Menu Close
La transformation numérique pousse les directeurs financiers à devenir les conseillers en stratégie privilégiés des autres dirigeants de la société. Sergey Nivens/Shutterstock

Le digital et la métamorphose de la fonction finance

L’évolution numérique bouleverse les pratiques au sein des entreprises et les métiers de la finance n’échappent pas à la règle. Les directions financières doivent donc impérativement s’interroger sur les changements en cours et les évolutions futures pour identifier au mieux les nouvelles compétences à développer, d’autant plus que les tâches traditionnelles de la fonction s’automatisent.

Les solutions cloud, le big data, l’analytics et la robotisation permettent en effet de simplifier les processus classiques de compilation et de centralisation des données. Ils permettent aussi de fluidifier la circulation et le partage de l’information dans l’entreprise, tout en fournissant des informations fiables et utiles à la prise de décision.

Tâches à forte valeur ajoutée

À titre d’exemple : les nouvelles solutions SAAS, qui automatisent les tâches manuelles de traitements comptables des données, ou encore l’utilisation de logiciels informatiques spécifiques qui facilite la collecte, la compilation et la consolidation des données comptables. On pourrait aussi évoquer la généralisation progressive de la dématérialisation comptable, qui pourrait conduire à l’automatisation du circuit de facturation pour les fournisseurs (P2P, purchase to pay) et les clients (O2C, order to cash). De même, le contrôle de gestion et la vérification du respect de toutes les procédures comptables peuvent être réalisés de manière automatique. Le travail des services financiers sera donc considérablement allégé au niveau de la clôture comptable de l’entreprise : génération automatique de tableaux de bords et de données statistiques directement exploitables, mise à jour automatique des « reporting », vision des flux en temps réel, etc.

De ce fait, la transformation digitale aura pour conséquence de permettre à la direction financière de réaliser des économies de coût au niveau des tâches de production et de consolidation des données. Cette situation entraîne une nécessaire réorientation des métiers des comptables, financiers et contrôleurs de gestion, vers des tâches d’analyse à plus forte valeur ajoutée.

Les comptables vont par exemple se transformer en « Business Process Analyst », s’assurant que les process de P2P et O2C sont efficacement mis en place. Quant aux contrôleurs de gestion, ils deviendraient des « Business Analyst ». À terme, ces transformations vont améliorer les processus de prise de décision en interne et permettre ainsi un meilleur pilotage des performances de l’entreprise.

Réorientation stratégique des CFO

Pour ce qui est des directeurs financiers, la digitalisation des processus va les amener à se consacrer davantage à l’analyse des données et à l’évaluation des performances des politiques « corporate ». Ce changement leur permettra sans doute de s’impliquer de plus en plus dans les processus de décisions stratégiques. Leur connaissance du marché, des clients et des fournisseurs, mais aussi des rouages financiers, sont autant d’atouts pour définir au mieux les politiques stratégiques de développement de l’entreprise. Ils peuvent donc devenir, à terme, des conseillers en stratégie privilégiés auprès des autres dirigeants.

Aussi, leur analyse du comportement des différents partenaires pourrait les conduire à intervenir davantage en amont du processus commercial. Ils deviendraient de précieux conseillers pour cibler les meilleures opportunités. Certains analystes prévoient même que le CFO, le « chief financial officer », va progressivement se muer en CRO, « chief revenue officer ».

Le directeur financier est donc appelé à endosser un rôle de pilote de la performance. Certains évoquent même le terme de « Chief Performance Officer » car il va aussi devoir optimiser les aspects opérationnels en interne. En s’appuyant sur des outils digitaux et analytiques, le CPO pourra rendre plus clairs les analyses de données, ou encore les tableaux de bords numériques. Il accroîtra ainsi la valeur ajoutée des métiers.

Ces outils analytiques peuvent être classés, de manière graduelle et pyramidale, en quatre familles :

  • l’analyse descriptive ;

  • l’analyse de diagnostic ;

  • l’analyse prédictive ;

  • et l’analyse prescriptive.

Les solutions et logiciels dont disposent aujourd’hui les directions financières permettent d’atteindre principalement les deux premiers niveaux d’analyse de la pyramide. Quelques solutions d’analyse prédictive émergent également. La digitalisation des processus internes va permettre aussi une gestion des flux en temps réel. Les CFO vont donc se retrouver aux avant-postes pour prévenir les risques et garantir les meilleures relations commerciales possibles avec les fournisseurs et clients.

Data « storytelling » et compétences de demain

Tous ces éléments vont sans doute permettre aux directions financières de ne plus être perçues comme des centres de coût, mais comme de véritables leviers de développement de l’entreprise. Progressivement, les rôles traditionnels de « reporting » et de contrôle des dépenses céderont la place à des rôles plus stratégiques de co-pilotage des performances de l’entreprise.

Ces rôles vont impliquer de nouveaux profils de CFO, avec de nouvelles compétences. Celles-ci concernent bien sûr la visualisation des données, mais aussi les capacités à faire preuve d’ouverture d’esprit, pour réfléchir au-delà du strict cadre comptable et financier. Les nouveaux CFO doivent dans ce sens développer des compétences numériques, statistiques, opérationnelles et collaboratives. C’est ce qui leur permettra de comprendre, par exemple, comment collecter efficacement les bonnes données, et comment en extraire ensuite des informations clés. Autrement dit, le data « storytelling » va devenir une compétence essentielle du CFO de demain.


Cet article a été écrit sur la base d’une interview réalisée avec Pascal Baudier, vice président finance chez SSI.

Want to write?

Write an article and join a growing community of more than 182,100 academics and researchers from 4,941 institutions.

Register now