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Négocier dans l’entreprise : pourquoi tant de craintes ?

La négociation collective à la française.

Soyons précis : l’article 2 de la loi El Khomri « n’inverse pas la hiérarchie des normes sociales » – comme il se dit, faussement, ici ou là. Et l’on voit mal pourquoi d’éminents juristes et conseillers d’État, soucieux d’insuffler une culture de la négociation dans notre pays, passeraient leurs journées à détricoter ce dont ils ont la charge… Cet article 2 poursuit un mouvement engagé depuis 1984 : permettre aux partenaires sociaux, dans l’entreprise, de légiférer eux-mêmes, et sur des points précis, encadrés par la loi (à propos de la durée du travail).

L’objectif, ainsi figure-t-il dans l’exposé des motifs, est d’« adapter les règles au plus proche du terrain » (p. 9). L’empilement des textes normatifs reste inchangé : tout en bas le contrat de travail (niveau 1), modifiable par décision unilatérale de l’employeur (niveau 2) ou par accord d’entreprise (niveau 3), ou de branche (niveau 4), ou par accord interprofessionnel (niveau 5) ; et tout en haut : la Constitution (niveau 7) et, en dessous, les lois, rassemblées dans un Code du travail (niveau 6).

Cette pyramide des normes est structurée par un principe, celui de l’ordre public social – soit la garantie donnée aux salariés que certaines conditions de leur emploi et de leur travail seront respectées par leur employeur. Ces garanties peuvent cependant être modifiées, mais uniquement dans un sens plus favorable aux salariés – on parle alors de « principe de faveur » et de « clause plus favorable ».

Cet empilement sera-t-il le même après le vote de la loi El Khomri ? Non, en effet. Le projet de loi articule différemment les niveaux normatifs 3 et 4. Il institue ainsi, sur la question de la durée du travail et uniquement à ce sujet, la primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche. C’est la reprise dans la loi de la proposition de Jean-Denis Combrexelle, faite dans son rapport La Négociation collective, le travail et l’emploi (septembre 2015) :

À la loi de fixer les grands principes du travail et de l’emploi, aux accords de branche de fixer l’ordre public conventionnel et aux accords d’entreprise de définir en priorité le droit conventionnel du travail sur tous les sujets qui ne relèvent pas de l’ordre public (p. 91).

Les négociateurs dans l’entreprise pourront désormais, par exemple,

lorsque les caractéristiques propres à l’activité d’un secteur le justifient, prévoir le dépassement de la durée maximale hebdomadaire de travail prévue à l’article L. 3122-7 à condition que ce dépassement n’ait pas pour effet de porter cette durée à plus de 44 heures sur douze semaines consécutives

(comme le prévoit le futur article L. 3122-18) – au lieu de 42 heures, ce que prévoit actuellement la loi.

Une nouvelle architecture du Code du travail, rendu plus lisible

Pourquoi instituer cette possibilité de déroger aux règles légales ou conventionnelles par la voie d’un accord d’entreprise ? Deux réponses figurent dans l’exposé des motifs de la loi Travail.

Si toutes traduisent une même volonté politique sociale-démocrate, elles diffèrent par leur intention : modifier des pratiques sociales pour la première

Donner au dialogue social une place beaucoup plus importante dans la définition des règles sociales pour que le pays passe enfin d’une culture de l’affrontement à une culture du compromis et de la négociation (p. 4)

ouvrir de nouveaux espaces normatifs pour la seconde

Le rôle de la loi, qui reste essentiel, est recentré sur ce qui est strictement nécessaire à la protection de l’ordre public. De vastes espaces d’adaptation aux besoins économiques sont ainsi ouverts aux branches professionnelles et aux entreprises (p. 6).

D’où la double visée de ce projet de loi – ce qui fonde son intérêt mais a alimenté sa contestation : donner, d’un côté, comme l’écrivent ses rédacteurs, « une place sans précédent à la négociation collective » en affirmant « la primauté de l’accord d’entreprise en matière de durée du travail » (p. 9) ; et, d’un autre côté, « permettre aux entreprises d’être plus réactives et compétitives grâce à des procédures assouplies, tout en assurant un niveau équivalent de protection des salariés » (p. 27).

Les contestataires s’inquiètent de cette simultanéité : favoriser le dialogue social dans l’entreprise et autoriser ceux qui y travaillent à légiférer eux-mêmes, y compris en dérogeant aux dispositions d’ordre public. Ce double bouleversement, on s’en doute, provoque des craintes et nourrit les critiques. N’y a-t-il pas le risque, s'interroge ainsi Danièle Linhart dans une tribune pour Le Monde, d’un déséquilibre programmé des négociations dans l’entreprise, car « le rapport de force entre patrons et salariés [y] est moins favorable » ?

Ou encore, comme le note le site web de la CGT, n’existe-il pas, par le recours au référendum, la possibilité pour l’employeur de contourner les délégués syndicaux, ce dernier pouvant « faire approuver directement par les salariés » ces dispositions dérogatoires ? Le site de Loi Travail : non merci ! est encore plus explicite : « Une entreprise peut, par simple accord, baisser les salaires et changer le temps de travail ». Ou encore : « Il suffit d’un accord d’entreprise pour que les heures supplémentaires soient cinq fois moins majorées ». Démêlons le vrai du faux.

Le vrai du faux

Oui, l’article 2 réécrit les dispositions antérieures du Code du travail portant sur cette durée du travail ; il institue, pour chacune d’elles, un renvoi à la négociation d’entreprise. Les pages 36 à 91 du projet de loi passent ainsi en revue ces thèmes, un à un, des articles L.3111 à L.3142. Le mode d’exposition du Code du travail réécrit est le même : d’abord les dispositions relatives à « l’ordre public » (soit les règles étatiques, impératives – mais révisables localement), puis « le champ de la négociation collective » (soit ce que peut déterminer un accord d’entreprise en dérogeant aux règles de niveau supérieur), enfin des « dispositions supplétives » (soit ce qui est autorisé par la loi en l’absence d’accord d’entreprise ou, à défaut, d’accord de branche). Il s’agit là d’une nouvelle architecture du Code du travail, rendu plus lisible.

Cet article 2 ne vient pas cependant, et brutalement, bouleverser le Code du travail – comme un coup de tonnerre libéral dans un ciel bleu d’acquis sociaux. D’autres lois l’ont précédé et partageaient le même objectif : promouvoir la négociation d’entreprise. La loi du 4 mai 2004, François Fillon étant ministre du travail, posa le principe que l’accord collectif d’entreprise pouvait déroger à l’accord de branche. La loi du 20 août 2008, portée par Xavier Bertrand, affirma ensuite la primauté de l’accord d’entreprise dans six domaines relatifs à la durée du travail : le contingent d’heures supplémentaires ; la prise du repos compensateur ; le forfait-jours ; l’aménagement annuel du temps de travail ; le compte épargne temps ; la date de la journée de solidarité.

La loi El Khomri ne fait donc « qu'achever le travail », en ajoutant à la liste de ces dérogations d’autres items, relevant jusqu’alors du seul ordre public (par exemple : la fixation des jours fériés et chômés, ou le taux de majoration des heures supplémentaires). Cela fait donc plus de dix années que ce régime dérogatoire existe ; de nombreux accords d’entreprise ont mis en musique cette liberté contractuelle. Qui s'en est effrayé jusqu'alors ?

Agir dans l'entreprise en législateur

Pourquoi légiférer dans l’entreprise, quitte à déroger à l’accord de branche ? Réponse : parce que la convention collective de branche n’est qu’un outil global de régulation économique. Son rôle est d’égaliser les conditions de la concurrence dans un secteur donné – par exemple, par la fixation de minimas de rémunération ou la codification des compétences requises sur tel type de poste.

Chaque entreprise, devant se conformer à ces normes de rémunération ou de qualification mais heureuse de disposer de ces repères pour construire sa politique sociale, peut alors miser, pour gagner des parts de marché, sur d’autres leviers que le simple dumping social : sur sa capacité d’innovation, sur la qualité de son organisation interne, sur sa réactivité face aux clients, etc. Ce faisant, devient cruciale pour chacune la manière dont elles peuvent concrètement optimiser les facteurs de production – et le facteur « immatériel », de la qualité du management à l’activation des compétences des salariés, n’est pas le moindre de ces facteurs… C’est là qu’apparaît l’intérêt d’une régulation sociale au plus près de cette optimisation.

La branche est en effet trop éloignée des réalités de chaque entreprise pour qu’elle puisse leur proposer des règles finement ajustées aux situations productives, par nature diverses et complexes. Les branches professionnelles sont elles-mêmes hétérogène s ; il peut coexister, dans un même secteur, de très petites et de très grandes entreprises, ou quelques entreprises en situation d’oligopole, ou encore des entreprises sans instances représentatives du personnel et, d’autres, de même taille, dotés de plusieurs de ces IRP. Difficile, dans ces conditions, d’élaborer à ce niveau sectoriel des règles convenables à toute entreprise. L’accord d’entreprise, lui, peut s’appuyer sur son idiosyncrasie pour répondre à des problèmes spécifiques de production ou d’organisation.

Mais il ne s’agit pas seulement de rendre localement congruents problèmes et solutions. Négocier dans l’entreprise, ce n’est pas uniquement faire du problem-solving et co-construire, par des séances de remue-méninges et à l’aide d’une méthodologie de type « méthode de Harvard », des scénarios efficients et mutuellement satisfaisants ; c’est aussi agir en législateur et co-définir une politique d’entreprise.

Dans l’entreprise se signent en effet les contrats individuels de travail. Le contrat collectif qui les complète et qui permet à l’employeur de ne pas se lancer sans cesse dans des centaines de négociations individuelles pour en modifier les termes – c’est l’un des arguments majeurs en faveur d’un contrat collectif : soulager l’employeur dans son face-à-face quotidien avec ses salariés – se doit d’y être également signé.

Il s’agit d’articuler et rationaliser deux mouvements : une mise à jour périodique des modalités de la mise au travail des salariés, compte tenu de la feuille de route productive et des aléas, notamment organisationnels, qui la perturbe ; et l’optimisation de ces mises à jour : elles peuvent concerner un seul atelier ou un seul établissement, ou n’être nécessaire que de façon temporaire, ou encore être assez incertaines pour devoir être expérimentées avant généralisation.

Il faut donc ajuster ces modifications les unes aux autres, dans le cadre d’une politique et d’une dynamique. Pas d’autre lieu que l’entreprise pour opérer ces multiples réglages ; syndicalistes et dirigeants y agissent ainsi comme des législateurs – le mot est du sociologue anglais Allan Flanders – adaptant sans cesse, à l’instar du législateur politique, les normes légales aux besoins socio-productifs.

D’où un troisième argument en faveur d’une négociation d’entreprise dynamique : les règles du jeu de l’action productive et organisationnelle qui s’y déroule, avec les ajustements que toutes deux nécessitent, ne peuvent être définies _que _par ses acteurs. Tout groupement, quel qu’il soit, du club sportif au cercle intellectuel, commence son activité par définir ses règles de fonctionnement, les droits et devoirs de ses membres et les possibilités d’y déroger. Dans l’entreprise, il en va de même ; et ces législateurs locaux peuvent d’autant mieux respecter ou modifier ces règles de fonctionnement qu’ils en sont, simultanément, les producteurs et les bénéficiaires. Et plus raccourcie sera la distance entre la norme et ceux qui la définissent, plus efficiente sera cette norme puisque élaborée par ceux-là mêmes qui ont identifié (plus ou moins correctement, mais c’est un autre débat !) le problème qu’elle est censée résoudre.

Les salariés trancheront la controverse !

Cette législation locale ne va nullement permettre aux employeurs « de contourner les délégués syndicaux », comme l’indique le site web de la CGT. Bien mieux, elle leur redonne du pouvoir par le biais de l’accord majoritaire. Ainsi, seuls les accords d’entreprise approuvés par les syndicats qui représentent la majorité des salariés (50 % des voix obtenues lors des élections DP et CE) seront valides. Les DS qui auront négocié de tels accords s’en trouveront légitimés et leur travail de défense des salariés mieux reconnu.

D’où l’intérêt de la clause de l’accord majoritaire : elle sécurise le dialogue social d’entreprise. Quiconque (direction ou syndicat) souhaitera modifier les conditions du travail et de l’emploi des salariés devra contracter avec son interlocuteur, et ce contrat (c’est-à-dire : l’accord d’entreprise) devra ensuite faire l’objet d’une pesée en légitimité – à savoir satisfaire l’obligation légale, pour que l’accord soit valide, qu’il ait été signé par une ou des organisations syndicales ayant réunie(s) sur son ou leur nom, lors de récentes élections de DP ou de CE, au moins la moitié des suffrages des salariés.

L’autre crainte que formule les protestataires concerne le rôle des salariés eux-mêmes, appelés par le législateur (titre II, article 10) à jouer un rôle dans la validation des accords d’entreprise. Il est en effet prévu de les consulter en cas d’absence d’accord majoritaire. Si une organisation, minoritaire, souhaite que l’accord soit néanmoins appliqué, elle peut demander à l’employeur d’organiser un référendum ; les salariés eux-mêmes trancheront la controverse. Pourquoi craindre cet appel aux salariés ?

Un débat récurrent traverse les organisations syndicales. Il porte sur une alternative : « légitimité de l’accord », ou « légitimité de l’acteur » qui rend légitime cet accord par sa signature ? Dans le premier cas, seul compte le contenu de l’accord et ce qu’il institue, indépendamment du statut de l’organisation syndicale qui l’a négocié (elle peut n’avoir réuni que moins de 30 % des suffrages des salariés, par exemple). Dans le second cas, l’accord n’est jugé valide que parce qu’il est adoubé par une organisation syndicale représentative qui, de ce fait, en le signant, garantit sa pertinence. La loi El Khomri introduit un juge de paix dans cette alternative accord / acteur : les salariés. Ils pourront, en votant pour ou contre la ratification de l’accord, faire prévaloir une autre légitimité : la leur, en tant que communauté de travail.

Il y a là une conception différente du rapport entre désignés syndicaux et salariés : les premiers parlent-ils au nom des seconds, quitte à en étouffer la voix et à s’autonomiser de leurs mandants, ou sont-ils d’abord des mandataires, et leur mandat se doit d’être périodiquement vérifié ou révisé par leurs mandants ? Ce sont deux conceptions du syndicalisme et de défense des droits des salariés qui vont s’affronter à propos du futur article L.2232-12 (qui codifie les conditions d’organisation de la consultation des salariés) : soit un syndicalisme tirant sa légitimité de son opposition radicale à l’employeur, rétif au compromis mais habile dans sa défense acharnée des droits des salariés ; soit un syndicalisme tirant sa légitimité de sa capacité à co-construire des solutions originales avec l’employeur, en mobilisant pour cela l’intelligence des salariés ou en leur tenant le langage de la vérité.

Des salariés sécurisés, des directions aux horizons dégagés

Revenons à la crainte des contestataires. L’argument selon lequel négocier dans l’entreprise transformerait les salariés en moutons menés à l’abattoir, inévitablement victimes d’un odieux chantage à l’emploi de la part d’employeurs ivres de leur pouvoir et inattentifs aux souffrances que produit leur soif de profit, semble un peu court… Une lecture attentive du projet de loi El Khomri, pour qui mésestime le pouvoir de résistance des salariés et l’inventivité de leurs stratégies d’opposition, suffit à rassurer.

Que se passerait-il en effet si l’employeur souhaite annualiser le temps de travail ou déroger à la durée maximale hebdomadaire du temps de travail et qu’aucun accord d’entreprise ne le lui permette ? Le droit commun s’applique, tout simplement ; il n’y aura donc pas annualisation puisque celle-ci n’est possible qu’en cas d’accord. Si une direction d’entreprise souhaite modifier la durée légale de travail et la moduler sur l’année, elle devra donc, nécessairement, à la table des négociations, apporter des compensations aux salariés, ou leur donner de sérieuses garanties.

Les employeurs ne pourront donc déroger aux règles légales que si elles ont réussi à convaincre les représentants des salariés du bien-fondé de leurs prétentions. Pourquoi ceux-ci signeraient-ils des accords dont les clauses iraient contre les intérêts de leurs mandants ? Ils comprendront vite qu’ils sont en position de force pour obtenir, en échange de leur acceptation, divers avantages…

Le jeu même de la négociation est construit sur de tels échanges : « Si tu veux obtenir le bien x dont je détiens l’accès, accorde-moi le bien y dont tu détiens l’accès »… La loi El Khomri ne fait ici que créer un cadre légal et permissif à ce type d’échanges de concessions et de rationalités. Cela signifie, c’est vrai, que la représentation de ce qu’est une négociation collective se modifie : moins l’obtention infinie d’avantages nouveaux (une négociation d’acquisition, que permettaient les conditions économiques des Trente Glorieuses) que l’invention de solutions efficientes, fondées sur des échanges de concessions (c’est-à-dire des renoncements à des prétentions, et non des dépossessions d’acquis), ce qu’on pourrait nommer une négociation d’échange.

Au centre, l'échange, les gains mutuels

Les textes accompagnant le projet de loi El Khomri ne font pas mystère de cet échange :

Un droit du travail répondant aux besoins de souplesse, de réactivité et de proximité [des entreprises] tout en protégeant efficacement les salariés » (p. 23).

Le titre lui-même du projet de loi rend compte de cet esprit de « donnant-donnant » : « Projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs ». Autrement dit : liberté donnée aux entreprises de déterminer elles-mêmes, par voie d’accord d’entreprise, les règles de travail et d’organisation de ce dernier ; et protection offerte aux salariés, bénéficiant ainsi de garanties et d’avancées sociales, telle la création du Compte personnel d’activité.

Pourquoi un tel « échange » (l’expression « gains mutuels » serait plus juste…) ? Réécrivons la question et la réponse se laisse alors aisément deviner : pourquoi donner, simultanément, et aux entreprises, et aux salariés ? Réponse : chaque partie obtient ainsi ce qu’elle désire – une meilleure protection des salariés, d’un côté (et « tout au long de leur parcours professionnel indépendamment de leur statut ») ; la possibilité donnée aux entreprises d’anticiper « les mutations économiques dans le dialogue avec les représentants de leurs salariés », d’un autre côté – comme l’indique l’exposé des motifs. Toutes peuvent donc s’estimer satisfaites. De la synergie entre ces deux types de gains naît une dynamique, vertueuse, puisque leur conjonction produit de l’efficience : des salariés sécurisés (par exemple via leur CPA, le compte permanent d’activité), donc aptes à mieux s’impliquer dans le projet d’entreprise ; et des horizons plus dégagés pour les directions, donc des projets productifs et organisationnels sécurisés.

Remarque, à propos du CPA, le compte permanent d’activité (soit la réunion du compte personnel de formation et du compte personnel de prévention de la pénibilité). Il comprendra, dès le 1er janvier 1917, un « compte engagement citoyen » ; ce dernier valorisera, notamment, l’exercice de responsabilités associatives. Ce compte est attaché aux personnes – et non à leur statut. Il s’agit là d’une avancée sociale dont on mesure encore peu l’importance – et dont on parle très peu – ce qui est dommage… Le CPA rompt en effet avec les logiques de statut qui ont fracturé les populations ouvrières et employées. La loi El Khomri, ce n’est donc pas seulement l’activation, nécessaire, de la négociation d’entreprise ; c’est aussi un droit universel à la formation octroyé aux salariés, et la reconnaissance, _via _la VAE, des compétences que détient chacun d’entre eux, y compris dans le cadre du _hors-_entreprise (mais que chacun pourra ensuite valoriser _dans _l’entreprise).

Refonder notre modèle social

Le projet de loi El Khomri a donc un objectif et une logique : développer le dialogue social dans l’entreprise, là où les problèmes se posent et où ils peuvent être résolus ; et permettre aux négociateurs d’entreprise de déroger à certaines règles d’ordre public, quand cela leur apparaît nécessaire et selon des modalités définies par la loi. Le projet de loi n’a donc pas tort d’indiquer, dans son exposé des motifs, qu’il s’agit là d’« une refondation de notre modèle social » (p. 5). Celle-ci semble urgente et de bon sens.

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