tag:theconversation.com,2011:/id/topics/fab-lab-33712/articlesfab lab – The Conversation2023-11-27T17:15:34Ztag:theconversation.com,2011:article/2179652023-11-27T17:15:34Z2023-11-27T17:15:34ZCapturer l’eau des nuages pour lutter contre la pénurie d’eau dans les déserts<p>En 2022, 2,2 milliards de personnes n’ont toujours pas accès à des services d’eau potable. Avec le réchauffement climatique, la rareté de l’eau potable est devenue un <a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/water-and-sanitation/">défi majeur pour notre avenir</a>, et cette problématique s’intensifie bien sûr en premier lieu dans les régions arides et surpeuplées. Un <a href="https://www.unwater.org/publications/un-water-analytical-brief-on-unconventional-water-resources/">récent rapport des Nations unies</a> souligne l’importance cruciale d’explorer les sources d’eau « non conventionnelles » telle que l’eau atmosphérique, car les ressources actuelles sont surexploitées et insuffisantes.</p>
<p>Pour trouver des solutions originales, la nature peut être une incroyable source d’inspiration. En effet, au cours de l’évolution, certaines espèces d’arbres et d’insectes ont développé des moyens ingénieux pour capter l’eau qui se trouve dans l’atmosphère sous forme de vapeur ou de brouillard.</p>
<p>Citons par exemple les <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s004420050683">séquoias géants</a> de Californie, qui captent plus d’un tiers de l’eau qu’ils consomment grâce au brouillard intercepté par leurs aiguilles et égoutté à leur pied. Le <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00425-020-03433-y">Dragonnier de Socotra</a>, lui, capte et ingère l’eau du brouillard directement par ses feuilles en forme de rosette. Certains <a href="https://theconversation.com/images-de-science-sinspirer-des-cactus-pour-recolter-de-leau-douce-151318">cactus</a>, <a href="https://phys.org/news/2016-06-moss-ultimate-toolkit.html">mousses</a> et <a href="https://www.nature.com/articles/262284a0">coléoptères du désert</a> jouent sur leur structure, leur géométrie ou l’affinité de leur surface avec l’eau pour favoriser la collecte du brouillard.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561370/original/file-20231123-19-aspm0w.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un dragonnier de Socotra.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/un-arbre-etrange-au-milieu-dune-zone-rocheuse-siq3xkHUhSg">Andrew Svk/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>Des filets pour capturer le brouillard</h2>
<p>Face à ces solutions fascinantes, l’homme n’est pas en reste : des filets pour capturer le brouillard sont utilisés depuis le début des années 90 notamment par l’<a href="https://fogquest.org/project-information/projects/">ONG Fog Quest</a>. Nous cherchons à développer des manières frugales de fabriquer des filets qui soient à la fois plus efficaces, plus économes, et plus faciles à fabriquer que ceux qui existent actuellement.</p>
<p>Dans certaines zones désertiques telles qu’au Chili ou au Maroc, les populations font usage de « filets à brouillard » pour capturer les gouttelettes d’eau des <a href="https://cloudatlas.wmo.int/fr/advection-fog.html">« brouillards d’advection »</a> qui se forment et se déplacent au-dessus de certains déserts montagneux proches des côtes océaniques. Poussé par les vents dominants, l’air chaud et humide des océans se condense en petites gouttes d’eau lorsqu’il se refroidit au contact de l’atmosphère plus fraîche de ces régions montagneuses.</p>
<p>Depuis plusieurs décennies, les progrès scientifiques et techniques pour concevoir de grands filets à un coût abordable ont conduit de <a href="https://www.courrierinternational.com/article/innovation-au-maroc-la-collecte-du-brouillard-pour-pallier-les-penuries-d-eau">nombreuses communautés dans le besoin à déployer des filets pour capturer le brouillard transporté par le vent</a>. Ces filets « à nuages » ou « à brouillard » ressemblent à des filets de pêche tendus dans les airs. Pour les meilleurs filets, ils peuvent avoir une efficacité de collecte allant jusqu’à 15 % de la quantité d’eau contenue dans le brouillard. Dépendant du lieu où sont placés ces filets, ils peuvent récolter entre 10 et 100 litres d’eau par mètre carré et par jour.</p>
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<img alt="coléoptère récoltant de l’eau dans le désert" src="https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561371/original/file-20231123-23-wrtsrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les <em>Onymacris unguicularis</em> se positionnent sur les crêtes des dunes, lèvent la face dorsale de l’abdomen face au vent et baissent la tête. Dans cette position presque verticale, ils attendent que le brouillard se dépose sur leurs élytres, dont les sillons canalisent les gouttelettes d’eau jusqu’à leur appareil buccal.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/jamesharrisanderson/5727784452">James Anderson/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>Dans les régions en stress hydrique qui sont propices aux brouillards d’advection, le véritable enjeu est de développer de filets à brouillard abordables, efficaces et durables. Les filets peu coûteux, tels que les filets « à patates » (ou <em>raschel mesh</em>) utilisés pour l’emballage alimentaire, sont certes accessibles, mais leur efficacité est limitée et ils ne résistent pas aux vents violents. Les filets plus robustes et performants, comme le <a href="https://www.aqualonis.com/">filet commercial Aqualonis FogCollector</a>, sont plus difficiles à produire et beaucoup plus coûteux.</p>
<p>Face à ces défis scientifiques et techniques, des chercheurs se mobilisent pour explorer ces solutions passives permettant d’améliorer les filets en travaillant sur leur efficacité, leur aérodynamisme ou encore sur la nature du matériau qui constitue le filet et son affinité avec l’eau. L’aspect « passif » signifie qu’il ne faut pas d’apport d’énergie supplémentaire (électrique ou d’origine fossile) à l'énergie fournie par le soleil pour faire évaporer l'eau et mettre les masses d'air en mouvement, contrairement à d’autres méthodes pour récolter de l’eau douce, souvent très énergivores comme <a href="https://theconversation.com/le-dessalement-des-eaux-quand-lutiliser-et-a-quel-prix-207232">certaines méthodes de dessalement de l’eau de mer</a>.</p>
<h2>Améliorer les filets à nuage en adaptant la géométrie de leurs fibres</h2>
<p><a href="https://www.nature.com/articles/s41545-023-00266-6">Nos récentes recherches</a> ont ainsi abouti à des filets à brouillard en kirigami, conçus par de simples découpage et pliage de feuilles plastique. Ce type de filet est peu coûteux, doté d’une géométrie simple, dont l’efficacité surpasse celle de la plupart des filets existants.</p>
<p>L’origine de cette efficacité vient de la géométrie de la fibre employée. Alors que la plupart des filets à brouillard emploient des fibres cylindriques, nous employons des fibres plates.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561379/original/file-20231123-17-sptqoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La mousse est passée maître dans l’art de collecter l’eau.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/mousse-gouttes-brins-dherbe-gazon-3021192/">susannp4/Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>Une goutte posée sur une surface va prendre une forme qui équilibre les pressions interne et externe de la goutte, ainsi que le surplus de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pression_de_Laplace">pression (de Laplace)</a> venant de la courbure de l’interface liquide de la goutte.</p>
<p>La fibre cylindrique présentant une courbure, une goutte ne pourra pas s’étaler, car pour compenser la courbure de la fibre, elle devra garder la forme d’une perle. Grâce à la géométrie plane des fibres employées dans nos filets, les gouttes de brouillards s’étalent complètement, forment rapidement un fin film liquide très stable sur toute la surface du filet, ce qui favorise la collecte d’eau.</p>
<p>Ainsi, nos tests ont démontré que, dans des conditions expérimentales équivalentes, notre filet à brouillard Kirigami avait collecté huit litres par mètre carré en une heure, tandis que les filets en harpe de fibres et en mailles <em>rashel mesh</em> couramment utilisés n’avaient récolté que trois et deux litres par mètre carré respectivement.</p>
<p>Comparé à l’un des meilleurs filets à brouillard du marché (l’<a href="https://www.aqualonis.com/">Aqualonis FogCollector 3D-2013</a>), notre filet Kirigami affiche une efficacité stationnaire comparable, mais se révèle nettement plus performant sur le plan dynamique, c’est-à-dire lors de brouillards de courte durée ou de faible intensité.</p>
<h2>Une approche conçue pour être aisée à mettre à l’échelle dans des conditions frugales</h2>
<p>La simplicité et la scalabilité du kirigami en font un candidat prometteur pour des applications à faible coût sur le terrain (il ne s’agit en effet que d’une feuille de plastique percée de découpes). Actuellement, nous testons des prototypes à grande échelle en collaboration avec l’<a href="https://darsihmad.org/fr/acceuil/">ONG marocaine Dar Si Hmad</a> qui possède le plus grand champ de filets à brouillard au monde, et les premiers résultats sont très encourageants.</p>
<p>En plus de cette nouvelle méthode de fabrication, nous avons aussi développé, en laboratoire, une méthode d’essai précise et bien contrôlée permettant de quantifier l’efficacité de notre filet à brouillard Kirigami et de le comparer à d’autres filets dans les mêmes conditions.</p>
<p>En effet, la mesure de l’efficacité d’un filet à brouillard est souvent subjective et n’est pas encore standardisée.</p>
<p>Notre banc d’essai consiste en une soufflerie produisant un écoulement d’air laminaire dans lequel un brouillard est généré et envoyé à l’aide de transducteurs piézoélectriques. Les échantillons de filets, placés dans l’écoulement sur des balances ultra-précises, nous permettent de mesurer l’efficacité de collecte en temps réel. Nous pouvons ainsi distinguer de manière dynamique les différentes contributions à l’efficacité.</p>
<h2>Une recherche sous contraintes créatives pour relever les défis sociétaux</h2>
<p>Afin de garantir l’accessibilité et l’évolutivité des solutions développées, nous avons travaillé sous contraintes : dans le contexte de la <a href="https://125.stanford.edu/frugal-science/">« science frugale »</a> (science qui vise à concevoir des solutions évolutives et créatives tout en prenant en compte le rapport coût/performance) <a href="https://fablab.ulb.be/">au sein d’un environnement « fab lab »</a> (un laboratoire de fabrication numérique).</p>
<p>Les fab labs, en favorisant la collaboration interdisciplinaire et le prototypage, jouent un rôle clé dans la création d’innovations pour relever des défis mondiaux, conformément aux <a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/objectifs-de-developpement-durable/">objectifs de développement durable des Nations unies</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/217965/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Denis Terwagne a reçu des financements belges du Fonds de la Recherche Scientifique - FNRS (Bourse n° PDR-WISD-12). </span></em></p>Avec des filets à brouillard, on peut capturer l’eau des nuages, comme le font certaines plantes. Une nouvelle méthode utilise maintenant la technique japonaise du « kirigami ».Denis Terwagne, Physicien et expérimentateur de l'interdisciplinaire, Professeur, Université Libre de Bruxelles (ULB)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1563272021-03-17T19:22:04Z2021-03-17T19:22:04ZL’impression 3D, au-delà du plastique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/389570/original/file-20210315-13-isuc12.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C154%2C896%2C583&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">On peut même imprimer du sucre en 3D. Ici, une confection de la Patisserie Numérique.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.lapatisserienumerique.com/fr/home-fr/">La Patisserie Numérique</a>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Aujourd’hui, vous pouvez télécharger des plans pour fabriquer le porte-téléphone de votre vélo avec une imprimante 3D – dans le fab lab de votre ville ou, si vous êtes passionné, chez vous. Dans les premiers mois de la crise du Covid-19, les imprimantes 3D ont été mises à contribution pour fabriquer des visières nécessaires aux soignants et pour <a href="https://theconversation.com/les-fab-labs-apportent-des-solutions-concretes-et-locales-a-la-crise-du-covid-19-136277">prototyper des respirateurs</a>.</p>
<p>La fabrication additive ou « impression 3D » est désormais <a href="https://www.3dnatives.com/en/what-were-the-3d-printing-trends-of-2020/">bien établie dans le paysage industriel</a>. Cette technique, apparue dans les années 2000, consiste à ajouter de la matière et s’oppose à l’usinage industriel, qui procède par moulage pour les plastiques et qui retranche de la matière dans le cas du métal ou du bois. Les premiers usages ont été le prototypage rapide à base de plastique fondu déposé couche après couche pour constituer un objet en volume. Aujourd’hui, les révolutions de la fabrication additive ne résident plus seulement dans sa facilité et la rapidité du prototypage, mais plutôt dans l’utilisation de nouveaux matériaux.</p>
<p>Les fab labs sont considérés depuis longtemps <a href="https://theconversation.com/fab-lab-do-it-yourself-hackers-et-autres-open-source-76881">comme de nouveaux lieux de démocratie</a> où s’approprier les technologies et la fabrication d’objets adaptés à leur utilisateur. De plus, le monde de la logistique permet aujourd’hui aux particuliers de commander des matières premières variées, et d’expérimenter de nouveaux matériaux à imprimer, s’éloignant du « simple » prototypage plastique pour fabriquer des objets les plus sophistiqués avec des matériaux de plus en plus innovants.</p>
<h2>Les matériaux intelligents</h2>
<p>Au <a href="https://dvic.devinci.fr/">De Vinci Innovation Center</a>, nous explorons deux grands axes autour de la fabrication additive inspirée du vivant : les matériaux intelligents et les matériaux organiques.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/389571/original/file-20210315-15-11lpmhd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/389571/original/file-20210315-15-11lpmhd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=272&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/389571/original/file-20210315-15-11lpmhd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=272&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/389571/original/file-20210315-15-11lpmhd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=272&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/389571/original/file-20210315-15-11lpmhd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=342&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/389571/original/file-20210315-15-11lpmhd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=342&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/389571/original/file-20210315-15-11lpmhd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=342&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des objets imprimés en plastique, en résine, mais aussi, ici, en silicone dopé avec une poudre métallique pour réaliser un capteur souple intelligent.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Clément Duhart</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>La pensée ingénieure a tendance à séparer un système en sous-ensembles, d’un côté l’électronique et d’un autre le corps mécanique. Cette répartition des tâches est présente à toutes les étapes de conception d’un produit du <em>design</em> jusqu’à l’industrialisation. Ceci contraste avec l’approche de la nature, très « intégrée » dirait-on dans un jargon d’ingénieur, puisque ses systèmes décisionnels, ses capteurs sensoriels et ses actionneurs musculaires font partie d’un tout. Ce type de conception offre de nombreux avantages en termes de robustesse, d’esthétisme ou encore d’intégration.</p>
<p>Le champ d’exploration des matériaux intelligents consiste à créer des matières dans lesquelles l’ensemble des éléments sont directement intégrés. Grâce à la fabrication additive, un objet peut être conçu avec différents matériaux aux propriétés mécaniques variées, tout en intégrant en leur sein des circuits électroniques faits d’encre conductive par exemple. Il est également possible d’envisager de nouveaux types d’énergie pour la motorisation tels que la pression pneumatique ou hydraulique en dessinant des structures de canaux plus ou moins complexes à l’intérieur de la matière lors de l’impression. </p>
<p>Par exemple, nous avons expérimenté la conception de muscles pneumatiques que nous pouvons combiner avec de l’encre conductive pour dessiner des capteurs d’étirement inspirés de travaux en <a href="https://ieeexplore.ieee.org/ielx7/7361/8169217/08080224.pdf"><em>soft robotics</em></a>. Il devient alors impossible de dissocier l’actuateur du capteur, qui sont devenus une seule matière.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/hrwBOjJ8aKU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">La peau synthétique développée au De Vinci Innovation Center.</span></figcaption>
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<p>Par exemple, nous avons créé une <a href="https://dvic.devinci.fr/resource/projects/ssi/">peau synthétique</a> multicouche intégrant le derme, l’épiderme, des veines et une texture capable de sentir le toucher. Pour poursuivre ces travaux, nous avons mis en place une chaire de recherche avec la <a href="http://www.lynxter.fr">start-up Lynxter</a> pour explorer l’ensemble des opportunités des matériaux dits « intelligents » sur la fabrication additive. L’espoir est de voir peut-être un jour naître une imprimante 3D biologique, capable d’imprimer des organes ou structures vivantes autonomes tel que fantasmé dans le film « Le Cinquième élément ».</p>
<h2>Imprimer des matériaux issus du monde du vivant</h2>
<p>Ces dernières décennies, l’évolution industrielle et économique a été influencée par la matière bon marché et poussée vers l’énergie accessible principalement extraite du pétrole. Leur abondance nous a empêchés de penser la matière autrement que par la sidérurgie et le plastique.</p>
<p>Nous commençons maintenant à repenser notre rapport aux objets manufacturés et aux outils technologiques, notamment à travers les mouvements dits <a href="https://www.youtube.com/watch?v=SfGORMt0nGQ">« low tech »</a>. La conception de nouveaux produits est influencée par de nouveaux matériaux et mécanismes empruntés au monde vivant et inspirés par la biodiversité de notre planète.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/biomimetisme-sinspirer-de-la-nature-pour-rendre-linnovation-plus-soutenable-86164">Biomimétisme : s’inspirer de la nature pour rendre l’innovation plus soutenable</a>
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<p>Par exemple, la soie à haute densité est un matériau très résistant et flexible, à faible coût de production et potentiellement local, et est biodégradable par exposition aux ultra-violets. On pourrait ainsi envisager de fabriquer un dossier de chaise personnalisé à notre dos par fabrication additive en soie et à faible impact écologique en termes de production de matière première et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89nergie_grise">d’énergie grise</a>, en lieu et place d’une chaise fortement carbonée en plastique.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/389073/original/file-20210311-15-1b059ez.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/389073/original/file-20210311-15-1b059ez.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/389073/original/file-20210311-15-1b059ez.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/389073/original/file-20210311-15-1b059ez.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/389073/original/file-20210311-15-1b059ez.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=441&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/389073/original/file-20210311-15-1b059ez.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=441&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/389073/original/file-20210311-15-1b059ez.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=441&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Deux étudiants développent un matériau micro-poreux inspiré du lichen, pour l’utiliser dans des vêtements.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Clément Duhart</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Une partie du groupe « Resilient Futures » dirigé par Marc Teyssier s’intéresse à la culture de cellules vivantes pour la production et le conditionnement de matière organique pour la fabrication additive, en collaboration avec la start-up française <a href="http://masp.tech">MASP</a>. Un des objectifs à court terme est de conditionner à grande échelle de la soie, mais d’autres matières organiques sont également à l’étude. Le marc de café, une fois traité, peut être imprimé et stabilisé pour créer des couches semblables à du cuir animal – une activité inspirée <a href="http://fabtextiles.org/coffee-leather-bag/">du fab lab de Barcelone</a>. Dans le cadre de la confection alimentaire, nous explorons comment la cuisine moléculaire et la fusion permettent d’imprimer des aliments en trois dimensions.</p>
<h2>L’impression 3D guidera-t-elle la révolution écologique dans l’industrie et la logistique ?</h2>
<p>La fabrication additive plastique et résine a souvent été associée à une <a href="https://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/articles/impression-3d-ecologique-53391/">technologie à forte empreinte carbone</a> en raison de la matière première employée. De nombreux projets et entreprises tentent de recycler cette matière première en nouveau filament d’impression, mais pour l’heure ces tentatives restent limitées. D’une part, la qualité de la matière recyclée n’est pas toujours satisfaisante pour des produits finis et d’autre part les processus de retraitement ont eux-mêmes un impact sur la planète même si des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959652614001504">activités de recherche tendent à améliorer ce statu quo</a>. Aujourd’hui, les déchets issus de la fabrication additive plastique ou résine peuvent suivre la chaîne traditionnelle de valorisation et être employés dans d’autres secteurs industriels moins exigeants en termes de propriétés chimiques et mécaniques, par exemple pour des <a href="https://www.actu-environnement.com/blogs/gregory-giavarina/133/Gregory-Giavarina-batiment-plastiques-recycles-utilisation-212.html">matériaux de construction</a>.</p>
<p>Enfin, la culture de matériaux issus du vivant nous permet de penser au-delà du tout pétrole, et de tenter de voir les nouvelles technologies comme une opportunité de changement. Si la fabrication additive est déjà un formidable outil de prototypage, elle devient maintenant un outil de fabrication tous matériaux – potentiellement plus « verts », et de fabrication personnalisée – donc adaptée aux usages, voire réduisant le transport de marchandises, comme l’a souligné Neil Gershenfeld, <a href="https://fab.cba.mit.edu/">l’inventeur des fab labs</a>. Les produits finis n’auraient alors plus besoin de parcourir plusieurs fois le tour de la terre en cumulant les distances parcourues par les différentes pièces qui le composent. Le développement d’espace de fabrication digital dans nos quartiers nous permettrait d’acheter les plans de fabrication de certains objets sur Internet et de les fabriquer localement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/156327/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Clément Duhart ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Métal, argile, verre, matériaux intelligents ou matière organique, l’impression 3D poursuit sa révolution.Clément Duhart, Enseignant systèmes embarqués, docteur en informatique, Pôle Léonard de VinciLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1500032020-12-18T08:07:39Z2020-12-18T08:07:39ZComment les « labs » se sont imposés comme outils d’innovation sociale<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/370117/original/file-20201118-15-kaitq3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=26%2C0%2C5964%2C3368&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><span class="source">pexels/fauxels</span></span></figcaption></figure><p><a href="https://ec.europa.eu/jrc/en/publication/public-policy-labs-european-union-member-_states">Policy Labs</a>, tournés vers l’innovation dans les processus d’action publique (le Policy Lab de l’ULB), <a href="https://theconversation.com/un-fab-lab-ca-sert-a-quoi-76765">fab labs</a> qui travaillent à la fabrication de nouveaux objets comme des visières pour le personnel soignant (pensons au fab lab de Charleroi) ou encore <a href="https://www.cairn.info/revue-retraite-et-societe-2016-3-page-125.htm">Living Labs</a> qui élaborent des <a href="http://well-livinglab.be">tests en conditions réelles</a> pour différentes technologies : depuis une petite décennie, différents <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/leadership-management/innovation-a-quoi-servent-les-labs-1246954">laboratoires</a> fleurissent dans nos paysages administratifs et politiques.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/abcOGe1tkEo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Reportage sur les fab lab (France 3).</span></figcaption>
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<p>Ces labs témoignent de la recherche d’innovation promue par des démarches interdisciplinaires et portée par des acteurs variés comme les universités, les administrations ou les organismes politiques. Plusieurs de ces labs sont nés d’une volonté d’innovation dite sociale.</p>
<p>Ces dispositifs pensent ainsi l’élaboration collective de services, de produits ou encore d’inventions ayant un intérêt social.</p>
<p>Financés par les pouvoirs publics ou plus rarement par des entreprises privées, leur création témoigne d’une transformation incrémentale et graduelle dû rôle des États dans les politiques sociales. Ce phénomène s’inscrit dans la continuité de la création de <a href="https://www.vie-publique.fr/fiches/24110-quest-ce-que-letat-providence">l’État-providence</a>, développé après la Seconde Guerre mondiale, et l’émergence d’un <a href="https://www.cairn.info/journal-informations-sociales-2005-8-page-118.htm">État investisseur</a>.</p>
<h2>Politiques sociales et individualisation du risque</h2>
<p>Dans les décennies suivant la Seconde guerre mondiale, on voit apparaître les bases de l’État-providence moderne qui vise à développer le bien-être des travailleurs et assurer leurs risques sur le marché de l’emploi (maladie, vieillesse, perte d’emploi). Il s’agit de l’avènement de politiques dites <a href="https://www.economie.gouv.fr/facileco/john-maynard-keynes">keynésiennes</a> qui donnent à l’État le rôle de garant des risques sociaux. </p>
<p>Dans un contexte économique prospère, les outils avec lesquels les États identifient et tentent de résoudre les problèmes publics reposent sur une logique d’action universaliste et assurantielle. Celle-ci sera remise en cause suite aux <a href="https://www.economie.gouv.fr/facileco/chocs-petroliers">chocs pétroliers</a> des années 1970 car elle peine à trouver des solutions durable au chômage de masse qui s’installe en Europe.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/mlTxi4t5zSg?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Margaret Thatcher : portrait d’une « Dame de fer ».</span></figcaption>
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<p>Face à ce nouveau problème, les outils d’action sociale keynésiens sont critiqués pour leur manque d’efficacité et des acteurs politiques comme <a href="https://www.persee.fr/doc/polit_0032-342x_1986_num_51_4_3629">Margaret Thatcher</a> au Royaume-Uni et <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/mav/95/PIRONET/16543">Ronald Reagan</a> aux États-Unis impulsent leur redéfinition. Pour eux, seuls les individus peuvent prévoir et gérer leurs risques sur le marché de l’emploi et l’État doit se désengager des allocations et des prestations sociales. </p>
<p>On assiste alors à l’émergence d’une vague <a href="https://www.researchgate.net/publication/286186342_Du_neoliberalisme_a_la_nouvelle_gouvernance_liberale_Le_nouveau_cours_des_reformes_sociales_a_l%E2%80%99echelon_global_in_Giraud_O_Warin_Ph_dir_Politiques_publiques_et_democratie_Paris_La_decouverte">néolibérale</a> qui inspire l’action sociale par la promotion de l’individualisation des risques sociaux des années 1980 aux années 2000. Les différents plans d’activation sociale des demandeurs d’emploi sont des outils nés à cette époque.</p>
<h2>Une nouvelle voie : l’investissement social</h2>
<p>Au début du nouveau millénaire, ce néolibéralisme peine à freiner et réduire le chômage de masse tout autant que le keynésianisme, ce qui conduit à l’apparition d’une volonté de réconciliation entre ces deux modèles. Cette « troisième voie » est notamment portée par <a href="https://journals.openedition.org/osb/482">Tony Blair</a> au Royaume-Uni, <a href="https://journals.openedition.org/rea/205">Gerhard Schröder</a> en Allemagne, ou <a href="https://institutdelors.eu/tous-les-contributeurs/frank-vandenbroucke/">Frank Vandenbroucke</a> en Belgique. Leur idée est de responsabiliser les individus dans leur gestion du risque social tout en octroyant à l’État un rôle de gestionnaire des allocations et des prestations sociales. C’est l’avènement des politiques dites <a href="https://books.openedition.org/cirac/299?lang=fr">d’activation sociale</a> qui conditionnent l’accès des individus aux allocations sociales à leur participation active dans leur recherche d’emploi.</p>
<p>Cette logique est encore approfondie depuis la crise économique de la zone euro en 2008-2009 et désignée sous le label « d’investissement social ».</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/b75uWRP5ZlU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">La Stratégie Europe 2020.</span></figcaption>
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<p>Désormais portée par de nouveaux acteurs politiques, comme la Commission européenne ou Emmanuel Macron, cette dynamique d’investissement préconise une intervention de l’État dans les <a href="https://www.leparisien.fr/politique/suivez-en-direct-les-annonces-de-macron-devant-le-congres-de-la-mutualite-13-06-2018-7769463.php">politiques sociales</a> pour autant que celles-ci servent la croissance économique et qu’elles développent l’autonomie des individus.</p>
<p>Très concrètement, l’investissement social promeut des dépenses avant l’entrée sur le marché de l’emploi : politiques de la petite enfance, de l’enseignement ou encore de l’aide à la jeunesse. Il s’agit de préparer au mieux les individus à pouvoir gérer leurs propres risques une fois en âge de travailler et de promouvoir <a href="https://www.cairn.info/revue-gerer-et-comprendre1-2012-1-page-52.htm">l’auto-entreprenariat</a> comme outil d’émancipation. Ils doivent apprendre à gérer leur activité professionnelle seuls, et repérer quand leurs compétences ne sont plus à jour afin d’aller faire une formation pour les actualiser et redevenir compétitif sur le marché de l’emploi.</p>
<p>Cette logique d’investissement tend à transformer en profondeur les acteurs et les méthodes de l’action sociale. En effet, elle promeut le développement continu « d’innovations » afin d’accélérer, ajuster et flexibiliser toujours plus l’action de l’État en fonction des besoins du marché de l’emploi.</p>
<p>Les entreprises <a href="https://www.essnormandie.org/une-entreprise-de-leconomie-sociale-quest-ce-que-cest-r/">d’économie sociale</a> en sont les idéaux types : des petites unités qui produisent de la richesse, participant à la croissance économique, tout en développant des programmes de formation ou d’insertion rapidement ajustables en fonction des besoins du marché de l’emploi.</p>
<p>La logique des métiers en pénuries définis par certaines agences d’aide à la recherche d’emploi est aussi dans la même logique. Dans ce contexte, les différents labs contribuent à huiler les rouages de processus administratifs parfois à la traîne par rapport à l’injonction de flexibilité et d’efficacité nécessaire au déploiement du modèle d’investissement social.</p>
<p>En associant désormais des chercheurs au regard critique et des praticiens, cela permet d’analyser les failles d’une action publique et de l’adapter pour qu’elle rencontre mieux les besoins du terrain.</p>
<h2>Les labs : acteurs de l’innovation</h2>
<p>Ces labs formalisent et organisent les liens entre les chercheurs, les administrations, et les pouvoirs politiques. Dans ce domaine, les pionniers américains comme le <a href="https://www.capolicylab.org/">California Policy Lab</a> des Universités de Californie à Los Angeles et de Berkeley développent des outils destinés à l’inclusion sociale de leur communauté depuis près de 20 ans.</p>
<p>En <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-d-administration-publique-2017-1-page-89.htm">Europe</a>, ce type de structure apparaît plus tardivement, il y a une dizaine d’années, même si certaines associations comme la <a href="http://www.la27eregion.fr/">27ᵉ Région</a> française qui « inspire et invente les services, les administrations et les modes d’action publics de demain » font figure d’exception.</p>
<p>En Belgique, on voit apparaître ce type de structures très récemment comme le fab lab de <a href="https://www.fablab-charleroi.be/">Charleroi</a> ou le Policy Lab de <a href="http://policylab.ulb.be/">Sciences Po</a>, tous deux à l’ULB.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1184795889472290816"}"></div></p>
<p>L’avènement de <a href="https://ec.europa.eu/social/main.jsp?catId=1044&langId=fr">l’investissement social</a> depuis les années 2010 explique en partie l’apparition des labs comme acteurs de l’innovation. Par des méthodes expérimentales, ceux-ci élaborent, testent, puis diffusent des nouvelles manières de faire l’action sociale. Le lien entre chercheurs, politiques et administrations se resserre dans une intention de partage d’expérience et d’innovation.</p>
<p>Reste à savoir de quoi celle-ci est véritablement le nom : les labs produisent-ils de nouvelles façons de faire ou recyclent-ils de vieilles recettes ? Le recul temporel n’est pas encore suffisant pour apporter une réponse formelle, mais il faut rester attentif à leur évolution qui tend à transformer durablement les politiques sociales contemporaines.</p>
<hr>
<p><em>Cet article s’inscrit dans le cadre d’une réflexion collective de synthèse et prospective <a href="https://cevipol.centresphisoc.ulb.be/fr/accueil-0">« 20 ans déjà, 20 ans demain. 2000-2020-2040 »</a> sur quelques évolutions politiques majeures à l’occasion des 20 ans du <a href="https://cevipol.centresphisoc.ulb.be/fr/accueil-0">Cevipol</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/150003/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fanny Sbaraglia receives funding from Wallonie-Bruxelles International (Bourse WBI World)</span></em></p>Retour sur les différentes politiques sociales, entre investissements, responsabilisation, gestion du risque, jusqu’aux « labs », ces pépinières innovantes et sociales.Fanny Sbaraglia, Chercheuse en Science Politique , Université Libre de Bruxelles (ULB)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1362772020-04-27T17:52:24Z2020-04-27T17:52:24ZLes fab labs apportent des solutions concrètes et locales à la crise du Covid-19<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/330793/original/file-20200427-145513-g981zz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Fabrication de visières au groupement de fablabs parisiens MAKERSCOVIDPARIS. </span> <span class="attribution"><span class="source">Quentin Chevrier / mon atelier en ville</span></span></figcaption></figure><p>Le 28 mars, le gouvernement français <a href="https://www.huffingtonpost.fr/entry/coronavirus-la-france-a-commande-plus-dun-millard-de-masques_fr_5e7f8dfbc5b6256a7a2bba67">annonçait</a> une commande de plus d’un milliard de masques à la Chine, qui arriveront <a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/coronavirus-les-masques-commandes-par-le-gouvernement-arrivent-en-france_3891289.html">d’ici fin juin</a>. En attendant, les <a href="http://carrefour-numerique.cite-sciences.fr/fablab/wiki/doku.php?id=charte">fab labs</a> et les <em>makers</em> se mobilisent pour aider les soignants à faire leur travail dans de bonnes conditions.</p>
<p>Le <a href="https://www.ted.com/talks/neil_gershenfeld_unleash_your_creativity_in_a_fab_lab?language=en">but des fab labs</a> est de concevoir des solutions à des problèmes locaux et de permettre l’essaimage de ces solutions à l’échelle mondiale grâce à une logique d’ouverture passant par la documentation et le partage. Avec des communautés très <a href="https://theconversation.com/independants-mais-ensemble-les-makers-inventent-de-nouvelles-collaborations-66608">distribuées</a>, il est parfois difficile d’essaimer, mais plusieurs projets innovants démontrent la force de la démarche, comme les <a href="http://enablingthefuture.org/">prothèses imprimées en 3D</a> et, en ce moment même, les visières contre le Covid-19.</p>
<h2>Les visières, symboles de la contribution des <em>makers</em> dans la lutte contre le Covid-19</h2>
<p>Dès le début de l’épidémie en Europe début mars, il était clair qu’une <a href="https://theconversation.com/la-france-en-penurie-de-masques-aux-origines-des-decisions-detat-134371">pénurie</a> de masques et d’équipements de protections individuels allait <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/sante/coronavirus-les-professionnels-du-soin-s-inquietent-du-manque-de-masques_142263">se produire</a>. Le 19 mars, Josef Prusa – icône de la culture <em>maker</em> – publiait un design de visière de protection : un serre-tête imprimé en 3D, une feuille de plastique et une bande élastique pour le maintien. Il insistait sur le fait que les <em>makers</em> devaient être très vigilants et appelait à leur responsabilité : une protection inefficace est plus dangereuse qu’une absence de protection car elle donne une impression de fausse sécurité. <a href="https://www.prusa3d.com/">Prusa Research</a> a donc fait <a href="https://www.forbes.com/sites/sarahgoehrke/2020/03/28/making-made-right-this-czech-company-guides-global-3-d-printing-pandemic-response/">valider</a> son design par le ministère de la santé tchèque – sans certification cependant.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/330405/original/file-20200424-163110-mamnyi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/330405/original/file-20200424-163110-mamnyi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=511&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/330405/original/file-20200424-163110-mamnyi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=511&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/330405/original/file-20200424-163110-mamnyi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=511&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/330405/original/file-20200424-163110-mamnyi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=642&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/330405/original/file-20200424-163110-mamnyi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=642&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/330405/original/file-20200424-163110-mamnyi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=642&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Deux aspects importants doivent être pris en compte pour un matériel médical : il ne doit pas gêner le professionnel de santé dans sa pratique et il doit être compatible avec les processus hospitaliers de stérilisation. De plus, le procédé de fabrication doit garantir que les équipements de protection ne sont pas contaminés par le SARS-CoV-2.</p>
<h2>La viralité de l’open source au service du bien commun</h2>
<p>Inspiré par le design de Prusa et grâce aux efforts de documentation et de discussion avec le corps médical, les <em>makers</em> ont adapté l’initiative aux besoins locaux et aux ressources disponibles.</p>
<p>Dès le 30 mars, la Youtubeuse héliox a <a href="http://www.covid3d.fr">mobilisé</a> sa communauté en expliquant <a href="https://www.youtube.com/watch?v=tAcXuqAD4Tk">comment imprimer</a> des visières en 3D, avec plus de 82 000 visières distribuées à ce jour. Des professionnels de santé ayant besoin de visières et les particuliers possédants des imprimantes 3D sont en contact via une <a href="http://covid3d.org">multitude</a> de <a href="https://visieresolidaire.org/fr/">plate-formes</a> : des équipements de protections sont donnés aux travailleurs exposés grâce à un système de cagnotte pour rembourser l’achat des consommables (comme le filament plastique qui sert d’« encre » aux imprimantes 3D). Les fab labs institutionnels s’équipent, par exemple <a href="https://u-paris.fr/fabrication-de-materiel-critique-en-3d-pour-les-soignants-et-les-patients-rendue-possible-par-le-soutien-de-kering/">l’APHP et l’Université de Paris</a>. Le réseau français des fab labs estime que <a href="https://www.lemonde.fr/pixels/article/2020/04/23/les-visieres-imprimees-en-3d-une-reponse-des-makers-a-la-crise-sanitaire_6037538_4408996.html">250 000 visières ont été produites</a>.</p>
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<figcaption><span class="caption">La YouTubeuse Heliox explique comment fabriquer une visière grâce à une imprimante 3D.</span></figcaption>
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<p>L’impression 3D d’une visière prend entre 30 minutes et 3 heures. Afin d’augmenter les capacités de production, les <em>makers</em> utilisent un autre outil classique des fab labs : la découpeuse laser. Par exemple, plusieurs centaines de visières par jour peuvent être fabriquées sur le modèle <a href="https://medium.com/@wevolumes/folded-by-volumes-la-visi%C3%A8re-de-protection-contre-le-covid-19-934e84c24e17"><em>folded by volumes</em></a>.</p>
<h2>Les limites et opportunités de ce modèle de fabrication décentralisée</h2>
<p>La limite principale de ce modèle local est l’approvisionnement en matières premières non produites localement : toutes les machines sont inutiles si on ne peut les approvisionner en matériaux. En temps normal, il suffit d’un clic pour recevoir sous 2 jours une bobine de filament pour impression 3D. Alors que nous visons une production décentralisée, nous sommes en fait très dépendants de la circulation globalisée de marchandises. Le <a href="https://preciousplastic.com/">recyclage de matières plastiques</a> permettrait de limiter le besoin en matière première des fab labs, mais cette solution n’est pas adaptée dans un contexte d’épidémie. Des « meta-collectifs » de tiers lieux se forment à <a href="https://makerscovid.paris/">Paris</a> ou à <a href="https://www.makersasylum.com/covid19/">Mumbai</a> pour centraliser les demandes de visières et pour mutualiser recherche, développement et ressources. Des industriels contribuent aussi en faisant des <a href="https://www.usinenouvelle.com/editorial/covid-19-mobilisation-a-travers-la-france-pour-produire-des-visieres-de-protection-avec-l-impression-3d.N949031">dons de matières premières</a>.</p>
<p>Il existe également une limite en termes d’échelle de production : les machines des fab labs sont adaptées pour le prototypage. Fabriquer des dizaines de milliers de masques demande un temps de main d’œuvre très important pour alimenter les machines en matériaux et assembler. Pour de plus grosses productions (plusieurs millions d’unités par semaines), des machines industrielles sont nécessaires, mais ces machines nécessitent un temps de calibration pour leur mise en route, des approvisionnements en matière première importants et n’ont pas la flexibilité des machines de prototypage.</p>
<h2>Comment les institutions peuvent aider ce mouvement</h2>
<p>Afin d’être adaptées au terrain, les innovations doivent absolument être construites en collaboration étroite avec des personnels médicaux. Au début de la crise, il y a eu beaucoup de temps perdu car chaque fab lab développait son modèle de visière et sollicitait des retours de personnels médicaux. Désormais, des organismes de santé publique <a href="https://3dprint.nih.gov/collections/covid-19-response">aux États-Unis</a> et <a href="https://covid3d.org/projects">l’APHP en France</a> proposent des banques de fichiers imprimables en 3D et validés d’un point de vue sanitaire. Les CHU peuvent aussi valider localement les dispositifs qui leur sont proposés. Face aux stocks de matières premières transformables par les fab lab qui diminuent et à la production industrielle planifiée <a href="https://www.20minutes.fr/economie/2758055-20200409-coronavirus-michelin-va-fabriquer-masques-protection-dix-sites">d’ici quelques semaines</a>, une coordination entre les différents acteurs serait nécessaire pour assurer la continuité des approvisionnements en visières.</p>
<p>Alors qu’il sera peut être nécessaire de porter un <em>masque-barrière</em> pour sortir dans quelques semaines, l’AFNOR propose maintenant une <a href="https://masques-barrieres.afnor.org/?_ga=2.82735391.865896057.1587718338-148719314.1586819764">documentation complète</a> pour leur fabrication, y compris artisanale – une exposition forcée à l’esprit du <a href="https://theconversation.com/lintelligence-est-dans-le-faire-73699">« faire »</a> dont on peut espérer qu’elle aura des <a href="https://usbeketrica.com/article/pourquoi-le-covid-19-va-aussi-propager-le-mouvement-maker">conséquences positives et durables sur les comportements de consommation</a>.</p>
<p>Les <em>respirateurs</em> nécessitent un gros effort de recherche et de développement de la part de la communauté des <em>makers</em> : bien concevoir un équipement de protection est déjà une tâche complexe alors qu’il n’y a aucune partie active ; concevoir un respirateur est beaucoup plus risqué et complexe, avec des <a href="https://hackaday.com/2020/03/12/ultimate-medical-hackathon-how-fast-can-we-design-and-deploy-an-open-source-ventilator/">contraintes en termes de fiabilité</a>. La publication d’une <a href="https://www.gov.uk/government/publications/coronavirus-covid-19-ventilator-supply-specification/rapidly-manufactured-ventilator-system-specification">fiche de spécifications requises</a> peut faire gagner beaucoup de temps et orienter l’innovation ouverte vers de <a href="https://theconversation.com/comment-le-coronavirus-a-reveille-lintelligence-collective-mondiale-135465">bonnes solutions</a>.</p>
<h2>Le défi actuel pour les <em>makers</em> : les respirateurs open source</h2>
<p>La pandémie a fait apparaître un manque massif de respirateurs par rapport à la demande mondiale : aux États-Unis par exemple, il y a environ <a href="https://www.latimes.com/science/story/2020-04-07/researchers-look-for-ways-to-divert-patients-from-ventilators-as-shortage-looms">173 000 respirateurs</a> et les chercheurs estiment qu’en fonction de l’évolution de l’épidémie cela représenterait <a href="https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMp2005689">entre 1,4 et 31 patients par respirateur</a>.</p>
<p>En Italie, en pleine épidémie, des médecins et ingénieurs d’une start-up ont imprimé des <a href="https://www.forbes.com/sites/amyfeldman/2020/03/19/talking-with-the-italian-engineers-who-3d-printed-respirator-parts-for-hospitals-with-coronavirus-patients-for-free/">pièces de respirateur</a> indisponibles, connectant un masque de <a href="https://theconversation.com/sauver-des-vies-avec-des-masques-decathlon-le-pouvoir-de-linnovation-frugale-134799">snorkeling grand public en respirateur de fortune</a> à une machine qui envoie l’air au patient.</p>
<p>Le projet de recherche <a href="https://e-vent.mit.edu/">E-vent (<em>emergency ventilator</em>) du MIT</a> utilise un ballon de premier secours normalement actionné à la main, et lui ajoute un moteur pour la compression et des capteurs pour détecter les paramètres de la ventilation. Un autre <a href="https://www.ventilatorproject.org/">projet</a> convertit des respirateurs utilisés pour l’apnée du sommeil en respirateurs d’appoint. En France, un collectif de designers travaille à la conception et au prototypage d’un respirateur à coût minimal – le <a href="https://mur-project.org/">MUR</a> qui se branche sur une arrivée d’air et permet de contrôler les différents paramètres de ventilation.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/330689/original/file-20200427-145508-16ubill.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/330689/original/file-20200427-145508-16ubill.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/330689/original/file-20200427-145508-16ubill.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/330689/original/file-20200427-145508-16ubill.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/330689/original/file-20200427-145508-16ubill.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/330689/original/file-20200427-145508-16ubill.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/330689/original/file-20200427-145508-16ubill.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le prototype MUR permet de contrôler les paramètres de ventilation.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://mur-project.org/wp-content/uploads/2020/04/vlcsnap-2020-04-15-11h15m20s857-1536x864.png">Le Club Sandwich Studio</a></span>
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<p>Dans ce contexte, l’<em>innovation ouverte</em> est nécessaire car elle permet de générer rapidement de multiples solutions locales qui se pollinisent. L’étape suivante est la sélection et le renforcement des solutions les plus optimales. L’open source favorise la pérennité du projet : si un fabricant fait faillite par exemple, les fichiers et savoir-faire documentés permettent de poursuivre la fabrication. L’open source offre aussi la possibilité de reconfigurer le matériel en cas de changement du type de besoin, ce qui permet d’éviter des <a href="https://www.franceinter.fr/coronavirus-8-500-respirateurs-produits-pour-rien">écarts entre les besoins et les commandes</a>.</p>
<p>On peut espérer que cette crise va impulser un mouvement collectif durable de recherche autour des <em>équipements médicaux open source</em>. Alors que ce genre d’innovation frugale est nécessaire dans des pays qui disposent d’équipements médicaux de pointe, elle sera sans doute encore plus utile à développer, documenter et partager dans des pays qui <a href="https://www.nytimes.com/2020/04/18/world/africa/africa-coronavirus-ventilators.html">ne disposent pas de respirateurs</a>.</p>
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<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article fait partie de la série « Les belles histoires de la science ouverte » publiée avec le soutien du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Pour en savoir plus, visitez le site <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/">Ouvrirlascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/136277/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Kevin Lhoste ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les fab lab sont équipés pour concevoir de nouvelles technologies et les prototyper rapidement – en attendant le passage à l’échelle industrielle, ils équipent soignants et patients.Kevin Lhoste, Chargé de recherche et d’enseignement, Responsable du Makerlab au CRI, Institut des Défis, Université de Paris et CRI., Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1253502019-10-21T20:11:12Z2019-10-21T20:11:12ZLe fab lab à l’université peut inspirer la ville de demain<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/297665/original/file-20191018-56242-1f26d3m.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=14%2C64%2C1128%2C716&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le fab lab au Cnam Lavbz a été lancé dans la salle historique dite des « textiles ».</span> <span class="attribution"><span class="source">Yvan Boude</span></span></figcaption></figure><p><em>Ce texte s’inscrit dans une série d’articles autour de la thématique « Universités et ville durable », sujet du colloque de l’Agence universitaire de la francophonie (AUF) qui se tient les 21 et 22 octobre 2019 à Dakar, avec plus de cent cinquante acteurs francophones : établissements universitaires, représentants gouvernementaux, maires, et experts en urbanisme dans le monde francophone.</em></p>
<hr>
<p>En un siècle, l’humanité a gagné plus de 5 milliards d’individus, passant de 2 à 7 milliards : plus de la moitié vit <a href="https://www.ined.fr/fichier/s_rubrique/19150/482.fr.pdf">désormais en ville</a>.</p>
<p>Or cet apport massif d’urbains doit se loger, travailler, se déplacer, se former.</p>
<p>Dans ce contexte, comment les villes peuvent-elles prendre plus de responsabilités et lesquelles, face à la fois à la globalisation de l’économie et l’urgence climatique ? De plus, la décentralisation politique implique une autonomisation des autorités locales qui s’accompagne d’une <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/metropolisation">dynamique de métropolisation</a>, désignant « le mouvement de concentration de populations, d’activités, de valeur dans des ensembles urbains de grande taille ».</p>
<p>C’est dans ce cadre général que s’expriment les notions de ville durable ou ville intelligente.</p>
<h2>Une promesse d’émancipation</h2>
<p>Le questionnement sur la ville durable renvoie assurément à la relation entre l’homme et la nature, débat initié depuis le Siècle des lumières, puis consolidé par Jean Jacques Rousseau, et qui reste d’actualité.</p>
<p>Toutefois, ce débat s’est déporté sur la ville, alors qu’en réalité c’est toujours de la nature de l’homme dont il s’agit. La ville n’est qu’une construction sociale. C’est dans cet espace organisé et agencé que les idées de bien-être sont nées et ont construit par utopies successives des conditions de vie alliant progrès techniques aux progrès sociaux.</p>
<p>Ainsi, la question de fond n’est-elle pas de savoir si la ville durable est la nouvelle promesse d’émancipation pour l’humanité ? Si telle est le cas, qu’en est-il du vivre ensemble ? Déjà en 2007, Cyria Emelianoff <a href="https://www.cairn.info/revue-l-information-geographique-2007-3-page-48.htm">posait cette question de fond</a> : « L’urbanisme moderne avait tenté d’incarner un idéal d’égalité entre les hommes. L’urbanisme durable n’a pas franchi le cap d’une recomposition du vivre ensemble »</p>
<h2>Veut-on vivre ensemble ?</h2>
<p>Vivre ensemble. Ces mots symbolisent à eux seuls le dessein de la ville, voire le destin de la ville que l’on retrouvera traduit dans des documents d’urbanisme.</p>
<p>Le vivre ensemble serait la capacité de réunir des populations différentes sur un même espace et de pouvoir les faire cohabiter avec pacifisme et bien-être, une cohabitation des entre- soi en quelque sorte.</p>
<p>La ville matérialiserait ainsi les utopies du vivre ensemble, bien que de nombreuses cités ont été (sont ?) exclusives socialement, économiquement, religieusement…</p>
<p>En ce début de XXI<sup>e</sup> siècle, veut-on vivre ensemble ? Des « gated communities » à la résidentialisation des parcs de lotissements locatifs ou privatifs, les illustrations ne manquent pas à travers le monde suggérant que les habitants ne veulent pas du vivre ensemble. L’article de <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00110078/document">Renaud Le Goix</a> sur « La dimension territoriale de la séparation sociale dans les <em>gated communities</em> en Californie du Sud » reste ainsi d’actualité sur les effets de ségrégation résidentielle induit par ce type d’espace urbain.</p>
<p>Reposant souvent sur un sentiment d’insécurité, pour des raisons fondées ou non, le vivre ensemble ne fait pas l’unanimité. En revanche, les pouvoirs publics, garants de l’intérêt général, œuvrent à mettre en action le vivre ensemble dans les documents de planification dans une conception de mixité sociale.</p>
<p>Pourtant, des expériences menées à partir des technologies laissent un espoir de nouvelles solidarités ou d’espaces de rencontre.</p>
<h2>Le fab lab académique comme modèle</h2>
<p>Le cas des fab lab, bien qu’il soit un signal faible, paraît représentatif d’un mouvement plus général qui introduit des nouveaux rapports sociaux.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/un-fab-lab-ca-sert-a-quoi-76765">Dans ces fab lab</a> convergent des technologies des loisirs vers des technologies de production.</p>
<p>Cela entremêle des rapports sociaux précédemment distincts. Ceci témoigne d’un changement en cours.</p>
<p>L’exemple des Fablabs académiques, symboles d’une ville « intelligente » par les équipements qui s’y concentrent, en est une bonne illustration.</p>
<p>Un Fablab est un laboratoire de fabrication, dont le statut d’académique tient au fait qu’il se situe au sein d’une université. Comme dans un fab lab classique, on y trouve du matériel de fabrication de type découpeuse laser, imprimante 3D… Un matériel onéreux qui nécessite un accompagnement afin de les utiliser. Vu de loin, seuls les initiés peuvent prétendre y avoir recours pour un projet personnel, qu’il soit dans le cadre d’une activité professionnelle, d’un hobby ou d’un passe-temps.</p>
<p>Pourtant, l’ambition affichée par nombreux établissements supérieurs est que ces équipements puissent servir aux étudiants mais aussi à la société civile. À titre d’exemple, le <a href="https://www.fablabs.io/labs/fablabtsu">FabLab de l’université d’État de Tbilissi</a> en Géorgie avec ses 23 000 étudiants, se situe dans cette perspective d’ouverture.</p>
<p>Les partenaires publics, académiques et privés ont investi plus d’un million de Lari (400 000 euros) dans l’achat d’équipements technologiques et une centaine enseignants se sont embarqués dans le projet, dont un noyau dur de 34 professeurs.</p>
<p>Une forme de pédagogie académique en mode projet se met en place dont les thématiques se déclinent en fonction du projet. Bien sûr, l’idée en filigrane repose sur le fait de révéler un futur éventuel Steve Jobs, cofondateur d’Apple, Luke Nosek, cofondateur de Paypal ou Brian Chesky, cofondeur d’Airbnb.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/297662/original/file-20191018-56220-5wkrwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/297662/original/file-20191018-56220-5wkrwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/297662/original/file-20191018-56220-5wkrwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=326&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/297662/original/file-20191018-56220-5wkrwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=326&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/297662/original/file-20191018-56220-5wkrwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=326&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/297662/original/file-20191018-56220-5wkrwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=410&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/297662/original/file-20191018-56220-5wkrwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=410&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/297662/original/file-20191018-56220-5wkrwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=410&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Carte des fab lab, Tiblissi est un véritable « hub » en Géorgie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">FabLab Scool</span></span>
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<h2>La dimension sociale et urbaine du Fablab</h2>
<p>Fédérer un écosystème économique local, de surcroît innovant, reste une motivation première. Mais, indéniablement, il y a aussi une dimension sociale au fab lab académique qui est de créer un lien entre université, ville, habitants et usagers.</p>
<p>Dans le cas du Fablab académique de l’université de Tbilissi, cela se symbolise par un concours d’idées pour le développement de la ville de Tbilissi, dont une dizaine de projets était retenue par la ville en 2015. A titre d’illustration le fab lab de l’université de Tbilissi a soutenu un projet de fabrication de jouets en matière écologique.</p>
<p>Ces relations ville – université ne peuvent pas se faire sans une implication très forte du maire qui impulse une dynamique d’ouverture au sein de la municipalité et des services de la ville. Dans notre cas, Davit Narmania, avant de devenir maire de Tbilissi (2014–2017) fut professeur d’économie à l’université, puis ministre du Développement régional et des infrastructures (2012 et 2014).</p>
<p>Il est actuellement ambassadeur de Géorgie en Allemagne. Cet élément souligne que le volontarisme politique est une des conditions sine qua non de la réussite de ce type d’expériences. L’un des objectifs affichés, que ce soit pour la ville ou l’université, est bien sûr la création d’emplois et le fab lab académique est l’espace désigné pour créer les conditions d’accompagnement à ces créations.</p>
<p>L’expérience géorgienne se retrouve dans de nombreux Fablab académiques. En France le Conservatoire National des Arts et Métiers a l’ambition d’ouvrir un Fablab académique <a href="http://labz.cnam.fr">CNAM-LabZ</a> dans une salle classée au titre de monument historique (la salle des textiles).</p>
<p>L’idée est d’offrir un espace dans le cœur de la métropole parisienne qui permette des rencontres entre chercheurs, auditeurs, startuppers mais aussi ouvert à des publics n’ayant pas le niveau académique prérequis pour entrer à l’université mais ayant des projets. Une vocation qui vient confirmer l’une des missions historiques du CNAM depuis 200 ans : <em>Docet omnes et ubique</em> (Il enseigne à tous et partout).</p>
<hr>
<p><em>Ce texte s’inscrit dans une série d’articles autour de la thématique « Universités et ville durable », sujet du <a href="https://www.auf.org/nouvelles/agenda/colloque-annuel-2019-de-lauf-lenseignement-superieur-developpement-urbain/">colloque de l’Agence universitaire de la Francophonie</a> (AUF) qui se tient les 21 et 22 octobre à Dakar avec plus de cent cinquante acteurs francophones : établissements universitaires, représentants gouvernementaux, maires, et experts en urbanisme dans le monde francophone.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/125350/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>SCHIRRER Maxime est expert auprès de la commission permanente des Villes innovantes de l'Association Internationale des Maires Francophones.</span></em></p>La ville n’est qu’une construction sociale. Dans ces espaces naissent des utopies améliorant les conditions de vie,comme l’illustre le cas des fab lab académiques.Maxime Schirrer, Maître de conférences, Responsable du Master Territoires EPN 11 Territoires, chercheur au LIRSA (http://lirsa.cnam.fr ), Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1209092019-08-21T05:41:37Z2019-08-21T05:41:37ZCarnets de voyage : les paradoxes du miracle économique coréen<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/285505/original/file-20190724-110175-lio1tf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C129%2C1196%2C1068&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En matière d'innovation, la Corée du Sud ne fait rien comme tout le monde…</span> <span class="attribution"><span class="source">Auteurs.</span></span></figcaption></figure><p>Samedi 29 juin 2019, 14h34. Notre avion décolle de Séoul après 10 jours d'un voyage d'études passionnant avec des étudiants de l'Université Paris-Dauphine. Quelques heures plus tard, le président des États-Unis Donald Trump atterrira en Corée pour accomplir un geste historique : le <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/usa/presidentielle/donald-trump/donald-trump-passe-la-frontiere-nord-coreenne-pour-une-poignee-de-main-avec-kim-jong-un_3514721.html">passage à pied de la frontière nord-coréenne</a> en compagnie de Kim Jong-un.</p>
<p>Que retenir de cette expérience ? Nous rentrons de ce pays magnifique avec beaucoup de questions et le sentiment de nombreux paradoxes. Le thème du voyage portait sur l'intelligence artificielle et le futur du travail en Corée. Nous avons visité de nombreuses entreprises, universités ou labs (Asiance, Skelter Labs, Sogang university, The Vault, Renault innovation lab, Thalès Corée, Incheong Campus International…) et fait de très belles rencontres. Avant de partir, nous avons aussi beaucoup lu.</p>
<h2>Mais d'où vient l'innovation ?</h2>
<p>Sur place, que d'étonnements ! Comment l'un des pays les plus tournés au monde vers l'exportation peut-il avoir un écosystème de techniques (des applications) aussi spécifiques ? Être aussi peu tourné vers toutes les plates-formes globales que nous connaissons ? Pratiquer aussi peu la langue anglaise ? Comment un pays aussi innovant (en 2018, pour la cinquième année, la Corée a été désignée comme le pays le plus innovant par le <a href="https://www.bloomberg.com/graphics/2015-innovative-countries/">Bloomberg Innovation Index</a>) peut-il être aussi ordonné ? Comment expliquer ce degré d'innovation dans un pays où tout et chacun à sa place, où les hiérarchies et les traditions sont si fortes, où la séniorité pèse si fortement, où le chaos et le désordre n'ont pas leur place ?</p>
<p>Interrogés sur les capacités d'innovation du pays, certains des experts rencontrés ont insisté sur des stratégies encore très tournées vers « l'absorption » davantage que la « disruption », et une place encore modeste donnée à l'entrepreneuriat et au freelancing. Mais là aussi, dans un Séoul où les <a href="https://www.wework.com/fr-FR">WeWork</a> (enseigne spécialisée dans les espaces de travail) nous ont semblé omniprésents, où nombre d'expatriés que nous avons rencontrés physiquement ou en ligne sont de bouillonnants entrepreneurs, difficile de comprendre tous ces paradoxes.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/285496/original/file-20190724-110187-wpvy3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/285496/original/file-20190724-110187-wpvy3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/285496/original/file-20190724-110187-wpvy3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=611&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/285496/original/file-20190724-110187-wpvy3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=611&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/285496/original/file-20190724-110187-wpvy3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=611&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/285496/original/file-20190724-110187-wpvy3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=767&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/285496/original/file-20190724-110187-wpvy3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=767&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/285496/original/file-20190724-110187-wpvy3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=767&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Visite du Renault Innovation Lab de Séoul.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur.</span></span>
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<p>Sur le digital en revanche, le voyage a été sans surprise. C'est bien un pays à la pointe, où le smartphone est au cœur de tout, que nous avons exploré. Si la sensation d'un portable greffé dans la main, d'une véritable symbiose avec le geste de la glissade sur l'écran, peut exister à Paris, Séoul incarne un changement d'échelle. Il suffit d'observer des Coréens en train d'attendre pour traverser une rue, de scruter ce court moment d'attente, pour être frappé par la même chose : le portable est là, dans la main, et exploité.</p>
<p>La question de la data privacy a été posée à de nombreuses reprises (à des entrepreneurs comme à des utilisateurs). On a souvent eu l'impression que la peur d'un <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2019/01/ZUBOFF/59443">capitalisme de surveillance</a> n'est pas la même ici que dans la plupart pays occidentaux. Et de nombreux Coréens font même le choix de monétiser leurs données privées d'achat et de mouvements en <a href="https://www.lesechos.fr/2018/05/voyage-dans-la-coree-du-neuf-1020373">acceptant de recevoir des tokens</a> valables pour des achats en ligne chez des partenaires.</p>
<h2>L'image exemplaire de la France</h2>
<p>En parlant d'achat en ligne, une différence cruciale nous est apparue dans le contexte coréen : la sécurité. On peut facilement se faire livrer un article devant sa porte ou dans son hall. Il restera à sa place. Personne ne viendra le prendre avant votre retour le soir. Bien sûr, cela change beaucoup de choses d'un point de vue postal et logistique.</p>
<p>Que dire sur un des sujets clés du voyage, l'intelligence artificielle ? Elle est <a href="http://www.koreaherald.com/view.php?ud=20190619000616">bien présente</a> au cœur des applications et des recherches. Un projet évoqué avec nous concerne une IA conversationnelle plus émotionnelle, capable de sentir le degré de stress et le type d'émotions à partir de la voix, du timbre de voix, de son rythme ou du frappé sur un clavier.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/285502/original/file-20190724-110179-ide2bn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/285502/original/file-20190724-110179-ide2bn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/285502/original/file-20190724-110179-ide2bn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/285502/original/file-20190724-110179-ide2bn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/285502/original/file-20190724-110179-ide2bn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/285502/original/file-20190724-110179-ide2bn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/285502/original/file-20190724-110179-ide2bn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/285502/original/file-20190724-110179-ide2bn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le lab The Vault travaille sur un outil d’IA pour le sport.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs.</span></span>
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<p>Mais le point qui nous a le plus surpris, pour des voyageurs venant d'aussi loin, a été d'être renvoyé vers le statut exemplaire de la France. Nos informaticiens, nos chercheurs (en mathématiques et en informatique), nos universités, nos entreprises, sont perçus comme les références qui vont probablement déclencher les innovations de rupture sur ces sujets. Dans le pays le plus automatisé au monde <a href="https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/GB.XPD.RSDV.GD.ZS">qui dépense 4,3% de son PIB en R&D</a> (plus que tout autre pays développé), ce renvoi vers l'extérieur, en particulier notre pays d'origine, nous a étonnés.</p>
<p>Sur le sujet du travail et des transformations du travail, nous avons senti un pays au bord d'une véritable transformation. Les <a href="https://france-coree.pagespro-orange.fr/economie/coree2001_chaebols.htm">chaebols</a>, ces vastes conglomérats familiaux qui sont au cœur de l'économie coréennes (Samsung, Hyundai, LG, etc.) ont atteint leurs limites. Ils ont du mal à produire des innovations disruptives et à maintenir le modèle social de l'emploi à vie dans de grandes entreprises très hiérarchiques. Et pour l'heure, la cohabitation avec le monde des startups et de l'open innovation semble difficile. Rapidement, les startups sont absorbées et les chaebols limitent et contraignent les espaces de développement entrepreneuriaux.</p>
<p>Par ailleurs, nous avons souvent senti <a href="https://www.marieclaire.fr/coree-du-sud-reportage-pression-jeunes-suicide,1288242.asp">beaucoup de stress</a> dans ce pays où le taux de suicide (notamment des plus jeunes) est un des plus élevés au monde. Les signes de stress sont subtils, mais ils sont bien là. Dans une façon de conduire, dans un rapport à l'alcool, dans la plongée dans la nuit et même dans le souci permanent et obsessionnel de bien faire. Les femmes et les jeunes semblent parfois ne pas avoir toute la place qu'ils méritent dans une société encore très patriciale. Les femmes en particulier sont clairement victimes d'une forme de machisme plus ou moins visible. Les jeunes ont du mal à s'affirmer face aux plus anciens.</p>
<h2>Force du collectif</h2>
<p>Des premières évolutions dans les pratiques de gestion des ressources humaines et les politiques publiques semblent aller en direction de véritables changements sociaux (notamment dans les promotions et la formation). C'est ce dont ont témoigné des jeunes salariés que nous avons rencontrés. Mais à nouveau, les paradoxes nous ont semblé multiples. Les traditions donnent un sens et des continuités à d'innombrables points de rupture.</p>
<p>La géographie même de Séoul (le sud du fleuve Han) incarne notre propos. La ville du sud est plus moderne, faite d'axes rectilignes (de 8 voies). On transforme régulièrement la géographie sans nostalgie inutile, avec un grand pragmatisme. Et tout Séoul est un immense showroom des savoir-faire et de l'esthétique de l'ambition coréenne. On montre partout ce que l'on sait faire et on montre ses savoir-faire en faisant. Le tout, dans une ambiance toujours esthétique. Hommes et femmes soignent particulièrement leurs apparences dans ce <a href="http://coreeaffaires.com/2013/12/05/la-coree-du-sud-et-la-cosmetique-un-marche-cle-pour-loreal/">marché clé</a> pour le luxe et les cosmétiques français.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/285503/original/file-20190724-110166-ct6exg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/285503/original/file-20190724-110166-ct6exg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/285503/original/file-20190724-110166-ct6exg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/285503/original/file-20190724-110166-ct6exg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/285503/original/file-20190724-110166-ct6exg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/285503/original/file-20190724-110166-ct6exg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/285503/original/file-20190724-110166-ct6exg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/285503/original/file-20190724-110166-ct6exg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Une libraire très étonnante à Séoul… aux allures de showroom !</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs.</span></span>
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<p>Les <a href="https://cosmeticobs.com/fr/articles/lactualite-des-cosmetiques-7/marche-et-tendances-cosmetiques-en-coree-du-sud-4028/">femmes coréennes utilisent en moyenne trois fois plus de cosmétiques que les femmes françaises</a>. La chirurgie esthétique (nous avons été frappés par le nombre de cliniques de chirurgie esthétique partout dans Séoul… dont une dans notre hôtel !) est omniprésente. Il faut ressembler aux stars des séries coréennes.</p>
<p>Les pratiques de management ont également été un <a href="https://regards-interculturels.fr/2015/07/management-coreen/">autre point d'étonnement</a>. Les témoignages que nous avons entendus soulignent de nombreuses hybridations entre des techniques de management américaines et des pratiques locales. On crée des plateaux type start-up en open space, des zones de sieste, des avatars qui permettent à chacun d'exprimer sa personnalité, des espaces de cuisine qui sont des convivialités nouvelles… mais on garde des placements thématiques ou fonctionnels dans l'espace de travail (pas de « flex office » ou de placements par projets). Le « chef » reste très respecté et l'équipe écoute en contribuant modestement. Mais en même temps, l'énergie, la force du collectif sont là. On est engagé et impliqué dans le travail.</p>
<p>Sur le plan universitaire, le pays était également très intéressant. Avec KAIST, le MIT coréen lancé en 1971, où les salaires sont trois fois plus élevés dans le reste du pays et où la recherche est à un niveau global, les moyens sont exceptionnels. La visite de l’<a href="http://www.igc.or.kr/en/index.do">Incheon Global Campus</a>, posé à plus d'une heure de Séoul, nous a également impressionnée. Cet immense campus, en partenariat avec des universités américaines et à proximité de l'aéroport international, semble sorti de nulle part. Que d'énergie ! J'y aurais vu un des makerspaces les plus propres et les mieux rangés de toutes mes visites de ces cinq dernières années dans une trentaine de pays !</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/285504/original/file-20190724-110179-adoqxm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/285504/original/file-20190724-110179-adoqxm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/285504/original/file-20190724-110179-adoqxm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/285504/original/file-20190724-110179-adoqxm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/285504/original/file-20190724-110179-adoqxm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/285504/original/file-20190724-110179-adoqxm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/285504/original/file-20190724-110179-adoqxm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/285504/original/file-20190724-110179-adoqxm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Visite du campus de l'université IGC et de son makerspace.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs.</span></span>
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<p>Encore fois, nous sommes tous revenus avec beaucoup de questions et sans la prétention d'avoir compris ce qu'il y avait à comprendre. Dans ce pays sur le fil du rasoir d'un point de vue géopolitique, le monde de demain continue à se fabriquer. Dans la discipline et l'esthétique. Les prochaines licornes digitales du monde de l'IA et d'ailleurs viendront d'ici. Je ne sais pas encore comment, mais je reviens convaincu qu'à nouveau, ce pays historiquement revenu de loin, à l'équilibre politique et géopolitique encore précaire, saura se réinventer. Et je reviendrai avec plaisir suivre ces transformations…</p>
<hr>
<p><em>Je tiens à remercier ici les étudiants du <a href="https://www.mbc.dauphine.fr/">master 128</a> de l'université Paris-Dauphine qui ont coorganisé ce voyage, en particulier Maximilien Briançon, Julie Piquet, Justine Gaine, Amine Bennekrouf, Jules Haton, Sarah Moubarak.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/120909/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François-Xavier de Vaujany est président du think tank et réseau collaboratif RGCS dédié aux nouvelles formes d'organisation et aux nouvelles formes de travail (<a href="http://rgcs-owee.org/">http://rgcs-owee.org/</a>)</span></em></p>Les participants au voyage d'études organisé par Paris-Dauphine reviennent sur un séjour plein de surprises à Séoul…François-Xavier de Vaujany, Professeur en management & théories des organisations, Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1197832019-07-17T21:24:29Z2019-07-17T21:24:29ZCarnet de voyage : regards croisés sur les makers et l’entrepreneuriat au Sénégal<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/284355/original/file-20190716-173376-5ny1od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=20%2C27%2C4580%2C3393&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Ne jamais faire confiance à un pélican, même domestiqué...</span> <span class="attribution"><span class="source">Auteurs.</span></span></figcaption></figure><p><em>Dans le cadre de la <a href="https://www.strategie-aims.com/events/conferences/30-xxviiieme-conference-de-l-aims/president_word">28ᵉ conférence annuelle organisée par l’association internationale de management stratégique francophone (#AIMS2019)</a> à Dakar (Sénégal) du 11 au 14 juin 2019, cinq enseignants-chercheurs résidant en France croisent leurs ressentis. L’organisation de cette édition en Afrique est l’occasion de poser la question de la signification et de l’adaptation de l’entrepreneuriat, et plus largement du management africain/en Afrique. Retours sur trois journées riches en réflexions et émotions au pays de l’hospitalité et de la débrouille.</em></p>
<hr>
<p>Deux femmes et trois hommes. Deux Africains et trois Européens. Tous enseignants-chercheurs en gestion dans des business schools françaises. Nous ne nous connaissons pas (bien). En amont de la conférence #AIMS2019, sur une plage au bout de l’Afrique (île de Ngor), nous entamons ensemble notre expérience en Teranga sénégalaise. Marchander une traversée en pirogue, voyager avec une inconnue sur les genoux, se laisser guider par un jeune dans le village, se faire mordre par un pélican pourtant domestiqué… une première expérience « touristique » de la côte de Dakar qui soude une certaine complicité au sein du groupe.</p>
<h2>#OWEEAfroMakers</h2>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/284354/original/file-20190716-173325-1flnnwb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/284354/original/file-20190716-173325-1flnnwb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/284354/original/file-20190716-173325-1flnnwb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/284354/original/file-20190716-173325-1flnnwb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/284354/original/file-20190716-173325-1flnnwb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/284354/original/file-20190716-173325-1flnnwb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/284354/original/file-20190716-173325-1flnnwb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Ker Thiossane axe ses activités autour de l’art et des nouvelles technologies depuis 2002.</span>
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</figure>
<p>Le lendemain, la partie académique de notre voyage débute réellement avec la rencontre de makers et entrepreneurs locaux. C’est l’occasion de tester le protocole de recherche <a href="http://rgcs-owee.org/owee-2/method-4/">« OWEE »</a> développé par le collectif RGCS, pour la première fois en Afrique après une trentaine d’éditions en Europe, Amérique et Asie. Ces <em>open-walked event-based experimentations</em> sont des postures d’observation et d’appropriation des phénomènes autour des nouvelles pratiques de travail et du futur du travail. Nous partons à la découverte de deux <a href="https://www.cairn.info/revue-entreprendre-et-innover-2016--page-5.htm">espaces collaboratifs d’innovation</a> de Dakar :</p>
<p>le centre des arts numériques <a href="http://www.ker-thiossane.org/">« Kër Thiossane »</a></p>
<p>et le social change hub <a href="https://www.jokkolabs.net/">« Jokkolabs »</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/284345/original/file-20190716-173342-m6saae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/284345/original/file-20190716-173342-m6saae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/284345/original/file-20190716-173342-m6saae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/284345/original/file-20190716-173342-m6saae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/284345/original/file-20190716-173342-m6saae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/284345/original/file-20190716-173342-m6saae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/284345/original/file-20190716-173342-m6saae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/284345/original/file-20190716-173342-m6saae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">#OWEEAfroMaker à Ker Thiossane, lieu de recherche, de résidence, de création et de formation.</span>
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<p>Kër Thiossane (<em>Kër</em> signaifiant « maison », et <em>Thiossane</em> « traditions ») s’ancre dans les traditions pour ouvrir sur le futur : construit dans la maison d’enfance du propriétaire, elle héberge notamment une école, un fab lab, et accueille des artistes en résidence. Cet espace nous plonge au cœur d’un écosystème qui marie arts, sciences et technologies, en appui sur la logique des communs (ressource partagée et gérée par une communauté). La visite de leurs <a href="http://www.ker-thiossane.org/spip.php?article7">jardins artistiques et partagés</a> dans le quartier Sicap permet de poursuivre les discussions autour des notions de communauté, de pouvoir, d’entraide, de formation, de développement.</p>
<h2>Jokkolabs, laboratoire du changement social</h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/284351/original/file-20190716-173370-1xxen8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/284351/original/file-20190716-173370-1xxen8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/284351/original/file-20190716-173370-1xxen8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/284351/original/file-20190716-173370-1xxen8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/284351/original/file-20190716-173370-1xxen8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/284351/original/file-20190716-173370-1xxen8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/284351/original/file-20190716-173370-1xxen8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jokkolabs Dakar est un espace de travail partagé professionnel avec une atmosphère communautaire.</span>
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<p>Revenant sur nos pas, nous avons partagé des taxis pour nous rendre chez Jokkolabs dans une autre partie de la ville. Ces déplacements ont été l’occasion de former, déformer et reformer notre groupe au contact des autres participants ; pour la plupart, des collègues chercheurs participant à la même conférence, mais aussi un couple de Français curieux en vacances à Dakar ! L’occasion de se présenter, de partager nos étonnements, de poser des questions, de parler de nos travaux respectifs, de comparer avec d’autres espaces et pratiques ailleurs dans le monde…</p>
<p>Arrivés chez Jokkolabs, nous découvrons ce laboratoire de changement sociétal par l’entrepreneuriat. L’entrepreneur nous y est présenté comme celle ou celui qui imagine un futur qui n’existe pas, dans une visée de transformation sociale. Ici tout est fait pour construire à partir du pouvoir des « liens » (c’est d’ailleurs la signification du terme <em>Jokko</em>). Jokkolabs construit des ponts entre les communautés éducatives, économiques et politiques ; les jeunes et les plus expérimentés ; les pays et les continents.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/284353/original/file-20190716-173360-1uw7i9b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/284353/original/file-20190716-173360-1uw7i9b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/284353/original/file-20190716-173360-1uw7i9b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/284353/original/file-20190716-173360-1uw7i9b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/284353/original/file-20190716-173360-1uw7i9b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/284353/original/file-20190716-173360-1uw7i9b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/284353/original/file-20190716-173360-1uw7i9b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jokkokids est un projet pluridisciplinaire open source pour les enfants qui explore et connecte le numérique, le faire et l’expression de soi.</span>
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<p>Notre visite commence par un espace consacré aux enfants « Jokkokids », dont la philosophie est de préparer ces derniers à la maîtrise des outils numériques, à la pratique du faire (<em>make</em>) et à l’expression de soi. La suite de la visite nous mène dans les salles de coworking, mi-dedans, mi-dehors. Puis nous nous installons sur le roof top où le vent apporte une bise bienvenue pour un stimulant échange avec le fondateur <a href="https://www.linkedin.com/in/karimsy/">Karim Sy</a>, poursuivi par un déjeuner avec quelques résidents (« Jokkoworkers »). Les discussions portent essentiellement sur la dynamisation de l’entrepreneuriat, la digitalisation, le contexte politique de l’Afrique et l’éducation.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/284346/original/file-20190716-173355-h54sai.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/284346/original/file-20190716-173355-h54sai.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/284346/original/file-20190716-173355-h54sai.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/284346/original/file-20190716-173355-h54sai.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/284346/original/file-20190716-173355-h54sai.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/284346/original/file-20190716-173355-h54sai.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/284346/original/file-20190716-173355-h54sai.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/284346/original/file-20190716-173355-h54sai.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><span class="source">Échange avec Karim Sy, fondateur de Jokkolabs, sur le rooftop à Dakar</span></span>
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<h2>Plus que de simples « bidouilleurs »</h2>
<p>Depuis le début de cette learning expedition, ce sont souvent les mêmes interrogations qui remontent. Qu’est-ce qui est différent ici de ce que nous connaissons mieux en Europe et Amérique du Nord ? Que signifient faire et entreprendre dans le contexte de l’Afrique ? Plus globalement, y a-t-il un modèle spécifique de management en Afrique, voire africain ? L’on pourrait également reformuler la question pour savoir s’il est (réellement) nécessaire d’adapter les modèles de management à ce territoire, ou ensemble de territoires. Est-ce une nécessité ? Une urgence ? Un contre-sens ? Une utopie ? Une dystopie ? S’agit-il en fait d’adopter une perspective contextualiste ou essentialiste de la question ; une vision normative ou performative ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/284348/original/file-20190716-173334-194ziuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/284348/original/file-20190716-173334-194ziuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/284348/original/file-20190716-173334-194ziuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/284348/original/file-20190716-173334-194ziuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/284348/original/file-20190716-173334-194ziuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/284348/original/file-20190716-173334-194ziuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/284348/original/file-20190716-173334-194ziuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Ker Thiossane cherche à relier le développement des pratiques artistiques numériques aux enjeux de l’éducation, la citoyenneté, l’écologie et l’urbanisme.</span>
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<p>Dans un pays comme le Sénégal, où beaucoup ont l’habitude de se débrouiller avec ce qu’ils trouvent, que signifie alors être un maker ? Les décharges et les rues regorgent de bricoleurs frugaux aux ressources limitées. L’universitaire franco-américain Navi Radjou, spécialiste de l’innovation frugale, a décrit de manière détaillée dans plusieurs ouvrages cet art de la débrouillardise. En Inde, on parle de « jugaad » ; au Sénégal, de « djengou » et en Côte d’Ivoire, de « grigra ». Comment expliquer dans ces conditions l’arrivée de fab lab « occidentaux » en Afrique de l’Ouest ? Assiste-t-on à une récupération de pratiques traditionnelles ou à l’émergence de nouvelles pratiques ?</p>
<h2>Pratiques de « djengers »</h2>
<p>Le Djengou est ancré dans la vie quotidienne d’une grande partie de la population sénégalaise – comme dans celle d’autres pays africains connaissant le même contexte socio-économique tel que la Côte d’Ivoire. Avec le temps, il est devenu plus qu’une pratique, une philosophie de vie qui va au-delà de l’individuel pour embrasser le collectif.</p>
<p>Dans des quartiers souvent défavorisés, les « djengers » fabriquent des produits pour leur propre usage mais qui bénéficient également au plus grand nombre. Ils mettent par exemple au point des boîtiers électriques artisanaux permettant à plusieurs foyers de se connecter au réseau d’électricité publique et donc de partager les frais d’un seul abonnement. La même chose se produit pour la connexion au réseau d’opérateurs de chaînes de télévision privées.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/284349/original/file-20190716-173376-1kp2v46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/284349/original/file-20190716-173376-1kp2v46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/284349/original/file-20190716-173376-1kp2v46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/284349/original/file-20190716-173376-1kp2v46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/284349/original/file-20190716-173376-1kp2v46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/284349/original/file-20190716-173376-1kp2v46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/284349/original/file-20190716-173376-1kp2v46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dérive au cœur du quartier populaire Sicap Liberté II #OWEE.</span>
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<p>Ces pratiques, certes illégales, ne paraissent pas pour autant illégitimes aux yeux des « djengers » et de ceux qui partagent cette philosophie. Leurs cours et garages sont-ils en quelque sorte des makerspaces informels ? Au regard de cette philosophie du partage et de la collaboration, tous les djengers sont-ils des makers ? Et les makers en Afrique se doivent-ils d’être des djengers ?</p>
<h2>Faux amis, vrais jumeaux ?</h2>
<p>Plusieurs participants à l’OWEE AfroMaker ont été frappés par de fortes similitudes entre le discours de la fondatrice du centre Kër Thiossane et celui portés par ceux des makerspaces occidentaux. À tel point qu’à certains moments il pouvait être difficile en fermant les yeux de savoir si l’on était à Paris, Dakar ou San Francisco ! Les <a href="http://www.seuil.com/ouvrage/makers-isabelle-berrebi-hoffmann/9782021389937">auteurs du livre</a> « Makers : enquête sur les laboratoires du changement social » ont mis l’accent sur ces dynamiques d’internationalisation et de réseau des makerspaces à l’échelle locale, nationale et internationale. Mais nous nous interrogeons sur l’intérêt et l’impact que ces nouveaux espaces institués de la débrouille peuvent avoir en retour sur les pratiques du faire traditionnellement ancrées dans la culture et le contexte socio-économique de l’Afrique de l’Ouest. Un risque de désappropriation est-il à craindre ? Ou est-ce une façon de stimuler des processus d’innovation inversée ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/282276/original/file-20190702-126345-hjhn9g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/282276/original/file-20190702-126345-hjhn9g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/282276/original/file-20190702-126345-hjhn9g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/282276/original/file-20190702-126345-hjhn9g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/282276/original/file-20190702-126345-hjhn9g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/282276/original/file-20190702-126345-hjhn9g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/282276/original/file-20190702-126345-hjhn9g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Que signifie être un maker au pays de la débrouille ?</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs.</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
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<p>Nous n’avons évidemment pas la prétention de répondre à ces questions après quelques heures de pérégrinations marchées et palabrées sur le sujet. Mais nous avons le sentiment que chercher à mieux comprendre le phénomène encore émergent des makers et des makerspaces depuis la fenêtre de l’Afrique permettrait de couvrir certains angles morts des recherches pourtant de plus en plus nombreuses sur le sujet. Cette expérience nous amène par exemple à souligner que les makers sont plus que de simples « bidouilleurs » ayant le sens de « l’hospitalité » et qu’ils ne le sont pas seulement par nécessité.</p>
<p>Alors qu’est-ce que le mouvement des makers a à apprendre du « Djengou » ? C’est ce que notre petit groupe continuera d’explorer dans les années à venir.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/119783/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julie Fabbri est vice-présidente de RGCS (Research Group on Collaborative Spaces). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Christian Gnekpe est membre de Strategic management society, Association de management stratégique, Academy of Management.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Amadou Lô, Pauline Fatien Diochon et Thibault Daudigeos ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Les enseignants-chercheurs partis à la rencontre des « makers » sénégalais sont revenus de leur learning expédition avec de nombreuses questions en tête.Julie Fabbri, Professeur en stratégie et management de l'innovation, EM Lyon Business SchoolAmadou Lô, Assistant Professor in Strategy and Innovation Management, TBS EducationChristian Gnekpe, Professeur de management stratégique, TBS EducationPauline Fatien Diochon, Professeur Associé en Management, SKEMA Business SchoolThibault Daudigeos, Professeur Associé au département Homme, Organisations et Société, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1065512018-11-15T21:40:59Z2018-11-15T21:40:59Z« Apprendre au XXIᵉ siècle », un pari sur l’intelligence collective<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/245116/original/file-20181112-83579-42ryed.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C16%2C991%2C634&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pour se préparer aux défis de demain, les enfants doivent apprendre à travailler ensemble. </span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Il est grand temps que l’apprentissage de la curiosité l’emporte sur celui de la soumission. Tel est le « credo » sur lequel repose <a href="https://calmann-levy.fr/livre/apprendre-au-xxie-siecle-9782702163429"><em>Apprendre au XXIᵉ siècle</em></a>, l’importante et passionnante contribution que <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_Taddei">François Taddei</a> vient d’apporter à la réflexion sur l’avenir de l’école et les enjeux de la connaissance. Si l’on veut progresser vers une « société apprenante », « où les apprentissages des uns facilitent ceux des autres », une « révolution de nos façons d’apprendre, en tout lieu et à tout âge » s’impose, juge-t-il. Le point sur les perspectives développées dans cet ouvrage.</p>
<h2>Créer et coopérer</h2>
<p>Pourquoi est-il indispensable aujourd’hui d’apprendre différemment ? L’auteur consacre un chapitre à cette première question. Mais les raisons de changer nous sont rappelées tout au long de l’ouvrage. C’est qu’il y a urgence. Il y a d’abord ce double « choc » que nous subissons : celui que les progrès de l’intelligence artificielle (IA) produisent sur nos façons de vivre et de travailler, au moment même où nos modes de vie sont remis en cause par le « péril environnemental ».</p>
<p>D’une part, il faut prendre en compte l’impact de la révolution numérique. <a href="https://www.capital.fr/votre-carriere/pourquoi-les-robots-vont-detruire-des-millions-d-emplois-972164">Les machines vont nous surpasser</a> dans bien des domaines. Les parcours de formation s’inscrivent dans un contexte très mouvant où les emplois évoluent en permanence. On ne sait même pas si la notion de métier survivra aux transformations en cours ! Et, d’autre part, face au péril environnemental, il faut « s’investir pour changer son environnement ».</p>
<p>Ensuite, il faut voir que ce double choc nous place devant un défi considérable. La « révolution » en marche procède d’une « galaxie de technologies interconnectées ». Des progrès spectaculaires sont réalisés en un temps très court. Nous vivons une « transition » capitale, de caractère « total », avec en toile de fond la <a href="https://www.cairn.info/resume.php?download=1&ID_ARTICLE=SOC_129_0041">fusion du biologique et du numérique</a>, qui place l’espèce humaine devant un « défi évolutif ».</p>
<p>Dans ces conditions, un changement de paradigme s’impose. Il faut prendre en compte « l’impact de la révolution des intelligences », et privilégier les <a href="https://www.la-croix.com/Famille/Education/Transmettre-competences-cles-XXIe-siecle-2018-08-31-1200965272">« compétences du XXIᵉ siècle »</a> : non plus, par exemple, mémoriser et calculer (ce que les machines font mieux que nous), mais <a href="http://www.emploiparlonsnet.pole-emploi.org/articles/la-creativite-est-devenue-une-competence-cle/">créer</a> et coopérer. Ainsi émerge un « nouveau paradigme », autour des « nouvelles manières d’apprendre par la recherche ».</p>
<h2>Des dispositifs en réseau</h2>
<p>« Les pédagogies qui répondent aux défis du millénaire existent déjà et ne demandent qu’à être développées et mises en réseau ». Pour les identifier, et en apprécier la pertinence, on peut commencer par pointer, a contrario, ce qu’il ne faut plus faire ! Car il faut se délivrer des « logiques d’hier ». Celles d’un système qui récompense plus la capacité de soumission que le potentiel d’invention.</p>
<p>Taddei observe très justement que, par exemple, les pratiques dominantes d’évaluation méritent un double reproche. Le « système éducatif » actuel, tout occupé à « sélectionner des élites », est plus « anxieux de trier que de s’assurer de l’efficience des apprentissages ». Et on évalue la capacité à répondre à des questions portant sur les « savoirs d’hier », plutôt que sur la capacité « à formuler des questions et à inventer de nouvelles approches ». D’une façon générale, il faut sortir d’un <a href="https://www.inegalites.fr/L-ecole-une-machine-a-trier">système malthusianiste</a>, humiliant, privilégiant l’écriture et la copie, valorisant la soumission à l’autorité et à la norme, où tout est « hypercontrôlé par la hiérarchie ».</p>
<p>Que faire, alors ? Taddei propose d’abord des lignes directrices, qui définissent de véritables principes d’action. En voici une liste rapide (non exhaustive !), qui donnera une idée de la richesse du propos de l’auteur : avoir confiance en l’éducabilité de tous ; faire <a href="http://www.cahiers-pedagogiques.com/Inventer-une-nouvelle-maieutique-pour-apprendre-a-apprendre">apprendre autrement</a> qu’en restant passif dans une salle de classe ; donner primauté au questionnement ; favoriser l’observation et l’expérimentation ; laisser une réelle liberté pédagogique aux enseignants et formateurs ; donner l’habitude de la réussite.</p>
<p>Le modèle au sein duquel ces principes peuvent s’incarner le mieux est celui des « écosystèmes de connaissance évolutifs et coopératifs », particulièrement propices au développement de l’intelligence collective. Cela peut se faire dans des espaces de liberté dont les <a href="http://carrefour-numerique.cite-sciences.fr/fablab/wiki/doku.php?id=charte">« fab labs »</a> constituent aussi un bon exemple. Il existe déjà « une myriade de dispositifs », qui expriment une « formidable dynamique encore souterraine ». Il suffirait de les légitimer et de les mettre en réseau pour que s’accomplisse la nécessaire révolution de l’apprendre.</p>
<h2>Intelligences et valeurs</h2>
<p>François Taddei mène en fait un double combat. Un combat pour promouvoir l’intelligence collective, notre « meilleur atout » dans la compétition avec l’IA. Et un combat pour conforter l’éthique, en la plaçant « au cœur de nos interrogations ». On a besoin d’elle pour que la transition que nous vivons soit bénéfique à tout le monde. Car « technique sans éthique n’est que ruine de l’âme ».</p>
<p>Mais la première bataille est-elle de nature à peser positivement sur la seconde ? L’intelligence, productrice de savoir, est-elle de nature à apporter à la technique l’éthique qui lui fait défaut ? Taddei le croit. En tout cas, l’espère. Car, s’il se montre optimiste, il sait que le pire est presque toujours autant à craindre, que le meilleur à espérer. On est toujours exposé au risque de la « bêtise collective ».</p>
<p>Suffit-il de mettre en mouvement l’intelligence collective pour progresser d’un point de vue éthique ? Que Taddei nous permette d’en douter. Certes, « le besoin d’éthique est omniprésent ». Même une « coévolution des intelligences, individuelles, artificielles et collective » ne nous semble pas de nature à entraîner parallèlement une évolution positive dans le champ éthique, qui permettrait d’espérer « un avenir souhaitable qui bénéficierait à tous ». Cela pour une raison simple : l’ordre des intelligences n’est pas celui des valeurs.</p>
<h2>Un défi à relever</h2>
<p>Taddei a eu raison, en ce sens, de rappeler la distinction que fait <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Aristote">Aristote</a> entre l’épistémè (la connaissance), la technè (la fabrication matérielle), et la phronesis (l’éthique de l’action). Le premier défi pour aujourd’hui est d’empêcher que la révolution technologique entraîne une défaite, voire un asservissement, de l’intelligence (triomphe de la technè sur l’epistémè). On peut espérer un sursaut, triomphant, de l’intelligence collective, grâce à la révolution des apprentissages.</p>
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<p>Mais cela concerne le « dialogue » (ou l’interface) technè/épistémè (technique/savoir), et non le dialogue technè/phronesis (technique/éthique), ni le dialogue épistémè/phronesis (science/éthique). Sans compter que la phronesis, selon Aristote lui-même, qui ne concerne que la faculté d’opiner, est distincte de la « sagesse ». Seule celle-ci, qui est une vertu de la partie scientifique de l’âme raisonnable, peut trancher de la valeur suprême (du « souverain Bien »).</p>
<p>On peut se référer ici aux <a href="https://lewebpedagogique.com/terminale-philo/2009/11/les-3-ordres-de-pascal-dans-les-pensees/">trois « ordres »</a> (l’ordre des corps, l’ordre des esprits, l’ordre de la charité) distingués par Pascal, pour qui « la distance infinie des corps aux esprits figure la distance infiniment plus infinie des esprits à la charité ». L’intelligence collective peut nous aider à dépasser les grandeurs « de chair », et faire de tous les hommes des « grands » dans l’ordre des esprits. Mais pourront-ils atteindre la sagesse, qui situe dans « un ordre infiniment plus élevé », et qui n’est atteignable que par les « yeux du cœur » ?</p>
<p>Cependant, pour Pascal, il n’est pas interdit aux « gens d’esprit » de devenir des « saints » ! C’est pourquoi on ne peut que remercier François Taddei d’avoir, avec passion, minutie, et rigueur, exploré les chemins, et identifié les moyens, d’une progression possible vers les « grandeurs d’esprit »… C’est déjà considérable !</p>
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<figcaption><span class="caption">Présentation du livre sur le site de l’éditeur.</span></figcaption>
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<p>« Bonnes feuilles » : Pour un <a href="https://theconversation.com/pour-un-service-public-de-lapprendre-102939">« service public de l’apprendre »</a></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/106551/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Charles Hadji ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Il est temps que l’apprentissage de la curiosité l’emporte sur celui de la soumission. Voilà le « credo » du dernier ouvrage de François Taddei, directeur du Centre de recherches interdisciplinaires.Charles Hadji, Professeur honoraire (Sciences de l’éducation), Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1025062018-09-30T18:39:17Z2018-09-30T18:39:17ZUn fab lab pour l’innovation cosmétique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/238541/original/file-20180930-48631-juoh0g.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C17%2C5982%2C3970&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Atelier réalisation de rouges à lèvres au we lab cosmetic.
</span> <span class="attribution"><span class="source">MDuchateau-Cosmétosciences.</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la Science 2018 dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>Dans un contexte réglementaire en perpétuelle évolution et devant un marché dicté par les consommateurs, la filière cosmétique se doit d’innover : ingrédients, formulation, qualité de produits… C’est dans ce contexte qu’a démarré en 2015 le programme <a href="http://cosmetosciences.org/">Cosmetosciences</a>, alliant la recherche et l’innovation pour un développement économique durable du territoire Centre-Val de Loire.</p>
<h2>Le programme Cosmetosciences de la Région Centre-Val de Loire</h2>
<p>Le programme ARD 2020 Cosmetosciences est financé par la région Centre-Val de Loire. Il est porté par l’Université d’Orléans en partenariat avec l’Université de Tours, le CNRS, le pôle de compétitivité Cosmetic Valley et le Studium. Tous ces partenaires travaillent à développer une dynamique de Recherche, de Formation et d’Innovation en soutien à la filière Parfumerie et Cosmétique. Ce programme s’inscrit dans une démarche transversale : sur plusieurs thématiques scientifiques (biologie, chimie, physique, mathématiques) et fédératrices impliquant de manière forte les chercheurs académiques et les industriels autour du fil conducteur <a href="http://www.universcience.tv/video-cosmetique-de-la-plante-a-la-peau-10133.html">« de la plante à la peau saine »</a>.</p>
<p>Durant ses 2 premières années de fonctionnement (2015-2016), c’est plus de 20 projets de recherche entre laboratoires universitaires et industriels qui ont vu le jour. Ceci a permis le recrutement de stagiaires de licence et master, et de jeunes chercheurs. Deux chercheurs internationaux ont également été accueillis pendant un an dans les laboratoires de recherche régionaux. Des actions incitatives ont également vu le jour pour valoriser et faire connaître les formations en cosmétique des universités d’Orléans et de Tours. Des rencontres entre étudiants et acteurs professionnels ont été organisées ainsi que des actions grand public et en milieux scolaires.</p>
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<span class="caption">Séminaire étudiants sur la beauté connectée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Cosmétosciences</span></span>
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<p>Début 2017, le programme se poursuit en phase 2 pour trois nouvelles années (2017-2019) sur la base d’un financement régional à hauteur de 4,8 millions d’euros. Les principaux objectifs de cette nouvelle phase sont de dynamiser, renforcer et rendre visible la cosmétique en Région Centre-Val de Loire, tant au niveau national qu’international. En tirant les bénéfices de la dynamique mise en place au cours de la phase 1 (partenariats, recherche, formation), le programme Cosmetosciences phase 2 se propose de mutualiser les compétences des réseaux tissés sur une entité unique : <strong>We Lab Cosmetic</strong>.</p>
<p>Le programme Cosmetosciences soutient non seulement la transversalité des projets de recherche et des formations universitaires, mais souhaite aussi favoriser l’insertion professionnelle des étudiants en permettant des rencontres avec le tissu industriel et en offrant un lieu d’accueil unique en France, doté de moyens humains et techniques de base, où les étudiants (ou indépendants) entrepreneurs, porteurs de projets en cosmétique, peuvent réaliser un prototype.</p>
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<h2>We Lab Cosmetic : un fab lab collaboratif</h2>
<p>C’est au cours d’une étude d’opportunité que le programme Cosmetosciences a saisi l’importance de créer un lieu tel que We Lab Cosmetic. Ce projet a vu le jour dès septembre 2017, sur le campus universitaire orléanais.</p>
<p>De type fab lab, il s’agit avant tout d’un lieu de rencontres et un environnement de travail idéal pour tout porteur de projets de l’univers cosmétique : le <em>cosmaker</em>. C’est donc un lieu qui permet de les accueillir pour tester leurs idées sur de petites échelles.</p>
<p>We Lab Cosmetic s’appuie sur les multiples compétences académiques reconnues en Région Centre-Val de Loire : chimie, biochimie, biologie, physique… Il cible en fait une partie des thématiques scientifiques développées dans Cosmetosciences pour apporter des réponses à certains défis de la filière cosmétique.</p>
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<span class="caption">Réseau régional d’accompagnement à l’entrepreneuriat cosmétique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Cosmétosciences</span></span>
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<p>We Lab Cosmetic offre l’accès à trois laboratoires :</p>
<ul>
<li><p><strong>Chimie du Végétal</strong> : Un laboratoire qui permet de valoriser une plante en fonction de ses usages traditionnels et de ses activités potentielles sur l’être humain. Il est possible, dans ce laboratoire, d’isoler certaines molécules ou familles de molécules contenues dans la plante par des procédés techniques simples, pour ensuite les analyser et les quantifier.</p></li>
<li><p><strong>Biologie</strong> : Dans ce laboratoire, on peut vérifier la toxicité des ingrédients utilisés dans les nouveaux produits cosmétiques créés au We Lab Cosmetic. Les tests sont réalisés sur des cellules de peau. On peut aussi évaluer certaines activités potentielles (cicatrisante, hydratante, anti-oxydante, anti-inflammatoire…) soit directement sur des protéines humaines, soit sur des cultures cellulaires.</p></li>
<li><p><strong>Formulation</strong> : C’est dans ce laboratoire que sont créés de nouveaux produits cosmétiques. La formulation, c’est l’art de bien mélanger les différents ingrédients pour obtenir une crème, un gel, un rouge à lèvres… On y peut y étudier aussi les caractéristiques physiques des produits et leur stabilité dans le temps.</p></li>
</ul>
<p>We Lab Cosmetic s’adresse à toute personne curieuse de développer un nouveau concept cosmétique : étudiants, entrepreneurs indépendants, start-up, TPE. En bref, une personne qui souhaite développer une nouvelle activité cosmétique ou simplement avoir accès à du matériel de base pour quelques essais techniques. Les entreprises peuvent aussi proposer des challenges à des étudiants. Ces projets sont à la fois bénéfiques pour l’étudiant puisqu’il acquiert de nouvelles compétences tout en travaillant avec les contraintes industrielles, mais aussi pour l’industriel qui peut externaliser un projet non prioritaire à l’entreprise et créer un nouveau lien avec des acteurs académiques.</p>
<p>Chaque projet bénéficie d’un accompagnement individuel (orientation, développement, technique) et peut aussi être transféré, selon son avancement, sur d’autres structures de l’écosystème régional afin de mieux se concrétiser (incubateurs, accélérateurs…). De plus, un programme d’animations et de rencontres est proposé aux cosmakers tout au long de l’année afin de faciliter les échanges. Une fois par mois, ces rencontres permettent d’entendre des témoignages d’anciens cosmakers ou d’autres entrepreneurs, ou de participer à des ateliers pratiques collectifs. Un ensemble de partenaires et d’experts permet de répondre à des questions sur la création d’entreprise et à certaines problématiques plus ciblées auxquelles sont confrontées les cosmakers (propriété intellectuelle, marketing, levée de fonds…).</p>
<p>Réunis au sein d’une dynamique résolument tournée vers l’innovation, les cosmakers ont désormais les moyens de transformer eux-mêmes la théorie en pratique.</p>
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<span class="caption">Un atelier cosmakers au We Lab Cosmetic : création d’une crème de nuit.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Cosmétosciences</span></span>
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<p>Concrètement depuis un an, ce sont quinze projets qui se sont développés au We Lab Cosmetic, dont six projets proposés par des étudiants et cinq challenges proposés par des entreprises et réalisés par des étudiants. Si l’attractivité est principalement régionale jusqu’à présent, quelques contacts ont été établis avec des cosmakers parisiens ou du sud de la France.</p>
<h2>Et pour le grand public ?</h2>
<p>Grâce au programme Cosmetosciences et à We Lab Cosmetic, plusieurs initiatives à destination du grand public ont vu le jour. Une malle pédagogique a été créée en 2016 pour des élèves de collèges. Cette malle est à disposition des enseignants et permet d’appliquer les programmes à des expériences concrètes. Pour accompagner cette malle, une exposition sera bientôt disponible.</p>
<p>Enfin, en plein cœur de l’université, We Lab Cosmetic est un lieu de rencontres entre chercheurs, étudiants et créateurs d’entreprises. C’est également un lieu de visite et d’ateliers pour les collégiens et lycéens. À l’occasion de certaines manifestations, telles que la Fête de la Science, We Lab Cosmetic est ouvert au grand public.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/102506/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuelle Percheron ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>We Lab Cosmetic est un lieu de rencontres et un environnement de travail idéal pour tout porteur de projets de l’univers cosmétique.Emmanuelle Percheron, Manager Administratif et Scientifique Cosmétosciences, Université d’OrléansLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/958042018-05-21T21:57:27Z2018-05-21T21:57:27ZQuelle politique européenne pour les tiers lieux méditerranéens ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/219738/original/file-20180521-14950-1y1i6x7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C149%2C2000%2C1176&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Restitution finale du projet COWORKMed à Zagreb, avril 2018.</span> <span class="attribution"><span class="source">COWORKMed</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Le projet <a href="https://coworkmed.interreg-med.eu/">COWORKMed</a> est un partenariat européen de recherche pluridisciplinaire, qui vise à mieux comprendre l’enjeu et la portée des espaces de coworking dans les territoires de cinq pays européens : France (région PACA), Espagne (Catalogne), Italie (région Toscane), <a href="https://coworkmed.interreg-med.eu/fileadmin/user_upload/Sites/Social_and_Creative/Projects/COWORKMED/2.2.2_Greece.pdf">Grèce</a> et Croatie. Le projet a débuté en décembre 2016 pour s’achever en avril 2018.</p>
<h2>Définir, recenser et cartographier</h2>
<p>Porté par l’<a href="https://www.avitem.org/fr/projet/coworkmed-recherche-sur-l%E2%80%99innovation-sociale-des-clusters-de-coworking">AVITEM</a> (Agence des Villes et Territoires Méditerranéens Durables) et <a href="https://ied.eu/">plusieurs partenaires européens</a> – Barcelona Activa SA SPM (Espagne), IRIS Research Institute s.r.l (Italie), Conseil Régional Sud Provence-Alpes-Côte-D’azur (France), Zagreb Development Agency (Croatie), Barcelona International Business Incubator (Espagne) – le premier objectif du projet a été de définir la notion d’espace de coworking. Après de nombreux échanges, notamment quant à la place de la notion de territoire, les partenaires se sont accordés sur la définition suivante :</p>
<blockquote>
<p>« Un espace de coworking est un espace physique dont l’objet est de construire et de mettre en œuvre une dynamique communautaire entre des usagers souhaitant bénéficier des relations collaboratives, ouvertes et durables. Pour atteindre ces objectifs, les espaces de coworking organisent des évènements et des activités favorisant les échanges et les apprentissages mutuels et en développant des interactions avec d’autres centres ou services. »</p>
</blockquote>
<p>À partir de cette définition, les partenaires ont cherché à <a href="https://coworkmed.interreg-med.eu/fileadmin/user_upload/Sites/Social_and_Creative/Projects/COWORKMED/3-3-1_-_Coworkmed_Census.pdf">recenser</a> les espaces de coworking grâce à la mise en œuvre d’une cartographie collaborative. Plus de 320 espaces de coworking ont été identifiés sur les territoires du projet COWORKMed, avec une forte concentration en Catalogne (plus de 150 espaces). La création de ces espaces est récente (depuis 2012) et majoritairement portée par des acteurs privés (66,7 %). Ces espaces représentent 2,3 % des espaces de coworking à travers le monde (COWORKMed, 2018).</p>
<p>Ce <a href="https://livemap.getwemap.com/iframe.php?emmid=6326&token=JOQ39BO9ZT34EQAI4TVUH9ULS#/search@43.72552940054183,9.552607327980922,6">travail de recensement</a> a permis de prendre conscience de l’extrême diversité des espaces de coworking, qui se déploient sous des formes multiples : fab lab, maker spaces, living labs, tiers lieux, business factory, laboratoires d’innovation publique, etc. Les partenaires du projet ont par conséquent décidé de ne pas figer la notion de coworking pour la laisser ouverte à de nouvelles opportunités, en lien notamment avec le développement des tiers lieux. Le nombre de tiers lieux devrait en effet croître dans les prochaines années en lien avec la croissance continue des indépendants, la transformation des économies (économie de la connaissance, économie collaborative, économie numérique…) et l’émergence d’un cadre incitatif et normatif favorisant le <a href="http://www.lemonde.fr/emploi/article/2017/09/12/la-reforme-du-code-du-travail-favorise-le-teletravail_5184562_1698637.html">télétravail</a>.</p>
<iframe width="100%" height="600" src="https://livemap.getwemap.com/iframe.php?emmid=6326&token=JOQ39BO9ZT34EQAI4TVUH9ULS#/search@43.72552940054183,9.552607327980922,6)" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<h2>Identifier les externalités et les besoins des tiers lieux</h2>
<p>Un second objectif de l’étude consistait à identifier les bénéfices socioéconomiques, environnementaux et territoriaux de <em>coworking spaces</em>. Des rapports ont été produits démontrant de la capacité des tiers lieux à augmenter la production et la performance des entreprises, des salariés et des collaborateurs. Ils autoriseraient également un accroissement de la qualité de vie, tout en stimulant les transformations du marché du travail, [ les <a href="https://coworkmed.interreg-med.eu/">collaborations et les processus d’innovation</a>. D’autres études ont cherché à objectiver l’apport des tiers lieux sur la réduction des distances de déplacement domicile-travail, les émissions de gaz à effet de serre ou la diminution de la charge des transports publics en période de forte affluence.</p>
<p>Pour accroître cet impact des tiers lieux sur les territoires, l’étude COWORKMed a aussi fait part de la nécessité de structurer une action publique en faveur de la création et du développement des tiers lieux. Les porteurs de projet ont souvent exprimé des besoins en termes de régulation, de mise en réseau et d’accompagnement financier et méthodologique. Du point de vue des méthodes, les responsables des coworking spaces et les acteurs publics semblent insuffisamment outillés pour mesurer les externalités des tiers lieux. </p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/hvCFQ09nCD0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Les études produites sur les externalités s’appuient encore davantage sur des hypothèses que sur des données quantitatives et qualitatives, à même d’évaluer et d’objectiver les phénomènes observés. Par ailleurs, des besoins en termes de structuration des réseaux de tiers lieux sont apparus, afin de mutualiser les ressources et d’accroître la visibilité et l’attractivité des espaces de coworking. Il semble indispensable d’accompagner le développement des réseaux de tiers lieux à l’image des réseaux <a href="https://fr-fr.facebook.com/eucoworknet/">European Coworking Network</a>, Cowocat (Associaci – Coworking de Catalunya) ou <a href="https://arize-leze-europe.org/coworking-pyrenees-en-cours/">Cowopy</a> (Coworking Pyrénées). Précisons que ces deux derniers réseaux ont été eux-mêmes des projets européens à « durée limitée ».</p>
<p>Enfin, l’étude a démontré de la nécessité d’accroître l’ancrage des tiers lieux dans leurs écosystèmes territoriaux et d’innovation. La performance des tiers lieux est selon l’économiste Raphaël Suire fortement dépendante de leur capacité à s’encastrer dans les territoires. Une perspective qui reste à conforter et à coupler avec l’enjeu du maillage des territoires et de développement de tiers lieux dans les circonscriptions de plus faible densité (espaces ruraux et périurbains). À l’exception de la région PACA, les tiers lieux des régions CoWorkmed sont, pour plus de 80 % d’entre eux, implantés dans les agglomérations.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/219735/original/file-20180521-14987-y5hpsb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/219735/original/file-20180521-14987-y5hpsb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/219735/original/file-20180521-14987-y5hpsb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/219735/original/file-20180521-14987-y5hpsb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/219735/original/file-20180521-14987-y5hpsb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/219735/original/file-20180521-14987-y5hpsb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/219735/original/file-20180521-14987-y5hpsb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Restitution finale du projet COWORKMed à Zagreb, avril 2018.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Préfigurer une action publique européenne</h2>
<p>À travers l’organisation de différents ateliers à Zagreb, Florence, Marseille et Barcelone, un troisième objectif du projet COWORKMed a consisté à penser une action publique européenne favorable aux tiers lieux. Quelle politique publique mettre en place pour accompagner des espaces multifonctionnels et intermédiaires, fonctionnant souvent avec des modes d’organisation horizontaux ? De ce point de vue, quatre grands chantiers ont été identifiés :</p>
<ul>
<li><p>Accompagner la création et le développement de coworking spaces dans les territoires de faible densité (aide à l’amorçage des projets, subventions à l’investissement attribuées après appels à projets et en complément d’aides régionales, etc.). L’effet levier des espaces de coworking pour le développement de ces territoires peut s’avérer déterminant et notamment du point de vue de la réduction des déplacements domicile-travail, et de la revitalisation de territoires périphériques et de centre-bourgs (faire vivre des services de proximité en retenant/attirant les travailleurs indépendants, salariés ou néo-ruraux sur les territoires).</p></li>
<li><p>Accompagner la création et le développement de réseaux de coworking spaces et de tiers lieux à l’échelle méditerranéenne, afin de mieux connecter les tiers lieux entre eux et avec leurs écosystèmes territoriaux et d’innovation, les outiller (mutualisation des méthodes), les rendre davantage lisibles et visibles par une communication commune et ciblée, et stimuler la demande par des actions des lobbying (par exemple, la sensibilisation des employeurs aux pratiques du télétravail). À terme, une réflexion sur la création d’un label « tiers lieux méditerranéens » pourrait être ouverte.</p></li>
<li><p>Faire des tiers lieux des supports d’une politique publique européenne plus agile et plus proche des territoires et des citoyens. Les tiers lieux peuvent constituer des espaces privilégiés pour co-construire et tester de nouvelles politiques publiques européennes. Par ailleurs, une réflexion pourrait être ouverte quant à l’usage des espaces de coworking par les agents de l’Union européenne et ses partenaires, afin d’intégrer une culture des tiers lieux au sein même des administrations de l’UE (travail collaboratif, gouvernance horizontale, culture numérique…).</p></li>
<li><p>Lancer un appel à projet européen pour soutenir les espaces de coworking et les tiers lieux ayant un impact direct sur les transitions, qu’elles soient économiques, numériques, écologiques, sociales, organisationnelles ou encore territoriales.</p></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/219737/original/file-20180521-14957-8srxk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/219737/original/file-20180521-14957-8srxk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/219737/original/file-20180521-14957-8srxk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/219737/original/file-20180521-14957-8srxk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/219737/original/file-20180521-14957-8srxk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/219737/original/file-20180521-14957-8srxk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/219737/original/file-20180521-14957-8srxk4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Workshop organisé à Marseille le 20 février 2018 au Mars Medialab.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>On le voit, ces différents chantiers ont été pensés dans le cadre d’une action publique européenne facilitatrice et non prescriptrice. L’état d’esprit des tiers lieux semble en effet peu compatible avec la conception d’une politique publique verticale et descendante, où l’acteur public aurait un rôle central en termes d’impulsion, de coordination, de labélisation, de financement et d’arbitrage. </p>
<p>L’enjeu est moins d’affirmer une politique de planification top-down d’espaces de coworking, qu’une action publique à-même de créer les conditions d’émergence et de développement de coworking spaces, et de s’inscrire dans « intervention de type environnementale », pour reprendre une formule de Michel Foucault. Un autre enjeu est de traiter de manière concomitante les questions d’innovation sociale et organisationnelle au sein de l’UE et celles que l’UE promeut sur les territoires à travers ses politiques publiques. À cet égard, l’usage régulier des tiers lieux par les agents de l’UE, pourrait permettre d’accompagner l’Union européenne dans la transformation de ses postures et de ses modes de faire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/95804/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raphaël Besson est Directeur de l'agence Villes Innovations, Chercheur associé au laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Université Grenoble Alpes</span></em></p>Plus de 320 espaces de coworking ont été identifiés sur les territoires du projet COWORKMed.Raphaël Besson, Directeur de l'agence Villes Innovations, Chercheur associé au laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/963912018-05-21T21:55:10Z2018-05-21T21:55:10ZLes fab lab au cœur des défis numériques en Afrique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/219032/original/file-20180515-195330-1a64j5x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C18%2C2048%2C1382&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Ordinateur Jerry.</span> <span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Servant tout à la fois d’ateliers de production, de création et de prototypage, de lieux de formation par la pratique et de facilitateurs de lien social, les fab lab contribuent à réduire l’opposition frontale traditionnelle entre « savoir » et « faire ».</p>
<p>La vague des fab lab a pris naissance aux États-Unis, en 1998, sous l’impulsion de <a href="https://www.ted.com/talks/neil_gershenfeld_on_fab_labs?language=fr">Neil Gerhenfeld</a>, professeur du MIT. Il s’agit d’ateliers conçus pour être ouverts, partagés et collaboratifs. Leur objectif est de proposer un espace physique, rassemblant des outils numériques (découpes laser, imprimantes 3D, etc.) dont l’usage est commun, afin de permettre à un individu de créer, d’inventer. Ils permettent ainsi de concevoir, de prototyper, de fabriquer et de tester des objets les plus divers.</p>
<p>Ces ateliers prennent un sens particulier en Afrique où ils deviennent des relais pour le développement de communs à visée éducationnelle.</p>
<h2>La spécificité des fab lab africains : des communs à visée éducationnelle</h2>
<p>Si les pays d’Afrique subsaharienne ont réalisé de <a href="https://theconversation.com/financer-leducation-en-afrique-subsaharienne-les-idees-recues-a-lepreuve-des-chiffres-90039">considérables progrès</a> dans le développement de leurs systèmes éducatifs, le retard initial et la très forte croissance démographique font que la région compte encore 50 millions d’enfants non scolarisés en âge d’être au primaire ou au secondaire. À ces difficultés d’accès s’ajoutent les très forts défis de l’équité et de la qualité des enseignements dispensés aux élèves.</p>
<p>Les fab lab d’Afrique subsaharienne connaissent une grande diversité, mais ils se donnent des objectifs éducationnels plus clairement et plus systématiquement que leurs homologues des pays développés.</p>
<p>Nombre d’entre eux proposent ainsi des ateliers non seulement aux enfants et adolescents, mais aussi aux étudiants, pour pallier le sous-équipement des universités, ou encore aux femmes, pour faciliter leur insertion sociale et professionnelle. Au-delà de l’aspect de formation des plus jeunes aux rudiments de l’électronique, voire de la fabrication numérique, le projet pédagogique vise ainsi à répondre à des enjeux sociétaux locaux.</p>
<p>Sésamé Koffi Agodjinou, fondateur du <a href="https://www.woelabo.com/">WoeLab</a> au Togo, anthropologue et architecte de formation, voit dans le fab lab un moyen de repenser avec et pour les citoyens une ville qui est traditionnellement dessinée par les seuls urbanistes. En ligne avec l’architecture vernaculaire qui propose une vision de la ville comme un village, le fab lab propose un lieu et des moments qui créent de la cohésion, soit, symboliquement, un nouvel enclos d’initiation pour les jeunes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/218960/original/file-20180515-122942-y004ck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/218960/original/file-20180515-122942-y004ck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/218960/original/file-20180515-122942-y004ck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/218960/original/file-20180515-122942-y004ck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/218960/original/file-20180515-122942-y004ck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/218960/original/file-20180515-122942-y004ck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/218960/original/file-20180515-122942-y004ck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Babylab : fab lab en Côte d’Ivoire.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Guiako Obin</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>De son côté, Guiako Obin, créateur du <a href="http://www.baby-lab.org/">Babylab</a> en Côte d’Ivoire, a choisi une commune très populaire d’Abidjan, marquée par la pauvreté et l’insécurité, pour faire du fab lab un levier de transformation sociale par l’éducation et lutter contre le désœuvrement et la délinquance des jeunes.</p>
<p>Enfin, le <a href="http://www.blolab.org/">Blolab</a> au Bénin, créé par Médard Agbayazon, se donne pour objectif de favoriser l’alphabétisation numérique des jeunes et des professionnels locaux (artisans, agriculteurs) et de les aider à construire des solutions peu coûteuses, faciles d’accès et rapides pour leur développement. Ici l’ingéniosité des membres de la communauté fab lab, inspirée et soutenue par des ressources informationnelles globales, apportent des solutions adaptées à des besoins locaux. À titre d’exemple, le lab a permis le développement d’une application de dénonciation des cas de violences basées sur le genre.</p>
<h2>Innovation frugale et bidouille au cœur du dispositif</h2>
<p>Avec plus d’une <a href="https://www.fablab.io/labs">quarantaine de lieux</a>, on ne peut que confirmer la vitalité de ce mouvement sur le continent africain. Le fab lab constitue un nouveau lieu d’innovation qui, dans des conditions difficiles, fait bien souvent appel à la débrouillardise et s’appuie sur la créativité et la volonté forte de ses promoteurs.</p>
<p>Dans l’atelier, la production elle-même doit également faire face au défi de la faiblesse des ressources financières et matérielles disponibles. Les communautés de fab lab, s’inscrivant ainsi dans l’innovation frugale, s’attachent à répondre aux besoins locaux avec des solutions simples et adaptées. Elles font par ailleurs appel aux ressources en ligne, qu’il s’agisse de modes d’emploi, d’instructions de construction, de communautés de pratique ou encore de sites de financement participatif.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/219776/original/file-20180521-14981-12q2ve1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/219776/original/file-20180521-14981-12q2ve1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/219776/original/file-20180521-14981-12q2ve1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/219776/original/file-20180521-14981-12q2ve1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/219776/original/file-20180521-14981-12q2ve1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/219776/original/file-20180521-14981-12q2ve1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/219776/original/file-20180521-14981-12q2ve1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Façade de fab lab.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Guiako Obin</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
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<p>En témoigne l’initiative <a href="http://youandjerrycan.org/">« Jerry Do-It-Together »</a>, qui organise des ateliers de construction d’ordinateurs Linux à partir de de composants électroniques recyclés fixés dans un jerrican de 20 litres. Usagers, designers et hackers se rassemblent ainsi autour des ordinateurs Jerry pour apprendre comment se fabrique le numérique et l’orienter vers leurs besoins.</p>
<p>Le mouvement croissant des fab lab africains est mu par une volonté de partage des connaissances et d’ouverture de l’innovation : en Afrique comme ailleurs, ils questionnent ainsi les modalités habituelles de production, d’éducation, de propriété intellectuelle et, plus généralement, nous interrogent sur la place du citoyen dans les projets économiques et sociétaux.</p>
<h2>En quoi ces espaces constituent-ils des communs ?</h2>
<p>Entrepreneuriaux, associatifs, publiques, universitaires, les fab lab illustrent comment la théorie des communs peut inspirer les activités de production. Depuis l’attribution du prix Nobel d’économie à Elinor Ostrom en 2009 pour ses travaux sur les Common Pool Resources, les communs connaissent un engouement sans précédent. Ils renvoient à la gestion collective d’une ressource par une communauté qui se fixe des règles ad hoc et met en place une structure de gouvernance permettant la distribution des différents niveaux de droits et d’obligations et la résolution des conflits.</p>
<p>L’objectif que se fixe la communauté est au cœur du faire en commun. Dans le cas des <a href="https://theconversation.com/comment-faire-face-a-la-surexploitation-des-eaux-souterraines-93503">communs structurés autour d’une ressource naturelle</a>, il s’agit souvent, mais pas toujours, de la préservation en quantité ou en qualité de la ressource. Cette définition héritière des communs traditionnels (agriculture, pastoralisme, pêche) s’étend pour toute une nouvelle génération de communs, les communs dits informationnels, dont l’objectif est au contraire le partage, la dissémination et l’enrichissement du bien, soit un objectif d’<a href="http://www.editionslesliensquiliberent.fr/livre-Le_retour_des_communs-9791020902726-1-1-0-1.html">« additionnalité »</a>.</p>
<p>Les fab lab sont ainsi porteurs de cette dynamique. Le lieu vise le développement de la connaissance numérique, de sa diffusion, de son partage (réseau), de sa conservation (bibliothèque et plates-formes web). Il met en commun les machines mais aussi les expériences. Il contribue à l’accumulation des savoirs et le reversement de ces connaissances via des programmes de formation. La connaissance est donc à la fois une composante du fab lab mais aussi un objectif.</p>
<p>Ce sont des lieux qui s’inscrivent à la fois dans un territoire, mais aussi dans les multiples ressources et communautés en ligne (logiciel libre, OpenStreetMap, réseaux sociaux). Cette dualité des communautés physiques et numériques se traduit par un double mouvement : une re-territorialisation, via un usage local, de communs numériques développés à l’échelle globale, et, par ailleurs, une dé-territorialisation des connaissances générées au sein des fab lab pour des usages à l’échelle mondiale.</p>
<hr>
<p><em>Ce texte s’appuie sur le working paper <a href="https://drive.google.com/file/d/1vvawhIISpiU8-_SiUCoAoADzn5maG_12/view">« Des communs informationnels aux communs éducationnels : les fab lab en Afrique francophone »</a>, co-rédigé par Stéphanie Leyronas, Isabelle Liotard et Gwenaël Prié.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/96391/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le salon Viva Tech débutera le 24 mai à Paris. Il met à l'honneur l'innovation en Afrique, notamment les fablabs. Portés par les dynamiques collaboratives, ces espaces font bouger les lignes.Stéphanie Leyronas, Chargée de recherche gestion des ressources naturelles, Agence française de développement (AFD)Gwenael Prié, Responsable d'Equipe Projet, Agence française de développement (AFD)Isabelle Liotard, Maître de Conférences, HDR , domaine d'expertise : économie de l'innovation, économie des réseaux, Université Sorbonne Paris NordLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/928882018-04-11T23:06:54Z2018-04-11T23:06:54ZLa créativité aussi se manage, surtout dans les grandes entreprises<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/214309/original/file-20180411-584-g7hru0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C449%2C5882%2C2998&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Fab labs, open labs, tiers-lieux... Autant d'endroits où se développe la créativité.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/pleasant-students-using-3d-printer-414455506?src=Piq7roIIRQGNuwj6yApT0Q-1-17">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Dans un environnement turbulent en perpétuelle et rapide évolution, la préservation de la compétitivité des grandes entreprises passe par le renouvellement de leurs approches. À ce titre, la créativité est essentielle. Elle permet de produire des idées nouvelles, en décalage par rapport aux schémas existants au sein l’organisation, tout en étant utiles à son activité. Pour développer cette créativité en entreprise, il est nécessaire de mettre en place des capacités dédiées, constituées d’un ensemble de dispositifs et ressources dont le fonctionnement s’éloigne des routines de l’organisation. Comment s’y prendre ?</p>
<h2>La montée en puissance des <em>open labs</em></h2>
<p>Ces dernières années, les grandes entreprises ont multiplié les initiatives destinées à améliorer la créativité de leurs salariés. En France, cette tendance s’est traduite par la mise en place par les grands groupes de nombreux laboratoires d’innovation ouverte ou <a href="http://www.newpic.fr/02group2015openlabsdownload.html"><em>open labs</em></a>. De nouvelles méthodes d’exploration, centrées sur l’expérience usager, ont ainsi été introduites, facilitant l’adoption de <a href="https://www.forbes.fr/management/les-intrapreneurs-a-la-conquete-de-lentreprise/">comportements d’intrapreneurs</a>, permettant de travailler autrement sur des projets nouveaux pour l’entreprise.</p>
<p>À travers une série de travaux sur les <em>open labs</em> d’entreprises, nous avons pu identifier les challenges liés au management de la créativité dans les entreprises établies, et construire des comparaisons qui dépassent les spécificités sectorielles.</p>
<h2>Manager la créativité : une approche renouvelée de la gestion des connaissances</h2>
<p>Les dispositifs favorisant la créativité visent à gérer les connaissances selon des principes opposés aux approches traditionnelles existant dans l’entreprise. <a href="http://www.managementinternational.ca/catalog/developper-des-capacites-hautement-creatives-dans-les-entreprises-le-cas-des-laboratoires-d-innovation-ouverte.html">Manager la créativité dans un grand groupe</a> revient à organiser les dispositifs autour de trois logiques complémentaires :</p>
<p><strong>Accéder des connaissances variées, éloignées des expertises de l’organisation</strong></p>
<p>Fondée sur un principe d’innovation ouverte, cette approche suppose de construire des partenariats avec des acteurs nouveaux (start-up, <a href="https://www.forbes.fr/management/les-tiers-lieux-s-imposent/">tiers lieux</a>, etc.), ainsi que de disposer d’équipes dont les principales qualités sont l’ouverture d’esprit, la curiosité, voire la possession d’une double spécialisation. Le <a href="https://www.usine-digitale.fr/article/bouygues-fait-de-son-e-lab-le-fer-de-lance-de-sa-transformation-numerique.N389489">e-lab</a> de <a href="https://www.bouyguestelecom.fr/">Bouygues</a> a par exemple construit un partenariat avec le <a href="https://www.ideas-laboratory.com/">Ideas Laboratory</a> de Grenoble. </p>
<p>Cette collaboration permet d’accéder à de nouveaux domaines d’expertise : collaborer avec des grands groupes de secteurs différents, des étudiants issus de multiples formations (ingénieurs, sociologues, architectes, designers…) ou des entrepreneurs. Bouygues se donne ainsi les moyens de réfléchir sur des thématiques futures telle que la ville intelligente. Cette solution permet de casser les <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-177235-de-lentreprise-en-silos-a-lentreprise-plateforme-bienvenue-dans-lere-de-lentreprise-intelligente-2138848.php">silos organisationnels</a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/m2AW1qQ-nAQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Tiers-lieux, fab lab, living labs, espace de co-making ou de co-working : quelques exemples.</span></figcaption>
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<p><strong>Articuler les nouveaux champs de connaissances pour stimuler la créativité</strong></p>
<p>Il ne suffit pas d’accéder à des connaissances nouvelles, il faut également développer des méthodes de créativité (<a href="https://theconversation.com/reapprendre-a-setonner-et-a-innover-avec-le-design-thinking-83164">design thinking</a>, <a href="http://parisinnovationreview.com/article/la-theorie-c-k-ou-comment-modeliser-la-creativite">C-K</a>, <a href="https://www.cairn.info/revue-l-expansion-management-review-2006-1-page-79.htm#pa16">méthode des « six chapeaux » d’Edward de Bono</a>…), et savoir matérialiser très vite les idées proposées pour évaluer rapidement la valeur des nouveaux concepts. Parmi les outils clés, la gestion de l’espace physique, les outils de prototypage, la sociologie, le design et l’<a href="http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/ethnographie/31410">ethnographie</a> facilitent la construction de nouvelles formes de multidisciplinarité et de réflexivité des équipes. Ils permettent de créer des ponts entre les différents mondes dont sont issus les individus impliqués.</p>
<p>Au sein des entreprises, ce type d’approche modifie complètement les démarches fondées sur des processus très structurés comme le <a href="https://www.stage-gate.com/resources_stage-gate.php"><em>stage gate process</em></a>. Ainsi, le <a href="http://www.groupeseb.com/fr/content/politique-et-enjeux">Seblab</a>, fondé par le groupe SEB, permet à l’entreprise de construire des projets sur un mode multidisciplinaire. Il ne se substitue pas aux processus structurés, mais apporte des capacités nouvelles et complémentaires aux équipes en charge du développement de nouveaux produits.</p>
<p><strong>Préserver la redondance des idées produites</strong></p>
<p>Toutes les idées nouvelles et originales ne seront pas exploitées par l’entreprise, mais elles constituent une source d’apprentissage pour l’organisation. Elles pourront être remobilisées ultérieurement dans d’autres projets. Préserver la mémoire des idées produites permet alors d’éviter de réinventer la roue à chaque nouvelle exploration. L’enjeu est majeur, mais complexe à traiter. Il repose sur des dynamiques de communautés (favoriser et soutenir les échanges autour des projets passés) et des actions de communication (construire la communication de l’entreprise autour des projets de créativité). Dans bien des cas, il s’agit aussi de codifier les idées pour construire une bibliothèque d’idées créatives mobilisables par l’entreprise : mettre en place des <a href="http://eduscol.education.fr/ecogest/ressources/outils-collabor/le_wiki_pour_travail">wiki</a> sur les projets réalisés, préserver et stocker les prototypes, filmer les pitches des projets. Le <a href="http://ilab.airliquide.com/">i-Lab</a> d’Air Liquide et les <a href="https://3dexperiencelab.3ds.com/fr">Ideas Lab de Dassault Systèmes</a> (3DS) sont emblématiques d’une politique active de capitalisation des idées produites.</p>
<p>Grâce à la mise en place d’un lieu, l’<em>open lab</em>, permettant de construire une « fluidité organisationnelle » et de favoriser les rencontres entre spécialistes différents, les entreprises peuvent désormais mobiliser rapidement des ressources. Développer leur créativité n’est plus une difficulté majeure pour elles. En revanche, l’inscription de ces initiatives dans la durée représente un nouveau défi majeur pour le management. Ce défi se matérialise par deux challenges.</p>
<h2>Premier challenge : gérer « le bazar dans la cathédrale »</h2>
<p>La relation entre l’<em>open lab</em> et le reste de l’entreprise repose sur un subtil équilibre. Bernard Lledos, <a href="https://www.ccmp.fr/collection-ccmp/cas-i-lab-dair-liquide-manager-la-creativite-dans-les-grandes-entreprises">responsable du I-Lab d’Air Liquide</a>, précise que, par rapport au groupe, le i-Lab <a href="http://docplayer.fr/56673691-Le-livre-blanc-des-open-labs.html">est un satellite qui</a></p>
<blockquote>
<p>« […] doit être sur une orbite géostationnaire. C’est-à-dire que si on est trop près de la Terre, la Terre étant le groupe et la maison mère, on va se faire rattraper, s écraser et se retrouver au contact d’eux. Par contre si on part de l’autre côté trop loin on va être complètement perdu, satellisé, plus de communications possibles avec le groupe. »</p>
</blockquote>
<p>Les <em>open labs</em> sont des dispositifs atypiques dans l’organisation. Ils apportent un degré de liberté et de « bazar » dans un univers très structuré et contrôlé, « la cathédrale » qu’est l’entreprise. L’autonomie reste la clé, à condition de ne pas se déconnecter des préoccupations de l’entreprise. Le management y est fondé sur le leadership et l’effet d’entraînement des équipes ; il n’est pas basé sur le contrôle.</p>
<h2>Second challenge : construire et piloter l’exploitation des idées créatives</h2>
<p>Le second challenge est indéniablement lié à la capacité de l’entreprise à transformer en valeur les idées nouvelles. Au-delà de la mise en place de nouvelles capacités destinées à produire de nouvelles idées, le défi pour les grandes entreprises, est d’acquérir des <a href="https://www.wiley.com/en-us/Dynamic+Capabilities%3A+Understanding+Strategic+Change+in+Organizations-p-9781405135757">capacités dynamiques</a> leur permettant de l’exploiter rapidement les résultats de leur créativité nouvelle. L’exploitation des idées créatives représente un challenge particulier lorsque leur exploitation modifie le <em>business model</em> de l’entreprise ou impacte ses compétences. Tout l’enjeu pour l’organisation est donc d’acquérir une agilité lui permettant de réorganiser rapidement ses ressources et partenariats. Il s’agit de faire percoler le nouvel état d’esprit dans le reste de la structure.</p>
<h2>Préserver les soutiens de l’<em>open lab</em>, condition <em>sine qua none</em> à sa survie</h2>
<p>Le risque majeur pour les <em>open lab</em> porte sur le rejet du dispositif à moyen et long termes. Celui-ci peut survenir si les dirigeants de l’entreprise ou les employés ne sont pas convaincus de la contribution de l’<em>open lab</em> à la création de valeur. Salariés comme dirigeants doivent être convaincus que les capacités créatives de cette structure permettent à l’entreprise de « penser autrement ». <a href="https://www.cairn.info/revue-entreprendre-et-innover-2016-4-p-52.htm">Construire la légitimité</a> des <em>open labs</em> constitue un challenge quotidien pour leurs managers. Pour y parvenir, ils doivent mettre en place des actions de communication et impliquer les salariés dans les projets créatifs qui y sont développés. </p>
<p>Il leur faut également trouver des sponsors (au niveau de la direction) et des ambassadeurs (au niveau des salariés). Ils seront en effet les relais les plus efficaces pour construire la légitimité de l’<em>open lab</em>. Si l’un de ces piliers est perdu, l’<em>open lab</em> court le risque de la fermeture. Ce fut le cas pour <a href="http://www.newpic.fr/02expertcontrib.html">LCL Factory, l’<em>open lab</em> de LCL</a> : le changement de direction de l’entreprise a été fatal à la petite structure.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/92888/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les grandes entreprises seraient incapables de créativité. Une idée renforcée par la vision des managers, qui considèrent que cette capacité ne se manage pas. Des a priori à remettre en cause d’urgence…Valérie Mérindol, Enseignant chercheur en management de l'innovation et de la créativité, PSB Paris School of BusinessDavid W. Versailles, Chair professor, strategic management and management of innovation, PSB Paris School of BusinessLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/935842018-04-02T19:57:56Z2018-04-02T19:57:56ZPour apprendre à faire, demain, un cyber‑coach guidera‑t‑il nos mains ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/212743/original/file-20180330-189807-rbh4dm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C66%2C1908%2C1031&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En cuisine, sans robot.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/p%C3%A2te-%C3%A9tage-de-cuisson-cuisine-chef-923037/">Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Quel plaisir de voir <a href="https://www.actualitte.com/article/lecture-numerique/antoine-compagnon-ne-pas-penser-que-le-livre-numerique-met-en-danger-la-culture/66048">Antoine Compagnon</a> déclarer son amour des tablettes numériques pour lire, et expliquer les avantages du numérique.</p>
<p>Pour apprendre, cependant, il nous faudra toujours davantage qu’une connexion à Internet ou un dialogue avec une intelligence artificielle (IA). Car nous sommes des corps vivants, pensants, qui explorent et créent en faisant.</p>
<p>Jouez-vous d’un instrument de musique ? Êtes-vous jardinier ? Êtes-vous cuisinier ? Êtes-vous menuisier ? La liste est sans fin. Toutes ces activités humaines nécessitent de faire et d’expérimenter dans le monde réel. Leur complexité et leur subtilité s’appuient sur la diversité du monde réel et elles conduisent à des apprentissages de gestes presque toujours difficiles et exigeants. Une longue histoire les a structurés en aventures collectives que marquent le passage des générations. Regarder la musique ou la cuisine au XX<sup>e</sup> siècle souligne le renouvellement de ces activités qui sont sources de créations permanentes.</p>
<p>À notre époque, celle de la transition digitale permanente, c’est la façon d’apprendre qui se transforme à chaque instant. Déjà, comme l’explique Antoine Compagnon, là où l’on passait quelquefois des jours à errer à la recherche de connaissances, quelques minutes peuvent désormais suffire, quel que soit le sujet. Et l’IA nous réserve encore bien d’autres surprises de ce côté-là.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/211150/original/file-20180320-31596-oqa3a0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/211150/original/file-20180320-31596-oqa3a0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/211150/original/file-20180320-31596-oqa3a0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/211150/original/file-20180320-31596-oqa3a0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/211150/original/file-20180320-31596-oqa3a0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/211150/original/file-20180320-31596-oqa3a0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/211150/original/file-20180320-31596-oqa3a0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/211150/original/file-20180320-31596-oqa3a0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Institut de Biologie du Développement de Marseille (IBDM).</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>La main à la pâte</h2>
<p>Ma réflexion est ici celle d’un chercheur physicien, qui pratique la science expérimentale. Notre capacité en terme de calcul scientifique quantitatif et de simulation numérique est devenue immense en quelques décennies et permet des approches extrêmement raffinées de phénomènes toujours plus complexes.</p>
<p>Dans les laboratoires, nous continuons pourtant à construire, à préparer, à manipuler, à mesurer, à observer. À faire. Il est finalement assez courant que cela se termine par une manipulation ou un assemblage délicat et inédit fait par des mains habiles. Quand c’est possible, on robotise tout ce qu’on peut. Les scientifiques n’ont aucun état d’âme à cet endroit. Mais il faut souvent réaliser un « tour de force » initial. Dans les équipes de recherche, on a besoin depuis toujours de dénicher les « doigts en or », décisifs au bon moment pour faire de l’expérience originale un succès. <a href="http://www.cnrs.fr/fr/recherche/prix/cristal.htm">Les « médailles de cristal » ont été créées par le CNRS</a> » pour reconnaître ces talents.</p>
<h2>Dans les fab lab, ça se termine aussi à la main</h2>
<p>L’invention des fab lab par les scientifiques doit également être envisagé sous cet angle. Le cours associé au fab lab du MIT Media Lab s’appelle : <a href="http://fab.cba.mit.edu/classes/863.17/">« Comment fabriquer (presque) n’importe quoi »</a>. Des machines et des outils qui permettent d’agir, de faire et de créer comme le ferait un chercheur dans son laboratoire peuvent maintenant être mises entre les mains de tous les publics, une fois couplées au monde numérique.</p>
<p>Le prix du ticket d’entrée du « tous chercheurs » tant en terme de compétence que de sécurité s’en trouve fortement abaissé. Les graveurs, qui découpent par faisceau laser, ces stars des fab lab, sont d’abord des lasers de puissance (10W à 400W sur moins de 1mm<sup>2</sup> pour que cette lumière taille le bois).</p>
<p>Ils sont aujourd’hui à la disposition du grand public après une rapide formation donnée en général par les fab lab managers. Ensuite, comme dans mon cours FabLabJamSession avec le CCSTI La Casemate à Grenoble, l’assemblage d’un premier prototype se termine souvent avec de la colle, des vis et des clous, des cutters… C’est aussi du fait main.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/211152/original/file-20180320-31608-1522loq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/211152/original/file-20180320-31608-1522loq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/211152/original/file-20180320-31608-1522loq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/211152/original/file-20180320-31608-1522loq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/211152/original/file-20180320-31608-1522loq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/211152/original/file-20180320-31608-1522loq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/211152/original/file-20180320-31608-1522loq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le fab lab de La Casemate à Grenoble, lieu de mon cours FabLabJamSession. C’était avant que quelqu’un n’y mette le feu dans la nuit du 20 novembre 2017…</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>« The science of me » de Leiland Hartwell</h2>
<p>À l’école, tout problème a une solution. Dans l’enseignement classique des sciences, l’enseignant attend « la » réponse, unique et universelle. Celle que l’on fournit sans trop y penser. Et ça marche, plutôt bien même : à ce jeu, les élèves et les étudiants sont des professionnels.</p>
<p>Pour les enseignants, c’est pratique : ils peuvent corriger des copies comme des robots. Mais ici, chacun a-t-il appris quelque chose ? Chacun sait-il qu’il a appris quelque chose ? De toute façon, la réponse à cette question si bien posée est certainement immédiatement disponible sur Internet… Pourquoi ne pas aller la chercher et passer à autre chose de moins prévisible ?</p>
<p>Leland Hartwell, Prix Nobel de Physiologie et Médecine en 2001, a fait une proposition pour l’enseignement des sciences qui m’a laissé sans voix par sa simplicité. C’est ce qu’il nomme <a href="http://sse.asu.edu/courses/the-science-of-me/">« the science of me »</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Les élèves exploreront scientifiquement les propriétés de leurs propres systèmes sensoriels. Chaque individu est différent, il n’y a donc pas de “bonne” réponse universelle. »</p>
</blockquote>
<p>La réponse n’est inscrite nulle part. Il faut aller la chercher soit même et s’assurer de sa validité.</p>
<p>La mise en œuvre de cette proposition d’un scientifique me semble particulièrement de notre temps. Elle se fonde sur la capacité que nous avons tous de faire des mesures partout sur nous-mêmes et sur notre environnement grâce aux microcapteurs performants, qui se trouvent par exemple dans nos smartphones et dans nos tablettes.</p>
<p>Faire de telles mesures ne nécessite aucun laboratoire, et souvent même aucune préparation particulière, comme le montrent les nouveaux microscopes optiques que l’on peut utiliser n’importe où pour découvrir soi-même une nouvelle profusion : celle de notre propre environnement au-delà du visible.</p>
<p>Nous pouvons donc explorer quantitativement la diversité du monde, le nombre infini de combinaisons, de variantes qu’il contient. Nous pouvons mesurer beaucoup, vite et précisément, et ce dès l’école et découvrir l’importance dans notre environnement de détails innombrables – souvent en deçà de nos capacités de perception – qui font souvent la différence à notre échelle, dans nos vies.</p>
<h2>Les créations des Meilleurs Ouvriers de France</h2>
<p>De multiples activités humaines souvent anciennes, toujours très sophistiquées et résultats d’apprentissages patients, jouent depuis longtemps avec la diversité, la variabilité du réel et avec la subtilité de nos sens et de nos gestes. Elles font ainsi de la création une méthode d’exploration qualitative du monde basée sur notre perception et notre plaisir.</p>
<p>Les professionnels reconnus de cette exploration du monde par la création nourrissent subtilement et littéralement nos sens.</p>
<p>De fait, les créateurs sont ceux qui vont intégrer Internet, IA et robots dans leur activité pour les maîtriser et les mettre à leur service sans se faire déborder : couturiers, ébénistes, verriers, jardiniers, vignerons, cuisiniers… en fait à tous ceux qu’a présentés récemment l’exposition sur <a href="http://www.arts-et-metiers.net/musee/les-meilleurs-ouvriers-de-france">Les Meilleurs Ouvriers de France</a> au musée des Arts et Métiers à Paris.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/211154/original/file-20180320-31611-x1lzwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/211154/original/file-20180320-31611-x1lzwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/211154/original/file-20180320-31611-x1lzwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/211154/original/file-20180320-31611-x1lzwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/211154/original/file-20180320-31611-x1lzwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/211154/original/file-20180320-31611-x1lzwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/211154/original/file-20180320-31611-x1lzwu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Fabrice Papin est Meilleur Ouvrier de France 2015 en restauration de mobilier.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les magnifiques photos de <a href="http://www.divergence-images.com/thierry-caron/">Stéphane Caron</a> qui accompagnaient cette exposition valent mieux qu’un long discours pour appuyer mon argument.</p>
<p>Et puis le résultat d’une recherche improbable et paradoxale associant les mots clés HEC, comme hautes études commerciales, et CAP, comme certificat d’aptitude professionnelle, me fait toujours sourire. Il y a eu plusieurs articles dans <a href="http://www.lemonde.fr/campus/article/2017/07/17/le-hipster-patissier-est-aujourd-hui-plus-valorise-que-le-cadre-sup-de-la-defense_5161299_4401467.html"><em>Le Monde</em></a> sur ce sujet en 2017. Est-ce là une préfiguration de l’avenir ?</p>
<h2>Rencontre au sommet « cuisine et sciences »</h2>
<p>L’<a href="http://www.corse.inra.fr/Actualites/AGRUMES">article du Conservatoire</a> INRA des Agrumes de San Giuliano en Corse commence par :</p>
<blockquote>
<p>« Depuis plusieurs années, Anne-Sophie Pic et les agents du conservatoire, explorent, expérimentent, arpentent les vergers parfumés, goûtent, sentent, observent pour mieux témoigner d’un patrimoine humain et gastronomique exceptionnel. »</p>
</blockquote>
<p>Le livre qui en est issu est une production remarquable construite sur ces échanges entre cuisine et agronomie. Mais pour vraiment apprécier et comprendre, il faut certainement goûter plutôt que lire, mais aussi, idéalement, voir sur place et faire. Alors merci Madame Pic et chers collègues de l’INRA. Merci,d’une part, de nous inviter avec ce livre à essayer les recettes à la maison. Après tout, on ne risque que de réussir… Et merci de souligner la richesse inégalable de cette collaboration « cuisine et sciences » construite sur la force de l’échange entre des partenaires si différents qui explorent ensemble.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/211151/original/file-20180320-31627-ie2y73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/211151/original/file-20180320-31627-ie2y73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/211151/original/file-20180320-31627-ie2y73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/211151/original/file-20180320-31627-ie2y73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/211151/original/file-20180320-31627-ie2y73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/211151/original/file-20180320-31627-ie2y73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=462&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/211151/original/file-20180320-31627-ie2y73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=462&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/211151/original/file-20180320-31627-ie2y73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=462&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Anne-Sophie Pic dans son restaurant à Valence.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Beau-Rivage Palace. Copyright Virginie Lemesle and Anne Emmanuelle Thion</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>« Cuisine mode d’emploi » de Thierry Marx</h2>
<p>Conduire des étudiants à « faire et penser ensemble avec des mentors toujours présents » est, me semble-t-il, ce qui fonde le discours d’un autre grand chef, Thierry Marx, dans son école <a href="http://www.cuisinemodemplois.com">Cuisine Mode d’Emploi(s)</a>.</p>
<p>Mais cette vidéo le montre : pour Thierry Marx, il existe trop peu de formations qui permettent d’accéder à son monde. Ce qui l’inquiète, ce n’est pas l’invasion de sa cuisine et de son restaurant par l’IA et les robots. Qu’ils y viennent, il verra s’il peut les mettre à son service. Quant à être des clients… Rappelons-nous que le repas est l’un des critères qui permettent de distinguer les hommes des robots chez Isaac Asimov dès les années 50.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/V6GheIs-iEM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/93584/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Joël Chevrier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’IA n’y suffira jamais. Les Meilleurs Ouvriers de France comme les sciences expérimentales le rappellent : il faut apprendre ensemble avec les mains pour vivre la diversité infinie du monde.Joël Chevrier, Professeur de physique, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/924652018-03-08T21:16:33Z2018-03-08T21:16:33ZL’hypothèse des tiers lieux culturels<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/208939/original/file-20180305-146655-1wjbwoe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=16%2C10%2C1167%2C772&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Au Cent Quatre, à Paris.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.accelimage.fr/la-photographie-europeenne-au-centquatre-a-paris/">accelimage</a></span></figcaption></figure><p><em>L’hypothèse des tiers lieux culturels a été présentée par Raphaël Besson lors d’une Journée organisée par l’Agence Régionale du Livre PACA et intitulée « Bibliothèque, Sciences et numérique » (Gardanne, novembre 2017). Cet article rend compte des premières caractéristiques et questionnements induits par l’hypothèse des tiers lieux culturels</em>.</p>
<hr>
<h2>La transformation des lieux culturels : un processus global</h2>
<p>De nombreux lieux culturels se transforment sous l’effet des mutations du numérique, de la baisse des finances publiques et du caractère stratégique des savoirs dans une économie de la connaissance.</p>
<p>C’est le cas des <a href="http://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-2010-04-0057-001">bibliothèques troisième lieu</a>, qui se définissent moins comme des lieux de consultation d’ouvrages et de pratique ascétique des savoirs, que comme des espaces de rencontre et de sociabilité. Ces bibliothèques sont ouvertes à la Cité et introduisent en leur sein des fonctions non directement liées à la sphère des connaissances, avec l’implantation de services publics (pôle emploi, mission locale, La Poste), d’espaces de coworking, d’activités associatives et dédiées aux loisirs (cours de tricot, yoga, cuisine, grainothèques, ateliers de réparation de vélos, etc.). À l’instar de la <a href="http://www.bordeaux.fr/o304">Bibliothèque Mériadeck</a> à Bordeaux ou de la <a href="http://www.mediatheques-entre-dore-et-allier.fr/">médiathèque de Lezoux</a>, le fonctionnement des bibliothèques troisième lieu est centré sur les usagers, et fait une place significative aux outils numériques et aux nouveaux modèles d’apprentissage (imprimantes 3D, serious games, plateformes collaboratives, etc.).</p>
<p>Les centres de culture scientifique comme le <a href="https://www.medialab-prado.es/">Medialab-Prado</a> à Madrid, <a href="http://www.cap-sciences.net/">Cap Sciences</a> à Bordeaux ou le <a href="http://www.quaidessavoirs.fr/#/?_k=awzy20">Quai des savoirs</a> à Toulouse réinventent leurs modèles de médiation aux sciences en s’appuyant sur les méthodes d’intelligence collective des living labs et les outils de prototypage rapide des fab lab. Ces centres de nouvelle génération proposent des espaces multiples à n dimensions sociales et fonctionnelles, comprenant autant de salles d’exposition interactives, cafés des savoirs, ateliers, salles de créativité, que d’espaces de test de dispositifs numériques. À l’inverse des politiques de diffusion de la culture et des savoirs vers le « grand public », tout est pensé́ pour que les visiteurs s’interrogent sur l’apport et les limites de contenus scientifiques, technologiques ou culturels, et construisent de manière active et ascendante de nouveaux savoirs, cultures ou dispositifs créatifs.</p>
<figure>
<iframe src="https://player.vimeo.com/video/111055900" width="500" height="281" frameborder="0" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Certains musées comme les Arts décoratifs à Paris ou le musée gallo-romain de Lyon, se sont récemment transformés en de véritables laboratoires d’expérimentation lors des évènements <a href="http://www.museomix.org/">Museomix</a>. Ces expériences ont rassemblé pendant trois jours des centaines de participants (codeurs, médiateurs culturels, conservateurs, designers, amateurs, bidouilleurs) qui étaient en charge d’inventer de nouvelles scénographies et interactions avec les œuvres.</p>
<p>Des friches industrielles comme la <a href="http://www.lafriche.org/fr/">Belle de Mai</a> à Marseille, le <a href="http://www.104.fr/">104</a> à Paris ou le <a href="http://journals.openedition.org/belgeo/13358">Emsherpark Park</a> dans la Ruhr en Allemagne défendent une vision dynamique du patrimoine culturel. Ces friches œuvrent depuis une vingtaine d’années à ancrer la culture dans les territoires et à l’expérimentation et à la coproduction. Cette préoccupation rejoint celle des campus universitaires, qui se vivent moins comme des communautés isolées dans des espaces monofonctionnels, que des espaces ouverts à leurs territoires. Ainsi, sur de nombreux campus, observe-t-on l’introduction de logements, de commerces, de cafétérias, de restaurants, d’équipement dédiés aux loisirs, au sport, à la culture, mais aussi à l’implantation d’espaces de valorisation économique des connaissances (incubateurs, pépinières d’entreprises, coworking spaces). Ces campus à l’image de l’<a href="http://3xn.com/project/orestad-college">Ørestad College</a> à Copenhague, développent toute une réflexion sur l’aménagement d’espaces de travail collaboratifs et ouverts. Ils promeuvent des modèles d’apprentissage collectif et fondés sur le « faire ».</p>
<p>Enfin, de nouveaux lieux culturels événementiels et éphémères se sont développés au cœur des villes ces dernières années. On pense à des évènements comme le <a href="https://www.levoyageanantes.fr/">voyage à Nantes</a> ou <a href="http://www.uneteauhavre2017.fr/fr">Un Eté au Havre</a>. On pense aussi aux expériences d’urbanisme temporaire comme l’<a href="http://www.hotelpasteur.fr/">hôtel Pasteur à Rennes</a> ou les <a href="https://lesgrandsvoisins.org/">Grands Voisins</a>. On pense enfin à la création de lieux d’expérimentation et de coproduction dans les espaces publics des villes, à l’image du <a href="https://www.nantesmetropole.fr/actualite/l-actualite-thematique/nantes-city-lab-le-laboratoire-de-toutes-les-innovations-nantaises-emploi-economie-92892.kjsp">Nantes City Lab</a>, des <a href="https://www.urbanews.fr/2016/01/11/50396-laboratoires-citoyens-madrilenes-fabrique-communs-urbains/">laboratoires citoyens de Madrid</a> ou des <a href="http://journals.openedition.org/geocarrefour/8446">« espaces d’aménagement libres pour les rêves des habitants »</a> mis en œuvre à Leipzig (Allemagne).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/208920/original/file-20180305-146691-1islf9v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/208920/original/file-20180305-146691-1islf9v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/208920/original/file-20180305-146691-1islf9v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/208920/original/file-20180305-146691-1islf9v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/208920/original/file-20180305-146691-1islf9v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/208920/original/file-20180305-146691-1islf9v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/208920/original/file-20180305-146691-1islf9v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Voyage à Nantes, l’arbre a basket.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Voyage_%C3%A0_Nantes_-_L%27arbre_%C3%A0_basket.jpg">Wikipédia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>L’hypothèse des tiers lieux culturels</h2>
<p>Ces différents lieux culturels ont en commun de sortir d’une vision élitiste et diffusionniste de la culture et des savoirs, pour s’intéresser aux acteurs informels et aux espaces de la vie quotidienne. Ils se représentent moins dans des grands équipements solennels ou des lieux de retraite protecteurs, que dans des espaces dédiés à la vie sociale et ouverts à la Cité. Ils opèrent par ailleurs un rapprochement intéressant entre les cultures écrites, numériques et techniques des savoirs et une variété de connaissances, qu’elles soient académiques, tacites, pratiques, expertes ou profanes.</p>
<p>Au-delà de ces premières caractéristiques, il semble essentiel de mieux caractériser ces lieux culturels et les transformations en cours. À cet effet, nous nous appuyons sur la notion de Tiers Lieu développée par le sociologue américain <a href="https://www.actualitte.com/article/interviews/bibliotheques-le-troisieme-lieu-consiste-a-privilegier-la-relation-humaine/83397">Ray Oldenburg</a>. Ce dernier formule l’hypothèse d’un développement croissant d’espace ouverts, hybrides (entre le domicile et le travail) et qui facilitent la rencontre entre des acteurs hétérogènes et des ressources multiples. C’est le cas par exemple des tiers lieux d’activité et des coworking spaces, qui sont spécialisés dans la création d’espaces de travail partagés et collaboratifs. Citons également les tiers lieux d’innovation, comme les fab lab ou les Living Labs, qui cherchent à stimuler les processus d’innovation en s’appuyant sur des méthodes d’intelligence collective, l’expérimentation et le prototypage. Quant aux tiers lieux sociaux et d’innovation publique, ils portent un objectif social affirmé, autour d’enjeux de société, de participation citoyenne et d’action publique.</p>
<p>Notre hypothèse est que nous assistons à l’émergence d’une nouvelle catégorie de tiers lieux, les tiers lieux culturels. Nous les définissons comme des espaces hybrides et ouverts de partage des savoirs et des cultures, qui placent l’usager (le visiteur, le lecteur, l’étudiant, le spectateur…), au cœur des processus d’apprentissage, de production et de diffusion des cultures et des connaissances. Les tiers lieux culturels sont encastrés dans leur territoire et se positionnent comme des interfaces entre l’uppergound des Institutions culturelles, et l’underground des habitants, usagers et des sphères culturelles et artistiques émergentes et alternatives. Les tiers lieux culturels promeuvent une culture de l’expérimentation, de la mise en scène et de la coproduction des savoirs et des cultures.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/208922/original/file-20180305-146675-n04ttt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/208922/original/file-20180305-146675-n04ttt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/208922/original/file-20180305-146675-n04ttt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/208922/original/file-20180305-146675-n04ttt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/208922/original/file-20180305-146675-n04ttt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/208922/original/file-20180305-146675-n04ttt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/208922/original/file-20180305-146675-n04ttt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le Medialab Prado de Madrid.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.medialab-prado.es/medialab">Medialab</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>De nombreuses questions en suspens</h2>
<p>L’hypothèse des tiers lieux culturels ne saurait être validée sans l’observation précise de lieux culturels et l’investigation des problématiques suivantes :</p>
<ul>
<li><p>Dans quelle mesure les tiers lieux culturels jouent une fonction réelle dans la vie de la Cité ? Parviennent-ils à encastrer socialement les connaissances et les cultures et à faire des innovations techniques et numériques un véritable apprentissage social ?</p></li>
<li><p>Dans quelle mesure les tiers lieux culturels réussissent-ils à réguler les tensions et à dépasser des antagonismes structurants entre science/savoir, culture numérique/culture écrite, approche conceptuelle/approche expérimentale, espace de réflexion/espace de sociabilité, lieu institutionnel/lieu alternatif, société de la connaissance (les communs)/économie de la connaissance (le marché), etc.</p></li>
<li><p>La rencontre des savoirs, des cultures et d’acteurs multiples aux intérêts potentiellement divergents, permet-elle d’enrichir les mécanismes de production et de diffusion des connaissances ? Quelles en sont les externalités positives, comme négatives (crispation identitaire, augmentation de la distance sociale, etc.) ?</p></li>
<li><p>Quels sont les risques à terme de ce mouvement généralisé de déspécialisation des lieux culturels ? Va-t-on assister à l’émergence d’espaces génériques, rendant caduque toute tentative de différenciation entre une bibliothèque, un musée, un incubateur ou un espace de service public ?</p></li>
<li><p>Les compétences et les métiers traditionnels de la culture sont-ils suffisants pour prendre en compte les nouveaux enjeux induits par les tiers lieux culturels ?</p></li>
<li><p>Finalement, les tiers lieux culturels préfigurent-ils de nouvelles formes de production et de diffusion des connaissances, ou se réduisent-ils à de simples « paravents esthétiques » masquant la réalité des coupes budgétaires et la perte d’attractivité de certains lieux de culture et de savoir ?</p></li>
</ul>
<p>C’est à cet ensemble de questions que nous consacrerons notre prochain article, qui proposera une lecture critique des tiers lieux culturels.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/92465/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raphaël Besson ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>De nombreux lieux culturels se transforment sous l’effet des mutations du numérique, de la baisse des finances publiques et du caractère stratégique des savoirs dans une économie de la connaissance.Raphaël Besson, Directeur de l'agence Villes Innovations, Chercheur associé au laboratoire PACTE (Université de Grenoble), Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/875482017-12-03T20:59:14Z2017-12-03T20:59:14ZDes transformations du travail aux mutations du management : le paradoxe du 51ᵉ état américain<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/196520/original/file-20171127-2077-1oj7nve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans un espace de co-working…</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/eyebee/4454314853/in/album-72157653040857006/">Ian May/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Conférence FNEGE-PWC <a href="http://www.fnege.org/actualites/1334/conference-gratuite-fnege-pwc-les-organisations-demain">« Les organisations demain : transformation du monde ancien ou irruption du monde nouveau »</a> dont The Conversation France est partenaire.</em></p>
<hr>
<p>« Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à paraître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres. » Cette citation célèbre tirée des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cahiers_de_prison">cahiers de prison</a> d’Antonio Gramsci semble parfaitement à propos pour décrire les transformations du travail.</p>
<p>Pour certains, nous serions entrés dans une société post-salariale, faite désormais de freelancers, d’indépendants et d’entrepreneurs. Le contrat de travail serait devenu un luxe, une exception, sur fond de précarité inéluctable. Depuis le début des années 2000, il y a bien sûr un fond de vérité dans ce discours souvent construit à partir d’une réalité américaine.</p>
<h2>Les transformations du travail : de quoi parle-t-on ?</h2>
<p>Pour le cas de la France, il est cependant utile de rappeler que les salariés n’ont jamais été aussi nombreux. 90 % de la population active possède aujourd’hui un contrat de travail, avec cependant une tendance très nette vers le contrat à durée déterminée (CDD), qui concerne aujourd’hui quasiment un jeune sur deux. Les contrats à durée limitée sont ainsi passés de 6 % en 1982 à 15 % de l’effectif salarié total en 2016.</p>
<p>Comme le rappelle une <a href="http://www.strategie.gouv.fr/publications/salarie-independant-une-question-de-metiers">étude récente de France Stratégie</a>, le <strong>nombre d’indépendants a diminué de 883 000 personnes</strong> entre 1982 et 2016. La tendance correspond surtout aux agriculteurs et certaines professions libérales. En l’espace de trente ans, la part des « indépendants traditionnels » est ainsi descendue à 13 % de l’emploi total. En parallèle, le nombre de freelancers et de néo-artisans connaît une augmentation significative sur la période récente (+4 % entre 2005 et 2014). Six fois sur dix, il s’agit d’entrepreneurs individuels.</p>
<p>Cette transformation récente masque elle aussi des réalités très diverses. Le consultant indépendant spécialisé n’est pas le livreur de Deliveroo. Chacun s’efforce d’équilibrer à sa façon ses aspirations à la liberté et ses besoins de sécurité. Avec un taux de chômage à 23,3 % chez les plus jeunes, l’équation est devenue difficile à résoudre.</p>
<p>Comment alors caractériser cette situation plus complexe qu’il n’y paraît ? Je pense que l’on peut pointer deux tendances centrales dans les transformations du travail : l’entrepreneuriat collaboratif et la pluriactivité. Elles sont indissociables l’une de l’autre.</p>
<p>La première tendance, l’<strong>entrepreneuriat collaboratif</strong>, est liée à l’individualisation du travail. L’horizontalité, le don, le contre-don, l’entre-aide, la rencontre, la solidarité, le nomadisme collectif, la construction et l’entretien de communautés, sont plus que jamais présents. Dans une société faite de plus en plus de salariés précaires, d’indépendants, de salariés intra-preneurs et autonomes, le travail s’individualise et se liquéfie.</p>
<p>Plus que jamais, les acteurs de cette économie que l’on dit « collaborative » sont à la recherche de nouveaux collectifs auxquels ils pourront se connecter. Les pratiques de l’entrepreneuriat collaboratif, les nouveaux lieux d’entrepreneuriat et d’innovation, les mythes de l’entrepreneuriat collaboratif et les plateformes numériques vont permettre de se retrouver et de construire des équilibres fragiles entre sécurité et liberté. C’est dans un faire et un entreprendre ensemble que se reconstituent des liens sociaux affaiblis par un monde du travail de plus en plus précaire et individuel. La communauté est au cœur de toutes les démarches. Le management devrait l’être sans doute davantage…</p>
<p>La seconde tendance est la <strong>pluriactivité</strong>. Afin de construire une sécurité, d’augmenter son niveau de revenu, de préparer l’avenir ou de survire difficilement dans le présent, on ne met plus tous « ses œufs dans le même panier ». Les pluriactifs (également appelés <a href="https://theconversation.com/leconomie-numerique-va-t-elle-nous-transformer-en-slashers-71728">« slashers »</a>) sont de trois types : salariés multiples, salariés complétant leur revenu par une activité d’entrepreneur ou encore freelancers multiples. Une <a href="https://www.mckinsey.com/global-themes/employment-and-growth/independent-work-choice-necessity-and-the-gig-economy">étude du McKinsey Global Institute de 2016</a> montre ainsi que 56 % des entrepreneurs européens et américains sont des pluriactifs.</p>
<p>Le développement de l’entrepreneuriat collaboratif et la généralisation de la pluriactivité correspondent à un éclatement radical des cadres spatiaux et temporels traditionnels du travail. Dans tous les cas, le travailleur est de plus en plus isolé, exposé à un stress parfois élevé, et la flexibilité des uns reste la précarité et la pauvreté des autres.</p>
<p>Le stade le plus avancé et le plus clair de ces évolutions est incarné par les États-Unis. Avec un tiers d’actifs freelancers, la société américaine est plus que jamais composée d’acteurs <a href="https://repositories.lib.utexas.edu/bitstream/handle/2152/28331/SpinuzziWorkingAloneTogether.pdf?sequence%3D2">« seuls ensemble »</a>. A l’individualisation du travail doit correspondre des mécanismes (le plus souvent marchands) qui vont permettre de faire fonctionner tant les processus organisationnels, les projets d’innovation et d’entrepreneuriat que la vie de la cité. Les plateformes globales, souvent américaines, revendiquent parfois ce rôle.</p>
<h2>Des transformations du travail aux mutations du management</h2>
<p>Qu’en est-il des transformations du management ? Sont-elles tirées elles aussi par la réalité américaine et les <a href="https://modcalifornien.wordpress.com/a-propos/le-modele-californien/">mythes californiens</a> ? Il serait tentant d’associer à la fin du travail la fin simple et brutale du management. Si le management correspond à l’ensemble des pratiques et des techniques qui est mobilisé afin d’animer et de guider une activité collective, le « nouveau monde » remet en cause cette perspective. Que gère et qui gère le travailleur indépendant, l’entrepreneur solitaire de l’espace de coworking, le manager-intrapreneur, les salariés réassemblés en permanence au fil de projets ? S’il est de moins en moins question de structures, d’organigrammes voire de techniques, il y a bien toujours des pratiques de management. Elles empruntent plus que jamais à l’entrepreneuriat collaboratif, et pour l’heure, ses sources californiennes.</p>
<p>Nous sommes tous les citoyens de ce 51<sup>e</sup> état américain qui n’est autre que le reste du monde. Nous en sommes conscients et nous aimons cela. Mais le capitalisme a développé des formes de travail collectif qui sont assez éloignées des mythes californiens. Les coopératives sont l’une de ces formes d’activité collective déjà anciennes. Elles sont nées en Europe au XIX<sup>e</sup> siècle, dans un contexte de crise du rapport au travail. Les coopératives d’activité et d’emploi (CAE) telles que <a href="http://www.coopaname.coop/article/comment-ca-marche">Coopaname</a> sont les héritières de cette forme juridique. Le « salarié-entrepreneur » peut y « être autonome sans être indépendant ». Il peut également « changer de statut pour rejoindre un projet collectif ».</p>
<p>Les coopératives sont également un des principes mis en avant par l’Organisation internationale du travail dans sa <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9claration_de_Philadelphie">fameuse déclaration de mai 1944</a>. Déclaration faite à Philadelphie, une des villes symboliques du « nouveau monde ». Il incombe aujourd’hui aux transformations du management de savoir saisir les opportunités de ces « anciennes » transformations du travail. Au-delà du droit et du politique, il revient aussi à chacun de s’interroger sur le type de travail et de management qu’il souhaite pour lui et ses proches et par addition, le type de société qui en découlera dans 10 ans.</p>
<p>Dans le clair-obscur, les monstres sont peut-être déjà là, mais il ne tient qu’à nous de les remplacer par des anges. Des anges libres et solidaires qui peuvent aussi venir de l’ancien monde. Dans tous les cas, je continue à rêver d’un 51<sup>e</sup> état qui soit le plus libre et le plus responsable de tous.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/87548/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François-Xavier de Vaujany est président du réseau académique et think tank RGCS (<a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/">https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/</a>). </span></em></p>Faut-il analyser les transformations du travail et les mutations du management à la seule lumière de la trajectoire des États-Unis ?François-Xavier de Vaujany, Professeur, PSL-Université Paris-Dauphine (DRM), Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/835532017-10-09T19:19:37Z2017-10-09T19:19:37ZQuelles compétences pour les nouveaux médiateurs scientifiques ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/189349/original/file-20171009-6979-13zhzd7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Montrer, démontrer…</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://visualhunt.com/f2/photo/7402015974/c575e25d9b/">RDECOM via VisualHunt </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la Science 2017 dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>La vulgarisation « à la papa » où l’expert déverse son savoir sur un public béat et ignorant a du plomb dans l’aile. Certes, à l’occasion de la <a href="https://www.fetedelascience.fr">fête de la science</a>, vous pourrez sans doute assister à une traditionnelle conférence de chercheur. À côté de ce modèle de communication <em>top down</em> se développent d’autres formats, d’autres postures, d’autres pratiques que les professionnels du milieu ont l’habitude de désigner sous le vocable <a href="http://www.les-ernest.fr/vulgarisation-communication-et-mediation-scientifique/">« médiation scientifique »</a> (MS). Visite guidée d’un écosystème en pleine mutation.</p>
<h2>Nouveaux outils, nouveaux lieux</h2>
<p>L’écosystème de MS est bien évidemment transfiguré par l’ère du numérique, la surabondance d’information et la circulation des connaissances beaucoup plus agile et hétérogène qu’autrefois. Les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Universite_de_tous_les_savoirs">longues conférences</a> côtoient désormais des formats de communication courts (rendus célèbres par les <a href="https://www.ted.com/">TED</a>) qui doivent leur réussite au web. Le médiateur scientifique se trouve lui même immergé dans une multitude de réseaux numériques, dont ses publics font partie. Ses activités de médiation ne peuvent pas se passer du « bourdonnement » des <a href="http://www.cafe-sciences.org/">blogs de sciences</a> et les <a href="http://forums.futura-sciences.com">forums de discussion</a>, les plateformes d’agrégation et remix de contenus, ou encore des <a href="https://www.consoglobe.com/science-participative-applis-cg">applications de science participative pour smartphones</a>.</p>
<h2>Des changements de posture</h2>
<p>OGM, bisphénol-A, nucléaire, nanotech… l’irruption des <a href="http://controverses.mines-paristech.fr/presentation/pourquoi-etudier-les-controverses/">controverses sociotechniques</a> dans le périmètre de la médiation scientifique a imposé un changement de posture. Un médiateur scientifique doit comprendre aussi bien la science que sa perception par le public. Le médiateur scientifique qui anime un <a href="https://theconversation.com/les-jeux-de-discussion-comprendre-et-se-comprendre-67322">jeu de discussion</a> du type <a href="http://www.playdecide.eu">PlayDecide</a> sur une controverse sociotechnique se doit de respecter et comprendre les convictions de ses publics. L’objectif d’une session PlayDecide n’est pas de convaincre que la science est belle et bonne mais d’aider chaque participant à : (i) clarifier pourquoi il pense ce qu’il pense sur la controverse (ii) mieux comprendre pourquoi d’autres peuvent avoir des opinions différentes sur la même controverse.</p>
<p>Dans d’autres dispositifs, le rapport savant>profane, cher à la vulgarisation scientifique, peut même être complètement inversé. C’est le cas des <a href="http://ledome.info/index.php?page=page&id_manifestation=1820"><em>living lab</em></a>, où le public est convoqué pour ce qu’il sait, et c’est ce savoir qui intéresse les chercheurs.</p>
<h2>Un brouillage des frontières</h2>
<p>Ces changements de postures s’accompagnent d’un <a href="http://webtv.bpi.fr/fr/doc/12592/La+culture+scientifique+:+entre+production+et+partage+des+connaissances">brouillage des frontières</a> entre diffusion, pratique et création de connaissances.</p>
<p>Par exemple, les espaces de type <a href="https://theconversation.com/fab-lab-do-it-yourself-hackers-et-autres-open-source-76881"><em>fab lab</em></a> fleurissent dans les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Centre_de_culture_scientifique,_technique_et_industrielle">centres de culture scientifique technique et industriels</a> (CCSTI). Diffusion et pratique de la culture scientifique sont indissociables dans ces lieux. Allez faire un tour à <a href="https://lacasemate.fr">La Casemate</a>, ou chez <a href="http://www.cap-sciences.net/au-programme/do-it-yourself">Cap Sciences</a> pour vous en convaincre.</p>
<p>D’autres dispositifs hybrident joyeusement diffusion et création des connaissances. En participant à un des multiples programmes de <a href="http://www.mnhn.fr/fr/participez/contribuez-sciences-participatives">sciences participatives</a> vous apprendrez des contenus scientifiques tout en faisant avancer la recherche. Dans le même esprit, <a href="https://dublin.sciencegallery.com/memory/">certaines expositions</a> dans des musées de sciences sont, en même temps, des lieux de partage et des lieux de création de connaissance grâce à des ateliers de collecte de données impliquant les visiteurs de l’exposition.</p>
<h2>Des nouveaux métiers</h2>
<p>À la périphérie de cet écosystème en pleine mutation apparaissent de nouveaux métiers reliés aux sciences et techniques et qui ont une composante « médiation ».</p>
<p>Pour ne donner que quelques exemples :</p>
<ul>
<li><p>les chercheurs mobilisent de plus en plus des outils et méthodes de recherche soulevant des enjeux éthiques et juridiques, tels que le big data, l’agrégation ou l’anonymisation des données. On assiste donc à une prolifération de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=-hzuj_rpgrY"><em>ethics advisors</em></a> qui légitiment les projets de recherche et en expliquent les implications aux financeurs.</p></li>
<li><p>comme l’a <a href="http://www.liberation.fr/depeches/2017/09/26/ma-these-en-180-secondes-ou-comment-apprendre-a-communiquer_1598985">récemment souligné</a> Marie-Charlotte Morin, gagnante du premier concours <a href="http://mt180.fr">« Ma thèse en 180 secondes »</a> (qui se consacre désormais à la MS), la recherche de financements extérieurs occupe, pour le meilleur et pour le pire, une place croissante dans la vie des chercheurs ; naissent donc des <a href="https://www.whitehorne.nl/services/research-grant-applications/erc-research-grants">« consultants »</a> qui aident les chercheurs à être plus performants dans l’obtention de ces fonds (notamment le « Graal » d’une ERC <em>starting grant</em>), en les aidant à « raconter » leur projet de façon succincte et captivante devant un public de pairs.</p></li>
<li><p>enfin, notons la naissance de « responsables des relations science-société » au sein d’agences telles que l’<a href="https://www.andra.fr/pages/fr/menu1/l-andra/qui-sommes-nous-r/comite-ethique-et-societe-7450.html">ANDRA</a>, signe d’une meilleure prise en compte des enjeux sociétaux au sein de ces organisations à la fois « techniques » et de gouvernance.</p></li>
</ul>
<h2>Des formations adaptées</h2>
<p>L’écosystème change, les métiers qui y sont rattachés se reconfigurent et la formation des médiateurs scientifiques s’adapte.</p>
<p><a href="http://www.estim-mediation.fr">L'école de la médiation</a> se destine à la formation continue des médiateurs. Le <a href="https://cri-paris.org/du/mediation-scientifique-innovante/">diplôme universitaire Médiation scientifique innovante</a>, quant à lui, fournit à ses étudiants une boîte à outils adaptée aux dispositifs émergents de médiation.</p>
<p>De l’essor des formats courts, aux techniques et acteurs de la médiation sur le Web, des controverses sociotechniques à l’apprentissage de la médiation « face publique », en passant par les jeux de discussion, et les nouveaux dispositifs muséologiques. Rien de trop pour le développer les compétences des « nouveaux » médiateurs scientifiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/83553/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Francesca Musiani coordonne l'unité d'enseignement 'Controverses socio-techniques' au sein du DU Médiation scientifique innovante. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jean-Marc Galan coordonne le diplôme universitaire Médiation scientifique innovante et l’offre de formation du think tank Traces.</span></em></p>À côté de la vulgarisation scientifique traditionnelle se développent d’autres pratiques sous le vocable médiation scientifique. Visite guidée d’un écosystème en pleine mutation.Francesca Musiani, Chargée de recherche, Institut des sciences de la communication du CNRS (ISCC), Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Jean-Marc Galan, Chercheur au CNRS, ISCC, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/831212017-09-11T21:10:34Z2017-09-11T21:10:34ZLes plates-formes d’innovation : des communautés porteuses de nouvelles relations de travail<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/184979/original/file-20170906-18486-hx1i85.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C1%2C1024%2C708&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Fab lab au sein d'une bibliothèque contemporaine à South Shields au Royaume-Uni.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/135302410@N02/33923572260/in/photolist-TFHb9U-WGqHgh-R922yJ-SN4jo4-QSmqfa-Ts5zar-SZhG1b-KAEztS-U2KAXH-KAEzgC-KjTPnb-KDafwx-KjTLrb-KAEyBG-JPCeX2-KAEz2j-KL2cJg-KjTLQh-JPCePB-KAEy2J-KAEwJJ-KAEwUJ-KL2ckv-KH8atm-JPsmR3-TfnKXf-TrJ57W-TrJ59Q-SN4jLZ-TrJ9r7-SN4jU4-TrJ5Gd-JPsmHN-KL2bqz-KL2bDR-KjTMuy-KH8b51-KAExXq-KjTM8S-KjTMm7-KjTLY3-KAEwwQ-U2KwU2-TQcGDZ-U2KBhR-TrJ7kJ-U2KwP2-U2Kx4k-TrJ94U-TrJ8eY">Julia Chandler/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>La digitalisation de l’économie offre aujourd’hui de nouvelles opportunités pour l’innovation. Elle oblige aussi à une accélération du développement des projets, voire à une transformation des modes de travail. Ces opportunités émergent en mobilisant de nouveaux outils technologiques (<em>data analytics</em>, visualisation, imprimantes 3D…) ou se matérialisent en construisant de nouveaux <em>business models</em>.</p>
<p>De nouveaux acteurs économiques émergent dans cette perspective. Qu’on les appelle <a href="http://www.newpic.fr/02group2015openlabsdownload.html"><em>fab lab</em>, <em>open labs</em>, <em>makerspaces</em>, <em>coworking spaces</em></a> ou encore incubateurs, ces nouveaux lieux d’innovation se multiplient aujourd’hui un peu partout en France. Ils répondent à un besoin concret : gagner en flexibilité et en transdisciplinarité. Ils utilisent les outils du monde des <em>makers</em> pour matérialiser plus vite les idées. Ces nouveaux lieux sont à la mode mais leur fonctionnement et leur valeur ajoutée sont encore mal compris.</p>
<p>Dans une <a href="http://www.newpic.fr/02proj2016openlabsidf.html">étude récente</a> cofinancée par l’<a href="http://www.innovationfcty.fr/">Innovation Factory</a>, <a href="http://www.bpifrance-lehub.fr/">Bpifrance le Hub</a> et <a href="https://www.parisandco.com/">Paris&Co</a>, nous avons analysé et comparé une quinzaine de lieux d’innovation en île-de-France.</p>
<h2>Au-delà du foisonnement, une définition commune</h2>
<p>La plupart des lieux ne coïncident pas avec les grilles traditionnelles qui distinguent <em>fab lab</em>, <em>coworking spaces</em>, <em>hacker spaces</em>, ou encore accélérateurs et incubateurs. Ces grilles sont incomplètes car elles ont tendance à les réduire à une activité unique. Elles ne reflètent ni l’étendue des services proposés, ni les dynamiques qu’ils suscitent.</p>
<p>Les nouveaux lieux sont portés par des entrepreneurs et/ou des associations. Ils reposent toujours sur des démarches ouvertes et collaboratives. Leur dynamique repose sur une communauté d’individus qui partagent les mêmes valeurs et expérimentent au quotidien de nouvelles démarches d’innovation. Le lieu physique est primordial car il cristallise la rencontre et l’émergence de nouveaux modèles de collaboration.</p>
<p>Au final, ces lieux représentent de véritables plates-formes d’innovation dans lesquelles les modes de travail se différencient nettement des organisations classiques et cette logique a été mis en évidence par de nombreux autres chercheurs sur <a href="https://theconversation.com/les-tiers-lieux-2-0-une-nouvelle-facon-dapprehender-le-monde-76723">The Conversation France</a>.</p>
<p>La vie quotidienne permet d’y avoir des collègues de travail, mais pas de lien hiérarchique. Les rencontres, les échanges, les centres d’intérêt commun et une curiosité partagée pour la nouveauté vont permettre de faire avancer les projets de chaque membre (ou équipe).</p>
<p>Le fonctionnement des plates-formes permet de casser les silos au quotidien, à la fois à l’intérieur de la plate-forme et dans l’écosystème. La flexibilité et l’agilité permettent de mixer les compétences. Cela se manifeste dans la mobilisation de méthodes d’idéation ou de prototypage rapide.</p>
<p>Ces méthodes sont par essence inclusives : tout le monde peut y participer, même ceux qui ne font pas formellement partie du projet, qui pensent ne pas détenir de compétences justifiant leur présence, ou qui veulent seulement promouvoir une thématique qui leur tient à cœur. C’est le principe même des <em>hold-ups</em> pratiqués chez <a href="http://www.sensespace.cc/">Makesense</a>.</p>
<h2>Trois catégories principales de plates-formes</h2>
<p>Ces plates-formes se distinguent pour l’essentiel par leur orientation <em>business</em>, <em>social business</em> ou <em>not for profit</em>.</p>
<p><strong>Les plates-formes <em>business oriented</em></strong> peuvent être généralistes ou thématiques, c’est-à-dire qu’elles proposent de renouveler les modèles économiques dans un monde numérique, elles peuvent proposer des modèles d’organisation alternatifs dans un secteur spécifique.. Reposant sur un modèle d’organisation différent de celui d’une agence de création, Digital Village permet à ses membres de conserver leurs statuts d’indépendants tout en bénéficiant d’une mutualisation de moyens.</p>
<p>Certaines plates-formes se définissent par les dynamiques collectives qu’elles impulsent au sein d’écosystèmes existants ou en devenir. C’est le cas du <a href="http://www.lecargo.paris/">Cargo</a> et de <a href="http://www.residencecreatis.fr/">Creatis</a> qui se situent à l’intersection entre contenu numérique et activités culturelles, ou du <a href="http://welcomecitylab.parisandco.paris/">Welcome City Lab</a> qui situe son activité entre contenu numérique et tourisme urbain</p>
<p><strong>Les plates-formes <em>social-business oriented</em></strong> cherchent à concilier la performance économique avec les enjeux associés au développement durable, ou à la création (ou au renouvellement) de biens collectifs. C’est le cas de La Ruche, de Makesense ou encore de <a href="https://liberte.paris/">Liberté Living Lab.</a> Leur objectif est de faire entrer l’économie sociale et solidaire comme une référence pour le développement de toutes activités.</p>
<p><strong>Les plates-formes <em>not-for-profit oriented</em></strong> portent des modèles alternatifs qui visent à réformer des activités existantes. Ainsi, <a href="https://lapaillasse.org/">La Paillasse</a> se donne mission de faire de la science autrement de manière plus ouverte et partagée fondée sur des dynamiques d’<em>open source</em> sans préalable de diplôme ou de titre. <a href="http://www.electrolab.fr/">Electrolab</a>, un <em>hacker space</em> spécialisé dans l’électronique, veut redonner envie aux citoyens de s’engager dans la technologie « par le faire ».</p>
<h2>Des plates-formes construites par et pour une communauté</h2>
<p>Au-delà de la mission qui reste spécifique à chaque plate-forme, les communautés qui s’y développent partagent des valeurs précises : réciprocité, bienveillance, collaboration, entrepreneuriat et passion. La culture entrepreneuriale est omniprésente dans la communauté et se trouve aussi chez ceux qui ont été à l’origine de la plate-forme et de la communauté. Ces communautés sont de tailles diverses (quelques dizaines à plusieurs centaines voire milliers de membres dans le cas du <a href="https://paris.numa.co/en/">NUMA</a>) mais elles sont toutes caractérisées par la diversité : diversité de projets, diversité sociale, diversité de compétences, diversité générationnelle et/ou diversité culturelle.</p>
<p>La diversité y constitue un atout stratégique car elle permet de décaler les points de vue et d’offrir une richesse dans l’expertise.</p>
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<p>« Le fait d’avoir une communauté hétérogène est très vertueux parce que du coup les [membres] sont complémentaires et [ils] se donnent des coups de main entre eux. » (Laurent Queige, Welcome City Lab).</p>
</blockquote>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">_La diversité des communautés dans les plates-formes d’innovation.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bpifrance Le Hub, Innovation Factory, Paris&Co</span></span>
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<p>Pour la plupart des plates-formes, les communautés entretiennent des relations de collaboration fondées sur la réciprocité. Cela n’exclut pas pour autant les relations marchandes. Les membres y intègrent les codes permettant de passer d’un modèle de relation à l’autre. La dynamique est le plus souvent guidée par la nature du projet et les types de contributions. Les relations collaboratives sont fondées sur « le don contre don ». Ces relations sont asynchrones, sans contrepartie directe ou monétaire.</p>
<p>Certaines relations collaboratives prennent parfois la forme de troc : une activité ou un conseil en échange d’un autre service, la mutualisation de certains outils, un « dépannage » technique. La contrepartie tire parti d’une autre compétence, parfois sur un plan totalement différent. Le plus souvent, la démarche fait partie des valeurs promues par le lieu et de la norme de comportement. Dans certains cas, elle permet d’obtenir des réductions sur le tarif de l’hébergement dans l’espace de coworking.</p>
<p>Dans les plates-formes, la communauté s’ouvre aussi sur les relations marchandes car les connexions entre membres font émerger des opportunités d’affaires. Cela peut survenir entre les membres de la communauté ou avec une entreprise de l’écosystème, ou autour d’un événement tenu dans le lieu.</p>
<p>Dans certains cas, les relations business occupent une place centrale parce que les artisans d’<a href="http://www.icimontreuil.com/">ICI Montreuil</a> ou les indépendants du web de <a href="http://digital-village.fr/">Digital Village</a> viennent réaliser leurs activités au sein de ces plates-formes. La solidarité entre ces acteurs existe mais la dynamique repose aussi sur le fait que les demandes des clients requièrent de plus en plus une combinaison de leurs expertises.</p>
<p>Comment font les individus pour gérer le passage d’un modèle de relations à l’autre ? La nature du projet et le temps consacré dictent leurs choix. Dans l’échange, chacun se rend compte assez vite si le projet en question apporte ou pas quelque chose. Lorsque l’échange se manifeste par un conseil ou une aide ponctuelle rapide, les relations de dons contre dons ou de troc s’imposent. Dans les autres cas, le troc ou les relations marchandes s’imposent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/83121/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Mérindol a reçu des financements de l'Innovation Factory et le HUB BBIfrance </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>David W. VERSAILLES a reçu des financements de Innovation Factory et Bpifrace le Hub pour cette recherche. </span></em></p>Analyse des plates-formes d’innovation au travers de leurs missions, la diversité de leurs communautés,et leurs modes de travail.Valérie Mérindol, Enseignant chercheur en management de l'innovation et de la créativité, PSB Paris School of BusinessDavid W. Versailles, Chair professor, strategic management and management of innovation, PSB Paris School of BusinessLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/767652017-06-26T19:34:23Z2017-06-26T19:34:23ZUn fab lab, ça sert à quoi ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/167041/original/file-20170427-15081-9b93ym.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Ultimaker History Fablab Protospace</span> <span class="attribution"><span class="source">Guy Sie, Utrecht, Netherlands / Wikimedia</span></span></figcaption></figure><p>C’est un chercheur du célèbre <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Massachusetts_Institute_of_Technology">Institut de technologie du Massachusetts</a>, Neil Gershenfeld, qui dans les années 2000 a inventé le concept de fab lab – contraction de <em>fabrication laboratory</em>, qui signifie « laboratoire de fabrication ». Depuis, des fab lab se sont installés aux quatre coins du monde, dans des contextes aussi différents que ceux de la Norvège, les Pays-Bas, la France, l’Afghanistan, l’Inde, ou encore l’Afrique du Sud…</p>
<h2>Illustrer l’air du temps</h2>
<p>Les fab lab représentent un mouvement d’un ensemble plus large appelé « open labs ». Ces lieux ouverts rassemblent diverses communautés qui se retrouvent autour de valeurs partagées, d’échanges de connaissances, astuces ou pratiques. Les processus de (co-)création qui y sont mis en œuvre sont largement soutenus par les technologies les plus récentes. Quant à leur succès et à leur diversité, on peut les expliquer par la convergence de plusieurs phénomènes.</p>
<p>Tout d’abord, une véritable démocratisation des savoirs et des technologies numériques a rendu accessible au plus grand nombre des possibilités nouvelles. Ensuite, la société subit de profondes mutations (prise de conscience écologique, transition numérique, questionnement démocratique, évolution du rapport au travail, etc.), tout en opérant une sorte de révolution autour du « do it yourself ». Et ce principe du « Fais-le toi-même », intimement lié à notre système de production, a été appliqué dans les sociétés agraire (le local), industrielle (le global) et l’est maintenant dans la société post-industrielle, ou société de l’information (le global et le local).</p>
<p>In fine, les fab lab constituent donc des espaces de réalisation de nos aspirations nouvelles. Une sorte « d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9t%C3%A9rotopie">hétérotopie</a> », un lieu de réalisation de nos utopies, où l’imaginaire se libère et les inspirations prennent forment.</p>
<h2>Faire à sa mesure et innover</h2>
<p>Tourné vers la fabrication numérique, le fab lab entend rassembler dans un même espace toutes les ressources pour réaliser un projet de A à Z, de l’intention jusqu’à sa matérialisation. La fabrication numérique permet notamment de produire des pièces complexes (pièces techniques, mécanismes, etc.) sans passer par le circuit industriel. Dans un fab lab, on peut réparer, détourner, hacker, fabriquer, monter ou démonter à peu près n’importe quoi.</p>
<p>En pratique, le fab lab donne au grand public un accès à des moyens de fabrication historiquement réservés à l’industrie. Il s’adresse aux entrepreneurs qui veulent passer plus vite du concept au prototype ; aux designers et aux artistes qui trouvent de nouveaux moyens d’expression ; aux étudiants désireux d’expérimenter et d’enrichir leurs connaissances pratiques en électronique, en <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Conception_et_fabrication_assist%C3%A9es_par_ordinateur">conception et fabrication assistées par ordinateur</a>, en design ; aux bricoleurs du XXI<sup>e</sup> siècle…</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Lorraine Fab Living Lab.</span>
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<p>Stimulant l’innovation <em>bottom up</em>, le fab lab participe finalement à la réappropriation des technologies par les citoyens et les utilisateurs. Il contribue à spatialiser le numérique, l’ancrer sur un territoire et élargir les capacités de participation et d’intervention des citoyens sur leur quotidien, leur environnement immédiat et leur espace de vie. Il est l’endroit où s’inventeront, plus sûrement que dans les grandes entreprises et les laboratoires, les objets et les lieux de demain.</p>
<p>Concrètement, pour être appelé fab lab, un atelier de fabrication numérique doit respecter la charte fab lab, mise en place par la <a href="http://fabfoundation.org/">Fab Foundation</a>. Le lieu doit ainsi être ouvert au public et en termes d’équipements, a minima d’une machine de découpe laser, d’une machine de découpe vinyle, d’une CNC (machine à commande numérique), d’une imprimante 3D et d’un scanner 3D (une <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Kinect">Kinect</a> fait l’affaire !).</p>
<h2>Des fab lab sur-mesure</h2>
<p>Chaque fab lab prend une « couleur » propre à son contexte d’implantation, en fonction des besoins et des ressources locales. Il y a des fab lab en extension des campus, d’autres à visée éducative, d’autres orientés vers l’humanitaire, d’autres encore vers le développement artistique et le design… Ces lieux sont passionnants. Car ils se situent précisément au croisement entre la nécessité sociale d’innover « différemment » pour répondre à des problématiques locales, et une culture de la collaboration et de l’innovation ouverte issue du Web 2.0.</p>
<p>Tous combinent, chacun à leur manière, cinq fonctions correspondant à cinq publics : la simple découverte du pouvoir de faire, de fabriquer, qui s’adresse aux enfants ou aux bricoleurs ; l’éducation par l’action, qui s’adresse plutôt aux écoles et universités ; le prototypage rapide, qui s’adresse aux entrepreneurs et créateurs ; la production locale, qui répond notamment aux besoins de pays en développement, mais aussi à ceux d’artistes, designers ou bricoleurs qui ne cherchent pas la grande série ; et l’innovation, l’invention des objets, des espaces, des formes de demain.</p>
<h2>Le fab lab augmenté</h2>
<p>L’expérience est encore plus intéressante lorsque le fab lab est « augmenté », quand il est relié à la recherche, aux entreprises, aux associations, aux citoyens. Ou encore quand il devient mobile Lab. Trop souvent, les plateformes d’innovation, espace de <em>co-working</em> et tiers lieux sont en effet installés en ville. Est-ce à dire que nos territoires ruraux ne sont pas créatifs ? Qu’ils n’ont pas envie de s’inscrire dans cette aventure collective ?</p>
<p>Loin s’en faut ! C’est pourquoi, à l’initiative d’une école d’ingénieurs, l’<a href="http://www.ensgsi.univ-lorraine.fr">ENSGSI (École nationale supérieure du génie des systèmes et de l’innovation)</a>, et d’un laboratoire de recherche, l’<a href="http://laboratoire-erpi.wikispaces.com/home">ERPI (Équipe de recherche sur les projets innovants)</a> de l’Université de Lorraine, le <a href="http://www.lf2l.fr">Nomad’Lab</a> a été créé en 2014 avec le soutien financier du Conseil Régional de Lorraine et la CGPME Lorraine.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">NomadLab.</span>
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<figure class="align-center ">
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<figcaption>
<span class="caption">NomadLab.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il entend pallier ce manque et se rendre au plus près des écoliers, des lycéens, du grand public et des entreprises (en particulier les PME) situés dans des territoires inter-urbains.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Lorraine Fab Living Lab.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Fabrique de la Société ?</h2>
<p>Bref, pour faire simple : un fab lab, c’est un lieu où :</p>
<ul>
<li><p>Les étudiants apprennent à matérialiser les idées qu’ils ont pu co-créer lors de sessions de créativité,</p></li>
<li><p>Les chercheurs cherchent et trouvent ( !) de nouveaux matériaux moins polluants pour réaliser les prototypes,</p></li>
<li><p>Les bidouilleurs viennent s’en donner à cœur joie en bricolant sur les machines pour les faire devenir des « monstres » tridimensionnels digne d’un épisode de <em>Men in Black</em> !</p></li>
<li><p>Les entreprises y trouvent une solution à leur gestion de stocks et au renouvellement sur mesure de pièces de modèles anciens qui ne sont parfois plus commercialisés…</p></li>
<li><p>Les citoyens peuvent se saisir de ressources nouvelles pour faire eux-mêmes la société de demain en passant du « Fais-le toi-même » au « Faisons le ensemble »</p></li>
</ul>
<h2>Donc un fab lab, c’est quoi ?</h2>
<p>Pour nous, aucune définition unique ne s’impose vraiment… Nous constatons que c’est un lieu où des publics éclectiques peuvent prototyper plus rapidement qu’avant et à moindre coût leurs idées, les tester et les enrichir en bénéficiant d’un collectif bienveillant. Nous espérons que ce type de lieux devienne ce que les communautés y participant veulent bien en faire… Et nous avons une certitude : c’est un lieu où l’on ne s’ennuie pas et où le savoir n’est pas corrélé à l’âge ou au diplôme… C’est peut-être cela, en fait, la 4<sup>e</sup> révolution (industrielle).</p>
<hr>
<p><em>Pour aller plus loin, visitez les sites du <a href="http://www.LF2L.fr">Lorraine Fab Living lab</a> et <a href="http://laboratoire-erpi.wikispaces.com/home">L’ERPI</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76765/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laure Morel a reçu des financements du Ministère de la Recherche, CPER 2018-2022, Région Lorraine.
Laure Morel est membre fondateur de l'Association France Living Lab.
Le Laboratoire ERPI est membre de l'association internationale des Fab Lab, la Fab Foundation et du Réseau français des Fab Lab,le RFFL.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pascal Lhoste a reçu des financements de Conseil Régional de Lorraine, Université de Lorraine, CGPME, AGEFA PME. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Laurent Dupont ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Étudiants, chercheurs, bidouilleurs, citoyens, entrepreneurs… dans un fab lab chacun peut apprendre, innover, tester et enrichir rapidement des idées en bénéficiant d’un collectif bienveillant.Laurent Dupont, Ingénieur de Recherche , Université de LorraineLaure Morel, Professeur en Génie Industriel, Université de LorrainePascal Lhoste, Directeur ENSGSI - Université de Lorraine; cofondateur du LF2L, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/782762017-05-28T20:34:40Z2017-05-28T20:34:40ZPodcast : le travail dans tous ses états<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/170762/original/file-20170524-25592-wpfun1.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C488%2C3254%2C1920&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Enregistrement de l'émission. De gauche à droite : Florence Allard-Poesi (UPEC), Anthony Hussenot (Dauphine) et Thierry Weil (Mines ParisTech).</span> <span class="attribution"><span class="source">Moustic the Audio Agency</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p><strong>Nouveau travail et robots (avec Thierry Weil) : que va changer l’arrivée des robots et de l’intelligence artificielle dans le travail ?</strong></p>
<p>Le travail est devenu aujourd’hui une denrée rare, un concept plus qu’une évidence et combien il suscite convoitises économiques et intérêts politiques, manipulations comptables et inquiétudes sociétales. Consubstantiel à la vie humaine depuis des siècles, son centre de gravité philosophique se déplace radicalement aujourd’hui grâce ou à cause de la robotisation, faisant naître maintes interrogations technologiques mais aussi épistémologiques. Est-ce la fin du travail ?</p>
<p><strong>Nouveau travail, tiers-lieux, métamorphose du salariat (avec Anthony Hussenot)</strong></p>
<p>Les usines et entrepôts sans humains sont déjà une réalité avec une révolution numérique qui détruit plus d’emplois qu’elle n’en crée. Et même s’il va falloir du temps pour remplacer complètement les humains dans les processus, une étude américaine récente montre que 47 % des emplois aux USA sont directement menacés par l’automatisation. Alors à l’instar de Bernard Stiegler et son livre <em>L’emploi est mort, vive le travail !</em> il convient d’insister sur les opportunités qu’offre pareille mutation, la transition entre le modèle actuel et ce qu’on pourrait appeler l’iconomie (c’est-à-dire l’utilisation des bénéfices de la technologie de l’information dans l’organisation de l’économie), cette transition promet d’être brutale et sans nuances. Réinventer le travail, ça veut dire quoi ? Nouveaux lieux ? Nouvelles pratiques ? Nouveaux modèles ? Notre futur ne sera fait que de formation permanente pour répondre constamment à de nouveaux enjeux ?</p>
<p><strong>Temps de travail, souffrance au travail (avec Florence Allard-Poesi). Cette réinvention du travail est-elle un leurre ? La libéralisation du travail va-t-elle entraîner des inégalités et des souffrances nouvelles ?</strong></p>
<p>Stress, pression, angoisse, burn-out… un concept nouveau est apparu, reconnu et théorisé : la souffrance au travail. Travail émancipé ou travail aliéné, objet d’une critique radicale chez Marx dans laquelle le salariat constitue intrinsèquement la source de la domination de la bourgeoisie sur le prolétariat, le travail n’a pourtant cessé de muter pendant le vingtième siècle ; accompagnant l’urbanisation et l’avènement de sociétés fondées sur la prédominance du tertiaire. Aujourd’hui, face à la digitalisation et à la mondialisation, nouveaux enjeux, nouvelles souffrances.</p>
<p><em><strong>Animation</strong> : Yves Bongarçon (Moustic the Audio Agency) et Didier Pourquery<br>
<strong>Réalisation</strong> : Joseph Carabalona (Moustic the Audio Agency)</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/78276/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thierry Weil est délégué de La Fabrique de l'industrie, laboratoire d'idées destiné à susciter et à enrichir le débat sur l'industrie. La Fabrique consacre plusieurs analyses à l'industrie du futur (<a href="http://www.la-fabrique.fr">www.la-fabrique.fr</a>).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Anthony Hussenot est membre du cercle de l'innovation en management de la fondation Paris-Dauphine.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Florence Allard-Poesi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Trois auteurs de The Conversation France échangent sur le travail face à l’intelligence artificielle, les métamorphose du travail, mais aussi la souffrance au travail.Thierry Weil, Membre de l'Académie des technologies, Professeur au centre d’économie industrielle, Mines Paris - PSLAnthony Hussenot, Professor in Organization Studies, Université Côte d’AzurFlorence Allard-Poesi, Professeur des universités en Sciences de Gestion, Directrice d'Unité de Recherche, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/768812017-05-21T19:49:37Z2017-05-21T19:49:37ZFab lab : do it yourself, hackers et autres open source<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/167774/original/file-20170503-20192-i0e9k0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le fab lab est a votre service.</span> </figcaption></figure><p>Si vous parlez de fab lab à un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Nerd">nerd</a> ou à un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Geek">geek</a>, vous verrez sûrement la lueur de l’innovation dans ses yeux. De prime abord, il s’agit d’un espace ouvert où se côtoient diverses machines, certaines incontournables tels que les scanners et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Impression_3D">imprimantes 3D</a> mais aussi des machines à découpe laser, ou encore des ateliers d’électroniques. Ces espaces sont également déroutants lorsqu’on y aperçoit des ingénieurs et des designers manipuler des objets traditionnellement réservés à l’éveil des enfants (pâte à modeler,legos…). Mais attention, il serait réducteur d’y voir une évolution 2.0 des garages californiens des années 1970. Si l’esprit que l’on y trouve ne peut se dérober à cette lignée, il s’agit avant tout de nouveaux espaces pour l’industrie de demain.</p>
<p>Depuis peu, les fab lab poussent dans nos villes comme des champignons. Ils s’inscrivent dans une mutation plus large de nos sociétés, où la collaboration et la mise en commun fondent une nouvelle forme d’industrie. Si les potagers communautaires de nos villes permettent à nouveau de tisser des liens entre les habitants d’un même quartier, les fab lab réinventent un riche et dense tissu industriel, où les start-up remplacent la traditionnelle recherche et développement. Les usagers forment une population extrêmement diversifiée, depuis l’étudiant en ingénierie ou en design en passant par le créateur de start-up jusqu’à l’industriel aguerri. Mais en ce lieu, tous partagent un même espace, les mêmes outils, les mêmes matières premières… et leur savoir-faire.</p>
<h2>De l’innovation naît l’éducation</h2>
<p>Les fab lab sont nés à la fin des années 1990 au Media Lab de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Massachusetts_Institute_of_Technology">Institut de technologie du Massachusetts</a> (MIT), sous la tutelle du Professeur Neil Gershenfeld, du Center for Bits and Atoms. Il est alors question de révolutionner notre modèle industriel. Et la mouvance des fab lab s’appuie sur un corpus de doctrines où se marient éducation, économie circulaire et innovation. L’idée ? Permettre à chacun d’expérimenter pour apprendre, et de créer pour recycler. Différents courants technophilosophiques se sont cristallisés en ces lieux, mais la liste ne saurait en être exhaustive. Les trois suivantes ont cependant transcendé leur espace-temps.</p>
<ul>
<li><p>Le <em>do it yourself</em> pousse chacun à concevoir son objet lui-même. Outre le fait d’inventer un objet unique, son créateur développe alors ses compétences pratiques et théoriques. Lors du processus de création, il est en effet amené à élaborer sa propre formation, en faisant lui-même sa veille technologique. Les <em>workshops</em> largement déployés dans les entreprises en sont une résultante, où les participants apportent de nouvelles idées en les développant.</p></li>
<li><p>Le courant <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hacker_(programmation)">hacker</a> incite à démonter et à détourner l’usage d’anciens biens de consommation afin de leur donner une nouvelle vie. Ils inversent l’ordre établi du productivisme, en faisant du produit la source de la matière à retransformer. Un événement majeur et aujourd’hui incontournable de cette mouvance : le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hackathon">hackathon</a>. Il s’agit de répondre à une problématique donnée dans un temps imparti et à partir de matières premières à recycler. Par exemple : « Comment fabriquer une porte des étoiles à partir d’un grille-pain usagé ? »</p></li>
<li><p>La communauté <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Open_source"><em>open source</em></a> joue un rôle capital dans la dynamique des fab lab. Il s’agit d’une philosophie et d’un modèle économique où le savoir est gratuit et échangé librement, afin d’améliorer les produits. La plus-value économique ne réside donc plus dans le produit, mais dans le service associé. Elle apporte d’une part la matière première immatérielle tels que les logiciels, langages informatiques, et d’autre part des tutoriels pour partager le savoir-faire.</p></li>
</ul>
<p>La démocratisation de ces espaces est le combustible de cette révolution en marche. Les communautés d’usagers de ces lieux en font des sphères d’apprentissage, de partage et d’innovation, où le challenge consiste en un jeu face à soi-même, face à sa capacité de créer, d’innover. Chaque usager devient à la fois ingénieur, designer et inventeur explorant l’innovation en y mêlant plusieurs disciplines… Il fait des fab lab le lieu privilégié de la pluridisciplinarité, non loin de la philosophie d’antidisciplinarité du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/MIT_Media_Lab">Media Lab</a>…</p>
<h2>De la diversité naît une nouvelle économie</h2>
<p>Ce nouvel espace de l’innovation par le partage et l’autoréalisation ouvre une nouvelle ère pour l’économie de demain. Il met à mal notre industrie actuelle, fondée en un bloc monolithique où chaque département est intégré dans une structure pyramidale pilotée par le management, et où les cycles linéaires de développement d’un produit se trouvent tous dans une économie de marché. </p>
<p>La mouvance autour des fab lab change drastiquement ce paradigme, par une structure industrielle plane, circulaire et décentralisée. En d’autres temps, la réalisation d’un produit nécessitait son incubation au sein d’une structure fournissant les services supports utiles à la réalisation. Désormais, Internet ouvre la porte au <em>crowd concept</em>, <em>funding</em>, <em>sourcing</em>, et autres dérivés de l’émergence participative.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jerrys sous Emmabuntüs lors de l’anniversaire des deux ans du fab lab de Gennevilliers (France).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Vallade/Wikimedia</span></span>
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<p>Aujourd’hui une idée naît, se transforme en prototype au sein d’un fab lab, prototype qui permettra de promouvoir l’idée initiale à travers une brève vidéo explicative, vidéo qui servira de support à la communication, communication qui incitera des donateurs potentiels à financer le projet et donc à forger un premier marché de consommateurs. La production en série est alors sous-traitée et pilotée à distance, tandis que les relais de livraison sont désormais sur les plateformes de livraison à domicile. Mais il ne faut pas oublier que cet objet est né dans un fab lab. Et pour s’assurer l’attrait de la communauté, cet objet devra pouvoir être <em>hacké</em> à son tour afin de construire un nouveau produit.</p>
<p>Ainsi l’objet se verra augmenté par des interfaces de communication open-source et des tutoriels. Dans ce modèle, toutes les phases sont gérées par des entités commerciales et industrielles disjointes. Le financement et la promotion sont assurés par les consommateurs eux-mêmes et la communauté des fab lab, tandis que la communauté Open Source se voit nourrie par un nouveau produit muni de tutoriels. L’explosion des imprimantes 3D en est un parfait exemple. Un grand nombre de ces projets tels que <a href="https://formlabs.com/blog/ship-a-kickstarter-product/">Formlabs</a> ont été financés par une plateforme de <em>crowdfunding</em> et sont désormais des outils incontournables dans les fab lab eux-mêmes.</p>
<h2>De la consommation naît le recyclage</h2>
<p>Cette mouvance s’inscrit également dans une économie durable où les objets, depuis la table en bois jusqu’aux dispositifs électroniques les plus sophistiqués, entrent dans des cycles de vie circulaires. Les objets sont soit réparés, recyclés ou hackés. C’est désormais possible grâce aux récents développements des approches modulaires tant en électronique qu’en informatique. Les célèbres kits <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Arduino">Arduino</a> permettent d’interchanger les composants électroniques et leurs codes logiciels associés, entre différents fabricants ou même entre différents objets. Si à l’origine cette technologie a été conçue pour prototyper rapidement, elle a pris depuis une dimension industrielle où les composants modulaires s’intègrent directement dans les produits finis tels que les mini-PC de type <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Raspberry_Pi">Raspberry Pi</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=406&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=406&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=406&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Sensor module kit.</span>
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<p>L’emballage n’est pas en reste. Si certaines matières sont naturellement retransformables tels que le bois ou les métaux, le plastique lui aussi a désormais un cycle de vie circulaire. De nombreuses entreprises se spécialisent dans le recyclage plastique pour produire la matière première des imprimantes 3D. Il ne faudra plus attendre longtemps désormais pour voir apparaître des compacteurs où nos objets plastiques usagés seront broyés pour produire des bobines de plastique prêtes à imprimer. </p>
<p>La prolifération des fab lab dans chaque pays, villes et quartiers laisse entre-apercevoir un monde où les objets seront téléchargés et imprimés dans le fab lab du coin par nos soins, à partir d’anciens objets dont nous n’avons plus l’utilité. Ces mêmes plans d’impression et de conception seront eux-mêmes améliorés par chaque usager, qui pourra alors s’empresser de le partager avec la communauté et gagner en notoriété.</p>
<p>Finalement les questions d’éducation, d’économie, d’industrie et de déchets n’ont jamais été aussi proches, en un même lieu, avec les mêmes outils et la même matière première. Les fab lab ne demandent qu’à être adoptés par la nouvelle génération.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76881/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Clément Duhart ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Il serait réducteur de voir dans les fab lab une simple évolution 2.0 du garage californien des années 70. Car il s’agit avant tout de nouveaux espaces pour l’industrie de demain.Clément Duhart, Enseignant Systèmes Embarqués, Docteur en Informatique, Pôle Léonard de VinciLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/767232017-05-15T19:08:46Z2017-05-15T19:08:46ZLes tiers lieux 2.0, une nouvelle façon d’appréhender le monde ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/169207/original/file-20170514-3678-3tbzub.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C107%2C2038%2C1367&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Makespace.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://visualhunt.com/f/photo/9425952261/609f085dcf/">LaurieJ/Visual Hunt </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Pourquoi parle-t-on de tiers lieux ? Dans le premier chapitre de son ouvrage <a href="https://books.google.fr/books/about/The_Great_Good_Place.html"><em>The Great Good Place</em></a>, paru en 1989 le sociologue américain Ray Oldenburg souligne ce qu’il nomme le « problème de lieux » aux États-Unis (« problem of place in America ») ; la vie des Américains est fragmentée et partagée entre le lieu de travail (<em>second place</em>) et celui de résidence (<em>first place</em>).</p>
<p>Il n’existe pas de lieux intermédiaires, des lieux de socialisation informelle permettant de vivre en communauté. Ceci a, selon Oldenburg, des répercussions sur la démocratie mais aussi la santé publique et la productivité des travailleurs américains.</p>
<h2>Les tiers lieux : de quoi parle-t-on ?</h2>
<p>Il manque donc un lieu informel d’exercice de vie publique à savoir un lieu se situant entre le lieu de travail et celui de résidence, un troisième lieu, un tiers lieu (<em>third place</em>). Pour Oldenburg, le tiers lieu prend, par exemple, la forme du café en France. C’est le lieu de l’exercice d’une vie publique à l’instar de l’agora athénienne.</p>
<p>Selon le même auteur, le tiers lieu a plusieurs caractéristiques remarquables : c’est un terrain neutre (ni chez soi, ni chez quelqu’un d’autre) qui égalise les statuts sociaux et où l’activité principale est la conversation.</p>
<p>Le tiers lieu se doit d’être facile d’accès. Le tiers lieu n’existe vraiment que par ses habitués. Ainsi, le tiers lieu attire plus par ceux qui le fréquentent que par ses qualités intrinsèques d’autant que ce lieu garde une apparence plutôt simple ; ni le lieu, ni les habitués ne cherchent à se distinguer.</p>
<p>Quoi qu’il en soi l’ambiance générale est plutôt joyeuse et conviviale notamment par opposition à l’ambiance au travail. En définitive le tiers lieu est une maison loin de la maison (<em>a home away from home</em>) où l’on peut être soi-même.</p>
<p>Oldenburg dresse une liste de tiers lieux dès le titre de son ouvrage : <em>The Great Good Place : Cafes, Coffee Shops, Bookstores, Bars, Hair Salons and Other Hangouts at the Heart of a Community</em>.</p>
<p>Tous ces lieux contribueraient à revivifier les communautés, à dynamiser la vie politique, à contrebalancer le délitement des liens sociaux. Ils seraient un lieu d’expression de la démocratie, un espace public où les idées peuvent circuler librement.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Makers.</span>
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<h2>De nouveaux tiers lieux à l’ère du numérique ?</h2>
<p>L’espace public a trouvé une nouvelle dimension à l’ère numérique notamment à travers les réseaux sociaux. Pour autant l’importance de la dimension physique des tiers lieux n’a pas disparu. Dans la lignée du mouvement des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_maker"><em>makers</em></a> des <em>fabrication laboratories</em> (fab labs) ont vu le jour inspirés par le cours du professeur du Massachusetts Institute of Technology (MIT) Neil Gershenfeld : <em>How to Make (Almost) Anything</em>.</p>
<p>En France, le <a href="http://wiki.fablab.is/wiki/Main_Page">wiki des fab labs</a>, en répertorie 99, un record mondial. Un fab lab se doit de respecter quatre critères définis par la <a href="http://fabfoundation.org/about-us/">FabFoundation</a> : accessibilité, adhésion à la <a href="http://fab.cba.mit.edu/about/charter/">charte des fab labs</a> (du MIT), mise à disposition de machines (découpeuse laser, imprimante 3D, etc.) et contribution au réseau international des fab labs.</p>
<p><em>Makerspace</em>, <em>hackerspace</em>, <em>hacklab</em> sont des appellations qui renvoient à des réalités voisines (mise à disposition de matériel, fonctionnement sur un principe de communauté de pratiques, éthique valorisant la liberté d’accès, la collaboration, l’autonomie, la solidarité). Les <a href="http://hackerspaces.org">hackerspaces</a> sont plutôt orientés vers le partage de ressources et de savoirs liés à l’informatique (software et/ou hardware).</p>
<p>Le <a href="https://wiki.hackerspaces.org">wiki des hackerspaces</a> recense plus de 1 271 hackerspaces actifs dans le monde. Quant aux <a href="http://blog.coworking.com/about/">espaces de coworking</a> qui rompent l’isolement du travailleur indépendant naissent à San Francisco en 2005. Le site <a href="http://coworking.com">coworking.com</a> souligne les valeurs du mouvement coworking : <em>community, openness, collaboration, sustainability, et accessibility</em>. Toujours selon ce site plus de 10 000 espaces de coworking sont répertoriés dans le monde.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p>Ces différents lieux partagent les spécificités qui caractérisent les tiers lieux selon l’approche d’Oldenburg (accessibilité, convivialité, égalitarisme, discussion). Ces spécificités ne peuvent être rencontrés, comme il se doit, ni dans le lieu de résidence, ni dans le lieu de travail.</p>
<p>Pourtant les personnes travaillent dans ces nouveaux tiers lieux. Mais l’on ne fait pas que travailler, on se forme, à la programmation dans les hackerspaces, à l’utilisation de nouvelles machines (découpeuse laser, imprimante 3D) dans les fab labs et à beaucoup d’autres choses car la démarche d’apprentissage est au cœur de ces nouveaux tiers lieux comme elle était au cœur du premier fab lab du MIT.</p>
<p>L’apprentissage entre égaux suppose la collaboration. Cette dernière est facilitée par la structuration de communautés (d’usagers, de coworkers, d’adhérents, etc.). Se côtoyer ne suffit pas, encore faut-il adhérer à un minimum de valeurs communes que certains qualifient de « californiennes » (méritocratie, liberté d’entreprendre, liberté d’accès) et d’autres comme relevant d’une éthique de hacker/maker (décrite par Michel Lallement, dans l’<em>Age du faire</em>, 2015).</p>
<p>On forme ainsi des communautés réunies par une volonté plus ou moins exprimée d’expérimenter, de tester, de bricoler (selon la formule de Claude Lévi-Strauss tirée de La Pensée sauvage) de nouvelles façons de faire. Dans le développement de logiciel on dirait « forker » c’est-à-dire de prendre un chemin de traverse (de ce nouvel embranchement naît une fourche – <em>fork</em> en anglais). Dans le langage usuel, on parlerait plutôt d’innover.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=577&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=577&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=577&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=725&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=725&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=725&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<h2>Des tiers-lieux 2.0 ?</h2>
<p>Internet a profondément changé les tiers-lieux. Le Web 1.0 était une collection de pages interconnectées sur Internet qu’il était possible uniquement de lire. Le <a href="http://darcyd.com/fragmented_future.pdf">Web 2.0</a> a tout changé. Les évolutions techniques ont permis aux utilisateurs-lecteurs de devenir producteurs de contenu (d’être proactif), de former des communautés et de collaborer. La proactivité (l’autonomie), la construction de communautés et la collaboration semblent être aujourd’hui la norme dans ces nouveaux tiers lieux, que l’on peut qualifier de « 2.0 ». Côtoyer ces tiers lieux 2.0 ouvre des perspectives.</p>
<p>Ni tout à fait chez soi, ni tout à fait un lieu de travail (traditionnel). Un entre-deux qui reflète la manière dont la conception du travail change chez des travailleurs dont la matière première à utiliser/transformer est avant tout le savoir et qui sont, qui plus est, souvent natifs du monde numérique (<em>digital native</em>). Ces travailleurs ne peuvent plus se satisfaire des formes organisationnelles héritées du taylorisme.</p>
<p>Quoi de mieux alors que des organisations qui fonctionnent comme des espaces de rencontre, de mise en réseau et dont les valeurs croisent celles des tiers lieux canoniques (espace d’expression démocratique) avec celles de l’éthique hacker (méritocratie, liberté, confiance, coopération, réciprocité, collaboration, ouverture, autonomie, responsabilité). Nous retrouvons ici une approche de l’organisation qui se centre sur les individus et en particulier leur liberté, leur responsabilité, leur bien être au travail et ce, dans une ambiance joyeuse où l’on peut être soi-même.</p>
<p>Tout n’est sans doute pas parfait dans les tiers-lieux 2.0. Ils ne révolutionnent pas de fond en comble notre manière de penser. Ils sont juste les témoins actifs de changements de société et nous permettent d’ancrer physiquement nos questionnements en matière <a href="https://theconversation.com/du-collaboratif-a-luniversite-les-academiques-doivent-ils-devenir-des-makers-71494">d’apprentissage et d’éducation</a>, <a href="https://theconversation.com/les-tiers-lieux-quelles-opportunites-pour-comprendre-et-transformer-les-pratiques-de-travail-75650">d’avenir du travail</a>, de <a href="https://theconversation.com/les-collectifs-artistes-comme-heterotopies-organisationnelles-un-modele-a-suivre-66373">management des organisations</a> ou même <a href="https://theconversation.com/la-politique-ne-se-fait-pas-a-la-corbeille-doit-elle-se-faire-dans-les-tiers-lieux-76648">d’exercice de la politique</a>.</p>
<p>Ils font, en tout cas, l’objet d’une attention croissante des chercheurs qui les voient pour ce qu’ils sont, un <a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com">très convivial et très puissant laboratoire d’idées</a>.</p>
<p>Pour en savoir plus sur ces travaux et réflexions, nous vous invitons à lire la note de synthèse publiée par le groupe RGCS sur ce sujet, <a href="https://collaborativespacesstudy.files.wordpress.com/2016/10/synthese_des_recherches_rgcs_2015_2016_vff.pdf">« Nouvelles pratiques de travail : la fin du clivage salariat-entrepreneuriat ? »</a> ainsi que l’article <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01512929">« Que peut-on apprendre des tiers lieux 2.0 ? »</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76723/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>David Vallat ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En quoi les tiers lieux 2.0 questionnent fondamentalement notre façon de concevoir le monde.David Vallat, Maître de conférences en économie, Université Claude Bernard Lyon 1Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/766482017-04-26T21:57:51Z2017-04-26T21:57:51ZLa politique ne se fait pas à la corbeille. Doit-elle se faire dans les tiers-lieux ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/166658/original/file-20170425-24654-181nd74.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Arnaud Montebourg visitant un Fab Lab toulousain durant sa campagne le 7 octobre 2016 (partagé sur son compte Facebook).</span> </figcaption></figure><p>Le 28 octobre 1966, le président de Gaulle organise une conférence de presse à l’Élysée. Posé sur une estrade, face à un public discipliné, il fait un commentaire économique qui entrera dans l’Histoire : « Vous savez, la politique de la France ne se fait <a href="http://www.ina.fr/video/I00013080">pas à la corbeille</a> ». L’auteur du <a href="http://www.charles-de-gaulle.org/pages/l-homme/accueil/oeuvres/le-fil-de-l-epee.php"><em>Fil de l’épée</em></a> souligne alors la distance qui doit dominer l’exercice du pouvoir, en particulier par rapport aux marchés financiers.</p>
<p>Passés les résultats du premier tour de cette élection présidentielle 2017, on peut s’interroger sur l’espace-temps du politique aujourd’hui. Où se « fait » la politique ? En votant soit pour les extrêmes, soit pour une solution alternative, une partie des Français a peut-être envoyé un signal post-gaullien. Nous aimerions revenir sur ces derniers mois de campagne, et le rôle particulier qu’ont pu y jouer les espaces collaboratifs et les tiers-lieux d’entrepreneuriat et d’innovation (espaces de coworking, makerspaces, fab labs, hackerspaces…), leurs pratiques, leurs symboles et leurs temporalités.</p>
<h2>Les tiers-lieux, une vitrine pour l’action politique ?</h2>
<p>Le geste était très symbolique. Le 6 octobre 2016, l’un des premiers temps forts de la campagne d’Arnaud Montebourg a été la visite <a href="http://www.artilect.fr/">d’Artilect à Toulouse</a>. Le candidat a conscience qu’il est au cœur d’une des pratiques de l’économie du partage. Il déclare ainsi sur <a href="https://www.Facebook.com/arnaudmontebourg.fr/posts/10154594539933792?comment_tracking=%7B%22tn%22%3A%22O%22%7D">son compte Facebook</a> :</p>
<blockquote>
<p>« J’étais au Fab Lab de Toulouse, le premier en France, tiers-lieu en « colocation » avec une structure d’Économie Sociale Solidaire. Innovation, bio, aide à la création d’entreprises, partage des outils de production : nous devons apprendre à travailler ensemble et à nous organiser pour redresser notre économie. #Toulouse. »</p>
</blockquote>
<p>Le vendredi 3 mars 2017, c’est Benoît Hamon qui visite <a href="https://la-ruche.net/">La Ruche</a>, espace de coworking parisien. Il y présente aux entrepreneurs et aux innovateurs sociaux du lieu ses propositions pour encourager l’entrepreneuriat. La Ruche a pour habitude de recevoir les candidats aux élections municipales depuis son ouverture, il y a presque 10 ans, mais c’était la première fois qu’un candidat à des élections nationales se rendait sur place.</p>
<p>De nombreux candidats ont par ailleurs participé au Salon des Entrepreneurs à Paris les 1<sup>er</sup> et 2 février 2017. Emmanuel Macron y a par exemple visité le stand de l’accélérateur <a href="https://paris.numa.co/">Numa</a>, tandis que François Fillon se prêtait au <a href="https://paris.numa.co/blog/le-crash-test-politique/">Crash Test Politique</a> sur l’avenir des GAFA** **et des plateformes collaboratives organisé par des anciens du Numa.</p>
<p>Les espaces collaboratifs et les tiers-lieux d’entrepreneuriat et d’innovation sont-ils les nouveaux marchés du dimanche pour les femmes et hommes politiques ? Est-ce là que la distance entre le peuple et les élus peut enfin être réduite ? Que le pouls social et économique d’un électorat peut être pris ? Où plutôt qu’une image de proximité (un contact avec le « vrai » rythme de la ville) peut être affichée devant les caméras des journalistes et les smartphones des entrepreneurs ? Dans l’espace-temps du tiers-lieux, ses acteurs, ses projets, ses événements, le politique semble davantage en mouvement, presque « en action ». Loin de l’estrade élyséenne… Reste alors à ne pas oublier que les espaces collaboratifs et les tiers-lieux n’existent pas qu’à Paris ou dans les grandes villes.</p>
<h2>Les tiers-lieux, un incubateur de l’action politique ?</h2>
<p>Cette campagne présidentielle a également été l’occasion de se rendre compte que certains politiques placent des espoirs plus tangibles dans les tiers-lieux. Depuis le mois de février, Benoît <a href="http://immobilier.lefigaro.fr/article/benoit-hamon-choisit-le-coworking-pour-son-qg-de-campagne_43108cdc-f29a-11e6-9846-871839e5cbf9/">Hamon avait ainsi installé son quartier général de campagne dans un espace de coworking du Xᵉ arrondissement de Paris</a>. Cela a-t-il suscité des débats et des connexions inédites pour son équipe de campagne ? En tous cas, cela ne semble pas lui avoir porté chance.</p>
<p>Au-delà du cas de la campagne présidentielle française, les politiciens placent les tiers-lieux au cœur de diverses politiques de territoires en matière d’innovation et d’entrepreneuriat (clusters, living labs, nouveaux campus universitaires distribués…). Incontestablement, ces nouveaux espaces et ces nouvelles pratiques peuvent être la vitrine d’un territoire, de son histoire, de ses savoir-faire.</p>
<p>Lors de son voyage à Berlin il y a deux ans, Rania de Jordanie a ainsi été accueillie au <a href="https://fablab.berlin/">Fab Lab Berlin</a> avec une partie de sa délégation. Sur un lieu unique et dans un temps raisonnable, elle a pu rencontrer des entrepreneurs et des makers, vivre et comprendre des technologies à l’avant-garde de l’économie collaborative et circulaire allemande. De la même façon, le 20 octobre 2016, le maire de Nanterre a pu montrer le makerspace <a href="http://www.electrolab.fr/">Electrolab</a> au préfet et à des industriels. L’expérience de ce type de visite permet d’éprouver le dynamisme de tout un quartier ou d’un territoire plus large.</p>
<p>Début mars, François Hollande, <a href="http://bit.ly/2puWOSo">Président de la République</a> pour encore quelques semaines, allait à la rencontre de la première promotion <a href="https://www.etalab.gouv.fr/decouvrez-la-1e-promotion-des-entrepreneurs-dinteret-general">d’Entrepreneurs d’intérêt général</a> (11 personnes sur 10 mois pour résoudre des défis numériques au sein de grandes administrations françaises) au <a href="https://liberte.paris/">Liberté Living Lab</a>, autre tiers-lieu parisien positionné sur l’innovation citoyenne.</p>
<p>Bien sûr, certains politiques (plutôt des activistes) ont compris que les espaces collaboratifs et les tiers-lieux incarnaient aussi des communautés, voire des mouvements sociaux, avec lesquels <a href="http://bit.ly/2lSkefx">échanger et co-construire des changements</a>. Le cas d’Audrey Tang, <a href="http://bit.ly/2oZZeHe">hackeuse de la démocratie taiwanaise</a>, est assez exemplaire. Il montre par ailleurs que les cultures maker et hacker ne s’opposent pas nécessairement aux modalités traditionnelles de l’action politique. Si certains hackers berlinois sont aujourd’hui des élus, <a href="http://www.rfi.fr/emission/20161013-taiwan-portrait-audrey-tang-hackeuse-ministre-chargee-numerique">Tang est devenue ministre chargée du numérique</a>…</p>
<h2>La mesure et le cœur d’une démocratie plus directe</h2>
<p>Les milieux plus larges que représentent parfois les tiers-lieux, notamment les startups et projets digitaux portés par des étudiants et jeunes entrepreneurs, sont également en train de changer certains codes et certaines pratiques de nos politiques. À nouveau, cette campagne présidentielle de 2017 en constitue une bonne illustration.</p>
<p>Cinq élèves de l’école Télécom Paris Tech ont ainsi mis en place une méthode expérimentale avec <em>Le Point,</em> « Predict the President », visant à fournir des <a href="http://www.lepoint.fr/presidentielle/presidentielle-les-deux-qualifies-pour-le-second-tour-sont-18-04-2017-2120431_3121.php">prédictions sensiblement différentes de celle des sondages classiques</a>. Bon trio, mais dans le mauvais ordre…</p>
<p>De nombreux comparateurs ont également vu le jour pendant cette période pour aider les Français à se décider et à alimenter leurs conversations et <em>timelines</em> Facebook. Un petit groupe de chercheurs aux sensibilités politiques variées a par exemple passé en <a href="http://bit.ly/2q0I5OJ">revue 20 avis d’experts, ONG et journaux non-partisans</a> ayant présenté des comparatifs détaillés des programmes des 5 candidats considérés comme majoritaires sur les grands sujets de société (liberté, égalité, justice, écologie, santé, énergie…).</p>
<p>La cellule data et innovation du <em>Parisien</em> a elle créé un <a href="https://atelier.leparisien.fr/tableau-de-bord-presidentielle-2017/">tableau de bord de l’élection présidentielle 2017</a> permettant de comparer les programmes et déplacements de tous les candidats. Si de nombreuses bandes d’amis se sont amusées à demander à leurs enfants de choisir « qui sera le chef » après avoir étalé devant eux l’ensemble des tracts des candidats, il n’est pas rare que des collègues de travail aient partagé plusieurs déjeuners (dans des tiers-lieux ou dans d’autres contextes) à comparer et débattre sérieusement des programmes des candidats à l’élection présidentielle 2017. Cette campagne animée et partagée aura au moins eu le mérite de raviver la flamme du débat politique dans les foyers, les bureaux et les cercles amicaux, notamment des étudiants et jeunes entrepreneurs.</p>
<p>On constate ainsi une place accrue des nouvelles technologies et du big data dans ces élections. Elle est largement portée par la vague des <em>civic techs</em>, hébergée ou incubée dans des tiers-lieux d’entrepreneuriat et d’innovation. Elle devrait se renforcer dans les années à venir et présager d’importants changements dans les modes de prédiction des résultats, mais aussi de propagande comme le laisse à penser la saison 6 de la série américaine <em>Homeland</em>.</p>
<p>Incontestablement, cette campagne présidentielle 2017 aura été pleine de surprises et de rebondissements. Fixés au cœur de la cité, les tiers-lieux ne sont pas encore de nouvelles agoras. Ils ne sont pas davantage des espaces-temps alternatifs pour l’action politique. C’est bien dans l’espace public de la place de la République que <a href="https://nuitdebout.fr/">Nuit debout</a> a fait son nid.</p>
<p>C’est sur de grandes places publiques que les principaux candidats se sont exprimés et fait filmer (de plus en plus par leur propre soin d’ailleurs). C’est pourtant dans le contexte semi-clos des tiers-lieux et des espaces collaboratifs d’innovation et d’entrepreneuriat que les candidats à l’élection présidentielle ont parfois cherché un peu d’image et de légitimité. N’oublions pas cependant que les tiers-lieux sont surtout des moments de silence. Ce silence dont a parfois besoin l’action politique. Silence au sujet duquel le général de Gaulle disait : « Rien ne rehausse l’autorité mieux que le silence, splendeur des forts et refuge des faibles. »</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76648/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François-Xavier de Vaujany est président du réseau académique et think tank RGCS (<a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/">https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/</a>)</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Julie Fabbri est vice présidente de RGCS (research group on collaborative spaces) et chercheur associé à l'Ecole polytechnique i3-CRG.
</span></em></p>Du rôle des tiers-lieux d’entrepreneuriat et d’innovation (espaces de coworking, makerspaces, fab labs, hackerspaces…) dans l’action politique, en particulier la campagne présidentielle 2017.François-Xavier de Vaujany, Professeur, PSL-Université Paris-Dauphine (DRM), Université Paris Dauphine – PSLJulie Fabbri, Professeur en stratégie et management de l'innovation, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/756502017-04-06T20:38:22Z2017-04-06T20:38:22ZLes tiers-lieux : quelles opportunités pour comprendre et transformer les pratiques de travail ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/163812/original/image-20170404-5725-z6kymz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">« L'Expérience Tiers-Lieux Fork The World. » Biennale Internationale Design, Saint Etienne 9 mars - 9 avril 2017.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/sylviafredriksson/33762022555/in/photolist-Trrc4a-RWJiiw-Tmm36b-Snw6hd-SsSMNh-TpVnBa-ScAqhg-RB4u26-Srftxn-RU4AuA-S5stoK-Sag3Uq-TrrggP-SK8GZL-RWAtZg-SZjQXo-Sag18y-Sp3gbz-TrqZ3g-cKVmVw-T5v7tJ-cKViKu-RB4vNH-Sp3M7M-Sp3zeJ-Sp3VVP-SNWMcm-TpVCeB-SMr4T7-RERwfV-RWAFFT-Sp3H2c-Tb3us1-T7Ximq-SBfxcJ-T7iEXs-RPigBd-SafzkN-TdsD5F-TrsSfz-ScQrjB-S5sAMn-ScBZuX-RPhR6u-RWAuTR-9AaXmA-TnPeX7-S8pVo9-SRtvpy-SkmVrw">Sylvia Fredriksson / Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Il y a bientôt trois ans, j’ai commencé à explorer le « nouveau monde » des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tiers-lieu">tiers-lieux</a> d’entrepreneuriat et d’innovation. Après des années de recherches sur des grands groupes, des universités, des administrations, des grands projets digitaux, je découvrais alors un objet particulièrement enthousiasmant. De nouvelles formes d’incubation et d’intermédiation, des <a href="http://bit.ly/2m2X7kF">espaces de coworking indépendants et corporate</a>, des <a href="http://bit.ly/2n6Isqi"><em>fab labs</em></a>, des <a href="http://bit.ly/2fnm4FJ">maker spaces</a>, des <a href="http://hackerspaces.org/"><em>hacker spaces</em></a> ont été et sont toujours l’occasion d’observations, d’entretiens, d’expériences de photographie et d’ateliers de co-création. Quelques années plus tard, mon enthousiasme est intact, mais les intuitions sur les tendances en cours ont peut-être gagné en précision et en distance critique.</p>
<p>C’est ce parcours scientifique, social et émotionnel, que j’aimerais évoquer ici. Il est indissociable d’une aventure plus collective : celle liée à la construction d’un réseau académique sur les nouveaux acteurs et les nouveaux lieux d’entrepreneuriat et d’innovation (en particulier les coworkers, les makers et les hackers) : le <a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com">Research Group on Collaborative Spaces</a> (RGCS)*.</p>
<h2>Sous l’écume : la guerre des mots, un moindre mal ?</h2>
<p>Avec le recul, je suis d’abord frappé par le décalage entre les discours des acteurs de l’écosystème des tiers-lieux en général et les tendances d’intérêts plus large des Français. Un petit détour par Google Trend (avec des requêtes centrées uniquement sur le cas de la France) l’illustre assez clairement.</p>
<p>Tout d’abord, la faiblesse des requêtes sur le terme « tiers-lieux » m’a beaucoup étonnée.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=384&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=384&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=384&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Évolution des requêtes sur le terme tiers-lieux en France (de 2004 à 2017).</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les termes alternatifs sont encore plus rares voire inexistants (« espaces collaboratifs », « open labs », « open creative labs », « communautés collaboratives »…) sur la période observée. Les résultats sont plus intéressants (et massifs) si l’on s’intéresse aux termes parfois associés (de façon inclusive) au vocabulaire de « tiers-lieu » (cf. figure ci-dessous).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=317&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=317&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=317&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Analyse des requêtes sur les objets-tiers-lieux pour la période 2004-2017 sur la zone France.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>La première tendance qui a attiré mon attention concerne les « fabs labs ». Le nombre de requêtes (en particulier comparé à celui d’autres types de tiers-lieux) est clairement en très forte augmentation depuis 2013. Les notions de « hacker spaces » et de « maker spaces » (quel que soit l’orthographe que j’ai pu tester) sont en croissance très relative sur la période.</p>
<p>La seconde tendance porte sur les espaces de coworking et le coworking. Si l’intérêt pour les espaces de coworking se traduit par une augmentation mineure (avec ou sans tiret) en particulier relativement au vocabulaire de fab lab, la notion de « coworking » (dans le périmètre des requêtes centrées sur la France) est en très force hausse, on pourrait presque dire en situation d’explosion. On comprend ici qu’il faut s’intéresser également aux tiers-lieux comme une « pratique » au sens sociologique.</p>
<p>Cela m’a amené à d’autres séries de requêtes (en français) sur des termes davantage liés aux pratiques qui peuvent correspondre aux tiers-lieux.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Analyse des requêtes sur les pratiques-tiers-lieux de la période 2004-2017 pour la zone France.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Google Trends</span></span>
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<p>L’« innovation » est de loin la tendance la plus forte (et la plus stable) sur la période (loin en volume de la notion d’entrepreneuriat). Le « coworking » se détache également par rapport aux autres notions, avec un point de décrochage plus net en 2015.</p>
<p>Plus généralement, c’est une véritable guerre des mots et des pratiques à laquelle nous assistons ces dernières années. Guerre de légitimation, d’inclusion, d’exclusion, et de différenciation entre des acteurs qui cherchent pour beaucoup à se positionner en positionnant le phénomène (ce processus de co-opétition sera détaillé prochainement dans une note de recherche RGCS ainsi qu’une publication académique). La problématique n’est pas nouvelle. J’ai connu des tendances proches au début des années 2000 avec la « nouvelle économie ». Et au passage, les universitaires (moi compris) ont sans doute une part de responsabilité dans l’inflation sémantique.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Exposition « L’Expérience Tiers-Lieux Fork The World. » Biennale Internationale Design, Saint Étienne 9 mars–9 avril 2017.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/sylviafredriksson/32289014733/in/photolist-RcgD9z-ScC3uK-TrsP1t-ScBCWc-Tf4hc2-SRsXPj-SrhutB-SvsgUq-Svsg5E-SRtahu-S9VyTL-SzabPV-RhtpuY-SzaaPt-Rhtnhb-Sza95M-TrswgB-RZkUd5-SvsoLS-RZkSyd-SkhXGs-Rk7zYr-Rk7yze-Rhtr3Y-RZkLUY-ScuLvJ-RcbQvx-SRrNTA-SRrMd1-R9ycpo-Svshob-Tf3eWn-ScAuKz-SRsWbQ-TrszY6-TnQnaG-SRsKwd-SRsET5-TrsgLp-Tf3d5M-S9W8fQ-Ski5XE-SnRMPn-Ski4zj-SnRLw2-Ski2Uq-Ski29N-Ski1rq-Tf2C5H-TrrjZk">Sylvia Fredriksson/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>Une parenthèse historique sur l’entrepreneuriat : de l’accompagnement à la co-création ?</h2>
<p>Prenons maintenant un peu de recul. Comme toujours, je crois dans la clé que peut donner une posture historique et la perspective du long terme, en particulier lorsqu’il s’agit de comprendre des phénomènes managériaux (très sujets aux modes et grands retours) comme l’entrepreneuriat et son accompagnement.</p>
<p>Depuis une vingtaine d’années, on assiste à un glissement ou à la superposition d’une logique d’expertise verticale à une logique d’entre-aide plus horizontale dans l’<a href="http://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=19&cad=rja&uact=8&ved=0ahUKEwiD8OHukI7TAhXKVhoKHdXKCm04ChAWCEowCA&url=http%3A%2F%2Fwww.erudit.org%2Fen%2Fjournals%2Fmi%2F2013-v17-n3-mi0805%2F1018269ar.pdf&usg=AFQjCNGSBYrOnqTP7Ipd3KdWHTlPa5hMfA">accompagnement entrepreneurial</a>. Les entrepreneurs (que leur projet soient proches ou pas) sont gérés en mode « communauté ». Le don et le contre-don, la dynamique collective seraient alors au cœur du processus entrepreneurial. <strong>L’expert-accompagnant cède en partie la place au « community manager ».</strong></p>
<p>Aux incubateurs, accélérateurs et financeurs traditionnels s’ajoutent ainsi les acteurs du coworking, l’émergence de l’open innovation, les modes de financement de plus en plus participatifs (crowdfunding), des infrastructures digitales qui valorisent la désintermédiation (avec la blockchain), et des environnements de travail de plus en plus ouverts et horizontaux.</p>
<p>Cela est cohérent avec l’idéologie qui domine de plus en plus l’entrepreneuriat d’aujourd’hui. La posture de l’expertise et de la transmission deviennent un non-sens. Toute connaissance de la structure industrielle devient quasi-instantanément obsolète dans un monde qui valorise l’« innovation permanente », la « disruption », la « liquidité ». Le processus entrepreneurial lui-même devient « idéation » collective et « co-création ». Cela n’est pas <a href="http://bit.ly/2owGtMt">sans conséquence politiques sur la cité et la société en générale</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Exposition « L’Expérience Tiers-Lieux Fork The World. » Biennale Internationale Design, Saint Étienne 9 mars – 9 avril 2017.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/sylviafredriksson/32918797094/in/photolist-S9Vrv9-TmhXhE-SDGEox-RcautR-S9VzgE-S8oUDW-SRtspL-T7TzQk-Sp3URz-Sp3jt6-ScAFTX-ScQjJx-SkmR5q-R9sojG-RB2KjK-SvsfKG-SkgHqJ-RPhEKj-Trr9BM-S9VzCG-Tmif1u-SnQC6M-ScQsQ2-TpV8ta-Srg95c-R7jRFo-RcgD9z-ScC3uK-TrsP1t-ScBCWc-Tf4hc2-SRsXPj-SrhutB-SvsgUq-Svsg5E-SRtahu-S9VyTL-SzabPV-RhtpuY-SzaaPt-Rhtnhb-Sza95M-TrswgB-RZkUd5-SvsoLS-RZkSyd-SkhXGs-Rk7zYr-Rk7yze-Rhtr3Y">Sylvia Fredriksson/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>Des lieux, des acteurs, des plateformes et des pratiques</h2>
<p>Comment alors qualifier aujourd’hui ce phénomène de l’entrepreneuriat et ses nouveaux modes d’émergence ? La plupart des études ont pris le parti d’une vision en termes de « lieux », d’« acteurs » et de « plates-formes ». J’aimerais proposer un complément davantage qu’une alternative avec un retour sur la notion de « pratiques entrepreneuriales ». De façon générale, les entrepreneurs semblent de plus en plus investis dans des pratiques d’« entrepreneuriat collaboratif ».</p>
<p>Pour commencer, on peut définir la notion de « pratique entrepreneuriale » comme regroupant des comportements, des postures, des normes et des modes de relation signifiants par rapport aux différents champs de l’entrepreneuriat, et en lien avec des pairs entrepreneurs et des apprentis entrepreneurs. Une pratique est donc un schéma de comportement qui a du sens et « produit » du sens sans devoir trop « en dire ». Elle est indissociable du flux matériel et symbolique d’activités quotidiennes qui vont l’entretenir ou la transformer.</p>
<p>Les pratiques entrepreneuriales se déclinent aujourd’hui sous des formes multiples aux imbrications (inclusives, complémentaires) variables : pratiques du « pitch », pratiques du « coworking », pratiques du « crowdfunding », pratiques du « design thinking », pratiques d’« open knowledge », pratiques de travail en mobilité, pratiques de « bricolage » (fascinantes pour les fab labs et les hackathons que j’ai pu observer), etc.</p>
<p>Ces pratiques ont une corporéité. Comme l’ont souligné <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-de-philosophie-2008-2-page-167.htm">Merleau-Ponty</a> puis <a href="http://www.persee.fr/doc/arss_0335-5322_1977_num_14_1_2554">Bourdieu</a>, elles sont signifiantes émotionnellement, de façon incarnée. Elles sont également de nouvelles formes d’habitus, sans doute plus fluctuants, que valorisent des champs eux-mêmes de plus en plus émotionnels et fluctuants.</p>
<p>La découverte (ou plutôt redécouverte de Merleau-Ponty) a ainsi été une autre surprise de ces trois dernières années. Le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_Merleau-Ponty">Merleau-Ponty phénoménologique</a>, mais également ontologique et politique, donnent des clés précieuses afin de comprendre des situations de coprésence émotionnelle, qui loin de s’opposer à la dynamique des plates-formes digitales, en favorisent peut-être la régulation. La philosophie politique de Merleau-Ponty permet également de mieux comprendre les « infrastructures » (ou « plates-formes »), les « dialectiques » et les paradoxes qui sont à l’œuvre dans l’économie du partage.</p>
<p>Les <strong>pratiques entrepreneuriales « collaboratives »</strong> vont correspondre aux pratiques spécifiques qui vont joindre, articuler, réguler les solitudes et les projets indépendants des entrepreneurs ainsi que des autres personnes en résidence ou en mobilité sur le tiers-lieu. Le paradoxe est qu’il va falloir faire collaborer tout en maintenant fortement l’autonomie et la singularité de chacun. <a href="https://www.linkedin.com/pulse/les-transformations-du-travail-vers-un-capitalisme-de-vaujany">Cela est typique du capitalisme d’assembleurs dans lequel nous entrons</a>. Les communautés des tiers-lieux et les plates-formes offrent chacune des ressources et des contraintes qui vont permettre aux entrepreneurs de gérer le paradoxe.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Fab Lab Adolfo Ibáñez University, Chili.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/michellemilla/29458983975/in/photolist-LTbZAP-DGvgvs-QGGKhm-LXK3dU-EYfvsE-KdCg42-L7gXod-KdCfer-FfhzKn-F4ABLd-EMHsd5-F4ACYy-EhV6Lg-EhV6ck-EMHpc5-EhzoyA-Ehzobb-EMHsKs-FcYZbu-EhzpCE-EhzqK9-F6Tirv-EMHtMN-Ehzqh5-JrAoFP-Jvn4nA-HCcN9F-JrAnpv-RZ8gfg-RwaRPU-KTECSX-RVwx9Q-RZ8k9Z-JXhhXn-KQRsLb-HCcPHc-KAEztS-KAEzgC-KjTPnb-KjTLrb-JPCeX2-KAEz2j-KL2cJg-KjTLQh-JPCePB-KDafwx-KAEyBG-KH8atm-KL2ckv-JPsmR3">Michelle Milla/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>Quelles opportunités pour les chercheurs en management et en économie ?</h2>
<p>Qu’ai-je finalement l’impression d’avoir découvert ces trois dernières années, au fur et à mesure d’observations qui m’ont mené à Paris, Barcelone, Berlin, Londres, San Francisco, Singapour, Syndey, Rome, Stockholm, Montréal et dans bien d’autres villes encore ?</p>
<p>Tout d’abord, <strong>un formidable « objet-valise »</strong>, celui que j’ai longtemps recherché (du côté des consultants et de nouvelles formes pédagogiques notamment).</p>
<p>Dans tous ces lieux, à l’approche de ces pratiques, au contact de ces communautés, j’ai souvent été frappé de croiser des docteurs, d’anciens doctorants, des personnes avec une sensibilité de sciences humaines et sociales. Plus largement, j’ai été souvent impressionné par le niveau de réflexivité des débats et des échanges auxquels j’ai eu le plaisir tantôt d’assister, tantôt de participer. La culture, les communautés collaboratives (quand elles existent), les mouvements sociaux, les pratiques, sont ou peuvent être de très précieux tiers-lieux et tiers-temps entre les universitaires, les praticiens, les politiques, les activistes et les journalistes. Dans, entre, et au-delà des frontières organisationnelless traditionnelles, ils permettent une véritable co-construction des savoirs.</p>
<p>Ces objets sont également <strong>une fenêtre pour rendre visible</strong> des phénomènes complexes. S’immerger dans des maker spaces, des espaces de coworking, des hacker spaces, est une opportunité unique d’aller au contact des nouvelles pratiques de travail (entrepreneuriat, télétravail, nomades digitaux, DIY…). Les tiers-lieux permettent de rencontrer des indépendants, d’observer de près les modes de formation des communautés, de comprendre les <a href="https://theconversation.com/lentrepreneuriat-alterne-en-finir-avec-le-mythe-dune-societe-post-salariale-73636">modes d’hybridation du salariat et de l’entrepreneuriat</a>, les nouvelles formes collectives de bricolage, etc. Cela ne signifie pas que ces processus et ces pratiques se forment « là-bas » ou uniquement là-bas. Mais cela offre une fenêtre aux chercheurs et aux citoyens soucieux de mieux comprendre l’émergence et la légitimation de nouvelles pratiques de travail. Ils pourront trouver dans les tiers-lieux des acteurs pertinents pour des récits de vie, un point de départ pour un shadowing, la mise en œuvre d’une quasi-expérimentation, etc. <a href="http://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/0170840616685354">Les mécanismes de développement et d’animation des communautés</a> pourront être observés à une échelle raisonnable. Pour reprendre le mot de Merleau-Ponty, les activités et les pratiques des acteurs liés aux tiers-lieux permettent de rendre visible les transformations du travail, et avec elles tout un territoire, ses savoir-faire, ses pratiques et ses acteurs.</p>
<p>Les acteurs, pratiques, communautés et cultures des tiers-lieux sont enfin un formidable espace de transformation, <strong>un levier politique</strong>. Il n’est pas toujours possible, pour les universitaires, de lancer un grand projet politique à partir de l’université et dans ses murs. Les tiers-temps et les tiers-lieux (qui peuvent aussi exister « à l’intérieur » des entreprises traditionnelles) sont ainsi des contextes précieux pour les projets académiques de transformation. Il est possible de « hacker » ensemble des processus RH, des modes d’organisation voire des stratégies.</p>
<p>Toujours pour reprendre les mots de Merleau-Ponty (« La science manipule des choses et renonce à les habiter », l’Oeil et l’esprit), les tiers-lieux sont une belle opportunité d’« habiter » les objets des sciences humaines et sociales, en particulier ceux du management. Les événements de RGCS (notamment le <a href="https://www.youtube.com/watch?v=UedXrARWjEg&t=4s">premier symposium en décembre 2016</a> et l’événement <a href="https://www.youtube.com/watch?v=bsSUHIkIHqk&feature=youtu.be">#collday2017</a> organisé à Berlin en mars 2016) ont permis de précieuses expérimentations sociales, pédagogiques, scientifiques et politiques. Monter ces tiers-temps (séminaires ouverts à tous, workshops de co-création, learning expeditions) avec les acteurs des tiers-lieux, expérimenter une marche collective ensemble dans la ville, a induit de nombreuses micro-collaborations. On peut plus ou moins choisir la place où l’on s’assied dans une salle de réunion. Il est quasiment impossible de ne pas être « brassé » par la marche collective et de ne pas se retrouver tôt ou tard (dans le bus, sur un banc, dans un ascenseur…) à côté d’une personne à laquelle on n’a pas encore parlée. Ou pas souhaiter parler.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/bsSUHIkIHqk?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">#collday2017seminar and learning expedition in Berlin.</span></figcaption>
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<h2>En conclusion : sens et jeu au cœur de l’entrepreneuriat collaboratif et de la recherche</h2>
<p><strong>Connecter, rendre visible, expérimenter</strong>… les tiers-lieux, les tiers-temps, la culture et les pratiques du collaboratif qui peuvent être associés à l’émergence de plus en plus forte et profonde (culturellement) de l’entrepreneuriat collaboratif, ré-ouvrent le champ des possibles tant entrepreneurial qu’académique. Aux universitaires (en particulier en management, en économie et en sociologie) de savoir saisir cette opportunité.</p>
<p>N’ayons pas peur… <strong>j’ai aussi compris avec cette expérience que création de sens vraiment partagé et amusement n’était pas incompatibles.</strong> Ils sont même au cœur des processus entrepreneuriaux et scientifiques. <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/hal-00644401/document">Ils l’ont toujours été</a>.</p>
<p>To be continued…</p>
<hr>
<p><em>Un grand merci au <a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/rgcs-coordinators/">collectif des coordinateurs</a> du réseau RGCS avec lesquels je partage cette aventure incroyable.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/75650/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François-Xavier de Vaujany est président du réseau académique et think tank RGCS (<a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/">https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/</a>). </span></em></p>Une première synthèse de trois années de recherches sur le phénomène des tiers-lieux d’entrepreneuriat et d’innovation (fab labs, espaces de coworking, makers spaces, hacker spaces, etc).François-Xavier de Vaujany, Professeur, PSL-Université Paris-Dauphine (DRM), Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/748932017-04-02T21:30:08Z2017-04-02T21:30:08ZApprendre à l’ère du numérique : penser et faire à nouveau réunis<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/163512/original/image-20170401-27273-3e1t65.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un « makerspace ».</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/7/76/Makerspace_SLUB.jpg">Slub Presse 2015/Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Comment peut-on reconstruire le lien entre « faire » et « penser » au cœur du monde qui vient ? Pour un enseignant, qui se réjouit d’être aussi, et de plus en plus, un mentor, c’est à dire celui qui accompagne et guide, bienveillant, par son expérience, c’est un programme exaltant.</p>
<h2>Reconstruire le lien intime entre « faire » et « penser »</h2>
<p>Êtes-vous un manuel ? La séparation radicale, issue de la révolution industrielle, entre « cols bleus » en bas, ceux qui font, travaillent la matière et exécutent, et « cols blancs » en haut, ceux qui pensent, décident et ordonnent, devient toujours plus artificielle même si elles fondent toujours pour une large part notre système de diplômes.</p>
<p>Certains qui se pensent « cols blancs », devraient toutefois aujourd’hui y regarder à deux fois. La pensée qui ne fait que reproduire et le tableur sur écran ne mettent certes pas du côté du travail manuel, mais de là à dire qu’ils mettent du côté de ceux qui pensent, décident et ordonnent… Une certitude par contre, ce nouvel exécutant « col blanc » est séparé du monde réel par un écran qui est son nouveau monde.</p>
<p>En fait, la distinction fondée sur la séparation entre « faire » et « penser » ne paraît même plus une grille de lecture pratique à défaut d’être justifiée, qui permet d’aborder l’évolution future des compétences et des métiers à l’âge du monde numérisé. C’est ce que rappelle et développe Matthew Crawford dans son livre intitulé en français, <em>Éloge du Carburateur</em>.</p>
<p>Dans la vidéo suivante, on voit <a href="https://theconversation.com/lintelligence-est-dans-le-faire-73699">Manu Prakash</a>, chercheur à Stanford, qui présente sa centrifugeuse en papier, inspirée par le mouvement d’une toupie.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/pPePaKnYh2I?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>À mes yeux, c’est époustouflant. Mais la capacité d’un chercheur comme Manu Prakash à créer des objets à partir de pratiquement rien n’est pas fondée sur son seul génie. Il est bien sûr fascinant parce qu’il produit de l’information utilisable, transférable et multipliable, pour transformer le réel n’importe où avec un minimum de ressources. Quelle créativité dans cette action sur le réel ! Mais c’est certainement d’abord un état d’esprit, une émulation dans un environnement favorable, positif et stimulant.</p>
<p>Serait-ce une façon de définir des écoles de demain ? La créativité s’appuie chez lui sur une formation en sciences expérimentales de très haut niveau. Comme professeur de physique, j’en suis profondément heureux. Et puis, analyser sa centrifugeuse en papier en revenant à la physique de base m’est un bonheur. Accumuler l’énergie liée à l’action répétée, au travail périodique des mains sans la perdre dans les frottements, c’est bien joué. Simple et de bon goût. Pour un physicien, c’est du petit lait.</p>
<p>Ce que l’on voit ici rejoint le programme du cours FabLab Jam Session que nous développons à l’Université Grenoble Alpes avec le centre de culture scientifique technique et industrielle <a href="https://lacasemate.fr/">La Casemate</a>, organisateur de la <a href="https://lacasemate.fr/rencontrer/maker-faire-grenoble/">Maker Faire Grenoble en mars 2017</a>. C’est aussi celui du cours « Learning by doing », du <a href="https://cri-paris.org/master-aire-edtech/">Master Edtech au CRI</a> Paris où j’enseigne.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/163514/original/image-20170401-27270-1q4vk25.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163514/original/image-20170401-27270-1q4vk25.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163514/original/image-20170401-27270-1q4vk25.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=984&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163514/original/image-20170401-27270-1q4vk25.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=984&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163514/original/image-20170401-27270-1q4vk25.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=984&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163514/original/image-20170401-27270-1q4vk25.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1236&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163514/original/image-20170401-27270-1q4vk25.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1236&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163514/original/image-20170401-27270-1q4vk25.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1236&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le livre de Matthew B. Crawford.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Éditions la Découverte</span></span>
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<h2>Expérience du réel</h2>
<p>Ce qui compte ici, c’est l’alliance de l’expérience du réel et de sa complexité avec l’accès facile à l’information. Quel que soit le projet, l’objectif premier n’est pas le projet lui-même mais la construction de sa propre capacité à lire une situation réelle et à agir sur elle au-delà d’une approche systématique et prévisible, au-delà de méthodes préfabriquées apprises et répétées à l’identique, au-delà de ces méthodes que des robots mettront en œuvre sans nous.</p>
<p>On voit avec Manu Prakash combien associer une créativité joyeuse, une connaissance scientifique de haut niveau et un réel talent d’expérimentateur est ici fécond et fascinant. On dira avec raison que c’est bien le moins que l’on peut attendre ici tant la formation du chercheur, comme celle de ses collaborateurs, est d’un niveau scientifique élevé. Manu Prakash est un pionnier, mais passer par la science n’est qu’une des modalités de mise en œuvre de ce si joli programme.</p>
<h2>Intelligence collective</h2>
<p>Il faut reconnaître qu’échapper ainsi à la concurrence des systèmes artificiels intelligents en s’inscrivant dans cette démarche paraît ambitieux et plutôt difficile. C’est la sortie par le haut. C’est clairement une véritable rupture qu’on ne distingue aujourd’hui que dans chez les précurseurs que sont les Makers par exemple.</p>
<p>S’il y a bien une certitude, c’est celle-là : l’humanité n’a pas connu une évolution biologique dans les dernières décennies qui aurait fait progresser radicalement notre intelligence individuelle et qui serait le moteur de la métamorphose du monde en cours.</p>
<p>La révolution d’une ampleur invraisemblable dans cette même période est bien celle des machines qui accèdent à l’information, deviennent ses véhicules et transforment l’humanité en profondeur. En fait, elles conduisent d’abord à la découpler du réel.</p>
<p>Elles sont alors les tambours des faits alternatifs, et de la post-vérité. Il apparaît particulièrement difficile de construire son expérience du réel à l’ère du numérique. En l’absence d’accompagnement pédagogique pour organiser ce bain d’information, pour le structurer et en faire de la connaissance, c’est bien ce qui se produit : le réel ne passe pas la barrière des écrans.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/163515/original/image-20170401-27273-u2scpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163515/original/image-20170401-27273-u2scpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163515/original/image-20170401-27273-u2scpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163515/original/image-20170401-27273-u2scpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163515/original/image-20170401-27273-u2scpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163515/original/image-20170401-27273-u2scpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163515/original/image-20170401-27273-u2scpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163515/original/image-20170401-27273-u2scpd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Permettre au réel de passer la barrière des écrans.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/byrawpixel/32851415932/in/photolist-S3Y6qY-bWexje-cigvj7-cigNHy-hpcwjK-ct87Au-bWeAHz-nDnpNu-cdBnB9-acJice-cuDNSy-49YLoC-c8wuVq-c8x1Lu-c8wqZQ-br86US-49ULGn-aQZYYB-8JHYJx-ctj6NA-c8UbVG-aZhe1T-9bxe9j-49UCbV-nTppMy-ceKK7q-aXr9yn-c8x2xw-dRbhP4-cuDLrE-9PVVzX-canmwh-cfVGDL-doVSxP-c8ECSm-a2qRQj-bXoyaF-k1H7g-c8EFx1-cigN4f-c9N2mA-cdVqTh-bXoz5v-eiC5pG-8RrYuH-bV2xRM-8D3CAS-oFEs5b-ct87oj-3522zm">Rawpixel/Flickr</a></span>
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<p>Au contraire, comme le montrent nombre de précurseurs, nous avons la possibilité d’utiliser ces systèmes artificiels de traitement de l’information pour mettre en route notre intelligence collective comme jamais, dans le but d’agir et de transformer le monde réel avec nos têtes et nos mains, pour revenir au réel. Il s’agit donc d’accompagner la construction de notre habileté manuelle, de notre capacité à apprécier, à diagnostiquer, en partant de cette connaissance disponible partout et des échanges faciles par delà les distances, pour modifier notre environnement, pour ajouter au réel, pour réparer. Cela concerne alors toutes les formes de connaissances et d’expertises que l’on soit plombier, médecin ou scientifique…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/74893/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Joël Chevrier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Associer une créativité joyeuse, une connaissance scientifique de haut niveau et un réel talent d’expérimentateur permet de (ré)concilier faire et penser.Joël Chevrier, Professeur de physique, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/738902017-03-07T20:59:45Z2017-03-07T20:59:45ZFace à l’uberisation, comment renouveler les capacités créatives de l’entreprise ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/159384/original/image-20170304-29009-1xrhh8w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Design Thinking Workshop (UX Camp Vienna).</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/142146350@N07/27202788816/in/album-72157668087230910/">UXpro Austria / Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est publié dans le cadre d’un partenariat avec l’<a href="http://www.anvie.fr/">Anvie</a> à l’occasion de la publication de son <a href="http://bit.ly/2ldhgVS">« Best-Of 2016 »</a>.</em></p>
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<p>Terme très à la mode, « l’uberisation » décrit un phénomène par lequel des startups, grâce à Internet, parviennent à rivaliser avec des acteurs traditionnels, voire à prendre le dessus. Tous les secteurs d’activité, sans exception ou presque, sont potentiellement concernés.</p>
<h2>Quelques éléments de définition et de contexte</h2>
<p><a href="http://bit.ly/2lIWgC1">L’uberisation</a>, terme inventé par Maurice Lévy, président de Publicis, décrit le phénomène par lequel des startups qui utilisent Internet remettent en cause un acteur traditionnel en redéfinissant les règles du jeu de son industrie. L’expression provient de la startup Uber qui fonctionne avec des VTC et conteste le monopole des taxis. L’ampleur prise par le phénomène dans de nombreux secteurs a donné l’expression uberisation. On parle désormais d’uberisation de l’assurance, des transports, de l’hôtellerie, etc.</p>
<p>L’uberisation met en lumière la difficulté que rencontrent nombre d’entreprises établies sur leur marché parfois depuis de nombreuses années et qui soudainement voient leur suprématie contestée. Au-delà d’une problématique de marché seule, l’uberisation pose la question de leur identité organisationnelle tant les ruptures traduisent la nécessité de changer le modèle économique même de ces acteurs, c’est-à-dire leurs ressources (Airbnb est le premier hôtelier du monde mais ne possède pas un seul hôtel), leurs processus (BlaBlaCar réinvente le transport par le partage) et leurs valeurs (la révolution digitale signifie transparence et immédiateté).</p>
<p>Au-delà, l’uberisation menace également de ringardiser les méthodes d’innovation. Beaucoup des grandes entreprises ainsi remises en question investissent énormément dans l’innovation et ont des budgets de R&D conséquents. Mais ils font face à des challengers entrepreneuriaux, qui misent sur la vitesse, l’audace et la réactivité, en misant à fond sur les nouvelles approches entrepreneuriales (design thinking, lean startup, effectuation, etc.) pour découper les chaînes de valeur actuelles et s’accaparer les parties les plus intéressantes.</p>
<p><a href="http://bit.ly/2mZtZrT">Le groupe de travail</a> constitué par l’Anvie s’est attaché à réfléchir aux possibilités concrètes d’action à partir du témoignage d’acteurs du terrain qui réfléchissent à leur action d’innovateur et avec le regard de chercheurs sur la question.</p>
<p>Sous l’angle humain, le groupe s’est demandé au fond pourquoi les innovateurs persistent à essayer de transformer les groupes de l’intérieur plutôt que de partir entreprendre à l’extérieur. Il y a une raison : les « hacktivateurs », mélange de hackers et d’activateurs, sont impertinents mais bienveillants envers l’organisation. Ils ne souhaitent pas la quitter pour aller entreprendre à l’extérieur car le monde ne peut pas être fait que de startups, et ils estiment que « sauver » les grands groupes est un enjeu important pour l’emploi. En outre, ces groupes ont des ressources, ils représentent un terrain de jeu avec un potentiel important qui séduit ceux qui ont de l’ambition.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/159386/original/image-20170304-29002-a8oo6x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/159386/original/image-20170304-29002-a8oo6x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/159386/original/image-20170304-29002-a8oo6x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=255&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/159386/original/image-20170304-29002-a8oo6x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=255&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/159386/original/image-20170304-29002-a8oo6x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=255&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/159386/original/image-20170304-29002-a8oo6x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/159386/original/image-20170304-29002-a8oo6x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/159386/original/image-20170304-29002-a8oo6x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Sacramento Hacker Lab.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/intelfreepress/8425352334/in/photolist-diXKKX-hu8XLo-99tasd-cNE4W7-dQw8Hq-8LDYw3-8NJet4-hErQn9-8LAUKB-bnDYdR-8NJd4n-htrr3D-6preRg-bnDWsB-8K4xmF-6gv5gQ-8K7zML-8K7zth-8K7zRb-8K4wWH-6prf8R-8K4wT2-8K7A8s-8K4xcz-8K7zkb-bnDYit-eBjLPe-bnDWWr-6prfa4-6pvorq-8K7A2s-bnDX9z-6pvooS-8K4wxX-8K7zxq-bnDXr4-bnDWci-bnDWLk-bnDY7X-bnDX54-9AkF5w-8K7zad-bnDXEM-bnDY5H-6prf6P-bnDXPK-8K4x1P-bnDX22-bnDWFk-8K7zd7">Intel Free Press/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<h2>« Gérer » la dimension organisationnelle de l’innovation</h2>
<p>Il est notamment nécessaire pour l’innovateur de savoir « vendre » les projets d’innovation en interne, mais aussi en externe, sachant que plusieurs approches peuvent être utilisées : directement auprès des acteurs concernés… ou en se « camouflant » derrière d’autres acteurs, la direction générale par exemple, voire en ne dévoilant pas l’entièreté du projet d’innovation. C’est d’ailleurs ce qu’a fait Edison, qui avait volontairement abaissé la luminosité des ampoules au niveau de celle de l’éclairage au gaz afin que sa découverte n’effraie pas les premiers utilisateurs… L’innovateur doit savoir rester discret. « L’innovateur doit avancer masqué ».</p>
<p>Le soutien de la direction générale est bien sûr utile pour défendre le projet et obtenir des ressources, mais il peut susciter des jalousies, et surtout, la direction générale peut se montrer impatiente d’obtenir des résultats rapides, ce qui peut tuer le projet car l’innovation met souvent longtemps à porter ses fruits. La relation aux décideurs est cruciale. Ils sont sur d’autres échelles de temps, d’autres impératifs, parfois très court terme.</p>
<p>Toujours sur le plan organisationnel, la création d’une direction de l’innovation n’apparaît pas souhaitable, car cela crée un silo supplémentaire, et cela déresponsabilise les collaborateurs. Au contraire, l’innovateur doit se connecter aux processus et aux pratiques, être un agent mutagène. Pour cela il faut susciter la demande et l’envie.</p>
<h2>Valoriser les innovations générées « par en bas »</h2>
<p>Il ressort ensuite que le projet d’innovation ne vient pas d’en haut en général, et assez naturellement la discussion a porté sur la gestion des innovations générées « par en bas. » Les démarches d’innovation doivent être transverses, et se déployer dans un lieu à part, neutre, permettant de les rendre plus efficaces, de contribuer au désilotage des organisations.</p>
<p>C’est tout l’intérêt des nouveaux lieux (lab, espace de coworking). Un lab interne est utile pour susciter et accompagner des projets, et il doit suivre quatre principes : s’arrimer à ce qui existe, fonctionner en coresponsabilité (le porteur du projet, son manager, le lab), rester à un niveau d’acceptabilité pour l’entreprise, et développer le sens du compromis. Au fond, un innovateur doit déranger l’ordre existant par définition, mais il doit le faire avec mesure s’il ne veut pas que l’organisation réagisse négativement et tue l’innovation.</p>
<p>Un lieu à part doit bien réfléchir à sa connexion au reste de l’organisation ; ce sont souvent les processus mis en œuvre, plus qu’un diagramme organisationnel, qui détermineront la réussite de cet aspect crucial. Loin d’être imposés d’en haut, les lieux qui réussissent semblent être ceux qui, par leur pratique, suscitent l’envie et la demande, et démontrent leur valeur par petites touches et par une fine inscription dans les processus et méthodes de travail existantes.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/159385/original/image-20170304-29005-8ryjpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/159385/original/image-20170304-29005-8ryjpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/159385/original/image-20170304-29005-8ryjpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=448&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/159385/original/image-20170304-29005-8ryjpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=448&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/159385/original/image-20170304-29005-8ryjpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=448&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/159385/original/image-20170304-29005-8ryjpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=563&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/159385/original/image-20170304-29005-8ryjpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=563&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/159385/original/image-20170304-29005-8ryjpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=563&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Design Thinking Workshop.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/bytemarks/5849285070/in/photolist-9UT7EA-9UQbRP-9UQ9YP-9UT8x7-9UQc9c-9UT62Y-9UT5uJ-9UQeQk-9UQfkx-9UT5Km-9UT8db-9UT58d-9UQcLk-9UT7mS-9UT35m-9UT25w-9UQf6H-9UT2qb-9UT4Rf-9UT1KU-9UQd3n-kYuBsc-or5QKs-mHeMk1-rf7iyq-q5S8yL-pn8BmJ-nj6qsw-pNfN5A-nDZks1-pbmUZv-nZ9zWN-oLEJFm-6zxYvb-87K8RN-ekb6fo-5Dk6ub-nwNK9R-oCfvA3-9jCaJi-GBsGQi-H7Doij-mch99m-GBsSg2-aAPKuU-Hu1SnU-9jCbuz-9dFj9D-9jFgqf-H7DmJs">Burt Lum/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>Plusieurs méthodes</h2>
<p>En ce qui concerne les méthodes, les démarches entrepreneuriales sont une bonne source d’inspiration (startup weekend, lean startup, effectuation, design thinking). Elles permettent de penser large, bien au-delà du cœur de métier de l’organisation. Associer par ailleurs des profils divers, et faire appel à l’externe est extrêmement profitable. Ces démarches innovantes permettent aux équipes de fonctionner autrement, d’adopter de nouvelles logiques de travail ; de fait, elles contribuent à la transformation des entreprises, mais elles ne se décrètent pas.</p>
<p>L’importance des démonstrateurs a été soulignée, car ils facilitent la prise de décision par le management. On peut à ce titre citer le célèbre exemple du Palm Pilot, qui a convaincu ses premiers investisseurs sur la base d’un prototype… en bois, très rudimentaire pourtant. L’impression 3D offre à ce titre de formidables opportunités, mais n’est pas forcément nécessaire : vidéos, objets en pâte à modeler ou en papier… se révèlent souvent suffisants. L’objectif est bien de rendre l’innovation tangible, par tous les moyens. Comme le soulignait l’un des intervenants, avec un démonstrateur posé sur la table du Comex, la question n’est plus tant « doit-on le faire ? » que « quand le fait-on ? »</p>
<p>Les concours d’innovation sont intéressants, mais on ne sait pas quoi en faire derrière. Si rien n’est prévu derrière, cela restera un concours d’idées, or le problème n’est pas le manque d’idées, mais précisément leur mise en œuvre. Il en va de même pour tous les événements, par exemple les <em>start-up weekends</em> et autre hackathons.</p>
<p>La liberté est nécessaire dans les démarches d’innovation, à la condition qu’elle s’inscrive dans un cadre, dans des contraintes de temps, d’espace et de budget et qu’elle ne nie pas la réalité de l’organisation, avec laquelle elle doit composer pour réussir.</p>
<p>Il faut savoir démarrer petit, et pas forcément directement avec un projet d’innovation. Par exemple, par des conférences internes où on vient parler de son métier et où on invite des entrepreneurs, des innovateurs, des acteurs de transformation. Ainsi, on lance un mouvement social, on crée des liens et on suscite une attente, une demande pour aller plus loin.</p>
<p>La RH est bien sûr cruciale, d’autant que la gestion des talents n’inclut pas les innovateurs, car ils sont trop compliqués à gérer et surtout ils ne sont pas identifiés comme tels par l’organisation. Or sans gestion de carrière pour ceux qui prennent des risques, pas de projection possible et donc risque de construire sur du sable. La RH doit avoir pour objectif à la fois l’autonomisation des individus dans leur démarche d’innovation et leur inscription dans une logique d’entreprise de long terme, ce qui est un exercice d’équilibrage difficile.</p>
<p>Au final, le groupe de travail insiste sur la nécessité du « faire », et pour cela du « faire petit au début », et celle de s’inscrire dans une réalité organisationnelle qui peut être frustrante mais qu’il ne faut pas nier car elle a ses objectifs de court terme. C’est cette difficulté – devoir innover alors qu’on veut des résultats à court-terme – qui est au cœur de la difficulté de l’innovateur. Celui-ci est donc à la fois un faiseur et un animal politique. Identifier, accompagner et faire grandir les innovateurs en leur fournissant un cadre approprié est l’enjeu majeur des organisations actuelles si elles veulent avoir une chance de survivre à l’uberisation de leur environnement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/73890/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Silberzahn a animé le groupe de travail de l'Anvie sur le thème « Face à "l'ubérisation", comment renouveler les capacités créatives des entreprises ? »</span></em></p>L’uberisation menace de ringardiser les méthodes d’innovation classiques. L’entreprise doit s’organiser pour apprendre de nouvelles formes de créativité.Philippe Silberzahn, Professeur stratégie et organisation, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.