tag:theconversation.com,2011:/us/topics/bretagne-35081/articlesBretagne – The Conversation2024-03-12T16:04:05Ztag:theconversation.com,2011:article/2217642024-03-12T16:04:05Z2024-03-12T16:04:05ZQuand les cormorans huppés collaborent avec les biologistes<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/580672/original/file-20240308-30-hix4g6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2619%2C2005&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Par les pelotes qu'ils rejettent, les cormorans livrent régulièrement de précieuses informations sur la biodiversité marine aux scientifiques.</span> <span class="attribution"><span class="source">Philippe Maes/Université Bretagne Sud</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Voici une pelote de réjection de cormoran huppé, <em>Gulosus aristotelis</em>, posée sur la vitre d’un scanner de bureau. Je l’ai ramassée avec beaucoup d’autres en mai 2012 sur l’îlot Er Valueg, non loin de l’île de Houat, à une quinzaine de kilomètres au large de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/bretagne-35081">côte du Morbihan</a>. Ces <a href="https://theconversation.com/fr/topics/oiseaux-20808">oiseaux</a> marins rejettent à peu près une pelote par jour sur les îlots qu’ils fréquentent toute l’année. Ils s’y retrouvent en période de reproduction mais aussi le reste du temps pour se toiletter, interagir socialement, digérer, dormir, et aussi… pour régurgiter des pelotes entre deux sessions de pêche en mer.</p>
<p>Les pelotes contiennent les restes non digérés des proies des cormorans. Ils attrapent et engloutissent tout ce qui bouge sous la surface de la mer : essentiellement des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/poissons-21149">poissons</a>, mais aussi des crevettes et d’autres crustacés. Parmi ces restes, on peut voir ici des fragments de crâne, des vertèbres et même, au centre de la pelote sur cette image, la petite bille transparente d’un cristallin, reste indigeste d’un œil de poisson.</p>
<h2>Récolteur de pelotes</h2>
<p>Si je suis devenu ramasseur de pelotes, c’est en fait pour étudier la biodiversité marine. Peu de recherches sont menées pour caractériser les peuplements de poissons côtiers, qui entrent largement dans le régime alimentaire d’<a href="https://www.documentation.eauetbiodiversite.fr/notice/00000000015df173f15a0ec0cffbb6ff">espèces exploitées par la pêche</a>. Ainsi, merlans, merlus, lieus, bars, des poissons habituels des étals de nos marchés, sont <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.0022-1112.2004.00400.x">des prédateurs de petites espèces côtières communes</a> tels le lançon ou le tacaud, sans grande valeur commerciale. De plus, ces petites espèces abondantes et ordinaires sont une composante essentielle de la biodiversité marine, un peu comme le sont les oiseaux communs de nos jardins. Ainsi leur suivi temporel à long terme permet de réaliser un état des lieux des écosystèmes et nous renseigne globalement sur leur évolution.</p>
<p>Il est donc intéressant de mieux connaître l’état des peuplements de ces espèces. L’abondance des différentes espèces fluctue-t-elle avec les saisons ? Ou d’une année à l’autre ? Est-elle dépendante de facteurs environnementaux comme la température et donc du réchauffement global ? Le biologiste peut aussi avoir besoin de mesurer certains paramètres biologiques de ces espèces comme leur vitesse de croissance ou encore de déterminer quelle est leur période de reproduction.</p>
<p>Mais pour répondre à ces questions, il faut des moyens en mer : bateaux, lignes, filets… Il faut aussi prélever des spécimens toute l’année, par tous les temps, en toutes saisons. Et répéter ces campagnes plusieurs années de suite, pour consolider les données. La méthode est à la hauteur du questionnement, mais coûte très cher et demande beaucoup de temps et d’énergie. Idéalement il faudrait, pour le chercheur biologiste que je suis, sous-traiter cette phase de prélèvements : trouver une main-d’œuvre motivée, compétente et capable d’échantillonner à bas coût par tout temps. Bref, il faut un plan B.</p>
<h2>Des déchets pleins de données</h2>
<p>La main-d’œuvre est justement fournie par les cormorans huppés et la pelote sur l’image montre comment ils nous font parvenir leurs échantillons. De fait, il est possible d’en ramasser tout au long de l’année sur les îlots de la côte sud-morbihannaise où stationnent les cormorans. Ensuite, au laboratoire, en triant et étudiant les restes non digérés qui s’y trouvent, nous obtenons des indices sur ce que ces oiseaux marins chassent et mangent, et donc sur les espèces de poissons présentes dans les zones prospectées.</p>
<p>Les éléments qui nous intéressent tout particulièrement ici sont les « otolithes » : ces petites concrétions blanches en forme d’écaille ou de pointe de lance visibles sur l’image. L’otolithe, littéralement « pierre d’oreille », fait partie de l’oreille interne des poissons osseux, organe de l’équilibre qui leur permet de capter et ressentir leurs mouvements dans les trois directions de l’espace.</p>
<p>La forme des otolithes est <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-the-marine-biological-association-of-the-united-kingdom/article/abs/t-harkonen-guide-to-the-otoliths-of-the-bony-fishes-of-the-northeast-atlantic-256-pp-hellerup-denmark-danbiu-aps-1986-price-5200/9D245F52472A7FD0D81EB5262EDA427C">propre à chaque espèce de poisson</a>. Ce sont eux qui nous permettent d’identifier les proies des cormorans huppés, de les dénombrer, et même d’en calculer la taille ou la masse, celles-ci étant proportionnelles à la longueur de l’otolithe. On peut mentionner que ces otolithes enregistrent aussi les caractéristiques du milieu dans lequel a vécu le poisson, entre leurs cernes de croissance semblables à celles des arbres, <a href="https://www.inc.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/biodiversite-lotolithe-un-gps-chimique-dans-loreille-des-poissons">mais c’est une autre histoire</a>.</p>
<h2>Reconstituer les cycles de vie des petits poissons côtiers</h2>
<p>Notre suivi à long terme montre qu’une bonne vingtaine d’espèces différentes peuvent être capturées par les cormorans de la côte sud du Morbihan. Certaines sont présentes toute l’année, d’autres nettement saisonnières. C’est le cas du chabot par exemple, un poisson benthique (c’est-à-dire vivant sur le fond de l’océan). La <a href="https://cdnsciencepub.com/doi/10.1139/f70-227">littérature mentionne</a> que les chabots mâles, qui surveillent et défendent leurs œufs, ne fuient pas les prédateurs, voire même les attaquent, et ce quelle que soit leur taille. Ce comportement expliquant l’abondance d’otolithes de chabot dans les pelotes en hiver et la <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1095-8649.2002.tb02489.x">surmortalité des mâles à cette période</a>. Le gobie est capturé pour les mêmes raisons mais un peu plus tard que le chabot, <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1095-8649.2002.tb01743.x">sa reproduction s’étendant d’avril à août</a>.</p>
<p>Autre exemple : le tacaud commun, un poisson à croissance rapide se reproduisant en fin d’hiver. Ici, les adultes sont trop gros pour les cormorans, et les otolithes vus dans les pelotes à partir d’avril-mai correspondent exclusivement à la capture de jeunes tacauds de l’année. Leur croissance peut être déduite des longueurs d’otolithes mesurées au fil des mois. On sait ainsi que de mai à septembre leur croissance est linéaire et d’environ 7 cm. En déduisant la date correspondant à de jeunes tacauds de 0 cm, on peut aussi remonter à la date de ponte, qui se situe vers la 3<sup>e</sup> semaine de mars. Intéressant à savoir quand on sait que le tacaud est au menu du merlu, espèce pêchée et d’intérêt économique.</p>
<p>Sans s’en douter, le cormoran huppé est devenu un collaborateur, un auxiliaire du biologiste, fonctionnant comme un engin de pêche à maille fine rapportant dans ses pelotes un échantillonnage régulier et ininterrompu de petits poissons côtiers communs. Dans le contexte actuel, où les changements globaux impriment des modifications de plus en plus importantes dans le fonctionnement des écosystèmes, ce type de suivi à long terme fournit un jeu de données permettant de décrire un état biologique initial des écosystèmes côtiers. Cela permet de dresser une sorte de « point zéro » auquel se référer en cas de grosse variation climatique ou d’un accident environnemental imprévu. Ce travail de suivi permet de voir qu’en réalité, l’état initial est dynamique et caractérisé par de fortes variations saisonnières ou interannuelles.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221764/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Maes a reçu des financements de l'Agence des Aires Marines Protégées</span></em></p>Cette pelote, constituée des restes de proies non digérés par un cormoran, contient de précieuses données que les biologistes qui les ramassent utilisent pour suivre la biodiversité marine.Philippe Maes, Maître de conférences en biologie marine, Université Bretagne SudLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2088242023-09-11T17:29:59Z2023-09-11T17:29:59ZUne zone côtière et des estuaires très prisés mais sous pression<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/543688/original/file-20230821-23-n058mw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=13%2C0%2C1486%2C576&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La rade de Brest, avec l’estuaire de l’Elorn (premier plan), la ville de Brest et ses installations portuaires (deuxième plan), et le goulet de la rade ouvert sur la mer d’Iroise (arrière plan).</span> <span class="attribution"><span class="source">Georges Chapalain, Cerema</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>La zone côtière, partout dans le monde, attire d’importantes populations. Aujourd’hui, environ <a href="https://sustainabledevelopment.un.org/content/documents/Ocean_Factsheet_People.pdf">40 % de la population mondiale vit à moins de 100 kilomètres des côtes</a>. Cette proportion devrait <a href="https://doi.org/10.1088/1748-9326/11/3/034010">se maintenir d’ici 2050</a>. Depuis l’Antiquité, la majorité des grandes métropoles sont côtières, et plus spécifiquement situées au niveau des estuaires.</p>
<p>Les estuaires intègrent, par ailleurs, des écosystèmes parmi les plus riches et diversifiés de la planète, jouant entre autres un rôle crucial de protection et de « nurserie » pour de nombreuses espèces marines.</p>
<p>Cependant, les estuaires collectent également les apports fluviatiles issus du lessivage des sols des bassins versants, et des effluents urbains et industriels locaux, notamment lors de fortes précipitations. Ces apports chargés en particules sédimentaires sont souvent pollués (nutriments, matière organique, polluants chimiques et microbiologiques, microplastiques). Ils affectent les écosystèmes de diverses manières : extinction de la lumière nécessaire à la photosynthèse, blooms phytoplanctoniques, <a href="https://www.dfo-mpo.gc.ca/oceans/publications/soto-rceo/2012/page03-fra.html">hypoxie (désoxygénation)</a>, perturbation des fonctions biologiques de reproduction et de croissance des organismes, voire mortalité dans les cas extrêmes.</p>
<p>La pression démographique et le changement climatique, qui modifient des paramètres clés du milieu comme la température, la salinité, l’acidité ou l’<a href="https://portals.iucn.org/library/sites/library/files/documents/2019-048-Fr-Summ.pdf">oxygène</a>, vont contribuer à <a href="https://www.ipcc.ch/report/sixth-assessment-report-working-group-i/">dégrader l’état chimique et écologique des estuaires, et plus généralement de la frange côtière</a>. Leur évolution est cependant difficile à prédire car ce sont des systèmes complexes (eaux douce et salée qui se mélangent, sédiments d’une grande variété, myriade d’organismes vivants), soumis à diverses influences topographiques (irrégularités des fonds et du rivage) et dynamiques (marée, vent, <a href="https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwiE-9WfsrGAAxU4RaQEHQJpDeIQFnoECBUQAQ&url=http%3A%2F%2Ffiles.meteofrance.com%2Ffiles%2Fglossaire%2FFR%2Fglossaire%2Fdesignation%2F687_curieux_view.html&usg=AOvVaw36S5ELWRGs-J-yPVcIIQTa&opi=89978449">surcote marine</a>, vagues, turbulence), et qui interagissent à différentes échelles d’espace et de temps.</p>
<p>Nous menons depuis 2010 des études sur la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=TZjdnlAEkok">rade de Brest</a>, grâce à des capteurs fixes et mobiles, sur terre et en mer, et des données satellites. Grâce à ce suivi in situ, nous pouvons contribuer à la surveillance de chantiers sur le littoral et à la compréhension de cet environnement pour notamment savoir comment la biodiversité locale réagit aux pollutions et au changement climatique.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/TZjdnlAEkok?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">La rade de Brest, l’une des plus grandes baies au monde. Source : Office français de la biodiversité.</span></figcaption>
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<h2>Comment étudier ces zones si particulières</h2>
<p>Depuis les années 50, les mesures recueillies lors de campagnes à la mer ont permis aux scientifiques de décrire les phénomènes à l’œuvre dans ces milieux à l’interface terre-mer-atmosphère, sièges d’intenses échanges de matière et d’énergie, et de poser les concepts de base de l’hydrodynamique estuarienne.</p>
<p>À la fin des années 70 apparurent les modèles numériques de simulation hydrodynamique et hydrosédimentaire, basés sur les lois de la physique, à même d’incorporer la complexité des estuaires. Vinrent ensuite les modèles biogéochimiques couplés à ces modèles hydrauliques. Les mesures in situ contribuèrent à valider ces modèles.</p>
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<img alt="navire de transport de passagers équipé d’instruments de recherche" src="https://images.theconversation.com/files/543515/original/file-20230818-21-dbyiqs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/543515/original/file-20230818-21-dbyiqs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/543515/original/file-20230818-21-dbyiqs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/543515/original/file-20230818-21-dbyiqs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/543515/original/file-20230818-21-dbyiqs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/543515/original/file-20230818-21-dbyiqs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/543515/original/file-20230818-21-dbyiqs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le navire Fromveur II de la Compagnie maritime Penn Ar Bed assure biquotidiennement le Suivi des eaux de surface de la mer d’Iroise et de la Rade de Brest par Navire d’Opportunité (SIRANO).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Bateau_Fromveur_II_(2011)_(1).jpg">Gzen92, Wikipedia</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>En dépit de ces progrès, beaucoup d’incertitudes persistent à ce jour sur la dynamique et le fonctionnement de ces environnements complexes empreints d’une grande variabilité spatio-temporelle. En particulier, l’observation depuis l’espace reste ainsi difficile dans les zones côtières.</p>
<p>C’est notamment le cas pour la salinité de surface qui constitue un indicateur essentiel du mélange et de la dilution des eaux douces dans les eaux marines. Actuellement, les <a href="https://doi.org/10.1016/j.rse.2020.111769">mesures par radiométrie micro-ondes</a> n’existent qu’au-delà d’environ 40 kilomètres des côtes, <a href="https://doi.org/10.1080/15481603.2023.2166377">avec des résolutions spatiales de 25 à 100 kilomètres et temporelles de 3 jours ou plus</a>. La spectrométrie optique de la couleur de l’océan permet de s’approcher des côtes avec une résolution spatiale de 0,25 à 1 kilomètre, tous les 1 ou 2 jours. Elle requiert cependant une <a href="https://doi.org/10.1080/15481603.2023.2166377">calibration spécifique poussée à l’aide de mesures in situ locales</a>. Elle est par ailleurs tributaire des conditions météorologiques. Ces considérations s’appliquent pareillement à la <a href="https://doi.org/10.3390/rs14092026">mesure de turbidité par cette méthode</a>.</p>
<h2>Une démarche fondée sur la mesure in situ automatique, en rade de Brest et mer d’Iroise</h2>
<p>Notre réseau de capteurs (Réseau d’ObseRvation Côtière Automatique muLtiparamètres, ou RORCAL) se compose d’un mix de stations à points fixes à terre (station fluvio-estuarienne) et en mer (bouée océanographique), et d’un dispositif mobile sur navire assurant le transport de passagers et de fret.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/543513/original/file-20230818-29-sgpsed.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="carte de la mer d’Iroise et du réseau des capteurs" src="https://images.theconversation.com/files/543513/original/file-20230818-29-sgpsed.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/543513/original/file-20230818-29-sgpsed.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=445&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/543513/original/file-20230818-29-sgpsed.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=445&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/543513/original/file-20230818-29-sgpsed.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=445&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/543513/original/file-20230818-29-sgpsed.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=560&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/543513/original/file-20230818-29-sgpsed.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=560&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/543513/original/file-20230818-29-sgpsed.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=560&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Implantation du Réseau d’ObseRvation Côtière Automatique muLtiparamètres (RORCAL) en rade Brest et mer d’Iroise.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Georges Chapalain, Cerema</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>En 2011, nous avons commencé avec le bateau de la Compagnie maritime Penn Ar Bed qui dessert quotidiennement depuis Brest les îles de Molène et d’Ouessant.</p>
<p>En 2015, nous avons déployé une bouée d’observation côtière autonome au débouché de l’estuaire de l’Elorn.</p>
<p>En 2018, c’est un sous-réseau de stations d’observation fluvio-estuarienne autonomes incluant des capteurs de niveau d’eau qui a été installé sur la rivière Elorn et son estuaire supérieur dans la ville de Landerneau, souvent inondée lors des grandes marées.</p>
<p>Le monitoring RORCAL est ainsi en capacité d’alerter en cas de niveau d’eau critique annonçant l’inondation, de <a href="https://www.francetvinfo.fr/meteo/climat/infographies-visualisez-l-ampleur-de-la-canicule-marine-en-atlantique-nord-qui-menace-des-milliers-d-especes_5904389.html">température élevée au moment d’une vague de chaleur</a> ou d’un <a href="https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwiwu8ud5eGAAxVcU6QEHfDsDYYQFnoECA8QAQ&url=https%3A%2F%2Fports.bretagne.bzh%2Factualites%2Fdragage-port-de-brest-la-phase-2-demarre%2F&usg=AOvVaw2Y-EqQ9IHVLGLMPyLKZcal&opi=89978449">pic de turbidité au cours d’un chantier portuaire tel que l’extension récente du polder du port de Brest</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/543517/original/file-20230818-25218-lqbm1h.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="bouée en mer" src="https://images.theconversation.com/files/543517/original/file-20230818-25218-lqbm1h.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/543517/original/file-20230818-25218-lqbm1h.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/543517/original/file-20230818-25218-lqbm1h.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/543517/original/file-20230818-25218-lqbm1h.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/543517/original/file-20230818-25218-lqbm1h.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/543517/original/file-20230818-25218-lqbm1h.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/543517/original/file-20230818-25218-lqbm1h.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La Bouée d’Observation Côtière Autonome (BOCA) au débouché de l’estuaire de l’Elorn en rade de Brest.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Georges Chapalain, Cerema</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>D’un point de vue scientifique, au-delà de la validation de modèles, RORCAL nous a permis diverses avancées sur la <a href="https://doi.org/10.1016/j.oceano.2022.07.007">description et la prévision des fortes chutes de la salinité (dessalures) des eaux de surface en rade de Brest associées au panache de l’Elorn en situation de crue</a> ou de la <a href="http://dx.doi.org/10.1016/j.csr.2012.12.003">température des eaux de surface de la rade de Brest et de la mer d’Iroise influencée par le mélange vertical en lien avec la rugosité des fonds et les vagues</a>.</p>
<p>Nous avons aussi pu quantifier la réponse biologique de diverses populations de <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/environnement/2019-08-09/la-moule-un-aspirateur-a-pollution-sous-la-coquille">moules bleues</a> (Mytilus spp.) de la rade de Brest et de la mer d’Iroise aux <a href="http://dx.doi.org/10.1016/j.marenvres.2017.04.008">facteurs environnementaux et à la pollution chronique aux hydrocarbures aromatiques polycycliques et aux organoétains issus d’activités portuaires</a>.</p>
<h2>Les limites actuelles et les plans pour le futur</h2>
<p>Ce dispositif est ainsi adapté à l’hétérogénéité spatiale du milieu et tout particulièrement au gradient longitudinal qui caractérise la zone estuarienne. Il permet un suivi automatique, continu, au long cours et spatialisé de nombreux paramètres qui nous permettent de mieux comprendre la zone de la rade de Brest (des aspects fluvio-océanographiques relatifs à la hauteur d’eau, la température, la salinité, le pH (acidité), la turbidité et la chlorophylle a ; ainsi que des aspects météorologiques comme la température de l’air, la pression atmosphérique et la vitesse et la direction du vent).</p>
<p>Les données in situ peuvent être complétées par les observations satellitaires. Aux méthodes classiques de modélisation numérique s’ajoutent aujourd’hui des méthodes d’apprentissage automatique déjà étrennées avec les données RORCAL de <a href="https://doi.org/10.1016/j.oceano.2022.07.007">salinité de la bouée BOCA en rade de Brest</a> ou encore de <a href="https://doi.org/10.1016/j.oceano.2021.07.003">niveau d’eau d’une des stations fluvio-estuariennes SOFA dans la ville de Landerneau soumise au risque d’inondation</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/543518/original/file-20230818-15-h1hccg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/543518/original/file-20230818-15-h1hccg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=126&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/543518/original/file-20230818-15-h1hccg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=126&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/543518/original/file-20230818-15-h1hccg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=126&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/543518/original/file-20230818-15-h1hccg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=158&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/543518/original/file-20230818-15-h1hccg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=158&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/543518/original/file-20230818-15-h1hccg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=158&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Différentes Stations d’Observation Fluvio-estuarienne Autonomes (SOFA) sur l’estuaire (ville de Landerneau) et la rivière Elorn.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Georges Chapalain, Cerema</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au-delà de la densification du dispositif RORCAL en rade de Brest, en cours, la réplication du dispositif, et tout particulièrement sa composante embarquée sur navire d’opportunité SIRANO, entre le continent et les îles de Sein, Groix et Belle-Île-en-Mer, pourrait permettre d’appréhender le devenir des apports fluviatiles de la Loire et La Vilaine à l’océan côtier de Bretagne Sud jusqu’aux abords de la Manche.</p>
<p>Ces développements pourraient également être intégrés dans des <a href="http://dx.doi.org/10.1007/s10236-013-0627-z">outils de météo-océanographie opérationnelle</a>, mais aussi dans des « jumeaux numériques » à même de répliquer dans l’environnement virtuel fondé sur des données réelles, le fonctionnement et les réponses du système à des perturbations. Ceci laisse augurer des outils avancés d’aide à la Gestion Intégrée de la Zone Côtière (GIZC). Ces outils cibleraient notamment l’appréciation de la vulnérabilité et des risques, l’exploitation raisonnée et durable des espaces et des ressources, et la planification et la mise en œuvre de mesures d’adaptation et de protection face aux conséquences du changement climatique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/208824/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Georges Chapalain ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son poste.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Éric Duvieilbourg ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son poste universitaire.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Nicolas Guillou ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son poste.
Les travaux de recherche et développement évoqués dans cet article ont pour cadre les programmes thématiques INTEractions entre RIvière(s) et MER (INTERIMER) et Mesure et EXpérimentation Innovantes en zone COtière (MEXICO) du Laboratoire de Génie Côtier et Environnement (LGCE) et de l’Equipe-Projet de Recherche « Hydraulique et Aménagement » (HA) du Cerema.
Brest métropole (Direction de l’Ecologie urbaine) est copropriétaire de la bouée BOCA-Elorn.
Le Conseil Général du Finistère a contribué au financement initial de SIRANO à bord du Navire Enez Eussa III.
</span></em></p>Là où eaux douces et salées se rencontrent, l’environnement est complexe. Des études de terrains permettent de mieux comprendre comment ces zones sont affectées par les humains.Georges Chapalain, Directeur de recherche du développement durable en océanographie côtière, CeremaÉric Duvieilbourg, Ingénieur d'Etudes CNRS au laboratoire des sciences de l'environnement marin (LEMAR) en conception instrumentale et de systèmes embarqués pour l'océanographie, Université de Bretagne occidentale Nicolas Guillou, Ingénieur, docteur en océanographie physique côtière, CeremaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1987462023-08-22T20:48:05Z2023-08-22T20:48:05ZMorbihan : comment la désertification des paysages sous-marins bouleverse les écosystèmes côtiers<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/541985/original/file-20230809-15-kf1a77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Champs d'algues laminaires dans le courant à Ouessant, Finistère.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://image.ifremer.fr/data/00565/67735/hd/24712.jpg">Olivier Dugornay, Ifremer</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Mai 2022, Morbihan, dans le sud de la Bretagne. Jean-Claude Ménard, président et fondateur d’<a href="https://www.assoloirevilaine.fr/">Estuaires Loire & Vilaine</a>, une association qui veille depuis plus de 30 ans sur les fonds marins de la région, effectue une plongée de suivi annuel dans la zone des récifs du Mor Braz, la « grande mer » délimitée à l’ouest par la presqu’île de Quiberon et Belle-Île et à l’est par Guérande (par opposition à la « petite mer » que constitue le Golfe du Morbihan).</p>
<p>Cette plongée a pour but d’examiner l’état des forêts d’algues, notamment celles formées par les laminaires, ce groupe d’algues brunes capables de créer des forêts arbustives structurantes pour des centaines d’espèces marines, comme l’ormeau, l’étrille ou le bar.</p>
<p>C’est à l’occasion de cette plongée que Jean-Claude Ménard découvre le véritable bouleversement en cours au sein des récifs bretons du Mor Braz. Sur des hectares, ces champs d’algues, denses et productifs, ont disparu pour laisser place à de véritables déserts sous-marins. Le responsable ? L’oursin <em>Psammechinus miliaris</em>, une espèce présente le long des côtes atlantiques européennes dont les individus adultes mesurent entre 4 et 6 cm. La prolifération de cet herbivore vorace peut entraîner la déforestation des champs algaux, par certains égards équivalente à une désertification des paysages sous-marins.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/541989/original/file-20230809-29-wpxsm7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="En broutant les algues qui constituent les forêts sous-marines, l’espèce _Psammechinus miliaris_ a désertifié de nombreux récifs du Mor Braz dans le Morbihan" src="https://images.theconversation.com/files/541989/original/file-20230809-29-wpxsm7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541989/original/file-20230809-29-wpxsm7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541989/original/file-20230809-29-wpxsm7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541989/original/file-20230809-29-wpxsm7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541989/original/file-20230809-29-wpxsm7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541989/original/file-20230809-29-wpxsm7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541989/original/file-20230809-29-wpxsm7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Premier constat en mai 2022 de l’apparition de déserts sous-marins dans le Morbihan. Le responsable ? L’espèce <em>Psammechinus miliaris</em> dont plusieurs individus sont ici visibles.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jean-Claude Ménard, Association Estuaires Loire et Vilaine</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Parc éolien, réchauffement, densités humaines…</h2>
<p>Que ce soit en France, en Europe ou dans le monde, les pressions exercées par les activités humaines sur les écosystèmes côtiers, comme ici dans le Mor Braz, sont nombreuses et variées.</p>
<p>Elles peuvent être ponctuelles – comme la construction du premier <a href="https://parc-eolien-en-mer-de-saint-nazaire.fr">parc éolien en mer au large de Saint-Nazaire</a> – ou <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-019-47201-9">chroniques</a>, à l’image des activités de pêche côtière, du réchauffement des eaux sous l’effet du changement climatique ou encore de l’augmentation des densités humaines sur la frange littorale du Morbihan ou de Loire-Atlantique.</p>
<p>On sait aujourd’hui que, tels des réfugiés climatiques, la plupart des espèces marines ont tendance à déplacer leurs aires de population des tropiques vers les hautes latitudes plus tempérées <a href="https://www.nature.com/articles/s41559-020-1198-2">six fois plus vite que les espèces terrestres</a>. Les conséquences de ces migrations à l’échelle régionale peuvent engendrer des bouleversements complexes, <a href="http://dx.doi.org/10.1007/s10021-015-9913-6">parfois irréversibles</a>, dans la structure et le fonctionnement des communautés d’espèces qui jusqu’alors cohabitaient depuis des générations.</p>
<h2>Des changements abrupts qui bouleversent tout</h2>
<p>Contrairement à d’autres régions du globe où réchauffement des eaux côtières et/ou pêche intensive des prédateurs sont identifiés comme facteurs déclencheurs, les causes de la prolifération de l’oursin dans le sud de la Bretagne restent à ce stade méconnues. On peut cependant constater que les déserts sous-marins qu’il laisse derrière lui ont conduit à un appauvrissement drastique de la diversité des espèces sous-marines et de la complexité des habitats sous-marins de la région.</p>
<p>L’apparition de ces « déserts d’oursins », se substituant à des forêts sous-marines complexes, productives et cruciales au maintien de la biodiversité, représente un phénomène <a href="http://dx.doi.org/10.1098/rstb.2013.0269">bien documenté dans plusieurs régions du globe</a> ; il est souvent lié au déclin des prédateurs de ces herbivores voraces (comme les langoustes en <a href="http://dx.doi.org/10.1007/s10021-015-9913-6">Tasmanie</a> ou les poissons de récifs en <a href="http://dx.doi.org/10.1111/oik.05060">Méditerranée occidentale</a>).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/541998/original/file-20230809-21-hzx8dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/541998/original/file-20230809-21-hzx8dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541998/original/file-20230809-21-hzx8dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541998/original/file-20230809-21-hzx8dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541998/original/file-20230809-21-hzx8dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541998/original/file-20230809-21-hzx8dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541998/original/file-20230809-21-hzx8dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541998/original/file-20230809-21-hzx8dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Aux antipodes, dans le sud-est de l’Australie, profitant d’une conjoncture favorable (déclin de ses prédateurs et réchauffement des eaux côtières), une autre espèces d’oursin <em>Centrostephanus rodgersii</em> a transformé des centaines d’hectares de forêts sous-marines en véritables déserts comme visible au premier plan sur cette photo.</span>
<span class="attribution"><span class="source">John Turnbull www.marineexplorer.org</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette désertification sous-marine est <a href="http://dx.doi.org/10.1007/s10021-015-9913-6">souvent difficile à inverser</a>, mais peut parfois être remédiée, grâce par exemple à des mesures de restauration de certains prédateurs, comme les loutres de mer sur la côte ouest canadienne pour lutter contre la prolifération de l’oursin pourpre (<em>Strongylocentrotus purpuratus</em>).</p>
<p>Les déserts d’oursins, tels que ceux observés récemment en Bretagne sud, ne sont qu’un exemple parmi d’autres des bouleversements recensés parmi les écosystèmes marins côtiers de la planète. L’eutrophisation, un enrichissement excessif en nutriments des eaux côtières liée à l’agriculture intensive ou aux fortes densités humaines (notamment les eaux usées), peut entraîner le remplacement des forêts sous-marines par des parterres dominés par des algues filamenteuses courtes. Ces dernières piègent les sédiments et maintiennent ainsi les récifs dans un état dégradé associé à une faible productivité et à un véritable anéantissement de la structure complexe des forêts sous-marines. On qualifie cet état de <a href="https://academic.oup.com/bioscience/article/68/2/64/4797262">« turf » </a>(gazon en anglais). </p>
<p>On le voit, les conditions et facteurs qui contribuent à l’apparition de tels changements abrupts s’avèrent complexes et multiples. Même si ces modifications d’états vers des écosystèmes « déprimés » chamboulent profondément à la fois leur fonctionnement et celui des activités humaines qui en dépendent, elles demeurent souvent difficiles à prévoir et à inverser.</p>
<h2>Des écosystèmes côtiers à la loupe</h2>
<p>Alors que la perte d’habitats reste la <a href="https://www.ipbes.net/sites/default/files/inline/files/ipbes_global_assessment_report_summary_for_policymakers.pdf">cause première</a> d’érosion de la biodiversité à l’échelle globale, notre compréhension des conséquences de tels bouleversements des habitats sous-marins demeure aujourd’hui parcellaire et limitée.</p>
<p>C’est dans ce contexte que notre <a href="https://dyneco.ifremer.fr/Nos-equipes/LEBCO/Recherche/Projets/TRIDENT">projet de recherche TRIDENT</a> mettra en œuvre de nouvelles approches de modélisation, à la fois de l’analyse de données et de la simulation numérique, afin de mieux comprendre et prédire la répartition spatiale ainsi que les changements passés et en cours des habitats sous-marins et leurs conséquences sur la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes côtiers.</p>
<p><a href="https://dyneco.ifremer.fr/Nos-equipes/LEBCO/Recherche/Projets/TRIDENT">Le projet TRIDENT</a> devrait permettre de recenser les changements d’états observés dans les écosystèmes côtiers de fonds au niveau mondial grâce aux suivis en plongée réalisés dans le cadre de <a href="https://reeflifesurvey.com/">Reef Life Survey</a>, un programme de sciences participatives. Ce travail en cours a identifié plus d’une quinzaine d’habitats sous-marins selon différents états écologiques (par exemple forêts d’algues laminaires, <a href="https://www.cnrtl.fr/definition/fuco%C3%AFde">champs d’algues fucoides</a>, déserts d’oursins, récifs coralliens, ou encore gazons d’algues filamenteuses en cours de formation…) sur les récifs observés le long des côtes mondiales.</p>
<h2>Prédire les conséquences de scénarios futurs</h2>
<p>Il s’agit ensuite d’identifier les mécanismes sous-jacents le maintien ou l’apparition de ces états pour prédire la manière dont les écosystèmes côtiers réagiront à des scénarios de changements futurs. Des approches d’apprentissage par la machine viseront à identifier comment les facteurs humains ou environnementaux locaux – la pêche, l’augmentation de la température des eaux côtières, la proximité d’infrastructures portuaires, de grandes villes associées à de fortes densités humaines, de fleuves qui peuvent être vecteurs de pollution urbaines ou agricoles, etc.- influent sur l’état des paysages sous-marins.</p>
<p>Le projet vise aussi à mieux comprendre le rôle de ces espèces sous-marines qui, comme les forêts d’algues sur les récifs bretons, forment des habitats fortement structurants pour les écosystèmes marins de fonds.</p>
<p>Un des enjeux du projet consiste à mieux comprendre la manière dont les espèces formatrices d’habitats – comme les champs d’algues, les herbiers, les récifs d’huîtres, bancs de moules ou encore les récifs coralliens en milieu tropical –, endossent différents rôles pour par exemple apporter des sources de nourriture et d’abris face à la prédation ou faciliter la coexistence d’une multitude d’espèces. Pour caractériser les liens entre les caractéristiques des paysages sous-marins et la diversité des espèces associées, le projet TRIDENT s’appuie à la fois sur une synthèse systématique de la littérature scientifique (soit plus de 400 articles), et sur l’analyse de suivis faunistiques existants réalisés dans différents habitats côtiers.</p>
<p>Les résultats attendus à l’issu du projet TRIDENT permettront ainsi de mieux appréhender les changements en cours et à venir sur les fonds marins qui jouxtent nos littoraux. Les connaissances acquises et les projections des conséquences de scénarios seront mobilisables pour guider la bonne gestion des activités humaines qui interfèrent avec les paysages sous-marins et les dynamiques complexes des écosystèmes côtiers associés.</p>
<hr>
<p><em>Le projet TRIDENT a débuté en mars 2022 pour une durée de 4 ans et implique des chercheurs du <a href="https://dyneco.ifremer.fr/en/Our-teams/LEBCO">laboratoire d’Écologie Benthique Côtière</a> de l’Ifremer à Brest, en collaboration avec <a href="https://sites.google.com/view/srobin-lpsm/accueil?pli=1">Sorbonne-Université</a> et l’<a href="https://www.imas.utas.edu.au">IMAS</a> en Australie</em>.</p>
<p><em>Le projet <a href="https://anr.fr/Projet-ANR-21-CE02-0006">TRIDENT</a> est soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui finance en France la recherche sur projets. Elle a pour mission de soutenir et de promouvoir le développement de recherches fondamentales et finalisées dans toutes les disciplines, et de renforcer le dialogue entre science et société. Pour en savoir plus, consultez le site de l’<a href="https://anr.fr/">ANR</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198746/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Martin Marzloff a reçu des financements de l'Agence National de la Recherche (projet TRIDENT ANR-21-CE02-0006). </span></em></p>Sur des hectares, des champs d’algues, denses et productifs, ont disparu pour laisser place à de véritables déserts sous-marins. Explications.Martin Marzloff, Research scientist in marine ecology, IfremerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2050672023-05-10T13:44:19Z2023-05-10T13:44:19ZPodcast : Vous prendrez bien un peu de « low tech » ?<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/512627/original/file-20230228-16-n5rwwk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Découvrez le nouveau podcast de The Conversation France : <a href="https://theconversation.com/fr/topics/lechappee-sciences-135626">« L’échappée Sciences »</a>. Deux fois par mois, un sujet original traité par une interview de scientifique et une chronique de l’un·e de nos journalistes.</em></p>
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<iframe src="https://playerbeta.octopus.saooti.com/miniplayer/large/217811?distributorId=c3cfbac6-2183-4068-a688-866933d3b5a6&color=40a372&theme=ffffff" width="100%" height="180px" scrolling="no" frameborder="0"></iframe>
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<p>Myco-matériaux, deshydrateur, chauffe-eau et four solaires, filtre à eau céramique, pédalier multifonctions, banque de graines, frigo du désert, toilettes sèches, cuir de kombucha, vélo cargo, éolienne 20 W, <a href="https://lowtechlab.org/fr/le-low-tech-lab/les-actions/habitat-low-tech">maisons bioclimatiques</a>… Cette liste à la Prévert vous dira sans doute quelque chose si vous aimez adopter, voire fabriquer, des objets capables de rendre le quotidien plus simple et plus durable.</p>
<p>Parce qu’elles cherchent à atteindre une frugalité efficace, les « low tech » intéressent dans notre pays un public grandissant à l’heure des dérèglements environnementaux et de la raréfaction des ressources. En témoigne le <a href="https://www.we-explore.org/exploremag/nos-explorations/nomade-des-mers/">périple de plusieurs années entrepris par le Nomade des mers</a>, ce voilier parti faire le tour du monde pour documenter les « low tech » utilisées sur la planète !</p>
<p>Une aventure qui s’est achevée à l’été 2022 à Concarneau, en Bretagne, donnant lieu au <a href="https://blogs.mediapart.fr/morganmeyer/blog/280622/le-festival-low-tech-comment-donner-envie-aux-basses-technologies">premier festival des « low tech » en France</a>.</p>
<p>Invité du nouvel épisode de notre podcast « L’échappée Sciences », le sociologue Morgan Meyer (CNRS, Mines Paris) revient sur l’émergence de ce mouvement. Avec lui, on part à la découverte de ces pratiques qui dépassent de très loin le bidouillage. Où ce courant a-t-il émergé ? Pourquoi la Bretagne s’impose-t-elle comme un <a href="https://bretagne.ademe.fr/actualites/manifestations/appel-candidatures-les-solutions-low-tech-au-service-de-la-sobriete-territoriale">territoire « laboratoire » pour ces initiatives</a> ? Les « low tech » pourront-elles un jour se déployer à grande échelle ? Autant de questions auxquelles Morgan Meyer apporte des éléments de réponse et de compréhension.</p>
<p>Pour la chronique de ce nouvel épisode, on se demande justement jusqu’où peuvent aller les « low tech » dans notre société très éprise de high tech. De la <a href="https://theconversation.com/la-lutte-pour-une-agriculture-libre-bricoler-et-partager-pour-semanciper-147051">réparabilité des appareils électroniques</a> à la <a href="https://theconversation.com/la-chasse-au-gaspillage-dans-le-cloud-et-les-data-centers-196669">chasse au gaspillage dans le cloud et les data centers</a>, les chercheuses et les chercheurs tentent de penser un monde plus économe.</p>
<p>Mais certaines approches techniques, qui partent du monde tel qu’il est aujourd’hui, peuvent se heurter à l’<a href="https://theconversation.com/leffet-rebond-quand-la-surconsommation-annule-les-efforts-de-sobriete-197707">« effet rebond »</a> : en optimisant nos utilisations d’énergie ou de ressources, on peut en fait provoquer une augmentation globale de la consommation. Pour dépasser ce paradoxe, des scientifiques font le chemin inverse : ils et elles partent de l’objectif à atteindre – et à définir – pour inventer une <a href="https://phenix.citi-lab.fr/">informatique intrinsèquement frugale</a> et des chaînes de production et d’<a href="https://www.cairn.info/revue-la-pensee-ecologique-2020-1-page-7.htm">interdépendances techniques adaptées à un monde sobre</a>.</p>
<p>Bonne écoute !</p>
<p><strong>Pour aller plus loin</strong> <br>
● <a href="https://sciencepolicy.colorado.edu/students/envs_5110/small_is_beautiful.pdf"><em>Small is beautiful : A study of economics as if people mattered</em></a>, E.F. Schumacher (1973)<br>
● <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/la-convivialite-ivan-illich/9782757842119"><em>La Convivialité</em></a>, Ivan Illich (1973)<br>
● <a href="https://www.jstor.org/stable/3101118"><em>Authoritarian and democratic technics. Technology and culture</em></a>, Lewis Mumford (1964)<br>
● <a href="https://www.cairn.info/revue-reseaux-2022-5-page-219.htm"><em>Expérimenter et rendre désirables les low tech : Une pragmatique de la documentation</em></a>, Morgan Meyer (2022)</p>
<p><strong>Et aussi…</strong><br>
● <a href="https://leszuts.coop/">La coopérative Les Zuts</a>, spécialisée dans la construction de <em>tiny houses</em> low tech<br>
● <a href="https://lowtechlab.org/">Le Low tech Lab</a></p>
<hr>
<p><em>Crédits : Animation et conception, Jennifer Gallé et Elsa Couderc. Réalisation, Romain Pollet. Musique du générique : « Chill Trap » de Aries Beats. Extrait du générique de la série <a href="https://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19548515&cfilm=114782.html">« MacGyver »</a> Randy Edelman - Adaptation : Jacky Giordano.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205067/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Parce qu’elles cherchent à atteindre une frugalité efficace, ces initiatives intéressent un public grandissant à l’heure des dérèglements environnementaux et de la raréfaction des ressources.Morgan Meyer, Directeur de recherche CNRS, sociologue, Mines Paris - PSLElsa Couderc, Cheffe de rubrique Science + Technologie, The Conversation FranceJennifer Gallé, Cheffe de rubrique Environnement + Énergie, The Conversation FranceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2041592023-05-04T14:56:15Z2023-05-04T14:56:15ZFinistère, 7 août 1944 : enquête sur le massacre invisible de Gouesnou<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/522951/original/file-20230426-28-s8qq58.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=51%2C59%2C1185%2C866&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Photo de l'église de Gouesnou, incendiée par les Allemands dans la nuit du 12 au 13 août 1944. Photo prise entre 1944 et 1947. Auteur inconnu. </span> <span class="attribution"><span class="source">Musée du patrimoine</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Le <a href="https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-irice-2011-1-page-63.htm">massacre d’Oradour-sur-Glane</a>, au cours duquel 643 civils périrent, semble être l’unique grande tuerie des nazis que la mémoire collective a retenu en France. Pourtant, il en existe d’autres, tout aussi marquantes et traumatisantes pour des villages, des départements, des familles. Mais leur mémoire s’est au fil du temps étiolée pour laisser place à un unique symbole national de la barbarie nazie.</p>
<p>Le 7 août 1944, presque deux mois après Oradour, dans la petite commune de Gouesnou, dans le Finistère, à seulement huit kilomètres au nord de Brest, eut lieu le massacre de civils le plus important du Grand Ouest.</p>
<p>Quarante-trois personnes furent assassinées par des soldats de l’armée régulière du III<sup>e</sup> Reich, plus précisement ceux de la <em>Kriegsmarine</em>, la marine de guerre allemande. Depuis près de 80 ans, cet évènement reste invisible ; pourquoi ?</p>
<p>C’est pour combler ce vide historique que j’ai entamé une thèse de doctorat, grâce notamment au concours financier de la municipalité de Gouesnou. Car depuis la fin de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/seconde-guerre-mondiale-20493">Seconde Guerre mondiale</a>, aucune recherche n’avait été entreprise sur cette tragédie. <a href="https://www.theses.fr/2022BRES0064">Mon enquête</a> porte donc sur le déroulé et la mémoire de ce massacre.</p>
<p>Dans les semaines qui suivent le <a href="https://theconversation.com/le-jour-j-a-ete-un-succes-grace-a-une-idee-de-genie-les-ports-artificiels-118386">débarquement des Alliés</a> sur les plages de Normandie le <a href="https://www.decitre.fr/livres/6-juin-1944-9782262028657.html">6 juin 1944</a>, la Bretagne est en effervescence.</p>
<p>La Résistance locale s’active pour ralentir la montée des renforts allemands vers le front. Les civils trépignent d’impatience à l’idée d’être enfin libérés et les Allemands savent pertinemment que rester bloqués dans la péninsule bretonne sera synonyme de fin, car il leur sera alors impossible d’évacuer par la mer. Ils devront <a href="https://www.mollat.com/livres/2639852/jean-luc-leleu-combattre-en-dictature-1944-la-wehrmacht-face-au-debarquement">se battre jusqu’au bout</a>, selon le mot d’ordre du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/adolf-hitler-86426">Führer</a>.</p>
<h2>À partir de 1943, la dure répression allemande</h2>
<p>La Bretagne est une région particulièrement active sur le plan de la Résistance depuis le 6 juin. Quelques maquis, <a href="https://www.ouest-france.fr/economie/tourisme/guide-ete/histoire-le-debarquement-debute-a-saint-marcel-en-1944-1f4a771c-d58b-11eb-8505-6750ce5b83e2">comme à Saint-Marcel</a>, dans le Morbihan, parviennent, non sans mal, <a href="https://www.belin-editeur.com/maquis-et-maquisards#anchor1">à mettre en difficulté l’armée allemande</a>.</p>
<p>La <em>Wehrmacht</em> (l’armée régulière du III<sup>e</sup> Reich) ne supporte pas cette « petite guerre », cette guérilla de partisans, de « Terroristen » comme disent les Allemands. Alors, face à la Résistance, l’occupant sévit de plus en plus.</p>
<p>On est loin de l’état d’esprit du début de l’occupation. La répression touche alors essentiellement les communistes, les juifs et les résistants. À partir de 1943, lorsque la Résistance se montre plus active dans l’Hexagone, les autorités allemandes décident de franchir un cap et de <a href="https://hal.science/hal-00157767">faire des otages</a>. Puis, en février 1944, le numéro deux de l’armée d’occupation en France, le général Hugo Sperrle, édicte une directive, qui porte d’ailleurs son nom.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/522355/original/file-20230421-4029-2c4ewg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/522355/original/file-20230421-4029-2c4ewg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/522355/original/file-20230421-4029-2c4ewg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=486&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/522355/original/file-20230421-4029-2c4ewg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=486&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/522355/original/file-20230421-4029-2c4ewg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=486&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/522355/original/file-20230421-4029-2c4ewg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=611&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/522355/original/file-20230421-4029-2c4ewg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=611&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/522355/original/file-20230421-4029-2c4ewg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=611&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Hugo Sperrle au procès de Nuremberg. Wikimedia.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette directive ordonne que toute unité allemande prise à partie par la Résistance devra procéder à des rafles d’otages, mais aussi fusiller les personnes suspectes et incendier leurs maisons. Et ce, sans ordre préalable de la hiérarchie militaire. « Les mesures prises, même excessives, ne pourront pas entraîner de sanction », précise même le texte.</p>
<p>C’est exactement ce qu’il s’est passé dans le hameau de Penguerec, sur la commune de Gouesnou, le 7 août 1944.</p>
<p>Pour comprendre l’enchaînement des événements, il faut revenir sur le contexte de cette fin de guerre dans la région. Lorsque l’armée américaine pénètre en Bretagne le 31 juillet 1944, elle est encore à plus de 300 kilomètres de Brest et de son port, <a href="https://www.calmann-levy.fr/livre/d-day-et-la-bataille-de-normandie-9782702140161/">qu’elle souhaite prendre intact</a>. La rapidité est donc de mise.</p>
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<p>À Gouesnou, la vie suit son cours. Dans cette paisible commune de 1300 habitants, l’occupation s’est déroulée sans histoires. La Résistance y est même absente jusqu’en 1943, lorsque trois frères, Philippe, Jean et Gilles Prédour, décident de constituer un petit groupe d’une dizaine de personnes. Mais celui-ci a pour consigne de ne rien entreprendre avant la libération.</p>
<p>Le village n’est ni un maquis, ni une plaque tournante de la Résistance – et les Allemands le savent, puisqu’ils cohabitent avec les habitants depuis décembre 1940.</p>
<h2>Une opération de résistance tourne au fiasco</h2>
<p>Pourtant, tout va basculer en quelques heures seulement ce lundi 7 août 1944. Pour reconstituer les événements, je me suis majoritairement appuyé sur des témoignages écrits et oraux des témoins de la journée du 7 août, notamment ceux conservés aux archives départementales de l’Ille-et-Vilaine.</p>
<p>La veille au soir, les Américains sont à Plabennec, soit à 3 km au nord de Gouesnou. Le 7, une rumeur parcourt le bourg dans la matinée : les Alliés auront atteint Gouesnou en début d’après-midi.</p>
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<p>C’est alors que les <a href="https://www.cairn.info/histoire-de-la-resistance--9782262042059.htm">résistants FFI – Forces française de l’Intérieur-</a> des frères Prédour, décident, en accord avec des parachutistes français largués dans le secteur trois jours plus tôt, de libérer la commune.</p>
<p>Pour cela, il faut déloger les trois ou quatre soldats allemands qui se trouvent en haut du clocher de l’église, poste de vigie pour surveiller les environs. Le groupe d’une dizaine de personnes attaque le beffroi en tout début d’après-midi, mais très vite, l’opération tourne au fiasco. Deux parachutistes sont tués, ainsi qu’un soldat allemand.</p>
<p>Depuis Gouesnou, les Allemands parviennent à contacter des renforts, situés au lieu-dit de Roc’h Glas, à 4 km au sud du bourg.</p>
<p>Au même moment et non-loin de là, coïncidence malheureuse, un jeune résistant, Pierre Phélep, accompagné de quelques amis, s’en prend justement à un projecteur de DCA (Défense contre aviation) appartenant à la batterie de Roc’h Glas, gardé par des soldats allemands. Il existait une dizaine de batteries de DCA autour de Brest ; leur mission était d’abattre les bombardiers alliés qui menaçaient la base sous-marine de l’armée allemande. Les projecteurs permettaient d’éclairer ces cibles.</p>
<p>L’attaque, qui n’était pas concertée avec celle de Gouesnou, se passe mal.</p>
<p>Vers 16h d’après les témoins, les Allemands se rendent à Penguerec, un hameau composé de trois fermes, à deux kilomètres au sud de Gouesnou. Ce lieu ne doit rien au hasard : dans l’une de ces fermes réside la famille de Pierre Phélep, tout juste 22 ans. Le jeune homme, également actif au sein d’un réseau qui distribue des journaux clandestins dans l’arsenal de Brest, s’y trouve.</p>
<p>Les Allemands, rendus furieux par l’attaque du projecteur DCA, incendient la ferme Phélep, mitraillent les deux autres maisons. Des grenades sont aussi jetées. Cette première exaction fait six victimes identifiées (dont Pierre Phélep et trois membres de la famille Phélep).</p>
<p>Dans le centre de Gouesnou, si les résistants et les parachutistes qui ont mené l’attaque du clocher ont réussi à prendre la fuite, les habitants, eux, persuadés encore, quelques minutes auparavant, de vivre les combats de la libération, sont abasourdis de voir la commune encore aux mains des Allemands.</p>
<p>Le maire, Jean-Louis Lamour, pressent qu’un malheur est imminent, comme il l’explique dans sa déposition de septembre 1948, consultable aux archives nationales, dans le fichier de la police judiciaire relatif aux meurtres et assassinats entre 1940 et 1950.</p>
<p>Il appelle ses concitoyens à rentrer chez eux et à se barricader. Mais il est trop tard : déjà, les soldats allemands forcent les portes des maisons. Une cinquantaine de Gouesnousiens sont arrêtés et rassemblés devant le mur d’enceinte de l’église, sous un soleil de plomb.</p>
<p>Puis les soldats allemands séparent les femmes et les enfants des hommes et décident d’acheminer ces derniers vers Penguerec. Les femmes et les enfants sont laissés dans l’expectative. Ils attendront le retour de leurs maris, pères, frères, en vain.</p>
<p>Les otages sont conduits vers Penguerec ; quelques autres civils sont raflés en chemin. Arrivés sur place, probablement vers 18h, la trentaine d’otages est placée face au spectacle macabre d’une ferme en flammes devant laquelle gîsent des corps. Les Allemands les massacrent aussitôt, dans un déchaînement de violence.</p>
<h2>« Hommes ordinaires » et violence inouïe</h2>
<p>Les Gouesnousiens ont été obligés d’abandonner les dépouilles. Au bout de dix jours, les Allemands réquisitionnent trois paysans pour enterrer les corps. Le charnier ne sera inhumé qu’en janvier 1945 et les corps seront placés dans une fosse commune du cimetière.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/ukraine-comment-les-equipes-medico-legales-enquetent-sur-les-atrocites-de-boutcha-180991">Ukraine : comment les équipes médico-légales enquêtent sur les atrocités de Boutcha</a>
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<p>En plus d’un homme abattu chez lui à Gouesnou, ce sont 42 personnes, dont 9 n’ont jamais été identifiées, qui ont été assassinées par des membres de la <em>Kriegsmarine</em>, la marine de guerre allemande.</p>
<p>Car ce ne sont pas des membres de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Waffen-SS">Waffen-SS</a>, tenants de l’idéologie nazie et réputés plus fanatiques, qui ont agi ici.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/O1N-2g27Pi8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Ce reportage diffusé par l’ORTF en juin 1969 donne la parole à des rescapés du massacre d’Oradour-sur-Glane, au cours duquel 643 personnes périrent.</span></figcaption>
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<p>La Waffen-SS est responsable, entre autres, des massacres d’Oradour-sur-Glane, mais aussi de ceux, moins connus, de Tulle (Corrèze), d’Ascq (Nord), ou de <a href="https://journals.openedition.org/abpo/3496">Maillé</a> (Indre-et-Loire).</p>
<p>Mais à Gouesnou, ce sont de simples soldats, <a href="https://www.mollat.com/livres/761450/christopher-r-browning-des-hommes-ordinaires-le-101e-bataillon-de-reserve-de-la-police-allemande-et-la-solution-finale-en-pologne">« des hommes ordinaires »</a>, pour reprendre l’expression de l’historien américain spécialiste de la Shoah Christopher Browning.</p>
<p>Ces hommes ordinaires commirent ce jour-là un massacre d’une violence inouïe, preuve que des membres de la Wehrmacht <a href="https://journals.openedition.org/rha/7082">ont eux aussi participé activement à la répression dans les territoires occupés</a>.</p>
<p>Si les Gouesnousiens, qui commémorent chaque année cette tragédie, ne l’ont jamais oubliée, elle est pourtant passée sous silence depuis près de 80 ans. Pour quelles raisons ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/522828/original/file-20230425-22-fgtdpd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=36%2C12%2C2005%2C1348&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/522828/original/file-20230425-22-fgtdpd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/522828/original/file-20230425-22-fgtdpd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/522828/original/file-20230425-22-fgtdpd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/522828/original/file-20230425-22-fgtdpd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/522828/original/file-20230425-22-fgtdpd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/522828/original/file-20230425-22-fgtdpd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Cérémonie de commémoration du massacre de Penguerec, au monument aux morts de Gouesnou, le 7 août 2019.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Premier élément de réponse, le massacre de Penguerec a été victime de la mémoire collective de sa région.</p>
<h2>Un massacre invisibilisé par un « brouillard de guerre »</h2>
<p>La Bretagne est un territoire très marqué par la forte présence de l’armée allemande et par l’implantation d’une Résistance précoce. <a href="https://www.tallandier.com/livre/les-francais-libres-lautre-resistance/">L’engagement de nombreux Bretons dans les Forces Françaises Libres</a> est aussi à noter : sur environ 73 000 FFL, 14 % étaient des Bretons. Dès juin 1940, des Français quittent les îles bretonnes pour rejoindre l’Angleterre, le plus emblématique de ces départs étant celui des <a href="https://www.ordredelaliberation.fr/fr/ile-de-sein">128 hommes de l’île de Sein en juin 1940</a>.</p>
<p>Les terribles bombardements comme celui de Rennes en juin 1940, ou ceux sur Brest durant l’Occupation ont également marqué les esprits. D’autant que Brest a aussi été dévastée, à la libération, par 40 jours d’un siège qui eut pour point d’orgue l’explosion de l’abri Sadi Carnot, <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/bretagne/finistere/brest/abri-sadi-carnot-brest-temoin-vie-quotidienne-guerre-1401199.html">qui tua environ 400 personnes</a>.</p>
<p>La mémoire collective s’est concentrée sur les faits de résistance et sur les immenses dommages subis par la cité du Ponant, laissant de côté le massacre de Pengerec.</p>
<p>Mais l’oubli de ce drame tient aussi à sa date. Le 7 août 1944, c’est le premier jour du siège de Brest, et Gouesnou se retrouve dans la tourmente des combats, totalement plongée dans un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Brouillard_de_guerre#:%7E:text=%C2%AB%20Brouillard%20de%20guerre%20%C2%BB%20est%20un,des%20forces%20et%20ses%20objectifs.">« brouillard de guerre »</a>. On ne sait pas vraiment ce qu’il s’y passe. La nouvelle du massacre n’est donc pas relayée. Par qui pourrait-elle l’être ?</p>
<p>Ce 7 août, les principaux organes de presse que sont la <em>Dépêche de Brest</em> et l’<em>Ouest-Eclair</em> n’existent plus. Du côté des politiques, seul le maire est encore présent. Mais il n’y a plus ni préfet, ni député, ni sénateur, bref, aucune autorité pour se faire l’écho de cet événement.</p>
<p>A contrario, le massacre d’Oradour-sur-Glane est immédiatement médiatisé, car il a lieu 10 juin 1944, dans une région encore sous administration de Vichy, avec des médias pour relayer l’information, et dans un secteur très éloigné des combats.</p>
<p>Une fois la libération achevée (à Gouesnou, elle commence le 2 septembre, et se termine avec la capitulation de Brest le 19 septembre) et les Gouesnousiens revenus dans leur commune, aucune association de victimes ne voit par ailleurs le jour.</p>
<p>Aucun parti ou responsable politique ne se fait le porte-parole des familles. Or, à Oradour, le parti communiste, très présent en Limousin, s’empare du sujet.</p>
<h2>Sidération et fatalité : « c’était la guerre, voilà tout »</h2>
<p>À Gouesnou, priorité est donnée à la reconstruction, au relogement, à la recherche de nourriture. Le temps de la sidération viendra plus tard.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/522658/original/file-20230424-1209-j8vqpl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/522658/original/file-20230424-1209-j8vqpl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/522658/original/file-20230424-1209-j8vqpl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=490&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/522658/original/file-20230424-1209-j8vqpl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=490&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/522658/original/file-20230424-1209-j8vqpl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=490&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/522658/original/file-20230424-1209-j8vqpl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=616&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/522658/original/file-20230424-1209-j8vqpl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=616&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/522658/original/file-20230424-1209-j8vqpl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=616&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Des soldats américains dans Gouesnou, après la libération du bourg, en septembre 1944. L’association « Les amis du patrimoine de Gouesnou », Author provided.</span>
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<p>Les Gouesnousiens vivent alors dans une sorte de fatalité. Ils ne cherchent pas, dans les années d’après-guerre, à comprendre ce qu’il s’est passé, ni pourquoi. Pour certains survivants que nous avons pu rencontrer, « c’était la guerre, voilà tout » ; « les gens en avaient marre d’en parler », comme nous l’ont confié Jeanne Goubin (née Jestin) et Marie-Thérèse Jestin en juin 2019.</p>
<p>Le massacre de Penguerec reste bien sûr très présent dans l’esprit de ceux qui l’ont vécu de près comme de loin, mais les rescapés n’évoqueront pas leur traumatisme.</p>
<p>Les enfants des victimes n’oseront pas non plus poser de questions : « On ne nous a rien raconté, on n’osait pas demander, on a tout appris avec les autres », relate Francine Phélep, nièce de Pierre Phélep, tué le 7 août.</p>
<p>Comme l’explique l’historienne Clotilde Vandendorpe <a href="https://www.editions-transmettre.fr/maille-la-memoire-oubliee-xml-378_384-1098.html">dans son ouvrage sur la question</a>, la problématique est la même à Maillé. « Pour certains psychologues et juristes, l’absence de procès et d’identification claire de coupables peuvent être vus comme une des causes qui conduisent les rescapés à ne plus parler des événements », analyse-t-elle.</p>
<p>Mais les motifs de cette invisibilisation sont aussi à chercher hors des murs de Gouesnou. Ainsi, il n’y a jamais eu, après la guerre, de véritable enquête judiciaire sur cet évènement. Aucun historien ne s’est penché sur ce drame, aucune personnalité politique locale ou nationale ne s’en est fait l’écho.</p>
<p>La raison est également politique, puisque dans la France d’après-guerre, les gouvernants, <a href="https://allemagneenfrance.diplo.de/fr-fr/actualites-nouvelles-d-allemagne/actualites-des-relations-franco-allemandes-seite/-/2550758">notamment Charles de Gaulle, ont voulu renouer des liens d’amitié forts avec l’Allemagne</a>.</p>
<p>Et pour cela, il a fallu sciemment <a href="http://theses.univ-poitiers.fr/notice/view/57766">passer sous silence plusieurs des nombreux crimes nazis commis en France</a>, comme celui de Gouesnou.</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=385&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=385&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=385&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Nous proposons cet article dans le cadre du Forum mondial Normandie pour la Paix organisé par la Région Normandie les 28 et 29 septembre 2023 et dont The Conversation France est partenaire. Pour en savoir plus, visiter le site du <a href="https://normandiepourlapaix.fr/">Forum mondial Normandie pour la Paix</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204159/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dimitri Poupon a reçu des financements de la ville de Gouesnou pour mener à bien sa thèse sur le massacre de Penguerec. </span></em></p>7 a oût 1944 : 43 civils sont massacrés par les soldats allemands à Gouesnou (Finistère). Près de 80 ans plus tard, une recherche inédite lève le voile sur cette tuerie de la Seconde Guerre mondiale.Dimitri Poupon, Docteur en Histoire contemporaine, Université de Bretagne occidentale Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1789502022-05-24T17:58:21Z2022-05-24T17:58:21ZImages de science : « Watersipora subatra », voyageuse au long cours<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/451023/original/file-20220309-25-1mfm9sg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4495%2C3000&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le bryozoaire _Watersipora subatra_ est originaire du Japon. Ici dans la rade de Brest, où sa présence est attestée depuis 2019.</span> <span class="attribution"><span class="source">Olivier Dugornay/Ifremer</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Originaire du Japon, <em>Watersipora subatra</em> envahit progressivement les océans et mers du globe. L’introduction d’une espèce dans un nouvel écosystème peut engendrer des déséquilibres écologiques parfois irrémédiables. En milieu marin, leurs conséquences peuvent être graves du fait de la difficulté d’intervention.</p>
<p>Il existe quelques exemples spectaculaires, tels l’<a href="https://gisposidonie.osupytheas.fr/?p=399">algue verte tropicale <em>Caulerpa taxifolia</em> en Méditerranée</a> ou encore le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Crabe_royal_du_Kamtchatka">crabe royal du Kamchatka</a>. Ces crabes, originaires de la mer de Béring entre l’est de la Russie et l’Alaska, ont été introduits en mer de Barents pour y développer une pêcherie et soutenir l’emploi local. Trouvant des écosystèmes favorables, cette espèce a rapidement étendu son aire de distribution vers l’ouest et colonisé les côtes de Norvège, actuellement jusqu’aux îles Lofoten. Elle représente une menace pour les écosystèmes qu’elle colonise dont elle perturbe profondément le fonctionnement, notamment en ingérant les œufs de poissons, notamment ceux du tacaud et de la morue.</p>
<p>Fort heureusement, dans la majorité des cas, les espèces introduites sont plus discrètes, ce qui n’exclut pas de les surveiller afin de déceler toute perturbation du fonctionnement au sein des écosystèmes ou la disparition d’autres espèces.</p>
<p>Le bryozoaire <em>Watersipora subatra</em> illustre l’exemple d’une introduction discrète mais d’une capacité de colonisation de nouveaux milieux très efficace – originaire du Japon, elle s’est largement implantée sur tout le <a href="https://archimer.ifremer.fr/doc/00612/72370/">littoral breton</a> en seulement une décennie.</p>
<p>Si son arrivée en Europe peut être due à la présence de colonies dans du naissain (juvéniles) d’huître japonaise, son expansion pourrait aussi se faire via la fixation de ses larves ou de ses colonies sur les coques de navires (phénomène communément appelé « fouling »), ou encore par des algues dérivantes sur lesquelles les colonies pourraient se développer.</p>
<h2>Des « animaux mousses » variés à travers le monde</h2>
<p>Les bryozoaires, littéralement « animaux mousses », sont des animaux coloniaux, fixés pour la plupart sur un substrat, inerte ou vivant, et majoritairement marins. Chaque individu, appelé zoïde ou zoécie, vit dans une loge millimétrique au sein d’une colonie, le zoarium, qui peut être encroûtante, dressée ou arbustive et mesurer de quelques centimètres à plusieurs dizaines de centimètres. La nutrition et la respiration des bryozoaires sont assurées par un courant d’eau créé par une couronne de tentacules appelée « lophophore ». Les loges étant le plus souvent carbonatées, plusieurs espèces contribuent ainsi dans les mers chaudes à la construction des récifs coralliens. La forme, la taille et l’agencement des loges permettent de reconnaître les différentes espèces.</p>
<p>Par leurs larves ou leurs colonies présentes dans le « fouling », quelques espèces sont facilement transportées de port en port et colonisent actuellement le littoral européen.</p>
<p>Tel est le cas de <em>Watersipora subatra</em>, originaire du Japon, qui est actuellement recensée comme une espèce introduite dans l’Atlantique Nord-Est, dans l’Indopacifique (Indonésie), le Pacifique sud-ouest (Australie, Nouvelle-Zélande) et le Pacifique nord-est (Californie). La taxonomie de ce genre, qui compte 13 espèces quelquefois <a href="https://www.biotaxa.org/Zootaxa/article/view/zootaxa.3857.2.1">très proches morphologiquement</a>, a induit de nombreuses hésitations avant que l’identification définitive des Watersipora présents sur les côtes européennes ne soit fixée.</p>
<p>Le long des côtes atlantiques européennes, cette espèce a été initialement identifiée comme <em>Watersipora aterrima</em> dans le bassin d’Arcachon entre 1968 et 1973, puis comme <em>Watersipora subovoidea</em> en Bretagne en <a href="https://www.vliz.be/imisdocs/publications/334935.pdf">2005</a>, revue comme <em>Watersipora subtorquata</em> en <a href="https://www.biotaxa.org/Zootaxa/article/view/zootaxa.2093.1.3">2009</a>. Il est désormais avéré que l’espèce présente en Bretagne, autour des îles Britanniques et en mer du Nord est en fait <em>Watersipora subatra</em> et que quatre autres espèces sont présentes sur le <a href="https://www.biotaxa.org/Zootaxa/article/view/zootaxa.3857.2.1">reste des côtes européennes</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/178950/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Financement de projets de recherche provenant de guichets divers (EC2CO, ANR, Agences de l'eau, Région Bretagne, FEAMP, INTERREG).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Eric Thiébaut a reçu des financements pour des projets de recherche provenant de différents financeurs ou programmes (ex. PNEC-EC2CO, ANR, Agence de l'eau Loire-Bretagne, OFB, FEAMP, Inter-Reg, Europe). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jérôme FOURNIER et Laurent Godet ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>L’arrivée d’une espèce invasive peut perturber l’écosystème, même quand elle reste discrète.Nicolas Desroy, Chercheur en faune benthique, IfremerEric Thiébaut, professeur en océanographie biologique, Sorbonne UniversitéJérôme FOURNIER, chercheur au CNRS, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Laurent Godet, Chercheur au CNRS, Université de NantesLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1763222022-02-08T21:04:31Z2022-02-08T21:04:31ZHuîtres et algues : partenaires pour le meilleur et pour le pire dans un océan en mutation<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/444269/original/file-20220203-17-1mg2qlm.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Élevage d’huîtres en poche sur table en rade de Brest. Les poches d’huîtres sont recouvertes d’algues vertes. Au sol, les algues vertes coexistent avec les fucus. </span> <span class="attribution"><span class="source">F. Pernet/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Bien que les algues et les huîtres n’aient pas de liens évidents – les huîtres ne mangent pas les algues, elles ne sont pas en compétition pour les ressources, elles ne se parasitent pas – les algues et les huîtres sont reliées par l’eau de mer et partagent de nombreux microbes.</p>
<p>Ainsi, par leur simple présence, les algues pourraient influencer le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Microbiote">« microbiote »</a> des huîtres, c’est-à-dire l’ensemble des micro-organismes associés tels que bactéries, virus, et champignons, avec des conséquences sur leur réponse immunitaire et leur santé. Comme chez l’<a href="https://theconversation.com/microbiote-intestinal-et-sante-une-alliance-que-chacun-peut-optimiser-168965">homme</a>, le microbiote peut aider ou nuire à la santé de l’huître et à la lutte contre les maladies.</p>
<h2>Partout dans le monde, des huîtres malades</h2>
<p>Cette hypothèse a germé 10 années après qu’ostréiculteurs et scientifiques aient constaté en 2008 des <a href="https://theconversation.com/pourquoi-les-huitres-sont-elles-de-plus-en-plus-souvent-malades-152005">mortalités massives</a> dans les élevages de jeunes huîtres creuses.</p>
<p>Ce phénomène, qui se reproduit tous les ans au printemps, a rapidement été associé à une infection par un nouveau variant de l’<em>ostreid herpesvirus</em>, dont la souche de référence avait été découverte dans les années 1990. En quelques années, ce variant s’est propagé le long du littoral européen, de l’Espagne au sud de la Norvège, et des variants étroitement liés ont été détectés en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Asie. Ce virus est une contrainte pour la production d’huîtres dans le monde.</p>
<p>Une <a href="https://www.cnrs.fr/sites/default/files/press_info/2019-01/cp_publi_mortalites_huitres.pdf">étude récente</a> a montré que l’infection virale provoque chez l’huître un état immunodéprimé suivi d’une « dysbiose », c’est-à-dire un déséquilibre du microbiote. La dysbiose conduit à une colonisation secondaire par des bactéries opportunistes et à la mort de l’huître.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/444272/original/file-20220203-25-120a14i.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/444272/original/file-20220203-25-120a14i.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/444272/original/file-20220203-25-120a14i.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/444272/original/file-20220203-25-120a14i.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/444272/original/file-20220203-25-120a14i.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/444272/original/file-20220203-25-120a14i.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/444272/original/file-20220203-25-120a14i.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/444272/original/file-20220203-25-120a14i.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Culture bactérienne sur gel en laboratoire pour analyser le microbiote des huîtres.</span>
<span class="attribution"><span class="source">F. Pernet/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>Dans cette maladie, le remaniement du microbiote de l’huître fait partie intégrante du processus infectieux induit par le virus. Étant donné que le microbiote des huîtres est variable selon le site d’élevage, le régime alimentaire, la température, ou la présence d’antibiotiques, il est possible de le modifier naturellement pour renforcer les défenses de l’huître contre l’infection virale.</p>
<h2>Algues vertes, brunes et rouges</h2>
<p><a href="https://theconversation.com/fr/topics/algues-38040">Les algues</a> sont particulièrement intéressantes, car elles abritent une riche diversité de bactéries associées, variable selon les espèces, qui peuvent être bénéfiques aux organismes reliés comme les huîtres.</p>
<p>C’est donc naturellement que nous est venue l’idée de vérifier si les algues vivant en association avec les huîtres pouvaient altérer leur microbiote, positivement ou négativement, et ainsi influencer leur réponse à une maladie.</p>
<p>Nous avons donc exposé des huîtres à des algues vertes (<em>Ulves</em>), brunes (<em>Fucus</em>) ou rouges (cordes de Solier) prélevées en rade de Brest, dans des conditions de laboratoire pendant deux semaines au printemps 2018, avant de les confronter au virus. Ces espèces d’algues ont été choisies, car elles se développent dans des habitats différents, plus ou moins touchés par les activités humaines, et leur microbiote bactérien devait être différent.</p>
<p>Les ulves et les fucus coexistent naturellement avec les huîtres tandis que les cordes de Solier se trouvent à proximité dans les zones plus profondes.</p>
<p>La prolifération des ulves est généralement associée à <a href="https://ez5-projets.ifremer.fr/simm_en/Nos-rubriques/%C3%89tat-du-milieu/Eutrophisation">« l’eutrophisation »</a>, c’est-à-dire à l’enrichissement en nutriments au-delà de la capacité d’autorégulation des écosystèmes. En Bretagne, depuis les années 1970, les algues vertes pullulent chaque année à la fin du printemps ou au début de l’été, donnant naissance au phénomène de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Mar%C3%A9e_verte">« marées vertes »</a>.</p>
<p>Les cordes de Solier se retrouvent le plus souvent dans des zones abritées saines en eaux calmes. Dans la rade de Brest, cette espèce se trouve dans des zones localement protégées.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/444271/original/file-20220203-27-t4ddkg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/444271/original/file-20220203-27-t4ddkg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/444271/original/file-20220203-27-t4ddkg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/444271/original/file-20220203-27-t4ddkg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/444271/original/file-20220203-27-t4ddkg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/444271/original/file-20220203-27-t4ddkg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/444271/original/file-20220203-27-t4ddkg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/444271/original/file-20220203-27-t4ddkg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Vue aérienne d’un élevage d’huîtres en poche en rade de Brest. Certaines poches sont recouvertes d’algues vertes et on peut distinguer des taches d’algues brunes au sol.</span>
<span class="attribution"><span class="source">F. Pernet/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<h2>Une surmortalité établie en lien avec les algues vertes</h2>
<p>Le risque de mortalité des huîtres était deux fois plus élevé en présence d’ulves que dans la condition témoin sans algue, et cette surmortalité était associée à une prolifération virale accrue, une dysbiose du microbiote bactérien, et une surexpression des défenses immunitaires. <a href="https://doi.org/10.1111/1365-2656.13662">Ces données inédites sont détaillées</a> en ce début février 2022 dans la revue scientifique <em>Journal of Animal Ecology</em>.</p>
<p>Nous savions que la prolifération des algues vertes avait des impacts majeurs sur les animaux vivant sur le fond, mais aucune étude n’avait établi de lien possible avec une maladie marine.</p>
<p>Deux années après le début de nos expérimentations, nous avons confirmé ces résultats avec des ulves provenant de plusieurs sites bretons différents.</p>
<p>Il s’agit maintenant de déterminer l’importance des ulves en tant que facteur de risque de mortalité dans les élevages sur le terrain. Pour cela, une étude épidémiologique d’envergure est incontournable. L’augmentation des marées vertes dans le monde due à l’eutrophisation pourrait avoir des conséquences sur le risque d’émergence de maladies qu’il faut évaluer précisément.</p>
<p>En attendant cette vaste étude épidémiologique, les ostréiculteurs peuvent, à leur échelle, limiter la prolifération des ulves dans leurs élevages en ajoutant des bigorneaux brouteurs, une sorte « d’auxiliaire » facilitateur. Cette pratique, qui a pour objectif initial de réduire le temps de nettoyage des poches tout en maintenant la circulation de l’eau autour des huîtres, pourrait ainsi améliorer la santé des cheptels.</p>
<h2>Les algues, créatrices de refuges contre l’acidification des eaux</h2>
<p>Contrairement aux ulves, nos expériences montrent que les fucus n’ont aucun effet, et les cordes de Solier réduisent le risque mortalité des huîtres d’un facteur deux par rapport au témoin. Bien que ce résultat ne fût pas significatif sur le plan statistique, la présence de certaines espèces d’algues pourrait être bénéfique à la santé des huîtres.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/444273/original/file-20220203-5081-13ls2sd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/444273/original/file-20220203-5081-13ls2sd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/444273/original/file-20220203-5081-13ls2sd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/444273/original/file-20220203-5081-13ls2sd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/444273/original/file-20220203-5081-13ls2sd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/444273/original/file-20220203-5081-13ls2sd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/444273/original/file-20220203-5081-13ls2sd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/444273/original/file-20220203-5081-13ls2sd.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Huître sauvage entourée de fucus. Les fucus n’ont pas d’effet sur la résistance des huîtres à la maladie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">E. Dugeny/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>Alors que l’océan, en absorbant près d’un quart des émissions humaines de CO<sub>2</sub>, s’<a href="https://theconversation.com/lacidification-des-oceans-lautre-danger-du-co-114716">acidifie</a> à un taux sans précédent historique, au point de menacer la vie des coquillages, le partenariat avec les algues est plein de promesses.</p>
<p>Grâce à la photosynthèse, les algues captent en effet le CO<sub>2</sub> pour le transformer en sucre et diminuent ainsi l’acidité de l’eau. Les algues créent ainsi des <a href="https://www.slate.fr/story/181212/algues-solution-lutter-changement-climatique-biodiversite-marine">refuges contre l’acidification</a> favorables à la croissance des coquillages.</p>
<p>Si la co-culture des algues et des coquillages représente une option sérieuse pour limiter les effets de l’acidification, il faut néanmoins prendre en compte les impacts sur la santé des animaux et choisir les meilleures associations possible.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/444275/original/file-20220203-27-1mkefr5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/444275/original/file-20220203-27-1mkefr5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/444275/original/file-20220203-27-1mkefr5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=270&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/444275/original/file-20220203-27-1mkefr5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=270&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/444275/original/file-20220203-27-1mkefr5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=270&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/444275/original/file-20220203-27-1mkefr5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=339&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/444275/original/file-20220203-27-1mkefr5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=339&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/444275/original/file-20220203-27-1mkefr5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=339&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Impact de l’acidification sur la croissance de l’huître. Ces coquilles ont été photographiées après 23 jours d’exposition à des conditions ambiantes (haut) et acidifiées (bas). Les coquilles en milieu acidifié étaient plus petites et décolorées par rapport au témoin.</span>
<span class="attribution"><span class="source">F. Pernet/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une interaction valable bien au-delà de la conchyliculture</h2>
<p>Ce que nous avons montré <a href="https://doi.org/10.1111/1365-2656.13662">dans notre récente étude</a> pour un système d’interaction simple incluant algues et huîtres s’applique à toutes autres espèces.</p>
<p>La conchyliculture, comme d’autres activités de production alimentaire tributaire du milieu naturel, telles que la production de miel ou de vin par exemple, devra s’adapter au changement climatique et au risque croissant de maladies.</p>
<p>Ainsi, on parle souvent de luttes : lutte contre l’acidification, lutte contre les maladies, lutte contre la pollution. Toutes ces luttes convergent et la clé de voûte est la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9silience_(%C3%A9cologie)">« résilience »</a>, c’est-à-dire la capacité d’un système vivant à retrouver son état de référence (ou un nouvel état d’équilibre) après une <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Perturbation_%C3%A9cologique">perturbation</a>.</p>
<p>Pratiquement, cette résilience des écosystèmes passe par le maintien de la biodiversité qui assure la complémentarité et la redondance des fonctions entre espèces. C’est l’objectif que nous devons garder en ligne de mire.</p>
<hr>
<p><em>Elyne Dugeny, Julien de Lorgeril, Bruno Petton, Eve Toulza et Yannick Gueguen sont co-auteurs de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/176322/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>L’étude évoquée dans cet article a été financée par le DLAL FEAMP Pays de Brest (projet FEDIVER) et H2020 (projet VIVALDI).</span></em></p>Une étude publiée ce mercredi 9 février 2022 montre comment les algues peuvent influencer le devenir des huîtres exposées à une maladie mortelle.Fabrice Pernet, Chercheur en biologie marine, IfremerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1737722021-12-20T18:51:40Z2021-12-20T18:51:40ZLe pétoncle noir bientôt de retour en Bretagne ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/437984/original/file-20211216-21-184oz5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">De jeunes pétoncles sont semés par l’équipe de l’écloserie du Tinduff (Finistère) sur des zones préalablement enrichies en substrats pour leur permettre de se fixer.</span> <span class="attribution"><span class="source">Stéphane Pouvreau / Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Longtemps pêché sur la côte atlantique française – principalement en rade de Brest, dans les Pertuis charentais et le bassin d’Arcachon –, le pétoncle noir (<em>Mimachlamys varia</em>) se fait de plus en plus rare.</p>
<p>Peu connu, il a pour cousin le pétoncle blanc, souvent appelé « vanneau » et plus largement consommé. Tous deux appartiennent à la famille des pectinidés, celle de la coquille Saint-Jacques. Moins répandu, le pétoncle noir fait l’objet d’une consommation plus restreinte et surtout locale. Les amateurs lui trouvent des qualités gustatives supérieures à celles du pétoncle blanc, du fait de son goût à mi-chemin entre la coquille et l’huître.</p>
<p>Au cours des dernières décennies, les stocks de <em>Mimachlamys varia</em> se sont effondrés, sous l’action conjointe de la surpêche et de la dégradation ou perte d’habitat. Dans les années 1970, la pêcherie du pétoncle noir produisait <a href="https://archimer.ifremer.fr/doc/00000/6041/">700 tonnes en rade de Brest</a>. Cette production est tombée à 70 tonnes dans les années 2010 ; la pêcherie a été fermée en 2018, faute de stocks suffisants.</p>
<p>Aujourd’hui, l’avenir de cette exploitation par la pêche est incertain, notamment en rade de Brest.</p>
<h2>Réintroduire l’espèce durablement</h2>
<p>Dans le cadre d’un projet de recherche – <a href="https://wwz.ifremer.fr/mascoet/">Mascoet</a>, réunissant des équipes de l’Ifremer, de l’université de Brest, des comités des pêches et une écloserie située en rade de Brest (celle du Tinduff) – des travaux sont conduits pour mieux connaître cette espèce.</p>
<p>Un des volets du projet concerne l’étude des conditions favorables à sa croissance (température, salinité, régime alimentaire…), mais aussi les conditions favorables à son implantation et son maintien en milieu naturel ; un effort particulier est ainsi consacré à l’étude de son habitat.</p>
<p>Le pétoncle noir a besoin de supports pour se fixer sur le fond, se développer (failles de roches, blocs, coquilles d’autres bivalves et notamment celles de l’huître plate, <em>Ostrea edulis</em>) et obtenir un abri contre ses principaux prédateurs – les étoiles de mer, les dorades. Mais, dans les zones fréquemment draguées, ces supports se raréfient.</p>
<p>L’ambition des scientifiques est de pouvoir proposer des solutions de réintroduction de l’espèce et de reconquête de ses conditions d’habitat favorable dans les sites historiques de présence. Pour permettre une reprise de son exploitation par les professionnels de façon durable.</p>
<p>Nous vous proposons de suivre en photos ces travaux sur le terrain…</p>
<h2>Des écoblocs en guise de maison</h2>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/437985/original/file-20211216-21-pni4zu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/437985/original/file-20211216-21-pni4zu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/437985/original/file-20211216-21-pni4zu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/437985/original/file-20211216-21-pni4zu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/437985/original/file-20211216-21-pni4zu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/437985/original/file-20211216-21-pni4zu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/437985/original/file-20211216-21-pni4zu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/437985/original/file-20211216-21-pni4zu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Écoblocs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Matthias Huber/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans le cadre des opérations de restauration écologique de l’habitat favorable aux pétoncles – comme ici (photo ci-dessus) sur le site du Roz en baie de Daoulas dans la rade de Brest –, de petits blocs de béton coquillier, fabriqués à partir de poudre de coquilles d’huîtres, sont proposés à des jeunes pétoncles.</p>
<p>Ces derniers viennent s’abriter à l’intérieur de chaque niche prévue à cet effet. Alors qu’il n’y a plus aucun pétoncle sur le fond, chaque écobloc abrite plus d’une dizaine de pétoncles.</p>
<figure class="align-center zoomable">
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<figcaption>
<span class="caption">Comptage des pétoncles dans les écobocs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Stéphane Pouvreau/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Des opérations de comptage des pétoncles présents dans chaque écobloc sont conduites, comme ici (photo ci-dessus) sur le chantier pilote de la rade de Brest ; on y compte une trentaine d’écoblocs déposés sur une surface de 5 m<sup>2</sup>. La densité actuelle est de 500 pétoncles sur l’ensemble du chantier, soit environ 100 pétoncles par m<sup>2</sup>.</p>
<p>Ce suivi va se poursuivre tout au long du projet et de nouveaux types d’écoblocs, de plus en plus bioinspirés, vont être testés.</p>
<h2>Un destin lié à celui des huîtres plates</h2>
<p>Comme les moules, le pétoncle noir vit fixé à l’aide d’un byssus sur divers supports : les failles de roches, les blocs de rocher, les coquilles d’autres bivalves et tout particulièrement sur celle de l’huître plate (<em>Ostrea edulis</em>).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/437987/original/file-20211216-25-1goeus4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/437987/original/file-20211216-25-1goeus4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/437987/original/file-20211216-25-1goeus4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/437987/original/file-20211216-25-1goeus4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/437987/original/file-20211216-25-1goeus4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/437987/original/file-20211216-25-1goeus4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/437987/original/file-20211216-25-1goeus4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/437987/original/file-20211216-25-1goeus4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les huîtres, un des habitats favoris des pétoncles.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Stéphane Pouvreau/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Même si le pétoncle peut changer plusieurs fois de support au cours de sa vie, les huîtres plates mortes présentant leurs deux valves intactes offrent des abris de premier choix permettant au pétoncle de se protéger des prédateurs (étoiles de mer, dorades).</p>
<p>Historiquement, les fonds de la rade de Brest hébergeaient d’importants <a href="https://www.encyclopedie-environnement.org/vivant/huitres-meconnus-milieux-cotiers/">bancs sauvages d’huîtres plates</a>, espèce quasi disparue aujourd’hui, en lien avec la surexploitation, la dégradation des milieux et l’émergence de maladies parasitaires. La disparition de ces supports a fortement contribué au déclin du pétoncle.</p>
<figure class="align-center zoomable">
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<figcaption>
<span class="caption">Les branchies du pétoncle.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Olivier Dugornay/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le pétoncle noir est un microphage filtreur qui se nourrit en piégeant les particules organiques en suspension dans l’eau de mer, tout particulièrement le phytoplancton qui constitue une source de nourriture majeure.</p>
<p>Une fois les particules piégées par les branchies – ces lames orange aplaties, visibles dans la cavité palléale que l’on distingue sur la photo ci-dessus –, elles sont conduites via des sillons vers les palpes labiaux qui les amènent ensuite vers la bouche. D’autres sources peuvent contribuer à son régime alimentaire telles que le microphytobenthos lorsqu’il est remis en suspension, et les détritus de macroalgues.</p>
<p>En rade de Brest, étant donné que les sources de nourritures fluctuent en fonction des paramètres du milieu (conditions de marées, apports continentaux et océaniques, charge particulaire…), la quantité et la qualité des ressources alimentaires disponibles constituent des paramètres importants à considérer puisqu’ils déterminent la croissance et le contenu énergétique de l’animal.</p>
<h2>En attendant que grandissent les pétoncles</h2>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/438043/original/file-20211216-13-1t1adhq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/438043/original/file-20211216-13-1t1adhq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/438043/original/file-20211216-13-1t1adhq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/438043/original/file-20211216-13-1t1adhq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/438043/original/file-20211216-13-1t1adhq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/438043/original/file-20211216-13-1t1adhq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=494&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/438043/original/file-20211216-13-1t1adhq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=494&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/438043/original/file-20211216-13-1t1adhq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=494&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Mesure pour suivre la croissance des pétoncles.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Olivier Dugornay/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour suivre la croissance des pétoncles noirs réintroduits dans la rade de Brest, où les conditions environnementales sont contrastées, on peut marquer les coquilles à l’aide d’un fluorochrome non toxique pour l’animal.</p>
<p>La strie fluorescente, que l’on distingue clairement sur la photo ci-dessus, est visible lorsqu’elle est éclairée sous une lumière bleue. Elle correspond au marquage du bord de la coquille au début de l’expérience. La distance comprise entre la strie fluorescente (début du suivi) et la bordure de la coquille indique la zone de croissance. Sur la photo, la coquille a grandi de 13 mm.</p>
<p>Des naissains de pétoncles (individus de même âge) produits en écloserie sont plongés dans une solution de calcéine durant quelques heures puis semés en milieu naturel dans des parcs expérimentaux.</p>
<p>L’objectif de ce marquage est double : il s’agit de différencier les pétoncles semés des individus issus du milieu naturel qui viendraient se fixer dans les parcs expérimentaux ; de suivre la croissance individuelle des pétoncles.</p>
<p>Toutes ces connaissances acquises au cours de ces différentes expériences permettront le futur développement de modèles numériques pour simuler et prédire la croissance et la distribution spatiale des pétoncles en rade de Brest, mais également sur d’autres sites potentiels de la façade Manche-Atlantique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/173772/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Cugier a reçu des financements de France Filière Pêche (FFP). FFP est le principal financeur du projet MASCOET.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Aline Blanchet-Aurigny a reçu des financements de France Filière Pêche (FFP). FFP est le principal financer du projet MASCOET.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Stéphane Pouvreau est membre de la SER, Society for Ecological Restoration (SER is the leading international organization working on the science, practice, and policy of ecological restoration)</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Olivier Dugornay ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Longtemps pêché en rade de Brest, Mimachlamys varia a été victime ces dernières décennies de la surexploitation et de la perte de son habitat. Un programme tente de le réintroduire.Philippe Cugier, Chercheur en modélisation des écosystèmes benthiques côtiers, IfremerAline Blanchet-Aurigny, Chercheuse en écologie marine, IfremerStéphane Pouvreau, Chercheur en biologie marine, spécialisé dans l’écologie et la physiologie des bivalves marins, IfremerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1703542021-12-05T17:15:25Z2021-12-05T17:15:25ZDans la rade de Brest, les effets irréversibles de la pollution humaine sur le plancton<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/435010/original/file-20211201-17-1bsn60l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=40%2C81%2C2227%2C1547&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La rade de Brest a subi deux phases de contaminations depuis 1940.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Rade_de_Brest#/media/Fichier:Rade_de_Brest.jpg">Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>Étudier l’ADN préservé dans les sédiments marins peut nous apporter de précieuses informations sur l’évolution des communautés planctoniques marines. Son contenu est essentiel aux travaux menés pour comprendre les trajectoires d’évolution des écosystèmes côtiers, et ce à l’échelle de plusieurs siècles.</p>
<p>En couplant les observations paléogénétiques à d’autres indicateurs biogéochimiques, il est ainsi possible de remonter jusqu’aux causes des changements biologiques observés. Cette analyse pluridisciplinaire a justement fait l’objet d’une étude en Bretagne, dans la rade de Brest, projet piloté par l’Ifremer (Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer) entre 2017 et 2020.</p>
<p>Ces travaux ont démontré que les pollutions de la Seconde Guerre mondiale et celles de l’activité agricole intensive après les années 1940 avaient complètement modifié les populations locales de plancton de la rade, favorisant le développement d’espèces de <a href="https://doi.org/10.1016/j.cub.2021.03.079">microalgues toxiques</a>.</p>
<h2>Des changements spectaculaires depuis 1940</h2>
<p>Grâce à l’échantillonnage de sédiments marins de différentes époques (carottes sédimentaires) dans trois sites de la rade de Brest, il a été possible de reconstruire l’évolution des communautés planctoniques depuis le Moyen Âge, il y a de cela 1400 ans, jusqu’à présent.</p>
<p>Après avoir été échantillonnées, les carottes de sédiments ont été découpées centimètre par centimètre en procédant immédiatement à la préservation et l’analyse de l’ADN ancien avec des méthodes précautionneuses visant à éviter des contaminations avec l’ADN contemporain.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1176058894730321920"}"></div></p>
<p>Cet ADN ancien a été amplifié et séquencé, et une analyse par « metabarcoding » (étude massive de barcodes moléculaires permettant d’identifier les espèces) a permis de caractériser de manière exhaustive les communautés de microeucaryotes (protistes) anciennes et modernes et d’analyser les changements dans leur composition au cours du temps.</p>
<p>Le résultat est spectaculaire. Du Moyen Âge jusqu’aux années 1940-50, certains genres dominent dans le plancton de la rade. Après cette période, d’autres ordres et genres apparaissent, et ceux qui dominaient précédemment ont disparu presque totalement. </p>
<p>Comment expliquer ce changement ? Des analyses de polluants (métaux lourds et PCBs) ont été effectuées dans les mêmes sédiments.</p>
<h2>Nickel et chrome, signatures de pollutions liées à la guerre</h2>
<p>Des pics de concentrations en nickel et en chrome ont été mesurés sur cette même période de 1940-1950. Ces signatures chimiques peuvent être associées à différentes sources de pollutions (trafic naval, construction des bases sous-marines, bombardements) engendrées par l’industrie militaire de la Seconde Guerre mondiale.</p>
<p>La rade de Brest a en effet subi 165 bombardements avec plus de 30 000 tonnes de bombes déployées. La ville a été complètement détruite entre 1940 et 1944, année où il ne restait que quatre bâtiments debout dans le centre-ville.</p>
<p>Ces mêmes signatures chimiques ont été retrouvées en teneurs similaires sur d’autres sites de guerre navale, tels que Pearl Harbor à Hawaï où l’aviation japonaise a détruit la flotte américaine en 1945.</p>
<h2>Après la guerre, le boom des pesticides et des engrais</h2>
<p>Dans les sédiments de la période post-guerre, les contaminations aux métaux lourds (zinc, plomb, argent, cuivre, mercure) et aux polychlorobiphényles (PCBs) ont été attribuées aux activités humaines, et en particulier au développement des activités industrielles et agricoles qu’a connu le territoire brestois.</p>
<p>Ces données suggèrent un usage croissant de pesticides et d’engrais dans les terres et leur écoulement vers le littoral via le lessivage des contaminants dans les rivières bretonnes.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1276018446346657797"}"></div></p>
<p>Des analyses des concentrations de pollen de plantes (aulne, frêne, saule) sur le même site d’étude témoignent des changements des paysages et des pratiques agricoles finistériennes, et confirment les <a href="https://doi.org/10.1016/j.gloplacha.2017.11.004">pressions humaines subies par le paysage côtier breton</a>.</p>
<p>Les pollutions d’origine agricole et industrielle, superposées aux effets des contaminations engendrées par la Seconde Guerre mondiale, ont ensemble bouleversé les communautés planctoniques de l’écosystème et favorisé le développement de nouveaux assemblages d’espèces, dont certaines sont toxiques pour l’homme.</p>
<h2>Une microalgue toxique dans les huîtres</h2>
<p>La microalgue <em>Alexandrium minutum</em> est ainsi devenue progressivement <a href="https://archimer.ifremer.fr/doc/00334/44516/">plus abondante dans la rade</a>, provoquant, à l’occasion de ses efflorescences régulières, des interdictions de vente des coquillages.</p>
<p>Accumulée par les huîtres et d’autres bivalves qui s’en nourrissent, elle les rend impropres à la consommation en provoquant des syndromes neurologiques et paralysants puissants, pouvant entraîner, dans de rares cas, la mort d’un humain par arrêt du muscle cardiaque.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/435713/original/file-20211205-17-1msd8ro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/435713/original/file-20211205-17-1msd8ro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/435713/original/file-20211205-17-1msd8ro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/435713/original/file-20211205-17-1msd8ro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/435713/original/file-20211205-17-1msd8ro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/435713/original/file-20211205-17-1msd8ro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/435713/original/file-20211205-17-1msd8ro.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Quand l’<em>Alexandrium minutum</em> prolifère les eaux affichent des teintes brun-rouges.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://envlit.ifremer.fr/documents/dossiers/phytorisk/version_francaise/le_phytoplancton/em_alexandrium_minutum_em">Ifremer</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La pollution humaine n’a ainsi pas seulement transformé le plancton de la rade mais également contribué au développement d’un nouveau risque sanitaire pour l’humain.</p>
<p>Sans parler des conséquences économiques subies par la filière conchylicole lorsque les exploitations aquacoles sont fermées durant les efflorescences toxiques, comme s’est produit en été 2012 en rade de Brest justement à la suite <a href="https://archimer.ifremer.fr/doc/00278/38921/">d’une efflorescence toxique d’<em>Alexandrium minutum</em></a></p>
<h2>Des effets irrémédiables</h2>
<p>L’approche paléoécologique poursuivie dans le cadre de cette étude démontre que, depuis la période de la Seconde Guerre mondiale, nous ne retrouvons plus dans la rade de Brest les communautés planctoniques présentes au Moyen Âge.</p>
<p>En l’espace d’environ 70 années, la communauté microbienne locale n’a jamais retrouvé la composition de la période antérieure aux contaminations. Les analyses sur le plancton marin suggèrent ainsi que des changements potentiellement irréversibles ont pu se produire dans l’écosystème de la rade de Brest.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1163813077936041985"}"></div></p>
<p>En effet, la modification connue par le plancton ne représente peut-être que la partie émergée de l’iceberg. Il est possible qu’elle ait entraîné des effets en cascade le long de la chaîne trophique marine, dont le plancton constitue la base, avec des conséquences potentiellement négatives sur les communautés du zooplancton, des organismes filtreurs benthiques ou des poissons.</p>
<h2>La nécessité d’une réduction drastique des polluants</h2>
<p>Ces observations contribuent aux études sur la capacité de résilience d’un écosystème côtier, c’est-à-dire sa capacité à récupérer son équilibre après un changement majeur.</p>
<p>Le seul vrai moyen de revenir aux conditions précédant les contaminations d’origine humaine et de réduire le risque induit par le plancton toxique serait de diminuer drastiquement l’usage des pesticides et engrais chimiques, et de poursuivre une politique de transition écologique vers des pratiques agricoles plus soutenables pour l’environnement.</p>
<p>Les courbes des polluants montrent que, grâce aux efforts accomplis depuis les années 1990 par le secteur, la pollution a diminué. Il est toutefois difficile de déterminer si cela suffira à la reconstitution de l’écosystème planctonique pré-Seconde Guerre mondiale, compte tenu des changements continus de l’espace côtier brestois.</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1016/j.cub.2021.03.079">Cette étude</a> illustre combien l’activité de l’homme est susceptible d’engendrer des dégâts irréversibles sur l’écosystème marin, même dans sa composante la plus microscopique. Espérons que la mise en évidence de ces effets puisse éviter de reproduire l’histoire de la rade de Brest et que la conscience accrue de ces enjeux fasse évoluer la gestion du territoire marin côtier.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/170354/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raffaele Siano a reçu des financements de la région Bretagne, du CNRS (EC2CO) et de l’Ifremer pour accomplir cette recherche. </span></em></p>La pollution issue des bombardements puis celle attribuée à l’agriculture intensive ont profondément modifié le plancton de la rade de Brest.Raffaele Siano, Chercheur en écologie du plancton marin, paleoécologie, écologie moléculaire et écologie côtière, IfremerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1694132021-11-21T17:46:25Z2021-11-21T17:46:25ZLa redécouverte de la dalle de Saint-Bélec<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/426741/original/file-20211015-25-4obdf0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C0%2C1920%2C1276&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Datée de l’âge du Bronze ancien (2200 à 1600&nbsp;avant notre ère), la dalle de Saint-Bélec est la plus ancienne représentation cartographique connue en Europe.
</span> <span class="attribution"><span class="source">INRAP</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
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</figure>
<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science (qui a lieu du 1<sup>er</sup> au 11 octobre 2021 en métropole et du 5 au 15 novembre 2021 en outre-mer et à l’international), et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition aura pour thème : « Eureka ! L’émotion de la découverte ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>« Décrire ce curieux monument avec ses cupules, ses cercles et ses diverses figurations gravées, dans lesquelles certains voient une représentation humaine informe et celle d’une bête, est chose difficile. […] Ne nous laissons pas égarer par la fantaisie, laissant le soin à un Champollion, qui se trouvera peut-être un jour, de nous en donner la lecture. »</p>
<p><a href="https://www.letelegramme.fr/ar/viewarticle1024.php?aaaammjj=20070513&article=279923&type=ar">Paul du Chatellier</a> résumait ainsi les questionnements à propos des gravures que porte la dalle de Saint-Bélec qu’il venait de mettre au jour dans un tumulus de <a href="http://bcd.bzh/becedia/fr/lage-du-bronze-en-bretagne">l’âge du Bronze ancien</a> (2200-1600 avant notre ère) à <a href="https://www.google.com/maps/place/29390+Leuhan/@48.2579825,-3.9227543,10.25z/data=!4m5!3m4!1s0x481118d2880c5a5d:0x145e775a08b2d89!8m2!3d48.099562!4d-3.785675">Leuhan</a> dans l’ouest de la Bretagne. Il la fit alors transporter dans sa résidence et musée privé, le manoir de Kernuz à <a href="https://www.google.com/maps/place/29120+Pont-l%E2%80%99Abb%C3%A9/@47.9239744,-4.1339865,10.79z/data=!4m5!3m4!1s0x48172dc0f04c8cf7:0x40ca5cd36e563e0!8m2!3d47.866915!4d-4.222298">Pont-L’Abbé</a> (Finistère).</p>
<p>Après sa mort, son importante collection archéologique fut acquise en 1924 par le <a href="https://musee-archeologienationale.fr/">musée d’Archéologie nationale</a> installé dans le château de Saint-Germain-en-Laye. Le souvenir de cette dalle s’évanouissant au fil du temps, elle ne sera retrouvée que récemment dans une des caves du château du musée.</p>
<h2>Une figuration de champs ?</h2>
<p>En 1994, <a href="https://www.persee.fr/doc/rao_0767-709x_2002_num_19_1_1205">Jacques Briard</a>, chercheur au CNRS et spécialiste de l’âge du Bronze, s’interroge sur l’interprétation à donner à la dalle de Saint-Bélec, pour laquelle il ne dispose que du dessin et du cliché publiés par P. du Chatellier.</p>
<p>Il pense y voir la figuration d’un système de champs associé à des cupules (points gravés dans la roche), à la manière de ce que l’on connaît dans la <a href="http://www.espaces-naturels.info/merveilles-vous-avez-dit-merveilles">Vallée des Merveilles</a> (Mercantour) ou dans le <a href="https://whc.unesco.org/fr/list/94/">Val Camonica</a> (Nord de l’Italie).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/426743/original/file-20211015-16-x8f7g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/426743/original/file-20211015-16-x8f7g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/426743/original/file-20211015-16-x8f7g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/426743/original/file-20211015-16-x8f7g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/426743/original/file-20211015-16-x8f7g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/426743/original/file-20211015-16-x8f7g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/426743/original/file-20211015-16-x8f7g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le cliché de Paul du Chatellier sur lequel s’était basé Jacques Briard pour son étude.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Archives départementales du Finistère</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Des années plus tard, nous partagerons ce sentiment : les gravures de cette pierre, faites de motifs répétés (cercles, carrés, cupules) joints par des lignes, ressemblent à une carte. Toutefois, impossible d’aller plus loin sans pouvoir étudier cette grande dalle de schiste mesurant 2,20 m de longueur et 1,50 m de largeur pour un poids approchant la tonne.</p>
<h2>Une belle endormie</h2>
<p>Il n’y avait aucune assurance que la dalle de Saint-Bélec soit arrivée jusqu’à Saint-Germain-en-Laye et aucune mention n’en faisait état, croyait-on encore récemment.</p>
<p>Dans les années 1990, <a href="https://www.afcinema.com/Disparition-du-directeur-de-la-photographie-Renan-Polles-artiste-proteiforme.html">Renan Pollès</a>, cinéaste et archéologue amateur, mène l’enquête sur une autre pierre ornée de la collection du Chatellier, la <a href="https://www.persee.fr/doc/rao_0767-709x_1993_num_10_1_996">dalle de Renongar</a> (Plovan), qu’il publiera ensuite dans la <em>Revue archéologique de l’Ouest</em>.</p>
<p>Il la retrouve dans une niche des douves du château de Saint-Germain-en-Laye et mentionne dans sa publication deux autres pierres gravées de la même collection, <a href="https://sketchfab.com/3d-models/dalle-du-tumulus-de-minven-en-treogat-29-d510cde058fe4a6cafb240bd03c8810f">celle du coffre de Minven</a> à Tréogat et une deuxième dont il pense qu’elle provient des <a href="https://www.sahpl.asso.fr/SITE_SAHPL/Gouezin_Philippe_Le_m%C3%A9galithisme_de_la_r%C3%A9gion_de_Lorient.pdf">tombes à couloir de Butten er Hah</a> sur l’île de Groix, fouillées dans les années 1890-1900 par Louis Le Pontois, commandant de marine et archéologue consciencieux. Or, celui-ci, pour protéger les pierres gravées de Butten er Hah, les a enfouies sur place. Cette bévue fut rattrapée par un conservateur, en corrigeant l’exemplaire de l’article de Pollès conservé à la bibliothèque du Musée d’Archéologie nationale et mentionnant au passage qu’il s’agissait de la dalle de Saint-Bélec.</p>
<p>Cette simple note indiquait que la dalle se devait se trouver à Saint-Germain-en-Laye, mais où ? Avec l’aide du conservateur d’alors, nous avons arpenté tous les endroits où elle pouvait avoir été entreposée. Plus une seule niche des douves ne contenait une telle dalle en schiste et elle ne se trouvait pas non plus dans les collections lapidaires du musée.</p>
<p>C’est grâce à la mémoire d’un gardien du musée que nous avons fini par la retrouver en 2014 dans une des caves, où elle avait été déplacée pour la protéger des intempéries. Nous n’étions pas au bout de nos peines, car la dalle était entreposée de chant sur une structure en bois contre un mur qui empêchait d’accéder aux gravures. Après avoir réussi à réunir quelques subsides, une équipe spécialisée a finalement pu, en 2017, déposer la dalle à plat pour que nous puissions enfin l’étudier.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/426742/original/file-20211015-17-1xoeu37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/426742/original/file-20211015-17-1xoeu37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/426742/original/file-20211015-17-1xoeu37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/426742/original/file-20211015-17-1xoeu37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/426742/original/file-20211015-17-1xoeu37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/426742/original/file-20211015-17-1xoeu37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/426742/original/file-20211015-17-1xoeu37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Retrouvée dans cette cave du musée d’Archéologie nationale, la dalle était entreposée avec la face gravée contre un mur. La relever nécessita une logistique complexe.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Clément Nicolas/Bournemouth University, Yvan Pailler/UBO-Inrap</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une carte en relief</h2>
<p>Une fois confrontés à la dalle de Saint-Bélec, plusieurs observations nous ont confortés dans notre interprétation cartographique. Premier constat : il nous manque des pièces du puzzle.</p>
<p>Dans la tombe, la dalle était cassée dans son tiers supérieur mais le fouilleur avait récupéré une bonne partie des fragments et les avait restaurés en 1900. Nous avons par la suite retrouvé l’un de ces fragments dans les réserves du musée.</p>
<p>Deuxième constat, le cliché de Paul du Chatellier n’était pas trompeur et son dessin assez fidèle, permettant de rabouter les pièces manquantes. Enfin, toute une partie de la dalle a été sculptée en creux pour former un triangle, dans lequel a été ménagé un motif carré en bas-relief et piqueté une ligne ramifiée.</p>
<p>L’ensemble évoquait une vallée et la confrontation avec la topographie autour du tumulus de Saint-Bélec allait vite s’imposer comme une évidence. Celui-ci surplombe la haute vallée de l’Odet, qui présente une angulation similaire et qui est fermée à l’ouest par un massif tabulaire granitique, soit exactement le panorama que l’on peut voir depuis le tumulus de Saint-Bélec. Nous avions affaire là à la figuration en relief d’une portion de la vallée de l’Odet sur une quinzaine de kilomètres.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/426747/original/file-20211015-22-yxqued.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/426747/original/file-20211015-22-yxqued.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/426747/original/file-20211015-22-yxqued.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/426747/original/file-20211015-22-yxqued.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/426747/original/file-20211015-22-yxqued.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/426747/original/file-20211015-22-yxqued.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/426747/original/file-20211015-22-yxqued.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/426747/original/file-20211015-22-yxqued.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Topographie des environs du tumulus de Saint-Bélec reportée sur la dalle.</span>
<span class="attribution"><span class="source">D'après IGN</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cependant, nos certitudes ne suffisaient pas à faire une démonstration pour convaincre la communauté des archéologues ; d’autant que certains, <a href="https://www.jstor.org/stable/20065543?seq=1#metadata_info_tab_contents">dans une conception résolument évolutionniste</a>, doutent encore que l’Homme ait pu dresser des cartes avant l’avènement des cités, de l’État et de l’écriture…</p>
<p>Une plongée dans la littérature ethnographique montre que des sociétés pré-industrielles n’ont aucun mal à figurer des cartes (d’ailleurs, sans carte mentale, il n’est pas possible de se repérer dans l’espace) et que certaines d’entre elles gravaient dans la pierre des cartes il n’y a pas encore si longtemps en <a href="https://press.uchicago.edu/books/HOC/HOC_V2_B3/HOC_VOLUME2_Book3_chapter2.pdf">Afrique du Sud</a> ou en <a href="https://press.uchicago.edu/books/HOC/HOC_V2_B3/HOC_VOLUME2_Book3_chapter9.pdf">Australie</a>.</p>
<p>C’est seulement en échangeant avec des collègues géographes, <a href="https://letg.cnrs.fr/auteur122.html">Pierre Stéphan</a> et <a href="https://www.cnrs.fr/fr/personne/julie-pierson">Julie Pierson</a>, que nous avons réussi à affermir notre démonstration. Ils nous ont poussé à développer nos hypothèses pour mieux les tester d’un point de vue statistique.</p>
<p>C’est ainsi que l’agencement d’autres lignes, qui formaient des ramifications et des méandres, nous est apparu comme la figuration d’autres rivières alentour. Des analyses spatiales ont été utilisées pour quantifier ce que jusqu’ici l’œil humain voyait mais sans pouvoir en faire la démonstration. Elles permettent de comparer statistiquement des formes (<a href="https://www.researchgate.net/publication/291255375_The_role_of_the_Pompeiu-Hausdorff_metric_in_fixed_point_theory">distance de Pompeiu-Hausdorff</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Test_de_Wilcoxon-Mann-Whitney">test de Wilcoxon</a>) ou des réseaux (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Indice_et_distance_de_Jaccard">distance de Jaccard</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Test_de_Mantel">test de Mantel</a>), ici les gravures et les éléments topographiques supposément représentés.</p>
<p>Ainsi, nous avons pu évaluer le degré de similarité entre le réseau de lignes gravées sur la dalle et le réseau hydrographique existant. Les résultats probants (autour de 70-80 %) se sont avérés équivalents à ceux obtenus pour des cartes mentales collectées auprès des Touaregs du Niger et des Papous en Nouvelle-Guinée.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/426744/original/file-20211015-19-1hg0acl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/426744/original/file-20211015-19-1hg0acl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/426744/original/file-20211015-19-1hg0acl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/426744/original/file-20211015-19-1hg0acl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/426744/original/file-20211015-19-1hg0acl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/426744/original/file-20211015-19-1hg0acl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/426744/original/file-20211015-19-1hg0acl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/426744/original/file-20211015-19-1hg0acl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Détail de la dalle gravée figurant la vallée de l'Odet.</span>
<span class="attribution"><span class="source">V. Lacombe/DigiScan3D et P. Stéphan/CNRS</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>La carte d’un territoire de l’âge du Bronze</h2>
<p>Bien que l’on ait réussi à identifier plusieurs éléments topographiques – la vallée de l’Odet, les montagnes Noires, les cours de l’Aulne, de l’Isole et du Stêr Laër –, il y a un certain nombre de motifs que nous n’avons pas encore réussi à décoder.</p>
<p>La fraîcheur des gravures suggère qu’un temps relativement court s’est écoulé entre les gravures et l’utilisation de la dalle comme paroi d’une tombe de l’âge du Bronze ancien. Et plusieurs motifs pourraient correspondre à des structures de cette période, comme des tumulus (cupules), des enceintes (motifs circulaires, <a href="https://www.lalanguefrancaise.com/dictionnaire/definition/patatoide">patataoïdes</a>) ou des champs (motifs réticulés). Pour tester le potentiel prédictif de cette carte gravée et en parfaire la démonstration, il faudrait maintenant réussir à repérer et à dater certains des sites qui pourraient y être figurés. De quoi nous occuper les prochaines années dans ce secteur des montagnes Noires.</p>
<hr>
<p><em>Pour en savoir plus : Notre étude, <a href="http://www.prehistoire.org/shop_515-47906-5446-800/04-2021-tome-118-1-p.-99-146-c.-nicolas-y.-pailler-p.-stephan-j.-pierson-l.-aubry-b.-le-gall-b.-le-gall-v.-lacombe-j.-rolet-la-carte-et-le-territoire-la-dalle-gravee-du-bronze-ancien-de-saint-belec-leuhan-finistere.html">« La carte et le territoire : la dalle gravée du Bronze ancien de Saint-Bélec »</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169413/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Clément Nicolas a reçu des financements de Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Ministère de la Culture, Conseil départemental du Finistère, Fondation Fyssen, Commission Européenne</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Yvan Pailler ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La plus ancienne carte en relief européenne a été redécouverte il y a quelques années au fond des caves d’un musée. Une chance, mais nombre de ses secrets restent encore à percer.Yvan Pailler, Archéologue, titulaire de la chaire ArMeRIE Inrap/UBO, UMR 6654 LETG, Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP)Clément Nicolas, Postdoc Marie Skłodowska-Curie, Bournemouth University – UMR 8215 Trajectoires, Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1674662021-09-07T18:27:45Z2021-09-07T18:27:45ZQuand un bolide spatial illumine le ciel de Bretagne<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/419843/original/file-20210907-24-1l21vgx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=9%2C3%2C1260%2C705&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Capture d’écran des images de la météorite prises par la webcam du barrage d’Arzal dans le Morbihan. </span> <span class="attribution"><span class="source">DAMGAN LA ROCHE-BERNARD TOURISME/DR</span></span></figcaption></figure><p>Dans la nuit du dimanche 5 septembre, le ciel s’est éclairé pendant quelques secondes au-dessus de la Bretagne. Ce flash très lumineux a été également observé dans le sud de l’Angleterre. Le site <a href="https://www.vigie-ciel.org/">Vigie-Ciel</a>, programme de sciences participatives qui invite à observer les étoiles filantes, rechercher des météorites et des cratères d’impact, a recueilli près de 500 rapports d’observateurs amateurs ou professionnels !</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/UDNyu_HfNls?wmode=transparent&start=2" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">La trajectoire du bolide vue du sud de l’Angleterre (Utvard Wittgenstein).</span></figcaption>
</figure>
<p>Je suis l’un des co-fondateurs de Vigie-Ciel, et voilà ce que l’on peut dire de cet événement. Un bolide a été détecté par nos caméras, il était extrêmement lumineux, sa trajectoire était localisée à l’extrême Ouest de la péninsule de Bretagne. On parle de bolide ou de météore (synonyme d’étoile filante). Un météore est le trait lumineux observé lorsqu’une poussière interplanétaire ou un petit météoroïde pénètre dans l’atmosphère terrestre à très grande vitesse (entre 12 et 72 km/s). Un météoroïde est une petite particule de quelques millimètres à quelques dizaines de centimètres de diamètre qui se déplace dans l’espace. C’est elle qui donne naissance au météore si elle a la chance de pénétrer dans l’atmosphère de la Terre. Si le météoroïde est suffisamment massif, une partie de l’objet peut résister à cette entrée dans l’atmosphère, et donner naissance à une météorite (le caillou que l’on peut retrouver sur Terre).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/419792/original/file-20210907-23-1qq8hs3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/419792/original/file-20210907-23-1qq8hs3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=440&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/419792/original/file-20210907-23-1qq8hs3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=440&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/419792/original/file-20210907-23-1qq8hs3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=440&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/419792/original/file-20210907-23-1qq8hs3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=553&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/419792/original/file-20210907-23-1qq8hs3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=553&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/419792/original/file-20210907-23-1qq8hs3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=553&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Trajectoire calculée avec les données des caméras FRIPON.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fripon/Vigie-Ciel</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Notre réseau d’une centaine de caméras couvre la France, tous les 60 ou 70 kms, mais bien sûr, il n’y en a pas au large. Elles se déclenchent automatiquement quand il y a un mouvement d’objet dans le ciel. Si le même événement est filmé par différentes caméras, il est alors possible de reconstituer une trajectoire en 3 dimensions et d’estimer la vitesse de l’objet. Dimanche soir, nous avons pu capturer le bolide grâce à trois caméras. Ce n’est pas une observation optimale. En effet, lorsqu’un objet est localisé plus à l’intérieur du territoire, il peut être filmé par plus d’une dizaine de caméras, ce qui améliore grandement les estimations de taille, de vitesse et de trajectoire. De plus, le ciel était couvert dans la région.</p>
<p>Néanmoins, grâce à nos images, on arrive à déterminer la vitesse, et par un modèle, en estimant le freinage de l’objet, dû au frottement de l’objet aux gaz de l’atmosphère, on est capable de déterminer la taille initiale et finale. Pour un objet très gros et rapide, sa vitesse va dégringoler très rapidement, et il peut se fragmenter. Si l’objet est lent au contraire, la vitesse va baisser moins rapidement.</p>
<p><a href="https://www.vigie-ciel.org/2021/09/06/bolide-du-5-septembre-23h47/">Selon nos premiers calculs</a>, les principaux paramètres de l’événement sont un passage au zénith de Brest et une fin de trajectoire brillante dans la Manche à 39 km d’altitude. La vitesse initiale de 21,5 km/s (~ 77 500 km/h) et une inclinaison de 34° par rapport à l’horizontale n’ont par permis la survie d’une météorite, l’objet d’une vingtaine de centimètres, et d’environ 40 kg, s’est complètement désintégré dans l’atmosphère. On peut donc parler de météoroïde mais pas de météorite.</p>
<h2>Un phénomène extrêmement lumineux et bruyant</h2>
<p>Lorsqu’un fragment d’astéroïde, de planète, et parfois de comète vient à la rencontre de la Terre, il pénètre l’atmosphère à une vitesse « cosmique », allant de quelques dizaines à quelques centaines de milliers de kilomètres à l’heure.</p>
<p>L’atmosphère ayant une densité très supérieure à celle du milieu interplanétaire, le bolide est brutalement ralenti par cette rencontre. Il va avoir tendance à se fragmenter, tandis que l’air, violemment comprimé, est porté à des températures gigantesques, entre 10 000 et 20 000 degrés. L’air ainsi échauffé s’ionise, c’est-à-dire que des électrons sont arrachés aux atomes, et il devient ainsi un plasma qui émet de la lumière.</p>
<p>Ainsi, ce n’est pas l’objet lui-même, ni ses fragments, que l’on voit briller, mais l’air ionisé qui les entoure. À une altitude variable, qui dépend de la taille de l’objet, de sa vitesse et de son angle d’incidence, le phénomène lumineux s’interrompt, car le bolide s’est ralenti et la pression n’est plus suffisante pour que l’air se transforme en plasma. Les reliquats de l’objet finiront par tomber en chute libre en étant soumis aux vents qui circulent dans l’atmosphère – on parle de « vol sombre ». Ces processus sont les mêmes quelle que soit la taille de l’objet incident, mais une fine poussière n’atteindra pas le sol. Elle sera volatilisée bien avant et n’engendrera qu’une petite traînée, à savoir une étoile filante.</p>
<p>C’est vrai qu’un événement aussi lumineux est impressionnant, mais ce n’est pas très rare. Des objets aussi volumineux qui pénètrent l’atmosphère au-dessus de la France métropolitaine, on en a quelques-uns par an. Ces chutes sont totalement aléatoires, et peuvent se produire n’importe où.</p>
<p>Plusieurs témoignages ont rapporté un « bang » en plus de la trace lumineuse. Ce bruit sourd est souvent entendu par les observateurs lors de l’entrée d’un météoroïde de plusieurs dizaines de centimètres de diamètre entre dans l’atmosphère. Ce « bang » est lié à la fragmentation de l’objet qui crée une onde de choc se propageant à la vitesse du son. Cette onde en plus d’être audible peut être également enregistrée par les sismomètres lorsqu’elle touche la surface.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/167466/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sylvain Bouley participe au projet FRIPON (Fireball Recovery and Interplanetary Observation Network), porté par l’Observatoire de Paris et plusieurs autres partenaires (Observatoire des sciences de l'Univers - Institut Pythéas , le Muséum national d'Histoire naturelle, l'Université Paris Saclay) . Ce projet scientifique a initialement été financé par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR). Sylvain Bouley participe également au projet Vigie-Ciel.</span></em></p>Un objet volant bien identifié a éclairé le ciel de la Bretagne à l’Angleterre pendant quelques secondes. Un phénomène impressionnant mais finalement pas si rare.Sylvain Bouley, Professeur en géologie planétaire, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1637612021-07-22T23:38:22Z2021-07-22T23:38:22ZDe la pierre à la rose, du magma au chaos<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/409891/original/file-20210706-23-890jbl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C19%2C2552%2C1897&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Chaos du Château sur la Côte de Granit Rose à Pors-Rolland, Perros-Guirec.</span> <span class="attribution"><span class="source">Nicolas Charles, BRGM</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Entre Ploumanac’h et Trébeurden, la côte bretonne revêt ses plus beaux habits et inspire de nombreux artistes. Des rochers aux formes insolites se parent d’un camaïeu de rose aux reflets changeants et dont la roche qui les compose donne son nom à la Côte de Granit Rose. À chacun son orthographe entre poètes et géologues, granit pour les littéraires et granite pour les scientifiques.</p>
<p>Le granite rose breton est une roche magmatique, issue de la cristallisation d’un magma à quelques kilomètres sous terre il y a environ 300 millions d’années. Elle est constituée comme toutes les roches granitiques de différents minéraux cristallisés les uns avec les autres, et sans espace entre les grains. Le quartz est gris et translucide, la biotite est noire et en feuillets, le feldspath est blanc laiteux ou alors ici teinté de rose par des oxydes de fer, à l’origine de la célèbre couleur de ce granite breton.</p>
<p>Même si le granite apparaît robuste, toutes les roches à la surface de notre planète sont soumises à l’altération et à l’érosion. À Pors-Rolland, le chaos du Château illustre parfaitement ces phénomènes qui modèlent progressivement le paysage. Tout commence par la lente cristallisation du magma en profondeur, suivie d’un phénomène de « rétraction » qui permet l’apparition d’un réseau de fractures, les diaclases. Par le jeu de l’érosion, le granite s’approche de la surface et ces diaclases vont guider la circulation des eaux d’infiltration légèrement acides. Une altération chimique et une érosion mécanique vont alors prendre place, désagrégeant peu à peu le granite en sable le long des fractures. Une fois à l’air libre, le sable est évacué par les eaux de ruissellement, ce qui individualise des blocs qui s’arrondissent avec le temps. Du magma naît le chaos…</p>
<p>Toujours exploitée à Perros-Guirec sous le nom de « Rose de La Clarté », cette roche ornementale bénéficie même d’une indication géographique protégée « <a href="https://www.granitdebretagne.bzh/">granit de Bretagne</a> ». En effet, depuis mars 2014 et la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000028738036/">loi n°2014-344</a> relative à la consommation, le dispositif des indications géographiques a été étendu aux produits industriels et artisanaux, dont les pierres naturelles, alors qu’il n’était réservé auparavant qu’aux produits agricoles et viticoles. L’indication géographique « granit de Bretagne » a été promulguée en <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000033893885">janvier 2017</a>.</p>
<hr>
<p><em>Pour aller plus loin :<br>
● Graviou P., Guérin O., 2017. Curiosités géologiques de la Côte de Granit Rose. BRGM Éditions, ISBN 978-2-7159-2650-9.<br>
● Graviou P., Jégouzo P., Jonin M., Plaine J., 2014. <a href="http://www.omniscience.fr/collections/Guides-geologiques-6/BRETAGNE--10-itineraires-de-randonnee-detailles-1-45.html">Guide géologique de la Bretagne. Omniscience-BRGM Éditions</a>, ISBN 978-2-916097-46-6</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/163761/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nicolas Charles a reçu des financements du BRGM.</span></em></p>La côte bretonne tout en dentelle rose et bleue.Nicolas Charles, Géologue, PhD, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1622822021-06-09T18:46:46Z2021-06-09T18:46:46ZFragilités et énigmes d’un sondage électoral<p>Au XX<sup>e</sup> siècle, les sondages d’opinion ont supplanté les multiples formes existantes pour connaître les attitudes du public, réussissant à instaurer un nouveau régime d’opinion en termes d’expression, de consistance, <a href="https://www.cairn.info/revue-le-mouvement-social-2007-4-page-95.htm">d’interprètes et d’usages</a>. Dans ce vaste ensemble, il est possible de distinguer les sondages électoraux, qui cherchent à anticiper des pratiques « réelles » de vote, des sondages d’opinion à proprement parler qui saisissent des valeurs, des jugements ou représentations dont l’expression peut se révéler <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01370740/document">improvisée</a>.</p>
<p>Seuls sondages susceptibles d’être réellement confrontés à des résultats, contrairement aux enquêtes d’opinion portant sur des sujets sociaux et politiques, les sondages électoraux transforment la vie politique. Ils arbitrent les prétentions des candidats à concourir et à s’imposer. Les sondages ont par exemple contribué à établir la légitimité de la socialiste Ségolène Royal pour être candidate à l’élection présidentielle française de 2007, comme ils ont dissuadé la candidature de François Hollande, pourtant président sortant.</p>
<p>La perception des rapports de force <a href="http://publictionnaire.huma-num.fr/notice/sondages-dopinion/">qu’ils suggèrent</a> informent par ailleurs les représentations et commentaires journalistiques des qualités nécessaires <a href="https://www.persee.fr/doc/polix_0295-2319_1989_num_2_5_1366">aux candidats</a> (Bernard Lacroix, « À quoi servent les sondages ? », <em>Revue de science administrative de la Méditerranée occidentale</em>, 22-23, 1988).</p>
<p>Ces sondages électoraux contribuent à façonner et à mettre en récit des dynamiques électorales, présentées sous la forme de <a href="https://methods.sagepub.com/book/sage-hdbk-public-opinion-research/n45.xml">« courses de chevaux »</a>. Ils délivrent une <a href="https://ideas.repec.org/a/kap/pubcho/v70y1991i2p181-213.html">information stratégique aux électeurs</a> dont ils tiennent compte au moment du vote, dans une forme <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/BF00992237">d’influence impersonnelle</a>.</p>
<p>Autant <a href="https://m.armand-colin.com/la-communication-politique-4e-ed-9782200627843">l’élection présidentielle</a> – 14 enquêtes en 1965, 293 en 2007 – est saturée par les sondages, autant les élections régionales et départementales des 20 et 27 juin 2021 en font une expérience bien plus modeste.</p>
<p>Ce qui s’expliquer par un coût de fabrication incompressible, quand l’exploitation ressort ici incomparablement plus restreinte que dans le cadre national. Mais c’est aussi cette rareté des sondages qui peut nous conduire à prêter une attention particulière à l’un d’entre eux lorsqu’il est publié. Ce que nous nous proposons de faire avec <a href="http://www.odoxa.fr/sondage/a-deux-mois-scrutin-bretagne-election-sannonce-tres-indecise/">l’enquête ODOXA</a> « l’état de l’opinion et intentions de vote en Bretagne » publiée le 7 mai 2021 par Le Télégramme.</p>
<h2>Les intentions de vote en Bretagne : une hiérarchie incertaine</h2>
<p>L’intérêt des candidats, journalistes et du grand public pour cette enquête a d’abord concerné, très loin devant tous les autres volets de l’enquête, la mesure des intentions de vote au premier tour de l’élection régionale bretonne (et plus secondairement les projections au second tour selon les configurations imaginées).</p>
<p>L’enquête établit ainsi dans le détail une distribution hiérarchisée des scores, qui fut la première – et souvent la seule – à être retenue et reprise. Pour ne retenir que les cinq têtes de liste, en position pour qualifier leurs listes au second tour, la hiérarchie est ressortie comme suit : 18 % pour la liste de Thierry Burlot (majorité présidentielle) ; 17 % pour la liste d’Isabelle Le Callennec (LR) contre 23,5 % en 2015 ; 14 % pour la liste du président sortant Loïg Chesnais-Girard (PS) contre 34,9 % en 2015 ; 14 % pour la liste de Gilles Pennelle (RN) contre 18,2 % en 2015 ; 11 % pour la liste de Claire Desmare-Poirier (EELV) contre 6,7 % en 2015…</p>
<p>En repartant du score donné très bas du président sortant Loïg Chesnais-Girard (14 %), nous souhaitons questionner les fragilités et les énigmes de l’enquête (qu’on pourrait généraliser pour une large part à d’autres enquêtes).</p>
<p>Il est fréquent que les intentions de vote soient répercutées de manière brute, sans filtre, sans chercher à en interroger la solidité. Nous le savons, la taille d’un échantillon ressort comme la variable la plus fondamentale, déterminant ce qu’on appelle la marge d’erreur. Cette dernière est mesurée par la loi normale, aussi connue sous le nom de loi de Gauss, calculée en fonction de la taille de l’échantillon, de la répartition des réponses et du degré de confiance que l’on <a href="https://www.apmep.fr/Inference-statistique-et-sondages">souhaite obtenir</a>.</p>
<p>Pour résumer, plus la taille croît et plus les marges d’erreur diminuent. Avec un échantillon représentatif de 1020 habitants de la région Bretagne âgés de 18 ans et plus, l’enquête considérée ici se situe dans les standards habituels, mais loin derrière certaines enquêtes électorales portant sur l’élection présidentielle par exemple l’enquête menée par CEVIPOF-Ipsos en 2017 portant sur <a href="https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2017/article/2017/04/19/plus-d-un-quart-des-electeurs-toujours-hesitants_5113314_4854003.html">11600 enquêtés</a>.</p>
<p>Mais si nous laissons de côté le volet « état de l’opinion » pour ne retenir que celui consacré aux intentions de vote, les marges d’erreur deviennent plus significatives. Le nombre de répondants inscrits sur les listes électorales tombe à 879. Davantage, celui comptant aller voter et ayant exprimé une intention de vote s’affiche à seulement 561 individus au premier tour, et 530 à 541 individus selon les hypothèses au second tour. Alors que l’échantillon rétrécit à vue d’œil, la solidité des réponses interroge elle aussi.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/lw_15Rfm1sM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Public Sénat.</span></figcaption>
</figure>
<p>Parmi les personnes ayant indiqué leur intention de voter parmi les listes proposées au premier tour de l’élection régionale bretonne, seuls 40 % d’entre elles se sont déclarées sûres de leur choix. 43 % ont manifesté une intention de vote en indiquant pouvoir encore changer d’avis, quand 17 % n’ont déclaré aucune intention de vote.</p>
<p>Une fois ces limites rappelées, le faible score prêté à Loïg Chesnais-Girard – 14 % donc – pourrait laisser penser, a priori, qu’il est peu connu, impopulaire, ou que son bilan est sévèrement jugé, ou pire, les trois à la fois. Qu’en est-il exactement ?</p>
<h2>Une notoriété gage de popularité ?</h2>
<p>À propos des <a href="https://www.cairn.info/revue-societes-contemporaines-2017-2-page-99.htm">barèmes de popularité</a>, Philippe Juhem a critiqué le sens commun selon lequel la popularité était un attribut spécifique de l’individu, pour défendre l’idée d’un attribut de position : l’accès aux responsabilités précéderait ainsi l’accroissement de popularité.</p>
<p>Nous pourrions, dans l’exemple breton, considérer que la notoriété se recoupe avec l’exercice des responsabilités politiques, et qu’elle contribue à établir la popularité. L’enquête (cf. tableau ci-dessous) montre une corrélation significative entre bonnes opinions exprimées et taux de notoriété.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/404819/original/file-20210607-28272-i0sgn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/404819/original/file-20210607-28272-i0sgn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/404819/original/file-20210607-28272-i0sgn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/404819/original/file-20210607-28272-i0sgn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/404819/original/file-20210607-28272-i0sgn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/404819/original/file-20210607-28272-i0sgn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=441&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/404819/original/file-20210607-28272-i0sgn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=441&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/404819/original/file-20210607-28272-i0sgn1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=441&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Taux de notoriété).</span>
<span class="attribution"><span class="source">T. Frinault</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour les personnalités situées en bas de classement, leur mauvais score ne traduit pas tant un fort pourcentage de mauvaises opinions, qu’une absence d’opinion : une majorité écrasante des répondants – environ 80 % – refuse de se prononcer.</p>
<p>La distribution entre bonnes et mauvaises opinions porte alors sur une base très réduite des répondants. Il n’en reste pas moins qu’une forte notoriété permet de bénéficier d’un réservoir élargi de bonnes opinions (et d’en recueillir aussi davantage de mauvaises).</p>
<p>Concernant la notoriété de Loïg Chesnais-Girad, l’enquête montre qu’elle est la plus forte de toutes les têtes de liste avec un taux ressortant à 54 % (nous mettons de côté Jean‑Yves Le Drian, seule personnalité testée mais qui n’est pas candidate). Ce taux double celui établi dans un précédent sondage <a href="https://www.lesechos.fr/politique-societe/politique/elections-regionales-2021-les-resultats-du-sondage-regiotrack-1285368">RégioTrack d’OpinonWay (réalisé en janvier 2021</a> auprès de 5073 personnes) : seuls 27 % des Bretons, soit la moitié tout de même, se disaient capables de citer son nom (aucune réponse n’était proposée). Autrement dit, la notoriété mesurée n’a rien à voir selon qu’on fournit une béquille aux répondants (réagir à des noms) ou non (qu’ils indiquent par eux-mêmes les noms).</p>
<p>Concernant sa popularité elle-même, la performance de Loïg Chesnais-Girard apparaît là encore relativement bonne puisqu’elle s’établit comme la meilleure de l’ensemble des têtes de liste en compétition auprès de l’ensemble des répondants, comme de ceux qui répondent sur les seules personnalités qu’ils disent connaître (77 % de bonnes opinions dans ce dernier cas, <em>ex aequo</em> avec Daniel Cueff).</p>
<h2>Hypothèse d’un vote rétrospectif : un bilan convaincant</h2>
<p>Qu’en est-il de l’appréciation du bilan de Loïg Chesnais-Girard ? Des chercheurs tels <a href="https://www.jstor.org/stable/1827369">Anthony Downs</a> ou <a href="https://www.jstor.org/stable/1955049">Gerald Kramer</a> ont mis en avant l’idée selon laquelle les électeurs, pour faire leur choix, seraient tournés vers l’avenir – et donc les programmes des candidats – en considérant égoïstement leurs intérêts (ignorant du même coup le fait qu’un électeur puisse voter selon l’idée qu’il se fait de l’intérêt général). Bien que tournés vers l’avenir (vote prospectif), ils doivent pourtant utiliser l’information déjà acquise, et donc passée. Ce qui fait immédiatement ressortir une asymétrie informationnelle entre les gouvernants sortants (qui ont un bilan évaluable) et leurs opposants.</p>
<p>Souscrivant à l’hypothèse d’un <a href="https://econpapers.repec.org/article/kappubcho/v_3a50_3ay_3a1986_3ai_3a1_3ap_3a5-25.htm">vote rétrospectif</a>, John Ferejohn estime que les électeurs évaluent la performance de leur gouvernement a posteriori. La promesse de mieux faire à l’avenir n’a que peu d’influence. Parce qu’évaluer de manière prospective les bénéfices futurs des programmes engendre des coûts d’information élevés, les électeurs évaluent et sanctionnent d’abord le bilan passé écrivait <a href="https://www.hup.harvard.edu/catalog.php?isbn=9780674497764">Vladimir Key</a>.</p>
<p>En faisant cette hypothèse que le bilan puisse influencer le vote (même si elle doit être complétée), que dit cette enquête bretonne ? Elle fait ressortir que 75 % des répondants se disent satisfaits de l’action de Loïg Chesnais-Girard en tant que président de la Région Bretagne (7 % très satisfaits et 68 % plutôt satisfaits). Ce taux de satisfaction oscille selon les <em>topics</em> entre un plancher de 63 % (pour les transports et mobilités en Bretagne) et un plafond de 85 % (pour le développement du tourisme et la valorisation du patrimoine).</p>
<p>Au final, comment expliquer qu’un président sortant à nouveau candidat, plus connu que ses concurrents, mieux perçu que ses concurrents, et dont le bilan donne satisfaction, soit donné aussi bas dans les intentions de vote ? Il faut ici se garder de toute certitude, mais se hasarder à des hypothèses (plus complémentaires qu’alternatives). Les résultats de cette enquête conduite tôt – la campagne avait à peine débuté – sont en définitive si fragiles que leur interprétation est malaisée. Le crédit à leur donner, sans être nul, est relatif. Par ailleurs, ces variables – notoriété, popularité, bilan – pourraient finalement jouer jouer plus secondairement que d’autres facteurs dans l’orientation des votes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/162282/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Frinault ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les sondages électoraux contribuent à façonner et à mettre en récit des dynamiques électorales.Thomas Frinault, Maître de conférences en science politique (spécialiste de l'étude du pouvoir local), Université Rennes 2Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1606302021-05-25T18:16:21Z2021-05-25T18:16:21ZBretagne : un scrutin régional indécis<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/401900/original/file-20210520-19-1ub2jpb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">X PY</span> </figcaption></figure><p>Il y a fort à parier que les prochaines élections régionales suscitent l’intérêt et captent davantage l’attention des médias (et du public ?) que le scrutin départemental organisé le même jour.</p>
<p>Ce déséquilibre d’intérêt ne reflète pas tant une asymétrie institutionnelle qu’elle sanctionne une représentation ordinaire opposant une collectivité vue comme moderne et d’avenir, la Région, à des conseils départementaux à qui le Premier ministre Manuel Valls avait promis une mort prochaine dans son <a href="https://www.vie-publique.fr/discours/190876-declaration-de-politique-generale-de-m-manuel-valls-premier-ministre">discours de politique générale</a> le 8 avril 2014.</p>
<p>En attendant, nos conseils régionaux, créés par la loi du 2 mars 1982, n’ont ni la compétence de leur compétence (aucun pouvoir législatif), ni une forte capacité d’intervention financière. Par comparaison en 2014, la région italienne de Lombardie disposait pratiquement à elle seule de l’intégralité des budgets régionaux français. Ces conseils régionaux n’ont pas davantage d’autonomie financière (leurs finances sont dérivées et leur pouvoir de moduler la fiscalité se résume à quelques centimes sur le litre d’essence et à quelques euros sur les cartes grises). C’est donc dans ce cadre d’un pouvoir étroitement bordé que les électeurs auront à départager par leur vote les listes et les programmes.</p>
<h2>Des « élections intermédiaires »</h2>
<p>Ignorant ce que les victoires électorales seront susceptibles de faire aux politiques régionales, l’essentiel des commentaires sera polarisé autour d’une interprétation des résultats, convoquant selon toute vraisemblance le modèle dit des « élections intermédiaires » – le concept fut proposé par Jean‑Luc Parodi (voir notamment « Dans la logique des élections intermédiaires », <em>Revue politique et parlementaire</em>, 903, 1983, p. 42-70_) – qui tend à rapporter les élections locales à des scrutins plus centraux qu’elles ont pour seule vertu de « confirmer », « d’atténuer », de « contrarier », de « préfigurer ».</p>
<p>Si l’occasion est donnée à chaque camp politique d’étalonner ses forces, ce scrutin aura valeur de test pour la majorité présidentielle, un an après sa quasi-déroute aux élections municipales – La République en marche (LREM) atteint seulement 2,22 % des suffrages exprimés au 1<sup>er</sup> tour selon un affichage particulièrement tardif du ministère de l’Intérieur – et moins d’un an avant l’élection présidentielle. Encore qu’un deuxième échec de la majorité présidentielle dans son projet d’implantation territoriale – utile à la pérennité politique du mouvement – ne semble que faiblement prédictif pour une élection présidentielle à part.</p>
<p>Dans l’attente du verdict des urnes, la campagne régionale elle-même est d’ores et déjà intéressante à observer pour ce qu’elle nous dit de la (re)configuration du jeu politique.</p>
<p>Arrêtons-nous sur le cas, à la fois représentatif et singulier, de la Bretagne où le succès du macronisme s’est construit en 2017 sur les décombres d’un Parti Socialiste (PS) anciennement conquérant et où le Rassemblement National (RN) trouble marginalement le jeu politique jusqu’ici.</p>
<h2>Retour sur l’entreprise macronienne : entre divorce et nouvelle majorité</h2>
<p>En Bretagne, la poussée de la gauche amorcée à partir des années 1970, qui a vu la conquête de villes (bastion municipal remporté sans discontinuité par le parti socialiste et ses alliés depuis 1977) et la bascule de conseils départementaux orientés à droite (conseils départementaux du Finistère (1998) et de l’Ille-et-Vilaine (2004)) a trouvé l’une de ses illustrations les plus emblématiques dans la conquête du conseil régional – en 2004 – et sa conservation – en 2010 et 2015 – sous le patronage continu de Jean‑Yves Le Drian.</p>
<p>Mais en 2017, la Bretagne a offert à Emmanuel Macron <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/bretagne/presidentielle-2017-comment-t-on-vote-bretagne-1248137.html">l’un de ses plus beaux scores régionaux</a> (29,05 % au 1<sup>er</sup> tour, 75,36 % au 2<sup>e</sup> tour), avec un quasi grand chelem de la majorité présidentielle aux élections législatives.</p>
<p>Dans un contexte de défaite et de schisme pour le camp socialiste, la majorité régionale sortante est néanmoins restée solidaire : les douze élus régionaux ayant formé un groupe LREM ont continué à apporter leur voix au sein de l’assemblée, tout en se séparant en dehors (stratégies contrastées de soutien politique aux élections municipales 2020). Aujourd’hui, cette parenthèse se referme malgré les tentatives de Jean‑Yves le Drian (parfois qualifié de « ministre de la Bretagne »), pris dans un conflit de loyautés, appelant à reconduire l’alliance :</p>
<blockquote>
<p>« Notre majorité est en état de mort cérébrale avec aucun espoir de réanimation » <a href="https://www.ouest-france.fr/elections/regionales/bretagne-mort-annoncee-de-la-majorite-regionale-356df6f0-9903-11eb-ba58-9c36148e3626">confiait</a> Hind Saoud, Porte-parole du groupe LREM au sein de l’assemblée (9 avril 2021).</p>
</blockquote>
<p>Cette phrase a été prononcée peu de temps après que le président socialiste sortant, Loïg Chesnais-Girard, a « destitué » l’un de ses vice-présidents, Thierry Burlot, de sa délégation à l’environnement. Ce dernier lui avait fait part de son annonce prochaine quant au fait de devenir tête de liste régionale – et donc son concurrent – pour le camp de la majorité présidentielle.</p>
<p>C’est le président de l’Assemblée nationale et conseiller régional breton Richard Ferrand qui a convaincu le socialiste historique, Thierry Burlot, de prendre la tête d’une liste régionale correspondant à la majorité présidentielle. C’est un conseiller et proche du même Ferrand, Olivier Dulucq, qui a été désigné directeur de campagne. Que Thierry Burlot revendique un équilibre politique des trois tiers sur la liste (centre gauche, centre droit, société civile) n’est guère surprenant. Si la majorité présidentielle penche davantage à droite en 2021 qu’en 2017 au plan national, le macronisme breton a été largement alimenté par des « transfuges » socialistes. L’équilibre s’inscrit ainsi davantage dans les pas du macronisme originel affiché en 2017 que dans ceux de la droitisation observée depuis.</p>
<h2>Capter les notables et semi-professionnels de la politique locale</h2>
<p>Plus intéressante est la stratégie de captation des notables et semi-professionnels de la politique locale. Certes, le fait d’utiliser des réseaux d'élus locaux préexistants avait déjà été largement expérimenté par la majorité présidentielle lors des élections municipales 2020. Faisant le pari d’une décomposition du jeu partisan, il s’est agi dans bien des cas de soutenir des candidats sortants extérieurs à la majorité présidentielle (soutien à la liste du maire sortant LR Jean‑Luc Moudenc à Toulouse par exemple) plutôt que de former ses propres listes. Cette dernière option fut en revanche privilégiée en Bretagne malgré les mains tendues de maires sortants – David Robo (LR) à Vannes, Luc Jollivet, ancien LR à Quimper – pour obtenir leur soutien.</p>
<p>Les listes LREM bretonnes ont globalement fait figurer peu d’élus sortants en jouant à plein le jeu de la citoyennisation, certes sélective comme à Rennes : la candidate Carole Gandon faisait figurer sur sa liste l’ancien président de l’université Rennes 2, le directeur de l’agence d’urbanisme, l’ancienne directrice de l’office municipal du tourisme…</p>
<h2>Une nouvelle alliance est-elle possible ?</h2>
<p>En 2021, la citoyennisation à tous crins s’érode, et l’option consiste moins à se greffer sur les réseaux préexistants qu’à les intégrer à la liste, avec l’ambition de s’assurer le concours d’élus capables d’apporter leur notoriété et leurs réseaux locaux. Notons la présence emblématique de Yves Bleunven et Dominique Cap, respectivement présidents des associations des maires du Morbihan et du Finistère.</p>
<p>L’alliance d’entre-deux tours avec la droite est-elle possible ? Si la cheffe de file Les Républicains, Isabelle Le Callenec (élue maire de Vitré en 2020), ne l’a pas exclue, l’hypothèse demeure peu probable. Le macronisme breton originel fut d’abord une entreprise de recyclage d’anciens socialistes, d’autant plus réticents à s’ouvrir au-delà du centre-droit que la nécessité de faire front face au RN – comme la question s’est posée en région Provence Alpes Côte d’Azur – est absente. Rappelons que Marine Le Pen n’y a obtenu « que » 15,33 % et 24,64 % aux premier et second tour de l’élection présidentielle 2017, contre respectivement 21,30 % et 33,90 % au plan national.</p>
<h2>Le Rassemblement national, tribun des territoires déclassés</h2>
<p>La Bretagne n’est certes plus l’ancienne terre de mission pour les forces du Rassemblement national (ex-Front national), mais n’est donc pas pour autant devenue une terre de prédilection. Ce qu’a récemment confirmé le scrutin municipal 2020. A la rareté des listes frontistes, seulement présentes dans une poignée de villes bretonnes (les plus importantes de la région en termes démographiques) se sont ajoutés des scores particulièrement faibles et très en-deçà de 2014 : 4,20 % à Rennes et 6,71 % à Brest pour s’en tenir aux deux principales villes.</p>
<p>Quelques facteurs explicatifs peuvent être mentionnés : une structure économique historiquement plus rurale et moins industrieuse (la Bretagne est moins victime que d’autres régions d’une crise de l’industrie sur laquelle le RN a « capitalisé ») ; une cohésion au-dessus de la moyenne (les inégalités entre les déciles les plus pauvres et les plus riches dans la population sont moins marquées) ; une identité ouverte au monde avec une forte émigration par le passé (la Bretagne a été victime de stéréotypes et de discriminations) ; une identité catholique prégnante, valorisant une tradition de tolérance (même si la pratique religieuse ne constitue plus un obstacle au vote frontiste comme par le passé).</p>
<p>Faute de rêver ouvertement à la victoire, improbable en raison du sous-vote frontiste breton et de la mauvaise dynamique traditionnelle d’entre-deux tours, Gilles Pennelle, chef de file sortant reconduit comme tête de liste RN, se dit <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/bretagne/regionales-je-suis-persuade-d-arriver-en-tete-au-premier-tour-gilles-pennelle-rn-2007733.html">« persuadé d’arriver en tête au premier tour »</a>. Pour ce faire, il ne peut autant mobiliser les thèmes fétiches du RN qu’aux élections municipales (sécurité, immigration, mineurs isolés).</p>
<p>Encore que dans une confusion invraisemblable, au regard de la décentralisation et des compétences, la sécurité semble désormais s’inviter dans les campagnes régionales en France. Outre le RN, on pense par exemple aux discours de campagne tenus par deux présidents sortants : Valérie Pécresse en Île-de-France, Laurent Wauquiez en Auvergne Rhône-Alpes. En tout état de cause, en Bretagne comme ailleurs, le RN exploite le thème des fractures territoriales et d’une France périphérique.</p>
<h2>Une logique frontiste de classe</h2>
<p>Métaphore spatiale d’une logique frontiste de classe autour des gagnants et des perdants (de la mondialisation, de l’Europe, du capitalisme, des politiques publiques…), ce thème lui permet de décliner sa fonction tribunitienne pour reprendre l’expression forgée par le politiste George Lavau à propos du parti communiste (<a href="https://www.persee.fr/doc/rfsoc_0035-2969_1982_num_23_4_3613"><em>À quoi sert le Parti communiste français ?</em></a>, Paris, Fayard, 1981) et par analogie avec le tribun de la République romaine : exprimer, apaiser et donner un débouché politique à la colère populaire.</p>
<p>Ce mot d’ordre s’imbrique avec sa géographie électorale. C’est en effet dans les territoires périphériques et ruraux bretons, en particulier ceux les plus durement frappés par la crise de l’agro-alimentaire, que le RN enregistre ses plus hauts scores. Marine Le Pen recueillait par exemple 40,13 % des voix au premier tour de l’élection présidentielle de 2017 à Radenac (Morbihan) contre 31,71 % en 2012.</p>
<p>Selon toute vraisemblance, ces élections ne feront que confirmer le passage d’un ancien vote dit « côtier » (le FN réalisait ses meilleurs scores sur le littoral) à un vote de périphérie : selon la logique du gradient d’urbanité, le vote FN progresse dans les périphéries éloignées des grandes villes, là où le sentiment de déclassement progresse, là où la densité et la qualité des services publics diminue. En Bretagne, ces périphéries sont souvent intérieures, alors que la zone littorale est plus urbanisée et dynamique. Ce qui n’est en revanche pas vérifié en Ille-et-Vilaine où la pôle urbain dynamique (l’agglomération rennaise) est au centre du département. Précisions que ce sont aussi les périphéries territoriales qui votaient traditionnellement conservateur qui votent le plus RN.</p>
<h2>Une alliance d’entre-deux tours à gauche dans la suite des municipales</h2>
<p>À gauche, l’hypothèse de faire des régionales une préfiguration d’une gauche réunie, aussi bien pour augmenter les chances de l’emporter que préparer 2022, s’est largement dégonflée malgré les <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/le-billet-politique/le-billet-politique-du-vendredi-12-mars-2021">espoirs suscités</a> dans les Hauts-de-France.</p>
<p>Le parti socialiste, parti traditionnel d’élus locaux, a particulièrement bien résisté en Bretagne lors des élections municipales 2020, et peut espérer un scénario analogue en dépit des embûches. Alors que la prime au sortant apparaît moins forte dans le cas régional, le président sortant, Loïg Chesnais-Girad, et à nouveau candidat, jouit d’une faible notoriété : seuls 27 % des Bretons seraient capables de citer son nom selon un sondage RégioTrack d’OpinonWay réalisé en janvier 2021 auprès de 5073 personnes pour <a href="https://www.lesechos.fr/politique-societe/politique/sondage-exclusif-regionales-les-presidents-sortants-en-position-de-force-a-cinq-mois-du-scrutin-1285361"><em>Les Echos</em> et <em>Radio classique</em></a>.</p>
<p>Les socialistes devront composer avec l’appétit croissant de leurs associés-rivaux écologistes. Critiques sur le bilan sortant, soucieux d’afficher comme partout leur indépendance au premier tour, ils pourraient, comme aux élections municipales, se laisser séduire par une alliance d’entre-deux tours, nécessaire pour décrocher une majorité relative et remporter la prime en sièges (un quart des sièges est automatiquement attribué à la liste vainqueur, le reste l’étant au prorata des suffrages exprimés). La timide conversion à la « social-écologie » du socio-démocrate Loïg Chesnais-Girard, qui n’a pas le même différend avec les écologistes que son prédécesseur et mentor Jean‑Yves Le Drian rend le scénario crédible.</p>
<hr>
<p><em>L’auteur vient de publier : Nouvelle sociologie politique de la France, Paris, (Armand Colin, 2021) avec Christian Le Bart et Erik Neveu.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/160630/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Frinault ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le scrutin régional en Bretagne révèle des lignes de fractures profondes mais aussi les stratégies de la majorité présidentielle.Thomas Frinault, Maître de conférences en science politique (spécialiste de l'étude du pouvoir local), Université Rennes 2Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1556192021-03-11T17:52:24Z2021-03-11T17:52:24ZUne nouvelle version de la nasse à poisson pour limiter l’impact de la pêche<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/388872/original/file-20210310-18-1gxx2tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Casiers de pêche. </span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>En fonction des espèces capturées, mais aussi des saisons, les pêcheurs doivent adapter leurs techniques. La diversité de poissons et crustacés ciblés implique la mise en œuvre de différents engins de pêche : la ligne pour le bar, le casier pour les crustacés, le filet pour le rouget barbet par exemple.</p>
<p>Il faut aussi tenir compte des différents acteurs et usages des espaces côtiers – que ce soit pour le développement des énergies marines renouvelables ou le respect des aires protégées. Les pêcheurs doivent cohabiter et faire évoluer leur métier en tenant compte de ces réalités.</p>
<p>Autre préoccupation majeure : la nécessité de réaliser une pêche respectueuse des ressources et fonds marins. Les pêcheurs sont à ce titre demandeurs de développements technologiques qui répondraient à ces enjeux de durabilité pour leur permettre de diversifier leurs pratiques. Il s’agit d’alléger la pression sur les écosystèmes pour assurer l’activité de pêche et aussi une plus grande <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.1212278110">résilience en cas de crise</a>.</p>
<p>Aujourd’hui, suite à la mise en place de mesures de gestion, <a href="https://wwz.ifremer.fr/Expertise/Peches-maritimes/Bilan-de-l-etat-des-populations-de-poissons-pechees-en-France/Bilan-2020-de-l-etat-des-populations-de-poissons-pechees-en-France">60 % des stocks de poissons</a> pêchés en France sont issus de populations exploitées durablement, contre 15 % il y a 20 ans. Notre projet de nasse s’inscrit dans la continuité de cet effort.</p>
<h2>Concevoir un engin fiable et peu impactant</h2>
<p>Dans ce contexte, nous avons conduit des travaux et des expérimentations en baie de Quiberon pour faire évoluer une technique de pêche bien connue : la nasse à poisson. Notre but était de concevoir un engin efficace et adapté aux problématiques actuelles.</p>
<p>Utilisée par les pêcheurs depuis des siècles, <a href="https://www.researchgate.net/publication/234166992_Fish_trapping_devices_and_methods_in_Assam_-_A_review_Indian_J_Fish_582_127-135">très répandue dans les pays en voie de développement</a>, la nasse connaît un regain d’intérêt, même si sur le terrain peu de pêcheurs l’utilisent actuellement en France métropolitaine. Nous avons notamment observé cette pratique dans le Golfe de Gascogne, où les nasses capturent efficacement le congre et le tacaud ; mais ces espèces, peu valorisées sur le marché, ne présentent qu’un faible intérêt pour les pêcheurs professionnels.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/386254/original/file-20210224-21-1cy4twp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/386254/original/file-20210224-21-1cy4twp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=381&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/386254/original/file-20210224-21-1cy4twp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=381&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/386254/original/file-20210224-21-1cy4twp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=381&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/386254/original/file-20210224-21-1cy4twp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=478&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/386254/original/file-20210224-21-1cy4twp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=478&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/386254/original/file-20210224-21-1cy4twp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=478&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Nasse à poisson datant de la période romaine.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/Fish_trap#/media/File:Valkenburg_De_Woerd_visfuik.jpg">Paul van Krimpen/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La conception de cette « nouvelle » nasse a été soumise à de multiples contraintes : mettre au point un engin qui n’aurait pas d’impact physique sur les habitats des fonds marins ; qui retiendrait les poissons de taille marchande tout en laissant les juvéniles s’échapper ; capable de capturer du poisson d’intérêt commercial, mais pas de crustacé, la <a href="https://www.comitedespeches-finistere.fr/upload/files/2018-015-NASSES%20A%20POISSON-B-%2030%2003%202018%281%29.pdf">réglementation l’interdisant</a>. Enfin, une nasse capable de faire face aux forts courants lorsqu’elle est déployée dans l’eau, tout en étant facilement maniable et occupant peu d’espace lorsqu’elle est à bord d’un navire.</p>
<p>Satisfaire tous ces objectifs et assurer la capacité de cet engin à capturer l’espèce cible en quantité suffisante constitue la clé pour que les pêcheurs l’adoptent de leur plein gré.</p>
<h2>Des grisets et des appâts</h2>
<p>Notre travail a débuté au cours de l’été 2018 par une phase d’enquête et de concertation auprès des pêcheurs. Il s’agissait de comprendre leurs contraintes et attentes envers la nasse ; et aussi de sélectionner ensemble l’espèce de poisson la plus pertinente à cibler.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/388881/original/file-20210310-15-gwm12u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/388881/original/file-20210310-15-gwm12u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/388881/original/file-20210310-15-gwm12u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/388881/original/file-20210310-15-gwm12u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/388881/original/file-20210310-15-gwm12u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/388881/original/file-20210310-15-gwm12u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/388881/original/file-20210310-15-gwm12u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dorade grise (<em>Spondyliosoma cantharus</em>).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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</figure>
<p>C’est le griset, ou dorade grise <em>(Spondyliosoma cantharus)</em>, qui a été retenu. Il s’agit d’une espèce accessible aux pêcheurs côtiers et ne présentant pas de problème de gestion des stocks.</p>
<p>L’étape suivante a consisté à lister des appâts potentiels sur la base des connaissances disponibles sur le régime alimentaire du griset et des pratiques des pêcheurs à l’hameçon. La capacité d’attraction de chaque appât a été évaluée à l’aide d’un éthogramme, qui permet de décrire et de traduire quantitativement le comportement des poissons, tout en tenant compte des conditions environnementales – courant marin, turbidité, temps écoulé entre la pose de l’appât et l’approche des individus.</p>
<p>Après avoir identifié l’appât pour lequel le griset montre le plus grand intérêt, la conception de la nasse a démarré en testant progressivement plusieurs hypothèses, correspondant à différents niveaux de conception de l’engin. Chaque niveau de conception a été testé quatre fois pour confirmer la répétabilité des comportements.</p>
<h2>Une nasse adaptée à l’espèce ciblée</h2>
<p>C’est d’abord une simple structure métallique, équipée du meilleur appât qui a été placée et comparée dans deux configurations : l’une lestée, l’autre flottée. L’intérêt de la configuration flottée réside dans le fait que l’appât n’est pas accessible aux crustacés, permettant d’éviter leur capture.</p>
<p>La meilleure configuration en matière d’approche du poisson a été retenue pour tester de la même manière les hypothèses suivantes.</p>
<p>Le poisson accède-t-il davantage à l’appât si : la nasse est recouverte d’un filet noir ou d’un filet transparent ? La nasse a une ou deux entrées ? La goulotte est simple ou complexe pour éviter l’échappement ?</p>
<p>Les réponses obtenues sur la base d’observations vidéo sous-marines ont abouti à la conception d’un prototype de nasse conçu en adéquation avec le comportement du griset. Ce prototype sera testé à l’été 2021 à bord de 2 navires de pêche professionnelle intervenant en Bretagne Sud.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/386968/original/file-20210301-20-1rh73ui.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/386968/original/file-20210301-20-1rh73ui.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/386968/original/file-20210301-20-1rh73ui.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/386968/original/file-20210301-20-1rh73ui.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/386968/original/file-20210301-20-1rh73ui.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/386968/original/file-20210301-20-1rh73ui.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/386968/original/file-20210301-20-1rh73ui.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des grisets face approchant la nasse expérimentale dans les eaux bretonnes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sonia Meuhault/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un prototype en phase de test</h2>
<p>Cette étape permettra de valider que l’engin développé est capable de capturer suffisamment de griset en conditions de pêche commerciale, de vérifier le profil de mensurations des individus capturés et d’ajuster les maillages en conséquence pour ne capturer que des individus de taille marchande.</p>
<p>Il s’agira aussi de valider l’ergonomie de l’engin lors de sa manipulation par les marins, ainsi que la valorisation économique du poisson lors de sa vente grâce à des enquêtes auprès des équipages et des patrons pêcheurs.</p>
<p>Parallèlement, le développement d’un engin de pêche nécessite de s’assurer de son moindre impact sur les fonds. Cet impact a été mesuré à l’aide d’un système de vidéo qui avait pour objectif de mesurer le mouvement et la pénétration d’une nasse initialement posée sur le fond et soumise aux courants de marée.</p>
<p>Ces mesures ont été complétées par celles d’un turbidimètre permettant d’évaluer la remise en suspension des sédiments liés au filage et au virage de la nasse, ainsi qu’à son éventuel mouvement au cours l’opération de pêche.</p>
<h2>Impacts quasi nuls sur le fond marin</h2>
<p>Le processus de sélection des appâts a montré que parmi la série testée, la coque (<em>Cerastoderma edule</em>) est l’un de ceux qui attirent le plus significativement le griset. L’observation des variables environnementales en parallèle du comportement du poisson montre que celui-ci tend majoritairement à approcher l’appât face au courant.</p>
<p>Cette observation plaide en faveur d’une structure flottée, libre de s’orienter dans l’eau, favorisant la diffusion de l’appât dans l’axe de la goulotte. Les étapes suivantes du développement de la nasse ont permis de définir le type de filet de recouvrement et de goulotte qui permet au poisson d’entrer.</p>
<p>Concernant les impacts sur le fond, les enregistrements vidéo ont montré un mouvement et une pénétration des nasses <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pone.0237819">quasi nuls sur le fond</a> (les mouvements enregistrés sont inférieurs à l’erreur de mesure).</p>
<p>Les essais à venir sur les navires professionnels indiqueront si cette technique de pêche est transférable et viable pour les pêcheurs. En effet, les performances de cet engin restent à confirmer sur d’autres secteurs de pêche, avec des conditions environnementales qui peuvent être différentes. Les éventuelles autres espèces capturées non ciblées seront observées et la sélectivité des mailles pourra alors être adaptée.</p>
<p>Point important : la capture par cette méthode d’attraction permet de préserver les qualités organoleptiques du poisson dont l’endurance n’est pas mise à l’épreuve et qui subit un stress moindre pendant l’opération de pêche.</p>
<p>Sachant qu’une fois le griset capturé, ce sera au consommateur de décider s’il est prêt à payer, ou pas, pour consommer le poisson issu de cette nouvelle technique de pêche.</p>
<hr>
<p><em>Fabien Morandeau et Dorothée Kopp (Ifremer) ont co-écrit cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/155619/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sonia Mehault ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Des travaux conduits dans la baie de Quiberon sur un prototype d’engin de pêche cherchent à promouvoir des techniques plus durables et efficaces.Sonia Mehault, Ingénieure en biologie et technologie halieutique, IfremerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1497492021-01-10T19:11:41Z2021-01-10T19:11:41ZCette micro-algue qui se cache derrière les eaux colorées vertes de Bretagne Sud<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/373607/original/file-20201208-23-uoyifq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans la baie de Vilaine, le 9 Juillet 2020. </span> <span class="attribution"><span class="source">Mathilde Schapira/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Depuis une première observation en 1982, on repère presque chaque année des eaux colorées vertes qui s’étendent <a href="https://doi.org/10.1016/j.marpol.2018.01.022">du Finistère Sud aux côtes Vendéennes</a>.</p>
<p>Sous l’influence de la Loire et de la Vilaine, cette zone est en effet la plus vulnérable du littoral Atlantique au phénomène dit « d’eutrophisation ». Ce terme désigne l’un des problèmes majeurs affectant les zones aquatiques, continentales et côtières. On peut le décrire comme une réponse des écosystèmes à des <a href="https://doi.org/10.5194/bg-16-1361-2019">apports externes de nutriments</a> issus de rejets directs d’effluents domestiques (comme les eaux usées), agricoles (comme les engrais azotés et phosphorés) et industriels.</p>
<p>Cette <a href="https://doi.org/10.1080/10641262.2011.611916">réaction des écosystèmes</a> peut se traduire par l’augmentation de la biomasse phytoplanctonique ainsi que par l’intensification et la multiplication des efflorescences d’espèces phytoplanctoniques, toxiques ou nuisibles. Ces épisodes se produisent généralement au cours du printemps et de l’été, lorsque l’ensoleillement et la température de l’eau atteignent des niveaux favorables à la prolifération de ces organismes photosynthétiques.</p>
<h2>Coloration verte et mortalités d’organismes marins</h2>
<p>Les eaux vertes observées en Bretagne Sud sont plus précisément la conséquence de la <a href="https://doi.org/10.2216/i0031-8884-35-5-381.1">prolifération d’une micro-algue, le <em>Lepidodinium chlorophorum</em></a>. Il mesure environ 20 µm et présente une forte coloration verte, observable en microscopie optique.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=501&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=501&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=501&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=629&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=629&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=629&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cellules de <em>L. chlorophorum</em> observées au microscope optique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Anne Schmitt-Gallotti/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Bien que <em>L. chlorophorum</em> <a href="https://archimer.ifremer.fr/doc/00133/24470/">ne produise pas de toxines</a>, il peut être considéré comme une espèce nuisible. En effet, dès les années 1990, les eaux colorées vertes à <em>L. chlorophorum</em> ont été associées à des <a href="https://doi.org/10.1016/S0272-7714(06)80008-9">mortalités de poissons et de bivalves</a> le long du littoral Atlantique.</p>
<p>Des mortalités d’organismes marins – moules, huîtres, certains mollusques, crevettes, crabes et petits crustacés – ont ainsi été enregistrées au cours de l’été 1988 près des Sables-d’Olonne. En 2012, des mortalités de moules de plus de 40 % ont été identifiées.</p>
<p>Les observations réalisées par l’Ifremer à cette période ont montré la présence d’un mucus de couleur verte sur les coquillages, sans pour autant faire directement le lien de cause à effet entre ces mortalités et les efflorescences de <em>L. chlorophorum</em>.</p>
<p>En 2018, des <a href="https://archimer.ifremer.fr/doc/00457/56879/">pertes importantes d’huîtres et de moules</a> ont été rapportées sur les zones de production du Morbihan et de Loire-Atlantique suite aux eaux colorées vertes.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Moules de bouchots de la baie de Pont Mahé, en juillet 2012.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Michael Retho/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Malgré les potentielles conséquences de la multiplication de ces eaux colorées vertes à <em>L. chlorophorum</em>, nos connaissances relatives à la dynamique des efflorescences ainsi qu’aux facteurs environnementaux les conditionnant <a href="https://doi.org/10.1016/j.hal.2015.11.016">restent encore limitées</a>. Très peu d’études ont été menées sur l’écologie de cette espèce et peu d’observations ont été recensées à travers le monde.</p>
<h2>Beaucoup d’aspects encore méconnus</h2>
<p>Une étude menée en laboratoire sur cette espèce a montré que <em>L. chlorophorum</em> pouvait produire de grandes quantités de substances à l’aspect visqueux, aussi appelées <a href="https://doi.org/10.3354/ame01187">particules exo-polymériques transparentes</a>.</p>
<p>Ces particules jouent un rôle majeur au sein des écosystèmes : riches en matière organique, elles forment de parfaits <a href="https://doi.org/10.1016/0198-0149(89)90131-3">microenvironnements, propices au développement bactérien</a>. Elles ont également tendance, en accélérant la <a href="https://doi.org/10.1016/j.pocean.2016.11.002">sédimentation de la matière organique vers les fonds marins</a>, à affecter les processus de recyclage de cette matière organique par les bactéries, et ainsi à diminuer les concentrations en oxygène à proximité du fond. Ces particules transparentes sont également <a href="https://doi.org/10.1016/S0079-6611(02)00138-6">susceptibles d’augmenter la viscosité de l’eau de mer</a>.</p>
<p>Au vu de leurs multiples effets sur les écosystèmes, il est essentiel de pouvoir quantifier les concentrations de ces particules transparentes dans l’océan.</p>
<h2>Des eaux peut-être un peu trop visqueuses</h2>
<p>On l’a vu, des mortalités importantes d’organismes marins ont suivi certaines efflorescences de <em>L. chlorophorum</em>, aussi suspecté d’être à l’origine de l’<a href="https://doi.org/10.1111/jbi.12665">arrêt de croissance chez l’huître creuse <em>Crassostrea gigas</em></a>.</p>
<p>Ces mortalités pourraient être en lien, comme évoqué plus haut, avec la production importante de particules exo-polymériques transparentes ; cela de deux manières : en diminuant les concentrations en oxygène à proximité du fond suite à la dégradation de la matière organique produite au cours de l’efflorescence ; en augmentant la viscosité de l’eau ce qui pourrait avoir un effet négatif sur le comportement de filtration et la croissance des bivalves. On pense notamment au <a href="https://doi.org/10.1016/j.jembe.2009.09.021">colmatage des branchies</a> qui pourrait altérer la respiration et l’assimilation de la nourriture chez ces organismes.</p>
<p>À ce jour, aucune étude ne s’est intéressée aux facteurs environnementaux favorisant le développement de <em>L. chlorophorum</em>. Et aucune étude n’a estimé les quantités de particules exo-polymériques transparentes produites lors d’une eau colorée verte en milieu naturel.</p>
<p>De la même manière, nous ne connaissons ni la composition de ces particules ni leur capacité à modifier significativement la viscosité de l’eau de mer. Une meilleure connaissance de ces particules exo-polymériques est le premier pas vers une compréhension plus fine des mécanismes à l’origine des mortalités observées suite aux eaux colorées vertes. Le <a href="https://wwz.ifremer.fr/lermpl/Etudes/Ecosystemes-marins/LEPIDO-PEN">projet de recherche Lepido-Pen</a> que nous conduisons tente d’apporter de premiers éléments de réponse.</p>
<h2>Un appel aux usagers du littoral</h2>
<p>Ces phénomènes d’eaux colorées ne s’annoncent pas, ils sont parfois très fugaces et localisés. Pour soutenir la recherche, un projet de science participative – <a href="https://www.phenomer.org/Participer">Phenomer</a> – propose aux usagers du littoral de signaler leurs observations d’eaux colorées.</p>
<p>Un formulaire de signalement est accessible sur le site web Phenomer et une application mobile est également téléchargeable. <a href="https://www.phenomer.org/Participer/Je-communique-mon-observation">Avec l’aide de tout à chacun</a>, les scientifiques pourront sans doute mieux cerner l’ampleur de ce phénomène et ses possibles causes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/149749/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pauline Roux a reçu des financements de la région Pays de la Loire.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mathilde Schapira a reçu des financements de la région Pays de la Loire.</span></em></p>Du Finistère Sud aux côtes Vendéennes, la prolifération nuisible du Lepidodinium chlorophorum inquiète et réclame de mieux comprendre les causes et l’ampleur de ce phénomène.Pauline Roux, Doctorante en écologie du phytoplancton, IfremerMathilde Schapira, Chercheur Ifremer, IfremerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1437692020-08-13T19:32:37Z2020-08-13T19:32:37ZPortrait géologique de la Bretagne : les Monts d’Arrée, des montagnes d’un autre temps<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/351312/original/file-20200805-20-1erusju.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C335%2C3982%2C2538&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Schistes et quartzites déchiquetés par l’érosion forment les plus hauts sommets des Monts d’Arrée. </span> <span class="attribution"><span class="source">Pierrick Graviou/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet été, le géologue Pierrick Graviou nous invite à découvrir, en photos, 5 curiosités géologiques à travers la Bretagne.</em></p>
<hr>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/351318/original/file-20200805-164-1o76rsf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351318/original/file-20200805-164-1o76rsf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351318/original/file-20200805-164-1o76rsf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351318/original/file-20200805-164-1o76rsf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351318/original/file-20200805-164-1o76rsf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351318/original/file-20200805-164-1o76rsf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=526&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351318/original/file-20200805-164-1o76rsf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=526&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351318/original/file-20200805-164-1o76rsf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=526&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Localisation des Monts d’Arrée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Google Maps</span></span>
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</figure>
<p>Culminant à près de 400 mètres d’altitude sur les communes de Commana et de Plounéour-Menez (Finistère), les Monts d’Arrée forment l’un des paysages les plus singuliers et les plus emblématiques de la Bretagne intérieure. La lande d’ajoncs et de bruyères y est omniprésente, laissant simplement émerger ici et là quelques chicots rocheux armant les crêtes souvent balayées par les vents ou enveloppées de brouillard.</p>
<p>Les reliefs y sont donc très modestes, ce qui n’empêche en rien les habitants du pays de se considérer comme des montagnards. Ils n’ont pas tout à fait tort <a href="https://hal-insu.archives-ouvertes.fr/insu-00873116/document">si l’on se réfère à l’histoire géologique</a> de ces contrées sauvages témoignant d’un autre temps. C’était il y a environ 420 millions d’années…</p>
<p>À cette époque, l’Armorique est encore un domaine insulaire, séparé d’un gigantesque continent – le Gondwana – par un océan sur les bords duquel se déposent des sédiments : argiles et sables fins, qui vont peu à peu se compacter et s’enfouir sous l’effet de leur propre poids <a href="http://ficheinfoterre.brgm.fr/Notices/0276N.pdf">pour se transformer en schistes et quartzites</a>. Mais cela ne va pas durer !</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351319/original/file-20200805-16-1upig7j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351319/original/file-20200805-16-1upig7j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351319/original/file-20200805-16-1upig7j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351319/original/file-20200805-16-1upig7j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351319/original/file-20200805-16-1upig7j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351319/original/file-20200805-16-1upig7j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351319/original/file-20200805-16-1upig7j.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Il y a 340 millions d’années, se tenaient en lieu et place des Monts d’Arrée, des sommets enneigés, recouverts d’immenses glaciers.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pierrick Graviou/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’Armorique et le Gondwana se rapprochent en effet sous l’action de la tectonique des plaques, tandis que l’océan disparaît progressivement. La collision est inévitable, engendrant un chevauchement des terrains et une importante déformation des roches qui se plissent et se fracturent sous la violence du choc. Il y a 340 millions d’années, une chaîne de montagnes comparable au massif de l’Himalaya se développe à travers toute l’Europe. Imaginez la scène avec, en lieu et place des Monts d’Arrée, des sommets enneigés et recouverts d’immenses glaciers.</p>
<p>Aujourd’hui, ces sommets totalement érodés ne sont plus que de lointains souvenirs, mais leurs racines sont toujours présentes au niveau des crêtes. Des racines constituées de schistes et de quartzites intensément déformés et qui ont pris naissance sous forme de sédiments d’origine marine. En Bretagne, où que l’on soit, la mer n’est jamais très loin…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143769/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierrick Graviou ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Arpentez cet été la Bretagne en 5 curiosités géologiques. Dernière étape, de mystérieux chicots rocheux.Pierrick Graviou, Géologue, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1437682020-08-12T19:22:29Z2020-08-12T19:22:29ZPortrait géologique de la Bretagne : La kersantite, une pierre bénie des dieux<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/351295/original/file-20200805-493-1lfoszw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une scène du calvaire de Pleyben (Finistère) réalisée en kersantite et représentant la nativité.</span> <span class="attribution"><span class="source">Pierrick Graviou/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet été, le géologue Pierrick Graviou nous invite à découvrir, en photos, 5 curiosités géologiques à travers la Bretagne.</em></p>
<hr>
<p>Si les monuments mégalithiques, comme les menhirs et les dolmens, sont emblématiques de la Bretagne, les <a href="https://www.croixbretagne.fr/Ccb/">calvaires</a> ne sont pas en reste avec de très nombreux exemplaires répartis sur l’ensemble du territoire breton.</p>
<p>On peut ainsi en rencontrer au hasard d’une promenade à l’intérieur du pays, s’identifiant le plus souvent à une croix ou, plus rarement, à un édifice plus ou moins imposant, <a href="http://www.7calvaires.fr/pleyben/">comme à Pleyben</a> ou à Plougastel-Daoulas (Finistère). Il ne s’agit alors plus d’un simple monument religieux, mais d’une véritable œuvre d’art, admirablement et finement sculptée, sur laquelle sont représentées des scènes de la vie du Christ.</p>
<p>Observons-les en détail !</p>
<p>Certaines de ces scènes illustrent la nativité, d’autres, la visitation ou la mise au tombeau… Les thèmes bibliques figurés sont donc variés, mais les sculptures restent, pour la plupart, réalisées dans le même matériau.</p>
<p>Il s’agit de la <a href="http://ficheinfoterre.brgm.fr/Notices/0275N.pdf">kersantite</a> : une roche sombre qui doit son nom au hameau de Kersanton, situé au fond de la rade de Brest, sur la commune de Loperhet. C’est là, il y a environ 280 millions d’années, que s’est formée cette roche peu commune résultant de la cristallisation d’un magma venu s’injecter sous forme de filons au sein de roches sédimentaires plus anciennes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351298/original/file-20200805-22-fq5opt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351298/original/file-20200805-22-fq5opt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351298/original/file-20200805-22-fq5opt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351298/original/file-20200805-22-fq5opt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351298/original/file-20200805-22-fq5opt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351298/original/file-20200805-22-fq5opt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351298/original/file-20200805-22-fq5opt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le jubé de la basilique Notre-Dame du Folgoët (Finsitère), entièrement réalisé en kersantite.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pierrick Graviou/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Exploitée depuis l’Antiquité, la kersantite est une roche à grain fin, tendre à la taille, durcissant à l’air et devenant résistante à l’altération. À partir de la Renaissance, ses qualités sont remarquées par les plus grands sculpteurs de la région, notamment <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Roland_Dor%C3%A9">Roland Doré</a> qui en fait sa pierre de prédilection.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/351300/original/file-20200805-372-lvb3t1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351300/original/file-20200805-372-lvb3t1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351300/original/file-20200805-372-lvb3t1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351300/original/file-20200805-372-lvb3t1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351300/original/file-20200805-372-lvb3t1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351300/original/file-20200805-372-lvb3t1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351300/original/file-20200805-372-lvb3t1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351300/original/file-20200805-372-lvb3t1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le phare des Pierres noires, situé au large de la pointe Saint-Mathieu (Finistère).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Julien Carnot/Wikimedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Aujourd’hui, il n’est donc pas étonnant de retrouver la kersantite dans de nombreuses églises, en particulier dans la basilique du Folgoët (Finistère) où elle est omniprésente. Mais si ce matériau béni des dieux a été principalement mis en œuvre dans le patrimoine religieux régional, il a également été utilisé pour la construction des phares d’Eckmühl, de la Vieille, des Pierres noires, etc. Peut-être pour mieux veiller sur les marins…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143768/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierrick Graviou ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Arpentez cet été la Bretagne en 5 curiosités géologiques. Quatrième étape, une roche aussi sombre que spirituelle.Pierrick Graviou, Géologue, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1437712020-08-11T20:12:30Z2020-08-11T20:12:30ZPortrait géologique de la Bretagne : Un voyage spatio-temporel<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/351321/original/file-20200805-356-mqptqu.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C176%2C2272%2C1408&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les roches les plus anciennes de France (deux milliards d’années) exposées sur la grève de Pors-Raden (Trébeurden, Côtes-d’Armor).</span> <span class="attribution"><span class="source">Pierrick Graviou/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet été, le géologue Pierrick Graviou nous invite à découvrir, en photos, 5 curiosités géologiques à travers la Bretagne.</em></p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Carte de la Bretagne et de ses départements.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9gion_Bretagne#/media/Fichier:Region_Bretagne_Arrondissement_2019.png">Tschubby/Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Un jour d’août 2020, en baie de Lannion : les vacanciers profitent de la marée basse pour dénicher quelques palourdes ou traquer les éventuelles crevettes restées prisonnières des mares résiduelles…</p>
<p>En s’adonnant ainsi à leur loisir favori, ils ne se doutent certainement pas, qu’à cet endroit même, affleurent les <a href="https://www.geocaching.com/geocache/GC5DH54_sur-les-plus-vieilles-roches-de-france">roches les plus anciennes de France</a>.</p>
<p>Des roches tout à fait exceptionnelles que l’on rencontre uniquement dans ce secteur de Bretagne et en Normandie, vers le Cap de la Hague, à l’extrémité septentrionale du Cotentin.</p>
<p>Ici, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tr%C3%A9gor">dans le Trégor</a>, on peut les voir à Locquirec (Finistère), sur la plage du Moulin de la Rive, ou encore à Trébeurden (Côtes-d’Armor), sur la petite grève de Pors-Raden.</p>
<p>Dans les deux cas, les analyses chimiques effectuées sont incontestables : il s’agit de roches qui ont cristallisé à partir d’un magma granitique au sein de la croûte terrestre, à plusieurs kilomètres de profondeur… il y a environ <a href="https://docplayer.fr/108163949-Lcartien-armoricain-des-roches-datees-a-2-milliards-d-annees.html">deux milliards d’années</a>, soit près de la moitié de l’âge de la Terre ! Bien plus que se proposent les machines à remonter le temps dans les romans de science-fiction.</p>
<p>Cet âge, les géologues l’ont déterminé grâce à la mesure des isotopes de l’uranium et du plomb contenus dans les « zircons » ; on désigne ainsi des minéraux microscopiques, présents notamment dans les roches granitiques et qui, lorsqu’ils sont plus gros et non fracturés, peuvent être utilisés en joaillerie.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351328/original/file-20200805-407-1mt8tur.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351328/original/file-20200805-407-1mt8tur.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351328/original/file-20200805-407-1mt8tur.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351328/original/file-20200805-407-1mt8tur.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351328/original/file-20200805-407-1mt8tur.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351328/original/file-20200805-407-1mt8tur.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351328/original/file-20200805-407-1mt8tur.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Cristaux de feldspaths étirés en amandes dans les gneiss œillés de Pors-Raden (Trébeurden, Côtes-d’Armor).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pierrick Graviou/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>S’il est impossible de distinguer les zircons à l’œil nu, vous pourrez en revanche admirer de gros cristaux de feldspath de teinte claire, pouvant atteindre plus de 5 centimètres de longueur. Ces cristaux sont souvent fracturés, ou plus ou moins étirés en forme d’amandes, selon l’intensité de la déformation et du métamorphisme subis par ces roches qualifiées de « gneiss œillés ».</p>
<p>Des gneiss qui ont subi bien des avatars au cours de leur longue histoire géologique et qui sont aujourd’hui exposés à la surface de la Terre grâce au travail imperceptible, mais incessant de l’érosion. Le temps de la Terre n’est pas celui des êtres humains !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143771/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierrick Graviou ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Arpentez cet été la Bretagne en 5 curiosités géologiques. Troisième étape, des pierres à l’exceptionnelle longévité.Pierrick Graviou, Géologue, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1437702020-08-10T21:15:39Z2020-08-10T21:15:39ZPortrait géologique de la Bretagne : la bouteille, la tortue et la patte d’éléphant<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/351290/original/file-20200805-24-n32t6n.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C64%2C1941%2C1215&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le chaos granitique de la Pointe du Château, à Ploumanac’h (Côtes-d’Armor).
</span> <span class="attribution"><span class="source">Pierrick Graviou/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet été, le géologue Pierrick Graviou nous invite à découvrir, en photos, 5 curiosités géologiques à travers la Bretagne.</em></p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351345/original/file-20200805-24-mfm8ea.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Carte de la Bretagne et de ses départements.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9gion_Bretagne#/media/Fichier:Region_Bretagne_Arrondissement_2019.png">Tschubby/Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Inutile de chercher ! Il ne s’agit pas ici d’une référence à une fable de Jean de la Fontaine que vous auriez pu ne pas connaître, mais simplement d’évoquer quelques noms de rochers granitiques rencontrés sur différents sites touristiques bretons.</p>
<p>Du Pays bigouden <a href="https://planet-terre.ens-lyon.fr/article/vade-mecum-granites.xml">à Ploumanac’h</a> (Côtes-d’Armor), en passant par Huelgoat ou Brignogan (Finistère), pour ne prendre que quelques exemples, ces rochers souvent gigantesques sont bien présents dans les paysages, tant à l’intérieur des terres que sur le littoral.</p>
<p>Ils sont <a href="https://www.bretagne.com/fr/la-bretagne/sa-culture/ses-legendes/huelgoat-chaos-geologique-et-rabelaisien">à l’origine de nombreuses légendes</a> et réveillent l’imagination. Mais comment se forment-ils ?</p>
<p><a href="https://planet-terre.ens-lyon.fr/article/vade-mecum-granites.xml">Le granite</a>, dont sont faites ces « sculptures » naturelles, est une roche d’origine magmatique. Sa lente cristallisation, à quelques kilomètres de profondeur, est suivie par sa rétraction et par l’apparition d’un réseau de fractures, appelées <a href="https://planet-terre.ens-lyon.fr/image-de-la-semaine/Img381-2012-03-19.xml">diaclases</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351292/original/file-20200805-475-4spm06.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351292/original/file-20200805-475-4spm06.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351292/original/file-20200805-475-4spm06.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351292/original/file-20200805-475-4spm06.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351292/original/file-20200805-475-4spm06.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351292/original/file-20200805-475-4spm06.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351292/original/file-20200805-475-4spm06.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La bouteille (Ploumanac’h).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pierrick Graviou/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351293/original/file-20200805-22-e1vxbs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351293/original/file-20200805-22-e1vxbs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351293/original/file-20200805-22-e1vxbs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351293/original/file-20200805-22-e1vxbs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351293/original/file-20200805-22-e1vxbs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351293/original/file-20200805-22-e1vxbs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351293/original/file-20200805-22-e1vxbs.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La patte d’éléphant (Ploumanac’h).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pierrick Graviou/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Lorsque par le jeu de l’érosion qui décape les terrains superficiels, le granite est à quelques mètres de la surface, ces diaclases qui découpent la roche en différents blocs guident la circulation des eaux d’infiltration légèrement acides. Ces dernières provoquent une altération chimique et une érosion mécanique de la roche qui se désagrège le long des fractures.</p>
<p>Progressivement, les blocs s’arrondissent et s’individualisent : d’abord enveloppés par l’arène granitique qui résulte de la décomposition de la roche, apparaissent ensuite de nombreux grains de quartz à peine corrodés, quelques cristaux de feldspaths plus ou moins altérés, ainsi que de rares paillettes de micas très dégradées.</p>
<p>Lorsque le granite parvient à l’air libre, l’arène est évacuée sous l’action des eaux de ruissellement ou par la mer, tandis que les rochers s’écroulent par gravité pour s’accumuler parfois sous forme de chaos.</p>
<p>Ils émergent aujourd’hui de la lande, dignes d’un inventaire à la Prévert dans lequel la bouteille, la tortue et la patte d’éléphant côtoient le caméléon, la tête de mort, le champignon et la sorcière. Il ne manque plus que le raton laveur… À vous de le trouver !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143770/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierrick Graviou ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Arpentez cet été la Bretagne en 5 curiosités géologiques. Seconde étape, un drôle de monde né de l’érosion.Pierrick Graviou, Géologue, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1433152020-08-09T18:01:38Z2020-08-09T18:01:38ZPortrait géologique de la Bretagne : Le mystère de la Roche-aux-Fées<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/349223/original/file-20200723-31-vtndze.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’allée couverte de la Roche-aux-Fées : le plus grand dolmen de France et l’un des plus beaux monuments mégalithiques de Bretagne.</span> <span class="attribution"><span class="source">Pierrick Graviou/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet été, le géologue Pierrick Graviou nous invite à découvrir, en photos, 5 curiosités géologiques à travers la Bretagne.</em></p>
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<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/351357/original/file-20200805-22-1bdnq8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351357/original/file-20200805-22-1bdnq8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351357/original/file-20200805-22-1bdnq8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351357/original/file-20200805-22-1bdnq8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351357/original/file-20200805-22-1bdnq8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351357/original/file-20200805-22-1bdnq8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351357/original/file-20200805-22-1bdnq8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351357/original/file-20200805-22-1bdnq8p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Localisation d’Essé.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Google Maps</span></span>
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<p>Situé à une trentaine de kilomètres au sud-est de Rennes, sur la commune d’Essé (Ille-et-Vilaine), le <a href="http://www.cc-rocheauxfees.fr/accueil/la_decouvrir/visiter/la_roche_aux_fees_et_autres_megalithes">dolmen de la Roche-aux-Fées</a> impressionne au premier regard par ses dimensions tout à fait exceptionnelles : près de 20 mètres de longueur pour 6 mètres de largeur et quatre mètres de hauteur.</p>
<p>Mais ce qui surprend surtout le visiteur averti, c’est la nature des roches mises en œuvre dans l’édification du monument, très différentes de ce que l’on peut trouver dans le sous-sol environnant. Car si ce sous-sol est essentiellement formé de <a href="http://ficheinfoterre.brgm.fr/Notices/0354N.pdf">schistes gris verdâtres</a> très fracturés et peu résistants, les éléments qui constituent le dolmen s’identifient à des <a href="http://ficheinfoterre.brgm.fr/Notices/0354N.pdf">grès rougeâtres</a> beaucoup plus adaptés à la construction.</p>
<p>Il faut donc se rendre à l’évidence : les blocs gigantesques utilisés à la Roche-aux-Fées n’ont pas été extraits localement. Ils ont été transportés depuis un autre lieu qui, si l’on en croit les <a href="https://journals.openedition.org/rao/3663">études géologiques et archéologiques</a>, se situe à environ 5 kilomètres plus au sud, au cœur de la forêt du Theil.</p>
<h2>Un véritable exploit</h2>
<p>Ces blocs pouvant atteindre plusieurs dizaines de tonnes – une quarantaine au total – ont ainsi été acheminés à travers la campagne, au mépris du relief et des embûches en tout genre.</p>
<p>Et quand on sait que ce travail colossal a été réalisé au cours du Néolithique, il y a environ 5000 ans, on se dit qu’il s’agit là d’un véritable exploit, une performance qui montre la détermination sans faille des maîtres d’œuvre.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/351356/original/file-20200805-356-r4zpt5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351356/original/file-20200805-356-r4zpt5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351356/original/file-20200805-356-r4zpt5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351356/original/file-20200805-356-r4zpt5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351356/original/file-20200805-356-r4zpt5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351356/original/file-20200805-356-r4zpt5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351356/original/file-20200805-356-r4zpt5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351356/original/file-20200805-356-r4zpt5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">L’entrée de l’allée couverte.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pierrick Graviou/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Il fallait que ce dolmen soit érigé à l’endroit précis où il se trouve aujourd’hui, suivant un agencement qui, lui non plus, ne doit rien au hasard et qui vient renforcer la magie du site : au solstice d’hiver, le 21 décembre, le <a href="https://www.youtube.com/watch?v=WerNoiRmLFY">soleil se lève exactement dans l’axe de l’allée couverte</a>, venant éclairer la dalle du fond pendant quelques minutes…</p>
<p>On est alors en droit de se demander si ce n’est finalement pas les fées qui seraient à l’origine de ce monument mégalithique. Des fées qui, selon la légende, auraient transporté les pierres cyclopéennes dans leur tablier. À chacun sa vérité !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143315/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierrick Graviou ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Arpentez cet été la Bretagne en 5 curiosités géologiques. Première étape, un impressionnant dolmen d’Ille-et-Vilaine.Pierrick Graviou, Géologue, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1288902020-02-13T17:59:53Z2020-02-13T17:59:53ZLes Tri Yann font leur « Kénavo Tour » : conversation avec Jean‑Louis Jossic<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/314464/original/file-20200210-109930-1etw3gx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C362%2C4730%2C2788&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Tri Yann en concert au Festival de Cornouaille, juillet 2012.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tri_Yann#/media/Fichier:Photo_-_Festival_de_Cornouaille_2012_-_Tri_Yann_en_concert_le_28_juillet_-_065.jpg">The Supermat/Wikipedia </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span></figcaption></figure><p>Cette conversation a lieu pendant la tournée d’adieux du groupe Tri Yann. Le <a href="https://www.francebleu.fr/emissions/c-est-arrive-pres-de-chez-nous/breizh-izel/jean-louis-jossic-et-tri-yann-une-derniere-tournee-pour-leur-50-ans">« Kenavo Tour »</a> est en effet un émouvant « Au Revoir » que nous offre l’un des groupes les plus mythiques et atypiques de la scène musicale française. Après quelques 50 années de présence sur toutes les scènes de France et d’Europe, cette épopée se terminera à la cité des congrès de Nantes – la ville des « Trois Jean » – le <a href="https://lacite-nantes.fr/evenement/tri-yann-kenavo-tour-les-adieux.html">28 mars 2020</a> prochain.</p>
<p>C’est d’ailleurs au cœur de Nantes que nous avons rencontré Jean‑Louis Jossic le chanteur des Tri Yann du haut de <a href="http://www.revue-placepublique.fr/Sommaires/Sommaires/Articles/debatjossic.html">ses cent vies</a> et coiffé de sa tignasse blanche emblématique</p>
<h2>L’adrénaline intacte</h2>
<p><strong>MB : Bonjour, Jean‑Louis Jossic, comment allez-vous en ce mois de février 2020 ?</strong></p>
<p><strong>JLJ :</strong> Bonjour, Marc, et bien… comment dire ! Nous allons correctement du haut de nos 70 ans. C’est-à-dire que nous avons tous les trois des petits bobos à soigner et les ennuis de plomberie classiques dus à nos grands âges. La bonne nouvelle c’est qu’il nous apparaît clairement, à tous les trois, qu’il va falloir arrêter et que le corps a ses raisons…</p>
<p>Toutefois, sur scène, la poussée d’adrénaline <a href="https://www.lefigaro.fr/musique/tri-yann-prepare-ses-adieux-et-sa-retraite-apres-50-ans-de-carriere-20200119">est toujours bien présente</a> et peut être même plus présente qu’avant car nous savons qu’il s’agit de nos derniers concerts et nous les apprécions comme tels. Les petits bobos disparaissent, la « pêche » est là et notre solidarité de vieux complices réapparaît comme pour nous donner une force décuplée. Nous étions, par exemple début février, sur Limoges puis sur Le Mans en un week-end. Nous avions peu de temps – une fois arrivés au Mans – pour nous caler avec le <a href="https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/le-mans-72000/sarthe-antares-fait-ses-adieux-a-tri-yann-cd6dbe14-45e3-11ea-b5c8-9b840c9599a0">bagad de Lann Bihoué</a> et avec les danseurs et leur chorégraphie. Au final, malgré la fatigue, tout s’est bien passé – sans trop de stress – et les clins d’œil sur scène sont même devenus nos rituels de passage de relais « entre Jean » lorsque l’un ou l’autre le demande !</p>
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<h2>Une tournée riche en émotions</h2>
<p><strong>MB : Quel est votre ressenti au beau milieu de cet émouvant « Kénavo Tour » ?</strong></p>
<p><strong>JLJ :</strong> Nous sommes tous les trois terriblement touchés par l’amour, la complicité et la bienveillance qui transparaît lors de nos concerts un peu partout en France (et en Allemagne car nous y avons fixé deux dates). Nous avions une trentaine de concerts programmés, nous sommes à mi-parcours avec encore une quinzaine de concerts à assurer dont les <a href="https://lacite-nantes.fr/evenement/tri-yann-kenavo-tour-les-adieux.html">derniers, fin mars, à Nantes</a>, et partout les barrières métalliques en quinconce, qui sont devenues la norme entre nous et le public, nous semblent totalement inutiles et dérisoires. Nous sommes également touchés par le caractère intergénérationnel du public qui vient nous dire au revoir, par les anecdotes et histoires qu’ils nous racontent, par leurs « tranches de vie » à nos cotés car elles sont souvent sont reliées à nos concerts, nos festivals ou à nos disques. C’est en effet très émouvant.</p>
<p>Nous sommes également fiers et heureux de finir notre carrière sur un tel événement et, surtout, tous les trois ensemble. A l’origine il y avait de désir de Jean d’arrêter fin d’été 2019 pour préserver sa santé, nous avons alors discuté et il n’était pas question de ne pas terminer ensemble. Nous avons donc décidé de nous arrêter quelques mois plus tard pour notre jubilé et pour clore une tournée <a href="https://www.ouest-france.fr/culture/musiques/apres-50-ans-de-scene-tri-yann-entend-le-loup-le-renard-et-la-retraite-6696435">commencée il y a cinquante ans à Plouharnel</a> comme le souligne Jean‑Paul !</p>
<p>Et c’est ce que nous sommes en train de faire et nous espérons bien aller au bout de ce drôle de « Kénavo Tour » afin de remercier l’intégralité de la grande famille des Tri Yann, celle qui est devant, derrière, autour et sur la scène.</p>
<h2>Un public bienveillant</h2>
<p><strong>MB : Que retiendrez-vous de cette belle et riche « tournée d’adieux » ?</strong></p>
<p><strong>JLJ :</strong> Que nous pourrions encore continuer, que nous pourrions encore ajouter quelques dates et même quelques Zénith (celui de Nantes par exemple !) mais il faut savoir dire « kénavo » au bon moment.</p>
<p>Que <a href="https://www.laquotidienne.fr/tri-yann-fait-son-kenavo-tour/">nous sommes également très heureux de partir au moment où « ça marche »</a> et au moment où « le public nous renvoie beaucoup d’amour ». Cela nous touche.</p>
<p>Que nous sommes contents de proposer à quelques « veilleurs » – c’est ainsi que je les nomme avec beaucoup de respect – de monter avec nous sur scène tous les soirs. Notre concert en est d’autant plus ancré et partagé, certains de ces veilleurs sont jeunes et d’autres moins jeunes, peu importe c est la <a href="https://www.laquotidienne.fr/tri-yann-fait-son-kenavo-tour/">famille Tri Yann an Naoned</a> et c’est « l’esprit veillé » auquel nous tenons. J’ai modestement repris cette idée d’un des concerts de Joan Baez à l’Olympia en <a href="https://www.youtube.com/watch?v=FjnCtibKUU0">1973</a> qui faisait monter son public sur scène (plus d’une centaine autour d’elle) et se gardait quelques mètres carrés pour sa voix et sa guitare, c’était formidable.</p>
<p>Que nous sommes très fiers aussi de pouvoir battre le record de longévité des <a href="https://www.youtube.com/watch?v=CD2uwb4sMNU">Frères Jacques</a> (38 ans) – dont deux des chanteurs étaient nanto-nazairiens et pour lesquels j’ai le plus profond respect – et d’arriver en fin de carrière avec cette belle satisfaction d’avoir pu durer bien au-delà de beaucoup d’autres groupes français sans jamais avoir rompu le lien avec notre public.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/314219/original/file-20200207-27542-15f4tmx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/314219/original/file-20200207-27542-15f4tmx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/314219/original/file-20200207-27542-15f4tmx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/314219/original/file-20200207-27542-15f4tmx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/314219/original/file-20200207-27542-15f4tmx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/314219/original/file-20200207-27542-15f4tmx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/314219/original/file-20200207-27542-15f4tmx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">JLJossic_Nantes_TY_MBidan.</span>
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<p>Que nous aimons terminer nos concerts avec le public sur scène et nos veilleurs qui chantent et qui nous portent à la fin – avec beaucoup de bienveillance – vers des espaces plus calmes pour y signer quelques autographes, pour échanger quelques mots et pour se reposer un tout petit peu avant de repartir !</p>
<h2>Cinquante ans de carrière</h2>
<p><strong>MB : Quelles sont – en toute subjectivité bien sûr – les trois ou quatre grandes étapes de vos 50 années de carrières ?</strong></p>
<p><strong>JLJ :</strong> Cette question est assez simple à appréhender au moins d’un point de vue chronologique <a href="http://xrouchon.perso.infonie.fr/pageweb/tri_yann/tyhistoir.htm">et historique</a> ! Finalement, nous avons connu beaucoup de succès à nos débuts dans les années 1970 avec la mode des musiques celtiques et avons joué dans des salles ou des festivals à 2000-3000 spectateurs.</p>
<p>Puis nous avons connu un plat (pas un creux, mais plutôt un plat) durant les années 1980 avec l’avènement de modes rock, folk, punk, électro, métalliques, etc. qui ne nous concernaient plus – mais nous tournions encore beaucoup dans des plus petites salles face à 200-300 spectateurs en Bretagne certes mais aussi en Allemagne ou sur Paris par exemple.</p>
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<p>Puis nous avons connu une « résurgence » dans les années 1990 avec la mode des musiques du monde (world music, <a href="https://realworldrecords.com/">real world</a>) et du rock alternatif qui mélangeait les instruments traditionnels et alternatifs (ce que nous faisions depuis le début). Nous avons été surpris du succès de notre compilation en 1995 (<em>Le meilleur de Tri Yann</em>) dont nous avons vendu 600 000 exemplaires mais j’avais également été surpris des années auparavant des étudiants qui chantaient et connaissaient nos chansons lors de certains concerts nantais en soutien aux étudiants en grève <a href="https://www.humanite.fr/novembre-decembre-1986-les-etudiants-deferlent-contre-la-loi-devaquet-627701">contre la loi Devaquet</a>. Cela nous avait fait chaud au cœur ! Puis dans les années 2000 et 2010 nous avons continuer notre chemin, nos disques, nos festivals et nos scénographies sans jamais être ni « trop à la mode » ni « pas assez à la mode » et essayant de rester fidèle aux demandes de notre public.</p>
<p>Nous avons beaucoup tourné – excepté aux <a href="https://www.eurockeennes.fr/programmation/">Eurockéennes de Belfort</a> et aux <a href="https://www.vieillescharrues.asso.fr/">vieilles charrues de Carhaix</a> – et avons bien sûr de fantastiques souvenirs. Je me souviens pêle-mêle de la tournée de l’été 1973, des flamboyants débuts du FIL à Lorient <a href="https://www.ouest-france.fr/bretagne/lorient-56100/interceltique-de-lorient-les-tri-yann-toujours-completement-dejantes-5177168">mais aussi d’éditions plus récentes</a>, du <a href="https://www.rythmes-croises.org/le-festival-de-cornouaille-de-quimper-2012/">festival de Cornouaille</a> à Quimper en 2012, je me souviens du « Kan Ar Khann » sur les luttes à Plogoff début 1980 et je me souviens aussi du stade de France pour la <a href="http://edoll.free.fr/stade2004.html">nuit celtique en mars 2004</a>. </p>
<p>Je me souviens de concerts quasiment a capella dans la boue et sous la pluie – coupure d’électricité oblige – avec un public fantastique et chaleureux. Je me souviens d’une belle rencontre avec Renaud aux Francopholies à La Rochelle qui nous rappelle quelques années après pour chanter avec lui lors de son concert nantais pour son anniversaire. Je me souviens de Bruno Coquatrix à l’Olympia, nous étions très jeunes et intimidés, nous avions chanté en première partie de Juliette Greco. Puis il vient nous voir et nous dit de sa belle voix « Maintenant vous faites partie de la famille, revenez quand vous voulez, je serai là »… et en effet, il le fut !</p>
<p><strong>MB :</strong> Merci Jean‑Louis pour ces échanges, une bonne route à tous les trois et kenavo ar c’hentañ</p>
<p><strong>JLJ</strong> : Merci à vous et – bien sûr – un grand merci à notre public, à notre famille !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/128890/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc Bidan est membre du conseil national des universités</span></em></p>Le « Kenavo Tour » est un émouvant et riche au revoir offert par l’un des groupes les plus mythiques de la scène musicale française après quelque 50 années de présence sur les plus grandes scènes.Marc Bidan, Professeur des Universités - Management des systèmes d’information - Polytech Nantes, Auteurs historiques The Conversation FranceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1260872019-11-28T19:25:45Z2019-11-28T19:25:45Z« Pour un géographe, l’île est une merveilleuse révélation »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/304264/original/file-20191128-178071-1inwyst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C6%2C2064%2C1538&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Vue depuis l'île d'Ouessant, 19 octobre 2019.</span> <span class="attribution"><span class="source">Sylvain Roche</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Mystérieuse maison insulaire à vendre pour <a href="https://www.geo.fr/voyage/une-ile-bretonne-a-vendre-pour-1-7-million-deuros-198663">1,7 million d’euros</a>, <a href="https://www.ouest-france.fr/bretagne/morbihan/montee-des-eaux-cette-etude-qui-raye-de-la-carte-dix-joyaux-du-morbihan-6605383">îles en voie de disparition</a> dans le Morbihan, <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/un-monde-d-avance/iles-eparses-reprise-des-discussions-entre-madagascar-et-la-france_3689185.html">tensions politiques</a> dans les îles Eparses, <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/migrants/mayotte-pourquoi-l-immigration-est-un-sujet-explosif-sur-l-ile_3669187.html">crise de l’immigration à Mayotte</a>, paradis <a href="https://www.ouest-france.fr/bretagne/ile-de-sein-29990/ile-de-sein-des-oiseaux-tres-rares-nous-rendent-visite-cet-automne-6615874">ornithologique</a> à Sein, les îles font régulièrement l’actualité et sont au cœur de nombreuses préoccupations géographiques, politiques et humaines.</p>
<p>Leur singularité, les pratiques des habitants, les rapports de ces derniers avec le continent ont été l’objet de nombreux travaux, autant artistiques que scientifiques. Les îles sont aussi des vecteurs de création et de pensée inédits.</p>
<p>C’est pourtant un peu par hasard que je me suis intéressé aux îles, il y a près de quarante ans, alors que j’étais en Master 1 de géographie à Brest. Je ne me doutais pas alors que le monde insulaire deviendrait peu à peu le <a href="https://www.cairn.info/revue-ethnologie-francaise-2006-3-page-475.htm">thème privilégié de mes recherches</a>.</p>
<p>À l’époque je vivais en proximité avec les îles, et <a href="http://www.vers-les-iles.fr/livres/Errances/Brigand_3.html">je me rendais souvent sur l’île Béniget</a> dans l’archipel de Molène. Nous allions chercher des lapins dans le cadre d’une campagne de repeuplement.</p>
<h2>Les imaginaires et représentations</h2>
<p>L’omniprésence de la nature et des espaces peu <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/anthropisation">anthropisés</a> m’ont tout de suite frappés tout comme le lien très fort des hommes avec leurs territoires que j’ai rapidement perçus.</p>
<p>Pour un géographe, l’île est une merveilleuse révélation, et un terrain, à la fois quantifiable, qualifiable mais aussi abordable. Quand on commence à travailler sur une île on a envie d’aller voir celle d’à côté, puis la prochaine et la suivante encore… c’est une quête infinie !</p>
<p>C’est ainsi que j’ai peu à peu aussi abordé ce qui relève de la sociologie et de l’anthropologie : quelles sont les populations qui viennent, s’installent, repartent, sur quelles motivations, pourquoi restent-elles ?</p>
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<figcaption><span class="caption">Thalassa, ma vie, mon île, 2017.</span></figcaption>
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<h2>Aller d’îles en îles</h2>
<p><a href="http://www.theses.fr/2000PA010538">Au début de ma thèse</a>, que j’ai entrepris sur les îles du Ponant, en Bretagne, les îliens ne se connaissaient pas forcément tous entre eux. Cela a changé depuis environ une dizaine d’années. Pendant longtemps les îliens se déplaçaient en bateaux pour aller de l’île au continent, maintenant ils se déplacent aussi pour aller d’îles en îles, notamment grâce à la plaisance.</p>
<p>J’ai ainsi remarqué que l’intérêt des habitants est plus porté sur l’île voisine que sur le continent. Cela est lié à l’île elle-même, comme objet singulier. Le continent demeure un espace compliqué, vaste, dur à cerner, à définir.</p>
<p>Beaucoup d’îliens préfèrent pour cela se rendre sur d’autres îles, y compris en outre mer. Les festivals qui ont émergé au fil des années ont valorisé ces espaces et les ont fait connaître aux différentes populations, ils ont eu un rôle fédérateur.</p>
<p>Je pense tout particulièrement au <a href="https://lesinsulaires.com/">festival des Insulaires</a> qui a lieu chaque année sur une île différente (cette année il s’est déroulé sur l’île de Batz en septembre). Il a particulièrement joué un grand rôle dans cet affranchissement des distances.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/7e9VVvyytuQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Emission « Littoral », Festival des insulaires à Groix, 2018, France 3 Bretagne.</span></figcaption>
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<h2>Définition de l’ile</h2>
<p>Une question se pose cependant : comment peut-on vraiment définir une île ? Au-delà de <a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/iles/">sa pure définition géographique</a>, l’île invoque quelque chose de très subjectif, à la fois de physique et sensuel. C’est une série d’échelles, d’empiètements. C’est aussi une question de mentalité, comme en Corse mais cela paraît moins évident par exemple en Angleterre.</p>
<p>À titre personnel, ce sont les petites îles qui m’intéressent, celle dont on peut faire le tour à pied et où on sent que la mer est omniprésente. </p>
<p>Ce qui est intéressant c’est de voir que ces catégories peuvent varier : à la Réunion certains n’ont jamais vu la mer ! Le rapport à l’eau et au littoral est ainsi longtemps demeuré <a href="https://www.cairn.info/revue-ethnologie-francaise-2002-3-page-439.htm">l’apanage du touriste</a>. Mais, être insulaire c’est aussi une revendication : l’une de mes étudiantes a interviewé Brigitte Fontaine. La chanteuse vit sur l’ile Saint-Louis (à Paris) et se définit comme insulaire !</p>
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<figcaption><span class="caption">Brigitte Fontaine, Rue Saint-louis en l’île.</span></figcaption>
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<h2>Entreprendre dans les îles</h2>
<p>Aujourd’hui, un constat apparaît : depuis quelques années les gens qui s’installent dans les îles, n’ont pas forcément un lien familial avec les lieux et font émerger des métiers complètement différents, qui n’ont plus rien à voir avec les métiers de pêche ou d’agriculture traditionnels.</p>
<p>Ce mouvement économique n’est pas négligeable et renvoie à des aspirations fortes de retrouver un certain art de vivre, de sécurité, de pouvoir parler à ses voisins, de tout faire à pied. Certains échouent bien sûr, mais il existe un phénomène important d’installation et d’entreprenariat très varié, qui, à mon sens n’est pas toujours valorisé.</p>
<p>Dans le cadre de nos recherches et avec plusieurs partenaires économiques et institutionnels, nous avons documenté cette tendance et créé un label <a href="https://www.ouest-france.fr/bretagne/ile-de-batz-29253/bretagne-l-association-savoir-faire-des-iles-du-ponant-est-nee-6530803">« Savoir faire des îles du Ponant »</a>. Aujourd’hui une soixantaine de personnes sont mobilisées dans cette association qui valorise des entrepreneurs îliens.</p>
<h2>Espaces en mouvement</h2>
<p>Les îles offrent des modes de penser le monde très différentes et souvent contradictoires. Elles représentent à fois une nature très protégée, mais aussi des territoires sur lesquels on invente des possibilités de vie différentes. Je pense par exemple à l’autonomie énergétique ou alimentaire. Ces solutions, ces idées de renouveau sont aussi envisageables pour d’autres territoires.</p>
<p>Elles sont un fonctionnement propre. On pourrait très bien imaginer que les îles soient représentées sur le plan politique de façon différente, ce sont d’ailleurs <a href="http://outremers360.com/politique/union-europeenne-les-iles-pronent-la-reconnaissance-du-fait-insulaire-dans-les-politiques-europeennes/">idées qui sont dans l’air</a>. Bien sûr, les statuts <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00172396/document">varient selon les îles</a> qui ont comportent des règles spécifiques, très claires sur nos espaces insulaires français.</p>
<p>Ce sont d’ailleurs des questions de recherche qui m’ont amené depuis maintenant six ans à travailler dans une perspective comparatiste sur les espaces polynésiens qui présentent un système d’îles absolument captivant pour le géographe.</p>
<p>Imaginez : pas de continent à moins de 12 heures d’avion !</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/qwWP_Af4PGs?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Louis Brigand et le peintre Didier-Marie Le Bihan parlent de leur livre « Enez Sun, carnet d’un géographe à l’île de Sein » (éditions Dialogues), 2017.</span></figcaption>
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<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/304237/original/file-20191128-178107-ytiu6e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/304237/original/file-20191128-178107-ytiu6e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/304237/original/file-20191128-178107-ytiu6e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/304237/original/file-20191128-178107-ytiu6e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/304237/original/file-20191128-178107-ytiu6e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/304237/original/file-20191128-178107-ytiu6e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/304237/original/file-20191128-178107-ytiu6e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article s’inscrit dans le cadre du colloque #Îles2019 du 14 au 19 octobre qui s’est tenu à Brest, Ouessant, Molène et Sein co-organisé par la Fondation de France, l’Université de Bretagne occidentale et l’Association des Îles du Ponant. Premier réseau de philanthropie en France, la <a href="https://www.fondationdefrance.org/fr">Fondation de France</a> réunit, depuis 50 ans et sur tous les territoires, des donateurs, des fondateurs, des bénévoles et des acteurs de terrain. À chacun, elle apporte l’accompagnement dont il a besoin pour que son action soit la plus efficace possible.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/126087/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Louis Brigand est porteur du Programme ENVIE d’ILES, soutenu par la Fondation de France.
</span></em></p>Les îles sont des vecteurs de création et de pensée inédits.Louis Brigand, Enseignant chercheur, géographe, Université de Bretagne occidentale Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/832352017-10-04T21:08:49Z2017-10-04T21:08:49ZPiratage de cartes à puces : comprendre comment ça marche<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/188597/original/file-20171003-739-1m66p6m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Lilliputien pris en flagrant délit d'attaque de carte à puce</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/thepreiserproject/12102280105/in/photolist-jrrmeP-3r4UCy-4nWcEs-61efg3-nBcrV-vBD3Q-58caSN-hMoLVq-4FERTh-9LecQG-9Lbq7v-aiCUF6-4FAD3X-5prHdz-5phntn-chCLW5-chCLim-aNSexk-2CobF-4FEH7j-5kexjb-4FAscx-chCQmf-62nVn1-chCMxu-5prHdv-9mCfhK-e2xxJm-chCPCW-8JrpcX-9t3fvm-9Lbq5V-8GfGnG-4FELKQ-4FEK5Y-doZMWG-9t3h6Q-9M5WvJ-5xs9D9-eyg1o4-bsK1GS-ETApL-5UjELR-5prKxT-8648oN-oq38sF-7dNiC6-2VtHRF-dzcg1S-65HRpg">Preiser 14075 Arbeiter/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Les puces ou circuits électroniques sont au cœur de nombreux dispositifs de la vie courante : cartes bancaires, cartes Vitale, smart phones, ordinateurs, montres connectées, systèmes biomédicaux, calculateurs de bord automobiles, badges/clés électroniques, etc. Il n’est pas rare d’en posséder une demi-douzaine dans nos poches et sacs et d’en côtoyer bien plus chaque jour.</p>
<p>Les données qu’elles contiennent sont souvent personnelles (informations médicales, financières, administratives, correspondance privée, etc.) ou critiques pour la sécurité des utilisateurs (voitures, avions, accès à des locaux dangereux, etc.).</p>
<p>Or, ces puces doivent être protégées dès leur conception et tout au long de leur utilisation contre différents types d’attaques.</p>
<h2>Comment attaquer les puces électroniques ?</h2>
<p>Les <strong>attaques mathématiques et informatiques</strong> exploitent d’éventuelles faiblesses des systèmes de sécurité (trop faible nombre de combinaisons, virus, <a href="https://aresu.dsi.cnrs.fr/IMG/pdf/failles_de_securite_v1-3.pdf">faille dans un protocole</a> soit la vulnérabilité dans un code par exemple, etc.) ou de communication (transmission Internet peu sécurisée, authentification faible, etc.).</p>
<p>Les <strong>attaques physiques par observation</strong> exploitent le fait qu’un attaquant puisse s’approcher assez près de la puce pour mesurer certaines grandeurs physiques comme son temps de calcul, le courant électrique qu’elle consomme ou le rayonnement électromagnétique qu’elle émet à l’extérieur.</p>
<p>Il existe d’autres types d’attaques physiques, <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/high-tech/des-cartes-a-puces-attaquees-au-laser_22819">telles que les attaques au laser</a>, que nous ne couvrirons pas dans cet article.</p>
<h2>Attaques par observation du temps de calcul</h2>
<p>Les premières grandes attaques de ce type remontent aux années 90 (voir ce <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Attaque_temporelle">site web</a> ou cette <a href="http://dx.doi.org/10.1007%2F3-540-68697-5_9">publication</a>). Certains anciens systèmes de vérification de codes secrets étaient vulnérables. Pour chaque nouveau chiffre entré par l’utilisateur, la puce le comparait avec le chiffre correspondant du code secret. En cas d’égalité, la puce passait au chiffre suivant. Mais en cas de différence, elle affichait immédiatement le message « code erroné ».</p>
<p>Ainsi, on pouvait essayer chaque chiffre possible à chaque position et déterminer <em>quand</em> le message d’erreur apparaissait ou pas. Pour chaque bon chiffre, la puce passait à la position suivante et calculait donc plus longtemps.</p>
<p>Pour un code de <em>n</em> chiffres entre 0 et 9, il y a théoriquement 10<sup><em>n</em></sup> combinaisons possibles.</p>
<p>Pour <em>n</em>=4 chiffres, on a 10<sup>4</sup> = 10*10*10*10 = 10 000 combinaisons.</p>
<p>Avec ces mauvais systèmes, seulement 10*<em>n</em> essais étaient nécessaires pour retrouver la bonne combinaison. Dans l’exemple <em>n</em>=4, cela donne 40 essais ce qui est ridiculement petit devant 10 000 combinaisons.</p>
<h2>Attaques par observation de la consommation d’énergie</h2>
<p>Les puces électroniques consomment du courant électrique pour effectuer les calculs et acheminer les informations. Cette consommation électrique dépend de nombreux éléments et en particulier de la complexité des calculs effectués. Par exemple, une addition est plus simple à effectuer qu’une multiplication et donc consomme moins d’énergie.</p>
<p>Ainsi, un attaquant capable de mesurer finement les variations, souvent toutes petites, de la consommation d’énergie d’un circuit peut essayer d’en déduire des informations sur ce qui est fait dans le circuit.</p>
<p>Ces attaques sont analogues aux techniques utilisées, et popularisées dans de nombreux films, pour ouvrir un coffre fort en écoutant les cliquetis de la serrure avec un stéthoscope. Les bonnes et mauvaises positions de la molette n’engendrent pas tout à fait le même type de son. L’attaquant, bien entraîné, peut alors distinguer les deux types de sons lorsqu’il tourne la serrure et en déduire les bonnes positions.</p>
<p>Pour l’observation de la consommation d’une puce, le principe est similaire. On mesure très fréquemment le courant consommé (au lieu des sons) avec une sonde de mesure et un oscilloscope (au lieu d’un stéthoscope).</p>
<p>Si les opérations effectuées dans la puce différent en fonction d’informations secrètes, elles engendrent une variation de la consommation d’énergie mesurable à l’extérieur. En analysant cette variation, on en déduit la valeur secrète. Ces attaques fonctionnent à condition de pouvoir se « brancher » sur les pattes d’alimentation de la puce. Mais ceci n’est pas toujours faisable en pratique.</p>
<h2>Attaques par observation du rayonnement électromagnétique</h2>
<p>Une puce est composée de nombreux transistors, ses organes de calcul, et de fils conducteurs. Tous ces éléments propagent des courants électriques qui engendrent des rayonnements ou émanations électromagnétiques. Le rayonnement émis par un circuit a une faible portée car il correspond à de très faibles courants.</p>
<p>Mais dans le bus, le métro, des files d’attente de magasin ou de cinéma, il est possible de s’approcher à quelques centimètres de la cible. On peut alors mesurer le rayonnement électromagnétique en s’approchant la puce ou la carte électronique sur laquelle elle est soudée.</p>
<p>Une plateforme d’attaque typique utilise plusieurs instruments illustrés sur la figure ci-dessous :</p>
<ul>
<li><p>une <em>sonde</em> électromagnétique, c’est une sorte de petite antenne spécialisée pour ce type de mesures ;</p></li>
<li><p>un <em>amplificateur</em> qui intensifie les faibles signaux mesurés par la sonde ;</p></li>
<li><p>un <em>oscilloscope</em> qui transforme les signaux amplifiés en valeurs numériques exploitables par l’ordinateur.</p></li>
</ul>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/187420/original/file-20170925-17403-14rcnsw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/187420/original/file-20170925-17403-14rcnsw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/187420/original/file-20170925-17403-14rcnsw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=231&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/187420/original/file-20170925-17403-14rcnsw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=231&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/187420/original/file-20170925-17403-14rcnsw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=231&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/187420/original/file-20170925-17403-14rcnsw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=291&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/187420/original/file-20170925-17403-14rcnsw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=291&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/187420/original/file-20170925-17403-14rcnsw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=291&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Petite plate-forme de mesure du rayonnement électromagnétique utilisée en enseignement (l’image de droite est un zoom de la partie en bas à droite de l’image de gauche).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Arnaud Tisserand (CNRS, Lab-STICC, UBS)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pouvoir mesurer des petites variations du rayonnement électromagnétique renseigne sur ce qui se passe dans la puce. Si les variations mesurées à l’extérieur sont liées à différentes opérations effectuées dans la puce et si ces dernières sont liées aux informations secrètes, alors l’attaque peut révéler ces informations.</p>
<p>La figure ci-dessous est un exemple de trace électromagnétique mesurée sur une petite plate-forme d’analyse utilisée en enseignement. L’axe horizontal représente le temps, l’axe vertical représente l’intensité du rayonnement électromagnétique.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/187629/original/file-20170926-10403-li63pz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/187629/original/file-20170926-10403-li63pz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/187629/original/file-20170926-10403-li63pz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=304&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/187629/original/file-20170926-10403-li63pz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=304&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/187629/original/file-20170926-10403-li63pz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=304&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/187629/original/file-20170926-10403-li63pz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=381&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/187629/original/file-20170926-10403-li63pz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=381&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/187629/original/file-20170926-10403-li63pz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=381&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Exemple de trace mesurée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Arnaud Tisserand (CNRS, Lab-STICC, UBS)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Supposons le programme informatique présenté sur la figure ci-dessous. Supposons que l’opération OP1 est plus simple, et donc consomme moins, que OP2. La trace de la figure ci-dessus nous renseignement immédiatement sur la valeur du bit aux différents instants notés A et B. À l’instant A, le rayonnement semble plus faible que pour l’instant B. Donc OP1 doit être effectuée à l’instant A et OP2 à l’instant B. On en déduit que le bit secret vaut 1 à l’instant A et 0 à B.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/187753/original/file-20170927-24212-cw7zbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/187753/original/file-20170927-24212-cw7zbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=215&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/187753/original/file-20170927-24212-cw7zbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=215&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/187753/original/file-20170927-24212-cw7zbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=215&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/187753/original/file-20170927-24212-cw7zbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=270&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/187753/original/file-20170927-24212-cw7zbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=270&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/187753/original/file-20170927-24212-cw7zbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=270&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Programme qui effectue l’opération OP1 quand le bit vaut 1 ou bien l’opération OP2 quand le bit vaut 0 (la partie droite est une illustration graphique de cet algorithme).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Arnaud Tisserand (CNRS, Lab-STICC, UBS)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Toutes les attaques présentées dans cet article sont des versions très simples de ce qui est fait en pratique. On utilise des outils mathématiques, comme les statistiques, et informatiques, comme l’apprentissage automatique, pour renforcer les attaques qui deviennent alors redoutables quand le circuit n’est pas protégé un minimum.</p>
<h2>Comment protéger les puces électroniques ?</h2>
<p>Il existe tout un ensemble de techniques pour se prémunir des attaques physiques par observation. On parle de <em>protections</em> ou de <em>contre-mesures</em>. L’idée principale est de <em>casser le lien</em> qui existe entre les informations secrètes manipulées dans la puce et l’exploitation des mesures effectuées à l’extérieur de la puce. Pour briser ce lien, on peut par exemple : limiter fortement le nombre de tentatives lors de la vérification de codes secrets ou de mots de passe, rendre l’activité électrique de la puce constante dans le temps (il n’y a plus de variations mesurables), utiliser des techniques mathématiques pour donner un aspect aléatoire aux opérations effectuées.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/83235/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Arnaud TISSERAND ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Chez le boulanger lors d'un achat sans contact, ou lors d'emplettes sur internet, nous craignons le piratage de notre carte. Comment sont protégées les puces électroniques ?Arnaud TISSERAND, Directeur de Recherche, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/715432017-01-20T00:11:45Z2017-01-20T00:11:45ZTempête Eleanor : pourquoi certaines régions sont plus exposées aux coupures d’électricité<p>Le passage de la <a href="https://www.infoclimat.fr/bulletin-special-335-tempete-eleanor.html">tempête Eleanor</a> sur le Nord de la France a occasionné de violentes rafales de vent et impacté le réseau électrique par des chutes de branches et d’arbres sur les fils. Mercredi 3 janvier au matin, on comptait plus de <a href="http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2018/01/03/97001-20180103FILWWW00052-tempete-eleanore-200000-foyers-prives-d-electricite-a-9h00.php">200 000 foyers privés de courant</a> dans les régions touchées (Normandie, Hauts-de France, Île-de-France et Grand-Est).</p>
<p>Ces tempêtes, de même que les vagues de froid, soulignent certaines inégalités territoriales face aux coupures électriques ; les habitants de la campagne bretonne y sont, par exemple, davantage exposés que les Franciliens. Comment expliquer de telles disparités ?</p>
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<h2>Réseaux des villes, réseaux des campagnes</h2>
<p>Il y a d’abord une inégalité géographique bien connue qui existe entre les équipements des villes de ceux des campagnes. Du fait de leur réseau électrique plus majoritairement aérien qu’en milieu urbain, les zones rurales ont été davantage impactées par ces coupures.</p>
<p>Si l’on compare la France à d’autres pays européens, l’Hexagone apparaît, avec ses <a href="http://www.caminteresse.fr/environnement/tempete-pourquoi-nenterre-t-on-pas-les-lignes-electriques-en-france-1139059/">44 % de lignes enterrées</a>, plutôt à la traîne. En Allemagne, cet enfouissement concerne 80 % des lignes et presque 100 % en Belgique et aux Pays-Bas.</p>
<p>Ces trois pays disposent d’un réseau de villes plus maillé que la France : l’habitat moins diffus favorise l’enfouissement du réseau électrique. Il faut cependant noter qu’entre 2010 et 2012, <a href="http://energie.lexpansion.com/prospective/reseau-electrique-les-difficultes-de-l-enfouissement_a-34-8053.html">plus de 80 % des nouvelles lignes</a> installées en France ont été enfouies.</p>
<p>Si les lignes enterrées semblent être la solution pour faire face aux tempêtes, elles demeurent néanmoins vulnérables en cas d’inondations. <a href="http://www.caminteresse.fr/environnement/tempete-pourquoi-nenterre-t-on-pas-les-lignes-electriques-en-france-1139059/">Lors de la tempête Xynthia</a>, en 2010, plusieurs lignes souterraines du littoral vendéen avaient été inondées, entraînant des coupures d’électricité.</p>
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<figcaption><span class="caption">La Bretagne, une péninsule électrique (Image temps, 2011).</span></figcaption>
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<h2>Bretagne et Provence-Côte d’Azur très exposées</h2>
<p>La seconde inégalité géographique, moins connue, se dessine entre certaines régions : un Breton ou un habitant de la région Provence-Côte d’Azur sera en effet plus exposé aux risques de coupures lors d’une vague de froid. Ces deux régions souffrent de problèmes identiques.</p>
<p>D’abord, elles <a href="http://rue89.nouvelobs.com/rue89-planete/2012/02/04/bretagne-eteins-la-lumiere-et-pas-seulement-en-hiver-229083">produisent peu d’électricité et possèdent un réseau électrique sous-dimensionné</a> par rapport aux besoins de leur population. Elles sont ensuite considérées comme des <a href="http://www.rte-france.com/fr/article/panorama-de-la-consommation-electrique-de-nos-regions">« péninsules électriques »</a> du fait de leur isolement géographique – elles se trouvent « au bout » du réseau de distribution électrique national.</p>
<p>Lors d’une précédente vague de froid, en 2009, ces deux régions avaient d’ailleurs été <a href="http://www.ladepeche.fr/article/2009/12/15/737716-risque-de-coupure-electrique-bretagne-et-paca-en-premiere-ligne.html">placées en alerte</a> par RTE (Réseau de transport d’électricité) ; les pouvoirs publics avaient alors appelé les habitants de ces régions à réduire leur consommation d’électricité entre 17h et 20h pour plusieurs jours consécutifs.</p>
<p>Contrairement à d’autres régions françaises équipées en centrales nucléaires (Normandie, Rhône-Alpes, Grand-Est notamment) ou bien desservies en électricité du fait de leur position de carrefour géographique (île-de-France, Centre-Val-de-Loire), les régions Bretagne et Provence-Côte-d’Azur dépendent fortement de l’importation d’électricité de régions limitrophes ou de pays voisins. La Bretagne ne produit ainsi que 15 % de son électricité.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/153420/original/image-20170119-26550-1exzp4h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/153420/original/image-20170119-26550-1exzp4h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=565&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/153420/original/image-20170119-26550-1exzp4h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=565&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/153420/original/image-20170119-26550-1exzp4h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=565&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/153420/original/image-20170119-26550-1exzp4h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=710&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/153420/original/image-20170119-26550-1exzp4h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=710&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/153420/original/image-20170119-26550-1exzp4h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=710&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cette carte montre les disparités régionales existantes au niveau de l’équilibre entre l’offre et la demande en période de pointe de consommation d’électricité.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.observatoire-electricite.fr/La-gestion-de-la-pointe-garantie">Observatoire de l’industrie électrique (2010)</a></span>
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<h2>Quelles solutions ?</h2>
<p>Ces inégalités sont pourtant loin d’être une fatalité. Deux pistes se distinguent nettement.</p>
<p>En premier lieu, enterrer les lignes électriques afin de réduire l’inégalité entre les zones urbaines et rurales. Si, ces dernières années, la grande majorité des nouvelles lignes ont été enterrées, plus de la moitié du réseau d’électricité en France demeure aérien.</p>
<p>Bien sûr, enterrer l’ensemble du réseau électrique français serait beaucoup trop coûteux – il a été estimé à plus de <a href="http://www.caminteresse.fr/environnement/tempete-pourquoi-nenterre-t-on-pas-les-lignes-electriques-en-france-1139059/">100 milliards d’euros</a> par ERDF en 2012. Mais pourquoi ne pas systématiser l’enterrement des lignes passant à proximité directe d’espaces boisés afin de prévenir le risque de chutes de branches ? Il semblerait que cela soit le cas depuis peu dans certains départements ruraux, <a href="http://www.lepopulaire.fr/limoges/transport/2016/05/12/l-enfouissement-des-lignes-a-haute-tension-une-priorite-dans-le-departement_11909974.html">comme en Haute-Vienne</a> par exemple.</p>
<p>Il apparaît également essentiel de réduire notre dépendance à l’énergie nucléaire en développant largement les énergies renouvelables. La France reste en effet « prisonnière » de cette spécialisation énergétique initiée dans les années 1950 et fait face depuis quelques années à la vétusté de certaines centrales, comme celle de Fessenheim.</p>
<p>En période de vague de froid durable sur l’Europe de l’Ouest, si plusieurs centrales venaient à s’arrêter pour cause de dysfonctionnements, l’importation d’électricité des pays voisins pourrait ne pas suffire ; une partie du pays serait plongée dans le noir, Provence-Côte d’Azur et Bretagne en tête.</p>
<p>Pour cette dernière région qui, rappelons-le, n’a plus aucune centrale nucléaire en fonctionnement depuis la <a href="http://www.20minutes.fr/rennes/1880811-20160705-bretagne-brennilis-demantelement-centrale-nucleaire-eternise">fermeture de celle de Brennilis</a> en 1985, l’accent est mis sur la transition énergétique avec le développement de l’éolien, de la méthanisation et des panneaux solaires. En 2015, <a href="http://www.bretagne.ademe.fr/sites/default/files/files/Encarts/En-savoir-plus/energies-renouvelables-bretagne.pdf">plus de 11 % de l’énergie consommée</a> en Bretagne était d’origine renouvelable. D’ailleurs, un <a href="http://www.plan-eco-energie-bretagne.fr/upload/docs/application/pdf/2010-12/pacte_electrique_breton.pdf">« pacte électrique breton »</a> a été signé en 2010 entre l’État, la région, RTE, l’Ademe et l’Agence nationale de l’habitat pour répondre à ces enjeux.</p>
<p>Enfin, c’est l’ensemble de nos <a href="http://www.rte-france.com/sites/default/files/pictures/divers/rte-ecogestes_2.png">habitudes de consommation</a> qu’il est essentiel de revoir pour devenir moins énergivore en électricité et donc moins dépendant des risques associés aux aléas climatiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/71543/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François Raulin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Avec les vents violents qui soufflent sur la France, se repose la question des inégalités géographiques dans l’approvisionnement en électricité. La Bretagne apparaît particulièrement vulnérable.François Raulin, Ingénieur de recherche, Laboratoire Métis EM Normandie, EM NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.