tag:theconversation.com,2011:/us/topics/collectivites-26722/articlescollectivités – The Conversation2022-12-14T18:41:51Ztag:theconversation.com,2011:article/1964272022-12-14T18:41:51Z2022-12-14T18:41:51ZCyberattaques contre les collectivités territoriales : le pire est-il à venir ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/500412/original/file-20221212-109649-3bblu5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=95%2C32%2C1102%2C643&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Depuis le Covid-19, les systèmes d’information des régions, départements ou communes sont de plus en plus ciblés par les pirates informatiques.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/developpeur-sans-visage-crop-travaillant-sur-le-code-logiciel-sur-ordinateur-portable-5926382/">Sora Shimazaki/Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Depuis le début de la crise du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/covid-19-82467">Covid-19</a> et notamment durant la période de confinement, on assiste à une augmentation sans précédent des cyberattaques touchant les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/collectivites-26722">collectivités territoriales</a> françaises (régions, départements, communes, communautés de communes, etc.). Toutefois, ces dernières sont souvent occultées par celles qui affectent les établissements de santé du fait de leurs conséquences potentiellement dramatiques, à l’image de l’attaque qui a touché, début décembre, le <a href="https://www.lefigaro.fr/actualite-france/yvelines-cyberattaque-contre-l-hopital-andre-mignot-du-centre-hospitalier-de-versailles-20221204">centre hospitalier de Versailles</a>, au Chesnay-Rocquencourt (Yvelines).</p>
<p>Nos travaux sur la <a href="https://www.cairn.info/revue-des-sciences-de-gestion-2021-3-page-21.htm">vulnérabilités des collectivités territoriales françaises</a> face aux <a href="https://theconversation.com/fr/topics/cyber-attaques-36559">cyberattaques</a> ont notamment été sanctionnés par la première (et seule à ce jour) thèse en sciences de gestion soutenue dès 2012 et donné lieu à plusieurs articles scientifiques ultérieurs. Ces travaux furent l’occasion d’appeler à la mise en place d’une politique publique nationale d’accompagnement des collectivités territoriales relativement à la nécessaire sécurisation de leurs systèmes d’information (SI), malheureusement sans grand succès.</p>
<p>Si nous aurions préféré avoir tort quant aux évolutions envisagées, force est de constater que le sujet est finalement apparu sur l’agenda médiatique <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2020-8-page-81.htm">depuis la crise du Covid</a> pour ne plus la quitter depuis lors. Eu égard à la structuration territoriale française (<a href="https://www.collectivites-locales.gouv.fr/collectivites-locales-chiffres-2022">45 205 collectivités locales</a> en 2022), ces dernières revêtent une importance prépondérante, autant pour leur proximité directe avec les citoyens qu’en termes de services rendus. C’est vraisemblablement ce constat qui a amené de plus en plus de groupes de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/hacker-33939">hackers</a> à les choisir pour cibles.</p>
<p>Les cyberattaques menées demeurent pour le moment essentiellement liées à l’envoi de ransomwares (logiciels malveillants se diffusant à l’intérieur d’un système d’information et chiffrant l’ensemble des données accessibles) et visent un objectif exclusivement pécuniaire au travers de la demande d’une rançon dont le paiement préalable conditionne l’envoi (ou pas) d’un code de déchiffrement. Ce type d’offensive s’avère effectivement d’une efficacité redoutable en cas de sauvegarde non redondante.</p>
<h2>Triple défi numérique</h2>
<p>Appelant de nos vœux une véritable prise de conscience des enjeux liés à une mauvaise sécurité des SI, il nous semble impératif d’alerter sur d’autres types d’atteintes aux données des collectivités, d’autant plus dangereux selon nous qu’ils s’avèrent potentiellement cumulatifs.</p>
<p>À trop se focaliser sur les rançongiciels touchant leurs serveurs, on en vient à oublier que les collectivités territoriales se situant intrinsèquement à l’intersection de trois univers (politique, économique et sociétal), celles-ci relèvent quotidiennement trois défis numériques majeurs : l’administration électronique, l’e-démocratie et la dématérialisation des appels d’offres.</p>
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<p>Dépassant largement la mise à disposition des administrés de nouveaux moyens de communication, l’administration électronique, régulièrement plébiscitée par les Français depuis plusieurs années, est devenue un outil stratégique de service public. Et cet état de fait devint encore plus évident durant la période de confinement relative au Covid-19 : il est aisé d’imaginer l’impact politique et social qu’auraient engendré des cyberattaques privant des citoyens d’un moyen d’interaction devenu d’autant plus essentiel qu’ils se trouvaient dans l’incapacité de se déplacer pour effectuer la moindre démarche administrative. Il convient par conséquent de sécuriser les SI afférents afin <a href="https://www.cairn.info/revue-des-sciences-de-gestion-2021-3-page-21.htm">d’assurer une continuité de service public</a> en cas de crise majeure.</p>
<p>Le même problème se pose en ce qui concerne l’e-démocratie. Nous avons récemment mis en évidence l’existence d’une typologie des <a href="https://www.cairn.info/revue-management-et-avenir-2021-6-page-15.htm">interactions entre la collectivité et ses administrés</a> selon le support numérique utilisé : interaction forte (échanges directs entre les citoyens et les exécutifs territoriaux), modérée (enquête en ligne ou dialogue sur les réseaux sociaux) ou faible (remontée d’informations ponctuelles à l’initiative des administrés).</p>
<p>Le degré de gravité d’une cyberattaque touchant les SI d’e-démocratie sera donc directement corrélé au vecteur numérique : pertes ou vols potentiels d’informations à caractère personnel dans les deux premières hypothèses et perte de confiance dans tous les cas. Ici encore se pose la question de l’impact de telles attaques contre des outils précisément mis en place pour tenter de favoriser une meilleure participation à la vie publique de citoyens de plus en plus méfiants vis-à-vis des institutions démocratiques.</p>
<p>À cela s’ajoute enfin la possibilité que les SI dédiés aux appels d’offres des collectivités puissent également être ciblés. Que se soit en termes de fonctionnement ou d’investissement une collectivité, à l’image de la grande majorité des organisations, se trouve dans l’obligation de faire appel à des prestataires extérieurs.</p>
<p>La dématérialisation de ces procédures fut précisément menée pour permettre une meilleure fluidité dans la gestion des appels d’offres, ainsi que dans le souci de permettre de simplifier les procédures afin de permettre à des petites et moyennes entreprises (PME) de répondre à ceux-ci avec une chance raisonnable de succès. Une offensive numérique visant les échanges entre les soumissionnaires et la collectivité s’avérerait également lourde de conséquences, non seulement en matière économique mais également en termes de crédibilité intrinsèque.</p>
<h2>Acteurs de la défense</h2>
<p>Face à l’ensemble des défis précités, on peut espérer que le volet dédié au financement numérique des collectivités territoriales du plan gouvernemental « France Relance » permettra d’améliorer sensiblement la sécurisation des SI territoriaux. Pour autant, l’opportunité budgétaire ne fait pas tout, <em>a fortiori</em> lorsque les projets potentiellement finançables entrent immanquablement en compétition les uns avec les autres et que les capacités d’accompagnement financier d’origine étatique demeurent par nature limitées.</p>
<p>Or, il convient de conserver à l’esprit qu’en matière de sécurisation des SI, comme nous le mettions déjà en évidence dans le premier <a href="https://eska-publishing.com/fr/politique-strategie-geo-economie/1944-les-collectivites-territoriales-face-a-la-cybercriminalite-9782747222952.html">ouvrage</a> dédié à cette problématique et paru dès 2014, l’une des conditions essentielles du succès, voire la principale d’entre elles, relève d’une volonté politique forte au sens ou l’impulsion doit venir directement des exécutifs territoriaux.</p>
<p>Notre expérience d’universitaire spécialiste du sujet et d’ancien élu d’une ville de plus de 100 000 habitants nous incite donc à préconiser la définition d’une véritable politique publique d’accompagnement des collectivités territoriales en matière de sécurisation de leurs SI. Et ce d’autant plus qu’à la lumière des enseignements tactiques issus du conflit ukrainien, on redécouvre la nécessité de renforcer la défense opérationnelle du territoire français dont les collectivités territoriales demeurent des <a href="https://www.youtube.com/watch?v=qusW-UE6Unw">parties prenantes essentielles</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196427/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Rémy Février ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le déploiement de l’administration électronique, de l’e-démocratie et de la dématérialisation des appels d’offres ouvre de nouvelles opportunités pour les hackers.Rémy Février, Maître de Conférences HDR en Sciences de Gestion - Equipe Sécurité-Défense-Renseignement, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1926522022-10-25T16:19:16Z2022-10-25T16:19:16ZDécentralisation : la gouvernance des collectivités locales est-elle assez fiable ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/490039/original/file-20221017-25-w5v4ok.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=233%2C328%2C1520%2C1048&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En juillet dernier, le Sénat a présenté un rapport préconisant d’élargir les compétences des régions, départements et communes (Ici, mairie de Serres-Castet, dans les Pyrénées-Atlantiques).
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Mairie_de_Serres-Castet.png">Marcel Roblin/Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La cause semble entendue : il faut décentraliser la République ! C’est ainsi que Gérard Larcher, le président du Sénat, a déclaré <a href="https://www.lesechos.fr/politique-societe/regions/le-senat-esquisse-une-nouvelle-etape-de-decentralisation-1220729">« Le temps de l’hypercentralisation est révolu »</a> le 2 juillet 2022 lors de la présentation d’un rapport regroupant 50 propositions « pour le plein exercice des libertés locales » élaboré par tous les groupes politiques du Sénat. C’est dire si la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/decentralisation-23118">décentralisation</a> est appelée des vœux de tous les élus représentant les collectivités locales.</p>
<p>Pour le président du Sénat, la forte <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/06/29/au-second-tour-des-municipales-abstention-record-et-percee-ecologiste_6044563_823448.html">abstention des dernières élections municipales</a> relève d’un « mal plus profond et plus ancien » :</p>
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<p>« Nos compatriotes réclament moins de discours, moins de bureaucratie, plus de proximité […] Seul un nouvel équilibre des pouvoirs entre l’État et les collectivités territoriales me semble permettre de restaurer la confiance et de donner un nouvel élan à notre pays […]. Nous voulons donner aux collectivités la pleine et entière responsabilité de compétences qu’elles nous paraissent pouvoir mieux exercer que l’État, parce qu’elles sont en proximité, parce que leur exercice pourra être plus souple et plus réactif. »</p>
</blockquote>
<p>L’idée est donc de donner aux collectivités de nouvelles compétences concernant l’emploi, la santé et l’écologie. Pourquoi pas ? Mais avant de valider un tel constat (qui reste à démontrer) et de telles demandes, il convient de s’interroger sur la gouvernance des collectivités locales. Dans quelle mesure cette gouvernance est-elle exemplaire ? Dans quelle mesure est-elle mieux à même que l’État d’assurer ces nouvelles missions et surtout dans quelle mesure est-elle est plus démocratique ?</p>
<h2>Une gouvernance bien différente des entreprises</h2>
<p>Bien sûr, les collectivités locales, et au premier chef les communes, sont en proximité avec la population. Mais si cela est vrai des communes, est-ce le cas des départements et de régions ? On peut en douter. Pour la plupart de nos concitoyens, les compétences des départements et des régions <a href="https://www.ouest-france.fr/elections/departementales/elections-departementales-flou-dans-les-competences-des-departements-3203587">restent floues</a>. C’est d’ailleurs <a href="https://www.observationsociete.fr/modes-de-vie/vie-politique-et-associative/participationvote/">pourquoi les électeurs votent davantage pour les municipales</a> que pour les élections régionales ou législatives.</p>
<p>Si les rapports en faveur de plus de décentralisation sont nombreux, rares sont ceux qui s’interrogent sur la gouvernance effective des collectivités locales. Alors que l’exécutif de l’État doit composer avec l’Assemblée nationale et le Sénat pour valider ses propositions de loi, rien de tel avec un exécutif régional, départemental ou municipal. Il leur suffit de faire approuver par leur majorité au sein de leurs conseils les délibérations qu’ils veulent faire appliquer.</p>
<p>Le cas des communes est particulièrement exemplaire. Le système électoral pour les communes a été construit afin de donner à la liste gagnante sortie des urnes une solide majorité de façon à assurer la stabilité de l’exécutif local. C’est ainsi que, dans les communes de plus de 1000 habitants, la liste gagnante obtient <a href="https://www.vie-publique.fr/fiches/20204-municipales-quel-mode-de-scrutin-dans-les-communes-de-1000-hab-et-plus">50 % des sièges des conseillers municipaux</a> et que le reste des sièges est réparti au prorata des voix obtenues par toutes les listes. Concrètement, si au second tour de l’élection il ne reste que deux listes, la liste gagnante qui a obtenu, par exemple 60 % des voix, rafle 50 % des sièges plus 60 % des sièges restants, soit au total 80 % (50 % + 30 %). La minorité s’en sort avec 20 % alors qu’elle avait obtenu 40 % des suffrages. C’est donc une forte distorsion dans la représentativité des élus municipaux qui va s’instaurer.</p>
<p>Ainsi, tant que le maire a la confiance de sa majorité il va pouvoir faire voter toutes les délibérations qu’il souhaite, même un budget non sincère. L’opposition aura beau demander des débats contradictoires, faire des amendements et manifester rien ne changera : le maire aura gain de cause, et cela pendant six ans. Hormis ses électeurs en vue du prochain scrutin, il ne devra en outre de comptes à personne, sauf à la trésorerie et à la préfecture pour des aspects purement administratifs. Le seul risque réel pour le maire est donc de voir sa majorité se fracturer, aussi il est important pour lui de soigner sa cohésion.</p>
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<p>Au total, le maire va pouvoir diriger sa commune sans contre-pouvoir réel. On est ici bien loin de la gouvernance des entreprises privées avec leurs conseils d’administration, voire de surveillance, avec des représentants des actionnaires. En effet, ces derniers sont relativement indépendants car ils n’ont pas été élus sur la liste conduite par le PDG (comme pour le maire) et qu’ils ont également des comptes à rendre à leurs mandants.</p>
<h2>Le précédent des « emprunts toxiques »</h2>
<p>Ces dernières années, la gestion des 36 000 communes de France a connu quelques ratés spectaculaires. Le cas des « emprunts toxiques » est à cet égard exemplaire. Dans les années 2004-2008, plus de 850 collectivités locales ont souscrit à des emprunts qui se sont avérés être des emprunts toxiques. Or, non seulement les élus savaient ce qu’ils faisaient – contrairement à ce qu’ils ont affirmé régulièrement – mais <a href="https://theconversation.com/emprunts-toxiques-certains-elus-locaux-savaient-ce-quils-faisaient-55924">plus les élus savaient, plus ils signaient</a>.</p>
<p>Dans un <a href="https://theconversation.com/emprunts-toxiques-entre-ignorance-et-petits-calculs-57709">article</a> publié en 2016, nous montrions à partir de l’expérience de la métropole grenobloise comment les élus responsables avaient fourvoyé leurs collectivités avec de tels montages financiers. Comme de très nombreuses collectivités locales, la métropole grenobloise a pu sortir de la nasse des emprunts toxiques grâce à l’appui de l’État, via le Fonds de soutien (SFIL). Mais outre que cette sortie a été <a href="https://theconversation.com/emprunts-toxiques-la-douloureuse-sortie-de-la-metropole-grenobloise-62053">très coûteuse financièrement</a>, elle a eu également un coût politique.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/emprunts-toxiques-entre-ignorance-et-petits-calculs-57709">Emprunts toxiques : entre ignorance et petits calculs</a>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/emprunts-toxiques-la-douloureuse-sortie-de-la-metropole-grenobloise-62053">Emprunts toxiques : la douloureuse sortie de la Métropole grenobloise</a>
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<p>Autre exemple emblématique : la région Poitou-Charentes qui sous la présidence de Ségolène Royal a souscrit pour près de <a href="https://www.lepoint.fr/economie/emprunts-toxiques-5-5-milliards-aux-frais-des-contribuables-21-02-2017-2106276_28.php">200 millions d’euros d’emprunts devenus toxiques</a>, dont 47 millions à très haut risque, selon le cabinet EY. On pourrait malheureusement citer bien d’autres exemples de la mauvaise gestion financière de ces collectivités.</p>
<p>Si on peut comprendre les élus des collectivités demandant davantage de compétences et de responsabilités afin d’élargir leurs pouvoirs, on peut néanmoins s’interroger si « un nouvel équilibre des pouvoirs entre l’État et les collectivités territoriales permettra de restaurer la confiance et de donner un nouvel élan à notre pays », pour reprendre les mots du président du Sénat. À tout le moins, si cela devait se faire il conviendrait de revoir sérieusement la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/gouvernance-23847">gouvernance</a> des collectivités locales.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/192652/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Albouy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le cas des « emprunts toxiques » souscrits dans les années 2000 a révélé des modes de décision qui interrogent au moment où le Sénat veut lancer une nouvelle étape dans la décentralisation.Michel Albouy, Professeur émérite de finance, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1837472022-05-27T15:48:44Z2022-05-27T15:48:44ZLes marges de manœuvre limitées des pouvoirs publics pour développer le tourisme<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/465032/original/file-20220524-19-h14png.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C0%2C1280%2C850&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans le secteur touristique, il faut aussi compter sur une myriade de petits acteurs privés.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/marchand-de-glace-route-c%c3%b4te-5730806/">Albrecht Fietz / Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le tourisme a particulièrement souffert de la pandémie. En France, <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/04/04/deux-ans-apres-la-pandemie-le-tourisme-face-au-mur-des-prets-garantis-par-l-etat_6120573_3234.html">38 % des acteurs du secteur</a> ont dû contracter un prêt garanti par l’État, et le <a href="https://www.sudouest.fr/economie/tourisme/le-tourisme-mondial-se-redresse-sans-atteindre-le-niveau-d-avant-la-pandemie-10911768.php">pays s’en sort pourtant mieux que ses voisins</a>.</p>
<p>La saison estivale 2022 <a href="https://www.leparisien.fr/societe/le-covid-est-derriere-nous-le-grand-retour-des-touristes-etrangers-en-france-20-04-2022-VPKVQW2TNZHKHDNBSSVZWOY7WU.php">s’annonce cependant bonne</a>, avec une météo clémente et des consommateurs qui ont pu mettre une épargne de côté durant la pandémie. De quoi pousser les pouvoirs publics à miser sur le secteur pour développer un territoire ? Ceux-ci souhaitent souvent occuper une place centrale dans l’organisation et l’animation du tourisme local.</p>
<p>Reste que les impulsions qu’ils proposent ne sont cependant pas toujours reprises par le tissu des entreprises du secteur, souvent de petites tailles. Or, les zones touristiques constituent des territoires identifiés par les voyageurs comme une offre globale. Ils ne choisiront bien souvent pas de se rendre à un endroit pour une ou deux particularités mais pour tout un ensemble de lieux et de services.</p>
<p>Notre <a href="https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-03240029/document">recherche</a> montre en fait, que les pouvoirs publics ne peuvent que difficilement piloter l’ensemble du système. Leur action, paradoxalement, ne peut fonctionner que sur des segments particuliers.</p>
<h2>Diversité et originalité</h2>
<p>La valeur d’un site dépend, du point de vue du visiteur, de deux facteurs. Deux facteurs qui reposent eux-mêmes sur deux types d’acteurs différents.</p>
<p>Il y a d’une part ce que l’on nomme le « paysage ». Ce sont les sites en eux-mêmes, les plages, musées, ou monuments. Le touriste vient à <a href="https://www.researchgate.net/publication/325514488_La_contribution_de_la_loi_NoTRE_a_la_definition_des_ecosystemes_d%E2%80%99affaires_touristiques">Richelieu</a> (Indre) pour ses fortifications, à Honfleur (Calvados) pour son grenier à sel, son église Sainte-Catherine dont la particularité est d’être construite en bois ou son port, et au Havre (Seine-Maritime), pour la plage, son architecture Perret ou son musée d’art moderne. Promouvoir, entretenir et mettre en valeur ce paysage est le rôle des collectivités territoriales.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/465022/original/file-20220524-15-p5zsu3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/465022/original/file-20220524-15-p5zsu3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/465022/original/file-20220524-15-p5zsu3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/465022/original/file-20220524-15-p5zsu3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/465022/original/file-20220524-15-p5zsu3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/465022/original/file-20220524-15-p5zsu3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/465022/original/file-20220524-15-p5zsu3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/465022/original/file-20220524-15-p5zsu3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le port de Honfleur constitue un élément incontournable de son paysage.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/honfleur-village-de-p%c3%aacheurs-66796/">Thomas Ulrich/Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>D’autre part se trouve l’ensemble de services complémentaires entre eux qui composent le séjour du client : l’hébergement, les lieux de restauration ou de loisirs sportifs par exemple. Leur production échoit, elle, à une mosaïque de petites entreprises.</p>
<p>En ce qui les concerne, nos recherches montrent que la propension à dépenser des touristes dépend en fait de deux éléments. Ils s’avèrent, d’une part, sensibles à la diversité des offres individuelles des entreprises : plus les activités sont variées, plus l’offre est large et le site attractif. Autrement dit, une interaction semble nécessaire entre les différents éléments de l’offre pour un bon fonctionnement de l’ensemble. D’autre part, nous soulignons l’importance de l’originalité des offres individuelles. Elles permettent de distinguer la destination touristique parmi ses concurrentes.</p>
<p>Ce peuvent être, par exemple, les galeries d’art réputées pour la destination touristique honfleuraise, dont le « paysage » est pourtant d’abord maritime. Se pose alors la question de la possibilité d’améliorer l’attractivité du territoire sans pour autant noyer le trait distinctif de la destination. Pari réussi à Honfleur, qui renvoie aussi l’image de « creuset des impressionnistes ».</p>
<h2>Densité et légitimité</h2>
<p>Puisqu’une coordination de l’ensemble semble ainsi nécessaire, faut-il s’en remettre aux pouvoirs publics ? Certains experts évoquent la nécessité d’une <a href="http://dx.doi.org/10.4468/2017.3.08storlazzi.lunic.micera">gouvernance partagée entre les acteurs</a>. Il ne semble cependant pas exister de cas de stratégies collectives réussies.</p>
<p>Prenons le cas de <a href="http://dx.doi.org/10.4468/2017.3.08storlazzi.lunic.micera">Venise</a>. La ressource touristique y est abondante et la tendance que l’on y observe paraît être à la maximisation des intérêts individuels au détriment du collectif. C’est en fait une conséquence d’une densité de touristes élevée : le besoin de coordination est plus faible car il n’y a pas nécessité de développer davantage l’attractivité de l’endroit.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/465025/original/file-20220524-23-x2k5ar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/465025/original/file-20220524-23-x2k5ar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/465025/original/file-20220524-23-x2k5ar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/465025/original/file-20220524-23-x2k5ar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/465025/original/file-20220524-23-x2k5ar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/465025/original/file-20220524-23-x2k5ar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/465025/original/file-20220524-23-x2k5ar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/465025/original/file-20220524-23-x2k5ar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">« À Venise, la densité touristique est telle que les pouvoirs publics n’ont pas à intervenir pour promouvoir le lieu.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/venise-rialto-italie-pont-2085864/">Ruth Archer/Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>C’est donc la densité de la ressource touristique qui va déterminer la légitimité de l’action publique. Elle ne sera reconnue, d’après nos résultats, que si la densité des touristes est faible. C’est pour cette raison que, souvent, les entreprises n’expriment pas de volonté d’intervention des pouvoirs publics.</p>
<p>L’action publique (par exemple au travers d’un office du tourisme) ne peut donc porter que sur la mise en valeur et la promotion des sites touristiques et de l’offre globale de la destination touristique. C’est d’ailleurs là une attente des acteurs du secteur. Il s’agit d’attirer les touristes et moins de coordonner l’écosystème.</p>
<p>Les pouvoirs publics ne joueront ce second rôle qu’indirectement puisque les entrepreneurs individuels s’adaptent à l’évolution des profils des touristes drainés. Éventuellement peuvent-ils utiliser les <a href="https://mbavocats.eu/quand-barcelone-revoit-laccueil-de-ses-touristes-les-clefs-du-plan-special-durbanisme-des-logements-touristiques-peuat/">plans d’urbanisme comme à Barcelone</a>, réglementer les <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/normandie/calvados/honfleur/la-ville-d-honfleur-calvados-veut-reguler-les-locations-saisonnieres-sur-son-territoire-et-soumet-toute-demande-de-mise-en-location-a-autorisation-2402635.html">locations saisonnières comme à Honfleur</a> ou encore favoriser l’implantation d’activités dont la densité est faible afin de rééquilibrer l’écosystème. À eux de trouver une niche la plus adaptée pour agir.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/183747/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marie-Laure Baron a reçu des financements de Le Havre Seine Métropole. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Samuel Grandval a reçu des financements de Le Havre Seine Métropole. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Xiao Liu a reçu des financements de Le Havre Seine Métropole. </span></em></p>L’attractivité d’un territoire dépend de toute une mosaïque d’acteurs privés qu’il leur est bien difficile de coordonner.Marie-Laure Baron, Maître de conférences en sciences de gestion, Université Le Havre NormandieSamuel Grandval, Maître de conférences HDR en sciences de gestion, Université Le Havre NormandieXiao Liu, Docteur, Université Le Havre NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1817312022-05-02T19:06:14Z2022-05-02T19:06:14ZObjectif ZAN : comment tenir les comptes ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/460788/original/file-20220502-22-pepqrx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2048%2C1536&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les parcs urbains sont-ils des espaces artificiels ou non ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/97758145@N08/15565450385">William Chevillon/flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Pendant la campagne présidentielle, un <a href="https://www.banquedesterritoires.fr/les-communes-touristiques-appellent-adapter-lapplication-du-zan">collectif d’élus publiait un « manifeste aux candidats »</a>, appelant notamment à « adapter l’application du <a href="https://theconversation.com/zero-artificialisation-nette-des-sols-le-dernier-rendez-vous-manque-de-nicolas-hulot-101540">Zéro Artificialisation Nette</a> » (ou ZAN) pour relancer durablement le tourisme dans leurs territoires.</p>
<p>Cet appel témoigne à nouveau de l’inquiétude que génère cet objectif national (qui implique de renaturaliser autant d’espace que ceux artificialisés à l’échelle nationale) auprès des collectivités.</p>
<h2>Les enjeux du ZAN</h2>
<p>Pourtant, le ZAN semble à première vue une avancée majeure dans la prise en compte des enjeux écologiques dans l’aménagement des territoires. En effet, la perte et la fragmentation des habitats naturels sont désormais reconnues comme le <a href="https://ipbes.net/sites/default/files/2020-02/ipbes_global_assessment_report_summary_for_policymakers_fr.pdf">principal facteur de l’effondrement de la biodiversité</a>. L’étalement urbain et l’intensification des usages des sols ont en outre des effets négatifs en termes climatique, social et économique.</p>
<p>En France, ce sont entre <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/artificialisation-des-sols">20 et 30 000 hectares</a> d’espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF) qui disparaissent chaque année en raison de l’étalement urbain, y compris dans les <a href="https://www.iddri.org/sites/default/files/PDF/Publications/Catalogue%20Iddri/D%C3%A9cryptage/201902-IB0219-AC%20artificialisation%20France_0.pdf">zones en décroissance démographique</a>. Si l’on considère plus largement l’ensemble de l’occupation intensive de l’espace par des activités humaines, <a href="https://naturefrance.fr/indicateurs/part-du-territoire-occupe-par-les-ecosystemes-peu-anthropises">c’est près de 47 % du territoire national qui peut être considéré comme anthropisé</a>.</p>
<p>Si la régulation de la consommation foncière a progressivement été prise en charge par les lois relatives à l’urbanisme, la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/article_jo/JORFARTI000043957221">loi Climat et Résilience de 2021</a> a pour atout d’articuler la nécessité de maîtrise de l’artificialisation avec la conservation de la biodiversité. Elle définit ainsi l’artificialisation en prenant en compte les fonctions écologiques réalisées par les sols (<a href="https://theconversation.com/la-biodiversite-des-sols-nous-protege-protegeons-la-aussi-88538">essentielles au maintien de la biodiversité</a>), et fixe l’objectif ZAN à l’horizon 2050.</p>
<p>Toutefois, les effets d’une loi dépendent fortement de ses modalités d’application. C’est notamment par décret en Conseil d’État que devra (à une échéance pour l’heure inconnue) être fixée « la nomenclature des sols artificialisés ainsi que l’échelle à laquelle l’artificialisation des sols doit être appréciée dans les documents de planification et d’urbanisme ».</p>
<h2>Comment va-t-on comptabiliser l’artificialisation ?</h2>
<p>La méthode de calcul de l’artificialisation est un enjeu crucial, car il détermine le niveau d’ambition de la politique. Justement, le <a href="http://www.consultations-publiques.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/logl2201338d_projet-decret-nomenclature_zan.pdf">projet de décret relatif à cette nomenclature</a> a été soumis à consultation du public en mars 2022.</p>
<p>On y apprend que l’artificialisation sera comptabilisée au niveau des documents de planification et d’urbanisme et qu’elle se limite aux espaces terrestres. Sur le plan technique, les comptes seront tenus à partir de 2031 grâce à « l’occupation des sols à grande échelle » (<a href="https://artificialisation.developpement-durable.gouv.fr/bases-donnees/ocs-ge">OCSGE</a>), une base de données de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) qui s’appuie sur un modèle séparant la couverture du sol et son usage.</p>
<p>Ces données, en cours de production, présenteront l’avantage d’être spatialement précises (dès 200m<sup>2</sup> pour les zones bâties et 2500 m<sup>2</sup> pour les objets situés hors zone construite) et régulièrement mises à jour, un bon compromis pour suivre les évolutions à l’échelle des documents d’urbanisme.</p>
<p>Ce système de suivi de l’occupation du sol permet de distinguer 14 types de couvertures (des zones imperméables bâties aux formations arborées de feuillus) et 17 catégories d’usage des sols (par exemple des usages agricoles, routiers ou de service logistique). Le choix de classer les catégories en « artificiel » ou « non artificiel » est ensuite le fruit du croisement entre la couche de couverture et celle des usages… mais aussi de négociations politiques.</p>
<h2>Les espaces verts urbains, naturels ou artificialisés ?</h2>
<p>Par exemple, dans le projet de décret, les espaces verts non arborés à usage urbain (qui comprennent notamment les espaces de pelouses des parcs urbains, mais aussi les terrains sportifs en herbe) sont considérés comme artificiels.</p>
<p>On peut alors légitimement se demander si ce choix ne découragerait pas les initiatives favorisant la nature en ville. Si déconstruire un espace bétonné (comme un parking) pour y installer un jardin urbain n’est pas compté comme une désartificialisation dans le bilan du ZAN, pourquoi les collectivités s’engageraient dans cette voie ?</p>
<p>Cette ambiguïté s’explique notamment par les limites de l’OCSGE. Les végétations non arborées sont décrites en deux postes : les « formations herbacées » et les « autres formations non ligneuses » (qui englobent les espaces à végétation plus haute mais dépourvus d’arbres). Les données du modèle de couverture de l’OCSGE ne distinguent pas le caractère plus ou moins naturel de ces espaces. Par exemple, un stade sportif en herbe sera interprété comme un espace de végétation herbacée. Considérera-t-on pour autant que la transformation d’un parking en un terrain de football est une action de désartificialisation ?</p>
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<img alt="Carte aérienne dont les terrains correspondant aux différents espaces sont mis en couleurs ; la carte de gauche est presque entièrement colorée, celle de droite l’est presque deux fois moins" src="https://images.theconversation.com/files/460018/original/file-20220427-16-d063l7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/460018/original/file-20220427-16-d063l7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=412&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/460018/original/file-20220427-16-d063l7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=412&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/460018/original/file-20220427-16-d063l7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=412&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/460018/original/file-20220427-16-d063l7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=518&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/460018/original/file-20220427-16-d063l7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=518&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/460018/original/file-20220427-16-d063l7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=518&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le jeu de données du SCOT du bassin d’Arcachon permet de tester différents scénarios. À gauche, les espaces végétalisés non arborés à usage urbain sont comptés comme artificialisés. À droite, ils sont exclus. Ce choix a une incidence forte sur les objectifs de réduction de l’artificialisation.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Brian Padilla et collègues/MNHN</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Le choix de classer les espaces verts non arborés à usage urbain parmi les espaces artificialisés rappelle également que, selon leur intégration dans les trames écologiques et leurs modalités de gestion, les <a href="https://sciencepress.mnhn.fr/sites/default/files/articles/hd/naturae2020a10pdfa_0.pdf">espaces verts urbains ne sont pas toujours favorables à la biodiversité</a>.</p>
<h2>Les carrières, espaces non artificialisés ?</h2>
<p>Le projet de décret propose un choix bien plus surprenant : les surfaces correspondant aux activités de carrières seraient considérées comme non artificialisées. Pourtant, quel que soit le type d’exploitation, ces activités impliquent généralement un <a href="https://www.unpg.fr/accueil/nos-activites/comment-sont-ils-produits/les-carrieres-terrestres/">décapage des terres de couverture pour extraire le gisement</a>.</p>
<p>La durée des exploitations dure le plus souvent entre 20 et 30 ans, mais de nombreuses exploitations sont prolongées bien au-delà, parfois jusqu’à plus de 100 ans. Pendant toute cette période, les fonctions des sols sont réduites au minimum, si bien qu’il semble inconcevable que ces surfaces ne soient pas considérées comme artificialisées au regard de la loi.</p>
<p>D’autant plus qu’au total, ce sont près de <a href="https://www.mineralinfo.fr/fr/ressources-minerales-france-gestion/carrieres-france">3 300 carrières représentant environ 110 000 ha de surface au sol qui sont concernées</a>. Une enveloppe confortable à déduire des objectifs ambitieux de la loi si le projet de décret demeure en l’état.</p>
<h2>Le risque de la simplicité : se tromper d’objectif</h2>
<p>Pour atteindre le ZAN, il est nécessaire de tenir les comptes : quels espaces ont été artificialisés, lesquels ont été au contraire restaurés en faveur de la biodiversité ?</p>
<p>Disposer de données à l’échelle nationale est un atout pour mieux territorialiser cet objectif ambitieux, mais il faut être conscient des limites imposées par l’exercice : les modèles décrivant la couverture et les usages du sol progresseront avec le temps.</p>
<p>Les outils à disposition offrent toutefois des options qu’il faut considérer. Il serait par exemple pertinent de ne plus compter uniquement en termes de surface, mais d’associer un coefficient d’artificialisation à chacune des catégories, de manière à rendre compte de l’intensité de l’artificialisation et de la fonctionnalité des sols concernés. Le caractère artificiel ne serait alors plus dichotomique, mais suivrait un gradient. Cela pourrait par exemple donner un poids plus important dans les comptes du ZAN aux espaces fortement imperméabilisés (des zones bâties) par rapport aux espaces verts urbains.</p>
<p>Si la simplicité d’une approche binaire et surfacique a ses vertus, elle se heurte à un écueil majeur : la biodiversité est un objet complexe. Alors que l’objectif du ZAN vise à enrayer son effondrement, une mise en garde s’impose : à trop simplifier, on peut atteindre le ZAN sur le plan comptable en oubliant, de nouveau, de préserver les espaces favorables au vivant.</p>
<hr>
<p><em>Les décrets attendus ont finalement été adoptés par le Conseil d’État le vendredi 29 avril 2022, après la rédaction de cet article. Les choix discutés ici ont été fixés : les espaces verts urbains non arborés sont classés comme sols artificialisés, alors que les carrières en exploitation le sont comme non artificialisées.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181731/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Brian Padilla a reçu des financements du MTES/FRB dans le cadre du programme ITTECOP. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Fanny Guillet a reçu des financements du MTES/FRB dans le cadre du programme ITTECOP</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Salomée Gelot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le plan Zero Artificialisation Nette vise à renaturaliser un espace pour chaque espace artificialisé. Mais la détermination artificiel ou non-artificiel fait encore débat.Brian Padilla, Ingénieur recherche et expertise en écologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Fanny Guillet, sociologue, chargée de recherche au CNRS, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Salomée Gelot, Recherche et expertise dans le cadre de la séquence ERC et le ZAN, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1779702022-03-01T20:12:18Z2022-03-01T20:12:18ZComment repenser le pilotage des politiques publiques après la crise du coronavirus ?<p>Depuis le début de l’année 2020, la pandémie liée au coronavirus met en évidence l’importance des structures publiques, notamment locales, pour l’organisation de la vie sociale et économique de nos pays et de leurs habitants. Elle en fait également éclater les limites et les insuffisances. Se rendent ainsi visibles plusieurs problèmes de pilotage des politiques publiques, auxquels des solutions paraissent devoir être trouvées.</p>
<p>C’est là l’objet de l’ouvrage récemment publié aux éditions Berger-Levrault <em>Le pilotage des politiques locales : de la planification à l’évaluation – Concepts, pratiques et normes</em>. Il analyse différents exemples qui nous invitent à considérer la crise du Covid-19 comme une opportunité de développement de l’innovation publique.</p>
<p>Force est de constater que les organisations publiques ne peuvent plus se contenter d’une gestion fondée sur le seul contrôle de leurs ressources, notamment financières, sur une gouvernance fermée et passive, sur des outils de gestion court-termistes, ainsi que sur des logiques de changement « top-down » et peu préventives.</p>
<h2>Changer de paradigme</h2>
<p>Le premier point d’achoppement mis en évidence par la crise est celui de la gestion des ressources. La période récente a révélé les capacités limitées des organisations publiques, à prévenir, à planifier, ou à prioriser. Dans les années à venir, les pratiques de gestion des risques, les outils de détection et d’analyse des besoins sociaux sont ainsi invités à se développer. Il s’agit d’anticiper, mais surtout de savoir s’adapter rapidement aux ruptures contextuelles et conjoncturelles. Pour l’heure, nos équipes dirigeantes conduisent l’action publique souvent à vue en restant focalisés sur les seuls moyens à leur disposition avec de faibles capacités collectives projectives.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/448602/original/file-20220225-21-fv4miv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/448602/original/file-20220225-21-fv4miv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/448602/original/file-20220225-21-fv4miv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=540&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/448602/original/file-20220225-21-fv4miv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=540&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/448602/original/file-20220225-21-fv4miv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=540&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/448602/original/file-20220225-21-fv4miv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=679&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/448602/original/file-20220225-21-fv4miv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=679&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/448602/original/file-20220225-21-fv4miv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=679&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Cette pandémie met aussi en évidence des limites qui relèvent de la coordination et de la coopération des différents acteurs de la sphère publique. L’engagement d’acteurs individuels ou associatifs des territoires permet souvent de trouver des solutions dans la gouvernance locale. On l’a, par exemple, vu pour la réalisation des masques ou des blouses manquantes, ou encore avec le financement sous forme de dons aux hôpitaux publics. Mais, les répartitions entre acteurs n’étant pas explicites, chacun se renvoie parfois un peu la balle lorsqu’il s’agit d’endosser une responsabilité.</p>
<p>Ces problématiques appellent un changement de paradigme au sein du management public. Très influencé par une culture du contrôle bureaucratique, il semble devoir se réformer dans une logique développée par le <a href="https://books.openedition.org/igpde/5756?lang=fr"><em>Post New-Public Management</em></a>. Celle-ci est centrée sur une ouverture à l’usager, sur une collaboration multipartite, sur l’anticipation et la transparence.</p>
<p>Des <a href="https://journals.openedition.org/pmp/4423">chercheurs</a>, qui interrogeaient les logiques de la loi Lolf, ont observé que les premières mises en place de véritables pilotages des politiques publiques se sont opérées dans les grandes villes anglo-saxonnes telles que Charlotte, Melbourne, Sydney ou Auckland. On les a également retrouvés à un niveau fédéral aux États-Unis ou en Australie. Avec la crise économico-financière de la fin des années 2000, on a pu les retrouver à <a href="https://hal-univ-pau.archives-ouvertes.fr/hal-02431100">l’échelle française</a>.</p>
<h2>Des collectivités innovantes</h2>
<p>Piloter une politique publique, c’est d’abord effectuer des diagnostics stratégiques, ce qui reste peu fait en pratique, mais aussi planifier l’activité sur le long terme. À ce titre, plusieurs outils peuvent être mobilisés : segmentations stratégiques, arbres à objectifs, outils de priorisation… S’ouvrir à d’autres acteurs, tels que les associations, permet le développement d’une intelligence collective et d’une gouvernance partagée, plus à même d’anticiper ou de faire face à des évolutions sociales ou environnementales. L’information circule alors mieux, que cela soit de manière descendante, des dirigeants vers la population, ou ascendante.</p>
<p>Ces pratiques commencent à être mises en œuvre de manière volontariste par des collectivités innovantes que notre ouvrage est venu étudier.</p>
<p>Le Sicoval, un établissement intercommunal du Sud-Est toulousain, a su réaliser un bilan à mi-mandat et modifier son projet politique 2014-2020 pour fixer un nouveau cap pour 2018-2020. Pour améliorer ses modes de gouvernance, plusieurs priorités ont alors été privilégiées et l’on a alors observé une organisation politique et administrative responsabilisée et des tableaux de bord produits pour évaluer les actions engagées.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/448607/original/file-20220225-21-9ji2hq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/448607/original/file-20220225-21-9ji2hq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/448607/original/file-20220225-21-9ji2hq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/448607/original/file-20220225-21-9ji2hq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/448607/original/file-20220225-21-9ji2hq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/448607/original/file-20220225-21-9ji2hq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/448607/original/file-20220225-21-9ji2hq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/448607/original/file-20220225-21-9ji2hq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">A mi-mandat, le conseil départemental a pris le temps d’analyser son projet « Ambitions 2021 ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">rostichep/Pixabay</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Plus au nord, la métropole d’Angers a engagé au début des années 2020 une relecture de ses politiques publiques. Elle se donne alors les moyens de répondre à plusieurs questions : que doit développer la collectivité ? Que doit-elle arrêter ? Que doit-elle faire différemment ? Que doit-elle continuer à faire ? La méthode y est ouverte et collaborative, mêlant élu et agents, fonctions métiers et support, en mode projet et en transversalité.</p>
<p>Plusieurs outils sont alors mobilisés comme une segmentation stratégique, un arbre à objectifs, des indicateurs d’évaluation, un budget par politiques publiques, un système d’information d’aide à la décision. Un plan d’action par axes d’intervention en a découlé. Cette démarche et ces outils ont permis de revoir les politiques locales, en particulier sur le plan budgétaire, pour déterminer les priorités et trouver de nouvelles marges de manœuvre dans un contexte contraint.</p>
<p>Dernier exemple à une échelle plus large, le conseil départemental de l’Isère a défini un projet intitulé « Ambitions 2021 » au service de son territoire, ses usagers et ses autres partenaires. Une démarche de pilotage des politiques y est déployée, mobilisant des indicateurs dans plusieurs documents de communication. Un bilan à mi-mandat du projet d’administration est venu évaluer plusieurs politiques publiques comme la famille, le cadre de vie, ou encore l’attractivité du territoire.</p>
<p>Ces quelques cas constituent une invitation pour les politiques publiques à se tourner vers un paradigme de fonctionnement intégrant le pilotage de leurs politiques et services publics, vers des modes de gouvernance ouverts et proactifs, vers des outils de gestion mobilisant aussi des dimensions stratégiques, organisationnelles et individuelles, ainsi que des logiques de changement participatives et anticipatrices.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/177970/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>David Carassus a reçu des financements de différentes collectivités locales pour faire fonctionner la chaire OPTIMA (chaire de l'Université de Pau et des Pays de l'Adour), mais aussi de partenaires de collectivités locales. </span></em></p>Certaines collectivités territoriales françaises emboîtent le pas de leurs homologues anglo-saxonnes dans des pratiques qui visent à renforcer la collaboration, l’anticipation et la transparence.David Carassus, Professeur en sciences de gestion, IAE Pau-BayonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1762932022-02-16T22:53:27Z2022-02-16T22:53:27ZDéclassement, manque de reconnaissance… ces enseignants qui veulent changer de métier<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/446466/original/file-20220215-17-5yx5um.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Quand leur métier n'est plus une source de reconnaissance, certaines enseignantes cherchent des portes de sorties vers les services «enfance» de collectivités.</span> </figcaption></figure><p>Y aurait-il une crise des vocations vers l’enseignement ? Régulièrement, face aux <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/somme/amiens/education-des-profs-remplacants-font-un-roubaix-paris-pour-reclamer-des-postes-2422030.html">problèmes de remplacements de profs</a>, exacerbés par la crise du Covid, les médias soulèvent cette question. Lors des <a href="https://www.devenirenseignant.gouv.fr/cid159189/donnees-statistiques-crpe-2021.html">concours de recrutement d’enseignants</a> en 2021, un certain nombre de postes sont restés <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/07/20/dans-l-enseignement-la-crise-du-recrutement-perdure_6088825_3224.html">non pourvus</a>. Et la baisse du nombre d'admissibles pour cette session 2022 <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2022/05/12/concours-enseignants-la-chute-du-nombre-de-candidats-notamment-en-mathematiques-et-en-allemand-inquiete-la-profession_6125769_3224.html">a alerté les syndicats</a>. </p>
<p>En novembre dernier, un article du <em>Monde</em> pointait ainsi <a href="http://www.senat.fr/rap/a21-168-32/a21-168-328.html">un autre phénomène</a>, celui des démissions : encore discret du point de vue statistique, il aurait cependant triplé entre 2013 et 2018, <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/11/22/les-demissions-d-enseignants-un-phenomene-en-expansion_6103110_3224.html">pour atteindre 1648 démissions</a> en 2020-2021. Une donnée qui peut cacher un mouvement plus vaste <a href="https://www.cairn.info/revue-education-et-societes-2019-1-page-119.htm">comme le rappelaient Magali Danner, Géraldine Farges et leurs co-autrices</a> dans la revue <em>Education et Sociétés</em> :</p>
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<p>« la démission n’est pas la seule manière de quitter la classe ; d’autres existent, moins visibles, tels la disponibilité – permettant de quitter temporairement la fonction publique – les mobilités vers d’autres corps, les détachements dans des associations ou des services administratifs. »</p>
</blockquote>
<p>Sur le terrain, nombreux pourtant sont encore les lycéennes et les lycéens, les étudiantes et les étudiants qui expriment l’envie d’embrasser cette profession, surtout dans le premier degré. C’est donc plus en aval dans les parcours que se joueraient les désaffections. Celles-ci concernent des enseignants dont la vocation était très forte au départ et qui commencent à douter, une fois en poste, face aux conditions d’exercice du métier, comme le pointait un numéro de la Revue internationale de sociologie de l’éducation autour des <a href="https://www.cairn.info/revue-education-et-societes-2019-1.htm">professions éducatives à l’heure des réformes</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1417504779576745987"}"></div></p>
<p>Plusieurs facteurs matériels et symboliques d’une désaffection du professorat ont ainsi pu être identifiés dans les recherches récentes, qu’il s’agisse du faible niveau des rémunérations en regard des diplômes exigés, du manque de reconnaissance des difficultés du métier et du niveau important de responsabilité envers les élèves et les familles. Des éléments structurels auxquels s’ajoutent de profonds bouleversements dans les politiques publiques qui ont instauré un <a href="https://www.cairn.info/revue-education-et-societes-2013-2.htm">système managérial</a> inédit dans le domaine de l’éducation, vecteur d’effets négatifs sur l’attachement des professeurs à leur activité professionnelle.</p>
<p>Par exemple, la <a href="https://theconversation.com/les-professeurs-francais-sont-ils-prets-a-etre-manages-80084">quantification</a> des actes pédagogiques comme celle des compétences acquises par les élèves et leur évaluation en continu, en se multipliant, empiète sur le temps consacré aux échanges avec les élèves, technicisant à outrance la relation éducative. Celle-ci se trouve soumise à des contrôles dont la cadence nie le temps long nécessaire aux apprentissages.</p>
<h2>Bureaucratisation croissante</h2>
<p>Nous avons pu éclairer cette fragilisation des vocations dans une étude auprès de <a href="https://www.cairn.info/revue-education-et-societes-2019-1-page-137.htm">femmes enseignantes en reprise d’études</a> dans un master professionnel de la petite enfance. Leur but étant de « sortir de l’école, quitter leur métier ». Le fait que le professorat dans le premier degré soit très féminisé (80 % en moyenne) justifie cette focalisation de l’enquête sur les enseignantes.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1349377782149738497"}"></div></p>
<p>Surtout, il s’agit d’explorer les déterminants sociaux qui pèsent sur la remise en cause d’un choix de métier à l’origine très solide, fréquemment, forgé dès l’enfance et vécu sur le mode de la vocation et de l’amour des enfants du fait des mécanismes de genre assignant les femmes aux métiers du <em>care</em> (éducation des enfants et soin à autrui).</p>
<p>Les profils sociologiques des enseignantes sont ceux de bonnes élèves qui se sont conformées avec application aux injonctions sexuées d’orientation vers l’enseignement, de telle manière qu’elles ont été éduquées à vivre leur choix du professorat comme un destin professionnel parfait pour les femmes, contrairement aux hommes, déclarant des motivations plus utilitaires comme la sécurité de l’emploi.</p>
<p>Les observations recueillies pour l’étude concernent des enseignantes de maternelle et d’éducation spécialisée âgées de 30 à 50 ans, entrées dans ce métier d’abord longtemps rêvé au fil de leurs études, puis réalisé avec fierté, mais ensuite vécu dans la souffrance au travail et les désillusions. Dans cette perturbation de la vocation, on retrouve les motifs de la dégradation des conditions de travail ou l’incertitude entretenue sur le statut des fonctionnaires, de leur rémunération et les droits à la retraite.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1473594490292158466"}"></div></p>
<p>Mais apparaît aussi la découverte d’autres milieux professionnels comme les services « Enfance » dans les villes, et d’autres façons de travailler ouvrant la perspective d’une mobilité sociale ascendante pour ces femmes très diplômées. Parmi les conditions favorisant cette envie d’une bifurcation professionnelle et son passage à l’acte figurent des leviers non négligeables comme une vie de couple égalitaire et le féminisme de certaines.</p>
<p>Les réformes qui ont imposé une <a href="https://www.erudit.org/en/journals/crs/1900-v1-n1-crs04877/1064725ar.pdf">bureaucratisation croissante des actes éducatifs</a> sont en toile de fond de ces remises en question. Chronophage, le pilotage par contrats d’objectifs et indicateurs de performance érode le temps long nécessaire à la pédagogie. L’injonction à monter des projets implique de sortir des préoccupations strictement centrées sur les contenus à transmettre et de les intégrer dans une architecture large d’actions et de partenariats de tous ordres comme les projets de cité éducative ou d’innovation pédagogique.</p>
<h2>Manque de reconnaissance</h2>
<p>Faute de temps et de moyens, les enquêtées disent ne plus supporter de devoir faire autre chose que veiller à l’accompagnement patient et bienveillant des apprentissages fondamentaux. Selon elles, l’éloignement de leur cœur de métier produit de la perte de sens et entame leur passion initiale, au point de les pousser à changer de secteur, voir même à rejeter tout métier de la relation directe à l’enfant.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-boom-des-profs-non-titulaires-un-tournant-pour-leducation-nationale-123290">Le boom des profs non titulaires, un tournant pour l’Éducation nationale ?</a>
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<p>Plus encore, l’expérience imposée de partenariats avec de nombreux services d’éducation périscolaires à travers le montage de projets éducatifs conduit à des remaniements identitaires non négligeables. L’école, la professeure, perdant leur position centrale et quasi exclusive de la question pédagogique, les professionnelles vont reconsidérer les avantages de leur statut et découvrir les atouts d’autres métiers dans le champ éducatif. En sorte qu’un nouvel horizon s’est ouvert pour les plus jeunes, quand pour les plus âgées il s’agit d’emprunter une voie de secours pour tenir jusqu’à la retraite.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1204135948788916227"}"></div></p>
<p>En effet, le spectre d’une période d’activité allongée pose le problème de l’énergie nécessaire au quotidien pour faire face à des groupes importants d’élèves dont les familles éprouvent de grandes difficultés sociales. Dès lors, incarnant des modèles de renoncement professionnel, ces femmes ne jouent plus le rôle attractif qu’elles avaient auprès des candidates au professorat. De figure sociale admirée et enviée, le professorat perd de son aura et ne sort pas vainqueur de la comparaison avec d’autres métiers moins exposés, moins prenants et mieux rémunérés.</p>
<p>La désaffection est bien entendu multifactorielle. Il est ainsi remarquable d’observer dans notre échantillon que ces ruptures biographiques touchent des enseignantes d’origine populaire dont l’école a pu constituer une première étape d’ascension sociale, et à l’inverse des femmes d’origine favorisée vivant mal le déclassement du métier. Quand l’enseignement n’est plus une source de reconnaissance et de satisfaction à la hauteur, elles cherchent des portes de sortie vers des directions de services « enfance » dans des collectivités locales ou le pilotage de dispositifs éducatifs variés développés par la Caisse d’allocations familiales par exemple.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/entre-les-enseignants-des-ecarts-de-salaires-qui-persistent-109545">Entre les enseignants, des écarts de salaires qui persistent</a>
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<p>Levier d’émancipation, la qualification élevée des enseignantes peut être mobilisée dans cet objectif de réalisation de soi autrement que dans le professorat. Mais cela concerne surtout celles qui bénéficient de rapports de genre favorables, en tant que fille réussissant dans la famille et conjointe dont la place est égale dans le couple. Elles peuvent ainsi imposer leur projet et recevoir les soutiens indispensables pour se décharger de l’articulation contraignante entre tâches domestiques et impératifs professionnels, qui pèse d’abord sur les femmes.</p>
<p>En somme, la déstabilisation des vocations observée à travers les réorientations des enseignantes a l’avantage d’éclairer les effets des transformations de l’activité sur des choix pourtant fermement ancrés au départ, autant que les besoins féminins d’une meilleure valorisation de leurs compétences</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/176293/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sophie Devineau ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si les candidats aux concours de l’Éducation nationale sont encore nombreux, la désillusion gagne nombre de professionnels sur le terrain. Bilan d’une enquête auprès d’enseignantes en reconversion.Sophie Devineau, Professeure des universités en sociologie, Université de Rouen NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1724472021-11-28T23:07:03Z2021-11-28T23:07:03ZLes méta-organisations, une clé pour une économie plus durable ?<p>Alors que la COP26 vient de s’achever, la question de la lutte contre le réchauffement climatique est plus que jamais au centre des débats. Or, agir en faveur du climat, ou pour tout autre <a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/objectifs-de-developpement-durable/">objectif de développement durable des Nations unies</a> nécessite des <a href="https://theconversation.com/developpement-durable-comment-les-entreprises-passent-des-idees-au-terrain-85490">actions collectives</a> associant des acteurs divers. Ces derniers diffèrent tant par leur nationalité, leur culture, les attentes, leur statut ou leur taille, mais partagent un objectif commun et avancent, s’organisent et se coordonnent ensemble pour l’atteindre.</p>
<p>Écrit ainsi, cela semble simple. Mais dans les faits, les choses s’avèrent particulièrement complexes. En effet, les théories des organisations ont depuis longtemps mis en évidence les difficultés d’organiser et piloter l’action collective des individus au sein d’une organisation donnée – entreprise, association, collectivité locale, etc.</p>
<p>C’est encore davantage le cas au sein d’une organisation constituée d’autres organisations et non d’individus – ce que les théories des organisations nomment une « méta-organisation » (MO). En effet, parvenir à fédérer dans une action collective et confiante des acteurs nombreux (collectivités, associations, start-up, grands groupes, établissements d’enseignement et de recherche, etc.) qui présentent des caractéristiques et attentes a priori diverses, constitue en pratique un exercice complexe.</p>
<h2>Combler les vides</h2>
<p>L’exercice vaut néanmoins d’être tenté. En effet, les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0956522105000813">recherches</a> ont montré que les MO peuvent véritablement peser sur leur environnement et <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/emre.12076">combler les vides</a> laissés par les organisations classiques (composées d’individus, donc) et le marché. Elles s’avèrent donc particulièrement efficaces pour répondre aux challenges socio-environnementaux majeurs qui nécessitent d’œuvrer collectivement, que ce soit au niveau international ou plus localement.</p>
<p>Ainsi, on trouve des ONG telles que Rainforest Alliance, dédiée à la restauration et la protection de la nature dans une logique de lutte contre le réchauffement climatique, qui regroupe des coopératives agricoles, des gouvernements, des entreprises et des associations de citoyens dans quelque 70 pays. Elle peut se prévaloir de <a href="https://www.rainforest-alliance.org/fr/nos-impacts/">bénéfices réels et mesurables sur les forêts, les populations et les communautés</a>, en déployant, notamment, un <a href="https://youtu.be/LhpedWtT0l4">programme de certification</a> d’agriculture durable portant sur les produits de base de l’hémisphère Sud (café, cacao, bananes…).</p>
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<figcaption><span class="caption">Présentation du programme de certification de Rainforest Alliance (2020).</span></figcaption>
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<p>Au Kenya, des producteurs de miel se sont regroupés au sein d’une MO, associant également des agriculteurs, des organisations de développement et des institutions de microfinance. Collectivement, ces acteurs très complémentaires ont réussi à atteindre leur objectif : proposer un modèle d’agriculture alternatif, remettant en question le modèle classique, écologiquement intensif et peu respectueux des agriculteurs kenyans. Le miel ainsi produit est aujourd’hui un des <a href="https://pubsonline.informs.org/doi/abs/10.1287/orsc.2017.1191">leaders en matière de pratiques agricoles durables</a>.</p>
<h2>Comment émerge une MO ?</h2>
<p>Si la recherche académique actuelle identifie clairement les enjeux associés à l’émergence et au développement de ce type de MO, les connaissances sur « comment » émergent, une nouvelle MO reste à construire.</p>
<p>Nous étudions ainsi OrbiMob’, une MO est en cours de constitution dans le domaine de la mobilité durable, au sein du territoire Clermont-Auvergne, afin de créer des synergies, d’accélérer, de connecter et d’enrichir les différents acteurs du territoire, aussi bien publics que privés. En effet, si les mobilités urbaines dans de grandes aires métropolitaines sont dans l’air du temps, les choses restent nettement moins avancées en matière de mobilités territoriales, avec des déplacements qui ont lieu dans un périmètre d’une centaine de kilomètres autour et à l’intérieur d’une ville moyenne.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1460759689180987396"}"></div></p>
<p>Le <a href="https://orbimob.org/partenaires/">projet OrbiMob’ Clermont-Auvergne</a> a justement pour ambition collective de devenir un pôle de référence sur la mobilité territoriale durable en matière d’éducation, recherche, expérimentation, développement économique et implication citoyenne.</p>
<p>Notre étude en cours sur l’émergence de la MO OrbiMob’ a permis d’identifier trois phases dans le passage de l’intention à l’action. Une première phase d’ébauche renvoie à un travail de sensibilisation auprès des différents acteurs. Au cours de cette phase, les initiateurs du projet OrbiMob’ ont capitalisé sur les collaborations et les liens existants entre les différentes organisations ciblées pour intégrer la MO. Miser sur les relations de confiance préexistantes est clé dans cette phase d’ébauche où il est crucial d’échanger et de faire émerger sur un objectif collectif commun.</p>
<p>Ensuite, une phase d’intégration s’est matérialisée par l’organisation d’une semaine événementielle autour de la mobilité territoriale durable qui s’est tenue en novembre 2020 et réitérée en octobre 2021. Cet événement a constitué une opportunité concrète de valorisation, collaboration et de coopération des membres de la MO. Elle a permis de créer de nouvelles relations et collaboration et de renforcer celles existantes entre les membres de la MO.</p>
<p>Enfin, une phase de structuration a été observée, renvoyant à la création d’un <a href="https://orbimob.org/partenaires/">partenariat officiel</a> réunissant préfecture, métropole, région, université, rectorat, Michelin et d’autres entreprises concernées par les enjeux de mobilité durable sur le territoire. Ce partenariat s’est doté d’un comité de préfiguration OrbiMob’ dont les contours et les ambitions évoluent progressivement vers un véritable comité stratégique de la MO.</p>
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<figcaption><span class="caption">Patrick Oliva, instigateur d’OrbiMob’, présente le projet (OrbiMob’, 2020).</span></figcaption>
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<p>En outre, deux points de vigilance peuvent être mis en avant pour aider à l’émergence d’une MO. D’abord, il est important que les organisations impliquées réalisent un effort de présentation et de traduction de leurs besoins/intérêts et cultures respectives. Il est important de comprendre quels enjeux chaque membre associe à l’action de la MO. Cet effort est indispensable pour faire émerger un consensus autour de l’objectif collectif et une identité collective.</p>
<p>Ensuite, les membres doivent parvenir à organiser la gouvernance de leur MO en veillant aux dérives de prise de contrôle par un ou des acteurs dominants (en particulier quand sont présents des acteurs leaders de la mobilité comme Michelin dans le cas d’OrbiMob’). Il est important pour cela de construire des organes de gouvernance inclusifs avec une représentation équilibrée des organisations membres et de construire un mode de prise de décision démocratique qui facilite la libre expression (vote à bulletin secret par exemple).</p>
<p>Aujourd’hui, nous faisons face à des défis majeurs sur le plan socio-environnemental, en particulier en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Dans ce contexte, l’organisation d’actions collectives de grande ampleur associant des organisations diverses qui représentent des intérêts et visions multiples semble indispensable. Si la coordination et la gouvernance des actions collectives constituent une question centrale des sciences de gestion et des théories des organisations depuis leur fondation, celle du pilotage de l’action collective méta-organisée apparaît majeure pour adresser nos enjeux collectifs du XXI<sup>e</sup> siècle. La recherche a encore beaucoup à faire pour développer et enrichir les connaissances sur les MO.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/172447/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Selon la recherche, une organisation constituée d’autres organisations, et non d’individus, pèse davantage sur son environnement et comble ainsi des vides laissés par le marché.Anne Albert-Cromarias, Enseignant-chercheur HDR, management stratégique, ESC Clermont Business SchoolEmilie Bargues, Enseignant-chercheur en Sciences de gestion, ESC Clermont Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1559152021-11-02T18:03:36Z2021-11-02T18:03:36ZDe la crise sanitaire à la réforme 3Ds : une opportunité pour la décentralisation ?<blockquote>
<p>« La France a eu besoin d’un pouvoir fort et centralisé pour se faire, elle a aujourd’hui besoin d’un pouvoir décentralisé pour ne pas se défaire. »</p>
</blockquote>
<p>Cette tirade de <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/715829/francois-mitterrand-le-president-des-sous-prefectures/">François Mitterrand date de 1981</a>. Quarante ans plus tard, la crise sanitaire du Covid-19 a réveillé des tensions anciennes entre l’État et ses territoires, sera-t-elle <em>in fine</em> l’opportunité d’un nouvel acte de décentralisation ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/404254/original/file-20210603-13-43m8lv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/404254/original/file-20210603-13-43m8lv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=386&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/404254/original/file-20210603-13-43m8lv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=386&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/404254/original/file-20210603-13-43m8lv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=386&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/404254/original/file-20210603-13-43m8lv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=485&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/404254/original/file-20210603-13-43m8lv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=485&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/404254/original/file-20210603-13-43m8lv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=485&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">François Mitterrand, Gaston Defferre et Pierre Mauroy en 1971, les futurs artisans de la décentralisation.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fondation Jean-Jaurès</span></span>
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</figure>
<p>La tragédie de la crise sanitaire aurait dû être un moment d’union nationale, or elle a vu multiplier les incidents mettant aux prises pouvoir central et élus locaux. L’utilisation de la réquisition par la puissance publique en est une parfaite illustration. La réquisition est un outil utile en temps de crise. Elle permet à l’État et aux collectivités de s’approprier (temporairement) autant de biens que nécessaire pouvant permettre de mettre fin à une crise. À titre d’exemple, en avril 2019, la préfecture du Grand Est n’hésite pas à réquisitionner des <a href="https://www.europe1.fr/societe/coronavirus-la-requisition-des-masques-fait-grincer-des-dents-3960535">masques destinés au département des Bouches-du-Rhône</a></p>
<p>Ce cas fut l’un des rares à être médiatisé, mais dans ce contexte de crise sanitaire, il y a eu « une vague de <a href="http://www.revuedlf.com/droit-administratif/linteret-des-mesures-de-requisition-administrative-en-periode-de-crise-sanitaire-exceptionnelle/">réquisitions massives</a> » dont la plupart est passée inaperçue.</p>
<h2>Frictions entre État et collectivités territoriales</h2>
<p>Les réquisitions de l’État envers des collectivités locales s’expliquent par l’intérêt national, qui dans un État unitaire, l’emporte sur les intérêts locaux ; cependant la décentralisation suppose aussi la prise en compte des territoires dans l’adaptation de la politique centrale.</p>
<p>À la fin du premier confinement, les élus locaux sont priés de rouvrir les écoles en mettant en place des protocoles sanitaires pas toujours adaptés à la structure des bâtiments. Il en résulte une profonde inquiétude des maires concernant leur <a href="https://www.lejdd.fr/Politique/edito-deconfinement-les-maires-ont-raison-de-sinquieter-mais-ils-auraient-tort-de-se-revolter-3965968">responsabilité juridique</a>. En mars 2021, cette problématique refait surface. Les élus locaux seraient responsables pénalement, alors qu’une grande partie de la décision leur échappe ? Le risque d’une rupture entre l’État et ses collectivités territoriales est alors réel.</p>
<h2>Inflexion réelle du gouvernement ou atavisme centralisateur ?</h2>
<p>Le <a href="https://www.gouvernement.fr/partage/11654-declaration-de-politique-generale-de-m-jean-castex-premier-ministre-assemblee-nationale">discours gouvernemental</a> évolue toutefois au début de l’été pour prendre en compte ce malaise des maires. En juin, à l’occasion du remaniement gouvernemental, le nouveau premier ministre Jean Castex promet de placer les territoires au cœur de sa politique gouvernementale et illustre son propos en mettant en avant le <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/691287/face-a-la-reprise-jean-castex-place-le-couple-maire-prefet-en-pointe/">« couple maire/préfet »</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Cette confiance dans les territoires suppose que le droit à la différenciation soit consacré dans une loi organique. Elle passe également, comme l’a indiqué le président de la République, par une nouvelle étape de la décentralisation. Elle repose tout autant sur une évolution profonde de l’organisation interne de l’État. Je m’étais fait le défenseur, à l’occasion de la mission qui m’avait été confiée par le précédent gouvernement sur le déconfinement du couple “maire–préfet de département”. Notre intention est de rendre rapidement plus cohérente et efficace l’organisation territoriale de l’État, en particulier au niveau du département. »</p>
</blockquote>
<p>Le premier ministre mélange astucieusement les notions de décentralisation et déconcentration. Il évoque la première mais n’applique que la seconde. En effet la décentralisation permet aux élus locaux de s’administrer librement, alors que la déconcentration se fonde sur un système de délégation de l’autorité de l’État vers des échelons inférieurs. Pour résumer, la décentralisation offre davantage de marge de manœuvre aux élus locaux qui prennent leurs décisions au nom de leurs administrés et non au nom de l’État. Le maire est à ce titre un <a href="https://www.franceculture.fr/politique/le-maire-et-ses-pouvoirs-a-laune-du-covid-19">personnage ambigu</a> car il est à la fois à la tête d’une collectivité territoriale décentralisée, mais est aussi une autorité déconcentrée. À chaque fois qu’un maire prend un arrêté municipal par exemple sur le port obligatoire d’un masque, il agit en tant qu’agent déconcentré de l’État.</p>
<p>Une véritable décentralisation en matière de santé signifierait par exemple que les Agences Régionales de Santé soient placées sous l’autorité non plus du ministre de la Santé comme actuellement, mais des conseils régionaux.</p>
<h2>Les élus locaux critiques mais force de propositions</h2>
<p>Si les élus locaux ne peuvent mettre en place eux-mêmes des politiques locales différentes que celle voulue par l’État, ils peuvent néanmoins lui proposer publiquement des politiques alternatives.</p>
<p>En décembre 2020, le <a href="https://rmc.bfmtv.com/emission/comment-expliquer-le-retard-de-la-france-en-matiere-de-vaccins-contre-le-covid-19-2025977.html">retard</a> de la France dans la mise en place de la vaccination expose une nouvelle fois au grand public les divergences entre l’État et les collectivités : contrairement aux pays voisins, le gouvernement avait dans un premier temps refusé la mise en place de <a href="https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/pas-de-vaccinodrome-a-valentigney-qu-ils-assument-que-l-etat-n-a-pas-assez-de-doses-de-vaccin-dit-le-1611248167">« vaccinodromes »</a>. Toutefois, face aux initiatives nombreuses de maires qui mettent à disposition des salles et commandent le matériel médical nécessaire et interpellent les ARS pour disposer de doses de vaccins, le gouvernement est obligé de revoir sa <a href="https://www.20minutes.fr/sante/2950175-20210111-coronavirus-gouvernement-fait-volte-face-centres-vaccination">politique vaccinale</a>.</p>
<p>Un autre épisode démontre cet antagonisme entre État et collectivités lorsque, fin décembre 2020, les élus du Grand Est <a href="https://www.google.com/amp/s/mobile.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/confinement/coronavirus-des-elus-du-grand-est-plaident-pour-un-reconfinement-local_4236361.amp">appellent à un nouveau confinement</a> alors qu’à l’<a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/confinement-maires-du-sud-ouest-plaident-commerces-lettre-au-premier-ministre-1890054.html">ouest</a>, les élus demandent de rouvrir les commerces « non essentiels ».</p>
<p>En Île-de-France, Anne Hidalgo, la maire de Paris préconise à la fois un confinement de <a href="https://www.google.com/amp/s/www.leparisien.fr/amp/paris-75/covid-19-le-confinement-de-paris-imagine-par-anne-hidalgo-se-precise-26-02-2021-8426377.php">trois semaines</a> pour éradiquer le virus et ensuite une réouverture des commerces non essentiels.</p>
<p>Ces suggestions sont jugées sévèrement par le gouvernement qui considère que la remise en cause de ses décisions n’incitent pas à respecter les mesures sanitaires prises. Seulement, la prise de décision s’effectue bien en amont, sans consultation des chefs de partis ou des élus locaux, et dans l’opacité du <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/metiers/armee-et-securite/conseil-de-defense-est-ce-une-institution-opaque_4178541.html">« conseil de défense »</a>“.</p>
<p>En mars 2021, un <a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/covid-19-les-francais-saluent-l-action-des-maires-et-des-entreprises-mais-critiquent-gouvernement-et-opposition-selon-notre-sondage_4329017.html">sondage</a> affirme que les Français sont critiques envers l’action du gouvernement, ils plébiscitent celle des entreprises et des élus locaux.</p>
<h2>Le président siffle la fin du match</h2>
<p>A la fin du mois d’avril, Emmanuel Macron annonce un <a href="https://www.franceinter.fr/societe/voici-le-calendrier-du-deconfinement-annonce-par-emmanuel-macron">calendrier</a> du déconfinement. Cette communication verticale tranche après des mois de <a href="https://www.lejdd.fr/Politique/revelations-emmanuel-macron-edouard-philippe-lhistoire-secrete-de-leur-divorce-4039330">tergiversations au sommet de l’État</a> sur les mesures à prendre, et de nombreux accrochages avec les collectivités, le tout répercuté par les médias.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/404249/original/file-20210603-17-6lefan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/404249/original/file-20210603-17-6lefan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/404249/original/file-20210603-17-6lefan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=700&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/404249/original/file-20210603-17-6lefan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=700&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/404249/original/file-20210603-17-6lefan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=700&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/404249/original/file-20210603-17-6lefan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=879&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/404249/original/file-20210603-17-6lefan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=879&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/404249/original/file-20210603-17-6lefan.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=879&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">« Louis XIV en Jupiter vainqueur de la Fronde », huile sur toile attribuée à Charles Poerson, château de Versailles, vers 1654.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikipédia</span></span>
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<p>Dans <a href="https://theconversation.com/de-louis-xvi-a-emmanuel-macron-lheritage-monarchique-de-la-v-republique-90324">l’esprit monarchique des institutions de la Vᵉ République</a>, le président a décidé chaque détail de la reprise. Un calendrier simple, accessible et qui répond à presque toutes les questions que chaque citoyen est en droit de se poser. Pour autant, c’est aussi une décision nationale qui s’applique à tout le territoire métropolitain sans possibilité d’être aménagé sur tel ou tel territoire.</p>
<p>Ce calendrier est plutôt <a href="https://www.lci.fr/politique/covid-19-coronavirus-pandemie-epidemie-les-francais-majoritairement-favorables-au-plan-de-deconfinement-selon-notre-sondage-2184818.html">bien accueilli</a> par la population et même par les élus locaux qui acceptent ce contrôle paternaliste de l’État. Cette recherche de cadre témoigne de la persistance du jacobinisme français dans les mentalités. Les mêmes élus qui avaient critiqué l’État incapable d’acheminer masques, tests et vaccins se réjouissent à présent de cette progressive <a href="https://www.europe1.fr/politique/deconfinement-jean-rottner-salue-un-calendrier-sage-et-raisonnable-4041836">sortie de crise</a>, la fronde des territoires a été vaincue.</p>
<p>Le 12 juillet, c’est encore une <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/07/12/allocution-d-emmanuel-macron-passe-sanitaire-etendu-tests-pcr-payants-obligation-vaccinale-pour-les-soignants-le-resume_6088062_823448.html">allocution présidentielle</a> qui donne le la : passe sanitaire étendu, tests PCR payants, obligation vaccinale pour les soignants… Emmanuel Macron durcit la ligne du gouvernement et est rapidement récompensé par des <a href="https://www.lefigaro.fr/politique/covid-19-67-des-francais-approuvent-le-passe-sanitaire-20210902">sondages très favorables</a> : en septembre 67 % des Français acceptent le passe sanitaire. Malgré cela, les manifestations chaque samedi dénotent une incompréhension d’une partie de la population envers ces restrictions sanitaires.</p>
<h2>Rapprocher la santé publique du citoyen</h2>
<p>Au plus fort de la crise sanitaire, la gouvernance des agences régionales de santé, avait fortement été remise en cause. La loi 3Ds, votée au sénat le 21 juillet propose de <a href="https://www.publicsenat.fr/article/parlementaire/decentralisation-le-senat-renforce-le-role-des-elus-locaux-dans-la-gouvernance">maigres progrès</a> pour rapprocher les décideurs des citoyens : par exemple un conseil d’administration paritaire coprésidé par le préfet et le président de région sera chargé de contrôler l’action des ARS.</p>
<p>Autre mesure symbolique, les sénateurs souhaitent que la <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/757440/decentralisation-ce-que-prevoit-desormais-le-projet-de-loi-3ds/">médecine scolaire</a> soit transférée au département après la fin de la crise sanitaire.</p>
<p>Il faudra en tout cas attendre décembre pour savoir si les députés partageront la vision des sénateurs sur la loi 3Ds, car la ministre Jacqueline Gourault vient d’annoncer le <a href="https://www.acteurspublics.fr/articles/lexamen-du-projet-de-loi-3ds-a-lassemblee-nationale-repousse-a-decembre">report de l’examen de la loi</a> à l’Assemblée nationale.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/155915/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nedjoua Halil-Merad est membre de l'AFDD (association française des docteurs en droit). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Guillaume Bagard et Sophie Le Coz ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>La crise sanitaire du Covid-19 a réveillé des tensions anciennes entre l’État et ses territoires, sera-t-elle in fine l’opportunité d’un nouvel acte de décentralisation ?Nedjoua Halil-Merad, Docteur en droit public - Élève avocate à l'ERAGE, Université de LorraineGuillaume Bagard, Docteur en droit, élève avocat et chercheur associé à l'Institut François Gény, Université de LorraineSophie Le Coz, Doctorante Sciences en Economiques (Finances locales, Histoire des communes, Histoire bancaire et financière) au BETA (UMR 7522) et ATER à l'UFR DEA de Metz, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1687702021-10-04T18:46:07Z2021-10-04T18:46:07ZSuppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales : les impensés de la réforme<p>Cet automne débute l’<a href="https://www.capital.fr/votre-argent/taxe-dhabitation-les-abattements-pour-les-plus-riches-en-2021-et-2022-1415003">allègement progressif de la taxe d’habitation</a> pour les derniers ménages qui s’en acquittaient. La <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000036339197">loi de finances initiale pour 2018</a> avait initié la démarche, promesse du candidat Macron, avec pour première cible les 80 % des foyers les plus modestes. La loi de finances initiale pour 2021 l’a conclue, avec une disparition effective de la taxe d’habitation pour les résidences principales à l’horizon 2023. Mais toutes les répercussions de cette réforme ont-elles bien été anticipées par le législateur ?</p>
<p>Avec la taxe d’habitation disparaît en effet ce qui fut longtemps l’un des piliers des finances locales : certes, <a href="https://www.vie-publique.fr/fiches/21918-quelles-sont-les-ressources-fiscales-des-collectivites-territoriales">pas le premier impôt direct en volume</a>, puisque la taxe professionnelle puis la taxe foncière ont successivement occupé ce rang, mais à coup sûr le plus symbolique.</p>
<p>Malgré les critiques légitimes dont elle était l’objet, notamment concernant sa <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/604577/pour-un-impot-local-progressif/">faible progressivité</a>, la taxe d’habitation participait bien à un subtil équilibre sociétal qui se trouve, par sa disparition, perturbé.</p>
<p>Trois dimensions ont, nous semble-t-il, été sous-estimées par ses contempteurs.</p>
<h2>Clientélisme tarifaire ?</h2>
<p>La Cour de justice de l’Union européenne ne badine pas avec la discrimination, et elle en a une appréciation extensive : traitement différent de situations similaires, tout naturellement, mais aussi <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/ALL/?uri=CELEX%3A61963CJ0013">traitement identique de situations différentes</a>. Autant vous dire que, dès qu’il y a préférence tarifaire en faveur des résidents pour les services publics mis en œuvre par la commune, ça coince.</p>
<p>Selon sa jurisprudence, seules des raisons impérieuses d’intérêt général peuvent le justifier, comme la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A62001CJ0388">« nécessité de préserver la cohérence du système fiscal »</a> ou l’existence d’un « lien direct » entre l’imposition et le tarif préférentiel.</p>
<p>La taxe d’habitation sur les résidences principales jouait jusqu’ici ce rôle discret de clé de voûte entre ce droit communautaire exigeant et le <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000007643192/">droit public français</a>, beaucoup moins regardant sur la préférence tarifaire fondée sur la domiciliation.</p>
<p>En effet, sans cet impôt local à vocation universelle, la gratuité ou le tarif préférentiel offerts aux résidents, dans les cantines ou les écoles de musique, ne s’apparenteraient plus qu’à une forme primaire de discrimination ou de clientélisme : le résident de la commune B, qui passe pourtant l’essentiel de son temps dans la commune A, paierait plus cher les services publics qu’un résident de ladite commune, non pas parce qu’il serait un passager clandestin du budget communal, mais bien parce qu’il n’en est pas électeur.</p>
<p>Si la préservation de la cohérence et de l’équilibre de systèmes fiscaux locaux ne peut plus justifier la différenciation tarifaire, qu’en dira demain le juge de l’Union européenne ? Les paris sont ouverts.</p>
<h2>Le rôle sociétal de l’impôt</h2>
<p>La disparition programmée de la taxe d’habitation, c’est aussi un argument de moins en faveur de l’obtention du droit de vote aux élections locales pour les étrangers hors Union européenne. Le <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000025241373/">durcissement des conditions d’accès à la nationalité française</a>, constaté depuis quelques années, avait pourtant redonné une certaine légitimité à cette vieille revendication. En effet, s’il était désormais plus difficile de devenir français, comment s’opposer plus longtemps à la participation à l’élection du conseil municipal pour des étrangers vivant sur le territoire de la commune et s’acquittant régulièrement de l’impôt local ?</p>
<p>Avec la fin de cet impôt local à vocation universaliste, c’est bien tout un pan de l’argumentaire bâti jusqu’ici qui disparaît.</p>
<p>Dans un étrange mouvement de posture – contre-posture, c’est un débat diamétralement opposé qui a connu ses premiers atermoiements cet été. L’existence de la taxe d’habitation aurait pu justifier le vote des étrangers locataires résidents, sa fin ne pourrait-elle pas justifier un vote des étrangers propriétaires non résidents ?</p>
<p>C’est l’idée défendue par Éric Woerth, président Les Républicains de la Commission des Finances à l’Assemblée nationale, au micro d’Europe 1, le 30 août dernier.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1432337580654215171"}"></div></p>
<p>Selon l’ancien ministre du Budget, puisque les propriétaires non-résidents sont désormais amenés à payer plus d’impôts locaux que les locataires résidents, il devient problématique de les maintenir totalement à l’écart des choix quant à l’usage fait desdits impôts :</p>
<blockquote>
<p>« Participer financièrement à l’accomplissement de service public, c’est quand même […] avoir le droit de choisir à un moment donné qui les met en œuvre. »</p>
</blockquote>
<p>Au-delà de l’agitation qui a suivi cette proposition, entre dénonciation d’un nouveau suffrage censitaire et analyse à la va-vite de la <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/2018/03/28/20002-20180328ARTFIG00012-la-suppression-de-la-taxe-d-habitation-n-a-aucun-interet-pour-l-economie-francaise.php">sociologie électorale des propriétaires</a>, ces déclarations ont le mérite d’illustrer pour nous l’absence de prise en compte, dans la décision de supprimer la taxe d’habitation sur les résidences principales, du rôle sociétal de l’impôt.</p>
<h2>La collectivité réinterrogée</h2>
<p>Avec la disparition de la taxe d’habitation sur les résidences principales, ce sont aussi un peu les communes qui s’effacent. Les conseils régionaux peuvent en témoigner, eux qui ont progressivement perdu tous les impôts directs qui leur avaient été alloués par la décentralisation des années 1980 (taxe d’habitation supprimée à la fin des années 1990, taxe professionnelle supprimée en 2010, taxe foncière sur les propriétés bâties transférées aux conseils départementaux, taxe foncière sur les propriétés non bâties transférées au bloc communal). Or, ne plus figurer sur aucun avis d’imposition ne peut que contribuer à fragiliser la relation au citoyen.</p>
<p>À cela s’ajoute un risque de renforcement de la préférence française pour la dépense publique. Un président de conseil départemental le soulignait il y a tout juste 10 ans, à l’occasion de la <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/59469/lavis-de-philippe-adnot-senateur-ni-et-president-du-conseil-general-de-laube/">grande réforme de la fiscalité locale</a> introduite par la loi de finances pour 2010 :</p>
<blockquote>
<p>« Lorsqu’une entreprise demandait une route hors gel, par exemple, je leur répondais par l’affirmative, en leur indiquant néanmoins que cela justifierait une hausse de l’impôt économique local […]. Cela rendait la demande des entreprises raisonnables. […] Cela se révèle également valable pour les citoyens. Lorsque nous bénéficiions d’une part de taxe d’habitation, le citoyen, en formulant une demande de service public supplémentaire, prenait le risque de provoquer une augmentation des impôts. »</p>
</blockquote>
<p>Pas certain donc, au regard du double risque ici énoncé d’effacement ou de sursollicitation, que la disparition de la taxe d’habitation soit dans l’immédiat une bonne affaire pour les administrations locales qui la percevaient.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/168770/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Eisinger est membre du Bureau de l'AFIGESE. </span></em></p>Il ne faut toucher aux vieux impôts que d’une main tremblante, leur rôle dans les équilibres sociaux étant souvent complexes à appréhender. Exemple avec l'une des mesures phares de quinquennat.Thomas Eisinger, Professeur associé en droit, gestion financière et management des collectivités, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1603192021-05-05T17:56:58Z2021-05-05T17:56:58ZÉcoles et Covid-19 : l’État se défausse-t-il sur les collectivités territoriales ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/398715/original/file-20210504-20-m3yet3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C5%2C994%2C661&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La lutte contre l'épidémie de Covid-19 impose de nouvelles contraintes matérielles du côté des élèves comme des écoles.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/backpack-full-school-supplies-mask-gel-1777515740">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>En matière d’affaires scolaires, l’État essaierait-il d’échapper à ses responsabilités pour les faire peser sur les régions, villes et départements ? La question se pose face aux mesures matérielles envisagées pour faire face à l’épidémie de Covid-19.</p>
<p>Le 22 avril dernier, les collectivités territoriales <a href="https://www.lemonde.fr/education/article/2021/04/30/ecole-a-distance-capteurs-de-co2-les-relations-entre-l-etat-et-les-collectivites-a-l-epreuve-du-covid-19_6078677_1473685.html">ont été « encouragées »</a> par le ministre de l’Éducation nationale Jean‑Michel Blanquer à équiper les établissements scolaires en capteurs de CO<sub>2</sub> et purificateurs d’air, lors d’une conférence de presse commune avec le Premier ministre et ses homologues de la Santé et de l’Intérieur.</p>
<p>Un capteur de CO<sub>2</sub> vaut entre <a href="https://www.lavoixdunord.fr/992334/article/2021-04-27/les-capteurs-de-co2-une-vraie-solution-anti-covid-pour-les-ecoles">80 euros et 300 euros</a>, et il en faudrait un par salle de classe. Il y a un certain nombre de salles dans chacun des <a href="https://www.education.gouv.fr/les-chiffres-cles-du-systeme-educatif-6515">61510 établissements</a> de France, sans compter les réfectoires, les halls, les bibliothèques qu’il faudrait aussi logiquement équiper.</p>
<p>On voit l’ampleur du problème à résoudre non seulement pour ce qui concerne la production industrielle à mettre en place, mais aussi quant à sa dimension financière qui s’ajouterait aux efforts de plus en plus conséquents consentis de fait par les collectivités territoriales.</p>
<h2>Loi de décentralisation</h2>
<p>En 1980, à la veille de la loi de « décentralisation », la part des collectivités territoriales dans les dépenses intérieures d’éducation était de 14 %. Elle atteint actuellement 24 % selon les statistiques ministérielles.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/3KOrmKdsxN8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Covid-19 : Amiens installe des capteurs de CO₂ dans une cantine scolaire (AFP, mai 2021).</span></figcaption>
</figure>
<p>On aurait pu croire que les principes de base de ce qui a été appelé « la décentralisation » avaient été dûment et solidement établis dans le cadre de la réforme institutionnelle mise en œuvre à partir de la loi du 2 mars 1982, initiée notamment par le ministre de l’Intérieur du gouvernement Mauroy, Gaston Defferre. Une nouvelle collectivité territoriale est alors créée : la région.</p>
<p>Il y a <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/sciences-humaines/education-enseignement-pedagogie/ecole-d-aujourd-hui-a-la-lumiere-de-l-histoire_9782738154866.php">transfert à l’ensemble des collectivités</a> (régions, départements et communes) de plus grandes responsabilités exercées plus librement : les procédures du contrôle a priori sont supprimées et les décisions prises sont immédiatement exécutoires. Les régions ont en charge les lycées ; les conseils généraux (appelés maintenant conseils départementaux), les collèges ; les communes, les écoles.</p>
<p>Chaque niveau de collectivités reçoit un même bloc de compétences : construction, reconstruction, extension, fonctionnement des établissements scolaires. Et une plus grande participation des collectivités territoriales aux décisions est instituée au sein des établissements scolaires et dans les conseils situés au niveau départemental ou académique.</p>
<p>L’État se réserve un certain nombre de compétences (et des pouvoirs importants) :</p>
<ul>
<li><p>les programmes et les horaires d’enseignement ;</p></li>
<li><p>les conditions d’obtention des diplômes et l’organisation des examens du second degré ;</p></li>
<li><p>le contrôle des enseignements scolaires par plusieurs corps d’inspection ;</p></li>
<li><p>la gestion et la rémunération des personnels enseignants et de certains personnels non enseignants notamment.</p></li>
</ul>
<p>La règle la plus générale est finalement celle des compétences partagées, dans la mesure où l’État conserve la responsabilité du service public d’enseignement (qui est inscrite dans le préambule de la Constitution : « l’organisation de l’enseignement public, gratuit et laïque à tous les degrés, est un devoir d’État »).</p>
<p>En principe, les compétences respectives de l’État et des collectivités territoriales sont clairement délimitées, l’État faisant de la fixation des programmes et de la gestion pédagogique son domaine réservé. Mais des interférences sont possibles. Et aussi des extensions assez inattendues du rôle effectif des collectivités territoriales.</p>
<h2>Développement de l’enseignement supérieur</h2>
<p>Cette extension du rôle des collectivités commence très tôt et très fort avec le rôle qu’elles vont finalement assumer dans l’accélération du développement des enseignements supérieurs alors que ceux-ci ne faisaient pas du tout partie de leurs attributions définies par la loi de « décentralisation »…</p>
<p>Dès le mois de mai 1990, le gouvernement annonce son intention d’engager 16 milliards de francs entre 1991 et 1995 pour <a href="http://www.senat.fr/rap/r02-241/r02-24156.html">développer l’enseignement supérieur</a>, construire 1,5 million de mètres carrés de locaux supplémentaires, des milliers de places de bibliothèque universitaires, des locaux de recherche, des logements et restaurants universitaires. Et il sollicite une aide complémentaire des collectivités locales de l’ordre de 7 milliards de francs.</p>
<p>Au terme de longues négociations, menées de l’été 1990 au mois de janvier 1992, région par région, et entérinées par trois comités interministériels d’aménagement du territoire, ce sont finalement 16 milliards de francs (autant que l’État) que les régions, les départements et les villes (à part à peu près égales) apportent, portant l’enveloppe à 32 milliards de francs, un chiffre vraiment considérable.</p>
<p>Les collectivités territoriales y ont gagné la <a href="https://www.vie-publique.fr/discours/172410-discours-de-m-lionel-jospin-ministre-de-leducation-nationale-de-la-je">délégation de maîtrise d’ouvrage</a> sur des équipements souvent prestigieux dont elles pourront se prévaloir. Elles ont pu peser de tout leur poids sur la future carte universitaire, en implantant des formations d’enseignement supérieur dans les villes moyennes (IUT, sections de techniciens supérieurs, antennes voire embryons d’universités).</p>
<p>Enfin, elles ont de fait été associées à la définition des filières et des formations nouvelles, en particulier en ce qui concerne les filières technologiques les mieux à même de servir de point d’appui au développement économique local.</p>
<p>On le voit, rien n’est simple dans la répartition effective des rôles de collectivités territoriales d’une part et de l’État d’autre part. Leurs intérêts peuvent diverger, même s’ils peuvent parfois se conjuguer. C’est le cas lorsque les efforts consentis par les collectivités territoriales peuvent les valoriser ainsi que leurs dirigeants, notamment lorsqu’il s’agit d’implanter de nouveaux établissements et d’innover. Mais c’est moins évident – tant s’en faut – lorsqu’il s’agit du strict fonctionnement ordinaire et/ou nécessaire.</p>
<p>On entre dans les campagnes électorales en vue du renouvellement des conseils départementaux et des conseils régionaux. On va voir si ce volet matériel de précaution va être ou non pris en compte, par qui, et de quelle manière.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/160319/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Claude Lelièvre ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Rien n’est simple dans la répartition effective des rôles des collectivités territoriales et de l’État. La question de l’équipement des établissements en capteurs de CO₂ le montre une nouvelle fois.Claude Lelièvre, Enseignant-chercheur en histoire de l'éducation, professeur honoraire à Paris-Descartes, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1573322021-03-21T17:41:01Z2021-03-21T17:41:01ZLe plan de relance va-t-il aggraver les inégalités économiques entre les départements ?<p>Les dernières estimations publiées par l’<a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/5018361">Insee</a> en janvier et les données du <a href="http://www.cepii.fr/CEPII/fr/bdd_modele/presentation.asp?id=31">CEPII</a> montrent qu’en dehors des deux guerres mondiales, la France a connu en 2020 la pire récession de son histoire depuis 1890, avec une récession à hauteur de 8,3 % de son PIB.</p>
<p>Pour y faire face, un <a href="https://www.vie-publique.fr/en-bref/276052-relance-economique-un-plan-de-100-milliards-deuros-sur-deux-ans">plan de relance</a> a été conçu à l’image de celui de 2008 mais avec une ampleur plus importante, proportionnelle à la récession anticipée. Les annonces effectuées en septembre 2020 envisagent le déploiement de 100 milliards d’euros qui visent notamment à soutenir l’investissement local. </p>
<p>On peut qualifier ce plan d’inspiration keynésienne : les pouvoirs publics misent sur les retombées de ce plan sur le territoire.</p>
<h2>Une concentration des sources de financement</h2>
<p>Or, le risque d’effondrement de l’ensemble du tissu économique local, le risque systémique, en cas de non-rentabilité de l’investissement menace les collectivités territoriales.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/390090/original/file-20210317-21-g4hrth.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/390090/original/file-20210317-21-g4hrth.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/390090/original/file-20210317-21-g4hrth.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=569&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/390090/original/file-20210317-21-g4hrth.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=569&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/390090/original/file-20210317-21-g4hrth.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=569&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/390090/original/file-20210317-21-g4hrth.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=716&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/390090/original/file-20210317-21-g4hrth.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=716&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/390090/original/file-20210317-21-g4hrth.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=716&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Carte des départements français.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:France_d%C3%A9partementale.svg">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Comme nous le montrons dans un article de recherche récent paru dans la <a href="https://www.dalloz-revues.fr/revues/Revue_d_economie_politique-119.htm"><em>Revue d’économie politique</em></a>, ce risque systémique serait lié aux interactions spatiales avec les départements voisins au niveau des comportements d’emprunt des collectivités, c’est-à-dire du financement des dépenses d’investissement (principalement destinées à des dépenses de voirie, pour les collèges ou encore l’ingénierie territoriale).</p>
<p>Il existerait un « effet multiplicateur » de l’emprunt des départements voisins sur le niveau d’endettement d’un département donné. En effet, l’analyse montre que, lorsque la valeur des emprunts des départements voisins d’un département donné s’accroît d’un euro, ceci va engendrer une hausse de l’emprunt du département considéré de 22 centimes en moyenne. Comment expliquer cet effet qui peut conduire à un endettement pas forcément justifié et qui accroît ainsi le risque de défaillance ?</p>
<p>Une piste d’explication passe par les canaux de financement des collectivités dont les cartes ont été profondément rebattues à la suite de la crise de 2008. En effet, après la quasi-faillite de la banque Dexia, l’équilibre entre les institutions privées et publiques finançant les collectivités locales s’est déplacé en faveur des dernières.</p>
<p>On a assisté à un phénomène de concentration des sources de financement vers les établissements bancaires publics, qui financent désormais les départements à plus de 53 % contre 32,5 % pour les établissements privés et 14,5 % pour le marché obligataire.</p>
<p>Cette concentration des financeurs pourrait ainsi conduire à une concentration des offres de crédit et à une harmonisation de leurs conditions car elle octroie une plus grande capacité de négociation aux établissements bancaires qui ont acquis un pouvoir de marché plus important. Cette transformation du marché du crédit reporte donc finalement le coût du risque sur les collectivités et moins sur le système financier. En d’autres termes, le risque serait reporté sur les financés et non sur les financeurs.</p>
<h2>Les départements face à l’effet ciseaux</h2>
<p>Il ressort en outre de cette étude que c’est au niveau des départements que la situation financière apparaît comme la plus préoccupante, plus qu’aux échelons de la commune, de l’intercommunalité ou de la région qui conserve de bonnes capacités d’investissement dans un contexte de taux bas.</p>
<p>En effet, l’aide sociale, au travers des allocations individuelles de solidarité ou en appui aux établissements de services sociaux et médico-sociaux, constitue l’une des principales compétences des départements. Or, ces compétences ont été largement sollicitées pour faire face aux conséquences de la crise de la Covid-19 en 2020.</p>
<p>En 2021, les départements pourraient ainsi se trouver confrontés à un effet ciseaux. En effet, les recettes liées à l’activité des entreprises, notamment la cotisation sur la valeur ajoutée, devraient largement diminuer contrairement à leurs dépenses. Si les dépenses sociales continuent d’être élevées, les départements devront puiser dans leur épargne. Si cette dernière reste élevée, certains départements pourraient toutefois se trouver rapidement en difficulté.</p>
<p>En tenant compte de l’effet multiplicateur du risque lié aux interactions spatiales, on comprend donc que la réussite du plan de relance dans son volet consacré à la cohésion territoriale repose sur un mécanisme de coordination particulier entre les différents départements, mais aussi entre les différents niveaux de collectivité. C’est ce qui permettra d’optimiser les dépenses pour assurer au mieux les retombées visées.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/157332/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Frouté ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’effet multiplicateur des investissements prévus par le gouvernement pourrait être contrecarré par les interactions entre territoires qui peuvent conduire à un endettement pas forcément justifié.Philippe Frouté, Maître de conférences en sciences économiques, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1441512020-08-13T19:33:27Z2020-08-13T19:33:27ZDécentralisation : le rôle clé des acteurs locaux dans la gestion des risques<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/352487/original/file-20200812-22-14m132k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C22%2C2991%2C1971&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le contexte actuel est marqué par une volonté d’implication locale forte notamment au niveau des mairies.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://image.shutterstock.com/image-photo/etretat-town-hall-commune-seinemaritime-600w-109202087.jpg">Kiev.Victor / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Depuis une vingtaine d’années, aux côtés de phénomènes naturels adverses et de risques industriels majeurs, de nouvelles menaces sourdent, traduisant des risques multiformes, multidimensionnels, <a href="https://www.jstor.org/stable/23646357?seq=1">d’une complexité toujours grandissante</a>, souvent invisibles parfois imperceptibles, donc difficiles à identifier, appréhender, prévoir, circonscrire et <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/14616700600645461">gérer</a>. La pandémie de Covid-19 en est une illustration.</p>
<p>Dans ce contexte, l’observation des attentes des citoyens vis-à-vis de la puissance publique et des comportements s’exprimant durant la crise sanitaire fait ressortir le rôle clé de la proximité et de la coopération pour parvenir à prendre la mesure des potentiels risques à venir et à les limiter, notamment dans les domaines environnementaux et sanitaires.</p>
<p>Pour reprendre les mots du président de la République Emmanuel Macron, le moment est venu de réfléchir à une « <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/06/25/comment-macron-dessine-sa-future-donne-territoriale_6044152_823448.html">nouvelle donne territoriale</a> », car « Tout ne peut pas être décidé si souvent à Paris » admettait-il le 14 juin dernier lors de son <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/06/25/comment-macron-dessine-sa-future-donne-territoriale_6044152_823448.html">allocution télévisée</a>.</p>
<p>L’adoption de la loi « <a href="https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/loi-engagement-et-proximite">Engagement et proximité</a> » en décembre 2019 et les concertations sur le <a href="https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/projet-de-loi-3d-decentralisation-differenciation-et-deconcentration">projet de loi « 3D »</a> (décentralisation, différenciation, déconcentration) démarrées en janvier dernier avaient déjà ouvert la voie au rééquilibrage des responsabilités entre échelon national et local.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1282685353904631808"}"></div></p>
<p>Dans un contexte caractérisé d’une part par l’expression d’une volonté d’implication locale forte – à la fois au niveau du rôle octroyé aux <a href="https://medias.amf.asso.fr/upload/files/Enquete%20AMF-CEVIPOF-2019-9%20PAP">acteurs de proximité</a> et aux membres de la société civile, comme en atteste l’organisation de la <a href="https://theconversation.com/convention-citoyenne-pour-le-climat-la-democratie-participative-vue-de-linterieur-141571">convention citoyenne pour le climat</a> – et, d’autre part, par le récent <a href="https://www.franceinter.fr/emissions/geopolitique/geopolitique-03-avril-2020">retour en force de l’État</a>, la question du juste degré de décentralisation des politiques publiques est posée.</p>
<h2>A chaque échelon son rôle</h2>
<p>Les attentes des citoyens vis-à-vis d’un État « limité, contraint… mais nécessaire » selon les mots de l’économiste David Martimort (notes personnelles), se renouvellent et se renforcent avec les crises, s’orientant vers une demande pour <a href="https://www.sciencespo.fr/cevipof/sites/sciencespo.fr.cevipof/files/Note1_Luc_ROUBAN_BaroV11bis.pdf">davantage de protection</a>, de proximité et d’implication de la puissance publique (les choix industriels dans les secteurs considérés comme stratégiques ont récemment été questionnés).</p>
<p>Les États restent soumis à diverses forces, des évolutions institutionnelles et organisationnelles internes liées à trois phénomènes : un processus de réforme territoriale d’une part, l’approfondissement de la construction européenne et ses implications en termes budgétaires, sectoriels, législatifs et réglementaires, d’autre part et, enfin, un mouvement de globalisation qui modifie l’équilibre économique et géopolitique mondial et induit de nombreux effets de débordement et de recomposition économique mais aussi sociale et sociétale.</p>
<p>Si l’État central constitue l’entité devant prendre en charge la prévention et la gestion des événements ayant une très faible probabilité de survenance mais aux coûts majeurs s’ils se matérialisent, l’échelon européen est indispensable pour pallier les échecs de marché et coordonner les capacités d’anticipation, de lutte contre des menaces communes et, au cœur de ces interactions multiples, l’échelon local demeure une pièce maîtresse.</p>
<p>Les collectivités territoriales restent en effet omniprésentes dans la gestion concrète des risques mais aussi en amont dans l’élaboration des politiques publiques pour <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000029946370&cidTexte=LEGITEXT000006070633&dateTexte=20141222">prévenir leur réalisation</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1250988687879483392"}"></div></p>
<p>Le niveau national élabore et arrête les grandes orientations devant être mises en œuvre sur l’ensemble du territoire, de façon homogène ou différenciée pour mieux correspondre aux conditions et aux besoins locaux. La déclinaison opérationnelle et l’adaptation de la stratégie nationale sont réalisées par les niveaux infranationaux.</p>
<h2>Une prime à la proximité</h2>
<p>Les avantages de la décentralisation s’expriment essentiellement en termes d’une acquisition plus aisée de l’information locale, d’une meilleure connaissance des besoins et des préférences des agents. Cette connaissance est nécessaire à l’efficience des politiques mises en œuvre mais particulièrement complexe à acquérir. Cette dimension revêt une acuité singulièrement forte dans le contexte de développement de risques sanitaires et environnementaux majeurs.</p>
<p>La perception, la représentation du risque et la compréhension des enjeux ne sont pas homogènes (voir par exemple <a href="https://link.springer.com/content/pdf/10.1007/s10640-016-0033-3.pdf">l’article</a> de l’économiste Nicolas Treich sur les comportements face au risque de catastrophe). Le philosophe René Descartes indiquait dans le « Discours de la méthode » en 1637 :</p>
<blockquote>
<p>« La diversité de nos opinions ne vient pas de ce que les uns sont plus raisonnables que les autres, mais seulement de ce que nous conduisons nos pensées par diverses voies, et ne considérons pas les mêmes choses. »</p>
</blockquote>
<p>Les perceptions divergentes <a href="https://www.cairn.info/revue-d-economie-politique-2015-5-page-665.htm">d’un monde observé conjointement</a> relèvent de facteurs idéologiques, socioculturels, historiques, mais surtout de <a href="https://books.google.fr/books/about/Erreur_de_Descartes_L.html?id=gvss5LgdWGEC">mécanismes cognitifs et émotionnels</a>. Les sciences comportementales montrent que nous éprouvons davantage d’empathie pour les membres de notre groupe social, « ceux qui nous sont proches géographiquement, ethniquement, culturellement » selon l’économiste <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=JZ8LDAAAQBAJ">Jean Tirole</a> ; le degré auquel les individus se sentent concernés par un événement semblerait inversement proportionnel à la distance qui les en sépare (distance spatiale, temporelle, entre êtres vivants).</p>
<p>La proximité pourrait donc être un catalyseur de la prise de conscience des enjeux d’un phénomène donné et un moteur du consentement individuel à adopter un comportement collectivement responsable. Afin de nous accompagner dans cette voie, les <a href="https://books.openedition.org/editionsehess/1424?lang=fr">experts</a> d’une part, et les responsables politiques locaux d’autre part, jouent un rôle majeur.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/351942/original/file-20200810-22-q5brrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351942/original/file-20200810-22-q5brrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351942/original/file-20200810-22-q5brrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=230&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351942/original/file-20200810-22-q5brrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=230&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351942/original/file-20200810-22-q5brrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=230&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351942/original/file-20200810-22-q5brrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=289&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351942/original/file-20200810-22-q5brrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=289&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351942/original/file-20200810-22-q5brrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=289&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Répartition des réponses à la question : « Diriez-vous que vous faites confiance à… ? (en pourcentage) ».</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.sciencespo.fr/cevipof/sites/sciencespo.fr.cevipof/files/CEVIPOF_confiance_10ans_CHEURFA_CHANVRIL_2019.pdf">Enquête Cevipof « 2009-2019 : la crise de la confiance politique »</a></span>
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<p>Alors que la confiance accordée aux décideurs politiques apparaît relative, s’inscrivant dans un climat morose (pessimisme, méfiance, lassitude) et illustrant le constat d’« <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/la-contre-democratie-la-politique-a-l-age-de-la-defiance-pierre-rosanvallon/9782020884433">âge de la défiance</a> » posé par l’historien et sociologue Pierre Rosenvallon en 2006, une prime à la proximité apparaît.</p>
<p>L’<a href="https://www.sciencespo.fr/cevipof/sites/sciencespo.fr.cevipof/files/Enque%cc%82te%20Municipales%20CEVIPOF%20AMF_diffusion%208%20juillet.pdf">enquête Ipsos Cevipof AMF</a> indiquait en 2019 que les citoyens font confiance aux élus de proximité et que ce degré de confiance diminue à mesure que l’on s’éloigne de la base de la pyramide et que la taille de la juridiction augmente. De même, le crédit porté aux informations communiquées par les experts s’érode en <a href="https://psycnet.apa.org/record/2001-01329-000">l’absence de personnification</a> ou d’identification possible à ces derniers.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/351944/original/file-20200810-16-59ba61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/351944/original/file-20200810-16-59ba61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=315&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/351944/original/file-20200810-16-59ba61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=315&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/351944/original/file-20200810-16-59ba61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=315&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/351944/original/file-20200810-16-59ba61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=396&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/351944/original/file-20200810-16-59ba61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=396&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/351944/original/file-20200810-16-59ba61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=396&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Niveau de confiance dans les acteurs.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.sciencespo.fr/cevipof/sites/sciencespo.fr.cevipof/files/CEVIPOF_confiance_10ans_CHEURFA_CHANVRIL_2019.pdf">Enquête Cevipof « 2009-2019 : la crise de la confiance politique »</a></span>
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<p>Un autre argument en faveur de la décentralisation relevant du rôle de la proximité est lié au concept d’« <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0176268002000988"><em>accountability</em></a> » qui désigne le fait pour le décideur public de rendre des comptes sur l’accomplissement des missions qui lui ont été confiées.</p>
<p>Les électeurs sont plus à même de surveiller, contrôler et sanctionner les élus locaux, s’ils ne sont pas satisfaits ou si les « contrats » ne sont pas respectés. L’acceptabilité des mesures publiques et la capacité à fournir des incitations efficaces aux citoyens sont de surcroît fortement corrélées à ce mécanisme.</p>
<p>En outre, des <a href="http://www.cae-eco.fr/Territoires-bien-etre-et-politiques-publiques">travaux récents menés par le Conseil d’analyse économique</a> ont montré que plusieurs composantes de la qualité de vie directement liées au territoire exerçaient un impact significatif sur le bien-être des individus.</p>
<h2>Une coopération nécessaire</h2>
<p>Si les avantages de la décentralisation sont patents, la centralisation, en revanche, permet de répondre à des soucis d’équité — notamment en prenant en compte les effets de débordement entre territoires qui seraient susceptibles d’affecter l’offre de bien public — facilite la réalisation d’économies d’échelle et peut maximiser la force de la réponse à des risques globaux.</p>
<p>Au-delà d’un réel arbitrage entre centralisation et décentralisation, c’est une gestion conjointe qui doit être menée par l’ensemble des niveaux d’intervention publique, basée sur la reconnaissance des apports de chaque échelon. Le degré d’interdépendance entre acteurs met en exergue non seulement les spécificités et le caractère indispensable de chaque échelon mais aussi la pertinence d’une coopération étendue et durable entre eux, et non d’un nouvel arbitrage entre centralisation et décentralisation, afin de bâtir une trajectoire soutenable et sûre.</p>
<p>L’environnement est l’un des domaines clés dans lesquels doivent s’exercer des formes de coopération adaptées entre territoires, entre acteurs privés et publics, mais aussi entre niveaux de décision publique.</p>
<p>Nos actes individuels ayant une <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=bmuVDwAAQBAJ">portée collective</a>, la préservation du bien commun nécessite que responsabilité privée et responsabilité collective se combinent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/144151/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Florence Lachet-Touya ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La gestion de la crise sanitaire a démontré la nécessité de privilégier une gestion partenariale par les différents échelons d’intervention publique.Florence Lachet-Touya, Maître de conférence en économie, Université de Pau et des pays de l'Adour (UPPA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1431032020-07-29T22:25:06Z2020-07-29T22:25:06ZCombien vaut une vie sauvée ? 37 fois le coût du sauvetage par les pompiers !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/349388/original/file-20200724-21-1dlwb8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=42%2C0%2C4724%2C3090&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une sapeuse-pompière des Bouches-du-Rhône prend en charge une victime au cours d’une opération sanitaire avec son équipe.</span> <span class="attribution"><span class="source">Service communication du SDIS 13</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Combien vaut une vie sauvée ? Et pourquoi une telle question, qui peut sembler provocatrice ? Car si certains arguent que « la vie n’a pas de prix », d’autres répondent qu’elle a cependant un coût, et notamment celui qui est investi dans les services de secours quand il s’agit de mettre en œuvre d’onéreux moyens pour la sauver.</p>
<p>De là à évaluer la qualité de nos services publics à l’aune de leur fonction économique dans la société, il n’y a qu’un pas qu’il convient d’étudier avant de le franchir.</p>
<p>Il se trouve que l’évaluation (et la méthode pour ce faire) de la valeur d’une vie en termes économiques peut grandement varier en fonction de l’objectif que cette évaluation poursuit : obtenir ce chiffre n’a que peu d’intérêt intrinsèquement, car la réponse paraîtrait toujours absurde.</p>
<p>Cependant, lorsqu’il s’agit d’évaluer financièrement le retour sur l’investissement que l’État et les collectivités confient aux services de secours, l’intérêt est de pouvoir juger sur des données factuelles la pertinence de cet investissement. C’est le projet dans lequel nous nous sommes lancés avec les sapeurs-pompiers des Bouches-du-Rhône.</p>
<h2>Une analyse coûts/bénéfices</h2>
<p>Nous nous sommes d’abord interrogés : « combien de vies sauvent les sapeurs-pompiers » ? Malgré pléthore de rapports et de statistiques, personne ne peut l’estimer au premier abord.</p>
<p>Nous nous sommes donc concentrés sur un échantillon en particulier, en analysant près de 2 226 rapports d’interventions sanitaires (c’est-à-dire toute opération de secours impliquant au moins une ambulance pour des situations urgentes, non urgentes et pour les accidents de transport) réalisées par le service départemental d’incendie et de secours des Bouches-du-Rhône entre le 18 et le 24 mars 2019.</p>
<p>Une vie sauvée a été comptabilisée dès lors que l’on considérait que sans l’intervention des sapeurs-pompiers, la personne concernée serait décédée.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1286236084133920769"}"></div></p>
<p>Selon cette analyse, 1,3 % des interventions sanitaires des pompiers sauveraient des vies. Il s’agit d’une estimation à consolider, car d’autres sauvetages sont réalisés lors des incendies, en mer et lors d’autres opérations de mise en sécurité (extraction de milieux hostiles).</p>
<p>En appliquant ce ratio à l’ensemble des opérations sanitaires annuelles des sapeurs-pompiers des Bouches-du-Rhône (et prenant pour hypothèse que la semaine étudiée a été représentative de toute autre semaine de la même année), nous obtenons le résultat d’une estimation de 1 592 vies sauvées au minimum, par cette institution, en un an.</p>
<p>Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (<a href="https://www.oecd-ilibrary.org/fr/environment/la-valorisation-du-risque-de-mortalite-dans-les-politiques-de-l-environnement-de-la-sante-et-des-transports_9789264169623-fr">OCDE</a>) et différentes <a href="https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/archives/CGSP_Evaluation_socioeconomique_17092013.pdf">publications</a>, la valeur statistique de la vie humaine est estimée en France à 3 millions d’euros.</p>
<p>Ces estimations sont faites afin de guider les responsables publics lorsqu’ils se retrouvent face à des <a href="http://www2.toulouse.inra.fr/lerna/treich/ACB03.pdf">choix d’investissements</a> visant à réduire le risque de mortalité, ces investissements sont alors « comparés » aux avantages attendus en termes de vies sauvées.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/sauver-les-etres-humains-ou-la-croissance-economique-les-etats-face-au-dilemme-135945">Sauver les êtres humains ou la croissance économique, les États face au dilemme</a>
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</em>
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<p>Nous prenons ce chiffre sans correction, autrement dit, sans tenir compte de l’âge, du sexe ou de l’état de santé des personnes, ceci pour des questions d’équité.</p>
<p>À partir de cette valeur statistique et du nombre de vies sauvées (environ 1,3%), nous avons ainsi évalué qu’une opération sanitaire de sapeurs-pompiers, en moyenne, « sauvegarde », en valeur de vie humaine, 38 991 euros.</p>
<p>Cette analyse coût/bénéfice rétrospective s’appuie sur la connaissance du coût moyen (supporté par la collectivité, non par le bénéficiaire) d’une opération sanitaire soit 1036 € en 2019 dans le même département (suivant la méthode de calcul de la <a href="https://www.ccomptes.fr/fr/documents/22937">Cour des comptes</a>). Toute opération sanitaire aurait alors un bénéfice valant… 37 fois son coût !</p>
<h2>Optimiser le temps d’intervention</h2>
<p>Les politiques d’amélioration continue adoptées depuis les années 2000 par les sapeurs-pompiers s’intéressent notamment à l’amélioration constante de la couverture opérationnelle afin de diminuer le temps d’intervention (le temps d’intervention moyen national est situé à 10 minutes et 45 secondes suivant les statistiques des services d’incendie et de secours de 2019 publiées par le <a href="https://www.interieur.gouv.fr/Publications/Statistiques/Securite-civile">ministère de l’Intérieur</a> car il s’agit d’un déterminant crucial qui influe également sur les <a href="http://crd.ensosp.fr/doc_num.php?explnum_id=18126">séquelles post-accidentelles</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/349620/original/file-20200727-35-1oiuauv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/349620/original/file-20200727-35-1oiuauv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=226&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/349620/original/file-20200727-35-1oiuauv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=226&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/349620/original/file-20200727-35-1oiuauv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=226&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/349620/original/file-20200727-35-1oiuauv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=284&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/349620/original/file-20200727-35-1oiuauv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=284&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/349620/original/file-20200727-35-1oiuauv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=284&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Durée moyenne par nature d’intervention (en hommes.heure).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.interieur.gouv.fr/Publications/Statistiques/Securite-civile/2018">Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces données et cette méthode permettent d’autres études, similaires, pour l’<a href="https://www.conix.fr/strategie-de-resilience-pour-les-infrastructures-vitales/">évaluation des patrimoines</a> bâtis et/ou écologiques préservés par les interventions sur feux urbains ou incendies de forêt.</p>
<p>Les secours restent une compétence partagée, interservices et la place de l’hôpital y est importante. La crise du Covid-19 vient nous le rappeler. Si en cette période les services d’incendie et de secours français ont sauvé peu de vies parmi les malades du Covid-19, l’hôpital aurait tout intérêt à comptabiliser le nombre de patients passés en réanimation et sortis guéris, prouvant ainsi à ses mandants combien il est indispensable à la préservation humaine et économique de notre pays.</p>
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<p><em>Remerciements :</em></p>
<p><em>Le <a href="https://www.linkedin.com/in/jean-paul-monet-69130619/?originalSubdomain=fr">lieutenant-colonel Jean‑Paul Monet</a> et Mme <a href="https://www.linkedin.com/in/hanane-chadli-mauricio-41a99811b">Hanane Chadli-Mauricio</a> du groupement Qualité du service départemental d’incendie et de secours des Bouches-du-Rhône (SDIS 13) ont largement contribué à cette étude, ainsi que les étudiants Dorian Goninet (Toulouse School of Economics) et Nouhaila Amir (AgroParis Tech).</em></p>
<p><em>Nous remercions le <a href="https://www.pompiers.fr/federation/presentation/president-de-la-federation-nationale-des-sapeurs-pompiers-de-france-fnspf">colonel Grégory Allione</a>, directeur du SDIS 13 pour son incitation à mener ces travaux, le <a href="https://www.linkedin.com/in/isabelle-palacios-9b533a179/?originalSubdomain=fr">commandant Isabelle Palacios</a>, Mme <a href="https://www.linkedin.com/in/camille-giraud-7a38a3143/?originalSubdomain=fr">Camille Giraud</a>, et plus généralement les sapeurs-pompiers des Bouches-du-Rhône pour leur collaboration</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143103/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Anaïs Saint Jonsson est sapeur-pompier volontaire expert pour le service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône.</span></em></p>Dans les Bouches-du-Rhône, pour un montant moyen d’environ 1 000 euros pour la collectivité, la valeur de chacune des 1 600 vies sauvées tous les ans se situerait aux alentours de 39 000 euros.Anaïs Saint Jonsson, Maître de conférences en management public (Institut de Management Public & Gouvernance Territoriale, CERGAM), Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1414192020-06-30T18:53:46Z2020-06-30T18:53:46ZAcheter responsable, un casse-tête pour les collectivités locales<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/343820/original/file-20200624-132961-1938aha.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=44%2C44%2C7304%2C4858&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les acheteurs publics disposent d’outils permettant de se libérer des contraintes juridiques mais qui restent beaucoup trop techniques.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://image.shutterstock.com/image-photo/sustainable-urban-development-concept-grass-600w-370954895.jpg">Pogonici / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>La commande publique représente environ <a href="https://read.oecd-ilibrary.org/governance/government-at-a-glance-2011/size-of-public-procurement-market_gov_glance-2011-46-en#page2">15 % du produit intérieur brut</a> français. L’introduction progressive de critères sociaux et environnementaux permet d’envisager les achats publics non plus seulement comme un acte juridique et administratif, mais comme un véritable levier de déploiement de politiques de développement durable.</p>
<p>Cependant, il existe encore aujourd’hui des <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/mi/2015-v20-n1-mi03638/1045357ar/">« points de frictions »</a>, dans la mise en œuvre de politiques d’achats publiques responsables (APR) qui a énormément de mal à se généraliser et reste encore aujourd’hui <a href="https://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/Etudes/2018/2018_06_commande_publique_responsable.pdf.">sous-utilisé</a>.</p>
<p>Ces difficultés dépendent en grande partie de la rigidité du cadre législatif de la commande publique qui entre souvent en contradiction avec des politiques de développement durable locales et ambitieuses.</p>
<h2>Une lente évolution du cadre législatif</h2>
<p>Depuis 2014, toute collectivité territoriale disposant de plus de 100 millions d’euros de budget achat annuel doit recourir à l’achat public responsable (APR) et publier son schéma des achats publics socialement et écologiquement responsables (<a href="https://journals.openedition.org/developpementdurable/13666">SPAPSER</a>).</p>
<p>Les <a href="https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/F33466">marchés publics</a>, qui sont des contrats onéreux entre un acheteur et un prestataire, sont soumis à un cadre législatif particulièrement complexe.</p>
<p>Depuis les années 1990, et jusque dans les années 2010, les achats publics responsables étaient quasiment impossibles. Si les premières tentatives d’achat public avec clauses sociales apparaissent de manière épisodique dans quelques villes au début des années 2000, jusqu’en 2014 la plupart des marchés étaient construits sur un rapport « critère technique – coût du marché », que l’on pourrait simplifier en parlant de rapport « coût-avantage ».</p>
<p>Ce rapport a par ailleurs été entériné par l’abrogation du code des marchés français pour lui préférer jusqu’en 2018 le code de la commande publique européenne, qui a institué trois règles de concurrence, mais qui a desserré le lien entre les critères d’attribution d’un marché et l’objet du marché. Le code actuel consiste en une transcription du code européen en droit français.</p>
<p>Les <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=0DE31FFC92067DE18BC93C76DB759C7A.tplgfr29s_1?idSectionTA=LEGISCTA000037703230&cidTexte=LEGITEXT000037701019&dateTexte=20200619">trois critères de concurrence</a> sont : la transparence des marchés, la liberté d’accès au marché et l’égalité de traitement entre les candidats.</p>
<p>Ces trois critères sont censés permettre l’efficacité des marchés et la bonne gestion des deniers publics, sans définir ni « l’efficacité » d’un marché ni ce qu’est une « bonne gestion » des deniers publics.</p>
<h2>Une injonction contradictoire</h2>
<p>Dans leur traduction au sein des marchés publics le critère d’égalité de traitement entre les candidats interdit aux collectivités d’introduire des critères relatifs à la situation géographique de l’entreprise pour favoriser les entreprises locales.</p>
<p>L’argument est similaire pour l’utilisation de labels écologiques ainsi que pour la <a href="https://www.marche-public.fr/contrats-publics/Instruction-clause-moliere-interdiction-ARCB1710251J.htm">langue</a> des prestataires de service, même quand cela revêt des questions de sécurité sociale et de sécurité sur les chantiers.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"860166408096886788"}"></div></p>
<p>Les critères de transparence et liberté d’accès au marché se traduisent quant à eux par de nombreuses procédures de publication des marchés, assurant ainsi la mise en concurrence la plus grande possible des entreprises et des structures associatives en fonction du type et du montant estimé du marché.</p>
<p>Lors d’une commande publique, la collectivité acheteuse doit préciser l’objet du marché. Il s’agit d’une demande exprimée par l’acheteur dans un marché qui doit correspondre à un besoin émis par la collectivité.</p>
<p>Néanmoins, la traduction de ce besoin en demande, et la rédaction de cette demande dans le langage technique et juridique des marchés peut entraîner des situations où les biens ou services achetés sont différents du besoin exprimé au départ par un service.</p>
<p>Le lien avec l’objet du marché impose aux acheteurs de ne spécifier des critères relatifs qu’au bien ou au service acheté. En d’autres termes, lors de l’achat d’un stylo, l’acheteur ne peut rédiger que des critères relatifs à la couleur de l’encre du stylo (noire, bleue…), ou au matériau de son emballage (métal, plastique…) mais il ne peut pas demander que l’entreprise qui produit ces stylos respecte l’égalité salariale homme-femme, ou applique une politique de recyclage des déchets plastiques.</p>
<p>Ainsi les marchés publics sont contraints à des injonctions contradictoires. Les acheteurs doivent respecter des critères de concurrence drastiques (qui peuvent remettre en cause l’intégralité de la procédure de passation du marché s’ils ne sont pas respectés) et ils doivent dans le même temps favoriser des politiques publiques de développement durable et leur déploiement sur leur territoire.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"992232990980833280"}"></div></p>
<p>Dans ce cadre législatif, il devient alors complexe de mettre en place des politiques d’achat ambitieuses. Les premiers essais d’achats dans les années 2000 avec des critères environnementaux ou sociaux ont d’ailleurs nécessité une <a href="https://journals.openedition.org/developpementdurable/13666">montée en technicité</a> particulière des acheteurs.</p>
<p>Néanmoins, il existe plusieurs outils à disposition des agents qui prennent en compte ces contraintes.</p>
<h2>Du « coût-avantage » au coût global</h2>
<p>En effet, depuis 2014, les acheteurs peuvent réaliser des sourçages (identification de fournisseurs) avant de rédiger leurs marchés pour déterminer l’origine des produits ou la qualité des services. Ils peuvent également évaluer le montant du marché à l’aide d’un raisonnement en coût global (CG).</p>
<p>Le CG permet de trancher avec une évaluation classique du montant du marché, en prenant en compte non seulement le coût d’achat, ce qui correspond au montant classique, mais également celui de son transport, de son utilisation et de sa destruction.</p>
<p>Par exemple, lors de la construction d’un bâtiment cela se traduit par un CG qui évalue le prix du terrain, des matériaux et de leur acheminement, le coût de l’utilisation de ce bâtiment et de sa destruction ou de sa valeur à la revente après utilisation.</p>
<p>Néanmoins, le sourçage et le CG sont deux outils extrêmement chronophages.</p>
<p>Dans le cas du sourçage les critères de concurrence impliquent que les acheteurs contactent toutes les entreprises en capacité de répondre à l’appel d’offres, sous risque de se mettre en situation d’irrégularité vis-à-vis de l’égalité de traitement entre les candidats. Ainsi le sourçage ne s’utilise qu’en cas de marché dont le montant s’avère sélectif (construction d’autoroute par exemple).</p>
<p>De même, le CG nécessite un niveau de technicité et de connaissance du produit très avancé. Pour un acheteur, déterminer l’intégralité des coûts liés au transport et à l’utilisation d’un service ou d’un bien peut s’avérer particulièrement technique.</p>
<p>Malheureusement, lors de sa <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000029313296&categorieLien=id">mise en place en 2014</a>, et de son introduction dans le <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=3F1B46D824A148ADBCBB282882D4DBC0.tplgfr29s_1?cidTexte=JORFTEXT000037695219&dateTexte=20200619">code de la commande publique</a> en 2019, l’obligation de rédaction et de publication d’un schéma relatif aux APR dans les collectivités territoriales ne s’est pas accompagnée d’une politique de formation des acheteurs, ou d’évolution de carrière.</p>
<p>Il s’est même doté en 2019 de deux nouvelles obligations : la création d’indicateurs permettant de contrôler l’avancement des objectifs de développement durable présents dans le schéma et le soutien à des démarches d’économie circulaire.</p>
<p>L’augmentation des critères de responsabilité à adosser aux marchés publics traduit à la fois un regain d’intérêt pour les marchés publics comme acte de consommation spécifique et comme levier de politiques de développement durable, mais également une contradiction profonde entre le droit européen et national et les capacités d’action des collectivités locales et de leurs agents.</p>
<p>Cette contradiction est accentuée par le manque de formations disponibles pour les acheteurs des collectivités locales qui doivent alors se former en interne ou à l’aide d’intervenants externes sur leur temps de travail ou leur temps personnel.</p>
<p>Or, les <a href="https://www.cairn.info/revue-gouvernement-et-action-publique-2017-4-page-9.htm">conditions nécessaires</a> à la réussite d’un marché ambitieux et innovant en termes de régulation tiennent en deux éléments : le montant dont dispose les agents pour réaliser leurs marchés, et la capacité d’innovation de ces agents au regard de leur connaissance du tissu économique relatif à leur marché.</p>
<p>Il semble donc aujourd’hui plus que nécessaire pour poursuivre la politique de développement durable ambitieuse entamée par la mise en place des APR de généraliser la formation des acheteurs territoriaux, mais également d’introduire plus de souplesse dans le cadre législatif et le lien avec l’objet du marché, ce qui pourrait permettre aux collectivités de favoriser des initiatives innovantes et de soutenir l’emploi et leur tissu économique local.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été rédigé par Olivier Gayot, doctorant en économie au Clersé (UMR 8019) à l’Université de Lille, sous la direction de Bruno Boidin, professeur d’économie (Université de Lille)</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/141419/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gayot Olivier a reçu une bourse de thèse financée en partie par la Région Hauts-de-France.</span></em></p>La rigidité du cadre législatif et le manque de formation des acheteurs publics entravent les actions locales en faveur du développement durable.Olivier Gayot, doctorant en sciences économiques, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1315272020-06-09T17:58:37Z2020-06-09T17:58:37ZLa face cachée de la digitalisation dans les collectivités territoriales<p>Depuis plusieurs années, les collectivités territoriales ont engagé des recherches d’économies pour contribuer au redressement des <a href="http://www.senat.fr/espace_presse/actualites/201910/projet_de_loi_de_finances_pour_2020.html">finances publiques locales et nationales</a>. Parmi les voies explorées, les démarches de digitalisation <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/581439/transition-numerique-ou-en-sont-les-collectivites-territoriales/">occupent une place grandissante</a>.</p>
<p>Il est difficile de trouver des chiffres fiables et précis pour quantifier la digitalisation dans les collectivités. Ce constat s’explique d’abord par le flou autour du terme « digitalisation ».</p>
<p>Parle-t-on de transformation numérique ? De dématérialisation ? <a href="https://theconversation.com/gestion-urbaine-vie-privee-des-visions-en-tension-pour-les-villes-de-demain-135894">De smart city</a> pour reprendre un terme désormais très répandu ?</p>
<p>Une <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/0033-3352.00196">définition globale</a> retient que la digitalisation regroupe « toutes les situations dans lesquelles les TIC sont utilisées pour améliorer les échanges, interactions et transactions entre l’administration et les autres parties prenantes […] ».</p>
<p>Dans les réformes des organisations publiques, on parle <a href="https://www.researchgate.net/publication/220526922_Moving_from_E-Government_to_T-Government_A_Study_of_Process_Reengineering_Challenges_in_a_UK_Local_Authority_Context">d’administration électronique</a>. Ce concept englobe une variété de pratiques, dont on peut mesurer <a href="https://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2010-2-page-20.htm">quatre phases d’avancement</a>. La phase d’information consistant à créer un site Internet destiné à diffuser de l’information. La phase d’interaction introduisant, au sein du site Internet, des outils de communication électronique personnalisés. La phase de transaction proposant des procédures sur le site afin que l’usager puisse réaliser des démarches en autonomie. Et la phase d’intégration, consistant à mettre en place une organisation capable d’offrir aux usagers des services flexibles, personnalisés et de qualité en multipliant les téléprocédures comme les guichets uniques.</p>
<p>Plusieurs arguments plaident en faveur de cette digitalisation, notamment une diminution des coûts de prestation et des gains de temps en interne, et un rapprochement avec l’usager.</p>
<h2>Des effets positifs réels</h2>
<p>De nombreuses <a href="https://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2010-2-page-20.htm">recherches</a> portant sur les <a href="http://www.theses.fr/2018NANT3002">coûts</a> ont mis en <a href="https://www.cairn.info/revue-gestion-et-management-public-2017-2-page-9.htm">évidence</a> les effets positifs des démarches de digitalisation à la fois pour la collectivité, les agents et le public (usagers, contribuables, bénéficiaires).</p>
<p>On observe ainsi des gains de productivité par la réduction de la charge de travail des agents et l’automatisation d’activités, la suppression de certaines tâches pénibles, comme la saisie manuelle, l’archivage ou les photocopies. Mais également la réduction des frais généraux, la simplification du fonctionnement des organisations publiques par l’amélioration de la diffusion de l’information en interne, et le rapprochement avec l’usager par la participation ou la co-production de services (activités périscolaires, vie de quartier, participation à la gestion des espaces verts dans certains quartiers, etc.).</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/HeJPs_MqhKE?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Fabien Ferrazza, directeur « secteur public » chez Docaposte, présente au micro d’Acteurs publics TV les outils développés par le groupe La Poste et sa filiale numérique pour accompagner la transformation digitale des collectivités (Nice, 29 octobre 2019).</span></figcaption>
</figure>
<p>On note aussi une amélioration de la qualité des prestations, comme les guichets uniques facilitant la satisfaction des demandes, et la diminution des contraintes horaires des services administratifs. À titre d’exemples, la flexibilité horaire pour les accès aux bibliothèques et gymnases avec des badges, l’inscription en ligne à la cantine et à la garderie ou la nouvelle chaîne de paiement électronique des amendes.</p>
<p>Des recherches récentes auprès des collectivités sont <a href="https://web.lexisnexis.fr/unerevues/pdf/une/rgp2001.pdf">plus nuancées</a> et signalent l’apparition de nouvelles contraintes et de coûts cachés indirects. Il s’agit de coûts non recensés dans le plan comptable, globalisés et donc peu ou non identifiés par l’organisation, qui viennent limiter voire annihiler les effets bénéfiques.</p>
<h2>Une digitalisation coûteuse pour les collectivités</h2>
<p>La digitalisation nécessite un certain nombre d’investissements en formation du personnel, des coûts de maintenance informatique et matérielle (modification du système d’information), et des délais pour qu’à la fois le personnel et la technique s’adaptent au fonctionnement de travail.</p>
<p>Une enquête réalisée <a href="https://www.orange-business.com/sites/default/files/lb_digitalisation-des-territoire.pdf">fin 2017</a> sur les intercommunalités <a href="https://www.banquedesterritoires.fr/transformation-numerique-les-intercommunalites-sont-elles-vraiment-pretes">illustre ces difficultés</a>.</p>
<p>Parmi les collectivités <a href="https://pmp.revuesonline.com/article.jsp?articleId=40935">que nous avons étudié</a>, une ville de l’ouest de la France de plus de 150 000 habitants, a ainsi mesuré son rapport bénéfice-coût, et il en ressort une quasi-équivalence entre les investissements et les gains financiers obtenus et à venir.</p>
<p>On aboutit ainsi à des situations paradoxales où les démarches de digitalisation permettant de réaliser des économies entraînent à court terme l’inverse, avec des investissements numériques et des coûts supplémentaires pour la collectivité. Ces investissements supplémentaires sont souvent dus aux coûts cachés qui étaient mal ou non anticipés, comme les formations, la rédaction de nouvelles procédures de travail, les négociations avec les agents autour des contraintes de flexibilité et le temps d’explication aux usagers.</p>
<h2>Un coût pour l’usager</h2>
<p>Des coûts cachés indirects émergent aussi de la numérisation des relations avec les citoyens. Ils concernent notamment le renforcement du travail prescrit pour l’usager et l’accès inégal aux outils numériques, souvent dû à l’écart générationnel ou aux territoires plus isolés et mal équipés.</p>
<p>Des procédures informatiques vont par exemple encadrer le travail demandé à l’usager-coproducteur de services, mais avec deux conséquences bien distinctes selon <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/catalogue/index-Le_travail_du_consommateur-9782707179074.html">Marie-Anne Dujarier</a>. D’une part, les processus informatisés induisent des effets pervers sur l’organisation du travail tels que devoir délivrer des services dans des temps raccourcis en respectant les obligations de transparence, de qualité et d’égalité d’accès au service public. D’autre part, le transfert d’activité se réalise vers le citoyen qui doit s’équiper et être sensibilisé au monde numérique.</p>
<h2>Des inégalités structurelles</h2>
<p>Rappelons par ailleurs que dans de nombreuses communes en France, vit une <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/3303333?sommaire=3353488">population vieillissante</a>, environ 19,6 % de la population a au moins 65 ans actuellement, souvent éloignée des réseaux Internet les plus développés.</p>
<p>Dans ce contexte, les effets positifs de la digitalisation deviennent subitement moins nombreux, voire contre-productifs.</p>
<p>Pour ces collectivités, l’interaction physique est délaissée, remplacée par une relation virtuelle qui n’est préparée ni en termes de technologies (investissement en matériel informatique et en fibre optique), ni en termes de compétences (formation et accompagnement des populations les plus fragiles face à la digitalisation).</p>
<p>Alors qu’elle en est un des enjeux principaux, la recherche d’économies peut finalement entraver la portée de la digitalisation. Ainsi, la fermeture d’accueils physiques dessert encore davantage les populations privées de la digitalisation des services publics, comme les personnes âgées ou les territoires en <a href="https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00931217/file/ThA_se_Sophie_Houzet-cvt.pdf">difficultés économiques et/ou mal connectés</a>.</p>
<p>Le transfert des interfaces physiques vers les grandes métropoles accentue les déséquilibres territoriaux et entretient l’émergence de déserts économiques. Par exemple la fermeture d’accueil de mairies, d’écoles, de services de santé, etc. Les médias les <a href="https://www.rue89strasbourg.com/les-tresoreries-rurales-du-bas-rhin-menacees-de-disparition-160411">relaient avantageusement</a> dès lors que des services d’État sont menacés (agences du Trésor public, gendarmerie…).</p>
<h2>Contourner ou anticiper les coûts cachés ?</h2>
<p>En fonction de l’ampleur du projet de digitalisation, c’est-à-dire d’une mise en ligne de services de base conçue en local à une recherche de connectivité des territoires, les parties prenantes sont variables. Mais le point qui semble le plus important est que les élus et les services administratifs devraient anticiper les risques de coûts cachés. Les expériences montrent qu’il est nécessaire de prendre conscience que la démarche de digitalisation envisagée, comme exclusivement favorable pour la collectivité et ses usagers, représente aussi des risques et des coûts.</p>
<p>Par exemple, l’intérêt d’une réflexion autour d’actions correctrices avant le lancement de la démarche a été mis en évidence dans une <a href="https://airmap2019.sciencesconf.org/data/pages/Airmap_2019.pdf">recherche récente</a>. Cette grande ville de l’ouest indiquée dans l’exemple a adapté en 2017 sa démarche de digitalisation, en allongeant les délais de 3 années et en donnant des marges de manœuvre aux directeurs de services, comme la possibilité offerte aux agents de choisir des modalités de travail différentes (activités sur le périmètre ville ou agglomération, flexibilité des horaires). Le résultat n’est pas encore mesuré financièrement, mais des enquêtes internes de satisfaction menées auprès du personnel et des habitants montrent des taux de satisfaction avant/après la digitalisation stable pour le personnel et en augmentation de 7 points pour la population malgré une légère baisse pour les strates âgées.</p>
<h2>Engager les élus</h2>
<p>Dans le pilotage au quotidien de la démarche, le manque de compétences dédiées et de budget consacré, mais aussi le <a href="http://www.theses.fr/2018NANT3002">faible portage politique</a> sont souvent signalés.</p>
<p>Le relatif engagement des élus, faute de compétences, de conviction, de craintes sur le sujet, implique que le projet est plutôt porté par l’administration, devenant plus technique que stratégique. Le digital devient alors un affichage politique auquel peu de moyens sont affectés.</p>
<p>Il nous semble qu’à l’image des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/tiers-lieux-37492">tiers-lieux</a> d’innovation qui depuis quelques années fleurissent autant dans les structures publiques que privées (comme les fab labs, open labs), les démarches de digitalisation doivent se doter d’équipes pluridisciplinaires dédiées, intégrant des usagers et une structuration plus poussée de la gouvernance du projet. par exemple la collecte et archivage des données, la valorisation et partage des actions, le système de mesure de l’amélioration de qualité, etc.</p>
<p>Les enjeux politiques sont de taille notamment au regard des perspectives post-Covid. Les campagnes sont devenues des refuges pendant la période de confinement. Les zones rurales sont en situation de réussir ce qu’elles ont tenté depuis des décennies, l’exode urbain. Mais que l’on ne s’y trompe pas. Certes, la crise a montré que l’on peut remplacer la proximité physique par la proximité numérique et qu’une grande majorité de ceux qui peuvent télétravailler (environ 40 % de l’emploi en France) pourrait être en <a href="https://www.huffingtonpost.fr/entry/-coronavirus-les-villes-moyennes-vont-elles-redevenir-attractives_fr_5ec4e0efc5b6d90bc30f10e6">mesure de s’exiler</a>. Mais il n’est pas garanti que dans les campagnes et les petites villes moyennes, le digital puisse répondre à tous les besoins en termes de culture, de loisirs, d’éducation, de santé ou de transports.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/131527/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Batac est membre de Sofos. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Christophe Maurel ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La digitalisation nécessite un certain nombre d’investissements en formation, des coûts de maintenance informatique et matérielle et des délais souvent peu ou mal comptabilisés par les territoires.Julien Batac, Maître de conférences, Université de BordeauxChristophe Maurel, Professeur en sciences de gestion, IAE Angers - Université d'AngersLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1345922020-03-24T19:19:24Z2020-03-24T19:19:24ZRepenser l’aménagement du territoire au Sénégal<p>La croissance démographique, le changement climatique, les mobilités, la gouvernance : autant de domaines où il est impératif d’agir d’une manière intelligible et raisonnée afin de faire face aux défis de la ville de demain. Dans un contexte de métropolisation marqué par une « mobilité généralisée », d’indétermination des limites urbaines, et d’ambition affichée des grandes villes d’accroître leur attractivité et leur compétitivité et de devenir des <a href="https://www.researchgate.net/publication/254394880_Worlding_Cities_Asian_Experiments_and_the_Art_of_Being_Global_-_By_Ananya_Roy_Aihwa_Ong">« villes de classe mondiale »</a>, l’objectif consistant à <a href="https://www.lequotidien.sn/session-ordinaire-2020-du-hcct-aminata-mbengue-ndiaye-pour-un-statut-particulier-pour-dakar/">doter Dakar d’un statut spécial</a>, avancé par la présidente du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT) Aminata Mbengue Ndiaye, relève-t-il réellement d’une stratégie pertinente et efficiente ?</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1229364551633772544"}"></div></p>
<h2>L’État et les collectivités ne sont d’accord que sur leur désaccord</h2>
<p>Les différends politiques voire politiciens entre l’État et la Ville de Dakar – et, plus largement, les collectivités locales – ne datent pas d’hier. À titre d’exemple, rappelons qu’en <a href="http://journals.openedition.org/cybergeo/27845;DOI:https://doi.org/10.4000/cybergeo.27845">octobre 2015</a>, « arguant de la situation insoutenable d’insalubrité dans la capitale, l’État, en contradiction avec les textes qui accordent la compétence de ce service à la Ville et à la commune (art. 170/305 CGCL), soustrait par décret « la gestion des déchets et la lutte contre l’insalubrité » à l’Entente CADAK-CAR (Communauté d’agglomération de Dakar – Communauté d’agglomération de Rufisque), présidée par le maire de Dakar, pour la confier à l’Unité de coordination et de la gestion des déchets solides (UCG), suscitant un nouveau conflit avec les autorités de la Ville ».</p>
<p>La même année, le gouvernement <a href="https://www.jeuneafrique.com/227446/economie/senegal-imbroglio-autour-de-lemprunt-de-la-ville-de-dakar/">n’a pas approuvé l’emprunt obligataire</a> contracté par la Ville de Dakar pour la construction du nouveau centre commercial Félix Eboué dans la commune du Plateau. Si des « objections techniques » avaient été avancées à l’époque par le ministère des Finances, il n’en reste pas moins que la recrudescence de ce type de conflits par la suite rend perplexe l’observateur averti.</p>
<p>Plus récemment, le feuilleton judiciaire sur <a href="https://www.lepoint.fr/afrique/senegal-l-ancien-maire-de-dakar-khalifa-sall-a-ete-gracie-29-09-2019-2338431_3826.php">l’affaire de la caisse d’avance</a> ayant opposé pratiquement les mêmes protagonistes (État-Ville) s’est conclu par une grâce présidentielle accordée à l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall.</p>
<h2>Statut spécial pour Dakar : un faux débat</h2>
<p>L’urgence, aujourd’hui, n’est pas à l’élaboration d’un statut spécial pour Dakar. Les priorités sont ailleurs. Ce qui s’impose, aujourd’hui, même si cela ne sera pas simple, est la dissolution d’institutions budgétivores comme le HCCT. Sur les 150 membres composant l’institution, <a href="https://www.pressafrik.com/%E2%80%8BAppel-au-boycott-Le-HCCT-est-inutile-et-budgetivore--Madieye-Mbodji_a153194.html">70 sont nommés par décision discrétionnaire du Président de la République</a>. En outre, la mise sur pied d’un gouvernement métropolitain dont l’architecture institutionnelle veillera à empêcher dans la mesure du possible les querelles d’égos politiques s’avère nécessaire.</p>
<p>Aujourd’hui, l’échelle fonctionnelle de l’aire métropolitaine dakaroise dépasse largement celle des limites administratives régionales. Le dynamisme de la périphérie et la résurgence de petites villes en témoignent au travers de l’implantation de grands équipements comme <a href="https://www.jeuneafrique.com/591537/economie/senegal-laeroport-international-blaise-diagne-veut-etre-le-plus-important-dafrique-de-louest/">l’aéroport international Blaise Diagne (AIBD)</a> à Diass, à une cinquantaine de kilomètres de Dakar, et des <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/cgq/2017-v61-n172-cgq03339/1042714ar.pdf">industries agroalimentaires dans la région de Thiès</a>.</p>
<p>Dès lors, l’action publique ne doit-elle pas aujourd’hui s’ajuster à la bonne échelle ? Ou comme le suggère le docteur Maurice Soudieck Dione, enseignant-chercheur en sciences politiques à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis du Sénégal, plus spécifiquement, ne s’agit-il pas aujourd’hui de procéder à un recentrage du politique (consolidation des perspectives relatives à l’intérêt général) et à un décentrage de l’économique (cadre structurel favorable au développement de l’économie des villes de l’intérieur) ?</p>
<p>L’installation d’équipements d’envergure dans la périphérie de Dakar indique que l’État du Sénégal est doté d’une volonté planificatrice ; mais il poursuit ses « Grands travaux » sans assumer institutionnellement la transition métropolitaine. Au-delà de la question institutionnelle, la seule urgence qui vaille est de se « défaire » de l’assistance technique étrangère et s’approprier davantage l’expertise locale. « Défaire » non au sens d’abandonner radicalement mais plutôt d’apprendre à s’en servir au mieux, en évitant de mettre en œuvre des stratégies qui ne collent pas forcément à la réalité pratique.</p>
<p>La stratégie doit donc procéder d’une articulation logique et cohérente de l’ici et de l’ailleurs, et non de « fantasmes urbains » pour reprendre le terme de Vanessa Watson. Comment comprendre le fait que 60 ans après les indépendances certains documents d’urbanisme, à l’instar du <a href="http://www.cetud.sn/index.php/mobilite/pdudakar">Plan directeur d’urbanisme de Dakar Horizon 2035</a>, soient <a href="https://openjicareport.jica.go.jp/pdf/12250023.pdf">produits</a> par l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA) ?</p>
<h2>Une expertise au service des territoires et une nouvelle approche des solidarités territoriales s’imposent</h2>
<p>Bien que la constante fondamentale en urbanisme ait toujours été la circulation d’idées, de bonnes pratiques et de modèles, la logique impose toutefois de savoir les réinterpréter et les adapter au contexte local. Et cette variable passe inévitablement par la connaissance du terrain dans ses plis et replis. Mais pas seulement ! La saisie des modes d’« habiter » et d’occuper l’espace est primordiale pour ancrer les stratégies dans la profondeur des réalités locales. Sous ce rapport, il est préconisé de créer une expertise au service des territoires, en priorité consacrée à l’aire métropolitaine dakaroise, sur laquelle portent les principaux grands investissements du <a href="https://www.sec.gouv.sn/dossiers/plan-s%C3%A9n%C3%A9gal-emergent-pse">Plan Sénégal émergent</a> (PSE).</p>
<p>Sans doute certains vont penser directement à <a href="http://www.anat.sn/">l’Agence nationale de l’aménagement du Territoire</a> (ANAT) ou à la <a href="http://www.servicepublic.gouv.sn/index.php/demarche_administrative/services/1/37">Direction de l’Urbanisme et de l’Architecture</a> (DUA). Si la première a une approche plutôt techniciste de l’aménagement du territoire, la seconde adopte une posture de l’ordre de l’informationnel voire du déclaratif. Aujourd’hui plus que jamais s’impose sur le triangle métropolitain une nouvelle approche des solidarités territoriales. Pourtant, le <a href="http://www.anat.sn/triangle-dtm/images/TelechargerLeSchema.pdf">schéma directeur d’aménagement et de développement territorial de la zone Dakar-Thiès-Mbour</a> préconise « la mise en place d’un dispositif incitatif et réglementaire qui va encadrer et promouvoir l’intercommunalité ». Si l’initiative est encore très pertinente, sa validation dans les formes et dans la pratique reste problématique.</p>
<p>La territorialisation des politiques publiques a été mal engagée. Il existe certes une stratégie de développement des solidarités territoriales dans la nouvelle réforme à travers la création de l’échelon « Ville ». Il reste néanmoins que sa portée et son contenu méritent d’être clarifiés, particulièrement les modalités contractuelles entre élus dans l’optique de l’évitement des conflits.</p>
<p>Un retour sur l’année 2015 permet de se remettre en mémoire les dissidences malencontreuses qui ont présidé à la <a href="https://www.seneweb.com/news/Politique/dissolution-de-l-entente-cadak-car-le-ps_n_167558.html">dissolution de l’Entente CADAK-CAR</a>, pourtant réputée être à l’époque un dispositif innovant dans la prise en charge de missions de service public. Aujourd’hui, le paysage institutionnel est morcelé et caractérisé par l’émiettement des responsabilités et des moyens. Le pluralisme gestionnaire est porteur de logiques plurielles qui ne vont pas dans le sens d’une cohérence d’ensemble de l’aire métropolitaine et donc de la gouvernabilité de la métropolisation.</p>
<p>En guise de participation au débat public dans un contexte de « dialogue national », nous apportons notre modeste contribution en invitant les acteurs à engager une double réflexion : d’une part, sur l’adéquation entre territoire institutionnel et territoire fonctionnel en évitant de privilégier les compromis politiques au détriment des considérations théoriques et techniques ; et, d’autre part, sur la création d’une agence de développement et d’urbanisme qui serait dotée d’un statut original et d’une mission de préparation des projets d’agglomération – métropolitains et territoriaux – et de veille scientifique et territoriale contribuant à la diffusion de l’innovation et des bonnes pratiques en termes de développement urbain durable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/134592/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mamadou Dit Papa Dieng ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La ville de Dakar ne doit pas être dotée d’un statut spécial, comme le souhaite le gouvernement. Au-delà de la ville, il convient de doter toute l’agglomération d’un gouvernement métropolitain.Mamadou Dit Papa Dieng, Doctorant en Aménagement de l'espace et urbanisme, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1308022020-03-23T18:47:04Z2020-03-23T18:47:04ZLa décentralisation, une histoire longue minée par les incohérences<p>La France peut-elle réellement adopter une décentralisation cohérente de son territoire ? Le 25 avril 2019, à l’occasion du Grand Débat national, le président de la République avait affirmé sa volonté d’ouvrir <a href="https://www.banquedesterritoires.fr/un-nouvel-acte-de-decentralisation-et-un-nouveau-pacte-territorial%29">« un nouvel acte de décentralisation adapté à chaque territoire »</a>.</p>
<p>Deux textes, la <a href="https://www.vie-publique.fr/loi/268675-loi-du-27-decembre-2019-engagement-dans-la-vie-locale-loi-sur-les-maires">loi engagement et proximité</a> et le <a href="https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/projet-de-loi-3d-decentralisation-differenciation-et-deconcentration">projet de loi 3D</a>, ainsi que plusieurs rapports parlementaires (rapport <a href="http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/colter/l15b1687_rapport-information">Cazeneuve et Viala</a>, rapport <a href="http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion_lois/l15b2539_rapport-information">Questel et Schellenberger</a>) ont été annoncés ou adoptés depuis sans pour autant qu’une visibilité totale du contenu de la réforme ne soit apparue.</p>
<h2>Une vision gestionnaire de la décentralisation</h2>
<p>D’où vient ce besoin crucial de décentralisation en France ? L’idéal des libertés locales, en tant que liberté de s’organiser à l’échelon de proximité a été construit dès l’Ancien Régime autour de l’imaginaire collectif et de la commune érigeant celle-ci comme un bastion puissant et relativement indépendant porteur de sens et de solidarité. Une vision politique de la décentralisation s’est ainsi peu à peu forgée, dans laquelle les communes resteraient maîtresses des grandes orientations de la vie publique locale.</p>
<p>Le [rapport Guichard en 1976](https://www.senat.fr/rap/r99-447-1/r99-447-13.html](https://www.senat.fr/rap/r99-447-1/r99-447-13.html) fait un constat de sclérose du fonctionnement de l’État et d’un besoin de décentralisation. Ce texte a fait émerger l’idée de décentralisation et la création d’un terreau favorable.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/319823/original/file-20200311-116270-18e1b2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/319823/original/file-20200311-116270-18e1b2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=761&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/319823/original/file-20200311-116270-18e1b2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=761&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/319823/original/file-20200311-116270-18e1b2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=761&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/319823/original/file-20200311-116270-18e1b2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=957&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/319823/original/file-20200311-116270-18e1b2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=957&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/319823/original/file-20200311-116270-18e1b2p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=957&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Hubert Dubedout, maire de Grenoble dans les années 80, penseur de la décentralisation.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b8/H._Dubedout0002.jpg">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Portée au début des années 80 par des hommes politiques comme Gaston Deferre (alors <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gaston_Defferre#Ministre">ministre de l’Intérieur</a> et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hubert_Dubedout">Hubert Dubedout</a> (maire de Grenoble), la décentralisation se traduisait par la construction d’un espace public à l’échelon local.</p>
<p>Cette vision politique était corroborée par une mise en perspective du principe de <a href="https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/1979/79104DC.htm">libre administration par le Conseil constitutionnel</a> et une valorisation de la clause générale de compétence. Cette dernière permet de prendre les décisions à l’échelon local sur toute question d’intérêt public local.</p>
<p>Ainsi, alors même que la décentralisation bénéficiait d’une aura positive et était présentée comme un élément de dynamique territoriale ayant amené du service à la population et la construction d’un certain nombre d’équipements (maisons de retraite, salles omnisports, terrains de tennis, salles de concert) la crise de 2008 allait marquer un tournant.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/IJ5ObeaEPgI?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<h2>Un regard très critique de la classe politique</h2>
<p>D’un discours valorisant de la décentralisation, la classe politique de façon quasi unanime a changé de ton pointant les dérives et juxtapositions d’échelons de ces processus.</p>
<p>Le discours de Toulon du 25 septembre 2008 de <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2009/03/06/reforme-des-collectivites-locales-nicolas-sarkozy-choisit-de-temporiser_1164467_823448.html">Nicolas Sarkozy</a>, et le <a href="https://www.fayard.fr/documents-temoignages/il-est-temps-de-decider-9782213644158">rapport Balladur</a> (<em>Il est temps de décider</em>, 2009) ont été particulièrement marquants, mettant en avant l’idée qu’il y a trop d’échelons, trop d’élus et que cela coûte trop cher.</p>
<p>La rationalisation des moyens et des structures est devenue le maître mot des réformes territoriales depuis, dans un contexte financier contraint et sous contrôle européen. Les lois qui se sont succédé, parfois loin de la logique de décentralisation – comme la <a href="https://www.vie-publique.fr/fiches/19610-la-loi-du-16-decembre-2010-de-reforme-des-collectivites">loi du 16 décembre 2010</a> de réforme des collectivités territoriales – sont venues dès lors essayer de rationaliser le paysage institutionnel, sans d’ailleurs y réussir.</p>
<p>Or l’édifice dans lequel l’ensemble des protagonistes a évolué semble vaciller depuis.</p>
<h2>Des attentes et des ambitions contraires</h2>
<p>L’État n’a ainsi pas abouti à une organisation rationnelle des structures et des compétences, en témoigne la juxtaposition toujours présente des échelons et des structures. Les élus locaux doivent composer avec des réformes imposées comme la <a href="http://www.leparisien.fr/politique/fusion-des-regions-le-bilan-severe-de-la-cour-des-comptes-25-09-2019-8159958.php">fusion des régions</a> ; les administrés peinent à se reconnaître dans des structures où les aspects techniques et technocratiques prennent le dessus sans questionner la base.</p>
<p>La fusion des intercommunalités et la constitution <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89tablissement_public_de_coop%C3%A9ration_intercommunale">d’Établissements publics de coopération intercommunale XXL</a> (EPCI, partir de 50 communes) en constituent une bonne illustration.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/319826/original/file-20200311-116281-u6gg35.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/319826/original/file-20200311-116281-u6gg35.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/319826/original/file-20200311-116281-u6gg35.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/319826/original/file-20200311-116281-u6gg35.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/319826/original/file-20200311-116281-u6gg35.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/319826/original/file-20200311-116281-u6gg35.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/319826/original/file-20200311-116281-u6gg35.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/319826/original/file-20200311-116281-u6gg35.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Carte des intercommunalités du département de la Loire, France. Composition au 1ᵉʳ janvier 2019.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_intercommunalit%C3%A9s_de_la_Loire#/media/Fichier:42-Loire-intercos-2019.png">Roland45/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Chaque réforme, au lieu de simplifier, a au contraire complexifié le phénomène en y ajoutant de nouveaux éléments.</p>
<p>La création des <a href="https://www.vie-publique.fr/fiches/20131-que-sont-les-poles-metropolitains-crees-par-la-loi-de-2010">pôles métropolitains en 2010</a> en constitue une bonne illustration. Cette création a elle-même été suivie en 2014 de celle des pôles d’équilibre territoriaux et ruraux en milieu rural.</p>
<p>C’est aussi dans cette ligne que les réformes ont été effectuées sous la mandature de François Hollande. Elles ont été en grande partie imposées aux collectivités territoriales, peu concertées, comme la loi NOTRe adoptée le 7 août 2015 et portant sur la <a href="https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/loi-portant-sur-la-nouvelle-organisation-territoriale-de-la-republique-notre">nouvelle organisation du territoire</a>.</p>
<h2>Un bilan sévère de la loi NOTRe</h2>
<p>[Le rapport d’information](http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/rap-info/i2539.pdf](http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/rap-info/i2539.pdf) de l’Assemblée nationale publié le 21 janvier 2020 dresse un bilan sévère de cette loi.</p>
<p>Les titres et sous-titres des différents chapitres de ce rapport parlent d’eux-mêmes :</p>
<blockquote>
<p>« Une loi mal née qui n’a pas atteint ses objectifs »</p>
<p>« Un big bang territorial conduit à marche forcée »</p>
<p>« Une organisation territoriale plus complexe et une perte de proximité pour les citoyens »…</p>
</blockquote>
<p>Le constat semble sans appel tant sur la méthode que sur le fond. Les recompositions opérées n’ont pas permis de trouver une cohérence globale et ne se sont pas traduites par des économies. La fusion des régions par exemple s’est révélée coûteuse et n’a pas généré les <a href="https://www.ccomptes.fr/system/files/2019-09/20190924-synthese-Finances-publiques-locales-2019-fascicule2_0.pdf">économies attendues</a>.</p>
<p>Il est ainsi pointé que la fusion des régions avec la création des grandes régions ou encore le développement d’<a href="https://www.lagazettedescommunes.com/645071/le-rapport-qui-rehabilite-les-intercommunalites-xxl">intercommunalités</a> ont été entrepris de façon dogmatique et sans que les économies annoncées ne soient au rendez-vous.</p>
<h2>Donner des gages aux élus locaux</h2>
<p>Afin de donner des gages aux élus locaux à la veille des élections municipales, un nouveau texte a été présenté alors même que se dessine en creux la <a href="https://www.cget.gouv.fr/actualites/edouard-philippe-et-jacqueline-gourault-presentent-le-projet-de-loi-3d">réforme dite 3D</a> : « décentralisation, déconcentration et différenciation » qui fait actuellement <a href="https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/projet-de-loi-3d-decentralisation-differenciation-et-deconcentration">l’objet de concertations</a> à travers le territoire. L’examen de la loi a été récemment ajourné à <a href="https://www.lagazetedescommunes.com/665857/loi-3d-jacqueline-gourault-annonce-un-examen-plutot-apres-lete/">« après l’été »</a> d’après la ministre de la Cohésion des territoires, Jacqueline Gourault.</p>
<p>Ce n’est donc pas une révision constitutionnelle que nous aurons mais un projet de loi suscitant des attentes qu’il ne faudra pas décevoir…</p>
<h2>Revaloriser la commune ?</h2>
<p>Il n’est pas sûr pour autant que le discours actuel de revalorisation de la commune, (par exemple avec des scissions d’<a href="https://www.collectivites-locales.gouv.fr/cartographie-des-epci-a-fiscalite-propre">EPCI à fiscalité propre</a>, de mesures en faveur des petites communes, soit porteur de sens alors que la perspective globale semble quand même aller vers un renforcement de l’intercommunalité. On est ainsi soumis à des mouvements de composition, recompositions dont on peine à voir la cohérence globale.</p>
<p>Si depuis 2010 le législateur s’est attaché à mettre en place des moyens coercitifs de regroupement, revaloriser la commune comme idéal semble tout aussi discutable.</p>
<p>Par ailleurs, alors même que les <a href="https://www.francebleu.fr/infos/societe/pourquoi-les-communes-se-regroupent-elles-1547573504">communes nouvelles</a> commencent à trouver leur place dans le paysage institutionnel, la revalorisation du statut des élus des petites communes pose question.</p>
<p>Pour autant, la création d’une commune nouvelle constitue très certainement une hypothèse d’étude intéressante pour pallier l’émiettement communal et faire face à des dépenses que ne peuvent plus assumer les plus petites communes.</p>
<h2>La différenciation en question</h2>
<p>La différenciation, qui vise à permettre une adaptation de la règle en fonction des réalités locales, au cœur du projet de loi 3D, même si ce dernier est évolutif, permet par exemple à certaines communes de délivrer des <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/606788/droit-a-la-differenciation-vers-une-nouvelle-etape-de-la-decentralisation/">cartes d’identité</a>. Dans d’autres cas, cela permet à un département d’élaborer un Schéma de cohérence territoriale (SCoT) ou entre <a href="https://www.banquedesterritoires.fr/inter-scot-des-territoires-en-devenir">départements</a>, une mesure aujourd’hui plébiscitée et valorisée par l’ensemble des acteurs que ce soit la classe politique, les élus locaux ou encore le gouvernement.</p>
<p>Certes, la prise en compte des spécificités territoriales existe déjà dans le texte constitutionnel (article 73, collectivité à statut particulier) ou dans les dispositifs prévus (Loi littoral, loi montagne, expérimentations…).</p>
<p>Mais le fait d’en permettre un exercice élargi semble susciter un engouement sans commune mesure avec les risques d’inégalités engendrés. Pourtant, au lieu de faire un véritable diagnostic de l’état des lieux de l’exercice des compétences, le gouvernement préfère donner des gages qui risquent d’être limités.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/n79lArY4cAE?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">La loi littoral permet à certaines communes d’agir en fonction de leurs spécificités (ici en 2018 discussion autour de modifications de cette loi).</span></figcaption>
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<h2>Des écueils à prévoir</h2>
<p>La possibilité de différenciation restera ainsi encadrée au regard du principe d’égalité et elle évoluera dans un cadre constitutionnel inchangé comme l’a souligné le <a href="https://www.vie-publique.fr/discours/272705-jacqueline-gourault-06012020-decentralisation">discours de Mme Gourault</a> du 6 janvier 2020 à l’occasion de la première des concertations régionales avec les élus locaux à Arras.</p>
<p>La différenciation engendrera aussi une complexité juridique à tous les niveaux, qui pourrait se traduire par une perte de confiance dans les institutions et le développement de territoires à deux vitesses entre ceux qui auront les moyens de faire, ceux qui auront des spécificités suffisantes à faire valoir et les autres restant soumis au corpus général.</p>
<p>L’enjeu est bien réel dans la mesure où il s’agit à la fois de permettre à des collectivités de même rang de gérer des compétences différentes ou encore de maintenir notamment au-delà d’une expérimentation un dispositif dérogatoire.</p>
<p>Pour autant, comme l’a souligné le <a href="https://www.conseil-etat.fr/ressources/avis-aux-pouvoirs-publics/derniers-avis-publies/differenciation-des-competences-des-collectivites-territoriales-relevant-d-une-meme-categorie-et-des-regles-relatives-a-l-exercice-de-ces-competences">Conseil d’État</a> dans un avis rendu le 7 décembre 2017, la différenciation de compétence doit demeurer limitée. Elle ne doit pas remettre en question les distinctions opérées par la Constitution entre les collectivités qui relèvent de l’article 72 et d’un principe d’identité législative et celles qui relèvent de l’article 73 et d’un principe d’adaptation législative (reconnu pour les départements et les régions d’outre-mer).</p>
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<figcaption><span class="caption">Cette nouvelle collectivité va se substituer aux deux départements alsaciens à partir de 2021.</span></figcaption>
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<p>Une différenciation ne peut être ainsi légitimée que par une différence de situation ou encore des considérations d’intérêt général en lien avec l’objet de la réglementation. Pour les collectivités de même rang, il faudra ainsi faire valoir la spécificité et les considérations d’intérêt général comme cela a été le cas, de façon limitée, pour la collectivité européenne d’Alsace.</p>
<p>Le véritable changement en droit des collectivités territoriales serait alors très certainement de revenir à des fondamentaux structurant la matière tels le principe de libre administration et l’autonomie financière. Cela permettrait de redonner du sens à des territoires porteurs de projets pour répondre aux besoins locaux sans ouvrir une boîte à outils administratifs qui risque de creuser les écarts entre les territoires.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/130802/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Martine Long est membre d'une structure de démocratie participative.
Membre du conseil de développement de Loire Angers </span></em></p>Les attentes et ambitions de la décentralisation en France présentent de nombreuses contradictions.Martine Long, Maitre de conférences (HDR) en droit public, Université d'AngersLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1310942020-02-06T18:21:15Z2020-02-06T18:21:15ZLe maire doit-il gérer une ville comme une entreprise ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/313337/original/file-20200203-41527-ijs2gu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=146%2C34%2C4327%2C3069&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les maires cherchent dorénavant à concilier missions de service public et nouvelles manières de gouverner l’espace public.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Shocky / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>La fonction de maire fait aujourd’hui face à une transformation du paradigme qui fondait l’action publique locale : les collectivités territoriales sont passées de l’administration de la chose publique à une gouvernance de l’action publique, détournant le rôle d’administrateur du maire vers un rôle de manager.</p>
<p>Certes, la casquette d’administrateur subsiste. Il s’agirait plutôt d’évoquer une hybridation de la place du maire, qui doit aujourd’hui concilier la traditionnelle mission de service public, avec les nouvelles manières de gouverner l’espace public.</p>
<h2>Notions de performance et d’efficacité</h2>
<p>Ainsi, le maire fait cohabiter un rôle public, dans lequel il doit <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/535291/portrait-robot-le-maire-manager/">respecter un cadre juridique</a> drastique tel que prévu par le code général des collectivités territoriales ou encore les règles textuelles et jurisprudentielles, avec un environnement de plus en plus managérial intégrant les notions de performance, d’efficacité et tous les indicateurs d’actions provenant du secteur privé.</p>
<p>Le maire ne peut qu’endosser ce rôle de manager correctement s’il noue des collaborations à l’intérieur de la collectivité et l’extérieur de la collectivité. Les collaborations peuvent se faire aussi bien lorsque le maire agit pour le compte de la collectivité en faisant des partenariats public-privée, ou encore en mettant en place des mécanismes de décision publique intégrant les administrés, cela est le produit d’un management de nature externe favorisant une inclusion économique et citoyenne.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/313532/original/file-20200204-41516-1tl93bj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/313532/original/file-20200204-41516-1tl93bj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/313532/original/file-20200204-41516-1tl93bj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/313532/original/file-20200204-41516-1tl93bj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/313532/original/file-20200204-41516-1tl93bj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/313532/original/file-20200204-41516-1tl93bj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/313532/original/file-20200204-41516-1tl93bj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Projet de « manager de rue » porté par le candidat à la mairie de Paris Benjamin Griveaux.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://twitter.com/le_Parisien/status/1223681781892820993?s=20">Le Parisien/Twitter</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette inclusion économique permet de réduire les coûts de l’action publique territoriale en ayant recours à des marchés publics avec des acteurs privés. Le maire va ainsi prendre en compte le critère du mieux-disant pour retenir l’offre de service ayant le meilleur ratio coût/efficacité pour la collectivité. Concernant l’inclusion citoyenne, elle permet une démocratie de proximité favorisant une prise de décision collective des administrés sur des problématiques les concernant directement.</p>
<p>Cette collaboration a un second volet beaucoup plus concret pour traduire la fonction de manager de maire : la collaboration interne intégrant des acteurs à l’intérieur de la collectivité.</p>
<h2>Un maire DRH</h2>
<p>Dans le secteur public, le maire, qui fixe la politique de recrutement de la collectivité, joue ainsi un rôle de directeur des ressources humaines. Lorsqu’il recrute, il le fait sur la base du statut de la fonction publique territoriale, mais il a aussi la possibilité de recruter des contractuels. Cette deuxième option permet au maire d’avoir plus de flexibilité car il n’a plus le souci de respecter scrupuleusement le cadre statutaire de la fonction publique. Par ailleurs, il doit faire attention dans le cadre de sa gestion afin de trouver un équilibre entre les ressources et les dépenses de la collectivité. Cela signifie qu’il doit veiller à ne pas avoir une masse salariale trop conséquente.</p>
<p>Ajoutons que le maire, dans sa fonction de manager, peut mettre en place des dispositifs de travail innovants empruntés au secteur privé, par exemple, le télétravail, pour permettre aux employés municipaux d’avoir un équilibre vie privée/vie professionnelle. Il peut aussi mettre en place des mécanismes incitatifs de lutte contre l’absentéisme par l’allocation de primes, ou encore des primes aux résultats pour favoriser l’implication des agents territoriaux.</p>
<p>La taille de la commune est un critère important dans cette notion de maire manager, puisque plus une commune est grande, plus les espaces de collaborations seront manifestes dans l’espace interne et externe. De même, plus une commune sera implantée dans un territoire urbanisé, plus cette dimension managériale s’imposera, car l’urbanisation produit un échange des pratiques du secteur privé avec le secteur public créant de fait une interdépendance des deux secteurs.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1149195779594170368"}"></div></p>
<h2>Réalité politique</h2>
<p>Un autre critère permet aussi de situer le maire dans une configuration managériale, c’est la configuration politique. En effet, les communes, dans l’organisation décentralisée française, unissent leurs actions dans des structures de coopération intercommunales. Ces entités sont les nouvelles arènes de gouvernance, puisque la mutualisation de l’action des communes implique une pluralité des sources pour certains financements stratégiques. Dans ces structures, le maire doit savoir gérer de manière efficace les intérêts de sa commune en faisant des compromis.</p>
<p>Toutefois, le rôle de maire garde une dimension politique évidemment plus prononcée que pour manager. Il doit notamment gérer sa majorité, de sorte qu’elle fasse passer des délibérations municipales en conseil municipal. Il doit donc <a href="http://www.managerattitude.fr/9938001/le-maire-un-manager-de-proximite.html">susciter l’union sacrée dans ses rangs politiques</a>, et parfois avec l’opposition en nouant des coalitions ou des alliances de circonstances.</p>
<p>Surtout, si le fruit de son travail peut être évalué par des tableaux de bords sociaux, des chiffres, des actions concrètes, le scrutin reste la seule évaluation qui vaille. C’est souvent lors d’une élection municipale qu’un maire peut présenter ce qu’il a fait pour la commune, et c’est le vote qui va déterminer le bien-fondé de son bilan politique.</p>
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<p><em>Article rédigé par Médy Ouichka, doctorant en droit public à l’Université de Lorraine, sous la direction de Léonard Matala-Tala, maître de conférences (habilité à diriger des recherches) de droit public (Université de Lorraine).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/131094/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Médy Ouichka ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les élus doivent désormais composer avec des notions issues du secteur privé telles que la « performance ». Leur gestion communale garde toutefois un certain nombre de spécificités.Médy Ouichka, Doctorant en droit public, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1266512019-12-08T21:11:04Z2019-12-08T21:11:04ZComprendre la polémique sur la consigne des bouteilles plastiques<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/305395/original/file-20191205-39009-o5j0uz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/photos/bottles-plastic-recycling-container-4673606/">D.Moriarty/Pixabay </a></span></figcaption></figure><p>Alors que le <a href="https://www.senat.fr/leg/pjl18-660.html">projet de loi</a> « Antigaspillage pour une économie circulaire » est en cours de discussion au Parlement, les débats sont vifs autour du « projet de consigne » qui devrait concerner les bouteilles en plastique transparent (PET), évoqué à l’article 8 du texte. Pourquoi une telle polémique ?</p>
<p>Pour y répondre, il faut d’abord rappeler ce qu’est la consigne. Il s’agit d’une somme qu’un vendeur ajoute à un bien de consommation (souvent équivalente de 5 à 10 % du prix du bien) qui sera restitué au consommateur si ce dernier rapporte le bien usagé.</p>
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<figcaption><span class="caption">Vers la fin du tout-jetable en France ? (Euronews, juillet 2019).</span></figcaption>
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<h2>Consigne et « responsabilité élargie des producteurs »</h2>
<p>Pour éclairer la discussion, il est utile de replacer la consigne dans le contexte politique, économique et institutionnel de la gestion des déchets en France.</p>
<p>Aujourd’hui, la collecte et le traitement (comprendre le réemploi, le recyclage, l’incinération ou la mise en décharge) des déchets d’emballage sont assurés par les collectivités locales. Elles sont financées par un éco-organisme, Citéo, qui est chargé de collecter auprès des producteurs leurs « éco-contributions », sorte de taxe obligatoire sur chaque produit d’emballage mis sur le marché. Ce mécanisme de financement est appelé « responsabilité élargie des producteurs » (REP).</p>
<p>La filière des emballages est couverte par la REP depuis 1992, tandis que d’autres filières de déchets ont vu le jour entre les années 2000 et aujourd’hui : déchets d’équipements électriques et électroniques, véhicules en fin de vie, piles et batteries, textiles, meubles…
Promue par l’Union européenne, mais aussi par l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), la REP est devenue <a href="https://www.alternatives-economiques.fr/limites-principe-pollueur-payeur/00038078">l’instrument économique</a> et politique « cadre » dans la gestion des déchets. En France, on compte <a href="https://www.ademe.fr/expertises/dechets/elements-contexte/filieres-a-responsabilite-elargie-producteurs-rep">15 filières</a> gérées par une vingtaine d’éco-organismes.</p>
<p>La filière des emballages demeure une exception en ce qu’elle est une filière dite « financière » où les collectivités demeurent chargées de la gestion des déchets, par opposition aux filières « opérationnelles » où les éco-organismes peuvent organiser eux-mêmes la collecte et le traitement.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-dechet-une-nouvelle-ressource-a-gerer-en-commun-113413">Le déchet, une nouvelle ressource à gérer en commun ?</a>
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<p>La REP permet de financer une politique publique via des contributions privées. Les pouvoirs publics contrôlent les éco-organismes par le biais de négociation d’un cahier des charges qui spécifie des objectifs quantifiés de collecte, ou de recyclage (75 % dans le <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/CDC_emballages_modifi%C3%A9_du_13avril2017.pdf">cas des emballages</a>), et fixe les modalités de contributions financières. La REP peut être considérée comme un « paradigme politique industriel », c’est-à-dire une politique publique stabilisée qui organise les activités économiques selon des <a href="https://doi.org/10.1017/CBO9781139174183">principes d’efficacité partagés</a>.</p>
<p>Le projet de loi actuellement en discussion accorde une part très importante à cet outil : il renforce en effet de nombreuses obligations au sein des REP existantes, prévoit également la création de nouvelles filières – jouets, outils de bricolage, outils de jardinage, produits de tabac, BTP. On dénombre plus de 244 occurrences du terme « responsabilité élargie des producteurs » dans le texte entier du projet de loi.</p>
<p>Or, le système de consigne semble entrer en contradiction avec la REP financière en vigueur dans le secteur des emballages en France. Car la consigne pourrait se traduire par une remise en question de l’action des collectivités qui se sont, depuis une trentaine d’années, engagées financièrement et contractuellement avec des opérateurs de tri, de recyclage ou d’incinération des déchets d’emballage. Les recycleurs seraient, par ricochet, également affectés, en perdant l’accès privilégié aux gisements de ces déchets.</p>
<h2>La remise en cause d’un compromis</h2>
<p>Les collectivités et les recycleurs sont prisonniers du phénomène de <a href="https://www.cairn.info/dictionnaire-des-politiques-publiques--9782724611755-page-411.htm">« dépendance au chemin emprunté »</a> : les investissements passés orientent les décisions futures. Ils ont construit leur stratégie dans un cadre défini – le tri et le recyclage des matières – institutionnalisé grâce à la REP. Ils sont donc <a href="https://doi.org/10.2307/2950710">tentés de défendre</a> une organisation de la filière en cohérence avec leur activité, comme cela a été démontré <a href="https://doi.org/10.1016/j.jclepro.2012.12.009">pour l’incinération en Suède</a>.</p>
<p>En ayant introduit l’idée que la consigne pourrait devenir le système dominant de collecte des déchets d’emballage, et faisant passer celle-ci sous le contrôle des acteurs privés, le gouvernement a créé une vive inquiétude au sein des collectivités locales et des recycleurs. Ces « parties prenantes » pourraient ici devenir les « parties perdantes ».</p>
<p>Le projet gouvernemental de généralisation de la consigne est motivé par une critique sévère des résultats du système actuel de collecte, de tri et de recyclage des emballages. Au regard des ambitions environnementales affichées – taux de collecte de <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/fr/TXT/?uri=CELEX:32019L0904">90 % en 2030</a> et objectif de <a href="https://www.senat.fr/leg/pjl18-660.pdf">« 100 % de plastiques recyclés »</a> – il faut changer le système.</p>
<p>Si on pouvait s’attendre à ce que les collectivités et les recycleurs s’opposent au projet de consigne pour recyclage, la surprise vient aussi d’autres parties prenantes, comme certaines ONG de protection de l’environnement, poursuivant des objectifs différents mais s’alliant dans la <a href="https://www.zerowastefrance.org/wp-content/uploads/2019/10/20191009_propositions-consigne-ong-environnementales.pdf">critique de la consigne pour recyclage</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1141280699397398528"}"></div></p>
<h2>La consigne critiquée</h2>
<p>Selon ses détracteurs, la consigne présente divers désavantages.</p>
<p>Socialement, elle viserait à responsabiliser des consommateurs qui, déjà aux prises avec de nombreuses injonctions relatives à la « vertu » de leur consommation, se verraient rajouter la question de la gestion des déchets. La consigne risquerait même de créer de la confusion pour le citoyen dans son geste de tri.</p>
<p>Économiquement, si la consigne supprime potentiellement les coûts, pour les collectivités locales, de collecte de certains déchets (pour les emballages, ils atteignent <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/2019.09.12_la_consigne_impact_financier_pour_les_collectivites.pdf">1,2 milliard d’euros</a>), elle fait également perdre des recettes, liées surtout à la suppression du soutien de Citéo pour ces types d’emballages, mais aussi à la perte de revente de matière.</p>
<p>Enfin, sur le plan environnemental, il n’est pas certain que les émissions de gaz à effet de serre dues au transport des déchets jusqu’aux points de collecte rendent le bilan carbone de la consigne intéressant. De plus, mieux collecter, et donc mieux recycler les matériaux, peut faire <a href="https://theconversation.com/pourquoi-leconomie-circulaire-ne-doit-pas-remplacer-la-sobriete-119021">craindre un « effet rebond »</a> : les consommateurs pourraient avoir moins de scrupule à utiliser des bouteilles en plastique dès lors qu’elles sont consignées, plutôt que d’adopter des pratiques plus sobres comme l’usage systématique de la gourde.</p>
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<figcaption><span class="caption">La consigne pour recyclage n’est pas nécessaire pour recycler 90 % des bouteilles plastiques. (Reporterre, 2019).</span></figcaption>
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<p>Les détracteurs de la consigne ont donc proposé une <a href="https://federec.com/FEDEREC/documents/CPCONSIGNEV11h452306copie1602.pdf">solution alternative</a>. Les collectivités, via le Cercle national du recyclage, proposent ainsi de mettre en place un système de collecte étendu aux emballages ménagers consommés hors foyer, dans les lieux publics (gares, parcs, centres commerciaux…), ce qui permettrait d’augmenter la performance de la filière.</p>
<p>Il faut enfin mentionner dans ce débat le travail de « cadrage » fourni par Jacques Vernier, une figure importante du milieu de la REP. Président de la commission des filières REP, il est l’auteur d’un <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/REP_Rapport_Vernier.pdf">rapport de référence</a> qui a fortement inspiré le projet de loi. On lui doit également un <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/2019.09.12_pre-rapport_de_jacques_vernier-consigne.pdf">pré-rapport sur la consigne</a> publié en septembre 2019, clarifiant les positions, principalement économiques, des parties prenantes ; notamment celles du « collectif boisson », constitué autour de Citéo et qui a transmis un <a href="https://dechets-infos.com/consigne-le-rapport-confidentiel-et-ses-chiffres-etonnants-4920112.html">rapport confidentiel</a> au ministère en janvier 2019.</p>
<p>Dans son rapport final, publié le 4 décembre 2019, Jacques Vernier se prononce en faveur de la consigne en l’assortissant d’une série de mesures destinées à résoudre les externalités mises en avant par ses détracteurs. Plus important peut-être, il qualifie la consigne de « responsabilité ciblée des producteurs ».</p>
<p>Il est ici intéressant de remarquer que Citéo se positionne sur les deux scénarios, à savoir l’adoption de la consigne pour emballage, ou l’« accélération des leviers » pour la collecte des emballages « bac jaune ».</p>
<h2>Ouvrir la controverse</h2>
<p>L’activité médiatique et institutionnelle des acteurs de la collecte et du recyclage aura contribué ces derniers mois à braquer l’attention sur le devenir de la consigne.</p>
<p>Quand le <a href="https://www.senat.fr/leg/tas18-148.pdf">Sénat a amendé l’article 8bis</a> en faisant porter la consigne exclusivement sur le réemploi, le projet est devenu incertain ; puis la Commission du développement durable de l’Assemblée nationale <a href="http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/rapports/r2454-aCOMPA.pdf">l’a supprimé</a> et il a semblé abandonné.</p>
<p>Mais cette <a href="https://www.environnement-magazine.fr/recyclage/article/2019/11/22/126816/emballages-aura-pas-consigne-sur-les-plastiques-savoure-amf">apparente « victoire »</a> des collectivités et des recycleurs est tout aussi réversible : le 25 octobre 2019, la secrétaire d’État Brune Poirson lançait ainsi <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/intervention-brune-poirson-reunion-acteurs-filiere-boisson-presentation-charte-verre-100-solutions">l’idée d’une consigne « mixte »</a>.</p>
<p>Alliant recyclage des bouteilles en plastique et réemploi des bouteilles en verre, cette proposition hybride, inspirée des travaux de Jacques Vernier, semble <a href="https://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/Avis/2019/2019_26_matiere_premiere_secondaire.pdf">avoir les faveurs</a> des institutions politiques concernées ; le 26 novembre 2019 est annoncée la <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/communique-presse-concertation-sur-consigne-letat-et-representants-collectivites-saccordent-sur">poursuite de la concertation</a> menée par le ministère de la Transition écologique. Et, le <a href="http://videos.assemblee-nationale.fr/video.8499270_5ddfcf1512ab1.commission-du-developpement-durable%20--%20lutte-contre-le-gaspillage-et-economie-circulaire-suite-28-novembre-2019">28 novembre 2019</a>, Brune Poirson a demandé à remettre le débat à la séance en hémicycle, suspendant ainsi l’espace parlementaire de controverse.</p>
<p>Les luttes politiques autour de la consigne témoignent des avantages et des risques d’une politique des déchets négociée avec les collectivités et les acteurs de la filière dans le cadre institutionnel de la REP. La consigne, parce qu’elle constitue une alternative crédible à la filière en place, peut être un levier mobilisable par le gouvernement pour encourager cette filière à progresser sur le plan économique et environnemental. Néanmoins, cette nouvelle stratégie du gouvernement affaiblit la crédibilité de ce cadre institutionnel, qui perdrait en continuité et en cohérence, ce dont les collectivités et les acteurs économiques ont besoin pour sécuriser leurs investissements.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/126651/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Vincent Jourdain a reçu des financements du projet de recherche CDP CIRCULAR, dans le cadre de l'IDEX de l'Université Grenoble-Alpes. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Thomas Reverdy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour décrypter le débat actuel sur la consigne, il faut revenir au cadre dans lequel s’inscrit la politique des déchets en France, conduite avec les collectivités et les acteurs du recyclage.Vincent Jourdain, Doctorant en sociologie économique, Université Grenoble Alpes (UGA)Thomas Reverdy, Maître de conférences HDR en sociologie, Institut polytechnique de Grenoble (Grenoble INP)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1270592019-11-20T22:39:49Z2019-11-20T22:39:49ZLe sport, cet atout politique des maires<p>Salle de sport, terrains de football, gymnases : au moment du bilan, les maires n’hésitent pas à mettre en avant <a href="https://www.lavoixdunord.fr/659993/article/2019-11-02/mouchin-construction-de-la-salle-de-sport-et-renovation-de-la-mairie-au-bilan-du#&VP=0">leurs efforts en matière d’équipement sportifs</a>, rappelant à quel point le sport, son accessibilité et sa diffusion sont cruciaux dans l’espace politique local.</p>
<p>En 2019 <a href="http://www.sports.gouv.fr/accueil-du-site/actualites/article/L-agence-nationale-du-sport-est-nee">lors de la création de l’Agence nationale du sport</a> (24 avril), David Lazarus, maire de Chambly (Hauts-de-France) et co-président du groupe de travail « sports » de l’association des maires de France (AMF) n’hésitait d’ailleurs pas à souligner,</p>
<blockquote>
<p>« On porte déjà le sport au quotidien en soutenant les équipements et les clubs. En nous mettant autour de la table, l’État nous donne un pouvoir de décision au niveau national mais aussi territorial. Disposer d’un guichet unique au niveau régional, ce sera un accélérateur formidable pour les collectivités. »</p>
</blockquote>
<p>Depuis le <a href="https://www.cairn.info/revue-outre-terre1-2004-3-page-13.htm">début du XX<sup>e</sup> siècle tout particulièrement</a>, les liens entre mondes sportif et politique se sont développés à mesure que le sport est devenu un enjeu médiatique, notamment sur une échelle nationale et internationale, et à tel point qu’on évoque régulièrement l’impact de la diplomatie sportive dans les <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-et-strategique-2013-1-page-131.htm">relations internationales</a>, bien qu’il soit plus supposé que réel et durable.</p>
<p>Mais on connaît moins les <a href="https://koebel.pagesperso-orange.fr/ListePubli1.htm">enjeux politiques locaux du sport</a> et plus particulièrement les profits symboliques que les instances locales de pouvoir peuvent tirer de la mise en scène du sport et des sportifs, quand ils sont porteurs d’une identité locale.</p>
<h2>Des parcours similaires vers le pouvoir</h2>
<p>Les deux espaces – politique et associatif – tirent profit l’un de l’autre pour plusieurs raisons. Il existe tout d’abord de nombreuses similitudes entre eux, quant à la manière d’accéder aux positions de pouvoir respectives.</p>
<p>Les compétences nécessaires pour accéder à des positions de pouvoir dans ces deux espaces (dirigeants associatifs ou édiles locaux) favorisent <a href="https://injep.fr/publication/parcours-de-jeunes-maires-de-france-inegalites-dacces-et-accentuation-des-clivages-au-cours-du-mandat/">ceux qui les ont déjà acquises</a> dans d’autres espaces (familial, scolaire, professionnel) et constituent un puissant filtre social : on ne trouve que 6 % d’ouvriers parmi les présidents d’associations – et ce chiffre tombe à 1 % dans celles qui ont plus de 20 salariés. De la même façon, on ne compte que <a href="https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/repertoire-national-des-elus-1/">0,8 % d’ouvriers</a> parmi les maires des communes de plus de 2 500 habitants.</p>
<p>Les instances de décision qui sont censées être des lieux de délibération démocratique ne sont le plus souvent que des chambres d’enregistrement de décisions qui se prennent entre acteurs centraux (ce que je soulève dans <a href="https://koebel.pagesperso-orange.fr/pdf/LePouvoirLocal.pdf"><em>Le pouvoir local ou la démocratie improbable</em></a>, éditions du Croquant) et n’ont pas grand-chose à voir avec la démocratie, et ce, d’autant plus que la ville ou l’association sont plus grandes.</p>
<p>On sait que l’investissement associatif peut constituer un tremplin politique, notamment pour accéder au poste d’adjoint chargé des sports. C’est le cas aussi de sportifs ayant conquis une certaine notoriété, à qui l’on peut proposer de faire partie du conseil municipal. On peut citer la récente candidature de <a href="https://www.atlantico.fr/atlantico-light/3582594/l-ancien-footballeur-vikash-dhorasoo-sera-candidat-a-la-mairie-de-paris-sous-les-couleurs-de-la-france-insoumise-et-avec-danielle-simonnet-lfi-ludovic-obraniak-lr-lille-marc-philippe-daubresse">Vikash Dhorasoo, ancien footballeur, à la mairie de Paris</a> sous les couleurs de la France Insoumise.</p>
<p>Ainsi les élus locaux savent – ou apprennent très vite – que les associations sportives de la commune sont une richesse qu’il peuvent/doivent utiliser à leur profit.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/301770/original/file-20191114-26207-6o04um.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/301770/original/file-20191114-26207-6o04um.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=361&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/301770/original/file-20191114-26207-6o04um.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=361&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/301770/original/file-20191114-26207-6o04um.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=361&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/301770/original/file-20191114-26207-6o04um.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=454&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/301770/original/file-20191114-26207-6o04um.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=454&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/301770/original/file-20191114-26207-6o04um.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=454&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Fête du sport à Jacou, dans la région de Montpellier. Démonstration de capoeira après le discours du maire.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pxhere.com/fr/photo/168987">Pxhere</a></span>
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<h2>Grâce aux communes, le foot n’est pas un sport de riches</h2>
<p>Aucune loi n’a jamais obligé les élus locaux à subventionner les associations ou à construire et mettre à leur disposition des équipements sportifs (sauf ceux destinés à l’EPS scolaire et sauf dans le cas où une structure intercommunale s’est dotée de cette compétence), mais tous le font.</p>
<p>C’est qu’il y a bien un intérêt à cela. Pourquoi est-il si facile, par exemple, d’obtenir en mairie ou sur son site Internet la liste à jour de toutes les associations sportives de la commune ?</p>
<p>Parce qu’elle constitue une belle carte de visite pour le maire, le <a href="https://www.marckolsheim.fr/Cultures-Sports-Loisirs/Sports/Activites-sportives.html">dynamisme associatif local étant repris à son compte pour symboliser son propre rayonnement</a>.</p>
<p>Les collectivités territoriales investissent entre 5 et 10 % de <a href="https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/184000764.pdf">leur budget annuel dans le sport</a>, soit environ 8,5 milliards de dépenses sportives (pour les seules communes et communautés) sur 99 milliards au total, ce qui représente deux tiers de l’investissement public dans ce domaine (près de 10 milliards d’euros).</p>
<p>Si elles arrêtaient de financer le football par exemple et que les clubs devaient acheter leurs terrains, les aménager et les entretenir seuls, dans certaines villes moyennes ou grandes, cela coûterait aussi cher que le golf et on stigmatiserait le football comme « un sport de riches »…</p>
<h2>Rester attractif à tout prix</h2>
<p>Les baisses drastiques de subventions de l’État aux collectivités et l’incitation corrélative à devenir de plus en plus attractif (sur un fond de crise financière et économique) ont provoqué une compétition presque généralisée entre collectivités.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/301768/original/file-20191114-26262-jttest.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/301768/original/file-20191114-26262-jttest.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/301768/original/file-20191114-26262-jttest.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=492&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/301768/original/file-20191114-26262-jttest.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=492&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/301768/original/file-20191114-26262-jttest.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=492&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/301768/original/file-20191114-26262-jttest.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=619&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/301768/original/file-20191114-26262-jttest.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=619&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/301768/original/file-20191114-26262-jttest.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=619&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Mise en compétition entre les collectivités. Recherche « google » simple sur les mots clefs : « communes gagner en attractivité ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Google</span></span>
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<p>Il s’agit ainsi d’attirer sur son territoire les entreprises et les emplois, les touristes et leur pouvoir d’achat, les citoyens solvables et leurs impôts, et ce, qu’on le veuille ou non, au détriment des communes moins bien loties – on dira « moins dynamiques » –, des départements et des régions moins attractifs, des pays voisins moins bien évalués par les agences de notation financière…</p>
<p>Comment devient-on attractif ? La réponse est très simple : il faut savoir se vendre. Or le sport joue dans cette quête un rôle non négligeable qui peut même parfois devenir central.</p>
<h2>Renforcer l’identité locale</h2>
<p>De nombreuses municipalités misent d’abord sur les résultats sportifs de leurs habitants et de leurs équipes. Ces dernières incarnent l’identité de la commune (elles en portent d’ailleurs souvent le nom) et c’est en partie ce qui explique qu’elles sont soutenues financièrement par la mairie : leurs victoires – bien plus que leurs défaites – <a href="http://www.savoir-agir.org/IMG/pdf/SA15-Koebel.pdf">sont aussi celles des édiles et des habitants</a> qui en retirent une certaine fierté.</p>
<p>La notoriété des divers champions qui habitent la commune ou en sont originaires rejaillit en partie sur celle-ci, à condition de savoir la mettre en scène, comme à travers une <a href="https://www.dna.fr/edition-de-obernai-barr-rosheim/2019/02/07/les-champions-de-la-ville-sportifs-meritants">cérémonie de remise de récompenses aux sportifs méritants</a> : tout en honorant les sportifs, le maire peut ainsi espérer les fidéliser, développer leur attachement à la commune, et honorer celle-ci en retour, tout en justifiant sa politique sportive.</p>
<p>Il arrive parfois que les meilleurs d’entre eux conquièrent la scène sportive internationale et que, lors d’une compétition où la France a des chances de médaille, un duplex soit organisé au cœur même de sa ville ou de son village d’origine, histoire de rendre la victoire encore plus « authentique », parce que enracinée dans la « France profonde ». De tels moments sont parfois uniques pour un maire qui n’aurait jamais pu espérer autrement « passer en direct » sur une chaîne nationale.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/CenUTpMAIT0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le cycliste Romain Bardet, la « fierté » de Brioude, à l’honneur dans un reportage de France 3.</span></figcaption>
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<h2>Ménager la population et les notables</h2>
<p>La vie municipale ordinaire est donc marquée par des projets concernant le sport : la construction d’une piscine ou d’une patinoire, d’un gymnase, d’un stade de football ou d’autres équipements spécialisés peuvent déchaîner les passions et les critiques, et décider au final du devenir d’un élu local…</p>
<p>Ce dernier doit ainsi prendre grand soin dans ses décisions, lorsqu’il attribue des subventions, des créneaux d’utilisation des équipements, quand il décide de les entretenir ou les améliorer, car il met en jeu ses relations avec une partie non négligeable de la population.</p>
<p>Et ce, d’autant plus qu’à la tête des clubs locaux les plus importants on trouve souvent des notables qui, en plus du fait qu’ils représentent un nombre important d’habitants et d’électeurs, <a href="https://www.cairn.info/revue-politix-2016-2-page-99.htm">ont localement un certain poids politique (comme les chefs d’entreprise)</a>.</p>
<p>C’est ce qui explique que les alternances politiques dans une ville ne remettent guère fondamentalement en cause la politique sportive menée précédemment, <a href="https://koebel.pagesperso-orange.fr/pdf/Koebel_Jurisport175.pdf">et que l’on observe une certaine inertie dans ce domaine</a>.</p>
<p>De plus en plus d’élus aujourd’hui sont conscients que la pratique sportive fédérale représente moins de la moitié de la pratique sportive réelle. Pas seulement du fait de l’augmentation de l’offre privée marchande : il s’agit le plus souvent d’activité physique auto-organisée (en famille, seul ou entre amis).</p>
<p>Les élus commencent à investir dans les aménagements urbains accessibles à tous, pour favoriser les mobilités actives – pistes cyclables, <a href="https://www.strasbourg.eu/vitaboucle">parcours urbains</a> – petits aménagements en plein air pour l’entretien physique par exemple, avec des objectifs de santé publique.</p>
<p>Contraintes par les fortes baisses de dotations de l’État, les subventions aux associations sportives sont en baisse, l’accès aux équipements devient de plus en plus souvent payant, et l’investissement en infrastructures nouvelles laisse place à des politiques de réhabilitation et de mutualisation. <a href="https://f3s.unistra.fr/websites/f3s/Formation/Plaquettes_des_Formations/Plaquettes_2019-2020/PK_masterPSAT_mars2019-300ex.pdf">Des professionnels s’y préparent dans de nouvelles formations spécialisées</a>.</p>
<p>On peut se demander quels seront les impacts sur la pratique sportive en club : une augmentation progressive du prix de la licence et, corrélativement, un phénomène de discrimination dans l’accès au sport organisé et encadré ?</p>
<p>La volonté des élus locaux d’impliquer les citoyens à l’élaboration des politiques sportives locales – dans divers dispositifs de démocratie participative – suffira-t-elle à les amadouer ?</p>
<hr>
<p><em>Cet article est inspiré d’une <a href="https://www.cairn.info/revue-savoir-agir.htm">précédente publication de l’auteur</a> apparue dans la revue Savoir/Agir.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/127059/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Koebel est membre de l'association Savoir/Agir qui publie la revue du même nom. </span></em></p>Les instances de pouvoir locales se préoccupent particulièrement de la mise en scène du sport et des sportifs pour gagner sur le plan politique.Michel Koebel, Professeur de sociologie, chercheur au laboratoire « Sport et sciences sociales », Université de StrasbourgLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1200112019-07-09T18:45:22Z2019-07-09T18:45:22ZLes sept situations stratégiques des PME françaises<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/283031/original/file-20190708-51288-7gzk20.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C2%2C992%2C663&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pour plus d'une PME-TPE sur trois, les aides publiques devraient concerner en priorité l’efficience organisationnelle.</span> <span class="attribution"><span class="source">Thodonal88 / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Si de nombreuses recherches s’intéressent aux pratiques stratégiques et managériales des TPE-PME, la plupart se concentrent sur des domaines particuliers de comportement de ces petites structures, ou sur les caractéristiques de leurs propriétaires-gestionnaires. C’est ainsi qu’on étudie en général les <a href="https://www.ifrap.org/emploi-et-politiques-sociales/les-entreprises-gazelles">gazelles</a>, les <a href="https://www.europe1.fr/economie/quest-ce-quune-licorne-des-nouvelles-technologies-2516455">licornes</a>, les entreprises internationales dès leur création (<a href="https://lentreprise.lexpress.fr/international-export/born-global-ces-jeunes-entreprises-nees-pour-l-export_1563537.html">« born global »</a>) ou d’autres entreprises extraordinaires, mais finalement assez peu la très large majorité que constituent les autres entreprises.</p>
<p>À partir d’une collecte de données réalisée en 2013 par les chercheurs du laboratoire Coactis – Université Lyon 2 et Université de Saint-Étienne 2 –, soit un échantillon de près de 600 TPE-PME d’une grande diversité de tailles et de secteurs, nous avons mis en œuvre une méthode statistique permettant d’identifier des groupes d’entreprises qui, confrontées à des situations stratégiques proches, adoptaient des choix similaires en matière de développement. La <a href="https://www.erudit.org/en/journals/ipme/2018-v31-n2-ipme03869/1049961ar/abstract/">classification finale</a> comporte sept profils d’entreprises, qu’il nous semble important de prendre en compte dans la perspective d’un meilleur accompagnement par les collectivités publiques.</p>
<h2>Y voir plus clair dans la richesse du tissu</h2>
<p><strong>Les PME « façonnières »</strong> sont des entreprises qui produisent à la demande plus souvent que la moyenne de l’échantillon. Elles ont un mode de fonctionnement plutôt à l’affaire, des objectifs à court terme et font la différence au niveau de leurs prix et de la fiabilité de leurs délais, enjeux sur lesquels les attentes de leurs marchés sont bien souvent très fortes. Elles estiment ainsi ne pas disposer d’avantage concurrentiel particulier et ne cherchent pas du tout à innover ni à s’internationaliser.</p>
<p><strong>Les PME « orientées métier »</strong> évoluent très majoritairement dans le secteur de l’industrie manufacturière et semblent guidées par les particularités de leur métier plus que par n’importe quel autre facteur. Elles font partie des plus anciennes et des plus grandes, avec une part des ouvriers assez importante parmi les salariés. Les attentes du marché concernent les délais, la fiabilité des délais, la qualité et le prix des produits. Ces entreprises sont peu dynamiques d’un point de vue stratégique et en termes d’innovation ; un tiers d’entre elles sont sous-traitantes de grands donneurs d’ordres. Leurs systèmes d’information et leurs outils informatiques sont ainsi assez développés, et elles estiment généralement être totalement dépendantes de leurs clients – situation souvent vécue négativement.</p>
<p><strong>Les PME « agitées »</strong> sont les plus petites, les moins structurées et parmi les plus jeunes de l’échantillon. Elles semblent un peu dispersées et impétueuses dans leur effort de développement. Deux tiers ne disposent pas d’équipe de direction et trois quarts de ces PME n’ont pas du tout mis en place de règles pour la plupart de leurs postes. Elles sont les moins outillées en systèmes d’information – qui ne sont pas envisagés comme pouvant améliorer la performance ou l’efficience de leur activité. Elles n’ont pas d’outil de formalisation de l’orientation stratégique ni de compétences commerciales ou marketing, et ne sont pas internationalisées. Une PME sur deux ne vend pas aux grandes entreprises. Elles s’adressent le plus souvent à des clients particuliers, fondent leur développement sur un meilleur rapport qualité/prix que la concurrence, et innovent peu.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1066901044867805184"}"></div></p>
<p><strong>Les PME « installées »</strong> évoluent majoritairement dans le secteur de l’industrie manufacturière, sont de taille moyenne et font partie des plus âgées. Elles fondent leur activité sur la réponse au besoin des clients ainsi que sur la qualité de leurs offres. Les attentes du marché sur ce dernier point étant fortes, ces entreprises mettent réellement l’accent sur l’aspect qualité, par l’innovation notamment. Deux tiers d’entre elles disposent également, entre autres responsables de services dédiés en interne, d’un responsable interne chargé de la QSE (Qualité, Sécurité, Environnement). Plus globalement, ces PME sont positionnées de manière moyenne sur de nombreux indicateurs retenus dans notre étude.</p>
<p><strong>Les PME « entrepreneuriales »</strong> évoluent plus souvent que les autres dans des secteurs dits de service. Elles sont majoritairement de petite taille, très jeunes et n’emploient pas d’ouvriers. Elles évoluent sur des marchés de niche en phase de croissance et profitent de cette situation pour accélérer leur développement, grâce à l’exploration constante de nouvelles connaissances et un niveau assez élevé d’<a href="https://www.manager-go.com/management/developpement-du-pouvoir-d-agir.htm">empowerment</a> structurel (autonomisation) de leurs salariés. Cela leur permet d’innover en termes de produits/services comme en termes de marketing, et ainsi de répondre aux attentes du marché qui sont perçues comme étant très élevées sur ce volet de l’innovation. Elles sont plutôt bien intégrées dans les réseaux et leurs dirigeants sont confiants dans leur capacité à développer leur entreprise.</p>
<p><strong>Les PME <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0266242605054049">« dénaturées »</a></strong> sont des PME manufacturières principalement orientées BtoB et généralement sans clients spécifiques. Leur principale caractéristique est qu’elles possèdent de nombreuses spécificités des grandes entreprises. Elles sont très orientées vers l’international : quasiment toutes exportent mais aussi achètent leurs matières premières à l’étranger pour la grande majorité ; un tiers y recrute ou y a même délocalisé une partie de sa production. Ces PME font partie des plus grandes, des plus âgées et des plus structurées, disposant notamment de nombreux responsables de services dédiés en interne, et d’équipes de direction mixtes. Souvent sur des marchés de niche en phase de croissance, elles innovent beaucoup et inscrivent leur dynamique dans la mise en œuvre d’un plan de développement, utilisant pour cela de nombreux outils de formalisation et de planification stratégiques. Ces PME recherchent principalement la rentabilité au service de leurs actionnaires.</p>
<p>Enfin, <strong>les PME « participatives »</strong> placent les salariés au cœur de leur développement. Le niveau d’empowerment structurel y est extrêmement élevé, avec une délégation et une responsabilisation des salariés considérables. Entre autres compétences liées au développement de leur entreprise, les dirigeants de ces PME sont à très à l’aise pour définir les rôles et les responsabilités de leurs équipes, les manager et gérer les conflits. Leur stratégie est construite à partir de leurs ressources et compétences, dont les dirigeants estiment savoir tirer le meilleur parti. D’ailleurs, la gestion des ressources humaines et la responsabilité sociétale sont des données très importantes pour ces entreprises. Ces caractéristiques leur permettent d’innover plus que la moyenne.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/283095/original/file-20190708-51268-1ly0zpn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/283095/original/file-20190708-51268-1ly0zpn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/283095/original/file-20190708-51268-1ly0zpn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/283095/original/file-20190708-51268-1ly0zpn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/283095/original/file-20190708-51268-1ly0zpn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/283095/original/file-20190708-51268-1ly0zpn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/283095/original/file-20190708-51268-1ly0zpn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le principe d’empowerment structurel (le degré d’autonomisation des salariés) distingue certaines PME-TPE dans le tissu économique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Denis Klimov 3000/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Améliorer l’accompagnement</h2>
<p>Les structures publiques pourraient utiliser cette classification pour orienter de manière plus fiable et plus rationnelle les TPE-PME entre les différentes aides et accompagnements qu’elles proposent. Seulement 18 questions sont en effet nécessaires pour déterminer un <em>scoring</em> sur chacun des profils, autrement dit un degré de prédominance de chaque situation stratégique pour une entreprise.</p>
<p>Une fois le profil déterminé, il serait alors plus facile d’orienter ainsi les entreprises :</p>
<ul>
<li><p>les aides à la croissance individuelle des PME (en termes d’aide à l’investissement, de réduction des charges sociales, d’accès à la commande publique, etc.) gagneraient à bénéficier principalement aux PME « façonnières », aux PME « orientées métiers », aux PME « installées » ainsi qu’aux PME « entrepreneuriales », ces 4 classes représentant plus de 55 % des entreprises de la base étudiée ;</p></li>
<li><p>les aides à la mutualisation des ressources (en termes d’actions collectives, de partage de coûts, etc.) concerneraient essentiellement les PME « orientées métier », soit 10,5 % des entreprises interrogées ;</p></li>
<li><p>les aides à l’efficience organisationnelle (en termes d’aide au conseil, d’aide à l’innovation, de soutien à la R&D, etc.) bénéficieraient plus efficacement aux PME « agitées » ainsi qu’aux PME « installées », soit environ 35 % de notre échantillon ;</p></li>
<li><p>les aides à la compétitivité collective (en termes de soutien à la recherche collective au sein de pôles de compétitivité par exemple) profiteraient davantage aux PME « entrepreneuriales », soit près de 19 % des entreprises interrogées.</p></li>
</ul>
<p>Les deux profils non évoqués ci-dessus pourraient faire l’objet d’une approche singulière. Une première question se pose quant à la pertinence de faire bénéficier les PME « dénaturées » (12 % des entreprises de la base) de tout ou partie des dispositifs de soutien aux TPE-PME, car elles se rapprochent beaucoup du fonctionnement des ETI, voire des grands groupes. Une seconde question renvoie au statut des PME « participatives » (qui représentent plus de 15 % des entreprises interrogées), qui pourraient faire l’objet d’un accompagnement ad hoc.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été corédigé par Thierry Serboff, co-fondateur et associé de Lab’N’Biz, docteur et chercheur en sciences du management spécialisé en TPE-PME.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/120011/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Cette classification permet notamment d’affiner les dispositifs d’accompagnement par les pouvoirs publics.Sophie Reboud, Professeur, Chercheur en management des PME et innovation, Burgundy School of Business Hervé Goy, Enseignant-chercheur spécialisé en stratégie, Université Jean Monnet, Saint-ÉtienneThierry Serboff, Chercheur associé, laboratoire Coactis, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1125902019-03-14T22:22:25Z2019-03-14T22:22:25ZGrand débat national : pas de solution miracle à la nouvelle question fiscale<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/263114/original/file-20190311-86703-otdp4u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C5%2C994%2C868&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le recours à la fiscalité affectée acterait une situation de défiance des citoyens à l’encontre de l’État.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Hadrian / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>C’est l’un des principaux objets du <a href="https://granddebat.fr/?gclid=CLesy4Hc-eACFROxGwod3qkKtA">grand débat national</a>, le sujet qui a initié le séisme social de l’automne dernier dont les répliques n’en finissent plus de se faire ressentir : l’impôt, cette <a href="https://www.conseil-constitutionnel.fr/le-bloc-de-constitutionnalite/declaration-des-droits-de-l-homme-et-du-citoyen-de-1789">« contribution commune […] indispensable »</a> et pourtant contestée. Les critiques sur son niveau (trop élevé !), sa structure (trop complexe et/ou trop injuste !) ou encore sur son utilisation (mal employé !) ont certes toujours existé : l’histoire du <a href="http://www.seuil.com/ouvrage/les-batailles-de-l-impot-nicolas-delalande/9782021174786">consentement à l’impôt</a> n’a jamais été un long fleuve tranquille. Mais les évènements en cours, qui trouvent leur origine dans les années 1970 avec le début de la <a href="http://www.seuil.com/ouvrage/la-crise-de-l-etat-providence-pierre-rosanvallon/9782020059947">crise de l’État-providence</a> et le questionnement corollaire de son financement, seront peut-être ultérieurement regardés comme un jalon majeur dans l’Histoire fiscale. La raison ? L’épuisement d’un levier traditionnel du consentement à l’impôt qui avait fait preuve, jusqu’à présent, d’une redoutable efficacité : la mobilisation de la fiscalité indirecte.</p>
<p>On parle certes beaucoup d’impôt sur la fortune immobilière dans les réunions publiques, un <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/02/25/la-polemique-sur-l-impot-sur-le-revenu-nouvel-episode-des-difficultes-du-gouvernement-sur-la-question-fiscale_5427828_823448.html">peu d’impôt sur le revenu</a> dans les ministères, mais la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et la fiscalité pesant sur les carburants restent bien les deux prélèvements au cœur de la plupart des échanges. Leur point commun ? Être des impôts indirects, c’est-à-dire des prélèvements pour lesquels celui qui effectue le reversement à l’administration fiscale n’est pas celui qui en <a href="https://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/finances-publiques/ressources-depenses-etat/ressources/quelle-est-difference-entre-impots-directs-impots-indirects.html">supporte effectivement la charge</a>.</p>
<p>Ce type d’impôts présente un certain nombre d’avantages pour les pouvoirs publics : son recouvrement est plutôt aisé (concentration sur un nombre relativement restreint d’acteurs économiques), son rendement est procyclique (adossé à la consommation), et surtout il est plus indolore pour la population que les impôts directs. Ainsi, quand certains pays du Golfe ont décidé de mettre en place des impôts pour la première fois l’an dernier, c’est une taxe sur la valeur ajoutée qui <a href="http://www.lefigaro.fr/flash-eco/2018/01/02/97002-20180102FILWWW00013-des-pays-du-golfe-introduisent-la-tva.php">a été retenue</a>.</p>
<h2>Les attraits de la fiscalité « spéciale »</h2>
<p>Or, ce ressort semble aujourd’hui épuisé en France. La TVA et la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TICPE) ne passent plus inaperçues aux yeux de nos concitoyens, malgré les trésors de discrétion qui avaient été mis en place pour les rendre le moins visibles possible (rappelons qu’aux États-Unis et au Canada les prix sont affichés hors taxes). Dans un mouvement de balancier somme toute classique, il est fort probable que cette fiscalité indirecte longtemps ignorée ne devienne un sujet central, ou même un coupable idéal, lorsqu’il s’agira d’identifier les origines de l’affaiblissement ressenti du pouvoir d’achat.</p>
<p>Que va donc pouvoir faire le gouvernement ? La tentation serait forte d’avoir recours au second levier traditionnel du consentement à l’impôt : la mobilisation de la fiscalité « spéciale ».</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/263112/original/file-20190311-86710-jq8rzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/263112/original/file-20190311-86710-jq8rzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/263112/original/file-20190311-86710-jq8rzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/263112/original/file-20190311-86710-jq8rzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/263112/original/file-20190311-86710-jq8rzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/263112/original/file-20190311-86710-jq8rzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/263112/original/file-20190311-86710-jq8rzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La TVA a la réputation d’être plus indolore pour la population que les impôts directs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Defotoberg/Shutterstock</span></span>
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<p>Derrière cette expression du professeur <a href="https://www.lgdj.fr/le-financement-des-services-publics-locaux-9782275035765.html">Robert Hertzog</a>, on retrouve en réalité deux ensembles de prélèvements. D’une part, ceux qui relèvent d’une fiscalité comportementale et/ou écologique, et visent à faire supporter à certains les externalités négatives de leurs comportements. D’autre part, ceux qui relèvent d’une fiscalité affectée, donnant au contribuable une information sur la destination de sa contribution et supprimant de facto tout un pan de la critique de l’impôt (où vont les fonds publics ?).</p>
<p>Cette fiscalité spéciale présente bien des attraits. Elle a déjà fait ses preuves au niveau national, avec notamment la contribution sociale généralisée (CSG) fléchée vers la protection sociale, comme au niveau local, avec la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) ou encore le versement transport (VT). Ces deux taxes ont d’ailleurs connu des hausses importantes sur les dernières années (+ <a href="https://www.collectivites-locales.gouv.fr/files/files/statistiques/brochures/chapitre_5_-_la_fiscalite_locale_4.pdf">50 % pour la TEOM entre 2006 et 2016 !</a>), sans commune mesure avec les évolutions subies par la taxe d’habitation ou la contribution foncière des entreprises. Cette dynamique a été permise par leur cadre juridique (pas de contrainte sur le taux de la TEOM, remontées régulières du plafond du VT en lois de finances) mais aussi, on peut le penser, par leur nature : l’affectation d’un impôt l’expose moins à la critique des citoyens en cas de hausse, puisqu’ils peuvent potentiellement en identifier les traductions concrètes (augmentation de la fréquence des tournées pour l’enlèvement des ordures ménagères, acquisition de nouveaux bus, etc.).</p>
<h2>Les risques d’une logique tarifaire</h2>
<p>Il pourrait donc être tentant, face à l’épuisement de la solution préférentielle qu’était la fiscalité indirecte, de multiplier le recours aux impôts spéciaux, ces impôts pour (les hôpitaux, les écoles, l’armée, etc.) et ces impôts contre (les fumeurs, les pollueurs, etc.). Une telle solution, aussi attrayante soit-elle dans la position actuelle de nos gouvernants, ne doit être mise à l’étude que d’une main tremblante.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/263111/original/file-20190311-86682-s72m5f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/263111/original/file-20190311-86682-s72m5f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=559&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/263111/original/file-20190311-86682-s72m5f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=559&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/263111/original/file-20190311-86682-s72m5f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=559&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/263111/original/file-20190311-86682-s72m5f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=703&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/263111/original/file-20190311-86682-s72m5f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=703&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/263111/original/file-20190311-86682-s72m5f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=703&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les taxes d’enlèvement des ordures ménagères a augmenté de 50 % entre 2006 et 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Maksimilian/Shutterstock</span></span>
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<p>D’une part, elle consacrerait un recul majeur de l’État qui renoncerait ainsi à sa prérogative historique qu’est le choix de la destination de la contribution commune, et fragiliserait incidemment encore sa légitimité. D’autre part, elle acterait une situation de défiance des citoyens à l’encontre de l’État (au même titre que la fiscalité indirecte était une forme de défiance de l’État à l’encontre de ses citoyens) sur laquelle il serait difficile de revenir.</p>
<p>Enfin et surtout, le recours accru à la fiscalité affectée porte en lui les germes d’une translation vers une logique tarifaire du financement de l’action publique : qu’il serait aisé de basculer d’une exigence de financement d’un service public rendu à tous à une exigence de financement du seul service public qui m’est rendu, d’exiger de savoir ce que je paie pour l’enlèvement des ordures dans ma ville à ne payer que pour l’enlèvement de mes ordures. Nous n’en sommes pas encore là, et il y aurait même une certaine hypocrisie à essayer de décrédibiliser une solution en ne mettant en avant que ses excès potentiels à long terme. Gardons seulement à l’esprit que, en matière fiscale comme ailleurs, il n’y a pas de solution miracle.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/112590/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas EISINGER est membre du Bureau de l'AFIGESE (Association Finances-Gestion-Évaluation des Collectivités Territoriales). </span></em></p>Face à l’épuisement du ressort de la fiscalité indirecte, le gouvernement pourrait être tenté de mettre en place des prélèvements affectés à des dépenses spécifiques. Une option qui a ses limites.Thomas Eisinger, Professeur associé en droit, gestion financière et management des collectivités, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1109382019-02-03T21:28:22Z2019-02-03T21:28:22ZRéseaux d’influence : fin de la réserve parlementaire, quid de la réserve ministérielle ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/256658/original/file-20190131-127151-148zqbu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C7%2C985%2C658&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les ex-ministres peuvent maintenir leur capacité d'influence après leur départ du gouvernement.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/9xaLKZvYxnA?utm_source=unsplash&utm_medium=referral&utm_content=creditCopyText">Elijah Macleod / Unsplash</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=283&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=283&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=283&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article a été publié dans la revue « <a href="https://lejournal.cnrs.fr/nos-blogs/dialogues-economiques-leco-a-portee-de-main/reseaux-dinfluence-fin-de-la-reserve">Dialogues économiques</a> » de l’AMSE, l’école d’économie d’Aix-Marseille, en partenariat avec The Conversation France.</em></p>
<hr>
<p>À la suite des <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichLoiPubliee.do?idDocument=JORFDOLE000034924758&type=general&legislature=15">lois pour la confiance dans la vie politique</a>, la réserve parlementaire a disparu en janvier 2018. Elle permettait aux sénateurs et députés d’attribuer des subventions à des associations et à des collectivités locales. Dans une <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01480532/document">récente étude</a>, Brice Fabre et Marc Sangnier dévoilent un autre mécanisme par lequel des personnalités politiques nationales parviennent à allouer des ressources financières à certaines collectivités locales. En effet, leur travail concerne les subventions octroyées par l’État aux communes de plus de 3 500 habitants entre 2002 et 2011 et cherche à identifier d’éventuelles variations géographiques en fonction du parcours personnel des ministres.</p>
<p>En premier lieu, une cartographie des liens entre les ministres et l’ensemble des municipalités est construite à partir de leurs communes de naissance, des lycées où ils ont étudié et des mairies où ils ont exercé un mandat de conseiller municipal ou de maire avant d’être nommés au gouvernement. Sur les 200 ministres de la période, 155 ont exercé un mandat de maire ou de conseiller municipal au préalable. Afin d’étudier si les mairies liées aux ministres nouvellement nommés reçoivent davantage que d’autres communes comparables, les chercheurs utilisent les comptes détaillés des municipalités françaises, obtenus auprès de la Direction générale des finances publiques (DGFP). Les caractéristiques retenues pour identifier les municipalités comparables incluent – entre autres – le nombre d’habitants, la structure d’âge de la population, le niveau de revenu des habitants, le taux de chômage ou encore le niveau des impôts locaux.</p>
<h2>Des liens professionnels mais pas personnels</h2>
<p>Les résultats des estimations montrent que le montant par habitant des subventions d’investissement reçues par une commune augmente d’environ 45 % dès lors qu’une personnalité politique y ayant effectué au moins un mandat municipal fait son entrée au gouvernement. Le ciblage des subventions accordées est précis puisque les auteurs vérifient que les communes limitrophes de celles où les ministres ont exercé un mandat ne voient pas le niveau de leurs subventions varier. À l’inverse, les municipalités de naissance des ministres et celles où ils ont étudié au lycée ne reçoivent pas davantage de subventions. Ainsi, alors que les liens professionnels et politiques importent dans l’allocation de ces subventions discrétionnaires, ce n’est pas le cas des seuls liens personnels.</p>
<p>Quelles sont les motivations des personnalités politiques ? Ces hausses de subventions peuvent constituer le paiement différé d’un soutien politique, ou bien avoir pour objectif de préparer une élection future, éventuellement municipale mais probablement aussi législative. En effet, que le ministre soit encore au conseil municipal ou non n’a pas d’influence sur le niveau de l’augmentation de subventions, ce qui suggère la recherche d’un soutien local, quel que soit le niveau d’implication dans la mairie. Une autre explication possible est que ce ciblage peut simplement provenir de la meilleure connaissance de ces municipalités par les ministres, ainsi que d’une capacité à les contrôler. Dans ce cas, les ministres permettent d’atténuer l’asymétrie d’information à laquelle fait face l’administration centrale dans l’attribution de subventions, en lui procurant une meilleure connaissance des territoires.</p>
<h2>Une capacité d’influence</h2>
<p>L’étude montre aussi le rôle central des réseaux dans la distribution des subventions discrétionnaires. En effet, quel que soit leur niveau hiérarchique – qu’il s’agisse d’un secrétaire d’État, d’un ministre délégué, d’un ministre ou d’un ministre d’État, la nomination au gouvernement a le même impact sur les subventions reçues. Ainsi, ce n’est pas le budget géré qui importe mais la capacité d’un membre du gouvernement à mobiliser l’administration et les réseaux qui s’ouvrent à lui. Ces réseaux sont nationaux. En effet, les subventions accordées par les départements et les régions aux municipalités connectées à un ministre ne varient pas, soit parce que les ministres n’ont pas les moyens de les influencer, soit parce qu’ils n’essaient pas de le faire. Ainsi, l’effet identifié n’est pas une influence politique générale ou un attrait nouveau pour une ville mais bien des réseaux nationaux activés initialement par un nouveau membre du gouvernement.</p>
<p>Ces réseaux survivent à la fin d’exercice du ministre. En effet, les municipalités perçoivent un surplus de subventions dès l’année de nomination au gouvernement de leur ancien maire ou conseiller municipal, et elles continuent ensuite de recevoir davantage, même au-delà de cinq années après cette nomination. Les auteurs développent plusieurs explications possibles à ce phénomène. Les ex-ministres peuvent maintenir leur capacité d’influence après leur départ du gouvernement. Par ailleurs, les municipalités ont appris à dialoguer avec l’administration compétente et entretiennent ces liens. Ainsi, le ministre développe la relation entre certains pouvoirs locaux et l’administration centrale, créant ainsi un réseau que les municipalités peuvent continuer à utiliser de manière pérenne.</p>
<h2>Des communes inégalement subventionnées</h2>
<p>Le montant total du surplus de subventions alloué aux municipalités du fait de leur lien présent ou passé avec un membre du gouvernement est estimé à 30 millions d’euros annuels. Comme les auteurs le précisent, il s’agit d’une fourchette basse, notamment puisque l’étude porte sur la période 2002-2011 et ne prend pas en compte les connexions des municipalités aux ministres des périodes précédentes. Cela représente déjà pas moins de 8 % du total des subventions allouées par l’État aux communes. Bien qu’une majorité de gauche n’ait exercé qu’au cours de la première année de l’étude, les estimations économétriques de Marc Sangnier et Brice Fabre suggèrent que le phénomène mis en évidence s’observe pour les deux bords politiques et a résisté à l’alternance de 2002.</p>
<p>Même si la motivation des ministres n’est pas purement individuelle mais oriente les subventions vers les communes au sujet desquelles ils sont davantage informés, cela souligne que l’administration manque d’information pour allouer ses subventions de manière optimale. Alors que la <a href="https://www.legifiscal.fr/impots-personnels/impots-locaux/taxe-habitation/suppression-progressive-taxe-habitation.html">suppression partielle de la taxe d’habitation</a> pourrait rendre les collectivités locales davantage dépendantes des transferts de ressources, cette étude met au jour des inefficiences dans ces transferts.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/110938/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Stéphane Benveniste ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La nomination d’un ministre augmente de 45 % les subventions d’investissement allouées à la commune dans laquelle il ou elle a exercé un mandat local.Stéphane Benveniste, Doctorant en économie publique à Aix-Marseille School of Economics, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1086422018-12-14T01:21:39Z2018-12-14T01:21:39ZLes droits de l’homme commencent près de chez soi<p>1958 : dix ans après l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme, Eleanor Roosevelt, coauteur de ce texte au côté de René Cassin notamment, s’interrogeait :</p>
<blockquote>
<p>« Où, après tout, commencent les droits de l’homme ? »</p>
</blockquote>
<p>Et elle répondait :</p>
<blockquote>
<p>« Dans les petites collectivités ; près de chez soi, en des lieux si proches et si petits qu’on ne peut les voir sur aucune carte du monde. »</p>
</blockquote>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/250299/original/file-20181212-110256-12cvugi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/250299/original/file-20181212-110256-12cvugi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=453&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/250299/original/file-20181212-110256-12cvugi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=453&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/250299/original/file-20181212-110256-12cvugi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=453&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/250299/original/file-20181212-110256-12cvugi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=570&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/250299/original/file-20181212-110256-12cvugi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=570&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/250299/original/file-20181212-110256-12cvugi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=570&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Eleanor Roosevelt lisant la Déclaration universelle des droits de l’homme (en 1949).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Eleanor_Roosevelt_and_Human_Rights_Declaration.jpg">DR</a></span>
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<p>C’est, bien en effet, dans sa commune, dans son quartier, dans son univers personnel que chaque femme, chaque homme, chaque enfant aspire à la protection de ses droits. Les droits de l’homme ne s’exercent pas dans le vide : ils n’ont de sens qu’au sein d’une collectivité et les individus qui les revendiquent sont toujours géographiquement situés.</p>
<h2>Les droits de l’homme ou les oubliés de la décentralisation</h2>
<p>2018 : 70 ans après l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme, la question de la protection locale des droits de l’homme reste toujours non posée et donc méconnue, une <a href="https://rm.coe.int/0900001680746f4f">« terra incognita »</a> a-t-on dit. Si les droits de l’homme –</p>
<p>« fait idéologique et politique majeur » de ces dernières décennies, selon <a href="https://www.cairn.info/revue-le-debat-2000-3-page-258.htm">Marcel Gauchet</a> – sont partout, ils ne sont peut-être pas là où l’on pourrait les attendre le plus, à savoir au niveau local.</p>
<p>Un examen des principales lois françaises relatives à la décentralisation révèle que la notion de « droits de l’homme » n’y est, pour ainsi dire, jamais employée. De nombreuses compétences ont pourtant été transférées aux collectivités territoriales.</p>
<h2>Les responsabilités des collectivités territoriales</h2>
<p>Or, lorsqu’un État délègue une partie de ses attributions à des autorités locales, il doit, conformément aux normes internationales des droits de l’homme, s’assurer que celles-ci respectent et font respecter leurs obligations en la matière. Il doit aussi leur donner les moyens de le faire.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/250250/original/file-20181212-110264-1ay52pk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/250250/original/file-20181212-110264-1ay52pk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=849&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/250250/original/file-20181212-110264-1ay52pk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=849&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/250250/original/file-20181212-110264-1ay52pk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=849&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/250250/original/file-20181212-110264-1ay52pk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1066&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/250250/original/file-20181212-110264-1ay52pk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1066&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/250250/original/file-20181212-110264-1ay52pk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1066&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">René Cassin, l’un des principaux artisans de la Déclaration universelle des droits de l’homme.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikimedia</span></span>
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<p>Cette affirmation ne doit pas être source de malentendus : elle ne signifie pas qu’en décentralisant, l’État central se déleste sur les collectivités territoriales d’une partie de ces obligations en matière de droits de l’homme. Elle signifie seulement que les collectivités territoriales ont des obligations découlant des droits de l’homme et que ces obligations s’ajoutent à celles du gouvernement sans s’y substituer : si l’État central est le premier garant de ces droits, il n’en est pas le seul.</p>
<p>Les organes onusiens de contrôle des droits de l’homme le rappellent régulièrement : <a href="https://www.refworld.org/publisher,CERD,FRA,55c8815c4,0.html">dans son dernier rapport sur la France</a>, le Comité des Nations unies pour l’élimination des discriminations raciales s’est ainsi dit préoccupé par les manquements des collectivités territoriales françaises dans ce domaine et a demandé à la France de s’assurer que le transfert de compétences aux collectivités locales n’affecte pas la non-discrimination sur son territoire.</p>
<p>Dans le domaine social également, les collectivités territoriales ont d’importantes responsabilités : ce sont ainsi les départements qui, en fournissant des prestations financières, jouent un rôle-clé s’agissant du droit à un niveau de vie suffisant protégé à l’article 25 de la <a href="http://www.un.org/fr/universal-declaration-human-rights/">Déclaration</a> universelle des droits de l’homme.</p>
<h2>Comme Monsieur Jourdain…</h2>
<p>Toutefois, les élus locaux et agents des collectivités territoriales « font » bien souvent des droits de l’homme comme Monsieur Jourdain faisait de la prose : sans en avoir conscience.</p>
<p>Ainsi du cas de ce département qui refusait de loger une mineure d’origine nigériane victime d’un réseau de prostitution : l’Aide sociale à l’enfance se disait submergée et renvoyait l’État à ses propres responsabilités en matière d’immigration. Ce faisant, les agents du service en cause étaient-ils conscients de porter atteinte aux droits de l’homme ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/250253/original/file-20181212-110240-1br3rin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/250253/original/file-20181212-110240-1br3rin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/250253/original/file-20181212-110240-1br3rin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/250253/original/file-20181212-110240-1br3rin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/250253/original/file-20181212-110240-1br3rin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/250253/original/file-20181212-110240-1br3rin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/250253/original/file-20181212-110240-1br3rin.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un centre d'accueil de l’aide sociale à l’enfance (ici à Forges-les-Bains).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Lionel Allorge/Wikimedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Certes, certaines collectivités territoriales font montre d’une aspiration à s’emparer de ces droits : plusieurs communes françaises, de toute taille (Angers, Bordeaux, Caudebec-lès–Elbeuf, Quimper, Perpignan, Rezé, Strasbourg…), ont ainsi signé la <a href="https://www.uclg-cisdp.org/fr/le-droit-a-la-ville/charte-europeenne">Charte européenne des droits de l’homme dans la ville</a>, texte rédigé par et pour les instances locales.</p>
<p>Ces « bonnes pratiques » sont-elles, toutefois, révélatrices d’une évolution générale au sein des collectivités territoriales et d’un souci accru de la part des élus locaux de protéger ces droits ? Et des actions sont-elles mises en œuvre dans le cadre local à cette fin ?</p>
<h2>Métropoles et régions <em>versus</em> petites communes</h2>
<p>C’est à ces questions que le <a href="https://droitsdelhommeglocal.wordpress.com/">projet GLOCAL</a>, financé par l’<a href="http://www.agence-nationale-recherche.fr/Projet-ANR-13-JSH1-0006">Agence nationale de la recherche</a> a cherché à répondre, son but étant de se pencher sur l’expérience quotidienne en France de la Déclaration universelle des droits de l’homme.</p>
<p>Dans le cadre de ce projet, une <a href="https://droitsdelhommeglocal.wordpress.com/2018/12/12/les-droits-de-lhomme-a-lepreuve-du-local/">enquête</a>, combinant des entretiens et un questionnaire (ayant obtenu 500 réponses complètes exploitables), a été menée auprès des élus locaux. 5 % des répondants seulement citent spontanément la Déclaration universelle des droits de l’homme comme texte de référence dans l’exercice de leur fonction.</p>
<p>Les résultats de cette enquête révèlent que les pratiques locales en faveur des droits de l’homme sont principalement fonction de la taille de la collectivité locale, de son poids démographique et de son statut : ainsi, c’est au sein des régions et des métropoles que les pratiques favorables aux droits de l’homme se font plus intenses, au contraire des petites communes. Dans les grandes collectivités territoriales, les droits de l’homme sont mobilisés lors des débats publics, voire dans les textes administratifs. Des informations sont proposées aux élus et aux agents et les dispositifs d’accès aux droits vont chercher, par exemple, à viser les minorités.</p>
<p>Par-delà les pratiques proprement dites, le regard que l’élu local porte lui-même sur les droits de l’homme est déterminé par sa propre trajectoire. Autrement dit, l’intérêt que celui-ci témoigne à ces droits est tributaire de son niveau de diplôme, de sa profession ou encore de ses engagements personnels (militants, associatifs ou religieux).</p>
<h2>Des « lointaines chimères » au « vœux pieux »</h2>
<p>Sur cette base et à la lumière de notre étude, il est possible de distinguer trois grandes catégories d’élus locaux.</p>
<ul>
<li><p>Une première catégorie d’entre eux, qui est majoritaire (48 % de nos répondants), envisage les droits de l’homme comme de « lointaines chimères ». Ces élus, bien souvent de petites communes et sans étiquette politique, expriment une relative distance à l’égard de ces droits. Peu enclins à recevoir des formations dans ce domaine, ils font montre d’une certaine défiance à l’idée que l’exécutif local puisse mobiliser ces droits.</p></li>
<li><p>Une deuxième catégorie d’élus (28 % environ de nos répondants) voit dans les droits de l’homme une « ligne d’horizon pour l’action ». Cette catégorie, qui regroupe principalement des représentants des grandes collectivités (régions, départements, métropole, communautés urbaines), s’approprie concrètement la culture juridique des droits de l’homme et cherche à développer des pratiques en leur faveur. Si les élus de cette catégorie sont souvent inscrits dans une collectivité de gauche, l’« attachement à l’esprit des droits de l’homme » n’est pas nécessairement associé à une majorité communiste ou socialiste, selon les termes d’une élue d’une métropole historiquement gouvernée par la droite lors d’un entretien.</p></li>
<li><p>Enfin, une troisième catégorie d’élus locaux (24 % environ de nos répondants) considèrent les droits de l’homme comme des « vœux pieux » : il s’agit souvent de représentants de petites communes, fréquemment à gauche et déclarant, bien souvent une pratique religieuse. Ces élus, particulièrement attachés aux droits sociaux, souhaiteraient une application renforcée des droits de l’homme dans le cadre local, mais insistent sur le manque de moyens et de financement dont ils disposent.</p></li>
</ul>
<p>C’est dire que la bonne volonté juridique des élus ne suffit pas à garantir une bonne mise en œuvre de ces droits. Penser l’action locale en termes de droits humains et lui donner les moyens de se concrétiser peut contribuer à une effectivité plus grande de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Il faut désormais penser ce texte en gardant à l’esprit les mots d’<a href="http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Blanche/Une-nouvelle-region-du-monde">Édouard Glissant</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Agis dans ton lieu, pense avec le monde. »</p>
</blockquote><img src="https://counter.theconversation.com/content/108642/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Catherine Le Bris dirige le projet GLOCAL financé par l'Agence nationale de la recherche.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pierre-Edouard Weill est membre du projet GLOCAL financé par l'Agence nationale de la recherche.</span></em></p>Si les droits de l’homme sont partout, ils ne sont peut-être pas là où l’on pourrait les attendre le plus : au niveau local.Catherine Le Bris, Chargée de recherche au CNRS, Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne, Paris 1, Université Paris 1 Panthéon-SorbonnePierre-Édouard Weill, Maître de conférences en Sociologie, Université de Bretagne occidentale Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1037282018-10-21T19:33:40Z2018-10-21T19:33:40ZProjets citoyens dans les renouvelables, où en est la France ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/237935/original/file-20180925-149973-1crnb0c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Inauguration du parc éolien de Béganne en Bretagne en 2014. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.eolien-citoyen.fr/accueil-begawatts.html">Éolien citoyen</a></span></figcaption></figure><p>Comme nombre d’autres pays, la France s’est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre, dont l’accumulation dans l’atmosphère perturbe l’équilibre climatique. Cet effort passe notamment par le développement des énergies renouvelables (éolien, biomasse, solaire, géothermie, hydraulique, marines) pour diminuer le recours aux énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz).</p>
<p>Si les grands axes de cette transition se décident au niveau gouvernemental – on pense aux objectifs fixés en 2015 par la <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/loi-transition-energetique-croissance-verte">loi de transition énergétique</a> –, son succès nécessite une forte implication des collectivités et des citoyens.</p>
<h2>Près de 300 projets citoyens recensés</h2>
<p>La participation aux projets de déploiement des renouvelables peut prendre différentes formes. Le terme de « projets participatifs » englobe cette diversité, désignant tout projet pour lequel des particuliers ont pu s’investir dans le financement, le montage et/ou la gouvernance. Ces initiatives peuvent avoir été impulsées par des citoyens, des collectivités et/ou des professionnels du secteur portant des projets.</p>
<p>Au sein de ces projets participatifs, ceux dits « citoyens » impliquent directement la population et/ou les collectivités au capital. Ces derniers deviennent alors des actionnaires du projet, ce qui leur permet de maîtriser les décisions stratégiques sur le long terme afin d’orienter le projet vers l’intérêt du territoire.</p>
<p>Selon la <a href="https://energie-partagee.org/energie-citoyenne/la-charte-energie-partagee/">Charte des acteurs de l’énergie citoyenne</a>, un projet se définit comme « citoyen » si, en plus de la participation locale majoritaire des collectivités et/ou habitants au capital, l’initiative remplit des conditions de finalité non spéculative, de gouvernance démocratique, et bien sûr de respect de l’environnement.</p>
<p>Plus courants dans d’autres pays, <a href="https://theconversation.com/energies-renouvelables-les-cooperatives-citoyennes-gagnent-du-terrain-88725">comme en Allemagne ou au Danemark</a>, les projets portés par des collectivités et collectifs citoyens commencent à se multiplier en France.</p>
<p>Entre 2014 et 2017, le nombre de projets citoyens a par exemple triplé dans 7 régions (Bretagne, Occitanie, Pays-de-la-Loire, Centre-Val-de-Loire, Auvergne-Rhône-Alpes,PACA, Nouvelle-Aquitaine), passant de <a href="https://enrcit.fr/qu-est-ce-qu-un-projet-citoyen/">62 à 192</a>, selon un sondage (non publié) réalisé par l’Ademe en mai 2017 auprès des structures d’animation régionales concernées.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/237896/original/file-20180925-149970-zmt3kx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/237896/original/file-20180925-149970-zmt3kx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/237896/original/file-20180925-149970-zmt3kx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/237896/original/file-20180925-149970-zmt3kx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/237896/original/file-20180925-149970-zmt3kx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/237896/original/file-20180925-149970-zmt3kx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/237896/original/file-20180925-149970-zmt3kx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=370&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Recensement des projets citoyens conduits en Bretagne, Occitanie, Pays de la Loire, Centre Val de Loire, Auvergne-Rhône-Alpes, PACA et Nouvelle Aquitaine, entre 2014 et 2017.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ademe</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le dernier recensement effectué par l’association Énergie partagée – qui rassemble au niveau national la plupart des acteurs de l’énergie citoyenne – indique ainsi <a href="http://www.wiki.energie-partagee.org/wakka.php?wiki=ProjetS2">près de 300 projets citoyens</a> répartis sur tout le territoire hexagonal (297 exactement, dont 102 en exploitation, 105 en développement et 90 en émergence).</p>
<p>Toujours selon les données d’Énergie partagée, on compte pour ces projets 122 MW de puissance électrique installée en production et 243 MW en développement ; 165 GWh/an sont produits et injectés dans le réseau par des installations citoyennes, ce qui représente un peu moins de 0,2 % de la production annuelle d’électricité renouvelable en France <a href="http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/fileadmin/documents/Produits_editoriaux/Publications/Datalab/2018/datalab-35-cc-des-energies-renouvelables-edition-2018-mai2018.pdf#page=8">pour l’année 2016</a> ; 170 millions d’euros ont été engagés dans les énergies renouvelables grâce aux citoyens. On compte 10 770 « actionnaires citoyens » recensés en France.</p>
<h2>À la recherche de l’ancrage social</h2>
<p>Par comparaison aux projets « classiques », les bénéfices d’un projet citoyen constituent une ressource nouvelle directement captée par le territoire, en plus des taxes obligatoires reversées à la collectivité.</p>
<p>La rentabilité de l’investissement <a href="https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/quelle-integration-territoriale-enr-participatives-2016-rapport.pdf#page=42">n’est pas la principale motivation</a> des citoyens qui s’engagent. Même si la dimension économique des projets ne peut être niée – les projets doivent être viables pour pouvoir être reproduits ailleurs –, l’objectif n’est pas de générer une manne financière pour les investisseurs, mais de créer de la richesse pour le territoire.</p>
<p>De plus, les bénéfices peuvent être réorientés pour mener des actions locales, comme des <a href="https://www.eolien-citoyen.fr/activites-de-lassociation/les-projets-enr-citoyens.html">actions de sensibilisation</a> par exemple. Le portage collectif de ces actions, avec des personnes qui en sont acteurs et non simples participants, rend plus facile l’engagement sur la voie des économies d’énergie.</p>
<h2>De nouveaux outils</h2>
<p>Des dispositifs de soutien aux énergies renouvelables citoyennes – que ce soit en matière d’accompagnement méthodologique ou financier – ont vu le jour aux niveaux national et territorial depuis une dizaine d’années.</p>
<p>En 2015, on recensait ainsi 49 structures d’animation, fonds, programmes d’appels à projets, sociétés publiques locales contribuant d’une manière ou d’une autre au déploiement de ces initiatives. L’Ademe accompagne cette dynamique depuis 2007, généralement en collaboration avec des conseils régionaux. Dans ce cadre, des guides pratiques à l’attention <a href="https://presse.ademe.fr/2017/01/guide-projets-participatifs-et-citoyens-denergies-renouvelables.html">des collectivités</a> et <a href="https://energie-partagee.org/guide-projets-d-energie-renouvelable-et-citoyenne-sorienter-pour-bien-demarrer/">des collectifs</a> souhaitant se lancer ont été publiés.</p>
<p>Depuis 2016, l’État a instauré dans les procédures d’appel d’offres pour les énergies renouvelables électriques, un bonus lié à la participation des citoyens au financement, en distinguant plus récemment un <a href="https://www.cre.fr/">bonus pour l’investissement participatif</a>, c’est-à-dire pour les projets « citoyens ». La région Occitanie a été pionnière dans le domaine avec la mise en place depuis quatre ans d’un <a href="https://www.laregion.fr/Appel-a-projets-Energies-Cooperatives-et-Citoyennes-2018">appel à projets dédié</a>.</p>
<p>L’association Énergie partagée a également développé dans le cadre d’une convention avec l’Ademe un <a href="https://energie-partagee.org">centre de ressource national</a> qui contient, par exemple, un ensemble de <a href="https://energie-partagee.org/outils/formations/">webinaires et de formations</a> ouvert à tous. Dans les territoires, des structures d’animation régionales orientent les collectifs à structurer leur projet et assurent une mise en relation entre les acteurs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/240480/original/file-20181013-109213-10ok3hc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/240480/original/file-20181013-109213-10ok3hc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/240480/original/file-20181013-109213-10ok3hc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=271&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/240480/original/file-20181013-109213-10ok3hc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=271&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/240480/original/file-20181013-109213-10ok3hc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=271&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/240480/original/file-20181013-109213-10ok3hc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=341&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/240480/original/file-20181013-109213-10ok3hc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=341&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/240480/original/file-20181013-109213-10ok3hc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=341&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les différentes phases des projets.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://energie-partagee.org/guide-projets-d-energie-renouvelable-et-citoyenne-sorienter-pour-bien-demarrer/">Énergie partagée</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Début 2018, un nouvel outil – <a href="http://enrcit.fr/">EnRCiT</a> – est venu compléter cette offre pour soutenir les projets citoyens lors de la phase de développement, la plus risquée. Il s’agit en effet de la phase où des investissements relativement importants sont réalisés pour conduire des études détaillées, avec un risque de ne pas obtenir les autorisations indispensables à la réalisation concrète du projet. La mise en œuvre de cet outil fait suite à une étude de préfiguration (non publiée) qui a été menée conjointement par l’Ademe et la Caisse des Dépôts et consignations.</p>
<p>EnRciT, en tant que société d’investissement (SAS), co-investit aux côtés des citoyens, des collectivités et des autres actionnaires. L’objectif est d’apporter les moyens financiers adéquats lors de la phase de développement, afin de mener les études technico-économiques et règlementaires des projets en vue d’obtenir les autorisations requises avant la construction.</p>
<p>Doté de 10 millions d’euros par la Caisse des Dépôts, l’Ircantec et le Crédit coopératif, cet outil doit permettre de financer environ 150 projets sur 10 ans.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/103728/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lilian Carpenè ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Près de 300 projets citoyens sont conduits en France dans le domaine des énergies renouvelables. Une cinquantaine de structures soutiennent cette dynamique dans les territoires.Lilian Carpenè, Ingénieur économiste, service « réseaux et énergies renouvelables », Ademe (Agence de la transition écologique)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.