tag:theconversation.com,2011:/us/topics/couleurs-52916/articlescouleurs – The Conversation2023-10-11T17:13:52Ztag:theconversation.com,2011:article/2143222023-10-11T17:13:52Z2023-10-11T17:13:52ZTextiles toxiques pour l'environnement et la santé : les designers ont un rôle à jouer<p>On entend souvent parler de la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=rwp0Bx0awoE">pollution de l’industrie textile</a>. Mais <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30278363/">son impact sur la santé humaine</a> est moins abordé. </p>
<p>Pourtant, les composés pétrochimiques utilisés dans la fabrication de nos vêtements ont des <a href="https://www.youtube.com/watch?v=onD5UOP5z_c">effets nocifs sur les travailleurs</a>, les <a href="https://www.youtube.com/watch?v=IxVq_38BoPE">communautés environnantes</a> et les <a href="http://www.cec.org/files/documents/publications/11777-furthering-understanding-migration-chemicals-from-consumer-products-fr.pdf">consommateurs</a>. </p>
<p>Cette problématique a une <a href="https://www.greenpeace.org/static/planet4-international-stateless/2012/11/317d2d47-toxicthreads01.pdf">incidence mondiale</a>, mais son évaluation est complexe. Pourquoi ? En raison de notre faible exposition quotidienne à un <a href="https://www.leslibraires.ca/livres/perturbateurs-endocriniens-la-menace-invisible-marine-jobert-9782283028179.html">« cocktail » composé d’une panoplie de substances synthétiques peu étudiées</a> dont il est difficile de distinguer les causes à effets. D’autant plus que la toxicité de ces substances peut s’amplifier par interaction ou dégradation, comme c’est le cas des <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/substances-chimiques/initiative-groupes-substances/azoiques-aromatiques-base-benzidine.html">colorants azoïques</a>, utilisés comme teinture textile, qui sont omniprésents et persistants dans l’environnement. </p>
<p>À travers ma recherche en design textile durable, j’explore la façon dont le design peut contribuer à rendre l’industrie textile plus respectueuse de l’environnement, en mettant l’accent sur la sensibilisation écologique des designers, des preneurs de décisions et du grand public. </p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/551518/original/file-20231002-15-cu6ppt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="teintures textiles" src="https://images.theconversation.com/files/551518/original/file-20231002-15-cu6ppt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/551518/original/file-20231002-15-cu6ppt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=221&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/551518/original/file-20231002-15-cu6ppt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=221&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/551518/original/file-20231002-15-cu6ppt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=221&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/551518/original/file-20231002-15-cu6ppt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=277&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/551518/original/file-20231002-15-cu6ppt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=277&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/551518/original/file-20231002-15-cu6ppt.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=277&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Teintures réalisées à partir de déchets agroalimentaires et inspirées des Pantone.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Vanessa Mardirossian)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>Une réflexion qui ne date pas d’hier</h2>
<p>Dès les années 1960, le designer <a href="https://papanek.org/archivelibrary/victor-papanek/">Victor Papanek</a> est le premier à soulever les <a href="https://www.lespressesdureel.com/ouvrage.php?id=8623">enjeux environnementaux liés à la conception</a> de produits industriels. </p>
<p>C’est aussi l’époque où émerge la conscience écologique, initiée par la biologiste <a href="https://www.leslibraires.ca/livres/printemps-silencieux-rachel-carson-9782918490005.html">Rachel Carson</a>, qui sensibilise la population à l’impact de l’activité humaine sur l’environnement. </p>
<p>Puis, dans les années 1990, l’avènement de la <a href="https://www.mcgill.ca/newsroom/fr/article/la-chimie-verte-mise-en-contexte">chimie verte</a> a favorisé la collaboration entre le design et la biologie pour développer des <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=1278402">textiles écologiques</a>. Ces derniers visaient à améliorer la gestion des déchets et à préserver la pureté de l’eau en suivant les <a href="https://mcdonough.com/wp-content/uploads/2013/03/Hannover-Principles-1992.pdf">principes de Hanovre</a>, qui cherchent à harmoniser l’interdépendance entre l’activité humaine et le monde naturel en éliminant les intrants toxiques à la source. </p>
<h2>Une approche inspirée du vivant pour accélérer la transition écologique textile</h2>
<p>L’humanité s’est toujours inspirée des formes de la nature pour créer. </p>
<p>Dans cette optique, à la fin du XX<sup>e</sup> siècle, la biologiste <a href="https://biomimicry.org/janine-benyus/">Janine Benyus</a> nous invite à observer les <a href="https://biomimicry.org">modes opératoires du vivant</a> pour repenser nos méthodes de fabrication en s’inspirant du <a href="https://www.ruedelechiquier.net/essais/376-biomimetisme-25-ans.html">biomimétisme</a>. </p>
<p>Pourrions-nous par exemple produire des teintures à température ambiante et sans molécules toxiques ? Cette démarche amène à considérer une réflexion commune entre le design, les sciences et l’ingénierie. </p>
<p>Cette vision multidisciplinaire du design où l’écologie, la médecine et la politique prennent part à l’acte de conception afin de mieux répondre aux besoins de la société était déjà prônée par Papanek dès 1969. </p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/551520/original/file-20231002-30-2h1680.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="schéma" src="https://images.theconversation.com/files/551520/original/file-20231002-30-2h1680.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/551520/original/file-20231002-30-2h1680.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/551520/original/file-20231002-30-2h1680.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/551520/original/file-20231002-30-2h1680.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/551520/original/file-20231002-30-2h1680.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/551520/original/file-20231002-30-2h1680.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/551520/original/file-20231002-30-2h1680.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Concept du « design minimal », de Victor Papanek.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Schéma tiré des travaux de Victor Papanek)</span></span>
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<h2>Développer une pensée écosystémique du design à travers une éducation écologique</h2>
<p>Dès 1990, le pédagogue <a href="https://blogs.ubc.ca/lled3662017/files/2017/08/Orr_Environmental-Literacy-Ecoliteracy.pdf">David Orr</a> introduit le concept d’écolittératie pour combler une lacune majeure dans l’éducation traditionnelle, qui est centrée sur l’humain et qui ignore son interconnexion avec la nature. Orr préconise une éducation environnementale pour développer un lien d’appartenance avec son milieu de vie et établir des modèles de production favorisant la résilience des écosystèmes. </p>
<p>Dans les années 2000, la chercheuse en design de mode <a href="https://katefletcher.com">Kate Fletcher</a> soutient le développement de cette littératie écologique afin d’amener les parties prenantes du secteur (designers, consommateurs, industriels) à comprendre l’implicite interconnexion des systèmes industriels et vivants, qui montre que la mode entretient une relation vitale avec la nature. </p>
<p>Puis, en 2018, la chercheuse en conception durable <a href="https://www.bloomsbury.com/ca/design-ecology-politics-9781350258778/">Joanna Boehnert</a> souligne que la littératie écologique favorise non seulement le développement de nouvelles façons de produire plus durables, mais permet aussi d’élargir notre vision sociale, politique, et économique afin d’aborder de façon systémique les défis transdisciplinaires de la durabilité. </p>
<p>C’est ce que soutient aussi le biologiste <a href="https://www.pikaia.fr/equipe/emmanuel-delannoy/">Emmanuel Delannoy</a> dans son modèle de <a href="https://www.apesa.fr/permaeconomie/">permaéconomie</a>, qui nous amène à reconsidérer notre relation au vivant afin d’établir une symbiose entre l’économie et la biosphère.</p>
<h2>Un patrimoine coloré à redécouvrir, transmettre et sublimer</h2>
<p>Mon projet de <a href="https://hexagram.ca/fr/qu-est-ce-que-la-recherche-creation/">recherche-création</a> propose une réflexion critique sur la teinture textile. </p>
<p>Ce champ d’investigation m’amène à explorer la coloration au-delà de son esthétique afin de soulever des questionnements d’ordre écologique, économique et pédagogique. </p>
<p>Alors que l’aspect <em>glamour</em> de la mode occulte les problématiques sanitaires et socio-environnementales de l’industrie textile, j’oriente ma réflexion vers une compréhension plus globale de la teinture qui comprend ses origines, ses modes de fabrication et ses interactions avec le vivant. </p>
<p>J’explore le développement de teintures non toxiques, en étudiant d’une part, la littérature sur les <a href="https://www.belin-editeur.com/le-monde-des-teintures-naturelles">colorants naturels depuis la préhistoire</a>. De l’autre, en rencontrant des experts du domaine comme l’historienne <a href="https://www.cnrs.fr/sites/default/files/download-file/CardonD.pdf">Dominique Cardon</a> ou l’artisane textile écolettrée <a href="https://fibershed.org/staff-board/">Rebecca Burgess</a>, fondatrice du concept <a href="https://fibershed.org">Fibershed</a>, qui vise à produire un vêtement biodégradable dans un espace géographique restreint. </p>
<p>J’étudie aussi des pratiques de terrain, dont celle du Laboratoire Textile de l’<a href="https://www.luma.org/fr/arles/nous-connaitre/les-projets/atelier-luma.html">Atelier Luma</a> qui travaille à l’intersection de l’écologie, du textile et du développement économique régional. </p>
<p>Enfin, je m’intéresse aux <a href="https://www.arts.ac.uk/subjects/textiles-and-materials/postgraduate?collection=ual-courses-meta-prod&query=!nullquery&start_rank=1&sort=relevance&f.Subject-test%7Csubject=Textiles%20and%20materials&f.Course%20level%7Clevel=Postgraduate">formations en design qui proposent une approche art-science</a> où l’<a href="https://wildproject.org/livres/vers-lecologie-profonde">écologie profonde</a> est intégrée au processus de conception. </p>
<h2>Symbiose entre la nature et l’industrie textile</h2>
<p>Dans <a href="https://speculativelifebiolab.com/2022/04/03/cooking-and-culturing-colour-part-iv/">le laboratoire de recherche où je travaille</a>, j’expérimente le croisement de recettes tinctoriales (teintures textiles à base de plantes) traditionnelles et prospectives. </p>
<p>Inspirée par le concept d’<a href="https://doi.org/10.1038/scientificamerican0989-144">écologie industrielle</a>, précurseur de l’économie circulaire, qui valorise les rebuts d’une industrie comme ressources pour une autre, j’utilise des <a href="https://www.lapresse.ca/societe/mode-et-beaute/2021-03-30/quand-les-dechets-se-melent-de-la-mode.php">déchets agroalimentaires comme source colorante</a>, que je combine à l’utilisation de <a href="https://hexagram.ca/fr/demo2-vanessa-mardirossian-the-culture-of-color-an-ecoliteracy-of-textile-design-2/">bactéries productrices de pigment</a> pour élargir la palette de couleurs. </p>
<p>Ainsi, les tannins issus de divers rebuts peuvent être valorisés dans des recettes de teintures. </p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/551537/original/file-20231002-25-qtiisx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="bouts de tissu colorés" src="https://images.theconversation.com/files/551537/original/file-20231002-25-qtiisx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/551537/original/file-20231002-25-qtiisx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/551537/original/file-20231002-25-qtiisx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/551537/original/file-20231002-25-qtiisx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/551537/original/file-20231002-25-qtiisx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/551537/original/file-20231002-25-qtiisx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/551537/original/file-20231002-25-qtiisx.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Tissu teint à partir de déchets et de bactéries.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Vanessa Mardirossian)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Mais colorer un textile n’est que la partie visible de l’iceberg. Car toute une préparation de la fibre se passe en amont pour assurer la résistance de la couleur à la lumière et au lavage. C’est ce qu’on appelle le « mordançage ». Que la fibre soit animale ou végétale, les mordants utilisés seront différents, mais doivent rester bénéfiques à l’environnement pour pouvoir y être rejetés. </p>
<p>Cette expertise acquise de façon itérative entre la théorie, le prototypage et l’analyse de résultats contribue à l’écolittératie textile. Doublée d’une connaissance en biologie, cette dernière permet d’appréhender les interactions délétères entre le monde matériel et vivant. </p>
<p>La synthèse des concepts d’écolittératie et de biomimétisme m’amène à réfléchir à une macro-vision de l’écosystème industriel de la mode et à envisager le concept d’« écolittératie textile » comme un moyen de déployer un réseau de collaborations intersectorielles entre le design, la santé, l’éducation et l’industrie. </p>
<p>Ma recherche vise ainsi à montrer que la <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.2752/175693810X12774625387594">matérialité textile doit s’harmoniser de manière symbiotique avec les écosystèmes naturels</a> afin que les deux parties bénéficient de leur interaction.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214322/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Vanessa Mardirossian est membre de l'Acfas, d'Hexagram et des laboratoires de recherche: Textiles & Materiality et Critical Practices in Material and Materiality de l'Université Concordia. Elle a reçu des financements du Conseil de recherches en Sciences Humaines du Canada (CRSH), de l'Université Concordia et de l'Université du Québec à Montréal.</span></em></p>La fabrication des vêtements, lors de leur production, leur utilisation et leur fin de vie, a un impact sur notre santé. Mais une meilleure connaissance écologique pourrait renverser la vapeur.Vanessa Mardirossian, PhD Candidate and educator in sustainable fashion, Concordia UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2036402023-09-21T16:31:19Z2023-09-21T16:31:19ZComment la couleur est devenue un enjeu majeur de l’histoire de l’art<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/548640/original/file-20230916-36057-q6y5ni.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=72%2C26%2C1828%2C1198&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Étude d'un martin-pêcheur, avec référence dominante à la couleur, John Ruskin, probablement octobre 1871. Pour Ruskin, la couleur joue un rôle clé : elle symbolise la beauté de la faune et de la flore.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://ruskin.ashmolean.org/collection/8979/object/14655">Ashmolean Museum</a></span></figcaption></figure><p>Le thème de la couleur est devenu un classique des expositions. Citons par exemple pour la seule année 2022 <a href="https://www.fondationlouisvuitton.fr/fr/evenements/la-couleur-en-fugue">« La Couleur en fugue » à la fondation Louis Vuitton</a> à Paris, <a href="https://www.museedegrenoble.fr/2458-bonnard.-les-couleurs-de-la-lumiere.htm">« Bonnard. Les couleurs de la lumière »</a> au musée de Grenoble ou bien encore <a href="https://www.museeregardsdeprovence.com/exposition/couleurs-des-suds-antoine-et-jos-henri-ponchin">« Couleurs des Suds »</a> au musée Regards de Provence de Marseille.</p>
<p>Le succès de la thématique doit sans doute beaucoup au fait qu’elle parle et résonne facilement, d’une façon que l’on imagine instinctivement comme « universelle ». La perception de la couleur est pourtant culturelle et contingente, comme nous l’apprennent les études de plus en plus nombreuses, depuis les <a href="https://www.inha.fr/fr/ressources/publications/collections-imprimees/collection-sources-pour-l-histoire-de-l-art/couleur-et-culture-usages-et.html">travaux précurseurs de John Gage au Royaume-Uni</a> et de l’historien <a href="https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb35519948s">Michel Pastoureau</a> en France.</p>
<p>Tout reste néanmoins à explorer dans cette branche encore nouvelle. La couleur comme objet d’étude ouvre ainsi des perspectives pluridisciplinaires : que nous apprennent les matériaux colorants sur notre rapport à l’art, à la mode, à la décoration ? Quelles idées, quel rapport au monde environnant et aux objets du quotidien notre utilisation et notre compréhension des couleurs véhiculent-elles ?</p>
<h2>La couleur au XIXᵉ siècle</h2>
<p>Si, comme l’a montré Michel Pastoureau, la couleur gagne à être historicisée et contextualisée, peu de travaux s’attardent sur les enjeux chromatiques de certaines aires géoculturelles précises. C’est l’objet de <a href="https://chromotope.eu/">Chromotope</a>, un ambitieux projet de recherche financé par l’Union européenne qui explore ce que le XIX<sup>e</sup> siècle a fait à la couleur, et dans lequel s’inscrit mon propre travail de recherche sur l’œuvre de l’écrivain, poète, peintre et critique d’art britannique John Ruskin (1819–1900). L’étude d’une période circonscrite permet une plongée plus en détail dans un moment charnière dans l’histoire de la couleur : la seconde moitié du XIX<sup>e</sup> siècle, qui voit l’apparition des premiers colorants et pigments de synthèse extraits de goudron de houille.</p>
<p>C’est <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/William_Henry_Perkin">William Henry Perkin</a>, un jeune apprenti chimiste anglais, qui synthétise pour la première fois la <a href="https://www.cnrs.fr/cw/dossiers/doschim/decouv/couleurs/la_mauveine.html">mauvéine</a> en 1856. Cette découverte accidentelle modifie profondément le rapport à la couleur dans les arts, la littérature et la culture visuelle de l’Angleterre industrielle : la mauvéine, peu coûteuse et efficace sur des textiles comme la laine ou la soie, ouvre la voie à une production industrielle qui donnera lieu à une « mauve mania » dans la mode britannique, ainsi que dans le reste de l’Europe. Les conséquences se font ressentir en peinture, en architecture, dans les arts décoratifs… mais aussi au cœur des <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/02666286.2019.1651593">débats esthétiques de l’époque</a> autour de l’authenticité des couleurs « naturelles » ou « artificielles ».</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/549581/original/file-20230921-25-4iuqh4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/549581/original/file-20230921-25-4iuqh4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=781&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/549581/original/file-20230921-25-4iuqh4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=781&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/549581/original/file-20230921-25-4iuqh4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=781&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/549581/original/file-20230921-25-4iuqh4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=982&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/549581/original/file-20230921-25-4iuqh4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=982&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/549581/original/file-20230921-25-4iuqh4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=982&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">[Image extraite de l’exposition : Robe de jour pour femme, Angleterre, soie pourpre aniline, vers 1865–70.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ashmolean.org/sites/default/files/ashmolean/images/media/rs643645_li_5223_9-2-lrg-purple-dress-1000tall.png">Manchester Art Gallery</a></span>
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<p>C’est dans le cadre de ce projet Chromotope que s’ouvre le 21 septembre 2023 au musée des Beaux-arts d’Oxford (l’Ashmolean Museum) une grande exposition sur la couleur au XIX<sup>e</sup> siècle, intitulée <a href="https://www.ashmolean.org/exhibition/colour-revolution-victorian-art-fashion-design">« Color Revolution : Victorian Art, Fashion and Design »</a>. Une exposition largement informée par les travaux interdisciplinaires de chercheurs et chercheuses en arts et littérature, conservateurs, conservatrices et scientifiques de la conservation qui ont collaboré afin de rendre leur recherche accessible à un plus large public.</p>
<h2>Le tournant Ruskin</h2>
<p>L’ère victorienne au Royaume-Uni, qui correspond au règne de la reine Victoria entre 1837 et 1901, fut marquée par l’apogée de la révolution industrielle et de l’empire colonial britannique, mais aussi par une riche scène artistique et littéraire. Parmi les figures majeures qui ont joué un rôle dans ces transformations, John Ruskin, critique d’art très influent et grand penseur de la couleur, occupe une place importante. Bien que moins connu en France qu’au Royaume-Uni, l’œuvre de cet artiste, collectionneur et écrivain prolifique, a notamment marqué Marcel Proust, qui le lut et le traduisit avec enthousiasme. <a href="https://id.erudit.org/iderudit/1043950ar">Cette influence se retrouve dans bien des aspects de son œuvre</a>. Dans <em>The Elements of Drawing</em> (<em>Éléments du dessin</em>), en 1857, il écrivait :</p>
<blockquote>
<p>« Tout ce que l’on voit dans le monde autour de soi ne se présente au regard que sous la forme d’un agencement de taches de différentes couleurs, de différentes nuances. »</p>
</blockquote>
<p>Dans une époque marquée par la consolidation d’un certain nombre de champs disciplinaires scientifiques comme les sciences naturelles ou humaines, l’anthropologie, la géologie, la botanique et d’autres, Ruskin se démarque par une pensée complexe qui échappe aux classifications, et fait la part belle à la nature, la morale et la pédagogie. Il écrit pour informer son lectorat, enseigner le dessin, éduquer les jeunes filles ; il fonde des institutions muséales à destination des populations ouvrières afin de remettre le beau et l’artisanat au centre de la vie et de la ville, comme le <a href="https://www.ruskinatwalkley.org/">St George’s museum à Sheffield</a> ; il s’oppose à l’industrialisation qu’il perçoit comme un danger majeur pour la civilisation européenne comme pour le monde naturel.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/549584/original/file-20230921-29-2kp2rk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/549584/original/file-20230921-29-2kp2rk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=698&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/549584/original/file-20230921-29-2kp2rk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=698&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/549584/original/file-20230921-29-2kp2rk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=698&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/549584/original/file-20230921-29-2kp2rk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=877&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/549584/original/file-20230921-29-2kp2rk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=877&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/549584/original/file-20230921-29-2kp2rk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=877&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Portrait de John Ruskin par le peintre préraphaélite John Everett Millais, Millais, entre 1853 et 1854.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ashmolean.org/sites/default/files/ashmolean/images/media/wa_2013_67-afull_0.jpg">Ashmolean Museum</a></span>
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<p>Dans son œuvre, la couleur joue un rôle clé : elle symbolise la beauté de la faune et de la flore, sacralise la peinture lorsqu’elle est utilisée correctement, mais peut gâcher une image instantanément si le peintre commet la moindre erreur dans les nuances et les harmonies chromatiques.</p>
<p>Dans ce rapport protoécologiste au monde, la couleur est un prisme par lequel l’observation minutieuse de l’environnement naturel permet de servir l’art, les êtres humains et la création divine. Loin de la pensée chromophobe d’un Platon qui s’attaque à la rhétorique autant qu’à la couleur ou de <a href="https://www.davidbatchelor.co.uk/books/chromophobia/">ses héritiers qui en dénonçaient les attributs sensuels</a>, la couleur devient ainsi pour Ruskin un élément sacré.</p>
<p>Ruskin prêtait en effet une attention toute particulière aux couleurs de la nature qu’il s’efforça de reproduire de la manière la plus fidèle possible : en témoignent ses nombreuses études, notamment à l’aquarelle, rassemblées dans la <a href="http://ruskin.ashmolean.org/">« Teaching Collection »</a> de l’Ashmolean Museum. Cette collection rassemble presque mille-cinq-cents œuvres, dessinées ou collectionnées par Ruskin, qui servirent de support à ses enseignements à l’Université d’Oxford à partir des années 1870. À titre d’exemple, on peut mentionner son célèbre martin-pêcheur dont il existe deux versions : une en noir et blanc, une multicolore. Le plumage de l’oiseau montre toute l’étendue du savoir-faire chromatique de Ruskin, avec des touches subtiles et éclatantes de bleu, violet, orange, et toutes les nuances liées à la texture et à la lumière. Ces images sont disponibles en version numérisée sur le site de la <a href="http://ruskin.ashmolean.org/collection">« Teaching Collection »</a>.</p>
<p>Lorsqu’il fonde le musée de Saint George, dans la banlieue de Sheffield, en 1857, Ruskin le conçoit comme un lieu de fluidité où les catégories artistiques figées n’ont pas cours : ce qui lui importe est de revivifier l’art et l’artisanat. Or, la couleur, commune à toutes ces pratiques, défie les tentations classificatoires et en ce sens, elle sert l’élan muséologique libérateur porté par Ruskin tout au long de la deuxième moitié du XIX<sup>e</sup> siècle. Elle échappe aux catégories muséales qui se solidifient alors à peine. Dans ce sens, on trouvera l’exposition « Colour Revolution » résolument ruskinienne : on y trouvera des supports variés (dessins et peintures, mais aussi céramique, vitraux, bijoux, meubles, vêtements…), avec une approche transversale, qui souligne l’attention portée à la matière de la couleur tout en même temps qu’à sa portée spirituelle. Ces éléments témoignent de la portée de l’œuvre et de l’influence de Ruskin qui dépasse l’époque victorienne et influence les pratiques muséales contemporaines.</p>
<p>À la lecture de Ruskin, la révolution de la couleur au XIX<sup>e</sup> siècle interroge ainsi nos rapports à la nature, à l’art, mais aussi à des questions éthiques brûlantes d’actualité. On pense à la couleur genrée, qualifiée de futile lorsqu’elle est vive dans la mode féminine ; mais aussi à la <a href="https://theconversation.com/jai-pour-moi-la-beaute-et-la-vertu-qui-nont-jamais-ete-noires-largument-esthetique-dans-le-racisme-coloriste-156889">couleur racisée</a> et au <a href="https://theconversation.com/au-musee-dorsay-les-modeles-noirs-sortent-de-lombre-114878">traitement artistique</a> de la couleur de peau non blanche dans une Europe colonialiste et impérialiste, au regard exotisant sur les couleurs de l’orient.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/549579/original/file-20230921-27-7c8h4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/549579/original/file-20230921-27-7c8h4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=863&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/549579/original/file-20230921-27-7c8h4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=863&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/549579/original/file-20230921-27-7c8h4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=863&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/549579/original/file-20230921-27-7c8h4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1085&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/549579/original/file-20230921-27-7c8h4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1085&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/549579/original/file-20230921-27-7c8h4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1085&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le Porteur de pipe, 1856, John Frederick Lewis.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ashmolean.org/sites/default/files/ashmolean/images/media/the_pipe_bearer_john_frederick_lewis_oil_on_canvas_1868-9._birmingham_museum_and_art_gallery._image_c_birmingham_museums_trust_licensed_under_cc0.jpg">Ashmolean museum</a></span>
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</figure>
<p>Autant de problématiques qui trouveront des échos dans le cadre de l’exposition. Au-delà de l’image terne et grise d’une Angleterre victorienne plongée dans la brume de l’industrialisation, Ruskin nous donne à penser et à découvrir une palette d’enjeux esthétiques, artistiques et politiques qui font résolument écho à nos préoccupations contemporaines.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/203640/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Stella Granier a reçu des financements de Sorbonne Université.
Ce projet a bénéficié d’un financement du Conseil européen de la recherche (ERC) au titre du programme-cadre de l’Union européenne pour la recherche et l’innovation "Horizon 2020" (convention de subvention n° 818563).</span></em></p>Que nous apprennent les couleurs sur notre rapport à l’art, à la mode, à la décoration ? Quelles idées véhiculent-elles ?Stella Granier, Doctorante en études anglophones, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2120792023-08-28T17:54:59Z2023-08-28T17:54:59ZLes chiens ne voient pas la vie en rose. Ni en noir et blanc<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/544316/original/file-20230823-23-qmzzxx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C0%2C995%2C666&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Contrairement à l'humain, les yeux des chiens sont situés plutôt sur le côté du crâne. Ils possèdent donc un champ visuel plus étendu.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Samuel est un jeune patient de 6 ans que je traite depuis quelques mois pour une myopie qui débute. C’est un garçon très éveillé pour son âge. Il me pose souvent des questions sur les tests, sur ce que je vois dans son œil. </p>
<p>Mais la dernière m’a plutôt surpris. </p>
<p>Il sait que certaines personnes ne voient pas bien les couleurs, comme son père. Mais qu’en est-il pour son petit caniche, Scotch ?</p>
<p>Je ne suis pas vétérinaire et ne veux pas empiéter sur leurs compétences. Mais comme optométriste, j’ai peut-être en poche quelques éléments qui peuvent répondre à la question de Samuel. </p>
<h2>Des cônes et des bâtonnets</h2>
<p>La lumière ambiante est composée de <a href="https://www.cnrtl.fr/definition/photon">particules (photons)</a>, qui s’alignent en rayons. Les rayons de lumière voyagent et frappent les objets. Certains rayons sont absorbés, et d’autres sont réfléchis selon les caractéristiques de leurs surfaces et de la composition de leur matière. Les longueurs d’onde des rayons réfléchis déterminent la couleur de l’objet perçue par l’œil. </p>
<p>Comme tout ce qui touche la vision chez l’humain, la perception de cette couleur est complexe. La rétine, partie sensible qui tapisse le fond de l’œil, contient deux types de récepteurs aux photons : les cônes et les bâtonnets. Les cônes, au centre de la rétine (fovéa), perçoivent la lumière vive et sont donc <a href="https://www.alloprof.qc.ca/zonedentraide/discussion/6916/question/p1">responsables de la perception des couleurs</a>.</p>
<p>Il existe trois types de cônes. Chaque type contient un photo-pigment en particulier, nommé opsine, qui en définit donc la nature. Cette opsine est produite sous l’influence de certains gènes spécifiques. L’opsine la plus courte (« Cône S » pour <em>short</em>) réagit surtout lorsque la lumière bleue (420 nm) est présente. Celle la plus longue (« Cône L ») est davantage sensible au rouge orangé (560 nm), et celle entre les deux (« Cône M », pour <em>middle</em>) <a href="https://lecerveau.mcgill.ca/flash/a/a_02/a_02_m/a_02_m_vis/a_02_m_vis.html">s’actionne en présence du vert (530 nm)</a>.</p>
<p>Ceci étant dit, chaque cône réagit à chacun des rayons qui entrent dans l’œil. Par exemple, une balle rouge entraînera une réponse faible du cône S (3/10), un peu plus marquée du cône M (5/10) et une <a href="https://e-cours.univ-paris1.fr/modules/uved/envcal/html/compositions-colorees/2-lumiere-visible-couleurs/3-3-vision-couleurs.html">grande réaction du cône L</a> (8/10). </p>
<p>Le cerveau recombine les signaux émis par chacun de ces cônes afin de former la couleur à percevoir. Ainsi, dans l’exemple précédent, la couleur perçue aurait le code 3-5-8, qui correspond à ce que la personne sait être le rouge. Un rose aurait peut-être un code 4-6-6, et un bleu 8-6-3. Chacune de ces combinaisons de 3 signaux des cônes est donc unique et permet d’apprécier toutes les teintes et leurs variations. </p>
<p>Du moins, tant que le code génétique est intact. </p>
<p>Les gènes associés à la vision des couleurs peuvent être mutés ou défectueux : la personne présentera alors une déficience, partielle ou complète. Plusieurs anomalies de ce type existent, la plus connue étant le daltonisme (déficience rouge-vert).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/544341/original/file-20230823-249-j6j8jf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="perception d’une plante selon une personne daltonienne" src="https://images.theconversation.com/files/544341/original/file-20230823-249-j6j8jf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/544341/original/file-20230823-249-j6j8jf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/544341/original/file-20230823-249-j6j8jf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/544341/original/file-20230823-249-j6j8jf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/544341/original/file-20230823-249-j6j8jf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/544341/original/file-20230823-249-j6j8jf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/544341/original/file-20230823-249-j6j8jf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le daltonisme est associé à une difficulté à percevoir le rouge et le vert.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Et les animaux, dans tout ça ?</h2>
<p>La vision des couleurs, chez l’humain comme chez les animaux, <a href="https://blog.defi-ecologique.com/vision-animale/">s’est développée par évolution</a>. Elle résulte donc des besoins de chaque espèce selon l’environnement dans lequel elle vit, en fonction des proies à chasser ou des menaces à éviter. </p>
<p>Par exemple, les oiseaux possèdent une 4<sup>e</sup> opsine qui leur permet de voir la lumière ultra-violette (UV). De son côté, l’humain ne peut la percevoir, car notre cristallin (lentille interne) <a href="https://www.pourlascience.fr/sd/biologie-animale/ce-que-voient-les-oiseaux-2196.php">filtre les rayons UV</a>. Les rayons UV influencent les décisions comportementales des oiseaux, notamment pour la recherche de nourriture et le choix du <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0065345408601059#:%7E:text=Publisher%20Summary,light%2C%20depending%20on%20the%20species.">partenaire</a>. </p>
<p>La vision des couleurs des oiseaux est donc davantage complexe. À ce titre, le pigeon, qui peut percevoir une myriade de couleurs, est celui qui remporte la <a href="http://visionanimale.fr/l%C5%93il-animal-principales-affections/la-vision-animale/# :%7E :text=Beaucoup %20d%E2%80%99oiseaux %20peuvent %20voir,de %20d %C3 %A9tection %20de %20la %20couleur.">palme de toutes les espèces !</a></p>
<p>Les insectes perçoivent également les UV. Cette fonction leur est essentielle au repérage du pollen, bien que leur vision des couleurs soit très modeste. Leurs yeux sont composés de multiples lentilles (ommatidies) qui perçoivent <a href="https://www.futura-sciences.com/planete/questions-reponses/zoologie-voit-mouche-5982/">davantage les mouvements que la couleur</a> Plus pratique en plein vol rapide !</p>
<p>La plupart des mammifères qui vivent en forêt n’ont que deux opsines. Ils ont perdu, au cours de l’évolution, celle qui est associée au rouge orangé. C’est ce qui explique qu’ils ne perçoivent pas les dossards oranges des chasseurs, contrairement à nous. </p>
<p>Les serpents sont quant à eux plus sensibles au rouge et à l’infrarouge, grâce à des récepteurs thermiques. Un avantage pour repérer les proies à chasser, car <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/fondamental/les-secrets-de-la-vision-thermique-des-serpents_22551">ils peuvent distinguer leur chaleur même la nuit</a>. </p>
<p>Sans surprise, c’est le singe qui se rapproche le plus de l’humain, avec ses trois opsines. On dit qu’il est trichromate. </p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/544344/original/file-20230823-19-pd8rjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="gros plan sur les yeux d’un chien noir" src="https://images.theconversation.com/files/544344/original/file-20230823-19-pd8rjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/544344/original/file-20230823-19-pd8rjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/544344/original/file-20230823-19-pd8rjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/544344/original/file-20230823-19-pd8rjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/544344/original/file-20230823-19-pd8rjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/544344/original/file-20230823-19-pd8rjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/544344/original/file-20230823-19-pd8rjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les chiens ne perçoivent que le vert jaune et le bleu violet. Les couleurs sont perçues plus pâles, comme des pastels.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Revenons à Scotch</h2>
<p>La vision des chiens – et donc celle de Scotch – est <a href="https://ophtalmoveterinaire.com/maladies_oculaires/vision-comment-voit-mon-chien/#:%7E:text=Pour%20r%C3%A9sumer%2C%20la%20vision%20du,pour%20sa%20vie%20de%20chien.">bien différente</a>. </p>
<p>Contrairement à l’humain, leurs yeux sont situés plutôt sur le côté du crâne. Conséquence : le chien possède un champ visuel plus étendu (250 à 280 degrés), mais moins de vision simultanée. </p>
<p>Sa vision des mouvements est bien développée dans tout son champ visuel. Mais sa vision centrale est bien plus faible que la nôtre, soit six fois moins bonne. C’est l’équivalent de la vision d’une personne très myope, sans lunettes. Pourquoi ? Parce que la rétine du chien ne contient pas de fovéa, et donc moins de cônes. </p>
<p>Moins de cônes, mais plus de bâtonnets. Et en prime, une couche supplémentaire de la rétine, le tapetum lucidum – ou tapis. Tous ces ingrédients combinés le font mieux voir en pénombre et la nuit. Cette couche reçoit la lumière et la réfléchit à nouveau sur la rétine pour une 2<sup>e</sup> exposition. C’est ce qui explique que vous avez l’impression que les yeux de votre chien brillent la nuit.</p>
<p>Pour ce qui est des couleurs, les chiens sont dichromates. Ils ne perçoivent que le vert jaune et le bleu violet. Les couleurs sont perçues plus pâles, comme des pastels. Et certaines couleurs ne font pas de contraste : c’est pourquoi une balle rouge sur un gazon vert leur apparaîtra comme jaune pâle sur fond gris, avec peu de contraste. </p>
<p>Il est donc possible, selon la couleur de la balle, que Scotch ne la voie pas… et qu’il regarde Samuel d’un air perdu. Pour ce qui est de l’infrarouge, il perçoit la chaleur par son nez, et non par ses yeux. </p>
<p>Les chats, quant à eux, sont également dichromates. Leur vision est donc semblable, mais leur palette de couleur est différente – elle est orientée vers le violet et le vert. Aucune perception du rouge-vert, ils sont donc daltoniens ! Leur vision claire se limite à quelques mètres devant eux. Ils sont très myopes eux aussi.</p>
<p>Leur évolution a fait que leurs autres sens compensent. Entre autres, bien qu’ils ne perçoivent que certains contrastes, ils sont <a href="https://www.lefigaro.fr/sciences/2013/10/21/01008-20131021ARTFIG00486-comment-les-chats-voient-le-monde.php">redoutables à percevoir le mouvement</a>. Une souris, ça bouge vite ! </p>
<p>Toute espèce s’adapte à son milieu et les humains ne font pas exception. Qui sait quelle sera notre vision des couleurs dans 500 ans, après avoir été exposés à de plus en plus d’appareils électroniques et de couleurs artificielles ? </p>
<p>À Samuel d’y répondre, lorsqu’il sera plus grand !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/212079/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Langis Michaud ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La vision du monde de votre fidèle compagnon est différente de la vôtre, mais il est faux de croire qu’ils ne voient que le noir, le blanc et les nuances de gris.Langis Michaud, Professeur Titulaire. École d'optométrie. Expertise en santé oculaire et usage des lentilles cornéennes spécialisées, Université de MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1926672022-10-25T16:14:04Z2022-10-25T16:14:04ZColombe : « De quelles couleurs sont les étoiles ? »<p>Pour savoir de quelle couleur sont les étoiles, il faut d’abord parler de la lumière car quand on parle de couleur, on parle forcément de lumière. La lumière, c’est un très grand nombre de petits grains minuscules, qu’on ne voit pas individuellement, et qu’on appelle « photons ». Ces photons vibrent, mais ne vibrent pas tous de la même manière. Certains vibrent beaucoup, d’autres un peu moins car ils ont moins d’énergie. La lumière du jour qu’on a quotidiennement autour de nous est un mélange de différents photons : ceux qui ont beaucoup d’énergie, ceux qui en ont moins et tous les niveaux intermédiaires.</p>
<p>Les photons qui ont le plus d’énergie vont paraître bleus dans notre œil. À l’inverse, les photons qui ont moins d’énergie vont paraître plutôt rouges. Entre les deux, les photons ont des énergies intermédiaires, donc des jaunes, des verts, etc.</p>
<p>Prenons l’exemple d’un phénomène de la vie courante qui nous rapproche des étoiles : le feu. Un feu de cheminée par exemple est plutôt rouge orangé. Par contre, le feu de la gazinière est plutôt bleu. Ces feux de différents types n’envoient pas les mêmes photons. Certains envoient des photons avec beaucoup d’énergie, qui donnent une flamme bleue et d’autres envoient des photons avec moins d’énergie qui donnent une flamme rouge. Ainsi les flammes bleues sont plus chaudes que les flammes rouges.</p>
<h2>Qu’est-ce qu’une étoile ?</h2>
<p>Venons-en maintenant aux étoiles. Qu’est-ce qu’une étoile ? C’est un amas de gaz qui s’est contracté sur lui-même, on dit qu’il s’est effondré. Quand un gaz s’effondre sur lui-même, il se met à chauffer, ce qui déclenche des réactions dans la matière. Ces réactions permettent la production de lumière. Toutes les étoiles n’ont pas la même couleur. Certaines comme le feu de la gazinière, émettent plus de photons bleus, donc on va les voir bleues. Certaines, comme le feu de cheminée, émettent plus de photons rouges, on va donc les voir rouges.</p>
<p>Entre les deux, on pourrait se dire que certaines étoiles doivent envoyer beaucoup de photons verts par exemple. Ce n’est pas le cas. Ces étoiles-là émettent un peu tous les photons en même temps. Quand les photons sont tous mélangés, ça donne du blanc. Les étoiles n’ont donc que 3 catégories de couleur : les bleues, les blanches et les rouges. Voilà les trois couleurs d’étoiles qu’on peut voir dans le ciel la nuit.</p>
<h2>De quelle couleur est notre soleil ?</h2>
<p>Le soleil est une étoile particulière puisque c’est notre étoile, notre voisine. On pense que le soleil est jaune, mais c’est parce que notre atmosphère sur Terre filtre certains photons, notamment les bleus. C’est pour ça que le ciel est bleu et que le soleil nous apparaît jaune. Pourtant, dans l’espace, le soleil est presque blanc, il fait donc partie des catégories intermédiaires.</p>
<h2>Est-ce que la couleur d’une étoile détermine son âge ?</h2>
<p>La nuit, en regardant le ciel, on peut voir les couleurs des étoiles : à l’œil nu on voit surtout les plus brillantes, mais avec de simples jumelles ou un télescope c’est encore plus net.</p>
<p>Les étoiles les plus chaudes (bleues) brûlent leur carburant plus vite que les étoiles moins chaudes (rouges). Donc quand on voit une étoile bleue dans le ciel, c’est une étoile jeune, bien plus jeune que notre soleil. Et une étoile rouge est en général bien plus vieille.</p>
<p>Par exemple dans la nébuleuse d’Orion, un immense nuage de gaz visible en hiver, il y a des étoiles bleues qui se sont formées dans ce nuage, et qui sont très jeunes et très chaudes.</p>
<p>Le <a href="https://gaia.obspm.fr/">satellite européen Gaia</a> est un satellite qui mesure les positions et les couleurs de beaucoup d’étoiles autour de nous, dans notre galaxie. Au travers de cette mesure des couleurs des étoiles, les scientifiques peuvent déduire leur âge, leur masse et leur température. Voilà plein de choses intéressantes pour apprendre la vie des étoiles. Gaia a déjà mesuré presque 2 milliards d’étoiles !</p>
<hr>
<p><em>Cet article est basé sur un épisode du podcast <a href="https://cnes.fr/fr/podcast-raconte-moi-lespace">« Raconte-moi l’espace »</a>, une série produite par le Centre National d’Etudes Spatiales (CNES).</em></p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dianerottner.com/">Diane Rottner</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p><em>Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : <a href="mailto:tcjunior@theconversation.fr">tcjunior@theconversation.fr</a>. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/192667/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Pailler ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La couleur d'une étoile peut nous renseigner sur son âge.Frédéric Pailler, Ingénieur exploitation des données du satellite GAIA, Centre national d’études spatiales (CNES)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1776022022-06-14T13:29:55Z2022-06-14T13:29:55ZLes tournesols ont des motifs imperceptibles qui attirent les pollinisateurs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/451615/original/file-20220311-27-1ylp0hw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=35%2C0%2C4663%2C3746&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les tournesols sont plus colorés pour les pollinisateurs, qui voient dans l’ultraviolet, que pour nous.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Unsplash/Marco de Hevia)</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Les fleurs constituent un des exemples les plus frappants de la diversité de la nature. Elles présentent une myriade de combinaisons de couleurs, de motifs, de formes et de parfums. On y trouve des tulipes colorées, de délicates marguerites, des frangipaniers odorants, mais aussi des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Arum_titan">fleurs cadavres géantes à l’odeur putride</a>. Leur variété et leur diversité sont stupéfiantes – il suffit de penser à <a href="https://www.2tout2rien.fr/orchidee-canard-volant/">l’orchidée en forme de canard volant</a>.</p>
<p>Mais même si nous pouvons admirer la beauté et la diversité des fleurs, elles ne sont pas vraiment conçues pour nos yeux.</p>
<p>Le but des fleurs est d’attirer les pollinisateurs, et c’est à leurs sens que les fleurs répondent. Les motifs ultraviolets (UV) en sont un bon exemple. De nombreuses fleurs accumulent des pigments UV dans leurs pétales, formant des motifs qui sont invisibles pour nous, mais que la <a href="https://doi.org/10.1016/S0169-5347(00)89179-X">plupart des pollinisateurs peuvent voir</a>.</p>
<p>Le décalage entre ce que nous voyons et ce que les pollinisateurs perçoivent est particulièrement frappant pour les tournesols. Malgré leur caractère emblématique dans la culture populaire (comme en témoigne le supposé honneur d’être l’une des rares espèces de fleurs ayant un <a href="https://unicode.org/emoji/charts/full-emoji-list.html">emoji à leur image</a>), ils ne semblent pas être le meilleur exemple de diversité florale.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/2gduA3EM26M?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Comment les insectes voient-ils le monde ?</span></figcaption>
</figure>
<h2>Une affaire de perception</h2>
<p>Ce que nous considérons généralement comme un seul tournesol est en fait une grappe de fleurs, appelée inflorescence. Tous les tournesols sauvages, dont il existe environ <a href="https://www.jstor.org/stable/43390641">50 espèces en Amérique du Nord</a>, ont des inflorescences très similaires. À nos yeux, leurs ligules (les <a href="https://cronodon.com/BioTech/asteraceae.html">pétales agrandis et soudés au pourtour de l’inflorescence du tournesol</a>) sont toutes du même jaune vif uniforme que nous connaissons bien.</p>
<p>Cependant, lorsqu’on l’examine dans le spectre UV (c’est-à-dire au-delà du type de lumière que nos yeux peuvent voir), ce qu’on voit est très différent. Les tournesols accumulent des pigments absorbant les UV à la base des ligules. Sur l’ensemble de l’inflorescence, il en résulte un motif <a href="https://www.researchgate.net/publication/268075987_A_Microscopic_Review_of_the_Sunflower_and_Honeybee_Mutualistic_Relationship">qui forme comme un centre de cible</a>.</p>
<p>Dans une étude récente, nous avons comparé <a href="https://doi.org/10.7554/eLife.72072.sa0">près de 2 000 tournesols sauvages</a>. Nous avons constaté que la taille de ces taches UV varie considérablement, tant entre les espèces qu’au sein d’une même espèce.</p>
<p>Le tournesol présentant la plus grande diversité dans la taille des cercles UV est <em>Helianthus annuus</em>, le tournesol commun. <em>H. annuus</em> est le <a href="https://dx.doi.org/10.3390/genes11030266">parent sauvage le plus proche du tournesol cultivé</a> et est le plus répandu des tournesols sauvages, poussant presque partout du sud du Canada jusqu’au nord du Mexique. Alors que certaines populations de <em>H. annuus</em> possèdent de très petites taches UV, chez d’autres, la région absorbant les ultraviolets couvre toute l’inflorescence.</p>
<h2>Attirer les pollinisateurs</h2>
<p>Pourquoi y a-t-il d’aussi grandes différences ? Les scientifiques connaissent depuis longtemps les <a href="https://doi.org/10.1007/BF00340242">motifs UV des fleurs</a>. Parmi les nombreuses approches utilisées pour étudier le rôle de ces motifs dans l’attraction des pollinisateurs, certaines ont été très inventives, comme <a href="https://doi.org/10.1242/bio.20146445">couper et coller des pétales</a> ou les <a href="https://doi.org/10.1111/1365-2435.12242">enduire de crème solaire</a>.</p>
<p>Lorsque nous avons comparé des tournesols avec différents cercles UV, nous avons constaté que les pollinisateurs étaient capables de les distinguer et préféraient les plantes avec des taches de taille moyenne.</p>
<p>Cela n’explique pas pour autant toute la diversité des motifs UV que nous avons observée dans différentes populations de tournesols sauvages : si les cercles UV moyens attirent plus de pollinisateurs (ce qui est <a href="https://doi.org/10.2135/cropsci2017.03.0148">manifestement un avantage</a>), pourquoi existe-t-il des plantes avec des taches petites ou grosses ?</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/446033/original/file-20220211-25-1brx0ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="images de tournesols sous lumière ultraviolette montrant des distributions de couleurs en forme de bulles d’air" src="https://images.theconversation.com/files/446033/original/file-20220211-25-1brx0ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/446033/original/file-20220211-25-1brx0ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=321&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/446033/original/file-20220211-25-1brx0ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=321&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/446033/original/file-20220211-25-1brx0ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=321&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/446033/original/file-20220211-25-1brx0ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=404&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/446033/original/file-20220211-25-1brx0ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=404&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/446033/original/file-20220211-25-1brx0ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=404&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Tournesols avec différents motifs UV tels que nous les voyons (en haut) et tels qu’une abeille pourrait les voir (en bas).</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Marco Todesco)</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>D’autres facteurs</h2>
<p>Si l’attraction des pollinisateurs est sans contredit la principale fonction des caractéristiques des fleurs, il apparaît de plus en plus que des facteurs <a href="https://www.researchgate.net/publication/254469747_Non-pollinator_agents_of_selection_on_floral_traits">non liés à la pollinisation</a>, comme la température ou les herbivores, peuvent affecter l’évolution de caractéristiques telles que la couleur et la forme des fleurs.</p>
<p>Nous avons découvert un premier indice que cela pourrait être le cas pour les motifs UV du tournesol lorsque nous avons examiné comment leur variation est régulée sur le plan génétique. Un seul gène, HaMYB111, est généralement responsable de la diversité des motifs UV qu’on observe chez <em>H. annuus</em>. Ce gène contrôle la production d’une famille de substances chimiques appelées glycosides de flavonol, que nous avons trouvées en forte concentration dans la partie absorbant les UV des ligules. Les <a href="https://dx.doi.org/10.1111/j.1365-313X.2007.03078.x">glycosides de flavonol</a> ne sont pas seulement des pigments qui absorbent les UV, et ils jouent un rôle important en aidant les plantes à <a href="https://dx.doi.org/10.1093/aob/mcr234">affronter différents stress environnementaux</a>.</p>
<p>Un deuxième indice est lié à la découverte du fait que le même gène est responsable de la pigmentation UV dans les pétales de <a href="https://doi.org/10.7554/eLife.06100">l’arabette de Thalius, <em>Arabidopsis thaliana</em></a>. Cette plante est l’organisme modèle le plus couramment utilisé en génétique végétale et en biologie moléculaire. Elle est capable de se polliniser elle-même et <a href="https://doi.org/10.1055/s-2003-44784">se passe donc généralement de pollinisateurs</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/447391/original/file-20220219-2552-1d64kx2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="une petite fleur blanche dans une prairie" src="https://images.theconversation.com/files/447391/original/file-20220219-2552-1d64kx2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/447391/original/file-20220219-2552-1d64kx2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/447391/original/file-20220219-2552-1d64kx2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/447391/original/file-20220219-2552-1d64kx2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/447391/original/file-20220219-2552-1d64kx2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/447391/original/file-20220219-2552-1d64kx2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/447391/original/file-20220219-2552-1d64kx2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">L’arabette de Thalius peut se polliniser elle-même sans recourir à des pollinisateurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Comme elles n’ont pas besoin d’attirer les pollinisateurs, leurs fleurs blanches sont petites et discrètes. Pourtant, leurs pétales sont remplis de flavonols qui absorbent les rayons UV. Cela laisse croire qu’il existe des raisons non liées à la pollinisation qui expliquent que ces pigments soient présents dans les fleurs de l’arabette de Thalius.</p>
<p>Enfin, nous avons remarqué que les tournesols de climats plus secs présentaient systématiquement des taches UV plus grosses. L’une des fonctions connues des glycosides de flavonol est de <a href="https://dx.doi.org/10.1111/tpj.12388">réguler la transpiration</a>. Nous avons effectivement constaté que les ligules avec de gros motifs UV (qui contiennent de grandes quantités de glycosides de flavonol) perdaient de l’eau à un rythme beaucoup plus lent que celles avec de petits motifs.</p>
<p>Cela semble indiquer que la pigmentation UV des fleurs peut avoir deux fonctions, du moins chez les tournesols : rendre les fleurs plus attrayantes pour les pollinisateurs et aider les plants à survivre dans des environnements secs en conservant l’eau.</p>
<h2>Une évolution économe</h2>
<p>Alors, qu’est-ce que cela nous enseigne ? Tout d’abord, que l’évolution est économe et que, dans la mesure du possible, elle utilise le même trait pour atteindre plus d’un objectif adaptatif. Ces observations nous apportent également une voie potentielle pour améliorer les cultivars de tournesol, en augmentant les taux de pollinisation en même temps que la résistance des plantes à la sécheresse.</p>
<p>Nos travaux, ainsi que d’autres études portant sur la diversité végétale, permettront de prévoir comment et dans quelle mesure les plantes arriveront à faire face aux changements climatiques, qui modifient déjà les environnements auxquels elles sont adaptées.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/177602/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marco Todesco a reçu des financements de Génome Canada et Genome British Columbia, et du Human Frontier Science Program. </span></em></p>Les tournesols ont des motifs cachés de couleurs ultraviolettes. Visibles par les pollinisateurs, ces couleurs sont dues à la présence de pigments qui aident également les plantes à retenir l’humidité.Marco Todesco, Research associate, Biodiversity, University of British ColumbiaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1819742022-05-16T19:48:21Z2022-05-16T19:48:21ZLes moustiques seraient plus attirés par certaines couleurs que par d’autres<p>Indéniablement, se retrouver couvert de piqures de moustiques vient rapidement gâcher une agréable soirée d’été. Mais plus qu’une simple nuisance, les moustiques sont aussi les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32191853/">créatures les plus mortelles</a> sur Terre, en raison des <a href="https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/vector-borne-diseases">maladies</a> qu’ils propagent.</p>
<p>De nombreuses recherches visent à <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23020619/">comprendre leurs comportements</a> et leurs préférences en matière de proie. On sait ainsi que la vision constitue un sens important chez les insectes piqueurs, règle à laquelle les moustiques n’échappent pas. Bien qu’ils ne se fient pas uniquement à <a href="https://www.cabi.org/isc/abstract/19990505183">ce qu’ils voient</a>, l’odorat et la température s’associent aux indices visuels pour les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S096098221500891X">aider</a> à localiser un hôte.</p>
<p>Des recherches antérieures avaient <a href="https://academic.oup.com/jme/article-abstract/29/2/278/2221060?login=false">cherché à établir un lien</a> entre des couleurs particulières (ou les longueurs d’onde de la lumière que nous percevons comme des couleurs distinctes) et le <a href="https://www.researchgate.net/profile/Lynda-Perkins/publication/21531025_Aedes_aegypti_Diptera_Culicidae_Vision_Response_to_Stimuli_from_the_Optical_Environment/links/5b03b0c50f7e9be94bdadcdd/Aedes-aegypti-Diptera-Culicidae-Vision-Response-to-Stimuli-from-the-Optical-Environment.pdf">comportement de recherche d’hôtes</a> des moustiques. Les résultats n’avaient toutefois pas été concluants, la même espèce ayant montré des préférences pour des couleurs différentes.</p>
<p>Une <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-022-28195-x">étude récente</a>, publiée en février 2022 dans la revue scientifique <em>Nature Communications</em>, est la dernière en date à explorer l’attirance des moustiques pour différentes couleurs. Cette recherche pourrait-elle nous aider à éviter d’être piqués en adaptant simplement les couleurs que nous portons ? Voyons voir.</p>
<p>Les chercheurs ont mené une série d’expériences sur trois espèces de moustiques vecteurs de maladies : principalement <em>Aedes aegypti</em>, mais aussi <em>Anopheles stephensi</em> et <em>Culex quinquefasciatus</em>.</p>
<p>Dans l’une de leurs expériences, ils ont utilisé une soufflerie équipée de caméras pour suivre les trajectoires de vol des moustiques. Un tunnel a été conçu pour les encourager à se comporter le plus naturellement possible.</p>
<p>Sur le sol du tunnel se trouvaient deux petits points colorés, l’un représentant la couleur (longueur d’onde) recherchée et l’autre le témoin (blanc). Certains des échantillons de couleur ont été choisis pour imiter différents tons de peau, dont un représentant la couleur d’une lotion de bronzage.</p>
<p>Chez les moustiques, seules les <a href="https://link.springer.com/book/10.1007/978-3-540-92874-4">femelles piquent</a>, car la plupart des espèces ont besoin d’un repas de sang pour achever le processus de reproduction. On a donc libéré 50 moustiques femelles, accouplées mais non nourries, dans la soufflerie, où elles chercheraient naturellement un hôte.</p>
<p>Au bout d’une heure, du dioxyde de carbone (CO<sub>2</sub>) a été libéré dans la soufflerie. Le CO<sub>2</sub>, exhalé par les humains et les autres mammifères, est inodore pour nous : mais les moustiques peuvent le sentir et utilisent cette odeur pour les guider vers une source de sang.</p>
<h2>Voir rouge</h2>
<p>Avant la libération du stimulus olfactif, les moustiques <em>Ae. aegypti</em> ont largement ignoré les cercles colorés sur le sol, explorant plutôt le plafond et les parois du tunnel. Mais une fois que le CO<sub>2</sub> a été introduit, ils ont commencé à étudier les cercles colorés, en particulier lorsque la longueur d’onde est passée de 510 nanomètres (nm) à 660 nm.</p>
<p>Ces longueurs d’onde plus grandes représentent des couleurs dans les extrémités orange et rouge du spectre, bien que les moustiques <em>Ae. aegypti</em> aient été davantage attirés par le rouge, puis le noir. Il est à noter que ces longueurs d’onde de l’orange au rouge sont les mêmes que celles émises par les tons de la peau humaine. Le bleu, le vert et le violet n’attiraient quant à eux pas plus les moustiques que le témoin.</p>
<p>Lorsque les points de couleur de peau ont été utilisés, ils attiraient davantage les moustiques que le contrôle, mais aucune préférence n’a été observée pour une couleur de peau particulière.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="A mosquito on skin" src="https://images.theconversation.com/files/447875/original/file-20220222-13-ie6n1z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/447875/original/file-20220222-13-ie6n1z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/447875/original/file-20220222-13-ie6n1z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/447875/original/file-20220222-13-ie6n1z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/447875/original/file-20220222-13-ie6n1z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/447875/original/file-20220222-13-ie6n1z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/447875/original/file-20220222-13-ie6n1z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les chercheurs ont voulu explorer le rôle des couleurs dans l’attirance des moustiques pour telle ou telle proie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/dangerous-malaria-infected-mosquito-skin-bite-1483138139">nechaevkon/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S096098221500740X">Des expériences antérieures</a> ont révélé que les moustiques sont plus attirés par des couleurs contrastées, par exemple un motif en damier, que par une couleur unie. Les chercheurs ont également montré aux moustiques différents points sur des fonds identiques et contrastés. Les <em>Ae. aegypti</em> étaient plus intéressés par les points présentant un contraste élevé avec le fond. Les scientifiques pensent que cela aide les moustiques à distinguer un objet (personne) du fond, même en cas de faible luminosité. Le contraste a ainsi joué un rôle plus important pour attirer les moustiques que la couleur elle-même.</p>
<p>Comme pour <em>Ae. aegypti</em>, <em>An. stephensi</em> était attiré par le noir et le rouge, avec peu d’intérêt pour les longueurs d’onde inférieures. <em>Cx. quinquefasciatus</em> a montré un intérêt pour le violet/bleu et le rouge (de manière intéressante, les extrémités opposées du spectre testé).</p>
<p>Les chercheurs ont par ailleurs mené une expérience distincte dans des cages à insectes afin d’explorer l’attirance des moustiques pour des teintes de peau réelles. Six volontaires de différentes origines ethniques ont été recrutés pour participer à ce test. Le témoin était un gant blanc placé dans une fenêtre et les mains des volontaires étaient tenues une à une dans l’autre fenêtre pour voir si les moustiques étaient attirés par une couleur de peau particulière.</p>
<p>Il est apparu que ces derniers étaient plus attirés par les mains que par le gant blanc : mais comme pour les points, il n’y avait pas de préférence pour une couleur de peau particulière.</p>
<h2>Que conclure de tout cela ?</h2>
<p>Cette étude met en évidence que les moustiques sont attirés par les couleurs de la peau humaine, mais seulement en présence de CO<sub>2</sub>, ce qui suggère que l’odeur de la respiration d’un humain ou d’un mammifère peut servir d’indice initial. Cela confirme une <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24315103/">recherche précédente</a> qui dévoilait que le CO<sub>2</sub> attire les moustiques.</p>
<p>Les chercheurs ont en outre constaté que la couleur et le contraste étaient des facteurs importants pour <em>Ae. aegypti</em> qui a révélé une préférence pour le rouge, puis le noir. Les <em>An. Stephensi</em> se sont quant à eux montré intéressés par des couleurs similaires à celles de <em>Ae. aegypti</em>, bien que préférant le noir au rouge. Pendant ce temps, <em>Cx. quinquefasciatus</em> était attiré par différentes couleurs.</p>
<p>Comme l’ont reconnu les chercheurs, leurs expériences n’ont pas tenu compte de certains <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23020619/">autres facteurs</a> qui influencent le choix de l’hôte par les moustiques. Notamment des substances chimiques libérées par la peau humaine, de la température de la peau et de la sueur présente sur la peau. Il serait instructif d’inclure ces facteurs aux expériences futures.</p>
<p>Qu’est-ce que cela signifie pour nous qui ne voulons pas nous faire mordre ? Vous pouvez essayer de porter du blanc, du bleu ou du vert et éviter le noir, le rouge et l’orange. Évitez absolument les motifs à carreaux rouges et noirs.</p>
<p>Si le fait d’adapter ses vêtements peut réduire le risque de se faire mordre, rien ne garantit que ce sera le cas ni que ce sera efficace, compte tenu notamment de la variation apparente des préférences en matière de couleurs entre les espèces. Mais ces résultats suggèrent qu’avec davantage de recherches, la couleur pourrait devenir un levier de contrôle des moustiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181974/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cassandra Edmunds ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Et si adapter les couleurs que nous portons pouvait nous éviter quelques piqures ?Cassandra Edmunds, Lecturer in Forensic Biology, Bournemouth UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1728812022-02-21T21:08:00Z2022-02-21T21:08:00ZL’art polarisant, ou comment créer de la couleur avec du scotch<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/446793/original/file-20220216-26-wa31fq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C15%2C3543%2C3521&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Greta, Tableau en Art Polarisant.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.artpolarisant.com/art?pgid=jr1rdrmz-7cf19857-4e59-4af4-be30-57e592bfed8d">Anne-Lise King</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>En poussant la porte de <a href="https://www.artpolarisant.com/">l’atelier d’Anne-Lise King</a>, le visiteur est d’abord surpris de découvrir l’artiste penchée au-dessus d’une table lumineuse, en train de découper et coller de vulgaires morceaux de rubans adhésifs, alors que les murs sont décorés de tableaux tout aussi transparents. On pourrait aisément se demander quel est l’intérêt esthétique de ces créations à l’aspect bien terne… Ce n’est qu’en chaussant des lunettes polarisées (par exemple des lunettes de cinéma 3D), que les couleurs de ces créations nous apparaissent dans toute leur splendeur, et que l’on comprend que les tableaux sont en fait des vitraux.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/u-JdAh8oDuk?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Création d’un tableau en art polarisant.</span></figcaption>
</figure>
<p>À ce stade, la plupart des observateurs (et lecteurs) néophytes se demandent sans doute : « mais où est donc la couleur si le scotch est transparent ? »</p>
<p>Eh oui, on se représente bien souvent la couleur comme une pigmentation de matière. Ici, il s’agit plutôt d’une question de sélection de longueurs d’onde. En effet, la <a href="https://www.futura-sciences.com/sciences/definitions/physique-lumiere-326/">lumière blanche</a> (comme celle émise par le soleil ou, dans le cas qui nous intéresse, par la table lumineuse utilisée par l’artiste) comprend toutes les couleurs de l’arc-en-ciel mélangées, chacune caractérisées par sa propre longueur d’onde. Lorsqu’elles arrivent toutes en même temps et de façon anarchique, notre œil n’est pas capable de les distinguer.</p>
<p>Or, la technique de l’art polarisant va justement permettre d’opérer une forme de « rangement » entre toutes ces longueurs d’onde (c’est-à-dire ces couleurs), permettant ainsi de les séparer et de les visualiser. C’est ce qu’on appelle la polarisation de la lumière. Pour cela, l’art polarisant fait intervenir deux types d’éléments optiques : deux filtres polarisants (par exemple des lunettes polarisantes, vendues dans le commerce) et un matériau biréfringent (par exemple le ruban adhésif).</p>
<h2>La polarisation de la lumière : les filtres</h2>
<p>La polarisation de la lumière est un phénomène complexe connu depuis très longtemps. En fait, la <a href="https://theconversation.com/letude-de-la-lumiere-une-aventure-qui-a-chamboule-notre-representation-du-monde-146139">lumière</a> peut être modélisée soit par un faisceau de photons (des particules très énergétiques) soit par des ondes électromagnétiques (de même type, grosso modo, que les vagues qui se propagent sur une surface d’eau). Cette onde électromagnétique est elle-même composée de plusieurs composantes, dont le champ électrique qui nous intéresse dans la suite de l’article.</p>
<p>L’intensité du champ électrique varie de manière périodique au cours de la propagation du rayon lumineux, mais son orientation peut prendre n’importe quelle direction. C’est le cas pour les sources naturelles de lumière, comme le soleil. Mais il est possible de « sélectionner » les rayons lumineux en fonction de l’orientation de leur champ électrique, grâce à des filtres polarisants.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Schéma : Un rayon lumineux est représenté par deux courbes, l’une horizontale, et l’autre verticale. Un premier filtre avec une fente verticale est placé sur le chemin : les rayons horizontaux sont bloqués, seuls les verticaux passent. Un second filtre à fente horizontale est placé sur le chemin : les rayons verticaux sont bloqués, plus rien ne passe" src="https://images.theconversation.com/files/446321/original/file-20220214-23-1xhzbyf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/446321/original/file-20220214-23-1xhzbyf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=293&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/446321/original/file-20220214-23-1xhzbyf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=293&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/446321/original/file-20220214-23-1xhzbyf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=293&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/446321/original/file-20220214-23-1xhzbyf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=369&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/446321/original/file-20220214-23-1xhzbyf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=369&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/446321/original/file-20220214-23-1xhzbyf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=369&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les filtres polarisants permettent de sélectionner les rayons lumineux en fonction de l’orientation de leur champ électrique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Géraldine Guida et Bruno Gallas</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les dispositifs utilisés dans l’art polarisant jouent avec ce que l’on appelle la polarisation rectiligne. Un polariseur rectiligne est défini par un axe (la petite fente représentée sur la figure 1). Par exemple, si l’axe du champ électrique de l’onde est parallèle à l’axe du polariseur, l’onde n’est pas absorbée. Par contre, l’axe du champ électrique de l’onde est perpendiculaire à l’axe du polariseur, l’onde est complètement absorbée, c’est-à-dire qu’elle est invisible. Pour simplifier : le filtre polarisant empêche l’onde de passer, comme à travers une grille.</p>
<p>Mais le scotch, dans tout ça ?</p>
<h2>L’importance du matériau biréfringent : le scotch</h2>
<p>Dans un matériau biréfringent, la lumière ne se propage pas à la même vitesse selon les axes horizontal ou vertical : on dit que ce matériau est « dispersif ». Par exemple, la composante horizontale du champ électrique peut être freinée par rapport à l’autre, ce qui fait tourner le champ électrique. Au lieu d’avoir une polarisation rectiligne, on a alors une polarisation elliptique. Chaque onde étant modifiée de façon différente, cette polarisation elliptique est différente pour chaque couleur (et oui : les couleurs ne vont pas à la même vitesse dans le matériau !)</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/446345/original/file-20220214-17-14s7t98.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Schéma : Un rayon lumineux est représenté par une courbe horizontale. Un matériau biréfringent est placé sur le chemin : l’onde se divise en deux ondes, obliques par rapport à l’horizontal. Un filtre à fente verticale est placé sur le chemin : seule une partie des rayons peut passer" src="https://images.theconversation.com/files/446345/original/file-20220214-17-14s7t98.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/446345/original/file-20220214-17-14s7t98.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=459&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/446345/original/file-20220214-17-14s7t98.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=459&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/446345/original/file-20220214-17-14s7t98.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=459&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/446345/original/file-20220214-17-14s7t98.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=577&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/446345/original/file-20220214-17-14s7t98.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=577&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/446345/original/file-20220214-17-14s7t98.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=577&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les matériaux bi-réfringents modifient le champ électrique de la lumière.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Géraldine Guida et Bruno Gallas</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Concrètement, du ruban adhésif, un film plastique étiré, le cristal de spath d’Islande… possèdent des propriétés de biréfringence.</p>
<h2>Comment faire une œuvre d’art polarisant ?</h2>
<p>L’art polarisant utilise toutes ces propriétés de polarisation de la lumière pour « dessiner » des tableaux.</p>
<p>La source de lumière est apportée par une table lumineuse. Un premier polariseur (placé derrière le tableau) détermine une polarisation rectiligne par rapport à l’axe optique du scotch.</p>
<p>Puis, le ruban adhésif transforme cette polarisation linéaire en polarisation elliptique, différente pour chaque couleur. La teinte finale dépend non seulement de l’épaisseur du matériau (du nombre de couches de scotch), mais aussi de leur orientation (si les rubans sont plus ou moins inclinés par rapport à la diagonale du cadre). En empilant différentes épaisseurs de rubans adhésifs orientées différemment les unes des autres, on obtient des jeux de couleurs différents et que l’on peut faire varier de multiples façons !</p>
<p>Enfin, le second polariseur (placé devant le tableau, qu’il s’agisse d’un filtre fixe, d’un filtre à tenir à la main ou encore d’une paire de lunettes polarisante) absorbe partiellement certaines gammes de couleurs. Le tableau devient alors visible. De plus, les couleurs apparaissent et changent progressivement en fonction des rotations des polariseurs.</p>
<p>En jouant tout à la fois sur l’empilement et l’orientation des portions de rubans adhésifs, et sur l’orientation des filtres, l’artiste peut alors créer une palette de couleurs lui permettant de laisser libre cours à son imagination.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Superposition de trois images. Image sans filtre : le papillon est transparent et incolore, on le distingue à peine. Images avec filtres : le papier est coloré, les couleurs changent selon l’orientation du filtre" src="https://images.theconversation.com/files/446799/original/file-20220216-10370-1ugp3xt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/446799/original/file-20220216-10370-1ugp3xt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=154&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/446799/original/file-20220216-10370-1ugp3xt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=154&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/446799/original/file-20220216-10370-1ugp3xt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=154&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/446799/original/file-20220216-10370-1ugp3xt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=193&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/446799/original/file-20220216-10370-1ugp3xt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=193&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/446799/original/file-20220216-10370-1ugp3xt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=193&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Sur les photos ci-dessus, on peut voir une figure de papillon faite de morceaux de rubans adhésifs, sans filtre polarisant (photo de gauche) puis entre deux filtres polarisants rectilignes, dont les directions de transmission sont perpendiculaires (photo du milieu) et parallèles (photo de droite). Les teintes sont complémentaires d’une photo à l’autre : par exemple le vert devient du magenta, et le bleu devient du jaune lorsqu’on tourne un des deux filtres d’un quart de tour.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Anne-Lise King</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’art polarisant est une des rares techniques de colorisation qui n’utilise pas de pigment pour faire apparaître des couleurs. Elle apporte des solutions dans de nombreux <a href="http://www.artpolarisant.com/">champs d’application</a> : cela permet d’innover dans le domaine du design (lampe aux couleurs changeantes), du spectacle (tour de magie, projections), de l’édition (création de cartes de vœux) l’architecture ou de la scénographie (baies vitrées décorées).</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été rédigé en collaboration avec Anne-Lise King, artiste plasticienne spécialiste de l’art polarisant. Les œuvres d’Anne-Lise King sont à découvrir au prochain salon d’art contemporain de la SIAC de Marseille, du 11 au 14 mars 2022.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/172881/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Géraldine Guida a reçu des financements de la DGA et du Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche.. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Bruno Gallas a reçu des financements de l'Agence Nationales de la Recherche. </span></em></p>Produire des tableaux vibrants de couleurs grâce à du scotch, mais surtout à des filtres spéciaux : voici la spécificité de l’art polarisant, dont les principes physiques sont ici décryptés.Géraldine Guida, Maître de Conférence en optique électromagnétique, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresBruno Gallas, Chercheur en nanostructure et optique, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1620162021-06-06T16:30:28Z2021-06-06T16:30:28Z« Maman, achète la bouteille jaune ! » Vos enfants sont plus sensibles que vous à la couleur des emballages<p>C’est en moyenne âgés de 9 ans que les enfants effectuent le premier achat de leur vie avec leur propre argent. D’après <a href="http://www.fbf.fr/fr/espace-presse/communiques/etude-sur-l%E2%80%99education-financiere-et-budgetaire-des-enfants1-et-lancement-de-la-6e-edition-%C2%AB-j%E2%80%99invite-1-banquier(e)-dans-ma-classe-%C2%BB">l’étude sur l’éducation financière et budgétaire des enfants</a> réalisée par Harris Interactive pour la Fédération bancaire française en 2021, 95 % des enfants de 8 à 14 ans déclarent recevoir « un peu d’argent ». Cela passe par de l’argent de poche (48 %), par des occasions particulières (76 %) ou encore en rendant des services (28 %).</p>
<p>L’enquête met en évidence leur sensibilité à la question du prix dans la mesure où 74 % d’entre eux sont prêts à attendre les soldes pour effectuer un achat, 64 % à comparer les points de vente et 60 % à acheter d’occasion. Nos <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/IJRDM-08-2013-0168/full/html">travaux</a> montrent, quant à eux, le rôle du packaging et notamment de la couleur des emballages dans leurs décisions d’achats.</p>
<p>Ce résultat n’est pas neutre. Les enfants, plus influencés par les éléments visuels que par des éléments verbaux, comme l’ont bien montré des études en psychologie, deviennent par la même également plus vulnérables. Cela vaut en particulier pour les habitudes alimentaires.</p>
<p>Face au taux croissant d’obésité des enfants notamment (<a href="https://www.le-guide-sante.org/actualites/nutrition/obesite-surpoids-enfant-adolescent-epidemie-mondiale">16 % des garçons, 18 % des filles</a> selon l’Inserm), la question de leur nutrition représente un enjeu sociétal important. Un des objectifs du <a href="https://www.mangerbouger.fr/PNNS/Le-PNNS/Les-objectifs-de-sante-publique">Programme national nutrition santé</a> vise ainsi à diminuer la prévalence de la surcharge pondérale chez les enfants et les adolescents. Dès lors, nos résultats peuvent également éclairer et servir aux professionnels s’insérant dans le mouvement du « manger sain ».</p>
<h2>Plaire aux enfants… et aux parents</h2>
<p>Prescripteur, acheteur, consommateur, le rôle des enfants évolue à grande vitesse et ceux-ci influencent de plus en plus les achats familiaux. Ils se trouvent en contact quotidien avec des packagings qui font partie de leur environnement familier : du matin au petit-déjeuner avec ses bouteilles de jus d’orange, ses paquets de céréales et ses pots de pâte à tartiner jusqu’au coucher après un tour par la case gel douche et dentifrice.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/404001/original/file-20210602-13-74zs2g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/404001/original/file-20210602-13-74zs2g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/404001/original/file-20210602-13-74zs2g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/404001/original/file-20210602-13-74zs2g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/404001/original/file-20210602-13-74zs2g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/404001/original/file-20210602-13-74zs2g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/404001/original/file-20210602-13-74zs2g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/404001/original/file-20210602-13-74zs2g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Avec leurs petits caddies, les enfants tentent souvent de modifier la liste des courses.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Lorsqu’ils accompagnent les adultes au supermarché, notamment avec les caddies à leur taille mis à disposition, nos chérubins observent et cherchent les produits convoités. Ils savent d’ailleurs ce qu’ils aiment ou n’aiment pas et souvent expriment sans hésitation leurs sentiments jusqu’à rendre l’expérience d’achat parfois mémorable pour les parents.</p>
<p>Les enfants constituant un groupe de consommateurs vulnérables, ils ne peuvent pas être traités, dans la communication des marques, comme des consommateurs lambda.</p>
<p>Outil stratégique de différentiation en rayons pour les marques, la conception du packaging pour enfant est une question centrale pour les marketeurs. La couleur, le personnage, la forme, les éventuels jeux ou activités à proposer sont soigneusement choisis pour plaire aux enfants et aux parents.</p>
<h2>Couleur et mémorisation des marques</h2>
<p>Peu de recherches académiques confirment néanmoins les choix de la part des marketeurs, en particulier en ce qui concerne la couleur dominante du packaging.</p>
<p>Nos travaux montrent à travers une expérimentation menée auprès de 160 enfants de 7 à 12 ans l’effet de la couleur du packaging et de l’âge sur la mémorisation du nom de marque. Le protocole consistait à leur présenter des paquets de jus de fruits colorés et non colorés pour tester leur faculté à mémoriser le nom de la marque après exposition, et à plus simplement la reconnaître lorsqu’elle est présentée parmi d’autres.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/404003/original/file-20210602-13-1cujq4j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/404003/original/file-20210602-13-1cujq4j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/404003/original/file-20210602-13-1cujq4j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=505&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/404003/original/file-20210602-13-1cujq4j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=505&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/404003/original/file-20210602-13-1cujq4j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=505&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/404003/original/file-20210602-13-1cujq4j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=635&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/404003/original/file-20210602-13-1cujq4j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=635&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/404003/original/file-20210602-13-1cujq4j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=635&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Avec son emballage coloré, la brique « Mr. Juicy » sera plus facilement identifiable par les enfants dans les rayons.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Il ressort de l’analyse statistique que la couleur de l’emballage a un impact positif sur la reconnaissance de la marque mais pas sur le rappel spontané du nom de la marque. Par ailleurs, il a été observé que plus les enfants grandissent, plus leur la capacité à se rappeler le nom de marque augmente. L’âge n’a en revanche pas d’impact significatif sur la reconnaissance de la marque.</p>
<p>Ainsi, la couleur du packaging, qui a priori pourrait sembler un détail esthétique pour les consommateurs, a-t-elle bel et bien un effet sur le traitement de l’information de nos enfants et plus particulièrement sur leur capacité à reconnaître une marque.</p>
<p>Ces résultats peuvent alimenter à la fois les réflexions des familles, celles des professionnels du marketing qui doivent différencier leurs produits dans les rayons, mais aussi donner des pistes d’action aux pouvoirs publics notamment lorsqu’ils se saisissent de la question de l’alimentation des enfants.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/162016/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nora Bezaz est membre du Laboratoire de recherche CEREFIGE, Université de Lorraine. </span></em></p>Ce qui peut ne paraître qu’un simple détail esthétique pour les adultes joue un rôle essentiel chez les plus jeunes dans la mémorisation et la reconnaissance d’une marque.Nora Bezaz, Enseignante-Chercheuse spécialisée en marketing, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1528392021-03-09T20:10:41Z2021-03-09T20:10:41ZQuels messages codés portent les ailes des papillons ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/388496/original/file-20210309-17-h6xari.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=21%2C96%2C1767%2C647&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Chez _Morpho rhetenor_, les couleurs servent à communiquer au sein de l’espèce : la femelle, jaune et brune, reconnaît le mâle par sa livrée chatoyante et iridescente.</span> <span class="attribution"><span class="source">Serge Berthier</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Si vous avez un jour la chance de vous promener au cœur de la forêt amazonienne, vous verrez forcément cet éphémère <a href="https://books.google.fr/books?hl=en&lr=&id=ryixebsrr00C&oi=fnd&pg=PA13">flash bleu iridescent</a> qui traverse le sous-bois. Vous venez d’admirer le vol du Morpho !</p>
<p>Dans le vert profond de la forêt et le rouge de la terre, on ne voit que ça. Pourquoi ce papillon parfaitement comestible a-t-il choisi de s’exhiber ainsi ? Dans ce cas précis, il s’agit d’un mâle qui signale sa présence à sa discrète compagne, cachée au sommet de la canopée. Chez les papillons, et particulièrement dans cet environnement chaud et humide, les signaux colorés constituent un des vecteurs de communication intra (au sein d’une même espèce) et interspécifique (envers d’autres espèces, proies ou prédateurs) les plus importants. C’est un jeu complexe où chacun envoie des messages à tout le monde, des informations véridiques, mais aussi trompeuses – des fake news, dirait-on aujourd’hui.</p>
<p>L’interprétation de ces jeux subtils a été apportée par les savants explorateurs du XIX<sup>e</sup> siècle. Ceux-ci apportèrent beaucoup d’eau au moulin de Charles Darwin, leur contemporain, qui élaborait alors sa théorie de l’évolution des espèces. Ces jeux colorés sont en effet une magnifique illustration de l’évolution et de la sélection naturelle. Ces savants, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Henry_Walter_Bates">Henry Walter Bates</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Russel_Wallace">Alfred Russell Wallace</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fritz_M%C3%BCller_(biologiste)">Fritz Müeller</a>, pour ne citer que les plus célèbres, ont parcouru l’Amazonie ou les forêts du Sud-est asiatique en tous sens et ont percé les secrets de ces échanges. Un classement des couleurs se met lentement en place, non pas en fonction de leur origine – nous verrons cela plus loin – mais de leur fonction.</p>
<h2>Une classification des couleurs</h2>
<p>On distingue deux grandes catégories de couleurs, qui valent tout aussi bien pour les animaux que les plantes : les couleurs cryptiques, destinées au camouflage, et les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Apos%C3%A9matisme">couleurs « sématiques »</a>, qui délivrent un message. Les messages des couleurs sématiques peuvent être vrais ou faux, destinés aux partenaires ou aux prédateurs.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/388485/original/file-20210309-21-16oc0c1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/388485/original/file-20210309-21-16oc0c1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=510&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/388485/original/file-20210309-21-16oc0c1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=510&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/388485/original/file-20210309-21-16oc0c1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=510&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/388485/original/file-20210309-21-16oc0c1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=641&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/388485/original/file-20210309-21-16oc0c1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=641&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/388485/original/file-20210309-21-16oc0c1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=641&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Couleurs et motifs criptiques de <em>Biston strataria</em> (Hufnagel, 1767).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Serge Berthier</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/mmnz.20020780210">messages intraspécifiques</a>, entre mâles et femelles où parfois entre insectes du même sexe, affichent leur appartenance à l’espèce et leur genre (les dimorphismes sexuels, les différences d’aspect sont courants et souvent impressionnants chez les papillons). Les messages interspécifiques s’adressent aux prédateurs et signalent le danger qu’il y aurait à attaquer. C’est chez ces derniers que les mimétismes se sont développés. Ils prennent le nom de leurs inventeurs.</p>
<h2>Se déguiser en animal non comestible ou dangereux : « j’ai l’air dangereux, mais c’est un faux »</h2>
<p>Le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89volution_du_mim%C3%A9tisme_chez_les_insectes#Le_mim%C3%A9tisme_Bat%C3%A9sien">mimétisme « batésien »</a>, mis en évidence par Henry Walter Bates, est certainement la plus spectaculaire des stratégies défensives des lépidoptères. Elle consiste en l’usurpation par un papillon comestible (le mime) de la livrée sématique – la couleur, les motifs – mais aussi des attitudes de vol d’un insecte non comestible (le modèle), quelle qu’en soit la cause : toxicité, goût désagréable ou venin. Les guêpes (Hyménoptères) par exemple, avec leur abdomen rayé noir et jaune, sont couramment copiées par les lépidoptères. S’il assure une relative immunité au mime, cet insecte qui se drape au fil de l’évolution de couleurs qui ne sont pas les siennes initialement, le mimétisme batésien met l’espèce modèle en danger.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/388486/original/file-20210309-23-4ep7dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/388486/original/file-20210309-23-4ep7dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/388486/original/file-20210309-23-4ep7dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/388486/original/file-20210309-23-4ep7dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/388486/original/file-20210309-23-4ep7dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/388486/original/file-20210309-23-4ep7dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/388486/original/file-20210309-23-4ep7dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/388486/original/file-20210309-23-4ep7dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Mimétisme batésien : à gauche le Monarque <em>Danaus chrysippus</em> (non comestible) et l’un de ses très nombreux mimes, <em>Hippolimnas missipus</em>, comestible.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Serge Berthier</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>L’efficacité du mimétisme batésien est d’autant plus importante que la population mimétique est faible au regard de celle mimée. En effet, l’apprentissage du prédateur s’effectue par une succession de réussites (capturer et manger des insectes comestibles) et d’échecs (insectes non comestibles), une trop forte proportion des insectes-mimes annulerait l’effet d’avertissement des couleurs sématiques des insectes-modèles. De ce point de vue, le mimétisme batésien peut être considéré comme un parasitisme auquel le modèle peut tenter d’échapper en modifiant sa livrée. On peut alors assister à une évolution parallèle du mime et du modèle, ce dernier tendant à s’éloigner le plus possible du premier qui, ainsi mis en danger, tente de le rattraper.</p>
<h2>Quand des espèces toxiques se copient les unes les autres : « ceci n’est pas ma couleur, mais je suis vraiment dangereux »</h2>
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<span class="caption">Mimétisme müllérien : Deux espèces toxiques se partageant ma même niche écologiques : <em>Itulia hilione</em> en haut et <em>Thyridia confusa</em> en bas.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Serge Berthier</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>Les espèces réellement « protégées », car elles sont non comestibles ou dangereuses, et présentant des couleurs sématiques, ne sont pas <em>ipso facto</em> à l’abri des prédateurs. Le danger pour elles, bien réel, survient durant l’apprentissage du prédateur qui, pour associer un désagrément à un signal avertissant, doit y avoir goûté de nombreuses fois. Ce risque d’erreur, souvent fatale pour le papillon, sera d’autant plus faible que le message sera clair et non ambigu. Le message doit être fort – les couleurs sématiques sont voyantes, mais elles ne doivent pas se présenter en trop grand nombre.</p>
<p>Ainsi les espèces protégées ont-elles intérêt à offrir une livrée identique aux yeux des prédateurs. Elles se partagent ainsi les pertes dues aux erreurs d’apprentissage des prédateurs et accélèrent ce dernier. Ce type d’associations, dites « müllériennes » et décrites par Fritz Mueller, est un cas limite de mimétisme, puisque tout le monde copiant tout le monde, il n’y a plus de mime ni de modèle bien défini. Et on comprend dès lors que tout intrus comestible dans l’association, par le fait du hasard ou d’un mimétisme batésien, réduit la portée du message.</p>
<h2>Curieuses associations de couleurs</h2>
<p>On peut souvent observer des papillons très bien camouflés au repos, mais qui exhibent des couleurs très voyantes lorsqu’ils décollent. C’est une autre stratégie.</p>
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<span class="caption">Association criptique/sématique, dite association « guillominéenne » chez <em>Catacolia ilia</em>. Les ailes antérieures, exposées au repos sont criptiques ; les ailes postérieures, visibles en vol, sont sématiques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Serge Berthier</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Les couleurs agissent au gré des mouvements des ailes. Le message est à chercher dans la dynamique de leur apparition ou disparition ! Par exemple, les colorations « éclairs », où un papillon camouflé révèle brusquement les couleurs vives de ses ailes postérieures en décollant, provoquent un instant d’indécision chez l’attaquant. À l’inverse, le prédateur peut être d’abord attiré par un signal visuel fort d’un papillon en vol, et ne plus voir sa proie qui devient invisible lorsqu’elle est au repos. En ce cas, le prédateur, éternellement frustré, finit par associer la couleur non plus à une proie, mais à une absence de proie ! Il finira par ne plus être attiré par cette couleur. Ces phénomènes sont appelés <a href="https://www.persee.fr/issue/bsef_0037-928x_1985_num_90_1">« associations guillauminéennes »</a>, du nom de l’entomologiste Guillemin.</p>
<h2>Se draper de couleurs pour se tenir chaud</h2>
<p>Les couleurs ont une autre fonction, non pas liée cette fois à leur aspect visuel, mais à l’origine pigmentaire de certaines d’entre elles. Les pigments absorbent une partie du spectre solaire pour ne laisser voir que l’autre (un pigment rouge absorbe toutes les longueurs d’onde du violet au jaune). Cette lumière absorbée et donc l’énergie qu’elle transporte sont généralement converties en chaleur. Les couleurs interviennent donc aussi dans l’équilibre thermodynamique des papillons qui sont des organismes « exothermes », qui puisent une grande partie de leur énergie… du soleil. </p>
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<p><em>L’<a href="http://www.cite-sciences.fr/fr/au-programme/expos-permanentes/les-expositions/bio-inspiree/">exposition permanente « Bio-inspirée », à la Cité des sciences et de l’industrie</a> permet de mieux comprendre les mécanismes mis en jeu par le vivant et dont s’inspirent les scientifiques.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152839/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Serge Berthier a reçu des financements de l'ANR (Agence Nationale de la Recherche) et du HFSP (Human Frontier Science Program).</span></em></p>Certains papillons empruntent l’apparence d’autres espèces pour défier les prédateurs. D’autres utilisent leurs couleurs pour attirer les partenaires. Pas si éloignés des humains, en somme.Serge Berthier, Professeur en physique, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1536892021-01-22T12:08:41Z2021-01-22T12:08:41ZLes chouettes effraies utilisent la lumière de la lune pour mieux chasser<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/379957/original/file-20210121-13-13jt28i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C5%2C912%2C608&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/barn-owl-flight-hunting-black-background-1082537198?src=-1-8">FJAH/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Baignés de lumière pendant la journée, les écosystèmes changent profondément la nuit. Lorsque le soleil disparaît, la vie nocturne émerge, et la chouette effraie (<em>Tyto alba</em>) entre en scène. De son autre nom « effraie des clochers », elle est un oiseau de proie nocturne que l’on trouve dans le monde entier, souvent près des villes et des villages. Bien qu’il s’agisse d’une espèce assez familière, il y a encore beaucoup de choses que nous ignorons à son sujet.</p>
<p>L’une de ses particularités est la différence de couleur du plumage entre les différents individus. Pourquoi certaines ont-elles le ventre complètement blanc, alors qu’il est roux chez d’autres ? Cette question a longtemps intrigué les scientifiques, mais nous avons enfin une réponse.</p>
<p>Les conditions de luminosité dans les environnements ensoleillés déterminent l’évolution des couleurs des animaux, car la composition et la quantité de lumière influent sur la façon dont un animal est vu par ses prédateurs ou ses concurrents. Les rayures d’un tigre, par exemple, permettent à ce grand félin de disparaître facilement dans la forêt indienne dense, <a href="https://academic.oup.com/beheco/article/28/2/373/2674187">où la canopée changeante divise la lumière en lignes</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/vidit-8-ans-pourquoi-les-tigres-ont-ils-des-rayures-151226">Vidit, 8 ans : « Pourquoi les tigres ont-ils des rayures ? »</a>
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<p>Par contraste, la manière dont les conditions de lumière affectent la coloration des espèces nocturnes est moins bien comprise. La lumière de la nuit change en fonction du cycle lunaire. Sortez par une nuit de nouvelle lune dans une zone rurale, et vous aurez besoin d’une torche pour voir clair. Faites de même une nuit de pleine lune et vous aurez probablement assez de lumière pour voir sans lampe. Comment les chouettes effraies font-elles face à ces changements radicaux de luminosité d’une nuit à l’autre ?</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/290513/original/file-20190902-175710-bn2eha.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/290513/original/file-20190902-175710-bn2eha.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/290513/original/file-20190902-175710-bn2eha.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/290513/original/file-20190902-175710-bn2eha.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/290513/original/file-20190902-175710-bn2eha.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/290513/original/file-20190902-175710-bn2eha.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/290513/original/file-20190902-175710-bn2eha.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les chouettes effraie à ventre blanc ou roux chassent différemment en fonction de la lumière lunaire.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Kerkuil_licht_en_donker.jpg">Kerkuil/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://artlibre.org/licence/lal/en">FAL</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nous pensions qu’elles auraient plus de mal à chasser les rongeurs, dont elles ont besoin pour nourrir leur progéniture, lors les nuits de pleine lune. Notre idée était qu’elles seraient plus facilement repérées par leurs proies au clair de lune. Si c’était le cas, les chouettes blanches auraient plus de difficultés à chasser les nuits de lune que les chouettes rousses, simplement parce que le blanc est plus réfléchissant et donc plus visible au clair de lune que le plumage roux. Il s’avère que nous avions complètement tort.</p>
<h2>Des proies paralysées par la lumière</h2>
<p>Depuis plus de 20 ans, nous suivons une population suisse de chouettes effraies. Nous surveillons leur comportement de chasse à l’aide de caméras et de traceurs GPS, nous enregistrons la date de leur reproduction annuelle et le développement de leur progéniture dans le nid. </p>
<p>L’étude de ce riche ensemble de données nous a permis de constater que les chouettes effraies ont effectivement plus de mal à chasser les nuits de lune. Elles chassent moins bien et apportent moins de proies au nid. Comme elles reçoivent moins de nourriture, leur progéniture ne prend pas assez de poids et les plus jeunes ont moins de chances de survivre et de s’envoler. </p>
<p>C’est bien ce que nous avons constaté chez les effraies rousses. Mais curieusement, ce n’est pas le cas pour les effraies blanches : au contraire, les effraies blanches semblaient avoir le même succès pour chasser, avec ou sans lumière de la lune.</p>
<p>Perplexes, nous avons décidé d’examiner le problème du point de vue des rongeurs que les chouettes effraies chassent chaque nuit. Notre expérience a consisté à étudier la façon dont les campagnols communs – la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Chouette_effraie#Alimentation">principale proie des chouettes effraies</a> – voient les chouettes blanches et rousses et réagissent à leur présence quand la lune est pleine ou quand elle se cache.</p>
<p><a href="https://www.nature.com/articles/s41559-019-0967-2">Nous avons constaté</a> que les proies détectaient plus facilement les chouettes les nuits de pleine lune, quelle que soit leur couleur. Nous savions quand les rongeurs avaient détecté une chouette car ils se figeaient. Rester immobile est un comportement courant chez les proies, car elles cherchent à ne pas être détectées et à laisser passer le risque. Curieusement, les nuits de pleine lune et uniquement lorsqu’ils faisaient face à une chouette blanche plutôt que rousse, les rongeurs restaient figés plus longtemps.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/290489/original/file-20190902-175682-1kshq87.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/290489/original/file-20190902-175682-1kshq87.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/290489/original/file-20190902-175682-1kshq87.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/290489/original/file-20190902-175682-1kshq87.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/290489/original/file-20190902-175682-1kshq87.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/290489/original/file-20190902-175682-1kshq87.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/290489/original/file-20190902-175682-1kshq87.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/290489/original/file-20190902-175682-1kshq87.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Des chercheurs étudient les chouettes effraie en pleine chasse.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jérémy Bierer</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Nous pensons que les campagnols se comportent ainsi lorsqu’ils rencontrent une chouette blanche parce qu’ils sont effrayés par la lumière vive qui se reflète sur leur plumage. </p>
<p>Cette peur est bien ancrée chez les rongeurs – les chercheurs médicaux exposent les rongeurs à une lumière vive pour mesurer leur réaction de peur et tester sur eux des médicaments destinés à traiter l’anxiété. </p>
<p>Le plumage blanc des effraies des clochers « exploiterait » cette peur en réfléchissant la lumière de la lune. Cela pourrait expliquer pourquoi le plumage blanc – un trait très rare chez les animaux nocturnes – a évolué chez cette espèce.</p>
<p>Cette découverte nous rappelle combien il est important de mieux comprendre et de préserver la faune nocturne et l’environnement dans lequel elle vit. Limiter la pollution lumineuse et laisser la nuit devenir aussi sombre que la Lune le désire pourrait être bénéfique aux belles effraies des granges.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153689/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Almut Kelber reçoit des fond de l'Université de Lund, en Suède, de la Fondation K & A Wallemberg Foundation, à Stockholm et du Conseil de la recherche suédois.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Alexandre Roulin et Luis Martín San José García ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Les chouettes effraies, très visibles pour les proies les nuits de pleine lune, ont réussi à faire de l’astre un allié.Almut Kelber, Professor of Biology, Lund UniversityAlexandre Roulin, Professeur, Chercheur Ornitologue, Université de LausanneLuis Martín San José García, Postdoctoral Researcher in Evolutionary Biology, Université de LausanneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1528362021-01-14T19:50:34Z2021-01-14T19:50:34ZD’où viennent les merveilleuses couleurs des papillons ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/378034/original/file-20210111-17-a9gc4i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=22%2C0%2C3792%2C2539&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">_Polyommatus icarus (Lycaenidae)_ obtient sa belle couleur bleu-pâle par diffusion.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Polyommatus_icarus_-_Burgenland.jpg">spacebirdy, Wikipédia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Dans de nombreuses civilisations, la Nature est plutôt source de matières premières que d’inspiration, mais, sous la double contrainte de notre expansion démographique et de l’épuisement des ressources, les choses commencent à changer. Exploiter les richesses naturelles de manière plus vertueuse, plus respectueuse de la planète et résiliente – c’est très précisément ainsi que fonctionne spontanément la nature.</p>
<p>Alors que nous utilisons l’ensemble des éléments chimiques existant, la nature n’en utilise pratiquement que six : les CHNOPS (carbone, hydrogène, azote, oxygène, phosphore, soufre). Et pourtant, quelle efficacité dans ses réalisations ! La nature nous montre une autre manière de procéder. La bio-inspiration fait aujourd’hui partie des pistes de recherche très actives pour assurer notre futur sur terre. Une <a href="http://www.cite-sciences.fr/fr/au-programme/expos-permanentes/les-expositions/bio-inspiree/">exposition permanente à la cité des Sciences et de l’industrie</a> présente les fondements de cette démarche et des exemples de réalisation dans tous les domaines.</p>
<p>La couleur, une composante universelle de notre environnement, en est un très bel exemple. Les papillons nous montrent la voie !</p>
<p>La couleur n’est pas une grandeur physique mesurable, mais une impression créée par le cerveau sous l’effet de différents signaux visuels. Personne, y compris au sein d’une même espèce, ne perçoit les couleurs de la même manière et il faut, quand on imagine les réactions de papillons à leurs propres couleurs, se méfier de tout anthropocentrisme. Par exemple, beaucoup d’espèces animales <a href="https://askabiologist.asu.edu/les-couleurs-que-les-animaux-voient">voient en noir et blanc</a>, et ceux qui voient en couleur ne voient pas la même chose que nous. Les insectes par exemple voient peu le rouge, mais sont sensibles aux ultraviolets.</p>
<h2>Des pigments dans les écailles</h2>
<p>Les pigments sont des molécules qui absorbent une partie du spectre visible pour ne laisser voir que l’autre partie. Un pigment qui absorbe le bleu et le violet par exemple ne réfléchira que les autres couleurs qui composent la lumière blanche, et apparaîtra plutôt rouge.</p>
<p>Les pigments assurent l’immense majorité des couleurs « chaudes » (du rouge au jaune). Plus une molécule est grande, plus les longueurs d’onde qu’elle peut absorber sont grandes. Pour faire du bleu (petite longueur d’onde), il faut absorber le rouge (grande longueur d’onde), donc de grandes molécules. Ce qui explique que les pigments bleus soient <a href="https://www.intechopen.com/books/photonic-crystals-introduction-applications-and-theory/how-nature-produces-blue-colors">rares dans la nature</a> et difficiles à synthétiser. Chez les papillons, on n’en trouve que chez de très rares espèces, comme les <em>Graphium</em> et certains <em>Nymphalidae</em>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/378516/original/file-20210113-15-12injrl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/378516/original/file-20210113-15-12injrl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/378516/original/file-20210113-15-12injrl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/378516/original/file-20210113-15-12injrl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/378516/original/file-20210113-15-12injrl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/378516/original/file-20210113-15-12injrl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/378516/original/file-20210113-15-12injrl.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"><em>Nessaea batesii</em>, un <em>Nymphalidae</em>, est un des rares papillons présentant un bleu d’origine pigmentaire sur les ailes antérieures. Il s’agit probablement d’une ptérobiline, un pigment biliaire.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Serge Berthier</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’énergie absorbée par les pigments est convertie majoritairement en chaleur. Ils participent donc aussi à la régulation thermique des papillons (qui se chauffent à l’énergie solaire).</p>
<p>L’origine des pigments est multiple : les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9lanine">mélanines</a> (noires à jaunes) sont par exemple synthétisées par l’organisme lui-même, alors que d’autres sont issues des plantes nourricières des chenilles et participent à la coloration de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Imago">« imago »</a> après la mue. Certains pigments sont toxiques et protègent l’insecte contre les prédateurs – ce sont les couleurs dites <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Apos%C3%A9matisme">« aposématiques »</a>.</p>
<h2>Émettre de la lumière</h2>
<p>Les lucioles et les vers luisants émettent de la lumière à la suite d’une réaction chimique bien connue, la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bioluminescence">« bioluminescence »</a>. Les papillons, eux, émettent de la lumière par « fluorescence » : certaines de leurs <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fluorochrome">molécules</a> émettent de la lumière visible sous des ultraviolets.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/378073/original/file-20210111-21-3310zb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/378073/original/file-20210111-21-3310zb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=185&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/378073/original/file-20210111-21-3310zb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=185&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/378073/original/file-20210111-21-3310zb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=185&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/378073/original/file-20210111-21-3310zb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=232&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/378073/original/file-20210111-21-3310zb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=232&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/378073/original/file-20210111-21-3310zb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=232&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les ailes postérieures du grand papillon des Philippines <em>Troides magellanus</em> fluorescent dans le vert-jaune. Cet effet s’ajoute à une impressionnante iridescence visible à forte incidence.</span>
<span class="attribution"><span class="source">@Serge Berthier</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’efficacité de la fluorescence est <a href="https://www.belin-editeur.com/lumiere-et-luminescence-2e-edition">généralement faible</a>, mais c’est suffisant chez quelques espèces de papillons pour modifier leur apparence sous l’effet des UV solaires, par exemple chez le <em>Morpho sulkowskyi</em>, mythique papillon bleu d’Amazonie, ou le <em>Troides magellanus</em> des Philippines.</p>
<h2>Des nanostructures pour des effets d’optique colorés</h2>
<p>Les couleurs structurales, également appelées « couleurs physiques », sont créées par divers phénomènes optiques. Ce sont par exemple les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Interf%C3%A9rence">interférences de film mince</a>, comme celles que l’on observe sur une flaque d’huile sur un sol mouillé par exemple. De tels empilements de couches se trouvent chez de nombreux insectes, mais aussi sur des plumes (paon, gorge de pigeon) et des écailles de poisson (Ablette).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/378036/original/file-20210111-19-1ugur12.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/378036/original/file-20210111-19-1ugur12.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=433&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/378036/original/file-20210111-19-1ugur12.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=433&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/378036/original/file-20210111-19-1ugur12.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=433&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/378036/original/file-20210111-19-1ugur12.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=544&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/378036/original/file-20210111-19-1ugur12.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=544&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/378036/original/file-20210111-19-1ugur12.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=544&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"><em>Papilio Neophilus olivencius</em>. Ses écailles contiennent des structures photoniques en trois dimensions.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Serge Berthier</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Les couleurs physiques peuvent également provenir de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Diffraction">diffraction</a> par des réseaux de trait très rapprochés, comme sur un CD, ou la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Diffusion_des_ondes">diffusion</a> par de très petites particules, responsable du bleu du ciel, ou de nos yeux.</p>
<p>Les couleurs structurales ne sont pas liées à l’absorption (pigment), mais à la séparation des longueurs d’onde. Elles sont créées par des structures photoniques, c’est-à-dire des architectures périodiques dont la période est de l’ordre de grandeur des longueurs d’onde de la lumière. Elles sont généralement très brillantes, directives et saturées ; mais si les nanostructures sont désordonnées, les couleurs sont plus mâtes, et peu saturées.</p>
<h2>Quand les Hommes utilisent les astuces des papillons</h2>
<p>Depuis l’aube de l’humanité, ce sont les pigments qui ont coloré notre vie. Inconvénient mineur : beaucoup ne sont pas très stables et se dégradent sous l’action de la lumière. Plus grave : certains, et de plus en plus, <a href="https://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2009:342:0059:0209:FR:PDF">sont considérés comme potentiellement cancérigènes</a>, ce qui en interdit certaines applications, en particulier en cosmétique.</p>
<p>L’idée de faire des couleurs sans pigments fait donc florès ! Mais ces nanostructures colorées ont aussi bien d’autres propriétés : antibactériennes (les bactéries ne peuvent s’y déplacer), <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rsta.2016.0191">superhydrophobes</a> (l’eau ne pénètre pas dans les structures : l’aile reste sèche), autonettoyantes. La nature est économe, et ici, multifonctionnelle.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/378525/original/file-20210113-13-11xbsdz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/378525/original/file-20210113-13-11xbsdz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=315&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/378525/original/file-20210113-13-11xbsdz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=315&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/378525/original/file-20210113-13-11xbsdz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=315&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/378525/original/file-20210113-13-11xbsdz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=396&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/378525/original/file-20210113-13-11xbsdz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=396&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/378525/original/file-20210113-13-11xbsdz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=396&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des nanostructures observées dans la nature inspirent les scientifiques. Ici, une aile de <em>Polyommatus Icarus (Lycaenidae)</em> vue au microscope. La membrane supérieure des écailles est constituée d’une structure spongieuse filaments de chitine extrêmement fins (100 nm) et entremêlés.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Serge Berthier</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Autant de caractéristiques que nous aimerions bien développer sur nos surfaces artificielles : vitres, tissus, capteurs solaires. Hormis les structures les plus simples comme l’empilement de couches minces (dans les traitements antireflets de nos optiques par exemple), nous ne savons pas les réaliser, et les structures naturelles constituent une infinie source d’inspiration. Sans chercher à les utiliser directement, on peut les étudier, comprendre leur fonctionnement et tenter de les reproduire. Par exemple, les structures inspirées des papillons se retrouvent ainsi <a href="http://transmaterial.net/">dans des fibres textiles</a>.</p>
<h2>Comment changer la couleur d’un objet</h2>
<p>Si les couleurs pigmentaires sont immuables, celles qui résultent d’une nanostructure dépendent de sa géométrie et de l’indice otique des matériaux qui la composent.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/378522/original/file-20210113-19-6ow22o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/378522/original/file-20210113-19-6ow22o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/378522/original/file-20210113-19-6ow22o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=758&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/378522/original/file-20210113-19-6ow22o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=758&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/378522/original/file-20210113-19-6ow22o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=758&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/378522/original/file-20210113-19-6ow22o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=952&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/378522/original/file-20210113-19-6ow22o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=952&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/378522/original/file-20210113-19-6ow22o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=952&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">En remplaçant l’air par un fluide autour d’un <em>Morpho</em>, on peut le faire changer de couleur. C’est l’indice des structures solide/air, <em>n</em>, qui est modifié.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Serge Berthier</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Un changement d’orientation de la nanostructure modifie sa géométrie (une inclinaison suffit à modifier les épaisseurs traversées par la lumière) et crée de l’iridescence, une couleur qui varie selon le point de vue ou l’incidence de la lumière. On retrouve cette technique dans de nombreuses peintures de luxe pour les bateaux ou les automobiles.</p>
<p>Le changement d’indice est facilement réalisable dans des structures solide/air. Les changements de couleur sont drastiques et la technique est utilisée dans des détecteurs de vapeur. Une vapeur, même en trace, qui pénètre une structure photonique induit un changement de teinte mesurable et spécifique de la molécule.</p>
<h2>Des idées pour nos écrans ?</h2>
<p>Dans les écrans digitaux actuels de nos télévisions ou de nos smartphones, des pixels colorés rouges, vert et bleu, bloquent ou laissent passer sous l’effet d’un courant électrique les rayons lumineux d’une source placée à l’arrière. Cette source représente la plus grosse consommatrice d’énergie du dispositif. Il est possible de s’en passer en <a href="https://issuu.com/infopro/docs/it937">utilisant, comme les papillons, des pixels interférentiels</a> qui réfléchissent ou pas la lumière extérieure. Chaque pixel se comporte comme une écaille de papillon dont on peut faire varier l’épaisseur à l’aide du courant électrique. En absence de courant électrique, un pixel bleu par exemple a une épaisseur produisant des interférences constructives dans le bleu ; au passage d’un courant, l’épaisseur diminue et les interférences deviennent destructives pour cette couleur.</p>
<hr>
<p><em>Pour en savoir plus sur les nanostructures élaborées par le vivant, voir le livre de Serge Berthier, <a href="https://www.belin-editeur.com/comment-fait-le-gecko-pour-marcher-au-plafond">« Comment fait le gecko pour marcher au plafond »</a>, Belin Éditeur (2016)</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152836/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Serge Berthier a reçu des financements de ANR Agence Nationale de la Recherche), HFSP (Human Frontier Science Program). </span></em></p>Les couleurs des papillons sont magnifiques, et leurs origines intéressent les chercheurs. Certaines utilisent des nanostructures dont on peut se « bioinspirer ».Serge Berthier, Professeur en physique, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1479272020-10-20T19:47:10Z2020-10-20T19:47:10ZPauline, 8 ans : « Pourquoi les yeux des gens peuvent être noirs, marron, bleus ou verts, mais pas orange ou blancs ? »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/364557/original/file-20201020-19-1u7y9oi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=16%2C40%2C5404%2C4201&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Nous avons toutes et tous des yeux différents.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.freepik.com/vecteurs-libre/ensemble-enfants-heureux-agitant-mains_5840373.htm#page=1&query=mains%20enfants&position=4"> brgfx / Freepik</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Les humains possèdent une variété de la couleur des yeux permettant de distinguer deux catégories : les yeux foncés et les yeux clairs. 4 humains sur 5, possèdent des yeux foncés allant du marron très clair au marron foncé presque noir ; et 1 sur 5 ont les yeux clairs, comme toi, livrant des nuances du bleu clair au bleu foncé, ou bien vert, avec parfois de petites teintes de jaune. D’où viennent ces différences de couleur ?</p>
<p>Il s’agit d’un pigment noir appelé mélanine qui est présent dans les cellules qui vont colorer les yeux. Ceux possédant des yeux foncés ont 50 fois plus de mélanine dans leur iris par rapport aux yeux clairs. D’accord, mais la mélanine est d’une couleur noire, alors comment expliquer les yeux bleus ou verts ?</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1045626196984238080"}"></div></p>
<p>La mélanine est présente sous forme de petits paquets de pigments appelés « mélanosomes » à l’intérieur de ces cellules (appelées les mélanocytes). Or, lorsque le nombre de mélanosomes est très faible, la lumière qui pénètre dans l’œil est diffusée ce qui donne une apparence de bleu ! C’est ce même phénomène qui donne la couleur bleue du ciel. Donc, aucun pigment bleu n’est fabriqué par nos cellules humaines contrairement à certains animaux, notamment le lémur aux yeux turquoise, seul primate en dehors de l’homme à posséder cette couleur, qui n’est pas liée à de la mélanine, mais à un autre pigment fabriqué dans leurs yeux.</p>
<h2>Et les yeux verts, alors ?</h2>
<p>Pour faire du vert, on mélange du bleu et du jaune, tu as peut-être déjà fait ça en cours de dessin. C’est effectivement ce qui se passe, plus particulièrement chez ceux qui ont des cheveux roux et ont plus souvent les yeux verts. En effet, chez eux les cellules fabriquent une mélanine couleur jaune-orangée, dénommée phéomélanine, qui mélangée à la mélanine donnera des teintes verdâtres tirant parfois sur le jaune. En plus certaines personnes ont leur iris décoré de petites tâches jaunâtres liées à la présence d’un vrai pigment jaune, la lipofuscsine.</p>
<h2>Certaines personnes ont les yeux rouges</h2>
<p>Oui, ils ont même des cheveux blancs, ce sont des albinos. Oui, cette particularité touche un individu sur 10 000. Les albinos ne fabriquent pas du tout de mélanine. Leurs yeux sont rouges, car la paroi de l’arrière de l’œil contient des vaisseaux sanguins dont la couleur rouge du sang traverse l’iris décoloré et donne cette apparence rouge.</p>
<h2>Une drôle de couleur : les yeux noisette !</h2>
<p>Il s’agit d’une variété particulière d’yeux marron très clair, avec souvent une nuance jaunâtre marquée au centre autour de la pupille, alors qu’un cercle d’une teinte brun clair borde l’iris. Environ 4 % des gens aux yeux dits marron portent cette particularité assez étonnante. Donc, on est proche d’un effet des yeux orange !</p>
<h2>Et pourquoi pas d’autres couleurs ?</h2>
<p>Les cellules humaines ne possèdent pas la capacité de fabriquer des pigments d’autres couleurs que le marron, le noir, ou le jaune. À la différence de certains animaux dont les yeux (chats, primates…) ou les plumes et le bec (oiseaux exotiques) peuvent arborer de jolies teintes de couleurs variées (rouge, bleu, vert ou violet). Bien sûr l’homme peut tricher et porter des lentilles colorées qui donneront l’illusion d’un iris coloré naturellement. À vous de faire votre choix !</p>
<h2>Est-ce que la couleur des yeux peut changer ?</h2>
<p>La couleur définitive des yeux est acquise dans les 6 mois après la naissance, le temps nécessaire aux mélanocytes de l’iris de faire leur travail. Donc les gens aux yeux bleus voient cette couleur définitive apparaître seulement quelques mois après la naissance. Passé ce délai la couleur inscrite sur ta carte d’identité ne bougera plus. Chez les personnes très âgées, le vieillissement de l’iris et de la cornée peut faire apparaître un halo grisâtre et des taches jaunes dans l’iris de l’œil, mais sans modifier complètement sa couleur.</p>
<hr>
<p>Pour aller plus loin : <em>ADN, histoire de nos différences</em>, Bernard Sablonnière, Éditions Odile Jacob, 2020.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dianerottner.com/">Diane Rottner</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p><em>Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : tcjunior@theconversation.fr. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/147927/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bernard Sablonnière ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Tu as dû remarquer autour de toi que nous avons tous des yeux différents, mais pas non plus de n’importe quelle couleur.Bernard Sablonnière, Neurobiologiste, professeur des universités − praticien hospitalier, faculté de médecine, Inserm U1172, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1427442020-09-02T19:24:06Z2020-09-02T19:24:06ZPourquoi certains tableaux vieillissent mieux que d'autres<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/355064/original/file-20200827-24-dzraxm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C1%2C1191%2C697&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le bleu outremer pâlit dans certaines peintures et pas dans d’autres. Ici, deux tableaux réalisés vers 1660 dont les bleus contrastent : « La laitière » de Johannes Vermeer à gauche et « La femme récurant une bassine en métal » de Jan Steen à droite.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.rijksmuseum.nl/en/collection/SK-A-2344">Rijks Museum</a></span></figcaption></figure><p>Qui n’a jamais pensé que les dessins de ses enfants méritaient d’être conservés tels des œuvres d’art pour les générations à venir ? Et de se demander ce qu’ils deviendraient, dans quel état on les retrouverait dans quelques décennies, voire dans quelques siècles ? On se doute bien que les feutres effaçables en machine ou les peintures à l’eau ne sont pas les matériaux les plus durables. Mais même en fournissant la palette des grands maîtres des temps passés, serait-on en mesure de conserver les teintes et luminosités de ces peintures pour longtemps ? </p>
<p>Certaines peintures, comme la peinture à l’huile, sont réputées pour durer plus longtemps. Mais toutes les couleurs ne sont pas épargnées – c’est le cas par exemple du bleu outremer.</p>
<h2>Colorant ou pigment ?</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/355053/original/file-20200827-18-1xpkns4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/355053/original/file-20200827-18-1xpkns4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/355053/original/file-20200827-18-1xpkns4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/355053/original/file-20200827-18-1xpkns4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/355053/original/file-20200827-18-1xpkns4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/355053/original/file-20200827-18-1xpkns4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/355053/original/file-20200827-18-1xpkns4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/355053/original/file-20200827-18-1xpkns4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Pigment bleu outremer, insoluble.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Ultramarinblau_Pigment.JPG">Marco Almbauer/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Toutes les matières colorantes – pigments et colorants – ne résistent pas de la même façon avec le temps. Un <em>colorant</em> est une espèce chimique soluble dans le liant utilisé ; dans le passé, il était le plus souvent d’origine végétale ou animale. Il va souvent pâlir au soleil. On a tous en mémoire des photographies de famille devenues aujourd’hui bleues ou jaunes, selon la résistance des colorants jaune, cyan et magenta utilisés.</p>
<p>On pourrait alors préférer la peinture à l’huile pour laquelle un <em>pigment</em>, c’est-à-dire de petites particules solides, insolubles dans le milieu qu’il colore et souvent d’origine minérale, est dispersé dans un liant, l’huile de lin. La tenue des pigments dans le temps est effectivement souvent meilleure.</p>
<h2>Le bleu outremer dans l’histoire</h2>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/355054/original/file-20200827-16-1s6uie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/355054/original/file-20200827-16-1s6uie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/355054/original/file-20200827-16-1s6uie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=495&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/355054/original/file-20200827-16-1s6uie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=495&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/355054/original/file-20200827-16-1s6uie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=495&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/355054/original/file-20200827-16-1s6uie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=622&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/355054/original/file-20200827-16-1s6uie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=622&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/355054/original/file-20200827-16-1s6uie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=622&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Lapis lazuli d’Afghanistan (bleu) et pyrite (jaune).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://de.wikipedia.org/wiki/Datei:Lapis-lazuli_hg.jpg">Hannes Grobe/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le bleu outremer a d’abord été extrait du lapis-lazuli provenant de contrées lointaines, notamment d’Afghanistan, d’où son nom d’« outremer ». Le procédé est long et complexe, à tel point qu’à certaines époques, le prix du bleu outremer fut plus élevé que l’or. Ceci <a href="https://www.editions-hazan.fr/livre/histoire-vivante-des-couleurs-9782754105033">explique aussi que son utilisation ait été réservée à des œuvres religieuses de prestige</a> notamment au Moyen-Âge.</p>
<p>Au début du XIX<sup>e</sup> siècle, avec le développement de la synthèse chimique, on a cherché à produire le bleu outremer de façon synthétique. Une gageure finalement réalisée en 1826 par J-P Guimet, qui a permis un usage généralisé de ce pigment. Ce bleu synthétique a aussi bien été utilisé par des artistes – Ingres a par exemple testé ce pigment au moment de sa création, Yves Klein le mélangea en 1960 avec un liant pour créer le célèbre « International Klein Blue » – que pour des applications de la vie quotidienne (peintures, encres d’imprimerie, azurage du papier et du linge…).</p>
<p>Mais ce pigment si recherché est pourtant victime d’un phénomène de dégradation spécifique : la « maladie (ou blanchiment) du bleu outremer ». De <a href="https://www.jstor.org/stable/1505446?seq=1">nombreuses</a> <a href="https://www.nationalgallery.org.uk/research/research-resources/technical-bulletin/some-observations-on-blanching-with-special-reference-to-the-paintings-of-claude">œuvres</a> en sont victimes quand d’autres sont totalement épargnées.</p>
<h2>Comment un pigment peut-il perdre sa couleur ?</h2>
<p>Pour pouvoir expliquer comment la couleur d’un pigment peut disparaître, il faut d’abord comprendre d’où elle vient.</p>
<p>On sait aujourd’hui que la couleur du bleu outremer ne provient pas d’un métal de transition (fer, cuivre, cobalt…), comme c’est souvent le cas dans les pigments (l’azurite est un exemple d’un pigment bleu <a href="http://factura-recherche.org/wp-content/uploads/2016/01/ETUDIANT_azurite_1.0.2.pdf">à base de cuivre</a>), <a href="https://pubs.rsc.org/en/content/articlelanding/1999/cs/a704920j#!divAbstract">mais du soufre</a> qui est présent sous la forme d’un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ion_radicalaire">anion radicalaire</a> emprisonné dans une cage d’aluminosilicate. Cette configuration chimique particulière des atomes de soufre permet d’absorber dans le rouge – ce qui explique la couleur bleue du pigment.</p>
<p>Contrairement au smalt dont on sait depuis le XVII<sup>e</sup> qu’il peut <a href="https://www.techno-science.net/actualite/pourquoi-ciels-peintre-murillo-ont-ils-vire-gris-N9152.html">se décolorer en quelques années</a>, le bleu outremer est réputé être un pigment stable. En effet, le soufre est ici « stabilisé » dans sa cage d’aluminosilicate et ne peut s’en échapper qu’à haute température. À température ambiante, seule la destruction de l’aluminosilicate peut expliquer la perte de la couleur, et c’est ce qui arrive en présence d’acide. Mais des environnements acides, ou d’autres types d’environnements agressifs ne se rencontrent pas souvent en conditions muséales, et ne peuvent donc pas expliquer tous les cas d’altérations des peintures au bleu outremer.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/355074/original/file-20200827-14-150qmfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Bleu outremer avant et après vieillissement dans des conditions contrôlées." src="https://images.theconversation.com/files/355074/original/file-20200827-14-150qmfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/355074/original/file-20200827-14-150qmfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=512&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/355074/original/file-20200827-14-150qmfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=512&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/355074/original/file-20200827-14-150qmfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=512&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/355074/original/file-20200827-14-150qmfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=643&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/355074/original/file-20200827-14-150qmfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=643&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/355074/original/file-20200827-14-150qmfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=643&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Du bleu outremer vieilli dans des conditions contrôlées, en laboratoire.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Anne Michelin</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>En fait, ni la chaleur ni l’humidité ne sont nécessaires au blanchiment du bleu outremer. Des expériences de vieillissement contrôlé, où l’on choisit les conditions environnementales auxquelles sont soumis les échantillons, montrent par contre que la lumière est un facteur décisif dans le blanchiment.</p>
<p>De plus, curieusement, si les peintures à l’huile (ou pour certains autres liants) blanchissent sous l’effet de la lumière, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0141391017302343">il n’en est rien</a> pour des pastilles de pigment bleu outremer compressées, sans liant.</p>
<p>Cette simple expérience permet de remettre en question le point de départ : a-t-on vraiment perdu la couleur du pigment ? La réponse est non : le pigment en lui-même n’est pas impacté.</p>
<h2>Si ce n’est pas le pigment, alors c’est ce qui l’entoure</h2>
<p>Dans nos expériences où l’éclairement est contrôlé, on voit bien que le liant est en piteux état : il ne reste pas grand-chose du film bien lisse du départ après 1500 heures sous les feux de la rampe. Le film est entièrement fragmenté et laisse place à une rugosité très importante, responsable du blanchiment.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/355072/original/file-20200827-18-e7k0wg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Rugosité du pigment dans son liant observée par un microscope électronique à balayage, avant blanchiment en haut et après en bas." src="https://images.theconversation.com/files/355072/original/file-20200827-18-e7k0wg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/355072/original/file-20200827-18-e7k0wg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=960&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/355072/original/file-20200827-18-e7k0wg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=960&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/355072/original/file-20200827-18-e7k0wg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=960&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/355072/original/file-20200827-18-e7k0wg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1206&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/355072/original/file-20200827-18-e7k0wg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1206&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/355072/original/file-20200827-18-e7k0wg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1206&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Rugosité du pigment dans son liant observée par un microscope électronique à balayage, avant blanchiment en haut et après en bas.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Anne Michelin</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Le changement de couleur observé est donc dû à un phénomène physique et plus précisément optique. La forte rugosité donne ici lieu à une augmentation de la réflexion diffuse qui est ici la cause principale du blanchiment : les multiples grains agissent comme de nombreuses facettes de miroir qui renvoient nettement plus de signaux vers l’œil du spectateur. Cela nous donne donc une impression de perte de couleur, mais, en réalité, la peinture nous apparaît simplement plus claire.</p>
<p>L’exposition à la lumière semble en fait être à l’origine d’un mécanisme de « photo-oxydation » : les rayons ultraviolets interagissent avec le liant pour produire des espèces chimiques très réactives, les « radicaux libres ». Ceux-ci, via des réactions en chaîne, sont responsables de l’oxydation massive du liant et de coupures de chaînes (cassures) dans le polymère. Le film de liant, très fragilisé, finit par se fragmenter laissant les grains de pigments apparents d’où un aspect final rugueux. Pour preuve, si on coupe le rayonnement ultraviolet ou si on ajoute un antioxydant au mélange initial, le blanchiment ne se produit plus.</p>
<p>Le phénomène de photo-oxydation des liants est un mécanisme classique. Ce qui est surprenant ici est que ce phénomène ne se produit qu’en présence de bleu outremer.</p>
<p>Avec d’autres pigments, il ne se passe rien.</p>
<h2>L’effet catalytique du bleu outremer</h2>
<p>Il y a donc un effet catalytique lié à ce pigment en particulier. On peut supposer qu’une interaction spécifique au niveau des cages aluminosilicatées se produit. En effet, cet effet catalytique est bien connu pour d’autres zéolites qui sont, eux, non colorés (les « zéolites » regroupent les minéraux de structure aluminosilicatée cristalline microporeuse – le bleu outremer en fait partie) et <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1387181198000079">exploités depuis longtemps dans le monde industriel</a>, mais cet effet n’a pas été étudié spécifiquement pour le bleu outremer.</p>
<p>Si l’explication du blanchiment du bleu outremer est maintenant connue, de nombreuses interrogations demeurent : pourquoi certaines peintures sont-elles épargnées ? Y a-t-il des pigments qui neutralisent l’effet catalytique du bleu outremer ? Y a-t-il un seuil en dessous duquel l’effet n’est pas perceptible ? Y a-t-il une différence entre bleu outremer naturel et synthétique ? Une équipe <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1296207419305217">affirme aujourd’hui</a> que le premier aurait un effet catalytique plus de quatre fois plus important que le pigment synthétique. Que se passe-t-il réellement au niveau de la cage d’aluminosilicate ?</p>
<h2>Connaître le mécanisme de blanchiment permet de mieux restaurer les œuvres</h2>
<p>Pour les peintures anciennes, il est possible de les restaurer en reformant un film continu : en comblant les lacunes et les fissures, la couleur va ressurgir. Pour les peintures modernes, il faut envisager une formulation contenant des antioxydants afin de différer la dégradation – si tant est que le liant n’ait pas besoin de processus radicalaires pour sécher, ce qui est le cas des peintures à l’huile.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/142744/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ce travail a bénéficié d'une aide de l'Etat gérée par l'Agence Nationale de la Recherche au titre du programme Investissements d'Avenir portant la référence ANR-11-IDEX-0004-02, dans le cadre du Laboratoire d'Excellence MATISSE porté par Sorbonne Universités.</span></em></p>Pourquoi certaines peintures bleu outremer palissent-elles et d’autres non ? Quand la chimie apporte des réponses et des solutions aux restaurateurs d’œuvres d’art.Anne Michelin, Maître de conférences du Muséum national d'histoire naturelle, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1296592020-01-12T22:53:32Z2020-01-12T22:53:32ZDroits des femmes : la vague mauve en Espagne et en France<p>À l’occasion d’une naissance, il est très courant de voir des cadeaux se répartir en deux couleurs distinctes : le bleu pour les garçons et le rose pour les filles. Mais pourquoi les filles ne recevraient-elles pas aussi des cadeaux bleus et inversement ? Le bleu, associé à la Vierge Marie, symbole de féminité dans la tradition chrétienne, est pourtant devenu dans la première moitié du XX<sup>e</sup> siècle la <a href="https://www.cairn.info/le-rose-et-le-bleu--9782701193663.htm">couleur des garçons et le rose la couleur des filles</a>. L’entrée progressive dans la société de consommation a peu à peu généré un clivage fort entre ces deux couleurs, entérinant des stéréotypes sexuels qui ont aujourd’hui la vie dure.</p>
<h2>Pourquoi le mauve ?</h2>
<p>Mais dernièrement, on a vu en Espagne peu de bleu et peu de rose. C’est le mauve qui a le vent en poupe ! Couleur des revendications féministes, le mauve s’est affiché partout le 25 novembre, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Cette couleur ambiguë s’est affichée aussi bien lors des manifestations que sur divers édifices, mairies, universités ou encore fontaines. Tous ces points d’accroche visuels participaient de la mobilisation pour les droits des femmes qui manifestaient, encore et toujours, contre les violences machistes et exigeaient des mesures fortes de prévention et de protection des victimes. Certaines villes comme Almería ont même <a href="https://www.noticiasdealmeria.com/almeria-se-tine-de-morado-por-las-victimas-de-la-violencia-de-genero">prolongé les actions jusqu’au 27 novembre</a>.</p>
<p>Historiquement, le mauve n’était pas une couleur politisée puisqu’elle n’était identifiée à aucun parti politique mais l’arrivée de Podemos, qui a décidé de se parer de mauve, a <a href="https://www.elcomercio.com/afull/color-ausente-banderas-morado-historia.html">changé la donne</a>. Il est dès lors légitime de s’interroger sur les limites éthiques de l’instrumentalisation du féminisme, ou du moins de son utilisation en tant qu’outil de marketing politique. Depuis les suffragettes jusqu’au récent mouvement #MeToo, le mauve est bien la <a href="http://8mars.info/le-violet-couleur-des-feministes">couleur militante des féministes</a>. Ce mélange de rouge et de bleu est le symbole de l’union et de l’abandon de la logique binaire des genres dans la nécessaire lutte contre ce fléau qui nous concerne toutes et tous.</p>
<h2>Les progrès des droits des femmes en Espagne</h2>
<p>Vu de France, la forte médiatisation des féminicides et autres actes violents envers les femmes commis en Espagne peut donner l’impression que ce pays souffre davantage de ce fléau que la France. C’est pourtant <a href="https://www.bfmtv.com/societe/feminicides-la-france-est-elle-plus-touchee-que-ses-voisins-europeens-1811255.html">totalement l’inverse</a> : en 2017, 108 féminicides ont eu lieu en France (67 millions d’habitants) contre 47 en Espagne (47 millions d’habitants).</p>
<p>La femme espagnole avait été longtemps relayée au rôle de la « buena madre » et de la « buena esposa » durant la dictature franquiste, qui avait même édité un guide à ce sujet <a href="https://laoveja100.wordpress.com/2010/11/08/guia-de-la-buena-esposa-1953/">(Guía de la buena esposa, 1953)</a>. La transition démocratique puis la Movida ont eu raison de ce carcan culturel au profit d’une libéralisation des mœurs qui a permis aux femmes de revendiquer leur place et leurs libertés. Il a fallu malgré tout attendre le gouvernement du socialiste Zapatero pour l’adoption en 2004 d’une loi visant à lutter contre les violences de genre : la <a href="https://elpais.com/diario/2004/10/08/sociedad/1097186401_850215.html">Ley Orgánica de Medidas de Protección Integral contra la Violencia de Género</a>. En 2014, sous le gouvernement du conservateur Mariano Rajoy, diverses manifestations contre un <a href="https://www.lemonde.fr/europe/article/2014/09/23/espagne-retrait-du-projet-de-loi-sur-l-avortement_4492861_3214.html">projet de loi destiné à réduire considérablement le droit d’avorter</a> avaient canalisé les revendications de femmes qui devaient (ré)clamer, encore, leur liberté sexuelle, fédérant ce que l’on a pu voir comme étant le début de la <a href="https://www.cairn.info/revue-reseaux-2017-1.htm">quatrième vague féministe</a>.</p>
<p>À l’occasion de la Journée internationale des femmes, le 8 mars 2018, une grève et une mobilisation historiques contre les inégalités de genre <a href="https://elpais.com/economia/2018/03/08/actualidad/1520545956_654616.html">avaient paralysé le pays</a>. À cette mobilisation historique des Espagnoles le 8 mars 2018 a suivi plus d’un an après une autre mobilisation historique : celle des Françaises le 23 novembre 2019. Une chose est sûre, la vague mauve n’est pas près de s’essouffler…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/129659/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sabrina Grillo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le mauve, couleur fusionnelle, symbolise la nécessité de dépasser la logique binaire de l’affrontement des genres pour défendre les droits des femmes – un combat qui est aussi celui des hommes.Sabrina Grillo, Maîtresse de conférences en civilisation de l'Espagne contemporaine, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1281722019-12-10T21:06:42Z2019-12-10T21:06:42ZLes nouvelles couleurs de la politique espagnole<p>Plus que jamais, les couleurs font partie de notre quotidien. Qu’il s’agisse des médias qui ont tout loisir de diffuser publicité et informations en couleurs, de la mode et des couleurs « tendance » selon les saisons ou de la politique, la couleur est un élément de communication fondamental. Notre perception des couleurs du monde varie selon les individus mais, le temps aidant, des associations entre idées et couleurs se sont installées dans les mœurs et dans l’histoire. Les couleurs participent de l’élaboration d’une mémoire collective historique et culturelle. Associées à des valeurs, à des personnes, à des idées, elles font partie intégrante de l’histoire d’un pays et… de sa politique.</p>
<h2>Marketing et politique</h2>
<p>Le marketing a été une réponse du capitalisme face à la nécessité de segmenter le marché en regard avec le jeu de la concurrence. À chaque besoin correspond un segment : la transposition aux stratégies de communication politique s’en est fort bien accommodée et les politiques ont parfaitement compris l’importance de soigner leur image. En effet, l’image d’un politique, d’un parti et de son idéologie sont relayées par un logo, des sigles et une couleur. Au fil du temps, l’identité chromatique des partis a orienté notre lecture du paysage politique : rouge pour un parti plutôt de gauche, bleu pour un parti plutôt de droite. En Espagne, ce sont effectivement les couleurs associées au PSOE (rouge) et au PP (bleu).</p>
<p>La tradition chromatique espagnole semble peu différer de la tradition française qui a associé le bleu à la royauté. Mais l’année 2014 a été celle du changement. Le nouveau roi, Felipe VI, a <a href="https://www.elperiodico.com/es/politica/20140619/estandarte-escudo-nuevo-felipe-vi-se-iza-por-vez-primera-en-el-palacio-real-3315394">remplacé le traditionnel fond bleu de son blason par un fond rouge</a>. Surtout, le PSOE et le PP vécurent en mai 2014 un électrochoc, mauve, avec l’arrivée au Parlement européen de cinq députés du jeune parti Podemos, né en début d’année. </p>
<p>Un an et demi plus tard, alors que depuis la transition démocratique les Espagnols avaient pris l’habitude de découvrir à l’issue des élections législatives une « vague rouge » ou une « vague bleue », une petite vague mauve est venue perturber l’équilibre chromatique de la démocratie ibérique après les législatives de décembre 2015. Avec un peu plus de 20 % des suffrages, Podemos talonnait le PSOE (22 %) et le PP (28,7 %). Pour la première fois, le bipartisme PSOE/PP était ébranlé. Le parti de Pablo Iglesias a en effet choisi le mauve pour marquer une rupture aussi bien idéologiquement que visuellement parlant et trouver sa place sur un échiquier politique qui ne cesse de se densifier et dont la lecture est rendue de plus en plus complexe.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"687181518670807040"}"></div></p>
<h2>La couleur du moment : le mauve détonant</h2>
<p>Le coup de communication était réussi pour Podemos : le mauve, couleur froide et ambiguë peu présente sur la scène politique, est issu du mélange du rouge et du bleu. De plus, on l’a vu récemment dans tous les médias, le mauve c’est aussi, et surtout, la couleur des revendications féministes. Ainsi, le 25 novembre, à l’occasion de la <a href="https://www.un.org/fr/events/endviolenceday/">Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes</a>, l’Espagne s’est parée de mauve dans des manifestations et la couleur s’est aussi affichée sur divers édifices.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/305926/original/file-20191209-90603-1hiuc02.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/305926/original/file-20191209-90603-1hiuc02.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=481&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/305926/original/file-20191209-90603-1hiuc02.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=481&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/305926/original/file-20191209-90603-1hiuc02.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=481&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/305926/original/file-20191209-90603-1hiuc02.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=605&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/305926/original/file-20191209-90603-1hiuc02.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=605&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/305926/original/file-20191209-90603-1hiuc02.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=605&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Pendant la « nuit violette », manifestation contre les violences faites aux femmes, Madrid, le 20 septembre 2019.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.facebook.com/emergenciafeminista/photos/a.131592091522171/131592951522085/?type=3&theater">Page Facebook d’Emergencia Feminista</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
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<p>Historiquement, <a href="https://www.elcomercio.com/afull/color-ausente-banderas-morado-historia.html">cette couleur n’était pas politisée</a> puisqu’elle n’était identifiée à aucun parti politique, mais l’arrivée de Podemos a changé la donne. À l’occasion du rassemblement des Indignés, initié le 11 mai 2011, des groupes féministes avaient en effet émergé au cœur de ce mouvement, saisissant l’opportunité de fédérer des espaces de discussion et de débat autour d’une revendication commune : une réelle démocratie. C’est le cas notamment du collectif catalan « Feministes Indignades ». Le choix chromatique de Podemos a-t-il été clairement influencé par les mouvements féministes qui ont aussi soutenu l’élan des Indignés ? Au début, le parti n’a pas laissé entendre que la couleur était un appel du pied aux féministes. Sarah Bienzobas, membre de Podemos, avait ainsi déclaré que le violet était pratiquement la seule couleur encore disponible dans la palette chromatique du monde politique (citée dans <a href="https://www.akal.com/libro/podemos_35200/"><em>Podemos. Una historia colectiva</em></a>, éd. Manuel Guedán, 2016). Notons en passant que la volonté de démocratisation en profondeur d’un système jugé corrompu et inopérant socialement n’est pas sans rappeler les fondements de la II<sup>e</sup> République d’Espagne… qui affichait aussi le mauve sur le drapeau national entre 1931 et 1936.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/305907/original/file-20191209-90557-1n73xjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/305907/original/file-20191209-90557-1n73xjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/305907/original/file-20191209-90557-1n73xjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/305907/original/file-20191209-90557-1n73xjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/305907/original/file-20191209-90557-1n73xjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/305907/original/file-20191209-90557-1n73xjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/305907/original/file-20191209-90557-1n73xjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/305907/original/file-20191209-90557-1n73xjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=452&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Drapeau de la Seconde république espagnole.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Seconde_R%C3%A9publique_(Espagne)#/media/Fichier:Flag_of_Spain_(1931%E2%80%931939).svg">Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Par ailleurs, le parti Podemos a participé aux élections législatives de 2016 à une autre coalition, apellée <a href="https://www.20minutos.es/noticia/2762240/0/unidos-podemos-logotipo-lema-campana-sonrisa-pais/">Unidos Podemos</a> qui réunissait Podemos, Izquierda Unida et Equo. Cette coalition arborait en guise de logo un cœur aux couleurs de l’arc-en-ciel, symbolique du rapprochement entre les groupes ayant rejoint Podemos (Compromís, En Marea et En Comú Podem) pour remplacer le « o » de Podemos, forme immuable et de rassemblement. Le cœur est représentatif de la volonté du parti qui a utilisé un <a href="https://twitter.com/ahorapodemos/status/738328312053956608">sigle universel et transversal</a>. Récemment, ce même symbole a été au centre d’une <a href="https://elpais.com/politica/2018/02/14/diario_de_espana/1518630483_909023.html">campagne de sensibilisation à la violence machiste</a>, plusieurs panneaux de signalisation « sens interdit » ayant été adaptés en forme de cœur en 2018 dans diverses villes d’Espagne.</p>
<p>Au début de l’année 2019, à la veille des nouvelles élections législatives, une nouvelle coalition s’est formée autour de Podemos, prenant un nom féminisé : Unidas Podemos. Durant cette campagne, puis pendant la suivante (qui a précédé les législatives du 10 novembre dernier), les divers partis politiques ont bien sûr traité des sujets traditionnels comme la fiscalité, l’immigration, l’économie, etc., mais ils se sont aussi disputé la bannière féministe en accordant une <a href="https://www.20minutos.es/noticia/3577954/0/feminismo-campana-electoral-partidos-politicos/">place de choix à l’égalité des genres et à la violence machiste</a>. Le discours de Unidas Podemos incluait tout particulièrement les préoccupations féministes. Le logo avait encore changé, l’arc-en-ciel du cœur disparaissant au profit de choix chromatiques plus restreints : violet, rouge et vert, couleurs des partis de la nouvelle coalition (Podemos, Izquierda Unida et Equo). </p>
<p>Ces changements à répétition témoignent de l’évolution et des choix stratégiques du parti à l’approche d’élections, et ils ont considérablement complexifié l’image d’une formation qui a tenu à montrer sa <a href="https://www.europapress.es/nacional/noticia-podemos-iu-equo-registran-coalicion-unidas-podemos-mantienen-corazon-logo-20190315191038.html">grande capacité d’adaptabilité aux problématiques centrales de son programme</a>.</p>
<p>De son côté, le PSOE a également eu recours au <a href="https://www.ultimahora.es/noticias/elecciones-2019/2019/02/19/1059489/sanchez-arranca-campana-corazones-para-espana-queremos.html">symbole du cœur pour sa campagne d’avril 2019</a>. Fort du gouvernement le plus féminin d’Europe et d’un slogan peu équivoque en novembre 2019 (« Ahora feminismo, ahora sí »), le parti avait fait le choix de mettre en avant son projet d’égalité homme/femme.</p>
<h2>L’orange dynamique</h2>
<p>Ciudadanos, un parti de centre-droit né en 2006, a choisi une couleur vive : l’orange. D’autres partis centristes tel que le Modem français ont eux aussi utilisé cette couleur joyeuse, associée à des concepts tels que l’énergie, la jeunesse mais aussi la transition car c’est une teinte issue du mélange du jaune et du rouge, couleur(s) d’ailleurs de l’automne, saison intermédiaire entre le froid de l’hiver (le bleu froid du conservateur PP ?) et la chaleur de l’été (révolutionnaire des partis de gauche ?). L’orange n’était pas utilisé non plus avant l’arrivée de Ciudadanos sur la scène politique, même si le PP avait tenté une légère coloration de son logo pour rajeunir l’image du parti avec un <a href="https://www.abc.es/espana/20150709/abci-evolucion-simbolo-201507091822.html">programme plus centriste et réformiste entre 2004 et 2008</a>. </p>
<p>Albert Rivera, président de Ciudadanos, avait déclaré qu’il était <a href="https://www.eldiario.es/politica/Albert-Rivera-orgulloso-naranjito-ilusion_0_363264313.html">« Naranjito »</a> en référence à la mascotte du Mondial de football en Espagne en 1982, une référence pouvant susciter l’intérêt d’un électorat plus âgé que les millennials et post-millenials, génération ciblée prioritairement par la formation centriste.</p>
<h2>Le vert éco-responsable</h2>
<p>Plusieurs partis ont adopté le vert pour leur logo. Il s’agit de Equo, Más País et de Vox. Le premier, fondé en 2011 par Juan José de Uralde, s’inscrit dans la mouvance écologiste et est adhérent du Parti vert européen. Equo avait rejoint Unidas Podemos en 2019 avant de se rapprocher du tout récent parti de gauche <a href="https://elpais.com/politica/2019/09/27/actualidad/1569591694_086960.html">Más País</a> d’Iñigo Errejón, ancien membre de Podemos. Sur ses réseaux sociaux, cette dernière formation, symbolisée par un logo affichant deux teintes de vert, avait déclaré son intention d’être un antidote contre l’abstention et le blocage politique et plaçait l’écologie au centre de son programme, qualifié de <a href="https://maspais.es/uploads/Programa-verde-Mas-Pais.pdf">projet vert, libre et juste</a>.</p>
<p>Autre parti à avoir choisi le vert, avec une nuance plus vive que les précédents : Vox. Le parti d’extrême droite est devenu, il y a quelques semaines, la troisième force politique du pays et est parvenu à entrer au Parlement. Le choix du vert est surprenant car c’est une couleur traditionnellement associée aux mouvements écologistes. Le logo de Vox est très parlant, sans mauvais jeu de mot, car « vox », qui vient du latin et signifie « voix », s’affiche comme le porte-parole de citoyens dont les cris ne seraient guère entendus, stratégie commune à bon nombre de partis populistes qui veulent donner l’image de relais des revendications des citoyens ordinaires. Le vert, ici, n’est pas une référence à l’écologie – le changement climatique n’est même pas mentionné dans le programme de Vox – mais la couleur de l’espoir, d’un renouveau. La lettre « o » centrale fait écho très clairement à la même lettre caractéristique de Podemos qui, par sa forme circulaire, symbolise l’union.</p>
<p>Plus que jamais, la politique espagnole est haute en couleurs et chacun sait que l’arc-en-ciel dispose d’une infinité de couleurs…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/128172/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sabrina Grillo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le choix des couleurs en politique n’est jamais anodin, comme le montre l’étude des dernières décisions prises en la matière par les principales formations espagnoles.Sabrina Grillo, Maîtresse de conférences en civilisation de l'Espagne contemporaine, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1254622019-10-20T19:40:34Z2019-10-20T19:40:34ZPourquoi les macaques japonais ont-ils le visage et les fesses rouges ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/297797/original/file-20191020-56198-g4tyz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C7%2C5184%2C3437&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Femelle macaque japonais</span> <span class="attribution"><span class="source">Lucie Rigaill</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>La couleur rouge a de tout temps occupé une place particulière au sein des sociétés humaines. Associée à la puissance et à la richesse pendant l’Antiquité, elle revêt ensuite de multiples symboliques selon les époques, évoquant tour à tour le sang du Christ, l’amour, la beauté, mais aussi la violence ou l’immoralité…</p>
<p>De nos jours, dans l’inconscient collectif, la couleur rouge est souvent associée à la sexualité et à la « sexitude ». <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5444069/">Différentes études</a> ont en effet montré que le rouge augmentait l’attractivité sexuelle. Il semble que les hommes perçoivent les femmes vêtues ou ornementées de rouge comme sexuellement réceptives et attractives, la réceptivité sexuelle perçue étant potentiellement responsable du lien rouge-attraction. Mais qu’en est-il chez d’autres espèces, et notamment chez les primates non-humains ?</p>
<p>Les primates représentent le groupe de mammifères le plus coloré et les mâles et les femelles de nombreuses espèces développent une coloration rouge au niveau de différentes parties du corps telles que la face, la poitrine, l’aire ano-génitale ou les pattes arrière.</p>
<h2>Le rouge comme attracteur sexuel</h2>
<p>Il semblerait qu’une coloration rouge de la peau joue aussi un rôle dans l’attractivité sexuelle chez ces espèces. Jusqu’ici, la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4167843/pdf/nihms-627009.pdf">plupart des études</a> s’intéressant au lien entre couleur et attractivité se sont focalisées sur la couleur des mâles. Ces études montrent que les femelles sont plus attirées par les mâles les plus colorés, notamment chez le macaque rhésus.</p>
<p>La coloration de la peau chez les mâles a aussi été associée à d’autres caractéristiques individuelles telles que le <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/11300708">statut social</a> au sein du groupe, les mâles les plus dominants étant les plus colorés. Le développement et le maintien de ces ornements colorés s’expliquent par la théorie de la sélection sexuelle développée par Charles Darwin dès 1859 et qui prédit que la présence de certains caractères (parfois extravagants voire handicapants, avec l’exemple classique de la queue du paon) ou leur plus forte expression chez un seul des deux sexes s’explique par l’avantage que de tels caractères procurent dans l’accès aux partenaires sexuels.</p>
<p>Ainsi, la sélection sexuelle pourrait opérer à deux niveaux : entre les sexes, les mâles et les femelles choisissent le partenaire ayant les attributs les plus attirants (sélection intersexuelle) ; et au sein du même sexe, avec une compétition entre les individus de même sexe afin d’accéder au partenaire (sélection intrasexuelle).</p>
<p>La coloration des mâles primates peut avoir évolué par le biais de ces deux mécanismes de sélection, intra- et intersexuel. Mais qu’en est-il chez les femelles primates ? L’expression de ces ornements pourrait avoir été maintenue au cours de l’évolution car ceux-ci conféreraient un avantage reproductif aux femelles « porteuses » qui seraient plus attirantes pour les mâles. La plupart des études sur les traits colorés chez les femelles primates (p. ex. mandrills, babouins) s’est focalisée sur la couleur du gonflement des parties génitales et a cherché à comprendre si ce signal facilement visible pouvait indiquer de façon fiable si les femelles étaient fécondes.</p>
<h2>Un indicateur du moment d’ovulation</h2>
<p>Dans notre étude chez le macaque japonais, nous avons analysé le rôle d’un autre trait coloré, la couleur de la face et de l’arrière-train, afin de comprendre si les variations de couleur de ces ornements pouvaient indiquer de façon fiable le moment de l’ovulation et/ou les caractéristiques individuelles, telles que le rang social ou la parité (nombre de gestations).</p>
<p>Dans cette espèce qui ne présente pas de gonflement sexuel chez l’adulte (point commun avec l’espèce humaine – fort heureusement pour nous !), les deux sexes arborent une coloration rouge de la face et de l’arrière-train avec un pic de coloration au moment de la saison de reproduction.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/297798/original/file-20191020-56234-120anrq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/297798/original/file-20191020-56234-120anrq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/297798/original/file-20191020-56234-120anrq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/297798/original/file-20191020-56234-120anrq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/297798/original/file-20191020-56234-120anrq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/297798/original/file-20191020-56234-120anrq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/297798/original/file-20191020-56234-120anrq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une femelle macaque japonais avec une magnifique face colorée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Lucie Rigaill</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En combinant des observations comportementales, des analyses photographiques et des données hormonales, notre étude chez 12 femelles macaques japonais montre que cette coloration liée aux changements de concentration des hormones sexuelles ne fournit pas d’indication fiable du timing exact de l’ovulation : les femelles ne sont pas plus rouges ou plus foncées au niveau de la face et de l’arrière-train lorsqu’elles ovulent. De ce fait, les mâles macaques japonais ne peuvent pas savoir à coup sûr à quel moment les femelles sont potentiellement fécondes en utilisant ce trait (ou d’autres traits tels que le comportement des femelles ou leurs vocalisations qui ne sont pas non plus des indicateurs fiables du moment de l’ovulation, comme nous l’avons montré dans une <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/pdf/10.1002/ajp.20717">précédente étude</a>.</p>
<p>Ceci est différent de ce qui se passe dans d’autres espèces de primates, notamment le <a href="https://www.researchgate.net/publication/225660289_Sexual_Skin_Color_Contains_Information_About_the_Timing_of_the_Fertile_Phase_in_Free-ranging_Macaca_mulatta">macaque rhésus</a>, chez qui la couleur de la face (mais pas de l’arrière-train) semble fournir une indication fiable du bon moment pour copuler. Les femelles macaques japonais semblent donc « cacher » ou ne pas afficher clairement leur ovulation, au moins au travers de la coloration de leur face ou de leur arrière-train. Ainsi, les femelles en ovulation ne sont pas monopolisées par un mâle et peuvent choisir plus librement leur partenaire sexuel, voire copuler avec plusieurs partenaires différents. Si la couleur de la peau ne semble pas être un indicateur du moment de l’ovulation dans cette espèce, quels sont les indices que pourraient utiliser les mâles pour savoir s’ils ont une chance de se reproduire et quelle est la fonction de cet indice visuel ?</p>
<h2>Une indication de statut social</h2>
<p>Pour répondre à la première question, même si la coloration de la peau n’indique pas précisément le moment de l’ovulation, l’arrière-train des femelles devient plus clair après l’ovulation qu’avant l’ovulation. Ce trait visuel semble donc être un indicateur grossier de la fenêtre pendant laquelle il pourrait être bon d’investir du temps et de l’énergie à copuler avec une femelle qui pourrait potentiellement ovuler. Ces résultats sont cohérents avec ceux obtenus lors d’une <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0135127">précédente étude</a> montrant que la face des femelles devient plus foncée pendant le premier mois de gestation vs le mois avant la conception, suggérant que les femelles pourraient signaler leur gestation via ce changement de coloration que les mâles pourraient utiliser pour ne pas perdre d’énergie à copuler « inutilement » (sans aucune chance que cela aboutisse à une conception) avec des femelles gestantes. C’est d’ailleurs ce qu’ils semblent faire, puisque les mâles de la population sauvage (Koshima) que nous avons suivie ne copulent pas avec des femelles déjà gestantes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/297799/original/file-20191020-56211-1sgaf9v.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/297799/original/file-20191020-56211-1sgaf9v.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/297799/original/file-20191020-56211-1sgaf9v.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/297799/original/file-20191020-56211-1sgaf9v.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/297799/original/file-20191020-56211-1sgaf9v.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/297799/original/file-20191020-56211-1sgaf9v.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/297799/original/file-20191020-56211-1sgaf9v.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une petite sieste au soleil…</span>
<span class="attribution"><span class="source">Lucie Rigaill</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En ce qui concerne la deuxième question – quelle est la fonction de la coloration rouge de la face et de l’arrière-train ? – notre étude montre qu’il existe une relation entre la couleur de la peau et le statut social : les femelles de haut statut social ont des arrières trains plus foncés et qui tendent aussi à être plus rouges.</p>
<p>C’est la première fois que cette relation est établie chez des femelles primates, car jusqu’ici celle-ci avait été uniquement mise en évidence chez les mâles. Cette relation couleur-rang social pourrait être particulièrement intéressante pour les mâles venant d’intégrer un nouveau groupe ou pour les mâles périphériques au groupe (les copulations extragroupe ne sont pas rares chez les primates non-humains, et notamment chez les macaques japonais). En effet, contrairement aux mâles résidents qui bénéficient d’un savoir concernant le rang social ou l’histoire reproductive (le nombre de naissances par femelle) des femelles de leur groupe et n’ont donc pas nécessairement besoin d’un signal visuel supplémentaire pour confirmer ce savoir, les mâles « naïfs » pourraient utiliser la coloration de la peau des femelles pour décider avec quelles femelles copuler : les femelles dominantes qui ont le plus de chances de concevoir.</p>
<p>À l’issue de ces recherches, certaines questions restent encore en suspens : les mâles préfèrent-ils les femelles plus rouges ou plus foncées dans cette espèce ? Est-ce plutôt la combinaison de plusieurs indices (comportements, odeurs, cris de copulation, couleur de la face et de l’arrière-train) qui permet aux mâles macaques japonais de décider à quel moment copuler avec telle ou telle femelle ? La communication sexuelle de cette espèce n’a pas encore livré tous ses secrets…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/125462/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cécile Garcia a reçu des financements du CNRS. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Lucie Rigaill ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La coloration chez les femelles primates jouerait un rôle dans l’attractivité sexuelle, cette nouvelle étude se focalise sur les femelles macaques japonais.Cécile Garcia, Chargée de Recherche - CNRS, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Lucie Rigaill, Professeure-assistante, Kyoto UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1147872019-04-04T19:56:15Z2019-04-04T19:56:15ZPourquoi existe-t-il des diamants de toutes les couleurs ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/267599/original/file-20190404-123437-3e58ey.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4523%2C2519&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La mine de diamants Premier en Afrique du Sud. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/0/07/South_Africa-Cullinan_Premier_Mine02.jpg">Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le mois prochain c’est la fête des Mères, et si vous offriez un diamant ? Pour celles et ceux pour qui le prix pourrait être un frein, il vous reste la méthode naturelle. Il faudra simplement compter avec des profondeurs de formation de 250 à 400 km et de 600 à 800 km, par réaction entre des carbonates et du fer dans la croûte océanique.</p>
<p>Il reste à élucider pourquoi ces deux intervalles de formation et surtout à quoi correspond la zone la plus profonde, qui ne représente que quelques pour cent des diamants que l’on rencontre. C’est la question qu’ont essayé de résoudre des <a href="https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/pdf/10.1029/2018GL080740">chercheurs de University of Michigan</a> dans un en examinant les conditions de température et pression dans le manteau terrestre. Effectivement, il existe une zone de décroissance de production, ou plutôt de vitesse de croissance des diamants entre 400 et 600 km due à des changements de production en fonction de la température et pression.</p>
<h2>Des impuretés magnifiques</h2>
<p>C’est aussi là qu’interviennent les impuretés qui cristallisent dans la maille du diamant (grenats ou éclogites, des minéraux de haute pression). Le problème est que ces impuretés sont également à l’origine de la destruction des diamants lors de leur remontée rapide à la surface.</p>
<p>Il faut alors se tourner vers les diamantaires et la société De Beers en particulier, qui ont classé les pierres selon les quatre « C » que sont <em>cut</em> (taille), <em>colour</em> (couleur), <em>clarity</em> (pureté) et <em>carat</em> (poids). C’est ce qui fait la qualité, et surtout la valeur d’une pierre. La taille et le poids sont fonction de l’habileté du tailleur et de la forme originale de la pierre. Par contre, sa pureté détermine en partie sa couleur. C’est ainsi que le diamant pur est généralement blanc ou légèrement brunâtre. Cela va même jusqu’au diamants chocolat, à fort taux d’impuretés en nickel, de moindre valeur. Dans les diamants jaunâtres, quelques atomes d’azote remplacent ceux de carbone. Ils sont facilement identifiables par cette abondance en nickel. Les défauts d’empilement des cristaux ou leur irradiation artificielle conduisent à des effets similaires.</p>
<p>Les diamants roses à rouges sont soupçonnés d’avoir subi des pressions inhabituelles durant leur formation et remontée, mais <a href="https://www.gia.edu/doc/Winter-2018-Gems-Gemology.pdf">leur origine est encore controversée</a>. Par contre, les diamants bleus possèdent des inclusions de bore qui donne cette couleur. Ce sont souvent des pierres d’origine profonde (à plus de 400 km), d’où leur occurrence en certaines mines uniquement. Et surtout, leur rareté qui en fait le prix. Se pose alors la question de la provenance de ce bore, habituellement rencontré à moindre profondeur. Ce serait du bore incorporé dans des serpentines, des roches vertes, entraînées lors de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Subduction">subduction</a> de la croûte, comme on en trouve dans les Alpes.</p>
<h2>Fabriquez votre propre diamant</h2>
<p>On sait, assez facilement recréer les conditions de formation de ces diamants, avec les couleurs au choix, à partir d’appareils à très haute pression et très haute température. De même leur détection est, elle aussi, assez facile, ce qui fait les prix moitié moindres des diamants industriels un critère important.</p>
<p>Donc, ces chercheurs du Michigan ont recréé les conditions de pression-température d’une plaque qui subducte, avec des vitesses d’enfouissement de 1 à 10 cm/an, soit 1–10 μm/h. Et effectivement la vitesse de réaction aboutissant à former un diamant décroît à partir de 16 GPa (en gros 400 km), pour devenir inférieure comparée à l’augmentation de pression liée à l’enfouissement de la plaque.</p>
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<figcaption><span class="caption">Rihanna, « Diamonds ».</span></figcaption>
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<p>Cela explique la non-observation de diamants à plus de 400 km. Alors pourquoi une seconde étape de formation à partir de 14 GPa ? Parce que la plaque ne descend pas plus profond. Elle s’accumule vers 650 km et stagne à ces profondeurs (et pressions). Du fait de cette stagnation, les vitesses de réaction permettent à nouveau la croissance des diamants, donnant lieu aux diamants (rares) profonds, originaires de 600-800 km. Il suffisait d’attendre ; c’est le drame des nouveaux riches.</p>
<p>Alors, est ce que valait la peine d’acheter la mine Premier (anciennement Cullinan), à une quarantaine de km à l’est de Prétoria ? Cette mine a fourni, non seulement les célèbres diamants bleus, mais plus du quart des diamants connus de plus de 400 carats (80 g). Le Cullinan 1, une fois taillé, avec ses 76 facettes, au lieu des 58 habituelles, fait tout de même 530,20 carats (106 g tout de même). Il est vrai que pour celles qui recherchent la perte de poids, mieux vaut se peser sans les bagues.</p>
<p>À part cette fonction ornementale, les diamants sont les témoins directs des profondeurs de la terre. Les inclusions, soit de minéral, soit de fluide, sont importantes pour ce qui concerne le fonctionnement du manteau. Tout d’abord ces inclusions peuvent être synchrones de la genèse des diamants, mais pas forcément du même âge. Ces informations sont naturellement importantes pour les pierres les plus profondes. Une catégorie spécifique se nomme CLIPPIR (pauvres en inclusions, purs, de forme irrégulière et résorbés).</p>
<p>Comme le nom l’indique (peu), ils sont originaires de la mine de Cullinan, dans le Lesotho. Les inclusions contiennent du fer, nickel, carbone et soufre, ainsi que des films de méthane et d’hydrogène. Surtout, certaines, encore plus rares contiennent un minéral appelé perovskite (CaSiO3), minéral que l’on recherche, mais que l’on a rarement vu dans des conditions naturelles. Cela indiquerait un recyclage de la croûte jusque dans le manteau inférieur. Ces inclusions informent également sur l’état de l’atmosphère primitive de la Terre par leur composition isotopique. Comme quoi, il ne faut jamais désespérer de l’utilité des diamants et de plus ils sont éternels.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/114787/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean Louis Vigneresse ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Un diamant constitué de carbone pur est généralement blanc ou légèrement brunâtre. Rajoutez quelques impuretés et vous obtenez un véritable arc-en-ciel diamantaire.Jean Louis Vigneresse, Géophysicien, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1029412018-09-24T20:11:25Z2018-09-24T20:11:25ZPourquoi Nemo a trois bandes blanches : l’énigme enfin résolue !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/237302/original/file-20180920-129856-r6go0o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C17%2C954%2C724&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le papa de « Nemo » le plus connu des poissons à trois bandes</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ecranlarge.com/films/838102-monde-de-nemo-3d-le">Disney Pixar</a></span></figcaption></figure><p>Les poissons coralliens sont connus pour leur grande diversité de couleurs et de motifs plus étonnants les uns que les autres. On peut citer par exemple le poisson-papillon à bec à bandes jaunes et blanches <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Paracanthurus_hepatus"><em>Paracanthurus hepatus</em></a> (Chelmon rostratus) qui possède un œil noir sur son corps ou bien le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Rhinecanthus_aculeatus">poisson baliste-Picasso</a> dont le nom est lié à ses couleurs vives et aux dessins qu’il possède sur ses flancs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/237303/original/file-20180920-129853-8e8yvm.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/237303/original/file-20180920-129853-8e8yvm.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/237303/original/file-20180920-129853-8e8yvm.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/237303/original/file-20180920-129853-8e8yvm.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/237303/original/file-20180920-129853-8e8yvm.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/237303/original/file-20180920-129853-8e8yvm.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/237303/original/file-20180920-129853-8e8yvm.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/237303/original/file-20180920-129853-8e8yvm.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Myriade de couleurs chez les poissons coralliens. À gauche le poisson à bec, et à droite le poisson baliste-Picasso.</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. E. Randall</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Parmi ces poissons coralliens, on retrouve aussi le fameux <em>Nemo</em> : poisson-clown star du film d’animation des studios Pixar « le monde de Némo ». Ce petit poisson-clown qui vit en symbiose avec l’anémone de mer est très reconnaissable grâce à son corps orange vif parcouru de larges bandes blanches.</p>
<p>Comment expliquer la myriade de couleurs et motifs arborés par les poissons coralliens ? Comment se forment ces motifs ? Quel est le rôle de ces couleurs ? Notre équipe de chercheurs de l’Observatoire de Banyuls-sur-Mer (France) et de l’Université de Liège (Belgique) ont décidé de s’intéresser à ces questions en <a href="https://bmcbiol.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12915-018-0559-7">étudiant le poisson-clown et ses cousins</a>.</p>
<p>Némo, alias <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Poisson-clown_%C3%A0_trois_bandes"><em>Amphiprion ocellaris</em></a>, appartient au groupe des poissons-clowns qui compte une trentaine d’espèces. Leur patron de coloration est caractérisé par une robe jaune, orange, brun ou noir avec des bandes blanches verticales composées de cellules réfléchissant la lumière appelées iridophores.</p>
<p>En plus d’autres caractères morphologiques, les espèces de poissons-clowns se distinguent par leur nombre de bandes blanches et la couleur de leur robe. Ainsi, certaines espèces n’ont aucune bande blanche verticale, comme <em>Amphiprion ephippium</em> ; d’autres n’en possèdent qu’une, comme <em>Amphiprion frenatus</em> ; ou alors ils en arborent deux comme <em>Amphiprion sebae</em> ; ou trois comme chez <em>Amphiprion ocellaris</em>, le fameux <em>Némo</em>. Nous avons donc voulu comprendre d’où venait cette diversité de patron de coloration chez les poissons-clowns. Qu’est-ce qui peut expliquer cette différence de nombre de bandes entre ces espèces ?</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/237304/original/file-20180920-129871-18jbm3t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/237304/original/file-20180920-129871-18jbm3t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/237304/original/file-20180920-129871-18jbm3t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/237304/original/file-20180920-129871-18jbm3t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/237304/original/file-20180920-129871-18jbm3t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/237304/original/file-20180920-129871-18jbm3t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/237304/original/file-20180920-129871-18jbm3t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/237304/original/file-20180920-129871-18jbm3t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Quatres espèces de poissons-clowns illustrant les quatre patrons de colorations existants chez les poissons-clowns. De haut en bas- de gauche à droite : <em>Amphiprion ephippium</em>, <em>Amphiprion frenatus</em>, <em>Amphiprion bicinctus</em> et <em>Amphiprion ocellaris</em>.</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. E. Randall</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>Comptons les bandes</h2>
<p>Pour comprendre le mécanisme menant à la diversité des patrons de pigmentation, chaque poisson a été groupé selon son nombre de bandes verticales. Des analyses intégrant l’histoire évolutive des poissons-clowns ont révélé que <a href="https://bmcbiol.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12915-018-0559-7">leur ancêtre commun possédait 3 bandes blanches</a>, et qu’au cours de leur diversification, des lignées de poissons-clowns ont perdu successivement la bande de la queue, puis celle du corps et enfin celle de la tête donnant ainsi quatre combinaisons : trois bandes (tête, corps et queue), deux bandes (tête et corps), une bande (tête seule) ou aucune bande. Il y a donc une diversité visiblement contrainte. Il semble que les mécanismes biologiques ne permettent pas d’avoir par exemple une espèce qui aurait une bande sur la queue et une sur la tête.</p>
<h2>Une perte des bandes au cours de l’évolution</h2>
<p>Pour comprendre ce mécanisme, nous nous sommes intéressés au développement de deux espèces ayant deux patrons de coloration différents à l’âge adulte : <em>A. ocellaris</em> qui présente trois bandes et <em>A. frenatus</em> qui n’a qu’une bande sur la tête.</p>
<p>Les bandes chez <em>A. ocellaris</em> apparaissaient dans un ordre bien défini au cours de sa transformation de larve à jeune adulte : d’abord celle de la tête, puis celle du corps et enfin celle de la queue. C’est-à-dire dans l’ordre inverse de celui de la disparition observée au cours de l’évolution !</p>
<p>Seconde observation très étonnante : <em>A. frenatus</em> présente le même développement que <em>A. ocellaris</em> à l’état larvaire, il y a l’apparition successive de trois bandes blanches de la tête à la queue alors que les individus adultes n’en possèdent qu’une ! Ces bandes surnuméraires sont ensuite perdues dans un ordre également séquentiel identique à celui de l’évolution (de la queue vers la tête).</p>
<p>Ces résultats suggèrent ainsi que la perte chronologique des bandes au cours de l’évolution a été contrainte par la séquence d’apparition des bandes au cours du développement et qu’il y a un lien très profond entre phylogenèse (histoire évolutive) et ontogenèse (développement de l’individu). Cela conduit à l’hypothèse que la formation des bandes est contrôlée par un mécanisme génétique très précis et dépendant de la polarité antéro-postérieure du poisson. Ces mécanismes restent encore à découvrir.</p>
<h2>Finalement, à quoi servent ces bandes ?</h2>
<p>Pour répondre à cette question, nous avons comparé la diversité des patrons de bandes blanches rencontrée chez des communautés naturelles de poissons-clowns avec la diversité observée chez des communautés où la diversité des patrons de bandes blanches serait distribuée totalement au hasard.</p>
<p>Grâce à ces simulations, nous avons pu montrer que la probabilité d’avoir des espèces de poissons-clowns avec le même nombre de bandes dans la même région était très rare.</p>
<p>Plusieurs facteurs écologiques peuvent influer cette distribution non aléatoire et il est très probable que le nombre de bandes blanches joue un rôle de signal permettant aux espèces de se reconnaître mutuellement. Cette reconnaissance est primordiale dans l’organisation sociale de ces poissons vivant dans des anémones et où peuvent se côtoyer plusieurs espèces. Cette reconnaissance permet également bien évidemment au papa de Némo de le retrouver à l’autre bout de l’océan !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/102941/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pauline Salis a reçu des financements de CNRS, et Sorbonne Université</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Bruno Frédérich a reçu des financements du Fonds de la Recherche Scientifique (FNRS) et de la Politique Scientifique Fédérale (Belspo) de Belgique. Il est membre du Laboratoire de Morphologie Fonctionnelle et Evolutive à l'Université de Liège (Belgique).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Vincent Laudet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Vos enfants connaissent tous le petit poisson-clown Némo, héros du film de Pixar. Peut-être se sont-ils demandé pourquoi avait-il des bandes blanches ? Des chercheurs, ces grands enfants, aussi !Pauline Salis, Chercheur postdoctoral, Sorbonne UniversitéBruno Frédérich, Maître de Conférences, Université de LiègeVincent Laudet, Directeur de l'Observatoire Océanologique, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/982812018-06-28T22:08:05Z2018-06-28T22:08:05ZQuand arts et sciences des plasmas se rencontrent au musée : enjeux d’une médiation croisée<p><em>Cet article a été coécrit avec l’aide de Charlotte Mansour, chargée de communication du Labex PLAS@PAR et Xavier Fresquet, chef de projet du Labex PLAS@PAR</em></p>
<hr>
<p>L’interdisciplinarité et le décloisonnement constituent-ils des clés de réponse aux enjeux sociétaux contemporains ?</p>
<p>La jeune <a href="https://www.sorbonne-universite.fr/">Sorbonne Université</a> et ses partenaires sont en faveur de ce postulat.</p>
<p>En son sein, le Laboratoire d’Excellence en physique des plasmas à Paris <a href="http://www.plasapar.com/en/">« PLAS@PAR »</a>, s’inscrit dans une dynamique en alliant excellence de la recherche et développement de projets multidisciplinaires, à travers une réflexion autour des notions de transmission et de partage des savoirs, en particulier vers le grand public.</p>
<p>Cette réflexion a ainsi vu naître en 2017-2018 un partenariat inédit avec le Centre Pompidou : scientifiques, enseignants en physique-chimie et arts plastiques, artistes, étudiants, scolaires et grand public se sont interrogés et ont expérimenté ensemble, tout au long de l’année, sur les rapports entre les arts et les sciences.</p>
<h2>Le plasma, qu’est-ce que c’est ?</h2>
<p>Également appelé 4<sup>e</sup> état de la matière ou matière ionisée, le plasma représente 99 % de l’univers visible. Étudié en laboratoire et observé dans son environnement naturel (foudre, aurores boréales, soleil, étoiles, nébuleuses interstellaires), le plasma fait aussi partie de notre quotidien, de l’éclairage (tubes néons) à la fabrication de circuits intégrés, la production d’énergie, la santé, la sécurité, l’environnement ou encore l’agronomie.</p>
<p>Si les sciences essaient de comprendre le monde et que les arts le transforment, il paraît légitime de s’interroger sur la primauté temporelle des théories artistiques face aux théories scientifiques et réciproquement. Interroger notre monde, n’est-ce pas l’essence même des sciences et des arts ?</p>
<p>Le tableau est très tôt considéré comme une imitation, une ouverture vers la nature et vers l’histoire. Nicolas Poussin le décrit comme « une imitation faite avec lignes et couleurs en quelque superficie de tout ce qui se voit sous le soleil ». À travers ces quelques mots, des notions essentielles émergent. Lumière, couleur et matière, composantes fondamentales de la peinture apparaissent comme des caractéristiques quantifiables et analysables. Un premier lien entre arts et sciences s’offre à nous.</p>
<p>Ces trois notions sont d’ailleurs tout aussi essentielles pour les sciences physiques, et naturellement en physique des plasmas. En effet la matière ionisée, en tant que matière chaude énergétique est à la fois lumineuse (elle émet des photons) et colorée (sa couleur dépend de la matière – oxygène, fer, azote, etc. – qui est excitée et de sa température). Le soleil, chaud, lumineux et brillant d’une lumière blanche qui éclaire notre quotidien, représente un exemple de plasma que chacun peut appréhender.</p>
<p>C’est ainsi, autour des discussions sur les liens que les arts entretiennent avec la notion de plasma, que le triptyque « matière-lumière-couleur » s’est imposé pour faciliter la médiation arts-sciences.</p>
<h2>Matière plastique, matière plasma</h2>
<p>La matière constitue notre univers, elle modèle notre environnement. Dans le champ des arts, la matière est sans cesse questionnée, qu’il s’agisse du matériau, du support, des techniques, ou encore de son caractère fini ou infini. La matière est au centre des préoccupations des artistes, depuis les premiers bas-reliefs sumériens jusqu’au Land Art, l’art optique, l’art abstrait, le surréalisme.</p>
<p>La foudre est un exemple concret de matière « plasma » qui parcourt l’histoire de l’art et inspire les artistes. Cette décharge électrique naturelle est un plasma très énergétique qui produit une lumière blanche intense. De <a href="http://juliusvonbismarck.com/bank/index.php?/projects/talking-to-thunder/">Julius von Bismarck</a>, à <a href="https://www.centrepompidou.fr/cpv/ressource.action?param.id=FR_R-ba2d8da42fe0665f4c82a1c415502c9f&param.idSource=FR_P-f1d87ab59055fc9942295de256286cbd">Judit Reigl</a> ou à <a href="https://www.diaart.org/visit/visit/walter-de-maria-the-lightning-field/">Walter de Maria</a>, l’éclair est à la fois sujet et matière, aussi bien tracé que dompté. D’un point de vue plus abstrait, la nature « turbulente » de la matière plasma (sous l’effet des champs magnétiques) est présente dans le geste créateur de nombreux artistes contemporains comme Jackson Pollock ou Sam Francis, dont le tableau <a href="https://www.centrepompidou.fr/cpv/resource/cxA9Mg4/rk5G5B"><em>Other White</em></a> n’évoque selon J.-J Sweeney, « pas seulement le jeu de la lumière, mais la substance dont la lumière est faite ».</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/224693/original/file-20180625-19382-1yrtspv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/224693/original/file-20180625-19382-1yrtspv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=469&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/224693/original/file-20180625-19382-1yrtspv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=469&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/224693/original/file-20180625-19382-1yrtspv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=469&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/224693/original/file-20180625-19382-1yrtspv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=589&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/224693/original/file-20180625-19382-1yrtspv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=589&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/224693/original/file-20180625-19382-1yrtspv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=589&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Walter De Maria, <em>The Lightning Field</em>, 1977. Installation près de Quemado, New Mexico.</span>
<span class="attribution"><span class="source">John Cliett/Dia Art Foundation</span></span>
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<h2>La lumière : physiciens vs artistes</h2>
<p>Fondamentale dans les arts, les sciences et les techniques, conférant vie et couleurs aux objets, la lumière révèle le monde et permet son interprétation (à travers la spectroscopie par exemple).</p>
<p>À la fois matériau et outil de composition, la lumière possède une réalité physique toute particulière. C’est conjointement une onde (électromagnétique) et un flux de corpuscules (photons). La lumière, que le physicien appelle rayonnement, se propage dans le vide et interagit avec la matière par un échange constant d’énergie (où la mécanique quantique est reine). Elle peut être visible par l’œil humain (du rouge au violet) ou invisible (infrarouge, ultraviolet, rayons X, ondes radio).</p>
<p>Si la physique révèle la nature de la lumière du soleil, la peinture étudie sa représentation, son rendu. La (re)découverte de la perspective s’effectue ainsi parallèlement à la compréhension du phénomène de propagation de la lumière en ligne droite. Les impressionnistes, durant la seconde moitié du XIX<sup>e</sup> siècle, représentent la mobilité des phénomènes lumineux de manière diachronique, comme une forme de réponse à la photographie naissante qui l’immobilise. Au XX<sup>e</sup> siècle, le courant du <em>light painting</em> va faire de la lumière une technique de peinture dont vont s’emparer aussi bien <a href="https://www.youtube.com/watch?v=X-i9eqlRzks">Pablo Picasso</a> que <a href="https://www.smithsonianmag.com/arts-culture/man-rays-signature-work-8698967/">Man Ray</a>. Produit d’un univers « électrique », la lumière du physicien ou de l’artiste est à la fois point de référence, indice ou limite. De son observation découle une nouvelle perception du monde, dans sa matérialité comme dans ses tonalités.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/224695/original/file-20180625-19390-1hd5wko.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/224695/original/file-20180625-19390-1hd5wko.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/224695/original/file-20180625-19390-1hd5wko.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/224695/original/file-20180625-19390-1hd5wko.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/224695/original/file-20180625-19390-1hd5wko.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/224695/original/file-20180625-19390-1hd5wko.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/224695/original/file-20180625-19390-1hd5wko.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Man Ray, 1922, <em>Sans titre</em>, rayographie, épreuve à la gélatine argentique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">https://en.wikipedia.org/wiki/Man_Ray#/media/File :Man_Ray,_1922,_Untitled_Rayograph.jpg</span></span>
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<h2>Couleur et plasmas</h2>
<p>Dans le prisme, l’arc-en-ciel, ou le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Disque_de_Newton">disque chromatique de Newton</a>, des organisations de couleurs s’installent, permettant la lecture des teintes, des nuances et de leurs valeurs. Ainsi, la physique nous démontre qu’une couleur peut être perçue ou créée de deux manières complémentaires : soit parce c’est la seule que le matériau éclairé réfléchit vers nous, les autres étant absorbées (peinture, encre, filtre coloré) ; soit parce qu’elle est émise par l’objet lui-même, par « synthèse additive » (une flamme, une ampoule, une étoile). On observe ici deux processus fondamentaux utilisés aussi bien par les artistes que par les physiciens.</p>
<p>La couleur est devenue l’un des enjeux majeurs de la peinture moderne. Des impressionnistes qui utilisent le pointillisme imitant la synthèse additive des couleurs pour jouer sur les sensations colorées, aux fauves qui l’étalent de manière brute, ou aux rayonnistes qui l’emploie pour créer une source lumineuse dans l’œuvre, la couleur initialement qualité deviendra matériau pour s’imposer comme sujet pictural, par exemple chez <a href="http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-yves_klein/ENS-Yves_Klein.htm">Yves Klein</a> ou <a href="https://www.centrepompidou.fr/cpv/resource/c9nBKKr/rLr5eaK">Gerhard Richter</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/225207/original/file-20180627-112620-qdnv9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/225207/original/file-20180627-112620-qdnv9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/225207/original/file-20180627-112620-qdnv9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/225207/original/file-20180627-112620-qdnv9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/225207/original/file-20180627-112620-qdnv9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/225207/original/file-20180627-112620-qdnv9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/225207/original/file-20180627-112620-qdnv9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Œuvre audiovisuelle immersive <em>Inside plasma</em>, présentée au Centre Pompidou, 7–8 avril 2018.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Artistes et crédit photo : Danny Rose</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>En physique, la technique qui vise à décomposer la lumière pour lire et interpréter les éléments à l’origine de ses différentes couleurs est appelée spectroscopie. Cette technique permet de nous renseigner sur de nombreuses propriétés des plasmas qui constituent notre univers (composition chimique, température, densité, vitesse et même champ magnétique).</p>
<p>L’art contemporain joue avec les mesures, les lectures et les interprétations des données issues des sciences physiques et de l’analyse des structures cristallines et lumineuses à effets colorés.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/224867/original/file-20180626-112601-1qjwjid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/224867/original/file-20180626-112601-1qjwjid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=544&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/224867/original/file-20180626-112601-1qjwjid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=544&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/224867/original/file-20180626-112601-1qjwjid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=544&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/224867/original/file-20180626-112601-1qjwjid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=684&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/224867/original/file-20180626-112601-1qjwjid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=684&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/224867/original/file-20180626-112601-1qjwjid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=684&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La spectroscopie permet par exemple d’analyser la lumière du soleil. Ici, le spectre solaire qu’utilisent les astronomes permet de connaître la composition des différentes couches de l’atmosphère du soleil.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Carine Briand, Baptiste Cecconi, Laurent Lamy / LESIA</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Faire émerger les convergences</h2>
<p>Comme nous l’avons vu brièvement, les notions « lumière, couleur et matière » présentent de nombreuses convergences entre ces deux champs essentiels de la connaissance que sont les arts et la physique. La transmission de ces corrélations auprès du public est alors devenue une nécessité.</p>
<p>Un programme de médiation croisée a ensuite été développé autour <a href="http://mediation.centrepompidou.fr/plaquette_art_sciences_parcours-ateliers.pdf">d’ateliers et parcours pédagogiques</a> adaptés à chaque public ; des groupes différents ont ainsi pu être sensibilisés à la notion de plasma par l’intermédiaire des arts. Le programme s’est déployé en 5 actes en 2017-2018 et s’est conclu au Centre Pompidou les 7 et 8 avril 2018 avec un <a href="http://mediation.centrepompidou.fr/programme_campus_arts-et-sciences-des-plasmas.pdf">Campus dédiés aux Arts et Sciences des plasmas</a>.</p>
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<iframe src="https://player.vimeo.com/video/266675582" width="500" height="281" frameborder="0" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption"><em>Inside plasma</em>, une installation immersive au cœur du 4ᵉ état de la matière. Design et réalisation par Danny Rose, en collaboration avec le Labex PLAS@PAR.</span></figcaption>
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<p>Plus de 2 200 visiteurs ont pu apprécier les collaborations artistiques et scientifiques proposées grâce à des installations ludiques et interactives (dont l’œuvre audiovisuelle immersive INSIDE PLASMA, le workshop PLASMA REFLECTION et les expériences de <a href="https://www-perso.ias.u-psud.fr/solarstormvr/">réalité virtuelle et augmentée</a> proposées par le <a href="http://www.e-sas.org/">SAS</a> et l’Institut d’astrophysique spatiale (IAS), à l’exposition de projets d’œuvres des artistes en résidence à la Station de Radioastronomie de Nançay, aux 4 conférences arts et sciences et aux 4 concerts du Collegium Musicae au sein des collections du Musée national d’art moderne. Deux films étaient également projetés en continu : l’un à visée pédagogique, conversation filmée à la croisée des arts et des sciences des plasmas autour d’œuvres de la collection permanente du Centre Pompidou, avec Arnauld Pierre, historien d’art à Sorbonne Université et Sylvie Cabrit, astronome à l’Observatoire de Paris ; le second, intitulé <em>Arts et Sciences des plasmas, Rétrospective</em>, retrace l’ensemble du projet, les moments privilégiés et les rencontres.</p>
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<iframe src="https://player.vimeo.com/video/266675930" width="500" height="281" frameborder="0" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Une œuvre d’art interactive qui permet aux visiteurs de voir leur propre réflexion dans le quatrième état de la matière : le Plasma. <em>Plasma Reflection</em> est conçu comme un miroir déformant qui transformerait la matière des personnes qui y font face. De l’autre côté du miroir, la matière est ionisée. C’est du plasma. Les silhouettes de ceux qui se tiennent ou se déplacent devant l’œuvre sont diffusées dans l’espace et sont soumises aux turbulences générées par le champ magnétique. L’installation vit avec des personnes qui interagissent avec elle.</span></figcaption>
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<p>Le plasma irrigue la création artistique et se prête aisément aux enjeux de la médiation.</p>
<p>Nous continuerons donc en 2019 cette aventure à travers de nouveaux projets Arts-Sciences et accueillerons toutes celles et ceux qui sont curieux de découvrir ces liens de manière ludique et pédagogique !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/98281/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le Laboratoire d’Excellence en physique des plasmas se penche sur le triptyque « matière-lumière-couleur » pour faciliter la médiation arts-sciences.Sylvie Cabrit, Astronome à l'Observatoire de Paris, Observatoire de ParisAndrea Ciardi, Maître de conférences, physique des plasmas, Sorbonne UniversitéXavier Fresquet, Humanités numériques, Musicologie, Physique des plasmas, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/826992018-04-25T21:39:19Z2018-04-25T21:39:19ZLe colorisme et les crèmes éclaircissantes : ces legs invisibles de la colonisation<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/216259/original/file-20180425-175038-c3sfre.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C207%2C3642%2C2373&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le complexe de la peau blanche survit et est entretenu depuis la période coloniale par les produits cosmétiques. Un tabou à faire tomber.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/beautiful-curly-hair-face-female-235500/">Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>« Je suis une version acceptable de fille noire pour Hollywood, cela doit changer » <a href="http://www.rtl.fr/girls/identites/zendaya-critique-colorisme-hollywood-7793137563">déclarait avec fracas Zendaya</a>, chanteuse et actrice américaine de 21 ans, lors du festival BeautyCon à New-York ce 22 avril.</p>
<p>L’ancienne vedette de la chaîne Disney, idole des adolescent·e·s, dont les ancêtres viennent aussi bien du continent européen qu’africain, brise un tabou. Dans le monde du glamour et du politiquement correct, les femmes métissées à la peau claire auraient clairement <a href="http://www.bbc.com/news/newsbeat-43879480">plus d’opportunités que les autres</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"988173135378829313"}"></div></p>
<p>Ce débat n’est pas anodin. En France, comme aux États-Unis, des milliers de femmes, et d’hommes sont marqués par ce qu’on nomme le <a href="https://www.cairn.info/de-la-question-sociale-a-la-question-raciale--9782707158512-p-37.htm">colorisme, une discrimination entre les peaux de couleurs, favorisant les peaux plus pâles</a>.</p>
<h2>Un phénomène issu de la colonisation</h2>
<p>Le phénomène prend racine à l’âge d’or de la <a href="http://www.persee.fr/doc/xxs_0294-1759_1991_num_32_1_2467_t1_0106_0000_2">France coloniale</a>, dans les années 1920. L’imposition de la langue, des normes et traditions françaises a non seulement <a href="http://classiques.uqac.ca/contemporains/balandier_georges/socio_colonisation/socio_colonisation_texte.html">profondément modifié et influencé</a> les cultures, économies, comportements sociaux et politiques dans la durée mais a aussi eu d’autres impacts, moins visibles, sur la perception et la psyché des populations locales.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/dOtuL7BcYSs?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Récap : qu’est-ce que le colorisme ?</span></figcaption>
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<p>La peau noire concentre une très importante dose de <a href="https://www.britannica.com/science/melanin">melanine</a> – le <a href="http://www.medicinenet.com/script/main/art.asp?articlekey=4340">pigment</a> qui donne à la peau, aux yeux et aux cheveux leur couleur. Or, par le biais de la colonisation et de l’idéologie raciste véhiculée à l’époque, la couleur sombre est rapidement devenue un marqueur identitaire péjoratif, associé aux classes socio-économiques et culturelles les plus défavorisées. Cette image a été intériorisée par les différentes populations africaines, et ce, pendant des siècles.</p>
<p>Certains « colonisés » ont donc cherché à imiter la couleur de peau ou les caractéristiques physiques des colons, dans le but d’améliorer leur condition de vie et leur image.</p>
<p>Ce processus d’aliénation – la « négrophobie » envers les autres Noirs et l’espoir de ressembler aux Blancs – a été <a href="https://www.scienceshumaines.com/frantz-fanon-contre-le-colonialisme_fr_28199.html">d’ailleurs décrit et analysé</a> dès 1952 par Franz Fanon dans <em>Peaux noires, masques blancs</em>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/W2zh61j73PI?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le court-métrage plusieurs fois primé, « Charcoal » (2017, de l’Haïtienne Francesca Andre) dénonce les ravages du colorisme.</span></figcaption>
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<p>Malgré la dénonciation de ce phénomène, le colorisme reste une réalité, notamment aux États-Unis où avoir conscience de la couleur de sa peau <a href="https://fordham.bepress.com/dissertations/AAI3003022/">affecte directement l’image et la confiance en soi</a>. Notons par ailleurs que chez la population américaine blanche le contraire est également vrai. Ainsi, après-guerre, a émergé le <a href="https://www.smithsonianmag.com/arts-culture/breck-girls-60936753/">concept</a> de la « Breck girl », la femme américaine aux cheveux longs, yeux clairs et peau d’albâtre, archétype de la beauté pendant de nombreuses années…</p>
<h2>Le marché lucratif des produits éclarcissants</h2>
<p>Ce décalage entre un idéal à atteindre – un critère de beauté, d’estime de soi fondé sur une peau claire – et la réalité a donné lieu à toutes sortes de stratégies de beauté dans les anciennes <a href="https://theconversation.com/self-love-not-bans-will-bring-an-end-to-africas-bleaching-syndrome-77985">colonies africaines</a> et sud-asiatiques.</p>
<p>Ainsi, pour un très grand nombre d’Indiens (hommes comme femmes), s’éclaircir la peau est rapidement devenu une habitude au même titre que de se lisser les cheveux ou s’épiler les sourcils.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/bleached-girls-india-and-its-love-for-light-skin-80655">Bleached girls: India and its love for light skin</a>
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<p>Les produits éclaircissant sont ainsi rapidement devenus une nouvelle manne financière.</p>
<p>D’ici à 2024, les profits issus de cette industrie pourraient cumuler à 25 milliards d’euros à l’échelle mondiale. Le <a href="http://www.aljazeera.com/programmes/specialseries/2013/08/201382894144265709.html">marché asiatique</a> seul ferait près de 4,68 milliards d’euros de profit dans les quatre prochaines années.</p>
<p>Le marché hexagonal lui est en plein essor : entre <a href="http://www.aljazeera.com/programmes/specialseries/2013/08/201382894144265709.html">1 et 5 millions de Français</a> auraient indiqué une ascendance africaine. Sans compter la présence d’une diaspora africaine importante en France. Combien de personnes utilisent alors ce type de produits ?</p>
<p>Il suffit de se promener au nord de la capitale parisienne, <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00005082">dans les quartiers de Château rouge,</a> ou Château d’Eau, pour remarquer que l’industrie de la « peau blanche » a pignon sur rue.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/216314/original/file-20180425-175077-16v61gs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/216314/original/file-20180425-175077-16v61gs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/216314/original/file-20180425-175077-16v61gs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/216314/original/file-20180425-175077-16v61gs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/216314/original/file-20180425-175077-16v61gs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/216314/original/file-20180425-175077-16v61gs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/216314/original/file-20180425-175077-16v61gs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Publicité pour les produits HT 26 conçus « pour les peaux noires et métissées » dans le métro ligne 4, à Château d’eau, Paris, 24 avril 2018.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sonia Zannad</span></span>
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<p>On notera ainsi la prolifération de boutiques et magasins dont les rabatteurs vantent les services (salons de coiffure, manucure, etc.) et vendant des <a href="http://www.metropolitiques.eu/Qui-sont-les-Africains-de-Chateau.html">produits cosmétiques « africains »</a> dont les crèmes et autres produits éclaircissant.</p>
<p>Ces derniers sont d’ailleurs vantés par des célébrités africaines, et ce malgré la controverse qui entoure cette industrie et ses fabricants, de grandes multinationales aux sièges… européens.</p>
<h2>Néocolonialisme ?</h2>
<p>Ainsi, la France est très active dans la production et la vente de crèmes éclaircissantes aux côtés de sommités internationales. Clarins SA donc avec son White Plus mais aussi E.T. Browne Drug Co., Cavin Kare Pvt., Shiseido Co., Beiersdorf A.G. et l’américain <a href="http://www.futuremarketinsights.com/reports/skin-lightening-products-market">Proctor and Gamble</a> comptent parmi les plus grands producteurs de telles crèmes, y compris celles produites en Europe et ailleurs.</p>
<p>Pour éviter la controverse entourant les marques et des produits <a href="https://www.huffingtonpost.fr/2017/10/23/une-publicite-pour-une-creme-eclaircissante-de-nivea-qualifiee-de-raciste_a_23252237/">qualifiés de racistes</a>, Clarins préfère promouvoir ses produits comme des crèmes de nuits ou agents de teinte, plutôt que comme des produits éclaircissant. Mais <a href="https://www.forbes.com/sites/sarahwu/2016/03/04/the-new-generation-of-brightening-skincare-products-will-no-longer-focus-on-exfoliation/#555b47795564">selon des documents analysés</a> à propos de l’un de ses produits, « les experts de Clarins ont trouvé que les extraits d’acerola sont capables de contrôler la surproduction de synthèse de mélanine à sa source ».</p>
<p>Cela n’empêche pas à ces marques de recourir à des célébrités locales pour vanter leurs produits, que ce soit en Inde – qui a légiféré en 2014 sur <a href="https://qz.com/219698/these-skin-lightening-commercials-will-infuriate-you-and-should-shame-indias-ad-industry/">ce type de publicités</a> – ou au Cameroun.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/185050/original/file-20170907-8366-cenr2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/185050/original/file-20170907-8366-cenr2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/185050/original/file-20170907-8366-cenr2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=599&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/185050/original/file-20170907-8366-cenr2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=599&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/185050/original/file-20170907-8366-cenr2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=599&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/185050/original/file-20170907-8366-cenr2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=752&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/185050/original/file-20170907-8366-cenr2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=752&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/185050/original/file-20170907-8366-cenr2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=752&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Dencia avant et apres.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Reprudencia Sonkey, mieux connue sous son nom de scène Dencia, a ainsi fait la promotion auprès de milliers de femmes africaines une gamme de crèmes éclaircissantes appelée <a href="http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/12/15/dencia-la-pop-star-qui-blanchit-la-peau-noire_4832444_3212.html">Whitenicious</a>.</p>
<p>Dans un objectif marketing, la chanteuse camerounaise a affiché des photos d’elle-même : avant (peau très foncée) et après (peau claire). Succès garanti : en moins d’un mois l’entreprise a enregistré un record de ventes.</p>
<p>Tout comme Clarins, Dencia évite la controverse, jouant sur les mots et les qualités du produit, moyen ici, de se débarrasser de ses <a href="http://www.ebony.com/entertainment-culture/dencia-wants-to-set-the-record-straight-on-whitenicious-interview-453#axzz4q9VkVSRj">taches noires</a>. Néanmoins, les femmes africaines achètent Whitenicious spécialement pour s’éclaircir la peau, ce qui suscita des critiques de la communauté noire envers Dencia. En dépit de cela, elle <a href="http://lascandaleuse.com/2014/03/02/dencia-sen-prend-a-lupita/">a assumé</a> vendre une crème pour le bien des femmes africaines à la peau foncée.</p>
<h2>En finir avec les normes imposées</h2>
<p>En 2012 le candidat François Hollande avait proposé d’<a href="http://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2012/article/2012/03/11/hollande-propose-de-supprimer-le-mot-race-dans-la-constitution_1656110_1471069.html">éliminer le mot « race » de la Constitution</a>. Si le geste était admirable et bien intentionné, l’effort était au mieux symbolique, au pire vain.</p>
<p>La race n’est pas ici le sujet mais le racisme intériorisé et le colorisme oui. Encourager la promotion de produits favorisant ces idéologies est dommageable et <a href="http://www.afriqueavenir.fr/2016/03/27/risques-lies-a-la-pratique-de-depigmentation-volontaire-ou-eclaircissement-de-la-peau/">risqué pour la santé</a>.</p>
<p>À l’image du <a href="https://o.nouvelobs.com/lifestyle/20170412.OBS7907/generation-nappy-le-cheveu-nouvelle-arme-politique-des-afro-feministes.html">mouvement <em>nappy</em> (acronyme pour « natural » et « happy »)</a> qui se développe en France, de nombreuses initiatives voient le jour – on pense ainsi à l’association étudiante <a href="https://www.facebook.com/sciencescurls/photos/pb.328152274204643.-2207520000.1524644581./613655572320977/?type=3&theater">Sciences Curls à Sciences Po Paris</a> – pour s’affranchir des normes visuelles et physiques imposées par l’histoire coloniale.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/YTtrnDbOQAU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Solanes Knowles, petite sœur de Beyoncé et chanteuse, soutient le mouvement « nappy ».</span></figcaption>
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<p>Si nos gouvernements veulent aider, alors ils pourraient interdire complètement la vente des produits éclaircissant ou les taxer spécifiquement, en <a href="http://ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/f5a0f0848470b68cf7c4b932f800074a.pdf">plus de ceux déjà répertoriés en Europe comme dangereux</a>. Le Ghana a ainsi déjà pris <a href="http://www.informationng.com/2017/08/ghana-bans-bleaching-creams-country.html">quelques mesures</a> mais il est grand temps de les généraliser à l’échelle mondiale, notamment du côté des fabricants.</p>
<p>Il faut par ailleurs développer des campagnes de service public comme celle lancée par des activistes indiennes <a href="https://www.theguardian.com/inequality/2017/sep/04/dark-is-beautiful-battle-to-end-worlds-obsession-with-lighter-skin">« Dark is beautiful »</a> et encourager la parole de jeunes stars issues de la pop-culture telles que Zendaya afin de faire enfin changer les mentalités.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/82699/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le colorisme, l’attrait pour les peaux claires sont des biais racistes qui se perpétuent, comme en témoigne l’utilisation massive de produits éclaricissants.Ronald E. Hall, Professor of Social Work, Michigan State UniversityNeha Mishra, Assistant Professor of Law, Reva University of BangaloreLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/481932015-09-28T04:38:24Z2015-09-28T04:38:24ZAnatomie du maquillage : la bouche<p>La pratique du maquillage est certainement la façon la plus ancienne qu’ont trouvée hommes et femmes pour mettre leur corps en valeur. Dès l’Antiquité, les cosmétiques à disposition se déclinent en fonction de leur destination. Teinter ses lèvres est un geste pratiqué par les femmes à toutes les époques.</p>
<p>Les Égyptiens y ont recours et passent dans l’au-delà fardés en signe de respect pour le monde des dieux, ce dont témoignent les masques funéraires. Médecine et cosmétologie sont alors étroitement liées. C’est le médecin grec <a href="http://www.lesbelleslettres.com/livre/?GCOI=22510100720140">Galien</a> qui, au II<sup>e</sup> siècle de notre ère, popularise le cérat (un cosmétique riche en cire d’abeille comme son nom l’indique). Les belles y ajoutent des colorants pour teinter leurs lèvres. La préparation n’est toutefois pas d’un grand confort, car elle présente une dureté qui ne facilite pas son application.</p>
<h2>Du cérat en bâton</h2>
<p>Au Moyen-Âge, on utilise des pommades teintées. Celles-ci sont adaptées de préparations réalisées initialement par les apothicaires. Elles sont composées de pommes, de graisse d’oie et de colorants. Le règne de Louis XIV met les lèvres vermillon à l’honneur. On privilégie, contrairement aux siècles précédents, les cérats, et ce pour une bonne raison. Un petit malin a eu l’idée de les mouler sous forme d’un bâton ressemblant fort à celui utilisé aujourd’hui. Le cérat labial ne doit cependant pas être confondu avec le cérat virginal (riche en ingrédients astringents) à usage gynécologique. La cire est désormais additionnée d’huiles végétales afin d’améliorer le confort de l’utilisateur. Les époques suivantes réserveront ce type de cosmétique aux femmes uniquement.</p>
<p>En 1900, on s’amuse à remplacer la pomme présente dans les pommades labiales par du raisin rouge en vertu de ses propriétés tinctoriales intéressantes. Le raisin (ce nom est toujours donné pour désigner un bâton de rouge à lèvres) est obtenu en mélangeant de la cire d’abeille jaune avec du beurre frais et de belles grappes de raisin mûr associées à de la racine d’orcanette ! Le cérat est ensuite moulé dans de jolies petites boîtes rondes en bois plus ou moins précieux.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/96325/original/image-20150927-17699-16cyqyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/96325/original/image-20150927-17699-16cyqyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=574&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/96325/original/image-20150927-17699-16cyqyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=574&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/96325/original/image-20150927-17699-16cyqyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=574&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/96325/original/image-20150927-17699-16cyqyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=721&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/96325/original/image-20150927-17699-16cyqyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=721&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/96325/original/image-20150927-17699-16cyqyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=721&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un bâton des années 1950 signé Max Factor.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://americanhistory.si.edu/collections/search/object/nmah_376010">americanhistory.si.edu</a></span>
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<h2>La formule magique</h2>
<p>En 1915, le savon s’invite dans la composition des rouges à lèvres. On redécouvre avec bonheur cet ingrédient que l’on incorpore aussi bien dans les dentifrices que dans les shampooings. Cires, graisses, huiles et eau sont stabilisées par un stéarate alors très à la mode. Le stéarate résulte de la saponification du suif par une base. Mais il n’est pas vraiment indiqué pour la réalisation du rouge à lèvres à cause de la mousse générée, même si c’est en petite quantité, et surtout du confort d’application loin d’être excellent.</p>
<p>1930 : Les innovations dans le domaine du maquillage des lèvres s’enchaînent. Partant d’une formule de base (cires + graisses + huiles) qui fait maintenant l’unanimité, les formulateurs rivalisent d’idées pour mettre au point le rouge à lèvres qui détrônera tous les autres. La formulation est très complexe, car il est beaucoup demandé à ce petit bâton. Il doit être suffisamment sec pour ne pas laisser un enduit gras inesthétique, mais pas trop sinon cela pose des problèmes lors de l’application et de la conservation. Il convient donc de faire varier les éléments de la formule d’un point de vue qualitatif, mais également quantitatif. De nombreux essais sont réalisés en associant cires (cire d’abeille, cérésine, paraffine solide, cires végétales…), graisses (beurre de cacao, vaseline, cholestérol, lanoline…) et huiles (paraffine liquide, huiles végétales…) en proportions variables. Un autre problème rencontré dans le domaine du maquillage des lèvres concerne la grande labilité des rouges qui ne présentent qu’une piètre tenue dans le temps.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/96256/original/image-20150925-17736-rqcp92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/96256/original/image-20150925-17736-rqcp92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=919&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/96256/original/image-20150925-17736-rqcp92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=919&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/96256/original/image-20150925-17736-rqcp92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=919&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/96256/original/image-20150925-17736-rqcp92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1155&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/96256/original/image-20150925-17736-rqcp92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1155&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/96256/original/image-20150925-17736-rqcp92.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1155&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">« Le Rouge Baiser » vu par René Gruau.</span>
<span class="attribution"><span class="source">DR</span></span>
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<h2>« Rouge Baiser »</h2>
<p>Il s’agit donc de résoudre une équation à deux inconnues (véhicule adhérent + colorant tenace), si l’on souhaite laisser sa trace indélébile dans l’histoire des cosmétiques. Le chimiste Paul Baudecroux est le candidat idéal. C’est lui que la postérité retiendra comme « l’inventeur du rouge à lèvres moderne ». Il n’est pas le seul, mais c’est certainement celui qui se sera le plus efficacement servi de la publicité. Une bonne base, un colorant, l’éosine, qui teinte puissamment les lèvres… Le rouge à lèvres « <a href="http://www.paulette-magazine.com/fr/article/mythe-rouge-baiser/1132">Rouge Baiser</a> » est né. Il va s’imposer des années durant, bénéficiant du talent d’un dessinateur de génie, <a href="http://www.palaisgalliera.paris.fr/fr/oeuvre/projet-pour-le-rouge-baiser-rene-gruau-0">René Gruau</a>, qui, en quelques traits, immortalise l’égérie de la marque, yeux masqués par un foulard, un chapeau ou les cheveux.</p>
<p>Depuis, toutes les grandes marques ont apporté leur pierre à l’édifice via des emballages astucieux ou l’incorporation d’actifs à propriétés hydratantes ou repulpantes. Tout récemment, Christian Louboutin lance un rouge à lèvres astucieux, qui grâce à un petit anneau placé sur le conditionnement, ne risque plus de tomber au fond du sac à main. L’<a href="http://www.chu-poitiers.fr/wp-content/uploads/25__Acide_hyaluronique_-_compl_ment_et_volum_trie.pdf">acide hyaluronique</a>, quant à lui, est omniprésent et s’invite dans toutes les formules promettant des lèvres XXL…</p>
<p><em>Cet article s’appuie sur l’<a href="http://www.edilivre.com/histoire-de-la-beaute-et-des-cosmetiques">ouvrage publié par les auteurs</a> : Beauté, mon beau souci – Histoire de la beauté et des cosmétiques.</em></p>
<p><em>Retrouvez le <a href="https://theconversation.com/anatomie-du-maquillage-les-yeux-48120">premier volet</a> de cette série sur le maquillage.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/48193/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Peindre ses lèvres par respect des dieux ou pour parler le langage muet de la séduction, une pratique décryptée dans ce second volet sur les l’histoire des cosmétiques.Céline Couteau, Maître de conférences en pharmacie industrielle et cosmétologie, Université de NantesLaurence Coiffard, Professeur en galénique et cosmétologie, Université de NantesLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.