tag:theconversation.com,2011:/nz/topics/cerveau-21903/articlescerveau – The Conversation2024-03-19T16:58:01Ztag:theconversation.com,2011:article/2259292024-03-19T16:58:01Z2024-03-19T16:58:01ZComment un bébé peut-il apprendre deux langues en même temps ?
<p><em>Chaque semaine, nos scientifiques répondent à vos questions.</em></p>
<p><em><a href="https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLSdior67a7Z5bsoJKoMtltxJ-q9EUW1WneDbrNIWpNZUMJsxkA/viewform">N'hésitez pas à nous écrire</a> pour poser la vôtre et nous trouverons la meilleure personne pour vous répondre.</em></p>
<p><em>Et bien sûr, les questions bêtes, ça n'existe pas !</em></p>
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<p>L’acquisition du langage chez les enfants constitue l’un des traits les plus fascinants de l’espèce humaine, ainsi que l’un des problèmes les plus ardus de la linguistique et des sciences cognitives. Quels sont les procédés qui permettent à un enfant <a href="https://www.routledge.com/Understanding-Child-Language-Acquisition/Rowland/p/book/9781444152654">d’acquérir une maîtrise complète de sa langue native</a> en à peine quelques années de vie, bien avant d’apprendre à lacer ses chaussures, et à un degré de compétence que les adultes n’égalent presque jamais ?</p>
<p>Loin de faire consensus, ce sujet a en réalité beaucoup divisé les communautés de chercheurs dans ces domaines : le XX<sup>e</sup> siècle fut marqué par l’idée très influente et controversée de Noam Chomsky selon laquelle l’acquisition de la langue native témoignerait d’une faculté grammaticale universelle et innée chez les humains, les distinguant des autres espèces animales.</p>
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<figcaption><span class="caption">Qu’est-ce que les langues ont toutes en commun ?</span></figcaption>
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<p>S’il est donc aussi impressionnant qu’un bébé puisse apprendre ne serait-ce qu’une seule langue, alors comment expliquer qu’il puisse aller jusqu’à en apprendre deux, trois, voire plus ?</p>
<h2>La moitié de la population mondiale est bilingue</h2>
<p>Cette question présuppose que le bilinguisme ou le multilinguisme seraient sporadiques dans les sociétés humaines, l’exception plutôt que la règle. Or, les experts estiment non seulement que près de la <a href="https://www.hup.harvard.edu/books/9780674066137">moitié de la population mondiale serait bilingue</a>, mais encore que le <a href="https://www.linguisticsociety.org/resource/multilingualism">multilinguisme</a> est en fait plus commun que le monolinguisme. Il suffit de se tourner vers quelques-uns des pays les plus peuplés du monde comme l’Inde ou la Chine.</p>
<p>Rien de surprenant, donc, qu’un enfant puisse être amené à apprendre plus d’une langue native ! Ce serait même quelque chose à encourager, et non à prévenir comme entrave au développement de l’enfant ou à son intégration culturelle et sociale. De nombreux chercheurs ont ainsi souligné les nombreux bénéfices cognitifs et sociaux du bilinguisme tout au long de la vie. Parmi ceux-ci, on peut citer une <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23175648/">meilleure mémoire</a>, un <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32036490/">déclenchement des maladies neurodégénératives plus tardif</a>, ou une <a href="https://psycnet.apa.org/record/2017-43419-001">meilleure adaptation à des contextes sociaux différents</a>.</p>
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<figcaption><span class="caption">Les bénéfices d’un cerveau bilingue.</span></figcaption>
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<p><a href="https://www.hup.harvard.edu/books/9780674017641">La clé de voûte du bilinguisme</a> chez les enfants semble résider d’une part dans un ensemble d’aptitudes cognitives générales chez les êtres humains de tout âge (telles que l’analogie, l’abstraction et la mémoire encyclopédique), et d’autre part dans l’étonnante plasticité cérébrale d’un enfant, notamment entre 0 et 3 ans.</p>
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<p><em>Pour satisfaire votre curiosité :</em></p>
<p><em>- <a href="https://theconversation.com/pourquoi-la-biere-mousse-t-elle-moins-quand-on-penche-le-verre-223691">Pourquoi la bière mousse-t-elle moins quand on penche le verre ?</a></em></p>
<p><em>- <a href="https://theconversation.com/pourquoi-a-t-on-des-courbatures-apres-une-seance-de-sport-221643">Pourquoi a-t-on des courbatures après une séance de sport ?</a></em></p>
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<p>Dès la naissance, un enfant est capable de retenir et catégoriser des stimuli linguistiques extrêmement riches en termes d’informations sur leurs prononciations, leurs structures, leurs sens, mais aussi les contextes familiaux et sociaux de leur usage. À partir de ces informations, un enfant est en mesure de très rapidement inférer qu’un ensemble de constructions linguistiques se distingue d’un autre en termes de conventions pour deux langues différentes (par exemple, le français et l’anglais), en particulier après la première année.</p>
<p>Il acquiert ainsi une compétence que l’on nomme « alternance codique », lui permettant de passer facilement d’une langue à l’autre, par exemple en fonction de son interlocuteur, et parfois au sein d’une seule et même phrase (<em>code-mixing</em>) !</p>
<h2>Laisser du temps à l’enfant</h2>
<p>Bien sûr, la facilité que représente le bilinguisme pour un enfant ne signifie pas pour autant que son développement linguistique est tout à fait identique à celui d’un monolingue. Que ce soit pour les enfants qui apprennent deux langues simultanément, ou bien une deuxième langue avant l’âge de trois ans, la maîtrise de deux grammaires alternatives pour des contextes sociaux spécialisés représente une charge cognitive supplémentaire. Il n’est ainsi pas rare pour un enfant bilingue qu’il prenne un tout petit peu plus de temps qu’un monolingue à apprendre pleinement la langue qu’ils ont en commun. Ce léger écart, qui se manifeste parfois par des « mélanges » interlangues, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/35399292/">se résorbe très vite à mesure que l’enfant grandit</a>.</p>
<p>Afin de guider davantage l’enfant et faciliter son acquisition bilingue, on cite souvent l’approche parentale dite « une <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/studies-in-second-language-acquisition/article/abs/raising-children-bilingually-through-the-one-parentone-language-approach-a-case-study-of-japanese-mothers-in-the-australian-context-takeuchi/F34BF798A2367F3833A5DA82F0FFD9EF">personne, une langue</a> ». Par exemple, si l’un des parents parle davantage anglais à l’enfant tandis que l’autre utilise davantage le français, le bébé sera en mesure de plus rapidement distinguer deux systèmes linguistiques et à les convoquer dans des interactions avec des personnes spécifiques, par exemple anglophones et francophones.</p>
<p>Par ailleurs, un équilibre dans la fréquence d’usage des deux langues à la maison permettra à l’enfant de bien les ancrer cognitivement en vue d’un usage régulier dans les années qui suivront. Si votre couple parle deux langues et que vous voulez les transmettre à votre enfant, il y a donc quelques habitudes que vous pouvez prendre, mais vous n’avez pas trop à vous inquiéter : parlez fréquemment ces deux langues à votre enfant, il s’occupera du reste !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225929/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cameron Morin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si vous avez la chance de pouvoir apprendre plusieurs langues à votre enfant, n’hésitez pas !Cameron Morin, Docteur en linguistique, ENS de LyonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2259602024-03-18T15:34:27Z2024-03-18T15:34:27ZCovid-19 : comment le coronavirus détruit des neurones essentiels pour la fertilité et la cognition<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/582547/original/file-20240318-20-ppt6sn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=26%2C1089%2C3515%2C2252&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Micrographie électronique à balayage colorisée d'une cellule (rose) infectée par des particules du virus SARS-CoV-2 (vert et violet), isolée à partir d'un échantillon de patient.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nihgov/50798069536/in/photolist-2koRoi7-2ivWYAQ-2itgZyx-2jk18mh-2iERQiZ-2iYmxva-2mFfcQ7-2jcerea-2jk18s4-2jk2hum-2jfwmb2-2jch9HX-2j4b4fV-2j4fdct-2iCRVRX-2iP8B13-2iERQmQ-2jfwm3X-2jfzdMX-2iDSu3E-2iDSu77-2iDWFNp-2iDVeTu-2iDVeUX-2iDVeVt-2iERQ8d-2iG5wqt-2iYiNki-2iPbjqr-2itfPmQ-2iDWFMh-2iDSu65-2iDVeQd-2iDSu8u-2nWQgad-2iETgaX-2ivUoVj-2ivUoW6-2itgZwo-2ivY9VB-2ivY9Xk-2o9zewJ-2koRooc-2koRocL-2jk2hQG-2jfAxCS-2jk18et-2itfPhS-2ivUoUn-2koRYXP"> Image prise au NIAID Integrated Research Facility (IRF) à Fort Detrick, Maryland / NIAID/NIH </a></span></figcaption></figure><p><em>Difficultés de concentration, de planification, troubles de la mémoire immédiate… Les personnes souffrant de Covid long se plaignent très souvent de problèmes cognitifs, qui s’ajoutent aux nombreux autres symptômes dont elles souffrent. Quatre ans après la première vague de la pandémie, la recherche sur les causes de ce « brouillard cérébral » progresse.</em></p>
<p><em>On sait aujourd’hui que le coronavirus SARS-CoV-2 à l’origine de la maladie est notamment capable de pénétrer dans notre cerveau et de détruire certaines cellules cérébrales. L’infection d’une petite population de neurones inquiète particulièrement les scientifiques : il s’agit des neurones à GnRH, qui jouent un rôle essentiel non seulement dans la fertilité, mais aussi dans le neurodéveloppement des enfants.</em></p>
<p><em>Directeur de recherche et responsable du laboratoire Inserm « Développement et plasticité du cerveau neuroendocrine », Vincent Prévot nous explique pourquoi leur destruction est préoccupante.</em></p>
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<p><strong>The Conversation : Des travaux récents ont montré que l’infection par le coronavirus SARS-CoV-2, même quand elle ne s’accompagne que de symptômes modérés, <a href="https://www.nejm.org/doi/10.1056/NEJMoa2311330">est associée à des atteintes cognitives</a>. Aujourd’hui, il ne fait plus de doute que l’infection par le SARS-CoV-2 est délétère pour le cerveau ?</strong></p>
<p><strong>Vincent Prévot :</strong> Plusieurs études ont montré que l’infection par le SARS-CoV-2 a des effets sur le cerveau. L’une des plus spectaculaires, <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-022-04569-5">publiée dans la revue <em>Nature</em></a>, montre qu’elle s’accompagne d’une diminution du volume du cerveau et d’une perte cognitive, d’autant plus importante que les personnes sont âgées. Et ce, même chez des gens qui n’ont pas fait de forme sévère.</p>
<p><a href="https://www.nature.com/articles/s41593-021-00926-1">Avec nos collaborateurs</a>, nous avons de notre côté démontré que le coronavirus était à l’origine de microruptures de vaisseaux sanguins cérébraux, parfois très nombreuses. Celles-ci pourraient entraîner la mort de certains neurones, et avoir des conséquences sur le vieillissement cérébral.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/covid-19-comment-le-coronavirus-sintroduit-dans-notre-cerveau-185834">Covid-19 : comment le coronavirus s’introduit dans notre cerveau</a>
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<p>Divers travaux ont par ailleurs montré que ce dernier <a href="https://www.researchsquare.com/article/rs-3818580/v1">semblait d’ailleurs accéléré</a> chez certains patients. Nous avons nous-mêmes constaté la dégradation très rapide, suite à l’infection par le coronavirus, de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37428895/">l’état d’un patient atteint de démence vasculaire à un stade précoce</a>.</p>
<p><strong>The Conversation : Avec vos collaborateurs, vous vous êtes particulièrement intéressé aux effets de l’infection sur une catégorie bien particulière de neurones, les neurones à GnRH. Pourriez-vous nous expliquer ce dont il s’agit ?</strong></p>
<p><strong>VP :</strong> Ces neurones produisent une hormone appelée GnRH (Gonadotropin-Releasing Hormone). Éparpillés dans notre cerveau, ils sont très peu nombreux : on estime qu’il en existe seulement environ 10 000, dont 2000 dans l’hypothalamus. En regard des 100 milliards d’autres neurones, c’est extrêmement peu.</p>
<p>Cependant ces neurones, que l’on retrouve chez tous les vertébrés, sont essentiels. En effet, ils contrôlent notamment les capacités de reproduction. Les neurones à GnRH s’activent à la puberté. L’hormone qu’ils produisent à cette période passe dans le sang et atteint l’hypophyse, une petite glande située sous le cerveau.</p>
<p>Celle-ci libère alors deux autres hormones, la LH et la FSH, qui vont agir sur les ovaires et les testicules, entraînant leur croissance et déclenchant la production de spermatozoïdes et d’ovocytes. LH et FSH sont aussi impliquées dans la sécrétion des œstrogènes et de la testostérone.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Donc, depuis l’hypothalamus, les neurones à GnRH contrôlent tous les processus associés aux fonctions reproductrices : la puberté, l’acquisition des caractères sexuels secondaires et, à l’âge adulte, la fertilité.</p>
<p>Mais ce n’est pas tout. Ces neurones jouent aussi <a href="https://theconversation.com/trisomie-21-une-hormone-ouvre-des-pistes-de-traitement-inedites-189887">un rôle essentiel dans le neurodéveloppement des enfants</a>. En effet, une semaine après la naissance, une première activation des neurones à GnRH se produit. Transitoire, elle est à l’origine d’une « mini-puberté » qui dure six mois environ, avant que ces neurones ne se mettent en hibernation en attendant la puberté adolescente. Or, cette première étape est fondamentale pour le développement des capacités cognitives des enfants.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/trisomie-21-une-hormone-ouvre-des-pistes-de-traitement-inedites-189887">Trisomie 21 : une hormone ouvre des pistes de traitement inédites</a>
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<p><strong>The Conversation : Comment avez-vous fait le lien entre ces neurones et le Covid-19 ?</strong></p>
<p><strong>Vincent Prévot :</strong> Au début de la pandémie, nous avons été troublés par le fait que la majorité des victimes des formes graves de Covid-19 étaient des hommes. Or, on sait que le dimorphisme sexuel est en partie contrôlé par le cerveau, via l’hypothalamus et les neurones à GnRH.</p>
<p>En outre, bon nombre de ces patients étaient en surpoids, voire obèses, ou diabétiques. Un constat qui, là encore, faisait soupçonner une implication de l’hypothalamus, car cette structure, qui intervient dans de nombreux mécanismes physiologiques (croissance, faim et soif, rythme circadien, régulation de la température, métabolisme…), joue aussi un rôle dans l’obésité et le diabète.</p>
<p>Nous nous sommes donc rapidement interrogés sur la possibilité que le virus puisse franchir la barrière hématoencéphalique, qui protège le cerveau des envahisseurs. À l’époque, peu de gens étaient prêts à l’admettre, car le SARS-CoV-2 était surtout considéré comme un virus pulmonaire.</p>
<p>Nous avons cependant prouvé que le virus pouvait bien accéder au cerveau, qui plus est de diverses façons.</p>
<p><strong>The Conversation : Comment le virus parvient-il à atteindre ces neurones ?</strong></p>
<p><strong>VP :</strong> La muqueuse de la cavité nasale (l’épithélium olfactif) est l’une de ses portes d’entrée. Il faut savoir que les neurones à GnRH ne naissent pas dans le cerveau, mais dans le nez, pendant le développement embryonnaire. Ils migrent dans le cerveau seulement dans un second temps.</p>
<p>Or, nous avons découvert ces dernières années que même une fois installés dans le cerveau, les neurones à GnRH gardent une attache physique avec l’épithélium olfactif, via leurs fibres nerveuses. C’est par là que passe le virus.</p>
<p>Qui plus est, dans la muqueuse nasale se trouve une autre sorte de neurones, les neurones olfactifs, dont le rôle est de détecter les molécules odorantes. Leurs fibres nerveuses sont en contact avec le bulbe olfactif situé dans le cerveau (la structure qui traite les informations liées aux odeurs). Nous avons démontré que le coronavirus SARS-CoV-2 était capable d’infecter ces neurones (c’est pour cela que l’un des symptômes est la perte de l’odorat, ou anosmie), lesquels constituent donc une seconde porte d’entrée.</p>
<p>Mais le virus dispose aussi d’une troisième voie d’accès au cerveau. Nos collègues allemands ont en effet découvert que le coronavirus <a href="https://theconversation.com/Covid-19-comment-le-coronavirus-sintroduit-dans-notre-cerveau-185834">détruit les cellules qui tapissent l’intérieur des vaisseaux sanguins cérébraux</a>. Ceux-ci perdent alors leur étanchéité, endommageant la barrière hématoencéphalique censée isoler le cerveau, et laissant « fuir » le virus.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/covid-19-comment-le-coronavirus-sintroduit-dans-notre-cerveau-185834">Covid-19 : comment le coronavirus s’introduit dans notre cerveau</a>
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<p>Enfin, à certains endroits de l’hypothalamus, la barrière hématoencéphalique s’interrompt, pour laisser passer librement dans le sang les neurohormones produites par cette structure cérébrale, telle que la GnRH. On peut donc imaginer que le virus, présent dans le sang, puisse lui aussi passer par là. Nous avons d’ailleurs montré qu’il infecte aussi des cellules appelées <a href="https://www.inserm.fr/actualite/les-tanycytes-des-intermediaires-indispensables-au-controle-de-la-glycemie-par-le-cerveau/">« tanycytes »</a>, qui régulent notamment la fréquence de sécrétion de la GnRH dans le sang…</p>
<p>L’entrée du virus dans le cerveau n’est pas sans conséquence : lorsque nous avons pratiqué des autopsies de patients décédés de la maladie, nous avons découvert que leurs neurones à GnRH avaient été tués ou étaient en train de mourir. La GnRH n’était donc plus produite à des taux suffisants. Or, en l’état actuel des connaissances, on considère que ces neurones ne se régénèrent pas.</p>
<p><strong>The Conversation : Quelles sont les conséquences pour les patients ?</strong></p>
<p><strong>VP :</strong> Divers rapports scientifiques avaient fait état de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34409772/">taux de testostérone très bas</a> chez des patients atteints de Covid-19. Par ailleurs, de nombreux hommes atteints de Covid long se plaignent d’une baisse de libido ou de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36251682/">problèmes érectiles</a>.</p>
<p>Nous l’avons aussi constaté dans la <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34008009/">cohorte</a> de 47 hommes que nous avons analysée lors de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37713808/">nos derniers travaux</a>. Les dosages que nous avons effectués indiquent par ailleurs que cette baisse de testostérone n’est pas due à un problème au niveau des organes sexuels, mais bien à un déficit de production de GnRH dans l’hypothalamus (c’est ce que l’on appelle un <a href="https://www.chu-lyon.fr/hypogonadisme-hypogonadotrope">hypogonadisme hypogonadotrope</a>.</p>
<p>Mais les problèmes posés pourraient être plus importants qu’une simple baisse de la libido. <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37713808/">Dans cette même étude</a>, nous avions déjà constaté un plus fort taux de mortalité chez les personnes en réanimation dont l’axe gonadotrope était altéré. Mais on sait aussi qu’un déficit en GnRH peut se traduire par des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37261390/">troubles cognitifs</a>.</p>
<p>Ainsi, certains traitements du cancer de la prostate ou de l’endométriose, qui consistent à supprimer l’axe GnRH, s’accompagnent d’une perte cognitive chez certaines personnes, ainsi que d’un risque accru de développer la maladie d’Alzheimer plus tard.</p>
<p>Or, dans notre cohorte, les patients qui présentaient des dosages hormonaux anormaux se traduisant par une baisse de testostérone étaient en proportion plus nombreux à signaler des troubles de la mémoire ou de l’attention, ou des difficultés de concentration. Ces résultats doivent encore être confirmés sur des cohortes de plus grande taille incluant également des femmes.</p>
<p><strong>The Conversation : Doit-on craindre que l’effet du virus se fasse sentir à long terme ?</strong></p>
<p><strong>VP :</strong> On peut légitimement se poser la question des conséquences de l’infection par le SARS-CoV-2 sur le cerveau humain. Comment vont vieillir les cerveaux des personnes infectées ? Les troubles cognitifs dont se plaignent les patients vont-ils persister ? Va-t-on assister à une augmentation des cas de démence dans les décennies à venir ?</p>
<p>C’est d’autant plus inquiétant que des effets sur le cerveau ont été constatés, y compris chez des personnes souffrant seulement de symptômes modérés.</p>
<p>Il ne s’agit pas d’être alarmiste, bien entendu. Mais le cas de <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/grippe#:%7E:text=la%20pand%C3%A9mie%20de%201918%20dite,due%20au%20sous%2Dtype%20H3N2.">l’épidémie de grippe espagnole survenue au début du XXème siècle</a>, doit nous faire réfléchir : une <a href="https://www.nature.com/articles/s41531-020-00123-0">grande partie des survivants avait développé la maladie de Parkinson</a>, pour des raisons <a href="https://www.vidal.fr/actualites/30687-il-y-a-100-ans-l-encephalite-lethargique-un-fleau-oublie.html">qui restent à élucider</a>.</p>
<p>Par ailleurs, on peut se demander si l’infection des enfants en très bas âge, longtemps considérée comme peu problématique, ne pourrait pas avoir elle aussi des conséquences à plus long terme. Si l’étape de mini-puberté a été altérée chez certains nourrissons, leur développement neurologique pourrait s’en ressentir, et nécessiter un accompagnement afin de tenter d’atténuer l’impact de cette situation.</p>
<p>Répondre à ces questions va nécessiter d’approfondir les recherches dans les années à venir.</p>
<p><strong>The Conversation : Quelle va être la suite de ces travaux ?</strong></p>
<p><strong>VP :</strong> Jusqu’ici, nos résultats ont été obtenus sur de petites cohortes. Nous allons maintenant changer d’échelle, en analysant des échantillons provenant d’hommes et de femmes participant à la <a href="https://etude-coper.fr/">cohorte française Coper</a>.</p>
<p>Il s’agit de 300 personnes qui ont eu un Covid « léger » sans conséquence à long terme, et 300 personnes qui ont eu un Covid similaire, mais ont développé un Covid long.</p>
<p>Nous allons tester l’état de l’axe gonadotrope et le comparer entre les deux groupes, afin de vérifier si un axe gonadotrope déficient est effectivement associé à des troubles neurologiques.</p>
<p>En attendant d’en savoir plus, mieux vaut éviter d’être contaminé par ce virus, qui n’est de toute évidence pas un simple virus respiratoire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225960/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Vincent Prévot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Loin de n’être qu’un « banal » virus respiratoire, le coronavirus SARS-CoV-2 peut envahir de nombreuses sortes de cellules dans notre corps. Y compris dans le cerveau, normalement si bien protégé.Vincent Prévot, Directeur de Recherche en Neuroendocrinologie et Neurosciences, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2216862024-02-22T15:09:23Z2024-02-22T15:09:23ZLes fibres alimentaires n’agissent pas seulement sur le côlon – le système immunitaire, le cerveau et la santé globale en bénéficient également<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/570673/original/file-20240119-19-bkynf2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=66%2C6%2C3923%2C2249&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La plupart des gens ne consomment que la moitié de la quantité de fibres alimentaires recommandée, ce qui peut avoir un effet négatif sur leur santé.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Les conseils sur l’alimentation ne manquent pas, qu’il s’agisse de manger des <a href="https://www.hsph.harvard.edu/nutritionsource/superfoods/">superaliments</a> qui permettent de <a href="https://www.npr.org/sections/thesalt/2015/04/11/398325030/eating-to-break-100-longevity-diet-tips-from-the-blue-zones">vivre jusqu’à 100 ans</a> ou de suivre des <a href="https://guide-alimentaire.canada.ca/fr/conseils-pour-alimentation-saine/regimes-et-tendances-alimentaires/">régimes restrictifs</a> qui sont censés faire perdre du poids et améliorer l’apparence. En tant que chercheur du <a href="https://farncombe.mcmaster.ca/"><em>Farncombe Family Digestive Health Research Institute</em></a>, je suis parfaitement conscient qu’il n’existe pas de « régime santé » universel qui convienne à tout le monde.</p>
<p>La plupart des professionnels s’accordent à dire que l’on doit avoir un régime équilibré sur le plan des groupes alimentaires, et qu’il est préférable d’y ajouter des légumes et des <a href="https://www.mdpi.com/2072-6643/11/8/1806">aliments fermentés</a> plutôt que de se limiter inutilement. De plus, la consommation d’aliments qui favorisent la santé intestinale améliore l’état de santé global.</p>
<h2>Pourquoi se préoccupe-t-on autant des fibres ?</h2>
<p>L’importance des fibres est connue depuis plusieurs décennies. <a href="https://doi.org/10.1017/S0954422417000117">Denis Burkitt</a>, regretté chirurgien et chercheur dans le domaine des fibres, a déclaré : « Si vous avez de petites selles, vous devrez avoir de gros hôpitaux. » Mais les fibres alimentaires ne se contentent pas de faciliter le transit intestinal, elles sont aussi un <a href="https://www.mayoclinic.org/healthy-lifestyle/nutrition-and-healthy-eating/expert-answers/probiotics/faq-20058065">nutriment prébiotique</a>.</p>
<p>Les prébiotiques ne sont pas activement digérés et absorbés, ils servent plutôt à favoriser la croissance de bactéries bénéfiques dans notre intestin. <a href="https://doi.org/10.3390%2Ffoods8030092">Ces micro-organismes contribuent ensuite à la digestion des aliments</a> pour que nous en retirions davantage de nutriments, soutiennent l’intégrité de la barrière intestinale et empêchent la prolifération de bactéries nocives.</p>
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<img alt="High-fibre foods against the outline of intestines" src="https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/570413/original/file-20240119-17-wpd6x9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les prébiotiques ne sont pas activement digérés et absorbés, ils servent plutôt à favoriser la croissance de bactéries bénéfiques dans notre intestin.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Indépendamment de leur effet sur les bactéries, les fibres peuvent aussi influencer notre système immunitaire lorsqu’elles <a href="https://doi.org/10.1111/bph.14871">interagissent directement avec des récepteurs exprimés par nos cellules</a>. Ces bienfaits peuvent même aider le système immunitaire à être plus tolérant et à réduire l’inflammation.</p>
<h2>Mange-t-on suffisamment de fibres ?</h2>
<p>Probablement pas. Le <a href="https://doi.org/10.3390%2Fnu15122749">régime alimentaire occidental</a> est pauvre en fibres et riche en aliments ultra-transformés. <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/nutriments/fibres.html">On recommande de consommer</a> de <a href="https://www.nature.com/articles/s41575-020-00375-4">25 à 38 grammes de fibres par jour</a>, selon l’âge, le sexe et le niveau d’activité. La plupart des gens consomment environ la moitié de la quantité recommandée, ce qui peut nuire à leur santé globale.</p>
<p>Les céréales complètes, les fruits et légumes, les légumineuses, les noix et les graines constituent de bonnes sources de fibres alimentaires. On insiste beaucoup sur les fibres solubles et moins sur les fibres insolubles, mais en réalité, la plupart des aliments contiennent un mélange de ces deux types, qui ont tous deux <a href="https://www.healthline.com/health/soluble-vs-insoluble-fiber%23risks">leurs bons côtés</a>.</p>
<p>Les collations à haute teneur en fibres gagnent en popularité. Avec une valeur globale estimée à 7 milliards de dollars américains en 2022, le <a href="https://www.precedenceresearch.com/prebiotic-ingredients-market#:%7E:text=The%2520global%2520prebiotic%2520ingredients%2520market,13.25%2525%2520from%25202022%2520to%25202030">marché des ingrédients prébiotiques</a> devrait tripler d’ici 2032.</p>
<h2>Les bienfaits des fibres alimentaires</h2>
<figure class="align-right ">
<img alt="Diagram of a human with arrows linking brain and intestines" src="https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/570414/original/file-20240119-17-fwfmrl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les fibres sont associées à la santé globale et à la santé cérébrale par l’axe intestin-cerveau.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Il existe de nombreuses preuves des bienfaits des fibres alimentaires. Les fibres ne sont pas seulement associées à la santé du côlon ; elles influencent aussi la santé globale et la santé du cerveau par <a href="https://my.clevelandclinic.org/health/body/the-gut-brain-connection">l’axe intestin-cerveau</a>. Les régimes pauvres en fibres ont été corrélés à des troubles gastro-intestinaux tels que le syndrome du côlon irritable ou des maladies inflammatoires de l’intestin.</p>
<p>Par ailleurs, une consommation suffisante de fibres <a href="https://doi.org/10.1038/s41575-020-00375-4">réduit les risques et la mortalité liés aux maladies cardiovasculaires et à l’obésité</a>. Des études montrent que <a href="https://doi.org/10.3390/nu13072159">certains types de fibres peuvent améliorer les fonctions cognitives</a>.</p>
<p>Certaines maladies gastro-intestinales, comme la maladie cœliaque, ne semblent pas influencées par la consommation de fibres. De plus, <a href="https://doi.org/10.1038/s41575-020-00375-4">il n’y a pas de consensus</a> sur le type de fibres et la dose qui serait bénéfique pour le traitement de la plupart des maladies.</p>
<h2>Les fibres ne sont pas toutes bonnes</h2>
<p>Étonnamment, ce ne sont pas toutes les fibres qui sont bonnes pour la santé. Fibre est un terme générique pour désigner les polysaccharides végétaux qu’on ne peut digérer. Il en existe de nombreux types, dont la fermentescibilité, la solubilité et la viscosité dans l’intestin varient.</p>
<p>Pour compliquer les choses, la <a href="https://doi.org/10.3389/fped.2020.620189">source a également son importance</a>. Les fibres provenant d’une plante en particulier ne sont pas les mêmes que celles issues d’une autre. En outre, le vieux dicton « trop, c’est comme pas assez » s’applique ici, car la surconsommation de suppléments de fibres peut provoquer des symptômes tels que constipation, ballonnements et gaz. Cela est dû en partie au fait qu’il existe différents microbiomes intestinaux et que tous n’ont pas la même la capacité à métaboliser les fibres pour produire des molécules bénéfiques telles que les acides gras à chaînes courtes.</p>
<p>Dans certains cas, comme chez les personnes atteintes de maladies inflammatoires de l’intestin, l’absence de bactéries capables de digérer les fibres peut laisser les fibres intactes <a href="https://doi.org/10.1053/j.gastro.2022.09.034">interagir directement avec les cellules intestinales et engendrer des effets inflammatoires</a>. Des données récentes ont même montré qu’une consommation excessive de fibres solubles, telles que l’inuline, un complément répandu, peut <a href="https://doi.org/10.1053/j.gastro.2023.10.012">accroître le risque de développer un cancer du côlon dans un modèle animal expérimental</a>.</p>
<h2>Un élément d’un régime alimentaire sain</h2>
<p>Les fibres alimentaires sont un élément important d’un régime alimentaire qui peut favoriser la santé de l’intestin et la santé globale. Les fibres contribuent à la sensation de satiété après les repas et à la régulation de la glycémie et du cholestérol. Assurez-vous de consommer des fibres dans votre alimentation et, si nécessaire, prenez des compléments alimentaires sans dépasser la dose recommandée.</p>
<p>Les prébiotiques favorisent le développement de bactéries intestinales qui peuvent influencer la santé et l’immunité de l’intestin dans le cadre de nombreuses maladies, bien que toutes les fibres ne se valent pas. Si les fibres ne guérissent pas les maladies, une saine alimentation peut soutenir le travail des médicaments et des traitements, dont elle peut améliorer l’efficacité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221686/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mark Wulczynski ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les fibres ne sont pas seulement associées à la santé du côlon ; elles influencent aussi la santé globale et la santé du cerveau par l’axe intestin-cerveau. Mais toutes les fibres ne se valent pas.Mark Wulczynski, Medical Sciences PhD Candidate, McMaster UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2235942024-02-21T15:45:50Z2024-02-21T15:45:50ZL’orgasme, une symphonie cérébrale parfaitement orchestrée<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/575660/original/file-20240212-24-5rben.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=48%2C26%2C3546%2C2667&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Est-ce le cerveau qui contrôle l’orgasme, ou l’inverse ? Ce qui est prouvé, c’est que l’orgasme peut avoir des effets bénéfiques sur la santé.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/image-illustration/blend-female-portrait-vivid-colors-on-514475704">agsandrew / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>« Donnez-moi la même chose qu’elle », dit Estelle Reiner au serveur en désignant Meg Ryan, qui vient de simuler un <a href="https://theconversation.com/fr/topics/orgasme-65476">orgasme</a> dans le restaurant où a lieu la fameuse rencontre du film <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Quand_Harry_rencontre_Sally"><em>Quand Harry rencontre Sally</em></a> (1989). Cette <a href="https://www.youtube.com/watch?v=8Pmlc9HlqzM">célèbre scène</a> est sans doute l’orgasme le plus connu de l’histoire du cinéma.</p>
<p>L’orgasme. Nous avons entendu, lu ou prononcé ce mot à de nombreuses reprises sans certainement nous arrêter pour réfléchir à sa signification. Son origine vient du mot grec <em>orgasmos</em>, qui dérive lui-même de <em>orgé</em> (« tempérament », « colère », « fureur »), et du suffixe <em>-asmos</em>, qui renvoie à l’idée de « résultat brusque », « coup ». L’orgasme est le point culminant intense et agréable de l’excitation sexuelle. Il se caractérise par des contractions rythmiques des muscles du plancher pelvien, accompagnées d’un plaisir intense et suivies d’un sentiment de relaxation et de satisfaction.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/mieux-anticiper-les-dechirements-du-perinee-220493">Mieux anticiper les déchirements du périnée</a>
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<h2>Le système nerveux est aux commandes</h2>
<p>Et si nous définissions l’orgasme de manière plus technique ? Nous dirions alors qu’il s’agit de l’intensité maximale de l’excitation générée par la stimulation afférente des récepteurs sensoriels viscéraux et/ou somatiques activés de manière exogène et/ou endogène. Cette intensité est associée à l’apparition de processus cognitifs d’ordre supérieur puis elle est suivie d’un relâchement et d’une résolution (diminution) de l’excitation.</p>
<p>Cette définition ressemble à du charabia. Mais elle nous rapproche probablement du véritable architecte de cette symphonie d’activités neuronales : le système nerveux. L’orgasme est un événement complexe qui implique une interaction synergique entre le corps et l’esprit. Et quel meilleur chef d’orchestre que notre système nerveux pour jouer ce rôle ?</p>
<p>En effet, des études basées sur l’<a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22465619/">imagerie par résonance magnétique fonctionnelle</a> montrent que pour atteindre un orgasme, de multiples structures nerveuses doivent être activées, ce qui entraîne une <em>tempête sympathique hyperactive</em>. Il s’agit d’un état dans lequel le système nerveux sympathique – celui qui contrôle les actions involontaires du corps comme la respiration ou le rythme cardiaque – présente une activité excessive. Cette frénésie provoque des changements physiologiques dans l’organisme, tels qu’une augmentation du rythme cardiaque, de la pression artérielle ou de la respiration (qui devient plus rapide et plus profonde).</p>
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<h2>Voici à quoi ressemble l’orchestre dirigé par le cerveau</h2>
<p>Mais la symphonie ne s’arrête pas là. À cette réponse périphérique, s’ajoute une activation centrale impliquant plusieurs régions du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/cerveau-21903">cerveau</a>. Il est temps de rencontrer ses protagonistes.</p>
<ul>
<li><p>Le <strong>cortex sensoriel</strong> est responsable du traitement des informations tactiles et sensorielles telles que la stimulation du <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21797981/">clitoris, du col de l’utérus ou du vagin</a>. Pendant l’orgasme, cette région du cerveau est activée, en réponse à la stimulation agréable qu’elle reçoit.</p></li>
<li><p>Les contractions rythmiques qui caractérisent l’orgasme sont le résultat de l’activation du <strong>cortex moteur</strong>, qui est responsable de la coordination de la réponse musculaire qui accompagne l’orgasme sexuel. C’est comme si le cerveau dirigeait une succession de mouvements qui se terminent par un <em>crescendo</em> de plaisir.</p></li>
<li><p>Des études scientifiques ont montré que le <strong>cortex visuel</strong> est également activé. Ce qui suggère que, pendant l’orgasme, l’attention portée aux surfaces corporelles qui se trouvent stimulées ainsi qu'à l’<a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/14534252/">imagerie visuelle</a> est accrue.</p></li>
<li><p>Même si tous les instruments sont importants dans un orchestre, au niveau du cerveau, la véritable star de cette symphonie est le <strong>système limbique</strong> qui constitue le centre des émotions et de la récompense. C’est là que toute la musicalité de l’apogée sexuelle se déchaîne. L’une des principales structures limbiques impliquées est l’<strong><a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22465619/">hypothalamus</a></strong>. Il coordonne la libération des hormones sexuelles et des neurotransmetteurs essentiels au processus d’excitation sexuelle et au développement de l’orgasme.</p></li>
<li><p>En suivant le rythme, l’<strong>amygdale</strong> apparaît comme un acteur de premier plan. Cette structure cérébrale est spécialisée dans le traitement des émotions, y compris celles associées à la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/sexualite-20483">sexualité</a>, comme l’excitation et le plaisir. Pendant l’orgasme, l’activité de l’amygdale augmente, ce qui contribue à intensifier notre réponse émotionnelle et notre sensation de plaisir.</p></li>
<li><p>L’<strong>hippocampe</strong>, connu pour son rôle dans la mémoire et l’apprentissage, a également sa place dans cet orchestre neuronal. Il est responsable de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22353205/">l’encodage et de la consolidation</a> des expériences sexuelles agréables. Cela signifie que le système limbique peut influencer la manière dont nous nous souvenons et traitons nos expériences sexuelles, y compris les orgasmes. Ces processus peuvent conditionner nos <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22609047/">réponses émotionnelles</a> et notre comportement sexuel futur.</p></li>
<li><p>Enfin, d’autres structures cérébrales telles que le <strong>cervelet</strong> et sa projection vers le <strong>tegmentum pontique</strong> sont <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19219848/">impliquées</a> dans les composantes cardiovasculaires et <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/17413656/">motrices</a> de l’orgasme. <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23981195/">Il a été démontré</a> que l’activation de la région ventrolatérale du tegmentum pontique produit les contractions du plancher pelvien qui sont responsables, chez la femme, (au moins en partie) de l’orgasme physique. Chez l’homme, cette zone génère aussi des contractions du plancher pelvien responsables, cette fois, de l’éjaculation.</p></li>
</ul>
<h2>Un flot de neurotransmetteurs</h2>
<p>À la fin, tout repose sur les neurotransmetteurs, ces messagers chimiques qui créent une poussée de sensations agréables qui envahissent le cerveau. Voyons leur rôle.</p>
<ul>
<li><p>La <a href="https://www.inserm.fr/c-est-quoi/pour-le-plaisir-cest-quoi-la-dopamine/">dopamine</a>, qui est connue comme le neurotransmetteur du plaisir et du bonheur, atteint des niveaux maximums pendant l’orgasme, ce qui génère une sensation d’extase et de récompense.</p></li>
<li><p>Souvent appelée <a href="https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2012/revue-medicale-suisse-333/l-ocytocine-hormone-de-l-amour-de-la-confiance-et-du-lien-conjugal-et-social">« hormone de l’amour »</a>, l’ocytocine est également libérée en grandes quantités, ce qui favorise les liens émotionnels et l’intimité entre les partenaires sexuels. C’est comme si le cerveau était programmé pour renforcer les liens pendant cette période, favorisant ainsi une plus grande connexion entre les partenaires.</p></li>
<li><p>Pendant l’orgasme, le cerveau sécrète également de la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5005298/">sérotonine</a>, une <a href="https://institutducerveau-icm.org/fr/la-serotonine/">substance</a> liée à la régulation de l’humeur et au bien-être émotionnel. Elle contribue à produire une sensation de satisfaction et de bonheur, ce qui nous amène à comprendre que l’orgasme n’est pas seulement un événement physique, mais aussi mental.</p></li>
</ul>
<h2>Un black-out salutaire</h2>
<p>Dans ce contexte, l’expérience émotionnelle et phénoménologique de l’orgasme est liée à la désactivation de certaines zones du cerveau, telles que le cortex préfrontal, temporal et entorhinal. Cela est interprété comme une augmentation de la perception de l’expérience agréable et de la sensation de satiété qui accompagne l’apogée sensorielle.</p>
<p>À la lumière de toutes ces recherches, il n’est peut-être pas évident de déterminer si c’est le cerveau qui contrôle l’orgasme ou si c’est l’inverse. En fait, certaines <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/17156391/">études</a> démontrent que de nombreuses zones sont désactivées au moment même où l’acte sexuel est culminant, ce qui suggère que le cerveau « s’éteint » virtuellement, à l’exception du tronc cérébral – responsable de l’activité cardiovasculaire – et du cervelet – responsable des mouvements.</p>
<p>Ce qui est prouvé, c’est que l’orgasme peut avoir des effets bénéfiques sur la santé : il soulage le stress, améliore l’humeur et renforce le système immunitaire. De plus, la libération d’endorphines et d’autres substances chimiques peut avoir des propriétés analgésiques et anti-inflammatoires, en soulageant la douleur et en favorisant un sentiment général de bien-être.</p>
<p>Après avoir lu cet article, je suis sûre que vous serez d’accord avec Estelle Reiner et que vous commanderez la même chose que Meg Ryan.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223594/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>José A. Morales García ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Différentes zones du cerveau sont impliquées dans l’extase sensorielle qui caractérise l’orgasme. Certaines sont activées, d’autres inactivées, comme les instruments d’un orchestre.José A. Morales García, Investigador científico en enfermedades neurodegenerativas y Profesor de la Facultad de Medicina, Universidad Complutense de MadridLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2228432024-02-21T15:39:35Z2024-02-21T15:39:35ZCharge mentale : comment éviter une surchauffe du cerveau ?<p>Lire ses e-mails tout en ayant à l’esprit l’organisation du week-end et en écoutant son interlocuteur au téléphone, est-ce possible ? Bienvenue dans le soi-disant multitâche, que notre quotidien entretient avec le télétravail et l’essor de la technologie numérique à notre disposition. Nous pouvons avoir l’impression de faire deux choses en même temps, mais en réalité notre <a href="https://theconversation.com/fr/topics/cerveau-21903">cerveau</a>, inconsciemment, reporte très rapidement son attention d’une tâche à une autre. Après plus de 50 ans de travaux scientifiques, l’expression <a href="https://theconversation.com/fr/topics/charge-mentale-59674">« charge mentale »</a> s’est développée ces dernières années dans la vie courante et dans différents milieux professionnels. Mais ce concept pose encore de nombreuses questions, tant sur sa définition précise que sur la façon de l’étudier ou de la ménager au quotidien.</p>
<p>La charge mentale, appelée aussi charge de travail mental, correspondrait à une <a href="http://arpege-recherche.org/user/pages/06.activites/03.colloques-epique/11.10e-colloque-epique/Actes_EPIQUE_2019.pdf">quantité de travail mental à déployer en un temps donné</a>, et ayant potentiellement des conséquences sur l’individu, telles que de la fatigue accumulée ou des erreurs dans la réalisation des tâches. Prenons l’exemple de la pratique intensive d’une habileté manuelle, d’un examen difficile, de la conduite sur une autoroute très fréquentée ou de la recherche dans un affichage visuel encombré. Ces activités font appel à des processus perceptifs, cognitifs et/ou moteurs afin de produire un <a href="https://doi.org/10.1037/0033-295X.84.1.1">comportement flexible et adaptatif</a>. L’engagement, le maintien et le contrôle de ces processus nécessitent différents niveaux d’effort mental selon les circonstances (activités de routine versus événement soudain). Parfois, cet effort mental massif conduit à ce que les scientifiques appellent une « surcharge cognitive » ou « surcharge mentale ».</p>
<h2>Une définition universelle qui peine à émerger</h2>
<p>Les chercheurs peinent encore à proposer une définition universelle qui traverse les disciplines qui s’intéressent à la charge mentale, comme la psychologie, le management et les sciences cognitives. Pour certains, la charge mentale correspond à la notion de <a href="https://kahneman.scholar.princeton.edu/sites/g/files/toruqf3831/files/kahneman/files/attention_lo_quality.pdf">capacité limitée de l’individu</a> (« réservoir » de ressources attentionnelles) pour traiter l’information. Pour d’autres, elle fait référence à la gestion des ressources attentionnelles et se focalise sur les <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1518/001872008X288394">exigences de la tâche à réaliser</a>. Parmi les très <a href="https://apps.dtic.mil/sti/pdfs/ADA474193.pdf">nombreuses définitions proposées dans la littérature</a>, il en ressort que la charge mentale peut se définir comme la quantité d’effort investi par l’individu lors de la réalisation d’une tâche en fonction de ses ressources disponibles et des caractéristiques de la tâche.</p>
<p>En neurosciences, en psychologie cognitive et en ergonomie (la discipline scientifique qui s’intéresse à la relation entre l’être humain et son travail), l’étude de la charge mentale concerne notamment les applications dites « critiques pour la sécurité ». Il s’agit de domaines tels que l’automobile, l’aviation, le contrôle du trafic aérien, les vols spatiaux ou encore la défense. Dans les situations où le coût cognitif dépasse les ressources disponibles, la surcharge produite accentue les risques d’accident, en raison des difficultés de l’individu à détecter des anomalies techniques ou des signaux d’alerte. On parle dans ce cas de <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/0018720813510735">surdité attentionnelle</a>. Cela peut être le cas par exemple pour un pilote d’avion lors d’un atterrissage ou de conditions météorologiques dégradées. Plus récemment, les études sur la charge mentale ont également suscité l’intérêt de la recherche dans les domaines des médias, de l’interaction humain-machine, de la formation médicale, du sport, et de la finance.</p>
<p>Si les études en laboratoire ont fait progresser notre connaissance des fonctions cérébrales au cours d’une tâche donnée, il est important d’évaluer les performances de l’individu et sa charge mentale dans des environnements de travail complexes rencontrés dans la vie quotidienne. C’est un des leitmotivs de la neuroergonomie, discipline datant de la fin du XX<sup>e</sup> siècle, qui vise à réaliser la synthèse entre les approches et les outils utilisés par les neurosciences et la démarche de terrain de l’ergonomie et de l’ingénierie. Basée sur une approche multidisciplinaire, la neuroergonomie est définie comme l’<a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/0963721411409176">étude du cerveau humain en relation avec les performances au travail et dans la vie quotidienne</a>. Citons par exemple la mesure de l’activité cérébrale chez des chirurgiens, pour qui l’<a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2405844023064666">augmentation de la charge mentale peut entraîner des erreurs et affecter négativement les performances</a>.</p>
<h2>Comment étudier la charge mentale ? Des réponses comportementales aux marqueurs neurophysiologiques</h2>
<p>Tout comme il existe de nombreuses définitions possibles de la charge mentale, il existe de nombreuses façons de la mesurer. Aucun outil ou méthode ne peut donner une vision complète de la manière dont un individu réagit à une tâche. Des approches qui combinent les <a href="https://www.nature.com/articles/s41583-023-00692-y">données de plusieurs capteurs ou mesures</a> sont donc nécessaires, et peuvent être plus précises et fiables pour estimer en temps réel la charge mentale. C’est d’autant plus le cas dans des environnements changeants (fluctuations de l’éclairage, de la température…) ou des contextes nécessitant de s’adapter à la situation (malaises, incidents techniques…).</p>
<p>Des questionnaires autoévaluatifs de la charge mentale ressentie permettent de recueillir la perception des individus lors de la réalisation de la tâche. Par exemple, en incorporant une procédure d’évaluation multidimensionnelle, le questionnaire <a href="https://www.researchgate.net/publication/281036900_Etude_des_proprietes_de_la_version_francophone_du_NASA-TLX">NASA-TLX</a> permet d’obtenir un score global de la charge mentale au cours ou après la réalisation de la tâche. Il se base sur une moyenne pondérée des scores (de 0 à 100) de six sous-échelles subjectives. Ces échelles sont l’exigence mentale (niveau d’activité mentale), l’exigence physique (niveau d’activité physique), l’exigence temporelle (sensation de pression pour réussir à réaliser la tâche dans un délai donné), la performance (niveau d’exécution des objectifs de la tâche), l’effort (quantité d’efforts engagés) et la frustration (sensation d’insatisfaction pendant la réalisation de la tâche).</p>
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<p>L’analyse des performances lors de l’exécution d’une tâche unique peut aussi aider à estimer la charge mentale. Par exemple, des erreurs plus fréquentes ou une diminution de la vitesse de traitement de l’information peuvent indiquer une charge mentale plus élevée si les exigences de la tâche augmentent. Dans le cas d’une double tâche cognitivo-motrice (téléphoner en conduisant, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0001457516304389">s’orienter en se déplaçant à vélo ou à pied</a>…), le partage des ressources ainsi créé peut conduire à une chute des performances comparativement à la réalisation séparée de chacune des deux tâches.</p>
<p>En complément, la neuroergonomie propose d’intégrer des mesures objectives pour évaluer la charge mentale <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fnhum.2019.00375/full">à l’aide de plusieurs techniques ambulatoires</a> dans des environnements qui varient au cours du temps (lieux de travail, salle de classe, salle d’opération, trafic…). Ainsi, l’analyse du suivi du regard par oculométrie peut fournir des informations sur la charge mentale en mesurant où un individu dirige son attention. Des mesures physiologiques, telles que la fréquence cardiaque et sa variabilité, l’activité électrodermale, et même l’imagerie cérébrale portable peuvent fournir des indicateurs neurophysiologiques spécifiques de la charge mentale.</p>
<h2>Dans le cerveau, le cortex préfrontal est un témoin privilégié de la charge mentale</h2>
<p>La charge mentale se manifeste notamment dans le cortex préfrontal, la zone du cerveau qui a connu le développement le plus important chez l’être humain ces derniers millions d’années. Cette partie de notre cerveau est très impliquée dans le <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.1088545">contrôle cognitif</a>, un mécanisme d’adaptation et de supervision du processus de prise de décision. Le contrôle cognitif intervient notamment dans la résolution de conflits, la détection d’erreurs ou l’inhibition, et vise à garantir un niveau de performance suffisant par rapport aux exigences de la tâche et aux événements imprévus, tout en maintenant un coût cognitif acceptable. Mesurer l’activation du cortex préfrontal, en observant à quel point il consomme de l’énergie, c’est-à-dire du glucose et de l’oxygène, peut renseigner sur la quantité des ressources mobilisées pour répondre aux demandes de la tâche. En effet, des tâches difficiles ou nécessitant une attention soutenue entraînent une <a href="https://doi.org/10.1093/cercor/bht206">activation plus prononcée du cortex préfrontal et des réseaux cérébraux associés</a>.</p>
<p>C’est aussi le cas lors d’un effort physique exigeant réalisé dans des environnements complexes, comme une course à vélo dans un trafic dense, où chacun peut décider de s’engager différemment dans l’exercice après avoir évalué les coûts et les bénéfices. Dans cette situation de double tâche à la fois physique et cognitive, la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0001457514003157">décision dans le choix de la vitesse</a> est cognitivement contrôlée, guidée probablement par une décision stratégique visant à maximiser les bénéfices par rapport aux coûts.</p>
<h2>La gestion de la charge mentale</h2>
<p>Dans des contextes exigeants, professionnels ou éducatifs, ou dans d’autres situations liées par exemple à la conduite, la charge mentale peut varier au fil du temps jusqu’à un trop-plein sous l’influence de différents facteurs externes et internes. Comment faire face à la multitude de facteurs auxquels nous devons porter attention ?</p>
<p>Plusieurs recommandations sur le plan individuel peuvent être exploitées. D’une part, il est souvent utile de dresser un aperçu de toutes les tâches à effectuer afin de les classer par ordre de priorité. Cela permet de construire une séquence de tâches à accomplir l’une après l’autre, et d’abandonner les tâches non essentielles afin de mieux valoriser le travail effectué. Chaque tâche doit correspondre à des objectifs spécifiques à court terme (vingtaine de minutes). Il est aussi important d’adapter les pauses à la tâche pour réguler efficacement la charge mentale et pour réduire les interruptions distractives. Il faut enfin toujours s’accorder un temps de récupération adéquat (lecture, sport…).</p>
<p>L’application des principes de la neuroergonomie peut fournir des solutions personnalisées et efficaces pour la gestion de la charge mentale. La recherche sur la charge mentale reste extrêmement pertinente, notamment pour prendre en compte la variabilité individuelle dans la façon dont les personnes traitent l’information et interagissent avec leur environnement. À ce titre, <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fnhum.2020.609096/full">l’apport de méthodes d’intelligence artificielle</a> afin d’extraire l’information congruente de plusieurs mesures combinées représente une piste intéressante pour évaluer en continu la charge mentale d’un individu engagé dans une tâche.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222843/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Stéphane Perrey ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La charge mentale reste difficile à définir et à étudier en situation réelle. Elle constitue cependant une notion centrale à l’ère du tout-numérique.Stéphane Perrey, Professeur des Universités en Physiologie de l'Exercice / Neurosciences Intégratives, Directeur Unité Recherche EuroMov Digital Health in Motion, Université de MontpellierLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2211562024-02-15T14:09:15Z2024-02-15T14:09:15ZUn petit ver pour décrypter les mystères de notre cerveau<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/575901/original/file-20240215-18-nwzm0a.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C3075%2C2020&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Avec ses 302 neurones (ici rendus fluorescents en vert), Caenorhabditis elegans constitue un modèle particulièrement simple mais éclairant pour comprendre les mécanismes neurobiologiques.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Varbuss.jpg">Heiti Paves/Wikimedia Commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La compréhension des mécanismes cérébraux qui sous-tendent notre interaction au monde est l’un des grands objectifs de la communauté scientifique actuelle. Mais celle-ci se heurte naturellement à la complexité du cerveau humain, poussant de nombreux chercheurs à faire un pas de côté en étudiant d’abord ces mécanismes sur des organismes plus simples. Comme l’affirmait Claude Bernard dans son <em>Introduction à l’étude de la médecine expérimentale</em> (1865) :</p>
<blockquote>
<p>« Le choix heureux d’un animal […] suffit souvent pour résoudre les questions générales les plus élevées. »</p>
</blockquote>
<p>Et il est des organismes qui se révèlent particulièrement intéressants de ce point de vue : le ver <em>Caenorhabditis elegans</em> (<em>C. elegans</em>). Étudier et modéliser son système nerveux constitue en effet une fenêtre sur le système nerveux des vertébrés, et à terme de l’être humain.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/575886/original/file-20240215-22-devbnl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Schéma du ver C. elegans" src="https://images.theconversation.com/files/575886/original/file-20240215-22-devbnl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/575886/original/file-20240215-22-devbnl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=197&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/575886/original/file-20240215-22-devbnl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=197&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/575886/original/file-20240215-22-devbnl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=197&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/575886/original/file-20240215-22-devbnl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=247&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/575886/original/file-20240215-22-devbnl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=247&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/575886/original/file-20240215-22-devbnl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=247&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">D’environ 1 mm de longueur, le ver C. elegans est un des organismes pluricellulaires les plus simples, en faisant un animal modèle privilégié en biologie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Caenorhabditis_elegans_(C._elegans)_clip_art.png">MA Hanson/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>C. elegans : un ver déjà nobélisé</h2>
<p><em>C. elegans</em> est un nématode devenu star des laboratoires depuis son introduction dans les années 1970 par l’éminent biologiste Sydney Brenner, pionnier de la biologie moléculaire. Ce petit ver, d’une taille de 1,3 mm pour un diamètre de 0,08 mm, vit dans des sols humides, de fines pellicules d’eau, ou encore dans les végétaux en décomposition et se nourrit de micro-organismes. Il n’existe pas de femelle de cette espèce, et la forme hermaphrodite prédomine largement sur le sexe mâle.</p>
<p>Sydney Brenner, visionnaire, voyait en <em>C. elegans</em> un organisme idéal pour l’étude d’importants et divers processus biologiques ayant lieu dans l’ensemble des organismes vivants, même les plus complexes comme l’être humain. L’attribution de deux prix Nobel de médecine ou physiologie (2002 et 2006) et un prix Nobel de chimie (2008) pour des travaux menés sur le ver lui donneront raison. Cependant, aucun de ces prix n’a été obtenu pour des études sur son système nerveux, pourtant très riche, combinant simplicité et complexité.</p>
<h2>Un ver petit, mais costaud</h2>
<p>La simplicité apparente de son système nerveux a également rapidement fait de lui un organisme idéal pour l’étude des mécanismes physiologiques liés à la génération de comportement. En effet, son système nerveux se compose précisément de 302 neurones, et environ 7000 connexions synaptiques pour sa version hermaphrodite. En comparaison, l’être humain possède environ 100 milliards de neurones, pour une estimation de 10 000 connexions par neurone. Le connectome de <em>C. elegans</em> – l’ensemble des connexions qui s’établissent entre tous les neurones – a été complètement décrit en 1986, et maintes fois actualisé depuis. C’est actuellement le seul organisme au monde pour lequel nous avons de telles informations, complètes et précises.</p>
<p>Pendant ses trois jours de vie, son système nerveux lui permet de se déplacer, manger, dormir, déféquer, se reproduire, etc. Mais il lui permet également la génération d’une grande variété de comportements et de capacités plus riches et complexes : la chimiotaxie (comportement d’attraction ou de répulsion vis-à-vis de substances chimiques), l’apprentissage, le développement de stratégies pour fuir ses prédateurs, ou encore des capacités sociales. Autant de comportements rendus possibles par un cerveau si simple… Simple, mais peut-être qu’en apparence.</p>
<p>En effet, l’étude des composantes microscopiques de son système nerveux révèle une machinerie bien plus complexe et étendue que ce qu’on imaginait initialement. En particulier, on observe de grandes similarités, à différentes échelles, dans le fonctionnement de son cerveau et celui de vertébrés plus complexes dont nous, humains, faisons partie. Cette dernière propriété en fait une petite fenêtre idéale sur l’étude du système nerveux des vertébrés. Si les outils classiques de la biologie permettent l’exploration de ces caractéristiques, la modélisation et les simulations informatiques peuvent aussi jouer un rôle crucial dans leur compréhension.</p>
<h2>Un défi de modélisation pas aussi simple qu’il n’y paraît</h2>
<p>La modélisation à laquelle nous nous intéressons consiste à construire des équations pour reproduire le comportement des neurones du ver. La modélisation consiste toujours en un jeu de compromis entre réalisme et simplicité. Le modèle se doit d’être réaliste vis-à-vis du phénomène, ou d’un ensemble de ses caractéristiques jugées pertinentes, que nous essayons de décrire. Cette correspondance du modèle à la réalité dépend notamment de l’échelle à laquelle on se place. Plus l’échelle est fine, et plus cela nécessite des données précises, parfois techniquement difficiles à obtenir. Mais il se doit aussi d’être assez simple pour permettre son étude et sa simulation informatique afin de pouvoir dégager des prédictions, sans quoi le modèle serait inutile.</p>
<p>Dans le cas qui nous intéresse, l’idée est de construire des modèles fidèles à la physiologie des neurones. Les neurones étant des cellules, le milieu intracellulaire est séparé du milieu extracellulaire par une membrane imperméable. Imperméable ? Pas tout à fait. En effet, de petits canaux situés tout le long du neurone permettent à certaines particules chargées (des ions) de circuler entre l’intérieur et l’extérieur du neurone. C’est le mouvement de ces ions qui est à l’origine de l’activité électrique d’un neurone. Traduire cette activité en langage mathématique passe donc par la description des déplacements de ces ions de part et d’autre de la membrane.</p>
<p>Dans le cas des neurones de <em>C. elegans</em>, l’une des difficultés vient du manque de connaissance des ions impliqués, les particules chargées qui circulent entre l’intérieur et l’extérieur du neurone et responsables du signal électrique. Ce problème vient en grande partie de la petite taille des neurones et de la difficulté à disséquer un ver d’un millimètre de long sans le tuer. Sans informations précises sur les composantes responsables du comportement d’un neurone, la tâche de modélisation de son comportement en devient ainsi immédiatement plus ardue. Une façon d’outrepasser ces difficultés est de développer des algorithmes informatiques et des méthodologies mathématiques permettant de déterminer hypothétiquement certains ions impliqués, rendant ainsi possible la construction du modèle. Ces développements ont fait l’objet d’une <a href="https://theses.hal.science/tel-03580037v1/document">thèse</a> au laboratoire de mathématiques appliquées du Havre (LMAH).</p>
<p>Construire des modèles de ce type nécessite de passer par différentes étapes, depuis les laboratoires de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/neurosciences-20430">neurophysiologie</a> jusqu’à ceux de mathématiques qui peuvent demander des mesures spécifiques. Il faut donc concevoir les manipulations sur les vers permettant de déterminer un minimum de paramètres nécessaires pour la construction des modèles. Ainsi, un travail de modélisation de ce type nécessite fondamentalement un travail interdisciplinaire dans lequel sont impliqués des chercheurs de différentes disciplines (neurophysiologie, mathématiques, informatique). Comme l’écrit si bien Alexandre Grothendieck, considéré comme l’un des plus grands mathématiciens du XX<sup>e</sup> siècle, dans son journal intime <em>Récoltes et Semailles</em>,</p>
<blockquote>
<p>« C’est dans la mesure où se conjuguent les points de vue complémentaires d’une même réalité, où se multiplient nos “yeux”, que le regard pénètre plus avant dans la connaissance des choses. »</p>
</blockquote>
<h2>Aujourd’hui, où en est-on ?</h2>
<p>Malgré les difficultés à disséquer les neurones de ce petit ver, il nous a été possible de recueillir certaines données précises sur le fonctionnement de ses neurones grâce à des mesures réalisées par des neurophysiologistes de l’université Rockefeller.</p>
<p>Une partie des neurones du ver <em>C. elegans</em> est maintenant <a href="https://hal.science/hal-03351604/document">modélisée assez précisément</a>. Cette étape de modélisation des neurones est nécessaire pour avancer dans la compréhension du fonctionnement du système nerveux. Elle n’est cependant pas suffisante, car c’est finalement l’interaction entre ses différents neurones et l’environnement qui détermine les comportements macroscopiques du ver et auquel s’intéresse la communauté scientifique.</p>
<p>Ainsi, d’autres chercheurs travaillent sur la modélisation du comportement du ver, mais sans tenir compte des éléments biologiques à l’échelle des neurones. Il reste donc à construire un modèle intégrant ces différentes échelles : partir des comportements des neurones à l’échelle microscopique pour reproduire les comportements observables du ver à l’échelle macroscopique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221156/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>C. elegans a beau être minuscule, c’est une star des laboratoires. En modélisant son système nerveux, les scientifiques veulent en apprendre plus sur les mécanismes qui fondent nos comportements.Nathalie Corson, Maîtresse de conférences en mathématiques appliquées, Université Le Havre NormandieLoïs Naudin, post doctorant en neurosciences computationnelles, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2146082024-02-13T18:03:31Z2024-02-13T18:03:31ZEst-ce normal d’oublier des mots quand on parle ? Quand doit-on s’inquiéter ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/553710/original/file-20231013-15-roq5c6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=10%2C2%2C979%2C663&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Lorsqu’un locuteur en bonne santé ne parvient pas à trouver un mot de son lexique qu’il a l’impression de connaître, les spécialistes du langage parlent du phénomène du « mot sur le bout de la langue ».</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>On a tous vécu cette situation où, au milieu d’une phrase, on est incapable de trouver le mot qu’on veut utiliser, même si on sait très bien qu’on le connaît.</p>
<p>Pourquoi cela se produit-il ?</p>
<p>Et doit-on considérer qu’il s’agit d’un signe qu’il y a un problème ?</p>
<p>Tout le monde éprouve occasionnellement des difficultés à trouver ses mots. Mais si cela arrive très souvent avec un large éventail de mots, de noms et de chiffres, cela peut être le signe d’un trouble neurologique.</p>
<h2>Les étapes de la production de la parole</h2>
<p>La formulation d’un mot nécessite plusieurs <a href="https://doi.org/10.1093/oxfordhb/9780190672027.013.19">étapes de traitement</a> : </p>
<ol>
<li><p>déterminer le sens voulu ;</p></li>
<li><p>choisir le mot juste dans son « lexique mental » (un dictionnaire mental du vocabulaire du locuteur) ;</p></li>
<li><p>récupérer sa structure sonore (appelé « forme ») ;</p></li>
<li><p>exécuter les mouvements des organes de la parole pour formuler son idée.</p></li>
</ol>
<p>La difficulté à trouver des mots peut survenir à chacun de ces stades.</p>
<p>Lorsqu’un locuteur en bonne santé ne parvient pas à trouver un mot de son lexique qu’il a l’impression de connaître, les spécialistes du langage parlent du phénomène du « mot sur le bout de la langue ».</p>
<p>Souvent, le locuteur frustré tentera de donner quelques informations sur le sens du mot qu’il souhaite utiliser, « tu sais, ce truc avec lequel tu frappes sur un clou », ou sur son orthographe, « ça commence par un M ! »</p>
<p>Ce type de problème est relativement commun et se produit généralement lors de la récupération de la structure sonore d’un mot (étape 3 ci-dessus).</p>
<h2>Qu’est-ce qui peut faire qu’on cherche un mot ?</h2>
<p>Les difficultés à trouver des mots surviennent à tout âge, mais elles sont plus fréquentes à mesure qu’on vieillit. Chez les personnes âgées, elles peuvent être source de frustration et d’anxiété quant à la possibilité de développer une démence. Mais il n’y a pas toujours lieu de s’inquiéter.</p>
<p>Pour étudier ce phénomène, les chercheurs peuvent demander aux personnes de tenir un journal afin de noter la fréquence et le contexte dans lequel il se produit. <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2015.01190/full">L’examen de journaux de bord</a> a montré qu’on a davantage tendance à chercher certains types de mots, tels que les noms de personnes et de lieux, les substantifs concrets (de choses, comme « chien » ou « bâtiment ») et les substantifs abstraits (de concepts, comme « beauté » ou « vérité ») <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2015.01190/full">que les verbes et les adjectifs</a>.</p>
<p>Les termes qu’on utilise peu sont aussi plus susceptibles d’engendrer le phénomène du « mot sur le bout de la langue ». On suppose que c’est dû au fait que les liens entre leur signification et leur sonorité sont plus faibles que pour les mots fréquents.</p>
<p>Des études en laboratoire ont également montré que ce phénomène se produit plus souvent dans des <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/13825585.2019.1641177">situations sociales stressantes</a>, par exemple lorsque l’on fait l’objet d’une évaluation, et ce, quel que soit son âge. Ainsi, de nombreuses personnes déclarent avoir connu ce type de problème dans le cadre d’entretiens d’embauche.</p>
<h2>Quand doit-on craindre un problème sérieux ?</h2>
<p>Des échecs répétés avec un large éventail de mots, de noms et de chiffres sont susceptibles d’indiquer des problèmes plus graves.</p>
<p>Les spécialistes du langage utilisent les termes « anomie » ou <a href="https://www.aphasia.com/aphasia-library/aphasia-types/anomic-aphasia/">« aphasie anomique »</a> pour décrire cette condition. Elle peut être due à des lésions cérébrales causées par un accident vasculaire cérébral, une tumeur, un traumatisme crânien ou une démence telle que la maladie d’Alzheimer.</p>
<p>La famille de l’acteur Bruce Willis a récemment révélé qu’il était atteint d’une maladie dégénérative connue sous le nom d’aphasie primaire progressive, dont l’un des premiers symptômes est la difficulté à trouver les mots plutôt que la perte de mémoire.</p>
<p>L’aphasie primaire progressive est généralement associée à la démence frontotemporale ou à la maladie d’Alzheimer, bien qu’elle puisse être causée par d’autres <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3637977/">pathologies</a>.</p>
<p>L’aphasie anomique peut être due à des problèmes survenant à différents stades de la production de la parole. Une évaluation par un neuropsychologue clinicien ou un orthophoniste peut clarifier quel stade est affecté et quelle est la gravité du problème.</p>
<p>Par exemple, si quelqu’un est incapable de nommer l’image d’un objet courant tel qu’un marteau, la personne qui l’évalue lui demandera de décrire à quoi sert l’objet (la réponse pourrait être « c’est quelque chose qui sert à frapper sur des choses » ou « c’est un outil »).</p>
<p>Si cela ne fonctionne pas, on lui dira de faire un geste ou de mimer la façon dont on l’utilise. On pourra aussi lui donner un indice, comme la première lettre (M) ou la première syllabe (mar).</p>
<p>Les résultats de la plupart des personnes atteintes d’aphasie anomique s’améliorent lorsqu’on leur propose des indices, ce qui montre qu’elles ont surtout des difficultés aux derniers stades, soit la récupération des formes de mots et les aspects moteurs de la parole.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1699457147673682242"}"></div></p>
<p>Cependant, si la personne est incapable de décrire ou de mimer l’utilisation de l’objet, et que les indices ne l’aident pas, cela incite à penser qu’il y a perte de la connaissance ou de la signification des mots. C’est généralement le signe d’un problème plus grave, tel que l’aphasie primaire progressive.</p>
<p>Des études d’imagerie menées sur des adultes en bonne santé et des personnes souffrant d’aphasie anomique ont montré que ce ne sont pas les mêmes zones du cerveau qui causent la difficulté à trouver les mots.</p>
<p>Chez les <a href="https://direct.mit.edu/jocn/article-abstract/35/1/111/113588/Neural-Correlates-of-Naturally-Occurring-Speech">adultes en bonne santé</a>, des échecs occasionnels à nommer l’image d’un objet courant sont liés à des changements dans l’activité des zones du cerveau qui contrôlent les aspects moteurs de la parole, ce qui pourrait indiquer un problème ponctuel d’articulation plutôt qu’une perte de mots.</p>
<p>Dans le cas d’une anomie causée par une aphasie primaire progressive, les régions du cerveau qui traitent le sens des mots présentent une perte de cellules nerveuses et de connexions ou une <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0148707">atrophie</a>.</p>
<p>Bien que l’aphasie anomique soit fréquente après un accident vasculaire cérébral survenu dans l’hémisphère gauche du cerveau, les difficultés à trouver des mots qui y sont associées ne semblent pas pouvoir être distinguées selon des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0010945215003299">zones précises</a>.</p>
<p>Il existe des <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/02687030244000563">thérapies</a> pour l’aphasie anomique. En général, un orthophoniste entraîne la personne à nommer des choses à l’aide de différents types d’indices ou d’amorces. Les indices peuvent être des caractéristiques d’un objet ou d’une idée, des caractéristiques sonores d’un mot ou une combinaison des deux. Les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S002199241730014X">applications pour tablettes</a> et téléphones intelligents donnent des résultats prometteurs lorsqu’on s’en sert pour compléter le traitement par des exercices à domicile.</p>
<p>Le type d’indice utilisé dépend de la nature de la déficience. La réussite de la thérapie est associée à des changements dans l’activité des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0093934X14000054">zones du cerveau</a> connues pour contribuer à la production de la parole. Malheureusement, il n’existe pas de traitement efficace pour l’aphasie primaire progressive, bien que <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/13607863.2019.1617246">certaines études</a> indiquent que l’orthophonie peut apporter des bénéfices temporaires.</p>
<p>Si vous êtes préoccupé par vos difficultés, ou celles d’un proche, à trouver des mots, vous pouvez consulter votre médecin généraliste qui vous orientera vers un neuropsychologue clinicien ou un orthophoniste.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214608/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Greig de Zubicaray est financé par l'Australian Research Council et la National Health and Medical Research Foundation.</span></em></p>Nous avons tous déjà oublié le mot dont nous avions besoin au milieu d’une phrase, et nous connaissons la sensation de l’avoir sur le bout de la langue. Mais quand est-ce que l’on doit s’inquiéter ?Greig de Zubicaray, Professor of Neuropsychology, Queensland University of TechnologyLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2200792024-02-12T16:12:55Z2024-02-12T16:12:55ZDétecter les odeurs est plus complexe qu’il n’y paraît<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/575005/original/file-20240212-28-khq3fg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5176%2C3445&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La perception des odeurs est un phénomène chimique complexe.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/femme-en-chemise-orange-avec-des-fleurs-violettes-sur-la-tete-7sff_QVfpX4">Elly Johnson/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Les nombreuses molécules odorantes qui pénètrent dans notre nez au quotidien à la faveur d’un repas, du croisement de l’effluve d’un parfum ou lors de situations plus désagréables, interagissent avec des « interrupteurs olfactifs », des récepteurs situés sur les neurones des tissus de notre cavité nasale.</p>
<p>Le récepteur en biologie est l’équivalent d’un interrupteur. Diverses molécules « allument ou éteignent » ces récepteurs de façon coordonnée ou non, interrompant ou déclenchant des actions et participant ainsi au fonctionnement des cellules, des organes et de l’organisme.</p>
<p>L’activation de ces récepteurs par une molécule odorante génère un signal électrique transmis au cerveau. L’identification et la fonction de ces récepteurs par les équipes de Richard Axel et Linda Buck a été récompensée par le <a href="https://www.nobelprize.org/prizes/medicine/2004/7438-the-nobel-prize-in-physiology-or-medicine-2004-2004-5/">prix Nobel de médecine en 2004</a>. Comme une odeur est constituée le plus souvent d’un mélange de molécules odorantes, qu’une molécule peut se fixer à plusieurs récepteurs différents et qu’un neurone ne porte qu’un seul type de récepteur, le message olfactif délivré à notre cerveau résulte d’une combinaison de récepteurs et donc de neurones activés.</p>
<p>Cette détection combinatoire ainsi que l’intégration des signaux qui en résultent par le cerveau nous permettent d’identifier par exemple l’odeur de banane, de fraise, de pain ou de parfums complexes. Ce mécanisme fait encore aujourd’hui l’objet de recherches mais il est bien accepté et motive de nombreux chercheurs publics et privés qui tentent notamment d’associer chaque molécule à ses récepteurs parmi les <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.1804106115">plus de 400 récepteurs potentiels chez l’humain</a>. Cela représente un champ de recherche important pour mieux comprendre l’olfaction et les troubles olfactifs associés mais aussi pour développer des arômes ou des parfums.</p>
<h2>Les récepteurs ne suffisent pas à bien percevoir les odeurs</h2>
<p>La détection olfactive par les récepteurs est essentielle mais le contrôle de la disponibilité des molécules odorantes pour ces récepteurs l’est tout autant. C’est le rôle de certaines enzymes présentes dans l’environnement des récepteurs sur <a href="https://doi.org/10.1080/03602532.2019.1632890">lequel mon équipe travaille</a>. Les enzymes sont des protéines qui accélèrent les réactions chimiques nécessaires au fonctionnement des cellules. L’enzyme qui nous intéresse se trouve dans les cellules des tissus de la cavité nasale et, comme un récepteur olfactif, elle est capable de fixer des molécules odorantes mais sa fonction est de les modifier. Elle n’est pas seule, de nombreuses enzymes prennent en charge la grande variété de molécules odorantes.</p>
<p><a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0249029">Nous avons participé</a> à déterminer la localisation de ces enzymes qui sont exprimées dans tous les types cellulaires des tissus olfactifs, dont les neurones qui portent les récepteurs. La fonction de ces enzymes du métabolisme des molécules odorantes est aujourd’hui sérieusement explorée car en modifiant celles-ci à proximité des récepteurs elles pourraient participer à leur élimination afin d’arrêter le signal qu’elles portent (hypothèse 1), ou à l’inverse elles pourraient laisser s’accumuler les molécules et donc augmenter l’intensité du signal correspondant (hypothèse 2) ou encore changer la qualité du signal en modifiant les molécules odorantes (hypothèse 3).</p>
<p>Ces 3 hypothèses qui se placent dans un étroit partenariat entre les enzymes et les récepteurs ne naissent pas de nulle part, elles s’appuient sur ce qui se passe dans le reste de l’organisme. En effet, ces familles d’enzymes du métabolisme existent dans de nombreux organes dont majoritairement le foie et sont impliquées dans l’élimination des molécules toxiques mais aussi de molécules qui portent un signal comme certaines hormones, lesquelles se fixent sur des récepteurs. Elles contrôlent donc la disponibilité de ces signaux et peuvent également les modifier pour les rendre plus ou moins actifs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/575018/original/file-20240212-26-3io5be.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Schéma de la modulation de la détection des odeurs via les enzymes" src="https://images.theconversation.com/files/575018/original/file-20240212-26-3io5be.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/575018/original/file-20240212-26-3io5be.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/575018/original/file-20240212-26-3io5be.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/575018/original/file-20240212-26-3io5be.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/575018/original/file-20240212-26-3io5be.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/575018/original/file-20240212-26-3io5be.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/575018/original/file-20240212-26-3io5be.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Schéma de la modulation de la détection des odeurs via les enzymes.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Élimination – disponibilité – modification des signaux, ces mécanismes enzymatiques bien établis dans l’organisme n’ont pas été pris en compte immédiatement concernant leur rôle dans l’olfaction. Ce mécanisme « péri-récepteur » a d’abord été mis de côté par la communauté scientifique car il ajoutait de la complexité au mécanisme de détection olfactive, lui-même en cours de caractérisation chez les mammifères. Par ailleurs, le doute résidait dans la capacité des enzymes à prendre en charge la variété de molécules odorantes et dans leur capacité à le faire dans le temps extrêmement court qu’impose la détection olfactive.</p>
<h2>Les enzymes, des partenaires essentiels des récepteurs olfactifs</h2>
<p>Certains groupes de chercheurs, dont le mien, ont orienté leurs travaux sur ces mécanismes péri-récepteurs.</p>
<p>Un premier verrou a été levé lorsque <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0059547">nous avons montré</a> que le métabolisme enzymatique de certaines molécules odorantes conduisait in fine à des métabolites non odorants (pas d’interaction avec les récepteurs) et donc participait effectivement à l’arrêt du signal (hypothèse 1). Les enzymes éteignent le signal en limitant la possibilité d’actionner les « interrupteurs olfactifs » : arrêt du signal.</p>
<p>À l’inverse, il a été montré que des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/alr.22897">métabolites intermédiaires pouvaient être odorant</a> et influencer la perception. Ainsi dans certains cas, nous sentons à la fois la molécule odorante initiale et son ou ses métabolites. <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-019-39404-x">Cette découverte a été renforcée par la démonstration</a> que la vitesse d’action métabolique des enzymes sur les molécules odorantes était équivalente à celle de leur détection par les récepteurs soit de l’ordre de quelques dizaines de millisecondes (un claquement de doigts). Les enzymes participent à allumer plusieurs « interrupteurs olfactifs » différents, simultanément : changement de la qualité du signal (hypothèse 3).</p>
<p>Enfin, des <a href="https://pubs.acs.org/doi/abs/10.1021/acs.jafc.2c02720">études</a> ont montré que si le fonctionnement de ces enzymes était perturbé par exemple à l’aide d’un inhibiteur enzymatique (qui peut être une molécule odorante), le signal n’était plus arrêté et les molécules odorantes au contraire stimulaient un plus grand nombre de récepteurs ce qui entraînait une réponse olfactive de plus grande intensité (hypothèse 2). L’inhibition des enzymes peut conduire à allumer un plus grand nombre « d’interrupteurs olfactifs » : augmentation de l’intensité du signal.</p>
<p>Ainsi, grâce à la détermination de quelques groupes de chercheurs sur la planète, ces mécanismes récepteurs et péri-récepteurs commencent à être considérés comme des partenaires dans l’olfaction périphérique (mécanisme se déroulant dans la cavité nasale). En contrôlant la disponibilité des molécules odorantes pour les récepteurs et leur qualité, les enzymes jouent un rôle majeur qui ouvre des perspectives vers la compréhension de la physiologie et la physiopathologie de l’olfaction et vers des applications dans la conception d’arômes ou de parfums par exemple en augmentant l’intensité de certaines molécules odorantes sans jouer sur leur concentration. Il est intéressant de noter <a href="https://www.nature.com/articles/s41588-021-00986-w">qu’une étude a montré</a> récemment que parmi des milliers de gènes, celui qui présente un polymorphisme (modification ponctuelle de la séquence d’ADN) significatif chez les patients infectés par le virus SARS-CoV-2 et souffrants de troubles olfactifs et celui d’une enzyme du métabolisme des molécules odorantes.</p>
<p>Cette petite histoire de l’olfaction nous montre que la science a cette capacité à finalement mettre en lumière les mécanismes d’abord sous-estimés.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220079/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Marie HEYDEL a reçu des financements de ANR. </span></em></p>Derrière la simplicité apparente de la perception des odeurs se cachent des mécanismes chimiques complexes.Jean-Marie Heydel, Professeur de Biochimie et Biologie Moléculaire, Université de Bourgogne – UBFCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2193772024-01-29T14:56:37Z2024-01-29T14:56:37ZMieux dormir, un facteur de protection contre la démence<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/569865/original/file-20240117-23-vqzz7m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=60%2C0%2C6720%2C4466&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le manque de sommeil ou sa mauvaise qualité font parties des facteurs de risque de développer la maladie d'Alzheimer. Heureusement, il y a des méthodes pour améliorer son sommeil.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>La démence est une perte progressive des capacités cognitives, comme celle de la mémoire, diminution qui est suffisamment importante pour avoir un impact sur les activités de la vie quotidienne. </p>
<p>Elle peut être causée par plusieurs maladies différentes, comme celle d’<a href="https://alzheimer.ca/fr/au-sujet-des-troubles-neurocognitifs/quest-ce-que-la-maladie-dalzheimer">Alzheimer</a>, qui est la forme la plus courante. La démence est due à une perte des neurones se produisant sur une longue période de temps. Puisqu’au moment de présenter des symptômes, plusieurs changements dans le cerveau se sont déjà produits, de nombreux scientifiques se concentrent sur l’étude des facteurs de risque et de protection de la démence. </p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/de-saines-habitudes-de-vie-peuvent-prevenir-jusqua-40-des-cas-de-demence-212150">De saines habitudes de vie peuvent prévenir jusqu’à 40 % des cas de démence</a>
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<p>Un facteur de risque, ou inversement, un facteur de protection, est une condition ou un comportement qui augmente ou réduit le risque de développer une maladie, sans toutefois le garantir. Certains facteurs de risque de la maladie d’Alzheimer et de la démence ne sont pas modifiables, comme l’âge ou la génétique, mais il en existe plusieurs sur lesquels on peut intervenir, <a href="https://www.thelancet.com/article/S0140-6736(20)30367-6/fulltext">notamment nos habitudes de vie et leurs impacts sur notre santé globale</a>.</p>
<p>Ces facteurs de risque incluent la dépression, le manque d’activité physique, l’isolation sociale, l’hypertension, l’obésité, le diabète, la consommation excessive d’alcool et le tabagisme, ainsi qu’un mauvais sommeil.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/changer-son-mode-de-vie-peut-reduire-les-risques-de-demence-mais-il-faut-le-faire-maintenant-218789">Changer son mode de vie peut réduire les risques de démence – mais il faut le faire maintenant</a>
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<p>Nous concentrons nos recherches sur la question du sommeil depuis plus de 10 ans, notamment dans le contexte de la <a href="https://www.nhlbi.nih.gov/science/framingham-heart-study-fhs">Framingham Heart Study</a>, une large étude de cohorte communautaire, pilotée par le NIH américain depuis les années quarante, dans le cadre de laquelle la santé des participants est suivie sur plusieurs années. Chercheurs en médecine du sommeil et en épidémiologie, nous avons une expertise dans la recherche portant sur le rôle du sommeil et de ses troubles dans le vieillissement du cerveau, au niveau cognitif et psychiatrique. </p>
<p>Dans le cadre de nos recherches, nous avons suivi et analysé le sommeil de gens âgés de 60 ans et plus afin de voir qui développait — ou non — la démence. </p>
<h2>Le sommeil comme facteur de risque ou de protection contre la démence</h2>
<p>Le sommeil semble jouer un rôle essentiel dans plusieurs fonctions cérébrales, comme la mémoire. Un sommeil de bonne qualité <a href="https://jamanetwork.com/journals/jamaneurology/fullarticle/2793873">pourrait donc jouer un rôle primordial dans la prévention de la démence</a>.</p>
<p>Le <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.1241224">sommeil est important pour maintenir de bonnes connexions dans le cerveau</a>. Récemment, des recherches ont révélé que le sommeil semble avoir une fonction semblable à celle d’un camion à ordures pour le cerveau : un <a href="https://doi.org/10.1016/j.mad.2023.111899">sommeil profond serait crucial pour éliminer les déchets métaboliques du cerveau</a> comme certaines protéines, y compris celles connues pour s’accumuler dans le cerveau des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. </p>
<p>Cependant, les liens entre le sommeil profond et la démence restent à clarifier.</p>
<h2>Qu’est-ce que le sommeil lent profond ?</h2>
<p>Pendant une nuit de sommeil, nous traversons plusieurs <a href="http://ceams-carsm.ca/a-propos-du-sommeil/">stades de sommeil</a> qui se succèdent et se répètent. </p>
<p>Le sommeil NREM (<em>non-rapid eye movement sleep</em>) se divise en sommeil léger (stade NREM1), en sommeil lent (stade NREM2), et en sommeil lent profond (stade NREM3). Ce dernier est associé à plusieurs fonctions restauratrices. </p>
<p>Ensuite, le sommeil paradoxal, ou sommeil REM (<em>rapid eye movement sleep</em>), est le stade généralement associé aux rêves les plus vivides. Chaque nuit, un adulte passe généralement environ 15 à 20 % en sommeil profond si l’on additionne toutes les périodes de sommeil NREM3. </p>
<p>Plusieurs changements de sommeil sont courants chez les adultes, comme se coucher et se réveiller plus tôt, dormir moins longtemps et moins profondément, et rester éveillé plus fréquemment pendant la nuit.</p>
<h2>Quand perte de sommeil profond rime avec démence</h2>
<p>Des <a href="https://jamanetwork.com/journals/jamaneurology/fullarticle/2810957">participants de la Framingham Heart Study</a> ont été évalués à l’aide d’un enregistrement de leur sommeil — connu sous le nom de <a href="https://sommeilmtl.com/?gad_source=1&gclid=CjwKCAiA75itBhA6EiwAkho9e59KoHerv89P5nUdElYK6pK2w08D4MRrDcIvNhg7Iw9HV8ssJgvRqBoC478QAvD_BwE">polysomnographie</a> — à deux reprises, espacé d’environ cinq ans, soit en 1995-1998 et ensuite en 2001-2003. </p>
<p>Plusieurs personnes montraient une diminution de leur sommeil lent profond au court des années, comme on s’y attend avec le vieillissement. À l’inverse, la quantité de sommeil profond de certaines personnes est restée stable ou a même augmenté. </p>
<p>Notre équipe de chercheurs de la Framingham Heart Study a suivi 346 participants âgés de 60 ans et plus pendant 17 années supplémentaires afin d’observer qui développait la démence, et qui ne la développait pas. </p>
<p>La perte progressive du sommeil profond dans le temps était associée à une augmentation du risque de démence, quelle qu’en soit la cause, notamment de type Alzheimer. Ces résultats étaient indépendants de nombreux autres facteurs de risque de démence.</p>
<p>Bien que nos résultats ne prouvent pas que la perte de sommeil profond provoque la démence, ils suggèrent qu’elle pourrait être un facteur de risque chez les personnes âgées. D’autres aspects du sommeil peuvent également être importants, comme sa durée ainsi que sa qualité. </p>
<h2>Des stratégies pour améliorer le sommeil profond</h2>
<p>Sachant l’impact d’un manque de sommeil profond sur la santé cognitive, quelles sont les stratégies pour l’améliorer ? </p>
<p>Avant tout, si vous rencontrez des problèmes de sommeil, il vaut la peine d’en parler à votre médecin. De nombreux troubles du sommeil sont sous-diagnostiqués et traitables, notamment par des avenues comportementales, c’est-à-dire non médicamenteuses. </p>
<p>Adopter de bonnes habitudes de sommeil peut aider, comme se coucher et se lever à des heures constantes ou éviter la lumière vive ou bleue au lit, comme celle des écrans. </p>
<p>Vous pouvez également éviter la caféine, limiter votre consommation d’alcool, maintenir un poids santé, pratiquer une activité physique pendant la journée, et dormir dans un environnement confortable, sombre et calme.</p>
<p>Le rôle que joue le sommeil profond dans la prévention contre la démence reste certes à explorer et à étudier. Favoriser son sommeil avec de bonnes habitudes de vie pourrait avoir le potentiel de nous aider à vieillir en santé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219377/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Andrée-Ann Baril a reçu des financements de la Sleep Research Society Foundation, la Société Alzheimer du Canada, les Instituts de recherche en santé du Canada, les Bourses postdoctorales Banting, la Fondation de l'Hôpital du Sacré-Coeur de Montréal, l'Université de Montréal et des frais de présentation de Eisai. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Matthew Pase a reçu des financements de National Health and Medical Research Council of Australia, National Institute on Aging, Dementia Australia, Alzheimer's Assocaition, National Heart Foundation of Australia, Australian Research Countil, Stroke Foundation, Brain Foundation, Alzheimer’s Drug Discovery Foundation, Rebecca L Cooper Medical Research Foundation, and Bethlehem Griffiths Research Foundation. </span></em></p>Le sommeil semble jouer un rôle essentiel dans plusieurs fonctions cérébrales, comme la mémoire. Un sommeil de bonne qualité pourrait donc jouer un rôle primordial dans la prévention de la démence.Andrée-Ann Baril, Professeure-chercheure adjointe au Département de médecine, Université de MontréalMatthew Pase, Associate Professor of Neurology and Epidemiology, Monash UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2161312024-01-25T14:49:52Z2024-01-25T14:49:52ZTraumatismes crâniens : le cas Lagaffe<p>Chutes, coups, accidents de travail, de vélo… Au cours de sa carrière de héros sans emploi, Gaston Lagaffe a subi (et a fait subir à son entourage !) un nombre impressionnant de traumatismes crâniens…</p>
<p>Quelles conséquences ces chocs auraient-ils pu avoir si Gaston n’avait pas été un personnage de bande dessinée ? Comment détermine-t-on la gravité d’un traumatisme crânien ? Explications.</p>
<h2>Gaston Lagaffe et les traumatismes crâniens</h2>
<p>Bien que peu sportif, sa tendance à la maladresse et ses nombreuses inventions à la sécurité souvent discutable ont exposé Gaston Lagaffe, ses amis et ses collègues à un risque élevé de chute et de traumatisme crânien.</p>
<p>Publiée en 2017 par les éditions Dupuis, l’édition intégrale recolorisée, qui regroupe par ordre de numéros croissants les gags de Gaston, est un outil bien commode pour répertorier l’ensemble des traumatismes crâniens dont a été victime le plus fatigué des employés de bureau et ses collègues, leurs mécanismes et leur gravité…</p>
<p><iframe id="67lsW" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/67lsW/8/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Sur les 152 traumatismes crâniens survenus dans les cases de BD fréquentées par Gaston, 6 ont été liés à un accident domestique, 30 à un accident de la voie publique (20 accidents de piétons, 9 accidents de voiture, 1 accident de vélo), et les autres à un accident survenu sur le lieu de travail.</p>
<p>Concernant les mécanismes à l’origine de ces traumatismes, on note 30 chutes (dont 10 dans les escaliers), au moins 100 chocs directs avec des objets en tout genre comme une boule de bowling (gag 572), une balle de bilboquet (gag 510), de jokari (gag 591) un fer à repasser (gag 899), une tortue (gag 877), et pas moins de 21 chocs directs tête contre plafond, porte ou mur… Enfin, 17 agressions diverses et autres coups de poing sont répertoriés, comme le direct envoyé par un voisin karatéka (gag 151) ou encore le coup de réveil asséné par un horloger (gag 660), voire le coup de chaise administré par Fantasio (gag 183).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/571399/original/file-20240125-25-qw98bz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">André Franquin, le « père » de Gaston Lagaffe.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Andr%C3%A9_Franquin,_tekenaar_strip_Guust_Flater,_1979_-_33.jpg">Noord-Hollands Archive, De Boer Photographic Press Collection/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>À vrai dire, ces situations sont (heureusement) relativement éloignées de celles qui provoquent des traumatismes crâniens dans le monde réel. Une ancienne étude menée en Aquitaine nous apprend que les traumatismes graves sont dus dans presque 50 % des cas à des accidents de la voie publique (voiture, cycliste, piéton). 24 % des traumatismes crâniens résultaient de chutes de sa propre hauteur, 17 % de chutes d’une grande hauteur, et 6 % d’un choc touchant la tête.</p>
<p>D’autres études indiquent des chiffres légèrement différents, mais qui restent en ligne avec ces estimations : 30 % à 40 % des traumatismes crâniens seraient liés à des accidents de la circulation, 20 à 30 % à des chutes, 10 à 20 % se produiraient durant la pratique d’un sport, 10 à 20 % seraient dus à agressions et 3 % seraient liés au travail.</p>
<p>Dans certaines cohortes, les traumatismes sévères liés au travail peuvent même atteindre 6 % du total, la grande majorité étant due à une chute d’une grande hauteur ou à un coup direct sur la tête, via un objet ou un équipement.</p>
<p>Par ailleurs, les études scientifiques ont par ailleurs déterminé que les mécanismes de survenue et les conséquences des traumatismes crâniens varient avec l’âge, et sont associés diversement avec la gravité. <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/docs/epidemiologie-des-traumatismes-craniens-en-france-et-dans-les-pays-occidentaux-synthese-bibliographique-avril-2016">Trois tranches d’âge ont été identifiées comme « à risque »</a> : les jeunes enfants (0-4 ans), les adolescents et jeunes adultes (15-24 ans) et les personnes âgées (> 65 ans).</p>
<h2>Des diagnostics pas si évidents</h2>
<p>En Europe, on estime que chaque année, 235 habitants sur 100 000 sont victimes d’un traumatisme crânien. La plupart (80 %) sont légers, 10 % sont d’une sévérité modérée, tandis que les 10 % restant sont des traumatismes graves. Mais contrairement à ce que l’on pourrait croire, il n’est pas toujours évident de définir la gravité d’un traumatisme crânien.</p>
<p>En 2010, un groupe d’experts définissait le traumatisme crânien comme <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21044706/">« une altération du fonctionnement cérébral […] provoquée par une force extérieure »</a>. Il faut comprendre ici « force extérieure exercée sur le crâne ou la tête ». Aussi le mécanisme responsable du traumatisme crânien peut donc être soit un traumatisme direct fermé ou pénétrant sur le crâne (choc ou impact d’objets sur le crâne), soit le résultat indirect d’un phénomène d’accélération/décélération du cerveau dans la boîte crânienne (« coup du lapin »).</p>
<p>La sévérité immédiate d’un tel traumatisme est appréciée grâce à l’échelle de Glasgow (<a href="https://www.academie-medecine.fr/le-dictionnaire/index.php?q=%C3%A9chelle%20du%20coma%20de%20Glasgow">Glasgow Coma Score</a>). <a href="https://www.sfmu.org/calculateurs/glasgow.htm">Cet outil</a> d’évaluation du niveau de conscience analyse trois aspects principaux : la réponse verbale, la réponse motrice et l’ouverture des yeux.</p>
<p>Le score total obtenu via l’échelle de Glasgow varie de 3 à 15. Un traumatisme crânien est considéré comme « grave » si le score est de 8 ou moins, « modéré » s’il est entre 9 et 12, et « léger » s’il se situe entre 13 et 15. La mortalité globale est de 20 à 80 % pour les traumatismes graves, de 10 à 15 % pour les modérés et inférieure à 1 % pour les traumatismes légers.</p>
<p><a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/15083875/">Selon l’Organisation mondiale de la Santé</a>, un traumatisme crânien léger est défini par un score de Glasgow de 13 à 15-30 minutes après la blessure, associé à une ou plusieurs des manifestations suivantes : confusion ou désorientation ; perte de conscience pendant 30 minutes ou moins ; amnésie post-traumatique pendant moins de 24 heures (ou autres anomalies neurologiques transitoires).</p>
<p>Toutefois, tous les spécialistes ne sont pas d’accord avec l’inclusion, dans la catégorie des traumatismes crâniens légers, des traumatismes crâniens avec un score de Glasgow de 13. Ils considèrent en effet que cette entité a une gravité particulière en matière de répercussions post-traumatisme, en regard des scores de 14 ou 15.</p>
<p>En outre, certains auteurs identifient une autre entité clinique parmi les traumatismes légers, la <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23670105/">commotion cérébrale (« concussion » en anglais)</a>. Cette dernière est définie comme une altération, transitoire (quelques secondes à minutes) et réversible, du fonctionnement cérébral (par exemple, perte de connaissance ou de mémoire, confusion) à la suite d’un choc sur la tête. Mais cette individualisation fait débat.</p>
<p>Une autre « forme » de traumatismes crâniens légers est même parfois nommée « subconcussions » : il s’agit de « simples » chocs à la tête, sans signe fonctionnel au moment du traumatisme crânien. Ces deux entités sont surtout décrites dans la population jeune et dans le domaine sportif, et certaines fédérations sportives ont mis en place des <a href="https://media.fff.fr/uploads/document/7cb3148f655bb3b5c0be576eff525f89.pdf">protocoles de dépistage</a> de ces états.</p>
<iframe src="https://www.westory.fr/dupuis/lire-en-ligne/gaston/22/le-retour-de-lagaffe?token=MvFLspwA3RTzJhMedRcvud6ugLsi9A2L" width="100%" height="600" frameborder="0" scrolling="no" allowfullscreen=""></iframe>
<p><em>Le nouvel album de Gaston, intitulé <a href="https://www.dupuis.com/gaston/bd/gaston-tome-22-le-retour-de-lagaffe/120853">« Le retour de Lagaffe »</a>, aux éditions Dupuis</em></p>
<p>Mais traumatisme crânien « léger » ne signifie pas forcément sans gravité à long terme. En effet, ce type de traumatismes (commotion, voir commotion sans signe associé) <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7799370/">pourraient être associés à l’apparition de démences neurologiques à long terme</a>, surtout s’ils sont répétés. À ce titre, on pourrait s’inquiéter pour Prunelle, Fantasio ou encore M. De Mesmaeker qui, tout au long des aventures de Gaston, subissent des traumatismes crâniens légers, mais souvent réitérés…</p>
<p>Au-delà du score de Glasgow, la gravité initiale du traumatisme crânien est aussi évaluée en fonction de la cause et du mécanisme du traumatisme, de la durée de la perte de connaissance, de la prise de substance (alcool, drogue…) ou de médicaments (notamment anticoagulants), et sur la présence de signes cliniques initiaux de souffrance neurologique (notamment par l’examen des pupilles).</p>
<p>L’âge de la personne joue aussi un rôle dans l’évaluation de la gravité : le risque d’hospitalisation et de décès après un traumatisme crânien est ainsi plus élevé chez les personnes âgées de plus de 65 ans, et augmente avec l’âge. Enfin, quelle que soit la tranche d’âge, le risque de survenue de traumatisme crânien est plus important chez les hommes : dans certaines cohortes, on compte jusqu’à plus de 70 % d’hommes ! Chez Gaston, c’est 100 % !</p>
<h2>Quels symptômes ?</h2>
<p>L’altération du fonctionnement cérébral qui résulte du choc se traduit par des signes cliniques tels que perte de connaissance ou baisse de l’état de conscience, perte de mémoire pour des faits pré ou post-traumatisme, déficits neurologiques (déficit moteur…), ou toutes altérations de l’état mental (confusion, désorientation, etc.). En raison de ces altérations, certains préfèrent parler de traumatisme cranio-encéphalique plutôt que de traumatisme crânien (le crâne n’étant pas seul touché…).</p>
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<img alt="Détail d’une fresque murale inspirée par la bande dessinée Gaston Lagaffe, à Bruxelles" src="https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/571406/original/file-20240125-23-9dsnim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Détail d’une fresque murale inspirée par la bande dessinée Gaston Lagaffe, à Bruxelles.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Comic_wall_Gaston_Laggaffe,_Andr%C3%A9_Franquin._Brussels.jpg">Oreopoulos G. et Vandegeerde D. Anné, Ferran Cornellà/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>S’il n’est pas toujours simple d’estimer la gravité des traumatismes subis par Gaston et ses proches, on peut pour cela s’aider des idéogrammes qui entourent les personnages, comme une spirale évoquant le vertige ou autres étoiles pour évoquer la confusion.</p>
<p>Un examen attentif indique que 21 traumatismes ont entraîné une atteinte du nerf hypoglosse (comme montré par une langue pendante, gag 877), 21 ont entraîné des yeux au beurre noir pouvant évoquer une fracture de la base du crâne, et 39 hématomes du crâne, dont certains très impressionnants, comme celui en forme de bonnet phrygien du gag 840. On ne retrouve en revanche aucune plaie ouverte du crâne ou embarrure (perforation de la boîte crânienne).</p>
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<img alt="Détail d’une fresque murale inspirée par la bande dessinée Gaston Lagaffe, à Bruxelles" src="https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/571403/original/file-20240125-25-uuw03m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Même légers, les traumatismes crâniens ne sont pas sans conséquence…</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Comic_wall_Gaston_Laggaffe_by_Andr%C3%A9_Franquin._Brussels.jpg">Oreopoulos G. et Vandegeerde D. Anné, Ferran Cornellà/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Pour les traumatismes dont nous pouvons juger de la gravité, 131 sont légers, 10 modérés, et aucun n’est considéré comme grave. Pour juger du risque de lésions intracrâniennes, on peut, comme le font les équipes médicales, utiliser la classification de Master.</p>
<p>Cette ancienne classification (mais toujours opérante) permet de répartir les patients en trois groupes de gravité et de potentiel évolutif différents : risque faible, modéré, et élevé correspondant respectivement aux groupes 1, 2 et 3. Les patients du groupe 1 sont autorisés à rentrer au domicile avec des consignes de surveillance. Les groupes 2 et 3 nécessitent une imagerie cérébrale et une prise en charge hospitalière adéquate.</p>
<p>Selon la classification de Master, les traumatismes subis ou causés par Gaston Lagaffe se répartissent comme suit : 82 traumatismes du groupe 1, 33 du groupe 2 et 26 du groupe 3. On note au moins 46 pertes de connaissance initiale et 31 confusions posttraumatisme. Enfin, au moins 8 situations de traumatismes conduisent à une hospitalisation souvent dans le cadre d’un polytraumatisme. </p>
<p>Il faut noter que les traumatismes sont parfois soignés dans Gaston Lagaffe par la mise de bandage autour de la tête (au moins 11 fois), ce qui n’est pas une pratique habituelle…</p>
<p>Aucune de ces situations dans Gaston n’entraîne de coma ni de décès. Mais qu’en est-il des séquelles ?</p>
<h2>Quelles séquelles pour les traumatisés crâniens ?</h2>
<p>Chaque année en France, environ 150 000 personnes sont victimes de traumatismes crâniens nécessitant un passage aux urgences. Entre <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/docs/epidemiologie-des-traumatismes-craniens-en-france-et-dans-les-pays-occidentaux-synthese-bibliographique-avril-2016">20 et 40 % de ces victimes présentent des signes neurologiques fonctionnels</a> ou gardent des séquelles.</p>
<p>Les conséquences à long terme des traumatismes que Gaston subit ou fait subir ne sont pas connues : impossible en effet de les qualifier étant donné que la temporalité du gag ne dure qu’un instant…</p>
<p>Quoi qu’il en soit, au fil des gags, il n’est pas noté d’apparition de troubles cognitifs ou du comportement tout au long des gags chez les personnages de Gaston. Tout au plus l’agent Longtarin développe-t-il une anxiété, voire une névrose vis-à-vis des parcmètres, et Mr Demesmaeker devient-il irritable, colérique lorsque le mot « contrat » est prononcé…</p>
<p>Dans la réalité, en revanche, les conséquences neurologiques post-traumatisme crânien peuvent être importantes, entraînant diverses déficiences neurologiques à long terme. Environ 60 % des victimes de traumatismes crâniens modérés à grave présentent des troubles cognitifs et comportementaux. Parmi les séquelles observées, qui varient en fonction de l’âge de survenue de l’accident, figurent les déficits moteurs, les déficiences sensorielles, les déficiences cognitives et comportementales.</p>
<p>Les troubles cognitifs concernent l’attention, la mémoire, la vitesse de traitement de l’information, les fonctions exécutives et l’anosognosie (trouble qui fait qu’un patient atteint d’une maladie ou porteur d’un handicap ne semble pas avoir conscience de sa condition), souvent accompagnés d’une fatigue fréquente et importante : <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0168605406001346">43 à 73 % des patients ayant subi un traumatisme crânien (même léger) se plaignent de fatigue</a>, un symptôme qui passe même au premier plan pour 7 % d’entre eux.</p>
<p>Ces séquelles cognitives et comportementales constituent ce que l’on appelle communément un « handicap invisible ». Un handicap, notamment du point de vue de la fatigue chronique, dont pourrait peut-être souffrir Gaston, au vu du nombre de traumatismes qu’il a subi au cours de ses 67 ans de carrière !</p>
<hr>
<p><strong>Pour aller plus loin :</strong></p>
<p><em>– En matière de surveillance des traumatismes crâniens légers, l’association France Traumatisme propose des <a href="https://www.france-traumatisme-cranien.fr/fr/traumatisme-cranien-leger/outils-information-prevention">fiches à destination des victimes et des médecins</a> (pour l’anecdote, elle sont dessinées par Philippe Geluck, le père d’un autre célèbre personnage de bande dessinée, le Chat).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216131/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mickaël Dinomais ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Gaston Lagaffe a fait son grand retour dans les locaux de Dupuis en novembre 2023. Son crâne et ceux de ses collègues vont à nouveau faire les frais de sa légendaire maladresse. Avec quelles conséquences ?Mickaël Dinomais, Professeur de médecine en Médecine Physique et Réadaptation, Université d'AngersLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2200832024-01-22T15:39:07Z2024-01-22T15:39:07ZChats, mouches, humains : comment la vision a évolué en de multiples facettes<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/570563/original/file-20240122-17-qye3iz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C0%2C5973%2C3988&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La variété des modes de vision dans le règne animal est incroyable. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/photo-en-gros-plan-dune-personne-t809JJ6r9KA">Marina Vitale/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Grâce à nos yeux, l’organe sensible de la vision, nous pouvons aisément et instantanément explorer le monde visible qui nous entoure. C’est littéralement incroyable : la vision opère sans effort malgré la complexité des processus qui sont mis en œuvre. Mais en fait, comment fonctionnent nos yeux ? Quelles leçons pouvons-nous tirer de leur diversité dans le règne animal ? Est-il possible de remonter aux origines de leur évolution pour comprendre comment les yeux ont émergé au cours de l’évolution du vivant ?</p>
<h2>L’œil humain : un chef-d’œuvre de la nature</h2>
<p>L’œil humain suscite un émerveillement immédiat quand on considère son fonctionnement ingénieux. Vu de l’extérieur et de face, l’œil dévoile le globe oculaire, protégé par les paupières, et en son centre se trouve la pupille, autour de laquelle l’iris coloré peut se dilater ou se contracter selon des facteurs comme la luminosité ambiante ou notre attention. Une coupe anatomique transversale permet de suivre le parcours de la lumière : celle-ci atteint d’abord une surface bombée, la cornée, puis le cristallin, une lentille qui concentre les rayons lumineux sur le fond de l’œil, sur lequel réside le composant sensible de l’œil, la rétine.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/568221/original/file-20240108-17-78s0cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/568221/original/file-20240108-17-78s0cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568221/original/file-20240108-17-78s0cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=148&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568221/original/file-20240108-17-78s0cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=148&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568221/original/file-20240108-17-78s0cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=148&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568221/original/file-20240108-17-78s0cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=187&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568221/original/file-20240108-17-78s0cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=187&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568221/original/file-20240108-17-78s0cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=187&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Anatomie de l’œil humain. La vue de face montre la partie antérieure du globe oculaire, avec d’avant en arrière les paupières qui protègent et lubrifient la surface oculaire, la sclère (partie blanche) et la cornée (partie transparente), puis l’iris (partie colorée) dont la contraction permet de modifier la taille de la pupille (partie noire). La vue en coupe permet d’illustrer le passage de la lumière à travers la cornée et sa focalisation sur la rétine grâce au cristallin. Cette surface contient des neurones sensibles à la lumière ainsi que plusieurs couches de traitement qui permettent de transmettre cette information au cerveau par l’intermédiaire du nerf optique sous forme d’une activité neurale.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Source</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>La rétine est un concentré de technologie. D’abord, il s’y trouve environ 100 millions de cellules sensibles, les photorécepteurs, qui transforment l’énergie lumineuse portée par les photons en réactions électrochimiques. Ces réactions génèrent une activité neuronale qui traverse différentes couches de traitement pour converger vers quelque 1,5 million de neurones de sortie, dites cellules ganglionnaires. Ces sorties s’unissent enfin pour former le nerf optique, reliant ainsi chaque rétine au reste du cerveau. De fait, la rétine est la seule portion du cerveau que nous pouvons directement observer !</p>
<p>Mais nos yeux ne se résument pas simplement à ça. Une complexité incroyable réside autour des yeux pour permettre de verser une larme ou d’accomplir un clignement. Notamment, grâce à la forme sphérique du globe oculaire, celui-ci peut réaliser des mouvements variés, soit rapides et saccadiques, soit lents et continus. Couplé au fait que les photorécepteurs sont particulièrement concentrés autour de l’axe de l’œil, notre regard permet alors de diriger cet axe vers des points d’intérêt, ou de stabiliser l’image d’un objet en mouvement. Cette capacité de bouger les yeux décuple ainsi les capacités de notre vision !</p>
<p>En élargissant le champ de notre curiosité au-delà de l’espèce humaine, nous réalisons la variété observée dans le règne animal, démontrant que les animaux exploitent des mécanismes tout aussi ingénieux.</p>
<h2>La pupille, prunelle de nos yeux</h2>
<p>Commençons notre exploration par la partie la plus apparente : la pupille. Son rôle est de moduler le passage de la lumière en faisant varier la taille de son ouverture. Intéressons-nous d’abord à la pupille du chat domestique : si dans l’obscurité sa forme est parfaitement ronde, elle se contracte graduellement quand la luminosité augmente pour former cette fente caractéristique en forme de biseau vertical. Les humains présentent un mécanisme de contraction similaire, mais il est uniforme dans toutes les directions, maintenant ainsi une forme ronde.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/569374/original/file-20240115-29-e34bgr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/569374/original/file-20240115-29-e34bgr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/569374/original/file-20240115-29-e34bgr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=148&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/569374/original/file-20240115-29-e34bgr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=148&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/569374/original/file-20240115-29-e34bgr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=148&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/569374/original/file-20240115-29-e34bgr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=187&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/569374/original/file-20240115-29-e34bgr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=187&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/569374/original/file-20240115-29-e34bgr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=187&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Pupilles chez différentes espèces : Humain, chat, chèvre, seiche. La pupille peut se contracter par l’action des muscles de l’iris et moduler la quantité de lumière. Contractée, sa forme peut être ronde (humain), en forme de fente verticale (chat) ou horizontale (chèvre). Contractée, la pupille de la seiche montre une forme caractéristique en « w ».</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>De manière plus étonnante, les pupilles des moutons ou chèvres se contractent selon un axe parallèle à l’horizon qui est stabilisé quand ces animaux bougent leur tête pour brouter. Ces espèces sont des proies, et comme cette forme leur permet d’étendre leur champ de vision, cette adaptation améliore leurs chances de survie. En revanche, chez les chats la forme de fente verticale favorise la perception de la profondeur des objets proches. En effet, la subtile différence entre les images captées par chaque œil leur permet de percevoir la profondeur et une acuité supérieure améliore la précision de cette estimation. Cet avantage évolutif s’avère particulièrement utile pour ces prédateurs lors d’une attaque à l’affût.</p>
<p>D’autres animaux présentent des pupilles aux formes encore plus remarquables. Un exemple est la seiche, dont la pupille, une fois contractée, arbore une forme ondulée ressemblant à la lettre manuscrite « w ». Cette pupille unique dans le règne animal a longtemps suscité une énigme. Il s’avère d’autre part que ces animaux modifient la couleur de leur peau pour communiquer ou se camoufler. Ce comportement constitue un paradoxe, car un tel comportement nécessite nécessairement la perception de la couleur ou de la texture de l’objet à imiter, alors qu’il a été montré que cette espèce ne possède <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.1524578113">pas de photorécepteurs sensibles à différentes couleurs</a>. <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.1524578113">Une hypothèse fascinante</a> a émergé qui relie ces deux mystères. Elle suggère que la forme de la pupille puisse jouer un rôle dans la perception des couleurs. À l’instar d’un arc-en-ciel décomposant les couleurs en bandes distinctes, ce type de système optique réfléchit les différentes couleurs suivant des angles légèrement distincts. La pupille singulière de la seiche pourrait ainsi produire de subtiles différences pour chaque couleur, permettant au cerveau d’extraire les informations utiles pour les discerner, et ceci sans nécessiter de photorécepteurs spécifiques. Cette hypothèse illustre l’ingéniosité des stratégies qui peuvent émerger par le biais de la sélection naturelle, où des millions de générations et des milliards d’individus ont favorisé ces traits pour la survie de l’espèce.</p>
<h2>D’autres facettes des yeux : La vision panoramique des mouches</h2>
<p>Les yeux des humains, des chats et des moutons présentent une grande variabilité dans leurs formes, mais partagent également de nombreux traits communs. Il semble donc qu’ils aient évolué selon des trajectoires distinctes et indépendantes, tout en ayant probablement un ancêtre commun.</p>
<p>Mais si l’on remonte encore plus loin dans les branches de « l’arbre du vivant », on découvre une autre « branche » radicalement différente dans laquelle les yeux sont composés de multiples éléments oculaires allongés et juxtaposés.</p>
<p>L’exemple le plus frappant de cette configuration est celui de la mouche. Les yeux d’une mouche commune comportent environ dix mille facettes organisées suivant une grille hexagonale, chacune des facettes comprenant une lentille et une poignée de photorécepteurs. Cette structure permet à la mouche d’avoir un champ de vision panoramique et lui permet d’exécuter des manœuvres impressionnantes, avec des accélérations dignes des meilleurs avions de chasse. Plus surprenant encore, ce système pèse moins d’un gramme et consomme très peu d’énergie. Comprendre ce mécanisme pourrait être extrêmement précieux pour guider la conception de futurs robots volants.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1458217977036394497"}"></div></p>
<p>En remontant encore plus dans l’arbre de l’évolution, on peut identifier une forme encore plus élémentaire chez certains micro-organismes dotés <a href="https://doi.org/10.1098/rstb.2009.0072">d’un mécanisme phototactique</a>, c’est-à-dire un mouvement guidé par la lumière. Ce mécanisme repose sur une association simple entre un capteur photosensible dirigé selon l’axe principal de l’organisme et des cils agissant comme des moteurs pour déplacer celui-ci. Selon que l’organisme cherche à se diriger vers une source de lumière (potentiellement une source de nourriture) ou à l’éviter, un lien direct entre les cellules sensibles et motrices permet de mettre en place ce comportement fondamental d’orientation. Ce comportement est notamment observé dans des algues utilisant la photosynthèse pour accumuler de l’énergie, l’attraction vers la lumière leur permettant d’optimiser l’efficacité de cette production.</p>
<p><a href="https://global.oup.com/ukhe/product/eyes-to-see-9780198747710">Des études récentes</a> convergent sur le fait que les yeux ont été « inventés » à plusieurs reprises, souvent avec des formes étonnantes. Considérons par exemple le système visuel unique de la <a href="https://theconversation.com/cette-coquille-saint-jacques-vous-regarde-167727">coquille Saint-Jacques</a> et ses nombreux yeux indépendants d’un bleu iridescent (plus de 200), permettant à ce mollusque d’explorer son environnement lumineux immédiat. Ainsi, certaines morphologies sont si distinctes qu’elles semblent ne pas partager d’ancêtre commun. Cette hypothèse semble difficile à accepter, car nous avons tendance à placer l’espèce humaine à une place unique au sommet de la hiérarchie du vivant. Cependant, les yeux évoluent dans des niches écologiques spécifiques, et à la lumière des pressions exercées par la sélection naturelle, il n’y a pas de nécessité à ce qu’il existe un ancêtre commun pour tous les types de yeux dans le règne vivant. Ces « inventions » ne sont que les reflets des nombreuses facettes des processus émergeant dans l’évolution des espèces.</p>
<p>Les différentes anatomies oculaires révèlent aussi que chaque système visuel est adapté à un ensemble bien spécifique de comportements et d’environnements. Bien que certaines de ces « inventions » puissent sembler aussi complexes que les machines créées par les mains d’un horloger, en mettant en lumière la diversité des solutions émergeant de façon spontanée dans les processus évolutifs du vivant, nous pouvons en conclure que les yeux ont plutôt évolué indépendamment à plusieurs reprises sans avoir besoin de recourir à l’existence d’un dessein intelligent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220083/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laurent Perrinet a reçu des financements de l'Agence nationale de la recherche (ANR) à travers le projet “AgileNeuRobot” N° ANR-20-CE23-0021. Ce travail a bénéficié d’une aide du gouvernement français au titre de France 2030, dans le cadre de l’Initiative d’Excellence d’Aix-Marseille Université – A*MIDEX, projet numero AMX-21-RID-025, "Polychronies".</span></em></p>Nos yeux n’ont pas besoin de mode d’emploi pour fonctionner. Mais quels processus sont à l’œuvre ? Et que pouvons-nous apprendre des yeux d’autres espèces vivantes ?Laurent Perrinet, Chercheur CNRS en Neurosciences computationnelles, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2200042024-01-15T15:22:20Z2024-01-15T15:22:20ZLa pilule contraceptive a aussi un effet sur le cerveau et la régulation des émotions<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/567188/original/file-20231221-19-oxth15.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C0%2C988%2C667&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Comme les hormones naturelles, dites endogènes, les hormones artificielles contenues dans la pilule, dites exogènes, peuvent accéder au cerveau.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Les contraceptifs oraux, aussi appelés pilules contraceptives, sont <a href="https://doi.org/10.18356/1bd58a10-en">utilisés par plus de 150 millions de femmes à travers le monde</a>. Environ un tiers des adolescentes en <a href="https://www150.statcan.gc.ca/n1/en/pub/82-003-x/2015010/article/14222-eng.pdf">Amérique du Nord</a> et en <a href="https://doi.org/10.1001/jamapsychiatry.2016.2387">Europe</a> les utilisent, ce qui en fait le médicament le plus prescrit aux adolescentes.</p>
<p>Il est bien connu que les contraceptifs oraux ont le pouvoir de modifier le cycle menstruel des femmes. Mais ce qu’on sait peut-être moins, c’est qu’ils ont aussi accès au cerveau, notamment dans les régions importantes pour la régulation des émotions.</p>
<p>En tant qu’étudiante au doctorat et professeure en psychologie à l’UQAM, nous nous sommes intéressées à l’influence des contraceptifs oraux sur les régions cérébrales impliquées dans les processus émotionnels. Nous avons publié nos <a href="https://doi.org/10.3389/fendo.2023.1228504">résultats dans le journal scientifique <em>Frontiers in Endocrinology</em></a>.</p>
<h2>La pilule, comment ça fonctionne ?</h2>
<p>Il existe plusieurs méthodes de contraception hormonale, mais le type le plus courant en Amérique du Nord est la pilule contraceptive, plus spécifiquement les <a href="https://doi.org/10.1016/j.yfrne.2022.101040">contraceptifs oraux combinés</a> (COC). Ils sont constitués de deux hormones artificielles simulant un estrogène (généralement l’éthinyl estradiol) et la progestérone.</p>
<p>Comme les hormones naturelles, dites endogènes, les hormones artificielles contenues dans la pilule, dites exogènes, <a href="https://doi.org/10.1016/j.yfrne.2022.101040">peuvent accéder au cerveau</a>. Elles se lient à des récepteurs dans différentes régions et signalent au cerveau de diminuer la production d’hormones sexuelles endogènes. C’est ce phénomène qui mène à l’arrêt de la cyclicité menstruelle, empêchant l’ovulation.</p>
<p>C’est donc dire que tout au long de l’utilisation des COC, le corps et le cerveau des utilisatrices ne sont pas exposés aux fluctuations d’hormones sexuelles typiquement observées chez les femmes naturellement cyclées.</p>
<h2>Les effets cérébraux de la pilule : les neurosciences à la rescousse !</h2>
<p>Lorsqu’elles commencent la prise de COC, les adolescentes et les femmes sont informées de divers effets secondaires, principalement physiques (nausées, maux de tête, variations de poids, sensibilité à la poitrine). Pourtant, il n’est généralement pas abordé que les hormones sexuelles accèdent au cerveau, notamment dans les régions importantes pour la régulation des émotions.</p>
<p>Des études ont d’ailleurs associé l’utilisation de COC à de <a href="https://doi.org/10.1016/j.psyneuen.2018.02.019">moins bonnes performances de régulation émotionnelle</a> et à un <a href="https://doi.org/10.1001/jamapsychiatry.2016.2387">risque plus élevé de développer des psychopathologies</a>.</p>
<p>De plus, les femmes sont plus susceptibles que les hommes de souffrir de <a href="https://doi.org/10.1016/j.jpsychires.2011.03.006">troubles liés à l’anxiété et au stress chronique</a>. L’utilisation des COC étant très répandue, il importe de mieux comprendre leurs effets sur l’anatomie des régions du cerveau qui sous-tendent la régulation émotionnelle.</p>
<p>Nous avons ainsi conduit une étude ayant pour objectif d’examiner les effets des COC sur l’anatomie des régions cérébrales impliquées dans les processus émotionnels. Nous nous sommes intéressées aux effets liés à leur utilisation actuelle, mais aussi aux effets possiblement durables, à savoir si les COC pouvaient affecter l’anatomie du cerveau – même après avoir cessé leur utilisation.</p>
<p>Pour ce faire, nous avons recruté quatre profils d’individus en santé, soit des femmes qui utilisent actuellement des COC, des femmes qui ont utilisé des COC dans le passé, des femmes qui n’ont jamais utilisé quelconque méthode de contraception hormonale et des hommes.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/567191/original/file-20231221-24-r2t5pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="imagerie résonance magnétique" src="https://images.theconversation.com/files/567191/original/file-20231221-24-r2t5pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/567191/original/file-20231221-24-r2t5pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/567191/original/file-20231221-24-r2t5pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/567191/original/file-20231221-24-r2t5pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/567191/original/file-20231221-24-r2t5pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/567191/original/file-20231221-24-r2t5pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/567191/original/file-20231221-24-r2t5pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">L’imagerie par résonance magnétique (IRM) permet de faire l’analyse de la morphologie de certaines régions du cerveau.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>À l’aide de l’imagerie cérébrale, nous avons trouvé que seules les femmes qui utilisent actuellement des COC présentaient un cortex préfrontal ventromédian légèrement plus mince que les hommes. Cette partie du cerveau est reconnue comme étant essentielle à la régulation des émotions comme la peur. La littérature scientifique montre que <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.0502441102">plus cette région est épaisse, meilleure est la régulation émotionnelle</a>.</p>
<p>De ce fait, les COC pourraient altérer la régulation des émotions chez les femmes. Bien que nous n’ayons pas testé directement le lien entre la morphologie cérébrale et la santé mentale, notre équipe se penche actuellement sur d’autres aspects du cerveau et de la santé mentale, ce qui permettra de mieux comprendre les découvertes anatomiques actuelles.</p>
<h2>Un effet actuel, mais pas durable : une histoire de dose</h2>
<p>Nous avons tenté de mieux comprendre ce qui pourrait expliquer l’effet de l’utilisation actuelle des COC sur cette région du cerveau. Nous avons découvert que cela était associé à la dose d’éthinyl estradiol. En effet, parmi les utilisatrices actuelles de COC, seules celles qui utilisaient un COC à faible dose (10-25 microgrammes), mais pas à dose plus élevée (30-35 microgrammes), étaient associée à un cortex préfrontal ventromédian plus mince.</p>
<p>Cela peut sembler surprenant : une plus faible dose était liée à un effet cérébral…</p>
<p>Sachant que tous les COC réduisent les concentrations d’hormones sexuelles endogènes, nous proposons que les récepteurs à estrogènes de cette région cérébrale pourraient être insuffisamment activés lorsque de faibles niveaux d’estrogène endogène sont combinés à un faible apport en estrogène exogène (éthinyl estradiol).</p>
<p>À l’inverse, des doses plus élevées d’éthinyl estradiol pourraient aider à obtenir une liaison adéquate aux récepteurs à estrogènes dans le cortex préfrontal, simulant ainsi une activité modérée à élevée similaire à celle des femmes ayant un cycle menstruel naturel.</p>
<p>Il est important de noter que cette plus faible épaisseur de matière grise était spécifique à l’utilisation actuelle des COC : les femmes ayant utilisé des COC dans le passé ne présentaient pas d’amincissement comparativement aux hommes. Notre étude soutient donc la réversibilité de l’influence des COC sur l’anatomie cérébrale, notamment sur l’épaisseur du cortex préfrontal ventromédian.</p>
<p>En d’autres termes, l’utilisation de COC pourrait affecter l’anatomie cérébrale, mais de manière réversible.</p>
<h2>Et maintenant ?</h2>
<p>Bien que notre recherche n’ait pas d’orientation clinique directe, elle contribue à faire progresser notre compréhension des effets anatomiques liés à l’utilisation des COC.</p>
<p>Loin de nous l’idée de vouloir que les femmes cessent d’utiliser leur COC : il serait beaucoup trop hâtif et alarmant d’avoir ce genre de discours.</p>
<p>Il importe également de se rappeler que les effets répertoriés dans notre étude semblent réversibles.</p>
<p>Notre objectif est de promouvoir la recherche fondamentale et clinique, mais également d’accroître l’intérêt scientifique en matière de santé de la femme, un domaine encore trop peu étudié.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220004/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Alexandra Brouillard est membre étudiante du Centre de recherche de l'Institut universitaire en santé mentale de Montréal. Elle détient une bourse d'études doctorales des Instituts de recherche en santé du Canada.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Marie-France Marin est chercheure régulière au Centre de recherche de l'Institut universitaire en santé mentale de Montréal, professeure au département de psychologie de l'Université du Québec à Montréal et professeure associée au département de psychiatrie et d'addictologie de l'Université de Montréal. Elle a été soutenue par une bourse salariale du Fonds de recherche du Québec - Santé (2018-2022) et est actuellement titulaire d'une Chaire de recherche du Canada sur la modulation hormonale des fonctions cognitives et émotionnelles (2022-2027). Le projet dont il est question dans l'article est subventionné par les Instituts de recherche en santé du Canada et a reçu l'appui de fonds de projets pilotes du Centre de recherche de l'Institut universitaire en santé mentale de Montréal et du Réseau de bio-imagerie du Québec. </span></em></p>Les contraceptifs oraux modifient le cycle menstruel ; ce qu’on sait peut-être moins, c’est qu’ils accèdent aussi au cerveau, notamment dans les régions importantes pour la régulation des émotions.Alexandra Brouillard, Doctorante en psychologie, Université du Québec à Montréal (UQAM)Marie-France Marin, Professor, Department of Psychology, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2187892024-01-02T19:27:15Z2024-01-02T19:27:15ZChanger son mode de vie peut réduire les risques de démence – mais il faut le faire maintenant<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/562264/original/file-20231125-24-4dpbbp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C704%2C5714%2C3742&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Changer son mode de vie peut être la meilleure façon de retarder l’apparition de la démence ou de ne pas la développer du tout.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Faire 10 000 pas par jour, diminuer sa consommation d’alcool, bien dormir la nuit, avoir une vie sociale active : ces éléments <a href="https://doi.org/10.1016/S0140-6736(20)30367-6">pourraient prévenir jusqu’à 40 % des cas de démence</a>.</p>
<p>Étant donné que la démence est une des <a href="https://doi.org/10.1186%2Fs12889-023-15772-y">maladies les plus redoutées</a>, ne devrions-nous pas simplement inciter les médecins et les gouvernements à promouvoir ces changements de mode de vie au moyen de programmes et d’initiatives politiques ?</p>
<p>La vérité n’est pas aussi simple. Nous savons qu’<a href="https://theconversation.com/got-health-goals-research-based-tips-for-adopting-and-sticking-to-new-healthy-lifestyle-behaviours-173740">il est difficile de changer son mode de vie</a>. Demandez à quiconque a déjà tenté de tenir sa résolution du Nouvel An de s’entraîner trois fois par semaine. C’est encore moins évident si les modifications que nous devons apporter maintenant ne produisent des résultats que dans plusieurs années, voire plusieurs décennies, et que nous ne comprenons pas vraiment pourquoi elles sont efficaces.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/prevention-de-lalzheimer-lexercice-physique-pourrait-reduire-linflammation-du-cerveau-172661">Prévention de l’Alzheimer : l’exercice physique pourrait réduire l’inflammation du cerveau</a>
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<h2>Prendre sa santé en main</h2>
<p>Quiconque a accompagné un proche atteint de démence, confronté aux petites et grandes indignités et au déclin qui finissent par lui faire perdre peu à peu ses souvenirs et la capacité de manger et de communiquer, sait qu’il s’agit d’une maladie dévastatrice.</p>
<p><a href="https://alzheimer.ca/fr/whats-happening/events/nouveaux-medicaments-et-traitements-contre-les-troubles-neurocognitifs-ce">Plusieurs nouveaux médicaments</a> contre l’Alzheimer (une des formes les plus courantes de démence) sont sur le point d’être commercialisés. Toutefois, ils sont encore loin de permettre la guérison et sont pour l’instant uniquement efficaces pour le stade précoce de la maladie.</p>
<p>Apporter des modifications à son mode de vie est actuellement notre meilleur espoir de retarder la démence ou de ne pas la développer du tout. L’acteur <a href="https://www.vanityfair.fr/article/la-nouvelle-vie-de-chris-hemsworth-menace-par-la-maladie-dalzheimer">Chris Hemsworth</a> en est bien conscient. Lui qui a vu son grand-père vivre avec la maladie d’Alzheimer a changé ses habitudes de vie après avoir appris qu’il était porteur de deux copies du gène APOE4. Ce <a href="https://www.reuters.com/business/healthcare-pharmaceuticals/what-is-apoe4-how-does-it-relate-alzheimers-disease-2023-04-21/">gène</a> constitue un facteur de risque pour l’Alzheimer, et le fait d’en posséder deux copies augmente considérablement la probabilité d’en souffrir.</p>
<p>Des recherches ont identifié certains <a href="https://doi.org/10.1016/S0140-6736(20)30367-6">facteurs modifiables</a> qui accroissent le risque de démence :</p>
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<li><p>manque d’activité physique</p></li>
<li><p>consommation excessive d’alcool</p></li>
<li><p>manque de sommeil</p></li>
<li><p>isolement social</p></li>
<li><p>perte auditive</p></li>
<li><p>faible engagement cognitif</p></li>
<li><p>mauvaise alimentation</p></li>
<li><p>hypertension</p></li>
<li><p>obésité</p></li>
<li><p>diabète</p></li>
<li><p>traumatisme crânien</p></li>
<li><p>tabagisme</p></li>
<li><p>dépression</p></li>
<li><p>pollution atmosphérique</p></li>
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<p>Notre connaissance des mécanismes biologiques de ces facteurs de risque est variée, certains étant mieux compris que d’autres, et voici quelques informations qui devraient vous intéresser.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/de-saines-habitudes-de-vie-peuvent-prevenir-jusqua-40-des-cas-de-demence-212150">De saines habitudes de vie peuvent prévenir jusqu’à 40 % des cas de démence</a>
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<h2>Réserve cognitive et neuroplasticité</h2>
<p>La <a href="https://doi.org/10.1016/j.neurobiolaging.2019.03.022">réserve cognitive</a> est la capacité du cerveau à résister aux dommages ou aux maladies neurodégénératives. En cas de perte de tissu ou de fonction dans une partie du cerveau, d’autres cellules cérébrales (neurones) travaillent davantage pour compenser. En théorie, cela signifie que les expériences et les activités vécues tout au long de la vie créent un barrage contre les dommages causés par la maladie et le vieillissement du cerveau.</p>
<p>On appelle <a href="https://doi.org/10.3928/02793695-20100302-01">neuroplasticité</a> l’étonnante capacité du cerveau à s’adapter, à apprendre, à se réorganiser, à créer de nouvelles voies ou à recâbler les voies existantes pour se remettre d’un traumatisme. IL est utile de savoir que la neuroplasticité peut intervenir à tout moment et à tout âge, ce qui signifie que l’apprentissage et les activités doivent se poursuivre la vie durant.</p>
<p>De nombreux facteurs de risque liés à la démence agissent sous doute conjointement, c’est pourquoi il est essentiel de modifier son mode de vie de façon globale. Ainsi, des <a href="https://doi.org/10.1007/s11920-016-0721-2">études ont montré</a> que l’exercice physique et l’engagement cognitif et social stimulent le cerveau et préservent sa plasticité en développant de nouvelles connexions neuronales et en constituant des réserves cognitives.</p>
<p>Une combinaison de facteurs est à l’origine de ce phénomène : augmentation de l’oxygène et du flux sanguin dans le cerveau, stimulation des facteurs de croissance qui maintiennent les neurones en bonne santé et réduction de l’inflammation.</p>
<p>Le contraire est également vrai. Un mauvais sommeil, une mauvaise alimentation, l’isolement social et une dépression non traitée sont liés à une <a href="https://doi.org/10.3928/02793695-20100302-01">diminution de la réserve cognitive</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Deux hommes âgés sur un banc public, dont l’un s’efforce d’entendre l’autre parler" src="https://images.theconversation.com/files/561625/original/file-20231125-21-n964o8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561625/original/file-20231125-21-n964o8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561625/original/file-20231125-21-n964o8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561625/original/file-20231125-21-n964o8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561625/original/file-20231125-21-n964o8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561625/original/file-20231125-21-n964o8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561625/original/file-20231125-21-n964o8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Lorsqu’une personne souffre de perte auditive, il peut lui être difficile de communiquer avec son entourage, ce qui se traduit par une perte d’informations sensorielles. Le cerveau doit travailler plus fort pour compenser cette perte.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Le même raisonnement s’applique à la perte d’audition, un facteur de risque pour la démence dont on a conscience depuis peu. Lorsqu’une personne entend moins bien, il peut lui être difficile d’entretenir des relations sociales, ce qui se traduit par une perte d’informations sensorielles. Le <a href="https://doi.org/10.1097%2FWAD.0000000000000325">cerveau doit travailler davantage</a> pour compenser cette perte, ce qui épuise ses réserves cognitives et le rend moins apte à résister à la démence.</p>
<h2>Stress et inflammation</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="Illustration d’un cerveau dessiné à la main avec des craies multicolores sur un tableau noir" src="https://images.theconversation.com/files/561626/original/file-20231125-17-6hps66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561626/original/file-20231125-17-6hps66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561626/original/file-20231125-17-6hps66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561626/original/file-20231125-17-6hps66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561626/original/file-20231125-17-6hps66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561626/original/file-20231125-17-6hps66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561626/original/file-20231125-17-6hps66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’inflammation chronique ou prolongée perturbe le fonctionnement normal du cerveau et endommage ses cellules.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>L’organisme réagit aux dommages par des réponses au stress et de l’inflammation. Celle-ci constitue une composante importante du système immunitaire et permet de se défendre contre les menaces et de réparer les lésions tissulaires. Si l’inflammation est naturelle et bénéfique à court terme, lorsqu’elle devient chronique ou prolongée, elle perturbe le fonctionnement normal du corps et endommage les cellules du cerveau.</p>
<p>Le <a href="https://doi.org/10.17219/acem/149897%22%22">processus inflammatoire</a> constitue un point commun entre la démence et la dépression non traitée. Une exposition prolongée aux hormones du stress peut entraîner une inflammation chronique. L’hypertension, la sédentarité, le tabagisme et la pollution atmosphérique sont également associés à l’inflammation chronique et au stress, qui peuvent endommager les vaisseaux sanguins et les neurones du cerveau.</p>
<p>Dans un domaine de recherche exploré depuis peu, on observe qu’il existe aussi un lien entre <a href="https://actu.fr/societe/la-solitude-est-un-probleme-de-sante-publique-mondial-alerte-l-oms_60346000.html">l’isolement social</a> et l’<a href="https://doi.org/10.1016/j.yfrne.2023.101061">inflammation</a>. Comme nous l’avons appris lors de la pandémie de ovid-19, le cerveau est câblé pour répondre par l’engagement social afin de créer des liens et du soutien émotionnel, en particulier dans les moments de détresse.</p>
<p>Des sondages montrent que <a href="https://www.thestar.com/opinion/contributors/we-have-a-loneliness-crisis-it-s-time-to-act/article_30e6c996-a9e2-588b-a776-58addc503762.html">plus d’un Canadien sur trois</a> se sent isolé. Le manque de liens sociaux et la solitude peuvent déclencher dans le corps une réponse au stress et des changements neuroendocriniens, et une exposition prolongée à ce processus inflammatoire peut endommager le cerveau.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/dix-facteurs-qui-augmentent-les-risques-de-developper-la-maladie-dalzheimer-143424">Dix facteurs qui augmentent les risques de développer la maladie d’Alzheimer</a>
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<h2>Des voies similaires dans plusieurs maladies</h2>
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<img alt="Trois femmes vêtues de combinaison sport sont en discussion" src="https://images.theconversation.com/files/561627/original/file-20231125-27-f0h7c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561627/original/file-20231125-27-f0h7c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561627/original/file-20231125-27-f0h7c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561627/original/file-20231125-27-f0h7c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561627/original/file-20231125-27-f0h7c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561627/original/file-20231125-27-f0h7c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561627/original/file-20231125-27-f0h7c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Bien qu’à tout âge, il y ait des avantages à rester actif sur les plans physique et social, certaines études montrent que les bénéfices seraient plus importants après 40 ans, au moment où le métabolisme ralentit, où les facteurs de risque augmentent et où la réserve cognitive devient encore plus essentielle pour lutter contre le déclin cognitif.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Bon nombre de ces facteurs de risque et leurs voies biologiques touchent plusieurs maladies chroniques. L’accumulation de preuves issues de <a href="https://doi.org/10.1016/S1474-4422(19)30087-0">décennies de recherche</a> appuie l’idée selon laquelle « ce qui est bon pour le cœur est bon pour la tête ».</p>
<p>Par conséquent, des changements de mode de vie peuvent réduire le risque de démence, mais aussi celui de diabète, d’hypertension et de problèmes cardiaques. Cela met en évidence la nature complexe de la démence tout en offrant une stratégie commune pour répondre aux multiples problèmes de santé qui peuvent survenir avec l’âge.</p>
<h2>Jamais trop tard</h2>
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<img alt="Un homme endormi dans un lit" src="https://images.theconversation.com/files/561628/original/file-20231125-27-dyme8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561628/original/file-20231125-27-dyme8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561628/original/file-20231125-27-dyme8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561628/original/file-20231125-27-dyme8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561628/original/file-20231125-27-dyme8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561628/original/file-20231125-27-dyme8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561628/original/file-20231125-27-dyme8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des facteurs tels que le manque de sommeil, une mauvaise alimentation et un manque d’engagement social et cognitif peuvent accroître les risques de souffrir de démence.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Il n’est jamais vraiment trop tard pour modifier ses habitudes. Le cerveau et le corps humain ont une remarquable capacité d’adaptation et de résilience tout au long de la vie.</p>
<p>Bien qu’à tout âge, il y ait des avantages à rester actif sur les plans physique et social, certaines recherches montrent que les <a href="https://doi.org/10.1016/j.smhs.2019.08.006">bénéfices seraient plus importants</a> après 40 ans, au moment où métabolisme du corps ralentit, où les facteurs de risque augmentent et où la réserve cognitive devient encore plus essentielle pour lutter contre le <a href="https://doi.org/10.1212/WNL.0000000000007003">déclin cognitif</a>.</p>
<p>Si modifier son mode de vie permet de voir ses enfants vivre leur vie d’adulte, de faire chaque jour à pied 20 pâtés de maisons pour se rendre à son café préféré et de demeurer dans son domicile, peut-être cela vaut le coup de faire 10 000 pas par jour, de changer son alimentation et d’entretenir son réseau d’amis. Au pire, on sera en meilleure santé et plus indépendant, avec ou sans démence. Dans le meilleur des cas, on évitera complètement la démence et d’autres maladies graves et on continuera à vivre pleinement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218789/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laura Middleton reçoit des fonds de l'Agence de santé publique du Canada et des Instituts de recherche en santé du Canada.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Saskia Sivananthan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les risques de démence liés au mode de vie sont complexes. Des facteurs tels que le sommeil, l’exercice et l’alimentation interagissent avec la réserve cognitive, la neuroplasticité et l’inflammation.Saskia Sivananthan, Affiliate Professor, Department of Family Medicine, McGill UniversityLaura Middleton, Associate Professor and Schlegel-UW Research Chair in Dementia and Active Living, Department of Kinesiology and Health Sciences, University of WaterlooLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2199172023-12-14T19:10:18Z2023-12-14T19:10:18ZPourquoi notre cerveau est-il devenu aussi énergivore ?<p>C’est l’un des grands paradoxes de l’évolution. L’humain a démontré que le fait d’avoir un <a href="https://theconversation.com/why-do-humans-have-such-large-brains-our-study-suggests-ecology-was-the-driving-force-96873">gros cerveau</a> est la clé de son succès dans l’évolution, et pourtant ce type de cerveau est extrêmement rare chez les autres animaux. La plupart d’entre eux se débrouillent avec de petits cerveaux et ne semblent pas avoir besoin de plus de neurones.</p>
<p>Pourquoi ? La réponse sur laquelle la plupart des biologistes se sont accordés est de dire que les gros cerveaux sont coûteux en termes d’énergie nécessaire à leur fonctionnement. Et, compte tenu du mode de fonctionnement de la sélection naturelle, les avantages <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/9234964/">ne dépasseraient tout simplement pas les coûts</a>.</p>
<p>Mais s’agit-il seulement d’une question de taille ? La façon dont nos cerveaux sont organisés affecte-t-elle leur coût énergétique ? Une nouvelle étude, <a href="http://www.science.org/doi/10.1126/sciadv.adi7632">publiée dans Science Advances</a>, apporte des réponses intéressantes.</p>
<p>Tous nos organes ont des coûts énergétiques de fonctionnement, mais <a href="https://www.jstor.org/stable/2744104">certains sont peu élevés et d’autres très chers</a>. Les os, par exemple,demandent assez peu d’énergie. Bien qu’ils représentent environ 15 % de notre poids, ils n’utilisent que 5 % de notre métabolisme. Les cerveaux sont à l’autre extrémité du spectre, et avec environ 2 % du poids du corps humain typique, leur fonctionnement utilise environ 20 % de notre consommation d’énergie totale. Et ce, sans aucune réflexion particulièrement intense – cela se produit même lorsque nous dormons.</p>
<p>Pour la plupart des animaux, les avantages qu’apporterait un cerveau si énergivore n’en vaudraient tout simplement pas la peine. Mais pour une raison encore inconnue – peut-être la plus grande énigme de l’évolution humaine – les humains ont trouvé des moyens de surmonter les coûts d’un cerveau plus gros et d’en récolter les bénéfices.</p>
<p>Il est certain que les humains doivent supporter les coûts les plus élevés de leur cerveau, mais ces derniers sont-ils différents en raison de la nature particulière de notre cognition ? Le fait de penser, de parler, d’être conscient de soi ou de faire des additions coûte-t-il plus cher que les activités quotidiennes typiques des animaux ?</p>
<p>Il n’est pas facile de répondre à cette question, mais l’équipe à l’origine de cette nouvelle étude, dirigée par Valentin Riedl de l’université technique de Munich, en Allemagne, a relevé le défi.</p>
<p>Les auteurs disposaient d’un certain nombre d’éléments connus pour commencer. La structure de base des neurones est à peu près la même dans tout le cerveau et chez toutes les espèces. La densité neuronale est également la même chez l’homme et les autres primates, de sorte qu’il est peu probable que les neurones soient le moteur de l’intelligence. Si c’était le cas, certains animaux dotés d’un gros cerveau, comme les orques et les éléphants, seraient probablement plus « intelligents » que les humains.</p>
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<img alt="Elephant and woman in village Surin Thailand." src="https://images.theconversation.com/files/565485/original/file-20231213-19-jr94u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/565485/original/file-20231213-19-jr94u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/565485/original/file-20231213-19-jr94u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/565485/original/file-20231213-19-jr94u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/565485/original/file-20231213-19-jr94u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/565485/original/file-20231213-19-jr94u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/565485/original/file-20231213-19-jr94u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les éléphants ont de plus gros cerveaux que les humains.</span>
<span class="attribution"><span class="source">venusvi/Shutterstock</span></span>
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<p>Ils savaient également qu’au cours de l’évolution humaine, le néocortex – la plus grande partie de la couche externe du cerveau, connue sous le nom de cortex cérébral – s’est développé plus rapidement que les autres parties. Cette région, qui comprend le cortex préfrontal, est responsable des tâches impliquant l’attention, la pensée, la planification, la perception et la mémoire épisodique, toutes nécessaires aux fonctions cognitives supérieures.</p>
<p>Ces deux observations ont amené les chercheurs à se demander si les coûts énergétiques de fonctionnement varient d’une région à l’autre du cerveau.</p>
<p>L’équipe a scanné le cerveau de 30 personnes à l’aide d’une technique permettant de mesurer simultanément le métabolisme du glucose (une mesure de la consommation d’énergie) et la quantité d’échanges entre neurones dans le cortex. Ils ont ensuite pu examiner la corrélation entre ces deux éléments et voir si les différentes parties du cerveau utilisaient des niveaux d’énergie différents.</p>
<h2>Des résultats surprenants</h2>
<p>Les neurobiologistes ne manqueront pas d’analyser et d’explorer les moindres détails de ces résultats, mais d’un point de vue évolutif, ils donnent déjà matière à réflexion. Les chercheurs ont constaté que la différence de consommation d’énergie entre les différentes zones du cerveau est importante. Toutes les parties du cerveau ne sont pas égales, énergétiquement parlant.</p>
<p>Les parties du cerveau humain qui se sont le plus développées ont des coûts plus élevés que prévu. Le néocortex demande environ 67 % d’énergie en plus que les réseaux qui contrôlent nos mouvements.</p>
<p>Cela signifie qu’au cours de l’évolution humaine, non seulement les coûts métaboliques de nos cerveaux ont augmenté au fur et à mesure qu’ils grossissaient, mais qu’ils l’ont fait à un rythme accéléré, le néocortex se développant plus rapidement que le reste du cerveau.</p>
<p>Pourquoi en est-il ainsi ? Un neurone est un neurone, après tout. Le néocortex est directement lié aux fonctions cognitives supérieures.</p>
<p>Les signaux envoyés à travers cette zone sont médiés par des substances chimiques cérébrales telles que la sérotonine, la dopamine et la noradrénaline (neuromodulateurs), qui créent des circuits dans le cerveau pour aider à maintenir un niveau général d’excitation (au sens neurologique du terme, c’est-à-dire d’éveil). Ces circuits, qui régulent certaines zones du cerveau plus que d’autres, contrôlent et modifient la capacité des neurones à communiquer entre eux.</p>
<p>En d’autres termes, ils maintiennent le cerveau actif pour le stockage de la mémoire et la réflexion – un niveau d’activité cognitive généralement plus élevé. Il n’est peut-être pas surprenant que le niveau d’activité plus élevé impliqué dans notre cognition avancée s’accompagne d’un coût énergétique plus élevé.</p>
<p>En fin de compte, il semble que le cerveau humain ait évolué vers des niveaux de cognition aussi avancés non seulement parce que nous avons de gros cerveaux, ni seulement parce que certaines zones de notre cerveau se sont développées de manière disproportionnée, mais aussi parce que la connectivité s’est améliorée.</p>
<p>De nombreux animaux dotés d’un gros cerveau, comme les éléphants et les orques, sont très intelligents. Mais il semble qu’il soit possible d’avoir un gros cerveau sans développer les « bons » circuits pour une cognition de niveau humain.</p>
<p>Ces résultats nous aident à comprendre pourquoi les gros cerveaux sont si rares. Un cerveau de grande taille peut permettre l’évolution d’une cognition plus complexe. Cependant, il ne s’agit pas simplement d’augmenter la taille des cerveaux et l’énergie au même rythme, mais d’assumer des coûts supplémentaires.</p>
<p>Cela ne répond pas vraiment à la question ultime : comment l’homme est-il parvenu à franchir le plafond de l’énergie cérébrale ? Comme souvent dans l’évolution, la réponse se trouve dans l’écologie, la source ultime d’énergie. La croissance et le maintien d’un cerveau de grande taille – quelles que soient les activités sociales, culturelles, technologiques ou autres auxquelles il est destiné – nécessitent un <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rstb.1991.0111">régime alimentaire fiable et de qualité</a>.</p>
<p>Pour en savoir plus, nous devons explorer le dernier million d’années, la période où le cerveau de nos ancêtres s’est réellement développé, afin d’étudier cette interface entre la dépense énergétique et la cognition.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219917/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le cerveau humain utilise 20 % de l'énergie que nous consommons, un chiffre élevé qui n’existe chez aucune autre espèce.Robert Foley, Emeritus Professor of Human Evolution, University of CambridgeMarta Mirazon Lahr, Professor of Human Evolutionary Biology & Director of the Duckworth Collection, University of CambridgeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2146072023-12-13T20:37:12Z2023-12-13T20:37:12ZLa science des rêves et des cauchemars : que se passe-t-il dans notre cerveau quand nous dormons ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/550970/original/file-20230830-27-ozyppi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=35%2C0%2C5946%2C3979&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il est très difficile d’étudier les rêves parce qu’on ne peut pas observer ce qui se passe quand les gens dorment.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/photo-of-a-woman-sleeping-near-fluffy-clouds-8264248/">Pexel/Ron Lach</a></span></figcaption></figure><p>La nuit dernière, vous avez sans doute dormi <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352721816301292">sept ou huit heures</a>. Vous avez probablement eu une ou deux heures de sommeil profond, surtout si vous êtes jeune ou actif physiquement. En effet, le sommeil <a href="http://apsychoserver.psych.arizona.edu/jjbareprints/psyc501a/readings/Carskadon%20Dement%202011.pdf">se modifie avec l’âge</a>, et <a href="https://www.hindawi.com/journals/apm/2017/1364387/">l’exercice physique</a> affecte l’activité cérébrale. Vous avez également eu environ trois ou quatre heures de sommeil léger.</p>
<p>Le reste du temps, vous étiez vraisemblablement dans la phase de sommeil paradoxal (REM pour <em>rapid eye movement</em>). Bien qu’il ne s’agisse pas du seul moment où le cerveau rêve – c’est possible durant d’autres phases –, c’est celui où il est le plus probable qu’on se souvienne de l’activité cérébrale et qu’on puisse la raconter.</p>
<p>C’est possible parce que des pensées ou des sentiments bizarres nous réveillent ou parce que la dernière heure de sommeil est presque entièrement constituée de <a href="https://www.researchgate.net/profile/Elizaveta-Solomonova/publication/320356182_Dream_Recall_and_Content_in_Different_Stages_of_Sleep_and_Time-of-Night_Effect/links/5a707bdb0f7e9ba2e1cade56/Dream-Recall-and-Content-in-Different-Stages-of-Sleep-and-Time-of-Night-Effect.pdf">sommeil paradoxal</a>. Quand un songe ou une alarme nous réveillent, on sort généralement du sommeil paradoxal et les images d’un rêve peuvent nous habiter encore quelques minutes. On en garde alors le souvenir.</p>
<p>Si le songe est étrange ou intéressant, il se peut qu’on en parle à quelqu’un d’autre, ce qui permet de mieux l’<a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00426-022-01722-7">encoder</a> dans la mémoire.</p>
<p>Les rêves et les cauchemars sont mystérieux, et nous n’avons pas fini d’en apprendre sur eux. Ils font rouler notre cerveau, nettoient les pensées liées aux événements de la journée à l’échelle moléculaire et peuvent nous aider à imaginer ce qui est possible pendant nos heures d’éveil.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/etre-pourchasse-perdre-ses-dents-tomber-ce-que-la-science-dit-des-reves-recurrents-160505">Être pourchassé, perdre ses dents, tomber… Ce que la science dit des rêves récurrents</a>
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<h2>Que savent les scientifiques sur le sommeil paradoxal et les rêves ?</h2>
<p>Il est très difficile d’étudier les rêves parce qu’on ne peut pas observer ce qui se passe quand les gens dorment. L’imagerie cérébrale a révélé que certains <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1087079216300673#sec3">schémas d’activité cérébrale</a> sont associés au rêve (et aux phases du sommeil qui y sont davantage associées). Mais ces essais reposent sur des témoignages personnels sur l’expérience du rêve.</p>
<p>Tout ce à quoi l’on consacre autant de temps permet sans doute d’atteindre plusieurs objectifs.</p>
<p>Au niveau physiologique de base, tous les mammifères rêvent (comme l’indiquent <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1053810021001409">l’activité cérébrale, le comportement pendant le sommeil et des études sur la conscience</a>) – même l’ornithorynque et l’échidné font probablement l’expérience de quelque chose de similaire au rêve (à condition que leur corps soit à la <a href="https://www.wired.com/2014/07/the-creature-feature-10-fun-facts-about-the-echidna/#:%7E:text=It%20was%20long%20thought%20that,re%20at%20the%20right%20temperature.">bonne température</a>). On peut voir une ressemblance entre leur activité cérébrale et leurs phases de sommeil et le <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1053810021001409#b0630">sommeil paradoxal humain</a>.</p>
<p>Ce n’est pas le cas des espèces moins évoluées. Certaines <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2468867319301993#sec0030">méduses</a> – qui n’ont pas de cerveau – font l’expérience de ce que l’on pourrait qualifier de sommeil sur le plan physiologique (selon leur position, leur calme, leur manque de réactivité et leur « réveil » rapide en cas de nécessité), mais sans les éléments physiologiques et comportementaux qui rappellent le sommeil paradoxal.</p>
<p>Chez les êtres humains, on considère que le sommeil paradoxal se produit cycliquement toutes les 90 à 120 minutes au cours de la nuit. Il nous empêche de dormir trop profondément et d’être <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4972941/">vulnérables aux attaques</a>. Certains scientifiques avancent que nous rêvons pour éviter que notre cerveau et notre corps se refroidissent. Notre température centrale est généralement <a href="https://www.thelancet.com/journals/laneur/article/PIIS1474-4422(22)00210-1/fulltext">plus élevée pendant ces phases du sommeil</a>. Si l’on doit réagir à des signaux externes ou à des dangers, il est plus facile de se réveiller <a href="https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.2147/NSS.S188911">au milieu d’un songe</a> qu’à d’autres moments.</p>
<p>Pendant le sommeil paradoxal, le cerveau se met en mode actif pour un certain temps, à la manière d’un périscope qui donne accès à la conscience en nous permettant d’observer ce qui se passe à la surface, pour replonger si tout va bien.</p>
<p>Certaines données indiquent que les « rêves de fièvre » sont beaucoup moins fréquents qu’on ne le pense. En effet, on atteint moins la <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2020.00053/full">phase du sommeil paradoxal</a> quand on est fiévreux, même si les songes qu’on fait alors ont tendance à être <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3830719/">plus sombres et étranges</a>.</p>
<p>Le fait de passer alors moins de temps en sommeil paradoxal pourrait s’expliquer par la difficulté à réguler sa température corporelle pendant cette phase. Pour nous protéger, le cerveau tente de réguler la température corporelle en « sautant » cette phase du sommeil. <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/23744731.2020.1756664">C’est aussi pour cette raison</a> que nous rêvons généralement moins quand il fait chaud.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="bed in pink landscape" src="https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Notre cerveau se nettoie quand il rêve.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/bed-on-colorful-flowers-on-cape-10079452/">Pexels/Mo Eid</a></span>
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</figure>
<h2>Un nettoyage en profondeur du cerveau</h2>
<p>Le sommeil paradoxal est important pour assurer le bon fonctionnement du cerveau, comme l’indiquent des études qui utilisent l’<a href="https://www.cell.com/current-biology/pdf/S0960-9822(17)31329-5.pdf">électroencéphalographie</a> pour mesurer l’activité du cerveau.</p>
<p>De la même manière que le sommeil profond aide le corps à restaurer ses capacités physiques, le sommeil de rêve <a href="https://www.cell.com/current-biology/pdf/S0960-9822(17)31329-5.pdf">« rince »</a> nos circuits neuronaux. À l’échelle moléculaire, les substances chimiques qui étayent la pensée sont déformées par l’activité cognitive de la journée. Le sommeil profond leur permet de retrouver leur forme initiale. Le cerveau est <a href="https://www.science.org/doi/abs/10.1126/science.1241224">« lavé »</a> par du liquide céphalo-rachidien que contrôle le <a href="https://theconversation.com/on-your-back-side-face-down-mice-show-how-we-sleep-may-trigger-or-protect-our-brain-from-diseases-like-als-181954">système glymphatique</a>.</p>
<p>À un autre niveau, le sommeil paradoxal « met de l’ordre » dans nos souvenirs et nos sentiments récents. Pendant <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC534695/">cette phase</a>, notre cerveau consolide les souvenirs procéduraux (la façon d’accomplir une tâche) et les émotions. Les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC534695/">autres phases</a> de sommeil, au cours desquelles nous rêvons moins, sont importantes pour la consolidation des souvenirs épisodiques (les événements).</p>
<p>À mesure que la nuit avance, notre production de cortisol, <a href="https://psycnet.apa.org/record/2005-01907-021">l’hormone du stress</a>, augmente. On pense que la quantité de cortisol peut influencer le type de souvenirs que nous consolidons et peut-être le type de songes que nous faisons. Cela signifie que les rêves de fin de nuit ont tendance à être <a href="https://learnmem.cshlp.org/content/11/6/671.full.pdf">plus fragmentés ou bizarres</a>.</p>
<p>Les différents types de sommeil permettent de <a href="https://www.researchgate.net/profile/Jb-Eichenlaub/publication/313545620_Daily_Life_Experiences_in_Dreams_and_Sleep-Dependent_Memory_Consolidation/links/5c532b0ba6fdccd6b5d76270/Daily-Life-Experiences-in-Dreams-and-Sleep-Dependent-Memory-Consolidation.pdf">consolider</a> l’activité cérébrale utile de la journée et d’éliminer les informations de moindre importance.</p>
<h2>Pensées aléatoires, sentiments réorganisés</h2>
<p>Ce classement et cette élimination des activités de la journée se déroulent pendant que nous dormons. C’est pourquoi nous rêvons souvent de choses qui se sont produites <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0264574">pendant la journée</a>.</p>
<p>Parfois, lorsque les pensées et les sentiments sont réorganisés et jetés à la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3921176/">« poubelle »</a> pendant le sommeil, nous pouvons ressentir de la conscience. Des pensées et des sentiments aléatoires sont mélangés de façon insolite et merveilleuse. Le fait que nous ayons conscience de ce processus peut expliquer l’étrangeté de certains songes. Nos expériences diurnes peuvent aussi engendrer des cauchemars ou des rêves angoissants après un <a href="https://www.sleepfoundation.org/dreams/how-trauma-can-affect-dreams">événement traumatisant</a>.</p>
<p>Certains rêves semblent <a href="https://rai.onlinelibrary.wiley.com/doi/pdfdirect/10.1111/j.1467-9655.2010.01668.x">prédire l’avenir ou sont porteurs d’un symbolisme fort</a>. Dans plusieurs sociétés, les rêves sont considérés comme une fenêtre sur une <a href="https://digitalcommons.ciis.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1050&context=ijts-transpersonalstudies">réalité alternative</a> où l’on peut envisager diverses possibilités.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=447&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=447&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=447&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les souvenirs peuvent être cimentés par les rêves et les cauchemars et les alimenter.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/assorted-photos-on-table-1989747/">Pexels/Suzy Hazelwood</a></span>
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<h2>Les rêves ont-ils un sens ?</h2>
<p>Nous avons une <a href="https://www.nature.com/articles/nrn2716">bonne compréhension</a> des aspects thermorégulateurs, moléculaires et neuronaux des rêves. Mais leurs aspects psychologiques et spirituels restent largement méconnus.</p>
<p>Notre cerveau est peut-être conçu pour essayer de donner un sens aux choses. Les sociétés humaines ont toujours interprété des phénomènes aléatoires – le vol des oiseaux, les feuilles de thé ou les planètes – et cherché leur signification. Presque toutes les sociétés humaines considéraient les rêves comme étant plus qu’un simple fonctionnement neuronal aléatoire.</p>
<p>L’histoire des sciences nous apprend que certains phénomènes que l’on croyait magiques peuvent être compris et maîtrisés par la suite, pour le meilleur et pour le pire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214607/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les rêves font fonctionner notre cerveau. Ils nettoient les pensées des événements de la journée. Ils peuvent même nous aider à imaginer ce qui est possible pendant nos heures de veille.Drew Dawson, Director, Appleton Institute, CQUniversity AustraliaMadeline Sprajcer, Lecturer in Psychology, CQUniversity AustraliaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2190492023-12-06T17:35:02Z2023-12-06T17:35:02ZInterface cerveau-machine : utiliser nos muscles pour faire parler nos neurones<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/563979/original/file-20231206-25-8i4mg0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C572%2C2153%2C1526&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Via une interface, notre cerveau pourrait contrôler un bras robotique.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/deux-mains-tendant-la-main-vers-un-objet-volant-dans-le-ciel-X9Cemmq4YjM">Cash Macanaya/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Un patient paralysé qui remarche en contrôlant un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1474442219303217">exosquelette robotique</a> par la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=sKuSZDZPmT4">force de sa pensée</a>. Ce n’est pas de la science-fiction, c’est ce que l’on appelle une interface cerveau-machine ; c’est-à-dire un système qui établit une connexion entre le cerveau et un système automatisé sans nécessiter le moindre mouvement de la part de l’utilisateur.</p>
<p>Le principe consiste à enregistrer les signaux électriques du cerveau puis à les décoder, c’est-à-dire à les associer à des mouvements. Ainsi, en détectant les intentions de mouvement, ces interfaces permettent à des patients de communiquer ou de contrôler des prothèses robotiques. Cependant, mesurer l’activité électrique du cerveau n’est pas facile. On peut utiliser des électrodes posées à la surface du crâne et ainsi obtenir un électroencéphalogramme (EEG). Seulement ces signaux sont souvent difficiles à décoder. Une alternative consiste à implanter des électrodes directement au contact des aires motrices du cerveau, ce qui nécessite une intervention chirurgicale.</p>
<p>Bien que les bénéfices attendus surpassent les risques encourus par la chirurgie, des solutions complémentaires sont actuellement à l’étude. Et de manière surprenante, ces solutions s’intéressent à un organe bien différent du cerveau : le muscle. Ces approches ont l’avantage d’être non invasives et pourraient avoir des applications dans la compréhension des mécanismes cérébraux impliqués dans la production du mouvement ou de manière plus pratique à permettre le contrôle de prothèse chez des personnes en situation de handicap ou qui ont subi une amputation.</p>
<h2>Et si le muscle remplaçait le cerveau</h2>
<p>Notre cerveau contrôle la plupart de nos mouvements en envoyant à nos muscles des messages nerveux sous forme d’impulsions électriques. Ces messages nerveux transitent notamment <em>via</em> des neurones dits <em>moteurs</em> – ou motoneurones spinaux – qui relient la moelle épinière aux fibres musculaires. Chaque motoneurone est connecté à plusieurs fibres musculaires (jusqu’à plusieurs milliers) et lorsqu’une impulsion électrique se propage le long d’un motoneurone, il conduit nécessairement à la formation d’une impulsion électrique sur chacune des fibres musculaires innervées. Ainsi, en plus de recevoir l’information sur la commande nerveuse du mouvement, le muscle agit comme un amplificateur de cette commande puisque chaque impulsion électrique est démultipliée par le nombre de fibres musculaires sur lesquelles elle se propage.</p>
<p>Depuis bientôt deux décennies, nous sommes capables de décoder l’activité électrique d’un muscle en utilisant une technique appelée électromyographie (EMG) haute densité, qui consiste à placer des dizaines, voire des centaines d’électrodes à la surface de la peau.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/563982/original/file-20231206-19-jsyemj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/563982/original/file-20231206-19-jsyemj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/563982/original/file-20231206-19-jsyemj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=258&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/563982/original/file-20231206-19-jsyemj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=258&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/563982/original/file-20231206-19-jsyemj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=258&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/563982/original/file-20231206-19-jsyemj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=325&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/563982/original/file-20231206-19-jsyemj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=325&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/563982/original/file-20231206-19-jsyemj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=325&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Schéma du principe de l’électromyographie (EMG) haute densité.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Combinés à l’utilisation d’algorithmes d’intelligence artificielle, les signaux recueillis peuvent être décomposés afin d’isoler l’activité de plusieurs motoneurones, fournissant une information sur la commande émise par le cerveau et transitant par la moelle épinière. Ainsi, le motoneurone spinal est le seul neurone du corps humain dont l’activité électrique peut être mesurée de manière non invasive, c’est-à-dire sans franchir la barrière de la peau. De telles informations n’avaient été obtenues jusqu’alors qu’avec des électrodes implantées dans des muscles ou des nerfs.</p>
<p>En utilisant cette approche non invasive, une <a href="https://journals.physiology.org/doi/full/10.1152/jn.00220.2021">étude</a> a récemment démontré qu’il est possible de décoder l’intention de mouvement d’un patient tétraplégique pour lui permettre de contrôler une main virtuelle. Malgré la lésion de la moelle épinière de ce patient qui altère fortement la transmission de l’information du cerveau vers les muscles de la main, ces chercheurs ont été capables de mesurer l’activité résiduelle de quelques motoneurones encore actifs. Bien qu’en nombre bien trop faible pour permettre un mouvement, ces motoneurones véhiculent toujours une commande nerveuse émanant principalement du cerveau, et donc une intention de mouvement. Ainsi, lorsque le patient essayait de fléchir son majeur, l’activité de quelques motoneurones était détectée par des électrodes posées sur son avant-bras, puis utilisée pour piloter une main virtuelle qui reproduisait une flexion du majeur. À terme, il devrait être envisageable de piloter des gants robotiques avec cette approche afin de retrouver en partie la fonction des mains.</p>
<h2>Vers une meilleure compréhension de la production du mouvement</h2>
<p>Au-delà de permettre le développement d’interfaces cerveau-machine innovantes, la capacité à décoder l’activité de motoneurones permet de changer radicalement l’échelle à laquelle nous étudions le mouvement. L’approche classique considère que le mouvement est contrôlé à l’échelle du muscle. Par exemple, lorsque l’on souhaite réaliser une extension de la jambe, le cerveau spécifierait l’activité des muscles produisant cette action, notamment les quatre muscles qui composent le quadriceps (c.-à-d., les muscles situés sur le devant de la cuisse). Cette vision est remise en cause par les résultats d’une <a href="https://physoc.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1113/JP283040">étude</a> de notre équipe, impliquant des chercheurs de l’université Côte d’Azur et des chercheurs de l’Imperial College London.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/563983/original/file-20231206-17-lvxgt0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/563983/original/file-20231206-17-lvxgt0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/563983/original/file-20231206-17-lvxgt0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=266&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/563983/original/file-20231206-17-lvxgt0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=266&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/563983/original/file-20231206-17-lvxgt0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=266&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/563983/original/file-20231206-17-lvxgt0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=335&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/563983/original/file-20231206-17-lvxgt0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=335&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/563983/original/file-20231206-17-lvxgt0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=335&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Deux motoneurones innervant des muscles différents peuvent recevoir la même commande.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Cette étude démontre que les commandes nerveuses sont distribuées à des groupes de motoneurones, et que ces groupes sont partiellement découplés des muscles. Ainsi, des motoneurones innervant deux muscles différents peuvent recevoir la même commande s’ils contribuent au même mouvement alors que deux motoneurones innervant le même muscle peuvent recevoir des commandes différentes s’ils contribuent à des actions différentes. En d’autres termes, notre cerveau spécifierait une commande pour des groupes de motoneurones, sans nécessairement se soucier des muscles. Cette organisation permettrait de simplifier le contrôle du mouvement (en transmettant la même commande à plusieurs motoneurones) tout en restant capable de réaliser un large répertoire de mouvements (en permettant notamment à certains muscles d’assurer plusieurs fonctions). Au delà de mieux décrire la production du mouvement, cette nouvelle <a href="https://physoc.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1113/JP283698">théorie</a> permet d’envisager l’augmentation des capacités humaines.</p>
<h2>De la récupération à l’augmentation du mouvement, il n’y a qu’un bras</h2>
<p>Bien que la capacité de décoder les intentions de mouvement offre des perspectives de restauration du mouvement pour de nombreux patients, elle permet également d’envisager l’augmentation du corps humain. Bien qu’effrayante et captivante à la fois, l’idée d’augmenter les capacités du corps humain avec des membres supplémentaires est au centre de <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-022-28725-7">plusieurs programmes de recherche</a>.</p>
<p>Imaginez-vous en train d’écrire un mail tout en préparant un café grâce à un troisième bras. Bien que nous n’en soyons pas encore là, des chercheurs ont montré que nous sommes capables d’apprendre à utiliser un <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/scirobotics.abd7935">troisième pouce</a> (robotique) en le contrôlant avec nos gros orteils. Mais attention, pour parler d’augmentation, il ne faut pas que l’utilisation d’un nouveau membre impacte les capacités de mouvement existantes. Par exemple, ce troisième pouce étant contrôlé par les mouvements des gros orteils, il est impossible de l’utiliser en marchant, et sans doute assez difficile de l’utiliser en étant debout.</p>
<p>Il est donc nécessaire de créer une nouvelle commande pour ce nouveau membre. C’est ici que la capacité d’identifier l’activité des motoneurones prend tout son sens. En effet, on pourrait imaginer qu’un individu puisse dissocier l’activité de motoneurones d’un même muscle du bras, de manière spontanée ou après avoir été entraîné à le faire. Ainsi, ces motoneurones transmettraient deux commandes différentes au lieu d’une seule : l’une pour le mouvement du bras et l’autre pour commander ce nouveau membre robotique.</p>
<p>En outre, des <a href="https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1741-2552/abcdbf">études</a> récentes suggèrent que ces motoneurones transmettent bien plus d’information que nécessaire pour contrôler le mouvement ; ainsi des recherches en cours visent à exploiter ces informations non utilisées par nos muscles pour créer de nouvelles possibilités de commande.</p>
<p>Irons-nous jusqu’à nous représenter ce nouveau bras comme partie intégrante de notre corps ? Ou devrons-nous admettre que notre cerveau ne peut contrôler que deux bras et deux jambes ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219049/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Pour les personnes paralysées, il serait très utile de pouvoir contrôler des bras ou des jambes robotisés, c’est le principe des interfaces cerveau-machine.François Hug, Professeur en sciences du mouvement humain, Directeur adjoint du Laboratoire Motricité Humaine Expertise Sport Santé (LAMHESS), Université Côte d’AzurSimon Avrillon, Post-doctorant en neuroscience, Imperial College LondonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2186442023-11-30T16:48:07Z2023-11-30T16:48:07Z« Le cerveau du jugement est inhibé au moment de la passion amoureuse. » Conversation avec Bernard Sablonnière<p>_Professeur émérite de biologie moléculaire et de biochimie, médecin biologiste, chercheur, Bernard Sablonnière est aussi auteur de plusieurs ouvrages sur les maladies du cerveau. Lors de son passage aux Tribunes de la presse 2023, il a évoqué les mécanismes biologiques de la passion amoureuse, des hormones et neurotransmetteurs impliqués jusqu’aux effets sur le cerveau et le comportement. _</p>
<hr>
<p><strong>Considérez-vous avoir la passion de la transmission et du partage ? Est-ce que transmettre vos connaissances est ou était un impératif pour vous dans votre métier ?</strong></p>
<p><strong>Bernard Sablonnière</strong> : Je crois que oui. J’ai commencé ma carrière de professeur de médecine en 1993, il y a longtemps et tout de suite, j’ai eu des amphithéâtres remplis de 600 étudiants en première et deuxième année de médecine. À force de faire de la transmission un peu trop académique, j’ai essayé d’améliorer ma pédagogie afin d’être un bon professeur qui transmet bien avec beaucoup d’exemples. Cela m’a incité, plusieurs années plus tard, à mettre en forme mon expérience sous forme de livre grand public. Mon premier livre s’appelait « L’odyssée moléculaire » et en tant que biochimiste, j’y racontais tout un tas de molécules du vivant. Et puis après, j’en ai écrit d’autres.</p>
<p><strong>À propos de la passion amoureuse, quelles sont les mécaniques cérébrales à l’œuvre lorsqu’on tombe amoureux ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : Il y a encore beaucoup de mystères autour du fonctionnement de ce sentiment d’amour chez l’homme. Mais l’étude du fonctionnement du cerveau nous a déjà apporté des éléments de compréhension, nous avons quelques clés chimiques dans le cerveau qui permettent aux neurones de communiquer entre eux. Ces clés sont au nombre de sept ou huit, mais expliquent 90 % des comportements chez l’homme. Dans certaines régions du cerveau, la dopamine est l’hormone de l’envie, du désir et au sujet de la passion, c’est elle qui va être le moteur chimique des informations.</p>
<p><strong>Quels sont les éléments qui vont déclencher la dopamine ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : C’est tout le mystère du déclenchement de l’envie. Nous avons évidemment des besoins vitaux : boire, se nourrir, dormir. Mais d’un point de vue anthropologique, ce n’est pas très romantique, le besoin de se reproduire est aussi inscrit dans le cerveau humain. Dans son évolution, l’espèce humaine a développé le cerveau limbique – le cerveau émotionnel –, et tout autour du cerveau reptilien – le cerveau du système instinctif. C’est pour essayer de donner à l’homme cette capacité de développer des comportements extrêmement spécialisés pour initier cette envie de se reproduire. D’où la complexité de l’amour d’ailleurs. </p>
<p>Il existe des gens qui ne tombent jamais amoureux, qui n’ont jamais de relations sexuelles. Cela peut être en raison de freins dans le cerveau liés à une éducation, un traumatisme dans l’enfance, etc., qui font que certains comportements sont inhibés complètement. Cela arrive, mais ce sont des circonstances pathologiques. Mais l’envie d’amour, l’envie de relation avec une ou un partenaire est finalement un besoin quasiment vital.</p>
<p><strong>Quelles réactions, chimiques et corporelles, le déclenchement de la dopamine va-t-il provoquer ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : La dopamine est responsable de la passion, un accélérateur extrêmement fort. Il faut que la relation aboutisse. L’espèce dit au cerveau « il faut que certains comportements marchent, sinon l’espèce va disparaître ». Le cerveau du jugement est inhibé au moment de la passion amoureuse ; la pensée du partenaire nous obsède et domine notre vie. Cela est dû à un déséquilibre des accélérateurs et des freins dans le cerveau. On est stressé au début, on ne mange plus, on ne dort plus… c’est la noradrénaline. Mais elle dure peu de temps. </p>
<p>Dès que la dopamine, hormone du désir, prend le dessus, débute le moment où nous sommes obnubilés par la passion. Lorsque la relation va commencer, si bien sûr il n’y a pas d’échec après, le cerveau va ensuite chercher à retrouver un équilibre entre les accélérateurs et les freins. La sérotonine, hormone régulatrice, va contribuer à baisser les hormones du stress. La libération de l’ocytocine survient ensuite et va permettre l’attachement. Les anthropologues considèrent que ce fonctionnement hormonal est fait pour permettre à la formation d’un couple de durer au moins deux/trois ans. Dans l’évolution de l’espèce, le cerveau a calibré ça avec une forte sécrétion d’ocytocine à ce moment-là pour permettre éventuellement à un bébé de naître et pour qu’il puisse être sevré dans de bonnes conditions.</p>
<p><strong>À partir de quel moment peut-on vraiment parler de passion, est-ce le cœur ou le cerveau qui décide ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : Le cœur n’a aucun rôle, c’est juste une pompe. Mais il est souvent associé à l’amour car il s’agit d’un organe exprimant très fortement les émotions et sensible à ces hormones stressantes telles que la noradrénaline, à l’origine des palpitations. Mais ces réactions cardiaques servent simplement à alerter le cerveau qu’une réaction corporelle se met en jeu. Le cerveau interprète ensuite l’émotion pour la traduire en quelque chose de plus mental, d’exprimable qu’est le sentiment. La phase de passion peut être déréglée chez certaines personnes. Dans les relations amoureuses, les gens peuvent continuer d’avoir une vie normale en dehors des périodes où ils sont avec l’être aimés. D’autres sont obsédés, à un niveau compulsionnel. C’est un déséquilibre entre les accélérateurs et les freins et ça dépend génétiquement de la façon dont le cerveau s’est créé puis s’est construit, et si on a des récepteurs ou des transporteurs de dopamine plus ou moins actifs dans notre cerveau.</p>
<p><strong>Comment est-il possible d’entretenir la passion ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : Tous les couples savent que si on veut remettre un peu de sel dans sa relation il faut innover. Il faut trouver des nouvelles situations où on va susciter un désir qui donnera un plaisir qui n’est pas connu chez le partenaire. Ne pas toujours lui acheter le même parfum, l’emmener dans le même resto… Il faut être plus spontané. Lorsque le cerveau se trouve face à une situation d’activation du circuit de désir-plaisir qu’il ne connaît pas, ça peut susciter une perception de plaisir qui est d’une intensité plus forte. Il faut donc varier les plaisirs. Et souvent je dis « petit désir, petit plaisir ». Si vous voulez augmenter l’intensité du plaisir, il faut essayer de changer la circonstance qui mène à cette activation de l’envie.</p>
<p><strong>Ces mécanismes que nous avons évoqués pour la passion amoureuse s’appliquent-ils aussi aux passions pour une activité comme que l’art, la musique… aux domaines matériel et immatériel finalement ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : Oui, car la passion est une envie d’intensité extrêmement forte. On va concentrer cette énergie sur cette activité-là et on va délaisser les autres. C’est cela le caractère passionnel, un peu compulsif. On va peut-être même se fatiguer, mais on aime ça parce qu’on perçoit ce plaisir et à ce moment-là, ça devient un peu comme une drogue. Cela correspond à la passion de la suractivité. On trouve aussi ce mécanisme chez un certain nombre d’hommes de pouvoir ou d’hommes politiques qui suractivent leur envie de tout. Et cela se termine par une envie de dominer qui est liée à une perception du plaisir assez importante.</p>
<p><strong>Que se passe-t-il dans notre cerveau lors d’une rupture ?</strong></p>
<p><strong>B. S</strong> : La rupture est un état de manque extrêmement instantané. Dans le circuit désir-récompense, un désir est émis mais la récompense n’arrive pas et le cerveau n’aime pas du tout ça, car le désir n’est pas calmé. Très vite, l’axe du stress est activé. Le cerveau envoie un signal à la petite région du cerveau appelée l’amygdale, qui se dit « ça y est, j’ai une émotion négative très forte. Je dois donner une alerte à l’ensemble du corps comme quoi ça ne marche plus ». Les hormones du stress – le cortisol – sont activées : on pleure, on dort mal parce que la noradrénaline nous met en état d’alerte permanent et on est désorienté. </p>
<p>Il y a un dérèglement de cet équilibre entre les accélérateurs et les freins au niveau émotionnel, et le cerveau va essayer de retrouver un équilibre. Le cortisol va pousser le corps humain à se reposer et reconstituer ses réserves de clés chimiques. L’hormone de la sérotonine va agir avec une molécule du cerveau appelée la diméthyltryptamine, elle permet d’avoir deux façons de réagir. Au début, la sérotonine va entraîner un comportement de calme. C’est une sorte de frein entraînant un comportement soumis par rapport à ce qui nous arrive. Et si la situation perdure dans d’autres neurones du cerveau, la sérotonine va provoquer un coup de fouet pour essayer de réagir et on va vouloir repartir, revivre.</p>
<p><strong>Le cerveau a-t-il révélé tous ses secrets ? À votre avis, quels sont les domaines inexplorés sur lesquels il faudrait axer en priorité les recherches ?</strong></p>
<p><strong>B. S.</strong> : Alors non, on ne connaît pas tout. Ce n’est aujourd’hui qu’un balbutiement, mais avec les techniques d’imagerie actuelles et les systèmes d’interactions entre puces électroniques puis neurones, il est possible de repérer les circuits de façon extrêmement fine, afin de mieux comprendre comment la régulation des influx se forme. Je pense que ce qui étonne de plus en plus les scientifiques, ce sont les capacités d’adaptation du cerveau, ce qui est appelé la plasticité. Les conséquences des recherches sur ce sujet pourraient être de nouvelles pistes pour traiter les maladies de Parkinson ou d’Alzheimer autrement qu’avec des médicaments. Ce sont des pistes intéressantes.</p>
<hr>
<p><em>Propos recueillis par Loéva Claverie et Agathe Courret, étudiantes en master professionnel de journalisme à l’Institut de Journalisme Bordeaux Aquitaine (IJBA).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218644/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bernard Sablonnière ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dopamine, cortisol, ocytocine… Notre cerveau déborde d’hormones lorsque l’on est amoureux (ou que l’on subit une rupture).Bernard Sablonnière, Neurobiologiste, professeur des universités − praticien hospitalier, faculté de médecine, Inserm U1172, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2179752023-11-29T17:22:42Z2023-11-29T17:22:42ZLes superpouvoirs de la musique sur notre cerveau<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/562403/original/file-20231129-17-e9wab7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=45%2C0%2C6749%2C5100&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Comment la musique agit-elle sur notre mémoire et sur nos émotions? </span> </figcaption></figure><blockquote>
<p>« Quand j’entends la chanson <a href="https://www.youtube.com/watch?v=KNZH-emehxA">“You’re Still the One”</a> de Shania Twain, cela me transporte comme par magie vers l’année de mes 15 ans. Je me vois sur le PC de mon père, après qu’il ait tenté de mettre fin à ses jours. Il avait écouté cet album peu avant sur son ordinateur et j’ai lancé le titre pendant que je rangeais ses dossiers. Chaque fois que j’entends cette chanson, je voyage dans le passé – la tristesse et la colère remontent à la surface. »</p>
</blockquote>
<p>Ainsi témoigne l’un des participants à nos recherches sur les pouvoirs de la musique.</p>
<p>Les pouvoirs de stimulation de la mémoire et les effets thérapeutiques de la musique font l’objet d’une fascination renouvelée. Cette résurgence peut être principalement attribuée aux récentes avancées de la recherche neuroscientifique, qui ont confirmé les propriétés thérapeutiques de la musique, telles que la régulation émotionnelle et l’engagement . Cela a conduit à une <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10560-022-00893-x">intégration croissante</a> de la musicothérapie dans les traitements conventionnels de la santé mentale.</p>
<p>Il a déjà été démontré que de telles interventions musicales aident les personnes atteintes de <a href="https://www.proquest.com/openview/f42a82f350c32a106111ca17ac5db5fe/1">cancer</a>, de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29149141/">douleur chronique</a> et de <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/15401383.2012.685020">dépression</a>. Les conséquences du stress, telles que l’élévation de la tension artérielle et la tension musculaire, peuvent également être <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/17437199.2020.1846580">atténuées par le pouvoir de la musique</a>.</p>
<p>En tant que mélomane de longue date et neuroscientifique, je pense que la musique a un statut spécial parmi tous les arts en termes d’ampleur et de profondeur de son impact sur les gens. L’un des aspects essentiels est son pouvoir de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0166432821005222">récupération de la mémoire autobiographique</a>, qui fait ré-émerger des souvenirs souvent très personnels d’expériences passées. Nous pouvons tous raconter un cas où une mélodie nous a transportés dans le passé, ravivant des souvenirs et les imprégnant souvent d’une gamme d’émotions puissantes.</p>
<p>Mais l’amélioration de la mémoire peut également se produire chez les patients atteints de démence, pour qui <a href="https://www.theguardian.com/lifeandstyle/2023/sep/20/a-moment-that-changed-me-i-played-my-way-to-people-with-dementia-the-effect-was-magic">l’impact transformateur de la musicothérapie</a> ouvre parfois une fenêtre sur des souvenirs, qu’il s’agisse d’expériences chères de l’enfance, d’arômes et de saveurs de la cuisine maternelle, d’après-midi d’été passés en famille ou de l’atmosphère et de l’énergie d’un festival de musique.</p>
<p>On a pu le constater avec cette <a href="https://www.youtube.com/watch?v=IT_tW3EVDK8">vidéo</a> virale, réalisée par l’<a href="https://musicaparadespertar.com/">Asociación Música para Despertar</a>, qui mettrait en scène la ballerine hispano-cubaine Martha González Saldaña (bien qu’il y ait eu une <a href="https://www.npr.org/2020/11/10/933387878/struck-with-memory-loss-a-dancer-remembers-swan-lake-but-who-is-she">certaine controverse</a> au sujet de son identité). La musique du Lac des cygnes de Tchaïkovski semble réactiver des souvenirs chers et même des réactions motrices chez cette ancienne danseuse étoile, qui est amenée à répéter certains de ses anciens mouvements de danse devant la caméra.</p>
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<figcaption><span class="caption">Le Lac des cygnes de Tchaïkovski semble réactiver des réponses motrices inutilisées depuis longtemps chez cette ancienne ballerine.</span></figcaption>
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<p>Dans notre laboratoire de l’université de Northumbria, nous cherchons à exploiter ces récentes avancées neuroscientifiques pour approfondir notre compréhension du lien complexe entre la musique, le cerveau et le bien-être mental. Nous voulons répondre à des questions spécifiques telles que la raison pour laquelle la <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpain.2023.1210572/full">musique triste ou douce-amère</a> joue un rôle thérapeutique unique pour certaines personnes, et quelles parties du cerveau elle « touche » par rapport à des compositions plus joyeuses.</p>
<p>Les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1053811919301284">outils de recherche avancée</a> tels que les moniteurs d’électroencéphalogramme (EEG) à haute densité nous permettent d’enregistrer la façon dont les régions du cerveau « parlent » entre elles en temps réel lorsqu’une personne écoute une chanson ou une symphonie. Ces régions sont stimulées par différents aspects de la musique, de son contenu émotionnel à sa structure mélodique, de ses paroles à ses schémas rythmiques.</p>
<p>Bien entendu, la façon dont nous réagissons à la musique est profondément personnelle, c’est pourquoi notre recherche nécessite également que les participants à l’étude décrivent ce qu’ils ressentent à l’écoute d’un morceau de musique particulier, y compris sa capacité à encourager une profonde introspection et à évoquer des souvenirs significatifs.</p>
<p>Ludwig van Beethoven a proclamé un jour : « La musique est une entrée incorporelle dans le monde supérieur de la connaissance qui comprend l’humanité mais que l’humanité ne peut pas comprendre ». Avec l’aide des neurosciences, nous espérons contribuer à changer cela.</p>
<h2>Une brève histoire de la musicothérapie</h2>
<p>Les origines de la musique sont très anciennes, antérieures au langage et à la pensée rationnelle. Ses racines remontent à l’ère paléolithique, il y a plus de 10 000 ans, lorsque les premiers hommes l’utilisaient pour communiquer et exprimer leurs émotions. Les <a href="https://news.cnrs.fr/articles/the-sound-of-palaeolithic-music">découvertes archéologiques</a> comprennent d’anciennes flûtes en os et des instruments de percussion fabriqués à partir d’os et de pierres, ainsi que des marques indiquant <a href="https://www.sciencedaily.com/releases/2008/07/080704130439.htm">l’endroit qui sonne le mieux dans une grotte</a> et même des <a href="https://theconversation.com/how-the-music-of-an-ancient-rock-painting-was-brought-to-life-185475">peintures représentant des rassemblements musicaux</a>.</p>
<p>Au cours de l’ère néolithique qui a suivi, la musique a connu un <a href="https://theconversation.com/what-archaeology-tells-us-about-the-music-and-sounds-made-by-africas-ancestors-143809">développement important</a> dans le monde entier. Des fouilles ont permis de découvrir divers instruments de musique, notamment des harpes et des instruments de percussion complexes, soulignant l’importance croissante de la musique dans les cérémonies religieuses et les rassemblements sociaux au cours de cette période, ainsi que l’apparition de formes rudimentaires de notation musicale, comme en témoignent les <a href="https://www.asor.org/anetoday/2022/04/music-ancient-mesopotamia">tablettes d’argile de l’ancienne Mésopotamie</a>, en Asie occidentale.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/557113/original/file-20231101-21-el7lrd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Quatre instruments de musique préhistoriques" src="https://images.theconversation.com/files/557113/original/file-20231101-21-el7lrd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/557113/original/file-20231101-21-el7lrd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/557113/original/file-20231101-21-el7lrd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/557113/original/file-20231101-21-el7lrd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=368&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/557113/original/file-20231101-21-el7lrd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=463&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/557113/original/file-20231101-21-el7lrd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=463&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/557113/original/file-20231101-21-el7lrd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=463&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Instruments de musique préhistoriques.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Musical_instruments_of_prehistory.jpg">Musée d’Archéologie Nationale/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>Les philosophes grecs de l’Antiquité, Platon et Aristote, ont tous deux reconnu le rôle central de la musique dans l’expérience humaine. Platon a souligné le pouvoir de la musique en tant que stimulus agréable et curatif, en déclarant : « La musique est une loi morale. Elle donne une âme à l’univers, des ailes à l’esprit, du souffle à l’imagination, et le charme et la gaieté à la vie ». De manière plus pratique, Aristote considérait que la musique avait le pouvoir de former le caractère.</p>
<p>Tout au long de l’histoire, de nombreuses cultures ont adopté les vertus curatives de la musique. Les anciens Égyptiens intégraient la musique à leurs cérémonies religieuses, la considérant comme une force thérapeutique. Les tribus amérindiennes, comme les Navajos, utilisaient la musique et la danse dans leurs rituels de guérison, s’appuyant sur les tambours et les chants pour promouvoir le bien-être physique et spirituel. Dans la médecine traditionnelle chinoise, des tonalités et des rythmes musicaux spécifiques sont censés équilibrer l’énergie du corps (qi) et améliorer la santé.</p>
<p>Au Moyen Âge et à la Renaissance, l’Église chrétienne a joué un rôle essentiel dans la popularisation de la « musique pour les masses ». Le chant des hymnes de congrégation a permis aux fidèles de s’engager dans une musique commune pendant les services religieux. Cette expression musicale partagée était un puissant moyen de dévotion et d’enseignement religieux, permettant à une population largement analphabète de se rapprocher de sa foi par la mélodie et les paroles. Le chant communautaire n’est pas seulement une tradition culturelle et religieuse, il a également été <a href="https://journals.co.za/doi/abs/10.4102/ve.v40i1.1910">reconnu comme une expérience thérapeutique</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/557117/original/file-20231101-25-aqs9xd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Grey-haired man in jacket sitting at a desk reading," src="https://images.theconversation.com/files/557117/original/file-20231101-25-aqs9xd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/557117/original/file-20231101-25-aqs9xd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=604&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/557117/original/file-20231101-25-aqs9xd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=604&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/557117/original/file-20231101-25-aqs9xd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=604&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/557117/original/file-20231101-25-aqs9xd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=759&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/557117/original/file-20231101-25-aqs9xd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=759&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/557117/original/file-20231101-25-aqs9xd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=759&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Benjamin Rush.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Benjamin_Rush_by_Sully.jpg">NYPL Digital Gallery/Wikimedia</a></span>
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<p>Aux XVIII<sup>e</sup> et XIX<sup>e</sup> siècles, les premières recherches sur le système nerveux humain ont été menées parallèlement à l’<a href="https://www.musictherapy.org/about/history/">émergence de la musicothérapie</a> en tant que domaine d’étude. Des pionniers tels que le médecin américain <a href="https://www.britannica.com/biography/Benjamin-Rush">Benjamin Rush</a>, signataire de la Déclaration d’indépendance des États-Unis en 1776, ont reconnu le potentiel thérapeutique de la musique pour améliorer la santé mentale.</p>
<p>Peu après, des personnalités telles que Samuel Mathews (l’un des étudiants de Rush) ont commencé à mener des expériences explorant les <a href="https://collections.nlm.nih.gov/catalog/nlm:nlmuid-2562064R-bk">effets de la musique sur le système nerveux</a>, jetant ainsi les bases de la musicothérapie moderne. Ces premiers travaux ont servi de tremplin à <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.2307/3345004">E. Thayer Gaston</a>, connu comme le « père de la musicothérapie », pour la promouvoir en tant que discipline légitime aux États-Unis. Ces développements ont inspiré des efforts similaires au Royaume-Uni, où <a href="https://academic.oup.com/mtp/article-abstract/36/1/1/4916024">Mary Priestley</a> a contribué de manière significative au développement de la musicothérapie en tant que domaine respecté.</p>
<p>Les connaissances acquises lors de ces premières explorations ont continué à influencer les psychologues et les neuroscientifiques depuis lors, y compris le grand neurologue et <a href="https://www.oliversacks.com/oliver-sacks-books/musicophilia-oliver-sacks/">auteur de best-sellers</a> Oliver Sacks, aujourd’hui décédé, qui a observé que :</p>
<blockquote>
<p>« La musique peut nous sortir de la dépression ou nous émouvoir aux larmes. C’est un remède, un tonique, un jus d’orange pour l’oreille. »</p>
</blockquote>
<h2>L’effet Mozart</h2>
<p>L’étude et la compréhension de tous les mécanismes cérébraux impliqués dans l’écoute de la musique et de ses effets ne sont pas l’apanage des neuroscientifiques. Notre équipe diversifiée comprend des experts en musique tels que Dimana Kardzhieva (citée ci-dessous), qui a commencé à jouer du piano à l’âge de cinq ans et a poursuivi ses études à l’École nationale de musique de Sofia, en Bulgarie. Aujourd’hui psychologue cognitive, sa compréhension combinée de la musique et des processus cognitifs nous aide à approfondir les mécanismes complexes par lesquels la musique affecte (et apaise) notre esprit. Un neuroscientifique seul risquerait d’échouer dans cette entreprise.</p>
<blockquote>
<p>« La musique est au cœur de ma profession, mais c’est aussi une quête spéciale et profondément personnelle. Elle m’a permis de faire face aux défis de la vie, en apprenant à canaliser mes sentiments et à les exprimer en toute sécurité. La musique m’a appris à prendre mes pensées, qu’elles soient agréables ou douloureuses, et à les transformer en quelque chose de beau. »</p>
</blockquote>
<p>Le point de départ de notre recherche est ce que l’on appelle « l’effet Mozart », c’est-à-dire l’idée que l’exposition à des compositions musicales complexes, en particulier des morceaux classiques, stimule l’activité cérébrale et, en fin de compte, <a href="https://files.eric.ed.gov/fulltext/ED390733.pdf">améliore les capacités cognitives</a>. Bien que les résultats soient mitigés <a href="https://psycnet.apa.org/record/2018-20917-004">quant à la réalité de l’effet Mozart</a>, en raison des différentes méthodes employées par les chercheurs au fil des ans, ce travail a néanmoins permis des avancées significatives dans notre compréhension de l’effet de la musique sur le cerveau.</p>
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<figcaption><span class="caption">Une étude a montré que l’écoute de la Sonate pour deux pianos en ré de Mozart améliorait les capacités cognitives.</span></figcaption>
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<p>Dans l’étude originale réalisée en 1993 par <a href="https://www.nature.com/articles/365611a0">Frances Rauscher et ses collègues</a>, les participants ont constaté une amélioration de leur capacité de raisonnement spatial après seulement dix minutes d’écoute de la Sonate pour deux pianos en ré de Mozart.</p>
<p>Dans <a href="https://psycnet.apa.org/record/2007-18075-020">notre étude de 1997</a>, qui utilisait la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=bEiYmeeV6sI">deuxième symphonie</a> de Beethoven et le morceau instrumental <a href="https://www.youtube.com/watch?v=9IrWyZ0KZuk"><em>For the Love of God</em></a> du guitariste de rock Steve Vai, nous avons constaté des effets directs similaires chez nos auditeurs, mesurés à la fois par l’activité <a href="https://www.nhs.uk/conditions/electroencephalogram/">EEG</a> associée aux niveaux d’attention et à la libération de l’hormone <a href="https://www.health.harvard.edu/mind-and-mood/dopamine-the-pathway-to-pleasure">dopamine</a> (le messager du cerveau pour les sentiments de joie, de satisfaction et de renforcement d’actions spécifiques). Nos recherches ont montré que la musique classique en particulier renforce l’attention portée à la façon dont nous traitons le monde qui nous entoure, indépendamment de l’expertise ou des préférences musicales de chacun.</p>
<p>La beauté de la méthodologie EEG réside dans sa capacité à suivre les processus cérébraux avec une précision de l’ordre de la milliseconde, ce qui nous permet de distinguer les réponses neuronales inconscientes des réponses conscientes. Lorsque nous avons montré à plusieurs reprises des formes simples à une personne, nous avons constaté que la musique classique accélérait le traitement précoce (avant 300 millisecondes) de ces stimuli. Les autres musiques n’ont pas eu le même effet, pas plus que la connaissance préalable de la musique classique ou le goût pour celle-ci. Par exemple, les musiciens professionnels de rock et de musique classique qui ont participé à notre étude ont amélioré leurs processus cognitifs automatiques et inconscients en écoutant de la musique classique.</p>
<p>Mais nous avons également constaté des effets indirects liés à l’excitation. Lorsque les gens s’immergent dans la musique qu’ils apprécient personnellement, ils ressentent un changement radical de leur état d’éveil et de leur humeur. Ce phénomène <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1111/1467-9280.00345">présente des similitudes</a> avec l’augmentation des performances cognitives souvent liée à d’autres expériences agréables.</p>
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<figcaption><span class="caption"><em>Les Quatre Saisons</em> de Vivaldi en intégralité.</span></figcaption>
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<p>Dans une autre étude, nous avons exploré l’influence particulière de la <a href="https://www.britannica.com/art/program-music">« musique à programme »</a> – terme désignant la musique instrumentale « porteuse d’une signification extra-musicale » et dont on dit qu’elle possède une capacité remarquable à faire appel à la mémoire, à l’imagination et à la réflexion personnelle. Lorsque nos participants ont écouté les <em>Quatre Saisons</em> d’Antonio Vivaldi, ils ont déclaré avoir vécu de manière très vivante le <a href="https://psycnet.apa.org/doiLanding?doi=10.1027%2F1618-3169%2Fa000166">changement des saisons</a> à travers la musique, y compris ceux qui ne connaissaient pas ces concertos. Notre étude a conclu, par exemple, que « Le printemps » – en particulier le premier mouvement, bien connu, vibrant, émotif et exaltant – a la capacité d’améliorer la vigilance mentale et les mesures cérébrales de l’attention et de la mémoire.</p>
<h2>Que se passe-t-il dans notre cerveau ?</h2>
<p>Les qualités émotionnelles et thérapeutiques de la musique sont étroitement liées à la libération de substances neurochimiques. Un certain nombre d’entre elles sont associées au bonheur, notamment l’ocytocine, la sérotonine et les endorphines. Cependant, la dopamine est au cœur des propriétés stimulantes de la musique.</p>
<p>Elle déclenche la libération de dopamine dans les régions du cerveau consacrées à la <a href="https://rewardfoundation.org/brain-basics/reward-system/">récompense et au plaisir</a>, générant des sensations de joie et d’euphorie semblables à l’impact d’autres activités agréables telles que la consommation de nourriture ou les rapports sexuels. Mais contrairement à ces activités, dont la valeur est clairement liée à la survie et à la reproduction, l’avantage évolutif de la musique est moins évident.</p>
<p>Sa forte fonction sociale est reconnue comme le principal facteur du développement et de la préservation de la musique dans les communautés humaines. Cette qualité protectrice pourrait donc expliquer pourquoi elle fait appel aux mêmes mécanismes neuronaux que d’autres activités agréables.</p>
<p>Le système de récompense du cerveau est constitué de régions interconnectées, dont le <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00276-014-1360-0">noyau accumbens</a> est la centrale. Il est situé profondément dans la région sous-corticale, et son emplacement laisse présager son implication significative dans le traitement des émotions, étant donné sa proximité avec d’autres régions clés liées à ce traitement.</p>
<p>Lorsque nous écoutons de la musique, que ce soit en jouant ou en écoutant, le noyau accumbens réagit à ses aspects agréables en déclenchant la libération de dopamine. Ce processus, connu sous le nom de voie de récompense de la dopamine, est essentiel pour éprouver et renforcer des émotions positives telles que les sentiments de bonheur, de joie ou d’excitation que la musique peut procurer.</p>
<p>Comme l’explique Jonathan Smallwood, professeur de psychologie à l’université Queen’s (Ontario), nous n’avons pas fini d’en apprendre sur l’impact de la musique sur les différentes parties du cerveau :</p>
<blockquote>
<p>« La musique peut être compliquée à comprendre du point de vue des neurosciences. Un morceau de musique englobe de nombreux domaines qui sont généralement étudiés séparément, tels que la fonction auditive, l’émotion, le langage et la signification. »</p>
</blockquote>
<p>Cela dit, nous pouvons constater que l’effet de la musique sur le cerveau va au-delà du simple plaisir. L’<a href="https://www.britannica.com/science/amygdala">amygdale</a>, une région du cerveau réputée pour son implication dans les émotions, génère et régule les réactions émotionnelles à la musique, qu’il s’agisse de la nostalgie réconfortante d’une mélodie familière, de l’excitation exaltante d’une symphonie qui va crescendo ou de la peur liée à une mélodie sinistre et obsédante.</p>
<p><a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1053811920308363">La recherche</a> a également démontré que, lorsqu’elles sont stimulées par la musique, ces régions peuvent réveiller des souvenirs autobiographiques qui suscitent une réflexion positive sur nous-mêmes et nous font nous sentir mieux – comme nous l’avons vu dans la vidéo de l’ancienne ballerine Martha González Saldaña.</p>
<p>Nos propres recherches indiquent que l’<a href="https://www.britannica.com/science/hippocampus">hippocampe</a>, essentiel à la formation de la mémoire, est la partie du cerveau qui stocke les souvenirs et les associations liés à la musique. Simultanément, le <a href="https://neuroscientificallychallenged.com/posts/know-your-brain-prefrontal-cortex">cortex préfrontal</a>, responsable des fonctions cognitives supérieures, collabore étroitement avec l’hippocampe pour retrouver ces souvenirs musicaux et évaluer leur signification autobiographique. Pendant l’écoute de la musique, cette interaction entre les centres cérébraux de la mémoire et de l’émotion crée une expérience puissante et unique, élevant la musique au rang de stimulus distinctif et agréable.</p>
<p>Les arts visuels, comme les peintures et les sculptures, ne provoquent pas l’engagement temporel et multisensoriel de la musique, ce qui diminue leur capacité à former des connexions émotionnelles et mémorielles fortes et durables. Les autres formes d’art peuvent évoquer des émotions et des souvenirs, mais restent souvent ancrés dans l’instant. La musique, et c’est peut-être unique, forme des souvenirs durables, chargés d’émotions, qui peuvent ré-émerger quand on réécoute une chanson particulière des années plus tard.</p>
<h2>Perspectives personnelles</h2>
<p>La musicothérapie peut profondément changer la vie des gens. Nous avons eu le privilège d’entendre de nombreuses histoires et réflexions personnelles de la part des participants à notre étude, et même de nos chercheurs. Dans certains cas, comme les souvenirs de la tentative de suicide d’un père suscités par la chanson <em>You’re Still The One</em> de Shania Twain, il s’agit de récits profonds et profondément personnels. Ils nous montrent le pouvoir de la musique pour aider à réguler les émotions, même lorsque les souvenirs qu’elle déclenche sont négatifs et douloureux.</p>
<p>Face à de graves difficultés physiques et émotionnelles, un autre participant à notre étude a expliqué comment il avait ressenti une amélioration inattendue de son bien-être en écoutant un morceau qu’il avait adoré, malgré le contenu apparemment négatif du titre et des paroles de la chanson :</p>
<blockquote>
<p>« L’exercice a été crucial pour moi après un accident vasculaire cérébral. Au milieu de ma séance de rééducation, alors que je me sentais déprimé et souffrant, un vieux morceau favori, <em>What Have I Done To Deserve This ?</em> des Pet Shop Boys, m’a donné un coup de fouet instantané. Non seulement elle m’a remonté le moral, mais elle a aussi fait battre mon cœur avec excitation – je pouvais sentir les picotements de la motivation courir dans mes veines ».</p>
</blockquote>
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<figcaption><span class="caption">Les Pet Shop Boys ont donné une motivation supplémentaire à une séance de rééducation après un accident vasculaire cérébral.</span></figcaption>
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<p>La musique peut servir d’exutoire cathartique, de source d’autonomisation, permettant aux individus de traiter et de faire face à leurs émotions tout en leur apportant réconfort et apaisement. Un participant a décrit comment un morceau peu connu datant de 1983 sert d’inducteur d’humeur délibéré – un outil pour améliorer son bien-être :</p>
<blockquote>
<p>« Chaque fois que je suis déprimé ou que j’ai besoin d’un remontant, je joue <a href="https://www.youtube.com/watch?v=EXmABxvHTG4"><em>Dolce Vita</em> de Ryan Paris</a>. C’est comme un bouton magique qui génère des émotions positives en moi – il me remonte toujours le moral en quelques instants. »</p>
</blockquote>
<p>Comme chaque personne a ses propres goûts et ses propres liens émotionnels avec certains types de musique, il est essentiel d’adopter une approche personnalisée lors de la conception d’interventions de musicothérapie, afin de s’assurer qu’elles trouvent un écho profond chez les individus. Même les témoignages de nos chercheurs, comme celui de Sam Fenwick, se sont révélés utiles pour formuler des hypothèses en vue d’un travail expérimental :</p>
<blockquote>
<p>« Si je devais choisir une seule chanson qui me fait vibrer, ce serait <a href="https://www.youtube.com/watch?v=UNjO3sZ-85w">“Alpenglow”</a>. Cette chanson me donne des frissons. Je ne peux m’empêcher de chanter et chaque fois que je le fais, j’en ai les larmes aux yeux. Lorsque la vie est belle, elle déclenche des sentiments de force intérieure et me rappelle la beauté de la nature. Lorsque je me sens mal, elle m’inspire un sentiment de nostalgie et de solitude, comme si j’essayais de résoudre mes problèmes toute seule, alors que j’aurais vraiment besoin de soutien. »</p>
</blockquote>
<p>Stimulée par ces observations, notre dernière étude compare les effets de la musique triste et de la musique joyeuse sur le cerveau, afin de mieux comprendre la nature de ces différentes expériences émotionnelles. Nous avons découvert que les mélodies sombres peuvent avoir des effets thérapeutiques particuliers, offrant aux auditeurs une plate-forme spéciale pour la libération émotionnelle et l’introspection significative.</p>
<h2>Explorer les effets de la musique joyeuse et triste</h2>
<p>En nous inspirant des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0031938418308576">études</a> sur les expériences cinématographiques émotionnellement intenses, nous avons récemment <a href="https://www.mdpi.com/2673-4087/4/2/14">publié une étude</a> mettant en évidence les effets de compositions musicales complexes, en particulier les <em>Quatre Saisons</em> de Vivaldi, sur les réponses à la dopamine et les états émotionnels. Cette étude a été conçue pour nous aider à comprendre comment la musique joyeuse et triste affecte les gens de différentes manières.</p>
<p>L’une des principales difficultés consistait à mesurer les niveaux de dopamine de nos participants de manière non invasive. L’imagerie cérébrale fonctionnelle traditionnelle est un outil courant pour suivre la dopamine en réponse à la musique – par exemple, la tomographie par émission de positrons (TEP). Toutefois, cette technique implique l’injection d’un radiotraceur dans la circulation sanguine, qui se fixe sur les récepteurs de dopamine dans le cerveau. Ce procédé présente également des limites en termes de coût et de disponibilité.</p>
<p>Dans le domaine de la psychologie et de la recherche sur la dopamine, une approche alternative et non invasive consiste à étudier la fréquence des clignements de paupières et la variation du rythme des clignements de paupières en fonction de la musique.</p>
<p>Le clignement des yeux est contrôlé par les <a href="https://www.britannica.com/science/basal-ganglion">ganglions de la base</a>, une région du cerveau qui régule la dopamine. Le dérèglement de la dopamine dans des conditions telles que la maladie de Parkinson peut affecter le rythme régulier de clignement des yeux. Des études ont montré que les personnes atteintes de la maladie de Parkinson présentent souvent des <a href="https://n.neurology.org/content/34/5/677">taux de clignement réduits ou une variabilité accrue des taux de clignement</a>, par rapport aux personnes en bonne santé. Ces résultats suggèrent que la vitesse de clignement des yeux peut servir d’indicateur indirect de la libération ou de l’altération de la dopamine.</p>
<p>Bien que la vitesse de clignement des yeux n’offre pas le même niveau de précision que les mesures neurochimiques directes, elle constitue une mesure de substitution pratique et accessible qui peut compléter les techniques d’imagerie traditionnelles. Cette approche alternative s’est révélée prometteuse pour améliorer notre compréhension du rôle de la dopamine dans divers processus cognitifs et comportementaux.</p>
<p>Notre étude a révélé que le sombre <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ZPdk5GaIDjo">« Mouvement d’hiver »</a> suscitait une réaction dopaminergique particulièrement forte, remettant en cause nos idées préconçues et mettant en lumière l’interaction entre la musique et les émotions. On aurait pu s’attendre à une réaction plus forte au <a href="https://www.youtube.com/watch?v=3LiztfE1X7E">Concerto de printemps</a>, familier et entraînant, mais cela n’a pas été le cas. Il s’est avéré que le mouvement d’hiver de Vivaldi suscitait une réponse dopaminergique particulièrement forte.</p>
<p>Notre approche est allée au-delà de la mesure de la dopamine afin de mieux comprendre les effets de la musique triste et de la musique joyeuse. Nous avons également utilisé <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC10044923/">l’analyse du réseau EEG</a> pour étudier comment les différentes régions du cerveau communiquent et synchronisent leur activité lors de l’écoute de différentes musiques. Par exemple, les régions associées à l’appréciation de la musique, au déclenchement d’émotions positives et à la récupération de riches souvenirs personnels peuvent « parler » entre elles. C’est comme si l’on observait une symphonie d’activités cérébrales se dérouler, alors que les individus expérimentent subjectivement une gamme variée de stimuli musicaux.</p>
<p>Parallèlement, les <a href="https://journals.plos.org/plosone/article/comments?id=10.1371/journal.pone.0110490">rapports d’expériences subjectives</a> nous ont donné un aperçu de l’impact personnel de chaque morceau de musique, y compris le cadre temporel des pensées (passé, présent ou futur), leur orientation (soi ou les autres), leur forme (images ou mots) et leur contenu émotionnel. La catégorisation de ces pensées et émotions, et l’analyse de leur corrélation avec les données cérébrales, peuvent fournir des informations précieuses pour de futures interventions thérapeutiques.</p>
<p>Nos <a href="https://www.mdpi.com/2673-4087/4/2/14">données préliminaires</a> révèlent que la musique joyeuse suscite des pensées orientées vers le présent et l’avenir, des émotions positives et une attention portée aux autres. Ces pensées sont associées à une activité cérébrale frontale accrue et à une activité cérébrale postérieure réduite. En revanche, les musiques tristes provoquent une réflexion sur les événements passés, ce qui s’accompagne d’une activité neuronale accrue dans les zones du cerveau liées à l’introspection et à la récupération de la mémoire.</p>
<p>Pourquoi la musique triste a-t-elle le pouvoir d’influer sur le bien-être psychologique ? L’expérience immersive des mélodies sombres offre une plate-forme pour la libération et le traitement des émotions. En évoquant des émotions profondes, la musique triste permet aux auditeurs de trouver du réconfort, de plonger dans l’introspection et de gérer efficacement leurs états émotionnels.</p>
<p>Cette compréhension constitue la base du développement de futures interventions ciblées de musicothérapie destinées aux personnes confrontées à des difficultés de régulation émotionnelle, de rumination et même de dépression. En d’autres termes, même la musique triste peut être un outil de développement personnel et de réflexion.</p>
<h2>Ce que la musicothérapie peut offrir à l’avenir</h2>
<p>Sans être une panacée, l’écoute de musique a des effets thérapeutiques considérables, ce qui pourrait conduire à une adoption accrue des séances de musicothérapie parallèlement à la thérapie par la parole traditionnelle. L’intégration de la technologie dans la musicothérapie, notamment par le biais de services applicatifs émergents, est sur le point de transformer la manière dont les gens accèdent à des interventions musicales thérapeutiques personnalisées et à la demande, offrant ainsi une voie pratique et efficace pour l’amélioration de soi et le bien-être.</p>
<p>À plus long terme, l’intégration de l’intelligence artificielle (IA) pourrait révolutionner la musicothérapie. L’IA peut adapter les interventions thérapeutiques de façon dynamique, en fonction de l’évolution des réactions émotionnelles d’une personne. Imaginez une séance de thérapie où l’IA sélectionnerait et ajusterait la musique en temps réel, en fonction des besoins émotionnels du patient, créant ainsi une expérience thérapeutique hautement personnalisée et efficace… Ces innovations sont prêtes à <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/frai.2020.497864/full">remodeler le domaine de la musicothérapie</a>, en libérant tout son potentiel thérapeutique.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Femme écoutant de la musique avec des écouteurs sans fil" src="https://images.theconversation.com/files/557136/original/file-20231101-17-6t5sr7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/557136/original/file-20231101-17-6t5sr7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/557136/original/file-20231101-17-6t5sr7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/557136/original/file-20231101-17-6t5sr7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/557136/original/file-20231101-17-6t5sr7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/557136/original/file-20231101-17-6t5sr7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/557136/original/file-20231101-17-6t5sr7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La technologie du neurofeedback pourrait créer des cartes cérébrales musicales individuelles qui faciliteraient l’auto-thérapie ».</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Woman_listening_to_music_with_wireless_headphones_neon_light_(50810419882).jpg">Vu Hoang/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En outre, une nouvelle technologie appelée <a href="https://www.britannica.com/science/neurofeedback"><em>neurofeedback</em></a> s’est révélée prometteuse. Le neurofeedback consiste à observer l’EEG d’une personne en temps réel et à lui apprendre à réguler et à améliorer ses schémas neuronaux. La combinaison de cette technologie avec la musicothérapie pourrait permettre aux gens de « cartographier » les caractéristiques musicales qui leur sont les plus bénéfiques et de comprendre ainsi comment s’aider au mieux.</p>
<p>Lors de chaque séance de musicothérapie, les participants apprennent tout en recevant des informations sur l’état de leur activité cérébrale. L’activité cérébrale optimale associée au bien-être et à des qualités musicales spécifiques – telles que le rythme, le tempo ou la mélodie d’un morceau – est apprise au fil du temps. Cette approche innovante est développée dans <a href="https://www.urncst.com/index.php/urncst/article/view/345">notre laboratoire et ailleurs</a>.</p>
<p>Comme pour toute forme de thérapie, il est primordial de reconnaître les limites et les différences individuelles. Cependant, il existe des raisons de croire que la musicothérapie peut conduire à de nouvelles percées. Les récentes <a href="https://www.mdpi.com/2076-3425/8/6/107">avancées dans les méthodologies de recherche</a>, en partie grâce aux contributions de notre laboratoire, ont considérablement approfondi notre compréhension de la manière dont la musique peut faciliter la guérison.</p>
<p>Nous commençons à identifier deux éléments essentiels : la régulation émotionnelle et le lien puissant avec les souvenirs autobiographiques personnels. Nos recherches en cours se concentrent sur l’élucidation des interactions complexes entre ces éléments essentiels et les régions cérébrales spécifiques responsables des effets observés.</p>
<p>Bien entendu, l’impact de la musicothérapie va au-delà de ces nouveaux développements dans le domaine des neurosciences. Le simple plaisir d’écouter de la musique, le lien émotionnel qu’elle favorise et le réconfort qu’elle procure sont des qualités qui vont au-delà de ce qui peut être mesuré uniquement par des méthodes scientifiques. La musique influence profondément nos émotions et nos expériences fondamentales, transcendant les mesures scientifiques. Elle s’adresse au cœur de notre expérience humaine et a des effets qu’il n’est pas facile de définir ou de documenter.</p>
<p>Ou, comme l’a si bien dit l’un des participants à notre étude :</p>
<blockquote>
<p>« La musique est comme cet ami fiable qui ne me laisse jamais tomber. Quand je suis au plus bas, elle m’élève avec sa douce mélodie. Dans le chaos, elle me calme avec un rythme apaisant. Ce n’est pas seulement dans ma tête ; c’est une [magie] qui fait vibrer l’âme. La musique n’a pas de frontières : un jour, elle me remonte le moral sans effort, et le lendemain, elle peut agrémenter chaque instant de l’activité dans laquelle je suis engagé. »</p>
</blockquote><img src="https://counter.theconversation.com/content/217975/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Leigh Riby ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La musicothérapie connaît un regain d’intérêt. Nos recherches visent à déterminer quelles parties du cerveau sont affectées par différents types de musique.Leigh Riby, Professor of Cognitive-Neuroscience , Department of Psychology, Northumbria University, NewcastleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2143352023-11-23T17:56:44Z2023-11-23T17:56:44ZAlzheimer : une nouvelle explication généralisable à toute maladie liée au vieillissement ?<p>Alors que le vieillissement de la population française s’accélère, la maladie d’Alzheimer progresse dans notre pays. On estime qu’elle affecte actuellement 900 000 personnes et, chaque année, environ 225 000 nouveaux cas sont diagnostiqués.</p>
<p>Ces chiffres élevés font de cette pathologie la principale cause de démence sénile d’évolution inexorable. En effet, les traitements disponibles aujourd’hui ne permettent malheureusement pas d’en guérir, mais uniquement d’en atténuer certains symptômes et de ralentir son évolution.</p>
<p>Actuellement, pour tenter de décrypter les causes de la maladie d’Alzheimer, les recherches suivent deux voies majeures, focalisées respectivement sur des mécanismes impliquant deux types de protéines : les protéines amyloïdes et la protéine Tau.</p>
<p><a href="https://www.mdpi.com/2073-4409/12/13/1747">Nos travaux</a>, publiés au mois de juin dernier dans la revue Cells (MDPI), ont permis de mettre en évidence un autre mécanisme pouvant expliquer l’origine de la maladie d’Alzheimer. Notre découverte permet d’envisager de nouvelles façons de la diagnostiquer et ouvre de nouvelles pistes thérapeutiques. Par ailleurs, ses applications potentielles ne se limitent pas à cette seule affection : elles pourraient aussi concerner d’autres maladies du vieillissement.</p>
<h2>Causes de la maladie d’Alzheimer : les hypothèses classiques en difficulté</h2>
<p>On sait de longue date que le cerveau des personnes décédées atteintes de la maladie d’Alzheimer présente deux types de lésions : <a href="https://www.inserm.fr/dossier/alzheimer-maladie/">les dépôts amyloïdes et les dégénérescences neurofibrillaires</a>.</p>
<p>Les dépôts amyloïdes sont des agrégats extracellulaires composés de protéines amyloïdes. Ces plaques s’accumulent autour des neurones et les empêchent de bien communiquer entre eux. Les dégénérescences neurofibrillaires résultent quant à elles de modifications d’autres protéines, les protéines Tau.</p>
<p>En temps normal, les protéines Tau assurent le maintien des microtubules dans la cellule (des sortes d’armatures squelettiques qui assurent la cohésion cellulaire). Mais chez les patients atteints de la maladie d’Alzheimer ou d’autres maladies dégénératives (tauopathies), les protéines Tau changent de forme tridimensionnelle par un processus appelé hyperphosphorylation. Cette hyperphosphorylation des protéines Tau conduit notamment à une fragilisation des microtubules des neurones qui, progressivement, meurent.</p>
<p>On a longtemps cru que l’accumulation au fil du temps de plaques amyloïdes et d’enchevêtrements de protéines Tau était responsable des manifestations cliniques de la maladie d’Alzheimer. Toutefois, depuis quelques années, les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37334596/">différents essais cliniques ciblant les protéines amyloïdes</a> se sont révélés <a href="https://www.vidal.fr/actualites/30049-maladie-d-alzheimer-la-fin-de-l-hypothese-amyloide.html">très décevants</a>.</p>
<p>Face à cette situation, l’acquisition de connaissances nouvelles à propos des mécanismes biologiques spécifiques à la maladie d’Alzheimer est aujourd’hui plus que jamais nécessaire. En particulier, pour proposer une nouvelle vision de la maladie d’Alzheimer, il faut retourner aux sources mêmes de cette maladie dégénérative, c’est-à-dire à la gestion du stress dit « oxydatif », qui, s’il n’est pas correctement réduit, conduit au vieillissement accéléré. L’accumulation de plaques amyloïdes et d’enchevêtrements de protéine Tau pourrait en être alors de simples conséquences.</p>
<p>Les résultats récents obtenus au sein de notre laboratoire de recherche, <a href="https://www.radiobiologie.fr/">l’UMR 1296 Inserm</a>, s’inscrivent dans ce contexte. Nos données nous ont en effet permis de proposer un nouveau mécanisme moléculaire pouvant <a href="https://hal.science/hal-04157903">expliquer l’origine de la maladie d’Alzheimer</a>. Cette hypothèse est soutenue non seulement par des observations expérimentales cohérentes, mais aussi par une modélisation mathématique.</p>
<p>Au cœur de notre modèle figure une autre protéine, baptisée ATM.</p>
<h2>Les cassures de l’ADN, une nouvelle piste d’explication</h2>
<p>En tant que radiobiologistes, nous étudions les effets sur le vivant des rayonnements ionisants (les rayons X, les rayons gamma, les particules…), lesquels produisent du stress oxydatif. À ce titre, la protéine ATM revient systématiquement dans tous nos projets de recherche. Elle est en effet une <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/16026874/">actrice majeure de la réponse à tout stress oxydatif</a>.</p>
<p>Ce type de stress survient lorsque des composés chimiques très réactifs, les espèces radicalaires oxygénées (ou ROS), sont présents dans l’environnement des cellules. Les conséquences d’une telle situation sont potentiellement très graves, puisque le stress oxydatif peut casser l’ADN. Schématiquement, la protéine ATM gère la signalisation et la réparation de telles cassures de l’ADN, qui nous agressent et qui nous font vieillir.</p>
<p>Nos travaux de recherche ont notamment démontré qu’après un stress, dû par exemple <a href="https://www.mdpi.com/2072-6694/11/7/905">à une irradiation</a>, une <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34680095/">contamination aux métaux</a> ou <a href="https://www.mdpi.com/2218-273X/12/2/250">aux pesticides</a>, de nombreuses copies d’ATM quittent le cytoplasme où elles sont produites (le cytoplasme est la partie de la cellule qui se trouve entre le noyau – contenant le matériel génétique – et la membrane cellulaire) pour entrer dans le noyau. Là, elles déclenchent la reconnaissance et la réparation des cassures de l’ADN.</p>
<p>Ce phénomène est appelé transit de la protéine ATM. En temps normal, il dure quelques minutes après le stress, et aboutit à la reconnaissance puis à la réparation de toutes les cassures de l’ADN. Toutefois, le transit d’ATM peut se trouver ralenti ou empêché si les protéines rencontrent et s’associent en chemin à d’autres protéines spécifiques, anormalement surexprimées dans le cytoplasme.</p>
<p>Nous avons appelé ces protéines les « protéines X », car elles peuvent varier d’un individu à un autre, d’une maladie à une autre, d’un tissu à un autre. Ces protéines X sont généralement celles qui, par leurs mutations, <a href="https://www.mdpi.com/2072-6694/11/7/905">causent les maladies</a> (quand ces mutations ne font pas disparaître lesdites protéines, mais au contraire, les dérégulent).</p>
<h2>Comment le blocage d’ATM provoque des maladies</h2>
<p>Depuis 2014, nous étudions au laboratoire des maladies associées soit à une forte prédisposition au cancer, soit à un vieillissement accéléré, mais qui ont toutes un point commun : <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34281212/">elles sont connues pour leur réponse anormale à une irradiation</a>.</p>
<p>C’est notamment le cas du <a href="https://www.esmo.org/content/download/79763/1460927/file/ESMO-ACF-Sarcomes-des-Tissus-Mous-un-Guide-pour-les-Patients.pdf#page=7">syndrome du rétinoblastome</a>, un syndrome familial qui est à haut risque de cancer de l’œil. Causée par la mutation du gène de la protéine Rb, cette maladie est associée à une surexpression de ladite protéine Rb dans le cytoplasme, ce qui empêche ATM d’atteindre le noyau. <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32862699/">Les cassures de l’ADN sont alors mal réparées et leur accumulation cause le cancer</a>.</p>
<p>Nous avons pu mettre en évidence des mécanismes de ce type dans d’autres maladies dégénératives, comme la maladie de Huntington dans lequel le rôle de la protéine X est tenu par une <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24277524/">protéine appelée la huntingtine</a>, ou encore la <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s12035-017-0648-6">sclérose tubéreuse de Bourneville</a> et la tubérine, le <a href="https://www.mdpi.com/1422-0067/23/3/1570">syndrome de Usher et les protéines USH</a>, etc.</p>
<p>De façon intéressante, la très grande majorité des protéines X qui sont associées à des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34281212/">maladies dégénératives sont localisées autour du noyau</a>, si bien que lors de leur transit du cytoplasme au noyau, les protéines ATM sont stoppées directement sur la membrane nucléaire. Pour évaluer la réponse au stress oxydatif, notamment dû à l’irradiation, on comprend donc qu’il faut d’abord rechercher quelle(s) protéine(s) X ralenti(ssen)t les protéines ATM dans leur transit du cytoplasme au noyau.</p>
<p>C’est aussi le cas lorsque l’on s’intéresse à la maladie d’Alzheimer. Dans ce cas précis, notre quête de la (ou des) protéine(s) X spécifique(s) de la maladie s’est rapidement orientée vers une protéine appelée Apoliprotéine E, ou APOE.</p>
<h2>Des couronnes autour du noyau, premier signe de la maladie d’Alzheimer ?</h2>
<p>La protéine APOE est surtout connue par les spécialistes de la maladie d’Alzheimer en raison des variations (on parle de « polymorphismes ») qu’elle présente chez une grande majorité de patients atteints. Par ailleurs, on sait que APOE présente des sites d’interaction préférentielle avec la protéine ATM, ce qui en faisait une bonne candidate au statut de « protéine X ».</p>
<p>Nous avons donc décidé d’étudier 10 lignées de cellules de peau provenant de patients atteints de la maladie d’Alzheimer à différents stades. Nous avons ainsi découvert que, bien que les origines de ces lignées cellulaires provenant de divers malades soient variées (et donc que les polymorphismes qu’elles contiennent soient différents de l’une à l’autre), toutes montraient systématiquement une surexpression de la protéine APOE autour du noyau.</p>
<p>De plus, nous avons aussi observé que la protéine ATM était elle aussi systématiquement localisée autour du noyau, formant des « couronnes périnucléaires ». Des analyses plus approfondies ont par ailleurs révélé que ces couronnes étaient constituées d’une première couche d’interaction entre ATM et APOE, au plus près de la membrane du noyau.</p>
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<img alt="Image de microscopie montrant grâce à l’immunofluorescence des exemples représentatifs de couronnes périnucléaires formées par la protéine ATM autour du noyau de cellules (fibroblastes) de peau de patients atteints par la maladie d’Alzheimer." src="https://images.theconversation.com/files/561393/original/file-20231123-15-uzoi2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561393/original/file-20231123-15-uzoi2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=209&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561393/original/file-20231123-15-uzoi2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=209&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561393/original/file-20231123-15-uzoi2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=209&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561393/original/file-20231123-15-uzoi2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=262&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561393/original/file-20231123-15-uzoi2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=262&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561393/original/file-20231123-15-uzoi2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=262&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Exemples représentatifs de couronnes périnucléaires formées par la protéine ATM autour du noyau de cellules (fibroblastes) de peau de patients atteints par la maladie d’Alzheimer.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.mdpi.com/2073-4409/12/13/1747">Berthel E., et al. « Toward an Early Diagnosis for Alzheimer’s Disease Based on the Perinuclear Localization of the ATM Protein », Cells (MDPI)</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37443782/">Grâce à des observations plus poussées d’imagerie cellulaire, ainsi qu’à un modèle mathématique</a> produit par Laurent Pujo-Menjouet, professeur à l’Université Lyon I, nous sommes aujourd’hui en mesure d’écrire un scénario décrivant un mécanisme probable pour expliquer la maladie.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/561402/original/file-20231123-27-rh6kse.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Schéma explicatif du modèle de vieillissement pathologique impliquant ATM." src="https://images.theconversation.com/files/561402/original/file-20231123-27-rh6kse.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561402/original/file-20231123-27-rh6kse.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=228&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561402/original/file-20231123-27-rh6kse.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=228&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561402/original/file-20231123-27-rh6kse.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=228&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561402/original/file-20231123-27-rh6kse.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=287&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561402/original/file-20231123-27-rh6kse.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=287&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561402/original/file-20231123-27-rh6kse.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=287&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le processus commencerait d’abord par la formation de complexes ATM-APOE qui ne gêneraient pas l’entrée d’ATM dans le noyau (points verts lumineux visibles à l’intérieur). Progressivement, la première couche ATM-APOE couvrirait tout le noyau (fine couronne en vert autour du noyau, quelques points vert encore visibles dedans). Enfin, la couronne épaissie interdirait toute pénétration d’ATM (plus de point vert lumineux dans le noyau).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.mdpi.com/2073-4409/12/13/1747">Berthel E., et al. « Toward an Early Diagnosis for Alzheimer’s Disease Based on the Perinuclear Localization of the ATM Protein », Cells (MDPI)</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>À mesure que du stress est produit, au fil de l’existence, chez des personnes dont les cellules surexpriment APOE, ATM s’agglutinerait progressivement autour du noyau des cellules, formant une première couche avec APOE, puis avec elle-même.</p>
<p>Ces multicouches interdiraient le passage de ATM dans le noyau. Les cassures de l’ADN dues au stress s’accumuleraient donc progressivement, puisqu’ATM ne serait plus capable de déclencher leur reconnaissance puis leur réparation.</p>
<p>Les couronnes périnucléaires s’avéreraient d’autant plus épaisses que le processus d’agglutination serait déjà ancien – à l’image, en quelque sorte, des cernes qui se forment lors de la croissance des troncs d’arbres. Cette accumulation de cassures dans l’ADN provoquerait une accélération du vieillissement des cellules et, in fine, leur mort. À cet instant, « l’épaisseur » des couronnes périnucléaires serait maximale.</p>
<p>En plus d’une explication mécanistique, nos observations introduisent ici la notion de prédisposition à la maladie d’Alzheimer, puisque tout porteur de cellules surexprimant une protéine APOE autour du noyau serait potentiellement susceptible.</p>
<h2>Une explication moléculaire du vieillissement valable pour d’autres pathologies</h2>
<p>Ces observations ont été menées sur des cellules provenant de la peau de 10 patients atteints de la maladie d’Alzheimer, mais elles pourraient être transposables aux cellules cérébrales et à d’autres types cellulaires. En effet, des données récentes suggèrent que la maladie d’Alzheimer pourrait être une maladie du vieillissement généralisée à d’autres tissus que le tissu cérébral (<a href="https://jacob.cea.fr/drf/ifrancoisjacob/Pages/Agenda/2023/SEPIA-lecture-series-wenquan-zou.aspx">communication du professeur Zou de l’université de Nanchang</a> (Chine), durant une conférence donnée au sein du service d’étude des prions et des infections atypiques de l’Institut François Jacob du CEA).</p>
<p>Par ailleurs, depuis la publication de notre étude, nous avons observé la formation de couronnes périnucléaires d’ATM dans d’autres pathologies liées au vieillissement, comme la myopathie de Duchesne (mais évidemment avec une protéine X différente d’APOE). En outre, en laissant vieillir en culture des cellules de cristallin, on voit également apparaître des couronnes périnucléaires d’ATM <a href="https://www.mdpi.com/2073-4409/12/16/2118">qui pourraient être liées à la formation de cataractes</a>. Enfin, des travaux en cours suggèrent que des cellules de peau issues d’individus normaux et vieillies artificiellement en culture pourraient montrer également des couronnes périnucléaires d’ATM.</p>
<p>L’agglutination de la protéine ATM autour du noyau, aidée par la surexpression d’une protéine spécifique constituerait donc une explication mécanistique du vieillissement cellulaire, en raison de l’impossibilité de réparer les dommages de l’ADN accumulés par un stress endogène et/ou exogène.</p>
<h2>Quelles retombées et quelles nouvelles pistes pour nos recherches ?</h2>
<p>Ces résultats pourraient également avoir des implications en matière de diagnostic. En effet, un simple prélèvement dermatologique de cellules de peau pourrait permettre de révéler non seulement l’existence d’une forte prédisposition à la maladie d’Alzheimer, mais aussi renseigner sur son avancée éventuelle. Un brevet a été déposé en ce sens par Inserm Transfert, en collaboration avec la société Neolys Diagnostics (groupe ALARA expertise, à Entzheim, en Alsace). Toutefois, de nouvelles investigations sont nécessaires pour asseoir ces tests sur des bases encore plus solides.</p>
<p>Ces résultats préliminaires pourraient aussi ouvrir de nouvelles pistes d’exploration en matière de traitement. On pourrait par exemple chercher des moyens de « détruire » précocement les couronnes périnucléaires d’ATM, ou d’en limiter la formation, afin d’améliorer la survie cellulaire par une meilleure gestion des cassures de l’ADN accumulées. Dans cette optique, différentes substances chimiques susceptibles de séparer les protéines ATM des protéines APOE sont en cours d’investigation au laboratoire.</p>
<p>Soulignons que nos observations ont été faites directement sur des cellules humaines, ce qui les rend d’autant plus pertinentes sur le plan clinique et évite tous les biais liés à l’extrapolation à partir de modèles animaux, pour lesquels la gestion des cassures de l’ADN peut montrer certaines différences avec l’être humain. Elles constituent une avancée majeure dans la compréhension des mécanismes en jeu dans la genèse de la maladie d’Alzheimer.</p>
<hr>
<p><em>Elise Berthel, la première auteure de la publication scientifique dont les résultats sont présentés dans cet article, a été postdoctorante financée par l’Inserm (UMR 1296) avant de devenir cheffe de projet financé par Neolys Diagnostics. Les premières expériences de caractérisation radiobiologique de la maladie d’Alzheimer ont été réalisées dans le cadre du master de Eymeric Le Reun (U1296), dirigé par Elise Berthel et Nicolas Foray.</em></p>
<p><em>Un brevet sur le diagnostic de la maladie d’Alzheimer à partir des couronnes périnucléaires d’ATM a été déposé conjointement par Inserm Transfert et Neolys Diagnostics sous la référence 23305025.1 le 9 janvier 2023.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214335/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nicolas Foray a été fondateur et conseiller scientifique de 2014 à 2020 (mais jamais dirigeant actif) de la Société Neolys Diagnostics, qui développe des tests de radiosensibilité. Il a reçu 2000 Euros en totalité pour cette fonction. L'unité Inserm 1296 que dirige Nicolas Foray reçoit régulièrement des financements et subventions d'agences soutien à la recherche : ANR, projets d'Investissement d'avenir, INCa, Ligue, ARC, FRM, CNES, Commission Européenne, EDF. Toutes dans le cadre réglementé d'appels à projets publics.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Michel Bourguignon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Alors que les recherches sur les deux principales pistes d’explication de la maladie d’Alzheimer piétinent, des données récentes ouvrent une troisième voie, impliquant des problèmes de réparation de l’ADN.Michel Bourguignon, Professeur émérite de Biophysique et Médecine Nucléaire, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Nicolas Foray, Directeur de Recherche à l'Inserm, Unité U1296 « Radiations : Défense, Santé, Environnement », InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2161092023-11-16T17:24:18Z2023-11-16T17:24:18ZSommeil : il est possible de dialoguer avec les rêveurs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/559715/original/file-20231115-19-szdbgp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C0%2C5982%2C3889&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il n’est pas facile pour les scientifiques d’explorer le monde des rêves, mais les connaissances progressent.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/fond-decran-numerique-de-bateau-a-voile-noir-DKix6Un55mw">Johannes Plenio/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Dans le film <a href="https://www.youtube.com/watch?v=LtxtwPoVzqI"><em>Inception</em></a> de Christopher Nolan, le personnage principal est capable d’infiltrer les rêves d’autres personnes, et même d’influencer leur contenu. Et si cette fiction n’était pas si éloignée de la réalité ?</p>
<p>Nos travaux suggèrent en effet qu’il est possible d’interagir avec des volontaires pendant leur sommeil, voire de dialoguer avec eux, à certains moments propices. Explications.</p>
<h2>La science des rêves : une discipline difficile</h2>
<p>Si l’on se réveille parfois avec des souvenirs vifs de nos aventures nocturnes, à l’inverse il arrive que l’impression d’une nuit sans rêves prédomine lorsqu’arrive le matin, comme si le temps s’était évanoui.</p>
<p>En effet, si nous nous souvenons en moyenne <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fneur.2012.00106/full">d’un à trois rêves par semaine</a>, nous ne sommes pas tous égaux face au souvenir de nos rêves. Ainsi, les gens qui disent ne jamais rêver constituent environ <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1389945702002551">2,7 à 6,5 % de la population</a>. Souvent, cependant, ces gens ont déjà rêvé dans le passé, quand ils étaient enfants par exemple. La proportion de gens qui dit n’avoir jamais rêvé de toute sa vie est très faible : 0,38 %.</p>
<p>Le fait de se rappeler des rêves dépend de <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fneur.2020.00724/full">nombreux facteurs</a> tels que le sexe (les femmes se rappellent plus fréquemment de leurs rêves) ou l’intérêt pour les rêves, ainsi que de la <a href="https://www.researchgate.net/publication/326900077_Researching_Dreams_The_Fundamentals">façon dont on collecte les rêves</a> (en tenant un « carnet de rêve », ou en les enregistrant au dictaphone, par exemple).</p>
<p>De par leur nature privée et évanescente, les rêves sont difficiles à capturer par les scientifiques. Certes, aujourd’hui, grâce aux connaissances acquises dans le domaine des neurosciences, il est possible, en analysant l’activité cérébrale d’un individu, son tonus musculaire et ses mouvements oculaires, de classifier son état de vigilance. Les scientifiques peuvent ainsi déterminer si une personne dort, et dans quel stade de sommeil elle se trouve : phase d’endormissement, sommeil lent léger, sommeil lent profond ou sommeil paradoxal.</p>
<p>Mais ces mesures physiologiques ne permettent pas de savoir si un dormeur rêve (les rêves pouvant se produire dans tous les stades de sommeil), et encore moins à quoi il rêve… Les chercheurs n’ont typiquement pas accès à l’expérience de rêve au moment même où elle est vécue. Ils sont donc contraints de se fier au récit de rêve collecté après la bataille – au moment du réveil – sans garantie que ce récit soit fidèle à ce qu’il s’est passé dans la tête du dormeur.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Photo d’une femme qui dort dans une caravane, de dos." src="https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Déterminer à quoi rêvent les gens durant leur sommeil reste encore hors de la portée des scientifiques….</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/donna-che-dorme-sulla-roulotte-ffustAcaX0E">Михаил Калегин/Unsplash</a></span>
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</figure>
<p>En outre, pour comprendre ce qui se passe dans le cerveau lors des rêves – et à quoi ils servent – il faudrait pouvoir comparer l’activité cérébrale lors des moments où les rêves se produisent avec ceux où ils sont absents. Par conséquent, il est impératif de déterminer avec précision quand les rêves surviennent pour progresser dans la science des rêves.</p>
<p>Pour y parvenir, l’idéal serait de pouvoir communiquer avec les dormeurs. Impossible ? Pas pour tout le monde : c’est ici qu’entrent en scène les rêveurs lucides.</p>
<h2>Les rêves lucides : une clé pour ouvrir la porte des songes</h2>
<p>La plupart d’entre nous réalisent avoir rêvé seulement au réveil. Les rêveurs « lucides », eux, ont la capacité unique d’être conscients de rêver, alors même qu’ils sont endormis en sommeil paradoxal, une période du sommeil durant laquelle l’activité cérébrale est plus proche de celle de la phase d’éveil.</p>
<p>Encore plus étonnant : les rêveurs lucides peuvent parfois même exercer un contrôle partiel sur le déroulement de l’histoire de leurs rêves ! Ils sont alors capables de s’envoler, de faire apparaître ou disparaître des personnes, de changer la météo, de se transformer en animaux… Bref, les possibilités sont infinies.</p>
<p>De tels rêves lucides peuvent survenir spontanément ou être provoqués par un entraînement spécifique. L’existence des rêves lucides est connue depuis l’Antiquité, mais elle a longtemps été considérée comme ésotérique, et indigne d’une exploration scientifique.</p>
<p>Cette vision des choses a changé grâce à une <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.2466/pms.1981.52.3.727">expérience astucieuse</a> mise en place par le psychologue Keith Hearne et le psychophysiologiste Stephen Laberge, dans les années 1980. Ces deux chercheurs se sont mis en tête de prouver scientifiquement que les rêveurs lucides sont bien endormis quand ils prennent conscience de rêver. Partant du constat que le sommeil paradoxal est caractérisé par des mouvements oculaires rapides, yeux fermés (d’où son nom de « Rapid Eye Movement sleep » en anglais), ils se sont posé la question suivante : serait-il possible d’utiliser cette propriété pour demander au dormeur d’envoyer un « télégramme » au monde alentour, depuis son rêve ?</p>
<p>Hearne et Laberge ont recruté des rêveurs lucides pour tenter d’obtenir une réponse. Ils se sont mis d’accord avec eux avant qu’ils ne s’endorment sur le télégramme à envoyer : les participants devraient faire des mouvements oculaires spécifiques, comme déplacer leur regard de gauche à droite trois fois, lorsqu’ils prendraient conscience qu’ils rêvaient. Et, alors qu’ils étaient objectivement en sommeil paradoxal, les rêveurs lucides l’ont fait !</p>
<p>Grâce à ce code de communication, les chercheurs pouvaient désormais détecter en temps réel des moments de rêve. Ces travaux ont ouvert la voie à de nombreuses recherches où les rêveurs lucides agissent comme des agents infiltrés du monde onirique, réalisant des missions (comme <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-018-21067-9">retenir sa respiration</a> en rêve) et les signalant aux expérimentateurs grâce au code oculaire.</p>
<p>À l’heure actuelle, il est possible de combiner de telles expériences avec des techniques d’imagerie cérébrale, afin d’étudier les régions cérébrales sollicitées lors des rêves lucides. Ceci constitue un énorme progrès dans la quête pour mieux comprendre les rêves et leur mécanisme de formation.</p>
<p>En 2021, près de 40 ans après les travaux pionniers de Hearne et Laberge, une <a href="https://www.cell.com/current-biology/pdfExtended/S0960-9822(21)00059-2">étude</a> réalisée par notre équipe, en collaboration avec des chercheurs du monde entier a permis d’aller encore plus loin.</p>
<h2>De la fiction à la réalité : dialoguer avec le rêveur</h2>
<p>Nous savions déjà que les rêveurs lucides étaient capables d’envoyer des informations depuis leur rêve. Mais peuvent-ils en recevoir également ? Autrement dit, serait-il possible de dialoguer avec un rêveur lucide ? Pour en avoir le cœur net, nous avons exposé un rêveur lucide à des stimuli tactiles durant son sommeil. Nous lui avons aussi posé des questions fermées, telles que « Aimez-vous le chocolat ? »</p>
<p>Ce dernier a été en mesure de répondre en souriant pour signifier un « oui » et en fronçant les sourcils pour un « non ». En outre, dans le cadre de ces travaux, des rêveurs lucides se sont vu présenter verbalement des équations mathématiques simples. Ils ont réussi à fournir des réponses appropriées tout en restant endormis.</p>
<p>Évidemment, les rêveurs lucides ne répondaient pas toujours, loin de là. Mais le fait qu’ils puissent le faire parfois (18 % des cas dans notre étude) ouvrait la porte à une communication entre expérimentateurs et rêveurs.</p>
<p>Cependant, le rêve lucide reste un phénomène rare et même les rêveurs lucides ne sont pas lucides tout le temps ni durant tout le sommeil paradoxal. Le portail de communication que nous avions ouvert était-il limité au seul sommeil paradoxal « lucide » ? Pour le déterminer, nous avons entrepris de nouveaux travaux.</p>
<h2>Élargir le portail de communication</h2>
<p>Pour savoir si nous pouvions communiquer de la même façon avec n’importe quel dormeur, quel que soit le stade de sommeil, nous avons mené des expériences avec des volontaires non rêveurs lucides sans troubles du sommeil, ainsi qu’avec des personnes atteintes de narcolepsie. Cette maladie, qui se caractérise par de nombreux endormissements (le plus souvent en sommeil paradoxal), est associée avec une <a href="https://academic.oup.com/sleep/article/38/3/487/2416990">propension accrue</a> aux rêves lucides.</p>
<p>Lors de <a href="https://www.nature.com/articles/s41593-023-01449-7">cette nouvelle expérimentation</a>, nous avons présenté verbalement aux participants des mots existants (par exemple « pizza ») et des mots inventés (par exemple « ditza ») dans tous les stades de sommeil. Nous leur avons demandé de sourire ou de froncer les sourcils en fonction du type de mot (inventé ou non). Sans grande surprise, les personnes narcoleptiques ont pu répondre quand elles étaient lucides en sommeil paradoxal, confirmant nos résultats de 2021.</p>
<p>Plus surprenant, en revanche, est le fait que les deux groupes de participants se sont aussi avérés capables de réagir à nos stimuli verbaux dans la plupart des stades du sommeil, même en l’absence de rêve lucide ! Les volontaires ont été capables de répondre de manière intermittente, comme si des fenêtres de connexion avec le monde extérieur s’ouvraient temporairement à ces moments précis.</p>
<p>Nous avons même pu déterminer la composition du cocktail d’activité cérébrale propice à ces moments d’ouverture vers le monde extérieur : en analysant l’activité cérébrale des dormeurs avant la présentation des stimuli, nous avons été en mesure de prédire s’ils allaient nous répondre ou non.</p>
<p>Pourquoi de telles fenêtres de connexion avec le monde extérieur existent-elles ? On peut émettre l’hypothèse que le cerveau s’est développé dans un contexte où un minimum de traitement cognitif était nécessaire durant le sommeil : on peut par exemple imaginer que nos ancêtres devaient rester attentifs aux stimuli extérieurs lorsqu’ils dormaient, en cas d’approche d’un prédateur. Dans le même ordre d’idée, on sait que le cerveau d’une mère réagit préférentiellement aux pleurs de son bébé pendant le sommeil…</p>
<p>Nos résultats suggèrent qu’il est désormais envisageable de « dialoguer » avec n’importe quel dormeur, quel que soit le stade de sommeil dans lequel il se trouve. En affinant les marqueurs cérébraux qui prédisent les moments de connexion avec le monde extérieur, il devrait être possible d’optimiser davantage les protocoles de communication à l’avenir.</p>
<p>Cette avancée ouvre la voie à un dialogue en temps réel avec les dormeurs, offrant ainsi aux chercheurs la possibilité d’explorer les mystères des rêves au moment même où ils surviennent. Mais si la frontière entre la science-fiction et la réalité s’amincit, rassurez-vous : les neuroscientifiques sont encore loin de savoir décoder le contenu de vos rêves. Vous pouvez donc continuer à rêver sur vos deux oreilles !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216109/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Accéder aux rêves des autres, un fantasme de science-fiction ? Pas si sûr : des scientifiques sont récemment parvenus à communiquer avec des dormeurs. Un pas de plus vers l’obtention de la clé des songes…Başak Türker, Chercheuse postdoctorale, Institut du Cerveau (ICM)Delphine Oudiette, Chercheure en neurosciences cognitives, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2172382023-11-08T20:47:34Z2023-11-08T20:47:34ZLes cerveaux ne fossilisent pas, comment étudier ceux de nos ancêtres ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/558426/original/file-20231108-19-73suns.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C681%2C3735%2C2783&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le fossile original Cro-Magnon 1 et une image virtuelle montrant grâce à l'imagerie la moitié droite de l'endocrâne et la moitié gauche du crâne (le code couleur sur le crâne correspond à la variation d'épaisseur des os).</span> <span class="attribution"><span class="source"> Antoine Balzeau CNRS/MNHN</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Depuis que les fossiles humains sont étudiés, les chercheurs s’intéressent à ce qui se cache dans leur boite crânienne. Le cerveau en effet a son importance, puisqu’il est lié aux capacités cognitives. Pourtant, son étude est rendue difficile pour les humains du passé car le cerveau ne résiste pas aux épreuves du temps : nous n’avons jamais retrouvé d’encéphale fossile. Les tissus les plus mous ne sont en effet jamais conservés, au contraire des restes osseux qui se transforment lors de la fossilisation. Heureusement, le cerveau laisse sur la surface interne du crâne des empreintes que les scientifiques étudient pour discuter de l’évolution du cerveau humain. Pour ce faire, nous tombons parfois sur un moulage interne naturel formé par du sédiment (c’est le cas par exemple pour <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1002/ajpa.21184">l’australopithèque de Taung</a>).</p>
<p>Depuis le milieu du XIX<sup>e</sup> siècle, des techniques de moulage sont aussi utilisées pour obtenir un objet en 3D de la surface endocrânienne. Enfin, depuis quelques dizaines d’années, nous utilisons des méthodes d’imagerie de plus en plus performantes pour reconstituer en 3D virtuelle ce volume, qui peut ensuite être imprimé physiquement par prototypage. Au Muséum national d’histoire naturelle, nous disposons de micro-tomographes qui nous permettent <a href="https://antoinebalzeau.jimdofree.com/recherche/imagerie-s/">d’obtenir des images scanners de très haute résolution</a> à partir desquelles nous reconstruisons toutes les structures cachées dans les fossiles, dont l’endocrâne.</p>
<p>C’est ainsi que nous pouvons observer les fins détails de la surface interne du crâne et tenter d’interpréter les caractéristiques du cerveau qu’ils reflètent. En effet les empreintes visibles pourraient correspondre aux circonvolutions sillonnant la surface du cerveau et marquant les limites entre les différentes régions cérébrales. L’objectif est de situer où se trouvent les grandes parties du cerveau, comme les lobes frontaux, pariétaux, temporaux ou occipitaux. Il s’agit aussi de localiser des zones spécifiques impliquées dans le comportement, et si possible de les observer les mesurer.</p>
<h2>Les crânes fossiles nous renseignent-ils sur le cerveau ?</h2>
<p>Mais les chercheurs s’interrogent sur la fiabilité de leurs déterminations et sur le lien réel entre endocrâne et cerveau. Jamais encore il n’avait été possible de vérifier si ce qui est observé sur l’endocrâne correspond précisément aux sillons visibles sur le cerveau.</p>
<p>Nous nous sommes ainsi <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/joa.13966">pour ce travail</a> publié aujourd’hui posé quelques questions fondamentales et avons tenté d’y répondre. Les empreintes qui tapissent l’intérieur d’une boite crânienne peuvent-elles révéler avec fiabilité l’anatomie du cerveau qu’elle contient ? L’étude des crânes fossiles peut-elle ainsi nous éclairer sur certaines capacités de nos ancêtres ? Autrement dit, une « paléoneurologie » fiable est-elle possible ?</p>
<p>Pour les besoins de cette étude, réalisée dans le cadre du projet ANR PaleoBRAIN, nous avons combiné les compétences de chercheurs de différents domaines. Nous avons utilisé des données IRM particulières obtenues sur un volontaire. Ces acquisitions ont été effectuées à l’Institut du Cerveau (ICM). L’originalité est que nous disposions ainsi de plusieurs séquences d’imagerie différentes, dont une classique pour reconstruction le cerveau, mais aussi une autre moins fréquemment usitée qui permet d’imager l’os. C’est grâce à cette dernière que nous avons reconstitué l’endocrâne de notre volontaire, pour lequel nous avions donc aussi des données précises pour son cerveau.</p>
<p>Grâce à des outils informatiques développés dans le domaine des neurosciences par l’équipe Baobab du centre de recherche Neurospin, nous avons pu effectuer des analyses comparatives des modèles d’endocrâne et de cerveau.</p>
<h2>14 experts testés</h2>
<p>Enfin et surtout, le cœur de l’étude a été de mettre à l’épreuve 14 experts internationaux de domaines variés étudiant l’évolution du cerveau (paléontologues, neurologues et primatologues) et travaillant régulièrement sur les endocrânes. Nous leur avons demandé à partir de l’image de l’endocrâne de positionner les principaux sillons qu’ils ont l’habitude d’observer lors de leur recherche. Puisque nous disposions non seulement de la forme de l’endocrâne mais aussi de celle du cerveau, nous pouvions ensuite vérifier la précision des déterminations effectuées à l’aveugle. </p>
<p>Ainsi, la correspondance réelle entre les positions des sillons du cerveau et les marques visibles sur l’endocrâne était disponible, alors que les experts travaillaient « à l’aveugle », comme ils sont contraints de le faire sur les endocrânes fossiles. La participation d’autant de spécialistes est très positive et illustre combien nous cherchons à améliorer la qualité de nos recherches, puisqu’en participant nous prenions le risque de constater que ce qui nous décrivions n’était pas juste !</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/558414/original/file-20231108-27-x5vjj5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/558414/original/file-20231108-27-x5vjj5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/558414/original/file-20231108-27-x5vjj5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/558414/original/file-20231108-27-x5vjj5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/558414/original/file-20231108-27-x5vjj5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/558414/original/file-20231108-27-x5vjj5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/558414/original/file-20231108-27-x5vjj5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les observations réalisées par les 14 experts, qui montrent de nombreuses différences d’interprétation, ont pu être comparées à la réalité. Ce test révèle les limites actuelles de la méthode et ouvre des pistes pour augmenter sa fiabilité..</span>
<span class="attribution"><span class="source">Antoine Balzeau CNRS et MNHN</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Les résultats révèlent quelques surprises, et heureusement ouvrent de belles pistes pour le futur des recherches sur l’évolution du cerveau humain. De nettes différences ont été observées entre les identifications proposées par les experts et les sillons du cerveau réel. Certaines marques, correctement repérées, ont notamment été associées à un mauvais sillon. Ce résultat illustre qu’essayer de reconstruire un sillon cérébral suivant la forme/position générale connue dans la documentation scientifique ou à partir d’un individu moyen induit un biais lorsque l’on regarde un endocrâne et tente de suivre les marques qui y sont observées. En effet, la morphologie du cerveau est extrêmement variable, celle de l’endocrâne l’est donc aussi !</p>
<p>Nous observons aussi que l’identification des sillons est meilleure dans la partie inférieure de l’endocrâne que dans la partie supérieure. Ceci est lié au mode de formation du crâne et du cerveau durant notre croissance. L’un et l’autre grandissent en parallèle, influant sur leur morphologie respective. De par notre position verticale, debout, le contact entre le cerveau et le crâne est plus rapproché vers le bas de notre tête que vers le haut, ou cerveau et crâne sont séparés par un espace un peu plus grand.</p>
<p>Certains résultats concernant des traits anatomiques spécifiques ont des implications sur des sujets débattus en paléoanthropologie et devront être analysés sur plus d’individus par la suite. En effet, le sillon central qui sépare les lobes frontaux et pariétaux n’a pas été bien localisé par la plupart des scientifiques.</p>
<h2>Mieux lire le cerveau de nos ancêtres préhistoriques</h2>
<p>D’où l’importance de ce projet que nous poursuivons sur de très nombreux volontaires. L’objectif sera de caractériser la position réelle des principaux sillons sur des endocrânes, puisque nous disposons aussi des cerveaux correspondants. Il sera aussi possible de clarifier ce que nous pouvons observer avec précision sur un endocrâne.</p>
<p>Ces résultats ouvrent de nouvelles perspectives. La description endocrânienne des spécimens fossiles devra à l’avenir prendre en compte la variation de position et de forme des sillons en plus d’utiliser des modèles de forme moyenne du cerveau. De plus, il ressort clairement de la présente étude que les chercheurs peuvent percevoir les empreintes des sillons avec une précision raisonnablement élevée, mais leur identification et leur attribution correctes restent un défi, en particulier lorsqu’il s’agit d’espèces disparues pour lesquelles nous manquons de connaissance directe du cerveau. Il nous reste donc beaucoup de travail à faire pour savoir bien lire le cerveau de nos ancêtres préhistoriques.</p>
<p><a href="https://paleobrain.jimdofree.com/">La prochaine étape</a>, que nous sommes en train de réaliser, va être d’étudier le détail de la relation entre l’endocrâne et le cerveau sur de nombreux individus. Cela va nous permettre de savoir ou se situent les principaux sillons sur un endocrâne, quelles parties de ces empreintes nous pouvons espérer observer avec précision, ce qui nous permettra enfin de mieux décrypter les traits présents sur les endocrânes de spécimens fossiles à partir d’informations objectives, solides et justes.</p>
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<p><em>Le projet <a href="https://anr.fr/Projet-ANR-20-CE27-0009">PaleoBRAIN</a> est soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui finance en France la recherche sur projets. Elle a pour mission de soutenir et de promouvoir le développement de recherches fondamentales et finalisées dans toutes les disciplines, et de renforcer le dialogue entre science et société. Pour en savoir plus, consultez le site de l’<a href="https://anr.fr/">ANR</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/217238/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Antoine Balzeau a reçu des financements de l'ANR (ANR-20-CE27-0009). </span></em></p>Les tissus mous du cerveau ne fossilisent pas, il est donc nécessaire d’extrapoler pour obtenir des informations sur l’organe de nos ancêtres. Le fait-on correctement ?Antoine Balzeau, Paléoanthropologue, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2144052023-11-07T17:27:34Z2023-11-07T17:27:34ZLa lecture, un loisir qui fait du bien aux enfants<p>Apprendre à lire demande un investissement sur plusieurs années, qui va bien au-delà du CP, pour que les enfants soient en mesure de réussir à identifier dans un premier temps les mots individuels, ce que l’on appelle le décodage, puis comprendre le sens de phrases et de textes. Cependant, ces efforts sont largement récompensés si l’on en croit les résultats de nombreuses études publiées ces dernières décennies et qui ont établi les bienfaits de la pratique régulière de la lecture sur le développement des <a href="https://theconversation.com/lire-des-histoires-aux-enfants-pourquoi-cest-important-196260">facultés cognitives</a> (par exemple le langage, l’attention ou la mémoire) et des capacités <a href="https://theconversation.com/enfants-lire-des-histoires-favorise-t-il-lempathie-125625">socio-émotionnelles</a> (permettant par exemple de reconnaître les émotions exprimées par autrui et de faire preuve d’empathie).</p>
<p>Signe de l’importance de ce sujet, celui-ci est l’objet du nouveau livre du chercheur en neurosciences Michel Desmurget, qui, après avoir publié en 2019 <em>La fabrique du crétin digital</em>, un ouvrage critiquant les effets d’un usage excessif des écrans et ayant reçu beaucoup d’attention, a publié en septembre 2023 <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/faites-les-lire-michel-desmurget/9782021492934"><em>Faites les lire ! Pour en finir avec le crétin digital</em></a>.</p>
<p>Dans ce nouvel ouvrage, l’auteur fait le constat de la baisse du temps alloué à la lecture ces dernières décennies chez les enfants, notamment les adolescents, sous l’effet probable d’un usage de plus en plus important des écrans à visée principalement récréative. Il rappelle, références à l’appui, les bienfaits de la lecture pour le plaisir sur le développement des enfants et propose d’inciter les plus jeunes à intensifier cette pratique.</p>
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<figcaption><span class="caption">Le livre, seul « antidote » face aux écrans, selon le neuroscientifique Michel Desmurget (France Inter, septembre 2023).</span></figcaption>
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<p>Au-delà du livre de Michel Desmurget, une <a href="https://www.cambridge.org/core/services/aop-cambridge-core/content/view/03FB342223A3896DB8C39F171659AE33/S0033291723001381a.pdf/early-initiated-childhood-reading-for-pleasure-associations-with-better-cognitive-performance-mental-well-being-and-brain-structure-in-young-adolescence.pdf">étude récente publiée par Yun-Jun Sun et ses collègues</a> dans le journal <em>Psychological Medicine</em> vient apporter un nouvel éclairage sur les mécanismes complexes impliqués dans les bienfaits de la lecture chez l’enfant en s’arrêtant notamment sur ses effets sur le cerveau.</p>
<h2>Des données auprès de 10000 jeunes lecteurs</h2>
<p>Les données obtenues auprès de plus de 10 000 enfants américains d’âges compris entre 9 et 13 ans dans le cadre du projet <a href="https://abcdstudy.org/about/">ABCD</a> (pour <em>Adolescent Brain and Cognitive Development</em>) ont été analysées. Il s’agit d’une cohorte très importante qui a été constituée dans le cadre d’un consortium regroupant 21 centres de recherche aux États-Unis et qui met à disposition les données obtenues à des chercheurs qui ne font pas forcément partie de ce consortium, comme c’est le cas pour Yun-Jun Sun et ses collègues.</p>
<p>L’avantage de cette approche est de permettre l’analyse de données très nombreuses et plus facilement généralisables à la population. L’inconvénient, c’est que le protocole ne sera pas aussi fin ou spécifique en termes de tests utilisés qu’avec une étude monocentrique associée à un échantillon plus limité.</p>
<p>Des mesures reflétant le niveau de lecture pour le plaisir des enfants ont été obtenues à partir d’un questionnaire rempli par leurs parents et comprenant les deux questions spécifiques suivantes : « Pendant combien d’années votre enfant a-t-il lu pour le plaisir ? » et « Environ combien d’heures par semaine votre enfant pratique-t-il la lecture pour le plaisir ? »</p>
<p>Il est important de préciser que ces mesures ne sont pas exemptes de biais, comme celui de « désirabilité sociale », qui amène à avoir tendance à répondre de manière potentiellement biaisée pour donner l’impression de correspondre aux meilleurs « standards » par rapport à des normes éducatives. Ainsi, les auteurs de l’étude n’ont pas pu contrôler correctement ce genre de biais en utilisant, en complément, un <a href="https://www.jstor.org/stable/pdf/747605.pdf">test de reconnaissance d’auteurs</a> (qui consiste à présenter une liste de noms d’auteurs à reconnaître parmi d’autres noms pour évaluer le niveau de connaissance de l’univers de la lecture).</p>
<p>Une évaluation neurocognitive a été faite pour obtenir des scores reflétant le niveau cognitif ou intellectuel des enfants (langage, mémoire, raisonnement, etc.). En outre, une échelle spécifique (<em>Child Behaviour Checklist</em> ou CBCL) a été administrée aux parents pour évaluer la présence éventuelle de signes ou de symptômes psychopathologiques et/ou de troubles du comportement chez leur enfant (trouble de l’attention, non-respect des règles, agressivité, stress, dépression, etc.).</p>
<p>Enfin, une image du cerveau de chaque enfant a été obtenue par IRM (imagerie par résonance magnétique) pour mesurer entre autres choses le volume des différentes régions ou parties du cerveau.</p>
<h2>Les effets de la lecture sur le bien-être et le développement du langage via le cerveau</h2>
<p>L’analyse des résultats montre, entre autres choses, des corrélations positives entre le niveau de lecture pour le plaisir et deux scores cognitifs : un score cognitif global, et un autre de mémoire verbale. Le niveau de lecture pour le plaisir était aussi positivement corrélé au niveau de développement du langage et à la réussite scolaire des enfants. À côté de cela, des corrélations négatives ont été mises en évidence entre le niveau de lecture pour le plaisir et des scores reflétant l’état mental des adolescents. Par ailleurs, le niveau de lecture pour le plaisir était aussi corrélé négativement avec le temps total d’écran des enfants.</p>
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<p>L’analyse des données obtenues par IRM montre que le niveau de lecture pour le plaisir était positivement corrélé au volume de plusieurs régions appartenant à un réseau connu pour sous-tendre le langage (notamment des régions fronto-temporales) ou à un réseau sous-tendant plutôt le système visuel et comprenant notamment les régions occipitales.</p>
<p>En outre, le volume de la plupart de ces régions était aussi positivement corrélé avec les scores cognitifs et négativement corrélé avec les troubles attentionnels et psychopathologiques et une analyse de médiation mettait en évidence le rôle médiateur qu’aurait le cerveau entre la lecture pour le plaisir et la cognition et le bien-être des adolescents. Ainsi, la lecture pour le plaisir aurait un effet sur le développement de certains réseaux de régions cérébrales qui aurait lui-même pour conséquence l’amélioration de la cognition et du bien-être des adolescents.</p>
<p>Dans cette étude, les enfants qui ont les meilleurs résultats (cognition plus élevée et moins de troubles de l’attention et du comportement) sont ceux qui lisent de façon régulière et intensive (environ 12 heures par semaine). Dès lors, lire toujours plus serait-il bénéfique ? Non, selon les résultats de l’étude puisqu’une durée de lecture hebdomadaire plus importante s’accompagne non seulement d’une absence d’amélioration des fonctions cognitives mais d’un léger déclin de celles-ci. Cela confirme le fait que le développement de la cognition ne dépend pas uniquement de la lecture, mais aussi d’autres activités, par exemple le sport ou les interactions sociales.</p>
<h2>Les atouts à long terme de la lecture</h2>
<p>L’ensemble des résultats que nous venons de décrire sommairement confirment les effets positifs de la lecture pour le plaisir sur la cognition, le bien-être et le cerveau des adolescents. Cela ouvre de nouvelles perspectives de recherche. Par exemple, nous pouvons nous demander si ces bienfaits sont seulement ponctuels, sur quelques années, ou s’ils sont durables – et peuvent avoir des répercussions sur plusieurs décennies, voire la vie entière.</p>
<p>L’étude de la persistance éventuelle de ces effets nous permettra de déterminer la meilleure façon de pratiquer la lecture afin de contribuer à l’optimisation du développement neurocognitif des individus tout au long de leur vie en les aidant par exemple à mieux résister face à certains effets du vieillissement. Il s’agirait ainsi d’envisager d’intégrer la mesure de la lecture pour le plaisir à celle de ce que l’on appelle la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2739591/">réserve cognitive</a>, un facteur bien connu pour contribuer à l’optimisation du développement des individus et les aider à mieux faire face lorsque des atteintes cérébrales se manifestent.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/apprendre-a-lire-quels-defis-cela-represente-t-il-pour-les-eleves-de-primaire-212144">Apprendre à lire : quels défis cela représente-t-il pour les élèves de primaire ?</a>
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<img src="https://counter.theconversation.com/content/214405/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Bernard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les bienfaits de la lecture sur le développement des enfants ont été établis ces dernières décennies. Une nouvelle étude nous aide à mieux en comprendre les effets cognitifs.Frédéric Bernard, Maître de conférences en neuropsychologie, Université de StrasbourgLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2097802023-11-07T14:46:32Z2023-11-07T14:46:32ZNous avons tous un accent. Voici pourquoi « l’accentisme » est une forme de discrimination contribuant au racisme<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/554541/original/file-20231018-27-nmd2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C3973%2C2230&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Nous parlons tous avec un accent. Mais certains accents sont discriminés. Il s'agit alors d'accentisme, un phénomène qui se rapproche du racisme.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Sutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Vous est-il déjà arrivé d’entendre quelqu’un parler dans son sommeil ? Ses paroles peuvent être dénuées de cohérence (sauf pour un psychanalyste probablement !), mais ce que la personne en question dit reste cohérent dans sa forme. La prononciation des mots respecte la norme grammaticale de la langue, leur ordre d’agencement dans les phrases est aussi pertinent. L’intonation empruntée l’est. Pourtant, l’individu dort et donc ne contrôle pas ce qu’il dit, ou plus précisément ne réfléchit pas. </p>
<p>Ceci nous amène à remarquer que dans l’expression d’une langue, certains éléments reposent sur la réflexion, mais d’autres relèvent du réflexe. C’est le cas de l’accent, un aspect lié à la forme des mots que nous émettons. </p>
<p>Auteur d’une thèse en études françaises avec cheminement en linguistique, j’analyse le système linguistique (surtout les langues africaines). Je forme aussi les enseignants, à l’Université Bishop et à l’Université de Sherbrooke, à la didactique du français et de l’anglais, langues secondes. Je me spécialise dans la gestion de la relation entre la première et la langue seconde.</p>
<h2>Deux hémisphères, deux tâches différentes</h2>
<p>Le processus d’apprentissage de la langue compte deux grandes phases : l’apprentissage et l’acquisition (je schématise <a href="https://www.victorias.fr/dossiers/cours-anglais-dictionnaire/krashen.html">mais la frontière n’est pas étanche</a>. Autrement dit, quand je suis en train d’apprendre, et quand j’ai fini d’apprendre (acquisition). La partie du cerveau qui s’occupe du processus d’apprentissage est (majoritairement) localisée dans l’hémisphère droit. La gestion de ce qui est déjà appris (donc acquis) se passe dans l’hémisphère gauche.</p>
<p>Dans l’hémisphère droit est localisé tout ce dont la réalisation requiert une réflexion active, comme les idées, les intonations rhétoriques. Dans l’hémisphère gauche est géré tout ce qui est produit automatiquement comme certains mots-outils et la syntaxe. Mais aussi le rythme, l’intonation syllabique et syntaxique, la courbe mélodique… communément connus sous le nom de l’accent. </p>
<p>Ainsi, le contenu relève de l’hémisphère droit, la forme, de l’hémisphère gauche.</p>
<h2>La difficulté d’imiter un accent</h2>
<p>Voilà pourquoi il est difficile pour un apprenant d’une langue seconde ou étrangère de réussir à feindre un accent. </p>
<p>Quand nous parlons une langue non acquise, nous gérons le contenu de ce que nous disons (le fond, les idées), ainsi que la manière dont nous le disons (la forme). Le locuteur d’une langue maternelle parlant sa langue ne s’occupe que des stratégies pour exprimer le contenu de son message. Par contre, l’outil linguistique comme tel (la forme, y compris l’accent) fait partie de lui, il est automatisé. Il n’a pas besoin de s’en occuper. Un locuteur qui n’a pas encore acquis une langue doit se concentrer sur le fond et sur la forme (syntaxe et autres). S’il veut feindre l’accent, il aura alors une charge cognitive excessive à accomplir, ce qui requiert davantage d’énergie. </p>
<p>Il est très difficile de réaliser cette double (ou triple) tâche sur une longue période de temps. Dans certaines situations, il peut bénéficier d’un allègement d’une partie de la tâche : la personne connaît bien (par cœur) le texte, les mots (le fond) qu’elle doit émettre, et peut alors concentrer ses efforts sur la formulation (le rythme, l’intonation, l’accent). </p>
<p>C’est le cas des routines de salutation qui sont répétitives (donc pas de surprise au niveau du contenu) d’une présentation bien préparée. C’est ce qui se passe pour les acteurs non francophones, comme Javier Barden, hispanophone, quand il joue le rôle d’un locuteur anglophone natif (<em>Goya’s Ghosts</em>) ou John Malkovich, anglophone, dans le rôle du Français Javert (<em>Les Misérables</em>), mais aussi celui d’Idriss Elba, anglophone, quand il joue le rôle de Nelson Mandela (<em>Long Walk to Freedom</em>) où il doit prendre un accent sud-africain. </p>
<h2>Haro sur l’accentisme</h2>
<p>Les accents souffrent parfois de représentations biaisées. Les langues française et italienne, par exemple, sont présentées comme romantiques, notamment en raison du courant littéraire (romantisme) développé par des auteurs comme Victor Hugo. Les langues russe, allemande ou arabe sont perçues comme menaçantes dans l’imaginaire populaire, pour des raisons sociopolitiques, historiques ou culturelles, développées notamment avec le cinéma. </p>
<p>Ainsi, <a href="https://vitrinelinguistique.oqlf.gouv.qc.ca/fiche-gdt/fiche/26542695/discrimination-basee-sur-laccent">l’accentisme</a>, la discrimination fondée sur l’accent, procède du même principe que le racisme. Les accents africains, par exemple, en sont particulièrement victimes. De l’espoir pourrait naître avec notamment des œuvres cinématographiques comme <a href="https://www.washingtonpost.com/opinions/2020/09/01/why-chadwick-bosemans-fight-african-accents-black-panther-was-so-important/"><em>Black Panther</em></a> à travers lesquelles l’accent africain n’est plus caricaturé. </p>
<h2>Il n’y a pas une façon unique de parler français</h2>
<p>En somme, l’accent est comme un récipient. Les paroles que quelqu’un prononce sont le contenu du récipient. Le contenu prend la forme du contenant, mais reste authentique, dans l’idée. Ceci est sans doute ce qu’un personnage (hispanophone) du film <em>Les vendanges de feu</em> voulait dire quand il déclara « je parle avec un accent mais je ne réfléchis pas avec un accent ».</p>
<p>Les représentations biaisées n’existent pas seulement entre deux langues différentes, mais bien au sein d’une même langue. C’est le cas du français.</p>
<p>Pour lutter contre les préjugés et jugements de valeur, la posture des linguistiques à propos de la variation linguistique est de ne pas considérer la variété du français de France comme le modèle original, et toutes les autres variétés comme des dérivés. Ils défendent qu’un quelconque modèle original localisé dans un espace géographique déterminé n’existe pas. </p>
<p>Par conséquent, toutes les variétés du français sont des <a href="https://www.usherbrooke.ca/crifuq/fileadmin/sites/crifuq/contributions/MERCIER_Francais.pdf">déclinaisons</a> (d’un modèle virtuel) y compris celle, ou plutôt celles parlées en France. Vous viendrait-il à l’esprit que l’anglais américain soit une déformation de l’anglais (de référence qui serait) britannique ? Pourquoi l’accepter alors dans le cas du français ? </p>
<p>Une telle posture permet de lutter contre la représentation négative que, par exemple, certains Québécois ont du joual. Il s’agit d’un <a href="https://www.usherbrooke.ca/crifuq/fileadmin/sites/crifuq/contributions/CAJOLET_Sommets.pdf">registre de langue</a> (niveau populaire) au sein d’une variété linguistique (français québécois) plus large. Une variété linguistique est authentique si elle est parlée par un grand nombre d’individus, vivant dans un endroit géographique spécifique, sur une durée de temps conséquente. </p>
<p>Un niveau de langue n’est ni bon ni mauvais, elle est juste appropriée ou non à un contexte. Être compétent dans une langue n’est pas parler comme un livre tout le temps, c’est plutôt savoir adapter son discours à son contexte pour maximiser la connexion entre les interlocuteurs. </p>
<p>La variété linguistique que mes enfants (nés au Québec) utilisent avec nous est plus nuancée (une affrication moins marquée, une modulation moins forte des voyelles allongées finales, les voyelles/a/moins arrondies en syllabes finales, etc.). Par contre, en accord avec la <a href="https://www.usherbrooke.ca/crifuq/fileadmin/sites/crifuq/uploads/Remysen-2020__insecurite_accommodation_.pdf">théorie de l’accommodation linguistique</a>, quand je les entends parler à leur camarade de classe, je me demande si ce sont bien les nôtres ! </p>
<p>Pour paraphraser Nelson Mandéla, quand vous parlez à un individu dans une variété qui lui est étrangère, cela va dans sa tête, et si vous lui parlez dans une variété familière, cela va dans son cœur.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209780/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dalla Malé Fofana ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Un niveau de langue n’est ni bon ni mauvais, mais plutôt approprié ou non à un contexte. Il s’agit de savoir adapter son discours afin de maximiser la connexion entre les interlocuteurs.Dalla Malé Fofana, Chargé de cours, linguistique, sciences du langage et communication, Bishop's UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2149252023-10-13T13:32:56Z2023-10-13T13:32:56ZIndicateurs précoces de la démence : 5 changements de comportement à surveiller après 50 ans<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/551837/original/file-20230929-24-as88uw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=146%2C251%2C6514%2C4290&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des changements de comportement tels que l’apathie, la difficulté à maîtriser ses pulsions ou une attitude socialement inappropriée peuvent indiquer un risque de démence chez les personnes âgées de plus de 50 ans.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>On relie souvent la démence à des troubles de la mémoire, notamment lorsqu’une personne âgée pose les mêmes questions ou égare des objets. En réalité, les individus atteints de démence présentent non seulement des problèmes dans d’autres domaines de la cognition, comme l’apprentissage, la réflexion, la compréhension et le jugement, mais aussi des <a href="https://www.alzint.org/u/World-Alzheimer-Report-2021.pdf">changements de comportement</a>. </p>
<p>Il est important de comprendre ce qu’est la démence et comment elle se manifeste. Je n’imaginais pas que les comportements étranges de ma grand-mère étaient le signe avant-coureur d’une maladie bien plus grave. </p>
<p>Elle devenait facilement agitée si elle ne parvenait pas à accomplir des tâches telles que la cuisine ou la pâtisserie. Elle prétendait voir une femme dans la maison, alors qu’en réalité, il n’y avait personne. Elle se méfiait également des autres et cachait des objets dans des endroits bizarres. </p>
<p>Ces comportements ont persisté pendant un certain temps avant qu’un diagnostic de démence ne soit posé.</p>
<h2>Troubles cognitifs et comportementaux</h2>
<p>Lorsque les changements cognitifs et comportementaux interfèrent avec l’autonomie fonctionnelle d’un individu, celui-ci est considéré comme atteint de démence. En revanche, si ces changements n’entravent pas l’indépendance d’une personne, mais qu’ils affectent néanmoins ses relations et son rendement au travail, on parle respectivement de <a href="https://alzheimer.ca/sites/default/files/documents/maladies-apparentees_trouble-cognitf-leger.pdf">troubles cognitifs légers (TCL)</a> et de <a href="https://doi.org/10.1186/s13195-021-00949-7">trouble du comportement léger</a>. </p>
<p><a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC9169943/">Les troubles légers cognitifs et comportementaux peuvent se produire ensemble</a>, mais chez un tiers des personnes qui développent une démence de type Alzheimer, les symptômes associés au comportement surgissent <a href="http://dx.doi.org/10.1016/j.jagp.2019.01.215">avant le déclin cognitif</a>. </p>
<p>Il peut être utile de repérer ces changements de comportement, qui apparaissent plus tard dans la vie (50 ans et plus) et marquent un changement persistant par rapport à des habitudes bien ancrées, afin de mettre en œuvre des traitements préventifs avant que des symptômes plus graves ne se manifestent. En tant que doctorante en sciences médicales, mes recherches se concentrent sur les comportements problématiques qui surviennent à un âge avancé et qui indiquent un risque accru de démence. </p>
<h2>Cinq signes comportementaux à rechercher</h2>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/551071/original/file-20230928-17-jmy46j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Illustration de cinq changements de comportement pouvant indiquer un risque de démence" src="https://images.theconversation.com/files/551071/original/file-20230928-17-jmy46j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/551071/original/file-20230928-17-jmy46j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=525&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/551071/original/file-20230928-17-jmy46j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=525&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/551071/original/file-20230928-17-jmy46j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=525&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/551071/original/file-20230928-17-jmy46j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=659&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/551071/original/file-20230928-17-jmy46j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=659&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/551071/original/file-20230928-17-jmy46j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=659&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La détection des changements de comportement peut être utile pour mettre en œuvre des traitements préventifs avant l’apparition de symptômes plus graves.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Daniella Vellone)</span></span>
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</figure>
<p>Nous pouvons observer <a href="https://doi.org/10.3233%2FJAD-160979">cinq comportements principaux</a> chez nos amis et parents plus âgés qui <a href="https://doi.org/10.1186/s13024-023-00631-6">peuvent justifier une attention particulière</a>. </p>
<h2>1. Apathie</h2>
<p>L’<a href="https://doi.org/10.1002%2Ftrc2.12370">apathie</a> est une baisse d’intérêt, de motivation et de dynamisme.</p>
<p>Une personne apathique peut négliger ses amis, de sa famille ou de ses activités. Elle peut manquer de curiosité pour des sujets qui l’auraient normalement intéressée, perdre la motivation d’agir en fonction de ses obligations ou devenir moins spontanée et énergique. Elle peut également sembler manquer d’émotions par rapport à ce qui la caractérise et donner l’impression que plus rien ne lui importe.</p>
<h2>2. Dysrégulation affective</h2>
<p>La <a href="https://doi.org/10.1016/j.jad.2023.03.074">dysrégulation affective</a> comprend des symptômes d’humeur ou d’anxiété. Une personne qui présente une dysrégulation affective peut développer une tristesse ou une instabilité de l’humeur ou devenir plus anxieuse ou préoccupée par des choses routinières telles que des événements ou des visites.</p>
<h2>3. Maîtrise des pulsions</h2>
<p>La <a href="https://doi.org/10.1002%2Ftrc2.12016">perte de maîtrise des pulsions</a> est l’incapacité à retarder la satisfaction et à gérer son comportement ou ses pulsions.</p>
<p>Une personne qui présente une incapacité à gérer ses pulsions peut devenir agitée, agressive, irritable, capricieuse, contestataire ou facilement frustrée. Elle peut se montrer plus têtue ou rigide, au point de ne pas vouloir considérer d’autres points de vue et d’insister pour obtenir ce qu’elle veut. Parfois, elles peuvent développer une désinhibition sexuelle ou des agissements intrusifs, présenter des comportements répétitifs ou des compulsions, se lancer dans les jeux d’argent ou le vol à l’étalage, ou éprouver des difficultés à réguler leur consommation de substances telles que le tabac ou l’alcool.</p>
<h2>4. Inadaptation sociale</h2>
<p>L’<a href="http://dx.doi.org/10.1017/S1041610217001260">inadaptation sociale</a> comprend les difficultés à respecter les normes sociétales dans les interactions avec les autres.</p>
<p>Une personne socialement inadaptée peut perdre le discernement dont elle disposait auparavant quant à la façon de s’exprimer ou de se comporter. Elle peut cesser de se préoccuper des conséquences de ses paroles ou de ses actes sur les autres, discuter ouvertement de sujets intimes, parler à des inconnus comme s’ils lui étaient familiers, dire des grossièretés ou manquer d’empathie dans ses interactions avec autrui.</p>
<h2>5. Anomalies de perception ou de pensée</h2>
<p>Les <a href="https://doi.org/10.1038/s44220-023-00043-x">anomalies de perception ou de pensée</a> renvoient à des croyances et à des expériences sensorielles fortement ancrées dans l’esprit des gens.</p>
<p>Un individu dont les perceptions ou les pensées sont perturbées peut se méfier des intentions d’autrui ou craindre que d’autres lui fassent du mal ou lui volent ses biens. Il peut aussi dire qu’il entend des voix, parler à des personnes imaginaires ou voir des choses qui n’existent pas.</p>
<p>Avant de considérer l’un de ces comportements comme le signe d’un problème plus grave, il est important d’exclure certaines causes potentielles de changement de comportement, telles que les drogues ou les médicaments, d’autres maladies ou infections, les conflits interpersonnels ou le stress, ou encore la réapparition de symptômes psychiatriques associés à un diagnostic antérieur de troubles mentaux. En cas de doute, il est peut-être temps de consulter un médecin. </p>
<h2>Les effets de la démence</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un jeune homme entourant de ses bras un homme plus âgé" src="https://images.theconversation.com/files/551224/original/file-20230929-21-dz5kln.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/551224/original/file-20230929-21-dz5kln.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/551224/original/file-20230929-21-dz5kln.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/551224/original/file-20230929-21-dz5kln.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/551224/original/file-20230929-21-dz5kln.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/551224/original/file-20230929-21-dz5kln.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/551224/original/file-20230929-21-dz5kln.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Certains types de changements de comportement méritent une attention particulière.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Beaucoup d’entre nous connaissent quelqu’un qui a souffert de démence ou qui s’est occupé d’une personne atteinte de démence. Ce n’est pas surprenant, car on prévoit que cette maladie touchera un <a href="https://www.ctvnews.ca/health/nearly-one-million-canadians-will-live-with-dementia-by-2030-alzheimer-society-predicts-1.6056849#:">million de Canadiens d’ici 2030</a>.</p>
<p>Les personnes âgées de 20 à 40 ans peuvent penser qu’il leur reste des dizaines d’années avant de souffrir d’une telle pathologie, mais il est important de comprendre qu’il s’agit d’un processus qui implique plusieurs personnes. En 2020, des partenaires de soins – y compris des membres de la famille, des amis ou des voisins – ont consacré <a href="https://alzheimer.ca/sites/default/files/documents/Landmark-Study-1-Path-Forward-Alzheimer-Society-of-Canada-2022-wb.pdf">26 heures par semaine</a> à aider les Canadiens âgés atteints de démence. Cela équivaut à 235 000 emplois à temps plein ou à 7,3 milliards de dollars par an. </p>
<p>Ces chiffres devraient tripler d’ici 2050. Il est donc important de chercher des moyens de compenser ces prévisions en prévenant ou en retardant la progression de la démence.</p>
<h2>Identifier les personnes à risque</h2>
<p>Bien qu’il n’existe actuellement aucun moyen de guérir la démence, des progrès ont été réalisés dans la <a href="https://alzheimer.ca/fr/au-sujet-des-troubles-neurocognitifs/comment-traiter-les-troubles-neurocognitifs">mise au point de traitements</a> qui <a href="https://alzheimer.ca/fr/au-sujet-des-troubles-neurocognitifs/suis-je-atteint-dun-trouble-neurocognitif/comment-obtenir-un-0">peuvent être plus efficaces à un stade précoce de la maladie</a>. </p>
<p>D’autres recherches sont nécessaires pour comprendre les symptômes de la démence au fil du temps ; par exemple, l’<a href="https://www.can-protect.ca/">étude en ligne CAN-PROTECT</a> évalue de nombreux facteurs contribuant au vieillissement du cerveau. </p>
<p>En identifiant les personnes à risque de démence par la détection des changements cognitifs, fonctionnels et comportementaux survenant plus tard dans la vie, on peut non seulement prévenir les conséquences de ces changements, mais aussi éventuellement la maladie ou sa progression.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214925/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Daniella Vellone ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La démence ne se manifeste pas uniquement par des troubles de la mémoire. Les personnes qui en sont atteintes peuvent également présenter des problèmes d’apprentissage, de compréhension et de jugement, mais aussi des changements de comportement.Daniella Vellone, Medical Science and Imaging PhD Candidate, University of CalgaryLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2055312023-10-05T13:26:38Z2023-10-05T13:26:38ZLa Banque de cerveaux Douglas-Bell Canada : une mine d’or pour la recherche sur les maladies du cerveau<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/552342/original/file-20231005-26-rmh9lm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4000%2C1508&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les méthodes expérimentales à notre disposition aujourd’hui permettent ni plus ni moins de « déconstruire » le cerveau en ses composantes élémentaires afin d’en comprendre les fonctions et les dysfonctions.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Le cerveau fascine les humains depuis toujours. </p>
<p>Mais nos connaissances scientifiques sur ces quelques 1,3 kg de substance fragile enchâssée dans la boîte crânienne ont longtemps été fragmentaires. Or, les percées techniques fulgurantes des dernières années ont inauguré en quelque sorte l’âge d’or des neurosciences moléculaires. </p>
<p>Ces percées ont aussi été permises grâce aux banques de cerveaux, qui conservent des cerveaux humains dans les meilleures conditions pour la recherche scientifique. Nous avons ici à Montréal l’une des plus importantes au monde, la Banque de cerveaux Douglas-Bell Canada (BCDBC), qui a été <a href="https://douglasbrainbank.ca/fr/a-propos">fondée en 1980 à l’Hôpital Douglas</a>. </p>
<p>La BCDBC, qui reçoit plusieurs cerveaux chaque mois, a récolté à ce jour plus de 3 600 spécimens. Son équipe traite chaque année des dizaines de requêtes de tissus provenant de scientifiques du Québec, du Canada, et de l’étranger, préparant ainsi environ 2 000 échantillons pour la recherche. </p>
<p>Ces efforts ont permis, au cours des 40 dernières années, un nombre considérable de découvertes sur différentes maladies neurologiques et psychiatriques. </p>
<p>Professeur titulaire au Département de psychiatrie de l’Université McGill, chercheur au Centre de recherche Douglas et directeur de la BCDBC depuis 2007, je travaille en étroite collaboration avec le <a href="https://douglas.research.mcgill.ca/fr/gustavo-turecki-2/">Dr Gustavo Turecki</a>, codirecteur de la BCDBC et responsable du volet consacré aux maladies psychiatriques et au suicide.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/552153/original/file-20231004-17-mdh992.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=14%2C2%2C1535%2C1231&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="hémisphère cérébral" src="https://images.theconversation.com/files/552153/original/file-20231004-17-mdh992.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=14%2C2%2C1535%2C1231&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/552153/original/file-20231004-17-mdh992.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=475&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/552153/original/file-20231004-17-mdh992.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=475&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/552153/original/file-20231004-17-mdh992.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=475&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/552153/original/file-20231004-17-mdh992.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=596&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/552153/original/file-20231004-17-mdh992.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=596&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/552153/original/file-20231004-17-mdh992.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=596&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La Banque de cerveaux Douglas-Bell Canada, qui reçoit plusieurs cerveaux à chaque mois, a récolté à ce jour plus de 3 600 spécimens.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Naguib Mechawar)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<h2>Une petite histoire de la recherche sur le cerveau humain</h2>
<p>Ce n’est que vers la seconde moitié du XIX<sup>e</sup> siècle que les scientifiques commencent à identifier les éléments microscopiques qui composent le cerveau.</p>
<p>À cette époque, on le conserve pour la première fois dans le formol, une solution qui préserve les tissus biologiques afin de pouvoir les manipuler plus facilement et de les garder à long terme. </p>
<p>Parallèlement, on développe des instruments de précision et des protocoles permettant d’examiner les caractéristiques microscopiques du tissu nerveux. </p>
<p>Jusqu’au milieu du XX<sup>e</sup> siècle, on se contente surtout de conserver des cerveaux de patients, prélevés à l’autopsie, dans le but d’identifier de possibles changements macroscopiques ou microscopiques en lien avec leurs symptômes neurologiques ou psychiatriques. </p>
<p>C’est notamment ce que fait le neurologue allemand Alois Alzheimer, qui analyse le cerveau d’une de ses patientes atteintes de démence. En 1906, il décrit alors, pour la première fois, les lésions microscopiques qui caractérisent la maladie portant aujourd’hui son nom. </p>
<p>Ainsi, jusqu’à la fin des années 1970, de nombreuses collections de spécimens de cerveaux conservés dans le formol se bâtissent dans des milieux hospitaliers, un peu à la façon des anciens cabinets de curiosités. </p>
<p>Vers la fin du XX<sup>e</sup> siècle, les approches expérimentales permettant l’analyse à haute résolution de cellules et de molécules au sein de tissus biologiques se multiplient. </p>
<p>Il devient alors nécessaire de recueillir et de conserver des cerveaux humains, obtenus grâce au consentement de la personne ou de sa famille, dans des conditions compatibles avec les techniques scientifiques modernes.</p>
<p>On se met à congeler l’un des hémisphères cérébraux afin, notamment, de pouvoir en mesurer les différentes composantes moléculaires. L’autre hémisphère est fixé dans le formol pour des études anatomiques macroscopiques et microscopiques.</p>
<p>C’est dans ce contexte que fut créée la Banque de cerveaux Douglas-Bell Canada.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/552154/original/file-20231004-25-z5k7jp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Les locaux de la BCDBC" src="https://images.theconversation.com/files/552154/original/file-20231004-25-z5k7jp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/552154/original/file-20231004-25-z5k7jp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/552154/original/file-20231004-25-z5k7jp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/552154/original/file-20231004-25-z5k7jp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/552154/original/file-20231004-25-z5k7jp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/552154/original/file-20231004-25-z5k7jp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/552154/original/file-20231004-25-z5k7jp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">À Montréal se trouve l’une des plus importantes banques de cerveaux au monde, la Banque de cerveaux Douglas-Bell Canada, qui fut fondée en 1980 à l’Hôpital Douglas.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Naguib Mechawar)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<h2>De nouvelles approches expérimentales qui portent fruit</h2>
<p>Des chercheurs de pointe de nombreuses universités à travers le monde bénéficient des échantillons de la BCDBC pour faire progresser leurs recherches. Cela inclut, il va sans dire, plusieurs équipes québécoises.</p>
<p>C’est ainsi que le <a href="https://douglas.research.mcgill.ca/fr/judes-poirier-2/">Dr Judes Poirier</a>, du Centre de recherche Douglas, affilié à l’Université McGill, et son équipe ont découvert que le gène APOE4 constitue un <a href="https://doi.org/10.1016/0140-6736(93)91705-Q">facteur de risque de la maladie d’Alzheimer</a>. Plus récemment, l’équipe du <a href="https://crhmr.ciusss-estmtl.gouv.qc.ca/fr/chercheur/gilbert-bernier">Dr Gilbert Bernier</a>, professeur au Département de neurosciences de l’Université de Montréal, a découvert que les lésions caractéristiques de cette maladie sont associées à une <a href="https://doi.org/10.1038/s41598-018-37444-3">expression anormale du gène BMI1</a>.</p>
<p>Du côté des maladies psychiatriques, et plus particulièrement de la dépression, des progrès importants ont été réalisés tout récemment par le <a href="https://douglas.research.mcgill.ca/fr/groupe-mcgill-detudes-sur-le-suicide/">Groupe McGill d’Études sur le Suicide</a>. </p>
<p>Ainsi, en utilisant des méthodes de pointe permettant d’isoler et d’analyser les cellules du cerveau humain, l’équipe du Dr. Turecki est parvenue à identifier précisément les types de cellules dont la fonction est affectée chez des hommes <a href="https://doi.org/10.1038/s41593-020-0621-y">ayant souffert de dépression majeure</a>, puis de découvrir que les types cellulaires en cause dans cette maladie diffèrent <a href="https://doi.org/10.1038/s41467-023-38530-5">entre les hommes et les femmes</a>. </p>
<p>Ces approches expérimentales donnent lieu à des ensembles de données gigantesques pouvant être interrogés dans le cadre d’études subséquentes. C’est le cas, par exemple, de travaux menés dans mon laboratoire et ayant identifié des signes de changements persistants dans la neuroplasticité au sein du cortex préfrontal de personnes ayant un historique de <a href="https://doi.org/10.1038/s41380-021-01372-y">maltraitance infantile</a>. En effet, les études citées ci-dessus nous ont permis de découvrir au moins un des types cellulaires impliqués dans ce phénomène. </p>
<p>En somme, les méthodes expérimentales à notre disposition aujourd’hui permettent ni plus ni moins de « déconstruire » le cerveau en ses composantes élémentaires afin d’en comprendre les fonctions et les dysfonctions.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/552155/original/file-20231004-27-62uc6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Hémisphères cérébraux conservés dans le formol" src="https://images.theconversation.com/files/552155/original/file-20231004-27-62uc6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/552155/original/file-20231004-27-62uc6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/552155/original/file-20231004-27-62uc6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/552155/original/file-20231004-27-62uc6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/552155/original/file-20231004-27-62uc6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/552155/original/file-20231004-27-62uc6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/552155/original/file-20231004-27-62uc6y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Des chercheurs de pointe de nombreuses universités à travers le monde bénéficient des échantillons de la BCDBC pour faire progresser leurs recherches.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Naguib Mechawar)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>Identifier, prévenir, dépister et traiter</h2>
<p>C’est grâce au travail acharné et au dévouement de toute l’équipe de la BCDBC, ainsi qu’au soutien indéfectible de tous ses partenaires, de mécènes (souvent anonymes) et d’organismes subventionnaires, et particulièrement le FRQS et son <a href="https://reseausuicide.qc.ca/fr/">Réseau québécois sur le suicide, les troubles de l’humeur et les troubles associés</a>, que cette ressource inestimable a non seulement réussi à survivre, mais à se développer et à se hisser au rang des plus importantes banques de cerveaux au monde. </p>
<p>Il est permis de croire que la BCDBC aura dans les années à venir un rôle important à jouer dans l’identification de plus en plus précise des causes biologiques des maladies du cerveau, et donc de nouvelles cibles en vue de meilleures approches de prévention, de dépistage et de traitement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205531/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Naguib Mechawar a reçu des financements des IRSC, du CRSNG, de HBHL (Apogée) et du FRQS (ERA-NET NEURON et RQSHA). </span></em></p>À Montréal se trouve l’une des plus importantes banques de cerveaux au monde, la Banque de cerveaux Douglas-Bell Canada. Elle permet des découvertes sur différentes maladies neurologiques et psychiatriques.Naguib Mechawar, Neurobiologiste, Institut Douglas; Professeur titulaire, Département de psychiatrie, McGill UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.