tag:theconversation.com,2011:/institutions/aalborg-university-2984/articlesAalborg University2024-03-20T16:00:56Ztag:theconversation.com,2011:article/2262522024-03-20T16:00:56Z2024-03-20T16:00:56ZMarseille vue de l’intérieur : une exploration de la violence urbaine<p><em>L’année 2023 a été particulièrement meurtrière à Marseille : selon des chiffres avancés par le procureur de la ville, <a href="https://www.lefigaro.fr/marseille/marseille-la-rivalite-sanglante-entre-deux-bandes-rivales-a-l-origine-du-record-de-narchomicides-20231221">au moins 49 personnes seraient mortes et plus d’une centaine auraient été blessées</a> du fait de trafic de stupéfiants. Au point où le terme <a href="https://www.liberation.fr/checknews/narchomicide-la-delinquance-change-de-visage-les-mots-pour-la-comptabiliser-aussi-20230912_JO4V77R6JJEPDBGSESXQDDTHAM/">« narchomicides »</a> est évoqué et que le président de la République s'y est rendu le 19 mars 2024, annonçant <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/03/19/a-marseille-emmanuel-macron-annonce-plus-de-82-interpellations-dans-le-cadre-d-une-operation-sans-precedent-contre-le-trafic-de-drogue_6222863_823449.html">« une opération sans précédent »</a> pour lutter contre le trafic de drogue.
Faisant un pas de côté, les anthropologues Dennis Rodgers et Steffen Jensen ont choisi d’explorer cette violence de manière plus large et plus contextualisée, en se basant sur un terrain de sept mois effectué entre 2021 et 2023 dans la cité Félix-Pyat. Située au cœur du III<sup>e</sup> arrondissement marseillais, elle est souvent décrite comme l’une des plus difficiles de la préfecture des Bouches-du-Rhône.</em></p>
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<h2><a href="https://theconversation.com/marseille-immersion-dans-la-cite-felix-pyat-1-4-la-mauvaise-reputation-220875">La mauvaise réputation</a></h2>
<p>Les représentations des cités marseillaises comme lieux de violence tributaires du trafic de drogue nourrissent des imaginaires masquant d’autres formes de violences structurelles.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/marseille-immersion-dans-la-cite-felix-pyat-2-4-des-trafics-pas-si-juteux-des-morts-complexes-220893">Des trafics pas si juteux, des morts complexes</a></h2>
<p>Il existe de profondes contradictions et ambiguïtés concernant le trafic de la drogue à Félix-Pyat, qu'il est nécessaire saisir dans son contexte social, économique, et culturel pour véritablement le comprendre.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/marseille-immersion-dans-la-cite-felix-pyat-34-des-murs-devant-les-yeux-221139">Des murs devant les yeux</a></h2>
<p>Certains aménagements des infrastructures du territoire à Marseille peuvent être vus comme une forme de violence, dont les effets sont tout aussi insécurisants que les activités du trafic de drogue.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/marseille-immersion-dans-la-cite-felix-pyat-44-etat-partout-etat-nulle-part-221195">État partout, État nulle part ?</a></h2>
<p>Les habitants de cités comme Félix-Pyat ne se perçoivent plus comme vivant au sein d’espaces bénéficiant d’un état de droit, mais plutôt dans des lieux d’exception devant être disciplinés et punis.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/226252/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dennis Rodgers a reçu une bourse ERC Advanced Grant (no. 787935) du Conseil Européen de la Recherche (<a href="https://erc.europa.eu">https://erc.europa.eu</a>) pour un projet intitulé “Gangs, Gangsters, and Ganglands: Towards a Global Comparative Ethnography” (GANGS).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Steffen Bo Jensen is a senior researcher at DIGNITY-Danish Institute Against Torture and a professor at the Department of Politics and Society, Aalborg University in Denmark</span></em></p>À partir du quartier Félix Pyat à Marseille, deux anthropologues ont choisi de comprendre le contexte de violence au-delà du phénomène de trafic de drogue qui mine la cité phocéenne.Dennis Rodgers, Research Professor, Anthropology and Sociology, Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID)Steffen Bo Jensen, Professor, Department of Politics and Society, Aalborg UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2211952024-03-14T18:54:29Z2024-03-14T18:54:29ZMarseille : l'État a-t-il vraiment abandonné les cités ?<p><em>Comment vit-on dans la cité Félix-Pyat, situé dans l'un des arrondissements les plus pauvres de Marseille ? Les anthropologues Dennis Rodgers et Steffen Jensen y ont passé sept mois en immersion, entre 2021 et 2023. Ils expliquent que bien que de nombreuses familles soient soutenues financièrement par l'État, elles se sentent pourtant abandonnées sur le volet sécuritaire.</em></p>
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<p>Il est courant de lire dans les médias que les cités de Marseille ont été <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/09/01/a-marseille-le-trafic-de-drogue-prospere-sur-l-abandon-de-la-ville_6093031_3232.html">« abandonnées »</a> par l’État français. C’est une expression qui revenait aussi souvent dans nos conversations avec les habitants de Félix-Pyat, comme Selim, pour qui « le plus gros problème de Félix-Pyat, c’est l’abandon ».</p>
<p>Il faisait ici référence à l’apparente incapacité de l’État à résoudre les problèmes de la cité :</p>
<blockquote>
<p>« la violence, le trafic, la saleté, l’insalubrité, la criminalité, la pauvreté, les risques sanitaires… »</p>
</blockquote>
<p>Quand on parcourt le quartier, il peut en effet apparaître abandonné. Le trafic est une présence très visible, et génère de nombreuses insécurités pour les habitants de la cité, comme nous l’avons décrit dans un <a href="https://theconversation.com/marseille-immersion-dans-la-cite-felix-pyat-2-4-des-trafics-pas-si-juteux-des-morts-complexes-220893">article précédent</a>. Les rues sont pleines d’ordures non ramassées, et de nombreux bâtiments sont aussi visiblement en mauvais état.</p>
<p>Cette insalubrité a de multiples effets nuisibles sur les habitants, comme nous avons pu le constater en discutant avec Mounia, une habitante du bâtiment B, au lendemain d’un incendie dans l’immeuble :</p>
<blockquote>
<p>« J’ai commencé à sentir la fumée, j’ai attrapé mes enfants et je suis sortie en courant. »</p>
</blockquote>
<p>Heureusement, le feu a été rapidement maîtrisé, mais elle nous a raconté que ses enfants avaient refusé de revenir tout de suite dans l’appartement, car ils avaient « trop peur », et elle était inquiète pour leur santé mentale sur le long terme. « Ce n’est pas la première fois », elle nous a dit, exaspérée, se plaignant du bailleur social gestionnaire du bâtiment, Marseille Habitat :</p>
<blockquote>
<p>« Ils ne réparent jamais rien, tout s’empire, il y a déjà eu des morts à cause des feux, il y en aura d’autres, c’est garanti… »</p>
</blockquote>
<h2>Un État-providence très présent</h2>
<p>Pourtant, au-delà de l’état des bâtiments, nous avons constaté que l’État est bel et bien présent dans la cité. En témoigne par exemple cette conversation avec la directrice d’une association locale implantée dans la cité Félix-Pyat. En lui faisant part de notre recensement statistique qui montrait que 54 % des ménages de la cité dépendaient de l’assistance sociale, elle nous a expliqué pourquoi cela était particulièrement significatif.</p>
<p>Pour ce faire, elle nous a dessiné un croquis illustrant comment les vies des habitants de la cité étaient intrinsèquement liées aux institutions sociales : la Sécurité sociale, la CAF, les programmes de développement professionnel de Pôle emploi, les bailleurs de logement social, les services de santé, etc. Et de souligner les difficultés des familles du quartier à naviguer dans les méandres de la bureaucratie de l’État-providence français.</p>
<p>Les procédures d’accès à ces services publics demeurent également souvent absconses pour bien des usagers, et la <a href="https://theconversation.com/la-numerisation-des-administrations-produit-tensions-et-exclusion-207049">numérisation</a> progressive des services sociaux ajoute aux difficultés. Peu d’habitants ont accès à des supports informatiques autres que leurs téléphones, et beaucoup – surtout au dessus d’un certain âge – ne sont pas à l’aise avec cet outil. De fait, la crainte d’être privé d’une prestation – de la CAF, du chômage, du RSA – soit par méconnaissance ou parce qu’on pourrait commettre une erreur de procédure en demandant une prestation, est très répandue à Félix-Pyat.</p>
<p>Plus encore, tout engagement avec l’administration française se double d’une paranoïa tangible, et une grande partie du travail des associations locales dans la cité Félix-Pyat repose sur de « l’accompagnement ». Il s’agit d’aider les habitants de la cité avec leurs demandes et la préparation de leurs dossiers – également souvent en raison de problèmes de langue pour les non-francophones – et d’éviter des sanctions qui sont vécues comme une menace constante et souvent arbitraire.</p>
<h2>Un État bifurqué ?</h2>
<p>Cette omniprésence – que l’on peut de plus qualifier d’oppressive – de l’État-providence dans la vie intime des habitants de Félix-Pyat s’accorde a priori mal avec l’idée que la cité a été « abandonnée ». Mais ce paradoxe peut en partie s’expliquer par l’existence d’une forme de cloisonnement dans les modes d’intervention de l’État français vis-à-vis de lieux comme Félix-Pyat. D’un côté, il y a le social, de l’autre, le sécuritaire.</p>
<p>En parcourant des documents relatifs à la politique de la ville à Marseille, nous avons ainsi constaté que ces derniers sont dépourvus de références aux questions de criminalité et de délinquance. Les mots « crime », « délinquance », « sécurité » ou « insécurité » sont même complètement absents des textes que nous avons consultés, qui se focalisent plutôt sur des thèmes tels que le « service au public », la « transition écologique », le « soutien aux associations », le « logement et cadre de vie », le « développement économique », « l’inclusion sociale », « l’éducation », ou bien « l’emploi et insertion professionnelle », entre autres.</p>
<p>Cela peut sembler à première vue très étrange compte tenu de l’importance des questions sécuritaires dans les discours officiels concernant les cités de Marseille (et d’ailleurs). Mais il existe en fait un phénomène que nous pourrions qualifier de « bifurcation » entre l’action sociale et l’action sécuritaire de l’État français, comme nous l’a expliqué une personne chargée des questions de politique de la ville associée à la Préfecture de Marseille :</p>
<blockquote>
<p>« Les questions de sécurité, ça a un côté très régalien. C’est la police nationale qui… [s’]en charge… [N]ous, au niveau de la politique de la ville ou des compétences exercée par les collectivités territoriales, on n’a pas ce volet sécurité… enfin, ce n’est pas un objectif… [Nous] on va être… sur le volet social ».</p>
</blockquote>
<p>De la même façon, lors d’un entretien avec un policier du III<sup>e</sup> arrondissement, il nous a clairement affirmé que la police estimait également que la sécurité n’avait rien à voir avec les questions sociales : « la police ne fait pas du social ».</p>
<p>Dans de nombreux autres contextes à travers le monde, une telle séparation des domaines d’intervention n’existe pas. La police travaille en étroite collaboration avec les systèmes de protection sociale, par exemple par le biais d’initiatives de police de proximité. Au <a href="https://academic.oup.com/bjc/advance-article-abstract/doi/10.1093/bjc/azad025/7208975">Danemark</a>, par exemple, l’unité de police chargée de promouvoir la sortie d’individus des gangs vise à développer des relations personnelles avec des membres de gangs, travaillant en tandem avec les travailleurs sociaux.</p>
<p>En France, depuis 2003, ce genre d’initiative a été <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-science-politique-2009-6-page-1147.htm">abandonnée</a>, et remplacée par une <a href="https://www.cairn.info/revue-droit-et-societe-2017-3-page-469.htm?ref=doi&contenu=article">forme très différente de maintien de l’ordre</a>. Cette dernière n’est plus basée sur le développement d’un rapprochement avec les communautés locales, mais plutôt sur une stratégie qui vise à les <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/la-force-de-l-ordre-didier-fassin/9782021050837">contrôler</a> à travers <a href="https://www.cairn.info/bavures-policieres--270713502X.htm?contenu=presentation">l’emploi régulier de la force</a>.</p>
<h2>Une incertitude généralisée</h2>
<p>Cette approche policière est particulièrement bien incarnée par les multiples interventions – ou « descentes » – qui sont effectuées à Félix-Pyat par toute une pléthore de différents types de police – CRS, police municipale, police nationale – que nous avons nous-mêmes constatés plusieurs fois par semaine.</p>
<p>Même si ces interventions n’aboutissent que très rarement à des arrestations – qui se font généralement uniquement sur la base d’informations précises – elles suscitent une inquiétude généralisée au sein de la cité, car elles sont perçues comme imprévisibles et arbitraires.</p>
<p>Cette dynamique sécuritaire particulière s’inscrit dans le courant de la <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/03/29/a-marseille-une-nouvelle-strategie-du-pilonnage-face-au-trafic-de-drogue_6074811_3224.html">« stratégie de pilonnage »</a> annoncée en 2021 par Gérald Darmanin, le ministre de l’intérieur français, pour lutter contre le trafic de drogue, mais elle peut aussi être reliée au discours politique plus large du besoin d’une <a href="https://twitter.com/EmmanuelMacron/status/1384207024481705995">« reconquête républicaine »</a> que le président de la République Emmanuel Macron a lancée en 2018.</p>
<p>Celui-ci identifie un certain nombre de zones urbaines en France – dont Félix-Pyat – comme des <a href="https://www.fayard.fr/livre/les-territoires-perdus-de-la-republique-9782842058241/">« territoires perdus de la République »</a>, où séviraient des attitudes et des pratiques criminelles, anti-républicaines, et anti-françaises, un discours qui peut clairement servir à légitimer la mise en œuvre toujours plus intense de nouvelles formes de maintien de l’ordre répressives afin de les « reconquérir ».</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/I4Fr6xokozw?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Athéna, de Romain Gavras, 2023, YouTube.</span></figcaption>
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<h2>Un abandon de l’éthos républicain français</h2>
<p>La représentation symboliquement très violente des <a href="https://www.cairn.info/la-france-a-peur--9782707165039.htm">cités comme des lieux intrinsèquement problématiques</a> qu’il faut « reconquérir », est de fait facilitée par cette bifurcation entre l’action sociale et l’action sécuritaire de l’État français. C’est cette dernière qui permet d’ignorer le fait que socialement, la vie quotidienne dans les cités est fondamentalement régie par l’État, et de mettre en avant l’idée que les cités ont besoin d’être « reconquises » par l’État.</p>
<p>Plusieurs de nos interlocuteurs étatiques – tant sociaux que sécuritaires – ont d’ailleurs explicitement justifié leurs modes d’intervention souvent très verticaux en argumentant que les habitants des cités les avaient « abandonnés », et que les consulter ne servait à rien. Pour les habitants de cités telles Félix-Pyat, par contre, ces stratégies de « reconquête » sont clairement perçues comme un abandon de la promesse de l’éthos républicain français d’inclusion et d’égalité.</p>
<p>Une habitante de la cité, que nous appellerons Noémie, nous a par exemple livré avec force sa conviction lors d’un entretien à propos de la violence policière dans la cité : « la police, c’est censé être des gardiens de la paix ». Sélim, pour sa part, nous a dit : « la police vient quand on ne les veut pas et ne vient jamais quand on les appelle… ».</p>
<p>En d’autres termes, les habitants de la cité ne se perçoivent plus comme vivant au sein d’espaces bénéficiant des règles et des principes d’un état de droit s’appliquant de manière égalitaire et universellement, mais plutôt dans des <a href="https://shs.hal.science/halshs-01151204v1/document">« espaces d’exception »</a>, au sein desquels ils sont confrontés à une politique sécuritaire répressive et un État-providence oppressif, dont les actions sont mises en œuvre de manière différenciée, inconstante, et arbitrairement. C’est cela qui constitue la forme « d’abandon » la plus importante affectant les cités telles que Félix-Pyat.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221195/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dennis Rodgers a reçu une bourse ERC Advanced Grant (no. 787935) du Conseil Européen de la Recherche (<a href="https://erc.europa.eu">https://erc.europa.eu</a>) pour un projet intitulé “Gangs, Gangsters, and Ganglands: Towards a Global Comparative Ethnography” (GANGS).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Steffen Bo Jensen is a senior researcher at DIGNITY-Danish Institute Against Torture and a professor at the Department of Politics and Society, Aalborg University in Denmark
</span></em></p>Comment vit-on dans la cité Félix-Pyat à Marseille, l'un des quartiers les plus pauvres de France ? Bien que de nombreuses familles soient soutenues financièrement par l'État, elles se sentent pourtant abandonnées sur le volet sécuritaire.Dennis Rodgers, Research Professor, Anthropology and Sociology, Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID)Steffen Bo Jensen, Professor, Department of Politics and Society, Aalborg UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2211392024-03-13T15:56:04Z2024-03-13T15:56:04ZMarseille : immersion dans la cité Félix-Pyat (3/4) - Des murs devant les yeux<p><em>L’année 2023 a été particulièrement meurtrière à Marseille : selon des chiffres avancés par le procureur de la ville, <a href="https://www.lefigaro.fr/marseille/marseille-la-rivalite-sanglante-entre-deux-bandes-rivales-a-l-origine-du-record-de-narchomicides-20231221">au moins 49 personnes seraient mortes et plus d’une centaine auraient été blessées</a> du fait de trafic de stupéfiants. Au point où le terme <a href="https://www.liberation.fr/checknews/narchomicide-la-delinquance-change-de-visage-les-mots-pour-la-comptabiliser-aussi-20230912_JO4V77R6JJEPDBGSESXQDDTHAM/">« narchomicides »</a> est évoqué. Les médias ont été nombreux à couvrir ce <a href="https://www.lemonde.fr/m-le-mag/visuel/2024/01/12/un-mort-par-semaine-a-marseille-les-ravages-de-la-guerre-de-la-drogue_6210524_4500055.html">phénomène</a> qui semble dépasser les pouvoirs publics. Faisant un pas de côté, les anthropologues Dennis Rodgers et Steffen Jensen ont choisi d’explorer cette violence de manière plus large et plus contextualisée, en se basant sur un terrain de sept mois effectué entre 2021 et 2023 dans la cité Félix-Pyat. Située au cœur du III<sup>e</sup> arrondissement marseillais, elle est souvent décrite comme l’une des plus difficiles de la préfecture des Bouches-du-Rhône. L’une de ses caractéristiques : un parc urbain défaillant et dangereux.</em></p>
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<p>La violence du trafic de la drogue est souvent perçue comme faisant partie intégrante de la vie dans les cités de Marseille. Nous l’avons constaté un après-midi d’avril 2022, lorsque nous avons parcouru la cité avec Nadia, une femme d’une trentaine d’années qui est née et a grandi dans le quartier.</p>
<p>Pendant notre marche, elle nous a parlé de la transformation du quartier au fil des ans, et notamment <a href="https://www.calameo.com/books/007482417572bb6428aec">d’un plan de rénovation urbaine qui eut lieu entre 2001 et 2005</a>. Celui-ci avait impliqué la démolition de plusieurs bâtiments afin « d’aérer » la cité, c’est-à-dire créer des espaces ouverts entre les bâtiments construits à l’origine de manière très rapprochée, et rendre la cité architecturalement moins opprimante. Même s’il y avait eu des oppositions à cette initiative à l’époque, Nadia pensait qu’en fin de compte cela avait bien amélioré la vie quotidienne dans la cité.</p>
<p>Ceci étant dit, plusieurs endroits de la cité mettaient néanmoins Nadia mal à l’aise. Parmi ces derniers, la piste de pétanque qui, selon elle, était « un espace très masculin », mais aussi et surtout, les lieux proches des points de vente de drogue connus. Plus particulièrement, la place centrale à l’entrée du quartier qu’elle nous disait avoir peur de traverser.</p>
<p>Elle nous a notamment expliqué qu’elle l’évitait régulièrement en raison des « petits » qui y traînaient souvent. « Je préférerais qu’ils ne soient pas là », nous dit-elle, malgré le fait qu’elle les connaissait presque tous, car eux aussi étaient originaires de la cité.</p>
<h2>« les petits » et « les grands »</h2>
<p><a href="https://www.theses.fr/2022PA100107">Comme c’est le cas dans de nombreuses autres cités à Marseille et ailleurs</a>, les personnes qui participent au trafic de drogue à Félix-Pyat peuvent être catégorisées en groupe d’âge. Il y a « les petits », généralement âgés de 14 et 18 ans, et « les grands », qui ont plutôt entre 19 et 25 ans.</p>
<p>Ces groupes d’âge ont des rôles différents au sein de l’organisation du trafic – les « petits » sont des « guetteurs » ou des « rabatteurs » (qui dirigent les clients vers le point de vente), et les « grands » sont des « charbonneurs » (vendeurs), ou bien des « gérants » de point de vente.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/a-marseille-lespace-public-vu-par-ceux-et-celles-qui-sinjectent-des-drogues-209646">À Marseille, l’espace public vu par ceux et celles qui s’injectent des drogues</a>
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<p>Les « petits » sont très visibles dans les rues de la cité, soit individuellement, soit en groupe. Beaucoup d’habitants de Félix-Pyat – de toutes générations – nous ont dit au cours de nos recherches qu’ils étaient devenus « incontrôlables ». Ils faisaient notamment la comparaison avec quelques années auparavant, quand « ils respectaient les grands », et les habitants de la cité plus généralement.</p>
<blockquote>
<p>« Ils rendaient service… ils ne nous embêtaient pas, sauf en fumant ou en encombrant les escaliers, mais maintenant ils nous menacent », nous a raconté Noémie, une ancienne habitante qui a longtemps vécu dans de la cité et qui y revient souvent.</p>
</blockquote>
<p>Faisant explicitement écho au malaise de Nadia et Noémie, deux autres jeunes femmes de la cité âgées d’une vingtaine d’années, que nous appellerons Mariama et Jeanne, ont souligné lors d’un entretien :</p>
<blockquote>
<p>« On les connaît tous – on a grandi avec ! – mais on ne passe pas à côté d’eux. Il vaut mieux éviter… Ils sont imprévisibles et c’est dangereux… On ne sait pas ce qu’ils pensent, on ne sait pas ce qu’ils disent… Ils ne sont pas bienveillants, on va dire, et ils sont… ils s’en foutent !… Il vaut mieux prendre des distances… »</p>
</blockquote>
<p>D’autres habitants nous ont relaté souffrir des menaces et des insultes répétées. Ils nous ont dit aussi devoir périodiquement justifier leur présence dans les espaces publics de la cité.</p>
<p>Nous en avons d’ailleurs nous-mêmes fait l’expérience, lors de nos recherches. Plusieurs fois, un ou plusieurs jeunes de ce groupe de « petits » nous ont interpellé, demandant de manière menaçante ce que nous faisions là, nous disant que nous n’avions rien à faire dans la cité, ou bien nous accusant d’être des policiers et nous sommant de partir.</p>
<h2>La lettre</h2>
<p>En mai 2023, après une série de fusillades dans la cité liée à la guerre entre <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/08/17/a-marseille-la-rivalite-entre-deux-bandes-de-trafiquants-de-drogue-de-plus-en-plus-meurtriere_6185612_3224.html">deux réseaux du trafic de drogue</a> qui a ensanglanté la ville, un groupe de mères de Félix-Pyat a organisé des marches pour protester contre l’insécurité ambiante.</p>
<p>Ces marches ont été accompagnées d’une forte présence policière qui a considérablement perturbé le trafic de drogue, effrayant les clients et freinant les livraisons.</p>
<p>Après la troisième marche, la lettre suivante a été affichée un peu partout dans la cité :</p>
<p>C’est la première fois qu’une telle initiative était menée à Félix-Pyat, même si ce genre de message a déjà été observé dans d’autres cités en France. La lettre ressemblait d’ailleurs fortement à une lettre similaire qui avait été affichée en banlieue parisienne et qui a circulé sur les réseaux sociaux.</p>
<p>Selon les témoignages que nous avons pu recueillir, cette lettre a marqué un tournant dans les relations avec les « jeunes du quartier ».</p>
<p>Même si certains habitants ont été choqués par sa nature menaçante – certains parlant même de la « honte » de voir « des fils menacer leurs mères » – la plupart ont jugé cette lettre de manière plus positive, soulignant que les « jeunes » s’excusaient et proposaient d’essayer de minimiser l’impact du trafic de drogue sur la vie quotidienne du quartier.</p>
<p>Aamira nous a dit, par exemple :</p>
<blockquote>
<p>« J’ai rigolé pour les fautes d’orthographe… C’est un avertissement, mais ils ont aussi dit qu’il ferait un effort, c’est du donnant-donnant – les jeunes essayent de faire propre, ils respectent les parents, ils nettoient… C’est uniquement menaçant si on ne respecte pas l’avertissement. »</p>
</blockquote>
<p>Comme nous l’a dit un autre de nos interlocuteurs, Abu, « ils ont fait un effort et se sont responsabilisés ! », notant en particulier que « les jeunes » allaient tenter de « sécuriser » les rues contre les fusillades après celles ayant sévi dans Félix-Pyat au cours des derniers mois.</p>
<p>Ces derniers ont de facto placés des bennes à ordures à des points stratégiques dans les rues de la cité afin de faire office de barrage et de ralentir les voitures. Même si certains habitants s’en plaignaient – notamment parce qu’il avait été stipulé de façon claire qu’ils n’avaient pas le droit de bouger ces conteneurs – beaucoup voyaient cette initiative d’un bon œil.</p>
<p>Par exemple, lors d’une conversation avec une personne travaillant pour une association locale, nous avons observé ensemble des CRS venus remettre les bennes à leur place, et celle-ci a remarqué :</p>
<blockquote>
<p>« la police nous enlève le peu de sécurité que nous avons, elle rend l’endroit ouvert aux attaques en enlevant les conteneurs ».</p>
</blockquote>
<h2>L’ambiguïté de la gouvernance criminelle</h2>
<p>Ces différents exemples illustrent bien comment le trafic de drogue impacte l’organisation urbaine de Félix-Pyat et influence la vie quotidienne des habitants de la cité, tantôt de manière négative, mais aussi parfois plus positivement (même si, bien sûr, la défense de la cité à travers la réorganisation de bennes d’ordures ne peut être vue que comme une action assez désespérée et ponctuelle…).</p>
<p>La plupart des médias ont tendance à décrire ce phénomène de <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/perspectives-on-politics/article/abs/conceptualizing-criminal-governance/0105EC32BB9F26830179CF0B16917B02">« gouvernance criminelle »</a> à Marseille comme étant uniquement dérogatoire à l’ordre public, parlant de l’émergence de <a href="https://www.laprovence.com/article/actualites/2628570/marseille-existe-t-il-des-cites-interdites.html">« cités interdites »</a>.</p>
<p>Le problème avec cette vision des choses trop étroite est qu’elle situe la dynamique d’agencement urbain des cités marseillaises comme étant uniquement liée aux impulsions d’acteurs locaux, tels que les trafiquants de drogues d’un quartier.</p>
<p>Plus particulièrement, l’idée des <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ms4LVcABjiI">« cités interdites »</a> place la responsabilité de l’interdiction au sein des cités, ce qui n’est que partiellement le cas. En fait, ces actes d’agencement urbain découlent souvent d’éléments qui sont extérieurs à la cité, comme nous venons de le montrer. Dans le cas de la violence à laquelle étaient confrontés les habitants du quartier en 2023, elle était due à une guerre de réseaux de drogues plus larges que le petit trafic dans le quartier.</p>
<h2>Que deviendra le bâtiment B ?</h2>
<p>La nature problématique de ce type de représentation devient encore plus claire en se penchant sur une autre forme d’organisation des espaces urbains : les processus d’aménagement du territoire (qu’ils soient portés par des institutions étatiques ou privées).</p>
<p>La question du futur du bâtiment B à Félix-Pyat est souvent revenue dans nos conversations avec les habitants et acteurs du quartier, par exemple.</p>
<p>Plus grand immeuble de la cité – avec 20 étages, 146 appartements, et plus de 600 habitants – c’est aussi l’un des plus insalubres : les vide-ordures sont remplis à ras bord, les murs couverts de graffiti, les appartements prennent régulièrement feu, et les ascenseurs sont généralement en panne.</p>
<p>Depuis des années, il fait l’objet de rumeurs concernant sa destruction imminente. Bien que cette dernière ait été <a href="https://marsactu.fr/a-felix-pyat-la-tour-b-va-tomber/">actée par l’Agence nationale de rénovation urbaine</a> (ANRU), le déficit budgétaire du bailleur social propriétaire de la majorité des appartements, <a href="https://marsactu.fr/marseille-habitat-face-a-un-mur-de-dettes-a-cause-de-471-parkings-hors-de-prix/">Marseille Habitat</a>, ainsi que le refus par les quelques propriétaires individuels de vendre leurs appartements à des prix inférieurs au marché, empêche sa mise en œuvre.</p>
<p>Aucune information officielle n’a cependant filtré sur l’état d’avancement ou pas de la destruction auprès des habitants, comme nous avons pu le constater lors de multiples réunions organisées par divers acteurs locaux dans la cité. De nombreuses personnes y présentaient des signes d’exaspération et d’énervement.</p>
<p>Certains habitants propriétaires d’appartements dans l’édifice se demandaient s’ils seraient expropriés sans recevoir une compensation adéquate. D’autres, locataires, <a href="https://www.cairn.info/revue-negociations-2023-1-page-5.htm">s’inquiétaient à l’idée de devoir être relogés loin de la cité</a>. Tous en tout cas partageaient le sentiment que « personne ne sait rien », mais aussi que c’était une stratégie voulue afin de créer de l’incertitude et du stress, dans le but d’épuiser les habitants et de faciliter la destruction de l’édifice.</p>
<p>Ces inquiétudes concernant la destruction du bâtiment B viennent aussi s’additionner à d’autres incertitudes liées à l’initiative de rénovation urbaine baptisée <a href="https://www.euromediterranee.fr/">Euroméditerranée</a>. Lancé en 1995, ce partenariat public-privé de 7 milliards d’euros vise à <a href="https://www.theses.fr/2019EHES0135">remodeler une vaste zone</a> située immédiatement au nord du centre-ville de Marseille. Felix-Pyat ne fait pas partie de la zone, mais la borde, et constitue donc un site de développement immobilier potentiel de premier ordre.</p>
<p>Certains habitants de Félix-Pyat avec qui nous avons discuté nous ont explicitement exprimé leur anxiété – « tout le monde est stressé » – face à cette gentrification potentielle, Selim nous disant même carrément :</p>
<blockquote>
<p>« Je pense que ce quartier, il est voué à être détruit. Parce que là, le projet Euromed… il y a plein d’échos qui disent qu’il y a plein de plans différents et parmi ces plans-là, Félix-Pyat n’existe pas… Donc, je pense qu’ils veulent détruire Félix-Pyat… Enfin, le détruire pour le reconstruire et ramener d’autres personnes, en fait, d’autres, euh… on va dire d’autres catégories de personnes… »</p>
</blockquote>
<h2>Détruire le quartier pour le reconstruire</h2>
<p>Ces craintes sont devenues particulièrement apparentes autour de l’aménagement dans le cadre de l’initiative Euroméditerranée d’un espace vert, le parc Bougainville, en bordure nord de la cité Félix-Pyat. Les travaux, <a href="https://www.euromediterranee.fr/projets/parc-bougainville">prévus en deux étapes</a>, ont commencé en 2022, et dureront jusqu’en 2027. <a href="https://madeinmarseille.net/155624-parc-municipal-bougainville-ouvre-public/">Une fois terminé</a>, le parc comprendra entre autres des jardins thématiques, des espaces pour différents sports de plein air, un parc aquatique, un hectare de « prairie sauvage », une rivière réhabilitée, des jardins potagers collectifs, ainsi qu’un « jardin pédagogique ».</p>
<p>Quand le parc Bougainville sera finalisé, un grand mur le séparera de Félix-Pyat, et il n’existera qu’un seul accès au Parc à partir de la cité, comme le montre l’image ci-dessous.</p>
<p>Cette architecture particulière du côté sud du Parc contraste brutalement avec le côté nord plus ouvert, une situation que de nombreux habitants de Félix-Pyat ne manquaient pas de noter lors de nos échanges avec eux en 2022, se plaignant aussi plus généralement d’un manque de concertation avec eux. En même temps, beaucoup avaient néanmoins l’espoir que le projet leur soit bénéfique.</p>
<h2>Une clôture grillagée</h2>
<p>Des représentants de la politique de la ville avec qui nous avons effectué des entretiens en 2022 nous avaient cependant déclaré que « le parc Bougainville n’est pas prévu pour eux [<em>ndlr, les habitants de la cité Félix Pyat</em>] ». C’est donc sans surprise qu’au fur et à mesure que le projet s’est mis en place, les discours des habitants de Félix-Pyat ont évolué.</p>
<p>Lors de notre retour à la cité en 2023, presque plus personne ne parlait positivement du parc. Un nouvel élément particulièrement dérangeant pour les habitants de la cité était apparu : une grande clôture grillagée érigée au-dessus du mur séparant la cité du parc, ostensiblement afin de minimiser le jet de déchets venant des édifices bordurant le parc.</p>
<p>« C’est comme si on était des animaux qu’on met en cage » nous a commenté laconiquement une personne travaillant pour une association locale de Félix-Pyat.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/570569/original/file-20240122-16-ghnge2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/570569/original/file-20240122-16-ghnge2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/570569/original/file-20240122-16-ghnge2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/570569/original/file-20240122-16-ghnge2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/570569/original/file-20240122-16-ghnge2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/570569/original/file-20240122-16-ghnge2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/570569/original/file-20240122-16-ghnge2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/570569/original/file-20240122-16-ghnge2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La clôture grillagée. À noter que la tombée du mur de l’autre côté fait plus de 3 mètres.</span>
<span class="attribution"><span class="source">D. Rodgers, S. Jensen</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ce dernier commentaire reflète bien les effets psychosociologiques négatifs que ce genre d’aménagement du territoire exclusif peut avoir. Cela peut potentiellement contribuer à la normalisation de visions ségrégationnistes de la société, et c’est pour cela que dans d’autres contextes, par exemple à <a href="https://www.jstor.org/stable/43497506">Managua</a> au Nicaragua, des initiatives de rénovation urbaine analogues à l’Euroméditerranée ont été qualifiées de « violence infrastructurelle », pour souligner comment elles peuvent être intrinsèquement oppressives.</p>
<p>Toute proportion gardée – le contexte nicaraguayen étant plus violent et autoritaire – on pourrait se demander dans quelle mesure l’aménagement des infrastructures du territoire à Marseille peut lui aussi être vu dans certains cas comme une forme de violence, dont les effets sociospatiaux sont tout aussi déstabilisants que ceux des activités du trafic de la drogue.</p>
<p>Pour les habitants des cités telles que Félix-Pyat en tout cas, il s’agit de se confronter à un autre type de stress émotionnel qui ne fait que renforcer leur sentiment d’isolation et de mise à l’écart.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221139/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dennis Rodgers a reçu une bourse ERC Advanced Grant (no. 787935) du Conseil Européen de la Recherche (<a href="https://erc.europa.eu">https://erc.europa.eu</a>) pour un projet intitulé “Gangs, Gangsters, and Ganglands: Towards a Global Comparative Ethnography” (GANGS).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Steffen Bo Jensen is a senior researcher at DIGNITY-Danish Institute Against Torture and a professor at the Department of Politics and Society, Aalborg University in Denmark
</span></em></p>Certains aménagements des infrastructures du territoire à Marseille peuvent être vus comme une forme de violence, dont les effets sont tout aussi insécurisants que les activités du trafic de drogue.Dennis Rodgers, Research Professor, Anthropology and Sociology, Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID)Steffen Bo Jensen, Professor, Department of Politics and Society, Aalborg UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2208932024-03-12T16:05:11Z2024-03-12T16:05:11ZMarseille : immersion dans la cité Félix-Pyat (2/4) - Des trafics pas si juteux, des morts complexes<p><em>L’année 2023 a été particulièrement meurtrière à Marseille : selon des chiffres avancés par le procureur de la ville, <a href="https://www.lefigaro.fr/marseille/marseille-la-rivalite-sanglante-entre-deux-bandes-rivales-a-l-origine-du-record-de-narchomicides-20231221">au moins 49 personnes seraient mortes et plus d’une centaine auraient été blessées</a> du fait de trafic de stupéfiants. Au point où le terme <a href="https://www.liberation.fr/checknews/narchomicide-la-delinquance-change-de-visage-les-mots-pour-la-comptabiliser-aussi-20230912_JO4V77R6JJEPDBGSESXQDDTHAM/">« narchomicides »</a> est évoqué. Les médias ont été nombreux à couvrir ce <a href="https://www.lemonde.fr/m-le-mag/visuel/2024/01/12/un-mort-par-semaine-a-marseille-les-ravages-de-la-guerre-de-la-drogue_6210524_4500055.html">phénomène</a> qui semble dépasser les pouvoirs publics. Faisant un pas de côté, les anthropologues Dennis Rodgers et Steffen Jensen ont choisi d’explorer cette violence de manière plus large et plus contextualisée, en se basant sur un terrain de sept mois effectué entre 2021 et 2023 dans la cité Félix-Pyat. Située au cœur du III<sup>e</sup> arrondissement marseillais, elle est souvent décrite comme l’une des plus difficiles de la préfecture des Bouches-du-Rhône. Mais le pouvoir d’attraction de la drogue et de son trafic recèle aussi de nombreuses parts d’ombre.</em></p>
<hr>
<blockquote>
<p>« Il faut se méfier des apparences… Ça paraît déstructuré, on sait nous en les observant que tous les 2-3 jours, tout le monde change de rôle… [Le réseau], ça génère… à peu près, 80,000 euros par semaine, donc ça fait beaucoup d’argent dans l’arrondissement le plus pauvre de France… ».</p>
</blockquote>
<p>Cette phrase est issue d’un entretien que nous avons effectué avec un policier, lors de nos recherches dans la cité de Félix-Pyat dans le III<sup>e</sup> arrondissement de Marseille. Elle résume bien la manière contradictoire dont le trafic de drogue dans les cités de la ville est perçu : il est à la fois opaque et énigmatique, organisé et lucratif.</p>
<h2>Un guetteur ne touche pas quatre fois le smic</h2>
<p>Si l’on s’attarde par exemple sur la particularité du vocabulaire utilisé, l’expression « le réseau », confère au trafic un certain formalisme et une structure tentaculaire, tout comme la rhétorique qui l’accompagne via d’autres termes communément mis en avant, tels que le « business » ou le <a href="https://www.rtl.fr/actu/justice-faits-divers/marseille-comment-le-trafic-de-drogue-gangrene-des-quartiers-de-la-ville-7900063451">« supermarché de la drogue »</a>.</p>
<p>Pourtant, de profondes contradictions et ambiguïtés sous-tendent le trafic de drogue à Félix-Pyat. Le chiffre de 80 000 euros de bénéfice hebdomadaire avancé par le policier nous semble difficile à réconcilier avec les niveaux de trafic que nous avons pu observer lors de nos recherches dans la cité. Et ceci même en prenant en compte le fait qu’une grande partie des ventes se font par <a href="https://www.ofdt.fr/BDD/publications/docs/eftxcg2dc.pdf">internet</a> plutôt que par le deal de rue.</p>
<p>En tout cas, les chiffres de saisies policières partielles concernant le trafic prenant place dans la cité auxquels nous avons eu accès impliquent souvent des quantités de drogue très faibles. Nous avons également essayé de confirmer certains des chiffres sur les rémunérations des différents « métiers » de la drogue, comme les « guetteurs », c’est-à-dire l’échelon le plus bas du trafic qui concerne surtout des jeunes de 14 à 18 ans. Postés en des lieux stratégiques de la cité, ils ont la responsabilité de donner l’alerte si la police ou toute personne jugée « suspecte » pénètre dans les lieux. Les autorités, mais aussi les travailleurs sociaux, associatifs, et même certains habitants du quartier, affirment qu’ils gagnent près de 200 euros par jour.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/5QVjvvVH0yc?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">So La Zone, le jeune rappeur marseillais, originaire de la Castellane, s’est fait connaître en racontant notamment son quotidien de dealer et ses relations avec la police et les institutions judiciaires.</span></figcaption>
</figure>
<p>Cela signifierait donc qu’un « guetteur » gagne quatre fois plus que le smic. À la lumière de nos observations sur le terrain, ce montant nous parait peu probable. En effet, les guetteurs que nous avons vus n’affichent que très peu de signes ostentatoires d’une quelconque richesse et donnent souvent même plutôt l’impression d’être dans le besoin à la façon dont ils sont habillés.</p>
<p>De plus, il s’agit d’une activité irrégulière et à temps partiel. Les jeunes proches du réseau avec qui nous avons échangé ont suggéré qu’au mieux un guetteur pouvait s’attendre à recevoir « un kebab ou un peu de drogue, peut-être 20 euros, s’il a de la chance ». Certains <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ms4LVcABjiI">reportages</a> à propos du trafic de drogue à Félix-Pyat semblent en outre confirmer ces dires.</p>
<p>Il arrive même que les guetteurs ne perçoivent aucune rémunération, en tout cas quand ils commencent cette activité. Comme nous l’a expliqué un jeune de Félix-Pyat qui avait été « aspirant guetteur », il s’était mis à guetter « juste comme ça », en imitant d’autres jeunes, pour essayer de se rapprocher du réseau, parce qu’il « voulait se faire de l’argent facile ». Ce dernier a rapidement déchanté et a vite délaissé le trafic après quelques semaines.</p>
<p>Au vu de la condition socio-économique de ceux qui nous ont confié avoir été impliqués par le passé dans le trafic de la drogue à Félix-Pyat, on peut aussi estimer que la grande majorité ne s’est pas enrichie (une situation qui s’applique aussi à <a href="https://www.berghahnjournals.com/downloadpdf/view/journals/focaal/2017/78/fcl780109.pdf">d’autres contextes</a>).</p>
<p>Selon nos recherches et nos entretiens, il apparaîtrait donc que les niveaux de rémunérations liés au trafic de drogue restent en vérité assez flous et souvent de l’ordre du fantasme, en tout cas au niveau de la cité – ceci ne veut pas dire que le trafic de drogue ne génère pas des revenus importants, mais ceux-ci sont surtout associés avec les hautes sphères du crime organisé, comme l’ont par exemple documenté <a href="https://www.cairn.info/milieux-criminels-et-pouvoirs-politiques--9782811100179.htm">Jean-Louis Briquet et Gilles Favarel-Garrigues</a>.</p>
<h2>Qu’est-ce qu’un règlement de compte ?</h2>
<p>S’il existe des éléments de contradictions et de confusion autour des discours concernant les rémunérations associées avec le trafic de drogue, ils sont encore plus importants concernant d’autres notions associées avec celui-ci, comme celle du « règlement de compte », largement relayée par les <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/bouches-du-rhone/marseille/reglement-de-comptes-a-marseille-coup-de-filet-contre-une-equipe-de-la-dz-mafia-suspectee-d-un-narchomicide-a-la-cite-des-micocouliers-2905520.html">médias</a> pour parler des homicides liés au trafic de drogue à Marseille.</p>
<p>Si l’expression n’a aucun statut juridique formel, elle n’en est pas moins utilisée, notamment par la police ou les institutions publiques, pour décrire une grande partie des <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/bouches-du-rhone/marseille/carte-reglements-de-comptes-dans-quels-quartiers-ont-eu-lieu-les-narchomicides-a-marseille-en-2023-2873189.html">homicides</a> liés au trafic de drogue qui ont lieu dans cité phocéenne ou ailleurs. À Marseille, on dénombre chaque année entre 20 et 30 règlements de compte par an depuis 2015, avec un pic exceptionnel de <a href="https://www.lemonde.fr/m-le-mag/visuel/2024/01/12/un-mort-par-semaine-a-marseille-les-ravages-de-la-guerre-de-la-drogue_6210524_4500055.html">49 morts en 2023</a>.</p>
<p>La logique sous-jacente du « règlement de compte » est de distinguer les <a href="https://books.openedition.org/pup/50550">meurtres liés aux dynamiques internes du trafic de drogue</a> – par exemple pour des questions de conflits d’ordre financiers ou de contrôle du marché – de meurtres qui seraient plus d’ordre interpersonnel ou accidentel.</p>
<p>Les médias parlent clairement beaucoup moins de ces derniers, préférant plutôt établir des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_de_r%C3%A8glements_de_comptes_%C3%A0_Marseille_et_sa_r%C3%A9gion">décomptes annuels</a> du nombre croissant de règlements de compte à Marseille.</p>
<p>Mais décrire un homicide systématiquement comme un « règlement de compte » est épistémologiquement problématique, car il décontextualise cette violence, limitant sa cause et ses conséquences au seul trafic de drogue et aux personnes directement impliquées, c’est-à-dire à un conflit entre la victime et son meurtrier.</p>
<p>En réalité, les dynamiques et les motivations qui sous-tendent la violence liée au trafic de drogue ont souvent d’autres dimensions, et trouvent leurs origines dans un contexte plus large qui reste méconnu.</p>
<h2>Comprendre les logiques de la violence</h2>
<p>Prenons par exemple le <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/bouches-du-rhone/marseille/homme-24-ans-abattu-cite-felix-pyat-marseille-1364327.html">conflit violent survenu à Félix-Pyat en 2017</a> impliquant la mort d’un trafiquant local, tué par d’autres trafiquants de la cité. À priori, ce meurtre correspondrait très bien à la notion d’un règlement de compte, c’est-à-dire une tuerie entre dealers pour le contrôle du trafic dans la cité. C’est effectivement ce qui a été rapporté dans les médias à l’époque.</p>
<p>Mais même si ces éléments étaient factuels, parler de ce meurtre uniquement en termes de règlement de compte est réducteur et masque certains facteurs significatifs, historiques, communautaires ou démographiques. Le fait notamment que la victime était d’origine maghrébine et que ses assassins étaient Comoriens. Aucun média ne l’a mentionné, or c’est capital si l’on veut comprendre les logiques de cette violence.</p>
<p>L’assassinat peut être lié à un moment critique de transition dans l’organisation du trafic de drogue à Félix-Pyat. Ce dernier était jusque-là dominé par un groupe de Maghrébins qui cantonnait les Comoriens à des tâches subalternes, en les maltraitant au passage. Suite à l’assassinat du trafiquant maghrébin, c’est un groupe de Comoriens qui a pris les commandes du trafic local.</p>
<p>Ce basculement peut être associé à des évolutions démographiques plus larges, et plus particulièrement à la minorisation de la population maghrébine de Félix-Pyat suite à une <a href="https://recitsdevie.org/projet_au-143-rue-felix-pyat.htm">importante vague migratoire comorienne</a> dans les années 1990 et 2000.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/SUO3NGtd8FU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Reportage LCP sur la diaspora comorienne à Marseille.</span></figcaption>
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<p>Ceci a conduit à des tensions raciales dans la cité, qui ont certainement contribué au cycle de violences débouchant sur le meurtre, et dont on retrouve trace lors d’entretiens que nous avons effectués.</p>
<p>Les discours, tant de ceux impliqués dans le trafic que de nombreux habitants du quartier, expliquaient le meurtre comme une vengeance des « esclaves noirs » contre les « esclavagistes arabes », reprenant une rhétorique historique et racialisée symboliquement puissante.</p>
<p>Ce meurtre montre ainsi que les causes de ce genre de violence débordent souvent les seuls enjeux du trafic de drogue et qu’ils peuvent être liés à une histoire et à des dynamiques locales particulières.</p>
<p>Cette contextualisation est d’autant plus importante quand on considère la réponse policière à ces meurtres. La stratégie dite de « pilonnage » notamment qui, comme <a href="https://www.20minutes.fr/societe/3227239-20220201-marseille-quoi-strategie-pilonnage-trafics-stup">l’indiquait un article récent</a>, consiste principalement à « taper de façon massive et répétée sur les endroits les plus problématiques pour effriter les points de deals et les réseaux de trafiquants » ne prend pas forcément en compte ces éléments contextuels.</p>
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<img alt="Contrôle d’un scooter dans le IIIᵉ arrondissement de Marseille, 2010. Photo d’illustration" src="https://images.theconversation.com/files/577976/original/file-20240226-17-zie9ae.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/577976/original/file-20240226-17-zie9ae.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/577976/original/file-20240226-17-zie9ae.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/577976/original/file-20240226-17-zie9ae.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/577976/original/file-20240226-17-zie9ae.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/577976/original/file-20240226-17-zie9ae.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/577976/original/file-20240226-17-zie9ae.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Contrôle d’un scooter, 2010. Photo d’illustration.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/25998107@N03/4460904556/in/album-72157623565134453/">Philippe Pujol/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Comme le relèvent les chercheurs Michel Peraldi et Claire Duport, ces interventions policières s’inscrivent dans un champ d’action limitée, celui du <a href="https://www.transverscite.org/IMG/pdf/marseille_une_affaire_d_etat_aoc_2021.pdf">« harcèlement policier et judiciaire »</a> uniquement des individus perçus comme directement associés avec le trafic de la drogue. Une compréhension plus large des enjeux démographiques et historiques pourrait peut-être permettre de mettre en place des mesures plus efficaces – et pas uniquement répressives – pour lutter contre et pallier les effets du trafic de la drogue.</p>
<h2>Des morts imbriquées dans des dynamiques plus larges</h2>
<p>La violence liée au trafic de la drogue est également indissociable de la vie sociale de la cité, dans la mesure où un trafiquant de drogue assassiné dans un règlement de compte est toujours le fils, l’ami, l’amant, le voisin ou une connaissance de quelqu’un. Autant de perspectives qui nourrissent un récit plus complexe que celui généralement rendu public et qui permettent aussi de mieux comprendre la place et les conséquences du trafic et de sa violence dans la cité.</p>
<p>Prenons par exemple un deuxième homicide qui a eu lieu à Félix-Pyat en février 2022, lorsque nous étions sur le terrain. La victime était un jeune homme de 23 ans. Selon les médias et la police, il était <a href="https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/un-marseillais-de-23-ans-tue-par-balles-a-la-cite-felix-pyat-1644832997">« connu des forces de l’ordre »</a>, laissant ainsi entendre que cette mort était probablement un règlement de compte on ne peut plus « classique ».</p>
<p>Dans la cité, par contre, de nombreuses rumeurs contradictoires ont circulé. Si aucune de celles-ci ne remettait en cause le fait que la victime ait été impliquée dans le trafic de drogue, il a été dit que les causes de sa mort étaient toutes autres, et que le jeune homme aurait « mal regardé » ou « mal parlé » à quelqu’un, qu’il aurait fait de l’œil à la femme d’un d’autre, qu’il devait de l’argent ou encore qu’il était au centre d’un conflit familial.</p>
<p>Nous ne savons pas ce qui est vrai ou pas, mais le fait qu’il y ait eu de multiples rumeurs est significatif, car cela suggère, comme dans le cas du meurtre qui a eu lieu à Félix-Pyat en 2017, que cette mort était potentiellement au cœur de dynamiques plus larges que des conflits d’intérêts internes au trafic de drogue.</p>
<p>Il ne s’agit pas juste d’un problème d’ordre conceptuel ou de représentation. Une expression telle que la notion du « règlement de compte » – ou bien aussi celle plus récente de <a href="https://www.lefigaro.fr/marseille/narchomicide-a-marseille-deux-hommes-mis-en-examen-20240112">« narchomicide »</a> – finit par conditionner la manière dont on traite la violence.</p>
<p>La couverture médiatique des règlements de compte contribue en particulier à déshumaniser les protagonistes de ces violences, les qualifiant en général uniquement de personnes « connues des services de police », « connues pour des délits liés aux stupéfiants », ou bien « connues pour des faits de trafic de drogue ».</p>
<p>Réduire ainsi tant les auteurs et victimes d’un règlement de compte ou narchomicide à leur seul statut de criminel récidiviste conditionne non seulement la réponse des autorités publiques au trafic de la drogue mais aussi la réception émotionnelle et morale de cette violence, empêchant en particulier de comprendre comment cette violence peut émerger et les conséquences profondes qu’elle peut avoir.</p>
<h2>Une ambiance changée</h2>
<p>En mai 2023, nous sommes retournés à Félix-Pyat après quelques mois d’absence. La cité était en deuil, car <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/bouches-du-rhone/marseille/trois-jeunes-hommes-tues-par-balles-devant-une-boite-de-nuit-a-marseille-2777410.html">trois jeunes avaient été assassinés</a> dans leur voiture à la sortie d’une boite de nuit. Les médias ont présenté l’affaire comme un règlement de compte, soulignant en particulier :</p>
<blockquote>
<p>« parmi les occupants de la voiture (visée) trois étaient connus des services de police pour trafic de stupéfiants et sont originaires d’une cité qui est connue pour les trafics de stupéfiants, la cité Félix-Pyat ».</p>
</blockquote>
<p>Il y avait en fait <a href="https://www.leparisien.fr/faits-divers/marseille-trois-hommes-tues-par-balles-ce-matin-selon-les-secours-21-05-2023-UTW5UM74QVHIBEYLXIGD5XNIXQ.php">cinq personnes dans la voiture</a>, et d’après les habitants de Félix-Pyat avec qui nous en avons parlé, une seule des trois victimes aurait été impliquée dans le trafic.</p>
<p>Cependant, tous « étaient des gens que tout le monde connaissait ». Des centaines de personnes de la cité sont allées à leurs prières funéraires, et encore plus ont circulé sans discriminer entre les appartements des familles des trois défunts afin de leur présenter leurs condoléances, et en particulier aux mères, « qui sont celles qui souffrent le plus de la violence », comme nous a dit Nadia lors d’un entretien.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/meres-des-quartiers-populaires-des-intermediaires-sur-le-fil-210141">Mères des quartiers populaires : des intermédiaires sur le fil</a>
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<hr>
<h2>« Tu pourrais mourir juste parce que tu sors acheter du pain… »</h2>
<p>Mais au-delà du choc, l’ambiance dans la cité nous a semblé particulièrement pesante en mai 2023, en partie parce que ces meurtres ont eu lieu durant une période de six mois de violence accrue à Félix-Pyat.</p>
<p>De multiples attaques perpétrées depuis des voitures en marche par des personnes extérieures à la cité avaient notamment eu lieu, faisant plusieurs dizaines de blessés, dont beaucoup de victimes « collatérales » qui n’étaient pas liées au trafic de drogue.</p>
<p>Les habitants du quartier liaient cette nouvelle violence indiscriminée à une guerre entre <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/08/17/a-marseille-la-rivalite-entre-deux-bandes-de-trafiquants-de-drogue-de-plus-en-plus-meurtriere_6185612_3224.html">deux réseaux du trafic de drogue</a> opérant au niveau de la ville de Marseille tout entière <a href="https://www.ouest-france.fr/provence-alpes-cote-dazur/marseille-13000/dz-mafia-vs-yoda-trois-choses-a-savoir-sur-ces-deux-gangs-de-trafiquants-en-guerre-a-marseille-1ccb662a-3ce2-11ee-96f7-905515ebb819">et avec des ramifications internationales</a>. Ils n’en comprenaient pas la logique car elle n’était plus locale, dépassant le cadre de la cité, ce qui générait une énorme peur.</p>
<p>Les habitants de la cité se voyaient comme les victimes d’enjeux qui les dépassaient totalement :</p>
<blockquote>
<p>« Avant la personne qui mourrait était la personne qui était visée, c’était normal. Maintenant il n’y a plus de logique… » nous dit Aamira, une habitante de longue date.</p>
</blockquote>
<p>Fatima, pour sa part, renchérit :</p>
<blockquote>
<p>« on a tous peur, tu t’imagines, tu pourrais mourir juste parce que tu sors acheter du pain… ».</p>
</blockquote>
<p>Face à cette violence imprévisible et d’origine externe, la réponse des habitants a donc été de mettre en avant les liens sociaux et la solidarité au sein de la communauté, et de commémorer les trois jeunes morts. Cette réaction collective démontre bien à quel point les effets de la violence du trafic de la drogue vont au-delà de celui-ci, et comment ils affectent la communauté locale tout entière.</p>
<p>Sans une compréhension plus globale du contexte et des conséquences sociales et culturelles de cette violence et de la façon dont elle se structure, nous ne pourrons pas développer d’outils efficaces pour la contrer. Et limiter ses effets.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220893/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dennis Rodgers a reçu une bourse ERC Advanced Grant (no. 787935) du Conseil Européen de la Recherche (<a href="https://erc.europa.eu">https://erc.europa.eu</a>) pour un projet intitulé “Gangs, Gangsters, and Ganglands: Towards a Global Comparative Ethnography” (GANGS).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Steffen Bo Jensen is a senior researcher at DIGNITY-Danish Institute Against Torture and a professor at the Department of Politics and Society, Aalborg University in Denmark
</span></em></p>Il existe de profondes contradictions et ambiguïtés concernant le trafic de la drogue à Félix-Pyat.Dennis Rodgers, Research Professor, Anthropology and Sociology, Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID)Steffen Bo Jensen, Professor, Department of Politics and Society, Aalborg UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2208752024-03-11T16:14:07Z2024-03-11T16:14:07ZMarseille : immersion dans la cité Félix-Pyat (1/4) – La mauvaise réputation<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/572905/original/file-20240201-15-ld5s43.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C28%2C6287%2C3416&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Grands ensembles à Félix Pyat, Marseille, 3e arrondissement, 2021.
</span> <span class="attribution"><span class="source">D.Rodgers & S. Jensen</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p><em>L’année 2023 a été particulièrement meurtrière à Marseille : selon des chiffres avancés par le procureur de la ville, <a href="https://www.lefigaro.fr/marseille/marseille-la-rivalite-sanglante-entre-deux-bandes-rivales-a-l-origine-du-record-de-narchomicides-20231221">au moins 49 personnes seraient mortes et plus d’une centaine auraient été blessées</a> du fait de trafic de stupéfiants. Au point où le terme <a href="https://www.liberation.fr/checknews/narchomicide-la-delinquance-change-de-visage-les-mots-pour-la-comptabiliser-aussi-20230912_JO4V77R6JJEPDBGSESXQDDTHAM/">« narchomicides »</a> est évoqué. Les médias ont été nombreux à couvrir ce <a href="https://www.lemonde.fr/m-le-mag/visuel/2024/01/12/un-mort-par-semaine-a-marseille-les-ravages-de-la-guerre-de-la-drogue_6210524_4500055.html">phénomène</a> qui semble dépasser les pouvoirs publics. Faisant un pas de côté, les anthropologues Dennis Rodgers et Steffen Jensen ont choisi d’explorer cette violence de manière plus large et plus contextualisée, en se basant sur un terrain de sept mois effectué entre 2021 et 2023 dans la cité Félix-Pyat. Située au cœur du III<sup>e</sup> arrondissement marseillais, elle est souvent décrite comme l’une des plus difficiles de la préfecture des Bouches-du-Rhône. Une image difficile à déconstruire mais qui masque aussi des violences structurelles tenaces.</em></p>
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<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/568611/original/file-20240110-24-2ul6v6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/568611/original/file-20240110-24-2ul6v6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568611/original/file-20240110-24-2ul6v6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=817&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568611/original/file-20240110-24-2ul6v6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=817&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568611/original/file-20240110-24-2ul6v6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=817&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568611/original/file-20240110-24-2ul6v6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1027&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568611/original/file-20240110-24-2ul6v6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1027&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568611/original/file-20240110-24-2ul6v6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1027&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le film <em>BAC Nord</em>, sorti en 2021.</span>
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<p>Une course-poursuite s’engage entre policiers et trafiquants de drogues. Trois agents de la Brigade anticriminalité (BAC) de Marseille s’engouffrent dans une cité afin d’y kidnapper un trafiquant, puis s’échappent en franchissant une barricade de deux mètres de haut, poursuivis par une horde de jeunes hommes cagoulés et armés sur des motos, tout en faisant face à une véritable pluie de détritus jetés depuis les tours environnantes par les habitants hostiles de la cité. Cette scène rocambolesque ouvre le film Bac Nord. Sorti en salle en 2021, il traite plus largement du trafic de drogue et de la corruption policière à Marseille.</p>
<p>Promu sous le label « inspiré par des faits réels », le film articule un ensemble de discours médiatiques et politiques reflétant un imaginaire violent censé caractériser Marseille. Un sujet qui a été rapidement instrumentalisé en politique comme en témoigne par exemple un <a href="https://twitter.com/MLP_officiel/status/1433132385214816278">tweet</a> de Marine Le Pen daté du 1<sup>er</sup> septembre 2021 :</p>
<blockquote>
<p>« BAC Nord : alors que le président va faire un show médiatique à <a href="https://twitter.com/hashtag/Marseille">#Marseille</a>, la réalité c’est ce film ! Allez le voir ! Prenez conscience de cette terrible réalité et de l’urgence à reprendre la main. »</p>
</blockquote>
<p>Plus récemment, le ministre de l’intérieur <a href="https://www.lefigaro.fr/marseille/a-marseille-gerald-darmanin-vise-uber-shit-et-les-consommateurs-de-drogues-des-beaux-quartiers-20240104">Gérald Darmanin</a> a évoqué la cité phocéenne, en mettant l’accent sur ses « points de deal » à « nettoyer » et la responsabilité des consommateurs de drogues issus des « beaux quartiers ».</p>
<h2>Des représentations symboliques violentes</h2>
<p>Il est en fait commun d’entendre des expressions telles que « Marseille, c’est Chicago », « Marseille, c’est le Far West », ou bien « Marseille, la capitale du crime français ». Comme l’ont analysé <a href="https://www.septentrion.com/fr/livre/?GCOI=27574100397430">Cesare Mattina et Nicolas Maisetti</a>, ce genre de représentation constitue une forme de stigmatisation et de violence symbolique, au sens où elles s’inscrivent durablement dans nos schémas de perception à propos du monde d’une manière qui dépasse les statistiques.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/568614/original/file-20240110-23-s84i19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568614/original/file-20240110-23-s84i19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=872&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568614/original/file-20240110-23-s84i19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=872&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568614/original/file-20240110-23-s84i19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=872&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568614/original/file-20240110-23-s84i19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1095&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568614/original/file-20240110-23-s84i19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1095&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568614/original/file-20240110-23-s84i19.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1095&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Peut-on vraiment qualifier Marseille de « French Chicago » ?</span>
<span class="attribution"><span class="source">myretroposter</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Marseille – comme d’autres villes telles que Glasgow, Naples, ou Chicago – est, dans notre imaginaire, une métropole gangrénée par la violence, <a href="https://www.laprovence.com/actu/en-direct/5159567/marseille-est-la-ville-la-plus-dangereuse-deurope-selon-un-site-americain.htm">« la plus dangereuse d’Europe »</a>, après certains médias. Pourtant, statistiquement parlant, les niveaux de violence à Marseille ne sont souvent pas plus élevés qu’à Paris. Le chercheur Laurent Mucchielli l’avait déjà souligné en 2013 dans son rapport <a href="https://www.jean-jaures.org/wp-content/uploads/drupal_fjj/publication-print/mucchielli_marseille.pdf">« Délinquance et criminalité à Marseille : fantasmes et réalités »</a>. Et les statistiques récentes concernant les crimes et délits sur <a href="https://ville-data.com/delinquance/classement-des-villes-les-plus-dangereuses-de-france">d’autres villes françaises</a> le confirment encore : Marseille arriverait 13<sup>e</sup> derrière Paris.</p>
<p>Il faut de plus distinguer délinquance, vols avec violence armée ou non, criminalité organisée et <a href="https://www.lefigaro.fr/actualite-france/insecurite-nantes-paris-marseille-les-villes-francaises-devissent-dans-le-classement-mondial-des-villes-les-plus-sures-20220923">sentiment d’insécurité</a>, autant de critères qui <a href="https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/police/cartes-delinquance-a-paris-lyon-ou-marseille-les-arrondissements-centraux-ou-touristiques-sont-les-plus-cibles_5702228.html">peuvent faire varier les statistiques</a>.</p>
<p>Ainsi, les représentations de la violence à Marseille sont souvent liées à des effets de loupe ou à des distorsions, des perceptions, et des expériences très variées.</p>
<p>La scène d’ouverture du film Bac Nord est particulièrement pertinente à ce niveau là, car elle a été tournée à Félix-Pyat, une cité dans laquelle nous avons effectué un travail de terrain de sept mois entre 2021 et 2023, ce qui nous permet d’affirmer avec certitude que sa réalité quotidienne ne correspond absolument pas aux images véhiculées par le film.</p>
<h2>Du Parc Bellevue à Félix-Pyat</h2>
<p>La cité Félix-Pyat – aussi connue comme le <a href="https://recitsdevie.org/projet_au-143-rue-felix-pyat.htm">« Parc Bellevue »</a> – a été construite en copropriété entre 1958 et 1961 pour accueillir les colons Pieds-noirs revenant d’Algérie et du Protectorat français de la Tunisie. Au cours de la décennie qui a suivi la construction de la cité, une deuxième vague d’immigrants est arrivée, principalement d’Afrique du Nord. Cette population maghrébine a lentement, puis plus rapidement, remplacé les premiers habitants de la cité. Cependant, au lieu de vendre leurs appartements, beaucoup de ces derniers ont commencé à les louer aux nouveaux arrivants.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/570559/original/file-20240122-20-f6krz6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/570559/original/file-20240122-20-f6krz6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/570559/original/file-20240122-20-f6krz6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/570559/original/file-20240122-20-f6krz6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/570559/original/file-20240122-20-f6krz6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/570559/original/file-20240122-20-f6krz6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/570559/original/file-20240122-20-f6krz6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/570559/original/file-20240122-20-f6krz6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Félix Pyat, 2010.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/44359189@N08/5096826992">Catherine Champerneau/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dès lors, un grand nombre de propriétaires, parce qu’ils n’habitaient plus à Félix-Pyat, ont cessé de payer les services et les charges de la copropriété, qui s’est lourdement endettée. Les édifices se sont peu à peu dégradés et un cercle vicieux s’est enclenché : ceux qui ont pu se le permettre ont déménagé le plus rapidement possible, alors que ceux qui sont restés étaient les plus paupérisés.</p>
<p>Dès les années 1980, la cité se caractérise par une pauvreté croissante. A partir des années 1990, l’immigration maghrébine est remplacée par les arrivées de réfugiés bosniaques et kurdes, mais aussi albanais et surtout, une nouvelle immigration comorienne. De fait, Félix-Pyat est aujourd’hui connue comme la <a href="https://www.routledge.com/The-Diaspora-of-the-Comoros-in-France-Ethnicised-Biopolitics-and-Communitarisation/Fritsch/p/book/9780367627942">« capitale des Comores »</a> à Marseille, qui concentre elle-même le plus grand nombre de Comoriens en dehors des Comores.</p>
<p>Félix-Pyat se distingue aussi par le fait que, géographiquement, c’est le soi-disant « Quartier Nord » le plus central de Marseille, située dans le III<sup>e</sup> arrondissement de la ville, dans le quartier de Saint-Mauront. La cité est donc beaucoup plus accessible depuis et vers le reste de la ville que d’autres cités plus au nord comme La Castellane ou bien Frais Vallon à l’Est.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/572908/original/file-20240201-17-v1xs58.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Carte Google de la cité Félix Pyat dans Marseille, IIIᵉ arrondissement" src="https://images.theconversation.com/files/572908/original/file-20240201-17-v1xs58.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/572908/original/file-20240201-17-v1xs58.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/572908/original/file-20240201-17-v1xs58.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/572908/original/file-20240201-17-v1xs58.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/572908/original/file-20240201-17-v1xs58.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/572908/original/file-20240201-17-v1xs58.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/572908/original/file-20240201-17-v1xs58.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Carte Google de la cité Félix Pyat dans Marseille, IIIᵉ arrondissement.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.google.com/maps/search/felix+pyat+marseille+cit%C3%A9/@43.3179808,5.3438843,13.89z?hl=fr&entry=ttu">Google maps</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En 2022, nous avons mené une « enquête de ménage » – porte à porte – auprès d’un échantillon représentatif de 228 des 605 ménages que compte la cité dont les résultats seront publiés dans un livre en cours de rédaction. Notre objectif était à la fois de collecter des données socio-économiques sur la population de la cité, mais aussi à propos des perceptions concernant la violence et l’insécurité dans la cité.</p>
<p>La population de la cité est d’environ 3,500 habitants, avec un ratio moyen de 5,8 personnes par ménage, réparties dans des logements de taille variables. La population de la cité est en générale jeune ; l’âge moyen est de 28 ans. Elle se partage de manière plus ou moins égale en termes de sexes.</p>
<p>Une majorité des ménages de la cité disent s’identifier avec « la communauté comorienne » : 57 % de la population, contre 30 % s’identifiant avec « la communauté maghrébine », et 13 % s’identifiant avec une autre communauté. Notre enquête de ménage confirme aussi que Félix-Pyat reste une cité pauvre : 63 % des chefs de famille gagnent moins de 1,000 euros par mois.</p>
<p>En parallèle, Félix-Pyat concentre aussi de nombreuses organisations associatives, et il existe clairement un tissu social et culturel collectif très fort, qui se mobilise de façon visible lors des célébrations de <a href="https://www.persee.fr/doc/diasp_1637-5823_2009_num_15_1_1195">« grands mariages »</a>, autour de la religion, ou bien lors de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89quipe_des_Comores_de_football_%C3%A0_la_Coupe_d%27Afrique_des_nations_2021">l’épopée sportive de l’équipe de foot des Comores à la CAN 2021</a> par exemple, quand les matchs furent projetés en plein air sur la place principale de la cité.</p>
<p>On vit, on rit, on aime, on pleure à Félix-Pyat, dont l’histoire, en fin de compte, est une « histoire plurielle et emblématique de l’évolution de la société française durant les cinq dernières décennies », comme l’ont très bien décrit Marie d’Hombres et Blandine Scherer dans leur superbe livre <a href="https://recitsdevie.org/projet_au-143-rue-felix-pyat.htm">« Au 143 rue Félix Pyat »</a>, recueillant textes, propos, et témoignages d’habitants du quartier.</p>
<h2>« Tout se passe là-bas, rien ici »</h2>
<p>Nous ne voulons pas, pour autant, minimiser ni la présence ni la violence du trafic de drogue à Félix-Pyat. Les deux y sont indéniablement manifestes. Mais compte tenu des représentations sensationnalistes qui abondent autour du phénomène, nous tenons à remarquer en premier lieu que les activités liées à la drogue sont bien plus visibles dans d’autres cités de la ville que nous avons pu visiter. Il est important de réaliser que le trafic de la drogue à Marseille est un phénomène très variable, comme cela est par ailleurs très bien décrit dans une étude sur <a href="https://theses.hal.science/tel-01955264/">« La concentration du crime et les caractéristiques de l’aménagement de l’espace urbain à Marseille »</a>.</p>
<p>Ceci étant dit, sur les murs de l’un des premiers bâtiments que l’on croise en entrant dans la cité Félix-Pyat, un graffiti suggère que « tout se passe là-bas, rien ici », avec une flèche indiquant le bâtiment suivant, où se trouverait le « charbon », c’est-à-dire un point de vente de la drogue. On voit régulièrement une clientèle variée s’y rendre pour acheter de la drogue, le plus souvent en soirée, mais aussi pendant la journée.</p>
<p>Les « guetteurs » sont aussi une présence régulière aux coins des rues de la cité, qu’ils barricadent à intervalles réguliers afin de faciliter les livraisons de drogue, tandis que plusieurs habitants nous ont raconté comment les cages d’escalier d’immeubles pouvaient aussi être barricadées pour ralentir la police en cas de descente.</p>
<p>Un interlocuteur, que nous nommerons Tarek, nous a précisé :</p>
<blockquote>
<p>« mais quand une vieille dame arrive, ils enlèvent les barricades pour qu’elle puisse passer ». Après une petite pause, il ajouta, « en fait, non, je blague. Ils ne sont pas gentils ».</p>
</blockquote>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/568619/original/file-20240110-25-8i31vs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568619/original/file-20240110-25-8i31vs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568619/original/file-20240110-25-8i31vs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568619/original/file-20240110-25-8i31vs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568619/original/file-20240110-25-8i31vs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568619/original/file-20240110-25-8i31vs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568619/original/file-20240110-25-8i31vs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">« Tout se passe là-bas, rien ici. »</span>
<span class="attribution"><span class="source">D. Rodgers & S. Jensen</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il y a aussi eu plusieurs <a href="https://www.laprovence.com/article/edition-marseille/6009924/relaxe-par-la-justice-tue-a-felix-pyat.html">meurtres</a> liés au trafic de drogue dans la cité au cours des dernières années, ainsi que de multiples <a href="https://www.laprovence.com/actu/en-direct/58910306011716/marseille-des-tirs-a-felix-pyat-cette-nuit-quatre-blesses-dont-trois-graves">blessés</a>.</p>
<p>Félix-Pyat a en outre fait les titres des journaux début septembre 2023 pour un cas de <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/bouches-du-rhone/marseille/ce-qu-il-faut-savoir-sur-le-proces-des-agresseurs-presumes-de-l-adolescent-sequestre-et-torture-au-chalumeau-a-marseille-2835617.html">torture d’un jeune trafiquant</a> de drogue extérieur à la cité qui avait voulu y vendre indépendamment du trafic local.</p>
<h2>D’abord la saleté, la pauvreté et ensuite la peur</h2>
<p>L’angoisse des parents de jeunes dans la cité, qu’ils soient impliqués dans le trafic ou pas, était souvent palpable lors de beaucoup des entretiens que nous avons effectués.</p>
<p>Certains habitants ont aussi exprimé le sentiment plus général de « vivre avec la peur » à cause de la délinquance et du trafic de drogue, même si celle-ci variait clairement en fonction des personnes ainsi que de leur relation avec différents espaces de la cité : paradoxalement, ceux qui vivaient plus prêt d’un point de vente exprimaient moins de peur que ceux dont les appartements étaient plus éloignés, à cause vraisemblablement d’un effet de familiarisation.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/serie-drogues-en-france-loin-des-cliches-204829">Série : Drogues en France, loin des clichés</a>
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<p>Beaucoup de jeunes femmes ont néanmoins souligné qu’elles évitaient de passer par certaines zones de la cité, en particulier lorsqu’elles y voyaient des attroupements de « guetteurs ». Les jeunes hommes, par contre, exprimaient plus de peur face aux risques de violence policière lors des descentes de CRS cherchant à perturber et interrompre le trafic de drogue.</p>
<p>Cependant, les résultats de notre enquête de ménage rapportent que la violence et la délinquance ne sont pas perçues comme étant le problème le plus important auquel les habitants de la cité sont confrontés au quotidien. Lors des entretiens, la « saleté », la « pauvreté », « l’état des bâtiments » et la « santé » sont des préoccupations qui sont apparues en premier comme l’indique le tableau ci-dessous.</p>
<p>Il ne fait aucun doute que la saleté est un problème réel à Félix-Pyat. Le mistral fait fréquemment voler les ordures non ramassées dans les rues de la cité, qui sont peuplées de rats et de gabians agressifs qui se battent entre eux pour les déchets alimentaires.</p>
<p>La même chose vaut pour la pauvreté : 54 % des ménages dépendent de l’assistance sociale. L’insalubrité des bâtiments de la cité est évidente et leur détérioration telle qu’elle se constate sur le plan visuel, sonore ou même olfactif. Les infrastructures de la cité – routes, parcs, bâtiments scolaires – sont généralement en mauvais état, en raison du manque d’entretien. Les bâtis endommagés par les incendies fréquents – plusieurs se sont déclarés lors de notre travail de terrain – sont rarement réparés et souffrent d’un vandalisme constant.</p>
<p>Beaucoup des habitants de Félix-Pyat sont aussi clairement en mauvaise santé. Certains par exemple souffrent de maladies respiratoires pour des raisons très certainement liées aux conditions environnementales ambiantes, <a href="https://marsactu.fr/legionelle-273-habitants-dair-bel-poursuivent-leur-combat-hors-norme-au-tribunal/">comme cela a été le cas dans d’autres cités marseillaises</a>.</p>
<h2>De quelles violences parle-t-on ?</h2>
<p>Les résultats de notre enquête de ménage nous permettent donc de remettre la violence associée à la délinquance et au trafic de drogues à Félix-Pyat à sa juste place parmi d’autres préoccupations au quotidien.</p>
<p>Dans d’autres contextes, ces préoccupations auxquelles sont confrontés la population de la cité sont souvent caractérisées comme des formes de violences – la pauvreté comme de la <a href="https://www.ucpress.edu/book/9780520243262/pathologies-of-power">« violence structurelle »</a>, le délabrement des bâtiments et espaces publics comme de la <a href="https://www.jstor.org/stable/43497507">« violence infrastructurelle »</a>, ou bien la saleté comme de la <a href="https://global.oup.com/academic/product/flammable-9780195372939">« violence environnementale »</a> – qui s’enchevêtrent et se renforcent.</p>
<p>À Félix-Pyat également, ces phénomènes s’auto-alimentent et créent un environnement qui impacte de manière systémique la vie quotidienne de la population de la cité. Vu ainsi, il ne suffit pas de décrire Félix-Pyat comme une cité violente du fait du trafic de drogue pour comprendre – encore moins résoudre – quoi que ce soit. Au contraire, ce constat peut masquer – et potentiellement légitimer – la situation plus large d’oppression structurelle dans laquelle vivent ses habitants, et dont les dynamiques dépassent le seul contexte de la cité.</p>
<p>Il nous parait dès lors opportun de mobiliser une autre notion de violence pour penser à la manière dont la situation globale dans les cités telles que Félix-Pyat est perçue, qui est celle de la violence « épistémique », mise en avant par <a href="https://monoskop.org/images/b/b7/Foucault_Michel_L_archeologie_du_savoir.pdf">Michel Foucault</a>.</p>
<p>Celle-ci caractérise une forme de violence à travers laquelle est imposée une <em>épistémè</em>, ou autrement dit, des règles de production du savoir qui déterminent les limites de nos connaissances. La violence épistémique fonctionne donc en imposant un cadre de pensée préétabli, dans le cas présent en focalisant le regard sur certains processus comme des formes de violences au détriment d’autres.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/K63Rr7zpIKY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Visite de Félix Pyat : quartier défavorisé de Marseille (avec le rappeur Yassta) par le reporter GabMorrison, YouTube, 2022.</span></figcaption>
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<p>Appréhender la violence dans les cités de Marseille uniquement à partir de la violence liée au trafic de drogue et limiter son analyse à l’échelle des cités constituent donc une violence épistémique qui empêche de réfléchir autrement.</p>
<p>Afin de la contrecarrer, nous avons clairement besoin d’un nouveau vocabulaire concernant la violence. Il faudrait en particulier parler de violences au pluriel, pour nous permettre de montrer la nature systémique du phénomène, mais aussi de comparer les effets de différentes formes de violence.</p>
<p>Ce n’est qu’en élargissant notre regard et en analysant ensemble plutôt que séparément différentes violences que nous pourrons faire place à de nouvelles idées et changer l’optique des discussions contemporaines concernant la violence dans les cités de Marseille, qui va bien au-delà de la criminalité et la délinquance.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220875/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dennis Rodgers a reçu une bourse ERC Advanced Grant (no. 787935) du Conseil Européen de la Recherche (<a href="https://erc.europa.eu">https://erc.europa.eu</a>) pour un projet intitulé “Gangs, Gangsters, and Ganglands: Towards a Global Comparative Ethnography” (GANGS).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Steffen Bo Jensen is a senior researcher at DIGNITY-Danish Institute Against Torture and a professor at the Department of Politics and Society, Aalborg University in Denmark </span></em></p>Les représentations des cités marseillaises comme lieux de violence tributaires du trafic de drogue nourrissent des imaginaires masquant d’autres formes de violences structurelles.Dennis Rodgers, Research Professor, Anthropology and Sociology, Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID)Steffen Bo Jensen, Professor, Department of Politics and Society, Aalborg UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1956112022-12-01T21:51:00Z2022-12-01T21:51:00ZFive ways drones will change the way buildings are designed<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/498004/original/file-20221129-22-g5a643.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=62%2C170%2C5907%2C3812&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/silhouette-drone-concept-city-418802431">elwynn/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Drones are already shaping the face of our cities – used for building planning, heritage, construction and safety enhancement. But, as studies by the UK’s <a href="https://assets.publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/579550/drones-uk-public-dialogue.pdf">Department of Transport</a> have found, swathes of the public have a limited understanding of how drones might be practically applied. </p>
<p>It’s crucial that the ways drones are affecting our future are <a href="https://www.routledge.com/Drone-Futures-UAS-in-Landscape-and-Urban-Design/Cureton/p/book/9780815380511">understood by the majority</a> of people. As experts in design futures and mobility, we hope this short overview of five ways drones will affect building design offers some knowledge of how things are likely to change.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/498002/original/file-20221129-16-p656p4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Infographic showcasing other ways drones will influence future building design." src="https://images.theconversation.com/files/498002/original/file-20221129-16-p656p4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/498002/original/file-20221129-16-p656p4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=834&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/498002/original/file-20221129-16-p656p4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=834&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/498002/original/file-20221129-16-p656p4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=834&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/498002/original/file-20221129-16-p656p4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1048&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/498002/original/file-20221129-16-p656p4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1048&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/498002/original/file-20221129-16-p656p4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1048&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Infographic showcasing other ways drones will influence future building design.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Nuri Kwon, Drone Near-Futures, Imagination Lancaster</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>1. Creating digital models of buildings</h2>
<p>Drones can take photographs of buildings, which are then used to build 3D models of buildings in computer-aided design software.</p>
<p>These models have accuracy to within a centimetre, and can be combined with other data, such as 3D scans of interiors using drones or laser scanners, in order to provide a completely accurate picture of the structure for surveyors, architects and clients.</p>
<p>Using these digital models saves time and money in the construction process by providing a <a href="https://youtu.be/n6CMPW2gQNo">single source</a> that architects and planners can view.</p>
<h2>2. Heritage simulations</h2>
<p><a href="https://studiodrift.com/">Studio Drift</a> are a multidisciplinary team of Dutch artists who have used drones to construct images through theatrical outdoor drone performances at damaged national heritage sites such as the <a href="https://theconversation.com/notre-dame-and-venice-why-such-a-gap-in-generosity-130733">Notre Dame in Paris</a>, Colosseum in Rome and <a href="https://theconversation.com/the-sagrada-familia-how-gaudis-masterpiece-became-a-myth-and-a-divisive-political-tool-173456">Gaudí’s Sagrada Familia</a> in Barcelona.</p>
<p><div data-react-class="InstagramEmbed" data-react-props="{"url":"https://www.instagram.com/p/CkJC4heKVJy/?utm_source=ig_embed\u0026utm_campaign=loading\u0026hl=en","accessToken":"127105130696839|b4b75090c9688d81dfd245afe6052f20"}"></div></p>
<p>Drones could be used in the near-future in a similar way to help planners to visualise the final impact of restoration or construction work on a damaged or partially finished building.</p>
<h2>3. Drone delivery</h2>
<p>The arrival of drone delivery services will see significant changes to buildings in our communities, which will need to provide for docking stations at community hubs, shops and pick-up points. </p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/498006/original/file-20221129-14-ge0pgp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="A delivery drone in shiny white pictured against a sunset." src="https://images.theconversation.com/files/498006/original/file-20221129-14-ge0pgp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/498006/original/file-20221129-14-ge0pgp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/498006/original/file-20221129-14-ge0pgp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/498006/original/file-20221129-14-ge0pgp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/498006/original/file-20221129-14-ge0pgp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/498006/original/file-20221129-14-ge0pgp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/498006/original/file-20221129-14-ge0pgp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Wingcopter are one of many companies trialling delivery drones.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Wingcopter_on_Bugarura_Island.jpg">Akash 1997</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>There are likely to be landing pads installed on the roofs of residential homes and dedicated drone-delivery hubs. Research has shown that drones can help with the last mile of any <a href="https://etrr.springeropen.com/articles/10.1186/s12544-019-0368-2">delivery</a> in the UK, Germany, France and Italy. </p>
<p>Architects of the future will need to add these facilities into their building designs.</p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/when-it-comes-to-delivery-drones-the-government-is-selling-us-a-pipe-dream-experts-explain-the-real-costs-195361">When it comes to delivery drones, the government is selling us a pipe dream. Experts explain the real costs</a>
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</p>
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<h2>4. Drones mounted with 3D printers.</h2>
<p>Two research projects from architecture, design, planning, and consulting firm <a href="https://www.gensler.com/gri/3d-printing-takes-flight">Gensler</a> and another from a consortium led by Imperial College London (comprising University College London, University of Bath, University of Pennsylvania, Queen Mary University of London, and Technical University of Munich) named <a href="https://www.imperial.ac.uk/news/239973/3d-printing-drones-work-like-bees/">Empa</a> have been experimenting with drones with mounted 3D printers. These drones would work at speed to construct emergency shelters or repair buildings at significant heights, without the need for scaffolding, or in difficult to reach locations, providing safety benefits.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/pDKNEO0gDuE?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Demonstration of a 3D printing drone.</span></figcaption>
</figure>
<p>Gensler have already used drones for <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-022-04988-4.">wind turbine repair</a> and researchers at Imperial College are exploring bee-like drone swarms that work together to construct blueprints. The drones coordinate with each other to follow a pre-defined path in a project called Aerial Additive Manufacturing. For now, the work is merely a demonstration of the technology, and not working on a specific building.</p>
<p>In the future, drones with mounted 3D printers could help create highly customised buildings at speed, but how this could change the workforce and the potential consequences for manual labour jobs is yet to be understood.</p>
<h2>5. Agile surveillance</h2>
<p>Drones offer new possibilities for surveillance away from the static, fixed nature of current systems such as closed circuit television.</p>
<p>Drones with cameras and sensors relying on complex software systems such as biometric indicators and “face recognition” will probably be the next level of <a href="https://skylarklabs.ai/">surveillance</a> applied by governments and police forces, as well as providing security monitoring for homeowners. Drones would likely be fitted with monitoring devices, which could communicate with security or police forces. </p>
<p>Drones used in this way could help our buildings <a href="https://www.evolo.us/category/2016/">become more responsive</a> to intrusions, and adaptable to changing climates. Drones may move parts of the building such as shade-creating devices, following the path of the sun to stop buildings overheating, for example.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/195611/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>The authors do not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and have disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>From building planning to heritage restoration and advance surveillance, drones are set to change the face of our cities – here’s how.Paul Cureton, Senior Lecturer in Design (People, Places, Products), Lancaster UniversityOle B. Jensen, Professor of Urban Theory and Urban Design, Aalborg UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1832382022-05-17T15:38:09Z2022-05-17T15:38:09ZLebanese election sees significant gains for independent non-sectarian politicians<iframe id="noa-web-audio-player" style="border: none" src="https://embed-player.newsoveraudio.com/v4?key=x84olp&id=https://theconversation.com/lebanese-election-sees-significant-gains-for-independent-non-sectarian-politicians-183238&bgColor=F5F5F5&color=D8352A&playColor=D8352A" width="100%" height="110px"></iframe>
<p><em>You can listen to more articles from The Conversation, narrated by Noa, <a href="https://theconversation.com/uk/topics/audio-narrated-99682">here</a>.</em></p>
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<p>Lebanese voters are <a href="https://www.bbc.co.uk/news/world-middle-east-61463884">signalling</a> a desire for change, with Hezbollah and its allies losing ground across the country in a parliamentary election.</p>
<p>Just as the recent election in <a href="https://www.bbc.co.uk/news/uk-northern-ireland-61362593">Northern Ireland</a> brought a boost for the non-sectarian Alliance Party, Lebanon’s election saw significant gains for political representatives <a href="https://www.reuters.com/world/middle-east/dozen-independent-newcomers-elected-lebanon-parliament-reuters-tally-official-2022-05-17/">untethered to sectarian politics</a>. Like Northern Ireland, Lebanon’s political system is set up to share power. Its new parliament will have various sectarian blocs, revolving around Hezbollah and rival party Lebanese Forces, and a sizeable non-sectarian group campaigning on economic issues, social justice and accountability. </p>
<p>Hezbollah, a pro-Iranian Shia-based party, emerged in 1982 largely in response to Israel’s invasion of Lebanon. It gained prominence after the end of <a href="https://www.google.co.uk/books/edition/War_and_the_City/b7-4DwAAQBAJ?hl=en&gbpv=1&dq=lebanon+civil+war&pg=PP1&printsec=frontcover">Lebanon’s civil war</a> (1975-1990) and its share of parliament seats started rising in the 2000 elections. After the departure of Syrian troops from Lebanon in 2005, its alliance with key political players such as the other Shia-based political party, Amal, and the Christian-based Free Patriotic Movement allowed it to <a href="https://www.jstor.org/stable/43698180">gradually block major policy processes</a> deemed detrimental to its interests such as negotiations on its demilitarisation. </p>
<p>The Hezbollah bloc has lost ground to rivals across the spectrum. Results indicate that the pro-Thawra opposition candidates have made significant gains, capturing up to <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/2022/05/13/lebanon-election-may15-opposition-elites/?utm_medium=social&tid=sm_tw_monkeycage&utm_campaign=wp_monkeycage&utm_source=twitter">13 seats</a>. The <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/01436597.2021.1948830">Thawra name</a> harks back to October 2019, as the state’s economy went into freefall, when an uprising of ordinary citizens, often called <a href="https://merip.org/2019/12/lebanons-thawra/">the Thawra</a>, campaigned for all sectarian leaders to resign and for rights for foreign domestic workers, women and <a href="https://www.hrw.org/video-photos/interactive/2020/05/07/if-not-now-when-queer-and-trans-people-reclaim-their-power">LGBTQ+ people</a>.</p>
<p>In this election <a href="https://www.google.co.uk/books/edition/The_Lebanese_Forces/4uJ8DwAAQBAJ?hl=en&gbpv=1&dq=lebanese+forces+party&pg=PR7&printsec=frontcover">the Lebanese Forces party</a> has used widespread anger against Hezbollah and its allies to increase its number of parliamentarians. Lebanese Forces has positioned itself as the main faction willing to contest Hezbollah in the power-sharing government.</p>
<p>Opposition gains have been secured even in areas traditionally seen as Hezbollah strongholds. In 2018, Hezbollah and its allies <a href="https://www.france24.com/en/middle-east/20220516-hezbollah-allies-suffer-losses-in-lebanon-s-parliamentary-election-according-to-early-results">won 71 seats</a>, making it the biggest faction in the parliament. Hezbollah emerged from Sunday’s election weakened as many voters blame the party for hindering an <a href="https://www.hrw.org/report/2021/08/03/they-killed-us-inside/investigation-august-4-beirut-blast">independent investigation </a> into the Beirut <a href="https://theconversation.com/beirut-explosion-the-disaster-was-exceptional-but-events-leading-up-to-it-were-not-researchers-144011">port explosion</a> which <a href="https://www.aljazeera.com/news/2021/8/2/one-year-on-beirut-blast-victims-still-struggling-to-return-home">killed more than 200 people</a>.</p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/beirut-explosion-yet-another-heartbreak-for-a-country-already-on-the-brink-144055">Beirut explosion yet another heartbreak for a country already on the brink</a>
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<p>This national election took place as Lebanon struggled with a series of crises beginning in 2019, including an economic meltdown that left more than 75% of the population below <a href="https://news.un.org/en/story/2021/09/1099102">the poverty line</a>, in what the World Bank ranks as among the three most <a href="https://www.worldbank.org/en/news/press-release/2021/05/01/lebanon-sinking-into-one-of-the-most-severe-global-crises-episodes#:%7E:text=The%20World%20Bank%20estimates%20that,40%20percent%20in%20dollar%20terms.">severe economic collapses</a> anywhere since the 19th century. The country is also dealing with the aftermath of the port disaster. More recently Russia’s invasion of Ukraine has pushed millions close to starvation because of Lebanon’s heavy <a href="https://reliefweb.int/report/lebanon/war-ukraine-rationing-lebanon">dependence on Ukrainian wheat</a>.</p>
<p>Lebanon’s political power-sharing system is deliberately designed to protect the entrenched interests of the state’s powerful sectarian leaders. All seats in the <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/19436149.2019.1633748?casa_token=Urz1osHsGjIAAAAA%3Aqk_1UJjM60Ko3Hr1guXUbW8e7VdsKwLUIcTulXJWdhQmy-eqcwsfM-lHmfgLj_GffkU-jmG-cCPx">128-member parliament</a> are reserved on a sectarian basis and the powerful factions have often functioned on behalf of other powers, such as <a href="https://www.reuters.com/world/middle-east/lebanon-is-dragged-back-into-eye-iranian-saudi-storm-2021-11-01/">Iran and Saudi Arabia</a>.</p>
<p>For its supporters, the power-sharing system gives guarantees of political representation to the main groups and ensures that no faction can control the government.</p>
<p>Critics point to a number of drawbacks with the system. Some Lebanese people are reliant on their sect leaders to distribute basic services, <a href="https://www.plutobooks.com/9780745334134/the-politics-of-sectarianism-in-postwar-lebanon/">such as healthcare</a>. Lebanon is further crippled by paralysis and dysfunction, with <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/13537113.2019.1565177?casa_token=tE1dI0bheIQAAAAA%3Az68hvSVB2ly9uK4unz0Ltme9zPf15oibMNieg1lQW9b74Ko85QMNIRZJ4qas0HfMAxUveEnePqJ8">the government rarely passing any new laws</a>. </p>
<p>Yet, despite many barriers to change, we may be beginning to see cracks in the system to allow anti-sectarian and independent opposition candidates to emerge as a serious force in Lebanon.</p>
<p>In recent years, hundreds of thousands of <a href="https://merip.org/2019/12/lebanons-thawra/">Lebanese have voiced dissent</a> by taking to the streets to demand an end to the state’s corrupt leaders, branded by <a href="https://www.newyorker.com/news/dispatch/the-making-of-lebanons-october-revolution">protesters</a> as “thieves”. </p>
<p>While the protests eventually ran out of steam, it built a platform for a political movement that has now gained independent parliamentary seats.</p>
<p>While it is tempting to suggest that Lebanon’s election has ushered in significant change, caveats are required. Voter <a href="https://www.reuters.com/world/middle-east/in-country-lebanese-election-turnout-around-41-interior-minister-says-2022-05-15/">turnout was 41%</a>, lower than in 2018. This may point more to apathy and disillusionment than hope. </p>
<p>Obsolete electoral laws have not kept pace with people’s lives, and may have been a factor in the low turnout. In Lebanon, people must vote in the constituencies where they were born. With fuel prices rising and a crumbling transportation system, many could not travel to their birthplace hours <a href="https://today.lorientlejour.com/article/1299744/an-analysis-of-turnout-around-lebanon-shows-an-apparent-hariri-effect-on-sunni-participation.html">away</a>. </p>
<p>This result could lead to political stalemate and confrontational power-sharing. The parliament could turn into a polarised arena where parties with opposing agendas are supposed to share power. The main factions are likely to disagree on the new speaker of parliament and on the allocation of executive ministerial positions, making it difficult for the council of ministers to address the disastrous economic situation.</p>
<p>Factions are also likely to disagree on the new presidential candidate set to replace current president Michel Aoun five months from now at the end of his term. </p>
<p>Yet there is still room for optimism. The success of these independent candidates demonstrates that anti-sectarian politics can succeed in an environment designed to prohibit it flourishing. Unlikely breakthroughs in sectarian strongholds represent notable and exceptional gains. </p>
<p>Independent candidates have not had the array of tools at the disposal of the major sectarian parties. They do not have the economic clout to court votes or have links to powerful media networks to echo their message. They also can’t ask for support from powerful states, such as Iran and Saudi Arabia. Their candidates are more likely to be harangued and attacked by <a href="https://www.aljazeera.com/news/2022/4/23/lebanon-opposition-election-candidates-threats-attacks">sectarian factions</a>.</p>
<p>Nevertheless, their victory in Lebanon’s elections has powerful implications. It is one of the key achievements of the 2019 Thawra movement, a landmark episode that many had dismissed for not having achieved very much.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/183238/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tamirace Fakhoury receives funding from UKRI. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>John Nagle does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>The election of independent parliamentarians in Lebanon is a move away from sectarian politics, say experts.John Nagle, Professor in Sociology, Queen's University BelfastTamirace Fakhoury, Associate Professor of Political Science, Aalborg UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1693832021-10-07T17:41:44Z2021-10-07T17:41:44ZPandora papers: as ordinary Lebanese suffer, elite secretly drain off billions<p>Few Lebanese people will be surprised that the latest leak of offshore financial documents <a href="https://www.aljazeera.com/news/2021/10/4/lebanese-prime-minister-among-officials-listed-in-pandora-papers">alleges</a> senior Lebanese figures, including the current prime minister, have used offshore tax havens (although <a href="https://www.reuters.com/world/middle-east/lebanon-pm-mikati-says-family-wealth-legal-response-pandora-papers-2021-10-05/">Najib Mikati</a>, a businessman who took the top job in July, has denied this). That the so-called Pandora Papers lists Lebanon as a world leader in the <a href="https://english.alaraby.co.uk/news/lebanese-angry-unsurprised-over-pandora-papers">most offshore companies</a> – 346 – further highlights the industrial scale of corruption in the state.</p>
<p>Lebanon is already ranked among the <a href="https://www.transparency.org/en/countries/lebanon">most corrupt states</a> internationally. Public opinion surveys show that <a href="https://www.chathamhouse.org/2021/06/breaking-curse-corruption-lebanon/03-history-corruption-and-poor-governance">91% of Lebanese citizens</a> believe that corruption is widespread within the public sector.</p>
<p>The <a href="https://www.icij.org/investigations/pandora-papers/">Pandora leaks</a> into the extent of money laundering and use of offshore havens are poor timing for Lebanon’s political establishment. The country is currently experiencing an unprecedented economic and political crisis. </p>
<p>Lebanon’s economic collapse is <a href="https://www.worldbank.org/en/news/press-release/2021/05/01/lebanon-sinking-into-one-of-the-most-severe-global-crises-episodes#:%7E:text=The%20World%20Bank%20estimates%20that,40%20percent%20in%20dollar%20terms.">ranked by the World Bank</a> as among the three most severe seen anywhere since the mid-19th century. According to the UN, the crisis has left more than three-quarters of the <a href="https://news.un.org/en/story/2021/09/1099102">population below the poverty line</a> and hyperinflation has massively <a href="https://english.alarabiya.net/News/2021/02/28/Lebanon-s-average-salary-plummets-by-84-percent">devalued salaries and savings</a>.</p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/lebanon-one-year-after-beirut-explosion-failing-state-struggles-amid-poverty-and-sectarianism-165543">Lebanon: one year after Beirut explosion, failing state struggles amid poverty and sectarianism</a>
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<p>The Pandora revelations show that, as ordinary Lebanese citizens continue to suffer, the state’s elites are draining billions of dollars into secret offshore tax havens and businesses.</p>
<p>The fact that Mikati is alleged in the Pandora Papers to be using offshore companies appears to contradict his image as a reformist statesman willing to confront the state’s corruption problem. </p>
<p><a href="https://www.reuters.com/world/middle-east/lebanese-president-meets-businessman-mikati-set-be-designated-premier-2021-07-26/">Mikati is seen by the west</a> and its institutions as an acceptable leader able to spearhead economic and structural reforms supposed to be key to creating stability in Lebanon.</p>
<h2>Snouts and troughs</h2>
<p><a href="https://www.chathamhouse.org/2021/06/breaking-curse-corruption-lebanon/03-history-corruption-and-poor-governance">Corruption in Lebanon</a> has involved billions of dollars. It has featured senior political leaders and their cronies using government ministries and offices as individual fiefdoms to enrich personal fortunes.</p>
<p>The political elites who run powerful ministries hand out lucrative contracts to private companies either owned by themselves, their families or allies, who are required to give enormous financial kickbacks in return. A study <a href="https://www.chathamhouse.org/2021/06/breaking-curse-corruption-lebanon/annex">published by Chatham House in June 2021</a> found a lack of transparency in the awarding of contracts for major infrastructure work going back decades.</p>
<p>The context in which grand corruption occurs in Lebanon is the legacy of the civil war and the <a href="https://www.jstor.org/stable/24877905">sectarian power-sharing system</a> set up at its end. The end of the civil war permitted the reinvention of warlords responsible for violence as democrats in a sectarian power-sharing government. </p>
<p>Power sharing is meant to give guarantees of representation to Lebanon’s various sects in government and the public sector. The main outcome of Lebanese power sharing, however, is what is called the “<a href="https://www.nytimes.com/2020/01/29/opinion/lebanon-crisis.html"><em>muhasasa</em></a>” (allotment) state. The allotment state means that major political and public offices are apportioned to the sect-based leaders in a system that is more pie sharing than genuine power sharing.</p>
<p>The sectarian carve-up of ministries and posts – <a href="https://www.cornellpress.cornell.edu/book/9780801451003/spoils-of-truce/">the spoils of peace</a> – has allowed such figures and their associates to amass obscene fortunes for themselves and their close allies. <a href="https://www.cornellpress.cornell.edu/book/9780801451003/spoils-of-truce/#bookTabs=1">Grand corruption</a> covers almost all sectors: transportation, health care, energy, natural resources, construction and social assistance programs.</p>
<p>The scale of grand corruption further impedes the development of democratic institutions and statebuilding. This claim is evident in how political leaders use corruption to create patron-client relationships with their communities. By essentially controlling many key services through public and private networks the political leaders make many Lebanese citizens reliant on them for daily survival. </p>
<p>In seeking <a href="https://www.degruyter.com/document/doi/10.7591/9780801470332/html">healthcare, food and other basic services</a>, Lebanese citizens often need to go to their communal leaders rather than to the state. Political leaders who distribute these services expect their communities to reciprocate by giving their support at the ballot box. Corruption is thus central to the survival of sectarian politics.</p>
<h2>Mired in corruption</h2>
<p>The capacity of the Lebanese state to effectively deal with grand corruption is limited. While political leaders give lip service to establishing anti-corruption measures, the agencies <a href="https://www.chathamhouse.org/2021/06/breaking-curse-corruption-lebanon/04-combating-corruption-tools-and-barriers">overseeing the process are toothless</a>. Political leaders deeply mired in corruption have no incentive to create policies that seriously tackle corruption. </p>
<p>In recent years no senior Lebanese politician or statesman has been charged let alone convicted for corruption. Only low-ranking public officials have been successfully prosecuted for bribery.</p>
<p>Lebanon’s judicial system is not immune from interference by the political leaders who use all of the powers at their disposal to <a href="https://www.chathamhouse.org/sites/default/files/2021-06/2021-06-29-breaking-curse-corruption-lebanon-merhej.pdf">slow or close down investigations</a> into grand corruption or into processes seeking to condemn impunity. The <a href="https://www.france24.com/en/live-news/20210927-lebanon-blast-probe-suspended-for-second-time-1">Beirut blast port probe</a> that has recently encountered massive political obstruction is widely said to be a case in point.</p>
<h2>What this means for ordinary citizens</h2>
<p>Lebanon’s 2019 revolutionary episode or <em>thawra</em> sought to dismantle this apparatus of sectarian pie sharing in which sectarian warlords vie for fortune and power. Protesters took to the streets for months calling on political leaders to step down. But other, compounding, crises – ranging from the pandemic, the Beirut blasts and the economic meltdown – have restricted people’s ability to organise and mobilise on the streets. </p>
<p>Lebanese political scientist Karim El-Mufti calls this the “<a href="https://www.courrierinternational.com/article/legislatives-la-contestation-libanaise-les-yeux-rives-sur-les-elections-de-2022">zombie syndrome</a>”, whereby people are thrown into exhaustion and despair. The landscape of the revolutionary uprising has increasingly become fragmented, and people are busy thinking about their livelihoods. With an economy in tatters, the dilemma on everyone’s mind is whether to stay or to leave.</p>
<p>Does this mean that Lebanese people have no agency? With the upcoming parliamentary elections scheduled for March 2022, various informal platforms and citizen-based parties have been hoping to draw on the momentum to turn the tide. The Pandora Papers constitute yet another piece of evidence that change is as urgent as ever.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169383/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tamirace Fakhoury receives funding from the Global Challenges Research Fund (UKRI)</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>John Nagle does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Lebanon is in the depths of one of the worst financial crises in history.John Nagle, Professor in Sociology, Queen's University BelfastTamirace Fakhoury, Associate Professor of Political Science and Global Refugee and Migration Studies, Aalborg UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1636682021-07-01T10:24:44Z2021-07-01T10:24:44ZLe sort précaire des footballeurs africains en Europe après leur ultime match<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/409279/original/file-20210701-17-dq6gx9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le Nigérian, Michael Emenalo (centre), fait partie des rares joueurs ayant réussi à poursuivre sa carrière sportive hors du terrain.</span> <span class="attribution"><span class="source">Nick Potts/PA Images via Getty Images</span></span></figcaption></figure><p>Pensez à votre ancien joueur de football préféré en Europe. Vous vous souvenez probablement de ses buts magnifiques, de ses arrêts incroyables, de son esprit de combativité. Que fait-il maintenant? Qu'est-ce qu'il est devenu? Il est entraîneur ou agent de joueurs? Peut-être commentateur sportif?</p>
<p>Pensez maintenant à votre ancien joueur de football préféré qui a émigré d'un pays africain pour jouer en Europe. Le fait de l’évoquer vous renvoie probablement à ces mêmes images de jeu fantastique. Mais que fait-il à présent? Vous l’ignorez? N’essayez pas de tricher en disant qu'il s'agit de George Weah, lauréat du Ballon d'Or en 1995 et aujourd'hui président du Liberia.</p>
<p>En fait, à l'exception de quelques parcours post-professionnels remarquables, nous savons rarement où se trouvent aujourd’hui les anciens footballeurs africains qui ont joué en Europe –- que ce soit à l’issue d’une carrière complète sur le terrain ou qu’ils aient dû cesser de jouer en tant que professionnels prématurément. </p>
<p>Pourquoi est-ce le cas ? Nous avons mené <a href="https://books.google.de/books?id=cxv9DwAAQBAJ&pg=PT216&lpg=PT216&dq=ungruhe+agergaard+postcareer+precarity&source=bl&ots=LtU6cxTN5G&sig=ACfU3U22nd-amEXt5ZVfiDvM_LJKkMI0pw&hl=de&sa=X&ved=2ahUKEwjf_ZPt74LvAhWNsRQKHaTHA3QQ6AEwEHoECAUQAw">différentes</a> <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/17430437.2020.1702780">études</a> pour tenter d'y voir plus clair.</p>
<h2>Exclusion structurelle</h2>
<p>Tout d'abord, seuls quelques joueurs migrants africains restent dans le milieu du football européen en tant qu'entraîneurs ou à des postes administratifs. Parmi les plus connus, citons <a href="https://clubofmozambique.com/news/portuguese-mozambican-football-icon-mario-wilson-dies-adeus-velho-capitao-watch/">Mário Wilson</a>, originaire du Mozambique, qui a passé la majeure partie de sa carrière au Portugal puis a entraîné le <a href="https://www.footballhistory.org/club/benfica.html">SL Benfica</a>, qui a remporté le championnat portugais en 1976. Il y a également <a href="https://www.theguardian.com/football/2020/jul/19/michael-emenalo-the-narrative-that-white-is-good-has-to-change">Michael Emenalo</a> du Nigeria, <a href="https://www.transfermarkt.com/michael-emenalo/profil/trainer/10799">qui a été</a> directeur technique du FC Chelsea et de l'AS Monaco après avoir joué pour diverses équipes aux États-Unis, en Europe et en Israël. Plus récemment, l'ancien international nigérian devenu entraîneur, Ndubuisi Egbo, a permis au FK Tirana de <a href="https://www.newframe.com/ndubuisi-egbos-struggles-and-triumph-in-albania/">remporter le titre</a> de champion d'Albanie lors de la saison 2019/20, tandis que Mbaye Leye, un ancien international sénégalais, a été nommé nouvel entraîneur principal du Standard Liège en décembre 2020.</p>
<p>Mis à part ces exceptions, d’anciens footballeurs africains sont, par contre, devenus entraîneurs ou agents de joueurs, ou alors se sont mis à travailler dans le secteur du football après leur retour en Afrique, même si leur plan initial était de rester en Europe et d'y gagner leur vie après leur carrière de footballeur.</p>
<p>Compte tenu de l'impact des joueurs africains dans le football européen, non seulement c’est étonnant, mais c’est assurément un gâchis de talents dans le domaine de l’encadrement pour ce secteur.</p>
<p>Le joueur, Raheem Sterling, et l'universitaire, Paul Campbell, ont récemment mis en évidence les inégalités structurelles qui empêchent les anciens joueurs noirs d'accéder à des postes d'entraîneur ou d'administrateur dans le football européen. En effet, si les footballeurs noirs représentent 30% des joueurs de la Premier League anglaise, mais seulement 1% des managers, l'exclusion structurelle des joueurs noirs est manifeste.</p>
<p>Les postes d'entraîneurs dans le football professionnel européen sont évidemment limités et la concurrence est rude. Qu'advient-il, cependant, de la majorité des joueurs africains et comment évoluent-ils après une carrière sur le terrain ?</p>
<p>Les réponses à ces questions sont décevantes. Hormis la poignée de célébrités du football, nos recherches démontrent que la majorité des joueurs professionnels africains évoluant en Europe sont vraiment mal préparés à leur nouveau parcours professionnel; ils font donc face à des défis sociaux et économiques dès que leur carrière de joueur prend fin pour un motif ou un autre.</p>
<p>Ces obstacles ne sont pas le fait du hasard. Ils sont le prolongement des divers risques pris par de nombreux joueurs africains, au cours de leur carrière internationale, sans oublier les périodes d’incertitude et de privations traversées.</p>
<h2>Une étude de cas</h2>
<p>Interrogé dans le cadre de notre étude, Ibrahim (un pseudonyme) est l’illustration parfaite de la réalité concernant les épreuves endurées par les joueurs africains à tous les niveaux de jeu en Europe. Il est parti pour le Danemark en tant que jeune talent prometteur nigérian de 18 ans et a signé un contrat avec un club en devenir. Malgré son talent, il n'a jamais réussi à percer.</p>
<p>Au cours de sa carrière, Ibrahim a souffert d’une maladie récurrente et d'une grave blessure. La plupart de ses contrats n’ont pas été renouvelés et il a souvent changé de club, passant la majeure partie de sa carrière dans les divisions inférieures du pays avec des salaires minimes à la clé, environ 2 000 dollars bruts par mois.</p>
<p>À la suite d’une deuxième blessure au genou et à la résiliation de son contrat, il n'a pas pu trouver de nouveau club. Après huit ans passés dans ce pays, il lui a fallu entamer une réflexion sur sa vie après le football. Bien qu’ayant à peine plus de 25 ans et même s’il ne comptait pas abandonner son rêve de devenir un footballeur professionnel, il ne pouvait pas se permettre de s’entraîner exclusivement pour se remettre à niveau, tout en cherchant un nouveau club. Il avait peu d’alternatives. Il se souvient :</p>
<blockquote>
<p>Je voulais juste travailler. Je voulais juste gagner de l'argent, mais je n'avais pas fait d’études. Comment survivre alors ?</p>
</blockquote>
<p>Puisqu’il avait droit aux prestations sociales, les autorités municipales danoises ont requis d’autres qualifications et ont, néanmoins, parrainé sa formation pour devenir aide-soignant. Il a obtenu son diplôme au terme d'une formation de 14 mois ; il travaille aujourd'hui à plein temps comme infirmier auxiliaire dans le secteur des soins aux personnes âgées, un emploi plutôt mal rémunéré, qui présente des difficultés spécifiques à surmonter, en raison des blessures qu’il a subies.</p>
<p>L'histoire d'Ibrahim n'est pas unique. En général, les footballeurs africains évoluant en Europe forment un groupe particulièrement vulnérable d'athlètes professionnels. Plus que d'autres, ils sont affectés par des rémunérations insuffisantes et des contrats de courte durée et font fréquemment face à des contraintes économiques.</p>
<h2>Investir dans l’avenir</h2>
<p>Même si tous les footballeurs professionnels doivent constamment livrer de bonnes performances, les joueurs africains sont soumis à une pression particulière. Pour eux, obtenir un contrat mieux payé ou plus durable est souvent un besoin existentiel pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille en Afrique. Pour éviter l'échec en Europe et la honte de rentrer au pays les mains vides, les joueurs africains ont tendance à se consacrer exclusivement à leur carrière de joueur professionnel.</p>
<p>Rares sont ceux qui ont le temps, les moyens, les connaissances et les relations indispensables à la préparation d’une carrière en dehors du football. Au Danemark comme dans d'autres pays scandinaves, les joueurs locaux, au contraire, bénéficient souvent d'un soutien leur permettant d’envisager une autre carrière professionnelle, par exemple, grâce à la possibilité de mener à bien deux carrières en combinant le football professionnel avec des études ou une formation professionnelle.</p>
<p>Les joueurs africains en sont souvent exclus en raison d’un manque généralisé de qualifications requises ou des compétences linguistiques nécessaires pour intégrer les programmes éducatifs en Europe. Par ailleurs, les clubs européens se montrent peu disposés à offrir des cours ou une formation professionnelle adéquate. Cela serait, sans doute, à l’encontre de leur approche coût-bénéfice visant à recruter de grands talents africains à des prix relativement bas.</p>
<p>Plusieurs personnes ayant participé à nos recherches travaillent en tant qu'aides-soignants, tout comme Ibrahim, dans le secteur des soins aux personnes âgées ou alors comme préposés au l’entretien ou livreurs. Bien que ces emplois leur garantissent des moyens de subsistance immédiats, ils s’accompagnent de conditions de travail difficiles.</p>
<p>Plusieurs personnes ayant participé à nos recherches travaillent comme aides-soignants, tout comme Ibrahim, dans le secteur des soins aux personnes âgées ou alors comme préposés au l’entretien ou livreurs. Bien que ces emplois leur garantissent des moyens de subsistance immédiats, ils s’accompagnent de conditions de travail difficiles.</p>
<p>Ainsi, compte tenu des contraintes structurelles liées au football européen, de l'accès limité à l'instruction, des salaires plutôt bas, des contrats de courte durée et de la nécessité de se concentrer presque exclusivement sur leurs performances sportives, bon nombre d’entre eux finissent dans la précarité. Après une carrière de footballeur, les possibilités d’ascension sociale sont rares – peu importe que l'on soit connu pour ses beaux buts, ses arrêts incroyables ou son formidable esprit de combativité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/163668/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian Ungruhe reçoit un financement du Comité conjoint des Conseils nordiques de la recherche pour les sciences humaines et sociales (NOS-HS) pour cette recherche.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sine Agergaard reçoit des fonds du Comité conjoint des Conseils nordiques de la recherche pour les sciences humaines et sociales (NOS-HS) pour cette recherche.</span></em></p>Etant donné l'impact des joueurs africains sur le football européen, il est surprenant que peu d'entre eux réussissent une reconversion, une fois leur carrière sportive sur le terrain achevée.Christian Ungruhe, Research fellow, Erasmus University RotterdamSine Agergaard, Professor, Aalborg UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1535102021-06-20T07:40:28Z2021-06-20T07:40:28ZThe precarious fate of African footballers in Europe after their game ends<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/380204/original/file-20210122-23-1fzgmsa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Nigeria's Michael Emenalo, left, is a rare post-playing success story.</span> <span class="attribution"><span class="source">Nick Potts/PA Images via Getty Images</span></span></figcaption></figure><p>Think of your favourite former male football player from Europe. You probably remember beautiful goals, unbelievable saves, fighting spirit. What is he doing now? Coaching? Or is he a player agent? Perhaps a sports commentator? </p>
<p>Now think of your favourite former male football player who migrated from an African country to play in Europe. He probably evokes similar images of fantastic playing. But what is he doing now? Don’t know? Please don’t cheat and say it was <a href="https://www.britannica.com/biography/George-Weah">George Weah</a>, <a href="https://www.besoccer.com/new/george-weah-the-only-african-winner-of-the-ballon-d-or-945044">winner</a> of the Ballon D’Or award in 1995 and now president of Liberia. </p>
<p>Indeed, beside a few remarkable post-playing trajectories, we know relatively little about the whereabouts of former African footballers who played in Europe – whether they had a full playing career or had to stop playing professionally earlier in life. </p>
<p>But why is this so? We’ve conducted <a href="https://books.google.de/books?id=cxv9DwAAQBAJ&pg=PT216&lpg=PT216&dq=ungruhe+agergaard+postcareer+precarity&source=bl&ots=LtU6cxTN5G&sig=ACfU3U22nd-amEXt5ZVfiDvM_LJKkMI0pw&hl=de&sa=X&ved=2ahUKEwjf_ZPt74LvAhWNsRQKHaTHA3QQ6AEwEHoECAUQAw#v=onepage&q=ungruhe%20agergaard%20postcareer%20precarity&f=false">various</a> <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/17430437.2020.1702780">studies</a> to try and shed more light.</p>
<h2>Structural exclusion</h2>
<p>First of all, only a few African migrant players remain in the game as coaches or in administrative positions in European football. Among the most prominent are <a href="https://clubofmozambique.com/news/portuguese-mozambican-football-icon-mario-wilson-dies-adeus-velho-capitao-watch/">Mário Wilson</a> from Mozambique who played most of his career in Portugal and coached <a href="https://www.footballhistory.org/club/benfica.html">SL Benfica</a> to win the Portuguese championship in 1976. There’s also <a href="https://www.theguardian.com/football/2020/jul/19/michael-emenalo-the-narrative-that-white-is-good-has-to-change">Michael Emenalo</a> from Nigeria who <a href="https://www.transfermarkt.com/michael-emenalo/profil/trainer/10799">served</a> as technical director for FC Chelsea and AS Monaco after having played for various teams in the US, Europe and Israel. More recently, the former Nigerian international Ndubuisi Egbo <a href="https://www.newframe.com/ndubuisi-egbos-struggles-and-triumph-in-albania/">won</a> the Albanian league title with FK Tirana in the 2019/20 season, while <a href="https://www.goal.com/en-cm/news/standard-liege-appoint-former-senegal-striker-mbaye-leye-as/1u92faq96vs1m17pxr0hsrmshm">Mbaye Leye</a>, a former Senegalese international, was appointed Standard Liège’s new head coach in December 2020.</p>
<p>Instead, former African footballers have become coaches or, player agents, or are otherwise occupied in the football industry only after returning to Africa, even if their initial plan was to stay in Europe and pursue their post-playing livelihoods there.</p>
<p>Given the <a href="https://supersport.com/football/news/190408_African_players_in_Europe_Salah_Keita_Belfodil_share_glory">impact</a> of African players in European football, this is remarkable and certainly a waste of coaching talent for the European football industry.</p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/for-every-drogba-there-are-hundreds-of-west-african-football-hopefuls-who-struggle-66533">For every Drogba there are hundreds of West African football hopefuls who struggle</a>
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<p>Recently, player <a href="https://www.independent.co.uk/sport/football/premier-league/raheem-sterling-racism-football-black-players-a9555666.html">Raheem Sterling</a> and academic <a href="https://blogs.lse.ac.uk/lsereviewofbooks/2020/07/30/author-interview-q-and-a-with-dr-paul-ian-campbell-author-of-education-retirement-and-career-transitions-for-black-ex-professional-footballers/">Paul Campbell</a> have pointed to the structural inequalities that prevent former Black players from embarking on coaching or administrative positions in European football. Indeed, if Black footballers <a href="https://www.researchgate.net/publication/263486206_Institutional_racism_whiteness_and_the_under-representation_of_minorities_in_leadership_positions_in_football_in_Europe">account for</a> 30% of the players in the English Premier League but only 1% of the managers, the structural exclusion of Black players is obvious. </p>
<p>Certainly, coaching positions in professional European football are limited and the competition is high. Yet what happens to the majority of African players, how do their trajectories evolve after a playing career? </p>
<p>The answer is disillusioning. Notwithstanding the handful of football celebrity accounts, our <a href="https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.1080/16138171.2020.1863706?needAccess=true">research</a> indicates the majority of professional African players in Europe are widely ill-prepared for their post-playing trajectories and face social and economic challenges after their playing careers end for whatever reason. </p>
<p>These challenges do not come out of the blue. They are a continuation of the various risks, uncertainties and <a href="https://anthrosource.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/awr.12096">hardships</a> many African players <a href="https://theconversation.com/for-every-drogba-there-are-hundreds-of-west-african-football-hopefuls-who-struggle-66533">experience</a> during their international careers.</p>
<h2>A case study</h2>
<p>The reality of these hardships facing African players at all levels of the game in Europe is illustrated by Ibrahim (a pseudonym), interviewed in our <a href="https://books.google.de/books?id=cxv9DwAAQBAJ&pg=PT216&lpg=PT216&dq=ungruhe+agergaard+postcareer+precarity&source=bl&ots=LtU6cxTN5G&sig=ACfU3U22nd-amEXt5ZVfiDvM_LJKkMI0pw&hl=de&sa=X&ved=2ahUKEwjf_ZPt74LvAhWNsRQKHaTHA3QQ6AEwEHoECAUQAw#v=onepage&q=ungruhe%20agergaard%20postcareer%20precarity&f=false">study</a>. He travelled to Denmark as a promising 18-year-old talent from Nigeria, signed by an up-and-coming club. Despite his talent, he never experienced a breakthrough. </p>
<p>During his career, Ibrahim suffered from recurrent illness and a severe injury. Most of his contracts were not renewed and he changed clubs frequently, spending most of his career in the lower-tier divisions of the country, in which salaries were minimal, roughly US$2,000 a month before taxes. </p>
<p>Following a second knee injury and the termination of his contract, he was unable to find a new club. After eight years in the country, he was forced to start thinking about life after football. Although he was in his mid twenties and did not want to give up the dream of professional football, he could not afford to focus only on training to recover while looking for a new club. There existed only few alternatives. He recalls</p>
<blockquote>
<p>I just wanted to work. I just wanted to earn money but I didn’t have any education. How can you survive?</p>
</blockquote>
<p>Nevertheless, since he was entitled to social benefits, Danish municipal authorities demanded further qualifications and sponsored his training to become an assistant nurse. He graduated after a 14-month course and now works full time as an ancillary nurse in the elderly care sector, a job in which salaries are rather low and which comes with particular challenges due to the injuries he incurred.</p>
<p>Ibrahim’s story is not unique. In general, African footballers form a particularly vulnerable group of professional athletes in Europe. More than others they are affected by underpayment and short contract lengths and often face economic hardships. </p>
<h2>Investing in the future</h2>
<p>Though every professional footballer needs to constantly deliver a strong performance, African players are under particular pressure. For them, getting a better paid contract or a more lasting deal is often an existential need to secure one’s livelihood and that of their families in Africa. To avoid failure in Europe and the shame of returning home empty-handed, African players tend to exclusively focus on their professional playing careers. </p>
<p>Only very few have the time, means, knowledge and relations that are essential to provide for their post-playing trajectories. On the contrary, in <a href="https://books.google.de/books?hl=de&lr=&id=cq7Ir9z2tMwC&oi=fnd&pg=PA77&dq=denmark+dual+careers+sports&ots=8UPgBwm0w5&sig=u0a78sf81Lm9lYO0pIppyfCFHlQ#v=onepage&q=denmark%20dual%20careers%20sports&f=false">Denmark</a> as in other <a href="https://www.taylorfrancis.com/chapters/edit/10.4324/9780203545683-25/athletes-careers-sweden-facilitating-socialization-sports-re-socialization-upon-retirement-natalia-stambulova-urban-johnson">Scandinavian countries</a>, local players often enjoy support to provide for their post-playing careers, for example through dual career opportunities and combining professional football with education or a job training. </p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/sport-in-africa-book-delivers-insights-into-the-games-people-and-politics-162001">Sport in Africa: book delivers insights into the games, people and politics</a>
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<p>African players are often excluded from this due to their widespread lack of required qualifications or language skills necessary to enter educational programmes in Europe. And European clubs seldom show great interest in providing for adequate courses or job training. Certainly it would contradict their cost-benefit approach to secure great African talent at relatively low prices. </p>
<p>Several of our research participants work as assistant nurses in the elderly care sector as Ibrahim does, or as cleaners or delivery workers. Though these jobs may secure immediate livelihoods, they involve challenging working conditions. </p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/382999/original/file-20210208-17-yrh1j8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="A turquoise book cover with yellow text reading 'Sports in Africa: Past and Present' and a black illustration that is the silhouette of a man running, she shape of the African continent emerging behind him." src="https://images.theconversation.com/files/382999/original/file-20210208-17-yrh1j8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/382999/original/file-20210208-17-yrh1j8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/382999/original/file-20210208-17-yrh1j8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/382999/original/file-20210208-17-yrh1j8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/382999/original/file-20210208-17-yrh1j8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/382999/original/file-20210208-17-yrh1j8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/382999/original/file-20210208-17-yrh1j8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Ohio University Press</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Hence, and given the structural constraints in the European football business, limited access to education, rather low salaries, short contracts and the need to almost exclusively focus on sportive performance, many end up in precarious living conditions. After a playing career opportunities for upward social mobility are scarce – no matter if one was known for beautiful goals, unbelievable saves or a great fighting spirit.</p>
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<p><em>This article is one of a <a href="https://theconversation.com/africa/search?q=%23SportInAfricaSeries">series</a> on the state of African sport. The articles are each based on a chapter in the new <a href="https://www.ohioswallow.com/book/Sports+in+Africa%2C+Past+and+Present#:%7E:text=%22A%20long%20overdue%20project%20by,studies%20as%20a%20humanities%20subject.&text=It%20challenges%20longstanding%20racial%2C%20ethnic,prescribed%20social%20and%20cultural%20identities">book</a> Sports in Africa: Past and Present published by <a href="https://www.ohioswallow.com">Ohio University Press</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153510/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian Ungruhe receives funding from the Joint Committee for Nordic Research Councils for the Humanities and Social Sciences (NOS-HS) for this research. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sine Agergaard receives funding from the Joint Committee for Nordic Research Councils for the Humanities and Social Sciences (NOS-HS) for this research.</span></em></p>Given the impact of African players in European football, it’s remarkable how few are able to secure jobs in football in Europe after their playing days end.Christian Ungruhe, Research fellow, Erasmus University RotterdamSine Agergaard, Professor, Aalborg UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1563282021-03-03T17:16:31Z2021-03-03T17:16:31ZWhy more people than ever are living alone – and what this means for the environment<p>Globally, households are shrinking – more and more people are living alone. In 2016, almost two thirds of all households in the EU were composed of <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php?title=%20People_in_the_EU_%E2%80%93_statistics_on_household_and_family_structures&oldid=375234#Household_composition:_number_of_persons">one or two people</a>, with shrinking households also prevalent <a href="https://ourworldindata.org/living-alone">around the world</a>. As countries move up the human development index, households are expected to <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/padr.12311">continue to shrink</a>.</p>
<p>As households have got smaller, homes are <a href="https://theconversation.com/average-home-is-more-spacious-now-than-ever-heres-why-thats-a-problem-for-the-environment-131582">getting larger</a>. This increases energy and resource use, domestic waste and <a href="https://link.springer.com/article/10.1007%2Fs11111-014-0203-6">greenhouse gases</a>. After all, most households have similar appliances like stoves and fridges, and cooled or heated spaces, <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/1469540516668229">regardless</a> of how many people live there. </p>
<p>There is also a tendency to share less within apartment buildings compared to previous decades. In Sweden, where once sharing a laundry room was the default, now more than 80% of newly built apartments <a href="https://www.sydsvenskan.se/2019-02-11/nu-vinner-egennyttan-over-miljon-kanske-ar-det-dags-att-tanka-om-behover-vi-verkligen-ha-en-tvattmaskin-hemma">have their own washing machine</a>. Smaller households simply don’t benefit from the sharing potential of larger households. So it’s no wonder that shrinking household size is emerging as a <a href="https://www.mdpi.com/1996-1073/13/8/1909">fundamental challenge</a> to reducing resource consumption and mitigating climate change.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="A small kitchen." src="https://images.theconversation.com/files/387512/original/file-20210303-17-qzslh4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/387512/original/file-20210303-17-qzslh4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/387512/original/file-20210303-17-qzslh4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/387512/original/file-20210303-17-qzslh4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/387512/original/file-20210303-17-qzslh4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/387512/original/file-20210303-17-qzslh4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/387512/original/file-20210303-17-qzslh4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">A one-person apartment has the same number of fridges and ovens as a large shared house.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/everything-open-small-modern-white-kitchen-1056324695">Baloncici / shutterstock</a></span>
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</figure>
<p>So why do more and more people live alone? In a study recently published in the journal <a href="https://www.buildingsandcities.org/insights/commentaries/sustainability-single-households.html">Buildings and Cities</a>, we found that there may be different reasons. But some key trends include young people leaving home to study or work, couples living apart for longer before moving in together (if at all), the dissolution of a partnership or death of a partner.</p>
<h2>Early, middle, late</h2>
<p><a href="https://link.springer.com/article/10.1007%2Fs12546-019-09235-8">Early in life</a>, it is most often delaying partnering and childbearing that increases solo-living. Across Europe, North America, and Africa, young men are more likely to live on their own. This is a transitional phase where forming a partnership is delayed in order to focus on education or building a career. Living alone is also common in countries where rural youth migrate to urban centres for work and form their own household. Among young adults, men take longer to get married or move in with partners compared to women.</p>
<p>In later life, the gender trend reverses dramatically, and women live alone two to four times <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/padr.12311">more often than men</a> across 113 countries looked at in one study. This can be explained by women living longer than men on average, resulting in <a href="https://www.nature.com/articles/421489a">more widows</a> living alone. Increasing life expectancy, dissolution of partnerships and death of a partner tend to be the main drivers behind trends in elderly one person households.</p>
<p>Middle-aged adults’ solo-living is more complex. According to a <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s12546-019-09235-8">Canadian panel survey</a>, employed men and those living in vulnerable communities are less likely to stay living on their own compared to unemployed men and those living in less vulnerable communities, respectively. Among women, those with poor health and medium-level of education are more likely to live alone compared to women with excellent health and lower education. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Man sits on chair on balcony looking out at woods" src="https://images.theconversation.com/files/387509/original/file-20210303-19-qwndvw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/387509/original/file-20210303-19-qwndvw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/387509/original/file-20210303-19-qwndvw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/387509/original/file-20210303-19-qwndvw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/387509/original/file-20210303-19-qwndvw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/387509/original/file-20210303-19-qwndvw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/387509/original/file-20210303-19-qwndvw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">As life expectancy increases, so will the number of elderly people living alone.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/KAbwsNHnsMY">Ian Noble / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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</figure>
<p>In countries with high value placed on the individual, living alone is more common than countries with high value of family co‐residence. For example, in Sweden and across the Nordics <a href="https://www.bbc.com/worklife/article/20190821-why-so-many-young-swedes-live-alone">living alone has become a norm</a> through a “culture of individualism” and a welfare state which enables people to access affordable housing and public services independent of family support. </p>
<h2>Solo wave</h2>
<p>Many societal factors underlie trends toward living alone: culture, economic means, demographic developments, health, policy and institutions all play their role at different life stages. As households continue to shrink, there will be new challenges to provide necessary services, particularly in poorer countries where communication technologies are less developed and welfare states are weaker, with a host of associated <a href="https://link.springer.com/article/10.1007%2Fs11111-014-0203-6">environmental challenges</a>.</p>
<p>The wave of solo-living currently sweeping many different countries, and about to sweep many more, will lead to increasing environmental impacts without focused policy attention. Policies might address both less environmentally impactful ways to live alone or ways to promote more people living together.</p>
<p>Though living alone is a growing trend, this does not necessarily mean that more people are permanently living alone – it can also imply that people at different stages of their life are living alone. Very different types of sharing or co-housing may ultimately be required to provide an attractive alternative.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/156328/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tullia Jack is a Marie Sklodowska-Curie International Fellow.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Diana Ivanova receives funding from the EU’s Horizon 2020 research and innovation program under Marie Sklodowska-Curie international fellowship, grant number 840454.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Milena Buchs receives funding from UK Research and Innovation, Centre for Research on Energy Demand Solutions, grant number EP/R035288/1.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Kirsten Gram-Hanssen does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>As households shrink, carbon footprints expand.Tullia Jack, Marie Skłodowska-Curie International Fellow, Department of the Built Environment, Aalborg UniversityDiana Ivanova, Research Fellow, University of LeedsKirsten Gram-Hanssen, Professor, Department of the Built Environment, Aalborg UniversityMilena Buchs, Associate Professor in Sustainability, Economics, and Low-Carbon Transitions, University of LeedsLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1500232020-11-16T20:45:11Z2020-11-16T20:45:11Z¿Puede la inteligencia artificial ayudarnos a hablar con nuestros muertos?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/369293/original/file-20201113-13-s1i02p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5890%2C3915&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/search/mano+semitransparente">Shutterstock / Ralf Geithe</a></span></figcaption></figure><p>A menudo, uno de los anhelos de las personas que han sufrido una pérdida es el de volver a hablar, aunque sea solo un instante, con su ser querido. Ahora, las nuevas tecnologías lo están haciendo posible de forma “virtual”, gracias a la inteligencia artificial. </p>
<p>¿Es esto una nueva y mera forma de “memoria digital” o una tecnología rodeada de serias cuestiones éticas?</p>
<h2>Los “robots de duelo” y la huella digital</h2>
<p>Los llamados <em>griefbots</em> (literalmente robots de duelo) son <em>chatbots</em> –programas de ordenador basados en inteligencia artificial (IA) y capaces de conversar con los humanos– constituidos a partir de la “huella digital” que el ser querido ha dejado: todo un legado de publicaciones en redes sociales, vídeos, fotos, correos electrónicos y mensajes de texto que alimentan una red neuronal artificial. </p>
<p>En conjunto, permiten “imitar” el estilo y la forma de pensar de la persona que ha fallecido. De esta forma, sus seres queridos pueden seguir conversando con ella de manera virtual después de su muerte.</p>
<h2>¿Ayudan los <em>griefbots</em> a superar la pérdida de un ser querido?</h2>
<p>El principal argumento para la creación de esta nueva tecnología es ofrecer una importante fuente de apoyo a las personas en duelo. </p>
<p>Este fue uno de los motivos por los que, de manera independiente el uno del otro, los investigadores <a href="https://replika.ai/about/story">Eugenia Kuyda</a> y <a href="https://dl.acm.org/doi/10.1145/2851581.2892591">Muhammad Ahmad </a>comenzaron a desarrollar los <em>griefbots</em>. La idea les sobrevino cuando perdieron a su mejor amigo y a su padre, respectivamente.</p>
<p>Los autores presentan los <em>griefbots</em> como una versión moderna de los rituales de duelo y de las formas clásicas de recuerdo, como un funeral o un álbum de fotos. </p>
<p>Desde este punto de vista, los <em>griefbots</em> cumplirían una función psicológica positiva en el proceso del duelo. Al fin y al cabo, permiten a las personas interactuar de forma más sofisticada con el recuerdo de la persona muerta, conmemorando su vida y contribuyendo a mantener viva su memoria. </p>
<p>Ahmad sostiene que el <em>griefbot</em> de su padre se inspira directamente en el deseo de que sus hijos conociesen a su abuelo. Así, ofrece una experiencia interactiva y directa que iría más allá de las clásicas historias contadas de generación en generación sobre quién fue este. </p>
<p>Por su parte, <a href="https://www.youtube.com/watch?v=yQGqMVuAk04">Kuyda subraya que el chat con su mejor amigo tras la muerte de este la ayudó a hablar sobre el tema</a> y le permitió descubrir aspectos de sí misma que no conocía.</p>
<p>Ambos programadores sostienen que las conversaciones con sus seres queridos fallecidos ayudaron a poner palabras a los sentimientos que los embargaron en el momento de la pérdida. También a expresar libremente sus miedos y preocupaciones. </p>
<p>En general, algo a lo que no se hubieran atrevido a hacer con alguien “real” por miedo a ser juzgados. </p>
<h2>¿Qué riesgos éticos conlleva esta interacción robot-humano?</h2>
<p>Sin embargo, otros autores alertan de los <a href="https://en.unesco.org/courier/2018-3/ethical-risks-ai">riesgos éticos que podría implicar la interacción robot-humano</a> a través de este tipo de herramientas tecnológicas. </p>
<p>Además de la privacidad de la persona muerta y de la propiedad y uso de su “huella digital” (con fines no necesariamente consentidos ni deseados), se encuentra la cuestión de cómo esta tecnología impacta en los familiares o amigos en duelo. </p>
<p>Una de las posibles consecuencias, al contrario de lo que sostienen sus creadores, sería el dificultar que estos avanzasen en sus vidas y se adaptasen poco a poco a un mundo sin la presencia del ser querido. Podría suceder que, al centrar su atención en la interacción virtual con el fallecido, la persona en duelo comenzara a aislarse socialmente.</p>
<p>Además, hay que tener en cuenta que este “otro virtual” está construido a partir del historial de conversaciones mantenidas de la persona fallecida. Es decir, el <em>chatbot</em> utiliza sus experiencias pasadas para predecir las respuestas futuras. </p>
<p>Esto hace que puedan darse respuestas que no encajan con lo que se hubiera esperado de la persona amada. Ya sea en base a las nuevas condiciones del presente, que hubieran requerido de reacciones más adaptadas; o bien a lo que conocíamos o creíamos conocer de ella. </p>
<p>Hay que tener en cuenta que tales herramientas se basan en su huella digital total. Esto incluye, por ejemplo, todas sus conversaciones con terceros. Por tanto, también sus diferentes posibles “yoes” o personalidades públicas, en función del contexto y/o de las personas con las que se daba la interacción. </p>
<p>Es decir, el uso de estas herramientas podría hacer que “descubriésemos” facetas del ser querido que no conocíamos y que quizá preferíamos no conocer. </p>
<p>Todo ello afectaría a nuestra imagen de la persona, olvidando así que el <em>chatbot</em> no es más que eso, un robot.</p>
<h2>Los chatbots para el final de la vida y la toma de decisiones importantes</h2>
<p>En la actualidad, los <em>chatbots</em> no sólo se están aplicando en el acompañamiento al duelo: también existe otro tipo destinado al asesoramiento de personas al final de su vida. Su objetivo en este caso es acompañarlas en la preparación de sus últimas voluntades. </p>
<p>También están pensados para ayudar a los pacientes en cuidados paliativos a reducir la ansiedad ante la muerte. Por ejemplo, promocionando conductas que mitiguen el estrés o posibilitando la discusión sobre cuestiones espirituales esenciales.</p>
<h2>La transformación de la experiencia de duelo y fin de vida por las nuevas tecnologías</h2>
<p>En definitiva, las nuevas tecnologías están transformando nuestra experiencia de duelo. Incluso nuestra manera de entender qué es la muerte. Todo ello plantea urgentes preguntas de tipo bioético sobre las implicaciones psicológicas y sociales derivadas de su implementación. </p>
<p>Debería desarrollarse una reflexión crítica sobre el posible impacto que todo esto podría tener en los dolientes. </p>
<p>También sobre la función psicológica de los ritos y los llamados “lazos continuos” con la persona amada, un tema clave en la psicología clínica. Sin olvidarnos de abrir un debate sobre los posibles valores o intereses que sustentan este tipo de tecnologías, así como las concepciones culturales sobre la vida y la muerte que podrían estar implícitas en su uso, un tema en el que la ética es esencial.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/150023/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Belén JIMÉNEZ ALONSO a reçu des financements de la Fundación Grífols para desarrollar un estudio sobre la dimensión ética de los chatbos aplicados al duelo y el final de la vida. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Ignacio Brescó de Luna no recibe salario, ni ejerce labores de consultoría, ni posee acciones, ni recibe financiación de ninguna compañía u organización que pueda obtener beneficio de este artículo, y ha declarado carecer de vínculos relevantes más allá del cargo académico citado.</span></em></p>Actualmente, gracias a la inteligencia artificial y la huella digital de una persona que ha fallecido, es posible recrear conversaciones con quienes ya no están. Sin embargo, esto podría suponer riesgos para aquellos que están sufriendo el duelo.Belén Jiménez Alonso, Profesora asociada en el departamento de Psicología, especialista en duelo, UOC - Universitat Oberta de CatalunyaIgnacio Brescó de Luna, Associate professor, Department of Communication & Psychology, Aalborg UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1376362020-05-04T19:42:32Z2020-05-04T19:42:32ZDe Managua au Cap, le trafic de drogue au temps du Covid-19<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/331731/original/file-20200430-42935-1tsu3y0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=49%2C261%2C4099%2C2624&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des gangs de trafiquants de drogue ont contribué à imposer des couvre-feux dans les favelas (quartiers pauvres) de Rio, ordonnant aux habitants de rester chez eux après 20 heures.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Un <a href="https://www.theguardian.com/society/2020/apr/13/a-million-volunteer-to-help-nhs-and-others-during-covid-19-lockdown">million de personnes</a> se seraient portées volontaires pour soutenir les activités du département de santé publique (NHS) au Royaume-Uni. Ailleurs des milliers <a href="https://www.un.org/africarenewal/web-features/coronavirus/meet-10-young-people-leading-covid-19-response-their-communities">d’individus</a> prennent des initiatives localement afin d’atténuer les effets de la pandémie. Un peu partout dans le monde, un mouvement de solidarité globale face à la propagation du Covid-19 semble émerger.</p>
<p>Certaines de ces initiatives incluent étonnamment des groupes considérés comme hors-la-loi, tels les gangs. Certains <a href="https://www.theguardian.com/world/2020/mar/25/brazil-rio-gangs-coronavirus">reportages</a> récents rapportent ainsi qu’à Rio de Janeiro, au Brésil, des gangs de trafiquants de drogue ont contribué à imposer des couvre-feux dans les favelas (quartiers pauvres) de la ville, ordonnant aux habitants de rester chez eux après 20 heures.</p>
<p>Les membres de ces gangs <a href="https://www.reuters.com/article/us-health-coronavirus-brazil-favelas-fea/gangs-call-curfews-as-coronavirus-hits-rio-favelas-idUSKBN21B3EV">se justifient</a> en affirmant imposer « un couvre-feu parce que personne ne prend cette [pandémie] au sérieux ». Un acte que beaucoup ont salué face à la <a href="https://theconversation.com/face-a-sa-gestion-de-crise-au-bresil-le-pouvoir-de-bolsonaro-ebranle-136158">réponse désastreuse</a> du gouvernement Bolsonaro au Covid-19.</p>
<p>De même, en Afrique du Sud, la propagation du Covid-19 a donné lieu à des <a href="https://www.bbc.com/news/av/world-africa-52205158/how-coronavirus-inspired-a-gangland-truce-in-south-africa">trêves entre gangs rivaux</a> dans la ville du Cap, avec des groupes ennemis allant parfois même jusqu’à s’allier afin d’aider à distribuer de la nourriture dans les townships (communautés pauvres) pour faire face aux pénuries causées par <a href="https://theconversation.com/covid-19-south-africas-neglected-military-faces-mission-impossible-133250">l’imposition de mesures de confinement par l’armée sudafricaine</a>.</p>
<p>À Rio de Janeiro comme au Cap, les gangs constituent souvent la principale forme d’autorité dans les favelas et les townships, soit parce que la présence de l’État y est faible ou inexistante, soit parce que celui-ci leur a <a href="https://books.google.ch/books?id=MYsyc-n1kJ0C&pg=PA192&dq=The+sovereign+outsourced:+local+justice+and+violence+in+Port+Elizabeth&hl=en&sa=X&ved=0ahUKEwjthLKbq-_oAhVcBhAIHV-0BO4Q6AEISjAE#v=onepage&q=The%20sovereign%20outsourced%3A%20local%20justice%20and%20violence%20in%20Port%20Elizabeth&f=false">« délégué »</a> son pouvoir.</p>
<p>Les gangs fournissent souvent déjà aux communautés locales toute une gamme de services, notamment en termes de sécurité, de prêts financiers, ou bien en offrant des formes de justice (violente). Répondre à la menace que constitue le Covid-19 peut être vu ainsi tout simplement comme une extension de ces formes de <a href="https://theglobal.blog/2020/03/18/gang-governance-from-the-local-to-the-global/">« gouvernance gangster »</a>.</p>
<h2>Dynamique des gangs</h2>
<p>Les gangs – tout comme beaucoup <a href="https://theconversation.com/terrorists-militants-and-criminal-gangs-join-the-fight-against-the-coronavirus-135914">d’autres groupes armés</a> – sont des institutions locales fondamentalement imbriquées dans leur contexte social, qui réagissent toujours à l’évolution de leurs <a href="https://theconversation.com/what-gangs-tell-us-about-the-world-we-live-in-114221">circonstances structurelles</a>. Ainsi, l’émergence des gangs peut être liée de manière générale à des conditions plus larges d’inégalité, et de lutte contre la discrimination et l’exclusion sociale. Mais dans quelle mesure les interventions par des gangs dans le contexte de la propagation du Covid-19 sont-elles altruistes ou plutôt instrumentales ?</p>
<p>C’est une question que nous explorons actuellement dans le cadre de notre recherche comparative sur la dynamique des gangs au Nicaragua et en Afrique du Sud pour le projet <a href="https://graduateinstitute.ch/research-centres/centre-conflict-development-peacebuilding/gangs-gangsters-and-ganglands-towards">GANGS</a>. Le matériel de recherche qui a nourri cet article s’adosse à une recherche <a href="https://cdn.theconversation.com/static_files/files/1019/1_-_GANGS_project_overview.pdf?1588060229">en cours</a> qui se déroule en ce moment au <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-latin-american-studies/article/living-in-the-shadow-of-death-gangs-violence-and-social-order-in-urban-nicaragua-19962002/4DF2EFF5663289AACBC6538C126A8E30">Nicaragua</a> et en <a href="https://press.uchicago.edu/ucp/books/book/chicago/G/bo6161597.html">Afrique du Sud</a>.</p>
<p>Notre planning de recherche a été considérablement perturbé par la crise de Covid-19. A peine étions-nous arrivés en Afrique du Sud le 12 mars pour un mois de travail de terrain que nos universités respectives nous ont demandé de rentrer dans la précipitation en Europe. Grâce à WhatsAap et aux nouvelles technologies, nous sommes cependant en contact permanent avec de nombreuses personnes-ressources qui nous aident sur le terrain, et que nous connaissons pour la plupart depuis plus de <a href="https://www.cairn.info/revue-cultures-et-conflits-2018-2-page-59.htm">vingt ans</a>.</p>
<p>Nous avons discuté virtuellement avec divers types d’habitants des quartiers pauvres des villes au Nicaragua et en Afrique du Sud dans lesquelles nous effectuons nos recherches, y compris des membres de gangs et des trafiquants de drogue. Nous leur avons demandé comment le Covid-19 avait affecté leurs activités. Leurs réponses apportent une image bien plus nuancée que la plupart des reportages publiés jusqu’à maintenant, suggérant en particulier que dans certains cas, le Covid-19 a donné lieu à la fois à des contraintes mais aussi à de nouvelles opportunités pour les gangs et le trafic de drogue. Les actes des gangs s’inscrivent alors moins dans une dynamique altruiste que dans une recherche de gains personnels ou de rapports de force.</p>
<h2>Le Nicaragua, entre peur et ignorance de la pandémie</h2>
<p>Le Nicaragua est devenu <a href="https://www.thelancet.com/journals/langlo/article/PIIS2214-109X(20)30131-5/fulltext">notoire</a> comme l’un des rares pays au monde à avoir ignoré les réalités du Covid-19. Le pays n’a ni fermé ses frontières, ni imposé quelconques mesures de confinement, ni favorisé une politique de distanciation sociale, et il n’a pas non plus mis en place de mesures de soutien économique face aux perturbations causées par la pandémie.</p>
<p>Ceci étant dit, nos conversations avec des habitants du barrio Luis Fanor Hernández*, un quartier pauvre de Managua, la capitale du Nicaragua, laisse voir qu’en dépit de l’absence de mesures de confinement et de distanciation sociale formelles, nombre d’individus sont plus réticents à sortir dans la rue et de nombreuses entreprises locales ont fermées. Comme nous l’a expliqué Doña Yolanda, une habitante du quartier que Dennis connaît depuis plus de vingt ans :</p>
<blockquote>
<p>« Les gens ont peur du virus, alors ils ne sortent pas, les rues sont désertes et les magasins fermés ».</p>
</blockquote>
<p>Ceci a eu un impact dramatique et extrêmement négatif sur les moyens de survie économique étant donné que beaucoup au Nicaragua – le <a href="https://www.forbes.com/places/nicaragua/">deuxième pays le plus pauvre de l’hémisphère occidental après Haïti</a> – vivent au jour le jour.</p>
<p>Cela comprend de nombreux petits trafiquants de drogue tel Antonio, qui nous confia :</p>
<blockquote>
<p>« Ce pays est foutu, les gens n’ont pas d’argent, alors ils ne viennent plus acheter de [la drogue]. »</p>
</blockquote>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/329779/original/file-20200422-47810-vh7v20.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/329779/original/file-20200422-47810-vh7v20.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=774&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/329779/original/file-20200422-47810-vh7v20.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=774&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/329779/original/file-20200422-47810-vh7v20.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=774&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/329779/original/file-20200422-47810-vh7v20.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=973&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/329779/original/file-20200422-47810-vh7v20.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=973&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/329779/original/file-20200422-47810-vh7v20.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=973&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les invendus d’Antonio.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Dennis Rodgers</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il nous a envoyé une photo de son stock de drogue invendu, en se plaignant :</p>
<blockquote>
<p>« Je peux normalement vendre tout ça en une journée, mais je n’ai rien vendu du tout, personne ne vient, les affaires se sont effondrées. »</p>
</blockquote>
<h2>Quand le marché de la drogue s’effondre</h2>
<p>Nous avons demandé à Antonio s’il avait une stratégie afin de pallier la perte de ses revenus. Il nous a expliqué alors qu’il avait recours à deux stratégies différentes. La première consistait à appeler ses clients de classe moyenne et supérieure et de leur proposer un service de livraison à domicile :</p>
<blockquote>
<p>« Comme ça, au lieu de me rencontrer au marché ou qu’ils viennent me trouver dans le quartier, ils m’appellent et je vais chez eux, je dépose la drogue à travers leur portail, je recule de deux mètres, ils la prennent et me laissent l’argent que je récupère ensuite après qu’ils aient reculé de deux mètres. »</p>
</blockquote>
<p>Ceci étant dit, Antonio vendait principalement ses drogues – du crack, de la cocaïne, et de la marijuana – à des membres de gangs et autres jeunes du barrio Luis Fanor Hernández, et il n’a qu’une poignée de clients de classe moyenne et supérieure, auxquels il doit offrir une remise de 20 à 30 % par rapport aux prix qu’il pratiquait avant la crise.</p>
<p>La deuxième stratégie à laquelle Antonio a recours est le recouvrement (musclé) de dettes auprès de ses clients. Il n’est pas rare que les trafiquants de drogue au Nicaragua permettent à leurs clients de s’endetter, afin de les fidéliser. Mais, lorsque ces dettes atteignent un niveau qu’un dealer juge insoutenable, il demande un remboursement partiel de celles-ci, combinant un refus de vendre plus de drogues avec des menaces et de la violence physique afin d’obtenir gain de cause.</p>
<p>Cette violence reste en général maîtrisée, impliquant tout au plus un passage à tabac. Si un trafiquant de drogue par exemple sortait un couteau ou une arme à feu pour une petite dette, il acquerrait une mauvaise réputation auprès de sa clientèle qu’il risquerait de perdre. Le Covid-19 a cependant changé cela, comme Antonio nous l’a expliqué :</p>
<blockquote>
<p>« Maintenant, il est plus facile de demander de se faire rembourser ses dettes. À cause du virus, je ne peux pas tabasser les gens, car cela impliquerait de les toucher, alors maintenant j’ai une excuse valable pour les menacer avec un pistolet à deux mètres et demander mon argent. C’est beaucoup plus efficace, les gens ont vraiment peur des armes à feu, alors ils paient tout de suite. »</p>
</blockquote>
<p>Il est clair qu’une telle stratégie n’est pas viable sur le long terme, mais elle reflète bien les circonstances extraordinaires précipitées par la propagation du Covid-19, et les actions qui en découlent.</p>
<h2>En Afrique du Sud, les gangs forcent les gens à rester dans la rue</h2>
<p>La situation en Afrique du Sud est très différente. Le gouvernement a réagi rapidement à la pandémie en imposant un confinement à l’échelle nationale, et des patrouilles par l’armée sud-africaine. Il a également tenté d’organiser des <a href="https://theconversation.com/gaps-in-south-africas-relief-scheme-leave-some-workers-with-no-income-136403">distributions de vivres</a> auprès des communautés les plus défavorisées. Cependant, ni les mesures de confinement ni la distribution de nourriture n’ont été mises en œuvre de manière très efficace.</p>
<p>Dans certains <a href="https://theconversation.com/whats-driving-cape-towns-water-insecurity-and-what-can-be-done-about-it-81845">« townships » ou quartiers pauvres</a> du Cap, tel que <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Mitchells_Plain">Mitchells Plain</a>, par exemple, les gangs ont mené des émeutes contre le manque de nourriture, tandis que dans les bidonvilles tel que Overcome Heights, dans lequel nous travaillons, les gangs cherchent activement – et parfois violemment – à forcer les habitants locaux à ne pas rester chez eux mais à poursuivre leurs activités quotidiennes dans les rues du bidonville.</p>
<p>La logique sous-jacente de cette stratégie est clairement de faire en sorte que les habitants du bidonville, qui constituent la plus grande partie de la clientèle des trafiquants de drogue locaux, puissent toujours acheter de la drogue (principalement de la méthamphétamine en cristaux, connue localement sous le nom de « tik »). Ainsi, selon Norma, une habitante d’Overcome Heights et une <a href="https://dignity.dk/wp-content/uploads/publication-series-no24.pdf">informatrice clef de Steffen</a>, le trafic de drogue y a en fait prospéré en raison de la pandémie.</p>
<p>En effet, des gangs rivaux du bidonville ont saisi la situation d’urgence provoquée par la pandémie afin de consolider un accord de paix fragile conclu en décembre 2019 après presque deux années de violence extrême qui avait fait plusieurs centaines de morts localement – principalement des membres des gangs, mais aussi parmi les habitants du bidonville. Le trafic de drogue en a bénéficié, se déroulant désormais dans un environnement plus sûr – et plus facilement gérable – qu’avant.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/329785/original/file-20200422-47847-z2yssn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/329785/original/file-20200422-47847-z2yssn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/329785/original/file-20200422-47847-z2yssn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/329785/original/file-20200422-47847-z2yssn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/329785/original/file-20200422-47847-z2yssn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/329785/original/file-20200422-47847-z2yssn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/329785/original/file-20200422-47847-z2yssn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un parc dans un township du Cap transformé en mémorial pour membres de gangs décédés. Chaque ruban symbolise un membre de gang tué.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Dennis Rodgers</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>L’émergence de nouvelles entreprises</h2>
<p>Ce contexte de <a href="https://www.telegraph.co.uk/news/2020/04/12/unprecedented-truce-notorious-south-african-slums-gangs-join">paix relative</a> a également permis aux gangs locaux de développer de nouvelles activités qui profitent de la crise du Covid-19.</p>
<p>Par exemple, les mesures de confinement ont conduit à la fermeture des « shebeens » (bars informels clandestins) et de la plupart des petits magasins dans les townships. Les gangs locaux ont pris le relais, vendant de l’alcool et des cigarettes dans leurs maisons de shoot qui eux, restent encore ouverts. Ils le font cependant à des prix très élevés.</p>
<p>Selon Norma, l’alcool est désormais vendu au double de son prix d’avant la pandémie, tandis que les cigarettes coûtent désormais 5 rands (0,25 €) individuellement, contre un prix moyen d’environ 35 rands par paquet de 20 auparavant. Paradoxalement, le prix des drogues est resté ce qu’il était avant la crise.</p>
<h2>Les gangs face au Covid-19 – volontaires ou profiteurs ?</h2>
<p>Vue depuis Managua et le Cap, les actions des gangs et des trafiquants de drogue par rapport au Covid-19 semblent clairement relever moins de formes de soutien communautaire altruistes, et plus des stratégies liées à leur survie ou bien afin de saisir des opportunités conjoncturelles pour élargir leur base de ressources, aussi bien sur le plan collectif qu’individuellement.</p>
<p>Il en est probablement de même dans d’autres contextes, dont le Brésil, par exemple, où l’emprise des gangs sur les favelas est rarement stable, et différents gangs s’y battent constamment. Ils doivent aussi faire face à d’autres acteurs armés tels que des milices paramilitaires ou bien l’État brésilien. Agir afin de faire respecter les mesures de confinement permet clairement à un gang assiégé de se consolider, et une pandémie telle que celle du Covid-19 offre la possibilité de changer les rapports de force, d’empiéter sur les territoires d’autres groupes, ou bien de conquérir des nouvelles parts du marché de la drogue. À ce titre, ce que les actions des gangs pourraient bien signaler, ce sont en fait les <a href="https://theconversation.com/what-is-solidarity-during-coronavirus-and-always-its-more-than-were-all-in-this-together-135002">limites de la solidarité sociale</a> en temps de crise, et une fenêtre sur le futur si la pandémie devait s’empirer.</p>
<hr>
<p><em>Les prénoms et certains noms de lieux ont été anonymisés par mesure de sécurité.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/137636/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dennis Rodgers receives funding from the European Research Council (ERC) under the European Union’s Horizon 2020 research and innovation programme (grant agreement No. 787935).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Steffen Bo Jensen ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>A quel point l’activité des gangs et leur « aide » en temps de crise peuvent-elles vraiment être qualifiées d’altruistes ?Dennis Rodgers, Research Professor, Anthropology and Sociology, Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID)Steffen Bo Jensen, Professor, Department of Politics and Society, Aalborg UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1352482020-04-15T11:02:30Z2020-04-15T11:02:30ZTemporary urban solutions help us deal with crisis – and can lead to radical shifts in city space<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/327707/original/file-20200414-117587-c0glrc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=34%2C5%2C3807%2C2525&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/girl-wearing-protective-face-mask-walks-1685517520">Vudi Xhymshiti/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>The coronavirus pandemic has resulted in new thinking about how cities are best organised to meet our needs. Part of this has involved short-term changes in the use of urban space. </p>
<p>In England, some <a href="https://www.gov.uk/government/news/government-to-grant-permission-for-pubs-and-restaurants-to-operate-as-takeaways-as-part-of-coronavirus-response">planning regulations</a> have been relaxed to allow buildings to be repurposed in response to the crisis. In Italy, there are proposals to <a href="https://www.dezeen.com/2020/03/24/shipping-container-intensive-care-units-coronavirus-covid-19-carlo-ratti/">convert shipping containers</a> to intensive care units.</p>
<p>Our research into the <a href="https://journals.sagepub.com/stoken/default+domain/10.1177%2F0042098019898076/full">temporary use of land and buildings</a> shows the ways in which short-term development is deployed during times of crisis. Temporary uses also offer the opportunity for more fundamental <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/02697459.2019.1679429">rethinking of urban space</a> in the longer term.</p>
<h2>Rapid response</h2>
<p>Responding to COVID-19, temporary spaces are providing a way of quickly bolstering intensive care bed spaces as demand spirals. London’s Nightingale hospital, in the <a href="https://www.bbc.com/news/health-52125059">remodelled ExCel conference venue</a>, is one of a number of international examples of <a href="https://www.bbc.com/news/world-52089337">temporary field hospitals</a>.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/rh34bldQBCg?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Shipping containers converted into intensive care units to help fight COVID-19.</span></figcaption>
</figure>
<p>Temporary use may also help facilitate <a href="https://www.vox.com/2020/3/15/21179296/coronavirus-covid-19-social-distancing-bored-pandemic-quarantine-ethics">social distancing</a>. <a href="https://chi.streetsblog.org/2020/03/29/database-documents-cities-around-the-world-that-are-repurposing-car-space-during-pandemic">Street closures in North America</a> have been used to deter car use and increase space for pedestrians. </p>
<p>There are also more imaginative examples. In Bristol, residents have created an informal <a href="https://metro.co.uk/2020/04/01/people-spray-paint-running-lane-street-ensure-joggers-maintain-social-distancing-12493093/">runners’ lane</a> to ensure safe passage between pedestrians and joggers in accordance with UK social distancing rules. </p>
<p>In Bogotá, curbs on car use have liberated space for the temporary expansion of the city’s network of cycle paths, helping, in turn, to reduce overcrowding on public transport. Likewise, Germany has introduced <a href="https://twitter.com/BurkhardStork/status/1242856265619058688">extensions to pavement and bike lanes</a>. </p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1239930029150109697"}"></div></p>
<p>These measures are practical responses, reflecting changed priorities regarding urban infrastructure. But the history of <a href="https://popupcity.net/observations/the-temporary-city/">temporary urbanism</a> in response to crises shows that short-term repurposing can address other needs. </p>
<p>After the 2011 earthquake in Christchurch, New Zealand, a number of examples of <a href="http://tacticalurbanismguide.com/about/">tactical, temporary re-use</a> of urban space emerged. Some – from an urban living room featuring a book exchange inside a <a href="https://gapfiller.org.nz/project/think-differently-book-exchange/">recycled fridge</a> to dance spaces on disused land with music from a <a href="https://gapfiller.org.nz/project/dance-o-mat/">converted washing machine</a> – were about maintaining community spirit in the face of adversity.</p>
<figure>
<iframe src="https://player.vimeo.com/video/164509608" width="500" height="281" frameborder="0" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Dance-O-Mat ballet performance amid the rubble in Christchurch after the 2011 earthquake.</span></figcaption>
</figure>
<p>Other temporary uses have responded to economic crises. In western cities after the global financial crisis, temporary re-use reflected landowners’ desire to maintain income and the wish of political leaders to protect local economies. This logic informed the establishment of temporary businesses known as <a href="https://www.architectural-review.com/essays/the-pop-up-problem-does-the-obnoxious-phenomenon-have-hidden-depths/8665758.article">pop-up shops</a> or the re-use of shipping containers for everything from urban agriculture to shopping malls. </p>
<p>These examples show <a href="https://www.theguardian.com/cities/2015/jul/20/cult-temporary-pop-up-phenomenon-cities">the dynamic role</a> temporary use of land and buildings can play in keeping cities functioning in the face of adversity.</p>
<p>In the current health crisis, there is scope for temporary solutions again to prove vital. Equally, these short-term expedient measures could have longer-term benefits, extending beyond the current crisis. </p>
<p>The reduction of traffic, <a href="https://globaldesigningcities.org/publication/global-street-design-guide/designing-streets-people/designing-for-pedestrians/sidewalk-extensions/">extension of footpaths</a> and installation of temporary cycle ways promotes new opportunities for play, health and sustainable mobility. As an example, <a href="https://playingout.net/">play streets</a> could radically alter <a href="https://vbn.aau.dk/en/publications/children-in-the-built-environment-promoting-play-playful-learning">urban childhoods</a> for the better.</p>
<p>More immediately, these measures would provide an alternative lifeline for communities if parks and green spaces were to eventually close. </p>
<h2>Learning from the past</h2>
<p>Lessons from the 2007/08 financial crisis suggest that allowing innovative adaptations to continue when something approaching normality resumes will be a challenge.</p>
<p>In the aftermath of the global financial crisis, the number of innovative temporary uses <a href="https://www.researchgate.net/publication/338356650_Temporary_use_in_England's_core_cities_Looking_beyond_the_exceptional">doubled in major English cities</a>. But when the wider economy recovered, many innovative temporary uses – including urban farms, beach bars and pop-up cinemas – <a href="https://www.researchgate.net/publication/336604510_The_Role_of_Temporary_Use_in_Urban_Regeneration_Ordinary_and_Extraordinary_Approaches_in_Bristol_and_Liverpool">were sacrificed</a> in favour of business-as-usual development. Those that remained were sometimes <a href="https://www.theguardian.com/lifeandstyle/2010/oct/12/pop-up-temporary-shops-restaurants">co-opted by established corporate interests</a>, often diluting their radical purpose.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/324897/original/file-20200402-74858-2teomg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/324897/original/file-20200402-74858-2teomg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/324897/original/file-20200402-74858-2teomg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/324897/original/file-20200402-74858-2teomg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/324897/original/file-20200402-74858-2teomg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/324897/original/file-20200402-74858-2teomg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=463&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/324897/original/file-20200402-74858-2teomg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=463&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/324897/original/file-20200402-74858-2teomg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=463&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Shipping container office units on disused land in Bristol, UK.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Michael Martin</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Rather than encouraging new innovative or progressive uses of space, the deployment of mobile temporary use frequently served as a means to <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/02697459.2019.1679429">incentivise development</a> by encouraging speculative private investment in previously unattractive locations. </p>
<p>With COVID-19, temporary uses might prove to be more lasting. This is partly because the scale of the health crisis requires adaptation beyond a few landmark developments. It may also require at least some element of social distancing to be maintained for a protracted period. <a href="https://www.citylab.com/transportation/2020/04/coronavirus-city-street-public-transit-bike-lanes-covid-19/609190/">Safe movement in and around cities</a> may require temporary design solutions to become more permanent, or to be deployed again if this or a similar health crisis resurfaces.</p>
<p>In the longer term, the shape of urban living after coronavirus, and the extent to which it is different, <a href="https://www.theguardian.com/world/2020/mar/26/life-after-coronavirus-pandemic-change-world">remains uncertain</a>. But previous crises suggest that at least some of the temporary uses currently emerging may well endure into the future.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/135248/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>The authors do not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and have disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Temporary use of land and buildings plays a role in the aftermath of crisis.Michael Martin, Assistant Professor in Urban Design, Aalborg UniversityIain Deas, Senior Lecturer in Urban & Regional Policy and Planning, University of ManchesterStephen Hincks, Reader in Urban Studies and Planning, University of SheffieldLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1084412018-12-11T15:01:00Z2018-12-11T15:01:00ZErectile dysfunction: exercise could be the solution<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/249449/original/file-20181207-128217-nizuhy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/download/confirm/430231723?src=_8uIeeiKBcF7f38UEXlPkA-1-78&size=medium_jpg">Sasin Paraksa/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Men with erectile dysfunction can improve their sexual function with 40 minutes of aerobic exercise, four times a week, according to our latest <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5960035/">review of the evidence</a>. </p>
<p>We reviewed all international studies carried out over the past ten years where inactive men with erectile dysfunction received professional help to become physically active. The results showed that most of the time it is possible to reduce erection problems with exercise. </p>
<p>Erectile dysfunction is the most common male sexual dysfunction. It is defined as a consistent or recurring inability to get and maintain an erection sufficient for sexual activity. In other words, persistent problems in getting it up or keeping it up during intercourse or masturbation.</p>
<p>Erectile dysfunction, including weakened night and morning erections, may be an early sign of health problems and, sometimes, a symptom of early-stage atherosclerosis (stiffening and narrowing of the arteries).</p>
<p>We know that erection problems are more common in smokers and in men who are physically inactive or overweight. It is also more common in men with high blood pressure, cardiovascular diseases and diabetes. So erection problems may be the first sign of vascular disease.</p>
<p>About 23% of inactive men and about 23-40% of obese men suffer from erectile dysfunction, as do 40% of men receiving treatment for high blood pressure and 75% of men with cardiovascular disease. By comparison, <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/30043660">18% of men in the general population</a> have, or have had, erectile dysfunction.</p>
<h2>Hardening of the arteries</h2>
<p>When a man becomes sexually aroused, blood flows to his penis and the increased blood in the erectile tissue results in an erection. But in men with <a href="https://www.nature.com/articles/3901312.pdf">atherosclerosis</a> the penile artery walls become thick and lose their elasticity. Three-quarters of erection problems are linked to atherosclerosis, a condition typically triggered by <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5960035/pdf/main.pdf">lifestyle factors</a>, such as obesity, physical inactivity and smoking.</p>
<p>We already knew that <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22072232">lifestyle modifications</a>, including physical activity, improved vascular health, sexual health and erectile function. Exercise is the lifestyle factor most strongly associated with erectile function and widely recognised as the most important promoter of vascular health, as physical activity improves blood circulation in the body, <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20522326">including the penis</a>. We also knew that there is <a href="https://bjsm.bmj.com/content/51/19/1419">strong evidence</a> that frequent physical activity significantly improves erectile function.</p>
<p>For our study, we wanted to know <em>how much</em> physical activity is needed to improve erectile function. We saw that physical activity of moderate to high intensity for 40 minutes, four times a week for six months resulted in an improvement or even a normalisation of the person’s erection. After six months of physical activity, men who could not masturbate or have sex for a long time were able to resume sexual activity.</p>
<p>The figure below shows, on a scale of 0-30 points, the average erectile function of men in different studies before and after the intervention (exercise). In all studies, men had improved erectile function. </p>
<iframe id="datawrapper-chart-cpNFw" src="https://datawrapper.dwcdn.net/cpNFw/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width: 0; min-width: 100% !important;" height="325" width="100%"></iframe>
<h2>Take-home message</h2>
<p>If you are physically inactive and in bad shape, it’s important to not push yourself into a fitness regime that is beyond you, otherwise, you risk injury, which could make exercising difficult and reduce your motivation to continue.</p>
<p>The best approach is to start with simple aerobic activity. Walk every day, swim or cycle, and increase the pace and distance week by week. After a few weeks, you could add jogging, dancing, tennis or football into the mix. Or, if you prefer, you could join a gym.</p>
<p>To strengthen blood circulation – throughout the body and also the penis – exercise intensity must be moderate to high. This means that you warm up your body and produce sweat, your face turns red, your pulse increases and you become slightly breathless – breathless enough to make it difficult to have a conversation.</p>
<p>If your erectile dysfunction is caused by early stages of atherosclerosis, 160 minutes of physical activity weekly for six months will probably improve your ability to get an erection.</p>
<p>A physically active lifestyle should be considered as the beginning of more permanent lifestyle changes. If you are overweight, the effect of the physical activity can be further increased by losing weight. And if you smoke, the effect of physical activity becomes even stronger by quitting.</p>
<p>But changing your lifestyle from being physically inactive to being physically active is easier said than done, so it is <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29661646">best to seek professional help</a>. Physiotherapists can help to evaluate your fitness level and potential. Also, they can provide you with a personalised training programme and guide and support you as you gradually increase your level of physical activity.</p>
<p>And exercise is much more enjoyable when you do it with others. So why not invite your partner or friends to join you? After all, training is healthy, but it should also be fun. </p>
<p><em>This article is co-published with <a href="http://sciencenordic.com/erectile-dysfunction-physical-activity-could-be-solution">ScienceNordic</a> and in Danish on <a href="https://videnskab.dk/krop-sundhed/rejsningsproblemer-motion-kan-vaere-loesningen">Forskerzonen</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/108441/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>The authors do not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and have disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Aerobic exercise can improve erections in men suffering from erectile dysfunction.Helle Gerbild, Assistant Researcher in Public Health, University of Southern DenmarkChristian Graugaard, Professor of Sexology, Aalborg UniversityKristina Areskoug-Josefsson, Associate Professor, Jönköping UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/732122017-02-24T07:40:22Z2017-02-24T07:40:22ZForget La La Land – best foreign language Oscar nominees show the true diversity of cinema<p>A marriage on the rocks in Iran, a prankster German father and a grumpy old Swede. Landmines in Denmark and a love story in Vanuatu. These stories are all vying for the same prize: that of <a href="http://www.oscars.org/oscars/ceremonies/2017">Best Foreign Language Film</a> at the 89th Academy Awards. </p>
<p>Maren Ade’s tragi-comedy Toni Erdmann is <a href="http://www.oddschecker.com/awards/oscars/best-foreign-language-film">favourite</a> to take home the Oscar on February 26, but the whole field demonstrates the diversity of cinema outside the Hollywood bubble.</p>
<p>To explain what’s on offer in 2017, The Conversation asked scholars from around the world to write about why these films matter, both at home and on cinema’s biggest stage.</p>
<h2>The Salesman: Iran</h2>
<p>Asghar Farhadi will represent Iranian cinema at the Oscars again, with his 2015 picture, <a href="http://www.newyorker.com/magazine/2017/01/30/the-salesman-and-split">The Salesman</a>. The film is an exposé of a subtle cultural issue in Iran: how to perceive violence and react to an act of abuse in a family relationship, particularly in a male-dominated society.</p>
<p>The story deals with a young artist couple, Rana and ’Emad (played by Taraneh Alidousti and Shahab Hosseini), who are putting on a production of Arthur Miller’s play Death of a Salesman. Their own conjugal life is shaken when Rana is attacked by a stranger in her home. Farhadi uses this scenario to raise the question of how we behave in moments of crisis. </p>
<p>Farhadi tackles this contentious cultural issue in a society of traditional values, where women’s “honour” is defined by their sexuality and men’s is defined by the control they exert over that sexuality. The audience observes ’Emad’s inner struggle with doubt, resentment and self-control in order to reconcile cultural norms of revenge and forgiveness. Rana’s defenceless conduct evokes an image of a passive victim avoiding conflicts out of terror.</p>
<p>The narrative is full of suspense and anxiety, as we have seen in Farhadi’s previous films <a href="https://www.theguardian.com/film/2014/mar/27/the-past-review-peter-bradshaw-asghar-farhadi">The Past</a> (2013), <a href="http://www.newyorker.com/magazine/2012/01/09/tehran-tales">A Separation</a> (2011) and <a href="http://www.latimes.com/entertainment/movies/la-et-mn-about-elly-review-20150508-column.html">About Elly</a> (2009). Along with his realistic narrative style, Farhadi reveals his remarkable expertise in documenting the rise of confrontation and conflict, leading his characters to make fundamental decisions about their lives. </p>
<p>After The Saleman’s <a href="http://www.festival-cannes.com/en/actualites/articles/asghar-farhadi-award-for-best-screenplay-forushande-the-salesman">success at the Cannes Film Festival</a>, where it won two awards for best film script and best male actor, the cast is looking forward to the results of the Oscars. As an act of protest against US President Donald Trump’s proposed travel ban, Farhadi and his cast have announced that they <a href="https://www.nytimes.com/2017/01/29/movies/trump-immigration-oscars-iranian-director-asghar-farhadi.html">won’t be present on the red carpet</a> this year. </p>
<h2>A Man Called Ove: Sweden</h2>
<p>Ove lives alone, very alone, in a semi-detached home in a small-scale Swedish suburb. “Misery hates company”, the US tagline says, and the only company Ove longs for is that of his wife who has died. When the film begins, he is about to commit suicide, hoping to join her in heaven. </p>
<p>Such a beginning may sound particularly Swedish, well in line with an Ingmar Bergman film or a <a href="http://www.citiesonstage.eu/en/lars-noren/lars-nor%C3%A9n">Lars Norén</a> play. But Man Called Ove is different. You don’t attract the <a href="http://www.indiewire.com/2016/12/a-man-called-ove-best-foreign-language-oscar-contender-box-office-1201761789/">largest audience to a Swedish film</a> in years if you don’t offer a somewhat more comforting vision of life.</p>
<p>Ove’s unfolding story, told in an emotional and warmly comic way, values the breaking down of barriers; barriers between individuals such as those between the grumpy old Ove himself and his more normal neighbours, but also barriers of class, ethnicity, fear and prejudices, hindering people from joining a supportive community.</p>
<p>One such modern barrier is that Bahar Pars, the film’s Swedish Iranian-born lead actress, could have been <a href="http://deadline.com/2017/02/bahar-pars-oscars-iran-trump-ban-man-called-ove-1201899503/">kept away from the Oscar award ceremony</a> amid the <a href="https://www.theguardian.com/us-news/2017/jan/29/oscars-organiser-says-us-ban-on-iranian-nominee-extremely-troubling">uncertainty</a> over US President Donald Trump’s travel ban.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"825466407290810368"}"></div></p>
<p>The film, and the internationally <a href="https://www.nytimes.com/2016/10/29/books/a-man-called-ove-fredrik-backman-sweden-success.html">bestselling novel by Fredrik Backman</a> it is based on, combine the contemporary story of overcoming loneliness with a series of progressive flashbacks to events in both Ove’s life and Swedish history. The film uses Ove’s life to trace the development of a successful Swedish welfare state. Viewers are invited to enjoy both nostalgia for the past and fantasies about how contemporary lives could be, once again, filled by meaningful relationships.</p>
<p>Made by experienced comedy director Hannes Holm, the film benefits from the match between Rolf Lassgård as Ove, and Bahar Pars as Parvane – Ove’s new neigbour, who disrupts both his life and his plans to commit suicide. Their acting – his stubborn reclusiveness and her energetic go-ahead spirit – carries the life-affirming transformation of a man called Ove. Misery needn’t hate company.</p>
<h2>Tanna: Australia/Vanuatu</h2>
<p>Lush tropical scenery of evergreen flora surrounded by turquoise-blue coral gardens. Smiling, healthy and athletic people consuming real food and living in perfect harmony with their natural environment. No cars, no telephone nor internet, no air conditioning, no tourists.</p>
<p>This is the scene set by Australian filmmakers Martin Butler and Bentley Dean for their exotic romance movie, Tanna, which takes place on the island of the same name. Tanna may look like paradise but the film’s protagonists deal with a serious problem: true love and one of its most fatal consequences, to die of a broken heart. </p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/100682/original/image-20151104-25358-1afyk7m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/100682/original/image-20151104-25358-1afyk7m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/100682/original/image-20151104-25358-1afyk7m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/100682/original/image-20151104-25358-1afyk7m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/100682/original/image-20151104-25358-1afyk7m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/100682/original/image-20151104-25358-1afyk7m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/100682/original/image-20151104-25358-1afyk7m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Love in paradise.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Contact Films</span></span>
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<p>Having done anthropological fieldwork on Tanna over a period of 25 years, I have been invited to attend public screenings of the film, in order to contextualise the life of the actors who appear in it. </p>
<p>In discussions with audiences, my comments about real-life Tanna always provoked the same refrain: “the dream has been shattered”. The fact is that the tribal groups featured in the movie have been among the most filmed and also the <a href="http://xdaysiny.com/volcano-hunting-tribal-living-tanna-island/">most visited</a> by tourists. </p>
<p>Like other Tannese people they have mobile phones, drive cars, watch movies and football games, eat rice and instant noodles. Those who migrate to the capital of Vanuatu, Port-Vila, often live in slums and work as security guards. </p>
<p>However, when they live on their home island, they still maintain relative autonomy. There, money is not yet the most important good, so people are glad participate in the shooting of a movie. That’s why the end result is <a href="https://www.nytimes.com/2016/09/16/movies/tanna-review.html">pretty good</a>.</p>
<p>This story, set in a remote corner of the world, has become a world success. Sadly, since the movie was shot, <a href="http://www.abc.net.au/news/2016-03-13/cyclone-pam-vanuatu-one-year-on/7242620">Cyclone Pam</a> has very severely damaged the island. </p>
<p>After the disaster, there are no more leaves on trees and of course no more fruit, no more food, no more traditional houses, and perhaps no more smiling people ready to participate in a cinematic adventure about tropical paradise.</p>
<h2>Toni Erdmann: Germany</h2>
<p>German comedy Toni Erdmann tells the story of a father-daughter relationship. Ines (Sandra Hüller) works as an executive consultant and is driven by the demands of the consultancy business; she is a very serious person. </p>
<p>Her father Winfried (Peter Simonischek), is a retired music teacher who always tries to be funny. He creates an outrageous alter ego, Toni Erdmann, and follows his daughter in character to confront her with the absurdity of her professional life. </p>
<p>When he arrives at Bucharest, where Ines works, he brings her into one absurd situation after another. At a private reception, he introduces himself as the German ambassador in Romania and Ines as his secretary Miss Schnuck. In an amazing scene, he starts to play the piano and introduces his daughter as Whitney Schnuck, performing the song <a href="http://www.allmusic.com/album/whitney-houston-greatest-love-of-all-mw0002370097/credits">Greatest Love of All</a> by Whitney Houston. </p>
<p>Another scene captures Ines’s birthday brunch, which was also supposed to be a team-building exercise for her and her colleagues. As she is facing some problems with her dress, she finally cracks and <a href="http://www.vulture.com/2016/12/toni-erdmann-nude-scene.html">decides to stay naked</a>. She tells her colleagues that this is a ritual they have to follow. Some furiously leave her flat, others show their irritation but do get naked. Finally, her father shows up in a traditional Bulgarian animal costume. When he leaves her flat she runs after him, and finally hugs her father, respecting him as he is.</p>
<p>Toni Erdmann is Maren Ade’s third feature film as director. She has also worked as producer for several German films. Her latest work is an excellent staged dramedy, which is able to show the occasional absurdity of formal situations and self-imposed obsessions, whether they are professional or private. </p>
<p>The film gained <a href="http://www.festival-cannes.com/en/actualites/videos/toni-erdmann-by-maren-ade">international success starting at the Cannes Film Festival</a>, where it was <a href="https://www.nytimes.com/2016/05/23/movies/the-director-of-toni-erdmann-savors-her-moment-at-cannes.html">acclaimed</a> by audiences and critics alike. Such has been the film’s success that Paramount Pictures has announced an <a href="https://www.theguardian.com/film/2017/feb/07/jack-nicholson-toni-erdmann-remake">American remake</a> starring Jack Nicholson and Kristen Wiig in the leading roles.</p>
<p>In the same way Toni Erdmann shows her daughter not to take everything so seriously, the audience of this remarkable film can learn that life can be much easier with humour and a sense of absurdity.</p>
<h2>Land of Mine: Denmark</h2>
<p>Danish film Land of Mine takes place just after the second world war on the Western coast of Denmark, where 2,000 young German prisoners of war are commanded to remove land mines from the coast by Danish and English allied authorities. During the process, almost half of the war captives are injured or die. </p>
<p>The story focuses on Danish sergeant Carl Leopold Rasmussen who has the command of a small German division of predominantly youngsters. He battles with pent-up anger towards the German occupational forces; the mining clearance is his chance to give vent to his bottled-up frustrations. However, the experience develops his hatred into an opportunity to forgive. </p>
<p>The film opens up a shady chapter in Danish history, with reference to actions that may have been in breach of international conventions of war. The film was very <a href="https://www.kristeligt-dagblad.dk/kultur/under-sandet-er-en-staerk-film-der-burde-blive-oscar-kandidat">well received</a> by the Danish press, but Danish historians were <a href="https://www.kristeligt-dagblad.dk/danmark/eksperter-film-og-tv-forplumrer-historieformidlingen">hesitant</a> about the historical accuracy of the narrative. In a critical sense, Land of Mine not only narrates the historical past, it may also present a mirror reflecting disconcerting contemporary Danish foreign policy, such as its <a href="http://www.jpost.com/Opinion/Denmark-in-the-Middle-East-453552">involvement in wars in the Middle East</a>.</p>
<p>Martin Zandvliet, a Danish director with a rapidly rising profile, wrote and directed Land of Mine. He successfully stages the immense west coast drama as a condensed chamber play during which we gradually entrench ourselves in Carl’s emotional journey, and the German youngsters’ dread of death. Two fairly new Danish actors, Roland Møller and Mikkel Boe Følsgaard, shine along with a number of highly talented upcoming German actors. </p>
<p>Land of Mine undoubtedly represents the rise of new Danish talent in film production, and indicates that a new generation of filmmakers is impatiently waiting in the wings.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/73212/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>The authors do not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and have disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>The best of global cinema from Germany to Iran and Vanuatu.Pegah Shahbaz, Postdoctoral research associate, Université Sorbonne Nouvelle, Paris 3 Anders Marklund, Senior Lecturer, Film Studies, Lund UniversityKim Toft Hansen, Associate professor of Scandinavian film and television, Aalborg UniversityLothar Mikos, Professor of Television Studies, Filmuniversität Babelsberg Konrad WolfMarc Tabani, Senior Research Fellow, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.