalisé par contraste.</p>
<p>Ainsi, une personne qui dispose d’un plan B lors d’une discussion, ou lorsqu’elle lit un texte de réfutation, peut plus facilement faire glisser son adhésion et ce, sans perdre la face. Tout comme le singe ne lâche pas la branche avant d’avoir agrippé la suivante, les humains passent d’une idée à l’autre plus facilement qu’ils ne les abandonnent sèchement, surtout s’ils étaient déjà inscrits dans une <a href="https://www.theatlantic.com/family/archive/2020/05/plandemic-video-what-to-say-conspiracy/611464/?utm_campaign=the-atlantic&utm_medium=social&utm_source=facebook&fbclid=IwAR01hH3iUMQ329aR1wc7G1aXiSiLf3yXbba-gYGfMGRfScKaC9LdwxKjJ5k">dynamique défensive</a>.</p>
<p>Et insister et répéter, n’est-ce pas, car une course ne peut être durablement gagnée qu’à la longue.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/139287/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Patrice Potvin a reçu des financements de Conseil de Recherche en Science Humaines du Canada et des Fonds de recherche du Québec . </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Marianne Bissonnette ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La recherche en éducation s’intéresse depuis longtemps aux conceptions erronées des apprenants. Que peut-elle nous apprendre sur la question des « fake news » ?Patrice Potvin, Professeur en didactique des sciences, Université du Québec à Montréal (UQAM)Marianne Bissonnette, Étudiante au doctorat en éducation, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1379122020-05-05T20:05:10Z2020-05-05T20:05:10ZVidéo : Les effets psychologiques du confinement<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/332705/original/file-20200505-83757-1drq4vz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C0%2C5168%2C3391&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans quel état psychologique allons-nous sortir du confinement ? </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/exJG8vgc63w">Ujjwal chouhan / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le déconfinement devrait s’amorcer à partir du lundi 11 mai. Le confinement strict aura alors duré environ deux mois et ses conditions auront été très variables, selon les individus, que l’on dispose d’une grande maison avec jardin ou d’un petit appartement sans balcon. Du point de vue psychologique, là aussi, les effets vont être extrêmement variables.</p>
<p>Afin d’estimer quel pourrait être l’impact psychologique d’une telle mesure au niveau individuel, des chercheurs du King’s College de Londres ont très récemment réalisé une <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(20)30460-8/fulltext">méta-analyse</a> des études s’étant intéressées à ce sujet. Cela dans le but d’essayer de mettre en lumière les observations qui semblaient robustes et persistantes à travers ces différents travaux.</p>
<p>Ainsi, les scientifiques se sont penchés sur pas moins de 24 études scientifiques ayant été effectués au total dans 10 pays différents lors d’épidémie comme notamment Ebola, le SRAS ou le H1N1. Les conclusions de ces études n’ont rien de très encourageant, tant durant la période du confinement que même des semaines, voire des mois plus tard. Toutefois, il semble possible d’entrevoir des mesures permettant d’atténuer ces conséquences.</p>
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<figcaption><span class="caption">« Covid-19 : les effets psychologiques du confinement », par Christophe Rodo (The Conversation France).</span></figcaption>
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<p><em>Une vidéo en partenariat avec <a href="https://soundcloud.com/latetedanslecerveau">La tête dans le cerveau</a> autour de l’épisode sur les conséquences psychologiques du confinement disponible en <a href="https://soundcloud.com/latetedanslecerveau/numero140">podcast</a>, dont toutes les références scientifiques sont à retrouver sur <a href="https://cervenargo.hypotheses.org/3423">Cerveau en Argot</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/137912/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Rodo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Un nouveau format dans The Conversation : des vidéos de scientifiques confiné·e·s, pour toujours éclairer le débat. Quelles sont les conséquences psychologiques du confinement et comment les atténuer ?Christophe Rodo, Jeune chercheur ATER terminant une thèse en neurosciences, au sein du Laboratoire de Neurosciences Cognitives, de l’Institut de Neurosciences des Systèmes et de l’Institut des Sciences du Mouvement, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1066532020-02-27T17:45:07Z2020-02-27T17:45:07ZÉtudiez fort, et vous pourrez réduire les risques de démence<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/244594/original/file-20181108-74766-5ku7fj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une nouvelle étude financée par le Centre for Aging and Brain Health Innovation examinera l’utilisation des technologies d’apprentissage à l’intention des personnes atteintes de démence et celles à risque.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Chaque année des centaines d’étudiants âgés se rassemblent à Toronto, convoqués en personne ou en ligne, dans l’attente fébrile de leur diplôme.</p>
<p>Certains d’entre eux ont plus de 90 ans, d’autres sont atteints de démence.</p>
<p>Une diplômée, qui a terminé 15 cours donnés par la faculté de l’Université Ryerson, a déjà été directrice artistique pour Madonna. Elle a soutenu une thèse selon laquelle la conception de l’art du philosophe prussien <a href="https://plato.stanford.edu/entries/kant/">Emmanuel Kant</a> était supérieure à celle du philosophe écossais <a href="https://www.britannica.com/biography/David-Hume">David Hume</a>. Kant estimait que l’art était basé sur l’intention, Hume disait qu’il était une habileté.</p>
<p>Durant le cours, cette étudiante pouvait fort bien défendre son argumentation rationnellement. La semaine suivante, elle ne s’en souvenait guère. Mais à ce moment précis, celui-là où les patients atteints de démence se retrouvent, existentiellement, elle était présente.</p>
<p>Et les bénéfices vont au-delà de la présence. La participation à l’enseignement supérieur peut aussi modérer la perte de la fonction cognitive associée au vieillissement et à la maladie d’Alzheimer.</p>
<p>Gill Livingston et son équipe qui dirigent la commission <em>The Lancet</em> sur la démence o <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(17)31363-6/fulltext">nt démontré que la résilience peut aider à ralentir la progression de la démence</a> ou à en retarder l’apparition. L’idée sous-jacente à la résilience est un concept nommé réserve cognitive. Les facteurs de mode de vie tels que l’alimentation et la forme physique – et aussi l’apprentissage – rehaussent la réserve cognitive. Une réserve cognitive accrue permet de lutter contre la perte de mémoire.</p>
<h2>De la philosophie à la neuropsychologie</h2>
<p>Au cours des quatre dernières années, l’Université Ryerson, en association avec Baycrest Health Sciences, a <a href="https://www.baycrest.org/Baycrest/Healthcare-Programs-Services/Programs/Culture-and-Arts-Programs/Baycrest-Learning-Academy">offert jusqu’à 20 cours par année</a> aux personnes âgées. Certaines d’entre elles sont atteintes de démence, d’autres pas – elles sont assises côte à côte en classe.</p>
<p>Les cours sont de sérieuses sessions intensives de deux heures pendant huit semaines. Parmi les sujets on compte la philosophie de Socrate, l'astronomie, la neuropsychologie, le romantisme et les grands artistes, la musique classique, les grands réalisateurs, la littérature française et l’archéologie.</p>
<p>Archéologue formée à Harvard, David Lipovitch dirige des cours sur des fouilles qu’il mène au Moyen-Orient. Des journalistes chevronnés au <em>Globe and Mail</em> et des spécialistes de l’histoire de Broadway s’adressent à des classes allant jusqu’à 30 étudiants.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/243059/original/file-20181030-76390-i7zbkf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/243059/original/file-20181030-76390-i7zbkf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/243059/original/file-20181030-76390-i7zbkf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/243059/original/file-20181030-76390-i7zbkf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/243059/original/file-20181030-76390-i7zbkf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/243059/original/file-20181030-76390-i7zbkf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/243059/original/file-20181030-76390-i7zbkf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La recherche indique que les études améliorent le bien-être des personnes âgées.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Le secret c’est l’implication – optimiser l’apprentissage pour réduire l’isolation sociale et rehausser l’estime de soi. Ces programmes ne sont pas « ludo-éducatifs », mais ils rivalisent avec le contenu des vrais programmes universitaires de premier cycle.</p>
<p>Ce qui est différent c’est que les étudiants n’effectuent pas de travaux. On les note sur leur effort à participer. Une étudiante atteinte de démence avancée, tout en étant toujours cohérente, a dit : « J’ai de la difficulté à me remémorer bien des choses et ceci est le moment marquant de ma semaine, alors VOUS n’oubliez pas de m’amener ici la semaine prochaine ! »</p>
<p>Ce genre de commentaire est fréquent. Et l’idée même que l’apprentissage organisé a poussé cette patiente à poser une « action métacognitive » – sachant qu’elle est atteinte de démence et qu’elle a besoin de compenser – est impressionnante en soi.</p>
<h2>Connexité sociale et stimulation mentale</h2>
<p>Le rapport de la commission <em>The Lancet</em> a aussi examiné le rôle de l’éducation dès la petite enfance dans le développement de la démence. Les données suggèrent qu’un manque d’accès à l’éducation entraîne une incidence accrue de démence en raison d’une réserve cognitive réduite.</p>
<p>Cela souligne la valeur d’éduquer les personnes âgées durant de longues périodes – non seulement celles qui sont atteintes de démence, mais aussi celles qui sont en santé et à risque de démence.</p>
<p>L’étude marquante de George Rebok en 2014 sur les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24417410">effets de l’éducation pour les personnes âgées</a> a suivi les participants sur une période de 10 ans, explorant plusieurs aspects de la fonction cognitive. On a noté de petits effets dans l’habileté accrue de penser et des effets plus impressionnants concernant l’hygiène personnelle, l’auto-efficacité et autres mesures de bien-être.</p>
<p>L’apprentissage semble offrir aussi bien la connexité que la stimulation mentale, menant à la résilience sociale par l’augmentation de la réserve cognitive. Le raisonnement et la vivacité de pensée se sont améliorés dans les résultats de Rebok, mais non la mémoire.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/243097/original/file-20181030-76408-19c1upd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/243097/original/file-20181030-76408-19c1upd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/243097/original/file-20181030-76408-19c1upd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/243097/original/file-20181030-76408-19c1upd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/243097/original/file-20181030-76408-19c1upd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/243097/original/file-20181030-76408-19c1upd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/243097/original/file-20181030-76408-19c1upd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">On prévoit qu’au moins la moitié de la population humaine aura plus de 50 ans d’ici 2050. (Baycrest Health Sciences).</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Baycrest Health Sciences)</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>On ne comprend toujours pas si la répétition mentale focalisée par l’apprentissage peut prévenir ou contrer la démence. Des études de Julia Spaniol à l’Université Ryerson <a href="https://www.ryerson.ca/news-events/news/2018/07/unlocking-the-mysteries-of-dementia/">démontrent qu’une hausse de l’implication et la motivation chez les personnes âgées</a> aide à débloquer la mémoire. Mais jusqu’à récemment, il n’y avait pas de recherche centrée sur le rôle d’apprentissage plus poussé, comme ces cours universitaires intensifs, sur les conséquences de la démence ou la qualité de vie.</p>
<h2>« Eudémonisme » pour une société vieillissante</h2>
<p>Toutefois, cela est sur le point de changer. Cet été, le <a href="http://www.cabhi.com/">Centre for Aging and Brain Health Innovation (CABHI)</a> a accordé une subvention à notre équipe – pour enquêter sur l’utilisation des technologies d’apprentissage, telles que les médias en continu comparativement aux sessions en personne pour les gens atteints de démence ou à risque d’en être frappé.</p>
<p>Le but de ce programme est de créer un accès plus large à des possibilités permanentes d’apprentissage pour les adultes âgés indépendamment de leur lieu de résidence – qu’il s’agisse de soins à long terme ou dans la communauté. Les études cliniques ont débuté en septembre 2018 et nous allons faire rapport sur nos données à la fin du printemps de 2019.</p>
<p>L’espérance de vie augmente et on prévoit qu’au moins la <a href="https://www.statista.com/statistics/672546/projected-world-population-distribution-by-age-group/">moitié de la population humaine aura plus de 50 ans d’ici 2050</a>. Il faudra que nos esprits restent éveillés et que nos sens soient bien affûtés pour profiter réellement des moments précieux de nos vieux jours.</p>
<p>Socrate parlait d’une idée appelée « eudémonisme », soit la « floraison dans la vie ». Trop de plaisir et on s’épuise. Trop de détermination et on se tourmente. Mais quand le plaisir et la détermination sont tous deux au plus haut niveau, nous atteignons cet état eudémoniste, <a href="https://forum.agewell-nce.ca/index.php/PL:Deborah.Fels">selon Deborah Fels</a>, l’une des grandes spécialistes canadiennes sur le vieillissement et l’accessibilité.</p>
<p>Apprendre c’est clairement ce que les humains font de mieux. Nous n’avons pas l’agilité du tigre ni la longévité des séquoias, mais nous apprenons continuellement et c’est ce qui nous distingue. En apprendre sur nous-mêmes et sur le monde peut être le secret du bonheur et de la santé dans les années de l’âge d’or.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/106653/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>David Chandross a reçu des financements du Centre for Aging and Brain Health and Innovation, à travers le Baycrest Health Sciences et l'Université Ryerson, pour les besoins de cette étude seulement.</span></em></p>Une nouvelle étude examine l’utilisation des technologies d’apprentissage pour les personnes atteintes de démence et celles à risque.David Chandross, Associate lecturer, Masters of Digital Media Program, and Senior Scholar in the field of Aging and Technology, Ted Rogers School of Management, Toronto Metropolitan UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1320382020-02-18T17:41:33Z2020-02-18T17:41:33ZBonnes feuilles : « Le cerveau attentif »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/315986/original/file-20200218-10991-f97ry3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=49%2C0%2C5477%2C3632&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le yoga, un sport qui requière une attention toute particulière.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/R1PUDOAhb5Q">Dave Contreras / Unsplash</a></span></figcaption></figure><p><em>Nous publions un extrait de l’ouvrage de Paolo Bartolomeo « Penser droit » qui vient de paraître aux éditions Flammarion. Neurologue et directeur de recherche à l’Inserm, Paolo Bartolomeo est spécialiste des troubles de l’attention.</em></p>
<hr>
<p>Que nous soyons en train d’admirer un tableau au musée, de chercher un ami dans une foule, de lire les longues phrases des romans de Henry James ou de traverser la rue en prenant garde à ne pas être renversés par une voiture, nous avons besoin de mobiliser un ensemble de processus regroupés sous le nom d’« attention ».</p>
<p>S’il est vrai que « chacun sait ce qu’est l’attention », comme l’écrivait William James, père fondateur de la psychologie expérimentale américaine et frère aîné de Henry, ce n’est que depuis peu que nous avons commencé à en percer les mécanismes intimes dans le cerveau. Or notre hémisphère droit y joue un rôle central.</p>
<h2>Pourquoi l’attention ?</h2>
<p>Tous les organismes biologiques font face à un même enjeu : ils doivent atteindre leurs objectifs dans un environnement encombré d’une multitude d’objets. Comme si ces derniers se faisaient concurrence pour capturer notre attention et déterminer notre comportement. Certains de ces objets – les mots dans une phrase, la couleur du feu quand je traverse la rue – sont essentiels au moment de l’action, et il faut y prêter attention. À ce même moment, d’autres sont toutefois à ignorer – les mots de la phrase d’à côté, ce panneau publicitaire qui clignote alors que je pose le pied sur le passage piéton.</p>
<p>Enfin, d’autres événements surgissent de façon inopinée, mais il est impératif et souvent urgent de les considérer – mon téléphone qui sonne pendant que je lis, cette voiture qui a manifestement brûlé le feu. Bref, un comportement cohérent demande de sélectionner les stimuli appropriés dans l’environnement mais également, nos capacités de traitement n’étant pas infinies, de pouvoir ignorer d’autres objets moins importants.</p>
<p>Il faut s’y résoudre : notre regard ne peut se diriger que sur un seul endroit à la fois. Pis, nos surfaces sensorielles ne sont pas homogènes : par exemple, dans la rétine de l’œil, une toute petite partie centrale, qu’on appelle la fovéa, est bien plus sensible que la périphérie de la rétine. Seule la fovéa rend possible notre vision « en haute définition ».</p>
<p>Lorsque nous voyons quelque chose à la périphérie de notre champ visuel, nous devons bouger notre tête et nos yeux pour centrer l’image sur cette région précise et ainsi pouvoir l’identifier. Une fonction importante de l’attention est justement celle de rendre possibles ces mouvements d’orientation vers les objets à la périphérie du champ visuel. Tout cela est bien connu des voleurs, qui prennent beaucoup de précautions pour distraire l’attention et le regard de leurs victimes.</p>
<h2>Prêter attention sans bouger les yeux</h2>
<p>Maintenant, essayez de fixer un mot de ce texte, tout en prêtant attention à ce qui se passe à droite. Effectivement, nous pouvons orienter notre attention même sans bouger les yeux : c’est l’attention implicite. Le célèbre « tricheur à l’as de carreau » de Georges de La Tour évite de regarder les objets de son attention, c’est-à-dire ses cartes… et le jeune joueur berné ! Comme précédemment, il s’agit d’une technique pour éviter que la victime se rende compte de ce qui se passe. Nous savons en effet que, si nous regardons quelque chose, notre entourage aura tendance à automatiquement suivre l’objet considéré : c’est ce qu’on appelle l’attention partagée. L’attention n’est donc pas seulement un rapport entre un observateur et un objet d’observation : elle implique une relation sociale qui inclut les personnes autour de l’observateur.</p>
<h2>Regarder sans voir</h2>
<p>Le manque d’attention peut aussi nous conduire à « regarder sans voir ». Les psychologues Daniel Simons et Christopher Chabris ont dans cet esprit conduit une expérience devenue célèbre, dans laquelle ils montraient à des sujets une vidéo de deux équipes de basketball se lançant un ballon, en leur demandant de compter le nombre des passes du ballon.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/vJG698U2Mvo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Comptez le nombre de passes que se font les joueurs en blanc (d’après Daniel Simons et Christopher Chabris).</span></figcaption>
</figure>
<p>Après un certain temps, une actrice portant un costume de gorille entrait dans la scène, s’arrêtait au centre en se frappant la poitrine et sortait. Étonnamment, plus d’un tiers des spectateurs occupés à compter les passes ne virent pas le « gorille ». En revanche, si on omettait de leur demander de compter les passes, le gorille était bien entendu toujours remarqué !</p>
<p>L’expérience spectaculaire du gorille a été inspirée par le phénomène dit de « cécité inattentionnelle » où l’attention, lorsqu’elle est particulièrement focalisée sur un objet, empêche la perception consciente d’autres objets.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/315935/original/file-20200218-11017-sbeoq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/315935/original/file-20200218-11017-sbeoq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/315935/original/file-20200218-11017-sbeoq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=555&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/315935/original/file-20200218-11017-sbeoq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=555&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/315935/original/file-20200218-11017-sbeoq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=555&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/315935/original/file-20200218-11017-sbeoq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=697&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/315935/original/file-20200218-11017-sbeoq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=697&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/315935/original/file-20200218-11017-sbeoq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=697&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Regarder la croix et rater le carré : un effet de « cécité inattentionnelle ». Les sujets réalisant une tâche perceptive difficile, qui demande toute leur attention, comme évaluer plusieurs fois la longueur relative des deux bras d’une croix dessinée sur une feuille, peuvent ne pas s’apercevoir de la présence d’un carré noir situé près de la croix lors d’un des essais.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Paolo Bartolomeo</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>À présent, regardez cette figure et comparez la longueur des deux traits de la croix pour essayer de déterminer si l’un est plus long que l’autre. Il s’agit d’une discrimination difficile exigeant beaucoup d’attention, car les traits ont des longueurs très proches. Lorsqu’on répète cette tâche plusieurs fois, mais en intégrant à certains essais un carré noir bien saillant près de la croix, environ la moitié des participants ne se rendent pas compte de sa présence. En d’autres termes, nous devenons souvent « aveugles » à un stimulus pourtant proéminent quand nous focalisons notre attention sur un autre objet.</p>
<p>Ces expériences et bien d’autres démontrent que, si l’attention est ailleurs, nous pouvons manquer des changements majeurs de notre monde visuel. Notre impression de toujours percevoir une scène visuelle riche et détaillée est illusoire. Le haut pourcentage d’accidents de la route causé par l’inattention est une conséquence dramatique de cet état de fait. Par exemple, la distraction provoquée par les téléphones mobiles est considérée comme l’une des causes principales du récent ralentissement des progrès dans la réduction des accidents de la route en Europe.</p>
<h2>Les réseaux de l’attention dans le cerveau</h2>
<p>En quoi les neurosciences peuvent-elles éclairer notre compréhension de l’attention ? Les travaux de Posner ont inspiré un vaste programme de recherche en neuroimagerie sur l’attention, mené, entre autres, par le neurologue Maurizio Corbetta à l’université de Washington, à Saint-Louis. Grâce à ces travaux, nous savons maintenant qu’il n’y a pas de région unique dans le cerveau qui gère ces processus attentionnels. Il s’agit en réalité de vastes réseaux allant de la région postérieure (pariétale) à la région antérieure (frontale) du cerveau.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/315988/original/file-20200218-11005-1id9ie7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/315988/original/file-20200218-11005-1id9ie7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=910&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/315988/original/file-20200218-11005-1id9ie7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=910&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/315988/original/file-20200218-11005-1id9ie7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=910&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/315988/original/file-20200218-11005-1id9ie7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1144&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/315988/original/file-20200218-11005-1id9ie7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1144&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/315988/original/file-20200218-11005-1id9ie7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1144&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Couverture de « Penser droit » de Paolo Bartolomeo aux éditions Flammarion.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
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<p>Bien que distantes à l’échelle du cerveau, ces régions parviennent à communiquer entre elles de manière rapide et efficace, car elles sont reliées par des « autoroutes » du cerveau, des gros faisceaux de substance blanche. Ces réseaux fronto-pariétaux orientent notre attention dans l’espace, vers le feu tricolore avant de traverser la rue par exemple. En général, chaque hémisphère du cerveau mobilise l’attention vers le côté opposé de l’espace grâce à un réseau « dorsal » de l’attention, situé vers le haut du cerveau.</p>
<p>Un événement imprévu et urgent à traiter en priorité, l’arrivée de la voiture dans notre exemple, interrompt l’orientation en cours et capte l’attention. C’est alors qu’un second réseau fronto-pariétal s’occupe d’interrompre l’activité attentionnelle en cours pour la rediriger vers une nouvelle cible. Cet autre réseau est situé plus bas dans le cerveau : c’est le réseau « ventral » de l’attention. Or, chez la plupart d’entre nous, le réseau ventral de l’attention est asymétrique entre les hémisphères cérébraux : il est surtout actif dans l’hémisphère droit, non dominant pour le langage.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/132038/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Paolo Bartolomeo est l'auteur de « Penser droit ».</span></em></p>Nous vous proposons un extrait de l’ouvrage « Penser droit » de Paolo Bartolomeo, mettant en avant les dernières découvertes dans le domaine des neurosciences.Paolo Bartolomeo, Neurologue clinicien et de neuroscientifique, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1319292020-02-17T18:14:12Z2020-02-17T18:14:12ZPodcast : Utiliser des films d’horreur pour mieux comprendre la peur<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/315751/original/file-20200217-11040-1x87gjn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/woman-with-face-paint-1904733/">David Fagundes/pexels</a></span></figcaption></figure><p>La peur est une émotion ayant notamment pour action de nous protéger en augmentant notre vigilance et la préparation des réactions à adopter face à des éléments pouvant nous menacer.</p>
<p>Les situations pouvant provoquer cette émotion peuvent être multiples. Alors que certaines sont immédiatement détectées comme une menace et engendrent une peur puissante et brutale, d’autres situations, au contraire, détectées comme étranges, inquiétantes, angoissantes vont pouvoir induire une peur grandissante plus soutenue dans le temps.</p>
<p>Afin d’essayer d’un peu mieux comprendre ce qu’il se passe dans le cerveau face à ces deux types de situations, des chercheurs finlandais ont réalisé des travaux en utilisant des films d’horreur comme stimulation effrayante.</p>
<p>Les résultats de cette étude montrent que lorsque les participants évaluent ressentir de la peur, l’activité cérébrale n’est pas tout à fait la même s’ils sont face à de longues scènes effrayantes ou s’ils sont confrontés à des scènes provoquant une peur plus brutale.</p>
<p>En un peu plus de 10 minutes, avec cet épisode, découvrez en détail que la peur pourrait, au niveau cérébral, avoir deux facettes distinctes.</p>
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<p><em>Un podcast en partenariat avec <a href="https://soundcloud.com/latetedanslecerveau">La tête dans le cerveau</a> dont toutes les références scientifiques sont à retrouver sur <a href="https://cervenargo.hypotheses.org/3340">Cerveau en Argot</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/131929/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Rodo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La peur, tant qu’elle n’est pas paralysante, est très utile pour réagir face aux événements imprévus de notre quotidien. Bien la comprendre est donc essentiel.Christophe Rodo, Jeune chercheur ATER terminant une thèse en neurosciences, au sein du Laboratoire de Neurosciences Cognitives, de l’Institut de Neurosciences des Systèmes et de l’Institut des Sciences du Mouvement, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1275512019-11-27T19:18:14Z2019-11-27T19:18:14ZChanger l’école : prenez garde aux neuromythes !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/303705/original/file-20191126-112499-1846mph.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C34%2C998%2C577&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">N’utilisons-nous vraiment que 10 % de notre cerveau ? Les intelligences sont-elles multiples ? Attention aux idées reçues.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/africanamerican-boy-raised-index-finger-near-1427254070?src=a3bbbb93-f282-447a-b615-2c8ccf248b93-2-37">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Les neurosciences sont fascinantes. Alors que le cerveau humain restait une forteresse inatteignable depuis la nuit des temps, une sorte de boîte noire recelant les mystères de l’esprit, voilà que les progrès technologiques transforment la science-fiction en réalité. En nous permettant d’observer l’activité cérébrale, ils ouvrent une perspective vertigineuse : toute personne deviendrait un livre ouvert, dont la réflexion et la « subjectivité » pourraient se traduire en signaux objectifs.</p>
<p>De l’espoir de réussir à décortiquer les rouages de la psychologie humaine naît la soif d’en comprendre et dominer la complexité. L’épithète « neuro » se voit alors accolée à de nombreuses disciplines, formant une série de labels intrigants : neuromarketing, neuromanagement, neuropolitique, neurodesign, neuroméditation, neurogastronomie, et… neuroéducation.</p>
<p>Cette dernière discipline paraît porteuse d’un enjeu particulier. Il ne s’agit pas en effet d’un simple domaine de l’activité humaine, mais du développement même des individus. Incontestablement, mêler le regard objectif des neurosciences à la pratique éducative constitue une belle aspiration. Mais la noblesse de la cause suffit-elle ?</p>
<h2>Neurosciences ou sciences cognitives ?</h2>
<p>Lorsqu’on parle de <a href="https://www.anae-revue.com/anae-en-acc%C3%A8s-libre/%C3%A9cole-neurosciences-neuro-%C3%A9ducation-neurop%C3%A9dagogie-des-neuro-illusions-cognitives-editorial-e-gentaz-anae-n-147/">« neuro » éducation</a>, force est de constater que ce sont presque toujours des résultats issus des sciences cognitives en général, et de la psychologie expérimentale en particulier, qui sont mis en avant. Précisons que les sciences cognitives, portant sur l’étude de la vie mentale, couvrent, outre les neurosciences, un ensemble hétéroclite de disciplines, allant de la psychologie à la philosophie, en passant par la linguistique, l’anthropologie, l’informatique, ou encore les mathématiques.</p>
<p>C’est un peu comme si on se mettait à vanter les mérites d’une nouvelle branche de la chirurgie, disons la chirurgie laser, alors que les résultats réels proviennent de la chirurgie traditionnelle.</p>
<p>Par ailleurs, s’appuyer sur une recherche qui relève spécifiquement d’un dispositif d’investigation des processus neuronaux pour proposer de nouvelles pratiques éducatives relève de la gageure. Entre un résultat issu de données d’imagerie cérébrale et une activité menée en classe, le décalage paraît tel que toute transposition à l’école semble hautement spéculative.</p>
<p>Ainsi, il semblerait qu’en matière d’éducation, les neurosciences proprement dites augmentent les tirages de la presse, donnent une image de rigueur et d’innovation aux politiques qui s’y réfèrent, mais sont pour l’instant peu porteuses de mesures effectives pour la salle de classe. Tentons de décrypter les ressorts de cette « neurophilie » qui repose largement sur des raccourcis de pensée qu’il est intéressant de dérouler pour mieux les saisir.</p>
<h2>De l’imagerie cérébrale aux mirages</h2>
<p>Tout d’abord, de fortes attentes sociétales dans le domaine de l’éducation, conjuguées à un sentiment d’échec et d’urgence, souligné par les faibles résultats de la France aux enquêtes internationales telles que <a href="https://www.oecd.org/pisa/pisa-2015-results-in-focus.pdf">PISA</a>, abaissent la vigilance critique et ouvrent la voie à la diffusion de neuromythes. Les neuromythes ont en effet tendance à combler le vide laissé par le manque de résultats effectifs issus spécifiquement des neurosciences.</p>
<p>Un neuromythe tient pour établies scientifiquement, par le biais d’observations d’activités neuronales, des caractéristiques supposées du cerveau et de la psychologie humaine. Il se différencie d’une controverse scientifique par le fait que, dans le cas d’un neuromythe, les auteurs des travaux cités ne se reconnaissent pas dans les conclusions tirées de leurs recherches : il s’agit de généralisations abusives, voire d’extrapolations fantaisistes. Ces neuromythes sont séduisants car, faisant écho au sens commun, ils donnent le sentiment que la science valide nos intuitions.</p>
<p>Ainsi, il existe un engouement neurophile qui rend crédule. Il repose sur l’intuition (erronée) que l’imagerie cérébrale a systématiquement valeur probante et permet d’observer objectivement un processus de pensée – un peu comme l’observation d’une radio permet de déceler la présence ou non d’une fracture.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/303712/original/file-20191126-112499-mh10sx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/303712/original/file-20191126-112499-mh10sx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=349&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/303712/original/file-20191126-112499-mh10sx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=349&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/303712/original/file-20191126-112499-mh10sx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=349&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/303712/original/file-20191126-112499-mh10sx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/303712/original/file-20191126-112499-mh10sx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/303712/original/file-20191126-112499-mh10sx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Résultat d’analyses statistiques complexes, les données d’imagerie sont sujettes à interprétation.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<p>Or, en réalité, les données d’imagerie sont le résultat d’analyses statistiques complexes et ne sont pas moins sujettes à interprétation que les données issues, par exemple, de la génétique ou de l’observation des comportements. Et l’allure séduisante de l’imagerie cérébrale joue des tours à notre esprit : il a même été montré que le simple fait d’accompagner un texte d’une image de cerveau <a href="http://www.antoniocasella.eu/dnlaw/McCabe_2008.pdf">augmente</a> l’impression de véracité du propos qui l’accompagne, y compris lorsque celui-ci comporte des erreurs de logique évidentes.</p>
<h2>Effets d’annonce</h2>
<p>Certains d’entre nous sont-ils « cerveau gauche » et d’autres « cerveau droit » ? Sur le plan cérébral, tout se joue-t-il avant 3 ans ? N’utilisons-nous vraiment que 10 % de notre cerveau ? Les intelligences sont-elles multiples ? Est-il possible d’apprendre en dormant ? Autant de questions sur les mystères de notre cerveau qui semblent avoir le potentiel de révolutionner l’éducation. Qu’en est-il pourtant au-delà des effets d’annonce ?</p>
<p>L’idée selon laquelle on utiliserait seulement 10 % de notre cerveau est totalement fantaisiste et ne repose sur aucune recherche, mais fait écho à l’intuition qu’il existerait des verrous mentaux, qui, si on trouvait le moyen de les faire sauter, permettraient de libérer « magiquement » des potentialités cachées.</p>
<p>La distinction « cerveau gauche/cerveau droit » comme distinguant les individus créatifs des personnes analytiques n’est pas plus fondée sur le plan biologique que l’expression « ne pas avoir les yeux en face des trous ».</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/votre-cerveau-est-il-grignote-par-les-neuromythes-104153">Votre cerveau est-il grignoté par les neuromythes ?</a>
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<p>Dans sa forme la plus populaire, la théorie des styles d’apprentissage conduit à différencier les individus qui bénéficieraient plus d’un apprentissage visuel, de ceux pour lesquels un format auditif serait plus efficace, ou encore de ceux, « kinesthésiques » ayant besoin d’apprendre par la manipulation. Cette théorie est conforme à l’intuition que les personnes diffèrent les unes des autres, et peuvent être réparties en catégories.</p>
<p>Sur le plan éducatif, elle donne l’impression d’être un juste milieu entre un sur-mesure irréaliste et un traitement globalisant inapproprié. En fait, les études expérimentales échouent à montrer la <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1111/j.1539-6053.2009.01038.x">pertinence de cette distinction</a> et mettent plutôt en évidence une supériorité des apprentissages qui reposent sur la sollicitation de plusieurs modalités sensorielles.</p>
<p>Concernant la théorie des intelligences multiples, elle épouse l’idée que l’intelligence est trop complexe pour se réduire à une valeur unique telle que le QI, et que hiérarchiser les individus selon un unique score manque d’humanisme, que chacun a des talents où il peut exceller, et que l’échec scolaire marque un manque d’adaptation de l’école à l’individu.</p>
<p>Là encore, les investigations sur la validité de cette théorie montrent plutôt de <a href="https://www.cerveauetpsycho.fr/sd/cognition/lintelligence-humaine-dans-tous-ses-etats-6646.php">fortes corrélations</a> entre ces intelligences supposément indépendantes et questionnent la pertinence même des domaines distincts d’intelligences identifiés.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/i3-O2ImT3-g?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Conférence d’Elena Pasquinelli sur les neuromythes à l’ENS, à l’occasion de la Semaine du Cerveau, en 2012.</span></figcaption>
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<h2>Confusions dangereuses</h2>
<p>Quant au mythe de « tout se joue avant tel âge » (3 ans pour certains, 4 ans pour d’autres, etc.), il prend notamment sa source dans l’idée d’un stock de neurones initial qui ne ferait que décroître au fil des ans. En fait, les recherches montrent que la réalité est bien plus complexe car le cerveau <a href="https://www.nature.com/articles/nn.3045">se développe</a> de manière si diversifiée qu’une affirmation aussi générale est dénuée de sens ; il a aussi été mis en évidence que des apprentissages sophistiqués sont possibles à des âges avancés.</p>
<p>Ainsi, à travers leur entrée dans l’organe même de notre pensée, les recherches en neurosciences recèlent un potentiel certain. Sont-elles pour autant en mesure de <a href="https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/02/19/les-sciences-cognitives-a-l-epreuve-de-la-classe_5259354_1650684.html">prendre l’ascendant</a> sur les autres disciplines pour donner le « la » aux politiques éducatives ? Rien ne le laisse penser. Peuvent-elles espérer prospérer sans une alliance profonde avec les autres disciplines contributives ? Pas plus.</p>
<p>Alors qu’un débat profond anime actuellement la communauté éducative sur la question du passage du laboratoire à la classe, le label « neuro » est trompeur et porte à confusion. Sans un effort pour battre en brèche les confusions et les stéréotypes, le risque évident est celui d’un retour de balancier conduisant à un discrédit durable des neurosciences en éducation, et à un rejet radical tout aussi injuste qu’une adhésion aveugle.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/303717/original/file-20191126-112531-1t56tfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/303717/original/file-20191126-112531-1t56tfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=925&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/303717/original/file-20191126-112531-1t56tfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=925&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/303717/original/file-20191126-112531-1t56tfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=925&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/303717/original/file-20191126-112531-1t56tfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1162&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/303717/original/file-20191126-112531-1t56tfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1162&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/303717/original/file-20191126-112531-1t56tfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1162&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Emmanuel Sander, Hippolyte Gros, Katarina Gvozdic et Calliste Scheibling-Sève sont les auteurs de l’ouvrage suivant : « Les neurosciences en éducation, mythes et réalités », publié en 2018 aux éditions Retz. Ils y passent en revue un certain nombre d’idées reçues – « Quand je dors, j’apprends », « Au contact des écrans, notre cerveau et notre façon d’apprendre se transforment », « Se tromper, c’est échouer » – et les confrontent aux résultats de la recherche.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/127551/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les recherches en neurosciences recèlent un potentiel certain pour l’enseignement. Sont-elles pour autant en mesure de donner le « la » des politiques éducatives ?Emmanuel Sander, Professeur à la Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation, Université de GenèveCalliste Scheibling-Sève, Post-doctorante, Université de GenèveHippolyte Gros, Postdoctoral fellow, Université de GenèveKatarina Gvozdic, Assistante doctorante recherche et enseignement, chargée d'enseignement, Université de GenèveLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1206232019-07-18T19:08:35Z2019-07-18T19:08:35ZPuisque le cerveau ne ressent pas la douleur, d’où viennent les maux de tête ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/284793/original/file-20190718-116557-se4d0u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=15%2C0%2C5160%2C3453&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le cerveau est dépourvu de récepteurs de la douleur, mais la douleur est bien là.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/download/confirm/762879901?src=ErImHdiQpFaBNlE32PN-7A-1-0&size=huge_jpg">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p><em>Le 18 février, l'hôpital du King’s College, à Londres, a annoncé quʼune patiente atteinte d’un <a href="https://www.cen-neurologie.fr/deuxieme-cycle/tumeurs-intracraniennes">gliome de grade II</a> a joué du violon pendant que les chirurgiens <a href="https://www.kch.nhs.uk/news/public/news/view/31290">extrayaient la tumeur</a> de son cerveau. <a href="https://cdn.theconversation.com/static_files/files/873/cerveau_douleur_espace.pdf?1582148068#page=2">Cette procédure surprenante</a> est rendue possible par le fait que le cerveau ne possède pas de récepteurs de la douleur. Ce qui ne signifie pas forcément qu’il n’en ressent aucune. Explications.</em></p>
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<p>Le cerveau n’a pas de <a href="https://lecerveau.mcgill.ca/flash/d/d_03/d_03_m/d_03_m_dou/d_03_m_dou.html">nocicepteurs</a> – les nerfs qui détectent les dommages ou (menace de dommages) subis par notre corps et qui signalent la situation à notre moelle épinière et à notre cerveau. En conséquence, la croyance que ce dernier ne ressent aucune douleur a pris forme, jusqu’à entrer dans la culture populaire.</p>
<p>Dans le film <em>Hannibal</em> de 2001, une scène particulièrement écœurante met en scène le tueur en série éponyme en train de découper le cerveau d’un agent du FBI parfaitement conscient, bien que drogué.</p>
<p>« Voyez-vous, le cerveau lui-même ne ressent aucune douleur », explique Hannibal Lecter à une Clarice Starling horrifiée.</p>
<p>Mais si le cerveau ne ressent aucune douleur, qu’est-ce qui cause les maux de tête ?</p>
<p>Bien que le cerveau n’ait pas de nocicepteurs, beaucoup d’autres <a href="http://cdmbuntu.lib.utah.edu/utils/getfile/collection/EHSL-NOVEL/id/551/filename/996.pdf">structures à l’intérieur de notre tête</a> en ont, notamment les vaisseaux sanguins, les muscles et les nerfs du cou, du visage et du cuir chevelu. Ce sont des problèmes rencontrés par ces structures qui causent les maux de tête.</p>
<p>La douleur ressentie lorsque l’on mange une glace semblent être causée par des changements soudains du flux sanguin dans les veines qui se trouvent entre le <a href="https://www.fasebj.org/doi/abs/10.1096/fasebj.26.1_supplement.685.4_supplement.685.4">fond de la gorge et le cerveau</a>. La déshydratation, quant à elle, provoque des céphalées en irritant les vaisseaux sanguins de la tête. C’est une des raisons des maux de crâne palpitants des lendemains de fêtes un peu trop alcoolisées… Et n’importe quel dentiste vous dira que le mal de tête peut être l’indice que <a href="https://www.nhs.uk/conditions/temporomandibular-disorder-tmd/">vous surmenez vos mâchoires</a>, peut-être parce que vous grincez des dents pendant votre sommeil.</p>
<p>L’origine de la douleur ressentie durant une migraine n’est pas encore bien comprise, mais on pense qu’elle résulte de l’<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5494713/">activation de nocicepteurs situés dans les méninges</a> – les membranes qui <a href="https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/corps-humain-meninge-15099/">enveloppent le cerveau et la moelle épinière</a> comme de la cellophane. La cause de cette activation n’est cependant pas encore claire.</p>
<p>Même si le cerveau n’a pas de nocicepteurs, un mal de tête peut quand même être le signe qu’il rencontre un problème. Les maux de tête prolongés qui ne répondent pas aux médicaments ou qui sont <a href="https://www.sciencedirect.com/topics/medicine-and-dentistry/thunderclap-headache">soudains et extraordinairement sévères</a> peuvent être des signes d’une grave anomalie au cerveau, comme une tumeur, une hémorragie ou une infection. Les douleurs qu’engendrent ces problèmes ne sont pas générées par l’activation de nocicepteurs situés dans le cerveau lui-même (il n’y en a pas) ; elles résultent de la pression que le cerveau, en gonflant, exerce sur les autres structures de la tête.</p>
<h2>Plus qu’une simple expérience sensorielle</h2>
<p>Fondamentalement, Hannibal Lecter se trompait sur le fait que le cerveau ne ressent aucune douleur. Même s’il ne possède pas de nocicepteurs, il « sent » <em>toute</em> notre douleur. Le cerveau est en effet l’organe par lequel nous interprétons, évaluons et expérimentons tous les signaux sensoriels de notre corps.</p>
<p>Les scientifiques font la distinction entre la <em>nociception</em> – le signal nerveux correspondant aux dommages causés à notre corps – et la <em>douleur</em>, l’expérience émotionnelle et cognitive désagréable qui survient normalement lorsque nos nocicepteurs sont activés.</p>
<p>Cela signifie que la douleur est plus qu’une simple expérience sensorielle, elle est influencée par nos pensées, nos sentiments et nos relations sociales. Par exemple, la façon dont nous ressentons la douleur est affectée par ce que nous pensons : ce que nous croyons que la douleur peut signifier, ce dont nous nous souvenons des expériences douloureuses antérieures.</p>
<p>La douleur est aussi une expérience émotionnelle : les personnes dépressives rapportent <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26867484">expérimenter davantage de douleurs dans leur vie quotidienne</a>. Et induire une baisse de moral chez des personnes par ailleurs « normales » <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18325674">augmente leur ressenti de la douleur et diminue leur tolérance vis-à-vis d’elle</a>.</p>
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<iframe src="https://player.vimeo.com/video/272364899" width="500" height="281" frameborder="0" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Janet Bultitude : La douleur ne se résume pas à ce que nous sentons.</span></figcaption>
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<p>La douleur est aussi une expérience sociale. Au cours d’une expérimentation, il a été demandé des étudiants de maintenir leur main le <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/15494194">plus longtemps possible dans une eau douloureusement froide</a>. Ils se sont avérés capables de tolérer la douleur durant un temps plus long lorsqu’ils pensaient que l’expérimentateur était un de leurs professeurs (s’ils pensaient que l’expérimentateur était un autre étudiant, ils la toléraient moins longtemps). Ce résultat montre que lorsqu’on nous interroge sur notre douleur, l’identité de la personne qui pose la question est importante.</p>
<p>Les modifications qu’entraînent les influences sociales en termes de douleur soulignent également les bénéfices que l’on peut retirer du soutien de ceux qui nous aiment. Dans une autre étude employant la même méthode du seau à glace, les participants se sont avérés faire montre d’une plus grande tolérance à la douleur générée par le froid <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28141635">lorsqu’une autre personne observait l’expérience en silence</a> (comparativement à la situation ou ils se retrouvaient seuls avec l’expérimentateur). Et si l’« observateur » était un ami du même sexe, la tolérance des participants augmentait, même si cet ami n’était pas présent dans la pièce (mais tout près).</p>
<p>La perception de la douleur est sous influences, et celles-ci sont nombreuses. Dès lors il n’est pas étonnant qu’il soit si complexe et frustrant de la soulager. La bonne nouvelle, c’est que chacune de ces influences représente également un moyen de gérer la douleur. Aider les gens à changer leur façon de penser, leurs sentiments vis-à-vis de leur douleur constitue un point important dans la gestion de la douleur, tout comme le maintien de leurs relations sociales.</p>
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<p><em>L’Université de Bath est <a href="https://www.bath.ac.uk/campaigns/pain-free-volunteers-needed-for-research-investigating-body-perception-in-chronic-pain/">à la recherche de bénévoles</a> pour participer à des recherches sur la perception de la douleur chronique par le corps.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/120623/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Janet Bultitude ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le cerveau n’a pas de récepteurs de la douleur, ce qui permet des opérations chirurgicales spectaculaires. Mais s’il ne ressent aucune douleur lui-même, il perçoit néanmoins toute la douleur du corps…Janet Bultitude, Lecturer in Cognitive and Experimental Psychology, University of BathLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1124922019-03-15T20:46:15Z2019-03-15T20:46:15ZComment la littérature change votre cerveau (et votre rapport aux autres)<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/264149/original/file-20190315-28483-ol6bh8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=32%2C64%2C5376%2C3535&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Êtes-vous comme Montesquieu, qui assurait n’avoir « jamais eu de chagrin qu’une heure de lecture n’ait dissipé » ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://kaboompics.com/photo/7873/woman-looking-for-a-book-in-store">Kaboompics</a></span></figcaption></figure><p>Nos motivations à lire sont diverses. Nous lisons des fictions populaires pour nous distraire, des fictions littéraires pour l’esthétique de leurs tournures, des textes documentaires pour enrichir nos connaissances, qu’elles soient académiques ou techniques, ou des ouvrages de développement personnel, dans un but explicitement énoncé par leur désignation même…</p>
<p>Une chose est sûre : si l’on en croit la 3<sup>e</sup> édition du baromètre <a href="https://www.centrenationaldulivre.fr/fr/ressources/etudes_rapports_et_chiffres/">« Les Français et la lecture »</a>, publiée le 13 mars par le Centre National du Livre, la France aime lire : 88 % de ses habitants se déclarent lecteurs, avec une nette prédilection <a href="http://www.lefigaro.fr/langue-francaise/actu-des-mots/les-habitudes-de-lecture-des-francais-devoilees-20190313">pour le roman</a>.</p>
<p>Pourtant, si de nombreuses études scientifiques se sont penchées sur les effets, à plus ou moins long terme, de la pratique de la méditation ou de la musique sur le cerveau, on connaît mal ceux de la lecture. Étonnamment, ils n’ont pas fait l’objet de beaucoup de recherches. La plupart des travaux existants se sont en effet attachés à décrire ce qui se passe dans le cerveau <a href="https://books.google.fr/books?id=4m8_DwAAQBAJ&pg=PA117&lpg=PA117&dq=Les+m%C3%A9canismes+de+la+lecture:+D%C3%A9veloppement+normal+et+pathologique,+enfance+dapres+spotorno+exemples+de+textes&source=bl&ots=ffh6nCpbcp&sig=ACfU3U2giBJmT0y61OLMwnbne-7FSFy5bA&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwikmMKoo4ThAhV6BWMBHUgwCHcQ6AEwCHoECAAQAQ#v=onepage&q=Les%20m%C3%A9canismes%20de%20la%20lecture%3A%20D%C3%A9veloppement%20normal%20et%20pathologique%2C%20enfance%20dapres%20spotorno%20exemples%20de%20textes&f=false">au moment où on lit</a>, ou à identifier les structures cérébrales <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/sante/comment-le-cerveau-lit_22822">nécessaires à la lecture</a>.</p>
<p>Il a toutefois été clairement démontré que la lecture procure des bienfaits considérables, en particulier sur la pensée, même si à ce titre, toutes les catégories d’ouvrages ne se valent pas. Retour sur quelques enseignements marquants des rares études existantes.</p>
<h2>Mieux « lire » les autres grâce à la littérature</h2>
<p>Le résultat le plus stupéfiant est <a href="http://science.sciencemag.org/content/342/6156/377">celui obtenu par David Comer Kidd et Emanuele Castano</a>, publié dans la prestigieuse revue <em>Science</em> en 2013, puis reproduit <a href="https://www.collabra.org/articles/10.1525/collabra.117/">par une autre équipe en 2018</a>.</p>
<p>Kidd et Castano ont montré que le simple fait de lire un extrait d’une fiction littéraire (autrement dit, un ouvrage récompensé par un prix et/ou écrit par un auteur de référence, comme Patrick Modiano ou Jean‑Marie Gustave Le Clézio), permet d’obtenir par la suite de meilleures performances en <a href="https://www.cairn.info/revue-de-neuropsychologie-2011-1-page-41.htm">« théorie de l’esprit »</a> que le fait de lire un passage tiré d’une fiction populaire (tel qu’un ouvrage faisant partie des meilleures ventes).</p>
<p>La théorie de l’esprit se définit comme la capacité à attribuer à autrui des pensées, des intentions, des émotions, et être ainsi à même de comprendre et de prédire le comportement des autres. Durant leurs travaux, Kidd et Castano ont évalué cette aptitude grâce au <a href="http://www.psychomedia.qc.ca/tests/lecture-de-l-etat-d-esprit-dans-les-yeux">test d’interprétation du regard</a> qui consiste à sélectionner le mot qui correspond à la pensée, à l’intention ou à l’émotion exprimée par le regard d’un individu.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/264184/original/file-20190315-28502-1fwbnpw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/264184/original/file-20190315-28502-1fwbnpw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/264184/original/file-20190315-28502-1fwbnpw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/264184/original/file-20190315-28502-1fwbnpw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/264184/original/file-20190315-28502-1fwbnpw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/264184/original/file-20190315-28502-1fwbnpw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/264184/original/file-20190315-28502-1fwbnpw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La littérature permet de mieux comprendre les émotions d'autrui.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/hPKTYwJ4FUo">iam Se7en/Unsplash</a></span>
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<p>En plus de cet effet à court terme de la lecture, les auteurs ont montré qu’il existait une corrélation positive entre l’expérience de la lecture chez les sujets, mesurée à partir d’un test de reconnaissance d’auteurs, et la performance au test d’interprétation du regard, ce qui suggère cette fois-ci un effet à long terme de la pratique de la lecture sur la théorie de l’esprit.</p>
<p>Il est donc clair que la lecture d’une œuvre littéraire a des conséquences positives, mais comment ces dernières s’expliquent-elles du point de vue neurologique ?</p>
<h2>La littérature modifie les connexions cérébrales</h2>
<p>Diverses études ont exploré les bases cérébrales de la théorie de l’esprit. Ces travaux consistaient à faire lire aux participants des textes <a href="https://books.google.fr/books?id=4m8_DwAAQBAJ&pg=PA117&lpg=PA117&dq=Les+m%C3%A9canismes+de+la+lecture:+D%C3%A9veloppement+normal+et+pathologique,+enfance+dapres+spotorno+exemples+de+textes&source=bl&ots=ffh6nCpbcp&sig=ACfU3U2giBJmT0y61OLMwnbne-7FSFy5bA&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwikmMKoo4ThAhV6BWMBHUgwCHcQ6AEwCHoECAAQAQ#v=onepage&q=Les%20m%C3%A9canismes%20de%20la%20lecture%3A%20D%C3%A9veloppement%20normal%20et%20pathologique%2C%20enfance%20dapres%20spotorno%20exemples%20de%20textes&f=false">visant à mobiliser cette capacité</a>, tout en observant l’activité de leur cerveau par <a href="http://www.coma.ulg.ac.be/papers/french/Gosseries_RMLg08.pdf">neuroimagerie fonctionnelle</a>. Les scientifiques ont ainsi <a href="https://www.researchgate.net/publication/321715315_Les_mecanismes_de_la_lecture_Developpement_normal_et_pathologique_de_l%E2%80%99enfant_a_la_personne_agee">mis en évidence l’implication de deux régions cérébrales spécifiques</a> : le cortex préfrontal médian et la jonction temporo-pariétale. Toutes deux jouent notamment un rôle <a href="https://books.google.fr/books?id=UAovDAAAQBAJ&pg=PA198&lpg=PA198&dq=%22cortex+pr%C3%A9frontal+m%C3%A9dial%22+impliqu%C3%A9+dans&source=bl&ots=q4PzLr8kod&sig=ACfU3U1185p222hKYz3sgDz2GfMtbf3qCw&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwid-8j-o4ThAhWOGBQKHX6LDQoQ6AEwA3oECAcQAQ#v=onepage&q=%22cortex%20pr%C3%A9frontal%20m%C3%A9dial%22%20impliqu%C3%A9%20dans&f=false">dans la compréhension des intentions d’autrui</a>.</p>
<p>Ces résultats sont intéressants, mais ne renseignent pas vraiment sur les effets de la lecture de textes littéraires sur le cerveau. À ce jour, une seule étude a exploré cet aspect : celle de <a href="https://www.liebertpub.com/doi/pdf/10.1089/brain.2013.0166">Berns et de ses collègues</a>, publiée en 2013 dans la revue <em>Brain connectivity</em>. Les auteurs ont demandé à un groupe de sujets sains, des étudiants de l’université Emory, où travaillaient les chercheurs, de lire chaque soir pendant neuf jours 30 pages du roman <a href="https://www.goodreads.com/book/show/880.Pompeii"><em>Pompeii : A Novel</em></a>, de Robert Harris. Leur activité cérébrale au repos était ensuite systématiquement mesurée le lendemain matin. Ce protocole visait à déterminer si l’impact de la lecture sur le cerveau durait dans le temps. </p>
<p>Les résultats montrent que, pendant cette période de lecture de neuf jours, la connectivité fonctionnelle entre le cortex préfrontal médian et la jonction temporo-pariétale avait augmenté. La communication améliorée entre ces deux régions (impliquées, comme nous l’avons vu, dans la théorie de l’esprit) pourrait expliquer pourquoi les compétences des lecteurs de romans augmentent au regard de cette fonction.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/264187/original/file-20190315-28505-1skkpda.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/264187/original/file-20190315-28505-1skkpda.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/264187/original/file-20190315-28505-1skkpda.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/264187/original/file-20190315-28505-1skkpda.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/264187/original/file-20190315-28505-1skkpda.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=526&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/264187/original/file-20190315-28505-1skkpda.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=526&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/264187/original/file-20190315-28505-1skkpda.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=526&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les modifications cérébrales qui résultent de la lecture perdurent même une fois le livre refermé.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/NP-pwHBvCYE">Tuấn Vỹ/Unsplash</a></span>
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<h2>Aller plus loin, pour optimiser les bienfaits de la lecture</h2>
<p>La lecture semble donc capable d’améliorer certaines capacités cognitives importantes pour la vie en société. Ces résultats très intéressants restent toutefois encore parcellaires, et appellent des recherches complémentaires.</p>
<p>Une étude idéale associerait des mesures cognitives de la théorie de l’esprit à des mesures cérébrales fonctionnelles et anatomiques. Celle-ci viserait à mettre en évidence les effets à court et à long terme de la lecture sur la théorie de l’esprit, ainsi qu’à mieux définir la signature cérébrale associée.</p>
<p>La littérature a déjà été intégrée dans des programmes destinés à renforcer le lien social, comme ceux visant à <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(96)03521-0/fulltext">promouvoir l’empathie chez les médecins</a>, ou à développer les aptitudes <a href="https://www.researchgate.net/publication/275873870_%E2%80%99Reading_for_Life%E2%80%99_Prison_Reading_Groups_in_Practice_and_Theory">des détenus</a>.</p>
<p>Mieux comprendre les mécanismes cérébraux qui sous-tendent les effets bénéfiques de la lecture sur le cerveau permettrait de rendre ces approches plus efficaces, voire d’en inventer de nouvelles.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/112492/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Bernard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La lecture nous instruit, nous distrait, nous transporte… Et nous transforme, en changeant notre perception d’autrui, littéralement. Pourtant, ses effets sur notre cerveau ont été peu étudiés.Frédéric Bernard, Maître de conférence en neuropsychologie, Université de StrasbourgLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1092802019-01-03T21:30:51Z2019-01-03T21:30:51ZNon, la sérotonine ne fait pas le bonheur (mais elle fait bien plus !)<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/252431/original/file-20190103-32142-9lmx4y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5830%2C3866&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La sérotonine contribue à la régulation des émotions, ce qui lui vaut d'être parfois qualifiée un peu rapidement par certains d’« hormone du bonheur »,</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/bF0qoFaYbys">Kinga Cichewicz/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>« Docteur, je dois manquer de sérotonine ! »</p>
<p>J’ai entendu cette phrase des dizaines de fois au cours de mes consultations de psychiatre, et la sortie du dernier livre de Michel Houellebecq, intitulé <a href="https://editions.flammarion.com/Catalogue/hors-collection/litterature-francaise/serotonine">« Sérotonine »</a> risque fort d’amplifier le phénomène. Le narrateur y dompte en effet son mal de vivre à grands coups de « Captorix », un antidépresseur imaginaire qui stimule la sécrétion de… sérotonine, évidemment.</p>
<p>Suffirait-il donc d’ingérer la bonne dose de ce <a href="http://www.psychomedia.qc.ca/lexique/definition/neurotransmetteur">neurotransmetteur</a>, parfois aussi appelé « hormone du bonheur », pour être heureux et reléguer mal-être ou dépression au rayon des mauvais souvenirs ? Les choses ne sont pas si simples.</p>
<h2>Les limites des analogies</h2>
<p>Je ne sais jamais très bien quoi répondre à ces patients qui se disent en manque de sérotonine. Une partie de notre travail de psychiatre consiste à expliquer comment fonctionnent les médicaments que nous prescrivons, afin que les patients puissent se les approprier, et surtout accepter de les prendre quand nous le pensons utile. Ce n’est jamais aisé, car les psychotropes font toujours un peu peur. Les idées reçues sont tellement nombreuses dans ce domaine qu’il est indispensable de dédramatiser voire de déculpabiliser (« si je prends un antidépresseur, c’est que je suis fou »).</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-antidepresseurs-sont-ils-de-dangereuses-drogues-76879">Les antidépresseurs sont-ils de dangereuses drogues ?</a>
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<p>Alors, nous multiplions les arguments scientifiques, à grand renfort de jolis dessins de cerveau et de <a href="http://synapse-serotoninergique.blogspot.com/p/blog-page_8932.html">synapses multicolores</a>, très simplifiées évidemment.</p>
<p>Et souvent, nous finissons par sortir l’argument-massue : l’analogie avec d’autres maladies mieux connues, aux traitements mieux acceptés. « Quand on est diabétique, on prend de l’insuline puisqu’on en manque, et tout le monde trouve ça normal ». Sous-entendu : si vous êtes déprimé ou anxieux, c’est que vous manquez de sérotonine, donc il suffit d’en prendre un peu pour aller mieux.</p>
<p>La dépression serait juste liée à un problème de quantité de cette hormone du bien-être, rien à voir donc avec une quelconque fragilité psychologique, passez au garage pour remettre à niveau et circulez ! C’est un professeur de médecine qui vous le dit. « Finalement, ce qui compte, c’est que le patient le prenne, ce fichu antidépresseur. Quand il sera guéri de sa dépression, il sera content et peu importe que mes arguments soient simplistes voire abusifs ! ».</p>
<p>À cet instant, mon surmoi de psychiatre biberonné à la transparence et à la vérité-due-au-patient (formalisée par la fameuse <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000227015&categorieLien=id">loi Kouchner</a>, le serment d’Hippocrate, les comités d’éthique, etc.) sort le carton jaune anti- <a href="https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/fakemed-homepathie-acupuncture-une-tribune-contre-les-therapies-alternatives-secoue-la-communaute-1521564747">#FakeMed</a>. Et menace d’expulser du terrain le bon petit soldat de l’<a href="https://www.lareponsedupsy.info/Psychoeducation">éducation thérapeutique</a> qui a appris qu’il fallait simplifier l’information pour qu’elle soit compréhensible, quitte à flirter avec la ligne rouge de la pseudoscience.</p>
<p>En éthique médicale, on appelle ce déchirement intérieur un <a href="http://www.ethique.gouv.qc.ca/fr/ethique/quest-ce-que-lethique/quest-ce-quun-dilemme-ethique.html">« conflit de valeur »</a>, lequel peut vite déboucher sur un conflit névrotique quand on a quelques prédispositions à la culpabilité hippocratique. Car, s’il fallait être vraiment honnête (et, rassurez-vous, je le suis le plus souvent…), nous dirions avant tout à nos patients que le mécanisme d’action de nos médicaments reste aujourd’hui très mystérieux, que les causes réelles de la dépression sont encore largement inconnues, en tout cas très multiples et complexes, et que la sérotonine n’est sûrement pas l’hormone du bonheur.</p>
<p>Mais quand on sait qu’au moins la moitié de l’effet d’un traitement vient du pouvoir de conviction du médecin qui vous le prescrit, ce qui concourt grandement à l’<a href="http://pelissolo.over-blog.com/2018/04/l-effet-placebo-premier-degre-de-la-psychotherapie.html">effet placebo</a>, ce type de déclaration d’ignorance risque de ne pas être très productif…</p>
<h2>Et la sérotonine dans tout ça ?</h2>
<p>En l’état actuel de la science, voici ce que l’on peut affirmer avec certitude sur la sérotonine :</p>
<p><strong>1. Il est impossible de doser la sérotonine pour en déduire un risque de dépression ou refléter un état psychologique.</strong>
<br>Les officines qui le prétendent, et facturent très cher des dosages complètement inutiles, se livrent à de réelles pratiques frauduleuses. La grande majorité de cette substance se trouve dans le <a href="https://presse.inserm.fr/linfluence-du-microbiote-intestinal-sur-le-metabolisme-du-tryptophane-et-sur-notre-sante/31709/">tube digestif</a> et le sang, sans aucune influence sur les neurones. Si on voulait vraiment connaître le « niveau » de votre sérotonine cérébrale, il faudrait en doser certains dérivés dans le liquide céphalo-rachidien, c’est-à-dire vous faire une <a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/examen/exploration/deroulement-ponction-lombaire">ponction lombaire</a>… Par ailleurs, ce taux ne renseigne quasiment en rien sur l’activité réelle de la sérotonine dans vos neurones, ce qui nous amène au point suivant.</p>
<p><strong>2. L’action de la sérotonine ne dépend pas uniquement de sa quantité brute dans le cerveau.</strong>
<br>La sérotonine peut produire des effets quasiment inverses selon la zone cérébrale où elle se trouve, car elle module l’activité de multiples systèmes et pour cela se fixe sur des <a href="http://www2.cnrs.fr/presse/communique/3675.htm">récepteurs</a> très nombreux (il en existe au moins 13 identifiés à ce jour) et très différents dans leurs réactivités et leurs rôles). Surtout, la sérotonine est produite en permanence par des neurones spécialisés. C’est plus sa vitesse de production et de recyclage qui compte que sa quantité totale à un temps T.</p>
<p><strong>3. Les effets de la sérotonine dépendent de nombreux paramètres.</strong>
<br>À ce premier niveau de complexité se superpose un second, car les effets de la sérotonine dépendent aussi de l’état d’une multitude d’autres systèmes, et notamment de l’état des autres neurotransmetteurs, en particulier la dopamine, qu’elle vient en général freiner. Un taux de sérotonine à un moment donné ne veut rien dire si on ne connaît pas cet état général, lequel se modifie en permanence, générant une complexité d’interactions infinies.</p>
<p><strong>4. La sérotonine ne régule pas uniquement les émotions.</strong>
<br>L’effet de la sérotonine sur les émotions est indiscutable. Il s’explique par la présence de ses récepteurs dans des structures clés comme le système limbique (le <a href="http://lecerveau.mcgill.ca/flash/d/d_04/d_04_cr/d_04_cr_peu/d_04_cr_peu.html">cerveau émotionnel</a>) et l’<a href="http://lecerveau.mcgill.ca/flash/i/i_04/i_04_cr/i_04_cr_peu/i_04_cr_peu.html">amygdale</a> en particulier, des structures cérébrales très impliquées dans les réactions de peur et d’anxiété notamment. La sérotonine a aussi de très nombreux autres effets : sur la régulation de la température, du sommeil, de la sexualité, de l’alimentation, etc. Agir sur cette molécule peut donc modifier un grand nombre de fonctions de l’organisme, pour le meilleur (dans la dépression, plusieurs de ces systèmes sont effectivement altérés) mais aussi pour le pire (effets secondaires).</p>
<p><strong>5. La sérotonine intervient dans la dépression et de nombreux autres troubles psychiques.</strong>
<br>Bien que souvent indirects (car provenant de travaux menés chez l’animal ou d’études très partielles chez l’être humain), de nombreux indices confirment aujourd’hui l’implication des systèmes sérotoninergiques dans les <a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/depression">dépressions</a> ainsi que dans beaucoup d’autres troubles psychiques, comme les troubles anxieux ou certains troubles de la personnalité. Plusieurs gènes contrôlant le recyclage de la sérotonine semblent conférer une vulnérabilité à différents troubles émotionnels ou comportementaux. Cet impact est toutefois faible et difficile à interpréter. Mais, surtout, les effets thérapeutiques des antidépresseurs favorisant l’action de la sérotonine, connus depuis plus de 50 ans, plaident fortement en faveur de l’implication de cette molécule dans les mécanismes de la dépression et de l’anxiété.</p>
<p>Il faut toutefois se souvenir que les systèmes neurobiologiques mis en cause sont complexes : les effets de la sérotonine entrent forcément en interaction avec les multiples autres facteurs en cause dans la souffrance psychique (personnalité, événements de vie, stress quotidien, représentation de soi et du monde, etc.).</p>
<p>Au-delà de ces faits avérés, des hypothèses, crédibles mais encore théoriques à ce jour, peuvent expliquer les effets des antidépresseurs.</p>
<h2>Restaurer les capacités d’auto-réparation</h2>
<p>L’un des rôles principaux de la sérotonine est de stabiliser et de protéger l’organisme contre le désordre intérieur et les comportements à risque. De manière imagée, elle favorise le calme et la stabilité, pour contrebalancer les effets d’autres systèmes qui visent à se défendre contre les dangers extérieurs (réactions de peur et pulsions impulsives ou agressives) et à se motiver pour agir pour notre survie (système de la dopamine qui favorise l’action coûte que coûte…).</p>
<p>La sérotonine atténue les émotions défensives les plus douloureuses que sont notamment la peur et la tristesse. Sans toutefois les faire disparaître complètement, ces réglages étant toujours subtils et autorégulés en permanence.</p>
<p>En phase dépressive ou en cas d’anxiété pathologique comme dans le <a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/trouble-panique/symptomes-diagnostic-evolution">trouble panique</a> ou les TOC (<a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/troubles-obsessionnels-compulsifs-toc">troubles obsessionnels compulsifs</a>), l’organisme est en mode d’hypersensibilité émotionnelle et de détection des problèmes, de manière exagérée et surtout constante car échappant aux régulations normales. Ceci peut entraîner une cascade de réactions inappropriées, comme le repli sur soi, des pensées négatives, le dérèglement des systèmes du sommeil ou de l’appétit, etc.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/dire-secoue-toi-un-peu-a-une-personne-deprimee-ca-ne-sert-a-rien-87199">Dire « Secoue-toi un peu » à une personne déprimée, ça ne sert à rien</a>
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<p>La plupart des antidépresseurs renforcent les effets de la sérotonine, en stabilisant sa production, et surtout en limitant sa destruction (il serait inutile d’administrer directement de la sérotonine, qui n’accéderait pas au cerveau). En renforçant les effets naturels de ce neurotransmetteur apaisant, on rétablit probablement la balance des émotions et des modes de pensée vers une polarité moins négative, ce qui réduit la douleur morale et ses effets secondaires. L’organisme et l’esprit retrouvent ainsi sans doute plus de sérénité et de clairvoyance, restaurant les capacités d’auto-réparation qui existent chez les êtres humains.</p>
<p>Ce renforcement n’est pas immédiat : il prend au moins quinze jours, car de nombreuses réactions et contre-réactions d’adaptation des récepteurs se mettent en place au début du traitement. Cela peut expliquer que les antidépresseurs n’améliorent pas immédiatement les symptômes, et que certains effets secondaires présents dans les premiers jours d’un traitement disparaissent ensuite.</p>
<h2>La sérotonine, une ressource pour retrouver l’équilibre intérieur</h2>
<p>Qu’on les nomme résilience, <em>coping</em> (adaptation) ou force de caractère, nous avons tous des capacités de gestion de l’adversité. Nous les mettons en œuvre le plus souvent sans même nous en apercevoir. Pour traiter une dépression, il faut activer ces aptitudes. Cela peut se faire grâce à une aide psychologique ou à une psychothérapie, toujours essentielle pour donner du sens aux épisodes traversés et faciliter la cicatrisation et la prévention, mais aussi par la prise d’un antidépresseur qui va agir sur la sérotonine.</p>
<p>Ce traitement est indispensable quand le désespoir est à son comble, pouvant conduire à des idées ou à des actes suicidaires, et quand la dépression empêche tout simplement de penser, en raison de la fatigue physique et morale, rendant de ce fait illusoire tout travail de psychothérapie. Mais il est également très utile pour réduire la douleur morale propre à toute dépression sévère.</p>
<p>Il ne consiste toutefois pas à « rendre heureux » par un dopage artificiel, mais seulement à réduire le déséquilibre émotionnel anormal lié à la pathologie. Un antidépresseur bien prescrit ne rend pas euphorique, et n’a aucun intérêt chez une personne non déprimée. Il rétablit juste un équilibre naturel, et redonne ainsi au patient plus de liberté de penser et d’agir sereinement selon sa propre volonté.</p>
<p>La sérotonine est l’une des ressources mobilisables pour retrouver cet équilibre intérieur. Ce n’est pas l’hormone du bonheur, et c’est très bien comme cela !</p>
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<p><strong><em>Pour en savoir plus :</em></strong></p>
<p><em>- Antoine Pelissolo (2017), <a href="https://editions.flammarion.com/Catalogue/hors-collection/psychologie-et-developpement-personnel/vous-etes-votre-meilleur-psy">« Vous êtes votre meilleur psy ! »</a>, Flammarion.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/109280/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Antoine Pelissolo a reçu ces trois dernières années des financements (rémunérations pour des travaux de recherche ou de formation, ou invitations à des réunions scientifiques) des laboratoires pharmaceutiques Biocodex, Otsuka et Janssen-Cilag.</span></em></p>La sérotonine joue un grand rôle dans la régulation de nos émotions et de nos humeurs, favorisant calme et stabilité. Mais lui prêter la faculté de rendre heureux, c’est aller un peu vite en besogne.Antoine Pelissolo, Professeur de psychiatrie, Inserm, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1081912018-12-14T01:21:21Z2018-12-14T01:21:21ZComment nos neurones influencent nos choix<p>En regardant la <a href="https://whc.unesco.org/fr/list/263">Tour de Belém</a> depuis la fenêtre de mon bureau – ce symbole portugais des grandes découvertes maritimes – je me demande souvent ce qui pousse les gens à explorer l’inconnu. Que se passe-t-il dans leur cerveau lorsqu’ils pèsent le pour et le contre avant d’essayer quelque chose de nouveau ? Pour répondre à cette question, en collaboration avec le Dr Zachary Mainen et son équipe de neuroscientifiques, nous étudions comment le cerveau gère l’incertitude lorsqu’il prend des décisions.</p>
<p>Obtenir une meilleure représentation des mécanismes neuronaux qui régissent nos choix permettrait de déterminer ce qui fait qu’une personne persiste à accomplir une action donnée, quel qu’en soit le risque. C’est important, car une telle propension peut entraîner des dysfonctionnements cognitifs menant à l’addiction ou à d’autres troubles compulsifs. En outre, on sait que le manque de persévérance face à l’adversité est une caractéristique des troubles dépressifs. Mieux comprendre les processus neuronaux qui contrôlent nos comportements pourrait donc, en ouvrant de nouvelles pistes thérapeutiques, avoir d’immenses implications pour la société.</p>
<h2>Une vie de dilemmes</h2>
<p>Imaginez que vous venez d’actionner le mécanisme d’un briquet. S’il ne s’allume pas, vous allez spontanément réessayer. Si, après la deuxième tentative, il n’y a toujours pas d’étincelle, vous recommencerez encore et encore, jusqu’à ce qu’une flamme jaillisse. À ce moment, vous saurez que votre briquet fonctionne. Mais si vous n’obtenez pas de flamme ? Combien de temps allez-vous continuer à vous acharner avant de décider de le jeter ?</p>
<p>Comme l’illustre ce petit exemple, notre vie quotidienne est remplie de dilemmes et d’incertitudes. Nous devons constamment choisir entre différentes options, que les conséquences de nos décisions soient triviales – dois-je continuer à allumer ce briquet ou m’en débarasser ? – ou risquent de changer notre vie – devrais-je mettre un terme à cette relation ou lui redonner une chance ? Généralement, nous pouvons soit continuer à faire ce que nous avons déjà l’habitude de faire, soit nous risquer à expérimenter des options inexplorées, qui pourraient s’avérer bien plus bénéfiques pour nous.</p>
<p>Face à ces situations, tout le monde ne réagit pas de la même façon. Certaines personnes sont naturellement enclines à tenter leur chance, tandis que d’autres préfèrent souvent s’en tenir à ce qu’elles connaissent le mieux. Et pourtant, être curieux, explorer sont des comportements fondamentaux pour les êtres humains et les animaux. Ils permettent par exemple de découvrir la meilleure façon de se procurer certaines ressources, qu’il s’agisse d’eau, de nourriture ou d’argent.</p>
<h2>De la décision à l’action</h2>
<p>Bien que les décisions que nous prenons aient un impact considérable sur notre vie quotidienne, nous ne comprenons que partiellement le processus complexe mis en œuvre lorsque nous délibérons et nous nous engageons. Ce sujet a été largement étudié du point de vue <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20345247">éthologique et théorique</a>, et les neuroscientifiques ont découvert récemment plusieurs zones du cerveau <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17600525">qui contribuent à la résolution des dilemmes et agissent sur eux</a>. Mais nous sommes encore loin de comprendre le chemin sinueux qui mène de la décision à l’action. En effet, même les décisions les plus banales mettent en jeu de nombreuses régions cérébrales, et <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18182129">impliquent la coopération de nombreuses cellules</a>.</p>
<p>Revenons à l’exemple de tout à l’heure. Pour décider s’il vous faut continuer ou non à battre le briquet, vous devez d’abord recueillir une information : une flamme s’est-elle formée, oui ou non ? La réponse à cette question activera dans votre cerveau les régions responsables du traitement des informations sensorielles (comme celles produites par la vue ou le toucher). Selon que vous verrez la flamme ou ne la verrez pas, vous serez alors satisfait ou surpris. Cette réaction survient parce que, dans votre cerveau, les informations sensorielles sont communiquées au système impliqué dans la récompense. En retour, ce circuit de récompense, qui libère de la <a href="http://lecerveau.mcgill.ca/flash/d/d_03/d_03_m/d_03_m_que/d_03_m_que.html">dopamine</a>, une molécule impliquée notamment dans le plaisir, <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18708140">aidera à motiver le choix de votre prochaine action</a>.</p>
<p>Que ferez-vous ensuite ? Eh bien, si vous voyez une flamme, vous pourrez simplement la maintenir en vie en continuant à presser la fourchette du briquet. Sinon, vous vous demanderez si le mouvement de votre doigt sur la molette a été bien exécuté, ou si le briquet est à court de gaz. Pour prendre en compte cette incertitude, vous mobiliserez les régions situées à l’avant de votre cerveau, dans le cortex frontal. Celles-ci sont impliquées dans les fonctions cognitives supérieures, telles que le jugement et la résolution de problèmes. Si vous pensez alors que le briquet n’est pas vide, vous l’actionnerez encore une fois. Là encore, c’est votre cortex frontal qui contrôlera la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/11252769">sélection de cette action volontaire</a>.</p>
<p>Vous devrez enfin décider combien de temps vous êtes prêt à passer pour essayer d’allumer ce briquet. Votre choix variera selon que vous en avez un autre à portée de main, ou en fonction de votre motivation à allumer votre cigarette. Votre niveau de sérotonine, un neuromodulateur lié <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25601545">à la patience</a> et <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29520000">à la persévérance</a>, pourrait aussi influer sur la durée de votre entêtement. Et ce même si l’éventualité d’une récompense pour votre action apparaît rapidement incertaine…</p>
<h2>Comprendre le processus décisionnel</h2>
<p>Au <a href="http://first.fchampalimaud.org/en/the-foundation/champalimaud-centre-unknown/">Champalimaud Centre for the Unknown</a> de Lisbonne, au Portugal, nous avons mis au point un exercice simple, qui reproduit avec des souris le dilemme du briquet. Dans cette expérience, les rongeurs cherchent à se procurer de l’eau, mais les gouttes ne leur sont délivrées qu’en petite quantité. Qui plus est, parfois, aléatoirement, la ressource en eau s’épuise. Les souris se retrouvent donc dans une situation qui ressemble à la confrontation avec un briquet capricieux, qui produirait des flammes de façon irrégulière jusqu’à ce que sa réserve de gaz soit soudain épuisée.</p>
<p>Au cours de cette expérience, nous surveillons attentivement le comportement des animaux pendant qu’ils accomplissent cette tâche de recherche d’eau, afin de comprendre jusqu’à quel point ils persévèrent, et à quel moment ils décident d’abandonner pour aller explorer ailleurs. Grâce à des modèles informatiques, nous pouvons expliquer les principaux aspects de ce processus décisionnel. Transposer ainsi un processus de décision compliqué (« après combien d’échecs dois-je abandonner et changer de stratégie ? ») dans un environnement naturaliste (recherche de nourriture ou d’eau) nous permet d’étudier la cognition chez les souris et de la mettre en parallèle avec celle des êtres humains. Comme l’explique mon collègue Pietro Vertechi, qui a développé la modélisation utilisée :</p>
<blockquote>
<p>« Durant l’exercice, les animaux reçoivent de nombreux stimuli différents, depuis la couleur de la boîte jusqu’à l’odeur de l’expérimentateur ou au goût de l’eau. Or, la plupart de ces informations ne sont d’aucune utilité pour accomplir la tâche souhaitée. Grâce à des modélisations mathématiques du comportement, nous sommes à même de déterminer lesquelles de ces variables sont importantes, celles dont le sujet doit garder la trace (comme le nombre d’essais consécutifs ratés, par exemple). Nous pouvons ensuite rechercher quelles régions du cerveau enregistrent ces informations, et comment elles le font. »</p>
</blockquote>
<h2>Des technologies de pointe pour reconstruire le puzzle neuronal</h2>
<p>Afin de reconstruire, pièce par pièce, le puzzle neuronal de la décision, nous cherchons à déterminer quels sont les mécanismes interactifs à l’œuvre dans le cerveau de la souris. Pour y parvenir, il nous faut suivre l’activité des différentes régions du système nerveux des rongeurs, et découvrir le rôle que joue chacune d’entre elles dans le processus de décision.</p>
<p>Nous utilisons pour cela des technologies de pointe, telle que la <a href="https://www.nature.com/articles/npp2014206/figures/1">photométrie de fibre</a>. Cette technologie récente nous permet de détecter, au moment où les souris obtiennent leur eau, le déclenchement de très faibles signaux au sein de leur cerveau, dans leur système de récompense, tel que celui produit par la libération de dopamine.</p>
<p>Grâce à une autre nouvelle technologie enregistrant simultanément l’activité électrique de centaines de neurones, nous sommes également capables d’écouter la conversation entre des neurones situés dans de multiples zones du cortex frontal, pendant que les animaux se livrent à une tâche donnée. Cette approche, qui permet d’obtenir une résolution spatio-temporelle fine, peut être utilisée pour suivre le trajet de l’information dans le cerveau, pendant la prise de décision.</p>
<p>Enfin, nous utilisons des lignées de souris modifiées génétiquement, dont le cerveau contient des sortes d’interrupteurs optiques. Ces derniers sont constitués de protéines sensibles à la lumière, appelées opsines. Ils nous permettent de contrôler l’activité neuronale des rongeurs à distance, via des impulsions lumineuses. Grâce à cet outil puissant, appelé <a href="https://lejournal.cnrs.fr/nos-blogs/aux-frontieres-du-cerveau/loptogenetique-quand-la-lumiere-prend-les-commandes-du-cerveau">optogénétique</a>, il est possible de contrôler directement certains groupes de cellules, comme les neurones libérant de la sérotonine, et ainsi de tester leurs effets sur le comportement.</p>
<p>Bien que la sérotonine soit la principale cible des antidépresseurs, sa fonction exacte demeure énigmatique. En testant son rôle mécaniste sur la modulation des décisions et des actions volontaires, nous espérons mettre au jour un nouveau rôle fondamental pour cette molécule. Ce qui pourrait conduire à la mise au point de stratégies thérapeutiques innovantes.</p>
<p>Bien que nos travaux soient loin de dessiner un panorama complet de la façon dont notre cerveau prend ses décisions, ils ouvrent, un pas après l’autre, la voie menant à l’élucidation d’un des plus grands mystères des neurosciences. En outre, les réponses scientifiques obtenues à propos des actions et des décisions que nous prenons de notre propre initiative peuvent aussi alimenter les débats philosophiques, en particulier ceux qui touchent <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25746063">à la question du « libre arbitre »</a>. En définitive, qui décide vraiment ? Votre cerveau ?</p>
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<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=121&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=121&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=121&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=152&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=152&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/202296/original/file-20180117-53314-hzk3rx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=152&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Créé en 2007 pour favoriser le partage des connaissances scientifiques sur les questions de société, AXA Research Fund soutient plus de 600 projets à travers le monde portés par des chercheurs de 54 nationalités. Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site du <a href="https://www.axa-research.org">Axa Research Fund</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/108191/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fanny Cazettes ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pourquoi prenons-nous une décision plutôt qu’une autre ? Pourquoi persévérons-nous dans certains cas, et pas dans d’autres ? Retour sur une énigme qui résiste encore aux scientifiques.Fanny Cazettes, Postdoctoral fellow - Champalimaud Foundation, Fundación ChampalimaudLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1080892018-12-03T21:46:08Z2018-12-03T21:46:08ZPodcast : Un objet peut-il devenir la continuité de nos membres ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/248489/original/file-20181203-194944-1ht81j3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/photo-displays-person-holding-ball-with-reflection-of-horizon-940880/">Sindre Strøm/Pexels</a></span></figcaption></figure><p>À quel point un outil tenu en main est-il intégré par notre cerveau comme un organe des sens ? À quel point ce prolongement de notre être est-il sensible ? Seule l’extrémité de cet outil, nous permet-elle de percevoir le monde, ou est-ce l’ensemble de cet objet qui devient une continuité de notre bras, de notre main, de nos doigts ?</p>
<p>C’est à l’ensemble de ces questions que des chercheurs français ont essayées d’apporter une réponse dans des <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-018-0460-0">travaux publiés en septembre 2018 dans la prestigieuse revue scientifique <em>Nature</em></a>.</p>
<p>En moins de 10 minutes, grâce à cet épisode, découvrez les résultats de cette fascinante étude reconsidérant le rapport que l’on a aux objets, qui plus que de simples outils pourraient être de réelles extensions sensorielles de nos corps.</p>
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<p><em>Un podcast en partenariat avec <a href="https://soundcloud.com/latetedanslecerveau">La tête dans le cerveau</a> dont toutes les références scientifiques sont à retrouver sur <a href="https://cervenargo.hypotheses.org/2433">Cerveau en Argot</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/108089/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Rodo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Nous utilisons des objets toute la journée, en quoi peuvent-ils être considérés comme faisant partie de notre corps et de nos sensations ?Christophe Rodo, Jeune chercheur ATER terminant une thèse en neurosciences à Aix-Marseille Université, au sein du Laboratoire de Neurosciences Cognitives, de l’Institut de Neurosciences des Systèmes et de l’Institut des Sciences du Mouvement, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1037922018-09-25T20:18:57Z2018-09-25T20:18:57ZPodcast : Mémoire visuelle ? Mémoire auditive ? Non, neuromythe !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/237782/original/file-20180924-85767-koktqm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C32%2C1200%2C998&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/livres-pages-histoire-histoires-1245690/">Free-Photos/Pixabay</a></span></figcaption></figure><p>Lorsqu’il faut retenir une information, nous sommes différents. Certains auront plus une mémoire visuelle, d’autres une mémoire sonore et enfin, certains d’entre nous auront besoin de manipuler les choses afin de retenir au mieux ! Nous avons quasiment tous déjà entendu ça, cela semble évident, et pourtant tout ceci est faux !</p>
<p>Car, la réalité est que les <a href="http://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1111/j.1539-6053.2009.01038.x">études scientifiques</a> sur le sujet, ont conclu qu’absolument rien ne permet de dire qu’il existerait une relation privilégiée entre une modalité sensorielle préférée et une méthode d’instruction plus efficace. Ce n’est qu’une croyance infondée, un neuromythe.</p>
<p>En moins de 10 minutes, grâce à cet épisode, découvrez en quoi cette croyance sur le fonctionnement du cerveau ne correspond pas à la réalité scientifique.</p>
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<p><em>Un podcast en partenariat avec <a href="https://soundcloud.com/latetedanslecerveau/numero48">La tête dans le cerveau</a> dont toutes les références scientifiques sont à retrouver sur <a href="https://cervenargo.hypotheses.org/2126">Cerveau en Argot</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/103792/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Rodo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Vous pensez avoir plutôt une mémoire visuelle ou sonore ? Et si cette question n’avait tout simplement aucun sens ?Christophe Rodo, Jeune chercheur ATER terminant une thèse en neurosciences à Aix-Marseille Université, au sein du Laboratoire de Neurosciences Cognitives, de l’Institut de Neurosciences des Systèmes et de l’Institut des Sciences du Mouvement, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/992302018-07-02T20:25:33Z2018-07-02T20:25:33ZPodcast : Avoir le cerveau plus gros que le ventre ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/225701/original/file-20180702-116132-1bvo4e4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C3%2C1200%2C1194&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une salade légère pour une alimentation équilibrée.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/en/salad-background-food-tasty-olives-2068220/">Daria Yakovleva/Pixabay</a></span></figcaption></figure><p>Entre une assiette de choux de Bruxelles et une tartine de Nutella, choisir l’aliment le plus sain est parfois difficile, cette décision serait même plus ou moins complexe en fonction des personnes et de l’anatomie cérébrale.</p>
<p>Manger sainement n’est pas toujours quelque chose de très facile. Même si nous sommes conscients qu’un aliment n’est pas très bon pour la santé, s’en détourner n’est pas forcément aisé. Et il semblerait que nous ne soyons pas tous égaux lorsqu’il s’agit de faire un choix face à de la nourriture.</p>
<p>Selon une récente <a href="http://www.jneurosci.org/content/early/2018/06/04/JNEUROSCI.3402-17.2018/tab-article-info">étude scientifique</a>, il semblerait exister un lien entre l’anatomie du cerveau et notre capacité de contrôle lors de choix alimentaires. Le contrôle de ces décisions pourrait dépendre de la quantité de neurones présente dans deux régions cérébrales bien précises.</p>
<p>En moins de 10 minutes, grâce à cet épisode, même si cela n’arrangera vraisemblablement pas votre hygiène alimentaire, découvrez plus en détail les intéressants résultats de ces travaux qui pourraient peut-être vous aider à un peu moins culpabiliser face à une belle tartine de <em>Nutella</em>.</p>
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<p><em>Un podcast en partenariat avec <a href="https://soundcloud.com/latetedanslecerveau">La tête dans le cerveau</a> dont toutes les références scientifiques sont à retrouver sur <a href="https://cervenargo.hypotheses.org/1962">Cerveau en Argot</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/99230/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Rodo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Manger mieux, bouger plus. Nous sommes martelés par ces slogans, mais sommes-nous tous égaux face à nos choix alimentaires ? Nos différences cérébrales pourraient avoir un rôle prépondérant.Christophe Rodo, Jeune chercheur ATER terminant une thèse en neurosciences à Aix-Marseille Université, au sein du Laboratoire de Neurosciences Cognitives, de l’Institut de Neurosciences des Systèmes et de l’Institut des Sciences du Mouvement, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/943462018-04-18T21:59:40Z2018-04-18T21:59:40ZVers une neuro-société : tout peut-il s’expliquer par l’imagerie cérébrale ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/215398/original/file-20180418-163991-1wnsiaj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C0%2C957%2C517&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'imagerie cérébrale est-elle l'outil parfait pour tout comprendre ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/cerveau-mettre-en-marche-%C3%A9ducation-3141247/">Geralt/Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Avec l’<a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01417550">explosion contemporaine des neurosciences</a>, le cerveau est devenu la métaphore de référence pour décrire l’être humain dans son individualité, sa subjectivité, ses actions, sa vie privée et sociale. La rapidité avec laquelle les sciences du cerveau s’insinuent dans la société est frappante. Depuis une dizaine d’années, on ne peut que constater l’impact croissant des neurosciences dans les représentations culturelles, l’éducation, les médias, mais aussi dans les milieux industriels, financiers, politiques, militaires. Le « neuro » est partout : neuroéconomie, neuromarketting, neurophilosophie, neuroéducation, neurogymnastique… et même neuropolitique.</p>
<p>Cet essor des neurosciences est étroitement associé à l’émergence des technologies d’imagerie cérébrale telles que l’IRM. La possibilité de voir le cerveau vivant en train de fonctionner ouvrirait la voie au décryptage de la pensée, des émotions, des motivations, avec au-delà la possibilité de maîtriser les processus de prise de décision qui guident nos choix et nos actions. On ne s’étonnera pas que l’IRM intéresse des secteurs a priori bien loin de la neurobiologie : ressources humaines, assurance, publicité, renseignement, justice, etc. Ces questions interpellent la démocratie et appellent une réflexion éthique.</p>
<h2>L’IRM, nouveau Big Brother ?</h2>
<p>Un apport majeur de l’IRM est d’avoir révélé les <a href="https://www.editions-lepommier.fr/le-cerveau-evolue-t-il-au-cours-de-la-vie">propriétés de « plasticité » du cerveau</a> qui se façonne en fonction de l’histoire vécue par chacun. Par exemple, chez les pianistes, on observe un épaississement des régions du cortex cérébral spécialisées dans la motricité des doigts et l’audition.</p>
<p>Ce phénomène est dû à la fabrication de connexions supplémentaires entre les neurones. De plus, ces changements du cortex sont directement proportionnels au temps consacré à l’apprentissage du piano pendant l’enfance. La plasticité cérébrale est à l’œuvre également pendant la vie d’adulte. Ainsi, le fait de s’exercer à jongler entraîne après seulement trois mois de pratique, un épaississement des zones du cortex qui contrôlent la coordination des bras et la vision. Et si l’entraînement cesse, les zones qui étaient épaissies rétrécissent.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/215401/original/file-20180418-163971-1p7smrn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/215401/original/file-20180418-163971-1p7smrn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=746&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/215401/original/file-20180418-163971-1p7smrn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=746&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/215401/original/file-20180418-163971-1p7smrn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=746&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/215401/original/file-20180418-163971-1p7smrn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=937&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/215401/original/file-20180418-163971-1p7smrn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=937&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/215401/original/file-20180418-163971-1p7smrn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=937&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Exemple d’image du cerveau obtenue par imagerie à résonance magnétique (IRM).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:MRI_T2_Brain_axial_image.jpg">English Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces exemples, et bien d’autres, résultats démontrent comment les évènements de la vie modifient le fonctionnement cérébral, ce qui se traduit concrètement par la restructuration des circuits de neurones du cortex. Rien n’est jamais figé dans notre cerveau. Il s’agit là d’une notion fondamentale à considérer pour l’interprétation les images par IRM. La présence de particularités anatomiques ou fonctionnelles dans un cerveau ne signifie pas qu’elles existent depuis la naissance, ni qu’elles y resteront gravées. En fait, L’IRM donne un cliché instantané de l’état du cerveau d’une personne à un moment donné. Elle n’apporte pas d’information sur son passé. Elle n’a pas non plus de valeur prédictive de futurs comportements. Un autre biais de l’IRM tient au <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17803985">pouvoir de fascination des images colorées du cerveau</a> qui peuvent apparaître comme une preuve scientifique « objective » pour un public non averti.</p>
<h2>Cerveau de droite ou de gauche ?</h2>
<p>Selon des chercheurs de l’Institut londonien de sciences cognitives, les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21474316">opinions politiques seraient inscrites dans nos neurones</a>. Leur expérience a consisté a recueillir les orientations politiques de 90 étudiants et à étudier par imagerie IRM la structure de leurs cerveaux.</p>
<p>Résultat : le cortex cingulaire antérieur, qui joue un rôle dans la détection des contradictions, est plus volumineux chez les libéraux (la gauche, dans les pays anglo-saxons), alors que la région de l’amygdale, impliquée dans les émotions liées à la peur, est plus développée chez les conservateurs (la droite).</p>
<p>Au dire des chercheurs, leurs résultats révèlent un substrat neuronal aux analyses psychologiques qui montrent que la peur des situations conflictuelles et des risques différencie les conservateurs des libéraux.</p>
<p>La « psychologie politique » est une discipline en plein essor depuis 10 ans, particulièrement aux États-Unis. Son objectif est de comprendre pourquoi certains individus ont des croyances libérales et progressistes, tandis que d’autres penchent pour les idées conservatrices et réactionnaires. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0092656605000632">Le clivage idéologique viendrait de la petite enfance</a>. D’après une étude menée chez des enfants de 3 ans suivis jusqu’à l’âge adulte, ceux décrits comme peureux, indécis, têtus et inhibés deviennent des adultes conservateurs. Par contre les enfants énergiques, expressifs, dominants et sociables adoptent plus tard les idées progressistes et libérales.</p>
<p>Toutes ces recherches ont fait l’objet d’une <a href="https://nyuscholars.nyu.edu/en/publications/political-neuroscience-the-beginning-of-a-beautiful-friendship">revue de John Jost</a> publiée en 2011, qui nous annonce l’émergence d’une nouvelle discipline, la neuro-politique qui permettra de « comprendre et réduire les sources de l’acrimonie idéologique qui encourage l’incivilité et fait obstacle au progrès politique et social ».</p>
<h2>Neuro-justice</h2>
<p>Au XIX<sup>e</sup> siècle, <a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/cesare-lombroso/">Cesare Lombroso</a> fondait la criminologie scientifique. Il prétendait repérer les criminels à partir des traits anatomiques du visage et du crâne. <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/sciences/mal-mesure-de-l-homme_9782738105080.php">La science venait au secours de la justice</a>…</p>
<p>Où en est-on au XXI<sup>e</sup> siècle ? La même quête anime toujours certains chercheurs, en particulier aux États-Unis où la lutte contre la délinquance et le terrorisme est une priorité nationale. Certes, le vocabulaire et les méthodes ont changé. On ne parle plus de criminalité mais de psychopathie antisociale, tandis que l’imagerie cérébrale a remplacé l’analyse des faciès et des bosses du crâne.</p>
<p>En Inde, le <a href="http://up-magazine.info/index.php/le-vivant/neurosciences/1473-quand-les-neurosciences-viennent-au-secours-de-la-justice">procès d’une jeune femme</a>, Aditi Sharma, <a href="https://www.nouvelobs.com/rue89/rue89-justice/20121006.RUE2575/l-irm-fonctionnelle-salut-je-suis-ton-cerveau-et-je-vais-t-envoyer-en-prison.html">a défrayé la chronique en 2008</a>. Accusée d’avoir empoisonné son fiancé, alors qu’elle clamait son innocence, elle a été soumise à l’épreuve d’un détecteur de mensonges basé sur l’activité électrique du cerveau. L’électroencéphalogramme montrait une réaction identique aux phrases « j’ai acheté de l’arsenic », « le ciel est bleu », « j’ai eu une liaison avec Udit ». Les experts en ont conclu que l’achat du poison était un fait établi au même titre que la couleur du ciel. L’argument a été retenu comme preuve à charge et la jeune fille condamnée à la détention à perpétuité. Par chance, la publication de l’affaire dans le New York Times ainsi que les nombreuses contestations de la validité de l’épreuve ont permis l’annulation de la condamnation. La Cour suprême de l’Inde a néanmoins maintenu l’autorisation des détecteurs de mensonges à condition que l’accusé·e donne son consentement.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"284268713530757121"}"></div></p>
<p>Aux États-Unis, l’<a href="http://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.0050103">utilisation judiciaire</a> d’examens relatifs à l’anatomie et au fonctionnement du cerveau date d’une vingtaine d’années, en lien avec l’émergence des techniques d’imagerie cérébrale. Un des premiers procès du genre est celui de John Hinckley, accusé de tentative d’assassinat du Président Ronald Reagan en 1981. La défense a présenté un scanner du cerveau de Hinckley montrant un élargissement des sillons du cortex, comme on en trouve parfois chez certains schizophrènes. Bien que l’observation n’ait jamais été confirmée, l’argument a porté car Hinckley a été déclaré non coupable pour cause de démence.</p>
<p>À ce jour, plus de 600 cas ont été répertoriés aux États-Unis pour lesquels des images obtenues par IRM ont été introduites au niveau pénal comme « preuve ». Le sujet des applications juridiques des neurosciences est devenu une thématique de recherche à part entière dénommée « Neuroloi » (Neurolaw). Elle est l’objet d’importants programmes de financement associant les universités et l’administration américaine.</p>
<h2>A la recherche des zones cérébrales du crime</h2>
<p>Violence, agressivité, atteinte à l’ordre moral, criminalité, terrorisme… Tous ces comportements déviants auraient-ils leur origine dans le cerveau ? Pour le savoir, la méthode de choix est l’imagerie par IRM. Le laboratoire dirigé par Adrian Raine à l’université de Californie est spécialisé dans le domaine. Son objectif est d’étudier les bases neuronales des comportements de type antisocial, agressif et criminel « pour mettre au point de nouveaux traitements et des programmes de prévention pour ces maladies très coûteuses à la société ».</p>
<p>Dans une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18327831">publication de 2008</a>, Raine passe en revue les travaux sur les particularités anatomiques des cerveaux de psychopathes violents. <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2255599/">Plusieurs études par IRM</a> ont montré une légère réduction de l’épaisseur du cortex cérébral dans les régions préfrontale et temporale. Il faut noter que ce phénomène n’est en rien spécifique des criminels.</p>
<p>On a pu l’observer également chez des sujets alcooliques, drogués et chez certains patients épileptiques. Le problème de son interprétation reste entier. En effet, jusqu’à présent, aucune démonstration scientifique ne permet d’établir une relation de causalité entre une réduction d’épaisseur du cortex et un comportement déviant. En raison des propriétés de plasticité du cerveau, l’origine des variations de la structure du cortex ne peut pas être déterminée. Finalement, il est important de garder à l’esprit que la majorité des comportements antisociaux est le fait d’individus au cerveau normal. Néanmoins, le nombre des publications sur ces thèmes explose, principalement aux États-Unis. De 70 articles publiés entre 1990 et 2000, on est passé à plus de 2 000 entre 2000 et 2015.</p>
<p>En France, pour évaluer la responsabilité pénale d’un accusé le juge nomme des psychiatres et des psychologues qui appuient leurs expertises avant tout sur des entretiens et très peu sur l’imagerie du cerveau. Mais pour combien de temps encore ? Le modèle américain risque de s’imposer avec la perspective de voir les neurosciences suppléer le médecin clinicien dans l’évaluation de la responsabilité et de la dangerosité d’un prévenu.</p>
<h2>Neuro-éthique</h2>
<p>Au XIX<sup>e</sup> siècle, la forme du crâne et la taille du cerveau ont été utilisées pour justifier la hiérarchie entre les sexes, les races et les classes sociales. De nos jours, les méthodes d’investigation ont fait des progrès spectaculaires avec l’imagerie cérébrale et la découverte de la plasticité du cerveau.</p>
<p>Cependant la tentation est toujours présente de mettre en avant un déterminisme biologique pour expliquer le malaise social et les inégalités entre les groupes humains, reléguant ainsi au second plan les raisons sociales et culturelles. Allié à la fascination exercée par les images IRM du cerveau, l’argument neuroscientifique devient éminemment séduisant et convaincant pour les non-initiés.</p>
<p>Dans ce contexte, une réflexion éthique se doit d’être menée sur l’impact des neurosciences dans la société, l’économie et les politiques publiques. En France, la loi de bioéthique inclus depuis 2011 une mission de veille sur les recherches et des applications des techniques d’imagerie cérébrale, confiée au <a href="http://www.ccne-ethique.fr/">comité consultatif national d’éthique</a>.</p>
<p>Cette mission a pour objet de défendre une éthique dans la production des savoirs en neurosciences, d’éveiller la responsabilité des chercheurs sur l’impact de leurs travaux dans le champ social et d’alerter sur les dérives dans l’utilisation et l’interprétation de l’IRM. Souhaitons que ces préoccupations soient confortées à l’occasion de la prochaine révision des lois de bioéthique prévue en 2018.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/94346/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Catherine Vidal ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une image est-elle une preuve scientifique irréfutable ? Certains scientifiques pensent pouvoir expliquer tous nos agissements avec l’imagerie médicale. Est-ce sérieux ?Catherine Vidal, Neurobiologiste, membre du Comité d’éthique de l’Inserm, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/946122018-04-09T20:14:39Z2018-04-09T20:14:39ZPourquoi anticiper aide-t-il à réussir ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/213684/original/file-20180408-5587-x8wkwk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C0%2C997%2C562&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption"></span> <span class="attribution"><span class="source">Oscar Keys/Unsplash</span></span></figcaption></figure><p><em>Cette chronique est dans la droite ligne et se nourrit des recherches et rencontres publiées sur mon site <a href="http://www.cahiersdelimaginaire.com/votrelaboratoirecreatif-sylviegendreau/">Les cahiers de l’imaginaire</a></em>.</p>
<hr>
<h2>En psychologie, que signifie l’anticipation ?</h2>
<p>Anticiper est la faculté que nous avons de prendre des décisions en étant capables de prévoir ses conséquences à la fois sur le plan temporel et spatial. L’<a href="http://www.ijese.net/makale/265/the-theoretical-analysis-of-the-phenomenon-of-anticipation-in-psychology">anticipation</a> est étroitement liée à la réflexion et, par conséquent, elle inclut aussi la capacité de prédire l’impact de nos actes sur notre environnement, sur la suite à donner à nos activités et sur notre comportement.</p>
<p>Le verbe anticiper tire sa signification de ses racines latines. En latin, <em>anticipere</em> signifie prendre les devants. L’importance de l’anticipation se répercute de multiples façons sur le plan psychologique. Savoir anticiper est étroitement lié à de nombreux problèmes : avancer, prévoir, devoir faire du sur place, avoir trop ou pas assez d’attentes, etc.</p>
<p>En vérité, et de manière plus globale, l’anticipation est un processus mental qui est au centre de toute activité humaine. Elle vise à éliminer le plus possible l’incertitude inhérente à toute prise de décision.</p>
<p>Qui anticipe bien doit être en mesure de prévoir un déroulement futur de la manière la plus complète et la plus précise possible.</p>
<p>Puisque l’anticipation est un processus mental qui occupe une place prépondérante chez l’humain, nous disposons tout naturellement, dans notre cerveau, des ressources nécessaires pour réduire le risque associé à nos prises de décision et aux actes qui en découlent. Parmi ces dispositifs, il y a l’imagerie mentale encore peu étudiée, mais suscitant de plus en plus d’intérêt de la part des chercheurs.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213685/original/file-20180408-5578-auyuv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213685/original/file-20180408-5578-auyuv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213685/original/file-20180408-5578-auyuv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213685/original/file-20180408-5578-auyuv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213685/original/file-20180408-5578-auyuv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213685/original/file-20180408-5578-auyuv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213685/original/file-20180408-5578-auyuv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Shianne Morales/Unsplash.</span>
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<h2>L’imagerie mentale</h2>
<p>Le cerveau est un formidable simulateur. Il peut aisément simuler des sensations, des actions, en fait tout type d’expériences.</p>
<p>La capacité de répéter mentalement une action avant de l’exécuter, ou l’imagerie motrice, intéresse particulièrement les entraîneurs et les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22506748">athlètes</a>.</p>
<p>Lorsque nous pratiquons l’imagerie mentale, notre cerveau traite l’information nécessaire à la répétition d’un mouvement ou d’une séquence par le biais de différentes régions du cortex pariétal. Ces zones sont précisément les mêmes que celles qui contrôlent la force ou la posture requise pour exécuter le mouvement en question, mais aussi celles qui servent à construire une image mentale du corps et de l’espace dans lequel le mouvement est effectué.</p>
<p>Les recherches sur l’imagerie motrice sont particulièrement importantes, car elles ouvrent une fenêtre sur les relations qui existent entre la représentation mentale d’une action et la manière dont celle-ci sera éventuellement exécutée.</p>
<p>L’imagerie motrice et l’imagerie mentale sont deux cousines proches. Ces processus sont effectués soit inconsciemment, ou consciemment dans le cadre d’un entraînement.</p>
<p>Des efforts de recherche accrus sont nécessaires pour mieux comprendre les mécanismes à l’œuvre. Un domaine qui est particulièrement intéressant à explorer est la connaissance et le contrôle qu’a un individu de ses images mentales.</p>
<p>Quelle est la nature exacte de cette expérience cérébrale et comment peut-on développer une véritable compétence dans ce domaine ?</p>
<p>Les imageries mentales et motrices en tant que processus mentaux de simulation sont d’autant plus importantes que nous avons trop souvent tendance lorsque nous planifions un projet à nous en remettre à la solidité de nos intentions, ce qui a pour effet d’introduire un biais optimiste dans la prédiction des résultats.</p>
<p>Si nous voulons que nos prédictions soient plus réalistes, il nous faut reconnaître que dans bien des cas, nous avons sous-estimé plusieurs obstacles.</p>
<p>Selon une <a href="http://journal.sjdm.org/14/14130/jdm14130.html">équipe</a> de chercheurs canadiens, trois raisons peuvent être invoquées pour expliquer ce déficit :</p>
<ul>
<li><p>Les prédictions se concentrent surtout sur les intentions et dans une moindre mesure sur les barrières à leur réalisation.</p></li>
<li><p>Certaines barrières ont été tout simplement ignorées, ou d’autres ont été mal comprises.</p></li>
<li><p>Même lorsque certaines contraintes ont été correctement évaluées et comprises, nous persistons en octroyant un pouvoir démesuré dans la force de nos intentions.</p></li>
</ul>
<p>Une solution consisterait à utiliser l’imagerie mentale pour améliorer la qualité et la fiabilité de nos prédictions.</p>
<h2>Mais qu’est-ce, au juste, que l’imagerie mentale ?</h2>
<p>On peut analyser l’<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3545187/">imagerie mentale</a> selon deux points de vue : soit l’image est perçue (nos yeux perçoivent un chat et l’image se constitue dans notre cerveau) ; soit l’image est construite mentalement (nous ne voyons pas réellement un chat, nous l’imaginons en puisant dans notre mémoire les données relatives à la morphologie d’un chat).</p>
<p>Prenons le point de vue de l’image construite.</p>
<p>Une image peut soit s’être imposée d’elle-même, inconsciemment, sans que nous le voulions, ou elle peut avoir été volontairement générée par notre cerveau.</p>
<p>Nous générons sans cesse et volontairement des images mentales : des objets de toutes sortes dont nous voulons nous remémorer la forme ou le fonctionnement, des événements de la vie quotidienne, des souvenirs. Nous nous servons alors d’une région spécifique du cerveau, une cache visuelle.</p>
<p>Une fois que le cerveau a généré une image mentale, elle disparaît rapidement. Le temps moyen d’une image mentale n’est que de 250 ms, le temps d’un battement de paupières ! Cela suffit pourtant pour analyser l’image et au besoin la transformer. Même lorsque nous nous efforçons de conserver cette image en tête, elle finit par disparaître après quelques secondes.</p>
<p>Une fois générée et maintenue dans le champ de perception, une image est examinée et traitée : quelles sont ses caractéristiques géométriques, ses dimensions ? Quelle est la forme d’une oreille d’un chat ? Comment l’oreille se déforme-t-elle exactement lorsqu’un chat prête subitement attention à un bruit suspect ? D’autres régions du cerveau entrent en scène lorsqu’il s’agit d’analyser une portion d’une image en particulier, ou de scanner une image.</p>
<p>Une image peut ensuite être mentalement transformée à des fins créatives ou d’interprétation. Le cerveau peut la tourner sur elle-même, la modifier, en changer les formes et les couleurs. Le cerveau procède enfin à une synthèse des différentes composantes qui ont été modifiées en les assemblant de nouveau pour créer une image d’ensemble cohérente.</p>
<p>Enfin, l’imagerie mentale est aussi et surtout une expérience éminemment subjective. Nous reconstruisons intérieurement ce que nos sens nous suggèrent, en y ajoutant toutefois une note personnelle. Cette modulation s’effectue selon, par exemple, la clarté, la vivacité des images mentales, notre mémoire, notre pensée créatrice.</p>
<p>Nous avons donc à notre disposition tout un arsenal pour construire une image mentale forte et convaincante.</p>
<p>L’objectif étant de canaliser ces ressources pour construire une image cohérente et persuasive de l’histoire complète et détaillée du projet à venir. Un script mental suffisamment élaboré et constamment mis à jour de toutes les étapes et de tous les obstacles prévisibles du projet à mener à bien.</p>
<h2>Simulez vos projets pour les mener à bien !</h2>
<p>Ce script pourra ensuite servir de guide pour la simulation d’un projet et l’évaluation des obstacles à surmonter pour le mener à bien. Peut-être pourrions-nous ainsi pallier ainsi au défaut que nous avons de sous-estimer l’importance des obstacles que nous devons franchir pour réaliser un projet ?</p>
<p>Le système que j’ai développé pour le cours en ligne <a href="https://www.dessinezvotrefutur.com/">Dessinez votre futur</a> incorpore, entre autres, des méthodes d’anticipation basées sur ces recherches. J’ai très hâte de voir les résultats que nous obtiendrons, la première édition sera lancée sous peu, si vous souhaitez atteindre vos objectifs et aimez les expériences, cliquez ici pour être informé de la date de <a href="https://www.dessinezvotrefutur.com/">lancement</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/94612/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
L’anticipation vise à éliminer le plus possible l’incertitude inhérente à toute prise de décision.Sylvie Gendreau, Chargé de cours en créativité et innovation, Polytechnique MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/865342018-02-12T21:19:06Z2018-02-12T21:19:06ZL’entretien du « Moi » !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/205844/original/file-20180211-51700-l21sy3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Moi, émoi.</span> <span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p><em>Cette chronique est dans la droite ligne et se nourrit des recherches et rencontres publiées sur mon site <a href="http://www.cahiersdelimaginaire.com/votrelaboratoirecreatif-sylviegendreau/">Les cahiers de l’imaginaire</a></em>.</p>
<hr>
<p>Je poursuis dans la même veine que la semaine dernière, <a href="https://theconversation.com/prendre-soin-de-sa-memoire-et-de-ses-emotions-91217">« Prendre soin de sa mémoire et de ses émotions »</a>. Je sais, parfois j’enfonce le clou. Mais, je trouve important de rappeler qu’il existe des solutions simples, qui coûtent peu, pour prendre soin de soi et de ceux qu’on aime. De petites habitudes qui peuvent changer une vie !</p>
<p>Les problèmes de santé mentale ne cessent d’augmenter dans notre société, et il semblerait que des personnes de plus en plus jeunes soient concernées. Des adolescents développent une addiction à de lourds psychotropes qui font basculer leur vie à jamais. Comment, chacun d’entre nous, peut-il lutter contre ce fléau ?</p>
<p>Des habitudes de vie saines : le sommeil, l’alimentation, le sport, la pratique de la méditation pour garder le stress à distance autant que possible. Mais aussi des <a href="http://bit.ly/2EAegfa">auto-analyse</a> de qui nous sommes !</p>
<h2>Qu’est-ce qui constitue notre identité ?</h2>
<p>Le corps comme tel, en tant qu’entité biologique, n’est pas en mesure de nous fournir une réponse suffisante, puisque nos cellules sont constamment renouvelées. Si notre corps ne constitue pas, à lui seul, les fondements de notre moi, vers qui ou vers quoi se tourner ?</p>
<p>Le moi, selon le professeur de neurologie, neurosciences et de psychologie <a href="http://bit.ly/2sqhVHt">Antonion Damasio</a>, est difficile à cerner. En tant que construction neuronale, le moi correspond à une représentation composite de ce que notre cerveau perçoit de notre corps. Toujours selon Damasio, cette perception est reflétée dans des <a href="http://bit.ly/2nUI8cR">cartes somatiques</a> à l’intérieur de notre système nerveux central. Une partie des signaux externes qui sont à l’origine de ces cartes sont ensuite modifiés par nos émotions. Une autre partie, les signaux internes, sont issus de stimulations internes en provenance d’autres régions du système nerveux.</p>
<p><a href="http://bit.ly/2H80HlR">Paul Audi</a>, philosophe, interviewé par Étienne Klein, interprète le moi de manière différente et se positionne plutôt dans une problématique affective.</p>
<p>Selon Audi, la création et la subjectivité sont à la base de la définition de l’humain. Le soi et le moi constituent un tandem dynamique, une polarité qui est constamment à l’œuvre. Le soi renvoie à l’individu, à sa distinction, à la conscience qu’il a de lui-même. Il n’y a pas de Moi sans la dictée d’un Soi.</p>
<h2>Il n’y a pas d’émoi sans corps !</h2>
<p>Audi va plus loin en rappelant qu’il n’y a pas d’émoi sans corps. Le corps trouve son unité dans ce qui s’éprouve soi-même. Mais alors comment le moi se transporte-t-il à travers le temps ?</p>
<p>Le moi trouve son identité dans un effort de comparaison entre ce qu’il est et ce qu’il pense avoir été. Par conséquent, le moi est le fruit d’une histoire, mais c’est une histoire très particulière : une série ininterrompue d’autotransformations des affects les uns dans les autres.</p>
<p>Afin de cerner ce qui constitue véritablement le moi, il faut sans cesse chercher les traces de ces transformations dans une narration, dans un récit. Et c’est vers les épreuves qu’il faut se tourner pour appréhender les maillons d’une toile qui est la fabrique du moi.</p>
<p>Un chercheur australien, <a href="http://bit.ly/2EkPlNp">James Allebone</a>, s’est penché dernièrement sur l’impact des crises chroniques d’épilepsie sur la perception qu’a un individu de son moi. Les résultats confirment ce dont les épileptiques se plaignent : pendant et après les périodes de crise, des troubles de dépersonnalisation, de dissociation et de modifications de leur personnalité se manifestent. Pendant l’adolescence en particulier, des crises fréquentes sont associées au développement de traits de la personnalité névrotique. Ils peuvent provoquer des altérations sévères dans le processus de la construction du moi.</p>
<p>Allebone souligne qu’il en est de même lorsqu’un individu présente une déficience de mémoire autobiographique. La mémoire autobiographique est un sous-ensemble de la mémoire épisodique. Ce sont des mémoires essentielles à la construction du moi car elle contribue à façonner l’histoire personnelle d’un individu. Les souvenirs y sont créés de manière automatique, même s’ils peuvent être ultérieurement modifiés par le raisonnement ou amplifiés par l’ajout de quantités d’informations supplémentaires. Les perturbations de ces mémoires chamboulent elles aussi l’architecture du moi et peuvent la compromettre.</p>
<p>Au cours de l’entretien (Audi–Klein), une citation de Beckett vient renforcer l’image insaisissable et louvoyante du moi : « L’individu est une succession d’individus. »</p>
<h2>Sans épreuves pas de moi !</h2>
<p>Le parcours dont il importe de retracer l’histoire est d’abord et avant tout une succession d’épreuves. Dans un carnet du moi, il faut sans cesse se poser la question : à partir de qui nous sommes-nous transformés ? Nous devons nous poser cette question à chaque étape cruciale de notre vie.</p>
<p>Ce qui nous désigne est aussi ce qui nous assigne. Par conséquent, pour devenir pleinement soi-même, il ne faut non pas tuer le père, rappelle Audi, mais tuer le fils qui réside en soi et auquel on s’identifie toujours. Pour se libérer, quoi que nous fassions, il faut refuser parfois les rôles qu’on nous assigne.</p>
<p>Ainsi se dessinent les lignes de force qui agissent constamment en nous. Nous butons sur nous-mêmes. Et une tension très forte se crée entre l’acceptation et la négation de soi. Il se forme ainsi, en nous, un plan invisible, un théâtre dans lequel se disputent ce que nous répudions et ce que nous voulons être.</p>
<p>D’où l’importance de suivre ce combat à la trace, car il incarne le véritable moi, le moi historique, ballotté par d’incessants coups de vent. L’autobiographie doit être constamment réécrite.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/205849/original/file-20180211-51703-1v3jh4s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/205849/original/file-20180211-51703-1v3jh4s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/205849/original/file-20180211-51703-1v3jh4s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/205849/original/file-20180211-51703-1v3jh4s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/205849/original/file-20180211-51703-1v3jh4s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/205849/original/file-20180211-51703-1v3jh4s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/205849/original/file-20180211-51703-1v3jh4s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Derrière les coups de vent.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pexels</span></span>
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<p>Une <a href="https://www.jstage.jst.go.jp/article/jjdp/26/1/26_70/_article/-char/en">étude</a> a récemment été menée au Japon auprès de plus de 200 participants.</p>
<p>Les participants devaient se rappeler des souvenirs autobiographiques et leur assigner une cote en fonction de différents paramètres : clarté et vivacité des souvenirs répertoriés, le degré d’importance que les participants eux-mêmes leur attribuaient, ainsi que la mesure selon laquelle les événements rappelés occupaient une place prépondérante dans leur vie quotidienne.</p>
<p>Les participants ont ensuite été divisés en deux groupes selon l’importance accordée à leurs souvenirs autobiographiques.</p>
<p>Ceux qui ont noté leurs souvenirs autobiographiques avec les niveaux d’importance les plus élevés sont ceux qui ont obtenu les scores les plus élevés dans les tests d’identité (<a href="http://bit.ly/2G5TBwO">Identity Scale</a> : série de questions visant à cerner les différents aspects de l’identité d’un individu). Chez eux, le moi, leur identité, est plus structuré, plus affirmé que chez les autres participants. De plus, leurs souvenirs sont plus vivaces, plus détaillés. Surtout, ces souvenirs sont plus souvent associés (par rapport au groupe de contrôle) à des actions structurantes, des réalisations positives.</p>
<p>Le chercheur conclut sur l’importance de l’autobiographie pour façonner le moi et le consolider. Pour ma part, je soulignerais également qu’écrire son autobiographie est essentiel pour développer sa créativité. Le modèle entre tous étant bien sûr, Marcel Proust.</p>
<p>Donc, à nos carnets du Moi, tous ! Et si ces sujets vous intéressent, je vous invite à mon webinaire, <a href="https://www.getdrip.com/forms/262930217/submissions/new">« 7 étapes pour réussir sa vie et ses projets »</a> le 14 février. Pour la Saint-Valentin commencer par s’aimer soi, c’est déjà pas mal. Et c’est souvent la meilleure façon d’apprendre, ensuite, à mieux aimer les autres.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/86534/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
Le moi trouve son identité dans un effort de comparaison entre ce qu’il est et ce qu’il pense avoir été.Sylvie Gendreau, Chargé de cours en créativité et innovation, Polytechnique MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.