tag:theconversation.com,2011:/global/topics/vagues-49586/articlesvagues – The Conversation2022-11-22T19:26:07Ztag:theconversation.com,2011:article/1940792022-11-22T19:26:07Z2022-11-22T19:26:07ZImages de science : se protéger de vagues de plus en plus hautes<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/493776/original/file-20221107-15-pveimj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C1%2C1006%2C733&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une vague se brise sur une structure en béton dans une simulation numérique.</span> <span class="attribution"><span class="source">Julien Réveillon</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Lors d’une tempête, une digue peut subir des pics de pression très variables, en particulier lorsque des poches d’air sont emprisonnées entre l’eau et le béton. <a href="https://www.theses.fr/2021PAUU3022">Par exemple</a>, des pressions proches de cinq bars menant à des forces de 400 000 newtons par mètre – soit l’équivalent du crash d’un SUV allant à 80 km/h – ont déjà été mesurées sur la digue Artha de Saint-Jean-de-Luz.</p>
<p>Les digues actuelles sont dimensionnées pour ce type d’impact mais la question se pose de leur renforcement face à l’intensification en force et en fréquence des <a href="https://www.geo.fr/environnement/les-tempetes-extremes-prevues-pour-2080-sont-deja-la-210231">tempêtes extrêmes</a> accompagnant le changement climatique. Les simulations numériques visent à adapter au mieux les installations du littoral face aux transformations à venir.</p>
<h2>Les mesures de défense face à la montée des eaux</h2>
<p>L’<a href="https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg2/">élévation du niveau de la mer</a> est une conséquence directe de la fonte des glaciers et des calottes glaciaires, ainsi que de l’expansion thermique des océans. C’est une menace majeure pour les régions côtières, car elle provoque la submersion et l’érosion du trait de côte (la limite terre/mer), l’inondation et la destruction des habitations ou encore la contamination des terres agricoles.</p>
<p>La mise en place de mesures de défense est déjà au cœur des préoccupations des décideurs en charge de l’aménagement du territoire et des bâtisseurs d’ouvrages maritimes. Des <a href="https://theconversation.com/elevation-du-niveau-de-la-mer-quels-littoraux-voulons-nous-pour-demain-180711">stratégies nouvelles sont explorées</a> en se basant sur l’état de la mer au large de nos côtes dans plusieurs dizaines d’années afin d’estimer les surcotes provoquées par les tempêtes – des <a href="https://doi.org/10.4000/vertigo.10947">prédictions extrêmement difficiles</a>.</p>
<p>La solution (dite « dure ») de défense la plus commune consiste à tenter de fixer le trait de côte et de construire ou renforcer les ouvrages de défense. Une autre solution (dite « souple ») consiste à préparer le territoire à l’arrivée de la mer. Par exemple, la commune de Quiberville en Normandie – une des <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000045726134">126 communes françaises</a> citées au journal officiel en avril 2022 comme devant s’adapter en priorité – a pris la décision de <a href="https://reporterre.net/Face-a-la-montee-des-eaux-s-adapter-plutot-que-betonner">laisser entrer la mer dans les zones basses de la commune et de réorganiser son agencement</a>.</p>
<h2>Quelle sera la force des vagues dans le futur ?</h2>
<p>Les phénomènes de submersion marine se produisent généralement lors d’événements climatiques extrêmes. Il est très difficile d’en prévoir l’intensité car outre le niveau moyen du niveau d’eau et les effets de la marée, ils dépendent de <a href="http://dx.doi.org/10.1016/j.envsoft.2015.07.021">paramètres locaux</a> tels l’intensité du vent s’appuyant sur l’eau, la baisse de pression locale ou la fréquence de succession des vagues déferlantes. L’ensemble de ces phénomènes surélèvent l’eau auprès des ouvrages de protection.</p>
<p>À ce jour, pour estimer leur impact futur sur les structures côtières, on les reproduit expérimentalement à petite échelle dans un canal à houle, ou on les modélise grâce à la simulation numérique, dans une succession d’impacts représentant trois heures de vagues d’une tempête « centennale » (c’est-à-dire dont la probabilité d’apparition est d’une année sur cent).</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Dans les modélisations, les effets de certains paramètres sont encore très difficiles à caractériser, tels que la présence d’air dans l’eau, sous forme de bulles, résultant de l’écume des vagues précédentes ou de poches et tubes d’air capturés par le déferlement ou encore de coussins d’air se formant entre l’eau et la paroi des digues. En fonction des circonstances, cet air va <a href="https://ascelibrary.org/doi/10.1061/%28ASCE%290733-950X%281993%29119%3A4%28381%29">amortir le choc ou encore l’amplifier</a>. Le pire des scénarios est de piéger une petite poche d’air entre l’eau et la paroi : la masse de la vague en cours de déferlement écrase brutalement la poche et augmente très fortement la pression de l’air et donc les forces que subira l’ouvrage.</p>
<p>Grâce au développement de <a href="https://doi.org/10.1146/annurev-fluid-010816-060121">modèles physiques et numériques adéquats</a>, les futurs aménagements du littoral envisagés pourront être soumis virtuellement à tous les évènements climatiques imaginables afin d’évaluer leur efficacité et résistance. Mais ces simulations numériques doivent sortir du cadre strict de la physique car elles resteront inutiles si elles n’intègrent pas une vision globale, comprenant notamment des dimensions de construction durable et d’<a href="https://theconversation.com/acceptabilite-sociale-il-faut-repenser-la-gouvernance-des-grands-projets-publics-183001">assentiment des populations concernées</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/194079/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Réveillon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Avec des tempêtes plus fréquentes et plus dures, l’adaptation au changement climatique passe aussi par la construction de structures résistantes à la pression des vagues.Julien Réveillon, Enseignant-Chercheur, énergie et mécanique des fluides numérique, Chargé de mission DDRS, Université de Rouen NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1923812022-10-26T13:50:39Z2022-10-26T13:50:39ZLa tempête Fiona a dévasté les communautés côtières, mais aussi perturbé le fleuve en profondeur<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/490456/original/file-20221018-8262-xkol0u.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=21%2C0%2C3549%2C2396&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des vagues déferlant sur le rivage de l'Étang-du-Nord, aux Îles-de-la-Madeleine, lors de la tempête post-tropicale Fiona, le samedi 24 septembre 2022.</span> <span class="attribution"><span class="source">LA PRESSE CANADIENNE/Nigel Quinn</span></span></figcaption></figure><p>La <a href="https://ici.radio-canada.ca/info/en-direct/1008905/direct-tempete-fiona-ouragan-maritimes-iles-madeleine-degats">tempête Fiona</a> a causé bien des dégâts matériels ainsi que de l’érosion sur les côtes de la Nouvelle-Écosse, de l’Île-du-Prince-Édouard et des Îles-de-la-Madeleine.</p>
<p>Mais saviez-vous que ses effets se répercutent dans les eaux du golfe du Saint-Laurent jusqu’à une cinquantaine de mètres de profondeur et même plus ?</p>
<p>Après avoir touché le sol canadien à l’île du Cap-Breton avec des vents violents, l'oeil du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cyclone">cyclone</a> a repris la mer dans le golfe du Saint-Laurent et a passé tout près de deux bouées océanographiques, opérées par Pêches et Océans Canada. Ces bouées sont équipées de senseurs qui permettent de mesurer la vitesse et direction du vent, la pression atmosphérique, la température de l’air et l’humidité de l’air, à l’image d’une station météorologique terrestre. Mais elles comportent également des senseurs qui mesurent la température et la salinité à la surface de la mer, ainsi que la hauteur des vagues. Elles peuvent également être munies d’une sonde qui descend jusqu’au fond de l’eau pour mesurer la température et la salinité sur toute la profondeur.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><strong><em>Cet article fait partie de notre série <a href="https://theconversation.com/ca-fr/topics/fleuve-saint-laurent-116908">Le Saint-Laurent en profondeur</a></em></strong>
<br><em>Ne manquez pas les nouveaux articles sur ce fleuve mythique, d'une remarquable beauté. Nos experts se penchent sur sa faune, sa flore, son histoire et les enjeux auxquels il fait face. Cette série vous est proposée par La Conversation.</em></p>
<hr>
<p>Ces bouées nous transmettent leurs mesures toutes les 30 minutes, via le réseau cellulaire ou par communication satellitaire, même au travers d’une tempête intense comme Fiona.</p>
<p>Chercheur en océanographie physique avec Pêches et Océans Canada à l’Institut Maurice-Lamontagne (IML) et l’un des responsables de ces bouées et utilisateur de leurs données, je propose d’apporter un éclairage sur les effets des tempêtes sur les eaux du golfe du Saint-Laurent tels qu’observés par ces bouées océanographiques.</p>
<h2>Des bouées au rôle précieux</h2>
<p>La première bouée sur le parcours de la tempête était la AZMP-ESG, pour « <a href="https://www.dfo-mpo.gc.ca/science/data-donnees/azmp-pmza/index-fra.html">Atlantic Zone Monitoring Program</a> East Southern Gulf », qui est située entre l’Île-du-Prince-Édouard et les Îles-de-la-Madeleine. Le 24 septembre 2022 à 11h30 UTC, l'oeil du cyclone passe près de la bouée et la pression atmosphérique atteint brièvement une dépression de 949 millibars (unité de mesure pour la pression), alors qu’elle était de 1 000 millibars le jour précédent et déjà sous la pression normale de 1 010 millibars.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/490717/original/file-20221019-19-ar7nh0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="bouée qui flotte dans l’eau" src="https://images.theconversation.com/files/490717/original/file-20221019-19-ar7nh0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/490717/original/file-20221019-19-ar7nh0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/490717/original/file-20221019-19-ar7nh0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/490717/original/file-20221019-19-ar7nh0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/490717/original/file-20221019-19-ar7nh0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/490717/original/file-20221019-19-ar7nh0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/490717/original/file-20221019-19-ar7nh0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Bouée AZMP-ESG, située entre l’Île-du-Prince-Édouard et les Îles-de-la-Madeleine.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Roger Pigeon et Michel Rousseau)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C5%92il_(cyclone)">oeil d’un cyclone</a> est la pression atmosphérique la plus faible, située en son centre. Dans l’hémisphère Nord, les vents tournent en sens antihoraire autour de celle-ci, en raison de la rotation de la Terre.</p>
<p>La mesure d’un minimum de pression atmosphérique à une bouée fait plus que nous indiquer le passage le plus près de l'oeil de la tempête de la bouée. La pression atmosphérique représente le poids de l’atmosphère au-dessus de l’instrument de mesure. Or, une différence d’un seul millibar correspond à la pression exercée par 1 cm de hauteur d’eau. Alors que la pression atmosphérique à la bouée AZMP-ESG a chuté de 51 millibars, la pression dans toute la colonne d’eau chuterait d’autant sans rajustement de la part de l’océan.</p>
<p>La faible pression dans l’eau crée un appel d’eau pour rééquilibrer la pression océanique et ce mouvement peut ainsi faire monter la surface de l’eau jusqu’à 51 cm pour retrouver l’équilibre ! Ce rajustement de la mer face à une basse pression atmosphérique est responsable d’une bonne partie des surcotes du niveau de la mer associées aux ondes de tempêtes qui inondent les terres côtières. Une surcote est l’excédent du niveau de la mer en comparaison aux prévisions de marées.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/490711/original/file-20221019-14-ve7gfe.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="maison au bord de la mer avec fortes pluies" src="https://images.theconversation.com/files/490711/original/file-20221019-14-ve7gfe.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/490711/original/file-20221019-14-ve7gfe.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/490711/original/file-20221019-14-ve7gfe.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/490711/original/file-20221019-14-ve7gfe.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/490711/original/file-20221019-14-ve7gfe.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/490711/original/file-20221019-14-ve7gfe.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/490711/original/file-20221019-14-ve7gfe.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">L’auberge de jeunesse Paradis Bleu, aux Îles-de-la-Madeleine, est entourée de hautes eaux causées par la tempête post-tropicale Fiona, le 24 septembre 2022.</span>
<span class="attribution"><span class="source">LA PRESSE CANADIENNE/Nigel Quinn</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Vagues records et chute de température</h2>
<p>La hauteur maximale de vague, mesurée à la bouée AZMP-ESG, a atteint 9,9 m pendant la tempête et les rafales ont atteint 126 km/h. Il faut savoir que les vagues ne dépassent une hauteur de 3 m que très rarement dans le golfe.</p>
<p>Quelques heures plus tard, à 20h30, la pression atmosphérique atteint 953,9 millibars à la bouée IML-10 située au nord-est des Îles-de-la-Madeleine. Les rafales y ont atteint 124 km/h et les vagues ont atteint le record de 15,9 m enregistré sur notre réseau de bouées, surpassant le précédent record de 13,1 m mesuré au même endroit en septembre 2019 lors de la <a href="https://www.ledevoir.com/societe/562221/dorian-dans-les-maritimes">tempête Dorian</a>.</p>
<p>Ces effets dramatiques ne sont par contre pas les seuls sur l’océan. À la bouée AZMP-ESG, la température de surface de la mer a chuté de 6,5 °C au passage de la tempête Fiona, passant de 16,4 °C le 23 septembre à 9,9 °C le 25 septembre. En temps normal, la température des eaux de surface du golfe décroît d’environ 1 °C par semaine en automne, alors qu’une couche mélangée se forme pour finalement englober près de la moitié du volume de toutes les eaux du golfe en hiver.</p>
<p>Le refroidissement de 6,5 °C en deux jours représente donc l’équivalent de plus de six semaines de changement saisonnier. Mais de façon plus importante, elle est compensée par un réchauffement inhabituel en profondeur due à une redistribution de la chaleur en profondeur par le mélange vertical occasionnée par le vent et les vagues.</p>
<h2>Les impacts en profondeur</h2>
<p>Prenons l’exemple <a href="https://www.dfo-mpo.gc.ca/csas-sccs/Publications/ResDocs-DocRech/2020/2020_030-fra.html">mieux documenté survenu durant la tempête Dorian en septembre 2019</a>, alors que la température de surface a chuté de 7 °C à la bouée AZMP-ESG à son passage.</p>
<p>Un profil de température fait avec la sonde descendue d’un treuil sur la bouée avant la tempête montre une colonne d’eau très stratifiée (c.-à-d. l’eau de mer moins dense qui flotte par-dessus des eaux plus denses) avec une température de 21 °C à la surface et de 1,5 °C à 35 m de profondeur. À 35 m de profondeur, les eaux sont habituellement très froides.</p>
<p>Sur près de 200 profils pris par la bouée entre juin et août, la température moyenne à cette profondeur était de 1,1 °C avec peu de variations. C’est donc habituellement une profondeur où les températures demeurent froides, constituant un habitat thermique favorable au crabe des neiges.</p>
<p>Le profil fait le 10 septembre, deux jours après la tempête, indique 12 °C à la surface (donc plus froid qu’avant la tempête) et 8,6 °C à 35 m (donc plus chaud). Ainsi, le refroidissement à la surface a été compensé par un réchauffement équivalent à 35 m et la température moyenne sur les 45 premiers mètres est presque identique entre les deux profils, indiquant une redistribution de la chaleur vers les profondeurs.</p>
<p>Dans l’habitat thermique habituellement stable et froid à 35 m de profondeur, un saut de température à 8,6 °C constitue donc un choc thermique important qui peut perdurer plusieurs semaines, car la couche mélangée a une grande inertie thermique et conservera sa température. Au bout de plusieurs semaines, la température de l’air descend sous la température de l’eau et le refroidissement et l’épaississement de la couche mélangée se produisent jusqu’à la fin de l’hiver.</p>
<p>Sans aucunement minimiser les effets dévastateurs que des tempêtes comme Fiona et Dorian ont sur les communautés côtières, elles ont aussi des effets marquants en profondeur dans l’océan.</p>
<p>Même le crabe des neiges sur le fond en ressent les effets !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/192381/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Peter Galbraith dirige le Programme de monitorage de la zone atlantique de Pêches et Océans Canada, donc ce programme est financé par ce Ministère. Le réseau de bouée est opéré par Pêches et Océans Canada.</span></em></p>La tempête Fiona a causé bien des dégâts matériels ainsi que de l’érosion sur les côtes canadiennes. Mais ses effets se répercutent également dans les profondeurs du golfe du Saint-Laurent.Peter Galbraith, Chercheur scientifique avec Pêches et Océans Canada et Professeur-associé, Université du Québec à Rimouski (UQAR)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1864142022-07-24T15:50:30Z2022-07-24T15:50:30ZComprendre la formation des vagues, et comment les surfeurs les domptent<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/472570/original/file-20220705-1817-lex54z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=29%2C14%2C4928%2C2512&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Faire du surf, c'est aussi comprendre la physique des vagues. Ici à Croyde Bay.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/U9g56y7R7Fk">Surfing Croyde Bay, Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p><em>Les vacances d'été amènent leur lots de questions cruciales: faut-il changer de file quand on est coincés dans les bouchons? Comment ce surfeur tient-il sur sa planche? Comment se protéger du soleil? Où construire un château de sable? D'où viennent les odeurs de la nature, et à quoi servent-elles? Nous vous proposons 5 articles pour bronzer moins bête.</em></p>
<p>Si vous choisissez, comme destination de vacances, la mer qui danse le long des golfes clairs, avec ses reflets changeants, témoins privilégiés des caprices du ciel, vous vous retrouverez sans doute à attendre qu’une vague vous emporte, avant qu’elle ne vienne s’échouer sur le bord. On en a tous fait l’expérience : rien de plus compliqué que de prévoir comment une vague va venir nous emporter ou comment sortir de l’eau une fois dans les flots impétueux.</p>
<p>Au moment d’apprécier l’ampleur d’une vague, pendant quelques secondes et de manière improvisée, on se transforme en physicien modélisateur d’un phénomène très complexe pour en prédire ses effets.</p>
<p>Les vagues sont des phénomènes naturels aussi spectaculaires que dangereux. La hauteur des vagues varie de quelques centimètres à 32,3 mètres pour la <a href="https://angeo.copernicus.org/articles/26/1327/2008/angeo-26-1327-2008.pdf">plus haute enregistrée par un instrument</a>, voire plus de 34 mètres pour la plus haute vague observée visuellement.</p>
<h2>Origine et nature des vagues</h2>
<p>Une vague est une déformation de la surface d’une masse d’eau le plus souvent provoquée par un autre fluide : le vent. À l’interface, le vent crée des vagues sur les océans, mers et lacs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/472568/original/file-20220705-14-bdbi5x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="tableau de naufrage avec des grandes vagues et un ciel de feu" src="https://images.theconversation.com/files/472568/original/file-20220705-14-bdbi5x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/472568/original/file-20220705-14-bdbi5x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/472568/original/file-20220705-14-bdbi5x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/472568/original/file-20220705-14-bdbi5x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/472568/original/file-20220705-14-bdbi5x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/472568/original/file-20220705-14-bdbi5x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/472568/original/file-20220705-14-bdbi5x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La neuvième vague, tableau Hovhannes Aivazovsky, 1850.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/File:Hovhannes_Aivazovsky_-_The_Ninth_Wave_-_Google_Art_Project.jpg">Hovhannes Aivazovsky/Wikipedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>D’autres phénomènes, beaucoup moins fréquents, sont aussi source de vagues : certains séismes, éruptions volcaniques ou chutes de météorites créant des vagues appelées tsunamis ou raz-de-marée. La marée est également à l’origine de vagues très particulières, appelées mascarets, de brusques surélévations de l’eau d’un fleuve ou d’un estuaire, provoqué par l’onde de la marée montante dans l’embouchure et le cours inférieur de certains cours d’eau, lors des grandes marées. Enfin, les navires sont aussi des sources de vagues.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-naissent-les-vagues-scelerates-146646">Comment naissent les vagues scélérates ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Les vagues sont des ondes, c’est-à-dire des phénomènes qui se déplacent de manière périodique dans le temps (on parle de période) et dans l’espace (on parle de longueur d’onde). Elles peuvent se propager pendant des kilomètres avant de toucher terre, et gagner en force en fonction de la pente du sol océanique. Pour comprendre ce phénomène, il faut rechercher une modélisation physique de la vague.</p>
<h2>Une brève histoire des vagues</h2>
<p>L’astronome et mathématicien George Biddell Airy a fourni la théorie la plus simple pour des vagues régulières (périodiques). L’onde d’Airy possède une surface libre, la surface de l’eau, de forme sinusoïdale. C’est une vision très simplifiée de la réalité, valable pour des vagues de faible « cambrure », c’est-à-dire le rapport de la hauteur sur la longueur d’onde.</p>
<p>[<em>Près de 70 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Si on regarde avec attention les vagues en mer, on constate que la plupart d’entre elles ne sont pas sinusoïdales : les crêtes sont plus pointues, les creux plus aplatis.</p>
<p>Mais ce qui est intéressant pour nous aujourd’hui dans la théorie d’Airy, c’est que les particules de fluide décrivent des ellipses presque fermées, dont la taille décroît avec la profondeur. On pense toujours à tort qu’un vague nous emporte : en réalité, si l’on nage en profondeur pendant la propagation d’une vague, on s’aperçoit qu’il y a un mouvement de va-et-vient, pas forcément intuitive du point de vue l’expérience au quotidien mais bien mis en évidence par la théorie d’Airy.</p>
<figure> <img src="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/be/Shallow_water_wave.gif"><figcaption>Unevagueavance et les particules transportées par les flots ont des trajectoires elliptiques. (Kraaiennest/Wikipedia).</figcaption></figure>
<p>En eau profonde, c’est-à-dire pour des profondeurs supérieures à la moitié de la longueur d’onde, ces ellipses sont des cercles. Le fait que les ellipses ne soient pas tout à fait fermées est une manifestation de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9rive_de_Stokes">« dérive de Stokes »</a>. Près de la surface libre, la vitesse d’une particule d’eau est plus importante sous une crête que la vitesse opposée lors du passage du creux suivant. Il en résulte une dérive dans le sens de propagation des vagues qui peut s’inverser en profondeur.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/472567/original/file-20220705-20-20rozd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Un homme et une femme jouent et rient, habillés dans une grande vague" src="https://images.theconversation.com/files/472567/original/file-20220705-20-20rozd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/472567/original/file-20220705-20-20rozd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/472567/original/file-20220705-20-20rozd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/472567/original/file-20220705-20-20rozd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/472567/original/file-20220705-20-20rozd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=474&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/472567/original/file-20220705-20-20rozd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=474&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/472567/original/file-20220705-20-20rozd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=474&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Quelle liberté ! Tableau d’Ilya Repin.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:%D0%98%D0%BB%D1%8C%D1%8F_%D0%A0%D0%B5%D0%BF%D0%B8%D0%BD_-_%D0%9A%D0%B0%D0%BA%D0%BE%D0%B9_%D0%BF%D1%80%D0%BE%D1%81%D1%82%D0%BE%D1%80.jpg">Ilya Repin</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Déferlement des vagues à l’approche de la plage</h2>
<p>Revenons à ce qui va nous concerner cet été : faire face aux vagues… dignement ! En fait, « s’approprier une vague », c’est comprendre son <a href="https://www.pourlascience.fr/sr/article-fond/le-deferlement-4923.php">déferlement</a>.</p>
<p>En effet, certaines vagues sont trop cambrées pour être stables : elles déferlent.</p>
<p>À l’approche d’un rivage, la profondeur diminue, la forme des vagues se modifie, d’abord de manière à peu près symétrique puis en général avec une face avant de plus en plus raide dès que la hauteur de la vague est du même ordre que la profondeur. Quand la vague se brise, l’essentiel de son énergie est dissipée en tourbillons et bulles d’air. L’impulsion associée contribue à accélérer le courant dans la direction du déferlement.</p>
<p>La forme d’un déferlement au voisinage du rivage dépend essentiellement de la pente des fonds. En allant dans le sens des pentes croissantes on distingue les plus souvent trois types de déferlement. Le déferlement progressif ou glissant se produit généralement sur les plages à très faible pente. Les vagues commencent à se briser loin du rivage avec une crête à l’aspect mousseux qui s’accentue lors de la progression en laissant derrière une couche d’écume.</p>
<p>Le déferlement plongeant est particulièrement spectaculaire avec ses rouleaux appréciés par les surfeurs. La vague s’enroule autour d’une poche d’air puis s’écroule en créant une éclaboussure notable. Cela tend à se produire le plus souvent sur une forte pente ou sur un changement brutal de la profondeur (un écueil), et c’est pour ça qu’il y a des « spots » appréciés par les surfeurs.</p>
<h2>Tirer son énergie des vagues</h2>
<p>Il y a beaucoup plus d’énergie dissipée que d’énergie réfléchie sur la plage. L’énergie dissipée à la surface de la vague qui s’effondre est bénéfique au surfeur qui peut l’utiliser comme source d’énergie cinétique : la vague lui apporte la dynamique nécessaire pour se déplacer, et réaliser les figures qu’il souhaite sur sa planche en mouvement grâce à la vague.</p>
<p>Le déferlement frontal ou gonflant se forme comme le déferlement plongeant mais la vague gravit la plage avant que la crête puisse s’enrouler. La zone de déferlement est très étroite et une grande partie de l’énergie est réfléchie vers les plus grandes profondeurs. Quand la crête va plus vite que la vague elle-même, une épaisse couche d’écume au sommet se forme au sommet. On parle alors de déferlement glissant, typique d’un rivage à faible pente. Ce type de déferlement désavantage complètement le surfeur puisque l’énergie est donnée aux profondeurs. Le talent du surfer en tant que « physicien occasionnel » est de pouvoir reconnaître les types de déferlement à cet effet.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/472564/original/file-20220705-26-q5cctz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Quatre types de vagues déferlant sur la plage : glissant, gonflant, plogeant et s’effondrant rapidement" src="https://images.theconversation.com/files/472564/original/file-20220705-26-q5cctz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/472564/original/file-20220705-26-q5cctz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=260&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/472564/original/file-20220705-26-q5cctz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=260&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/472564/original/file-20220705-26-q5cctz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=260&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/472564/original/file-20220705-26-q5cctz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=327&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/472564/original/file-20220705-26-q5cctz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=327&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/472564/original/file-20220705-26-q5cctz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=327&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Types de déferlements.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Breaking_wave_types.gif">S.L. Douglas et J. Krolak/FHWA/Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il existe aussi un cas intermédiaire entre les déferlements plongeant et frontal. Au lieu de constituer un rouleau, la vague présente une face verticale avant de s’effondrer.</p>
<p>Les surfeurs sont souvent surnommés les « dompteurs » de vagues. Les bonnes conditions de vagues permettent une bonne pratique de surf (avec beaucoup de technique quand même !). Cela signifie de bonnes conditions de vent ou de houle, pouvant varier selon les lieux.</p>
<p>Les vagues creuses, avec un déferlement plongeant, sont les préférées des « shortboarders », qui utilisent des planches courtes. Les vagues creuses sont les vagues les plus puissantes, mais pas forcément les plus grandes. En effet, certaines vagues que l’on peut qualifier de creuses sont bien plus puissantes qu’une vague molle de la même taille. Le principe du shortboard (planche courte) est de permettre une pratique du surf plus « dynamique » avec des changements multiples de direction sur la vague pour réaliser différentes figures. Ceci est rendu possible avec une vague dont le déferlement est mieux contrôlé.</p>
<p>Finalement, un surfeur fait avant tout de la recherche appliquée discipline « bonnes vagues ».</p>
<p>De manière générale, que vous jouiez avec elles, que vous les contempliez ou les affrontiez, profitez de ces instants de liberté offerts par la Nature. Et souvenons-nous qu’il n’y a qu’une seule planète Terre pour passer de beaux étés !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/186414/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Waleed Mouhali ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le vent, la pente du sol océanique, la vitesse de l’eau – des paramètres à prendre en compte pour profiter des vagues cet été.Waleed Mouhali, Enseignant-chercheur en Physique, ECE ParisLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1840912022-06-02T17:45:50Z2022-06-02T17:45:50ZComment les surfeurs sauvent des vies sur les plages françaises<p>À la plage, la <a href="https://www.researchgate.net/publication/233514582_Close_is_not_Close_Enough_Drowning_and_Rescues_Outside_Flagged_Beach_Patrol_Areas_in_Australia">surveillance de la baignade</a> reste le meilleur moyen pour lutter contre les risques de noyade. Cependant, avec l’accroissement de la population sur le littoral, l’évolution des modes de consommation et la contraction des moyens disponibles pour financer ces opérations, l’<a href="https://www.sudouest.fr/gironde/lacanau/securite-sur-le-littoral-de-gironde-pourquoi-les-sauveteurs-sont-deployes-tardivement-sur-les-plages-10962779.php">équation devient de plus en plus délicate à résoudre</a>.</p>
<p>En témoigne ces accidents, qui surviennent généralement durant les « ailes de saisons » (c’est-à-dire au printemps et à l’automne), où les températures peuvent être clémentes mais les <a href="https://www.sudouest.fr/gironde/lege-cap-ferret/gironde-une-femme-de-61-ans-meurt-noyee-au-grand-crohot-10961561.php">conditions de mer parfois solides et, surtout, non surveillées</a>. Les bilans pourraient être plus lourds encore, sans l’intervention d’observateurs privilégiés, présents à la plage à ces moments-là, notamment les surfeurs.</p>
<p>En Australie, une des rares études disponibles sur le sujet a ainsi estimé que les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26056968/">surfeurs sauvaient, chaque année, à peu près autant de personnes que les surveillants de baignade</a>. Le surf étant, aujourd’hui, <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/14775085.2013.766528">répandu un peu partout sur le globe</a>, il y a fort à penser que cela n’est pas un cas à part.</p>
<h2>Une enquête internationale auprès des surfeurs</h2>
<p>Pour vérifier cette hypothèse, le <a href="https://www.beachsafetyresearch.com/">Beach Research Group</a> de l’université de Nouvelles Galles du Sud (UNSWBRG) a lancé, en décembre dernier, une enquête internationale afin de <a href="https://www.beachsafetyresearch.com/blog/the-global-surfer-survey-launch">recenser les sauvetages réalisés par les surfeurs</a>.</p>
<p>Déployée sur Internet, l’enquête comportait plus de 50 questions, abordant, tour à tour, le profil du surfeur lui-même, ses habitudes de pratiques, son opinion vis-à-vis de plusieurs thèmes d’actualité (relatifs à la protection de l’environnement ainsi qu’à la sécurité des baigneurs) mais aussi son éventuelle expérience d’un sauvetage en mer. Dans ce dernier cas, des questions étaient posées sur les conditions dans lesquelles le sauvetage avait eu lieu. Traduit en quatre langues, le questionnaire contenait une version française.</p>
<p>Rappelons que ce type de méthode souffre d’un <a href="http://norden.diva-portal.org/smash/record.jsf?pid=diva2%3A702543&dswid=2823">« biais de sélection »</a> au sens où, contrairement à d’autres techniques de sondage, il est difficile de contrôler a priori qui y répond. Il y a donc de fortes chances que s’expriment, en priorité, des individus se sentant particulièrement concernés par la problématique – soit ceux qui ont déjà réalisé un sauvetage.</p>
<p>Une situation d’autant plus complexe que l’<a href="https://journals.openedition.org/echogeo/12749">on ne connaît pas la population mère des surfeurs</a>. À l’instar d’autres sports de nature, l’activité se déroule le plus souvent hors des <a href="https://www.giplittoral.fr/sites/default/files/2021-06/rapport_diag_surf_vf.pdf">cadres réglementaires et institutionnels</a> (fédérations, compétitions…) standards.</p>
<p>Ces précautions prises, nous pouvons dresser quelques tendances pour la France, grâce à une extraction des données fournies par l’enquête du UNSWBRG, au 31 mars 2022. Nous exploitons les réponses de 585 répondants qui couvrent la quasi-totalité des départements littoraux. 269 sauvetages sont décrits.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1527997346918940673"}"></div></p>
<h2>Qui est impliqué ?</h2>
<p>Dans notre échantillon, 55,9 % des individus ont ainsi déclaré avoir porté secours à quelqu’un depuis qu’ils surfent. Parmi ces derniers, <a href="https://www.francetvinfo.fr/france/nouvelle-aquitaine/pyrenees-atlantiques/pyrenees-atlantiques-pierre-olivier-coutant-professeur-de-surf-sourd-sauve-deux-adolescents-de-la-noyade_5158402.html">presque un sur deux (47 %) l’a fait, ou refait, durant ces 12 derniers mois</a>.</p>
<p>Sur un plan statistique, la probabilité est significativement plus élevée chez les hommes (61 % des hommes ont déclaré avoir réalisé un sauvetage), âgés de 46 à 55 ans, et qui surfent depuis plus de vingt ans (avec, respectivement, 71,4 % et 79,5 % de réponses positives dans chacune de ces catégories). Les surfeurs en question se qualifient, plus souvent que les autres, d’un niveau « avancé » voire « professionnel ».</p>
<p>Ces résultats sont finalement assez proches de ceux obtenus par une autre étude, menée cette fois à l’<a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34144263/">échelle européenne</a>, avançant que, pour être en mesure de porter secours, il faut disposer, au préalable, d’une connaissance fine du milieu marin et d’une réelle confiance en ses capacités, toutes deux renforcées par une pratique assidue.</p>
<p>S’ajouteraient des compétences spécifiques en matière de sauvetages : dans nos traitements statistiques, la probabilité d’avoir porté secours est en effet plus élevée chez les titulaires d’un diplôme de type BNSSA (Brevet national de sécurité et de sauvetage aquatique), que chez les surfeurs avec des compétences plus générales de premiers secours.</p>
<p>Enfin, plus que leur durée, c’est la fréquence des sessions qui semble augmenter les chances de réaliser un sauvetage. Plus les surfeurs vont souvent à l’eau, sans nécessairement y rester longtemps, plus ils ont de chance de se retrouver dans une situation requérant leur intervention.</p>
<p>Dans notre échantillon, les personnes secourues sont en majorité des hommes (72,8 % des sauvetages décrits), âgés de 20 à 30 ans (36,9 %) ou de 30 à 50 ans (26,1 %). Dans 48,5 % des cas, la victime nageait à des endroits où elle n’avait pas pied. Les surfeurs portent aussi secours à d’autres surfeurs (32,1 %) ou à des bodyboarders (7,5 %). Les répondants estiment que les courants d’arrachement, plus communément connus sous le nom de <a href="https://theconversation.com/ba-nes-et-courants-darrachement-ce-quil-faut-savoir-avant-daller-se-baigner-163755">courants de baïne le long des plages du sud-ouest, sont responsables de près des deux tiers des accidents (66,1 %)</a>.</p>
<h2>Dans quelles conditions les surfeurs interviennent-ils ?</h2>
<p>Lorsque les surfeurs interviennent, la météo est le plus souvent ensoleillée (64,4 % des sauvetages décrits), avec des vagues dont la taille est estimée à deux mètres maximum (68 %). Autrement dit, des conditions pas suffisamment intimidantes pour maintenir les baigneurs hors de l’eau, mais que l’on sait <a href="https://nhess.copernicus.org/articles/21/2075/2021/">propices à l’activation des courants</a>.</p>
<p>Plus de la moitié des interventions citées (59,1 %) ont eu lieu à des endroits, ou à des moments, dépourvus de surveillance : des <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11069-015-2101-3">configurations par définition risquées</a>. Dans la majorité des cas (83,5 %), les surfeurs sont intervenus de leur propre initiative, ayant eux-mêmes repéré la personne en difficulté.</p>
<p>Sur le moment, les victimes sont épuisées (42,2 % de citations), voire paniquées (38,8 %), plus rarement calmes (14,9 % de citations). Dans l’ensemble, elles sont plutôt reconnaissantes (52,6 % de citations, contre 9 % de personnes jugées « non reconnaissantes »). Plus du tiers se sentait « bien » et serait reparti par ses propres moyens (37,3 %). Une minorité (12,3 %) aurait fait l’objet d’un examen médical. Ce dernier résultat concourt certainement à la faible visibilité des sauvetages réalisés par les surfeurs. Cela n’empêche pas la situation d’être jugée « grave » dans 68,2 % des cas.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un surfeur sauveteur los d’une démonstration-formation" src="https://images.theconversation.com/files/466055/original/file-20220530-26-sm0rfq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/466055/original/file-20220530-26-sm0rfq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/466055/original/file-20220530-26-sm0rfq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/466055/original/file-20220530-26-sm0rfq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/466055/original/file-20220530-26-sm0rfq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/466055/original/file-20220530-26-sm0rfq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/466055/original/file-20220530-26-sm0rfq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le sauvetage n’est jamais un acte anodin, y compris pour le surfeur (session de formation à Lossiemouth, Écosse).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jasperimage/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une nouvelle gouvernance de la surveillance des plages ?</h2>
<p>Il n’est évidemment pas question de faire basculer la responsabilité de la surveillance de la baignade des professionnels vers les usagers des plages, aussi expérimentés soient-ils.</p>
<p>Porter secours dans un environnement où les aléas naturels sont importants est une tâche qui ne s’improvise pas, au risque de <a href="https://www.academia.edu/68450579/The_impulse_to_rescue_Rescue_altruism_and_the_challenge_of_saving_the_rescuer?from_sitemaps=true&version=2">se retourner contre ceux-là mêmes qui tentent d’apporter leur aide</a>. Dans notre échantillon, dix surfeurs ont déclaré se sentir « mal » après cette expérience.</p>
<p>Pour autant, la baignade <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03549020/">hors surveillance est un phénomène avéré</a> qui, dans un contexte de changement climatique (où l’on s’attend à une multiplication des pics de chaleur hors saison estivale), risque de s’accentuer. Dans ces conditions, il n’est pas inutile d’évaluer l’intérêt de telles démarches citoyennes.</p>
<p>Contrairement à l’image encore trop souvent véhiculée, le <a href="https://journals.openedition.org/lectures/48348">surfeur est aujourd’hui pleinement intégré dans la société</a>. Son expérience, et surtout, sa capacité à être à proximité immédiate des terrains d’accidents, sont des atouts non négligeables, que les <a href="https://www.surfingfrance.com/federation/actualites/surfeur-sauveur-veut-passer-a-la-vitesse-superieure.html">instances fédérales cherchent à valoriser</a>. Dans l’enquête, 88,1 % des répondants français estiment qu’ils doivent veiller à la sécurité des autres à l’eau, et près de 9 sur 10 seraient intéressés par des formations aux premiers secours.</p>
<p>Voici peut-être une autre expression de la légendaire solidarité des gens de mer.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/184091/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La surveillance de baignade dispose d’un acteur trop souvent sous-estimé, même en France : le surfeur. Retour sur la nature de ses interventions et les précautions à prendre pour préserver chacun.Jeoffrey Dehez, Chargé de recherche en économie des loisirs et environnement, InraeBruno Castelle, Directeur de Recherche CNRS, Université de BordeauxDavid Carayon, Ingénieur d’études en statistiques, InraeRob Brander, Professor, UNSW Beach Safety Research Group, School of Biological, Earth & Environmental Sciences, UNSW SydneyLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1811082022-05-03T18:37:42Z2022-05-03T18:37:42ZImages de science : Comment les vagues se propagent-elles sur un tore liquide ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/457429/original/file-20220411-20-mwd5z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=156%2C0%2C910%2C535&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Cet anneau d'eau est posé sur un substrat superhydrophobe, c’est-à-dire une surface sur laquelle l’eau n’adhère quasiment pas.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://images.cnrs.fr/photo/20220011_0011">Filip NOVKOSKI / MSC / CNRS Photothèque</a></span></figcaption></figure><p>Les <a href="https://theconversation.com/comment-naissent-les-vagues-scelerates-146646">vagues</a> à la surface de la mer ou d’un lac ont été étudiées depuis longtemps par les scientifiques, et sont généralement bien comprises. Mais comment se propageraient-elles sur une surface plus complexe, par exemple à la surface d’un anneau (un tore) de liquide ?</p>
<h2>Comment obtenir un tore liquide ?</h2>
<p>Une première difficulté est d’obtenir un tel tore. Bien que les tores de fluides soient omniprésents dans la nature (<a href="https://doi.org/10.1002/2015GL064874">anneau de fumée</a> ou <a href="https://doi.org/10.1038/scientificamerican0896-82">anneau d’une bulle sous-marine produite par les dauphins</a>, par exemple), il est rare d’y trouver des <a href="https://doi.org/10.1103/PhysRevLett.123.094502">tores liquides</a>. En effet, ceux-ci sont habituellement <a href="https://www.insis.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/la-stabilisation-dun-anneau-de-fluide">instables</a> : ils se fragmentent en gouttelettes, ou bien referment leur trou central.</p>
<p>Une faible quantité d’eau déposée sur une surface plane forme une petite goutte. Pour une plus grande quantité, on observe un étalement du liquide, en partie du au fait qu’il « mouille » la surface, c’est-à-dire qu’il aime le contact avec la surface. Pour éviter cet effet, nous utilisons une surface que nous avons traité au préalable de façon <a href="https://www.chemistryworld.com/features/superhydrophobic-materials-from-nature/3010321.article">« superhydrophobe »</a>, c’est-à-dire qu’elle repousse l’eau, à la manière d’une feuille de lotus.</p>
<p>Une grosse goutte peut être ainsi produite, les forces capillaires assurant sa cohérence et minimisant sa surface, à la manière de la tension d’une membrane d’un ballon de baudruche. L’avantage est que cette goutte n’adhère presque plus sur la surface du fait de son contact réduit, et peut ainsi bouger quasiment sans contrainte.</p>
<p>Cependant, il manque un ingrédient crucial pour obtenir un tore de liquide.</p>
<p>L’astuce expérimentale, pour obtenir un tore, est de graver une rainure circulaire, de forme conique et faiblement pentue, sur la plaque. L’eau tente alors, par capillarité, de remonter la faible pente de la rainure, mais elle est repoussée vers le bas par la gravité. De cette façon, la capillarité et la gravité s’équilibrent. Cette technique nous permet alors d’obtenir un tore infiniment stable, dont son périmètre central se situe à l’aplomb de la rainure circulaire.</p>
<h2>Différents modes de propagation</h2>
<p>Nous avons pu alors mesurer, pour la première fois, des vagues le long d’un tore et étudier leur comportement. En utilisant un piston mobile, nous avons pu créer des ondes qui se propagent à la fois sur le bord extérieur et intérieur du tore.</p>
<p>Les ondes ainsi obtenues présentent différents <a href="https://journals.aps.org/prl/abstract/10.1103/PhysRevLett.127.144504">modes de propagation</a>.</p>
<p>Nous y trouvons des ondes se propageant comme à la surface d’un lac (ondes dites gravito-capillaires), mais qui sont modifiées par la géométrie courbe du tore. D’autres modes de propagation sont aussi observés, tels ceux résultant du mouvement global d’oscillation du tore, de haut en bas, le long de la pente de la rainure ; les deux bords bougeant dans le même sens. D’autres, enfin, correspondent à des modes de ballottement dont les deux bords bougent en sens opposé.</p>
<p>Cette diversité inattendue fait d’un tore liquide un système nouveau, intéressant pour étudier ces ondes. L’interaction entre des ondes se propageant sur chaque bord du tore pourrait permettre, par exemple, de mieux modéliser les oscillations indésirables dans les plasmas magnétisés en forme de tore (tokamak).</p>
<p>Nous nous concentrons actuellement sur des ondes de plus grandes amplitudes. Les solitons en sont un exemple fascinant : localisés, ils se propagent sans déformation sur de longues distances avec une vitesse qui dépend de leur amplitude. Ils sont notamment utilisés pour modéliser les tsunamis. Nous avons, tout récemment, rapporté <a href="https://arxiv.org/abs/2204.11490">l’observation de solitons le long du tore et étudié leur collision</a>. Le tore étant fermé sur lui-même, la périodicité d’une telle géométrie induit alors des formes et des vitesses de solitons qui sont différentes de celles observées sur une surface plane de liquide.</p>
<p>Ces premières expérimentales au sein de ce « beignet » de liquide ouvrent ainsi la voie vers des propriétés des solitons jusqu’alors inconnues dans cette géométrie.</p>
<hr>
<p><em>Cette image fait partie des lauréats du concours Mécapixel 2021.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181108/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Filip Novkoski a reçu un financement de thèse de l'École normale supérieure</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Eric Falcon a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche (France) et de la Simons Foundation (USA). </span></em></p>Surface superhydrophobe et rainure circulaire : voici la recette pour obtenir un tore de liquide. Ce « beignet » peut alors servir à étudier la propagation complexe des oscillations à sa surface.Filip Novkoski, Doctorant en physique, Université Paris CitéEric Falcon, Directeur de Recherche, CNRS, MSC, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1747132022-01-17T19:31:35Z2022-01-17T19:31:35Z« Avec Omicron, nous assistons plus à une autre forme d'épidémie qu'à une simple nouvelle vague »<p><em>Depuis le printemps 2020, la France a connu cinq vagues de contaminations dues au SARS-CoV-2 et ses différents variants (depuis 2021). Quelle est aujourd’hui la situation dans le pays ? Quel effet a l’arrivée d’Omicron, tant sur les hospitalisations que pour les enfants ? Et comment l’hôpital a-t-il adapté la prise en charge des patients atteints du Covid ? Analyse et prise de recul par le Pr Karine Lacombe, infectiologue et Cheffe de Service des maladies infectieuses et tropicales (Hôpital Saint-Antoine, Paris).</em></p>
<hr>
<p><strong>The Conversation-France : En France, où en est-on des vagues liées aux différents variants du SARS-CoV-2 ?</strong></p>
<p><strong>Karine Lacombe :</strong> Depuis novembre 2021, nous étions dans une cinquième vague où le variant Delta était majoritaire. Elle s’est manifestée par une augmentation des contaminations, qui s’est doublée 15 jours à 3 semaines plus tard d’une hausse des hospitalisations. Jusqu’à atteindre à la période de Noël un <a href="https://covidtracker.fr/">plateau élevé, lentement ascendant, des hospitalisations et des passages en réanimation</a>. On comptait 245 admissions par jour en soins critiques mi-décembre, 285 fin décembre et 345 actuellement.</p>
<p>Et, spécificité de la séquence présente, avant même qu’on ait une inflexion des contaminations et surtout de l’occupation des services de réanimation, on a vu émerger mi-décembre avec l’arrivée d’Omicron une espèce de sixième vague venant chevaucher la précédente. <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/dossiers/coronavirus-covid-19/coronavirus-chiffres-cles-et-evolution-de-la-covid-19-en-france-et-dans-le-monde">On a assisté depuis fin décembre à une augmentation fulgurante des contaminations, mais sans que ça se traduise encore en hospitalisation</a> : pour l’heure, les malades qui arrivent dans nos services sont surtout des patients Delta.</p>
<p>Nous procédons, chez les personnes hospitalisées, a des tests PCR combinés qui dépistent, entre autres, les SARS-CoV-2 et les virus grippaux. Pour l’heure, la grippe n’est pas encore trop présente mais ça va forcément monter. Et <a href="https://theconversation.com/deux-variants-peuvent-se-retrouver-dans-une-meme-cellule-avec-quels-risques-174956">en cas de co-infection</a>, comment va se comporter Omicron ? La grippe ? Les deux virus vont-ils entraîner des symptômes ? On ne peut pas savoir.</p>
<p><strong>T.C. : C’est encore tôt, mais que pouvez-vous déjà observer concernant le variant Omicron ?</strong></p>
<p><strong>K.L. :</strong> Il est possible que ce variant ait des propriétés différentes de celles de ses prédécesseurs, telles qu’une extrême contagiosité et des signes cliniques qui ne sont pas exactement les mêmes. On note ainsi des spécificités au niveau des patients : on a d’un côté des malades porteurs de Delta qui arrivent avec un Covid clair à l’hôpital… et d’autres qui arrivent avec diverses pathologies et chez qui on découvre, en les testant à leur arrivée aux Urgences, la présence passée inaperçue d’Omicron. Dans leur cas, on ne peut pas vraiment parler d’un Covid, puisque le Covid est une maladie avec des symptômes bien définis (le principal étant une pneumonie hypoxémiante, c’est-à-dire nécessitant de forts besoins en oxygène) et ici absents, mais plutôt d’un portage asymptomatique.</p>
<p>Donc on a pour l’instant plus une autre forme d’épidémie qu’une simple nouvelle vague. Mais on est au tout début de cette sixième séquence, il est donc difficile de voir où ça va mener. On a toutefois les exemples de l’Angleterre et de l’Afrique du Sud, qui aurait déjà passé son pic et où il semblerait qu’Omicron ait causé moins de formes Covid graves. En Angleterre, actuellement, sur dix personnes qui arrivent aux Urgences pour Covid, une passe en réanimation ; habituellement c’est une sur cinq… C’est pour ça qu’on entend parfois dire qu’il est deux fois moins pathogène.</p>
<p>À quoi est-ce dû ? Aux propriétés intrinsèques d’Omicron… ou au fait que 75 % de la population est vaccinée (90 % en France) ? Il est encore trop tôt pour le dire, nous aurons des statistiques précises d’ici une quinzaine de jours.</p>
<p><strong>T.C. : Y a-t-il déjà des données concernant les symptômes d’Omicron ?</strong></p>
<p><strong>K.L. :</strong> Les premières constatations cliniques que l’on fait, c’est qu’Omicron donnerait plutôt des formes d’affection « hautes » : de type pharyngite et laryngite, des maux de gorge qui évoquent les angines, le nez qui coule… Des choses touchant plutôt la sphère ORL, et pas le poumon profond à la différence de Delta. Chez les personnes vaccinées, en particulier ayant reçu trois doses, on a beaucoup de porteurs asymptomatiques ou développant de rares symptômes sur deux à trois jours – comme une espèce de grippe, avec un peu de mal de gorge, parfois un peu de fièvre, de courbatures et puis ça passe.</p>
<p>Il faut malgré tout rester prudent : la dernière semaine de décembre, 14 % des personnes hospitalisées pour Covid en réanimation chez nous avaient Omicron.</p>
<p>Autre point, nous avons <a href="https://geodes.santepubliquefrance.fr/#c=indicator&f=09&i=covid_hospit_clage10.hosp&s=2022-01-12&t=a01&view=map1"><strong>500 enfants hospitalisés en France</strong> pour un Covid</a> (on ne sait pas encore si c’est Omicron ou Delta), soit le nombre le plus élevé qu’on ait eu – et 80 % n’ont pas de comorbidités. Ce qui est proportionnellement normal : avec plusieurs centaines de milliers de personnes qui s’infectent tous les jours, les enfants sont forcément touchés. Mais en l’occurrence, c’est une épidémie qui a été fulgurante chez eux et les jeunes adultes.</p>
<p>Et se pose la question des PIMS (<a href="https://www.santepubliquefrance.fr/etudes-et-enquetes/surveillance-nationale-des-cas-de-syndrome-inflammatoire-multi-systemique-pediatrique-pims">syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique</a>) qui peuvent toucher les enfants trois à quatre semaines après leur Covid. On a eu quelques cas avec les autres variants, qu’en sera-t-il avec Omicron ? C’est quelque chose qui inquiète, et on n’en saura pas plus avant février-mars. (<em>Entre le 2 mars 2020 et le 26 décembre 2021, 826 cas de PIMS ont été signalés, dont 745 en lien avec le Covid-19. Le nombre de cas étant en augmentation depuis fin novembre indique <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/etudes-et-enquetes/surveillance-nationale-des-cas-de-syndrome-inflammatoire-multi-systemique-pediatrique-pims">Santé publique France</a>, ndlr</em>)</p>
<p><strong>T.C. : Avec une telle propagation d’Omicron et la diffusion du vaccin, va-t-on arriver à l’immunité collective régulièrement mise en avant ?</strong></p>
<p><strong>K.L. :</strong> Peut-être par la force des choses… Mais ça ne serait pas une immunité homogène : il y aurait des niveaux différents au sein de chaque groupe de population, car <a href="https://theconversation.com/avoir-ete-malade-de-la-covid-19-ne-protege-pas-aussi-bien-quun-vaccin-surtout-face-au-variant-delta-165196">l’immunité acquise par la vaccination est plus solide et dure plus longtemps que celle acquise par l’exposition au virus – et encore plus quand on est vacciné après infection</a>. Malgré tout, ça devrait permettre de freiner la diffusion de l’épidémie – à moins qu’à un moment émerge un nouveau variant qui échappe totalement à notre système immunitaire.</p>
<p>C’est un peu ce qu’on voit avec Omicron, puisqu’il faut trois doses pour arriver à le maîtriser et que des personnes infectées par d’autres variants et non vaccinées se réinfectent facilement.</p>
<p><strong>T.C. : Vous avez indiqué que la hausse des contaminations ne s’accompagnait pas (encore) de celle des hospitalisations. La prise en charge des patients a-t-elle évolué en deux ans ?</strong></p>
<p><strong>K.L. :</strong> Nous avons effectivement réalisé énormément de progrès : on adapte désormais le type de traitement au profil du patient et au stade de la maladie auquel il se trouve.</p>
<p>On considère, pour simplifier, que le Covid se déroule en deux phases : une virale, qui commence deux à trois jours avant le début des symptômes et persiste trois à quatre jours après ; puis une inflammatoire, où le virus est moins présent mais où le patient développe une réponse inflammatoire exacerbée. Les médicaments développés visent ces deux phases.</p>
<p>Au début de l’épidémie, comme on avait plutôt des malades en phase inflammatoire, on s’est surtout concentré sur l’évaluation de médicaments capables de « casser » cette réaction, puisque c’est l’emballement de nos défenses immunitaires qui amène en réanimation. Le premier qui a vraiment montré son efficacité est un corticoïde (le <a href="https://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=935">dexaméthasone</a>). D’autres ont ensuite joué sur la modulation de la réponse immunitaire.</p>
<p>Ce qui a permis de diminuer la mortalité en réanimation par deux : avant elle montait jusqu’à 30 %, on culmine maintenant plutôt autour de 15 %.</p>
<p>Ensuite, on a ensuite progressé dans le traitement de la phase virale. Normalement, lorsque l’on est exposé au virus, naturellement ou par vaccination, on développe des anticorps capables de reconnaître l’intrus et de guider notre réponse immunitaire. Or, certains n’ont pas d’anticorps et risquent des formes sévères de la maladie : par exemple les personnes immunodéprimées – et les non-vaccinées.</p>
<p>Des traitements capables de mimer l’action de ces anticorps ont été mis au point, les plus probants étant les <a href="https://www.vidal.fr/medicaments/utilisation/biotherapie-biosimilaire/anticorps-monoclonaux.html">anticorps monoclonaux</a> (<em>créés en laboratoire contre une cible bien précise, ici la protéine Spike, ndlr</em>). Autorisés chez les patients immunodéprimés, ils diminuent de 80 % le risque d’hospitalisation en cas de symptômes les cinq premiers jours de la maladie.</p>
<p>Malheureusement, plusieurs de ces <a href="https://ansm.sante.fr/actualites/traitements-par-anticorps-monoclonaux-actuellement-disponibles-contre-la-covid-19-et-utilisation-selon-les-variants">anticorps monoclonaux (tel Ronapreve)</a> très efficaces contre la souche originelle du SARS-CoV-2 et les précédents variants, dont Delta, ne marchent plus sur Omicron dont la Spike a beaucoup changé du fait de ses mutations (<a href="https://ansm.sante.fr/actualites/evusheld-une-nouvelle-bitherapie-danticorps-monoclonaux-contre-la-covid-19-autorisee-en-acces-precoce">Evusheld restant en partie efficace</a>).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Modélisation 3D du cocktail d’anticorps monoclonaux Evulshed" src="https://images.theconversation.com/files/440764/original/file-20220113-17-1u6jloq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/440764/original/file-20220113-17-1u6jloq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=531&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/440764/original/file-20220113-17-1u6jloq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=531&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/440764/original/file-20220113-17-1u6jloq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=531&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/440764/original/file-20220113-17-1u6jloq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=667&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/440764/original/file-20220113-17-1u6jloq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=667&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/440764/original/file-20220113-17-1u6jloq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=667&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le mélange d’anticorps monoclonaux Evusheld (Tixagevimab à droite, et Cilgavimab, à gauche) conserve une partie de son efficacité contre le variant Omicron.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fvasconcellos, d’après Dong J, Zost SJ, Greaney AJ, Starr TN, Dingens AS, Chen EC (2021)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Quand un malade arrive à l’hôpital, on fait donc toujours une analyse sérologique pour rechercher la présence d’anticorps. S’il n’y en a pas, on peut proposer l’injection de monoclonaux.</p>
<p>Un autre type d’antiviral existe, mais à l’efficacité moins établie. L’un n’a d’ailleurs <a href="https://www.has-sante.fr/jcms/p_3304161/fr/covid-19-deux-nouveaux-traitements-evalues-par-la-has">pas eu son autorisation d’accès précoce en France</a> (le <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-021-03667-0">molnupiravir</a>, de MSD), et l’autre (développé par Pfizer) est en cours d’examen. Les données ne sont pas encore publiées et évaluées scientifiquement, juste <a href="https://www.pfizer.com/news/press-release/press-release-detail/pfizers-novel-covid-19-oral-antiviral-treatment-candidate">annoncées dans des communiqués de presse</a>.</p>
<p><strong>T.C. : Existe-il des traitements préventifs ?</strong></p>
<p><strong>K.L. :</strong> Le meilleur est bien sûr le vaccin, qui protège des formes graves ceux qui peuvent, physiologiquement, faire des anticorps. Et ceux qui ne le peuvent pas, peuvent recevoir des anticorps monoclonaux. Pour ces publics vulnérables, dont les personnes immunodéprimées, on peut les injecter à titre préventif – c’est de la prophylaxie préexposition (avant d’être exposé au virus) ou post-exposition immédiate.</p>
<p>On les utilise aussi en curatif précoce dans les cinq jours après le début des premiers symptômes. Au-delà de ces cinq jours, si on est encore malade, c’est que s’installe une forme grave, en particulier pulmonaire. On a alors recours aux immunomodulateurs et corticoïdes.</p>
<p><strong>T.C. : Comment l’hôpital se prépare-t-il, encore, à faire face ?</strong></p>
<p><strong>K.L. :</strong> On a recommencé à déprogrammer des actes de chirurgie… mais c’est de plus en plus difficile : du personnel est parti, épuisé, entraînant la fermeture de lits. On se bat de nouveau au quotidien pour réinventer des solutions. En essayant par exemple d’accélérer la sortie des patients en les faisant rejoindre plus vite, selon leurs besoins, des centres de rééducation, des maisons de retraite temporaires ou des centres pour SDF Covid, etc. de façon à pouvoir vider les lits et prendre de nouveaux patients.</p>
<p>Ou alors on « détourne » des lits de certaines unités, en changeant leur destination. Par exemple dans des secteurs dédiés à des bilans (diabète, cardio-vasculaire…), on va apporter tout le matériel nécessaire (respirateurs et autres) pour les transformer en unité de soin intensif adaptée au Covid.</p>
<p>Mais d’une part, ça veut dire que les soins et analyses des malades initialement programmés dans ces unités sont décalés, d’un mois, trois mois… Et d’autre part, c’est très compliqué logistiquement parlant, et épuisant physiquement et nerveusement pour les soignants. Un autre souci, avec un Omicron aussi contagieux, ce sont les arrêts de travail pour cause d’infection. Heureusement, avec la vaccination obligatoire des soignants, il n’y a pas de formes graves mais tout de même pas mal de personnel arrêté.</p>
<p>Avec ce variant, ça n’est peut-être pas tant la gravité de la maladie que la désorganisation de la société qui risque de s’en suivre qui va être le principal problème.</p>
<p><strong>T.C. : Avec le recul, comment voyez-vous ces deux années écoulées ?</strong></p>
<p><strong>K.L. :</strong> Aujourd’hui, à chaque nouvelle vague, on a à gérer de nouvelles inconnues : comment les gens vaccinés vont-ils résister, quels signes cliniques vont dominer, comment « armer » (transformer) des lits supplémentaires en réanimation… Mais en 2020, on a vécu quelque chose d’inimaginable et on est passé juste à côté d’une terrible catastrophe.</p>
<p>On a réussi à faire face parce qu’on a été solidaires. À la fois à l’hôpital, où des liens très forts ont été créés et qui perdurent malgré la fatigue, et avec la population qui, quoi qu’on en dise, a été très impliquée. En un an, on en est par exemple à 90 % de vaccinés : qui l’aurait cru ? On ne se rend pas compte de l’effort logistique que représente un tel niveau de vaccination de la population, qui a elle-même accepté l’injection.</p>
<p>On a tendance à sous-estimer cela parce que ceux qui font le plus de bruit, c’est la minorité bruyante qui est contre (le vaccin, etc.) et ceux qui font de la désinformation. Globalement, on est tous allés dans le même sens.</p>
<p>On a été confronté à une crise sans précédent, qui nous a affectés mentalement, physiquement, socialement… Mais je pense que quand on va en sortir et qu’on se retournera sur ces trois années, même si notre démocratie a été mise en tension, on s’en sortira la tête haute.</p>
<p>Si j’ai un grand regret toutefois, c’est la difficulté de lutter contre la désinformation. Au nom de la liberté d’expression, on a laissé des sites diffuser en continu de fausses informations. On peut ne pas être d’accord sur certains points mais, à un moment, on ne peut pas aller contre la connaissance scientifique établie collégialement. Je ne parle pas des victimes de ces Fake-news, que l’on retrouve ensuite dans nos services, mais de ceux qui les promeuvent souvent dans un but économique ou personnel et qui abusent des publics vulnérables qui les écoutent. Cela, on n’a pas su le prendre en charge.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174713/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Karine Lacombe a reçu des financements pour de l’expertise scientifique ponctuelle et de l’aide à la participation à des réunions scientifiques (financement personnel) et un soutien à la recherche clinique (financement de mon institution) : Gilead, MSD, Janssen, Sobi, GSK, ViiV Healthcare.
Karine Lacombe participe au Think Thank de l’Express pour analyser les projets des candidats à la Présidentielle 2022 (responsable de la recherche et de la santé) et biotech SPIKIMM (expertise pour le développement clinique d’un Ac monoclonal de l’Institut Pasteur).</span></em></p>Quelle est la situation sanitaire et hospitalière en France alors que le pays passe de Delta à Omicron ? Comment ont évolué prise en charge et traitement ? L'analyse de l'infectiologue Karine Lacombe.Karine Lacombe, Infectiologue, cheffe de service des maladies infectieuses de l'Hôpital Saint-Antoine, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1628922021-06-18T09:01:45Z2021-06-18T09:01:45ZEn 20 ans, les risques de submersions marines des côtes ont augmenté de 50 %<p>Entre 1993 et 2015, les risques de submersion marine ont augmenté de près de 50 % à l’échelle mondiale : c’est ce que révèle l’étude internationale – coordonnée par l’IRD avec des chercheurs du CNES et de Mercator Océan – que nous venons de publier ce vendredi 18 juin 2021 dans la revue <em>Nature Communications</em>.</p>
<p>En combinant données satellitaires et modèles numériques, nous montrons que ces risques de submersion sont amenés à s’accélérer, notamment dans la zone intertropicale.</p>
<p>Cette situation s’explique par une combinaison de facteurs, dont l’élévation globale du niveau de la mer, mais aussi le déferlement des vagues sur les côtes, un phénomène majeur peu pris en compte jusqu’à présent dans les prévisions climatiques à cause de sa complexité.</p>
<p>La mer monte actuellement de 3 millimètres en moyenne environ par an ; selon les scénarios d’émissions de gaz à effet de serre retenus, ce niveau pourrait les 80 cm à la fin du XXI<sup>e</sup> siècle !</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1405308439589535748"}"></div></p>
<h2>Le rôle du changement climatique</h2>
<p>Les régions côtières situées à faible altitude – à l’image des côtes basses et sableuses d’Afrique de l’Ouest et des grands deltas comme la région du Gange Brahmapoutre – abritent près de <a href="https://www.ipcc.ch/srocc/">10 % de la population mondiale</a>.</p>
<p>Ces zones aux écosystèmes uniques et sensibles – à l’image des lagunes côtières qui abritent une riche biodiversité ou aux sols d’alluvions fertiles utilisés pour l’agriculture dans le delta du Mékong (Vietnam) – subissent l’érosion du littoral, phénomène est imputable aux activités humaines : déficit de sable sur le littoral à cause des barrages sur les rivières qui bloquent les apports, extraction de sable non contrôlée, affaissement du sol lié au pompage des nappes phréatiques et à l’urbanisation… Elles sont aussi exposées à l’élévation du niveau de la mer.</p>
<p>Et elles font également face à des aléas dévastateurs, que ce soit des épisodes de submersion et/ou d’inondation. On se souvient des tempêtes Katrina et Xynthia, qui ont frappé les États-Unis en 2005 et l’Europe en 2010 ; ou encore du Typhon Haiyan, plus gros cyclone tropical jamais mesuré, qui toucha l’Asie en 2013.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/1UgiTlzEphA?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le super-typhon Haiyan s’abat sur les Philippines (Euronews/Youtube, novembre 2013)</span></figcaption>
</figure>
<p>Ces phénomènes épisodiques sont exacerbés par le réchauffement climatique et les pressions d’origine humaine – aménagements urbains et côtiers, développement des infrastructures touristiques et portuaires, urbanisation galopante et densification urbaine.</p>
<p>La ville de Miami (États-Unis) devrait ainsi devenir l’une des métropoles les plus exposées aux événements de submersion marine dans les années à venir.</p>
<p>Si l’ampleur et la fréquence de ces aléas restent incertaines, les scientifiques estiment que les pays de la zone intertropicale – comme ceux d’Afrique de l’Ouest et d’Asie du Sud-Est – seront particulièrement vulnérables, notamment car ils abritent des métropoles très peuplées sur des côtes basses, pas ou peu protégées – à l’inverse des Pays-Bas où un système de digues et dunes de protection pour faire face aux aléas climatiques extrêmes a été mis en place.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/YZXPdQSu3yA?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">L’érosion littorale depuis l’espace (IRD/Youtube, 2021).</span></figcaption>
</figure>
<h2>Les grandes vagues à la manœuvre</h2>
<p>Ces épisodes de submersion marine surviennent lorsque le niveau extrême des eaux côtières dépasse l’élévation maximale de la côte (dune, falaise, digue).</p>
<p>Leurs conséquences sont importantes : rupture des protections (brèches) et inondations de zones jusque-là épargnées, comme ce fut le cas lors de la tempête Xynthia en 2010 en France, ou lors du passage de Katrina aux États-Unis.</p>
<p>Les scientifiques ont observé que ce niveau extrême résulte d’une combinaison de plusieurs processus : le niveau régional de la mer, la circulation océanique, le transfert de masse des continents vers l’océan (calottes glaciaires, eaux terrestres, glaciers), la « surcote » (c’est-à-dire la surélévation du niveau d’eau par rapport au niveau de repos) durant les tempêtes due à la pression atmosphérique et aux vents, la marée et, enfin, les effets du déferlement des vagues.</p>
<p>Malgré le <a href="https://lemag.ird.fr/fr/les-vagues-chahutent-le-niveau-de-la-mer">rôle important que jouent les vagues océaniques</a> dans la détermination du niveau de la mer au niveau de la côte, leur contribution était jusqu’à présent largement négligée dans les modèles de prévision des risques de submersion, faute d’une précision suffisante de la topographie des côtes.</p>
<h2>Identifier les « points chauds »</h2>
<p>Dans notre étude, nous avons combiné l’utilisation d’un modèle numérique mondial inédit de niveau de la mer à la côte, incluant l’effet transitoire des vagues d’élévation de surface avec une nouvelle estimation des niveaux extrêmes atteints ; cela a pu être réalisé grâce à des données d’altimétrie satellitaire radar qui permettent de surveiller la hausse du niveau des mers et en tenant compte des ondes de marées, d’analyses du déferlement des vagues et des mesures de protection naturelles et artificielles des côtes.</p>
<p>Nous avons procédé à la quantification de l’augmentation mondiale des évènements de submersion marine pour la période de 1993 à 2015. Pour cela, nous avons précisé, grâce aux données satellitaires, deux paramètres clés de la topographie des côtes : la pente et l’élévation maximale subaérienne de ces espaces.</p>
<p>Le niveau extrême des eaux côtières a été calculé selon une résolution horaire, de façon à identifier le nombre potentiel d’heures de franchissement des protections littorales dans chaque zone sur une base annuelle.</p>
<p>Résultat : en 23 ans, le nombre d’heures par an de submersion marine agrégé au niveau mondial a augmenté de près de 50 %. Nous sommes passés de 10 000 heures par an à plus de 15 000 heures.</p>
<p>La combinaison des marées et des épisodes de grandes vagues (d’une dizaine de mètres au maximum) est le principal contributeur au franchissement épisodique des côtes.</p>
<p>Plusieurs « points chauds » ont été identifiés : le golfe du Mexique, le sud de la Méditerranée, l’Afrique de l’Ouest, Madagascar et la mer Baltique. Ici, l’augmentation des risques de submersion marine est plus élevée en raison des côtes basses et/ou non protégées (naturellement ou artificiellement).</p>
<h2>Une accélération dans les décennies futures</h2>
<p>Nos travaux comportent également un volet de prévision pour le XXI<sup>e</sup> siècle, qui s’appuie sur différents scénarios de hausse du niveau de la mer.</p>
<p>Le nombre d’heures de submersion potentiel pourrait augmenter fortement d’ici à la fin du siècle, avec un rythme plus rapide que l’élévation moyenne du niveau de la mer : c’est-à-dire que le poids de chaque millimètre de hausse n’est pas constant et augmente, et que le risque de franchissement des protections côtières s’accentue.</p>
<p>Cette accélération de la submersion marine est exponentielle et sera clairement perceptible dès 2050, quel que soit le scénario climatique.</p>
<p>À la fin du siècle, l’intensité de l’accélération dépendra des trajectoires d’émissions de gaz à effet de serre, et donc de la hausse du niveau de la mer. En cas de fortes émissions, le nombre d’heures de submersions marines pourrait être multiplié par 50 fois par rapport à ce que nous connaissons actuellement.</p>
<p>Ces chiffres soulignent l’ampleur du défi à relever par la communauté internationale : les besoins de protection sont sans précédent ; il s’agit aussi de changer nos modes d’utilisation des zones littorales fortement exposées à ces aléas marins.</p>
<p>De plus en plus de régions seront exposées à ce risque, tout particulièrement ceux de la zone intertropicale, ainsi que le Nord-Ouest des États-Unis, la Scandinavie ou l’extrême-Est de la Russie.</p>
<p>Des études complémentaires devront être conduites, à des échelles locales et régionales, pour détailler ces projections mondiales. Ces dernières constituent une base solide pour proposer des mesures efficaces d’adaptation, tout principalement dans les points chauds identifiés.</p>
<hr>
<p><em><a href="https://www.linkedin.com/in/cristelle-duos-98283681/?originalSubdomain=fr">Cristelle Duos (IRD)</a> est co-autrice de cet article</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/162892/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Rafael Almar ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Cette accélération de la submersion marine est exponentielle et sera clairement perceptible dès 2050, quel que soit le scénario climatique.Rafael Almar, Chercheur en dynamique littorale, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1562622021-05-09T18:19:30Z2021-05-09T18:19:30ZLe surf, antidote au capitalisme technologique ?<p>Le succès grandissant du surf est indiscutable : compétitions toujours plus nombreuses, vagues toujours plus hautes, <a href="https://www.theinertia.com/surf/how-the-surfing-industry-has-experienced-both-boom-and-bust-during-the-pandemic/">tourisme associé au surf</a> en plein boom… Certains passionnés bravent même la <a href="https://www.beachbrother.com/news/surf/les-spots-surf-plus-froids-monde-938149625.html">rigueur des pays froids afin de retrouver un environnement sauvage</a>. Fictions et documentaires sur le sujet ne cessent de se multiplier depuis les années 60, et des entreprises telles que <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/lsd-la-serie-documentaire/le-surf-une-vague-mondiale-34-une-nouvelle-vague-de-surfeuses">Quicksilver, Billabong ou Roxy ont développé leur marché autour du surf et du mode de vie associé</a>.</p>
<p>La décision de l’intégrer aux JO de 2020 à Tokyo signe définitivement le succès planétaire de ce sport. Au cœur d’une <a href="http://www.slate.fr/story/151538/underground-pop-culture-histoire-surf">nouvelle pop culture</a> assortie d’une <a href="https://www.arkhe-editions.com/livre/histoire-du-surf/">« idéologie moderne de la glisse »</a>, la pratique du surf représente un véritable phénomène contemporain.</p>
<h2>Une quête spirituelle</h2>
<p>L’esprit de contemplation occupe une part centrale dans l’expérience du surf. <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/lecriture-est-un-sport-comme-les-autres/sigolene-vinson-et-le-surf">« Le surf, c’est une sorte de philosophie stoïque, c’est accepter qu’on n’a pas le pouvoir sur les choses »</a>, nous dit Sigolène Vinson. De fait, les meilleures applications météo ne permettent pas de prévoir <a href="http://www.librairie-maritime.com/livres/l-instinct-glisse-petit-hymne-surf-aux-vagues-liberte-9782361570194.html">s’il sera possible de surfer ou non</a>.</p>
<p>À l’origine, le surf constitue une activité spirituelle profondément ancrée dans la religion et la culture de différentes îles du Pacifique, <a href="https://www.arkhe-editions.com/livre/histoire-du-surf/">notamment à Hawaï</a> où elle était liée à la célébration du Dieu Lonos, le <a href="https://journals.openedition.org/eps/6051">dieu de la fertilité</a>. S’il était à l’époque réservé aux personnalités de haut rang, certains surfeurs ont conservé <a href="http://www.librairie-maritime.com/livres/l-instinct-glisse-petit-hymne-surf-aux-vagues-liberte-9782361570194.html">cet état d’esprit d’osmose avec la nature</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Ces surfeurs dans l’âme, on les surnomme “soul surfeurs”. Ils explorent la facette imperceptible de la discipline, rêvant de la précieuse équation entre l’homme et l’élément, celle qui poussait Duke Kahanamoku, pionnier du surf hawaïen, à s’élancer sur des murs d’eau colossaux muni d’une antique planche d’acacia. Pour eux, la glisse n’est ni un vecteur d’esbroufe ni un enchaînement de manœuvres spectaculaires, mais un art de vivre, une philosophie. Ils y voient même parfois une croyance apparentée à l’animisme, dans laquelle les éléments naturels – en particulier l’océan – sont dotés d’une force vitale ».</p>
</blockquote>
<h2>Reconquérir sa liberté</h2>
<p>Un <em>soul surfeur</em> ou <em>free surfeur</em> oriente toute sa vie autour de cette pratique, dans une société où la liberté est de plus en plus compromise, le rapport à la nature souvent inexistant, <a href="https://www.franceculture.fr/oeuvre/lage-du-capitalisme-de-surveillance">l’aliénation par les technologies toujours plus forte</a>. Cette sensation d’être pleinement présent à ce que l’on fait est devenue rare – sauf peut-être dans les sports extrêmes qui permettent d’atteindre ce type d’intensité. Le surf pratiqué par les <em>soul surfeurs</em> c’est cet idéal des <a href="http://nationalhumanitiescenter.org/pds/gilded/empire/text1/turner.pdf">pionniers en quête de liberté</a> largement <a href="https://press.uchicago.edu/ucp/books/book/chicago/F/bo3773600.html">repris par la contre-culture américaine des années 60</a> avant qu’elle ne soit absorbée par le capitalisme.</p>
<p>Le surf représente une manière d’être libre dans un monde où l’intelligence artificielle et ses algorithmes laissent de <a href="https://www.casilli.fr/publications-2/">moins à moins de place au libre arbitre et au hasard</a>. C’est l’apothéose du besoin de se soustraire au système, de se recentrer sur soi. L’engouement pour le yoga ou la méditation, <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/0001839221993475">devenues des industries victimes de leur succès</a> s’inscrit d’ailleurs dans la même quête de spiritualité et de liberté.</p>
<h2>Un antidote à la technologie toute-puissante</h2>
<p>Le surf apporte une touche de poésie au temps du capitalisme technologique. La vague à surfer représente la déroute de l’intelligence artificielle. Pour faire dire à une IA comment prendre la vague, il faudrait lui avoir montré toutes les vagues du monde et selon toutes les conditions météo possibles. Et quand bien même une IA aurait intégré toutes ces données, elle serait en défaut de prédire comment aborder le déferlement suivant. C’est ce qui rend ce moment d’attente si précieux et unique : il est proprement imprédictible.</p>
<p>Au milieu des flots, conscient de sa condition face aux éléments naturels, le surfeur observe, sent, décide et fait. L’océan indomptable le remet sa juste place d’être humain. Pas au-dessus de la nature, pas au-dessus du monde, mais bien en dessous. Les promesses de la société capitaliste se heurtent à cette paroi impénétrable. C’est pour cela que dans la pratique du surf, quelque chose résiste au capitalisme qui aspire sa critique.</p>
<p>Dans un monde où les transhumanistes ambitionnent d’utiliser les technologies pour sauver l’humanité, <a href="https://time.com/574/google-vs-death/">voire à tuer la mort</a>, le surf rappelle l’homme à son insignifiance vertigineuse face à la force incoercible que constitue l’océan – et la nature de manière générale. C’est pourquoi le capitalisme ne va pas cesser de tenter de l’absorber, <a href="https://www.persee.fr/doc/rfsoc_0035-2969_2001_num_42_1_5341">tant il tient à ingérer sa critique, sans jamais y parvenir</a>.</p>
<p>Même le meilleur surfeur peut se retrouver pris dans la houle, au milieu de l’océan, incapable d’affronter l’élément qui se tient devant lui. C’est aussi de cette mise en danger et de cette humilité face aux éléments que l’homme tire sa liberté.</p>
<h2>Une pratique qui résiste à la récupération commerciale</h2>
<p>La multiplication des écoles de surf, des magazines, des compétitions, des films, de la musique, de la mode du surf en témoigne : le <em>soft power</em> du surf n’a jamais été aussi fort. Certains chefs d’entreprises vont même jusqu’à souligner l’importance de « laisser leurs employés surfer », comme <a href="https://eu.patagonia.com/lv/fr/product/let-my-people-go-surfing-revised-paperback-book/BK067.html">Yves Chouinard, fondateur de la marque Patagonia</a>.</p>
<p>Pourtant, quelque chose résiste. Le capitalisme ne peut s’emparer de ce moment unique et solitaire où le surfeur doit faire fi de tout ce qu’il connaît pour ne pas se faire emporter, pour finalement prendre la vague et ressentir un sentiment d’osmose avec un élément indomptable et puissant.</p>
<p>Comme le rappelle <a href="http://www.librairie-maritime.com/livres/l-instinct-glisse-petit-hymne-surf-aux-vagues-liberte-9782361570194.html">Lodewijk Allaert</a> :</p>
<blockquote>
<p>« ceux qui l’ont compris n’ont que faire du simulacre commercial, du fétichisme vestimentaire ou de la mauvaise météo. Ils savent qu’au-delà du corps, au-delà de la pensée et des mots, un lien infrangible et primitif les unit à l’élément liquide. Une sorte d’alchimie entre l’homme et la vague qui inexorablement encourage à y revenir. »</p>
</blockquote>
<h2>Une médecine douce ?</h2>
<p>Le surf se révèle une médecine de l’âme particulièrement efficace face à la <a href="https://www.college-de-france.fr/site/anne-fagot-largeault/inaugural-lecture-2001-03-01.htm">dérive technoscientifique croissante de la médecine</a>, <a href="https://www.cairn.info/journal-dix-septieme-siecle-2002-4-page-675.htm">comme le souligne Romano</a> :</p>
<blockquote>
<p>« La médecine objective qui réduit le malade à une courbe de température sur un lit d’hôpital ne peut manquer de susciter une médecine subjective, douce, naturelle ou parallèle pour faire pendant à la déshumanisation qu’elle enveloppe à titre de prémisse méthodique. »</p>
</blockquote>
<p>Si certains hôpitaux mettent en place des <a href="https://www.association-mindfulness.org/membre-instructeur.php?id=184">programmes de méditation laïcisés afin d’apaiser des patients souffrant de maladies chroniques ou de dépression</a>, d’autres sont parvenus à utiliser le surf à des fins thérapeutiques pour véritablement guérir par exemple des <a href="https://twitter.com/resurfacemovie">vétérans souffrant de troubles post-traumatiques</a>.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/l8W1yvrPA-U?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<h2>L’océan comme frontière irréductible</h2>
<p>À l’heure de la pandémie de Covid-19, de nombreuses personnes ont <a href="https://marielauredjelic.wixsite.com/mlsallesdjelic/post/le-temps-aux-temps-du-coronavirus">remis en cause leur mode de vie</a> – <a href="https://www.sortiraparis.com/actualites/a-paris/articles/221411-avec-le-deconfinement-les-demenagements-cartonnent-en-france">déménagement</a>, <a href="https://theconversation.com/la-crise-de-la-covid-19-remet-en-question-le-sens-que-lon-donne-a-son-travail-136895">changement de travail</a> ou <a href="https://www.bbc.com/afrique/monde-55675237">divorce</a>. </p>
<p>La société dit avoir « pris conscience » de sa faiblesse face à ce virus, et tout est mis en place pour lutter contre cette pandémie. La limitation des libertés, que ce soit par les règles imposées par le gouvernement afin de limiter la propagation du virus comme le port du masque, le couvre-feu, la fermeture de lieux publics, couplée à la multiplication des applications destinées à contrôler le déplacement des citoyens, ont largement affecté les libertés individuelles.</p>
<p>Certains vont même jusqu’à qualifier de telles mesures <a href="https://www.franceculture.fr/oeuvre/lage-du-capitalisme-de-surveillance">« d’excès d’orgueil démontré par le capitalisme de surveillance en réponse à la pandémie de Covid-19 »</a>. Si la contre-culture américaine avait conçu les <a href="https://press.uchicago.edu/ucp/books/book/chicago/F/bo3773600.html">technologies comme une manière d’émanciper l’individu des contraintes de l’establishment</a>, <a href="https://www.liberation.fr/debats/2020/09/28/the-social-dilemma-ou-comment-des-repentis-des-reseaux-sociaux-investissent-netflix_1800737/">celles-ci sont aujourd’hui de plus en plus critiquées</a>.</p>
<p>Le surf est peut-être susceptible de prodiguer cet affranchissement, d’offrir des moments hors des radars. Selon Jérémy Lemarié : </p>
<blockquote>
<p>« Les surfeurs sont souvent présentés comme des conquérants qui voyagent au gré de leurs envies, des nouvelles vagues à découvrir, fuyant les vicissitudes de la vie moderne : […] Aujourd’hui, la mer est leur seule échappatoire dans la surpopulation et le cloisonnement de la vie moderne. L’océan est leur dernière frontière. »</p>
</blockquote>
<p>Si en 1945 Vannevar Bush présentait au gouvernement américain la <a href="https://www.nsf.gov/od/lpa/nsf50/vbush1945.htm">science comme la nouvelle frontière à conquérir</a>, il semble que son souhait ait été exaucé. Les technologies promettent en effet aujourd’hui de dépasser les limites du temps – avec <a href="https://www.calicolabs.com">l’ambition transhumaniste de tuer la mort</a> – et de l’espace, avec la conquête spatiale. Dès lors, l’océan se pose peut-être <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/le-temps-de-la-consolation-michael-f-ssel/9782021183382">comme une dernière frontière irréductible à même de consoler l’homme face au désenchantement moderne</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/156262/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yaëlle Amsallem a reçu des financements de ESCP Business School. </span></em></p>Comment s’explique l’engouement grandissant pour la pratique du surf ?Yaëlle Amsallem, Doctorante en sciences de gestion, ESCP Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1513542020-12-14T18:59:49Z2020-12-14T18:59:49ZComment la Covid-19 fait évoluer les modèles mathématiques des épidémies<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/374764/original/file-20201214-15-1nxaasb.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=20%2C14%2C1853%2C965&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Nombre de cas Covid-19 confirmés, par pays au 14 décembre 2020 (du noir au rouge puis rose et gris: : plus de 10 000 000; 1 000 000–9 999 999; 100 000–999 999; 10 000–99 999; 1 000–9 999; 100–999; 1–99; 0 ou pas de données).</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/COVID-19_pandemic#/media/File:COVID-19_Outbreak_World_Map.svg">Pharexia (original author); Ratherous, AKS471883 (contributors), Wikipédia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>En pleine pandémie mondiale de la Covid-19, après que le grand public s’est initié au nombre de reproduction et aux courbes exponentielles, certains médias ont <a href="https://www.liberation.fr/checknews/2020/06/03/les-previsions-de-ferguson-qui-ont-conduit-de-nombreux-pays-a-se-confiner-etaient-elles-fantaisistes_1790061">pu critiquer</a> les modèles mathématiques et leurs prédictions catastrophistes, auxquelles les politiques auraient tort de croire.</p>
<p>Et pourtant, les décideurs politiques ont besoin de prévisions pour prendre de graves décisions, et seuls les modèles mathématiques proposent de telles prédictions. Cela ne doit pas faire oublier que les prédictions chiffrées des modèles des épidémies sont à prendre avec beaucoup de précautions : nous tentons d’expliquer ce qui limite la fiabilité de celles-ci et comment elle progresse au fur et à mesure que l’on apprend à connaître la Covid-19.</p>
<h2>Depuis quand la seconde vague était-elle prévisible ?</h2>
<p>Si l’on regarde les données de l’épidémie depuis début mars en France, on se rend compte que l’épidémie a connu quatre phases jusqu’au début du second confinement, schématisées sur la figure ci-dessous.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/374866/original/file-20201214-17-gjdns0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374866/original/file-20201214-17-gjdns0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374866/original/file-20201214-17-gjdns0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=317&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374866/original/file-20201214-17-gjdns0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=317&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374866/original/file-20201214-17-gjdns0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=317&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374866/original/file-20201214-17-gjdns0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=398&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374866/original/file-20201214-17-gjdns0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=398&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374866/original/file-20201214-17-gjdns0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=398&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Décès quotidiens à l’hôpital en France, en échelle logarithmique, du mois de mars au 8 décembre 2020. Une croissance linéaire sur le graphique correspond donc en réalité à une croissance exponentielle, et de même pour une décroissance linéaire ; avec des temps de doublement t₂ et de division par deux t½ donnés pour les différentes phases. On remarque en particulier que le temps de doublement associé à la seconde vague pouvait être estimé dès le mois de septembre 2020. On voit également que la décrue engagée à la suite du second confinement n’a pas encore eu le temps de ramener le nombre quotidien de décès au niveau observé au mois de juin dernier.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphaël Forien</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il était clair depuis le mois de septembre environ que la croissance du nombre de cas nous conduirait vers une nouvelle crise sanitaire si elle n’était pas freinée. Si, comme nous l’expliquons plus bas, l’ampleur exacte de cette crise était difficile à prédire, elle aurait vraisemblablement été plus sévère que celle que nous avons connue au printemps.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comprendre-les-bases-des-modeles-mathematiques-des-epidemies-136056">Comprendre les bases des modèles mathématiques des épidémies</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Au printemps, le nombre de reproduction de l’épidémie a été ramené en dessous de 1 <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7524515/">grâce au confinement</a>. Aussi appelé « R effectif », le nombre de reproduction est une estimation, sur les 7 derniers jours, du nombre moyen d’individus contaminés par une personne infectée. La relative lenteur de la croissance du nombre d’hospitalisations et de décès liés au Covid-19 observée depuis le premier confinement résulte sans doute des mesures comme le port du masque, la distanciation sociale, le fait qu’en été, les gens passent davantage de temps en extérieur qu’en lieu clos, etc. </p>
<p>Cet automne, l’objectif est de ramener le nombre de reproduction de 1,4 environ à moins de 1 – alors qu’au printemps il fallait le ramener de plus de 3 à moins de 1. Cet objectif est a priori plus facile à atteindre et <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2020/11/12/covid-19-quelle-est-la-situation-de-l-epidemie-dans-les-101-departements-francais_6059504_4355770.html">explique que ce second confinement ait été efficace</a> alors qu’il est moins strict que le premier.</p>
<h2>Une troisième vague épidémique est-elle à craindre ?</h2>
<p>Pour éviter une reprise de l’épidémie et donc une nouvelle vague, il faut un moyen efficace et durable de réduction de la transmission de la maladie. Tant qu’une proportion significative de la population n’est pas immunisée (ce qu’on appelle <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32908300/">l’immunité de groupe</a>), cela passe par une diminution des contacts et l’application des gestes qui limitent la transmission de la maladie. D’après plusieurs travaux publiés, au 1<sup>er</sup> septembre 2020, <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-020-2918-0">seulement à peu près 5 % des Français avaient été touchés par le Covid-19</a>, ce qui est trop peu pour pouvoir significativement freiner l’épidémie. En effet dans ces conditions, pour que l’épidémie régresse, le R<sub>0</sub> doit se maintenir en dessous de 1,05, contre 1 si la population n’est pas immunisée. En outre, même si les vaccins bientôt disponibles s’avèrent capables d’offrir une protection durable et d’empêcher la propagation de la maladie – ce qui n’est pas encore certain puisqu’ils n’ont été testés que sur une période courte, il faudra de longs mois pour vacciner une fraction importante de la population.</p>
<p>En l’absence d’une politique stricte de test des cas contacts et d’isolation des personnes infectieuses, il est à craindre qu’à partir de janvier 2021, le nombre de reproduction remonte au-dessus de 1. Les autorités devront réagir rapidement en cas de signes de reprise de l’épidémie si elles veulent éviter une troisième vague et un troisième confinement : plus les mesures seront prises tardivement, plus elles devront rester en place longtemps afin de faire revenir le nombre quotidien de nouveaux cas en dessous d’un niveau fixé.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/covid-19-pour-eviter-dautres-confinements-les-personnes-contagieuses-doivent-sisoler-plus-rapidement-150565">Covid-19 : Pour éviter d’autres confinements, les personnes contagieuses doivent s’isoler plus rapidement</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<h2>Qu’est-ce qui limite la fiabilité des prévisions des modèles mathématiques ?</h2>
<p>Combien y aurait-il eu de morts en France si la population n’avait pas été confinée au printemps ? Plusieurs épidémiologistes ont proposé de répondre à cette question à l’aide de modèles mathématiques, mais aucun consensus ne semble émerger dans la communauté scientifique. Les prédictions de N. Fergusson, de l’Imperial College de Londres, ont parfois été <a href="https://www.nationalreview.com/corner/professor-lockdown-modeler-resigns-in-disgrace/">vertement critiquées</a> comme trop alarmistes, car fondées sur des hypothèses <a href="https://www.liberation.fr/checknews/2020/06/03/les-previsions-de-ferguson-qui-ont-conduit-de-nombreux-pays-a-se-confiner-etaient-elles-fantaisistes_1790061">trop simplistes ou irréalistes</a>. Quel crédit apporter aux chiffres avancés ? Qu’est-ce qui limite réellement leur fiabilité ?</p>
<p>La première source d’incertitude vient d’un certain nombre de paramètres que le modélisateur a besoin de connaître pour faire ses prédictions. À cet égard, l’une des principales inconnues au début de l’épidémie est le taux de létalité de la maladie, c’est-à-dire la proportion des individus infectés qui décèdent des suites de l’infection. C’est ce paramètre qui permet de déduire le nombre d’infectés à partir du nombre de décès, et donc d’en déduire la fraction de la population immunisée. La figure ci-dessous montre comment la valeur de ce paramètre affecte les prévisions des modèles concernant ce qui aurait pu se produire sans le second confinement. L’incertitude sur le taux de létalité de la maladie est un donc une source importante de variabilité dans les prédictions.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/374871/original/file-20201214-20-12gttie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374871/original/file-20201214-20-12gttie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374871/original/file-20201214-20-12gttie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374871/original/file-20201214-20-12gttie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374871/original/file-20201214-20-12gttie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374871/original/file-20201214-20-12gttie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374871/original/file-20201214-20-12gttie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374871/original/file-20201214-20-12gttie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Projection de l’évolution des décès dans les hôpitaux dans quatre régions à l’aide d’un modèle homogène sans le second confinement. Chaque courbe est calculée en supposant une valeur différente du taux de létalité, prise dans l’intervalle de confiance déterminé par de précédents travaux. Comme expliqué dans le texte, ces prédictions sont à lire avec précaution, mais on observe bien l’effet de l’incertitude concernant le taux de létalité.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphaël Forien</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>De plus, les modèles mathématiques les plus simplistes font une <em>hypothèse d’homogénéité</em>, qui veut que chaque individu contagieux infecte n’importe quel individu susceptible avec la même probabilité. Lorsqu’une proportion suffisamment importante de la population est immunisée, l’épidémie commence à décroître, car une bonne partie des gens rencontrés par un individu infectieux sont déjà immunisés, ce qui limite la propagation de la maladie.</p>
<p>Des modèles plus réalistes prennent en compte la répartition spatiale des individus, le comportement différencié des diverses classes d’âge par rapport à la maladie ou le réseau des relations sociales. Mais les individus ne sont pas tous égaux en ce qui concerne la propagation de l’épidémie. Une certaine fraction de la population a plus d’échanges sociaux que les autres. Ceux-ci auront tendance à propager l’épidémie plus rapidement que les autres, mais ils seront également infectés plus tôt en moyenne. L’épidémie croît donc plus rapidement au début, et ralentit lorsqu’une fraction importante de ces individus « super actifs » a été touchée et immunisée. Ce ralentissement est alors <a href="https://science.sciencemag.org/content/369/6505/846">supérieur à celui que l’on observerait si le même nombre d’individus choisis au hasard dans la population étaient immunisés</a>.</p>
<p>En somme, la fraction de la population qui doit être immunisée pour atteindre l’immunité collective est en fait inférieure à celle que prédit le modèle homogène. Les mathématiciens qui étudient les épidémies s’efforcent donc de modéliser au mieux l’hétérogénéité des individus au sein de la population, mais beaucoup de chemin reste à parcourir.</p>
<p>Bien que l’on ne connaisse pas les détails du modèle utilisé par Neil Ferguson, on peut donc se douter que ses prédictions étaient pessimistes. Mais de combien exactement, impossible de le dire. Sans le premier confinement en France, nos hôpitaux auraient dans tous les cas été débordés. Les mesures prises étaient-elles correctement calibrées, et adaptées à la dangerosité de cette maladie ? C’est une autre question.</p>
<p>Depuis le début de la crise sanitaire, de nombreux scientifiques se sont investis pour tenter de comprendre et de lutter contre cette épidémie, ce qui a permis de grandes avancées dans plusieurs domaines. C’est aussi le cas de la modélisation mathématique des épidémies. Même si la science avance lentement, les travaux en cours permettront à l’avenir de mieux comprendre la fiabilité des modèles mathématiques et de leurs prédictions.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/151354/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Étienne Pardoux a reçu des financements pour des missions de la chaire Modélisation Mathématique de la Biodiversité. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Raphaël Forien a reçu des financements pour des missions de l'ANR (projet RESISTE 18-CE45-0019) et de la chaire Modélisation Mathématique et Biodiversité.</span></em></p>Alors que les prédictions mathématiques peuvent sembler simplistes, elles intègrent de plus en plus d’information à mesure que notre connaissance de la Covid-19 croît.Étienne Pardoux, Professeur d'université, Institut de Mathématiques de Marseille, Aix-Marseille Université (AMU)Raphaël Forien, Chargé de Recherche, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1466462020-09-27T16:13:10Z2020-09-27T16:13:10ZComment naissent les vagues scélérates ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/359851/original/file-20200924-24-y0l5yf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C0%2C3841%2C2588&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La Grande Vague de Kanagawa, estampe japonaise d’Hokusai, vers 1830.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Tsunami_by_hokusai_19th_century.jpg?uselang=fr">Wikipédia</a></span></figcaption></figure><p>Il est difficile d’imaginer à quel point l’océan peut être violent. Émergeant soudainement de la houle environnante, ses évènements les plus extrêmes atteignent la hauteur d’un immeuble de dix étages avant de disparaître quelques dizaines de secondes plus tard. Bien que de nombreuses questions restent encore en suspens concernant ces vagues scélérates, de récentes expériences en laboratoire <a href="https://journals.aps.org/prfluids/abstract/10.1103/PhysRevFluids.5.082801">publiées</a> dans la revue Physical Review Fluids les reproduisent et identifient leur mécanisme de formation.</p>
<h2>Du folklore à l’observation in situ</h2>
<p>Les vagues scélérates ont longtemps été considérées comme relevant du mythe. En recoupant différentes sources, <a href="https://www.glerl.noaa.gov/pubs/fulltext/2007/20070019.pdf">on constate</a> qu’elles sont mentionnées depuis, au moins, le XV<sup>e</sup> siècle. Christophe Colomb ou encore l’explorateur français Dumont d’Urville assurent en avoir vu. L’académie des sciences, régulièrement mandatée pour fournir des consignes aux équipages des voyages d’exploration maritime, indique <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k29606/f380.item">dans son premier Compte rendu hebdomadaire en 1853</a> rédigé par François Arago et relatif au voyage de La Bonite :</p>
<blockquote>
<p>« Les jeunes officiers dont se compose l’état-major de la Bonite seront probablement bien surpris si nous les avertissons qu’aucun de leurs devanciers n’a résolu d’une manière complète les questions suivantes : quelle est la plus grande hauteur des vagues pendant les tempêtes ? Quelle est leur plus grande dimension transversale ? Quelle est leur vitesse de propagation ? »</p>
</blockquote>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/359847/original/file-20200924-18-tszizi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/359847/original/file-20200924-18-tszizi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/359847/original/file-20200924-18-tszizi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/359847/original/file-20200924-18-tszizi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/359847/original/file-20200924-18-tszizi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/359847/original/file-20200924-18-tszizi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/359847/original/file-20200924-18-tszizi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/359847/original/file-20200924-18-tszizi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Vague scélérate vue d’un navire marchand dans le Golfe de Gascogne vers 1940.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Wea00800,1.jpg">NOAA/Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il est maintenant possible d’identifier systématiquement ces plus grandes vagues à partir des jeux de données actuels. Pour cela, on commence par calculer la hauteur typique (dite « hauteur significative ») d’une houle, à savoir la moyenne du tiers des plus grandes amplitudes rencontrées. Toute vague au moins deux fois plus grande que cette hauteur significative est, par définition, une vague scélérate.</p>
<p>L’enregistrement le plus connu a lieu le premier janvier 1995 sur une plate-forme pétrolière en mer du Nord : entourée de vagues de typiquement onze mètres de haut, l’une d’elles atteint brusquement vingt-six mètres, heureusement sans causer de dommage notable. Des mesures similaires, effectuées par des radars ou des installations offshore, apportent régulièrement de nouveaux exemples de vagues scélérates partout autour du globe. La question n’est donc plus si de telles vagues existent, mais pourquoi elles se forment.</p>
<h2>Une approche non linéaire</h2>
<p>L’étude des vagues est, dans le cas général, un problème très complexe. Ainsi, effectuer une <a href="https://polar.ncep.noaa.gov/waves/viewer.shtml?-multi_1-NE_atlantic-">prédiction météorologique de la houle en mer</a> nécessite l’utilisation de superordinateurs et donne uniquement accès aux propriétés moyennes telles la hauteur significative. Dans les années 1980, un chercheur nommé <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Howell_Peregrine">Howell Peregrine</a> réussit cependant à trouver une solution théorique ayant les mêmes caractéristiques que les vagues scélérates, appelée depuis le « soliton de Peregrine ».</p>
<p>À première vue, un soliton de Peregrine ressemble à une vague tout à fait ordinaire, mais, à un instant et à un endroit précis, sa hauteur se voit multipliée par trois pour ensuite revenir à son niveau initial.</p>
<p>L’effet à l’origine de ce comportement remarquable est appelé « focalisation non linéaire ». Celle-ci traduit le fait qu’une vague un peu plus haute que ses voisines leur pompe de l’énergie, augmentant ainsi son amplitude au détriment de son environnement immédiat. En regardant de plus près le soliton de Peregrine, on constate qu’il comporte initialement une section imperceptiblement plus haute que le reste, qui croît avec le temps jusqu’à voir son amplitude tripler.</p>
<p>Pour mener à bien ce calcul, Howell Peregrine se limite à un modèle mathématique simple où toutes les vagues se propagent dans la même direction et sont faiblement cambrées, c’est-à-dire où la surface de l’eau reste peu inclinée par rapport à l’horizontale. Bien entendu, ces contraintes ne sont pas compatibles avec les mers déchaînées rencontrées lors des tempêtes, où des vagues se propagent dans toutes les directions et sont tellement raides qu’elles déferlent régulièrement. Il s’agit plutôt d’une houle formée par un vent régulier, les vagues étant alors selon sa direction et peu cambrées.</p>
<h2>Les premières vagues scélérates en laboratoire</h2>
<p>Ces limites d’application rendent la réalisation d’expériences en laboratoire indispensables pour déterminer à quel point cette solution mathématique est pertinente pour décrire les vagues scélérates observées dans l’océan. Celles-ci ayant des hauteurs pouvant atteindre une trentaine de mètres, cela s’annonce à première vue délicat ! Heureusement, les équations de la mécanique des fluides sont telles que des essais sur des modèles réduits permettent d’extrapoler les résultats aux échelles réelles. Ce principe est par exemple exploité pour optimiser les carènes des navires.</p>
<p>En 2011, trois chercheurs réalisent une <a href="https://journals.aps.org/prl/abstract/10.1103/PhysRevLett.106.204502">étude</a> dans un canal hydrodynamique de quinze mètres de long disposant à une extrémité d’un batteur permettant d’engendrer les vagues souhaitées. En l’occurrence, ce dernier est préparé avec la solution théorique calculée par Peregrine, de hauteur typique deux centimètres et de longueur d’onde un demi-mètre. Une onde scélérate est alors effectivement observée. Une vidéo réalisée quelques années plus tard dans des conditions sensiblement équivalentes est accessible ici pour se fixer les idées.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/i9P2M94xSyc?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Créer des vagues scélérates dans un canal artificiel, pour mieux les comprendre.</span></figcaption>
</figure>
<p>Important conceptuellement, l’application pratique de ce résultat reste limitée étant donné que ces vagues très particulières ne probablement jamais rencontrées <em>in situ</em>.</p>
<h2>D’une solution bien particulière à des vagues aléatoires</h2>
<p>Deux ans plus tard, deux mathématiciens élargissent le résultat de Peregrine et montrent que beaucoup d’ondes évoluent spontanément pour former des vagues scélérates, ressemblant lorsque leur amplitude est maximale au soliton de Peregrine. Ce résultat théorique est certes toujours limité aux vagues qui se propagent dans une seule direction et qui sont faiblement cambrées, mais leur forme peut maintenant être quelconque. L’objet mathématique décrit bien mieux les vagues rencontrées dans l’océan.</p>
<p>Une expérience se met alors en place à l’École Centrale de Nantes : nous utilisons notre <a href="https://www.ec-nantes.fr/innovation/plateformes-d%E2%80%99experimentation/bassins-oceaniques">bassin de traction</a> pour créer à une extrémité les vagues souhaitées et observer leur évolution sur près de 150 mètres, comme représentée sur la photographie ci-dessous.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/359785/original/file-20200924-20-6s1kmp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/359785/original/file-20200924-20-6s1kmp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/359785/original/file-20200924-20-6s1kmp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/359785/original/file-20200924-20-6s1kmp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/359785/original/file-20200924-20-6s1kmp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/359785/original/file-20200924-20-6s1kmp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/359785/original/file-20200924-20-6s1kmp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Bassin de traction de l’École Centrale de Nantes lors de l’étude des vagues scélérates (crédit : Éric Falcon).</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Des ondes aléatoires peu cambrées sont d’abord envoyées dans le bassin avec un batteur. Comme prédit, des vagues scélérates ressemblant à des solitons de Peregrine apparaissent au cours de la propagation. La même expérience est ensuite réalisée avec des ondes de plus grande amplitude, qui sortent alors du modèle théorique des deux mathématiciens. Des vagues scélérates sont toujours observées, mais déferlent alors rapidement et ne ressemblent plus au soliton de Peregrine. Ce résultat montre que le mécanisme de focalisation non linéaire, dont le domaine d’application était auparavant considéré comme assez restrictif, rend compte de la formation d’une grande variété d’évènements extrêmes.</p>
<p>En rapide progression ces dernières décennies, de nombreuses questions sur les vagues scélérates demeurent ouvertes. En particulier, il reste impossible de prédire, pour des conditions météorologiques données, la plus grande hauteur possible des vagues. Le constat d’Arago partagé aux officiers de La Bonite reste ainsi, presque deux siècles plus tard, plus que jamais d’actualité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/146646/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ce travail a été financé par l'agence nationale de la recherche, la Simons Foundation et le fonds européen de développement régional</span></em></p>Quand une vague un peu plus haute que ses voisines leur pompe de l’énergie, augmentant ainsi son amplitude au détriment de son environnement immédiat, on obtient une vague scélérate.Guillaume Michel, Maître de conférences, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/907142018-02-08T21:06:24Z2018-02-08T21:06:24ZL’immense potentiel des énergies marines renouvelables<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/205467/original/file-20180208-180841-1adwti5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il est possible de produire de l’électricité grâce à la houle. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/NZVtzge6ZJk">Fab Lentz/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>Il y a eu les récentes déclarations de la Banque mondiale, annonçant, à l’occasion du One Planet Summit, l’arrêt après 2019 de ses financements pour des projets d’exploitation d’hydrocarbures ; il y a eu aussi la récente décision de la France <a href="https://theconversation.com/arret-des-hydrocarbures-en-france-ne-confondons-pas-la-fin-et-les-moyens-85336">d’acter la fin</a> de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures d’ici 2040.</p>
<p>Si ces initiatives constituent des avancées certaines, elles ne reflètent malheureusement pas la réalité d’un secteur qui <a href="https://www.actu-environnement.com/ae/news/loi-hydrocarbures-hulot-permis-recherche-exploitation-petrole-30369.php4">continue de prospérer</a> à court et moyen terme.</p>
<p>En effet, non seulement aucun des pays majeurs en termes de production d’hydrocarbures n’a exprimé l’intention d’inverser la tendance, mais ce marché va en outre voir émerger de nouveaux producteurs, <a href="http://www.iris-france.org/104524-fin-des-energies-fossiles-et-environnement-energetique-international-contradiction-ou-realisme">notamment en Afrique</a>. Rappelons également que l’extraction pétrolière en mer représente un tiers de la production mondiale de pétrole, et pourrait s’accroître si les contraintes techniques et environnementales du <a href="http://boutique.lemonde.fr/atlas-de-l-eau-et-des-oceans.html">milieu marin profond</a> venaient petit à petit à être surmontées.</p>
<p>Nous savons néanmoins que les réserves de pétrole <a href="http://www.editionstechnip.com/fr/catalogue-detail/1119/dernier-siecle-du-petrole-le-la-verite-sur-les-reserves-mondiales.html">s’épuiseront d’ici à 50 ans</a> et les réserves d’uranium alimentant le nucléaire, énergie certes décarbonnée, <a href="https://www.connaissancedesenergies.org/fiche-pedagogique/reserves-d-uranium-naturel-dans-le-monde">d’ici 100 ans</a>.</p>
<p>Il n’est donc essentiel d’accélérer la transition énergétique pour lutter contre le changement climatique et pallier la fin des ressources fossiles, en soutenant notamment le développement des énergies renouvelables.</p>
<h2>Des obstacles à surmonter</h2>
<p>Parmi ces énergies renouvelables, les énergies marines méritent notre attention. Bien qu’elles ne représentent que 0,03 % du mix énergétique mondial, elles progressent de façon accélérée, parfois supérieure à 80 % l’an.</p>
<p>Elles nécessitent toutefois un réel soutien, en raison de résistances locales, des pêcheurs et des touristes, d’incertitudes quant à leurs impacts environnementaux (à l’image du <a href="https://www.connaissancedesenergies.org/afp/eolien-en-mertreport-report-de-lavis-de-lagence-pour-la-biodiversite-180129">projet éolien offshore du Tréport</a>, suspendu à l’avis de l’AFB), et surtout de leur coût qui demeure encore élevé.</p>
<p>C’est ainsi le cas pour les technologies non encore matures telles que l’éolien flottant (entre 165 et 364 €/MWh, selon les estimations de l’Ademe), l’hydrolien (entre 123 € et 571 €/MWh) ou l’énergie thermique des mers (ETM) en territoire ultra-marin (entre 200 et 510 €/MWh, selon les estimations d’EY).</p>
<p>En dépit de ces obstacles, les énergies marines renouvelables (EMR) présentent une réelle complémentarité par rapport aux énergies renouvelables terrestres, comme l’éolien et le solaire. L’espace marin, contrairement aux terres émergées, est loin d’être saturé, bien qu’il fasse l’objet de convoitises de plus en plus pressantes.</p>
<p>C’est pourquoi l’<a href="http://enb.iisd.org/download/pdf/enb2588f.pdf">ONU</a>, sur le plan international et la <a href="http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52014DC0008&from=EN">Commission européenne</a> en ont largement assuré la promotion.</p>
<p>Le potentiel théorique global des EMR est évalué à <a href="https://www.worldenergy.org/wp-content/uploads/2017/03/WEResources_Marine_2016.pdf">2 millions de Terawatt/heure</a> par an – dont un peu plus de 100 000 TWh/an sont <em>techniquement</em> exploitables –, susceptibles de satisfaire près de cinq fois la totalité de la consommation électrique mondiale. L’enjeu réside donc dans l’innovation et la maîtrise technologique permettant la mise en valeur de cette ressource considérable, diversement répartie sur la planète. À une géopolitique des ressources s’associe une géopolitique des technologies.</p>
<h2>L’éolien offshore en tête</h2>
<p>Parmi les EMR, la technologie qui présente le plus de maturité est l’<a href="https://www.eurobserv-er.org/barometre-eolien-2017/">éolien offshore</a>, marché dominé par l’Union européenne, avec une capacité de 12,4 GW qui représente plus de 90 % de l’ensemble du parc éolien mondial et qui lui permet de fournir 42 des 50 TWh de la production mondiale actuelle de l’ensemble des EMR.</p>
<p>Le marché de l’éolien offshore devrait représenter <a href="https://windeurope.org/wp-content/uploads/files/about-wind/reports/Wind-energy-in-Europe-Scenarios-for-2030.pdf">70 GW de capacité installée</a> dans l’UE d’ici 2030.</p>
<p>Quel sera toutefois l’impact du Brexit sur la réalisation de ces objectifs, sachant que le leader sur ce marché est le Royaume-Uni, devant l’Allemagne, le Danemark et la Belgique, sans parler de la France, dont aucun littoral n’est à ce jour doté de tels équipements. Elle pourrait toutefois rattraper son retard, si l’on en croit la feuille de route fixée par la commission éolien offshore du SER (Syndicat des énergies renouvelables), à savoir <a href="http://www.enr.fr/userfiles/files/Brochures%20Eolien/SER_feuillederouteSEReolienenmer2030.pdf">15 GW d’ici 2030</a>.</p>
<p>Quoi qu’il en soit, et quelle que soit la forme de son futur partenariat avec l’UE (Adhésion à l’EEE, à l’AELE ou autre accord de libre-échange), le Royaume-Uni devrait continuer à participer activement à l’élaboration de l’Union de l’énergie, notamment à travers les <a href="http://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/STUD/2017/614181/IPOL_STU%282017%29614181_EN.pdf">projets d’interconnexions</a>.</p>
<p>L’Union européenne est, en outre, concurrencée par la Chine. Avec un même objectif de 70 GW d’ici 2030, celle-ci ambitionne néanmoins près de <a href="https://www.iea.org/publications/freepublications/publication/china_wind.pdf">200 GW d’ici 2050</a>, bien davantage que les <a href="https://www.boem.gov/National-Offshore-Wind-Strategy/">États-Unis</a> (22 GW pour 2030 et 86 GW d’ici 2050).</p>
<h2>En outre-mer</h2>
<p>L’Union européenne a donc intérêt à développer les autres EMR, telles que l’énergie des courants et des vagues, mais aussi l’énergie thermique des mers (ETM), celle-ci étant localisée en outre-mer.</p>
<p>L’UE devrait ainsi pouvoir compter sur la France pour valoriser son immense domaine maritime sur le plan énergétique. En effet, 97 % des <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/zone-economique-exclusive-zee">ZEE</a> françaises sont situées en outre-mer, où l’objectif affiché de la France est d’atteindre une totale autonomie énergétique en 2030 (comme le fixe l’<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000023983208&idArticle=LEGIARTI000031063168">Article L100-4</a> I 8° du code de l’énergie).</p>
<p>Pour y parvenir, la France a donc <a href="https://www.energiesdelamer.eu/publications/1724-20energie-thermique-des-mers-un-retour-en-force">intérêt à investir dans l’ETM</a>, cet investissement pouvant être valorisé sur les marchés d’exportation et aussi grâce à une coopération avec les petits États insulaires voisins de ses territoires du Pacifique, des Caraïbes et de l’océan Indien, tels Fidji, Les Seychelles, ou Maurice.</p>
<hr>
<p><em>Pour aller plus loin : <a href="http://www.iris-france.org/wp-content/uploads/2017/11/ProgClimat-Energie-bleue-nov-17.pdf">De l’énergie noire à l’énergie bleue</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/90714/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Séverine Michalak ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les énergies marines ne représentent aujourd’hui que 0,03 % du mix énergétique mondial.Séverine Michalak, Enseignante-chercheuse, docteure en droit, Université Côte d’AzurLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.