tag:theconversation.com,2011:/us/topics/fondation-bnp-paribas-francais-51744/articlesFondation BNP Paribas (français) – The Conversation2023-04-03T17:52:11Ztag:theconversation.com,2011:article/2020762023-04-03T17:52:11Z2023-04-03T17:52:11ZClimat : des microalgues virtuelles pour mieux comprendre le rôle de l’océan<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/516094/original/file-20230317-3576-w20ftn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C3024%2C2008&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Efflorescence de diazotrophes (_Trichodesmium_) dans la mer de Corail, capturée le 1<sup>er</sup> septembre 2019 par le satellite Landsat 8. L’interaction entre la physique et la biologie de l’océan se manifeste dans ces filaments verts qui serpentent au grès des courants.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://earthobservatory.nasa.gov/images/145610/a-bloom-of-nitrogen-fixing-bacteria">Joshua Stevens/NASA</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>L’océan absorbe un <a href="https://www.nature.com/articles/s43017-022-00381-x">quart du CO₂</a> émis par les activités humaines, jouant un rôle majeur dans l’atténuation du changement climatique. Mieux connaître les processus impliqués est crucial pour comprendre le rôle de l’océan dans le système climatique global et mieux appréhender les bouleversements induits par le changement climatique.</p>
<p>Pour cela, les <a href="https://theconversation.com/les-oceans-bientot-dotes-de-jumeaux-virtuels-pour-quoi-faire-160425">modèles numériques</a> sont parmi les outils les plus utilisés. Ils représentent le climat sur une Terre virtuelle et sont essentiels pour explorer les climats passés, prédire les climats futurs ou comprendre comment fonctionne notre climat actuel.</p>
<h2>Modéliser les océans, un exercice difficile</h2>
<p>Ces modèles reposent sur une série d’équations qui gouvernent les principaux phénomènes physiques, chimiques et biologiques influençant le climat terrestre.</p>
<p>La difficulté de représenter ces phénomènes repose sur la complexité des processus physiques et biologiques à simuler et leurs interactions.</p>
<p>Du côté de la physique de l’océan, les équations sont assez bien connues et définies. L’amélioration des modèles se cantonne surtout à une plus grande résolution, pour l’instant limitée par la capacité de calcul et de stockage de données de nos ordinateurs.</p>
<p>Pour les aspects biologiques, cependant, de nombreuses questions persistent sur la façon de formaliser et simplifier au mieux des processus d’une grande complexité. Schématiquement, la captation du CO<sub>2</sub> est notamment médiée par le phytoplancton. Ces algues microscopiques vivent à la surface de l’océan et absorbent le CO<sub>2</sub> via la photosynthèse ; à leur mort, une partie d’entre elles coulent au fond des océans, stockant le carbone pour des centaines voire des milliers d’années.</p>
<p>Pour représenter le phytoplancton, l’une des approches les plus répandues est de le diviser en « types fonctionnels », c’est-à-dire différents groupes de phytoplancton qui ont des traits majeurs en commun comme la taille ou la stratégie trophique. Cette approche part du principe que chacun de ces types peut avoir un impact différent sur le cycle du carbone et un rôle différent dans l’écosystème.</p>
<h2>Les diazotrophes, alliés du climat</h2>
<p>Un type en particulier focalise actuellement l’attention : les <a href="https://theconversation.com/ces-petites-creatures-marines-sont-essentielles-pour-combattre-le-changement-climatique-149566">diazotrophes</a>. Comme leur nom l’indique, ces microalgues peuvent utiliser le diazote (N<sub>2</sub>) pour leur croissance – étymologiquement pour leur alimentation (« trophos » en grec). En transformant ce diazote, les diazotrophes fournissent des nutriments qui sont essentiels au reste du phytoplancton et lui permettent de fixer le CO<sub>2</sub>. Ils ont donc un rôle fondamental de fertiliseurs naturels des océans.</p>
<p>Des études récentes, sur le terrain et en laboratoire, ont révélé la grande diversité des diazotrophes et leur <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.aay9514">adaptation à des environnements différents</a>. Par exemple, alors qu’on les pensait confinés aux eaux chaudes et transparentes des tropiques, certains types de diazotrophes unicellulaires ont été découverts dans les <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.1813658115">eaux arctiques</a> ou dans l’obscurité des <a href="https://ami-journals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/1462-2920.15645">profondeurs</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Par ailleurs, les chercheurs sont longtemps partis du principe que les diazotrophes contribuaient peu à la séquestration du carbone, car le <em>Trichodesmium</em> (le diazotrophe historiquement le plus étudié) a tendance à rester en surface et à être peu soumis à la prédation. Or, les preuves s’accumulent et prouvent que d’autres types de diazotrophes (tels que les assemblages symbiotiques de diatomées-diazotrophes) sont responsables <a href="https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1029/2012GL053356">d’importants flux de carbone</a> vers les profondeurs.</p>
<p>Malgré leur importance, les diazotrophes sont souvent représentés de façon très sommaire dans les modèles numériques. C’est le résultat à la fois de notre compréhension encore limitée de leur physiologie et des contraintes en termes de capacité de calcul : quand on ajoute de la complexité dans les modèles, les simulations prennent plus de temps et/ou nécessitent des ordinateurs plus puissants.</p>
<p>De nombreux modèles globaux, comme ceux utilisés dans le cadre du GIEC (Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat), les représentent encore de manière implicite : de l’azote est ajouté artificiellement à la surface de l’océan lorsque certaines conditions environnementales, supposées favorables aux diazotrophes, sont présentes.</p>
<p>D’autres modèles les représentent de manière explicite, mais se contentent de reproduire un seul type de diazotrophe, reprenant les caractéristiques du <em>Trichodesmium</em>. Cette approche est pourtant très réductrice au vu des avancées, et limite d’autant nos capacités à capturer la distribution globale de ces microalgues, à évaluer leur impact sur le reste de l’écosystème et à prédire les conséquences du changement climatique sur l’ensemble du phytoplancton et la séquestration du carbone.</p>
<h2>Mieux représenter les diazotrophes dans les modèles numériques</h2>
<p>Pour répondre à ces lacunes, nous avons développé, dans le cadre du projet <a href="https://twitter.com/notion_project?lang=fr">NOTION</a>, une toute nouvelle représentation des diazotrophes, qui en inclut cette fois trois types différents.</p>
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<img alt="Représentation schématique de l’océan pacifique, avec des bandes de couleurs différentes s’étendant entre l’Amérique centrale et l’Afrique centrale, avec une autre bande moins étendue à la hauteur de l’espagne" src="https://images.theconversation.com/files/517767/original/file-20230327-1352-kegjgq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/517767/original/file-20230327-1352-kegjgq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=559&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/517767/original/file-20230327-1352-kegjgq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=559&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/517767/original/file-20230327-1352-kegjgq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=559&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/517767/original/file-20230327-1352-kegjgq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=702&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/517767/original/file-20230327-1352-kegjgq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=702&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/517767/original/file-20230327-1352-kegjgq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=702&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Exemple de taux de fixation d’azote simulé pour une journée en Novembre (conditions moyennes). Chaque couleur correspond à un type de diazotophe différent. Parfois, les couleurs se superposent, indiquant une communauté de diazotrophe mélangée. Simulation réalisée par Domitille Louchard à ETH Zurich.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Domitille Louchard, Mar Benavides</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Si les équations qui décrivent leur croissance et leur mortalité sont les mêmes, chaque type se différencie des autres par des paramètres distincts. Ces paramètres représentent la façon dont chaque diazotrophe réagit à différentes conditions de température, luminosité ou concentration en nutriment.</p>
<p>Cette représentation novatrice des diazotrophes a été intégrée à un modèle numérique régional à haute résolution appliqué à l’Océan Atlantique, hotspot de la diazotrophie marine.</p>
<p>Cette prise en compte de la diversité des diazotrophes a débouché sur une expansion de la fixation du diazote dans les simulations et une meilleure concordance avec les observations. Les flux verticaux de carbone ont aussi été accrus, notamment dans des régions comme l’Atlantique tropical ouest, où les assemblages symbiotiques de diatomées-diazotrophes prospèrent.</p>
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<img alt="Représentation schématique de l’océan pacifique identique à la figure 2 ; la présence d’azote fixé augmente fortement àpartir d’avril, puis rediminue à partir de novembre" src="https://images.theconversation.com/files/517428/original/file-20230324-22-ibaffr.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/517428/original/file-20230324-22-ibaffr.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=560&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/517428/original/file-20230324-22-ibaffr.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=560&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/517428/original/file-20230324-22-ibaffr.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=560&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/517428/original/file-20230324-22-ibaffr.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=703&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/517428/original/file-20230324-22-ibaffr.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=703&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/517428/original/file-20230324-22-ibaffr.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=703&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un an de fixation d’azote en surface dans le nouveau système numérique développé dans le cadre du projet NOTION. Simulation réalisée par Domitille Louchard à ETH Zurich.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Domitille Louchard, Mar Benavides</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Ce nouveau modèle nous permet par ailleurs de défricher de nouvelles questions, comme la compétition entre les diazotrophes, mais aussi de mieux appréhender le rôle que ces microalgues joueront dans un contexte de changement global. Quelle sera leur importance comme source d’azote pour le reste des producteurs primaires ? Les diazotrophes peuvent-ils aider à atténuer les effets du changement climatique ? Vastes sont les possibilités de recherche offertes par cette représentation plus réaliste.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Le projet de recherche « Notion » dans lequel s’inscrit cette publication a bénéficié du soutien de la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-biodiversity-initiative">programme Climate and Biodiversity Initiative</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/202076/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Domitille Louchard a reçu des financements de la Fondation BNP Paribas (Climate & Biodiversity initiative). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mar Benavides a reçu des financements de Climate & Biodiversity Initiative Fondation BNP Paribas, projet NOTION.</span></em></p>L’océan absorbe un quart du CO₂ émis par l’homme, notamment grâce au phytoplancton, dont les diazotrophes. Savoir modéliser ces microalgues est crucial pour comprendre le rôle de l’océan dans le climat.Domitille Louchard, Assistant researcher, Swiss Federal Institute of Technology ZurichMar Benavides, Research scientist, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1935882022-11-08T19:02:19Z2022-11-08T19:02:19ZClimat : planter des millions d’arbres pour lutter contre le réchauffement… mais pas n’importe comment<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/492586/original/file-20221031-21-8qixe7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un membre du projet de reforestation de Pesalat, sur l’île de Bornéo, replante des arbres dans une zone de marécage tourbeux défrichée par les incendies et l’exploitation forestière.</span> <span class="attribution"><span class="source">World Ressources Institute</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Compte tenu de l’accentuation des dérèglements climatiques, il est indispensable de restaurer les espaces forestiers et de veiller à la pérennité des nouvelles plantations. Le <a href="https://treedivnet.ugent.be/">Tree Diversity Network</a>, un réseau international de recherche, s’y emploie.</p>
<p>Si l’intérêt des responsables politiques pour les <a href="https://www.dw.com/en/politicians-planting-trees/g-43561522">cérémonies de plantation d’arbres</a> ne date pas d’hier, les projets de reboisement raisonnés revêtent aujourd’hui une importance grandissante, comme le montre la multitude d’initiatives internationales visant à décupler la couverture forestière mondiale en réhabilitant des millions d’hectares de terres dégradées et déboisées.</p>
<p>Lancé en 2017, le <a href="https://www.un.org/esa/forests/documents/un-strategic-plan-for-forests-2030/index.html">plan stratégique des Nations unies pour les forêts</a> est sans aucun doute l’une des initiatives les plus emblématiques en ce sens, puisqu’elle vise à accroître la couverture forestière mondiale de 3 % d’ici à 2030 ; cela équivaut à 120 millions d’hectares, soit une superficie plus de deux fois supérieure à celle de la France.</p>
<p>Mobilisant plus de 60 pays, le <a href="https://www.bonnchallenge.org/">Défi de Bonn</a> a quant à lui pour objectif de restaurer le double de la surface visée par le plan de l’ONU, soit 350 millions d’hectares, sur la même période.</p>
<p>Pour les écologues forestiers, ces efforts indispensables soulèvent néanmoins de grandes interrogations. Comment faire en sorte que les forêts restaurées assurent toutes les fonctions que nous attendons d’elles ? Que faire pour les rendre résilientes afin qu’elles continuent de pleinement jouer leur rôle à l’avenir, tout particulièrement dans le contexte des dérèglements climatiques à l’œuvre ? Dans quelle mesure la restauration des zones forestières peut-elle contribuer à résoudre d’autres problèmes majeurs à l’échelle mondiale, tels que la lutte contre l’appauvrissement de la biodiversité et la dégradation de l’environnement ?</p>
<h2>Choisir les zones propices au reboisement</h2>
<p>Pour passer des promesses des responsables politiques à une restauration efficace des forêts, assurée par les acteurs de terrain, il est nécessaire de s’appuyer sur la science. Le principal défi consiste à recenser les zones de la planète les plus adaptées au reboisement, en ayant recours à une planification intégrée du paysage qui tienne notamment compte des considérations suivantes :</p>
<ul>
<li><p>répondre aux besoins croissants en matière de production alimentaire ;</p></li>
<li><p>éviter de cibler les espaces riches en biodiversité tels que les prairies naturelles, qu’il convient de ne pas convertir en zones boisées, même si elles se prêtent a priori aux plantations sylvicoles ; </p></li>
<li><p>tenir compte des atouts économiques et culturels qu’offrent les autres modes d’utilisation des sols.</p></li>
</ul>
<p>Des chercheurs s’emploient à établir des cartes détaillées visant à illustrer ce potentiel de restauration à l’échelle mondiale en dehors des zones forestières, agricoles et urbaines existantes. Malgré tout, la question de savoir quelle proportion de ces terres devrait être transformée en forêts suscite de nombreux débats.</p>
<h2>Bien sélectionner les essences</h2>
<p>Une fois définies les zones de reboisement appropriées, le défi suivant consiste à déterminer la nature des plantations, laquelle s’avère décisive au regard des efforts déployés. Les forêts couvrent aujourd’hui environ 30 % des terres émergées de la planète, et selon <a href="https://www.fao.org/forest-resources-assessment/2020/fr">l’Évaluation des ressources forestières mondiales menée en 2020 par la FAO</a> (l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), les forêts plantées représentent d’ores et déjà 290 millions d’hectares, soit environ 7 % de la superficie forestière mondiale, et fournissent près de 50 % des volumes de bois récoltés.</p>
<p>Les experts forestiers s’intéressent tout particulièrement aux essences à planter, sachant qu’elles détermineront la composition des parcelles reboisées pour les décennies à venir. Il convient donc de veiller à ce qu’elles présentent de bonnes performances, en présentant par exemple un fort potentiel de croissance, de bonnes capacités en matière de séquestration du carbone et une forte contribution à la biodiversité. </p>
<p>Elles doivent par ailleurs être en mesure de faire face aux défis environnementaux croissants du XXI<sup>e</sup> siècle, et tout particulièrement aux dérèglements climatiques, en résistant à des périodes de sécheresse sans précédent, telles que celles qui ont frappé de nombreuses parties de l’Europe au <a href="https://edo.jrc.ec.europa.eu/documents/news/GDO-EDODroughtNews202208_Europe.pdf">printemps et à l’été 2022</a>.</p>
<p>Malheureusement, aucune essence ne présente à elle seule toutes ces caractéristiques, ce qui oblige à faire des compromis lorsqu’il s’agit de faire des choix dans le cadre des projets de reboisement.</p>
<h2>Privilégier les plantations diversifiées</h2>
<p>Jusqu’à présent, la plupart des projets de plantation d’arbres à grande échelle se sont fondés sur la monoculture d'un nombre très réduit d’essences à vocation commerciale (comme les pins, épicéas ou eucalyptus). Or, il est à craindre que ces monocultures ne soient pas à même de résister aux menaces environnementales croissantes. Fort heureusement, des scientifiques du monde entier ont établi des plantations expérimentales comparant forêts pures et mélangées, qui sont riches en enseignements pour imaginer des plantations plus performantes et résilientes.</p>
<p>Les expérimentations menées dans le cadre du réseau Tree Diversity visent à évaluer de manière rigoureuse la façon dont les essences se développent, croissent et résistent lorsqu’on les associe les unes aux autres. </p>
<p>Ces études relativement récentes ne portent pour l’instant que sur des arbres d’une vingtaine d’années, et donc sur les premiers stades de l’évolution des forêts.</p>
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<p>À l’heure actuelle, nos travaux concernent essentiellement la croissance des arbres. Nous nous efforçons ainsi de déterminer s’ils grandissent plus rapidement lorsqu’ils partagent leur espace de croissance avec d’autres essences dont les besoins diffèrent. Nous étudions également la résistance de diverses essences aux variations climatiques et à d’autres phénomènes potentiellement nocifs comme les attaques de champignons pathogènes et insectes ravageurs. </p>
<p>Les équipes du TreeDivNet interviennent dans la plupart des grandes zones climatiques du globe, notamment boréales et tempérées, méditerranéennes et tropicales.</p>
<p>Ces plantations expérimentales couvrent plus de 850 hectares – l’équivalent de 1 200 terrains de football – et représentent l’une des plus vastes installations de recherche en écologie au monde, où sont menées pas moins de 30 études sur l’évolution d’environ 250 essences et plus d'un million d'arbres. Des données cruciales y sont recueillies, afin de nous permettre d’en savoir davantage sur les combinaisons d’essences qui permettent d’obtenir les meilleures performances de croissance et staockage de carbone en présentant la meilleure résistance aux menaces pesant sur les forêts.</p>
<h2>Résister aux phénomènes extrêmes</h2>
<p>Dans le cadre de la lutte contre le réchauffement de la planète, les chercheurs du TreeDivNet <a href="https://www.cambio-treediversity.com/">unissent leurs efforts</a> afin de déterminer quelles associations d’essences sont les plus adaptées pour permettre aux plantations de prospérer dans un contexte environnemental incertain et en pleine mutation. </p>
<p>Leur contribution potentielle aux <a href="https://mixforchange.cirad.fr/">efforts d’atténuation des dérèglements climatiques et d’adaptation à leurs effets</a> repose sur la capacité des jeunes plants à survivre aux phénomènes extrêmes, comme la sécheresse et les incendies, ainsi qu’aux insectes ravageurs tels que les scolytes.</p>
<p>Nos travaux ont permis d’estimer la survie de centaines de milliers d’arbres au cours de leurs premières années de croissance, et les premiers résultats révèlent que les plantations mixtes sont moins exposées à un risque d'échec total de reprise après plantation. </p>
<p>La réduction du risque de mortalité des arbres dans les plantations mixtes, due à l'effet « portefeuille » ou d’« assurance écologique », pourrait ainsi offrir une stratégie d’adaptation aux gestionnaires forestiers qui s’efforcent d’assurer la pérennité des forêts dans des contextes futurs incertains. Comme ces expressions l’indiquent, ce phénomène s’apparente à la manière dont nous diversifions notre épargne pour garantir des revenus plus réguliers à long terme.</p>
<p>Les arbres que nous étudions sont soumis à des tests poussés reposant sur des techniques de pointe. Des radiographies de carottes de bois permettent de recenser les sujets dont la croissance a été retardée par la sécheresse ou d’autres aléas, tandis que l’observation des isotopes du carbone nous indique s’ils ont subi un stress hydrique, ce qui ralentit le cas échéant la photosynthèse. </p>
<p>Notre objectif consiste à synthétiser ces observations sous forme de profils écologiques pour les différents types d’arbres, afin d’aider les gestionnaires de forêts à choisir les combinaisons d’essences les plus à même de faire face aux défis à venir.</p>
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<span class="caption">Radiographie d’une carotte de bois provenant d’un tilleul (<em>Tilia cordata</em>) cultivé dans le cadre de l’expérimentation belge FORBIO : à gauche, le cœur de l’arbre ; à droite, son écorce. La croissance annuelle se présente sous forme de bandes distinctes, les plus larges correspondant aux années de forte pousse.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Lander Baeten/Ghent University</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>Pour un recours concret à la science</h2>
<p>Bien que nos travaux soient essentiellement menés par des chercheurs, nous souhaitons avant tout qu’ils servent aux gestionnaires des forêts sur le terrain. Dans les mois à venir, nous allons chercher à nous rapprocher des propriétaires et gestionnaires forestiers en nous appuyant sur les avancées scientifiques pour contribuer à la mise en œuvre de pratiques de boisement viables susceptibles d’être adoptées par le plus grand nombre.</p>
<p>Il est par ailleurs indispensable de nouer des liens pérennes avec les parties prenantes du secteur forestier du monde entier. De tels partenariats pourraient en effet favoriser la transition écologique permettant de passer de monocultures limitées à quelques essences commerciales à des plantations riches en biodiversité et bien adaptées à divers facteurs de stress, notamment dus aux dérèglements climatiques, pour les décennies à venir.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Le projet de recherche <a href="https://group.bnpparibas/actualite/cambio-role-diversite-arbres-lutte-contre-changement-climatique">« CAMBIO »</a>, dans lequel s’inscrit la présente publication, a bénéficié du financement de la <a href="https://group.bnpparibas/en/group/about-us/bnp-paribas-foundation">Fondation BNP Paribas</a> au titre de son <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-biodiversity-initiative">programme de mécénat « Climate and Biodiversity Initiative »</a>.</em></p>
<p><em>Traduit de l’anglais par Damien Allo pour <a href="http://www.fastforword.fr">Fast ForWord</a></em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/193588/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lander Baeten a reçu des financements du programme Climate & Biodiversity de la Fondation BNP Paribas (projet CAMBIO). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Charlotte Grossiord a reçu des financements de la Fondation Sandoz et du Fonds national suisse.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Christian Messier a reçu des financements du Conseil de recherche en Sciences et Génie du Canada (CRSNG). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Hervé Jactel a reçu des financements de l’UE via l’appel Biodiversa (projet MixForChange).
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Joannès Guillemot a reçu des financements de l’UE via l’appel Biodiversa (projet MixForChange).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Michael Scherer-Lorenzen a reçu des financements de Deutsche Forschungsgemeinschaft (DFG).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Haben Blondeel et Kris Verheyen ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>La restauration des forêts constitue un élément clé de la lutte contre les perturbations climatiques. Le réseau de recherche mondial, le Tree Diversity Network, tente d’y contribuer efficacement.Lander Baeten, Associate professor conservation ecology, Ghent UniversityCharlotte Grossiord, Professor of environmental sciences and engineering, EPFL – École Polytechnique Fédérale de Lausanne – Swiss Federal Institute of Technology in LausanneChristian Messier, Full professor, forest ecology, Université du Québec à Montréal (UQAM)Haben Blondeel, Postdoctoral associate, Ghent UniversityHervé Jactel, Directeur de recherche en écologie forestière, InraeJoannès Guillemot, Researcher in forest ecophysiology, CiradKris Verheyen, Professor, forest ecology and management, Ghent UniversityMichael Scherer-Lorenzen, Professor, Biodiversity and Ecosystem Functioning, University of FreiburgLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1916122022-09-29T16:15:09Z2022-09-29T16:15:09ZDes yeux et des oreilles technologiques pour percer les secrets de la biodiversité amazonienne<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/487292/original/file-20220929-20-5u4qnt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’Amazonie constitue la plus grande étendue de forêt tropicale au monde.</span> <span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>La forêt tropicale couvre <a href="https://rainforests.mongabay.com/">12 % de la surface terrestre de la planète</a> mais abrite environ <a href="https://doi.org/10.1111/j.1461-0248.2009.01294.x">deux tiers de toutes les espèces terrestres</a>. L’Amazonie, qui s’étend sur le vaste bassin du fleuve Amazone et le plateau des Guyanes en Amérique du Sud, est la plus grande étendue de forêt tropicale au monde. Elle abrite davantage d’espèces animales que tout autre environnement terrestre de la planète.</p>
<p>Repérer la faune sauvage dans ces forêts sombres et denses qui regorgent d’insectes et de palmiers épineux est toujours un défi. Cela tient à la nature même de la biodiversité de l’Amazonie, où l’on trouve un petit nombre d’espèces abondantes et un grand nombre d’espèces rares qu’il est difficile de recenser correctement.</p>
<p>Savoir quelles espèces sont présentes et comprendre la nature de la relation qu’elles entretiennent avec leur milieu est capital pour l’écologie et la protection de l’environnement. On en tire des informations essentielles sur l’impact des perturbations humaines telles que le dérèglement climatique, l’exploitation forestière ou la combustion du bois. Cela permet aussi de repérer des activités humaines durables, comme l’abattage sélectif, qui consiste à enlever un ou deux arbres et à laisser les autres.</p>
<p>Dans le cadre du <a href="https://www.youtube.com/watch?v=N4RmX_MCsn0">projet Bioclimate</a>, nous avons tenté de surmonter ces obstacles et d’affiner notre compréhension de la faune amazonienne à l’aide d’une série de dispositifs technologiques, parmi lesquels figurent les pièges photographiques et la surveillance acoustique. Leur capacité à recueillir des données de façon continue et sans intervention humaine permet aux animaux de vaquer à leurs occupations sans être dérangés.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/471624/original/file-20220629-26-u6qqw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/471624/original/file-20220629-26-u6qqw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/471624/original/file-20220629-26-u6qqw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/471624/original/file-20220629-26-u6qqw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/471624/original/file-20220629-26-u6qqw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1006&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/471624/original/file-20220629-26-u6qqw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1006&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/471624/original/file-20220629-26-u6qqw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1006&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Bien qu’elles abritent une très grande partie de la biodiversité mondiale, les forêts tropicales sont souvent des zones sombres où l’observation de la faune sauvage est parfois compliquée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Oliver Metcalf</span></span>
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<h2>Des yeux dans les arbres</h2>
<p>Les pièges photographiques sont de petits dispositifs déclenchés par tout changement d’activité alentour, tels que les mouvements des animaux. Ils ont été essentiels à notre travail dans la forêt nationale de Tapajos, à Para, dans le nord-ouest du Brésil, et nous ont permis d’évaluer l’impact de perturbations telles que le dérèglement climatique sur la présence et le comportement des animaux, eux-mêmes indispensables au déroulement de processus naturels.</p>
<p>La régénération des forêts passe par l’un de ces processus, la dispersion des graines par les animaux qui, après avoir mangé des fruits ou transporté des noix, en éliminent ou en laissent tomber les graines ailleurs. Nos <a href="https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/1365-2745.13358">recherches</a> ont révélé qu’au moins 85 % de toutes les espèces d’arbres de nos parcelles voient leurs graines dispersées par les animaux.</p>
<p>Nous savons également que nombre de ces animaux sont fortement <a href="https://www.nature.com/articles/nature18326">affectés par les perturbations</a>. Pour mieux comprendre les conséquences qu’aurait leur disparition, nous devons savoir de quelles espèces il s’agit, quelles graines ces dernières dispersent et sur quelle distance.</p>
<p>Nous avons tenté de répondre à ces questions en installant des caméras au pied des arbres fruitiers de notre zone d’étude, afin de savoir quelles espèces mangeaient quels fruits avant d’en disperser les graines dans toute la forêt.</p>
<p>Sur les quelque 30 000 heures d’images obtenues, nous avons repéré des animaux sur 5 459 vidéos et identifié pas moins de 152 espèces d’oiseaux et de mammifères, y compris des espèces menacées comme le caïque vautourin (<em>Pyrilia vulturina</em>).</p>
<p>Les vidéos livrent un aperçu saisissant du comportement des animaux, tel un ocelot (<em>Leopardus pardalis</em>) chassant un opossum commun (<em>Didelphis marsupialis</em>), un tamanoir (<em>Myrmecophaga tridactyla</em>) portant un bébé sur son dos, et même une femelle capucin brun curieuse (<em>Sapajus apella</em>) qui, après avoir observé de près la caméra, a fini par la jeter par terre.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/E6tfETDKbAE?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Les pièges photographiques ont apporté un éclairage utile sur certains mammifères secrets et souvent nocturnes. On voit ici un tamanoir (<em>Myrmecophaga tridactyla</em>) avec un nourrisson sur son dos, un ocelot (<em>Leopardus pardalis</em>) en train de chasser puis de manger un opossum commun (<em>Didelphis marsupialis</em>), et un tapir du Brésil se délecter de fruits. (Source : Liana Chesini Rossi)</span></figcaption>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/9mkF7Df7Lw8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Travailler avec des animaux n’est jamais simple. Ce capucin brun (<em>Sapajus apella</em>), inquiet de la présence du piège photographique, l’a jeté à terre. (Source : Oliver Metcalf.).</span></figcaption>
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<p>Notons aussi la présence de 48 espèces fructivores, dont certaines sont d’importants disperseurs de graines, tel le tapir du Brésil (<em>Tapirus terrestris</em>), capable, grâce à sa taille, de disséminer de grandes graines sur des distances plus importantes.</p>
<p>Nos recherches ont démontré que des espèces d’oiseaux comme le pénélope à poitrine rousse (<em>Penelope pileata</em>) et des mammifères comme le ouistiti argenté (<em>Mico argentatus</em>) ou le daguet gris (<em>Mazama nemorivaga</em>) sont des consommateurs fréquents de fruits. Un grand nombre de ces espèces sont chassées de façon excessive dans la zone étudiée, ce qui provoque des incidences en cascade sur la régénération des forêts.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/h2VPUyDdkX4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Diverses espèces jouent un rôle important dans la dissémination des graines dans les forêts. Grâce aux pièges photographiques, nous avons pu identifier les animaux qui visitent les arbres fruitiers. Ces vidéos montrent un ouistiti argenté (<em>Mico argentatus</em>), un pénélope à poitrine rousse (<em>Penelope pileate</em>) et un daguet gris (<em>Mazama nemorivaga</em>) qui se nourrissent de fruits. (Source : Liana Chesini Rossi.).</span></figcaption>
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<h2>Des forêts qui fourmillent de vie</h2>
<p>Les enregistreurs acoustiques, quant à eux, sont indispensables pour dresser un inventaire de la communauté d’oiseaux, riche de multiples espèces. En effet, bien que difficiles à repérer dans ces forêts touffues, les oiseaux sont trahis par leurs chant.</p>
<p>Lorsque les ornithologues étudient les oiseaux tropicaux, ils sont limités par la fréquence à laquelle ils peuvent effectuer des comptages, car il est souvent difficile, d’un point de vue logistique, de se rendre sur chacun des sites. De ce fait, les relevés traditionnels durent assez longtemps (entre cinq et quinze minutes) et n’enregistrent qu’un nombre limité de comptages répétés sur chaque site étudié. Cela signifie que seule une petite partie de la période au cours de laquelle les oiseaux sont les plus actifs (les deux heures qui suivent le lever du soleil et que l’on appelle le chœur de l’aube) peut être étudiée.</p>
<p>Mais les oiseaux ne chantent pas tous au même moment : si certaines espèces aiment chanter très tôt le matin, la plupart attendent qu’il fasse légèrement plus chaud et que le soleil soit levé, tandis que d’autres sont plus tardives. En se limitant à quelques relevés, il est difficile de couvrir l’ensemble de la période et de détecter toutes les espèces présentes. De plus, les relevés n’étant réalisés que sur une poignée de jours, des facteurs tels que la météo ou la présence ponctuelle de prédateurs peuvent modifier drastiquement le relevé des espèces détectées.</p>
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<p><a href="https://zslpublications.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/rse2.227">Notre étude</a> a montré qu’en réglant les enregistreurs acoustiques automatiques pour qu’ils effectuent 240 enregistrements de 15 secondes aboutissant à une heure de sondage, nous avons enregistré 50 % d’espèces en plus sur chaque site étudié, par rapport à quatre relevés de 15 minutes qui reproduisaient la durée des relevés humains. Nous avons ainsi pu étendre notre sondage sur un plus grand nombre de jours, mais surtout sur la totalité du chœur de l’aube. Nous avons découvert qu’un petit groupe d’espèces préfère chanter sur un laps de temps s’étendant de 15 minutes avant le lever du soleil à 15 minutes après. Pour le détecter, il est nécessaire d’effectuer plusieurs relevés sur cette période, ce qui n’est possible qu’avec des enregistreurs automatiques.</p>
<p>Ces études plus complètes permettent une meilleure estimation des espèces habitant ces régions hyper-diversifiées, mais aussi de celles qui en disparaissent lorsque les forêts sont exploitées ou brûlées. Une seule heure de relevés réalisés sur chaque site grâce à cette méthode nous a permis de détecter 224 espèces d’oiseaux sur 29 sites.</p>
<p>Les espèces répertoriées dans les forêts intactes et dans celles qui ont subi des perturbations ont confirmé ce qu’indiquaient nos études précédentes : les <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00442-015-3495-z">forêts primaires inaltérées abritent des communautés d’oiseaux uniques</a> qui disparaissent lorsque les forêts sont dégradées par l’abattage sélectif ou les incendies.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/uR3r20XMArI?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Séquence audio d’une forêt primaire non perturbée à 6 h 55 le 6 août 2018, où l’on entend onze espèces d’oiseaux, dont le myrmidon gris (<em>Myrmotherula menetriesii</em>) et le grallaire grand-beffroi (<em>Myrmotherula Campanisona</em>), que l’on ne trouve généralement que dans les forêts de bonne qualité. (Source : Oliver Metcalf).</span></figcaption>
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<p>Les enregistreurs acoustiques nous ont également permis de recueillir des données sur de longues périodes, avec déjà plus de dix mille heures d’enregistrement.</p>
<p>Avec un si grand nombre de données collectées, un·e scientifique ne peut écouter tous les enregistrements. En revanche, le nouveau domaine de l’éco-acoustique a permis l’élaboration de techniques statistiques pour caractériser des paysages sonores entiers. Ces indices acoustiques mesurent la variation de l’amplitude et de la fréquence pour donner une valeur à l’intensité et la variété de chaque paysage sonore. En éliminant la nécessité d’identifier les sons individuels, ils permettent de traiter efficacement de grands volumes de données acoustiques.</p>
<p>Nous avons utilisé ces indices acoustiques pour montrer que les forêts primaires non perturbées présentent des paysages sonores uniques qui peuvent être <a href="https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/2041-210X.13521">identifiés à l’aide de techniques d’apprentissage automatique</a>. Nous pouvons ensuite les comparer aux paysages sonores perturbés par des phénomènes tels que les incendies ou l’exploitation forestière, afin de déterminer les groupes d’espèces les plus touchés.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/471389/original/file-20220628-21-ky1bvg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/471389/original/file-20220628-21-ky1bvg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/471389/original/file-20220628-21-ky1bvg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/471389/original/file-20220628-21-ky1bvg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/471389/original/file-20220628-21-ky1bvg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/471389/original/file-20220628-21-ky1bvg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/471389/original/file-20220628-21-ky1bvg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les incendies sauvages provoquent une forte mortalité des arbres et ouvrent des brèches dans la canopée. Ces changements dans la structure de la forêt entraînent une modification de la composition des espèces et des différences significatives dans les paysages sonores entre forêts inaltérées et forêts perturbées. Jos Barlow.</span>
</figcaption>
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<p>En conclusion, les pièges photographiques et les enregistreurs acoustiques nous permettent d’avoir des yeux et des oreilles dans la forêt, même lorsque nos chercheurs n’y sont pas. Nous continuerons à utiliser les avancées technologiques au fur et à mesure de leur développement pour comprendre l’écologie animale et le comportement de la faune afin de mieux valoriser et protéger son habitat.</p>
<p>Nous cherchons en particulier à développer des modèles algorithmiques d’apprentissage pour identifier les espèces et, dans certains cas, différencier les individus d’une même espèce. Les images et les sons saisis par les enregistreurs automatiques ouvrent de nouvelles voies vers la compréhension de la vie et du comportement des animaux, et de nouvelles perspectives sur le monde secret de la faune des forêts tropicales.</p>
<p><em>Traduit de l’anglais par Catherine Biros pour <a href="http://www.fastforword.fr">Fast ForWord</a></em></p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Le projet de recherche « Bioclimate » est soutenu par la <a href="https://group.bnpparibas/en/group/bnp-paribas-foundation">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du programme <a href="https://group.bnpparibas/en/hottopics/climate-biodiversity-initiative">Climate and Biodiversity Initiative</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/191612/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Oliver Metcalf a reçu des financements de ECOFOR (NE/K016431/1), AFIRE (NE/P004512/1), PELD‐RAS (CNPq/CAPES/PELD 441659/2016‐0) de la BNP Paribas Foundation’s Climate and Biodiversity Initiative (Project Bioclimate).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Liana Chesini Rossi a reçu des financements de PELD‐RAS (CNPq/CAPES/PELD 441659/2016‐0), RESFLORA (MCIC-CNPq 420254/2018-8), SEM-FLAMA (CNPq-PrevFogo-IBAMA 441949/2018-5), ECOFOR (NE/K016431/1), Instituto Nacional de Ciência e Tecnologia—Biodiversidade e Uso da Terra na Amazônia (CNPq 574008/2008-0) et Embrapa (SEG: 02.08.06.005.00).</span></em></p>Grâce à des pièges photographiques et à la surveillance acoustique passive, les chercheurs ont pu capturer les mouvements de 152 espèces avec une richesse de détails époustouflante.Oliver Metcalf, Postdoctoral Research Associate, Manchester Metropolitan UniversityLiana Chesini Rossi, Phd candidate, ecology and biodiversity, University of São Paulo StateLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1810932022-04-19T16:39:34Z2022-04-19T16:39:34ZEn ville, les arbres favorisent aussi la biodiversité<p>Arbres et villes ne sont pas antagonistes ; du moins, ils ne le sont plus tout à fait. Ces dernières années, de nombreuses métropoles ont en effet mis en place des programmes ambitieux de plantations d’arbres, témoignant d’un véritable engouement pour le sujet. Il y a toutefois un paradoxe, puisque l’extension des villes continue de se faire au détriment des espaces naturels, entraînant la fragmentation des habitats et la disparition des espaces boisés, lesquels sont remplacés par des surfaces imperméables qui emmagasinent et irradient la chaleur.</p>
<p>L’arbre en ville est souvent présenté comme une <a href="https://infos.ademe.fr/magazine-septembre-2021/dossier/larbre-en-ville-une-solution-dadaptation-fondee-sur-la-nature/">« solution fondée sur la nature »</a> permettant de rafraîchir les villes. Mais les arbres jouent également un rôle plus discret, et pourtant tout aussi fondamental : celui de soutenir durablement la biodiversité.</p>
<p>Pendant longtemps, cette dernière n’a été considérée que sous l’angle du nombre d’espèces présentes dans un environnement donné. Mais il est une autre dimension dont l’importance est de plus en plus reconnue : celle de la <a href="https://www.cell.com/current-biology/pdf/S0960-9822(22)00400-6.pdf">diversité des interactions</a> entre les espèces.</p>
<p>Elles sont en effet à l’origine de l’évolution du vivant et de son adaptation aux contraintes environnementales. Et c’est aussi sur elles que pourraient se créer les « solutions fondées sur la nature ». <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11252-022-01207-w">Du chemin reste néanmoins à parcourir dans ce sens</a>.</p>
<h2>Une biodiversité urbaine et dynamique</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/457664/original/file-20220412-30661-7atn7s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/457664/original/file-20220412-30661-7atn7s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/457664/original/file-20220412-30661-7atn7s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1056&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/457664/original/file-20220412-30661-7atn7s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1056&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/457664/original/file-20220412-30661-7atn7s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1056&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/457664/original/file-20220412-30661-7atn7s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1327&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/457664/original/file-20220412-30661-7atn7s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1327&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/457664/original/file-20220412-30661-7atn7s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1327&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La chenille processionnaire, couverte de ses poils urticants qui terrorisent les citadins.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikimedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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</figure>
<p>En ville, les arbres et les bois abritent une grande diversité d’organismes. Le lecteur citadin pensera peut être aux pucerons dont le miellat goutte sur le toit des voitures et des vélos garés sous les tilleuls, aux <a href="https://chenille-risque.info/">chenilles processionnaires</a> qui inquiètent tant en ce début de printemps, ou aux étourneaux qui s’abritent la nuit dans les frondaisons (tant d’exemples existent !).</p>
<p>Tous ces organismes sont en interaction constante avec l’arbre et les uns avec les autres. Levez la tête sous un chêne, vous y verrez la trace du passage des insectes herbivores : les chenilles ont mangé le bord des feuilles, les pucerons et les <a href="https://theconversation.com/quel-est-ce-tigre-dans-mon-chene-160509">punaises</a> y ont percé de petits trous pour aspirer la sève. Mais s’il reste des feuilles à observer, c’est aussi que des prédateurs, notamment des oiseaux, ont attaqué ces insectes, assurant ainsi la protection de l’arbre.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/318559/original/file-20200304-66069-bjv5os.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/318559/original/file-20200304-66069-bjv5os.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/318559/original/file-20200304-66069-bjv5os.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/318559/original/file-20200304-66069-bjv5os.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/318559/original/file-20200304-66069-bjv5os.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/318559/original/file-20200304-66069-bjv5os.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/318559/original/file-20200304-66069-bjv5os.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/318559/original/file-20200304-66069-bjv5os.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Cartographie de la répartition des arbres dans Paris.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://public.tableau.com/profile/badiu.alexandru#!/vizhome/ParisCityUrbanForest/Dashboard1">opendata.paris.fr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les arbres, les insectes herbivores et les oiseaux insectivores représentent une dimension de la biodiversité urbaine, et qui plus est d’une biodiversité dynamique.</p>
<h2>Des interactions encore mal connues</h2>
<p>De nombreux travaux de recherche ont par ailleurs démontré que l’<a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0006320705003563">urbanisation homogénéise la biodiversité</a> : celle-ci est plus semblable entre deux villes d’une même région qu’entre une ville et sa campagne avoisinante. Avec des conséquences sur les interactions entre les organismes, et par extension sur la dynamique de la biodiversité et les services fournis aux citadins, qui <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11252-022-01207-w">sont encore mal comprises</a>.</p>
<p>Il faut dire que l’urbaniste ne facilite pas la tâche de l’écologue ! De même que la ville n’est pas un désert biologique, ce n’est pas non plus un territoire homogène. La quantité d’arbres peut varier considérablement d’une zone à l’autre, ce qui peut avoir un effet très important sur la biodiversité qu’elle abrite.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/422861/original/file-20210923-17-pujote.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/422861/original/file-20210923-17-pujote.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/422861/original/file-20210923-17-pujote.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/422861/original/file-20210923-17-pujote.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/422861/original/file-20210923-17-pujote.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/422861/original/file-20210923-17-pujote.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/422861/original/file-20210923-17-pujote.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Au bois de Boulogne.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/78933929@N02/34804027194">Katrinitsa/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Des chercheurs de l’Université d’État de Caroline du Nord ont par exemple montré que les zones moins arborées fournissent moins de ressources aux herbivores. Cela <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11252-020-00939-x">diminue leur abondance et par conséquent les dégâts causés aux arbres</a>. Au contraire, des chercheurs de l’Université de Queensland en Australie ont mis en évidence que la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0169204614002631">préservation d’arbres adultes dans les rues permet de maintenir la diversité des oiseaux</a>.</p>
<h2>Plus il y a d’arbres, plus les insectes les attaquent</h2>
<p>Nous avons étudié l’hétérogénéité de la biodiversité liée aux arbres urbains dans le cadre d’un <a href="https://twitter.com/BCastagneyrol/status/1469328470920552462">projet de science participative</a> mené au niveau européen.</p>
<p>52 écoles et 41 scientifiques ont échantillonné des feuilles de chêne dans 17 pays. Certains étaient en ville, d’autres à la campagne. En examinant les 18 060 feuilles envoyées par l’ensemble des partenaires du projet, nous avons pu étudier l’impact de l’urbanisation sur les insectes associés au chêne pédonculé (<em>Quercus robur</em>) dans la majeure partie de son aire de répartition en Europe.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=620&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=620&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=620&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=779&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=779&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=779&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Dégâts de <em>Corythucha arcuata</em> sur chêne pédonculé.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bastien Castagneyrol</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nous avons constaté des effets contrastés des surfaces imperméabilisées (typiques des zones urbanisées) et de la densité d’arbres sur les insectes herbivores liés aux chênes : les chênes entourés par de nombreux arbres étaient en moyenne plus attaqués (suggérant une plus grande abondance et diversité d’herbivores), alors que les chênes poussant dans un environnement très urbanisé subissaient moins d’attaques. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S221457451830049X">Ces résultats étaient attendus</a>. Ce qui l’était moins, c’est que la densité d’arbres pouvait moduler l’effet de l’urbanisation. En particulier, une plus forte densité d’arbres renforçait son impact négatif sur les insectes responsables de la formation de galles sur les feuilles de chêne, et au contraire atténuait l’effet de l’urbanisation sur les insectes creusant des galeries dans les feuilles.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/458315/original/file-20220415-26-du8dn4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/458315/original/file-20220415-26-du8dn4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=436&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/458315/original/file-20220415-26-du8dn4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=436&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/458315/original/file-20220415-26-du8dn4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=436&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/458315/original/file-20220415-26-du8dn4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=548&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/458315/original/file-20220415-26-du8dn4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=548&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/458315/original/file-20220415-26-du8dn4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=548&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un exemple de galle formée par une feuille de hêtre. La galle abrite une larve d’insecte herbivore. C’est l’insecte qui induit la formation de la galle, où il bénéficie d’un abri et de nourriture.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Notre étude confirme l’importance de maintenir la présence d’arbres dans nos villes, évidemment pour notre propre bénéfice immédiat, mais aussi parce que leur densité peut <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/gcb.12825">tamponner les effets de l’urbanisation sur la biodiversité</a>.</p>
<p>À tout le moins, compte tenu de notre compréhension encore limitée des réseaux complexes d’interactions entre les arbres et l’ensemble de la biodiversité urbaine, il convient d’être vigilant quant aux conséquences en cascades de toute action menée sur les arbres en ville. Nous poursuivrons le travail l’année prochaine avec la <a href="https://www6.inrae.fr/arborecol">participation de nouvelles écoles au projet</a>.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p>_The research project <a href="https://group.bnpparibas/en/news/tree-bodyguards-impact-climate-change-tree-health">“Tree bodyguards”</a> of which this publication is part was supported by the <a href="https://group.bnpparibas/en/group/about-us/bnp-paribas-foundation">BNP Paribas Foundation</a> as part of the <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-biodiversity-initiative">Climate and Biodiversity Initiative program</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181093/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bastien Castagneyrol a reçu des financements de la fondation BNP Paribas (programme Climate and biodiversity initiative). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Elena Valdés-Correcher a reçu des financements de la fondation BNP Paribas (programme Climate and biodiversity initiative).</span></em></p>La présence d’arbres dans les villes ne sert pas qu’à les rafraîchir. Leur densité conditionne aussi la richesse de la biodiversité urbaine.Bastien Castagneyrol, Chercheur en écologie, InraeElena Valdés-Correcher, Chercheuse en écologie, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1740502022-02-02T18:37:09Z2022-02-02T18:37:09ZUne BD pour se familiariser à l’agroécologie<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/444035/original/file-20220202-21-1kw8q35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.carolinegaujour.com/bd-ird/">Caroline Gaujour</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Comment intéresser le grand public aux enjeux climatiques du secteur agricole ? À l’aide de la bande dessinée ! Et plus précisément à l’aide d’une BD interactive, intitulée <em>Une question à un million</em>, <a href="https://www.carolinegaujour.com/bd-ird/">disponible en intégralité</a> sur le site de l’illustratrice Caroline Gaujour.</p>
<p>Le secteur agricole est aujourd’hui particulièrement touché par les conséquences néfastes du réchauffement : les sols se dégradent, les rendements des cultures sont plus faibles et <a href="https://theconversation.com/en-afrique-de-lest-lagriculture-au-defi-des-secheresses-recurrentes-140599">sensibles à ces perturbations</a>. Victime, l’agriculture est aussi actrice de cette situation en contribuant à l’augmentation de la concentration en gaz à effet de serre de l’atmosphère.</p>
<p>Si elles sont moins médiatisées que les politiques de préservation des forêts, les modalités d’utilisation des terres offrent toutefois des options pour <a href="https://theconversation.com/du-benin-a-madagascar-comment-on-cultive-le-carbone-en-afrique-108135">lutter contre ces dérèglements</a>.</p>
<p>Investir dans des pratiques agricoles basées sur l’enrichissement en carbone des sols représente ainsi une solution face au changement climatique. Plusieurs projets internationaux – de <a href="https://theconversation.com/linitiative-4-pour-1-000-quest-ce-que-cest-54425">l’initiative 4 pour 1 000</a> à la <a href="https://theconversation.com/grande-muraille-verte-au-sahel-les-defis-de-la-prochaine-decennie-169177">Grande Muraille verte</a> – y contribuent.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/443772/original/file-20220201-23-12ba4ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/443772/original/file-20220201-23-12ba4ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/443772/original/file-20220201-23-12ba4ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=322&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/443772/original/file-20220201-23-12ba4ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=322&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/443772/original/file-20220201-23-12ba4ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=322&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/443772/original/file-20220201-23-12ba4ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=405&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/443772/original/file-20220201-23-12ba4ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=405&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/443772/original/file-20220201-23-12ba4ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=405&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Extraits de la BD.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.carolinegaujour.com/bd-ird/">Caroline Gaujour</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Le développement d’une agriculture durable, rémunératrice pour les exploitants sans compromettre l’environnement, s’impose désormais. Dans les pays du Sud, de tels projets, souvent soutenus par des ONG, investissent dans l’agriculture familiale. Il s’agit d’accroître la productivité et la rentabilité des systèmes agricoles, tout en <a href="https://www.ird.fr/des-pratiques-agro-ecologiques-la-fois-benefiques-aux-agriculteurs-et-la-societe">contribuant à atténuer les émissions de gaz à effet de serre</a>.</p>
<p>Chercheuses à l’IRD dans ce domaine, nous souhaitions vulgariser nos travaux, menés en collaboration avec une équipe de l’université d’Antananarivo (Madagascar), et aiguiser la curiosité du public sur les différents métiers du développement rural.</p>
<h2>Dans la région d’Itasy à Madagascar</h2>
<p>Nous voulions évoquer des situations et des personnages qui permettent aux lecteurs de s’identifier. Nous voulions un support de discussion pour de futures interventions et formations.</p>
<p>La première étape a consisté à publier un <a href="https://doi.org/10.1016/j.jclepro.2020.125220">article scientifique paru dans une revue internationale</a> avec Narindra Harisoa Rakotovao, une jeune scientifique malgache qui s’est intéressée aux projets de développement agricole dans la région d’Itasy.</p>
<p>Pour que le lecteur puisse s’interroger, nous avons opté pour un scénario interactif, dans le style des romans dont on est le héros. Nous avons ensuite opté pour le format, souple, de la bande dessinée.</p>
<p>L’illustratrice Caroline Gaujour a commencé par adapter le scénario interactif en story-board en s’aidant de photos de références de terrain. Elle a ensuite créé les visuels des différents personnages, puis élaboré les 35 planches de BD nécessaires à traduire l’histoire en dessins. Le lecteur y partage l’expérience de Thomas, un jeune consultant international.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/443773/original/file-20220201-25-c0kcgp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/443773/original/file-20220201-25-c0kcgp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/443773/original/file-20220201-25-c0kcgp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/443773/original/file-20220201-25-c0kcgp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/443773/original/file-20220201-25-c0kcgp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/443773/original/file-20220201-25-c0kcgp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/443773/original/file-20220201-25-c0kcgp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/443773/original/file-20220201-25-c0kcgp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Dessins des personnages dans la phase préparatoire de la BD.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.carolinegaujour.com/bd-ird/">Caroline Gaujour</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/443774/original/file-20220201-15-w0kler.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/443774/original/file-20220201-15-w0kler.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/443774/original/file-20220201-15-w0kler.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/443774/original/file-20220201-15-w0kler.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/443774/original/file-20220201-15-w0kler.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/443774/original/file-20220201-15-w0kler.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/443774/original/file-20220201-15-w0kler.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/443774/original/file-20220201-15-w0kler.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Croquis pour les planches.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.carolinegaujour.com/bd-ird/">Caroline Gaujour</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Après avoir explicité les enjeux d’un projet de développement rural dans la petite région agricole (1800 hectares) située près d’Itasy et le point de vue de différents personnages – un agriculteur, un volontaire dans une ONG, un collègue, Internet, une chercheuse –, le jeune consultant aidé du lecteur a le choix entre différents projets agricoles pour la région.</p>
<p>Les bénéfices potentiels de chaque projet ont été quantifiés par trois indicateurs projetés sur une période de 20 ans – le bilan des émissions de gaz à effet de serre (GES), les bénéfices économiques pour les agriculteurs et l’efficacité des investissements économiques pour atténuer les GES. Les conséquences de ces différents projets sont explicitées en aparté.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/443776/original/file-20220201-25-x87hhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/443776/original/file-20220201-25-x87hhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/443776/original/file-20220201-25-x87hhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/443776/original/file-20220201-25-x87hhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/443776/original/file-20220201-25-x87hhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/443776/original/file-20220201-25-x87hhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/443776/original/file-20220201-25-x87hhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/443776/original/file-20220201-25-x87hhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">L’une des 35 planches de la BD, Thomas avec son collègue.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.carolinegaujour.com/bd-ird/">Caroline Gaujour</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<h2>Une avalanche de questions et de choix</h2>
<p>Tout au long de la BD, le lecteur suit le cheminement de pensée du jeune consultant qui travaille pour un bailleur. Les politiques internationales et la coopération entre États incitent en effet des bailleurs à investir dans des projets de développement industriels, environnementaux ou agricoles.</p>
<p>Ces projets sont souvent de grande ampleur et les sommes impliquées élevées. La portée et les conséquences sur les populations peuvent être importantes : comment et avec qui définir de tels projets ? Quels sont les objectifs souhaitables ? Comment utiliser au mieux l’argent de la coopération ? Qui est légitime pour décider ? Autant de questions que doit se poser le jeune consultant.</p>
<p>Au fil de ses rencontres, la multiplicité des informations et des points de vue complique encore un peu plus ses choix…</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/443777/original/file-20220201-15-m1r6y3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/443777/original/file-20220201-15-m1r6y3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/443777/original/file-20220201-15-m1r6y3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=186&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/443777/original/file-20220201-15-m1r6y3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=186&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/443777/original/file-20220201-15-m1r6y3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=186&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/443777/original/file-20220201-15-m1r6y3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=233&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/443777/original/file-20220201-15-m1r6y3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=233&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/443777/original/file-20220201-15-m1r6y3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=233&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le jeune consultant Thomas en pleine réflexion….</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.carolinegaujour.com/bd-ird/">Caroline Gaujour</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.carolinegaujour.com/bd-ird/">Caroline Gaujour</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Le personnage de la chercheuse souhaite sortir le jeune consultant de sa torpeur, mais elle l’assomme avec un peu plus d’informations. La recherche est ici traitée de manière humoristique : elle ne donne aucune solution, ne trouve rien ou si peu, mais pose un tas de questions !</p>
<p>Cette multiplicité des problématiques illustre la vitalité de la recherche sur ces thèmes : il n’y a pas de solutions évidentes, mais il n’y a pas de mauvais choix non plus… sauf de ne rien faire.</p>
<hr>
<p><em>Retrouvez l’intégralité de la BD <a href="https://www.carolinegaujour.com/bd-ird/">« Une question à un million » ici</a></em></p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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</figure>
<p><em>Le projet de recherche « SoCa » dans lequel s’inscrit cette publication a bénéficié du soutien de la Fondation <a href="https://verticalsoft-site.secure.force.com/phiwebsite/home?id=a0524000005nTY1AAM">BNP Paribas</a> dans le cadre du programme Climate and Biodiversity Initiative.</em></p>
<p><em>Le nouvel appel à projets (2023-2025) est lancé. Six à neuf projets de recherche seront sélectionnés et soutenus financièrement par la Fondation, à hauteur de six millions d’euros. La date limite de réception <a href="https://verticalsoft-site.secure.force.com/phiwebsite/Program?id=a0524000005nTY1&prid=a0r24000000uCSL">des dossiers de candidatures</a> est fixée au 20 avril 2022.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174050/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une plongée en BD dans le monde du développement rural à Madagascar.Tiphaine Chevallier, Chercheuse, Institut de recherche pour le développement (IRD)Lydie Chapuis-Lardy, Senior research scientist in Soil Science, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1691832021-10-28T18:59:11Z2021-10-28T18:59:11ZLes sciences participatives, un outil pédagogique à développer<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/428851/original/file-20211027-27-k0m6cx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=40%2C45%2C1520%2C1135&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les sciences et recherches participatives sont définies comme des « formes de production de connaissances scientifiques auxquelles des acteurs non-scientifiques-professionnels, qu’il s’agisse d’individus ou de groupes, participent de façon active et délibérée ».</span> <span class="attribution"><span class="source">Nathalie Andriamamonjy</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Science et société dialoguent en continu. Les chercheurs qui « font la science » sont aussi des citoyens, de même que les citoyens « lambda » ne sont pas pour autant dénués de savoirs à même de contribuer à la fabrique de la science. Si cette interaction entre science institutionnelle et citoyens a toujours existé, elle est aujourd’hui mise en lumière à travers les sciences et recherches participatives (SRP).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"><em>Tree bodyguards</em> est un projet de science participative à l’échelle européenne qui implique un réseau de classes et de scientifiques dans l’étude de la résistance des arbres aux attaques d’insectes herbivores.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Nathalie Andriamamonjy</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Celles-ci <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02801940/">sont définies</a> comme des « formes de production de connaissances scientifiques auxquelles des acteurs non scientifiques professionnels, qu’il s’agisse d’individus ou de groupes, participent de façon active et délibérée ». Particulièrement florissantes dans le domaine de l’écologie et des sciences de l’environnement, elles apparaissent comme une façon de co-construire les savoirs. Mais elles constituent également un formidable outil de dialogue entre la science et la société, et un outil pédagogique encore sous-exploité pour l’enseignement scientifique.</p>
<p>L’enseignement des sciences à l’école revêt une triple dimension : disciplinaire, épistémologique et sociale. Les élèves doivent acquérir des savoirs, comprendre comment ils se sont construits et s’approprier ces connaissances pour agir en citoyens dans leur vie de tous les jours.</p>
<p>La pleine exploitation des SRP pour l’enseignement scientifique se heurte alors à une difficulté majeure : faire coïncider les objectifs de la recherche scientifique et ceux de l’enseignement des sciences dans toutes ses dimensions. La tâche est d’autant plus complexe que les approches de SRP sont encore peu connues des enseignants, alors que les programmes les invitent à les utiliser.</p>
<h2>Les SRP à la frontière entre science et recherche</h2>
<p>Une distinction fondamentale doit être opérée entre la science et la recherche. La science est un ensemble de savoirs et de connaissances sur lequel l’ensemble de la communauté scientifique s’accorde. La recherche, c’est la science en train de se faire : les savoirs émergent et évoluent rapidement, leurs contours se précisent, mais ils ne sont pas encore stabilisés. Faire comprendre cette distinction entre « ce que je sais que je sais » (la science) et « ce que je sais que je ne sais pas encore » (la recherche) est aussi essentiel que délicat.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1435557929218940930"}"></div></p>
<p>Or, à l’école, les SRP se situent justement à la frontière entre science et recherche : l’enseignant transpose et enseigne les savoirs savants sur lesquels se fondent les hypothèses de la recherche, en même temps que les élèves participent à cette dernière, sans pour autant que les savoirs qui en sont issus ne leur soient enseignés.</p>
<h2>Un outil encore sous-exploité</h2>
<p>Nous avons mené un travail d’<a href="https://www.researchgate.net/profile/Severine-Perron/publication/350343445_Les_projets_de_sciences_citoyennes_a_l%E2%80%99Ecole_quelles_pratiques_d%E2%80%99enseignement_Cas_du_projet_Oak_bodyguards_en_France/links/60d41c6e458515ae7da79002/Les-projets-de-sciences-citoyennes-a-lEcole-quelles-pratiques-denseignement-Cas-du-projet-Oak-bodyguards-en-France.pdf">enquête</a> auprès de 13 enseignants participant avec leur classe au projet « Tree bodyguards ».</p>
<p>Ce projet de science participative au niveau européen implique un réseau de classes et de scientifiques dans l’étude de la <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/geb.13244">résistance des arbres aux attaques d’insectes herbivores</a> en lien avec le climat et les changements globaux. Les élèves sont impliqués dans la récolte de données et de matériel biologique, lesquels sont transmis aux chercheurs, qui les analysent. Les données sont collectées selon un protocole standard, détaillé, développé par les chercheurs.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/qZogB38sAGM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">TREE BODYGUARDS : comment les arbres se protègent-ils des insectes ? (Fondation BNP Paribas, 24 juillet 2020).</span></figcaption>
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<p>Pour la majorité des enseignants interrogés, le protocole de recueil de données écrit par les scientifiques est devenu la séquence d’enseignement en tant que telle, sans qu’il y ait eu de mise en contexte ou de problématisation. Pour les enseignants, l’objectif était de faire participer les élèves à un authentique projet de recherche scientifique, mais pas d’acquérir des connaissances en écologie ou de contextualiser les apprentissages.</p>
<p>Autrement dit, les dimensions disciplinaires et sociales de l’enseignement scientifique s’étaient effacées face à la dimension épistémologique. Il n’y avait pas de construction de connaissances sur les relations trophiques (mangeur mangé) dans les écosystèmes ou les conséquences des changements globaux sur ces relations.</p>
<h2>Pour les chercheurs et les profs, un défi exigeant</h2>
<p>Il y a bien sûr un fort enjeu éducatif et social à expliquer le fonctionnement de la recherche et l’on ne peut que se réjouir que les sciences et recherches participatives y participent, en favorisant les interactions entre le monde de la recherche et celui de l’enseignement.</p>
<p>Mais c’est sous-exploiter leur potentiel. La responsabilité n’en revient pas uniquement aux enseignants, elle est aussi partagée par les chercheurs pilotant les projets de SRP mis en œuvre en milieu scolaire.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"916360480792416257"}"></div></p>
<p>Pour qu’ils soient mis en œuvre avec succès en milieu scolaire, c’est-à-dire pour que les élèves contribuent à la production de données utilisables pour construire de nouveaux savoirs scientifiques, il est impératif que les protocoles de SRP soient adaptés aux compétences des élèves à un niveau donné, alignés avec le calendrier scolaire et intégrés aux programmes scolaires.</p>
<p>C’est par exemple le cas des différents projets du programme <a href="https://www.vigienature-ecole.fr/">Vigie nature école</a>. En proposant des activités clés en main aux enseignants pour le suivi de la biodiversité à partir de protocoles rigoureux (dimension épistémologique), ils permettent de faire acquérir des connaissances naturalistes aux élèves (dimension disciplinaire), tout en contribuant à les sensibiliser à leur environnement (dimension sociale).</p>
<p>Or, avoir été élève un jour ne donne pas les clés pour comprendre ce qu’est le métier d’enseignant, ses objectifs, ses contraintes. Seuls, les chercheurs peuvent avoir des difficultés à satisfaire ces exigences.</p>
<p>Il ne faut pas non plus sous-estimer la diversité des compétences implicites que doivent mobiliser les enseignants eux-mêmes pour participer aux projets de SRP. Il peut s’agir d’un minimum de connaissances naturalistes ou d’agilité avec les outils numériques. Elles peuvent constituer un frein, une autocensure, pour de nombreux enseignants.</p>
<h2>Le rôle facilitateur des maisons pour la science</h2>
<p>Ces réflexions écrivent un rôle essentiel pour un troisième acteur des SRP à l’école à l’interface entre les chercheurs et les enseignants, celui de la formation initiale et continue des enseignants.</p>
<p>Le travail mené avec les enseignants ayant participé avec leurs classes au projet <em>,Tree bodyguards</em> a clairement mis en avant le rôle des maisons pour la science comme « intermédiaires facilitateurs ». Le <a href="https://www.fondation-lamap.org/fr/reseau-lamap/maison-pour-la-science">réseau des maisons pour la science</a> a été mis en place par la fondation <a href="https://www.fondation-lamap.org/fr">La main à la pâte</a>.</p>
<p>Les Maisons sont implantées dans les universités et font le lien entre le monde de la recherche et celui de l’enseignement. Elles ont pour mission de promouvoir les démarches d’investigations scientifiques auprès des enseignants au travers d’une offre de formation continue assurée conjointement par des pédagogues et des chercheurs.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1172082359879049216"}"></div></p>
<p>Pour les enseignants comme pour les chercheurs, il s’agit d’avoir un interlocuteur privilégié capable d’appréhender à la fois les objectifs des projets de SRP en matière de production de connaissances scientifiques et d’apprentissages.</p>
<p>Nous faisons le pari que les SRP à l’école sont promises à un bel avenir sous réserve que les projets évoluent d’un mode contributif vers un mode plus collaboratif, fondé sur la co-construction des objectifs (même s’ils diffèrent selon les acteurs) et des méthodes de la recherche et de la transmission des savoirs. Et nous espérons bien gagner ce pari !</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Le projet de recherche « Tree bodyguards » dans lequel s’inscrit cette publication a bénéficié du soutien de la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du programme <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-biodiversity-initiative">Climate and Biodiversity Initiative</a>.</em></p>
<p><em>Séverine Perron (Groupe de recherche en didactique comparée Gredic, Université de Genève), Patricia Marzin Janvier (Centre de recherche sur l’éducation les apprentissages et la didactique Cread, EA 3875, Université de Bretagne) et Mauricette Mesguich (Maison pour la science en Aquitaine) ont contribué à la rédaction de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169183/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bastien Castagneyrol a reçu des financements de la Fondation BNP Paribas dans le cadre du programme Climate and Biodiversity Initiative pour le projet Tree Bodyguards (www6.inrae.fr/tree-bodyguards).</span></em></p>Si elles intègrent peu à peu l’enseignement scientifique, les sciences et recherches participatives devraient être mieux adaptées aux objectifs pédagogiques.Bastien Castagneyrol, Chercheur en écologie, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1630612021-06-21T18:37:50Z2021-06-21T18:37:50ZCompter les mammifères, les oiseaux et les bousiers pour protéger l’Amazonie<p>L’Amazonie compte pour environ <a href="https://rainforests.mongabay.com/amazon/">50 % de toutes les forêts tropicales existantes</a> sur la planète ; elle abrite plus de <a href="https://conbio.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1523-1739.2005.00705.x">400 espèces de mammifères, 1700 espèces d’oiseaux</a> et un nombre indéterminé d’espèces d’insectes qui se comptent par millions. </p>
<p>Elle est aussi vitale pour maintenir la vie sur Terre, les forêts amazoniennes atténuant le changement climatique en captant autour de 560 millions de tonnes de carbone par an et en aidant l’agriculture par la <a href="https://www.nature.com/articles/s41558-018-0177-y">stimulation des précipitations</a> à des échelles locales et continentales.</p>
<h2>Des espaces indispensables et menacés</h2>
<p>La forêt amazonienne et son immense biodiversité disparaissent à un rythme alarmant, lié à la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0264837720325333?dgcid=author">production et l’exportation croissantes du bétail</a> au Brésil. Les forêts qui subsistent encore sont sous la menace permanente d’activités anthropiques destructrices, telles que <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0006320717311709">l’exploitation forestière</a>, les <a href="https://theconversation.com/amazon-fires-explained-what-are-they-why-are-they-so-damaging-and-how-can-we-stop-them-122340">incendies</a> et les <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/abs/10.1098/rstb.2019.0116">perturbations climatiques</a> (sécheresses et inondations extrêmes).</p>
<p>À ce jour, les études menées sur les questions climatiques et la biodiversité dans les forêts tropicales sont principalement fondées sur des investigations de court terme, qui se concentrent sur les réactions des plantes et du carbone. Il en résulte que nous sommes pour la plupart conscients de l’importance des arbres des forêts dans le cadre de la régulation climatique. Nos recherches en Amazonie ont ainsi révélé que la <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rstb.2018.0043">mortalité des arbres et la perte de carbone</a> restaient élevées plusieurs années après les incendies de forêt provoqués par la sécheresse.</p>
<p>Néanmoins, pour comprendre pleinement la résilience des forêts tropicales, nous avons aussi besoin d’études sur le long terme, qui tiennent compte de l’impact des perturbations climatiques sur la faune et qui évaluent leur rôle dans la récupération des forêts après perturbations.</p>
<h2>Une résilience sous conditions</h2>
<p>Les animaux jouent un rôle clé pour comprendre la résilience des forêts tropicales. </p>
<p>Les oiseaux, par exemple, sont des disperseurs de graines, leur disparition pouvant entraîner une <a href="https://science.sciencemag.org/content/340/6136/1086">réduction de la taille des graines</a> des palmiers tropicaux, rendant la <a href="https://theconversation.com/without-birds-tropical-forests-wont-bounce-back-from-deforestation-68094">reprise de la végétation improbable ou impossible</a>. </p>
<p>De même, les grands animaux frugivores, notamment les singes hurleurs et les singes-araignées, ingèrent et disséminent eux aussi des graines, de sorte que si leur abondance vient à diminuer, cela peut affecter les voies de <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/ele.12102">régénération des forêts</a>.</p>
<p>Même s’il est désormais bien connu que ce sont les petites bestioles <a href="https://www.jstor.org/stable/2386020?seq=1">qui dirigent le monde</a>, notre compréhension du rôle des invertébrés n’en est qu’à ses débuts. Dans les forêts tropicales, il a été démontré que les <a href="https://science.sciencemag.org/content/363/6423/174">termites</a> améliorent la résistance à la sécheresse, tandis que les bousiers peuvent aider les forêts tropicales à se régénérer.</p>
<h2>Compter la faune</h2>
<p>Bien que l’on sache que la faune et ses fonctions sont primordiales pour comprendre les mécanismes de récupération des forêts, il n’est pas évident de la comptabiliser.</p>
<p>Malgré la diversité des arbres et la difficulté à les identifier, leur suivi est relativement simple : ils ne bougent pas, peuvent être mesurés d’une année sur l’autre, leurs caractéristiques structurelles et chimiques peuvent être échantillonnées et évaluées, et leurs réponses physiologiques évaluées sur le terrain. Bien sûr, tout cela exige un travail complexe, mais notre compréhension de la <a href="https://science.sciencemag.org/content/368/6493/869">sensibilité au climat</a> de la végétation des forêts tropicales a sans aucun doute été facilitée par le fait qu’elle soit immobile.</p>
<p>Les animaux, de leur côté, sont bien plus difficiles à suivre. Un seul hectare de forêt peut abriter jusqu’à 160 espèces d’oiseaux, et 100 hectares – une surface huit fois plus petite que le Bois de Boulogne à Paris – peuvent en contenir <a href="https://esajournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.2307/1943045">jusqu’à 245</a>.</p>
<p>Écoutez ce <a href="https://macaulaylibrary.org/asset/336869191">chœur d’oiseaux</a>. Combien d’espèces distinguez-vous ? Un spécialiste pourrait en nommer 12 espèces dans ce simple extrait de 32 secondes… mais rares sont ceux qui dans le monde ont cette capacité.</p>
<iframe width="100%" height="360" src="https://macaulaylibrary.org/asset/336869191/embed/640" frameborder="0" allowfullscreen="" style="width :640px ;"></iframe>
<p>S’il est déjà difficile de procéder à l’évaluation instantanée des espèces présentes, ne parlons pas de l’évaluation des changements au cours du temps ! Les espèces qui chantent à un moment donné varient au cours de l’année, d’un jour à l’autre, tout au long de la journée, et même en fonction des cycles lunaires.</p>
<p>Qu’en est-il des invertébrés ? La plupart des espèces n’ont pas encore été formellement classifiées par les taxonomistes, et leur identification repose sur quelques spécialistes ayant accès à des collections de référence complètes. </p>
<p>Leur abondance varie <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00442-020-04831-5">au cours de l’année</a>, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1470160X18305958">d’une année sur l’autre</a>, en réponse aux variations climatiques, <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/btp.12756">aux événements climatiques extrêmes</a>, et en fonction d’autres facteurs, encore incompris.</p>
<h2>Des pistes pour le suivi de la faune</h2>
<p>Heureusement, il existe des solutions pour assurer le suivi de la faune forestière. Dans ce contexte, <a href="https://youtu.be/N4RmX_MCsn0">notre projet Bioclimate</a> adopte à la fois des méthodes novatrices, et d’autres déjà bien éprouvées, pour évaluer comment petits et grands animaux peuvent aider les forêts tropicales à rebondir après des perturbations telles que l’exploitation forestière, les sécheresses ou les incendies.</p>
<p>Pour les insectes, nous pouvons nous appuyer sur certains groupes qui jouent un rôle d’indicateur de la santé des forêts. Les bousiers sont parfaits pour cela : <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0006320708001420?via%3Dihub">nombre de leurs activités</a> profitent aux forêts, ils sont faciles et bon marché à collecter ; ils peuvent <a href="https://www.biorxiv.org/content/10.1101/2021.02.10.430568v1.full">témoigner des impacts des perturbations</a> pour d’autres animaux dont ils utilisent les excréments pour se nourrir et faire leur nid.</p>
<p>En analysant l’ADN des excréments dont se nourrissent les bousiers, nous pouvons ainsi évaluer quels mammifères sont présents dans les forêts d’Amazonie. Cette connaissance est utile pour mieux comprendre comment les changements environnementaux affectent les <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/full/10.1098/rspb.2018.2002">relations entre ces insectes et les mammifères</a>.</p>
<p>En ce qui concerne les oiseaux, il est possible de surveiller en permanence les populations grâce à l’utilisation d’<a href="https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/2041-210X.13521">enregistreurs audio autonomes</a>, qui contribuent également à comprendre la façon dont ils occupent l’espace en différents endroits – de nombreux oiseaux forestiers sont rares et possèdent de vastes territoires, il est donc probable qu’on les rate lors de visites ponctuelles.</p>
<p>Le fait d’avoir de nombreux enregistreurs audio fonctionnant en même temps sur de longues périodes rend possible un contrôle simultané d’un grand nombre de lieux et d’animaux. Afin de surmonter la difficulté des humains à écouter de multiples chants d’oiseaux ensemble, nous développons aussi des <a href="https://openresearchsoftware.metajnl.com/articles/10.5334/jors.154/">algorithmes de machine-learning</a> qui facilitent l’identification des vocalisations de certaines espèces.</p>
<h2>Vers une connaissance plus précises des interactions</h2>
<p>Pour assurer l’avenir de l’Amazonie, il est essentiel d’évoluer vers une recherche axée sur des réponses permettant l’analyse précise de la manière dont les nombreux insectes, oiseaux et autres animaux qui vivent dans ces lieux contribuent à la santé de la forêt.</p>
<p><a href="https://youtu.be/N4RmX_MCsn0">L’objectif de nos travaux</a> est ainsi d’intégrer à la fois des ensembles de données récoltées sur le long terme et ces nouvelles données expérimentales, afin de faire progresser notre compréhension de la relation entre biodiversité et climat dans les forêts tropicales. </p>
<p>Grâce à ces connaissances, nous souhaitons fournir une meilleure image de la manière dont l’Amazonie réagit aux activités humaines et de la façon dont nous pourrions mieux la préserver.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Le projet de recherche « Bioclimate » est soutenu par la <a href="https://group.bnpparibas/en/group/bnp-paribas-foundation">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du programme <a href="https://group.bnpparibas/en/hottopics/climate-biodiversity-initiative">Climate and Biodiversity Initiative</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/163061/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Filipe França has received research funding from the BNP Paribas Foundation (Climate and Biodiversity) and the Brazilian National Council for Scientific and Technological Development (CNPq). He is the co-coordinator of Synergize and PELD-RAS projects and, currently, a Visiting Academic at the University of Canterbury, New Zealand.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Alexander C. Lees has received research funding from the BNP Paribas Foundation (Climate and Biodiversity) and the National Environment Research Council (NERC).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jos Barlow has received research funding from the BNP Paribas Foundation (Climate and Biodiversity) and the National Environment Research Council (NERC).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Yves Bas has received research funding from the BNP Paribas Foundation (Climate and Biodiversity).</span></em></p>Nous en savons étonnamment peu sur les millions d’animaux, de plantes et d’oiseaux qui peuplent l’Amazonie.Filipe França, Senior research associate, Lancaster UniversityAlexander C. Lees, Senior Lecturer in Conservation Biology, Manchester Metropolitan UniversityJos Barlow, Professor of Conservation Science, Lancaster UniversityYves Bas, Post-doctorant, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1582042021-03-31T15:02:38Z2021-03-31T15:02:38Z1 288 milliards de dollars : chiffrer les dégâts causés par les invasions biologiques pour enfin agir<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/392886/original/file-20210331-17-i66bb5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4437%2C2927&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Mouches mexicaines des fruits. Originaire du Guatemala et du Mexique, cette espèce est envahissante en Californie, où elle pèse sur l’agriculture du pamplemousse. Ici, des femelles déposant leurs œufs sur un fruit.</span> <span class="attribution"><span class="source"> Jack Dykinga/USDA Agricultural Research Service (2007)</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Elles ont plus d’impacts que le changement climatique, sont plus omniprésentes que la déforestation ou la destruction des coraux, font plus de dégâts sur la biodiversité que la pollution – plastique ou au glyphosate – et pourtant, vous ne les connaissez probablement pas.</p>
<p>Elles se répandent silencieusement dans le monde entier, vivent sous votre nez sans même s’inquiéter d’être découvertes. Les décideurs les laissent progressivement s’imposer, la plupart du temps aussi inconscients de leur présence et de leur impact que l’est le grand public… Non, ce n’est pas une énième conspiration ! Elles sont bien réelles : ce sont les invasions biologiques.</p>
<p>Les scientifiques étudient ce phénomène depuis des décennies, de plus en plus inquiets de l’augmentation exponentielle de leur nombre et des dégâts écologiques causés.</p>
<h2>Là où les humains vont</h2>
<p>On les appelle les envahisseurs, pourtant, ils ne viennent pas de l’espace… mais bien des différentes régions du globe.</p>
<p>Ce sont des plantes d’Amérique du Sud, des étoiles de mer d’Afrique, des insectes d’Europe ou des oiseaux d’Asie. Ces espèces proviennent de forêts tropicales, de savanes sèches, de lacs tempérés et d’océans froids. Elles envahissent tous les endroits de la planète <a href="https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/1365-2664.12470">où les humains ont mis les pieds</a>.</p>
<p>Elles sont là parce que nous les avons apportées, comme animaux de compagnie, plantes ornementales, ou comme passagers clandestins durant nos voyages touristiques, et commerciaux. Des milliers d’espèces exotiques envahissantes, en provenance de toutes les régions, <a href="https://doi.org/10.1038/ncomms14435">envahissent toutes les régions, et cela depuis des siècles</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/392797/original/file-20210331-21-1fh8dwn.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/392797/original/file-20210331-21-1fh8dwn.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/392797/original/file-20210331-21-1fh8dwn.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/392797/original/file-20210331-21-1fh8dwn.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/392797/original/file-20210331-21-1fh8dwn.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/392797/original/file-20210331-21-1fh8dwn.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/392797/original/file-20210331-21-1fh8dwn.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Originaire d’Amérique du Sud, la jacinthe d’eau (ici en fleur) est classée parmi les espèces envahissantes les plus sévères.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Anna Turbelin/Universite Paris-Saclay</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Avoir des plantes et animaux exotiques autour de nous n’est pas forcément un problème. Le problème, c’est qu’une fraction d’entre eux causent des dégâts lors de leur établissement et de leur propagation dans leur nouvel environnement.</p>
<p>Ces dégâts peuvent être écologiques (par exemple, des extinctions d’espèces), sanitaires (par exemple, allergies, piqûres, maladies) et économiques (par exemple, dommages aux infrastructures).</p>
<p>Mais comment une belle plante, un minuscule crabe, un joli poisson, ou même un cerf majestueux, pourraient-ils poser problème ?</p>
<h2>Perche du Nil, pythons géants et redoutables fourmis…</h2>
<p>Imaginez être l’une de ces centaines d’espèces de cichlidés qui ont évolué dans le lac africain Victoria (et nulle part ailleurs sur Terre), ces mignons petits poissons adorés par les aquariophiles. Imaginez maintenant partager votre lac avec un nouveau venu, l’énorme perche carnivore du Nil, qui peut atteindre 2 mètres pour 200 kg. Nulle part où se cacher ou fuir.</p>
<p>Vous pouvez aisément vous figurer la suite : en seulement quelques décennies, la perche du Nil a décimé <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/BF00004782">plus de 200 des 300 espèces</a> de poissons cichlidés du lac. Comme ces cichlidés étaient herbivores, détritivores ou insectivores, c’est toute la chaîne trophique qui a été bouleversée et l’écosystème entier irrémédiablement dégradé.</p>
<p>De même, être un petit mammifère dans les Everglades de Floride envahis par des dizaines de milliers de <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.1115226109">pythons géants de 5 mètres</a>, n’est guère plus enviable ; de même pour les petits insectes présents dans l’une des innombrables régions envahies par l’une des <a href="https://doi.org/10.1007/s10531-014-0794-3">nombreuses espèces de fourmis</a> redoutables.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/392838/original/file-20210331-19-184ggvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/392838/original/file-20210331-19-184ggvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/392838/original/file-20210331-19-184ggvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/392838/original/file-20210331-19-184ggvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/392838/original/file-20210331-19-184ggvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/392838/original/file-20210331-19-184ggvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/392838/original/file-20210331-19-184ggvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Issu des eaux marines chaudes du Pacifique Sud et de l’océan Indien, le poisson-lion a provoqué des dégâts très importants sur la biodiversité méditerranéenne.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Unsplash</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ou encore, être une plante sur le passage de destruction de la chenille légionnaire d’automne, qui s’est propagée de l’Afrique à l’Asie et l’Australie en moins de cinq ans, ravageant les plantes sauvages et cultivées – <a href="https://doi.org/10.1564/v28_oct_02">plus de 80 espèces au total</a>.</p>
<p>Ou bien même, être une plante qui meurt lentement dans l’ombre d’une épaisse couverture de l’arbre Miconia, surnommé le « cancer vert », qui élimine toute autre plante <a href="https://www.cabi.org/isc/datasheet/33990">à des kilomètres à la ronde</a>. Ou d’ailleurs, tout organisme vivant confronté à l’une des milliers d’espèces exotiques envahissantes à travers la planète. Lorsqu’elles arrivent, les espèces locales ont souvent peu de chance d’en sortir indemnes.</p>
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<figcaption><span class="caption">En, Guadeloupe, l’ONF lutte contre le <em>Miconia calvescens</em> (ONF/Youtube, 2020).</span></figcaption>
</figure>
<h2>Un chiffrage pour une prise de conscience</h2>
<p>Cela fait bien longtemps que les scientifiques <a href="https://pubag.nal.usda.gov/catalog/61">ont démontré</a> que les invasions biologiques sont une menace mondiale pour la biodiversité, au même titre que la destruction de l’habitat ou le changement climatique, et qu’elles représentent une menace grave pour la santé humaine et les économies.</p>
<p>Alors pourquoi sont-elles bien moins médiatisées ? Pourquoi les gens ne sont-ils pas au courant ? Pourquoi décideurs n’agissent-ils pas ?</p>
<p>Peut-être simplement parce que nous, les scientifiques, n’avons jusqu’ici pas utilisé le bon langage ou les bonnes unités pour faire réaliser la menace.</p>
<p>C’est la raison pour laquelle nous avons arrêté de parler d’extinctions d’oiseaux et de dégradation d’habitats, et <a href="https://www.youtube.com/watch?v=fJ0hybhty0Y">nous avons entrepris de compiler les coûts économiques</a> des invasions biologiques rapportés dans le monde entier. Malheureusement, quand on parle d’argent, on est plus écoutés.</p>
<p>Cela n’a pas été chose facile : parce que les coûts sont très divers, et on ne peut tout simplement pas les comparer (ni les additionner) : par exemple, des dégâts causés par la moule zébrée sur les infrastructures au Canada dans les années 1990 avec les pertes agricoles en Chine liées à tous les insectes envahissants en 2004-2005. Et nous avons collecté des milliers de coûts, compilés et analysés au sein de <a href="https://www.nature.com/articles/s41597-020-00586-z">notre base de données InvaCost</a>, qui ne cesse <a href="https://doi.org/10.6084/m9.figshare.12668570">d’évoluer et de s’étoffer au fil du temps</a> et des recherches. Les résultats de nos travaux viennent <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-021-03405-6">d’être publiés dans la revue spécialisée <em>Nature</em></a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/OHZaI4ns_6k?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Présentation du projet de recherche Invacost (Fondation BNP Paribas, 2015).</span></figcaption>
</figure>
<p>Ainsi, après plusieurs années de collecte, de standardisation des données et d’ajustements méthodologiques avec des économistes et des écologues, nous avons abouti à une somme globale. Et grande fut notre surprise…</p>
<p>Plus de mille milliards de dollars ! Plus précisément, 1 288 milliards de dollars de coûts économiques liés aux invasions biologiques dans le monde entier.</p>
<h2>163 milliards de dollars, rien que pour 2017</h2>
<p>Le plus inquiétant, c’est que ce coût global est essentiellement lié aux dégâts et pertes, qui ont coûté dix à cent fois plus que les investissements réalisés pour éviter ou contrôler ces invasions.</p>
<p>De plus, ces coûts augmentent de façon exponentielle au fil du temps : le coût moyen triple en effet chaque décennie depuis 1970. Pour 2017 seulement, notre estimation dépasse les 163 milliards de dollars ; à titre de comparaison, un chiffre plus de vingt fois supérieur aux budgets combinés de l’Organisation mondiale de la Santé et de l’Organisation des Nations unies pour la même année…</p>
<p>Malgré l’ampleur impressionnante de ces coûts, ceux-ci sont considérablement sous-estimés. Nous n’avons analysé en effet que la moitié la plus robuste des données disponibles (si nous avions pris toutes les données, nous aurions eu une estimation totale quatre fois plus élevée).</p>
<p>De plus, les impacts des invasions ne sont pas tous monétisés ou monétisables, tandis que ceux qui le sont n’ont pas tous été estimés – moins de 10 % des espèces exotiques envahissantes ont été étudiées pour leurs coûts – et l’ont souvent été dans un nombre très limité de pays.</p>
<p>Par conséquent, les coûts énormes estimés ici ne représentent que la partie émergée de l’iceberg qu’est le fardeau économique réel des invasions biologiques dans le monde.</p>
<h2>La prévention avant tout</h2>
<p>Les législations en vigueur sont <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/pdf/10.1111/geb.12517">nettement insuffisantes</a>, surtout si l’on tient compte de l’augmentation rapide des invasions.</p>
<p>L’adage « mieux vaut prévenir que guérir » prend ici tout son sens : les mesures proactives pour empêcher les invasions doivent devenir une priorité. Une fois l’invasion avérée, plus la réponse est précoce, plus son contrôle sera efficace – et moins il sera coûteux.</p>
<p>Si l’on tarde à intervenir, seules des mesures d’atténuation des impacts sont alors possibles, l’élimination de l’invasion devenant rapidement illusoire. L’invasion de l’<a href="https://doi.org/10.1016/S0006-3207(02)00161-1">écureuil gris en Italie</a> en est un exemple frappant. En provenance d’Amérique, ce mignon rongeur menace pourtant d’extinction l’écureuil roux, le local européen, qui disparaît dans les zones envahies. Cependant, des questionnements éthiques ont retardé la mise en place des campagnes d’éradication, pourtant efficaces, laissant le temps à l’espèce de s’implanter et de s’étendre sur le territoire.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/392822/original/file-20210331-19-uiyjil.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/392822/original/file-20210331-19-uiyjil.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/392822/original/file-20210331-19-uiyjil.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/392822/original/file-20210331-19-uiyjil.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/392822/original/file-20210331-19-uiyjil.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=538&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/392822/original/file-20210331-19-uiyjil.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=538&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/392822/original/file-20210331-19-uiyjil.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=538&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’écureuil gris américain, qui élimine l’écureuil roux européen par compétition et par transmission de maladies.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Anna Turbelin/Universite Paris-Saclay</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les espèces exotiques envahissantes ne connaissent pas nos frontières : il s’agit d’une menace globale, qui doit être appréhendée à la même échelle. Pour être efficace, la coopération internationale devrait investir en priorité dans la gestion de ces invasions pour les pays à faible revenu (notamment en Asie centrale, en Asie du Sud-Est et en Afrique), <a href="http://www.nature.com/doifinder/10.1038/ncomms12485">où les législations et les capacités de gestion font bien souvent défaut</a>.</p>
<p>Enfin, des recherches plus nombreuses sur les coûts économiques des invasions biologiques sont nécessaires, car les connaissances actuelles demeurent fragmentées. Ce manque de données nuit à notre compréhension globale du phénomène ainsi qu’à nos capacités à l’aborder efficacement.</p>
<p>Mais, rappelons-le, l’objectif initial de nos travaux est d’estimer les coûts économiques énormes des invasions biologiques pour sensibiliser sur l’impact le plus important : celui qui menace la biodiversité et les écosystèmes. Espérons que mille milliards de dollars seront suffisants pour une cette indispensable prise de conscience !</p>
<hr>
<p><em>Les travaux évoqués dans cet article ont été rendus possible grâce au financement de la base de données InvaCost par la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Fondation BNP Paribas</a> et le <a href="https://www.axa-research.org/fr">Axa Research Fund</a> dans le cadre de la chaire de « Biologie des invasions » portée par la <a href="https://www.fondation.universite-paris-saclay.fr/">Fondation Paris-Saclay Université</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/158204/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Franck Courchamp receives funding from AXA Research Fund and the CNRS</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Boris Leroy, Camille Bernery et Christophe Diagne ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Les invasions biologiques sont une menace importante pour la biodiversité, mais elles coûtent aussi très cher à nos sociétés. Une étude estime ce coût à plus de 1000 milliards de dollars depuis 1970.Camille Bernery, Doctorante en écologie des invasions, Université Paris-SaclayBoris Leroy, Maître de conférences en écologie et biogéographie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Christophe Diagne, Chercheur post-doctorant en écologie des invasions, Université Paris-SaclayFranck Courchamp, Directeur de recherche CNRS, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1505502021-01-05T19:14:22Z2021-01-05T19:14:22ZAntarctique : comment on organise une exploration scientifique en milieu hostile<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/373276/original/file-20201207-21-1142pdn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=55%2C101%2C2941%2C1925&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Vue aérienne du raid scientifique EAIIST prise par drone alors qu’il évolue sur le plateau Antarctique autour de 78 °S. Le raid est composé de trois convois comprenant les espaces de vie et l’énergie (en bas à gauche), les cuves de fioul (milieu)
et l’équipement scientifique (haut). </span> <span class="attribution"><span class="source">EAIIST/IPEV/PNRA</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Le premier à avoir imaginé, pensé, organisé et tenté de réaliser un raid terrestre sur le continent Antarctique est l’incroyable explorateur britannique Ernest Henry Shackleton. L’expédition Imperial Trans-Antarctic Expedition de 1914, plus connue sous le nom du navire qui fût englouti par les glaces, l’Endurance, avait pour objectif de traverser ces espaces polaires, de la mer de Weddell à la mer de Ross en passant par le pôle Sud.</p>
<p>Les « polaires » connaissent tous cette histoire incroyable de l’Endurance, ce monument épique de la survie en milieu hostile, de la traversée inconcevable en barque entre l’île inhospitalière et glacée de l’Éléphant et la Géorgie du Sud. Cette expédition fût une prouesse (une histoire de survie exemplaire sous le commandement de Shackleton) dans un échec (aucune traversée n’aura lieu).</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/sgh_77TtX5I?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Survival ! The Shackleton Story. (National Geographic Creative/Youtube, 2014).</span></figcaption>
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<p>Un siècle plus tard, se lancer à l’assaut de l’Antarctique demeure une aventure un peu folle, qui exige des années de préparation. Entre le 23 novembre 2019 et le 5 février 2020, une équipe que je coordonnais s’y est risquée, à l’occasion du raid <a href="https://www.eaiist.com/fr/">East Antarctic International Ice Sheet Traverse</a> (EAIIST). Le trajet, établi à partir de l’analyse de cartes satellites, s’est décomposé en 34 jours de conduite à 12 km/h de moyenne, 19 jours d’arrêt technique à Cap Prud’homme et Concordia et 26 jours d’arrêts « science ».</p>
<p>Huit ans de préparation, deux mois d’expédition et 3300 kilomètres aller-retour. Un an après, voici quelques leçons tirées de cette expérience hors du commun.</p>
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<figcaption><span class="caption">Présentation vidéo du raid EAIIST. (Institut polaire français/Vimeo, 2019).</span></figcaption>
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<h2>De la préparation… et de la chance</h2>
<p>Un raid de trois mois en Antarctique ne s’improvise pas. La genèse du projet remonte à 2011 ; 8 ans auront donc été nécessaires pour préparer ce voyage. Huit années ponctuées d’innombrables réunions, d’échecs, d’échanges, de crises aussi. Le retrait d’un de nos partenaires du projet nous a, par exemple, forcés à modifier le parcours. Quant aux difficultés d’acheminement du matériel à cause de la glace de mer, elles nous ont contraints à décaler d’une année notre projet. Il ressort de cette expérience qu’une préparation longue, bien en amont et minutieuse par des personnels aguerris et expérimentés, est une condition sine qua non pour la réussite d’une telle entreprise.</p>
<p>Malgré tout cela, je mesure aussi combien la chance joue dans une telle expédition. La préparation réduit les aléas, mais ne les élimine pas. Nous avons dû faire face à la casse d’un moteur de tracteur, puis à la rupture d’un timon et d’un essieu de traîneau, autant d’éléments centraux à la progression du convoi. Par chance, ces problèmes techniques sont arrivés une fois le programme scientifique effectué, sur le chemin du retour. L’expérience des mécaniciens aguerris aux conditions polaires et leur habilité à trouver des solutions au milieu de rien ont permis d’éviter tout abandon de matériel.</p>
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<span class="caption">Vue plongeante d’un site de forage. On aperçoit un coupe vent permettant aux opérateurs de travailler à l’abri, ainsi que deux carottiers pour forer la glace. Un petit modèle (premier plan à gauche) qui fore à 20 mètres maximum et un modèle plus gros, dont le mât est basculé pour extraire les carottes fore lui à 200 mètres.</span>
<span class="attribution"><span class="source">EAIIST/IPEV/PNRA</span></span>
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<p>Que ces avaries aient lieu en plein milieu du programme scientifique et ce sont toutes les cartes du jeu qui auraient été rebattues. Et que dire de l’émergence d’une pandémie comme le monde n’en a pas connu depuis la grippe espagnole si elle avait été plus précoce ? S’il est absolument nécessaire de préparer bien en amont ce type de projet, rendu très complexe par la nature du terrain, l’architecture du programme scientifique et la sécurité des personnels, la chance doit aussi vous accompagner.</p>
<h2>Choisir son équipe avec soin</h2>
<p>Dans la préparation d’un raid isolé en quasi autonomie comme celui que nous avons vécu, la composition de l’équipe n’est pas une tâche à prendre à la légère. Même si la dynamique d’un groupe vivant quasiment les uns sur les autres est difficilement prévisible, il est des atouts qu’il faut mieux mettre de son côté avant de partir en procession.</p>
<p>Les contraintes de départ étaient d’avoir à bord un personnel technique compétent et expérimenté, composé d’un chef de raid, de deux mécaniciens et d’un docteur. Les six places restantes pour les scientifiques devaient, là aussi, être occupées par du personnel expérimenté connaissant parfaitement le terrain et ses conditions difficiles, être adaptable et multitâche. Il fallait aussi prendre en compte une participation franco-italienne au raid. Je souhaitais de plus la présence de femmes autant que possible, afin d’avoir des points de vue variés et complémentaires sur les sujets qui pourraient être abordés au cours des 70 jours de ce confinement volontaire.</p>
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<span class="caption">Pause déjeuner dans la caravane vie du raid scientifique EAIIST. Exiguë mais confortable et chaleureuse compte tenu de l’environnement !</span>
<span class="attribution"><span class="source">A.Spolaor/IPEV/PNRA</span></span>
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<p>Toutes les personnes que nous avons choisies comptabilisaient des années d’expérience polaire dans toutes les configurations possibles (travail en station de recherche, en camp isolé, en raid, en milieu alpin) et possédaient des spécialités scientifiques adaptées.</p>
<p>L’entente a été excellente, chacun a su amener une personnalité, un regard complémentaire au groupe. Je n’ai ressenti que très peu de tension entre nous, chacun faisant l’effort d’être le plus accommodant possible tout en maintenant un esprit chaleureux, amical et bienveillant.</p>
<p>Les rencontres avec le raid logistique alimentant la station Concordia sur les portions de route communes ont par ailleurs été des moments très forts du raid. Ce n’est pas vraiment l’endroit où l’on imagine croiser quelqu’un sur sa route ! Se retrouver en toute amitié, au milieu de nulle part, prendre l’apéritif, partager un repas entre les « scientos » et les « technicos » restera un moment fort de cette aventure, tout comme le fût l’échange de personnel aux mégadunes.</p>
<h2>Maximiser les retours scientifiques</h2>
<p>L’organisation d’un raid scientifique en milieu hostile, contraignant tant pour les machines que pour les personnes, présente d’autre part des coûts significatifs qu’il convient de minimiser en maximisant tous les retours scientifiques possibles.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/377188/original/file-20210105-15-1q6480d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Wikipedia/eaiist.com" src="https://images.theconversation.com/files/377188/original/file-20210105-15-1q6480d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/377188/original/file-20210105-15-1q6480d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/377188/original/file-20210105-15-1q6480d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/377188/original/file-20210105-15-1q6480d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/377188/original/file-20210105-15-1q6480d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/377188/original/file-20210105-15-1q6480d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/377188/original/file-20210105-15-1q6480d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Carte générale de l’Antarctique (gauche) ; parcours du raid EAIIST (droite).</span>
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<p>Fort d’un programme scientifique chargé, nous avons établi un chronogramme, la configuration du raid, une répartition des tâches et la rotation du personnel. Une saison sur le plateau Antarctique n’ouvre en effet qu’une soixantaine de jours d’activités de recherche en saison d’été. En tenant compte des préparatifs nécessaires, c’est au final cinquante jours de raid qui étaient disponibles pour réaliser EAIIST. À ces cinquante jours sur le plateau Antarctique, il fallait ajouter 2 fois 10 jours de conduite pour acheminer les véhicules de la côte à Concordia puis les redescendre.</p>
<p>Pour permettre à toutes les expériences scientifiques d’être réalisées, une rotation de personnel devait s’effectuer sur la zone des mégadunes, permettant ainsi à 15 personnes en tout de participer alors que le raid ne peut accueillir que 10 couchages. La composition du convoi a été pensée par l’Institut polaire afin d’accommoder le personnel, d’assurer un haut niveau de sécurité et de pouvoir acheminer tous les équipements : cinq tracteurs Challenger de type C65, des traîneaux, des cuves de fioul, une dameuse, la caravane vie (cuisine, bureau, dortoir, communication), la caravane énergie (atelier mécanique, sanitaire, douche, groupe électrogène, réserve nourriture) et les deux laboratoires mobiles CLIMCOR chaud et froid…</p>
<p>Apprenant des difficultés des années précédentes relatives à l’acheminement du matériel et du personnel causées par les aléas de la glace de mer, nous avons anticipé l’expédition du matériel lourd un an à l’avance. Ce choix s’est avéré fondamental. Au-delà du fait de gagner en flexibilité et de s’affranchir des conditions de glace de mer, l’avarie apparue sur l’Astrolabe au début de la saison 2019 aurait porté un coup certainement fatal au projet de raid si l’on intègre en plus aujourd’hui la problématique Covid-19.</p>
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<span class="caption">Mesure de l’albédo (ou pouvoir réfléchissant) de la neige. Cette mesure permet de connaître la quantité d’énergie reçue et renvoyée de l’atmosphère et permet d’établir un bilan d’énergie. Au bout de la perche se trouve un spectro-radiomètre mesurant l’énergie lumineuse.</span>
<span class="attribution"><span class="source">G. Larocca/IPEV/PNRA</span></span>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/373875/original/file-20201209-20-10y8sb3.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/373875/original/file-20201209-20-10y8sb3.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/373875/original/file-20201209-20-10y8sb3.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/373875/original/file-20201209-20-10y8sb3.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/373875/original/file-20201209-20-10y8sb3.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/373875/original/file-20201209-20-10y8sb3.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/373875/original/file-20201209-20-10y8sb3.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Échantillonnage d’un puits de neige. L’empilement des couches permet de remonter le temps et de suivre l’évolution passée de la composition chimique des précipitations. Les opérateurs sont habillés de façon à minimiser les contaminations. Les prélèvements de neige se font en enfonçant dans la paroi de neige des flacons propres qui sont ensuite stockés dans des caisses isothermes et rapatriés en Europe pour être analysés.</span>
<span class="attribution"><span class="source">G. Larocca/IPEV/PNRA</span></span>
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<p>À ce jour, l’ensemble des échantillons a été rapatrié à Grenoble. Ils sont stockés dans un entrepôt frigorifique à – 20 °C. Avec 900 mètres de carotte de glace et des milliers d’échantillons de neige prélevés tout au long du trajet, la moisson a été fructueuse et attend d’être expédiée dans les différents laboratoires partenaires du projet. Covid-19 oblige, l’analyse des échantillons est à ce jour suspendue et en attente de jours plus favorables à l’expédition de ce précieux trésor.</p>
<p>Leur analyse devrait permettre d’apporter des éléments de réponse à l’une des questions fondamentales que l’on se pose sur l’Antarctique : les hauts plateaux de cette zone ont-ils vu ou non leurs précipitations de neige augmenter avec le réchauffement climatique ? Et si oui, comment celles-ci se situent dans une perspective historique ? Rappelons que l’un des enjeux majeurs du réchauffement climatique concerne la montée du niveau des mers, d’ores et déjà enclenchée, inéluctable et irréversible à l’échelle des sociétés humaines.</p>
<p>Savoir à quelle vitesse cette montée se produira est loin d’être une question anodine : elle concerne directement l’enjeu de l’adaptabilité des régions côtières où vivent plus de 600 millions de personnes dans le monde. Nul doute que d’autres études et d’autres raids scientifiques seront nécessaires pour mieux appréhender cette question tant l’Antarctique s’avère vaste et varié. Un continent si loin des yeux et pourtant si proche pour notre futur commun.</p>
<h2>Voyager léger</h2>
<p>Les retours scientifiques gagneront aussi en précision si les raids à venir disposent d’infrastructures plus légères, capables de parcourir de grandes étendues en peu de temps tout en garantissant sécurité et autonomie. Car si le raid scientifique en tracteur est un outil fantastique d’exploration, il implique néanmoins des infrastructures lourdes, peu agiles, qui manquent de souplesse et d’adaptabilité. S’il convient parfaitement à des raids où les opérations scientifiques nécessitent une charge utile importante, sa « lourdeur » peut aussi devenir un handicap.</p>
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<span class="caption">Vue aérienne du raid scientifique EAIIST prise par drone alors qu’il évolue sur le plateau Antarctique autour de 78 °S. À l’arrêt du soir les tracteurs sont détachés de leur charge et réunis en face de la caravane énergie pour être réchauffés durant la nuit.</span>
<span class="attribution"><span class="source">EAIIST/IPEV/PNRA</span></span>
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<p>Une réflexion sur le sujet est en cours à l’Institut polaire français en concertation avec les scientifiques ; disposer d’une infrastructure plus agile représenterait un intérêt majeur pour l’étude des forts gradients d’altitude, d’accumulation, de température, de vent, d’humidité, d’écoulement que l’on observe en Antarctique.</p>
<p>Quoiqu’il en soit, aidé par la chance – temps favorable, neige portante, peu de soucis –, EAIIST constitue à ce jour une réussite à la fois scientifique et logistique.</p>
<hr>
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Le <a href="https://group.bnpparibas/actualite/premiere-traversee-antarctique-est">projet de recherche « EAIIST »</a> dans lequel s’inscrit cette publication a bénéficié du soutien de la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du programme Climate Initiative</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/150550/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Joël Savarino a reçu des financements de la fondation BNP Paribas via son programme Climate Initiative et de l’Agence nationale de la recherche.</span></em></p>Entre novembre 2019 et février 2020, une équipe de scientifiques franco-italienne s’est lancée à l’assaut de l’Antarctique. Retour sur une expédition hors du commun.Joël Savarino, Directeur de recherche CNRS, Institut des géosciences de l’environnement, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1495662020-11-16T18:21:05Z2020-11-16T18:21:05ZCes petites créatures marines sont essentielles pour combattre le changement climatique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/369664/original/file-20201116-23-1t6jpmq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Image montrant des Crocosphaera, un type de bactéries diazotrophes indispensables à la vie dans les océans. </span> <span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>L’océan absorbe environ un <a href="https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1029/2018GB006041">quart du CO₂ que les humains émettent dans l’atmosphère</a>, ce qui atténue le changement climatique et rend la vie possible sur Terre. Une grande partie de ce CO<sub>2</sub> est consommé par le phytoplancton, de petites créatures marines qui utilisent la lumière pour produire de la photosynthèse, comme les plantes et les arbres sur terre. </p>
<p>Parallèlement, ils transforment le CO<sub>2</sub> en une matière organique. Le phytoplancton est la base de la chaîne alimentaire marine, et sa productivité n’affecte pas seulement les niveaux de CO<sub>2</sub>, mais également la pêche et l’économie mondiale.</p>
<p>Alors pourquoi le phytoplancton reste un inconnu pour la plupart d’entre nous, s’il est si important ? Essayez de le trouver la prochaine fois que vous visiterez un aquarium, vous risquez d’avoir du mal ! La plupart des espèces de phytoplancton sont 100 fois plus petites que les fourmis de votre jardin, ce qui signifie que vous aurez besoin d’une loupe très puissante (un microscope) pour pouvoir les étudier. De nos côtes jusqu’au milieu de l’océan, le phytoplancton est très répandu mais sa connaissance exige une certaine pratique de la mer.</p>
<h2>Samaritains de l’océan</h2>
<p>Le phytoplancton a toutefois besoin d’un ingrédient clé pour être actif : le <a href="https://www.nature.com/articles/387272a0">nitrogène</a>. Tout comme les engrais ou les légumineuses sont nécessaires pour faire pousser les cultures sur terre, l’azote fournit la valeur nutritive dont le phytoplancton a besoin pour se développer dans l’océan. Mais il peut être difficile d’obtenir suffisamment d’azote dans le milieu marin. Les côtes reçoivent l’azote par le biais des rivières ou des remontées d’eaux profondes riches en azote, mais la plus grande partie de l’océan en est trop éloignée pour bénéficier de ces sources.</p>
<p>Pour compliquer les choses, la surface de l’océan tropical est chaude, ce qui rend très difficile le mélange avec les eaux profondes, riches en nutriments. Ces « déserts océaniques » constituent de grandes étendues d’eau bleu clair et représentent [environ 60 % de la surface océanique mondiale]. Comment la vie est-elle possible là-bas sans azote ? Heureusement, d’autres minuscules créatures <a href="https://theconversation.com/tropical-ocean-bacteria-help-pump-co2-out-of-the-atmosphere-new-study-125590?utm_medium=Social&utm_source=Twitter#Echobox=1571839929">appelées « diazotrophes »</a> existent aussi dans ces zones.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1112839651642015744"}"></div></p>
<p>Les diazotrophes viennent à la rescousse en accomplissant un service herculéen : transformer l’azote inerte de l’air en formes azotées juteuses disponibles pour le phytoplancton. Cette transformation implique un grand investissement énergétique des diazotrophes, pour finir par donner cet azote à la communauté. Les diazotrophes sont ainsi les véritables Samaritains de l’océan.</p>
<p>Leur mission cruciale se trouve pourtant menacée par le changement climatique. La pollution, l’acidification, la perte d’oxygène et le réchauffement font partie des effets négatifs de notre développement économique et d’une croissance démographique en constante augmentation. Le changement climatique affecte déjà la <a href="https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/2017EF000592">quantité de nitrogène qui atteint l’océan</a> en modifiant la circulation des courants, en augmentant la charge en azote de l’agriculture par les rivières ou les apports atmosphériques des activités industrielles.</p>
<p>Mais comment le changement climatique affectera-t-il l’activité et la diversité des diazotrophes ? Difficile à dire puisqu’on ne connaît ni leur nombre ni l’étendue de leur diversité. Seules cinq espèces ont été étudiées dans l’océan, et les expériences de simulation du changement climatique n’ont été testées que sur deux d’entre elles. Les expéditions mondiales de circumnavigation ont révélé que les bactéries diazotrophes sont beaucoup plus variées que nous le pensions.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/367487/original/file-20201104-15-17d2wka.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/367487/original/file-20201104-15-17d2wka.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367487/original/file-20201104-15-17d2wka.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367487/original/file-20201104-15-17d2wka.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367487/original/file-20201104-15-17d2wka.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367487/original/file-20201104-15-17d2wka.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367487/original/file-20201104-15-17d2wka.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367487/original/file-20201104-15-17d2wka.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Expériences pour tester la réponse des cellules diazotrophes au changement climatique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Mar Benavides</span></span>
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<h2>Un indispensable puits de CO₂</h2>
<p><a href="https://twitter.com/NOTION_project">Notre projet scientifique Notion</a> se penchera sur l’avenir du phytoplancton par le biais d’une lentille diazotrophe. En laboratoire, nous allons recréer les conditions du changement climatique et observer comment les diazotrophes y réagissent.</p>
<p>Nous allons répondre à des questions telles que : le CO<sub>2</sub> supplémentaire présent dans l’eau du fait du changement climatique affecte-t-il leur croissance ? Les diazotrophes donnent-elles encore plus d’azote « fertilisant » à d’autres organismes dans un monde où la teneur en CO<sub>2</sub> est plus élevée ?</p>
<p>Il existe déjà des modèles globaux de la circulation océanique et de la distribution des espèces de phytoplancton, mais ils doivent être complétés à l’aide de données expérimentales afin de prédire à quoi ressemblera notre océan à l’avenir. Le projet Notion intégrera de nouvelles bases de données mondiales et expérimentales afin d’intégrer les informations manquantes au sein des modèles. Nous transformerons ainsi la biologie en mathématiques, en utilisant le comportement de réponse des diazotrophes comme tendances pouvant être projetées dans différents scénarios de changement climatique futur.</p>
<p>Grâce à ces outils, nous espérons mieux comprendre comment l’océan réagit au changement climatique. De telles connaissances seront essentielles pour une utilisation durable des étendues océaniques et de leurs ressources, ainsi que pour évaluer sa capacité à demeurer un indispensable puits de CO<sub>2</sub>.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Le projet de recherche « Notion » dans lequel s’inscrit cette publication a bénéficié du soutien de la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-biodiversity-initiative">programme Climate and Biodiversity Initiative</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/149566/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mar Benavides a reçu des financements de la Fondation BNP Paribas (Climate & Biodiversity initiative).</span></em></p>Dans l’océan, le phytoplancton, aidé par les diazotrophes, joue un rôle essentiel dans le retrait du CO₂ de l’atmosphère. Mais le changement climatique perturbe cet équilibre délicat.Mar Benavides, Research scientist, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1371382020-11-04T21:09:41Z2020-11-04T21:09:41ZComprendre les mécanismes d’adaptation aux dérèglements climatiques, un vrai défi<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/367295/original/file-20201103-23-qytnvj.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C35%2C1997%2C1230&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Couple de mésanges bleues dans un chêne. </span> <span class="attribution"><span class="source">Stéphan Tillo</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Urbanisation croissante, agriculture intensive, surexploitation des ressources, introduction d’espèces exotiques et dérèglements climatiques : toutes ces modifications environnementales constituent un cocktail détonant pour la biodiversité.</p>
<p>Face à ces transformations, des questions reviennent fréquemment : les espèces sauvages pourront-elles s’adapter à des changements aussi rapides et d’une telle ampleur ? Les adaptations observées permettront-elles de préserver une part de la biodiversité mondiale ?</p>
<p>Au cours des dernières décennies, notre vision des processus d’adaptation des organismes vivants à leur environnement a drastiquement changé.</p>
<p>On a en effet longtemps pensé que l’évolution des espèces se faisait sur des échelles de temps très longues, avant de réaliser qu’elle pouvait <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11284-007-0416-6">être très rapide</a>, comme en attestent par exemple l’évolution de la résistance aux antibiotiques chez les bactéries pathogènes de l’homme, ou l’évolution de la coloration chez un papillon commun, la <a href="https://planet-vie.ens.fr/thematiques/genetique/mutation-reparation/la-mutation-a-l-origine-du-melanisme-industriel-de-la">phalène du boulot</a>, suite au noircissement de l’écorce des arbres due à une forte pollution atmosphérique en Angleterre au XIXe siècle.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/367296/original/file-20201103-15-eh029g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/367296/original/file-20201103-15-eh029g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367296/original/file-20201103-15-eh029g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=195&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367296/original/file-20201103-15-eh029g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=195&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367296/original/file-20201103-15-eh029g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=195&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367296/original/file-20201103-15-eh029g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=246&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367296/original/file-20201103-15-eh029g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=246&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367296/original/file-20201103-15-eh029g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=246&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les deux types de coloration de la phalène du bouleau : (A) forme claire, (B) forme sombre.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://planet-vie.ens.fr/thematiques/genetique/mutation-reparation/la-mutation-a-l-origine-du-melanisme-industriel-de-la">Vincent Guili</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Evolution et plasticité</h2>
<p>Les organismes vivants s’adaptent aux modifications de leur milieu de vie (comme la diminution des précipitations ou présence d’un nouveau prédateur) via deux processus majeurs : l’évolution génétique et/ou la plasticité phénotypique.</p>
<p>L’adaptation par évolution génétique se fait par modification, entre générations, de la composition génétique de la population sous l’action de la sélection naturelle. Par exemple, les <a href="https://www.nature.com/articles/423136b">moustiques porteurs d’une mutation nouvelle</a> apparue dans les années 1980 ont une survie bien meilleure face aux insecticides que les autres individus non porteurs de cette innovation génétique. Ainsi, cette mutation et la résistance aux insecticides qu’elle procure se sont répandues dans les populations naturelles de moustiques en deux décennies environ.</p>
<p>Ce processus d’adaptation par évolution de la composition génétique nécessite que les traits sélectionnés (la résistance, par exemple) soient au moins en partie « héritables » – c’est-à-dire transmissibles entre générations, de parents à enfants – et variables génétiquement. Il est important de relever que puisque les changements génétiques ont lieu entre les générations, l’évolution génétique est d’autant plus rapide que le temps de génération de l’espèce est court : ainsi, le moustique peut s’adapter à un nouvel environnement plus rapidement que la baleine.</p>
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<figcaption><span class="caption">Les mécanismes de l’évolution : moustiques et insecticides. (Vincent Maisonneuve/Youtube, 2015).</span></figcaption>
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<p>Un second mécanisme d’adaptation est la « plasticité phénotypique ».</p>
<p>Alors que l’évolution génétique est un processus qui induit des changements entre générations dans une population donnée, la plasticité phénotypique est un processus d’adaptation qui peut induire des changements au sein de chaque individu de la population.</p>
<p>Par exemple, chez de nombreux mammifères, la quantité de tissu adipeux d’un individu peut varier en fonction de plusieurs paramètres environnementaux, le froid notamment. De même, de nombreuses espèces augmentent leur temps de vigilance lorsque le risque de prédation est élevé.</p>
<p>La plasticité s’exprime donc au sein d’une génération, rendant possibles des adaptations plus rapides que par l’évolution génétique. Elle permet notamment un réajustement de l’organisme en réponse aux conditions environnementales changeantes au cours de la vie des individus.</p>
<p>Souvent, les organismes ont besoin de temps pour être prêts face à de nouvelles conditions environnementales : si la réponse plastique est le développement d’une défense contre les prédateurs, celle-ci doit être mise en place bien avant la rencontre avec le prédateur. Les organismes utilisent donc des indices présents dans l’environnement pour développer la réponse adéquate au bon moment. C’est le cas des têtards qui développent des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1558-5646.1997.tb05119.x">morphologies différentes</a> en fonction de la présence ou non d’odeur de prédateur.</p>
<p>Dans le contexte actuel, l’existence d’un mécanisme tel que la plasticité phénotypique, largement répandu dans le monde vivant, pouvant permettre une adaptation très rapide aux changements environnementaux est d’un intérêt majeur pour comprendre et anticiper les conséquences des bouleversements d’origines anthropiques sur la biodiversité.</p>
<h2>Pondre au bon moment</h2>
<p>La mésange bleue (<em>Cyanistes caeruleus</em>), un petit passereau, est très étudiée dans la discipline de l’écologie, et fait l’objet de nombreuses recherches basées sur des observations en populations naturelles.</p>
<p>Les travaux sur cette espèce ont contribué à mieux comprendre l’importance de la plasticité phénotypique pour l’adaptation des organismes au changement climatique.</p>
<p>Des études en milieu naturel, mises en place depuis plusieurs dizaines d’années pour les suivis les plus anciens, nous ont permis de mieux comprendre l’écologie de la mésange bleue. Chez cette espèce, comme chez la plupart des autres passereaux insectivores vivant en forêts tempérées, les poussins sont principalement nourris de chenilles par leurs deux parents – environ 1800 chenilles pour nourrir un seul poussin de l’éclosion à l’envol.</p>
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<img alt="Mésange bleue avec un insecte dans le bec sur une branche d’arbre" src="https://images.theconversation.com/files/363509/original/file-20201014-19-y4zjot.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/363509/original/file-20201014-19-y4zjot.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/363509/original/file-20201014-19-y4zjot.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/363509/original/file-20201014-19-y4zjot.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/363509/original/file-20201014-19-y4zjot.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/363509/original/file-20201014-19-y4zjot.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/363509/original/file-20201014-19-y4zjot.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Il faut environ 1000 chenilles pour nourrir, entre l’éclosion et l’envol, l’oisillon de la mésange bleue.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/134610993@N02/47745451381">Lumiks Lumiks/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>Ainsi, la synchronisation entre les besoins en nourriture des poussins et la période d’abondance des chenilles a un impact majeur sur la survie des poussins. Pour que les poussins naissent au bon moment, c’est-à-dire lorsque les parents pourront trouver une grande quantité de chenilles à ramener au nid, la femelle mésange doit pondre environ 30 jours avant le pic d’abondance des chenilles dans la forêt.</p>
<p>Mais comment pondre au bon moment ?</p>
<p>La date de ponte chez les mésanges, comme chez de nombreux oiseaux, dépend en partie de l’environnement et notamment de la température : les années chaudes, les mésanges pondent plus tôt que les années froides, illustrant parfaitement le concept de plasticité phénotypique.</p>
<p>La période durant laquelle les mésanges sont les plus sensibles à la température, c’est-à-dire la période où les oiseaux captent les indices d’un printemps plus ou moins chaud et précoce, peut varier entre un et trois mois avant la reproduction. En fonction des populations, cette période de <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rstb.2018.0178">sensibilité à la température</a> commence au printemps ou à la fin de l’hiver. La fiabilité de la température en tant que prédicteur de la période d’abondance de nourriture (les chenilles) est cruciale pour le succès de la reproduction.</p>
<p>La plasticité en réponse à la température est commune. Ainsi, face au réchauffement climatique, de nombreuses espèces, animales et végétales, se reproduisent de plus en plus tôt au cours des années, tout comme les arbres bourgeonnent plus précocement. Ces changements de rythme de vie, liés à une réponse des organismes aux changements des températures, sont d’ores et déjà observables dans nos jardins et forêts.</p>
<p>La plasticité explique donc en grande partie ce qu’on appelle des printemps de plus en plus précoces. La plasticité relative à la phénologie – c’est-à-dire le calendrier des évènements au cours de l’année, comme la date de ponte des mésanges – est en effet une des principales réponses des <a href="https://doi.org/10.1038/nature01286">espèces sauvages au changement climatique</a>.</p>
<p>On ne sait toutefois que peu de choses sur la façon dont les changements globaux peuvent affecter cette réponse et tester les limites de l’adaptation. Est-il possible pour les espèces de s’adapter rapidement à ces milieux inédits et stressants ? Une étude récente suggère que la plasticité de la phénologie <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-019-10924-4">pourrait être déjà insuffisante</a> pour permettre la persistance des populations.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/changement-climatique-et-crise-de-la-biodiversite-la-dangereuse-alliance-83825">Changement climatique et crise de la biodiversité : la dangereuse alliance</a>
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<h2>Des perturbations nouvelles et stressantes</h2>
<p>Sur la question de l’adaptation des animaux aux changements climatiques, de nombreuses questions scientifiques restent ouvertes.</p>
<p>Que se passe-t-il lorsque les environnements deviennent trop différents de ceux expérimentés historiquement par les organismes ? En particulier, comment l’adaptation à un changement climatique progressif permet-elle de faire face aux évènements climatiques extrêmes comme les canicules ? Comment les différences de réponses entre espèces affecteront leurs interactions (par exemple, entre proies et prédateurs ou entre espèces en coopération) ?</p>
<p>Les chenilles se développent de plus en plus tôt en réponse au changement climatique, mais existe-t-il une limite pour les mésanges, une date avant laquelle il est physiologiquement impossible de commencer à se reproduire, empêchant la synchronisation avec leurs proies ? Comment les changements globaux affectent-ils la fiabilité des informations nécessaires aux organismes pour répondre à l’environnement ?</p>
<p>Par exemple, à l’éclosion, les jeunes de tortues marines s’orientent souvent vers les villes plutôt que vers la mer, la lumière urbaine étant plus forte que celle de la Lune. Ce type d’erreurs d’interprétation peut-il limiter voire annuler les bénéfices de la plasticité ?</p>
<p>Enfin, les organismes pourront-ils faire face à des <a href="https://doi.org/10.1016/j.tree.2019.02.010">changements environnementaux multiples grâce à la plasticité phénotypique</a> ? En plus du changement climatique (changement des températures et des précipitations), les organismes sont en effet confrontés à de multiples perturbations – de nouveaux pathogènes et prédateurs, la présence de pesticides, le développement des milieux urbains, etc.</p>
<p>Notre projet de recherche « Mommy knows best » vise à évaluer si les limites de la plasticité sont déjà détectables dans les populations naturelles, avec comme modèle d’étude la mésange bleue. Il s’agira de tester l’effet de divers facteurs environnementaux sur la plasticité de la date de ponte chez les mésanges (comme l’effet de l’urbanisation ou des pratiques agricoles, par exemple) et de modéliser les effets de la plasticité sur la dynamique des populations de mésanges, afin de comprendre dans quelle mesure des modifications de la plasticité peuvent affecter le risque d’extinction des populations.</p>
<p>Les conclusions de ce projet pourront également apporter un éclairage conceptuel sur le processus de plasticité phénotypique dans le contexte du changement climatique, et être appliquées à d’autres espèces sauvages.</p>
<p>Comprendre les limites de l’adaptation face aux changements globaux permettra de mieux comprendre l’ampleur du défi auquel est confrontée la biodiversité à l’heure actuelle… Mais nul besoin d’attendre pour lutter contre son anéantissement <a href="https://www.pnas.org/content/114/30/E6089">déjà en cours</a> !</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Le projet de recherche « Mommy knows best » dans lequel s’inscrit cette publication a bénéficié du soutien de la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-biodiversity-initiative">programme Climate and Biodiversity Initiative</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/137138/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Céline Teplitsky a reçu des financements de la Fondation BNP Paribas. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Anne Charmantier est membre du conseil scientifique de la Fondation pour la Recherche sur al Biodiversité (FRB)</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Suzanne Bonamour ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Au cours des dernières décennies, notre vision des processus d’adaptation des organismes vivants à leur environnement a drastiquement changé.Céline Teplitsky, Chercheuse en écologie évolutive, CNRS, Université de MontpellierAnne Charmantier, Directrice de recherche en écologie évolutive, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Suzanne Bonamour, Chercheuse post-doctorale, Muséum national d’histoire naturelle, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1480672020-10-22T19:55:07Z2020-10-22T19:55:07ZÉloge des glaciers, ces dragons du froid qui inquiètent et fascinent<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/365074/original/file-20201022-14-i2hmus.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le glacier Perito Moreno, en Patagonie. La multitude de séracs donne l’impression que la surface du glacier est recouverte d’écailles de dragon.</span> <span class="attribution"><span class="source">Olivier Dangles/IRD</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p><a href="https://reporterre.net/Ozone-temperature-septembre-2020-le-mois-de-tous-les-tristes-records">Alors que les records de température</a> tombent les uns après les autres, nous sommes plus que jamais préoccupés par le sort des glaciers, ces victimes emblématiques des dérèglements du climat.</p>
<p>On s’inquiète d’un <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/07/05/la-mysterieuse-neige-rose-du-glacier-presena-dans-les-alpes-italiennes_6045276_3244.html">changement soudain de couleur de la glace</a> ; on tente de les <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/06/21/en-italie-un-glacier-recouvert-de-draps-blancs-geants-pour-ralentir-sa-fonte_6043648_3244.html">recouvrir de draps blancs</a> pour limiter les effets du rayonnement ; on invite le <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/02/14/sur-les-pentes-du-mont-blanc-macron-tente-de-convaincre-de-sa-mue-ecologiste_6029507_823448.html">président français au chevet de la Mer de Glace</a>…</p>
<p>Une inquiétude totalement justifiée : en un demi-siècle, les glaciers du monde entier ont perdu <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-019-1071-0">9000 milliards de tonnes de glace</a> ; cela équivaut à perdre chaque année trois fois le volume de glace contenu dans les Alpes européennes.</p>
<p>Pourtant, il fut un temps, pas si lointain, où les glaciers inspiraient plutôt la crainte. Jusqu’à la fin du petit âge glaciaire (∼1300-1860), les habitants des vallées des Alpes se plaignaient régulièrement auprès des autorités civiles des dégâts qu’ils occasionnaient aux cultures et aux habitations. À l’époque, on comparait les glaciers à des <a href="https://www.aletscharena.ch/naturphaenomen/unesco/gletscherwelten-world-of-glaciers.pdf">dragons accrochés aux falaises</a>, mâchoires ouvertes, serpentant dans les vallées étroites et menaçant de s’abattre sur les villages.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/363508/original/file-20201014-13-11hy8mt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/363508/original/file-20201014-13-11hy8mt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/363508/original/file-20201014-13-11hy8mt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/363508/original/file-20201014-13-11hy8mt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/363508/original/file-20201014-13-11hy8mt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/363508/original/file-20201014-13-11hy8mt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/363508/original/file-20201014-13-11hy8mt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/363508/original/file-20201014-13-11hy8mt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Illustration imaginative de la Mer de glace sous la forme d’un dragon, par Henry George Willink (1892).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Henry George Willink</span></span>
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<p>Dragons et glaciers ont en fait nombre de points communs dans leurs « rapports » avec les humains. Et, au-delà de l’anecdote, la parabole des dragons souligne la nécessité d’appréhender la disparition annoncée des glaciers de manière transdisciplinaire, pour faire dialoguer sciences physiques, écologiques et philosophiques.</p>
<h2>Extinction programmée</h2>
<p>Il faut se faire à l’idée. Après avoir utilisé ces dernières décennies les mots « retrait », « recul », ou encore « diminution » pour décrire la dynamique des glaciers, nous devons désormais fouiller un nouveau champ lexical : celui de l’« extinction ».</p>
<p>Ce processus a déjà commencé dans de nombreuses régions du monde, notamment dans les montagnes tropicales, où de petits glaciers situés à l’altitude limite de la glace (entre 4800 et 5000 m dans les Andes équatoriennes) ont déjà entièrement disparu. De même, les glaciers mythiques du <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/ece3.5327">Kilimandjaro (Tanzanie)</a> ou le <a href="https://www.pnas.org/content/116/52/26382">Puncak Jaya (Indonésie)</a> auront totalement disparu d’ici une dizaine d’années.</p>
<p>Quelques siècles après <a href="https://www.researchgate.net/publication/233467718_Ecological_aspects_of_dragons">l’extinction des derniers dragons</a>, les glaciers vont eux aussi disparaître, terrassés par les humains et les conséquences funestes de leurs modes de vie.</p>
<h2>La glace noire</h2>
<p>Sur le plan physique, les glaciers sont, comme les dragons, d’immenses masses vivantes et mobiles, souvent couvertes de « séracs », de grands blocs de glace facturée, en forme d’écailles.</p>
<p>Composés de zone d’accumulation, de transport et d’ablation de la glace, leur survie se trouve menacée lorsque leur bilan en masse est déficitaire, c’est-à-dire que l’accumulation de la glace ne suffit plus à compenser son ablation.</p>
<p>Dans de nombreuses régions du monde, l’extinction des glaciers est accélérée par le <a href="https://www.nature.com/articles/nclimate1433/">noircissement de la glace</a>. Ce phénomène est causé par le dépôt de <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Black_carbon">carbone noir</a> contenu dans des particules de suie émises lors de combustions incomplètes, provoquées par les moteurs à essence, les centrales électriques ou encore les incendies, parfois à plusieurs centaines de kilomètres des glaciers.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/365076/original/file-20201022-19-lz9ulr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/365076/original/file-20201022-19-lz9ulr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/365076/original/file-20201022-19-lz9ulr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/365076/original/file-20201022-19-lz9ulr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/365076/original/file-20201022-19-lz9ulr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/365076/original/file-20201022-19-lz9ulr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=509&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/365076/original/file-20201022-19-lz9ulr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=509&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/365076/original/file-20201022-19-lz9ulr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=509&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Dépôt de poussières et crevasse remplie d’eau sur un glacier du volcan Antisana, en Équateur.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Olivier Dangles/IRD</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Ayant un moindre pouvoir réfléchissant que la glace vierge, et une plus grande capacité d’absorber l’énergie solaire, ce noircissement accélère la fonte de la glace. En certains endroits, notamment les zones planes, ces particules s’accumulent, formant de véritables trous, des cryoconites, colonisées par des biofilms, ces communautés de micro-organismes dont le métabolisme thermogène accentue la fonte.</p>
<p>Le rôle de ces cryoconites dans le processus d’extinction glaciaire est encore peu connu ; mais à l’image des « draconites », ces pierres magiques convoitées par les hommes et contenues dans la tête des dragons, <a href="https://www.researchgate.net/publication/233467718_Ecological_aspects_of_dragons">probablement à l’origine de leur disparition</a>, elles pourraient s’avérer être l’un des points faibles des glaciers.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/363507/original/file-20201014-15-lqocmy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/363507/original/file-20201014-15-lqocmy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/363507/original/file-20201014-15-lqocmy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/363507/original/file-20201014-15-lqocmy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/363507/original/file-20201014-15-lqocmy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/363507/original/file-20201014-15-lqocmy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/363507/original/file-20201014-15-lqocmy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/363507/original/file-20201014-15-lqocmy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Des cryoconites à la surface du glacier 12 du volcan Antisana (4900 m), en Équateur.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Olivier Dangles/IRD</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<h2>« Hic sunt dracones »</h2>
<p>Quelles sont les conséquences de l’extinction des glaciers pour la biodiversité ?</p>
<p>Les glaciers jouent un <a href="https://www.nature.com/articles/s41559-019-1042-8">rôle majeur dans la genèse et le maintien d’une remarquable diversité</a> – espèces animales et végétales, aquatiques et terrestres dont certaines sont endémiques des zones périglaciaires, comme plusieurs espèces de mouches aquatiques.</p>
<p>En particulier, les glaciers fournissent de l’eau et des sels minéraux indispensables à la vie et engendrent des conditions environnementales hétérogènes et instables <a href="https://www.nature.com/articles/nclimate1435?draft=collection">favorables à la coexistence d’espèces</a>.</p>
<p>Depuis quelques années, les scientifiques ont également découvert que la vie était abondante à la surface même des glaciers : virus, levures, bactéries, algues, tardigrades, collemboles, crustacés minuscules et insectes, dont le plus grand représentant est… un dragon. Sur les glaciers de l’extrême sud des Andes, le <a href="https://www.biotaxa.org/rce/article/view/29210">dragon de Patagonie (<em>Andiperla willinki</em>)</a>, un plécoptère de 2 cm de long, effectue la totalité de son cycle biologique dans la matrice glaciaire, la larve vivant dans l’eau et l’adulte à la surface de la glace ou dans de petites crevasses.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/363526/original/file-20201014-19-19xqkzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/363526/original/file-20201014-19-19xqkzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/363526/original/file-20201014-19-19xqkzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/363526/original/file-20201014-19-19xqkzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/363526/original/file-20201014-19-19xqkzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/363526/original/file-20201014-19-19xqkzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/363526/original/file-20201014-19-19xqkzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/363526/original/file-20201014-19-19xqkzq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le dragon de Patagonie (<em>Andiperla willinki</em>) – ici une nymphe – est une espèce d’insecte de l’ordre des Plécoptères (famille Gripopterygidae) inféodée aux glaciers de l’extrême sud de la cordillère des Andes (entre les parallèles 46º et 56º Sud).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gripopterygidae#/media/Fichier:Andiperla1.jpg">Wikipedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>Cette cryobiodiversité a développé un incroyable arsenal d’innovations physiologiques pour s’adapter à la vie sur la glace, comparable à certains pouvoirs magiques de dragons : résistance à des températures extrêmes (-272 °C), à d’importantes radiations UV ou même au vide sidéral.</p>
<p>Si cette biodiversité commence à être mieux décrite dans les régions tempérées, ce n’est pas le cas pour les glaciers tropicaux qui restent, pour la plupart, des terres inconnues ; des territoires où vivent les dragons, « Hic sunt dracones » comme le mentionnaient les cartes médiévales. Il est probable que cette cryobiodiversité disparaîtra avant d’avoir livré tous ses secrets.</p>
<h2>Tout un monde spirituel</h2>
<p>Si glaciologues et écologues écrivent depuis plusieurs décennies la chronique d’une mort annoncée des glaciers, les sciences humaines sont restées plus discrètes sur le sujet. Mais, à l’image des dragons craints des habitants des Alpes, les mythes et croyances liés aux glaciers sont répandus partout dans le monde.</p>
<p>Au Pérou par exemple, des centaines de pèlerins visitent chaque année les glaciers sacrés (ou ce qu’il en reste) de la région de Cuzco pendant la fête religieuse du <a href="https://ethnologie.unistra.fr/institut/conferences-et-films-en-ligne/documentaires-ethnographiques/le-seigneur-de-quylluriti-2018/">Quyllurit’i</a>.</p>
<p>Les glaciers sont devenus de puissants symboles culturels, liés aux dimensions philosophiques et morales du changement climatique. Au-delà des effets sur l’approvisionnement en eau, l’alimentation humaine et animale, l’extinction glaciaire aura d’importantes conséquences sociales sur les communautés de montagne, y compris en matière d’identité culturelle, de spiritualité, d’esthétique ou encore de loisirs. <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/wcc.354">Des études anthropologiques</a> ont d’ailleurs suggéré que la perte de glacier peut affecter les identités communautaires et individuelles, les compréhensions subjectives de la relation homme-nature ou encore entraîner un sentiment généralisé d’insécurité ou d’éco-anxiété.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/363528/original/file-20201014-19-unmpim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/363528/original/file-20201014-19-unmpim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/363528/original/file-20201014-19-unmpim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/363528/original/file-20201014-19-unmpim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/363528/original/file-20201014-19-unmpim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/363528/original/file-20201014-19-unmpim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/363528/original/file-20201014-19-unmpim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/363528/original/file-20201014-19-unmpim.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le sommet englacé du volcan Cotopaxi (5900 m), en Équateur.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Olivier Dangles/IRD</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Depuis des siècles, les hommes sont <a href="https://rai.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/1467-9655.12062">fascinés par les dragons</a> et les <a href="https://books.google.fr/books?id=5e3IAAAAQBAJ">glaciers</a>. Si, en dépit de leur disparition, les premiers conservent une place importante dans nos cultures, quelles seront les conséquences physiques, écologiques et spirituelles d’une vie sans glace ?</p>
<p>Dans le cadre du projet de recherche <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ZGyI2uYQBGo">« Life without Ice »</a>, nous cherchons à répondre à cette question en proposant une étude intégrative et transdisciplinaire de l’extinction des glaciers, et en privilégiant une approche de <a href="https://theconversation.com/et-si-on-cherchait-autrement-plaidoyer-pour-une-science-de-la-durabilite-139586">science de la durabilité</a>. Cette approche efface les frontières entre les disciplines, promeut l’enrichissement mutuel de différents modèles de pensées et de raisonnement, combine les faits et les valeurs, afin de construire des systèmes de savoir plus adaptés aux défis du changement climatique. </p>
<p>Et si les glaciers venaient à disparaître à jamais dans quelques siècles, on pourra toujours se réconforter par les prédictions de scientifiques reconnus : le <a href="https://www.nature.com/articles/520042a">réchauffement climatique devrait conduire à la renaissance des vrais dragons</a>…</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Le projet de recherche « Life without ice » dans lequel s’inscrit cette publication a bénéficié du soutien de la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-biodiversity-initiative">programme Climate and Biodiversity Initiative</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/148067/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Olivier Dangles a reçu des financements de l’AFD, l’ANR, le FFEM, la Fondation McKnight et la Fondation BNP Paribas. </span></em></p>La parabole des dragons souligne la nécessité d’appréhender la disparition annoncée des glaciers de manière transdisciplinaire, pour faire dialoguer sciences physiques, écologiques et philosophiques.Olivier Dangles, Écologue, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1443662020-08-23T15:24:07Z2020-08-23T15:24:07ZAntarctique : dans les coulisses d’une mission scientifique qui suit les manchots Adélie<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/353597/original/file-20200819-24722-jchvjv.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C31%2C5176%2C3414&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les manchots Adélie font partie des prédateurs marins supérieurs qui servent d’« éco-indicateurs » du changement climatique en Antarctique.</span> <span class="attribution"><span class="source">Candice Michelot</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>L’Arctique et l’Antarctique figurent parmi les régions les plus affectées par le changement climatique, <a href="http://www.meteofrance.fr/actualites/78418660-arctique-la-fonte-des-glaces-de-mer-s-accelere">se réchauffant plus vite</a> que n’importe quel autre endroit sur la planète.</p>
<p>Le déclin de l’étendue et de la concentration de la banquise au cours des 35 dernières années en Arctique est équivalent à la rapide perte de banquise que l’Antarctique a subie depuis 2014. Le continent blanc de plus de 14 millions de km<sup>2</sup> avait pourtant montré jusqu’alors une tendance à l’augmentation de sa couverture de glace de mer, avec des variations régionales. Les causes des disparités dans cette dynamique aux deux pôles sont complexes et restent encore <a href="https://www.numerama.com/sciences/530703-lantarctique-a-perdu-autant-detendue-de-banquise-en-3-ans-que-larctique-en-35-ans.html">assez mal connues</a>.</p>
<p>De nombreuses espèces ont un cycle de vie étroitement lié à la dynamique de la glace de mer. Certaines espèces effectuent leur activité de reproduction sur la banquise, ou s’en servent pour leur alimentation en se nourrissant de proies fixées sur ce support. Autour de l’Antarctique, cette couverture servant de plate-forme à la biodiversité polaire s’étend entre 3 et 19 millions de km<sup>2</sup> entre la fin de l’été austral (fin février) et la fin de l’hiver (fin septembre).</p>
<p>Toutefois, les modèles projettent une nette diminution de l’étendue et de la concentration moyenne annuelle de la banquise autour du continent sous l’influence – entre autres – de la hausse des températures d’ici à la fin du siècle, avec des conséquences inévitables sur les écosystèmes associés.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/353598/original/file-20200819-24671-1i5g6eg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/353598/original/file-20200819-24671-1i5g6eg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/353598/original/file-20200819-24671-1i5g6eg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/353598/original/file-20200819-24671-1i5g6eg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/353598/original/file-20200819-24671-1i5g6eg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/353598/original/file-20200819-24671-1i5g6eg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/353598/original/file-20200819-24671-1i5g6eg.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Vue aérienne de la banquise, d’icebergs, de la bordure de la glace de mer et des fragments de banquise dérivant.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Candice Michelot</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Des espèces « sentinelles »</h2>
<p>Dans un tel contexte marqué par des dérèglements globaux, les prédateurs marins supérieurs, comme les oiseaux ou les mammifères marins, servent d’« éco-indicateurs » des variations de l’environnement.</p>
<p>Placées en haut de la « chaîne trophique » – terme qui désigne l’ensemble des chaînes alimentaires reliées entre elles dans un milieu –, ces espèces se nourrissent sur de larges gammes de proies et d’habitats ; elles intègrent ainsi les modifications se produisant dans les niveaux trophiques inférieurs.</p>
<p>Leur longue espérance de vie (20 ans en moyenne pour les emblématiques manchots empereurs par exemple) permet d’observer les effets des variations se déroulant dans l’environnement sur de larges échelles temporelles.</p>
<p>L’étude de telles espèces, dites « sentinelles », permet ainsi d’évaluer l’impact des changements climatiques sur des écosystèmes lointains et difficiles d’observation, tels que les milieux polaires.</p>
<p>En Antarctique, le manchot Adélie (<em>Pygoscelis adeliae</em>) est l’une de ces espèces.</p>
<h2>Sur l’île des Pétrels</h2>
<p>En Terre Adélie, la colonie de manchots du même nom – située sur l’île des Pétrels, près de la base française Dumont d’Urville, en Antarctique de l’Est – est intensément étudiée depuis 2010 par les équipes de l’<a href="https://www.institut-polaire.fr/language/fr/">Institut polaire</a> dans le cadre du <a href="https://www.institut-polaire.fr/blog/Programmes-soutenus/adelie-penguins-as-monitor-of-the-marine-environment/?lang=fr-FR">programme 1091</a>.</p>
<p>La colonie de l’île des Pétrels a connu deux récents échecs de reproduction, en 2013-14 et 2016-17, aucun poussin n’ayant survécu. À l’origine de ces évènements extrêmes : une extension, une concentration et une persistance de la couverture de la glace de mer plus élevée que d’habitude et couplée, en 2013-14, à des chutes de pluie.</p>
<p>L’intensification de la fréquence d’évènements climatiques extrêmes pourrait avoir des conséquences écologiques très importantes sur cette espèce, le cycle de reproduction et l’alimentation des manchots Adélie étant étroitement liés aux conditions de la glace.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/353599/original/file-20200819-24722-1atra4d.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/353599/original/file-20200819-24722-1atra4d.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/353599/original/file-20200819-24722-1atra4d.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/353599/original/file-20200819-24722-1atra4d.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/353599/original/file-20200819-24722-1atra4d.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/353599/original/file-20200819-24722-1atra4d.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/353599/original/file-20200819-24722-1atra4d.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Couple de manchots Adélie en parade.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Candice Michelot</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Naissances australes</h2>
<p>La saison de reproduction des manchots commence au printemps austral (octobre – novembre) lorsque la couverture de glace commence à se fragmenter et à fondre et que les ressources marines abondent.</p>
<p>Début novembre, les manchots Adélie rejoignent donc leur colonie située sur des îles ou sur la bordure continentale de l’Antarctique : ils forment des couples, préparent leur nid et s’accouplent pour pondre deux œufs mi-novembre.</p>
<p>La femelle part ensuite en premier pour s’alimenter en mer (on appelle cela un « voyage d’incubation »). Le mâle reste au nid pour couver, sans se nourrir ; il part au retour de la femelle pour chercher sa nourriture. Ces voyages sont longs d’une quinzaine de jours afin qu’ils reconstituent leurs réserves corporelles.</p>
<p>L’éclosion des œufs survient 35 jours environ après la ponte. Les adultes alternent encore entre la garde des poussins au nid et des voyages alimentaires plus courts en mer (d’un à quelques jours). Ces déplacements sont principalement dédiés à nourrir les poussins, leurs parents devant faire la navette pour répondre aux besoins importants de leur progéniture.</p>
<p>Les manchots Adélie s’alimentent principalement de krill (le krill Antarctique <em>Euphausia superba</em> et le krill des glaces <em>E. crystallorophias</em>) et de calandre antarctique (<em>Pleuragramma antarctica</em>), dans des zones de glace diffuse et fragmentée, où la couverture est faiblement concentrée.</p>
<p>On le comprend, les manchots sont hautement dépendants des conditions de glace de mer pour leur reproduction et leur développement. Une couverture et étendue de glace peuvent jouer le rôle de barrière physique, les empêchant d’accéder au krill et calandres. Une augmentation de la durée de leurs voyages, due par exemple à une difficulté accrue à trouver des victuailles, peut mener à l’affaiblissement des poussins, voire à leur mort.</p>
<h2>Comparer les colonies</h2>
<p>L’étude du comportement alimentaire des manchots permet de mieux connaître les variations environnementales et leurs conséquences. Mais l’étude d’une colonie n’est souvent pas suffisante pour comprendre l’ensemble des réponses comportementales des différentes populations d’une espèce à ces changements.</p>
<p>En Terre Adélie, jusqu’à récemment, aucune donnée de comportement alimentaire n’avait été collectée dans des colonies adjacentes à celle de l’Île des Pétrels.</p>
<p>En 2016-17 et 2017-18, le <a href="https://www.institut-polaire.fr/blog/Programmes-soutenus/adelie-penguins-as-monitor-of-the-marine-environment/?lang=fr-FR">programme 1091</a> a pu accéder pour la première fois à la colonie de Cap Bienvenue – située à 24 kilomètres à l’est de Dumont d’Urville ; il s’agissait pour nous d’obtenir des données de comportement alimentaire des manchots Adélie lors de leur voyage en mer.</p>
<p>Dans une <a href="https://www.int-res.com/abstracts/meps/v640/p215-230/">étude publiée en 2020</a> dans la revue scientifique <em>Marine Ecology Progress Series</em>, nous avons ainsi cherché à comparer les stratégies alimentaires des manchots Adélie de l’île des Pétrels à ceux de Cap Bienvenue.</p>
<p>Nous nous sommes posé différentes questions : les individus des deux colonies se nourrissaient-ils dans des habitats caractérisés par les mêmes conditions de glace de mer lors de leurs longs voyages d’incubation ? S’alimentaient-ils sur le même type de proies ?</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/353605/original/file-20200819-42970-1k6cx9y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/353605/original/file-20200819-42970-1k6cx9y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/353605/original/file-20200819-42970-1k6cx9y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=643&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/353605/original/file-20200819-42970-1k6cx9y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=643&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/353605/original/file-20200819-42970-1k6cx9y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=643&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/353605/original/file-20200819-42970-1k6cx9y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=808&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/353605/original/file-20200819-42970-1k6cx9y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=808&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/353605/original/file-20200819-42970-1k6cx9y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=808&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Localisation des deux colonies étudiées.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Candice Michelot</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Répondre à ces questions avait pour but d’estimer si les comportements observés dans une colonie pouvaient être généralisés à d’autres, pour la mise en place de mesures de protection des espèces et des écosystèmes.</p>
<h2>Un GPS scotché aux plumes</h2>
<p>En novembre 2016, nous avons équipé les femelles de l’île des Pétrels de GPS avant leur départ en mer pour leur premier voyage d’incubation. À la même période, nous avons rejoint la colonie de Cap Bienvenue pour équiper des femelles avec des GPS. En 2017, ce sont les mâles partant en mer qui ont été équipés de GPS avant leur premier voyage alimentaire d’incubation, dans ces deux mêmes colonies.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/353601/original/file-20200819-42976-93q0pp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/353601/original/file-20200819-42976-93q0pp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/353601/original/file-20200819-42976-93q0pp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/353601/original/file-20200819-42976-93q0pp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/353601/original/file-20200819-42976-93q0pp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/353601/original/file-20200819-42976-93q0pp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/353601/original/file-20200819-42976-93q0pp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Manchot auquel nous avons fixé un GPS.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Candice Michelot</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Le départ des femelles et leur retour à la colonie sont synchronisés lors des voyages d’incubation – c’est-à-dire qu’elles quittent en même temps la colonie pour aller s’alimenter en mer et reviennent au nid à la même période – tout comme les mâles après le retour de leur femelle. Nous nous sommes ainsi basés sur le comportement des manchots Adélie de l’île des Pétrels pour synchroniser nos déplacements en hélicoptère sur la colonie de Cap Bienvenue pour le déploiement et la récupération des équipements GPS.</p>
<p>Les manchots Adélie sont capturés sur leur nid pendant que leur partenaire garde les œufs. Les GPS sont fixés par du scotch résistant à l’eau sur les plumes de leur dos. À leur retour au nid après leur voyage en mer, ils sont recapturés afin de récupérer le matériel. Des prises de sang sont également prélevées au retour des animaux.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/353604/original/file-20200819-42893-1o43gzd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/353604/original/file-20200819-42893-1o43gzd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/353604/original/file-20200819-42893-1o43gzd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/353604/original/file-20200819-42893-1o43gzd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/353604/original/file-20200819-42893-1o43gzd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/353604/original/file-20200819-42893-1o43gzd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/353604/original/file-20200819-42893-1o43gzd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/353604/original/file-20200819-42893-1o43gzd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Cartes des trajets GPS enregistrés.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Candice Michelot</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<p>L’analyse des isotopes stables de carbone et azote dans le plasma de ces échantillons permet d’évaluer dans quels habitats (zone côtière vs zone hauturière) et sur quels niveaux de la chaîne alimentaire les manchots se sont alimentés.</p>
<h2>Polynies et fissures</h2>
<p>Nous avons également téléchargé des données satellites journalières de concentration de glace autour des colonies. Grâce à ces informations, nous avons pu extraire différentes caractéristiques d’importance écologique pour l’alimentation des manchots dans le paysage de la glace de mer.</p>
<p>Nous avons tout d’abord déterminé la position de la bordure, frontière entre la banquise et l’océan ouvert. Cette limite est généralement située à une centaine de kilomètres des colonies en période d’incubation.</p>
<p>Viennent ensuite les « polynies », de grands trous d’eau se formant dans la couverture de glace aux mêmes endroits d’une année sur l’autre et permettant d’accéder à l’eau libre dans des zones plus proches des colonies. Il y a enfin les fissures, correspondant à des trous d’eau allongés qui se forment à la suite de la fragmentation et à la fonte de la couverture de glace.</p>
<p>Lors des deux périodes d’études, la bordure était située à plus d’une centaine de kilomètres des colonies. Des polynies et fissures étaient cependant ouvertes dans la banquise, offrant des accès à l’eau à des distances rapprochées des colonies.</p>
<p>Nos résultats ont mis en évidence que les manchots des deux colonies, aussi bien femelles que mâles, n’auraient pas tiré avantage des proches accès à l’eau afin de se nourrir. Ils se sont à la place alimentés au niveau de la lointaine bordure de glace, et ce malgré la longue distance à parcourir.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/353603/original/file-20200819-24722-1uxip5m.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/353603/original/file-20200819-24722-1uxip5m.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/353603/original/file-20200819-24722-1uxip5m.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/353603/original/file-20200819-24722-1uxip5m.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/353603/original/file-20200819-24722-1uxip5m.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/353603/original/file-20200819-24722-1uxip5m.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/353603/original/file-20200819-24722-1uxip5m.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Manchots marchant sur la banquise et partant en mer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Candice Michelot</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Les individus de l’île des Pétrels comme ceux de Cap Bienvenue se sont par ailleurs alimentés de krill principalement pour les femelles, et un mélange de krill et de poissons pour les mâles.</p>
<p>Malgré une forte concentration et extension de la couverture de glace de mer, les manchots Adélie de ces deux colonies adoptent un comportement alimentaire similaire. La principale caractéristique de la banquise utilisée pour l’alimentation de cette espèce est prévisible pour sa localisation et son abondance en ressources. Le krill se développe en effet densément à la limite entre la banquise et l’océan. Cette frontière est caractérisée par des processus océanographiques qui concentrent les ressources en abondance.</p>
<p>Notre étude souligne ainsi l’importance de protéger certains habitats critiques pour préserver la subsistance des espèces vulnérables aux changements environnementaux.</p>
<p>La similarité des habitudes alimentaires des manchots Adélie dans ces deux colonies en fonction des conditions de glace met en évidence la nécessité d’étudier les réponses comportementales dans de nouveaux sites.</p>
<p>Généraliser les réponses d’une colonie d’étude pour représenter un ensemble de populations permettrait ainsi, dans un contexte de conservation, de mettre en place des mesures de protection des écosystèmes comme des Aires marines protégées à plus large échelle.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Le <a href="https://group.bnpparibas/actualite/sensei-8-especes-animales-comprendre-rechauffement-climatique">projet de recherche « Sentinels of the sea ice »</a> (Sensei) est soutenu par le programme <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Climate Initiative</a> de la Fondation BNP Paribas</em>.</p>
<p><em>Cet article a été rédigé par Candice Michelot, aux noms des coauteurs de l’article publié dans Marine Ecology Progress Series : Akiko Kato, Thierry Raclot, Kozue Shiomi, Pauline Goulet, Paco Bustamante et Yan Ropert-Coudert.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/144366/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Candice Michelot a reçu des financements du CNRS, Institut polaire français Paul Emile Victor, Fondation BNP Paribas, WWF-UK. </span></em></p>Aux pôles, l’étude du comportement de certaines espèces offre des indices précieux sur les variations de l’environnement et leurs conséquences sur la faune locale.Candice Michelot, Doctorante en écologie, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1374252020-06-02T17:35:50Z2020-06-02T17:35:50ZMieux comprendre la diffusion des virus entre les espèces<p>La pandémie de Covid-19 a ouvert une nouvelle ère dans la compréhension des maladies infectieuses et leur gestion à l’échelle mondiale. Une crise à laquelle nombre de pays ne s’étaient pas correctement préparés, se reposant sans doute sur les succès de l’antibiothérapie, de la vaccination de masse, de l’augmentation du niveau de vie et des systèmes de santé pour assurer la sécurité sanitaire de leurs concitoyens.</p>
<p>Rappelons-nous qu’au début du XX<sup>e</sup> siècle, les maladies infectieuses représentaient encore la principale cause de mortalité dans le monde. Aux États-Unis, l’espérance de vie était alors de 47 ans, <a href="https://www.nature.com/articles/35021206">avec une très forte mortalité infantile due aux maladies infectieuses</a>. Quelques décennies plus tard, ce fut au tour des maladies chroniques – comme le cancer ou les maladies cardiaques – de devenir les principales causes de mortalité dans les pays aux ressources économiques élevées, avec une espérance de vie de nos jours proche des 80 ans.</p>
<p>Mais, en ce début du XXI<sup>e</sup> siècle siècle, dérèglements climatiques et recul de la biodiversité redistribuent les cartes d’une santé mondialisée.</p>
<h2>Des barrières qui se franchissent</h2>
<p>La recherche sur les maladies infectieuses a changé de paradigme, prenant de mieux en mieux en compte les <a href="https://www.nature.com/articles/nature10762">éléments pathogènes présents dans les écosystèmes</a>.</p>
<p>Les barrières entre santé animale et humaine s’atténuent face au constat que deux tiers des pathogènes humains sont aujourd’hui issus d’un <a href="https://www.nature.com/articles/nature06536">transfert horizontal</a> de l’animal (sauvage ou domestique) vers l’homme.</p>
<p>Ces maladies infectieuses, dites « zoonotiques », constituent un <a href="https://www.nature.com/news/cost-of-human-animal-disease-greatest-for-world-s-poor-1.10953">véritable fardeau pour plus de 1 milliard d’individus</a> dans le monde ; elles se concentrent <a href="https://cgspace.cgiar.org/handle/10568/21161">principalement dans les zones tropicales</a>, notamment en Afrique et dans le Sud-Est asiatique.</p>
<p>Dans un monde de plus en plus connecté, physiquement et virtuellement, les maladies infectieuses zoonotiques ont <a href="https://science.sciencemag.org/content/342/6164/1337.full">pris une nouvelle dimension</a>. La crise sanitaire du Covid-19, en modifiant profondément la perception du risque infectieux issu de l’animal, en constitue un exemple frappant.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/maladies-emergentes-dorigine-animale-dou-viendra-la-prochaine-menace-136208">Maladies émergentes d’origine animale : d’où viendra la prochaine menace ?</a>
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<h2>D’une espèce à l’autre</h2>
<p>Pour certaines de ces affections zoonotiques, les hommes représentent ce qu’on appelle un « cul-de-sac » épidémiologique. C’est le cas de la rage, dont le virus ne peut pas se transmettre d’humain à humain. Pour d’autres maladies, ils constituent des hôtes accidentels, pas assez compétents pour amplifier, transmettre le pathogène et créer une épidémie, comme dans le <a href="https://www.nature.com/articles/39057?proof=trueIn">cas de l’encéphalite spongiforme bovine</a>. Mais, dans de rares cas, les êtres humains constituent des hôtes offrant les conditions favorables à l’installation du pathogène. C’est vrai <a href="https://www.cdc.gov/vhf/ebola/history/summaries.html">pour le virus Ebola</a> et, ces derniers mois, le <a href="https://www.who.int/emergencies/diseases/novel-coronavirus-2019">SARS-CoV 2</a>.</p>
<p>Les maladies nouvellement apparues (dites « émergentes) – dont <a href="https://www.oie.int/fr/pour-les-medias/une-seule-sante/">75 % sont zoonotiques</a> – pouvaient jusqu’à présent faire relativement peu de victimes. Que ce soit le SRAS, la grippe influenza H5N1, le virus Nipah, la fièvre de la vallée du Rift ou le MERS-CoV, ces affections ont cumulé, à elles cinq, moins de 4000 morts par an. Elles auront toutefois fortement déstabilisé les pays touchés et inquiété les autres.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/335132/original/file-20200514-77235-1c7w7sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/335132/original/file-20200514-77235-1c7w7sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/335132/original/file-20200514-77235-1c7w7sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/335132/original/file-20200514-77235-1c7w7sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/335132/original/file-20200514-77235-1c7w7sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/335132/original/file-20200514-77235-1c7w7sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/335132/original/file-20200514-77235-1c7w7sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/335132/original/file-20200514-77235-1c7w7sp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La civette palmiste, réservoir du coronavirus SARS-CoV-1, à l’origine de l’épidémie de SRAS de 2002-2003.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/ac/Palm_civet_on_tree.jpg">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
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<figcaption><span class="caption">Ebola, portrait d’un virus tueur. (France 24, 2019).</span></figcaption>
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<p>Par son adaptation et sa diffusion rapide, la Covid-19 est en train d’écrire une nouvelle page de la gestion des maladies infectieuses émergentes, la quasi-totalité des pays du globe ayant été touchés, en une rapidité record. Selon un dernier bilan, consulté le 2 juin 2020, plus de 376 000 personnes sont mortes de ce coronavirus.</p>
<p>En opposition aux maladies zoonotiques émergentes, d’autres maladies infectieuses zoonotiques (comprendre celles impliquant l’animal dans sa chaîne de transmission) sont endémiques dans de nombreuses régions du monde.</p>
<p>Ces affections sont souvent négligées, malgré un nombre important de victimes (59 000 morts par an pour la rage et 30 000 pour la leishmaniose, par exemple) et <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/j.1600-0579.2007.00476.x">intensifient souvent les cycles de pauvreté</a> pour des populations déjà vulnérables.</p>
<p>Citons enfin ces maladies infectieuses, non zoonotiques (qui n’affectent pas l’homme), mais impliquant toutefois l’animal dans leur transmission ; celles-ci peuvent engendrer des pertes animales et économiques importantes. Ce fut le cas en Chine, début 2019, avec le <a href="https://www.oie.int/fr/sante-animale-dans-le-monde/maladies-animales/african-swine-fever/">virus de peste porcine africaine</a>. Transmis par des suidés sauvages aux élevages de cochons, il a entraîné la mort de centaines de millions d’animaux.</p>
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<figcaption><span class="caption">Le fléau de la peste porcine. (Radio Canada Info, 2019).</span></figcaption>
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<h2>Caractériser le « saut d’espèces »</h2>
<p>Face à toutes ces situations de saut de pathogène d’une espèce à l’autre, il est important de détailler les facteurs qui favorisent ces phénomènes et d’identifier les éléments inconnus à étudier. Le saut d’espèce, voilà un concept difficile à appréhender tant il désigne une <a href="https://science.sciencemag.org/content/312/5772/394">multiplicité de situations</a>. On peut toutefois distinguer deux grands types de sauts.</p>
<p>Il y a d’abord un saut d’espèces que l’on qualifiera d’« évolutif » : il correspond à l’émergence et à l’installation d’un pathogène au sein d’une nouvelle espèce (appelée dans ce cas « réceptrice ») à partir d’une espèce « émettrice » et après adaptation du pathogène à son nouvel hôte.</p>
<p>Les exemples récents, et les plus dévastateurs, de ce type de saut concernent, pour les hommes, la pandémie de sida ; et chez les non-humains, citons la décimation, au XX<sup>e</sup> siècle, de la population de lapins européens par la <a href="https://www.oie.int/doc/ged/D13973.PDF">myxomatose</a> ; et pour le XIX<sup>e</sup>, l’impact catastrophique de la peste bovine chez les ruminants africains. Si l’on remonte plus loin dans le temps, nombre de travaux indiquent que les maladies humaines majeures – rougeole, tuberculose ou variole notamment – sont issues d’un saut d’espèces (à partir d’animaux domestiques), il y de cela <a href="https://europepmc.org/article/med/16701375">plus de 10 000 ans</a>.</p>
<p>De nombreuses questions entourent ce phénomène.</p>
<p>En premier lieu, comment et pourquoi certains pathogènes sont capables d’infecter une nouvelle espèce et de s’y maintenir ? Pour le virologue Thijs Kuiken (Centre médical Erasme de Rotterdam), la probabilité qu’un virus devienne endémique dans une nouvelle population <a href="https://science.sciencemag.org/content/312/5772/394">dépend de trois processus</a> : les interactions interspécifiques entre hôtes émetteurs et récepteurs ; les interactions entre l’hôte et le virus chez l’espèce réceptrice ; les interactions entre individus chez l’espèce réceptrice. Si la transmission est possible, la connaissance du réseau de contacts est alors indispensable pour savoir si le virus va persister dans la population ou s’éteindre.</p>
<p>Ce type de saut s’oppose à celui, plus « écologique », où le pathogène franchit fréquemment la barrière des espèces, mais sans endémisation dans la population réceptrice. Ou, autrement dit, sans que l’espèce réceptrice puisse maintenir le pathogène sans contamination extérieure ; c’est notamment le cas pour le virus de la rage, qui affecte régulièrement de nombreuses espèces animales.</p>
<h2>Des stratégies d’infection variées</h2>
<p>Les pathogènes <a href="https://europepmc.org/article/med/16701375">adoptent différentes stratégies</a> pour infecter leurs hôtes. Ils peuvent être spécialistes et n’infecter qu’une seule espèce, comme le <em>Plasmodium falciparum</em> (l’un des cinq parasites responsables du paludisme) chez l’homme, ou généralistes et infecter un large spectre d’hôtes de différents ordres taxonomiques – comme la rage ou le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Blastocystis">protozoaire <em>Blastocystis hominis</em></a>.</p>
<p>Les raisons de cette variabilité sont encore largement méconnues, mais certains facteurs, telles les routes de transmission indirectes, sont identifiés comme étant associés à une grande variété d’hôtes sensibles.</p>
<p>Même s’ils peuvent infecter différents hôtes, les pathogènes dits « généralistes » sont habituellement, mais pas toujours, moins bien adaptés aux espèces colonisées le plus récemment. Par exemple, la dose requise pour le virus de la rage issu du renard pour infecter les chiens sera un million de fois supérieure à celle nécessaire pour infecter d’autres renards.</p>
<p>Le saut d’espèces, qu’il soit plus « évolutif » ou « écologique », est encore un phénomène mal compris. En percevoir les mécanismes constitue une étape clé dans l’étude des maladies infectieuses humaines et animales.</p>
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<figcaption><span class="caption">Grandes tueuses : le paludisme. (Inserm, 2016).</span></figcaption>
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<h2>Les facteurs aggravants</h2>
<p>Depuis une cinquantaine d’années, on souligne le <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10393-006-0063-3">rôle des « écotones »</a> – ces zones de transitions entre deux types d’habitats – dans l’émergence de maladies infectieuses et la <a href="https://doi.org/10.1098/rstb.2011.0354">transmission interspécifique</a>.</p>
<p>La multiplication d’activités d’élevage à la périphérie d’espaces dédiés à la protection de la nature augmenterait ainsi considérablement le contact entre animaux sauvages et domestiques.</p>
<p>Parallèlement, la <a href="https://science.sciencemag.org/content/333/6042/569.abstract">démographie humaine croissante</a> génère une forte pression sur les milieux naturels. En Australie, l’émergence des virus Hendras et Menangle accompagne, par exemple, une déforestation massive et une agriculture en expansion modifiant l’habitat des chauves-souris, porteuses des virus, en les poussant à exploiter des <a href="https://wwwnc.cdc.gov/eid/article/13/1/06-1342_article">arbres fruitiers en zones périurbaines</a>.</p>
<p>L’intensification de l’élevage à proximité des zones urbaines a également considérablement <a href="https://www.pnas.org/content/110/21/8399">réduit les obstacles à la transmission interspécifiques</a>. Près de 50 % de la population humaine vit désormais dans un environnement urbain, induisant une connectivité de plus en forte entre espaces ruraux dédiés à l’agriculture et zones citadines.</p>
<p>Un cas d’école décrit ainsi <a href="https://doi.org/10.1146/annurev.ento.54.110807.090510">l’expansion géographique du virus de l’encéphalite japonaise</a> en Asie du Sud-Est en lien avec l’augmentation de l’irrigation des rizières, de l’élevage porcin et de la démographie humaine.</p>
<h2>Le rôle de la biodiversité et de l’homme</h2>
<p>Nombre de travaux scientifiques soulignent que <a href="https://www.nature.com/articles/nature09575">l’altération de la biodiversité</a> peut être responsable des évènements d’émergence des maladies.</p>
<p>Hormis le fait que la fragmentation de l’habitation, la déforestation, l’augmentation de l’agriculture et de l’élevage redistribuent totalement les contacts entre espèces, des mécanismes liés à l’épidémiologie du virus sont également en jeu.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/covid-19-ou-la-pandemie-dune-biodiversite-maltraitee-134712">Covid-19 ou la pandémie d’une biodiversité maltraitée</a>
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<p>En effet, la disparition d’espèces sauvages enlève du système des individus et des espèces qui pourraient jouer le rôle de « cul-de-sac » épidémiologique, car moins adapté et moins capable d’amplifier et de transmettre le pathogène.</p>
<p>Par leur présence, ces individus et ces espèces sauvages permettraient ainsi de <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/full/10.1098/rstb.2016.0129">« diluer » la transmission des pathogènes</a>. Cette théorie de « l’effet dilution » suggère ainsi fortement que des stratégies de conservation pourraient avoir des effets bénéfiques sur la santé humaine et animale.</p>
<p>Malgré l’intérêt d’aligner stratégies de santé publique, vétérinaire et environnementale, cette théorie reste fortement débattue, car extrêmement dépendante du contexte… davantage d’espèces entraînant également un plus large panel de pathogènes. En d’autres mots, la biodiversité des hôtes peut diminuer le risque comme augmenter la transmission de chaque pathogène.</p>
<p>La compréhension des mécanismes de diffusion d’un pathogène nécessite souvent de <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/ele.12122">se placer à l’échelle de la communauté d’hôtes</a>. La notion de réservoir se complexifie pour les pathogènes généralistes, et souvent zoonotiques, nécessitant l’adoption d’un paradigme multispécifique. Les <a href="https://doi.org/10.1016/j.tree.2014.03.002">conditions du maintien de tels pathogènes dans un système</a> dépendent de la présence ou de l’absence d’une ou de plusieurs espèces hôtes, de la densité de ces espèces et de la fréquence des interactions au sein et entre ces espèces.</p>
<p>Cependant <a href="https://www.pnas.org/content/112/5/1464">peu d’études</a> montrent à ce jour la part relative de chaque espèce dans les dynamiques spatio-temporelles des maladies infectieuses. De même, les comportements humains et les pratiques culturelles, favorisant l’exposition d’une population à un nouveau pathogène, sont rarement intégrés dans les modèles de diffusion malgré leur importance dans les dynamiques épidémiologiques. Par exemple, la consommation de viande de poulet crue a entraîné des <a href="https://science.sciencemag.org/content/312/5772/394">cas mortels d’infection au H5N1</a> chez l’homme.</p>
<p>Il est temps désormais que la recherche traite sérieusement le rôle de la biodiversité et l’impact de sa détérioration sur nos sociétés, en lien notamment avec le risque infectieux dans le contexte de changement climatique. L’intégration des comportements humains (et de leur hétérogénéité) dans les modèles épidémiologiques est également un défi de recherche pour les années à venir.</p>
<p>Pour tout cela, il s’avère capital d’investir dans la formation d’experts internationaux, de mettre en place des approches holistiques et pluridisciplinaires pour comprendre les dynamiques qui animent les hommes, les animaux d’élevage et les animaux sauvages au sein de leurs environnements respectifs.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Le projet de recherche <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-biodiversity-initiative/projets">« HUM-ANI »</a> dans lequel s’inscrit cette publication a bénéficié du soutien de la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-biodiversity-initiative">programme Climate and Biodiversity Initiative</a></em>.</p>
<p><em>Vladimir Grosbois (Cirad) est co-auteur de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/137425/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les travaux de recherche évoqués dans cet article ont pour cadre le projet HUM-ANI, mis en œuvre par l’IRD en partenariat avec le CIRAD, le CNRS, l’University of Zimbabwe, Chinhoyi University of Technology of Zimbabwe, University Nelson Mandela, Department of Veterinary Services of Zimbabwe, University of Oxford, Imperial College London, Zimbabwe National Parks. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Franck Prugnolle et Vladimir Grosbois ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Le saut d’espèces est encore un phénomène mal compris. En percevoir les mécanismes constitue une étape clé dans l’étude des maladies infectieuses.Eve Miguel, Chercheuse en écologie et épidémiologie, Institut de recherche pour le développement (IRD)Franck Prugnolle, Directeur de recherche en écologie et évolution, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Vladimir Grosbois, Research scientist, CiradLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1172782019-06-27T21:08:26Z2019-06-27T21:08:26ZComme des bonbons, ces petits poissons maintiennent la vie dans les récifs coralliens<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/274965/original/file-20190516-69199-1o4ia0x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C0%2C2991%2C1854&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">De tout petits poissons jouent le rôle terrible mais crucial de nourrir la merveilleuse faune colorée que les récifs coralliens abritent.</span> <span class="attribution"><span class="source">Tane Sinclair Taylor</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>En pensant aux récifs coralliens, l’image qui s’offre souvent à notre esprit est celle d’une eau translucide dans laquelle un nombre incalculable de poissons multicolores nagent autour du corail. Si l’on y réfléchit, cette abondance de poissons est contre-intuitive, puisque les récifs coralliens existent dans des régions où les nutriments, tels que l’azote et le phosphore, sont rares.</p>
<p>Cette question centrale a déconcerté les scientifiques depuis les voyages de Charles Darwin et se pose aujourd’hui plus que jamais : à mesure que les récifs coralliens subissent un déclin sans précédent, les communautés de poissons qui s’y trouvent et leur valeur pour l’humain se voient menacées. Il existe plusieurs théories. Selon l’une d’elles, la topographie des récifs, inclinée, pourrait expliquer la concentration dans les récifs des nutriments et du plancton des eaux environnantes. Une autre suggère que ce paradoxe est lié au fait que certains invertébrés qui vivent dans récifs, comme les éponges, recyclent de la matière organique morte en nourriture.</p>
<p>Avec une équipe de chercheurs dirigée par Simon Brandl de l’Université Simon Fraser au Canada, nous avons révélé dans un <a href="https://www.sciencemag.org/news/2019/05/these-tiny-mysterious-fish-may-be-key-solving-coral-reef-paradox">article publié dans <em>Science</em></a>, que l’abondance emblématique des poissons sur les récifs est selon nous alimentée par un groupe jusqu’alors peu représenté dans l’image que nous nous faisions des écosystèmes coralliens : les minuscules poissons de récif, dits « poissons crypto-benthiques » – crypto car ils se fondent dans leur environnement, benthiques étant relatif aux fonds marins – qui se caractérisent par une dynamique larvaire unique, une croissance rapide, et une extrême mortalité.</p>
<h2>Mangés à peine nés</h2>
<p>Dans le cadre de notre étude, réalisée entre 2016 et 2019, nous montrons que ces petits vertébrés – qui appartiennent à 17 familles de poissons différentes et ont une taille inférieure à 50 mm – remplissent une fonction essentielle pour les récifs coralliens, qui permet aux grands poissons des récifs de prospérer.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/275180/original/file-20190517-69199-rf2614.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/275180/original/file-20190517-69199-rf2614.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/275180/original/file-20190517-69199-rf2614.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/275180/original/file-20190517-69199-rf2614.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/275180/original/file-20190517-69199-rf2614.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/275180/original/file-20190517-69199-rf2614.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/275180/original/file-20190517-69199-rf2614.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les poissons crypto-benthiques sont dévorés alors qu’ils sont à peine âgés de quelques semaines.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Tane Sinclair Taylor</span></span>
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<p>Les crypto-benthiques fonctionnent comme des M&M’s – dont ils ont les couleurs : à rayures jaunes, à tâches turquoises, vert et jaune citron, violet, à motifs… Ce sont de minuscules faisceaux d’énergie colorés que tout organisme des récifs coralliens capable de se nourrir engloutira presque aussitôt qu’ils arriveront sur le récif. En fait, la grande majorité des poissons crypto-benthiques seront mangés dès les premières semaines de leur existence, alors qu’ils sont encore des larves ou juvéniles. Dévorés par la majorité des poissons prédateurs présents dans les récifs, certaines crevettes, les crabes et même des mollusques.</p>
<p>Aussi, s’ils sont systématiquement dévorés dès leur plus jeune âge, comment expliquer que ces poissons ne disparaissent pas des récifs comme un sac de bonbons dans la salle de pause du bureau ? Les chercheurs ont résolu ce paradoxe en examinant les larves de différents poissons de récif : la plupart entreprennent des voyages épiques à travers l’océan, où peu d’entre eux survivent. Car les grands poissons pondent dans la mer, laissant les courants disperser leur grand nombre d’œufs afin d’assurer la possible reconstitution d’une population. À l’inverse, les poissons crypto-benthiques semblent avoir trouvé un moyen d’éviter ce purgatoire.</p>
<h2>Des larves sédentaires</h2>
<p>Contrairement à leurs congénères des récifs, ils pondent des descendants en nombre limité, mais ceux-ci restent dans le voisinage des récifs de leurs parents, qui les choient tout particulièrement, au lieu de les disperser très loin. En nombre, les larves crypto-benthiques dominent donc les communautés larvaires des autres espèces établies dans les récifs.</p>
<p>Par conséquent, la mortalité précoce des poissons crypto-benthiques est compensée immédiatement par chaque œuf qu’ils génèrent : ils grandissent très vite donc pondent rapidement, et leur œuf a davantage de chances de survivre puisqu’il évite le piège mortel de la haute mer. Ceci fournit à son tour un flux continu et copieux aux populations crypto-benthiques adultes – l’âge adulte étant atteint autour de 3 ou 4 mois de vie.</p>
<p>Des bébés qui remplacent rapidement chaque poisson mangé sur le récif. Cette pompe nutritive fournit près de 60 % de tous les tissus de poisson consommés sur les récifs, mais nous ne le voyons jamais, car le poisson est dévoré bien avant qu’on ait pu le compter. On peut donc comparer cette réserve à un sachet de bonbons qui se réapprovisionnerait comme par magie à chaque M&M’s mangé.</p>
<h2>Un enjeu de résilience pour les récifs</h2>
<p>Cette stratégie larvaire unique peut rendre les poissons crypto-benthiques beaucoup plus vulnérables qu’on ne le supposait auparavant. Très liés à leur habitat, ils sont parmi les premières victimes de la disparition du corail. D’autant plus que leur durée de vie larvaire est limitée : si une population s’effondre quelque part, ils pourront difficilement émigrer vers une autre île.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/275182/original/file-20190517-69189-1tfhs9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/275182/original/file-20190517-69189-1tfhs9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=555&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/275182/original/file-20190517-69189-1tfhs9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=555&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/275182/original/file-20190517-69189-1tfhs9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=555&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/275182/original/file-20190517-69189-1tfhs9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=697&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/275182/original/file-20190517-69189-1tfhs9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=697&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/275182/original/file-20190517-69189-1tfhs9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=697&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les poissons crypto-benthiques présentent une grande diversité d’espèces.</span>
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<p>Mais nous espérons que leur extrême diversité – plus de 2 800 espèces de ces poissons ont déjà été découvertes, et on estime qu’il y en aurait 1 000 de plus – pourrait en faire une pierre angulaire résiliente de la productivité des récifs coralliens : on attend d’un groupe aussi varié d’être capable, non seulement en nombre mais aussi en termes de patrimoine génétique, de faire face aux changements.</p>
<p>L’ensemble des espèces crypto-benthiques abondantes, minuscules et de courte durée semble en effet constituer un groupe fonctionnel critique sur les récifs coralliens. Ils offrent une explication à la productivité énigmatique des écosystèmes coralliens, qui sous-tend la production de biomasse de poissons de récif et soutient la dynamique caractéristique des récifs coralliens modernes qui évoluent rapidement. De plus en plus perturbés, ces derniers requièrent une énergie importante pour pouvoir se régénérer.</p>
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<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Le projet de recherche <a href="https://group.bnpparibas/actualite/reef-services-comprendre-impact-recifs-coralliens">Reef Services</a> dans lequel s’inscrit cette publication a bénéficié du soutien de la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-initiative">programme Climate Initiative</a>.</em></p>
<p><em><a href="http://www.criobe.pf/pro/personnel/personnels-administratifs-et-techniques/jeanine-almany/">Jeanine Almany</a> du <a href="http://www.criobe.pf/">Centre de recherches insulaires et observatoire de l’environnement</a> a contribué à la rédaction de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/117278/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valeriano Parravicini a reçu des financements de la Fondation BNP PARIBAS, l'Agence Nationale de la Recherche, la Fondation de France et le LABEX CORAIL. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Simon Brandl receives funding from the Natural Sciences and Engineering Research Council of Canada (NSERC). </span></em></p>Les récifs coralliens abritent quantité d’espèces alors même que la nourriture y est rare. L’explication ? La présence d’étonnants petits poissons, que la faune locale dévore comme des bonbons.Valeriano Parravicini, Maître de conférences, écologie, École pratique des hautes études (EPHE)Simon Brandl, Postdoctoral research fellow, Simon Fraser UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1147262019-04-03T20:19:09Z2019-04-03T20:19:09ZDes chercheurs mettent au point une méthode pour détecter les espèces envahissantes<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/267191/original/file-20190402-177171-3gniss.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">_Anoplolepis gracilipes_, la fourmi « folle », en pleine action. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/steve_shattuck/15006697440/in/photolist-b1mD2H-9FAR82-9FARzg-LgaBrc-p9zZsH-p9jspr-oS6fjL-EiCUTN">Steve Shattuck/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Avez-vous déjà entendu parler des « espèces envahissantes » ? Ou encore d’invasions biologiques ? Non, ou vaguement peut-être… Vous devriez pourtant ! Car on ne parle pas ici de quelques petits bonshommes verts, mais bien du tamarix de Russie, du rat noir, de l’étoile de mer japonaise, du poisson-lion, de la jacinthe d’eau, du crapaud-buffle, et de dizaines de milliers d’autres espèces évoluant sur notre planète, mais pas au bon endroit.</p>
<p>Lorsqu’une espèce est introduite dans un écosystème dans lequel elle n’a pas évolué, elle n’est pas adaptée aux espèces locales, et réciproquement. Il y a donc deux alternatives possibles : soit ce sont les espèces locales qui gagnent les nouvelles interactions et l’espèce introduite s’éteint ; soit c’est l’espèce introduite qui gagne et s’établit, s’étend et affecte les espèces locales. On l’appelle alors « espèce envahissante ».</p>
<p>Le sujet est crucial : ces invasions d’espèces introduites par les humains dans des régions inconnues d’elles peuvent causer des dégâts impressionnants ; et cela aussi bien aux écosystèmes qu’aux sociétés humaines. Avec l’augmentation massive des échanges internationaux et le changement climatique, ce phénomène risque de continuer de s’aggraver dans les années à venir.</p>
<p>Jugez-en plutôt : la fourmi de feu coûte par exemple plus de <a href="https://articles.extension.org/sites/default/files/Copy%20of%20the%20National%20Study.pdf">6 milliards de dollars</a> par an aux États-Unis, entre de coût de leur contrôle et les dégâts sur les infrastructures, les réseaux électriques et de communications, l’agriculture et d’autres secteurs économiques. Le moustique tigre remonte du sud de la France avec le potentiel de transmettre par sa piqûre des virus mortels, tels que ceux de <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2014/05/20/le-moustique-vecteur-de-la-dengue-et-du-chikungunya-remonte-vers-le-nord_4422178_3244.html">la dengue, du chikungunya et du Zika</a>. Le chat introduit dans les îles de tous les océans du monde, a mené à l’<a href="https://academic.oup.com/bioscience/article/63/10/804/238142">extinction</a> de dizaines d’espèces d’oiseaux, reptiles et amphibiens qui n’avaient jamais vu un tel prédateur.</p>
<p>Les espèces envahissantes dans leur ensemble sont la <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/full/10.1098/rsbl.2015.0623">seconde cause d’extinction</a> d’espèces vivantes depuis un siècle ; elles représentent également la <a href="https://www.fws.gov/southwest/es/documents/R2ES/LitCited/LPC_2012/Wilcove_et_al_1998.pdf">seconde menace actuelle sur la biodiversité</a> dans le monde ; elles sont aussi responsables de milliers de morts tous les ans. Les terribles morsures de la petite fourmi de feu, par exemple, envoient plus de 100 000 Américains par an chez le médecin ou à l’hôpital, et une près centaine en meurt de choc anaphylactique. Enfin, elles ont un coût économique de centaines de milliards d’euros par an au niveau mondial.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"984144565828386816"}"></div></p>
<h2>Comme un « profiler »</h2>
<p>Face à de telles conséquences, il n’est pas étonnant que les scientifiques aient cherché depuis des décennies un moyen de prévoir quelles espèces peuvent devenir envahissantes, et où, avant même qu’elles ne soient introduites dans une nouvelle région du monde.</p>
<p>Car une intervention à la frontière, ou très rapidement après, permet d’être bien plus efficace et de dépenser bien moins que de tenter de contrôler une espèce envahissante déjà fermement établie et de subir les dégâts occasionnés sur des surfaces sans cesse grandissantes. Ce type de prédiction n’était cependant pas envisageable jusqu’à tout récemment, faute d’outils et de données adéquats.</p>
<p>Ce temps semble désormais révolu : notre équipe (Université Paris Sud/CNRS), en collaboration avec des chercheuses de Suisse et d’Espagne, <a href="https://www.pnas.org/content/early/2019/03/28/1803456116">vient en effet de publier</a> ce 29 mars dans la prestigieuse revue américaine <em>PNAS</em>, une étude où nous avons combiné plusieurs types de modèles statistiques et une grosse base de données de caractéristiques écologiques et comportementales de fourmis ; il s’agit de prédire quelles seront les prochaines espèces de fourmis envahissantes, et quelles régions du monde elles risquent d’envahir. Avant même qu’elles n’aient commencé.</p>
<h2>19 espèces de fourmis</h2>
<p>Ces travaux, démarrés il y a huit ans, utilisent les outils statistiques les plus récents et les plus performants pour identifier, à la manière des <em>profilers</em> de tueurs multirécidivistes dans les séries policières américaines, les profiles psychologiques de ces coupables.</p>
<p>En établissant un modèle statistique de toutes les combinaisons de caractéristiques des fourmis qu’on sait être envahissantes – 19 sont déclarées comme telles par l’Union internationale de la conservation de la nature (IUCN) –, il nous a été possible d’établir un profil écologique de la fourmi envahissante type – avec tel type de système social, tel type de fondement de nouvelles colonies, tel type de régime alimentaire, etc.</p>
<p>Car la fourmi folle jaune, la fourmi électrique, la fourmi fantôme ou la fourmi de feu, pour ne citer qu’elles, n’ont pas en commun que ces noms terribles : il a été ainsi possible d’établir un véritable portrait-robot de leurs caractéristiques écologiques. Ce modèle statistique a ensuite été appliqué à un millier de fourmis non envahissantes pour voir si certaines possédaient le même profil : et effectivement 13 d’entre elles présentaient la même combinaison de caractéristiques ; elles sont donc logiquement capables de faire aboutir le même type d’invasion au cas où les activités humaines les transporteraient négligemment ailleurs…</p>
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<figcaption><span class="caption">L’Australie face à la menace des fourmis de feu. (Euronews/YouTube, 2017).</span></figcaption>
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<p>Cet « ailleurs » a lui aussi été prédit dans <a href="https://www.pnas.org/content/early/2019/03/28/1803456116">notre étude</a> : et cela, en établissant une autre sorte de profil, celui des combinaisons de conditions climatiques idéales pour ces espèces. En le projetant sur la surface terrestre, on peut déterminer dans quelles régions chacune de ces 13 espèces trouvera les conditions favorables à une invasion si elles y sont introduites. Ces régions à risque sont la Floride, l’Amérique centrale et le Brésil, l’Afrique centrale et Madagascar, l’Asie du Sud-est, l’Indonésie et le nord-est de l’Australie et de très nombreuses îles de par le monde.</p>
<p>Parmi ces 13 suspectes se trouve la fourmi des pavés – ainsi nommée pour ces batailles rangées au cours desquelles elle affronte ses rivales, laissant des milliers de cadavres sur le pavé… Ou la fourmi difficile, baptisée de la sorte en référence à la difficulté à la contrôler ; elle entraîne de véritables armées au sein de ses nids pouvant abriter plus de 3 millions d’individus. Ou encore la fourmi d’Éthiopie, qui forme des supercolonies, véritables réseaux de colonies alliées pouvant couvrir et contrôler des territoires gigantesques.</p>
<p>Bien qu’on ne connaisse pas encore le type de dégâts que ces suspectes pourraient causer si elles envahissaient ces régions, on peut imaginer qu’il s’agirait d’une gamme et d’une importance similaire aux 19 espèces déjà connues pour être envahissantes : réduction de la biodiversité locale, perturbation du fonctionnement des écosystèmes, coûts pour l’agriculture, le tourisme et même problèmes sanitaires pour certaines d’entre elles.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/des-vers-geants-predateurs-envahissent-les-jardins-francais-dans-lindifference-96241">Des vers géants prédateurs envahissent les jardins français. Dans l’indifférence</a>
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<h2>Disculper certaines espèces</h2>
<p>La puissance et l’utilité de ce nouvel outil de <em>profiling</em> statistique se trouve renforcée par une découverte inattendue : nous avons en effet établi que l’une des 19 espèces de fourmis cataloguées comme envahissantes – la fourmi champignonniste, celle que l’on voit se balader en file indienne avec un morceau de feuille dans les mandibules – ne se conformait en fait aucunement au profil écologique d’une envahissante ; à tel point même que le modèle ne parvenait jamais à prédire qu’elle pourrait le devenir.</p>
<p>Après des recherches approfondies auprès de spécialistes, cette fourmi a définitivement été identifiée comme ravageur des cultures de sucre de canne en Guadeloupe – où elle cause des dégâts considérables – mais n’a jamais envahi d’autres régions que cette île toute proche de son aire naturelle. Pour cause : elle n’a pas les caractéristiques écologiques lui permettant de faire face aux nouveaux écosystèmes. Le système de <em>profiling</em>, censé permettre de découvrir et de surveiller de nouveaux envahisseurs avant même qu’ils ne commettent des dégâts a donc aussi permis d’innocenter une espèce accusée à tort !</p>
<p>Il reste désormais à transposer cet ensemble d’outils statistiques à d’autres groupes d’espèces, ce que les chercheurs s’emploient déjà à faire – avec sans aucun doute bien d’autres surprises à la clé.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/266946/original/file-20190401-177167-5zhe8i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/266946/original/file-20190401-177167-5zhe8i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/266946/original/file-20190401-177167-5zhe8i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=837&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/266946/original/file-20190401-177167-5zhe8i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=837&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/266946/original/file-20190401-177167-5zhe8i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=837&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/266946/original/file-20190401-177167-5zhe8i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1052&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/266946/original/file-20190401-177167-5zhe8i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1052&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/266946/original/file-20190401-177167-5zhe8i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1052&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">DR.</span>
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<p><em>Pour découvrir le monde fascinant des fourmis envahissantes, Franck Courchamp et le dessinateur Mathieu Ughetti vous donnent rendez-vous en librairie pour découvrir leur BD « La guerre des fourmis » qui vient de sortir aux éditions des Équateurs. Et aussi sur <a href="https://theconversation.com/fr/topics/la-guerre-des-fourmis-54185">The Conversation</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/114726/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Franck Courchamp receives funding from ANR. </span></em></p>À partir de modèles statistiques et d’une base de données sur des espèces envahissantes de fourmis, une équipe internationale vient de mettre au point un outil pour prévenir les invasions biologiques.Franck Courchamp, Directeur de recherche CNRS, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1108512019-02-03T21:28:03Z2019-02-03T21:28:03ZEn Afrique du Sud, un risque de sécheresse multiplié par trois avec le changement climatique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/256566/original/file-20190131-108338-wirorn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=269%2C151%2C4235%2C2814&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les habitants du Cap faisant la queue pour obtenir de l’eau, en février 2018.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Entre 2015 et 2017, la région du Cap occidental, en Afrique du Sud, a connu trois années parmi les <a href="https://www.groundup.org.za/article/how-severe-drought-detailed-look-data/">moins pluvieuses</a> jamais enregistrées dans cette zone. Une telle situation a conduit à un appauvrissement progressif des réservoirs d’approvisionnement en eau : à l’été 2017-2018, la région et la ville du Cap tout particulièrement ont craint une réelle pénurie, évitée de peu par des réductions drastiques.</p>
<p>Des sécheresses d’une amplitude proche s’étaient déjà produites – par exemple à la <a href="http://dx.doi.org/10.4314/wsa.v29i4.5057">fin des années 1920</a> et au début des années 1970, ainsi qu’<a href="https://www.news24.com/SouthAfrica/News/Drought-begins-to-bite-20030717">entre 2003 et 2004</a>, provoquant des coupures d’eau au Cap. Ces phénomènes sont-ils en train de s’intensifier avec le réchauffement global en cours ?</p>
<p>Le rendement sur lequel repose le système d’eau du Cap occidental était jusqu’ici calculé en se basant sur l’hypothèse d’un <a href="http://www.wmo.int/pages/prog/hwrp/chy/chy14/documents/ms/Stationarity_and_Nonstationarity.pdf">climat stationnaire</a>. L’idée étant que les précipitations passées peuvent servir à estimer les précipitations présentes et futures, et donc aussi les rendements des systèmes d’eau. Un modèle adapté aux ressources en eau permet d’estimer la fréquence des insuffisances en fonction des pluies passées – sur les 80 dernières années pour la région du Cap. Cela permet de concevoir un système d’eau relativement fiable : l’approvisionnement au Cap et dans les environs prévoit d’assurer le ravitaillement en eau sans restriction 98 % du temps, c’est-à-dire, en moyenne, 49 des 50 dernières années.</p>
<p>Au vu des évolutions futures du climat, les planificateurs chargés de la <a href="http://www.ipcc.ch/report/ar5/syr/">gestion des ressources en eau</a> tiennent compte du changement climatique dans la modernisation ou la conception de nouveaux systèmes d’approvisionnement en eau.</p>
<p>Ce changement climatique global a-t-il déjà altéré les risques de sécheresses connues au Cap ?</p>
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<h2>Un risque de sécheresse multiplié par trois</h2>
<p>Nous avons évalué ces modifications dans une <a href="http://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/aae9f9/meta">analyse</a> publiée récemment. En utilisant plusieurs <a href="https://www.worldweatherattribution.org/the-role-of-climate-change-in-the-2015-2017-drought-in-the-western-cape-of-south-africa/">méthodes de modélisation</a>, nous avons d’abord estimé la fréquence et l’intensité des quantités de précipitations sur trois ans au Cap occidental, dans un monde où le réchauffement climatique d’origine humaine n’existerait pas.</p>
<p>Puis nous avons comparé ce scénario au risque de sécheresse tel que nous le vivons en réalité, à une époque où les gaz à effet de serre et autres polluants ont entraîné la hausse des températures d’un degré environ.</p>
<p>Les résultats issus des différents modèles varient mais montrent tous que la menace de sécheresse a augmenté substantiellement du fait du réchauffement climatique. Notre meilleure estimation conclue que le risque de sécheresse de cette ampleur a été multiplié par un peu plus de trois.</p>
<h2>Adapter les réseaux hydrographiques</h2>
<p>Cela signifie que l’hypothèse d’un climat stable, qui sous-tend la conception du système d’approvisionnement en eau, se trouve ébranlée par le changement climatique, au moins dans la région du Cap occidental.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/247222/original/file-20181126-140534-18xzvby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/247222/original/file-20181126-140534-18xzvby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/247222/original/file-20181126-140534-18xzvby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/247222/original/file-20181126-140534-18xzvby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=294&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/247222/original/file-20181126-140534-18xzvby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=369&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/247222/original/file-20181126-140534-18xzvby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=369&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/247222/original/file-20181126-140534-18xzvby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=369&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’évolution des risques de sécheresse comme celles expérimentées au Cap, attribuables à l’influence humaine sur le climat. Le « ratio de risque » (RR) concerne la probabilité de cette sécheresse aujourd’hui, comparée à celle connue dans un monde sans réchauffement climatique. Un ratio risque supérieur à 1 indique que le risque a augmenté. Pour chaque approche de modélisation, les meilleures estimations pour le RR (la ligne noire) et l’intervalle de confiance à 95 % (barre de couleur) sont montrées. La synthèse fournit la meilleure estimation et le meilleur intervalle de confiance parmi toutes les approches de modélisations, indiquant un RR de 3,32, soit une multiplication par un peu plus de trois des risques.</span>
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<p>Notre analyse souligne que les prédictions en matière de bouleversements liés au changement climatique en Afrique du Sud se produisent déjà, avec davantage de périodes sèches aujourd’hui qu’il y a 20 ou 50 ans. Le système de ressource en eau se trouve plus fréquemment sous pression, et plus fortement que ce qui avait été anticipé.</p>
<p>Outre l’évaluation des risques actuels, nous montrons que le passage de <a href="https://www.ipcc.ch/report/ar5/wg1/">1 à 2 degrés de réchauffement climatique</a> dans les 50 prochaines années pourrait encore augmenter les risques d’intenses sécheresses.</p>
<p>Cela signifie que les épisodes de sécheresse se produiront bien plus fréquemment. Sans une adaptation de l’offre et de la demande en eau, des phénomènes tels que les pénuries vécues par Le Cap en 2017-2018 pourraient se produire tous les 15 ans, en moyenne, et non tous les 50 ans comme précédemment estimé.</p>
<h2>L’urgence d’agir</h2>
<p>Une étude publiée dans la revue <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-018-05649-1">Nature</a> suggère que la pénurie d’eau au Cap résulte largement de l’érosion du potentiel de gestion de l’eau en Afrique du Sud.</p>
<p>Pour nous, le changement climatique y contribue tout aussi largement. Les organisations en charge de la gestion de l’eau – le département d’eau et d’assainissement au niveau national, les agences de gestion des bassins hydrographiques aux niveaux local et régional – devront construire un système d’eau plus résilient, tenant compte des estimations en termes d’évolution des risques de sécheresse.</p>
<p>Comme pour d’autres infrastructures, la conception des futurs systèmes d’approvisionnement en eau tient généralement compte des projections en terme de changement climatique. Mais comme la sécheresse au Cap le montre, on ne parle plus ici d’un futur lointain ! Le changement climatique nous affecte déjà. Il est grand temps de réduire nos émissions de gaz à effet de serre et, surtout, de ne plus repousser la mise en place d’actions d’anticipation et d’adaptation.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Le projet de recherche <a href="https://group.bnpparibas/actualite/changement-climatique-stimuler-programmes-adaptation-efficaces-afrique">« Pour une Afrique moins vulnérable »</a> dans lequel s’inscrit cette publication a bénéficié du soutien de la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-initiative">programme Climate Initiative</a>.</em></p>
<p><em>Traduit de l’anglais par <a href="https://theconversation.com/profiles/nolwenn-jaumouille-578077">Nolwenn Jaumouillé</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/110851/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mark New a reçu des financements de du Axa Research Fund, de l’Intiative pour le climat de la Fondation BNP Paribas, du Centre de recherche pour le développement international, de DANIDA et de la Fondation nationale pour la recherche, entre autres.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Friederike Otto a reçu des financements de l'Initiative pour le climat de la Fondation BNP Paribas, du British Council India et du Nature Conservancy, entre autres.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Piotr Wolski a reçu des financements de la chaire sur le risque climatique en Afrique du Fonds AXA pour la recherche, et d’autres sources de financement gouvernementales et non-gouvernementales soutenant la recherche sur les ressources en eau et le climat.</span></em></p>Les systèmes d’approvisionnement en eau n’ont pas été conçus pour répondre aux évolutions météorologiques provoquées par le changement climatique. Il est désormais nécessaire de les adapter.Mark New, Director, African Climate and Development Initiative, University of Cape TownFriederike Otto, Acting Director, Environmental Change Institute, University of OxfordPiotr Wolski, Senior Researcher in Hydro-Climatology, University of Cape TownLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1081352018-12-16T20:30:53Z2018-12-16T20:30:53ZDu Bénin à Madagascar, comment on « cultive » le carbone en Afrique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/249959/original/file-20181211-76977-1icjgnf.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C131%2C3976%2C2730&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Parcelles agroforestières dans la région d'Itasy, à Madagascar.</span> <span class="attribution"><span class="source">LRI/Université d'Antananarivo </span></span></figcaption></figure><p>Chaque année, grâce à la photosynthèse, environ 30 % du CO₂ atmosphérique est capté par les plantes exposées à la lumière : par une réaction biochimique, elles le transforment en carbone organique.</p>
<p>Lorsque ces plantes ou une partie de ces plantes meurent, via la chute des feuilles ou le renouvellement des racines, elles sont consommées par les organismes vivants du sol – bactéries, champignons ou vers de terre ; elles se décomposent et constituent la matière organique du sol. Cette matière organique est composée à 50 % de carbone.</p>
<p>Les sols contiennent ainsi deux fois plus de carbone que l’ensemble de la biomasse – plantes, arbres – et représentent le plus grand réservoir de carbone terrestre.</p>
<p>Cette transformation participe au recyclage des éléments nutritifs – azote, phosphore, potassium – indispensables à la croissance des plantes. Elle permet aussi de lier durablement le carbone restant aux particules du sol. Les écosystèmes terrestres émettent du CO<sub>2</sub> lors des processus de décomposition de la matière organique mais, globalement, leurs émissions sont négatives : ils captent plus de carbone qu’ils n’en rejettent.</p>
<p>Le stockage de carbone dans les sols via la photosynthèse et la décomposition de la matière organique sont des processus naturels que l’homme peut amoindrir ou renforcer, selon la manière dont il gère les plantes, les sols, et utilise l’espace.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"799128486237663232"}"></div></p>
<h2>Capturer les rejets de CO<sub>2</sub></h2>
<p>Dans le contexte actuel de changement climatique, une réduction massive de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre s’impose dans tous les secteurs d’activités – énergie, transport, bâtiment, agriculture. Le stockage du carbone dans les sols via la photosynthèse peut y participer en permettant de retirer du CO<sub>2</sub> présent dans l’atmosphère.</p>
<p>Ce stockage contribuerait à contenir l’augmentation de la température à la surface de la planète en dessous de +1,5 °C à l’horizon 2100. C’est ce que promeut l’initiative <a href="https://theconversation.com/linitiative-4-pour-1-000-quest-ce-que-cest-54425">4 pour 1000</a>, lancée fin 2015 lors de la COP21 à Paris.</p>
<p>Pour y parvenir, des solutions concrètes existent, mais de nombreuses inconnues demeurent. Par exemple, la définition du potentiel de stockage de carbone des sols et sa quantification ; la question du lieu, des moyens, des pratiques agricoles et des échelles de temps restent également à déterminer.</p>
<h2>Des pratiques agricoles très variées</h2>
<p>Initié en 2017 pour trois années, le projet <a href="https://group.bnpparibas/actualite/soca-carbone-sols-service-agriculture-familiale-tropicale">Soca</a> s’intéresse aux moyens de stocker du carbone dans les sols en Afrique.</p>
<p>Des chercheurs français et africains travaillent en collaboration sur plusieurs dizaines de parcelles agricoles dans quatre pays : le Bénin, la Côte d’Ivoire, le Cameroun et Madagascar. Ces terrains utilisent des cultures différentes, vivrières (riz pluvial, manioc, mil) ou de rente (palmier à huile, cacaoyer), mais sont toutes conduites dans un contexte d’agriculture familiale.</p>
<p>Les pratiques agricoles varient selon les pays, les contextes climatiques, les sols, mais aussi selon les paysans. Certaines sont des monocultures ; d’autres sont dites agroforestières, c’est-à-dire que sur une même parcelle de champ, sont cultivés des arbres et des cultures – par exemple des agrumes et des cultures maraîchères. Parmi les cultures étudiées, certaines s’appuient sur la fertilisation : elle consiste à apporter les éléments minéraux nécessaires au développement de la plante, tels que des engrais ; d’autres n’y ont pas recours.</p>
<p>Le premier objectif du projet Soca consiste à quantifier le stockage de carbone dans le sol selon la diversité des climats, des types de sol – leur texture –, de leurs usages et des pratiques agricoles. Le second vise à comprendre et à hiérarchiser les différents facteurs qui jouent sur ces stocks de carbone contenus dans les sols.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/249961/original/file-20181211-76986-1aeh4hq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/249961/original/file-20181211-76986-1aeh4hq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/249961/original/file-20181211-76986-1aeh4hq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/249961/original/file-20181211-76986-1aeh4hq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/249961/original/file-20181211-76986-1aeh4hq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/249961/original/file-20181211-76986-1aeh4hq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/249961/original/file-20181211-76986-1aeh4hq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Installation d’une parcelle en agroforesterie, les plants d’agrume seront plantés dans une parcelle de cultures maraîchères (Madagascar).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Tiphaine Chevallier</span></span>
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<h2>Stocker le carbone efficacement</h2>
<p>Une analyse des données collectées dans la littérature scientifique a porté sur les stocks de carbone de divers types de sols et sous différents usages en milieu tropical. Elle a montré que les quantités de carbone apportées au sol sous forme de résidus de culture ou d’amendement organique – tel que fumier et compost – sont les principaux déterminants et leviers d’action pour stocker du carbone dans les sols cultivés.</p>
<p>En moyenne, <a href="http://www.documentation.ird.fr/hor/fdi:010072871">8,2 % du carbone</a> apporté est stabilisé dans les sols.</p>
<p>Mais notre analyse insiste également sur la nécessité de ne pas focaliser les études uniquement sur les particules fines du sol – constituées d’argiles et de limons fins. Elles assurent la <a href="http://www.documentation.ird.fr/hor/fdi:010072061">stabilisation du carbone du sol</a> à long terme mais participent peu au recyclage des éléments nutritifs et à la production agricole à court terme.</p>
<p>La décomposition des particules plus grossières, constituées par les résidus de culture et les débris végétaux, contribue au contraire à fournir des éléments nutritifs pour les plantes. Il s’agit donc d’en tenir compte pour conserver le double objectif de stocker du carbone dans les sols pour le climat mais aussi pour la sécurité alimentaire.</p>
<h2>L’agroforesterie, véritable puits de carbone</h2>
<p>Dans cette perspective, les systèmes agroforestiers semblent l’une des options les plus adaptées. Ils permettent d’éviter la déforestation, les problèmes d’érosion des sols et le destockage de carbone des sols. Les agriculteurs des zones étudiées dans le projet Soca gardent des essences forestières dans leur plantation de cacaoyers au Cameroun, ou plantent des arbres aux côtés de leurs cultures vivrières à Madagascar.</p>
<p>En 2018, une étude menée à Andasibé, dans l’Est de Madagascar, s’est penchée sur deux types d’agroforesterie : essences forestières ou arbres fruitiers associés à des cultures annuelles. Des mesures de terrain et des enquêtes auprès de 15 familles d’agriculteurs ont permis d’estimer l’empreinte carbone de chacune de ces fermes de quelques hectares.</p>
<p>Les deux types d’agroforesterie se comportent comme des puits de carbone, mais le système dans lequel les cultures annuelles sont associées aux essences forestières captent 3 fois plus de carbone que les systèmes associant les arbres fruitiers – respectivement -5,13 et -1,65 tonnes de CO<sub>2</sub> équivalent par hectare et par an. Les premiers systèmes comportent une diversité et une densité d’arbres (236 par hectare) supérieures au second système (200 par hectare).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"935637553146990593"}"></div></p>
<h2>Aider les paysans à choisir</h2>
<p>Le choix du système agroforestier est souvent guidé par le contexte socio-économique des agriculteurs. Au Sud Bénin, le palmier à huile est surtout présent dans de petites plantations villageoises. Dans les jeunes plantations, les agriculteurs associent les palmiers encore non productifs à des cultures annuelles, des tomates, du manioc, du maïs ou de l’ananas.</p>
<p>Des ateliers de discussions, ainsi que 54 enquêtes individuelles d’agriculteurs, ont montré que les choix techniques des cultivateurs sur ces associations étaient également liés à des choix socio-économiques : entre autres, la capacité d’investissement, la taille de la famille, ou l’insertion dans des réseaux d’agriculteurs.</p>
<p>Des sols productifs et stables favorisent donc directement la résilience des agriculteurs aux transformations climatiques. Les décisions des agriculteurs dans la conduite de leur parcelle affectent leur production agricole et leurs revenus sur le court terme, mais aussi les stocks organiques et la fertilité de leurs sols sur le long terme. Étudier les stocks de carbone dans les sols vise à caractériser les bénéfices à court et à long terme de telle ou telle pratique agricole, afin d’épauler les paysans dans leurs choix.</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Le <a href="https://group.bnpparibas/actualite/soca-carbone-sols-service-agriculture-familiale-tropicale">projet Soca</a> est soutenu par la Fondation BNP Paribas dans le cadre du programme <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Climate Initiative</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/108135/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tiphaine Chevallier a reçu des financements de Fondation BNP Paribas dans le cadre du programme « Climate Initiative » . </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Lydie Chapuis-Lardy a reçu des financements de Fondation BNP Paribas dans le cadre du programme « Climate Initiative ». </span></em></p>Grâce au processus de la photosynthèse, le stockage du carbone dans les sols peut participer aux nécessaires efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre.Tiphaine Chevallier, Chercheuse, Institut de recherche pour le développement (IRD)Lydie Chapuis-Lardy, Senior research scientist in Soil Science, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1085162018-12-10T20:39:15Z2018-12-10T20:39:15ZPlus 2 % d’émissions de CO₂ en 2018, une tendance qui s’installe pour 2019<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/249694/original/file-20181210-76959-103n9f9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=23%2C371%2C3964%2C2125&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">À l’occasion de la COP24, le Global Carbon Project publie une évaluation annuelle peu encourageante des rejets de CO2 pour l’année 2018.</span> <span class="attribution"><span class="source">AAP Image/Mick Tsikas</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Les émissions de CO<sub>2</sub> liées aux énergies fossiles et aux activités industrielles devraient avoir augmenté de plus de 2 % cette année. Une hausse qui porterait les émissions globales à un niveau record de 37,1 milliards de tonnes de CO<sub>2</sub>.</p>
<p>Le <a href="http://www.globalcarbonproject.org/index.htm">Global Carbon Project</a> a rendu le 6 décembre dernier ses projections annuelles, publiées à la fois dans <a href="https://www.earth-syst-sci-data.net/10/2141/2018/"><em>Earth System Science Data</em></a>, <a href="http://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/aaf303/meta"><em>Nature</em></a> et <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-018-07585-6"><em>IOPscience</em></a>. Cette initiative réunit des scientifiques utilisant des données industrielles et climatiques du monde entier : ils dressent chaque année un panorama global des sources et des puits planétaires de gaz à effet de serre.</p>
<p>Pour la deuxième année consécutive, les rejets augmentent. Ils s’étaient pourtant stabilisés au cours de la période 2014-2016. Un regain incompatible avec les objectifs de l’Accord de Paris, qui exige de plafonner rapidement les émissions de gaz à effet de serre pour contenir le réchauffement climatique. Leur forte hausse, due à l’usage du charbon, du pétrole et du gaz naturel, risque de se poursuivre en 2019.</p>
<p>La forte demande énergétique explique cette remontée des émissions, dont le rythme dépasse celui de la décarbonation du système énergétique mondial. La consommation d’énergie a ainsi crû d’un sixième au cours de la dernière décennie. Une augmentation liée à l’émergence d’une classe moyenne mondiale et à la nécessité de fournir de l’électricité à des centaines de millions de personnes vivant dans la pauvreté. Le défi consiste pour l’ensemble des pays à décarboner leurs économies tout en satisfaisant les besoins en énergie, et ce tout particulièrement dans les pays en développement.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/248481/original/file-20181203-194925-1wdjier.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/248481/original/file-20181203-194925-1wdjier.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/248481/original/file-20181203-194925-1wdjier.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/248481/original/file-20181203-194925-1wdjier.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/248481/original/file-20181203-194925-1wdjier.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/248481/original/file-20181203-194925-1wdjier.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/248481/original/file-20181203-194925-1wdjier.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/248481/original/file-20181203-194925-1wdjier.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Scénarios d’émissions mondiales de CO₂ d’ici à 2100 – le point rouge correspond à notre projection pour 2018.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project/Jackson et coll. 2018</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Le charbon fait la course en tête</h2>
<p>En 2017 et 2018, les émissions de CO<sub>2</sub> dues au charbon ont recommencé à augmenter après le pic de 2013. Elles demeuraient cependant en 2017 à 3 % en dessous de ce record ; les niveaux de 2018 semblent eux s’en rapprocher dangereusement. Ce regain constitue la raison principale à la forte croissance des rejets en 2018, avant même les émissions liées au pétrole et au gaz naturel.</p>
<p>La Chine et l’Inde se placent cette année en tête des contributeurs expliquant cette croissance des émissions liées au charbon. Les États-Unis enregistrent au contraire le plus fort recul en la matière : plus de 250 centrales à charbon ont fermé depuis 2010 – et de nouvelles fermetures <a href="https://platform.mi.spglobal.com/web/client?auth=inherit#news/article?id=48671375&cdid=A-48671375-11561&utm_content=bufferd8095&utm_medium=social&utm_source=twitter.com&utm_campaign=buffer">sont attendues</a> dans les cinq prochaines années.</p>
<p>La croissance des émissions liées à la production de ciment a quant à elle considérablement ralenti.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/248340/original/file-20181203-194941-1txzrqg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/248340/original/file-20181203-194941-1txzrqg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/248340/original/file-20181203-194941-1txzrqg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/248340/original/file-20181203-194941-1txzrqg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/248340/original/file-20181203-194941-1txzrqg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/248340/original/file-20181203-194941-1txzrqg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/248340/original/file-20181203-194941-1txzrqg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/248340/original/file-20181203-194941-1txzrqg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Émissions annuelles globales d’émissions de CO₂ liées aux énergies fossiles en 2017, avec la projection de 2018 : le charbon approcherait des niveaux observés en 2013.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>La Chine, plus gros contributeur</h2>
<p>La plupart des pays participent à l’intensification des émissions mondiales de CO<sub>2</sub>. Dix-neuf pays, représentant 20 % des émissions globales, ont toutefois réduit leurs émissions au cours de la dernière décennie (2008-2017) – et ce malgré la croissance de leurs économies. Parmi ces pays, le Danemark, la République tchèque, la France, le Royaume-Uni, les États-Unis ou encore les Pays-Bas.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1070682019192102912"}"></div></p>
<p>Pour 2018, la Chine qui représente 27 % des émissions mondiales, devrait voir augmenter de 4,7 % ses rejets de CO<sub>2</sub> (contre 1,7 % en 2017). Malgré leur baisse prévue à long terme, les émissions des États-Unis pourraient également s’aggraver de 2,5 % cette année. En cause, la demande croissante en chauffage et en refroidissement, ainsi que la consommation de pétrole.</p>
<p>Pour la première fois depuis 2014, l’Union européenne pourrait réduire ses émissions de 0,7 % en 2018, après une augmentation de 1,4 % en 2017. Les émissions indiennes augmenteraient quant à elles de 6,3 %, du fait d’une importante croissance de l’usage du charbon. En Australie, les rejets n’ont cessé de s’intensifier au cours des <a href="http://www.environment.gov.au/climate-change/climate-science-data/greenhouse-gas-measurement/publications/quarterly-update-australias-national-greenhouse-gas-inventory-june-2018">quatre dernières années</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/248341/original/file-20181203-194938-1qrbjwi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/248341/original/file-20181203-194938-1qrbjwi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/248341/original/file-20181203-194938-1qrbjwi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/248341/original/file-20181203-194938-1qrbjwi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/248341/original/file-20181203-194938-1qrbjwi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/248341/original/file-20181203-194938-1qrbjwi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/248341/original/file-20181203-194938-1qrbjwi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/248341/original/file-20181203-194938-1qrbjwi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Émissions annuelles globales de CO₂ liées aux énergies fossiles en 2017, et projections d’émissions pour 2018, basées sur les données de janvier à septembre.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project/Le Quere et coll. 2018/Jackson et coll. 2018</span></span>
</figcaption>
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<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/248344/original/file-20181203-194935-1an1pod.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/248344/original/file-20181203-194935-1an1pod.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/248344/original/file-20181203-194935-1an1pod.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=329&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/248344/original/file-20181203-194935-1an1pod.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=329&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/248344/original/file-20181203-194935-1an1pod.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=329&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/248344/original/file-20181203-194935-1an1pod.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=414&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/248344/original/file-20181203-194935-1an1pod.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=414&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/248344/original/file-20181203-194935-1an1pod.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=414&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Émissions de CO₂ par tête et par pays en 2017.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Quelles perspectives ?</h2>
<p>Une révolution énergétique historique s’opère déjà en direction de sources d’énergie plus propres. Les énergies renouvelables – solaire, éolien, biocarburants – accélèrent globalement à un rythme exceptionnel. Leur capacité mondiale double tous les quatre ans, bien qu’elles partent de plus loin que l’énergie générée par les carburants fossiles. La poursuite et l’accélération de cette tendance est <a href="https://www.nature.com/articles/nclimate3202">cohérente</a> avec les exigences de l’accord de Paris.</p>
<p>Ce mouvement devrait toutefois être accompagné d’un déclin aussi rapide des émissions dues aux carburants fossiles : or cette diminution indispensable ne transparaît pas dans nos dernières données. La forte croissance des émissions prévue pour 2018, et susceptible de se poursuivre en 2019, entre en contradiction avec les objectifs de l’accord climatique conclu à la COP21 en 2015.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/248343/original/file-20181203-194953-1edkrcs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/248343/original/file-20181203-194953-1edkrcs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/248343/original/file-20181203-194953-1edkrcs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/248343/original/file-20181203-194953-1edkrcs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/248343/original/file-20181203-194953-1edkrcs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/248343/original/file-20181203-194953-1edkrcs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/248343/original/file-20181203-194953-1edkrcs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/248343/original/file-20181203-194953-1edkrcs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Consommation annuelle mondiale d’énergie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project</span></span>
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<p>Le <a href="https://www.unenvironment.org/resources/emissions-gap-report-2018">rapport 2018</a> sur l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction d’émissions illustre les divergences croissantes entre : les tendances d’émissions actuelles ; les engagements nationaux en matière de réduction d’émissions ; enfin, les réductions requises pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris.</p>
<p>Tous les pays doivent intensifier leurs efforts et leurs ambitions pour contrer la croissance des émissions. C’est la condition nécessaire à une décarbonation compatible avec l’objectif climatique d’<a href="https://www.ipcc.ch/report/sr15/">1,5° C</a> de réchauffement à l’horizon de la fin du siècle, et le maintien en dessous du seuil critique des <a href="https://www.ipcc.ch/report/ar5/">2° C</a>.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>L’initiative Global Carbon Project bénéficie du soutien de la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-initiative">programme Climate Initiative</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/108516/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pep Canadell a reçu des financements de l’Australian National Environmental Science Program - Earth Systems and Climate Change Hub.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Corinne Le Quéré est affiliée au Comité du Royaume-Uni sur le changement climatique et au Haut Conseil français pour le climat.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Glen Peters a reçu des financements du Conseil norvégien de la recherche et de la Commission européenne (Horizon 2020).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Robbie Andrew a reçu des financements du Conseil norvégien de la recherche.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Rob Jackson a reçu des financements de la Fondation Gordon et Betty Moore.</span></em></p>La demande énergétique en hausse est l’un des facteurs explicatifs de cette tendance.Pep Canadell, CSIRO Oceans and Atmosphere; Executive Director, Global Carbon Project, CSIROCorinne Le Quéré, Professor, Tyndall Centre for Climate Change Research, University of East AngliaGlen Peters, Research Director, Center for International Climate and Environment Research - OsloRobbie Andrew, Senior Researcher, Center for International Climate and Environment Research - OsloRob Jackson, Chair, Department of Earth System Science, and Chair of the Global Carbon Project, globalcarbonproject.org, Stanford UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1022902018-11-14T20:45:37Z2018-11-14T20:45:37ZLe pétrel des neiges, sentinelle du changement climatique en Antarctique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/245040/original/file-20181112-83596-10p46fn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C241%2C4026%2C2498&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le pétrel des neiges, oiseau marin vivant en Antarctique, peut vivre jusqu’à l’âge de 50 ans.</span> <span class="attribution"><span class="source">Christophe Sauser</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>La manière dont le changement climatique influence les écosystèmes terrestres et marins est devenue ces dernières décennies un sujet de préoccupation majeur pour l’écologie et la biologie de la conservation.</p>
<p>Aux pôles, de profonds changements sont déjà visibles ; ils conduisent à une modification du cycle de vie de certaines espèces animales ou végétales.</p>
<p>En Arctique, au pôle Nord, l’étendue et l’épaisseur de la banquise ont drastiquement diminué ces quarante dernières années, avec deux records de fonte, en <a href="https://go.nasa.gov/2GklR2s">mars 2017 puis en mars 2018</a>. Cette réduction menace les espèces qui dépendent de la banquise pour vivre et certains oiseaux marins ont été forcés de modifier leur régime alimentaire, ce qui a <a href="https://bit.ly/2D5luqx">entraîné une baisse</a> de la survie de leurs poussins.</p>
<p>En Antarctique, au pôle Sud, les changements climatiques entraînent des <a href="https://bit.ly/2Da0MFO">modifications plus contrastées</a> de la banquise selon les régions. La réponse des écosystèmes diffère ainsi suivant que la couverture de glace augmente ou diminue.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/244811/original/file-20181109-38373-nxew6w.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/244811/original/file-20181109-38373-nxew6w.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/244811/original/file-20181109-38373-nxew6w.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/244811/original/file-20181109-38373-nxew6w.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/244811/original/file-20181109-38373-nxew6w.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/244811/original/file-20181109-38373-nxew6w.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/244811/original/file-20181109-38373-nxew6w.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Vue de la banquise fragmentée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Christophe Sauser</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (<a href="https://ipcc.ch/home_languages_main_french.shtml">GIEC</a>) prévoit dans ses projections climatiques une <a href="https://www.ipcc.ch/publications_and_data/ar4/syr/fr/spms3.html">diminution globale</a> de l’épaisseur et de l’étendue de la glace de mer en Antarctique d’ici la fin du siècle. Ce qui entraînerait une modification de l’écosystème naturel au détriment de nombreux organismes.</p>
<p>Positionnés en haut du réseau dit « trophique », c’est-à-dire de l’ensemble des chaînes alimentaires reliées entre elles au sein des océans, les prédateurs marins supérieurs (oiseaux, mammifères ou thons, par exemple) constituent d’excellents <a href="https://www.int-res.com/articles/theme/m352p199.pdf">indicateurs biologiques</a> de ces transformations.</p>
<p>Ces prédateurs utilisent de vastes zones en mer pour trouver leur nourriture et intègrent donc les variations de l’environnement océanique à de larges échelles spatiales. Ces animaux sont en outre « longévifs », certains individus pouvant vivre jusqu’à 50 ans. Ils témoignent ainsi des variations de l’environnement à l’échelle de nombreuses années, permettant d’avoir une vision globale de l’état d’un écosystème. Le pétrel des neiges en fait partie.</p>
<h2>Direction l’archipel de Pointe-Géologie</h2>
<p>Oiseau prédateur marin supérieur, le pétrel des neiges (<em>Pagodroma nivea</em>) est sensible aux fluctuations de la banquise. Il s’agit d’une espèce dite « pagophilique » – c’est-à-dire écologiquement dépendante de la glace de mer – se nourrissant presque exclusivement dans les zones de banquise fragmentée (<a href="https://www.britannica.com/science/pack-ice"><em>pack-ice</em></a>).</p>
<p>Il s’alimente en plongeant ou en saisissant ses proies à la surface, essentiellement de petits poissons antarctiques et du krill (petits crustacés).</p>
<p>Les pétrels des neiges, qui constituent une espèce endémique de l’Antarctique et de l’océan Austral, peuvent vivre une cinquantaine d’années et nichent en colonies sur les zones rocheuses du littoral antarctique. Ils se reproduisent de novembre à mars – période de l’été austral – et reviennent tous les ans dans la même colonie pour se reproduire, allant jusqu’à réutiliser le même nid que les années précédentes. Cela facilite le suivi individuel et les pétrels des neiges constituent ainsi un modèle de choix pour les scientifiques.</p>
<p>Une <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s004420000481">étude à long terme</a> sur des pétrels de l’archipel de Pointe-Géologie (Terre Adélie, en Antarctique), initiée en 1963 et toujours en cours aujourd’hui, a déjà permis de mettre en évidence une corrélation entre la démographie des adultes et les conditions de la banquise en hiver.</p>
<p>L’étude a par exemple révélé que la survie individuelle des adultes était meilleure lorsque l’étendue de banquise austral était moins importante au début de l’hiver. Même si les causes exactes restent mal connues, il est probable que l’étendue de banquise à cette période ait un effet sur la quantité de ressources alimentaires (principalement des poissons et des crustacés) disponibles pour ces oiseaux.</p>
<h2>Sur la trace des jeunes pétrels</h2>
<p>À la suite de ce travail, <a href="http://www.cebc.cnrs.fr/ecomm/Fr_ecomm/Fr_index.html">notre équipe de recherche</a> s’est intéressée aux traits d’histoire de vie – ces paramètres impliqués dans la survie et la reproduction des organismes – qui caractérisent les premiers stades de la vie des pétrels. Ces stades, dits juvéniles, caractérisent la vie des individus entre leur naissance et leur première reproduction ; ils influencent fortement la dynamique des populations chez les espèces à longue durée de vie comme le pétrel des neiges. C’est en effet de leur survie que va dépendre leur reproduction future (en moyenne à l’âge de 10 ans) et donc l’avenir de la population.</p>
<p>Il nous est donc paru primordial de développer nos connaissances sur les juvéniles et leurs réponses aux fluctuations environnementales liées au changement climatique.</p>
<p>Dans une <a href="http://www.cebc.cnrs.fr/publipdf/2018/SBL14_2018.pdf">étude publiée en juillet 2018</a> dans la revue scientifique <em>Biology Letters</em>, nous avons voulu étudier deux questions concernant les juvéniles de pétrels des neiges : La condition corporelle et la survie juvénile suivent-elles au cours des années une tendance particulière ? Les paramètres de survie et de reproduction sont-ils influencés par la glace de mer ?</p>
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<figcaption>
<span class="caption">La survie des jeunes pétrels influence fortement la dynamique démographique de l’espèce.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Christophe Sauser</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/244816/original/file-20181109-116832-1pgs5le.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/244816/original/file-20181109-116832-1pgs5le.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/244816/original/file-20181109-116832-1pgs5le.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/244816/original/file-20181109-116832-1pgs5le.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/244816/original/file-20181109-116832-1pgs5le.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/244816/original/file-20181109-116832-1pgs5le.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/244816/original/file-20181109-116832-1pgs5le.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Quarante jours après sa naissance, le pétrel des neiges peut réaliser son premier envol.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Christophe Sauser</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Les poussins de 200 nids</h2>
<p>À l’aide d’un suivi à long terme initié en 1993, nous avons pu modéliser la condition corporelle des jeunes pétrels juste avant leur envol du nid. Cette condition est calculée pour un individu en divisant sa masse par sa taille, relativement à la taille moyenne des individus de la population. La condition corporelle indique la quantité de réserves de graisse de l’individu. Ainsi, à taille égale, un individu à la condition corporelle forte aura plus de réserves énergétiques qu’un individu à la condition corporelle faible.</p>
<p>Dans ce suivi, l’ensemble des poussins de 200 nids sont mesurés et pesés chaque année à l’âge de 40 jours, soit quelques jours avant leur envol. Au cours de la période 1993-2014, la condition corporelle des jeunes pétrels s’est détériorée tandis que la concentration en glace de mer en été pendant la période de croissance des juvéniles a augmenté.</p>
<h2>Des proies moins accessibles</h2>
<p>La relation entre la concentration de glace de mer et la condition corporelle semble non linéaire : en dessous de 20 à 30 % de concentration de glace, correspondant au pourcentage de la surface de l’océan recouverte par de la banquise, la condition corporelle est stable. Au-delà, elle décroît.</p>
<p>Ce qui signifie que les années où les concentrations de glaces sont élevées, les adultes de pétrels des neiges peinent à trouver les ressources alimentaires nécessaires aux poussins, ces ressources étant plus rares et les proies moins accessibles pendant la période d’élevage des jeunes.</p>
<p>La concentration de glace est connue pour affecter la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0967064508001586">production primaire océanique</a>, c’est-à-dire la production de matière organique sous la forme de plancton végétal, et donc les ressources alimentaires disponibles pour les proies des pétrels. Lorsque la concentration de glace est élevée, la banquise fournit également une barrière naturelle aux proies contre les prédateurs.</p>
<h2>Pétrels mais aussi manchots, guillemots, mouettes</h2>
<p>La survie des juvéniles, évaluée grâce à la proportion de juvéniles ayant survécu entre leur envol et l’âge de 5 ans – âge du premier retour à la colonie –, semble affectée par les mêmes processus que la condition corporelle. Lorsque la concentration de glace est importante, l’abondance et l’accessibilité des proies se trouvent diminuées.</p>
<p>Les augmentations récentes de concentration de glace de mer dans certaines régions de l’Antarctique ont donc eu un impact négatif sur la condition corporelle et la survie des jeunes pétrels des neiges. Et ces augmentations auront probablement un impact négatif sur la démographie de l’espèce. Ces résultats contrastent avec les effets positifs observés <a href="https://swfsc.noaa.gov/uploadedFiles/Divisions/AERD/Publications/loeb.nature.paper.1997.pdf">chez d’autres espèces</a> dépendantes de la glace, comme le manchot Adélie (<em>Pygoscelis adeliae</em>) par exemple.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/244810/original/file-20181109-116838-1t04l89.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C76%2C3917%2C2359&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/244810/original/file-20181109-116838-1t04l89.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/244810/original/file-20181109-116838-1t04l89.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/244810/original/file-20181109-116838-1t04l89.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/244810/original/file-20181109-116838-1t04l89.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/244810/original/file-20181109-116838-1t04l89.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/244810/original/file-20181109-116838-1t04l89.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le pétrel plonge à la surface de l’eau pour se nourrir de poissons et de crustacés.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Christophe Sauser</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>C’est pourquoi d’autres études à long terme documentant les effets de la glace de mer sur les traits d’histoire de vie sont nécessaires pour améliorer notre compréhension des effets complexes de cette glace sur la démographie des prédateurs et des écosystèmes polaires.</p>
<p>C’est l’un des objectifs principaux du notre projet scientifique « Sentinels of the sea ice » (<a href="https://sites.google.com/view/senseicebc">Sensei</a>) qui vise à comprendre les effets des variations de la glace de mer en Arctique et en Antarctique sur un cortège d’espèces d’oiseaux (dont le pétrel des neiges, mais aussi des manchots, guillemots et mouettes) et de mammifères marins (phoques) associées à la glace de mer.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Le <a href="https://group.bnpparibas/actualite/sensei-8-especes-animales-comprendre-rechauffement-climatique">projet de recherche « Sentinels of the sea ice » (Sensei)</a> est soutenu par le programme <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Climate Initiative</a> de la Fondation BNP Paribas</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/102290/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Barbraud a reçu des financements du CNRS, Institut polaire français Paul Emile Victor, Fondation BNP Paribas.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Christophe Sauser a reçu des financements du CNRS, Institut polaire français Paul Emile Victor, Fondation BNP Paribas.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Karine Delord a reçu des financements du CNRS, Institut polaire français Paul Emile Victor, Fondation BNP Paribas.</span></em></p>En Antarctique, cet oiseau marin est le témoin privilégié des changements climatiques qui affectent durablement son espèce.Christophe Barbraud, Directeur de recherche en écologie des populations, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Christophe Sauser, Doctorant en écologie, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Karine Delord, Ingénieure en écologie des prédateurs marins, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1049122018-11-04T19:44:43Z2018-11-04T19:44:43ZComment font les arbres pour se protéger des insectes ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/332785/original/file-20200505-83725-1g7m629.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1024%2C682&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une chenille de bombyx disparate (Lymantria dispar) sur une feuille de chêne. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://ccsearch.creativecommons.org/photos/2b34ecb0-32bc-4d87-8866-1a2b4153ed40">Andreas März/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p><a href="https://bit.ly/2JwMEYE">6 % environ</a>, c’est la part de surface de feuilles d’arbres consommée chaque année par les insectes herbivores, comme la chenille processionnaire du chêne ou le bombyx disparate. Cette proportion, déjà suffisante pour ralentir la croissance des arbres, pourrait bien augmenter avec le réchauffement climatique.</p>
<p>Face à ces dérèglements, les arbres mettent en œuvre des stratégies de régulation pour se défendre. Tandis que la <a href="http://www.fao.org/forestry/statistics/80938/fr/">demande en bois</a> ne cesse d’augmenter – que ce soit pour l’ameublement, le chauffage, la construction ou la production de carton et de papier –, il apparaît indispensable d’identifier la manière dont les arbres pourront faire face aux dégâts croissants que risquent de leur causer les insectes herbivores.</p>
<h2>Des défenses naturelles</h2>
<p>Dans leur constitution, les arbres sont déjà munis de solides défenses vis-à-vis des insectes herbivores. Leurs feuilles, par exemple, sont dotées de propriétés physiques et chimiques limitant la consommation des insectes : une cuticule épaisse rend ainsi la feuille difficile à déchirer et à digérer.</p>
<p>Sur le plan chimique, les feuilles renferment également une grande quantité de composés (des <a href="https://www7.inra.fr/opie-insectes/pdf/i168huignard.pdf">tanins</a> notamment), capables de nuire aux herbivores de diverses façons, en réduisant par exemple l’activité de leurs enzymes digestives ou, tout simplement, en les intoxiquant.</p>
<p>D’autres acteurs jouent un rôle primordial bien qu’indirect dans la stratégie de défense des arbres : par leur consommation d’herbivores, les prédateurs comme la mésange et les parasitoïdes comme les trichogrammes (dont les larves se nourrissent dans le corps d’un autre insecte, le mangeant de l’intérieur) diminuent aussi la pression herbivore sur les arbres.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/243246/original/file-20181031-76405-1k89oce.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C97%2C1050%2C597&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/243246/original/file-20181031-76405-1k89oce.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/243246/original/file-20181031-76405-1k89oce.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/243246/original/file-20181031-76405-1k89oce.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/243246/original/file-20181031-76405-1k89oce.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/243246/original/file-20181031-76405-1k89oce.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/243246/original/file-20181031-76405-1k89oce.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Certains prédateurs participent à la défense des arbres en attaquant les insectes herbivores.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/k1GmCGLmNGg">Vincent van Zalinge/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Impact des dérèglements climatiques</h2>
<p>Ces mécanismes de défense naturelle sont aujourd’hui perturbés par le réchauffement climatique, dont les effets affectent directement arbres, herbivores et prédateurs. Pour quelques degrés de plus, les feuilles poussent plus tôt dans l’année. Pour quelques degrés de trop, en été, la survie des arbres peut être menacée.</p>
<p>Chez les insectes, les hivers plus doux limiteront probablement la mortalité hivernale, au risque d’augmenter les pullulations, donc les dégâts massifs : les températures plus élevées accélèrent en effet le développement des insectes, à un rythme qui atteint parfois plusieurs générations par an.</p>
<p>Faute d’expérimentation facile, il s’avère compliqué d’anticiper précisément les conséquences du réchauffement climatique sur les dégâts causés par les insectes herbivores.</p>
<p>Dans le but de les comprendre, <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01607330">plusieurs études</a> ont été menées en laboratoire, dans des chambres de culture à la température contrôlée ; elles ont toutefois leurs limites. Elles simplifient à l’extrême la diversité des facteurs en jeu et ne peuvent pas rendre compte de l’ensemble des interactions entre les arbres, tous les herbivores et tous les prédateurs naturellement présents dans les écosystèmes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/243252/original/file-20181031-122177-188ko75.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/243252/original/file-20181031-122177-188ko75.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/243252/original/file-20181031-122177-188ko75.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/243252/original/file-20181031-122177-188ko75.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/243252/original/file-20181031-122177-188ko75.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/243252/original/file-20181031-122177-188ko75.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/243252/original/file-20181031-122177-188ko75.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Cette chenille herbivore, qui mange les feuilles des arbres, imite les serpents pour éloigner les prédateurs.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/drphotomoto/10847889563/in/photolist-hwAgCF-5BtzVz-gP2eUx-6iJMAd-cTkyXA-i1zENf-ei4zp5-pczdBj-s5huTW-goFGP1-7pJvcK-6qrtqY-a2oYC1-733kQz-wg1TGX-BxvLnz-6Envr8-eYmfsV-bFFzPH-c5WpEd-bumzAS-bsLG5L-6t4Hnw-dqnq9t-5FsSDA-7Uu4ep-4YJJ1t-avSqYJ-9Vfa9P-9pK7ZA-o6qRdn-5ouNZh-KcAKJm-uixTEL-w4a2ZU-wD4Gro-C22yWp-2HCFiU-fJsSmQ-bsLHsS-g2iZgE-e5LHU6-fbnc1K-nJj4Dz-7NWkB9-bFFyFD-bHifbp-bumzeC-8kmkeA-bsLBpJ">John Flannery/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Latitudes et défenses chimiques des feuilles</h2>
<p>Une autre approche consiste à caractériser les effets du climat actuel en réalisant des observations le long de grands axes géographiques, et de transposer dans le temps ce que l’on observe dans l’espace.</p>
<p>Prenons un exemple : dans l’hypothèse où le climat de la France serait demain celui de l’actuelle Espagne, on peut supposer que la régulation des dégâts d’insectes herbivores aujourd’hui à l’œuvre en Espagne sera la même, demain, en France.</p>
<p>En suivant ce raisonnement, de nombreux chercheurs ont étudié les <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/geb.12347">dégâts d’insectes herbivores</a>, les <a href="https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/j.1365-2435.2010.01814.x">défenses des arbres</a>, ou encore <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/ece3.5862">l’activité des prédateurs</a>, le long de grands gradients latitudinaux, des régions tropicales vers les régions polaires en passant par les zones tempérées.</p>
<p>Dans une <a href="https://pdfs.semanticscholar.org/b5f6/cb03ab94b732aeef3b7832f4f9c897a00e56.pdf">étude publiée en 2018</a>, nous avons ainsi mis en relation les dégâts d’insectes herbivores sur le chêne pédonculé avec les défenses chimiques des feuilles le long d’un gradient allant du nord de l’Espagne au sud de la Suède.</p>
<p>Près de 60 % des feuilles présentaient des dégâts d’insectes en Espagne, contre 30 % en Suède, mettant ainsi en lumière une diminution des dégâts d’insectes du sud vers le nord de l’Europe. En parallèle, la majorité des défenses chimiques (notamment les tanins) étaient plus concentrées dans les feuilles au Nord qu’au Sud.</p>
<h2>Des chenilles en pâte à modeler</h2>
<p>En s’en tenant à cette étude, on est tenté de conclure que les arbres sont menacés par le réchauffement climatique parce qu’il leur ferait perdre leur capacité à produire des défenses chimiques ; et donc subir davantage de dégâts de la part des herbivores.</p>
<p>Une telle conclusion est néanmoins caricaturale. Et des <a href="https://ib.berkeley.edu/labs/fine/Site/publications_files/Limetal2015.pdf">travaux menés par des chercheurs</a> de l’université de New South Wales à Sidney ont montré que tous les cas de figure existent quant à la relation entre latitude et défenses des plantes contre les herbivores. Il n’y a donc pas lieu d’en tirer des généralités.</p>
<p>Une autre hypothèse apparaît alors. Si les défenses des plantes ne suffisent pas à expliquer l’effet du climat sur les dégâts d’insectes, les défenses indirectes jouent peut-être un rôle. Dans une <a href="https://bit.ly/2PB0JJK">étude pilotée à l’échelle mondiale</a>, des universitaires ont utilisé des chenilles en pâte à modeler pour mimer de véritables chenilles, afin de tromper les prédateurs. Ces derniers, naïfs, se sont jetés sur ces leurres, y imprimant des traces de becs, de dents ou de mandibules.</p>
<p>Or, l’expérience a montré que la quantité de fausses chenilles attaquées par les prédateurs augmentait quand on avançait des pôles vers l’équateur. Peut-on en conclure que le nombre de prédateurs augmente à mesure que le climat se réchauffe, assurant un meilleur contrôle des dégâts d’insectes herbivores ? Les auteurs de l’étude restent très prudents, mais la piste mérite d’être creusée.</p>
<h2>Anticiper les changements</h2>
<p>Dans ce contexte, nous avons lancé en 2018, avec une équipe de chercheurs d’Inrae Bordeaux et en collaboration avec des universitaires de toute l’Europe, un projet scientifique <a href="http://www.bordeaux-aquitaine.inra.fr/Toutes-les-actualites/Qui-a-mange-mes-chenilles-Appel-aux-ecoles-pour-un-projet-de-science-participative">comportant un volet participatif</a>.</p>
<p>Il s’agit d’étudier simultanément les effets du climat sur les défenses des chênes et sur l’activité des prédateurs, en exposant des chenilles en pâte à modeler dans les arbres. Des écoliers, collégiens et lycéens de six pays se sont joints à nous.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/243229/original/file-20181031-76411-9667vv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/243229/original/file-20181031-76411-9667vv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/243229/original/file-20181031-76411-9667vv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/243229/original/file-20181031-76411-9667vv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/243229/original/file-20181031-76411-9667vv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/243229/original/file-20181031-76411-9667vv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/243229/original/file-20181031-76411-9667vv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des chercheurs ont mis dans la nature de fausses chenilles pour attirer les prédateurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bastien Castagneyrol</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Nous avons d’ores et déjà pu vérifier que les élèves, sous certaines conditions, <a href="https://theoryandpractice.citizenscienceassociation.org/articles/10.5334/cstp.267/">peuvent fournir du matériel biologique ou des données exploitables par les chercheurs</a>. Nous cherchons maintenant à faire parler ces données. Il s’agit notamment d’évaluer l’importance relative des différents mécanismes qui régulent les dégâts d’insectes sur les arbres, mais aussi d’étudier la manière dont les sciences citoyennes peuvent être utilisées à l’école dans les enseignements scientifiques.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Le projet de recherche « Tree Bodyguards » dans lequel s’inscrit cette publication a bénéficié du soutien de la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-biodiversity-initiative">programme Climate and Biodiversity Initiative</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/104912/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bastien Castagneyrol a reçu des financements de la fondation BNP Paribas pour le projet Tree Bodyguards dans le cadre du programme Climate & Biodiversity Initiative.</span></em></p>Avec changement climatique, les arbres développent des stratégies pour adapter leurs systèmes de défense contre les insectes herbivores.Bastien Castagneyrol, Chercheur en écologie, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/927572018-07-23T23:16:37Z2018-07-23T23:16:37ZSécheresse : pourquoi les épisodes se multiplient-ils sous les tropiques ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/228810/original/file-20180723-189338-o4lqvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C116%2C4320%2C2974&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Conifère souffrant de la sécheresse dans le nord de la Patagonie. </span> <span class="attribution"><span class="source">Projet Themes</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>La sécheresse fait partie des risques naturels <a href="http://emdat.be/sites/default/files/adsr_2016.pdf">qui menacent le plus gravement</a> la population mondiale. En termes d’impact, le phénomène est seulement devancé par les inondations.</p>
<p><a href="http://www.unisdr.org/we/inform/publications/46796">Entre 1995 et 2015</a>, ce sont ainsi 1,1 milliard de personnes qui ont subi les effets d’un grave épisode sec. À titre de comparaison, cela représente près de deux fois le bilan cumulé des ouragans.</p>
<p>Une équipe internationale de chercheurs a décidé de s’intéresser à l’<a href="https://group.bnpparibas/actualite/themes-percer-mystere-expansion-tropiques">intensification de ce phénomène en Amérique du Sud</a>, avec le double objectif de l’analyser et de mobiliser les autorités politiques locales pour s’adapter à cet aspect du changement climatique.</p>
<p>Une hausse de fréquence des sécheresses a en effet été observée, dans les 30 à 40 dernières années, en <a href="https://www.clim-past.net/11/1139/2015/">Amérique du Sud</a>, en <a href="https://www.csiro.au/en/Research/Environment/Extreme-Events/Drought/South-east-Australia">Australie</a>, en <a href="http://www.pnas.org/content/107/50/21256">Amérique du Nord</a> et <a href="https://www.nat-hazards-earth-syst-sci.net/11/33/2011/">dans la région méditerranéenne</a>.</p>
<p>À la mi-février 2018, le ministère de l’Économie argentin <a href="http://www.lefigaro.fr/flash-eco/2018/02/28/97002-20180228FILWWW00201-secheresse-en-argentine-de-lourdes-pertes-en-perspective.php">chiffrait ainsi à 3 milliards de dollars minimum</a> le manque à gagner sur les exportations agricoles, dû à la sécheresse en <a href="https://www.reuters.com/article/argentina-drought-debt/argentina-to-provide-debt-relief-to-drought-hit-farmers-idUSL1N1QV16P">cours dans le centre du pays</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/215564/original/file-20180419-134691-j4n4od.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution de la pluviosité dans les Andes entre 18°S et 42°S. Une tendance à la diminution de 65 mm/décennie est observée depuis les années 1980.</span>
<span class="attribution"><span class="source">V. Daux et R.Villalba</span></span>
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<h2>Pister l’expansion des sécheresses</h2>
<p>La première campagne de terrain pour <a href="https://group.bnpparibas/actualite/themes-percer-mystere-expansion-tropiques">ce projet de recherche</a> appelé Themes (pour « The Mystery of the Expanding Tropics »), a été réalisée en février 2018 dans les Andes argentines.</p>
<p>Dix-neuf scientifiques (dont huit ingénieurs et techniciens et deux doctorants) français, argentins, chiliens, britanniques et étasuniens participent au projet. Une mission d’échantillonnage au Chili, visant les mêmes objectifs que la campagne argentine, a également eu lieu. Des campagnes de relevés des appareils de mesure seront programmées pendant les étés austraux des deux années à venir.</p>
<p>Dans la ligne de mire des scientifiques : l’élargissement de la circulation de Hadley, une composante de la circulation atmosphérique, dont la dynamique pourrait expliquer en partie la progression des sécheresses constatée dans les Andes centrales, et un peu partout sous les tropiques.</p>
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<figcaption><span class="caption">Les scientifiques Valérie Daux et Ricardo Villalba reviennent sur la naissance du projet de recherche Themes. (Alizée Guilhem et Nina Schretr/YouTube, 2018).</span></figcaption>
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<h2>La circulation de Hadley, qu’est-ce que c’est ?</h2>
<p>Cette bande atmosphérique – formée de cellules ressemblant à des « tapis roulants » de 15 km de haut et presque 3 000 km de large – assure les échanges de chaleur de l’équateur vers les tropiques en altitude.</p>
<p>Chaque cellule « tapis-roulant » commence son mouvement au niveau équatorial, là où l’air chauffé, moins dense, se met à monter. En altitude, la décompression le refroidit et la vapeur d’eau condense, ce qui donne de fortes précipitations. La mécanique des « cellules de Hadley » se met en place lorsque la colonne d’air sec se sépare en deux masses, poussées vers le nord ou le sud de part et d’autre de l’équateur, avant de plonger vers la surface à 30° de latitude environ.</p>
<p>Ces branches descendantes des cellules de Hadley apportent au sol de l’air chaud et sec : ce sont elles qui contrôlent le climat sec des régions subtropicales. C’est à leur latitude que se trouvent les plus grands déserts de la planète (comme le Sahara ou l’Atacama).</p>
<p>Mais au cours des dernières décennies, les cellules de Hadley se sont allongées en direction des pôles, ce qui a entraîné un élargissement des zones subtropicales où l’air sec plonge vers le sol. Cet effet, particulièrement marqué dans l’hémisphère sud, s’est manifesté par une augmentation de la fréquence et de l’intensité des sécheresses.</p>
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<span class="caption">Représentation modélisée de la circulation de Hadley autour de l’équateur.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Climate Initiative/Fondation BNP Paribas</span></span>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=420&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=420&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=420&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/215567/original/file-20180419-163978-f69cy0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Élargissement de la cellule de Hadley dans les Andes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">R. Villalba</span></span>
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<p><a href="https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1029/2006GL028443">Plusieurs études</a> ont suggéré que cet élargissement pourrait <a href="https://www.nature.com/articles/ngeo.2007.38">être lié au changement climatique global</a>. Les auteurs formulent notamment l’hypothèse que le réchauffement de l’atmosphère, en réduisant les contrastes de pression autour de la tropopause (qui marque la limite supérieure de la cellule de Hadley), ait accru la stabilité des masses d’air et repoussé plus loin vers les pôles la descente d’air sec.</p>
<p>Les chercheurs estiment que l’expansion de la circulation de Hadley, constatée sur 1 à 3° de latitude dans chaque hémisphère au cours des 40 dernières années, <a href="https://www.nature.com/articles/nclimate1633">se poursuivra probablement tout au long du XXIᵉ siècle</a>.</p>
<p>Les conséquences sont déjà importantes en termes de baisse de pluviométrie dans le bassin méditerranéen, le sud-ouest des États-Unis, en Australie, en Afrique du Sud et au sud-ouest de l’Amérique du Sud. C’est précisément ce qui semble se produire dans les Andes sud-américaines, depuis l’Altiplano (à partir de 16° de latitude sud) jusqu’à la Patagonie du Nord (43° de latitude sud).</p>
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<figcaption><span class="caption">Les scientifiques Robert Wilson et Ingniaco A. Mundo détaillent leurs recherches sur l’impact de l’expansion de cellule de Hadley en Amérique du Sud. (Intissar El Hadj Mohamed, Émilie Groyer, Coraline Madec/Youtube, 2018).</span></figcaption>
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<h2>Des archives naturelles pour mieux comprendre</h2>
<p>Les scientifiques en exploration dans les Andes argentines ne sont pas partis d’une page blanche : <a href="https://www.nature.com/articles/srep00702">dès 2012</a> plusieurs travaux suggèrent un lien entre la progression des sécheresses et l’élargissement de la circulation de Hadley.</p>
<p>Cependant, les mécanismes, et l’amplitude à long terme du phénomène d’élargissement de la circulation de Hadley restent imparfaitement connus. Or comprendre précisément ces ressorts permettrait de mieux anticiper les sécheresses ; et de mobiliser la société civile et les décideurs des pays concernés afin de sécuriser l’approvisionnement en eau.</p>
<p>Ces lacunes dans nos connaissances sont, au moins en partie, imputables au manque de données historiques à grande échelle sur l’évolution de la circulation atmosphérique tropicale-subtropicale. Dans cette partie du monde, les séries de mesure directe des précipitations sont rares, et n’excèdent pas 50 ans d’ancienneté.</p>
<p>Pour y remédier, le projet de recherche Themes va s’appuyer sur la dendrochronologie, c’est-à-dire l’étude des informations enregistrées année après année dans les cernes des arbres. Ces archives naturelles, qui stockent de nombreux paramètres à chaque étape de croissance de l’arbre, pourraient permettre d’étendre à plusieurs siècles (au moins 400 ans) notre connaissance des variations de précipitation.</p>
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<figcaption><span class="caption">L’ingénieure de recherche Monique Pierre explique comment on « lit » les cernes des arbres pour explorer les climats du passé. (Salomé Gotreau, Benjamin Robert et Sarah Terrien/YouTube, 2018).</span></figcaption>
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<p>Dans cette optique, la situation géographique de l’Amérique du Sud lui confère un atout unique : on trouve dans la Cordillère des Andes des arbres portant des cernes annuels dans une bande de latitude étendue (courant de 20° à 60° sud).</p>
<p>Il existe d’ailleurs une collection importante de données et d’échantillons de bois de différentes espèces dans les collections des laboratoires de recherche argentins et chiliens. Ces collections seront examinées et d’autres échantillons seront encore prélevés pour compléter les archives.</p>
<p>Il s’agit d’actualiser et/ou de développer de nouvelles séries dendrochronologiques le long des Andes depuis l’Altiplano jusqu’au nord de la Patagonie, en passant par le Chili central.</p>
<h2>Les isotopes, un langage à décrypter</h2>
<p>Outre les données météorologiques, les équipes du projet Themes comptent combiner de nombreux indicateurs recueillis grâce aux cernes d’arbres afin de reconstruire l’évolution passée de la circulation de Hadley et sa localisation.</p>
<p>Ils s’appuieront notamment sur la composition des cernes en isotopes 18 de l’oxygène et 13 du carbone : ces variétés rares des deux atomes communs du monde vivant comportent, dans leur noyau, un nombre de particules neutres (neutrons) qui diffère de celui de l’atome majoritaire. Le noyau de l’oxygène 18 cache ainsi deux neutrons de plus que l’oxygène 16 ; le carbone 13 recèle un neutron de plus que le classique carbone 12. Les propriétés de ces différentes « versions » sont grossièrement similaires à celle de l’atome majoritaire, mais pas strictement identiques.</p>
<p>La différence se remarque notamment à la survenue de certains processus physico-chimiques : par exemple, quand de l’eau s’évapore, les isotopes d’oxygène qui contiennent 16 neutrons (appelés <sup>16</sup>O) ont tendance à aller plus facilement dans la vapeur que les isotopes qui contiennent 18 neutrons (<sup>18</sup>O). De même, l’isotope <sup>12</sup>C du carbone est privilégié par la plante pendant la photosynthèse, ce qui entraîne un appauvrissement des sucres formés en <sup>13</sup>C par rapport au carbone du CO<sub>2</sub> atmosphérique.</p>
<p>Dans l’arbre, on peut donc observer plusieurs réactions qui affectent la répartition des isotopes – depuis l’absorption d’eau (qui fournit les atomes d’oxygène) jusqu’à la fabrication de la cellulose. L’intensité de ces réactions dépend de plusieurs facteurs, tels que la température ou l’humidité de l’air.</p>
<p>Par voie de conséquence, les variations de composition isotopique de la cellulose, d’un cerne annuel à l’autre, reflètent les variations de l’environnement de croissance de l’arbre… On peut ainsi mettre en évidence des corrélations entre cette composition en isotopes et la température, l’humidité ou encore l’insolation.</p>
<p>L’exercice doit permettre de proposer une reconstruction solide et fiable des fluctuations des siècles passés. Ces données seront ensuite utilisées pour calibrer les modèles climatiques actuels, avant de tenter de prédire l’évolution future.</p>
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<figcaption><span class="caption">L’ingénieur de recherche Michel Stievenard explique comment on analyse en laboratoire les prélèvements effectués sur les arbres. (Salomé Gotreau, Benjamin Robert et Sarah Terrien/YouTube, 2018).</span></figcaption>
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<h2>Des modèles pour prédire le futur ?</h2>
<p>Les modèles climatiques constituent des programmes numériques qui intègrent les équations physiques régissant les flux de matière et d’énergie dans les océans et l’atmosphère. La puissance de calcul des ordinateurs n’étant pas infinie, ces modèles recourent à des représentations simplifiées du monde, basées sur des conditions de départ que les chercheurs espèrent cohérentes.</p>
<p>Pour tester leur validité, les spécialistes font tourner ces modèles sur des échelles de temps et d’espace dont on connaît à l’avance les caractéristiques. À l’arrivée, si les données calculées par le modèle virtuel ressemblent à celles des mesures réelles, on peut estimer que les paramètres du modèle sont corrects. Ce n’est qu’alors que les chercheurs pourront effectuer des simulations pour le futur.</p>
<p>In fine, si les hypothèses de calcul des modèles théoriques collent aux mesures de terrain, elles pourront servir de base pour proposer une évolution probable des changements hydroclimatiques qui attendent la région jusqu’en 2100.</p>
<p>Cette étape de validation par comparaison étant cruciale, les chercheurs ont besoin d’augmenter la longueur dans le temps des séries de mesures. Et c’est dans la réalisation de cet objectif que la dendrochronologie s’avère une précieuse alliée.</p>
<p>À la suite de la campagne de prélèvement de bois de plusieurs espèces (cyprès de Patagonie, cèdre du Chili et araucaria du Chili) qui a eu lieu en février dans les Andes, s’ouvre maintenant la période d’exploitation des échantillons récoltés. Une première étape vers la connaissance du futur ?</p>
<hr>
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<p><em>Le <a href="https://group.bnpparibas/actualite/themes-percer-mystere-expansion-tropiques">projet de recherche Themes</a> est soutenu par le programme <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Climate Initiative</a> de la Fondation BNP Paribas</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/92757/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Daux a reçu des financements de la Fondation BNP Paribas. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Olivier Aballain ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les épisodes secs se multiplient un peu partout sous les tropiques. Une équipe de chercheurs travaille sur les conifères d’Amérique du Sud pour mieux comprendre ce phénomène.Valérie Daux, Professeure en Sciences de la Terre, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Olivier Aballain, Responsable pédagogique, ESJ Lille (École supérieure de journalisme de Lille)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/946182018-05-23T20:50:33Z2018-05-23T20:50:33ZVilles et émissions de CO₂ : pourquoi il nous faut des données plus fiables<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/218602/original/file-20180511-135202-zsswut.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C186%2C5426%2C2859&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">À Tokyo. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/G8rRItjrwkA?utm_source=unsplash&utm_medium=referral&utm_content=creditCopyText">Ben Blennerhassett/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>Les villes concentrent l’activité économique, et la consommation d’énergie pour les logements, les transports, les infrastructures. Il en résulte que les villes ont de très fortes émissions de gaz à effet de serre qui réchauffent le climat. En regroupant 50 % de la population mondiale, les métropoles contribuent en effet pour <a href="https://www.ipcc.ch/pdf/assessment-report/ar5/wg3/ipcc_wg3_ar5_chapter12.pdf">plus de 70 % des émissions de CO₂</a> au niveau planétaire.</p>
<p>L’urbanisation se poursuit à un rythme accéléré, en particulier dans les pays en voie de développement mais aussi avec l’expansion de territoires urbanisés en Europe et en Amérique du Nord. En 2030, les zones urbaines – et particulièrement les mégalopoles qui regrouperont <a href="http://esa.un.org/unpd/wup/index.html">75 % de la population mondiale</a> – devraient émettre <a href="https://www.iea.org/media/weowebsite/2008-1994/WEO2008.pdf">76 % des émissions de CO₂</a>.</p>
<p>Premier pays émetteur de gaz à effet de serre, la Chine et son 1,3 milliard d’habitants, a ainsi connu une urbanisation spectaculaire au cours des dernières décennies. Entre 1978 et 2016, le pourcentage de la population urbaine a augmenté de <a href="https://www.nature.com/news/society-realizing-china-s-urban-dream-1.15151">18 à 57 %</a>. On estime qu’un milliard de Chinois résideront dans une ville en 2030.</p>
<p>Les migrations massives que nous observons actuellement, depuis les espaces ruraux vers les villes, s’accompagnent d’une transformation sociale et d’une expansion des surfaces urbanisées. Les émissions de CO<sub>2</sub> d’un pays sont donc concentrées dans les villes ; et, dans un futur proche, elles dépendront non seulement de l’accélération de l’urbanisation, mais aussi de l’évolution des formes urbaines, des structures économiques, des infrastructures de transport, et de la consommation en énergie des logements et des bâtiments commerciaux.</p>
<p>Dans les pays émergents, l’urbanisation s’accompagne souvent du développement à proximité des agglomérations d’industries rejetant des gaz à effet de serre (et des polluants) dans l’atmosphère. En général, pour ces pays, la consommation en énergie, et les émissions de CO<sub>2</sub>, par habitant est <a href="http://advances.sciencemag.org/content/3/7/e1700300">bien plus élevée dans les villes</a> que dans les zones rurales.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/219574/original/file-20180518-42200-lzohzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/219574/original/file-20180518-42200-lzohzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/219574/original/file-20180518-42200-lzohzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/219574/original/file-20180518-42200-lzohzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/219574/original/file-20180518-42200-lzohzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/219574/original/file-20180518-42200-lzohzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/219574/original/file-20180518-42200-lzohzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">En 2030, un milliard de Chinois seront des citadins.</span>
<span class="attribution"><span class="source">毛 祥/Unsplash</span></span>
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<h2>De fortes disparités entre villes</h2>
<p>Il existe toutefois de grandes disparités entre villes, et ce même au sein d’un même pays, concernant le niveau des émissions de CO<sub>2</sub> ; ceci reflète des choix d’infrastructures urbaines et des politiques de développement différentes. Un habitat plus dense et des transports alternatifs à l’utilisation de véhicules individuels <a href="https://bit.ly/2LpcdeH">favorisent</a> par exemple une économie d’émissions par habitant.</p>
<p>Les villes ont un rôle majeur à jouer dans les futurs efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre adoptés fin 2015 via l’Accord de Paris ; l’objectif est de l’Accord de Paris est en effet extrêmement ambitieux : une réduction d’un facteur deux des émissions de gaz à effet de serre tous les dix ans, afin d’atteindre une neutralité globale en CO<sub>2</sub> à la fin du XXI<sup>e</sup> siècle. Cet objectif ne pourra être atteint qu’avec une transition énergétique et sociale profonde, en particulier dans villes ou résidera la majorité de la population.</p>
<p>La plupart des grandes métropoles ont pris des engagements de réduction volontaire de leurs émissions. De tels engagements peuvent faire la différence.</p>
<p>Par exemple, le plan <a href="http://www.apc-paris.com/sites/www.apc-paris.com/files/file_fields/2018/05/11/guidecitoyen.parispourleclimat-tousacteurs.editeparlagenceparisienneduclimatmai2018.pdf">« Climat air énergie »</a> de la ville de Paris propose de réduire les émissions de gaz à effet de serre du territoire parisien de 75 % en 2050 par rapport à 2004 ; un engagement sur du plus long terme que l’objectif européen de réduction des émissions de 40 % en 2030 par rapport à l’année 1990 (soit 41 % de moins qu’en 2004). Ce plan prévoit des actions dans de multiples domaines : déplacements, habitat, urbanisme, gestion des ressources et des déchets, alimentation.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"994103280035942400"}"></div></p>
<h2>La qualité des données</h2>
<p>Le défi est de rassembler et d’interpréter de données fiables sur les émissions de CO<sub>2</sub> et d’autres gaz à effet de serre des centres urbains, d’une qualité suffisante pour intégrer les engagements volontaires des villes aux efforts nationaux de réduction des émissions ; et comprendre ainsi comment elles vont contribuer concrètement aux trajectoires futures des émissions.</p>
<p>Aujourd’hui, les données relatives aux émissions de gaz à effet de serre reportées aujourd’hui par les villes sont souvent ambiguës et parfois incohérentes, rendant difficile la comparaison des émissions et des facteurs qui les contrôlent, entre différentes métropoles. La collecte de ces données est d’autre part assez lourde et peut facilement représenter des efforts de plusieurs millions de dollars.</p>
<p>Les données les plus robustes existent pour les villes les plus riches et les plus engagées dans la lutte contre le changement climatique, telles que Paris ou Los Angeles ce qui conduit à un biais important dans la qualité des données globales disponibles. Or, les centres urbains qui auront le <a href="http://www.un.org/en/development/desa/population/publications/pdf/urbanization/the_worlds_cities_in_2016_data_booklet.pdf">taux de croissance le plus élevé</a> dans les années à venir sont plutôt les villes de taille moyennes, celles de moins d’un million d’habitant en Asie et en Afrique et le groupe des 47 pays les moins avancés qui possède la plus forte croissance démographique.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"861963142070513667"}"></div></p>
<p>Les villes des pays les moins avancés sont aujourd’hui celles qui n’ont pas encore les ressources économiques et les capacités d’infrastructure pour collecter et évaluer systématiquement leurs émissions de CO<sub>2</sub>. Les données collectées actuellement ne sont donc pas bien adaptées pour pouvoir formuler des solutions de réduction des émissions.</p>
<p>Par exemple, les villes ont besoin de données sur leur parc immobilier pour évaluer l’impact de la modernisation des logements, la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0301421510009419">consommation en énergie</a> et les types de fuels et de sources d’énergie utilisés par différents habitants (dont le niveau de vie et l’accès aux services peut être très différent) ainsi que l’impact de l’expansion des territoires urbanisés. Les enquêtes sur les déplacements individuels constituent, par exemple, une base insuffisante pour répondre aux défis de la mobilité urbaine.</p>
<p>En outre, des données qualitatives manquent souvent. Certaines des informations les plus pertinentes sur le plan des politiques urbaines et des comportements individuels qui auront un impact sur les émissions futures de CO<sub>2</sub> ne sont pas forcément saisies dans des données purement économiques et quantitatives sur les émissions, mais plutôt dans les récits : par exemple, qui, pourquoi et comment les villes font les choses comme elles le font, qui peuvent fournir le contexte et les relations causales des actions au résultat final en termes d’émissions de CO<sub>2</sub>, qui peut être mesuré par des données quantitatives.</p>
<h2>Une collecte qui se structure</h2>
<p>Des données plus fiables sur les émissions de gaz à effet de serre, à la fois pour le suivi des efforts de réduction de chaque ville et pour l’analyse systématique des différences entre métropoles, sont cruciales pour la construction de nouvelles connaissances, permettant l’apprentissage interurbain en guidant les politiques d’aménagement et la pratique urbaine.</p>
<p>Surmonter ces problèmes est essentiel pour développer des solutions basées sur les connaissances qui pourront être transposées dans les villes du monde entier tout en respectant leurs différences. Une infrastructure de données harmonisée et à grande échelle est nécessaire pour ouvrir la voie et inclure de manière concrète les efforts de réduction des émissions par les villes dans les objectifs de l’Accord de Paris.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/219577/original/file-20180518-42203-glh9fw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/219577/original/file-20180518-42203-glh9fw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/219577/original/file-20180518-42203-glh9fw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/219577/original/file-20180518-42203-glh9fw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/219577/original/file-20180518-42203-glh9fw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/219577/original/file-20180518-42203-glh9fw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/219577/original/file-20180518-42203-glh9fw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/219577/original/file-20180518-42203-glh9fw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Sur le site du Global Carbon Project.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project</span></span>
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<p>Plusieurs organisations internationales – comme le <a href="http://www.c40.org/">C40</a>, le <a href="https://regions20.org/">R20</a>, <a href="http://www.iclei.org/">ICLEI</a> et le <a href="https://www.cdp.net/fr">CDP</a> – collectent depuis plusieurs années des données d’émissions des gaz à effet de serre de la part de villes qui ont pris des engagements volontaires.</p>
<p>Pour ajouter à ces premières données sur les émissions de CO<sub>2</sub> les variables socio-économiques clés qui permettent de comprendre pourquoi les émissions sont différentes, et d’aider au design de scénarios de réduction des émissions, le Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement avec le <a href="http://www.globalcarbonproject.org/">Global Carbon Project</a> travaillent sur un nouveau jeu de données qui sera rendu public courant 2018 et distribuées librement sur le site du <a href="http://www.globalcarbonatlas.org/en/content/welcome-carbon-atlas">Global Carbon Atlas</a>. Sur cette plate-forme, les données annuelles des émissions de CO<sub>2</sub> par pays sont déjà disponibles grâce à la contribution de plus de 80 laboratoires de recherche dans le monde.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>L’initiative Global Carbon Atlas a été lancée avec le soutien la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas">Fondation BNP Paribas</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/94618/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Ciais a reçu des financements de mécénat du programme Climate Initiative de la Fondation BNP Paribas.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Anna Peregon a reçu des financements de mécénat du programme Climate Initiative de la Fondation BNP Paribas.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Cathy Nangini a reçu des financements de mécénat du programme Climate Initiative de la Fondation BNP Paribas.</span></em></p>Avec une urbanisation mondiale galopante, la mesure précise des émissions de CO₂ des villes devient un enjeu majeur. Or il existe de forts contrastes dans la manière dont sont effectués ces relevés.Philippe Ciais, Directeur de recherche au Laboratoire des science du climat et de l’environnement, Institut Pierre-Simon Laplace, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)Anna Peregon, Chercheuse dans le domaine du changement climatique, Institut Pierre-Simon Laplace, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)Cathy Nangini, Data and Data Visualization Scientist, Institut Pierre-Simon Laplace, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/911042018-04-05T20:23:23Z2018-04-05T20:23:23ZAu Brésil, le « cratère » à remonter le temps du climat<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/213198/original/file-20180404-95689-1svk2vv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C8218%2C6192&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’un des membres de l’équipe de forage brésilienne mandatée pour réaliser les prélèvements dans la tourbière de Colônia. </span> <span class="attribution"><span class="source">Moises Saman/Magnum</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Située au sud de la ville de São Paulo au Brésil, la « dépression de Colônia », gigantesque cratère de 3,6 km de diamètre dont la formation est probablement due à un impact météoritique, constitue un véritable eldorado pour les paléoclimatologues, spécialistes des climats du passé.</p>
<p>Cette dépression marécageuse s’est formée au cœur de la forêt atlantique brésilienne, l’une des forêts tropicales humides les plus riches de la planète. L’âge de la formation de Colônia est estimé à trois millions d’années ; son remplissage sédimentaire constitue autant d’archives géologiques, biologiques et climatiques uniques sur l’histoire de la Terre, et plus particulièrement celle des tropiques de l’hémisphère sud.</p>
<h2>Des informations inédites</h2>
<p>Les études sur le climat qui s’intéressent au temps long – c’est-à-dire qui observent la succession des <a href="https://www.youtube.com/watch?v=V7YW7vgqLtc">cycles glaciaires et interglaciaires</a> – sont très rares. Car seuls quelques prélèvements (on parle aussi d’« enregistrements ») peuvent permettre de reconstituer l’évolution en continu de ces climats du passé.</p>
<p>Il en est ainsi des carottes de glace <a href="https://www.refletsdelaphysique.fr/articles/refdp/pdf/2014/04/refdp201441p12.pdf">prélevées en Antarctique</a> ; celles-ci ont permis de reconstituer les climats sur 8 cycles glaciaires et interglaciaires, ce qui correspond à 800 000 ans. Quant à celles <a href="http://bit.ly/2u8ppjf">réalisées dans les océans</a>, elles permettent de reconstruire jusqu’à <a href="http://www.lorraine-lisiecki.com/LisieckiRaymo2005.pdf">103 cycles</a> glaciaires et interglaciaires au cours des dernières 2,7 millions d’années.</p>
<p>Concernant les régions tropicales, on connaît pour l’hémisphère nord les enregistrements de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/027737919390013C">Fuquene et de Funza (Colombie)</a> et ceux de <a href="https://journals.uair.arizona.edu/index.php/maps/article/viewFile/15416/15404">Bosumtwi (Ghana)</a> qui ont permis de « remonter » à 1 million d’années. Pour l’hémisphère sud, les carottes réalisées dans le <a href="https://www.researchgate.net/publication/223198431_A_complete_pollen_record_of_the_last_230_ka_from_Lynch%27s_Crater_north-eastem_Australia">Lynch Crater en Australie</a> auront permis d’explorer les variations climatiques sur les derniers 230 000 ans.</p>
<p>Avec les recherches conduites dans le cratère de Colônia, on va donc pouvoir, pour la première fois, préciser l’évolution des climats de la zone tropicale de l’hémisphère sud en continu et sur un temps très long. Toutes les informations que cette étude générera seront ainsi totalement nouvelles.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213245/original/file-20180404-189801-11l47b2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213245/original/file-20180404-189801-11l47b2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213245/original/file-20180404-189801-11l47b2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213245/original/file-20180404-189801-11l47b2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213245/original/file-20180404-189801-11l47b2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213245/original/file-20180404-189801-11l47b2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213245/original/file-20180404-189801-11l47b2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Vue générale du bassin de Colônia.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Moises Saman/Magnum Photos</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<span class="caption">La forêt tropicale recouvre encore partiellement le bassin.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Moises Saman/Magnum Photos</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<h2>Le prélèvement de 1989</h2>
<p>À Colônia, une première carotte de 7,80 mètres de profondeur a été réalisée en 1989 et ses <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0031018208005786">résultats publiés en 2009</a>. Cet enregistrement a permis de montrer le potentiel scientifique de la dépression de Colônia en mettant en lumière un dépôt sédimentaire régulier permettant d’établir une chronologie fiable ; ce prélèvement a aussi montré que le sédiment contenait des grains de pollen, intéressants pour étudier l’évolution de la forêt tropicale.</p>
<p>Cette première étude a permis de remonter jusqu’à 120 000 ans environ, c’est-à-dire un cycle glaciaire/interglaciaire complet. Les analyses de pollen réalisées sur cette carotte de 7,80 mètres ont montré comment la forêt tropicale répondait aux variations des cycles de l’insolation et des précipitations ; elles ont également mis en lumière les différences avec les enregistrements effectués dans les régions tempérées, montrant notamment le maintien d’une forte biodiversité dans cette région pendant l’époque glaciaire.</p>
<p>Une deuxième carotte, prélevée en 2014 à 14 mètres de profondeur (et dont les résultats sont en cours de publication), a montré un changement important de composition du sédiment vers 9 mètres de profondeur, avec non plus de la tourbe mais la présence d’<a href="http://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers17-05/010068855.pdf">argiles lacustres</a>. Celles-ci indiquent que la dépression, avant de se combler sous la forme de la tourbière marécageuse que nous observons aujourd’hui, était formée par un lac. Cette carotte a été datée à sa base à 200 000 ans.</p>
<p>Ces informations ont ouvert de nouvelles perspectives d’analyses, car les variations du niveau des lacs sont de manière générale davantage reliées aux conditions climatiques régionales que la formation d’une tourbière.</p>
<h2>De nouveaux prélèvements à 50 mètres</h2>
<p>La mission de prélèvements à 50 mètres, réalisée à l’été 2017 dans le cadre du <a href="https://group.bnpparibas/actualite/tropicol-comprendre-impacts-biodiversite-face-grands-cycles-climatiques-naturels">projet Tropicol</a> et documentée par le travail photographique de <a href="https://www.magnumphotos.com/newsroom/environment/moises-saman-window-brazils-past/">Moises Saman de l’Agence Magnum</a>, visait à réaliser un nouvel échantillon plus profond afin de travailler sur les longues échelles de temps et de répondre à des nouvelles questions scientifiques.</p>
<p>Pour atteindre ces 50 mètres de profondeur, une entreprise de forage brésilienne a été mandatée avec un double objectif : forer et récupérer le matériel issu du forage. Laurent Augustin, ingénieur foreur au Centre de carottage et de forage national (<a href="http://c2fn.dt.insu.cnrs.fr/spip/spip.php?article118">C2FN</a>), a accompagné tout le processus pour garantir la qualité des prélèvements.</p>
<p>Le forage s’est effectué en 37 tronçons de 150 cm de longueur. Deux carottes de 50 mètres ont ainsi été récupérées, situées à 4 mètres l’une de l’autre et décalées de 80 centimètres en hauteur. Il s’agissait d’assurer un recouvrement maximum du dépôt sédimentaire.</p>
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<span class="caption">Lors du forage à 50 mètres.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marie-Pierre Ledru/IRD</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<span class="caption">Examen en laboratoire d’une section de sédiment prélevée dans la dépression en août 2017.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marie-Pierre Ledru/IRD</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<span class="caption">Détail du sédiment qui permettra d’observer les variations de l’environnement et du climat sur une longue durée et en continu.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marie-Pierre Ledru/IRD</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Le prélèvement de ces carottes s’est effectué sur deux semaines et a nécessité l’intervention de 8 personnes. Au cours du forage, les visiteurs – étudiants et professeurs des universités de São Paulo et de Campinas ainsi que les habitants des environs – furent nombreux.</p>
<p>À 50 mètres, il devient possible de travailler sur les argiles lacustres, dont le dépôt est plus homogène que les tourbes de la partie superficielle ; et surtout, ce forage donne accès à un temps bien plus long de… 800 000 ans au minimum ! Il est alors possible d’atteindre les mêmes échelles de temps que celles des prélèvements effectués en Antarctique.</p>
<p>Réalisé avec un carottier de 9 cm de diamètre, contre des demi-diamètres de 5 cm lors des enregistrements précédents, le nouveau prélèvement a aussi fourni du matériel en quantité plus importante pour les différentes analyses. Plus de spécialistes des disciplines relatives aux reconstitutions des climats et des environnements des tropiques vont ainsi pouvoir être sollicités.</p>
<h2>Après le forage</h2>
<p>Depuis le forage de cet été, tous les tubes ont été scannés sans être ouverts à l’Université de São Paulo pour fournir une première image du contenu sédimentaire. Ils ont ensuite été transportés par avion à Aix-en-Provence pour être conservés en chambre froide à 4 °C.</p>
<p>L’analyse de ces prélèvements se fait en plusieurs étapes. Il s’agit d’abord de dater les sédiments pour préciser le cadre chronologique. 3 méthodes sont utilisées pour cette datation : le carbone 14 jusqu’à 40 000 ans, la luminescence jusqu’à 400 000 ans et le paléomagnétisme pour les temps plus anciens. Cette phase qui a démarré en janvier 2018, se prolongera jusqu’à l’été.</p>
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<span class="caption">Le scanner de l’université de São Paulo.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Moises Saman/Magnum Photos</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<span class="caption">Les variations du sédiment à l’intérieur de chaque section apparaissent sur l’écran du scanner.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Moises Saman/Magnum Photos</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>En parallèle, depuis janvier, des analyses dites non destructives – parce qu’effectuées sur un demi-diamètre de carotte sans découpage du sédiment – de la géochimie et des composants minéralogiques du sédiment (qui vont montrer les variations relatives au paysage, à l’érosion, aux pluies) sont menées au Centre européen de recherche et d’enseignement des géosciences de l’environnement d’Aix-en-Provence (<a href="https://www.cerege.fr/fr">Cerege</a>).</p>
<p>Lors de l’ouverture des carottes, en janvier, l’autre demi-diamètre prélevé a été entièrement découpé centimètre par centimètre. Sur ces tranches de sédiments, différentes analyses seront conduites : celle des grains de pollen pour étudier les modifications de la composition floristique de la forêt tropicale, son expansion et sa régression en fonction des cycles climatiques ; celle des microcharbons pour identifier les phases d’incendie ; celle des biomarqueurs, composants biochimiques des végétaux reliés au climat ; celle de la microbiosphère (bactéries) ; enfin, la biochimie des parois des pollens servira à reconstituer l’intensité radiative du rayonnement ultra-violet (énergie solaire).</p>
<p>Ces analyses mobilisent différentes équipes dans des universités et centres de recherche au <a href="http://www.ird.fr/toute-l-actualite/communiques-et-dossiers-de-presse/cp-2017/forage-du-cratere-de-colonia-au-bresil">Brésil, en France, en Suisse et aux Pays-Bas</a>.</p>
<p>Toutes ces analyses seront ensuite rassemblées, les résultats obtenus interprétés pour en extraire l’information globale afin de communiquer les nouvelles découvertes dans des publications scientifiques à partir de 2019. Une exposition à destination du grand public est également programmée à São Paulo au musée <a href="http://parquecientec.usp.br/">CienTec</a> pour la fin 2019.</p>
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<span class="caption">Échantillons prélevés dans le « cratère ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Moises Saman/Magnum Photos</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<h2>Qu’attendre de cette mission ?</h2>
<p>Cette mission scientifique conduite dans le cratère de Colônia devrait permettre de mieux comprendre la place des tropiques dans la dynamique climatique globale en répondant notamment à ces questions : quel est le rôle de la circulation tropicale sur les climats globaux ? Comment les variations des pôles sont-elles ressenties sur la zone intertropicale ? Quels sont les facteurs de forçage – température de surface océanique, expansion des glaces aux pôles, CO<sub>2</sub>, insolation, énergie radiative… – qui sont à l’origine des phases de régression ou d’expansion de la forêt tropicale ?</p>
<p>Ces résultats nous permettront aussi de continuer à explorer le « cratère » en préparant pour 2020 une nouvelle campagne de forage dont l’objectif sera d’aller jusqu’à la base du dépôt sédimentaire, à environ 300 mètres de profondeur, afin d’élucider l’origine de la dépression de Colônia.</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213383/original/file-20180405-95689-18nehb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Le forage de la dépression de Colônia s’inscrit dans le cadre du <a href="https://www.youtube.com/watch?v=CVDHcYyv6Tw">projet Tropicol</a>, soutenu par le programme LEFE de l’INSU et le programme <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Climate Initiative</a> de la Fondation BNP Paribas</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/91104/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marie-Pierre Ledru a reçu des financements de la Fondation BNP Paribas et du programme LEFE de l’INSU. </span></em></p>Dans la région de São Paulo, des scientifiques ont réalisé des forages pour étudier les climats du passé. Marie-Pierre Ledru qui coordonne cette mission revient sur cette aventure scientifique.Marie-Pierre Ledru, Directrice de recherche, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/939992018-03-29T15:48:45Z2018-03-29T15:48:45ZComme pour le climat, la science est indispensable à chaque objectif du développement durable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/212633/original/file-20180329-189807-rm7vi2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=9%2C0%2C2029%2C1134&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">À l’Institut international de recherche sur l'élevage (ILRI), à Nairobi au Kenya.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/dfataustralianaid/10665368893/in/album-72157637430496785/">Kate Holt/Africa Practice/DFAT</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Le GIEC, qui fête cette année ses 30 ans, a joué un rôle de lanceur d’alerte sur la réalité du réchauffement climatique, le rôle que les activités humaines jouent dans ce phénomène et les dégâts irréversibles qu’il est susceptible de causer.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/le-giec-une-boussole-scientifique-pour-le-climat-93624">Ses rapports à venir</a> seront décisifs pour réaliser l’objectif de l’Accord de Paris visant à limiter à 2 °C d’ici la fin du siècle la hausse moyenne des températures. Voire, celui plus ambitieux, de <a href="https://theconversation.com/a-quoi-va-servir-le-prochain-rapport-special-du-giec-91806">limiter cette hausse à 1,5 °C</a>.</p>
<p>Lancé en 1988, le GIEC incarne un modèle quasi-unique, au plan international, d’articulation entre science et prise de décision. Car il combine une synthèse formalisée et transparente des connaissances existantes, et des incertitudes qui persistent, conduite en toute indépendance par la communauté scientifique, avec un rôle explicite de contribution au processus politique multilatéral des conférences intergouvernementales sur le climat (<a href="https://theconversation.com/cop-50019">les COP</a>).</p>
<p>Il est donc indispensable qu’il continue à disposer des moyens lui permettant de poursuivre ce rôle, en dépit des menaces que le retrait américain de l’Accord de Paris font peser <a href="https://theconversation.com/a-lapproche-de-son-30-anniversaire-le-giec-face-a-un-triple-defi-78724">sur son financement</a>, dont les États-Unis assuraient 45 % jusqu’à présent.</p>
<h2>La nécessité d’un nouveau multilatéralisme</h2>
<p>Il est toutefois illusoire, dans un contexte géopolitique mondial troublé, d’attendre des seuls accords entre gouvernements la mise en œuvre d’objectifs qui heurtent souvent les intérêts économiques.</p>
<p>Cette situation vaut pour la lutte contre le changement climatique mais concerne aussi les 16 autres <a href="http://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/objectifs-de-developpement-durable/">objectifs du développement durable</a> (ODD) pour 2030, adoptés en septembre 2015 par les pays membres des Nations unies.</p>
<p>Pour que ces changements s’engagent véritablement, des coalitions d’acteurs transcendant les clivages traditionnels entre secteur public et privé, ainsi qu’un nouveau modèle en rupture avec le droit international classique, doivent être mis en place.</p>
<p>Il s’agit d’inventer une nouvelle forme de multilatéralisme ouvrant une troisième voie entre le productivisme refusant toute prise en compte des limites des ressources planétaires et une décroissance qui interdirait aux populations des pays en développement l’accès aux indispensables améliorations de leur niveau de vie.</p>
<p>Le One Planet Summit, organisé fin 2017 par la présidence française, a montré que de <a href="https://theconversation.com/le-one-planet-summit-la-finance-au-service-du-climat-88929">telles coalitions</a> pouvaient être élaborées avec succès pour inscrire la lutte contre le réchauffement climatique dans l’économie réelle.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/212636/original/file-20180329-189821-wc2mnu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/212636/original/file-20180329-189821-wc2mnu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/212636/original/file-20180329-189821-wc2mnu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=310&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/212636/original/file-20180329-189821-wc2mnu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=310&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/212636/original/file-20180329-189821-wc2mnu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=310&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/212636/original/file-20180329-189821-wc2mnu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=389&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/212636/original/file-20180329-189821-wc2mnu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=389&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/212636/original/file-20180329-189821-wc2mnu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=389&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les 17 objectifs du développement durable.</span>
<span class="attribution"><span class="source">ONU</span></span>
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<h2>Pérenniser la recherche</h2>
<p>À court et moyen terme, ce sont les pays de la zone intertropicale et méditerranéenne qui sont les plus directement vulnérables aux conséquences du réchauffement.</p>
<p>Or s’il s’est efforcé dernièrement de mieux associer les scientifiques de ces pays, le GIEC n’est pas le mieux équipé pour relever le formidable défi du renforcement de leurs capacités de recherche. L’Afrique demeure aujourd’hui le <a href="https://theconversation.com/heres-one-way-to-recover-and-protect-africas-lost-science-49678">parent pauvre de la science</a> avec un nombre de chercheurs par habitant 40 fois inférieur à la moyenne mondiale, et 2 % seulement du total des publications scientifiques.</p>
<p>Cette situation constitue un handicap pour les avancées de la connaissance. Et en particulier celle du climat qui, pour parvenir à des prédictions régionales fiables de l’impact du réchauffement global, doit s’appuyer sur des observations combinant télédétection satellitaire et mesures réalisées <em>in situ</em> sur de longues périodes de temps.</p>
<p>Aujourd’hui, les données fiables manquent cruellement et le financement visant à pérenniser des laboratoires de recherche compétitifs doit devenir une priorité des gouvernements du continent africain comme de l’aide publique au développement.</p>
<h2>Une mise œuvre complexe</h2>
<p>Le succès de la lutte contre le réchauffement est tributaire de celui des 16 autres objectifs du développement durable, des synergies positives, mais aussi des contradictions potentielles dans leur mise en œuvre.</p>
<p>Ainsi, alors que près de la moitié des 7,6 milliards d’humains souffre actuellement d’une <a href="https://theconversation.com/in-south-africa-childhood-hunger-and-obesity-live-side-by-side-43805">forme de malnutrition</a>, qu’il s’agisse de sous-alimentation ou d’obésité, il faudra <a href="https://theconversation.com/sommes-nous-trop-nombreux-sur-terre-81225">d’ici 2050</a> satisfaire les besoins d’une population comptant plus de deux milliards d’individus supplémentaires.</p>
<p>Or jusqu’à présent, l’augmentation de la productivité agricole s’est alimentée d’une croissance exponentielle du recours aux produits chimiques, les paysans chinois utilisant par exemple les <a href="https://www.capital.fr/economie-politique/la-pollution-des-terres-agricoles-s-aggrave-en-chine-1030217">engrais non organiques</a> à un taux par hectare supérieur de 70 % à la moyenne mondiale.</p>
<p>Si cette tendance ne s’inverse pas, l’agriculture qui contribue déjà <a href="https://theconversation.com/quels-nouveaux-modeles-agricoles-pour-faire-face-aux-changements-globaux-87711">au quart des émissions de gaz à effet de serre</a> verrait sa part augmenter à 70 % d’ici 2050… en contradiction ouverte avec l’objectif climatique !</p>
<p>À l’inverse, alors que l’on assiste à une concentration de la richesse mondiale historiquement sans précédent entre les mains des 10 % les plus privilégiés de la population mondiale, et que plus de la moitié des 760 millions de personnes qui vivent dans l’extrême pauvreté avec moins de 1,9 dollar par jour se concentre en Afrique subsaharienne, la lutte sur le climat ne doit pas conduire à freiner la croissance indispensable pour éradiquer la pauvreté et réduire les inégalités.</p>
<h2>Un rapport d’évaluation pour le développement durable</h2>
<p>On pourrait multiplier les exemples démontrant combien le développement durable a besoin des apports de la science et de leur traduction concrète.</p>
<p>Le monde ne pourra en effet faire l’économie de plateformes de collecte et d’analyses de données scientifiques couvrant tous les aspects du développement durable, de la santé à la biodiversité en passant par la lutte contre les inégalités.</p>
<p>La mise en place de tels dispositifs risque d’être longue mais il faut souligner ici une avancée positive : les Nations unies ont confié à un groupe d’experts scientifiques indépendants un premier rapport d’évaluation, prévu pour 2019, des ODD. L’exemple du GIEC pourrait ainsi être étendu à tous les aspects du développement durable.</p>
<p>Les 30 ans du GIEC sont l’occasion de réinventer un dispositif autour de la lutte contre le réchauffement climatique, dans l’esprit qui a fait sa force : un cercle vertueux entre le champ scientifique et le champ politique, mais qui laisse une place – de plus en plus importante – aux acteurs privés.</p>
<p>Ici, la science peut jouer le rôle de facilitateur, de rapprochement entre des intérêts et des points de vue divergents, mais qui ont en commun le souci de favoriser le développement durable.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Jean-Paul Moatti participera ce vendredi 30 mars à la conférence organisée par la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas">Fondation BNP Paribas</a>, à l’auditorium Glicenstein (Paris) à partir de 12h15 : « Développement durable : faut-il donner le pouvoir aux scientifiques ? ». <a href="https://evenium.net/ng/person/event/website.jsf?eventId=climateinitiative&page=tickets&loc=fr&justSubmit=false&cid=74219">Informations et inscription gratuite ici</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/93999/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Paul Moatti est membre du groupe d’experts indépendants chargés de rédiger en 2019 le rapport de l’ONU sur le développement durable. </span></em></p>Si les travaux du GIEC sur le climat ont montré la place essentielle du travail des scientifiques, cet apport de la science doit aujourd’hui être étendu au développement durable dans son ensemble.Jean-Paul Moatti, Président-directeur général, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.