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La crise sanitaire et le confinement conduisent à des activités inhabituelles dans le cerveau, provoquant insomnie, manque de concentration ou agitation. Shutterstock

Le confinement est dur pour le cerveau. Voici comment récupérer vos facultés et vos capacités

Le confinement — le deuxième en moins de neuf mois — a d’indéniables impacts sur notre cerveau : incapacité à lire ou à écrire, manque de persévérance dans les tâches, agitation… Tout cela est normal ! Notre centrale électrique ne fonctionne pas comme d’habitude. Notre cerveau est sollicité autrement.

Ce courant électrique permet au cerveau de coordonner nos mouvements, contrôler notre respiration, ressentir la faim, la douleur et les émotions. Ce courant doit circuler convenablement : plus l’activité électrique du cerveau est intense, plus nous aurons besoin de sommeil ou ressentirons les effets de son manque. Cela peut avoir diverses conséquences sur la santé physique (surpoids, diabète, maladies cardiovasculaires) et sur la santé mentale (modifications comportementales, concentration, perturbations de l’humeur).

Depuis longtemps, on pense que l’activité électrique du cerveau serait en relation avec de graves problèmes psychologiques. Chaque rythme cérébral a une fréquence particulière et le cerveau communique selon cinq bandes de fréquences (Delta, Thêta, Alpha, Bêta, et Gamma). Chacune correspond à des niveaux d’éveil et de sommeil différents et localisés dans des zones différentes du cerveau.

Professeure agrégée à l’École nationale d’administration publique depuis 2009, j’ai récemment obtenu diverses attestations en neuroscience ainsi qu’un diplôme de cycle supérieur d’études spécialisées en santé mentale. J’étudie les différentes variables qui influencent la compétence et le savoir agir des individus et des organisations, ainsi que les diverses problématiques reliées à la santé mentale.

Le cerveau, votre centrale électrique

On mesure l’activité électrique du cerveau en plaçant des électrodes sur le cuir chevelu dans différentes zones. L’unité de mesure obtenue est un potentiel de rythme exprimé en Hertz indiquant, par sa fréquence, la nature de l’activité dans la zone mesurée. On peut ainsi évaluer la tension électrique, la vitesse de propagation, le rythme et la synchronisation d’une activité dans le cerveau.

Activités électriques dans le cerveau. Shutterstock

En combinant ces mesures avec la fréquence du rythme cardiaque et avec la respiration, on peut estimer la Variabilité de la Fréquence Cardiaque, (VFC) une mesure non invasive permettant d’explorer l’influence du système nerveux autonome sur le système cardiovasculaire. La VFC est un indicateur pertinent pour évaluer la capacité d’un individu à faire face au stress ou à gérer des situations stressantes. Cela contribuerait à expliquer pourquoi deux individus, face à une même situation, réagissent différemment.

Lorsqu’on gère un événement difficile, comme en ces temps de crise sanitaire, notre sommeil est de moins bonne qualité. On se submerge d’informations en écoutant davantage les nouvelles et en parlant constamment du même événement et de ses conséquences. On active davantage les neurones responsables des émotions qui sont au cœur de notre cerveau. On sollicite davantage celles du lobe frontal et temporal et l’activité électrique s’amplifie dans ces zones.

On observe, entre autres, des problèmes de concentration, de persévérance dans une tâche exigeant la réflexion, ou dans la motivation à entreprendre des actions exigeantes.

De plus, nos hormones responsables de l’humeur et de la joie sont fort probablement moins sollicitées en temps de crise. Ce qui nous procure du plaisir et génère, entre autres, de la sérotonine et de la dopamine est aussi moins fréquent. Pour certains, les situations contribuant à diminuer ou à générer un désordre dans ces hormones ou neurotransmetteurs se multiplient ou s’intensifient de sorte que la transmission des informations entre les neurones dans notre système nerveux est modifiée.

La neurotransmission

La sérotonine est impliquée dans plusieurs comportements et capacités (contrôler sa chaleur, comportements alimentaires et sexuels, gestion du sommeil et anxiété).

Lorsque ces neurotransmetteurs sont « dérangés » par une augmentation de l’activité électrique du cerveau, nos comportements et capacités s’en trouvent autant modifiés. La dopamine est impliquée dans le comportement et les capacités surtout au niveau de la cognition, des fonctions motrices, de la motivation, du sommeil ou de la mémorisation.

Neuroactivité des cellules neuronales humaines : nœuds de liaison cérébrale, neurotransmetteurs, axones, synapses nerveuses actives avec signaux électriques chimiques. Shutterstock

Or, il est normal de se sentir plus agité ou de ne pas agir de manière aussi efficace qu’à notre habitude. Conséquemment, il y a risque de développer des mécanismes de compensation ou de défense. Certains feront des listes ou entreprendront des tâches exigeant moins de réflexion ou de concentration (nettoyer, cuisiner). D’autres vont consommer davantage de substances favorisant la production de dopamine ou de sérotonine (tabac, alcool, café, sucre). Ils vont rechercher du réconfort (faire du pain) et s’octroyer du plaisir (aller courir) pour se sentir mieux, ou moins agités.

Cette gestion des émotions a aussi un impact sur le fonctionnement de notre système immunitaire. Ce dernier est responsable de notre défense contre les agressions extérieures. Certaines études montrent que lorsqu’un individu vit des émotions négatives, le système immunitaire s’affaiblit, diminuant ainsi notre capacité de protection contre ces agressions. Donc, plus on gère positivement nos émotions plus notre système immunitaire est favorisé, ce qui s’avère fort utile en temps de pandémie.

Peut-on améliorer cette variabilité et influencer l’efficacité de l’activité électrique du cerveau ? Il existe une solution pour récupérer ses facultés et ses capacités.

L’autorégulation ou Gros-bedon, ti-bedon 5-5 !

Que veut dire « Gros bedon ti-bedon 5-5 » ? Il s’agit en fait d’une version ludique de ce que devrait être la pratique de la « cohérence cardio-respiratoire », souvent appelée à tort « cohérence cardiaque ».

La « cohérence cardio-respiratoire » (CCR) [est une technique qui a fait ses preuves pour aider les gens à à maîtriser leurs émotions ou gérer des problèmes de santé mentale (anxiété, dépression)] ou encore à cesser de fumer, à maigrir ou à relaxer tout simplement.

Pour y arriver, on inspire profondément jusqu’à faire gonfler le ventre en cinq secondes (d’où l’expression « Gros bedon ti-bedon 5-5 »). L’inspiration active la branche sympathique de notre système nerveux, celle qui dynamise l’action et nous permet de fuir ou de foncer devant la menace. Puis, on expire en cinq secondes en vue de solliciter la branche para sympathique qui elle, se charge du repos et de la restauration de notre système. Pour la relaxation, on effectue la même procédure, mais en inspirant profondément en quatre secondes et en expirant en six secondes, ce qui favorisera davantage le repos et la restauration.

La CCR peut aider à mieux gérer nos émotions. Elle permet au cœur et aux poumons d’entrer en cohérence, de générer une fréquence d’activité électrique correspondant à la relaxation (10-12 Hertz), et d’enclencher le processus de repos et de restauration nécessaire au retour à l’équilibre du système nerveux autonome et au final, d’envoyer un message au cerveau que « tout va bien » !

Certaines études confirment qu’après avoir appliqué cette technique entre trois à cinq minutes, le taux de déhydroépiandrostérone (DHEA, hormone naturelle produite à partir du cholestérol par les glandes surrénales) augmente et cette dernière est précurseur de la synthèse d’hormones comme la testostérone, les oestrogènes et la progestérone.

Ce n’est que depuis récemment que les avancées technologiques nous permettent d’étudier les cerveaux et les capacités humaines du vivant des individus. Plusieurs études démontrent qu’il serait normal de se sentir épuisé après une crise. Fort à parier que notre société subira un impact de cet ordre après la crise actuelle. Alors, allez-y… respirez !

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