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Cosmétiques et produits d’hygiène. Aksenova Natalya/Shutterstock

Joyeux anniversaire ! Notre réglementation cosmétique a 40 ans

La réglementation cosmétique, née en 1976 sous la forme d’une Directive européenne (76/768/CEE) est une quadragénaire tout juste liftée… Bien sûr, différents « replâtrages » avaient été effectués au fil du temps, mais ceux-ci, bien qu’utiles, avaient alourdi le texte.

En 2009, cette « belle » n’était carrément plus visible – ni lisible – à force d’avoir superposé les couches de maquillage, comprendre des modifications successives qui apportaient pourtant des précisions d’importance. Un brin de chirurgie esthétique s’imposait donc !

Cette année-là, la directive meurt après 33 ans de bons et loyaux services. Elle sera remplacée par le Règlement (CE) N°1223/2009, un document unique qui compile l’ensemble des éléments à prendre en compte lorsque l’on souhaite se lancer dans la fabrication et la distribution de produits cosmétiques.

Ce lifting signe une véritable renaissance. Il est si bien réussi que certains industriels en viennent à ne plus reconnaître leur chère vieille directive. Ceux-là s’ébaudissent à chaque page en découvrant des notions vieilles de plusieurs années ! Tout semble parfait… Mais il y a un mais…

En effet, les annexes (listes de substances autorisées) ne sont pas à jour. On trouve par exemple dans la liste des filtres UV le PABA (acide para-aminobenzoïque) bien qu’il soit interdit depuis 2008 (Directive 2008/123/CE) ! Le règlement, document unique, fut donc un beau rêve. La réglementation étant par définition « vivante » c’est-à-dire capable de s’adapter aux connaissances du moment, il est impossible de graver les informations dans le marbre une fois pour toutes. Les ajouts modifiant le Règlement (CE) N°1223/2009 ont donc commencé à sortir…

Premiers pas en 1976

Retour aux origines, au début des années 1970. Il aura fallu attendre la mort de nourrissons pour bien prendre la mesure de la nécessité de mettre en place une réglementation cosmétique. En 1972, la France est sous le choc de l’affaire du talc Morhange qui vient de provoquer la mort de 36 nourrissons et de nombreux cas d’intoxications. L’hexachlorophène, un conservateur antimicrobien, s’est retrouvé accidentellement surdosé dans des lots de produits mis sur le marché. Une erreur de fabrication a abouti à cette teneur excessive en conservateur dans le talc incriminé.

Simone Veil, quand elle était ministre de la Santé, a fait évoluer la réglementation cosmétique. Roland Godefroy/Wikipédia, CC BY

Simone Veil, alors ministre de la Santé du gouvernement Chirac, soumet un projet de loi modifiant le Livre V du Code de la Santé publique et concernant la fabrication, l’importation et la mise sur le marché des produits cosmétiques et des produits d’hygiène corporelle, le 2 avril 1975. On se soucie enfin de la qualité des produits cosmétiques par l’instauration d’une réglementation des ingrédients et des pratiques de fabrication.

La France joue alors un rôle moteur au niveau européen, en proposant une directive au conseil de la CEE, le 6 octobre 1972 : c’est la Directive 76/768/CEE qui pose les bases réglementaires de la cosmétologie moderne. Désormais, le cosmétique possède une toute nouvelle définition et on abandonne le terme de produit de beauté. En effet, on peut lire à l’article L658-1 du Code de la Santé publique que les produits cosmétiques et les produits d’hygiène corporelle sont définis comme « toutes les substances ou préparations autres que les médicaments destinées à être mises en contact avec les diverses parties superficielles du corps humain ou avec les dents et les muqueuses, en vue de les nettoyer, de les protéger, de les maintenir en bon état, d’en modifier l’aspect, de les parfumer ou d’en corriger l’odeur ».

Les décennies suivantes vont voir apparaître des compléments importants au texte d’origine. Des versions successives vont, par exemple, rendre obligatoire la réalisation de tests permettant d’apporter la preuve d’un effet vanté par le marketing (Directive 93/35/CEE du Conseil du 14 juin 1993).

Définitions

L’article premier de cette directive qui modifie pour la sixième fois la Directive 76/768/CEE nous indique que l’« on entend par produit cosmétique toute substance ou préparation destinée à être mise en contact avec les diverses parties superficielles du corps humain (épiderme, systèmes pileux et capillaire, ongles, lèvres et organes génitaux externes) ou avec les dents et les muqueuses buccales, en vue exclusivement ou principalement de les nettoyer, de les parfumer, d’en modifier l’aspect et/ou de corriger les odeurs corporelles et/ou de les protéger ou de les maintenir en bon état ». On constate que cette définition diffère peu de la définition d’origine.

Quelle définition pour un cosmétique ? Efraimstochter/Pixabay

Une version légèrement différente se retrouve à l’article L. 5131-1 du Code de la Santé publique : « on entend par produit cosmétique toute substance ou préparation destinée à être mise en contact avec les diverses parties superficielles du corps humain, notamment l’épiderme, les systèmes pileux et capillaire, les ongles, les lèvres et les organes génitaux externes, ou avec les dents et les muqueuses buccales, en vue, exclusivement ou principalement, de les nettoyer, de les parfumer, d’en modifier l’aspect, de les protéger, de les maintenir en bon état ou de corriger les odeurs corporelles ». L’ajout de l’adverbe « notamment » est savoureux et relève de la science-fiction : est-il prévu que l’être humain bénéficie un jour d’appendices particuliers qu’il faudra nettoyer, parfumer… Outre cette modification de la définition, la Directive 93/35/CEE introduit l’obligation de faire figurer sur l’emballage des produits leur composition qualitative ainsi que l’interdiction, à partir du 1er janvier 1998, de la mise sur le marché d’ingrédients ou de mélanges d’ingrédients ayant été testés sur les animaux.

Ces différentes modifications surviennent souvent dans un contexte lié à des scandales sanitaires telles que l’affaire du sang contaminé, par exemple.

Molécules allergisantes

La Directive 2003/15/CE, quant à elle, portera obligation de faire figurer sur l’emballage des produits cosmétiques la présence d’un certain nombre de molécules, pour la plupart d’origine végétale, connues pour leurs propriétés allergisantes (c’est l’établissement de la liste des 26 allergènes). Cette Directive qui sonne aussi le glas de l’utilisation des animaux pour tester l’absence d’effet irritant pour la peau, l’œil ou les muqueuses des produits apporte également un changement dans la manière de communiquer sur la péremption des produits. Pour la première fois, on va se servir d’un petit logo pour informer le consommateur sur la PAO (période après ouverture), délai exprimé en mois pendant lequel il est possible d’utiliser un produit sans risquer de problème (cette notion reste sans doute floue dans l’esprit du public).

Des vœux pour la belle quadragénaire

Après avoir feuilleté brièvement l’album de famille de cette réglementation cosmétique, il est temps de passer aux vœux. Ses fondamentaux restent les mêmes depuis 40 ans : fabriquer les cosmétiques en respectant les Bonnes Pratiques de Fabrication, assurer la traçabilité en rédigeant un Dossier Information Produit irréprochable, contrôler les produits fabriqués afin de s’assurer qu’aucune anomalie n’est survenue… Mais le vocabulaire évolue : une compilation régulière des modifications survenues s’est avérée indispensable. Ainsi est né le Règlement (CE) N°1223/2009. Le but ultime reste toujours la préservation de la santé du consommateur. Un lifting, de temps en temps, sera donc conseillé. Pour les 40 ans à venir, espérons que cette réglementation devienne le livre de chevet de tout industriel qui se respecte. Longue vie aux Règlements… qui offrent un cadre strict pour la production de produits qui font toujours rêver.

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