tag:theconversation.com,2011:/nz/topics/psychologie-21636/articlespsychologie – The Conversation2024-03-28T08:58:50Ztag:theconversation.com,2011:article/2204292024-03-28T08:58:50Z2024-03-28T08:58:50ZPeut-on être trop heureux pour se préoccuper du climat ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/567573/original/file-20240102-29-1brw8i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le bien-être social participe à la prise de conscience climatique... mais seulement jusqu'à un certain point.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/homme-couple-amour-femme-9750932/">Koolshooters / Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>Notre bien-être est-il toujours bon pour la planète ? Le <a href="https://www.coe.int/t/dg3/socialpolicies/socialcohesiondev/source/Trends/Trends-20_fr.pdf">bien-être social</a> est un concept qui englobe à la fois la santé mentale et physique, les relations interpersonnelles ainsi que le sentiment d'appartenance à la communauté. Il est essentiel pour que les individus se sentent capables et motivés à agir. À cet égard, il constitue donc un levier précieux pour agir contre le changement climatique.</p>
<p>Mais en excès, il peut aussi se transformer en frein : car si aucune limite n’est mise, la quête d’un bien-être absolu par quelques-uns peut entraver la quête de durabilité de tous. Où tracer la ligne ? À partir de quand cet excès de bien-être peut-il avoir des effets délétères ?</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-liens-sociaux-sont-essentiels-pour-le-bien-etre-voici-sept-manieres-deviter-lisolement-205466">Les liens sociaux sont essentiels pour le bien-être. Voici sept manières d’éviter l’isolement</a>
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<p>Pour le comprendre, il faut déjà en finir avec le mythe de l’humain purement rationnel : <em>Homo œconomicus</em> reste un <em>Homo sapiens</em> guidé par la chimie de son cerveau. Effet rebond, inégalités sociales et <a href="https://theconversation.com/fr/topics/bulle-de-filtre-23254">bulles de filtres</a> sur les réseaux sociaux renforcent nos comportements les plus dommageables au plan environnemental.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/face-au-changement-climatique-faire-de-la-peur-un-moteur-et-non-un-frein-200876">Face au changement climatique, faire de la peur un moteur et non un frein</a>
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<p>Surtout, il convient de réintégrer les inégalités socio-économiques dans notre approche du progrès social. Des politiques publiques visant à l’amélioration du bien-être pourraient faire partie de la solution, à condition de cibler les populations qui en ont le plus besoin. Comprendre : à condition de ne pas alimenter de nouveaux comportements incompatibles avec la crise climatique chez les autres.</p>
<h2>Le bien-être social, bon pour la planète… jusqu’à un certain point</h2>
<p>La capacité des citoyens à agir face aux crises climatique et environnementale va dépendre de leurs compétences, de leurs motivations et de leurs envies personnelles. Autant de facteurs <a href="https://www.mdpi.com/2673-8392/2/3/79">influencés par le bien-être social</a>. Et de fait, la littérature scientifique suggère que les pays qui ont un niveau de bien-être social élevé <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0960148121000070">créent un environnement propice à l’engagement des citoyens</a> dans la lutte contre le changement climatique.</p>
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<p>En effet, les citoyens en bonne santé sont plus susceptibles de participer activement à des initiatives écologiques, tandis que ceux qui bénéficient d’un réseau social solide et d’un bon niveau d’éducation ont tendance à être mieux informés et à <a href="https://www.librairie-sciencespo.fr/livre/9780192893307-development-as-freedom-amartya-sen/">s’engager davantage dans des pratiques soutenables</a>. Le développement de la santé, de l’éducation ou de l’accès à Internet favorise aussi le <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0360544223011854">développement des énergies renouvelables</a>, par exemple.</p>
<h2>En finir avec <em>Homo œconomicus</em></h2>
<p>En 1992, l’économiste Manfred Max-Neef présentait une <a href="https://www.researchgate.net/figure/Matrix-of-Needs-and-Satisfiers-Max-Max-Neef-1992b-206-7_tbl2_237428304">matrice des neuf besoins humains fondamentaux</a>. On y retrouvait : l’affection, la compréhension, la créativité, l’identité, la liberté, les loisirs, la participation, la protection et la subsistance.</p>
<p>Pour répondre efficacement à ces besoins, Max-Neef identifiait quatre catégories existentielles, où se déclinent les neuf besoins précédents :</p>
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<li><p>l’être (soit des qualités comme le fait d’avoir une bonne santé physique ou mentale),</p></li>
<li><p>l’avoir (soit des choses telles que la nourriture, un logement…),</p></li>
<li><p>le faire (soit des actions, comme le fait de se reposer ou de travailler),</p></li>
<li><p>et enfin l’interaction (par exemple participer à la vie de la communauté)</p></li>
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<p>L’apport de Max-Neef a été de dépasser la vision qui prédominait jusqu’alors, consistant à considérer notre espèce comme <em>Homo œconomicus</em> – soit un individu rationnel jamais rassasié qui va privilégier l’accumulation de toujours plus de biens matériels, dont les besoins illimités ne seront jamais pleinement satisfaits.</p>
<p>Car au cœur de cette conception se trouve un dilemme crucial : une croissance illimitée du bien-être social de chacun est-elle souhaitable pour lutter contre le changement climatique ?</p>
<p>Les besoins fondamentaux tels que la subsistance, la protection, et la liberté sont globalement atteints dans de nombreux pays du monde, même si cela est encore loin d’être acquis partout : <a href="https://www.un.org/en/exhibits/page/sustainable-development-goals">selon les Nations unies</a>, 731 millions de personnes luttent encore pour satisfaire les besoins humains les plus élémentaires. En parallèle, dans des pays développés, de plus en plus d’individus ayant satisfait leurs besoins fondamentaux se tournent <a href="https://www.scirp.org/journal/paperinformation?paperid=108876">vers des expériences de consommation hédoniste</a>.</p>
<h2>Quand la recherche du plaisir atteint un point critique</h2>
<p>Le concept de Max-Neef se rapporte à des comportements observés dans le règne animal. Comme les humains, les autres mammifères adoptent des comportements qui leur procurent du plaisir, <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3004012/">ce qui suggère des similitudes dans le circuit de la récompense du cerveau</a>.</p>
<p>Le lien entre le plaisir anticipé et les récompenses retardées, comme démontré par des expériences sur la <a href="https://planet-vie.ens.fr/thematiques/animaux/systeme-nerveux-et-systeme-hormonal/le-circuit-de-la-recompense">réponse dopaminergique chez le singe</a>, met en évidence un mécanisme d’apprentissage et de motivation, qui existe chez l’homme comme chez le singe.</p>
<p>Le plaisir anticipé y est associé dans le cerveau à la libération de dopamine, <a href="https://www.cairn.info/revue-l-annee-psychologique-2022-2-page-339.htm">ce qui nous motive biologiquement à obtenir la récompense</a> souhaitée. Les gains matériels peuvent ainsi contribuer à notre bien-être en nourrissant des émotions positives ainsi que notre satisfaction psychologique.</p>
<p>Chez l’homme, cette tendance à rechercher le plaisir a atteint un point critique à travers l’émergence de la <a href="https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Folio/Folio-essais/La-Societe-de-consommation">société de consommation</a>. Les sociétés qui ont internalisé les valeurs du consumérisme ont atteint un stade du développement où elles tirent tellement de plaisir de leurs modes de vie qu’elles ne se rendent pas toujours compte du mal qu’ils leur causent.</p>
<p>Elles sont prises dans un <a href="https://books.google.fr/books?id=FS6sDwAAQBAJ&printsec=copyright">cycle sans fin d’extraction, de transformation, de production, de transport, de consommation et d’élimination</a>, juste pour satisfaire un besoin de plaisir.</p>
<h2>Bulles de filtre et effet rebond</h2>
<p>À l’heure du numérique, cette recherche du plaisir se joue désormais sur le terrain des réseaux sociaux. Chaque notification, partage ou « like » peut déclencher une petite libération de dopamine, <a href="https://amplifyingcognition.com/the-neuroscience-behind-social-media-dependence-and-how-to-overcome-it/">activant notre circuit de la récompense et renforçant notre engagement</a> sur ces plates-formes. Les algorithmes qui régissent nos fils d’actualité ne font pas autre chose : ils nous fournissent un flux de contenu personnalisé qui correspond à nos comportements et intérêts antérieurs, <a href="https://books.google.fr/books/about/The_Filter_Bubble.html?id=-FWO0puw3nYC">créant ainsi un effet de chambre d’écho</a>.</p>
<p>Par exemple, si votre activité sur les médias sociaux est centrée sur la « fast fashion », les voitures de luxe et les destinations de voyage exotiques, vous aurez moins de chances d’être exposés à des contenus sur les achats d’occasion, les véhicules électriques ou l’écotourisme local.</p>
<p>Cela illustre la manière dont les « bulles de filtre » peuvent renforcer les comportements préjudiciables à l’environnement. Elles nous permettent d’habiter un espace numérique réconfortant qui nous confronte rarement aux réalités inconfortables ou à l’urgence de la dégradation de l’environnement.</p>
<p>Il peut sembler contradictoire que l’amélioration du bien-être social entraîne une diminution de la sensibilisation du public. Mais il est facilement admis dans d’autres domaines, comme l’économie, qu’une amélioration technologique, en permettant une baisse des prix, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0921800914002055">stimule une hausse de la consommation dans un autre domaine</a> à travers un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2666784321000267">effet rebond indirect</a>. Ainsi, les consommateurs peuvent dépenser les économies réalisées grâce à leur nouvelle chaudière plus économe en énergie pour partir plus loin en vacances à l’étranger – et émettre davantage de CO<sub>2</sub> du fait du voyage en avion.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/leffet-rebond-quand-la-surconsommation-annule-les-efforts-de-sobriete-197707">L'effet rebond : quand la surconsommation annule les efforts de sobriété</a>
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<p>Comme <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1462901104000371">l’a souligné la chercheuse Brenda Boardmann</a> dans des travaux sur l’efficacité énergétique dans les foyers britanniques, les gains d’efficacité réalisés ont été effacés par la multiplication des appareils et leur gain de taille et de puissance. « À un moment donné, la société devra reconnaître que des niveaux de vie toujours plus élevés menacent notre capacité à limiter le changement climatique et, par conséquent, réduisent notre qualité de vie future », écrivait-elle.</p>
<h2>Prioriser les personnes les plus défavorisées</h2>
<p>Tout ceci possède de fortes implications politiques. Il peut être éclairant de transposer ici le concept de « iatrogénie », terme médical où il s’agit des effets secondaires involontaires provoqués par un traitement ou une intervention médicale. Car si le traitement (dans ce cas, la recherche perpétuelle du bien-être) non seulement ne guérit pas (ou ne sensibilise pas à l’environnement) mais conduit en fait à de nouveaux problèmes (tels que l’aggravation des crises climatique et environnementale), peut-être devrions-nous arrêter ce traitement ?</p>
<p>C’est la question que nous posons, <a href="https://nouveautes-editeurs.bnf.fr/accueil?id_declaration=10000000900241&titre_livre=Happy_End">inspirés par les réflexions de Nicolas Hazard</a>, qui traçait un parallèle entre croissance économique et traitement médical – et leurs effets indésirables pour la santé du patient ou pour celle de la planète.</p>
<p>Autrement dit, les gouvernements n’ont pas besoin d’accroître éternellement le bien-être social pour atténuer le changement climatique. Au contraire, une approche plus ciblée pourrait être adoptée en donnant la priorité aux groupes sociaux dont les niveaux de bien-être sont plus faibles. Cette stratégie garantirait une allocation plus efficace des ressources pour maximiser l’impact environnemental, tout en améliorant le développement social global et le bien-être individuel de ces populations.</p>
<p>Prenons un exemple concret. Le choix de passer d’un <a href="https://theconversation.com/stationnement-des-suv-nos-voitures-sont-elles-devenues-obeses-222547">SUV gourmand en essence à une voiture compacte et économe</a> en carburant est une décision écologique cohérente pour la planète, mais elle n’est peut-être pas à la portée de tout le monde, surtout si vous avez un budget serré et que vous dépendez de votre véhicule pour vos déplacements quotidiens.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/567600/original/file-20240102-19-nrcu9p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/567600/original/file-20240102-19-nrcu9p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/567600/original/file-20240102-19-nrcu9p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/567600/original/file-20240102-19-nrcu9p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/567600/original/file-20240102-19-nrcu9p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/567600/original/file-20240102-19-nrcu9p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/567600/original/file-20240102-19-nrcu9p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Changer de véhicule pour acquérir par exemple une voiture électrique n’est pas un geste écologique à la portée de tout le monde.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Rathaphon Nanthapreecha</span></span>
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<p>En réalité, il existe un lien direct entre le niveau de vie et la pression sur l’environnement. Plus une personne sera riche, plus elle aura tendance à polluer, <a href="https://wir2022.wid.world/www-site/uploads/2021/12/Summary_WorldInequalityReport2022_French.pdf">comme l’a montré un rapport publié en 2022</a>. Au niveau mondial, les 10 % de personnes les plus riches sont responsables de près de la moitié des émissions de gaz à effet de serre, alors que les 50 % les plus pauvres n’en sont responsables qu’à hauteur de 12 %.</p>
<p>Pour susciter un changement plus large, il est important de créer une vision convaincante de l’avenir qui incite les gens à prendre part au changement. Adopter un régime végétarien ou conduire un véhicule électrique sont des mesures importantes, mais insuffisantes si notre volume de consommation total reste inchangé. Et cela d’autant plus si ces options plus respectueuses de l’environnement ne sont accessibles qu’à quelques privilégiés.</p>
<p>Un changement de paradigme s’impose, qui nécessite des choix politiques forts et l’union des consommateurs autour des préoccupations écologiques. Nous devons construire un <a href="https://www.editions-harmattan.fr/livre-justice_environnementale_vers_de_nouvelles_injustices_sociales_damien_bazin-9782343176741-63583.html">cadre écologique inclusif qui reconnaisse les besoins de tous</a> sans marginaliser les comportements individuels ni ignorer nos différences.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220429/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Doctorante à l'Université Côte d'Azur, membre du Laboratoire GREDEG-CNRS et membre du laboratoire LEGI de l'Ecole Polytechnique de Tunisie, Université de Carthage. </span></em></p>Le concept de bien-être social permet de comprendre pourquoi, en dépit des progrès réalisés pour répondre aux besoins humains les plus fondamentaux, la crise climatique est toujours là.Abir Khribich, Université Côte d’AzurLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2239232024-03-26T11:24:12Z2024-03-26T11:24:12ZRéseaux sociaux : quels usages favorisent le bien-être ?<p>Les <a href="https://theconversation.com/fr/search?q=r%C3%A9seaux+sociaux+">réseaux sociaux</a> ont « un impact sur le développement affectif, sensoriel, cognitif d’un enfant ». <a href="https://theconversation.com/faut-il-avoir-peur-des-ecrans-retour-sur-une-annonce-presidentielle-224456">Ces paroles sont celles du président Emmanuel Macron</a> qui appelle à mettre en œuvre des recommandations pour « le bon usage des écrans […] parce qu’il en va de l’avenir de nos sociétés et de nos démocraties ».</p>
<h2>Quel impact psychologique de l’excès de médias numériques ?</h2>
<p>Mais comment éduquer les enfants si les parents sont eux-mêmes très souvent devant des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/ecrans-52265">écrans</a> ? Cette question est d’autant plus importante que des recherches ont montré que <a href="https://theconversation.com/mobile-deprime-et-e-anxiete-quand-les-reseaux-sociaux-nous-rendent-malades-84986">nombres d’usages des écrans, et surtout des réseaux sociaux, sont également liés à des problèmes psychologiques chez les adultes</a> et ce, sans même que les utilisateurs aient conscience de ces liens.</p>
<p>Mais il y a une bonne nouvelle : on peut se protéger de ces problèmes et les <a href="https://www.dunod.com/connectes-et-heureux-du-stress-digital-au-bien-etre-numerique-du-stress-digital-au-bien-etre">solutions</a> ne passent pas nécessairement par la diminution du temps d’écran.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/578916/original/file-20240229-16-5yncpq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>D’une manière globale, des études sur de larges populations montrent que plus on utilise les médias numériques (smartphones, Internet, réseaux sociaux, jeux vidéo…) et plus on est susceptible de souffrir de problèmes psychologiques (émotions négatives, anxiété, symptômes dépressifs…).</p>
<p>Les récentes recherches montrent que si les liens entre les utilisations de ces médias et l’altération du bien-être sont significatifs, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33187873">l’ampleur n’est tout de même pas très élevée</a>.</p>
<p>Par exemple, chez les adolescents, jusqu’à présent, les <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/2167702621994549">écrans ne causeraient pas le « tsunami délétère »</a> que certains annoncent parfois.</p>
<p>Cependant, ces résultats globaux masquent de grandes différences entre individus, certains seraient plus touchés que d’autres. Analysons les deux grands processus impliqués dans les états affectifs négatifs et les altérations du bien-être.</p>
<h2>Se comparer sur les réseaux présente des effets délétères</h2>
<p>Dans notre vie, se comparer aux autres est un besoin social fondamental qui permet d’obtenir des informations sur soi, de s’autoévaluer et de construire son identité sociale.</p>
<p>Si ce processus, normal, est souvent mis en œuvre de manière automatique, c’est-à-dire non intentionnelle et non consciente dans notre vie quotidienne, il est <a href="https://econtent.hogrefe.com/doi/full/10.1027/1864-1105/a000304">mis en œuvre de la même manière sur les réseaux sociaux</a>. Toutefois, sur les réseaux, chacun essaye de présenter l’image de soi et ses activités d’une manière fortement valorisée. Les photos sont, par exemple, judicieusement construites et travaillées dans ce but.</p>
<p>Nombreuses sont alors les comparaisons en notre défaveur : à partir de son profil et de ses posts, nous allons considérer que telle personne, que nous connaissons plus ou moins, est « mieux que nous » (sur le plan physique, sur le plan de ses compétences dans la vie…) ou a « une plus belle vie que la nôtre ».</p>
<p>Ainsi, comme notre image de soi et notre estime personnelle est construite à la suite de nos interactions avec les autres, ces comparaisons dites ascendantes, peuvent altérer notre propre image et <a href="https://psycnet.apa.org/record/2016-45315-074">augmenteraient tristesse et mal-être</a>.</p>
<h2>Attention aussi aux situations de vulnérabilité accrue !</h2>
<p>Dans le processus de comparaison, les récentes recherches montrent que nous sommes différents les uns des autres. Examinons quelques cas où les personnes se comparent plus que les autres sur les réseaux sociaux, ce qui les rend plus vulnérables aux problèmes psychologiques.</p>
<p>En effet, il faut savoir que certains individus ressentent davantage, dans leur vie, le besoin de se comparer aux autres. Ils vont alors, <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/0144929X.2018.1545049">bien plus souvent que les autres, se comparer sur les réseaux sociaux</a> et ce, sans même qu’ils en aient conscience.</p>
<p>D’autre part, certaines personnes sont plus « matérialistes » que d’autres (les matérialistes pensent que le bonheur réside dans la possession matérielle). Globalement, elles passent plus de temps sur les réseaux sociaux que les personnes « non matérialistes ». Dans les informations qu’elles postent, elles affichent plus souvent que les autres les biens qu’elles possèdent et vont fortement se comparer pour entrer « en compétition » avec les autres et tenter de les surpasser. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0747563217300687">Les conséquences sont souvent délétères pour elles</a>.</p>
<p>On sait également que les personnes qui n’ont pas une bonne image d’elles-mêmes, plutôt anxieuses, timides et hypersensibles sont également fortement sensibles aux comparaisons sociales.</p>
<p>Sur les réseaux sociaux, des <a href="https://econtent.hogrefe.com/doi/full/10.1027/1864-1105/a000304">études</a> ont montré qu’elles utilisent des stratégies de présentation de soi plus valorisantes afin de diminuer l’angoisse sociale et d’accroître leur estime de soi.</p>
<p>Ces personnes sont également plus sensibles aux commentaires des autres qui, s’ils sont positifs, les rassurent quant à leur appartenance à des groupes sociaux et à leur identité sociale. À l’inverse, des commentaires négatifs altèrent facilement leur bien-être.</p>
<p>D’autres recherches ont également montré que plus les personnes présentent des <a href="https://psycnet.apa.org/record/2024-29223-001">symptômes dépressifs</a>, plus elles se comparent aux autres. Elles entrent ensuite dans un cercle vicieux : plus elles se comparent et plus cela augmente leurs symptômes dépressifs initiaux.</p>
<h2>Développer son intelligence numérique plutôt que diminuer son temps d’écran</h2>
<p>On comprendra, dès lors, qu’une première solution n’est pas de diminuer le temps d’écran mais davantage de modifier la manière d’utiliser les médias numériques et notamment les réseaux sociaux. Globalement, le défi pour l’être humain aujourd’hui est de mieux s’adapter à ce nouvel environnement digital en développant une nouvelle forme d’intelligence : l’intelligence numérique.</p>
<p><a href="https://www.dunod.com/connectes-et-heureux-du-stress-digital-au-bien-etre-numerique-du-stress-digital-au-bien-etre">Celle-ci est définie</a> comme la capacité à bien s’adapter, grâce à des procédures mentales spécifiques, à un environnement numérique en mutation permanente et à interagir de manière optimale avec cet environnement pour satisfaire nos besoins psychologiques, et sociaux. Et ce, tout en préservant, voire en améliorant notre santé physique et mentale.</p>
<p>Ainsi, une fois que l’usager prend conscience du processus de comparaison à l’œuvre sur les réseaux sociaux, il peut mettre en place des « stratégies cognitives » conscientes pour corriger les conséquences potentiellement délétères pour lui.</p>
<p>Il peut par exemple chercher, d’une part, à diminuer le temps qu’il passe à regarder les infos que les autres postent sur eux-mêmes pour se valoriser, et d’autre part, se construire un “beau profil” et poster des informations sur lui-même dont il pourra être fier, aussi bien sur un plan personnel que social. En effet, <a href="https://www.liebertpub.com/doi/abs/10.1089/cyber.2009.0411">poster des informations valorisantes pour soi contribue à améliorer son estime personnelle</a>.</p>
<h2>Des « usages passifs » qui nuisent aux relations avec nos proches</h2>
<p>Le deuxième processus impliqué dans les états affectifs négatifs et l’altération du bien-être concerne les relations que nous entretenons sur les réseaux sociaux avec nos proches, c’est-à-dire les personnes psychologiquement et socialement importantes pour nous (famille, amis chers).</p>
<p>Les <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/psychologie/developpement-personnel/ces-liens-qui-nous-font-vivre_9782415003685.php">récentes recherches</a> montrent que le bien-être dépend avant tout des relations positives et chaleureuses que nous établissons avec nos proches.</p>
<p>Or, de <a href="https://academic.oup.com/jcmc/article/24/5/259/5583692">nombreuses pratiques sur Internet</a> nuisent à ses relations si précieuses pour nous. C’est notamment le cas des jeux vidéo qui se jouent seul ou avec des inconnus en ligne. De même, lorsque nous passons du temps à naviguer sur les réseaux sociaux simplement pour lire ou regarder les posts ou vidéos mis en ligne par des individus que nous ne connaissons pas ou peu. C’est ce que les chercheurs nomment les « usages passifs ». Autant de temps non consacré à interagir avec nos proches.</p>
<h2>Émoticônes, vocaux et autres modes de partage positifs</h2>
<p>À l’inverse, toutes les pratiques qui favorisent les relations sociales et affectives avec les proches comme des appels téléphoniques, les messages vocaux (entendre la voix d’un proche aimé apporte des émotions positives) ou écrits (les émoticônes affectivement chargés transmettent « de bonnes émotions »).</p>
<p>Pour être précis, les <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/09637214211053637">relations qui accroissent le plus le bien-être</a> sont celles qui, d’une part, sont perçues comme réciproques, chacun montrant de l’intérêt pour l’autre, et, d’autre part, sont perçues comme véritablement chaleureuses.</p>
<p>De même, les vidéos et les divertissements sont bénéfiques lorsqu’ils favorisent l’interaction avec les proches en permettant de vivre des expériences socio-émotionnelles positives qui rapprochent affectivement.</p>
<p>Par exemple, lorsque les divertissements sont regardés ensemble en présentiel, offrant alors des moments de partages sociaux agréables lors desquels, par exemple, on rit ensemble, ou lorsqu’ils font l’objet d’un partage en ligne où on sait que nous allons surprendre ou faire rire nos proches, par écrans interposés.</p>
<p>Enfin, n’oublions pas que les médias numériques facilitent également les rencontres en présentiel (sorties, soirées…) avec les proches. Ainsi, s’ils sont bien utilisés, les médias numériques sont bénéfiques pour le bien-être, nous donnent le sentiment que nous sommes bien intégrés socialement et favorisent les relations affectives chaleureuses avec ceux que nous apprécions.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223923/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Didier Courbet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Poster des informations qui nous valorisent plutôt que de se comparer les uns aux autres ou encore privilégier les moments de partage… Quand le bon usage des réseaux sociaux favorise le bien-être.Didier Courbet, Professeur et Chercheur en Sciences de la Communication, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2228292024-03-12T16:09:45Z2024-03-12T16:09:45ZEnfants surdoués : de quoi le « haut potentiel » est-il le nom ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/580500/original/file-20240307-16-3i0hjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C5%2C994%2C660&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Faut-il proposer aux enfants dits "précoces" ou "surdoués" des parcours spécifiques ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/shes-way-clever-her-age-shot-2146625927">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Aujourd’hui, qui n’a jamais entendu parler de « HPI » – ou haut potentiel intellectuel ? Popularisé récemment par une <a href="https://www.allocine.fr/series/ficheserie_gen_cserie=25616.html">série télévisée</a>, cet acronyme est utilisé depuis les années 2010 pour désigner ce qu’on appelait jusqu’alors les « surdoués » ou, au XIX<sup>e</sup> siècle, les enfants prodiges.</p>
<p>Ce « haut potentiel », même les spectateurs néophytes de la série savent qu’il est mesuré par un test d’intelligence, permettant d’évaluer le QI – ou quotient intellectuel –, nombre un brin magique censé prédire la réussite scolaire ou professionnelle.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/scientifiquement-le-hpi-nexiste-pas-184606">Scientifiquement, le HPI n’existe pas</a>
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<p>Dans le même temps, les chercheurs en psychologie sont fort embarrassés pour définir l’intelligence. Car tant le QI que le « haut potentiel » – par convention, un QI au moins égal à 130 (ce qui représenterait, par construction, <a href="https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-telephone-sonne/tous-haut-potentiel-intellectuel-2697000">2,3 % de la population</a> soit environ, en France, 1 550 000 personnes) – sont des notions mobilisées essentiellement par des psychologues praticiens qui ont à se prononcer soit pour des recrutements dans les entreprises, soit pour des décisions pédagogiques dans le milieu éducatif.</p>
<p>Même s’il n’existe <a href="https://www.eyrolles.com/Entreprise/Livre/l-intelligence-ca-s-apprend-nbsp--9782377474516/">pas de consensus scientifique chez les spécialistes sur ce que signifie le terme même d’intelligence</a>, l’intérêt des tests, aux yeux du grand public, vient de leur corrélation statistique avec la réussite scolaire, et en général professionnelle. Mais c’est sans doute cela l’essentiel…</p>
<h2>Un contexte social « porteur »</h2>
<p>Depuis une cinquantaine d’années, des <a href="https://www.librairie-ledivan.com/ebook/9782707337634-la-gestion-des-risques-robert-castel/">chercheurs comme Robert Castel</a> décrivent une tendance lourde à renvoyer à la psychologie ou à la psychiatrie la gestion des problèmes sociaux. L’institution scolaire, qui entend prendre en compte de plus en plus les spécificités des enfants – au début des années 2000, Ségolène Royal parlait ainsi d’« école pour chacun » – fait preuve d’une <a href="https://journals.openedition.org/lectures/16569">« médicalisation décomplexée »</a>, particulièrement depuis les années 1990.</p>
<p>Cette évolution conduit souvent à interpréter les <a href="https://theconversation.com/lechec-scolaire-histoire-et-invention-dune-notion-217943">échecs scolaires</a> en termes de défaillances personnelles. Les enfants qui peinent à l’école sont nombreux à être adressés à des spécialistes et <a href="https://theconversation.com/dyslexique-hyperactif-hpi-ces-diagnostics-qui-se-multiplient-en-milieu-scolaire-161530">à être étiquetés comme « dys »</a> – dyslexique, dyscalculique…</p>
<p>C’est au nom de ce « droit à la différence » que des parents convaincus des capacités exceptionnelles de leur enfant se regroupent en association (notamment l’association nationale pour les enfants surdoués (ANPES), créée en 1971) et <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/la_petite_noblesse_de_l_intelligence-9782707173072">engagent un combat vigoureux contre les méfiances du Ministère et des enseignants concernant la notion perçue comme élitiste de surdoué</a>, afin de faire reconnaître cette autre forme de spécificité.</p>
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<figcaption><span class="caption">Wilfried Lignier – La petite noblesse de l’intelligence, une sociologie des enfants surdoués (Librairie Mollat, interview en 2012).</span></figcaption>
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<p>Ces parents mettent en avant le fait qu’un enfant trop brillant rencontre souvent des problèmes à l’école, souffre de sa situation et devrait donc pouvoir bénéficier de parcours ou de traitements spécifiques. Ils finissent par être entendus, et le Ministère admet (au seuil des années 2000) que ces enfants qu’il préfère appeler « précoces » (expression euphémisée de la supériorité intellectuelle) peuvent éprouver des problèmes.</p>
<p>Dans la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000259787/">loi « Pour l’avenir de l’école » de 2005</a>, il est écrit que des « aménagements appropriés sont prévus au profit des élèves intellectuellement précoces ou manifestant des aptitudes particulières, afin de leur permettre de développer pleinement leurs potentialités ».</p>
<h2>Les parents d’élèves qui contestent les décisions de l’institution scolaire</h2>
<p>Dans un contexte de concurrence pour des places scolaires ou sociales inégalement prestigieuses et inégalement attractives, ces parents vont porter une demande d’évaluation capable d’asseoir un pronostic sur les performances à venir. L’objectif est de faire bénéficier leur enfant d’un traitement particulier, permettant d’optimiser son cursus scolaire.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/legalite-scolaire-un-enjeu-de-survie-pour-la-democratie-150254">L’égalité scolaire, un enjeu de survie pour la démocratie</a>
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<p>Le diagnostic de précocité, posé par un psychologue, le plus souvent dès l’école primaire, suit la demande de parents convaincus que leur enfant a des besoins particuliers et des qualités mal appréhendées par les maîtres.</p>
<p>Ces parents, en général bien plus diplômés que l’ensemble de la population, sont à l’aise avec la culture psychologique, et se sentent en <a href="https://www.ladn.eu/nouveaux-usages/non-votre-enfant-nest-pas-hpi-vous-etes-juste-riche/">droit de contester l’institution scolaire</a>. Armés d’un test de QI délivrant le verdict de « haut potentiel », ils n’hésitent pas à exercer des pressions pour amener les enseignants à se plier à leurs souhaits, concrètement, à obtenir pour leur enfant un saut de classe ou des aménagements de scolarité.</p>
<p>Aujourd’hui, certains parents défendent véritablement, non sans moyens matériels, car il faut payer pour faire tester son enfant, une <a href="https://www.cairn.info/revue-politix-2011-2-page-179.htm">« cause » de l’intelligence</a> (selon la formule de Wilfried Lignier), fondée sur l’usage scolaire du diagnostic psychologique. Il s’agit de fait, grâce à cette ressource présentée comme indiscutable d’un QI élevé, d’une stratégie de distinction, justifiée par le caractère crucial de la réussite scolaire.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/reussite-scolaire-faut-il-croire-au-don-pour-les-langues-etrangeres-207247">Réussite scolaire : faut-il croire au don pour les langues étrangères ?</a>
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<p>On défend ainsi la nécessité d’une prise en charge spécifique de ces enfants en arguant <a href="https://www.francetvinfo.fr/societe/education/la-societe-ne-voit-pas-leur-souffrance-pourquoi-la-scolarisation-des-enfants-precoces-releve-souvent-du-parcours-du-combattant_2934209.html">du fait que ces « surdoués » peuvent se retrouver en souffrance</a>, même si en réalité l’immense majorité des élèves ainsi étiquetés connaitra des <a href="https://www.ouest-france.fr/sante/psycho/enfants-hpi-de-la-legende-noire-des-surdoues-aux-idees-recues-on-demele-le-vrai-du-faux-27e2af2e-9002-11ed-8732-c929ccc6462c">scolarités excellentes</a>. Ces stratégies de parents pour qui l’institution devrait être à leur service s’inscrivent dans la droite ligne de l’individualisation croissante des parcours scolaires.</p>
<h2>Qu’est-ce que les QI mesurent au juste ?</h2>
<p>Il reste qu’au-delà de cette quête du testing, on ne sait pas trop ce qui est mesuré. <a href="https://presse.inserm.fr/canal-detox/le-qi-une-mesure-fiable-de-lintelligence-vraiment/">Les tests de QI</a> entendent donner de l’intelligence d’une personne une mesure unique, épousant la conception commune d’une intelligence qui caractériserait chacun, au même titre que les traits physiques, chacun en ayant plus ou moins.</p>
<p>Le premier test d’intelligence construit en 1905 par le <a href="https://www.cerveauetpsycho.fr/sd/histoire-neurosciences/alfred-binet-ou-les-premices-du-qi-1347.php">psychologue Alfred Binet</a> visait avant tout à détecter les enfants incapables de suivre l’enseignement normal, par des exercices variés recouvrant ce qui est en fait une « intelligence de l’écolier ».</p>
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<figcaption><span class="caption">Diagnostics HPI : haute arnaque potentielle (Libération, juin 2022)</span></figcaption>
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<p>Aujourd’hui, les tests d’intelligence sont toujours construits par rapport à ce qu’exige l’école : des capacités verbales, visuo-spatiales, le raisonnement, la mémoire, la vitesse… Le plus utilisé d’entre eux, le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Wechsler_Intelligence_Scale_for_Children">WISC</a>, permet de situer les enfants parmi leur groupe d’âge, autour d’un score moyen défini par convention à 100, la majorité se situant entre 70 et 130, seuls les HPI dépassant la borne supérieure. Le score est donc un classement entre enfants, par rapport aux capacités exigées aujourd’hui par l’école telle qu’elle est.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-les-eleves-interpretent-ils-les-ecarts-de-reussite-en-classe-151402">Comment les élèves interprètent-ils les écarts de réussite en classe ?</a>
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<p>D’aucuns soulignent que nombre de qualités comme la créativité ou l’empathie échappent totalement à cette mesure, qui est aussi étroite que la définition du mérite scolaire lui-même. Mais l’école doit classer, et elle le fait sur la base de critères faciles à mesurer ! Les tests « fabriquent » donc une mesure très dépendante de l’école, au risque d’entériner un fantastique gaspillage de talents et d’enfoncer pour la vie certains enfants au vu de <a href="https://www.uga-editions.com/menu-principal/actualites-nouveautes/a-paraitre/l-intelligence-ca-s-apprend--1320285.kjsp">performances qui s’avèrent pourtant très flexibles dans le temps</a> et selon les pratiques pédagogiques des enseignants.</p>
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<p>Même si les débats sont récurrents sur l’explication de ce « plus ou moins » – ces différences interindividuelles sont-elles innées ou acquises ?-, le score obtenu au test de QI évoque irrésistiblement l’idée de don, renvoyant à l’ordre de la nature. Avec des incidences politiques évidentes : mesurer l’intelligence a pour finalité, dans la pratique, d’affecter les personnes là où serait leur place « naturelle », du moins dans le parcours scolaire adéquat.</p>
<p>Alors que les enjeux autour de la notion de haut potentiel prennent aujourd’hui une importance sociale sans commune mesure avec le caractère souvent fragile des instruments et des travaux sur lesquels ils s’appuient, il est important de <a href="https://journals.openedition.org/insaniyat/2560">relancer le débat sur la mesure de l’intelligence et ce qu’on en fait</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222829/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marie Duru-Bellat ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La notion de haut potentiel est en vogue et prend aujourd’hui une importance sociale sans commune mesure avec la fragilité des instruments et des travaux sur lesquels elle s’appuie.Marie Duru-Bellat, Professeure des universités émérite en sociologie, Centre de recherche sur les inégalités sociales (CRIS), Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2251062024-03-11T16:13:30Z2024-03-11T16:13:30ZPsychologie des foules : loin des idées reçues, des comportements altruistes et raisonnables<p>Dans « Le Pluriel » (1966), Georges Brassens chante que « le pluriel ne vaut rien à l’homme et sitôt qu’on est plus de quatre on est une bande de cons ». La même année, Jean Ferrat lui répondra dans « En groupe, en ligue, en procession » que « l’on peut être seul et con, et que dans ce cas, on le reste ». Ce qui pourrait ici ne paraître qu’un duel amusé entre chanteurs populaires révèle une sorte de lieu commun de notre « psychologie naïve », c’est-à-dire de la façon dont on attribue des traits aux autres (ici, aux groupes) et dont on explique leur comportement.</p>
<p>Brassens n’est pas le seul à craindre la foule et la multitude. Dans le journal <em>Le Gaulois</em> (1882) et dans un article intitulé « Les foules », Guy de Maupassant avoue se méfier de ces foules qui mettraient à mal le contrôle de l’individu sur lui-même, faisant</p>
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<p>« cesser à l’homme d’être un homme pour faire partie d’une foule, noyant la volonté individuelle dans la volonté commune comme une goutte d’eau se mêle à un fleuve ».</p>
</blockquote>
<p>En psychologie scientifique, cette notion renvoie à la <a href="https://psycnet.apa.org/record/1976-20842-001">déindividuation</a>, mise en lumière par Diener dans une expérience dans laquelle on observe davantage de vol de bonbons et d’argent par des enfants lorsque ceux-ci se trouvent en groupe. La foule, puisqu’elle favorise l’anonymat, permettrait aux individus qui la composent de ne plus être identifiables, de ne plus avoir à souffrir d’une mauvaise réputation, et donc de se laisser aller à des actions immorales.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/dix-conseils-pour-survivre-pendant-un-mouvement-de-foule-110259">Dix conseils pour survivre pendant un mouvement de foule</a>
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<p>L’anonymat n’est pas la seule raison de l’immoralité de l’individu en foule. C’est aussi (ou plutôt) parce que la présence d’autrui les <a href="https://psycnet.apa.org/record/1981-25739-001">empêcherait de se contrôler</a> que les individus peuvent se montrer alors sous le plus mauvais jour.</p>
<h2>Une petite histoire de la psychologie de la foule</h2>
<p>Avant même Diener, l’idée que la foule suspend la capacité des individus à s’autoréguler faisait partie de notre psychologie naïve de la foule. C’est notamment autour de travaux sur les foules qui produisent des crimes en groupes, que se cristallise la notion de « submersion » (l’individu et sa capacité de contrôle de soi sont submergés par la foule), entérinée par Gustave Le Bon dans sa <em>psychologie des foules</em> en 1895.</p>
<p>La notion de submersion dans la foule est largement contestée. Des travaux de psychologie sociale, notamment menés par le psychologue social britannique Steven Reicher (1984) autour des émeutes de Saint-Paul à Londres en 1980, montrent que les individus en foule ne perdent pas leur identité mais qu’ils adoptent l’identité et les normes du groupe social qu’ils forment alors avec les autres membres de la foule. Par exemple, des membres passifs d’un public deviennent des révolutionnaires et des agents du changement face aux agents du statu quo que seraient les forces de l’ordre. Pour autant, ce mythe (comme d’autres mythes sur la foule) persiste.</p>
<h2>Des lieux communs sur la foule</h2>
<p>Dans un article intitulé <a href="https://www.proquest.com/docview/223510329"><em>La foule déchaînée va à l’école</em></a> publié en 2005, les sociologues David Schweingruber et Ronald T. Wohlstein passent à la moulinette des manuels de sociologie pour en examiner les représentations ou lieux communs au sujet de la foule. On y retrouve souvent les idées que les foules sont irrationnelles (la présence d’autrui nous fait perdre notre capacité à penser rationnellement), gouvernées par des émotions (ce sont les émotions donc – peur ou colère, par exemple – plutôt que la raison qui guident les foules), et suggestibles (nous imitons aveuglément les autres en foule).</p>
<p>On retrouve également deux autres représentations connexes. Premièrement, la conception que la foule est individualiste. Le fait d’être en foule rendrait l’individu individualiste, notamment face au danger – avec les exemples des paniques de foule lors desquelles les individus agiraient selon le chacun pour soi au détriment du bien-être d’autrui s’il le faut. Deuxièmement, l’idée que la foule serait impuissante et incapable de s’organiser, notamment en cas de drame.</p>
<h2>Le mythe de l’individualisme en foule</h2>
<p>Si beaucoup d’œuvres cinématographiques comprennent leur scène de panique (on pense par exemple à <em>Titanic</em> de James Cameron, sorti en 1997) montrant des individus aux prises les uns avec les autres pour la survie individuelle, laissant parfois de côté leurs amis et leur famille, la réalité semble toute autre.</p>
<p>Dans un <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0260392">travail réalisé avec des rescapés du Bataclan</a> (13 novembre 2015 à Paris), nous avons montré que la solidarité était très présente, avec du soutien émotionnel (chercher à rassurer les autres, même au risque de se faire repérer par des terroristes), du soutien informationnel (informer les autres de la position et des actions des terroristes, notamment du rechargement des armes qui laissaient aux otages un peu de temps pour chercher à s’enfuir) et du soutien physique (faire la queue pour bénéficier d’une courte échelle permettant de monter sur le toit du Bataclan).</p>
<p>Ce ne sont pas les seuls travaux qui vont dans ce sens. La solidarité et l’entraide sont fréquentes en foule face au danger. D<a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/028072700902700104">ans des travaux autour des attentats à Londres</a> de 2005, Drury et collègues rapportent des comportements d’approvisionnement en eau, de premiers soins et de réconfort entre victimes.</p>
<h2>Le mythe de l’impuissance de la foule</h2>
<p>De fait, les membres de la foule (comme au Bataclan) n’attendent pas l’arrivée des secours et des autorités pour prendre les choses en main. Nous avons entendu des rescapés nous parler de soins apportés aux blessés. Ce n’est pourtant pas ce que l’on entend sinon. <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Catastrophe_d%27Hillsborough">Le drame de Hillsborough</a> (Royaume-Uni, 1989) est un exemple frappant.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/580981/original/file-20240311-160090-rfd0w6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/580981/original/file-20240311-160090-rfd0w6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/580981/original/file-20240311-160090-rfd0w6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=749&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/580981/original/file-20240311-160090-rfd0w6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=749&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/580981/original/file-20240311-160090-rfd0w6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=749&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/580981/original/file-20240311-160090-rfd0w6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=941&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/580981/original/file-20240311-160090-rfd0w6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=941&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/580981/original/file-20240311-160090-rfd0w6.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=941&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La Une de The Sun du 19 avril 1989.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikimedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Au cours d’un match entre l’équipe de Liverpool et celle de Nottingham Forest, une mauvaise gestion des flux de supporters a provoqué une congestion causant la mort de 97 personnes. Si les politiciens et les médias d’alors se sont empressés de blâmer la foule pour son incapacité à s’organiser (la une du journal The Sun du 19 avril 1989 disait que des supporters avaient même profité de la cohue pour faire les poches des victimes, des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/casp.2153">travaux ultérieurs</a> (notamment de Chris Cocking et John Drury en 2013 ont montré, témoignages à l’appui, que coopération et entraide ont émergé pour faire face au manque de secours.</p>
<p><a href="https://bpspsychub.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1348/014466608X357893">Un participant d’une autre étude</a> de la même équipe de recherche raconte qu’il aurait aimé convaincre certains de ne pas se mettre en danger pour aider les autres, particulièrement celles ou ceux qui se sont livrés à des comportements « héroïques » (nous le citons) comme chercher à sortir les personnes blessées hors de la foule pour les mettre à l’abri.</p>
<p>Cette solidarité survit souvent aux drames eux-mêmes. Une communauté s’est ainsi constituée autour du dramatique incendie de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Incendie_de_la_tour_Grenfell">tour de Grenfell à Londres en 2017</a>, afin de demander justice et réparation.</p>
<p>En dépit de nombreux « debunking », ces deux mythes persistent autour de la foule. <a href="https://chouettes-foules.fr/">Nous avons créé un site</a> pour en parler, avec des articles et un jeu. Dans ce jeu, nous cherchons à promouvoir l’idée que la foule, loin d’être l’endroit où l’individu se perd, peut aussi être le lieu pour trouver des solutions et vivre des émotions collectives qui transforment (plutôt qu’elles n’abaissent) les individus.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225106/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les travaux de Guillaume Dezecache sont financés par son employeur (l'IRD) ainsi que par l'Agence Nationale de la Recherche. Il a bénéficié de financements de la Fondation MAIF pour la recherche dans le cadre du projet Chouettes Foules.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Rhea Haddad a reçu des financements de la Fondation MAIF pour la Recherche dans le cadre de sa thèse CIFRE au sein de Strane Innovation. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Tiffany Morisseau est responsable du pôle Cognition et Société de Strane Innovation. Elle a reçu des financements de la Fondation MAIF pour la recherche dans le cadre du projet Chouettes Foules.</span></em></p>Beaucoup de fausses idées circulent sur la psychologie des foules. Pourtant, les individus qui les composent font preuve de solidarité et de raisonnement.Guillaume Dezecache, Sciences de la durabilité, Institut de recherche pour le développement (IRD)Rhea Haddad, Doctorante en psychologie sociale, Université Clermont Auvergne (UCA)Tiffany Morisseau, Chercheuse en psychologie cognitive, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2244182024-03-10T16:48:46Z2024-03-10T16:48:46ZOublier, c’est normal ! Mais quand faut-il s’inquiéter ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/577925/original/file-20240214-22-ktb21p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=73%2C98%2C8106%2C5359&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/disappointed-forgetful-young-woman-tired-cramming-1887098245">Cast Of Thousands/Shutterstock</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Au quotidien, oublier certaines choses est assez agaçant – voire, en fonction de l’âge, inquiétant. Mais l’oubli est un phénomène tout à fait naturel : la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/memoire-22674">mémoire</a> a besoin d’oublier. De plus, les souvenirs peuvent ne pas être aussi fiables qu’on le croit, mais au contraire être déformés par rapport à ce qui s’est réellement passé.</p>
<p>Mais quel niveau d’oubli est « normal » ? Est-il acceptable par exemple de <a href="https://www.leparisien.fr/international/etats-unis/apres-mitterrand-dallemagne-le-president-joe-biden-confond-legypte-et-le-mexique-09-02-2024-OWVMC372J5EH3N4CHIEOK3VB7Y.php">mélanger les noms de pays</a>, comme l’a fait récemment le président américain Joe Biden ?</p>
<h2>Une question d’attention</h2>
<p>Pour <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6853990/">se souvenir de quelque chose</a>, le cerveau doit l’apprendre (encodage), le conserver en lieu sûr (stockage) et être capable de le retrouver en cas de besoin (récupération). Si une de ces étapes est perturbée, le souvenir peut être perdu, ou oublié.</p>
<p>Le cerveau ne peut pas traiter toutes les informations sensorielles qui lui arrivent : il <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2718243/">filtre les informations</a> afin de traiter ce qui est important. Ainsi, il encode sous forme de souvenirs principalement les choses auxquelles on prête vraiment attention.</p>
<p>Qui n’a jamais oublié les prénoms des invités lors d’une soirée entre amis, parce que son attention est tournée vers autre chose ? Il s’agit là d’une défaillance de la mémoire – un oubli – <a href="https://www.frontiersin.org/journals/psychology/articles/10.3389/fpsyg.2014.00841/full">tout à fait normale, et très courante</a>.</p>
<p>Les habitudes et les conventions peuvent aider à contourner ce problème. Par exemple, si l’on range toujours ses clefs au même endroit, nul besoin d’encoder à chaque fois une nouvelle information pour les retrouver.</p>
<p>La répétition est également importante pour ancrer les souvenirs, qui ont tendance à <a href="https://psycnet.apa.org/doiLanding?doi=10.1037%2F0033-2909.102.3.403">disparaître s’ils ne sont pas remobilisés</a>. Plus nous répétons, rabâchons ou racontons des souvenirs, plus nous nous en souvenons longtemps – si ce n’est que nous avons tendance à modifier ces souvenirs lorsque nous les racontons, et qu’il est probable que nous nous souvenions mieux de la dernière version que de l’évènement initial.</p>
<p>Dans les années 1880, le psychologue allemand Hermann Ebbinghaus a mené une expérience pendant laquelle les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hermann_Ebbinghaus">participants devaient mémoriser des séries de syllabes inconnues qui ne voulaient rien dire</a>. Il a noté ce dont les participants se souvenaient au fil du temps, et montré que la plupart de nos souvenirs s’estompent en l’espace d’un jour ou deux s’ils ne sont pas remobilisés. En revanche, si les séries étaient répétées à intervalles réguliers, les participants pouvaient retenir un bien plus grand nombre de syllabes pendant plus d’une journée.</p>
<p>Ces répétitions volontaires, qui permettent de mieux se souvenir d’une chose, provoquent parfois l’oubli d’une autre. Nous pouvons ainsi encoder l’endroit où la voiture est garée en allant faire des courses puis l’oublier, tant nous sommes occupés à répéter d’autres choses – la liste de courses à ne pas oublier, par exemple.</p>
<p>Cet exemple permet d’illustrer une autre caractéristique de l’oubli : la capacité à <a href="https://www.sciencedaily.com/releases/2021/05/210526085058.htm">oublier une information particulière tout en se souvenant, globalement, de l’essentiel</a>. S’il est parfois impossible de se rappeler précisément où est garée la voiture en sortant du magasin, on sait souvent si elle était à gauche ou à droite de la porte, sur le bord du parking ou vers le centre, ce qui permet de la chercher dans une zone relativement définie.</p>
<h2>L’impact du vieillissement</h2>
<p>En <a href="https://theconversation.com/fr/topics/viellissement-119180">vieillissant</a>, les gens <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1123445/">s’inquiètent davantage de leur mémoire</a>. Il est vrai que l’oubli devient plus prononcé, mais cela ne signifie pas forcément qu’il y a un problème.</p>
<p>Plus le temps passe, plus il y a de choses dont nous devons nous souvenir. Nos expériences passées partagent de nombreux points communs, et <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/B9780121025700500100">il peut être difficile de distinguer différents souvenirs</a>.</p>
<p>Par exemple, si vous n’êtes allé qu’une seule fois en vacances à la plage en Espagne, il est probable que vous vous en souveniez avec une grande clarté. En revanche, si vous avez passé de nombreuses vacances en Espagne, dans différentes villes et à différentes périodes, il vous sera plus difficile de vous rappeler si un évènement s’est produit lors de vos premières vacances à Barcelone ou lors d’un voyage ultérieur.</p>
<p>Le chevauchement des souvenirs, ou interférence, limite la récupération des informations. Imaginez que vous classiez des documents sur un ordinateur : au début, le système de classement est clair, chaque document trouve aisément une place où il sera facile à retrouver. Mais plus les documents arrivent, plus il devient difficile de décider dans quel dossier les ranger. De nombreux documents se retrouvent dans un seul dossier parce qu’ils sont tous liés à un élément. Ainsi, au fil du temps, il devient de plus en plus difficile de retrouver le bon document lorsqu’on le cherche, soit parce qu’on ne sait pas où on l’a mis, soit parce qu’on sait où il devrait être, mais qu’il y a beaucoup d’autres choses dans le même dossier.</p>
<p>Enfin, ne pas oublier peut poser problème. C’est le cas de certains <a href="https://theconversation.com/fr/topics/troubles-du-stress-post-traumatique-tspt-118588">stress post-traumatiques</a>, où le souvenir est persistant, ne s’efface pas et interrompt régulièrement la vie quotidienne.</p>
<p>Le deuil ou la dépression peuvent aussi <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3518852/">rendre plus difficile l’oubli d’informations négatives</a>, alors que dans ces cas, les oublier serait extrêmement utile.</p>
<h2>Oublier n’empêche pas forcément de prendre des décisions</h2>
<p>Oublier est fréquent, et le devient de plus en plus avec l’âge. De plus, oublier des noms ou des dates, comme l’a fait Joe Biden, ne nuit pas forcément à la prise de décision. Les personnes âgées peuvent avoir des connaissances approfondies et une bonne intuition, qui peuvent aider à compenser de tels trous de mémoire.</p>
<p>Mais bien entendu, ces trous de mémoire peuvent être le signe d’un problème plus grave et suggérer qu’il faut consulter un médecin.</p>
<p>Le fait de poser la même question à plusieurs reprises par exemple peut dévoiler que l’oubli est plus qu’un problème de distraction ponctuelle au moment d’encoder la réponse.</p>
<p>De même, oublier son chemin dans des endroits très familiers peut révéler une difficulté à utiliser les indices de l’environnement pour se souvenir et se repérer. Et si oublier le nom d’une personne au cours d’un dîner est normal, oublier comment utiliser sa fourchette et son couteau ne l’est pas.</p>
<p>En fin de compte, les trous de mémoire ne sont pas forcément à craindre – il faut s’inquiéter s’ils deviennent extrêmes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/224418/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Alexander Easton ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Vous ne vous souvenez pas d’où vous avez mis vos clefs ? C’est normal, vous ne faites pas un début d’Alzheimer. Mais alors, comment savoir quand l’oubli est vraiment inquiétant ?Alexander Easton, Professor of Psychology, Durham UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2232122024-02-20T14:40:04Z2024-02-20T14:40:04ZLes personnes souffrant de TOC ont une moins longue espérance de vie<p>Une nouvelle étude a récemment révélé que les personnes atteintes de <a href="https://www.nhs.uk/mental-health/conditions/obsessive-compulsive-disorder-ocd/overview/">troubles obsessionnels compulsifs</a> (TOC) ont un <a href="https://www.bmj.com/content/384/bmj-2023-077564.full">risque accru de décéder plus tôt que les autres</a>, que ce soit de cause naturelle ou non naturelle.</p>
<p>De précédents travaux avaient déjà identifié des <a href="https://jamanetwork.com/journals/jamapsychiatry/fullarticle/2484488">excès de mortalité chez les personnes souffrant de TOC</a>, mais les causes spécifiques de ces décès n’avaient pas été étudiées plus avant – à l’exception peut-être du suicide. Il avait notamment été découvert que les personnes souffrant de TOC avaient des <a href="https://www.nature.com/articles/mp2016115">taux de suicide similaires à ceux de personnes atteintes d’autres troubles mentaux</a>.</p>
<p><a href="https://www.psychiatry.org/patients-families/obsessive-compulsive-disorder/what-is-obsessive-compulsive-disorder">Les TOC affectent environ 2 % de la population</a>. Les personnes qui en souffrent expérimentent des pensées répétitives et intrusives qui les plongent dans la détresse (elles sont, par exemple, obnubilées par la peur d’être contaminées, ou de devenir agressive envers d’autres personnes). Afin de diminuer l’inconfort causé par ses pensées, elles accomplissent des rituels extrêmement chronophages : rituels de nettoyage, de répétition, de vérification…</p>
<p>Ce trouble dégrade significativement leur qualité de vie, affecte leurs relations ainsi que leurs activités sociales et, d’une façon générale, leur capacité à vivre normalement.</p>
<p>Mes collègues et moi-même, au Karolinska Institute en Suède, avons décidé d’essayer de comprendre comment les décès de cause naturelle ou ceux de cause non naturelle <a href="https://www.bmj.com/content/384/bmj-2023-077564.full">contribuent à la mortalité plus élevée constatée chez les personnes souffrant de TOC</a>.</p>
<p>Nous nous sommes pour cela appuyés sur les registres de population suédois, lesquels incluent des données administratives et de santé pour l’ensemble de la population du pays. Grâce à ces registres, nous avons pu comparer un groupe de 61 378 individus diagnostiqués comme souffrant de TOC avec 613 780 personnes non atteintes par cette pathologie.</p>
<p>Les données enregistrées dans ces bases nous ont permis de suivre ces deux groupes sur une période de plus de 40 ans, de 1973 à 2020. Nous avons ainsi découvert que les personnes atteintes de TOC mouraient à un âge moyen de 69 ans, contre 78 ans celles qui n’en souffraient pas.</p>
<p>Le risque de décès au cours de la durée couverte par cette étude était accru de 82 % dans le groupe des personnes ayant un TOC par rapport au groupe qui n’était pas atteint par cette pathologie.</p>
<p>Ce risque accru de décès s’est avéré attribuable à la fois à des causes naturelles (le risque est alors augmenté de 31 %) et à des causes non naturelles (risque augmenté de 230 %).</p>
<h2>Des causes spécifiques</h2>
<p>C’est la première fois que des travaux identifient les causes spécifiques à l’origine des décès « naturels » de personnes souffrant de TOC. Nos résultats révèlent que l’accroissement du risque de mortalité qui les concerne est dû à des risques accrus de maladie pulmonaire (73 %), de troubles mentaux et comportementaux (58 %), de maladie des tractus urinaires et génitaux (55 %), de maladies endocrines, métaboliques et d’origine nutritionnelle (47 %), ainsi que de maladies touchant les vaisseaux sanguins (33 %), le système nerveux (21 %) et le système digestif (20 %).</p>
<p>Curieusement, le risque de décès par cancer était inférieur de 13 % chez les personnes souffrant de TOC. La raison pour laquelle ce risque est moindre, à l’inverse des risques cités plus haut, n’est pas connue.</p>
<p>Parmi les causes de mort non naturelle, le principal contributeur à cette mortalité accrue s’est avéré être le suicide. Le risque de suicide est en effet cinq fois plus élevé chez les personnes atteintes de TOC que chez les autres. Les personnes avec TOC ont par ailleurs un risque 92 % plus élevé de mourir dans un accident, notamment dans des accidents de la route ou suite à des chutes.</p>
<p>La prise en compte de l’existence d’autres troubles mentaux, tels que l’anxiété, la dépression, ou des troubles liés à l’utilisation de substances n’a pas modifié ces résultats. Qui plus est, la comparaison au sein de fratries, de personnes souffrant de TOC avec leurs frères et sœurs qui n’en souffraient pas n’a pas non plus modifié ce résultat.</p>
<p>Ceci confirme que cette situation n’est pas attribuable à des facteurs annexes (environnementaux, génétiques, des troubles mentaux associés…), mais semble bien être lié aux TOC eux-mêmes.</p>
<h2>Des décès en grande partie évitables</h2>
<p>Ces résultats ne semblent pas particulièrement positifs pour les personnes souffrant de TOC. Cependant, il est important de noter qu’au sein du groupe étudié la proportion de personnes décédées de chacune des causes citées précédemment était relativement faible, même si par rapport au groupe ne souffrant pas de TOC, cela se traduit par un risque plus élevé.</p>
<p>Ainsi, au cours de la période sur laquelle s’étendait l’étude, 2,5 % des personnes atteintes de TOC sont décédées des suites de maladies cardiovasculaires (crises cardiaques, accidents vasculaires cérébraux…), un pourcentage plutôt faible. Ce pourcentage est néanmoins plus élevé que celui constaté dans le groupe sans TOC, qui est plutôt de 1,8 %.</p>
<p>Quoi qu’il en soit, il n’est pas acceptable que les personnes atteintes de TOC aient à faire face à ces risques supplémentaires. Nous espérons que ces résultats contribueront à une meilleure prise en charge de ces patients, en incitant notamment les professionnels de santé à prendre conscience de cette situation.</p>
<p>Soulignons que la plupart des causes de décès pour lesquelles un risque accru a été démontré pour les personnes atteintes de TOC concernent des causes externes (telles que le suicide, les accidents) ou des maladies non transmissibles (maladies cardiovasculaires, diabète, maladies pulmonaires chroniques, troubles mentaux, troubles neurologiques…). Or, ces causes de décès sont généralement considérées comme évitables.</p>
<p>Les personnes atteintes de TOC doivent elles aussi être conscientes qu’elles sont concernées par l’augmentation de ces risques. Cela peut les motiver à modifier leurs comportements, en les incitant par exemple à faire davantage d’exercice et à adopter une alimentation plus saine, des pratiques qui peuvent jouer un rôle dans la prévention de ces maladies et des décès prématurés qui y sont associés.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223212/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lorena Fernandez de la Cruz a reçu des fonds du Conseil suédois de la recherche pour la santé, la vie professionnelle et le bien-être (FORTE), de la région de Stockholm (fonds ALF), de la Société suédoise de médecine (Svenska Läkaresällskapets) et du Karolinska Institutet. Elle reçoit également des royalties pour sa contribution à UpToDate et Wolters Kluwer Health, ainsi que pour du travail éditorial pour Elsevier, qui ne concerne pas les travaux de recherche qu’elle soumet.</span></em></p>Les personnes souffrant de troubles obsessionnels compulsifs ont un risque de décès accru par rapport aux autres, que ces décès résultent de causes naturelles ou d’accidents.Lorena Fernández de la Cruz, Clinical Researcher, Psychiatric Epidemiology, Karolinska InstitutetLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2206122024-02-18T15:48:08Z2024-02-18T15:48:08Z« L’envers des mots » : Résilience<p>De plus en plus fréquent dans les discours médiatiques et le langage courant, le terme <a href="https://theconversation.com/fr/topics/resilience-22971"><em>résilience</em></a> aurait été utilisé pour la première fois par <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/9298804/">Emmy Werner</a>. Cette psychologue du développement se pencha dans les années 1980-1990 sur les conséquences à long terme du stress survenu au cours des périodes prénatales et périnatales, à partir d’une recherche longitudinale sur 698 personnes de l’île de Kauaï à Hawaii, de leur naissance à l’âge adulte.</p>
<p>Dans cette recherche, ce qui a étonné l’auteure fut qu’un tiers des enfants à risque n’avaient pas connu de problèmes particuliers pendant leur enfance et étaient devenus des adultes heureux et compétents. En outre, bon nombre des enfants ayant connu des problèmes ont été capables de rebondir à l’adolescence et à l’âge adulte. C’est pour qualifier ces sujets « vulnérables, mais invincibles » qu’Emmy Werner a utilisé le mot « résilience ».</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/psychologie-le-coping-ou-comment-nous-faisons-face-aux-stress-intenses-178833">Psychologie : le « coping », ou comment nous faisons face aux stress intenses</a>
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<p>La définition de la résilience proposée en 2001 par la Fondation de l’Enfance et par le <a href="https://www.cairn.info/revue-etudes-2001-10-page-321.htm">groupe de travail dirigé par Michel Manciaux</a> envisage cette notion comme « … la capacité d’une personne, d’un groupe, à se développer bien, à continuer à se projeter dans l’avenir en dépit d’événements déstabilisants, de conditions de vie difficiles, de traumatismes parfois sévères ».</p>
<p>Pour la professeure en psychologie <a href="https://ulysse.univ-lorraine.fr/discovery/fulldisplay?vid=33UDL_INST:UDL&docid=alma991004344399705596">Marie Anaut</a>, la résilience implique « l’adaptation face au danger, le développement normal en dépit des risques et le ressaisissement de soi après un traumatisme ». Retenons également la <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/psychologie/psychanalyse/vilains-petits-canards_9782738109446.php">définition de Boris Cyrulnik</a> pour qui la résilience est « la capacité à réussir, à vivre et à se développer positivement, de manière socialement acceptable, en dépit du stress ou d’une adversité qui comportent normalement le risque grave d’une issue négative ».</p>
<p>L’importance de la résilience a surtout été mise en évidence dans la littérature relative au développement de l’enfant et de l’adolescent. Elle est souvent définie en fonction des facteurs de protection liés à l’individu lui-même et à son environnement. Des facteurs de résilience ont été relevés chez les personnes décrites comme ayant des ressources personnelles (estime de soi, la <a href="https://theconversation.com/aider-un-enfant-a-prendre-confiance-en-lui-les-conseils-de-trois-grands-philosophes-158590">confiance en soi</a>, l’autodiscipline, le courage et l’optimisme face à l’adversité) ou encore possédant des capacités cognitives supérieures à la moyenne, un sentiment de compétence, un lieu de contrôle interne, le sens de l’humour, de l’empathie et des compétences sociales.</p>
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<p>D’autres facteurs contribueraient à la protection des individus : l’adaptabilité au changement, l’autonomie, l’indépendance, les habiletés à résoudre les problèmes, la capacité à donner du sens à l’événement et la religion. Le contexte familial semble également jouer un rôle. Le fait d’avoir des parents chaleureux, de bénéficier de leur soutien, l’absence de conflits, la structuration de la vie de famille sont des facteurs propices à une bonne résilience.</p>
<p>Notons enfin que le soutien social des pairs, des professionnels, de la famille élargie, de professeurs et de voisins est également à prendre en compte. Il prend diverses formes comme le fait de bénéficier d’une présence réconfortante, de conseils ou d’informations susceptibles de constituer une aide pour mieux comprendre les événements ou les épreuves auxquels il faut faire face.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-stress-de-lenfance-menacent-ils-notre-coeur-dadulte-158716">Les stress de l’enfance menacent-ils notre cœur d’adulte ?</a>
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<p>La position qui domine actuellement la littérature consiste à aborder la résilience en termes de processus. Celle-ci est alors envisagée dans une perspective développementale, c’est-à-dire qu’elle est fonction du stade de développement dans lequel se trouve le sujet, ce qui conduit à des différences de réactions suivant l’âge, l’évolution, la construction psychique, l’entourage du sujet. Ce n’est pas une qualité « fixe » ou un trait de personnalité de l’individu, elle peut être soumise à des variations conséquentes selon les circonstances. Ainsi, la résilience ne se révèle pas dans le quotidien de la vie, mais dans l’épreuve qui seule est susceptible de mobiliser cette ressource, qu’il convient d’aller puiser au plus profond de soi.</p>
<p>Ainsi, pour mobiliser les processus de résilience, les individus doivent être confrontés à des événements aversifs ou traumatisants, comportant de la violence, une effraction physique ou psychique (par exemple, la perte d’un proche, un accident, une maladie…). Il peut aussi s’agir également d’une accumulation d’événements aversifs ou de carences graves et répétées, comme des négligences affectives.</p>
<p>Les processus de résilience peuvent être mis en œuvre dans des situations variées qui contribuent à rompre l’équilibre de l’individu adapté à son environnement. Certaines expériences suscitant des émotions fortes et négatives (comme la peur, la confusion, la défiance, etc.) pourraient constituer des risques pour le bien-être et l’équilibre mental de l’individu. Ainsi, une grande variété de situations est susceptible de mobiliser les processus de résilience, si tant est tant qu’elle soit alors mobilisable.</p>
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<p><em>Cet article s’intègre dans la série <strong><a href="https://theconversation.com/fr/topics/lenvers-des-mots-127848">« L’envers des mots »</a></strong>, consacrée à la façon dont notre vocabulaire s’étoffe, s’adapte à mesure que des questions de société émergent et que de nouveaux défis s’imposent aux sciences et technologies. Des termes qu’on croyait déjà bien connaître s’enrichissent de significations inédites, des mots récemment créés entrent dans le dictionnaire. D’où viennent-ils ? En quoi nous permettent-ils de bien saisir les nuances d’un monde qui se transforme ?</em></p>
<p><em>De <a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-validisme-191134">« validisme »</a> à <a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-silencier-197959">« silencier »</a>, de <a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-bifurquer-191438">« bifurquer »</a> à <a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-degenrer-191115">« dégenrer »</a>, nos chercheurs s’arrêtent sur ces néologismes pour nous aider à mieux les comprendre, et donc mieux participer au débat public. À découvrir aussi dans cette série :</em></p>
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<li><p><a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-technoference-199446"><em>« L’envers des mots » : Technoférence</em></a></p></li>
<li><p><a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-ecocide-200604"><em>« L’envers des mots » : Écocide</em></a></p></li>
<li><p><a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-neuromorphique-195152"><em>« L’envers des mots » : Neuromorphique</em></a></p></li>
</ul><img src="https://counter.theconversation.com/content/220612/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cyril Tarquinio ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La résilience, cette capacité à « se projeter dans l’avenir en dépit d’événements déstabilisants », est en vogue. Mais est-ce une qualité « fixe » qu’un individu possède ou pas ? Peut-elle se développer ?Cyril Tarquinio, Professeur de psychologie clinique, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2179432024-02-14T14:32:22Z2024-02-14T14:32:22ZL’échec scolaire : histoire et invention d’une notion<p>L’école française est réputée, du moins dans une partie non négligeable des représentations publiques et politiques, être enferrée dans une crise multiforme. À la faveur de ces constats, l’attention s’est focalisée sur « l’échec scolaire », les « décrocheurs » et les résultats moyens des élèves français dans les classements internationaux (PISA).</p>
<p>Ce contexte de compétition scolaire accrue se traduit, aux yeux de plusieurs observateurs, par une injonction toujours plus pressante à <a href="https://www.cairn.info/a-l-ecole-des-competences--9782707175410.htm">fabriquer des élèves et un système éducatif performants</a>. Une telle évolution semble relever du paradoxe pour une institution censée être le socle du modèle républicain et de ses valeurs.</p>
<p>En effet, en France, comme dans de nombreux autres pays, c’est dans les années 1960-1970 – soit au moment où sont perçus les premiers effets des politiques de massification scolaire – que les thèmes de <a href="https://www.pug.fr/produit/1751/9782706145605/refus-et-refuses-d-ecole">l’échec scolaire</a> et de la crise sont mis sur le devant de la scène éducative, médiatique et politique. Que signifie ce changement historique ?</p>
<h2>Avant les années 1950, un échec scolaire fréquent mais invisible</h2>
<p><a href="https://www-cairn-info.merlin.u-picardie.fr/l-echec-scolaire--9782130483618.htm">La notion d’échec scolaire est relativement récente</a>. L’expression apparaît en effet dans les années 1960. Est-ce à dire qu’il est absent des expériences scolaires d’avant-1945 ? Assurément, non. En réalité, la question ne se pose pas exactement en ces termes avant le milieu du XX<sup>e</sup> siècle, mais renvoie à différentes situations dans un système d’enseignement qui reste organisé selon une division et une ségrégation en deux « ordres » (primaire et secondaire) fondées sur l’appartenance sociale.</p>
<p>Dans l’enseignement secondaire (composé de lycées d’État et de collèges municipaux qui ont leurs propres classes élémentaires), les échecs de certains enfants issus de milieux aisés sont considérés comme « paradoxaux » dans une <a href="https://www.persee.fr/doc/diver_0335-0894_1996_num_104_1_7053">population scolaire normalement destinée à des études longues</a>, comme l’a montré dès 1985 Viviane Isambert-Jamati, et à non des scolarités courtes, caractéristiques des jeunes des milieux populaires.</p>
<p>En effet, « l’école du peuple », gratuite (1881), ne permet qu’aux élèves ayant un bon niveau scolaire d’obtenir le fameux certificat d’études (une minorité d’élèves : moins d’un tiers à la fin du XIX<sup>e</sup> siècle) et de poursuivre leurs études au-delà de l’obligation scolaire, dans les établissements de l’enseignement primaire supérieur. Les autres, c’est-à-dire la plupart des enfants issus de milieux ouvriers et paysans, rejoignent l’usine ou la ferme à l’âge de 13 ans.</p>
<p>Ces sorties du système scolaire ne sont cependant pas perçues comme un échec dans les classes populaires : elles ne posaient pas problème, elles étaient légitimes pédagogiquement, socialement, politiquement et culturellement, résume <a href="https://www.cairn.info/revue-carrefours-de-l-education-2008-2-page-229.htm">Jean Houssaye</a>. Tout au plus pouvaient-elles être vécues comme des ambitions déçues.</p>
<p>D’autre part, le modèle scolaire républicain généralise la pratique du redoublement dans l’enseignement primaire. Ainsi, en 1888, seulement 30 % des élèves réalisent le cursus prévu sans redoubler ! Son usage, d’abord massif puis atténué, a pour effet une <a href="https://books.openedition.org/pur/50117">répartition inégale des effectifs</a> et des classes où l’âge des élèves est très variable.</p>
<p>Une part non négligeable de ces élèves en difficulté pratiquent « l’école buissonnière ». L’absentéisme se maintient à des niveaux élevés. Il peut par exemple atteindre <a href="https://books.openedition.org/pur/50117">20 % dans les cours élémentaires des quartiers ouvriers de Paris et sa banlieue</a>. De plus, une partie des enfants de 6 à 13 ans ne sont inscrits dans aucun établissement scolaire. Mais le sort de ces enfants intéresse peu…</p>
<h2>La psychologie de l’enfance s’empare du sujet</h2>
<p><a href="https://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2010-5-page-14.htm?ref=doi">La situation des élèves « en retard »</a> préoccupe en revanche les milieux politiques, pédagogiques et médicaux, mais tardivement. Pour les désigner est employée une multitude de catégories aux contours flous : « retardés », « cancres », « arriérés », « débiles », « idiots », « crétins », « inadaptés », « déficients »… Des recherches médicales tentent d’en expliquer les causes et donnent lieu à la publication de multiples <a href="https://sante.gouv.fr/fichiers/numerisations/CCHP_TOME2_1873_T.pdf">rapports</a>.</p>
<p>Au tournant du siècle, la psychologie de l’enfance naissante cherche également à évaluer, mesurer ces retards et imaginer les structures capables de prendre en charge les « enfants anormaux » selon l’expression du moment, qui englobe par ailleurs les cas d’élèves présentant un handicap.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/intelligent-vraiment-une-breve-histoire-des-tests-de-qi-49518">Intelligent, vraiment ? Une brève histoire des tests de QI</a>
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<p><a href="https://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/test_de_Binet-Simon/183418">Alfred Binet et Théodore Simon</a> mettent ainsi au point un outil permettant de repérer les enfants susceptibles de rencontrer les plus grandes difficultés scolaires : il s’agit d’une échelle psychométrique (dite d’intelligence) qui a pour but un diagnostic « d’arriération » en comparant les performances de l’enfant à celles de sa classe d’âge (vulgarisé plus tard sous le sigle « QI »). Ils sont par ailleurs membres de la commission interministérielle (1904-1905) chargée d’étudier l’application de l’obligation scolaire aux enfants anormaux.</p>
<p>Cette obligation débouche sur la loi du 15 avril 1909 créant des écoles et des classes de perfectionnement pour les enfants dits arriérés, qui sont la <a href="https://www.persee.fr/doc/rfp_0556-7807_1992_num_100_1_2509_t1_0140_0000_2">préfiguration de l’éducation spécialisée</a>.</p>
<h2>Dans les années 1960, l’échec scolaire devient un problème social et politique</h2>
<p>Pourquoi des enfants réussissent-ils globalement moins que d’autres à l’école ? Dans les années 1960, la <a href="https://theconversation.com/les-heritiers-ce-que-bourdieu-et-passeron-nous-ont-appris-de-linegalite-des-chances-177185">sociologie française de l’éducation</a> répond à cette question en montrant le rôle de l’école et de la culture scolaire dans la reproduction du modèle des catégories socialement favorisées et donc des inégalités sociales. Comme le rappelle l’historien <a href="https://journals.openedition.org/histoire-education/4206">Jean-François Condette</a> :</p>
<blockquote>
<p>« l’échec scolaire n’est longtemps vu qu’en terme individualiste et clinique, comme l’échec d’un enfant dans sa scolarité pour des raisons personnelles [mais] la question devient, à partir des années 1960, pour certains psychologues et sociologues et un certain nombre de cadres de l’Éducation nationale, un problème social concernant le mauvais fonctionnement du système scolaire. »</p>
</blockquote>
<p>Celui-ci est alors en pleine transformation : les réformes de 1959 et 1963 prolongent la scolarité obligatoire à 16 ans et jettent les bases du collège unique (1975), tandis que le discours public insiste sur le rôle primordial de la scolarisation dans le développement économique et technique futur.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/estime-de-soi-et-difficultes-scolaires-un-cercle-vicieux-161384">Estime de soi et difficultés scolaires, un cercle vicieux ?</a>
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<p>L’émergence de la notion d’échec scolaire est en effet concomitante de la croissance des effectifs dans le premier cycle du second degré (massification) et de son ouverture à un public plus large sociologiquement (démocratisation), à un moment où la statistique fournit une grille de lecture de ces processus.</p>
<p>À partir de 1957, le service statistique du ministère de l’Éducation nationale s’intéresse par exemple au milieu social des collégiens (recours à la classification par CSP de l’Insee construite pour le recensement de 1954) et croise cet indicateur avec d’autres variables : le niveau scolaire et l’âge notamment. Le retard scolaire devient donc mesurable.</p>
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<p>C’est alors que naît l’échec scolaire comme problème public, à partir du moment où l’entrée en classe de 6<sup>e</sup> et la poursuite d’études au collège deviennent la norme. L’entrée en scène des sociologues (comme <a href="https://www.persee.fr/doc/pop_0032-4663_1963_num_18_1_10410">Alain Girard</a>) permet de mettre en avant l’influence du milieu social sur l’échec scolaire (ou plutôt la réussite qui devient désormais la finalité des scolarisations) mais aussi le fait que d’excellents élèves ne poursuivent pas d’études.</p>
<p>Le poids des inégalités territoriales est alors largement sous-estimé bien que les études ministérielles mettent au jour des variations départementales dans l’accès aux études prolongées et des départements en « retard » ou scolairement « sous-développés ».</p>
<p>La notion d’échec scolaire s’étend ensuite à d’autres niveaux du système scolaire, à mesure de la massification du lycée dans les années 1980 puis dans l’enseignement supérieur massifié dans les années 1990-2000 dans le contexte de la montée du chômage et de la peur de l’exclusion sociale. L’abandon de l’école en cours de cursus et les sorties sans diplôme du système scolaire <a href="https://journals.openedition.org/lectures/242">deviennent alors un problème public et institutionnel</a>.</p>
<h2>Vers la mise en place de politiques publiques</h2>
<p>Il est aussi devenu une catégorie de l’action publique selon <a href="https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-dynamiques-2015-1-page-34.htm">Pierre-Yves Bernard</a> : l’institution scolaire prend en charge, par diverses politiques (dont l’éducation prioritaire) et de multiples <a href="https://eduscol.education.fr/1613/prise-en-charge-des-jeunes-en-situation-de-decrochage-scolaire">dispositifs</a> ou structures (comme les micro-lycées) les jeunes en <a href="https://www.education.gouv.fr/la-lutte-contre-le-decrochage-scolaire-7214">situation de décrochage scolaire</a>, parce qu’elle pose à moyen terme la question de leur insertion professionnelle et sociale.</p>
<p>Si l’échec puis le décrochage scolaire sont révélateurs de l’importance prise par le diplôme et la qualification, la massification a eu pour première conséquence une certaine dévalorisation des diplômes dans la mesure où le bénéfice retiré de leur obtention diminue. C’est le cas du baccalauréat en particulier.</p>
<p>Deuxièmement, la démocratisation a pour effet pervers de déplacer les inégalités et les échecs scolaires au lieu de les supprimer, comme l’a montré l’historien <a href="https://www.cairn.info/l-enseignement-s-est-il-democratise--9782130444176.htm">Antoine Prost</a>. Ainsi, dans les années 1960,pour les « mauvais » élèves qui demeuraient auparavant dans les classes de fin d’études primaires (après le cours moyen) sont créées des classes de 6<sup>e</sup> de transition puis des classes de 4<sup>e</sup> pratiques confiées à des instituteurs spécialisés. Après la mise en place du collège unique, les classes préprofessionnelles de niveau (CPPN) remplacent les classes pratiques et accueillent des élèves en échec scolaire se destinant à l’apprentissage ou l’enseignement professionnel dans des filières socialement dévalorisées.</p>
<p>L’histoire de ces élèves en échec scolaire n’est donc pas seulement l’histoire de ceux qui décrochent de l’école. Elle est aussi celle de l’école qui marginalise certains types d’élèves : les <a href="https://www.rfi.fr/fr/podcasts/livre-france/20221029-les-d%C3%A9croch%C3%A9s-de-rachid-zerrouki">« décrochés »</a> (SEGPA), <a href="https://www.cairn.info/refus-et-refuses-d-ecole--9782706145605.htm">« refusés »</a> d’école ou <a href="https://www.cairn.info/ameliorer-l-ecole--9782130555599-page-37.htm">« vaincus de la compétition scolaire »</a>.</p>
<p>Ainsi, <a href="https://www.persee.fr/doc/diver_0335-0894_1996_num_104_1_7051">l’échec scolaire est très variable selon le moment historique où il est considéré</a>. La large diffusion de la notion est moins un symptôme d’une crise de l’école qu’un reflet des attentes grandissantes de l’école vis-à-vis des élèves et de la société vis-à-vis de son école (dont les finalités ont changé). Elle tient finalement à un improbable lien de cause à effet : plus le niveau d’études et de qualification d’une population augmente, plus l’échec scolaire progresse…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/217943/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Cahon a reçu des financements de la région Hauts-de-France et du Fonds européen de développement régional (FEDER) dans le cadre d'une recherche collective intitulée « Picardie-REUssite-éducatiVE » (PREUVE, 2015-2019).
</span></em></p>Si l’échec scolaire est une réalité de longue date, sa prise en considération est assez récente. Retour sur l’histoire d’une notion qui interroge les liens entre la société et son école.Julien Cahon, Professeur des universités, Université de Picardie Jules Verne (UPJV)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2204322024-02-05T15:11:38Z2024-02-05T15:11:38ZÉcole inclusive : entre soignants et enseignants, une coordination à renforcer<p>Qu’ils soient en situation de handicap ou pas, tous les <a href="https://www.tousalecole.fr/content/besoins-educatifs-particuliers-identification">élèves</a> ayant des <a href="https://www.tousalecole.fr/content/besoins-educatifs-particuliers-identification">besoins particuliers</a> se trouvent au croisement de plusieurs environnements : l’école, la famille et, pour certains, les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux.</p>
<p>Pour garantir de bonnes conditions d’accès aux savoirs, il convient de créer des liens de <a href="https://www.cnrtl.fr/definition/academie9/partenariat">partenariat</a> entre les acteurs internes et externes à l’école, ce qui favorise le partage d’expériences. Il s’agit de trouver un langage commun et de négocier une action conjointe pour mieux soutenir le projet scolaire des élèves.</p>
<p>En effet, de nombreux facteurs peuvent contribuer à entraver les apprentissages d’un élève tels que l’évolution de son état de santé, de sa situation familiale, sociale. Le statut des différents adultes (enseignant, parent, éducateur, soignants) va aussi impacter les interactions avec les élèves, chacun parlant de sa perspective propre.</p>
<h2>Une approche écologique pour comprendre les situations vécues par les élèves</h2>
<p>L’environnement dans lequel évolue chaque individu impacte son développement et ses manières d’agir. C’est ce que suppose la <a href="https://nospensees.fr/la-theorie-ecologique-de-bronfenbrenner/">théorie écologique du psychologue et chercheur Bronfenbrenner</a>. Ainsi, lorsqu’on veut favoriser l’accessibilité des savoirs à l’école, il faut d’abord s’intéresser aux <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-de-philosophie-2008-3-page-313.htm">contextes</a> dans lesquels apparaissent des <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-de-philosophie-2008-3-page-313.htm">situations</a> nécessitant des aménagements. Par exemple, la localisation de l’établissement scolaire peut être importante (zone rurale, urbaine, collège situé en réseau d’éducation prioritaire).</p>
<p>Cette démarche permet de mieux comprendre les spécificités des interactions entre les élèves et leur environnement. Chaque établissement scolaire s’inscrit aussi dans une histoire et, depuis la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000509314/">loi du 10 juillet 1989</a>, dans un projet d’établissement. Tous ces éléments de contexte vont avoir un impact sur les échanges entre les enseignants et leurs élèves.</p>
<p>Enfin, une situation d’enseignement peut être comprise comme une représentation de la vie quotidienne d’un enseignant et d’un élève qui vont chacun adopter des comportements que l’autre va interpréter et qui vont influencer leurs manières d’être et d’agir dans la situation, nous dit le <a href="https://www.cairn.info/la-sociologie-de-erving-goffman--9782707142023-page-3.htm">sociologue Erwing Goffman</a>.</p>
<p>Ces interactions mettent en jeu ces acteurs et vont se dérouler au sein de <a href="https://www.philippeclauzard.fr/2018/11/focus-sur-les-situations-didactiques.html">situations didactiques</a> créées pour transmettre des connaissances et aider l’élève à apprendre. Une situation n’est donc pas figée puisqu’elle est appelée à se transformer comme le montre Benasayag avec la <a href="http://philo-analysis.over-blog.com/2019/09/notes-de-lecture-miguel-benasayag-le-mythe-de-l-individu-la-decouverte-1998.html">théorie de la situation</a> et s’inscrit donc dans une réalité concrète.</p>
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<figcaption><span class="caption">L’intégration des enfants handicapés dans le système scolaire (Franceinfo/INA, 2019).</span></figcaption>
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<p>Un enseignant qui cherche à aménager ses pratiques pédagogiques va opérer une <a href="https://gil-conflit.over-blog.org/2020/01/william-isaac-thomas-1863-1947-ecole-de-chicago.html">définition de la situation</a> en pensant aux actions qu’il souhaite mener pour favoriser <a href="https://handicap.gouv.fr/accessibilite-universelle">l’accessibilité</a>.</p>
<p>Cette approche écologique de l’éducation inclusive nous amène à considérer que le développement d’un élève en situation de handicap dépend de facteurs liés à son environnement scolaire. Or, les élèves en situation de handicap se situent au croisement de plusieurs environnements comme leurs pairs mais avec des besoins supplémentaires, qui nécessitent d’interagir aussi avec l’environnement du <a href="http://cairn.info/revue-etudes-2010-12-page-631.htm">care</a>.</p>
<p>C’est pourquoi la question du partenariat entre les acteurs internes et externes à l’école se pose afin d’analyser les situations d’interaction entre un élève en situation de handicap et son enseignant et de répondre au plus près aux besoins d’aménagement tout en développant l’accessibilité à l’école.</p>
<h2>Agir ensemble, pour quels objectifs ?</h2>
<p>Les élèves avec des besoins particuliers interagissent avec plus ou moins d’environnements en fonction des situations. Lorsqu’ils sont à l’école, ils peuvent rencontrer des obstacles, qui peuvent s’expliquer en partie par des facteurs externes. C’est pourquoi il est nécessaire d’articuler les actions de chaque professionnel intervenant auprès d’eux avec celles des professionnels de l’école.</p>
<p>Cette manière de penser les situations vécues par les élèves à l’école a pour but d’éviter les malentendus et les obstacles liés notamment à l’utilisation du langage et à la culture des acteurs. « Le sens d’un mot ne dépend pas de sa signification mais de son usage » disait ainsi le philosophe <a href="https://www.lesechos.fr/weekend/livres-expositions/wittgenstein-le-penseur-le-plus-singulier-du-XXe-si%C3%A8cle-1212300">Ludwig Wittgenstein</a>. Par exemple, l’interprétation du comportement d’un élève en classe dans une situation d’enseignement pourra être comprise de plusieurs manières en fonction des acteurs et implique un travail de partenariat.</p>
<p>[<em>Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Prenons l’exemple, de Lucas, 16 ans. Il prépare un CAP et bénéficie d’aménagements pédagogiques compte tenu de troubles du comportement dans certaines situations qui l’entravent dans ses apprentissages. En parallèle, il bénéficie d’un suivi dans un établissement spécialisé. La question s’est donc posée de savoir comment permettre à ce garçon de s’apaiser quand il est trop en tension.</p>
<p>Une rencontre entre les partenaires a alors permis d’évoquer le besoin de « sas » pour lui permettre de décompresser (autrement dit, un lieu identifié pour se récupérer). Ce terme est particulièrement intéressant car il dépasse les interprétations éducatives ou soignantes des adultes en lien avec lui pour être utilisé de manière transversale dans les espaces (de l’école, de la famille, du « care ») avec le même sens.</p>
<h2>Partenariats ou collaborations ?</h2>
<p>Le <a href="https://ien-bobigny2ash.circo.ac-creteil.fr/spip.php?article91">Pôle inclusif d’accompagnement localisé</a> (PIAL) pourrait aussi être un espace adapté pour mettre en œuvre un <a href="https://www.cafepedagogique.net/2022/08/17/dominique-momiron-que-faudrait-il-pour-que-lecole-soit-vraiment-inclusive/">partenariat inclusif</a> car il permet une collaboration entre des enseignants spécialisés, des AESH (Accompagnants d’elèves en situation de handicap) et des éducateurs spécialisés.</p>
<p>La Haute autorité de santé (HAS) encourage également la création de liens plus étroits entre les acteurs du soin et de l’éducation et l’école au sein de la communauté éducative afin de mettre en œuvre des <a href="https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2023-10/synthese_rbpp_parcours_scolaires_vd.pdf"><em>actions partagées</em></a> autour de plusieurs axes : aider l’enfant à être acteur de sa scolarité, impliquer les parents dans la scolarité de l’enfant. Ce partenariat peut prendre plusieurs formes et sa réussite implique un engagement de tous les acteurs.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lecole-inclusive-peut-elle-profiter-a-tous-les-eleves-129830">L’école inclusive peut-elle profiter à tous les élèves ?</a>
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<p>L’<a href="https://www.ac-reims.fr/qu-est-ce-qu-une-equipe-de-suivi-de-scolarisation-121604">Équipe de suivi de scolarisation</a> (ESS) est un autre exemple d’espace de travail entre partenaires. Elle regroupe toutes les personnes qui participent à la mise en œuvre du Projet personnalisé de scolarisation (PPS) d’un élève en situation de handicap : les parents, le professeur principal, la Conseillère principale d’éducation (CPE) mais aussi des acteurs externes à l’école en fonction des situations et des besoins, qui interviennent dans le champ social, médico-social ou sanitaire.</p>
<p>Mais faut-il parler davantage de partenariat ou de collaboration ? Deux approches sont possibles : distinguer ces deux notions en parlant de <a href="https://www.versunecoleinclusive.fr/wp-content/uploads/2016/02/Partenariat.pdf">« partenariat entre professionnels » et de « collaboration entre enseignants et parents »</a> ou considérer que ces deux notions se complètent dans la mise en œuvre de l’école inclusive. Mais un contexte d’école inclusive n’empêche pas forcément certaines limites (des contraintes organisationnelles qui s’imposent à l’école ou encore un manque de confiance et de l’incompréhension dans les relations parents/école).</p>
<p>Il est donc essentiel de développer un <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/rse/2018-v44-n1-rse04136/1054160ar/">« agir ensemble »</a> car le partenariat est un élément clé au cœur du projet d’école inclusive. Il nécessite la mise en commun des expertises entre les différents acteurs ou la réalisation d’actions conjointes négociées.</p>
<p>Le développement de l’accessibilité à l’école est une réalité concrète impliquant de nombreux acteurs internes à l’école mais aussi externes comme des institutions sociales, médico-sociales et sanitaires. En effet, les besoins d’aménagements sont multiples et étroitement liés à des situations spécifiques. C’est pourquoi il est utile de penser le partenariat en prenant appui sur la <a href="https://theconversation.com/ce-que-la-pensee-complexe-dedgar-morin-apporte-a-leducation-212999">pensée complexe promue par Edgar Morin</a>, c’est-à-dire « ce qui est tissé ensemble ».</p>
<p>Cette démarche implique de penser les contradictions et les complémentarités mais aussi de considérer que tous les acteurs (école, élèves, parents, professionnels du care) produisent l’école inclusive qui elle-même produit les acteurs. Enfin, un tel travail de liaison contribue à façonner des représentations d’une école véritablement inclusive tout en reconnaissant la place de chacun.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/accueil-et-pedagogie-ou-lecole-inclusive-en-est-elle-en-france-187733">Accueil et pédagogie : où l’école inclusive en est-elle en France ?</a>
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<p class="fine-print"><em><span>Jean-Yves Anjard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour mieux répondre aux besoins des élèves en situation de handicap, il importe de prendre en compte les recommandations de tous les professionnels qui l’accompagnent.Jean-Yves Anjard, Docteur en sciences de l'éducation et de la formation, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2220692024-02-01T14:57:28Z2024-02-01T14:57:28ZLa peur aide-t-elle à apprendre ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/571586/original/file-20231030-25-tocxly.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C2%2C998%2C652&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Confrontés à des situations qui les effraient, les enfants apprennent à se méfier des nouvelles expériences.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Beaucoup d’entre nous gardent un souvenir cuisant de jours où ils se sont fait disputer par un parent ou un enseignant. Les expériences auxquelles se mêle la peur s’impriment souvent dans notre mémoire. Il est essentiel en effet de se rappeler des situations douloureuses pour tenter de les éviter dans le futur. Il s’agit d’une réaction favorable à <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/10832548/">notre survie</a>.</p>
<p>Ce lien étroit entre peur et mémoire pourrait nous amener à penser que la peur favorise les apprentissages. La recherche montre cependant qu’elle peut avoir des <a href="https://www.nature.com/articles/s44159-023-00156-1">conséquences négatives à long terme</a> pour les enfants comme pour les adultes, et rendre l’apprentissage plus difficile.</p>
<p>Alors comment apprenons-nous et qu’apprenons-nous quand nous avons peur ? Voici les réponses que nous apporte la recherche.</p>
<h2>Comment la peur affecte les apprentissages des enfants</h2>
<p>La peur est conçue pour nous protéger contre les <a href="https://www.nature.com/articles/s44159-023-00156-1">dangers actuels et futurs</a>. Confrontés à des situations qui les effraient, les enfants apprennent à éviter de nouvelles expériences au lieu d’explorer, de s’engager et d’aborder l’inconnu avec curiosité.</p>
<p>Une exposition constante à la peur modifie la façon dont le cerveau réagit au monde extérieur. La peur déclenche une <a href="https://www.jstor.org/stable/40971979">réaction de stress dans le cerveau</a> et le met en état d’alerte ; elle nous rend hyperréactifs pour répondre de manière décisive aux menaces qui se présentent.</p>
<p>Cette attitude peut être bienvenue si vous vous retrouvez par exemple face à l’agressivité d’une personne inconnue. Mais elle n’a rien de productif dans un environnement d’étude comme l’école, où l’on nous demande justement d’être ouverts à de nouvelles expériences et de créer des solutions innovantes.</p>
<p>En fait, les zones du cerveau activées lorsque nous avons peur sont différentes de celles que nous utilisons lorsque nous réfléchissons attentivement <a href="https://www.annualreviews.org/doi/full/10.1146/annurev-psych-010814-015221">à la manière d’aborder un problème délicat</a>. <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4774859/">Des recherches</a> ont montré que, lorsque nous sommes dans un état de peur, les parties les plus primitives du cerveau prennent le relais de l’activité du cortex préfrontal, le « centre de contrôle » du cerveau.</p>
<p>Cela signifie qu’il est très difficile de faire des prévisions, de prendre des décisions judicieuses et d’utiliser nos connaissances existantes si nous nous sentons menacés ou effrayés.</p>
<h2>La peur se transmet des adultes aux enfants</h2>
<p>Les adultes jouent un rôle essentiel dans la façon dont les enfants vont réagir à la peur. Leur comportement face à des situations inconnues sert de modèle aux plus jeunes. Ils créent également (ou pas) des environnements sûrs qui favorisent l’exploration des enfants.</p>
<p>La peur s’apprend facilement par l’intermédiaire des adultes qui comptent dans la vie de l’enfant. Des études ont ainsi montré que les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0005796701000134">tout-petits</a> et les <a href="https://psycnet.apa.org/record/2008-01363-018?doi=1">enfants d’âge scolaire</a> apprennent à éviter les nouvelles expériences si leurs parents communiquent ou montrent des signes de peur à cet égard.</p>
<p>Pensez, par exemple, à la façon dont un enfant peut apprendre à craindre les animaux en voyant les réactions de ses parents. Ou, par exemple, à la façon dont les avertissements constants comme <a href="https://theconversation.com/stand-back-and-avoid-saying-be-careful-how-to-help-your-child-take-risks-at-the-park-212969">« Fais attention ! »</a> peuvent finir par rendre un enfant trop anxieux pour prendre des risques pour jouer, grimper aux arbres…</p>
<p>Les comportements des adultes influencent également le degré de sécurité intérieure que ressentent les enfants et qui leur permet d’oser être eux-mêmes et d’explorer le monde en toute confiance.</p>
<p>Les études sur les comportements des parents montrent de manière systématique qu’une parentalité impliquant des agressions physiques et verbales est associée à de <a href="https://bmcpsychology.biomedcentral.com/articles/10.1186/s40359-023-01046-0">moins bonnes performances chez les enfants</a>, incluant des résultats scolaires insuffisants, des niveaux d’agression et d’anxiété plus élevés, des relations médiocres avec les pairs.</p>
<p>La <a href="https://ejop.psychopen.eu/index.php/ejop/article/view/2013">situation s’inverse totalement</a> lorsque les parents, tout en donnant des règles et des limites, sont <a href="https://ejop.psychopen.eu/index.php/ejop/article/view/2013">chaleureux et encouragent l’autonomie</a>.</p>
<p>Les enseignants peuvent jouer également un rôle essentiel dans le développement de réactions de peur. Les élèves sont plus susceptibles d’être motivés et d’avoir une scolarité qui marche si les enseignants sont <a href="https://psycnet.apa.org/record/2018-44922-001">« favorables à l’autonomie »</a>, ce qui implique d’être curieux et ouvert par rapport aux intérêts des élèves, de solliciter leur point de vue et leur proposer des choix, d’accepter toute une gamme d’émotions, de la frustration, la colère ou la réticence au jeu jusqu’à la joie et la curiosité.</p>
<h2>Les effets de la peur sur les apprentissages à l’âge adulte</h2>
<p>Parmi les personnes qui souffrent d’anxiété à l’âge adulte, nombreuses sont celles qui ont été exposées dans leur enfance à des environnements où elles se sont senties <a href="https://www.aztrauma.org/wp-content/uploads/2018/02/Adverse-learning-experiences-in-childhood-may-affect-the-ability-to-learn-through-the-lifespan.pdf">constamment menacées</a>.</p>
<p>Ces adultes peuvent finir par éviter d’assumer de nouvelles tâches, envisageant sans cesse de nouvelles questions et multipliant les points de vue. Ce sont là des compétences que les employeurs apprécient généralement.</p>
<p>Les environnements de travail qui créent de la peur peuvent également être contre-productifs et stressants.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/557631/original/file-20231106-21-9va95c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Un patron qui fait régner la peur dans un open space" src="https://images.theconversation.com/files/557631/original/file-20231106-21-9va95c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/557631/original/file-20231106-21-9va95c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/557631/original/file-20231106-21-9va95c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/557631/original/file-20231106-21-9va95c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/557631/original/file-20231106-21-9va95c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/557631/original/file-20231106-21-9va95c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/557631/original/file-20231106-21-9va95c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les environnements de travail qui créent de la peur peuvent également être contre-productifs et stressants.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/cropped-shot-unhappy-senior-boss-standing-452661235">Shutterstock</a></span>
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<p>La recherche suggère que lorsque les employés perçoivent leur environnement de travail comme dangereux, ils sont plus susceptibles de souffrir <a href="https://www.mdpi.com/1660-4601/18/5/2294">d’épuisement professionnel, d’anxiété et de stress</a>. Les situations stressantes peuvent également interférer avec notre capacité à <a href="https://www.nature.com/articles/npjscilearn201611">transférer ce que nous savons à de nouvelles situations</a>.</p>
<p>Par ailleurs, les chercheurs affirment qu’une relation de confiance entre les employés et leurs supérieurs peut influencer la propension des travailleurs à révéler leur vulnérabilité et <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/smj.3051">à accepter des tâches</a> qui <a href="https://psycnet.apa.org/record/2005-15746-011">impliquent de l’incertitude</a>.</p>
<p>Les chercheurs ont également constaté que des relations positives au travail peuvent encourager la <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.2189/asqu.2005.50.3.367">créativité</a>, ce qui rend les missions plus intéressantes et plus agréables.</p>
<h2>Qu’apprenons-nous quand nous avons peur ?</h2>
<p>La peur s’accompagne bel et bien d’apprentissages. La question est de savoir de quoi il s’agit.</p>
<p>Face aux menaces et à l’hostilité, nous apprenons à éviter les défis et à nous conformer aux règles extérieures au lieu de nous demander comment améliorer les systèmes. Nous protégeons nos sentiments et limitons nos pensées aux domaines qui nous semblent sûrs.</p>
<p>Est-ce le type d’apprentissage qui nous permet de grandir et d’évoluer ?</p>
<p>Plus que jamais, les enfants et les adultes doivent collaborer de manière créative pour résoudre des problèmes difficiles. Cela signifie qu’il faut être capable d’affronter l’incertitude et d’accepter de faire des erreurs ou d’échouer. Développer ces compétences nécessite des environnements sûrs et stimulants, et non des environnements familiaux, scolaires ou professionnels régis par la peur.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222069/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Deborah Pino Pasternak a reçu des financements de l'Australian Research Council.</span></em></p>Il existe un lien étroit entre peur et mémoire. Faut-il en déduire que cette émotion peut aider à apprendre ? La recherche nous montre au contraire qu’elle a des conséquences négatives à long terme.Deborah Pino Pasternak, Associate Professor in Early Childhood Education and Community, University of CanberraLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2212382024-01-23T16:35:27Z2024-01-23T16:35:27ZFormation ou expérience : de quoi nos compétences dépendent-elles vraiment ?<p>L’âge de Gabriel Attal, né en 1989 et <a href="https://www.lexpress.fr/monde/le-premier-ministre-ressemble-a-un-nouveau-ne-gabriel-attal-vu-par-la-presse-etrangere-EUIBMBSSEZDZ5FGGAIV35OZH24/">nommé premier ministre le 9 janvier dernier</a>, a fait couler beaucoup d’encre, en France et à l’étranger. Trente-quatre ans, n’est-ce pas un <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/01/09/quels-sont-les-records-d-age-et-de-longevite-des-premiers-ministres-de-la-v-republique_6209915_4355770.html">peu jeune pour diriger un gouvernement</a> ? On pourrait rétorquer d’emblée, avec <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-pierre-corneille-en-quatre-tragedies-et-une-comedie">Corneille</a>, que l’âge ne fait rien à l’affaire. Car, « aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années », disait la célèbre tragi-comédie du XVII<sup>e</sup> siècle <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k54586108/f3.item"><em>Le Cid</em></a> dans une réplique qu’ont apprises des générations de collégiens.</p>
<p>Encore faudrait-il dire ce qu’est une âme bien née, ce qui soulève le problème des dons ; et préciser de quelle « affaire » il s’agit. Existe-t-il des tâches, ou des fonctions, pour lesquelles on est trop jeune… ou trop vieux ? Et cela ne dépend-il pas essentiellement de capacités propres aux individus ?</p>
<p>C’est toute la question du rapport entre les compétences, et l’expérience, qui se trouve posée. Examiner cette question nous permettra de mieux comprendre la dynamique du processus éducatif. Car c’est elle qui, pour l’essentiel, et en jeu dans cette « affaire ». Qu’en disent les sciences de l’éducation ?</p>
<h2>Savoirs, compétences, expérience : des réalités distinctes ?</h2>
<p>À première vue, les compétences et l’expérience sont deux réalités bien distinctes. Dans le sens du mouvement créé par le développement, tant dans le domaine de la formation, que dans celui de l’éducation, de <a href="https://theconversation.com/faut-il-continuer-a-noter-les-eleves-184694">pratiques d’évaluation centrées sur les compétences</a>, celles-ci ont fait l’objet de nombreux travaux.</p>
<p>Le Gouvernement du Québec définit la <a href="https://ulysse.univ-lorraine.fr/discovery/fulldisplay/alma991005643969705596/33UDL_INST:UDL">compétence</a> comme « un savoir agir fondé sur la mobilisation et l’utilisation efficaces d’un ensemble de ressources ». Ce qui distingue la compétence d’un simple savoir, lequel n’est pas directement opératoire. La compétence implique :</p>
<ul>
<li><p>la possession de ressources (en termes de savoirs et de savoir-faire) ;</p></li>
<li><p>la capacité de mobiliser de façon adéquate ces ressources, pour faire face à des familles de tâches (ex. : conduire une voiture ; installer un chauffe-eau) ;</p></li>
<li><p>et donc l’existence de familles de tâches identifiables dans l’univers des tâches possibles (ex. : les problèmes de soustraction ; la conduite d’un ministère).</p></li>
</ul>
<p>Mais la compétence n’est pas une donnée immédiate. Fait capital, elle se construit, grâce à un apprentissage. Certes, cette construction repose sur un socle de capacités que l’on peut considérer comme innées. Puis, une fois construite, la compétence se situe du côté des ressources internes des individus ; et, à ce titre, du côté du donné – mais d’un donné construit. Alors que l’expérience, forgée au fil du temps, est sans conteste et totalement du côté de l’acquis.</p>
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<figcaption><span class="caption">De plus en plus, dans le champ du recrutement, on parle en termes de « compétences ». (France Travail, 2019).</span></figcaption>
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<p>L’expérience peut s’entendre de deux façons. Elle est de l’ordre du fait brut : avoir de l’âge ; avoir vécu ; avoir rencontré et résolu des problèmes. Et de l’ordre de la maturité, consécutive à ce vécu : celui-ci a laissé des traces sous la forme d’une familiarité avec les problèmes, ou d’une véritable sagesse, qui rendent plus facile, et plus efficace, l’entrée en jeu de ses compétences.</p>
<p>Il y a bien alors un acquis important, qui s’intègre au « bagage » des ressources personnelles. On apprend de ses expériences, et l’ensemble de ces apprentissages constitue ce que l’on appelle l’expérience.</p>
<h2>Éduquer : ouvrir un champ pour la réalisation de soi</h2>
<p>Finalement, le donné et l’acquis sont en interconnexion. Compétence et expérience sont à la fois l’objet, et le fruit, d’un apprentissage. Quand le développement de l’individu est positif, compétences et expérience agissent de concert et travaillent dans le même sens. On pourrait définir à cet égard quatre grands cas de figure :</p>
<ul>
<li><p>l’individu compétent, mais sans expérience (le novice).</p></li>
<li><p>expérimenté mais avec un bagage très restreint de compétences (le professionnel limité, au champ d’exercice étroit).</p></li>
<li><p>sans compétence ni expérience.</p></li>
<li><p>et à la fois expérimenté, et très compétent (l’expert ouvert à toutes sortes de situations, et qui échappe à l’enfermement technocratique).</p></li>
</ul>
<p>L’éducation et la formation ont pour mission de faire progresser vers ce dernier idéal. Car le développement de la personne ne peut se faire en dehors d’un milieu humain, qui offre un environnement déterminé (historique, économique, social, politique, familial). Cet environnement propose, ou non, un accompagnement adéquat pour faire fructifier le socle de potentialités, désirs, capacités, propres à chacun.</p>
<p>C’est pourquoi le prix Nobel d’économie <a href="https://www.economie.gouv.fr/facileco/amartya-sen">Amartya Sen</a> propose de parler de « capabilités » plutôt que de capacités. Chaque capabilité ouvre sur un champ de réalisation de soi (ex. : se nourrir ; participer à la vie politique) où l’on pourra construire des compétences, et acquérir une expérience… si le milieu a une valeur éducative, et formatrice. C’est-à-dire s’il s’organise en milieu susceptible de favoriser les apprentissages.</p>
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<figcaption><span class="caption">Qu’est ce que les capabilités ? (FNEGE Médias, 2021)</span></figcaption>
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<p>À tout moment, chacun est (entre autres, car aucune personne humaine ne se réduit à cela) la somme de ses compétences, et le résultat de son expérience. Les compétences se construisent et évoluent. Leur état conditionne l’expérience, elle-même en élaboration progressive.</p>
<p>Chacun est engagé dans une spirale dont la positivité n’est jamais assurée, et qui peut se révéler tout autant destructrice, que majorante (au sens où Jean Piaget parlait d’une <a href="https://www.fondationjeanpiaget.ch/fjp/site/presentation/index_notion.php?NOTIONID=85">« équilibration majorante »</a>, qui permet de grandir et d’accroître son pouvoir d’agir). Tout dépend de la qualité de la construction de soi en termes de compétences et d’expérience, et de la qualité de l’offre d’éducation et de formation que propose le milieu dans lequel on a la chance, ou la malchance, de se trouver.</p>
<h2>L’être humain, un être à jamais inachevé</h2>
<p>Il faut être attentif, enfin, à une dernière caractéristique du développement de l’être humain : c’est un processus doublement marqué par un inachèvement constitutif. Dans son ouvrage <a href="https://www.persee.fr/doc/rfsoc_0035-2969_1964_num_5_4_6400"><em>L’entrée dans la vie. Essai sur l’inachèvement de l’homme</em></a>, Georges Lapassade a remarquablement décrit l’homme comme un être à la fois prématuré et « immaturé », « à jamais marqué par un inachèvement originel ».</p>
<p>Plasticité et fragilité sont deux caractéristiques humaines fondamentales. Si bien que la capacité de perfectionnement de soi (pour qui bénéficie d’une spirale majorante…) n’est que l’autre face de « l’inachèvement permanent de l’individu… à l’image de l’inachèvement permanent de l’espèce ». Double inachèvement qu’exprime l’idée de <a href="https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/n%C3%A9ot%C3%A9nie/54244">« néoténie »</a>), capacité de progresser par l’épanouissement de formes juvéniles, sans espoir d’achèvement complet et définitif.</p>
<p>En termes simples, cela signifie que l’éducation ne peut être que permanente. Et que chacun est sommé de se donner les moyens de progresser toujours, vers l’idéal de l’individu ayant développé pleinement ses capabilités, dans le cadre d’un <a href="https://www.eyrolles.com/Entreprise/Livre/orientation-et-formation-tout-au-long-de-la-vie-9782367176321/">« trajet de formation émancipateur »</a>.</p>
<p>Dans le meilleur des cas, les compétences et l’expérience s’enrichissent mutuellement au cours d’un développement que l’éducation a pour mission principale d’orchestrer, avant que chacun ne prenne le relais pour devenir l’autorégulateur de sa propre vie.</p>
<p>Mais ce processus d’éducation, puis d’autoéducation, est sans fin. Personne ne peut se prévaloir d’avoir atteint la maturité, et d’être devenu adulte. D’où la pertinence du concept d’« anthropolescence » (sur le modèle du terme « adolescence ») que <a href="https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2022/10/26/la-mort-de-guy-avanzini-pionnier-des-sciences-de-l-education_6147447_3382.html">Guy Avanzini</a> a proposé pour désigner « <a href="https://www.labouquinette.fr/livre/9782865863280-cahiers-binet-simon-n-4-94-libres-propos-sur-l-ecole-collectif/">cet être humain qui ne cesse de se renouveler</a> et, né plusieurs, ne cesse de manifester, et de se manifester, sa pluralité, à travers un renouvellement de lui-même ».</p>
<p>C’est pourquoi, enfin, n’en déplaise à Corneille, ce n’est qu’à la fin d’une vie que l’on peut savoir si l’âme qui s’en va était « bien née ». Car, paradoxalement, c’est à l’aune du développement que l’on peut apprécier la qualité d’un donné initial. Ce n’est qu’à la fin de l’histoire que la vérité (toujours relative) se révèle.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221238/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Charles Hadji ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Existe-t-il des tâches, ou des fonctions, pour lesquelles on est trop jeune… ou trop vieux ? Retour sur ce que les sciences de l’éducation nous disent du rapport entre expérience et compétences.Charles Hadji, Professeur honoraire (Sciences de l’éducation), Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2198662024-01-18T17:21:05Z2024-01-18T17:21:05ZPourquoi les enfants mentent-ils ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/565510/original/file-20221209-22427-9f9cod.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=13%2C68%2C9188%2C5932&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Respecter une consigne demande une bonne maîtrise de soi.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/adorable-latin-toddler-wearing-casual-clothes-1856365738">Krakenimages.com/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Avez-vous regardé ce jouet ? Ainsi interrogés dans le cadre d’une <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0278099">étude sur le mensonge chez les tout-petits</a>, 40 % des jeunes participants ont répondu par l’affirmative alors même qu’ils n’avaient pas jeté un seul coup d’œil au jeu. Lorsqu’un si grand nombre d’enfants invente des mensonges sans avoir le moindre avantage à en tirer, cela signifie qu’il ne faut pas voir là seulement d’insolents bobards.</p>
<p>Des chercheurs de Pologne et du Canada ont testé la maîtrise de soi des enfants à l’âge de 18 mois en leur demandant de ne pas regarder un jouet. Les 252 participants ont été testés à nouveau à l’âge de deux ans, puis six mois plus tard. Seuls 35 % d’entre eux ont désobéi à la demande de ne pas regarder, mais 27 % d’entre eux ont prétendu à tort qu’ils avaient respecté la consigne.</p>
<p>Dès leur plus jeune âge, les enfants apprennent que le mensonge est une faute morale. Pourtant, dans certains cadres d’interactions sociales, les enfants peuvent aussi être encouragés à mentir. Si de nombreux parents <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1111/chso.12139">disent explicitement à leurs enfants de ne pas déformer la vérité</a>, soulignant l’importance d’être honnête, ils leur transmettent aussi des messages nuancés sur l’honnêteté. Par exemple, ils peuvent affirmer qu’il est parfois acceptable de dire de petits mensonges pour protéger les sentiments d’autrui.</p>
<p>Nombreuses sont les raisons pour lesquelles les enfants de l’étude ont pu faire de faux aveux. Ils étaient si jeunes qu’ils ont peut-être eu du mal à comprendre la question. Nous savons que les enfants ont tendance à <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/20438461/">dire oui plus facilement</a> que les adultes lorsqu’on leur pose des questions de type oui-non.</p>
<p>Les recherches montrent que les enfants ont besoin <a href="https://www.lancsngfl.ac.uk/curriculum/pshe/download/file/SEAD.pdf">d’explorer et de tester les limites d’un nouveau concept</a> avant de le comprendre. Le jeu et l’apprentissage sont intimement liés, en particulier pour les enfants.</p>
<p>Le fait de raconter des bobards apparaît dans les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3788848/pdf/nihms489244.pdf">années préscolaires</a>. Les enfants de deux ans en sont déjà capables. Le mensonge va de pair avec la progression des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21887961/">compétences sociales des enfants</a>. Bien que considéré comme un comportement problématique, il est également le signe d’un développement cérébral sain chez les enfants et constitue une étape importante sur le plan cognitif.</p>
<p>Les premiers mensonges des enfants ne comportent que quelques mots. Au fur et à mesure que leurs capacités cognitives se développent, <a href="https://srcd.onlinelibrary.wiley.com/doi/pdf/10.1111/cdep.12023">leurs mensonges deviennent plus complexes</a> et peuvent être maintenus plus longtemps.</p>
<h2>Des compétences émotionnelles en jeu</h2>
<p>Pour mentir, <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/desc.13096">trois éléments sont nécessaires</a>. Premièrement, les enfants doivent avoir suffisamment de retenue pour surmonter leur tendance à dire la vérité. En psychologie, on appelle cela le contrôle inhibiteur.</p>
<p>Deuxièmement, ils doivent avoir accès à la mémoire à court terme et être capables de créer simultanément des scénarios alternatifs. Troisièmement, les enfants doivent pouvoir passer d’un comportement conforme à la vérité à un comportement en phase avec l’histoire qu’ils inventent ; c’est ce qu’on appelle la flexibilité cognitive.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une petite fille coiffée d’une capeline se penche sur une table et tient une tasse à café d’un air malicieux" src="https://images.theconversation.com/files/500066/original/file-20221209-34427-t8ib8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/500066/original/file-20221209-34427-t8ib8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/500066/original/file-20221209-34427-t8ib8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/500066/original/file-20221209-34427-t8ib8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/500066/original/file-20221209-34427-t8ib8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/500066/original/file-20221209-34427-t8ib8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/500066/original/file-20221209-34427-t8ib8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">En train de comploter ? Ou simplement de jouer ?</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/cute-little-girl-drinking-attractive-female-295052069">Photography Cornwall/Shutterstock</a></span>
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</figure>
<p>Les enfants sont plus susceptibles de raconter de petits mensonges lorsqu’ils ont une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0022096520304999">compréhension émotionnelle élevée</a> et sont capables de saisir la nature, les causes et les conséquences des émotions qui les touchent ou concernent les autres.</p>
<p>Les styles d’éducation jouent un rôle dans le recours à ces petits mensonges. Les enfants qui mentent pour protéger les sentiments d’autrui sont plus susceptibles d’avoir des parents <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0022096511001317">plutôt autoritaires</a> et qui les soutiennent et répondent à leurs besoins. En revanche, les enfants élevés dans un <a href="https://srcd.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1467-8624.2011.01663.x">environnement punitif</a> sont plus susceptibles de mentir et de persister dans leur mensonge, peut-être pour se protéger d’une punition sévère.</p>
<h2>Des modèles qui influencent les enfants</h2>
<p>Le <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/desc.12883">comportement des adultes</a> peut influencer la propension des enfants à mentir ou non. Les enfants qui observent une autre personne <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0022096517306811">recevoir une récompense pour avoir dit la vérité</a> ou une punition pour avoir dit un mensonge sont plus enclins à dire la vérité.</p>
<p>De même, les enfants qui voient que leurs pairs sont récompensés d’avoir avoué un méfait sont plus enclins à dire la vérité. Les adultes doivent donc être conscients que les enfants prêtent autant attention aux actes qu’à ce qu’on leur demande de faire.</p>
<p>Encourager les enfants à dire la vérité en évitant de mentir en leur présence et en les récompensant lorsqu’ils sont francs, même s’ils ont agi de manière indésirable, peut les inciter à être honnêtes à l’avenir.</p>
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<p>À l’âge adulte, beaucoup d’entre nous peinent à admettre que les nuances de gris entre l’honnêteté et la malhonnêteté sont le lubrifiant social de la vie. La comédie sortie en 2009 <a href="https://www.imdb.com/title/tt1058017/"><em>L’invention du mensonge</em></a>, avec Ricky Gervais et Jennifer Garner, se déroule dans une réalité alternative où le mensonge n’existe pas. Le premier personnage à apprendre à mentir dans ce film, Mark, interprété par Gervais, ment d’abord pour son propre compte, avant de réaliser que la malhonnêteté peut être utilisée pour aider les autres, par exemple pour réconforter sa mère mourante.</p>
<p>Vers la fin de <em>L’invention du mensonge</em>, Anna, le personnage de Garner, demande à Mark pourquoi il n’a pas utilisé son pouvoir de mentir pour la manipuler afin qu’elle l’épouse. Il répond que « cela ne compterait pas ». Si nous pouvons être honnêtes avec nous-mêmes sur notre relation avec le mensonge, nous pouvons aider nos enfants à apprendre à dire la vérité quand c’est le plus important.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219866/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gadda Salhab ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Qu’en enfant mente est souvent problématique. Mais qu’il en soit capable marque une étape importante dans son développement cognitif.Gadda Salhab, PhD Candidate, Forensic Psychology, University of PortsmouthLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2207122024-01-16T16:20:13Z2024-01-16T16:20:13ZLa curieuse joie d’avoir tort : de l’importance de l’humilité intellectuelle<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/568230/original/file-20231214-23-ck96kw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=121%2C0%2C6081%2C3988&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Parfois, de nouvelles informations permettent de prendre une nouvelle direction. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/photo/man-stands-at-a-crossroads-in-the-forest-in-autumn-royalty-free-image/1708245189">Schon/Moment via Getty Images</a></span></figcaption></figure><p>On attribue cette déclaration à Mark Twain : « Je suis en faveur du progrès ; c’est le changement que je n’aime pas ». Une phrase qui souligne la tendance humaine à désirer la croissance tout en opposant une forte résistance au dur labeur qui l’accompagne. Je peux certainement m’identifier à ce sentiment.</p>
<p>J’ai été élevé dans un foyer évangélique conservateur. Comme beaucoup de ceux qui ont grandi dans un environnement similaire, j’ai appris un ensemble de croyances religieuses qui ont encadré la façon dont je me comprenais le monde qui m’entourait. On m’a appris que Dieu est aimant et puissant, et que ses fidèles sont protégés. On m’a appris que le monde était juste et que Dieu était bon. Le monde me semblait simple et prévisible – et surtout, sûr.</p>
<p>Ces croyances ont volé en éclats lorsque mon frère est décédé de manière inattendue alors que j’avais 27 ans. Sa mort à 34 ans, avec trois jeunes enfants, a choqué notre famille et notre communauté. Outre le chagrin, certaines de mes hypothèses les plus profondes ont été remises en question. Dieu n’était-il pas bon ou n’était-il pas puissant ? Pourquoi Dieu n’a-t-il pas sauvé mon frère, qui était un père et un mari gentil et aimant ? Et à quel point l’univers est-il injuste, insensible et aléatoire ?</p>
<p>Cette perte profonde a marqué le début d’une période au cours de laquelle j’ai remis en question toutes mes croyances à la lumière de mes propres expériences. Au bout d’un temps considérable, et grâce à un thérapeute exemplaire, j’ai pu réviser ma vision du monde d’une manière qui m’a semblé authentique. J’ai changé d’avis sur beaucoup de choses. Le processus n’a pas été agréable. Il m’a fallu plus de nuits blanches que je n’ose l’imaginer, mais j’ai pu réviser certaines de mes croyances fondamentales.</p>
<p>Je ne l’avais pas réalisé à l’époque, mais cette expérience relève de ce que les chercheurs en sciences sociales appellent <a href="https://doi.org/10.1177/0146167217697695">l’humilité intellectuelle</a>. Et honnêtement, c’est probablement en grande partie la raison pour laquelle, en tant que <a href="https://scholar.google.com/citations?user=2rkql34AAAAJ&hl=en&oi=ao">professeur de psychologie</a>, je m’intéresse tant à l’étudier. L’humilité intellectuelle a <a href="https://theconversation.com/us/topics/intellectual-humility-125132">fait l’objet d’une attention accrue</a>, et elle semble d’une importance cruciale à notre époque, où il est plus courant de défendre sa position que de changer d’avis.</p>
<h2>Ce que signifie l’humilité intellectuelle</h2>
<p>L’humilité intellectuelle est une forme particulière d’humilité liée aux croyances, aux idées ou aux visions du monde. Il ne s’agit pas seulement de croyances religieuses, mais aussi d’opinions politiques, d’attitudes sociales diverses, de domaines de connaissance ou d’expertise ou de toute autre conviction forte. L’humilité intellectuelle a des dimensions à la fois internes et externes.</p>
<p>L’humilité intellectuelle implique la prise de conscience et l’appropriation de nos propres <a href="https://doi.org/10.1016/j.paid.2017.12.014">limites et préjugés</a>, de ce que l’on sait et de la manière dont on l’a appris. Elle exige une volonté de <a href="https://doi.org/10.1080/00223891.2015.1068174">réviser ses opinions</a> à la lumière de preuves solides.</p>
<p>Sur le plan interpersonnel, il s’agit de <a href="https://doi.org/10.1177/009164711404200103">maîtriser son ego</a> afin de pouvoir présenter ses idées de manière modeste et respectueuse. Il s’agit de présenter ses convictions d’une manière qui ne soit pas défensive et d’admettre que l’on a tort quand c’est le cas. Cela implique de montrer que vous vous souciez davantage d’apprendre et de préserver les relations que d’avoir « raison » ou de faire preuve de supériorité intellectuelle.</p>
<p>Une autre façon de concevoir l’humilité, intellectuelle ou autre, est d’être au bon niveau dans une situation donnée : pas trop haut (ce qui est de l’arrogance), mais pas non plus trop bas (ce qui est de l’autodépréciation).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/565899/original/file-20231214-29-aopjwl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="male standing with mic, seated audience, in a casual business seminar" src="https://images.theconversation.com/files/565899/original/file-20231214-29-aopjwl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/565899/original/file-20231214-29-aopjwl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/565899/original/file-20231214-29-aopjwl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/565899/original/file-20231214-29-aopjwl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/565899/original/file-20231214-29-aopjwl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/565899/original/file-20231214-29-aopjwl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/565899/original/file-20231214-29-aopjwl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Avoir confiance en son domaine d’expertise n’est pas croire que l’on sait tout sur tout.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/photo/business-people-with-raised-arms-during-seminar-royalty-free-image/966267126">Morsa Images/DigitalVision via Getty Images</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Je connais assez bien la psychologie, mais pas beaucoup l’opéra. Lorsque je me trouve dans un cadre professionnel, je peux profiter de l’expertise que j’ai acquise au fil des ans. Mais lorsque je me rends à l’opéra avec des amis plus cultivés, je devrais écouter et poser davantage de questions, plutôt que d’affirmer avec assurance mon opinion très peu informée.</p>
<p>Les quatre principaux aspects de l’humilité intellectuelle sont les suivants :</p>
<ul>
<li><p>Ouvert d’esprit, évitant le dogmatisme et étant prêt à réviser ses croyances.</p></li>
<li><p>Curieux, vous recherchez de nouvelles idées, des moyens de vous développer et de grandir, et vous êtes capable de changer d’avis pour vous aligner sur des preuves solides.</p></li>
<li><p>Réaliste, en admettant vos défauts et vos limites, en voyant le monde tel qu’il est plutôt que tel que l’on voudrait qu’il soit.</p></li>
<li><p>être capable d’apprendre, en réagissant sans se mettre sur la défensive et en changeant son comportement pour s’aligner sur de nouvelles connaissances.</p></li>
</ul>
<p>L’humilité intellectuelle est souvent un travail difficile, surtout lorsque les enjeux sont importants.</p>
<p>En commençant par admettre que, comme tout le monde, vous avez des biais cognitifs et des défauts qui limitent votre savoir, l’humilité intellectuelle peut consister à s’intéresser sincèrement aux croyances de votre parent au cours d’une conversation lors d’une réunion de famille, plutôt que d’attendre qu’il ait terminé pour lui prouver qu’il a tort en lui faisant part de votre opinion – qui est supérieure.</p>
<p>Il peut s’agir d’examiner les mérites d’un autre point de vue sur une question politique brûlante et les raisons pour lesquelles des personnes respectables et intelligentes peuvent ne pas être d’accord avec vous. Lorsque vous abordez ces discussions difficiles avec curiosité et humilité, elles deviennent des occasions d’apprendre et de progresser.</p>
<h2>Pourquoi l’humilité intellectuelle est un atout</h2>
<p>Bien que <a href="https://theexperimentpublishing.com/catalogs/summer-2023/humble/">j’étudie l’humilité</a> depuis des années, je ne la maîtrise pas encore à titre personnel. Il est difficile de nager à contre-courant des normes culturelles qui <a href="https://doi.org/10.1177/1948550609355719">récompensent le fait d’avoir raison et punissent les erreurs</a>. Il faut travailler constamment pour la développer, mais la science psychologique a mis en évidence que cette attitude comporte de nombreux avantages.</p>
<p>Tout d’abord, il faut tenir compte des avancées sociales, culturelles et technologiques. <a href="https://theconversation.com/intellectual-humility-is-a-key-ingredient-for-scientific-progress-211410">Toute avancée significative</a> dans les domaines de la médecine, de la technologie ou de la culture est due au fait que quelqu’un a admis qu’il ne savait pas quelque chose et qu’il s’est ensuite passionné pour la recherche du savoir avec curiosité et humilité. Pour progresser, il faut <a href="https://doi.org/10.1016/j.paid.2016.03.016">admettre ce que l’on ne sait pas</a> et chercher à apprendre quelque chose de nouveau.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/565900/original/file-20231214-15-2ngmpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="animated people talking over a meal" src="https://images.theconversation.com/files/565900/original/file-20231214-15-2ngmpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/565900/original/file-20231214-15-2ngmpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/565900/original/file-20231214-15-2ngmpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/565900/original/file-20231214-15-2ngmpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/565900/original/file-20231214-15-2ngmpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/565900/original/file-20231214-15-2ngmpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/565900/original/file-20231214-15-2ngmpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">L’humilité intellectuelle peut rendre les conversations moins conflictuelles.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/photo/extended-family-having-meal-together-royalty-free-image/1256317730">Compassionate Eye Foundation/Gary Burchell/DigitalVision via Getty Images</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Lorsque les gens font preuve d’humilité intellectuelle, leurs relations avec les autres s’améliorent. Des recherches ont montré que l’humilité intellectuelle est associée à une <a href="https://doi.org/10.1080/17439760.2015.1037861">plus grande tolérance à l’égard des personnes avec lesquelles vous n’êtes pas d’accord</a>.</p>
<p>Par exemple, les personnes intellectuellement humbles acceptent mieux les personnes qui ont des opinions <a href="https://doi.org/10.1080/17439760.2016.1167937">religieuses</a> et <a href="https://doi.org/10.1080/15298868.2020.1714711">politiques</a> différentes des leurs. L’ouverture <a href="https://doi.org/10.1080/15298868.2017.1361861">aux nouvelles idées</a> en est un élément central, de sorte que les gens sont moins sur la défensive face à des perspectives potentiellement stimulantes. Ils sont <a href="https://doi.org/10.1080/17439760.2015.1004554">plus enclins à pardonner</a>, ce qui peut aider à réparer et à maintenir les relations.</p>
<p>Enfin, l’humilité facilite le développement personnel. L’humilité intellectuelle vous permet d’avoir une <a href="https://theconversation.com/teens-dont-know-everything-and-those-who-acknowledge-that-fact-are-more-eager-to-learn-214120">vision plus juste de vous-même</a>.</p>
<p>Lorsque vous <a href="https://doi.org/10.1111/phpr.12228">pouvez admettre et assumer vos limites</a>, vous pouvez aussi demander de l’aide dans les domaines où vous avez une marge de progression et vous êtes <a href="https://theconversation.com/turning-annual-performance-reviews-into-humble-encounters-yields-dividends-for-employees-and-managers-216949">plus réceptif aux informations reçues</a>. Lorsque vous vous limitez à faire les choses comme vous les avez toujours faites, vous manquez d’innombrables occasions de croissance, d’expansion et de nouveauté – autant de choses qui peuvent provoquer l’admiration, l’émerveillement, et font que la vie vaut la peine d’être vécue.</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1016/j.obhdp.2019.04.008">L’humilité peut ainsi favoriser le sentiment d’authenticité</a> et le développement personnel.</p>
<h2>L’humilité ne signifie pas qu’il faut se laisser faire</h2>
<p>Malgré ces bénéfices, l’humilité a parfois mauvaise presse. Les gens peuvent avoir des idées fausses sur l’humilité intellectuelle, il est donc important de dissiper certains mythes.</p>
<p>L’humilité intellectuelle n’est pas un manque de conviction ; on peut croire fermement à quelque chose jusqu’à ce que l’on change d’avis et que l’on croie autre chose. Ce n’est pas non plus être timoré. Vous devez placer la barre très haut en ce qui concerne les preuves dont vous avez besoin pour changer d’avis. Il ne s’agit pas non plus de se dévaloriser ou d’être toujours d’accord avec les autres. N’oubliez pas qu’il s’agit d’être au bon niveau, et non de se déprécier.</p>
<p><a href="https://www.intellectualhumilityscience.com/">Les chercheurs travaillent d’arrache-pied</a> pour valider des méthodes fiables permettant de cultiver l’humilité intellectuelle. Je fais partie <a href="https://www.templeton.org/grant/applied-research-on-intellectual-humility-a-request-for-proposals">d’une équipe</a> qui supervise un ensemble de projets visant à tester différentes interventions destinées à développer l’humilité intellectuelle.</p>
<p>Certains chercheurs examinent différentes façons d’engager des discussions, et d’autres explorent le rôle de l’amélioration de l’écoute. D’autres testent des programmes éducatifs, et d’autres encore cherchent à savoir si différents types de commentaires et l’exposition à divers réseaux sociaux peuvent renforcer l’humilité intellectuelle.</p>
<p>Des travaux antérieurs dans ce domaine suggèrent que <a href="https://doi.org/10.1177/009164711404200111">l’humilité peut être cultivée</a>, et nous sommes donc impatients de voir quelles seront les voies les plus prometteuses qui émergeront de ce nouveau projet.</p>
<p>Il y a une autre chose que la religion m’a enseignée qui était légèrement erronée. On m’a dit que trop apprendre pouvait être problématique ; après tout, qui souhaite apprendre au point de perdre sa foi ?</p>
<p>Mais dans mon expérience, ce que j’ai appris en perdant la foi a pu sauver la part de ma foi que je peux vraiment approuver et qui me semble authentique par rapport à mes expériences. Plus vite nous ouvrirons notre esprit et cesserons de résister au changement, plus vite nous trouverons la liberté qu’offre l’humilité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220712/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Certains des travaux décrits ont été soutenus par des subventions de la John Templeton Foundation accordées à Daryl Van Tongeren et à ses collègues. Cet article a été produit avec le soutien du Greater Good Science Center de l'université de Berkeley et de la John Templeton Foundation dans le cadre de l'initiative du GGSC sur la sensibilisation à la science de l'humilité intellectuelle.</span></em></p>L’humilité intellectuelle consiste à admettre ses propres préjugés et la possibilité de se tromper dans ses croyances ou sa vision du monde.Daryl Van Tongeren, Associate Professor of Psychology, Hope CollegeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2198622023-12-27T16:27:21Z2023-12-27T16:27:21ZL’anxiété stimule-t-elle vraiment la créativité?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/565497/original/file-20230905-19-xuho6l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C487%2C5145%2C3245&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les voyages créatifs impliquent souvent d'entrer dans l'inconnu - et de le faire seul.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/photo/man-on-a-mission-royalty-free-image/1369468881?phrase=minimalism+minimal+surreal+journey">DNY59/iStock via Getty Images</a></span></figcaption></figure><p>Aux États-Unis, les troubles anxieux touchent environ un <a href="https://www.nimh.nih.gov/health/statistics/any-anxiety-disorder">tiers de la population</a>. Il n’est donc pas surprenant qu’un grand nombre d’artistes et d’écrivains souffrent également <a href="https://www.inserm.fr/dossier/troubles-anxieux/">d’anxiété</a> et de dépression.</p>
<p>Mais alors que certains critiques considèrent les peintures saisissantes de Vincent Van Gogh et les poèmes confessionnels de Sylvia Plath <a href="https://www.thecollector.com/sylvia-plath-famous-poet/">comme le résultat direct de leur psychose et de leur dépression</a>, j’ai tendance à être moins romantique à ce sujet. Je considère que leur brillante production s’est produite en dépit de leur angoisse mentale, plutôt qu’à cause d’elle.</p>
<p>Dans mon nouveau livre, <a href="https://rowman.com/ISBN/9781538170380/Afraid-Understanding-the-Purpose-of-Fear-and-Harnessing-the-Power-of-Anxiety"><em>Afraid</em></a>, j’explore l’interaction entre la peur, l’anxiété et le travail créatif.</p>
<p>Elles sont plus étroitement liées qu’on ne le pense : selon la situation, la peur et l’anxiété peuvent inspirer ou entraver. Mais lorsque l’anxiété devient envahissante, le travail créatif est souvent bloqué.</p>
<h2>L’anxiété comme obstacle</h2>
<p>Si l’anxiété peut entraver le travail créatif, c’est d’abord parce qu’elle détourne l’attention nécessaire vers des peurs et des inquiétudes.</p>
<p>Si un écrivain craint de perdre son emploi, il lui sera plus difficile de se concentrer sur son travail. L’anxiété excessive court-circuite toutes les tâches non liées à la menace, et les gens régressent <a href="https://www.verywellmind.com/learning-brain-vs-survival-brain-6749311">vers un mode de survie de base</a>. L’essentiel de l’attention, de la réflexion et des émotions sera consacré à la gestion de la source du danger, qu’elle soit réelle ou imaginaire. Et les esprits créatifs sont particulièrement doués dans ce dernier domaine.</p>
<p>Parce que les peurs sont centrées sur la survie, les <a href="https://www.psychologytoday.com/us/blog/fixing-families/202212/are-you-too-routinized-too-rigid-maybe-youre-anxious">gens deviennent moins flexibles et plus méfiants</a> lorsqu’ils sont effrayés et anxieux. Dans ces moments-là, il est beaucoup plus intéressant de suivre un chemin connu que de prendre des risques et de s’aventurer dans l’inconnu. Inutile de préciser qu’une aversion pour l’inconnu ne mène pas souvent à des percées créatives !</p>
<p>Une autre façon dont la peur peut entraver la créativité est liée à la crainte d’être rejeté.</p>
<p>Les amis, la famille, les collègues et les critiques <a href="https://www.theatlantic.com/business/archive/2014/10/why-new-ideas-fail/381275/">résistent souvent</a> aux idées inhabituelles ou à celles qui s’écartent des normes artistiques établies. Outre l’envie et la concurrence, ces réactions réflexes <a href="https://doi.org/10.1098/rstb.2009.0134">sont également logiques du point de vue de l’évolution</a> : les normes et les modes de pensée convenus favorisent l’harmonie du groupe. L’histoire est remplie de rejets, de moqueries et d’oppressions à l’encontre d’idées et de styles nouveaux jugés trop « excentriques » – les peintres <a href="https://www.famsf.org/stories/memorable-rejections-monet-and-the-artists-struggle-part-one#">Claude Monet</a> et <a href="https://truthout.org/articles/honoring-radical-women-worldwide-who-have-positively-changed-history/">Frida Kahlo</a> et l’auteur <a href="https://www.pbs.org/wgbh/americanexperience/features/whaling-biography-herman-melville/">Herman Melville</a> ont tous été sévèrement critiqués, rejetés ou persécutés par leurs contemporains.</p>
<p>Pour créer quelque chose de vraiment original, un artiste doit souvent rompre avec le statu quo.</p>
<p>Il est donc naturel que toute entreprise créative suscite la peur de la critique, du rejet ou de l’échec. Le chemin le moins fréquenté peut être plus dangereux. Elle peut même s’avérer infructueuse. Et parfois, on le paye de sa vie : <a href="http://www.pbs.org/empires/thegreeks/keyevents/399.html">Socrate a été exécuté</a> parce qu’on l’accusait de corrompre les jeunes par ses questions, tandis que le philosophe italien Giordano Bruno <a href="https://blogs.scientificamerican.com/observations/was-giordano-bruno-burned-at-the-stake-for-believing-in-exoplanets/">a été brûlé à mort, en raison de ses affirmations hérétiques</a> selon lesquelles la Terre n’était pas le centre de l’univers.</p>
<h2>Quand l’anxiété inspire</h2>
<p>Il ne s’agit pas de dire que pour être artiste, il faut être aussi détendu que possible. Un certain niveau d’anxiété peut être utile.</p>
<p>Alors que la terreur peut vous paralyser, l’ennui et la langueur peuvent <a href="https://link.springer.com/referenceworkentry/10.1007/978-3-319-01384-8_288">réduire votre motivation à néant</a>.</p>
<p>Il existe un niveau d’anxiété idéal qui permet d’exploiter la motivation et la cognition et de concentrer toute l’attention sur la tâche à accomplir.</p>
<p>Alors que la date limite de rédaction de <em>Afraid</em> approchait à grands pas, j’ai ressenti une pointe d’anxiété qui m’a propulsé jusqu’à la ligne d’arrivée : J’ai décidé de me retirer dans un centre de villégiature près des montagnes de Tucson pendant deux semaines et de travailler 12 heures par jour pour terminer le livre. L’angoisse de ne pas respecter la date limite a suffi à m’inciter à m’atteler à la tâche.</p>
<p>Et puis il y a le spectre de la mort.</p>
<p>Les génies comme Michel-Ange et Charles Dickens étaient immortels, leurs coups de pinceau et leurs mots sont devenus éternels.</p>
<p>Le travail créatif est un moyen d’atteindre un certain niveau d’immortalité – l’art, les livres et les articles vivent au-delà de la date de péremption.</p>
<p>L’anthropologue américain Ernest Becker a affirmé que la peur de la mort <a href="https://doi.org/10.1177/0146167213490804">motivait les humains à composer</a> des histoires, des mythes et des légendes sur l’au-delà et l’immortalité, et qu’elle a inspiré de grandes œuvres architecturales comme les pyramides égyptiennes.</p>
<p>Cette peur existentielle <a href="https://theconversation.com/i-want-to-stare-death-in-the-eye-why-dying-inspires-so-many-writers-and-artists-128061">a également motivé les auteurs et les artistes</a> à rechercher une forme d’immortalité à travers leurs œuvres. Je trouve quelque peu réconfortant qu’après ma mort, certaines de mes découvertes scientifiques et certains de mes écrits puissent continuer à vivre à travers d’autres personnes.</p>
<p>D’ailleurs, vous lirez peut-être cet article longtemps après ma disparition…</p>
<h2>Ce que vous pouvez et ne pouvez pas contrôler</h2>
<p>Le travail créatif implique la traversée d’un paysage mental plein d’écueils, qu’il s’agisse d’explorer son imagination, ses souvenirs, ou d’échafauder sa réflexion. L’échec menace toujours.</p>
<p>Cette incertitude peut susciter la peur et le doute.</p>
<p>Il est intéressant de noter que la peur est uniquement axée sur la survie, alors que la créativité fonctionne au mieux <a href="https://www.simplypsychology.org/maslow.html">lorsque les besoins fondamentaux de survie sont satisfaits</a>. En outre, la peur est une émotion primitive, alors que l’art, la science et la culture font partie des capacités les plus évoluées de l’humanité.</p>
<p>Mais la peur et la créativité sont également similaires en ce sens qu’elles possèdent toutes deux des processus automatiques et intuitifs. Les meilleures œuvres d’art ne sont pas le seul résultat d’une pensée logique. Comme un fœtus, l’art grandit à l’intérieur de l’artiste de manière autonome tandis que l’artiste continue à le nourrir ; lorsque le moment est venu, l’accouchement se produit. La peur est elle aussi essentiellement autonome : lorsque vous remarquez qu’une voiture fonce sur vous, vous bondissez hors de la route avant de réfléchir aux intentions du conducteur.</p>
<p>En ce sens, les gens ne contrôlent pas totalement leur peur et leur créativité. Pour que les deux fonctionnent de manière productive, une harmonie équilibrée doit exister entre l’inconscient et le conscient.</p>
<h2>Cultiver sa créativité</h2>
<p>Il existe néanmoins des éléments de votre conscience que vous pouvez influencer.</p>
<p>Si vous voulez créer quelque chose mais que vous vous sentez <a href="https://theconversation.com/the-5-000-year-history-of-writers-block-190037">inhibé par le syndrome de la page blanche</a>, l’hésitation ou l’insécurité, réfléchissez au type de peur qui vous retient.</p>
<p>S’agit-il de la peur de l’échec ou du jugement ? La peur de votre propre critique intérieur ? Ou y a-t-il un autre défi quotidien ou une autre responsabilité qui accapare la majeure partie de votre attention ?</p>
<p>Une fois que vous avez identifié la source de l’anxiété, voyez si vous pouvez recadrer la peur d’une manière objective qui vous libère de ses entraves. Vous pouvez peut-être considérer l’échec comme une possibilité, mais en fin de compte comme quelque chose qui ne vous tuera pas : vous pourrez toujours réessayer.</p>
<p>Une autre option consiste à faire appel aux <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8992377/">circuits de la récompense</a> de votre cerveau, par exemple, en pensant aux résultats positifs possibles de votre travail, y compris l’accès à une forme d’immortalité. Vous pouvez également utiliser le réseau de la peur à votre avantage, en vous souvenant d’une échéance, d’une promotion qui pourrait dépendre de votre travail ou de la sensation désagréable de ne pas avoir terminé une tâche. Le fait de diviser le travail en plusieurs parties le rendra plus réalisable et moins effrayant.</p>
<p>Parfois, un changement de décor peut aider. Lorsque je suis partie pour terminer <em>Afraid</em>, j’ai choisi le désert, non seulement parce que le paysage m’inspire, mais aussi parce qu’il y a aussi quelque chose dans cette géographie radicalement différente qui me permet de me vider la tête de tout le désordre de la vie quotidienne dans le Michigan.</p>
<p>De même qu’il existe de nombreux chemins à emprunter dans le cadre d’une activité créative, il existe une série de stratégies permettant de combattre ou d’utiliser toutes les petites peurs qui surgissent en cours de route.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219862/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Arash Javanbakht ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Un psychiatre explique les nombreuses façons dont l’anxiété peut entraver, colorer ou contraindre la créativité.Arash Javanbakht, Associate Professor of Psychiatry, Wayne State UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2189472023-12-13T20:38:33Z2023-12-13T20:38:33ZComment aider quelqu’un à sortir d’une secte ?<p>Le 28 novembre 2023, <a href="https://www.liberation.fr/societe/police-justice/vaste-coup-de-filet-en-france-contre-une-secte-internationale-de-yoga-tantrique-20231128_BXFCO4VCKJCGNKHREQOLQMBKQU/">la police française a perquisitionné des propriétés </a> associées à la Fédération Internationale de Yoga et de Méditation, un groupe néo-tantrique aussi connu sous le nom d'Atman. 41 personnes ont été placées en garde à vue, dont le chef spirituel roumain Gregorian Bivolaru, qui fait face à des accusations de « trafic d'êtres humains », « enlèvement en bande organisée », « viol » et « abus de faiblesse en bande organisée par des membres d'une secte ». Une source judiciaire a rapporté que 26 victimes présumées ont été retrouvées vivant dans des conditions exiguës et insalubres lors du raid. Cette opération met en lumière la crainte que certaines personnes puissent être manipulées et piégées dans des organisations sectaires dangereuses et néfastes.</p>
<p>Personne ne décide jamais d’adhérer à une secte.</p>
<p>Au début, l’idée de rejoindre un groupe semble <a href="https://www.bbc.com/afrique/region-65409532">répondre à un besoin ou à un idéal</a>. Pour la plupart des gens, cela semble fonctionner au début, du moins dans une certaine mesure.</p>
<p>Un récent <a href="https://www.parismatch.com/actu/faits-divers/linquietant-couple-derriere-twin-flames-universe-objet-dun-documentaire-sur-netflix-231633">documentaire Netflix</a> se penche sur les expériences des membres de Twin Flames Universe, un site fondé par un couple d’Américains qui propose des cours en ligne sur la recherche de l’âme sœur. Les personnes qui rejoignent Twin Flames attendent, contre plusieurs milliers de dollars, d’être mises en contact avec leur « flamme jumelle ». Cependant, d’anciens membres du groupe affirment avoir subi un contrôle démesuré sur tous les aspects de leur vie. Une déclaration <a href="https://twinflamesuniverse.com/media-statement/">sur le site web du groupe</a> indique que ces affirmations « déforment » leurs « véritables objectifs et méthodes » et « dénaturent l’autonomie des membres de notre communauté ».</p>
<p>De manière générale, pourquoi certaines personnes quittent-elles une secte et comment peut-on aider quelqu’un qui est membre d’une secte ? La réponse est toujours <a href="https://www.unadfi.org/rubrique/prevention/aide-aux-victimes/">unique et dépend du contexte</a>. Les facteurs importants à prendre en compte sont les caractéristiques personnelles de l’individu, la nature du groupe et les circonstances extérieures.</p>
<p>Pour certaines personnes, l’éloignement est progressif. Le groupe sectaire classique encourage à s’isoler de ses amis, de sa famille et même de son emploi. Mais si la personne continue à s’engager dans d’autres activités et groupes sociaux, ceux-ci peuvent réduire l’attrait d’un groupe sectaire de plus en plus exigeant.</p>
<p>Certaines personnes changent brusquement d’avis lorsque le groupe sectaire franchit une ligne éthique ou lorsqu’elles se rendent compte de la duplicité de l’enseignement et du comportement d’un leader. Il arrive qu’un groupe de personnes <a href="https://www.purepeople.com/article/joaquin-phoenix-ses-parents-ont-fait-partie-d-une-secte-accusee-de-pedophilie_a281506/1">décide de partir ensemble</a>.</p>
<p>Cependant, à mesure que la durée et la profondeur de l’engagement augmentent, il peut devenir de plus en plus difficile de partir. Cela est dû en partie à l’effet dit des <a href="https://www.observatoire-ocm.com/management/couts-irrecuperables/">« coûts irrécupérables »</a>. Si vous dépensez toutes vos économies en « formation » et que vous coupez tous vos liens avec votre famille, il devient plus difficile de repartir à zéro.</p>
<p>En outre, de nombreuses personnes sont victimes des activités néfastes du groupe, tout en y contribuant. <a href="https://infosecte.org/wp-content/uploads/Pelland-M-A.-2009.-Victimisation-au-sein-des-sectes.pdf">La honte et la stigmatisation sociale</a> ne facilitent pas le départ.</p>
<p>Si vous craignez qu’une personne de votre entourage ait rejoint une secte, que pouvez-vous faire pour l’aider ?</p>
<h2>Surveillez votre langage</h2>
<p>L’intervention d’une personne extérieure <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0165178116319941">peut aider à protéger quelqu’un</a> d’un endoctrinement plus poussé, mais il est important de faire attention aux termes utilisés dans les conversations.</p>
<p><a href="https://archive.org/details/isbn_9780113409273/page/110/mode/2up">Les recherches sur les personnes qui ont quitté</a> des groupes sectaires ont montré que ces différentes actions peuvent aider la personne sous emprise :</p>
<ul>
<li><p>essayer de maintenir un contact positif</p></li>
<li><p>ne pas faire honte à la personne ni la dévaloriser</p></li>
<li><p>être curieux et faire des recherches</p></li>
<li><p>Poser des questions sur des aspects spécifiques du groupe qui vous inquiètent.</p></li>
</ul>
<p>Ne dites pas à une personne enthousiaste à l’idée de rejoindre un groupe que vous estimez sectaire que vous pensez qu’elle a subi un lavage de cerveau ou qu’elle fait partie d’une secte. À ce stade du parcours de la personne, l’utilisation de <a href="https://www.swissinfo.ch/fre/societe/groupes-religieux-probl%C3%A9matiques_comment-aider-un-proche-%C3%A0-sortir-d-une-secte/45122758">langage sur les sectes</a> lui donne généralement l’impression d’être séparée de la société.</p>
<p>Les membres des groupes sectaires sont souvent avertis que les personnes extérieures au groupe ne peuvent pas comprendre les expériences des convertis. Le fait de qualifier le groupe de secte diabolique peut renforcer cette croyance.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Deux hommes qui marchent en discutant avec des cafés à emporter" src="https://images.theconversation.com/files/561858/original/file-20231127-21-boemhx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561858/original/file-20231127-21-boemhx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561858/original/file-20231127-21-boemhx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561858/original/file-20231127-21-boemhx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561858/original/file-20231127-21-boemhx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561858/original/file-20231127-21-boemhx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561858/original/file-20231127-21-boemhx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Si vous connaissez une personne influencée par un groupe sectaire, tentez de maintenir un contact bienveillant avec elle.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/friends-senior-young-man-walking-talking-2223478821">Dmytro Sheremeta/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Faites vos recherches</h2>
<p>L’adhésion à un groupe sectaire s’accompagne généralement d’un effet d’attraction (ce que le groupe a d’attirant) et d’un effet de répulsion (ce que la personne essaie de changer dans sa vie). L’exploration et l’identification de ces facteurs d’attraction et de répulsion peuvent encourager les gens à prendre des décisions plus actives et les faire réfléchir à leur propre identité.</p>
<p><a href="https://infosecte.org/">Faites des recherches</a> sur ce qui peut poser problème dans ce groupe particulier. Il peut être utile de poser des questions sur des points spécifiques avant de soulever les problèmes.</p>
<p>Par exemple :</p>
<ul>
<li><p>Que se passerait-il si on te demandait de ne plus jamais être en contact avec ta famille ? Est-ce acceptable et éthique ? Que penseront-ils du fait que tu quittes leur vie ?</p></li>
<li><p>Combien d’argent penses-tu qu’il soit raisonnable de dépenser pour ce groupe ?</p></li>
<li><p>Serait-ce une bonne idée de protéger tes économies ou tes biens, juste « au cas où » les choses changeraient avec le groupe ?</p></li>
</ul>
<h2>Encourager la pensée critique</h2>
<p>L’utilisation de <a href="https://archive.org/details/thoughtreformpsy0000lift/page/428/mode/2up?q=cliche">« clichés bloquant la réflexion »</a>, des phrases passe-partout qui empêchent toute pensée critique, est souvent utilisée par des groupes sectaires qui visent à aligner la pensée des gens sur un dogme.</p>
<p>Par exemple, les mauvaises expériences ou les maladies peuvent être attribuées au « karma » ou l’attention portée aux besoins physiques et émotionnels peut être qualifiée de « recherche de soi » ou de « promotion de l’ego ». Ces explications peuvent être gentiment remises en question en introduisant d’autres idées, présentées comme des possibilités.</p>
<p>Dans certains groupes, les expériences des membres sont constamment remises en question et reformulées. Par exemple, la remise en question d’une figure d’autorité peut être détournée en accusant le membre de faire preuve d’un « manque de foi » ou en lui ordonnant de « méditer sur son esprit négatif ».</p>
<p>Ce type de comportement peut être assimilé au <a href="https://www.cairn.info/magazine-cerveau-et-psycho-2022-6-page-82.htm">gaslighting</a>, technique de manipulation qui consiste à inciter quelqu’un à ne pas faire confiance à sa mémoire, à ses pensées et à ses sensations, et peut amener les gens à se sentir désorientés, physiquement malades et à douter de leur santé mentale.</p>
<p>Des questions telles que celles proposées ci-dessus peuvent encourager une personne à envisager d’autres façons de penser et à s’intéresser plus clairement à ses propres expériences et à son éthique. Cela aide les gens à réfléchir de manière plus critique aux explications données par un groupe pour justifier un comportement nuisible et à rester en contact avec leur propre boussole morale interne.</p>
<p>S’ils sont enracinés dans le groupe, cela vaut la peine d’essayer de garder une porte ouverte. Un contact, même minime, à l’occasion d’un anniversaire ou de Noël, peut aider les gens à savoir qu’il y a une personne amicale à l’extérieur. Une <a href="https://doi.org/10.1037/rel0000410">étude récente</a> sur les membres de la famille des adeptes d’une secte a montré que ceux qui ont fini par quitter le groupe ont déclaré que les liens familiaux étroits en dehors du mouvement étaient importants.</p>
<h2>La vie d’après</h2>
<p>Les expériences de départ des groupes religieux sont <a href="https://www.cerveauetpsycho.fr/sd/psychologie/le-long-combat-pour-sortir-de-la-secte-5487.php">complexes</a> et diverses. Certains peuvent se distancer physiquement d’un groupe, mais conservent des aspects de son idéologie et même certaines <a href="https://global.oup.com/academic/product/drifting-through-samsara-9780197579961?cc=us&lang=en&#">pratiques</a> pendant de longues périodes après avoir quitté le groupe. Un exemple est le mouvement <a href="https://www.bloomsbury.com/uk/free-zone-scientology-9781350182547/">Free Zone Scientology</a>, composé de personnes qui pratiquent les techniques de <a href="https://www.slate.fr/culture/gare-au-gourou/ron-hubbard-free-jazz-fondateur-scientologie-the-apollo-stars">Ron Hubbard</a> en dehors des structures de l’Église de Scientologie.</p>
<p>Dans d’autres cas, les anciens membres continuent parfois à avoir des contacts sociaux avec des personnes du groupe, surtout si des proches sont encore membres. Ils peuvent décider de ne jamais dénoncer officiellement le groupe, tout en s’éloignant de sa vision du monde.</p>
<p>Il n’est pas facile de reprendre pied socialement et financièrement après avoir quitté un groupe sectaire. Selon une <a href="https://link-springer-com.libezproxy.open.ac.uk/article/10.1007/s10943-021-01397-1">étude récente</a>, « un effort émotionnel considérable » est nécessaire pour créer de nouveaux liens sociaux et une nouvelle compréhension de soi.</p>
<p>Certaines personnes peuvent avoir besoin d’un soutien pratique pour trouver un logement, un emploi ou une formation. Pour beaucoup, le contact avec d’autres personnes ayant vécu des expériences similaires est important et valorisant.</p>
<p>Les personnes qui quittent une secte peuvent avoir besoin de <a href="https://www.bacp.co.uk/bacp-journals/therapy-today/2013/may-2013/working-with-cult-survivors/">temps et d’espaces sécurisés</a> pour réévaluer leurs expériences. Dans la mesure du possible, il est préférable de le faire avec l’aide d’un conseiller professionnel.</p>
<p>Ces groupes sectaires montrent à quel point notre besoin de liens sociaux peut être puissant – à la fois pour attirer les gens dans ces groupes et pour les aider à s’en retirer.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218947/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Suzanne Newcombe est directrice honoraire d'Inform - Information Network Focus on Religious Movements (<a href="http://www.inform.ac">www.inform.ac</a>). Inform a été créé en 1988 par le professeur Eileen Barker de la London School of Economics afin de fournir des informations actualisées et précises sur les groupes religieux nouveaux et minoritaires, souvent appelés "sectes", et de jeter un pont entre la recherche universitaire et les questions du grand public. Son financement de départ a été assuré par le ministère de l'intérieur britannique et Inform continue de recevoir des fonds du gouvernement britannique pour le financement de projets, ainsi que des subventions de fondations caritatives et d'organismes de financement universitaires.</span></em></p>Si vous craignez qu’une personne de votre entourage ait rejoint un groupe sectaire, il est important de ne pas lui faire honte ou de la dévaloriser.Suzanne Newcombe, Senior Lecturer in Religious Studies, The Open UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2163032023-12-06T17:44:04Z2023-12-06T17:44:04ZPasser au tableau : comment faire de ce rituel scolaire un moyen de réguler ses émotions ?<p>« C’est à qui le tour de passer au tableau ! », « Viens au tableau nous dire tout ce que tu racontes à ton camarade ! » ou encore « Qui souhaite venir au tableau ? »… Quels sont les élèves qui n’ont jamais entendu ce type d’exhortation au cours de leur scolarité ?</p>
<p>En France, l’installation de tableaux dans les classes est finalement assez récente, puisqu’elle date de l’instruction obligatoire chère à Jules Ferry (1882). Toutes les classes sont aujourd’hui dotées de cet artefact noir, blanc ou numérique. Il devient alors un support de transmission pour l’enseignant mais également une occasion d’expression – le plus souvent imposée – pour les élèves, qui sont invités à venir y résoudre des exercices, réciter des leçons, recopier des mots…</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-classe-une-forme-scolaire-depassee-201029">La classe : une forme scolaire dépassée ?</a>
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<p>Rien d’étonnant donc à ce que ce rituel, pensé par l’institution comme l’occasion d’évaluer ou d’exposer une connaissance face aux autres, ait et continue à être vécu par certains élèves <a href="https://www.cairn.info/l-eleve-humilie--9782130593133.htm">« comme une sorte de passage à tabac »</a>, participant au processus de <a href="https://theconversation.com/violences-scolaires-ou-le-harcelement-commence-t-il-107074">harcèlement scolaire</a> dont on connaît désormais les funestes conséquences. Les humiliations subies <a href="https://theconversation.com/le-corps-a-lecole-une-dimension-oubliee-152562">lorsque le corps est mis en scène</a>, lorsqu’il est exposé aux moqueries, aux remarques déplacées des élèves et parfois des enseignants peuvent participer du harcèlement comme l’expliquait Kilian Vaysse, de l’Association contre les discriminations et le harcèlement, lors du colloque <a href="https://groupe-vyv.tv/embed/16h15_Table_ronde_harcelement_scolaire_soutenir_lebesoin_de_justice_desenfants2dtqf"><em>Enfant demain</em></a>.</p>
<p>Qui n’a en effet pas souhaité disparaître six pieds sous terre lorsqu’il se retrouve debout au tableau, face à plus d’une vingtaine de paires d’yeux qui le déshabillent littéralement – notamment quand il ne maîtrise pas totalement sa leçon. Qui n’a jamais vécu cette situation ? Et finalement que révèle ce temps de passage au tableau : la maitrise d’une connaissance (enseignée à l’école) ou bien une <a href="https://theconversation.com/les-emotions-une-cle-de-la-lutte-contre-le-harcelement-scolaire-122880">compétence émotionnelle</a> (moins enseignée à l’école) à restituer une connaissance ?</p>
<h2>Favoriser la coopération entre élèves</h2>
<p>Tout bien considéré, si la classe et l’école en général bouillonnent d’émotions, celles-ci font peu l’objet d’une réelle réflexion didactique. Tout se passe comme si ces émotions, les siennes et celles des autres, ne relevaient pas du périmètre de l’école. <a href="https://www.cairn.info/l-education-morale--9782130568599-page-141.htm">Émile Durkheim</a>, référence majeure du projet de l’école républicaine, ne préconisait-il pas d’arracher l’enfant à la famille jugée émotionnellement trop toxique au prétexte que « la morale qui y est pratiquée y est surtout affective. L’idée abstraite du devoir y joue un moindre rôle que la sympathie, que les mouvements spontanés du cœur. »</p>
<p>Pourtant, nombreux sont les travaux montrant <a href="https://journals.openedition.org/osp/748">l’intérêt de considérer les émotions</a>. Leur prise en compte se traduit en effet par un bien-être subjectif plus marqué et à une amélioration des <a href="https://site.nathan.fr/livres/comment-les-emotions-viennent-aux-enfants-et-pourquoi-apprendre-les-reguler-va-les-aider-toute-leur-vie-edouard-gentaz-9782092493199.html">performances scolaires</a>. Mais encore faut-il leur ouvrir la porte de la classe, et plus largement celle de l’école, pour que les élèves les apprivoisent et en fassent des compagnes plutôt que d’en être esclave.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/ces-rituels-qui-organisent-la-vie-scolaire-une-importance-a-reconsiderer-169037">Ces rituels qui organisent la vie scolaire : une importance à reconsidérer ?</a>
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<p>C’est précisément ce à quoi nous nous sommes attachés avec les enseignants d’écoles primaire rencontrés dans le cadre d’une recherche-action. Concrètement, il s’agissait de <a href="https://www.cairn.info/cultiver-l-empathie-a-l-ecole--9782100778997.htm?contenu=presentation">transformer l’exercice du passage au tableau en un temps d’éducation aux compétences socio-émotionnelles</a>. Pour faire de cet exercice souvent individuel, angoissant, un moment de construction de soi, d’approvisionnement de ses émotions et d’apprentissage optimal, les enseignants ont, entre autres, expérimenté la récitation à plusieurs voix.</p>
<p>Par groupe de 3 ou 4, les élèves sont invités à réciter au tableau une poésie préalablement divisée par leurs soins en trois ou quatre parties. L’un d’entre eux entame la récitation et s’arrête soit lorsqu’il a terminé sa partie, lorsqu’il se sent en difficulté (une hésitation, un trou de mémoire, une perturbation liée au regard des élèves auditeurs…), ou bien quand il éprouve l’envie de passer le relais à l’un de ses camarades. Le deuxième, attentif à la situation (phrasé, mimiques, mouvement du corps…) prend alors la suite de la récitation avant de lui-même passer la main à un autre camarade.</p>
<p>L’enseignant propose plusieurs passages de façon à ce que chaque élève ait récité le texte dans son intégralité. À partir de ce design pédagogique, de très nombreuses variantes ont été proposées : récitation seule avec désignation d’un joker-souffleur avec ou sans contrainte d’intervention, libre choix de la répartition du texte, choix du lieu de récitation (à sa place, à côté de l’enseignant…), etc.</p>
<h2>Apprendre à se mettre en scène</h2>
<p>Le scénario pédagogique mis en œuvre dans cette recherche-action, permet, d’une part, de réduire le stress, préjudiciable aux apprentissages et, d’autre part, de libérer rapidement la participation des élèves et favorise leur entrée dans la tâche proposée.</p>
<p>Très vite, les élèves apprennent à s’organiser collectivement et s’inscrivent dans un <a href="https://theconversation.com/la-pedagogie-de-la-resonance-selon-hartmut-rosa-comment-lecole-connecte-les-eleves-au-monde-197732">processus de résonance</a> nécessaire à une coopération sans fard. Aux dires des enseignants, grâce à cet exercice collectif, ils ont moins d’appréhension dans leur prise de parole et sont plus attentifs à celle des autres. Au-delà d’un simple entraînement à la mémorisation, ils s’expriment désormais à l’oral avec plus d’aisance et – point essentiel – en tenant compte d’autrui.</p>
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<p>Ainsi pensé et expérimenté régulièrement, <a href="https://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=article&no=33063">« le rituel du passage au tableau »</a> prend une tout autre tournure pour les élèves. De situation stressante, parfois terrifiante, il devient un temps de jeu, de mise en scène de soi plus confiante, un temps de développement de l’empathie envers ses camarades, de récitation et de développement des compétences socio-émotionnelles utiles tout au long de la vie pour naviguer sans heurts dans les mondes sociaux.</p>
<p>Parce que la vie sociale est souvent l’occasion de se mettre en scène sous le regard d’autrui dans le cadre d’une réunion de travail, d’un exposé, d’un événement familial ou amical… apprendre à ressentir, identifier et apprivoiser ses propres émotions et celles des autres devrait également faire partie des missions de l’école.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216303/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Omar Zanna ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Passer au tableau est souvent vécu par les élèves comme une épreuve exposant au jugement des autres. Mais ne peut-on pas faire de ce rituel une occasion d’apprendre à apprivoiser ses émotions ?Omar Zanna, Professeur des universités en sociologie, Le Mans UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2186632023-12-04T16:55:40Z2023-12-04T16:55:40ZPourquoi les enfants ne veulent pas donner les jouets dont ils n’ont plus besoin<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/561915/original/file-20230606-17-2z6arh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C0%2C5455%2C3637&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Se défaire de choses que l'on possède présente des similitudes avec d'autres situations à surmonter comme des attentes déçues.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/offended-african-american-preschooler-girl-looking-1222838167">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Dans tout foyer avec des enfants, les objets s’accumulent inévitablement. Au fil des anniversaires, des fêtes de Noël, des célébrations d’événements comme des victoires sportives ou d’achats impulsifs, on se trouve envahi par un flot de jouets, de vêtements et de bibelots.</p>
<p>Se séparer de ces biens, voilà une tout autre affaire. Si certains enfants se laissent convaincre de déposer leurs vieux jouets dans des bacs de collectes solidaires ou de donner leurs vêtements trop petits à des amis, d’autres enfants ont vraiment du mal à faire ces gestes.</p>
<p>Essayons de comprendre pourquoi c’est une démarche si difficile et comment les parents et les éducateurs peuvent encourager les enfants dans cette voie.</p>
<h2>Apprendre à se séparer</h2>
<p>Éviter le désordre, c’est la première raison qui s’impose pour inciter les enfants à faire du tri. <a href="https://doi.org/10.1016/j.jenvp.2021.101553">Les recherches montrent que le désordre peut avoir un impact négatif</a> sur l’humeur et le bien-être des personnes qui sont attachées à avoir un intérieur bien rangé. Cependant, la définition de ce qui constitue un espace encombré varie considérablement d’une personne à l’autre.</p>
<p>S’ils ont constamment du mal à se débarrasser de ce qui leur appartient et que cela leur cause une grande détresse, certains enfants peuvent, dans les cas les extrêmes, développer un <a href="https://childmind.org/article/hoarding-in-children/">trouble de la thésaurisation</a>.</p>
<p>Du point de vue psychologique, se défaire de choses que l’on possède présente des similitudes avec d’autres situations à surmonter comme des attentes déçues (par exemple l’annulation d’un événement) ou la rupture d’une relation. Cultiver dès l’enfance la capacité à séparer d’objets <a href="https://www.buzzfeed.com/letgo/why-is-it-so-hard-to-let-go-of-old-things">peut avoir des répercussions positives</a> bien au-delà d’apprendre à garder les choses en ordre.</p>
<h2>Pourquoi les enfants s’attachent à des objets</h2>
<p><a href="https://doi.org/10.1016/j.copsyc.2020.07.023">L’attachement aux objets</a> commence au cours de la première année de vie de l’enfant. Les nourrissons peuvent être angoissés lorsqu’on leur enlève leur couverture ou leur ours en peluche. Les chercheurs considèrent que ce comportement d’attachement précoce est dû au fait que les objets agissent comme un substitut réconfortant lorsque le parent est absent.</p>
<p>Au fur et à mesure que les enfants grandissent, jusqu’au début de l’adolescence, le besoin de réconfort reste l’une des principales motivations à s’attacher à des objets. Cependant, le type de réconfort recherché peut devenir <a href="https://doi.org/10.1080/03004430.2020.1841756">plus complexe à mesure que l’enfant prend de l’âge</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Crayons de couleur" src="https://images.theconversation.com/files/530258/original/file-20230606-27-5endiw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/530258/original/file-20230606-27-5endiw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/530258/original/file-20230606-27-5endiw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/530258/original/file-20230606-27-5endiw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/530258/original/file-20230606-27-5endiw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/530258/original/file-20230606-27-5endiw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/530258/original/file-20230606-27-5endiw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Comme les adultes, les enfants conservent des objets au cas où ils en auraient à nouveau besoin.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/colorful-crayons-placed-on-new-page-289880336">Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Avec le temps, les enfants peuvent en venir à considérer un jouet comme une entité spéciale. Dans une étude, on a présenté à des enfants une <a href="https://doi.org/10.1016/j.cognition.2007.01.012">machine à dupliquer</a> basée sur un simple tour de passe-passe. Ils pouvaient choisir de recevoir une copie de leur jouet ou de se voir restituer leur jouet original. Les enfants étaient plus enclins à demander qu’on leur rende le jouet original plutôt que d’en avoir une copie, ce qui indique un certain degré d’attachement au jouet original.</p>
<p>Certains jouets acquièrent une sorte de statut d’« ami ». Cette interaction est considérée comme <a href="https://www.parents.com/toddlers-preschoolers/development/social/first-friends-toddlers-and-stuffed-animals/">bénéfique pour le développement psychologique et social</a>. Il est facile d’imaginer qu’il peut être difficile de se séparer d’un objet considéré de cette manière.</p>
<p>Les possessions peuvent également <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2352250X20301597">agir comme des points de repère pour la mémoire</a>. Ce vieux t-shirt délavé et mal ajusté qu’ils hésitent à jeter peut leur rappeler à quel point ils se sont sentis spéciaux et aimés lors de leur fête d’anniversaire.</p>
<p>Tout comme les adultes, les enfants peuvent tomber dans le piège du <a href="https://simplelionheartlife.com/just-in-case-clutter/">« je pourrais en avoir besoin plus tard »</a>. Par exemple, un enfant qui aimait colorier mais qui a évolué vers d’autres passe-temps peut néanmoins hésiter à jeter ses vieux crayons de couleur, au cas où.</p>
<h2>Un accompagnement étape par étape</h2>
<p>Tout d’abord, essayez d’adopter le comportement que vous aimeriez que votre enfant adopte. Si vous avez du mal à vous débarrasser de vos propres affaires, comment verrait-il la nécessité de se débarrasser des siennes ?</p>
<p>Ensuite, discutez avec l’enfant des motivations sous-jacentes à sa résistance à se débarrasser de ses affaires et aidez-le à surmonter ses blocages mentaux.</p>
<p>Pour un jouet qui a un « statut d’ami », vous pouvez encourager l’enfant à se concentrer sur d’autres jouets qui sont également spéciaux. Aidez-les à comprendre que les relations peuvent se terminer, ce qui n’est pas un drame. D’autres peuvent voir le jour. Adoptez une approche progressive en incitant l’enfant à donner son jouet lorsqu’il sera prêt à le faire. Cela peut l’aider à sentir qu’il ne s’en débarrasse pas complètement, que le jouet continue d’exister, mais avec quelqu’un d’autre.</p>
<p>Dans le cas d’un objet qui rappelle de bons moments et qui a une valeur sentimentale, rappelez-lui qu’il existe d’autres moyens d’entretenir la mémoire, comme les photos ou les souvenirs avec les proches.</p>
<p>Dans le cas des réactions du type « Je pourrais en avoir besoin plus tard », une stratégie consiste à dissiper l’inquiétude qui sous-tend la résistance en leur disant qu’ils pourront obtenir un autre objet du même type si nécessaire. Il y a de fortes chances que cela ne soit pas nécessaire.</p>
<p>Il y aura d’autres raisons et motivations que celles mentionnées ci-dessus, c’est pourquoi il faut adopter une approche ciblée. Pour ce faire, communiquez avec votre enfant afin de comprendre son point de vue. Ensuite, adaptez votre stratégie afin de répondre au mieux à ses préoccupations spécifiques.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/530262/original/file-20230606-25-ysvc6h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/530262/original/file-20230606-25-ysvc6h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/530262/original/file-20230606-25-ysvc6h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/530262/original/file-20230606-25-ysvc6h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/530262/original/file-20230606-25-ysvc6h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/530262/original/file-20230606-25-ysvc6h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/530262/original/file-20230606-25-ysvc6h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Essayez de comprendre pourquoi votre enfant ressent une telle résistance à laisser tomber quelque chose.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/having-good-time-skate-park-635789831">Shutterstock</a></span>
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</figure>
<p>Essayez d’éviter de vous lamenter uniquement sur le désordre de l’appartement, ce qui pourrait nourrir des sentiments de culpabilité et de ressentiment chez l’enfant s’il peine à l’idée de se débarrasser de ses affaires. En revanche, en découvrant les raisons sous-jacentes à leur réticence, vous pourrez travailler avec eux pour faire face à ces pensées et à ces émotions.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218663/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Certains enfants n’ont aucun mal à donner leurs vieux jeux ou habits tandis que d’autres rechignent à le faire. Quels sont les enjeux derrière cet attachement aux objets ?Shane Rogers, Lecturer in Psychology, Edith Cowan UniversityNatalie Gately, Senior Lecturer and Researcher, Edith Cowan UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2175812023-11-20T17:09:23Z2023-11-20T17:09:23ZPourquoi mon enfant est-il sage chez les autres mais fait-il des colères à la maison ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/559051/original/file-20231108-17-pz2e5a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=15%2C31%2C5307%2C3511&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il arrive à tous les enfants, même aux mieux élevés, de se comporter mal de temps en temps.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/girl-in-white-and-black-crew-neck-shirt-_-uN7DbAE-o">Xavi Cabrera/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Peut-être en tant que parents connaissez-vous ce scénario : votre enfant se comporte bien à l’école, il est poli avec ses professeurs, mais, une fois rentré à la maison, il fait une crise l’après-midi.</p>
<p>Chez son ami, il dit « s’il vous plaît » et « merci » chez un ami, mais en famille, il se montre grossier. Il respecte les règles lorsqu’il rend visite à un voisin mais, à la maison, il faut constamment lui rappeler de ne pas claquer les portes et de ne pas se servir librement dans la cuisine.</p>
<p>Comment expliquer ce décalage d’attitudes ? Que faire pour y remédier ?</p>
<h2>Les enfants prennent très tôt conscience des effets de leur comportement</h2>
<p>Il arrive à tous les enfants, même aux mieux élevés, de se comporter mal de temps en temps.</p>
<p>Lorsque les jeunes enfants sont fatigués, par exemple après une séance de jeu ou une longue journée à la crèche ou à l’école, ils peuvent devenir irritables et turbulents. Les enfants sont aussi naturellement <a href="https://raisingchildren.net.au/babies/play-learning/learning-ideas/learning-baby-to-preschool">curieux</a> et peuvent parfois mal se comporter juste pour tester les effets de leur comportement.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="Un enfant saute sur un divan" src="https://images.theconversation.com/files/558528/original/file-20231108-19-2yqpof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/558528/original/file-20231108-19-2yqpof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=899&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/558528/original/file-20231108-19-2yqpof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=899&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/558528/original/file-20231108-19-2yqpof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=899&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/558528/original/file-20231108-19-2yqpof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1130&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/558528/original/file-20231108-19-2yqpof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1130&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/558528/original/file-20231108-19-2yqpof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1130&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les enfants peuvent mal se comporter juste pour tester leur entourage et voir ce qui se passe.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/anonymous-child-having-fun-on-sofa-in-living-room-4740511/">Ksenia Chernaya/Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cependant, certains enfants semblent se comporter systématiquement plus mal quand ils sont chez eux. Pour comprendre ce phénomène, il est nécessaire de s’arrêter sur ce qui les motive à réagir de cette façon.</p>
<p>Dès tout-petits, les enfants s’aperçoivent que chacun de leurs comportements peut avoir des effets sur leur environnement. Par exemple, les bébés réalisent vite que les pleurs sont un moyen très efficace de signaler leur détresse. Les parents apprennent rapidement à changer une couche mouillée ou à nourrir leur enfant lorsqu’il pleure. Lorsqu’un bébé sourit, l’adulte lui rend en général son sourire et le cajole.</p>
<p>Les enfants comprennent donc sans tarder que leur comportement peut être un moyen efficace de <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/development-and-psychopathology/article/influential-child-how-children-affect-their-environment-and-influence-their-own-risk-and-resilience/6DA2FB300B9DF3CD5EB5FB9EF5916">contrôler les actions des autres</a>.</p>
<h2>Les récompenses des mauvais comportements</h2>
<p>Le comportement des enfants, qu’il soit souhaitable ou indésirable, est influencé par les <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-319-94598-9_4">conséquences</a> qu’il entraîne.</p>
<p>Parfois, les réactions des parents ou des frères et sœurs peuvent accidentellement récompenser un mauvais comportement, et les enfants en déduisent que cette façon d’agir est payante.</p>
<p>Ainsi, les enfants peuvent prendre conscience que, lorsqu’ils ne font pas ce qu’on leur demande, ils reçoivent une attention particulière de la part de leurs parents. Celle-ci peut prendre la forme d’une discussion, d’une dispute ou d’une répétition répétée des instructions. Les adultes ne considèrent peut-être pas cela comme une « récompense », mais les enfants voient de leur côté que leur père ou leur mère leur consacre du temps.</p>
<p>Les enfants peuvent également réaliser qu’ils ont plus de chances d’obtenir un appareil électronique quand ils se plaignent et pleurnichent. Dans ce scénario, l’enfant arrive à ses fins et le parent est soulagé de lui avoir cédé l’iPad parce qu’il met fin à un bruit très irritant (du moins à court terme). Comme l’enfant et le parent tirent tous deux un avantage de la situation, cette interaction est susceptible de se reproduire.</p>
<h2>Pourquoi les enfants sont-ils plus sages à l’école ?</h2>
<p>Lorsque les enfants se trouvent en présence de personnes qui leur sont moins familières, ils ne savent pas comment celles-ci vont réagir ni quel comportement serait récompensé. Dans ces <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4339261/">circonstances</a>, il est courant que les comportements indésirables soient moins fréquents, du moins temporairement.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Des enfants lèvent la main en classe." src="https://images.theconversation.com/files/558546/original/file-20231109-17-5up1dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/558546/original/file-20231109-17-5up1dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/558546/original/file-20231109-17-5up1dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/558546/original/file-20231109-17-5up1dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/558546/original/file-20231109-17-5up1dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/558546/original/file-20231109-17-5up1dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/558546/original/file-20231109-17-5up1dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’école a l’avantage de proposer des routines fixes et des modèles de comportement positifs.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/students-inside-a-classroom-in-the-school-4936021/">Arthur Krijgsman/Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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</figure>
<p>Les enfants peuvent également mieux se comporter à l’école qu’à la maison du fait de la bonne organisation mise en place par les enseignants. Les enfants y sont occupés par une variété d’activités intéressantes, les attentes en matière de comportement sont bien formalisées et les bonnes attitudes sont clairement récompensées par de l’attention, des félicitations, de petites gratifications matérielles comme des jetons.</p>
<p>Les enfants ont également tendance à <a href="https://parents.au.reachout.com/common-concerns/everyday-issues/things-to-try-peer-pressure/encourage-positive-peer-pressure">imiter le comportement de leurs pairs</a>, en particulier s’ils voient que cela <a href="https://www.canr.msu.edu/news/monkey_see_monkey_do_model_behavior_in_early_childhood">donne des résultats</a>, comme le fait d’obtenir l’attention de l’enseignant ou d’accéder à des activités prisées.</p>
<h2>Comment les parents peuvent-ils inciter leurs enfants à mieux se comporter à la maison ?</h2>
<p>La bonne nouvelle, c’est que <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0005789416300624">si les enfants se comportent bien dans un contexte</a>, nous savons qu’ils sont capables de faire de même à la maison.</p>
<p>Les parents peuvent évaluer dans quelle mesure les enfants ont besoin de se détendre à la maison tout en attendant d’eux qu’ils soient polis et respectent les règles. Avec quelques <a href="https://academic.oup.com/book/1250/chapter-abstract/140180334">ajustements</a>, il est généralement possible d’observer une nette amélioration du comportement.</p>
<p>Voici quelques mesures pratiques que peuvent prendre les parents :</p>
<ul>
<li><p><strong>Instaurez des routines</strong> : Il peut s’agir de permettre à votre enfant de se détendre et de se relaxer, de lui donner une collation saine, puis de lui proposer une activité attrayante lorsqu’il rentre de l’école ou d’une sortie. La routine facilite le passage d’un environnement à l’autre pour tout le monde. C’est encore mieux si la routine inclut des activités – comme le coloriage ou une course à l’extérieur – qui sont apaisantes ou qui permettent de brûler de l’énergie.</p></li>
<li><p><strong>Établissez des règles de vie simples</strong> : Il s’agit d’indiquer clairement à votre enfant comment vous attendez de lui qu’il se comporte, comme « ranger ses jouets ».</p></li>
<li><p><strong>Prenez acte des efforts de bonne conduite</strong> : Faites savoir à votre enfant qu’il a fait ce qu’il fallait, en décrivant ce qui vous satisfait (« vous partagez si gentiment le jouet tous les deux »). Il y a ainsi plus de chances que le comportement se reproduise.</p></li>
<li><p><strong>Passez régulièrement de petits moments avec votre enfant</strong> : Cela montre que vous êtes là pour lui et qu’il n’a pas besoin d’être plus bruyant ou de faire des bêtises pour attirer votre attention. Le fait de passer souvent de petits moments avec votre enfant – ne serait-ce qu’une ou deux minutes – au cours de la journée est un moyen efficace de renforcer votre relation et de prévenir les problèmes de comportement.</p></li>
<li><p><strong>Avoir des attentes réalistes</strong> : Le changement est plus facile si vous vous concentrez sur un ou deux objectifs à la fois. En outre, lorsque vous vous efforcez d’améliorer le comportement de votre enfant, attendez-vous à des revers occasionnels. Aucun enfant (ou parent) n’est parfait !</p></li>
</ul><img src="https://counter.theconversation.com/content/217581/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Trevor Mazzucchelli est co-auteur de « Stepping Stones Triple P - Positive Parenting Program » et consultant auprès de Triple P International. Triple P International (TPI) Pty Ltd est une société privée autorisée par UniQuest Pty Ltd, au nom de l'UQ, à publier et à diffuser Triple P dans le monde entier. Il n'est ni actionnaire ni propriétaire de TPI, mais il a reçu et pourrait recevoir à l'avenir des redevances et/ou des honoraires de conseil de la part de TPI. TPI n'a pas participé à la rédaction de cet article.</span></em></p>Votre enfant se comporte bien à l’école, il est poli en classe mais, une fois à la maison, il fait une crise. Comment expliquer de telles différences de conduite ?Trevor Mazzucchelli, Associate professor, Curtin UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2181022023-11-19T16:34:58Z2023-11-19T16:34:58ZMaltraitance infantile : comment la violence actuelle induit la violence future<p>Selon Organisation mondiale de la Santé, au cours de l’année écoulée, on peut estimer que jusqu’à 1 milliard d’enfants âgés de 2 à 17 ans ont été <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/violence-against-children">victimes de maltraitance infantile</a>.</p>
<p>Derrière cette expression se cachent la maltraitance physique (coups et blessures infligées à des enfants), la maltraitance émotionnelle (atteintes à l’estime de soi), les abus sexuels et la négligence. À cela, il faut ajouter les enfants qui sont exposés à des traumas infantiles, liés à des situations de violence, comme un terrain de guerre. Ces diverses formes de maltraitance et de traumas infantiles sont malheureusement fréquentes : par exemple on estime qu’au niveau mondial <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/1077559511403920">la prévalence est de l’ordre de 12.7 % rien que pour les abus sexuels</a>.</p>
<p>Or, les conséquences de ces maltraitances se font sentir durant des années, voire des décennies, et même se perpétuer au-delà de l’existence des victimes.</p>
<h2>La maltraitance infantile a des conséquences durables</h2>
<p>Les conséquences de la maltraitance infantile sont dévastatrices puisqu’elles induisent des altérations du fonctionnement émotionnel, cognitif et social des sujets, altérations qui persistent une fois que les victimes sont devenues adultes.</p>
<p>Les conséquences peuvent être non seulement des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37525603/">pathologies psychiatriques</a> telles que l’anxiété généralisée, la dépression, les états de stress post-traumatique, les addictions, mais aussi des pathologies métaboliques comme l’obésité. Ainsi, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27908895/">46 % des adultes souffrant de dépression reportent avoir été victimes de maltraitances dans leur enfance</a>, ce qui est un taux très élevé. Par ailleurs, certaines victimes de maltraitance reproduisent ce qu’ils ont subi enfant, et <a href="https://www.youtube.com/watch?v=zPOZ0BZfqOk">deviennent à leur tour des prédateurs</a>.</p>
<p>De façon intéressante, ces altérations du fonctionnement psychologique ont été identifiées non seulement dans les cas où la maltraitance s’est traduite par des violences physiques (coups, viols), mais aussi dans les cas où les actes de maltraitance n’ont pas été associés à des atteintes physiques, <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8339467/">comme c’est le cas avec les maltraitances émotionnelles ou la négligence</a>. Ces effets sont persistants sur le long terme <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31519507/">puisqu’elles peuvent se transmettre sur plusieurs générations</a>, en particulier au travers d’un déficit de l’attachement.</p>
<p>Dès lors, on peut se demander si les séquelles des diverses formes de maltraitance induisent des conséquences biologiques, en plus des conséquences psychologiques.</p>
<h2>La maltraitance infantile induit des conséquences biologiques</h2>
<p>Les faits concernant de potentiels effets biologiques des maltraitances infantiles sont bien documentés. On sait notamment que <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1783123/">la maltraitance et les traumas infantiles induisent une augmentation de marqueurs de l’inflammation</a> <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26938439/">et des hormones du stress</a>. Ils sont aussi associés à des <a href="https://theconversation.com/les-maltraitances-de-lenfance-laissent-des-cicatrices-dans-ladn-157900">altérations de l’expression des gènes</a> qui persistent jusqu’à l’âge adulte.</p>
<p>En outre, des altérations cérébrales morphologiques et fonctionnelles cérébrales <a href="https://www.youtube.com/watch?v=80Bt6aICUXo&t=2s">ont également été constatées</a>, comme une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6939135/">diminution du volume du cortex préfrontal</a> (une zone importante pour la régulation des émotions, la planification de l’action, la flexibilité cognitive) et de l’hippocampe (une zone importante pour la mémoire) ou une augmentation de l’activité de l’amygdale (une zone impliquée dans l’anxiété et le stress). Par ailleurs, une altération de la connexion entre le cortex préfrontal et l’amygdale a également été observée, ce qui explique probablement les difficultés de régulation émotionnelle.</p>
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<p>Les conséquences des maltraitances se traduisent également par des modifications sur le plan cellulaire, comme des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29158585/">altérations au niveau des oligodendrocytes</a> (les cellules qui forment la gaine entourant les faisceaux de fibres cérébrales) dans une sous-partie du cortex préfrontal, ce qui atteste à la fois du fait que la maltraitance induit des modifications morphologiques durables, et de leur impact fonctionnel.</p>
<p>Il est important de souligner que ces changements biologiques ne sont pas transitoires et limités à la période de l’enfance, mais qu’ils altèrent le développement du sujet et persistent jusqu’à l’âge adulte, voire bien au-delà, influant également sur les descendants des victimes.</p>
<h2>Des conséquences biologiques durables</h2>
<p>Il a été démontré que certaines des altérations biologiques résultant de maltraitances infantiles peuvent se transmettre aux générations suivantes, c’est-à-dire aux enfants, voire aux petits-enfants des personnes exposées à la maltraitance et à la violence. </p>
<p>C’est le cas par exemple des effets sur les hormones du stress, dont le niveau élevé est retrouvé <a href="https://research.rug.nl/en/publications/intergenerational-impact-of-childhood-trauma-on-hair-cortisol-con">chez les descendants de mères qui avaient subi un trauma pendant leur enfance</a> ; il en est de même <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-developmental-origins-of-health-and-disease/article/abs/maternal-childhood-maltreatment-associations-to-offspring-brain-volume-and-white-matter-connectivity/ECFC9E30F964F5F089B3422F2C03F4FF">pour certaines altérations cérébrales</a>. Par ailleurs, <a href="https://www.youtube.com/watch?v=sHNXpDvKR70&t=32s">l’altération de l’expression des gènes peut quant à elle se transmettre sur plusieurs générations</a>. </p>
<p>Cela donne le vertige quand on pense à certains contextes familiaux, mais aussi aux situations de guerre, puisque le cercle vicieux de la violence peut ainsi se perpétuer de génération en génération, mettant en péril la cohésion sociale entre les personnes - et les peuples ? - dans un cycle sans fin.</p>
<h2>La situation est-elle sans espoir ?</h2>
<p>Fort heureusement, n’est pas totalement désespérée. Des mesures efficaces existent, qui permettent de stimuler la résilience, <a href="https://www.researchgate.net/publication/363186210_A_systematic_review_of_community-level_protective_factors_in_children_exposed_to_maltreatment">comme le support social à l’école ou lors des activités extrascolaires</a>. Certaines psychothérapies, comme les <a href="https://theconversation.com/connaissez-vous-les-therapies-comportementales-cognitives-et-emotionnelles-129883">thérapies cognitivo-comportementales</a>, ou la participation à des programmes inclusifs et à des <a href="https://www.researchgate.net/publication/342452242_Psychosocial_Interventions_for_Third-Generation_Palestinian_Refugee_Children_Current_Challenges_and_Hope_for_the_Future">interventions psychosociales impliquant des communautés entières</a>, ont aussi fait leurs preuves. </p>
<p>Il faut donc être vigilant à les rendre disponibles dans les communautés les plus à risque, en particulier dans des pays ayant été confrontés à des situations de violences armées. Ce pourrait être l’un des leviers pour arriver à une paix durable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218102/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Catherine Belzung coordonne la chaire Unesco « Maltraitance infantile » (<a href="https://unescochair-children-maltreatment.univ-tours.fr/version-francaise/accueil">https://unescochair-children-maltreatment.univ-tours.fr/version-francaise/accueil</a>).</span></em></p>Les conséquences des traumas subits dans l’enfance peuvent persister durant toute l’existence, voire se transmettre à la descendance. Heureusement, il est possible de stimuler la résilience des victimes.Catherine Belzung, Professor, Université de ToursLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2156092023-11-09T16:41:01Z2023-11-09T16:41:01ZAutisme : avoir un animal domestique est bon pour les enfants et leur famille<p>Selon l’Organisation mondiale de la santé, un <a href="https://www.who.int/fr/news-room/questions-and-answers/item/autism-spectrum-disorders-(asd)">enfant sur 100 serait aujourd’hui diagnostiqué avec un trouble du spectre de l’autisme</a> (TSA).</p>
<p>Ce trouble entraîne des difficultés plus ou moins marquées à communiquer et à interagir avec autrui. Ces enfants peinent à reconnaître les émotions de l’autre, et à comprendre comment ils se sentent, ainsi qu’à entamer et maintenir une interaction, discuter, etc. </p>
<p>Ils manifestent aussi des comportements et des intérêts que l’on dit <a href="https://www.psychiatry.org/psychiatrists/practice/dsm">« répétitifs et/ou restreints »</a> : ils peuvent devenir très experts dans un domaine qui leur plaît, préfèrent que leur environnement reste inchangé, ont des gestes répétitifs comme se balancer sur soi, battre des mains, sautiller, etc.</p>
<p>Les enfants avec TSA sont aussi souvent affectés par une hyper- ou une hyposensibilité sensorielle : ils peuvent alors être extrêmement sensibles et gênés par les stimulations de leur environnement, ou au contraire ne pas y réagir du tout.</p>
<p>Toutes ces difficultés leur posent des défis permanents, non seulement dans leur capacité à fonctionner et évoluer dans leur quotidien, mais aussi dans leur capacité à établir des relations avec les autres. Toutefois, l’adoption par la famille d’un animal pourrait améliorer la situation. Explications.</p>
<h2>Des bienfaits remarqués de longue date</h2>
<p>C’est dans les années 1950 que Boris Levinson, un pédopsychiatre américain, rapporte pour la première fois les <a href="https://psycnet.apa.org/record/1980-03089-001">bienfaits de la présence d’un chien lors des séances qu’il réalisait avec un jeune garçon avec TSA</a>.</p>
<p>Les recherches sur les apports des animaux pour les enfants avec TSA ne débuteront cependant <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/2793790/">qu’à la fin des années 1980</a>. Depuis, les connaissances accumulées indiquent que les animaux peuvent effectivement jouer un rôle particulier pour ces enfants.</p>
<p>En effet, non seulement la plupart des enfants avec TSA montrent un attrait spontané envers les animaux, mais de plus, certaines des difficultés qu’ils rencontrent dans l’interaction avec l’humain <a href="https://www.cairn.info/revue-la-revue-internationale-de-l-education-familiale-2022-1-page-157.htm?ref=doi">ne se retrouvent pas avec l’animal</a>. C’est par exemple le cas des difficultés à initier l’échange, à regarder le visage, à effectuer des contacts « œil à œil », ou à <a href="https://theconversation.com/spectre-de-lautisme-quand-il-est-plus-facile-de-lire-les-emotions-chez-les-animaux-que-chez-les-humains-181913">reconnaître les émotions</a>.</p>
<p>L’intégration d’un animal dans le quotidien de l’enfant avec TSA, qu’il s’agisse d’un animal de compagnie ou d’un chien d’assistance peut avoir de nombreux effets positifs sur leur développement, résultant de la relation particulière que ces enfants peuvent entretenir avec lui.</p>
<p>Les études révèlent non seulement des apports similaires à ce qui est observé chez l’enfant sans TSA, mais également que ces bienfaits iraient au-delà. Nous pouvons les décliner en quatre sphères d’action principales : la communication et les interactions, le bien-être, les comportements problèmes, le jugement et les regards externes.</p>
<h2>Meilleures capacités de communication et d’interactions sociales</h2>
<p>Dans un premier temps, il nous faut évoquer les bienfaits sur la sphère des compétences de communication et d’interaction sociale de l’enfant, une sphère affectée par le TSA.</p>
<p>Similairement à tout enfant, grandir auprès d’un animal permet à l’enfant avec TSA d’évoluer avec un être <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/25308197/">qui est un véritable partenaire d’interaction et avec qui il pourra établir une relation signifiante</a>.</p>
<p>La recherche nous montre également que la présence de l’animal peut être un amplificateur du développement de ces enfants. En effet, après l’arrivée d’un animal de compagnie dans la famille, les enfants avec TSA montrent une amélioration de la communication et du langage. Ils sont <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0041739">plus réciproques dans l’interaction</a>, <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/00469580231195029?icid=int.sj-abstract.citing-articles.19">et montrent</a> plus de comportements <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33290937/">d’aide et de soutien envers l’autre</a>.</p>
<p>Dans une étude que nous avons publiée en 2022, en utilisant un système permettant l’enregistrement du regard, nous avons pu montrer que des enfants avec TSA vivant avec un chien d’assistance depuis plusieurs années ont de meilleures stratégies pour <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2022.869452/full">reconnaître l’émotion lorsqu’ils regardent les visages humains</a> (comparativement à des enfants avec TSA vivant sans chien d’assistance). Plus concrètement, cela signifie qu’ils ont notamment davantage tendance à regarder la bouche pour reconnaître la joie et les yeux pour la colère.</p>
<h2>Bien-être amélioré</h2>
<p>Les bénéfices pour le bien-être des enfants avec TSA constituent également un important apport de la vie avec un animal. Ils peuvent s’attacher à leur animal, et celui-ci sera une source de compagnie et de réconfort, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30259286/">réduisant leur solitude et leur détresse</a>. Mieux encore, les recherches démontrent même que les enfants avec TSA qui ont un animal ont non seulement une meilleure humeur générale, mais ont aussi <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s40489-020-00227-6">moins de problèmes d’anxiété et de symptômes dépressifs</a>.</p>
<p>On observe par exemple que dans les semaines qui suivent l’arrivée d’un chien d’assistance dans la famille, les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/20189722/">taux de cortisol</a> – parfois aussi appelée « hormone du stress » – des enfants avec TSA diminuent. La présence d’un animal a également des effets <a href="https://pure.ulster.ac.uk/en/publications/experiences-of-family-life-with-an-autism-assistance-dog-3">sur la confiance en soi et l’estime de soi de ces enfants</a>.</p>
<h2>Comportements problèmes atténués</h2>
<p>Le TSA est très fréquemment associé à l’expression de « comportements défis », qui sont des comportements pouvant être dangereux pour l’individu ou son environnement, et/ou qui interfèrent sur sa capacité à pratiquer des activités de la vie quotidienne : crises, fugues, comportements d’opposition, auto-stimulations et stéréotypies (comportements tels que secouer ou agiter les mains, balancer le corps, se cogner la tête, se mordre, frapper certaines parties du corps, etc.).</p>
<p>L’expression de ces comportements est souvent liée à une difficulté à faire face à la situation, autrement dit une difficulté à la comprendre, ou à réagir face à un surplus de stimulations, à une frustration…</p>
<p>Il a pu être montré que l’arrivée d’un animal dans la famille, en particulier d’un chien d’assistance, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/18955467/">a pour effet de</a> <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22978246/">réduire l’expression de ces comportements</a>. Cette atténuation des comportements problèmes a par ailleurs des conséquences positives sur la qualité de vie de l’enfant.</p>
<h2>Modification du jugement et des regards extérieurs</h2>
<p>En raison de leurs comportements atypiques et de leurs difficultés à respecter les normes d’interactions, les enfants avec TSA sont souvent jugés et laissés à l’écart. La littérature scientifique révèle que la présence d’un animal au côté de l’enfant a pour effet d’attirer les autres personnes vers lui et de promouvoir des interactions sociales positives.</p>
<p>En outre, la cape ou le harnais distinctifs que portent les chiens d’assistance présentent aussi un autre bénéfice : ils permettent une identification du handicap invisible par les personnes alentour, ce qui diminue leur éventuelle propension à porter un jugement négatif et encourage la bienveillance vis-à-vis de l’enfant et de ses comportements atypiques.</p>
<h2>Des bénéfices pour l’ensemble de la famille</h2>
<p>Au-delà de ces quatre sphères d’effets sur l’enfant avec TSA (communication et interactions, bien-être, comportements problèmes, jugement et regards externes), les bénéfices de la présence de l’animal s’étendront également au reste de la famille.</p>
<p>Il est en particulier observé que <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S155878781630034X">suite à l’arrivée d’un animal dans la famille</a> les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33069669/">parents ont moins</a> <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27986514/">d’anxiété et de stress</a>. De manière plus générale, la présence d’un animal contribuerait aussi <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/08927936.2015.1070003">à un meilleur fonctionnement familial dans les foyers d’enfants avec TSA</a>.</p>
<p>Malgré tous ces bienfaits potentiels, il est important de ne pas concevoir l’animal comme « une pilule magique ». En effet, différentes recherches nous indiquent que ces effets dépendraient directement de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32130592/">l’attachement et de la qualité de relation</a> <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0041739">que l’enfant avec TSA établit avec l’animal</a>.</p>
<p>Or à l’instar des enfants sans TSA, tous les enfants avec TSA n’ont pas le même attrait envers les animaux, tout comme, tous ne développent pas la même relation avec leur animal. Le type d’interaction qui se met en place, le degré d’attachement à l’animal ou l’autonomie de l’enfant à s’en occuper varient.</p>
<p>Ainsi, les familles d’enfants avec TSA souhaitant intégrer un animal auraient intérêt à s’assurer, avant de franchir le pas, de l’attrait ou de l’envie de leur enfant. Il serait aussi judicieux de vérifier que l’animal envisagé a bien un profil adéquat pour leur enfant, que ce soit en matière de comportements par rapport aux besoins de l’enfant ou de compatibilité de personnalités.</p>
<p>Cela maximiserait les chances qu’une relation forte s’établisse au sein du duo formé par l’enfant et son animal, optimisant ainsi les chances de succès et d’émergence de bienfaits.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/215609/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nicolas Dollion a reçu des financements de la Fondation Adrienne et Pierre Sommer, la région Bretagne, l'Association Handi'Chiens et la Fondation Mira. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Marine Grandgeorge a reçu des financements de différents organismes dont la Fondation AP Sommer, la Région Bretagne, l'association Handi'chiens, la Fondation MIRA, l'IFCE et l'université de Rennes. </span></em></p>Les enfants présentant un trouble du spectre de l’autisme vivant avec un animal voient s’améliorer leur bien-être et leur capacité à interagir, tandis que leurs comportements problèmes s’atténuent.Nicolas Dollion, Maitre de conférences Psychologie du développement - chercheur au laboratoire C2S (EA 6391), Université de Reims Champagne-Ardenne (URCA)Marine Grandgeorge, Ethologie, Relation Homme - Animal, Médiation Animale, Développement typique et atypique, Université de Rennes 1 - Université de RennesLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2114082023-11-07T14:47:24Z2023-11-07T14:47:24ZLes répercussions d’une séparation peuvent être lourdes pour les leaders politiques, mais aussi les chefs d’entreprise<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/542234/original/file-20230808-17-d1kkk4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=187%2C98%2C5994%2C3752&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des recherches récentes démontrent qu'un divorce ou une séparation peuvent avoir des conséquences sur la manière de gérer des dirigeants d'entreprises et politiques.</span> <span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Justin Tang</span></span></figcaption></figure><p>À la suite de l’annonce de sa séparation, le <a href="https://theconversation.com/les-adversaires-politiques-de-justin-trudeau-devraient-eviter-de-tirer-profit-de-sa-separation-211004">premier ministre Justin Trudeau</a>, se retrouve désormais dans un nouveau rôle, <a href="https://theconversation.com/prime-minister-justin-trudeau-assumes-a-new-role-single-dad-just-like-his-own-father-210938">celui de père monoparental</a>.</p>
<p>Cela soulève des questions sur les répercussions politiques des séparations et des divorces chez les personnalités publiques.</p>
<p>La nouvelle survient dans un contexte où le divorce est devenu chose courante dans les sociétés modernes. Environ la <a href="https://www.forbes.com/advisor/legal/divorce/divorce-statistics/">moitié des premiers mariages se terminent par un divorce, et le taux d’échec des mariages subséquents est encore plus élevé</a>.</p>
<p>Le stress aigu qu’entraîne le divorce peut mener à une baisse de la participation sociale, à une dégradation de la situation financière, au bouleversement des relations familiales et à des problèmes juridiques. Il <a href="https://doi.org/10.1002/smi.2940">augmente le risque de dépression, d’épuisement professionnel, d’anxiété, de maladie physique</a> et même de mortalité.</p>
<p>Ces effets négatifs ne se limitent pas à la vie personnelle ; ils peuvent également toucher la vie professionnelle.</p>
<p>L’impact du divorce sur le rendement professionnel peut être profond, comme il l’est sur la vie personnelle.</p>
<h2>Impact du divorce sur le rendement professionnel</h2>
<p>De nombreuses études ont montré que les conflits liés au divorce <a href="https://doi.org/10.1037/a0022170">peuvent mener à des problèmes au travail</a>, par exemple à une diminution des heures travaillées et de la productivité, à une <a href="https://doi.org/10.1111/jomf.12166">augmentation des absences et des congés de maladie</a> et même à l’invalidité de longue durée.</p>
<p>Les exigences de la vie personnelle épuisent parfois les ressources réservées aux tâches professionnelles, ce qui empêche de bien concilier les obligations professionnelles et familiales.</p>
<p>Dans le cas des PDG, les chercheurs commencent à s’intéresser aux répercussions du divorce sur leur entreprise et ses actionnaires. Il est encore difficile de dire à quel point le divorce d’un PDG nuit à son rendement professionnel. Notre étude est la première à explorer cette question.</p>
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<img alt="Deux alliances se trouvent à côté du mot divorce dans un dictionnaire" src="https://images.theconversation.com/files/541812/original/file-20230808-28-ui9ptc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541812/original/file-20230808-28-ui9ptc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541812/original/file-20230808-28-ui9ptc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541812/original/file-20230808-28-ui9ptc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541812/original/file-20230808-28-ui9ptc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541812/original/file-20230808-28-ui9ptc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541812/original/file-20230808-28-ui9ptc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le divorce est devenu chose courante dans les sociétés modernes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Les PDG sont les décideurs en chef et les architectes de la stratégie d’entreprise. Par conséquent, les distractions et les capacités cognitives réduites en raison du divorce ont parfois de lourdes conséquences sur leur rendement professionnel et, donc, sur celui de l’entreprise.</p>
<p>Toutefois, les PDG peuvent souvent compter sur l’appui de la direction pour prendre des décisions et composer avec leurs conséquences potentielles, ce qui est d’autant plus vrai dans les grandes entreprises comptant du personnel de soutien.</p>
<h2>Divorce des PDG et rendement des entreprises</h2>
<p>Notre <a href="https://doi.org/10.5465/amd.2020.0031">rapport de recherche basé sur les données d’entreprises danoises et leurs PDG</a> montre que le divorce du dirigeant peut avoir un effet négatif sur le rendement de son entreprise. Toutefois, l’ampleur de cet effet dépend des circonstances.</p>
<p>Le divorce du PDG se répercute plus fortement dans les petites entreprises, dans les secteurs connaissant une croissance rapide et lorsqu’il y a des enfants à la maison. Le degré de contrôle et le pouvoir décisionnel du PDG dans l’entreprise sont d’autres facteurs qui influencent grandement l’ampleur des répercussions.</p>
<p>Comme le souligne notre étude, il est important de fournir du soutien personnel et organisationnel aux PDG qui traversent une période difficile. Un tel soutien peut atténuer les effets négatifs sur le rendement de l’entreprise.</p>
<p>Ces constatations mettent en évidence le rapport complexe entre la vie personnelle et professionnelle des PDG, et l’incidence de tels événements sur le succès d’une entreprise.</p>
<h2>Conséquences pour les dirigeants politiques</h2>
<p>Les conclusions de notre étude concernent aussi étroitement les dirigeantes et dirigeants politiques, comme Justin Trudeau, dont le poste revêt un haut degré de pouvoir et de responsabilité.</p>
<p>Dans le milieu politique, l’impact du divorce sur le rendement varie en fonction de plusieurs facteurs, dont les normes culturelles, les attitudes sociétales face au divorce et les attentes envers les personnalités publiques.</p>
<p>Dans un pays où la population a un point de vue plutôt libéral sur les questions familiales et le divorce, la pression sociétale pourrait être moindre pour les leaders politiques. Les gens sont plus ouverts d’esprit et tendent à accepter plus facilement les choix personnels. La stigmatisation envers les leaders politiques qui vivent un divorce est moindre.</p>
<p>On a pu le constater lors de l’annonce du divorce de Sanna Marin, première ministre sortante de la Finlande, qui a attiré beaucoup <a href="https://www.helsinkitimes.fi/world-int/world-news/finland-in-the-world-press/23551-sanna-marin-s-divorce-nato-drills-and-cha-cha-cha-finland-in-the-world-press.html">moins d’attention médiatique que la controverse entourant sa fête avec des amis et des célébrités</a>. Dans les pays plus libéraux, les médias abordent davantage les capacités professionnelles de la personne que les questions personnelles comme le divorce. </p>
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<img alt="Une femme vêtue d’un veston et d’une jupe élégante porte le regard hors caméra" src="https://images.theconversation.com/files/542005/original/file-20230809-5449-uz7tor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/542005/original/file-20230809-5449-uz7tor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/542005/original/file-20230809-5449-uz7tor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/542005/original/file-20230809-5449-uz7tor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/542005/original/file-20230809-5449-uz7tor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/542005/original/file-20230809-5449-uz7tor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/542005/original/file-20230809-5449-uz7tor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">En mai, Sanna Marin, première ministre sortante de la Finlande, a annoncé sur Instagram que son mari et elle allaient divorcer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Sergei Grits)</span></span>
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<p>En revanche, aux États-Unis, les <a href="https://press.uchicago.edu/ucp/books/book/chicago/N/bo22723661.html">médias couvrent souvent les facettes personnelles et professionnelles de la vie des personnalités politiques</a>, ce qui peut amplifier l’impact du divorce sur l’image publique.</p>
<h2>Vie personnelle et professionnelle</h2>
<p>Notre étude souligne l’importance d’un solide système de soutien. Le fait d’avoir des gens et des réseaux de soutien en place aide la personne à composer avec les défis du divorce et à maintenir son leadership.</p>
<p>En l’absence d’un système de soutien adéquat, la capacité à prendre des décisions cruciales et à assurer la gouvernance s’en trouve affaiblie. Il peut en résulter de mauvaises décisions et, finalement, des conséquences économiques négatives.</p>
<p>Comme notre étude le montre, il est crucial pour les chefs d’entreprise et les leaders politiques de reconnaître à quel point leur vie personnelle peut se répercuter sur leur vie professionnelle.</p>
<p>De plus, les études sur la façon dont les politiciennes et politiciens concilient vie personnelle et responsabilités professionnelles, et sur l’incidence de cette conciliation sur leur prise de décisions, peuvent grandement contribuer à améliorer le rendement des leaders et le service public.</p>
<p>Il est important de souligner qu’il s’agit de tendances générales et qu’il peut y avoir des exceptions dans chaque pays. En fin de compte, les conséquences du divorce d’un dirigeant politique dépendent du lien complexe entre les normes culturelles, les dynamiques médiatiques et la capacité de la personne à composer avec la perception du public dans ces périodes difficiles.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/211408/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’impact d’un divorce sur les performances professionnelles peut être profond, affectant les individus à la fois sur le plan personnel et professionnel.Denis Schweizer, Professor of Finance, Concordia UniversityJuliane Proelss, Associate Professor Finance, Concordia UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2164782023-10-30T19:04:26Z2023-10-30T19:04:26ZPourquoi les films suscitent un intérêt croissant comme outils thérapeutiques<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/556085/original/file-20231016-27-lbbygb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C6170%2C4311&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La thérapie par les films peut aider à gérer les émotions difficiles.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/group-people-watching-sad-movie-cinema-2087654509">Zoran Zeremski/ Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Beaucoup d'entre nous aiment se poser pour regarder un bon film, car les films peuvent nous faire ressentir des choses. Un film triste peut nous aider à évacuer nos émotions, une comédie nous remonter le moral. Les films nous donnent également l'occasion de nous connecter à nos émotions et de les explorer en toute sécurité.</p>
<p>En raison de l'effet que les films peuvent produire sur nous, leur utilisation en tant qu'outils thérapeutiques suscite un intérêt croissant. Bien que ce domaine soit encore très récent, mon examen de la littérature scientifique publiée, à ce jour, sur ce sujet montre que la thérapie par le film (<em>parfois appelée filmothérapie ou cinémathérapie, ndlr</em>) <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/capr.12658">peut s'avérer efficace</a> pour aider les gens à traiter les émotions difficiles qu'ils ressentent, ce qui peut contribuer à améliorer leur santé mentale.</p>
<p>J'ai constaté que le cinéma <a href="https://www.taylorfrancis.com/books/mono/10.4324/9781315731582/cinema-therapy-john-izod-joanna-dovalis">implique les gens sur le plan émotionnel</a> d'une manière qui <a href="https://books.google.co.uk/books/about/Reel_Therapy.html?id=xQcGAAAACAAJ&redir_esc=y">peut s'avérer thérapeutique</a>. Parler des personnages d'un film peut être plus confortable que de discuter directement des problèmes que l'on rencontre, car cela met une certaine <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/jcad.12270">distance émotionnelle</a> par rapport à ce que l'on vit. Les films peuvent également aider les gens à acquérir des compétences, des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/j.1556-6676.1986.tb01229.x">savoir-être</a> en s'inspirant de la façon dont les personnages des films <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0191886920305882?via%3Dihub">font face à leurs difficultés</a>.</p>
<p>[<em>Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>En passant en revue la bibliographie scientifique, j'ai également relevé que la thérapie par le film <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/jcad.12270">réduisait les conflits</a> entre parents et adolescents, augmentait l'empathie et le dialogue entre eux et contribuait à faciliter leur communication. Elle permettait également de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1877042814024331?via%3Dihub">réduire l'anxiété</a> et rendait la thérapie plus attrayante.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-la-musicotherapie-peut-aider-les-enfants-anxieux-161688">Comment la musicothérapie peut aider les enfants anxieux</a>
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<p>La thérapie par le film s'est également révélée particulièrement bénéfique pour certains groupes de personnes. La recherche a par exemple montré que la thérapie par le film peut aider de <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/jclp.22997">jeunes personnes autistes</a> à identifier leurs points forts et à développer leur résilience. Elle peut également aider des <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1521/ijgp.2014.64.2.254">patients souffrant de troubles psychiatriques</a> à exprimer leurs pensées et leurs sentiments. Une autre étude a également mis en évidence le fait que <a href="https://search.informit.org/doi/10.3316/informit.529826981952514">regarder des films de super-héros puis en discuter</a> permettait à de jeunes personnes diagnostiquées schizophrènes de trouver de la force et des raisons d'affronter les difficultés qu'ils rencontrent.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/avc-autisme-sclerose-en-plaque-quand-le-cheval-se-fait-therapeute-186504">AVC, autisme, sclérose en plaque… Quand le cheval se fait thérapeute</a>
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<p>Mais comme la recherche dans ce domaine ne fait que commencer, il est important de poursuivre les investigations pour comprendre comment les gens s'impliquent dans les films, de manière à favoriser leur bien-être et rendre la thérapie par le film la plus bénéfique possible.</p>
<h2>Quel soutien les films apportent-ils ?</h2>
<p><a href="https://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Aristote/98715">Aristote</a> avait remarqué que les spectateurs des tragédies grecques semblaient passer par un processus de purge émotionnelle (ou catharsis) qui leur était bénéfique, grâce à l'empathie qu'il ressentait envers les personnages. Le cinéma et la télévision fonctionnent de la même manière, en offrant un espace sécurisé pour ressentir et exprimer des émotions, sans en subir les conséquences dans le monde réel.</p>
<p>Un film rassemble <a href="https://hts.org.za/index.php/HTS/article/view/2878">des images, des histoires, des métaphores et de la musique</a>, autant d'éléments dont les bienfaits thérapeutiques ont été démontrés. De plus, les films et la télévision sont accessibles. Ils représentent quelque chose de familier, à partir duquel peut s'engager une discussion comme base de conversations thérapeutiques.</p>
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<img alt=" Une jeune femme portant des écouteurs regarde un film ou une émission sur son ordinateur portable." src="https://images.theconversation.com/files/553985/original/file-20231016-19-pk3etk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/553985/original/file-20231016-19-pk3etk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=316&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/553985/original/file-20231016-19-pk3etk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=316&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/553985/original/file-20231016-19-pk3etk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=316&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/553985/original/file-20231016-19-pk3etk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=398&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/553985/original/file-20231016-19-pk3etk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=398&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/553985/original/file-20231016-19-pk3etk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=398&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les films peuvent offrir un espace sécurisé pour exprimer ses émotions.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/young-sad-african-american-woman-watching-1956958240">Fractal Pictures/ Shutterstock</a></span>
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<p>Bien que les recherches montrent que la thérapie par le cinéma peut s'avérer bénéfique, peu de recommandations ont été établies pour utiliser au mieux les films dans le cadre d'une thérapie. C'est pourquoi, après avoir étudié la littérature scientifique, j'ai mis au point une méthode qui s'appuie sur les recherches et les pratiques actuelles afin de déterminer la meilleure façon d'utiliser les films en thérapie.</p>
<p>Je l'ai appelée la «<a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/capr.12658">Movie method</a>», ce qui signifie engagement conscient, observation des réactions, expression de l'expérience, identification de la pertinence personnelle et exploration de nouvelles possibilités. Bien qu'il soit recommandé de travailler avec un thérapeute en cas de problèmes de santé mentale, tout le monde peut utiliser la Movie method pour se connecter plus attentivement aux films et aux émissions de télévision qu'il regarde. </p>
<p>(<em>La santé mentale est un état de bien-être qui s'avère <a href="https://www.ameli.fr/paris/assure/sante/themes/sante-mentale-de-l-adulte/sante-mentale-definition-et-facteurs-en-jeu">indispensable pour se sentir en bonne santé</a>. Si on ressent un mal-être, même en l’absence de trouble mental ou psychologique, il convient de consulter un professionnel de santé, ndlr</em>). </p>
<p>La première étape de la Movie method consiste à vérifier en pleine conscience comment vous vous sentez - et vous assurez que c'est un bon jour pour vous engager dans le film que vous avez choisi de regarder. Réfléchissez à l'effet que pourrait avoir le fait de regarder ce film ou d'engager une réflexion autour de ce film. </p>
<p>Si vous vous sentez prêt à aller de l'avant, observez en pleine conscience vos pensées, vos sentiments et vos réactions physiques pendant que vous regardez le film. Prenez du recul par rapport à vos sentiments, sans les juger, au lieu de vous laisser entraîner par eux.</p>
<p>Après avoir regardé le film, exprimez ou nommez les émotions que vous ressentez. Il peut être utile de les noter. Soyez curieux de vos sentiments, remarquez si vous ressentez physiquement certaines émotions dans votre corps, comme de la tension ou de la relaxation. Parfois, on observe un certain ressenti, qui peut évoluer. On peut réfléchir à ce dont ce ressenti a besoin pour évoluer (par exemple de la gentillesse ou de la compréhension) et imaginer qu'on reçoit ce dont on a besoin. </p>
<p>Ensuite, identifiez ce que le film représente pour vous. Notez à qui vous vous êtes identifié et comment le parcours de ce personnage peut vous rappeler vos propres défis et réussites. Si les films peuvent donner un aperçu de la vie de différents groupes et cultures, veillez à <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/jclp.22999">faire preuve d'esprit critique</a> sur la manière dont ces personnages ou ces questions sont représentés. Vous éviterez ainsi de renforcer les stéréotypes ou les représentations inexactes.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/quand-le-racisme-est-devenu-une-question-politique-dans-le-cinema-francais-155189">Quand le racisme est devenu une question politique dans le cinéma français</a>
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<p>Considérez la manière dont le film peut vous aider à explorer de nouvelles possibilités et stratégies, vous aider à grandir. Réfléchissez à la façon dont les personnages du film ont résolu leurs problèmes et à ce que cela peut vous apprendre. Remarquez les liens entre l'histoire du film et votre histoire personnelle ; et voyez si vous changeriez l'histoire ou si en vous écririez la suite. Envisagez les enseignements que vous pouvez tirer de cette réflexion. </p>
<p>La prochaine fois que vous allez vous poser pour regarder un film, réfléchissez à la manière dont vous pouvez tirer le meilleur parti de cette expérience. Appliquer les méthodes de thérapie par le film peut vous aider à vous impliquer davantage et, avec plus d'attention, dans ce que vous regardez. En définitive, cela peut vous aider à apprendre de nouvelles choses sur vous-même.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216478/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jenny Hamilton ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La recherche a par exemple montré que la thérapie par le film peut aider de jeunes autistes à identifier leurs points forts et à développer leur résilience.Jenny Hamilton, Senior Lecturer in Counselling/ Psychological Therapies/ Programme Leader for MSc Counselling, University of LincolnLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2136252023-10-24T14:20:09Z2023-10-24T14:20:09ZUne visite au musée, la nouvelle pilule bien-être ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/554090/original/file-20231016-28-1a079n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C1%2C986%2C655&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Est-ce que le simple fait d'être en contact avec de l'art a des effets spécifiques ?</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Nous sommes samedi matin. Tasse de café à la main, à peine réveillé, votre regard se perd vers l’horizon. Il pleut. Vous venez de vous décider. Cet après-midi, pour vous, ce sera le musée.</p>
<p>Et si, sans le savoir, vous veniez de prendre une bonne décision pour votre santé ?</p>
<p>C’est l’hypothèse qu’a émis l’association des <a href="https://www.medecinsfrancophones.ca/a-propos/lassociation/">Médecins francophones du Canada</a> en 2018, en lançant le <a href="https://www.mbam.qc.ca/fr/actualites/prescriptions-museales/">programme de prescriptions muséales</a> en partenariat avec le Musée des beaux-arts de Montréal. Aujourd’hui terminé, ce projet a permis à des milliers de patients de recevoir une ordonnance de leur médecin pour une visite au musée, en solo ou accompagné. La prescription visait à favoriser le rétablissement et le bien-être de patients pouvant, par exemple, être atteints de maladie chronique (hypertension, diabète), neurologique, ou encore de trouble cognitif ou de santé mentale. Le choix de prescrire était laissé à la discrétion du médecin.</p>
<p>Cinq ans plus tard, cette initiative pionnière a fait des petits, et nous voyons aujourd’hui fleurir de plus en plus d’activités muséales bien-être allant du <a href="https://www.mnbaq.org/en/activity/museo-yoga-1211">muséo-yoga</a> aux <a href="https://www.mam.paris.fr/fr/contempler-meditation-guidee-en-ligne">méditations guidées</a> avec les œuvres d’arts, en passant par la pratique de la <a href="https://www.beaux-arts.ca/magazine/votre-collection/lart-de-la-contemplation-lente-une-peinture-de-jean-paul-riopelle">contemplation lente</a> ou <em>slow looking</em>. </p>
<p>Les offres ne manquent pas et font grandir en chacun la même conviction : l’art nous fait du bien.</p>
<h2>Au-delà de la première impression</h2>
<p>Ces initiatives ont récemment fait la manchette dans des médiats nationaux des deux bords de l’Atlantique, tant en <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/museotherapie-je-crois-que-nous-sommes-dans-un-moment-de-bouillonnement-2414180">France</a> qu’au <a href="https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/gravel-le-matin/segments/entrevue/90530/visite-gratuite-musee-beaux-arts-montreal-ordonnance-medecin-sante">Canada</a>, et gagnent en visibilité auprès du grand public. Comme une conséquence de cette popularité, on peut lire de plus en plus d’affirmations parlant de la visite au musée comme un « antistress puissant », un « remède miracle contre le stress », ou encore comme ayant des « effets incroyables ».</p>
<p>Enthousiasmant !</p>
<p>En bonne neuroscientifique, je ne peux toutefois m’empêcher de me demander pourquoi, au vu des extraordinaires effets relaxants annoncés, les foules ne se bousculent pas aux portes de nos musées quotidiennement. </p>
<p>Autant de raisons pour aller jeter un œil aux rapports et études scientifiques récemment publiés sur le sujet.</p>
<h2>L’art fait du bien ? De l’intuition à l’observation</h2>
<p>En 2019, l’Organisation mondiale de la Santé publiait un épais rapport colligeant des éléments de preuve concernant le rôle des activités artistiques et culturelles <a href="https://apps.who.int/iris/handle/10665/329834">pour favoriser la santé et le bien-être</a>. De façon remarquable, les auteurs de ce rapport tentent de s’affranchir d’une vision unifiée des bienfaits de l’art qui, tel un remède de grand-mère, constituerait une solution universelle aux problèmes de santé. </p>
<p>A la place, ceux-ci encouragent de nouvelles approches plus précises et rigoureuses, orientées sur l’observation des réponses psychologiques, physiologiques ou encore comportementales induites par certaines composantes spécifiques de l’activité artistique (engagement esthétique, stimulation sensorielle, activité physique).</p>
<h2>Acteur ou spectateur ?</h2>
<p>La spécificité de la visite au musée est d’être une activité artistique dite réceptive – c’est-à-dire qu’il ne s’agit pas ici de produire de l’art (peindre, dessiner, composer). Elle présente toutefois l’avantage d’être accessible et déjà bien ancrée dans nos habitudes collectives, ce qui en fait une bonne candidate pour la prévention en santé.</p>
<p>La question est alors de savoir s’il suffit d’être exposé à de l’art pour bénéficier de ses bienfaits. Autrement dit, est-ce que le simple fait d’être en contact avec de l’art a des effets spécifiques ?</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="femme dans un musée" src="https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/554091/original/file-20231016-15-yh6rw2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Être exposé à l’art permettrait de vieillir en meilleure santé ?</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Des consommateurs de culture en meilleure santé</h2>
<p>Des recherches ont été conduites en Angleterre sur des échantillons de plusieurs milliers d’individus dont on a suivi les indicateurs de santé à long terme, et à qui on a demandé pendant 10 ans de rapporter leurs habitudes en <a href="https://www.elsa-project.ac.uk">termes d’activités culturelles et artistiques</a>.</p>
<p>Ces travaux montrent que les individus fréquentant régulièrement (tous les deux, trois mois et plus) les lieux de culture (théâtres, opéras, musées, galeries) présentent un risque de <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/the-british-journal-of-psychiatry/article/cultural-engagement-and-cognitive-reserve-museum-attendance-and-dementia-incidence-over-a-10year-period/0D5F792DD1842E97AEFAD1274CCCC9B9">démence</a> et de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6429253/">dépression</a> divisé par deux, et un risque de développer un <a href="https://academic.oup.com/psychsocgerontology/article/75/3/571/5280637">syndrome de fragilité gériatrique</a> (phénomène de déclin de la santé lié au vieillissement et associé à une perte de l’indépendance fonctionnelle) réduit d’environ 40 %.</p>
<p>Être exposé à l’art permettrait donc de vieillir en meilleure santé ?</p>
<p>Peut-être, mais il reste à confirmer que l’engagement culturel est la cause de l’amélioration des indicateurs de santé observés dans ces travaux. Pour cela, des études de cohorte et <a href="https://cihr-irsc.gc.ca/f/48952.html">essais cliniques contrôlés randomisés</a> sont nécessaires. Or, ce type d’étude est encore rare dans le domaine.</p>
<h2>À la recherche des principes actifs</h2>
<p>Par ailleurs, il reste une question, et de taille ! Celle du pourquoi… </p>
<p>Pourquoi l’art, et notamment l’art visuel, me ferait du bien. Qu’est ce qui se passe dans mon corps lorsque j’entre en contact avec une œuvre, comment ce contact me transforme et contribue à me maintenir en meilleure santé. Si tel est le cas.</p>
<p>C’est la question que s’est posée Mikaela Law chercheuse en psychologie à Université d’Auckland en Nouvelle-Zélande, et ses collaborateurs en 2021. Ces chercheuses et chercheurs ont <a href="https://bmjopen.bmj.com/content/11/6/e043549.abstract">exploré la littérature scientifique</a> en quête d’études disponibles adressant la réponse physiologique aux arts visuels et son effet sur le stress rapporté par l’individu. </p>
<p>Certaines des études répertoriées dans ce travail montrent que le contact avec une œuvre est à même de diminuer la pression artérielle, la fréquence cardiaque et le cortisol sécrété dans la salive. De telles modifications traduisent une diminution de l’état de tension du corps, que l’on appelle aussi le stress. Un changement qui semble perçu par l’individu et se traduit par une diminution du stress dont il témoigne après l’exposition.</p>
<p>D’autres études, à l’inverse, n’observent rien. </p>
<p>Ainsi, si le contact avec l’art visuel est susceptible de provoquer la détente physique et psychologique du spectateur, celui-ci pourrait ne pas constituer une condition suffisante.</p>
<p>Cette conclusion nous invite donc à nuancer le discours et à approfondir la réflexion sur ce qui se passe au moment de la rencontre avec l’œuvre qui conditionne ses effets sur le psychisme de l’individu.</p>
<p>Aujourd’hui, nous sommes samedi…</p>
<p>Vous irez au musée c’est décidé. </p>
<p>Il est probable que cette décision soit une bonne décision pour votre santé. </p>
<p>Il est également probable que cela dépende du musée et de la façon dont vous visiterez. </p>
<p>Une chose est certaine par contre, c’est que vous augmentez fortement vos chances de passer une agréable journée !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213625/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emma DUPUY travaille en partenariat avec le musée des beaux-arts de Montréal et a reçu des financements de MITACs, de l'Université de Montréal, et des Fonds de Recherche du Québec.</span></em></p>Une visite au musée pour lutter contre la grisaille mentale ? Voici ce qu’en dit la science.Emma Dupuy, Postdoctoral researcher, Université de MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2149782023-10-10T21:15:28Z2023-10-10T21:15:28ZLes athlètes de haut niveau sont-ils plus intuitifs que les autres ?<p>Un lob bien placé de Serena Williams, une reprise de volée magique de Zinédine Zidane… Dans le sport, un geste parfaitement exécuté dans le bon timing nous procure des émotions intenses.</p>
<p>Comment expliquer cette capacité des athlètes à agir de façon pertinente, rapide, adaptée dans des situations à enjeux et sous forte pression temporelle ?</p>
<p>Les travaux en psychologie du sport sur la prise de décision intuitive chez les sportives et sportifs permettent de trouver des réponses à cette question et de comprendre comment ils et elles utilisent leur intuition dans des environnements particulièrement complexes.</p>
<h2>Le coup d’œil décisif</h2>
<p>Pour atteindre les plus hautes performances, les athlètes sont confrontés à de fortes exigences relatives aux situations compétitives rencontrées (charge physique et mentale, pression temporelle, incertitude, pression sociale, enjeux économiques). Sur le terrain, ils évaluent en un coup d’œil la situation à partir de détails infimes et identifient instantanément la réponse à apporter en allant puiser dans leur répertoire d’expériences. Plus leur expertise est solide, plus cette intuition est fiable et le coup d’œil rapide.</p>
<p>Les premiers travaux qui se sont intéressés à l’intuition en action remontent aux années 1960 et concernaient les joueurs d’échecs. Les chercheurs ont montré que les maîtres ne regardaient pas chaque pièce individuellement mais repéraient plutôt des groupes de pièces partageant certaines caractéristiques (nature offensive ou défensive, couleur). La reconnaissance de ces configurations permet aux experts de décider instantanément du coup à jouer et des suivants… si bien qu’ils savent qu’ils ont gagné bien avant la fin de la partie !</p>
<p>Dans les années 1980, c’est le domaine des situations d’urgence qui est devenu un terrain d’étude privilégié de l’intuition. Le <a href="https://www.psychologytoday.com/us/contributors/gary-klein-phd">psychologue américain Gary Klein</a> a suivi des chefs pompiers sur 150 opérations. Dans 80 % des cas, les décisions importantes étaient prises en moins d’une minute, ce qui ne laisse pas le temps d’avoir recours à des processus rationnels. Dès lors, pour ce chercheur, les experts confrontés à des situations dynamiques ne peuvent fonder leurs choix sur la base d’une évaluation rationnelle ou d’une analyse exhaustive des possibilités offertes par la situation. Au contraire, et notamment en sport, c’est bien l’intuition qui permet aux experts de répondre spontanément à des situations complexes, en articulant des éléments pertinents de la situation et des expériences passées.</p>
<p>Chez les sportifs experts, les premiers travaux sur les décisions intuitives renvoient <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S074959780300027X">à une étude auprès de handballeurs professionnels</a>. Les chercheurs allemands ont présenté des vidéos de scènes de match et demandé aux participants ce qu’ils auraient fait à la place du joueur en moins de 3 secondes. Puis ils avaient 45 secondes pour réfléchir à toutes les options possibles et les hiérarchiser. Les résultats montrent que la première option était en moyenne meilleure que les actions choisies après réflexion. Chez les sportifs de haut niveau, la première intuition semble ainsi être la meilleure !</p>
<h2>Trois modalités pour la prise de décision</h2>
<p>Fondateur de l’approche naturaliste de la prise de décision, Gary Klein a identifié <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1518/155534310X12844000801203">trois modalités de prise de décision intuitive</a>. Une première modalité dite de « reconnaissance simple » consiste à associer une première option plausible à une configuration de la situation reconnue comme familière. Une seconde modalité fait appel à la « simulation mentale » pour évaluer l’effet d’une ou deux options potentielles : l’expert simule mentalement des actions habituelles et leur devenir sur le déroulement de la situation. Une troisième modalité dite de « diagnostic » consiste à rechercher dans son répertoire une option plausible proche de la situation rencontrée.</p>
<p>Les études menées en psychologie du sport ont cherché à identifier ces modalités chez des sportifs experts dans divers sports (football, <a href="https://johk.pl/?p=5359">handball</a>, <a href="https://journals.openedition.org/activites/2341">hockey sur glace</a>, <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/10413200802575759">volleyball</a>, judo, <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/02640414.2015.1122824">karaté</a>. Selon la revue de littérature <a href="https://www.taylorfrancis.com/chapters/edit/10.1201/9781351060073-12/decision-making-sport-anne-claire-macquet">menée par A.C. Macquet</a> sur ces modalités de décision intuitive, 60 à 81 % des décisions des experts sont classées comme une reconnaissance simple, environ 13 à 28 % des décisions des experts sont liées au diagnostic, et environ 3 à 24 % renvoient à la simulation mentale. Dans les différentes situations sportives étudiées, les décisions des experts reposaient majoritairement sur la priorité donnée à « la première option », issue d’une simple reconnaissance de la situation courante. Cependant, en étudiant les <a href="https://johk.pl/?p=5359">décisions d’un gardien de but au handball</a> ou celle de <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/1555343414527968">défenseurs de football</a>, les travaux ont montré que lorsque les athlètes étaient éloignés du ballon, ils disposaient de plus de temps pour la simulation mentale et le diagnostic de la situation. La perception de l’urgence de la situation semble ainsi jouer un rôle médiateur, comme point de bascule d’une modalité à l’autre.</p>
<h2>Une diversité d’éléments pris en compte pour décider</h2>
<p>La prise de décision intuitive repose sur la reconnaissance de la situation en y associant quatre types d’éléments qui sont les attentes, les indices pertinents, les actions typiques et les buts plausibles. Des études en hockey sur glace, football, volleyball et handball ont montré que les indices pertinents pour prendre une décision intuitive étaient principalement issus de l’environnement (de 38 % à 52 %). Par exemple, dans l’étude en football réalisée auprès de défenseurs experts, les caractéristiques spatiales (les lignes du jeu, les distances, les positions dans l’espace) et temporelles (la vitesse d’un adversaire, le mouvement d’un partenaire) de la situation courante constituent des indices pertinents pour la reconnaissance de la situation.</p>
<p>Ensuite, les actions typiques potentielles au sein du répertoire de chaque athlète constituent un élément particulièrement important dans l’évaluation de la situation courante (de 18 à 35 %). Ce résultat conforte l’influence des techniques maîtrisées sur les décisions intuitives quel que soit le sport étudié. Zinédine Zidane pouvait marquer des buts en reprise de volée parce qu’il maîtrisait ce geste technique dans des conditions <a href="https://www.dailymotion.com/video/x2qa9b7">qu’il considérait comme favorables</a>.</p>
<p>Enfin, les attentes relatives à l’évolution de la situation et les buts plausibles s’avèrent être des éléments secondaires influençant la reconnaissance de la situation. La proportion de ces éléments est très variable d’une étude à l’autre, ce qui conforte l’influence du lieu et du moment du jeu (phase offensive ou défensive, distance au ballon, etc.) sur la décision intuitive. Par exemple, quand l’équipe adverse prépare une attaque par une circulation du ballon à distance de la cible, le gardien de but de handball exprime des attentes relatives à l’évolution de la situation pour deviner le(s) tireur(s) potentiel(s), il anticipe ainsi en permanence le déroulement futur de l’action.</p>
<p>Les travaux menés sur les décisions intuitives et présentés dans cet article permettent de mieux comprendre les ressorts de la performance experte en sport. Pour autant, d’autres perspectives de recherche animent et <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2022.936140/full">animeront les futurs travaux dans le domaine du sport</a> : quels sont les liens entre prise de décision rationnelle et intuitive ? Entre prise de décision intuitive et créativité ? Et les émotions ? Comment développer la prise de décision intuitive chez les sportifs ? Existe-t-il une intuition collective ?</p>
<p>Le projet <a href="https://www.youtube.com/watch?v=-wfKkOqgejw&t=307s">« Train Your Brain »</a> financé dans le cadre du programme prioritaire de recherche <a href="https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr/programme-prioritaire-de-recherche-ppr-sport-de-tres-haute-performance-92142">« Sport de très haute performance »</a> et mené en collaboration avec la Fédération française d’escrime, actuellement en cours devrait fournir quelques réponses.</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science (qui a lieu du 6 au 16 octobre 2023 en métropole et du 10 au 27 novembre 2023 en outre-mer et à l’international), et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition porte sur la thématique « sport et science ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214978/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cyril Bossard est membre de la Société Française de Psychologie du Sport. </span></em></p>Comment expliquer les décisions intuitives des sportives et sportifs de haut niveau ?Cyril Bossard, Maitre de Conférences en STAPS, Université de Bretagne occidentale Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2138272023-10-09T17:47:26Z2023-10-09T17:47:26ZUltratrails, plongées, expéditions : faut-il une personnalité hors du commun pour s’adapter à des conditions extrêmes ?<p>Kilian Jornet a gagné l’ultratrail du Mont-Blanc en 2022 en parcourant plus de 170 kilomètres et plus de 10 000 mètres de dénivelé en 19 heures 49 minutes et 30 secondes. Stéphanie Gicquel a parcouru 2045 kilomètres à ski en 74 jours, traversant l’Antarctique pour rejoindre le Pôle Sud avec des températures allant jusqu’à -50°. Thomas Pesquet a réalisé une sortie extravéhiculaire de 6 heures et 54 minutes, à 400 kilomètres au-dessus de la Terre.</p>
<p>Ces sportifs de l’extrême déploient des efforts surdimensionnés pour s’adapter à des conditions environnementales ou des exigences exceptionnelles. Pousser l’humain au-delà de ses limites n’est pas anodin sur le plan comportemental ou psychologique.</p>
<p>Alors, sont-ils différents du commun des mortels, pour réussir à réaliser de telles performances ?</p>
<h2>Les environnements et les performances extrêmes</h2>
<p>Effectuer un exercice intense en haute altitude, en plongée profonde, dans une station polaire ou lors d’un vol dans l’espace, ou courir un ultratrail, représentent des activités extrêmes stressantes pour le corps comme pour l’esprit.</p>
<p>En effet, ces environnements sont souvent caractérisés par des conditions naturelles hostiles (hypoxie, hyperbarie, apesanteur, froid, chaud, nuit…). Et si les facteurs de l’environnement physique sont la principale source de stress, certaines situations s’accompagnent aussi d’exigences sociales. En effet, dans les stations polaires ou dans les vols spatiaux habités, les personnes peuvent séjourner plusieurs mois ensemble et les participants sont exposés à d’autres formes de « stresseurs » : isolement prolongé, confinement, ennui, manque d’intimité, réduction des plaisirs, relations interpersonnelles, la liste est longue. Ainsi, Valeri Ryumin, un cosmonaute russe, <a href="https://www.researchgate.net/publication/348564933_L%E2%80%99humain_dans_l%E2%80%99espace_defis_psychologiques">aurait décrit ces conditions extrêmes ainsi</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Toutes les conditions nécessaires pour commettre un meurtre sont réunies si vous mettez deux hommes dans une cabine mesurant 18 pieds sur 20 et que vous les y laissez pendant deux mois. »</p>
</blockquote>
<p>Selon la nature de l’environnement, les personnes peuvent développer des symptomatologies différentes. En haute altitude par exemple, certains développent le mal aigu des montagnes, une symptomatologie spécifique à la haute altitude, caractérisée par un ensemble de troubles physiologiques, psychologiques, comportementaux, cognitifs et affectifs dus à des conditions environnementales hypoxiques. Ce mal est lié à la fois au <a href="https://www.researchgate.net/publication/14819979_Effects_of_Altitude_on_Mood_Behaviour_and_Cognitive_Functioning">niveau d’altitude et à la vitesse d’ascension</a> et varie selon les individus.</p>
<p>L’adaptation à ces contraintes multiples est un défi, et certaines personnes s’adaptent mieux que d’autres, et parfois plus rapidement.</p>
<h2>Le rôle de la personnalité</h2>
<p>Des études ont montré que la <a href="https://hal.univ-lorraine.fr/hal-04219768">personnalité joue un rôle important dans le processus d’adaptation aux situations extrêmes</a>.</p>
<p>D’ailleurs, l’adaptation est au cœur de la définition de la personnalité de Allport depuis le début du XX<sup>e</sup> siècle. Depuis les années 2000, on la définit même comme un modèle caractéristique d’adaptation dans la manière habituelle de penser (cognition), de sentir ou ressentir (émotions) et de se comporter ou de réagir (comportements), qui tend à demeurer relativement stable à travers les situations et le temps.</p>
<p>Au cours d’une ascension simulée de l’Everest en chambre hypobare, les <a href="https://hal.science/hal-04220346">sujets « réservés » et « opportunistes »</a> se sont montrés plus aptes à relever le défi de l’hypoxie que les sujets « ouverts » et « consciencieux ».</p>
<p>En plongée professionnelle, l’évaluation des états d’anxiété de seize plongeurs a montré que trois présentaient un niveau d’anxiété clinique au cours de la plongée. L’analyse de leur personnalité a montré qu’ils présentaient des difficultés à se contrôler et une instabilité émotionnelle souvent concomitante à des humeurs dépressives et anxieuses.</p>
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<p>La comparaison de la personnalité d’un plongeur qui a développé des <a href="https://api.istex.fr/ark:/67375/WNG-FH738ZLB-J/fulltext.pdf?sid=clickandread">réactions sévères d’anxiété</a>, suite à l’observation d’un plongeur en situation de narcose, avec celle d’un plongeur qui n’a pas eu de réaction a montré que le premier était extraverti avec un risque de somatisation.</p>
<p>En micropesanteur, les sujets qui s’adaptent le mieux aux <a href="https://hal.science/hal-02314127">conditions exigeantes d’un vol parabolique</a> (alternance de phase d’hypergravité et de microgravité) sont des personnes qui n’apprécient pas la monotonie, les tâches répétitives et routinières. Ils sont plus <a href="https://hal.science/hal-03725559">dynamiques et proactifs dans leurs recherches de sensations</a>.</p>
<p>Ces quelques études témoignent que la personnalité est devenue un facteur reconnu, capable de jouer un rôle dans les processus d’adaptation en environnements extrêmes.</p>
<h2>Le rôle particulier de l’« intelligence émotionnelle »</h2>
<p>L’<a href="https://doi.org/10.1177/175407391665049">intelligence émotionnelle</a> peut être considérée comme une caractéristique de personnalité qui fournit un cadre intéressant pour évaluer les différences individuelles en ce qui concerne la manière dont les individus identifient, expriment, comprennent, régulent et utilisent <a href="https://www.cairn.info/les-interventions-en-psychologie-de-la-sante--9782100587780.htm">leurs propres émotions</a> – et celles des autres.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/550870/original/file-20230928-20-irzk45.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="grille de questions pour évaluer l’intelligence émotionnelle" src="https://images.theconversation.com/files/550870/original/file-20230928-20-irzk45.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/550870/original/file-20230928-20-irzk45.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=568&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/550870/original/file-20230928-20-irzk45.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=568&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/550870/original/file-20230928-20-irzk45.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=568&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/550870/original/file-20230928-20-irzk45.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=714&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/550870/original/file-20230928-20-irzk45.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=714&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/550870/original/file-20230928-20-irzk45.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=714&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Il existe plusieurs types d’évaluation de l’intelligence émotionnelle. Ce questionnaire, connu sous le nom de « Brief Emotional Intelligence Scale – 10 (BEIS-10) » permet d’évaluer la capacité à évaluer ses propres émotions et celles des autres, à les réguler et à les utiliser. Pour répondre, il faut lire attentivement les états émotionnels décrits, choisir celui qui convient le mieux à ce que vous ressentez généralement, en cochant la case appropriée, sans passer trop de temps sur chaque question, en indiquant celle qui vous décrit le mieux en ce moment.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://doi.org/10.1027/1614-0001/a000028">Michel Nicolas, adapté de Davies et collaborateurs, 2010</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Les <a href="https://www.researchgate.net/profile/Michel_Nicolas2">sports extrêmes offrent une situation particulièrement pertinente pour examiner ce trait de personnalité</a>. Les ultra-trails en montagne comme l’UTMB (Ultra Trail du Mont-Blanc) et le Tor des Géants sont répertoriés parmi les courses les plus difficiles au monde.</p>
<p>Nous avons montré que les athlètes ayant des scores d’intelligence émotionnelle élevés ont déclaré des <a href="https://www.researchgate.net/publication/362372464_Emotional_Intelligence_in_Ultra-Marathon_Runners_Implications_for_Recovery_Strategy_and_Stress_Responses_during_an_Ultra-Endurance_Race">états de récupération plus élevés que les athlètes ayant des scores plus faibles</a>. Les résultats confirment le rôle positif de l’intelligence émotionnelle sur la <a href="https://www.researchgate.net/publication/332359025_Time_courses_of_emotions_experienced_after_a_mountain_ultra-marathon_Does_emotional_intelligence_matter">capacité d’un individu à faire face à des situations difficiles</a> en « récupérant » davantage (des ressources) pour améliorer leur adaptation psychologique à ces sports extrêmes. Dans cette perspective, cette caractéristique de personnalité pourrait avoir un rôle protecteur contre le stress et améliorer la préparation mentale avant la compétition.</p>
<p>Différentes études ont suggéré que les caractéristiques dispositionnelles, telle que la personnalité des individus attirés par les situations extrêmes, variaient d’un environnement à un autre (e.g., stations polaires, missions spatiales) et peuvent influencer les processus d’adaptation. Identifier ces caractéristiques de personnalité pourrait permettre d’améliorer la sélection et la préparation des individus pour améliorer leur adaptation. En connaissant le profil de personnalité, le psychologue peut ainsi individualiser la préparation selon les caractéristiques de la personne. Par exemple, certains individus accordent <a href="https://hal.univ-lorraine.fr/hal-02012277/file/Art%20JP%202%20-%20HAL.pdf">plus d’importance à certaines informations sensorielles</a> dans l’exécution de leurs actions. Ces personnes pourraient alors être entraînées à utiliser d’autres modalités sensorielles pour accroître leurs capacités et leurs performances. Un autre exemple consisterait à développer l’intelligence émotionnelle chez nos sportifs de l’extrême pour les aider à réguler leurs émotions et à gérer leur stress dans le but de maintenir, voire d’améliorer, leur performance.</p>
<p>La plupart des études en environnements extrêmes se focalisent sur les troubles de l’adaptation et tentent d’identifier des caractéristiques de personnalité pour améliorer la sélection et l’entraînement des participants. Mais de Thomas Pesquet à Killian Jornet et Stéphanie Gicquel, à n’en pas douter, les athlètes de l’extrême ont des caractéristiques de personnalité hors du commun.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science (qui a lieu du 6 au 16 octobre 2023 en métropole et du 10 au 27 novembre 2023 en outre-mer et à l’international), et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition porte sur la thématique « sport et science ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213827/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Benoît Bolmont a reçu des financements du Centre National d'Etudes Spatiales. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Michel Nicolas ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les sportifs et explorateurs de l’extrême ont-ils des traits de personnalité en commun pour bien s’adapter à des conditions extrêmes et surprenantes ?Benoît Bolmont, Professeur en STAPS, Université de LorraineMichel Nicolas, Psychologie, Université de Bourgogne – UBFCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.