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Le relationnel bancaire, un outil pour contourner les discriminations sur le marché du crédit

La discrimination envers les femmes est généralement liée à une question de préférence et non pas à un manque d'information. Hyejin Kang / Shutterstock

La discrimination est aujourd’hui encore fortement présente au sein de l’Union européenne, et principalement en France : 74 % des Français considèrent qu’il existe encore une discrimination basée sur l’origine ethnique, et 52 % basée sur le genre.

À l’origine de la discrimination se trouvent deux potentiels phénomènes. Soit la discrimination résulte d’un manque d’information sur les caractéristiques des membres d’un groupe qui est différent. Soit elle résulte de préférences.

Dans les deux cas, la présence de discrimination au sein du marché du crédit reste un sujet malheureusement bien connu notamment des minorités ethniques ou des femmes. Nous savons désormais que celles-ci voient leur demande de crédit plus souvent refusée que la majorité ethnique ou les hommes.

De plus, lorsqu’elles obtiennent ce crédit, les conditions de celui-ci sont alors peu avantageuses : ces minorités sont plus souvent rationnées, c’est-à-dire qu’elles obtiennent un montant inférieur à celui demandé. Par ailleurs, le taux du crédit est plus élevé, comme aux États-Unis où on peut observer des différences de près de 2 % sur le taux selon la Réserve fédérale, et elles doivent fournir plus de garanties que les autres.

Privilégier le relationnel bancaire

S’il existe aujourd’hui de nombreux programmes ayant pour but de réduire la discrimination dans différents domaines, principalement au niveau de l’emploi, peu de programmes aident les minorités ethniques ou les femmes à obtenir un crédit au sein des institutions bancaires. Nous pouvons tout de même citer la présence de lois (loi du 27 mai 2008) ou de médiateurs de crédit. Ainsi, la présence de discrimination reste un sujet crucial au niveau du crédit bancaire.

Que peuvent donc faire les minorités ou les femmes pour réduire cette discrimination vécue ? Une réponse potentielle est de développer un relationnel bancaire avec son partenaire financier.

Pour comprendre ce qu’implique le relationnel bancaire, supposons que vous ayez besoin d’un crédit. Deux possibilités s’offrent à vous. La première est d’aller voir une banque au hasard, de fournir tous les documents nécessaires pour une demande de crédit, de n’entretenir aucun contact avec cette dernière autre que le strict minimum pour obtenir le crédit : c’est ce qu’on appelle le transactionnel bancaire.

La seconde possibilité est d’aller voir votre banque historique, autrement dit la banque avec laquelle vous avez potentiellement déjà eu un crédit afin d’échanger longuement avec elle dans le but de la persuader que votre projet est bon. Cela veut dire multiplier les contacts et maintenir une relation longue avec elle : c’est le relationnel bancaire.

Le relationnel bancaire implique de nombreux échanges et contacts entre la banque et le client. Or, ces contacts, répétés sur le long terme, peuvent permettre de réduire la discrimination, comme le démontre la théorie du contact intergroupe, développée par le psychologue Gordon Allport en 1954.

Cette théorie nous dit que les contacts entre deux groupes ethniques différents, aussi appelés contacts intergroupes, permettent d’augmenter les connaissances d’un groupe à propos de l’autre et, ainsi, de réduire la discrimination et les préjugés entre eux.

Même si la discrimination peut être exacerbée lors des premiers échanges entre deux groupes ethniques distincts, la théorie explique que cette discrimination se réduit au fur et à mesure et ce grâce à la répétition des contacts sur une longue période de temps.

Choisir son interlocuteur

Malheureusement, même si la recherche scientifique tend à démontrer que l’occurrence multiple d’échanges entre une institution bancaire et son client contribue à réduire les inégalités auxquelles les minorités ethniques doivent faire face, ce n’est pas le cas pour tout le monde.

En effet, le relationnel bancaire s’avère ne pas être efficace quand il s’agit de traiter la discrimination envers les femmes, par exemple. Une explication possible tient dans le fait que la discrimination envers les femmes résulte le plus souvent de préférences que d’un manque d’information pouvant être pallié par l’entretien d’une relation bancaire sur le long terme.

Maintenant et au-delà du relationnel bancaire, d’autres paramètres tendent à influencer également la présence de discrimination sur le marché du crédit. Le premier paramètre repose sur le chargé d’affaires lui-même qui sera votre interlocuteur en cas de demande de crédit.

En effet, si les contacts intergroupes sur le long terme s’avèrent efficaces pour réduire la discrimination, la possibilité d’entretenir des échanges avec un chargé d’affaires du même genre ou appartenant à la même minorité ethnique facilite le processus d’octroi de crédit sans pénalités pour l’emprunteur.

Les discriminations ont tendance à s’atténuer lorsque le client s’entretient avec un interlocuteur de même origine ethnique ou de même genre. Mychele Daniau/AFP

La discrimination étant issue majoritairement d’une méconnaissance entre deux groupes d’ethnie ou de genre différents, appartenir au même groupe diminue d’autant plus le risque de discrimination.

Le second paramètre consiste à regarder la présence de minorité dans la population. Plus le taux de minorité est élevé, moins la discrimination est importante. En effet, un niveau de minorité plus important permet d’augmenter la tolérance – et donc réduire la discrimination.

Du point de vue de la banque, réduire la discrimination peut impliquer de revoir le management de l’institution. Dans un premier temps, la banque devrait permettre et/ou inciter le chargé d’affaires à développer la relation avec ses clients. Dans un second temps, le chargé d’affaires pourra alors participer à la décision d’octroi de crédit pour que l’emprunteur puisse profiter de la relation ainsi créée, et bénéficier ainsi d’une baisse de la discrimination.

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