En 2016 déjà, la pénurie annoncée de jeunes diplômés en informatique contribuait à réinventer le recrutement. Les entreprises ont fait preuve d’inventivité et de créativité pour séduire. Les chiffres sont éloquents. En 2019, les recrutements de cadres devraient être au plus haut niveau avec une sixième année consécutive de hausse. Le nombre d’embauches devrait se situer entre 270 700 et 292 000. La progression par rapport à 2018 pourrait aller jusqu’à 10 %, selon les 10 000 entreprises interrogées, selon l’Association pour l’emploi des cadres (APEC). Pour la première fois depuis la crise, le taux d’emploi des 15-24 ans augmente en 2017 (+ 0,9 point) pour atteindre 28,7 %. Il avait baissé fortement entre 2008 et 2013 à la suite de la crise économique de 2008-2009, puis était resté quasiment stable jusqu’en 2016.
À voir les jeunes qui se pressent aux entretiens de certains gros pourvoyeurs d’emplois, le conformisme semblerait de mise : costume bleu et cravate pour les jeunes garçons, tailleur strict pour les jeunes filles. Les CV sont similaires également : tous ont un bac+5, un bon niveau d’anglais, une première expérience (stage ou alternance), une parfaite maîtrise des outils informatiques. On pourrait croire qu’il s’agit d’une armée de clones, partis en guerre pour décrocher le Graal, à savoir un CDI.
Pourtant, il n’en est rien. Ces jeunes diffèrent beaucoup de leurs aînés malgré le conformisme vestimentaire apparent (sans doute un héritage transmis) : autonomes, formés aux réseaux sociaux, créatifs. Ils savent d’ailleurs se distinguer les uns des autres et faire valoir leur valeur ajoutée en développant leur propre identité.
Séduire plus que sélectionner
En 2019, la pénurie n’est plus le fait d’un seul secteur d’activité. Les jeunes diplômés sont très courtisés. Les processus sont somme toute assez classiques : entretiens collectifs, entretiens individuels, tests de personnalité, tests d’aptitude, etc. Il s’agit de sélectionner mais, chose nouvelle, il faut attirer et retenir les meilleurs. L’enjeu pour les Ressources humaines est énorme. Les services doivent désormais construire et faire vivre une « marque employeur », communiquer sur les réseaux sociaux, et surtout convaincre ces jeunes diplômes de rejoindre leur organisation.
Surtout, les RH doivent faire vite. Le recrutement correspond à la rencontre de deux personnalités différentes qui doivent très rapidement s’apprivoiser. Il faut ensuite aller très vite pour envoyer une proposition construite aux jeunes diplômés. L’envoi est bien évidemment numérique et la lettre d’intention d’embauche précède la préparation du contrat. Cela permet d’aller plus vite que les autres recruteurs (surtout avec la possibilité d’une signature électronique). Les pièces justificatives sont également téléchargées sur une plate-forme dédiée. De nouveaux spécialistes de ce type de services sont d’ailleurs apparus sur le marché, par exemple Welcometothejungle ou Jobteaser. Ces sites n’ont plus seulement vocation à diffuser des offres d’emploi, mais également à accompagner, à informer sur les processus et à guider les candidats.
La rémunération au cœur de l’acceptation
Les jeunes diplômés reçoivent plusieurs offres sur une période assez courte. Deux solutions : être le plus rapide et remporter le consentement du jeune, ou être plus attractif, c’est-à-dire donner envie de rejoindre une organisation, une équipe, avoir envie de s’engager pour une entreprise dont on partage les valeurs et les buts. L’offre devra donc être particulièrement soignée, tant sur la forme que sur le fond.
On veillera à susciter l’intérêt des jeunes recrues en leur proposant plus qu’un emploi et un salaire ! Le « package » devra être adapté (pour donner au jeune la sensation qu’il est vraiment unique). Il s’agira donc d’intégrer une part variable, négociable. Il n’est pas forcément utile d’insister sur des avantages sociaux collectifs qui ne valorisent pas la recrue et qui sont perçus comme « obligatoires ». Ainsi, inutile de communiquer sur la présence d’une complémentaire santé par exemple. Mieux vaut insister sur les perspectives de salaires, de promotion, d’évolution, de missions à l’étranger et de formation.
Intégrer : welcome onboard !
Les services RH parlent désormais de « onboarding ». Ce terme a été initié par les start-up. Il s’agit de conserver les compétences rares au-delà du délai très court de la période d’essai (quatre mois éventuellement renouvelables, jusqu’à huit mois pour un cadre). Les procédures étaient autrefois rarement formalisées. Les services RH perçoivent désormais la nécessité de mettre en œuvre un accueil collectif (réunion d’accueil, séminaire de team-building) mais aussi personnalisé (poste de travail accueillant le jour J, avec mise à disposition de « goodies » avec le logo de l’entreprise).
Pour ne pas manquer ce moment clé, le service RH doit s’attacher à mobiliser les managers concernés afin de :
organiser la première journée du nouveau collaborateur ;
prévoir une formation interne en cas de besoin ;
préparer une rencontre avec le reste des troupes ;
planifier un entretien au bout d’un mois d’essai, puis un rapport d’étonnement en fin de période d’essai ;
ne pas laisser le candidat sans nouvelles avant son arrivée même s’il a déjà signé son contrat de travail ;
solliciter un collaborateur qui deviendra tuteur ;
organiser l’accueil physique : bureau, ordinateur, codes de connexion, etc.
Un jeune qui découvre qu’il n’est pas attendu risque de répondre à d’autres sollicitations avant la fin de la période d’essai. En effet, on gardera à l’esprit que pour le salarié en cours de période d’essai, le délai de prévenance pour quitter l’entreprise est de 48 heures. Une durée réduite à 24 heures si la durée de présence du salarié dans l’entreprise est inférieure à 8 jours.
Recruteurs, essayez donc de ré-enchanter les processus de recrutement en vous appuyant sur les nouveaux outils organisationnels et technologiques pour séduire cette nouvelle vague de diplômés !
L’École de Management de Normandie organise son traditionnel « True Normand » le 20 juin 2019.