La voie maritime du Saint-Laurent est composée d’un grand ensemble d’infrastructures interreliées entre elles : chenaux, canaux, installations portuaires et flottes illustrent les connexions entre les équipements de transport, la production industrielle et l’environnement artificiel fabriqué par l’humain.
Cet article fait partie de notre série Le Saint-Laurent en profondeur
Ne manquez pas les nouveaux articles sur ce fleuve mythique, d'une remarquable beauté. Nos experts se penchent sur sa faune, sa flore, son histoire et les enjeux auxquels il fait face. Cette série vous est proposée par La Conversation.
Ces infrastructures de grande valeur représentent d’importants investissements en capitaux déjà amortis. L’entretien, la modernisation et l’adaptation du réseau fluvio-maritime permettent de répondre aux demandes de capacité, de fluidité et de fiabilité imposées par l’industrie du transport.
De leur position en tant que nœud des chaînes d’approvisionnement, les ports du Saint-Laurent sont devenus les catalyseurs qui relient commerce, développement et innovations industrielles. L’importance du fleuve dans tous les aspects de l’économie québécoise est énorme, et elle devrait augmenter encore plus au cours des prochaines années.
Professeur émérite de géographie à l’Université de Montréal, je suis conseiller académique à l’Administration portuaire de Montréal. Je m’intéresse aux enjeux du transport maritime depuis 30 ans.
Des navires et des marchandises
Le fleuve Saint-Laurent compte 20 ports commerciaux et 14 infrastructures portuaires (terminal maritime, quai, port de pêche). En 2021, ces 34 infrastructures maritimes de ce qu’on appelle le « système Saint-Laurent » manutentionnent près de 150 millions de tonnes de fret.
Les ports les plus importants sont Montréal (34 Mt), Sept-Îles (30,7 Mt), Québec (28,5 Mt) et Port-Cartier (25 Mt).
Environ 8 000 navires marchands circulent sur le système Saint-Laurent annuellement, dont des vraquiers solides, des pétroliers, des navires de marchandises générales, des porte-conteneurs et des navires rouliers.
L’acheminement de matières premières y est primordial. Les ports du Saint-Laurent manutentionnent environ 70 Mt de minerais essentiellement destinés à l’exportation. Entre 25 et 32 Mt d’hydrocarbures transitent sur le fleuve chaque année.
Le commerce de céréales compte pour environ 18 Mt. Les céréales des Prairies sont d’abord transportées par rail vers Thunder Bay, puis transférées vers les ports de Montréal, Québec, Sorel, Trois-Rivières, Baie-Comeau et Port-Cartier à travers la voie maritime du Saint-Laurent pour être acheminées vers les marchés d’Europe et d’Afrique.
Environ 15 % du volume d’exportations provient des champs agricoles du Québec, notamment des producteurs de soya et de maïs de la Montérégie, qui acheminent une partie de leur récolte à partir du port de Montréal. Le système fluvio-maritime Saint-Laurent est fortement sollicité pour répondre aux besoins d’approvisionnement et d’écoulement des marchandises conteneurisées.
De son côté, Montréal est le seul port à conteneurs sur le Saint-Laurent. Le trafic estimé à 15 Mt est surtout composé de biens manufacturés, de produits forestiers et pâtes et papiers, de céréales et produits agroalimentaires, de machinerie et de produits métalliques.
Le poids de Montréal dans la manutention du trafic conteneurisé devrait s’accentuer de plus en plus.
Le Saint-Laurent, fortement ancré dans le commerce est-ouest
L’économie du Québec est tributaire du commerce extérieur. Sa prospérité dépend fondamentalement de sa capacité de réussir sur les marchés internationaux.
Les ports du Saint-Laurent jouent ainsi un rôle important dans le soutien de l’économie et du commerce de la province, tant les importations que les exportations. Elles ne cessent d’augmenter et devraient, selon les projections, continuer de le faire à un rythme soutenu au cours des prochaines années.
L’importance économique du système Saint-Laurent se confirme sur plusieurs plans.
Les navires qui font escale dans les ports du Saint-Laurent sont de plus en plus gros, ce qui exige des investissements dans la réhabilitation et l’expansion des infrastructures portuaires existantes.
Ensuite, les tonnes-kilomètres associées au commerce maritime augmentent plus rapidement que les tonnages, ce qui indique que l’industrie pénètre vers des marchés trans-océaniques de plus en plus éloignés.
En effet, le système portuaire du Saint-Laurent est fermement ancré dans le commerce est-ouest. La réponse économique du système Saint-Laurent aux processus mondiaux a été de consolider les échanges commerciaux avec le marché européen et de s’aligner avec les économies du bassin Pacifique, notamment celle de la Chine.
Une autre caractéristique est la persistance des liens nord-sud avec les économies africaines (surtout des ressources naturelles) et le développement d’échanges commerciaux avec les marchés moyen-orientaux.
Le commerce intercontinental compte pour plus de la moitié des flux maritimes des ports du Saint-Laurent. La part du marché continental est de son côté d’environ 15 %. Ce commerce s’effectue avec les ports situés sur la côte Atlantique et la côte du Golfe du Mexique, aux États-Unis. Les ports du Saint-Laurent bénéficient également de l’intégration des marchés économiques de l’Amérique Centrale et du Sud.
L’importance du commerce régional
Le commerce régional, soit les échanges entre les ports du système Saint-Laurent et ceux des Grands Lacs, n’est pas en reste. Ils comptent pour le tiers du trafic total des ports du fleuve.
Le volume de trafic entre les ports du Québec et les marchés de l’Ontario est relativement équilibré en termes d’exportation et d’importation. Les échanges de fer et de charbon tendent cependant vers la baisse en raison du déclin de secteurs industriels traditionnels. Plus de 60 % de ce trafic est composé d’exportations du Québec vers le Midwest des États-Unis. Les échanges avec les provinces de l’Atlantique sont de leur côté surtout composés d’importations en provenance de ces dernières.
Il importe de souligner une croissance modérée des échanges avec l’Arctique canadien qui témoigne d’un intérêt pour le développement de chantiers miniers en milieu nordique.
L’examen des flux maritimes à l’intérieur du système Saint-Laurent montre que le transport maritime sur courte distance demeure important. Les échanges intérieurs entre les ports du Québec reposent sur le transfert de minerais et de combustibles.
Des besoins d’investissement
Les ports du Saint-Laurent offrent des logistiques fiables, efficaces et écologiques reliant le fret maritime aux expéditeurs terrestres.
Considérant l’importance du secteur portuaire pour le Québec, il faut y investir. Les plans et besoins futurs comprennent les opérations courantes d’entretien des infrastructures, le remplacement des actifs portuaires existants et de nouveaux projets de développement d’infrastructures maritimes, terrestres et intermodales. Selon l’Association des administrations portuaires canadiennes, ces plans et besoins sont estimés à 6 milliards $ à l’horizon 2025.
La croissance économique et les activités commerciales futures du Québec passent par l’assurance d’une capacité suffisante de ses ports. Ils sont essentiels pour assurer la compétitivité du Québec dans le commerce international et pour saisir de nouveaux débouchés sur les marchés.