tag:theconversation.com,2011:/uk/topics/dechets-23906/articlesdéchets – The Conversation2024-01-25T09:54:59Ztag:theconversation.com,2011:article/2210522024-01-25T09:54:59Z2024-01-25T09:54:59ZDéchets alimentaires : à quoi va servir le nouveau tri à la source ?<p>Le 1<sup>er</sup> janvier 2024 est entrée en vigueur l’obligation, pour toutes les collectivités, de <a href="https://infos.ademe.fr/economie-circulaire-dechets/2024/le-tri-a-la-source-des-biodechets-cest-maintenant/">proposer à leurs habitants une solution de tri à la source</a> et de valorisation de leurs biodéchets : autrement dit, de l’ensemble de leurs déchets alimentaires et déchets verts.</p>
<p>En France, les biodéchets représentaient en 2017 83kg par habitant et par an, correspondant à <a href="https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/4351-modecom-2017-campagne-nationale-de-caracterisation-des-dechets-menagers-et-assimiles.html">1/3 de nos ordures ménagères</a>. Précisons que l’enjeu actuel pour les collectivités porte surtout sur les déchets alimentaires, produits par toute la population ; les déchets verts étant dans la majorité des cas traités sur place ou grâce à des solutions déjà existantes.</p>
<p>Si elle exige pour les consommateurs et les collectivités de s’y adapter, cette nouvelle étape dans le tri des déchets est <a href="https://theconversation.com/dechets-verts-et-alimentaires-des-detritus-sous-exploites-77112">indispensable</a> d’un point de vue énergétique et environnemental, puisqu’elle va d’une part éviter une incinération et un enfouissement qui n’avaient pas lieu d’être, et d’autre part générer des bénéfices environnementaux pour la production d’énergie et l’agriculture : ces biodéchets auront en effet deux destinations principales, les <a href="https://theconversation.com/lhistoire-peu-connue-du-compost-en-france-de-la-chasse-a-lengrais-a-la-chasse-au-dechet-220411">amendements organiques</a> et le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/methanisation-33105">biométhane</a>.</p>
<h2>Où en est-on ?</h2>
<p>La mise en place de cette réglementation est le fruit d’un long processus débuté il y a une dizaine d’années. En 2010, le Grenelle II de l’environnement initiait le processus, puis la <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/loi-relative-transition-energetique-croissance-verte-tepcv">loi de transition écologique pour la croissance verte</a> du 17 août 2015 fixait une échéance de tri des biodéchets pour tous les producteurs (et non seulement les gros producteurs non ménagers) au 1<sup>er</sup> janvier 2025.</p>
<hr>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Pour suivre au plus près les questions environnementales, retrouvez chaque jeudi notre newsletter thématique « Ici la Terre ». <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-environnement-150/">Abonnez-vous dès aujourd’hui</a>.</em></p>
<hr>
<p><a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?qid=1528981579179&uri=CELEX:32018L0851">L’Union européenne</a> a ensuite repris cette mesure pour l’appliquer à l’ensemble des États-membres et en a avancé l’échéance à 2024. Les collectivités connaissaient donc le changement à venir depuis 2015. Pourtant, en décembre 2023, seuls 30 % de la population française, selon l’Agence de la transition écologique (Ademe), est couverte par une solution de tri à la source de ses biodéchets. Ce chiffre devrait atteindre les 40 % courant 2024.</p>
<p>Parmi les freins qui expliquent ce retard, on peut citer l’extension parallèle des consignes de tri pour la poubelle jaune à emballages. Certaines collectivités ont priorisé cette question, repoussant à 2024 celle des biodéchets. En outre, la loi n’étant pas punitive pour les collectivités qui ne mettraient pas en place ce tri, la seule sanction qui s’appliquent à elles est indirecte : la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042910922">taxe générale sur les activités polluantes</a> (TGAP), qui s’applique aux poubelles noires, augmente depuis 2019 et jusqu’en 2025 passant de 17€/tonne à 65€/tonne pour les installations de stockage de déchets non dangereux.</p>
<p>Les collectivités ont donc intérêt, en principe, à en diminuer le volume en sortant les biodéchets. Pourtant, la mise en place de la gestion de ce nouveau flux représente, elle aussi, un coût important pour la collectivité. Les solutions de tri à la source et la valorisation impliquent en effet des investissements, qui sont accompagnés par l’État via des fonds dédiés aux biodéchets, comme le <a href="https://aides-territoires.beta.gouv.fr/aides/bab0-soutenir-le-tri-a-la-source-et-la-valorisatio/">Fonds vert en 2024</a>.</p>
<h2>Deux formes de tri à la source</h2>
<p>Pour la mise en place du tri des biodéchets, deux choix s’offrent aux collectivités : la gestion de proximité ou la collecte – au porte à porte ou via des bornes d’apport volontaire proches de leurs logements, dans lesquels les citoyens viennent déposer leurs déchets.</p>
<p>Dans le premier cas, il s’agit d’un compostage individuel ou partagé dans les résidences où c’est adapté : les déchets sont compostés sur place – un processus d’une durée de 9 mois – puis sont utilisés par les habitants eux-mêmes sur leurs espaces verts – potager, plates-bandes, pots de fleurs, pelouse…</p>
<p>Dans le second cas, les biodéchets sont collectés et envoyés vers une unité de traitement : soit une compostière industrielle, soit un méthaniseur.</p>
<p>[<em>Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Restes de repas, épluchures, coquilles d’œufs… Les déchets alimentaires étant assez spéciaux à traiter, les plates-formes doivent pour y être autorisées obtenir des agréments sanitaires : ce sont des ensembles de protocoles et de règles à respecter pour s’assurer qu’il n’y a aucun risque pour la santé des humains et des animaux (hygiénisation, montée en température et surveillance des potentiels pathogènes). Ces installations requièrent donc des équipements spécifiques.</p>
<h2>Matière organique pour restaurer nos sols</h2>
<p>Commençons par l’usage le plus répandu, à savoir le compostage. En plein air ou plus rarement à l’intérieur, la matière se transforme en compost au cours d’un processus qui dure entre 4 et 6 mois : l’activité des micro-organismes fait monter en température les biodéchets jusqu’à 70 °C, ce qui vient dégrader la matière organique. S’ensuivent des phases de maturation qui aboutissent à l’obtention d’une matière stable et d’un compost mûr.</p>
<p>Ce compost est ensuite revendu au milieu agricole et va servir à enrichir le sol en matière organique, afin de lui conférer une meilleure rétention de l’eau et limiter l’érosion des sols. Un enjeu crucial de préservation des sols et des cultures, dans un contexte de fréquence accrue des épisodes de sécheresse. Il diminue en parallèle les besoins en engrais, dont l’usage augmente à mesure que les sols se dégradent.</p>
<h2>Méthanisation pour la souveraineté énergétique</h2>
<p>L’autre possibilité pour la valorisation des biodéchets est la méthanisation : sous l’action de micro-organismes naturellement présents dans les biodéchets, la matière organique est dégradée lors d’un processus appelé fermentation anaérobique. Cette dégradation est réalisée en conditions contrôlées et en enceinte fermée qui permet l’absence d’oxygène, contrairement au compostage qui est une réaction aérobie.</p>
<p>De cette réaction est obtenue du biogaz ainsi qu’une fraction solide – le digestat – qui est généralement recompostée ou épandue directement sur des sols agricoles. Contrairement au compostage, la méthanisation ne monte pas suffisamment en température pour hygiéniser les déchets alimentaires. Les installations doivent donc investir dans des équipements supplémentaires pour cette étape obligatoire de traitement.</p>
<p>Cette production de biogaz, réinjectée dans les réseaux, constitue un substitut du gaz naturel importé et répond donc à un enjeu de souveraineté énergétique – le gaz naturel représente <a href="https://www.grdf.fr/institutionnel/role-transition-ecologique/gaz-energie-avenir/gaz-mix-energetique">16 % du mix énergétique en France et 42 % de notre consommation en chauffage</a>.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lobligation-de-tri-des-biodechets-va-t-elle-enfin-faire-decoller-la-methanisation-en-france-221272">L’obligation de tri des biodéchets va-t-elle enfin faire décoller la méthanisation en France ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<h2>Choix territorial, enjeu foncier et acceptabilité</h2>
<p>Mais le choix va surtout répondre à des enjeux territoriaux. En effet, la répartition des unités de traitement déjà existantes s’inscrit dans une logique historique : dans les zones qui pratiquaient et pratiquent l’élevage, les méthaniseurs sont nombreux puisque le besoin en compost est faible tandis que la méthanisation permet de valoriser les effluents d’élevage ou les résidus de culture chez les céréaliers.</p>
<p>Dans le sud de la France, les plates-formes de compostage sont plus plébiscitées puisque les cultures sont plutôt maraîchères (vergers, viticulture, etc.). L’enjeu d’installation des plates-formes étant de bien s’assurer du besoin territorial de la matière produite, le but n’étant pas de produire du compost à Lille pour l’envoyer à Marseille.</p>
<p>Au fur et à mesure du développement de la filière émergent des enjeux importants sur le foncier avec une forte concurrence entre les secteurs : où installer les nouvelles plates-formes ? Comment adapter l’existant ? A cela se mêlent des enjeux d’acceptabilité, ces solutions pouvant générer des nuisances selon l’endroit où elles se trouvent. Généralement les installations de traitement de déchets sont éloignées des aires d’habitation.</p>
<p>À ce stade, aucune des deux n’est plus préconisée que l’autre. Des études menées par l’Ademe sont en cours sur l’analyse cycle de vie complète de chaque procédé afin d’évaluer les coûts environnementaux associés à chacun au regard des bénéfices qui en découlent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221052/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Muriel Bruschet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La nouvelle obligation du tri à la source pour les collectivités, encore peu mise en œuvre, est pourtant indispensable.Muriel Bruschet, Référente Nationale Biodéchets, Ademe (Agence de la transition écologique)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2191252024-01-03T17:36:32Z2024-01-03T17:36:32ZDans les mers, des tonnes de déchets radioactifs laissés à l’abandon<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/564809/original/file-20231211-19-wbrfv3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4992%2C2851&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Rien qu'en Atlantique nord-est, près de 200 000 fûts de 200 litres de déchets radiacatifs ont été immergés, et n'ont pour l'heure toujours pas été récupérés.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La gestion des <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/la-france-compte-1-76-million-de-m3-de-dechets-radioactifs-a-gerer-20231212">déchets radioactifs</a> est <a href="https://www.ouest-france.fr/environnement/nucleaire/uranium-issu-des-combustibles-uses-les-liens-sont-tenaces-entre-le-nucleaire-francais-et-la-russie-10900e3a-bcd9-11ed-95d7-ae0463183236">l’une des faces sombres</a> du recours à l’énergie nucléaire. La NASA avait un temps envisagé de les envoyer en <a href="https://www.science-et-vie.com/questions-reponses/pourrait-on-envoyer-nos-dechets-dans-le-soleil-62359.html">orbite autour du Soleil</a>, avant de renoncer à ce projet dispendieux et risqué.</p>
<p>Les États nucléarisés ont vite opté pour la solution la plus simple et la moins coûteuse, en immergeant ces déchets en mer. <a href="https://hal.science/hal-01091818/document">Le principe de dilution</a> justifiait cette pratique : on considérait la mer si vaste que les déchets radioactifs allaient se diluer sans conséquence notable pour la faune et la flore marines. Les campagnes de <a href="https://www.bing.com/videos/riverview/relatedvideo?&q=zodiacs+greenpeace+dechet+radioactifs&&mid=2C8F9C3FC0D81BCD2AF92C8F9C3FC0D81BCD2AF9&&FORM=VRDGAR">Greenpeace</a> ont toutefois marqué l’opinion dans les années 1970, en <a href="https://www.dailymotion.com/video/xfdqno">mettant des images</a> sur une réalité qui n’était pas secrète, mais que l’on pouvait avoir du mal à se représenter.</p>
<p>Rien qu’en Atlantique nord-est, près de <a href="https://lejournal.cnrs.fr/articles/atlantique-sur-la-piste-des-futs-radioactifs">200 000 fûts</a> de 200 litres de ces déchets ont ainsi été immergés, et n’ont pour l’heure toujours pas été récupérés. Nombre d’entre eux sont désormais en état de détérioration avancé, ce qui rend cette récupération presque impossible. L’Agence Internationale de l’Énergie Atomique (AIEA) précise que dans ces fûts « des <a href="https://theconversation.com/quappelle-t-on-un-dechet-radioactif-179347">déchets radioactifs</a> provenant de la recherche, de la médecine, de l’énergie nucléaire et des activités militaires ont été emballés […], enrobés dans une matrice en béton ou en bitume ».</p>
<p><a href="https://lejournal.cnrs.fr/articles/atlantique-sur-la-piste-des-futs-radioactifs">Une mission scientifique est prévue en 2024</a> pour cartographier le fond des zones maritimes concernées, et estimer la dangerosité de ces dépôts. Il s’agira alors d’évaluer le comportement des <a href="https://energie-nucleaire.net/qu-est-ce-que-l-energie-nucleaire/radioactivite/radionucleide">radionucléides</a> là où les fûts ont été détériorés. L’incertitude actuelle porte sur leur mobilité et la possibilité qu’ils migrent dans la <a href="http://www2.ecolex.org/server2neu.php/libcat/docs/TRE/Full/Fr/TRE-001268.pdf">colonne d’eau</a>, présentant un <a href="https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/pollution-futs-radioactifs-mer-70-ans-apres-y-t-il-risque-environnement-marin-97798/">risque potentiel encore mal évalué pour les animaux</a> qui y vivent.</p>
<h2>De 1946 à 1982 : des immersions tous azimuts</h2>
<p>Rapidement <a href="https://afcn.fgov.be/fr/dossiers/dechets-radioactifs/gestion-des-dechets-radioactifs/immersion-en-mer-de-dechets-radioactifs">imitée par d’autres pays</a>, la <a href="https://www.andra.fr/sites/default/files/2018-01/585.pdf">première immersion a été réalisée par les États-Unis</a>, à 80 km des côtes californiennes, en 1946. En France, un projet similaire du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) envisageant des immersions dans la Méditerranée a été enterré dans les années 1960, à la suite des contestations des populations locales concernées et des écologistes, le <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1960/10/11/le-commandant-cousteau-critique-les-conditions-dans-lesquelles-a-ete-organisee-l-immersion-de-dechets-radio-actifs_2109120_1819218.html">Commandant Cousteau en tête</a>.</p>
<p>Les pratiques étrangères d’immersion ont eu un impact réel en France, comme l’attestent les <a href="https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1965_num_11_1_1847">témoignages de marins-pêcheurs en Atlantique de l’époque</a>, au large de La Rochelle, de Guilvinec ou de Concarneau, déplorant remonter dans leurs filets des déchets radioactifs immergés dans leurs lieux de pêche.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/0llbDGLUjNY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Au fond de la Manche, ces déchets nucléaires qui inquiètent….</span></figcaption>
</figure>
<p>Dans l’Atlantique nord-est, la France a elle aussi participé à <a href="https://www.youtube.com/watch?v=rUDwK5IEaGw">deux campagnes d’immersions coordonnées</a> par l’agence nucléaire de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), avec l’Allemagne, la Belgique, le Royaume-Uni et les Pays-Bas. En 1967, 11 000 tonnes de déchets radioactifs sont ainsi immergés au large de la Galice, et deux ans plus tard, 9 000 nouvelles tonnes le sont à 900 km des côtes bretonnes.</p>
<p>La construction du <a href="https://www.ouest-france.fr/environnement/nucleaire/nucleaire-le-stockage-de-surface-des-dechets-a-la-hague-confronte-a-la-realite-du-temps-long-b8fdde4e-95ba-11ed-9400-7aba786c7303">centre de traitement de la Hague</a> dans la Manche a mis un terme à la pratique française de l’immersion en Atlantique, tandis que d’autres États nucléarisés l’ont poursuivie plusieurs années durant. Toutefois, dans son inventaire national publié en 2018, l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (<a href="https://www.connaissancedesenergies.org/sites/default/files/pdf-actualites/andra-synthese-2018-web.pdf">l’Andra</a>) indique que la France a continué à immerger 3200 tonnes de déchets radioactifs produits par ses essais nucléaires dans le Pacifique, en Polynésie, jusqu’en 1982, au large des atolls de Hao et Mururoa.</p>
<h2>Une interdiction progressive de l’immersion en mer</h2>
<p>En 1958, la <a href="https://legal.un.org/ilc/texts/instruments/french/conventions/8_1_1958_high_seas.pdf">Convention sur la haute mer</a> commence par préciser en son article 25 que « tout État est tenu de prendre des mesures pour éviter la pollution des mers due à l’immersion de déchets radioactifs ». Mais cette convention ne concerne alors que la haute mer, et aucune définition de la notion de « pollution des mers » n’y est précisée.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/rUDwK5IEaGw?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Dans les années 1960, la France décide d’immerger une partie de ses déchets radioactifs dans l’Atlantique. INA.</span></figcaption>
</figure>
<p>Il faut attendre la <a href="https://www.imo.org/fr/about/Conventions/pages/convention-on-the-prevention-of-marine-pollution-by-dumping-of-wastes-and-other-matter.aspx">Convention de Londres de 1972</a>, pour que soit interdite l’immersion des <a href="https://www.andra.fr/les-dechets-radioactifs/tout-comprendre-sur-la-radioactivite/classification">déchets de haute activité</a>, et limitée celle des autres déchets radioactifs de plus faible activité. Surtout, la Convention arrête une définition large de l’immersion, qui désigne « l’élimination délibérée dans la mer de déchets ou autres matières à partir de navires, aéronefs, plates-formes ou autres ouvrages artificiels, ainsi que le sabordage en mer de ces navires ou plates-formes ». Les annexes énumèrent les déchets dont l’immersion est interdite et ceux pour lesquels un permis spécifique d’immersion est requis.</p>
<p>[<em>Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Puis, en 1983, est décidée la suspension provisoire et volontaire de toute immersion de déchets radioactifs en mer, <a href="http://www.informationnucleaire.ch/pdf_fiche_1/01_RAPPORT_AIEA.pdf">jusqu’à ce que de nouvelles études sur les effets de ces activités</a> soient disponibles en 1985. Mais cette suspension a été prolongée afin que les gouvernements puissent analyser les résultats obtenus. <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1993/11/16/le-vote-de-la-convention-de-londres-l-immersion-des-dechets-radio-actifs-est-definitivement-interdite_3971903_1819218.html">L’adoption d’une résolution, en 1993</a>, a rendu pérenne l’interdiction de toute immersion, devenue ainsi totale et définitive.</p>
<h2>L’étape essentielle du Protocole de Londres en 1996</h2>
<p>Le <a href="http://www2.ecolex.org/server2neu.php/libcat/docs/TRE/Full/Fr/TRE-001268.pdf">Protocole de Londres en 1996</a> remplace quant à lui la Convention de 1972 depuis son entrée en vigueur, en 2006. Il comprend trois apports principaux.</p>
<p>Premièrement, il inverse la logique de l’interdiction. En 1972, on avait énuméré les matières qui ne pouvaient plus être immergées. Le Protocole, lui, érige en principe l’interdiction d’immerger des déchets radioactifs, à l’exception de ceux qui sont énumérés dans une annexe. Pour ces déchets toutefois, un permis d’immerger est nécessaire.</p>
<p>Deuxièmement, le Protocole définit une approche de précaution. Il convient ainsi de « prendre les mesures préventives appropriées lorsqu’il y a des raisons de penser que des déchets ou autres matières introduites dans le milieu marin risquent de causer un préjudice et ce, même en l’absence de preuves concluantes de l’existence d’un lien causal entre les apports et leurs effets ».</p>
<p>Troisièmement, sans s’attarder sur les modalités, le Protocole précise que le pollueur « devrait, en principe, assumer le coût de la pollution » et que les parties contractantes doivent s’assurer que ledit Protocole n’a pas simplement pour résultat de déplacer la pollution d’un secteur de l’environnement à un autre.</p>
<h2>Que faire des déchets radioactifs déjà immergés ?</h2>
<p>L’appréhension juridique des immersions de déchets radioactifs se heurte à des difficultés intrinsèques. Si tant est qu’au sein de l’immensité océane on parvienne un jour à déceler la présence de déchets radioactifs non déclarés, il restera difficile de savoir qui les a immergés, à quel moment, et même à quel endroit, puisque les courants pourraient les avoir déplacés. Aussi, la désignation du responsable peut être complexe à établir. Excepté si un navire était pris sur le vif, l’effectivité de cet assemblage juridique resterait difficile à mettre en œuvre si un État ayant signé le Protocole décidait d’y faire entorse. Son existence a cependant le mérite d’acter l’engagement des États nucléarisés à ne plus utiliser la mer comme le dépotoir de leurs activités nucléaires.</p>
<p>L’une des interrogations qui subsistent réside toutefois dans la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=iEPJO62qEk8">pratique de l’immersion réalisée par la Russie</a>, l’un des États nucléarisés les plus pollueurs qui semble plus réticent à suivre le mouvement d’interdiction des immersions. Le peu de données disponibles laisse augurer le pire scénario, notamment en mer de Kara, en mer de Barent et en mer Blanche. L’eau y est peu profonde, et il s’agit de zones géographiques très sensibles au réchauffement climatique. Outre les fûts et conteneurs que l’on retrouve ailleurs, elles abriteraient aussi plusieurs sous-marins et réacteurs nucléaires.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/iEPJO62qEk8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Océan Arctique, cimetière atomique. Arte.</span></figcaption>
</figure>
<p>Les <a href="https://lejournal.cnrs.fr/articles/atlantique-sur-la-piste-des-futs-radioactifs">missions scientifiques prévues dans l’océan Atlantique</a> détermineront si ces déchets radioactifs sont en l’état dangereux ou non. Quoi qu’il en soit, l’interdiction de leur immersion en mer est essentielle à la construction d’une éthique en la matière. Celle-ci reste incomplète, tant qu’une solution n’aura pas été trouvée pour le devenir des déchets immergés en état d’être repêchés. Cela serait cohérent avec la préoccupation émergente dans notre droit contemporain de ne pas compromettre la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins.</p>
<p>Dans son principe au moins, celle-ci vient d’être consacrée en France par le <a href="https://www.conseil-constitutionnel.fr/actualites/communique/decision-n-2023-1066-qpc-du-27-octobre-2023-communique-de-presse">Conseil constitutionnel</a>, à l’occasion du contrôle des dispositions législatives instituant le <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-magazine/france-2/complement-d-enquete/complement-d-enquete-dechets-nucleaires-quand-nos-poubelles-debordent_6077022.html">projet d’enfouissement sous terre des déchets radioactifs à Bure</a>. Il a néanmoins estimé ici que les conditions de stockage permettent « de protéger l’environnement et la santé contre les risques à long terme de dissémination de substances radioactives », et que la charge de la gestion de ces déchets n’est pas « reportée sur les seules générations futures ». Depuis, le <a href="https://www.conseil-etat.fr/actualites/stockage-de-dechets-radioactifs-le-conseil-d-etat-confirme-l-utilite-publique-du-projet-de-stockage-de-dechets-radioactifs-cigeo">Conseil d’État</a> s’est notamment appuyé sur cette décision pour considérer que le projet Cigéo était bien d’utilité publique.</p>
<p>Le régime juridique devant traduire en droit la <a href="https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-de-la-justice-2019-3-page-441.html">prise en compte d’une telle capacité des générations futures</a> reste toutefois encore à l’état larvaire. D’ici à ce qu’il gagne en consistance, les fûts encore en état solide qui tapissent les planchers océaniques ont le temps de subir l’inexorable détérioration à laquelle ils semblent promis.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219125/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nicolas Pauthe est membre de la Société Française de l'Environnement (SFDE) et de l'Association Française de Droit Constitutionnel (AFDC)
</span></em></p>Depuis 1993, l’immersion de déchets radioactifs en mer est interdite. Mais que faire des déchets jetés auparavant dans les océans ?Nicolas Pauthe, Docteur en droit public, enseignant-chercheur post-doctorant, Université de Pau et des pays de l'Adour (UPPA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2136092023-11-23T16:24:55Z2023-11-23T16:24:55ZLes citoyens recyclent, mais l’industrie est défaillante et le modèle de consommation, jamais remis en question<p>Pourtant, il s’agit d’une des stratégies circulaires les plus basses dans la <a href="https://www.rncreq.org/images/UserFiles/files/3RV%20ICI%20juin%202009%20P1-6.pdf">hiérarchie 3RV</a> (réduction, réemploi, recyclage, valorisation). Elle n’implique en effet aucun changement structurel ou systémique majeur du modèle « linéaire », soit l’extraction, la production et la mise au rebut de biens, vers un modèle circulaire, où la création de produits intervient à partir de matières secondaires. </p>
<p><a href="https://www.canada.ca/fr/services/environnement/conservation/durabilite/economie-circulaire.html">L’économie circulaire</a> s’articule autour de <a href="https://unpointcinq.ca/article-blogue/economie-circulaire-solution-durable/">deux idées clés</a> : </p>
<p>1) Repenser les modes de consommation et de production existants afin de minimiser la consommation de ressources vierges</p>
<p>2) Optimiser l’utilisation des ressources (énergie, matériaux, produits) existantes en prolongeant leur durée de vie ou en les réutilisant utilement afin de repenser les modes de consommation et de production existants. </p>
<p>L’étape du recyclage a pourtant été promue et médiatisée depuis plusieurs décennies dans de nombreuses municipalités canadiennes, avec l’appui d’une réglementation et de plans provinciaux. Malgré ces efforts, des <a href="https://www.canada.ca/fr/environnement-changement-climatique/nouvelles/2020/10/le-canada-fait-un-pas-de-plus-vers-lobjectif-de-zero-dechet-de-plastique-dici-2030.html">dysfonctionnements majeurs, persistent notamment dans la phase de tri des déchets plastiques</a>. En l’occurrence, <a href="https://www.cbc.ca/radio/thesundayedition/the-sunday-edition-for-april-21-2019-1.5099057/why-your-recycling-may-not-actually-get-recycled-1.5099103">87 % de ces déchets aboutissent dans des sites d’enfouissement ou dans l’environnement</a>.</p>
<p>Les médias font régulièrement état de cette <a href="https://www.theglobeandmail.com/canada/article-wish-cycling-canadas-recycling-industry-in-crisis-mode">« crise du recyclage »</a>. Parallèlement, on constate une crise de confiance des citoyens : en 2020, pas <a href="https://blog.legeropinion.com/fr/nouvelles/canadiens-confiance-a-leur-systeme-de-recyclage">moins de la moitié des Canadiens (48 %) avaient confiance dans le système de recyclage et ce chiffre était en baisse par rapport à 2018 (54 %)</a>.</p>
<p>Si les efforts ont été traditionnellement orientés vers la conscientisation et la responsabilité individuelle des consommateurs canadiens, cette approche culpabilise le maillon le moins responsable des problèmes liés au recyclage. </p>
<h2>Enquête des pratiques canadiennes en matière de recyclage</h2>
<p>Face à ces crises et afin de mieux comprendre comment améliorer le recyclage et promouvoir d’autres stratégies circulaires (par exemple, la réduction à la source), une vaste enquête pancanadienne auprès d’un millier de répondants a été conduite par notre équipe multi-universitaires, le <a href="https://recherche.uqac.ca/laboratoire-de-recherche-sur-les-nouvelles-formes-de-consommation-labonfc#:%7E:text=Le%20LaboNFC%20est%20un%20regroupement,depuis%20le%20d%C3%A9but%20de%20leur">Laboratoire de recherche sur les Nouvelles Formes de Consommation (LaboNFC)</a> de l’UQAC, en partenariat avec <a href="https://5redo.ca">5R Enabler Designs and Operations Inc</a> (5REDO) et son directeur, le Dr. Mahdi Takaffoli et l’analyste Ophela Zhang. Les résultats de l’étude seront publiés sous peu dans un article intitulé « Le recyclage des plastiques au Canada : Un système inadapté aux attentes de la population canadienne », dans la <em>Revue Organisations & Territoires</em>.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/leconomie-circulaire-stagne-et-si-le-modele-cooperatif-servait-dinspiration-206641">L'économie circulaire stagne. Et si le modèle coopératif servait d'inspiration ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>L’échantillon a été constitué à partir d’un panel en ligne. Les participants y ont été sélectionnés aléatoirement selon des quotas préétablis afin de favoriser la représentativité de l’échantillon avec la population canadienne.</p>
<p>Cette enquête met en lumière plusieurs éléments essentiels pour progresser vers une mise en œuvre plus complète des principes de l’économie circulaire.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Trois bacs de recyclage alignés sur le trottoir enneigé d’une rue résidentielle" src="https://images.theconversation.com/files/557884/original/file-20231106-23-lfyf1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/557884/original/file-20231106-23-lfyf1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/557884/original/file-20231106-23-lfyf1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/557884/original/file-20231106-23-lfyf1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/557884/original/file-20231106-23-lfyf1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/557884/original/file-20231106-23-lfyf1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/557884/original/file-20231106-23-lfyf1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Des bacs de recyclage dans une rue montréalaise.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<ul>
<li><strong>Un engagement massif pour le recyclage</strong></li>
</ul>
<p>91 % des répondants au sondage sont bien engagés dans le recyclage des déchets. Ils recyclent et réutilisent la quasi-totalité de leurs déchets, que ce soit à la maison, au travail ou en vacances. </p>
<p>Cette proportion peut paraître élevée compte tenu du fait qu’environ les deux tiers des municipalités canadiennes recyclent. Toutefois, le recyclage comprend également les systèmes de consigne gérés par le privé, dont les chaînes de supermarché. De plus, les individus peuvent également recycler ailleurs qu’à leur domicile, comme au bureau ou à l’école. </p>
<p>Par ailleurs, les répondants au sondage indiquent nettoyer les plastiques avant de les mettre dans le bac de recyclage. De plus, ils gardent leurs déchets dans des piles séparées de verre, de plastique, de papier et de métal. On note également qu’ils jettent les piles usagées dans un conteneur de collecte approprié, plutôt que dans la poubelle. Concernant la perception, ils ajoutent que le recyclage à la maison ne prend ni beaucoup de temps ni beaucoup de travail.</p>
<ul>
<li><strong>Un système de recyclage inefficace</strong></li>
</ul>
<p>Pour 82 % des répondants, le système actuel n’est pas efficace. Selon eux, le plastique collecté n’est pas correctement recyclé pour être réutilisé comme matières premières dans la production de nouveaux produits. Ils sont conscientisés sur le fait que le tri en amont est une étape très importante du processus de recyclage. Même s’ils estiment qu’il est difficile de savoir exactement quels articles en plastique sont recyclables ou non dans le système actuel, ils font tout de même confiance à leur perception et à leurs connaissances pour trier à la maison.</p>
<ul>
<li><strong>Des achats de plus en plus écoresponsables</strong></li>
</ul>
<p>L’enquête révèle que les Canadiens sont prêts à utiliser des sacs réutilisables pour acheter des fruits et légumes, plutôt que d’utiliser les sacs en plastique dans les magasins. De plus, la majorité est disposée à participer à des programmes qui leur offrent les produits essentiels du quotidien dans des emballages réutilisables et recyclables.</p>
<p>Aussi, ils sont nombreux à acheter des produits et des services respectueux de l’environnement, soit des produits fabriqués à partir de plastiques recyclés (plutôt qu’à partir de nouveaux plastiques). De même, ils privilégient l’achat d’articles dans des emballages en papier.</p>
<ul>
<li><strong>L’enjeu du recyclage des emballages souples</strong></li>
</ul>
<p>Enfin, les répondants indiquent ne pas opter pour des contenants en bioplastique et ne participent pas aux programmes de collecte de certains types de plastique (par exemple, des emballages souples) qui ne sont pas couramment recueillis par le système de recyclage actuel.</p>
<p>Au vu de ces résultats, il apparaît que les consommateurs font preuve de bonne volonté et d’une diligence prudente. Toutefois, il faut se questionner sur la responsabilité des producteurs, distributeurs, transporteurs et recycleurs, dont les décisions ont structuré de facto le système — aujourd’hui perçu comme défaillant — et, par extension, les politiques publiques, qui ne sont pas à la hauteur des enjeux.</p>
<h2>Pistes d’amélioration souhaitées</h2>
<p>Les consommateurs estiment ainsi faire leur part et que l’amélioration du système de recyclage devrait donc s’effectuer à d’autres niveaux qu’au leur. Plusieurs changements ont été mentionnés en ce sens :</p>
<p>1) L’offre de produits, contenants et emballages réutilisables ou recyclables, car les consommateurs sont fortement enclins à les utiliser ;</p>
<p>2) 56 % des consommateurs souhaiteraient un système de consignation pour certains contenants en plastique ;</p>
<p>3) 52 % aimeraient des points de dépôt (par exemple dans les grands magasins) pour les emballages en plastique souple qui ne sont pas systématiquement collectés ;</p>
<p>4) 42 % souhaiteraient des contenants réutilisables lorsqu’ils se font livrer de la nourriture à domicile ;</p>
<p>5) 30 % souhaiteraient des magasins sans emballages.</p>
<p>Cette enquête révèle que les consommateurs canadiens sont relativement préoccupés par l’environnement, ce qui influe directement sur la modification de leurs comportements en matière de recyclage des déchets. </p>
<p>Cependant, la transformation de leurs pratiques de consommation n’est pas encore correctement associée à une politique ambitieuse et claire de tri, ni à d’autres options proposées, notamment en ce qui a trait aux contenants réutilisables. Ainsi, pour l’heure, le modèle de consommation n’est pas remis en question en raison d’un manque d’éléments facilitateurs vers l’économie circulaire. </p>
<p>Ce constat appelle ainsi des changements plus profonds avec toutes les parties prenantes afin que la transition vers l’économie circulaire aille au-delà du passage d’une poubelle noire à une poubelle bleue.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213609/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Myriam Ertz a reçu des financements du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH), du Fonds de recherche du Québec - Société et culture (FRQSC), du Fonds de développement académique du réseau (FODAR), et de Chaires de recherche du Canada (CRC).
Cette recherche a été soutenue financièrement par le Réseau de recherche en économie circulaire du Québec (RRECQ) et par une Subvention d’Engagement Partenarial du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Emmanuel Raufflet a reçu des financements des fonds de recherche du Québec et des fonds de recherche du Canada. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>ADDAR WALID a reçu une bourse de recherche de l'UQAC</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Anaïs Del Bono ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les citoyens sont conscients de l’importance du recyclage. Mais cette responsabilisation individuelle camoufle les graves problèmes de fonctionnement de l’industrie du recyclage.Myriam Ertz, Professeure adjointe en marketing, responsable du LaboNFC, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Anaïs Del Bono, PhD candidate in management and strategy, specialisation in socio-ecological transitions, HEC MontréalEmmanuel Raufflet, Professor in Management and Circular Economy, HEC MontréalWalid Addar, Formal analysis-Lead, Investigation-Supporting, Validation-Supporting, Writing – original draft-Lead, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2133932023-09-18T16:01:17Z2023-09-18T16:01:17ZLes restaurants écoresponsables par le menu<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/548776/original/file-20230918-34002-sxflpx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C0%2C4992%2C3335&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un plat écoresponsable proposé par le restaurant l'Aiguillage à Grenoble : panais entier confit au citron, polenta crémeuse au tofu fumé, condiments d'herbes poivrées et mizuna.</span> <span class="attribution"><span class="source">Pascale Cholette</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Chaque année, en France, ce sont près de <a href="https://www.lhotellerie-restauration.fr/journal/hygiene-securite/2020-08/la-gestion-des-dechets-au-restaurant.htm">7 milliards de repas</a> qui sont pris au restaurant. Or, depuis quelque temps déjà, dans un contexte prégnant de crise environnementale, les Français s’interrogent sur leur alimentation : ils souhaitent davantage savoir ce qu’ils consomment et visent une <a href="https://www.senat.fr/rap/r19-476/r19-4764.html">restauration plus durable</a>. Alors que débute la <a href="https://www.service-public.fr/particuliers/actualites/A1674">semaine européenne du développement durable</a>, à quoi ressemblent les quelques centaines de restaurants écoresponsables de l’hexagone ?</p>
<h2>Impacts environnementaux et sociétaux</h2>
<p>Les restaurateurs écoresponsables ont repensé leur façon de travailler afin de l’inscrire dans une démarche beaucoup plus durable. Ainsi, au niveau environnemental, l’accent est essentiellement mis sur la réduction de l’empreinte carbone avec l’utilisation de produits locaux, si possible biologiques et de saison ; l’offre de plats végétaux, la limitation du gaspillage alimentaire ; la réduction, le tri et le recyclage des déchets ; la réduction de la consommation d’eau ; l’utilisation d’emballages durables ; l’offre de doggy bags ; le don des produits non consommés à des associations.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/548802/original/file-20230918-19-f0ikob.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/548802/original/file-20230918-19-f0ikob.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/548802/original/file-20230918-19-f0ikob.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/548802/original/file-20230918-19-f0ikob.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/548802/original/file-20230918-19-f0ikob.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/548802/original/file-20230918-19-f0ikob.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/548802/original/file-20230918-19-f0ikob.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Elodie (à gauche), la cheffe du restaurant l’Aiguillage à Grenoble, et l’ensemble de son équipe.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pascale Cholette</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces actions sont importantes dans un pays où le <a href="https://theconversation.com/invendus-rebuts-et-surplus-des-initiatives-novatrices-pour-lutter-contre-le-gaspillage-alimentaire-208995">gaspillage alimentaire</a> et les pertes en général atteignent <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/gaspillage-alimentaire">10 millions de tonnes de produits par an</a>. Il s’agit d’un immense gâchis de ressources naturelles (terres arables et eau) mais aussi une production inutile de gaz à effet de serre (3 % des émissions nationales selon l’ADEME). Or, la restauration est l’un des secteurs les plus impactés par le problème du gaspillage tout particulièrement en ce qui concerne les produits non consommés et la gestion des déchets.</p>
<p>Les actions écoresponsables se jouent aussi au niveau sociétal. Ainsi, pour les restaurateurs écoengagés, il est important de former leur personnel au développement durable pour qu’il se sente impliqué et qu’il y participe pleinement. Si ces initiatives sont individuelles et encore peu nombreuses, l’espoir est placé dans les écoles de cuisine comme <a href="https://www.ferrandi-paris.com/fr/actualites/des-modules-sur-lecoresponsabilite-delivres-par-ecotable-des-etudiants-de-ferrandi-paris">Ferrandi</a> ou Lyfe Institut qui sensibilisent leurs étudiants à l’écoresponsabilité. D’autre part, mettre en avant ses engagements durables pour les restaurateurs favorise l’attractivité de l’établissement, la <a href="https://ecotable.fr/blog/articles/partager-sa-demarche-eco-responsable-pour-attirer-ses-equipes-restauration-article-blog">fidélisation des équipes</a> et limite ainsi le turn-over dans un secteur souvent confronté à une réelle pénurie de main-d’œuvre. En effet, pour de nombreux employés et tout particulièrement les plus jeunes, l’engagement écoresponsable d’un restaurant est une garantie de trouver un établissement en phase avec ses valeurs écologiques.</p>
<h2>L’importance grandissante des labels</h2>
<p>Depuis quelques années, des labels sont apparus pour accompagner et valoriser les engagements et les implications des restaurateurs dans le développement durable. Ces labels sont de plus en plus nombreux avec par exemple le label FIG (Food Index for Good), le Green Food, le titre de Maître restaurateur de France, la « plastic-free certification », etc. Le label <a href="https://ecotable.fr/">Ecotable</a>, créé en 2019, est le premier label de restauration durable en France. Il émane de l’association du même nom. Il permet à tous les types de restaurateurs de s’engager dans l’écoresponsabilité en mesurant leur impact environnemental et en les accompagnant dans leurs démarches écologiques.</p>
<p>Ce label mesure la cohérence écologique des restaurants et délivre un, deux ou trois écotables en fonction de leur degré d’écoresponsabilité. Pour en obtenir un, le restaurateur doit respecter les saisons, proposer au minimum 15 % de produits issus de <a href="https://theconversation.com/agriculture-pourquoi-la-bio-marque-t-elle-le-pas-en-france-207510">l’agriculture bio</a> ou de filières agricoles durables. Pour deux écotables, on monte à 30 % de produits bio et à 50 % pour trois. Les critères de saisonnalité des produits, de tri, de valorisation des déchets, de choix de producteurs ou encore de propositions d’alternatives végétariennes font aussi partie du cahier des charges. Aujourd’hui ce sont environ 250 restaurants en France qui sont labélisés, parmi lesquels le <a href="https://www.radiofrance.fr/francebleu/podcasts/coin-cuisine/natacha-et-elodie-du-restaurant-l-aiguillage-a-grenoble-cuisinent-le-chou-dans-tous-ses-etats-4598828">restaurant l’<em>Aiguillage</em> à Grenoble</a>, qui détient trois écotables et qui propose une cuisine saine, locale et soucieuse de l’environnement.</p>
<p>Le guide Michelin a lui aussi décidé, en 2020, de prendre en compte l’engagement écoresponsable des restaurants figurants dans son guide (assiettes Michelin, Bib gourmands et étoiles Michelin) en créant <a href="https://guide.michelin.com/fr/fr/article/sustainable-gastronomy/on-vous-dit-tout-sur-l-etoile-verte-michelin">l’étoile verte</a>.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/548103/original/file-20230913-21-6higos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/548103/original/file-20230913-21-6higos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/548103/original/file-20230913-21-6higos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/548103/original/file-20230913-21-6higos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/548103/original/file-20230913-21-6higos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/548103/original/file-20230913-21-6higos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/548103/original/file-20230913-21-6higos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/548103/original/file-20230913-21-6higos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le chef isérois Christophe Aribert, au fort engagement écoresponsable, détient deux toiles rouges et une étoile verte Michelin.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Studio Papi aime Mamie</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour se voir attribuer [l’étoile verte], il faut montrer un fort engagement dans une approche durable de la gastronomie, avec le respect de la terre, des saisons, des animaux, mais aussi offrir une cuisine plus verte, avec l’utilisation de produits locaux et bio, une bonne gestion des déchets ou encore de bonnes performances énergétiques. Cependant, à ce jour, seuls 90 restaurants la détiennent, parmi lesquels le chef isérois deux étoiles <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-magazine/france-2/13h15/13h15-du-samedi-24-avril-2021_4362491.html">Christophe Aribert</a> de la <em>Maison Aribert</em>. Ce chef, au très fort engagement écoresponsable, respecte entre autres « les saisons, les produits de saison, les produits locaux et les gens qui les produisent. » Il détient d’ailleurs aussi trois écotables et la « plastic-free certification ».</p>
<h2>Greenwashing et freins financiers</h2>
<p>Si on assiste à une prise de conscience générale des enjeux de la durabilité de l’alimentation, aussi bien par le grand public que par les professionnels, la situation n’est cependant pas encore idyllique.</p>
<p>En effet, on ne trouve en France que quelques centaines de restaurants écoresponsables – principalement à Paris – dans un pays qui compte environ 175 000 établissements selon l’Insee, soit environ 0,2 % des restaurants, ce qui est minime. Ensuite, les labels servant à les identifier ne sont pas toujours très clairs pour des clients qui ne savent pas forcément les reconnaître. De plus, ces labels émanent essentiellement d’initiatives privées et supposent une adhésion en contrepartie.</p>
<p>Même si l’engagement de la plupart des restaurateurs qui souscrivent à ces labels ne fait aucun doute, on pourrait se demander, tout comme <a href="https://www.leparisien.fr/bien-manger/ecotable-green-food-etiquettable-que-valent-les-labels-qui-promettent-des-restaurants-ecoresponsables-22-10-2021-TQKN2CZH6RGWTPJJ35ZLUMHJGM.php"><em>Le Parisien</em></a>, si le niveau de garantie est le même que celui qui pourrait être apporté par un référentiel officiel doté d’un cahier des charges transparent, validé par les pouvoirs publics et audité par un organisme indépendant.</p>
<p>D’autre part, on peut s’interroger sur une éventuelle forme de greenwashing même dans certains restaurants labellisés. S’il n’est nullement question de remettre en cause les différents labels, une étude faite dans les restaurants détenteurs de l’étoile verte a relevé des incohérences avec le modèle écoresponsable. <a href="https://i-buycott.org/etoile-verte-michelin-greenwashing-buycott/">Les enquêteurs</a> se sont, par exemple, rendus compte que certains produits n’étaient pas locaux ou que l’impact carbone des assiettes n’était pas toujours respecté (de la viande de bœuf était parfois proposée.) Selon eux, dans ces restaurants, les produits bovins, bovidés, les crustacés, le chocolat et le café devraient être proscrits.</p>
<p>Un autre frein au développement des restaurants écoresponsables est d’ordre financier. En effet, de nombreux professionnels estiment que mettre en place des pratiques de développement durable dans leur restaurant par exemple une restauration bio et locale est très intéressant mais que <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/08/31/les-restaurants-peinent-a-prendre-la-vague-ecolo_5348405_3234.html">cela coûte plus cher</a> que d’utiliser les produits habituels. Les clients ne sont pas toujours prêts à payer plus et le risque pour le restaurant est une réduction de la rentabilité. Voilà pourquoi ils aimeraient pouvoir obtenir des aides et des subventions. D’autre part, tous les restaurants n’ont pas la place pour produire leur compost ou pour avoir plusieurs poubelles dans leur cuisine. Enfin, un restaurant milieu de gamme n’aura sans doute pas les mêmes moyens financiers, ni les mêmes retombées économiques qu’un restaurant étoilé s’il souhaite devenir écoresponsable.</p>
<p>Malgré l’engouement pour une alimentation durable, les restaurants écoresponsables semblent avoir du mal à se développer en France. Pour l’heure, il n’est pas si simple que cela pour les restaurateurs de s’engager dans cette démarche, d’autant plus que cette dernière coûte cher.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213393/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Louisgrand ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En France, 0,2 % des restaurants peuvent se dire écoresponsables. Quelles sont leurs spécificités ? Pourquoi sont-ils encore si peu nombreux ?Nathalie Louisgrand, Enseignante-chercheuse, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2060142023-06-16T12:56:57Z2023-06-16T12:56:57ZIndustrie spatiale : comment réguler le « New space » ?<p>ClearSpace, Loft Orbital, ShareMySpace… Ces noms ne vous disent peut-être rien : ils font pourtant partie d’une constellation de start-up liées aux technologies spatiales dont le nombre a presque <a href="https://www.nasa.gov/sites/default/files/files/SEINSI.pdf">quintuplé sur une période de 10 ans</a>. Le chiffre d’affaires du secteur, en 2019, pèse pour près de <a href="https://www.oecd.org/innovation/the-space-economy-in-figures-c5996201-en.htm">300 milliards de dollars</a> en 2019.</p>
<p>Elle dessine ce qu’est le « New Space », qui lui-même complète un « Old Space » dans lequel les activités spatiales étaient essentiellement gouvernées par des acteurs publics tels que les États. Le lancement du satellite soviétique Sputnik l’avait incarné dès 1957.</p>
<p>Depuis le début des années 2000, c’est ainsi à un fort développement de l’entrepreneuriat que l’on assiste dans le secteur. L’évolution s’est produite sous l’influence conjointe de facteurs culturels, économiques, politiques et technologiques, qui ont permis une <a href="https://theconversation.com/le-rover-emirati-rashid-doit-se-poser-sur-la-lune-pour-une-mission-ephemere-204283">facilité d’accès à l’espace extra-atmosphérique pour les entrepreneurs</a>. De nouveaux entrants dans cet écosystème <a href="https://theconversation.com/lindustrie-spatiale-mondiale-a-laube-dune-decennie-de-bouleversements-majeurs-152338">ont bouleversé le fonctionnement traditionnel du secteur</a> à plusieurs niveaux. Cela appelle de nouvelles régulations auxquelles les jeunes pousses ne sont pas toujours bien préparées.</p>
<h2>Le spatial, un secteur chamboulé au tournant des années 2000</h2>
<p>Les dynamiques entrepreneuriales récentes sont fortement corrélées à un changement culturel et économique promu par les entrepreneurs de la Silicon Valley dans le <a href="https://www.ifri.org/sites/default/files/atoms/files/nardon_new_space_2017_p.pdf">domaine des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC)</a>. Ces derniers ont exercé une pression toute particulière sur le secteur spatial, de plus en plus demandeurs de services reposant sur ses technologies, ce qui a ouvert de nouvelles opportunités en matière de modèles commerciaux. La start-up franco-américaine <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/qui-est-loft-orbital-cette-start-up-spatiale-franco-americaine-qui-a-leve-125-millions-d-euros.N1166892">Loft Orbital</a> propose aujourd’hui, par exemple, de louer des satellites afin que les entreprises ne soient plus contraintes de posséder et d’exploiter le leur.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Qui dit nouveaux entrepreneurs dit aussi nouveaux besoins de financement. Le développement d’investisseurs privés tels que <a href="https://seraphim.vc/">Seraphim Space IT</a> est alors venu en réponse à des <a href="https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2002-2-page-205.htm">problèmes de légitimité politique</a> sur le développement des activités spatiales à la fin des années 1990, alors que la guerre froide et les rivalités spatiales liées touchaient à leur fin. Les fonds provenaient alors surtout des États, autrement dit des contribuables. Le contexte devient alors propice pour voir apparaître les <a href="https://www.nasa.gov/content/cots-commercial-partners">premiers partenariats public-privé opérés par la National Aeronautics and Space Administration (NASA)</a>, avec SpaceX notamment.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/spacex-vers-une-nouvelle-ere-de-la-conquete-spatiale-139591">SpaceX : vers une nouvelle ère de la conquête spatiale</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Outre ces facteurs économiques et politiques, l’accessibilité croissante et la baisse des coûts des technologies et des infrastructures spatiales ont également joué un rôle important dans l’essor du <em>New Space</em>. On peut citer des avancées telles que l’impression 3D, les fusées réutilisables et les <a href="https://theconversation.com/les-cubesats-un-exemple-dinnovation-low-cost-dans-lindustrie-spatiale-129375">nanosatellites ou « cubesats »</a>, plus petits et moins coûteux. Elles ont permis aux entreprises privées d’entrer dans le secteur grâce à des coûts de production qui ont <a href="https://youtu.be/7a4UJnJJnJs">facilité l’accès à l’espace</a>.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/retour-des-humains-sur-la-lune-artemis-figure-de-proue-dune-competition-globale-150153">Retour des humains sur la Lune: Artemis, figure de proue d’une compétition globale</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>L’ensemble a fait basculer les acteurs du spatial vers des logiques nouvelles. Ils ont notamment dû repenser leurs activités en fonction des besoins des utilisateurs finaux, et moins selon des impératifs de défense ou des objectifs scientifiques. Les principales agences spatiales du monde, telles que la NASA, l’Agence spatiale européenne (ESA) ou le CNES, ont mis en place d’importantes mesures d’incitation à l’entrepreneuriat. <a href="https://www.spaceappschallenge.org/">Challenges</a>, <a href="https://entreprises.cnes.fr/fr/actinspace">hackathons</a>, <a href="https://commercialisation.esa.int/esa-business-incubation-centres/">incubateurs</a> et <a href="https://air-cosmos.com/article/cosmicapital-un-fonds-ddi-aux-technologies-du-new-space-en-france-et-en-europe-25472">financements</a> en capital-risque ont ainsi vu le jour.</p>
<p><iframe id="BYfhf" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/BYfhf/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Les récents plans d’investissement public, à l’image du <a href="https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2021/10/12/presentation-du-plan-france-2030">plan national d’investissement France 2030</a>, indiquent qu’une « attention particulière sera accordée aux projets portés par les acteurs émergents (start-up et PME-ETI innovantes) » dans <a href="https://www.bpifrance.fr/nos-appels-a-projets-concours/appel-a-projets-spatial-developpement-et-industrialisation-de-constellations-de-satellites-et-de-leurs-technologies-habilitantes">l’appel à projets opéré la BPI</a> sur le développement et l’industrialisation de constellations de satellites et les technologies associées.</p>
<h2>Quelle place pour la soutenabilité ?</h2>
<p>Ce développement doit aussi répondre de ses conséquences. Un défi majeur réside ainsi dans la gestion des déchets spatiaux, provoqués par le nombre croissant d’objets lancés en orbite autour de la Terre et dont la fin de vie demeure problématique. Plus de débris, c’est potentiellement plus de collisions avec des objets fonctionnels, donc plus de débris avec des effets en chaîne : c’est ce que l’on appelle le <a href="https://www.cite-espace.com/centre_ressources/le-syndrome-de-kessler/">syndrome de Kessler</a>.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/q7IerRMAcno?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Pour pallier un <a href="https://theconversation.com/pollution-dans-lespace-et-si-on-taxait-144744">manque de régulation</a>, la communauté spatiale internationale se concerte ainsi dans le cadre de diverses initiatives telles que l’<a href="https://www.iadc-home.org/"><em>Inter-Agency Space Debris Coordination Committee</em></a> et le <a href="https://moonvillageassociation.org/"><em>Moon Village Association</em></a> qui proposent des directives de bonne conduite. Plusieurs start-up proposent aussi de répondre à la problématique des débris spatiaux, telle que <a href="https://clearspace.today/">Clearspace</a>, qui ambitionne de devenir le prochain <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/air-defense/spatial-clearspace-en-piste-pour-devenir-le-premier-eboueur-du-ciel-1269956">« éboueur du spatial »</a>.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/destruction-dun-satellite-russe-de-nouveaux-debris-menacent-la-station-spatiale-internationale-151789">Destruction d’un satellite russe : de nouveaux débris menacent la Station Spatiale Internationale</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Les <a href="https://theconversation.com/les-satellites-starlink-nous-empecheront-bientot-dobserver-les-etoiles-150410">États</a> tentent également de répondre à ces enjeux de <a href="https://theconversation.com/comment-les-activites-spatiales-peuvent-elles-evoluer-vers-plus-de-durabilite-200396">soutenabilité</a>, en fixant des <a href="https://theconversation.com/quel-cadre-juridique-pour-les-conflits-spatiaux-de-demain-153244">normes contraignantes</a>. On peut citer notamment la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000018931380">loi française de 2008 relative aux opérations spatiales (loi LOS)</a>, <a href="https://entreprises.cnes.fr/fr/consultation-actualisation-los-2023">actuellement en cours d’actualisation</a>. Elle a la particularité en droit spatial d’obliger les opérateurs de satellites français à libérer les orbites utilisées dans les 25 ans qui suivent la fin de leur mission par désintégration dans l’atmosphère terrestre ou placement sur une orbite cimetière. Elle fixe en outre des <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX%3A52021XC0218%2801%29">critères d’impacts socio-environnementaux dans les appels à projets publics</a>.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pollution-dans-lespace-et-si-on-taxait-144744">Pollution dans l’espace : et si on taxait ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Les <a href="https://www.unoosa.org/oosa/en/ourwork/access2space4all/index.html">questions d’impacts sociaux</a> méritent tout autant d’être pris en compte dans le développement des activités entrepreneuriales spatiales. Un travail pour les identifier est à poursuivre mais le bureau des affaires spatiales des Nations unies a déjà défini un certain nombre de <a href="https://www.unoosa.org/oosa/en/ourwork/space4sdgs/index.html">thématiques</a> s’inspirant des 17 objectifs de développement durable de l’ONU. On peut notamment citer l’accès aux données spatiales pour tous auquel la start-up française <a href="https://www.sharemyspace.space/">ShareMySpace</a> s’attelle.</p>
<h2>Légiférer sans entraver la compétitivité ?</h2>
<p>Néanmoins, qui dit régulation dit aussi enjeu de compétitivité lorsque l’on touche à un secteur mondialisé. Les critères posés semblent aujourd’hui trop différer d’un pays à l’autre, ce qui peut conduire à un phénomène dit de « forum shopping » : les entreprises vont tenter de profiter de la juridiction la plus susceptible de donner raison à leurs propres intérêts.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/pourquoi-la-chine-tient-tant-a-gagner-la-nouvelle-course-aux-etoiles-155581">La Chine</a>, les <a href="https://theconversation.com/le-rover-emirati-rashid-doit-se-poser-sur-la-lune-pour-une-mission-ephemere-204283">Émirats arabes unis</a>, les <a href="https://theconversation.com/retour-des-humains-sur-la-lune-artemis-figure-de-proue-dune-competition-globale-150153">États-Unis</a>, <a href="https://www.lefigaro.fr/societes/l-inde-s-impose-comme-une-grande-nation-spatiale-20221118">l’Inde</a> et le <a href="https://www.lexpress.fr/sciences-sante/sciences/l-exploitation-privee-des-ressources-de-l-espace-autorisee-au-luxembourg_1932344.html">Luxembourg</a> contribuent ainsi à un marché spatial international hautement compétitif avec des cadres légaux flexibles, en plus d’offrir parfois des solutions techniques et commerciales souvent moins chères qu’en France. C’est ce qu’a souligné Stanislas Maximin, PDG de la start-up Latitude lors des Assises du <em>New Space</em> à Paris, le 7 juillet 2022 à propos de la loi LOS :</p>
<blockquote>
<p>« Le problème c’est qu’on est un tout petit pays. Il y a aussi les États-Unis, la Chine, l’Allemagne… Que toute l’Europe légifère ? Pourquoi pas : ça ferait plus ou moins entre 20 et 30 % de l’économie spatiale mondiale. La France seule ? Je le vois surtout comme un risque ».</p>
</blockquote>
<p>Dans le contexte international hautement concurrentiel du <em>New Space</em>, les résultats de nos <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/radm.12547">travaux de recherche</a> indiquent que multiplier des critères socio-environnementaux sans accompagnement dédié spécialisé sur le sujet semble aller à l’encontre du développement de l’entrepreneuriat spatial. Cela peut réduire la compétitivité des nouveaux entrants, et plus particulièrement des start-up.</p>
<p>Cela n’implique pas que ces critères de soutenabilité doivent être absents du cahier des charges des appels à projets ou des normes juridiques en vigueur. Néanmoins, nous pensons qu’il est plus pertinent de les introduire de les adapter à la maturité des entreprises qui ne sont pas toutes en mesure de répondre aux mêmes contraintes. Plusieurs start-up ont pu nous l’indiquer, comme ce dirigeant :</p>
<blockquote>
<p>« Aujourd’hui, on ne va pas se mentir, on essaie d’abord de développer un produit. Quand on en fera 5 000 par an, on lancera plus sérieusement la réflexion sur ces sujets qui sont intéressants, mais il faudra que cela intervienne au bon moment ».</p>
</blockquote>
<p>Nous avons également remarqué dans nos recherches qu’il existe un fossé entre les attentes institutionnelles envers les start-up et les moyens à disposition pour accompagner ces jeunes pousses vers un développement soutenable. L’accompagnement entrepreneurial des nouveaux entrants en matière de soutenabilité demeure marginal et ne prépare pas suffisamment ces derniers à répondre aux contrats et appels à projets en matière d’impacts socio-environnementaux ainsi qu’à leur ouverture à de nouveaux marchés. Renforcer cet accompagnement permettrait de développer des activités spatiales plus compétitives et plus soutenables, sans pour autant réduire l’attractivité des territoires et des organisations orchestrant ces activités.</p>
<hr>
<p><em>La Chaire academico-industrielle Sirius, portée par Airbus Defence and Space, le Centre national d’études spatiales (CNES), Thales Alenia Space ainsi que par TBS Education et l’Université Toulouse 1 Capitole s’attache dans ses <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/radm.12547">travaux</a> à analyser les aspects légaux et managériaux du « New Space »</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/206014/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Aveline Cloitre a reçu des financements de la Chaire SIRIUS portée par Airbus Defence and Space, le Centre national d’études spatiales (CNES), Thales Alenia Space ainsi que par TBS Education et l’Université Toulouse 1 Capitole</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Victor Dos Santos Paulino a reçu des financements de la Chaire SIRIUS portée par Airbus Defence and Space, le Centre national d’études spatiales (CNES), Thales Alenia Space ainsi que par TBS Education et l’Université Toulouse 1 Capitole</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Christina Theodoraki ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le secteur spatial a connu un vaste bouleversement depuis le début des années 2000 avec l’arrivée massive d’acteurs privés. Comment organiser ce marché pour éviter les externalités négatives ?Aveline Cloitre, PhD student, space entrepreneurship, TBS EducationChristina Theodoraki, Professeur Associé en Entrepreneuriat et Stratégie, TBS EducationVictor Dos Santos Paulino, Professeur associé en management de l'innovation et stratégie, Chaire Sirius, TBS EducationLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2066412023-06-15T07:09:47Z2023-06-15T07:09:47ZL'économie circulaire stagne. Et si le modèle coopératif servait d'inspiration ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/531964/original/file-20230614-23-xr3cbp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=23%2C15%2C5148%2C3039&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Malgré le battage médiatique autour de l’économie circulaire, les taux de circularité dans le monde sont inférieurs à 8%. Et la tendance est à la baisse. Et si le mouvement coopératif pouvait servir de déclencheur? </span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Il n’y aura pas de durabilité sans faire de changements dans l’économie. </p>
<p>Voilà pourquoi l’économie circulaire est devenue cruciale, traduisant les objectifs de durabilité pour les entreprises : repenser et réduire la production, réutiliser plus fréquemment les produits, les réparer, recycler, et transformer les déchets. Pourtant, malgré le battage médiatique autour de l’économie circulaire, les taux de circularité dans le monde sont inférieurs à 8 %. <a href="https://www.circularity-gap.world/2023">Et la tendance est à la baisse</a>.</p>
<p>Alors que les stratégies circulaires sont souvent associées à l’innovation, à l’optimisation des processus et à l’efficacité, on peut se demander si on devrait procéder différemment. Et si l’élément manquant pour la transformation était une organisation plus démocratique de l’économie ?</p>
<p>En tant que chercheur à l’intersection de la durabilité et de la gestion, je m’intéresse particulièrement à la relation entre les questions environnementales et sociales. Non seulement l’économie circulaire, mais aussi la société circulaire. </p>
<h2>L’approche réformiste du mouvement coopératif</h2>
<p>Les coopératives sont des acteurs économiques qui se distinguent par le principe « une personne, une voix ». Ce n’est plus la propriété du capital qui est déterminante dans les décisions, mais bien les membres. </p>
<p>Le 1<sup>er</sup> juillet, le mouvement célèbre la Journée internationale des coopératives, avec pour thème leur rôle de <a href="https://www.coopsday.coop">« partenaires pour un développement durable accéléré »</a>. </p>
<p>Quel est donc le rôle du modèle coopératif pour la durabilité et la circularité ?</p>
<p>Le mouvement coopératif peut être placé dans une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0921344920302354">approche réformiste de l’économie circulaire</a>. Les coopératives ont tendance à opérer dans un marché basé sur l’échange, tout en exigeant que les acteurs du marché s’organisent démocratiquement. Dans une coopérative de travail, les travailleurs sont les propriétaires de l’entreprise, dans une coopérative de consommateurs, ce sont les consommateurs, etc. </p>
<p>Par conséquent, nous pouvons nous attendre à ce que les coopératives poussent les processus de démocratisation également dans les économies durables et circulaires. Cela mérite d’être souligné, car les références à la démocratie sont généralement absentes des définitions de l’économie circulaire. Cette démocratie se décline en de nombreuses variantes, mais au cœur de celle-ci se trouve l’échange d’arguments dans le débat public. </p>
<p>Voici donc <a href="https://www.researchgate.net/publication/371303389_Embedding_Circularity_Theorizing_the_Social_Economy_its_Potential_and_its_Challenges">quatre arguments</a> — abrégés sous l’acronyme <strong>M-O-T-S</strong> coop — que le modèle coopératif offre pour une transition vers une économie circulaire démocratique et durable :</p>
<p><strong>1) Mutualisation des ressources</strong></p>
<p>Une motivation économique bien connue pour la création d’une coopérative est la mutualisation des ressources en réponse à un besoin partagé. </p>
<p>Historiquement, le mouvement coopératif est né lorsque des employés et des familles menacés par les dynamiques du capitalisme du XIX<sup>e</sup> siècle ont <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89quitables_Pionniers">uni leurs forces pour acheter de la nourriture qu’ils n’auraient pas pu s’offrir individuellement</a>. Au XXI<sup>e</sup> siècle, on a vu émerger le phénomène des <a href="https://www.elgaronline.com/display/edcoll/9781788119955/9781788119955.00012.xml">« recuperados »</a>, des travailleurs et communautés qui convertissent des entreprises privées que les propriétaires ne jugent plus viables. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/531963/original/file-20230614-6597-q5wc7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/531963/original/file-20230614-6597-q5wc7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/531963/original/file-20230614-6597-q5wc7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/531963/original/file-20230614-6597-q5wc7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/531963/original/file-20230614-6597-q5wc7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/531963/original/file-20230614-6597-q5wc7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/531963/original/file-20230614-6597-q5wc7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Contenant réutilisable de la coopérative Retournzy pour les commandes de nourriture pour apporter dans des restaurants à Montréal.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Retournzy)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette motivation socio-économique pour le partage des ressources place la coopérative pleinement, et « avant la lettre », dans celui exigé par l’économie circulaire. Il n’est donc pas surprenant que la <a href="https://www.mdpi.com/2071-1050/15/3/2530">mutualisation s’avère être un modèle d’entreprise circulaire clé aux yeux des coopératives</a>. </p>
<p><a href="https://tiess.ca/economie-circulaire/">Un projet du TIESS</a> a établi huit modèles d’affaires des organisations de l’économie sociale dans l’économie circulaire. Par exemple, en réponse aux déchets plastiques produits par les commandes à emporter pendant la pandémie, la <a href="https://retournzy.ca">coopérative Retournzy</a>, fondée à Montréal, fournit un service qui permet aux restaurants et à leurs clients de commander des plats à emporter en utilisant des contenants réutilisables. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/530168/original/file-20230605-15-pu6mfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/530168/original/file-20230605-15-pu6mfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=446&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/530168/original/file-20230605-15-pu6mfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=446&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/530168/original/file-20230605-15-pu6mfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=446&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/530168/original/file-20230605-15-pu6mfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=560&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/530168/original/file-20230605-15-pu6mfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=560&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/530168/original/file-20230605-15-pu6mfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=560&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Stratégies d’économie circulaire et modèles d’affaires.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ziegler et al. 2023</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p><strong>2) Organisation démocratique</strong></p>
<p>Il est important que le partage des ressources se fasse entre personnes ayant un statut égal. </p>
<p>Ainsi, le modèle coop introduit un principe démocratique au sein de l’économie. Ce principe crée un véritable levier pour les consommateurs et les travailleurs puisque ces derniers ont le droit de décider des objectifs et des stratégies de gouvernance. Une enquête menée auprès des fédérations des coopératives du Québec montre qu’elles perçoivent la <a href="https://www.mdpi.com/2071-1050/15/3/2530#B30-sustainability-15-02530">volonté de leurs membres comme le principal levier de la circularité et de la durabilité</a>.</p>
<p><strong>3) Technologie rééquilibrée par rapport à la demande</strong> </p>
<p>Le passage à une économie circulaire est aussi un défi technique. </p>
<p>Cependant, l’accent est généralement mis sur l’offre : l’investissement dans des stratégies « high-tech » dans l’espoir qu’elles créeront les solutions techniques qui favoriseront la demande. </p>
<p>Le modèle coop pousse à un choix et à une utilisation de la technologie qui donnent la priorité aux membres plutôt qu’au capital. Par exemple, la <a href="https://altecoop.ca">coopérative de travail ALTE</a> regroupe des ingénieurs qui, inspirés par le mouvement « low-tech », veulent relocaliser l’économie et favoriser l’autonomie alimentaire et énergétique. Cette perspective renforce la première stratégie circulaire, trop souvent oubliée, qui consiste à repenser la production et la consommation.</p>
<p><strong>4) Sociétés régionales et circulaires</strong></p>
<p>Les coopératives sont des petites et moyennes entreprises (<a href="https://www.monitor.coop/">bien qu’il existe également de grandes coopératives</a>, et même des institutions bancaires). Elles sont ancrées dans leur économie régionale et, comme le travail est beaucoup moins flexible que le capital, elles sont là pour rester, avec un sens du lieu et un attachement régional.</p>
<p>La vision des <a href="https://portailcoop.hec.ca/in/details.xhtml?id=h::9d159d0e-4056-4288-be50-8bf60d5976c8&bookmark=4b7f3605-3991-4ff3-8823-04b1cadde00c&queryid=738a6017-9522-48ba-a026-50f7acd5fda6&posInPage=0">Inuits et les membres des Premières Nations sur la coopération</a> va plus loin vers une réciprocité écologique. Elle considère les animaux, les écosystèmes et la Terre non pas comme des objets, mais plutôt comme des sujets qui partagent les ressources avec nous, et à qui nous devons aussi redonner. La Terre doit être traitée avec respect. </p>
<h2>Favoriser le potentiel des coopératives</h2>
<p>La contribution des coopératives pour la circularité peut paraître exagérée, car toutes ne sont certainement pas vertes ou circulaires. </p>
<p>Cependant, elles fournissent un potentiel structurel qui rend ce modèle très attrayant pour les économies et sociétés circulaires. Pour favoriser ce potentiel, les coopératives peuvent adopter des stratégies explicites de circularité et de durabilité. Elles doivent utiliser leur voix et leur poids pour le déploiement de politiques sociales et environnementales. Et elles devraient déployer leur principe d’intercoopération — la coopération entre les coopératives —, pour créer des économies circulaires justes et intégrées dans les régions.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/206641/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Rafael Ziegler a reçu des financements du SSHRC (Social Sciences and Humanities Research Council), project number 890-2022-0023, partnership “Social Economy embedding circular economy.” </span></em></p>Le Canada est connu pour sa tradition de coopératives. Quels sont leur rôle et leur potentiel dans la transition vers une économie circulaire ?Rafael Ziegler, Professor, Department of Managment, HEC MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2042192023-06-12T18:40:23Z2023-06-12T18:40:23ZGestion des déchets en Inde : les initiatives citoyennes peuvent-elles faire la différence ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/524733/original/file-20230506-21-xcpq9n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C3%2C1278%2C954&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les ordures jetées et laissées dans la rue sont un problème majeur en Inde ; ici à Vellore.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:India_-_Sights_%26_Culture_-_Common_garbage_dump_outside_a_temple_%282566331277%29.jpg">McKay Savage / Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>La gestion des déchets est un problème majeur dans de nombreuses villes à travers le monde, en particulier dans plusieurs <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0959652619321249">pays en voie de développement</a>, dont l’Inde. À Bengaluru (plus communément connu sous le nom de Bangalore), le collectif citoyen <a href="https://www.theuglyindian.com/">« The Ugly Indian »</a> s’est emparé du problème et nettoie les rues et les trottoirs de la ville.</p>
<p>En Inde, l’intensité de problème de la gestion des déchets est particulièrement évidente, surtout dans les grandes villes où la population est confrontée à des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/taja.12380">tas d’ordures</a> sur les trottoirs ou au coin des rues. En cause, les habitants qui y déposent leurs déchets, ainsi que le <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0956053X08000901">manque de personnel et de ressources des systèmes de collecte</a>.</p>
<p>Ces amoncellements d’ordures dégradent et polluent les environs, une situation parfois aggravée par <a href="https://edition.cnn.com/2022/12/10/india/india-bhalswa-landfill-pollution-climate-intl-hnk-dst/index.html">l’incendie des déchets</a>. Ils attirent également des animaux errants tels que des vaches, des rats et des chiens ; ce qui entraîne parfois des <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11252-021-01097-4">rencontres désagréables</a>.</p>
<p>Au fil du temps, de nombreux <a href="https://theconversation.com/inde-propre-un-pari-sanitaire-a-haut-risque-politique-57461">programmes d’assainissement</a> – à l’image de la campagne <a href="https://swachhbharat.mygov.in/">« Inde propre »</a> – gérés par le gouvernement ont essayé d’améliorer les infrastructures sanitaires et de sensibiliser le public à l’importance d’un environnement propre.</p>
<p>Toutefois, beaucoup de ces initiatives n’ont pas atteint leurs objectifs en raison d’une mauvaise <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/0956247814567058">mise en œuvre des programmes</a>, d’un suivi inadéquat, d’une incapacité à garantir des <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8552289">changements de comportement</a> et de <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/25741292.2022.2069650">défauts de conception</a> qui n’abordent pas les problèmes sous-jacents, tels que le sans-abrisme, la pauvreté, les migrations urbaines massives et les inégalités sociales.</p>
<h2>« The Ugly Indian », une initiative citoyenne de nettoyage</h2>
<p>Frustrés par le manque de résultats des actions gouvernementales, certains <a href="https://theconversation.com/lutter-contre-la-corruption-grace-a-la-societe-civile-apprendre-du-cas-indien-67496">groupes de citoyens</a> se sont engagés dans des solutions participatives pour tenter de résoudre ce problème.</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1177/00420980221084246">Une étude que j’ai réalisée</a> présente une telle initiative dans la grande ville de Bengaluru. Conduite par des bénévoles, qui se font appeler avec un sens certain de l’autodérision <a href="https://www.theuglyindian.com/">« TUI » (The Ugly Indian)</a>, a pour objectif d’éliminer et d’empêcher les ordures des rues et des trottoirs de cette ville indienne.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/k98lqkNUhPM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Un exemple de rénovation menée par le collectif TUI. YouTube, The Ugly Indians.</span></figcaption>
</figure>
<p>Pour cela, les bénévoles ont créé des événements appelés « spot-fix » ou « remis en beauté » pour améliorer l’apparence des lieux. Les bénévoles sont recrutés via les réseaux sociaux (notamment Facebook et Twitter). La plupart d’entre eux ne sont pas réguliers et ne participent qu’une ou deux fois aux spot-fixes qui ont lieu à côté de chez eux.</p>
<p>Concrètement, ils ramassent les ordures, nettoient les rues, peignent les murs et parfois même installent des plantes en pot. Immédiatement après les événements, des <a href="https://www.facebook.com/theugl.yindian/photos/pcb.5941497155909490/5941496792576193/">photos frappantes « avant-après »</a> sont publiées sur les réseaux sociaux. Les lieux sont ensuite entretenus par des bénévoles locaux, qui veillent à ce que les endroits restent propres et à ce que toute dégradation supplémentaire soit évitée.</p>
<p>[<em>Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Les spot-fixes ponctuels ne sont ainsi considérés comme des succès que s’ils restent propres pendant <a href="https://theuglyindian.com/about_us.html">au moins 90 jours</a>. Les commentaires sur la page Facebook indiquent parfois que certains endroits nettoyés se détériorent et que certains sont particulièrement difficiles à améliorer.</p>
<p>Ces discussions indiquent cependant que la plupart de ces endroits restent propres. En 2018, il était ainsi estimé que 400 spot-fixes avaient été effectués en trois ans et qu’environ <a href="http://timesofindia.indiatimes.com/articleshow/64278967.cms">95 % d’entre eux sont restés propres</a>.</p>
<p>Ces spot-fixes sont effectués dans différentes localités de la région municipale de Bengaluru. La fréquence peut varier, la page Facebook du groupe annonçant en moyenne deux ou trois événements par semaine. Parfois, des campagnes intensives peuvent viser à atteindre des <a href="https://bangaloremirror.indiatimes.com/bangalore/civic/a-100-make-overs-in-just-over-a-month/articleshow/81859375.cms">chiffres plus élevés</a> sur de courtes périodes.</p>
<h2>Entre autonomie et normes implicites</h2>
<p>Ces événements bénéficient une organisation très sommaire, et les participants sont libres de faire ce qu’ils veulent avec très peu des contraintes. Mélange d’improvisation et de préparation en amont, il n’y a pas d’organisme central qui gère ces initiatives. Ces événements sont ainsi caractérisés par un sens de l’égalitarisme où la hiérarchie est largement absente.</p>
<p>Néanmoins, il existe des normes communes, qui garantissent la coordination de l’action des participants. Ils mettent par exemple souvent l’accent sur le slogan « Taisez-vous, on a du boulot », de telle sorte que les personnes qui s’engagent dans des discussions inutiles sont ignorées pour se remettre rapidement au travail.</p>
<p>Il existe également des motifs communs entre les lieux, qui donnent une certaine uniformité aux actions. Par exemple, de nombreux spots présentent des couleurs comme le rouge brique et le blanc. Une autre couleur dominante est le bleu. Nous pouvons également observer la dominance de ces couleurs et des motifs géométriques similaires dans les spots nettoyés de toute la ville.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/hveoFIRlNm0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Un exemple de rénovation menée par le collectif TUI. YouTube, The Ugly Indians.</span></figcaption>
</figure>
<p>Ces normes ont évolué de multiples façons. Tout d’abord, beaucoup des mêmes participants se réunissent pour des spot-fixes dans différentes localités et reprennent des éléments similaires. Ensuite, les réseaux sociaux (qui servent de principales plates-formes de communication) présentent le travail et les résultats des événements précédents, ce qui permet de guider les attentes des participants potentiels. Enfin, les outils et les ressources comme les balais, les pinceaux, les peintures, etc. sont réutilisés d’un spot-fix à l’autre.</p>
<h2>L’inclusivité grâce à l’anonymat</h2>
<p>Les participants ont également une aversion pour l’autopromotion individuelle dans le cadre de cet effort. Bien qu’ils encouragent les <a href="https://www.newindianexpress.com/cities/bengaluru/2022/feb/12/ugly-indian-takes-up-500-km-mission-for-bengaluru-roads-2418422.html">médias à mettre en lumière leur travail</a>, permettant d’attirer davantage de participants et de toucher différents quartiers de la ville, ils préfèrent rester des <a href="https://swachhindia.ndtv.com/theuglyindian-group-determined-to-beautify-urban-spaces-26370/">citoyens anonymes</a>.</p>
<p>L’identité personnelle ou l’origine des participants n’est pas précisée dans les spots-fixes. De même, l’appartenance à des groupes plus importants tels que les partis politiques ou les groupes religieux n’est pas mise en évidence. Cela contribue à rendre ces événements ouverts à la participation d’une manière inclusive.</p>
<h2>Un travail en coopération avec d’autres acteurs</h2>
<p>En outre, le travail est effectué sans blâmer qui que ce soit, en <a href="https://bangaloremirror.indiatimes.com/bangalore/civic/palace-road-2-0-exudes-karnataka-pride/articleshow/95285893.cms">collaboration avec les systèmes existants</a>. Le personnel municipal responsable de la collecte des déchets dans la région est notamment consulté en amont des spot-fixes. Ils participent à l’événement et fournissent des ressources, notamment des véhicules utilisés pour l’enlèvement des ordures accumulées. Ainsi, les participants collaborent avec la collectivité et s’assurent de leur soutien.</p>
<p>Il existe également une collaboration avec des organisations locales telles que les sociétés coopératives de logement, les entreprises qui ont des bureaux à proximité et les bases des forces armées qui ont des résidences dans les environs. Toutefois, le matériel publicitaire de ces organisations n’est pas affiché sur le site de l’événement.</p>
<p>Grâce à ces différentes caractéristiques (participation ouverte, égalitarisme, autonomie, normes implicites, anonymat et coopération avec d’autres acteurs), les résultats sont satisfaisants, même avec peu de moyens et en peu de temps. Ces solutions ponctuelles, qui ont survécu à Bengaluru pendant plus de dix ans, inspirent d’ailleurs des <a href="https://www.thehindu.com/news/cities/chennai/the-ugly-indian-makes-debut-in-chennai/article5953980.ece">efforts similaires</a> ailleurs dans le pays. C’est pourquoi les commentaires sur les réseaux sociaux décrivent TUI comme une « idée » qui se répand, plutôt que comme une organisation.</p>
<p>Il est vrai que cette solution n’aborde pas le problème du traitement des ordures et ne résout pas le problème à la base. Cependant, les différences visibles dans la rue à la suite des réparations ponctuelles ont sensibilisé la population à la propreté des lieux publics.</p>
<p>Cela montre que les efforts communautaires avec très peu de ressources ou avec une organisation structurelle minimale peuvent parfois être efficaces, durables, et avoir un impact important.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204219/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jacob Vakkayil ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les amoncellements sauvages d’ordures en ville constituent un problème majeur en Inde. Pour tenter de faire bouger les lignes, un collectif citoyen s’est emparé du problème et nettoie les rues.Jacob Vakkayil, Professor in Management, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2054192023-06-08T10:33:48Z2023-06-08T10:33:48ZMassification des déchets : circulez, il n’y a rien à voir ?<p>En mars 2023, durant le mouvement social contre la réforme des retraites, la <a href="https://theconversation.com/travailler-plus-longtemps-mais-dans-quel-etat-le-cas-des-eboueurs-198888">grève des éboueurs de Paris</a> et des employés de trois usines d’incinération environnantes a entraîné l’arrêt partiel de la collecte des ordures ménagères.</p>
<p>Malgré la réquisition d’éboueurs du secteur privé, jusqu’à 10 000 tonnes de déchets se sont progressivement amoncelées dans et autour des <a href="https://theconversation.com/poubelles-sans-frontieres-105721">poubelles</a>, usuellement collectées quotidiennement dans les rues de la capitale.</p>
<p>Face à cette situation critique, les réactions politiques se sont rapidement multipliées. Clément Beaune, ministre des Transports, parle de <a href="https://www.ladepeche.fr/2023/03/15/greve-des-eboueurs-a-paris-gerald-darmanin-demande-que-la-mairie-requisitionne-du-personnel-11062850.php">question de « santé publique et salubrité publique</a> », et <a href="https://www.bfmtv.com/paris/les-parisiens-sont-martyrises-rachida-dati-fustige-la-gestion-de-la-greve-des-eboueurs-par-anne-hidalgo_AN-202303140712.html">Rachida Dati</a>, maire du 7<sup>e</sup> arrondissement, d’ajouter qu’« aujourd’hui, nous avons la possibilité de dire stop à cette insalubrité. Cela devient un problème de santé publique et de sécurité ».</p>
<p>L’argument avancé est celui de l’hygiène et des risques sanitaires que <a href="https://theconversation.com/dechets-dans-les-rues-de-paris-pour-lavenir-prise-de-conscience-choc-ou-developpement-de-mauvaises-habitudes-202454">ces montagnes de détritus</a> font courir aux Parisiens et Parisiennes. Sans rejeter celui-ci, nous pouvons tout de même en questionner l’unicité : l’absence de ramassage des ordures pose-t-elle seulement un problème d’hygiène et de salubrité publique ?</p>
<p>La sidération au sein de la population pourrait se comprendre à l’aune de deux éclairages supplémentaires. L’arrêt du ramassage des déchets vient, tout d’abord, briser la trame quotidienne et banale, bien que codifiée et hygiéniste, de leur traitement, dont les ménages sont la clé de voûte. La présence des rejets dans l’espace public dérange ensuite, car ils sont le révélateur d’une intimité et de choix de vie que nous peinons à rendre plus écologiques.</p>
<h2>Du déchet privé aux déchets publics</h2>
<p>Plus qu’une salubrité publique dégradée, cet état de fait exceptionnel rend finalement saillante une propriété insoupçonnée du déchet comme marqueur de la frontière poreuse entre espace de vie privé et espace public.</p>
<p>La collecte et le traitement des déchets ménagers suivent une partition aussi minutieuse qu’invisible. De nos foyers jusqu’aux bacs d’ordures, de la mise au rebut au ramassage des poubelles, chaque étape est concrète, mais discrète.</p>
<p>Cette organisation sociale et technique est l’héritage de la doctrine hygiéniste ayant émergé au XIX<sup>e</sup> siècle, dont l’acmé est bien connue : l’uniformisation, à Paris tout d’abord, des récipients à déchets et de leur collecte en 1883, par un <a href="https://www.herodote.net/almanach-ID-445.php#:%7E:text=Le%2024%20novembre%201883%2C%20sous,l%E2%80%99%C3%A9vacuation%20des%20ordures%20m%C3%A9nag%C3%A8res.">arrêté du préfet Eugène Poubelle</a>. Celui-ci sonne la fin de la présence continue des résidus dans les rues, et leur confère leur symbolique négative caractéristique d’objets et matières devant être à tout prix dissimulés.</p>
<h2>La fin des chiffonniers</h2>
<p>Cet arrêté possède une autre implication remarquable : il rend obsolète le travail de récupération des chiffonniers. Ceux-ci se chargeaient de trier et manipuler les restes, afin de les valoriser par la revente et le troc, participant de fait à leur circulation et élimination. Ce métier d’antan s’est transformé en tâches banales, devenues l’apanage des ménages et ne cessant d’évoluer depuis la mise en place de la collecte sélective des emballages, papiers ou contenants en verre depuis les années 1990.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="un éboueur derrière son camion dans les rues de paris" src="https://images.theconversation.com/files/525356/original/file-20230510-21-1wvk1l.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/525356/original/file-20230510-21-1wvk1l.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/525356/original/file-20230510-21-1wvk1l.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/525356/original/file-20230510-21-1wvk1l.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/525356/original/file-20230510-21-1wvk1l.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/525356/original/file-20230510-21-1wvk1l.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/525356/original/file-20230510-21-1wvk1l.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Camion d’éboueurs dans les rues de Paris.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Collecte_des_d%C3%A9chets,_Paris_-_octobre_2013.JPG">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il convient à présent de connaître précisément les consignes de tri et de catégoriser les rebuts en fonction des critères industriels de valorisation de ces matières. Cette catégorisation mène d’ailleurs à une logique de hiérarchisation de nos objets et matières : de ce qui pourra être gardé, puis recyclé ou détourné à ce qui sera enfoui ou incinéré.</p>
<p>[<em>Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>La massification des ordures sur la voie publique vient donc remettre en cause ces deux éléments constitutifs – hiérarchisation puis invisibilisation – de notre représentation collective de ce dont le déchet est le nom : cartons, plastiques, papiers et autres restes alimentaires s’y mêlent indistinctement et à la vue de tous.</p>
<h2>Reflet de nos choix de vie</h2>
<p>Au-delà de considérations matérielles, nous cherchons aussi à dissimuler nos résidus par pudeur, car ils sont le reflet de notre intimité, comme le dit le célèbre aphorisme : « Montre-moi tes poubelles, je te dirai qui tu es ». Ils révèlent ainsi nos choix de consommation et de vie, alors même que l’heure est à la multiplication des injonctions à modifier nos pratiques quotidiennes et nos habitudes pour les rendre plus écologiques : tout comme l’énergie, l’eau ou encore la mobilité, les déchets n’échappent pas aux appels à la sobriété par l’adoption d’écogestes.</p>
<p>Ayant pour slogan <a href="https://www.zerowastefrance.org/demarche-zero-waste/">« le meilleur déchet, c’est celui qu’on ne produit pas »</a>, le discours <em>Zero Waste</em> est dominant en la matière et le succès des tendances comme l’achat en vrac, le compostage, ou le <em>do it yourself</em> révèle que les individus sont soucieux de réduire leur production de déchets. En outre, le <em>Zero Waste</em> promeut aussi une image positive du déchet, qu’il est souvent possible de détourner ou réemployer plutôt que d’éliminer.</p>
<p>Une pratique typique, selon ces principes, est l’achat de seconde main, qui représente un marché florissant, principalement en zone urbaine et sur les plates-formes en ligne. Il existe même ce que l’on pourrait qualifier d’esthétique du détournement de rebut, dont l’exemple caractéristique est celui des meubles en palettes, jadis considérés comme recours d’ameublement pour les plus nécessiteux et à présent valorisés.</p>
<p>S’il est complexe d’estimer sa propre production de déchets, voir ces quantités de rejets jonchant les rues ainsi que la rapidité de leur entassement vient nous rappeler de manière frappante la conséquence concrète de nos modes de consommation.</p>
<h2>Souillure et désordre</h2>
<p>En définitive, les déchets sont donc bien plus que ce que l’on trouve sale ou inutile. Ils sont un reflet de notre identité, à l’échelle individuelle, mais surtout de notre organisation sociale, spatiale et politique. Ils sont symboliquement le marqueur de frontière entre le visible et l’invisible, le privé et le public, l’ordre et la contestation. C’est pourquoi ils sont d’ordinaire méticuleusement relégués en marge de nos espaces de vie.</p>
<p>Or lorsqu’ils restent, y compris momentanément, dans ces espaces et ne circulent plus, ce sont ces frontières et dans le même temps l’intégralité de l’organisation sociale sur lesquelles elle repose qui sont remises en cause.</p>
<p>Comme nous l’expliquait déjà <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/de_la_souillure-9782707148117">l’anthropologue Mary Douglas</a> dans les années 1960, la souillure est une catégorie œcuménique représentant le désordre, sans laquelle il ne pourrait y avoir d’ordre. Les évènements du mois de mars 2023 nous démontrent que son analyse est toujours d’actualité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205419/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Maxence Mautray mène une thèse dans le cadre d’un contrat Cifre financé par le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et par le SMICVAL (Syndicat mixte intercommunal de collecte et de valorisation) du Libournais et de la Haute-Gironde. </span></em></p>La présence des déchets dans l’espace public dérange, en révélant notre intimité et nos choix de vie que nous peinons à rendre plus écologiques.Maxence Mautray, Doctorant en sociologie de l’environnement, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2068832023-06-05T15:45:57Z2023-06-05T15:45:57ZSe convertir à l’économie circulaire : les entreprises entre recyclabilité et quête de rentabilité<p>Savourer son café du matin, ce peut être pour son goût, ce peut être pour l’énergie qu’il apporte, ce peut être aussi car on sait que l’emballage et les grains moulus ne deviendront pas des <a href="https://theconversation.com/topics/dechets-23906">déchets</a>. La capsule en aluminium sera <a href="https://theconversation.com/topics/recyclage-21060">recyclée</a>, peut-être pour accueillir un prochain café, et le marc sera transformé en biocarburant. Accepter de payer un peu plus pour ce café et en faire de même pour d’autres produits s’ils s’inscrivent dans l’<a href="https://theconversation.com/topics/economie-circulaire-26694">économie circulaire</a>, beaucoup de <a href="https://theconversation.com/topics/consommateurs-33275">consommateurs</a> y semblent aujourd’hui prêts.</p>
<p>Les déchets sont à l’origine de la plupart des problèmes environnementaux, réchauffement climatique, pollution et perte de la biodiversité et de plus en plus de personnes en sont conscientes. Nombreux tentent alors de se passer des produits dont le modèle économique se base sur le schéma « extraire, fabriquer, consommer, jeter ».</p>
<p>Néanmoins selon le <a href="https://www.circularity-gap.world/2023">rapport Global Circularity Gap 2023</a>, seuls 7,2 % des matériaux sont réinjectés dans l’économie à la fin de leur cycle de vie. Cela signifie que plus de 90 % des matériaux finissent par devenir des déchets et ne peuvent plus être réutilisés. Nous sommes encore loin de la circularité.</p>
<p>Au sein d’un <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=4314781">travail de recherche</a> récent, mené avec Stefan Buehler, de l’université de Saint-Gall, et Rachel Chen de l’université de Californie à Davis, nous avons donc tenté de comprendre les rouages des modèles économiques circulaires afin d’élaborer des stratégies pour renforcer la circularité. Il s’agissait notamment d’identifier les conditions qui rendent la transition d’un modèle économique linéaire à un modèle circulaire à la fois rentable et socialement souhaitable.</p>
<h2>Boucler la boucle</h2>
<p>Comment les entreprises peuvent-elles tirer profit de l’économie circulaire ? Contrairement au modèle économique linéaire, qui s’arrête au point de vente, le modèle circulaire s’appuie sur 3 piliers : réduire, c’est-à-dire optimiser les produits en vue de leur recyclage en limitant les déchets ; réutiliser, c’est-à-dire récupérer les produits en fin de vie grâce à un processus de logistique inverse ; recycler, c’est-à-dire transformer les produits récupérés en matières premières.</p>
<p>Pour passer à l’économie circulaire, une entreprise doit donc revoir sa façon de concevoir ses produits et mettre en place une chaîne logistique inverse pour récupérer les produits en fin de vie. Pour que la boucle soit bouclée, il faut aussi que les consommateurs acceptent de restituer les produits pour qu’ils soient recyclés. La clé de l’économie circulaire réside en effet dans l’interaction entre les décisions des entreprises en matière de conception des produits, et celles des consommateurs pour leur mise au rebut en vue de leur recyclage.</p>
<hr>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Chaque lundi, que vous soyez dirigeants en quête de stratégies ou salariés qui s’interrogent sur les choix de leur hiérarchie, recevez dans votre boîte mail les clés de la recherche pour la vie professionnelle et les conseils de nos experts dans notre newsletter thématique « Entreprise(s) ».</em></p>
<p><a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-entreprise-s-153/"><em>Abonnez-vous dès aujourd’hui</em></a></p>
<hr>
<p>L’approche circulaire offre aussi aux entreprises une nouvelle source de revenus potentielle. Récupérer et recycler les ressources contenues dans les produits en fin de vie réduit le coût unitaire, celui de l’aluminium de ma capsule de café par exemple. En outre, cette pratique peut justifier l’application d’un tarif supérieur, la fameuse « prime verte », pour les produits plus faciles à recycler.</p>
<p>Comment alors trouver un équilibre entre la recyclabilité et prix plus élevé ? Nous avons intégré cet aspect aux décisions d’achat des consommateurs. Notre modèle intègre des questions telles que la fin de vie d’un produit, la facilité et le coût de recyclage ainsi que le sentiment de culpabilité associé au non-recyclage. Nous avons également tenu compte de l’impact de la réutilisation des ressources contenues dans les produits sur leur conception, sur les bénéfices et sur l’empreinte écologique globale de l’entreprise.</p>
<h2>Convaincre les consommateurs</h2>
<p>Il est étonnant de constater que le passage à l’économie circulaire ne réduit pas toujours l’empreinte écologique globale de l’entreprise. Cela s’explique par un <a href="https://theconversation.com/quel-role-joue-le-marketing-dans-le-changement-climatique-144690">effet de rebond</a> : même si l’empreinte de chaque café est plus faible dans le modèle circulaire, la baisse des déchets est parfois plus que compensée par l’augmentation des ventes des produits plus écologiques, si bien que l’empreinte globale du producteur de café est supérieure.</p>
<p>Notre analyse montre de plus qu’il est difficile pour une entreprise de parvenir à une circularité totale. Je prépare mon café avec une capsule qui a été spécialement conçue pour être recyclée, et je compte faire en sorte qu’elle le soit. Mais pour que le produit soit véritablement circulaire, il faut que tous les consommateurs fassent de même.</p>
<p>Pour que la circularité soit intéressante, les consommateurs doivent être convaincus de l’importance du recyclage et de la réutilisation des ressources contenues dans les produits en fin de vie, et la logistique inverse ne doit pas être trop onéreuse. On constate que plus le recyclage est facile, plus les consommateurs se prêtent au jeu.</p>
<h2>Rester rentable</h2>
<p>Le système de consigne (l’entreprise rend une partie du prix d’achat quand le lecteur ramène le produit à recycler) semble ainsi augmenter la recyclabilité mais pas nécessairement les bénéfices : le nombre de consommateurs supplémentaires qui recyclent le produit n’est pas toujours suffisant pour compenser le coût de la consigne. Le constat est le même avec le rachat, c’est-à-dire lorsque l’entreprise rachète les produits en fin de vie à ses clients pour les réutiliser et les recycler.</p>
<p>Il semble, pour l’entreprise, qu’il vaille mieux, en général rester propriétaire, en louant le produit à court ou à long terme. Ainsi, tous les produits sont récupérés, et la rentabilité et la recyclabilité s’en trouvent accrues.</p>
<p>Il y a par ailleurs de fortes chances que le modèle économique circulaire s’avère plus rentable à l’avenir. Les politiques gouvernementales vont dans le sens de la réduction des déchets, ce qui rend les entreprises moins enclines à proposer des produits non recyclables. Qui plus est, avec l’augmentation du prix des matières premières, la récupération et le recyclage des ressources contenues dans les produits en fin de vie deviennent de plus en plus intéressants. Grâce au progrès technologique, enfin, le coût de la mise en place d’une logistique inverse devrait baisser, tout comme le coût de fabrication de produits recyclables.</p>
<p>Cette étude invite ainsi à mettre en œuvre des politiques qui pénalisent financièrement les entreprises linéaires, par exemple en taxant les déchets. D’autres mesures, comme une meilleure sensibilisation des consommateurs ou une diminution du coût de la logistique inverse, en facilitant l’accès pour les consommateurs ou en mettant en place un service de collecte, aideront à la fois les entreprises et les consommateurs à réduire leurs déchets et leur consommation de ressources.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/206883/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Daniel Halbheer ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour avoir un modèle circulaire, les entreprises doivent convaincre les consommateurs de rapporter leur produit après usage pour les recycler, ce qui ne s’avère pas toujours assez rentable.Daniel Halbheer, Professeur Associé, HEC Paris Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2024542023-03-28T19:32:00Z2023-03-28T19:32:00ZDéchets dans les rues de Paris : pour l’avenir, prise de conscience choc ou développement de mauvaises habitudes ?<p>De <a href="https://www.bfmtv.com/marseille/replay-emissions/le-12-17/marseille-la-collecte-des-dechets-perturbee-depuis-lundi-matin_VN-202303200382.html">Marseille</a> au Sud, à <a href="https://www.lavoixdunord.fr/1305225/article/2023-03-20/blocage-de-la-collecte-arques-dix-tonnes-de-dechets-ne-seront-pas-ramassees-ce">Arques</a> dans le Nord, de <a href="https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/poubelles-a-nantes-cest-buffet-a-volonte-pour-les-rats-a8a44c1c-c33d-11ed-9554-cf54dc89cc00">Nantes</a> à l’Ouest, à <a href="https://www.estrepublicain.fr/societe/2023/03/10/la-collecte-des-dechets-reprend-du-service-ce-lundi">Montbéliard</a> à l’Est, de nombreux déchets se sont accumulés, et par endroit s’accumulent encore, sur les trottoirs. À Paris, la barre des <a href="https://www.bfmtv.com/paris/greve-des-eboueurs-a-paris-la-barre-des-10-000-tonnes-de-dechets-non-ramasses-atteinte_AD-202303170506.html">10 000 tonnes d’ordures</a> jonchant les rues a été franchie vendredi 17 mars. </p>
<p>Ce chiffre, avec les réquisitions de personnel, est redescendu dimanche 26 <a href="https://www.lefigaro.fr/social/greve-des-eboueurs-a-paris-baisse-sensible-du-volume-de-dechets-non-ramasses-20230326">sous les 8 000 tonnes</a> mais la baisse pourrait n'être que temporaire avec un mouvement de grève des éboueurs qui pourrait s'étendre aux prestataires privés. Certains habitants, dans le 16<sup>e</sup> arrondissement notamment, ont aussi décidé de se <a href="https://www.huffingtonpost.fr/france/article/greve-des-eboueurs-a-paris-ces-habitants-se-cotisent-pour-le-ramassage-des-ordures_215540.html">cotiser</a> pour assurer un ramassage par des prestataires privés. Les déchets servent aussi parfois de <a href="https://actu.fr/ile-de-france/paris_75056/manifestations-a-paris-un-feu-de-poubelles-se-propage-a-un-immeuble_58297505.html">combustibles</a> à des manifestants.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/517855/original/file-20230328-24-k12nr.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/517855/original/file-20230328-24-k12nr.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/517855/original/file-20230328-24-k12nr.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/517855/original/file-20230328-24-k12nr.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/517855/original/file-20230328-24-k12nr.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/517855/original/file-20230328-24-k12nr.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/517855/original/file-20230328-24-k12nr.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/517855/original/file-20230328-24-k12nr.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les pompiers ont dû intervenir à plusieurs reprises pour des déchets en feu.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Timothée David</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour certains, ce nouveau paysage urbain pourrait aussi faire <a href="https://www.leparisien.fr/environnement/greve-des-eboueurs-dommage-dattendre-un-probleme-pour-prendre-conscience-du-volume-de-nos-dechets-18-03-2023-WDWOFZ6GJZCPDPDDTA72KPU4SA.php?ts=1679326713375">réaliser</a> les volumes importants de déchets que nous produisons, dont nous n’avons pas forcément conscience. En effet, en temps normal, nos poubelles sont vidées régulièrement, ce qui nous empêche de visualiser correctement la quantité produite. À observer, sur les avenues, de nombreux contenants de repas de livraison, d’emballage ou de bouteilles plastiques, Melisandre Seyzériat, coordinatrice générale de l’association <em>Zero Waste Paris</em>, a invité, sur BFM Paris, à assimiler que « ce sont des ordures très facilement <a href="https://www.bfmtv.com/paris/replay-emissions/capitale-2020/greve-des-eboueurs-les-franciliens-ont-ils-trop-de-dechets_VN-202303160783.html">évitables</a> », par exemple, en remplaçant des bouteilles par des gourdes.</p>
<p>Un autre phénomène pourrait cependant jouer en sens contraire. Plutôt que d’être choqués par la quantité d’ordures produites par chacune et chacun, certains individus pourraient s’habituer à leur présence et cela pourrait enclencher un cercle vicieux que la recherche a nommé « broken windows theory ».</p>
<h2>Quelle nouvelle norme ?</h2>
<p>C’est dans une <a href="https://www.theatlantic.com/magazine/archive/1982/03/broken-windows/304465/">tribune</a> de 1982 que le criminologue George L. Kelling et le politologue James Q. Wilson introduisaient aux États-Unis, pour la première fois, ce concept. Il désigne une situation dans laquelle la présence de détériorations dans l’espace public favoriserait les comportements non civiques. Une simple « fenêtre cassée », pour reprendre le nom donné à ce phénomène, ouvrirait la voie à des transgressions plus graves. Plus le sol sera jonché de papiers par exemple, plus les individus auront tendance à <a href="https://psycnet.apa.org/record/1990-30919-001">jeter par terre</a> un prospectus que l’on vient de leur donner.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Ce « broken window theory » a été un des concepts les plus influents pour les politiques des villes. Son interprétation s’est traduite par l’adoption de plusieurs mesures de tolérance zéro, surtout aux États-Unis, avec des <a href="https://www.joelvanderweele.eu/wp-content/uploads/2021/11/BrokenWindows.pdf">effets mitigés</a>. Il constitue pourtant un triple signal : les fenêtres brisées suggèrent à la fois des agissements antisociaux d’une partie des habitants, une indifférence de la part des autres et une absence d’application de la loi.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1637184962053931009"}"></div></p>
<p>Des <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1207/s15327965pli1604_03?journalCode=hpli20">travaux</a> ont étudié ce type de normes, qualifiées de « descriptives » : les individus font ce qu’ils observent que les autres font. Ceci vaut pour tout, des comportements violents aux comportements écoresponsables, par exemple. Lorsque les habitants suivent la norme descriptive, c’est souvent qu’ils ne sont pas sûrs de ce que dit la norme injonctive, ils ne sont pas sûrs de ce qu’il est bien vu de faire. Est-il donc à craindre que cette nouvelle norme, visible, de déchets dans les rues, érode certains acquis citoyens, en produisant des effets indésirables à long terme ? Des dépôts de sacs poubelles dans les rues ou un relâchement du tri peuvent-ils perdurer, même une fois le conflit réglé ?</p>
<p>Un point d’attention que mettent en avant nos <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/kykl.12002">travaux</a> est celui des inégalités, si jamais elles se faisaient ressentir en la matière. Visibles et non résolues, elles sont propices à créer de la violence entre les différentes franges de la société.</p>
<h2>Visualiser l’ampleur de ce que nous jetons</h2>
<p>Il paraît souhaitable, pour l’avenir, que ces semaines au milieu des ordures enclenchent un cycle vertueux. Un projet de recherche, intitulé <a href="https://beaware.inria.fr/">Be-Aware</a> et exposé dans un <a href="https://theconversation.com/546-kilos-de-dechets-dans-votre-salon-et-si-la-realite-augmentee-venait-au-secours-de-lenvironnement-196514">précédent article</a> publié sur The Conversation, cherche, lui, à induire cette prise de conscience via l’usage d’instruments de réalité augmentée. Grâce à ces outils, les individus pourraient visualiser, dans leurs salons, les quelques <a href="https://www.cniid.org/Les-dechets-en-France-quelques-chiffres,151">546 kilos de déchets</a> produits en moyenne chaque année par un habitant français (masse que mesurait l'institut Eurostat en 2019).</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/546-kilos-de-dechets-dans-votre-salon-et-si-la-realite-augmentee-venait-au-secours-de-lenvironnement-196514">546 kilos de déchets dans votre salon : et si la réalité augmentée venait au secours de l’environnement ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Tout comme les ordures qui s’accumulent dans les rues, ces outils nous donneraient à voir une réalité qui nous échappe, lorsque nos poubelles sont vidées régulièrement par les services de ramassage. On peine, de fait, à voir l’ampleur de ce que nous jetons, et les chiffres ne sont pas toujours d’une grande aide. Nos expériences en laboratoire, en cours, tendent à montrer que visualiser le tout dans un <a href="https://hal.science/hal-03907474/">environnement familier</a> pourrait parfois être plus efficace qu’un graphique.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/517154/original/file-20230323-1130-smm40f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/517154/original/file-20230323-1130-smm40f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/517154/original/file-20230323-1130-smm40f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/517154/original/file-20230323-1130-smm40f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/517154/original/file-20230323-1130-smm40f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/517154/original/file-20230323-1130-smm40f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/517154/original/file-20230323-1130-smm40f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/517154/original/file-20230323-1130-smm40f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Un utilisateur consulte, in-situ, la quantité de déchets produits par son restaurant d’entreprise en une semaine.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il y a là une perspective éducative qui nous semble intéressante, et qui permet de réduire une difficulté posée par ce que l’on appelle la <a href="https://psycnet.apa.org/buy/2010-06891-005">« distance psychologique »</a> : même conscients des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1539-6924.2011.01695.x">enjeux environnementaux</a>, les individus n’agissent pas en proportion suffisante, car les conséquences de leurs actions paraissent incertaines, éloignées dans le temps ou dans l’espace. Les rendre visibles « ici » et « maintenant » pourrait encourager l’adoption de comportement vertueux et l’émergence de pressions citoyennes pour la mise en place de politiques pro-environnementales.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/517156/original/file-20230323-16-h1qtjg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/517156/original/file-20230323-16-h1qtjg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/517156/original/file-20230323-16-h1qtjg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/517156/original/file-20230323-16-h1qtjg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/517156/original/file-20230323-16-h1qtjg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/517156/original/file-20230323-16-h1qtjg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/517156/original/file-20230323-16-h1qtjg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/517156/original/file-20230323-16-h1qtjg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Des équations affichées au RER Gare du Nord au moment de la Cop 21.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les images des poubelles resteront-elles imprimées durablement dans l’esprit des Parisiens, plus par exemple que les <a href="https://www.rerb-leblog.fr/un-voyage-sur-le-theme-du-climat/">équations</a> qu’ils pouvaient voir affichées sur les quais du RER Gare-du-Nord pendant la Cop21 ? Ces équations permettaient de calculer l’ampleur du réchauffement climatique, mais étaient-elles vraiment utilisables ? Dans le cadre du projet Be Aware, nous avons conduit des expérimentations pour mesurer l’impact de la précision de l’information et sa crédibilité. Peut-être, tel Saint-Thomas, n’y sommes-nous pas autant sensibles qu’à des images fortes, comme celles des rues de la capitale actuellement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/202454/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Angela Sutan a reçu des financements de l'ANR à travers le projet Be-Aware ANR-22-CE33-0003.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Ivan Ajdukovic a reçu des financements de l'ANR à travers le projet Be-Aware ANR-22-CE33-0003.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Martin Hachet a reçu des financements de l'ANR à travers le projet Be-Aware ANR-22-CE33-0003.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sylvain Max ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les déchets qui s’accumulent dans la capitale avec la grève des éboueurs permettent de se rendre compte des quantités que l’on jette. Ils peuvent aussi ouvrir la porte à plus d’incivilités à l’avenir.Angela Sutan, Professeur en économie comportementale, Burgundy School of Business Ivan Ajdukovic, Associate professor, Burgundy School of Business Martin Hachet, Directeur de recherche, InriaSylvain Max, Social Psychologist, Associate Professor, Burgundy School of Business Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1901072023-03-07T14:04:04Z2023-03-07T14:04:04ZLes milliards de masques utilisés depuis le début de la pandémie menacent la faune<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/483347/original/file-20220907-26-juby92.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=37%2C44%2C4910%2C3278&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un masque de protection, utilisé comme mesure préventive contre la Covid-19, gît sur le sol d'une plage près de Barbate, dans la province de Cadix, au sud de l'Espagne, en février 2022.</span> <span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Emilio Morenatti)</span></span></figcaption></figure><p>Tout au long de la pandémie de Covid-19, le port du masque a été l’une des principales mesures de santé publique mises en œuvre pour lutter contre la maladie. Depuis mars 2020, des milliards de masques chirurgicaux jetables ont été utilisés dans le monde, ce qui soulève la question suivante : que deviennent tous ces masques usagés ?</p>
<p>En tant que chercheurs dans le domaine de la pollution par les plastiques à usage unique et les microplastiques, nous avons compris qu’une vague mondiale de pollution par résidus de plastique se préparait dès les premiers jours de la pandémie, et ce, même pendant les périodes de confinement, quand l’exercice physique se limitait à de courtes promenades dans le quartier. Masques et gants jonchaient le sol, volaient au vent et s’accrochaient aux clôtures.</p>
<p>De plus, en tant qu’écologistes, nous avions une idée des endroits où on retrouverait ces déchets : dans les nids, l’estomac des animaux sauvages ou enroulés autour de leurs pattes.</p>
<p>Au Canada, une équipe de chercheurs dirigée par la biologiste de la conservation Jennifer Provencher a <a href="https://doi.org/10.1139/er-2018-0079">étudié l’impact des résidus de plastique sur la</a> faune. Dans une étude menée lors du nettoyage d’un canal aux Pays-Bas, des biologistes du centre de biodiversité Naturalis ont constaté <a href="https://doi.org/10.1163/15707563-bja10052">que les résidus d’équipements de protection individuelle (ÉPI) présentaient une interaction avec la faune similaire à celle des autres plastiques</a>.</p>
<h2>Des effets sur la faune</h2>
<p>Dans un dessin humoristique <a href="https://www.reddit.com/r/RATS/comments/i4nv66/face_masks_for_the_win/">qui circule sur Internet</a>, un rat rentre chez lui avec des sacs d’épicerie et trouve deux autres rats allongés dans des hamacs superposés faits de masques chirurgicaux. Le rat allongé en bas s’exclame : « On trouve des hamacs gratuits partout en ville. Un vrai miracle ! »</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1294320425099571202"}"></div></p>
<p>Nous avons partagé ce dessin avec nos collègues au début de la pandémie, alors que nous enquêtions sur les déchets d’ÉPI dans les rues et les stationnements de Toronto.</p>
<p>Nous avons constaté que dans la zone que nous avons étudiée (qui couvre une superficie de Toronto équivalente à environ 45 terrains de football), plus de 14 000 masques, gants ou lingettes désinfectantes jetables s’étaient accumulés à la fin de l’année. De quoi faire des dortoirs entiers de hamacs à rats.</p>
<p>Il nous fallait comprendre l’ampleur des dommages causés à la faune sauvage par les ÉPI. Nous avons constaté que beaucoup d’autres personnes étaient également préoccupées par la situation.</p>
<h2>Des images choquantes</h2>
<p>Après avoir mené une enquête mondiale en consultant les comptes des réseaux sociaux portant sur les interactions de la faune avec les résidus d’ÉPI, nous avons découvert des images choquantes : un hérisson pris dans un masque, les élastiques emmêlés dans ses piquants. Une minuscule chauve-souris, les élastiques de deux masques enroulés autour d’une de ses ailes. Un nid, rempli d’œufs blanc ivoire, isolé par des plumes duveteuses et un masque en tissu.</p>
<p>Beaucoup de ces animaux sont morts, mais la plupart étaient vivants au moment où ils ont été observés, et certains ont pu être libérés de leur piège de plastique par les personnes qui les avaient pris en photo.</p>
<p><div data-react-class="InstagramEmbed" data-react-props="{"url":"https://www.instagram.com/p/CDAB4MQBCKO","accessToken":"127105130696839|b4b75090c9688d81dfd245afe6052f20"}"></div></p>
<p>En tout, nous avons trouvé 114 cas d’interactions entre la faune et des déchets d’ÉPI, signalés sur les réseaux sociaux par des personnes inquiètes, partout dans le monde. La plupart des animaux sauvages étaient des oiseaux (83 %), mais des mammifères (11 %), des poissons (2 %), des invertébrés tels qu’une pieuvre (4 %) et des tortues de mer (1 %) ont également été observés.</p>
<p>La majorité des observations provenaient des États-Unis (29), de l’Angleterre (16), du Canada (13) et de l’Australie (11), ce qui s’explique probablement à la fois par l’augmentation de l’accès aux appareils mobiles et le fait que les mots-clés de notre recherche étaient en anglais. Les observations provenaient également de 22 autres pays répartis sur tous les continents, à l’exception de l’Antarctique.</p>
<h2>Peser le pour et le contre</h2>
<p>Alors que l’on <a href="https://doi.org/10.1021/acs.est.0c02178">estime à 129 milliards le nombre de masques utilisés chaque mois dans le monde</a>, comment pouvons-nous, en tant qu’écologistes et chercheurs en environnement, dire aux gens de partout sur la planète confrontés à une pandémie mondiale d’utiliser moins de masques ? C’est tout simplement impossible.</p>
<p>Les masques N95 ont joué un rôle essentiel dans la réduction de la transmission de la Covid-19 et, bien qu’ils soient plus néfastes pour l’environnement que les masques en tissu, <a href="https://doi.org/10.1021/acs.chas.1c00016">leur bénéfice pour la santé est incontestablement</a> supérieur.</p>
<p>Alors, qu’aurions-nous pu faire de mieux ? Lors de notre recherche sur les déchets provenant des ÉPI, nous avons constaté une profusion de masques et de gants jetés à proximité des poubelles publiques.</p>
<p>Nous avançons une hypothèse : l’absence de messages clairs, de la part des municipalités et des provinces, sur les bonnes façons de se débarrasser des ÉPI, ainsi que notre réticence à nous rassembler près des endroits où ils sont jetés, ont probablement contribué à ce phénomène de pollution mondiale.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/481955/original/file-20220831-12-g98rae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="une poubelle publique remplie d’EPI et de masques chirurgicaux jusqu’au point de débordement" src="https://images.theconversation.com/files/481955/original/file-20220831-12-g98rae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/481955/original/file-20220831-12-g98rae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/481955/original/file-20220831-12-g98rae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/481955/original/file-20220831-12-g98rae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/481955/original/file-20220831-12-g98rae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/481955/original/file-20220831-12-g98rae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/481955/original/file-20220831-12-g98rae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Développer de meilleurs moyens pour que les gens se débarrassent de leurs déchets EPI pourrait aider à empêcher les masques chirurgicaux usagés de finir dans l’environnement.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Améliorer les façons dont on peut se débarrasser des ÉPI usagés pourrait contribuer à éviter que des masques usagés ne se retrouvent dans la nature.</p>
<p>Les leçons tirées de cette expérience peuvent encore être mises en œuvre pendant que nous continuons à subir les vagues de cette pandémie ; l’utilisation des masques n’est pas encore révolue. Notre recherche se poursuit et nous surveillons l’accumulation de déchets d’ÉPI qui se retrouveront probablement dans d’autres nids et autour des corps d’autres animaux.</p>
<p>Si une augmentation de l’utilisation de plastique à usage unique causée par la Covid-19 était probablement inévitable, la hausse de la pollution plastique aurait quant à elle pu être atténuée grâce à des investissements dans la sensibilisation du public et à des modifications des infrastructures de gestion des déchets. Masques et autres ÉPI auraient ainsi pu être éliminés et traités correctement, avec un minimum de rejets dans l’environnement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190107/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Des milliards de masques et autres équipements de protection individuelle ont été utilisés tout au long de la pandémie. Contenant du plastique, ces articles nuisent à la faune et à son environnement.Shoshanah Jacobs, Associate Professor, Integrative Biology, University of GuelphJackie Saturno, Research Associate, Dalhousie UniversityJustine Ammendolia, PhD Student, Resource and Environmental Studies, Dalhousie UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1988882023-02-01T19:09:11Z2023-02-01T19:09:11ZTravailler plus longtemps mais… dans quel état ? Le cas des éboueurs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/507308/original/file-20230131-4652-n9up99.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=21%2C26%2C1257%2C846&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Durant une collecte de déchets, comme ici à Paris, la fréquence cardiaque d’un éboueur frôle le niveau considéré comme excessif.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Collecte_des_d%C3%A9chets,_Paris_-_octobre_2013.JPG">Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La <a href="https://theconversation.com/fr/topics/reforme-des-retraites-82342">réforme des retraites</a> du gouvernement, adoptée à l'Assemblée nationale après le recours au 49.3 le 16 mars dernier, continue de mobiliser contre elle, notamment chez les éboueurs. Mardi 21 mars, la CGT Services Publics de la ville de Paris a annoncé la <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/greve-des-eboueurs-a-paris-la-situation-s-ameliore-tres-legerement-avec-les-premieres-requisitions-20230320">reconduction du mouvement</a> débuté il y a une quinzaine de jours jusqu'au lundi 27 mars. En début de semaine, près de 10 000 tonnes de déchets jonchaient toujours les trottoirs de la capitale, malgré les réquisitions de personnel ordonnées par la Préfecture de la Paris. </p>
<p>Les éboueurs sont en effet particulièrement exposés aux conséquences de l’allongement substantiel de la durée de vie professionnelle prévue par le texte, qui porte l'âge légal de départ de 62 à 64 ans. Pour que ces deux ans de travail supplémentaires puissent se concrétiser dans les faits, la question de la santé au travail doit se poser au préalable. Il s’agit notamment de passer d’une logique de réparation à une logique de prévention des maux du travail. Le projet du gouvernement comporte certes un volet <a href="https://theconversation.com/fr/topics/penibilite-36200">pénibilité</a>, mais les pistes présentées ne vont pour l’instant pas dans ce sens.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/penibilite-usure-professionnelle-burn-out-quelles-avancees-dans-le-projet-de-reforme-des-retraites-197972">Pénibilité, usure professionnelle, burn-out : quelles avancées dans le projet de réforme des retraites ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>La soutenabilité du travail sur le long terme dépend en effet de l’équilibre entre l’état de santé des travailleurs et l’exercice de leur métier, ce qui se traduit par deux questions : premièrement, l’état de santé d’un travailleur est-il compatible avec son métier à un instant <em>t</em> ? ; deuxièmement, le métier exercé influe-t-il sur l’état de santé du travailleur, et dans quel sens ?</p>
<p>Au-delà du cas des éboueurs, pour permettre aux salariés de satisfaire aux exigences légales de départ en retraite, le gestionnaire va dorénavant devoir, en collaboration avec les spécialistes en santé au travail et en prévention, se poser ces questions tout au long de la carrière professionnelle du salarié, et cela dès le début de celle-ci, sans considération de l’âge du salarié.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="Éboueurs à Marseille" src="https://images.theconversation.com/files/507533/original/file-20230201-21-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/507533/original/file-20230201-21-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/507533/original/file-20230201-21-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/507533/original/file-20230201-21-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/507533/original/file-20230201-21-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/507533/original/file-20230201-21-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/507533/original/file-20230201-21-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Lorsque les ripeurs sont deux pour une tournée, chacun ramasse en moyenne 4,7 tonnes de déchets.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Eboueurs_20100508_Aix-en-Provence_1.jpg">Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>12 238 pas</h2>
<p>Dans un <a href="https://www.annales.org/gc/2022/gc148/2022-06-04.pdf">article</a> publié récemment dans la revue <em>Gérer et Comprendre</em>, nous analysons l’état de santé des ripeurs, c’est-à-dire des éboueurs qui collectent les ordures ménagères à l’arrière des camions de ramassage.</p>
<p>Notre étude montre qu’un ripeur, lorsque la tournée de ramassage est faite avec deux personnes à l’arrière du camion, collecte les déchets pendant une durée moyenne de 401 minutes (presque 7 heures), bénéficie d’un temps de pause de 33 minutes, ramasse 4,7 tonnes de déchets, réalise 12 238 pas et parcourt au total 44,6 km à l’arrière du camion.</p>
<p>Le coût cardiaque, c’est-à-dire la différence entre la fréquence cardiaque au travail et celle au repos, est à 28,8 battements par minute. Or, le seuil supérieur qui caractérise une astreinte physique excessive est à 30 battements.</p>
<p>On comprend facilement que l’usure physique est très forte dans ce métier extrêmement contraignant, ce qui pose la question de la responsabilité du gestionnaire en termes de GRH et de santé au travail.</p>
<h2>Le coût cardiaque élevé du monoripage</h2>
<p>Cela pose aussi la question de la responsabilité des donneurs d’ordre, qui sont souvent des communes ou des communautés de communes pour la collecte des déchets. La responsabilité est d’autant plus forte lorsque le gestionnaire ou le donneur d’ordre, sous pression de la concurrence, envisage la pratique du monoripage, c’est-à-dire l’affectation d’un seul ripeur par camion.</p>
<p>Toutes les moyennes citées pour deux ripeurs se dégradent alors : 434 minutes de collecte, avec un écart-type à 90 minutes ; 26 minutes de pause ; 9,6 tonnes de déchets collectés ; 16 599 pas effectués ; 58,3 km en moyenne par tournée ! Le coût cardiaque bondit au-delà du seuil supérieur, jusqu’à 38,8 battements par minute.</p>
<p>Le métier de ripeur est probablement l’un des métiers les plus éprouvants, car il cumule nombre des difficultés contemporaines du travail : contraintes physiques et de temps, interactions avec les usagers, complexité des chaînes de responsabilité en matière de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/qvt-69248">Qualité de vie au travail (QVT)</a>, etc.</p>
<h2>Des réponses déjà élaborées</h2>
<p>Pourtant, un <a href="https://www.theses.fr/087694425">travail doctoral</a> mené en 2019, fondé sur l’étude de plusieurs entreprises de collecte des déchets, montrait que certains employeurs avaient déjà <a href="https://www.anact.fr/la-gestion-de-lemployabilite-et-des-parcours-par-la-sante-au-travail-analyser-les-pratiques-de-grh">élaboré des réponses</a> qui permettaient aux salariés d’exercer leur métier jusqu’à l’âge de la retraite en étant bien moins usés. Nous avions identifié deux modèles de GRH qui fournissent deux réponses différentes à une seule question : combien de temps un salarié doit-il/peut-il rester dans un métier contraignant ?</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Dans la première entreprise étudiée, l’employeur estimait que le salarié devait pouvoir exercer son métier « pour la vie », et mettait tout en œuvre pour le lui permettre, adaptant sa GRH quotidienne à son état de santé. Dans les faits, cette attitude se traduisait par l’introduction de marges de manœuvre dans deux grands domaines.</p>
<p>Premièrement, dans tous les aspects de la GRH : évaluation attentive aux souhaits d’évolution, moyens conséquents pour la formation, dialogue social permettant de limiter en interne le recours au monoripage si les ripeurs ne le souhaitaient/pouvaient pas, etc. Deuxièmement, dans tous les aspects de la vie quotidienne : soutien aux ripeurs en difficulté, organisation des équipes et du travail, pour adapter ce dernier aux éventuelles faiblesses transitoires résultant d’événements de la vie ou de santé… En conséquence, les indicateurs dans cette entreprise étaient bons : faible absentéisme, très peu d’inaptitudes, forte attractivité et très faible turn-over.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Poubelles à Paris" src="https://images.theconversation.com/files/507530/original/file-20230201-25-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/507530/original/file-20230201-25-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=551&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/507530/original/file-20230201-25-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=551&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/507530/original/file-20230201-25-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=551&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/507530/original/file-20230201-25-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=693&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/507530/original/file-20230201-25-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=693&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/507530/original/file-20230201-25-m0ncyt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=693&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les éboueurs cumulent bon nombre des difficultés contemporaines du travail.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/186368025@N06/49484241723">Paola Breizh/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans la deuxième entreprise, l’employeur estimait au contraire qu’un ripeur devait exercer son métier le moins longtemps possible. Imaginant que l’instabilité dans le métier pouvait garantir la stabilité dans l’emploi, les gestionnaires avaient élaboré un projet de flexisécurité en interne, voire à l’échelle du territoire et entre employeurs.</p>
<p>Ainsi, le recrutement favorisait délibérément des candidats surqualifiés pour le métier de ripeur mais motivés par une carrière dans la fonction publique. L’employeur leur expliquait dès l’embauche que le métier de ripeur ne pouvait être qu’une étape dans leur carrière, un moyen mais pas une fin.</p>
<p>En les recrutant, il leur ouvrait l’accès aux concours de la fonction publique, qu’il les encourageait ensuite vivement à passer en leur fournissant des moyens conséquents (en temps et en argent) pour qu’ils puissent les préparer et les réussir. Malheureusement, nous n’avons pas pu avoir accès aux résultats de cette politique, le projet débutant lors de notre étude.</p>
<h2>Une réforme à quel prix ?</h2>
<p>Sans être toujours aussi contraignantes que celle des ripeurs, toutes les activités professionnelles ont un impact sur la santé dès lors que l’on considère celle-ci au plan physique et psychique. À l’heure où l’on observe dans de nombreux métiers une <a href="https://rfg.revuesonline.com/articles/lvrfg/abs/2015/04/lvrfg41249p53/lvrfg41249p53.html">augmentation des cas de burn-out et de suicides</a>, ainsi qu’un redoublement des questionnements sur le <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/redonner-du-sens-au-travail-thomas-coutrot/9782021503234">travail et son sens</a>, les débats sur l’âge de départ en retraite remettent en avant les questions sur la durée pendant laquelle on peut envisager d’exercer un métier. Nos travaux menés chez des « premiers de corvée » comme les ripeurs peuvent se révéler source d’inspiration.</p>
<p>En effet, cette réflexion doit être l’occasion de rappeler que les effets du travail sur la santé peuvent aussi être positifs, sur le plan de la santé comme sur le plan social ; ce qui, au-delà des finalités et objectifs économiques de la réforme, justifie également de favoriser au maximum le maintien en emploi des seniors.</p>
<p>Pour conclure, nous pouvons dire que tenter de faire travailler des salariés vieillissants sans se poser la question de la soutenabilité du travail et sans mettre la GRH au service de cette question expose aux risques d’exclusion, d’arrêts-maladie, de chômage, d’invalidité voire de décès : c’est coûteux pour les individus comme pour la société. Une réforme peut-elle être payée un tel prix ?</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/valoriser-lemploi-des-seniors-le-prealable-oublie-de-la-reforme-des-retraites-197141">Valoriser l’emploi des seniors, le préalable oublié de la réforme des retraites</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<img src="https://counter.theconversation.com/content/198888/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La question de la pénibilité constitue l'un des enjeux de la mobilisation des éboueurs, dont le mouvement de grève contre la réforme des retraites est reconduit à Paris jusqu'à lundi.Jean-Yves Juban, Professeur de sciences de gestion, Université Grenoble Alpes (UGA)Isabelle Salmon, Médecin du travail collaborateur, chercheur associé au CERAG, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1981412023-01-19T11:48:20Z2023-01-19T11:48:20ZPourquoi il est grand temps de quitter les villes<p><em>Si le processus d’urbanisation globalisée ne semble pas vouloir marquer le pas, le géographe Guillaume Faburel nous invite à considérer le débranchement urbain dans son texte « Vider les villes ? », dont nous vous proposons des extraits. Retrouvez cette réflexion et bien d’autres dans <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/ecologies-9782348076886">le livre collectif « Écologies. Le vivant et le social », publié aux éditions de la Découverte</a>.</em></p>
<hr>
<p>Vider les villes ? Voilà bien a priori une hérésie. La ville, c’est le progrès et l’émancipation. Tous les grands moments de notre civilisation y sont chevillés, des cités-États aux villes-monde et métropoles d’aujourd’hui. Pourquoi diable vouloir les vider ?</p>
<p>Simplement parce que tous les mois à travers le monde l’équivalent d’une ville comme New York sort de terre. À moins de croire dans le solutionnisme technologique et le durabilisme des transitions, il est temps de rouvrir une option envisagée dès les années 1970 : la désurbanisation de nos sociétés. Voici peut-être l’unique solution face à la dévastation écologique. Un seul « s » sépare demeure et démesure, celui de notre propre survie.</p>
<p>Aujourd’hui, 58 % de la population mondiale est urbaine, soit près de 4,4 milliards d’habitants (dont presque 40 % résidant aux États-Unis, en Europe et en Chine), contre 751 millions en 1950. Cette proportion est même annoncée à 70 % en 2050 par l’Organisation des Nations unies (ONU).</p>
<p>[…]</p>
<p>Avec plus de vingt millions d’habitants, Mumbaï a vu sa superficie bâtie presque doubler entre 1991 et 2018, perdant ainsi 40 % de son couvert végétal. Dhaka, dont la population de l’agglomération excède aussi vingt millions d’habitants, a vu disparaître 55 % des zones cultivées, 47 % des zones humides et 38 % du couvert végétal entre 1960 et 2005. Pendant que la superficie bâtie augmentait de 134 %.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/499586/original/file-20221207-12-amtpnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/499586/original/file-20221207-12-amtpnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/499586/original/file-20221207-12-amtpnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/499586/original/file-20221207-12-amtpnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/499586/original/file-20221207-12-amtpnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/499586/original/file-20221207-12-amtpnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/499586/original/file-20221207-12-amtpnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Vue aérienne de Dacca, capitale du Bangladesh, la ville la plus densément peuplée au monde, avec 43 797 habitants au km carré. Elle manque d’espaces verts et l’air y est irrespirable pour ses 15 millions d’habitants.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Plus près de nous, le Grand Paris est le chantier d’aménagement le plus important de l’histoire de la capitale depuis le Second Empire (XIX<sup>e</sup> siècle), avec pas moins de deux cents kilomètres de lignes de métro supplémentaires, cent soixante kilomètres de tunnels à percer, soixante-huit gares à construire, quatre-vingt mille logements par an à sortir de terre.</p>
<p>En France d’ailleurs, la population urbaine a augmenté de 20 % entre 1960 et 2018, pour officiellement dépasser les 80 % de la population hexagonale en 2020, ramenés toutefois à 67 % en ne tenant plus uniquement compte de l’influence des villes mais aussi de la taille des peuplements (critère de densité des constructions). Près de la moitié vit dans l’une des vingt-deux grandes villes (dont quatre millionnaires en nombre d’habitants), à ce jour officiellement dénommées métropoles. Et, depuis ces centres métropolitains jusqu’aux couronnes périurbaines, comme dans un bon tiers des périmètres de villes moyennes et d’inter-communalités (elles-mêmes grossissantes par volontarisme réglementaire), l’urbanisation croît deux fois plus vite en surface qu’en population (et même trois fois dans les années 1990, soit annuellement la taille de Marseille, un département tous les dix ans, la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur en cinquante ans).</p>
<hr>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Pour suivre au plus près les questions environnementales, retrouvez chaque jeudi notre newsletter thématique « Ici la Terre ». Au programme, un mini-dossier, une sélection de nos articles les plus récents, des extraits d’ouvrages et des contenus en provenance de notre réseau international. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-environnement-150/">Abonnez-vous dès aujourd’hui</a>.</em></p>
<hr>
<h2>La métropolisation du monde</h2>
<p>Les foyers premiers ainsi que le modèle principal de cette croissance sont assurés par les grandes agglomérations, au premier chef les sept villes-monde (New York, Hongkong, Londres, Paris, Tokyo, Singapour et Séoul) et leurs épigones, cent vingt métropoles internationales. Elles représentent en cumul 12 % de la population mondiale pour 48 % du Produit Intérieur Brut (PIB) mondial. Il y a donc du capital à fixer et de la « richesse » à produire… À condition de continuer à grossir. Tokyo a déjà un PIB supérieur à celui du Canada, Paris à celui de la Suisse…</p>
<p>Engagée depuis une quarantaine d’années dans les pays occidentaux, la métropolisation représente le stade néolibéral de l’économie mondialisée : polarisation urbaine des nouvelles activités dites postindustrielles et conversion rapide des pouvoirs métropolitains aux logiques de firme marchande.</p>
<p>Elle incarne l’avantage acquis ces dernières décennies par les grandes villes : articulation des fonctions de commandement (ex : directions d’entreprises) et de communication (ex : aéroports, interconnexions ferroviaires, etc.), polarisation des marchés financiers (ex : places boursières et organismes bancaires), des marchés d’emplois de « haut niveau » – que l’Insee qualifie de métropolitains depuis 2002 (conception-recherche et prestations intellectuelles, commerce interentreprises et gestion managériale, culture et loisirs) ou encore de marchés segmentés de consommation (tourisme, art, technologies…).</p>
<p>[…]</p>
<h2>Une empreinte environnementale et sanitaire déplorable</h2>
<p>Or, occupant seulement 2 % de la surface de la Terre, le fait urbain décrit produit 70 % des déchets, émet 75 % des émissions de gaz à effet de serre (GES), consomme 78 % de l’énergie et émet plus 90 % de l’ensemble des polluants émis dans l’air pour, souvenons-nous, 58 % de la population mondiale.</p>
<p>Pour les seuls GES, vingt-cinq des cent soixante-sept plus grandes villes du monde sont responsables de près de la moitié des émissions urbaines de CO<sub>2</sub> – la fabrication du ciment représentant près de 10 % des émissions mondiales, en augmentation de 80 % en dix ans. À ce jour, 40 % de la population urbaine mondiale vit dans des villes où l’exposition à la chaleur extrême a triplé sur les trente-cinq dernières années.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/canicule-et-urbanisme-arretons-de-densifier-nos-villes-142504">Canicule et urbanisme : arrêtons de densifier nos villes !</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Plusieurs mégapoles s’enfoncent annuellement de plusieurs centimètres sous le poids de la densité des matériaux de construction et du pompage des nappes phréatiques (Mexico, Téhéran, Nairobi, Djakarta…). La prévalence des maladies dites de civilisation est nettement plus importante dans les grandes villes, responsables de quarante et un millions de décès annuels à travers le monde (cancers, maladies cardiovasculaires et pulmonaires, diabète et obésité, troubles psychiques et maladies mentales).</p>
<p>Enfin, selon le Fonds monétaire international, à l’horizon de la fin du siècle, 74 % de la population mondiale (annoncée en 2100 urbaine à 80 %) vivra des canicules mortelles plus de vingt jours par an. Un point de comparaison : la canicule de 2003 en France, 15 000 morts, en dix-huit jours. D’ailleurs, en France, les pollutions atmosphériques des grandes villes sont responsables de 50 000 morts annuellement.</p>
<p>Le secteur du bâtiment-travaux publics (BTP), toutes constructions confondues (mais à 90 % dans les aires définies comme urbaines), représente 46 % de la consommation énergétique, 40 % de notre production de déchets et 25 % des émissions de GES. L’autonomie alimentaire des cent premières villes est de trois jours (98 % d’alimentation importée) et Paris, par tous ses hectares nécessaires, a une empreinte écologique trois cent treize fois plus lourde que sa propre superficie.</p>
<p>[…]</p>
<p>Si l’on croise les données de nos impacts écologiques avec celles des limites planétaires, on constate que l’empreinte moyenne de chaque Français va devoir être divisée par quatre à six pour prétendre à la neutralité carbone à horizon de 2050. Pour ce faire, loin du technosolutionnisme ambiant et du durabilisme du verdissement, l’autonomie, comprise comme autosubsistance et autogestion, est le seul moyen de se figurer l’ensemble de nos pressions et de les contenir par l’autodétermination des besoins, au plus près des ressources et de leurs écosystèmes. Ceci, sans pour autant négliger nos interdépendances sociales et quelques-unes de nos libertés.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/458411/original/file-20220418-118857-54wjei.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/458411/original/file-20220418-118857-54wjei.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/458411/original/file-20220418-118857-54wjei.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/458411/original/file-20220418-118857-54wjei.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/458411/original/file-20220418-118857-54wjei.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/458411/original/file-20220418-118857-54wjei.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/458411/original/file-20220418-118857-54wjei.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une pancarte sur une statue indique « Grand Péril Express » à côté d’un drapeau du mouvement Extinction-Rebellion lors d’une manifestation contre les projets d’urbanisation des terres agricoles en Île-de-France, devant l’Hôtel de Ville de Paris, le 10 octobre 2021.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Thomas Samson/AFP</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Or pour faire autonomie, toute ville devrait produire 100 % de son énergie, qui plus est renouvelable (or, à ce jour, Lyon, Bordeaux ou Rennes n’en produisent par exemple que 7 % à 8 % , non renouvelables), remettre en pleine terre entre 50 % et 60 % des sols pour la production vivrière et le respect du cycle de l’eau (à ce jour, entre 1 % et 1,5 % dans les villes labellisées Métropoles françaises), ou encore restituer aux écosystèmes au moins 15 % des sols urbanisés pour la biodiversité. Tout ceci est infaisable morphologiquement et, quoi qu’il en soit, impensable dans le cadre d’une ville devenue médiation première du capital.</p>
<p>Nous n’avons en fait pas d’autre choix que de nous affranchir des grandes centralités et de leurs polarités, comme certains espaces périurbains commencent à le faire ; en déconcentrant et en relocalisant, en décentralisant, sans omettre de décoloniser quelques habitudes et modes de vie.</p>
<p>Mais comment passer de l’ère de taire l’inconséquence de nos écologies urbaines à l’âge du faire des géographies posturbaines, sans pour autant rétrécir la société par le jeu des identités et le retour de quelques barbelés ? Quelles sont les conditions d’une désurbanisation sans perte d’altérité, et sans oublier cette fois la communauté biotique ?</p>
<h2>Bientôt, le débranchement urbain ?</h2>
<p>Cette autre géographie est d’ores et déjà en construction, à bas bruit. Les espaces plus ouverts, ceux des campagnes, offrent d’autres possibilités, sous condition de révision de quelques comportements, particulièrement ceux liés à nos mobilités, connectivités et divertissements. En France, cela correspond au foisonnement d’alternatives au sein des espaces dessinés par les treize mille petites villes et petites villes de proximité, bourgs et villages centre, auxquels il faut ajouter les milliers d’autres villages, hameaux et lieux-dit : néoruralités qui connaissent leur septième vague d’installation, néopaysanneries dynamiques, zones à défendre, communautés existentielles/intentionnelles, écolieux et fermes sociales…</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/vers-un-tournant-rural-en-france-151490">Vers un tournant rural en France ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Permaculture et autosubsistance vivrière, chantiers participatifs et autoconstruction bioclimatique, épiceries sociales ambulantes et médiathèques villageoises itinérantes, fêtes locales et savoirs vernaculaires… sont clairement ici en ligne de mire. Et l’on pourrait imaginer des foires locales aux logements, puisque près de trois millions sont vacants dans les périphéries, alors que ce secteur est prétendument en crise. Et, toute cette effervescence ne concerne pas moins de 30 % du territoire hexagonal.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/506055/original/file-20230124-24-rmc7wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/506055/original/file-20230124-24-rmc7wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/506055/original/file-20230124-24-rmc7wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=847&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/506055/original/file-20230124-24-rmc7wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=847&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/506055/original/file-20230124-24-rmc7wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=847&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/506055/original/file-20230124-24-rmc7wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1064&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/506055/original/file-20230124-24-rmc7wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1064&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/506055/original/file-20230124-24-rmc7wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1064&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Paru le 12 janvier 2023.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.editionsladecouverte.fr/ecologies-9782348076886">Éditions de la Découverte</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Là serait la raison du débranchement urbain : cesser d’être les agents involontaires des méga-machines urbaines en recouvrant de la puissance d’agir, non plus pour faire masse contre la nature mais pour faire corps avec le vivant. Le triptyque habiter la terre, coopérer par le faire, autogérer de manière solidaire peut constituer la matrice d’une société écologique posturbaine. À condition de vider les villes, les grandes, et de cheminer enfin vers le suffisant.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198141/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Guillaume Faburel ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si 58 % de la population mondiale est urbaine, il y a incompatibilité de ce mouvement d'urbanisation avec la sauvegarde de la planète.Guillaume Faburel, Professeur, chercheur à l'UMR Triangle, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1973702023-01-16T15:06:26Z2023-01-16T15:06:26ZVoici comment votre tasse de café contribue aux changements climatiques<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/503446/original/file-20230106-18-tfcw43.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=29%2C0%2C4876%2C3260&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les scientifiques affirment que le gaspillage de café et d'eau lors de la préparation d'une tasse de café a une empreinte carbone plus importante que l'utilisation de capsules de café.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Unsplash)</span></span></figcaption></figure><p>La consommation mondiale de café n’a cessé d’augmenter <a href="https://coffee-rank.com/world-coffee-consumption-statistics/">depuis près de 30 ans</a>. On estime qu’environ <a href="https://britishcoffeeassociation.org/coffee-consumption/">deux-milliards de tasses de café</a> sont consommées quotidiennement dans le monde. Avec une consommation moyenne quotidienne de <a href="https://coffeeassoc.com/wp-content/uploads/2021/06/CAC-Coffee-Consumption-and-COVID19-Infographic-2020.pdf">2,7 tasses de café par personne</a>, le café est sans contredit la boisson la plus populaire auprès des Canadiens.</p>
<p>Parallèlement à cette augmentation soutenue de la consommation, le marché des cafetières s’est beaucoup diversifié. Parmi elles, les cafetières à capsules connaissent un grand succès, <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/12/16/oui-les-dosettes-de-cafe-en-aluminium-sont-cheres-polluantes-et-peu-recyclees_5398374_4355770.html">divisant l’opinion publique</a>. Ce mode de préparation est en effet considéré comme un non-sens écologique, en raison de l’importante quantité d’emballages individuels à usage unique utilisée.</p>
<p>En tant que chercheurs travaillant sur l’évaluation des impacts environnementaux des produits et services, les questions sur les impacts environnementaux causés par la consommation de café en capsule nous sont souvent adressées. Nous avons donc décidé de faire une compilation de plusieurs études scientifiques portant sur l’empreinte carbone de la préparation d’un café.</p>
<p>Dans cet article, nous présentons l’empreinte carbone de différentes manières de préparer un café et donnons également quelques conseils pour réduire leur impact.</p>
<h2>Le cycle de vie de la préparation d’une tasse de café</h2>
<p>La pollution causée par la préparation de notre tasse de café à la maison n’est que la partie émergée de l’iceberg.</p>
<p>Avant de pouvoir déguster une tasse de café, <a href="https://www.visualcapitalist.com/from-bean-to-brew-the-coffee-supply-chain/">plusieurs étapes sont nécessaires</a>, telles que la production agricole des grains de café vert, leur transport, la torréfaction et la mouture des grains, le chauffage de l’eau pour le café et le lavage des tasses.</p>
<p>Ces étapes, communes à tous les modes de préparation de café, consomment des ressources et émettent des gaz à effet de serre (GES).</p>
<p>Pour comparer d’une manière adéquate l’empreinte carbone de plusieurs modes de préparation d’un café, il est impératif de prendre en compte <a href="https://www.oregon.gov/deq/filterdocs/pef-coffee-fullreport.pdf">l’ensemble de leur cycle de vie</a> ; depuis la production du café, en passant par la fabrication des emballages et des machines, jusqu’à la préparation du café et la fin de vie des déchets.</p>
<h2>Comparaison de quatre méthodes de préparation d’un café</h2>
<p>Nous avons comparé quatre méthodes de <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1111/jiec.12487">préparation de café (280 ml)</a> (les quantités de café entre parenthèses indiquent la quantité de café utilisée au cours du cycle de vie complet de chaque préparation. En effet, il y a des pertes associées, par exemple, aux étapes de mouture et de torréfaction des grains de café) :</p>
<ul>
<li><p>Café filtre traditionnel (25 grammes de café)</p></li>
<li><p>Café encapsulé (14 grammes de café)</p></li>
<li><p>Café infusé – presse française (17 grammes de café)</p></li>
<li><p><a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0959652609001474?via%3Dihub">Café soluble ou café instantané</a> (12 grammes de café)</p></li>
</ul>
<p>Les résultats de notre analyse indiquent clairement que le café filtre traditionnel a l’empreinte carbone la plus élevée, en raison d’une plus grande quantité de café utilisée. L’empreinte carbone du mode de préparation est en fait fortement influencée par la quantité de café utilisée et l’intensité carbone de l’électricité nécessaire au fonctionnement des appareils électriques (cafetière, bouilloire et lave-vaisselle).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/505238/original/file-20230118-23-bgzrro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="graphique" src="https://images.theconversation.com/files/505238/original/file-20230118-23-bgzrro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505238/original/file-20230118-23-bgzrro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505238/original/file-20230118-23-bgzrro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505238/original/file-20230118-23-bgzrro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505238/original/file-20230118-23-bgzrro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=446&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505238/original/file-20230118-23-bgzrro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=446&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505238/original/file-20230118-23-bgzrro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=446&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">L’empreinte carbone de plusieurs manières de préparer un café à la maison.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Luciano Rodrigues Viana)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Lorsque les consommateurs utilisent les quantités recommandées de café et d’eau, le café soluble semble être l’option la plus sobre en carbone. Cela est dû à la plus faible quantité de café utilisée par tasse, à la plus faible consommation électrique d’une bouilloire, par rapport à une cafetière, et à l’absence de déchets devant être traités en fin de vie.</p>
<p>En revanche, le café en capsule ne s’avère pas être une option si désastreuse pour l’environnement.</p>
<p>Pourquoi ? Parce que les capsules permettent de réduire les quantités de café, d’électricité et d’eau utilisées lors de la préparation d’un café. Boire un café en capsule permet d’économiser entre 11 et 13 grammes de café par rapport à un café filtre traditionnel. Or, la production de 11 grammes de café Arabica au Brésil émet, en moyenne, <a href="https://ecoinvent.org/the-ecoinvent-database/">environ 59 grammes d’éq. CO₂</a> (équivalent CO<sub>2</sub>). Cette valeur est bien plus élevée que les 27 grammes d’éq. CO<sub>2</sub> émis lors de la fabrication et l’enfouissement d’une capsule en plastique. Ces chiffres donnent une idée de l’importance d’éviter la surconsommation et le gaspillage de café.</p>
<h2>Chiffres en perspective</h2>
<p>L’empreinte carbone de la consommation de café est non négligeable. En effet, le budget carbone disponible pour chaque habitant de la terre, établi dans le but de respecter les accords climatiques, est de <a href="https://www.unep.org/emissions-gap-report-2020">2,1 t éq. CO₂ par an</a>.</p>
<p>À titre comparatif, les émissions liées à la consommation de 152 litres de café annuellement, <a href="https://www.cbc.ca/news/business/canada-coffee-tim-hortons-1.3745971">moyenne canadienne</a>, représentent 3-5 % de ce budget au Québec et 4-8 % en Alberta (où l’électricité est très carbonée).</p>
<h2>Production de grains de café vert</h2>
<p>Quel que soit le mode de préparation de votre café, la production des grains est la phase la plus émettrice de GES. Elle contribue de 40 à 80 % des émissions totales. Il y a plusieurs raisons à cela.</p>
<p><a href="https://www.coffeehabitat.com/2006/02/what_is_shade_g/">Le caféier est un arbuste</a> qui est traditionnellement cultivé à l’ombre du couvert forestier. Néanmoins, avec l’augmentation de la demande et la modernisation du secteur, de nombreuses plantations traditionnelles ont été transformées en vastes champs entièrement exposés au soleil. Ces champs nécessitent des systèmes d’irrigation et un épandage de fertilisants et de pesticides intensifs.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une plantation de café" src="https://images.theconversation.com/files/503164/original/file-20230105-64877-jn7odg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/503164/original/file-20230105-64877-jn7odg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/503164/original/file-20230105-64877-jn7odg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/503164/original/file-20230105-64877-jn7odg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/503164/original/file-20230105-64877-jn7odg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/503164/original/file-20230105-64877-jn7odg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/503164/original/file-20230105-64877-jn7odg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le processus de production du café contribue largement à l’empreinte carbone du café en raison de l’irrigation intensive, des systèmes de fertilisation et des pesticides adoptés.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Moises Castillo)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p><a href="https://link.springer.com/article/10.1065/lca2006.01.230">Les travaux agricoles, l’irrigation et l’utilisation d’engrais azotés</a> – dont la production nécessite de grandes quantités de gaz naturel et dont l’utilisation émet du protoxyde d’azote, un puissant GES – contribuent de manière significative à l’empreinte carbone de la production des grains de café.</p>
<h2>Comment réduire l’empreinte carbone de notre tasse de café ?</h2>
<p>Au niveau du consommateur, éviter le gaspillage de café et d’eau est le moyen le plus efficace de réduire l’empreinte carbone des cafés filtres traditionnels, infusés et solubles. Dans ce sens, il convient d’opter pour des préparations de café plus petites, comme les espressos de 50 ou 100 ml.</p>
<p>Les machines à capsules présentent l’avantage d’éviter une préparation excessive de café et d’eau. Toutefois, si la commodité des machines à capsules incite les consommateurs à doubler leur consommation, elles perdent alors toute pertinence environnementale. Les consommateurs doivent également s’informer à propos des possibilités de recyclage des capsules dans la ville où ils habitent afin d’éviter qu’elles ne soient envoyées dans des sites d’enfouissement. Mieux encore, les amateurs de ce style de café peuvent opter pour des <a href="https://www.capsme.fr/">capsules réutilisables</a>.</p>
<p>Si vous habitez dans une province où la production d’électricité est très carbonée, il convient de ne pas utiliser la plaque chauffante des cafetières et de rincer votre tasse de café à l’eau froide.</p>
<p>L’électricité utilisée pour laver une tasse de café en Alberta, province où la production d’électricité est basée sur le <a href="https://www.cer-rec.gc.ca/en/data-analysis/energy-commodities/electricity/report/canadas-renewable-power/provinces/renewable-power-canada-alberta.html">charbon et le gaz naturel</a>, émet plus de GES (29 grammes d’éq. CO<sub>2</sub>) que la fabrication d’une capsule de café et son envoi à l’enfouissement (27 grammes d’éq. CO<sub>2</sub>). Au Québec, <a href="https://www.cer-rec.gc.ca/en/data-analysis/energy-commodities/electricity/report/canadas-renewable-power/provinces/renewable-power-canada-quebec.html">grâce à l’hydroélectricité</a>, laver sa tasse au lave-vaisselle a un impact négligeable (0,7 gramme d’éq. CO<sub>2</sub> par tasse).</p>
<h2>Remettre en question nos raisonnements intuitifs pour mieux agir</h2>
<p>Ne pas utiliser des capsules nous donne bonne conscience en tant que consommateur de café. Mais concentrer le débat autour des capsules est contre-productif, car cela occulte les gestes les plus efficaces pour réduire l’empreinte carbone associée à la consommation de café à l’échelle individuelle. Les analyses de cycle de vie (ACV) présentent l’intérêt d’identifier les phases les plus polluantes de la chaîne de production et leurs résultats remettent parfois en question nos raisonnements intuitifs, qui sont de temps à autre trompeurs.</p>
<p>Il est avant tout important de limiter le gaspillage et la préparation excessive de café, d’autant plus que la production de café sera probablement affectée dans le futur. Les changements climatiques pourraient en effet réduire la superficie mondiale de terres propices à la <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10584-014-1306-x">production du café d’environ 50 %</a> d’ici à 2050, et ce, dans un contexte où la <a href="https://www.sustaincoffee.org/assets/resources/ci-report-coffee-in-the-21st-century.pdf">demande va tripler</a>.</p>
<p>Même si les consommateurs de café ont un rôle à jouer dans la réduction de leur empreinte carbone, c’est principalement les gouvernements des pays producteurs de café et des entreprises multinationales qui doivent créer des conditions économiques et techniques nécessaires à l’émergence d’une <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11027-013-9467-x">production de café moins dépendante</a> des systèmes d’irrigation, d’engrais et de pesticides, et ce, tout en évitant la déforestation.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/197370/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Luciano Rodrigues Viana a reçu des financements du Conseil de Recherches en Sciences Naturelles et en Génie du Canada (CRSNG).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jean-François Boucher est financé par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Charles Marty et Pierre-Luc Dessureault ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>L’empreinte carbone du mode de préparation est fortement influencée par la quantité de café utilisée et l’intensité carbone de l’électricité nécessaire au fonctionnement des appareils électriques.Luciano Rodrigues Viana, Doctorant en sciences de l'environnement, Département des sciences fondamentales, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Charles Marty, Adjunct professor, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Jean-François Boucher, Professeur, Eco-consulting, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Pierre-Luc Dessureault, Assistant researcher, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1965142022-12-20T15:58:33Z2022-12-20T15:58:33Z546 kilos de déchets dans votre salon : et si la réalité augmentée venait au secours de l’environnement ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/500690/original/file-20221213-10619-o5h4ft.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1186%2C575&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un utilisateur d'un produit conçu par un collectif de chercheurs consulte, in-situ, la quantité de déchets produits par son restaurant d'entreprise en une semaine. Les déchets sont représentés par des sacs poubelles virtuels dont le volume est équivalent à celui des déchets réels. </span> <span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Notre rapport à l’environnement se trouve souvent biaisé par la désirabilité sociale : aujourd’hui, il est par exemple difficile de se déclarer publiquement contre la préservation de l’environnement. Si la grande majorité des personnes interrogées se disent donc en faveur de la protection de la planète, cela ne se traduit pas toujours par l’adoption de modes de vie plus vertueux, de soutien plus actif aux politiques, aux organisations ou aux industries respectueuses de l’environnement.</p>
<p>En d’autres termes, nous continuons à observer un écart : le comportement réel ne <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S095937801630543X">correspond pas aux attitudes déclarées</a>.</p>
<p>Une explication de l’inertie propre à ces comportements réside dans la nature abstraite des conséquences de nos actions sur la planète : elles sont éloignées géographiquement, dans le temps, incertaines, et ne touchent pas toujours des populations que l’on côtoie. On parle ici de <a href="https://psycnet.apa.org/buy/2010-06891-005">« distance psychologique »</a> : les individus se sentent moins affectés par des événements perçus comme « plus lointains » sur le plan spatial, temporel, social ou hypothétique. Le phénomène <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1539-6924.2011.01695.x">joue à plein</a> sur les questions environnementales.</p>
<p>Outre des mesures incitatives ou contraignantes, il semble donc important d’aider les individus à mieux comprendre l’impact environnemental de leurs décisions en rendant leurs conséquences, souvent éloignés dans l’espace ou le temps, visibles et saillantes dans l’« ici » et le « maintenant ». Cela permettrait de les aider à adopter des comportements plus vertueux, et les inciter à faire pression pour la mise en place de politiques pro-environnementales. Des travaux ont montré qu’un bon moyen de promouvoir tout cela est de <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0013916511421196">proposer un ancrage dans un environnement familier</a> et réel. Et si les outils de réalité augmentée, en réduisant la distance psychologique, nous y aidaient ?</p>
<p>Telle est l’idée au cœur du projet <a href="https://beaware.inria.fr/">Be-Aware</a>. Il a été imaginé par les équipes du centre de l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria) de l’Université de Bordeaux, du laboratoire d’économie expérimentale de la Burgundy School of Business de Dijon (LESSAC), et du Centre international de recherche sur l’environnement et le développement à Paris.</p>
<h2>Chacun sa poubelle géante</h2>
<p>Considérons des objets bien connus de tous : les ordures ménagères. À la ville comme à la campagne, nos déchets ne s’accumulent pas dans ou devant notre domicile. Nos services de propreté fonctionnent correctement, avec des ramassages hebdomadaires qui laissent l’opportunité à chacun de se débarrasser facilement de ses déchets.</p>
<p>Cette situation, pour confortable soit-elle, ne nous permet pas de visualiser l’ampleur des déchets que nous produisons. En France, d’après les chiffres d’Eurostat de 2019, un individu produit en moyenne <a href="https://www.cniid.org/Les-dechets-en-France-quelques-chiffres,151">546 kilos de déchets ménagers par an</a>. Mais comment se le représenter ?</p>
<p>C’est justement parce qu’il est complexe de se faire une représentation de ce chiffre qu’il est difficile d’inciter les individus à réduire cette quantité. Certaines actions œuvrent déjà dans cette direction. À Lyon par exemple, dans le cadre du projet Global Getaway, une œuvre éphémère de l’artiste Friendly Liu, représentant une <a href="https://actu.fr/auvergne-rhone-alpes/lyon_69123/c-est-quoi-cette-poubelle-geante-posee-en-plein-lyon_54847406.html">poubelle géante</a> a été exposée aux passants, afin d’essayer d’aider les individus à réfléchir sur leur production de déchets.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>À nos yeux, il est possible de faire encore mieux en montrant à chacun <em>sa</em> poubelle géante. Dans notre projet, nous utilisons des <a href="https://ieeexplore.ieee.org/document/7539328">outils de « visualisation située »</a> (<em>embedded data representations</em>) : des données statistiques sont visualisées à proximité des espaces physiques, des objets ou des personnes auxquels elles se réfèrent. Ainsi, nous pouvons, par exemple, afficher dans un environnement familier les quantités de déchets qu’un individu produit par semaine, par an, ou sur l’ensemble de sa vie.</p>
<p>Rendus possibles par la réalité augmentée, ils permettent aux spectateurs d’interpréter les chiffres cumulés dans leur contexte. Il s’agit de les pousser à <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01572490/document">prendre des mesures dans le monde physique</a> en réponse aux informations obtenues.</p>
<h2>Éduquer et pousser à agir</h2>
<p>Nos premiers tests en laboratoire ont montré qu’avec ces visualisations, la réponse émotionnelle s’avère plus importante que lorsque les données sont communiquées de façon plus traditionnelle avec des chiffres, graphiques ou images affichés sur un écran d’ordinateur. Les participants ont en outre trouvé les visualisations des déchets crédibles, réalistes, informatives et fiables, et il semble qu’ils les prennent en compte dans leur décision.</p>
<p>Le développement de ces outils à une échelle plus large ne paraît pas insensé : ils sont simples, facilement adaptables à la consommation de chacun, et compréhensibles par tous. Les contraintes techniques et d’équipement sont, de plus, minimales : dans certains cas, de simples smartphones peuvent être utilisés pour créer l’illusion de réalité augmentée.</p>
<p>Dans d’autres cas, des dispositifs plus immersifs encore, comme des casques de réalité augmentée, peuvent permettre d’exposer des centaines de participants à des expériences utilisateur marquantes et impactantes. Nos outils sont faciles à utiliser en salle de cours, et, dans ce sens, la réalité augmentée nous permettra de mieux expliquer aux étudiants et aux lycéens les problématiques associées au mécanisme de partage d’un « bien commun ».</p>
<p>L’action pro-environnementale est directement liée à un changement profond de nos modes de vie. Ce changement ne peut avoir lieu que s’il est compris, accepté, accompagné, et encouragé. Les nouvelles approches éducatives dans ce domaine, comme celles que nous proposons avec la réalité augmentée, semblent constituer une opportunité intéressante à saisir pour la construction d’un futur durable, équitable et désirable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196514/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Angela Sutan a reçu des financements de l'ANR, Agence Nationale de la Recherche.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Ivan Ajdukovic a reçu des financements de l'ANR, Agence Nationale pour la Recherche </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Martin Hachet a reçu des financements de l'ANR, Agence Nationale pour la Recherche </span></em></p>Permettre de voir concrètement les conséquences d’actions diffuses est un bon moyen d’éveiller les consciences, meilleur en tout cas que des chiffres ou des graphiques.Angela Sutan, Professeur en économie comportementale, Burgundy School of Business Ivan Ajdukovic, Associate professor, Burgundy School of Business Martin Hachet, Directeur de recherche, InriaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1801812022-04-24T20:28:22Z2022-04-24T20:28:22ZLe réemploi, solution à privilégier pour écouler les invendus non alimentaires<p>En France en 2019, les invendus non alimentaires ont été estimés à plus de <a href="https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/5035-etude-des-gisements-et-des-causes-des-invendus-non-alimentaires-et-de-leurs-voies-d-ecoulement.html">4 milliards d’euros de valeur marchande</a>. Si la majorité a réintégré le circuit économique, notamment grâce au déstockage et au don, 7 % des produits ont été purement et simplement détruits.</p>
<p>Afin d’endiguer le phénomène, le législateur français a décidé de cibler ces produits, dans le cadre de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire dite <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000041553759/">« loi AGEC »</a>, adoptée en février 2020. Se loge en effet parmi les 130 articles de cette loi-fleuve, une <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000043975010">disposition</a> qui a fait couler beaucoup d’encre : l’interdiction de détruire les invendus non alimentaires.</p>
<p>Une <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/gaspillage-edouard-philippe-annonce-l-interdiction-de-la-destruction-des-produits-non-alimentaires-invendus_3474541.html">première mondiale</a>, selon les mots du Premier ministre Édouard Philippe, qui mettrait ainsi fin à une absence de cadre juridique en la matière. Elle fait d’ailleurs directement écho à la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000032036289">loi Garot de 2016</a> qui prononçait l’interdiction de la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/article_jo/JORFARTI000032036290">destruction de toutes les denrées alimentaires invendues encore consommables et des pratiques de javellisation dans les grandes surfaces</a>.</p>
<p>Ladite disposition ne prohibe en réalité pas totalement la destruction des invendus non alimentaires, mais vient consacrer au sein du <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000043975010">Code de l’environnement</a> une nouvelle obligation qui consiste pour les professionnels concernés à respecter des modalités de gestion spécifiques à ces produits qui n’ont pas trouvé preneur.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/2OiqAeR_UN8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Loi anti-gaspillage : les invendus non alimentaires ne peuvent plus être incinérés (France 3 Centre-Val de Loire, 2 janvier 2022).</span></figcaption>
</figure>
<h2>Toute la chaîne de production visée</h2>
<p>Celle-ci incombe à un grand nombre de professionnels puisqu’elle s’adresse à tous les acteurs des chaînes de production et de distribution que sont les producteurs, les importateurs, les distributeurs et même, <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599049/">dans certaines situations</a>, les plates-formes en ligne ou marketplaces telles qu’Amazon ou encore Cdiscount.</p>
<p>Lorsqu’ils se retrouvent avec des invendus, les professionnels doivent désormais suivre un ordre de priorité bien précis issu du <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A32008L0098">droit européen</a> : les invendus doivent être réemployés, réutilisés ou recyclés.</p>
<p>Le non-respect de cette obligation sera alors passible d’une amende administrative dont le montant ne pourra excéder 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale. La sanction pourra également faire l’objet d’une publication par une autorité administrative aux frais de la personne punie.</p>
<p>Si la somme de l’amende n’est pas forcément dissuasive pour certaines entreprises, le potentiel affichage du non-respect de cette obligation de gestion semble assez persuasif.</p>
<h2>Priorité donnée au réemploi</h2>
<p>En d’autres termes, les professionnels soumis au respect de cette obligation de gestion doivent, dans un premier temps, réemployer leurs invendus – c’est la première solution à privilégier.</p>
<p>Pour certains invendus, c’est même la seule solution possible : il est ainsi obligatoire pour les produits d’hygiène et de puériculture. La liste des produits touchés est précisée par <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042883198">décret</a> et concerne par exemple les savons, shampooings ou encore les déodorants mais également les biberons, anneaux de dentition, les ustensiles nécessaires à l’alimentation des enfants en bas âge…</p>
<h2>Le don fortement encouragé</h2>
<p>Pour que le réemploi soit possible, il faut que le produit soit donné ou vendu sur un canal où il pourra faire l’objet d’un usage identique à celui pour lequel il avait été conçu.</p>
<p>Parmi les solutions les plus courantes de réemploi, le don à des associations, la vente à des grossistes spécialisés dans le déstockage ou encore la vente aux salariés de l’entreprise… Le choix de l’option est libre et le don n’est que facultatif, bien qu’il soit néanmoins fortement encouragé, en particulier grâce à une incitation fiscale qui <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000041999518/">dispense les professionnels de la régularisation de la TVA</a>.</p>
<p>Il ne représente d’ailleurs aujourd’hui qu’une faible partie des opérations de réemploi, mais constitue un exutoire à fort potentiel pour les prochaines années en ce qui concerne les produits d’hygiène et de puériculture. Le volume des dons pourrait augmenter de manière significative, selon <a href="https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/5035-etude-des-gisements-et-des-causes-des-invendus-non-alimentaires-et-de-leurs-voies-d-ecoulement.html">l’Agence de l’environnement et de la maitrise de l’énergie (Ademe)</a>.</p>
<h2>Réutilisation et recyclage</h2>
<p>Cette opération du réemploi n’est toutefois pas toujours possible, notamment en raison de l’état du produit (dépourvu d’emballage, abîmé, défectueux, rapporté en magasin par le consommateur…).</p>
<p>Le cas échéant, le professionnel doit alors se tourner vers la préparation en vue de la réutilisation, deuxième opération énoncée dans l’ordre de priorité susmentionné. Celle-ci implique de réaliser un ou plusieurs contrôle(s), un nettoyage ou encore de réparer les biens invendus avant de pouvoir les écouler par d’autres canaux de distribution tels que ceux précédemment évoqués.</p>
<p>À défaut, lorsque ce mode de traitement n’est pas possible, l’invendu devra être recyclé voire en tout dernier recours, détruit.</p>
<h2>La destruction en dernier recours</h2>
<p>Cette nouvelle obligation n’interdit en effet pas totalement la destruction des invendus non alimentaires. Le recours à cette opération est même autorisé par la loi mais circonscrit à deux hypothèses.</p>
<p>La première concerne les produits qui ne peuvent être réemployés, réutilisés ou recyclés en raison des risques sérieux que ces opérations peuvent générer pour la santé ou la sécurité. La seconde s’adresse à ceux qui n’ont plus aucune possibilité d’être vendus ou donnés, faute de marché ou de demande, et qui ne peuvent pas non plus être recyclés soit parce que l’opération serait trop coûteuse soit car les installations de recyclage seraient trop éloignées.</p>
<h2>L’Union européenne se penche sur la question</h2>
<p>Si la gestion des invendus non alimentaires est désormais plus encadrée au niveau national, la question est également étudiée à l’échelle de l’Union européenne.</p>
<p>La Commission européenne a en effet affirmé dans le cadre de son initiative en matière de produits durables, qu’elle entendait notamment introduire <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52020DC0098&from=EN">l’interdiction de la destruction des marchandises durables invendues</a>.</p>
<p>Le tout demeure en discussion, contrairement à la France où l’obligation de gestion des invendus non alimentaires est entrée en vigueur le 1<sup>er</sup> janvier dernier pour une partie des produits, à savoir ceux soumis à un principe de responsabilité élargie du producteur : les produits d’hygiène et de puériculture, mais aussi les vêtements et chaussures, les équipements électroniques, les objets d’éveil et de loisirs ainsi que les livres et les fournitures scolaires… Pour le reste, il faudra attendre le <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/article_jo/JORFARTI000042753991">31 décembre 2023</a> avant que l’obligation ne soit généralisée à l’ensemble des produits ciblés par la loi.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/180181/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Clémence Lepla est doctorante contractuelle (financée par l’Université de Lille et la Région des Hauts-de-France) au sein de l’équipe de recherches René Demogue du Centre « droits et perspectives du droit (CRDP) de l’Université de Lille.</span></em></p>Retour en détails sur la disposition législative entrée en vigueur en janvier 2022, qui interdit la destruction des invendus non alimentaires.Clémence Lepla, Doctorante en droit privé, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1793472022-03-22T19:37:51Z2022-03-22T19:37:51ZQu’appelle-t-on un déchet radioactif ?<p>L’<a href="https://www.iaea.org/fr">Agence internationale de l’énergie atomique</a> (AIEA) définit un déchet radioactif comme :</p>
<blockquote>
<p>« tout matériau qui contient ou est contaminé par des radionucléides à des concentrations ou niveaux d’activités supérieurs aux valeurs définies par les autorités compétentes de réglementation et pour lequel aucune utilisation n’est prévue ».</p>
</blockquote>
<p>Un radionucléide désigne un noyau d’atome dont la durée de vie (soit sa <a href="https://www.laradioactivite.com/site/pages/activitedunradioelement.htm">période radioactive</a>, mesurée en seconde) est finie. On dit alors qu’il est « instable ». Il tendra spontanément à se transformer en un noyau stable (on dit alors qu’il « se désintègre ») en émettant un <a href="https://www.irsn.fr/FR/connaissances/Nucleaire_et_societe/education-radioprotection/bases_radioactivite/Pages/8-rayonnement-ionisant.aspx">rayonnement ionisant</a>, dont le potentiel danger pour l’homme est quantifié par sa <a href="https://www.irsn.fr/FR/connaissances/Nucleaire_et_societe/education-radioprotection/bases_radioactivite/Pages/9-concepts-de-dose.aspx">dose</a>.</p>
<p>Un ensemble de radionucléides, ou source radioactive, est caractérisé par son activité, soit le nombre de désintégrations qu’elle produit pendant une seconde. Son unité, le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Becquerel">Becquerel</a>, décrit son niveau de radioactivité.</p>
<h2>La différence entre « déchets » et « matières » radioactifs</h2>
<p>La <a href="https://www.doctrine.fr/l/texts/codes/LEGITEXT000006074220/articles/LEGIARTI000006834544">loi française</a> différencie un « déchet » radioactif (substance radioactive n’ayant aucune utilisation ultérieure) d’une « matière » radioactive (substance radioactive ayant une possible utilisation ultérieure).</p>
<p>Par exemple, des gants utilisés par une personne travaillant dans un environnement radioactif constituent un déchet. L’uranium issu du retraitement du combustible usé (URT) est une matière.</p>
<p>Dans les faits, un déchet sera très faiblement, faiblement, moyennement ou hautement radioactif ; et il le sera pendant très peu de temps, peu de temps ou très longtemps. Il faut retenir que le niveau de radioactivité d’un déchet est inversement proportionnel à sa durée de vie. On estime qu’au bout de 10 fois cette durée de vie, le niveau de radioactivité devient négligeable.</p>
<p>Macroscopiquement, l’effet de l’activité d’une source radioactive correspond à une production de chaleur ; microscopiquement, à une production de rayonnement.</p>
<p>Un <a href="https://inventaire.andra.fr/linventaire-national/quest-ce-que-linventaire-national">inventaire national</a> est réalisé chaque année par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra). Il permet une vision transparente des stocks de matières et déchets radioactifs sur le territoire français. Il nous apprend qu’environ 1 200 industriels, provenant de secteurs économiques différents, produisent des déchets radioactifs aujourd’hui, dont 60 % sont produits par l’industrie électronucléaire.</p>
<p>À titre de comparaison, le <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/bilan-environnemental/16-production-de-dechets-et-recyclage">ministère de la Transition écologique</a> établit annuellement un inventaire de l’ensemble des déchets produits en France : environ 5 tonnes de déchets sont produites par habitant et par an, dont 2 kg de déchets radioactifs.</p>
<h2>Gérer et réduire les déchets</h2>
<p>Le but fondamental de la gestion des matières et des déchets radioactifs, tel qu’organisé en France, vise la protection des populations actuelles et futures ainsi que de l’environnement.</p>
<p>Ce souci est partagé par un grand nombre de pays, à travers une <a href="https://www.iaea.org/topics/nuclear-safety-conventions/joint-convention-safety-spent-fuel-management-and-safety-radioactive-waste">convention internationale</a> fixant les principes de sûreté.</p>
<p>Leur application conduit à mettre en place des règles pratiques optimisées dans la gestion industrielle des matières et déchets radioactifs. Elles sont très contraignantes, parfois même beaucoup plus que dans d’autres domaines de gestion des déchets. Par exemple, le <a href="https://www.edf.fr/groupe-edf/espaces-dedies/l-energie-de-a-a-z/tout-sur-l-energie/produire-de-l-electricite/les-dechets-radioactifs">plan de gestion choisi par EDF</a> est basé sur quatre règles :</p>
<ul>
<li><p>Réduire la production de déchets ;</p></li>
<li><p>Trier soigneusement sur le site de production ;</p></li>
<li><p>Traiter par différents procédés (fusion, incinération, compactage, vitrification) avant leur conditionnement final, pour une réduction du volume et/ou de la radioactivité ;</p></li>
<li><p>Isoler les déchets.</p></li>
</ul>
<p>Cela aura permis à EDF de réduire depuis 1985 d’un <a href="https://www.edf.fr/groupe-edf/produire-une-energie-respectueuse-du-climat/l-energie-nucleaire/edf-une-expertise-nucleaire-unique/la-gestion-des-dechets-radioactifs">facteur trois</a> le volume total des déchets produits pendant l’exploitation des réacteurs. Les déchets technologiques et de filtration sont ainsi incinérés sur le site de <a href="https://www.cyclife-edf.com/sites/default/files/Cyclife/pdfs/brochures-fiches-techniques/cyclife-incineration-processus-fr.pdf">Centraco</a> pour permettre cette réduction sensible du volume à traiter.</p>
<h2>Le cadre législatif français</h2>
<p>En France, trois lois ont historiquement encadré la gestion des matières et déchets radioactifs. La première, dite <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000356548/">loi Bataille</a> et émanant du rapport du député Christian Bataille sur la stratégie de gestion des déchets radioactifs, date du 30 décembre 1991. Elle a fixé un cadre pour la recherche scientifique sur les déchets radioactifs pendant une durée de quinze ans.</p>
<p>Elle a été suivie par la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000240700">loi sur les déchets radioactifs</a>, du 28 juin 2006, relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs, qui instaure le Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (<a href="https://www.asn.fr/espace-professionnels/installations-nucleaires/le-plan-national-de-gestion-des-matieres-et-dechets-radioactifs">PNGMDR</a>). Ce dernier élabore, en concertation avec de nombreux acteurs, des recommandations pour une gestion optimisée, transparente, complète et durable des matières et déchets radioactifs.</p>
<p>Enfin, la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000032932790/">loi du 25 juillet 2016</a> précise les modalités de création d’une installation de stockage réversible en couche géologique profonde pour les déchets les plus radioactifs.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/reacteurs-nucleaires-smr-de-quoi-sagit-il-sont-ils-moins-risques-172089">Réacteurs nucléaires « SMR » : de quoi s’agit-il ? Sont-ils moins risqués ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>On peut résumer le cadre législatif national et le Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs par une stratégie en trois étapes qui sont :</p>
<ul>
<li><p>Utiliser le maximum de matières radioactives dans les réacteurs ;</p></li>
<li><p>Concentrer et confiner les radionucléides issus de la fission ;</p></li>
<li><p>Stocker les déchets radioactifs ultimes.</p></li>
</ul>
<p>L’organisation en est la suivante : les déchets sont gérés par un établissement public national, l’<a href="https://www.andra.fr/">Andra</a>. Elle est placée sous la tutelle de trois ministres (Énergie, Recherche et Environnement). Elle est contrôlée par l’<a href="https://www.asn.fr/">ASN</a> et évaluée par la <a href="https://www.cne2.fr/">Commission nationale d’évaluation</a> (CNE2), <a href="https://www2.assemblee-nationale.fr/15/les-delegations-comite-et-office-parlementaire/office-parlementaire-d-evaluation-des-choix-scientifiques-et-technologiques/(block)/32013">l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques</a> (OPECST) et <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/lautorite-environnementale">l’Autorité environnementale</a> (AE).</p>
<h2>Tri, entreposage et stockage, trois actions distinctes</h2>
<p>Pour les déchets radioactifs, la loi <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006074220/LEGISCTA000006159291/">différencie l’entreposage (caractère temporaire) du stockage (définitif)</a>.</p>
<p>L’ensemble des activités de la filière nucléaire repose sur le concept de défense en profondeur, répondant à la règle d’imposer trois barrières. Dans les activités de stockage des déchets radioactifs, par exemple, ces trois barrières sont : le colis, l’ouvrage de stockage et le site de stockage.</p>
<p>La loi décrit le classement en six catégories des déchets radioactifs, en fonction de leur niveau de radioactivité et de leur durée de vie. Ces deux critères caractérisent leur traitement (compactés, solidifiés…), leur conditionnement (isolation efficace en colis spécifiques) et la solution de gestion adaptée (surface, couche géologique…).</p>
<p>Fin 2019, le volume global de déchets radioactifs s’élève à 1 670 000 m<sup>3</sup>. Cela représente un cube d’un peu moins de 120 m de côté équivalent à la longueur d’un terrain de foot.</p>
<p>La première catégorie contient les déchets à vie très courte (VTC) : ils proviennent essentiellement du secteur médical, où sont utilisés des produits radioactifs à des fins de diagnostic ou thérapeutiques. Ils sont entreposés sur place afin que leur radioactivité disparaisse, puis évacués dans les filières de gestion de déchets conventionnels. Selon l’Andra, fin 2019, 2077 m<sup>3</sup> de déchets VTC ont été inventoriés.</p>
<p>La seconde catégorie concerne les déchets de très faible activité (TFA, de 1 à 100 Bq/g). Ils représentent 31,3 % en volume des déchets et 0,0001 % de la radioactivité totale. Seule la France les considère comme des déchets radioactifs. Leur radioactivité est proche de la radioactivité naturelle. À titre de comparaison, 1 g d’engrais phosphaté produit une <a href="https://www.sfmn.org/images/pdf/GroupesDeTravail/GT_Radioprotection/Irradiation_naturelle_en_10_episodes.pdf">radioactivité de 50 Bq</a>.</p>
<p>Ce sont essentiellement des gravats et des ferrailles, provenant du fonctionnement et démantèlement des installations nucléaires, mais également de l’industrie utilisant des matériaux naturellement radioactifs. Ils sont stockés, depuis 2003, dans le Centre industriel de regroupement, d’entreposage et de stockage (<a href="https://aube.andra.fr/activites/stockage-des-dechets-de-tres-faible-activite/le-centre-industriel">Cires</a>, dans l’Aube). Il s’agit du premier centre de stockage au monde pour ce type de déchets. Selon l’Andra, fin 2019 le stock de TFA représente 570 000 m<sup>3</sup>.</p>
<p>La troisième catégorie contient les déchets de faible et moyenne activité (FMA-VC, de 100 à 100 000 Bq/g et une durée de vie inférieure à 31 ans). Ils représentent 59,6 % en volume des déchets et 0,03 % de la radioactivité totale. Ils sont issus des activités liées à l’exploitation d’installations nucléaires ou à leur déconstruction (par exemple des vêtements, des outils ou des filtres ou le résidu du traitement d’effluents liquides ou gazeux).</p>
<p>Du fait de leur durée de vie courte et de leur faible ou moyen niveau de radioactivité, le risque devient négligeable au bout de 10 fois leur durée de vie, soit au maximum 310 ans. Ils sont stockés depuis 1992 en surface au <a href="https://aube.andra.fr/">CSA</a> sur le centre de Soulaines (Aube). Ils sont en général placés dans un conteneur en métal ou en béton puis enrobés avec du béton. Un colis de déchets FMA-VC est composé de 15 à 20 % de déchets radioactifs seulement. Selon l’Andra, fin 2019 le stock de FMA-VC est de 961 000 m<sup>3</sup>.</p>
<p>La quatrième catégorie contient des déchets de faible activité à vie longue (FA-VL, de 100 à 100 000 Bq/g et une durée de vie supérieure à 31 ans). Ils représentent 5,9 % en volume des déchets et 0,14 % de la radioactivité totale.</p>
<p>Ils sont issus essentiellement de la déconstruction des anciennes centrales de type <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Uranium_naturel_graphite_gaz">UNGG</a> et des anciennes industries du radium. Les solutions de gestion sont actuellement à l’étude ; ils sont pour l’instant entreposés sur les sites de production. Selon l’Andra, fin 2019 le stock de FA-VL est de 93 600 m<sup>3</sup>.</p>
<p>La cinquième catégorie contient des déchets de moyenne activité à vie longue (MA-VL, de 100 000 à 100 millions de Bq/g et une durée de vie supérieure à 31 ans). Ils représentent 2,9 % en volume des déchets et 4,9 % de la radioactivité totale. Ils proviennent en grande majorité des gaines métalliques entourant le combustible. Ils sont entreposés sur leur lieu de conditionnement (en particulier sur le site de la Hague). Selon l’Andra, fin 2019 le stock de MA-VL est de 42 700 m<sup>3</sup>.</p>
<p>Enfin, la sixième catégorie contient les déchets de haute activité (HA, au-delà de 10 milliards de Bq/g et une durée de vie supérieure à 31 ans). Ils représentent 0,2 % du volume des déchets, mais contribuent à 94,9 % de la radioactivité totale. Ce sont les produits issus du processus de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9action_en_cha%C3%AEne_(nucl%C3%A9aire)">réaction en chaîne de fission</a> : produits de fission (noyaux produits lors de la cassure en deux de l’uranium) et actinides mineurs (radionucléides plus gros que l’uranium créés par absorption de neutrons et désintégration radioactive). Selon l’Andra, fin 2019 le stock de HA est de 4090 m<sup>3</sup>.</p>
<h2>Enfouir dans l’argile</h2>
<p>Les deux catégories de déchets les plus radioactifs, mais les moins volumineuses (HA et MA-VL), sont destinées à être enfouies dans une couche d’argile à 500 m de profondeur. C’est le projet Cigéo, un centre de stockage en couches géologiques profondes. Il sera implanté en Meuse/Haute-Marne. Il a pour objectif de protéger les déchets des agressions externes et de les isoler à long terme de l’environnement. Lorsque la capacité de stockage prévue du site sera atteinte, vers 2150, le site sera alors fermé et mis sous surveillance.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1438842675386634248"}"></div></p>
<p>Selon la <a href="https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/20140527_rapport_cout_production_electricite_nucleaire.pdf">Cour des comptes</a>, sur l’ensemble des exploitants de la filière électronucléaire (EDF, CEA, Framatome et Orano) et la totalité de leur production de déchets radioactifs, 90 % de déchets sont à vie courte (filtres, tissus, gravats) et seulement 10 % sont à vie longue. Les produits de fission et les actinides mineurs qui concentrent la quasi-totalité de la radioactivité représentent environ 7 cm<sup>3</sup>/an/habitant.</p>
<p>En février 2022, la Commission européenne a <a href="https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/da/SPEECH_22_743">adopté une taxonomie</a> répertoriant les « activités économiques ayant un impact favorable sur l’environnement ». La production d’électricité d’origine nucléaire y est désormais incluse, à condition que des garanties soient apportées pour le traitement des déchets. L’occasion d’engager une réflexion concertée au niveau européen sur la gestion de ces déchets ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/179347/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuelle Galichet va recevoir des financements de l’ANR dans le cadre du projet JENII « Jumeaux d’Enseignement Numériques Immersifs et Interactifs ». Emmanuelle Galichet est membre de la Société Française de Physique (SFP), de la Société Française de l'Energie Nucléaire (SFEN) et de Women in Nuclear (WIN).</span></em></p>En France, 1 200 industriels provenant de secteurs économiques différents génèrent des déchets radioactifs. 60 % de ces déchets relèvent de l’industrie électronucléaire.Emmanuelle Galichet, Enseignante chercheure en physique nucléaire, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1758812022-02-09T20:43:37Z2022-02-09T20:43:37ZUn filet de pêche biodégradable pour limiter la pollution plastique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/444753/original/file-20220207-999-1dg6tzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La fragmentation des filets de pêche perdus a des conséquences néfastes pour la faune marine. </span> <span class="attribution"><span class="source">Juliette Lasserre</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Les engins de pêche (filets, casiers…) sont fabriqués à partir de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/plastique-23485">plastiques</a> dont la durée de vie peut atteindre plusieurs centaines d’années, un vrai problème lorsqu’ils sont perdus en mer.</p>
<p>L’accumulation et la fragmentation progressive de <a href="https://theconversation.com/images-de-science-la-pollution-aux-microplastiques-144634">ces déchets dans les eaux</a> ont des conséquences néfastes pour la faune marine, comme l’ingestion de particules de plastique qui impacte ensuite l’ensemble de la chaîne alimentaire.</p>
<p>Autre problème notable dans la liste des <a href="https://doi.org/10.1038/s41598-021-86123-3">risques liés aux dispositifs de pêche dans l’environnement</a> : les engins perdus peuvent être à l’origine de ce qu’on nomme la « pêche fantôme », en continuant de piéger des animaux marins.</p>
<h2>Une offre alternative à construire</h2>
<p>Prenons l’exemple précis de la zone de la Manche où le secteur de la pêche et de l’aquaculture représente une activité économique importante, avec <a href="https://assets.publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/647482/UK_Sea_Fisheries_Statistics_2016_Full_report.pdf">15 % des parts du marché européen</a>. Ici comme ailleurs, les professionnels manquent d’équipement à durée de vie contrôlée : il n’y a pour le moment pas d’engins de pêche biodégradable disponible sur le marché même si plusieurs projets de recherche sont en cours.</p>
<p>Or la substitution de ces plastiques par des matériaux biodégradables représente aujourd’hui une alternative promue par la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?qid=1516265440535&uri=COM:2018:28:FIN">directive européenne</a>. Dans une démarche globale de réduction des déchets, il devient primordial d’adapter la durée de vie du matériau à son utilisation.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/444754/original/file-20220207-999-ozykas.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/444754/original/file-20220207-999-ozykas.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=495&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/444754/original/file-20220207-999-ozykas.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=495&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/444754/original/file-20220207-999-ozykas.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=495&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/444754/original/file-20220207-999-ozykas.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=622&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/444754/original/file-20220207-999-ozykas.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=622&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/444754/original/file-20220207-999-ozykas.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=622&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Collecte de déchets en bord de mer, dont de nombreux filets de pêche échoués, sur la plage du Lohic (Morbihan), en janvier 2022.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Juliette Lasserre</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>C’est dans cette optique que six institutions de recherche et quatre partenaires industriels se sont regroupés <a href="https://indigo-interregproject.eu/">au sein du projet INdIGO</a> pour assurer le développement et l’adoption d’un nouveau filet biodégradable par les professionnels de la pêche et de l’aquaculture.</p>
<p>INdIGO s’attache aussi à améliorer la prévention et la gestion des pollutions générées par les engins, en identifiant les filières de recyclage existantes et en développant une application pour localiser les engins déjà perdus via le programme de science participative « Fish & Click ».</p>
<h2>« Fish & Click », en savoir plus sur les engins de pêche perdus, abandonnés ou rejetés</h2>
<p>Depuis 2020, Fish & Click sollicite les usagers de la mer (plongeurs, pêcheurs, plaisanciers, promeneurs) afin de recenser le matériel de pêche perdu ou abandonné en mer et sur le littoral. Les observations sont signalées via un formulaire simple et accessible à tous, sur le <a href="https://fishandclick.ifremer.fr/">site Internet</a> ou sur l’application mobile <a href="https://play.google.com/store/apps/details?id=fr.ifremer.fishandclick">Fish & Click</a>. La catégorie du matériel retrouvé, le lieu, la date et une photo de l’engin de pêche sont demandés aux participants.</p>
<p>Les données recueillies doivent permettre de cartographier la répartition des déchets plastiques issus des activités de pêche et d’aquaculture et d’orienter le développement de matériaux biodégradables vers les types d’engins les plus enclins à être perdus.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/jG0_lFu5dH8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Présentation de Fish & Click (Ifremer, 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>Fish & Click compte aujourd’hui 440 observateurs et plus de 1860 signalements d’engins et de fragments d’engins perdus dans la zone de la Manche et en Bretagne Sud. Les observations sur le littoral représentent 85 % des signalements, les plages étant plus faciles d’accès que les explorations sous-marines.</p>
<p>Parmi les 18 000 engins signalés, les cordages constituent la majorité des signalements à terre, notamment en Bretagne et dans les Hauts-de-France. La tendance est tout autre en Normandie, puisqu’environ 60 % des signalements sont dans la catégorie « autre » et concernent du matériel d’aquaculture (filet de mytiliculture, poches ostréicoles…). Une part importante de ce matériel est également signalée en Bretagne Nord (25 %).</p>
<p>En mer, trois types d’engins perdus sont majoritairement observés : les lignes, les cordages et les casiers respectivement dans le nord-est du Golfe de Gascogne, la mer Celtique et la Manche. Le nombre d’observations est très variable d’une zone à l’autre, que ce soit en mer ou sur le littoral. La poursuite de la collecte de données par les citoyens permettra de consolider ces résultats.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1463553004041297926"}"></div></p>
<h2>Les engins de pêche biodégradables</h2>
<p>Dans le cadre du projet INdIGO, l’un des objectifs concerne la mise au point d’un engin de pêche résistant et biodégradable en milieu marin.</p>
<p>Pour cela, il faut d’abord s’entendre sur ce que signifie « biodégradable ».</p>
<p>Évoquer les biomatériaux exige en effet d’identifer au mieux les aspects d’origine et de fin de vie. Le terme « bioplastique » renvoie ainsi à trois familles de polymères : les polymères biosourcés et biodégradables, les polymères biosourcés et non biodégradables et les polymères non biosourcés mais biodégradables.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/bienvenue-dans-le-monde-du-biosource-112719">Le terme « biosourcé »</a> s’applique aux polymères dont la majorité des constituants est issue de la biomasse, c’est-à-dire de matières premières renouvelables qui peuvent se régénérer sur une période de temps significative à l’échelle humaine. Les ressources minérales et les énergies fossiles sont considérées comme des ressources naturelles, mais non renouvelables, ne pouvant se régénérer sur une période suffisamment courte pour les activités humaines.</p>
<p>Le terme « biodégradable » s’applique aux polymères issus de ressources renouvelables ou non. En effet, la biodégradabilité dépend principalement de la structure chimique du plastique et des caractéristiques du milieu dans lequel il est placé (compost industriel, sol réel, milieu marin…). Selon la <a href="https://www.boutique.afnor.org/fr-fr/norme/nf-en-13432/emballage-exigences-relatives-aux-emballages-valorisables-par-compostage-et/fa049121/454">norme NF EN 13432</a>, la biodégradabilité désigne la capacité intrinsèque d’un matériau à être dégradé par une attaque microbienne, pour simplifier progressivement sa structure et finalement se convertir facilement en eau, CO<sub>2</sub> et/ou CH<sub>4</sub> et une nouvelle biomasse.</p>
<h2>En conditions réelles</h2>
<p>La première étape concernant la mise au point d’un engin de pêche résistant et biodégradable en milieu marin correspond au développement d’une nouvelle formulation, composée d’un mélange de plastiques, qui sera utilisée pour fabriquer les monofilaments (filaments composés d’un brin unique) et multifilaments (filaments composés de plusieurs brins).</p>
<p>Les acteurs du projet tentent ainsi de concevoir la meilleure combinaison possible afin d’élaborer des matériaux avec les propriétés requises (résistance, élasticité, efficacité…).</p>
<p>Deux prototypes de filets biodégradables seront ensuite développés en mai 2022 dans le but de remplacer une partie des filets actuellement utilisés pour l’aquaculture (filet de catinage) et pour la pêche (filet fin).</p>
<p>L’une des particularités de ce projet concerne l’étude approfondie du comportement du filet en conditions réelles, tout en s’assurant que l’impact sur l’environnement est nul. Des tests de déploiement en mer seront réalisés par la suite avec les professionnels de la pêche et de l’aquaculture.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/une-nouvelle-version-de-la-nasse-a-poisson-pour-limiter-limpact-de-la-peche-155619">Une nouvelle version de la nasse à poisson pour limiter l’impact de la pêche</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Le suivi de la dégradation du filet sera étudié via des tests de vieillissement en mer. Des tests de biodégradation et d’écotoxicité permettront de vérifier scientifiquement que les filets INdIGO, en fin de vie, sont réellement assimilables par les micro-organismes, sans aucun impact sur l’environnement marin.</p>
<p>Enfin, une analyse du cycle de vie permettra de modéliser différents scénarios de fin de vie du nouveau filet, afin de fournir une analyse robuste pour évaluer les impacts environnementaux à chaque étape de la vie du produit.</p>
<hr>
<p><em>Juliette Lasserre (Ifremer) a contribué à l’élaboration de cet article. <a href="http://indigo-interregproject.eu/newsletter/">Une newsletter dédiée</a> permet de suivre l’avancement du projet INdIGO</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/175881/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La fragmentation des déchets plastiques dans les eaux a des conséquences très néfastes pour la faune. Des recherches sont conduites pour élaborer des filets de pêche résistants et moins polluants.Morgan Deroiné, Ingénieure R&D matériaux biodégradables, Université Bretagne SudLaetitia Miquerol, Ingénieur en écologie marine, IfremerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1718572022-01-31T19:07:33Z2022-01-31T19:07:33ZLes jeunes, plus réticents que leurs aînés à agir contre la pollution numérique ?<p>Imaginez que notre messagerie intègre un compteur calculant son impact écologique, ou un indicateur des ressources naturelles contenues dans notre téléphone ou notre portable. Comme l’agroalimentaire, qui complète le « nutri-score » par un « planet score » ou un « ecoscore », nous pourrions disposer d’indicateurs comparables pour mesurer notre pollution numérique.</p>
<p>Dans un monde où tout se quantifie, cette question apparaît essentielle pour que nous percevions davantage les conséquences de notre utilisation des technologies de l’information et de la communication (TIC), notamment leurs consommations énergétiques.</p>
<p>La dernière étude de l’Ademe <a href="https://librairie.ademe.fr/consommer-autrement/5226-evaluation-de-l-impact-environnemental-du-numerique-en-france-et-analyse-prospective.html">donne le numérique responsable de 10 % de la consommation électrique en France</a>. Les évolutions récentes dues au confinement, comme le télétravail, ne sont pas encore mesurées.</p>
<p>Ce sujet a été le thème d’un travail d’abord individuel puis collectif dans le cadre d’un cours d’initiation à la recherche en Bachelor à l’Essca lors du dernier trimestre 2021. À partir d’un entretien envoyé massivement, puis complété par d’autres semi-directifs : au total, 400 personnes réparties en trois tranches d’âges (génération Z, génération Y et Z et retraités) auront participé à notre étude. Penchons-nous sur les résultats.</p>
<h2>La « sobriété numérique », encore méconnue</h2>
<p>Commençons par le terme de « sobriété numérique », employé dans le premier questionnaire, qui à lui seul suscite des interrogations : le sujet de l’impact écologique du numérique semble largement méconnu, quel que soit l’âge concerné.</p>
<p>Nous avons donc commencé par des illustrations de cette pollution pour interpeller les répondants : combien avez-vous de téléphones et de chargeurs inutilisés ? Avez-vous une idée de l’impact écologique d’une visioconférence ? Nettoyez-vous votre messagerie régulièrement ? Cette courte énumération permet alors à l’interlocuteur de mieux cerner la notion et éventuellement de nous faire part de ses pratiques.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/6AVOrkbkO3Q?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Pollution : l’insoutenable croissance du numérique. (Alternatives économiques, 20 janvier 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>Il émerge trois profils-types parmi nos interrogés : la génération Z, les générations X et Y, et les retraités.</p>
<h2>Générations Z, X et Y : la pollution numérique secondaire</h2>
<p>Zoé et Léo sont encore étudiants, parfois aux portes du monde du travail, ou à peine entrés dedans. Bien sûr, ils sont conscients de l’importance de l’écologie et partagent les idées de Greta Thunberg. Ils ne comptent plus les téléphones, tablettes, chargeurs, câbles, enceintes et écouteurs connectés qui font partie de leur quotidien. L’écran est un élément essentiel et le temps passé à l’utiliser ne se mesure plus. Alors, quand il est question de changer les comportements et de restreindre l’usage du numérique, l’écologie devient secondaire. « Elle (la pollution) existait avant ». La réponse oscille entre « WTF » et « OK boomer ».</p>
<p>Favorable à l’économie circulaire, le portable reconditionné séduit peu : l’attrait de la nouveauté reste encore vif, les incertitudes de la vie antérieure sont un frein. La différence de prix ne semble pas être un critère décisif. Mais cela reste une bonne idée, « si les autres l’adoptent ». Surtout, le numérique véhicule une idée d’indépendance et d’autonomie qui s’assimile à une forme de liberté quasiment sacralisée : « C’est à moi ». Donc je consomme si je veux. À ce titre, la possibilité d’une taxe pour compenser l’externalité de la pollution numérique est largement rejetée.</p>
<p>Candice et Ruben sont de jeunes actifs. Entre (télé) travail et activités personnelles, les écrans sont bien présents, et leur nombre aussi. La sobriété numérique, ils connaissent car le terme a surgi dans le monde professionnel. Un téléphone reconditionné, pourquoi pas ? Mais finalement, vu l’écart de prix… Nettoyer sa boîte mail ? Quand j’ai le temps. D’ailleurs, combien en ai-je ? Le sujet de la pollution numérique et de la sobriété reste encore très théorique. Plutôt une idée intéressante qu’une pratique.</p>
<h2>Retraités, le numérique de récup’</h2>
<p>Monique et Roger quant à eux profitent de leur retraite. Les enfants et petits enfants donnent volontiers leurs anciens appareils aux aînés, qui donc n’en manquent pas. Ils font ainsi de la récupération… peut-être un peu forcée. D’ailleurs, pour eux, c’est vraiment en fin de vie qu’il faut songer à en changer. Pour eux, le numérique, c’est surtout le lien avec leurs proches. Alors, avec ce téléphone ou un autre ?</p>
<p>La sobriété numérique ne leur parle pas en tant que concept. En revanche, puisqu’ils ont le temps, ce sont eux qui nettoient le plus fréquemment leurs messageries – moins pleines que celles de leurs petits-enfants, moins nombreuses que celles de leurs enfants.</p>
<p>Finalement, comme Monsieur Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir, la sobriété numérique leur est familière dans la vie de tous les jours. Ils sont réceptifs à cette notion car ils veulent laisser un monde « pas trop pourri à leurs petits enfants ». De ce fait, le recyclage des vieux appareils leur apparaît naturel.</p>
<h2>Écarts entre la parole et le geste</h2>
<p>Au-delà du terme, il existe donc un besoin de pédagogie, de concret et d’exemples parlants. Une fois celle-ci appréhendée, les plus âgés interrogés se montrent réceptifs, conscients de l’importance du sujet, n’hésitant pas à l’approfondir et envisageant d’adapter leurs comportements au bénéfice des générations futures. La notion est encore méconnue, certes, mais elle est en bonne voie pour recevoir un accueil positif.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1234616967933448192"}"></div></p>
<p>À l’inverse, les plus jeunes se montrent plus réticents à faire œuvrer d’un effort laborieux. Il y a donc un paradoxe à explorer entre cette identification à des enjeux écologiques ambitieux et planétaires et des pratiques quotidiennes contraignantes. D’ailleurs, ceux qui marchent pour le climat sont-ils les mêmes que ceux qui rechignent changer leurs habitudes ? Ceci mérite assurément une étude afin de mieux comprendre cette situation.</p>
<p>Cette étude pose autant de questions qu’elle apporte de réponses. Elle souligne en tout cas que faute d’éducation et de pédagogie, notre consommation énergétique liée aux TIC risque fort de rester un sujet à moyen et long terme…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/171857/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cet article a été rédigé par l’auteur et les étudiants en bachelor de l’Essca dans le cadre d’un cours d’initiation à la recherche.</span></em></p>Une étude réalisée par des étudiants révèle que les jeunes, plus sensibilisés à la pollution numérique que les plus âgés, semblent aussi moins enclins à agir pour la combattre.François Delorme, Maître de conférences en sciences de gestion, chercheur associé CERAG, membre du WIKISGK, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1741622022-01-04T19:08:02Z2022-01-04T19:08:02Z« Bien, mais pas assez » : quand les employés jugent hypocrites les objectifs verts de leurs entreprises<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/438799/original/file-20211222-49721-s3rhe2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=73%2C127%2C959%2C670&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Nous portons tous des jugements moraux lorsque nous constatons qu’une organisation prêche mais n’agit pas…
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixahive.com/photo/an-employee-working-on-reports/">Pixahive</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La mise en œuvre de la durabilité est urgente, comme en témoignent encore le récent <a href="https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg1/">rapport</a> du GIEC des Nations unies sur le changement climatique et les initiatives mondiales visant à mobiliser l’action, telles que la <a href="https://news.un.org/en/">COP-26</a>. Face à ces questions environnementales et sociales pressantes, de nombreuses organisations ont fixé des objectifs ambitieux en matière de durabilité, à l’image de l’engagement de Nestlé à atteindre des émissions nettes de <a href="https://www.nestle.com/randd/sustainability">gaz à effets de serre nulles d’ici 2050</a> ou l’intention de Coca-Cola de <a href="https://www.coca-colacompany.com/news/coke-announces-ambitious-sustainability-goal">recycler autant de bouteilles et de canettes</a> qu’elle n’en vend d’ici 2030.</p>
<p>Cette communication des organisations pourrait inciter les employés, qui jouent un rôle central dans la mise en œuvre de la durabilité car ils sont responsables de la <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/0149206311436079">transformation de ces objectifs en résultats quotidiens</a>, à participer aux efforts de durabilité.</p>
<p>Cependant, un problème peut survenir lorsque les organisations sont perçues comme créant un décalage entre les paroles et les actes, ce qui signifie que les promesses et les engagements ne sont pas directement suivis par la pratique. Dans de telles situations, l’hypocrisie, une interprétation hautement démotivante, peut apparaître même lorsque les organisations sont engagées dans des efforts de durabilité.</p>
<p>Dans une <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10551-021-04954-6">étude</a> récente, à paraître dans le <em>Journal of Business Ethics</em>, nous explorons le cas d’une organisation du secteur des cosmétiques reconnue comme un leader en matière de durabilité mais au sein de laquelle certains employés jugeaient hypocrite l’organisation et leurs supérieurs.</p>
<p>Nous avons donc étudié quand et comment les interprétations de l’hypocrisie apparaissent dans la mise en œuvre de la durabilité à travers 30 entretiens avec des employés.</p>
<h2>Capturer les subjectivités</h2>
<p>L’hypocrisie est une interprétation d’un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0191308518300030">désalignement entre une parole et une intention</a>. En ce sens, nous portons tous des jugements moraux lorsque nous observons une entreprise prêcher et ne pas agir. Dans le cas des employés, ces analyses sont souvent influencées par leurs expériences vécues au sein des organisations, par des affaires antérieures impliquant leurs supérieurs, voire par des convictions, des croyances ou des connaissances spécifiques des enjeux durabilité.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/438801/original/file-20211222-13-skmwr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/438801/original/file-20211222-13-skmwr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/438801/original/file-20211222-13-skmwr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/438801/original/file-20211222-13-skmwr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/438801/original/file-20211222-13-skmwr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/438801/original/file-20211222-13-skmwr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/438801/original/file-20211222-13-skmwr3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les expériences passées ainsi que les convictions influencent l’analyse que font les employés des initiatives de leurs employeurs en termes de durabilité.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pixahive.com/photo/corporate-employee/">Pixahive</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nous avons ainsi identifié quatre scénarios fondés sur deux grands raisonnements de jugement moral : conséquentialiste (basé sur les résultats) et déontologique (basé sur les motifs).</p>
<p>Prenons comme exemple l’objectif d’abolir les emballages à usage unique d’ici 2022, créé par l’entreprise que nous avons étudiée. Jusqu’à présent, les actions visant à atteindre cet objectif sont restées embryonnaires.</p>
<p>Dans un premier scénario apparaît une <strong>« hypocrisie basée sur les résultats »</strong>. Les employés analysent l’aspiration de l’organisation et concluent qu’il est difficile de voir des résultats clairs. Viola, une employée ayant des connaissances techniques en matière d’emballage, nous a par exemple confié ses inquiétudes :</p>
<blockquote>
<p>« Ils viennent de créer un objectif de suppression des emballages à usage unique jusqu’en 2022, mais il n’y a pas de projet pour s’en occuper dans un avenir proche. Comment allons-nous faire dans un délai aussi court ? Mon patron essaie de minimiser la gravité de la situation en disant “une étape à la fois”, ou en avançant que l’entreprise, au moins, essaie. J’ai l’impression que de nombreuses personnes avec lesquelles je travaille ont de bonnes intentions, mais que bien souvent, elles ne comprennent pas vraiment les implications de leurs actions et approuvent ces projets. »</p>
</blockquote>
<p>Dans son explication du cas, elle met l’accent sur l’absence de résultats lorsqu’elle évoque son supérieur ou encore que les « implications de leurs actions » ne sont pas pleinement comprises. Elle travaille directement avec les emballages et a une vision particulière du sujet. Par conséquent, elle pense que l’hypocrisie découle de résultats insuffisants.</p>
<p>Un deuxième scénario possible est celui de <strong>« l’hypocrisie fondée sur les motifs »</strong>. Dans celui-ci, les employés pensent que l’entreprise ou les supérieurs ont créé cet objectif pour de mauvaises raisons (par exemple, dans une optique de « greenwashing »). Les employés peuvent avoir eu des expériences antérieures dans l’organisation ou avoir participé à certaines conversations, ce qui les amène à conclure qu’effectivement, la réduction des emballages à usage unique représente une hypocrisie. C’est le cas de Philippe, un employé qui organise des événements pour promouvoir les produits de l’entreprise :</p>
<blockquote>
<p>« Je n’ai pas le droit de distribuer de gobelets en plastique au public. […] Mais en même temps, dans les bureaux, nous avons des gobelets en plastique ! L’entreprise a de nombreux tabous liés à la durabilité, et c’est l’un d’entre eux. »</p>
</blockquote>
<p>Le troisième scénario cumule <strong>« l’hypocrisie fondée sur les motifs et les résultats »</strong>. Si Viola avait également remis en question les intentions réelles derrière les objectifs affichés, en plus de ses doutes sur les capacités de résultats, elle aurait alors une « double » vision de l’hypocrisie dans ce cas.</p>
<p>Enfin, un quatrième scénario est celui où les employés observent un décalage entre les mots et les intentions, mais concluent qu’il n’y a rien de mal à cela, à l’image du témoignage suivant que nous avons recueilli :</p>
<blockquote>
<p>« Je ne peux même pas juger certaines initiatives de durabilité, car je n’ai aucune connaissance à leur sujet. Mais je doute vraiment de beaucoup de choses. Je doute que nous atteignions zéro émission de carbone en, je ne sais pas, 2032, ou que nous ayons un “impact positif”. »</p>
</blockquote>
<p>Dans ce cas, les employés donnent à l’entreprise le bénéfice du doute dans une situation de <strong>« rationalisation des désalignements »</strong>. Ils peuvent percevoir certains décalages, mais ne les considèrent pas encore comme de l’hypocrisie.</p>
<h2>Réduire l’hypocrisie perçue</h2>
<p>Au-delà de l’identification de ces différentes possibilités d’émergence de l’hypocrisie, notre étude peut fournir aux managers des pistes pour la limiter dans les interprétations des employés.</p>
<p>En ce qui concerne « l’hypocrisie fondée sur les motifs », les entreprises peuvent prendre certaines mesures pour rapprocher les employés des processus de mise en œuvre de la durabilité.</p>
<p>Pour revenir à l’exemple des emballages à usage unique, supposons que l’entreprise ait créé des objectifs importants dans les processus de production. Après les avoir fixés, les responsables peuvent demander aux employés concernés de participer à l’élaboration des objectifs d’étapes à court et moyen terme.</p>
<p>Pour ceux qui ne participent pas directement au processus de production, une possibilité est de les impliquer dans la communication de ces objectifs. Comment pouvons-nous aligner cet objectif avec le reste de l’entreprise ? Quelle est la meilleure façon d’impliquer les autres membres de votre département dans nos activités de durabilité ? Ces questions peuvent amorcer un processus positif de participation des employés qui réduit les éventuelles interprétations d’hypocrisie.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/438800/original/file-20211222-4747-11n60vf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/438800/original/file-20211222-4747-11n60vf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=431&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/438800/original/file-20211222-4747-11n60vf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=431&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/438800/original/file-20211222-4747-11n60vf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=431&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/438800/original/file-20211222-4747-11n60vf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/438800/original/file-20211222-4747-11n60vf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/438800/original/file-20211222-4747-11n60vf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Impliquer les équipes dans la communication des objectifs verts de l’entreprise, une solution pour limiter les perceptions d’hypocrisie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pxhere.com/fr/photo/1432557">Pxhere</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cela se produit pour au moins deux raisons : premièrement, il nous est plus difficile de penser que quelqu’un est hypocrite qu’une entreprise. L’idée lointaine d’une grande organisation aux intérêts obscurs est beaucoup plus facile à accepter comme une hypocrisie que celle d’un collègue qui s’efforce quotidiennement de faire avancer les questions de durabilité. Deuxièmement, lorsqu’une personne est directement impliquée dans des activités de durabilité, elle comprend mieux les difficultés, les défis et les obstacles liés à la mise en œuvre de ces activités, ce qui réduit la possibilité que les décalages entre les discours et les actions soient considérés comme de l’hypocrisie.</p>
<p>D’autre part, pour éviter « l’hypocrisie basée sur les résultats », il est nécessaire d’augmenter la transparence et la fréquence des échanges avec les employés. Les résultats à court, moyen et long terme doivent être communiqués efficacement, et les non-résultats encore plus. Lorsqu’un objectif est fixé mais n’est pas atteint, il ne faut pas prendre peur, mais plutôt admettre qu’il n’a pas été possible de faire ce qui avait été promis et envisager des plans pour corriger le tir.</p>
<p>Ces dernières années, nous avons justement vu certaines entreprises reculer dans la communication de leurs objectifs et indicateurs par crainte de décevoir les espoirs qui pouvaient naître chez les différentes parties prenantes.</p>
<p>Cependant, la sincérité, qui consiste à admettre qu’il était impossible d’atteindre ce qui avait été initialement proposé, est souvent davantage appréciée que des objectifs ambigus et des chiffres incomplets. Ainsi, lorsque les employés perçoivent un effort légitime pour obtenir des résultats, même s’ils ne sont pas entièrement atteints pour une raison valable, ils finissent par ne pas juger le décalage comme de l’hypocrisie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174162/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lucas Amaral Lauriano ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une trop faible implication des équipes en charge de déployer les politiques de durabilité risque de faire naître un scepticisme quant aux intentions réelles de leurs employeurs.Lucas Amaral Lauriano, Professeur de ressources humaines, organisations et négociation., IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1736732021-12-13T18:28:35Z2021-12-13T18:28:35ZTornades aux États-Unis : le casse-tête du nettoyage post-catastrophe<p>Pour les communautés du Sud-Est et du Midwest des États-Unis, frappées par une <a href="https://www.nytimes.com/live/2021/12/11/us/tornadoes-midwest-south#arkansas-tornado-nursing-home-monette">série hors norme de tornades ces 10 et 11 décembre 2021</a>, l’évaluation des dégâts prendra un certain temps. Les opérations de nettoyage prendront, elles, des mois… voire des années.</p>
<p>La gestion d’énormes quantités de débris et de déchets constitue l’un des principaux défis que doivent relever les collectivités à la suite d’une catastrophe naturelle. Souvent, cette tâche dépasse les capacités des gestionnaires de déchets locaux, laissant les détritus intacts pendant des semaines, des mois, des années.</p>
<p>En novembre 2018, l’incendie de forêt le plus destructeur et le plus coûteux de l’histoire de la Californie, le Camp Fire, fait 85 victimes et <a href="https://www.fire.ca.gov/incidents/2018/11/8/camp-fire/">détruit près de 19 000 structures</a>. Un an plus tard, les équipes étaient encore en train de ramasser et de transporter des tas de bois, de métaux, d’appareils électroménagers, de terre contaminée, de produits chimiques ménagers toxiques et d’autres débris et déchets totalisant <a href="https://storage.googleapis.com/proudcity/buttecountycarecovers/uploads/2019/10/DR-4407-CA-Recovery-Update-043-10.23.19.pdf">plus de 3,2 millions de tonnes courtes</a>… soit à peu près le poids de 2 millions de voitures.</p>
<p>L’ouragan Michael, qui a frappé la Floride en octobre 2018, a laissé de son côté environ 13 millions de mètres cubes de débris. Pour visualiser à quoi cela ressemble, imaginez un amoncellement de 13 millions de boîtes, chacune de la taille d’un sèche-linge. Plus d’un an après, les équipes étaient <a href="https://fox8.com/2019/10/10/one-year-later-florida-panhandle-struggles-to-recover-from-hurricane-michael/">toujours en train d’enlever les déchets</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1469721781405638660"}"></div></p>
<p>En tant que spécialiste de <a href="https://scholar.google.com/citations?user=vUhXX-MAAAAJ&hl=en">l’ingénierie urbaine</a>, de la <a href="https://scholar.google.com/citations?user=rytzGosAAAAJ&hl=en">gestion et de la planification des catastrophes</a> et de la <a href="https://scholar.google.com/citations?user=J8dGrPwAAAAJ&hl=en">gestion des déchets</a>, nous considérons qu’il s’agit d’un problème essentiel et insuffisamment étudié.</p>
<p>Les catastrophes vont continuer à se produire et les pertes qu’elles occasionnent vont continuer à augmenter en raison du changement climatique, de la croissance démographique, de l’urbanisation, de la déforestation et du vieillissement des infrastructures.</p>
<p>Nos sociétés ont aujourd’hui un besoin urgent de meilleures stratégies pour traiter les montagnes de déchets que ces événements laissent derrière eux.</p>
<h2>Une quantité incroyable de débris</h2>
<p>Les catastrophes naturelles liées au climat – inondations, glissements de terrain, tempêtes, incendies de forêt, vagues de chaleur et de froid extrêmes – touchent des millions de personnes dans le monde. Ces événements se sont multipliés au fil du temps, en particulier au cours des dernières décennies, tout comme les pertes qu’ils occasionnent.</p>
<p>En 2020, les États-Unis ont ainsi connu un nombre record de <a href="https://www.noaa.gov/stories/record-number-of-billion-dollar-disasters-struck-us-in-2020">22 catastrophes naturelles</a>, ayant chacune causé au moins un milliard de dollars de dommages. Pour 2021, leur nombre s’élève à <a href="https://www.noaa.gov/news/us-hit-with-18-billion-dollar-disasters-so-far-year">18 événements de ce type si on arrête la comptabilité début octobre</a>. L’épidémie de tornades de la mi-décembre viendra sans aucun doute s’y ajouter.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/437023/original/file-20211211-140267-1tvh5qs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Map showing locations of major storms, flooding and wildfires across the US" src="https://images.theconversation.com/files/437023/original/file-20211211-140267-1tvh5qs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/437023/original/file-20211211-140267-1tvh5qs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/437023/original/file-20211211-140267-1tvh5qs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/437023/original/file-20211211-140267-1tvh5qs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/437023/original/file-20211211-140267-1tvh5qs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=416&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/437023/original/file-20211211-140267-1tvh5qs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=416&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/437023/original/file-20211211-140267-1tvh5qs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=416&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">De janvier à septembre 2021, dix-huit catastrophes météorologiques et climatiques ont frappé les États-Unis, entraînant pour chacune des coûts évalués à un milliard de dollars.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.noaa.gov/news/us-hit-with-18-billion-dollar-disasters-so-far-year">NOAA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les catastrophes produisent généralement des milliers, voire des millions de tonnes de débris lors d’un seul événement. Par exemple, les déchets provenant d’ouragans comprennent de la végétation, comme des arbres et des arbustes ; des déchets solides municipaux, comme des ordures ménagères ; des matériaux de construction et de démolition ; des véhicules ; et des produits ménagers dangereux, comme des peintures, des produits de nettoyage, des pesticides et des produits chimiques pour piscines.</p>
<p>Les débris des incendies de forêt sont en grande partie constitués de cendres, de sols contaminés, de métal et de béton, ainsi que d’autres débris structurels et de produits ménagers dangereux – peintures, produits de nettoyage, solvants, huiles, batteries, herbicides, pesticides…</p>
<h2>L’exemple de la gestion post-Katrina</h2>
<p>Le ramassage et le nettoyage des débris après une catastrophe représentent un processus lent, coûteux et dangereux.</p>
<p>Tout d’abord, les équipes doivent évacuer les débris des routes utilisées pour les opérations de sauvetage. Elles déplacent ensuite ces matériaux vers des zones de stockage temporaire. Il n’existe aujourd’hui aucun moyen de trier ou de stocker facilement les matières dangereuses ; celles-ci restent donc mélangées à la masse des autres débris. Cela pose des problèmes majeurs pour la réutilisation et le recyclage des déchets post-catastrophe.</p>
<p>Au-delà des risques directs pour la santé et la sécurité, les débris menacent également l’environnement. Ils peuvent émettre des polluants atmosphériques et contaminer les eaux souterraines, les eaux de surface et le sol. Les débris et les déchets non collectés peuvent en outre entraver les opérations de sauvetage et de récupération et ralentir les efforts de reconstruction.</p>
<p>Lorsque l’ouragan Katrina a inondé La Nouvelle-Orléans en 2005, il a laissé derrière lui quelque <a href="https://fas.org/sgp/crs/misc/RL33477.pdf">75 millions de mètres cubes de déchets</a> qui ont entravé et ralenti les efforts de reconstruction. Les débris comprenaient près de 900 000 produits « blancs » (comme des réfrigérateurs), 350 000 voitures et plus de 16 000 tonnes de viande pourrie. Les coûts de nettoyage ont été estimés à environ 4 milliards de dollars.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/7unlPvNxLLA?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Retour en vidéo sur la catastrophe Katrina. (National Geographic/Youtube, 2012).</span></figcaption>
</figure>
<h2>Le recyclage comme horizon</h2>
<p>Lors d’un <a href="https://csun.uic.edu/publications/files/NSF_PDMEM_Final_Report.pdf">atelier réunissant des spécialistes</a> qui s’est tenu en 2019, nous avons identifié les étapes clés pour gérer durablement les débris et déchets de catastrophes.</p>
<p>Selon nous, ces tâches essentielles se résument ainsi :</p>
<ul>
<li><p>identifier ce que contiennent les déchets ;</p></li>
<li><p>trouver de meilleures approches pour leur recyclage et leur réutilisation ;</p></li>
<li><p>concevoir de nouvelles technologies pour identifier les composants dangereux et trier les différents types de déchets ;</p></li>
<li><p>développer des marchés pour promouvoir la réutilisation et le recyclage.</p></li>
</ul>
<p>Aujourd’hui, les responsables publics et les planificateurs en savent en effet peu sur la quantité et les types de matériaux générés lors d’événements extrêmes : ce qu’ils contiennent, dans quelles proportions, s’ils sont gros et triables ou fins et mélangés, quelle quantité peut être réutilisée ou recyclée, etc.</p>
<p>Le développement de nouvelles technologies et d’approches de gestion pouvant faciliter la caractérisation, la réutilisation et le recyclage de ces débris doit devenir une priorité absolue.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/73OFvzz68Es?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Les habitants de Liberty City, en Floride, se plaignent de la saleté et des odeurs provenant du traitement des débris après le passage de l’ouragan Irma en 2017.</span></figcaption>
</figure>
<p>Les drones et les technologies de détection autonomes peuvent par exemple être combinés à l’intelligence artificielle pour estimer les quantités et la qualité des débris, les types de matériaux qu’ils contiennent et la manière dont ils peuvent être rapidement réutilisés. Les technologies qui permettent un tri et une séparation rapides des matériaux mélangés peuvent également accélérer les opérations de gestion des débris.</p>
<p>Une autre manière d’aborder le problème pourra consister à créer de nouveaux matériaux de construction durables – tout particulièrement dans les zones exposées aux catastrophes – pour faciliter la réutilisation des débris.</p>
<p>Enfin, de nouvelles approches commerciales pourront contribuer à créer une demande et un accès aux déchets et aux produits recyclés. Avec un tri approprié, certains matériaux issus de catastrophes peuvent être utilisés pour fabriquer de nouveaux produits ou matériaux. On pense ici aux arbres entiers qui ont été abattus et peuvent devenir des ressources pour les fabricants de meubles.</p>
<p>Aujourd’hui, la possibilité de faire correspondre des matériaux post-catastrophe à une potentielle demande est trop souvent gâchée.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/173673/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sybil Derrible receives funding from the National Science Foundation and the Illinois Department of Transportation. In Fall 2019, he was a Visiting Professor at the University of Transport Technology in Hanoi (Vietnam). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Juyeong Choi receives funding from the National Science Foundation, Natural Hazards Center, and the Florida Department of Transportation. He is an Assistant Professor in Civil and Environmental Engineering, FAMU-FSU College of Engineering.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Nazli Yesiller receives funding from the National Science Foundation, California Air Resources Board, California Department of Resources Recycling and Recovery, and W.M. Keck Foundation.</span></em></p>La gestion d’énormes quantités de débris et de déchets constitue l’un des principaux défis à relever pour les collectivités confrontées à une catastrophe naturelle.Sybil Derrible, Associate Professor of Sustainable Infrastructure Systems, University of Illinois ChicagoJuyeong Choi, Assistant Professor, Florida A&M University-Florida State University College of Engineering, Florida State UniversityNazli Yesiller, Director, Global Waste Research Institute, California Polytechnic State UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1613932021-11-22T21:37:56Z2021-11-22T21:37:56ZQuand l’open data et l’open source deviennent des leviers pour accélérer la transition écologique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/431000/original/file-20211109-22-61aj2q.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C4%2C1389%2C962&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des simulateurs ouverts et réutilisables ont été créés par l’Ademe pour aider les citoyens à réduire leur impact carbone.</span> <span class="attribution"><span class="source">Ademe</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Sites Internet, applications d’information ou d’achat… ces très nombreux outils comptent chaque jour des millions d’utilisateurs. Mais dès qu’il s’agit d’obtenir des informations environnementales, cela exige souvent pour les citoyens d’aller chercher l’information par ailleurs, sans qu’ils sachent toujours sur quelles données s’appuient les résultats. De plus en plus soucieux de tenir compte de l’impact environnemental de leur consommation, les citoyens se trouvent bien souvent démunis à l’heure de choisir.</p>
<p>C’est à cet enjeu que répond <a href="https://datagir.ademe.fr">Datagir</a>, le service conçu par l’Agence de la transition écologique (Ademe) en s’appuyant sur les données qu’elle produit. Son objectif : que l’information environnementale arrive directement jusqu’au consommateur, intégrée aux applications qu’il utilise déjà ou via des simulateurs aussi simples à utiliser qu’à intégrer à tout type de site.</p>
<h2>Plus de 100 jeux de données en open data</h2>
<p>Chaque année, l’Ademe produit une multitude de données sur l’environnement. L’idée de Datagir est d’exploiter ces plus de 100 jeux de données ouvertes dont elle dispose pour en faire bénéficier le plus grand nombre.</p>
<p>Deux grandes thématiques émergent : l’alimentation avec Agribalyse, la base de données qui recense l’impact environnemental de plus de 2 500 produits. La Base Carbone, qui répertorie de nombreux ratios CO<sub>2</sub> (appelés facteurs d’émissions) : transport, énergie, biens de consommation…</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/DNdv0TbxJgc?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Agribalyse, du champ à l’assiette, améliorons nos pratiques (Ademe, 31 juillet 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>Certains acteurs, sous l’impulsion de l’Ademe, peuvent désormais s’approprier ces données en les réintégrant par exemple à leur service : c’est ce qu’ont fait l’application Yuka, le site Marmiton, Frigo Magic ou Open Food Facts avec Agribalyse. Cela leur a permis de créer puis fournir à leurs utilisateurs un écoscore, à l’image du nutriscore qui existe déjà, afin qu’ils aient accès à l’impact de la recette qu’ils s’apprêtent à mitonner ou du paquet de chips qu’ils sont tentés d’acheter.</p>
<h2>Des simulateurs personnalisables</h2>
<p>Avec ces données, Datagir a par ailleurs conçu à date six simulateurs qui permettent au citoyen de calculer son empreinte carbone ou de s’informer dans différents domaines. Présents sur le site de Datagir et chacun un site dédié, ils ont surtout pour vocation d’être diffusés et encapsulés en iframe : concrètement, cela signifie que n’importe quel organisme peut s’en saisir et les intégrer à son site sans effort, pour directement toucher sa communauté.</p>
<ul>
<li><p><a href="https://www.monimpacttransport.fr">Mon impact transport</a> : alors que le transport représente 30 % des émissions françaises de CO<sub>2</sub>, cet outil permet de comparer l’impact des différents modes de mobilité afin d’aider les citoyens à faire leurs choix.</p></li>
<li><p>Sa déclinaison <a href="https://www.teletravail.monimpacttransport.fr">Mon impact transport-télétravail</a> permet de calculer les émissions de gaz à effet de serre évitées sur les déplacements grâce au télétravail.</p></li>
<li><p><a href="https://www.monconvertisseurco2.fr">Mon convertisseur CO₂</a> permet de mesurer les émissions nécessaires pour fabriquer et consommer les objets qui nous entourent, et ainsi les comparer entre eux ou mieux percevoir ce qui se cache derrière une tonne de CO<sub>2</sub> par exemple.</p></li>
<li><p><a href="https://www.mesfruitsetlegumesdesaison.fr">Mes fruits et légumes de saison</a> : alors que 25 % des émissions de gaz à effet de serre en France sont liées à l’alimentation, cet outil permet de découvrir quels sont les fruits et légumes de saison et de mesurer l’impact carbone de son alimentation.</p></li>
<li><p><a href="http://quefairedemesdechets.fr">Que faire de mes déchets</a> pour savoir comment et où trier ses déchets, mais aussi être guidé pour éviter de produire ce type de déchet.</p></li>
<li><p><a href="https://www.nosgestesclimat.fr">Nos Gestes Climat</a> permet d’informer le citoyen sur son empreinte environnementale, de faire la pédagogie sur les ordres de grandeur de la transition à opérer pour respecter l’accord de Paris et d’encourager à adopter de gestes concrets, à notre échelle.</p></li>
</ul>
<h2>Un simulateur national, de nombreuses déclinaisons</h2>
<p>Le simulateur d’empreinte carbone individuel Nos Gestes Climat, développé en partenariat avec l’Association Bilan Carbone (ABC), s’inscrit comme tous les outils Datagir dans une démarche open source. La méthodologie de calcul est transparente, améliorée en continu grâce aux retours utilisateurs.</p>
<p>S’il a déjà conquis un très large public (plus de 700 000 visiteurs début novembre 2021), le simulateur peut aussi être vu comme un point de départ fiable favorisant les initiatives de développement à d’autres échelles. Cette base open source permet ainsi à ces initiatives de gagner du temps en repartant d’un existant sans obligatoirement tout reconstruire.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/rkcEP7CfYzo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">L’interview Datagir – Clément Auger : Comment nous avons adapté Nos Gestes Climat à Centrale Nantes (DatAgir ADEME-betagouv, 15 avril 2021).</span></figcaption>
</figure>
<p>La première déclinaison a été développée par l’École Centrale Nantes dans le cadre de l’option « Neutralité Carbone ». Grâce à cette <a href="https://ngc-ecn.netlify.app/">version personnalisée et adaptée aux enjeux de leur campus</a>, les étudiants ont pu sensibiliser les usagers de l’établissement aux problématiques environnementales pour initier des changements à l’échelle universitaire.</p>
<p>Plus récemment, <a href="https://www.gamearth.green/">Game Earth</a> et <a href="https://www.bl-evolution.com/">BL Evolution</a> ont développé une version qui permet de calculer l’empreinte carbone associée à ses pratiques sportives (équipements, déplacements, alimentation) : <a href="https://www.monmatchcarbone.fr/">Mon Match Carbone</a>.</p>
<p>À d’autres échelles et dans d’autres contextes, des développements sont également en cours, preuves du potentiel d’accélération de l’open data et de l’open source en matière de transition écologique !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/161393/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Martin Régner ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Construit grâce aux données de l’Ademe, Datagir est un outil destiné à tous les acteurs souhaitant guider les consommateurs dans leurs choix.Martin Régner, Intrapreneur, service Datagir, Ademe (Agence de la transition écologique)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1697652021-10-20T19:40:33Z2021-10-20T19:40:33ZVos appareils électroniques sont-ils obsolètes de plus en plus rapidement ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/427214/original/file-20211019-15-1mp7047.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=24%2C9%2C2020%2C1523&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un écran cassé peut souvent se remplacer, mais ce n’est pas le cas de tous les composants de nos téléphones, tablettes et ordinateurs.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/zooboing/4668010058/in/photostream/">Patrick Hoesly, Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>En 2019, l’ADEME <a href="https://librairie.ademe.fr/cadic/1866/guide-pratique-impacts-smartphone.pdf">soulignait</a> que 88 % des Français changent de téléphone alors que le précédent est encore en état de marche et que seuls 15 % des téléphones sont collectés pour être recyclés.</p>
<p>La fabrication de dispositifs électroniques et leur remplacement rapide demandent beaucoup de ressources, notamment <a href="https://multimedia.ademe.fr/infographies/infographie-terres-rares-ademe/">terres rares</a> et ressources pétrolières. En effet, à l’heure même où l’<a href="https://www.lemonde.fr/blog/huet/2021/08/09/le-rapport-du-giec-en-18-graphiques/">on cherche à diminuer drastiquement son utilisation</a>, le pétrole reste un <a href="https://www.planete-energies.com/fr/medias/decryptages/la-petrochimie-une-industrie-incontournable">matériau de base</a> pour de nombreux produits de notre quotidien (plastiques, tissus synthétiques, films d’emballage notamment).</p>
<p>Ces produits représentent également une source de pollution importante : <a href="https://multimedia.ademe.fr/infographies/infographie-terres-rares-ademe/">80 % des déchets électroniques</a> ne peuvent pas être recyclés et sont soit incinérés, soit enfouis.</p>
<p>Même si elle ne résout pas tous les problèmes liés à la surconsommation, la lutte contre l’obsolescence programmée permet de limiter l’utilisation extensive des ressources et la pollution, tout en permettant aux consommateurs de réaliser de substantielles économies.</p>
<h2>Qu’est-ce que l’obsolescence programmée ?</h2>
<p>L’obsolescence programmée est définie en France par l’<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000032225325/">article L441-2 du code de la consommation</a> : « L’obsolescence programmée se définit par l’ensemble des techniques par lesquelles le metteur sur le marché d’un produit vise à en réduire délibérément la durée de vie pour en augmenter le taux de remplacement ».</p>
<p>Cette obsolescence programmée peut revêtir de multiples facettes. L’<strong>obsolescence technique</strong> fait suite à une faiblesse matérielle délibérée qui rend le produit inutilisable. Elle peut se manifester sous la forme de la panne d’un composant essentiel, de l’utilisation de matériaux peu robustes ou encore en introduisant un dispositif limitant la durée de vie du produit. Par exemple, certaines imprimantes indiquent que les cartouches d’impression sont vides <a href="https://www.lesnumeriques.com/imprimante/obsolescence-programmee-imprimantes-epson-ne-convainc-pas-n72957.html">alors qu’il reste encore de l’encre</a>.</p>
<p>L’<strong>obsolescence logicielle</strong> impacte les biens électroniques, principalement les smartphones, les tablettes et les ordinateurs. Certains appareils ne permettent plus l’installation des systèmes et logiciels les plus récents. Officiellement, ce blocage permet d’éviter l’installation d’un logiciel que l’appareil ne pourrait pas utiliser pleinement en raison de ses caractéristiques techniques.</p>
<p>A contrario, l’utilisateur se voit parfois imposer l’installation de la dernière version du système d’exploitation, celle-ci ralentissant considérablement le fonctionnement de l’appareil. L’entreprise Apple a été condamnée en France à 25 millions d’euros d’amende <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/apple-condamne-a-une-amende-de-25-millions-d-euros-par-l-autorite-de-la-concurrence_2117598.html">pour ce motif</a>.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-lutte-pour-une-agriculture-libre-bricoler-et-partager-pour-semanciper-147051">La lutte pour une agriculture libre : bricoler et partager pour s’émanciper</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Enfin, l’<strong>obsolescence programmée indirecte</strong> rend un produit inutilisable en raison de l’indisponibilité d’un produit ou d’un composant associé. Nous retrouvons dans cette catégorie l’impossibilité de trouver un chargeur de remplacement pour un produit électronique, l’incapacité de réparer un produit en raison de l’inexistence des pièces détachées nécessaires à sa réparation ou encore l’excessivité du prix de la réparation. C’est la raison pour laquelle l’Europe <a href="https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/l-europe-veut-de-vrais-chargeurs-universels-20210923">souhaite imposer l’utilisation de chargeurs universels pour les smartphones</a>.</p>
<p>Deux autres catégories d’obsolescence viennent s’ajouter à celles-ci : l’<strong>obsolescence esthétique</strong>, qui ne repose pas sur une usure anticipée ou une impossibilité d’utiliser le produit, mais sur le recours à des techniques marketing pour créer un besoin de changement chez l’utilisateur. Le produit possédé apparaît alors comme dépassé, soit en raison de son esthétique, soit des fonctionnalités qu’il propose. Nous pouvons également citer ici l’<strong>obsolescence écologique</strong>, qui a vu le jour <a href="https://www.moustique.be/actu/2017/09/26/les-ecolos-planifient-aussi-obsolescence-168505">ces dernières années</a> : certaines entreprises incitent les consommateurs à changer un produit en état de fonctionnement par un nouveau produit qui serait plus économe en énergie.</p>
<h2>D’où vient ce concept ?</h2>
<p>Officiellement, l’obsolescence programmée est apparue suite à la crise économique de 1929 : Bernard London, un courtier new-yorkais, <a href="https://www.cairn.info/revue-du-mauss-2014-2-page-50.htm">propose</a>, alors de déterminer une durée de vie pour les produits afin d’en faciliter le renouvellement. Il ne s’agit pas précisément d’obsolescence programmée, mais plutôt d’« obsolescence planifiée ». Dans cette vision, chaque produit doit avoir une durée de vie déterminée lors de sa fabrication, et les <a href="https://www.cairn.info/revue-du-mauss-2014-2-page-50.htm">consommateurs ont l’obligation de ne plus utiliser ces produits passée cette limite</a>, même si les produits peuvent encore techniquement être utilisés. Bien que cette proposition n’ait pas été mise en œuvre, elle a contribué à l’acceptation de l’obsolescence programmée, démontrant ses atouts économiques et sociaux – les enjeux environnementaux et ceux liés à la rareté de certaines ressources n’étaient alors pas d’actualité.</p>
<p>Le premier exemple d’obsolescence programmée date cependant d’avant la crise de 1929. En 1924, les principaux fabricants d’ampoules mondiaux se sont réunis secrètement, créant le premier cartel mondial. Les ampoules fabriquées jusqu’alors avaient une durée de vie importante, la durée moyenne de fonctionnement étant de 2500 heures (une ampoule <a href="https://www.nouvelobs.com/sciences/20160607.OBS2022/la-belle-histoire-de-l-ampoule-qui-brille-depuis-115-ans.html">fonctionne depuis 1901</a> dans la caserne de pompiers de Livermore en Californie). Cette longévité limitant les revenus de ces entreprises, la décision de <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/industry-story-au-diable-la-vie-eternelle.N543299">plafonner la durée de fonctionnement à 1000 heures</a> fut prise. Chaque entreprise du cartel se devait de respecter cet engagement, et des contrôles étaient réalisés dans les sites de fabrication pour vérifier sa bonne mise en œuvre.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/e9xmn228HM0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Depuis cette époque, l’obsolescence programmée est <a href="https://journals.openedition.org/tc/12557">omniprésente</a> dans le monde économique, permettant de redynamiser des marchés saturés ou en voie de saturation.</p>
<h2>Comment lutter contre l’obsolescence programmée ?</h2>
<p>Plusieurs initiatives permettent de lutter contre l’obsolescence programmée.</p>
<p>Après la création d’un « <em>Repair Café</em> » à Amsterdam en 2009, des communautés d’utilisateurs se sont développées à travers l’Europe pour proposer des ateliers de réparation de produits défectueux ou des <a href="https://www.linfodurable.fr/technomedias/ou-trouver-des-tutoriels-en-ligne-pour-reparer-vos-objets-vous-memes-17317">tutoriels</a>. D’autres communautés permettent d’offrir une deuxième vie à des objets en leur trouvant un nouveau propriétaire, que ce soit en les vendant, par don ou par troc.</p>
<p>Les États se mobilisent aussi pour lutter contre ce phénomène. Ainsi, en France, depuis le 1<sup>er</sup> janvier 2021, les fabricants de certains produits doivent afficher un indice de réparabilité. Cet indice permet à l’acheteur de connaître les possibilités de réparation d’un produit lors de son achat.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/dans-la-fabrique-de-lindice-de-reparabilite-en-vigueur-depuis-janvier-2021-155536">Dans la fabrique de « l’indice de réparabilité » en vigueur depuis janvier 2021</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>L’obsolescence logicielle représente un défi majeur. Une <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/numerique-et-environnement-remise-au-parlement-du-rapport-sur-lobsolescence-logicielle-prevu">étude</a> initiée par le Ministère de la Transition Écologique suggère d’imposer aux fabricants d’assurer les mises à jour pendant au moins 5 ans après la fabrication. En attendant que de telles initiatives aboutissent, les auteurs de cette étude recommandent de ne faire que les mises à jour indispensable à la sécurité pour les équipements électroniques anciens, car les mises à jour peuvent ralentir l’équipement concerné.</p>
<p>La législation française considère l’obsolescence programmée comme un délit <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006069565/LEGISCTA000032222837/#LEGISCTA000032225329">Article 441-2 du Code de la consommation</a>, mais la preuve de ce délit est presque impossible à établir. Une <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4054_proposition-loi">proposition de loi a été initiée le 7 avril 2021</a>. Celle-ci propose d’étendre la durée minimale de garantie légale sur les biens matériels de 2 à 10 ans et de garantir la disponibilité des pièces détachées sur cette durée.</p>
<p>Si celle-ci est validée, elle représentera une avancée considérable pour lutter contre le phénomène d’obsolescence programmée.</p>
<p>Une prise de conscience des utilisateurs est également nécessaire. En effet, au-delà de la problématique d’obsolescence avec une panne empêchant totalement le fonctionnement de l’appareil, d’après une étude de l’ADEME, 88 % des téléphones portables remplacés chaque année <a href="https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/1886-tiroirs-pleins-de-telephones-remplaces-consommateurs-et-objets-a-obsolescence-percue.html">fonctionnent encore</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169765/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Delphine Billouard-Fuentes ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>D’où viennent les pannes de nos appareils électroniques ? Sont-ils réparables ? Retour sur les différents types d’obsolescence et les outils législatifs pour contenir les abus.Delphine Billouard-Fuentes, Professeur associé, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1620572021-06-13T16:35:29Z2021-06-13T16:35:29ZComment freiner le commerce illégal de déchets plastiques ?<p>Une récente opération mondiale contre la pollution marine, coordonnée en Europe par Interpol et Frontex, <a href="https://www.europol.europa.eu/newsroom/news/1-600-offences-detected-in-global-operation-against-marine-pollution">a dévoilé 1 600 délits environnementaux</a>, dont une grande partie liée au commerce illégal de déchets. 22 personnes suspectées d’être impliquées dans un réseau criminel de trafic de déchets plastiques entre l’Europe et l’Asie ont été arrêtées.</p>
<p>Rien qu’en 2020, dans les pays de l’OCDE, plus de 1,7 milliard de tonnes de déchets plastiques ont été envoyées de façon illégale à des pays tiers via des intermédiaires ou des « courtiers ».</p>
<p>La consommation de plastique dans le monde a atteint en 2018 les <a href="https://www.statista.com/statistics/282732/global-production-of-plastics-since-1950/">360 millions de tonnes</a>. La production de déchets est si importante que son recyclage ou sa valorisation énergétique génèrent un marché dont le volume commercial attendu pour 2022 dépasse les 50 milliards de dollars. Dans l’Union européenne, 25 millions de tonnes de déchets plastiques sont générées chaque année, <a href="https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/IP_18_5">mais seuls 30 % sont récupérés pour le recyclage</a>.</p>
<p>L’exportation vers des pays membres ou extérieurs à l’Union européenne est une option prévue et permise par la norme européenne, tant qu’il existe des preuves solides que la récupération de matériaux s’effectuera dans des conditions équivalentes à celles imposées par la législation européenne.</p>
<p>Cependant, la gestion opérationnelle finale de ces déchets plastiques (recyclage et valorisation énergétique) dans les pays qui l’encouragent entraîne des coûts et le paiement de droits et de taxes. Ce qui génère un marché noir afin d’optimiser les profits.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/401046/original/file-20210517-23-1pskm2v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/401046/original/file-20210517-23-1pskm2v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/401046/original/file-20210517-23-1pskm2v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/401046/original/file-20210517-23-1pskm2v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/401046/original/file-20210517-23-1pskm2v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/401046/original/file-20210517-23-1pskm2v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/401046/original/file-20210517-23-1pskm2v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/401046/original/file-20210517-23-1pskm2v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les principales évolutions dans les exportations de déchets plastiques vers l’Asie depuis janvier 2018.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.interpol.int/es/Noticias-y-acontecimientos/Noticias/2020/Un-informe-de-INTERPOL-alerta-del-drastico-aumento-de-los-delitos-relacionados-con-los-residuos-plasticos">Interpol</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Pourquoi il existe un marché noir des déchets</h2>
<p>Les motivations derrière ce commerce illégal sont nombreuses, mais voici les trois principales :</p>
<ul>
<li><p>La volonté de tirer profit d’une matière première en évitant les coûts du traitement approprié.</p></li>
<li><p>Le prix du plastique recyclé n’est pas compétitif par rapport au plastique vierge lorsque le prix du pétrole est relativement bas. Cela incite à s’en débarrasser par le biais de pays tiers.</p></li>
<li><p>L’existence d’un surplus important sur le marché producteur et le manque de traçabilité, en raison d’un <a href="https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/IP_18_6444">écart évident entre l’offre et la demande</a> pour les plastiques recyclés.</p></li>
</ul>
<p>Ces expéditions illégales sont facilitées par un mauvais contrôle dans les ports de départ et par l’utilisation de licences d’exportation de matières plastiques (via des déclarations frauduleuses), alors qu’il s’agit en réalité de déchets plastiques.</p>
<p>Ceux-ci finissent dans des pays où ils sont traités illégalement : soit ils sont brûlés dans des installations énergétiques, soit ils sont déversés directement dans des décharges. Dans le meilleur des cas, un faux tissu industriel est formé pour recycler les plastiques sans contrôle sanitaire ni contrôle de la main-d’œuvre mobilisée.</p>
<h2>Incendies de décharges</h2>
<p>Depuis que les contrôles à l’importation se sont renforcés dans les pays qui recevaient traditionnellement ces déchets – alors que leur propre production est excédentaire – les pays d’Europe du Sud ont signalé une augmentation des feux de déchets plastiques dans les stations de traitement et les décharges.</p>
<p>L’administration espagnole a par exemple observé cette <a href="https://www.interpol.int/es/Noticias-y-acontecimientos/Noticias/2020/Un-informe-de-INTERPOL-alerta-del-drastico-aumento-de-los-delitos-relacionados-con-los-residuos-plasticos">évolution</a> liée à l’élimination des déchets accumulés dans les champs et les entrepôts de certains recycleurs.</p>
<p>L’Espagne avait l’habitude d’exporter près de 60 % de ses déchets plastiques vers la Chine. Depuis que cette dernière ne l’autorise plus, les centres de recyclage n’ont pas la capacité de traiter tout le plastique qui n’est plus exporté. Il a été estimé qu’entre 2017 et 2018, la fréquence des incendies de déchets en Espagne <a href="https://www.interpol.int/es/Noticias-y-acontecimientos/Noticias/2020/Un-informe-de-INTERPOL-alerta-del-drastico-aumento-de-los-delitos-relacionados-con-los-residuos-plasticos">a augmenté de 100 %</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/401047/original/file-20210517-23-r3ctwp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/401047/original/file-20210517-23-r3ctwp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/401047/original/file-20210517-23-r3ctwp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/401047/original/file-20210517-23-r3ctwp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/401047/original/file-20210517-23-r3ctwp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/401047/original/file-20210517-23-r3ctwp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/401047/original/file-20210517-23-r3ctwp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/401047/original/file-20210517-23-r3ctwp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Types d’activités illégales de traitement des déchets plastiques, en janvier 2018.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.interpol.int/es/Noticias-y-acontecimientos/Noticias/2020/Un-informe-de-INTERPOL-alerta-del-drastico-aumento-de-los-delitos-relacionados-con-los-residuos-plasticos">Interpol</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Améliorer la gestion des plastiques</h2>
<p>La situation actuelle semble complexe. D’un côté, le contrôle à l’encontre de ces délits s’est renforcé. Les pays du Sud-est asiatique ne sont plus les importateurs traditionnels de déchets plastiques qu’ils étaient, ou du moins plus dans les mêmes proportions. La population de son côté souhaite de plus en plus contribuer au recyclage, ce qui entraîne une augmentation de la récupération de matériaux plastiques. Dans ce contexte, l’industrie de recyclage est toutefois incapable d’assimiler tous ces volumes de déchets.</p>
<p>Cela conduit les mafias à cherche de nouvelles destinations et « marchés » illégaux. On observe un transfert des déchets vers des pays tels que la Turquie, ou même au sein de l’Union européenne vers la Bulgarie, la Roumanie et la Pologne. Là, ils sont utilisés dans les usines de production d’énergie comme combustible de substitution, ce qui permet d’économiser environ 40 euros par tonne de plastique brûlé illégalement.</p>
<p>Pour résoudre cette situation, trois types de solutions existent :</p>
<p><strong>Techniques</strong></p>
<ul>
<li><p>Réduire ou éliminer la fabrication de plastiques non recyclables ou difficilement, comme ceux <a href="https://www.boe.es/doue/2019/155/L00001-00019.pdf">à usage unique</a> ; promouvoir des matériaux biodégradables alternatifs.</p></li>
<li><p>Augmenter la qualité des matériaux récupérés, en améliorant les systèmes de collecte sélective et l’efficacité des centres de tri.</p></li>
</ul>
<p><strong>Économiques</strong></p>
<ul>
<li><p>Faire en sorte que le recyclage soit plus rentable pour les entreprises, à travers des normes de recyclabilité et en augmentant la part des plastiques recyclés dans les nouveaux produits. Améliorer les systèmes de gestion des déchets impliquerait des économies de <a href="https://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:2df5d1d2-fac7-11e7-b8f5-01aa75ed71a1.0023.02/DOC_1&format=PDF">77 à 120 € par tonne collectée</a>.</p></li>
<li><p>Soutenir l’innovation et le financement pour le développement de plastiques plus intelligents et recyclables. On estime les besoins d’investissements en la matière entre <a href="https://www2.deloitte.com/content/dam/Deloitte/my/Documents/risk/my-risk-blueprint-plastics-packaging-waste-2017.pdf">8 400 et 16 600 millions d’euros</a>.</p></li>
</ul>
<p><strong>Politiques</strong></p>
<p>Sur le plan politique, il s’agit de lutter contre les importations illégales, sur la base de l’amendement de la <a href="https://www.basel.int/Portals/4/Basel%20Convention/docs/text/BaselConventionText-s.pdf">Convention de Bâle</a> – traité international sur le contrôle des mouvements transfrontaliers de déchets dangereux et leur élimination, signé par 180 pays. Le but est de renforcer les règles d’exportation et d’obliger les opérateurs du commerce des déchets à demander le consentement du gouvernement du pays destinataire.</p>
<p>Au sein de l’Union européenne, plusieurs objectifs ambitieux ont été adoptés. <a href="https://ec.europa.eu/info/research-and-innovation/research-area/environment/circular-economy/plastics-circular-economy_en">Dix millions de tonnes</a> de plastiques recyclés seront convertis en nouveaux produits d’ici à 2025. Et en <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=celex:32018L0852">2030</a>, 55 % des déchets de contenus plastiques seront recyclés. Les bouteilles devront par ailleurs contenir au minimum 30 % de matériau recyclé.</p>
<p>Toutes ces mesures, comme d’autres qui émergent au fil du temps, contribueront à diminuer et éliminer le gouffre entre l’offre et la demande. Et elles compliqueront le traitement illégal de plastiques dont se nourrissent les mafias et les recycleurs sans scrupule.</p>
<p>Le défi est complexe et les consommateurs doivent également faire un effort pour changer leurs habitudes, afin de réduire la fabrication de certains produits en plastique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/162057/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>José Vicente López ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En 2020, plus de 1,7 milliard de tonnes de déchets plastiques ont été transférées illégalement vers des pays tiers. Car leur gestion est coûteuse et l’industrie du recyclage incapable de tout absorber.José Vicente López, Investigador en el Departamento de Ingeniería y Gestión Forestal y Ambiental, Universidad Politécnica de Madrid (UPM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1487872020-10-25T16:44:32Z2020-10-25T16:44:32ZBonnes feuilles : « Plastique, le grand emballement »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/365349/original/file-20201025-13-1lab40m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/OTDyDgPoJ_0">Jonathan Chng/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p><em>Nous publions un extrait de l’ouvrage de Nathalie Gontard (avec Hélène Seingier), <a href="https://www.editions-stock.fr/livres/essais-documents/plastique-le-grand-emballement-9782234088481">« Plastique, le grand emballement »</a>, paru le 7 octobre 2020 chez Stock. Dans ce passage, les autrices s’intéressent au traitement des déchets plastiques.</em></p>
<hr>
<p>Chaque Français ou Française jette, à l’année, l’équivalent de son poids en plastique. Que deviennent ces monceaux de barquettes de frites, ballons de football ou tables de jardin une fois que nous ne les utilisons plus ? Entre un tiers et la moitié de ces déchets finiront dans la nature, dans un cours d’eau ou dans une forêt, où ils seront libres de se fragmenter puis de polluer là où le vent les portera. Les autres, ceux qu’une bonne âme aura déposés dans une poubelle, poursuivront leur existence dans une station d’enfouissement ou une usine d’incinération.</p>
<p>Dans la terre, l’eau ou le feu, voilà où finissent 86 % de nos déchets plastiques. Tout le monde s’en contentait jusqu’à présent mais avec l’explosion de la consommation, les cimetières de polymères débordent salement. Le plastique a conquis notre vie pour le meilleur. Aujourd’hui ses déchets l’envahissent pour le pire.</p>
<p>Face à nos angoisses montantes, la circularité enflamme notre imaginaire. Elle pourrait régénérer, en un tour de cycle, toute cette matière qui se dégrade. Le recyclage est officiellement déclaré « remède miracle » par nos autorités ! En parallèle, elles pointent du doigt les « plastiques à usage unique » et les interdisent. Mais ces mesures, nées d’un mélange d’optimisme volontaire et de déni de réalité, comportent des limites qui laissent encore pas mal de champs libres à un matériau aussi tentaculaire que le plastique.</p>
<h2>Cache-cache dans nos décharges</h2>
<p>J’ai un projet que peu de personnes sur Terre m’envient : j’aimerais partir en exploration souterraine dans les décharges et les stations d’enfouissement de déchets. Voilà des lieux où s’entassent, depuis les années 1950, tous les résidus de la consommation humaine, et notamment les plastiques. Une sorte de gisement géologique contenant, strate par strate, la mémoire de tous les objets que nous avons produits, achetés, consommés puis jetés : des vêtements, des appareils, des matériaux de construction… Un extraordinaire catalogue chronologique de nos modes de vie. Ou de ce qu’il en reste.</p>
<p>Les décharges constituent aussi une passionnante source de savoir sur le devenir des plastiques une fois en terre. Certes, l’âge des polymères enfouis ne dépasse guère une cinquantaine d’années mais nous pourrions tout de même en tirer des informations pour comprendre le comportement de la matière plastique dans ce lieu où elle repose une fois que nous cessons de l’utiliser.</p>
<p>J’ai ainsi un projet de recherche, que je souhaite faire financer par l’Union européenne : effectuer des carottages dans les stations d’enfouissement, prélever des échantillons en profondeur pour scruter l’état de dégradation des déchets plastiques en fonction de leur ancienneté. Je suis surprise que personne n’ait eu la curiosité de le faire à ce jour.</p>
<p>Ce qui est assurément le plus surprenant dans ces lieux mal aimés de notre mémoire matérielle, c’est que les déchets plastiques y sont stockés… dans du plastique. Lorsqu’une station d’enfouissement ouvre aujourd’hui, on creuse un grand trou, on le tapisse d’immenses bâches dites géotextiles, constituées d’un mélange de tissu et de plastique, puis on y entasse les déchets. Des drains évacuent les petits jus qui s’échappent du délicieux rassemblement d’ordures tandis que la partie solide, elle, attend que le temps passe.</p>
<p>Mais nous savons que le plastique vieillit inexorablement, se dégrade, se fragmente. Ce processus vaut pour les déchets mais aussi pour les fameuses bâches censées les retenir. Lorsque nos résidus plastiques seront réduits à l’échelle nanométrique, plus rien ne risque de les empêcher de passer entre les mailles du filet, qui se sera lui-même lentement décomposé. Il n’y a objectivement aucune raison pour que tout ce petit monde de micro - et de nanoparticules de plastique, emballages ménagers et bâches géotextiles, ne parte un jour se balader main dans la main dans les recoins environnants. Certes, il faut du temps pour que ces déchets plastiques soient réduits aux échelles micro et nanométriques, mais certains sont déjà stockés depuis plus de cinquante ans et, à l’époque, les décharges n’avaient même pas le filet de la bâche géotextile pour les retenir. Je brûle de savoir ce qu’il est advenu de ces résidus entassés au cœur des sols.</p>
<p>Des industriels, des politiques mais aussi <a href="https://www.ellenmacarthurfoundation.org/publications/reuse">certaines fondations</a> ou ONG reprochent aux décharges et stations d’enfouissement de représenter un gâchis : la valeur économique de la matière plastique y est perdue, déplorent-ils. Pourtant, rien ne nous empêcherait de trier et de retraiter les polymères qui dorment dans nos décharges si nous savions les recycler. Mais le talon d’Achille de l’enfouissement, son véritable danger, est d’un autre ordre, bien plus inquiétant : pour stocker correctement le plastique, il faudrait un matériau qui dure bien plus longtemps que lui, et qui soit capable de retenir des particules si minuscules qu’elles passent les barrières des organismes vivants.</p>
<p>Vous pouvez objecter que l’on stocke de dangereux déchets nucléaires dans des cocons métalliques enfouis bien loin sous nos pieds. Vous avez tout à fait raison. Mais si ces résidus sont plus toxiques que le plastique, leur volume, lui, est limité : 2 kg par an et par habitant, contre cinquante fois plus pour les plastiques dans nos contrées. Sans compter que l’homme n’a pas encore trouvé de solution qui garantisse à nos descendants l’innocuité de cet héritage empoisonné.</p>
<p>Les plastiques enfouis dans nos stations sont donc destinés, à terme, à rejoindre leurs contemporains qui ont fui directement dans la nature, pour contaminer nos eaux douces et nos océans, après avoir transité par nos sols.</p>
<p>Mais que deviendront nos innombrables tonnes de polymères usagés ? Les taux de mise en décharge sont devenus inférieurs à 2 % dans certains pays comme la Suisse ou la Norvège. Ils ont choisi d’autres options de fin de vie pour les plastiques, comme l’incinération.</p>
<p>Quoi qu’il se passe en 2025 ou plus tard, les décharges existantes constituent déjà un extraordinaire stock de matière plastique. La question de la destruction ou de la valorisation de ce stock reste ouverte, d’abord pour éliminer définitivement le risque qu’il représente, avant d’espérer en récupérer soit de l’énergie soit de la matière.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/148787/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Gontard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les décharges constituent une passionnante source de savoir sur le devenir des plastiques une fois en terre.Nathalie Gontard, Directrice de recherche, professeure, sciences de l’aliment et de l’emballage, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.