tag:theconversation.com,2011:/id/topics/amour-22900/articlesamour – The Conversation2024-02-12T16:10:53Ztag:theconversation.com,2011:article/2224412024-02-12T16:10:53Z2024-02-12T16:10:53ZApplications de rencontres : comment en faire bon usage<p>Les rencontres amoureuses peuvent s’accompagner de nouveaux défis, et sont parfois source de frustration. Par le passé, les relations étaient souvent <a href="https://www.ucpress.edu/ebook/9780520917996/consuming-the-romantic-utopia">arrangées par les familles et guidées par les normes sociétales</a>, ce qui limitait les options mais nous épargnait le supplice lié à la nécessité de faire des choix. Aujourd’hui, les célibataires ont à leur disposition une infinité de partenaires potentiels. Une étude réalisée en 2019 par le Pew Research Center a montré que les couples qui se sont rencontrés en ligne sont <a href="https://www.pewresearch.org/short-reads/2019/06/24/couples-who-meet-online-are-more-diverse-than-those-who-meet-in-other-ways-largely-because-theyre-younger/">plus diversifiés</a>, que ce soit en termes de revenus, d’éducation, d’orientation politique ou d’appartenance ethnique.</p>
<h2>Le coût de la liberté</h2>
<p>Selon le <a href="https://www.amazon.fr/Escape-Freedom-Erich-Fromm/dp/0805031499">psychanalyste Erich Fromm</a>, la liberté peut parfois susciter un sentiment d’impuissance, voire d’isolement. Notre équipe de chercheurs en marketing explore le monde des rencontres en ligne pour déterminer dans quelle mesure le marché des rencontres amoureuses, qui s’appuie sur des principes de liberté et de choix infinis, s’étend à tous les aspects de la vie humaine. Nos <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/0267257X.2022.2033815">recherches révèlent</a> que les sentiments d’anxiété et de frustration des utilisateurs découlent d’un conflit entre la perception de la marchandisation des relations et les valeurs sociétales.</p>
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<p>Certains participants à l’étude ont qualifié les rencontres en ligne d’« épuisantes », exprimant l’espoir de pouvoir « enfin » terminer le processus. Didier, un ingénieur de 51 ans vivant à Paris, qualifie les rencontres en ligne de « manipulation de masse » ; Ella, une rédactrice de 25 ans, déclare qu’au début, les rencontres en ligne étaient « excitantes et nouvelles », mais qu’au fil du temps, elle a trouvé l’expérience déprimante.</p>
<p>Alors pourquoi, face aux promesses d’options amoureuses illimitées, avons-nous parfois l’impression que l’amour a tendance à s’éloigner ?</p>
<h2>La modernité « liquide » et la montée du capitalisme émotionnel</h2>
<p>Dans son livre <a href="https://www.amazon.fr/Liquid-Love-Frailty-Human-Bonds/dp/0745624898"><em>L’amour liquide</em></a>, le sociologue britannique Zygmunt Bauman affirme que le monde moderne a inauguré l’ère de « l’individu sans attaches », qui privilégie la liberté et la flexibilité à l’attachement. Cela a transformé les notions traditionnelles d’amour et de relations en des formes plus éphémères et « liquides ».</p>
<p>La sociologue franco-israélienne Eva Illouz <a href="https://www.fnac.com/a5926310/Eva-Illouz-Why-love-hurts">fait écho à ces observations</a>, affirmant que nos sociétés capitalistes d’aujourd’hui sont confrontées à de nouveaux défis en raison de l’évolution des normes et des valeurs. Certes, nous avons désormais un plus grand contrôle de nos vies amoureuses et nous pouvons aspirer à une plus grande égalité entre les sexes. Mais les injonctions sociales continuent de véhiculer des normes irréalistes en matière d’amour, ce qui n’encourage pas à s’investir dans le travail émotionnel nécessaire à l’établissement de liens plus profonds.</p>
<h2>Des valeurs mal alignées</h2>
<p>Dans le cadre des rencontres en ligne, que se passe-t-il lorsque les valeurs ou les attentes de deux personnes en matière de relations amoureuses ne sont pas les mêmes ? Comme le montre notre <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/0267257X.2022.2033815">étude</a>, ces décalages peut être source de frustration. Par exemple, un participant peut être à la recherche d’une relation à long terme, tandis qu’un autre est plus intéressé par des relations occasionnelles ou par l’élargissement de ses horizons. Tous deux perçoivent alors les actions de l’autre comme inappropriées.</p>
<p>Mark, un consultant en gestion de 26 ans, fait part de son sentiment de frustration lorsque les femmes qu’il a rencontrées sur une application voulaient se connecter avec lui sur les médias sociaux ou l’appeler fréquemment, car il préférait établir des limites. En revanche, Alice, une administratrice de 54 ans, déclare que certains des hommes qu’elle a rencontrés en ligne n’étaient souvent pas clairs quant à leur état civil. Elle a même mis au point des techniques pour savoir si un partenaire potentiel était en couple, par exemple s’il raccrochait le téléphone très rapidement ou payait toujours en liquide.</p>
<p>Il arrive même que ces désirs contradictoires traversent une seule et même personne : elle peut aspirer à l’engagement, à la confiance et à la proximité, tout en ne voulant pas ou en ne pouvant pas renoncer au choix illimité de partenaires. Derek, un entrepreneur de 38 ans, a réfléchi à l’écart entre ses attentes en matière de relations et son expérience des rencontres en ligne :</p>
<blockquote>
<p>« Pour moi, les relations à long terme sont une question de valeurs – de valeurs humaines. Mais si j’ai un rendez-vous et que le lendemain matin, avec un nouveau profil, je me dis “Oh, super”, et la personne que j’ai vu hier soir se retrouve en bas de la liste. »</p>
</blockquote>
<p>Ce décalage peut conduire à des expériences négatives, à de mauvais traitements, voire à des abus en ligne. Rose, maître de conférences de 23 ans, déclare que les rendez-vous galants lui font peur en raison des « histoires horribles » qu’elle a entendues. En effet, les récits d’autres participants à l’étude (dont nous avons choisi de taire les noms) font état d’expériences allant de la détresse au traumatisme, y compris des agressions verbales, des rencontres avec des personnes qui ne ressemblent pas du tout à leur photo, et même une agression sexuelle commise par une personne utilisant un faux profil.</p>
<h2>La gamification des rencontres</h2>
<p>Le cadre social désinstitutionnalisé des rencontres en ligne peut conduire à des situations où il n’y a parfois que peu ou pas de liens sociaux partagé entre les partenaires. Les personnes rencontrées en ligne sont perçues comme moins « réelles » que celles rencontrées par l’intermédiaire d’amis ou de membres de la famille. Ce rapport déformé de la réalité peut rendre les comportements moins prévisibles, car il n’y a pas de sanctions spécifiques pour ce qui serait normalement considéré comme un comportement contraire à l’éthique.</p>
<p>Si de nombreux participants à l’étude apprécient le choix offert par les applications de rencontres, certains hésitent à dire qu’ils les utilisent – ou prétendent qu’ils n’y ont recours que de manière exceptionnelle. La peur du jugement social est encore très présente : certaines personnes se disent que si elles trouvent un partenaire de cette manière, les membres de leur cercle social se diront qu’il s’agit d’un échec, parce qu’elles n’ont pas réussi à trouver un partenaire dans la « vraie vie » par des moyens traditionnels.</p>
<p>L’incertitude survient lorsque nous ne sommes pas sûrs des codes en vigueur et des résultats de nos interactions sociales. Cela peut se produire lorsque le cadre dans lequel se déroule l’interaction n’est pas bien défini. Comme les termes de la relation ne sont pas clarifiés, les deux parties se sentent vulnérables et préfèrent ne pas trop s’ouvrir pour éviter d’être potentiellement blessées. Les codes de communication sont également souvent peu clairs, ce qui donne lieu à de <a href="https://www.reddit.com/r/OnlineDating/">multiples discussions dans les communautés en ligne</a>, où les utilisateurs demandent des conseils pour expliquer les comportements de leurs partenaires.</p>
<h2>Quelques stratégies de survie</h2>
<ul>
<li>Choisissez l’authenticité.</li>
</ul>
<p>Si vous utilisez une application de rencontre, envisagez une stratégie audacieuse : l’authenticité. L’autopromotion, c’est bien, c’est même nécessaire, mais la conviction, le réalisme et l’honnêteté le sont tout autant. De cette façon, vous pouvez essayer de rencontrer des partenaires qui vous voient comme la personne que vous êtes et non comme celle que vous projetez. Choisissez des photos flatteuses et mettez en valeur vos traits de caractère, mais montrez aussi vos convictions et votre vraie personnalité.</p>
<ul>
<li>Utilisez les fonctions de l’application pour affiner votre choix</li>
</ul>
<p>Lorsque vous cherchez une relation en ligne, il est important de tirer le meilleur parti des ressources disponibles, afin de ne pas passer à côté de connexions potentielles. Pensez à utiliser des filtres et des outils de recherche pour affiner votre recherche de partenaires compatibles. Précisez vos préférences, telles que l’âge, le lieu de résidence et les centres d’intérêt communs, afin d’augmenter vos chances de trouver une relation sérieuse.</p>
<ul>
<li>Appréciez les petites choses</li>
</ul>
<p>Il est essentiel d’adapter votre approche et de redéfinir ce qui a de la valeur dans ce contexte unique. Au lieu de juger le succès à l’aune d’un seul critère, envisagez de le redéfinir pour y inclure d’autres aspects – par exemple, des conversations enrichissantes ou des intérêts partagés. Cette flexibilité vous permettra de recalibrer vos attentes et de découvrir la valeur de votre expérience de l’application, même si elle ne correspond pas à vos objectifs initiaux. L’amour se construit sur des émotions partagées.</p>
<ul>
<li>Parlez, mais écoutez aussi</li>
</ul>
<p>N’ayez pas peur de discuter de vos attentes avec des partenaires potentiels. Plus important encore, lorsqu’une personne dit qu’elle ne cherche pas une relation sérieuse, croyez-la, plutôt que d’essayer de la changer ou d’espérer qu’elle revienne sur sa décision. Montrez-lui que vous l’écoutez et que vous ne vous contentez pas d’émettre des idées préconçues.</p>
<ul>
<li>Continuez à explorer, mais sachez quand vous arrêter</li>
</ul>
<p>Enfin, n’abandonnez pas. Les rencontres en ligne étant de mieux en mieux acceptées, un nombre croissant de personnes trouvent de vraies relations en ligne. Malgré tous les obstacles, <a href="https://www.pewresearch.org/internet/2020/02/06/the-virtues-and-downsides-of-online-dating/">plus de 12 % des mariages</a> commencent en ligne, selon une étude du Pew Research Center. Considérez les applications de rencontres non pas comme une recherche sans fin, mais comme un moyen de parvenir à une fin – et potentiellement à une fin heureuse.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222441/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les applications de rencontre sont de plus en plus utilisées et offrent une multitude de choix. Mais face à tant d’options, certains utilisateurs peuvent se sentir dépassés et épuisés.Alisa Minina Jeunemaître, Associate Professor of Marketing, EM Lyon Business SchoolJamie Smith, Director of Undergraduate Programmes, ISC Paris Business SchoolStefania Masè, Associate professor of marketing and communication, IPAG Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2189542023-12-14T19:11:09Z2023-12-14T19:11:09ZTéléfilms de Noël : les recettes de leur succès au long cours<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/565157/original/file-20231212-23-3tf6ve.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C0%2C988%2C664&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">_Falling for Christmas_, téléfilm de Noël diffusé sur Netflix.</span> <span class="attribution"><span class="source">Netflix</span></span></figcaption></figure><p>Alors que la nuit tombe plus tôt, que les rues, vitrines et monuments s’illuminent de mille feux et que les traditionnels marchés s’installent au cœur des bourgs, Noël envahit également l’intérieur des habitations, des décorations aux petits écrans. En effet, comme le chantait <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Rct7_aMc5B8">Billy Mack</a> dans le désormais culte <a href="https://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=44445.html"><em>Love Actually</em></a>, « Christmas is all around », y compris à la télévision.</p>
<p>Les « films de Noël » ne sont pas nouveaux : ils existent dès la fin du <a href="https://www.brut.media/fr/entertainment/tout-ce-qu-il-faut-savoir-sur-les-films-de-noel-e5ccd9ce-ca1b-4cfe-9468-c19a72a2a054">XIX<sup>e</sup> siècle</a> et arrivent en France au tout début du XX<sup>e</sup> siècle (avec notamment <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Dc3ei1tseeM"><em>Santa Claus</em></a> de George Albert Smith, en 1898). Parmi les plus iconiques, on compte <em>Maman j’ai raté l’avion</em> (1990), <em>Love Actually</em> (2003), <em>The Holiday</em> (2006), ou les diverses adaptations des contes et histoires de Noël (<em>Le Grinch</em>, par exemple).</p>
<p>En plus d’un siècle d’histoire, ils ont bien entendu évolué au gré des époques et des technologies. Si les films de Noël existent toujours, ces dernières décennies ont vu le succès d’un autre format : les téléfilms de Noël. Ces derniers sont produits uniquement pour la télévision, et donc sont soumis à une production différente, généralement bien moins onéreuse. Ils se distinguent aussi par des codes narratifs bien précis empruntés aux comédies romantiques – les décorations de Noël en plus – qui en font des objets emblématiques de la période des fêtes.</p>
<h2>Un scénario cousu de fil blanc</h2>
<p>En général, l’histoire suit une jeune femme carriériste vivant dans une grande ville ; elle rencontre un problème qui la contraint à se rendre dans une petite bourgade pour les fêtes, où elle va rencontrer un homme. Sur place, les habitants et le protagoniste masculin, baignés dans une ambiance festive traditionnelle, l’aident à résoudre son problème, l’incitant ainsi à changer de vie et à s’installer dans la bourgade où elle a passé Noël… avec l’homme en question.</p>
<p>Parmi les instigateurs de ces codes bien connus de tous les amateur de ces téléfilms, on compte la chaîne américaine Hallmark, filiale de Hallmark Cards, la plus grande entreprise de cartes de vœux américaine. A l’origine, les films produits par la chaîne Hallmark avaient pour but de rappeler aux téléspectateurs que le temps était venu d’envoyer des cartes de vœux.</p>
<p>Les valeurs de Noël représentées dans les téléfilms appellent au partage et à la générosité, tentant ainsi d’inciter leurs publics à promouvoir les mêmes valeurs dans leur vie quotidienne. La chaîne Hallmark elle-même était, avant de devenir Hallmark, une chaîne religieuse (The Faith and Values Channel), puis une chaîne centrée sur la famille (Odyssey Network).</p>
<p>Cette orientation vers des programmes pour la famille s’est intensifiée après le rachat d’Odyssey par Hallmark, ce qui explique le côté conservateur de ses productions mais aussi l’aspect marketing, toujours présent derrière ces programmes saisonniers. La chaîne Hallmark diffuse dès le début des années 2000 ses premiers films de Noël et <a href="https://www.brut.media/fr/entertainment/tout-ce-qu-il-faut-savoir-sur-les-films-de-noel-e5ccd9ce-ca1b-4cfe-9468-c19a72a2a054">lance en 2009 son « Countdown to Christmas », une programmation spéciale de fin octobre au 1<sup>er</sup> janvier »</a>, établissant la diffusion saisonnière des téléfilms de Noël. Hallmark est par ailleurs un des plus grands producteurs de téléfilms de Noël, avec plus de <a href="https://www.brut.media/fr/entertainment/tout-ce-qu-il-faut-savoir-sur-les-films-de-noel-e5ccd9ce-ca1b-4cfe-9468-c19a72a2a054">300 films diffusés depuis 2009 et près de 40 nouveaux films produits et diffusés chaque année</a>.</p>
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<p>Ces téléfilms sont le fruit d’un simple calcul : un téléfilm de Noël Hallmark est produit pour environ <a href="https://thesciencesurvey.com/arts-entertainment/2022/01/13/the-hallmark-movie-popularity-paradox/">800 000 $ en trois mois</a> (contre plusieurs millions de dollars et plus d’un an pour un film classique) tout en étant extrêmement rentable, lors de la diffusion américaine (les annonceurs plébiscitent ces productions de fin d’année) et de la vente de ces téléfilms à l’international.</p>
<p>Les téléfilms Hallmark jouissent d’un succès certain, rassemblant plusieurs millions de téléspectateurs devant leur écran. De fait, Hallmark était en 2020 une des chaînes américaines les plus regardées.</p>
<h2>En France aussi</h2>
<p>Mais les téléfilms de Noël se sont également démocratisés en France ces dernières années. TF1 diffuse quotidiennement <a href="https://www.allocine.fr/article/fichearticle_gen_carticle=1000047293.html">2 téléfilms de Noël</a> à partir de fin octobre. Les téléspectateurs français peuvent également trouver des films de Noël sur les plates-formes de replay My TF1 (dans la section <a href="https://www.tf1.fr/tf1/telefilms-de-noel">Les Films de Noël</a>) et M6 Replay (dans la section <a href="https://www.6play.fr/6play/-telefilms-de-noel-6play-f_1317">Téléfilms de Noël</a>).</p>
<p>Depuis plusieurs hivers, les téléfilms de Noël sont également devenus des incontournables des plates-formes de streaming telles que Netflix, qui s’est lancé dans la production de téléfilms et séries de Noël depuis 2017. Ces productions, parmi lesquelles on peut citer <em>A Christmas Prince</em> (2017), <em>The Princess Switch</em> (2018), <em>A Castle for Christmas</em> (2021) ou <em>The Noel Diary</em> (2022), rencontrent un succès indéniable. Sous forme de téléfilm ou de séries, ces réalisations reprennent les codes bien connus des films de Noël, tout en tentant d’actualiser le genre, avec plus de diversité dans les castings et la production de films de Noël LGBTQ-<em>friendly</em> par exemple (<em>Happiest Season</em>, 2020, <em>Single All the Way</em>, 2021).</p>
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<p>On l’a bien compris, à partir du 1<sup>er</sup> novembre, il n’est plus possible d’échapper à ces productions kitsch et pleines de bons sentiments. Comme l’écrit <a href="https://www.20minutes.fr/television/4006934-20221024-telefilms-noel-arrivent-automne-nouveau-printemps-demain?utm_term=Autofeed&xtref=twitter.com&utm_medium=Social&utm_source=Twitter&fbclid=IwAR2an9RyYBO-FiLZ620jilY9jYjpOVIAk9awU3XL_L47tITojOYCCqjxwvU#Echobox=1666630466">Maxime Fettweis</a>, « désormais incontournables, ces productions américaines se sont fait une place de choix dans le catalogue des rituels de Noël ». Celles-ci enchantent autant qu’elles agacent : pour certains téléspectateurs, ces productions codifiées et prévisibles sont insupportables, alors qu’elles font chaque année le bonheur d’autres publics, inconditionnels du genre. Qu’on les aime ou qu’on les déteste, les téléfilms de Noël ne laissent personne indifférent. Mais quelles sont les raisons de leur succès ?</p>
<h2>Un rendez-vous réconfortant</h2>
<p>Un des premiers facteurs de succès des téléfilms de Noël, c’est leur temporalité : ces productions ne sont diffusées qu’à une période de l’année, entre fin octobre et début janvier. Ce sont donc des produits « de saison », dont les spectateurs ne peuvent profiter qu’à une période donnée et pendant un laps de temps déterminé.</p>
<p>Outre leur saisonnalité, les téléfilms de Noël sont également un divertissement qui arrive à point : novembre rime généralement avec pluie et froid, alors que décembre est le plus souvent une période effrénée et stressante de planification des achats de Noël et d’organisation des fêtes de famille. Que ce soit contre la grisaille de novembre ou la frénésie de décembre, les téléfilms de Noël apportent <a href="https://thesciencesurvey.com/arts-entertainment/2022/01/13/the-hallmark-movie-popularity-paradox/">optimisme</a> et réconfort, et présentent une vision positive des fêtes de fin d’année.</p>
<p>Autre raison de leur succès, ces téléfilms en appellent à la <a href="https://thesciencesurvey.com/arts-entertainment/2022/01/13/the-hallmark-movie-popularity-paradox/">nostalgie</a> des téléspectateurs à l’égard de la période de Noël. Par le biais de poncifs liés à la période des fêtes, ils convoquent des souvenirs et soulignent ce qui en fait une période magique – ou offrent l’occasion de la fantasmer ou de l’idéaliser. À cet égard, les téléfilms de Noël sont une véritable madeleine de Proust permettant un retour en enfance. Les spectateurs voient à nouveau Noël à hauteur d’enfant, avec ses lumières, sa magie et sa chaleur humaine – ou peuvent se lover dans cet imaginaire stéréotypé, quand bien même Noël n’a jamais ressemblé à cela pour eux. Ces productions se veulent un plaisir réconfortant qui garantit une déconnexion avec les problèmes du quotidien.</p>
<h2>Des valeurs conservatrices et rassurantes</h2>
<p>Les téléfilms de Noël mettent également en avant des valeurs conservatrices qui peuvent être rassurantes : la famille, la communauté, la solidarité, l’amitié, la loyauté. Ces « bons sentiments » qui peuvent faire paraître ces films mièvres sont également ce qui les rendent attrayants : ils ne sont pas engagés politiquement (même s’ils sont sous-tendus par une idéologie conservatrice), non clivants, et ne traitent pas de sujets controversés. Ce sont des téléfilms qui se veulent <a href="https://www.wgfoundation.org/blog/2022/12/6/hallmark-christmas-movies">consensuels</a>, qui rassemblent en rappelant les valeurs idéales d’une société utopique. Dans ces productions, les valeurs américaines conservatrices ont la part belle, et subliment la vie dans les petites villes, le travail manuel et les petits bonheurs quotidiens, par opposition à la représentation des citadins-cols blancs carriéristes et égocentriques. Ces téléfilms mettent aussi l’accent sur le fait qu’il n’y a pas besoin d’aller loin pour trouver le bonheur, dans une vision rassurante et un « retour aux vraies valeurs » qui trouve un écho aux États-Unis et au-delà.</p>
<h2>Un divertissement pour toute la famille</h2>
<p>Enfin, les téléfilms de Noël sont des produits divertissants par leur simplicité de compréhension. Ils ne requièrent pas une grande attention, s’adressent à tous, petits et grands, et permettent ainsi de rassembler toute la famille. Les scénarii cousus de fil blanc permettent de s’adonner à d’autres activités en parallèle tout en créant une ambiance de Noël.</p>
<p>C’est ce <a href="https://www.vogue.com/article/hallmark-christmas-movies">qu’affirmait Bill Abbott</a>, alors dirigeant de Crown Media Family Networks, la maison mère de la chaîne Hallmark, lorsqu’il déclarait : « Notre but est de créer une expérience où on peut allumer la télévision, se sentir bien, et cuisiner, décorer ou faire une activité en lien avec les fêtes qui met dans l’esprit de Noël. » Les téléfilms de Noël ne sont donc pas des films faits pour être appréciés pour leur qualité cinématographique, mais l’équivalent télévisuel d’un feu de cheminée, appréciés pour leur valeur symbolique et leur capacité à fédérer. Ils parlent à toutes les générations et ainsi unissent la famille devant la télévision, que ce soit pour profiter du film… ou pour s’en moquer.</p>
<p>Qu’on les aime ou qu’on les déteste, les téléfilms de Noël font à présent bien partie du paysage médiatique français. Ce genre codifié et rassurant, fortement ancré dans les valeurs traditionnelles américaines, a su trouver son public en France. Au-delà des téléfilms américains, les plates-formes de streaming comme Netflix ont permis une plus grande diversification des productions de Noël, avec l’apparition de téléfilms et séries de Noël <a href="https://www.allocine.fr/series/ficheserie_gen_cserie=28716.html">français</a>, <a href="https://www.programme-tv.net/news/cinema/290161-aux-antipodes-de-noel-netflix-devoile-un-nouveau-film-de-noel-a-laccent-espagnol/">espagnols</a> ou <a href="https://www.allocine.fr/series/ficheserie_gen_cserie=25431.html">norvégiens</a> qui adaptent le genre aux spécificités culturelles européennes. Un premier pas vers de nouvelles représentations ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218954/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julie Escurignan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Qu’on les aime ou qu’on les déteste, les téléfilms de Noël font à présent bien partie du paysage médiatique français. Mais pourquoi séduisent-ils autant ?Julie Escurignan, Enseignante chercheuse en Communication & Marketing, Responsable du Master Creative & Cultural Industries Management, Pôle Léonard de VinciLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2186442023-11-30T16:48:07Z2023-11-30T16:48:07Z« Le cerveau du jugement est inhibé au moment de la passion amoureuse. » Conversation avec Bernard Sablonnière<p>_Professeur émérite de biologie moléculaire et de biochimie, médecin biologiste, chercheur, Bernard Sablonnière est aussi auteur de plusieurs ouvrages sur les maladies du cerveau. Lors de son passage aux Tribunes de la presse 2023, il a évoqué les mécanismes biologiques de la passion amoureuse, des hormones et neurotransmetteurs impliqués jusqu’aux effets sur le cerveau et le comportement. _</p>
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<p><strong>Considérez-vous avoir la passion de la transmission et du partage ? Est-ce que transmettre vos connaissances est ou était un impératif pour vous dans votre métier ?</strong></p>
<p><strong>Bernard Sablonnière</strong> : Je crois que oui. J’ai commencé ma carrière de professeur de médecine en 1993, il y a longtemps et tout de suite, j’ai eu des amphithéâtres remplis de 600 étudiants en première et deuxième année de médecine. À force de faire de la transmission un peu trop académique, j’ai essayé d’améliorer ma pédagogie afin d’être un bon professeur qui transmet bien avec beaucoup d’exemples. Cela m’a incité, plusieurs années plus tard, à mettre en forme mon expérience sous forme de livre grand public. Mon premier livre s’appelait « L’odyssée moléculaire » et en tant que biochimiste, j’y racontais tout un tas de molécules du vivant. Et puis après, j’en ai écrit d’autres.</p>
<p><strong>À propos de la passion amoureuse, quelles sont les mécaniques cérébrales à l’œuvre lorsqu’on tombe amoureux ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : Il y a encore beaucoup de mystères autour du fonctionnement de ce sentiment d’amour chez l’homme. Mais l’étude du fonctionnement du cerveau nous a déjà apporté des éléments de compréhension, nous avons quelques clés chimiques dans le cerveau qui permettent aux neurones de communiquer entre eux. Ces clés sont au nombre de sept ou huit, mais expliquent 90 % des comportements chez l’homme. Dans certaines régions du cerveau, la dopamine est l’hormone de l’envie, du désir et au sujet de la passion, c’est elle qui va être le moteur chimique des informations.</p>
<p><strong>Quels sont les éléments qui vont déclencher la dopamine ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : C’est tout le mystère du déclenchement de l’envie. Nous avons évidemment des besoins vitaux : boire, se nourrir, dormir. Mais d’un point de vue anthropologique, ce n’est pas très romantique, le besoin de se reproduire est aussi inscrit dans le cerveau humain. Dans son évolution, l’espèce humaine a développé le cerveau limbique – le cerveau émotionnel –, et tout autour du cerveau reptilien – le cerveau du système instinctif. C’est pour essayer de donner à l’homme cette capacité de développer des comportements extrêmement spécialisés pour initier cette envie de se reproduire. D’où la complexité de l’amour d’ailleurs. </p>
<p>Il existe des gens qui ne tombent jamais amoureux, qui n’ont jamais de relations sexuelles. Cela peut être en raison de freins dans le cerveau liés à une éducation, un traumatisme dans l’enfance, etc., qui font que certains comportements sont inhibés complètement. Cela arrive, mais ce sont des circonstances pathologiques. Mais l’envie d’amour, l’envie de relation avec une ou un partenaire est finalement un besoin quasiment vital.</p>
<p><strong>Quelles réactions, chimiques et corporelles, le déclenchement de la dopamine va-t-il provoquer ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : La dopamine est responsable de la passion, un accélérateur extrêmement fort. Il faut que la relation aboutisse. L’espèce dit au cerveau « il faut que certains comportements marchent, sinon l’espèce va disparaître ». Le cerveau du jugement est inhibé au moment de la passion amoureuse ; la pensée du partenaire nous obsède et domine notre vie. Cela est dû à un déséquilibre des accélérateurs et des freins dans le cerveau. On est stressé au début, on ne mange plus, on ne dort plus… c’est la noradrénaline. Mais elle dure peu de temps. </p>
<p>Dès que la dopamine, hormone du désir, prend le dessus, débute le moment où nous sommes obnubilés par la passion. Lorsque la relation va commencer, si bien sûr il n’y a pas d’échec après, le cerveau va ensuite chercher à retrouver un équilibre entre les accélérateurs et les freins. La sérotonine, hormone régulatrice, va contribuer à baisser les hormones du stress. La libération de l’ocytocine survient ensuite et va permettre l’attachement. Les anthropologues considèrent que ce fonctionnement hormonal est fait pour permettre à la formation d’un couple de durer au moins deux/trois ans. Dans l’évolution de l’espèce, le cerveau a calibré ça avec une forte sécrétion d’ocytocine à ce moment-là pour permettre éventuellement à un bébé de naître et pour qu’il puisse être sevré dans de bonnes conditions.</p>
<p><strong>À partir de quel moment peut-on vraiment parler de passion, est-ce le cœur ou le cerveau qui décide ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : Le cœur n’a aucun rôle, c’est juste une pompe. Mais il est souvent associé à l’amour car il s’agit d’un organe exprimant très fortement les émotions et sensible à ces hormones stressantes telles que la noradrénaline, à l’origine des palpitations. Mais ces réactions cardiaques servent simplement à alerter le cerveau qu’une réaction corporelle se met en jeu. Le cerveau interprète ensuite l’émotion pour la traduire en quelque chose de plus mental, d’exprimable qu’est le sentiment. La phase de passion peut être déréglée chez certaines personnes. Dans les relations amoureuses, les gens peuvent continuer d’avoir une vie normale en dehors des périodes où ils sont avec l’être aimés. D’autres sont obsédés, à un niveau compulsionnel. C’est un déséquilibre entre les accélérateurs et les freins et ça dépend génétiquement de la façon dont le cerveau s’est créé puis s’est construit, et si on a des récepteurs ou des transporteurs de dopamine plus ou moins actifs dans notre cerveau.</p>
<p><strong>Comment est-il possible d’entretenir la passion ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : Tous les couples savent que si on veut remettre un peu de sel dans sa relation il faut innover. Il faut trouver des nouvelles situations où on va susciter un désir qui donnera un plaisir qui n’est pas connu chez le partenaire. Ne pas toujours lui acheter le même parfum, l’emmener dans le même resto… Il faut être plus spontané. Lorsque le cerveau se trouve face à une situation d’activation du circuit de désir-plaisir qu’il ne connaît pas, ça peut susciter une perception de plaisir qui est d’une intensité plus forte. Il faut donc varier les plaisirs. Et souvent je dis « petit désir, petit plaisir ». Si vous voulez augmenter l’intensité du plaisir, il faut essayer de changer la circonstance qui mène à cette activation de l’envie.</p>
<p><strong>Ces mécanismes que nous avons évoqués pour la passion amoureuse s’appliquent-ils aussi aux passions pour une activité comme que l’art, la musique… aux domaines matériel et immatériel finalement ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : Oui, car la passion est une envie d’intensité extrêmement forte. On va concentrer cette énergie sur cette activité-là et on va délaisser les autres. C’est cela le caractère passionnel, un peu compulsif. On va peut-être même se fatiguer, mais on aime ça parce qu’on perçoit ce plaisir et à ce moment-là, ça devient un peu comme une drogue. Cela correspond à la passion de la suractivité. On trouve aussi ce mécanisme chez un certain nombre d’hommes de pouvoir ou d’hommes politiques qui suractivent leur envie de tout. Et cela se termine par une envie de dominer qui est liée à une perception du plaisir assez importante.</p>
<p><strong>Que se passe-t-il dans notre cerveau lors d’une rupture ?</strong></p>
<p><strong>B. S</strong> : La rupture est un état de manque extrêmement instantané. Dans le circuit désir-récompense, un désir est émis mais la récompense n’arrive pas et le cerveau n’aime pas du tout ça, car le désir n’est pas calmé. Très vite, l’axe du stress est activé. Le cerveau envoie un signal à la petite région du cerveau appelée l’amygdale, qui se dit « ça y est, j’ai une émotion négative très forte. Je dois donner une alerte à l’ensemble du corps comme quoi ça ne marche plus ». Les hormones du stress – le cortisol – sont activées : on pleure, on dort mal parce que la noradrénaline nous met en état d’alerte permanent et on est désorienté. </p>
<p>Il y a un dérèglement de cet équilibre entre les accélérateurs et les freins au niveau émotionnel, et le cerveau va essayer de retrouver un équilibre. Le cortisol va pousser le corps humain à se reposer et reconstituer ses réserves de clés chimiques. L’hormone de la sérotonine va agir avec une molécule du cerveau appelée la diméthyltryptamine, elle permet d’avoir deux façons de réagir. Au début, la sérotonine va entraîner un comportement de calme. C’est une sorte de frein entraînant un comportement soumis par rapport à ce qui nous arrive. Et si la situation perdure dans d’autres neurones du cerveau, la sérotonine va provoquer un coup de fouet pour essayer de réagir et on va vouloir repartir, revivre.</p>
<p><strong>Le cerveau a-t-il révélé tous ses secrets ? À votre avis, quels sont les domaines inexplorés sur lesquels il faudrait axer en priorité les recherches ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : Alors non, on ne connaît pas tout. Ce n’est aujourd’hui qu’un balbutiement, mais avec les techniques d’imagerie actuelles et les systèmes d’interactions entre puces électroniques puis neurones, il est possible de repérer les circuits de façon extrêmement fine, afin de mieux comprendre comment la régulation des influx se forme. Je pense que ce qui étonne de plus en plus les scientifiques, ce sont les capacités d’adaptation du cerveau, ce qui est appelé la plasticité. Les conséquences des recherches sur ce sujet pourraient être de nouvelles pistes pour traiter les maladies de Parkinson ou d’Alzheimer autrement qu’avec des médicaments. Ce sont des pistes intéressantes.</p>
<hr>
<p><em>Propos recueillis par Loéva Claverie et Agathe Courret, étudiantes en master professionnel de journalisme à l’Institut de Journalisme Bordeaux Aquitaine (IJBA).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218644/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bernard Sablonnière ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dopamine, cortisol, ocytocine… Notre cerveau déborde d’hormones lorsque l’on est amoureux (ou que l’on subit une rupture).Bernard Sablonnière, Neurobiologiste, professeur des universités − praticien hospitalier, faculté de médecine, Inserm U1172, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2075352023-07-14T12:49:43Z2023-07-14T12:49:43ZComment éviter le perfectionnisme malsain lorsqu’on planifie un mariage ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/536864/original/file-20230711-23-qapb2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C1911%2C1281&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Tenter d’organiser une journée spéciale plutôt que parfaite peut contribuer à atténuer la pression qui accompagne généralement la planification d’un mariage.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Pexels/Emma Bauso)</span></span></figcaption></figure><p>Nous vivons à l’ère de la perfection. <a href="https://doi.org/10.1177/1088868318814973">Le perfectionnisme est un trait de personnalité qui incite à exiger l’excellence et à juger sévèrement soi-même et les autres</a>. Les attentes sont si élevées que lorsque quelque chose n’est pas irréprochable, cela ne vaut plus rien.</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1037/bul0000138">Les taux de perfectionnisme</a> n’ont cessé d’augmenter au cours des dernières décennies. Notre culture est obsédée par la perfection pour ce qui est du corps, du travail, du conjoint, des vacances… bref, la vie doit être parfaite. <a href="https://doi.org/10.1177/1088868318814973">Nous pensons que les autres exigent toujours plus de nous et nous exigeons toujours plus des autres et de nous-mêmes</a>.</p>
<p>Les mariages en sont l’exemple le plus flagrant.</p>
<p>Après <a href="https://www.dal.ca/faculty/science/psychology_neuroscience/faculty-staff/our-faculty/simon-sherry.html">25 ans de recherche sur le sujet (et plus de 100 publications</a>), je m’intéresse particulièrement aux tendances culturelles qui incitent au perfectionnisme — et le mariage remporte la palme dans ce domaine.</p>
<h2>Une quête de perfection</h2>
<p>La plupart des mariages ont des éléments en commun : deux personnes, en robe blanche et en beau costume, échangent des vœux et des alliances. Mais aujourd’hui, à l’ère des médias sociaux et de l’industrie du mariage, cet événement doit proposer une esthétique. La réception doit avoir un thème, les couleurs de la cérémonie doivent être coordonnées et, par-dessus tout, tout-doit-être-parfait.</p>
<p>Les <a href="https://www.pinterest.ca/today/best/2023s-top-wedding-trends/110204/">tableaux d’inspiration Pinterest</a> donnent le ton et les <a href="https://www.instagram.com/explore/tags/perfectwedding/">photos Instagram</a> établissent la norme. La perfection est un conte dont les médias sociaux sont les conteurs. Quelle place reste-t-il au romantisme ?</p>
<p><div data-react-class="InstagramEmbed" data-react-props="{"url":"https://www.instagram.com/p/CseTY3Mu2z2","accessToken":"127105130696839|b4b75090c9688d81dfd245afe6052f20"}"></div></p>
<p><a href="https://doi.org/10.1007/978-3-319-18582-8_10">De nombreux perfectionnistes sont sensibles au rang social, au statut et à la domination</a> au sein du groupe, ce qui suscite l’envie, la jalousie et le désir de surpasser les autres et transforme tout en compétition. Le mariage est un événement marquant qui modifie ou renforce le statut social ; ce qui pousse certaines personnes à rechercher la perfection jusqu’à l’excès. On s’attarde à d’infimes détails au détriment de ce qui devrait compter réellement : la célébration de l’amour.</p>
<p>Comment vivre un grand jour magnifique et romantique sans tomber dans le piège de la quête de la perfection ? Pour cela, il faut se concentrer sur les gens.</p>
<h2>La pression qui vient des autres</h2>
<p>La pression pour organiser une fête qui plaira aussi bien aux membres de la famille les plus sages qu’aux amis les plus aventureux est énorme. <a href="https://doi.org/10.1037/0022-3514.60.3.456">Le perfectionnisme prescrit par la société repose sur la croyance que la société, la famille et les amis ont des attentes irréalistes à notre égard</a>.</p>
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<img alt="Une jeune femme et une femme plus âgée, assises face à face, ont l’air en colère" src="https://images.theconversation.com/files/531027/original/file-20230608-23-et4qwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/531027/original/file-20230608-23-et4qwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/531027/original/file-20230608-23-et4qwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/531027/original/file-20230608-23-et4qwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/531027/original/file-20230608-23-et4qwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/531027/original/file-20230608-23-et4qwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/531027/original/file-20230608-23-et4qwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La pression pour planifier un événement qui plaira à tout le monde est énorme.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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</figure>
<p>Si votre mère est en larmes parce que vous ne voulez pas de cérémonie religieuse, posez-vous les questions suivantes :</p>
<ol>
<li><strong>Quelles sont mes valeurs ?</strong></li>
</ol>
<p><a href="https://psycho-therapie-toulouse.fr/connaitre-ses-valeurs-personnelles-notre-boussole-interieure/">Déterminez vos valeurs</a> et traduisez-les en actions. Si vous et votre conjoint souhaitez échanger avec chaque convive, n’invitez que les personnes les plus proches. Si l’environnement vous tient à cœur, remplacez les décorations jetables par des fleurs de saison. Vous aimez les animaux ? Demandez aux gens de faire un don à l’association caritative de votre choix au lieu d’acheter un cadeau. Si vos valeurs teintent votre mariage, vous risquez moins de le percevoir comme un <a href="https://doi.org/10.1016/j.jbusres.2022.113341">« échec » s’il ne répond pas aux attentes des autres, ce que vivent souvent les perfectionnistes</a>.</p>
<ol>
<li><strong>Qu’est-ce que je veux ?</strong></li>
</ol>
<p>La recherche de la perfection coûte cher. On a tendance à dépenser pour des alliances parfaites, des invitations sur du papier haut de gamme, une lune de miel sous les tropiques et bien d’autres choses encore. L’industrie du mariage capitalise sur ces aspirations, transformant les mariages en investissements considérables dont le coût moyen va de <a href="https://www.moneysense.ca/spend/average-wedding-cost-canada/">22 000 $ à 30 000 $</a>. Ces « idéaux » ne correspondent pas à tous les budgets. Il s’agit de désirs, et non de besoins, et il vaut mieux allouer votre argent à ce qui vous importe. Un mariage au palais de justice, des fleurs achetées à l’épicerie et un repas-partage entre amis peuvent être tout aussi exceptionnels. <a href="https://www.scienceshumaines.com/des-9-causes-de-la-depression_fr_41093.html">Les perfectionnistes ont tendance à lier leur estime et leur identité à des choses, au point où les « valeurs en toc »</a>,comme le consumérisme, finissent par dominer leur vie. L’objectif est de faire la fête, pas de dépenser de l’argent pour faire plaisir aux autres, donc ne vous sentez pas obligés de vous endetter.</p>
<ol>
<li><strong>Comment pouvons-nous évoluer ?</strong></li>
</ol>
<p>Trop souvent, les couples tombent dans le <a href="https://psycnet.apa.org/doiLanding?doi=10.1037%2F0022-3514.74.2.360">piège de la « destinée »</a>. Quand on croit qu’il faut qu’une personne soit faite pour une autre, il est facile de penser « ce n’était pas la bonne personne » lorsque les choses se compliquent. <a href="https://doi.org/10.1186/s12889-022-14802-5">Les films de Disney et les romans d’amour ont inscrit la fin des contes de fées dans la culture populaire</a>, mais la vie ne s’arrête pas au mariage. Pendant et après celui-ci, vous vivrez des défis et des désaccords. Si vous souhaitez évoluer ensemble pendant la préparation du mariage et après celui-ci, vous aurez moins tendance à dramatiser — comme le font de nombreux perfectionnistes — <a href="https://doi.org/10.1007/BF01172967">si les choses (ou votre conjoint) ne correspondent pas à des critères de perfection</a>.</p>
<h2>La pression sur les autres</h2>
<p>Vous travaillez fort pour organiser une journée parfaite, mais le bébé de votre sœur braille pendant la cérémonie et l’oncle Michel se saoule et fait des blagues vulgaires pendant la réception. Lorsqu’on vit un moment important, on peut avoir tendance à exiger la perfection des autres, ce que l’on appelle le <a href="https://doi.org/10.1037/0022-3514.60.3.456">perfectionnisme orienté vers les autres</a>. <a href="https://psycnet.apa.org/record/2017-21407-009">Et cela risque de faire naître des bridezillas et desgroomzillas(futurs mariés tyranniques) ou de transformer les beaux-parents en monstres</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un gateau de mariage écrasé au sol" src="https://images.theconversation.com/files/531028/original/file-20230608-16844-zx6m64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/531028/original/file-20230608-16844-zx6m64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/531028/original/file-20230608-16844-zx6m64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/531028/original/file-20230608-16844-zx6m64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/531028/original/file-20230608-16844-zx6m64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/531028/original/file-20230608-16844-zx6m64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/531028/original/file-20230608-16844-zx6m64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Si vous tenez absolument à éviter les erreurs, cela va monopoliser tout votre esprit.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Si un problème survient, ce qui arrivera assurément, n’oubliez pas les trois points suivants :</p>
<ol>
<li><strong>Conjoint idéal ou mariage idéal</strong> ? </li>
</ol>
<p>Les mariages sont censés célébrer l’amour. Quand c’est fini, vous rentrez chez vous avec la personne que vous aimez, que la cérémonie ait répondu ou non à vos attentes. Ce n’est qu’un jour de votre vie, alors qu’est-ce qui est le plus important ? Avoir un mariage idéal ou avoir et être un bon conjoint ? En vous concentrant l’un sur l’autre plutôt que sur l’événement, le <a href="https://www.proquest.com/docview/1292258894">comportement des convives ne vous semblera pas catastrophique</a> parce qu’il n’affectera pas votre relation.</p>
<ol>
<li><strong>Les relations humaines</strong>. </li>
</ol>
<p>Vos invités sont là pour participer à un grand jour de votre vie. Est-il plus important que la célébration soit digne du magazine <em>Vogue</em> ou que vos meilleurs amis soient là pour vous épauler ? Les perfectionnistes ont de la difficulté à collaborer <a href="https://doi.org/10.1007/978-3-319-18582-8_10">parce qu’ils sont plus préoccupés par ce que fait une personne que par ce qu’elle est</a>. Un perfectionniste se souciera davantage de savoir si le discours de sa mère suscite les « bonnes » réactions que de savoir ce que celle-ci ressent à l’occasion de cette étape importante de la vie de son enfant. Si vous donnez priorité à vos proches, vous chercherez à échanger avec eux plutôt qu’à vous assurer qu’ils jouent leur rôle à la perfection.</p>
<ol>
<li><strong>Les erreurs</strong>. </li>
</ol>
<p>Tout le monde commet des erreurs. Votre père trébuchera sur votre traîne. Le garçon d’honneur fera un discours maladroit. Le repas sera en retard. Cela arrive. Si, comme les perfectionnistes, <a href="https://doi.org/10.1007/BF01172967">vous tenez absolument à éviter les erreurs, cela va monopoliser votre esprit</a>. Respirez et riez un bon coup.</p>
<h2>La pression sur soi-même</h2>
<p>La pression <a href="https://www.brides.com/gallery/wedding-beauty-best-tips">pour avoir une apparence parfaite le jour de son mariage</a> peut être très forte. Souvent, les <a href="https://doi.org/10.1016/j.appet.2007.11.001">femmes vont suivre un régime</a>, investir dans un blanchiment des dents et des soins de la peau avant leur mariage et se faire maquiller par une professionnelle. <a href="https://www.mariage.com/accessoires-et-beaute/7-sports-pratiquer-mariage-etre-en-pleine-forme-evacuer-stress">Les hommes ressentent</a> de la pression <a href="https://www.gq.com/story/wedding-workout-plan">pour se mettre en forme</a>.</p>
<p>Tout cela alimente le <a href="https://doi.org/10.1037/0022-3514.84.6.1303">perfectionnisme orienté vers soi (où on exige la perfection de soi-même) et la présentation perfectionniste de soi (où l’on souhaite paraître parfait en cachant ou niant ses défauts)</a>.</p>
<p>Il peut être difficile d’avoir confiance en soi si l’on croit ne pas répondre à de telles attentes, mais essayez de garder à l’esprit les points suivants :</p>
<ol>
<li><strong>La perfection est un mythe</strong>. </li>
</ol>
<p>Personne, et rien, n’est parfait. Il y aura sûrement des « défauts ». Peut-être que le stress vous fera transpirer ou que vous bégayerez en prononçant vos vœux. Vous vous remémorerez tout cela avec tendresse. Ce sont souvent les « imperfections » qui rendent vos souvenirs, ainsi que votre mariage, parfaits. En vous rappelant que la perfection est une norme irréaliste, voire indésirable, vous pourrez cesser de la chercher.</p>
<ol>
<li><strong>Il ne s’agit pas d’un concours</strong>. </li>
</ol>
<p>Vos intérêts, relations et valeurs diffèrent de celles de vos voisins. Leur mariage somptueux, avec 300 invités, leur convenait peut-être. Ils ne comprennent peut-être pas votre désir d’organiser un mariage intime avec 50 personnes, mais cela n’a pas d’importance. Chaque mariage est beau à sa façon. L’idée est de créer des souvenirs, pas de tenter d’impressionner qui que ce soit. Malgré ce que votre perfectionnisme vous dit, votre mariage n’est pas un échec et il ne s’agit pas d’une compétition.</p>
<ol>
<li><strong>Quelqu’un vous aime</strong>. </li>
</ol>
<p>Vous ne ressemblerez peut-être pas au mannequin qui portait votre robe ou votre costume. Ce n’est pas grave. <a href="https://doi.org/10.1037/0022-3514.84.1.234">Les perfectionnistes vivent souvent un sentiment d’échec, de culpabilité ou de honte et ont une faible estime de soi en raison de leur tendance à être très critique envers eux-mêmes</a>. Rappelez-vous que votre conjoint est tombé amoureux de vous. Il se peut que vous soyez plus en forme ou que vous vous achetiez une tenue plus flatteuse dans les années à venir, mais cela ne doit pas vous empêcher de profiter de ce moment. L’amour n’a pas besoin de perfection.</p>
<p>Après tout, il s’agit de votre grand jour, pas d’un jour parfait.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207535/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Simon Sherry est financé par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Il est également propriétaire de CRUX Psychology, un cabinet privé de psychologie.</span></em></p>Les mariages sont de plus en plus élaborés : des chaussures aux chemins de table, tout est parfaitement coordonné. Cela est emblématique de notre obsession culturelle pour la perfection.Simon Sherry, Clinical Psychologist and Professor in the Department of Psychology and Neuroscience, Dalhousie UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2041572023-04-27T18:03:44Z2023-04-27T18:03:44ZAmour et téléréalité, un succès télévisuel inoxydable ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/522792/original/file-20230425-18-u4yhd0.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=9%2C0%2C1072%2C610&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans « Mariés au premier regard », les futurs époux ne se rencontrent que le jour de leur mariage. Ici, Anabel s'avance vers l'autel, dans la saison 7. </span> <span class="attribution"><span class="source">M6 / Julien Theuil</span></span></figcaption></figure><p>Il y a quelques semaines, les portraits des nouveaux candidats de <em>L’amour est dans le pré</em> ont enfin été diffusés. Le 30 janvier, entre 21h11 et 22h04, ce sont ainsi 3,39 millions de téléspectateurs qui sont tombés sous le charme des agriculteurs et des agricultrices de cette nouvelle saison. En France, cette émission de <em>dating</em> est bientôt sur le point de célébrer ses noces de porcelaine puisqu’elle est diffusée depuis 18 ans sur la chaîne M6.</p>
<p>Plus récemment encore, le 20 Mars 2023, M6 a également lancé la septième saison de l’émission <em>Mariés au premier regard</em>, et ce sont « en moyenne 2,08 millions de téléspectateurs [qui] ont été séduits par le programme » peut-on lire dans un <a href="https://www.ozap.com/actu/audiences-quel-accueil-pour-maries-au-premier-regard-sur-m6-face-au-telefilm-avec-tomer-sisley-sur-tf1/629468">article</a> de presse spécialisée – dont 25,1 % de FRDA-50 autrement dit de « femmes responsables des achats de moins de cinquante ans ». Le coup d’envoi de la saison précédente avait réuni quant à lui 2,32 millions de téléspectateurs.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/tout-ce-que-vous-avez-toujours-voulu-savoir-sur-leconomie-des-sites-de-rencontres-sans-jamais-oser-le-demander-140490">Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l’économie des sites de rencontres (sans jamais oser le demander)</a>
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<p>Les émissions de <em>dating</em> sont les émissions de télé-réalité qui s’emparent du sujet de l’amour et qui placent au cœur de leurs mécaniques narratives la rencontre amoureuse, le mariage, la conjugalité ou encore la sexualité. Alors que le nombre de mariages baisse en France (on comptait par exemple 305 234 mariages de personnes de sexe différent en 2000 contre 237 000 en 2022, selon l’Insee) et que certaines invitations à en <a href="https://usbeketrica.com/fr/article/2039-fin-couple-utopie-dystopie">finir avec le couple</a> et à <a href="https://www.binge.audio/podcast/le-coeur-sur-la-table/la-revolution-romantique-nest-pas-un-diner-de-gala">déconstruire le mythe de l’amour romantique</a> fleurissent, le succès que rencontre encore ce genre d’émissions peut sembler surprenant. Cela dit, si les chiffres d’audience de certaines émissions comme celles-ci peuvent diminuer avec le temps, le <em>dating</em> à la télévision n’est pas un genre qui s’essouffle.</p>
<h2>Une économie mondialisée</h2>
<p>C’est en 1965 que l’Américain Chuck Barris développe le premier format de <em>dating</em> : il s’agit de <em>The Dating Game</em>, une émission dans laquelle une jeune femme célibataire pose des questions à trois hommes qu’elle ne voit pas. À l’issue de ces échanges, elle choisit celui qui l’accompagnera à un rendez-vous galant. Le format américain donne lieu en 1985 à la production de l’émission française <em>Tournez Manège !</em> diffusée pendant huit ans sur la chaîne TF1.</p>
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<p>Souvent le public ignore que la majorité des programmes qu’il regarde sont des contenus adaptés de formats étrangers. Aujourd’hui, le nombre de formats de <em>dating</em> circulant sur le marché ne peut être calculé précisément mais il est possible toutefois d’affirmer que ce genre représente l’un des plus populaires à la télévision.</p>
<p>Il a d’abord massivement proliféré sur les écrans des pays occidentaux, et aujourd’hui, des formats de <em>dating</em> s’exportent aussi dans d’autres parties du monde. Par exemple, l’émission <em>Love is Blind</em> diffusée sur Netflix depuis 2020 a été récemment adaptée au Japon et <em>The Bachelor</em> en Afrique du Sud en 2022.</p>
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<p>En France, on a vu défiler sur nos écrans un nombre considérable d’émissions de ce genre telles que <em>Bachelor, le gentleman célibataire</em> (2003), <em>Qui veut épouser mon fils ?</em> (2010), <em>L’amour est aveugle</em> (2010), ou encore l’une des plus récentes, l’émission <em>Cosmic Love</em> diffusée en 2022 et présentée par la star de télé-réalité Nabilla Vergara et dans laquelle les participants s’en remettent entièrement au cosmos pour trouver l’amour.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/522793/original/file-20230425-1294-xcfypv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/522793/original/file-20230425-1294-xcfypv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/522793/original/file-20230425-1294-xcfypv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/522793/original/file-20230425-1294-xcfypv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/522793/original/file-20230425-1294-xcfypv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/522793/original/file-20230425-1294-xcfypv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/522793/original/file-20230425-1294-xcfypv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’émission « Love is Blind » Japan est diffusée sur Netflix depuis 2022.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Capture d’écran, Netflix</span></span>
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<h2>Et si c’était vrai ?</h2>
<p>Certaines émissions de <em>dating</em> – que les producteurs appellent en anglais les « bikinis shows » – reposent sur un casting de jeunes adultes, hommes et femmes, aux plastiques standardisées et dont les narrations se construisent sur des idylles éphémères aux allures de mélodrames. On pense par exemple en France à l’émission <em>L’île de la tentation</em> (diffusée en 2002 sur TF1) ou désormais à l’émission <em>Séduction haute tension</em> (diffusée depuis 2020 sur la plate-forme de streaming Netflix). Les émissions dites de télé-réalité, et notamment le <em>dating</em>, sont donc des genres hybrides qui regroupent un large éventail d’émissions.</p>
<p>Dans ces conditions, les producteurs opposent par exemple au caractère superficiel des « bikinis shows » les émissions de <em>dating</em> qui font de l’amour le support d’expériences dites « sociales » mettant en scène des gens dits « ordinaires ». On pense par exemple d’abord à <em>L’amour est dans le pré</em> mais aussi aux émissions qui s’emparent du mariage et dont plusieurs titres ont été importés en France comme <em>Quatre mariages pour une lune de miel</em> (2011), <em>La robe de ma vie</em> (2017) ou encore <em>Mariés au premier regard</em> (2016).</p>
<p>Pour ce type d’émissions, les producteurs s’efforcent de mettre au centre de leurs préoccupations le <a href="https://theconversation.com/comment-sexplique-le-succes-des-emissions-de-tele-realite-immobilieres-185436">caractère « réel »</a> du contenu qu’ils produisent. Il serait par ailleurs trop simpliste de réduire les émissions de <em>dating</em> à des contenus scénarisés, où toute action serait mise en scène de façon millimétrée – car il s’agit surtout, pour les participants, d’individus qui s’engagent dans des expériences dont les étapes sont « programmées » – provoquant de fait des réactions plus ou moins attendues de leur part.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourquoi-les-applications-de-rencontre-nous-deshumanisent-elles-184672">Pourquoi les applications de rencontre nous déshumanisent-elles ?</a>
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<p>Cela dit, toutes les personnes engagées dans la production de ce type d’émissions ne peuvent se détacher d’un impératif majeur : capter l’attention du public et l’émouvoir. Que ce soit pour les mariés qui ressentent des émotions et qui se doivent de les exprimer derrière la caméra, ou encore pour le monteur qui décide de sélectionner une séquence qu’il considère comme émouvante.</p>
<h2>Ce que veulent les femmes</h2>
<p>Les histoires d’amour qui sont proposées aux téléspectateurs se doivent alors d’être romantiques, mais pas trop, pour qu’elles puissent apparaître comme suffisamment réalistes. Les discours soutenus explicitement ou en creux par la plupart de ces dispositifs de téléréalité ne dépendent finalement que peu du registre de l’amour romantique, même si celui-ci représente l’ingrédient indispensable à la réactualisation des fantasmes liés à la conjugalité hétérosexuelle. Néanmoins, ces émissions en reprennent les codes visuels et narratifs.</p>
<p>De fait, les émissions de <em>dating</em> s’éloignent plutôt de l’idéal d’amour romantique en proposant un modèle réaliste d’amour et de conjugalité. Ce modèle s’appuie notamment sur une forte psychologisation des rapports amoureux. Par exemple, dans l’émission <em>Mariés au premier regard</em> – dans laquelle des inconnus se découvrent le jour de leur mariage – les jeunes mariés sont accompagnés par des psychologues dans cette aventure matrimoniale (et télévisée) pour les aider à construire des « relations véritables », pour reprendre leurs mots.</p>
<p>Quant à Karine Le Marchand, la présentatrice de <em>L’amour est dans le pré</em>, elle enjoint par exemple l’un des agriculteurs (Thierry) à ne pas « reproduire les erreurs du passé » dans l'un des premiers épisodes de la saison diffusée en 2022. Les émissions de <em>dating</em> participent de cette façon à une forme de régulation morale de l’expression du sentiment amoureux et continuent à diffuser des modèles amoureux qu’elles contribuent à normaliser et légitimer.</p>
<p>Enfin, soulignons que tout comme les comédies romantiques, les <em>soaps operas</em> ou les <em>telenovelas</em>, les émissions de <em>dating</em> invitent finalement les femmes à surinvestir le terrain de l'amour. Que ce soit alors du côté des téléspectatrices, qui constitue la principale cible des diffuseurs, ou du côté des participantes, qui derrière l'écran occupent un rôle important dans la réactualisation des fantasmes liés à la conjugalité hétérosexuelle. Fantasmes qui dans une société qui demeure profondément patriarcale, semblent encore résister à l'érosion.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204157/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Aziliz Kondracki ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Alors que le mythe de l’amour romantique semble avoir du plomb dans l’aile, les émissions de « dating » rencontrent un succès qui ne se dément pas. Comment expliquer ce paradoxe ?Aziliz Kondracki, Doctorante en anthropologie, École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1998092023-02-13T20:38:32Z2023-02-13T20:38:32ZSans Valentin, ou l’avènement du « post-amour »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/509750/original/file-20230213-20-n9amuo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=63%2C45%2C5951%2C3967&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le « post-amour » c’est l’avènement d'une valse-hésitation très contemporaine. </span> <span class="attribution"><span class="source">Unsplash</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La Saint-Valentin est devenue un événement commercial et médiatique incontournable, servi par un cadre romantique bien marketé. Pour autant, comment croire encore à « l’amour-toujours » en 2023 ? Le couple post #MeToo traverse une zone de turbulences peu commune, et bien des certitudes amoureuses se trouvent <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/reinventer_l_amour-9782355221743">remises en question</a>. Je propose ici de d'explorer une nouvelle hypothèse : vivons-nous à l'ère du « post-amour » ?</p>
<p>Notre époque a accouché du « post-amour », hybride sentimental et sexuel d’un genre nouveau. « Post-amour » ? La nouvelle forme du sentiment amoureux, caractérisé par la <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/reinventer_l_amour-9782355221743">fin des certitudes et des idéaux</a> qui ont défini l’amour comme <a href="https://www.fondationderougemont.org/ouvrages/lamour-et-loccident/">récit majuscule de l’Occident</a>, aux origines mythologiques et religieuses, romanesques et morales. Le « post-amour » est surtout un sentiment ressenti par celles et ceux vivant l’amour tout en hésitant sur ses formes, son genre, son avenir. Il est transitoire, flexible, <a href="https://www.editions-observatoire.com/content/Dating_Fatigue">désillusionné</a>. Il est clair qu’il percute de plein fouet la Saint-Valentin, ses clichés, son business sulpicien et son romantisme mièvre.</p>
<p>Ce « post-amour » fait son lit dans le terreau de l’individualisme, de la judiciarisation des rapports de genres, de la nouvelle guerre des sexes et de la « confusion des sentiments » caractérisant l’époque.</p>
<h2>Le « post-amour », valse-hésitation et « rêve party »</h2>
<p>Le « post-amour » c’est l’avènement de cette valse-hésitation, sur fond de « je t’aime moi non plus » et de « Fuir le bonheur avant qu’il ne se sauve » selon les chansons-prophéties de Gainsbourg ; ou encore de la sublime « Brandt rhapsodie », fredonnée par Benjamin Biolay et Jeanne Cherhal. Leur duo, en forme de slam entêtant, raconte une histoire d’amour – rencontre, passion, désamour et séparation – sur fond de Post-its collés de-ci de-là, et montre <a href="https://theconversation.com/saint-valentin-pourquoi-quelques-mots-valent-mieux-quune-rose-rouge-199749">combien le langage trahit nos affects</a>. En clair, tout est bien qui finit mal. Les Rita Mitsouko nous avaient prévenus : « les histoires d’amour finissent mal, en général… ». C’est un amour mis à distance, disséqué, analysé, théorisé, espéré, détesté, autant qu’espéré, secrètement. Combien de séries, de films, de pièces de théâtre, de spectacles de stand up ont fleuri depuis une vingtaine d’années sur le thème « c’est compliqué ».</p>
<p>Dans son essai <em>La fin de l’amour</em>, la <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/la-fin-de-l-amour-eva-illouz/9782021430349">sociologue Eva Illouz</a> propose la notion féconde de « relations négatives », pour caractériser ces histoires avortées dès leur genèse. Rangeons-y ces couples qui secrètent les conditions de la rupture très vite, entre ressentiment, hypersensibilité, exigences trop élevées et fatalisme voire cynisme assumé. Elles sont pléthore, « ces relations négatives » voyant leurs protagonistes saborder consciencieusement ce qui aurait pu donner « quelque chose de bien ensemble », mais qui s’avère mort-né. Car des pressions convergentes sabotent le couple, le font imploser de l’intérieur, en mode Blitzkrieg, ou de guerre lasse. En tout cas, selon Illouz toujours, « elles n’évoluent pas vers une forme sociale stable mais sont appréciées pour leur caractère éphémère et transitoires : elles sont pratiquées malgré les pertes et les souffrances qu’elles provoquent ».</p>
<h2>Récit de soi et réflexivité</h2>
<p>Saint-Valentin ? Pensons-en ce jour aux millions de célibataires, pour qui l’amour est un espoir, mais le couple un <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-ex-ologie-une-vie-de-celibataire">repoussoir</a>. Et sont désormais régulièrement de retour sur le marché du célibat des individus qui, auparavant, seraient restés unis, puisque leurs relations étaient cimentées par les institutions et les conventions.</p>
<p>Internet et les applis constituent en fait un immense second marché de la rencontre, le <a href="https://theconversation.com/pourquoi-les-applications-de-rencontre-nous-deshumanisent-elles-184672">rendez-vous des naufragés du cœur</a> et des parcours de vie compliqués qui aspirent à (se) reconstruire, en se recomposant. Ou « à s’éclater » en cumulant.</p>
<p>Sur le <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/les_nouvelles_lois_de_l_amour-9782707198945">« Net sentimental »</a>, on parle énormément de ses peines, de ses déceptions, de ses blessures, et bien sûr, de ses espoirs. Finalement, on s’y raconte bien plus encore qu’on ne s’y rencontre. Sur les sites de rencontre, on parle beaucoup et l’on écrit plus encore. Cet espace est tout à la fois un exutoire, un atelier d’écriture collectif, le refuge des « obsédés textuels » qui jettent là l’encre permettant de fixer un peu l’expérience intime de leurs dérives, de leurs naufrages, d’îles désertes et de moments fastes aussi, ceux durant lesquels le corps exulte, ou les cœurs s’exaltent.</p>
<p>Certains se complaisent dans ce récit de soi, sur fond de blessures, de fantasmes et d’aspirations. Ce qui pourrait relever de l’intime, ordinairement dit sur le mode de la confidence à des proches, est très vite mis en mots et jeté à Toile ouverte. Sans par ailleurs que l’on sache si c’est vrai ou si c’est du storytelling, permettant de mieux « se vendre ».</p>
<p>Le « post-amour » induit une impitoyable réflexivité de tout ce qui est donné à vivre, ensuite théorisé, disséqué, partagé, commenté. <em>L’Obs</em> a su tirer le parti de ce besoin de parole. Ainsi, la rubrique numérique <a href="https://www.nouvelobs.com/les-series-de-rue89/20220511.OBS58333/324-nuances-de-tinder-surprise.html">« Tinder Surprise »</a>, adaptée en de savoureuses <a href="https://www.arte.tv/fr/videos/RC-019644/l-amour-a-ses-reseaux/">pastilles vidéo sur Arte</a>, permet l’expression cathartique de plans souvent foireux, juxtaposition de bien des bizarreries sexuelles et séquences tellement exotiques que la chose prête à rire, et déjà de soi.</p>
<p>La matrice technologique console, épanche, elle sert de déversoir, de défouloir, mais aussi de terrain de jeu et d’espace de séduction tous azimuts. Et combien sont-ils à avouer avoir une revanche à prendre sur les hommes (ou les femmes), et sur la vie ? On croise en ligne pléthore de personnes blessées du cœur, qui surfent entre sentiments et ressentiment, qui sont des « post-amoureux ».</p>
<p>Le post-amour, c’est l’amour du fast sex et du « polygaming », c’est l’amour des « cumulards du cœur », qui adorent les comédies sentimentales autant qu’ils aimaient la série « Bref ». Ils utilisent ces technologies relationnelles que sont les sites et les applis avec pragmatisme, espoir et désillusion. L’amour est plus aveugle que jamais, et on navigue à vue. Mais le « fast sex » uberisé a un GPS intégré, et il est rarement question de s’attarder – ce ne serait d’ailleurs <a href="https://theconversation.com/tout-ce-que-vous-avez-toujours-voulu-savoir-sur-leconomie-des-sites-de-rencontres-sans-jamais-oser-le-demander-140490">pas dans l’intérêt</a> desdites applications.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/geoffrey-chaucer-et-les-origines-litteraires-de-la-saint-valentin-153346">Geoffrey Chaucer et les origines littéraires de la Saint-Valentin</a>
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<p>Aux distorsions imposées au romantisme comme cadre idéologique, s’ajoutent les troubles introduits dans les rapports de genres et aussi la conscience diffuse que le couple est devenu une denrée périssable. On rejoint là <a href="https://www.gallimardmontreal.com/catalogue/livre/amour-liquide-de-la-fragilite-des-liens-entre-les-hommes-bauman-zygmunt-9782841566020">« l’amour liquide » du philosophe Zygmunt Bauman</a>. Avec toujours une perception duale de tout cela : le côté radieux du caractère facile, décomplexé, de rencontres possiblement standardisées, mais aussi l’intuition de la duplicité probable des uns et des autres. Un jeu de poker menteur, où l’as de pique ressort plus souvent que l’as de cœur.</p>
<p>Certains doivent désormais aussi composer avec la crainte d’être considérés à tort comme des harceleurs sexuels, ou d’avoir des comportements inappropriés, dans une société post-#MeToo qui ne transige plus – heureusement – avec la notion de consentement et les <a href="https://usbeketrica.com/fr/comment-le-applis-de-rencontre-luttent-elles-contre-les-cyber-violences-sexuelles">violences dans les rapports de genre</a>, sachant que les réseaux sociaux exhument d’abord, et relaient ensuite.</p>
<p>Enfin, ces millions de célibataires ne peuvent ignorer les pesantes prescriptions sanitaires qui enjoignaient il y a peu encore de se tenir à bonne distance, de se méfier de toute promiscuité, et donc de l’intimité, possiblement dangereuse. Ceci complexifie encore la donne relationnelle. La carte du Tendre, en 2023, est parsemée d’embûches nouvelles, qui rendent la quête plus difficile encore. Saint-Valentin pour beaucoup, sans Valentin pour un grand nombre aussi, pour qui cette soirée particulière évoque Tantale plus que Vénus ou Cupidon !</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/509811/original/file-20230213-22-fteoz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/509811/original/file-20230213-22-fteoz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/509811/original/file-20230213-22-fteoz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1091&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/509811/original/file-20230213-22-fteoz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1091&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/509811/original/file-20230213-22-fteoz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1091&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/509811/original/file-20230213-22-fteoz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1371&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/509811/original/file-20230213-22-fteoz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1371&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/509811/original/file-20230213-22-fteoz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1371&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Pascal Lardellier est l’auteur de <a href="https://editionsdelaube.fr/catalogue_de_livres/saimer-a-lere-des-masques-et-des-ecrans/">« S’aimer à l’ère des masques et des écrans »</a> (L’Aube, 2022).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199809/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pascal Lardellier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Saint Valentin ? Pensons en ce jour aux millions de célibataires pour qui l’amour est un espoir, mais le couple, parfois, un repoussoir.Pascal Lardellier, Professeur à l'Université de Bourgogne Franche-Comté, Chercheur au laboratoire CIMEOS, Université de Bourgogne – UBFCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1991262023-02-13T20:37:09Z2023-02-13T20:37:09ZLe polyamour, entre « bricolage » au quotidien, communication et critique sociale du couple<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/507899/original/file-20230202-7442-x2e5wd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C432%2C5155%2C2932&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les relations polyamoureuses se fondent sur une communication permanente entre les partenaires.</span> <span class="attribution"><span class="source">Pixel-Shot</span></span></figcaption></figure><p>On souhaite peut-être qu’il en soit autrement, mais le sentiment de l’amour n’est pas universel ; il est tributaire des normes de la société dans laquelle nous vivons. Notre conception actuelle de l’amour est en partie <a href="https://www.fayard.fr/pluriel/letrange-histoire-de-lamour-heureux-9782818500057">héritée du romantisme du XIXᵉ siècle</a>.</p>
<p>Ainsi, le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/couple-30520">couple</a> binôme tel qu’il est envisagé dans l’amour romantique se pense comme la rencontre entre deux individus, destinés à vivre ensemble. De cette idéologie, découle une vision de la relation amoureuse standard : un couple hétérosexuel liant deux personnes tombées amoureuses au premier regard, après s’être croisées dans la vraie vie et non sur une <a href="https://journals.openedition.org/lectures/34477">application de rencontre</a>. Celle-ci valorise un couple stable, cohabitant, <a href="https://theconversation.com/lideal-du-couple-parental-mis-a-mal-par-la-rupture-124563">qui souhaite avoir des enfants</a>, dont les partenaires sont engagés dans des <a href="https://www.cairn.info/revue-societes-contemporaines-2011-3-page-59.htm">rapports à visée égalitaire</a> et pratiquent une <a href="http://www.epel-edition.com/publication/239/surveiller-et-jouir.html">sexualité dite conventionnelle</a>.</p>
<p>Dans la réalité, on sait pourtant que les usages <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/fichier/2017510/COUFAM15e_D4_Parcours-conjugaux.pdf">s’écartent de ce modèle</a>.</p>
<p>Plus théoriquement, ensuite, les fondements idéologiques du couple binôme ont été questionnés, notamment par les utopistes et révolutionnaires, au nombre desquels on peut citer Charles Fourier (1772-1837) ou Alexandra Kollontaï (1872-1952) ainsi que, plus récemment, <a href="https://journals.openedition.org/sociologie/9599">par les féministes des années 70</a>.</p>
<h2>Des relations émotionellement impliquantes</h2>
<p>Ce que l’on désigne aujourd’hui par polyamour constitue, pour ceux qui le pratiquent, l’une des alternatives possibles au modèle du couple. Cette alternative consiste à entretenir plusieurs relations amoureuses, émotionnellement impliquantes, sans dissimuler ses multiples liens à ses partenaires.</p>
<p>En ce sens, elle se distingue de la relation adultère (avec mensonge au partenaire « trompé »), des relations amicales et sexuelles sans mise en couple, des couples « ouverts » ou « libertins » (dans lesquels les relations extraconjugales sont plutôt envisagées comme des activités sexuelles, souvent dépourvues de sentiment amoureux).</p>
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<p>Dans le cadre d’une recherche sociologique menée sur cette forme de non-monogamie en France, j’ai suivi, de 2020 à 2022, une quinzaine de « cafés poly » se déroulant pour certains en présentiel à Paris et en région, pour d’autres en distanciel. Au sein de ces groupes de paroles mensuels, 15 à 30 personnes concernées se retrouvent pour échanger dans un cadre qui se veut bienveillant.</p>
<p>À ces observations participantes s’ajoute une analyse de contenus en ligne (essentiellement des blogs, des forums de discussion, des comptes Instagram, des témoignages audio ou vidéo) ainsi qu’une quinzaine d’entretiens, réalisés avec des personnes concernées, et au cours desquels nous avons échangé sur leur trajectoire affectivo-sexuelle.</p>
<h2>« Un truc qui nous ressemble vraiment »</h2>
<p>Le polyamour revêt de multiples formes. Il peut s’agir d’un couple « socle » sur lequel se greffent des relations périphériques, d’un « trouple » (un « couple » de trois personnes), de relations plurielles non hiérarchisées, cohabitantes ou non, etc. Les modalités du lien s’inventent en fonction des configurations.</p>
<p>Ainsi, à l’instar de toutes les pratiques affectives s’édifiant dans les marges, l’une des caractéristiques de ce type de relation réside dans la part de bricolage qu’elle suppose.</p>
<blockquote>
<p>« On a expérimenté, comme tous les gens, on est dans cette expérience » (Inès, 45 ans, une relation de couple stable, une relation amoureuse en construction, une relation amicale et sexuelle)</p>
</blockquote>
<p>Au-delà, les polyamoureux et polyamoureuses cherchent à donner à leurs relations des formes qui leur correspondent.</p>
<blockquote>
<p>« On construit un truc qui nous ressemble vraiment, là ouais, vraiment ! On fait quelque chose qui est à notre image et qui nous ressemble. » (Inès)</p>
</blockquote>
<h2>Distance critique et éthique</h2>
<p>L’un des plus célèbres guide pratique du polyamour s’intitule <a href="https://blogs.mediapart.fr/edition/aux-lecteurs-et-lectrices-emancipe-es/article/130521/l-ethique-des-amours-plurielles-de-dossie-easton-et-janet-w-ha"><em>La salope éthique</em></a>. Ceci paraît emblématique du fait que chez les personnes polyamoureuses, la distance critique et réflexive à l’égard de l’amour conjugal conventionnel implique un attachement de premier plan à l’éthique.</p>
<p>« Honnêteté », « bienveillance mutuelle », « intégrité » figurent, à cet égard, parmi les valeurs cardinales auxquelles Deborah Taj Anapol, psychologue clinicienne américaine, consacre plusieurs sections de <a href="https://archive.org/details/polyamorynewlove0000anap"><em>Polyamory. The New Love Without Limits</em></a>, son ouvrage précurseur.</p>
<p>Au cours de nos échanges, l’une des organisatrices d’un « café poly » en ligne explique, qu’à ses yeux, le polyamour,</p>
<blockquote>
<p>« c’est la possibilité de relations plurielles dans un cadre éthique. Ça […] veut dire grossièrement : je prends soin de moi, je prends soin de l’autre et je tiens compte de l’autre, de ses émotions et je prends soin de ma relation avec elle ou lui et des relations de manière générale. »</p>
</blockquote>
<p>Le souci porté à soi et à l’autre se retrouve aussi dans le fait que les partenaires cherchent à tisser des liens affectifs les reconnaissant comme des êtres multiples et désirants.</p>
<h2>Potentielles situations conflictuelles</h2>
<p>Ce type de relation délivre de la nécessité de combler la totalité des attentes de l’autre – ce qui prévaut dans un couple classique, configuration dans laquelle l’autre est à la fois partenaire économique, sexuel, ami, co-parent, etc. En cela, le polyamour s’éloigne de la vision romantique d’un alter ego.</p>
<blockquote>
<p>« J’adore Clara, elle est drôle et avec elle, j’aime plein de trucs, mais on peut pas aller au ciné ensemble. Elle parle tout le temps, elle mange, elle bouge. Elle n’est pas cinéphile du tout. »
(Matthieu, 44 ans, une relation régulière, des « plans d’un soir »)</p>
</blockquote>
<p>Comme dans n’importe quelle relation inter-indivuelle, mésententes et dissensions se manifestent parfois. Le fait même de multiplier le nombre de partenaires peut alors rendre les situations conflictuelles, ce dont ont témoigné certaines des personnes au cours de ma recherche.</p>
<p>Il n’est pas surprenant, dès lors, que le mot « communication » revienne si souvent concernant les manières de résoudre les conflits.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/507905/original/file-20230202-2164-ussmzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/507905/original/file-20230202-2164-ussmzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=482&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/507905/original/file-20230202-2164-ussmzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=482&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/507905/original/file-20230202-2164-ussmzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=482&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/507905/original/file-20230202-2164-ussmzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=605&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/507905/original/file-20230202-2164-ussmzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=605&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/507905/original/file-20230202-2164-ussmzz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=605&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">GoodStudio</span></span>
</figcaption>
</figure>
<blockquote>
<p>« Ça va se faire dans l’échange et la communication. En écoutant l’autre, ses besoins et ses ressentis. En laissant de la place pour la parole. »
(Claire, 42 ans, en couple stable, des relations ponctuelles sur quelques mois)</p>
</blockquote>
<h2>Contribuer au mouvement de transformation de la société</h2>
<p>En cherchant à entretenir des relations riches, singulières et calquées sur leurs propres attentes, en plaçant les sentiments et les émotions au centre de leur vie, les polyamoureux et polyamoureuses souhaitent ainsi contribuer, à leur manière, au mouvement de transformation de la société.</p>
<p>À ce sujet, mon travail de terrain confirme les observations réalisées par d’autres universitaires à l’étranger (Suède, Angleterre, États-Unis).</p>
<blockquote>
<p>« Si ton modèle théorique il est complètement claqué, ta remise en question, c’est bullshit. Si c’est juste une question de communication non-violente, on va rapidement régler le problème (rires). Il faut tout prendre à bras le corps, ce sont des problèmes bien plus structurels. » (Clémence, 28 ans, en couple stable, une relation amoureuse, une relation amoureuse en construction)</p>
</blockquote>
<p>Comme le montre par exemple la sociologue américaine Elisabeth Sheff, le polyamour est rarement le « first step outside of the box » : il s’inscrit dans un style de vie <a href="https://rowman.com/ISBN/9781442253100/The-Polyamorists-Next-Door-Inside-Multiple-Partner-Relationships-and-Families">globalement critique à l’égard des oppressions et des privilèges</a> (blancs, masculins, hétéronormés, capitalistes, etc.).</p>
<p>Qui, dans notre société, peut s’autoriser à consacrer un temps significatif au sentiment amoureux ? Qui est en mesure, au quotidien, de mettre des mots sur ses émotions ? Qui peut entretenir plusieurs relations amoureuses aussi riches et denses que souhaitées ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/507902/original/file-20230202-10513-iwyq0q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/507902/original/file-20230202-10513-iwyq0q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/507902/original/file-20230202-10513-iwyq0q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/507902/original/file-20230202-10513-iwyq0q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/507902/original/file-20230202-10513-iwyq0q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/507902/original/file-20230202-10513-iwyq0q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/507902/original/file-20230202-10513-iwyq0q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des adeptes du polyamour défilent lors de la gaypride de Toronto (Canada), en juin 2018.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shawn Goldberg</span></span>
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<p>Dans leur grande majorité, les personnes rencontrées au cours de ma recherche ont fait des études supérieures, sont férues de culture, participent à la vie associative, sont engagées politiquement (dans des syndicats, des collectifs féministes ou en faveur de l’écologie, etc.) et exercent des professions qui leur permettent de disposer de temps.</p>
<p>Le polyamour concernerait donc plutôt une population <a href="https://www.jstor.org/stable/24713313">politisée, éduquée</a>, et <a href="https://www.forewordreviews.com/reviews/loves-not-color-blind/">plutôt non racisée</a>.</p>
<h2>Un « travail acharné » pour toutes et tous ?</h2>
<p>Le « travail acharné » que nécessite le polyamour – pour reprendre le concept de « hard work » <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/09589236.2022.2098094">que l’anthropologue Rahil Roodsaz a développé à l’issue d’un travail de recherche mené aux Pays-Bas</a> ne semble cependant pouvoir concerner qu’une minorité de personnes.</p>
<p>Il n’existe que très peu de données quantitatives sur le polyamour, néanmoins, Jennifer Rubbin et ses coauteurs estiment que seule 4 à 5 % de la population des États-Unis <a href="https://journal-fuer-psychologie.de/article/view/324/355">est concernée par la non-monogamie consensuelle</a>.</p>
<p>En France, où peu de recherches sont menées sur ce sujet, l’Étude des parcours individuels et conjugaux (Epic) menée par l’Ined et l’Insee en 2013-2014 indique que 71 % des 25-65 ans considèrent <a href="https://www.cairn.info/revue-population-2019-1-page-173.htm">que l’on ne peut pas être amoureux de plusieurs personnes à la fois</a>. Le modèle du couple binôme a la vie dure.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199126/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Stéphanie Tabois ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Aux antipodes de la quête d’un unique alter ego, héritée de l’amour romantique, le polyamour revêt des formes multiples. Ses adeptes placent la communication au centre des relations.Stéphanie Tabois, Sociologue et anthropologue, Université de PoitiersLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1997492023-02-12T17:25:15Z2023-02-12T17:25:15ZSaint-Valentin : pourquoi quelques mots valent mieux qu’une rose rouge<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/509590/original/file-20230212-20-s27lq6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=61%2C159%2C1977%2C1069&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Faut-il écrire ses sentiments pour mieux aimer?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/meandmyshadow/8543244428">Julian Mason/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>17h50, la nuit est tombée déjà. Vous marchez d’un pas pressé, lisant sur votre téléphone le dernier mail du collègue qui vient d’arriver, vite répondre mais arriver à l’école avant que les portes ne ferment, sans quoi vous friserez le « parent défectueux » . Le nez sur votre écran, vous remarquez quand même une file d’attente insensée d’hommes devant la vitrine du fleuriste . Bigre! C’est la Saint-Valentin.</p>
<p>Pas de panique.</p>
<p>Il suffit peut-être de quelques minutes et de quelques mots, pour, ce soir, lui faire de nouveau (res)sentir votre amour. Le langage ne sert pas seulement à échanger des informations (c’est bon, je serai à l’heure à la sortie de l’école). Sa fonction n’est pas que fonctionnelle, ou référentielle (décrire le monde qui nous est extérieur). Elle est aussi <a href="https://books.openedition.org/pufc/42660"><em>expressive</em></a>. Les mots seuls donnent accès à nos vies intimes, donnent vie à nos sentiments. Encore mieux qu’avec une rose rouge, parole de linguiste!</p>
<h2>De loup à loulou, chouchou doudou et minou</h2>
<p>Voilà 10 ans, 20 ans que vous vivez avec chouchou, doudou ou minou. Vous vous adressez l’un à l’autre comme vous vous adressez à vos enfants. C'est l'autre familier, adorable et vulnérable, qui ne vous la fait plus, que retrouvez avec satisfaction le soir non loin de vos chaussons.</p>
<p>L’autre n’est plus son soi autre, celui que vous rencontrâtes un soir d’été, sur cette plage de Picardie, alors qu’un vent de folie douce secouait vos cheveux, que votre corps embrasé fondait de désir, que vous croquiez à pleines dents le maquereau tout juste péché, encore frétillant d’eau de mer. Alors son prénom, fut-il Georges ou Simone, mettait le feu à votre imaginaire, alors vous traciez de la pointe de votre doigt de pied nu dans le sable mouillé un G comme J’ai envie de toi ou un S comme serre-moi dans tes bras. </p>
<p>Au début d’une romance, le nom propre de l’autre est une porte ouverte sur un monde imaginaire. Comme tous les noms propres, il ne décrit aucunement le référent qu’il désigne, son sens est purement, dans les termes de Kleiber, <a href="https://www.cairn.info/revue-langue-francaise-2016-2-page-29.htm"><em>dénominatif</em></a> ; libre à nous de fantasmer à son propos.</p>
<p>Mais le temps passe, c’est ce qu’il fait. L’être de vos rêves est devenu objet de connaissance conjugale. Or, « la connaissance conjugale qu’on a des gens […] c’est peut‐être la pire de toutes » (Marguerite Duras, <em>Les petits chevaux de Tarquinia</em>). Si son prénom franchit vos lèvres aujourd’hui, c’est quand elles se pincent : enfin, George ou Simone, combien de fois je t’ai dit de ne pas prendre cette marque de maquereaux, les enfants n’aiment pas.</p>
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<p>Le reste du temps, vous baignez dans le bain tiède et mousseux de l’amour-doudou, et vos mots portent l’empreinte de cette pulsion de re-baptême propre à l’amour : « Appelle-moi amour, et je me rebaptise ! », crie Roméo à Juliette dans la pièce de Shakespeare (acte 2, scène 1).</p>
<p>Votre langage commun est un code qui décline toutes les marques d’une expressivité ronronnante, douce et tendre ; redoublement de syllabe, doudou, loulou, bibiche, tel Louis de Funès gagatisant auprès de Claude Gensac dans la série des <em>Gendarmes</em> ; suffixes mignons, chérinette/chérinou : autant de mots-caresses dits <a href="http://www.jstor.org/stable/41097466">« hypocoristiques » en linguistique</a>, qui prolifèrent dans nos <a href="https://dictionnaire.lerobert.com/definition/vocatif">vocatifs</a>.</p>
<p>Tous ces petits noms crient notre besoin de réassurance, notre pulsion d’appropriation de l’être aimé. Ce que Barthes nomme, dans ses <em>Fragments d’un discours amoureux</em>, « vouloir saisir ».</p>
<p>Les métaphores animalières sont un autre exemple de transfiguration caressante et réductrice. Dans votre appartement défilent toutes sortes d’animaux de petite taille et à poils doux, chat lapin souris ou belette, parfois on ne sait pas qui parle à qui et de quoi ou de qui il s’agit. De la peluche, de l’enfant, du chat qui ne se nourrit pas que d’amour mais aussi de croquettes. De l’adulte que vous êtes pourtant. Que vous fûtes. Qui sut, autrefois, être cet être de braise, désirant comme un fou, comme un loup à la gueule pleine de salive. Avant qu’il ne devienne loulou.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/NvhDHqYF10k?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<h2>Et si ce soir, vous faisiez exception ?</h2>
<p>Et si ce soir, vous élargissiez l’espace temps, si vous alliez chercher au fond de vos tripes quelques sons âpres et sauvages, si vous alliez réveiller la bête qui sommeille en vous ? Si en quelques mots, jetés sur un bout de papier, vous poussiez de nouveau, ne serait-ce qu’une seconde, le cri du loup, de la louve ? Si vous faisiez re-bouger, re-parler l’amour ? Car, avant d’en venir au mot, il faut aller puiser en soi la motivation : cet élan qui jaillit de l’émotion, de la mise en mouvement du sentiment. Il faut relancer le cycle émotion-sentiment, <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=McrLCgAAQBAJ">comme l’explique le neurologue Damasio</a>. Pour pouvoir dire « je t’aime », encore faut-il se donner les moyens, le temps, de faire venir à soi l’envie de le dire.</p>
<p>Un papier, un crayon. 10 min quelque part, où l’on ne vous dérange pas. Dans la salle de bains, aux toilettes, sur un siège de métro. 10 min pour re-penser à l’autre, comme quelqu’un de réellement autre. Re-penser la relation, pour que vos mots la refaçonnent. Parce que le langage modèle aussi vos désirs, les siens, la façon dont vous percevez le lien amoureux et dont les autres le perçoivent. Penser à cette personne qu’est l’autre quand vous n’êtes pas là. A tout ce qui vous échappe, qui est la plus grande partie de sa journée. Quand les chaussons ne sont pas sur ses pieds. Quand elle est cet être qui vous inspira ce désir fou de rester avec lui. Qui vous fit formuler peut-être ces mots insensés, les promesses d’éternité, je t’aimerai toujours, d’exclusivité, je ne veux personne d’autre que toi. Pour le dire avec Apollinaire dans ses <em>Poèmes à Lou</em> :</p>
<blockquote>
<p>« Tu es l’avenir et mon éternité,<br>
Toi mon amour unique et la seule beauté. »</p>
</blockquote>
<p>Pourquoi, comment les avez-vous ressentis, ces mots d’éternité ? Quelle évidence vous submergeait alors ? Quel geste avait-il donc, cet être que vous aimez encore, qui vous bouleversait ? Quel rire, quel sourire, quel mot, quelle attention vous touchait en plein cœur, vous foudroyant d’amour ?</p>
<p>C’est le moment de re-plonger dans vos émotions d’amour intense. Qu’elles remontent à la surface. Elles sont là, pas loin, tapies au fond de vous. La vie en a fait ce tapis sur lequel vous évoluez. Un tapis élimé, un peu terne et poussiéreux, dont les couleurs, tapées par le temps qui passe et les semelles de vos chaussures, ne demandent qu’un peu de votre attention pour revenir à la vie. Un peu de votre énergie.</p>
<p>L’émotion amoureuse est une énergie renouvelable par la parole. Qui demande parfois, quand on n’est pas en plein shoot d’une nouvelle romance, qu’on suspende la vie courante pour en res-sentir le flux. Pour en écouter battre le cœur. Parfois même il faut se mettre à quatre pattes sur le tapis. Le brosser follement, le suspendre par la fenêtre et le battre avec violence pour que s’envolent enfin les moutons de poussière.</p>
<h2>Alchimistes de l’amour</h2>
<p>Alors, à travers les particules qui flottent dans l’air, un rayon de soleil peut venir se poser sur votre tapis d’amour. En raviver les couleurs.</p>
<p>Vous aimez toujours.</p>
<p>Vous l’aimez depuis tant de temps !</p>
<p>Cela, déjà, est un cri d’amour. Un cri de jouissance. « La jouissance ne se dit pas ; mais elle parle et elle dit : je-t’-aime », nous rappelle Barthes. Vous, deux, ensemble, avez vaincu le temps.</p>
<p>Vos promesses d’éternité, dont ne vous ressentez peut-être plus l’urgence, qui ne vous tordent plus le ventre, vous les vivez. Les toujours de vos débuts sont votre quotidien, vos matins, vos après-midi, vos soirs. Comme le clame John Donne, dans son poème « The Legacy » : « Les heures des amants sont une éternité pleine ».</p>
<p>Vous avez, alchimistes de l’amour, transmué un rêve (faire durer l’amour) en une réalité : un lieu, rempli d’objets, de bruits, d’images, d’être vivants. Autant d’émanations, de produits dérivés de votre amour. Dans ce décor, qu’est-ce qui vous fait vibrer ? Vous met en colère ? Vous remue le plus ? Le sentiment amoureux n’est pas aussi lisse que vos petits noms le laisseraient croire, il est aussi fait d’ombres, de peur, de manque, il cristallise votre monde intérieur, le trouble de vos expériences. Laissez le sentiment <a href="https://presses.ens.psl.eu/collections_21_offshore_john-donne_978-2-7288-0497-9.html">venir perturber votre langue</a>.</p>
<p>Votre doudou l’est-il devenu parce qu’il est l’être qui vous console le mieux, parce que vous aimez dormir avec, parce que sa peau est douce, parce que son regard est comme une caresse ? Ou aussi, parce que vous avez besoin de le triturer, de l’empocher, de le piétiner, et parfois même, de l’oublier ?</p>
<p>Décrivez-lui.</p>
<p>Encore une ligne, peut-être. 4 mots. Que vous l’aimez toujours. Vous l’aimez, cet être sauvage que vous avez apprivoisé, qui par amour de vous a changé ses dents « pour des quenottes », comme chante Brassens en 1956 dans <a href="https://www.google.com/search?q=Je+me+suis+fait+tout+petit&rlz=1C5CHFA_enFR802FR802&oq=Je+me+suis+fait+tout+petit&aqs=chrome..69i57j46i512j0i512l4j46i512j0i512l3.220j0j7&sourceid=chrome&ie=UTF-8#fpstate=ive&vld=cid:2e949195,vid:yeVwgtcaOGU">« Je me suis fait tout petit »</a>. Par amour, rappelez-vous d’où il vient. D’où vous venez tous les deux. Du bois. D’un ailleurs. D’une plage, peut-être, de Picardie. D’un bar, enfumé, de Paris. De votre jeunesse. De vos espoirs. De votre courage.</p>
<p>En esprit, quittez un moment la familiarité du couple. Ne serait-ce que pour en apprécier le cocon, en souligner la douceur, dire comment ses contours vous protègent, que vous vous y sentez bien, pourquoi il est précieux. Dites que l’amour fait l’étoffe de votre bonheur. Qu’il est dans ce tapis, ou peut-être, dans le ciel. « Je t’aime tant que tout mon amour ne tient plus en moi, il y en a une bonne partie dans le ciel », <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b10724179w/f205.item">écrit Juliette Drouet à Victor Hugo</a> vers 1834, dont la lettre est conservée dans les manuscrits de la BNF.</p>
<p>Envisagez ce fait : le couple que vous formiez aurait pu ne pas être. Demain, il pourrait ne plus être. Aujourd’hui, il est.</p>
<p>En quoi est-ce joyeux ? Dites-le.</p>
<p>En quoi est-ce une bonne nouvelle ? Défaites l’habitude de vos mots communs, appelez-le de nouveau Georges ou Simone, confrontez l’adulte, l’étranger à quoi la vie peut toujours le rappeler.</p>
<p>Faites l’effort de penser le danger. Pour faire venir la lumière. Et ressentir de nouveau la nécessité des mots de l’amour.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/509566/original/file-20230211-27-s1gmjy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/509566/original/file-20230211-27-s1gmjy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/509566/original/file-20230211-27-s1gmjy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=878&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/509566/original/file-20230211-27-s1gmjy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=878&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/509566/original/file-20230211-27-s1gmjy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=878&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/509566/original/file-20230211-27-s1gmjy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1103&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/509566/original/file-20230211-27-s1gmjy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1103&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/509566/original/file-20230211-27-s1gmjy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1103&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Pourquoi le ou la désirez-vous encore ? Toujours, malgré tout ? Quel son, quelle odeur, quelle partie de son corps, quel défaut de son élocution, quelle fragilité vous retient ? Quelle ombre sur son visage ? Quelle ride nouvelle ? Vous êtes la seule personne capable de décrire ce que le temps fait à l’être que vous aimez.</p>
<p>Les mots d’amour naissent de l’émotion, qu’ils alimentent et décuplent en retour. Ils la font exister. Mieux que tous les objets, que toutes les roses, ils activent notre imaginaire. Les mots font l’amour.</p>
<p>Ce soir, dites-lui avec vos mots comment vous l’aimez. Encore. Aucune déclaration n’épuisera la lumière diffuse, ténue et tenace, d’un amour qui dure.</p>
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<p><em>Julie Neveux est l’autrice de <a href="https://www.grasset.fr/livres/le-langage-de-lamour-9782246826965">« Le langage de l’amour. De la rencontre à la rupture, comment les mots révèlent nos sentiments »</a>, Grasset, 2022.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199749/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julie Neveux ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les mots seuls donnent accès à nos vies intimes, donnent vie à nos sentiments. Encore mieux qu’avec une rose rouge. Parole de linguiste.Julie Neveux, Maîtresse de Conférences en linguistique, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1846722022-07-25T19:55:30Z2022-07-25T19:55:30ZPourquoi les applications de rencontre nous déshumanisent-elles ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/473603/original/file-20220712-32189-fhu5qg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=29%2C99%2C6619%2C4326&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’utilisateur se retrouve sans le savoir dans une sorte de purgatoire où son expérience est rendue volontairement frustrante, aux antipodes de la promesse initiale des plateformes.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Aujourd’hui, malgré une réputation encore sulfureuse, les applications constituent un moyen crédible de rencontrer des partenaires pour de nombreux Français.</p>
<p>À titre d’exemple, <a href="https://www.ifop.com/publication/enquete-sur-la-rencontre-en-ligne-et-la-digitalisation-de-la-vie-sexuelle-a-lheure-du-Covid-19/">près d’un quart des Français</a> ayant trouvé un partenaire depuis la fin du premier confinement l’a rencontré sur une application de rencontre.</p>
<p>Pourtant, ce type de plates-formes suscite encore de la méfiance pour les non-utilisateurs, mais aussi pour les utilisateurs. Ces derniers vivent parfois ces applications comme des espaces de frustration et parfois de souffrance. Au-delà du lieu commun du « supermarché de l’amour », nous proposons d’examiner les raisons pour lesquelles les applications de rencontre peuvent aliéner ou objectifier leurs utilisateurs.</p>
<h2>Un design d’application exploitant le désir amoureux</h2>
<p>Quel que soit leur concept (à l’exception des <a href="https://www.challenges.fr/high-tech/internet/l-appli-de-slow-dating-anti-tinder-once-grandit-a-toute-vitesse_448777">applications de slow dating</a> proposant volontairement peu de profils dans une logique qualitative) et, leurs spécificités, les applications de rencontre visent à faciliter et à accélérer les rencontres. À l’instar des réseaux sociaux, leur enjeu économique fondamental est l’acquisition, la rétention et la monétisation de leurs utilisateurs. Et comme pour les réseaux sociaux, la <a href="https://theconversation.com/tout-ce-que-vous-avez-toujours-voulu-savoir-sur-leconomie-des-sites-de-rencontres-sans-jamais-oser-le-demander-140490">démarche business sous-jacente à ces plates-formes</a> revêt de graves conséquences.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/que-se-passe-t-il-dans-le-cerveau-quand-on-tombe-amoureux-72834">Que se passe t-il dans le cerveau quand on tombe amoureux ?</a>
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<p>Ainsi, dès l’inscription, les applications simplifient l’accès à leur vivier de célibataires : il suffit souvent d’un compte Facebook ou d’un numéro de téléphone, et d’une image pour exister sur la plate-forme. Les utilisateurs étant peu guidés et conseillés, la qualité des profils s’en ressent.</p>
<p>Selon l’étude que nous avons menée dans le cadre de notre ouvrage <a href="https://www.editions-harmattan.fr/livre-applications_de_rencontre_decryptage_du_neo_consumerisme_amoureux_ziyed_guelmami_francois_nicolle-9782343256191-72575.html">« Applications de rencontre. Décryptage du néo-consumérisme amoureux »</a>, seulement 59 % des profils masculins proposent une description et un tiers d’entre eux proposent une description ou biographie de plus d’une phrase. La pauvreté du contenu de nombreux profils (ou leur aspect très artificiel) implique que l’on s’y attarde moins, qu’on ne les prend pas au sérieux. En conséquence, l’être humain derrière le profil s’avère beaucoup moins visible. Notons que ce phénomène est moins prégnant sur les sites de rencontre traditionnels (où les frais d’inscription supposent une plus grande élaboration du profil) et sur certaines applications encourageant les utilisateurs à répondre à un grand nombre de questions pour alimenter leur profil.</p>
<h2>Algorithmes secrets</h2>
<p>Ce premier problème n’a pourtant qu’une influence toute relative sur le désir des utilisateurs, promis à la rencontre d’une abondance de célibataires. Une ou deux photos peuvent suffire à susciter l’envie de rencontrer. Ici, la nécessité des applications à retenir leurs inscrits peut s’avérer nuisible. Nul ne sait comment sont conçus les différents algorithmes de suggestion de profils, seulement, si l’on se fie à l’expérience des utilisateurs telle qu’elle est racontée, on se rend compte que les applications distillent les profils pertinents au compte-goutte et qu’une lassitude tend à s’installer. Ce sentiment suscite une moindre implication dans la démarche de <em>dating</em>, un moindre intérêt dans chaque profil proposé, et, conséquemment, la multiplication de comportements peu constructifs, voire antisociaux.</p>
<p>Enfin, la nécessité de monétiser les profils prometteurs contribue également à faire des applications de rencontres des machines à créer de la frustration. Il s’agit pour ces plates-formes d’amoindrir la performance naturelle de ces utilisateurs pour les encourager à opter pour des options payantes (pour mettre en avant son profil, pouvoir aimer un nombre illimité de profils ou envoyer un message non sollicité, etc.). Ce système permet aux applications de rencontre de figurer parmi les <a href="https://www.sudouest.fr/sciences-et-technologie/et-l-application-la-plus-rentable-est-tinder-1336287.php">plus rentables au monde</a>.</p>
<p><em>[Près de 70 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5">Abonnez-vous aujourd’hui</a>.]</em></p>
<p>L’utilisateur lambda, attiré par les applications pour leur gratuité apparente, se retrouve donc sans le savoir dans une sorte de purgatoire où son expérience serait rendue volontairement frustrante, aux antipodes de la promesse initiale des plates-formes, en proie aux problèmes d’estime de soi que l’on peut imaginer. On observe ainsi nombre d’utilisateurs s’accrochant désespérément à la moindre mise en contact et certains autres développant de l’agressivité.</p>
<h2>Un système fécond de comportements antisociaux</h2>
<p>La conception (le design) des applications de rencontre, ainsi que la <a href="https://theconversation.com/le-cyberespace-lieu-de-schizophrenie-identitaire-95329">nature même du cyberespace</a>, favorise les comportements antisociaux et tend donc à déshumaniser les rencontres en ligne. Nous abordons ici quelques exemples parlants qui nous ont été relatés dans le cadre de notre étude.</p>
<p>Tout d’abord, parmi les critères d’adoption des applications de rencontre, deux aspects sont régulièrement évoqués : s’engager dans une <a href="https://www.cairn.info/revue-societes-contemporaines-2016-4-page-13.htm">logique d’homophilie</a> ou s’ouvrir à de nouveaux horizons. Si cela semble contradictoire, nos recherches démontrent que ces deux approches aboutissent sur un comportement de recherche similaire : une hypercritérisation.</p>
<p>D’après notre étude, 73,8 % des répondants se considèrent plus sélectifs en matière de critères sur les applications que dans la vie hors ligne. Cette hypercritérisation correspond à une tendance très prononcée à focaliser son attention sur des critères conçus comme des préférences personnelles mais souvent découlant du système des applications tels que l’âge, la taille, la couleur de peau, des cheveux, le métier, le niveau d’études, la religion, la qualité de l’orthographe, etc.</p>
<p>Cette hypercritérisation va souvent de pair avec une hypersélectivité. Un utilisateur pourra donc considérer que le moindre élément d’un profil est rebutant et disqualifier ainsi chaque profil non conforme, à tout moment. Ce phénomène, s’il peut paraître bénin ou légitime, tend à vider la démarche de rencontre de son sens, à la rendre bien plus artificielle et à instaurer la fameuse atmosphère de « prêt-à-jeter » tant décriée sur les applications. Paradoxalement, l’hypercritérisation et l’hypersélectivité constituent le revers de la médaille d’une trop grande abondance de profils.</p>
<h2>Violence du <em>ghosting</em></h2>
<p>En conséquence, le <a href="https://uottawa.scholarsportal.info/ottawa/index.php/CJMS-RCEM/article/view/5878/4893"><em>ghosting</em></a> s’est imposé comme un acte de violence normalisé et intériorisé par les utilisateurs. Ce terme issu de l’anglais « ghost » (fantôme) désigne le fait de ne plus donner de nouvelles à quelqu’un de manière subite et définitive, sans raison apparente. Selon notre étude, 53 % des hommes et 80 % des femmes admettent l’avoir déjà fait lors de leur activité de <em>dating</em>. Il est intéressant de noter que le <em>ghosting</em> se pratique aussi après une rencontre « en réel » suite à des échanges sur les applications de rencontre. Il ne s’agit donc pas seulement d’un problème de design des applications ; le système d’abondance qu’elles ont instauré altère également les interactions humaines hors du monde virtuel. Plusieurs éléments viennent favoriser cette pratique sur les applications : la consommation cyclique des plates-formes (les utilisateurs s’inscrivent et se désinscrivent au gré de leur situation amoureuse), l’incitation à flirter avec plusieurs personnes à la fois, la décontextualisation des rencontres (c’est-à-dire qu’aucun contexte social ne consolide le lien établi entre deux personnes), la mauvaise perception – paradoxale – que l’on a des autres utilisateurs sur ces plates-formes (c’est le cas de 54 % des répondants de notre étude), le fait d’être soi-même régulièrement victime de ghosting et de vouloir « rendre la pareille ».</p>
<p>La problématique de l’hypercritérisation présente également des cas plus extrêmes, par exemple la fétichisation, notamment des minorités. <a href="https://www.causette.fr/en-prive/fesses/fetichisation-la-souffrance-des-minorites-sur-les-applications-de-rencontre">De nombreux témoignages</a> ainsi que les travaux du chercheur français <a href="https://twitter.com/marc_jahjah">Marc Jahjah</a> mettent en évidence ce phénomène sur les applications. La fétichisation consiste dans ce cas à ne plus considérer son interlocuteur comme un individu à part entière, mais à l’assimiler à une catégorie, un stéréotype, basé sur des critères visibles comme la couleur de peau, la taille, une partie de son corps (seins, mains, pieds, cheveux, sexe, etc.). Ici, l’humain est donc réduit à l’un de ses attributs : il s’agit donc d’une forme d’objectification qui contribue à alimenter le sentiment de déshumanisation et de marchandisation sur les plates-formes de rencontre.</p>
<h2>Quitter les applications pour réhumaniser la rencontre en ligne ?</h2>
<p>La lassitude (la <a href="https://www.psychologies.com/Couple/Seduction/L-amour-sur-Internet/Articles-et-dossiers/Dating-fatigue-le-grand-ras-le-bol-des-applis-de-rencontre">« dating fatigue »</a>) est sans doute le plus grand mal qui ronge le monde des applications aujourd’hui. Si ces plates-formes semblent satisfaire leurs utilisateurs au début de leur activité, ce sentiment semble décroître au fur et à mesure du temps, ce qui amène logiquement les utilisateurs à quitter ces plates-formes. 88 % de nos sondés déclarent avoir déjà désinstallé toutes leurs applications de rencontre. Cependant, parmi eux, seuls 31 % l’ont fait car ils avaient rencontré une personne qui leur convenait. Les 69 % restants ont quitté les applications par lassitude, pour leur caractère chronophage ou suite à une mauvaise expérience. Ces chiffres ne surprennent pas, étant donné que la <a href="https://www.rtbf.be/article/comment-la-frustration-des-hommes-est-le-gagne-pain-des-applis-de-rencontre-10852584">frustration sur les applications de rencontre</a> fait partie intégrante de leur modèle d’affaires « freemium ».</p>
<p>En guise d’alternative, les ex-utilisateurs, notamment les <a href="https://www.franceinter.fr/societe/c-est-completement-malsain-enquete-sur-ces-jeunes-qui-quittent-les-applis-de-rencontre">jeunes</a>, se tournent de plus en plus vers les réseaux sociaux comme <a href="https://www.femmes.nc/couple/instagram-est-il-le-nouveau-tinder.html">Instagram</a> pour faire des rencontres. Sur ces plates-formes, les échanges sont perçus comme plus authentiques, et donc, plus humains.</p>
<p>Nous soulevons donc le rôle essentiel que les utilisateurs ont à jouer pour contribuer à réhumaniser les rencontres en ligne, mais soulignons surtout la responsabilité des applications qui se doivent de proposer une conception éthique de l’expérience utilisateur si elles souhaitent se pérenniser. Un mouvement s’opère déjà chez les plates-formes pour intégrer des dispositifs de sécurité et pour <a href="https://theconversation.com/tinder-est-bien-plus-quune-appli-de-rencontre-132553">lutter contre les pratiques antisociales</a> mais leur modèle d’affaires semble encore limiter leurs options.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/184672/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’atmosphère de « prêt-à-jeter » des applications produit frustration, lassitude, problèmes de confiance en soi et en les autres.François Nicolle, Enseignant chercheur - ICD Paris, ICD Business SchoolZiyed Guelmami, Enseignant-chercheur en marketing, Institut Mines-Télécom Business School Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1841252022-06-01T19:24:28Z2022-06-01T19:24:28ZAs-tu un amoureux ou une amoureuse ? Pourquoi il faut éviter de poser cette question à un enfant<p>Lorsque sa mère lui a demandé un jour, après l’école, s’il avait une petite amie, Nicolas, 4 ans, a regardé son père d’un air étrange en disant : « Papa, est-ce qu’il faut avoir une petite amie ? »</p>
<p>Quant à Olivia, 7 ans, lorsqu’un des parents, lors d’une fête d’anniversaire, lui a demandé lequel des invités était son petit ami, elle a immédiatement baissé la tête et s’est éloignée, embarrassée, du groupe d’enfants avec lequel elle jouait. Le lendemain, à l’école, elle a évité de rester avec eux car elle était gênée que quelqu’un puisse penser que l’un de ses amis était son petit ami.</p>
<p>Ces deux situations vous sont probablement familières, car il est courant que les adultes posent de telles questions aux enfants. Même s’il est évident qu’ils ne cherchent qu’à observer la réaction de l’enfant, cette question apparemment innocente peut avoir des conséquences sur la manière dont l’enfant se comporte avec les autres.</p>
<h2>Le concept d’amitié chez les enfants</h2>
<p>L’interaction avec les pairs est un moyen d’apprentissage très puissant. Le concept d’amitié évolue au cours des étapes du développement et diffère donc en fonction de l’âge de l’enfant. <a href="https://www.gse.harvard.edu/faculty/robert-selman">Robert Selman</a>, professeur à l’université de Harvard, a proposé l’une des théories les plus connues sur l’évolution de l’amitié.</p>
<p>Il a suggéré que si les enfants d’âge préscolaire conservent une vision égocentrique de l’amitié et considèrent que les amis sont ceux avec qui ils partagent des jeux et le même espace physique, pour les enfants d’âge scolaire, les préférences partagées et la coopération deviennent plus importantes. À l’adolescence, le soutien mutuel est davantage valorisé.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/364477/original/file-20201020-17-1g62emd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C4%2C1000%2C661&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/364477/original/file-20201020-17-1g62emd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/364477/original/file-20201020-17-1g62emd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/364477/original/file-20201020-17-1g62emd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/364477/original/file-20201020-17-1g62emd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/364477/original/file-20201020-17-1g62emd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/364477/original/file-20201020-17-1g62emd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le choix d’amis ne dépend pas uniquement des activités partagées par les enfants, mais aussi des jugements exprimés par les adultes.</span>
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<a href="https://theconversation.com/comment-les-enfants-choisissent-ils-leurs-amis-142319">Comment les enfants choisissent-ils leurs amis ?</a>
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<p>Les relations entre pairs contribuent au développement émotionnel et social de chacun, en favorisant le sentiment d’appartenance à un groupe. Dans l’enfance, la curiosité à l’égard de son propre corps et du corps des autres est normale, tandis que dans la préadolescence, l’exploration sexuelle est courante.</p>
<p>Le changement de la nature des relations entre pairs se produit à l’adolescence, avec un intérêt sexuel accru. Ce n’est qu’à ce moment-là que les amitiés évoluent vers un lien plus affectif.</p>
<h2>L’influence des adultes</h2>
<p>Dès le plus jeune âge, on observe une <a href="https://psycnet.apa.org/record/1990-19535-001">préférence pour les relations avec des pairs du même sexe</a> qui se poursuit à l’adolescence. Bien qu’il soit courant que les enfants préfèrent jouer avec des camarades de leur propre sexe, cette ségrégation influence leurs relations avec les autres.</p>
<p>Les adultes, par leurs commentaires, approuvent ou désapprouvent les relations que les enfants entretiennent avec leurs camarades, les conditionnent. Nous influençons, peut-être naïvement et sans méchanceté, les relations entre les garçons et les filles.</p>
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<p>Bien qu’il existe une préférence avérée pour les amitiés entre personnes du même sexe, les enfants n’attribuent pas, dès leur plus jeune âge, leurs relations avec les autres à autre chose qu’à l’amitié. En fait, un enfant de 4 ans peut difficilement expliquer ce qu’est un petit ami ou une petite amie ; il peut même assimiler cette notion à celle de meilleurs amis. Lorsqu’un adulte utilise les expressions « petit ami » ou « petite amie » pour désigner un bon ami de son enfant, cela crée une confusion chez l’enfant, qui, à son jeune âge, apprend à identifier ses émotions et celles des autres.</p>
<h2>On ne peut pas être amis ?</h2>
<p>Demander aux enfants s’ils ont un petit ami ou une petite amie peut influencer la manière dont ils se comportent avec leurs amis. En posant de telles questions, nous transmettons l’idée que les garçons et les filles ne peuvent pas avoir une relation d’amitié, mais qu’en jouant avec des pairs de l’autre sexe, la relation devient quelque chose de plus. De cette façon, nous les encourageons à n’avoir de relations qu’avec les personnes du même sexe, en marquant les différences entre les deux.</p>
<p>En outre, nous les incitons à éviter les amis de sexe différent afin d’éviter les commentaires désobligeants du reste du groupe. La question innocente « Qui est ta petite amie ? » peut susciter chez un garçon de 8 ans un rejet à l’égard de l’amie féminine avec laquelle il partage des jeux, car il ne veut pas être distingué du groupe du fait d’avoir une relation d’amitié intime, souvent associée à des comportements dont les enfants ont honte, comme s’embrasser ou se tenir la main.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/376628/original/file-20201224-13-jw7x5t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=44%2C332%2C5748%2C3359&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/376628/original/file-20201224-13-jw7x5t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/376628/original/file-20201224-13-jw7x5t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/376628/original/file-20201224-13-jw7x5t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/376628/original/file-20201224-13-jw7x5t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/376628/original/file-20201224-13-jw7x5t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/376628/original/file-20201224-13-jw7x5t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jouer, est-ce intégrer des représentations sociales ou exercer son imaginaire ?</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/etre-assis-jouer-jeune-sol-3662822/">de cottonbro provenant de Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<a href="https://theconversation.com/les-jeux-denfants-ont-ils-un-genre-145880">Les jeux d’enfants ont-ils un genre ?</a>
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<p>En demandant aux enfants s’ils ont un petit ami ou une petite amie, nous les avertissons qu’il existe une manière différente de se comporter avec des personnes, ce qui encourage un changement dans leur façon d’être avec leurs amis.</p>
<h2>Hypersexualisation inutile</h2>
<p>Lorsque nous demandons aux enfants quel garçon ils aiment ou qui est leur petite amie, nous normalisons l’idée qu’à leur âge ils peuvent avoir un ami proche comme les adultes, ce qui encourage l’hypersexualisation des enfants. Nous tolérons des comportements qui n’ont pas leur place dans l’enfance, en les approuvant par nos commentaires et les encourageons à assumer des rôles qui ne correspondent pas à leur stade de développement.</p>
<p>En conclusion, les adultes devraient encourager les amitiés des enfants, car les liens sociaux sont l’un des plus puissants facteurs de protection du bien-être psychologique.</p>
<p>Toutefois, interpréter les comportements sociaux des enfants, tels que le partage du temps et des jeux, comme des relations amoureuses, crée des différences entre eux, les perturbe dans l’apprentissage des émotions et peut les amener à s’éloigner précisément des amis avec lesquels ils partagent davantage d’intérêts et de préférences.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/184125/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Las personas firmantes no son asalariadas, ni consultoras, ni poseen acciones, ni reciben financiación de ninguna compañía u organización que pueda obtener beneficio de este artículo, y han declarado carecer de vínculos relevantes más allá del cargo académico citado anteriormente.</span></em></p>Les commentaires bien intentionnés auxquels nous n’accordons pas d’importance ont un effet plus fort que nous le pensons sur la façon dont les enfants se socialisent.Mireia Orgilés, Catedrática de Universidad. Experta en Tratamiento Psicológico Infantil, Universidad Miguel HernándezJosé Pedro Espada, Catedrático de Psicología, Universidad Miguel HernándezLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1748912022-01-18T18:29:13Z2022-01-18T18:29:13ZLa gestion de l’argent au sein du couple, un reflet de la conception d’une relation amoureuse<p>L’argent reste généralement, dans l’idéal collectif, décorrélé du sujet de l’amour. Pourtant, comme le soulignait le poète <a href="https://citations.ouest-france.fr/citation-charles-baudelaire/malheureusement-bien-vrai-sans-loisir-24398.html">Charles Baudelaire</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Il est malheureusement bien vrai que, sans le loisir et l’argent, l’amour ne peut être qu’une orgie de roturier ou l’accomplissement d’un devoir conjugal. »</p>
</blockquote>
<p>La gestion des finances dans le couple apparaît comme un sujet délicat, probablement parce qu’il s’agit d’un aspect directement lié à <a href="https://academic.oup.com/jcr/article-abstract/45/2/298/4756471?redirectedFrom=fulltext">l’intimité</a> de la relation. Selon la sociologue Janine Mossuz-Lavau, en France « l’argent est <a href="https://www.cairn.info/revue-dialogue-2008-3-page-15.htm?contenu=article">encore plus tabou que la sexualité</a> ».</p>
<p>Dans <a href="https://www.cairn.info/revue-gerer-et-comprendre-2021-1-page-13.htm">nos travaux</a>, nous avons voulu aborder cette boîte noire de la prise de décision des conjoints en identifiant les facteurs d’influence qui expliquent les modes de fonctionnement des couples en matière de gestion des finances. Le thème est loin d’être anecdotique dans la mesure où des conflits liés à l’argent émergent souvent dans les couples, pouvant déboucher sur des <a href="https://www.financialplanningassociation.org/article/journal/MAY17-tightwads-and-spenders-predicting-financial-conflict-couple-relationships">séparations et des divorces</a>.</p>
<h2>Liberté, égalité, ou fraternité</h2>
<p>La gestion financière du couple touche en effet à <a href="https://journals.openedition.org/rccs/6467">différentes décisions quotidiennes</a> ayant trait à l’argent comme l’épargne, les investissements et les dépenses courantes. Dès le premier rendez-vous d’un couple, des règles commencent à s’établir entre les partenaires qui vont poser les premières pierres à l’édifice de la relation : l’addition est-elle partagée ou payée par l’un d’eux ? Puis, les <a href="https://www.persee.fr/doc/caf_2101-8081_2011_num_105_1_2617">routines mises en place</a> dès la première cohabitation façonnent le mode de gestion de l’argent du couple qui s’inscrit dans le temps.</p>
<p>Un aspect important concerne le choix du <a href="https://journals.openedition.org/terrain/3530">mode d’organisation des comptes bancaires</a>. Selon l’Insee, seulement <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/1281044">3 couples sur 5</a> environ optent pour un fonctionnement en compte commun uniquement, acceptant ainsi que toutes les entrées d’argent soient partagées au sein du ménage. Parmi les nombreux couples qui rejettent ce mode de fonctionnement en commun en matière d’argent, environ la moitié utilisent des comptes séparés, et l’autre moitié optent pour un mode mixte combinant des comptes individuels avec un compte joint. Mais qu’est-ce qui pousse les couples à privilégier une organisation plutôt qu’une autre ?</p>
<p><iframe id="UgWq6" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/UgWq6/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Dans une étude en cours, nous montrons que la façon dont les couples organisent leurs comptes bancaires et leurs dépenses est le reflet de leur conception d’une relation amoureuse. Les motivations des individus concernant leur choix de gestion de l’argent peuvent se traduire, en écho à la devise de la République française, par le triptyque <a href="https://www.vie-publique.fr/dossier/276089-liberte-egalite-fraternite">« liberté, égalité, fraternité »</a>.</p>
<p>Les couples qui optent pour un compte commun sont le plus souvent dans une logique d’idéal fusionnel et refusent d’adopter une logique comptable au sein de leur relation avec leur partenaire. Ainsi, un des répondants interrogés explique :</p>
<blockquote>
<p>« Quand on s’est mis ensemble, on a décidé de tout penser à deux et de tout partager et de ne pas commencer à compter chaque petit centime. Pour moi, s’aimer c’est tout mettre en commun dont l’argent ! »</p>
</blockquote>
<p>Les couples qui optent pour des comptes individuels cherchent généralement à garder leur indépendance financière, à s’offrir une certaine autonomie décisionnelle, et à limiter les difficultés en cas de séparation future. À ce dernier sujet, une répondante indique d’ailleurs :</p>
<blockquote>
<p>« Mon compte personnel me permet de penser à moi, de faire des achats que j’aime et que mon partenaire n’aime pas forcément. Et puis finalement, de ne pas discuter pour un oui ou pour un non pour la moindre petite chose dont j’ai envie. »</p>
</blockquote>
<p>Le mode de gestion des comptes bancaires retenu reflète donc les valeurs qui caractérisent chaque couple. Les comptes individuels sont fréquemment associés à des notions d’indépendance et de liberté, alors que les comptes communs sont liés à la recherche de solidarité et de partage, faisant écho à la fraternité. Enfin, la quête d’égalité guide vers une répartition proportionnelle des dépenses, en intégrant des disparités de revenus.</p>
<h2>Un « non directeur financier » plus exposé</h2>
<p>La prise de décision du couple en matière de gestion des finances peut refléter l’exercice de relations de pouvoir entre conjoints et générer des sentiments d’<a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0192513X19891463">insatisfaction</a>. Plusieurs répondants ont évoqué ainsi un sentiment d’injustice ou un système imposé par leur conjoint qui ne leur convient pas.</p>
<p>De façon surprenante, le mode de gestion financière évolue relativement peu au cours du temps au sein du couple, même si un des partenaires le demande explicitement. Cette tendance peut s’expliquer par la difficulté de remettre en cause le contrat de départ, tacite ou officiellement discuté entre les conjoints. En conséquence, les partenaires doivent veiller à ce que leur point de vue soit pris en compte sur le plan financier dès les premières phases de leur relation amoureuse.</p>
<p>Des <a href="https://www.lefigaro.fr/sciences/parler-d-argent-pour-mieux-continuer-a-s-aimer-20211107">échanges formels entre les conjoints</a>, visant à prendre en compte les valeurs de chacun et trouver un terrain d’entente bénéfique pour le couple, apparaissent donc être une condition sine qua non pour une relation équilibrée.</p>
<p>Mieux comprendre les modes d’organisation des couples autour de l’argent peut aider à proposer des solutions visant à améliorer le <a href="https://www.lefigaro.fr/actualite-france/couple-et-argent-les-comptes-separes-sont-ils-la-cle-du-bonheur-20210129">bien-être</a>, à accompagner le <a href="https://www.pleinevie.fr/conso-argent/budget/quel-budget-pour-bien-vieillir-a-la-retraite-8209.html">bien vieillir</a> et à renforcer les compétences individuelles en matière de gestion financière pour les partenaires les plus vulnérables lors de périodes difficiles (maladie ou décès du conjoint, chômage, divorce, etc.).</p>
<p>À ce dernier sujet, le <a href="https://academic.oup.com/jcr/article/45/5/1013/4985189">« non directeur financier »</a> d’un ménage, c’est-à-dire le partenaire qui préfère se décharger des décisions relatives à l’argent sur son conjoint, va être particulièrement exposé lors de ces étapes de vie délicates. Aussi, des entreprises spécialisées en gestion de patrimoine, comme <a href="https://groupe-quintesens.fr/actualite/protection-du-conjoint-retraite-et-solution-de-financement-etude-cas">Quintésens</a>, proposent aux couples d’analyser leur situation financière afin d’identifier la solution d’accompagnement la plus adaptée pour préparer la retraite et protéger le conjoint survivant. Le secteur bancaire, à l’instar de <a href="https://www.fortuneo.fr/cote-finances/decryptage-epargner-a-deux-et-epargner-pour-deux-160318">Fortuneo</a>, fournit également des conseils personnalisés pour épargner à deux en fonction du statut matrimonial.</p>
<p>La gestion des finances des couples peut aussi se caractériser par de <a href="https://academic.oup.com/jcr/article/47/1/1/5610529">l’infidélité financière</a>, lorsqu’un des partenaires cache volontairement des informations financières à son conjoint. Si cet aspect est associé à des comportements à risque, comme, par exemple, les jeux d’argent, il apparaît important que des solutions réglementaires d’accompagnement soient proposées afin d’éviter que le ménage se retrouve dans une situation financière trop délicate et nuisible au bien-être des partenaires. Des <a href="https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F790">mesures d’urgence légales</a>, à la demande d’un des époux, comme interdire de vider un compte bancaire, restent ainsi possibles.</p>
<p>Appréhender les différents contours de l’organisation pratique des couples français permet, par ailleurs, de nourrir le débat public en matière de politiques sociales. Le débat sur la déconjugalisation de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) à l’Assemblée nationale à l’automne 2021 en est un exemple frappant. Une <a href="https://lcp.fr/actualites/handicap-l-assemblee-repousse-une-nouvelle-fois-la-deconjugalisation-de-l-aah-92085">députée</a> membre de la Commission des affaires sociales, sous-entendant une conception du couple où une mise en commun totale des ressources s’opère, a ainsi expliqué :</p>
<blockquote>
<p>« Nous pensons que l’individualisation de l’AAH remettrait en cause l’ensemble de notre système socio-fiscal qui est fondé sur la solidarité familiale, conjugale et nationale. »</p>
</blockquote>
<p>Or, la prise en considération de <a href="https://www.cairn.info/revue-gerer-et-comprendre-2021-1-page-13.htm">l’hétérogénéité des modalités de gestion des finances</a> par les couples apparaît centrale pour les accompagner de façon réaliste et pertinente au cours du temps et selon les différents challenges de vie possibles.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174891/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le compte commun traduit une logique d’idéal fusionnel, tandis que le choix de conserver des comptes individuels exprime la volonté de conserver une certaine autonomie décisionnelle.Sarah Benmoyal Bouzaglo, Maitre de conférences, Université Paris CitéCorina Paraschiv, Professeur en sciences de gestion, Université Paris CitéMaïva Ropaul, Maître de conférences en sciences de gestion, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1696812021-11-16T18:49:38Z2021-11-16T18:49:38ZFictions pour la jeunesse : les nouvelles héroïnes cassent-elles vraiment les stéréotypes de genre ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/431055/original/file-20211109-15-1w1ne3x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C1192%2C797&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Jennifer Lawrence, dans le rôle de Katniss, héroïne de "Hunger games", et personnage apprécié par les adolescentes.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.allocine.fr/film/fichefilm-145083/photos/detail/?cmediafile=19851874">Allociné / Copyright Metropolitan FilmExport</a></span></figcaption></figure><p><em>C'est en se heurtant au réel et en multipliant les expériences que chaque enfant dessine son chemin vers l'âge adulte. Mais sa personnalité et ses convictions, il les forge aussi à partir des imaginaires dans lesquels il baigne et des histoires qu'on lui raconte. Notre série « L'enfance des livres » vous invite à découvrir la complexité et l'extraordinaire diversité de la littérature de jeunesse. Après un retour sur <a href="https://theconversation.com/cinq-auteurs-de-jeunesse-a-faire-absolument-decouvrir-aux-enfants-185235">quelques grands auteurs d'aujourd'hui</a>, <a href="https://theconversation.com/becassine-lheroine-qui-avait-du-mal-a-grandir-184751">une figure indémodable, Bécassine</a>, l'écriture de<a href="https://theconversation.com/parler-de-la-traite-des-esclaves-aux-enfants-alma-lhistoire-dun-roman-178796"> Timothée de Fombelle</a> et <a href="https://theconversation.com/trois-questions-sur-lhistoire-des-livres-pour-enfants-181098">une histoire des livres pour enfants</a>, ce dernier épisode se penche sur la littérature « young adult ».</em></p>
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<p>L’influence des personnages de fiction sur la représentation des normes de féminité et de masculinité chez les jeunes est un sujet souvent abordé du point de vue de la littérature qui leur est destinée. Dans cette catégorie, à l’exception de ce qui relève des intrigues de romance, les personnages féminins sont longtemps demeurés secondaires.</p>
<p>Des maisons d’édition dédiées à un public enfantin ont ainsi développé une production qui renverse les stéréotypes tenaces. On peut citer Talents hauts, où, par exemple, dans <em>La princesse et le dragon</em>, l’héroïne combat son dangereux ennemi par la force de son intelligence, libérant ainsi un prince charmant goujat qui lui reproche sa tenue vestimentaire débraillée. Elle s’émancipera de lui à son tour, renversant la position d’attente des princesses à l’égard des princes pour revendiquer de choisir quel prince lui convient ou non.</p>
<p>Du côté des productions pour adolescentes, adolescents et jeunes adultes, les stéréotypes de genre dans les productions qui leur sont destinées sont retravaillés dans le sens de contre-stéréotypes, voire de <a href="https://journals.openedition.org/jda/2967">néostéréotypes</a>. C’est le cas de la littérature dite « young adult ».</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/enfants-et-ados-neuf-romans-contre-les-stereotypes-de-genre-131885">Enfants et ados : neuf romans contre les stéréotypes de genre</a>
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<p>Cette catégorie marketing qui vise le public cible des 14-25 (voire 30 ans), désigne un ensemble de publications qui ne se caractérisent pas par un style littéraire identifié : il peut s’agir de dystopie comme de fantasy ou de romance. Les ouvrages considérés comme précurseurs sont tantôt <em>Harry Potter</em>, tantôt <em>Nos étoiles contraires</em> de John Green. Ce dernier livre met en récit l’histoire d’amour entre deux adolescents atteints de cancer et caractérise également la sous-catégorie de la « sick litt » dont la spécificité réside dans une histoire romantique endeuillée par la maladie.</p>
<h2>Des héroïnes fortes</h2>
<p>Parmi les personnages marquants de la « young adult », on peut citer Hermione d’<em>Harry Potter</em>, Triss de <em>Divergentes</em>, Katniss Everdeen de <em>Hunger Games</em> ; mais également Ellana dans <em>Le Pacte des Marchombres</em> de Pierre Bottero. Ces personnages ressortent de manière massive lorsqu’on interroge des lycéens et lycéennes sur les personnages de fiction qui les ont marqués.</p>
<p>À partir d’une <a href="https://journals.openedition.org/ges/351">enquête de réception</a> réunissant 77 entretiens avec des lycéens et lycéennes de classe moyenne, plutôt lecteurs et lectrices, il apparaît qu’elles sont systématiquement qualifiées par ces jeunes de « fortes », « indépendantes » et « badass ».</p>
<p>À ce titre, elles sont désignées par leur autonomie et leur force morale, qualités qui sont également appréciées chez des personnages littéraires issus de la culture scolaire comme Phèdre et Antigone. Ces héroïnes classiques, emblématiques de transgressions sociales et politiques qu’elles assument, sont appréciées pour les mêmes raisons que les personnages de la « young adult », sans présumer des différences de genre littéraire et des transgressions réellement accomplies par les unes et les autres.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/431049/original/file-20211109-19-7054b7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/431049/original/file-20211109-19-7054b7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=410&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/431049/original/file-20211109-19-7054b7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=410&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/431049/original/file-20211109-19-7054b7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=410&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/431049/original/file-20211109-19-7054b7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=515&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/431049/original/file-20211109-19-7054b7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=515&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/431049/original/file-20211109-19-7054b7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=515&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le personnage de Phèdre est souvent décrit par les élèves qui découvrent les tragédies de Racine comme un personnage fort.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Alexandre_Cabanel_-_Ph%C3%A8dre.jpg">Phèdre, par Alexandre Cabanel</a></span>
</figcaption>
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<p>Hermione connaît un succès particulier, amplifié par l’engagement féministe de son interprète à l’écran Emma Watson. Les caractéristiques d’Hermione et les prises de position publiques d’Emma Watson semblent se conforter. Hermione est louée pour son intelligence et son rôle central dans l’intrigue, même si elle apparaît peu transgressive dans l’univers d’<em>Harry Potter</em>.</p>
<p>Emma Watson, quant à elle, a été largement plébiscitée comme figure féministe dans une <a href="https://www.cairn.info/revue-mouvements-2019-3-page-75.htm">autre enquête</a> que nous avons menée, cette fois-ci auprès d’étudiants et étudiantes. Pour les jeunes femmes comme pour les jeunes hommes, Emma Watson est la figure féministe la plus citée, à hauteur de 40 %, en réponse à un questionnaire ayant obtenu 2000 réponses dans des établissements de Nouvelle-Aquitaine.</p>
<p>Au-delà de la prédominance d’Hermione, le caractère transgressif des personnages féminins de « young adult » est discuté par les personnes interrogées : si elles font preuve de force physique et d’intelligence, elles dépendent presque toujours, affectivement, d’un personnage masculin, avec lequel elles entretiennent une romance réelle ou latente. L’hétérosexualité presque obligatoire de ces personnages est relevée par le public pour lequel un personnage féminin transgressif n’est ni nécessairement hétérosexuel, ni nécessairement engagé dans une romance. </p>
<h2>Des schémas récurrents</h2>
<p>Le passage obligé par la romance dans la « young adult » est souligné par certaines lycéennes qui vont souligner que les histoires d’amour ne sont pas toujours crédibles. Ce point est important pour elles car les livres mais aussi les films ou les séries, sont en effet des supports d’apprentissage clairement revendiqués en matière amoureuse – le film d’amour le plus largement cité étant <em>Titanic</em>. Elles travaillent leur compétence émotionnelle dans ces loisirs.</p>
<p>Elles insistent sur l’évolution parfois trop schématique du personnage masculin, un « bad boy » qui se convertit en garçon sensible, amoureux et dévoué.</p>
<p>Ce point relève en fait d’un schéma récurrent des romances, basées sur la transformation du personnage masculin pour que puisse advenir la relation amoureuse souhaitée par l’héroïne (et par projection, par les lectrices).</p>
<p>Janice Radway a mis en évidence ce canevas narratif des romans Harlequin dès 1984 dans son étude classique, <em>Reading the Romance</em>, hélas jamais traduite intégralement en français (voir la <a href="https://www.persee.fr/doc/polix_0295-2319_2000_num_13_51_1108">conclusion de l’ouvrage</a> traduite par Brigitte Le Grignou en 2001). Radway explique comment ce déroulement de l’intrigue, sans cesse renouvelé, reconduit un schéma patriarcal tout en permettant aux lectrices de vivre fantasmatiquement une autre fin que celle de leurs relations hétérosexuelles réelles.</p>
<p>Or, malgré l’évolution des caractéristiques des personnages, le principe narratif se répète dans les productions contemporaines. Ce n’est pas tant ce script amoureux – au sens de scénario répétitif inscrit dans les imaginaires – qui gêne. Les lectrices savent à quoi s’attendre en choisissant ces lectures. Les garçons ne disent pas en lire, voire s’en moquent comme de consommations féminines, alors même qu’ils reconnaissent devoir prendre conseil auprès de leurs amies filles en matière amoureuse. Ce qui suscite la critique relève de l’aptitude à rendre le déroulement de l’histoire assez fin psychologiquement pour que la lecture en soit crédible.</p>
<h2>Enjeu éducatif</h2>
<p>Cette réflexivité sur les procédés esthétiques, également appelée « appropriation esthétique », ne dépend pas de la classe sociale d’origine, ni de la filière de spécialisation au lycée. Des filles et garçons d’origine populaire, et en bac professionnel, en font preuve. Le contre-stéréotype de femme forte et indépendante apparaît ainsi comme un nouveau standard pour les jeunes qui lisent beaucoup et qui identifient un procédé répétitif. Par comparaison, les personnages masculins marquants sont beaucoup plus diversifiés : de <em>Jack et La Mécanique du cœur</em> aux personnages de mangas, y compris <em>Dragon Ball Z</em>, ces personnages se caractérisent par différentes combinaisons entre force physique, intelligence et sensibilité.</p>
<p>La sensibilité des personnages masculins est devenue une exigence comme cela a déjà été démontré. L’absence de personnages masculins centraux dans des intrigues sentimentales est soulignée par certains garçons qui s’en plaignent.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lectures-ces-classiques-quharry-potter-fait-decouvrir-a-vos-enfants-117719">Lectures : ces classiques qu’Harry Potter fait découvrir à vos enfants</a>
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<p>Un double enjeu éducatif peut dès lors être identifié. D’une part, les personnages féminins sont davantage travaillés et développés par des biens culturels destinés à la jeunesse dans un sens qui se veut féministe, visant à satisfaire l’horizon d’attente du public de jeunes femmes auxquelles il s’adresse. Mais pour les lectrices et lecteurs assidus, ces traits de personnalité se dévoilent comme un nouveau standard commercial qui ne remet pas en cause les schémas amoureux les plus classiques.</p>
<p>D’autre part, il manque aux garçons, dans un apprentissage amoureux – qu’ils disent, dans notre enquête, devoir beaucoup aux filles – de trouver des personnages masculins centraux et complexes dans une intrigue sentimentale. Cela permettrait de ne pas faire reposer exclusivement l’évolution des normes de genre sur des modèles de femmes fortes, ni de reconduire, malgré cette évolution, des scénarii amoureux où les hommes sont déresponsabilisés de tout travail relationnel.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169681/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Viviane Albenga ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si la littérature « young adult » met désormais en avant des personnages de jeunes femmes fortes et indépendantes, elle continue à se fonder sur des schémas amoureux très classiques.Viviane Albenga, Maîtresse de conférences en sociologie, Université Bordeaux MontaigneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1641032021-09-02T17:56:07Z2021-09-02T17:56:07ZComment l’amour traverse l’œuvre de Dante<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/416562/original/file-20210817-25-o2j3y5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=16%2C0%2C1515%2C862&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dante Gabriel Rossetti,
Paolo and Francesca da Rimini,
1855.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.tate-images.com/preview.asp?image=N03056">Tate Gallery</a></span></figcaption></figure><p>Les 700 ans de la mort de Dante, survenue à Ravenne entre le 13 et le 14 septembre 1321, a fait fleurir de nombreuses recherches sur le poète florentin et son œuvre majeure.</p>
<p>On ne compte plus le nombre de <a href="https://www.700dantefirenze.it/lista-eventi">célébrations et d’événements en son nom</a>, dont le dernier a été l’attribution posthume de la citoyenneté d’honneur de Vérone, ville où le père de la langue italienne séjourna plusieurs fois pendant son exil de la ville de Florence, se liant d’amitié avec le prince Cangrande de la Scala.</p>
<h2>Une quête de sens intemporelle</h2>
<p>Comme l’a souligné le Président de la République italienne, Sergio Mattarella : « Il représente l’identité nationale née bien avant l’État italien ». La beauté et la richesse de <em>La Divine Comédie</em> de Dante résident dans le fait que, à chaque époque, elle peut être lue avec intérêt et résonner avec l’actualité.</p>
<p>En 2004, aux États-Unis, deux thérapeutes et un neurologue ont élaboré la « méthode Dante », entendue comme un véritable voyage thérapeutique, qui permet à la personne qui l’entreprend de surmonter le mal-être et les difficultés, <a href="https://www.efficacemente.com/crescita-personale/fare-chiozza/">et donc de retrouver une forme de sérénité</a>. En somme, la promesse de se transformer tout en restant soi.</p>
<p>La pandémie mondiale a également permis d’offrir de nouvelles interprétations au chef-d’œuvre de Dante, car la quête de sens se fait sentir avec encore plus d’acuité. Après les confinements successifs, nous avons tous ressenti une forte envie de sortir et de « voir les étoiles », à l’instar du poète.</p>
<p>Nous savons bien que le long chemin de <em>La Divine Comédie</em> est celui qui conduit le Poète à se détacher des tentations humaines et du péché, à s’élever jusqu’aux hauteurs de l’amour le plus absolu qui soit : celui qui se concrétise dans la rencontre avec Dieu. La philosophe américaine Martha Nussbaum, dans son beau livre <em>L’intelligence des émotions</em> (aux pages 657-693 de l’édition italienne que j’ai consultée), en fait une interprétation très intéressante.</p>
<h2>Théorie de l’émotion</h2>
<p>Nussbaum consacre depuis de longues années des études approfondies à la thématique des émotions : pour elle, toutes les constructions durables, même en politique, reposent sur l’amour pour l’humanité. La philosophe est fortement convaincue qu’une société ne peut être juste sans amour.</p>
<p>La justice sociale est, en effet, fortement enracinée dans les émotions et les sentiments comme la compassion, l’empathie, l’amour. Pour donner force à sa thèse, Nussbaum s’appuie sur de grands chefs-d’œuvre de la littérature de tous les temps.</p>
<p>Par exemple, elle esquisse les caractéristiques de l’amour platonique, qui tend vers le beau en toutes choses et qui, cependant, ne parvient jamais à donner vie à une authentique théorie de l’émotion. Elle débat de la signification de l’ascension amoureuse chez saint Augustin, avec sa référence constante et problématique à la méchanceté innée de l’homme.</p>
<p>Elle analyse la façon dont Proust décrit les émotions, la douleur de la passion amoureuse, la jalousie qui fait de l’amant le geôlier de sa bien-aimée. Elle se penche sur des auteurs plus récents, comme Emily Brontë, Gustav Mahler, Walter Whitman et James Joyce. Comment pourrait-elle ne pas parler du poème dantesque, qui représente précisément la description du voyage le plus fascinant qui soit pour atteindre l’amour ?</p>
<p>Ainsi, après avoir vécu avec douleur le détachement de Virgile, le guide aimable qui l’a accompagné jusqu’au seuil du Paradis, Dante est prêt à revoir Béatrice. Toute perte est douloureuse, mais elle est tout aussi nécessaire pour parvenir à un nouveau stade de maturité spirituelle. Il est à ce titre significatif que Béatrice appelle l’aimé par son nom (et c’est la seule fois où le nom du Poète apparaît dans la Comédie) :</p>
<blockquote>
<p>« Dante, perché Virgilio se ne vada,<br>
non pianger anco, non piangere ancora ;<br>
ché pianger ti conven per altra spada »</p>
<p>« Dante, parce que Virgile s’en va,<br>
ne pleure pas, ne pleure pas encore ;<br>
il convient que tu pleures par une autre épée. » (<em>Purgatoire</em>, XXX, 55-57)</p>
</blockquote>
<p>Béatrice est la femme qui a embrassé et qui embrasse les fautes et les vertus de l’aimé, dans les yeux de laquelle toute leur histoire terrestre est présente. Nussbaum souligne que l’amour chrétien est l’amour pour l’individu, pour <em>cet</em> individu spécifique et non, par conséquent, une sorte d’admiration contemplative.</p>
<p>Pour cette raison, la philosophe américaine dit qu’elle trouve cette scène – quand Béatrice regarde Dante en l’accueillant aux portes du Paradis – « à la fois physiquement sensuelle et profondément émouvante ». </p>
<p>Il ne s’agit pas ici de l’amour purement érotique qui lie Paolo et Francesca. L’autre n’est pas, en effet, un simple instrument de plaisir, mais il est l’individu dans sa singularité unique, vu pour ce qu’il est. Il ne s’agit pas non plus l’amour filial que Dante porte à son maître Brunetto Latini, rencontré au chant XV de l’Enfer, celui des sodomites. Un intellectuel dont la faute la plus grande réside dans son orgueil, à la différence de Dante, pour lequel l’homme a toujours besoin de Dieu pour atteindre l’<em>eudaimonìa</em> (la béatitude).</p>
<p>L’idée que l’amour chrétien est l’amour vrai, s’offrant à l’individu dans son intégrité, et qui atteint sa pleine adéquation avec le salut éternel, est également développée par Nussbaum dans l’article : <a href="https://www.degruyter.com/document/doi/10.1515/APEIRON.1993.26.3-4.161/html">« Le “Dante” de Béatrice : aimer l’individu ? »</a>, Apeiron 26 : 161-178 (1993).</p>
<p>Il est intéressant de lire Dante selon l’interprétation de Martha Nussbaum, car la philosophe comprend l’amour que le Divin Poète manifeste pour l’humanité déchue, pour l’humanité fragile et imparfaite. Sur ce plan, il va bien plus loin qu’ Augustin. Chez Augustin s’exprime une colère contre les hérétiques, les païens, les incroyants, les juifs. Chez Dante, il y a, plus encore que chez Augustin, l’expression d’un amour total pour l’humanité déchue et donc, à ce titre, très prometteur pour la vie politique de ce monde. Et pourtant, prévient-elle, l’ascension de Dante n’est pas exempte de problèmes critiques.</p>
<p>Tout d’abord, le poète exprime une colère qui est parfois justifiée parce qu’elle s’adresse aux injustices et à la corruption du monde, mais il arrive qu’elle soit dirigée contre ceux qui ont commis des erreurs uniquement parce qu’ils ont suivi leurs croyances. Pour Dante, les seuls êtres vertueux ne sont pas tous chrétiens. Il présente des figures d’hérétiques vertueux et donc dignes de respect, au même titre que les croyants. La moralité n’est pas seulement un fait lié à la croyance religieuse. Dante valorise également la liberté de l’autre et se place dans une perspective compatissante qui soutient une vision libérale de l’État ; cependant, la liberté de l’individu est toujours contrôlée, toujours soumise à l’autorité de l’Église (que Béatrice représente).</p>
<p>Les pages de l’Enfer, où les êtres humains jugés dégoûtants sont bannis, posent de sérieux problèmes sur le plan de l’acceptation et de la réciprocité, tant en amour que dans la vie sociale.</p>
<p>Une autre grande limite de la vision dantesque est la place attribuée au sexe parmi les joies de la vie humaine. Le sexe n’est permis que selon son acception dans la doctrine catholique : il ne peut être pratiqué qu’à des fins reproductives et tout amour est d’autant plus parfait qu’il se rapproche de la chasteté.</p>
<p>Enfin, en ce qui concerne la compassion, Nussbaum constate que le poète divin fait un pas en avant décisif, car la compassion pour la souffrance humaine est précisément une composante fondamentale de l’ascension. Ici, Nussbaum trouve que Dante a une vision plus pragmatique de la compassion que celle d’Augustin.</p>
<p>En conclusion, Nussbaum affirme que le poème de Dante est conforme aux canons de l’orthodoxie chrétienne de type médiéval. Une déclaration que l’on peut discuter. Mais nous pouvons certainement nous accorder avec cette affirmation de la philosophe :</p>
<blockquote>
<p>« Il n’y a pas de texte dans toute la littérature qui manifeste un amour plus pur, une curiosité plus absolue à l’égard des vies humaines. Dante embrasse vraiment le monde avec amour. »</p>
</blockquote><img src="https://counter.theconversation.com/content/164103/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lucia Gangale ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La philosophe américaine Martha Nussbaum, dans son livre « L’intelligence des émotions », explore le thème de l’amour à travers « La Divine Comédie » de Dante Alighieri.Lucia Gangale, Doctorant, Université de ToursLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1639182021-07-08T17:45:36Z2021-07-08T17:45:36ZByron et Delacroix, aux avant-postes de l’Internationale romantique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/410177/original/file-20210707-27-19hjzng.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C3%2C1199%2C764&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">« Le combat du Giaour et du Pacha » (détail), par Eugène Delacroix (1835).
</span> </figcaption></figure><p>Profitons ce que l’Euro du foot et des stades, compétition répartie entre 11 pays du continent et dont le match d’ouverture a vu l’Italie et la Turquie s’affronter (pacifiquement), n’ait pas encore livré son verdict, pour revenir sur une arène européenne d’un autre genre, celle de la poésie et des studios d’artistes du XIX<sup>e</sup> siècle romantique. Une exposition au Musée Delacroix, intitulée <a href="http://www.musee-delacroix.fr/fr/actualites/expositions/un-duel-romantique-le-giaour-de-lord-byron-par-delacroix">« Un duel romantique, Le Giaour de Lord Byron par Delacroix »</a>, nous en offre l’occasion.</p>
<p>Plusieurs fois déprogrammée en raison de la crise sanitaire, l’exposition confiée aux soins de Claire Bessède et de Grégoire Hallé a enfin rouvert ses portes, au 6 rue de Fürstenberg à Paris. Au cœur du dispositif, la rencontre au sommet <a href="http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Poesie-Gallimard/Le-corsaire-et-autres-poemes-orientaux">entre le poète Byron</a>, auteur, en 1813, d’un conte turc, le premier d’une série, intitulé « Le Giaour », et le peintre Delacroix, passionnément épris de choses venues d’Angleterre – Walter Scott, par exemple – et d’Orient. Le second lit le poème du premier, d’abord en anglais, puis en français dans la traduction d’Amédée Pichot. Dès lors, il n’a plus qu’une idée en tête, ainsi qu’il l’écrit sobrement, en mai 1824 : « Faire le Giaour ». C’est cet impératif, ardent autant que catégorique, qu’on voudrait regarder de près.</p>
<p>Particulièrement fécond, il donna naissance à pas moins de trois tableaux, échelonnés entre 1826 et 1856, et dont les deux plus célèbres se trouvent installés côte à côte, aux fins de comparaison, dans l’ancien atelier du peintre ; de taille moyenne, sans grandiloquence donc, ils mettent en scène le duel à mort entre « l’infidèle » et Hassan, le chef de guerre ottoman. Et on ne compte pas les travaux préparatoires, ainsi que nombre d’œuvres du peintre placées sous le signe de l’affrontement, du combat à mort, entre hommes ou entre chevaux, mais aussi entre homme (Jacob) et ange. Tel un anachronique western, ce « duel au soleil » s’inscrit au premier chef au sein d’une rivalité amoureuse.</p>
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<h2>Amour et vengeance</h2>
<p>Hassan et le Giaour brûlent du même désir pour la même femme, Leïla, l’une des concubines du pacha. Le corps de cette dernière brille par son absence ; enveloppé puis cousu dans un sac, il a été jeté à la mer, dans l’amont d’un poème lui-même tissé de fragments disparates, à la façon dont opéraient les anciens rhapsodes. L’amant illégitime brûle de venger sa mort, et sa vengeance s’accomplit dans un étroit défilé montagneux, à l’issue d’une embuscade mettant aux prises deux groupes d’assaillants. Hassan meurt, non sans avoir maudit son assassin, auquel il prophétise une destinée de mort-vivant, de vampire assoiffé du sang des membres de sa propre famille. Quant au Giaour, tourmenté par le souvenir de l’aimée, il finit ses jours dans un monastère, à ruminer son chagrin inextinguible.</p>
<p>Le prototype du héros byronien, ténébreux, mélancolique et impénitent, venait de naître. Davantage encore que le poème, le tableau met au premier plan un déplacement, voire un transfert. Avide de représenter une symétrie, objective autant que subjective, entre deux rivaux dont les visages sont comme aimantés l’un par l’autre, Delacroix les fait s’empoigner et s’étreindre, d’homme à homme, en une lutte plus érotique et sexuelle que guerrière. Au demeurant, dans le tableau de 1835, le corps dénudé du Giaour, au niveau des avant-bras et de la base du cou, contraste avec le buste du pacha, invisible car sanglé de pied en cap dans une forme de puritanisme, ou de pudeur, propres à la culture musulmane.</p>
<p>Le tableau n’est pas loin de figurer un viol, en tout cas une prédation violente, un rapt, hypothèse que renforcerait la présence massivement animale des chevaux, blanc pour l’Ottoman, noir pour le natif des îles ioniennes sous domination vénitienne. Chacun cherchant à faire plier l’échine de l’autre, ils prolongent au second plan du tableau l’inextricable imbroglio dans lequel sont impliqués les deux cavaliers. Et si, en définitive, « faire le Giaour » n’était qu’un euphémisme, pour ne pas avoir à parler crûment de « faire l’amour » ? On se souvient qu’un certain Marcel Proust mettra l’expression « faire catleya » dans la bouche du personnage de Swann, épris d’Odette de Crécy, amoureuse de ces fleurs.</p>
<h2>Un imaginaire colonial</h2>
<p>A cette relation potentiellement homosexuelle, il convient surtout de rendre son coefficient géopolitique. Nous sommes dans l’Orient compliqué, en l’occurrence dans une Grèce soumise au joug ottoman. En amont du poème de 1813, il y a toute la « campagne » d’Orient de Byron, qui l’a mené à Athènes, en Albanie, à Constantinople, et dont il a ramené, outre un orientalisme (qui est aussi un exotisme) de pacotille, un goût prononcé pour des mœurs moins normatives que dans son « Nord moral », et, surtout, une vive appétence pour la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes. </p>
<p>En aval des <em>Contes orientaux</em>, son engagement « philhellène », comme on disait alors, se soldera par le don de sa vie à la cause d’une indépendance grecque bien longue à venir. Ce « vertige de la guerre », partagé par un millier de combattants volontaires comme Byron, brigadiste international avant la lettre, l’historien Hervé Mazurel, spécialiste de l’Europe romantique, y a consacré un passionnant ouvrage où alternent trajectoires individuelles et prise de conscience collective, de la part d’Européens de plus en <a href="https://journals.openedition.org/rh19/4848">plus convaincus de l’importance des racines grecques de l’Europe</a>.</p>
<p>Après le néo-hellénisme du dix-huitième siècle, le temps semblait enfin venu d’embrasser un panphilhéllénisme européen. Mais c’est sans contradiction aucune que, dans le tableau de Delacroix, la longue lame du sabre du Giaour sur le point de s’enfoncer dans la poitrine du Pacha renoue avec tout un imaginaire à la fois colonial et postcolonial (forcément avant l’heure, pour ce dernier adjectif) : la conquête d’un pays s’apparente souvent au rapt d’une femme livrée sans défense aux assauts d’un envahisseur masculin. Le geste du Giaour, un Occidental, a beau appeler à une décolonisation ardemment convoitée, il n’en répète pas moins la gestuelle d’une reconquête, forcément meurtrière, et ce, pour les deux belligérants. Ce que Delacroix saisit intuitivement, en présentant un pacha déjà cadavérique, yeux vitreux et gisant, avant l’heure, sur le corps de son frère d’armes, dressé hors de sa selle. Du reste, au premier plan, au pied des chevaux, la tête d’un autre cadavre, étendu au sol celui-là, coiffé du même turban que son maître et aux paupières closes, donne à penser que les cavaliers avaient, d’emblée, rendez-vous avec leur double, la mort.</p>
<p>En son temps, Baudelaire parlait, à propos du peintre, d’un « accent sauvage et furieux dans le seul sens de la destruction » (<em>Salon</em>, 1845). En poussant encore plus loin le parallèle géopolitique, l’affrontement à mort entre un « Infidèle » et un musulman paraît aller dans le sens d’un anachronique « choc de civilisation ». Mais le substrat religieux – dont Samuel Huntington fait le socle de ses analyses controversées – est absent du poème de Byron, qui avouait volontiers préférer cent fois les Turcs aux Grecs, à titre personnel s’entend. Quant au peintre, il préfère retenir ce qui, dans le motif du « duel » exprime la dualité autant que l’antagonisme, la fusion des contraires davantage que leur exacerbation.</p>
<h2>L’affrontement entre peinture et poésie</h2>
<p>Troisième terme de l’équation, « Faire le Giaour », c’est faire la guerre, cette fois, entre la poésie et la peinture. Tout au long de sa carrière, Eugène Delacroix, qui se rêvait poète, aura jalousé le verbe et l’imagination épique de l’écrivain britannique Lord Byron, le tableau <em>La mort de Sardanapale</em>, conservé au Musée du Louvre et reproduit dans l’exposition, en étant le plus célèbre exemple. Qui ne voit et ne comprend alors que le « duel romantique » est, aussi, celui que se livrent à armes plus ou moins égales le verbal et le non verbal ? Guerre fratricide, entre des arts qui entrent et dansent dans la même ronde, celle de l’émulation réciproque. Chacun rivalise avec l’autre, chacun envie ce dont l’autre dispose, et dont il manque pour sa part cruellement.</p>
<p>Privilégiant l’arrêt sur image, et le resserrement maximal d’une l’action se refermant comme un piège, là où le poète, adepte d’un récit volontairement non linéaire, se plaçait déjà dans le temps de l’après, post-désastre en somme, Delacroix entre, lui, directement dans le présent immémorial de la mêlée, faisant de la peinture un lieu de tensions irrésolues. La lutte du Giaour et du Pacha reproduit en le mimant le combat sans merci que se livrent la couleur et la ligne, le motif et la touche, mais aussi la statuaire et la pigmentation, le drapé et la coulure. Et Delacroix d’opter volontairement pour la confusion, le vortex, l’enchevêtrement, dans lesquels il devient difficile de distinguer le bien et le mal, l’homme et l’animal, le sang et l’or, l’Oriental et l’Occidental (ils ont du reste changé de place, en passant du tableau de 1826 à celui de 1835).</p>
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<span class="caption"><em>La mort de Sardanapale</em>, Eugène Delacroix, 1827.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Mort_de_Sardanapale#/media/Fichier:Eug%C3%A8ne_Delacroix_-_La_Mort_de_Sardanapale.jpg">Wikimedia</a></span>
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<p>« On n’y voit rien », ainsi qu’aimait à le dire Daniel Arasse, partisan de se défaire de toutes les certitudes dont se parent les historiens de l’art. Seule triomphe ici l’énergie romantique, saisie dans une furieuse et paroxystique démonstration de force – force d’une peinture en train de se faire et de se défaire… et devant laquelle, magie du déconfinement, on a retrouvé le plaisir de se tenir pour de vrai, en chair et en os et en vis-à-vis ! Libre au visiteur, alors, de sortir de la grande pièce où Delacroix a croisé le fer et le pinceau, pour descendre le petit escalier qui mène au jardin, avant de remonter à l’assaut de ce que Baudelaire désignait par « les hauteurs difficiles de la religion ; le Ciel lui appartient comme l’Enfer, comme la guerre, comme la volupté » (cité par Jacques Henric, dans <em>La peinture et le mal</em>, Grasset, 1982).</p>
<h2>Le romantisme, ce spectre qui hanta l’Europe</h2>
<p>Pastichant Karl Marx, au seuil de son célèbre <em>Manifeste</em> de 1848, publié en anglais, français, italien, flamand et danois, il est sans doute possible de dire du romantisme qu’il fut un spectre qui hanta l’Europe. « L’Europe romantique », titrait pour sa part la revue <em>Critique</em>, en juin-juillet 2009.</p>
<p>Dans l’éditorial de leur numéro spécial, Patrizia Lombardo et Philippe Rocher écrivaient à propos du Romantisme, ce « phénomène parfaitement européen et transnational » :</p>
<blockquote>
<p>« Ce n’est pas la somme des littératures et cultures nationales : c’est une internationale des nationalités, différente du cosmopolitisme de la République des lettres à l’âge classique. Plus proche, pour le meilleur et pour le pire, des aspirations et contradictions qui sont les nôtres. »</p>
</blockquote>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/410176/original/file-20210707-25-v8gj8c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/410176/original/file-20210707-25-v8gj8c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/410176/original/file-20210707-25-v8gj8c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=816&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/410176/original/file-20210707-25-v8gj8c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=816&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/410176/original/file-20210707-25-v8gj8c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=816&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/410176/original/file-20210707-25-v8gj8c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1025&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/410176/original/file-20210707-25-v8gj8c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1025&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/410176/original/file-20210707-25-v8gj8c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1025&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">L’album Delacroix de Catherine Meurisse (Dargaud).</span>
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<p>Sans pousser trop loin le parallèle entre romantisme et communisme, on retiendra quand même une prise de conscience identique – celle de la « puissance » d’un mouvement artistique, volontiers révolutionnaire dans ses aspirations politiques, et que les « puissances de la vieille Europe » (Marx, encore) cherchèrent à contenir. Une puissance spontanément transnationale, mue par le désir de s’affranchir de toutes les frontières : frontières entre les pays, les genres, les cultures, les arts. Nul besoin de les appeler, dès lors, les artistes romantiques, ces autres prolétaires, à s’« unir ». </p>
<p>Dans le creuset de leurs pratiques comme de leurs lectures, se forgeait déjà une destinée commune. Delacroix lisait Byron dans le texte, Berlioz de même, sans oublier Rossini et mille et un autres artistes… et les nations européennes promptes à se rendre coup pour coup se redécouvraient, hors les circuits officiels, partie prenante d’une Europe de la culture plus que de la guerre. Restait, en réaction à la Réaction, à opposer au « conte du spectre » romantique, un « Manifeste » du romantisme lui-même.</p>
<p>Un manifeste incarné dans les tableaux d’un Delacroix, qui fut toute sa vie en art, écrira Alexandre Dumas dans sa <em>Causerie</em> du 10 novembre 1864, ce qu’on appelle en politique un « fait de guerre » et un « cas de guerre ». « Ses croquis furent des escarmouches, ses dessins des combats, ses tableaux des batailles ».</p>
<p>Ces mots, on les trouve repris au seuil de l’ouvrage illustré par Catherine Meurisse, autre rescapée du « cauchemar de l’histoire », puisque la chance aura voulu qu’elle échappe à l’attentat perpétré contre les journalistes et dessinateurs de <em>Charlie Hebdo</em>, dont elle faisait partie. En couverture de son <em>Delacroix</em> (Dargaud, 2019), la présence du « Duel » ne doit, elle en revanche, rien au hasard. Maculée par une large tache à l’encre fuchsia, sur fond blanc, la silhouette des combattants s’y devine à peine. Il n’empêche, ils restent plus que jamais aux prises l’un avec l’autre, mais l’instinct de vie semble avoir triomphé sur les pulsions de mort. Le foot passe, l’Internationale romantique reste…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/163918/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc Porée ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le « duel romantique » mis en scène dans le « Giaour » est aussi celui que se livrent à armes plus ou moins égales la poésie et la peinture..Marc Porée, Professeur de littérature anglaise, École normale supérieure (ENS) – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1533462021-02-11T20:31:32Z2021-02-11T20:31:32ZGeoffrey Chaucer et les origines littéraires de la Saint-Valentin<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/381070/original/file-20210128-15-vwi4o1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=35%2C612%2C1122%2C811&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Codex Manesse, UB Heidelberg.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/28433765@N07/8253593377/in/photolist-dzkPL6-KpNSFT-cp8gks-9zvBHW-8DgAUF-2hDu11x-KGsa4M-h41Zdp-zrczHj-2hDrdgx-KDhFvW-KoaLkj-K96jma-VbK93u-8DgAU6-pAbKco-K8SaE9-Kob4wo-dozmDZ-PRtVYC-9zvBKL-97PSKj-dACwMT-97LKxe-8DgATt-L5wxmM-9zsCVP-U5euzS-25yHJdT-9zvBMJ-L2GAAb-KXLt36-LAKNcR-27XZ8Rj-5EdLSe-8DjGRC-9tBuBx-2hDukHP-2hDumbs-8DjH15-8DjH9h-8DgB6g-8DgB1M-5eqj5n-4KRYhZ-t5mqbP-7p2bFf-8DgAZM-7p1Y2W-bpwJUb">Peter/Flickr</a></span></figcaption></figure><p>La Saint-Valentin approche et avec elle les éternelles questions relatives à ses origines. Tout le monde y va de sa théorie mais semble s’accorder sur le fait qu’à un moment donné un prêtre du nom de Valentin a violemment été mis à mort, cruelle augure pour une fête de l’amour !</p>
<p>Remontons donc ensemble le temps de quelques siècles. La Saint-Valentin appartient depuis le Moyen Âge à une tradition poétique dite « valentine », tradition où se mêlent les conventions héritées de l’amour courtois articulées autour d’une date bien précise, le 14 février. Avant d’être un <a href="https://www.jckaufmann.fr/ouvrages/saint-valentin-mon-amour/">phénomène sociologique fixe</a>, la Saint Valentin a vu ses codes se formaliser progressivement, notamment grâce à l’œuvre d’un poète médiéval anglais, fort (mé)connu en France, Geoffrey Chaucer.</p>
<h2>Le printemps… en février ?</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/379562/original/file-20210119-26-1tjv9vt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Les Très Riches Heures du Duc de Berry" src="https://images.theconversation.com/files/379562/original/file-20210119-26-1tjv9vt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/379562/original/file-20210119-26-1tjv9vt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=998&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/379562/original/file-20210119-26-1tjv9vt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=998&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/379562/original/file-20210119-26-1tjv9vt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=998&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/379562/original/file-20210119-26-1tjv9vt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1254&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/379562/original/file-20210119-26-1tjv9vt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1254&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/379562/original/file-20210119-26-1tjv9vt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1254&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"><em>Les Très Riches Heures du duc de Berry</em>.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Les_Très_Riches_Heures_du_duc_de_Berry_février.jpg">R.-G. Ojéda/RMN</a></span>
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</figure>
<p>Inutile de s’attarder plus longtemps sur l’association de la <a href="https://theconversation.com/la-saint-valentin-et-les-divinites-de-lamour-109978">Saint Valentin avec les divinités de l’amour</a> ou sur le fait qu’on ne sache pas précisément de quel Valentin nous parlons (il en existe au moins deux, un prêtre de Rome, un évêque de Terni, tous deux mis à mort). Contentons-nous de noter qu’au début des années 1380, Chaucer composa un poème narratif intitulé « Le Parlement des oiseaux » dans lequel des oiseaux justement se réunissent lors d’un parlement présidé par Nature le jour de la Saint-Valentin afin de choisir leur partenaire dans une douce ambiance printanière.</p>
<p>Je vous vois d’ici penser : « Le printemps en février ? » Et bien oui ! La <a href="https://books.google.fr/books?id=_bqdZbKPztMC&pg=PA15">date du début du printemps</a> n’était alors pas aussi clairement établie qu’elle ne l’est aujourd’hui et la tradition antique, notamment sous la plume de <a href="http://evene.lefigaro.fr/celebre/biographie/pline-l-ancien-431.php">Pline l’Ancien</a>, <a href="https://www.persee.fr/doc/licla_0992-5279_1993_num_19_1_1739">Ovide et Ptolémée</a>, plaçait même son arrivée début février. La Rome et Grèce antique marquaient d’ailleurs les saisons à mi-chemin entre équinoxe et solstice, ce qui nous donnait alors le retour du printemps aux alentours du 6-9 février. De nombreux calendriers, en particulier ceux écrits en Angleterre dans les villes de Winchester et Durham entre les IX<sup>e</sup> au XIV<sup>e</sup> siècles, notaient d’ailleurs que février marquait la reprise de l’activité agricole et le retour du chant des oiseaux, et ce même si les livres d’heures associent très souvent février à un mois d’hiver (comme le montre l’illustration ci-contre).</p>
<h2>Les oiseaux et l’amour valentin</h2>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/381078/original/file-20210128-15-1afn9li.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="La Conférence des oiseaux peinte par Habib Allah" src="https://images.theconversation.com/files/381078/original/file-20210128-15-1afn9li.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/381078/original/file-20210128-15-1afn9li.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=942&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/381078/original/file-20210128-15-1afn9li.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=942&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/381078/original/file-20210128-15-1afn9li.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=942&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/381078/original/file-20210128-15-1afn9li.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1184&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/381078/original/file-20210128-15-1afn9li.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1184&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/381078/original/file-20210128-15-1afn9li.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1184&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La Conférence des oiseaux peinte par Habib Allah.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Conf%C3%A9rence_des_oiseaux#/media/Fichier:Conference_of_the_birds.jpg">Wikimedia</a></span>
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<p>Chaucer s’inspira donc d’une tradition calendaire particulière et en regardant un calendrier en février, il n’aurait pas eu de mal à voir en Valentin un choix de patron idéal pour cette saison : retour du printemps, du chant des <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/cultures-dislam/des-oiseaux-qui-parlent">oiseaux</a> et début de l’accouplement d’un grand nombre d’espèces (comme la grive draine, la corneille), tout semblait coller.</p>
<p>Il n’inventa pas à proprement parler la tradition amoureuse associée à la Saint-Valentin (qui remonte au moins à l’Antiquité), mais il fixa en revanche sa date et l’articula, via son utilisation des oiseaux, avec les traditions populaires liées au printemps. Mais pourquoi le 14 ? Et bien, d’une part, parce que la date correspond aux estimations du début du printemps en Angleterre de son vivant. Et d’autre part, il faut avouer que les autres noms que l’on retrouve dans les calendriers anglais et les martyrologies entre le 7 et le 14 février ne se prêtaient pas vraiment à la poésie. Pourriez-vous imaginer offrir des chocolats à l’élu·e de votre cœur pour la <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01709204/document">Saint Austreberte le 10, Eulalia le 12 ou Eormenhilde le 13</a> ? Pas vraiment. Qui plus est, la Saint Valentin était alors suffisamment récente pour représenter aux yeux d’un poète un canevas blanc. Aucune légende populaire n’était véritablement attachée à ce jour précis (si ce n’est les récits des martyrologies sur la mort du Saint), ce qui en faisait la date et le patron idéal pour ce que Chaucer avait en tête.</p>
<p>Même s’il n’invente pas complètement la totalité de cette fête, Chaucer semble bien être le premier avec « Le Parlement des oiseaux » à concentrer son attention sur <a href="https://interestingliterature.com/2014/02/the-literary-origins-of-valentines-day/">cette tradition</a>, à la rendre annuelle et à définir Saint Valentin comme patron des amoureux. Il insiste d’ailleurs sur l’importance de la cérémonie visant à unir les oiseaux, cérémonie qu’il décrit comme étant annuelle. Nature « pleine de grâce, invita chaque oiseau à prendre place, la même qu’ils occupent chaque année, se tenant là pour la Saint-Valentin » (v. 319-22). Chaucer définit de même les règles de cette célébration lorsqu’il fait dire à Nature : « Vous savez bien qu’à la Saint-Valentin, par mon statut et sous ma gouvernance, vous choisissez tous vos partenaires – et vous vous envolez suivant vos voies » (v. 386-9). Puis enfin, une fois la journée finie, Chaucer nous invite à célébrer le retour prochain de l’été : « Saint Valentin, toi si haut dans le ciel, ainsi les oiseaux ont pour toi chanté : bienvenu, été, dont le doux soleil, a le froid de l’hiver secoué » (v. 683-5).</p>
<p>Chaucer définit donc clairement l’aspect traditionnel de cette cérémonie annuelle. Il y est explicite, et définit subtilement chaque aspect de la fête, ce qui tend à nous faire penser que la tradition n’avait alors rien de bien traditionnel. Ce poème nous donne l’impression que Chaucer définit et explique à son public ce qu’est la Saint-Valentin. La suite de détails fait donc du « Parlement » le premier poème valentin, ce qui a permis aux poèmes suivant (de Chaucer ou de ses continuateurs) d’être bien plus concis quant aux spécificités de cette fête.</p>
<h2>Chaucer et la suite des festivités</h2>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/381074/original/file-20210128-15-ovikic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Geoffrey Chaucer tel que représenté dans Les Contes de Canterbury" src="https://images.theconversation.com/files/381074/original/file-20210128-15-ovikic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/381074/original/file-20210128-15-ovikic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=914&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/381074/original/file-20210128-15-ovikic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=914&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/381074/original/file-20210128-15-ovikic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=914&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/381074/original/file-20210128-15-ovikic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1149&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/381074/original/file-20210128-15-ovikic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1149&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/381074/original/file-20210128-15-ovikic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1149&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Geoffrey Chaucer tel que représenté dans Les Contes de Canterbury.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/britishlibrary/12458838675/in/photolist-jYWNFn-Ma1tRa-c3K8e5-xKNyHZ-qjsGpu-914iPt-bA6F8M-H3fGu4-9isup9-23iEmgD-8TgNQc-aaz4NT-LhCQj3-2hHuh4G-23rUdyo-51CSt9-fcW7BD-2f73tGZ-ptvNbr-qjhnNX-s6PspM-k4UTSr-Ngf99a-24MoHjb-bUB2hS-258qRME-Dvo7Z5-tsJAjj-9qaN1-7fJHp8-5TSZGH-bsJ6iP-cPeiUQ-7Mknxr-29X9EbB-2jgtkqD-RN2FAP-5ZsTLB-dWhirL-22JuRfL-2b34GKq-G3pLrF-JSikHy-uE3Hat-Q4sGMk-68NtsK-k54wBd-owim26-9fPuaN-pXN7V1">British Library/Flickr</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour résumer donc, la relation entre Valentin et la fertilité n’est, en quelque sorte, que le résultat d’une coïncidence et résulterait essentiellement de la proximité de sa fête avec des pratiques agricoles ancestrales propres à février et visant à préparer la terre au retour de l’été.</p>
<p>Chaucer fut néanmoins le premier à associer définitivement ces spécificités calendaires avec <a href="https://www.jstor.org/stable/2847741">l’amour, les oiseaux à la date du 14 février</a>. « Le Parlement des oiseaux » lui permit de définir les aspects de cette cérémonie. Une fois la chose faite, il put se permettre, en 1385 dans le prologue d’une « Complainte de Mars », d’entrer directement dans le vif du sujet en invitant les oiseaux à chanter à « l’aube grise » (v. 1) avant d’ajouter : « Saint Valentin, un chant d’oiseau j’ouïs/en ce jour, avant le lever du soleil » (v. 13-4).</p>
<p>Ce positionnement de la fête le 14 février, cet enthousiasme et cette célébration de l’été vient nuancer la dureté de l’hiver, qui touche bientôt à sa fin. Dans sa « Complainte », Chaucer développe une histoire d’amour malheureuse entre Mars et Vénus, équilibrée par l’imagerie printanière du début du poème. Cet hiver du cœur au printemps est révélateur du génie de Chaucer. Dans le « Parlement des oiseaux » et la « Complainte de Mars » il déplaça purement et simplement une imagerie poétique printanière habituellement associée à avril ou mai en février, un choix d’autant plus percutant qu’il permit un contraste entre les deux saisons et donc entre leurs émotions respectives.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153346/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jonathan Fruoco ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Redécouvrons les origines de la Saint-Valentin au travers de l’œuvre de Geoffrey Chaucer. Le Parlement des oiseaux, une ode au printemps et à la fertilité, Chaucer un poète en quête de festivités.Jonathan Fruoco, Chercheur associé au CEMA, Sorbonne Université, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1550822021-02-10T19:11:46Z2021-02-10T19:11:46ZVoyez-vous le meilleur ou le pire chez votre partenaire ? Tout dépend de la couleur de vos lunettes !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/383579/original/file-20210210-23-wwbo49.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=75%2C21%2C7065%2C5247&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Nos perceptions de notre partenaire agissent comme une paire de lunettes teintées qui colorent notre relation de couple.</span> <span class="attribution"><span class="source">shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Pour certains, la pandémie de Covid-19 est l’occasion de passer plus de temps ou de renouer avec son conjoint ou sa conjointe. Pour d’autres couples, le confinement a amplifié des difficultés relationnelles déjà présentes avant la pandémie, entraînant plus de stress et d’insatisfaction dans la relation.</p>
<p>Les ruptures, les divorces et même la violence domestique <a href="https://ici.radio-canada.ca/premiere/emissions/tout-un-matin/segments/entrevue/339369/separation-couple-divorce-covid-confinement">ont augmenté</a> depuis le début de la pandémie.</p>
<p>Étant donné qu’avoir des relations stables et satisfaisantes <a href="http://dx.doi.org/10.1177/1745691614568352">est essentiel au maintien d’une bonne santé</a>, il est nécessaire de comprendre les causes de la détresse relationnelle et comment y remédier. C’est l’un des objectifs du laboratoire <em>Breaking Sad</em> de la <a href="http://dozoislab.com/#">Western University</a>. Les recherches menées dans ce laboratoire se concentrent sur la façon dont les pensées négatives contribuent à la dépression et influencent nos relations.</p>
<p>Nos études récentes suggèrent que les croyances que nous avons au sujet de nos partenaires peuvent être particulièrement déterminantes pour comprendre ce qui cause les relations dysfonctionnelles.</p>
<h2>L’importance des perceptions</h2>
<p>Lors d’une <a href="https://doi.org/10.1521/jscp.2018.37.5.356">étude récente</a>, nous avons constaté que les individus engagés dans une relation intime se créent une image mentale sophistiquée de leur partenaire. De plus, ces représentations sont stockées dans notre mémoire et <a href="https://doi.org/10.1016/j.cpr.2019.03.003">influencent la façon dont nous comprenons, interprétons et réagissons</a> aux paroles et actions de nos partenaires. Dans un sens, elles agissent comme une paire de lunettes aux verres teintés qui colorent l’expérience que nous vivons avec notre partenaire.</p>
<p>Lorsque l’image que vous avez de votre partenaire est positive (par exemple, vous la percevez comme une personne attentionnée, réfléchie et bien intentionnée), c’est comme si vous portiez une paire de lunettes roses. Vous serez plus enclin à interpréter ce que votre partenaire fait de manière plus positive ou à excuser plus facilement certains comportements : « Il n’a pas répondu à mon message texte parce qu’il était occupé en réunion. Je sais qu’il ne m’ignore pas et qu’il répondra dès qu’il en aura l’occasion ».</p>
<p>En revanche, si la représentation que vous vous faites de votre partenaire est en général négative (« Elle est égoïste et ne se soucie pas de mes besoins »), vous aurez peut-être tendance à voir ses actions à travers une paire de lunettes beaucoup moins roses. Vous pouvez penser : « Elle n’a pas répondu à mon message texte parce qu’elle m’ignore et ne se soucie pas de ce que j’ai à dire ».</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Homme regardant son téléphone" src="https://images.theconversation.com/files/382353/original/file-20210203-17-gnskyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/382353/original/file-20210203-17-gnskyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/382353/original/file-20210203-17-gnskyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/382353/original/file-20210203-17-gnskyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/382353/original/file-20210203-17-gnskyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/382353/original/file-20210203-17-gnskyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/382353/original/file-20210203-17-gnskyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les pensées négatives à propos d’un partenaire affectent notre interprétation de ses gestes. Un message texte sans réponse sera perçu comme un manque de considération, par exemple.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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</figure>
<p>Plus nous percevons les gestes d’un partenaire sous un jour défavorable, plus nos représentations négatives se consolident – et plus nos « verres teintés » s’assombrissent.</p>
<p>Ainsi, entretenir des pensées négatives à l’égard de notre partenaire peut nous mettre en colère, nous déprimer et nous amener à mal interagir avec lui ou avec elle, par exemple en critiquant ou en nous éloignant. En fin de compte, les deux partenaires se sentent insatisfaits et moins soutenus dans la relation.</p>
<p>Malheureusement, pour plusieurs personnes, les convictions positives à l’égard d’un partenaire, qui sont prédominantes au début d’une relation, <a href="https://books.google.ca/books/about/Love_Is_Never_Enough.html?id=-okmCV9PfKoC&redir_esc=y">ont tendance à devenir plus négatives avec le temps</a>. Le trait de caractère qui nous attirait autrefois devient souvent l’élément qui nous irrite le plus. Au début, nous trouvons sa spontanéité excitante, mais après un certain temps, nous pouvons aussi interpréter cette qualité comme un manque de planification et de fiabilité de sa part.</p>
<h2>Changer les pensées négatives</h2>
<p>Que faire si vous avez une image trop négative de votre partenaire de vie ? Comment pouvez-vous voir un peu plus clairement à travers les lunettes de votre couple ?</p>
<p>Vous pouvez d’abord faire l’effort conscient de vous appuyer davantage sur les faits lorsque vous réfléchissez à votre relation de couple.</p>
<p>Les recherches montrent que la <a href="https://books.google.ca/books/about/Mind_Over_Mood.html?id=omJwsphImoYC&redir_esc=y">réflexion fondée sur des faits</a> contribue de manière importante au bien-être psychologique. Ainsi, lorsque vous tentez de comprendre une situation, basez votre réflexion sur des preuves tangibles en constatant les faits plutôt que de vous fier aux pensées négatives qui surgissent immédiatement dans votre esprit.</p>
<p>Au lieu de tirer des conclusions hâtives et croire que votre partenaire est égoïste et ne se soucie pas de vous parce qu’il n’a pas rapporté de lait comme vous lui aviez demandé, faites une pause et posez-vous la question : qu’est-ce qui me prouve que mon partenaire est égoïste et ne se soucie pas de moi ? Sur quels faits puis-je m’appuyer pour soutenir cette idée ?</p>
<p>Non seulement cet exercice peut vous aider à vous sentir mieux sur le moment, mais il vous permettra de voir les choses un peu plus clairement et de réagir de manière plus appropriée aux gestes ou paroles de votre partenaire.</p>
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<img alt="Une femme souriante avec sa tête sur l’épaule d’un homme" src="https://images.theconversation.com/files/382354/original/file-20210203-15-4ya1cc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/382354/original/file-20210203-15-4ya1cc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/382354/original/file-20210203-15-4ya1cc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/382354/original/file-20210203-15-4ya1cc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/382354/original/file-20210203-15-4ya1cc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/382354/original/file-20210203-15-4ya1cc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/382354/original/file-20210203-15-4ya1cc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Donner un câlin à son partenaire au lieu de le critiquer peut changer la façon dont vous le percevez.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Unsplash</span></span>
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<p>En plus de changer la façon dont vous percevez votre partenaire, <a href="https://doi.org/10.1037/a0033823">il est important de changer les interactions que vous avez avec elle ou lui</a>.</p>
<p>Et, aussi difficile à croire que cela puisse paraître, changer la façon dont vous réagissez, en faisant un câlin à votre partenaire, par exemple, au lieu de le critiquer lorsqu’il arrive à la maison sans pinte de lait, peut modifier vos sentiments et vos pensées à son sujet. S’efforcer de créer des interactions positives avec son partenaire peut contribuer à changer les perceptions négatives que vous avez développées à son sujet au fil du temps ou à les empêcher de se développer.</p>
<p>Aujourd’hui, plus que jamais, alors que le stress est élevé et que les relations amoureuses sont sous tension en raison de la pandémie, il est important de faire tout le nécessaire pour entretenir nos relations les plus intimes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/155082/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>David J. A. Dozois a reçu un financement du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada pour les travaux liés à cet article. Il est membre du Comité consultatif médical et scientifique d'Otsuka Pharmaceutical. Le Dr. Dozois a également publié des livres sur la thérapie cognitivo-comportementale. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>David J. A. Dozois ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’image que l’on se fait de notre partenaire influence nos interactions et la façon dont nous interprétons ses comportements. La relation dépend de nos lunettes, qui sont sombres ou teintées de rose.Jesse Lee Wilde, PhD Student, Clinical Psychology, Western UniversityDavid J. A. Dozois, Professor of Clinical Psychology, Western UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1438002020-08-16T18:57:50Z2020-08-16T18:57:50ZPorter un masque nous empêche-t-il de séduire ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/351331/original/file-20200805-24-1ufcwj5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C1272%2C3456%2C2907&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le masque cache l'un des atouts les plus importants dans le processus de séduction: le sourire.</span> <span class="attribution"><span class="source">Caju Gomes/Unsplash</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Le masque s’est imposé dans l’environnement social comme un moyen de se protéger du COVID-19. Mais son port entrave tout un pan de la communication humaine non-verbale.</p>
<p>Les mimiques, les expressions faciales – alliées susceptibles de permettre des ajustements dans l’interaction – s’effacent sous le tissu. Seuls les yeux et le front accompagnent alors le processus de communication. Nous devons ainsi nous défaire d’un élément majeur du non-verbal, notre sourire.</p>
<p>Or, la <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.2466/pms.2002.94.1.97">recherche</a> a depuis longtemps mis en évidence son importance dans le <a href="https://www.dunod.com/sciences-humaines-et-sociales/pourquoi-faut-il-sourire-quand-on-n-est-pas-beau-psychologie-seduction">processus de séduction</a>.</p>
<p>A mesure qu’avance l’été, période propice aux rencontres amoureuses, nous sommes aussi de <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/08/12/coronavirus-en-france-pres-de-1-400-cas-supplementaires-recenses-en-24-heures_6048782_3244.html">plus en plus masqués</a>. Comment séduire dans ces conditions ? Et au-delà, pouvons-nous nous passer de sourire ?</p>
<h2>Un sourire ravageur</h2>
<p>En latin, <em>seducere</em> signifie « tirer de côté, déplacer, écarter du chemin initial ». Dans l’hébreu biblique, quand Ève impute au serpent de l’avoir séduite, elle dit : « Il m’a levée » ou soulevée ; en somme, il l’a amenée à se décoller de sa posture initiale.</p>
<p>Cela suffit à indiquer qu’il y a chez tout un chacun un désir d’être séduit, c’est-à-dire d’être déplacé parfois très peu du chemin de sa routine ; un désir d’être mis en mouvement.</p>
<p>En septembre 2012, dans le magazine <em>InStyle</em>, Julia Roberts attribuait l’éclat de son sourire à son habitude de se laver les dents avec du bicarbonate de soude.</p>
<p>C’est pourtant un <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27881323/">autre secret</a> qu’ont découvert l’universitaire Vasiliki Koidou et ses collègues : la ligne reliant le bas de ses canines est presque parallèle à celle joignant le centre de ses pupilles.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/351332/original/file-20200805-22-11pm0z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351332/original/file-20200805-22-11pm0z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351332/original/file-20200805-22-11pm0z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351332/original/file-20200805-22-11pm0z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351332/original/file-20200805-22-11pm0z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351332/original/file-20200805-22-11pm0z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351332/original/file-20200805-22-11pm0z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351332/original/file-20200805-22-11pm0z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Graphique 1 – Les chercheurs ont montré qu’il existait une différence d’angle entre ces deux lignes chez un groupe contrôle et chez un groupe de 94 célébrités. Cet angle était près de 30 % inférieur chez les célébrités (0,97 degré contre 1,33 degré).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Si le sourire est jugé plus beau quand cet angle est faible, ce serait parce que le visage est alors plus symétrique, sans doute parce que dans les théories de l’évolution la symétrie faciale peut être considérée comme est un signe de bonne santé (pas maladie, d’anomalies génétiques de perturbations dans le processus de développement).</p>
<p>D’autres travaux ont par ailleurs montré que le nombre de dents exposé par le sourire était également un paramètre susceptible de rendre plus attractif le sourire d’une personne. C’est ce qu’ont <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21210007/">montré</a> par exemple Sulieman Al-Johany et ses collègues en 2011.</p>
<p>Il existe ainsi une différence significative entre les célébrités et les autres, les célébrités étant plus nombreuses à montrer 12 dents lorsqu’elles sourient.</p>
<p>Ces données ont été corroborées par les <a href="https://www.researchgate.net/publication/328250355_Details_of_pleasing_smiles">conclusions</a> de Pedro Oliveira et ses co-auteurs, qui ont indiqué que le fait de montrer 12 dents (contre 10 ou 8 en moyenne chez le tout-venant) était une caractéristique des sourires les plus attrayants.</p>
<h2>Faut-il sourire ?</h2>
<p>Le simple fait de sourire semble conduire à affecter bien d’autres dimensions comme la beauté du visage. <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.2466/pms.1996.82.3c.1111">Une équipe de chercheurs</a> a pris des photos d’hommes et de femmes de différents âges obtenues dans une condition de demande de sourire ou de non-sourire.</p>
<p>Lorsqu’il y avait sourire, on a demandé aux personnes de prendre trois types de poses : sourire fermé (étirement des lèvres sans ouverture de la bouche), sourire haut (lèvres tirées mais ouverture de la lèvre du haut dévoilant les dents supérieures) et sourire large (lèvres étirées et dents supérieures et inférieures dévoilées).</p>
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<img alt="Femme sourire" src="https://images.theconversation.com/files/351336/original/file-20200805-407-1x2wn92.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351336/original/file-20200805-407-1x2wn92.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351336/original/file-20200805-407-1x2wn92.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351336/original/file-20200805-407-1x2wn92.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351336/original/file-20200805-407-1x2wn92.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351336/original/file-20200805-407-1x2wn92.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351336/original/file-20200805-407-1x2wn92.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Sourire dit fermé, on ne voit pas les dents.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/beau-beaute-brune-brunette-1065084/">Hannah Nelson/Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351333/original/file-20200805-24-16dhgwj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351333/original/file-20200805-24-16dhgwj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351333/original/file-20200805-24-16dhgwj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351333/original/file-20200805-24-16dhgwj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351333/original/file-20200805-24-16dhgwj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351333/original/file-20200805-24-16dhgwj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351333/original/file-20200805-24-16dhgwj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un sourire dévoilant uniquement la partie supérieure de la dentition.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/amusement-arriere-plan-flou-beau-beaute-1239291/">Daniel Xavier/Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
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<figure class="align-center ">
<img alt="Femme large sourire" src="https://images.theconversation.com/files/351335/original/file-20200805-22-hq5i94.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351335/original/file-20200805-22-hq5i94.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351335/original/file-20200805-22-hq5i94.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351335/original/file-20200805-22-hq5i94.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351335/original/file-20200805-22-hq5i94.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351335/original/file-20200805-22-hq5i94.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351335/original/file-20200805-22-hq5i94.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Sourire dit large dévoilant les dents supérieures et inférieures.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/a-la-mode-adulte-beau-bijoux-773371/">Tarzine Jackson/Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces personnes étaient ensuite évaluées par d’autres hommes et femmes en termes d’intelligence, de gentillesse, de caractère heureux, d’extraversion, de sympathie, de soumission et d’ambition et, enfin, d’attrait physique. Pour cette dernière dimension, les résultats furent les suivants :</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/351338/original/file-20200805-14-4n2xtq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351338/original/file-20200805-14-4n2xtq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351338/original/file-20200805-14-4n2xtq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=350&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351338/original/file-20200805-14-4n2xtq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=350&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351338/original/file-20200805-14-4n2xtq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=350&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351338/original/file-20200805-14-4n2xtq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=440&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351338/original/file-20200805-14-4n2xtq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=440&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351338/original/file-20200805-14-4n2xtq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=440&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évaluation de l’attractivité et du bonheur perçu chez les personnes en fonction de l’intensité du sourire.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>La simple présence du sourire suffit à accroître l’attrait de la personne mais on constate également que, au fur et à mesure que le sourire s’élargit, la même personne est évaluée plus positivement.</p>
<p>Le sourire embellit donc bien le visage et conduit même à considérer que la personne en question est plus heureuse. En outre, il n’affecte pas que cette dimension puisque ces mêmes chercheurs ont observé que la personne était considérée comme plus gentille, possédant un caractère plus agréable, plus extraverti, plus sympathique… avec le sourire.</p>
<h2>Quand sourire rime avec beauté et compétences</h2>
<p>L’ensemble des évaluations s’accroît au fur et à mesure que le sourire devient plus large. <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/ejsp.2420200307">Un article scientifique de 1990</a> a retrouvé ces résultats en montrant qu’une même personne (homme ou femme) qui sourit était perçue comme plus attrayante physiquement mais également plus sociable, plus indépendante et plus compétente.</p>
<p>En outre, leur recherche a montré que le lien entre le sourire et l’évaluation de l’attrait était très élevé. En revanche dans cette même étude les auteurs montrent que les personnes souriantes étaient perçues comme plus féminines et moins autonomes.</p>
<p>À n’en pas douter le sourire semble renforcer l’attrait. Mais cela se vérifie plus chez les <a href="https://www.researchgate.net/publication/286884845_Women_smiled_more_often_and_openly_than_men_when_photographed_for_a_pleasant_public_occasion_in_20th_century_United_States_society">femmes</a> que chez les hommes, ainsi que l’ont montré deux groupes de chercheurs ayant examiné des <a href="https://www.semanticscholar.org/paper/Smile-and-Gender-in-Students%27-Yearbook%3A-A-Cultural-Gu%C3%A9guen/d5d099bf1b2bf388b7a5c5cac9e736a40474e35d?p2df">photographies de promotions d’étudiants</a>.</p>
<p>Dans les deux études, les auteurs montrent clairement que, quel que soit le type de circonstance de pose photographique, les hommes sourient moins fréquemment que les femmes. De plus, les femmes tendent également à plus recourir au sourire large que les hommes comme le montrent les <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10919-010-0093-y">travaux</a> de Piotr Szarota.</p>
<h2>Un sourire genré</h2>
<p>On pourrait penser que le sourire devient un comportement prototypique du sexe féminin au fur et à mesure du développement. Ainsi, le sourire serait « genré » et ferait en quelque sorte partie de manière plus marqué des attributs des femmes.</p>
<p>C’est ce que semble montrer une <a href="https://www.researchgate.net/profile/Brenda_Russell/publication/288644574_Smiling_in_School_Yearbook_Photos_Gender_Differences_from_Kindergarten_to_Adulthood/links/5730de8708ae08415e6a80bf/Smiling-in-School-Yearbook-Photos-Gender-Differences-from-Kindergarten-to-Adulthood.pdf">étude de 1999</a> dans laquelle les chercheurs ont observé et évalué les sourires des élèves en fonction de leur année scolaire (nous avons retraduit les « années scolaires » du système américain en âge pour plus de lisibilité dans la Fig. 4).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351347/original/file-20200805-14-y9w3my.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351347/original/file-20200805-14-y9w3my.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=408&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351347/original/file-20200805-14-y9w3my.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=408&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351347/original/file-20200805-14-y9w3my.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=408&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351347/original/file-20200805-14-y9w3my.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=513&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351347/original/file-20200805-14-y9w3my.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=513&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351347/original/file-20200805-14-y9w3my.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=513&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Graphique 4, le sourire serait « genré » et ferait en quelque sorte partie de manière plus marqué des attributs des femmes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Si au départ on trouve un taux de sourire identique entre les deux sexes dans les photos de classe, c’est à partir de l’âge de 9 à 12 ans que les différences significatives apparaissent entre les garçons et les filles</p>
<p>Or, c’est à cet âge que les conduites et apprentissages de séduction entre les garçons et les filles se développent et se renforcent. Le sourire apparaît donc bien ici comme un marqueur psychosocial de la différence entre les sexes.</p>
<h2>Le sourire nous influence-t-il ?</h2>
<p>Si le sourire est susceptible de nous embellir, on sait aussi que cela affecte le comportement de celui qui en est la cible. On a pu montrer que le sourire conduisait à apporter plus facilement son aide à quelqu’un comme de l’aider à trouver une lentille de contact qu’il avait prétendument perdue, ou de donner une direction.</p>
<p>On a également montré qu’une serveuse souriante recevait plus de pourboires. Le sourire semble toutefois beaucoup plus bénéficier aux femmes.</p>
<p><a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.2466/pr0.94.3.756-760">Dans une recherche</a> de Nicolas Guéguen et Jacques Fischer-Lokou, des compères, garçons et filles de 20 ou 21 ans, d’attrait physique jugé moyen, faisaient de l’auto-stop en regardant le conducteur dans les yeux.</p>
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<img alt="Auto stop à Cracovie" src="https://images.theconversation.com/files/351346/original/file-20200805-503-1k1dfco.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351346/original/file-20200805-503-1k1dfco.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351346/original/file-20200805-503-1k1dfco.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351346/original/file-20200805-503-1k1dfco.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351346/original/file-20200805-503-1k1dfco.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=576&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351346/original/file-20200805-503-1k1dfco.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=576&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351346/original/file-20200805-503-1k1dfco.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=576&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Pour avoir une chance d’être pris en stop… souriez ! (et soyez une femme).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b0/Hitchhiking_in_Krak%C3%B3w.jpg">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Selon le cas, ils ou elles souriaient au conducteur. On mesurait alors le taux d’arrêt. Huit cents conducteurs hommes et femmes ont été testés dans les différentes conditions. L’analyse a montré que, lorsque les autostoppeurs étaient des femmes souriantes, les automobilistes s’arrêtaient plus souvent, ce qui n’est pas le cas lorsque les autostoppeurs sont des hommes.</p>
<p><a href="https://psycnet.apa.org/record/1979-28605-001">Une étude déjà ancienne</a> montre qu’une serveuse de bar qui, au moment où elle remet une boisson au client, dispense le sourire minimal (mouvement des lèvres mais pas de mise en évidence des dents) ou un large sourire (sourire avec dents largement découvertes) voit ses pourboires varier.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/351339/original/file-20200805-14-s4svjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351339/original/file-20200805-14-s4svjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351339/original/file-20200805-14-s4svjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=350&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351339/original/file-20200805-14-s4svjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=350&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351339/original/file-20200805-14-s4svjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=350&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351339/original/file-20200805-14-s4svjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=440&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351339/original/file-20200805-14-s4svjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=440&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351339/original/file-20200805-14-s4svjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=440&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Evolution des pourboires en fonction des sourires.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Un large sourire augmente ses revenus mais cet effet est surtout lié aux comportements des hommes qui sont servis. Si cette tendance s’observe aussi chez les femmes, elle est bien moins flagrante que chez les hommes. Ces derniers auraient même tendance à se rapprocher de la femme qui leur sourit… <a href="https://link.springer.com/article/10.3758/BF03337025">dans les ascenseurs</a>.</p>
<h2>Interprétations erronées</h2>
<p>Pour d’autres chercheurs, lors d’interactions entre hommes et femmes, le fait que les hommes abordent plus facilement les femmes qui leur sourient proviendrait du fait qu’ils interprètent cela comme un plus fort désir de leur part qu’il ne l’est en réalité.</p>
<p>Ainsi, de nombreux hommes interprètent les comportements amicaux des femmes comme des tentatives de séduction alors que les femmes interprètent ces signes comme des signes simplement amicaux.</p>
<p>Cette distorsion de l’interprétation de ces signes pourrait donc expliquer pourquoi les hommes s’intéressent plus à une femme qui leur a souri ou pourquoi ils vont alors plus souvent faire des tentatives pour rentrer en contact avec elles.</p>
<p>De plus on sait que le sourire embellit la personne qui l’affiche, surtout s’il est symétrique. Or, les hommes sont très sensibles, beaucoup plus que les femmes à l’effet de l’apparence physique, notamment des visages comme cela a été indiqué.</p>
<h2>Jouer sur d’autres atouts que le sourire</h2>
<p>Mais le sourire n’est qu’une dimension de la séduction. Il existe bien d’autres signaux qui vont entrer dans l’équation de la séduction afin de faire comprendre au partenaire qui nous approche qu’il est le bienvenu ou non.</p>
<p>On trouve par exemple, le regard soutenu, le geste désinvolte tout en regardant l’autre dans les yeux… En ce qui concerne le regard, c’est aussi un <a href="https://psycnet.apa.org/record/2004-21112-006">comportement</a> utilisé par les hommes qui veulent séduire ou se rapprocher d’un·e partenaire.</p>
<p>Ainsi, notre été est peut être sauvé car même si notre sourire de séducteur/trice sera cette année caché par le masque, rien n’est perdu, car nous pouvons faire nos « yeux de velours » pour attirer l’autre, que nous soyons un homme ou une femme.</p>
<p>A défaut de sourires éclatants qui laisseraient paraître au moins dix de vos plus belles dents, multiplier les contacts visuels, dodeliner la tête ou incliner votre tête du côté semblerait tout aussi bien fonctionner.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143800/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les mimiques, les expressions faciales s’effacent sous le tissu. Nous devons ainsi nous défaire d’un élément majeur du non-verbal, notre sourire.Cyril Tarquinio, Professeur en psychologie, Université de LorraineCamille Louise Tarquinio, Doctorante en Psychologie, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1350592020-07-26T17:16:36Z2020-07-26T17:16:36ZSe mettre en couple ne doit plus rien au hasard<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/346905/original/file-20200710-18-k2pyai.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2049%2C1369&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pourquoi se met-on en couple ? Et si tout était calculé d'avance. </span> <span class="attribution"><span class="source">Mayur Gala/Unsplash</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Les expériences de confinement et déconfinement <a href="https://www.liberation.fr/france/2020/04/19/les-amours-contrariees-du-covid_1785737">l’ont montré</a> : les couples n’ont cessé de se faire et de se défaire, malgré la crise, via Tinder, Meetic ou d’autres réseaux sociaux.</p>
<p>Si l’épidémie a élevé la peur des contacts physiques, a renforcé la virtualisation des relations, elle a semble-t-il, amplifié l’exigence de sincérité et un désir de sélection attentive des partenaires, qu’on connaît parfois seulement virtuellement avant de les rencontrer en face à face.</p>
<p>Cela renouvelle les questions sur ce que l’on attend de la relation, et impose en quelque sorte de formuler plus explicitement des critères de choix.</p>
<p>Dans ce contexte, il est intéressant de revenir sur l’évolution contemporaine de la construction des relations de couple. Sommes-nous attachés à trouver l’âme sœur nonobstant nos différences, ou au contraire cherchons-nous un appariement traduisant une similitude ? Les études sur le couple montrent en effet que depuis plusieurs décennies, dans un monde compétitif, s’opère une quête de partenaires dont les valeurs, le mode de vie, le niveau d’éducation sont similaires aux nôtres.</p>
<p><a href="https://www.puf.com/content/Les_maladies_du_bonheur">Est-ce l’affirmation d’un désir de distinction</a>, la volonté de mettre toutes les chances de son côté lorsqu’il y va de la formation d’une relation durable et d’un projet familial, ou un calcul économique ?</p>
<h2>Une homogamie éducative croissante</h2>
<p>Aux États-Unis, mais aussi en Europe, dans la seconde moitié du XX<sup>e</sup> siècle, la sélection de partenaires éduqués a été en partie motivée par les différences de revenus associées au niveau d’éducation. Les plus éduqués perçoivent en effet des rémunérations beaucoup plus élevées que ceux qui ont des <a href="http://scholar.harvard.edu/files/goldin/files/career_and_marriage_in_the_age_of_the_pill.pdf">niveaux intermédiaires</a>.</p>
<p>Au cours des années 1960-1970, le mariage entre individus de même niveau scolaire, était surtout lié à la diminution du nombre de mariages hétérogènes sur le plan éducatif parmi les personnes relativement instruites ; après cette date, l’augmentation continue de l’homogamie est passée par la diminution du nombre de mariages hétérogènes à la fois en bas et en haut du spectre éducatif.</p>
<p>Au cours des dernières décennies du XX<sup>e</sup> siècle, un premier indice de cette différenciation des exigences éducatives dans les strates les plus éduquées a été donné par la comparaison des niveaux d’éducation au sein du couple dans les cohortes de naissance successives de deux groupes distincts.</p>
<p><a href="https://www.cambridge.org/core/journals/spanish-journal-of-psychology/article/role-of-personality-and-intelligence-in-assortative-mating/42533AC8F3C5C83BF7CC103AB2A4DBF2">Les corrélations entre les niveaux scolaires</a> des époux appartenant au groupe « très éduqué » s’élèvent des cohortes nées vers 1920 à celles nées vers 1950 (carrés gris), tandis que parallèlement la similitude des niveaux scolaire des époux au sein du groupe « peu éduqué » diminue légèrement (points noirs), mais dans l’ensemble il y a un rapprochement de la similitude des niveaux d’éducation entre époux.</p>
<p>Plusieurs pays d’Europe connaissent un tel rapprochement éducatif dans le couple. Au Danemark, au sein d’une cohorte suivie au cours des vingt-cinq dernières années, les mariages révèlent aussi l’importance des appariements fondés sur l’éducation dans les strates les plus éduquées.</p>
<p>À l’autre extrémité du spectre éducatif, les hommes restent longtemps célibataires, se marient moins facilement et sont amenés à être moins exigeants quant au niveau d’éducation de leur partenaire que ne l’étaient les hommes qui se marièrent dans les années 1970, la femme étant alors généralement plus éduquée que son mari.</p>
<p>En Espagne, comparant les raisons du choix des partenaires entre 2000 et 2010, Escorial et Martín-Buro indiquent que la sélection repose <a href="http://ftp.iza.org/dp6379.pdf">dans les couches cultivées</a> sur une « similitude des capacités à comprendre l’environnement […] plutôt même que sur une similitude de personnalité ». La concentration d’aptitudes cognitives élevées, dans les milieux qui en possèdent déjà le plus, augmente donc.</p>
<h2>Du phénotype au génotype</h2>
<p>La similitude recherchée dans le couple reste cependant liée à des qualités sensibles. Si statistiquement, et donc sociologiquement, les rapprochements s’opèrent sur la base du niveau éducatif, et non plus comme autrefois du statut social, ceux qui se mettent en couple peuvent encore concevoir leur choix comme le produit d’une affinité basée sur une impression sensible.</p>
<p>Or, ces proximités éducatives n’impliquent pas nécessairement une similitude plus forte des membres du couple s’agissant du segment du génotype qui contribue à déterminer les aptitudes cognitives. Ceci mérite une précision. Le génotype de l’enfant associe aléatoirement des qualités distinctes codées par le génotype de chaque parent d’où, en l’absence de similitude génétique des parents pour les aptitudes cognitives, le fait qu’ils donnent à <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-economic-history/article/education-and-income-in-the-early-twentieth-century-evidence-from-the-prairies/0F5357717F81B36ADFDB9B8DC0C0A848">leurs enfants de ce point de vue des dons inégaux</a>.</p>
<p>Il faut en effet distinguer dans les traits observables chez les enfants, ce qui découle du niveau d’éducation des parents et des gènes reçus. Si, dans les milieux aisés, les deux parents portent des séquences génétiques très similaires, il n’y a pas de distribution au hasard des aptitudes. Quel que soit le parent « transmetteur », la mère ou le père, les gènes transmis prédisposent les enfants dans ces milieux à de fortes performances cognitives.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/348361/original/file-20200720-92332-1xq9ehm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/348361/original/file-20200720-92332-1xq9ehm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/348361/original/file-20200720-92332-1xq9ehm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/348361/original/file-20200720-92332-1xq9ehm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/348361/original/file-20200720-92332-1xq9ehm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/348361/original/file-20200720-92332-1xq9ehm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/348361/original/file-20200720-92332-1xq9ehm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Quand les deux partenaires du couple sont très éduqués, leurs enfants, qu’ils reçoivent les gènes codant des aptitudes cognitives du père ou de la mère, héritent des gènes performants.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/jrOPyEXA8DE">Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>Selon <a href="https://www.pnas.org/content/113/24/6647">Dalton Conley</a>, il n’y a pas eu de rapprochement significatif des génotypes des époux dans les cohortes récentes. D’autres études appuient l’idée que la similitude entre époux n’est pas seulement observable au niveau phénotypique, mais au niveau génotypique.</p>
<p>Ainsi, au Royaume-Uni <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0160289616301854?via%3Dihub">David Hugh-Jones et d’autres professeurs d’économie</a> ont observé des niveaux plus élevés d’assortiment génétique que leurs collègues américains précités.</p>
<p>Dès lors, quand les deux partenaires du couple sont très éduqués, leurs enfants, qu’ils reçoivent les gènes codant des aptitudes cognitives du père ou de la mère, héritent des gènes performants puisque les deux parents les possèdent. La volonté des familles de pousser leur avantage sur le plan génétique est une volonté en acte.</p>
<p>Certes, pour les générations nées avant 1960, les exigences éducatives n’étaient pas aussi grandes qu’elles le sont devenues pour celles qui arrivent à l’âge adulte dans les dernières décennies du XX<sup>e</sup> siècle ou les premières du suivant, mais depuis des indices suggèrent qu’elles ont inscrit des écarts dans le ‘dur du dur’, le génome.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/katFC0-sh7c?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Bébés OGM : peut-on modifier le génome humain ?</span></figcaption>
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<p>Beaucoup de gens ont fait séquencer leur ADN et, si c’est plutôt la recherche des origines que les motive, rien n’interdit de consulter les bases de données publiques permettant de savoir si le partenaire qu’on est en train de choisir a les gènes désirables comme de connaître ses origines.</p>
<p>En raison de la baisse des prix du séquençage génétique, la connaissance du génotype de chacun est devenue très accessible. Un eugénisme, qu’on qualifie aujourd’hui bien imprudemment de « positif » au sens où il ne vise pas à éliminer, mais cherche à produire un individu augmenté, pourrait bien en résulter.</p>
<h2>Vers le « meilleur des mondes » ?</h2>
<p>Qu’en sera-t-il des comportements d’appariement si ces données génotypiques personnelles sont utilisées, dans les milieux où les individus comme les familles, à travers le choix de bonnes écoles, de bonnes fréquentations s’attachent déjà de façon systématique à augmenter les atouts dont ils disposent ?</p>
<p>Est-ce que les individus les mieux pourvus ne vont pas envisager ainsi d’avoir une progéniture dotée de meilleures aptitudes ? Les données observées n’interdisent pas de le penser. Si la lenteur des évolutions génétiques fait encore obstacle à la matérialisation d’un tel eugénisme, il reste que pour construire un monde équitable, il faudra affronter sans détour l’impact de ces comportements distinctifs.</p>
<p>L’école et les biens culturels publics n’ont pas vraiment le pouvoir d’unifier : ce sont typiquement des libertés créances, en ce sens que le bénéfice qu’on en retire ne résulte pas automatiquement d’un droit, mais du recours effectif à ce droit – typiquement celui d’étudier – dont l’usage varie selon les capacités. Les institutions publiques ont donc beaucoup à faire pour éviter de trop grands déséquilibres qui trouvent aujourd’hui une origine dans la formation du couple.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/135059/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hugues Lagrange ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Sommes-nous attachés à trouver l’âme sœur nonobstant nos différences, ou au contraire cherchons-nous un appariement traduisant une similitude ?Hugues Lagrange, Directeur de recherche en sociologie CNRS à l’Observatoire sociologique du changement, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1404902020-06-18T17:39:06Z2020-06-18T17:39:06ZTout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l’économie des sites de rencontres (sans jamais oser le demander)<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/341165/original/file-20200611-80746-3jadu0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C2%2C994%2C651&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Selon les données collectées en ligne, les hommes auraient tendance à rechercher des partenaires plus petites, plus jeunes et moins diplômées qu’eux.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Fotokalua / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Vous êtes en quête d’une relation durable ou d’une rencontre sans lendemain ? Inscrivez-vous à Tinder ou à Bumble. Ou encore, si vos préférences sont nettement plus ciblées, à GlutenfFreeSingles ou ClownDating. Les algorithmes ont remplacé les agences matrimoniales et la drague à l’ancienne. L’analyse économique s’était risquée sans données à échafauder une théorie du mariage, l’explosion des sites de rencontres a depuis tourné la tête de bien des économètres.</p>
<p>Savez-vous qu’un <a href="https://www.bfmtv.com/international/sites-rencontres-a-lorigine-dun-couple-trois-aux-etats-unis-529778.html">mariage sur trois</a> aujourd’hui aux États-Unis débute par une mise en relation virtuelle ? Qu’une entreprise chinoise qui s’était mariée à un site californien LGBT a été <a href="https://www.theverge.com/2020/3/6/21168079/grindr-sold-chinese-owner-us-cfius-security-concerns-kunlun-lgbtq">forcée de divorcer</a> par l’administration américaine pour des raisons de sécurité intérieure ? Que chacun, dans ses requêtes de partenaires, privilégie des profils plus favorables que le sien et qu’en conséquence une proportion significative d’utilisateurs ne récolte jamais de réponse à leur avance ?</p>
<p>Avant de se pencher sur la formation des couples, donnons quelques éléments d’économie de base sur l’industrie des plates-formes de rencontre. C’est moins sexy, mais c’est utile à savoir si vous êtes une future utilisatrice ou un futur utilisateur.</p>
<h2>Racolés avec une offre gratuite</h2>
<p>Si vous craignez les monopoles, la multitude de sites (plusieurs milliers en tout) vous rassurera. À tort pourtant. Il n’y a pas de Google ou d’Amazon visibles qui trustent le marché, mais un acteur peu connu, Interactive Corp., le domine à travers sa filiale Match Group, cotée au Nasdaq. Elle est à la tête d’une <a href="https://www.nyulawreview.org/issues/volume-94-number-4/antitrust-and-commitment-issues-monopolization-of-the-dating-app-industry/">cinquantaine de sites</a> dont les tout premiers en audience : le leader Tinder, mais aussi Plenty Of Fish, Match.com, OK Cupid, Hinge, Meetic, etc.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/341238/original/file-20200611-80750-bkmzpj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/341238/original/file-20200611-80750-bkmzpj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/341238/original/file-20200611-80750-bkmzpj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=326&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/341238/original/file-20200611-80750-bkmzpj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=326&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/341238/original/file-20200611-80750-bkmzpj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=326&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/341238/original/file-20200611-80750-bkmzpj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=409&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/341238/original/file-20200611-80750-bkmzpj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=409&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/341238/original/file-20200611-80750-bkmzpj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=409&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Parts de marchés dans le secteur des rencontres en ligne.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.nyulawreview.org/issues/volume-94-number-4/antitrust-and-commitment-issues-monopolization-of-the-dating-app-industry/">« Antitrust and commitment issues :monopolization of the dating app industry » d’Evan Michael Gilbert</a></span>
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<p>Les inclinations amoureuses diverses et les préférences sexuelles particulières des utilisateurs expliquent cette multiplicité des marques. En posséder plusieurs en portefeuille permet d’étendre la clientèle auprès d’audiences spécifiques ainsi que de conserver dans son giron les consommateurs qui papillonnent d’une plate-forme généraliste à l’autre.</p>
<p>À la crainte ordinaire du prix élevé du monopole s’ajoute ici un risque de dégradation de la qualité du service. Un modèle d’affaires des sites de rencontre consiste en effet à racoler des clients sur une offre basique gratuite pour les convertir ensuite vers une offre payante plus complète. Or, une fois le partenaire idéal trouvé et conquis, fiancé et marié, la plate-forme perdra son abonné – au moins pour quelque temps. La concurrence sur la qualité contrecarre cette incitation naturelle à freiner l’amélioration des performances des algorithmes pour former des couples durables.</p>
<p>En termes d’affaires, le positionnement marketing pour faciliter les rencontres éphémères rapporte plus. Surtout quand l’offre gratuite rapporte de solides recettes publicitaires. Toutefois, certains sites s’affichent spécialisés dans la recherche d’âme sœur. C’est ce que prétend <a href="https://www.cnet.com/news/facebook-dating-wont-push-tinder-off-your-home-screen-just-yet/">Facebook Dating</a>, un nouveau venu qui n’a pas encore vraiment percé. Son orientation est cependant crédible dans la mesure où il s’agit d’un service complémentaire du réseau social mondial plus qu’un centre de profit qui cherchera à le maximiser.</p>
<h2>L’infidélité, ça peut coûter cher…</h2>
<p>Quel que soit le positionnement des plates-formes, il faut faire aussi attention aux données personnelles. Les sites de rencontre enregistrent et conservent des informations intimes. Cela va bien au-delà du nom, prénom, adresse et numéro de carte bancaire.</p>
<p>Pour dresser leur profil, OK Cupid pose à ses abonnés des centaines de questions. Entre autres : « S’ils se sont déjà livrés à une activité sexuelle effrénée alors qu’ils étaient dans un état dépressif » ou « S’ils sont prêts à couiner comme un dauphin si leur partenaire le leur demande pendant l’acte sexuel » ! (Pour ceux qui s’inquièteraient de mes travers sachez que j’ai découvert ces <a href="https://thoughtcatalog.com/brian-donovan/2012/09/a-tour-of-the-sex-questions-on-okcupid/">questions insolites</a> sans m’abonner au site de Cupidon. Je n’ai donc pas eu à y répondre).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/341236/original/file-20200611-80754-4zyuk9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/341236/original/file-20200611-80754-4zyuk9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/341236/original/file-20200611-80754-4zyuk9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/341236/original/file-20200611-80754-4zyuk9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/341236/original/file-20200611-80754-4zyuk9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/341236/original/file-20200611-80754-4zyuk9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/341236/original/file-20200611-80754-4zyuk9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">« Couinez-vous comme un dauphin si votre partenaire le demande ? », une question que le site Ok Cupid ne se gêne pas pour poser….</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pxfuel.com/en/free-photo-oeril">Pxfuel</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>En 2016, 70 000 comptes ont été piratés et leurs informations divulguées par des <a href="https://openpsych.net/files/papers/Kirkegaard_2016g.pdf">étudiants danois en master</a>. Autre esclandre, le piratage de <a href="https://www.lci.fr/international/ashley-madison-le-dramatique-bilan-du-piratage-du-site-de-rencontres-extraconjugales-1538133.html">plusieurs millions de comptes</a> d’un site américain spécialisé dans les rencontres extra-conjugales. L’infidélité peut coûter cher…</p>
<p>Il y a des dizaines d’affaires de ce type. Elles concernent surtout des plates-formes peu connues, peu visibles, souvent éphémères. Leurs méthodes douteuses sont alors plus difficiles à contrôler et à sanctionner.</p>
<p>Les données peuvent également être transmises à des tiers (les prestataires de services techniques des sites, par exemple) ou vendues à des fins publicitaires. Le risque d’usage malveillant est réduit, mais il peut rester bien embarrassant. Par le passé, Grindr qui s’adresse aux gays, bi – et transsexuels, a renseigné des commerçants de logiciel sur l’adresse et le téléphone d’abonnés, mais également sur leur séropositivité au Sida.</p>
<h2>Des fiançailles (capitalistiques) brisées</h2>
<p>Ce site LGBT a aussi fait parler de lui d’une autre façon. En 2018, après deux années de fiançailles capitalistiques, il s’est <a href="https://www.theverge.com/2020/3/6/21168079/grindr-sold-chinese-owner-us-cfius-security-concerns-kunlun-lgbtq">entièrement donné</a> à une entreprise chinoise, spécialisée dans les jeux en ligne. Il semble qu’elle n’aurait pas alors notifié sa prise de contrôle auprès du CFIUS, le comité en charge d’évaluer les implications des investissements étrangers sur la sécurité intérieure des États-Unis.</p>
<p>Craignant que le gouvernement chinois puisse utiliser les données personnelles pour faire chanter des citoyens américains – dont éventuellement des élus du Congrès et des représentants de l’administration – le comité a ordonné une séparation sans consentement mutuel. Grindr a été cédé le mois dernier à un groupe d’investisseurs californiens.</p>
<p>Vos données personnelles seront mieux protégées si vous résidez en Europe. Vous pourrez plus facilement en exercer le contrôle et accéder aux informations que vous avez semées derrière vous comme des petits cailloux. Une masse qui peut être conséquente comme en témoigne la journaliste Judith Duportail dans <em><a href="https://www.theguardian.com/technology/2017/sep/26/tinder-personal-data-dating-app-messages-hacked-sold">I asked Tinder for my data</a>. It sent me 800 pages of my deepest, darkest secrets</em>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"912642655728865280"}"></div></p>
<p>Au terme de ce rapide survol, il apparaît raisonnable de s’abonner à plus d’un site, de les sélectionner de propriétaires différents, d’identifier leur positionnement pour la drague d’un soir ou pour une relation durable, de privilégier les plates-formes ayant pignon sur rue, ainsi que de lire attentivement les conditions d’utilisations de vos données. Sinon, pour choisir plus précisément je suggère, comme pour l’achat d’une tondeuse à gazon ou d’un fer à repasser, de consulter les enquêtes et tests comparatifs de <a href="https://www.quechoisir.org/comparatif-sites-de-rencontres-en-ligne-n189/">Que choisir ?</a> ou de <a href="https://www.consumerreports.org/dating-relationships/online-dating-guide-match-me-if-you-can/">Consumer Reports</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/341245/original/file-20200611-80766-gqvqi8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/341245/original/file-20200611-80766-gqvqi8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/341245/original/file-20200611-80766-gqvqi8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=861&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/341245/original/file-20200611-80766-gqvqi8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=861&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/341245/original/file-20200611-80766-gqvqi8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=861&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/341245/original/file-20200611-80766-gqvqi8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1082&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/341245/original/file-20200611-80766-gqvqi8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1082&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/341245/original/file-20200611-80766-gqvqi8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1082&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">C’est à Aristophane que l’on doit la plus ancienne théorie de la formation des couples. Ici, son buste au Musée des Offices à Florence, en Italie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikimedia</span></span>
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<p>Pour les esprits moins pratiques, la théorie de la formation des couples offre aussi un éclairage utile. La plus ancienne est racontée par le poète grec Aristophane dans <em>le Banquet de Platon</em>, au V<sup>e</sup> siècle avant J.-C. À l’origine les hommes étaient dotés de quatre bras, quatre jambes et deux visages. Punis pour avoir tenté d’escalader le ciel, Zeus les sépare en moitiés. Il condamne définitivement chacun à errer en quête de l’âme sœur pour <a href="https://www.philolog.fr/le-mythe-de-landrogyne-texte-de-platon/comment-page-1/">reconstituer son antique nature</a>.</p>
<p>Plus terre à terre, le prix Nobel d’économie Garry Becker dans <em>Une théorie du mariage</em> suppose également que le désir d’union de chacun est gouverné par la <a href="https://www.nber.org/chapters/c2970.pdf">recherche d’une moitié unique</a>. Mais il s’agit alors du partenaire qui, grâce à ses qualités complémentaires spécifiques, maximisera le gain d’une vie en commun avec enfants, maison et voiture.</p>
<p>Ce premier article d’économie sur le mariage est une construction purement théorique. Il n’est étayé par aucune donnée empirique. À cette époque de la vie de Becker, Internet n’existait pas et les agences matrimoniales d’alors n’enregistraient pas d’informations statistiquement exploitables.</p>
<p>Notez l’absence de jalousie et de rivalité entre les hommes dans ces deux fictions. La prédestination et la nature n’offrent à tout à chacun qu’un seul choix. Inutile de convoiter le partenaire d’un autre puisqu’il correspondra toujours à une moins bonne option.</p>
<h2>Appariements à attractivité égale</h2>
<p>Aujourd’hui en revanche, les théories de la formation des couples qui prévalent jouent à fond la concurrence. Le principe général est le suivant : les individus classent les partenaires possibles selon une échelle de préférence ou encore d’attractivité ; ils font leur demande en mariage auprès de leur préféré ou du plus attractif, mais ils ne sont pas les seuls à guigner le même partenaire ; celui-ci a bien sûr son mot à dire ; il peut refuser telle proposition espérant trouver un meilleur parti.</p>
<p>Un modèle fameux pour parvenir à caser tout ce monde rival a été conçu par un couple académique formé d’un mathématicien, David Gale, et d’un économiste, Lloyd Shapley (voir l’appendice de ma <a href="https://theconversation.com/lacces-aux-sommets-de-lenseignement-superieur-rarete-clubs-et-classements-103171">chronique de septembre 2018</a>).</p>
<p>Le modèle aboutit à une affectation stable où chacun a trouvé chaussure à son pied : aucun couple formé ne peut dévier de sorte que ses membres s’en sortent mieux. Si l’un voulait convoler avec un partenaire plus attractif, ce dernier perdrait au change, car le nouveau prétendant serait forcément moins bien que le sien.</p>
<p>Autrement dit, il ne sert à rien de vouloir conquérir un partenaire plus attractif que soi, car un rival plus attractif vous délogera et prendra son cœur. Les appariements se réalisent finalement entre partenaires d’attractivité égale, ce qui est une autre forme de complémentarité. On montre d’ailleurs mathématiquement que la formation des couples par complémentarité ou par rivalité aboutit <a href="https://princetonup.degruyter.com/view/title/535213?tab_body=toc">au même équilibre</a>, à la même affectation optimale.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/341255/original/file-20200611-80742-vtnpca.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/341255/original/file-20200611-80742-vtnpca.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/341255/original/file-20200611-80742-vtnpca.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/341255/original/file-20200611-80742-vtnpca.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/341255/original/file-20200611-80742-vtnpca.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/341255/original/file-20200611-80742-vtnpca.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/341255/original/file-20200611-80742-vtnpca.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La théorie de la formation des couples part du principe que les individus classent les partenaires possibles selon une échelle d’attractivité, mais que la concurrence pour un même partenaire peut être rude….</span>
<span class="attribution"><span class="source">Daxiao Productions/Shutterstock</span></span>
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<p>Naturellement, l’affectation idéale n’est possible que dans le cadre d’hypothèses simplificatrices en particulier sur l’ordre des préférences et sa connaissance par les individus. Dans la réalité, forcément plus complexe, il en va autrement. Il n’y aurait pas de divorces sinon !</p>
<p>On se doute par exemple que les abonnés des sites de rencontre visent plutôt un partenaire mieux qu’eux, comprendre plus beau et plus riche. C’est ce qu’a cherché à démontrer un couple académique, cette fois formé d’un physicien et d’une sociologue.</p>
<p>Les deux chercheurs ont établi une échelle de désidérabilité selon le nombre de premiers messages reçus en un mois par les utilisateurs d’un site de rencontre hétérosexuel dans plusieurs villes des États-Unis. Le record est détenu par une New-Yorkaise de 30 ans avec plus de 1 000 approches. Ils ont également classé les utilisateurs en appliquant Page Rank, l’algorithme de Google pour estimer la popularité des pages web. Eh bien, en moyenne les hommes et les femmes recherchent des partenaires qui sont 25 % plus désirables qu’eux-mêmes.</p>
<h2>Tenter le coup</h2>
<p>Le <a href="https://ideas.repec.org/a/eee/jetheo/v185y2020ics0022053119301061.html">modèle proposé</a> pour expliquer ce phénomène repose sur un arbitrage entre viser haut et soulever un intérêt réciproque. En effet, plus le choix s’éloigne vers le haut de son propre score d’attractivité, moins il y a de chances de nouer un lien amical ou amoureux.</p>
<p>Or, même si retenir et envoyer une proposition est aisé – il suffit de balayer des dizaines de profils et d’afficher un cœur sur une photo ou de rédiger quelques mots – le temps passé et l’effort consenti, donc le coût, ne sont pas nuls. Sans parler du désagréable sentiment de se prendre un râteau.</p>
<p>Une interprétation intuitive de ce <a href="https://www.dallasfed.org/research/economics/2020/0211">modèle</a> est que les hommes et les femmes ne distinguent qu’imparfaitement l’attractivité des partenaires potentiels et comptent alors sur une erreur de l’autre : il y a une chance qu’il, ou qu’elle, ne s’aperçoive pas que je ne joue pas dans sa catégorie. Alors je tente. Mais pas systématiquement, car les approches ont bien un coût.</p>
<p>On se doute aussi que le genre masculin n’est pas à son avantage. Sans surprise, les données des sites de rencontre hétérosexuels montrent qu’en comparaison d’eux-mêmes les hommes s’adressent préférentiellement à des femmes plus petites, plus jeunes et moins diplômées et qu’ils accordent <a href="https://www.researchgate.net/publication/281965128_Gender_Differences_in_Online_Dating_What_Do_We_Know_So_Far_A_Systematic_Literature_Review">plus d’importance aux attraits physiques</a> que les femmes.</p>
<p>Sans surprise également, les hommes répondent à 60 % aux invitations tandis que les femmes, peut-être moins intéressées par des rencontres éphémères, ne répondent qu’à 6 % des propositions. Ces <a href="https://www.economist.com/leaders/2018/08/18/modern-love">chiffres</a> sont fournis par le Tinder chinois, Tantan, qui précise aussi que 5 % des hommes ne reçoivent jamais de réponse à leur invitation de rencontre. Pour Tinder, on retrouve, semble-t-il, une disproportion des <em>likes</em> similaires : les femmes acceptent 12 % des sollicitations <a href="https://medium.com/@worstonlinedater/tinder-experiments-ii-guys-unless-you-are-really-hot-you-are-probably-better-off-not-wasting-your-2ddf370a6e9a">contre 72 % pour les hommes</a>.</p>
<p>Il serait intéressant de connaître les chiffres de Bumble. Sur ce site qui talonne désormais Tinder, seules les femmes peuvent établir le premier contact. Une innovation simple qui lui a permis d’en recruter un très grand nombre de façon accélérée. « Rejoignez la ruche », tel est son slogan. Aux hommes pour une fois d’attendre d’être sollicités. Si vous ne le savez pas <em>Bumblebee</em> désigne en anglais le genre des bourdons (<em>Bombus</em>), des sortes d’abeilles dont les ouvrières n’ont pas besoin de s’accoupler pour pondre des œufs. Le taux d’acceptation des sollicitations par les hommes sur ce site frôle-t-il alors les 100 % ?</p>
<h2>Une plus forte proportion de mariages mixtes</h2>
<p>Au chapitre de l’endogamie, on ne sera pas surpris non plus des préférences révélées par les appariements réalisés sur les sites de rencontre : les individus préfèrent nouer des liens avec des partenaires de même couleur de peau et de religion identique. Mais le point important n’est pas là. Il faut comparer les rencontres en ligne avec les <a href="https://web.stanford.edu/%7Emrosenfe/Rosenfeld_et_al_Disintermediating_Friends.pdf">formes alternatives traditionnelles</a> qu’elles remplacent en partie.</p>
<p>Avant Internet, les mariages étaient issus d’une première rencontre dans le cercle familial ou amical, dans les cafés ou au ciné, sur les bancs du lycée ou de l’université, au travail ou, plus rarement, à l’église ou grâce aux petites annonces. Depuis, toutes ces formes déclinent.</p>
<p>Aux États-Unis, les sites de rencontre sont même en passe d’arriver en tête. Or, les mariages issus d’un premier contact en ligne se caractérisent par une plus grande exogamie : la proportion de mariages mixtes et de mariages interreligieux est <a href="https://academic.oup.com/sf/article-abstract/98/3/1257/5498124?redirectedFrom=fulltext">plus élevée</a>.</p>
<p>A contrario, les sites de rencontre ont permis aux personnes aux orientations sexuelles moins partagées – et donc forcément moins nombreuses dans leur entourage proche –, de trouver plus facilement un partenaire. Aux États-Unis 70 % des homosexuels rencontrent leur partenaire en ligne, une proportion plus de <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/0003122412448050">trois fois plus grande</a> que les hétérosexuels.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/341789/original/file-20200615-65952-krv9l0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/341789/original/file-20200615-65952-krv9l0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/341789/original/file-20200615-65952-krv9l0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/341789/original/file-20200615-65952-krv9l0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/341789/original/file-20200615-65952-krv9l0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/341789/original/file-20200615-65952-krv9l0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/341789/original/file-20200615-65952-krv9l0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les applications favorisent les rencontres de partenaires éloignés l’entourage proche.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Santypan/Shutterstock</span></span>
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<p>La <a href="https://www.sociologicalscience.com/download/vol-4/september/SocSci_v4_490to510.pdf">comparaison</a> avec les formes de rencontres traditionnelles semble également montrer que les relations durables issues d’une première rencontre initiées sur Internet sont <a href="https://www.economist.com/briefing/2018/08/18/how-the-internet-has-changed-dating">plus longues et plus heureuses</a>.</p>
<p>Il n’y a aucun doute qu’en élargissant considérablement le nombre de partenaires potentiels au-delà du cercle restreint des connaissances amicales, familiales et professionnelles, les sites de rencontre ont augmenté les chances d’appariements mieux assortis.</p>
<p>Voilà, vous ne savez pas encore tout sur les sites de rencontre, mais suffisamment peut-être pour vous décider d’y recourir ou non, pour un plan d’un soir ou pour trouver l’âme sœur. Suffisamment aussi pour porter un jugement moins subjectif sur leur utilité sociale.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/140490/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François Lévêque ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Des tensions géopolitiques autour des données – très – personnelles aux stratégies des utilisateurs, découvrez les rouages d’un secteur à l’origine d’un mariage sur trois aux États-Unis.François Lévêque, Professeur d’économie, Mines ParisLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1396302020-06-08T18:12:48Z2020-06-08T18:12:48ZLa preuve par trois : la méditation va vous faire du bien<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/338349/original/file-20200528-51496-1ob8nbm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=32%2C24%2C5458%2C3639&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Trouver un moment pour méditer en cette période troublée peut s’avérer particulièrement bénéfique.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/calm-couple-pajamas-meditating-listening-spiritual-1598506348">Mariia Korneeva / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
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</figure>
<p><em>La preuve par trois : les experts de The Conversation déclinent 3 aspects d’une question d’actualité en 3 épisodes à écouter, à la suite ou séparément ! Dans cette série, Catherine Pourquier, enseignante chercheuse à Burgundy School of Business vous fait découvrir les bienfaits de la méditation de pleine conscience et vous invite à pratiquer trois exercices, idéalement à la suite. Vous pourrez apprendre à vous concentrer sur votre souffle pour libérer votre mental, puis vous découvrirez l’importance de l’ouverture du cœur et enfin, vous aurez l’occasion de vous connecter pleinement à la force vitale en vous et autour de vous.</em></p>
<h2><a href="https://theconversation.com/podcast-mieux-respirer-pour-mieux-reguler-ses-emotions-139606">Mieux respirer pour mieux réguler ses émotions</a></h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338351/original/file-20200528-51462-i5w8v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338351/original/file-20200528-51462-i5w8v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338351/original/file-20200528-51462-i5w8v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338351/original/file-20200528-51462-i5w8v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338351/original/file-20200528-51462-i5w8v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338351/original/file-20200528-51462-i5w8v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338351/original/file-20200528-51462-i5w8v3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Quand on est en prise avec ses émotions, la respiration se bloque au niveau la cage thoracique, ce qui provoque une mauvaise oxygénation du corps et du mental.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/serene-young-woman-taking-deep-breath-1523325020">fizkes/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<iframe src="https://player.acast.com/5e69020345f6295e08d5a28b/episodes/podcast-mieux-respirer-pour-mieux-reguler-ses-emotions?theme=default&cover=1&latest=1" frameborder="0" width="100%" height="110px" allow="autoplay"></iframe>
<p><a href="https://open.spotify.com/episode/2vfe0SukPc4dPp8GLc7PNV"><img src="https://images.theconversation.com/files/237984/original/file-20180925-149976-1ks72uy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=268&fit=clip" width="268" height="82"></a>
<a href="https://podcasts.apple.com/au/podcast/podcast-mieux-respirer-pour-mieux-r%C3%A9guler-ses-%C3%A9motions/id1516230224?i=1000477097492"><img src="https://images.theconversation.com/files/233721/original/file-20180827-75984-1gfuvlr.png" alt="Listen on Apple Podcasts" width="268" height="68"></a></p>
<p>La respiration profonde par le ventre constitue une porte d’entrée vers l’état de pleine conscience et permet dans l’instant présent de se reconnecter avec son corps et ses émotions.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/podcast-trouver-la-securite-interieure-pour-partager-son-amour-139611">Trouver la sécurité intérieure pour partager son amour</a></h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338353/original/file-20200528-51483-1uqzupj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338353/original/file-20200528-51483-1uqzupj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338353/original/file-20200528-51483-1uqzupj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338353/original/file-20200528-51483-1uqzupj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338353/original/file-20200528-51483-1uqzupj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338353/original/file-20200528-51483-1uqzupj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338353/original/file-20200528-51483-1uqzupj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le cœur est l’un des sept centres énergétiques ou chakras principaux qui composent la colonne partant du bas du dos jusqu’à la base de la tête.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/hands-buddha-statue-touching-heart-on-390933526">Bubbers BB/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<iframe src="https://player.acast.com/5e69020345f6295e08d5a28b/episodes/podcast-trouver-la-securite-interieure-pour-partager-son-amo?theme=default&cover=1&latest=1" frameborder="0" width="100%" height="110px" allow="autoplay"></iframe>
<p><a href="https://open.spotify.com/episode/5FlkXCWsuPWlPPYnpAqR6X"><img src="https://images.theconversation.com/files/237984/original/file-20180925-149976-1ks72uy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=268&fit=clip" width="268" height="82"></a>
<a href="https://podcasts.apple.com/au/podcast/podcast-trouver-la-s%C3%A9curit%C3%A9-int%C3%A9rieure-pour-partager/id1516230224?i=1000477097493"><img src="https://images.theconversation.com/files/233721/original/file-20180827-75984-1gfuvlr.png" alt="Listen on Apple Podcasts" width="268" height="68"></a></p>
<p>Ouvrir la cage thoracique grâce à la respiration de pleine conscience permet de développer un sentiment de bienveillance à l’égard de soi-même et des autres.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/podcast-ne-faire-plus-quun-avec-le-monde-139628">Ne faire plus qu’un avec le monde</a></h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338355/original/file-20200528-51471-7ke6sa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338355/original/file-20200528-51471-7ke6sa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338355/original/file-20200528-51471-7ke6sa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338355/original/file-20200528-51471-7ke6sa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338355/original/file-20200528-51471-7ke6sa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338355/original/file-20200528-51471-7ke6sa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338355/original/file-20200528-51471-7ke6sa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Lorsqu’on débute la méditation, il est intéressant de commencer par poser son attention sur chaque partie de son corps pour ensuite trouver l’unité, la dimension globale en soi.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.freepik.com/photos-gratuite/femme-assise-dans-pose-yoga-plage_859033.htm#page=1&query=meditation&position=4">pressfoto/Freepik</a></span>
</figcaption>
</figure>
<iframe src="https://player.acast.com/5e69020345f6295e08d5a28b/episodes/podcast-ne-faire-plus-quun-avec-le-monde?theme=default&cover=1&latest=1" frameborder="0" width="100%" height="110px" allow="autoplay"></iframe>
<p><a href="https://open.spotify.com/episode/3WK6IoNWbwWVrLr2MR5Iig"><img src="https://images.theconversation.com/files/237984/original/file-20180925-149976-1ks72uy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=268&fit=clip" width="268" height="82"></a>
<a href="https://podcasts.apple.com/au/podcast/podcast-ne-faire-plus-quun-avec-le-monde/id1516230224?i=1000477097494"><img src="https://images.theconversation.com/files/233721/original/file-20180827-75984-1gfuvlr.png" alt="Listen on Apple Podcasts" width="268" height="68"></a></p>
<p>Dans l’état de pleine conscience, celui qui médite parvient à se relier au vivant à l’intérieur et à l’extérieur de lui.</p>
<hr>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Catherine Pourquier est l’auteure du livre <a href="https://editions-jouvence.com/livre/365-meditations-et-exercices-de-pleine-conscience/">« 365 méditations et exercices de pleine conscience »</a> publié aux éditions Jouvence en 2017</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/139630/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Catherine Pourquier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Catherine Pourquier (Burgundy School of Business) vous propose trois exercices de pleine conscience à faire où et quand vous le souhaitez pour vous apaiser.Catherine Pourquier, Professeur de Conduite du Changement, Burgundy School of Business Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1396282020-06-08T18:12:44Z2020-06-08T18:12:44ZPodcast : Ne faire plus qu’un avec le monde<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/338336/original/file-20200528-51527-1m7fxev.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C31%2C4187%2C2760&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Lorsqu’on débute la méditation, il est intéressant de commencer par poser son attention sur chaque partie de son corps pour ensuite trouver l’unité, la dimension globale en soi.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.freepik.com/photos-gratuite/femme-assise-dans-pose-yoga-plage_859033.htm#page=1&query=meditation&position=4">pressfoto / Freepik</a></span></figcaption></figure><p>La méditation de pleine conscience constitue un excellent moyen pour trouver la sérénité à l’intérieur de soi. Pour y parvenir, nous pouvons pratiquer « un scan corporel » qui consiste à porter son attention sur chaque partie de son corps successivement pour ensuite prendre conscience de l’unité de son être.</p>
<p>Dans ce troisième et dernier exercice centré sur le souffle vital et la lumière, Catherine Pourquier vous aide à créer l’harmonie en vous-même et avec votre environnement en 8 minutes.</p>
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<p><a href="https://open.spotify.com/episode/3WK6IoNWbwWVrLr2MR5Iig"><img src="https://images.theconversation.com/files/237984/original/file-20180925-149976-1ks72uy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=268&fit=clip" width="268" height="82"></a>
<a href="https://podcasts.apple.com/au/podcast/podcast-ne-faire-plus-quun-avec-le-monde/id1516230224?i=1000477097494"><img src="https://images.theconversation.com/files/233721/original/file-20180827-75984-1gfuvlr.png" alt="Listen on Apple Podcasts" width="268" height="68"></a></p>
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<p><em>La preuve par trois : les experts de The Conversation déclinent 3 aspects d’une question d’actualité en 3 épisodes à écouter, à la suite ou séparément ! Dans cette série, Catherine Pourquier, enseignante chercheuse à Burgundy School of Business vous fait découvrir les bienfaits de la méditation de pleine conscience et vous invite à pratiquer trois exercices, idéalement à la suite. Vous pourrez apprendre à vous concentrer sur votre souffle pour libérer votre mental, puis vous découvrirez l’importance de l’ouverture du cœur et enfin, dans ce dernier épisode, vous aurez l’occasion de vous connecter pleinement à la force vitale en vous et autour de vous.</em></p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Catherine Pourquier est l’auteure du livre <a href="https://editions-jouvence.com/livre/365-meditations-et-exercices-de-pleine-conscience/">« 365 méditations et exercices de pleine conscience »</a> publié aux éditions Jouvence en 2017</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/139628/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Catherine Pourquier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans l’état de pleine conscience, celui qui médite parvient à se relier au vivant à l’intérieur et à l’extérieur de lui.Catherine Pourquier, Professeur de Conduite du Changement, Burgundy School of Business Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1396112020-06-08T18:12:41Z2020-06-08T18:12:41ZPodcast : Trouver la sécurité intérieure pour partager son amour<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/338300/original/file-20200528-51462-p30gps.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C0%2C4312%2C2879&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le cœur est l’un des sept centres énergétiques ou chakras principaux qui composent la colonne partant du bas du dos jusqu’à la base de la tête.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/hands-buddha-statue-touching-heart-on-390933526">Bubbers BB / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Il est indispensable de s’aimer soi-même pour pouvoir aimer de façon juste les autres. En pratiquant la médiation de l’ouverture du cœur, nous développons un sentiment de sécurité indispensable au renforcement de l’estime de soi qui permet par la suite d’aller en confiance vers les autres.</p>
<p>Dans ce deuxième exercice d’une durée d’environ 9 minutes, Catherine Pourquier vous accompagne pour retrouver cet état d’amour en vous et pour le diffuser à toutes les cellules de votre corps, puis au-delà.</p>
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<p><a href="https://open.spotify.com/episode/5FlkXCWsuPWlPPYnpAqR6X"><img src="https://images.theconversation.com/files/237984/original/file-20180925-149976-1ks72uy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=268&fit=clip" width="268" height="82"></a>
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<p><em>La preuve par trois : les experts de The Conversation déclinent 3 aspects d’une question d’actualité en 3 épisodes à écouter, à la suite ou séparément ! Dans cette série, Catherine Pourquier, enseignante chercheuse à Burgundy School of Business vous fait découvrir les bienfaits de la méditation de pleine conscience et vous invite à pratiquer trois exercices, idéalement à la suite. Vous pourrez apprendre à vous concentrer sur votre souffle pour libérer votre mental, puis dans ce deuxième épisode, vous découvrirez l’importance de l’ouverture du cœur et enfin vous aurez l’occasion de vous connecter pleinement à la force vitale en vous et autour de vous.</em></p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Catherine Pourquier est l’auteure du livre <a href="https://editions-jouvence.com/livre/365-meditations-et-exercices-de-pleine-conscience/">« 365 méditations et exercices de pleine conscience »</a> publié aux éditions Jouvence en 2017</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/139611/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Catherine Pourquier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ouvrir la cage thoracique grâce à la respiration de pleine conscience permet de développer un sentiment de bienveillance à l’égard de soi-même et des autres.Catherine Pourquier, Professeur de Conduite du Changement, Burgundy School of Business Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1396062020-06-08T18:12:38Z2020-06-08T18:12:38ZPodcast : Mieux respirer pour mieux réguler ses émotions<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/338287/original/file-20200528-51527-ekgiul.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C36%2C6012%2C3966&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Quand on est en prise avec ses émotions, la respiration se bloque au niveau de la cage thoracique, ce qui provoque une mauvaise oxygénation du corps.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/serene-young-woman-taking-deep-breath-1523325020">Fizkes / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Nous respirons depuis bien avant notre naissance, mais nous avons perdu en grandissant le sens naturel de la respiration calmante. Nous respirons le plus souvent de façon automatique, sans conscience. Pourtant, faire une pause pour prendre conscience de sa respiration, c’est s’offrir un moment précieux de reconnexion avec son être. Il est alors possible de se sentir plus vivant, dans l’instant présent, et d’accéder à une plus grande sérénité intérieure.</p>
<p>Dans ce premier exercice de méditation de pleine conscience d’environ 7 minutes, Catherine Pourquier vous guide pas à pas et vous aide à vous recentrer calmement sur votre souffle.</p>
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<p><em>La preuve par trois : les experts de The Conversation déclinent 3 aspects d’une question d’actualité en 3 épisodes à écouter, à la suite ou séparément ! Dans cette série, Catherine Pourquier, enseignante chercheuse à Burgundy School of Business vous fait découvrir les bienfaits de la méditation de pleine conscience et vous invite à pratiquer trois exercices. Dans ce premier épisode, vous pourrez apprendre à vous concentrer sur votre souffle pour libérer votre mental, puis dans les suivants vous découvrirez l’importance de l’ouverture du cœur et de la reconnexion à la force vitale en vous et autour de vous.</em></p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=417&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/323406/original/file-20200326-133016-tod0zl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=524&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Catherine Pourquier est l’auteure du livre <a href="https://editions-jouvence.com/livre/365-meditations-et-exercices-de-pleine-conscience/">« 365 méditations et exercices de pleine conscience »</a> publié aux éditions Jouvence en 2017</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/139606/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Catherine Pourquier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La respiration profonde par le ventre constitue une porte d’entrée vers l’état de pleine conscience et permet dans l’instant présent de se reconnecter avec son corps et ses émotions.Catherine Pourquier, Professeur de Conduite du Changement, Burgundy School of Business Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1389962020-05-29T00:07:41Z2020-05-29T00:07:41ZCinq leçons sur la distance en littérature<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/338284/original/file-20200528-51496-of7egi.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=41%2C0%2C4000%2C2904&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Jeune fille lisant sur le divan, Isaac Israëls, 1920.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Isaac_Isra%C3%ABls#/media/Fichier:Isaac_Israels_meisje_lezend_op_de_divan_1920.JPG">Wikipedia</a></span></figcaption></figure><p>Tant que durera la pandémie, il va falloir se résoudre à vivre à distance des uns des autres. Le nouveau modus vivendi qui est désormais le nôtre s’avère indissociable du maintien des gestes barrières et autres mesures de « distanciation », physique dont, pour l’essentiel, nous ignorions tout il y a encore quelques (longues) semaines. Raison de plus pour revenir sur une forme de distanciation qu’on appellera « littéraire », bien connue, elle, des spécialistes. Théorisée par Brecht ou Chklovski, mise en œuvre chez Kafka ou Proust, la distance est sans doute inhérente à l’acte d’écrire lui-même. À condition d’ajouter, sans craindre le paradoxe, qu’elle constitue aussi le meilleur antidote qui soit face aux périls de la distanciation sociale.</p>
<p>Oublions les librairies qui n’ont, hélas, pas eu le droit d’ouvrir pendant le confinement. Tâchons de ne pas (trop) penser aux ravages causés par la crise dans le milieu de l’édition, laquelle va frapper beaucoup d’écrivains au portefeuille. Retenons que les livres nous tiennent compagnie. Il est vrai que plus on fréquente la littérature, plus on est frappé par l’étendue du savoir qui est le sien. Savoir sur la maladie, la mort, le deuil, la vie aussi, ce qui n’est pas pour nous surprendre. Plus étonnante, son expertise en matière de distance et de distanciation. Ce savoir s’exprime dans des bouts de citation, à la faveur de cette « culture phrasée » <a href="https://www.grasset.fr/livres/la-puissance-du-detail-9782246854746">chère à Jean‑Claude Milner</a>. Il s’incarne, surtout, dans la chair d’écrits, d’anticipation pour l’un, de remémoration pour l’autre. Soit, au total, cinq leçons sur la distance.</p>
<h2>Les lois de la proxémie</h2>
<p>En 1966, l’anthropologue canadien E.T. Hall jetait les bases d’une nouvelle discipline scientifique, la « proxémie », comprenons l’usage qui est fait de l’espace et des distances sociales. La façon que nous avons d’occuper l’espace en présence d’autrui est constitutive de notre identité, posait-il au seuil de <em>The Hidden Dimension</em>. La « dimension cachée » du titre est celle de l’espace vital nécessaire à l’équilibre de tout être vivant, animal ou humain. Chez l’homme, cette dimension devient intégralement culturelle, car corrélée à une civilisation, une nationalité. </p>
<p>Ce que les Français ou les Italiens perçoivent comme « proche » ou « lointain » diffère, parfois sensiblement, de la perception que s’en font les Britanniques ou les Nord-Américains. Chez les Anglo-Saxons, l’inconfort se fait palpable en cas de contact rapproché avec son interlocuteur, alors que les Latins semblent moins regardants quant au strict respect des frontières de leur intimité – la distance de sécurité sanitaire est fixée à 6 pieds (soit 1, 80 m) aux États-Unis et au Royaume-Uni, alors qu’elle est de 1, 50 mètre en Allemagne et en Belgique et de 1 mètre en France…</p>
<p>Ce qui vaut pour les relations interpersonnelles, avec les modalités de la conversation, se retrouve au niveau de l’habitat, des déplacements, etc. En gros, Hall distingue sur une base physique allant de quelques centimètres à une dizaine de mètres, quatre types de distance, de l’intime à la publique, chaque catégorie s’évaluant selon deux modalités (proche et éloignée). Lettré, il convoque W.H. Auden ou encore Thoreau ou Kafka à l’appui de ses analyses (grossièrement) comparatives. Hall ne cite pas Isaac Asimov, dont le roman <em>The Naked Sun</em> (<em>Face aux feux du soleil</em>, dans la traduction française), paru en 1956, donne pourtant froid dans le dos tant il semble avoir intégré par avance toutes les règles de distanciation physique et sociale actuelles. L’espace de deux, trois mois, la dystopie fictionnelle sera devenue notre existence de tous les jours.</p>
<h2>Un monde de distanciation physique</h2>
<p>Dans un espace-temps qui est celui de la science-fiction, et des cycles robotiques, Asimov imagine une planète colonisée, Solaria, dont les habitants, éduqués dès la naissance dans la phobie du moindre contact, officiellement par crainte des infections microbiennes, vivent à l’isolement et se déchargent sur des robots du soin d’entretenir leurs vastes domaines. Les rapports sexuels, qui restent nécessaires pour procréer, relèvent de la corvée. En revanche, la seule communication admise, de type holographique, se fait sans pudeur et l’exposition de la nudité y est monnaie courante.</p>
<p>Le roman d’Asimov, même sorti du contexte de la guerre froide, continue de nous parler. En particulier, il alerte sur les possibles dévoiements, aux relents de discrimination, des mesures destinées à lutter contre la crise sanitaire actuelle.</p>
<p>Quand on sait que certaines catégories sociales sont plus impactées que d’autres par le Covid-19, qui sait si on ne cherchera pas, tôt ou tard, à les mettre au ban afin de s’en protéger coûte que coûte ? Il est à craindre que les messages martelés sur les gestes barrières à mettre en place, l’injonction, partout répétée, à garder « ses » distances, finissent par laisser des traces, renforçant l’ère du soupçon dans laquelle nous sommes entrés.</p>
<p>Ces manœuvres d’évitement qu’on se surprend soi-même à mettre en pratique et qu’on redoute de voir perdurer sur le long terme, il est impossible que la littérature ne s’en inquiète pas. Inconcevable, par rapport à ce qui fait son ADN, qu’elle ne se mêle pas de résister à la pression, collective, du « Vivons à distance les uns des autres ». Elle le fera sous la forme d’un récit, d’une fable qui portera, avant toute chose, sur l’irrépressible besoin de contacts que le confinement a mis au jour chez les animaux sociaux que nous sommes. Sans négliger la critique en bonne et due forme – littéraire, s’entend – de tout ce qui est susceptible de s’avancer masqué, à l’abri de mesures opportunément dites « barrières ». Rien de tel que la distance de la littérature pour battre en brèche une distanciation de mauvais aloi.</p>
<h2>L’amour de loin</h2>
<p>Continuons avec ces phrases célèbres que colportent les histoires de la littérature. « S’enfermer dans sa tour d’ivoire » en est une. Mais sait-on seulement que Sainte-Beuve, critique et poète à ses heures, en est l’auteur ? À l’instant d’évoquer le caractère batailleur et public de Victor Hugo, il l’opposait à l’un de ses contemporains, Alfred de Vigny : « Et Vigny, plus secret,/Comme en sa tour d’ivoire, avant midi, rentrait. » (1837) Il faudrait développer, mais la place manque, tant l’idée d’une littérature hautaine et désengagée, ayant définitivement pris ses distances d’avec les vicissitudes du monde, demande à être combattue.</p>
<p>Toute autre est la formulation attribuée au troubadour aquitain Jaufré Rudel, au XII<sup>e</sup> siècle, relative à <a href="https://www.cairn.info/revue-la-pensee-de-midi-2003-3-page-165.htm">« L’amour de loin »</a> (amor de lonh). Prince de Blaye, Rudel tombe amoureux de la princesse de Tripoli dont il avait entendu parler. Il s’engage alors dans la deuxième Croisade, tombe malade et meurt dans les bras de la princesse qu’il n’avait jamais vue, non sans lui avoir dédié une bonne part de son œuvre poétique.</p>
<p>À son insu, Rudel aura engagé la poésie, et le lyrisme amoureux à sa suite, sur le chemin d’une apologie de la distance, associée à la divinisation de l’objet aimé, placé sur un piédestal. Un chemin escarpé qui connaîtra une série de points culminants : l’amour courtois entre la Dame et son troubadour ; le romantisme du XIX<sup>e</sup> siècle ; mais aussi la poésie de Breton et d’Aragon.</p>
<p>Un reste de ce tropisme subsiste dans <a href="http://www.leseditionsdeminuit.fr/livre-L%E2%80%99%C3%89quivoque_%C3%A9pistolaire-2148-1-1-0-1.html">ce que Vincent Kaufmann nomme pour sa part « l’équivoque épistolaire »</a> à l’œuvre dans la correspondance, notamment amoureuse, de Flaubert ou de Kafka. Semblant réclamer à corps et à cris la présence de l’être aimé, leurs lettres se nourrissent, en fait, de son éloignement, jusqu’à craindre que son retour, en faisant cesser le prétexte de la lettre, ne suspende le sentiment amoureux lui-même. À croire que l’écrivain, monstrueux ou inhumain en cela, donne délibérément la préférence, non point à l’incarnation, mais à la distance « grâce à laquelle le texte littéraire peut advenir »…</p>
<h2>Détachement et esprit critique</h2>
<p>Désireux de rompre avec la veine du théâtre épique, selon la typologie d’Aristote, Berthold Brecht théorise à partir des années 1936 le <em>Verfremdungseffekt</em>, ou effet de distanciation. Et d’exhorter les spectateurs de ses pièces à rompre avec l’empathie (« Glotzt nicht so romantisch »), mais aussi avec l’illusion référentielle et les ressorts de l’action dramatique. Tout est bon pour susciter, dans le public mais y compris chez les acteurs, un salutaire réflexe de détachement, préludant à la prise de conscience critique.</p>
<p>Se désengluer de la chose qu’on chercherait à imposer, se sevrer des intrigues sentimentales, tel est l’objectif avoué. Face au spectacle qui secrète l’aliénation, il dresse un « spectateur émancipé » (Rancière). Taillant des croupières au naturalisme bourgeois, le dramaturge marxiste use de la distanciation, sans jamais perdre de vue la parenté de son mot d’ordre avec le manifeste des formalistes russes. Dès 1917, ces derniers, Viktor Shklovsky en tête, plaidaient pour le même genre de rupture créatrice. L’« étrangisation », qui implique la mise à distance tout à la fois des mots de la tribu et de la perception routinière, aura bel et bien revitalisé la poésie moderne. Mais qui peut sérieusement croire que les poètes, russes ou pas, aient attendu 1917 pour mettre en œuvre la défamiliarisation des usages de la langue et du monde baptisée « ostranénie » ?</p>
<h2>Décanter la matière des souvenirs</h2>
<p>« Une émotion remémorée dans la tranquillité, la quiétude » (« emotion recollected in tranquillity »). Ainsi se définit la poésie selon William Wordsworth, le plus proustien des versificateurs anglais. C’est souvent à distance de l’événement que campe le poète, pour y remâcher, y décanter la matière de ses souvenirs. Ni trop près, ni trop loin. En s’éloignant du présent de l’écriture, l’émotion se purifie de sa violence et se trouve convertie en autre chose, où l’inquiétude n’a toutefois pas entièrement déserté la place.</p>
<p>C’est vrai, grosso modo, de la poésie élégiaque, ainsi le recueil de Michel Deguy, <em>A ce qui n’en finit pas. Thrène</em> (1995), imprimé sur pages non numérotées. La mort de l’épouse s’y trouve renvoyée aux confins de la conscience, là où la distance se fait irrévocable et la perte irréparable, et restituée dans le présent d’un veuvage appelé à durer, interminablement. Les romanciers sont logés à même enseigne, quand il s’agit de restituer l’impact causé par une catastrophe, naturelle ou terroriste.</p>
<p>Après l’effondrement des tours du World Trade Center et les millions de vues du Falling Man anonyme sautant de l’une des fenêtres du bâtiment pour chuter dans le vide, cinq ans s’écouleront avant que Don DeLillo n’en tire une figure aimée de loin et un roman éponyme comme tombé en distance.</p>
<h2>Entre désir et nostalgie</h2>
<p>Terminons avec Marcel Proust, le plus wordsworthien des romanciers français. L’arc monumental dessiné par La Recherche, de la première à la dernière phrase du cycle, parle de distance et de remémoration. Dès les premières pages, avec l’évocation du cérémonial du coucher (« de bonne heure »), apparaît la tension, chez le narrateur, entre désir de proximité et désir d’éloignement. Chaque soir, quand revient l’heure du coucher, à l’idée du baiser que déposera sur sa joue la mère de Marcel, avant de le quitter très vite, ce dernier éprouve un mixte d’impatience et d’appréhension : « longtemps avant le moment où il me faudrait me mettre au lit et rester, sans dormir, loin de ma mère et de ma grand-mère ». Tout est dit de l’angoisse d’abandon, de l’éloignement redouté d’avec la mère ; mais le réagencement du désir par l’écriture l’emporte, pour preuve cette autre formulation, au comble du paradoxe, là encore : « De sorte que ce bonsoir que j’aimais tant, j’en arrivais à souhaiter qu’il vînt le plus tard possible, à ce que se prolongeât le temps de répit où ma mère n’était pas encore venue. »</p>
<p>Impossible de rendre plus transparent le désir d’allonger l’attente, de différer le plus possible la consommation du pourtant convoité baiser. Et si la littérature ne faisait jamais que cela, à savoir distancer un temps qui est lui-même celui du <em>longing</em>, pour le dire en anglais, entre désir et nostalgie ? À l’autre bout de la chaîne, parvenu à la dernière page du livre, le constat est celui-ci : l’espace a beau céder la place au « Temps » (ultime mot du texte), la distance n’en disparaît pas pour autant ; temporelle, elle cesse d’être uniquement un intervalle, de marquer une césure, pour se faire milieu ambiant, vacance intérieure où les époques « si distantes » du Temps Retrouvé, et le monde avec elles, se déposent et se recomposent tout à la fois. La Recherche, ou la distance faite œuvre.</p>
<p>Une dernière chose. La défense et illustration de la distance en littérature n’invalide pas un choix d’apparence contraire, celui de la proximité. Le proche et le distant, lointainement à l’unisson.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/138996/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc Porée ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Théâtre, poésie, roman… Art de l’anticipation ou de la remémoration, la littérature ne cesse de jouer avec la notion de distance.Marc Porée, Professeur de littérature anglaise, École normale supérieure (ENS) – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1358912020-05-06T15:06:18Z2020-05-06T15:06:18ZLa sexualité au temps du confinement : le site Pornhub est-il le modèle de l’avenir ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/333118/original/file-20200506-49538-zxsmgc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'actrice porno Ginger Banks est présente sur le stand de Pornhub, lors de l'AVN Adult Entertainment Expo, le 24 janvier 2018, à Las Vegas. Le géant montréalais Pornhub a rendu gratuit son abonnement durant la pandémie. </span> <span class="attribution"><span class="source">AP Photo/John Locher</span></span></figcaption></figure><p>S’il est encore trop tôt pour définir les moments clés de la pandémie actuelle, l’un d’entre eux a peut-être eu lieu le 14 mars 2020, lorsque le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pornhub">géant de l’industrie pornographique Pornhub</a>, dont le siège social est à Montréal, a choisi de rendre son accès gratuit aux citoyens italiens jusqu’à la fin du mois <a href="https://nightlife.ca/2020/03/25/pornhub-premium-est-desormais-gratuit-pour-tout-le-monde-sur-la-planete/">avant d’étendre cette offre à tous sur la planète</a>.</p>
<p>Au-delà de son caractère anodin, que peut nous révéler cette décision sur la sexualité de l’avenir ? Et quelles sont les réelles intentions de Pornhub ?</p>
<p>Loin d’être une question privée, le sexualité s’inscrit dans une perspective économique. Au XIX<sup>e</sup> siècle, le modèle puritain prescrit par exemple une sexualité limitée à la reproduction qui <a href="https://www.persee.fr/doc/rhpr_0035-2403_1978_num_58_4_4460_t1_0472_0000_2">correspond à l’éthique de l’effort exigé à l’usine</a>. Les années 60 s’accompagnent quant à elles de nouveaux slogans comme <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Il_est_interdit_d%27interdire_!">« Il est interdit d’interdire »</a> ou « <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Faites_l%27amour,_pas_la_guerre">Faites l’amour, pas la guerre</a> » revendiquant une jouissance sexuelle davantage en accord <a href="https://www.cairn.info/revue-le-philosophoire-2004-1-page-184.htm">avec la jouissance des biens matériels de la société de consommation</a>.</p>
<p>Paradoxalement, cette « libération » du sexe se paie d’un gigantesque processus de normalisation porté par la psychologie. Nombre de rapports par semaine, choix des partenaires, positions à expérimenter ou à privilégier : le sexe n’étant plus tabou, les dernières barrières qui le protégeaient du social sautent. La sexualité est montrée et affichée. Dès lors, la norme prend une place de plus en plus importante dans les pratiques.</p>
<p>Mes recherches en cours portent sur le lien entre le néolibéralisme et l’émergence de nouvelles spiritualités (développement personnel, méditation, yoga) dans les sociétés occidentales.</p>
<h2>Porno et performance</h2>
<p>La sortie du film <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gorge_profonde_(film)"><em>Gorge profonde</em> en 1972</a> constitue à ce titre un tournant dans la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Pjk0jWuzI2E">culture de masse</a>. Le titre du film paraît en effet lier le sexe à un nouveau code en vigueur, celui de l’échec ou de la réussite (le terme renvoyant avant tout à une sorte d’exploit). À partir de ce moment, la pornographie ne cessera de renvoyer à un idéal sportif, hygiéniste, taillé aux normes industrielles de la performance.</p>
<p>La complicité entre pornographie et capitalisme n’ira qu’en augmentant au fil du temps. Des pratiques comme le sexe de groupe et les masturbations multiples déploient en fait la même logique d’accumulation – des partenaires, des éjaculations – que celle du capital.</p>
<p>Sous la forme <a href="https://usbeketrica.com/article/rentree-litteraire-ou-nous-menera-la-societe-de-transparence">d’une transparence généralisée</a>, l’objectif de la pornographie est donc avant tout de rendre les corps visibles. Cette visibilité permet de gérer, de corriger et aussi de sanctionner plus facilement les comportements individuels, comme dans une aire ouverte où l’individu est d’autant plus docile qu’il se sait surveillé.</p>
<h2>L’explosion de la pornographie</h2>
<p>Encore cantonnée aux magazines et aux films jusqu’aux années 2000, la pornographie connaît un développement sans précédent grâce à Internet. Portée par des entreprises comme Youporn ou Pornhub, l’industrie pornographique génère <a href="https://www.journaldugeek.com/2010/06/02/quelques-chiffres-pour-le-porn-sur-internet/">jusqu’à 35 % du contenu téléchargé sur la toile</a>.</p>
<p>Les chiffres ne mentent pas : plusieurs dizaines de milliers de nouveaux films tournés chaque année pour un chiffre d’affaires estimé à <a href="https://www.scienceshumaines.com/la-pornographie-influence-t-elle-nos-pratiques_fr_36595.html">50 milliards $ par an tous secteurs cumulés</a>. L’ex-actrice Ovidie résume : « En dix ans, l’humanité a regardé l’équivalent de <a href="https://start.lesechos.fr/societe/culture-tendances/le-porno-une-industrie-en-pleine-mutation-1175320">1,2 million d’années de porno »</a>.</p>
<p>Si on ajoute le fait que des versions dénudées du selfie et la diffusion de contenus sexuellement explicites sans le consentement de la personne concernée ressemblent de plus en plus à une <a href="https://www.huffingtonpost.fr/entry/nudes-dick-pics-sextos-sondage-francais_fr_5e4bfa03c5b65f25da4f480f">étape obligatoire de socialisation pour les jeunes</a>, la pornographie prend la forme d’une industrie massive du corps humain. Aujourd’hui, le sexe tend même à se calquer sur le modèle des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9ants_du_Web">géants du web, les GAFA</a>, qui passe désormais par <a href="https://journals.openedition.org/nrt/6408">l’exploitation massive de données</a>.</p>
<p>On peut donc penser que la décision de Pornhub relève moins d’une belle initiative que d’un changement structurel indispensable à une meilleure rentabilité.</p>
<h2>Cibler les désirs</h2>
<p>Une bonne illustration de ce nouveau modèle revient en fait <a href="https://www.imdb.com/title/tt0470752/">au film <em>Ex Machina</em></a>, qui peut se lire comme une métaphore de la sexualité à l’ère du confinement.</p>
<p>Le film raconte l’histoire d’un jeune codeur informatique (Caleb) amené à participer à un test afin de déterminer si un robot du nom d’Ava est doué ou non de conscience. Le spectateur apprend au cours de l’histoire que le riche patron de l’entreprise de logiciels à l’origine de l’expérience s’est basé sur la collecte de données de Caleb pour élaborer Ava en fonction de son historique de recherches pornographiques.</p>
<p>En fait, tout l’intérêt du film réside dans cette interrogation : à quoi ressemblerait une sexualité au temps du <em>digital labour</em>, c’est-à-dire la mise au travail d’internautes. Comme l’explique le sociologue Dominique Cardon, le <em>digital labour</em> est un <a href="https://journals.openedition.org/lectures/19584">travail qui se présente souvent sous la forme d’un divertissement inoffensif et gratuit</a>. On peut y inclure le visionnement de vidéos, ou les chats qui ont pour point commun de renseigner sur les goûts de l’utilisateur et de générer à son insu des « traces qui seront valorisées et monétisées par l’industrie numérique ».</p>
<p>En offrant la « gratuité » aux internautes, Pornhub ne fait rien d’autre que remplacer l’abonnement par une exploitation optimale des données qui pourrait devenir à terme son modèle privilégié.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/333121/original/file-20200506-49542-bxvi16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/333121/original/file-20200506-49542-bxvi16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/333121/original/file-20200506-49542-bxvi16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/333121/original/file-20200506-49542-bxvi16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/333121/original/file-20200506-49542-bxvi16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/333121/original/file-20200506-49542-bxvi16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/333121/original/file-20200506-49542-bxvi16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’actrice, auteure et musicienne Bella Thorne assiste à la première de JT LeRoy à ArcLight Hollywood à Los Angeles, le 24 avril 2019. Elle fait ses débuts comme réalisatrice sur Pornhub.</span>
<span class="attribution"><span class="source">by Richard Shotwell/Invision/AP</span></span>
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<p>Au XXI<sup>e</sup> siècle, la sexualité pourrait bien ressembler à ce désir individuel pris dans les mailles d’un circuit économique dopé au ciblage et à la personnalisation, à l’image du plan final du film <em>Ex Machina</em> montrant Caleb enfermé dans une cage de verre d’où il ne parviendra jamais à sortir. « Quand c’est gratuit, c’est vous le produit », nous apprend le marketing.</p>
<h2>Des algorithmes efficaces</h2>
<p>Le développement d’algorithmes de plus en plus efficaces est susceptible d’enfermer l’internaute dans une bulle de filtres. Celle-ci lui montre seulement ce qu’il connait déjà, son futur étant prédit <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/sp/2015-sp03078/1043642ar">« par le passé de ceux qui lui ressemblent »</a>.</p>
<p>À l’enfermement physique s’ajouterait donc celui, plus cognitif, de l’imagination. L’utilisateur se retrouverait en quelque sorte « confiné » dans une boucle continue le renvoyant à ses propres préférences. À cela viendrait sans doute s’ajouter la menace de la dépendance. Pour mieux le dire, cette sexualité numérique et « gratuite » porterait donc le germe d’une sexualité narcissique et repliée sur elle-même.</p>
<p>La distanciation physique et sociale n’est pas uniquement la conséquence de la crise actuelle, mais l’extension logique – et dramatique – du programme de réformes néolibérales enclenché par Ronald Reagan et Margaret Thatcher dans les années 80. À l’époque, le mot d’ordre était déjà le suivant : <a href="https://www.theguardian.com/politics/2013/apr/08/margaret-thatcher-quotes">« la société n’existe pas »</a>.</p>
<h2>Penser une autre pornographie</h2>
<p>La pornographie n’est pourtant pas vouée à faire l’objet d’une marchandisation des acteurs et des spectateurs. Elle a longtemps possédé un rôle pédagogique, philosophique et artistique qu’on peut aussi bien retrouver dans les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Litt%C3%A9rature_et_sexualit%C3%A9">discours de Platon que dans le traité du Kamasutra ou encore la poésie de Baudelaire</a>. Tout l’enjeu reste de trouver le moyen d’en faire un outil d’émancipation plutôt que de contrôle.</p>
<p>Cette réappropriation peut bien sûr passer par la réduction de la consommation individuelle, mais aussi par la réappropriation des outils technologiques. Certains réseaux sociaux, (<a href="https://www.lesinrocks.com/2014/05/07/web/actualite/fuckbook-pornostagram-pinsex-version-x-reseaux-sociaux/">Pinsex, Fuckbook ou Uplust</a>) permettent aux utilisateurs d’échanger et partager directement leurs propres photos ou vidéos. Il s’agit peut-être d’un premier pas encourageant dans l’émancipation vis-à-vis des grandes multinationales.</p>
<p>Elle pourrait plus simplement passer par un retour à l’érotisme, comme le proposait le critique culturel Mark Fisher. « Peut-on penser à une pornographie sponsorisée par Dior ou Chanel, dont les fantaisies seraient mises en scène de façon aussi artistique que la <a href="http://k-punk.abstractdynamics.org/archives/008304.html">séance photo la plus glamour</a> ? » Contre la réalité hyper augmentée du modèle Pornhub, qui va de pair avec le culte de la performance, des <a href="https://www.jeuneafrique.com/mag/732436/culture/etre-noir-dans-le-porno-des-acteurs-temoignent-sur-les-stereotypes-raciaux/">stéréotypes raciaux et du benchmarking humain</a>, l’imagination, la fantaisie et la libre circulation du désir paraissent somme toute des demandes relativement modestes.</p>
<p>Après la répression, la plus grande menace pesant sur la sexualité, c’est la privatisation. Et s’il s’agit d’une vision un peu sombre de l’avenir, c’est parce que la crise récente a montré que la catastrophe n’était pas seulement un genre réservé à la science-fiction.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/135891/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dimitri M'Bama ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En offrant la « gratuité » aux internautes, Pornhub ne fait rien d'autre que remplacer l'abonnement par une exploitation optimale des données qui pourrait devenir à terme son modèle privilégié.Dimitri M'Bama, Doctorant en science politique à l'Université de Montréal, Université de MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.