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Les RH dans tous leurs états

Le collectif de travail au cœur de la résolution des conflits

Comme adhérer à toutes les règles d'une organisation est parfois difficile, on observe parfois des comportements qualifiés de déviants. Antonio Guillem / Shutterstock

Une organisation est souvent soumise à des conflits au sein des équipes. Les conflits sont inévitables mais ne doivent pas pour autant être négligés. La matrice de Thomas et Kilmann sert souvent d’outil de référence en matière de gestion des conflits. La méthode proposée est d’identifier les styles de gestion des conflits. Cinq styles y sont identifiés : tendance à rivaliser, à collaborer, à éviter, à céder et au compromis. Parmi ces styles, le compromis y apparaît comme une solution acceptable par l’ensemble des parties.

Matrice de Thomas et Kilman. Skillsone.com

Dans les organisations, il est donc intéressant de se demander à partir de quel moment un individu perçoit une solution comme acceptable, et surtout se contentera du compromis. Cela va dépendre des caractéristiques intrinsèques propres à chaque collaborateur : son âge, son genre, son environnement social et géographique, son éducation, et le groupe dans lequel il évolue. Cela dépendra aussi de sa place au sein de l’équipe. En effet, si l’organisation offre la possibilité à l’individu de bien s’intégrer dans celle-ci, le collaborateur en adoptera les codes et s’attachera à en respecter les normes.

L’importance du groupe

Une équipe de travail se conforme à un ensemble de valeurs et aux règles collectives jugées légitimes. Mais adhérer à toutes ces règles est parfois difficile. En conséquence, on observe des comportements qualifiés de déviants, sources de conflits. Les individus déviants sont ceux qui ne respectent pas les règles de l’équipe de travail. Ils peuvent être déviants dans une organisation et pas dans une autre, car cette notion de déviance est toujours relative à une société, à une époque, voire à un contexte donné puisque les normes évoluent constamment.

Le manager garantit la cohésion du groupe et s’attache à éviter tout conflit qui serait nuisible au collectif de travail. Quand un conflit se présente, le manager doit en prendre rapidement la mesure et traiter les éléments de façon factuelle, sans jamais aller sur le terrain émotionnel. Si un individu déviant se révèle dans le groupe, il s’agira de mettre en place des outils de contrôle. En effet, le contrôle exercé par le management permet d’encourager le respect des règles sociales et de décourager leur transgression qui pourrait conduire à une désorganisation de l’ordre établi au sein de l’équipe. Le contrôle peut donc être un facteur de cohésion qui permet à aux collaborateurs de travailler ensemble. Le contrôle social est évoqué dans la littérature. Il correspond à « tous les moyens grâce auxquels une société, un ensemble social ou plutôt les hommes qui les composent en tant qu’ensemble collectif structuré, réussissent à s’imposer à eux-mêmes le maintien d’un minimum de conformité et de comptabilité dans leurs conduites », comme l’écrit le sociologue français Michel Crozier dans « La transformation des modes du contrôle social et la crise des régulations traditionnelles », La Revue Tocqueville, vol. II, n°1 (1980).

Fishbein et Ajzen (2010) indiquent qu’un individu peut aller dans le sens de la pression normative en raison de son désir de se soumettre aux attentes de « référents » pertinents (groupe de pairs, managers), mais aussi parce qu’il peut souhaiter aller dans le sens des actions attendues dans un groupe social donné.

Les normes correspondent aux règles respectées par le groupe. Elles rendent les comportements prévisibles : elles permettent aux « rôles » des différents individus de s’ajuster harmonieusement. L’application d’un code de conduite commun permet la cohésion. La régulation de l’équipe passe par l’adoption de « règles du jeu » communes et de sanctions destinées à les faire respecter. Pour garantir le fonctionnement de l’équipe de travail, il faut que chaque individu ne fonctionne pas seul. Le manager doit donc régulièrement rappeler les intérêts et les règles du groupe et obliger à les respecter. L’influence et la pression sociale peuvent avoir des conséquences sur le comportement, surtout si l’orientation comportementale conduit à une récompense, ou à une punition donnée par un groupe de référents.

Les normes sociales perçues par l’individu comprennent les croyances normatives et les croyances de rôles. Les croyances normatives font référence à la perception d’un individu du degré d’approbation des personnes qui comptent pour lui quant à son adoption d’un comportement type. La croyance en l’existence de rôles sociaux spécifiques représente la perception qu’a une personne de ce que doit faire un individu occupant une position sociale similaire à la sienne. (Gagnon M.P., 2003 « Déterminants psychosociaux et organisationnels de l’adoption des technologies de télémédecine dans le Réseau québécois de télésanté élargi », thèse de doctorat en santé communautaire, Université de Laval, Québec)

L’individu évalue la correspondance entre le comportement et ses propres principes moraux. Le concept d’identité personnelle évoque une forme d’articulation entre la perception que l’individu a de lui-même et les caractéristiques qu’il associe à la réalisation du comportement. D’autres facteurs influencent le comportement du collaborateur comme la capacité à se soumettre. En 1963, le psychologue américain Stanley Milgram effectue une expérience qui met en évidence l’état agentique d’un individu, c’est-à-dire sa capacité à obéir. Celle-ci est liée à l’éducation. Certains individus peuvent se soumettre à un système, même en l’absence de sanction et de pression hiérarchique. L’individu oublie alors ses propres principes et endosse le rôle d’agent d’exécution.

L’engagement de l’individu est donc au cœur du processus d’obéissance. Il est confronté à des enjeux, des règles et des exigences situationnelles qu’il doit respecter, tout comme ses collègues. Ce conformisme au groupe et le processus d’obéissance sont bien au cœur de la problématique de gestion des conflits. Quant au manager, il a la responsabilité de veiller à bien définir les règles, les récompenses et surtout les sanctions qui permettront l’éviction des individus déviants par rapport au groupe conforme.

L’analyse transactionnelle au service de la résolution des conflits

Le système de l’analyse transactionnelle du psychologue américain Éric Berne énonce que, dans certaines situations d’interactions conflictuelles, les acteurs vont créer un jeu psychologique dramatique au tracé prévisible pour endosser un des rôles prédéfinis et interchangeables du drame. Il existe trois types de rôles distincts mais la plupart d’entre nous est programmée pour jouer les trois : parent, adulte et enfant.

Karpman, disciple d’Éric Berne, est allé plus loin dès 1968 dans l’analyse en transposant ces trois rôles à toutes les interactions humaines. Il a modélisé le triangle dramatique ou tragique, dans lequel figurent le persécuteur, la victime et le sauveteur. Dans ce triangle appliqué à l’entreprise, le manager devra donc, lors d’un conflit, très rapidement identifier le persécuteur, la victime, et se poser en sauveteur de l’équipe pour en sortir.

Cette théorie est d’ailleurs transposée lors de l’installation de caméras dans les entreprises : l’employeur est perçu comme le sauveteur de victimes potentielles (les salariés ou les clients) et cela devient un levier possible pour anticiper un possible conflit lors de la mise en œuvre du système et favoriser l’acceptation.

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