tag:theconversation.com,2011:/fr/topics/sante-20135/articlessanté – The Conversation2024-03-25T16:39:00Ztag:theconversation.com,2011:article/2265272024-03-25T16:39:00Z2024-03-25T16:39:00ZKate Middleton suit une « chimiothérapie préventive » contre le cancer. Qu’est-ce que cela veut dire ?<p>Catherine Middleton, dite Kate Middleton, princesse de Galles et épouse du prince William, héritier du Royaume-Uni, a mis un terme la semaine dernière aux spéculations concernant sa santé, en annonçant souffrir d’un cancer. Dans une vidéo de deux minutes destinées à remercier ses abonnés sur les réseaux sociaux pour leurs messages de soutien, la princesse a expliqué que « les analyses effectuées après l’opération [de chirurgie abdominale] ont révélé la présence d’un cancer. »</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1771237869509644455"}"></div></p>
<p>« Mes conseillers médicaux m’ont recommandé d’entamer une chimiothérapie préventive, dont les premières étapes ont commencé. », ajoute-t-elle. Aucun autre détail n’a été communiqué concernant le traitement en cours.</p>
<p>Que signifie « chimiothérapie préventive » ? Dans quel contexte ce type de prise en charge peut-il s’avérer efficace ? Voici ce que nous pouvons en dire.</p>
<h2>Il ne s’agit pas d’un remède contre le cancer</h2>
<p>Il est désormais scientifiquement bien établi qu’adopter un certain mode de vie permet de <a href="https://www.e-cancer.fr/Comprendre-prevenir-depister/Reduire-les-risques-de-cancer">limiter le risque de survenue de cancers</a>. Faire du sport, adopter un régime alimentaire sain, se protéger du soleil… toutes ces actions ont fait montre de leurs bénéfices.</p>
<p>Dans des cas très spécifiques, l’administration de certains médicaments peut aussi être envisagée. C’est par exemple le cas du tamoxifène, qui bloque les récepteurs aux œstrogènes dont sont pourvues certaines cellules cancéreuses. Cette molécule peut être administrée aux patientes dont le risque de <a href="https://www.inserm.fr/actualite/cancer-du-sein-une-piste-pour-bloquer-la-formation-de-metastases/">cancer du sein</a> est très élevé.</p>
<p>Les travaux évaluent également l’intérêt de <a href="https://www.cancer.gov/about-cancer/causes-prevention/research/aspirin-cancer-risk">l’aspirine pour les personnes à haut risque de développer un cancer du côlon</a> ou certains autres cancers.</p>
<p>Toutefois, dans le cas présent, il ne s’agit pas de ce type de thérapie.</p>
<h2>En quoi une chimiothérapie peut-elle être préventive ?</h2>
<p>Dans le contexte de la prise en charge d’un cancer déclaré, la chimiothérapie préventive se réfère à l’administration de médicaments anticancéreux après suppression des cellules cancéreuses. L’objectif est d’empêcher la maladie de se réinstaller.</p>
<p>Il faut savoir que lorsqu’un cancer est localisé, autrement dit limité à une région donnée du corps, et que l’imagerie (scanner) n’a pas mis en évidence de propagation à d’autres sites, il est possible de venir à bout de la maladie grâce à des traitements tels que la chirurgie ou la radiothérapie.</p>
<p>En revanche, si la maladie a été détectée après qu’elle se soit propagée à d’autres parties du corps, les cliniciens optent pour des traitements <a href="https://www.healthline.com/health/cancer/metastatic-cancer">qui vont circuler dans l’ensemble de l’organisme</a>. C’est le cas des chimiothérapies (médicaments anticancer), des traitements hormonaux, ou des immunothérapies.</p>
<p>Les chimiothérapies peuvent également être utilisées via une autre approche, qui consiste à les administrer avant ou après une chirurgie ou une radiothérapie. L’idée est alors <a href="https://www.verywellhealth.com/adjuvant-therapy-5198903">d’empêcher le cancer initial de revenir</a>. En effet, si la chirurgie peut permettre d’éliminer l’intégralité des cellules cancéreuses, il peut aussi arriver dans certains cas que des cellules aient pu passer dans la circulation sanguine et ainsi s’installer dans d’autres endroits du corps.</p>
<p>Administrer une chimiothérapie avant ou après la chirurgie ou la radiothérapie permet de tuer ces cellules et de limiter le risque de retour du cancer.</p>
<p>L’efficacité de cette approche a été prouvée grâce à des essais cliniques. Le taux de rechute et la survie de patients ayant subi uniquement une chirurgie ont été comparés à ceux de patients ayant subi une chirurgie puis une chimiothérapie (lorsque la chimiothérapie est administrée administrée après l’acte chirurgical, on parle de <a href="https://www.e-cancer.fr/Patients-et-proches/Les-cancers/Cancer-du-sein/Chimiotherapie">chimiothérapie adjuvante</a>). Les résultats ont montré que dans le second cas les patients étaient moins sujets aux rechutes et survivaient plus longtemps.</p>
<h2>Quelle est l’efficacité de la chimiothérapie préventive ?</h2>
<p>L’efficacité de cette approche dépend du type de cancer et du type de chimiothérapie administrée.</p>
<p>Dans le cas du cancer du côlon, considéré comme à haut risque de récidive après une chirurgie (en raison soit de son étendue soit de cette dissémination aux ganglions lymphatiques), la première chimiothérapie testée <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7564362/">avait augmenté le taux de survie à 5 ans de 15 %</a>. Dans le cas de l’administration de chimiothérapie plus intensive, les chances de survie à six ans approchent les 80 %.</p>
<p>On administre généralement ce genre de chimiothérapie pendant une durée de trois à six mois.</p>
<h2>Comment fonctionne la chimiothérapie ?</h2>
<p>Un grand nombre de médicaments utilisés en chimiothérapie empêche la division des cellules cancéreuses en s’attaquant à leur ADN (le matériel génétique situé dans leur noyau). Pour améliorer leur efficacité, les médicaments ciblant différents sites cellulaires peuvent être combinés.</p>
<p>La chimiothérapie n’est pas sélective, autrement dit elle ne s’attaque pas uniquement aux cellules cancéreuses : elle tue toutes les cellules qui se divisent.</p>
<p>Cependant, dans le cas du cancer, les tissus anormaux contiennent une proportion plus élevée de cellules en division que le reste du corps. Cela signifie qu’à chaque cycle de chimiothérapie une <a href="https://www.e-cancer.fr/Patients-et-proches/Se-faire-soigner/Traitements/Chimiotherapie/Qu-est-ce-que-la-chimiotherapie">proportion plus importante de cellules cancéreuses est éliminée</a> (en regard des dommages collatéraux subis par les cellules saines).</p>
<p>Les tissus normaux peuvent en outre « récupérer » entre deux cycles.</p>
<h2>Quels sont les effets secondaires des chimiothérapies ?</h2>
<p>Les <a href="https://www.e-cancer.fr/Patients-et-proches/Les-cancers/Cancer-de-l-endometre/Chimiotherapie/Les-effets-secondaires">effets secondaires des chimiothérapies</a> sont généralement réversibles, et se font sentir dans les parties du corps où les cellules se renouvellent le plus.</p>
<p>Les chimiothérapies perturbent par exemple la production des cellules sanguines. Or, lorsque la quantité de globules blancs est basse, le risque d’infection augmente. La mort des cellules qui compose la paroi de l’intestin se traduit quant à elle par des aphtes, des nausées, des vomissements et des troubles intestinaux. Certains médicaments parfois administrés pendant la chimiothérapie peuvent aussi s’attaquer à d’autres organes, provoquant par exemple un engourdissement des mains et des pieds.</p>
<p>Les chimiothérapies génèrent également des symptômes généralisés, tels que la <a href="https://www.e-cancer.fr/Patients-et-proches/Les-cancers/Cancer-de-l-endometre/Chimiotherapie/Les-effets-secondaires#toc-fatigue">fatigue</a>.</p>
<p>Étant donné que la chimiothérapie préventive est administrée après que toute trace de cancer a été éliminée par un acte de chirurgie locale, les patients peuvent généralement reprendre leurs activités dans les semaines qui suivent la fin du dernier cycle de traitement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/226527/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ian Olver est financé par le Conseil australien de la recherche.</span></em></p>La princesse de Galles a annoncé souffrir d’un cancer dont la prise en charge nécessite l’administration d’une « chimiothérapie préventive ». De quoi s’agit-il ?Ian Olver, Adjunct Professsor, School of Psychology, Faculty of Health and Medical Sciences, University of AdelaideLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2258252024-03-25T16:34:35Z2024-03-25T16:34:35ZGérer autrement notre système de santé : les acteurs du secteur incités, mais insuffisamment formés<p>Raisons budgétaires, manque de personnel, évolution des pratiques médicales… Les 2976 hôpitaux publics et privés français ont fait l’objet de la <a href="https://www.vie-publique.fr/en-bref/292502-hopitaux-et-cliniques-les-chiffres-cles-de-lannee-2022">fermeture de près de 40 000 lits d’hospitalisation complète en 10 ans</a>. Des dizaines de petits hôpitaux ont fermé, tout comme des maternités et des services hospitaliers mal équipés ou déficitaires. En parallèle, le nombre de places d’hospitalisation a progressé de près de 2 % grâce notamment à l’hospitalisation partielle et à l’hospitalisation à domicile, en hausse de 16 % entre fin 2019 et fin 2020 pour atteindre <a href="https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/feuille-de-route-had-2022-05-01-2.pdf#page=5">240 000 séjours</a>. La moitié seulement de cette hausse s’explique par le coronavirus. Si la courbe s’est <a href="https://www.fnehad.fr/wp-content/uploads/2023/04/MOP-3015.pdf">infléchie en 2021</a>, les pouvoirs publics se sont donné pour feuille de route de <a href="https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/feuille-de-route-had-2022-05-01-2.pdf#page=7">développer</a> plus encore cette approche des soins.</p>
<p>Avec pareilles évolutions, l’organisation des soins mobilise de multiples intervenants professionnels rendant leur coordination essentielle. L’<a href="https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/feuille-de-route-had-2022-05-01-2.pdf#page=23">injonction</a> à cela de la part des pouvoirs publics semble de plus en plus forte au moment où le système de <a href="https://theconversation.com/topics/sante-20135">santé</a> doit faire face à d’importantes contraintes comme le <a href="https://theconversation.com/la-population-de-la-france-va-t-elle-diminuer-suite-a-la-baisse-de-la-natalite-222790">vieillissement de la population</a>, l’<a href="https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/communique-de-presse/mieux-connaitre-et-evaluer-la-prise-en-charge-des-maladies-chroniques">augmentation des maladies chroniques</a> et l’importance de contenir le déficit de l’assurance maladie qui pourrait <a href="https://www.latribune.fr/economie/france/a-8-8-milliards-d-euros-le-deficit-de-la-securite-sociale-va-doubler-d-ici-trois-ans-977591.html">doubler d’ici trois ans</a>.</p>
<p>Plusieurs acteurs du système de santé ont déjà intégré dans leurs pratiques une fonction de <a href="https://theconversation.com/topics/organisation-21871">coordination</a>. En complément des professionnels de santé intervenant à domicile se développent également des dispositifs d’appui à la coordination (<a href="https://sante.gouv.fr/systeme-de-sante/structures-de-soins/les-dispositifs-d-appui-a-la-coordination-dac/">DAC</a>) ou des communautés professionnelles territoriales de santé (<a href="https://sante.gouv.fr/systeme-de-sante/structures-de-soins/les-communautes-professionnelles-territoriales-de-sante-cpts/">CPTS</a>). L’organisation de ce système dense semble néanmoins <a href="https://serval.unil.ch/resource/serval:BIB_276592407385.P001/REF.pdf">difficile car il paraît peu lisible</a>. Il reste par ailleurs <a href="https://sante.gouv.fr/systeme-de-sante/systeme-de-sante/strategie-de-transformation-du-systeme-de-sante/">cloisonné</a> avec notamment la persistance de frontières entre les soins de ville et hospitaliers, entre les professionnels médicaux, paramédicaux et sociaux.</p>
<h2>Cinq ans d’expérimentation</h2>
<p>Pour en sortir, les pouvoirs publics tentent de mettre en place une législation favorable, à l’innovation. Celle-ci peut certes être technologique ou thérapeutique, mais aussi organisationnelle. L’<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/article_jo/JORFARTI000036339172">article 51</a> de la loi de Finances de la Sécurité sociale 2018 (LFSS 2018) visait notamment à permettre aux acteurs de la santé, peu formés au management, à s’approprier la notion de « projet ».</p>
<p>Ce dispositif réglementaire autorisait pour les cinq années suivantes à expérimenter de nouvelles organisations grâce à des modes de financement qui n’étaient, jusqu’à présent, pas utilisés. Il s’agit par exemple des <a href="https://sante.gouv.fr/systeme-de-sante/parcours-des-patients-et-des-usagers/article-51-lfss-2018-innovations-organisationnelles-pour-la-transformation-du/les-experimentations/article/experimentation-d-une-incitation-a-une-prise-en-charge-partagee-ipep">incitations à une prise en charge partagée</a> (IPEP) : un intéressement versé à des professionnels qui se constituent une patientèle commune pour une meilleure coordination et prise en charge.</p>
<p>On retrouve également le <a href="https://sante.gouv.fr/systeme-de-sante/parcours-des-patients-et-des-usagers/article-51-lfss-2018-innovations-organisationnelles-pour-la-transformation-du/les-experimentations/article/experimentation-d-un-paiement-en-equipe-de-professionnels-de-sante-en-ville">paiement en équipe de professionnels de santé en ville</a> (Peps), qui, dans une même logique de coordination, vise à remplacer le paiement à l’acte par une rémunération collective.</p>
<p>L’objectif était notamment, d’après la loi, de « permettre l’émergence d’organisations innovantes dans les secteurs sanitaire et médico-social concourant à l’amélioration de la prise en charge et du parcours des patients, de l’efficience du système de santé et de l’accès aux soins ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1764055240679080270"}"></div></p>
<p>Près de mille projets ont été déposés sur les plates-formes régionales et nationale et plus de cent ont été autorisés à être expérimentés, regroupant au total un <a href="https://sante.gouv.fr/systeme-de-sante/parcours-des-patients-et-des-usagers/article-51-lfss-2018-innovations-organisationnelles-pour-la-transformation-du/les-rendez-vous-de-l-article-51/article/journee-nationale-des-porteurs-de-projet-23-novembre-2023">million de patients</a>. L’article 51 de la LFSS 2018 marque ainsi une <a href="https://www.cairn.info/revue-les-tribunes-de-la-sante-2020-1-page-35.htm?ref=doi">rupture nette</a> avec les tentatives précédentes d’amélioration des prises en charge du fait d’une plus grande souplesse, d’une rapidité des procédures accrue et d’un dispositif législatif davantage ouvert aux acteurs de santé.</p>
<h2>Aligner les motivations</h2>
<p>Nos <a href="https://www.theses.fr/2023PAUU2132">travaux de recherche</a> ont suivi certaines de ces expériences et mettent en avant leur potentiel transformatif. Observant succès et échecs, ils donnent également quelques clefs pour permettre de les mettre au mieux en œuvre.</p>
<p>Deux projets en Nouvelle-Aquitaine ont particulièrement été suivis, avec des fortunes diverses : un projet A, porté par un hôpital public et qui a échoué dans sa mise en œuvre, et un projet B, lancé par un Groupement de coopération sanitaire, qui, lui, a connu une réussite. Chacun reposait sur une innovation organisationnelle, de financement et technologique avec le développement d’interfaces numériques.</p>
<p>Le premier consiste à prendre en charge de manière coordonnée des patients qui souffrent de maladies inflammatoires chroniques. Il est porté par quatre médecins hospitaliers. Le second consiste à prendre en charge de manière coordonnée des patients pour des chirurgies orthopédiques. Ce projet est porté par un médecin militaire.</p>
<p>Le premier élément clé qui peut rendre compte de l’échec du projet A a trait aux motivations. Qu’elles soient collectives ou individuelles, elles restent le socle d’un projet innovant. L’enjeu est de les aligner et de faire adhérer les acteurs aux valeurs et à la culture de l’organisation. Que tout le monde, en somme, soit sur la même longueur d’onde. Or, les porteurs du projet A semblaient aussi animés par des motivations individuelles qui ont freiné l’élan collectif. Un personnel de l’Agence régionale de santé (ARS) Nouvelle-Aquitaine nous a ainsi confié :</p>
<blockquote>
<p>« Ce sont des porteurs qui aiment être devant. Il y a, quoi qu’on en dise, une volonté d’attirer la lumière. C’est positif pour faire naître des projets ; la preuve ils ont répondu à l’appel à manifestation d’intérêt. Mais lorsqu’il s’agit de les décliner, les choses deviennent plus compliquées. »</p>
</blockquote>
<h2>Apprendre à gérer</h2>
<p>Porter un projet et faire naître des coordinations nouvelles appelle en outre des compétences managériales particulières. Le financement et la gestion de budget, tout d’abord, représentent la condition <em>sine qua non</em> de l’amorçage des projets. Sans financement, pas de projet et sans maîtrise des outils de gestion, pas de mise en œuvre. Au-delà, la maîtrise des interactions humaines (gestion des conflits, résistance au changement…) doit être développée. Un pilotage de projet et des évaluations régulières sont également nécessaires pour garantir des avancées. Cela limite par ailleurs les risques d’exposition médiatique.</p>
<p>L’ARS relevait sans nuance pour le projet B, celui qui a réussi, le point suivant :</p>
<blockquote>
<p>« Clairement, depuis le début, il y a une maîtrise de tous les éléments qui sont nécessaires au bon déroulement du projet. Le porteur est en réalité un manager qui a un sens humain très fort et une connaissance globale du système ».</p>
</blockquote>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1766823677914472915"}"></div></p>
<p>La nouveauté se heurte par ailleurs bien souvent à une résistance au changement que nous avons pu observer notamment de la part de certains médecins hospitaliers. L’« hospitalocentrisme » reste assez marqué dans les mentalités. Dans la même veine, les conflits persistants entre les parties prenantes du projet A ont sans doute figé le projet avec un non-déploiement malgré le fort potentiel. Un des porteurs déplore :</p>
<blockquote>
<p>« Les conflits l’emportent sur le sens et la dynamique commune. Pourtant je peux vous dire que ce projet avait tout pour réussir et on a mis le paquet… »</p>
</blockquote>
<p>Face à cet enjeu, les tutelles comme l’ARS peuvent apporter une aide précieuse. Le dispositif article 51, dans son essence même, incite les acteurs de santé à travailler de manière coordonnée et facilite la conduite et le déploiement des projets grâce à l’accompagnement prévu et aux financements alloués.</p>
<p>Reste que, comme nous le montrons, ces éléments s’avèrent nécessaires mais non suffisants. Les professionnels de santé qui portent les projets doivent être formés aux outils et méthodes du projet sans oublier la dimension de management des ressources humaines. Leurs tutelles semblent, en la matière, avoir un rôle à asseoir pour notamment rappeler aux porteurs de projet le cadre des dispositifs afin d’éviter les risques de non-déploiement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225825/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cécile Dezest a reçu des financements de ARS NA-CDAPPB. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Emmanuelle Cargnello et Isabelle Franchisteguy-Couloume ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>La Loi de Finances de la Sécurité sociale 2018 ouvrait la voie à de nouvelles expérimentations pour organiser notre système de soins. Une recherche en dresse un premier bilan.Cécile Dezest, Docteure en sciences de Gestion, Université de Pau et des pays de l'Adour (UPPA)Emmanuelle Cargnello, Professeur des universités en sciences de gestion, IAE Pau-BayonneIsabelle Franchisteguy-Couloume, Maître de conférences - Habilitée à Diriger les Recherches en sciences de gestion, Université de Pau et des pays de l'Adour (UPPA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2212022024-03-25T13:47:48Z2024-03-25T13:47:48ZEt si avoir des pieds plats était… normal ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/582329/original/file-20240316-24-z9ht8m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C2%2C985%2C663&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Au fil des années jusqu'à aujourd'hui, de nombreux professionnels de la santé continuent de soutenir la théorie selon laquelle avoir les pieds plats est un facteur de risque majeur pour les troubles musculosquelettiques. </span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>L’idée selon laquelle les personnes ayant les pieds plats sont plus sujettes à développer divers problèmes a été largement répandue parmi les chercheurs, les professionnels de la santé et la population générale pendant de nombreuses décennies, voire des siècles.</p>
<p>Plus précisément, il était reconnu que d’avoir des pieds plats constituait une prédisposition future à des douleurs et autres problèmes musculosquelettiques (c’est-à-dire aux muscles, tendons et/ou ligaments).</p>
<p>Une sorte de bombe à retardement.</p>
<p>Or, dans un <a href="https://bjsm.bmj.com/content/57/24/1536">éditorial récent</a> publié par mon équipe de recherche dans le <em>British Journal of Sports Medicine</em>, nous remettons en question ce mythe. Nous y démontrons que la théorie selon laquelle avoir des pieds plats conduit inévitablement à des douleurs ou à d’autres problèmes musculosquelettiques est infondée.</p>
<p>Chercheur en médecine podiatrique à l’Université du Québec à Trois-Rivières, j’étayerai ici les faits saillants de notre étude.</p>
<h2>D’où cette théorie provient-elle ?</h2>
<p>L’idée que les pieds plats posent problème remonte à plusieurs siècles.</p>
<p>Elle a été ravivée dans la seconde moitié du XX<sup>e</sup> siècle par des podiatres américains, <a href="https://books.google.ca/books/about/Normal_and_Abnormal_Function_of_the_Foot.html?id=CI-KQgAACAAJ&redir_esc=y">Merton L. Root, William P. Orien et John H. Weed</a>, qui ont popularisé le concept de pieds « idéaux » ou « normaux ».</p>
<p>Ces cliniciens-chercheurs ont avancé que les pieds ne répondant pas à des critères spécifiques de normalité (par exemple, une arche plantaire bien définie, un talon droit et aligné avec le tibia) étaient considérés comme anormaux, moins performants et plus enclins aux blessures en raison de multiples compensations biomécaniques, telles qu’un affaissement plus important du pied lors de la marche.</p>
<p>Cette théorie est devenue centrale dans les programmes éducatifs des professionnels de la santé, bien qu’elle disparaisse progressivement avec la mise à jour des cursus modernes. Elle a toutefois été enseignée pendant près de cinq décennies à travers le monde, et ce, même si les fondements scientifiques étaient faibles. En fait, la science n’a jamais validé cette théorie, la laissant toujours au stade d’hypothèse.</p>
<p>Au fil des années jusqu’à aujourd’hui, de nombreux professionnels de la santé continuent de soutenir la théorie selon laquelle avoir les pieds plats est un facteur de risque majeur pour les troubles musculosquelettiques.</p>
<p>Conséquemment, cette idée est encore solidement ancrée dans les croyances de la population générale.</p>
<h2>Est-ce que pieds plats riment avec blessures musculosquelettiques ?</h2>
<p>Contrairement à la proposition de <a href="https://books.google.ca/books/about/Normal_and_Abnormal_Function_of_the_Foot.html?id=CI-KQgAACAAJ&redir_esc=y">Root et ses collègues</a>, des méta-analyses, le plus haut niveau d’évidence scientifique, ont révélé une absence de risque accru de développer la grande majorité des blessures musculosquelettiques chez les personnes avec des pieds plats.</p>
<p>Ces <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1186/s13047-014-0055-4">méta-analyses</a> ont seulement identifié des liens faibles entre avoir des pieds plats et le risque de développer un syndrome de stress tibial médial (douleurs au niveau du tibia), un syndrome fémoro-patellaire (douleurs autour de la rotule), ainsi que des blessures non spécifiques de surutilisation des membres inférieurs.</p>
<p>C’est tout.</p>
<p>Par ailleurs, une <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s40279-019-01110-z">revue systématique</a> et une <a href="https://sportsmedicine-open.springeropen.com/articles/10.1186/s40798-022-00416-z">méta-analyse</a> ont conclu que les coureurs avec les pieds plats ne sont pas plus à risque de se blesser que ceux avec des pieds plus droits.</p>
<p>Ces analyses remettent en question l’idée selon laquelle les pieds plats constituent un risque substantiel pour les troubles musculosquelettiques.</p>
<p>Cependant, malgré ces conclusions, diverses sources telles que la littérature grise, les sites Web professionnels, les forums et d’autres médias, laissent souvent entendre que les pieds plats présentent un risque élevé de blessure, voire nécessitent un traitement, même en l’absence de symptômes.</p>
<p>Malheureusement, cette situation conduit fréquemment à des interventions inutiles, telles que l’utilisation de chaussures orthopédiques ou d’orthèses plantaires sur mesure pour des pieds plats asymptomatiques, suscitant également d’importantes préoccupations chez les patients quant à l’apparence de leurs pieds.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/583293/original/file-20240321-16-al3tgo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="goupe de personnes qui courent" src="https://images.theconversation.com/files/583293/original/file-20240321-16-al3tgo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/583293/original/file-20240321-16-al3tgo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/583293/original/file-20240321-16-al3tgo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/583293/original/file-20240321-16-al3tgo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/583293/original/file-20240321-16-al3tgo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/583293/original/file-20240321-16-al3tgo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/583293/original/file-20240321-16-al3tgo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les coureurs avec les pieds plats ne sont pas plus à risque de se blesser que ceux avec des pieds plus droits.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Remettre les pendules à l’heure</h2>
<p>Les pieds plats asymptomatiques ne nécessitent généralement pas l’intervention des professionnels de la santé. Selon les connaissances scientifiques actuelles, évaluer si une personne a les pieds plats pour déterminer son risque de blessure est inefficace et contre-productif.</p>
<p>Par contre, il est possible qu’une personne ayant les pieds plats développe une blessure musculosquelettique. Cela ne signifie pas nécessairement que les pieds plats ont causé la blessure.</p>
<p>Il est tout à fait possible que deux variables soient présentes en même temps sans qu’il y ait pour autant un lien de cause à effet. Il y a une différence importante entre un lien de cause à effet et une corrélation. Un lien de cause à effet implique qu’un changement dans une variable (la cause) entraîne un changement dans une autre variable (l’effet). Lorsque deux variables sont corrélées, des changements dans une variable peuvent être associés à des changements dans l’autre variable, mais cela ne signifie pas que l’une cause l’autre.</p>
<p>Prenons l’exemple suivant pour mieux illustrer le concept : nous soumettons 500 enfants âgés de 6 à 12 ans au même examen de mathématiques. En effectuant des tests de corrélation, nous constatons une tendance : plus les enfants ont de grands pieds, plus leur note finale à l’examen est élevée.</p>
<p>Cela soulève la question : est-ce que la taille des pieds influence réellement les compétences en mathématiques ? Bien sûr que non !</p>
<p>Une autre variable, non prise en compte, joue un rôle majeur dans cette corrélation : l’âge ! Comme les pieds grandissent en vieillissant, nous observons une corrélation forte mais inappropriée !</p>
<p>Le même principe s’applique aux pieds plats. Si une blessure musculosquelettique survient chez une personne aux pieds plats, les recherches actuelles indiquent que ces derniers ne sont pas nécessairement en cause, et d’autres facteurs doivent être explorés.</p>
<p>Il s’agit d’un lien de corrélation et non de cause à effet.</p>
<h2>Réduisons le surdiagnostic dans les soins de santé</h2>
<p>La réduction du surdiagnostic dans les soins de santé est devenue cruciale. Ce phénomène, défini comme le diagnostic d’une condition qui n’apporte aucun bénéfice net à l’individu, constitue un fardeau mondial entraînant des effets néfastes potentiels sur les plans <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(16)32585-5/abstract">physique</a>, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1836955317300164">psychologique et financier</a> des patients.</p>
<p>Sur le plan financier, il est facile de comprendre que la prescription d’orthèses plantaires sur mesure à plusieurs centaines de dollars pour prévenir les blessures musculosquelettiques associées aux pieds plats asymptomatiques a un impact négatif substantiel. Surtout dans l’optique où la présence de pieds plats n’augmente que très peu le risque de développer ces blessures.</p>
<p>Pour résoudre ce problème, les professionnels de la santé doivent contribuer à réduire le surdiagnostic des pieds plats en établissant une distinction plus claire pour leurs patients entre les variantes anatomiques inoffensives et les conditions potentiellement préoccupantes.</p>
<p>Étant donné que le surdiagnostic entraîne souvent un surtraitement, éviter les traitements non nécessaires contribuera à apaiser les inquiétudes des patients concernant leurs pieds plats.</p>
<p>Finalement, il est impératif d’abandonner l’idée dépassée, encore trop souvent répandue, selon laquelle avoir les pieds plats pose problème et expose les individus à un risque élevé de blessures musculosquelettiques. Il est temps de changer notre perspective et notre approche concernant l’importance des pieds plats, en reconnaissant leur diversité naturelle dans le contexte de la santé globale des pieds.</p>
<p>Mais surtout, il est temps de considérer les pieds plats asymptomatiques pour ce qu’ils sont… une simple variante anatomique !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221202/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gabriel Moisan est membre de l'Ordre des Podiatres du Québec. Il a reçu des financements du conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), des Amputés de Guerre du Canada et du réseau provincial de recherche en adaptation-réadaptation (REPAR).</span></em></p>Avoir des pieds plats asymptomatiques n’est pas problématique et ne nécessite pas de traitement. Il y a un besoin important de déboulonner ce mythe important.Gabriel Moisan, Professeur, Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2260382024-03-19T16:57:11Z2024-03-19T16:57:11ZMénopause : quels sont les symptômes les plus courants, et comment les prendre en charge ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/582478/original/file-20240313-30-p6p9n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C151%2C7772%2C5041&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/menopausal-mature-woman-having-hot-flush-2281774401">Shutterstock/SpeedKingz</a></span></figcaption></figure><p>En dépit d’un nombre croissant de nouvelles recherches menées sur la ménopause, il semble de plus en plus compliqué de trouver des informations claires sur ce sujet. En effet, médias, Internet, soignants ou scientifiques ne s’accordent pas tous systématiquement.</p>
<p>Pour ajouter encore à cette confusion, une <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(24)00462-8/fulltext">série d’articles</a> parus récemment dans le prestigieux journal médical <em>The Lancet</em> a remis en question certains aspects que l’on croyait acquis concernant non seulement les symptômes de la ménopause, mais aussi l’efficacité des traitements hormonaux (aussi appelés <a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/menopause/traitements">« traitements hormonaux substitutifs de la ménopause »</a>) pour soulager certains d’entre eux.</p>
<p>Quels sont les symptômes qui indiquent de façon fiable le début de la périménopause ou de la ménopause ? Et quel est l’intérêt réel des traitements hormonaux ? Voici ce qu’en dit la science.</p>
<h2>Qu’est-ce que la ménopause ?</h2>
<p>Pour le dire brièvement, la ménopause est la perte complète de la fertilité féminine.</p>
<p>Il s’agit de la période de la vie d’une femme (ou de personnes dont le sexe de naissance était le sexe féminin) durant laquelle les règles (menstruations) s’arrêtent définitivement. La ménopause est diagnostiquée après 12 mois sans nouvelles règles (sauf en cas d’ablation des ovaires, laquelle qui provoque une ménopause induite chirurgicalement). Commence alors la période de postménopause.</p>
<p>La <a href="https://www.inserm.fr/c-est-quoi/derniers-stocks-cest-quoi-la-premenopause">périménopause</a> débute quant à elle lorsque les cycles menstruels varient pour la première fois de sept jours ou plus. Elle se termine lorsqu’il n’y a pas eu de règles pendant 12 mois.</p>
<p>La périménopause et la ménopause sont difficiles à identifier dans le cas ou une personne a subi une hystérectomie, mais que ses ovaires sont intacts, ou bien si les menstruations naturelles sont supprimées par un traitement (comme la contraception hormonale) ou une maladie (comme un trouble de l’alimentation).</p>
<h2>Quels sont les symptômes les plus courants de la ménopause ?</h2>
<p>Au cours de nos travaux, nous avons analysé la littérature scientifique afin de faire un état des lieux des recommandations de prise en charge de la ménopause et de la périménopause se basant sur les standards les plus exigeants. Nous avons ainsi pu en identifier les <a href="https://srh.bmj.com/content/early/2024/02/21/bmjsrh-2023-202099.long">symptômes reconnus au niveau international</a> :</p>
<ul>
<li><p>bouffées de chaleur et sueurs nocturnes (connues sous le nom de symptômes vasomoteurs) ;</p></li>
<li><p>troubles du sommeil ;</p></li>
<li><p>douleurs musculo-squelettiques ;</p></li>
<li><p>diminution de la fonction ou du désir sexuel ;</p></li>
<li><p>sécheresse et irritation vaginales ;</p></li>
<li><p>perturbation de l’humeur (humeur maussade, changements d’humeur ou symptômes dépressifs), mais sans dépression clinique.</p></li>
</ul>
<p>Aucun de ces symptômes n’est cependant spécifique à la ménopause, ce qui signifie qu’ils pourraient avoir d’autres causes.</p>
<h2>Des symptômes dont la gravité varie d’une personne à l’autre</h2>
<p><a href="https://journals.lww.com/menopausejournal/abstract/2015/07000/moderate_to_severe_vasomotor_and_sexual_symptoms.6.aspx">Notre étude</a> sur les femmes australiennes a révélé que 38 % des femmes avant la périménopause, 67 % des femmes périménopausées et 74 % des femmes postménopausées de moins de 55 ans ont déclaré avoir eu des bouffées de chaleur et/ou des sueurs nocturnes.</p>
<p>Mais la <a href="https://journals.lww.com/menopausejournal/abstract/2015/07000/moderate_to_severe_vasomotor_and_sexual_symptoms.6.aspx">gravité de ces symptômes varie considérablement</a>. Avant la périménopause, seules 2,8 % des femmes ont indiqué avoir subi des bouffées de chaleur et des sueurs nocturnes modérément à sévèrement gênantes, contre 17,1 % des femmes périménopausées et 28,5 % des femmes postménopausées de moins de 55 ans.</p>
<p>Bouffées de chaleur et sueurs nocturnes gênantes semblent donc constituer des indicateurs fiables de la périménopause et de la ménopause. Toutefois, ce n’en sont pas les seuls symptômes. Ce ne sont pas non plus des phénomènes touchant uniquement les femmes occidentales, contrairement à ce qui a pu être parfois suggéré : les femmes des pays asiatiques sont également concernées.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Femme assise sur une chaise, l’air déprimé" src="https://images.theconversation.com/files/581467/original/file-20240313-16-ht265a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/581467/original/file-20240313-16-ht265a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/581467/original/file-20240313-16-ht265a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/581467/original/file-20240313-16-ht265a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/581467/original/file-20240313-16-ht265a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/581467/original/file-20240313-16-ht265a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/581467/original/file-20240313-16-ht265a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Ne pas avoir de sueurs nocturnes ou de bouffées de chaleur ne signifie pas pour autant ne pas être ménopausée.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/sad-asian-mature-woman-lonely-home-1682995819">Maridav/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les symptômes dépressifs et l’anxiété sont également souvent liés à la ménopause, mais ces symptômes sont moins spécifiques que les bouffées de chaleur et les sueurs nocturnes, car ils peuvent survenir tout au long de la vie adulte. Néanmoins, les recommandations actuelles considèrent que l’apparition de troubles de l’humeur peut constituer à elle seule la manifestation des <a href="https://www.cell.com/cell/abstract/S0092-8674(23)00905-4">changements hormonaux en lien avec la ménopause</a>. Autrement dit, une femme qui n’a pas de bouffées de chaleur ou de sueurs nocturnes <a href="https://srh.bmj.com/content/early/2024/02/21/bmjsrh-2023-202099.long">peut néanmoins être en périménopause ou en postménopause</a>.</p>
<p>On appréhende encore mal dans quelle mesure les changements hormonaux de la ménopause pourraient être liés à des problèmes de mémoire, de concentration ou à des difficultés de réflexion (des symptômes fréquemment regroupés et sous l’appellation « brouillard cérébral »). Certaines études suggèrent que la périménopause pourrait altérer la <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/13697137.2022.2122792">mémoire verbale épisodique</a>, mais que ce trouble pourrait se résoudre de lui-même à mesure que les femmes traversent la ménopause. Il semblerait que les fonctions cérébrales exécutives (réflexion stratégique, planification) <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/13697137.2022.2122792">ne soient en revanche pas affectées</a>.</p>
<h2>Dans quels cas les traitements hormonaux sont-ils utiles ?</h2>
<p>Les articles du <em>Lancet</em> suggèrent que le traitement hormonal substitutif de la ménopause soulage les bouffées de chaleur et les sueurs nocturnes (symptômes « vasomoteurs »). Toutefois, la probabilité qu’une telle thérapie améliore le sommeil, l’humeur ou le « brouillard cérébral » semble ne concerner que les femmes qui sont gênées par ces symptômes vasomoteurs.</p>
<p>Le traitement hormonal est aussi recommandé pour la prise en charge des troubles de l’humeur associés à la ménopause. Autrement dit, se voir prescrire une telle thérapie ne nécessite pas d’avoir des bouffées de chaleur ou des sueurs nocturnes.</p>
<p>Souvent, les traitements hormonaux de la ménopause sont prescrits en association avec un œstrogène à application topique, afin de traiter les symptômes vaginaux (sécheresse, irritation ou nécessité fréquente d’uriner).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Médecin parlant à une femme" src="https://images.theconversation.com/files/581473/original/file-20240313-30-mix8c4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/581473/original/file-20240313-30-mix8c4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/581473/original/file-20240313-30-mix8c4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/581473/original/file-20240313-30-mix8c4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/581473/original/file-20240313-30-mix8c4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/581473/original/file-20240313-30-mix8c4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/581473/original/file-20240313-30-mix8c4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Nul besoin de ressentir des bouffées de chaleur et des sueurs nocturnes pour prendre une thérapie hormonale.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/mature-woman-consultation-female-doctor-sitting-1393901327">Monkey Business Images/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Aucune des directives internationales actuelles ne recommande en revanche la prescription de traitement hormonal en ce qui concerne la prise en charge des symptômes cognitifs responsables du « brouillard cérébral ».</p>
<p>Par ailleurs, l’efficacité de ce genre de traitement pour prendre en charge les douleurs musculo-squelettiques, qui constituent les symptômes ménopausiques les <a href="https://journals.lww.com/menopausejournal/abstract/2016/07000/prevalence_and_severity_of_vasomotor_symptoms_and.6.aspx">plus courants dans certaines populations</a>, doit encore être étudiée.</p>
<p>Enfin, certaines recommandations nationales considèrent que le traitement hormonal est efficace <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/13697137.2023.2258783">pour limiter le risque d’ostéoporose ou de fractures</a>, mais pas pour prévenir d’autres maladies.</p>
<h2>Quels sont les risques des thérapies hormonales ?</h2>
<p>Les principales préoccupations à propos des traitements hormonaux substitutifs de la ménopause ont concerné l’accroissement potentiel du risque de cancer du sein et de thrombose veineuse profonde (qui est susceptible de provoquer la formation d’un caillot dans les poumons).</p>
<p>Aujourd’hui, on considère que les traitement hormonaux recourant uniquement à des œstrogènes <a href="https://www.nice.org.uk/guidance/ng23">n’entraînent pas, ou peu, de modification du risque de cancer du sein</a>.</p>
<p>Les œstrogènes pris avec un progestatif, nécessaire pour les femmes qui n’ont pas subi d’hystérectomie, <a href="https://www.moh.gov.my/moh/resources/Penerbitan/CPG/Women%20Health/CPG_Management_of_Menopause_2022_e-version-1.pdf">ont été associés à une petite augmentation</a> du risque de cancer du sein (mais comme tout risque, celui-ci semble varier en fonction <a href="https://www.bmj.com/content/bmj/371/bmj.m3873.full.pdf">du type de traitement utilisé, de la dose et de la durée d’utilisation</a>).</p>
<p>Les œstrogènes pris par voie orale ont également été associés à un risque accru de thrombose veineuse profonde, ledit risque variant en fonction de la formulation utilisée. Ce problème peut être évité en utilisant des <a href="https://www.bmj.com/content/bmj/364/bmj.k4810.full.pdf">patchs ou des gels d’œstrogènes prescrits à des doses standards</a>.</p>
<h2>Et si je ne veux pas de thérapie hormonale ?</h2>
<p>Si vous ne pouvez pas ou ne voulez pas prendre de traitement hormonal pour atténuer les bouffées de chaleur et les sueurs nocturnes gênantes, des thérapies non hormonales efficaces sont aussi disponibles sur ordonnance.</p>
<p>En Australie, la plupart de ces options sont « hors indication », cependant le <a href="https://ec.europa.eu/health/documents/community-register/2023/20231207160974/anx_160974_fr.pdf">fezolinetant</a>, un nouveau médicament, vient d’être approuvé pour traiter les bouffées de chaleur et les sueurs nocturnes postménopausiques. </p>
<p>(<em>en Europe, ce médicament a obtenu <a href="https://www.apmnews.com/freestory/10/404209/amm-europeenne-pour-veoza-dans-les-symptomes-vasomoteurs-associes-a-la-menopause">une autorisation de mise sur le marché en décembre 2023</a>. Il avait été approuvé aux États-Unis au mois de mai de la même année, ndlr</em>) </p>
<p>Pris sous forme de comprimé, le fezolinetant agit dans le cerveau en bloquant la neurokinine 3, la molécule responsable de la réponse thermique inappropriée à l’origine des bouffées de chaleur et/ou des suées.</p>
<p>Si l’on peut déplorer que l’efficacité de la plupart des traitements en vente libre soit <a href="https://srh.bmj.com/content/early/2024/02/21/bmjsrh-2023-202099.long">nulle ou non prouvée scientifiquement</a>, notons que la thérapie cognitivo-comportementale et l’hypnose peuvent permettre de <a href="https://journals.lww.com/menopausejournal/abstract/2023/06000/the_2023_nonhormone_therapy_position_statement_of.4.aspx">soulager certains symptômes</a>.</p>
<hr>
<p><em><strong>Pour en savoir plus :</strong></em></p>
<ul>
<li><a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/menopause">Le dossier de l’Assurance maladie consacré à la ménopause et à la périménopause</a>, ainsi qu’à leur prise en charge </li>
<li>Le dossier de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) <a href="https://www.inserm.fr/dossier/menopause/">sur la périménopause et la ménopause</a> </li>
<li>La page consacrée à <a href="https://cngof.fr/espace-grand-public/la-menopause-et-apres/">la ménopause et la périménopause</a> sur le site du Collège national des gynécologues et obstétriciens </li>
<li><a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-menopause-pour-tout-le-monde">« Ménopause pour tout le monde »</a>, une série de quatre podcasts proposée par France Culture.</li>
</ul><img src="https://counter.theconversation.com/content/226038/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Susan Davis est chercheuse au NHMRC et directrice du programme de recherche sur la santé des femmes de l'Université de Monash. Elle a assuré des présentations de ses travaux pour Theramex, Besins Healthcare, Mayne Pharma et Abbott Laboratories. Elle a aussi fait partie de comités de conseils consultatifs pour Theramex, Astellas, Besins Healthcare, Mayne Pharma, Abbott Laboratories et Gedeon-Richter.</span></em></p>Bouffées de chaleurs, sueurs nocturnes, « brouillard cérébral »… Les symptômes de la ménopause sont multiples. Comment les détecter et les prendre en charge ? Voici les recommandations scientifiques.Susan Davis, Chair of Women's Health, Monash UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2259602024-03-18T15:34:27Z2024-03-18T15:34:27ZCovid-19 : comment le coronavirus détruit des neurones essentiels pour la fertilité et la cognition<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/582547/original/file-20240318-20-ppt6sn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=26%2C1089%2C3515%2C2252&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Micrographie électronique à balayage colorisée d'une cellule (rose) infectée par des particules du virus SARS-CoV-2 (vert et violet), isolée à partir d'un échantillon de patient.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nihgov/50798069536/in/photolist-2koRoi7-2ivWYAQ-2itgZyx-2jk18mh-2iERQiZ-2iYmxva-2mFfcQ7-2jcerea-2jk18s4-2jk2hum-2jfwmb2-2jch9HX-2j4b4fV-2j4fdct-2iCRVRX-2iP8B13-2iERQmQ-2jfwm3X-2jfzdMX-2iDSu3E-2iDSu77-2iDWFNp-2iDVeTu-2iDVeUX-2iDVeVt-2iERQ8d-2iG5wqt-2iYiNki-2iPbjqr-2itfPmQ-2iDWFMh-2iDSu65-2iDVeQd-2iDSu8u-2nWQgad-2iETgaX-2ivUoVj-2ivUoW6-2itgZwo-2ivY9VB-2ivY9Xk-2o9zewJ-2koRooc-2koRocL-2jk2hQG-2jfAxCS-2jk18et-2itfPhS-2ivUoUn-2koRYXP"> Image prise au NIAID Integrated Research Facility (IRF) à Fort Detrick, Maryland / NIAID/NIH </a></span></figcaption></figure><p><em>Difficultés de concentration, de planification, troubles de la mémoire immédiate… Les personnes souffrant de Covid long se plaignent très souvent de problèmes cognitifs, qui s’ajoutent aux nombreux autres symptômes dont elles souffrent. Quatre ans après la première vague de la pandémie, la recherche sur les causes de ce « brouillard cérébral » progresse.</em></p>
<p><em>On sait aujourd’hui que le coronavirus SARS-CoV-2 à l’origine de la maladie est notamment capable de pénétrer dans notre cerveau et de détruire certaines cellules cérébrales. L’infection d’une petite population de neurones inquiète particulièrement les scientifiques : il s’agit des neurones à GnRH, qui jouent un rôle essentiel non seulement dans la fertilité, mais aussi dans le neurodéveloppement des enfants.</em></p>
<p><em>Directeur de recherche et responsable du laboratoire Inserm « Développement et plasticité du cerveau neuroendocrine », Vincent Prévot nous explique pourquoi leur destruction est préoccupante.</em></p>
<hr>
<p><strong>The Conversation : Des travaux récents ont montré que l’infection par le coronavirus SARS-CoV-2, même quand elle ne s’accompagne que de symptômes modérés, <a href="https://www.nejm.org/doi/10.1056/NEJMoa2311330">est associée à des atteintes cognitives</a>. Aujourd’hui, il ne fait plus de doute que l’infection par le SARS-CoV-2 est délétère pour le cerveau ?</strong></p>
<p><strong>Vincent Prévot :</strong> Plusieurs études ont montré que l’infection par le SARS-CoV-2 a des effets sur le cerveau. L’une des plus spectaculaires, <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-022-04569-5">publiée dans la revue <em>Nature</em></a>, montre qu’elle s’accompagne d’une diminution du volume du cerveau et d’une perte cognitive, d’autant plus importante que les personnes sont âgées. Et ce, même chez des gens qui n’ont pas fait de forme sévère.</p>
<p><a href="https://www.nature.com/articles/s41593-021-00926-1">Avec nos collaborateurs</a>, nous avons de notre côté démontré que le coronavirus était à l’origine de microruptures de vaisseaux sanguins cérébraux, parfois très nombreuses. Celles-ci pourraient entraîner la mort de certains neurones, et avoir des conséquences sur le vieillissement cérébral.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/covid-19-comment-le-coronavirus-sintroduit-dans-notre-cerveau-185834">Covid-19 : comment le coronavirus s’introduit dans notre cerveau</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Divers travaux ont par ailleurs montré que ce dernier <a href="https://www.researchsquare.com/article/rs-3818580/v1">semblait d’ailleurs accéléré</a> chez certains patients. Nous avons nous-mêmes constaté la dégradation très rapide, suite à l’infection par le coronavirus, de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37428895/">l’état d’un patient atteint de démence vasculaire à un stade précoce</a>.</p>
<p><strong>The Conversation : Avec vos collaborateurs, vous vous êtes particulièrement intéressé aux effets de l’infection sur une catégorie bien particulière de neurones, les neurones à GnRH. Pourriez-vous nous expliquer ce dont il s’agit ?</strong></p>
<p><strong>VP :</strong> Ces neurones produisent une hormone appelée GnRH (Gonadotropin-Releasing Hormone). Éparpillés dans notre cerveau, ils sont très peu nombreux : on estime qu’il en existe seulement environ 10 000, dont 2000 dans l’hypothalamus. En regard des 100 milliards d’autres neurones, c’est extrêmement peu.</p>
<p>Cependant ces neurones, que l’on retrouve chez tous les vertébrés, sont essentiels. En effet, ils contrôlent notamment les capacités de reproduction. Les neurones à GnRH s’activent à la puberté. L’hormone qu’ils produisent à cette période passe dans le sang et atteint l’hypophyse, une petite glande située sous le cerveau.</p>
<p>Celle-ci libère alors deux autres hormones, la LH et la FSH, qui vont agir sur les ovaires et les testicules, entraînant leur croissance et déclenchant la production de spermatozoïdes et d’ovocytes. LH et FSH sont aussi impliquées dans la sécrétion des œstrogènes et de la testostérone.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Donc, depuis l’hypothalamus, les neurones à GnRH contrôlent tous les processus associés aux fonctions reproductrices : la puberté, l’acquisition des caractères sexuels secondaires et, à l’âge adulte, la fertilité.</p>
<p>Mais ce n’est pas tout. Ces neurones jouent aussi <a href="https://theconversation.com/trisomie-21-une-hormone-ouvre-des-pistes-de-traitement-inedites-189887">un rôle essentiel dans le neurodéveloppement des enfants</a>. En effet, une semaine après la naissance, une première activation des neurones à GnRH se produit. Transitoire, elle est à l’origine d’une « mini-puberté » qui dure six mois environ, avant que ces neurones ne se mettent en hibernation en attendant la puberté adolescente. Or, cette première étape est fondamentale pour le développement des capacités cognitives des enfants.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/trisomie-21-une-hormone-ouvre-des-pistes-de-traitement-inedites-189887">Trisomie 21 : une hormone ouvre des pistes de traitement inédites</a>
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<p><strong>The Conversation : Comment avez-vous fait le lien entre ces neurones et le Covid-19 ?</strong></p>
<p><strong>Vincent Prévot :</strong> Au début de la pandémie, nous avons été troublés par le fait que la majorité des victimes des formes graves de Covid-19 étaient des hommes. Or, on sait que le dimorphisme sexuel est en partie contrôlé par le cerveau, via l’hypothalamus et les neurones à GnRH.</p>
<p>En outre, bon nombre de ces patients étaient en surpoids, voire obèses, ou diabétiques. Un constat qui, là encore, faisait soupçonner une implication de l’hypothalamus, car cette structure, qui intervient dans de nombreux mécanismes physiologiques (croissance, faim et soif, rythme circadien, régulation de la température, métabolisme…), joue aussi un rôle dans l’obésité et le diabète.</p>
<p>Nous nous sommes donc rapidement interrogés sur la possibilité que le virus puisse franchir la barrière hématoencéphalique, qui protège le cerveau des envahisseurs. À l’époque, peu de gens étaient prêts à l’admettre, car le SARS-CoV-2 était surtout considéré comme un virus pulmonaire.</p>
<p>Nous avons cependant prouvé que le virus pouvait bien accéder au cerveau, qui plus est de diverses façons.</p>
<p><strong>The Conversation : Comment le virus parvient-il à atteindre ces neurones ?</strong></p>
<p><strong>VP :</strong> La muqueuse de la cavité nasale (l’épithélium olfactif) est l’une de ses portes d’entrée. Il faut savoir que les neurones à GnRH ne naissent pas dans le cerveau, mais dans le nez, pendant le développement embryonnaire. Ils migrent dans le cerveau seulement dans un second temps.</p>
<p>Or, nous avons découvert ces dernières années que même une fois installés dans le cerveau, les neurones à GnRH gardent une attache physique avec l’épithélium olfactif, via leurs fibres nerveuses. C’est par là que passe le virus.</p>
<p>Qui plus est, dans la muqueuse nasale se trouve une autre sorte de neurones, les neurones olfactifs, dont le rôle est de détecter les molécules odorantes. Leurs fibres nerveuses sont en contact avec le bulbe olfactif situé dans le cerveau (la structure qui traite les informations liées aux odeurs). Nous avons démontré que le coronavirus SARS-CoV-2 était capable d’infecter ces neurones (c’est pour cela que l’un des symptômes est la perte de l’odorat, ou anosmie), lesquels constituent donc une seconde porte d’entrée.</p>
<p>Mais le virus dispose aussi d’une troisième voie d’accès au cerveau. Nos collègues allemands ont en effet découvert que le coronavirus <a href="https://theconversation.com/Covid-19-comment-le-coronavirus-sintroduit-dans-notre-cerveau-185834">détruit les cellules qui tapissent l’intérieur des vaisseaux sanguins cérébraux</a>. Ceux-ci perdent alors leur étanchéité, endommageant la barrière hématoencéphalique censée isoler le cerveau, et laissant « fuir » le virus.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/covid-19-comment-le-coronavirus-sintroduit-dans-notre-cerveau-185834">Covid-19 : comment le coronavirus s’introduit dans notre cerveau</a>
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<p>Enfin, à certains endroits de l’hypothalamus, la barrière hématoencéphalique s’interrompt, pour laisser passer librement dans le sang les neurohormones produites par cette structure cérébrale, telle que la GnRH. On peut donc imaginer que le virus, présent dans le sang, puisse lui aussi passer par là. Nous avons d’ailleurs montré qu’il infecte aussi des cellules appelées <a href="https://www.inserm.fr/actualite/les-tanycytes-des-intermediaires-indispensables-au-controle-de-la-glycemie-par-le-cerveau/">« tanycytes »</a>, qui régulent notamment la fréquence de sécrétion de la GnRH dans le sang…</p>
<p>L’entrée du virus dans le cerveau n’est pas sans conséquence : lorsque nous avons pratiqué des autopsies de patients décédés de la maladie, nous avons découvert que leurs neurones à GnRH avaient été tués ou étaient en train de mourir. La GnRH n’était donc plus produite à des taux suffisants. Or, en l’état actuel des connaissances, on considère que ces neurones ne se régénèrent pas.</p>
<p><strong>The Conversation : Quelles sont les conséquences pour les patients ?</strong></p>
<p><strong>VP :</strong> Divers rapports scientifiques avaient fait état de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34409772/">taux de testostérone très bas</a> chez des patients atteints de Covid-19. Par ailleurs, de nombreux hommes atteints de Covid long se plaignent d’une baisse de libido ou de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36251682/">problèmes érectiles</a>.</p>
<p>Nous l’avons aussi constaté dans la <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34008009/">cohorte</a> de 47 hommes que nous avons analysée lors de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37713808/">nos derniers travaux</a>. Les dosages que nous avons effectués indiquent par ailleurs que cette baisse de testostérone n’est pas due à un problème au niveau des organes sexuels, mais bien à un déficit de production de GnRH dans l’hypothalamus (c’est ce que l’on appelle un <a href="https://www.chu-lyon.fr/hypogonadisme-hypogonadotrope">hypogonadisme hypogonadotrope</a>.</p>
<p>Mais les problèmes posés pourraient être plus importants qu’une simple baisse de la libido. <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37713808/">Dans cette même étude</a>, nous avions déjà constaté un plus fort taux de mortalité chez les personnes en réanimation dont l’axe gonadotrope était altéré. Mais on sait aussi qu’un déficit en GnRH peut se traduire par des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37261390/">troubles cognitifs</a>.</p>
<p>Ainsi, certains traitements du cancer de la prostate ou de l’endométriose, qui consistent à supprimer l’axe GnRH, s’accompagnent d’une perte cognitive chez certaines personnes, ainsi que d’un risque accru de développer la maladie d’Alzheimer plus tard.</p>
<p>Or, dans notre cohorte, les patients qui présentaient des dosages hormonaux anormaux se traduisant par une baisse de testostérone étaient en proportion plus nombreux à signaler des troubles de la mémoire ou de l’attention, ou des difficultés de concentration. Ces résultats doivent encore être confirmés sur des cohortes de plus grande taille incluant également des femmes.</p>
<p><strong>The Conversation : Doit-on craindre que l’effet du virus se fasse sentir à long terme ?</strong></p>
<p><strong>VP :</strong> On peut légitimement se poser la question des conséquences de l’infection par le SARS-CoV-2 sur le cerveau humain. Comment vont vieillir les cerveaux des personnes infectées ? Les troubles cognitifs dont se plaignent les patients vont-ils persister ? Va-t-on assister à une augmentation des cas de démence dans les décennies à venir ?</p>
<p>C’est d’autant plus inquiétant que des effets sur le cerveau ont été constatés, y compris chez des personnes souffrant seulement de symptômes modérés.</p>
<p>Il ne s’agit pas d’être alarmiste, bien entendu. Mais le cas de <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/grippe#:%7E:text=la%20pand%C3%A9mie%20de%201918%20dite,due%20au%20sous%2Dtype%20H3N2.">l’épidémie de grippe espagnole survenue au début du XXème siècle</a>, doit nous faire réfléchir : une <a href="https://www.nature.com/articles/s41531-020-00123-0">grande partie des survivants avait développé la maladie de Parkinson</a>, pour des raisons <a href="https://www.vidal.fr/actualites/30687-il-y-a-100-ans-l-encephalite-lethargique-un-fleau-oublie.html">qui restent à élucider</a>.</p>
<p>Par ailleurs, on peut se demander si l’infection des enfants en très bas âge, longtemps considérée comme peu problématique, ne pourrait pas avoir elle aussi des conséquences à plus long terme. Si l’étape de mini-puberté a été altérée chez certains nourrissons, leur développement neurologique pourrait s’en ressentir, et nécessiter un accompagnement afin de tenter d’atténuer l’impact de cette situation.</p>
<p>Répondre à ces questions va nécessiter d’approfondir les recherches dans les années à venir.</p>
<p><strong>The Conversation : Quelle va être la suite de ces travaux ?</strong></p>
<p><strong>VP :</strong> Jusqu’ici, nos résultats ont été obtenus sur de petites cohortes. Nous allons maintenant changer d’échelle, en analysant des échantillons provenant d’hommes et de femmes participant à la <a href="https://etude-coper.fr/">cohorte française Coper</a>.</p>
<p>Il s’agit de 300 personnes qui ont eu un Covid « léger » sans conséquence à long terme, et 300 personnes qui ont eu un Covid similaire, mais ont développé un Covid long.</p>
<p>Nous allons tester l’état de l’axe gonadotrope et le comparer entre les deux groupes, afin de vérifier si un axe gonadotrope déficient est effectivement associé à des troubles neurologiques.</p>
<p>En attendant d’en savoir plus, mieux vaut éviter d’être contaminé par ce virus, qui n’est de toute évidence pas un simple virus respiratoire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225960/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Vincent Prévot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Loin de n’être qu’un « banal » virus respiratoire, le coronavirus SARS-CoV-2 peut envahir de nombreuses sortes de cellules dans notre corps. Y compris dans le cerveau, normalement si bien protégé.Vincent Prévot, Directeur de Recherche en Neuroendocrinologie et Neurosciences, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2236702024-03-04T17:00:07Z2024-03-04T17:00:07ZLes métiers très féminisés du soin et du lien : pourquoi il est urgent de les reconnaître à leur juste valeur<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/575958/original/file-20240215-22-zd1sk3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5800%2C3881&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pas toujours facile de prendre du temps pour chaque patient quand les tâches sont aussi nombreuses.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>La crise sanitaire a mis en lumière l’importance sociale et sociétale des métiers du soin et du contact humain. Pourtant ces métiers, majoritairement exercés par des femmes, demeurent sous-valorisés, les tâches, les responsabilités et les difficultés auxquelles elles font face demeurant invisibilisées.</p>
<p>En 1983, la loi Roudy établissait le principe d’une <a href="https://theconversation.com/egalite-salariale-entre-les-femmes-et-les-hommes-que-dit-le-droit-177593">rémunération égale pour un travail de valeur égale</a>. Cependant, après quarante ans, cet objectif n’est toujours pas atteint. En France, les <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/6047789?sommaire=6047805">femmes continuent à percevoir des salaires inférieurs à ceux des hommes</a>. Et cette disparité s’explique en partie par le fait que les métiers les plus féminisés font l’objet de salaires plus faibles.</p>
<p>Afin de mieux comprendre le quotidien de ces métiers, leurs responsabilités, leurs conditions de travail, leurs rémunérations et leurs aspirations, nous avons mené une <a href="https://ires.fr/publications/cgt/investir-dans-le-secteur-du-soin-et-du-lien-aux-autres-un-enjeu-degalite-entre-les-femmes-et-les-hommes/">recherche</a> fondée sur leurs témoignages. Entre décembre 2021 et mars 2022, nous avons lancé pour l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires), une consultation en ligne intitulée « Mon travail le vaut bien », en collaboration avec des syndicats et des associations professionnelles. Près de 7 000 salariés y ont participé, issus de quinze professions liées aux soins et au lien aux autres (aides-soignantes, infirmières, AESH, aides à domicile, etc.). Elles représentent près de 4 millions de personnes en France.</p>
<h2>Des métiers couteaux-suisses</h2>
<p>Ils et elles ne forment pas un groupe homogène, et présentent des différences en termes de statuts, de missions et de qualifications, évoluant dans divers environnements professionnels tels que les hôpitaux, les écoles, les Ehpad, au domicile des personnes ou bien chez elles. Pourtant, malgré cette diversité, ils et elles partagent de nombreux points communs.</p>
<p>Ces quinze professions partagent tout d’abord une gestion de charges émotionnelles intenses, des contraintes organisationnelles strictes et des fortes exigences physiques et mentales. Elles exigent une grande polyvalence, obligeant à jongler entre plusieurs tâches simultanément. Une infirmière témoigne :</p>
<blockquote>
<p>« Les interruptions de tâches sont notre quotidien : écouter les patients, répondre au téléphone, distribuer les médicaments… Et il faut tout faire en même temps ! »</p>
</blockquote>
<p>Au-delà des activités centrales de ces métiers, nous avons demandé aux enquêtés de nous donner un exemple de tâches réalisées en dehors de leur fonction. Le nuage de mots suivants en synthétise les réponses. Les activités administratives et de gestion ressortent en premier, viennent ensuite des tâches de soin, effectuées par des professionnelles du lien, par exemple une aide à domicile qui va aider à la prise de médicaments, ou inversement des métiers du soin qui vont devoir prendre en charge des activités d’entretien ou de surveillance.</p>
<h2>Des métiers pressés et pressants</h2>
<p>Répondre à toutes ces tâches exige du temps, une ressource qui manque cruellement pour la très grande majorité de ces métiers. Cela contraint parfois les professionnels à sacrifier la qualité des services ou à effectuer des choix entre les soins et les interactions sociales. Ils doivent également composer avec des interruptions constantes, jonglant d’une urgence à l’autre. Leur travail réel implique une capacité d’adaptation et une réorganisation continue de leurs activités. Une aide-soignante souligne l’intensité de son travail :</p>
<blockquote>
<p>« Je dois donner à manger à plusieurs personnes polyhandicapées tout en animant le repas et en prenant moi-même mon repas ».</p>
</blockquote>
<p>Certaines activités notamment administratives et de gestion entrent également en conflit avec l’essence même de ces métiers, générant une pression particulière. De plus, s’engager dans le quotidien des personnes en situation de handicap, des personnes âgées ou très jeunes, implique souvent des horaires de travail atypiques : débuter tôt le matin, finir tard le soir, travailler la nuit ou les week-ends.</p>
<p>Les professions des soins et des relations humaines sont par ailleurs soumises à de nombreuses contraintes physiques similaires à de nombreux travailleurs manuels et qui ont aussi un impact sur leur santé. Elles sont amenées à porter des charges lourdes, maintenir des positions inconfortables, effectuer des gestes répétitifs et font face au bruit. Elles sont aussi exposées à des produits potentiellement dangereux, à la saleté et à une proximité physique constante avec d’autres individus. La plupart des salariés de ces professions sont amenés à devoir gérer des situations agressives, apaiser des personnes en détresse, être confrontés à l’isolement, être contraints de cacher leurs émotions ou encore avoir peur, des activités qui font partie des <a href="https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/publications/etudes-et-resultats/lexposition-de-nombreuses-contraintes-liees-aux-conditions-de">principaux risques psychosociaux</a> identifiés dans la recherche scientifique.</p>
<h2>Des compétences minimisées</h2>
<p>Le travail émotionnel et les responsabilités liées à l’humain ne reçoivent pas toujours la reconnaissance méritée car ils sont trop souvent associés à des qualités « naturelles », voire « féminines ». La comparaison menée dans une autre partie de l’étude Ires entre des ingénieurs hospitaliers (profession à prédominance masculine, nécessitant un diplôme de niveau bac+5) et des sages-femmes (profession à prédominance féminine, également à bac+5) montre que les ingénieurs gagnent en fin de carrière près de 500 euros de plus par mois ; les énormes responsabilités humaines des sages-femmes semblant ainsi bien moins reconnues que les connaissances techniques des ingénieurs.</p>
<p>Les responsabilités liées à l’humain sont ainsi souvent sous-estimées car considérées comme allant de soi. Elles semblent pourtant fondamentales : 90 % des répondants exerçant des métiers du soin et du lien doivent garantir la confidentialité des données, notamment médicales, 95 % contribuent à la sécurité et à la protection des personnes, et 97 % veillent à la santé ou au bien-être des individus.</p>
<p>Et globalement, les qualifications requises ne sont pas toujours mises en avant. Les répondants mentionnent fréquemment l’absence de fiche de poste : le travail est peu normé, et se prête alors à un ajout de tâches ou de responsabilités, les obligeant souvent à faire le travail d’autres collègues ou d’autres corps de métier. En outre, l’apprentissage des connaissances et des compétences humaines et sociales reposent sur une <a href="https://www.cairn.info/revue-travail-et-emploi-2018-3-page-31.htm">grande pratique</a>. Les professionnels prennent sur leur temps personnel pour compléter leurs connaissances, comme le souligne une AESH qui mentionne devoir effectuer des « recherches sur Internet sur les handicaps concernant le ou les enfants » dont elle a la charge.</p>
<h2>Entre grande fierté et manque de reconnaissance</h2>
<p>Malgré tout, la fierté du travail prédomine pour la grande majorité des répondants, animés du sentiment que leur travail est utile aux autres et qu’il porte des valeurs fortes.</p>
<p>Parallèlement 92 % des professionnels estiment être mal payés, surtout parmi les bas salaires. Ce constat est à la fois subjectif et objectif. Les <a href="https://ires.fr/publications/cgt/investir-dans-le-secteur-du-soin-et-du-lien-aux-autres-un-enjeu-degalite-entre-les-femmes-et-les-hommes/">résultats</a> de François-Xavier Devetter, lui aussi chercheur à l’Ires, montrent la sous-rémunération de ces métiers, en les comparant avec les salaires moyens correspondant au niveau de diplôme réel de celles et ceux qui les exercent. Les faibles salaires sont alors la première raison pour ne pas recommander son métier, comme cette assistante maternelle qui doute :</p>
<blockquote>
<p>« Est-il recommandable de travailler 56 heures par semaine pour 3,25 € de l’heure ? »</p>
</blockquote>
<p>Cette réalité crée une situation paradoxale : d’un côté, le désir de promouvoir une profession socialement utile et dont on est fier, et de l’autre, ne pas la recommander car les salaires y sont bien en deçà de ce qu’ils devraient être.</p>
<p>Ces travailleurs du soin et du lien font l’objet de peu d’études approfondies. Les nôtres mettent en lumière le manque de reconnaissance de ces professions, qui revendiquent à la fois une vraie revalorisation des salaires et l’augmentation des effectifs. <a href="https://ires.fr/publications/cgt/investir-dans-le-secteur-du-soin-et-du-lien-aux-autres-un-enjeu-degalite-entre-les-femmes-et-les-hommes/">L’ensemble de l’étude Ires</a> montre l’urgence d’investir dans ces métiers du soin et du lien aux autres ; à la fois pour « faire société » mais aussi car il s’agit d’un enjeu central pour l’égalité entre les femmes et les hommes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223670/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>L'étude, à l'origine de cet article, a reçu des financements de l'Institut de recherches économiques et sociales (IRES).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>L'étude, à l'origine de cet article, a reçu des financements de l'Institut de recherches économiques et sociales (IRES).</span></em></p>Une enquête portant sur près de 7 000 professionnels du soin et du lien aux autres montre des personnes fières de leur utilité sociale mais qui ne recommandent pas leur métier.Rachel Silvera, Économiste, maîtresse de conférences, co-directrice du réseau MAGE, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLouis-Alexandre Erb, Doctorant en économie des inégalités, Université Paris-EstSéverine Lemière, Maîtresse de conférences en Sciences de gestion, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2246852024-03-01T16:29:07Z2024-03-01T16:29:07ZCrise agricole : quels défis pour demain ?<p>Produire bio, en circuit court, en agriculture raisonnée. Et, « en même temps », accepter la concurrence de producteurs étrangers soutenus par des subventions internationales ou ne respectant pas les normes sanitaires. Produire toujours plus, mais si possible sans les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/pesticides-25901">pesticides</a> difficilement dissociables du modèle de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/agriculture-intensive-61354">production agricole intensif</a>. Respecter des réglementations plus ou moins strictes quant à leur usage, et devoir rétropédaler lorsque l’exécutif choisit de les « mettre en pause ». Nourrir la France, tout en restant invisible…</p>
<p>Les agricultrices et agriculteurs français ont marqué leur opposition à des normes et des injonctions contradictoires toujours plus nombreuses, dans un contexte où les consommateurs eux-mêmes ont parfois du mal à s’y retrouver. Retour sur les principaux points économiques, scientifiques, réglementaires ou historiques de ces colères.</p>
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<h2><a href="https://theconversation.com/pesticides-et-sante-les-agriculteurs-ont-ete-sont-et-seront-les-principales-victimes-de-ces-substances-223102">Pesticides et santé : les agriculteurs ont été, sont et seront les principales victimes de ces substances</a></h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/578673/original/file-20240228-30-93zj95.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/578673/original/file-20240228-30-93zj95.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/578673/original/file-20240228-30-93zj95.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/578673/original/file-20240228-30-93zj95.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/578673/original/file-20240228-30-93zj95.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/578673/original/file-20240228-30-93zj95.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/578673/original/file-20240228-30-93zj95.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les agriculteurs sont en première ligne en matière d’exposition aux pesticides.</span>
<span class="attribution"><a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Les effets des pesticides sur la santé des agriculteurs ont été constatés dès la fin du XIX<sup>e</sup> siècle. Depuis, un lien clair a été établi entre ces produits et certains cancers plus fréquents dans la profession.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/plan-ecophyto-tout-comprendre-aux-annonces-du-gouvernement-223571">Plan Ecophyto : tout comprendre aux annonces du gouvernement</a></h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/578669/original/file-20240228-24-4olh0y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/578669/original/file-20240228-24-4olh0y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/578669/original/file-20240228-24-4olh0y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/578669/original/file-20240228-24-4olh0y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/578669/original/file-20240228-24-4olh0y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/578669/original/file-20240228-24-4olh0y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/578669/original/file-20240228-24-4olh0y.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Pour comprendre ce qui se joue à travers les indicateurs Ecophyto défendus par les uns ou les autres, il faut d’abord définir de quoi on parle.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Usaid Egypt/Flickr, CC BY-NC</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Comment s’y retrouver dans la jungle des indicateurs du plan Ecophyto, QSA, NoDU, HRI… et en quoi posent-ils problème ? L’éclairage de plusieurs experts du Comité scientifique et technique du plan.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/une-vraie-souverainete-alimentaire-pour-la-france-220560">Une vraie souveraineté alimentaire pour la France</a></h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/578667/original/file-20240228-27-rvdzde.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/578667/original/file-20240228-27-rvdzde.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/578667/original/file-20240228-27-rvdzde.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/578667/original/file-20240228-27-rvdzde.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/578667/original/file-20240228-27-rvdzde.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/578667/original/file-20240228-27-rvdzde.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/578667/original/file-20240228-27-rvdzde.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La souveraineté alimentaire est devenue un argument d’autorité, trop souvent invoqué afin de poursuivre des pratiques agricoles délétères.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Thibaut Marquis/Unsplash</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>La souveraineté alimentaire est régulièrement invoquée pour justifier le productivisme agro-alimentaire. Une vision restrictive qui ignore bon nombre des services écosystémiques rendus par la nature.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/mobilisations-agricoles-ou-en-sont-les-femmes-224106">Mobilisations agricoles : où (en) sont les femmes ?</a></h2>
<p>Le secteur agricole continue à se représenter au masculin alors que les femmes sont de plus en plus présentes dans les arènes décisionnelles et les instances de gouvernance. Décryptage d’une invisibilisation.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/comment-la-societe-francaise-a-appris-a-mepriser-les-paysans-et-leurs-patois-223387">Comment la société française a appris à mépriser les « paysans » et leurs « patois »</a></h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/578671/original/file-20240228-30-r0xgok.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/578671/original/file-20240228-30-r0xgok.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/578671/original/file-20240228-30-r0xgok.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/578671/original/file-20240228-30-r0xgok.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/578671/original/file-20240228-30-r0xgok.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/578671/original/file-20240228-30-r0xgok.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/578671/original/file-20240228-30-r0xgok.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une chanson en patois limousin. Carte postale ancienne.</span>
<span class="attribution"><a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Comment s’est imposée la prétendue supériorité universelle du français, par opposition aux patois régionaux ?</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/agriculture-comment-napoleon-iii-a-permis-le-productivisme-a-la-francaise-222775">Agriculture : comment Napoléon III a permis le productivisme à la française</a></h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/578686/original/file-20240228-22-tk4pbq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/578686/original/file-20240228-22-tk4pbq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=491&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/578686/original/file-20240228-22-tk4pbq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=491&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/578686/original/file-20240228-22-tk4pbq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=491&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/578686/original/file-20240228-22-tk4pbq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=617&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/578686/original/file-20240228-22-tk4pbq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=617&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/578686/original/file-20240228-22-tk4pbq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=617&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La récolte des foins. Huile sur toile, 1881, Julien Dupré. L’agriculture de subsistance qui co-existait avec l’agriculture commerciale connaît un bouleversement sans précédent sous Napoléon III et laissera peu à peu place au modèle intensif.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Julien Dupré</span></span>
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<p>La crise agricole française et sa logique productiviste est un facteur héréditaire de l’identité agricole de la France depuis la fin du Second Empire (1852-1870).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/224685/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
Retour sur les principaux points économiques, scientifiques et historiques des récentes colères agricoles.Clea Chakraverty, Cheffe de rubrique Politique + Société, The Conversation FranceSarah Sermondadaz, Cheffe de rubrique environnement et énergieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2206522024-03-01T09:50:49Z2024-03-01T09:50:49ZCôte d'Ivoire : comment relancer la politique d'accès à la santé pour tous<p>Depuis 2011, l'Etat ivoirien a lancé des <a href="https://www.hfgproject.org/evaluation-de-la-gouvernance-du-secteur-sante-en-cote-divoire/">initiatives</a> visant à promouvoir la santé pour tous, plaçant la <a href="https://psgouv.ci/welcome/details_sous_menu3/oprationnalisation-progressive-de-la-couverture-maladie-universelle-cmu594">Couverture maladie universelle </a>(CMU) au centre de sa politique de santé. Mais la mise en œuvre de la CMU est confrontée à plusieurs défis. En septembre 2022, une visite de deux ministres dans deux hôpitaux d’Abidjan <a href="https://www.pressecotedivoire.ci/article/14760-cmu-dans-6-mois-lenrolement-pourrait-etre-payant">a révélé une sous-utilisation importante de la carte CMU</a>.</p>
<p>En tant que socio-anthropologue ayant travaillé sur <a href="https://hal.science/hal-03691264">les politiques de préparation et de réponses aux épidémies dans le système de santé en Côte d'Ivoire</a>, je m’attache ici à mettre en perspective les enjeux et défis liés à la mise en œuvre de la CMU en Côte d'Ivoire. Ce travail repose sur une analyse approfondie de documents. Il a été réalisé grâce au soutien de <a href="https://raee.fr/?PagePrincipale">l’Institut de recherche pour le développement au Réseau anthropologie des épidémies émergentes</a> et son Groupement de recherche international.</p>
<p>Les documents examinés sont composés notamment de rapports d'étude, de plans de développement sanitaire, d'articles scientifiques en lien avec la politique de santé en Côte d'Ivoire, de rapports d'activités, de discours en lien avec la CMU sur les réseaux sociaux, d'articles de presse. </p>
<h2>Les politiques d’assurance maladie de 1960 à 2011</h2>
<p>De 1960 à 1980, le gouvernement ivoirien <a href="https://www.persee.fr/doc/caoum_0373-5834_1988_num_41_162_3264">a offert gratuitement</a> les soins et les médicaments aux populations. A partir de 1980, ces politiques basculent vers la “gratuité partielle” ou à la <a href="https://revues-ufhb-ci.org/fichiers/FICHIR_ARTICLE_1876.pdf">“gratuite quasi-totale”</a>. Dès 1994, le recouvrement des coûts après l’adoption de <a href="https://iris.who.int/handle/10665/202070">l’Initiative de Bamako s’est généralisé </a>, restant en vigueur jusqu’en 2010. En 2000, le gouvernement de <a href="https://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Laurent_Gbagbo/121002">Laurent Gbagbo</a> avait entrepris d’instituer un <a href="https://iris.who.int/handle/10665/202070">système d’Assurance maladie universelle (AMU)</a>. Mais l’AMU est restée entravée par la <a href="https://www.afd.fr/fr/ressources/etat-des-lieux-des-inegalites-en-cote-divoire">rébellion de 2002</a>. Comme en 1980, en 2011, les nouvelles autorités annoncent une mesure d’exemption totale des frais médicaux. En 2015, conformément à une promesse de campagne du président sortant, Alassane Ouattara, la CMU est lancée pour un meilleur accès aux soins de santé moyennant une contribution mensuelle de 1000 francs CFA (environ 1,5 USD) par personne. </p>
<h2>Les cadres réglementaires et institutionnels</h2>
<p>La CMU, sous le président Alassane Ouattara, a acquis des fondements légaux et institutionnels. D’un point de vue légal, elle a été instituée par la loi du <a href="https://www.gouv.ci/_actualite-article.php?recordID=5188&d=2">24 mars 2014</a>. Le <a href="https://www.juriafrica.com/lex/decret-2017-149-1er-mars-2017-30479.htm">décret du 1er mars 2017</a> fixe la liste des affections, des actes de médecine et de biologie et la liste des médicaments couverts par la CMU. </p>
<p>Les<a href="https://www.scribd.com/document/534281022/ARRETE-INTERMINISTERIEL-Prestations-CMU"> arrêtés interministériels du 4 janvier et 04 avril 2019 fixent les tarifs des actes de santé</a>. Le décret du 8 septembre 2021 permet la nomination d’un directeur de cabinet adjoint chargé de la CMU. En septembre 2022, à l’issue d’un conseil des ministres où la sous-utilisation de la carte CMU a été évoquée, le gouvernement décide de l’imposer pour accéder à certains services publics. Mais cette décision s’inscrit aussi dans une perspective d’inciter les populations à se faire enrôler massivement. Le gouvernement a par ailleurs annoncé que l’enrôlement pour la CMU serait payant dans les six mois après la décision d’imposer la carte CMU pour accéder à certains services publics. L’examen des documents montre que la CMU a connu quelques avancées, d’un point de vue légal, réglementaire et institutionnel, dans sa mise en place, ces dernières années. Toutefois, comme le besoin de se soigner ne se décrète pas, ces textes n’ont pas favorisé l’adhésion massive escomptée des populations.</p>
<h2>Les fragilités des politiques</h2>
<p>L'analyse temporelle et contextuelle de la mise en œuvre de la CMU montre que cette politique de santé s’insère dans la continuité de ce que le sociologue <a href="https://theconversation.com/profiles/francis-akindes-1053308">Francis Akindès</a> qualifie de <a href="http://www.cairn.info/revue-politique-africaine-2017-4-page-5.htm">“sentiers sinueux d’une sortie de crise en Côte d’Ivoire”</a>. Lesquels travaux ont été particulièrement marqués par un <a href="https://www.gouv.ci/doc/presse/1477497207RAPPORT%20FINAL_CDVR.pdf">processus de réconciliation inabouti </a>(avec une justice partiale).</p>
<p>Selon <a href="https://www.gouv.ci/doc/presse/1477497207RAPPORT%20FINAL_CDVR.pdf">le rapport</a> de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation, dès sa prise de pouvoir, “le président de la République avait déclaré qu’il était profondément attaché à une justice équitable”. Cependant, le rapport atteste que “plusieurs centaines de personnes proches de l’ancien président Laurent Gbagbo étaient contraintes à l’exil ou incarcérées, alors que peu de partisans de Alassane Ouattara à qui des faits graves étaient reprochés n'avaient été traduits en justice”.</p>
<p>D’autres incohérences dans des politiques sociales comme celle consacrée aux <a href="https://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=CRII_089_0078">logements sociaux</a>, à la gratuité de l’école, à l’informatisation de l’inscription des étudiants et élèves et au renouvellement des cartes nationales d’identité ont alimenté les imaginaires d'une importante partie de la population ces dernières décennies. Or, <a href="https://www.canada.ca/content/dam/phac-aspc/documents/services/health-promotion/population-health/ottawa-charter-health-promotion-international-conference-on-health-promotion/chartre.pdf">la Charte d'Ottawa en 1986</a> stipule que la paix est une condition préalable à la promotion de la santé. Un post de l’OMS sur les réseaux sociaux en janvier 2023 rappelait : “Health for peace, peace for health” (la santé pour la paix, la paix pour la santé). Il est donc important de souligner que dans la<a href="http://www.cairn.info/revue-tiers-monde-2014-3-page-197.htm"> société du soupçon</a> et de forte <a href="https://www.fnac.com/a5527963/Robert-Castel-La-Montee-des-incertitudes">“montée des incertitudes”</a>, une telle politique nécessite un travail de construction de la confiance.</p>
<p>La dépendance aux financements extérieurs et la faible implication des populations constituent d'autres points faibles de la politique de santé.<br>
Tout d'abord, <a href="https://www.hfgproject.org/measuring-monitoring-progress-toward-universal-health-coverage-case-study-cote-divoire/">la mise en place</a> de la CMU en Côte d'Ivoire repose sur le travail d’un groupe de réflexion. Aucun des documents consultés ne mentionne une étude préalable pour la mobilisation, notamment des <a href="https://www.cnps.ci/independant/">travailleurs indépendants, perçus comme les principaux bénéficiaires de la CMU</a>. Néanmoins, le gouvernement compte sur leur bonne volonté pour payer leurs cotisations via notamment des<a href="https://www.ipscnam.ci/services/je-paie-ma-cotisation/"> plateformes de paiement en ligne</a>. </p>
<p>Des étudiants ayant souscrit à la CMU dès la phase pilote affirment n’avoir jamais payé leurs cotisations. Une internaute soutient s’être retrouvée avec 50 000 FCFA (82 USD) d’arriérés et n’a pu utiliser sa carte lorsqu’elle en avait besoin. La faible contribution des populations diminue les recettes fiscales et renforce <a href="https://ucp-fm.com/uploads/documentations/6388a0fde5e42-suivis-plan-national-de-developpement-sanitaire-pnds-2021-2025-VF.pdf">la dépendance de l’Etat</a> à l’aide extérieure pour certains programmes de santé. Comme le souligne la Banque mondiale, certes, “<a href="https://documents.banquemondiale.org/fr/publication/documents-reports/documentdetail/277191561741906355/situation-economique-en-cote-divoire">accroître les recettes fiscales</a> permettra au gouvernement de maintenir son programme d’investissements afin d’améliorer les services sociaux…”. Mais, nous estimons que l'autre défi majeur de l'Etat pour la CMU est de parvenir à se doter d’instruments de contrôle des cotisations des sans-emploi et des travailleurs du secteur informel. </p>
<h2>Les enjeux géopolitiques du financement</h2>
<p>Depuis <a href="https://www.amazon.com/Americas-Vital-Interest-Global-Health/dp/0309058341/ref=sr_1_1?crid=3U810XLT87UNUkeywords=America%27s+Vital+Interest+In+Global+Health&sprefix=america%27s+vital+interest+in+global+health%2Caps%2C378&sr=8-1">le rapport</a> de la Commission de l’Institute of Medicine en 1997, les politiques de santé s’insèrent dans la perspective de la santé globale. Cette approche <a href="https://factsreports.revues.org/1564">introduit l'aide pour la santé</a> dans les systèmes de coopération canalisés par des mécanismes capitalistes de financement. Des mécanismes qui impliquent divers acteurs ayant des intérêts contradictoires. Or, la santé relève des politiques sociales dont l'application des exigences du capitalisme est susceptible d'entraver sa démocratisation.</p>
<p>Certains leviers du succès de la CMU restent ainsi tributaires de la complexe politique d’articulation des intérêts nationaux avec les enjeux de santé globale. Or, les <a href="https://ucp-fm.com/uploads/documentations/6388a0fde5e42-suivis-plan-national-de-developpement-sanitaire-pnds-2021-2025-VF.pdf">les partenaires mondiaux</a> n'interviennent que pour certaines maladies spécifiques. En outre, en mettant en place la CMU, le gouvernement veut non seulement respecter ses engagements envers les populations, mais aussi envers la communauté internationale. </p>
<p>En Côte d'Ivoire, la CMU s’insère dans la continuité des politiques de sortie de crise chaotique. Lesquelles incohérences alimentent la méfiance des populations et détériorent la confiance envers le gouvernement. Si la CMU a des ancrages légaux et institutionnels, elle reste fragilisée par l’absence d’un travail de mobilisation locale, la faiblesse des recettes fiscales et l’absence de stratégies pour favoriser le paiement des cotisations des acteurs du secteur informel. </p>
<h2>Que faire?</h2>
<p>Pour <a href="https://www.fnac.com/a1346596/Olivier-Nay-Le-gouvernement-du-compromis">mobiliser les populations</a>, il importe d'impliquer davantage les organisations de la société civile du secteur de la santé, les municipalités et les conseils régionaux qui sont supposés être des courtiers dans les actions publiques. </p>
<p>En ce qui concerne les cotisations des travailleurs indépendants, notamment les agriculteurs, nous suggérons que les autorités travaillent avec les acheteurs des produits agricoles, les coopératives d'agriculteurs et les agriculteurs eux-mêmes pour définir dans quelle mesure leurs cotisations annuelles peuvent être prélevées directement lors de la vente des produits. </p>
<p>Il nous paraît nécessaire de multiplier les sites d'enrôlement dans les villes, d'organiser des campagnes d'enrôlement dans les villages, mais en privilégiant les centres de santé comme principaux sites d'enrôlement. </p>
<p>Il semble également important de travailler à favoriser davantage la disponibilité et l'accès aux médicaments dans les pharmacies publiques ou privées accréditées. </p>
<p>Ces différentes suggestions nécessitent néanmoins un travail sociologique ou anthropologique approfondi pour une meilleure compréhension des représentations liées à cette politique de santé afin de mieux éclairer les actions de sa mise en œuvre et favoriser l’adhésion des populations</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220652/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Firmin Kra à bénéficié d’un soutien financier du Réseau Anthropologie des Epidémies Emergentes (RAEE) porté par l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD). </span></em></p>Le défi majeur de l'Etat est de parvenir à se doter d’instruments de contrôle des cotisations des sans-emploi et des travailleurs du secteur informel.Firmin Kra, Enseignant-chercheur, Université Alassane Ouattara de BouakéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2213352024-02-28T15:40:51Z2024-02-28T15:40:51ZComment bien prendre soin de ses os<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/569791/original/file-20230915-17-zgaqyj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C13%2C4368%2C2890&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pratiquer une activité physique adaptée à son état de santé et à son âge, en privilégiant les exercices de mise en charge, contribue à préserver la solidité de ses os.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/active-senior-woman-working-exercise-gym-641129533">Liderina/ Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Tout comme nos muscles, <a href="https://theconversation.com/fr/topics/os-63601">nos os</a> perdent de leur force avec l’âge. Cela peut avoir de graves conséquences sur notre vie quotidienne et augmenter le risque de fractures, qui sont liées à un <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00198-009-0920-3">risque accru de décès</a>. Heureusement, tout comme nous pouvons renforcer nos muscles, nous pouvons renforcer nos os.</p>
<p>(<em>Chez les seniors, le risque de décès augmente notamment après une fracture du col du fémur selon l’état de santé du patient au moment de la fracture, si on en croit des données françaises issues de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation des statistiques <a href="https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/publications/etudes-et-resultats/quel-risque-de-deces-un-apres-une-fracture-du-col-du-femur">Drees</a>. En effet, selon la Drees, le risque de décès à un an augmente dès qu’il existe une pathologie chronique significative, en particulier, dans les situations les plus graves, ndlr</em>).</p>
<p>Les os sont bien plus qu’un simple échafaudage à l’intérieur de notre corps. L’os est un organe complexe qui se présente sous une multitude de formes et de tailles. Il est constitué d’un mélange varié de <a href="https://www.niams.nih.gov/health-topics/what-bone">composants organiques et inorganiques</a> comme le collagène et le calcium. Combinés ensemble, ces composants créent une structure suffisamment malléable pour que les muscles puissent tirer sur les os pour nous permettre de bouger, tout en étant suffisamment solides pour protéger les organes essentiels.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>L’os n’est pas la structure solide, inamovible et permanente que l’on pourrait imaginer. Un os sain et vivant reste solide parce qu’il est constamment renouvelé, l’os ancien et endommagé étant extrait et remplacé par de l’<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK45513/">os frais</a>.</p>
<p>Ce contrôle interne de la qualité des os permet à notre squelette d’être remplacé <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK45504/#ch2.s4">environ tous les dix ans</a> chez les personnes en bonne santé, bien que ce processus soit plus lent chez les personnes âgées ou malades. Certaines situations de santé, comme le cancer et les changements hormonaux durant la <a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/menopause/menopause-quelles-repercussions-sur-la-sante">ménopause</a>, peuvent également entraîner une perte osseuse excessive.</p>
<p>Contrairement à de nombreux autres tissus, tels que le cartilage, le tendon et le muscle, qui ne sont composés que d’un petit nombre de types cellulaires, l’os est constitué d’une multitude de cellules différentes. Il s’agit notamment des cellules osseuses, de cellules immunitaires, de cellules graisseuses, de cellules nerveuses et de cellules sanguines, pour n’en citer que quelques-unes.</p>
<p>L’action combinée de ces <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3341892/">différents types de cellules</a> aide notre corps à maintenir un volume osseux adéquat tout au long de la vie, afin que nous puissions continuer à être actifs.</p>
<p>Des <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4515490/">cellules osseuses spécialisées</a> (appelées ostéoblastes et ostéoclastes) aident à modifier nos os pour réparer les dommages et augmenter leur volume en fonction des exigences qui leur sont imposées. Ainsi, un joueur de tennis, qui effectue ses services de manière répétée avec le même bras, aura un volume osseux plus important au niveau du bras avec lequel il sert.</p>
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<h2>Renforcer ses os</h2>
<p>Il est essentiel de préserver vos os tout au long de votre vie pour votre santé et votre bien-être. Une perte soudaine de mobilité à la suite d’une fracture a des répercussions considérables dans la vie de tous les jours : se rendre dans les magasins, aller voir des amis et effectuer les moindres tâches quotidiennes à la maison peut se révéler douloureux.</p>
<p>Quel que soit son âge, on peut préserver la densité (la solidité) de ses os grâce à une bonne <a href="https://theconversation.com/fr/topics/alimentation-21911">alimentation</a> et de l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/activite-physique-23234">activité physique</a>.</p>
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<img alt="Un éventail d’aliments riches en calcium, notamment le lait, le fromage, les sardines et le brocoli." src="https://images.theconversation.com/files/548526/original/file-20230915-17-h3uv76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/548526/original/file-20230915-17-h3uv76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/548526/original/file-20230915-17-h3uv76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/548526/original/file-20230915-17-h3uv76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/548526/original/file-20230915-17-h3uv76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/548526/original/file-20230915-17-h3uv76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/548526/original/file-20230915-17-h3uv76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le calcium présent dans ces aliments est important pour renforcer les os.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/foods-rich-calcium-such-sardines-bean-366258461">Evan Lorne/Shutterstock</a></span>
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<p>Il est recommandé de privilégier une alimentation équilibrée et riche en <a href="https://www.anses.fr/fr/content/le-calcium-pourquoi-et-comment-en-consommer">calcium</a> (un minéral essentiel pour les os). Essayez d’en consommer <a href="https://www.nhs.uk/conditions/vitamins-and-minerals/calcium/">700 mg par jour</a>. Le lait, le yaourt et le fromage sont d’excellentes sources de calcium. Si vous êtes végan, des aliments tels que le tofu, les haricots secs et les lentilles contiennent tous du calcium. Il se peut que vous deviez prendre un supplément si vous ne parvenez pas à obtenir la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0261561420306567#bib5">quantité recommandée</a> de calcium dans votre alimentation.</p>
<p>(<em>Les principales sources alimentaires de calcium sont les produits laitiers, les légumineuses, les fruits à coque, les produits céréaliers, certains légumes-feuilles (choux, blettes, épinards, etc.), les fruits de mer et certaines eaux très riches en calcium, liste l’<a href="https://www.anses.fr/fr/content/le-calcium-pourquoi-et-comment-en-consommer">Anses</a> ou Agence nationale de sécurité sanitaire française. Il faudra se rapprocher de son médecin avant toute supplémentation en calcium, car des apports excessifs en calcium peuvent être à risque pour la santé chez des personnes sensibles, ndlr</em>).</p>
<p>Précision importante : pour absorber pleinement le <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/3012979/">calcium</a>, notre corps a besoin de vitamine D. Il est donc essentiel de passer du temps à l’extérieur car notre peau produit de la vitamine D lorsqu’elle est exposée au soleil. Essayez de passer dix minutes à l’extérieur deux fois par jour. En hiver, lorsque l’ensoleillement est moindre, vous pouvez envisager une supplémentation en vitamine D.</p>
<p>(<em>Outre l’exposition au soleil, la consommation d’aliments riches en vitamine D – poissons gras comme le saumon, la sardine ou le maquereau, produits laitiers et céréales enrichis en vitamine D, jaune d’œuf, etc.– aide à <a href="https://www.anses.fr/fr/content/vitamine-d-pourquoi-et-comment-assurer-un-apport-suffisant">assurer un apport suffisant en vitamine D</a>. Avant d’envisager une supplémentation, notamment via des compléments alimentaires, il convient au préalable de faire le point avec votre médecin traitant, ndlr</em>).</p>
<p>L’activité physique est un autre moyen de préserver la solidité des os – en particulier les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6323511/">exercices de mise en charge</a> – (<em>c’est-à-dire avec un certain niveau d’impact, ndlr</em>). Marcher et monter les escaliers sont d’excellentes options pour commencer si vous ne faites pas régulièrement de l’exercice. Mais des activités plus dynamiques – comme le saut à la corde ou la musculation – sont préférables, car elles stimulent davantage la croissance osseuse. En effet, lorsque les muscles tirent fortement sur l’os auquel ils sont attachés, cela <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6279907/">stimule la croissance osseuse</a>.</p>
<p>Ce type d’exercices peut être pratiqué par tout le monde, à tous les âges. Veillez simplement à adapter l’exercice que vous pratiquez à votre niveau de forme et à vos capacités. Il est également recommandé d’augmenter progressivement sa pratique afin d’éviter les blessures.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lactivite-physique-adaptee-pour-rester-durablement-en-bonne-sante-171979">L’activité physique adaptée, pour rester durablement en bonne santé</a>
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<p>Réduire les polluants présents dans votre corps (tels que la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5352985/">fumée de tabac</a> et l’<a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00198-011-1787-7">alcool</a>) contribuera également à ce que vos cellules osseuses aient toutes les chances de fonctionner correctement durant toute votre vie.</p>
<p>Si vous êtes préoccupé par la solidité de vos os – ou si vous souffrez de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6288610/">certains problèmes de santé</a> qui peuvent diminuer votre densité minérale osseuse (tels que la <a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/intolerance-gluten-maladie-coeliaque">maladie cœliaque</a>, les maladies inflammatoires de l’intestin, les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5349336/">différentes formes de diabète</a> ou un <a href="https://www.inserm.fr/dossier/osteoporose/">cancer</a>) – n’hésitez pas à faire part de vos inquiétudes à votre médecin généraliste. Il vous donnera des conseils personnalisés sur la meilleure façon de prendre soin de vos os.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221335/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>James Edwards a reçu des financements de diverses sources gouvernementales, caritatives et industrielles</span></em></p>Certaines situations de santé, comme les changements hormonaux durant la ménopause, peuvent entraîner une perte osseuse excessive. En prévention, l’alimentation et l’activité physique peuvent aider.James Edwards, Associate Professor of the Oxford Skeletal Ageing and Regeneration Group, University of OxfordLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2237462024-02-25T16:27:16Z2024-02-25T16:27:16ZComment des bulbes de fleurs traités rendent résistantes des moisissures dangereuses pour la santé<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/577366/original/file-20240222-16-81uuet.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5176%2C3453&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les bulbes de tulipes traités peuvent favoriser l’émergence de moisissures résistantes aux antifongiques.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/fleurs-assorties-en-macrophotographie-pendant-la-journee-5aXEo-hGwU0">Krystina Rogers/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>Quel est le rapport entre les bulbes de tulipe et l’aspergillose, une grave maladie due à un champignon microscopique, la moisissure <em>Aspergillus fumigatus</em> ? C’est ce que nous avons tenté de découvrir au Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Besançon.</p>
<p>Depuis une vingtaine d’années, le nombre de cas cliniques d’aspergillose dus à des souches d’<em>Aspergillus</em> résistant aux antifongiques les plus utilisés est en augmentation. Or ces mêmes antifongiques sont également utilisés dans le domaine agricole et en horticulture.</p>
<p>Nous nous sommes demandé si le fait de planter, à l’hôpital, des bulbes de tulipes traités aux antifongiques pouvait faciliter l’émergence de souches résistantes transmissibles à l’être humain.</p>
<p>Les résultats que nous avons obtenus suggèrent que l’utilisation de tels bulbes pourrait effectivement favoriser le développement de résistance aux antifongiques.</p>
<p>Ces résultats posent particulièrement question dans le contexte actuel de suspension du <a href="https://sante.gouv.fr/sante-et-environnement/les-plans-nationaux-sante-environnement/article/plan-ecophyto-2">plan Écophyto</a>, dont l’objectif était de réduire l’usage des pesticides et fongicides en agriculture…</p>
<h2>L’aspergillose invasive, une maladie opportuniste mortelle</h2>
<p>L’aspergillose est une maladie causée par des champignons microscopiques (moisissures) du genre <em>Aspergillus</em>. Elle peut se manifester sous forme d’infections localisées, d’infection disséminée mortelle ou de maladies allergiques, et toucher de nombreux organes (rein, sinus, peau, sang…).</p>
<p>En France, il s’agit de la troisième cause d’infection fongique invasive. Principalement causée par <em>Aspergillus fumigatus</em>, l’aspergillose touche les personnes immunodéprimées, en particulier les patients ayant reçu une greffe de moelle osseuse ou d’organe, ainsi que les patients sous traitements anticancéreux.</p>
<p>Les spores d’<em>Aspergillus fumigatus</em> sont omniprésentes dans l’air, dans les sols, sur les plantes agricoles, et dans le compost. De ce fait, l’inhalation de ces spores est inévitable. En temps normal, ce n’est pas un problème, car les spores sont éliminées par les défenses immunitaires au niveau du système respiratoire.</p>
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<img alt="Une préparation du champignon microscopique Aspergillus fumigatus, vu sous un objectif grossissant 40 fois" src="https://images.theconversation.com/files/577377/original/file-20240222-26-qrnn9j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/577377/original/file-20240222-26-qrnn9j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/577377/original/file-20240222-26-qrnn9j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/577377/original/file-20240222-26-qrnn9j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/577377/original/file-20240222-26-qrnn9j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=384&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/577377/original/file-20240222-26-qrnn9j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=384&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/577377/original/file-20240222-26-qrnn9j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=384&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une préparation du champignon microscopique Aspergillus fumigatus, vu sous un objectif grossissant 40 fois.</span>
<span class="attribution"><span class="source">S. Rocchi</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Cependant, chez certaines personnes, l’aspergillose est une maladie dite « opportuniste » : lorsque le système immunitaire est déficient (immunosuppression), le champignon contamine les poumons et peut s’y développer, et par extension provoquer l’aspergillose invasive (et la colonisation d’autres organes).</p>
<p>De 2012 à 2018, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/35499498/">1661 cas de cette maladie ont été recensés dans notre pays</a>, avec un taux de mortalité de 42,5 % chez les patients ayant par ailleurs une maladie du sang, lesquels représentaient 60 % des cas d’aspergillose invasive.</p>
<h2>Émergence de souches résistantes aux médicaments</h2>
<p>Le traitement de l’aspergillose nécessite le recours à des médicaments antifongiques. Les azolés agissent en bloquant la fabrication d’un composant important de la membrane cellulaire des champignons, l’ergostérol. Ce sont des thérapeutiques qui allient l’efficacité et une bonne tolérance pour les patients.</p>
<p>Ceux-ci sont utilisés pour traiter non seulement les êtres humains, mais aussi les animaux. Par ailleurs, ils sont également largement employés comme fongicides en agriculture (de pleins champs, maraîchère, viticole), dans les scieries et en horticulture, afin de lutter contre les champignons qui s’attaquent aux plantes (phytopathogènes) ou au bois (lignivores).</p>
<p>Or, lorsque les fongicides azolés sont appliqués dans l’environnement, ils ont un impact non intentionnel sur <em>Aspergillus</em> : ils éliminent les souches sensibles et favorisent, par pression de sélection, celles qui se sont adaptées à ces molécules azolées. Résultat : des souches insensibles aux fongicides azolés se développent.</p>
<p>La surenchère des quantités d’antifongiques répandues et l’utilisation de mélanges d’antifongiques n’ont pas permis d’endiguer l’apparition de ces résistances. Ni même, d’ailleurs, d’éradiquer durablement les phytopathogènes des cultures de riz, de blé, de maïs, de soja et de pommes de terre.</p>
<p>En revanche, désormais, de nombreux patients atteints d’aspergillose sont infectés par une telle souche d’<em>Aspergillus</em> résistante aux azolés. Or, il existe peu de traitements alternatifs, certains étant inefficaces vis-à-vis des espèces dites « filamenteuses » comme Aspergillus ou toxiques pour certains malades (l’amphotéricine est par exemple plus efficace, mais potentiellement toxique pour les reins).</p>
<p>Une des mesures envisageables pour éviter à court terme ces infections à champignons résistants est la prévention de l’exposition.</p>
<h2>Dépister les souches résistantes aux azolés</h2>
<p>Dans l’optique de mieux prévenir les infections par des souches d’<em>Aspergillus fumigatus</em> résistant aux azolés, depuis 2015, nous réalisons au Centre Hospitalo-Universitaire de Besançon leur dépistage dans l’air intérieur.</p>
<p>Étant donné que des travaux de recherche avaient suggéré que les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28369271/">bulbes de plantes ornementales traitées aux azolés pouvaient jouer un rôle dans la propagation mondiale des souches</a>, nous avons étendu notre surveillance environnementale à des prélèvements de sols. Nous souhaitions ainsi évaluer si la terrasse de notre hôpital, ornée de pots de fleurs, pouvait être une source potentielle de diffusion de la résistance.</p>
<p>En 2019, au total, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31753549/">69 isolats d’<em>Aspergillus fumigatus</em> résistants aux azolés</a>, et présentant une mutation TR34/L98H, ayant été décrits comme liés à l’utilisation des fongicides dans l’environnement, ont été obtenus : 1 à partir de l’air de l’unité de soins intensifs, 4 à partir des couloirs principaux de l’hôpital, 59 à partir de pots de tulipes importés des Pays-Bas et 5 à partir du sol d’arbres cultivés en pots.</p>
<p>Confirmer l’hypothèse selon laquelle les souches résistantes récoltées dans les couloirs de l’hôpital ou isolées dans les échantillons cliniques proviendraient bien des bulbes traités plantés dans les parterres de fleurs nécessiterait encore de séquencer leur génome. Mais quoi qu’il en soit, ces résultats ont montré l’intérêt de mieux surveiller les sources potentielles d’émergence de résistances dans notre hôpital.</p>
<h2>Dites-le plutôt avec des fleurs… bio</h2>
<p>Suite à ces résultats, et au risque accru d’infections nosocomiales (les infections contractées à l’hôpital) il avait été décidé de ne plus planter de bulbes traités.</p>
<p>Afin de ne pas supprimer radicalement l’existence de terrasses comportant des jardinières de tulipes, pour préserver un lieu de promenade des patients, nous avons recommandé le remplacement des bulbes de tulipes traités par des bulbes issus de l’horticulture biologique, sans exiger le changement de la terre.</p>
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<img alt="Photo des parterres de tulipes situés devant l’entrée du CHU de Besançon" src="https://images.theconversation.com/files/577387/original/file-20240222-16-fhbmy2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/577387/original/file-20240222-16-fhbmy2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/577387/original/file-20240222-16-fhbmy2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/577387/original/file-20240222-16-fhbmy2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/577387/original/file-20240222-16-fhbmy2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/577387/original/file-20240222-16-fhbmy2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/577387/original/file-20240222-16-fhbmy2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les parterres de tulipes situés devant l’entrée du CHU de Besançon.</span>
<span class="attribution"><span class="source">S. Rocchi</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Un an après nous avons fait les mêmes prélèvements dans les bacs de terre, avec le même mode opératoire. Nous avons constaté que le taux de résistance était passé de 71 % à moins de 3 % en un an. Ces résultats suggèrent que le remplacement des bulbes traités par des bulbes biologiques <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33690850/">peut suffire à rétablir une population majoritairement sensible en seulement un an</a>.</p>
<h2>Nécessité d’une surveillance environnementale</h2>
<p>Jusqu’à présent, <em>Aspergillus fumigatus</em> a été peu étudié dans l’environnement, car il ne s’agit pas d’un champignon phytopathogène causant des pertes de récoltes.</p>
<p>Cependant, désormais des génotypes d’<em>Aspergillus fumigatus</em> résistants à plusieurs azolés sont détectés dans le monde entier, dans les isolats cliniques ainsi que dans l’environnement.</p>
<p>L’utilisation massive des fongicides azolés dans l’environnement est un facteur majeur pour la sélection de la résistance aux antifongiques médicaux. Il est donc impératif de soutenir le développement d’approches qui déconnecteront à terme l’utilisation des antifongiques en agriculture et leur utilisation en clinique.</p>
<p>Bien qu’il soit séduisant de suggérer une évolution rapide vers une agriculture durable sans pesticide, ou que certaines classes d’antifongiques soient réservées exclusivement pour un usage clinique, ceci ne semble pas faisable à court terme : le nombre de molécules efficaces disponibles est faible, et l’agriculture fait face à la même problématique de résistance.</p>
<p>Dans une telle situation, les systèmes de surveillance permettant de suivre les souches d’<em>Aspergillus fumigatus</em> résistant aux antifongiques sont essentiels. Malheureusement, on manque de tels systèmes à l’heure actuelle.</p>
<p>Par ailleurs, la compréhension de la façon dont la résistance persiste, évolue ou peut être gérée, demeure incomplète. Ce déficit de connaissances menace gravement la gestion des maladies fongiques chez l’être humain et les animaux.</p>
<h2>Protéger les patients de l’émergence de souches résistantes liées à l’utilisation de nouveaux fongicides</h2>
<p>La nécessité d’une surveillance environnementale est également devenue plus pressante car cinq agents antifongiques dotés de nouveaux modes d’action sont en cours de développement.</p>
<p>Parmi eux, l’olorofim, un nouvel antifongique de la classe des orotomides, représente un espoir pour les patients atteints d’aspergilloses résistantes. Ce nouveau médicament a déjà un analogue fongicide approuvé récemment par l’<em>U.S. Environmental Protection Agency</em>. Mais des travaux de recherche ont montré que cette molécule est capable d’induire des résistances in vitro.</p>
<p>De façon similaire à ce qui s’est passé pour les fongicides azolés, l’utilisation massive des orotomides fongicides risque de réduire les possibilités de traitement chez les patients atteints d’infections fongiques.</p>
<p>Des projets européens visent à développer une méthode standardisée pour la surveillance environnementale. Un tel outil améliorera le suivi et la compréhension des schémas de résistance et permettra d’évaluer les associations avec les pratiques de travail (pulvérisation, compostage), ainsi que l’influence d’autres facteurs (géographique, climatique) sur les niveaux de résistance.</p>
<p>Cela pourra réduire l’exposition à <em>Aspergillus fumigatus</em> résistant aux antifongiques, ce qui devrait permettre de diminuer le nombre de patients atteints d’une aspergillose résistante aux azolés, et donc réduire la mortalité de manière significative.</p>
<p>En attendant, dans les jardins hospitaliers, il est préférable pour la sécurité des patients d'utiliser exclusivement des plantes bio !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223746/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Prise en charge de frais de déplacement et d'inscription à des congrès par les sociétés PFIZER et GILEAD.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Gabriel Reboux et Steffi Rocchi ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>L’aspergillose est une grave maladie causée par une moisissure dont certaines souches résistent aux antifongiques. Or, ces mêmes antifongiques sont utilisés en agriculture, ce qui pourrait participer du problème.Gabriel Reboux, Chercheur senior, affilié au laboratoire de Parasitologie-Mycologie du centre hospitalier universitaire (CHU) de Besançon, Université de Bourgogne – UBFCLaurence Millon, Professeure des Universités, praticien hospitalier - CHU de Besançon, UMR/CNRS 6249 Chrono-environnement, Université de Bourgogne – UBFCSteffi Rocchi, Chercheuse affiliée à l'UMR/CNRS 6249 Chrono-environnement, Université Bourgogne Franche-Comté (UBFC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2216862024-02-22T15:09:23Z2024-02-22T15:09:23ZLes fibres alimentaires n’agissent pas seulement sur le côlon – le système immunitaire, le cerveau et la santé globale en bénéficient également<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/570673/original/file-20240119-19-bkynf2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=66%2C6%2C3923%2C2249&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La plupart des gens ne consomment que la moitié de la quantité de fibres alimentaires recommandée, ce qui peut avoir un effet négatif sur leur santé.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Les conseils sur l’alimentation ne manquent pas, qu’il s’agisse de manger des <a href="https://www.hsph.harvard.edu/nutritionsource/superfoods/">superaliments</a> qui permettent de <a href="https://www.npr.org/sections/thesalt/2015/04/11/398325030/eating-to-break-100-longevity-diet-tips-from-the-blue-zones">vivre jusqu’à 100 ans</a> ou de suivre des <a href="https://guide-alimentaire.canada.ca/fr/conseils-pour-alimentation-saine/regimes-et-tendances-alimentaires/">régimes restrictifs</a> qui sont censés faire perdre du poids et améliorer l’apparence. En tant que chercheur du <a href="https://farncombe.mcmaster.ca/"><em>Farncombe Family Digestive Health Research Institute</em></a>, je suis parfaitement conscient qu’il n’existe pas de « régime santé » universel qui convienne à tout le monde.</p>
<p>La plupart des professionnels s’accordent à dire que l’on doit avoir un régime équilibré sur le plan des groupes alimentaires, et qu’il est préférable d’y ajouter des légumes et des <a href="https://www.mdpi.com/2072-6643/11/8/1806">aliments fermentés</a> plutôt que de se limiter inutilement. De plus, la consommation d’aliments qui favorisent la santé intestinale améliore l’état de santé global.</p>
<h2>Pourquoi se préoccupe-t-on autant des fibres ?</h2>
<p>L’importance des fibres est connue depuis plusieurs décennies. <a href="https://doi.org/10.1017/S0954422417000117">Denis Burkitt</a>, regretté chirurgien et chercheur dans le domaine des fibres, a déclaré : « Si vous avez de petites selles, vous devrez avoir de gros hôpitaux. » Mais les fibres alimentaires ne se contentent pas de faciliter le transit intestinal, elles sont aussi un <a href="https://www.mayoclinic.org/healthy-lifestyle/nutrition-and-healthy-eating/expert-answers/probiotics/faq-20058065">nutriment prébiotique</a>.</p>
<p>Les prébiotiques ne sont pas activement digérés et absorbés, ils servent plutôt à favoriser la croissance de bactéries bénéfiques dans notre intestin. <a href="https://doi.org/10.3390%2Ffoods8030092">Ces micro-organismes contribuent ensuite à la digestion des aliments</a> pour que nous en retirions davantage de nutriments, soutiennent l’intégrité de la barrière intestinale et empêchent la prolifération de bactéries nocives.</p>
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<img alt="High-fibre foods against the outline of intestines" src="https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les prébiotiques ne sont pas activement digérés et absorbés, ils servent plutôt à favoriser la croissance de bactéries bénéfiques dans notre intestin.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Indépendamment de leur effet sur les bactéries, les fibres peuvent aussi influencer notre système immunitaire lorsqu’elles <a href="https://doi.org/10.1111/bph.14871">interagissent directement avec des récepteurs exprimés par nos cellules</a>. Ces bienfaits peuvent même aider le système immunitaire à être plus tolérant et à réduire l’inflammation.</p>
<h2>Mange-t-on suffisamment de fibres ?</h2>
<p>Probablement pas. Le <a href="https://doi.org/10.3390%2Fnu15122749">régime alimentaire occidental</a> est pauvre en fibres et riche en aliments ultra-transformés. <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/nutriments/fibres.html">On recommande de consommer</a> de <a href="https://www.nature.com/articles/s41575-020-00375-4">25 à 38 grammes de fibres par jour</a>, selon l’âge, le sexe et le niveau d’activité. La plupart des gens consomment environ la moitié de la quantité recommandée, ce qui peut nuire à leur santé globale.</p>
<p>Les céréales complètes, les fruits et légumes, les légumineuses, les noix et les graines constituent de bonnes sources de fibres alimentaires. On insiste beaucoup sur les fibres solubles et moins sur les fibres insolubles, mais en réalité, la plupart des aliments contiennent un mélange de ces deux types, qui ont tous deux <a href="https://www.healthline.com/health/soluble-vs-insoluble-fiber%23risks">leurs bons côtés</a>.</p>
<p>Les collations à haute teneur en fibres gagnent en popularité. Avec une valeur globale estimée à 7 milliards de dollars américains en 2022, le <a href="https://www.precedenceresearch.com/prebiotic-ingredients-market#:%7E:text=The%2520global%2520prebiotic%2520ingredients%2520market,13.25%2525%2520from%25202022%2520to%25202030">marché des ingrédients prébiotiques</a> devrait tripler d’ici 2032.</p>
<h2>Les bienfaits des fibres alimentaires</h2>
<figure class="align-right ">
<img alt="Diagram of a human with arrows linking brain and intestines" src="https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les fibres sont associées à la santé globale et à la santé cérébrale par l’axe intestin-cerveau.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Il existe de nombreuses preuves des bienfaits des fibres alimentaires. Les fibres ne sont pas seulement associées à la santé du côlon ; elles influencent aussi la santé globale et la santé du cerveau par <a href="https://my.clevelandclinic.org/health/body/the-gut-brain-connection">l’axe intestin-cerveau</a>. Les régimes pauvres en fibres ont été corrélés à des troubles gastro-intestinaux tels que le syndrome du côlon irritable ou des maladies inflammatoires de l’intestin.</p>
<p>Par ailleurs, une consommation suffisante de fibres <a href="https://doi.org/10.1038/s41575-020-00375-4">réduit les risques et la mortalité liés aux maladies cardiovasculaires et à l’obésité</a>. Des études montrent que <a href="https://doi.org/10.3390/nu13072159">certains types de fibres peuvent améliorer les fonctions cognitives</a>.</p>
<p>Certaines maladies gastro-intestinales, comme la maladie cœliaque, ne semblent pas influencées par la consommation de fibres. De plus, <a href="https://doi.org/10.1038/s41575-020-00375-4">il n’y a pas de consensus</a> sur le type de fibres et la dose qui serait bénéfique pour le traitement de la plupart des maladies.</p>
<h2>Les fibres ne sont pas toutes bonnes</h2>
<p>Étonnamment, ce ne sont pas toutes les fibres qui sont bonnes pour la santé. Fibre est un terme générique pour désigner les polysaccharides végétaux qu’on ne peut digérer. Il en existe de nombreux types, dont la fermentescibilité, la solubilité et la viscosité dans l’intestin varient.</p>
<p>Pour compliquer les choses, la <a href="https://doi.org/10.3389/fped.2020.620189">source a également son importance</a>. Les fibres provenant d’une plante en particulier ne sont pas les mêmes que celles issues d’une autre. En outre, le vieux dicton « trop, c’est comme pas assez » s’applique ici, car la surconsommation de suppléments de fibres peut provoquer des symptômes tels que constipation, ballonnements et gaz. Cela est dû en partie au fait qu’il existe différents microbiomes intestinaux et que tous n’ont pas la même la capacité à métaboliser les fibres pour produire des molécules bénéfiques telles que les acides gras à chaînes courtes.</p>
<p>Dans certains cas, comme chez les personnes atteintes de maladies inflammatoires de l’intestin, l’absence de bactéries capables de digérer les fibres peut laisser les fibres intactes <a href="https://doi.org/10.1053/j.gastro.2022.09.034">interagir directement avec les cellules intestinales et engendrer des effets inflammatoires</a>. Des données récentes ont même montré qu’une consommation excessive de fibres solubles, telles que l’inuline, un complément répandu, peut <a href="https://doi.org/10.1053/j.gastro.2023.10.012">accroître le risque de développer un cancer du côlon dans un modèle animal expérimental</a>.</p>
<h2>Un élément d’un régime alimentaire sain</h2>
<p>Les fibres alimentaires sont un élément important d’un régime alimentaire qui peut favoriser la santé de l’intestin et la santé globale. Les fibres contribuent à la sensation de satiété après les repas et à la régulation de la glycémie et du cholestérol. Assurez-vous de consommer des fibres dans votre alimentation et, si nécessaire, prenez des compléments alimentaires sans dépasser la dose recommandée.</p>
<p>Les prébiotiques favorisent le développement de bactéries intestinales qui peuvent influencer la santé et l’immunité de l’intestin dans le cadre de nombreuses maladies, bien que toutes les fibres ne se valent pas. Si les fibres ne guérissent pas les maladies, une saine alimentation peut soutenir le travail des médicaments et des traitements, dont elle peut améliorer l’efficacité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221686/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mark Wulczynski ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les fibres ne sont pas seulement associées à la santé du côlon ; elles influencent aussi la santé globale et la santé du cerveau par l’axe intestin-cerveau. Mais toutes les fibres ne se valent pas.Mark Wulczynski, Medical Sciences PhD Candidate, McMaster UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2232122024-02-20T14:40:04Z2024-02-20T14:40:04ZLes personnes souffrant de TOC ont une moins longue espérance de vie<p>Une nouvelle étude a récemment révélé que les personnes atteintes de <a href="https://www.nhs.uk/mental-health/conditions/obsessive-compulsive-disorder-ocd/overview/">troubles obsessionnels compulsifs</a> (TOC) ont un <a href="https://www.bmj.com/content/384/bmj-2023-077564.full">risque accru de décéder plus tôt que les autres</a>, que ce soit de cause naturelle ou non naturelle.</p>
<p>De précédents travaux avaient déjà identifié des <a href="https://jamanetwork.com/journals/jamapsychiatry/fullarticle/2484488">excès de mortalité chez les personnes souffrant de TOC</a>, mais les causes spécifiques de ces décès n’avaient pas été étudiées plus avant – à l’exception peut-être du suicide. Il avait notamment été découvert que les personnes souffrant de TOC avaient des <a href="https://www.nature.com/articles/mp2016115">taux de suicide similaires à ceux de personnes atteintes d’autres troubles mentaux</a>.</p>
<p><a href="https://www.psychiatry.org/patients-families/obsessive-compulsive-disorder/what-is-obsessive-compulsive-disorder">Les TOC affectent environ 2 % de la population</a>. Les personnes qui en souffrent expérimentent des pensées répétitives et intrusives qui les plongent dans la détresse (elles sont, par exemple, obnubilées par la peur d’être contaminées, ou de devenir agressive envers d’autres personnes). Afin de diminuer l’inconfort causé par ses pensées, elles accomplissent des rituels extrêmement chronophages : rituels de nettoyage, de répétition, de vérification…</p>
<p>Ce trouble dégrade significativement leur qualité de vie, affecte leurs relations ainsi que leurs activités sociales et, d’une façon générale, leur capacité à vivre normalement.</p>
<p>Mes collègues et moi-même, au Karolinska Institute en Suède, avons décidé d’essayer de comprendre comment les décès de cause naturelle ou ceux de cause non naturelle <a href="https://www.bmj.com/content/384/bmj-2023-077564.full">contribuent à la mortalité plus élevée constatée chez les personnes souffrant de TOC</a>.</p>
<p>Nous nous sommes pour cela appuyés sur les registres de population suédois, lesquels incluent des données administratives et de santé pour l’ensemble de la population du pays. Grâce à ces registres, nous avons pu comparer un groupe de 61 378 individus diagnostiqués comme souffrant de TOC avec 613 780 personnes non atteintes par cette pathologie.</p>
<p>Les données enregistrées dans ces bases nous ont permis de suivre ces deux groupes sur une période de plus de 40 ans, de 1973 à 2020. Nous avons ainsi découvert que les personnes atteintes de TOC mouraient à un âge moyen de 69 ans, contre 78 ans celles qui n’en souffraient pas.</p>
<p>Le risque de décès au cours de la durée couverte par cette étude était accru de 82 % dans le groupe des personnes ayant un TOC par rapport au groupe qui n’était pas atteint par cette pathologie.</p>
<p>Ce risque accru de décès s’est avéré attribuable à la fois à des causes naturelles (le risque est alors augmenté de 31 %) et à des causes non naturelles (risque augmenté de 230 %).</p>
<h2>Des causes spécifiques</h2>
<p>C’est la première fois que des travaux identifient les causes spécifiques à l’origine des décès « naturels » de personnes souffrant de TOC. Nos résultats révèlent que l’accroissement du risque de mortalité qui les concerne est dû à des risques accrus de maladie pulmonaire (73 %), de troubles mentaux et comportementaux (58 %), de maladie des tractus urinaires et génitaux (55 %), de maladies endocrines, métaboliques et d’origine nutritionnelle (47 %), ainsi que de maladies touchant les vaisseaux sanguins (33 %), le système nerveux (21 %) et le système digestif (20 %).</p>
<p>Curieusement, le risque de décès par cancer était inférieur de 13 % chez les personnes souffrant de TOC. La raison pour laquelle ce risque est moindre, à l’inverse des risques cités plus haut, n’est pas connue.</p>
<p>Parmi les causes de mort non naturelle, le principal contributeur à cette mortalité accrue s’est avéré être le suicide. Le risque de suicide est en effet cinq fois plus élevé chez les personnes atteintes de TOC que chez les autres. Les personnes avec TOC ont par ailleurs un risque 92 % plus élevé de mourir dans un accident, notamment dans des accidents de la route ou suite à des chutes.</p>
<p>La prise en compte de l’existence d’autres troubles mentaux, tels que l’anxiété, la dépression, ou des troubles liés à l’utilisation de substances n’a pas modifié ces résultats. Qui plus est, la comparaison au sein de fratries, de personnes souffrant de TOC avec leurs frères et sœurs qui n’en souffraient pas n’a pas non plus modifié ce résultat.</p>
<p>Ceci confirme que cette situation n’est pas attribuable à des facteurs annexes (environnementaux, génétiques, des troubles mentaux associés…), mais semble bien être lié aux TOC eux-mêmes.</p>
<h2>Des décès en grande partie évitables</h2>
<p>Ces résultats ne semblent pas particulièrement positifs pour les personnes souffrant de TOC. Cependant, il est important de noter qu’au sein du groupe étudié la proportion de personnes décédées de chacune des causes citées précédemment était relativement faible, même si par rapport au groupe ne souffrant pas de TOC, cela se traduit par un risque plus élevé.</p>
<p>Ainsi, au cours de la période sur laquelle s’étendait l’étude, 2,5 % des personnes atteintes de TOC sont décédées des suites de maladies cardiovasculaires (crises cardiaques, accidents vasculaires cérébraux…), un pourcentage plutôt faible. Ce pourcentage est néanmoins plus élevé que celui constaté dans le groupe sans TOC, qui est plutôt de 1,8 %.</p>
<p>Quoi qu’il en soit, il n’est pas acceptable que les personnes atteintes de TOC aient à faire face à ces risques supplémentaires. Nous espérons que ces résultats contribueront à une meilleure prise en charge de ces patients, en incitant notamment les professionnels de santé à prendre conscience de cette situation.</p>
<p>Soulignons que la plupart des causes de décès pour lesquelles un risque accru a été démontré pour les personnes atteintes de TOC concernent des causes externes (telles que le suicide, les accidents) ou des maladies non transmissibles (maladies cardiovasculaires, diabète, maladies pulmonaires chroniques, troubles mentaux, troubles neurologiques…). Or, ces causes de décès sont généralement considérées comme évitables.</p>
<p>Les personnes atteintes de TOC doivent elles aussi être conscientes qu’elles sont concernées par l’augmentation de ces risques. Cela peut les motiver à modifier leurs comportements, en les incitant par exemple à faire davantage d’exercice et à adopter une alimentation plus saine, des pratiques qui peuvent jouer un rôle dans la prévention de ces maladies et des décès prématurés qui y sont associés.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223212/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lorena Fernandez de la Cruz a reçu des fonds du Conseil suédois de la recherche pour la santé, la vie professionnelle et le bien-être (FORTE), de la région de Stockholm (fonds ALF), de la Société suédoise de médecine (Svenska Läkaresällskapets) et du Karolinska Institutet. Elle reçoit également des royalties pour sa contribution à UpToDate et Wolters Kluwer Health, ainsi que pour du travail éditorial pour Elsevier, qui ne concerne pas les travaux de recherche qu’elle soumet.</span></em></p>Les personnes souffrant de troubles obsessionnels compulsifs ont un risque de décès accru par rapport aux autres, que ces décès résultent de causes naturelles ou d’accidents.Lorena Fernández de la Cruz, Clinical Researcher, Psychiatric Epidemiology, Karolinska InstitutetLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2231022024-02-18T15:49:12Z2024-02-18T15:49:12ZPesticides et santé : les agriculteurs ont été, sont et seront les principales victimes de ces substances<p>Jeudi 1er février 2024, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau a annoncé la <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/02/02/gabriel-attal-tente-d-eteindre-la-colere-des-agriculteurs-en-cedant-sur-l-environnement_6214355_823448.html">mise en pause du plan Écophyto II+</a>, qui visait à <a href="https://agriculture.gouv.fr/le-plan-ecophyto-quest-ce-que-cest">« réduire les usages de produits phytopharmaceutiques de 50 % d’ici 2025 »</a>. Cette décision visait à satisfaire les demandes d’une partie des agriculteurs, dans le contexte des négociations destinées à mettre un terme à la crise débutée en janvier.</p>
<p>Les effets délétères de ces substances sur la santé, et en particulier celle des exploitants agricoles des pays occidentaux et de leurs familles, sont pourtant de mieux en mieux documentés. Plusieurs types de cancers sont notamment plus répandus dans les populations d’agriculteurs que dans la population générale. C’est aussi le cas de diverses maladies neurodégénératives et respiratoires.</p>
<p>Voici ce que l’on en sait à l’heure actuelle, et les questions qui restent posées.</p>
<h2>Qu’est-ce qu’un « pesticide » ?</h2>
<p>Sous l’appellation de « pesticides » sont regroupés un ensemble de produits de synthèse ou naturels visant à lutter, le plus souvent en les détruisant, contre les organismes jugés nuisibles pour l’être humain ou ses activités, notamment en agriculture.</p>
<p>Ces substances répondent à quatre usages : il peut s’agir de produits phytopharmaceutiques (les plus connus des pesticides, ceux qui sont utilisés sur les cultures), de certains biocides (utilisés dans les bâtiments d’élevage ou en salle de traite, pour traiter le bois afin de le protéger des insectes et des moisissures…), de certains médicaments vétérinaires (antiparasitaires externes ou antifongiques) et enfin de certains médicaments destinés à la santé humaine (anti-poux, anti-gale, anti-mycoses…).</p>
<p>Les pesticides ont donc par nature une activité toxique vis-à-vis du vivant. Ils sont de ce fait soumis à une réglementation plus ancienne et plus contraignante que la plupart des autres produits chimiques. Cette réglementation, établie au niveau européen, <a href="https://www.efsa.europa.eu/fr/topics/topic/pesticides">est complexe</a>, car elle vise à encadrer le quadruple usage de ces substances.</p>
<h2>Des effets sur la santé connus de longue date</h2>
<p>L’histoire des pesticides commence à la fin du XIX<sup>e</sup> siècle. En France, dès les années 1880, certaines substances (arsenicaux, dérivés du cuivre et du soufre) ont été employées dans les régions où l’agriculture s’intensifiait, notamment en viticulture et en arboriculture. Déjà à cette époque, <a href="https://hal.science/hal-01196933">des médecins hygiénistes notèrent chez les travailleurs agricoles l’émergence de nouvelles maladies</a> liées à leur emploi.</p>
<p>Mais c’est après la Seconde Guerre mondiale que l’usage des pesticides prend véritablement son essor, avec le passage à une production industrielle en quantité et en variété des familles chimiques. Conséquence : dès les années 1950-1970, plusieurs constats préoccupants sont faits.</p>
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<img alt="Publicité pour des pesticides à base de nicotine, The Florists’ Review, novembre 1917" src="https://images.theconversation.com/files/576249/original/file-20240216-28-276kp4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/576249/original/file-20240216-28-276kp4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=887&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/576249/original/file-20240216-28-276kp4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=887&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/576249/original/file-20240216-28-276kp4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=887&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/576249/original/file-20240216-28-276kp4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1115&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/576249/original/file-20240216-28-276kp4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1115&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/576249/original/file-20240216-28-276kp4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1115&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Publicité pour des pesticides à base de nicotine, The Florists’ Review, novembre 1917.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://archive.org/details/5205536_40_3/page/n189/mode/2up">University of Illinois Urbana-Champaign (via archive.org / Wikimedia Commons)</a></span>
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<p>Des intoxications aiguës se produisent, dans les vergers en Californie, chez les applicateurs d’organophosphorés, ainsi que chez d’autres travailleurs en contact avec les végétaux après les traitements. Des contaminations alarmantes de l’environnement sont détectées, et des travaux révèlent que le lait humain est lui aussi contaminé, notamment par certains insecticides de la famille des organochlorés (tels que le DDT ou le lindane).</p>
<p>Dès les années 1960, en France, certains médecins du travail agricole se préoccupent des effets des pesticides sur la santé des travailleurs agricoles. Aux États-Unis, les critiques associées à leur utilisation ont alimenté dès cette époque d’importantes mobilisations protestataires, dénonçant leurs effets délétères sur la santé des saisonniers agricoles, des consommateurs ou de la faune sauvage.</p>
<p>Après plus de cinquante ans d’études épidémiologiques (1970-2020), il est maintenant admis que les populations agricoles des pays à forts revenus, dans lesquels la plupart des études ont été conduites, présentent des particularités en matière de risque de cancer.</p>
<h2>Trois cancers clairement plus fréquents chez les agriculteurs</h2>
<p>Dans les pays occidentaux, on observe un excès de certains cancers dans les populations agricoles, par rapport à la population générale.</p>
<p>Il s’agit principalement des cancers de la prostate (cancer masculin le plus fréquent en France, il touche chaque année près de 60 000 hommes, entraînant le décès de près de 9 000 d’entre eux), des lymphomes non hodgkiniens et des myélomes multiples.</p>
<p>Pour les cancers de la prostate, au moins 5 méta-analyses ont été conduites sur le lien avec l’exposition professionnelle aux pesticides et elles ont conclu pour quatre d’entre elles à une augmentation de risque variant de 13 à 33 %. Quelques méta-analyses ont porté sur le lien avec des familles chimiques spécifiques de pesticides comme celle sur les insecticides organochlorés qui a conclu à <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26245248/">une augmentation de risque variant de 30 à 56 %</a> selon les molécules étudiées. Pour les lymphomes, une méta-analyse datant de 2014 montrait <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24762670/">une augmentation de risque variant de 30 à 70 %</a> pour les 7 familles chimiques étudiées.</p>
<p>Dans sa première expertise collective publiée en 2013, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) concluait à une présomption forte d’un lien entre l’exposition professionnelle aux pesticides et la survenue de ces trois cancers. Cette conclusion a été maintenue lors de la <a href="https://www.inserm.fr/wp-content/uploads/2021-07/inserm-expertisecollective-pesticides2021-rapportcomplet-0.pdf**">mise à jour de cette expertise collective, en 2021</a>.</p>
<p>En raison de ces données scientifiques, ces trois cancers font l’objet de tableaux de maladies professionnelles en France (tableau 59 du régime agricole pour les lymphomes non hodgkiniens incluant les myélomes multiples et, tableaux 61 (régime agricole) et 102 (régime général) pour les cancers de la prostate).</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/glyphosate-sur-quelles-pathologies-portent-les-soupcons-et-avec-quels-niveaux-de-preuves-217583">Glyphosate : sur quelles pathologies portent les soupçons et avec quels niveaux de preuves ?</a>
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<p>D’autres cancers ayant fait l’objet de moins d’études (leucémies, tumeurs du système nerveux central, sarcomes, cancers du rein et de la vessie), seraient aussi plus fréquents chez les utilisateurs professionnels de pesticides. L’expertise collective Inserm de 2021 a conclu à une présomption moyenne de lien pour ces cancers.</p>
<p>Enfin, de nombreux autres cancers ont été très peu étudiés et n’ont d’ailleurs pas pu faire l’objet d’une analyse détaillée par les expertises de l’Inserm de 2013 et 2021 par manque de moyens humains et/ou de données disponibles. Il s’agit des cancers broncho-pulmonaires, des cancers digestifs (colorectaux, estomac, pancréas, foie, œsophage), des cancers gynécologiques (sein, ovaires, corps et col de l’utérus), des cancers ORL ou des lèvres et des cancers de la thyroïde.</p>
<h2>Les données manquent pour étudier tous les pesticides utilisés</h2>
<p>Il faut noter que peu d’études épidémiologiques ont analysé les liens entre la survenue de cancers ou de maladies chroniques et l’exposition à des familles ou des molécules pesticides spécifiques. En effet, la plupart des études conduites portaient sur des effectifs réduits, ne permettant pas d’explorer la diversité des molécules.</p>
<p>On considère que plus de 1000 molécules à activité pesticide ont été homologuées en Europe, et ont été présentes pour une utilisation agricole à un moment ou un autre. Certaines molécules étant retirées tandis que de nouvelles sont homologuées, aujourd’hui, on considère que le nombre de molécules autorisées est plus proche de 400.</p>
<p>Cependant, il est important de considérer également les molécules retirées du marché, en raison des effets retardés qu’elles peuvent avoir (<a href="https://www.anses.fr/fr/content/apc-gt-lindane">comme dans le cas du lindane</a>, interdit en France depuis 1998 pour les usages agricoles et assimilés - mais seulement en 2006 dans les produits anti-poux, qui persiste encore néanmoins dans l’environnement).</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pesticides-vers-une-meilleure-reconnaissance-des-effets-sur-la-sante-des-enfants-dagriculteurs-222330">Pesticides : vers une meilleure reconnaissance des effets sur la santé des enfants d’agriculteurs</a>
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<p>Ainsi, dans le meilleur des cas, pour des cancers très étudiés et pour des familles chimiques de pesticides très anciennes (herbicides tels que le 2,4D ou insecticides organochlorés comme le DDT, utilisés depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale), il n’existe pas plus d’une dizaine d’études disponibles permettant de documenter un lien.</p>
<p>Dans la méta-analyse de 2015 qui a conclu à une augmentation de risque de cancer de la prostate de plus de 50 % pour les expositions professionnelles au lindane, faute de données, les auteurs n’ont pu analyser que 5 organochlorés parmi la vingtaine qui ont été utilisés massivement dans le monde depuis les années 1950…</p>
<p>Les auteurs de la méta-analyse de 2014 qui a établi un lien entre lymphomes non hodgkiniens et expositions à des pesticides spécifiques (21 familles chimiques et plus de 80 matières actives rapportées) n’ont identifié que 12 études fournissant des données sur les phénoxy-herbicides (2,4D, MCPA…).</p>
<p>En 2017, d’autres auteurs se sont focalisés sur le lien entre ces lymphomes non hodgkiniens et l’exposition au 2,4D à partir de 12 études cas-témoins et d’une cohorte historique dans une usine de production de cet herbicide. Cette méta-analyse a pu conclure à une augmentation du risque de 70 % chez les professionnels les plus exposés.</p>
<h2>D’autres maladies que le cancer sont aussi concernées</h2>
<p>Au-delà des cancers, des données de plus en plus nombreuses et convergentes indiquent que l’exposition aux pesticides a pour conséquences d’autres effets sur la santé. Les effets sur le cerveau, par exemple, sont de mieux en mieux documentés.</p>
<p>D’après les expertises collectives de 2013 et de 2021 de l’Inserm, le niveau de présomption du lien <a href="https://www.inserm.fr/wp-content/uploads/2021-07/inserm-expertisecollective-pesticides2021-rapportcomplet-0.pdf#page=265">entre l’exposition aux pesticides et le développement d’une maladie de Parkinson est fort</a>. Les connaissances sur ce lien se sont constituées au cours du temps à partir de la survenue de quelques cas observés chez de personnes ayant été exposées à des substances proches de certains herbicides (des toxicomanes ayant consommé des drogues contenant une substance, le MPTP, très proche chimiquement du paraquat et du diquat, deux herbicides largement utilisés).</p>
<p>Ces constats ont été renforcés par des études géographiques montrant une plus forte prévalence de la maladie dans certaines zones agricoles, puis des études cas-témoins et quelques données de cohorte. Au final, les nombreuses études publiées mettent en évidence un risque de maladie de Parkinson quasiment doublé chez les personnes ayant été exposées aux pesticides.</p>
<p>Les données toxicologiques renforcent la compréhension de ce lien : chez des animaux exposés en laboratoire à certains pesticides (notamment la roténone, une molécule dérivée d’une plante et considérée comme un insecticide biologique), des atteintes neurodégénératives ont été mises en évidence.</p>
<p>Par ailleurs, plus d’une cinquantaine d’études ont également révélé des altérations des performances cognitives (capacités du cerveau à traiter les informations) chez les personnes exposées de manière chronique aux pesticides, ce qui a également conduit l’expertise collective de l’Inserm à conclure à un niveau de présomption fort pour ces troubles.</p>
<p>Ces résultats interrogent sur un possible lien avec la maladie d’Alzheimer, pour laquelle les troubles cognitifs peuvent représenter des symptômes précurseurs. Cependant, le nombre d’études sur cette maladie reste aujourd’hui encore limité. De ce fait, le niveau de présomption du lien est considéré comme « moyen ».</p>
<p>Il faut enfin souligner que certaines altérations respiratoires chroniques ont donné lieu à un grand nombre d’études probantes au cours des dix dernières années, amenant l’Inserm à la conclusion d’un niveau de présomption fort entre l’exposition aux pesticides et le risque de développer <a href="https://www.inserm.fr/dossier/bronchopneumopathie-chronique-obstructive-bpco/">une bronchopneumopathie chronique obstructive</a>, une grave maladie inflammatoire des bronches.</p>
<h2>Accumuler et croiser les données grâce à des cohortes de grande taille</h2>
<p>La difficulté à documenter l’effet de molécules pesticides spécifiques a été en partie résolue dans certaines études récentes, qui se sont essentiellement appuyées sur de grandes cohortes prospectives.</p>
<p>C’est par exemple le cas de l’<em>Agricultural Health Study</em> aux USA, qui porte sur plus de 50 000 agriculteurs utilisateurs de pesticides inclus à la fin des années 1990 (les questionnaires initiaux interrogeaient les agriculteurs sur l’usage d’une cinquantaine de molécules spécifiques).</p>
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<img alt="Un panneau portant une mention en anglais et en espagnol interdisant l’entrée d’une zone traitée." src="https://images.theconversation.com/files/576266/original/file-20240216-18-89sfx3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/576266/original/file-20240216-18-89sfx3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/576266/original/file-20240216-18-89sfx3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/576266/original/file-20240216-18-89sfx3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/576266/original/file-20240216-18-89sfx3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/576266/original/file-20240216-18-89sfx3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/576266/original/file-20240216-18-89sfx3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un panneau portant une mention en anglais et en espagnol interdisant l’entrée d’une zone traitée.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Eerie_caution_sign_about_use_of_pesticides.jpg">Austin Valley / Wikimedia Commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>En France, depuis le milieu des années 2000, la cohorte AGRIculture & CANcer (<a href="https://www.agrican.fr/">AGRICAN</a>) suit plus de 182 000 affiliés agricoles dans 11 départements français métropolitains, dont près de 70 % d’agriculteurs/éleveurs. Ces participants sont utilisateurs de pesticides pour plus de 70 % des hommes et plus de 20 % des femmes.</p>
<p>Les cohortes Agricultural Health Study et AGRICAN sont en outre associées avec des données du recensement agricole norvégien au sein d’un consortium international de cohortes agricoles nommé AGRICOH.</p>
<p>Parallèlement, la plupart des études cas-témoins plus récentes permettent d’analyser le lien avec des pesticides spécifiques. De plus, certaines de ces études cas-témoins – les plus anciennes – sont réunies en consortium internationaux portant sur des maladies ciblées, généralement peu fréquentes, et bénéficiant du regroupement de cas à l’échelle internationale.</p>
<p>C’est le cas du consortium INTERLYMPH : regroupant plus de 20 études cas-témoins conduites dans une dizaine de pays différents, dont la France, il porte sur plus de 17 000 patients atteints de lymphomes.</p>
<h2>Une nocivité confirmée</h2>
<p>À l’heure actuelle, AGRICAN a permis d’obtenir des résultats concernant les effets d’expositions professionnelles agricoles – incluant les pesticides – sur les cancers de la prostate, de la vessie, du côlon et du rectum, du système nerveux central, des ovaires ainsi que pour les myélomes multiples ou les sarcomes.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/576259/original/file-20240216-24-ipzdgl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Avertissements sur un sac de semences traitées." src="https://images.theconversation.com/files/576259/original/file-20240216-24-ipzdgl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/576259/original/file-20240216-24-ipzdgl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/576259/original/file-20240216-24-ipzdgl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/576259/original/file-20240216-24-ipzdgl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/576259/original/file-20240216-24-ipzdgl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/576259/original/file-20240216-24-ipzdgl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/576259/original/file-20240216-24-ipzdgl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Avertissements sur un sac de semences traitées.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Semences_de_France,_produit_canc%C3%A9rig%C3%A8ne.jpg">Wikimedia Commons / Yann</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Pour chacun de ces cancers, plusieurs secteurs de production ont été associés à des effets délétères, ainsi que certaines tâches associées soit à une exposition directe, lors de l’application des pesticides sur les cultures ou en traitement de semences, soit à l’exposition indirecte : réentrée (autrement dit, le fait de revenir dans les cultures juste après les traitements, ce qui conduit à un contact avec des surfaces traitées et un transfert de résidu de la plante vers la peau des travailleurs), contact avec des semences enrobées, récoltes…</p>
<p>Pour permettre aux personnes ayant travaillé en agriculture d’estimer leurs expositions à certains pesticides, en fonction des cultures sur lesquelles elles sont intervenues, un outil épidémiologique (<a href="https://sites.bph.u-bordeaux.fr/PESTIMAT/Pestimat_ModeEmploi">PESTIMAT</a>) a été élaboré. Celui-ci a permis d’évaluer l’influence, dans la survenue de tumeurs du système nerveux central, de molécules pesticides spécifiques, telles que les herbicides, insecticides et fongicides carbamates.</p>
<p>Par ailleurs, en 2019, AGRICOH a permis de conclure à une association entre l’exposition au glyphosate et la survenue d’un type de lymphome particulier, le lymphome diffus à grandes cellules B. Cette analyse a également permis de détecter une association entre l’exposition à un insecticide de la famille des pyréthrinoïdes, la deltaméthrine, et la survenue d’une autre hémopathie lymphoïde (les leucémies lymphoïdes chroniques).</p>
<p>Enfin, en 2021, les travaux d’INTERLYMPH ont montré (en s’appuyant sur 9 études cas-témoins pour 8 000 patients atteints de lymphomes), que l’exposition des agriculteurs à deux insecticides, le carbaryl et le diazinon, était associée à un doublement du risque de certains lymphomes. L’année suivante, d’autres travaux menés dans le cadre d’INTERLYMPH ont révélé que chez les personnes ayant utilisé pendant de nombreuses années des phénoxy-herbicides comme le 2,4 D, les risques de survenue de plusieurs lymphomes spécifiques étaient doublés.</p>
<h2>Des questions encore en suspens qui concernent aussi d’autres professions</h2>
<p>L’impact de l’exposition professionnelle aux pesticides sur la santé humaine, notamment en termes de cancers et de certaines maladies neurodégénératives, ne fait guère de doute aujourd’hui, en raison d’une littérature scientifique nombreuse et convergente. Les arguments en faveur d’un lien entre cette exposition et d’autres maladies, en particulier respiratoires et endocriniennes, sont aussi de plus en plus nombreux au fil des ans.</p>
<p>Cependant, les connaissances nécessitent d’être encore renforcées. En effet, des zones d’ombre persistent notamment quant aux fenêtres d’exposition les plus critiques. L’impact des expositions aux pesticides pendant la vie fœtale et l’enfance est aussi une source de préoccupations.</p>
<p>Par ailleurs, si l’agriculture est le secteur professionnel utilisant les plus grandes quantités de pesticides, de nombreux autres secteurs d’activité sont également concernés, mais nettement moins étudiés (espaces verts, industrie du bois, hygiène publique, pompiers, industries agroalimentaires…).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223102/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre Lebailly est membre élu du Conseil d'Administration de la Ligue Nationale de Lutte contre le Cancer au niveau national et au niveau du comité départemental du Calvados. Il a reçu des financements de diverses associations/fondations (Ligue contre le Cancer, Fondation de France, Fondation ARC) et structures publiques (ANSES, Office Français de la Biodiversité, INSERM, ANR...) ou privées (MSA, Centre de Lutte Contre le Cancer François Baclesse). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Isabelle Baldi a reçu des financements de ANR, Ligue contre le cancer, INSERM, ANSES, ECOPHYTO, Fondation de France, ARC, ...(financements publics ou associations reconnues d'utilité publique)</span></em></p>Les effets des pesticides sur la santé des agriculteurs ont été constatés dès la fin du XIXᵉ siècle. Depuis, un lien clair a été établi entre ces produits et certains cancers plus fréquents dans la profession.Pierre Lebailly, Maître de Conférences en Santé publique, membre de l'Unité de recherche Interdisciplinaire pour la prévention et le traitement des cancers - ANTICIPE, chercheur en épidémiologie au Centre de Lutte Contre le Cancer François Baclesse à Caen, Université de Caen NormandieIsabelle Baldi, Professeur des Universités – Praticien Hospitalier, co-directrice de l’équipe EPICENE ( Epidémiologie du cancer et des expositions environnementales) - Centre de Recherche INSERM U 1219, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2234142024-02-15T14:10:12Z2024-02-15T14:10:12ZLes émulsifiants, des additifs alimentaires qui pourraient être associés à un risque de cancer<p><em>Les émulsifiants sont des additifs alimentaires très couramment présents dans les produits alimentaires en France. En 2023, des travaux basés sur la cohorte NutriNet-Santé avaient mis en évidence l’existence d’un lien entre leur consommation <a href="https://www.bmj.com/content/382/bmj-2023-076058">et le risque de maladies cardiovasculaires</a>. Pour la première fois, de nouveaux travaux publiés dans la revue PLoS Medicine suggèrent <a href="https://journals.plos.org/plosmedicine/article?id=10.1371/journal.pmed.1004338">l’existence d’un lien entre consommation d’émulsifiants et risque accru de cancer</a>.</em></p>
<p><em>Mathilde Touvier, qui dirige l’équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (Eren, Inserm/Inrae/CNAM/Université Sorbonne Paris Nord/Université Paris Cité), et Bernard Srour, chercheur en épidémiologie dans cette même équipe, coordonnateur du Réseau nutrition activité physique cancer recherche (Réseau NACRe), ont coordonné ces travaux, dans le cadre de <a href="https://etude-nutrinet-sante.fr/">l’étude NutriNet-Santé</a>. Ils décryptent ces nouveaux résultats.</em></p>
<hr>
<p><strong>The Conversation : Pouvez-vous nous expliquer à quoi servent les émulsifiants ?</strong></p>
<p><strong>Mathilde Touvier :</strong> Les émulsifiants ont pour rôle d’obtenir certaines textures dans les aliments industriels, de rajouter de l’onctuosité, et de permettre la stabilité des mélanges obtenus dans le temps. Ainsi, la durée de conservation est allongée, et les produits peuvent rester plus longtemps en rayon sans perdre leurs propriétés.</p>
<p>On trouve des émulsifiants dans de nombreux produits, depuis des desserts (madeleines, gâteaux, glaces…) jusqu’à des plats préparés en passant par des barres chocolatées, des margarines, des sauces industrielles, etc. Par ailleurs, certains de ces additifs se retrouvent même dans des produits que le consommateur pourrait juger comme « sains », comme les margarines allégées, souvent perçues comme une meilleure alternative au beurre, ou certaines marques de biscottes ou de yaourts.</p>
<p>Il existe de nombreuses sortes d’émulsifiants : les mono- et diglycérides d’acides gras, les carraghénanes (des polysaccharides obtenus à partir d’algues rouges), des amidons modifiés, des lécithines, des phosphates, des celluloses, des gommes, des pectines…</p>
<p>Leur présence dans les aliments est très variable d’une marque à l’autre, y compris pour un même type de produit. Par exemple, une crème glacée à la vanille d’une certaine marque peut en contenir, tandis que celle d’une autre marque n’en contiendra pas.</p>
<p><strong>The Conversation : Vous avez étudié les liens avec le risque de cancer de plusieurs dizaines d’émulsifiants retrouvés dans des produits de grande consommation. Concrètement, comment avez-vous procédé ?</strong></p>
<p><strong>Bernard Srour :</strong> Nous avons mesuré l’exposition à presque une soixantaine d’additifs, dont une trentaine était consommée par au moins 5 % de la population. Pour cela, nous avons travaillé <a href="https://etude-nutrinet-sante.fr/">dans le cadre de l’étude de cohorte NutriNet-Santé</a>. Nous avons dans un premier temps estimé l’apport en additifs alimentaires de type émulsifiants dans l’alimentation des participants, puis nous avons mené une étude épidémiologique afin de déterminer s’il existait un lien statistique entre ces additifs et le développement de cancers.</p>
<p>Plus de 92 000 personnes ont été sélectionnées, l’une des conditions étant qu’elles n’aient pas eu de cancer avant leur inclusion ni pendant leur deux premières années de suivi dans la cohorte. Leurs comportements alimentaires ont été évalués par des questionnaires détaillés et répétés, afin de déterminer leurs habitudes de consommation. Lorsqu’un participant déclarait avoir consommé un aliment d’une marque donnée, nous listions les éléments composant cet aliment afin de déterminer les additifs alimentaires qu’il contenait.</p>
<p>Nous avons pour cela croisé plusieurs bases de données, notamment celle d’<a href="https://fr.openfoodfacts.org/">Open Food Facts</a>, une base de données collaborative, ainsi que la base <a href="https://www.oqali.fr/">OQALI</a> (Observatoire de la qualité de l’alimentation, une base de données nationale gérée par l’Institut national de la recherche agronomique et de l’environnement (INRAE) et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)), et celle de Mintel Global New Products Database (GNPD). Cela nous a permis notamment de suivre les changements de composition des aliments au fil du temps, lorsque certaines formulations étaient modifiées par les industriels.</p>
<p>Au-delà de ces aspects qualitatifs, nous avons aussi effectué des dosages, ou bénéficié de ceux qui avaient été faits par d’autres structures (notamment par l’Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA) ou l’association de consommateurs UFC – Que Choisir).</p>
<p>Pour limiter les risques de biais, nous avons aussi, bien évidemment, tenu compte de facteurs tels que l’âge, le sexe, l’indice de masse corporelle, la consommation d’alcool, le statut tabagique, la pratique d’activité physique… Un grand nombre de paramètres nutritionnels ont également été pris en compte (apports en énergie, sucre, sel, part d’aliments « ultra-transformés » dans le régime alimentaire, consommation d’édulcorants, etc.), afin de tenir compte de la qualité globale de l’alimentation, pour que l’on ne puisse pas se dire que cet effet pourrait être la conséquence d’une « malbouffe » générale.</p>
<p><strong>The Conversation : Vos résultats indiquent un lien entre certains émulsifiants et l’augmentation du risque de certains cancers. Lesquels ?</strong></p>
<p><strong>Mathilde Touvier :</strong> Nous avons observé des associations entre un apport plus élevé de certains de ces additifs, notamment les mono- et diglycérides d’acides gras (E471) ou les carraghénanes (E407 et E407a), et un risque accru de différents cancers.</p>
<p>En l’occurrence, pour le E471, les plus forts consommateurs dans cette étude (3<sup>e</sup> tertile de consommation) avait un risque accru de cancer tous types confondus de l’ordre de 15 %, comparé aux plus faibles consommateurs (premier tertile). Les associations étaient plus spécifiquement observées pour le cancer du sein, et le cancer de la prostate.</p>
<p>Aucune association stable n’a été détectée entre consommation d’émulsifiants et le risque de cancer colorectal dans cette étude, mais la puissance statistique était limitée pour cette localisation de cancer. Il sera donc important de reproduire ces analyses dans quelques années, avec une durée de suivi et un nombre de cas plus importants.</p>
<p>Concernant les carraghénanes, les associations semblent concerner plus spécifiquement le cancer du sein. Les plus forts consommateurs de E407 avaient un risque plus élevé de 28 % comparés aux plus faibles consommateurs.</p>
<p><strong>The Conversation : A-t-on une idée des raisons pour lesquelles ces additifs sont associés à un risque de cancer plus important ? Des hypothèses sur leurs modes d’action ?</strong></p>
<p><strong>Mathilde Touvier :</strong> Dans une étude épidémiologique telle que la nôtre, l’objectif est de détecter des associations, mais il est difficile d’extrapoler pour « deviner » les mécanismes sous-jacents à partir de ces analyses</p>
<p>Il pourrait exister un effet de « classe », qui serait lié à la « famille » des émulsifiants, et donc au mécanisme d’émulsion, cependant étant donné que l’on ne constate pas d’association entre la quantité totale d’émulsifiants et les risques de cancer dans cette analyse, cette hypothèse ne semble pas la plus probable.</p>
<p>En revanche, nos collègues toxicologues vont devoir maintenant essayer d’expliquer pourquoi certaines substances comme les carraghénanes ont l’air d’avoir un rôle plus important que d’autres. Certaines pistes d’explication existent déjà.</p>
<p>On sait par exemple, grâce aux travaux de l’équipe de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/?term=Beno%C3%AEt%20Chassaing%20emulsifier&sort=date&page=1">Benoît Chassaing</a>, co-auteur de notre article, que certains émulsifiants <a href="https://presse.inserm.fr/un-additif-alimentaire-couramment-utilise-altererait-le-microbiote-et-lenvironnement-intestinal-humain/44394/">perturbent le microbiote intestinal ainsi que certains paramètres métaboliques</a>, ce qui se traduit notamment par des phénomènes inflammatoires.</p>
<p>Mais il y a encore beaucoup de choses à découvrir et à comprendre.</p>
<p><strong>Bernard Srour :</strong> Nous avons prévu dans ce projet un volet plus mécanistique, car dans la cohorte NutriNet-Santé, en plus des données nutritionnelles, nous avons une collection de fluides biologiques (urine et plasma) pour près de 20 000 participants. Dans ces échantillons, nous avons fait des dosages de marqueurs métaboliques, des marqueurs de l’inflammation et des marqueurs du stress oxydant.</p>
<p>Dans les prochaines étapes du projet, nous allons regarder si les associations observées avec le cancer, et celles mises en évidence précédemment <a href="https://www.bmj.com/content/382/bmj-2023-076058">avec les maladies cardiovasculaires</a>, peuvent s’expliquer par des perturbations au niveau de ces marqueurs.</p>
<p>L’idée serait de mieux comprendre par quelles voies mécanistiques biologiques l’ingestion de ces additifs peut influencer le risque de cancers et de maladies cardiométaboliques. Des prélèvements de selles sont également en cours pour analyser le microbiote intestinal.</p>
<p>Soulignons aussi que s’agissant d’un projet pluridisciplinaire, ce sont les résultats obtenus par les toxicologues sur certains émulsifiants qui nous ont amenés à nous intéresser à ces additifs. D’autres travaux sont en cours, notamment pour tester comment des mélanges de ces additifs pourraient avoir des liens avec la santé, à travers des approches épidémiologiques, et expérimentales.</p>
<p>C’est en assemblant ces différentes pièces du puzzle, études de cohortes, études expérimentales, et interventionnelles de courte durée chez l’humain si possible, que l’on peut espérer obtenir un jour une image globale des effets de ces molécules sur la santé.</p>
<p><strong>The Conversation : Quelles sont les limites de cette étude ?</strong></p>
<p><strong>Bernard Srour :</strong> La cohorte était majoritairement composée de femmes (79 %), et les participants avaient un âge moyen de 45 ans, ainsi qu’un niveau d’éducation plus élevé que la moyenne (donc faisant plus attention à leur alimentation), ce qui limite la possibilité de généraliser ces résultats à l’ensemble de la population. En outre, dans ce type d’études épidémiologiques, malgré la prise en compte d’un grand nombre de facteurs dits de confusion (comme l’âge, le statut tabagique, etc.), le lien de causalité ne peut être directement établi. Pour avoir une vue d’ensemble, d’autres études seront nécessaires.</p>
<p><strong>The Conversation : En attendant d’en savoir plus, quelle serait la conduite à tenir ? Peut-on se passer de ces additifs, et si oui, faut-il revoir la réglementation ?</strong></p>
<p><strong>Mathilde Touvier :</strong> Les émulsifiants ne sont pas indispensables, au sens où ils ne sont pas là pour garantir la sécurité microbiologique, des produits, par exemple. Ils visent avant tout à faciliter les procédés de fabrication, et à assurer la stabilité de ces mélanges dans le temps.</p>
<p>Il est possible de s’en passer, puisque certaines marques le font.</p>
<p>Actuellement, bien qu’on n’en soit pas encore à un niveau de preuve fort, on constate qu’un certain nombre de présomptions s’accumulent, au niveau expérimental comme au niveau épidémiologique, quant à leurs effets sur la santé. À la lumière de ces nouveaux éléments, la question qui se pose pour les autorités telles que l’autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), c’est : « À partir de quel moment est-ce qu’on agit ? »</p>
<p>En tant que consommateur, d’une façon générale, le mieux est d’appliquer ce qui figure déjà dans le <a href="https://www.mangerbouger.fr/ressources-pros/le-programme-national-nutrition-sante-pnns/qu-est-ce-que-le-pnns">programme national nutrition santé</a> (PNNS) : limiter les aliments ultra-transformés, et limiter les aliments contenant des additifs « cosmétiques » comme peuvent l’être les émulsifiants.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223414/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bernard Srour a reçu des financements de l'ANR et du département Alimentation humaine d'INRAE dans le cadre d'une Chaire de Professeur Junior. Il a reçu des financements de l'Institut national du Cancer (INCa) et de la Fondation ARC pour le fonctionnement du Réseau NACRe. Bernard Srour a reçu des fonds de la Fondation Bettencourt-Schueller dans le cadre du Prix Jeunes Chercheurs 2020.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mathilde Touvier a reçu des financements de divers organismes publics ou associatifs à but non lucratif (ERC, INCa, Fondation Bettencourt, Ministère de la Santé...). </span></em></p>On trouve des émulsifiants dans un grand nombre d’aliments industriels. De nouveaux travaux révèlent un lien entre la consommation de ces additifs et une augmentation des risques de cancers.Bernard Srour, Research Associate Professor of Epidemiology at CRESS - EREN (Inrae, Inserm, Université Sorbonne Paris Nord, Université Paris Cité), and head of the NACRe network (Réseau NACRe), InsermMathilde Touvier, Directrice de l'Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle, U1153 Inserm,Inra,Cnam, Université Sorbonne Paris Nord, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2223572024-02-12T14:09:52Z2024-02-12T14:09:52ZCancer du poumon : une découverte pourrait mieux prédire les patients à risque de récidive et raffiner le traitement<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/573525/original/file-20240205-29-abkjt8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La chimiothérapie est utilisée comme traitement à tous les patients atteints d'un cancer du poumon. Or, plusieurs n'auraient pas besoin d'un traitement aussi invasif si les diagnostics sur les risques de récidive étaient plus raffinés. Une nouvelle technologie pourrait changer la donne.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Le cancer du poumon <a href="https://cancer.ca/en/research/cancer-statistics/cancer-statistics-at-a-glance">cause plus de décès que les cancers du sein, du côlon et de la prostate réunis</a>. </p>
<p>Toutefois, grâce aux progrès réalisés dans son dépistage, davantage de patients vont être diagnostiqués à un stade plus précoce, ce qui leur permettra de subir une intervention chirurgicale. Celle-ci constitue la principale modalité de traitement pour les patients avec un cancer du poumon de stade précoce. </p>
<p>Malheureusement, une proportion significative de patients connaîtront une récidive de leur cancer après la résection, une chirurgie pour enlever la tumeur, et les protocoles cliniques actuels ne permettent pas de prédire quels sont les patients à risque. En le sachant mieux, des traitements ciblés pourraient leur être offerts. </p>
<p>Pour trouver des solutions à ce problème, notre groupe de recherche à l’Université McGill, en collaboration avec l’Université Laval, a entamé un projet <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-022-05672-3#MOESM1">dont les premiers résultats ont été publiés dans la revue <em>Nature</em></a>. Nous avons découvert que l’utilisation d’une nouvelle technologie d’imagerie, ainsi que l’intelligence artificielle, pourraient changer la donne.</p>
<h2>Trop, ou pas assez d’interventions</h2>
<p>Ce dilemme clinique a des implications importantes sur le choix du traitement, tel que la chimiothérapie. Ainsi, les patients atteints de cancer du poumon qui seraient guéris par la chirurgie pourraient être épargnés des toxicités de la chimiothérapie, et les patients qui auraient un risque de récidive de leur cancer pourraient bénéficier d’interventions thérapeutiques supplémentaires.</p>
<p>Ainsi, la prédiction de la récidive pour les patients atteints d’un cancer du poumon de stade précoce représente un défi avec des implications importantes pour les 31 000 Canadiens qui continuent d’être diagnostiqués avec cette terrible maladie chaque année.</p>
<h2>Imagerie par cytométrie de masse</h2>
<p>Pour relever ce défi clinique, nous avons utilisé l’<a href="https://www.mcgill.ca/gci/fr/plateformes/cytometrie-de-masse#:%7E:text=La%20cytom%C3%A9trie%20de%20masse%20par,prot%C3%A9ines%20au%20niveau%20des%20cellules.">imagerie par cytométrie de masse</a> (ICM), une nouvelle technologie qui permet une caractérisation complète du microenvironnement tumoral. </p>
<p>Il s’agit d’un écosystème complexe composé d’interactions entre les cellules tumorales, les cellules immunitaires, notamment les lymphocytes, et diverses cellules structurelles. L’ICM permet de visualiser jusqu’à 50 marqueurs à la surface de cellules, soit beaucoup plus que ce qui était possible auparavant. </p>
<p>Cette technologie permet d’identifier différents types de cellules et de déterminer leur organisation spatiale, c’est-à-dire comment elles interagissent les unes avec les autres. L’ICM produit des images qui peuvent être analysées pour déterminer la fréquence des principales sous-populations cellulaires, leurs états d’activation, les autres types de cellules avec lesquelles elles interagissent et leur localisation dans des regroupements de cellules. </p>
<p>Nos résultats publiés dans <em>Nature</em> ont révélé que divers types de cellules peuvent interagir dans des communautés de cellules, et que les communautés avec des lymphocytes B étaient fortement associées à une plus longue survie chez les patients atteints d’un cancer du poumon. Notre étude souligne qu’au-delà de la fréquence des cellules, les interactions cellulaires et la localisation spatiale ont également une corrélation très forte avec d’importants résultats cliniques comme la survie.</p>
<h2>L’intelligence artificielle pour de meilleures prédictions</h2>
<p>À partir de nos résultats initiaux, nous avons émis l’hypothèse que des caractéristiques spatiales importantes, comme les interactions cellulaires, intégrées dans les images ICM pourraient être importantes pour prédire des résultats cliniques. </p>
<p>Notre ensemble de données, composé de 416 patients et de plus de 1,6 million de cellules, a fourni suffisamment de puissance pour effectuer des prédictions à l’aide de l’intelligence artificielle. Nous avons cherché à prédire quels patients atteints d’un cancer du poumon d’un stade précoce auraient une récidive de leur cancer après la chirurgie, ce qui nous permettrait d’adapter l’utilisation de la chimiothérapie. </p>
<p>En utilisant des échantillons tumoraux de 1 mm2, matériel facilement disponible à partir de résections chirurgicales ou de biopsies, nous avons utilisé des algorithmes d’intelligence artificielle pour faire nos prédictions. En utilisant les informations spatiales contenues dans les images ICM, notre algorithme a pu prédire avec une précision de 95 % quels patients connaîtraient une récidive du cancer. </p>
<h2>Six marqueurs peuvent faire toute la différence</h2>
<p>L’un des défis pour l’utilisation de nos résultats dans les hôpitaux est que l’ICM n’est pas disponible dans les milieux cliniques. Les services de pathologie clinique utilisent généralement des technologies moins complexes telles que l’immunofluorescence, qui sont souvent limitées à l’utilisation de trois marqueurs ou moins à la fois. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="image obtenue grâce à immunofluorescence" src="https://images.theconversation.com/files/573537/original/file-20240205-17-2oj4zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/573537/original/file-20240205-17-2oj4zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/573537/original/file-20240205-17-2oj4zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/573537/original/file-20240205-17-2oj4zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/573537/original/file-20240205-17-2oj4zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/573537/original/file-20240205-17-2oj4zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/573537/original/file-20240205-17-2oj4zm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Image d’immunofluorescence d’une tumeur traitée par immunothérapie. Cette technologie moins complexe est souvent limitée à l’utilisation de trois marqueurs ou moins à la fois.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour relever ce défi, nous avons cherché à identifier le nombre minimum des marqueurs nécessaires pour faire des prédictions significatives sur la récidive des patients atteints de cancer du poumon après une intervention chirurgicale. En utilisant six marqueurs, nous avons obtenu une précision de 93 % pour la prédiction de la progression, un résultat qui se rapproche de la précision de 95 % obtenue avec l’utilisation de 35 marqueurs. </p>
<p>Ces résultats suggèrent qu’en exploitant la puissance de l’intelligence artificielle avec les technologies disponibles dans les hôpitaux, nous pourrions être en mesure d’améliorer la gestion clinique post-chirurgicale des patients atteints d’un cancer du poumon d’un stade précoce. Notre objectif ultime est d’augmenter les taux de guérison pour les personnes présentant un risque élevé de récidive du cancer, tout en minimisant la toxicité pour ceux qui peuvent être guéris par la chirurgie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222357/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mark Sorin a reçu des financements du Fonds de recherche du Québec et des bourses d'études supérieures
du Canada Vanier.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Logan Walsh a reçu des financements de l'initiative interdisciplinaire en infection et immunité de l’Université McGill, du Brain Tumour Funders’ Collaborative, des instituts de recherche en santé du Canada (CIHR; PJT-162137), de la fondation canadienne pour l'innovation et est titulaire de la chaire de recherche Rosalind Goodman sur le cancer du poumon.</span></em></p>Le traitement pour les patients atteints d’un cancer du poumon est le même pour tous, indépendamment des risques de récidive. L’utilisation d’une nouvelle technologie pourrait raffiner le diagnostic.Mark Sorin, Étudiant au MD-PhD, chercheur en cancer du poumon, McGill UniversityLogan Walsh, Assistant Professor, McGill UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2208272024-02-08T16:21:09Z2024-02-08T16:21:09ZLa musculation a des bienfaits insoupçonnés sur la santé, surtout avec l'âge<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/568477/original/file-20231222-21-ph8fgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=455%2C14%2C8365%2C5662&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’entraînement musculaire est à peu près aussi efficace que les exercices aérobiques pour tous les aspects importants de la santé, y compris la santé cardiovasculaire.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Tout le monde s’accorde à dire que l’exercice physique est bon pour la santé. Parmi ses nombreux avantages, on peut noter l’amélioration des fonctions cardiaques et cérébrales, la régulation du poids, le ralentissement des effets du vieillissement et la réduction des risques de souffrir de plusieurs <a href="https://perspectivesinmedicine.cshlp.org/content/8/7/a029694">maladies</a> chroniques.</p>
<p>Cependant, on a trop longtemps considéré qu’une façon de se maintenir en forme, par les exercices aérobiques, était supérieure à l’autre, par la musculation, pour favoriser la santé. En réalité, elles sont aussi valables l’une que l’autre et elles peuvent toutes deux nous permettre d’atteindre le même objectif, c’est-à-dire une bonne forme physique générale.</p>
<p>Les exercices aérobiques, tels que la course à pied, la natation et le vélo, sont populaires parce qu’ils sont très bénéfiques. De nombreuses <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pmed.1001335">données scientifiques</a> le confirment.</p>
<p>Ce qu’on sait moins, c’est que l’entraînement contre résistance – que ce soit avec des haltères, des appareils d’haltérophilie ou de simples pompes, fentes et tractions – fonctionne à peu près aussi bien que les exercices aérobiques pour tous les aspects importants de la santé, y compris la santé cardiovasculaire.</p>
<p>Les exercices de résistance offrent un autre avantage : le développement de la force et de la puissance, qui devient de plus en plus important <a href="https://doi.org/10.1007/s12603-021-1665-8">avec l’âge</a>.</p>
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<iframe src="https://player.vimeo.com/video/843867756" width="500" height="281" frameborder="0" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Vidéo sur les différentes formes de musculation et leur efficacité pour améliorer sa force.</span></figcaption>
</figure>
<p>Comme mes collègues et moi-même l’expliquons dans un <a href="https://doi.org/10.1249/FIT.0000000000000916">article récemment publié</a> par l’<em>American College of Sports Medicine</em>, le développement et le maintien de la force musculaire permettent de se lever facilement d’une chaise, de préserver son équilibre et sa posture et d’activer son métabolisme.</p>
<p>Alors, si les exercices aérobiques et l’entraînement contre résistance offrent à peu près autant des bienfaits, comment se fait-il que nous voyions tellement plus de coureurs et de cyclistes que d’haltérophiles ?</p>
<p>C’est le fruit d’une combinaison de facteurs tels que le timing, la commercialisation et les stéréotypes.</p>
<h2>La montée de l’aérobique</h2>
<p>La préférence pour les exercices aérobiques remonte à <a href="https://www.cooperinstitute.org/research/ccls">l’étude longitudinale du Cooper Centre</a>, qui a joué un rôle essentiel dans la démonstration de l’efficacité de ce type d’entraînement. Le Dr Ken Cooper a inventé – ou du moins popularisé – le terme avec son livre <a href="https://www.cooperaerobics.com/About/Aerobics.aspx">« Aerobics »</a>, incitant les baby-boomers rivés à leur bureau à faire de l’exercice pour se mettre en forme.</p>
<p>Pendant ce temps, on ne s’intéresse pas à la musculation, en <a href="https://www.cnet.com/health/fitness/does-lifting-weights-make-women-bulky/">particulier chez les femmes</a>, en raison de l’idée erronée qui veut que ce type d’entraînement soit réservé aux hommes qui aspirent à être super musclés. <a href="https://www.britannica.com/biography/Charles-Atlas">Charles Atlas</a>, ça vous dit quelque chose ?</p>
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<img alt="A smiling man holding small blue dumbbells" src="https://images.theconversation.com/files/567302/original/file-20231222-29-if70n6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/567302/original/file-20231222-29-if70n6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/567302/original/file-20231222-29-if70n6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/567302/original/file-20231222-29-if70n6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/567302/original/file-20231222-29-if70n6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/567302/original/file-20231222-29-if70n6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/567302/original/file-20231222-29-if70n6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les exercices de résistance ne gonflent pas forcément les muscles et ne nécessitent pas de soulever des charges lourdes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Des influences culturelles ont consolidé la prédominance des exercices aérobiques dans le domaine de la forme physique. En 1977, Jim Fixx a popularisé la course à pied et le jogging en publiant <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/The_Complete_Book_of_Running">« Jogging : courir à son rythme pour vivre mieux »</a>. Dans les années 1980, la vidéo <a href="https://www.janefonda.com/shop/fitness-videos/jane-fondas-complete-workout/">« Complete Workout »</a> de Jane Fonda et des émissions d’exercices telles qu’<a href="https://www.imdb.com/title/tt0268895/">« Aerobicize »</a> et <a href="https://www.imdb.com/title/tt0299431/">« 20 Minute Workout »</a> ont contribué à renforcer l’idée que pour s’entraîner, on doit augmenter sa fréquence cardiaque.</p>
<p>Le mot « aérobique », auparavant confiné au lexique de la science et de la médecine, est entré dans la culture populaire à peu près en même temps que les jambières, les survêtements et les bandeaux absorbants. De nombreuses personnes trouvaient logique l’idée que respirer fort et transpirer pendant une longue séance d’exercices vigoureux était le meilleur moyen de se mettre en forme.</p>
<p>Pendant ce temps, la musculation attendait qu’on braque les projecteurs sur elle.</p>
<h2>Reconnaître le mérite des exercices de résistance</h2>
<p>Si l’aérobique est le lièvre, la musculation est la tortue. L’entraînement aux poids et haltères se rapproche maintenant de son rival et se prépare à le dépasser, car les athlètes et les gens ordinaires reconnaissent désormais sa valeur.</p>
<p>La musculation n’est entrée dans les mœurs qu’au cours des 20 dernières années, et ce, même pour les sportifs de haut niveau. Aujourd’hui, elle renforce le corps et prolonge la carrière des joueurs de soccer ou de tennis, des golfeurs et de <a href="https://doi.org/10.1007/s40279-016-0486-0">bien d’autres sportifs</a>.</p>
<p>L’intérêt croissant pour l’entraînement contre résistance doit beaucoup au <a href="https://www.livestrong.com/article/545200-the-fall-of-fitness/">CrossFit</a>, qui, malgré certaines controverses, a contribué à briser les stéréotypes et à initier de nombreuses personnes, en particulier des femmes, à la pratique de la musculation.</p>
<p>Il est important de savoir que les exercices de résistance ne gonflent pas forcément les muscles et ne nécessitent pas l’utilisation de charges lourdes. Comme l’ont montré les recherches de notre équipe, soulever des poids légers jusqu’au point de défaillance en plusieurs séries procure de <a href="https://journals.physiology.org/doi/full/10.1152/japplphysiol.00154.2016">réels bienfaits</a>.</p>
<h2>Force et vieillissement</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="An older couple in sweatshirts using small dumbbells" src="https://images.theconversation.com/files/567293/original/file-20231222-23-reglr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/567293/original/file-20231222-23-reglr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=452&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/567293/original/file-20231222-23-reglr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=452&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/567293/original/file-20231222-23-reglr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=452&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/567293/original/file-20231222-23-reglr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=568&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/567293/original/file-20231222-23-reglr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=568&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/567293/original/file-20231222-23-reglr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=568&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La musculation peut aider au maintien de l’autonomie et de la fonctionnalité globale du corps.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Les bienfaits de la musculation ne se limitent pas à une amélioration de la force. Elle offre un aspect souvent négligé dans l’entraînement aérobique traditionnel : la capacité d’exercer une force rapidement, ou ce que l’on appelle la puissance. Avec l’âge, les activités de la vie quotidienne telles que se lever, s’asseoir et monter les escaliers demandent <a href="https://doi.org/10.1186/s11556-022-00297-x">plus de force et de puissance</a> que d’endurance cardiovasculaire.</p>
<p>Ainsi, la musculation peut être essentielle au maintien de l’autonomie et de la fonctionnalité globale du corps.</p>
<h2>Revoir le discours sur la mise en forme</h2>
<p>Le but n’est pas d’opposer la musculation à l’exercice aérobique, mais de reconnaître qu’ils se complètent. Il est préférable de pratiquer les deux types d’exercice plutôt que de se contenter d’une seule. L’<a href="https://doi.org/10.1161/CIR.0000000000001189"><em>American Heart Association</em></a> a récemment déclaré que</p>
<blockquote>
<p>« … l’entraînement contre résistance est une approche sûre et efficace pour améliorer la santé cardiovasculaire chez les adultes avec ou sans maladie cardiovasculaire… »</p>
</blockquote>
<p>Il est essentiel d’adopter une position nuancée, en particulier lorsque nous guidons des <a href="https://doi.org/10.1016/j.arr.2021.101368">personnes âgées</a> qui peuvent associer l’exercice physique principalement à la marche et ignorer qu’en négligeant la force et la puissance, elles seront de plus en plus limitées.</p>
<p>L’entraînement contre résistance peut être très varié, il offre un <a href="https://doi.org/10.1016/j.jshs.2023.06.005">éventail d’activités</a> pour répondre aux capacités de chacun.</p>
<p>Il est temps de revoir le discours sur la mise en forme pour faire davantage de place à la musculation. Il ne s’agit pas de la considérer comme un substitut à l’exercice aérobique, mais plutôt comme un élément essentiel d’une approche holistique de la <a href="https://doi.org/10.1249/ESM.0000000000000001">santé et de la longévité</a>.</p>
<p>En éliminant les stéréotypes, en démystifiant la pratique et en prônant l’inclusion, la musculation peut devenir accessible et attrayante pour un vaste public, ce qui conduira à une nouvelle façon de percevoir et de prioriser les avantages de cette forme d’entraînement pour la <a href="https://doi.org/10.1136/bjsports-2021-105061">santé et la forme physique</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220827/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Stuart Phillips reçoit des fonds des IRSC, du CRSNG, des NIH américains et de plusieurs bailleurs de fonds industriels. Il est affilié à Exerkine Corporation.</span></em></p>Les exercices aérobiques devraient partager la vedette avec l’haltérophilie en tant que forme d’exercice qui favorise la santé et qui peut être indispensable au fur et à mesure que nous vieillissons.Stuart Phillips, Professor, Kinesiology, Tier 1 Canada Research Chair in Skeletal Muscle Health, McMaster UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2216972024-02-07T15:45:06Z2024-02-07T15:45:06ZEn 2024, le Nutri-score évolue : pourquoi, et que faut-il en retenir ?<p>Le Nutri-score est un logo destiné à informer les consommateurs sur la qualité nutritionnelle des aliments et leur permettre de les comparer entre eux, tout en incitant les industriels à améliorer la composition nutritionnelle de leurs produits. Son mode de calcul a fait l’objet d’une révision qui entre en vigueur en 2024 dans les sept pays européens qui l’ont adopté. En voici les raisons, et ce qu’il faut en retenir.</p>
<h2>Une mise à jour planifiée</h2>
<p>Lorsqu’il a été proposé par les scientifiques en 2014 et adopté officiellement en France en 2017 puis dans 6 autres pays européens (Belgique, Allemagne, Luxembourg, Pays-Bas, Espagne et Suisse), il a été acté que le Nutri-score serait mis à jour régulièrement, en fonction de l’évolution de la science dans le domaine de la nutrition et également de l’évolution du marché alimentaire (afin de tenir compte des innovations et reformulations par les industriels).</p>
<p>En 2022, la gouvernance transnationale du Nutri-score, qui regroupe les pays qui l’ont adopté officiellement, a mandaté un comité scientifique composé d’experts sans conflits d’intérêts issus des 7 pays pour réaliser la mise à jour du mode de calcul du Nutri-score. Après 2 ans de travail, le comité a publié deux rapports très complets sur les <a href="https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/maj__rapport_nutri-score_rapport__algorithme_2022_.pdf">aliments généraux</a> et sur les <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/nutrition-et-activite-physique/documents/rapport-synthese/update-of-the-nutri-score-algorithm-for-beverages.-second-update-report-from-the-scientific-committee-of-the-nutri-score-v2-2023">boissons</a>).</p>
<p>Ces documents proposaient des points d’amélioration de l’algorithme initial, tout en maintenant sa structure générale. Rappelant que les classifications des aliments par le Nutri-score actuel étaient globalement adéquates sur le plan nutritionnel, le Comité a cependant proposé des modifications du mode de calcul pour diverses catégories d’aliments.</p>
<h2>Quels changements pour les aliments ?</h2>
<p>Les modifications spécifiques de l’algorithme sont les suivantes :</p>
<ul>
<li>une augmentation du nombre de points de pénalisation pour la teneur en sucre (15 points au lieu de 10 dans la version initiale). Ce choix s’explique par le fait qu’un [ <a href="https://efsa.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.2903/j.efsa.2022.7074">rapport récent de l’EFSA</a>] a montré qu’il n’y avait pas de seuil minimal de teneur en sucre sans risque pour la santé et pour permettre un alignement avec la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/en/ALL/?uri=CELEX:32011R1169">réglementation européenne</a>, afin de permettre une classification plus adéquate des produits sucrés ;</li>
</ul>
<hr>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-sucre-un-facteur-de-risque-de-cancer-189999">Le sucre, un facteur de risque de cancer ?</a>
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<hr>
<ul>
<li><p>une augmentation du nombre de points de pénalisation pour la teneur en sel (20 points au lieu de 10) : ce changement est lié au fait qu’un apport élevé en sodium augmente la pression artérielle et le risque d’hypertension, ce qui constitue un facteur de risque de <a href="https://www.who.int/data/gho/indicator-metadata-registry/imr-details/3082">maladies cardiovasculaires et d’insuffisance rénale chronique</a>. En outre, ce changement traduit la volonté de s’aligner sur les règles actuelles de l’Union européenne en matière de déclaration des nutriments. À ce titre, il s’agit de discriminer mieux les aliments fortement salés, afin de favoriser les versions moins salées et/ou de stimuler la reformulation des aliments par les industriels ;</p></li>
<li><p>une modification de l’allocation des points valorisant la teneur en fibres pour permettre une meilleure discrimination entre les produits céréaliers raffinés et complets et ainsi être en cohérence avec les recommandations nutritionnelles de santé publique ;</p></li>
<li><p>une augmentation du nombre de points pour les protéines (jusqu’à 7 points), avec une limitation des points pour les protéines de la viande rouge (2 points maximum) : les teneurs en protéine reflétant également les apports en calcium et fer, cette augmentation permet donc de mieux discriminer les aliments sources de ces nutriments. La limitation de la prise en compte des protéines dans la composante positive en ce qui concerne la viande rouge est justifiée par les <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10654-021-00741-9">travaux</a> mettant en évidence les liens entre apport important de viande rouge et risques de cancers, notamment colorectal ;</p></li>
<li><p>une modification de la composante « fruits, légumes, légumineuses, fruits secs et huiles de colza, olive et noix », qui désormais ne compte plus que les fruits, les légumes et les légumineuses (les fruits oléagineux étant désormais catégorisés avec les matières grasses, du fait de leur teneur élevée en lipides) ;</p></li>
<li><p>une modification du seuil entre le score A et le score B.</p></li>
</ul>
<h2>En ce qui concerne les boissons</h2>
<p>Le lait, les boissons lactées, les boissons fermentées à base de lait et les boissons végétales sont dorénavant inclus dans la catégorie des boissons (et non plus comme jusqu’à présent, dans la catégorie des aliments généraux).</p>
<p>Cette modification est motivée par le mode de consommation et d’usage de ces produits (des aliments liquides qui par définition sont bus et principalement consommés – seuls ou associés à d’autres composantes – comme des boissons), ainsi que par la volonté d’améliorer pour ces produits la capacité de mieux les discriminer en fonction de leur composition nutritionnelle. Il s’agit notamment d’objectiver les différences dans leur teneur en sucre et en graisses saturées.</p>
<p>Des modifications ont été proposées pour les composantes énergétiques, celles du sucre et des protéines, la composante positive « fruits et légumes » et l’ajout d’une composante négative supplémentaire, avec 4 points attribués en cas de présence d’édulcorants dans la boisson.</p>
<p>Cette dernière justification est liée au fait que les travaux scientifiques récents <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0735109720365967">n’ont pas permis de mettre en évidence un bénéfice des boissons édulcorées</a> et suggèrent pour certains édulcorants un <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pmed.1003950">possible effet délétère</a>. D’autre part, il existe un risque potentiel que la réduction de la teneur en sucre dans les boissons soit associée à une utilisation accrue des édulcorants. Pour toutes ces raisons les recommandations de santé publique en Europe visent à limiter leur consommation.</p>
<p>Enfin, le seuil du plafond lié à la présence de protéines (initialement fixé pour les produits négatifs comme supérieur à 11) a été supprimé. En effet, le maintien de ce seuil aurait conduit à des problèmes de classements de certains produits laitiers entiers.</p>
<h2>Un classement plus strict des produits</h2>
<p>Globalement, les modifications de l’algorithme conduisent à un classement plus strict des produits, sauf pour quelques groupes ciblés. Les produits sucrés et salés sont classés moins favorablement du fait de l’allocation des points désormais plus pénalisante.</p>
<p>Cela impacte par exemple les céréales sucrées du petit déjeuner sucrées. Ces dernières années, ces produits ont fait l’objet de reformulations qui ont réduit de façon significative leur teneur en sucre (elles sont passées de plus de 40 à 20-22 g de sucre/100g de céréales). Par ailleurs, la réduction concomitante de leur teneur en sel et l’ajout de blé complet, source de fibres, leur ont permis progressivement de se retrouver classées de C à B puis juste en dessous du seuil permettant d’être classées en A.</p>
<p>L’effort de reformulation du fabricant est louable. Toutefois, ces céréales contiennent tout de même encore des quantités relativement élevées de sucre et sont donc à nouveau classées en C, ce qui permet une discrimination par rapport aux céréales natures qui ne contiennent pas ou très peu de sucres (0 à 7 g/100g) et qui elles, se maintiennent en A.</p>
<p>Il faut cependant souligner que même en C, ces céréales « reformuléee » restent mieux classées que leurs concurrentes qui n’ont pas fait d’effort de réduction de leurs teneurs en sucre : ces dernières en contiennent généralement de 30 à 40 g pour 100g, ce qui les positionne en D ou E.</p>
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<img alt="Photo d’illustration des changements du classement Nutri-score de certains produits" src="https://images.theconversation.com/files/574058/original/file-20240207-26-aqocd5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/574058/original/file-20240207-26-aqocd5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=189&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/574058/original/file-20240207-26-aqocd5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=189&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/574058/original/file-20240207-26-aqocd5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=189&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/574058/original/file-20240207-26-aqocd5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=238&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/574058/original/file-20240207-26-aqocd5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=238&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/574058/original/file-20240207-26-aqocd5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=238&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le nouveau Nutri-score est plus strict avec certains produits.</span>
<span class="attribution"><span class="source">fournie par l’auteur</span></span>
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</figure>
<p>Les produits laitiers sucrés sont également moins favorablement classés. Ce déclassement est légitime, car le mode de calcul initial de l’algorithme, moins pénalisant pour le sucre dans le mode de calcul des aliments généraux, amenait certains laits aromatisés (chocolat, fraise, vanille…) et des yaourts à boire, pourtant sucrés, à bénéficier d’un classement trop favorable.</p>
<p>Désormais, « laits aromatisés » et « boissons lactées sucrées » ne seront plus classés A ou B (comme c’était le cas précédemment), mais principalement en D et E (certaines de ces boissons à faible teneur en sucre pourront se retrouver en C). De même, les boissons fermentées à base de lait (incluant les yaourts à boire sucrés et aromatisés) ne seront plus classées en A mais seront différenciées en fonction de leur teneur en sucre entre les classes de Nutri-score C et E.</p>
<p>Les boissons à base de plantes (incluant les boissons à base de soja, d’amande, d’avoine, de riz…) ne seront plus classées en A comme actuellement. Elles se distribueront entre les classes B et E selon leur composition nutritionnelle, notamment leurs teneurs en sucre.</p>
<p>Les fromages à pâte pressée à faible teneur en sel (comme l’emmental) passent de D à C, les autres fromages restant C, D ou E en fonction de leur teneur en sel et en acides gras saturés (dont les apports élevés sont liés à un risque accru de maladies chroniques, notamment de maladies cardiovasculaires).</p>
<p>La viande rouge (<a href="https://theconversation.com/pour-limiter-le-risque-de-cancer-colorectal-doit-on-vraiment-consommer-moins-de-viande-rouge-et-de-charcuterie-124728">dont la consommation excessive est considérée comme à risque élevé de certains cancers</a>) se retrouve moins bien classée que la volaille ou le poisson (dont les consommations ne sont pas associées à des effets défavorables sur la santé).</p>
<p>Les produits de la pêche, et en particulier les poissons gras sans ajouts de sel ou d’huile, sont principalement classés dans les catégories A et B du Nutri-score (ce qui est justifié par les travaux épidémiologiques mettant en évidence leurs effets favorables sur la santé, n <a href="https://theconversation.com/omega-3-ce-quil-faut-manger-ce-quil-faut-savoir-104117">otamment du fait de leurs teneurs élevées en oméga-3</a>).</p>
<p>Les pains complets riches en fibres sont classés plutôt en A alors que les pains blancs (raffinés, donc moins riches en nutriments et en fibres) se retrouvent en B ou C en fonction de leur teneur en sel.</p>
<p>Les fruits secs oléagineux et graines sans sel ni sucre ajoutés sont pour la plupart A ou B tandis que les versions salées et/ou sucrées sont en moyenne C ou D.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/amandes-noix-et-autres-fruits-a-coque-que-sait-on-de-leurs-effets-sur-la-sante-153800">Amandes, noix et autres fruits à coque : que sait-on de leurs effets sur la santé ?</a>
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<p>Les huiles avec de faibles teneurs en acides gras saturés (olive, colza, noix, huile de tournesol oléique) sont désormais classées B, tandis que les autres huiles sont classées en C ou D en fonction de leurs teneurs en acides gras saturés. L’huile de coco et le beurre se maintiennent en E du fait de leur teneur élevée en graisses saturées).</p>
<p>Les plats préparés, notamment riches en graisses saturées ou en sel, sont classés moins favorablement, passant en moyenne des classes A/B aux classes B/C voire D pour certaines catégories de produits, notamment certaines pizzas.</p>
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<img alt="Photo d’illustration des changements du classement Nutri-score des huiles" src="https://images.theconversation.com/files/574059/original/file-20240207-26-fds9cr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/574059/original/file-20240207-26-fds9cr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=201&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/574059/original/file-20240207-26-fds9cr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=201&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/574059/original/file-20240207-26-fds9cr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=201&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/574059/original/file-20240207-26-fds9cr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=252&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/574059/original/file-20240207-26-fds9cr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=252&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/574059/original/file-20240207-26-fds9cr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=252&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les classements des huiles sont eux aussi modifiés.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fournie par l’auteur</span></span>
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<h2>Boissons : seule l’eau reste A</h2>
<p>En ce qui concerne les boissons, l’eau reste la seule boisson classée A. Les boissons sucrées avec des teneurs en sucre très limitées (environ <2 g/100mL) passent en B, alors que celles avec des quantités élevées de sucre sont maintenues en D/E, permettant une meilleure discrimination des boissons en fonction de leur teneur en sucres.</p>
<p>Les boissons contenant des édulcorants ne sont plus classées en B mais en C (voire D ou E pour celles qui contiennent à la fois des édulcorants et du sucre).</p>
<p>Les laits écrémés et demi-écrémés se retrouvent en B, c’est-à-dire dans les classes de Nutri-score les plus favorables pour les boissons, puisque seule l’eau est classée A. Ils sont maintenant différenciés du lait entier, qui est classé C. Les boissons lactées sucrées (laits aromatisés), de même que les yaourts à boire aromatisés ne sont plus classées en B (comme c’était le cas avec la précédente version du Nutri-score) mais se retrouvent principalement en D et E (seuls certains à faible teneur en sucre peuvent être C).</p>
<p>Les boissons à base de plantes (soja, avoine, riz, amandes…) sont</p>
<p>classées de B à E selon leur composition nutritionnelle.</p>
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<img alt="Photo d’illustration des changements du classement Nutri-score des boissons" src="https://images.theconversation.com/files/574060/original/file-20240207-20-73rx7p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/574060/original/file-20240207-20-73rx7p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=248&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/574060/original/file-20240207-20-73rx7p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=248&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/574060/original/file-20240207-20-73rx7p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=248&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/574060/original/file-20240207-20-73rx7p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=312&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/574060/original/file-20240207-20-73rx7p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=312&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/574060/original/file-20240207-20-73rx7p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=312&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Parmi les boissons, seule l’eau est désormais classée en Nutri-score A.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fournie par l’auteur</span></span>
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<h2>Le cas des cacaos en poudre</h2>
<p>Les cacaos en poudre ont désormais globalement le même classement, quelles que soient les modalités de leur déclaration nutritionnelle. Le règlement européen sur l’information des consommateurs stipule en effet que la déclaration nutritionnelle du produit peut être présentée pour le produit tel que préparé si le produit ne peut être consommé tel que vendu.</p>
<p>Les cacaos en poudre tiraient parti de cette possibilité en indiquant souvent les valeurs nutritionnelles pour 100g ou 100mL de produit préparé selon une méthode de préparation détaillée, contenant donc en grande partie du lait demi-écrémé.</p>
<p>Ceci conduisait à leur attribuer un Nutri-score plutôt favorable (en général B). Avec la mise à jour de l’algorithme, que la déclaration soit faite sur le produit tel que vendu ou reconstitué avec du lait, le Nutri-score est en général le même, soit D.</p>
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<img alt="Photo d’illustration des changements du classement Nutri-score des poudres de cacao" src="https://images.theconversation.com/files/574063/original/file-20240207-28-3r7jiy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/574063/original/file-20240207-28-3r7jiy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=208&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/574063/original/file-20240207-28-3r7jiy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=208&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/574063/original/file-20240207-28-3r7jiy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=208&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/574063/original/file-20240207-28-3r7jiy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=261&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/574063/original/file-20240207-28-3r7jiy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=261&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/574063/original/file-20240207-28-3r7jiy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=261&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le classement des poudres de cacao a été revu pour limiter les biais liés à la préparation des breuvages les employant.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fournie par l’auteur</span></span>
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<p>Pour les autres groupes alimentaires, les classifications actuelles restent inchangées.</p>
<h2>2 ans de délai pour les industriels qui le souhaitent</h2>
<p>La version révisée du Nutri-score corrige certaines des limitations identifiées avec le recul depuis sa mise en place. Elle permet surtout une meilleure cohérence et un meilleur alignement avec les recommandations nutritionnelles récentes en vigueur en Europe, au bénéfice des consommateurs, et de la santé publique.</p>
<p>Cette mise à jour du Nutri-score est censée être en place depuis le 1<sup>er</sup> janvier 2024 dans les 7 pays qui l’ont adopté. Cependant, en France, elle ne prendra effet qu’en avril, du fait du gouvernement italien : celui-ci a en effet eu recours à une procédure de demande complémentaire reposant sur des arguments dénués de tout fondement pour décaler de 3 mois la mise en place de la version révisée du Nutri-score.</p>
<p>Les industriels bénéficieront d’un délai de deux ans pour l’appliquer, afin de pouvoir écouler leurs stocks et renouveler leurs étiquettes.</p>
<h2>Que peut-on attendre des futures mises à jour du Nutri-score ?</h2>
<p>Un point important sera, à côté de l’information des consommateurs sur la composition nutritionnelle, de fournir également une information sur le fait que l’aliment est ultra-transformé ou non (classé NOVA 4).</p>
<p>Il est aujourd’hui <a href="https://nutriscore.blog/2021/11/28/le-nutri-score-et-les-autres-dimensions-sante-des-aliments-informer-au-mieux-les-consommateurs/">impossible d’agréger les 2 dimensions</a> (qualité nutritionnelle et ultra-transformation) dans le cadre d’un algorithme unique qui résumerait à lui seul la valeur « santé » globale des aliments. En revanche, une possibilité est de les combiner graphiquement par exemple en ajoutant une bordure noire autour du Nutri-score si l’aliment est ultra-transformé.</p>
<p><a href="https://nutrition.bmj.com/content/6/1/108">Un essai randomisé contrôlé</a> a d’ores et déjà mis en évidence que ce type de logo combiné permet aux consommateurs de comprendre indépendamment ces deux dimensions complémentaires des aliments et d’orienter leurs choix vers des aliments plus favorables à leur santé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221697/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Chantal Julia a reçu des financements d'institutions publiques uniquement: Ministère de la Santé, IRESP, Santé publique France, INCa</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mathilde Touvier a reçu des financements d'organismes publics ou associatifs à but non lucratif de l'INCa, l'ERC, le Ministère de la Santé, etc. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pilar Galan et Serge Hercberg ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Le système d’étiquetage nutritionnel Nutri-score a évolué au 1ᵉʳ janvier 2024, afin de tenir compte des recommandations nutritionnelles les plus récentes en vigueur en Europe. Voici ce qui change.Serge Hercberg, Professeur Emérite de Nutrition Université Sorbonne Paris Nord (Paris 13) - Praticien Hospitalier Département de Santé Publique, Hôpital Avicenne (AP-HP), Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle, U1153 Inserm,Inra,Cnam, Université Sorbonne Paris NordChantal Julia, Maitre de Conférence Université Paris 13, Praticien Hospitalier, Hôpital Avicenne (AP-HP), Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle, U1153 Inserm,Inra,Cnam, Université Sorbonne Paris NordMathilde Touvier, Directrice de l'Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle, U1153 Inserm,Inra,Cnam, Université Sorbonne Paris Nord, InsermPilar Galan, Médecin nutritionniste, Directrice de Recherche INRAe, Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle, U1153 Inserm, Université de Paris, Université Sorbonne Paris Nord, Cnam, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2217952024-02-04T15:35:01Z2024-02-04T15:35:01ZRésistances aux antibiotiques : comment nous pouvons tous agir<p>Virus de la Covid-19, de la variole du singe, hausse des infections fongiques, multiplication des cas d’infections bactériennes sexuellement transmissibles… Les maladies infectieuses font leur grand retour dans l’actualité, alors qu’on les pensait vaincues grâce à la vaccination, aux progrès de l’hygiène, et à notre puissant arsenal thérapeutique, au premier rang duquel figurent les antibiotiques, les antiviraux et les antifongiques.</p>
<p>Malheureusement, après avoir un temps marqué le pas, ces microscopiques envahisseurs semblent contre-attaquer, et certaines nouvelles en provenance du front ne sont pas très bonnes pour nous. L’antibiorésistance, autrement dit la résistance des bactéries aux antibiotiques, inquiète tout particulièrement les spécialistes. Voici ce qu’il faut en savoir.</p>
<h2>L’antibiorésistance, un phénomène naturel</h2>
<p>Pour comprendre d’où vient l’antibiorésistance, il faut revenir sur l’origine de nos antibiotiques. Nombre d’entre eux proviennent, à l’origine, de molécules produites par des champignons ou des bactéries. En effet, dans l’environnement, les êtres vivants sont en compétition les uns avec les autres pour occuper une place (on parle aussi de « niche ») dans les écosystèmes, et en exploiter les ressources.</p>
<p>Dans ce contexte, certaines espèces produisent des molécules qui s’avèrent toxiques pour d’autres espèces, leur procurant un avantage sur leurs concurrentes.</p>
<p>C’est justement après avoir constaté fortuitement les effets dévastateurs du champignon <em>Penicillium notatum</em> sur les cultures de bactéries qu’il entretenait dans son laboratoire que Sir Alexander Fleming, biologiste écossais, <a href="https://www.pasteur.fr/fr/journal-recherche/dossiers/antibiotiques-quand-bacteries-font-resistance">isola la pénicilline en 1928</a>, puissant antibiotique s’il en est.</p>
<p>Mais au sein d’une même culture, toutes les bactéries ne sont pas vulnérables : certaines d’entre elles peuvent s’avérer insensibles à l’antibiotique qui décime leurs congénères. Une fois que les bactéries sensibles ont été éliminées, les survivantes qui résistent à l’antibiotique peuvent alors se développer. Ce dernier est alors devenu inefficace.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Hyht7jwsJg4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Dès 1945, autrement dit quatre ans seulement après la <a href="https://www.lequotidiendumedecin.fr/archives/le-premier-patient-traite-par-penicilline">première utilisation médicale de la pénicilline</a>, Sir Alexander Fleming avertissait quant au risque de voir émerger des souches de bactéries résistantes :</p>
<blockquote>
<p>« Cela aboutirait à ce que, au lieu d’éliminer l’infection, on apprenne aux microbes à résister à la pénicilline et à ce que ces microbes soient transmis d’un individu à l’autre, jusqu’à ce qu’ils en atteignent un chez qui ils provoqueraient une pneumonie ou une septicémie que la pénicilline ne pourrait guérir. »</p>
</blockquote>
<p>L’avenir allait lui donner raison. On l’a vu, les bactéries se défendent contre les antibiotiques, en devenant résistantes, depuis des milliards d’années. Dès que les humains ont commencé à utiliser largement les antibiotiques, dans les années 1940, des bactéries résistantes ont été identifiées, comme prédit par Fleming.</p>
<p>Plus on a utilisé d’antibiotiques, plus les résistances se sont développées et propagées. L’antibiorésistance a commencé à atteindre un niveau préoccupant dans les années 1990, ce qui a entraîné la mobilisation d’un grand nombre de pays.</p>
<p>Ce phénomène est aujourd’hui identifié par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) <a href="https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/antimicrobial-resistance">comme l’une des menaces majeures pesant sur la santé de l’humanité</a>.</p>
<p>Rien qu’en France, chaque année, <a href="https://www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/health-burden-infections-antibiotic-resistant-bacteria-2016-2020">environ 4500 personnes décèdent en raison d’une infection à bactérie multirésistante</a>, c’est-à-dire résistante à de nombreux antibiotiques. Pour mettre ce chiffre en perspective : dans notre pays, ces bactéries tuent beaucoup plus que les accidents de la route, qui avaient fait <a href="https://www.onisr.securite-routiere.gouv.fr/etat-de-linsecurite-routiere/bilans-annuels-de-la-securite-routiere/bilan-2022-de-la-securite-routiere">3550 victimes en 2022</a>. </p>
<p>Dans le monde, <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(21)02724-0/fulltext">ce sont près de 1,3 million de personnes qui sont mortes en 2019 de telles infections</a>, soit plus que les décès dus au paludisme ou au VIH. Si rien n’est fait, le problème de l’antibiorésistance va continuer à s’aggraver : certaines projections suggèrent même que dès 2050, <a href="https://amr-review.org/sites/default/files/160525_Final%20paper_with%20cover.pdf#page=7">elle pourrait causer plus de morts dans le monde que le cancer</a>.</p>
<h2>Quelles conséquences peut avoir l’antibiorésistance sur notre santé ?</h2>
<p>Le phénomène d’antibiorésistance compromet l’efficacité des traitements antibiotiques, nuisant à la santé humaine ainsi qu’à celle des animaux. Cela veut dire concrètement qu’on a de fortes chances de mourir d’une infection due à une bactérie qui ne peut pas être traitée par les antibiotiques disponibles, lorsque cette infection est grave.</p>
<p>De manière générale, la durée des soins est souvent plus longue lorsqu’une infection bactérienne est résistante aux antibiotiques, et il faut parfois être pris en charge à l’hôpital.</p>
<p>Par ailleurs, l’antibiorésistance augmente le risque de séquelles liées à l’infection, car l’infection devient plus difficile, voire impossible, à traiter.</p>
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<p>Un exemple caractéristique est celui des infections à gonocoque, l’une des bactéries les plus fréquemment impliquées dans les infections sexuellement transmissibles. Jusque dans les années 1990, on pouvait traiter de telles infections par des comprimés d’antibiotiques (de la famille des fluoroquinolones). Depuis, les gonocoques sont devenus de plus en plus résistants à ces antibiotiques, et il faut désormais systématiquement administrer un traitement antibiotique par piqûre (de ceftriaxone).</p>
<p>On a même décrit dans le monde <a href="https://www.cnr-ist.fr">des souches de gonocoque résistantes à presque tous les antibiotiques disponibles</a>. Les patients atteints présentaient une infection ne guérissant pas sous traitement habituel et ont dû recevoir des antibiotiques dits <a href="https://sante.gouv.fr/prevention-en-sante/les-antibiotiques-des-medicaments-essentiels-a-preserver/professionnels-de-sante/article/professionnels-votre-role-pour-preserver-l-efficacite-des-antibiotiques#:%7E:text=Les%20antibiotiques%20dits%20%22de%20dernier,Leur%20utilisation%20est%20principalement%20hospitali%C3%A8re.">« de dernier recours »</a> ; des cas de transmission de ces souches ont aussi été rapportés. Ces infections gonococciques très résistantes aux antibiotiques restent heureusement extrêmement rares à ce jour.</p>
<p>Les infections urinaires à des bactéries résistantes à de multiples antibiotiques sont aussi très problématiques. Quand on a est victime d’une infection urinaire due à une telle bactérie, on s’en aperçoit souvent plusieurs jours après le début des symptômes, le temps d’avoir les résultats de l’examen d’urine.</p>
<p>Cela retarde d’autant l’initiation d’un traitement antibiotique efficace, ce qui veut dire que l’on souffre plus longtemps. Cela peut aussi augmenter le risque de complications, comme l’atteinte des reins.</p>
<p>Et là aussi, on doit parfois être traité par piqûres d’antibiotiques, à la place du traitement antibiotique par la bouche qu’on prend habituellement quand la bactérie est sensible aux antibiotiques.</p>
<h2>Tout le monde est concerné</h2>
<p>Il est important de comprendre que l’antibiorésistance nous concerne tous : chacun d’entre nous peut être atteint d’une infection à bactérie résistante aux antibiotiques, <a href="https://theconversation.com/les-infections-resistantes-aux-antibiotiques-ca-narrive-pas-quaux-autres-78143">même s’il ne prend lui-même que peu ou pas d’antibiotiques</a>.</p>
<p>En effet, les bactéries, qu’elles soient résistantes ou sensibles aux antibiotiques, circulent et se transmettent en permanence entre humains, animaux (de compagnie ou d’élevage), et au sein de l’environnement (sol, eau, surfaces diverses…).</p>
<p>Les résidus d’antibiotiques que les humains et animaux éliminent peuvent aussi contaminer l’environnement, avec un risque variable selon les familles d’antibiotiques. Certains, comme les pénicillines, se dégradent rapidement. D’autres, comme les fluoroquinolones, peuvent au contraire persister dans l’environnement, <a href="https://www.anses.fr/fr/content/avis-et-rapport-de-lanses-relatif-%C3%A0-%C2%AB%C2%A0antibior%C3%A9sistance-et-environnement-%C3%A9tat-et-causes">et donc y favoriser l’émergence de bactéries résistantes</a>.</p>
<p>Encore pire, les bactéries sont aussi capables de transmettre très facilement les gènes qui leur confèrent les résistances aux antibiotiques, et ce non seulement au sein d’une même espèce, mais aussi d’une espèce à l’autre !</p>
<h2>Des niveaux variables d’antibiorésistance sur le territoire</h2>
<p>Comme de nombreux d’indicateurs de santé (obésité, taux de vaccination, etc.), l’antibiorésistance varie beaucoup d’un territoire à l’autre. On observe des différences importantes entre les régions, voire les départements.</p>
<p>Un exemple parlant est celui d’<em>Escherichia coli</em>, la bactérie la plus fréquemment responsable d’infections urinaires, dont certaines souches sont très résistantes aux antibiotiques en France.</p>
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<img alt="Carte indiquant les pourcentages de bactéries E. coli résistantes aux antibiotiques détectées sur le territoire français." src="https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=581&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=581&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=581&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=730&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=730&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=730&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cette carte indique les pourcentages de détection de bactéries <em>E. coli</em> multirésistantes aux antibiotiques en France.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://geodes.santepubliquefrance.fr">Sites GEODES / Santé publique France</a></span>
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<p>De telles variations existent aussi pour les autres bactéries, ou pour les consommations d’antibiotiques. Elles peuvent s’expliquer par de multiples facteurs, tels que les habitudes des professionnels de santé ou des patients, les actions régionales et locales menées pour améliorer les pratiques, ou encore l’incidence des infections, qui peut varier en fonction de l’état de santé de la population.</p>
<p>Une déclinaison régionale et territoriale des actions est donc essentielle, pour tenir compte des spécificités locales et accompagner la politique nationale au plus proche du terrain. Ce sont les Agences Régionales de Santé (ARS) qui sont aux commandes, et elles bénéficient pour cela de l’appui de centres régionaux experts du sujet, comme <a href="https://sante.gouv.fr/prevention-en-sante/les-antibiotiques-des-medicaments-essentiels-a-preserver/des-politiques-publiques-pour-preserver-l-efficacite-des-antibiotiques/article/prevention-des-infections-et-de-l-antibioresistance-a-l-echelle-regionale">les centres régionaux en antibiothérapie</a>.</p>
<h2>Concrètement, comment lutter contre l’antibiorésistance ?</h2>
<p>En France, depuis plus de 20 ans, les gouvernements successifs ont mis en place des plans de lutte contre l’antibiorésistance. Ceux-ci ont permis de faire diminuer la consommation des antibiotiques. Néanmoins, beaucoup reste encore à faire, car <a href="https://www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/surveillance-antimicrobial-consumption-europe-2022">la France reste l’un des pays qui consomme le plus d’antibiotiques en Europe</a> : près de trois fois plus que les pays les plus vertueux, comme les Pays-Bas, l’Autriche ou la Suède.</p>
<p>Coordonné par le ministère en charge de la santé, le <a href="https://sante.gouv.fr/prevention-en-sante/les-antibiotiques-des-medicaments-essentiels-a-preserver/">dernier plan en date pour la santé humaine court sur 2022-2025</a>. Nous sommes tous concernés, car nous avons tous besoin de recourir à des antibiotiques au cours de notre existence. Pour lutter contre l’antibiorésistance, il faut à la fois :</p>
<ul>
<li><p>Prévenir les infections et réduire leur transmission, grâce aux mesures d’hygiène, comme le lavage ou la friction des mains, et à la vaccination ;</p></li>
<li><p>N’utiliser les antibiotiques que quand il faut et comme il faut, car <a href="https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/dossier_presse_prevention_des_infections_et_de_l_antibioresistance_fevrier_2022.pdf">même une seule prise d’antibiotique sélectionne des bactéries résistantes dans nos microbiotes</a>, dans la flore intestinale par exemple.</p></li>
</ul>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Schéma de la doctrine du Haut Conseil de la Santé Publique sur les 10 mesures universelles d’hygiène pour une prévention individuelle et collective des maladies infectieuses." src="https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La doctrine du Haut Conseil de la Santé Publique sur les 10 mesures universelles d’hygiène pour une prévention individuelle et collective des maladies infectieuses.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/AvisRapportsDomaine?clefr=1351">Haut Conseil de la Santé Publique</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nous pouvons tous agir pour y parvenir, pas besoin d’être soignant pour jouer un rôle dans la lutte contre l’antibiorésistance. Voici quelques recommandations importantes et simples à mettre en œuvre au quotidien :</p>
<ul>
<li><p>Utiliser les bons gestes <a href="https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/AvisRapportsDomaine?clefr=1351">afin de prévenir les infections courantes</a>, comme le lavage ou la friction des mains ;</p></li>
<li><p>Se vacciner et promouvoir <a href="https://vaccination-info-service.fr">la vaccination</a> autour de soi ;</p></li>
<li><p>Rapporter les antibiotiques restants à la pharmacie, pour éviter de contaminer l’environnement ;</p></li>
<li><p>Ne pas s’automédiquer ni partager ses antibiotiques, car un traitement antibiotique est adapté à un cas précis ;</p></li>
<li><p>Poser des questions à <a href="https://www.ameli.fr/sites/default/files/Documents/2022288_AntibiotiquePatient_v4_0.pdf">son professionnel de santé</a> ;</p></li>
</ul>
<p>Quand on a une infection ou qu’on prend un antibiotique, se renseigner en consultant notamment <a href="https://www.sante.fr/antibiomalin">Antibio’Malin</a>, l’espace dédié aux antibiotiques du site <a href="https://www.sante.fr/">santé.fr</a>, qui contient des informations pratiques, des fiches sur les antibiotiques, les infections courantes ainsi qu’une foire aux questions.</p>
<h2>Pour renforcer l’implication de tous, des pistes à explorer</h2>
<figure class="align-right ">
<img alt="Affiche de sensibilisation à destination du grand public quant à l’usage des antibiotiques." src="https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Cette affiche rappelle que les antibiotiques ne sont pas efficaces contre les maladies virales telles que la bronchite.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/infections-associees-aux-soins-et-resistance-aux-antibiotiques/resistance-aux-antibiotiques/documents/affiche/zoe-peut-vous-le-confirmer-les-antibiotiques-ca-ne-marche-pas-contre-sa-bronchite.-affiche-40x60cm">Santé publique France</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La stratégie nationale 2022-2025 de prévention des infections et de l’antibiorésistance citée précédemment mentionne de nombreuses actions, notamment la <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/infections-associees-aux-soins-et-resistance-aux-antibiotiques/resistance-aux-antibiotiques/outils/#tabs">campagne nationale sur les antibiotiques menée par Santé publique France</a> et la <a href="https://e-bug.eu/fr-fr">promotion des ressources e-Bug auprès des enfants et des adolescents</a>.</p>
<p>Il faut cependant aller plus loin pour que l’antibiorésistance fasse partie du quotidien des Français. Il pourrait être intéressant de s’inspirer d’expériences menées à l’étranger, ainsi que de pistes qui avaient été suggérées dès 2015 <a href="https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_antibiotiques.pdf">dans un rapport rédigé par un large groupe d’experts</a>.</p>
<p>Le monde de la fiction et de la culture a ainsi, par exemple, un rôle essentiel à jouer. Intégrer des messages de prévention dans des séries audiovisuelles, des romans, ou une comédie musicale (<a href="https://www.mouldthatchangedtheworld.com">comme au Royaume-Uni</a>), mettre l’accent sur le monde des microbes dans certains musées (<a href="https://www.micropia.nl/en/">aux Pays-Bas, un musée leur est même consacré</a>), promouvoir les nombreux jeux sérieux qui ont été créés sur la thématique… Les pistes sont multiples, n’hésitez pas à contribuer !</p>
<p>Au même titre que la lutte contre le changement climatique, autre grand défi de notre époque, la lutte contre l’antibiorésistance nécessite la mobilisation de tous. C’est la condition <em>sine qua non</em> si l’on veut parvenir à changer les comportements sur le long terme et préserver l’efficacité de nos antibiotiques, pour nous et pour les autres, en France et à l’international, maintenant et pour les générations futures.</p>
<p><em><strong>- Pour en savoir plus :</strong> la série d’animations courtes <a href="https://www.youtube.com/playlist?list=PLfT0X0LfNabpspLvNIwtLoi61HivajGTY">Antibiostories</a>, pour comprendre les bases du bon usage des antibiotiques et les enjeux de la lutte contre l’antibiorésistance.</em></p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=926&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=926&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=926&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1164&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1164&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1164&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p><em>Céline Pulcini est l’auteur du roman <a href="https://www.amazon.fr/Dans-tourbillon-m%C3%A9decine-C%C3%A9line-Pulcini-ebook/dp/B0CRS7VRTC">« Dans le tourbillon de la médecine »</a>, qui aborde notamment le sujet des études de médecine, de la prévention, des infections et de l’antibiorésistance.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221795/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Céline Pulcini ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’augmentation du nombre d’espèces de bactéries résistantes aux antibiotiques constitue une préoccupation de santé publique majeure, qui nous concerne tous, partout sur la planète.Céline Pulcini, Professeur de médecine, infectiologue, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2220312024-01-31T16:01:30Z2024-01-31T16:01:30ZHausse des cas d’infection invasive au streptocoque A : comment il se propage, et les symptômes à surveiller<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/571469/original/file-20240122-27145-c07mvm.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C48%2C1968%2C1488&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une augmentation des cas d’infection causée par le streptocoque du groupe A a été observée dans plusieurs pays, dont le Canada.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Institut national des allergies et des maladies infectieuses (NIAID))</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Une hausse rapide des cas de maladies graves à streptocoque du groupe A — également appelé Streptococcus pyogenes ou streptocoque A — a récemment fait la une des médias. Le <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2042368/grippe-Covid-symptome-maldie-infection">nombre de décès</a> dus à cette infection est aussi plus élevé que d’habitude, y compris chez les enfants, et les gens se demandent pourquoi et comment ces infections se propagent, et quels sont les symptômes à surveiller.</p>
<p>Peu après la diminution du nombre d’infections par la Covid-19 dans le monde, on a assisté à une <a href="https://www.bbc.com/news/health-64122989">hausse considérable</a> du nombre de patients diagnostiqués avec des maladies causées par le streptocoque du groupe A dans différentes régions de la planète.</p>
<p>Au Canada, Santé publique Ontario signale actuellement une forte augmentation des cas <a href="https://www.publichealthontario.ca/-/media/Documents/I/2023/igas-enhanced-epi-2023-2024.pdf">d’infections invasives à streptocoque du groupe A</a>. Une <a href="https://www.who.int/fr/emergencies/disease-outbreak-news/item/2022-DON429">hausse similaire</a> a été constatée dans plusieurs pays d’Europe, touchant principalement les enfants de moins de 10 ans.</p>
<p>Pourquoi cette bactérie est-elle soudainement devenue un enjeu mondial ?</p>
<p>Pour répondre à cette question, il est essentiel de connaître certaines caractéristiques de la maladie. Le streptocoque du groupe A affecte exclusivement les humains et se propage par des <a href="https://doi.org/10.1016/S2666-5247(21)00332-3">gouttelettes en suspension dans l’air ainsi que par contact de personne à personne</a>. <a href="https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"></a></p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Vue microscopique d’une bactérie du groupe A Streptococcus" src="https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=938&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=938&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=938&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1179&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1179&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1179&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le streptocoque du groupe A possède plusieurs facteurs qui favorisent l’infection et lui permettent d’envahir et de coloniser différents tissus, et d’y survivre.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(NIAID)</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Parmi les maladies causées par cet organisme, on trouve des infections des voies respiratoires telles que l’amygdalite et la pharyngite (symptômes de <a href="https://www.cdc.gov/groupastrep/diseases-public/strep-throat.html">l’angine streptococcique</a> classique), ainsi que des infections cutanées superficielles et d’autres, connues sous le nom de <a href="https://doi.org/10.4103%2F1947-2714.101997">pyodermite</a>.</p>
<p>Dans certains cas, le streptocoque A peut engendrer des infections invasives mettant la vie des patients en danger, telles que la <a href="https://www.healthlinkbc.ca/sites/default/files/documents/healthfiles/hfile60-f.pdf">fasciite nécrosante</a>, la <a href="https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/medecine-septicemie-8149/">septicémie</a> (empoisonnement du sang) et le <a href="https://www.cdc.gov/groupastrep/diseases-public/streptococcal-toxic-shock-syndrome.html">syndrome de choc toxique streptococcique</a>.</p>
<p>Pour causer un aussi large éventail de maladies dans différentes parties du corps, la bactérie dispose de plusieurs facteurs qui favorisent l’infection et lui permettent d’envahir et de coloniser différents tissus et d’y survivre. Il s’agit notamment de molécules, telles que les superantigènes, les exotoxines et les adhésines, qui aident les agents pathogènes à échapper au système immunitaire de l’hôte.</p>
<p>Un nouveau variant du streptocoque du groupe A, nommé M1UK, <a href="https://doi.org/10.1016/S1473-3099(19)30446-3">a été d’abord rapporté au Royaume-Uni</a>, où il a été associé à une augmentation des cas de scarlatine et d’infections invasives.</p>
<p>Les <a href="https://doi.org/10.1038/s41467-023-36717-4">bactéries de la sous-lignée M1UK</a> possèdent la capacité de stimuler l’expression du superantigène SpeA grâce à une seule mutation génétique. La surproduction de SpeA pourrait être responsable de la hausse de la transmission et de la survie du pathogène, ainsi que de l’agressivité de la maladie, bien que cela soit encore à l’étude.</p>
<h2>Comment expliquer le pic de cas actuel ?</h2>
<p><a href="https://doi.org/10.1542/peds.2009-2648">Environ 10 % des enfants d’âge scolaire</a> sont porteurs de cette bactérie dans la gorge et les voies respiratoires supérieures, sans présenter de symptômes, et développent avec le temps une certaine immunité contre le streptocoque A.</p>
<p>Pendant la pandémie de Covid-19, il est probable que les enfants n’aient pas été exposés autant qu’à l’habitude à cette bactérie, de sorte que leur système immunitaire n’est <a href="https://doi.org/10.1016%2FS0262-4079(21)00716-8">sans doute pas aussi performant pour lutter</a> contre celle-ci et qu’ils pourraient y être plus vulnérables.</p>
<p>La propagation de la nouvelle souche M1UK pourrait être également à l’origine de l’augmentation du nombre de cas, mais cela demeure à vérifier.</p>
<h2>Doit-on s’inquiéter de cette hausse ?</h2>
<p>De manière générale, les Canadiens n’ont pas à s’inquiéter outre mesure, car les infections graves dues au streptocoque du groupe A sont rares.</p>
<p>Toutefois, il est important de prendre l’angine à streptocoque au sérieux, de consulter un médecin et de se méfier des symptômes qui pourraient indiquer une infection invasive. Sans traitement, cette bactérie peut engendrer divers problèmes, tels que des infections invasives.</p>
<p>Comment se protéger et quand consulter un médecin ?</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un professionnel de la santé hors cadre prélève un échantillon de la gorge d’une jeune fille" src="https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un test de dépistage rapide permet de diagnostiquer l’angine à streptocoque. En cas de résultat positif, on peut prescrire des antibiotiques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Comme le streptocoque du groupe A est courant et que de nombreux porteurs sont asymptomatiques, il est difficile de ne pas y être exposé. On recommande une bonne hygiène des mains, de se couvrir quand on tousse et qu’on éternue, de rester à la maison si on est malade et de ne pas envoyer ses enfants à l’école s’ils ont très mal à la gorge.</p>
<p>Si vous pensez souffrir d’une <a href="https://www.aboutkidshealth.ca/Article?contentid=11&language=French">infection à streptocoque</a>, notamment si vous avez la gorge douloureuse et de la difficulté à avaler, si vous avez de la fièvre, un gonflement des amygdales ou une éruption cutanée, consultez un médecin de famille afin de déterminer s’il s’agit d’une infection à streptocoque du groupe A. Un <a href="https://www.healthlinkbc.ca/tests-treatments-medications/medical-tests/rapid-strep-test-strep-throat">test de dépistage rapide</a> peut être effectué en prélevant un échantillon dans la gorge. S’il s’avère positif, le médecin peut prescrire des antibiotiques.</p>
<p>Les infections invasives à streptocoque du groupe A sont très dangereuses et constituent une urgence médicale, même si les premiers symptômes ne sont pas toujours clairs. Il peut s’agir de fièvre, de frissons, de symptômes grippaux, de nausées ou de vomissements, mais surtout d’infections cutanées rouges et chaudes qui peuvent être très douloureuses et se répandre rapidement.</p>
<p>Des données solides indiquent que des <a href="https://doi.org/10.1542/peds.105.5.e60">maladies virales antérieures, telles que la varicelle</a>, peuvent prédisposer à l’infection invasive au streptocoque A. On devrait surveiller de près les enfants atteints de varicelle pour s’assurer qu’ils n’en souffrent pas.</p>
<p>Actuellement, il n’y a pas de vaccin contre le streptocoque du groupe A, alors qu’il en existe un contre la varicelle. De nombreuses équipes de recherche dans le monde, <a href="https://www.mccormicklab.ca/">dont la nôtre</a>, travaillent à la mise au point d’un vaccin contre le streptocoque A.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222031/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>John McCormick reçoit des fonds des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), du Conseil des sciences naturelles et de l'ingénierie du Canada (CRSNG) et de la Fondation Leducq.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Juan Manuel Diaz reçoit des fonds des Instituts de recherche en santé du Canada.
</span></em></p>L’augmentation du nombre de maladies graves causées par les streptocoques du groupe A est préoccupante. Voici pourquoi et comment elle se propage, et quels sont les symptômes à surveiller.John McCormick, Professor of Microbiology and Immunology, Western UniversityJuan Manuel Diaz, Postdoctoral Associate, department of Microbiology and Immunology, Western UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2223462024-01-31T15:57:37Z2024-01-31T15:57:37ZCertains polluants de l’air intérieur passent à travers la peau<p>Bien que nous passions la <a href="https://www.nature.com/articles/7500165">majorité de notre temps à l’intérieur</a>, cela ne nous protège pas pour autant de la pollution de l’air. Dans l’air intérieur se retrouvent en effet de nombreux polluants, tels par exemple que les produits chimiques qui entrent dans la composition des matériaux de construction, produits de nettoyage, et autres meubles ou ustensiles.</p>
<p>Ces substances peuvent exister sous forme gazeuse (on les appelle <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0045653522039820">composés organiques volatiles</a>), ce qui signifie que nous pouvons les inhaler. Mais il existe également des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1352231008008480">composés organiques semi-volatils</a> : comme leur nom le suggère, ces composés existent non seulement sous forme gazeuse, mais ils peuvent aussi se déposer et persister sur les surfaces (s’y adsorber). Cela inclut non seulement les surfaces présentes à l’intérieur de l’habitation, mais aussi la poussière qui s’y trouve.</p>
<p>Or, si ces produits chimiques sont capables de pénétrer dans notre corps par inhalation, par ingestion ou par contact avec une surface sur laquelle ils sont adsorbés, ils peuvent également nous contaminer en passant à travers notre peau directement depuis l’air ambiant.</p>
<p>Une fois dans notre corps, ces substances peuvent nuire à notre santé, affectant potentiellement le <a href="https://www.epa.gov/indoor-air-quality-iaq/volatile-organic-compounds-impact-indoor-air-quality">système respiratoire, le système nerveux, la santé cognitive</a> et le <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2677823/">système hormonal</a>.</p>
<h2>Exposition cutanée</h2>
<p>Parmi les nombreux groupes de composés organiques semi-volatils qui existent, le groupe des <a href="https://www.cdc.gov/biomonitoring/Phthalates_FactSheet.html">phtalates</a> est celui auquel vous avez le plus de risque d’avoir été confronté. Ces substances sont en effet omniprésentes dans notre environnement, et nous y sommes presque continuellement exposés.</p>
<p>Les phtalates sont ajoutés à de nombreux produits afin de les rendre plus doux et plus flexibles (ce sont des plastifiants). On les trouve non seulement dans certains types de plastiques (comme les emballages alimentaires ou les tuyaux de jardin), mais aussi dans différents matériaux de construction (comme les revêtements de sol en vinyle), ainsi que dans les produits d’hygiène et de soin (dont des shampooings et des laques pour les cheveux).</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/fournitures-scolaires-le-grand-flou-des-substances-chimiques-et-leurs-dangers-190023">Fournitures scolaires : le grand flou des substances chimiques et leurs dangers</a>
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<p>Des travaux scientifiques ont établi qu’il existe des associations entre l’exposition à ces produits chimiques et divers problèmes de santé, notamment une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0048969721024426">moins bonne qualité du sperme</a>, une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0304389423009639">moindre santé cardiovasculaire</a> et des <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8157593/">altérations de la croissance et du développement</a> chez les enfants.</p>
<p>Une fois que les phtalates pénètrent dans le corps, ils se décomposent en quelques heures à quelques jours. Les produits de décomposition (métabolites) ainsi produits sont ensuite excrétés par l’urine. Mais malgré cette excrétion rapide, on trouve presque systématiquement des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0013935111000752">traces de phtalates dans nos organismes</a>. En effet, nous sommes continuellement exposés à cette famille de produits chimiques au cours de notre vie quotidienne, et ce, de différentes façons.</p>
<p>Une idée reçue encore trop répandue est que l’on ne court un risque d’exposition aux produits chimiques qu’à condition de les ingérer ou de les inhaler. Mais divers travaux de recherche ont établi que l’absorption cutanée a un impact majeur sur les niveaux de phtalates qui se retrouvent dans notre corps.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-exposome-214985">« L’envers des mots » : Exposome</a>
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<p>Ainsi, au cours d’une <a href="http://dx.doi.org/10.1289/ehp.1409151">étude</a> menée en 2015, six participants ont été exposés, dans une chambre spéciale, à de l’air contenant deux sortes de phtalates, à des niveaux élevés. Concrètement, une peinture latex contenant de fortes concentrations de ces composés a été appliquée sur des plaques d’aluminium suspendues dans la pièce où se trouvaient les participants.</p>
<p>Afin que les scientifiques puissent discriminer la quantité de phtalates absorbée par inhalation par rapport à celle passant à travers la peau, les personnes impliquées dans cette étude ont été exposées deux fois – une fois en portant une cagoule ajustée filtrant l’air (elles étaient ainsi exposées uniquement via leur peau) et une autre fois sans la cagoule (elles se retrouvaient donc ainsi exposées à la fois par la peau et par inhalation). Afin d’augmenter la surface cutanée exposée, les participants étaient simplement vêtus de shorts.</p>
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<img alt="Une personne plonge un pinceau dans de la peinture blanche." src="https://images.theconversation.com/files/571626/original/file-20240126-19-ccqamq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/571626/original/file-20240126-19-ccqamq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/571626/original/file-20240126-19-ccqamq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/571626/original/file-20240126-19-ccqamq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/571626/original/file-20240126-19-ccqamq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/571626/original/file-20240126-19-ccqamq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/571626/original/file-20240126-19-ccqamq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les participants ont été exposés aux phtalates émis par de la peinture latex.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/man-holds-brush-his-hand-ready-1765689377">Olya Maximenko/Shutterstock</a></span>
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<p>Leur régime alimentaire a été contrôlé, et leur utilisation de produits d’hygiène et de soins, restreinte, car comme mentionné plus haut, ceux-ci peuvent constituer une <a href="https://ehjournal.biomedcentral.com/articles/10.1186/1476-069X-13-43">source majeure de contamination aux phtalates</a>. Après cette exposition, il leur a été demandé de collecter leur urine pendant plusieurs jours. </p>
<p>C’est en mesurant la concentration de métabolites de phtalates présents dans ces échantillons d’urine que les scientifiques ont pu estimer la quantité de phtalates absorbée suite à l’exposition à la peinture.</p>
<p>Résultat : même lorsque seule leur peau était exposée, les participants ont absorbé des doses substantielles de phtalates. Logiquement, leur exposition s’est avérée plus élevée lorsque les deux voies d’exposition, peau et voies respiratoires, étaient impliquées.</p>
<h2>Les vêtements peuvent être protecteurs ou contaminants</h2>
<p>Dans la même étude, un individu a participé à une autre sorte d’expérimentation, pour mieux comprendre comment la peau absorbe ces produits chimiques, ainsi que pour déterminer si les vêtements ont un effet protecteur.</p>
<p>Ce participant a été lui aussi exposé aux phtalates deux fois, mais en portant systématiquement une cagoule filtrante, pour s’assurer que sa peau était la seule voie d’absorption possible. Durant la première expérimentation, cette personne portait des vêtements propres. Au cours de la seconde expérimentation, les vêtements portés avaient été exposés à l’air de la chambre pendant plusieurs jours avant que le participant ne les enfile. Les résultats ont ensuite été comparés à ceux des participants à la peau nue.</p>
<p>Les chercheurs ont ainsi découvert que l’exposition aux phtalates du participant était réduite lorsqu’il portait des vêtements propres, mais qu’elle était trois à six fois plus élevée lorsqu’il portait les vêtements contaminés (par rapport aux personnes ayant participé à l’essai « peau nue »). Ce résultat révèle que les vêtements peuvent également constituer un « réservoir » de polluants.</p>
<p>En 2016, des résultats similaires ont été publiés. Ils avaient été obtenus au cours d’une <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/ina.12327">étude de suivi</a> mettant en œuvre des expériences quasiment identiques, à ceci près que le produit chimique de test était la nicotine contenue dans la fumée de cigarette. Plus récemment (résultats publiés en 2023), des <a href="https://doi.org/10.1021/acs.est.3c06142">travaux de recherche menés au domicile de plusieurs personnes (et non en laboratoire)</a> ont, elles aussi, donné des résultats similaires.</p>
<p>Des <a href="https://pubs.acs.org/doi/full/10.1021/acs.est.2c08835">études de modélisation</a> ont également indiqué que les substances <a href="https://theconversation.com/voici-ce-que-vous-devez-savoir-sur-les-pfas-que-lon-surnomme-polluants-eternels-194583">perfluoroalkyles et polyfluoroalkyles (PFAS)</a>, un autre type de composé organique semi-volatil couramment utilisé, peuvent également être absorbées par la peau.</p>
<p>Tous ces résultats mettent en évidence le rôle potentiellement significatif de l’absorption cutanée dans l’exposition à la pollution de l’air – et le rôle protecteur des vêtements.</p>
<h2>Quels risques pour la santé ?</h2>
<p>Les dommages que peut causer un produit chimique donné diffèrent en fonction de la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1438463906001076">manière dont il pénètre dans le corps</a>. Les produits chimiques ingérés passent par les intestins et le foie avant de passer dans le sang. Les produits chimiques inhalés passent d’abord par les poumons, où ils peuvent <a href="https://www.epa.gov/expobox/exposure-assessment-tools-routes-inhalation">entrer directement dans le sang</a>. Enfin, les produits chimiques qui pénètrent via la peau peuvent <a href="https://www.epa.gov/expobox/exposure-assessment-tools-routes-dermal">eux aussi passer directement dans le flux sanguin</a>. Il n’est même pas nécessaire que la peau soit blessée, car certains produits chimiques peuvent être absorbés directement à travers une peau saine.</p>
<p>Par ailleurs, pour des niveaux d’exposition similaires, la concentration de polluants au sein de notre organisme diffère en fonction de la voie d’exposition. Ainsi, une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0378427411001986">étude</a> a modélisé la concentration dans le foie et le rein d’un produit chimique appelé <a href="https://theconversation.com/perturbateurs-endocriniens-pourquoi-les-remplacants-du-bisphenol-a-posent-aussi-probleme-155772">bisphénol A</a>, selon que l’absorption avait eu lieu par ingestion ou via la peau. Les résultats ont révélé que, selon la voie d’exposition, les concentrations différaient notablement dans ces deux organes.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/perturbateurs-endocriniens-pourquoi-les-remplacants-du-bisphenol-a-posent-aussi-probleme-155772">Perturbateurs endocriniens : pourquoi les remplaçants du bisphénol A posent aussi problème</a>
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<p>En conclusion, plus nous sommes exposés à des composés chimiques, plus la probabilité qu’ils s’adsorbent sur notre peau et que celle-ci devienne une voie d’exposition importante augmente. Heureusement, il est possible de réduire cette vulnérabilité de diverses façons :</p>
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<li><p><a href="https://www.usgbc.org/credits/retail-ci/v2009/eqc45">Utiliser des matériaux de construction (peintures, adhésifs…) à faible émission</a> lorsque c’est possible.</p></li>
<li><p><a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/ina.12396">Nettoyer les surfaces intérieures</a> pour éliminer tout produit chimique qui pourrait s’y être déposé (en particulier les surfaces poussiéreuses).</p></li>
<li><p><a href="https://www.nature.com/articles/jes201542">Laver les vêtements</a> et la literie régulièrement, ainsi que les <a href="https://pubs.acs.org/doi/10.1021/acs.est.6b00113">nouveaux vêtements</a> avant de les porter. Cela aidera à prévenir <a href="https://pubs.acs.org/doi/10.1021/acs.est.3c06142">l’absorption chimique</a> par la peau.</p></li>
<li><p><a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/ina.12561">Aérer régulièrement son domicile</a> (à moins que ledit domicile dispose d’une ventilation mécanique contrôlée – VMC efficace). Cela aidera à réduire la concentration de polluants dans l’air.</p></li>
<li><p><a href="https://ehp.niehs.nih.gov/doi/10.1289/ehp.1409151">Prendre un bain</a> et <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/ina.12437">se laver les mains</a> après une exposition peut également aider à réduire l’absorption cutanée.</p></li>
</ol>
<p>En améliorant ainsi la qualité de l’air intérieur, il est possible de réduire le risque d’être exposé à de multiples polluants nocifs pour la santé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222346/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Asit Kumar Mishra bénéficie d'un financement du programme de recherche et d'innovation Horizon 2020 de l'Union européenne dans le cadre de la convention de subvention Marie Skłodowska-Curie n° 101034345. Il est affilié à l'American Society of Heating, Refrigerating and Air-Conditioning Engineers (ASHRAE) et à l'International Society of Indoor Air Quality and Climate (ISIAQ).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Gabriel Bekö est affilié à l'Université technique du Danemark. Il est membre élu de l’Academy of Fellows of the International Society of Indoor Air Quality and Climate.</span></em></p>Sols en vinyle, jouets en plastique, meubles… De nombreux objets de notre environnement contiennent des produits chimiques volatiles ou semi-volatiles qui peuvent être inhalés ou passer par notre peau.Asit Kumar Mishra, Research Fellow in School of Public of Health, University College CorkGabriel Bekö, Associate Professor, Department of Environmental and Resource Engineering Indoor Environment, Technical University of DenmarkLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2216642024-01-30T16:12:02Z2024-01-30T16:12:02ZAlcool : et si vous faisiez le point ?<p>Que l’on ait, ou pas, relevé le <a href="https://theconversation.com/alcool-et-dry-january-relever-le-defi-de-janvier-est-toujours-benefique-meme-en-cas-dechec-220556">#DefiDeJanvier</a> (adaptation en français du terme anglo-saxon « Dry January ») également appelé « Mois sans alcool », cet évènement aura été l’occasion de faire le point sur sa consommation d’alcool.</p>
<p>En pratique, tout au long de l’année, on peut continuer à télécharger l’application <a href="https://dryjanuary.fr/lapplication-try-dry/">Try Dry</a> de #DryJanuaryFrance soutenue, entre autres, par la Fédération Addiction, un réseau d’associations et de professionnels de l’addictologie.</p>
<p>Cette application permet d’évaluer sa consommation d’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/alcool-26411">alcool</a> de manière simple, en répondant au questionnaire AUDIT pour <strong>A</strong>lcohol <strong>U</strong>se <strong>D</strong>isorder <strong>I</strong>nventory <strong>T</strong> (en français, « test pour faire l’inventaire des troubles liés à l’usage d’alcool »). Le questionnaire est également mis à disposition en ligne par le <a href="https://www.addictaide.fr/parcours/audit/">Fonds Addict’AIDE</a>.</p>
<p>En fonction des résultats, il conviendra de se tourner vers son médecin traitant ou un autre professionnel de santé.</p>
<h2>Évaluer sa consommation d’alcool en 10 questions</h2>
<p>Simple et court – puisqu’il ne comprend que dix questions –, le questionnaire AUDIT est <a href="https://ijadr.org/index.php/ijadr/article/view/222">validé internationalement</a>. Comme son nom l’indique, ce test évalue votre consommation d’alcool mais aussi votre de risque de présenter un trouble associé à cette consommation, via un score qui vous est attribué une fois que vous avez répondu à toutes les questions.</p>
<p>Les trois premières questions traitent de la <em>consommation</em> du patient : sa fréquence, le nombre de verres d’alcool par occasion de boire, etc.</p>
<p>Les questions de 4 à 6 s’intéressent à la <em>dépendance à l’alcool</em> : la perte de contrôle, l’impossibilité de remplir ses obligations et le besoin d’alcool dès le matin ;</p>
<p>Enfin, les questions de 7 à 10 ciblent les <em>problèmes liés à l’alcool</em> : le sentiment de culpabilité, les regrets après avoir bu, les trous noirs ou <a href="https://theconversation.com/black-out-quand-les-souvenirs-se-dissolvent-dans-lalcool-129045">« black-out »</a> (quand on ne se souvient pas des évènements de la veille), le fait de s’être blessé ou avoir blessé quelqu’un (du fait de sa consommation) et d’avoir reçu des conseils pour réduire sa consommation.</p>
<p>Si le score est supérieur ou égal à 7 chez l’homme, et supérieur ou égal à 6 chez la femme, cela signifie qu’il y a un risque que la personne soit concernée par ce que l’on appelle « un trouble lié à l’usage de l’alcool ». Ce risque sera d’autant plus important que le score sera élevé.</p>
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<img alt="Capture d’écran de la page destinée à l’alcool du site Addict’AIDE, le village des addictions." src="https://images.theconversation.com/files/571953/original/file-20240129-15-aq22bi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/571953/original/file-20240129-15-aq22bi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/571953/original/file-20240129-15-aq22bi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/571953/original/file-20240129-15-aq22bi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/571953/original/file-20240129-15-aq22bi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=564&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/571953/original/file-20240129-15-aq22bi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=564&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/571953/original/file-20240129-15-aq22bi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=564&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Addictaide.fr est un portail qui permet aux personnes dépendantes, notamment à l’alcool, et à leurs proches de trouver des outils et des ressources pour ne plus être seuls face à l’addiction.</span>
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<h2>Trop de personnes dépendantes à l’alcool dans le déni</h2>
<p>Quand on aborde la question de l’alcool, l’image de l’ivrogne, de l’alcoolique décrit par l’écrivain Émile Zola reste bien ancrée en France. Et du fait de l’évolution des modes de consommation d’alcool – moins d’alcool régulier au cours des repas, plus d’alcoolisations ponctuelles importantes un à deux jours par semaine – de nombreux patients sont dépendants de l’alcool sans en avoir conscience et rejettent cette idée.</p>
<p>Ceci est particulièrement vrai pour les jeunes adultes qui présentent plusieurs critères de dépendance à l’alcool et sont dans le déni. Cette façon de consommer de l’alcool semble également en <a href="https://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2024/2/2024_2_1.html">augmentation chez les femmes de plus de 35 ans</a>.</p>
<p>Le phénomène n’épargne pas non plus les adolescents et ce, dès le collège. Selon une <a href="https://www.ofdt.fr/publications/collections/resultats/les-usages-de-substances-psychoactives-chez-les-collegiens-et-lyceens-resultats-enclass-2022/">enquête qui vient d’être publiée en 2024</a>, les épisodes d’alcoolisation ponctuelle importante concerneraient une part non négligeable des adolescents, dès les classes de 4<sup>e</sup> et de 3<sup>e</sup> au collège et un nombre important de lycéens.</p>
<p>Dans tous les cas, considérer les alcoolisations ponctuelles massives (terme préféré à l’anglicisme « binge drinking »), répétées deux à trois fois par semaine, comme une forme de dépendance à l’alcool pourra inciter certaines personnes concernées à modifier leur comportement et à réduire leur consommation.</p>
<p>La maladie alcoolique englobe la dépendance à l’alcool et les conséquences sur le plan physique et psychiatrique à moyen et à long terme. Considérer un alcoolique – le terme est, et reste, péjoratif – comme un malade à part entière est indispensable.</p>
<h2>Le trouble lié à l’usage de l’alcool (TUA)</h2>
<p>Dans la V<sup>e</sup> version du manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (<a href="https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2023-10/fiche_3.detecter_un_trouble_de_lusage_dalcool_tua__le_dsm-5.pdf">DSM V-TR</a>), la notion d’abus et dépendance a été supprimée. Aujourd’hui, on considère qu’ il existe un continuum avec un trouble <em>léger</em>, <em>modéré</em>, puis <em>sévère</em> lié à l’usage de l’alcool ou TUA, selon le nombre de critères de dépendance présents (au cours des 12 derniers mois).</p>
<p>En pratique, certains signes doivent alerter : une consommation quotidienne importante d’alcool, un comportement violent, des retentissements sur la vie familiale, sociale, professionnelle… Sur le plan physique, des sueurs ou tremblements le matin, des troubles du sommeil ou encore une <a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/hypertension-arterielle-hta/definition-facteurs-favorisants">hypertension artérielle</a> peuvent être évocateurs d’un troublé lié à l’usage de l’alcool.</p>
<p>Malheureusement, la consommation d’alcool est rarement abordée lors des consultations de médecine générale, alors que cela devrait être systématique, comme pour le tabac. On rappellera que le tabac et l’alcool représentent deux facteurs de risque responsables, respectivement, de <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2021/tabac-en-france-premieres-estimations-regionales-de-mortalite-attribuable-au-tabagisme-en-2015">75 000</a> et <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2020/consommation-d-alcool-en-france-ou-en-sont-les-francais">41 000 morts évitables chaque année en France</a>.</p>
<p>Il est essentiel de procéder à un <a href="https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2021-02/reco403_fiche_outil_2021_alcool_cannabis_tabac_cd_2021_02_11_v0.pdf">repérage précoce suivi d’une intervention brève</a> (notamment une évaluation des risques). Il est également primordial d’assurer un accompagnement durable afin de favoriser la réduction ou l’arrêt de la consommation d’alcool !</p>
<h2>Un TUA associé à des complications médicales et psychosociales</h2>
<p>La consommation chronique d’alcool est à l’origine de <a href="https://www.alcoologie-et-addictologie.fr/index.php/aa/article/download/556/241/">nombreuses pathologies</a> associées <a href="https://hal-lara.archives-ouvertes.fr/hal-01570661/document">au TUA</a> : <a href="https://www.cancer-environnement.fr/fiches/nutrition-activite-physique/alcool-et-cancer/">cancers</a>, maladies de l’<a href="https://www.stop-alcool.ch/fr/l-appareil-digestif">appareil digestif</a>, <a href="https://www.ipubli.inserm.fr/bitstream/handle/10608/168/?sequence=15">du cœur et des vaisseaux</a>, <a href="https://www.ipubli.inserm.fr/bitstream/handle/10608/168/?sequence=11">du système nerveux</a>, des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0761842518301293">poumons</a>, etc.</p>
<p>Les conséquences sanitaires, sociales et économiques liées à la consommation d’alcool sont également majeures. Elle est à l’origine de <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-de-psychologie-sociale-2014-1-page-5.htm">violences</a> et d’accidents, sachant qu’un <a href="https://www.ofdt.fr/statistiques-et-infographie/series-statistiques/alcool-evolution-des-accidents-mortels-de-la-route/">accident mortel sur quatre sur la route</a> est attribué à l’alcool. Quant au coût économique, il est estimé à <a href="https://addictions-france.org/articles/cout-social-des-drogues-et-priorites-de-laction-publique/">102 milliards d’euros</a>.</p>
<h2>Un accompagnement anonyme, gratuit et dans la durée en centres de soins</h2>
<p>Il est important de faire le point avec un professionnel du champ sanitaire et social, afin d’assurer une prise en charge médico-psycho-sociale adaptée à chacun.</p>
<p>L’accompagnement par un médecin (généraliste, spécialiste), une structure de soins spécialisée en alcoologie ou une association d’entraide va permettre de prendre conscience de cette pathologie et de mettre en place un objectif d’abstinence ou de réduction de la consommation d’alcool.</p>
<p>Les Centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) présentent plusieurs spécificités : pluridisciplinarité des équipes (médecins, infirmiers, psychologues, professionnels socio-éducatifs, patients experts), accompagnement dans la durée, gratuité et possibilité d’anonymat. Ils sont financés par l’Assurance maladie et gérés soit par des associations, soit par des établissements publics de santé. </p>
<p>Ces centres s’adressent aux personnes ayant un TUA, ainsi qu’à leur entourage, qui peuvent les contacter directement. Mais la personne concernée peut aussi être orientée par son médecin. En charge de l’accueil, de l’information et de la prévention, les équipes pluridisciplinaires assurent aussi la prise en charge médicale, psychologique, sociale et éducative ainsi qu’un rôle d’orientation.</p>
<p>On peut trouver une liste de centres de soins proches de chez soi via <a href="https://drogues-info-service.fr/Les-drogues-et-vous/L-arret/Je-souhaite-me-faire-aider">Drogues-Info-Service</a> en indiquant son adresse, sa ville ou son département. Également par l’intermédiaire de l’<a href="https://www.addictaide.fr/alcool/annuaire/">annuaire</a> du portail Addict’AIDE.</p>
<h2>Des consultations d’addictologie et séjours à l’hôpital</h2>
<p>En fonction de l’intensité du TUA et de l’existence de complications sur le plan physique, psychologique ou psychiatrique, une hospitalisation pourra être nécessaire dans des structures hospitalières spécialisées.</p>
<p>Selon les territoires, les compétences d’addictologie sont présentes dans différents types d’établissements et le patient peut y recourir spontanément ou dans le cadre de son <a href="https://www.ameli.fr/assure/remboursements/etre-bien-rembourse/medecin-traitant-parcours-soins-coordonnes">parcours de soins</a>,en passant par son médecin traitant.</p>
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<img alt="Capture d’écran de la page d’accueil du site Alcool-Info-Service.fr. Est inscrit son numéro 0980 980 930" src="https://images.theconversation.com/files/571946/original/file-20240129-19-uo2hen.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/571946/original/file-20240129-19-uo2hen.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/571946/original/file-20240129-19-uo2hen.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/571946/original/file-20240129-19-uo2hen.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/571946/original/file-20240129-19-uo2hen.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/571946/original/file-20240129-19-uo2hen.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/571946/original/file-20240129-19-uo2hen.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les personnes concernées par un problème avec l’alcool, ou leurs proches, peuvent solliciter Alcool Info Service, le service national d’aide à distance en matière d’alcool et de dépendances, par tchat ou téléphone 7j/7 au 0980 980 930 (appel anonyme et non surtaxé).</span>
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<p>Il est également possible de se rendre à des consultations d’addictologie. On peut aussi se rapprocher de ce que l’on appelle les équipes de liaison et de soin en addictologie (<a href="https://sante.gouv.fr/prevention-en-sante/addictions/article/les-equipes-de-liaison-et-de-soins-en-addictologie-elsa">ELSA</a>). Elles interviennent auprès des patients, aux urgences et pendant une hospitalisation, en soutien aux équipes soignantes, quand un problème avec l’alcool est mis en évidence.</p>
<p>Une hospitalisation de jour – la personne vient le jour à l’hôpital et rentre chez elle le soir – dans un service hospitaliser d’addictologie peut être envisagée. Cela permet de mener une évaluation pluridisciplinaire de la situation des patients, d’élaborer des projets thérapeutiques individualisés et de proposer des prises en charge adaptées.</p>
<p>L’hospitalisation de jour peut survenir de prime intention ou au décours d’une hospitalisation, également en situation de crise pour des patients connus. L’accompagnement proposé favorise le lien environnemental et familial.</p>
<p>Quant à l’hospitalisation complète en addictologie, elle peut être mise en place, en urgence ou de manière programmée, pour un sevrage, une évaluation ou pour des complications et/ou d’autres pathologies associées sur le plan physique ou psychiatrique.</p>
<p>Enfin, il existe des services de soins de suite et de réadaptation en addictologie. Ils accueillent les personnes, en relais d’une hospitalisation ou en accès direct, afin de réduire ou de prévenir les conséquences fonctionnelles, physiques, cognitives, psychologiques et sociales, et faciliter la réadaptation pour les patients.</p>
<h2>Le traitement du trouble lié à l’usage de l’alcool</h2>
<p>L’objectif du traitement du trouble lié à l’usage de l’alcool est soit l’abstinence (arrêt total de la consommation d’alcool), le sevrage alcoolique (sachant qu’un sevrage complet conduit à l’abstinence), soit la réduction de la consommation (fréquence et quantité d’alcool consommé). Il dépendra de la sévérité du trouble et de l’existence de complications qui peuvent nécessiter l’arrêt de toute consommation d’alcool.</p>
<p>Des <a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/medicaments/utiliser-recycler-medicaments/medicaments-contre-la-dependance-l-alcool-0">médicaments peuvent aussi aider</a> au maintien de l’abstinence, à la prévention de la rechute ou à la réduction de la consommation, en complément d’un accompagnement psychothérapeutique.</p>
<p>En 2023, la Société française d’alcoologie a mis à jour ses <a href="https://sfalcoologie.fr/wp-content/uploads/RECOS-SFA-Version-2023-2-2.pdf">recommandations concernant le mésusage d’alcool</a>. Elle y détaille l’accompagnement psychothérapeutique, qui va des interventions brèves à l’entretien motivationnel, en passant par les thérapies cognitives et comportementales (TCC) et les <a href="https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2023-10/guide_agir_en_premier_recours_pour_diminuer_le_risque_alcool.pdf">psychothérapies</a> d’inspiration analytique, familiale ou basées sur les compétences psychosociales.</p>
<p>Nous ne sommes pas tous égaux face à la maladie alcoolique, qui est complexe et multifactorielle : les facteurs de vulnérabilité sont nombreux, et la prise en charge sera adaptée à chacun.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221664/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Arvers est administrateur de la SFT, de l'IRAAT et de l'IREPS ARA.</span></em></p>Une consommation élevée d’alcool peut conduire à un trouble de l’usage de l’alcool qui peut être associé à de graves complications. D’où l’importance de faire le point et de se faire suivre si besoin.Philippe Arvers, Médecin addictologue et tabacologue, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2220652024-01-29T15:44:29Z2024-01-29T15:44:29ZUn coronavirus de pangolin décime des souris « humanisées » : que faut-il savoir ?<p>Une publication mise en ligne début janvier 2024 sur le site <a href="https://www.biorxiv.org/">BioRχiv</a> (prononcé, à l’anglo-saxonne, « bioarchive ») a fait couler beaucoup d’encre. Il faut dire que l’histoire qu’elle raconte est particulièrement intrigante.</p>
<p>Intitulée <a href="https://www.biorxiv.org/content/10.1101/2024.01.03.574008v1">« Lethal Infection of Human ACE2-Transgenic Mice Caused by SARS-CoV-2-related Pangolin coronavirus GX_P2V(short_3UTR) »</a>, elle implique des souris, des pangolins, ainsi qu’un virus qui est le cousin d’une vieille connaissance, le coronavirus SARS-CoV-2.</p>
<p>Dans cet article scientifique non encore évalué par les pairs (c’est un point important à souligner), des chercheurs de <a href="https://enjwc.buct.edu.cn">l’université de technologie chimique de Pékin</a> relatent les résultats de leurs expérimentations. Ces dernières ont consisté à infecter, avec un virus dérivant d’un coronavirus initialement isolé chez des pangolins, des souris « humanisées ».</p>
<p>Résultat : une semaine plus tard, 100 % des rongeurs étaient morts, le virus ayant envahi non seulement leurs poumons, mais aussi leurs cerveaux. Comment interpréter ces résultats ? Faut-il s’en inquiéter ? Décryptage.</p>
<h2>Retour en arrière</h2>
<p>Pour bien comprendre le contexte dans lequel ont été menées ces expérimentations, il nous faut revenir quelques années en arrière. En 2020, précisément.</p>
<p>À cette époque, des équipes de recherche chinoises publiaient des séquences de génomes de coronavirus de pangolins. Celles-ci provenaient de virus isolés à partir d’échantillons prélevés entre 2017 et 2019, sur des animaux saisis lors d’opérations anti-contrebande. Avant cette découverte, on ne connaissait pas de coronavirus de pangolins. Toutefois, le fait d’avoir trouvé des coronavirus chez les pangolins n’est pas étonnant, puisque ces virus infectent les mammifères.</p>
<p>Deux souches distinctes avaient alors été isolées par les équipes chinoises, après infection de cellules en culture : la souche <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37330497/">pCoV-GD01</a> (à partir d’un prélèvement effectué en 2019) et la souche <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/?term=%22GX-P2V%20%22&sort=date">GX-P2V</a> (prélèvement daté de 2017).</p>
<p>À la suite de la découverte des deux coronavirus de pangolin, d’autres travaux ont été menés pour les caractériser : séquençage complet de leur génome, infection de différentes lignées cellulaires, infections d’animaux humanisés. Il a ainsi été découvert que les génomes de ces deux virus présentent des homologies importantes avec celui du SARS-CoV-2.</p>
<p>Rappelons que si le pangolin a un temps figuré sur la liste des suspects pouvant avoir servi d’intermédiaire entre le réservoir naturel du SARS-CoV-2 (encore inconnu, même si les chauves-souris sont soupçonnées) et l’être humain, <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC9408936/">il a ensuite été disculpé</a>. En effet, des virus de séquences beaucoup plus proches ont été identifiés chez certaines chauves-souris (en particulier le <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-022-04532-4">coronavirus RaTG13, isolé chez le rhinolophe <em>Rhinolophus affinis</em></a>, que l’on trouve notamment dans le sud-ouest de la Chine, à plus de 1 500 km de Wuhan, où se sont probablement produites les premières infections par le SARS-CoV-2).</p>
<p>Les conclusions des études menées sur les souches pCoV-GD01 et GX-P2V ont été publiées entre 2020 et 2023, après révision par les pairs. Autrement dit, des scientifiques, experts du domaine, mais n’ayant pas participé à ces travaux, ont analysé ces résultats et la façon dont ils ont été obtenus, et les ont jugés dignes de confiance.</p>
<p>Il faut à nouveau souligner que la nouvelle étude n’a pas encore subi ce processus d’évaluation, qui est le parcours habituel de toute publication scientifique « sérieuse ».</p>
<h2>Une nouvelle étude qui doit encore être vérifiée</h2>
<p>Les travaux publiés en janvier 2024 sont pour l’instant ce que l’on appelle, dans le jargon de l’édition scientifique, un « preprint » : elle n’a pas encore été évaluée par les pairs. Ce n’est pas anormal, car BioRχiv, le site où elle a été déposée, est justement destiné à héberger de telles publications. Elles peuvent, après y avoir été uploadées, faire l’objet de commentaires.</p>
<p>Cette façon de procéder permet de faire circuler plus rapidement les informations auprès de spécialistes, qui peuvent les commenter, et parfois aussi servir à établir l’antériorité d’une découverte.</p>
<p>Cependant, les informations qui figurent dans des preprints (quel que soit le site qui les héberge) ne doivent pas être considérées comme totalement fiables avant d’avoir passé une évaluation par les pairs, et d’avoir été publiée dans une revue à comité de lecture.</p>
<p>Quelles sont, justement, les informations contenues dans cette nouvelle étude ?</p>
<h2>Des virus de pangolin mutés, certes, mais pas intentionnellement</h2>
<p>Au cours des précédents travaux, publiés en 2020 et 2023, les virus de pangolins qui avaient été isolés ont été cultivés sur des cellules, en laboratoire.</p>
<p>Au fil de ces cultures successives, leur génome a subi des mutations, dont certaines d’entre elles se sont avérées conférer un avantage aux virus qui les possédaient. Ces mutants ont donc prospéré, transmettant leurs mutations à leur descendance.</p>
<p>Ce phénomène naturel se produit classiquement lorsque l’on cultive des virus <em>in vitro</em>, quels qu’ils soient : il a notamment déjà été observé dans le cas du VIH ou du virus de l’hépatite C, par exemple. Plusieurs mutants de sélection ont été obtenus de cette façon, mais l’un d’entre eux nous intéresse tout particulièrement.</p>
<p>Baptisé GX-P2V(3’UTR), il a la particularité de posséder un génome amputé de 104 nucléotides, les « briques » constitutives de l’ARN dont est fait le génome des coronavirus. Ce morceau manquant est normalement situé dans la région non codante située à l’une de ses extrémités (3’UTR).</p>
<p>Autre particularité de ce mutant : les auteurs ont découvert que lorsqu’ils l’utilisaient pour infecter des souris, la totalité des animaux malades mourrait en 7 à 8 jours. Chez les animaux morts, une quantité importante d’ARN viral a été retrouvée dans les poumons et le cerveau. D’après les auteurs, ce sont probablement les atteintes cérébrales qui ont tué les rongeurs.</p>
<p>Or, les souris infectées n’étaient pas n’importe quelles souris, mais des souris dites « humanisées ». Autrement dit, des souris génétiquement modifiées pour produire, à la surface de leurs cellules, le récepteur ACE2 humain. Celui-là même qui permet au coronavirus SARS-CoV-2 à l’origine de la pandémie de 2020 de reconnaître les cellules humaines et de les infecter…</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="Modèle en 3D du coronavirus SARS-CoV-2" src="https://images.theconversation.com/files/571950/original/file-20240129-25-t9rema.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/571950/original/file-20240129-25-t9rema.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/571950/original/file-20240129-25-t9rema.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/571950/original/file-20240129-25-t9rema.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/571950/original/file-20240129-25-t9rema.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/571950/original/file-20240129-25-t9rema.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/571950/original/file-20240129-25-t9rema.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Sur ce modèle en 3D du coronavirus SARS-CoV-2, la protéine Spike qui permet au virus de pénétrer dans les cellules humaines en s’arrimant au récepteur ACE2 est représentée en rouge.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nihgov/49643893178/in/photolist-2iCRVSJ-2iH8Kxi-2jk18mh-2koRoi7-2jk18s4-wewpg4-2o9zewJ-2jk2hum-2mhKAx4-2iTjLFU-2ivWYAQ-2iEP3MV-2iERQ6u-2iERQiZ-2jfwm7p-2iLBJKi-WwL7yT-2iH8KzC-2jfwmb2-2j4dFiW-2jcerea-2iCRVRX-2inuGL9-2jciuth-2jk2hXA-2iDVeRk-2kChCCT-2iTjLJQ-EEe6u9-2iLBJK3-2iERQ8d-2iCUCvw-2kS41M9-2iG5wqt-2jfzdMX-2itfPmQ-2itgZyx-2iCUCv6-2iYmxva-2jfwm3X-2iETgaX-2j4fdfV-2jk18Cz-2jk2hwW-2jk18et-2ivY9VB-2ivY9Xk-2jk2hQG-2iG5wss-2koRooc">NIH</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Lorsque les chercheurs ont analysé plus avant le génome de GX-P2V(3’UTR), ils ont constaté la présence de mutations dans les gènes ORF1ab, S et N. ORF1ab est une partie du génome conservée chez les coronavirus, qui permet de produire des protéines indispensables au cycle de vie de ces virus. Le gène S code quant à lui pour la protéine Spike (la « clé » qui permet au coronavirus d’entrer dans les cellules qu’il infecte, en interagissant avec un récepteur situé à leur surface). Enfin, le gène N sert à produire la protéine de la nucléocapside, qui est associée au matériel génétique du virus et le protège. Cette dernière protéine est habituellement très immunogène (capable d’induire une réponse immunitaire).</p>
<h2>Que faut-il retenir de ces travaux ?</h2>
<p>Rappelons à nouveau que cette étude est en cours de relecture par les pairs, et que les remarques des membres du comité de lecture ne sont à ce jour pas connues.</p>
<p>Si l’on se cantonne aux informations contenues dans le preprint, l’équipe chinoise semble avoir caractérisé un coronavirus de pangolin capable d’infecter des cellules humanisées chez la souris, avec pour conséquences des lésions pulmonaires et surtout cérébrales sévères. Une capacité qui n’est pas fréquente chez les coronavirus.</p>
<p>Toutefois, il faut souligner que cette étude comporte plusieurs limites.</p>
<p>La première, et pas la moindre, est que ces résultats sont en contradiction avec les résultats d’une autre étude, publiée précédemment par une équipe chinoise (dans une revue à comité de lecture, donc ayant passé l’évaluation par les pairs). Ces travaux démontraient que le <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36688655">mutant GX-P2V(3’UTR) était responsable d’infections peu graves chez des souris humanisées</a>.</p>
<p>Il est pour l’instant compliqué d’expliquer cette contradiction, car les souris infectées dans la nouvelle étude semblent différentes de celles utilisées dans d’autres études. Produites par une société chinoise (Beijing SpePharm Biotechnology Company), on ne connaît pas bien leurs particularités. C’est une des remarques que pourraient faire aux auteurs les relecteurs : pourquoi n’avoir pas utilisé les souris habituellement employées en recherche animale ?</p>
<p>Il pourrait également être intéressant de savoir comment ces souris humanisées réagiraient à une infection par le SARS-CoV-2 (aussi sévèrement ? Plus ou moins sévèrement ?). Aucune comparaison n’est présentée dans l’étude.</p>
<p>Par ailleurs, ce travail porte sur un mutant de sélection, pas sur un virus naturel. Les mutants de sélection apparaissent lors de la culture de virus in vitro, en l’absence de la pression du système immunitaire de l’hôte. On ne sait donc pas comment ce virus se comporterait s’il était confronté à la pression naturelle du système immunitaire humain.</p>
<p>De plus, les infections ont été menées sur des souris humanisées exprimant le récepteur ACE2 humain, ce qui ne constitue pas un modèle naturel non plus. Naturellement, en effet, les souris expriment un récepteur ACE2 qui n’est pas reconnu par le SARS-CoV-2, elles ne sont donc pas infectées par ce virus. En humanisant les souris, on force leur organisme à exprimer le récepteur ACE2 humain (hACE2) : les rongeurs deviennent donc sensibles au SARS-CoV-2. Cependant, la répartition d’hACE2 sur leurs tissus ou la quantité de récepteurs exprimés sont probablement surestimées par rapport à ce qu’on observe chez les êtres humains.</p>
<p>Enfin, les modèles animaux sont utilisés de longue date <a href="https://lejournal.cnrs.fr/articles/peut-se-passer-des-modeles-animaux">pour tenter de comprendre les maladies, pour tester des vaccins, des médicaments, etc.</a> Mais même si la maladie développée par l’animal ressemble à celle observée chez les humains, le modèle n’est jamais directement transposable. Au cours des infections virales par exemple, les protéines virales interagissent avec les structures cellulaires, qui sont spécifiques des espèces. Les résultats obtenus dans un modèle animal doivent donc toujours être considérés avec précaution.</p>
<h2>Les questions que pose cette étude</h2>
<p>Au-delà des questions purement « biologiques » qui persistent concernant les spécificités et la dangerosité potentielle de ce virus GX-P2V « raccourci », ces travaux sont l’occasion de revenir sur un débat qui continue d’agiter la communauté scientifique : celle des expériences de « gain de fonction », qui consistent à manipuler des virus pour les rendre intentionnellement plus virulents.</p>
<p>Précisons que dans le cas présent, cette étude visait à caractériser les propriétés d’un virus mutant obtenu incidemment en laboratoire : celui-ci n’a pas été produit suite à une manipulation intentionnelle.</p>
<p>Les expériences de gain de fonction consistent à faire évoluer le virus étudié de façon artificielle afin de lui conférer de nouvelles propriétés. Il peut s’agir par exemple de la capacité à infecter une nouvelle espèce hôte qu’il n’infectait pas auparavant. L’idée est ensuite d’analyser les modifications qui lui ont permis d’acquérir ces nouvelles capacités.</p>
<p>Pour y parvenir, on peut soit introduire de nouveaux gènes dans le génome du virus, en le modifiant grâce à des outils d’édition génétique (comme la technologie CRISPR), soit en le cultivant dans certaines conditions (avec des médicaments antiviraux, pour faire émerger des virus mutants résistants, par exemple), soit en le cultivant simplement sur des cellules, pendant plusieurs générations, et en sélectionnant les virus présentant la caractéristique que l’on veut étudier (une virulence accrue, par exemple ; on « accélère » et on oriente en quelque sorte l’évolution naturelle).</p>
<p>En 2014, une équipe américaine avait déjà déclenché la polémique en construisant un <a href="https://www.cell.com/cell-host-microbe/fulltext/S1931-3128(14)00163-2">virus de la grippe chimère mi-grippe aviaire, mi-grippe espagnole</a>. La communauté scientifique s’était alors mobilisée par interdire ces expériences.</p>
<p>La controverse existe toujours parmi les scientifiques au sujet de ce type d’expérimentations. Certains considèrent qu’elles sont indispensables pour faire progresser la connaissance, mieux comprendre les dangers que pose l’évolution de certains virus, et permettre le développement de vaccins ou de médicaments. D’autres affirment que ce genre de travaux devraient être interdits, car ils représentent un risque trop important pour l’humanité : nous ne sommes jamais à l’abri d’une erreur de manipulation qui pourrait entraîner la dissémination d’un virus ainsi modifié.</p>
<p>Un scénario qui, rappelons-le, ne peut être complètement écarté dans le cas de l’émergence du SARS-CoV-2, même si aucune preuve solide n’a pu jusqu’à présent étayer la thèse d’un accident de laboratoire. Depuis son émergence en 2019, la question de la biosécurité des laboratoires de virologie et des infrastructures destinées à étudier les virus les plus dangereux, notamment en Chine, reste d’actualité. L’Organisation mondiale de la Santé en a la charge, cependant ses experts continuent à rencontrer des difficultés pour rassembler toutes les informations nécessaires à l’élucidation des origines SARS-CoV-2, informations que nous n’avons toujours pas.</p>
<p>Pour conclure, soulignons qu’en France, ainsi qu’en Europe et aux États-Unis, les expériences de gain de fonction sur le coronavirus SARS-CoV-2 sont interdites. Toutefois, les travaux présentés dans la publication discutée ici ne seraient probablement pas tombés sous le coup de cette interdiction, car le virus muté ne l’a pas été intentionnellement.</p>
<p>L’évaluation de ces résultats par les pairs, ainsi que d’éventuelles réplications de ces travaux, permettront de déterminer s’il y a vraiment lieu de surveiller plus étroitement le variant GX-P2V(3’UTR).</p>
<p>Une chose est certaine : la question de la circulation des virus entre les espèces et des risques d’émergence virale reste plus que jamais posée, en particulier à notre époque, alors que les échanges globalisés se conjuguent à de profondes modifications environnementales. Rappelons que plus des deux tiers des émergences épidémiques <a href="https://www.emro.who.int/fr/about-who/rc61/zoonotic-diseases.html">trouvent leur origine dans le passage d’un agent pathogène de l’animal à l’être humain</a>…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222065/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Anne Goffard est Virologue membre de l'Université de Lille et médecin au CHU de Lille. Elle a reçu des financements de l'I-Site ULNE, de l'ANR, du CNRS et du CHU de Lille. Elle est adjointe au maire de Lille en charge des Universités, de la Recherche, des Etudiants et de la Gestion du risque pandémique.</span></em></p>Début janvier, un article scientifique chinois rapportait qu’un coronavirus de pangolin muté en laboratoire s’avérait fatal pour des souris « humanisées ». Faut-il s’inquiéter de ces résultats ?Anne Goffard, Médecin, Professeure des Universités – Praticienne Hospitalière, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2193772024-01-29T14:56:37Z2024-01-29T14:56:37ZMieux dormir, un facteur de protection contre la démence<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/569865/original/file-20240117-23-vqzz7m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=60%2C0%2C6720%2C4466&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le manque de sommeil ou sa mauvaise qualité font parties des facteurs de risque de développer la maladie d'Alzheimer. Heureusement, il y a des méthodes pour améliorer son sommeil.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>La démence est une perte progressive des capacités cognitives, comme celle de la mémoire, diminution qui est suffisamment importante pour avoir un impact sur les activités de la vie quotidienne. </p>
<p>Elle peut être causée par plusieurs maladies différentes, comme celle d’<a href="https://alzheimer.ca/fr/au-sujet-des-troubles-neurocognitifs/quest-ce-que-la-maladie-dalzheimer">Alzheimer</a>, qui est la forme la plus courante. La démence est due à une perte des neurones se produisant sur une longue période de temps. Puisqu’au moment de présenter des symptômes, plusieurs changements dans le cerveau se sont déjà produits, de nombreux scientifiques se concentrent sur l’étude des facteurs de risque et de protection de la démence. </p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/de-saines-habitudes-de-vie-peuvent-prevenir-jusqua-40-des-cas-de-demence-212150">De saines habitudes de vie peuvent prévenir jusqu’à 40 % des cas de démence</a>
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<p>Un facteur de risque, ou inversement, un facteur de protection, est une condition ou un comportement qui augmente ou réduit le risque de développer une maladie, sans toutefois le garantir. Certains facteurs de risque de la maladie d’Alzheimer et de la démence ne sont pas modifiables, comme l’âge ou la génétique, mais il en existe plusieurs sur lesquels on peut intervenir, <a href="https://www.thelancet.com/article/S0140-6736(20)30367-6/fulltext">notamment nos habitudes de vie et leurs impacts sur notre santé globale</a>.</p>
<p>Ces facteurs de risque incluent la dépression, le manque d’activité physique, l’isolation sociale, l’hypertension, l’obésité, le diabète, la consommation excessive d’alcool et le tabagisme, ainsi qu’un mauvais sommeil.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/changer-son-mode-de-vie-peut-reduire-les-risques-de-demence-mais-il-faut-le-faire-maintenant-218789">Changer son mode de vie peut réduire les risques de démence – mais il faut le faire maintenant</a>
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<p>Nous concentrons nos recherches sur la question du sommeil depuis plus de 10 ans, notamment dans le contexte de la <a href="https://www.nhlbi.nih.gov/science/framingham-heart-study-fhs">Framingham Heart Study</a>, une large étude de cohorte communautaire, pilotée par le NIH américain depuis les années quarante, dans le cadre de laquelle la santé des participants est suivie sur plusieurs années. Chercheurs en médecine du sommeil et en épidémiologie, nous avons une expertise dans la recherche portant sur le rôle du sommeil et de ses troubles dans le vieillissement du cerveau, au niveau cognitif et psychiatrique. </p>
<p>Dans le cadre de nos recherches, nous avons suivi et analysé le sommeil de gens âgés de 60 ans et plus afin de voir qui développait — ou non — la démence. </p>
<h2>Le sommeil comme facteur de risque ou de protection contre la démence</h2>
<p>Le sommeil semble jouer un rôle essentiel dans plusieurs fonctions cérébrales, comme la mémoire. Un sommeil de bonne qualité <a href="https://jamanetwork.com/journals/jamaneurology/fullarticle/2793873">pourrait donc jouer un rôle primordial dans la prévention de la démence</a>.</p>
<p>Le <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.1241224">sommeil est important pour maintenir de bonnes connexions dans le cerveau</a>. Récemment, des recherches ont révélé que le sommeil semble avoir une fonction semblable à celle d’un camion à ordures pour le cerveau : un <a href="https://doi.org/10.1016/j.mad.2023.111899">sommeil profond serait crucial pour éliminer les déchets métaboliques du cerveau</a> comme certaines protéines, y compris celles connues pour s’accumuler dans le cerveau des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. </p>
<p>Cependant, les liens entre le sommeil profond et la démence restent à clarifier.</p>
<h2>Qu’est-ce que le sommeil lent profond ?</h2>
<p>Pendant une nuit de sommeil, nous traversons plusieurs <a href="http://ceams-carsm.ca/a-propos-du-sommeil/">stades de sommeil</a> qui se succèdent et se répètent. </p>
<p>Le sommeil NREM (<em>non-rapid eye movement sleep</em>) se divise en sommeil léger (stade NREM1), en sommeil lent (stade NREM2), et en sommeil lent profond (stade NREM3). Ce dernier est associé à plusieurs fonctions restauratrices. </p>
<p>Ensuite, le sommeil paradoxal, ou sommeil REM (<em>rapid eye movement sleep</em>), est le stade généralement associé aux rêves les plus vivides. Chaque nuit, un adulte passe généralement environ 15 à 20 % en sommeil profond si l’on additionne toutes les périodes de sommeil NREM3. </p>
<p>Plusieurs changements de sommeil sont courants chez les adultes, comme se coucher et se réveiller plus tôt, dormir moins longtemps et moins profondément, et rester éveillé plus fréquemment pendant la nuit.</p>
<h2>Quand perte de sommeil profond rime avec démence</h2>
<p>Des <a href="https://jamanetwork.com/journals/jamaneurology/fullarticle/2810957">participants de la Framingham Heart Study</a> ont été évalués à l’aide d’un enregistrement de leur sommeil — connu sous le nom de <a href="https://sommeilmtl.com/?gad_source=1&gclid=CjwKCAiA75itBhA6EiwAkho9e59KoHerv89P5nUdElYK6pK2w08D4MRrDcIvNhg7Iw9HV8ssJgvRqBoC478QAvD_BwE">polysomnographie</a> — à deux reprises, espacé d’environ cinq ans, soit en 1995-1998 et ensuite en 2001-2003. </p>
<p>Plusieurs personnes montraient une diminution de leur sommeil lent profond au court des années, comme on s’y attend avec le vieillissement. À l’inverse, la quantité de sommeil profond de certaines personnes est restée stable ou a même augmenté. </p>
<p>Notre équipe de chercheurs de la Framingham Heart Study a suivi 346 participants âgés de 60 ans et plus pendant 17 années supplémentaires afin d’observer qui développait la démence, et qui ne la développait pas. </p>
<p>La perte progressive du sommeil profond dans le temps était associée à une augmentation du risque de démence, quelle qu’en soit la cause, notamment de type Alzheimer. Ces résultats étaient indépendants de nombreux autres facteurs de risque de démence.</p>
<p>Bien que nos résultats ne prouvent pas que la perte de sommeil profond provoque la démence, ils suggèrent qu’elle pourrait être un facteur de risque chez les personnes âgées. D’autres aspects du sommeil peuvent également être importants, comme sa durée ainsi que sa qualité. </p>
<h2>Des stratégies pour améliorer le sommeil profond</h2>
<p>Sachant l’impact d’un manque de sommeil profond sur la santé cognitive, quelles sont les stratégies pour l’améliorer ? </p>
<p>Avant tout, si vous rencontrez des problèmes de sommeil, il vaut la peine d’en parler à votre médecin. De nombreux troubles du sommeil sont sous-diagnostiqués et traitables, notamment par des avenues comportementales, c’est-à-dire non médicamenteuses. </p>
<p>Adopter de bonnes habitudes de sommeil peut aider, comme se coucher et se lever à des heures constantes ou éviter la lumière vive ou bleue au lit, comme celle des écrans. </p>
<p>Vous pouvez également éviter la caféine, limiter votre consommation d’alcool, maintenir un poids santé, pratiquer une activité physique pendant la journée, et dormir dans un environnement confortable, sombre et calme.</p>
<p>Le rôle que joue le sommeil profond dans la prévention contre la démence reste certes à explorer et à étudier. Favoriser son sommeil avec de bonnes habitudes de vie pourrait avoir le potentiel de nous aider à vieillir en santé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219377/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Andrée-Ann Baril a reçu des financements de la Sleep Research Society Foundation, la Société Alzheimer du Canada, les Instituts de recherche en santé du Canada, les Bourses postdoctorales Banting, la Fondation de l'Hôpital du Sacré-Coeur de Montréal, l'Université de Montréal et des frais de présentation de Eisai. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Matthew Pase a reçu des financements de National Health and Medical Research Council of Australia, National Institute on Aging, Dementia Australia, Alzheimer's Assocaition, National Heart Foundation of Australia, Australian Research Countil, Stroke Foundation, Brain Foundation, Alzheimer’s Drug Discovery Foundation, Rebecca L Cooper Medical Research Foundation, and Bethlehem Griffiths Research Foundation. </span></em></p>Le sommeil semble jouer un rôle essentiel dans plusieurs fonctions cérébrales, comme la mémoire. Un sommeil de bonne qualité pourrait donc jouer un rôle primordial dans la prévention de la démence.Andrée-Ann Baril, Professeure-chercheure adjointe au Département de médecine, Université de MontréalMatthew Pase, Associate Professor of Neurology and Epidemiology, Monash UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2214202024-01-28T16:07:04Z2024-01-28T16:07:04ZFin de vie : pourquoi le « droit de provoquer délibérément la mort » bouleverserait l’éthique médicale et la relation de soin ?<p>En ce début de 2024, les contours ainsi que les règles d’application d’une législation favorable à l’aide à mourir semblent se préciser, en dépit d’un exercice politique difficile à décrypter. Le président de la République Emmanuel Macron <a href="https://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/fin-de-vie-emmanuel-macron-confirme-un-texte-distinct-sur-les-soins-palliatifs-2045152">devrait annoncer sa position définitive en février</a>. Dans un premier temps, il semble acquis qu’elle concernera les soins palliatifs.</p>
<p>L’arbitrage législatif qui suivra le projet de loi sera notamment consacré aux conditions d’encadrement du caractère « exceptionnel » de l’aide à mourir ainsi qu’à ses conséquences sur la déontologie des pratiques soignantes.</p>
<p>J’évoquerai tout d’abord l’émergence du concept d’exception d’euthanasie il y a 24 ans (car la distinction entre suicide médicalement assisté et euthanasie semble l’un des points de tension éthique dont il sera débattu), avant d’anticiper l’impact d’une médecine du faire mourir dans la rédaction du prochain code de déontologie médicale.</p>
<h2>« Une sorte d’exception d’euthanasie »</h2>
<p>Rappelons que l’euthanasie est un acte ayant pour intention d’interrompre volontairement et médicalement une vie. Elle se distingue du suicide, voire du suicide « médicalement assisté », en ce que l’intervention directe du médecin provoque la mort.</p>
<p>Dans son avis du 27 janvier 2000 intitulé <a href="https://www.ccne-ethique.fr/fr/publications/avis-63-fin-de-vie-arret-de-vie-euthanasie">« Fin de vie, arrêt de vie, euthanasie »</a>, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) indiquait que l’euthanasie « consiste en l’acte d’un tiers qui met délibérément fin à la vie d’une personne dans l’intention de mettre un terme à une situation jugée insupportable. »</p>
<p>Il me semble utile d’en reprendre ici quelques extraits, car cet avis préfigure le cadre législatif qui pourrait être proposé en 2024, au même titre que l’avis du 13 septembre 2022 « Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : autonomie et solidarité ».</p>
<p>Lors de la publication du texte en 2000, le CCNE anticipait avec clairvoyance les risques d’une contractualisation de la relation de soin qui intégrerait le droit de disposer des compétences du soignant pour exécuter une demande de mort (ce à quoi s’opposent <a href="https://sfap.org/system/files/avis_ethique_commun_-_160223.pdf">plusieurs sociétés savantes de professionnels de santé</a>) :</p>
<blockquote>
<p>« Le Comité renonce à considérer comme un droit dont on pourrait se prévaloir la possibilité d’exiger d’un tiers qu’il mette fin à une vie. La valeur de l’interdit du meurtre demeure fondatrice, de même que l’appel à tout mettre en œuvre pour améliorer la qualité de la vie des individus. Par ailleurs, la perspective qui ne verrait dans la société qu’une addition de contrats individuels se révèle trop courte, notamment en matière de soins, là où le soignant ne serait plus considéré que comme un prestataire de services. […] »</p>
</blockquote>
<p>L’avis n° 63 s’avère pertinent lorsqu’il aborde les conditions d’une dépénalisation de l’euthanasie avant l’examen d’une juridiction au cas par cas. En cela, il se refuse à toute légalisation de l’aide à mourir ainsi qu’au seul recours à une procédure collégiale étayant la décision d’un médecin :</p>
<blockquote>
<p>« Sur le plan du droit, ces constatations ne devraient pas conduire pour autant à la dépénalisation et les textes d’incrimination du Code pénal ne devraient pas subir de modification. Les juridictions, chargées de les appliquer, devraient recevoir les moyens de formuler leurs décisions sans avoir à user de subterfuges juridiques faute de trouver dans les textes les instruments techniques nécessaires pour asseoir leurs jugements ou leurs arrêts. La procédure pénale pourrait offrir des solutions dont il n’appartient toutefois pas au CCNE de définir les modalités. Tout au plus peut-il tenter de formuler l’une ou l’autre suggestion de nature à contribuer à la réflexion. L’acte d’euthanasie devrait continuer à être soumis à l’autorité judiciaire. Mais un examen particulier devrait lui être réservé s’il était présenté comme tel par son auteur. »</p>
</blockquote>
<p>C’est pour se conformer à de tels principes que le CCNE avance le concept « d’exception d’euthanasie ». Il suscite aujourd’hui encore des débats contradictoires. En effet, comment caractériser la nature d’une « circonstance exceptionnelle » dès lors que chaque fin de vie est en soi singulière ? Le risque n’est-il pas de qualifier ou de disqualifier les circonstances de maladies spécifiques <a href="https://www.lefigaro.fr/actualite-france/exception-d-euthanasie-les-medecins-redoutent-un-cheval-de-troie-20231108">qui apparaîtraient plus insupportables, voire indignes d’être vécues, que d’autres</a> ?</p>
<p>Le CCNE évoque alors 3 « mobiles » susceptibles de justifier l’acte létal :</p>
<blockquote>
<p>« Une sorte d’exception d’euthanasie, qui pourrait être prévue par la loi, permettrait d’apprécier tant les circonstances exceptionnelles pouvant conduire à des arrêts de vie que les conditions de leur réalisation. Elle devrait faire l’objet d’un examen en début d’instruction ou de débats par une commission interdisciplinaire chargée d’apprécier le bien fondé des prétentions des intéressés au regard non pas de la culpabilité en fait et en droit, mais des mobiles qui les ont animés : souci d’abréger des souffrances, respect d’une demande formulée par le patient, compassion face à l’inéluctable. Le juge resterait bien entendu maître de la décision. »</p>
</blockquote>
<p>Observons que dans sa résolution <a href="https://cdn.theconversation.com/static_files/files/3007/cnom-findevie-fev2013.pdf?1705677062">« Fin de vie, “assistance à mourir” »</a> du 8 février 2013, le Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM) a intégré à sa réflexion déontologique les « situations cliniques exceptionnelles », tenant compte de manière implicite des préconisations du CCNE en 2000.</p>
<p>Le CNOM y apporte cependant quelques précisions :</p>
<blockquote>
<p>« Sur des requêtes persistantes, lucides et réitérées de la personne, atteinte d’une affection pour laquelle les soins curatifs sont devenus inopérants et les soins palliatifs instaurés, une décision médicale légitime doit être prise devant des situations cliniques exceptionnelles, sous réserve qu’elles soient identifiées comme telles, non pas par un seul praticien, mais par une formation collégiale. »</p>
</blockquote>
<p>Plutôt que de proposer l’euthanasie comme finalité explicite de la décision médicale et mentionnant, comme dans l’avis n° 63 du CCNE, le recours à « une commission interdisciplinaire » sous forme de « collège », le CNOM propose :</p>
<blockquote>
<p>« une sédation, adaptée, profonde et terminale délivrée dans le respect de la dignité pourrait être envisagée, par devoir d’humanité, par un collège dont il conviendrait de fixer la composition et les modalités de saisine. Ce collège fonderait son avis sur l’évaluation de la situation médicale du patient, sur le caractère réitéré et autonome de sa demande, sur l’absence de toute entrave à sa liberté dans l’expression de cette demande. »</p>
</blockquote>
<h2>La position de l’Académie nationale de médecine</h2>
<p>Quelques jours après la publication de cette résolution du CNOM, le 26 février 2013, L’Académie nationale de médecine prenait position, <a href="https://www.academie-medecine.fr/communique-de-presse-ne-pas-confondre-fin-de-vie-et-arret-de-vie">dans un communiqué</a>, contre ce recours à la une « sédation, adaptée, profonde et terminale » assimilable à un « arrêt de vie », donc à une euthanasie. L’Académie rappelait sa volonté de « distinguer clairement “fin de vie” et “arrêt de vie” et [de] souligner que le terme “fin de vie” lui-même recouvre des situations bien distinctes ».</p>
<p>Selon cette instance, la loi Leonetti et les textes réglementaires qui l’accompagnent permettaient aux médecins « de répondre aux situations difficiles de fin de vie – en dépit de leur complexité ».</p>
<p>Dans un communiqué, l’Académie soulignait que</p>
<blockquote>
<p>« “l’arrêt de vie” (aide à mourir en réponse à une demande volontaire à mourir, alors que la vie en elle-même n’est ni irrémédiablement parvenue à son terme, ni immédiatement menacée) ne peut être assimilé à un acte médical. Au-delà de l’aspect sémantique, l’Académie de médecine invite à la rigueur dans l’emploi des mots et des formules, tout écart en ce domaine étant susceptible d’interprétations tendancieuses, au risque de dénaturer les termes d’une loi toujours en vigueur et qu’elle entend défendre. »</p>
</blockquote>
<p>Dix ans plus tard, en 2023, les membres de l’Académie nationale de médecine préconiseront de <a href="https://www.academie-medecine.fr/wp-content/uploads/2023/07/Avis-23-17-Favoriser-une-fin-de-vie-digne-et-apais-e_2023_Bulletin-de-l-Aca.pdf">« ne pas effacer les textes fondateurs par une loi nouvelle, mais reconnaître les situations de souffrance insoutenables et inhumaines qui n’entrent pas dans le champ de ces textes »</a>. Des situations qui seraient donc de nature à être prises en compte si la législation évoluait.</p>
<p>L’enjeu actuel sera de tenter d’établir une définition rigoureuse de ce qui sera considéré comme une situation exceptionnelle pour justifier une aide à mourir, sans donner à penser que des « critères de minutie » établis à cet égard seraient de nature à se substituer à une approche au cas par cas, concertée et responsable.</p>
<h2>Quel serait l’impact d’un « droit de provoquer délibérément la mort » ?</h2>
<p>En pratique quelles seraient les conséquences d’une évolution législative sur la déontologie médicale, sur l’engagement et la relation dans l’accompagnement et le soin ?</p>
<p>Pour étayer cette anticipation, je me référerai au seul document officiel accessible en ce début 2024 : <a href="https://www.lefigaro.fr/actualite-france/suicide-assiste-en-presence-d-un-medecin-exception-d-euthanasie-et-secourisme-a-l-envers-les-premieres-pistes-de-l-aide-a-mourir-20231213">le projet de loi du 6 octobre 2023 relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie</a>.</p>
<p>Ses rédacteurs affirment dans son article 11, qui « définit l’aide à mourir » que</p>
<blockquote>
<p>« L’aide à mourir s’inscrit dans la continuité des droits des patients énoncés à l’article L. 1110-5 du code de la santé publique, qui dispose que : “Toute personne a le droit d’avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance. Les professionnels de santé mettent en œuvre tous les moyens à leur disposition pour que ce droit soit respecté.”, sans être elle-même qualifiée de droit. Cette aide ouvre à la personne en fin de vie la possibilité de bénéficier de l’administration d’une substance létale. L’administration de cette substance est par principe réalisée par la personne elle-même. »</p>
</blockquote>
<p>Dans un premier temps, l’article concernerait le suicide médicalement assisté. Précisons cependant que l’article L. 1110-5 a été revu à la suite du vote de la loi du 2 février 2016 <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000031970253">créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie</a>. Sa signification en est détournée dès lors que le texte est tronqué dans l’interprétation qui en est tirée.</p>
<p>En effet, l’article L. 1110-5-3 n’évoque en rien une « aide » assimilée à « l’administration d’une substance létale » :</p>
<blockquote>
<p>« Toute personne a le droit de recevoir des traitements et des soins visant à soulager sa souffrance. Celle-ci doit être, en toutes circonstances, prévenue, prise en compte, évaluée et traitée. Le médecin met en place l’ensemble des traitements analgésiques et sédatifs pour répondre à la souffrance réfractaire du malade en phase avancée ou terminale, même s’ils peuvent avoir comme effet d’abréger la vie. […] »</p>
</blockquote>
<p>Or, en quelques lignes, levant tout obstacle à une interprétation extensive d’un texte qui n’a pas été rédigé à cette fin, les auteurs du projet de loi du 6 octobre 2023 en concluent (second temps de leurs projet) – toujours dans l’article 11 – que</p>
<blockquote>
<p>« le texte introduit une exception d’euthanasie sans la nommer : si la personne est en incapacité physique de s’autoadministrer la substance létale, un tiers peut la lui administrer ».</p>
</blockquote>
<p>Il s’agit bien d’une légitimation de la notion « d’exception d’euthanasie » qui pensée, façonnée et en quelque sorte validée par les instances d’éthique ou de déontologie à travers un travail d’élaboration depuis 2000, ne peut pas aujourd’hui leur permettre d’émettre à son égard la moindre réserve, et ce même si elles estimaient que l’on a accordé une interprétation extensive à des positions exprimées avec nuance et prudence.</p>
<p>Dans l’hypothèse de l’évolution disruptive que provoquerait dans le champ de l’éthique médicale la légalisation de l’aide à mourir, l’article R. 4127-38 du code de la santé publique devrait être alors modifié, abolissant l’un des principes cardinaux de la déontologie médicale : <a href="https://www.conseil-national.medecin.fr/code-deontologie/devoirs-patients-art-32-55/article-38-soins-mourants-accompagnement">« le (médecin) n’a pas le droit de provoquer délibérément la mort. »</a></p>
<p>Si la loi devait évoluer en ce sens, l’article 38 du code de déontologie, repris dans le code de la santé publique, devrait subir une modification sur un autre point, puisqu’il faudrait préciser que « le médecin doit accompagner le mourant jusqu’à ses derniers moments, assurer par des soins et mesures appropriés la qualité d’une vie qui prend fin, ainsi que les conditions de l’aide à mourir et réconforter son entourage. »</p>
<p>La nouvelle version de l’article R. 4127-38 du code de la santé publique confronterait les soignants à des dilemmes éthiques de nature à fragiliser leurs positions dans les circonstances les plus délicates. <a href="https://www.lejdd.fr/societe/fin-de-vie-12-organisations-soignantes-appellent-preserver-la-relation-de-soin-avec-les-patients-136159">Ce dont témoignent des organisations de professionnels de santé</a>, lorsqu’elles déclarent qu’« il est légitime que tout individu puisse exprimer son souhait de mourir, mais il est impératif que le dialogue qui doit alors s’engager ne soit pas faussé par le fait que celui qui entend ce cri de souffrance disposerait du droit de vie ou de mort, de la possibilité de dire oui ou non. »</p>
<p>Qu’en sera-t-il des critères de justification et de distinction permettant de circonscrire les limites entre « les soins et mesures appropriés à la qualité d’une vie qui prend fin » et l’aide à mourir ? In fine, sera-t-on encore fondé à se préoccuper de tels enjeux, dès lors que la loi fixera des normes et instituera des pratiques compatibles avec l’acceptabilité éthique du protocole de la mort donnée ?</p>
<p>L’article R.4127-37 du code de la santé publique devrait lui aussi, être révisé. Rappelons que ce texte dispose que :</p>
<blockquote>
<p>« En toutes circonstances, le médecin doit s’efforcer de soulager les souffrances du malade par des moyens appropriés à son état et l’assister moralement. Il doit s’abstenir de toute obstination déraisonnable et peut renoncer à entreprendre ou poursuivre des traitements qui apparaissent inutiles, disproportionnés ou qui n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie. »</p>
</blockquote>
<p>Or, dès lors que la souffrance est l’un des arguments susceptibles d’être invoqués pour justifier l’aide active à mourir, l’option devra être explicitement énoncée dans cet article. « Soulager les souffrances du malade » pourra en effet s’envisager jusque dans l’acte qui met un terme à ses souffrances.</p>
<p>Lorsque l’assistance médicale peut alternativement relever d’une médecine de l’accompagnement ou d’une médecine de la mort donnée, il semble délicat de fixer des lignes de conduite. Ce que la fin d’une vie a d’humain, d’exceptionnel et de singulier peut-il être reconnu et respecté dans une législation relative à l’aide à mourir forcément normative ?</p>
<p>À l’épreuve du renoncement à un principe cardinal de l’éthique médicale, qu’en sera-t-il demain de la déontologie et de la relation de confiance essentielle à l’humanisme du soin ?</p>
<p>Ces questions se posent aujourd’hui en des termes politiques qui ne peuvent s’exonérer d’une exigence éthique. Elles semblent mériter mieux que ce dont témoigne la version provisoire du projet de loi du 6 octobre 2023 relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie, ainsi qu’une considération sociale à l’égard de la personne vulnérable dans la maladie où ne prévalent pas les seules conditions de son aide à mourir.</p>
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<p><strong><em>Pour aller plus loin :</em></strong></p>
<p><em>- Hirsch, E. 2023 <a href="https://www.editionsducerf.fr/librairie/livre/20002/Devoir-mourir-digne-et-libre">« Devoir mourir, digne et libre »</a>, Ed. du Cerf ;</em></p>
<p><em>- Hirsch, E. 2024 « Soigner par la mort est-il encore un soin ? », Ed. du Cerf (à paraître).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221420/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuel Hirsch ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En 2024, le Parlement se penchera sur le projet de loi relatif à la fin de vie. Au centre des débats se tiendra la question sensible de l’« aide active à mourir », autrement dit l’euthanasie.Emmanuel Hirsch, Professeur d'éthique médicale, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2161312024-01-25T14:49:52Z2024-01-25T14:49:52ZTraumatismes crâniens : le cas Lagaffe<p>Chutes, coups, accidents de travail, de vélo… Au cours de sa carrière de héros sans emploi, Gaston Lagaffe a subi (et a fait subir à son entourage !) un nombre impressionnant de traumatismes crâniens…</p>
<p>Quelles conséquences ces chocs auraient-ils pu avoir si Gaston n’avait pas été un personnage de bande dessinée ? Comment détermine-t-on la gravité d’un traumatisme crânien ? Explications.</p>
<h2>Gaston Lagaffe et les traumatismes crâniens</h2>
<p>Bien que peu sportif, sa tendance à la maladresse et ses nombreuses inventions à la sécurité souvent discutable ont exposé Gaston Lagaffe, ses amis et ses collègues à un risque élevé de chute et de traumatisme crânien.</p>
<p>Publiée en 2017 par les éditions Dupuis, l’édition intégrale recolorisée, qui regroupe par ordre de numéros croissants les gags de Gaston, est un outil bien commode pour répertorier l’ensemble des traumatismes crâniens dont a été victime le plus fatigué des employés de bureau et ses collègues, leurs mécanismes et leur gravité…</p>
<p><iframe id="67lsW" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/67lsW/8/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Sur les 152 traumatismes crâniens survenus dans les cases de BD fréquentées par Gaston, 6 ont été liés à un accident domestique, 30 à un accident de la voie publique (20 accidents de piétons, 9 accidents de voiture, 1 accident de vélo), et les autres à un accident survenu sur le lieu de travail.</p>
<p>Concernant les mécanismes à l’origine de ces traumatismes, on note 30 chutes (dont 10 dans les escaliers), au moins 100 chocs directs avec des objets en tout genre comme une boule de bowling (gag 572), une balle de bilboquet (gag 510), de jokari (gag 591) un fer à repasser (gag 899), une tortue (gag 877), et pas moins de 21 chocs directs tête contre plafond, porte ou mur… Enfin, 17 agressions diverses et autres coups de poing sont répertoriés, comme le direct envoyé par un voisin karatéka (gag 151) ou encore le coup de réveil asséné par un horloger (gag 660), voire le coup de chaise administré par Fantasio (gag 183).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">André Franquin, le « père » de Gaston Lagaffe.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Andr%C3%A9_Franquin,_tekenaar_strip_Guust_Flater,_1979_-_33.jpg">Noord-Hollands Archive, De Boer Photographic Press Collection/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>À vrai dire, ces situations sont (heureusement) relativement éloignées de celles qui provoquent des traumatismes crâniens dans le monde réel. Une ancienne étude menée en Aquitaine nous apprend que les traumatismes graves sont dus dans presque 50 % des cas à des accidents de la voie publique (voiture, cycliste, piéton). 24 % des traumatismes crâniens résultaient de chutes de sa propre hauteur, 17 % de chutes d’une grande hauteur, et 6 % d’un choc touchant la tête.</p>
<p>D’autres études indiquent des chiffres légèrement différents, mais qui restent en ligne avec ces estimations : 30 % à 40 % des traumatismes crâniens seraient liés à des accidents de la circulation, 20 à 30 % à des chutes, 10 à 20 % se produiraient durant la pratique d’un sport, 10 à 20 % seraient dus à agressions et 3 % seraient liés au travail.</p>
<p>Dans certaines cohortes, les traumatismes sévères liés au travail peuvent même atteindre 6 % du total, la grande majorité étant due à une chute d’une grande hauteur ou à un coup direct sur la tête, via un objet ou un équipement.</p>
<p>Par ailleurs, les études scientifiques ont par ailleurs déterminé que les mécanismes de survenue et les conséquences des traumatismes crâniens varient avec l’âge, et sont associés diversement avec la gravité. <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/docs/epidemiologie-des-traumatismes-craniens-en-france-et-dans-les-pays-occidentaux-synthese-bibliographique-avril-2016">Trois tranches d’âge ont été identifiées comme « à risque »</a> : les jeunes enfants (0-4 ans), les adolescents et jeunes adultes (15-24 ans) et les personnes âgées (> 65 ans).</p>
<h2>Des diagnostics pas si évidents</h2>
<p>En Europe, on estime que chaque année, 235 habitants sur 100 000 sont victimes d’un traumatisme crânien. La plupart (80 %) sont légers, 10 % sont d’une sévérité modérée, tandis que les 10 % restant sont des traumatismes graves. Mais contrairement à ce que l’on pourrait croire, il n’est pas toujours évident de définir la gravité d’un traumatisme crânien.</p>
<p>En 2010, un groupe d’experts définissait le traumatisme crânien comme <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21044706/">« une altération du fonctionnement cérébral […] provoquée par une force extérieure »</a>. Il faut comprendre ici « force extérieure exercée sur le crâne ou la tête ». Aussi le mécanisme responsable du traumatisme crânien peut donc être soit un traumatisme direct fermé ou pénétrant sur le crâne (choc ou impact d’objets sur le crâne), soit le résultat indirect d’un phénomène d’accélération/décélération du cerveau dans la boîte crânienne (« coup du lapin »).</p>
<p>La sévérité immédiate d’un tel traumatisme est appréciée grâce à l’échelle de Glasgow (<a href="https://www.academie-medecine.fr/le-dictionnaire/index.php?q=%C3%A9chelle%20du%20coma%20de%20Glasgow">Glasgow Coma Score</a>). <a href="https://www.sfmu.org/calculateurs/glasgow.htm">Cet outil</a> d’évaluation du niveau de conscience analyse trois aspects principaux : la réponse verbale, la réponse motrice et l’ouverture des yeux.</p>
<p>Le score total obtenu via l’échelle de Glasgow varie de 3 à 15. Un traumatisme crânien est considéré comme « grave » si le score est de 8 ou moins, « modéré » s’il est entre 9 et 12, et « léger » s’il se situe entre 13 et 15. La mortalité globale est de 20 à 80 % pour les traumatismes graves, de 10 à 15 % pour les modérés et inférieure à 1 % pour les traumatismes légers.</p>
<p><a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/15083875/">Selon l’Organisation mondiale de la Santé</a>, un traumatisme crânien léger est défini par un score de Glasgow de 13 à 15-30 minutes après la blessure, associé à une ou plusieurs des manifestations suivantes : confusion ou désorientation ; perte de conscience pendant 30 minutes ou moins ; amnésie post-traumatique pendant moins de 24 heures (ou autres anomalies neurologiques transitoires).</p>
<p>Toutefois, tous les spécialistes ne sont pas d’accord avec l’inclusion, dans la catégorie des traumatismes crâniens légers, des traumatismes crâniens avec un score de Glasgow de 13. Ils considèrent en effet que cette entité a une gravité particulière en matière de répercussions post-traumatisme, en regard des scores de 14 ou 15.</p>
<p>En outre, certains auteurs identifient une autre entité clinique parmi les traumatismes légers, la <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23670105/">commotion cérébrale (« concussion » en anglais)</a>. Cette dernière est définie comme une altération, transitoire (quelques secondes à minutes) et réversible, du fonctionnement cérébral (par exemple, perte de connaissance ou de mémoire, confusion) à la suite d’un choc sur la tête. Mais cette individualisation fait débat.</p>
<p>Une autre « forme » de traumatismes crâniens légers est même parfois nommée « subconcussions » : il s’agit de « simples » chocs à la tête, sans signe fonctionnel au moment du traumatisme crânien. Ces deux entités sont surtout décrites dans la population jeune et dans le domaine sportif, et certaines fédérations sportives ont mis en place des <a href="https://media.fff.fr/uploads/document/7cb3148f655bb3b5c0be576eff525f89.pdf">protocoles de dépistage</a> de ces états.</p>
<iframe src="https://www.westory.fr/dupuis/lire-en-ligne/gaston/22/le-retour-de-lagaffe?token=MvFLspwA3RTzJhMedRcvud6ugLsi9A2L" width="100%" height="600" frameborder="0" scrolling="no" allowfullscreen=""></iframe>
<p><em>Le nouvel album de Gaston, intitulé <a href="https://www.dupuis.com/gaston/bd/gaston-tome-22-le-retour-de-lagaffe/120853">« Le retour de Lagaffe »</a>, aux éditions Dupuis</em></p>
<p>Mais traumatisme crânien « léger » ne signifie pas forcément sans gravité à long terme. En effet, ce type de traumatismes (commotion, voir commotion sans signe associé) <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7799370/">pourraient être associés à l’apparition de démences neurologiques à long terme</a>, surtout s’ils sont répétés. À ce titre, on pourrait s’inquiéter pour Prunelle, Fantasio ou encore M. De Mesmaeker qui, tout au long des aventures de Gaston, subissent des traumatismes crâniens légers, mais souvent réitérés…</p>
<p>Au-delà du score de Glasgow, la gravité initiale du traumatisme crânien est aussi évaluée en fonction de la cause et du mécanisme du traumatisme, de la durée de la perte de connaissance, de la prise de substance (alcool, drogue…) ou de médicaments (notamment anticoagulants), et sur la présence de signes cliniques initiaux de souffrance neurologique (notamment par l’examen des pupilles).</p>
<p>L’âge de la personne joue aussi un rôle dans l’évaluation de la gravité : le risque d’hospitalisation et de décès après un traumatisme crânien est ainsi plus élevé chez les personnes âgées de plus de 65 ans, et augmente avec l’âge. Enfin, quelle que soit la tranche d’âge, le risque de survenue de traumatisme crânien est plus important chez les hommes : dans certaines cohortes, on compte jusqu’à plus de 70 % d’hommes ! Chez Gaston, c’est 100 % !</p>
<h2>Quels symptômes ?</h2>
<p>L’altération du fonctionnement cérébral qui résulte du choc se traduit par des signes cliniques tels que perte de connaissance ou baisse de l’état de conscience, perte de mémoire pour des faits pré ou post-traumatisme, déficits neurologiques (déficit moteur…), ou toutes altérations de l’état mental (confusion, désorientation, etc.). En raison de ces altérations, certains préfèrent parler de traumatisme cranio-encéphalique plutôt que de traumatisme crânien (le crâne n’étant pas seul touché…).</p>
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<img alt="Détail d’une fresque murale inspirée par la bande dessinée Gaston Lagaffe, à Bruxelles" src="https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Détail d’une fresque murale inspirée par la bande dessinée Gaston Lagaffe, à Bruxelles.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Comic_wall_Gaston_Laggaffe,_Andr%C3%A9_Franquin._Brussels.jpg">Oreopoulos G. et Vandegeerde D. Anné, Ferran Cornellà/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>S’il n’est pas toujours simple d’estimer la gravité des traumatismes subis par Gaston et ses proches, on peut pour cela s’aider des idéogrammes qui entourent les personnages, comme une spirale évoquant le vertige ou autres étoiles pour évoquer la confusion.</p>
<p>Un examen attentif indique que 21 traumatismes ont entraîné une atteinte du nerf hypoglosse (comme montré par une langue pendante, gag 877), 21 ont entraîné des yeux au beurre noir pouvant évoquer une fracture de la base du crâne, et 39 hématomes du crâne, dont certains très impressionnants, comme celui en forme de bonnet phrygien du gag 840. On ne retrouve en revanche aucune plaie ouverte du crâne ou embarrure (perforation de la boîte crânienne).</p>
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<img alt="Détail d’une fresque murale inspirée par la bande dessinée Gaston Lagaffe, à Bruxelles" src="https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Même légers, les traumatismes crâniens ne sont pas sans conséquence…</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Comic_wall_Gaston_Laggaffe_by_Andr%C3%A9_Franquin._Brussels.jpg">Oreopoulos G. et Vandegeerde D. Anné, Ferran Cornellà/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Pour les traumatismes dont nous pouvons juger de la gravité, 131 sont légers, 10 modérés, et aucun n’est considéré comme grave. Pour juger du risque de lésions intracrâniennes, on peut, comme le font les équipes médicales, utiliser la classification de Master.</p>
<p>Cette ancienne classification (mais toujours opérante) permet de répartir les patients en trois groupes de gravité et de potentiel évolutif différents : risque faible, modéré, et élevé correspondant respectivement aux groupes 1, 2 et 3. Les patients du groupe 1 sont autorisés à rentrer au domicile avec des consignes de surveillance. Les groupes 2 et 3 nécessitent une imagerie cérébrale et une prise en charge hospitalière adéquate.</p>
<p>Selon la classification de Master, les traumatismes subis ou causés par Gaston Lagaffe se répartissent comme suit : 82 traumatismes du groupe 1, 33 du groupe 2 et 26 du groupe 3. On note au moins 46 pertes de connaissance initiale et 31 confusions posttraumatisme. Enfin, au moins 8 situations de traumatismes conduisent à une hospitalisation souvent dans le cadre d’un polytraumatisme. </p>
<p>Il faut noter que les traumatismes sont parfois soignés dans Gaston Lagaffe par la mise de bandage autour de la tête (au moins 11 fois), ce qui n’est pas une pratique habituelle…</p>
<p>Aucune de ces situations dans Gaston n’entraîne de coma ni de décès. Mais qu’en est-il des séquelles ?</p>
<h2>Quelles séquelles pour les traumatisés crâniens ?</h2>
<p>Chaque année en France, environ 150 000 personnes sont victimes de traumatismes crâniens nécessitant un passage aux urgences. Entre <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/docs/epidemiologie-des-traumatismes-craniens-en-france-et-dans-les-pays-occidentaux-synthese-bibliographique-avril-2016">20 et 40 % de ces victimes présentent des signes neurologiques fonctionnels</a> ou gardent des séquelles.</p>
<p>Les conséquences à long terme des traumatismes que Gaston subit ou fait subir ne sont pas connues : impossible en effet de les qualifier étant donné que la temporalité du gag ne dure qu’un instant…</p>
<p>Quoi qu’il en soit, au fil des gags, il n’est pas noté d’apparition de troubles cognitifs ou du comportement tout au long des gags chez les personnages de Gaston. Tout au plus l’agent Longtarin développe-t-il une anxiété, voire une névrose vis-à-vis des parcmètres, et Mr Demesmaeker devient-il irritable, colérique lorsque le mot « contrat » est prononcé…</p>
<p>Dans la réalité, en revanche, les conséquences neurologiques post-traumatisme crânien peuvent être importantes, entraînant diverses déficiences neurologiques à long terme. Environ 60 % des victimes de traumatismes crâniens modérés à grave présentent des troubles cognitifs et comportementaux. Parmi les séquelles observées, qui varient en fonction de l’âge de survenue de l’accident, figurent les déficits moteurs, les déficiences sensorielles, les déficiences cognitives et comportementales.</p>
<p>Les troubles cognitifs concernent l’attention, la mémoire, la vitesse de traitement de l’information, les fonctions exécutives et l’anosognosie (trouble qui fait qu’un patient atteint d’une maladie ou porteur d’un handicap ne semble pas avoir conscience de sa condition), souvent accompagnés d’une fatigue fréquente et importante : <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0168605406001346">43 à 73 % des patients ayant subi un traumatisme crânien (même léger) se plaignent de fatigue</a>, un symptôme qui passe même au premier plan pour 7 % d’entre eux.</p>
<p>Ces séquelles cognitives et comportementales constituent ce que l’on appelle communément un « handicap invisible ». Un handicap, notamment du point de vue de la fatigue chronique, dont pourrait peut-être souffrir Gaston, au vu du nombre de traumatismes qu’il a subi au cours de ses 67 ans de carrière !</p>
<hr>
<p><strong>Pour aller plus loin :</strong></p>
<p><em>– En matière de surveillance des traumatismes crâniens légers, l’association France Traumatisme propose des <a href="https://www.france-traumatisme-cranien.fr/fr/traumatisme-cranien-leger/outils-information-prevention">fiches à destination des victimes et des médecins</a> (pour l’anecdote, elle sont dessinées par Philippe Geluck, le père d’un autre célèbre personnage de bande dessinée, le Chat).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216131/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mickaël Dinomais ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Gaston Lagaffe a fait son grand retour dans les locaux de Dupuis en novembre 2023. Son crâne et ceux de ses collègues vont à nouveau faire les frais de sa légendaire maladresse. Avec quelles conséquences ?Mickaël Dinomais, Professeur de médecine en Médecine Physique et Réadaptation, Université d'AngersLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.