tag:theconversation.com,2011:/us/topics/matieres-premieres-21368/articlesmatières premières – The Conversation2024-03-05T16:00:55Ztag:theconversation.com,2011:article/2226562024-03-05T16:00:55Z2024-03-05T16:00:55ZExploitation minière en Afrique : enjeux fiscaux, sociaux et environnementaux<p>« La course est lancée » pour dominer la technologie des énergies propres, a déclaré Ursula von der Leyen, en mars 2023, lorsqu’elle a annoncé la mise en place du <a href="https://www.consilium.europa.eu/fr/infographics/critical-raw-materials/">Règlement européen sur les matières premières critiques</a>, qui vise à réduire la dépendance actuelle de l’UE en matière d’approvisionnement en minerais critiques. Ce texte a été présenté en réponse à la <a href="https://www.ofce.sciences-po.fr/blog/linflation-reduction-act-americain-une-loi-mal-nommee/">loi sur la réduction de l’inflation des États-Unis</a>, qui comprend notamment un engagement à accroître l’approvisionnement national en ces minerais essentiels.</p>
<p>Dans ce contexte de compétition entre grandes puissances, on peut craindre que certains impacts socio-économiques et environnementaux négatifs propres à l’industrie minière soient volontairement ignorés, dans un objectif de sécurisation rapide des ressources. Or, négliger ces questions pourrait compromettre les efforts déployés pour atténuer le changement climatique et protéger la biodiversité, et répéterait les erreurs du passé, avec une exploitation systématique des pays en développement réduits à la production de matières premières de base, comme l’a souligné le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres dans son <a href="https://news.un.org/en/story/2023/12/1144267">adresse aux dirigeants mondiaux</a> lors de la COP28.</p>
<h2>Un moment charnière</h2>
<p>La transition énergétique, qui vise à réduire, voire à remplacer un système utilisant les énergies fossiles par un nouveau mode de consommation centré sur les énergies renouvelables, implique un besoin accru de ressources minières, aussi appelées minerais critiques. La demande de ces minerais – lithium, cobalt, graphite, nickel et cuivre – <a href="https://www.iea.org/news/iea-critical-minerals-and-clean-energy-summit-delivers-six-key-actions-for-secure-sustainable-and-responsible-supply-chains">va exploser dans les années à venir</a>.</p>
<p>Le continent africain abrite de vastes ressources naturelles, <a href="https://theconversation.com/les-nouveaux-enjeux-de-lexpansion-miniere-en-afrique-220605">notamment minières</a>. Cependant, le nombre de pays pouvant prétendre produire une quantité significative de minerais critiques pour la transition énergétique est, au regard de l’état des réserves connues, <a href="https://theconversation.com/les-minerais-critiques-des-ambitions-pour-lafrique-220735">très restreint</a>. Contrairement au boom minier des minerais précieux qui se situait principalement en Afrique de l’Ouest, ce nouveau boom trouve son centre de gravité en Afrique centrale et australe : République démocratique du Congo (RDC) et Zambie pour le cuivre et le cobalt, Afrique du Sud et Zimbabwe pour le platine et le manganèse, ou encore Madagascar et Mozambique pour le graphite, le titane et les <a href="https://www.vie-publique.fr/parole-dexpert/289457-terres-rares-quels-enjeux-pour-la-france-et-leurope">terres rares</a>.</p>
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<p>C’est donc l’occasion pour ces pays de réexaminer les régimes fiscaux afin de favoriser une mobilisation plus efficace des recettes qui seront nécessaires pour assurer leur propre transition énergétique.</p>
<p>Contrairement au secteur pétrolier, où les pays et compagnies ont adopté principalement des accords de partage de la production (ou des revenus), dans le secteur minier c’est le régime de concession qui est prédominant. Dès lors, les États doivent développer la fiscalité pour récupérer une partie des revenus générés par l’exploitation minière. Le débat sur la politique fiscale optimale qui permettrait aux gouvernements africains de capter une « juste » part de la rente ressurgit donc suite à l’augmentation des cours de certains des minerais clés pour la transition énergétique.</p>
<p>Il est crucial de ne pas reproduire le cycle des années 2000. À cette époque, la vague de privatisations des années 1990 combinée à la hausse des prix des métaux en 2000 s’est traduite par une vague d’investissements, mais les administrations des États africains n’étaient pas préparées pour négocier avec les multinationales minières, et leurs codes miniers pas suffisamment bien conçus pour les aider à tirer un revenu décent de l’exploitation. En outre, ces pays ont offert des incitations fiscales de façon trop systématique dans le cadre des premières conventions minières négociées, qui n’ont que rarement permis aux gouvernements de percevoir les recettes attendues. Exemple révélateur de cette asymétrie : <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2011/02/COLOMA/20108">« les contrats chinois »</a> conclus entre Pékin et Kinshasa entre 2007 et 2008 pour plusieurs milliards de dollars.</p>
<h2>Depuis 2010, un processus de rééquilibrage des intérêts</h2>
<p>Les pays producteurs de minerais, critiques ou pas, ont entrepris depuis 2010 des processus d’élaboration de <a href="https://www.ictd.ac/fr/publication/la-fiscalite-miniere-en-afrique-quelle-evolution-recente-en-2018/">nouveaux codes miniers</a> afin de rééquilibrer les intérêts de l’ensemble des parties concernées.</p>
<p>Les redevances minières sont en hausse (elles sont généralement versées aux collectivités locales plutôt qu’à l’État central). Par ailleurs, les taux sont de plus en plus variables ou progressifs en fonction du cours des matières premières. En moyenne, les taux de l’impôt sur les sociétés pour le secteur minier restent généralement inférieurs aux taux du régime général, mais on observe une moindre pratique des exonérations dans le cadre des conventions minières (il est préférable d’avoir un <a href="https://ferdi.fr/publications/analyse-comparee-des-cadres-legislatifs-et-conventionnels-de-la-fiscalite-aurifere-en-afrique-de-l-ouest">taux moindre mais effectivement appliqué)</a>.</p>
<p>La gratuité des participations pour les États est plus fréquente, ce qui permet à ces États de recevoir des dividendes, mais aussi des informations sur l’exploitation de la mine qui peuvent être utiles pour déterminer la rentabilité réelle du projet et donc la taxation appropriée.</p>
<p>On constate enfin une résurgence de l’impôt sur la rente, qui permet de compenser les pertes liées aux sous-estimations (intentionnelles ou non) du potentiel des prix des minerais par les compagnies.</p>
<p>Dans l’ensemble, les <a href="https://ferdi.fr/publications/analyse-la-fiscalite-miniere-augmente-en-afrique">impôts ont augmenté</a> ; cependant, toute augmentation du taux d’imposition ne garantit pas que les recettes seront effectivement perçues.</p>
<h2>Etat des lieux au cours de la dernière décennie</h2>
<p>Les recettes du secteur minier en Afrique demeurent pourtant inférieures à leur potentiel. Le <a href="https://jaga.afrique-gouvernance.net/_docs/app_ar2013_fr_summary_hi_res_final.pdf">rapport du Africa Progress Panel (2013)</a> avait déjà attiré l’attention de la communauté internationale sur ce paradoxe coûteux pour la mobilisation des ressources intérieures en Afrique. <a href="https://www.ictd.ac/fr/publication/quavons-nous-appris-au-sujet-de-la-taxation-des-activites-minieres-en-afrique/">Lundstøl & Moore, en 2016</a>, soulignent que le chiffre d’affaires du secteur a été multiplié par 4,6 pendant le dernier boom 2000-2010 tandis que les recettes fiscales, elles, n’ont été augmentées que d’un facteur de 1,15.</p>
<p>Force est de constater que sur la période 2010-2020 les choses ne se sont guère améliorées. En effet, on observe que les recettes fiscales sont toujours significativement plus faibles que les rentes minières issues de l’extraction : elles sont de deux à cinq fois moins importantes sur 2010-2019.</p>
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<h2>Les défis de la fiscalité minière</h2>
<p>Ainsi, réviser les codes miniers ne suffit pas et peut même se révéler contreproductif car les fréquents changements de niveaux de taxation peuvent représenter une difficulté pour les investisseurs et les faire fuir.</p>
<p>Car si la baisse des recettes minières s’explique en partie par la baisse des cours des minerais jusqu’à 2019, elle résulte également des défis récurrents de la fiscalité minière :</p>
<ul>
<li><p>la faible capacité des administrations fiscales et minières dans les pays ;</p></li>
<li><p>la course au moins-disant fiscal que se livrent toujours les économies du continent ;</p></li>
<li><p>la non-imposition du secteur artisanal, qui joue un rôle important dans minerais de la transition ;</p></li>
<li><p>les clauses de stabilisation dans les conventions passées figeant les dispositions fiscales sur des périodes de 10 à 30 ans et rendant inopérantes les nouvelles dispositions fiscales.</p></li>
</ul>
<h2>Le problème de l’évasion fiscale</h2>
<p>L’optimisation fiscale agressive des entreprises multinationales, qui leur permet de réduire les profits déclarés dans les pays à taux d’imposition élevés pour les transférer dans des pays à taux d’imposition privilégiés, reste le défi principal.</p>
<p>Plusieurs études ont montré la relation qui existe entre les taux d’imposition et le niveau de profits des entreprises minières. En particulier, <a href="https://www.imf.org/en/Publications/WP/Issues/2021/01/15/Is-There-Money-on-the-Table-Evidence-on-the-Magnitude-of-Profit-Shifting-in-the-Extractive-49983">Beer and Devlin (2021)</a> montrent qu’une augmentation du taux d’impôt sur les bénéfices de 1 % entraîne une réduction de l’assiette de ce même impôt de 3,5 %. En 2021, le <a href="https://www.letemps.ch/economie/compagnies-minieres-ne-paient-assez-dimpots-afrique">FMI indiquait</a> que 15 pays d’Afrique perdaient entre 450 et 730 millions de dollars par an en recettes fiscales sur le revenu des sociétés, en raison du transfert de bénéfices par les entreprises multinationales.</p>
<p>Parmi les techniques d’érosion de la base d’imposition et de transfert de bénéfices, la plus fréquemment utilisée dans le secteur minier est l’abus des règles sur les prix de transfert. Les entreprises vendant le minerai à leur filiale à l’étranger pour le transformer peuvent effectuer cette opération à un prix inférieur au cours réel afin de diminuer le profit, et donc le prélèvement, dans le pays d’origine. Il existe aussi d’autres techniques aux résultats similaires comme la surévaluation des coûts d’investissement, le surendettement auprès de sociétés affiliées, le chalandage fiscal (<a href="https://doi.org/10.35188/UNU-WIDER/2023/433-5">Kinda and Tagem,2023</a>) et les transferts indirects de titres miniers (<a href="https://www.elibrary.imf.org/view/journals/087/2021/022/087.2021.issue-022-en.xml">Albertin et coll., 2021</a>).</p>
<h2>Mise en place de standards sur les prix de transfert et de prix plancher</h2>
<p>Des avancées ont été réalisées par la communauté internationale, notamment à travers les actions de lutte contre l’érosion de la base d’imposition via le <a href="https://www.igfmining.org/resource/determining-price-minerals/">transfert de bénéfices (BEPS-OCDE) et les standards sur les prix de transfert</a>.</p>
<p>Par exemple, pour déterminer le prix de vente du cuivre entre parties liées, la Zambie a adopté ce que l’on appelle la « sixième méthode », qui utilise des prix cotés publics, ajustés en fonction des conditions précises de la vente, pour calculer le produit de la vente aux fins de l’impôt sur les bénéfices. L’autorité fiscale zambienne (ZRA) <a href="https://oecd-development-matters.org/2020/11/12/victoire-historique-devant-la-cour-supreme-en-zambie--des-milliards-de-dollars-us-en-recettes-fiscales-supplementaires-et-un-message-par-dela-les-frontieres/">a remporté une bataille judiciaire</a> contre une filiale de Glencore, Mopani Mining Copper plc, qui pratiquait abusivement la manipulation des prix de transfert sur le cuivre pour éviter l’imposition.</p>
<h2>Renégociation des contrats miniers</h2>
<p>En mai 2023, les autorités congolaises ont lancé la <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20230526-quel-avenir-pour-le-contrat-du-si%C3%A8cle-entre-la-rdc-et-la-chine">renégociation du fameux contrat du siècle</a> (dit Mines contre infrastructures) signé en 2007, qui prévoyait plus de 6 milliards de dollars d’investissements chinois en échange d’accès aux mines de cobalt et de cuivre.</p>
<p>Or, quinze ans après, les résultats attendus n’ont pas été au rendez-vous. <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20240130-la-rdc-obtient-5-8-millliards-suppl%C3%A9mentaires-dans-le-contrat-du-si%C3%A8cle-avec-les-entreprises-chinoises">Ces négociations ont abouti en février 2024</a> et les autorités congolaises ont obtenu 5,8 milliards USD de surplus dans les négociations avec le groupement d’entreprises chinoises signataires de l’accord, cependant ce groupement voit les quelque 100 millions USD d’exonération maintenus.</p>
<h2>L’exemple de la Copperbelt – révélateur des tensions entre le développement économique…</h2>
<p>La <a href="https://www.britannica.com/place/Copperbelt-region-Africa">Copperbelt</a> désigne une zone géologique riche en gisements de cobalt et de cuivre, située à cheval entre le sud de la République démocratique du Congo (RDC) et le nord de la Zambie. Grâce à l’extraction qui y est conduite, la RDC est de loin le premier producteur de cobalt, avec près de 70 % de la production mondiale. Le pays est aussi (re)devenu un très important producteur de cuivre.</p>
<p>En dépit de son importance pour la production mondiale de minerais critiques, cette zone comporte de grandes fragilités. Le secteur ne crée pas suffisamment de valeur économique pour réduire durablement la pauvreté. Depuis les années 2000, on assiste dans la région à une forte croissante démographique en raison de la forte attractivité économique des mines et donc de la main-d’œuvre disponible, que l’économie de la zone peine à intégrer.</p>
<p>En effet, bien que les mines de la région nécessitent annuellement plus de <a href="https://rue.bmz.de/resource/blob/75700/f832381629ad21dc7f2d16f2a06b227a/lion-in-the-copperbelt-data.pdf">2 milliards de dollars</a> de biens et services pour leur fonctionnement : électricité, carburant, pièces de rechange ou produits chimiques. Mais le partage de la valeur économique avec les populations locales reste limité.</p>
<p>Plusieurs raisons peuvent l’expliquer. On citera en particulier le manque d’intégration des fournisseurs locaux au sein de cet écosystème minier, en particulier pour les produits et services à forte valeur ajoutée. On pourra aussi noter les difficultés économiques et technologiques rencontrées par ces pays qui rendent compliquée la production locale de produits à plus forte valeur ajoutée par exemple, des batteries. Enfin, la zone est notoirement enclavée et éloignée de certains des principaux poumons économiques des deux pays, ce qui constitue un frein supplémentaire au développement industriel.</p>
<h2>… et la protection de l’environnement</h2>
<p>La Copperbelt est intégralement localisée au sein de l’écorégion du Miombo zambézien central, un environnement hébergeant une importante biodiversité florale et animale. Les pressions exercées par l’extraction du cuivre et du cobalt peuvent être classées en deux catégories d’impacts :</p>
<ul>
<li><p>Les impacts directs renvoient à la surface nécessaire à l’extraction des minerais et aux infrastructures associées, impliquant l’inévitable défrichement de la zone ainsi que la production de déchets miniers ;</p></li>
<li><p>L’impact indirect, généré par l’attractivité des villes minières, qui implique le développement d’activités économiques de subsistance comme l’agriculture ou la production de charbon de bois, qui ont un impact direct sur l’état des forêts.</p></li>
</ul>
<p>Le grand nombre de mines industrielles et artisanales dans cette région rend inévitables les dommages environnementaux directs comme la déforestation des sites d’extraction, et la production de déchets miniers ou indirects via le développement de l’agriculture pour répondre aux besoins d’une population croissante et au développement des mines artisanales (la zone hébergerait aussi plus de <a href="https://www.bgr.bund.de/EN/Themen/Min_rohstoffe/Downloads/studie_BGR_kupfer_kobalt_kongo_2019_en.pdf?__blob=publicationFile&v=3">100 000 mineurs artisanaux</a>).</p>
<p>Bien que cette zone comporte de nombreuses aires protégées, la combinaison des dynamiques démographiques et minières semble compromettre les efforts de conservation de l’environnement mis en place par les gouvernements. <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/19475705.2021.2017021">De récents travaux</a> suggèrent que les aires protégées à proximité des sites miniers sont largement dégradées par les activités humaines.</p>
<h2>Initiatives internationales</h2>
<p>Les pays ont tout intérêt à retirer des bénéfices et à se mêler de l’exploitation minière pour prendre soin et protéger des zones comme celle de la Copperbelt.</p>
<p>Il existe de nombreuses initiatives internationales pour les accompagner : <a href="https://www.icmm.com/fr/societe-et-economie/gouvernance-et-transparence/l-initiative-relative-a-la-transparence-des-industries-extractives">l’Initiative sur la transparence des industries extractives</a> et <a href="https://www.igfmining.org/">l’Intergovernmental Forum on Mining, Minerals, Metals and Sustainable Development</a> (IGF) pour les aspects gouvernance et fiscalité, l’<a href="https://responsiblemining.net/">Initiative for Responsible Mining Assurance</a> (IRMA) et la <a href="https://www.oecd.org/fr/gouvernementdentreprise/mne/mining.htm">Due Diligence Guidance for Responsible Supply Chains of Minerals from Conflict-Affected and High-Risk Areas</a> de l’OCDE pour les aspects environnementaux et sociaux.</p>
<p>Ainsi c’est forte des conseils et de l’assistance technique du Forum sur l’administration fiscale africaine (ATAF), de l’OCDE et du Groupe de la banque mondiale que l’administration fiscale de la Zambie a <a href="https://oecd-development-matters.org/2020/11/12/victoire-historique-devant-la-cour-supreme-en-zambie--des-milliards-de-dollars-us-en-recettes-fiscales-supplementaires-et-un-message-par-dela-les-frontieres/">bâti son argumentaire</a> de manière à faire valoir que Mopani Mining Copper plc avait vendu son cuivre à Glencore International AG à bas prix, minorant de cette façon son bénéfice imposable et, donc, l’impôt dont elle était redevable.</p>
<p>De même, en mai 2022, le gouvernement guinéen a travaillé avec l’IGF et l’OCDE pour <a href="https://www.igfmining.org/impactstory/guinea-bauxite-reference-price/">établir un prix minimum de la bauxite</a> que les sociétés minières devraient appliquer dans leurs ventes aux sociétés affiliées dans des conditions économiques normales. Ce « prix de référence » est entré en vigueur en septembre 2022.</p>
<p>Afin d’éviter les « injustices et l’extractivisme » du passé de l’exploitation des ressources naturelles, les dirigeants africains appellent à un meilleur contrôle de l’extraction des minéraux et des métaux nécessaires à la transition vers une énergie propre. <a href="https://www.theguardian.com/environment/2024/feb/28/african-leaders-call-for-equity-over-minerals-used-for-clean-energy">Une résolution</a> en faveur d’un changement structurel favorisant un partage équitable des bénéfices de l’extraction, soutenu par un groupe de pays principalement africains, dont le Sénégal, le Burkina Faso, le Cameroun et le Tchad, a été présentée mercredi 28 février 2024 à l’assemblée environnementale des Nations unies à Nairobi et appelle à l’utilisation durable des minerais de transition.</p>
<hr>
<p><em>Pour une analyse plus détaillée de ces questions, lire le chapitre qui y est consacré dans <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/l_economie_africaine_2024-9782348081903">« L’économie africaine 2024 »</a>, qui vient de paraître aux éditions La Découverte</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222656/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hugo Lapeyronie a reçu des financements de l'Association Nationale de la Recherche et de la Technologie (ANRT). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Harouna Kinda et Julien Gourdon ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>En Afrique, le secteur minier est en plein boom, en bonne partie du fait de son rôle central dans la transition énergétique. Mais la hausse de l’extraction s’accompagne de nombreux défis.Julien Gourdon, Economiste, Agence française de développement (AFD)Harouna Kinda, Attaché temporaire d’enseignement et de recherche, Université Clermont Auvergne (UCA)Hugo Lapeyronie, Doctorant en économie du développement, Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2056302024-02-08T16:52:01Z2024-02-08T16:52:01ZChanvre, bois, laine, quels matériaux pour décarboner le secteur du bâtiment ?<p>Avec la montée des préoccupations environnementales et la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre, l’usage des matériaux biosourcés dans le domaine du bâtiment, aussi bien en construction neuve qu’en rénovation, devrait connaître une forte croissance dans les années à venir.</p>
<p>Les matériaux biosourcés sont des matériaux issus de la matière organique renouvelable (biomasse) d’<a href="https://theconversation.com/faire-pousser-des-isolants-thermiques-un-panorama-des-materiaux-disponibles-en-france-185653">origine végétale</a> ou animale. Dans le bâtiment, ils se présentent sous la forme de fibres pour la constitution de laines d’isolation, ou de granulats (tiges végétales concassées) utilisés pour réaliser des mortiers ou des bétons. Ils peuvent être utilisés en plancher bas, sous forme d’isolants (sous toiture, sous plancher, sur parois), en paroi verticale et en enduit de finition (en intérieur comme en extérieur).</p>
<p>Leurs performances environnementales et notamment leur <a href="https://www.cerema.fr/fr/actualites/neutralite-carbone-construction-atouts-materiaux-biosources">aptitude à stocker le carbone biogénique</a> – c’est-à-dire, fixé par les plantes au cours de la croissance des végétaux – confèrent à ces matériaux un rôle essentiel dans le cadre de l’application de la Réglementation environnementale 2020 (RE 2020) et plus globalement dans la mise en œuvre de la <a href="https://theconversation.com/la-planification-ecologique-existe-deja-en-france-mais-doit-devenir-operationnelle-183670">Stratégie nationale bas-carbone</a> (SNBC).</p>
<h2>D’où viennent les matériaux biosourcés ?</h2>
<p>De nombreuses matières premières organiques peuvent être utilisées pour fabriquer des matériaux biosourcés. À l’heure actuelle, une grande variété de filières existent déjà en France, avec des degrés de maturité plus ou moins importants. Sans avoir prétention à l’exhaustivité, énumérons les principales :</p>
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<span class="caption">Site de sylviculture.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jean-Louis Zimmermann</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<span class="caption">La maison Feuillette est le plus ancien bâtiment du monde construit en ossature bois et isolé en ballots de paille connu à ce jour.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphaël Pauschitz/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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</figure>
<ul>
<li><p>Le bois : la France est la première puissance européenne en matière de volume de bois sur pied (forêts de résineux et de feuillus), mais elle est pratiquement la dernière en termes de consommation de bois par habitant, traduisant ainsi son fort potentiel de développement.</p></li>
<li><p>La paille utilisée sous forme de bottes : ce « déchet » de la culture céréalière est un matériau de construction aux origines anciennes : la plus vieille maison en paille de France – la « Maison Feuillette » à Montargis – a été édifiée en 1921 !</p></li>
<li><p>Le chanvre : cette excellente tête d’assolement qui permet la régénération des sols par rotation des cultures peut être cultivée sur quasiment l’ensemble du territoire métropolitain français et ne nécessite pratiquement aucun traitement et a besoin de peu d’eau.</p></li>
<li><p>Le lin : cette filière se tourne principalement vers le textile (fibres) et l’équipement automobile (fibres et graines), cependant une partie de la production des fibres est commercialisée sous forme d’isolants et les anas de lin sont utilisés dans des bétons végétaux.</p></li>
</ul>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/faire-pousser-des-isolants-thermiques-un-panorama-des-materiaux-disponibles-en-france-185653">Faire pousser des isolants thermiques: un panorama des matériaux disponibles en France</a>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/568939/original/file-20240111-27-mkm1zd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568939/original/file-20240111-27-mkm1zd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568939/original/file-20240111-27-mkm1zd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568939/original/file-20240111-27-mkm1zd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568939/original/file-20240111-27-mkm1zd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568939/original/file-20240111-27-mkm1zd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568939/original/file-20240111-27-mkm1zd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Champs de Miscanthus près de Rouvres, en France.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Andrea Kirkby/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/568938/original/file-20240111-29-shkjbz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568938/original/file-20240111-29-shkjbz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568938/original/file-20240111-29-shkjbz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568938/original/file-20240111-29-shkjbz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568938/original/file-20240111-29-shkjbz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568938/original/file-20240111-29-shkjbz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568938/original/file-20240111-29-shkjbz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Champs de coton.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Erik Anestad/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<ul>
<li><p>Le miscanthus, ou « herbe à éléphant » : cette plante herbacée originaire d’Asie, haute de 4 m, peut être plantée sur des terres inaptes, ou presque, à d’autres cultures.</p></li>
<li><p>La ouate de cellulose : ce matériau est constitué de papier recyclé (journaux et magazines), reconditionné sous la forme d’un isolant léger très performant.</p></li>
<li><p>Le coton : cet excellent isolant thermique et acoustique est exclusivement utilisé en France dans sa forme recyclée compte tenu du coût très élevé de la matière première.</p></li>
<li><p>Le colza : ce fruit du croisement d’un chou et d’une navette est cultivé depuis l’Antiquité.</p></li>
<li><p>Le tournesol : introduite en Europe au XVI<sup>e</sup> siècle, cette plante est cultivée pour ses graines riches en huile alimentaire de bonne qualité.</p></li>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/quel-role-de-la-biomasse-dans-la-transition-ecologique-205311">Quel rôle de la biomasse dans la transition écologique ?</a>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/568678/original/file-20240110-27-h67wgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568678/original/file-20240110-27-h67wgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568678/original/file-20240110-27-h67wgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568678/original/file-20240110-27-h67wgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568678/original/file-20240110-27-h67wgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568678/original/file-20240110-27-h67wgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568678/original/file-20240110-27-h67wgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Gros plan sur l’écorce d’un chêne-liège.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Gauthier V./Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/568679/original/file-20240110-20-7nfu2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568679/original/file-20240110-20-7nfu2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568679/original/file-20240110-20-7nfu2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568679/original/file-20240110-20-7nfu2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568679/original/file-20240110-20-7nfu2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568679/original/file-20240110-20-7nfu2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568679/original/file-20240110-20-7nfu2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La tonte obligatoire des moutons a fait chuter le cours de la matière première.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Myri_Bonnie/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<ul>
<li><p>Le liège : ce matériau présent dans l’écorce de quelques arbres, et notamment celle du chêne-liège, protège l’arbre des insectes, du froid et des intempéries tout en lui permettant de respirer et est particulièrement prisé dans le domaine de la construction pour son imputrescibilité.</p></li>
<li><p>Le roseau : cette plante pousse dans des roselières, zones humides en bordure de lacs, d’étangs, de marais ou de bras morts de rivière.</p></li>
<li><p>Le bambou : utilisé depuis des siècles en Asie, il est aujourd’hui très convoité par les architectes contemporains occidentaux en raison de sa solidité et de sa souplesse.</p></li>
<li><p>Et enfin, la laine de mouton : déchet de la tonte obligatoire des moutons, ce matériau a vu son prix chuter fortement au cours des dix dernières années, ouvrant de nouvelles perspectives de valorisation en circuit court sur certains territoires.</p></li>
</ul>
<p>Ces matières premières peuvent être utilisées seules ou en combinaison avec d’autres matériaux pour fabriquer des produits de construction biosourcés.</p>
<h2>Vers des bâtiments plus écologiques ?</h2>
<p>Face aux impacts environnementaux du secteur de la construction et aux objectifs de neutralité carbone affichés pour 2050, la <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/reglementation-environnementale-re2020">nouvelle réglementation environnementale RE 2020</a> ne porte plus uniquement sur la performance énergétique des bâtiments. Elle prend désormais en compte l’impact du bâtiment et de ses composants sur le changement climatique tout au long de son cycle de vie : fabrication, transport, mise en œuvre, utilisation, maintenance, remplacement et fin de vie.</p>
<p>Cela passe notamment par un nouvel indicateur, <a href="https://www.cerema.fr/fr/actualites/reglementation-environnementale-2020-quelles-definitions">appelé Ic construction</a>. Celui-ci est calculé sur la durée de vie du bâtiment, fixée conventionnellement à 50 ans. Il ne pas doit pas dépasser une valeur seuil donnée, différente pour l’habitat individuel et pour l’habitat collectif, qui va <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043877196">baisser progressivement au cours des prochaines années</a> pour être de plus en plus restrictif.</p>
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<p>Diminuer les émissions de gaz à effet de serre (GES) tout au long du cycle de vie du bâtiment et décarboner les systèmes constructifs devient donc la nouvelle exigence réglementaire.</p>
<p>Cet objectif implique de minimiser le recours <a href="https://theconversation.com/en-construction-mieux-vaut-preconiser-le-bois-pour-reduire-lempreinte-carbone-des-batiments-180752">aux matériaux dont les procédés de fabrication sont très émetteurs de gaz à effet de serre</a>. Ou encore mieux, qu’elle comprenne une part <em>significative</em> de matériaux biosourcés, capables de stocker du carbone sur toute la durée de vie du bâtiment.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/produits-biosources-greenwashing-ou-plus-value-environnementale-216398">Produits « biosourcés » : greenwashing ou plus-value environnementale ?</a>
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<h2>Des matériaux biosourcés qui piègent le carbone</h2>
<p>La séquestration de carbone correspond à la capture du CO<sub>2</sub> de l’air et à son stockage en dehors de l’atmosphère, par exemple dans la biomasse, l’océan ou les forêts. <a href="https://theconversation.com/que-sont-les-puits-de-carbone-et-comment-peuvent-ils-contribuer-a-la-neutralite-carbone-en-france-201420">Il s’agit d’un important régulateur du climat</a>.</p>
<p>Or, il s’agit également d’un des grands atouts des matériaux biosourcés fabriqués à partir de biomasse végétale. En effet, ils sont en mesure de stocker du carbone sous forme de <a href="https://www.cerema.fr/fr/actualites/neutralite-carbone-construction-atouts-materiaux-biosources">carbone biogénique</a>, en prolongeant la durée de vie des végétaux qui ont piégé le CO<sub>2</sub> de l’atmosphère par photosynthèse.</p>
<p>En fonction de la quantité de biomasse intégrée à un matériau, cela permet mécaniquement de diminuer ses émissions totales de CO<sub>2</sub>. Dans certaines configurations, cette part de stockage carbone peut compenser en partie, voire entièrement les émissions liées à la phase de production du matériau. C’est par exemple le cas pour le béton de chanvre, <a href="https://www.interchanvre.org/documents/5.actu_presse/documents_de_reference/2006_ACV%20chanvre.pdf">qui stocke davantage de CO<sub>2</sub> que ce que sa production en émet</a>.</p>
<p>Ce stockage peut alors être considéré comme une émission négative, et dans certains cas être déduit des émissions globales du produit de construction lors de l’analyse du cycle de vie (ACV) du matériau. La capacité de stockage carbone des matériaux biosourcés peut ainsi être comptabilisée dans <a href="https://theconversation.com/fr/topics/cycle-de-vie-21061">l’analyse de cycle de vie</a> des bâtiments lorsque celle-ci recourt à la méthodologie dite dynamique. Celle-ci inclut une <a href="https://www.construction21.org/france/articles/h/acv-dynamique-vs-acv-statique-3-3-decomposition-de-l-impact-et-approche-temporelle.html">analyse des impacts au cours du temps</a>.</p>
<p>Car les bénéfices associés au carbone piégé par les matériaux biosourcés dépendent aussi de paramètres temporels comme le temps de renouvellement de la plante, la durée de vie du matériau et la date de fin de vie du produit. La méthode de calcul du bilan carbone va elle aussi <a href="https://rpn.univ-lorraine.fr/UNT/acv-bioproduits/co/Methodo_alloc_impacts.html">influencer le bilan carbone total</a>.</p>
<p>Le choix de la méthodologie statique ou dynamique est important. Les effets du carbone biogénique sont négligés dans les analyses de cycle de vie statiques, car il est considéré que le carbone stocké par un produit est <a href="https://www.batimentbascarbone.org/wp-content/uploads/2023/04/Referentiel_BBCA_Neuf_v4.1_Option_Contribution_Neutralite_v1.0_31.03.2023.pdf">« relargué » dans l’atmosphère</a> en fin de vie.</p>
<p>La prise en compte de la temporalité et du carbone biogénique est donc essentielle dans le calcul du bilan environnemental global d’un produit, si l’on veut tirer parti des atouts des matériaux biosourcés.</p>
<h2>Les sous-produits de plantes annuelles plus avantageux que le bois ?</h2>
<p>Mais tous les matériaux biosourcés ne sont pas égaux en la matière. Les arbres, par exemple, présentent une longue période de renouvellement. Leur croissance lente implique que, pour une même quantité de carbone stockée, il faut attendre plus longtemps pour les arbres que pour les espèces végétales à croissance rapide, comme la paille ou le chanvre, qui se renouvellent en une année. Autrement dit, il faut <a href="https://www.onf.fr/vivre-la-foret/+/1ba8::la-foret-un-indispensable-pour-une-planete-decarbonee.html">plusieurs décennies pour qu’un arbre atteigne son pic d’absorption de CO<sub>2</sub></a>, contre environ un an pour une plante annuelle.</p>
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<img alt="La paille se renouvelle bien plus vite que les arbres, ce qui permet de fixer davantage de carbone." src="https://images.theconversation.com/files/568671/original/file-20240110-27-p7g01m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568671/original/file-20240110-27-p7g01m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568671/original/file-20240110-27-p7g01m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568671/original/file-20240110-27-p7g01m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568671/original/file-20240110-27-p7g01m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568671/original/file-20240110-27-p7g01m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568671/original/file-20240110-27-p7g01m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des bottes de paille.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Frédéric Bisson/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il en découle une conséquence importante : les matériaux biosourcés à renouvellement rapide, comme la paille, permettent des prélèvements de CO<sub>2</sub> biogénique plus fréquents. Par conséquent, plus les périodes de renouvellement seront courtes et la durée de vie du produit longue, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0360132317305644">moins l’empreinte environnementale du produit sera élevée</a>.</p>
<p>Cette remarque est fondamentale pour réaliser une évaluation complète des bénéfices environnementaux des matériaux biosourcés dans les secteurs du bâtiment et de la construction. Ainsi, il sera pertinent de privilégier la paille ou le chanvre pour l’isolation, par exemple, tout en optant pour une structure bois pour la solidité de la charpente. Le bois et les autres matériaux biosourcés à renouvellement rapide ne doivent pas être opposés, il s’agit de solutions complémentaires.</p>
<h2>L’importance des choix de construction</h2>
<p>L’ACV utilisée pour évaluer l’impact environnemental d’un bâtiment repose sur le <a href="https://www.asso-iceb.org/wp-content/uploads/2012/11/guide_bio_tech_l_energie_grise_des_materiaux_et_des_ouvrages.pdf">calcul</a> de l’énergie utilisée pour la fabrication et l’utilisation des matériaux et équipements, dite <a href="https://www.connaissancedesenergies.org/questions-et-reponses-energies/quappelle-t-lenergie-grise">« énergie grise »</a> et sur les consommations en usage du bâtiment.</p>
<p>Or, cette énergie grise représente les trois quarts de l’énergie consommée durant toute la durée de vie d’un bâtiment neuf <a href="http://www.vegetal-e.com/fr/actu_4669/la-re-2020-prendra-en-compte-la-capacite-des-materiaux-de-construction-a-stocker-du-carbone.html">selon l’Ademe</a>. Autrement dit, au moment d’entrer dans un bâtiment neuf, ce dernier a déjà entraîné la consommation de 75 % de l’énergie qu’il consommera pendant toute sa durée de vie, généralement estimée à 50 ans pour les bâtiments actuels.</p>
<p>Pour les calculs d’analyse du cycle de vie, l’utilisation du bois en construction a donc un impact positif, mais minoré par rapport aux végétaux à cycle court. Ceci étant dû au temps de régénération du bois en forêt, qui est similaire voire supérieur à la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0950061816313046">durée de vie des bâtiments</a>. Tandis que les plantes à cycle annuel (colza, tournesol, chanvre, paille…) mobilisent les surfaces agricoles sur une durée nettement plus faible que pour les productions forestières.</p>
<p>Ainsi, sur 50 ans et pour une surface égale, la séquestration de carbone et la quantité de matériau utilisable sera bien supérieure pour ces cultures que pour les arbres d’une forêt.</p>
<p>Enfin, comme il ne s’agit pas de cultures dédiées mais de coproduits végétaux, leur utilisation dans la construction est encore plus vertueuse d’un point de vue environnemental : en effet, elles apportent aussi une <a href="https://theses.hal.science/tel-01835828/document">plus-value économique à l’agriculteur</a> sur une production à vocation alimentaire.</p>
<p>Tout pour plaire, donc… ou presque : il faut aussi s’assurer des performances acoustiques et surtout thermiques (isolation) de ces matériaux. Sans quoi, les gains de CO<sub>2</sub> réalisés lors de la construction pourraient être amoindris par une consommation d’énergie accrue lors de la vie du bâtiment.</p>
<p>À cet égard, les biomatériaux présentent des performances équivalentes, voire meilleures que les matériaux traditionnels en <a href="https://www.cerema.fr/fr/actualites/neutralite-carbone-construction-atouts-materiaux-biosources">permettant d’amortir les variations de températures extérieures</a></p>
<p>et de <a href="https://www.cerema.fr/fr/actualites/materiaux-biosources-emissions-polluants-interieur-deuxieme">réguler l’humidité intérieure dans les bâtiments</a>. D’un point de vue économique enfin, le choix des matériaux biosourcés <a href="https://www.cerema.fr/system/files/documents/2017/10/170614-cerema-etat-connaissancecouts-biosources.pdf">ne représente pas systématiquement un gros surinvestissement</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205630/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laurent Arnaud a reçu des financements de l'Ademe : Subvention pour mener des programmes de recherche et de développement de l'Ademe</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Etienne GOURLAY a reçu des financements de l'ADEME et de l'ANR.</span></em></p>Les matériaux biosourcés, d’origine végétale (bois, chanvre, paille…) ou animale (laine…), présentent l’avantage de séquestrer du carbone. De quoi verdir le secteur de la construction ?Laurent Arnaud, Responsable du Domaine Bâtiment au CEREMA (Dr-HDR), CeremaEtienne GOURLAY, Responsable d'études scientifiques "Performances des Matériaux Biosourcés", CeremaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2186312023-12-03T16:28:16Z2023-12-03T16:28:16ZLoi européenne sur les métaux critiques : moins de dépendance mais des questions en suspens<p>Les préoccupations de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/union-europeenne-ue-20281">l’Union européenne</a> (UE) concernant le risque d’approvisionnement en matières premières critiques (ou <em>critical raw materials</em>, CRM en anglais) se sont considérablement accrues au cours de la dernière décennie en raison de leur importance croissante pour la transition numérique et écologique. En effet, la production de CRM reste actuellement largement concentrée géographiquement en dehors de l’Europe, <a href="https://www.euractiv.fr/section/economie/news/dependance-aux-matieres-premieres-chinoises-lue-doit-se-preparer-au-pire/">notamment en Chine</a>, ce qui expose l’UE à des risques d’approvisionnement majeurs. Consciente de sa dépendance à l’égard de sources extérieures pour ces matériaux, Bruxelles <a href="https://france.representation.ec.europa.eu/informations/discours-sur-letat-de-lunion-2022-de-la-presidente-von-der-leyen-2022-09-14_fr">prend désormais des mesures pour relever ce défi</a> et ainsi se protéger contre d’éventuelles restrictions d’exportations de pays tiers.</p>
<p>L’Europe n’a pas de temps à perdre. Selon l’Agence internationale de l’énergie, la demande mondiale de CRM devrait quadrupler d’ici 2040, sous l’effet d’une multiplication par 42 de la demande de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/lithium-61289">lithium</a> et d’une multiplication par 7 de la demande en <a href="https://theconversation.com/fr/topics/terres-rares-30956">terres rares</a> d’ici 2050. Essentiels à la fabrication des batteries, les terres rares et le lithium sont au cœur de la mobilité et du stockage de l’énergie, ce qui rend la sécurité du CRM vitale pour atteindre les <a href="https://commission.europa.eu/strategy-and-policy/priorities-2019-2024/european-green-deal_fr">objectifs de l’UE en matière de décarbonation</a>.</p>
<p><iframe id="3YtIE" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/3YtIE/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Cependant, la Chine possède actuellement un quasi-monopole des exportations de <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/terres-rares-et-metaux-strategiques">terres rares</a>, le cobalt et le lithium, constituant ainsi la source de plus de 90 % des importations européennes. Pékin est bien conscient de l’importance de ce levier de puissance et s’en <a href="https://legrandcontinent.eu/fr/2023/07/15/les-matieres-critiques-chinoises-dans-linterregne/">sert déjà dans son bras de fer technologique avec les États-Unis</a>.</p>
<h2>Une liste de 16 matières premières</h2>
<p>Pour relever ces défis, la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/HTML/?uri=CELEX:52023PC0160">Commission européenne a proposé en mars 2023 la loi sur les matières premières critiques</a> (CRMA), qui vise à garantir l’accès de l’UE aux matières premières essentielles. Cette législation vise à réduire la dépendance des vingt-sept en encourageant l’augmentation de la production européenne, le recyclage et le raffinage des matières premières critiques.</p>
<p>La CRMA établit une liste de 16 matières premières stratégiques et critiques et fixe des objectifs pour augmenter la contribution de l’UE (10 % pour l’extraction, 40 % pour la transformation et 15 % pour le recyclage). La proposition comprend des mesures visant à rationaliser les processus administratifs d’extraction, à surveiller les chaînes d’approvisionnement et à investir dans la recherche et l’innovation.</p>
<p>Néanmoins, les critiques ont soulevé des inquiétudes quant à l’<a href="https://www.delorscentre.eu/en/publications/eu-critical-raw-materials">absence de fonds dédiés, remettant en cause la viabilité financière et l’efficacité de la législation</a>. L’extraction, le traitement et le recyclage des CRM nécessitent en effet des investissements importants et les possibilités de financement actuelles de l’UE sont dispersées et complexes. En réponse, le Parlement européen a proposé la <a href="https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2023-0325_EN.pdf">création d’un Fonds européen pour les matières premières stratégiques</a> en septembre 2023.</p>
<h2>« Club d’acheteurs bruxellois »</h2>
<p>Un autre sujet de discorde concerne les risques potentiels liés à <a href="https://reporterre.net/Mine-de-lithium-dans-l-Allier-les-habitants-en-colere">l’acceptation des projets stratégiques par les populations locales</a>, qui peuvent s’inquiéter des impacts environnementaux et sociaux. Dans le texte européen, les projets stratégiques sont définis comme des projets relatifs aux matières premières qui renforcent de manière significative la sécurité de l’approvisionnement de l’UE en matières premières stratégiques. Les entreprises dont les projets seront reconnus comme stratégiques bénéficieront de procédures d’autorisation simplifiées et d’un accès plus facile aux possibilités de financement. Cela soulève des inquiétudes quant à l’équilibre entre l’accélération des projets et la mise en place de garanties environnementales et sociales solides.</p>
<p>En outre, les discussions mettent en évidence le manque de dispositions concrètes sur la circularité de la CRMA. Les critiques soutiennent que la loi n’offre <a href="https://ieep.eu/wp-content/uploads/2023/10/Circularity-and-the-European-Critical-Raw-Materials-Act-IEEP-2023.pdf">pas suffisamment d’orientations pour renforcer le rôle du secteur de la réparation</a> dans l’extension du cycle de vie des produits contenant des CRM. La loi se concentre sur l’exploitation des déchets, l’amélioration des processus de recyclage et l’augmentation de la réutilisation des produits et des CRM secondaires, mais elle n’aborde pas la législation sur le droit à la réparation.</p>
<p>Enfin, les dispositions de la CRMA relatives à l’achat groupé, qui visent à encourager le regroupement de la demande intérieure de l’UE par la constitution de stocks stratégiques, ont suscité certaines craintes. Le chercheur américain <a href="https://www.piie.com/publications/policy-briefs/why-proposed-brussels-buyers-club-procure-critical-minerals-bad-idea">Cullen S. Hendrix a par exemple exprimé des inquiétudes concernant un « club d’acheteurs bruxellois », soulignant le risque d’effets néfastes sur les économies en développement. La pratique d’achat groupé par les</a> pays de l’UE pourrait en effet, en faisant baisser les prix de vente, entraver la capacité des pays en développement à bénéficier de leur dotation en CRM pour financer leur transition énergétique.</p>
<h2>Et pour la France ?</h2>
<p>Du point de vue français, le CRMA répond à deux attentes politiques complémentaires sur le moyen et long terme. Premièrement, le texte de loi vient en appui à l’exécutif, qui cherche depuis longtemps à voir la Commission européenne accepter plus de souplesse en ce qui concerne les aides d’État. Ces dernières représentent en effet un levier privilégié pour favoriser le développement territorial dans l’hexagone, comme en témoignent les subventions à la <a href="https://www.hautsdefrance.fr/prologium-technology-sinstalle-en-hauts-de-france/">hauteur d’un milliard et demi d’euros attribuées au projet d’usine de batteries à Dunkerque</a>. En outre, le CRMA offre des perspectives intéressantes pour favoriser des projets industriels à l’instar de la mine de lithium dans l’Allier – qui d’ailleurs suscite les inquiétudes des habitants.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1668865884528541696"}"></div></p>
<p>Le deuxième point fort de cette législation européenne est qu’elle démontre la valeur ajoutée de l’action de l’UE en tant qu’acteur à l’échelle mondiale. Ceci est une conception très française de l’Europe, qui voit en la construction européenne un moyen non seulement de peser dans les affaires internationales mais aussi de s’affranchir de la puissance américaine.</p>
<p>La logique « gaulliste » de cette vision consiste à penser la base industrielle en lien avec les capacités de défense. Ce n’est donc pas une coïncidence que le Conseil européen, sous la présidence française en 2022, a appelé à œuvrer à la <a href="https://www.consilium.europa.eu/media/54777/20220311-versailles-declaration-fr.pdf">construction d’une base économique plus solide en même temps que le renforcement des capacités de défense européennes</a>.</p>
<h2>Répondre aux préoccupations</h2>
<p>Actuellement en phase de trilogue, les négociations entre le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen sont presque terminées. La prochaine étape de la procédure législative de l’UE est l’approbation et l’adoption formelle par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne. <a href="https://www.consilium.europa.eu/en/press/press-releases/2023/11/13/council-and-parliament-strike-provisional-deal-to-reinforce-the-supply-of-critical-raw-materials/">L’accord provisoire sur le CRMA conclu avec le Parlement européen</a> le 13 novembre 2023 doit en effet encore être approuvé et formellement adopté par les deux institutions.</p>
<p>La CRMA jouera un rôle essentiel dans la capacité de l’UE à atteindre ses objectifs en matière de transition écologique et à renforcer son autonomie stratégique. Cependant, la CRMA a suscité de nombreux débats et a soulevé des inquiétudes parmi les différentes parties prenantes. Bien qu’elle soit susceptible de répondre aux défis de l’UE en matière d’accès sûr et durable aux CRMA, il est essentiel d’examiner attentivement les préoccupations soulevées par les critiques et d’y répondre afin de garantir l’efficacité des dispositions prises au sein du CRMA.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218631/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les efforts politiques de l’Union européenne pour sécuriser les approvisionnements en lithium ou en terres rares suscitent plusieurs critiques. Décryptage.Lucas Miailhes, Doctorant en Science Politique/Relations Internationales, Institut catholique de Lille (ICL)Andrew Glencross, Directeur d'ESPOL, Professeur de Science Politique, Institut catholique de Lille (ICL)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2097432023-08-15T21:06:12Z2023-08-15T21:06:12ZMais où James Bond va-t-il chercher tous ces gadgets ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/537345/original/file-20230713-15-u5em9p.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C8%2C1880%2C804&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Chez Q bien sûr&nbsp;! Mais celui-ci ne les sort pas de sa manche. Dans Spectre (2015), Daniel Craig et Ben Whishaw incarnent le fameux espion et son fournisseur de gadgets.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.youtube.com/watch?v=SzvxegcZzPU">Spectre</a></span></figcaption></figure><p>Montre-laser, pistolet à empreintes digitales, explosifs et bien sûr voitures suréquipées… les gadgets sont un des symboles de James Bond. Leur inventeur génial s’appelle « Q ». Si certains de ces gadgets ont réellement existé (laser, reconnaissance d’empreintes digitales, réacteur dorsal), d’autres sont, comme on va le voir, plus fantaisistes. </p>
<p>Mais tous reposent sur un socle commun, les matières premières nécessaires à leur fabrication, et en particulier les <a href="https://mineralinfo.fr/fr">ressources minérales</a>, que les géologues contribuent à trouver dans la croûte terrestre. De tout temps, les humains ont utilisé les <a href="https://theconversation.com/connais-tu-le-lien-entre-ton-telephone-portable-et-les-cailloux-132894">ressources minérales pour créer et utiliser des technologies</a>, du silex préhistorique au lithium des batteries actuelles. Le plus célèbre agent secret de Sa Majesté ne fait pas exception.</p>
<h2>Les voitures rapides et peu discrètes de l’agent secret le plus célèbre du monde</h2>
<p>En 1964 dans <em>Goldfinger</em>, James Bond (Sean Connery) doit abandonner sa Bentley pour une Aston Martin DB5 modifiée par l’ingénieux Q (l’inoubliable Desmond Llewelyn). C’est la première des huit apparitions du bolide désormais indissociable de 007.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="L’aston Martin DB5, voiture historique de James Bond" src="https://images.theconversation.com/files/537729/original/file-20230717-138681-wy16lv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537729/original/file-20230717-138681-wy16lv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537729/original/file-20230717-138681-wy16lv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537729/original/file-20230717-138681-wy16lv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537729/original/file-20230717-138681-wy16lv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537729/original/file-20230717-138681-wy16lv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537729/original/file-20230717-138681-wy16lv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’Aston Martin DB5, apparue pour la première fois dans Goldfinger en 1964. Ce bolide fait la part belle à l’aluminium extrait du minerai de bauxite.</span>
<span class="attribution"><span class="source">N. Charles</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’automobile est un bon exemple de la complexification des produits et de l’augmentation de la diversité des matières premières utilisées au cours du temps. </p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/537731/original/file-20230717-248129-ixx1gi.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="zoom sur un minéral rose à taches rosées et blanchâtres" src="https://images.theconversation.com/files/537731/original/file-20230717-248129-ixx1gi.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537731/original/file-20230717-248129-ixx1gi.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537731/original/file-20230717-248129-ixx1gi.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537731/original/file-20230717-248129-ixx1gi.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537731/original/file-20230717-248129-ixx1gi.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537731/original/file-20230717-248129-ixx1gi.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537731/original/file-20230717-248129-ixx1gi.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Bauxite : principal minerai d’aluminium, métal utilisé dans la DB5 de 007 qui tire son nom des Baux-de-Provence.</span>
<span class="attribution"><span class="source">N. Charles</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La DB5 recèle ainsi divers métaux et minéraux à commencer par l’aluminium, un métal permettant de gagner en légèreté. Il est extrait de la bauxite, un minerai notamment exploité en Jamaïque aux environs d’Ocho Rios… qui a servi de décor pour l’île Crab Key, repaire du Dr. No, en 1962.</p>
<p>La carrosserie de la DB5 est un ensemble de plaques en alliage d’aluminium et de magnésium reposant sur une structure en tubes d’acier. Le bloc-moteur est en aluminium à l’instar des pistons et de la culasse. Les bielles et le vilebrequin sont constitués d’un acier dopé au chrome et au molybdène qui assurent une meilleure résistance. Les jantes en aluminium reposent sur des moyeux en acier chromé tout comme les rayons.</p>
<p>Il ne faut bien entendu pas oublier la <a href="https://mineralinfo.fr/sites/default/files/documents/2021-03/silice_industrielle_rp-66167-fr_2016revise2020.pdf">silice des vitrages</a>, le <a href="http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-69037-FR.pdf">cuivre du câblage électrique</a>, le plomb de la batterie ou les carbonates et le <a href="https://mineralinfo.fr/sites/default/files/documents/2021-03/kaolin_argiles_kaoliniques_rp-67334-fr_2018.pdf">kaolin dans la peinture</a>, et le pétrole pour faire rouler l’ensemble à vive allure !</p>
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<p>L’industrie automobile a largement évolué depuis 1964 et les innovations se succèdent, augmentant la diversité des ressources minérales utilisées. Plusieurs dizaines sont nécessaires aujourd’hui pour un véhicule standard – et que dire des derniers bolides pilotés par 007 depuis les années 2000 comme la BMW Z3 ou l’Aston Martin Valhalla. </p>
<p>Cela se poursuit avec les véhicules électriques qui voient intervenir <a href="https://theconversation.com/relocaliser-lextraction-des-ressources-minerales-en-europe-les-defis-du-lithium-138581">lithium</a>, cobalt, graphite, <a href="https://mineralinfo.fr/fr/ecomine/sulfate-de-nickel-un-ingredient-cle-des-batteries-li-ion">nickel</a> et <a href="https://mineralinfo.fr/fr/ecomine/marche-des-terres-rares-2022-filieres-dapprovisionnement-aimants-permanents">terres rares</a> dans les batteries. D’ailleurs en 1971, dans <em>Les diamants sont éternels</em>, James Bond vole et conduit un module lunaire électrique ! Plus récemment dans <em>Mourir peut attendre</em> (2021), l’Aston Martin Valhalla est un bolide hybride rechargeable, mais James Bond n’est pas encore passé au tout électrique.</p>
<h2>Des armes en or… trop mou ?</h2>
<p>Autre objet culte, le Walther PPK, pistolet allemand qu’utilise 007 dans bon nombre d’opus de la saga. C’est une arme faite d’un alliage d’acier inoxydable. Bien que l’acier soit principalement constitué de fer, il contient aussi d’autres éléments en fonction de l’utilisation et des propriétés recherchées : chrome, molybdène, nickel, manganèse, carbone, silicium, cuivre, soufre, azote, phosphore, bore, titane, niobium, tungstène, vanadium, cérium.</p>
<p>Beaucoup plus précieux, le pistolet de Francisco Scaramanga (Christopher Lee) est en or massif et se présente sous la forme d’un assemblage d’objets du quotidien afin de ne pas être repéré lors des contrôles : briquet, boutons de manchette, stylo-plume et étui à cigares. Limité à un coup, ce pistolet tire des balles d’un calibre de 4,2 mm, pesant 30 g, et surtout en or 23 carats avec des traces de nickel. Voilà pour la fiction…</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="pistolet d’or au musée" src="https://images.theconversation.com/files/537734/original/file-20230717-129345-k99hdj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537734/original/file-20230717-129345-k99hdj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537734/original/file-20230717-129345-k99hdj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537734/original/file-20230717-129345-k99hdj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537734/original/file-20230717-129345-k99hdj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537734/original/file-20230717-129345-k99hdj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537734/original/file-20230717-129345-k99hdj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le pistolet d’or de Francisco Scaramanga, l’or massif étant ici peu réaliste pour l’utilisation dédiée… La balle, en or elle aussi, est gravée « 007 ». Exposition au « International Spy Museum ».</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://flickr.com/photos/66857806@N02/14592496766">Gareth Milner, Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il est difficile en effet d’imaginer un pistolet entièrement constitué d’or, un métal très dense et surtout très mou, qui ne résisterait pas longtemps à la puissance répétée d’un coup de feu. En bijouterie, l’or, pour pouvoir être porté, est souvent d’ailleurs allié à l’argent, au cuivre ou au zinc. Au 1<sup>er</sup> juillet 2023, un kilogramme d’or se négociait environ 56 500 euros. Pas étonnant, l’or est depuis l’Antiquité un métal précieux, inaltérable et brillant avec une couleur jaune soutenue qui suscite convoitise et sert de valeur refuge.</p>
<p>Ainsi, dans <em>Bons baisers de Russie</em> (1963), James Bond reçoit 50 souverains britanniques en or dissimulés dans une mallette truffée de gadgets. Attiré par les pièces d’or, l’ennemi Grant ouvre la mallette piégée alors qu’il tient en joue 007. Du gaz lacrymogène s’en échappe, ce qui sauvera la vie de Bond.</p>
<h2>James Bond et ses ennemis équipés de technologies de pointe</h2>
<p>La saga est aussi l’occasion de mettre en avant des technologies de pointe peu connues du grand public au moment de la sortie d’un film. Des technologies qui reposent sur des matières premières.</p>
<p>Quel meilleur exemple que le <a href="https://www.sfpnet.fr/le-laser-principe-de-fonctionnement">laser</a> (de l’anglais « <em>light amplification by stimulated emission of radiation »</em> et signifiant « amplification de lumière par émission stimulée de rayonnement »). Pistolet, montre, voiture, satellite… Dans un scénario, tout est « mieux » équipé d’un laser !</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="pistolet laser en plastique" src="https://images.theconversation.com/files/537736/original/file-20230717-243941-ymm8xc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537736/original/file-20230717-243941-ymm8xc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=259&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537736/original/file-20230717-243941-ymm8xc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=259&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537736/original/file-20230717-243941-ymm8xc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=259&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537736/original/file-20230717-243941-ymm8xc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=326&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537736/original/file-20230717-243941-ymm8xc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=326&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537736/original/file-20230717-243941-ymm8xc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=326&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des pistolets laser (en plastique !) de la base spatiale dans Moonraker, 1979.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Nicolas Charles</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Dans <em>Goldfinger</em> (1964), James Bond est menacé par un laser – qui remplace la scie sauteuse imaginée dans le roman éponyme de Ian Flemming. Le laser sera également mis en avant dans d’autres épisodes : satellite dans <em>Les diamants sont éternels</em> (1971) et <em>Meurs un autre jour</em> (2002) ; pistolets-laser dans <em>Moonraker</em> (1979) ; montre-laser dans <em>Jamais plus jamais</em> (1983) ou <em>Goldeneye</em> (1995) ; voiture équipée d’un laser dans <em>Tuer n’est pas jouer</em> (1987)…</p>
<p>Au final, les applications réelles des lasers sont entre autres : télémétrie, découpe, projection lumineuse. Le premier laser opérationnel date de mai 1960 – le physicien Théodore Maiman l’introduit tout juste avant James Bond. Ce premier laser fonctionnait à l’aide d’un rubis, minéral de la famille du corindon (oxyde d’aluminium), comme le saphir. Mais il s’agit d’un <a href="https://www.gemsociety.org/article/understanding-gem-synthetics-treatments-imitations-part-4-synthetic-gemstone-guide/">rubis synthétique</a> créé à partir d’oxyde d’aluminium (issu de la <a href="https://lelementarium.fr/element-fiche/aluminium/">bauxite</a>) mélangé à une infime quantité de <a href="https://lelementarium.fr/element-fiche/chrome-2/">chrome</a> (principalement produit à partir de la chromite). Selon les applications, il existe différents types de lasers :</p>
<ul>
<li><p>Lasers cristallins : constitués d’un verre siliceux (à partir de quartz très pur) ou de cristaux synthétiques de rubis ou de saphir (oxyde d’aluminium dopé au <a href="https://mineralinfo.fr/sites/default/files/documents/2020-12/fichecriticitetitane171017.pdf">titane</a>, au <a href="https://mineralinfo.fr/sites/default/files/documents/2020-12/fichecriticitechrome171003.pdf">chrome</a> ou aux terres rares : néodyme, ytterbium, praséodyme, erbium ou thulium) ;</p></li>
<li><p>Lasers à fibre : composés de fibre optique à base de silice (issue d’un quartz ultra-pur) et dopée aux <a href="http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-65330-FR.pdf">terres rares</a> (métaux principalement extraits de minéraux comme la bastnaésite, la monazite ou le xénotime) ;</p></li>
<li><p>Lasers à gaz : fonctionnant avec de l’hélium (extrait des gisements de gaz naturel) et du néon (extrait des gaz de l’air atmosphérique) ou du CO<sub>2</sub> ;</p></li>
<li><p>Lasers à colorants organiques.</p></li>
</ul>
<p>Le faisceau lumineux de couleur rouge dans <em>Goldfinger</em> a été émis à partir d’un laser (probablement à rubis) dont la luminosité a été amplifiée par effets spéciaux.</p>
<p>En revanche, le caractère destructeur du laser n’est que pure fiction. Lors du tournage, un opérateur a utilisé un chalumeau à acétylène sous la table prédécoupée alors même que Sean Connery y était allongé !</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/537735/original/file-20230717-210016-ygo2ez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537735/original/file-20230717-210016-ygo2ez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537735/original/file-20230717-210016-ygo2ez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537735/original/file-20230717-210016-ygo2ez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537735/original/file-20230717-210016-ygo2ez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537735/original/file-20230717-210016-ygo2ez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537735/original/file-20230717-210016-ygo2ez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les dents de Requin (« L’espion qui m’aimait » de 1977 et « Moonraker » de 1979) sont en acier inoxydable de qualité chirurgicale. Exposées au « International Spy Museum ».</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/111748974@N02/26039238632/">Shaun Versey, Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour finir, puisque les méchants ont toujours une dent contre James Bond, évoquons la mâchoire en acier chirurgical de l’impressionnant Requin (Richard Kiel) dans <em>L’espion qui m’aimait</em> (1977) et <em>Moonraker</em> (1979). C’est un acier inoxydable qui limite les risques de réactions allergiques lorsqu’il est en contact avec la peau (très pauvre en carbone, c’est un alliage fer-nickel-chrome-manganèse-molybdène résistant à la corrosion).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209743/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nicolas Charles ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une série estivale sur la sulfureuse et insoupçonnée liaison entre James Bond et la géologie. Entre voitures mythiques et lasers à gogo, les gadgets de 007 reflètent notre utilisation du monde minéral.Nicolas Charles, Géologue, PhD, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2090772023-07-09T15:29:09Z2023-07-09T15:29:09ZLa sobriété, impensé de la politique européenne sur les matériaux critiques<p>La question de la sécurisation des approvisionnements en <a href="https://theconversation.com/pourquoi-parle-t-on-de-criticite-des-materiaux-105258">matériaux critiques</a>, c’est-à-dire des matières premières essentielles à l’économie et aux technologies bas-carbone (véhicule électrique, panneaux solaires, éolien, etc.) a pris de l’ampleur ces dernières années. En juillet 2023, la <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/la-chine-verrouille-l-acces-aux-metaux-critiques-20230703">Chine a ainsi décidé</a> d’instaurer des licences d’exportation pour le gallium et le germanium, indispensables à l’industrie des semi-conducteurs.</p>
<p>Cela a donné lieu à de nouvelles législations, comme le <a href="https://single-market-economy.ec.europa.eu/sectors/raw-materials/areas-specific-interest/critical-raw-materials/critical-raw-materials-act_en"><em>Critical Raw Materials Act</em></a> (CRMA) proposé par la Commission européenne en mars 2023. Ce règlement identifie 34 matériaux considérés comme critiques pour l’UE – depuis la dernière liste réalisée en 2020, 6 ont été ajoutés (arsenic, <a href="https://theconversation.com/cuivre-quel-avenir-pour-ce-metal-essentiel-a-la-transition-energetique-119500">cuivre</a>, feldspath, hélium, manganèse et nickel) et 2 retirés (caoutchouc naturel et indium).</p>
<p>Une seconde liste de matériaux considérés comme stratégiques (SRM) a aussi été créée, comprenant les matériaux « importants pour les technologies qui contribuent à la double transition verte et numérique et aux objectifs en matière de défense et d’aérospatiale ».</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/535784/original/file-20230705-4482-6f1os7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/535784/original/file-20230705-4482-6f1os7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/535784/original/file-20230705-4482-6f1os7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=128&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/535784/original/file-20230705-4482-6f1os7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=128&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/535784/original/file-20230705-4482-6f1os7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=128&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/535784/original/file-20230705-4482-6f1os7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=161&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/535784/original/file-20230705-4482-6f1os7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=161&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/535784/original/file-20230705-4482-6f1os7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=161&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Liste des matériaux critiques et stratégiques. En gras, les matériaux ayant intégré la liste en 2023. Le cuivre et le nickel ne font pas partie des matériaux critiques mais sont considérés comme des matériaux stratégiques.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://op.europa.eu/en/publication-detail/-/publication/57318397-fdd4-11ed-a05c-01aa75ed71a1">Commission européenne, 2023</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Le CRMA s’appuie sur cette nouvelle liste pour fixer quatre <a href="https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/13597-European-Critical-Raw-Materials-Act_en">objectifs européens</a> à l’horizon 2030 en matière de production, de transformation, de recyclage et de diversification des fournisseurs. Des objectifs encore susceptibles d’évoluer à la lumière des négociations qui sont en <a href="https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2023/06/30/critical-raw-material-act-council-adopts-negotiating-position/">cours au sein du Parlement européen et du Conseil de l’UE</a>. Il est toutefois difficile d’estimer la faisabilité du chemin à parcourir pour les atteindre.</p>
<h2>Miner 10 % de la consommation</h2>
<p>Un premier problème concerne la lisibilité et la mesurabilité des objectifs de production. La proposition indique que la filière extractive européenne devra permettre de miner « au moins 10 % de la consommation annuelle de matières premières stratégiques de l’Union, dans la mesure où ses réserves le permettent ».</p>
<p>La formulation laisse entendre que l’objectif porte sur la consommation cumulée des différents SRM par les entreprises établies dans l’UE. Elle ne précise toutefois pas comment sera opéré ce calcul.</p>
<p>En effet, considérer un objectif moyen de production masque des écarts importants entre les matériaux : la Commission européenne estime ainsi dans son <a href="https://op.europa.eu/en/publication-detail/-/publication/57318397-fdd4-11ed-a05c-01aa75ed71a1">évaluation technique</a> que l’UE dépend à 48 % des importations pour le cuivre alors qu’elle est entièrement dépendante des importations de terres rares.</p>
<p>Une façon d’éviter cet écueil serait d’envisager que l’objectif est en fait d’atteindre une production européenne de 10 % pour chacun des SRM. Or un tel objectif risque de se heurter aux <a href="https://theconversation.com/relocaliser-lextraction-des-ressources-minerales-en-europe-les-defis-du-lithium-138581">limites des ressources</a> minières européennes.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/535855/original/file-20230705-29-p80i72.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/535855/original/file-20230705-29-p80i72.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/535855/original/file-20230705-29-p80i72.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=526&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/535855/original/file-20230705-29-p80i72.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=526&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/535855/original/file-20230705-29-p80i72.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=526&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/535855/original/file-20230705-29-p80i72.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=661&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/535855/original/file-20230705-29-p80i72.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=661&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/535855/original/file-20230705-29-p80i72.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=661&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Caractéristiques de matériaux stratégiques (minerais) pour l’Union européenne.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Commission européenne, 2023</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un temps minier très long</h2>
<p>Si l’intention est louable, l’objectif d’extraction européenne semble ainsi difficile à évaluer… et donc à atteindre. Afficher un objectif explicite devrait permettre à l’UE de stimuler les <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CONSIL:ST_8863_2023_INIT">investissements</a> dans le secteur (2 % des investissements mondiaux dans l’exploration minière sont actuellement destinés aux États de l’UE) et d’alléger et simplifier ses procédures d’autorisation, obstacles de taille au développement minier européen.</p>
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<p>Questionnons toutefois l’ampleur de l’effort que cela représente. L’horizon temporel considéré semble très limité compte tenu du <a href="https://www.iea.org/data-and-statistics/charts/average-observed-lead-times-from-discovery-to-production-for-selected-minerals-2010-2019">« temps minier » nécessairement long</a> : il s’écoule en général entre 5 à 20 ans entre l’exploration initiale et la mise en production d’un projet minier. D’autant que l’UE pâtit d’une sous-exploration flagrante de ses ressources minières.</p>
<p>Enfin, un objectif à l’échelle de l’UE risque de faire peser des contraintes différenciées sur les États membres dont les <a href="https://single-market-economy.ec.europa.eu/sectors/raw-materials/related-industries/minerals-and-non-energy-extractive-industries/metallic-minerals_en">réalités minières</a> et les problématiques d’acceptabilité sociale sont très différentes.</p>
<h2>Transformer 40 % des matériaux stratégiques consommés</h2>
<p>L’UE entend de plus renforcer sa filière de transformation des minerais en affichant un objectif de production européenne de 40 % des matériaux stratégiques consommés par l’UE d’ici à 2030.</p>
<p>L’ambiguïté méthodologique dans la définition de la consommation est la même que pour l’objectif d’extraction. S’y ajoute la difficulté à obtenir des données portant sur le taux de production actuel de minerais transformés au sein de l’UE.</p>
<p>Dans son évaluation technique, la Commission européenne calcule le taux d’indépendance aux importations de chaque minerai évalué. Sur cette base, on peut considérer que l’objectif viserait en fait à passer de 27,7 % de SRM transformés produits sur le sol européen actuellement à 40 % d’ici 2030.</p>
<p>Cette ambition est rendue possible par la séparation géographique des étapes de l’extraction et de la transformation, par le délai plus court d’installation des infrastructures de transformation et par la volonté de réduire l’empreinte carbone européenne et de faciliter la mise en œuvre du Plan industriel du Pacte vert dans lequel s’inscrit le CRMA.</p>
<h2>Coût, compétitivité, acceptabilité</h2>
<p>Cependant, l’implantation de nouvelles raffineries et fonderies au sein de l’UE se heurte à une problématique de compétitivité et de relocalisation d’industries polluantes sur le territoire européen.</p>
<p>Outre la nécessité d’importer une large part des matières premières et le coût du travail plus élevé que dans des pays concurrents, le coût des matériaux transformés sur le sol européen pâtira également des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/535856/original/file-20230705-25-uw2c6d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/535856/original/file-20230705-25-uw2c6d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/535856/original/file-20230705-25-uw2c6d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=526&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/535856/original/file-20230705-25-uw2c6d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=526&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/535856/original/file-20230705-25-uw2c6d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=526&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/535856/original/file-20230705-25-uw2c6d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=661&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/535856/original/file-20230705-25-uw2c6d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=661&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/535856/original/file-20230705-25-uw2c6d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=661&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Caractéristiques de matériaux stratégiques (raffinés) pour l’Union européenne.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Commission européenne, 2023</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En plus des émissions de gaz à effet de serre, les activités d’extraction et de transformation ont d’importants impacts écologiques locaux, du fait de la pollution des écosystèmes et des conflits d’usage sur la consommation d’eau ou l’occupation des sols qu’elles créent. D’où l’opposition des populations locales malgré les normes exigeantes de l’UE.</p>
<h2>Une filière de recyclage loin d’être au point</h2>
<p>La Commission européenne a également pour objectif que 15 % de la consommation annuelle de matériaux stratégiques de l’UE proviennent de filières de recyclage européennes. Cela reviendrait à multiplier le <a href="https://op.europa.eu/en/publication-detail/-/publication/57318397-fdd4-11ed-a05c-01aa75ed71a1">niveau de recyclage actuel par 1,35 d’ici à 2030</a>.</p>
<p>Le recyclage des déchets miniers nécessite une collecte, un tri et un prétraitement complexe avant qu’ils puissent être transformés en matière première secondaire, autant d’étapes lourdes et coûteuses à mettre en place.</p>
<p>L’horizon temporel de disponibilité de ces déchets représente également un défi. Plusieurs matériaux sont ainsi largement et efficacement recyclés mais principalement intégrés dans des biens d’équipement à longue durée de vie : ils ne pourront être recyclés que sur le long terme.</p>
<p>En outre, l’évolution rapide des technologies des batteries agit comme un frein au développement de la filière de recyclage – les investisseurs étant réticents à se positionner sur des technologies encore incertaines.</p>
<p>À ces problématiques s’ajoutent encore celles des alliages ou des usages dispersifs des métaux, rendant plus complexe, voire impossible, leur recyclage, ou encore la question du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9cyclage">« décyclage »</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/535851/original/file-20230705-19-fzq3sn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/535851/original/file-20230705-19-fzq3sn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/535851/original/file-20230705-19-fzq3sn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/535851/original/file-20230705-19-fzq3sn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/535851/original/file-20230705-19-fzq3sn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/535851/original/file-20230705-19-fzq3sn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/535851/original/file-20230705-19-fzq3sn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/535851/original/file-20230705-19-fzq3sn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Taux de recyclage (EOL-RIR) au sein de l’Union européenne.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Commission européenne, 2023</span></span>
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<h2>Diversifier les sources, défi complexe</h2>
<p>D’ici à 2030, l’approvisionnement de l’UE en matériaux stratégiques ne devrait pas dépendre à plus de 65 % d’un unique pays tiers, et ce pour toute étape de la chaîne de valeur du matériau. Actuellement, plus de la moitié d’entre eux dépend à plus de 65 % d’un pays extérieur à l’UE.</p>
<p>Si l’on peut espérer que l’augmentation de la production minière européenne, le développement du recyclage et la diversification des sources réduisent ces dépendances, cela s’annonce extrêmement complexe pour des matériaux dont la production est très concentrée – comme le platine, produit à 74 % par l’Afrique du Sud.</p>
<p>Diversifier ses approvisionnements en terres rares, en borates ou en niobium en quelques années représente aussi un défi de taille compte tenu des importantes dépendances actuelles de l’UE à un seul pays, respectivement la Chine, la Turquie et le Brésil.</p>
<h2>Une diplomatie minérale européenne ?</h2>
<p>Dans sa volonté de développer une diplomatie minérale, l’UE risque ainsi de se heurter à de nombreux problèmes. Elle risque d’arriver après d’autres acteurs qui ont déjà largement investi les territoires miniers depuis le début des années 2000, <a href="http://www.cepii.fr/PDF_PUB/lettre/2022/let428.pdf">comme la Chine</a>. D’autre part, la diplomatie minérale va nécessiter un volume de financement important et des acteurs miniers européens souhaitant porter cette dynamique.</p>
<p>En outre, les bouleversements géopolitiques actuels avec leurs possibles jeux d’alliances (bloc occidental contre bloc chinois) et de <a href="https://theconversation.com/metaux-strategiques-et-si-les-pays-producteurs-se-regroupaient-en-cartel-du-type-opep-194749">possibles coalitions entre producteurs miniers</a> (cartel) risquent d’exacerber les tensions sur les marchés des métaux, voire de faire apparaître des conflits liés à la compétition d’accès.</p>
<p>La compétition entre puissances et les problématiques d’acceptabilité au niveau local pourraient devenir les nouveaux maîtres mots de la géopolitique de l’énergie et des métaux.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/535791/original/file-20230705-21-s5ak77.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/535791/original/file-20230705-21-s5ak77.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/535791/original/file-20230705-21-s5ak77.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/535791/original/file-20230705-21-s5ak77.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/535791/original/file-20230705-21-s5ak77.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/535791/original/file-20230705-21-s5ak77.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/535791/original/file-20230705-21-s5ak77.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/535791/original/file-20230705-21-s5ak77.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Principaux fournisseurs de l’UE en matériaux critiques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Commission européenne, 2023</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<h2>Et la sobriété ?</h2>
<p>Dans ce contexte, il est étonnant qu’aucune attention n’ait été portée à la question de la sobriété dans la politique européenne sur les matériaux stratégiques – la modération dans l’usage des matériaux est en effet absente des textes du CRMA.</p>
<p>Réduire la consommation de matériaux dans l’UE constitue pourtant le <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-et-strategique-2022-4-page-43.htm">meilleur rempart</a> pour assurer l’autonomie stratégique du continent, et le contexte ukrainien le confirme.</p>
<p>Rappelons que le 3<sup>e</sup> volet du sixième rapport du <a href="https://www.ipcc.ch/report/sixth-assessment-report-working-group-3/">GIEC</a> publié en avril 2022 a mis au cœur de la lutte contre le changement climatique les politiques de sobriété, définies comme un « ensemble de mesures et de pratiques quotidiennes qui évitent une demande en énergie, en matières premières, en terres et en eau, tout en assurant le bien-être de tous dans le respect des limites planétaires ».</p>
<p>Pour le GIEC comme pour l’UE, la sobriété devrait constituer un pilier majeur des politiques de décarbonation.</p>
<h2>Des co-bénéfices</h2>
<p>Son véritable intérêt apparaît quand on réalise l’ampleur de ses co-bénéfices : des véhicules électriques plus légers limitent à la fois la consommation d’électricité, la pollution liée à l’usure des plaquettes de frein, les impacts environnementaux liés à la production du véhicule et la dépendance aux métaux critiques.</p>
<p>Une approche par la sobriété et non par notre capacité à extraire ou transformer les matériaux offrirait des perspectives renouvelées concernant le modèle productif européen : maîtriser la demande en matériaux facilitera l’atteinte des objectifs européens.</p>
<p>Cette <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-et-strategique-2022-4-page-77.htm">démarche</a> suppose d’interroger nos modes de consommation et nos besoins en intégrant pleinement la question de la justice sociale et la variabilité des modes de vie dans la population.</p>
<hr>
<p><em>Le projet <a href="https://anr.fr/Projet-ANR-17-CE05-0024">GENERATE</a> est soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui finance en France la recherche sur projets. Elle a pour mission de soutenir et de promouvoir le développement de recherches fondamentales et finalisées dans toutes les disciplines, et de renforcer le dialogue entre science et société. Pour en savoir plus, consultez le site de l’<a href="https://anr.fr/">ANR</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209077/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuel Hache a reçu des financements de l'Agence nationale de la recherche (ANR) pour le projet GENERATE (Géopolitique des énergies renouvelables et analyse prospective de la transition énergétique) entre 2018 et 2020. Il est chercheur associé au laboratoire Economix de l’université Paris Nanterre et directeur de recherche à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Louis-Marie Malbec, Vincent d’Herbemont et Émilie Normand ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>L’Union européenne fixe des objectifs peu atteignables en matière de relocalisation de ces matériaux stratégiques, sans s’interroger sur la façon d’en réduire notre usage.Emmanuel Hache, Économiste et prospectiviste, IFP Énergies nouvelles Émilie Normand, Économiste, IFP Énergies nouvelles Louis-Marie Malbec, Économiste, IFP Énergies nouvelles Vincent d’Herbemont, Ingénieur économiste, IFP Énergies nouvelles Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2050722023-05-21T15:05:27Z2023-05-21T15:05:27ZVéhicules électriques : la géothermie, future source d’approvisionnement en lithium ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/524671/original/file-20230505-17-wkjukb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=57%2C32%2C1166%2C707&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’un des plus importants gisements de lithium mondial se trouve dans le salar d’Uyuni, en Bolivie. Il est extrait en siphonnant les eaux des bassins d’évaporation, visible sur cette vue satellite.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Lithium_brine_extraction_in_the_Salar_de_Uyuni_salt_flat,_Potos%C3%AD,_Bolivia_-_3_January_2023_(52616752619).jpg">Pierre Markuse / Copernicus Sentinel program / Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Le Parlement européen a voté le 14 février 2023 la <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/automobile/automobile-le-parlement-europeen-approuve-la-fin-des-moteurs-thermiques-en-2035_5658587.html">fin de la production de véhicules thermiques à l’horizon 2035</a> pour les habitants des pays membres de l’Union européenne. En pratique, cela revient à l’arrêt des ventes de voitures et véhicules utilitaires légers neufs à essence et diesel dans l’UE à cette date, ainsi que des hybrides (essence-électrique), au profit de <a href="https://theconversation.com/automobile-les-trois-etapes-qui-ont-conduit-lue-a-mettre-fin-aux-vehicules-thermiques-dici-2035-186248">véhicules 100 % électriques</a>.</p>
<p>Cette décision s’inscrit dans un schéma plus large de recours aux véhicules électriques. Ainsi, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), environ <a href="https://www.iea.org/news/demand-for-electric-cars-is-booming-with-sales-expected-to-leap-35-this-year-after-a-record-breaking-2022">2 milliards de véhicules électriques</a> seront en circulation d’ici 2050, alors que les ventes n’étaient que de 10 millions en 2022 (avec une projection de +35 % en 2023 pour atteindre 14 millions).</p>
<p>Cette augmentation du nombre de véhicules électriques va très logiquement s’accompagner de besoins de plus en plus importants en batteries, et donc en leurs composants, comme le <a href="https://theconversation.com/les-materiaux-de-la-transition-energetique-le-lithium-105429">lithium</a>. Les exploitations habituelles étant déjà sous tension, les saumures géothermiques pourraient-elles devenir une source essentielle d’approvisionnement de la filière lithium européenne ?</p>
<h2>Le lithium, enjeu économique en voie de pénurie</h2>
<p>Le lithium est l’un des <a href="https://theconversation.com/energie-comment-vont-evoluer-les-batteries-lithium-ion-tres-consommatrices-de-metaux-en-tension-183161">composants clés des batteries de véhicules électriques</a>. En 2022, le lithium était présent dans près de 90 % des batteries : les batteries lithium-nickel-manganèse-cobalt (LNMC) représentaient 60 % de part de marché, suivies des batteries lithium-fer-phosphate (LFP) avec une part d’un peu moins de 30 %. Environ 60 % de la demande en lithium concernait ainsi les batteries de véhicules électriques, contre environ 15 % en 2017.</p>
<p>Face à cette demande croissante, l’approvisionnement mondial en lithium est mis à rude épreuve. En 2021 et 2022, la demande a ainsi dépassé l’offre, malgré l’augmentation de 180 % de la production depuis 2017. Selon l’<a href="https://www.iea.org/reports/global-ev-outlook-2023">AIE</a>, le monde pourrait donc faire face à des pénuries de lithium d’ici 2025.</p>
<p>En réaction à ces changements, le <a href="https://www.transitionsenergies.com/monde-dependant-batteries-lithium-ion-materiaux-permettent-de-les-fabriquer/">marché mondial du lithium</a> fait l’objet de toutes les attentions de la part des spéculateurs, des constructeurs automobiles et des fabricants de batteries, qui tentent de sécuriser leurs approvisionnements ainsi que leurs marges.</p>
<p>Les <a href="https://www.reuters.com/markets/commodities/lithium-price-slide-deepens-china-battery-giant-bets-cheaper-inputs-2023-02-28/">cours</a> du carbonate de lithium (lithium raffiné) ont ainsi été multipliés par six entre août 2021 et novembre 2022, et ceux des cristaux de spodumène (minéral contenant du lithium) ont encore plus progressé dans le même temps.</p>
<p>La <a href="https://www.transitionsenergies.com/krach-du-lithium/">consommation mondiale</a> a quant à elle augmenté de plus de 280 % entre 2010 et 2021. Le prix de la tonne est quant à lui passé de moins de 5 000 euros en 2012 à plus de 85 000 euros en novembre 2022, avant de redescendre depuis mars à un peu plus de 50 000 euros.</p>
<p>Le lithium fait ainsi partie des métaux dits stratégiques. La France en a même fait une priorité en matière de souveraineté économique.</p>
<h2>Les défis de l’approvisionnement en lithium</h2>
<p>L’exploitation du lithium a lieu principalement sur des gisements de types saumures, tels les salars du plateau andin dans le <a href="https://www.insu.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/le-triangle-du-lithium-quand-la-taille-compte">triangle du lithium</a>, ou par excavation minière conventionnelle dans les pegmatites riches en spodumène, comme en Australie.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une très grande mine à ciel ouvert, avec un lac au fond" src="https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/524672/original/file-20230505-27-t545h7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La mine de Greenbushes, en Australie, représente un important gisement de lithium.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Open_pit_of_the_Greenbushes_mine,_January_2023_07.jpg">Calistemon/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<p>Ainsi, la <a href="https://pubs.usgs.gov/periodicals/mcs2022/mcs2022.pdf">majeure partie des réserves mondiales de lithium</a> se trouvent en Bolivie (21 millions de tonnes), Argentine (19 millions de tonnes), Chili (9,8 millions de tonnes), Australie (7,3 millions de tonnes), et en Chine (5,1 millions de tonnes).</p>
<p>Cette concentration de la ressource en quelques points du globe rend l’<a href="https://theconversation.com/relocaliser-lextraction-des-ressources-minerales-en-europe-les-defis-du-lithium-138581">Europe dépendante des pays producteurs</a>, tant au niveau de l’approvisionnement que du coût de revient de cette matière première.</p>
<p>Outre cet aspect économique, il est important de noter que l’exploitation des salars est une <a href="https://ecoinfo.cnrs.fr/2011/06/01/le-lithium-impacts-de-la-production/">aberration écologique</a>, qui nécessite de pomper de l’eau en profondeur et de la laisser s’évaporer. Et ce, dans des régions qui subissent déjà un fort stress hydrique. Le pompage, l’ajout d’additifs chimiques ainsi que les terrassements nécessaires aux bassins de décantation défigurent durablement les paysages à fort potentiel d’attraction touristique, et détruisent des écosystèmes particulièrement vulnérables et uniques au monde.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/batteries-electriques-une-meilleure-tracabilite-pour-un-lithium-plus-durable-190080">Batteries électriques : une meilleure traçabilité pour un lithium plus durable</a>
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<p>L’impact de <a href="https://www.france24.com/fr/europe/20221024-l-une-des-plus-grandes-mines-de-lithium-d-europe-sera-exploit%C3%A9e-en-france-d-ici-2027">l’exploitation en carrière</a> est lui aussi très important, et peut s’accompagner de <a href="https://theconversation.com/en-chine-lexploitation-des-terres-rares-saccompagne-dune-pollution-massive-183676">pollutions majeures</a>, comme c’est aussi le cas pour d’autres métaux.</p>
<p>L’approvisionnement européen en lithium est ainsi confronté à de nombreux défis. Certains sont liés à la forte progression de la demande, d’autres à des contraintes écologiques et sanitaires, et d’autres enfin à la concentration des ressources hors de l’Europe.</p>
<h2>La géothermie, nouvelle source d’approvisionnement en lithium</h2>
<p>Or, des <a href="https://www.egec.org/wp-content/uploads/2023/01/Geothermal-minerals-for-the-EU-critical-raw-materials-act.pdf">concentrations élevées en lithium</a> ont récemment été découvertes dans certaines saumures provenant d’exploitations géothermiques européennes, laissant augurer une nouvelle source d’approvisionnement.</p>
<p>La <a href="https://theconversation.com/il-existe-plusieurs-types-de-geothermie-comment-marchent-ils-et-quels-sont-les-risques-153923">géothermie</a> consiste à capter la chaleur terrestre pour l’exploiter directement. Elle peut ainsi fournir de la chaleur à différentes échelles, des habitations individuelles jusqu’aux réseaux de chaleur d’une agglomération, en passant par l’industrie agroalimentaire. Lorsque la température et le débit sont suffisants, la chaleur peut également être convertie en énergie électrique et injectée sur le réseau national.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une usine dans les cheminées fument ; la photo est prise au crépuscule ou à l’aube, avec des montagnes en fond" src="https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/524675/original/file-20230505-19-55hfvy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’usine géothermique de Golemo Selo, en Bulgarie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/lAcYPEiau0U">Viktor Kiryanov/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<p>Parmi les différentes techniques d’exploitation géothermiques possibles, la géothermie par stimulation de réservoir (EGS, Enhanced Geothermal Systems) permet de remonter à la surface des fluides naturellement surchauffés, présents à grande profondeur, grâce à un premier forage (appelé puits producteur). Ces fluides sont ensuite injectés dans leur niveau d’origine grâce à un deuxième forage (appelé puits injecteur).</p>
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<p>Ces fameux fluides sont des saumures, dont on ne modifie en rien la chimie, mais dont on prélève aujourd’hui uniquement la chaleur. Or, selon le terrain géologique dans lequel ils sont captés, ils peuvent contenir du lithium dissous. Le fluide ayant déjà été ramené en surface pour les besoins géothermiques, il ne reste qu’à extraire le précieux métal : d’une pierre deux coups, chaleur et lithium.</p>
<p>De plus, l’Europe est riche en terrains géologiques favorables à ces saumures riches en lithium, ce qui pourrait conduire à une production et un approvisionnement plus local, et moins dépendant de pays ou de sociétés étrangères.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="On trouve des zones vertes et jaune en suède/norvège/finlande, au nord de l’angleterre et en grèce ; des zones orange et rouge au portugal, au centre de la france et en europe centrale" src="https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/525942/original/file-20230512-8466-fu8xp9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Carte de favorabilité d’exploitation du lithium en Europe, de nulle (blanc) à très favorable (rouge).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://data.geus.dk/egdi/?mapname=egdi_geoera_frame#baslay=baseMapGEUS&extent=-2616900,592270,11121880,5873110&layers=frame_cba_scores_lithium_v01">FRAME project/Geological Survey of Sweden</a></span>
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</figure>
<p>Enfin, la technologie EGS a l’avantage de fonctionner en circuit fermé : il n’y a nul besoin ni de puiser de l’eau pour la faire évaporer ni de défigurer le paysage sur des centaines de kilomètres carrés, comme pour les salars ou les mines.</p>
<h2>Vers un développement de la géothermie ?</h2>
<p>La découverte de saumures géothermiques riches en lithium pourrait accroître l’intérêt des investisseurs et des pouvoirs politiques dans le développement de la géothermie. La demande en lithium est telle que la production de chaleur pourrait même, à terme, devenir un effet secondaire de l’extraction, et non plus la ressource principalement recherchée.</p>
<p>Durant la dernière décennie, la Commission européenne a montré un intérêt particulier pour le développement de la géothermie à grande profondeur, notamment la géothermie par stimulation de réservoir. L’exploration et le développement de systèmes EGS ont été étudiés en détail par différents projets de recherche et de démonstration tels <a href="https://cordis.europa.eu/project/id/608553">IMAGE</a>, <a href="https://cordis.europa.eu/project/id/691728">DESTRESS</a>, <a href="https://cordis.europa.eu/project/id/727550/fr">GEMEX</a> et <a href="https://www.meet-h2020.com/">MEET</a>.</p>
<p>Des <a href="https://www.brgm.fr/fr/actualite/actualite/coupler-production-lithium-geothermie-succes-projet-eugeli">projets préliminaires</a> visant à coproduire lithium et énergie géothermale sur réservoirs stimulés ont démontré la faisabilité technique du processus d’extraction, ainsi que son potentiel économique.</p>
<p>De nombreuses recherches sont à présent nécessaires afin de développer à l’échelle européenne cette nouvelle activité. Une approche multidisciplinaire est indispensable afin de cartographier la ressource en fonction du contexte géologique, déterminer les propriétés mécaniques et pétrophysiques des différents types de réservoir, comprendre les processus d’altération de la roche réservoir et les mécanismes de transport et concentration du lithium, et développer de nouvelles techniques d’extraction à haut rendement et respectueuses de l’environnement.</p>
<p>Mais au-delà de ces considérations économiques, les batteries lithium-ion <a href="https://theconversation.com/energie-comment-vont-evoluer-les-batteries-lithium-ion-tres-consommatrices-de-metaux-en-tension-183161">méritent-elles vraiment une telle place</a> dans une société sans carburant ? Qu’elles aient changé notre société est indéniable, mais si rien n’est fait concernant le coût environnemental de l’extraction des métaux bruts, du recyclage et de la réutilisation, les batteries pourraient bien devenir la prochaine grande crise environnementale après l’effet de serre. Avec ou sans exploitation géothermique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205072/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Largement utilisé dans les batteries, le lithium est une ressource très demandée. Une nouvelle voie d’extraction est envisagée ici, basée sur les fluides extraits des exploitations géothermiques.Olivier Pourret, Enseignant-chercheur en géochimie et responsable intégrité scientifique et science ouverte, UniLaSalleGhislain Trullenque, Enseignant Chercheur Géologie structurale et géothermie, UniLaSalleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1997972023-02-13T20:38:01Z2023-02-13T20:38:01ZD’où viennent les profits record des compagnies pétrolières et à quoi servent-ils ?<p>Tour à tour, les compagnies pétrolières annoncent des <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/02/08/les-majors-du-petrole-affichent-des-resultats-record_6160981_3234.html">profits record pour 2022</a>, les plus hauts qu’elles aient connus de toute leur histoire. Côté américain, 55,7 milliards de dollars de profits ont ainsi été enregistrés par <a href="https://corporate.exxonmobil.com/news/newsroom/news-releases/2023/0131_exxonmobil-announces-full-year-2022-results">ExxonMobil</a> et 36,5 milliards par <a href="https://www.chevron.com/-/media/chevron/stories/documents/4Q22-earnings-press-release.pdf">Chevron</a>. </p>
<p>Les majors européennes ne sont pas en reste, avec des profits s’élevant à 39,9 milliards de dollars pour <a href="https://www.shell.com/investors/results-and-reporting/quarterly-results/2022/q4-2022/_jcr_content/root/main/section/simple/call_to_action/links/item1.stream/1675295770390/c4588bfb8b938904cc08e44fb874ae2891b6e70a/q4-2022-qra-document.pdf">Shell</a> ou encore 20,5 milliards de dollars de bénéfice net engrangés pour <a href="https://totalenergies.com/system/files/documents/2023-02/TotalEnergies_4T22_Resultats.pdf">TotalEnergies</a> et 27,6 pour le groupe britannique <a href="https://www.bp.com/en/global/corporate/investors/results-and-presentations/quarterly-results-and-webcast.html/register">British Petroleum</a>. Ces chiffres mirobolants ne manquent pas de faire polémique dans l’actuel contexte de crise énergétique.</p>
<h2>Comment expliquer de tels profits record ?</h2>
<p>Répondre à cette question nécessite d’effectuer un bref retour sur l’évolution du cours du baril lors de l’année 2022. La forte reprise de l’activité qui a suivi la crise économique mondiale liée à la pandémie de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/Covid-19-82467">Covid-19</a> s’est traduite par une hausse de la demande de pétrole qui a, mécaniquement, tiré les prix du brut vers le haut.</p>
<p>À ce facteur économique s’est ajouté un élément géopolitique majeur, l’invasion de l’Ukraine par la Russie le 24 février 2022. Cette attaque a créé une onde de choc sur le marché pétrolier avec un cours du baril qui s’est immédiatement envolé pour côtoyer les sommets de mars à mai 2022.</p>
<p>Cette flambée des prix du brut dès le début du conflit s’explique par les <a href="http://www.cepii.fr/PDF_PUB/pb/2022/pb2022-37.pdf">craintes provoquées par la guerre en Ukraine</a> quant à un possible manque d’approvisionnement en hydrocarbures, tirant en conséquence les prix de l’or noir vers le haut. Les incertitudes relatives aux perspectives économiques mondiales ont ensuite pris le relais, en particulier quant à un éventuel ralentissement de l’activité économique en <a href="https://theconversation.com/fr/topics/chine-20235">Chine</a>, deuxième plus gros pays consommateur de pétrole au monde.</p>
<p><iframe id="Hzt4m" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/Hzt4m/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>La recrudescence des cas de Covid-19 a en effet jeté un doute sur la santé économique à venir de l’empire du Milieu, générant une vive incertitude au niveau mondial. Les prix du brut ont alors été tirés vers le bas en raison des anticipations à la baisse de la demande chinoise de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/petrole-21362">pétrole</a>. Quoi qu’il en soit, sur l’ensemble de l’année 2022, les prix du brut (brent) ont enregistré une croissance moyenne de 42,6 % par rapport à 2021.</p>
<p>Outre l’impact conséquent sur le pouvoir d’achat des ménages, si cette flambée du cours du baril a engendré une hausse des coûts de production pour la très grande majorité des entreprises, tel n’est pas le cas pour les compagnies pétrolières qui produisent des hydrocarbures. C’est la raison pour laquelle l’envolée des prix du brut s’est traduite par des bénéfices record pour les groupes pétroliers.</p>
<h2>Où vont ces profits ?</h2>
<p>C’est évidemment la question qui fait couler beaucoup d’encre, puisqu’une grande partie des bénéfices est redistribuée aux actionnaires sous la forme de dividendes. Le sujet des dividendes a toujours fait l’objet de <a href="https://www.boursorama.com/bourse/actualites/faut-il-arreter-les-dividendes-c8bc75abfa460c9123413c308b36de85">vifs débats en France</a>, dans la mesure où une (très) faible minorité de Français détient des actions, contrairement à la population de nombreux autres pays (États-Unis, Royaume-Uni, Pays-Bas, etc.) pour qui il s’agit de la principale source d’épargne constituée en vue, notamment, de la retraite. Du côté des compagnies, leur réticence à ralentir les versements de dividendes tient au fait que ceux-ci leur permettent d’attirer des actionnaires dont les placements tirent à la hausse leur valeur boursière.</p>
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<p>À ces versements de dividendes s’ajoutent les rachats d’actions. La partie des sommes colossales accumulées par les compagnies pétrolières qui n’est pas utilisée pour investir leur sert ainsi aussi à racheter leurs propres actions sur le marché boursier, ce qui a pour effet de faire monter les cours.</p>
<p>On entre alors dans une boucle autoentretenue : les « <a href="https://theconversation.com/les-superprofits-sont-aussi-gonfles-comptablement-par-linflation-191032">superprofits</a> » des compagnies pétrolières leur permettent de faire monter le cours de leurs actions en bourse et cette croissance de la valeur boursière alimente à son tour les bénéfices engrangés par les majors, d’autant plus lorsque les prix du brut sont orientés à la hausse.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/rachats-dactions-face-aux-exces-des-marches-une-regulation-encore-trop-timide-191179">Rachats d’actions : face aux excès des marchés, une régulation encore trop timide</a>
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<p>En pleine crise énergétique mondiale, ces pratiques ont naturellement de quoi être décriées. D’un point de vue strictement économique, il est toutefois important d’étudier si des dividendes en hausse et des rachats d’actions pèsent sur les bénéfices que les firmes pourraient consacrer à l’<a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/sciences-humaines/economie-et-finance/des-economistes-repondent-aux-populistes_9782415001872.php">investissement</a>.</p>
<p>Si tel peut effectivement être le cas pour des entreprises non cotées qui n’auraient pas facilement accès aux marchés financiers, il n’en est pas de même pour les majors. Ces dernières ont généralement des niveaux de trésorerie très élevés et les dividendes n’en constituent qu’une faible proportion. Elles sont donc à même tout à la fois d’investir massivement, en fonction de leurs projets et des opportunités qui se présentent, et de distribuer des dividendes.</p>
<p>Une partie des bénéfices des groupes pétroliers est ainsi destinée à l’investissement dans les hydrocarbures, mais aussi dans les énergies renouvelables. Sur ce dernier point, les compagnies – en particulier américaines – ont été vivement critiquées du fait des faibles montants investis dans le solaire, l’éolien et les autres énergies renouvelables comparativement aux sommes qu’elles versent aux actionnaires. C’est une des raisons qui a conduit le président américain Joe Biden à vouloir <a href="https://www.lesechos.fr/monde/etats-unis/etats-unis-joe-biden-veut-finir-le-boulot-apres-les-succes-legislatifs-de-2022-1904504">quadrupler la taxe sur les rachats d’actions</a> entrée en vigueur en janvier 2023.</p>
<h2>Faut-il taxer ces superprofits ?</h2>
<p>La question de l’instauration d’une taxe sur les profits des géants du pétrole est toujours l’objet de nombreux débats. En Europe, certains pays comme la France avaient choisi d’instaurer un bouclier tarifaire alors que d’autres, tels le Royaume-Uni, l’Italie ou la Hongrie, ont opté pour la mise en place de taxes.</p>
<p>Si l’instauration de taxes exceptionnelles sur les superprofits des compagnies pétrolières peut s’avérer utile pour compenser la hausse des prix de l’énergie, elle pourrait cependant avoir des effets contre-productifs en retardant la transition énergétique. Si les énergies renouvelables sont destinées à devenir des sources d’énergie essentielles d’ici quelques années, elles ne peuvent remplacer « au pied levé » le pétrole : la transition n’est pas immédiate et demande en effet du temps.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pouvoir-dachat-le-bouclier-tarifaire-un-soutien-de-100-euros-par-trimestre-185056">Pouvoir d’achat : le bouclier tarifaire, un soutien de 100 euros par trimestre</a>
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<p>Afin de promouvoir le passage aux énergies renouvelables et assurer la transition énergétique, il convient de prendre garde à ne pas interrompre brutalement les investissements dans le secteur pétrolier, ce qui pourrait advenir en cas d’instauration de taxes très élevées. Cela est encore plus important dans le contexte actuel de la guerre en Ukraine, puisqu’il est nécessaire de remplacer le pétrole russe par du pétrole en provenance d’autres pays. Il faut donc faire preuve de vigilance afin de ne pas entraver cette dynamique.</p>
<p>Taxer lourdement les entreprises lorsque celles-ci réalisent des investissements qui s’avèrent gagnants peut en outre être contre-productif puisque cela reviendrait à taxer les compagnies les plus innovantes. Cela ne profiterait pas aux entreprises du secteur des énergies renouvelables qui pourraient, elles aussi, se voir taxer en cas de réalisation de superprofits alors même que ceux-ci découleraient d’une stratégie d’investissement ambitieuse.</p>
<p>À ce jour, l’urgence est d’aider les consommateurs à faire face aux <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/cours-du-baril-et-prix-a-la-pompe-pourquoi-tant-de-decalage-1900165">prix à la pompe élevés</a> sans entraver les investissements des entreprises, nécessaires à la transition énergétique. De ce point de vue, une piste réside dans la redistribution des recettes provenant de la taxe carbone aux ménages les plus vulnérables afin de les aider dans la réalisation de la transition énergétique. De même, une taxe carbone « flottante » évoluant en fonction des fluctuations du cours du baril permettrait de contrebalancer la hausse des prix du brut via une réduction du montant de la taxe et limiter ainsi l’impact sur les prix affichés des carburants.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199797/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Mignon est conseiller scientifique au CEPII, membre du Cercle des économistes, présidente de la section 05 (sciences économiques) du CNU et secrétaire générale de l'AFSE.</span></em></p>L’envolée des prix du brut du premier semestre 2022 conjuguée à la stratégie de rachat d’actions pour soutenir les cours de bourse des majors expliquent notamment leurs résultats historiques.Valérie Mignon, Professeure en économie, Chercheure à EconomiX-CNRS, Conseiller scientifique au CEPII, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1925732022-11-21T19:26:25Z2022-11-21T19:26:25ZRecycler 100 % des métaux, un objectif atteignable ?<p>Popularisé par l’engouement autour de l’économie circulaire, le recyclage a le vent en poupe. Charriant la promesse d’un modèle fonctionnant en vase clos et marquant son indépendance par rapport à des ressources minières au bilan écologique souvent dénoncé, le recyclage multiplie les avantages théoriques sur le papier.</p>
<p>Cet apport de métaux recyclés dits secondaires se substitue en effet à une partie des besoins auparavant assurés par les mines (métaux dits primaires), et permet donc d’éviter les déchets et contaminations associés à la mine tout en diminuant notre dépendance à l’importation de métaux depuis des pays potentiellement sensibles géopolitiquement.</p>
<p>D’un point de vue énergétique, une tonne d’acier, d’aluminium ou de cuivre recyclée est en outre moins énergivore que son équivalent primaire – avec des économies d’énergie <a href="https://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/8607">allant de 60 à 90 %</a>. Les volumes de métaux recyclés réintroduits dans la boucle, enfin, sont autant de matières qui n’iront pas finir dans les décharges avec le lot de pollutions et de coûts qu’elles auraient pu générer.</p>
<p>Pourtant, et sans même viser la circularité parfaite, l’essor du « tout » recyclage pour l’ensemble des métaux est loin d’être aussi simple et relève davantage d’une route semée d’embûches.</p>
<h2>Comment on mesure le recyclage</h2>
<p>Commençons par préciser ce que l’on entend derrière ce vaste concept de recyclage. Quatre différentes façons de l’évaluer permettent de l’appréhender : le taux de collecte, le taux d’efficacité du recyclage, le taux de recyclage en fin de vie des éléments et le taux d’incorporation de <a href="https://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/8702">matière recyclée dans les produits</a>.</p>
<p>Le taux de collecte représente les quantités de métaux effectivement collectées chaque année sur le flux total qui parvient en fin de vie tandis que le taux d’efficacité du recyclage mesure la quantité recyclée sur la quantité qui est collectée. Le produit de ces deux derniers taux équivaut au taux de recyclage en fin de vie des éléments. Le taux d’incorporation, quant à lui, correspond à la part de matière recyclée dans le cycle de production.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Chacun de ces indicateurs a son utilité. Pour minimiser la quantité de déchets à gérer dans les décharges, le taux de recyclage des éléments en fin de vie est plus pertinent, alors que pour réduire les ressources extraites à partir des mines (et l’énergie consommée associée), agir sur le taux d’incorporation de matière recyclée dans les produits aura plus d’incidence.</p>
<p>Si l’on exclut la possibilité d’une baisse de la production de produits (ou d’un découplage absolu), se rapprocher d’un taux d’incorporation de recyclé de 100 % nécessite un taux de recyclage des éléments en fin de vie de 100 %.</p>
<h2>Des produits complexes</h2>
<p>Jusqu’ici, les faits semblent contredire ce but. Une grande partie des métaux <a href="https://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/8702">ne sont pas ou peu recyclés</a>, c’est le cas de la plupart des métaux mineurs (parfois dits métaux rares, comme le lithium, le gallium ou l’indium). Et les métaux bien recyclés (acier, métaux de base et précieux) ont de leur côté atteint un plateau et ne progressent plus.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=728&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=728&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=728&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=915&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=915&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=915&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution des différents taux de recyclage selon les métaux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Données de Krausmann et coll. 2017</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il semblerait donc que le scénario du tout recyclé se heurte à la réalité de produits qui sont souvent : complexes (nombre de composants et d’éléments), variés et dont les concentrations en métaux – jouant à la fois sur les coûts et les recettes des recycleurs – ne sont pas toujours favorables à ces derniers par rapport à la mine classique.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Rapport entre les concentrations dans les mines et dans les circuits imprimés d’ordinateurs (PCB) pour plusieurs métaux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fizaine 2020</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>La diversité des produits et des composants complexifie le montage de lignes de recyclage adaptées et leur massification, d’autant plus que les courtes durées de vie technologique de certains produits peuvent rendre complètement caduc le modèle de recyclage auparavant pertinent.</p>
<p>Ainsi, le remplacement très rapide des lampes fluo compactes par leur équivalent en LED en quelques années a mis un terme aux expérimentations de recyclage des terres rares issues des premières, les flux traitables de déchets étant amenés à se tarir vite.</p>
<h2>Des conditions économiques parfois défavorables</h2>
<p>Pour continuer, le prix des métaux mais surtout sa volatilité associée n’est pas non plus toujours un terrain très favorable à la mise en place de chaînes de recyclage car celle-ci accentue l’incertitude sur le niveau des recettes. Quand bien même les prix des métaux atteindraient des niveaux élevés, différentes études passées ont démontré la faible réaction de l’offre secondaire des métaux <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0921344917300605?via%3Dihub">au prix de ces derniers</a>.</p>
<p>Du côté des coûts, l’extraction à partir de la « mine urbaine » n’est pas forcément un eldorado économique notamment lorsque l’on s’intéresse à la concentration des métaux mineurs. Pour ces derniers, les concentrations de la mine urbaine sont bien souvent très en deçà de celle de la mine classique. Associés à des prix moyens, ils ne représentent qu’une fraction mineure des recettes extractibles, il n’est donc pas surprenant que les métaux mineurs ne soient pas ciblés par les recycleurs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=461&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=461&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=461&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=580&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=580&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=580&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Proportion des différents métaux dans la valeur totale contenue dans les circuits imprimés d’ordinateurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fizaine 2020</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Relation entre prix, dilution, valeur et métaux recyclés dans les circuits imprimés d’ordinateurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fizaine 2020</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ensuite <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/09593330.2016.1237552">d’autres études</a>) ont montré que la réduction en amont des quantités de métaux notamment précieux dans les produits électroniques (en particulier par la miniaturisation) a rendu beaucoup moins attractif le modèle du recyclage. Il y aurait alors, un arbitrage entre d’une part des produits complexes avec des concentrations faibles de métaux (donc économes en métaux) mais peu recyclables, et des produits plus simples mais plus gourmands en métaux et donc mieux recyclables. Le premier R de l’économie circulaire (c’est-à-dire diminuer) aurait ainsi tendance à chasser son dernier R (recycler).</p>
<p>Des effets similaires ont été observés pour les panneaux photovoltaïques dont les épaisseurs en baisse (et concentration) auraient des effets défavorables au recyclage des métaux contenus.</p>
<h2>Des contraintes multiples</h2>
<p>Enfin, il existe aussi d’autres obstacles, trop longs à développer ici, d’ordre technologiques, culturels et juridiques qui contraignent <a href="http://www.editionstechnip.com/fr/catalogue-detail/2166/les-metaux-rares-opportunite-ou-menace.html">l’atteinte du tout recyclé</a>.</p>
<p>Une mauvaise réaction face à ces constats consisterait à disqualifier l’intérêt du recyclage. Au contraire, le recyclage devra faire partie intégrante d’un modèle économique plus durable à la fois du point de vue des ressources et de l’environnement.</p>
<p>Comme le rappellent sans cesse les spécialistes des sciences de l’environnement, le recyclage n’est toutefois qu’une petite partie de la solution et sa maximisation est complexe, difficile et parfois incompatible avec d’autres leviers de l’économie circulaire. La recherche a donc encore du travail pour mieux comprendre comment dénouer ces contraintes et proposer de nouveaux modèles plus soutenables.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/192573/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Florian Fizaine ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La « mine urbaine » semble à première vue un eldorado afin de récupérer et réutiliser les métaux. Mais les obstacles à sa mise en œuvre demeurent nombreux.Florian Fizaine, Maître de conférences en sciences économiques, Université Savoie Mont BlancLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1900802022-10-10T19:00:55Z2022-10-10T19:00:55ZBatteries électriques : une meilleure traçabilité pour un lithium plus durable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/484039/original/file-20220912-6429-j1xjtu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=9%2C10%2C1192%2C786&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des tas de sels contenant du lithium, dans le salar d'Uyuni en Bolivie.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/tomab/4147784984/in/photolist-7jwtYd-S98sqr-T9d6F1-T9d6sf-To1b28-TjpQFb-S98uBv-S98sbt-S98shk-mStdaa-mSscCT-mSse7H-8S4TfB-mSydxz-mSrWoH-mSy5gK-mSs7F6-mSs13B-mSxavM-mSsAL6-mSzEYj-mSt2in-mSu3aj-mSxHTa-mReVUh-mSvurq-nbRvRV-nt4nTe-mRdCBH-mSrSYD-mR7FgJ-mR9fKA-mR7mic-mRdx7p-mR5Rbi-mRd2yM-mReZeJ-mR5Vur-mRdsjZ-cpGbH9-mRfsX9-mR6D4Z-mRbtS3-mR85cy-mRduxB-mR8S5q-mRdFZ6-mR8xJg-mRaavB-mR68JM">TomaB/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span></figcaption></figure><p>On aime bien savoir d’où viennent les produits que l’on consomme, preuve en est l’AOC de tel fromage ou vin, l’étiquetage de la provenance des fruits et légumes, l’affichage des conditions équitables de production de telle tablette de chocolat ou du café. Mais alors que l’impact environnemental et social associé à nos appareils électroniques entre de plus en plus dans les consciences (pénurie d’eau, bilan carbone, conditions de travail, respect des peuples indigènes, etc.), on ne peut pas encore savoir d’où vient le lithium, un des éléments les plus problématiques dans les batteries actuellement, et donc s’assurer de son origine.</p>
<p>Nous proposons une approche géochimique qui établit une « empreinte digitale » du lithium afin de tracer le lithium de nos batteries et, potentiellement, d’offrir des garanties pour une extraction socialement et environnementalement durable.</p>
<h2>Le lithium, nouvel « or blanc »</h2>
<p>Le lithium a un rôle clé dans les batteries rechargeables des appareils électroniques portables (tablettes et téléphones), des moyens de transport électriques (véhicules hybrides et électriques, scooters et vélos électriques) et pour les technologies stationnaires de stockage d’énergie, indispensables pour le développement des énergies renouvelables intermittentes.</p>
<p>En d’autres termes, les « sels de lithium » sont actuellement une des clés de voûte à la transition énergétique décarbonée.</p>
<p>Les tonnages de lithium nécessaires à la fabrication des batteries au lithium devraient dépasser <a href="https://www.mineralinfo.fr/fr/ecomine/marche-du-lithium-2020-enjeux-paradoxes">100 kilotonnes en 2025</a>, notamment car l’électrification des transports, encouragée ou imposée par différent pays de l’Union européenne, va considérablement augmenter le besoin en lithium dans les prochaines années.</p>
<p>Avec la demande croissante en lithium, les impacts environnementaux et sociaux liés à l’exploitation minière vont augmenter, ainsi que les attentes des consommateurs en termes de garanties sur l’origine du lithium et des efforts déployés pour réduire son impact environnemental et social.</p>
<h2>D’où vient le lithium ?</h2>
<p>À l’heure actuelle, seuls <a href="https://www.mineralinfo.fr/fr/ecomine/marche-du-lithium-2020-enjeux-paradoxes">deux types de gisements</a> sont à l’origine de l’essentiel de la production mondiale en lithium. Il s’agit de gisements de lithium sous la forme de roches dures, par exemple les pegmatites à spodumène (Australie, Canada, Chine) et des saumures des salars sud-américains du « triangle du lithium » (Bolivie, Argentine, Chili) et de Chine.</p>
<p>En Argentine, les communautés indigènes signalent déjà que l’exploitation du lithium sur leurs terres menace <a href="https://www.amnesty.org/fr/latest/press-release/2019/03/amnesty-challenges-industry-leaders-to-clean-up-their-batteries/">leur survie et l’exercice de leurs droits ancestraux</a>.</p>
<p>Au Zimbabwe, où l’exploitation du lithium est actuellement faible, des <a href="https://www.business-humanrights.org/fr/derni%C3%A8res-actualit%C3%A9s/investigating-illicit-financial-flows-in-zimbabwes-lithium-mining-sector/">flux financiers illicites</a> ont déjà été identifiés par certaines ONGs dans le secteur de l’extraction du lithium.</p>
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<p>Ces deux sources de lithium présentent aussi des impacts environnementaux différents. Ainsi, l’exploitation des saumures de lithium consomme de grandes quantités d’eau par évaporation et provoque un <a href="https://www.nature.com/articles/s43247-020-00080-9">risque de pénurie d’eau douce</a> pour les populations et les écosystèmes locaux dans des zones déjà très arides. De son côté, l’impact environnemental de l’exploitation du lithium à partir des roches dures est dominé par un traitement à l’acide sulfurique et par un procédé qui passe par la fracturation mécanique et le traitement thermique du minerai donc plus énergivore que celui de la filière salar. Ainsi, pour la filière roches dures l’impact est plus élevé en termes de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32250776/">réchauffement climatique (émission de CO₂) et d’acidification</a> que pour la filière salar.</p>
<p>À titre d’exemple, les sels de lithium issus des spodumènes australiens qui sont ensuite extraits et purifiés en Chine possèdent un <a href="https://www.jadecove.com/research/liohco2impact">bilan carbone trois fois plus élevé</a> que ceux produits à partir des salars du Chili et d’Argentine.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un échantillon de spodumène de 12,5 centimètres à Itagassu, Espirito Santo, Brésil.</span>
<span class="attribution"><span class="source">BRGM, Urbain de Cayeux</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une chaîne d’approvisionnement complexe</h2>
<p>La chaîne d’approvisionnement pour la fabrication des batteries est complexe et divisée en de nombreuses étapes, généralement réalisées dans des lieux et des pays différents : l’exploitation minière, la métallurgie d’extraction et de purification, la synthèse des matières actives de la cathode, la fabrication des éléments de la batterie et l’assemblage des packs de batteries.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=119&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=119&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=119&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=150&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=150&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=150&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La chaîne d’approvisionnement pour la fabrication des batteries.</span>
<span class="attribution"><span class="source">BRGM, Desaulty</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>De plus, un fabricant de batteries peut avoir plusieurs sources d’approvisionnement et différents lots de production d’un même modèle de voiture électrique peuvent par exemple contenir des lithiums d’origines très diverses.</p>
<p>En raison de la complexité de cette chaîne d’approvisionnement, il est difficile pour les utilisateurs finaux de s’assurer que le lithium est issu d’une filière d’approvisionnement responsable et durable.</p>
<h2>Les « empreintes digitales » du lithium</h2>
<p>Pour aider à contrôler et à certifier l’origine et le commerce de la production de lithium, nous proposons une méthode analytique, basée sur l’analyse isotopique du lithium.</p>
<p>En effet, le lithium possède deux isotopes stables (les isotopes sont des variantes du même élément, qui se distinguent par leur masse, pour le lithium il s’agit de <sup>6</sup>Li et <sup>7</sup>Li), que l’on retrouve tous les deux dans les échantillons de lithium, mais leur proportion varie en fonction du minerai, et en particulier des conditions physico-chimiques de formation.</p>
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<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/relocaliser-lextraction-des-ressources-minerales-en-europe-les-defis-du-lithium-138581">Relocaliser l’extraction des ressources minérales : en Europe, les défis du lithium</a>
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</em>
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<p>Cette signature isotopique représente une « empreinte digitale » du lithium. Par exemple, le lithium provenant de saumure contient proportionnellement plus de <sup>7</sup>Li (le nom d’un des deux isotopes) que celui des gisements de type roches dures.</p>
<h2>Traçabilité géochimique du lithium ?</h2>
<p>Cette « empreinte digitale » est en fait, dans la plupart des cas, conservée jusqu’au lithium des batteries qui se trouvent dans nos voitures et nos téléphones. En d’autres termes, en analysant nos batteries, nous pouvons savoir d’où provient le lithium qui la compose grâce à une analyse isotopique.</p>
<p>En effet, nous avons montré dans une étude récente publiée dans <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-022-31850-y"><em>Nature Communications</em></a> que si certains procédés d’extraction et de purification avaient tendance à augmenter le contenu relatif du <sup>7</sup>Li par rapport à la signature isotopique naturelle, les autres étapes de fabrication des batteries ne modifient pas la signature isotopique. Il est ainsi possible de déterminer si le lithium provient d’un gisement de type saumure ou roche dure.</p>
<p>Pour une détermination plus fine de la provenance, le développement d’une base de données regroupant notamment les valeurs des rapports isotopiques des sels de lithium disponibles sur le marché sera nécessaire. La plus grande limite de cette approche sera les chevauchements des signatures pour des produits provenant de différents sites ou producteurs de sel.</p>
<h2>Vers la certification d’une filière d’approvisionnement en lithium responsable et durable</h2>
<p>Dans le contexte de volonté politique de réindustrialiser la production de batteries en Europe, et de défense de filière de production des batteries durables et responsables, avoir les moyens de certifier le lithium est important.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=214&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=214&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=214&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=269&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=269&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=269&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La chaîne de certification proposée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">BRGM, Desaulty</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le principe de cette méthode analytique est le même que celui développé pour la <a href="https://www.brgm.fr/fr/actualite/video/tao-tracabilite-analytique-or-guyane">traçabilité de l’or</a>, et du <a href="https://www.bgr.bund.de/EN/Themen/Min_rohstoffe/Rohstoff_forsch/LF_Herkunftrsnachweis_COLTAN_Newsletter01-2010.html">coltan</a>, qui permet de vérifier si le produit correspond à son origine déclarée en comparant l’échantillon en question à des échantillons de référence d’origine connue stockés dans une base de données.</p>
<p>L’aspect crucial pour le lithium sera le développement de la base de données de référence contenant les signatures isotopiques complètes et actualisées des différents produits disponibles sur le marché. Cette base de données devra être incrémentée au fur et à mesure de l’exploitation de nouveaux gisements ou du développement de nouveaux procédés d’extraction et de purification. Pour ce faire, il sera nécessaire de collaborer avec les miniers et producteurs de sels de lithium pour évaluer la signature de leurs produits. Cette collaboration entre la recherche publique et les différents acteurs de la filière est une condition sine qua non pour le développement d’une filière d’approvisionnement en lithium responsable et durable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190080/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une nouvelle méthode pour tracer le lithium de nos batteries électriques et encourager une gestion plus durable des ressources minérales.Anne-Marie Desaulty, Chercheur en géochimie isotopique, BRGM, BRGMCatherine Guerrot, PhD Géochimie isotopique et géochronologie, BRGMDaniel Monfort Climent, Ingénieur géologue, ressources minérales et économie circulaire, BRGMGaetan Lefebvre, Chercheur, BRGMSébastien Perret, Technicien en analyses isotopiques, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1837692022-08-30T12:46:01Z2022-08-30T12:46:01ZProduction locale d’équipements de protection : la solution pour éviter les pénuries futures ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/467761/original/file-20220608-219-8pvfva.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C0%2C983%2C667&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La production des EPI se concentre en Asie, surtout en Chine, qui répondait à 50% de la demande au moment où la pandémie s’est amorcée en 2020.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Pendant les premiers mois de la pandémie de Covid-19, l’approvisionnement en équipements de protection (masques, gants, visières, blouses) a été une tâche ardue pour presque tous les réseaux de la santé des pays industrialisés. Les <a href="https://www.franceinter.fr/emissions/secrets-d-info/secrets-d-info-19-septembre-2020">pénuries</a> se sont multipliées partout sur la planète. Dans cette course contre la montre, tous se sont arrachés les produits provenant des mêmes fournisseurs, <a href="https://cpp.hec.ca/wp-content/uploads/2021/04/PP-2020-03.pdf">surtout localisés en Asie</a>. Ces produits n’étaient, par ailleurs, <a href="https://www.lapresse.ca/covid-19/2020-03-29/le-canada-verifiera-la-qualite-des-masques-chinois">pas toujours de grande qualité, quand ils ne sont pas carrément défectueux</a>.</p>
<p>Dans la foulée, des manufacturiers locaux, œuvrant dans d’autres secteurs d’activités comme le textile, pour la fabrication de blouses, ou le pharmaceutique, pour le gel désinfectant, ont investi dans la <a href="https://cpp.hec.ca/wp-content/uploads/2021/06/PP-2020-03_2.pdf">production des équipements de protection individuelle (EPI)</a>. Cependant, plusieurs de ces manufacturiers n’ont pas pu soutenir cette production, faute de contrats d’achat, d’accès aux matières premières ou encore en raison d’une capacité limitée à <a href="https://www.ledevoir.com/economie/598946/60-moins-de-blouses-medicales-a-coudre-que-prevu-par-ottawa">répondre à la demande de différents clients</a></p>
<p>Et si la solution pour éviter une telle situation lors d’une prochaine crise était justement de développer dès maintenant une production locale ?</p>
<p>Nous nous intéressons depuis plusieurs années à la gestion des achats et de l’approvisionnement dans le secteur de la santé. Les immenses défis vécus au début de la pandémie pour l’achat des EPI nous ont motivés a étudier en profondeur la résilience de la chaîne logistique de ces équipements. L’une des solutions que nous explorons dans nos travaux de recherche est justement l’approvisionnement local.</p>
<h2>Les avantages de la production locale</h2>
<p>Les EPI sont achetés par multiples organisations, notamment dans le secteur de la santé (hôpitaux, cliniques). Ces équipements sont achetés auprès des fournisseurs, qui les produisent ou qui distribuent des produits d’autres manufacturiers.</p>
<p>Lorsqu’on parle d’approvisionnement local, on peut faire référence à des distributeurs locaux, qui achètent à des usines situées à l’étranger, ou encore à des manufacturiers locaux. Dans nos recherches, nous nous intéressons surtout à la production locale, bien que les distributeurs locaux contribuent également à l’économie locale et à la résilience de la chaîne logistique. Une fois achetés, les EPI sont distribués à l’intérieur des organisations à tous les utilisateurs qui ont en besoin.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/467747/original/file-20220608-12-h3o7rg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="schéma illustrant les fournisseurs, producteurs, acheteurs" src="https://images.theconversation.com/files/467747/original/file-20220608-12-h3o7rg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/467747/original/file-20220608-12-h3o7rg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=163&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/467747/original/file-20220608-12-h3o7rg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=163&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/467747/original/file-20220608-12-h3o7rg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=163&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/467747/original/file-20220608-12-h3o7rg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=205&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/467747/original/file-20220608-12-h3o7rg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=205&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/467747/original/file-20220608-12-h3o7rg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=205&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Différents joueurs sont impliqués dans la chaîne logistique des EPI.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Martin Beaulieu)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>La production locale contribue principalement à <a href="https://doi.org/10.1108/IJPDLM-01-2021-0019">sécuriser l’approvisionnement</a>. Elle permet également de diminuer les risques et les coûts logistiques associés à l’approvisionnement à l’international, qui ont été <a href="https://doi.org/10.1108/00070701211252048">exacerbés par la pandémie</a>. La congestion dans les ports, la pénurie des conteneurs et de main-d’œuvre et les prix élevés du carburant sont en effet parmi les écueils que l’on doit contourner afin de faire parvenir des biens provenant de régions éloignées.</p>
<p>L’approvisionnement local permet également de réduire les effets néfastes du transport de marchandises pour l’environnement et facilite la gestion des fournisseurs par les organisations acheteuses. Ainsi, la proximité géographique permet un contrôle plus strict, de la part des acheteurs, des conditions des travailleurs afin d’éviter, par exemple, les manufacturiers qui sont soupçonnés <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/2022-05-21/la-presse-en-malaisie/le-cout-humain-des-gants-a-bas-prix.php">d’avoir recours au travail forcé</a>. La proximité des organisations acheteuses avec les manufacturiers favorise également le développement conjoint de produits qui correspondent mieux aux besoins des utilisateurs et aux critères de développement durable.</p>
<h2>Une production locale ? Oui, mais…</h2>
<p>Mais l’approvisionnement local des EPI n’est pas une mince tâche. Avant la pandémie, il y avait très peu de producteurs locaux. La production des EPI se concentre en Asie, surtout en Chine, qui répondait à la moitié de la demande <a href="https://www.business-standard.com/article/current-affairs/global-annual-spend-on-ppe-can-hit-50-80bn-china-key-player-jefferies-120063000576_1.html">au moment où la pandémie s’est amorcée en 2020</a>. La raison de cette domination asiatique ? La prépondérance du plus bas prix comme critère d’achat dans les appels d’offres, et ce, <a href="https://www.usitc.gov/publications/332/journals/final_china_and_medtech_gvc_jice_508_compliant.pdf">depuis de très nombreuses années</a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/rb0cjtWDwlA?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">En 2020, face à une pénurie, la France a dû se tourner vers la Chine pour lui fournir des masques.</span></figcaption>
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<p>Pour que la production locale soit viable, il est nécessaire que le critère de localisation puisse être tenu en compte lors de la sélection des fournisseurs par les acheteurs. Une autre option est de réserver une partie des contrats à des fournisseurs locaux. On devrait cependant s’assurer que la production locale reste compétitive.</p>
<p>En effet, des prix trop élevés en comparaison à des producteurs étrangers seraient difficilement durables à long terme, dans l’optique où des options nettement plus économiques seraient disponibles. Des investissements en technologies de production et en automatisation peuvent aider à ce que la production locale dépende moins de la main-d’œuvre bon marché pour être compétitive.</p>
<p>De plus, dans le cas du Québec, où le marché local est relativement modeste, le défi demeure de maintenir une industrie locale forte, avec un nombre de joueurs suffisant pour garantir une saine concurrence. Les entretiens que nous avons réalisés avec des producteurs locaux révèlent qu’ils ne souhaitent pas des subventions pour maintenir la production des EPI, mais une demande prévisible par des contrats d’approvisionnement.</p>
<p>En effet, l’aide ponctuelle du gouvernement à travers de subventions ne garantit pas que les manufacturiers puissent trouver des clients pour leurs produits et ainsi survivre après que la subvention s’épuise. En revanche, la possibilité d’obtenir des contrats d’achat à long terme permettrait aux producteurs de soutenir leurs activités dans le temps.</p>
<h2>Une production locale, mais surtout verte et équitable</h2>
<p>Lorsqu’on parle de production locale, il faut aussi se poser la question de l’origine des intrants (matières premières, emballages). Si les intrants clés viennent tous de l’étranger, la production locale sera trop vulnérable aux effets d’une pandémie ou d’une autre crise mondiale.</p>
<p>Les tissus utilisés pour la fabrication des masques, par exemple, ont été très convoités pendant le début de la pandémie. Naturellement, un manufacturier local devrait arrêter sa production, faute des stocks de tissus. L’origine des intrants devrait ainsi faire partie des critères de sélection des fournisseurs.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/o-LuIxmaO0s?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">En août 2020, le gouvernement canadien annonçait la fabrication de masques N95 en Ontario.</span></figcaption>
</figure>
<p>La décision d’achat des organisations devrait aussi tenir compte de l’impact environnemental des EPI. Par exemple, les EPI biodégradables et réutilisables, bien que plus dispendieux, pourraient devenir intéressants lors d’appels d’offres, dans l’optique où l’on considère des critères environnementaux. Les gouvernements commencent déjà à modifier leur critères d’achat pour <a href="https://www.ledevoir.com/economie/669771/projet-de-loi-12-les-pme-d-ici-d-abord">favoriser les achats locaux responsables</a>.</p>
<h2>Une partie de la solution</h2>
<p>Il serait cependant naïf de croire que seule la production locale pourrait assurer l’approvisionnement des EPI lors de la prochaine pandémie. Depuis le début de l’actuelle pandémie, la prévision de la demande en EPI est un défi constant. Bien malin est celui qui peut prévoir l’ampleur et l’impact de la prochaine crise sanitaire sur les besoins en EPI.</p>
<p>Les fournisseurs locaux ne pourront jamais répondre à une augmentation subite de la demande, telle que celle qui a été observée au début de l’année 2020, ni aux variations successives et abruptes de la demande associées aux changements dans les consignes sanitaires.</p>
<p>Il faudra donc (1) conserver des réserves à différents niveaux (national, local, institutionnel) de produits finis et de matières premières, (2) maintenir de bonnes relations avec des fournisseurs étrangers capables de supporter des variations significatives de la demande et (3) compter sur un système logistique assez performant pour pouvoir anticiper et répondre rapidement aux <a href="https://cpp.hec.ca/wp-content/uploads/2021/04/PP-2020-03.pdf">besoins en EPI de la prochaine pandémie</a>.</p>
<p>Mais une production locale, plus verte et équitable, fait sans doute partie de la solution.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/183769/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Claudia Rebolledo a reçu des financements de CRSH</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Martin Beaulieu ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Est-ce que la production locale des équipements de protection individuelle (EPI) représente la solution miracle pour assurer l’approvisionnement en EPI lors de la prochaine pandémie ?Claudia Rebolledo, Professeure en gestion de l'approvisionnement, HEC MontréalMartin Beaulieu, Chercheur associé, HEC MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1832502022-05-18T18:08:50Z2022-05-18T18:08:50ZMoyen-Orient et Afrique du Nord : la fragilité des États limite les investissements étrangers<p>À l’horizon 2030, la Banque mondiale prévoit que <a href="https://documents1.worldbank.org/curated/en/461291612960159930/pdf/World-Bank-Group-Strategy-for-Fragility-Conflict-and-Violence-2020-2025.pdf">deux tiers des personnes en situation d’extrême pauvreté</a> dans le monde vivront dans des États fragiles et/ou touchés par des conflits. La pandémie mondiale de Covid-19 n’a fait qu’exacerber cette fragilité et ses conséquences ont été nombreuses : l’augmentation de la pauvreté en particulier chez les enfants, la dégradation du système éducatif et de la protection sociale, les changements climatique et démographique, la montée dramatique des conflits violents, ainsi que la plus grande crise de déplacements forcés jamais enregistrée.</p>
<p>Les situations de fragilité touchent plusieurs pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA) où <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/sites/b462aac8-fr/index.html?itemId=/content/component/b462aac8-fr">quatre personnes sur dix vivent dans des États fragiles</a> secoués par des crises économiques, géopolitiques et sociétales. Deux États de cette région, à savoir le Yémen et la Syrie, figurent même parmi les trois États jugés comme les plus fragiles au monde, alors que d’autres tels que Djibouti, l’Égypte, le Liban, la Libye, l’Iran ou encore l’Irak, sont en état d’alerte élevée concernant leur niveau de fragilité selon le dernier classement basé sur <a href="https://fragilestatesindex.org/">l’Indice des États fragiles de 2021</a> (<em>Fragile States Index)</em> publié par le think tank américain <em>Fund for Peace</em>.</p>
<p><iframe id="pvN2s" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/pvN2s/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p><a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/cjas.1658">L’étude empirique</a> que nous avons menée auprès de dix-sept pays de la région MENA durant la période 2002-2018, récemment publiée dans la Revue canadienne des sciences de l’administration, confirme le fait que la fragilité décourage les investisseurs. Des éléments contextuels caractéristiques de la région contribuent également à renforcer cet effet négatif que peut avoir la fragilité sur l’attractivité des investissements étrangers.</p>
<h2>Une fragilité multidimensionnelle</h2>
<p>Il n’existe pas de définition précise associée au concept d’<a href="https://blogs.worldbank.org/fr/voices/qu-est-ce-qu-un-etat-fragile">« États fragiles »</a> appelés aussi défaillants. Ce dernier a vu le jour dans un contexte à la fois sécuritaire, marqué par les attentats terroristes du 11 septembre 2001, et économique, avec les politiques de développement préconisées par des organisations intergouvernementales à l’égard des pays politiquement instables et en situation d’extrême pauvreté.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-terrorisme-un-frein-aux-investissements-etrangers-en-afrique-du-nord-et-au-moyen-orient-180798">Le terrorisme, un frein aux investissements étrangers en Afrique du Nord et au Moyen-Orient</a>
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<p>Sur le plan sécuritaire, les États les plus fragiles sont des pays en situation de conflit violent ou de guerre civile dans lesquels l’État n’est plus en mesure d’assurer le contrôle de son territoire et de fournir les services de base à sa population. Sur le plan économique, la fragilité des États renvoie à des économies prises dans une « trappe à pauvreté ». Prises ensemble, la dimension sécuritaire et la dimension économique de la fragilité donnent naissance à l’une des catégories d’États fragiles les plus connues, à savoir les <a href="https://documents1.worldbank.org/curated/ar/329261468782159006/pdf/269030PAPER0WB0Licus0Task0force0report.pdf">« pays à faible revenu en difficulté »</a> (<em>low-income countries under stress</em>, LICUS) introduite par la Banque mondiale en 2002, et qui renvoie aujourd’hui à des <a href="https://www.banquemondiale.org/fr/topic/fragilityconflictviolence/overview">pays en situation de fragilité, conflit et violence</a> (<em>fragility, conflit and violence (FCV) settings</em>).</p>
<p>Par-delà cette approche très institutionnelle, la fragilité de l’État est désormais définie par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans un <a href="https://www.oecd.org/fr/publications/etats-de-fragilite-261b19f4-fr.htm">cadre multidimensionnel</a> comme « la conjonction d’une exposition à des risques et d’une capacité insuffisante de l’État, d’un système ou d’une communauté à gérer, absorber ou atténuer ces risques. La fragilité peut avoir des conséquences dommageables comme la violence, la déliquescence des institutions, des déplacements de personnes, des crises humanitaires ou d’autres situations d’urgence ».</p>
<p>On peut ainsi identifier cinq dimensions principales de la fragilité : </p>
<ul>
<li><p>la dimension économique : vulnérabilité de l’État face aux risques induits par les chocs macroéconomiques</p></li>
<li><p>politique : risques provenant de décisions politiques liées à la corruption ou à l’instabilité du régime politique</p></li>
<li><p>sécuritaire : vulnérabilité de l’État face au risque de terrorisme et de criminalité organisée</p></li>
<li><p>sociétale : risques induits par les inégalités sociales</p></li>
<li><p>environnementale : vulnérabilité de l’État face aux risques environnementaux, climatiques et sanitaires.</p></li>
</ul>
<p>La fragilité de l’État est souvent mesurée par des indices composites, tels que <a href="https://fragilestatesindex.org/">l’indice des États fragiles</a> (<em>Fragile States Index</em>, FSI), les <a href="http://info.worldbank.org/governance/wgi/">indicateurs de gouvernance mondiale</a> (<em>World Governance Indicators</em>, WGI) de la Banque mondiale ou <a href="https://www.systemicpeace.org/inscrdata.html">l’indice de fragilité de l’État</a> (<em>State Fragility Index</em>, SFI) du <em>Center for Systemic Peace</em>, même si ces indicateurs ne couvrent pas toujours les différentes dimensions de la fragilité que nous venons d’évoquer.</p>
<h2>« Malédiction des ressources »</h2>
<p>Les pays de la région MENA, <a href="https://theconversation.com/le-terrorisme-un-frein-aux-investissements-etrangers-en-afrique-du-nord-et-au-moyen-orient-180798">déjà impactés par les conséquences des attentats terroristes du 11 septembre 2001</a>, ont vu leur instabilité institutionnelle se dégrader encore davantage à la suite des événements du <a href="https://theconversation.com/printemps-arabes-le-capitalisme-de-connivence-a-coute-cher-aux-grandes-entreprises-familiales-158649">« printemps arabe »</a>, dix ans plus tard. Le changement de régime politique dans certains pays de la région, l’escalade de conflits violents dans d’autres couplés à la baisse des <a href="https://theconversation.com/moyen-orient-cours-du-petrole-et-dette-souveraine-56249">prix du pétrole</a>, ont contribué à diminuer la confiance des investisseurs et, par conséquent, ont réduit fortement l’attractivité de ces localisations.</p>
<p>Dans un tel contexte, les entreprises ont tendance à choisir une localisation qui leur fournit un environnement stable leur permettant d’exploiter les avantages offerts par le pays d’accueil, d’accroître leur efficience et de réduire leurs coûts de production.</p>
<p>Toutefois, certains éléments contextuels laissent penser que la fragilité et l’instabilité politique ne découragent pas nécessairement tous les investissements, en particulier ceux qui concernent les matières premières. En effet, la présence de ressources naturelles dans ces pays aurait tendance à réduire l’impact négatif de la fragilité sur les investissements directs à l’étranger (IDE).</p>
<p>Cependant, les résultats de notre étude, citée ci-dessus, révèlent le contraire. La présence de matières premières, notamment les réserves de pétrole et de gaz naturel dans les pays du Golfe persique, semble plutôt vécue comme une contrainte liée à « la malédiction des ressources » que certains pays MENA ont pu connaître lorsque les rentes exceptionnelles tirées de la production et de l’exportation de pétrole ont provoqué des conflits et contribué à nuire à la diversification des activités économiques et au développement des autres secteurs d’activité.</p>
<p>De même, nous avons pu observer que le faible niveau de gouvernance démocratique dans ces pays contribue à renforcer cet impact négatif dans une région toujours aussi largement dominée par des régimes autocratiques. Cela tient au fait que l’absence d’institutions démocratiques garantissant la protection des libertés civiles et politiques rend plus probable l’expropriation des investissements étrangers par les élites politiques locales.</p>
<p>Pour conclure, les dirigeants d’entreprises devraient davantage prendre en considération la fragilité de l’État parmi les facteurs qui concourent à leur choix de localisation, en particulier dans la région MENA. Parallèlement, les gouvernements devraient s’attacher tout particulièrement à mettre en place des politiques et réformes nécessaires pour asseoir une stabilité politique, sociale et économique afin de rassurer et d’attirer des investisseurs étrangers.</p>
<p>Ils devraient d’autant plus le faire dans une période où le risque sécuritaire sera important dans les années à venir comme en témoigne Robert Greenway, directeur de l’Abraham Accords Peace Institute, qui fait remarquer que <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/monde/proche-moyen-orient/robert-greenway-le-moyen-orient-va-traverser-la-periode-la-plus-eprouvante-de-son-histoire_2173395.html">« Le Moyen-Orient va traverser la période la plus éprouvante de son histoire »</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/183250/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le faible cadre démocratique garantissant la protection des libertés rend notamment plus probable l’expropriation des investissements étrangers par les élites politiques locales.Dora Triki, Professeur associé en management international, ESCE International Business SchoolAlfredo Valentino, Associate Professor, ESCE International Business SchoolAnna Dimitrova, Professeur associé en Affaires internationales, ESSCA School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1819032022-05-05T19:02:17Z2022-05-05T19:02:17ZLa géographie de la malédiction des ressources naturelles vue du ciel brésilien<p>L’augmentation actuelle du prix de l’énergie se fait durement sentir en Europe et plus généralement dans les pays importateurs d’hydrocarbures. Cependant, nos importations sont aussi les exportations des pays producteurs, qui devraient a priori bénéficier de l’augmentation du prix de leurs exportations. L’augmentation du prix des hydrocarbures est-elle pour autant une bonne nouvelle pour eux ?</p>
<p>Étonnamment, les travaux empiriques menés depuis bientôt une trentaine d’années incitent à une réponse prudente. À l’échelle macroéconomique, on a observé que les pays exportateurs de ressources naturelles <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0014292101001258">croissaient moins rapidement</a> que les autres. On a ainsi commencé à parler d’une malédiction des ressources naturelles.</p>
<p>Paradoxalement, les pays producteurs de ressources naturelles jouissent également d’un <a href="https://direct.mit.edu/rest/article/91/3/586/57795/The-Elusive-Curse-of-Oil">revenu par habitant plus élevé</a>. De plus, si on passe de comparaisons entre pays à des comparaisons de régions d’un même pays ou d’un continent, on observe que celles qui exploitent des ressources naturelles ne s’en portent que mieux. C’est en tout cas ce qu’on a observé aux <a href="https://academic.oup.com/restud/article/85/2/695/4055596?login=true">États-Unis</a>, au <a href="https://www.aeaweb.org/articles?id=10.1257/pol.5.2.1">Pérou</a> ou en <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0304387818303936">Afrique sub-saharienne</a>. On observe donc un paradoxe entre des résultats ambigus à l’échelle macroéconomique et des résultats concordants et optimistes à l’échelle régionale.</p>
<p>Pour le résoudre, il faut être capable d’observer finement l’effet des ressources naturelles à l’intérieur d’un pays. C’est ce que fait <a href="https://www.journals.uchicago.edu/doi/pdf/10.1086/718554">notre étude (à paraître)</a> consacrée au Brésil.</p>
<h2>L’œil des satellites</h2>
<p>Le Brésil constitue un cas d’école parce qu’il produit du pétrole et du gaz, mais dans des quantités trop faibles pour influencer leurs cours mondiaux. De plus, le pays a adopté un mécanisme de partage automatique des bénéfices du pétrole et du gaz entre ses communes en fonction de la présence de puits sur leur territoire ou à proximité de leurs côtes et du passage d’oléo – et de gazoducs.</p>
<p>On peut donc estimer l’effet du prix des hydrocarbures sur les communes brésiliennes sans que l’estimation soit contaminée par un effet en retour. On peut en outre nettement distinguer l’effet du prix des hydrocarbures sur les communes productrices et sur les autres, puisque les revenus des unes et des autres sont précisément déterminés par le mécanisme automatique de partage.</p>
<p>Il faut toutefois relever un défi de taille : mesurer l’activité économique à l’échelle des communes. Or, les données de PIB municipal sont inutilisables parce qu’elles sont déduites de la production d’hydrocarbure et mèneraient donc à une estimation tautologique. La solution est venue de la NASA et des données du Defense Meteorological Satellite Program Operational Linescan System (DMSP-OLS) qui recense les émissions lumineuses de nuit captées par satellite depuis 1992.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/460939/original/file-20220503-11804-xaebpr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/460939/original/file-20220503-11804-xaebpr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/460939/original/file-20220503-11804-xaebpr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/460939/original/file-20220503-11804-xaebpr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/460939/original/file-20220503-11804-xaebpr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/460939/original/file-20220503-11804-xaebpr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/460939/original/file-20220503-11804-xaebpr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/460939/original/file-20220503-11804-xaebpr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les émissions lumineuses du Brésil captées par satellite en 1992.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ncei.noaa.gov/">Auteurs à partir des données du National Oceanic and Atmospheric Administration</a></span>
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<span class="caption">Les émissions lumineuses du Brésil captées par satellite en 2001.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ncei.noaa.gov/">Auteurs à partir des données du National Oceanic and Atmospheric Administration</a></span>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/460941/original/file-20220503-23-yf76tq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/460941/original/file-20220503-23-yf76tq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/460941/original/file-20220503-23-yf76tq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/460941/original/file-20220503-23-yf76tq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/460941/original/file-20220503-23-yf76tq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/460941/original/file-20220503-23-yf76tq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/460941/original/file-20220503-23-yf76tq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/460941/original/file-20220503-23-yf76tq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les émissions lumineuses du Brésil captées par satellite en 2013.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ncei.noaa.gov/">Auteurs à partir des données du National Oceanic and Atmospheric Administration</a></span>
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<p>Un ensemble de <a href="https://www.aeaweb.org/articles?id=10.1257/aer.102.2.994">travaux</a> <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0921800905001254">menés</a> depuis une quinzaine d’années montre que l’intensité des émissions lumineuses de nuit fournit une approximation raisonnable de l’activité économique. Comme les satellites mesurent ces émissions avec une précision d’environ un kilomètre carré, on peut les agréger pour calculer les émissions lumineuses des communes.</p>
<p>Un autre avantage des émissions lumineuses est qu’elles réagissent à l’activité, quelle qu’elle soit. En particulier, elle ne se restreint pas aux activités officiellement enregistrées mais inclut également l’économie informelle ou souterraine, qui échappe aux statistiques officielles mais représente pourtant une activité. Il ne reste donc plus qu’à étudier la relation entre les recettes d’hydrocarbures perçues par les municipalités et leurs émissions lumineuses.</p>
<h2>Attention aux voisins</h2>
<p>Comme l’objet de l’étude est de mesurer l’effet du prix des hydrocarbures non seulement sur les communes productrices mais surtout sur les autres, on passerait à côté de l’information pertinente en étudiant simplement la corrélation entre les revenus issus des hydrocarbures d’une commune et ses émissions lumineuses.</p>
<p>Un recours à l’économétrie spatiale, un ensemble de méthodes statistiques qui permettent de relier les émissions lumineuses d’une commune à celle de ses voisines, permet d’estimer comment les revenus d’une commune affectent sa propre activité mais aussi celle des communes environnantes, ce qui permet de mesurer les effets de débordement d’une commune sur les autres.</p>
<p>Les résultats confirment que les communes productrices de pétrole profitent de leurs ressources naturelles : elles émettent davantage de lumière lorsque le prix des hydrocarbures augmente. Plus précisément, selon nos estimations, une augmentation de 10 % des revenus issus des hydrocarbures augmente l’activité mesurée par les émissions lumineuses de 1,4 %.</p>
<p>En revanche, l’activité des communes situées dans un rayon de 150 kilomètres autour des communes productrices se ralentit. Toujours selon nos estimations, la diminution de l’activité provoquée par l’augmentation des revenus des communes voisines est comparable à ce que gagnerait la commune si ses revenus augmentaient du même montant. On observe le même phénomène lorsqu’on étudie l’évolution des salaires.</p>
<h2>Le tour des régions</h2>
<p>Une autre façon d’observer les effets de débordement consiste à travailler à l’échelle régionale en agrégeant les revenus d’hydrocarbures et les émissions lumineuses. L’effet qu’on observe alors est la somme des effets directs des revenus d’hydrocarbures sur les communes productrices et des effets de débordement qu’elles imposent à leurs voisines et que leurs voisines leur imposent.</p>
<p>Lorsqu’on procède de cette façon, on n’observe plus de relation entre revenus d’hydrocarbures et activité. Le bonheur des unes a fait le malheur des autres et les deux effets se compensent à l’échelle régionale.</p>
<p>Une hypothèse permettant d’expliquer ce résultat est que, pour se développer, les communes productrices attirent des travailleurs et des capitaux aux dépens de leurs voisines. En se développant grâce aux hydrocarbures, elles priveraient donc les autres des ressources nécessaires à leur propre développement.</p>
<p>Les résultats de l’étude soulignent la dimension géographique de l’effet de l’exploitation des ressources naturelles sur l’activité. Ce qui est une bénédiction pour les communes productrices peut être une malédiction pour leurs voisines, au risque d’accroître les inégalités régionales et de provoquer des tensions politiques. Pour être équitable et politiquement soutenable, l’exploitation de ressources naturelles devrait donc s’accompagner d’un mécanisme de partage de leurs bénéfices et d’une politique d’aménagement du territoire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181903/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une étude à partir des données de la NASA montre un ralentissement de l’activité économique dans les communes brésiliennes situées à proximité des sites gaziers et pétroliers.Pierre-Guillaume Méon, Professor of economics, Université Libre de Bruxelles (ULB)Phoebe W. Ishak, Postdoctorante, CNRS et école d'économie de Aix-Marseille, Faculté d'économie et de gestion (FEG), Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1811932022-04-19T16:39:17Z2022-04-19T16:39:17ZEnvol des prix, insécurité alimentaire… les lourdes conséquences pour l’Afrique de la guerre en Ukraine<p>Dès les premiers jours de l’invasion russe en Ukraine, Kristalina Georgieva, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), <a href="https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/la-crainte-de-famines-en-raison-du-conflit-en-ukraine-augmente-1393091">tirait la semaine d’alarme</a> : « Bon nombre de pays africains subissent déjà une grande insécurité alimentaire. Le Soudan, l’Éthiopie et toute la région de la Corne de l’Afrique sont en difficulté, ce que la flambée récente des prix des denrées alimentaires va accentuer ». Et Emmanuel Macron d’enchaîner : « l’Union européenne doit redéfinir une stratégie alimentaire à l’égard de l’Afrique sans quoi plusieurs pays seront touchés par des famines dans les douze à dix-huit prochains mois ».</p>
<p>De fait, le conflit semble s’enliser en Ukraine et la situation pourrait devenir <a href="https://ferdi.fr/publications/conflit-russie-ukraine-quelles-consequences-sur-les-economies-africaines">intenable pour les pays d’Afrique</a> : difficulté d’approvisionnement et envol des prix des biens alimentaires et énergétiques préoccupent. Surtout que ces économies ont peu de marge de manœuvre pour aider leur population du fait d’un environnement macroéconomique dégradé.</p>
<p>La dépendance aux exportations ukrainiennes et russes reste un problème de taille qu’il s’agisse des produits agricoles, de l’énergie ou des matériaux nécessaires à la production d’infrastructures sur le continent. Depuis 2016, dans les importations de blé du continent, les productions russes et ukrainiennes pèsent pour environ 45 % du total, 30 % pour l’orge, 20 % pour le maïs. Pour les huiles de tournesol, c’est 45 % des importations totales. Et ces produits représentent 35 % des biens alimentaires importés sur le continent.</p>
<p><iframe id="uwjdo" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/uwjdo/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p><iframe id="qhqmC" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/qhqmC/4/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Hors du secteur alimentaire, une logique similaire concerne le soufre, les combustibles minéraux, les produits chimiques, les engrais essentiels à la production agricole ou encore les matériaux en fer, acier ou cuivre dont le continent a besoin pour ses infrastructures. La dépendance envers la Russie et Ukraine est, ici, certes moins marquée : entre 5 et 20 % des importations de ces produits, qui eux-mêmes représentent 25 % des importations totales du continent. À court terme cependant des tensions seront perceptibles, le temps pour les pays de trouver d’autres fournisseurs, si ceux-ci ne mettent pas en place de <a href="https://www.ifpri.org/blog/bad-worse-how-export-restrictions-exacerbate-global-food-security">restrictions aux exportations</a>.</p>
<h2>38 millions de victimes</h2>
<p>Même si certaines économies peuvent mécaniquement trouver plus facilement que d’autres à s’approvisionner ailleurs, les prix de ces biens vont fortement augmenter et ce phénomène touchera inévitablement tout le continent. C’est d’ailleurs la flambée des prix plutôt qu’une pénurie réelle des produits de première nécessité qui devrait se manifester en premier.</p>
<p>Avant le conflit, les prix mondiaux des denrées alimentaires atteignaient déjà des sommets historiques en 2021. L’inflation sur un an était à deux chiffres pour les huiles (+60 %) et les céréales (+30 %), avec un impact disproportionné sur les pauvres des villes. Les prix alimentaires mondiaux n’avaient <a href="https://www.fao.org/worldfoodsituation/foodpricesindex/fr/">jamais été aussi hauts</a> d’après l’indice FAO et les prix de blé et du maïs ont augmenté de 20 % et 19 % en mars dernier, en un mois seulement. Les perturbations de l’offre mondiale et la hausse de l’inflation des denrées alimentaires en raison du conflit aggraveront cette insécurité alimentaire déjà présente en Afrique de l’Ouest et dans le Sahel. Selon les estimations récentes du <a href="https://www.ipcinfo.org/ch">cadre harmonisé</a> sur l’insécurité alimentaire dans cette région, <a href="https://www.food-security.net/wp-content/uploads/2022/04/108-FNS-March2022.pdf">38 millions de personnes</a> pourraient être les victimes collatérales en matière alimentaire de la guerre Russie-Ukraine.</p>
<p>Comment comprendre cette situation avant l’invasion ? Début 2022, la situation des stocks mondiaux sur les céréales était satisfaisante d’après la FAO. De plus, les perspectives de récoltes mondiales de céréales en 2022 sont bonnes. Les premières estimations indiquent en effet que la production mondiale de blé devrait connaître une quatrième hausse annuelle consécutive et atteindre 790 millions de tonnes. L’envolée des prix des céréales et des huiles précédant le déclenchement de la guerre semble donc davantage lié à des phénomènes spéculatifs dans un contexte de reprise post-Covid globalement inflationniste qu’à un défaut de stock.</p>
<p><iframe id="ANYAb" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/ANYAb/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>L’alimentation et l’énergie pèsent lourd dans l’indice des prix des consommateurs : <a href="https://twitter.com/GitaGopinath/status/1499884852321075215/photo/1">50 % en Afrique</a> contre 30 % dans le reste du monde. Et les chiffres du FMI attestent d’une augmentation bien plus forte que pour les prix agricoles. En un an, ils ont été multipliés par cinq pour le gaz, par trois pour le charbon et par deux pour le pétrole.</p>
<p>Cette hausse était le fait d’une forte demande en provenance de la Chine et liée à la reprise économique post-Covid. Sur les dix pays les plus vulnérables à la hausse des prix du pétrole, car très dépendant des importations, huit sont considérés comme des <a href="https://fragilestatesindex.org/">États fragiles</a>. On note enfin une hausse des prix d’autres intrants en 2021 : +50 % pour les métaux et +100 % pour les engrais dont le prix a augmenté de 34 % sur le seul mois de mars.</p>
<p><iframe id="uMzA1" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/uMzA1/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>En résumé, les pays les plus directement exposés sont ceux qui dépendent des importations en provenance de Russie et d’Ukraine, pour des produits qu’ils importent en grande quantité et dont les prix vont augmenter. Ces critères mettent en évidence la vulnérabilité de <a href="https://ferdi.fr/publications/conflit-russie-ukraine-quelles-consequences-sur-les-economies-africaines">quatorze économies</a> sur le continent alors que dix-neuf autres présentent un risque élevé. Les onze autres économies présentent un risque plus modéré.</p>
<h2>Un choix cornélien</h2>
<p>Plusieurs pays, notamment ceux d’Afrique du Nord, le Nigeria et l’Afrique du Sud, ont des programmes de <a href="https://www.imf.org/en/Topics/climate-change/energy-subsidies">subvention de produits alimentaires et du carburant</a>. Dans un contexte de fort accroissement de l’endettement public dans la majorité des pays africains, leur poids pourrait cependant rapidement s’avérer insoutenable pour les gouvernements.</p>
<p>Au cours des 18 derniers mois, les gouvernements ont emprunté pour financer à la fois leur riposte face au Covid-19 et des mesures de relance. Le ratio dette publique/PIB de l’ensemble du continent est au plus haut depuis vingt ans, à plus de 65 %, contre 60 % fin 2020. Il dépasse même 100 % en Angola, au Mozambique, au Soudan et au Zimbabwe. Le FMI estime que <a href="https://www.imf.org/external/pubs/ft/dsa/dsalist.pdf">22 pays</a> de l’Afrique subsaharienne sont dans une situation délicate en la matière.</p>
<p>Surtout, on remarque la substitution d’emprunts multilatéraux à long terme et à faible coût par des émissions privées à coût plus élevé au cours de la dernière décennie. Les risques sont donc plus importants et cela pourrait déclencher des sorties de capitaux de nombreux marchés émergents et pré-émergents. Or les pays le plus exposés aux risques liés au conflit sont justement ceux ayant une dette déjà très élevée relativement aux autres économies du continent.</p>
<p>Maintenir les systèmes de subvention en place dans ce contexte de surendettement semble peu soutenable du point de vue de la maitrise des déficits publics. Cependant, y renoncer, c’est courir le risque de déclencher des troubles sociaux. Rappelons que la flambée mondiale des prix des denrées alimentaires en 2007-2008 avait déclenché des <a href="https://www.jeuneafrique.com/19297/economie/dossier-agriculture-cinq-ans-apr-s-les-meutes-de-la-faim-le-doute/">émeutes</a> dans une douzaine de pays africains.</p>
<h2>Des opportunités néanmoins</h2>
<p>Tous ne connaîtront pas les mêmes difficultés. La hausse des prix des produits énergétiques aura des effets <a href="https://ferdi.fr/dl/df-wkHp6z7z3cPjvmmKqnDR2oPr/note-breve-b233-conflit-russie-ukraine-quelles-consequences-sur-les.pdf">hétérogènes en Afrique</a>. Pour les douze exportateurs nets de pétrole de la région, elle sera, comme on pouvait s’y attendre, profitable. Le Nigeria, l’Angola, et le Cameroun dans une moindre mesure, en bénéficieront sur le marché du pétrole mais souffriront de problèmes de capacités de production. Les quelques pays producteurs de gaz (Algérie, Nigeria, et Mozambique) également.</p>
<p>Pour ces pays, une opportunité de croissance se présenterait si l’Europe s’efforce de réduire sa dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie. L’Algérie, Nigeria, le Sénégal, le Mozambique et la Tanzanie, qui représentent près de <a href="https://www.jeuneafrique.com/863516/economie/gaz-naturel-lafrique-pourrait-fournir-20-des-besoins-mondiaux-dici-2025/">10 % des réserves prouvées de gaz naturel dans le monde</a>, pourraient aussi bénéficier de la diversification énergétique en Europe. Les 27 ont en effet décidé récemment de classer le gaz comme <a href="https://reporterre.net/La-Commission-europeenne-labelise-comme-durable-le-gaz-et-le-nucleaire">énergie durable</a>.</p>
<p><iframe id="A6fRp" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/A6fRp/4/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Attirer les acheteurs européens nécessiterait toutefois beaucoup de nouveaux investissements. En effet, en l’état actuel, un <em>shift</em> dans l’approvisionnement de gaz vers l’Afrique serait assez compliqué d’un point de vue logistique. Cela vaut notamment pour l’Algérie qui est considérée comme la meilleure alternative. En raison de désaccords diplomatiques, Alger a pris la décision de <a href="https://www.lepoint.fr/afrique/l-algerie-ferme-le-robinet-du-gaz-vers-le-maroc-01-11-2021-2450121_3826.php">fermer le gazoduc</a> Maghreb-Europe qui approvisionne l’Europe via l’Espagne mais surtout via le Maroc.</p>
<p>Certaines économies du continent pourraient aussi bénéficier d’un effet de demande sur les métaux et les minerais face aux possibles problèmes d’acheminement ou embargo sur ces métaux russes. Il s’agit en particulier de l’Afrique du Sud, du Ghana et de la Tanzanie.</p>
<p>De quoi amener de la nuance au tableau donc, mais pas au point de faire oublier que les effets de la crise sur la plupart des pays d’Afrique pourraient être lourds de conséquences. La crise frappe la région à un moment où les pays disposent d’une marge de manœuvre minimale, voire inexistante après la pandémie Covid-19, pour contrer le choc. Il est donc certain qu’elle intensifiera les pressions économiques et les cicatrices auxquelles des millions de ménages et d’entreprises étaient déjà confrontés à la suite de la pandémie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181193/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Gourdon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les gouvernements se trouvent aujourd'hui face à un choix délicat : s’endetter à des taux élevés, ou bien risquer manifestations et émeutes.Julien Gourdon, Economiste, Agence française de développement (AFD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1716092021-11-11T16:24:35Z2021-11-11T16:24:35ZFlambée des prix de l’énergie : quelles réponses politiques possibles ?<p>Selon le dernier rapport semestriel de la <a href="https://thedocs.worldbank.org/en/doc/c5de1ea3b3276cf54e7a1dff4e95362b-0350012021/original/CMO-April-2021.pdf">Banque mondiale</a> : « les prix de l’énergie devraient en moyenne être supérieurs de plus de 80 % en 2021 par rapport à l’année dernière », affectant ainsi considérablement la soutenabilité des dépenses énergétiques, notamment pour les <a href="https://www.bruegel.org/2021/09/is-europes-gas-and-electricity-price-surge-a-one-off/">ménages européens</a>.</p>
<p>Ainsi, les prix du gaz naturel et de l’électricité ont connu des progressions vertigineuses. Ceux-ci sont passés de 16 euros le mégawatt par heure, début janvier, à 88 euros fin octobre, soit une hausse de plus de 450 % en moins d’un an. Ensemble, le gaz naturel et le charbon fournissent encore plus de 35 % de la production totale d’électricité de l’Union européenne, le gaz représentant plus d’un cinquième de ce mixe.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/431271/original/file-20211110-19-1tcdfjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/431271/original/file-20211110-19-1tcdfjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/431271/original/file-20211110-19-1tcdfjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/431271/original/file-20211110-19-1tcdfjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/431271/original/file-20211110-19-1tcdfjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/431271/original/file-20211110-19-1tcdfjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=453&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/431271/original/file-20211110-19-1tcdfjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=453&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/431271/original/file-20211110-19-1tcdfjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=453&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><span class="source">Banque mondiale, Bloomberg</span></span>
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<p>Les prix du <a href="https://www.boursorama.com/bourse/matieres-premieres/cours/8xBRN/">pétrole brut</a>, quant à eux, ont connu la reprise la plus rapide jamais enregistrée, après l’effondrement des prix au printemps 2020, soit plus de 80 dollars le baril à la mi-novembre (60 % de hausse depuis le début de l’année). Le même scénario s’esquisse pour le <a href="https://www.iea.org/reports/world-energy-outlook-2021/prices-and-affordability">charbon</a>, dont les prix ont augmenté de 30 % sur le trimestre et ont presque doublé depuis le mois d’août, en grande partie en raison des perturbations sur l’offre.</p>
<p>Ce contexte explosif fait aujourd’hui peser un <a href="https://www.worldbank.org/en/news/press-release/2021/10/21/soaring-energy-prices-pose-inflation-risks-as-supply-constraints-persist">risque inflationniste</a> sur les économies européennes et mondiales. En effet, d’après les estimations d’<a href="https://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php?title=Inflation_in_the_euro_area">Eurostat</a>, l’inflation dans la zone euro aurait atteint 4,1 % en octobre 2021, contre 3,4 % en septembre 2020.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/431272/original/file-20211110-17-1az7511.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/431272/original/file-20211110-17-1az7511.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/431272/original/file-20211110-17-1az7511.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=284&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/431272/original/file-20211110-17-1az7511.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=284&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/431272/original/file-20211110-17-1az7511.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=284&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/431272/original/file-20211110-17-1az7511.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=357&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/431272/original/file-20211110-17-1az7511.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=357&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/431272/original/file-20211110-17-1az7511.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=357&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Eurostat</span></span>
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<p>Cette accélération aurait principalement pour origine <a href="https://theconversation.com/linflation-reste-pour-linstant-tiree-par-les-prix-de-lenergie-170403">l’envolée des prix des matières premières</a>, ce qui est visible en comparant le niveau global d’inflation avec celui de l’inflation sous-jacente (niveau d’inflation hors prix des matières premières agricoles ou énergétiques).</p>
<p>Au regard de son ampleur, cette flambée des prix de l’énergie aura surtout des conséquences importantes sur les coûts de production, mais aussi le pouvoir d’achat des ménages européens, <a href="https://www.eulerhermes.com/en_global/news-insights/economic-insights/Energy-prices-in-Europe-a-costly-winter-is-coming.html">grands consommateurs de gaz naturel</a>, et donc sur la pérennité de la reprise économique.</p>
<h2>Les moins aisés en première ligne</h2>
<p>La hausse des prix devrait notamment entraîner d’énormes difficultés pour les plus pauvres. En effet, selon la <a href="https://ec.europa.eu/energy/sites/default/files/documents/swd2020_951_-_1_en_autre_document_travail_service_part3_v1.pdf">Commission européenne</a>, en moyenne, dans l’UE, les ménages du décile de revenu le plus bas ont dépensé 8,3 % de leurs revenus en énergie en 2018, tandis que les ménages du décile de revenu moyen n’ont dépensé que 6,3 % de leurs revenus globaux. Comme dans toute crise énergétique, ce sont donc bien les consommateurs les plus fragiles qui vont payer les pots cassés.</p>
<p>Face à cette situation, les États membres de l’UE affichent aujourd’hui un certain <a href="https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say/initiatives/12911-Reseaux-gaziers-revision-des-regles-de-l%E2%80%99UE-en-matiere-d%E2%80%99acces-au-marche_fr">volontarisme</a>. La France et l’Espagne soutiennent toutes deux une refonte des marchés européens de l’électricité en réorganisant le système actuel, qui fixe le prix de l’électricité en fonction du combustible le plus cher nécessaire pour répondre à la demande prévue. Ce système a pour objectif de lutter contre la spéculation.</p>
<p>L’Espagne a également exigé une approche commune de l’UE, notamment l’achat de gaz naturel pour contrer le pouvoir de marché des vendeurs et la constitution de réserves stratégiques. Le Luxembourg et la France sont également favorables à un éventuel retour à des contrats d’approvisionnement en gaz à long terme pour garantir la stabilité des prix, mais cela exigerait un changement de la politique actuelle de la Commission.</p>
<p>Il est possible que les pays européens, englués dans la défense de leurs capacités énergétiques propres, aient commis l’erreur de supposer que les gazoducs suffisaient à eux seuls à garantir l’approvisionnement en gaz de la Russie. Or, les derniers mois ont montré que les pays dotés d’une vision stratégique et d’un pouvoir d’achat fort, ont pu évincer l’Europe des routes stratégiques d’<a href="https://www.oecd.org/coronavirus/policy-responses/covid-19-and-global-value-chains-policy-options-to-build-more-resilient-production-networks-04934ef4/">approvisionnement</a>. Par exemple, la politique de la Russie en Europe, via la gazoduc North Stream 2, évince un très grand nombre de pays, tels que <a href="https://www.brookings.edu/blog/order-from-chaos/2021/03/05/how-to-solve-the-nord-stream-2-dilemma/">l’Ukraine et plusieurs pays d’Europe du Sud</a>.</p>
<p>Afin d’éviter de futures crises énergétiques et le recours répété à des dépenses d’urgence pour soutenir les ménages, l’Europe devrait ainsi songer à concevoir et mettre en œuvre une stratégie énergétique alternative.</p>
<p>Pour ce faire, elle pourrait utiliser des instruments de marché pour couvrir la volatilité des prix et sécuriser l’approvisionnement, ou conclure des alliances stratégiques avec de grands pays exportateurs comme la Russie, le Qatar, l’Australie ou les États-Unis.</p>
<p>L’utilisation, et la généralisation, d’instruments de couvertures tels que les contrats forward ou futures permettent, pour beaucoup de transactions, d’amortir les contraintes de volatilité. Peut-être serait-il intéressant d’envisager des contrats termes communs à l’échelle européenne, ou de véritables bourses d’énergie collectives, permettant ainsi à des États plus faibles de faire face à la hausse des coûts de leur énergie.</p>
<h2>Coûts de production réduits</h2>
<p>Ayant tiré les <a href="https://www.bcg.com/fr-fr/publications/2021/preparation-for-last-oil-price-boom">enseignements du supercycle</a> qui a précédé 2008, lorsque la baisse des prix a entraîné une réduction des investissements, l’industrie pétrolière et les marchés des matières premières auraient, semble-t-il, considérablement changé au cours de la dernière décennie.</p>
<p>L’industrie serait devenue beaucoup plus réactive à l’évolution des chocs extérieurs, notamment à travers des projets de production pétrolière à la fois plus réactifs et mieux dimensionnés. Les techniques de forage rapides mises au point pendant la <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/2016/10/27/20002-20161027ARTFIG00267-etats-unis-la-revolution-du-schiste-du-boom-au-bust.php">révolution du schiste en 2014-2015</a> auraient aussi aidé d’autres types d’actifs, y compris les grands projets offshores, à réduire le temps nécessaire à l’obtention de la première huile – dans certains cas, jusqu’à 50 %.</p>
<p>De fait, l’industrie aurait considérablement réduit les coûts en amont depuis 2014 rendant la production commercialement viable à 50 dollars le baril, ce qui n’était pas le cas auparavant. Des prix élevés peuvent encore survenir, mais les producteurs peuvent ainsi agir plus rapidement pour mettre la production en ligne lorsqu’ils augmentent, ce qui limite le potentiel de hausse durable des prix.</p>
<p>L’OPEP+ (l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et leurs dix alliés) apparaît en outre plus agile que son prédécesseur, l’OPEP. Cette agilité découle de réunions plus fréquentes entre ses membres, avec un groupe de surveillance capable de déterminer les niveaux de production beaucoup plus rapidement que par le passé.</p>
<p>Mais combien de temps encore les consommateurs pourront supporter ce temps d’adaptation ? Et combien de temps l’État pourra encore financer des chèques énergie ? Est-ce que la nouvelle géopolitique du gaz ne va pas mettre durablement la Russie au centre de la politique énergétique européenne ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/171609/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le contexte appelle l’UE à changer de stratégie, en mettant par exemple en place des contrats d’approvisionnement en gaz à long terme et conclure des alliances avec les pays exportateurs.David Bourghelle, Maître de conférences en finance, laboratoire LUMEN, Université de LilleFredj Jawadi, Professeur des Universités en finance et en économétrie, Laboratoire LUMEN, Université de LillePhilippe Rozin, Maître de conférences en finance, laboratoire LUMEN, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1601112021-05-03T18:25:59Z2021-05-03T18:25:59ZCroissance, inflation et pénuries : les trois caractéristiques de l’économie du « monde d’après »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/398053/original/file-20210430-15-rjiivl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5615%2C3741&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le secteur du BTP souffre actuellement d'une pénurie de matériaux comme le bois de construction.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/foreman-turning-his-back-camera-consulting-122391229">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Qu’on l’aime ou pas, le keynésianisme, selon lequel l’intervention étatique reste le meilleur moyen de rétablir la croissance, domine l’analyse des crises et la conception des politiques économiques depuis 85 ans. Dans ce paradigme bien enraciné, les crises s’expliquent par une contraction inattendue de la demande, elle-même déterminée par des raisons multiples et variées, comme une politique monétaire <a href="http://www.parisschoolofeconomics.com/hautcoeur-pierre-cyrille/crise-financiere-29.pdf">trop rigoriste en 1929-1936</a>, ou une contraction du crédit par un secteur bancaire ayant pris des <a href="https://www.lafinancepourtous.com/decryptages/crises-economiques/crise-des-subprimes/crise-financiere/comment-la-crise-de-2008-a-t-elle-commence/">risques démesurés en 2008</a>.</p>
<p>Ainsi, face à la crise de la Covid-19, les gouvernements ont adopté au cours de l’année 2020 des stratégies du type <a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/quoi-qu-il-en-coute-emmanuel-macron-lance-un-appel-general-a-la-mobilisation-contre-le-coronavirus_3863731.html">« quoi qu’il en coûte »</a> pour <a href="https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/cnp-2021-deuxieme-rapport-janvier.pdf">stimuler la demande</a> le plus en amont possible. Ils se sont empressés notamment de réduire les taxes sur les entreprises en difficulté et d’augmenter la dépense publique, notamment sous forme de transferts.</p>
<p>Ces transferts ont pris la forme d’un <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/03/27/coronavirus-en-europe-la-bataille-pour-eviter-le-chomage-de-masse_6034586_3234.html">recours massif au chômage partiel</a> en Europe, ou des indemnités <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/09/16/covid-19-quand-washington-se-montre-genereux-avec-les-americains_6052396_3234.html">plus élevées aux États-Unis</a>. Avec des taux d’intérêt de court terme déjà proches de zéro, l’action des banques centrales, notamment dans la Zone euro, s’est limitée à <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/12/11/la-banque-centrale-europeenne-porte-son-intervention-a-2-400-milliards-d-euros_6063024_3234.html">absorber</a> les nouvelles émissions d’obligations d’État.</p>
<p>De cette manière les taux d’intérêt de long terme sont également maintenus à un niveau insignifiant, voire négatif, dans une illustration de l’absurde de cette situation. À titre d’exemple, si en France la production <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-eco/papier-baisse-de-la-production-de-8-2-en-france-20201117">s’effondrait de 8,2 % en 2020</a>, le pouvoir d’achat n’aura <a href="http://www.economiematin.fr/news-baisse-pouvoir-achat-crise-croissance-rdb-argent-menages">baissé que de 1 %</a>, signe de cette largesse de l’État. La dette publique passe de 98 % du PIB en 2019 à 116 % du PIB en 2020 et est prévue à <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/la-dette-publique-va-exploser-a-122-4-du-pib-en-2021-20201211">122 % pour fin 2022</a>.</p>
<p>Les organisations économiques internationales comme le Fonds monétaire international (FMI) ou l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont défendu sans aucune retenue cette politique fiscale d’une grande largesse, et d’ailleurs continuent de le faire.</p>
<h2>Choc d’offre</h2>
<p>Ce qui rend singulière la crise de la Covid-19, c’est la conjonction d’une crise de demande classique, mais qui a été très vite enrayée, avec un fort choc d’offre qui lui se propage et s’intensifie au fur et à mesure où la demande de biens se renforce avec la sortie de crise. Cette situation devrait nous rappeler la crise du prix du pétrole dans les années 1970, lorsque les pays qui ont refusé l’austérité ont dû faire face à une inflation rapide.</p>
<p>Sous l’impact de la crise sanitaire, la capacité du secteur productif à fournir des biens et services s’est dégradée en raison de 3 raisons principales.</p>
<p>En premier lieu, une perte sévère en productivité dans les opérations physiques. L’organisation des opérations a dû savoir intégrer la distanciation, les gestes barrières (aération renforcée, port du masque, etc.), les nettoyages intensifs (désinfection), la mise en place de marquage et de déplacements limitant toute forme de croisement ou encore l’accompagnement des personnes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/398064/original/file-20210430-21-anfjud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/398064/original/file-20210430-21-anfjud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/398064/original/file-20210430-21-anfjud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/398064/original/file-20210430-21-anfjud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/398064/original/file-20210430-21-anfjud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/398064/original/file-20210430-21-anfjud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/398064/original/file-20210430-21-anfjud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La mise en place de mesures anti-Covid-19, comme la distanciation, ont entrainé une forte perte en productivité dans les opérations physiques.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/coronavirus-pandemic-effects-long-queue-enter-1698985708">Shutterstock</a></span>
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</figure>
<p>Par ailleurs, les parents ont été <a href="https://theconversation.com/parents-teletravailleurs-comment-concilier-linconciliable-134120">confrontés à la garde de leurs enfants</a>. Dans certains cas, le seul recours a été tout simplement d’arrêter de travailler, car nombre de postes ne se prêtent également pas au télétravail. En contrepartie, les solutions numériques des échanges en ligne, les visioconférences et le télétravail ont permis d’amortir en partie le choc dans les secteurs et les activités qui le permettaient. En revanche, après une période d’enthousiasme béat, les <a href="https://theconversation.com/le-teletravail-est-il-durable-les-enseignements-du-confinement-151886">limites du télétravail</a> commencent à ressortir. Enfin, de nombreuses ressources ont dû être redéployées vers la lutte contre la pandémie (masques, produits pharmaceutiques), privant d’autres secteurs de ces matériaux.</p>
<p>Selon le <a href="https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/cnp-2021-deuxieme-rapport-janvier.pdf">rapport du Conseil national de la productivité</a> de janvier 2021, la baisse de la production combinée à une moindre baisse de l’emploi s’apparente à une baisse de la productivité, extrêmement marquée au second trimestre de 2020. Le rapport reprend une analyse de l’Insee, selon laquelle « pour 46 % des entreprises des services, 40 % de celles de l’industrie et 56 % de celles du bâtiment, toutes interrogées en octobre, les mesures de protection sanitaires réduisent la productivité, entraînant des difficultés d’organisation importantes ».</p>
<p>En second lieu, des pertes sèches de capacité de production se sont révélées et ne vont faire que s’intensifier. Les confinements ont en effet entraîné des fermetures temporaires d’usines, ou le report d’activités de maintenance. La disponibilité de personnel dans certains secteurs a réduit la capacité de production. Les <a href="https://theconversation.com/agriculture-les-migrants-saisonniers-recoltent-ce-que-le-covid-19-a-seme-140116">travailleurs immigrés saisonniers</a>, très présents en agriculture ou sur les chantiers de construction, ont disparu d’un jour à l’autre, en raison des restrictions sur la mobilité internationale de cette main-d’œuvre.</p>
<p>Aujourd’hui, il faut se prémunir sur les troubles de vision pointés par le <a href="https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/cnp-2021-deuxieme-rapport-janvier.pdf">Conseil national de productivité</a> : « La crise se traduit par une situation paradoxale où, jusqu’à maintenant (fin 2020), les faillites sont en diminution de 36 % pour l’ensemble des entreprises et de 29 % pour les PME par rapport à 2019 ». Ainsi la manne financière déversée a permis de <a href="https://www.lesechos.fr/economie-france/conjoncture/covid-la-vague-de-faillites-est-decalee-a-lannee-prochaine-1272258">bloquer les faillites</a> mais cette aide ne pourra pas se prolonger indéfiniment.</p>
<p>L’argent public a maintenu à flot des activités solvables, mais <a href="https://theconversation.com/les-pge-vont-ils-changer-les-entreprises-francaises-en-zombies-145459">parfois insolvables</a>, dont un test de vérité sera le remboursement des prêts garantis par l’État. En 2021, de nombreuses restructurations de firmes devraient avoir lieu, ce qui conduira à d’inévitables déperditions de ressources, car le rattrapage est inéluctable et est estimé à un <a href="https://www.leparisien.fr/economie/2021-l-annee-de-tous-les-dangers-pour-les-defaillances-d-entreprises-06-01-2021-8417649.php">surplus de l’ordre de 30 % des défaillances en 2021</a> par rapport à un régime annuel normal.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1377363058138353666"}"></div></p>
<p>Au premier trimestre de cette année, <a href="https://www.lesechos.fr/economie-france/conjoncture/covid-premiere-alerte-sur-le-front-des-defaillances-dentreprises-1306668">80 % des entreprises</a> qui se sont présentées devant les tribunaux ont été liquidées, un taux inédit depuis 20 ans. Ce rattrapage aura donc un impact sur la dégradation du fonctionnement des chaînes de valeur qui verront des goulots d’étranglement se former dans les secteurs les plus exposés.</p>
<p>Enfin, en troisième lieu, les flux de la mondialisation ont commencé leur recomposition. Les blocages locaux, les pénuries naissantes dans la <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/04/06/le-secteur-de-la-construction-confronte-a-une-penurie-inedite-de-materiaux_6075662_3234.html">construction</a> ou les <a href="https://theconversation.com/semi-conducteurs-une-penurie-appelee-a-durer-157250">semi-conducteurs</a>, les <a href="https://www.leparisien.fr/economie/canal-de-suez-debloque-pourquoi-le-transport-maritime-nest-pas-au-bout-de-ses-peines-30-03-2021-YHPE2XEZ6JHZLMDCCS3SSE63GU.php">problèmes associés aux transports maritimes</a> et aux conteneurs, une prise de conscience des bénéfices de la diversification des sources d’approvisionnement, les mots d’ordre politique dans certaines économies « orientées » ont précipité un <a href="https://theconversation.com/avant-le-coup-darret-la-mondialisation-etait-en-phase-de-stabilisation-136253">ralentissement</a> qui s’observait déjà avant la crise.</p>
<p>La Chine, qui produisait pour le monde et qui gardait les surplus pour son marché intérieur, a inversé la logique depuis quelques années. Entre 2010 et 2016, son taux d’épargne a diminué de <a href="https://www.ceicdata.com/en/indicator/china/gross-savings-rate">50 % à 44 %</a>.Elle recentre désormais son économie sur son <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/la-chine-se-recentre-sur-son-marche-interieur-20200904">marché intérieur</a> et confie un moindre surplus aux marchés extérieurs.</p>
<h2>Des dérèglements sur fond de reprise</h2>
<p>À ce jour, les conjoncturistes et les organisations internationales sont quasi unanimement optimistes quant à la <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/04/06/le-fmi-prevoit-une-croissance-mondiale-plus-rapide-mais-inegale-en-2021_6075726_3234.html">vigueur de la relance en seconde partie de 2021</a>. Ces prévisions prennent en compte les progrès sur le plan de la vaccination, mais surtout les dépenses énormes consenties par les gouvernements partout dans le monde, sans se poser la question si le secteur productif pourra suivre et si oui, à quelle vitesse.</p>
<p>Pourtant, on commence depuis peu à observer les conséquences concrètes du choc d’offre et saisir son ampleur. Un mot résume la situation très dégradée de l’économie : la <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/industrie/industrie-une-penurie-de-matieres-premieres-pese-sur-les-usines_4369739.html">pénurie de matières premières</a> et produits de base. On observe une <a href="https://www.lsa-conso.fr/l-inquietante-flambee-du-prix-des-matieres-premieres,377953">hausse des prix sur les matières premières</a> (pétrole et produits dérivés, soja) ou sur les produits intermédiaires (puces électroniques, mais aussi <a href="https://www.petitbleu.fr/2021/04/16/plastique-bois-acier-penuries-dans-lindustrie-9490870.php">acier, bois de construction</a>, etc.).</p>
<iframe width="100%" height="315" src="https://embedftv-a.akamaihd.net/b9e024a00b2f44308312b4560c998419" frameborder="0" scrolling="no" allowfullscreen=""></iframe>
<p>Les matériaux de construction se font rares et <a href="https://www.sudouest.fr/economie/immobilier/immobilier-la-penurie-et-la-flambee-des-prix-des-materiaux-inquietent-le-secteur-de-la-construction-1818324.php">leurs prix flambent</a> ; les délais de mise en chantier et de réalisation des projets se rallongent, et des <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/penurie-de-materiaux-et-flambee-des-prix-inquietent-le-secteur-du-batiment-20210407">surcoûts se profilent</a>.</p>
<p>Le prix du transport maritime connaît une hausse sans précédent. Sur la route Chine – Europe, le prix moyen du fret maritime a été multiplié par 4 entre octobre 2020 et janvier 2021, et <a href="https://www.ft.com/content/feb3029b-7baf-427a-840b-01c30c0c78d2">rien n’indique une diminution</a> dans l’immédiat.</p>
<p>Ainsi la contraction d’offre en 2020 a créé un <a href="https://partageonsleco.com/2020/12/14/leffet-dhysterese/">« effet d’hystérèse »</a>, le retour à la production d’avant impliquant des coûts sanitaires et de transaction supplémentaires, ce qui pousse les entreprises à augmenter les prix à la sortie d’usine.</p>
<p>Enfin, la hausse des prix ne permet pas de résoudre tous les déséquilibres. Si le marchand de journaux a terminé son stock de la journée, quel que soit le prix que nous lui proposons il ne pourra pas nous en fournir un.</p>
<p>Actuellement, la <a href="https://fr.motor1.com/news/486745/production-usine-composant-electronique/">production d’automobile est profondément affectée</a> par le manque de composants électroniques (comme les semi-conducteurs) et des produits en plastique. Ces composantes deviennent un matériel si rare, que Taïwan n’a pas hésité à <a href="https://www.taiwannews.com.tw/en/news/4114962">tenter une négociation avec l’Allemagne</a> portant sur un échange composants contre vaccins.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1372492086054899712"}"></div></p>
<p>En bout de course, une augmentation du prix des automobiles se profile. D’ailleurs, le constructeur Renault vient <a href="https://www.lefigaro.fr/societes/renault-milite-pour-une-hausse-des-prix-des-voitures-20210422">d’augmenter ses prix</a> pour compenser la hausse des coûts, et fait passer aux autres constructeurs le message de suivre son exemple.</p>
<p>Dans l’immédiat, il n’est pas à exclure que ces pénuries conduisent à une forte hausse des prix producteurs, et par ricochet, à de fortes hausses des prix à la consommation. Au mois de mars, les <a href="https://data.oecd.org/price/producer-price-indices-ppi.htm">prix à la production</a> ont augmenté aux États-Unis de 4,2 % sur l’année (la plus forte hausse depuis 2011). Le taux d’inflation a fait un bond spectaculaire, de 1,7 % en février, à 2,6 % en mars.</p>
<p>La zone euro est en retard de quelques mois sur les États-Unis et le taux d’inflation en Allemagne au mois de mars est de 1,7 %… quand dépassera-t-il les 2 % ciblés par la BCE ? Le rapport d’avril dernier du IHS Markit sur le PMI (<em>Purchase Manager Index</em>) de la zone euro relève clairement ces <a href="https://www.markiteconomics.com/Public/Home/PressRelease/7344c5db768b4d27a4174697c342ec50">tensions productives fortes</a>, sur un fonds de reprise économique. Le rapport souligne également que le secteur manufacturier transfère activement la hausse des coûts sur les prix, et donc sur les consommateurs.</p>
<p>Le scénario que nous dessinons est donc un scénario pessimiste, qui réunira des pénuries nombreuses sur les produits et une inflation ranimée. Cette conjonction aura tendance à s’inscrire dans la durée, les opérateurs en place tirant parti de ces pénuries et n’ayant aucun intérêt, du fait des conséquences de l’inflation, de s’endetter et d’augmenter significativement leur potentiel productif.</p>
<p>Les entreprises doivent prendre en compte ce changement de modèle, pour revoir leur management des opérations et leurs stratégies, dans un monde où le principal frein au développement de l’activité sera la pénurie de certains facteurs de production, et pas la demande.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/160111/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Si les mesures d’urgence de soutien à la demande ont permis de maintenir le pouvoir d’achat, le choc d’offre crée une désorganisation du secteur productif qui pourrait se répercuter sur les prix.Radu Vranceanu, Professeur d'économie, ESSEC Philippe-Pierre Dornier, Professeur en management des opérations, ESSEC Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1549692021-02-16T19:26:05Z2021-02-16T19:26:05ZLes pressions sur l’eau, face ignorée de la transition énergétique<p>La question des matériaux utilisés pour produire les technologies bas-carbone (batteries, éoliennes, panneaux solaires, véhicules électrifiés, etc.) est fondamentale, et largement commentée. Celle de la consommation en eau nécessaire à l’extraction des minerais et la fabrication de ces technologies est beaucoup moins abordée, alors qu’elle est pourtant essentielle.</p>
<p>On parle en effet des pressions sur l’eau dans le cadre des usages agricoles, de l’élevage et plus <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10021-011-9517-8">particulièrement de la production de viande</a>, mais peu quand il s’agit du déploiement des technologies bas carbone. Dans un monde de plus en plus contraint par la ressource hydrique, cet enjeu va pourtant devenir incontournable, et l’est d’ailleurs déjà dans certaines régions.</p>
<p>Aux effets connus du réchauffement climatique <a href="https://www.nature.com/articles/s41558-019-0456-2">sur le cycle de l’eau</a> s’ajoutent les <a href="https://www.fao.org/aquastat/en/overview/methodology/water-use">pressions anthropiques croissantes</a> exercées sur les ressources en eau : entre 1900 et 2010, les prélèvements au niveau mondial ont été multipliés par plus de 7 alors que la population n’a été multipliée sur la même période « que » par 4,4. Certaines zones se retrouvent ainsi en état de fort stress hydrique, augurant des conflits d’usages croissants entre l’agriculture, l’industrie et la population, voire des tensions au niveau international.</p>
<h2>L’eau et les métaux de la transition</h2>
<p>Les technologies de la transition énergétique sont complexes et consomment certains matériaux en grande quantité. <a href="https://theconversation.com/les-materiaux-de-la-transition-energetique-le-lithium-105429">Le lithium</a>, le <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/article/cobalt-transition-energetique-quels-risques-dapprovisionnements">cobalt</a> ou encore le nickel sont ainsi devenus les métaux vedettes des batteries lithium-ion utilisées dans les véhicules électriques. <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/article/cuivre-transition-energetique-metal-essentiel-structurel-et-geopolitique">Le cuivre</a>, déjà omniprésent dans notre quotidien, pourrait voir sa demande exploser en relation avec les nouvelles mobilités mais également avec le solaire photovoltaïque (PV).</p>
<p>De manière globale, la dynamique de transition énergétique mondiale ne pourra se réaliser qu’à travers <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/article/transition-energetique-bas-carbone-quelles-evolutions-geopolitique-lenergie">l’intensification des extractions minières à travers le monde</a> et donc engendrer une augmentation de la consommation d’eau.</p>
<p>À l’échelle d’un pays, le secteur minier se trouve souvent <a href="http://pdf.wri.org/working_papers/mine_the_gap.pdf">bien loin derrière l’agriculture</a> ou même d’autres secteurs industriels (au <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0301420718301193">Pérou</a>, par exemple, il pèse pour environ 1 % de la consommation en eau du pays contre presque 89 % pour l’agriculture). Il n’en demeure pas moins un important consommateur, notamment lors des phases d’extraction et de traitement des minerais et génère de nombreuses externalités sur l’eau (déversements de substances, drainages acides, etc.).</p>
<p>En outre, pour bon nombre de métaux étudiés, la production minière ou les activités de transformation sont effectuées dans des pays où la pression sur la ressource en eau est déjà forte et pour lesquels la situation hydrique n’est pas, dans l’état actuel des choses, amenée à s’améliorer dans les décennies à venir.</p>
<p>Très gourmande en eau, l’industrie des terres rares illustre bien cette problématique. <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/article/les-terres-rares-transition-energetique-quelles-menaces-les-vitamines-lere-moderne">Nos résultats</a> révèlent en effet une pression accrue sur les ressources en eau dans au moins deux pays déjà soumis à des épisodes de fort stress hydrique : la Chine et l’Australie. Dans un scénario climatique contraint, la consommation en eau de l’industrie australienne des terres rares en 2050 représenterait plus de deux tiers (69,2 %) du prélèvement en eau de l’ensemble des secteurs industriels en 2015 ou encore 11,2 % de l’eau prélevée au total en 2015 dans le pays.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Classement des pays dans la production minière mondiale de certains métaux pour l’année 2020 et niveau de stress hydrique attendu en 2040.</span>
<span class="attribution"><span class="source">World Resource Institute, 2015 ; USGS, 2021</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Or les terres rares ne sont pas les seuls éléments concernés par la politique minière volontariste de l’Australie : celle-ci figure dans le top 5 des producteurs mondiaux pour le lithium, le nickel, le cuivre le cobalt ou encore l’aluminium. On ne peut alors qu’imaginer <a href="https://ofb.gouv.fr/documentation/eau-et-milieux-aquatiques-les-chiffres-cles-edition-2020">l’empreinte eau du secteur minier</a> dans un pays où les épisodes de sécheresse s’intensifient.</p>
<p>Bien que moins alarmant, le constat est similaire pour la Chine : la plus grande réserve de terre rares au monde – Bayan Obo en Mongolie intérieure – est située dans une zone de stress hydrique qualifié de « extrêmement élevé ».</p>
<h2>Des conflits sur l’eau de plus en plus fréquents</h2>
<p>Dans de nombreux autres pays miniers, les conflits autour de la ressource en eau représentent déjà une menace.</p>
<p>Au Chili par exemple, les activités d’extraction (cuivre et lithium) se concentrent dans le nord du pays, zone parmi les plus arides au monde. Ces dernières années, on constate un renforcement de la mobilisation des populations indigènes et des groupes environnementaux, appuyés récemment par le régulateur environnemental chilien, qui dénoncent l’épuisement de l’aquifère situé dans la zone du désert d’Atacama et les dommages causés aux écosystèmes. Les batailles juridiques se multiplient et ralentissent des projets miniers, comme celui de « Rajo Inca », un projet à 1,2 milliard de dollars mené par Codelco.</p>
<p>Malgré ses ressources en eau, le Pérou <a href="https://www.2030wrg.org/peru/background/">est soumis à un fort stress hydrique</a> en raison de leur inégale répartition, des pollutions diverses et de la fonte des glaciers de la région andine. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0301420718301193">La rareté de l’eau et les investissements miniers</a> élevés seraient les deux facteurs qui augmentent la prédisposition aux conflits dans la région. L’empreinte environnementale du secteur minier apparaît ainsi « la goutte de trop » : la <a href="http://cooperaccion.org.pe/wp-content/uploads/2016/10/GOBERNANZAAGUA.pdf">pollution de 16 des 21 fleuves les plus contaminées</a> serait due aux activités minières ou industrielles présentes ou passées selon l’Autorité nationale de l’eau (ANA).</p>
<h2>La désalinisation, fausse bonne idée ?</h2>
<p>La multiplication des conflits et la raréfaction de cette ressource mettent en péril les activités minières et demandent aux entreprises du secteur d’anticiper, de s’adapter et d’innover.</p>
<p>En réponse au défi de l’eau, ces dernières cherchent notamment à réduire leur consommation en améliorant l’efficacité de leurs procédés d’exploitation ou de transformation. Le développement d’un procédé innovant d’extraction directe du lithium adapté aux eaux des salars d’Argentine par <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/innovation-et-industrie/nos-expertises/climat-et-environnement/metaux-critiques-et-terres-rares/nos-solutions">IFP Energies Nouvelles et Eramet</a> illustre par exemple ce type de défis. L’entreprise chilienne SQM, spécialisée dans le lithium souhaite ainsi grâce à ses innovations réduire sa consommation en eau de 30 % d’ici 2030.</p>
<p><a href="https://www.cochilco.cl/Listado%20Temtico/2020%2010%2030%20Consumo%20de%20agua%20en%20la%20mineria%20del%20cobre%20al%202019_version%20final.pdf">Dans l’industrie du cuivre</a>, l’amélioration des processus de recyclage de l’eau a permis de faire passer la part d’eau recyclée dans la consommation totale du secteur de 72,7 à 76,4 % entre 2018 et 2019.</p>
<p>Une autre option connaît un franc succès dans la région ces dernières années : le recours à la désalinisation. Cochilco (la Commission chilienne du cuivre) estime ainsi que l’utilisation d’eau de mer <a href="https://www.cochilco.cl/Listado%20Temtico/2020%2010%2030%20Consumo%20de%20agua%20en%20la%20mineria%20del%20cobre%20al%202019_version%20final.pdf">devrait plus que tripler</a> à l’horizon 2029.</p>
<p>La <a href="https://www.mckinsey.com/industries/metals-and-mining/our-insights/desalination-is-not-the-only-answer-to-chiles-water-problems">viabilité d’une telle stratégie</a> interroge toutefois dans la mesure où les installations de pompage, de traitement de l’eau de mer et d’acheminement de l’eau sur des milliers de kilomètres à travers les Andes supposent des investissements ainsi qu’une consommation en matériaux et en énergie conséquente. En bref, un procédé énergivore et à forte intensité matière.</p>
<p>L’exploitation des aquifères grâce aux procédés de forage est une autre des possibilités exploitées pour faire face au manque d’eau. Début 2020, au plus fort de la sécheresse australienne, Glencore optait ainsi pour cette dernière solution <a href="https://www.wsj.com/articles/australia-is-dry-as-a-bone-and-miners-need-water-to-stay-afloat-11579170604">afin d’alimenter en eau</a> sa mine CSA de cuivre située en <a href="https://www.wsj.com/articles/australia-is-dry-as-a-bone-and-miners-need-water-to-stay-afloat-11579170604">Nouvelle-Galles du Sud</a>. Là aussi, ces forages effectués pour exploiter des eaux souterraines déjà menacées interrogent.</p>
<h2>L’empreinte eau, un indicateur mal connu</h2>
<p>Dans ce contexte, l’enjeu de la consommation en eau devrait faire l’objet d’une sensibilisation plus importante auprès des citoyens pour aller dans le sens d’une plus grande sobriété. Il est notamment incarné par la notion d’empreinte eau, qui pour une population donnée correspond à la quantité d’eau utilisée sur le territoire pour répondre à l’ensemble de ses besoins. Elle incorpore ainsi, en plus de l’eau du robinet consommée, celle nécessaire à la production des biens et des services produits sur le territoire national mais également importés.</p>
<p>L’empreinte eau des citoyens des pays de l’OCDE est, en moyenne, plus élevée que celle des pays hors-OCDE. Celle d’un Français est par exemple supérieure à 200m3/habitant/an alors qu’elle est de 167m3/habitant/an au niveau mondial.</p>
<p>Plus encore, il s’avère que l’empreinte eau française est environ trois fois supérieure au volume d’eau consommé à l’échelle domestique. À l’instar de l’empreinte carbone, une large portion du bilan en eau d’un français vient du fait que la consommation d’eau pour produire les biens et services importés en France est supérieure à celle des biens et services exportés de France.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=346&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=346&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=346&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=435&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=435&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=435&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Comparaison international des volumes d’eau consommée par personne et de l’empreinte eau, moyenne 1995–2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">D’après les données de base de données EXIOBASE3.7 ; MTES, 2020</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette non-prise en compte de l’empreinte eau accentue le décalage entre la perception de l’usager sur sa consommation et la réalité des impacts de son mode de vie sur la ressource en eau. Cette perception est d’autant plus aggravée qu’il existe une forte tolérance vis-à-vis des <a href="https://www.novethic.fr/actualite/environnement/eau/isr-rse/en-france-20-du-reseau-d-eau-fuit-et-c-est-un-probleme-ecologique-148759.html">fuites d’eau potable des canalisations</a> (environ 20 % de l’eau serait perdue) par les citoyens et les opérateurs, évitant à ces derniers d’investir massivement dans la maintenance des infrastructures.</p>
<p>Comme pour la sobriété énergétique ou en matériaux, une modification des comportements d’achats est nécessaire et elle passera par une meilleure information du consommateur avec, par exemple, un étiquetage obligatoire du contenu en eau des produits.</p>
<h2>Recycler les minerais</h2>
<p>L’empreinte environnementale relative à l’eau des minerais recyclés est bien inférieure à celle des minerais directement extraits du sous-sol. La consommation en eau peut être divisée par 5 dans le cas des terres rares, par 10 dans le cas du cuivre ou même par 20 dans le cas du cobalt. Lorsque l’on sait que <a href="https://globalewaste.org/">seulement 42,5 % du total des déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE)</a> ont été recyclés au sein de l’Union européenne à 28 en 2019, la promotion de la collecte et du recyclage apparaît être un levier intéressant à mobiliser.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=229&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=229&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=229&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=288&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=288&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=288&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Quantité d’eau utilisée pour l’extraction de minerai ou la réutilisation de déchets de l’industrie minière.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sverdrup and Koca, 2016</span></span>
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</figure>
<p>La mise en place par les pouvoirs publics de politiques publiques allant dans le sens d’une économie circulaire pourrait par ailleurs être porteuse de bénéfices allant au-delà de la réduction de la pression sur les ressources.</p>
<p>Selon l’Institut de l’économie circulaire, elle permettrait la <a href="https://institut-economie-circulaire.fr/wp-content/uploads/2018/01/2015_iec_etude_emploi.pdf">création ou le renforcement de filières créatrices d’emplois</a>, argument d’autant plus pertinent dans le contexte de la crise économique générée par la pandémie de la Covid-19. Elle permettrait également de renforcer la souveraineté de l’État français et plus largement des pays de l’Union européenne dans leur approvisionnement en métaux critiques.</p>
<p>Enfin, appuyer la recherche et l’innovation autour des procédés industriels de pointe est également un levier pour améliorer la gestion de l’eau dans le secteur tout en consolidant le rayonnement des entreprises françaises à l’international.</p>
<h2>L’or bleu : bien commun ou bien privé ?</h2>
<p>L’industrie minière, mais également les populations vont aussi devoir faire face à l’augmentation de l’incertitude autour des conditions d’accès à l’or bleu. On voit en effet deux phénomènes antagonistes se développer.</p>
<p>D’une part, on observe un mouvement de marchandisation de la ressource en eau dont la dernière manifestation hautement symbolique est <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/les-contrats-futurs-sur-leau-sechangent-pour-la-premiere-fois-a-la-bourse-de-chicago-1388069">l’introduction d’un contrat à terme sur l’eau</a> sur le Chicago Mercantile Exchange fin 2020.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1202085416909836294"}"></div></p>
<p>D’autre part, certaines populations ou collectivités revendiquent l’eau en tant que <a href="https://news.un.org/fr/story/2010/07/190352-lassemblee-generale-declare-que-lacces-leau-potable-est-un-droit-fondamental">droit humain fondamental</a> et entendent s’opposer à l’accaparement de celle-ci par le secteur privé.</p>
<p>Parmi les pays évoqués ici, le Chili est un exemple évocateur. Plébiscité par le peuple chilien, le <a href="https://dialogochino.net/en/climate-energy/38578-chile-opens-the-door-for-an-ecological-constitution/">projet de nouvelle constitution</a> pourrait redonner à l’eau, privatisée depuis 1981, le statut de bien commun, ce qui engendrera des incertitudes pour le secteur minier.</p>
<p>Ce mouvement de réappropriation de l’eau en tant que bien public est également observable dans certains pays occidentaux. C’est par exemple ce qu’il s’est passé à Paris avec la remunicipalisation du service public de l’eau en 2009 et, depuis 2010, la régie Eau de Paris en assure toute la distribution.</p>
<p>Bien qu’elle soit un modeste usager d’eau à côté du secteur agricole, l’industrie minière devra, comme tous les autres secteurs, composer dans un monde où le spectre de la <a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/water-action-decade/">crise de l’eau redoutée par les Nations-Unies</a> risque de devenir bien réel et où chaque goutte d’eau consommée comptera.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/154969/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuel Hache a reçu des financements de l'Agence nationale de la recherche (ANR) pour le projet Generate (Géopolitique des énergies renouvelables et analyse prospective de la transition énergétique) entre 2018 et 2020. Il est chercheur associé au laboratoire Economix de l’Université Paris Nanterre et directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Charlène Barnet et Gondia Sokhna Seck ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Les technologies bas-carbone nécessaires à la transition énergétique ne sont pas seulement gourmandes en métaux, mais également en eau.Emmanuel Hache, Économiste et prospectiviste, IFP Énergies nouvelles, Auteurs historiques The Conversation FranceCharlène Barnet, Économiste, IFP Énergies nouvelles Gondia Sokhna Seck, Spécialiste en modélisation et analyse des systèmes énergétiques, IFP Énergies nouvelles Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1517752020-12-17T19:35:11Z2020-12-17T19:35:11ZSobriété : à quand un Yuka pour comparer les matériaux dans nos produits ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/375655/original/file-20201217-17-1ghcxtt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une consommation durable passe notamment par une information claire sur les contenus en matériaux de nos achats. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/young-man-stands-behind-his-laptop-1051249994">shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Dans un article récent, <a href="https://theconversation.com/pourquoi-les-etiquettes-energie-ont-elles-encore-change-150785">Corinne Faure et Joachim Schleich</a> s’interrogeaient sur les changements opérés sur les étiquettes énergétiques des produits électroménagers, ces adhésifs censés guider les consommateurs dans leurs achats pour accélérer le déploiement des produits les moins énergivores. En parallèle des politiques d’intégration des énergies renouvelables, la recherche d’efficacité énergétique est au centre des préoccupations actuelles des politiques européennes dans le cadre de la dynamique de transition énergétique.</p>
<p>En 2007, l’Union européenne avait fixé un objectif d’efficacité énergétique de <a href="https://www.europarl.europa.eu/factsheets/fr/sheet/69/efficacite-energetique">20 % en 2020</a>, objectif revu à la hausse en 2018 dans la politique « Une énergie propre pour tous les Européens » avec une cible de 32,5 % en 2030. Si de nombreuses politiques européennes ou nationales se focalisent sur la question énergétique, la question des matériaux de la transition et plus globalement de nos consommations de matériaux dans la vie quotidienne est souvent reléguée au second plan.</p>
<p>Pourtant, le seul secteur de l’extraction et de la production des métaux contribuerait à environ 16 % de la consommation énergétique mondiale. En outre, selon un rapport publié en 2019 par l’<a href="https://www.oecd.org/environment/waste/highlights-global-material-resources-outlook-to-2060.pdf">OCDE</a>, la consommation mondiale de matériaux (métaux, énergies fossiles, biomasse, matériaux non métalliques), évaluée à 33 kg par jour et par personne, devrait être portée à environ 45 kg à l’horizon 2060. Et l’ensemble des zones économiques mondiales devrait être touché.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374411/original/file-20201211-23-1xu599u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374411/original/file-20201211-23-1xu599u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=291&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374411/original/file-20201211-23-1xu599u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=291&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374411/original/file-20201211-23-1xu599u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=291&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374411/original/file-20201211-23-1xu599u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=366&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374411/original/file-20201211-23-1xu599u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=366&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374411/original/file-20201211-23-1xu599u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=366&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Croissance du PIB et croissance de la consommation de matériaux entre 2011 et 2060.</span>
<span class="attribution"><span class="source">OCDE</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Les travaux réalisés sur les matériaux de la transition énergétique à <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/enjeux-et-prospective/decryptages/les-metaux-transition-energetique">IFP énergies nouvelles</a> ont notamment permis de mettre en exergue l’importance de certains métaux pour les technologies bas-carbone et ont mis en évidence des <a href="https://theconversation.com/pourquoi-parle-t-on-de-criticite-des-materiaux-105258">criticités</a> différenciées selon les matériaux.</p>
<p>Ainsi, en l’absence de technologies de rupture, le <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/article/cuivre-transition-energetique-metal-essentiel-structurel-et-geopolitique">cuivre</a> et le <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/article/cobalt-transition-energetique-quels-risques-dapprovisionnements">cobalt</a> pourraient être fortement critiques à l’horizon 2050 dans des scénarios climatiques ambitieux, au contraire de métaux plus traités dans l’actualité quotidienne comme le lithium et les terres rares.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/374544/original/file-20201211-16-1aarneq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374544/original/file-20201211-16-1aarneq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374544/original/file-20201211-16-1aarneq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=116&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374544/original/file-20201211-16-1aarneq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=116&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374544/original/file-20201211-16-1aarneq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=116&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374544/original/file-20201211-16-1aarneq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=145&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374544/original/file-20201211-16-1aarneq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=145&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374544/original/file-20201211-16-1aarneq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=145&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Ratio maximum de la demande cumulée de matériaux à l’horizon 2050 rapporté aux ressources prouvées en 2010. Les chiffres se lisent de la manière suivante : pour le cobalt, dans un scénario 4 °C, la demande cumulée mondiale représentera 64 % des ressources prouvées mondiales en 2010, contre 83,2 % dans un scénario 2 °C.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs</span></span>
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</figure>
<p>Au-delà de la question de la criticité se pose la question de la place des matériaux et des matières premières en général dans l’économie et dans la perception des citoyens, lors de leurs actes d’achats quotidiens.</p>
<h2>Les matières premières, une préoccupation cyclique</h2>
<p>Objet central de l’économie à travers l’allocation des ressources, les matières premières ont été le centre de préoccupations au XVIII<sup>e</sup> et XIX<sup>e</sup> siècle des premiers classiques (Malthus, Ricardo) et de certains marginalistes, notamment Jevons avec son ouvrage <em>The Coal Question</em> qui mit en évidence la notion d’effet rebond. Elles sont réapparues à la fin des années 1960 avec la question de l’épuisement des ressources naturelles dans les préoccupations du Club de Rome.</p>
<p>Dans le contexte des Trente Glorieuses (1945-1975) qui avait vu une hausse rapide du niveau de vie dans les pays développés et une utilisation massive des ressources dans le processus de reconstruction et d’urbanisation, les travaux du Club de Rome étaient apparus comme divergentes du paradigme économique d’abondance des matières premières, négociables à faible coût au niveau mondial.</p>
<p>Commandé en 1970 et publié en 1972, le rapport Meadows, <a href="https://clubofrome.org/publication/the-limits-to-growth/"><em>Les limites à la croissance</em></a>, avait exposé, pour la première fois, un risque de pénurie de matières premières sur la base de scénarios à long terme. Le rapport trouvera une résonance particulière avec les évènements observés sur les marchés de matières premières agricoles et énergétiques durant la décennie 1970, et suscitera des interrogations plus larges en matière de politiques publiques avec la mise en avant du concept global de sécurité d’approvisionnement.</p>
<h2>Le XXIᵉ siècle, libéré de la question ?</h2>
<p>Toutefois, les marchés de matières premières vont avoir tendance à disparaître des préoccupations majeures des industriels et des économistes durant la décennie 1980, avec la baisse des prix généralisée. Un nouveau changement de paradigme s’installe durant les années 1990, symbolisé par la montée en puissance du secteur des nouvelles technologies de l’information et des communications (NTIC). La dématérialisation progressive des économies et leur tertiarisation devaient, croyait-on à l’époque, marquer la fin de la dépendance aux matières premières.</p>
<p>Enfin libérée, l’économie mondiale allait, via Internet et la « nouvelle économie », s’épanouir en s’émancipant du contenu matières de ses approvisionnements, et ce d’autant plus que les prix des matières premières avaient touché, en cette fin de siècle, les niveaux les plus bas jamais enregistrés. La crise asiatique avait ainsi provoqué l’effondrement des prix du pétrole à moins de 10 dollars le baril, alors que dans le même temps, certaines sociétés des NTIC voyaient leur valorisation multipliée par 100 en quelques semaines sur la seule perspective de gains futurs. Cet « oubli » de la question des matières premières aura notamment pour conséquence un désintérêt des investisseurs pour le secteur minier et un mouvement profond de rationalisation des principales activités industrielles, particulièrement dans le secteur des métaux non-ferreux.</p>
<h2>Les matériaux critiques, enjeu de la transition</h2>
<p>L’entrée de la Chine dans l’Organisation mondiale du commerce en décembre 2001 et son modèle d’industrialisation durant la décennie 2000 sont l’occasion d’un retour de la préoccupation à l’égard des matières premières dans l’économie planétaire.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1055000305820143616"}"></div></p>
<p>La dynamique de transition énergétique actuelle place également les matières premières au centre du jeu économique et géopolitique mondial. Avec le déploiement des technologies bas-carbone (éolien, solaire et stockage) et en raison de leur contenu en matériaux plus important que les technologies traditionnelles (centrales et véhicules thermiques), la transition énergétique contribuerait à une hausse marquée de la demande en matériaux et pourrait bouleverser la géopolitique des marchés de matières premières. Dans ce contexte, les politiques publiques de mobilité soutenable et d’investissements dans les filières du recyclage apparaissent essentielles.</p>
<p>Les politiques de recyclage constituent par exemple un levier fondamental pour la réduction de la criticité sur les métaux. Elles permettent un double dividende stratégique en diminuant les importations de matériaux (et donc le déficit de la balance commerciale) et les impacts environnementaux. Les matériaux issus du recyclage enregistrent en effet une baisse relative de la consommation en énergie, en eau et une décrue des émissions de gaz à effet de serre (GES) pour la production de métaux.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/374413/original/file-20201211-13-1nbnkx4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374413/original/file-20201211-13-1nbnkx4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374413/original/file-20201211-13-1nbnkx4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=235&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374413/original/file-20201211-13-1nbnkx4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=235&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374413/original/file-20201211-13-1nbnkx4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=235&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374413/original/file-20201211-13-1nbnkx4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=296&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374413/original/file-20201211-13-1nbnkx4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=296&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374413/original/file-20201211-13-1nbnkx4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=296&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Quantité d’eau et d’énergie utilisée pour l’extraction de minerai ou la réutilisation de déchets de l’industrie minière.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sverdrup and Koca, 2016</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Pour un Yuka des matériaux</h2>
<p>L’action publique doit ainsi favoriser l’ensemble des leviers permettant de diminuer les pressions sur les ressources en informant les consommateurs sur l’importance de leurs décisions. <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2016/10/01/le-sulfureux-parcours-du-telephone-portable-des-mines-aux-filieres-clandestines-de-dechets_5006655_3244.html">Un article publié dans <em>Le Monde</em> en 2016</a> pointait du doigt que « sur les 25 millions de téléphones portables mis sur le marché en France chaque année, seuls 15 % étaient collectés pour être réparés, réemployés ou recyclés ».</p>
<p>À l’heure actuelle, l’encouragement à la sobriété matériaux devrait être central dans l’accompagnement du citoyen dans le contexte de transition bas carbone. La notion bas carbone n’est pourtant pas associée dans la perception des acteurs économiques et des décideurs à la minimisation de la consommation de matériaux. Or cet enjeu est essentiel pour aller vers une société globalement sobre. D’un comparateur de contenu à celui d’un affichage obligatoire pour les produits de consommation courante, diverses initiatives peuvent être mises en place. Ces actions nécessiteraient l’établissement d’une méthodologie claire à l’image de celle développée par Yuka dans l’alimentation.</p>
<p>Ces initiatives auraient en outre un effet bénéfique sur la compréhension des politiques européennes sur le sujet. En septembre 2020, la Commission européenne a publié <a href="https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_20_1542">sa liste des matériaux critiques</a> pour l’Union européenne. Mise à jour tous les 3 ans depuis 2011, elle donne les matériaux considérés comme critiques pour l’Union et les politiques à instaurer. Mais qui en dehors des industriels et des milieux économiques sait que 30 matériaux font désormais l’objet d’études au niveau européen, contre 14 en 2011 ? Ce type d’initiatives rapprocherait l’Union européenne et le citoyen en informant ce dernier de façon claire.</p>
<p>Plus généralement, les politiques de transition écologique ne pourront faire abstraction d’une véritable réflexion sur la sobriété, non seulement énergétique mais également en matériaux. Le bannissement du jetable, une législation sur le délit d’obsolescence programmée sont autant de politiques indispensables pour s’acheminer vers une planète plus sobre en ressources. La dynamique collective et citoyenne devrait pouvoir s’appréhender avec une information claire sur les contenus en matériaux de nos achats, nous transformant ainsi en <em>consom’acteur</em> responsable.</p>
<p>En parallèle de narratifs prospectifs sur un monde sobre en ressources à l’horizon 2050, la sobriété de nos sociétés exige une politique d’apprentissage des différents acteurs, entreprises et consommateurs.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/151775/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuel Hache a reçu des financements de l'Agence nationale de la recherche (ANR) pour le projet GENERATE (Géopolitique des énergies renouvelables et analyse prospective de la transition énergétique) entre 2018 et 2020. Il est chercheur associé au laboratoire Economix de l’université Paris Nanterre et directeur de recherche à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Charlène Barnet et Gondia Sokhna Seck ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>On parle beaucoup de sobriété énergétique, mais la sobriété des matériaux est aussi essentielle pour diminuer la pression sur les ressources.Emmanuel Hache, Économiste et prospectiviste, IFP Énergies nouvelles, Auteurs historiques The Conversation FranceCharlène Barnet, Economiste, IFP Énergies nouvelles Gondia Sokhna Seck, Spécialiste modélisation et analyses des systèmes énergétiques, IFP Énergies nouvelles Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1430202020-11-12T21:52:16Z2020-11-12T21:52:16ZL’espace pour tous… ou seulement pour quelques-uns ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/360333/original/file-20200928-22-vyyzu4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=18%2C134%2C2048%2C1207&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Explorer l’espace ou l’exploiter ? L’atterrissage de la capsule du _New Shepard_, une fusée privée.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nasafo/47085559171/in/photostream/">NASA / Fickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=243&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=243&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=243&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=305&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=305&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=305&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la prochaine Fête de la science qui aura lieu du 2 au 12 octobre prochain en métropole et du 6 au 16 novembre en outremer et à l’international et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition aura pour thème : « Planète Nature ? ».</em></p>
<p><em>Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
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<p>Il y a 60 ans, le président américain John F. Kennedy justifiait d’engager son pays dans la course à la Lune « non pas parce que c’est facile, mais parce que c’est difficile ». À cette raison morale, s’ajoutaient évidemment d’autres enjeux, plus politiques : sortir « par le haut » d’une tension diplomatique extrême entre son pays et l’Union soviétique ; prouver que les États-Unis possédaient le leadership dans un domaine technologique hautement stratégique.</p>
<p>Aujourd’hui, les motifs pour une nation ou une entreprise de s’engager dans un programme spatial ont changé : il est question d’utiliser l’espace « au profit de l’humanité » ou d’en explorer le voisinage le plus proche le plus proche de la Terre ; des raisons qui suscitent l’enthousiasme, mais aussi les critiques.</p>
<h2>Les deux faces de l’espace</h2>
<p>L’utilité des armadas de satellites qui tournent au-dessus de nos têtes n’est plus à prouver : de nos communications à nos déplacements en passant par nos prévisions météorologiques, nous dépendons très étroitement de ces fidèles compagnons, tout comme en dépendent nos systèmes économiques, énergétiques ou encore de défense. Si la multiplication de ces objets spatiaux et des <a href="https://theconversation.com/pollution-dans-lespace-et-si-on-taxait-144744">débris qu’ils génèrent</a> peut être inquiétante, leur raison d’être n’est fondamentalement plus discutable. Les activités spatiales « tournées vers la Terre », comme la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/T%C3%A9l%C3%A9d%C3%A9tection">télédétection</a> et la météorologie, les télécommunications et la géolocalisation, sont devenues une évidence à gérer, en même temps qu’une responsabilité à assumer.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/-LL1MBpTN4w?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Les débris en orbite autour de la Terre.</span></figcaption>
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<p>En revanche, celles qui s’intéressent à l’espace lointain, à l’exploration de la Lune, de Mars et du système solaire, voire à l’exploitation des ressources que pourraient contenir ces corps célestes sont désormais l’objet de critiques à la hauteur de l’enthousiasme qu’elles ont suscité par le passé et continuent à susciter.</p>
<h2>Une ruée vers l’espace</h2>
<p>Cette direction des activités spatiales profite de l’émergence et du succès d’entreprises privées dont SpaceX, Blue Origin ou Virgin Galactic sont les plus médiatiques. Après de nombreuses tentatives qui se sont soldées par des échecs, il a fallu attendre la fin des années 2000, un « coup de pouce » de la part de l’administration américaine et les gains astronomiques réalisés par les GAFAM pour que le secteur privé prenne vraiment pied dans le domaine spatial.</p>
<p>Elon Musk, Jeff Bezos et Richard Branson sont ainsi devenus les icônes du <a href="https://www.cnrseditions.fr/catalogue/physique-et-astrophysique/le-nouvel-age-spatial/">« NewSpace »</a>, de ce nouvel intérêt pour l’espace, avec un commun leitmotiv : celui de rendre l’espace accessible à un plus grand nombre de Terriens. Qu’il s’agisse de développer le <a href="https://theconversation.com/tourisme-spatial-quand-les-plaisirs-de-quelques-uns-polluent-la-planete-de-tous-146552">tourisme spatial</a>, d’envisager la colonisation de Mars, d’installer les industries polluantes dans l’espace pour réserver la Terre au séjour des humains, d’exploiter les <a href="https://theconversation.com/a-qui-appartiennent-mars-la-lune-et-leurs-ressources-naturelles-141406">ressources minières de la Lune et des astéroïdes</a>, les acteurs du NewSpace ne manquent pas d’idées pour donner à l’entreprise spatiale un nouvel élan.</p>
<p>Et l’accueil réservé à leurs projets comme à leurs premières réalisations est à la hauteur de leurs ambitions : la <a href="https://www.france24.com/fr/20151222-spacex-lanceur-fusee-blue-origins-musk-bezos-course-espace">course entre SpaceX et Blue Origin</a> pour mettre au point la première fusée réutilisable, l’<a href="https://www.sciencesetavenir.fr/espace/question-de-la-semaine-ou-se-trouve-la-tesla-envoyee-par-elon-musk-dans-l-espace_138527">envoi de la Tesla d’Elon Musk</a> avec un mannequin à son bord et au son de la musique de David Bowie, le <a href="https://www.lemonde.fr/sciences/article/2020/05/30/spacex-apres-un-report-mercredi-le-decollage-de-la-capsule-spatiale-confirme-pour-samedi-soir_6041289_1650684.html">vol de la première capsule spatiale américaine</a> depuis la fin du programme des navettes sont les étapes les plus marquantes de l’écriture d’un nouveau chapitre de l’odyssée de l’espace, suivi par de jeunes aficionados enthousiastes.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/360331/original/file-20200928-20-7245lg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/360331/original/file-20200928-20-7245lg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/360331/original/file-20200928-20-7245lg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/360331/original/file-20200928-20-7245lg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/360331/original/file-20200928-20-7245lg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/360331/original/file-20200928-20-7245lg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/360331/original/file-20200928-20-7245lg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le booster de la fusée réutilisable New Shepard, de la compagnie Blue Origin.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nasafo/32143859417/in/photostream/">NASA/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
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<p>Les agences spatiales « traditionnelles » profitent de ce regain d’intérêt pour l’espace : les missions d’exploration du système solaire ou celles de la station spatiale internationale font à nouveau la une des médias.</p>
<h2>Dénigrement</h2>
<p>Dans le même temps, l’espace fait l’objet de discours de dénigrement, de <em>bashing</em> écrivent les anglophones. Ce n’est pas nouveau : déjà en juillet 1969, quelques heures avant le lancement de la mission Apollo 11, des activistes menés par le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ralph_Abernathy">pasteur Ralph Abernathy</a>, un ami de Martin Luther King, avaient protesté contre le coût du programme lunaire américain évalué à l’époque à plus de 25 milliards de dollars (l’équivalent de 200 à 240 milliards de dollars actuels). Les tracts qu’ils distribuaient à la foule des curieux et des touristes étaient éloquents : ils montraient la misère des minorités aux États-Unis, le peu de progrès de la lutte contre l’inégalité raciale, alors que la course à la Lune, à l’espace et, pourquoi pas demain, vers Mars drainait déjà d’exorbitants budgets.</p>
<p>Aujourd’hui, les arguments du dénigrement des activités spatiales n’ont guère changé ; à leur coût et à l’oubli des affaires terriennes s’ajoutent le souci de l’environnement de la Terre et la pollution des orbites autour d’elle. Il est temps, <a href="https://usbeketrica.com/fr/article/tourisme-spatial-s-envoyer-betement-en-l-air-n-est-pas-ethique">expliquent ces opposants</a>, de revenir sur Terre, d’oublier les rêves de fuir une planète épuisée, saccagée pour rejoindre des paradis célestes et artificiels. Plus concrètement, estiment-ils, il est temps de poser un moratoire sur le tourisme spatial ou la conquête de Mars.</p>
<h2>Le risque est de confondre exploration et conquête, observation scientifique et colonisation</h2>
<p>Le dénigrement n’est pas un acte anodin : au-delà de la critique, il sous-entend l’acte de noircir une réputation, de rabaisser, de calomnier une personne, une institution, une activité. Était-ce la volonté d’Abernathy en 1969 ? Est-ce celle de ses héritiers modernes ? Rien n’est vraiment sûr. À l’époque, le militant américain avait finalement ordonné le retrait des manifestants, comme pour reconnaître être dépassé par l’enjeu de l’exploration de la Lune.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/starlink-les-dommages-collateraux-de-la-flotte-de-satellites-delon-musk-135330">Starlink : les dommages collatéraux de la flotte de satellites d’Elon Musk</a>
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<p>Tels sont de fait l’enjeu et l’intérêt de l’actuel mouvement qui pourrait être qualifié, sans doute trop facilement, de « space bashing ». Nous devons examiner, analyser la signification de l’entreprise spatiale, débutée avec le lancement de <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/espace/il-y-a-60-ans-spoutnik-le-tout-premier-satellite-se-desintegrait-dans-l-atmosphere_119601">Spoutnik</a> en 1957, de ses apports scientifiques et techniques, économiques et politiques.</p>
<p>Mais aussi prendre la mesure de ses ambiguïtés : à bien regarder les projets du NewSpace ou ceux des agences spatiales, le risque n’est-il pas constant de confondre exploration et conquête, observation scientifique et tourisme ou colonisation ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/360322/original/file-20200928-22-133e6sn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/360322/original/file-20200928-22-133e6sn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/360322/original/file-20200928-22-133e6sn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/360322/original/file-20200928-22-133e6sn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/360322/original/file-20200928-22-133e6sn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/360322/original/file-20200928-22-133e6sn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/360322/original/file-20200928-22-133e6sn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Vue d’artiste de la mission Gaia, de l’ESA, qui doit cartographier la Voie Lactée.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.esa.int/var/esa/storage/images/esa_multimedia/images/2004/05/gaia_mapping_the_stars_of_the_milky_way/10200416-8-eng-GB/Gaia_mapping_the_stars_of_the_Milky_Way_pillars.jpg">ESA</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Il y a 50 ans, en déclarant l’espace <a href="https://theconversation.com/a-qui-appartiennent-mars-la-lune-et-leurs-ressources-naturelles-141406">bien commun de l’humanité et les corps célestes son patrimoine</a>, le droit spatial n’a pas ouvert l’espace aux activités débridées des Terriens les plus entreprenants ou les plus riches. Il a plutôt, et d’une manière presque prophétique, reconnu et instauré l’idée d’une commune responsabilité vis-à-vis de ce qui reste d’abord la réalisation d’un des plus beaux rêves de l’humanité : celui de s’arracher à la gravité terrestre, de s’approcher des étoiles. Ne dénigrons pas trop vite ce qui a pu nous élever ; demandons-nous plutôt comment poursuivre ce rêve, tout en respectant la communauté humaine à laquelle nous appartenons, la Terre de laquelle dépend notre survie.</p>
<p>Qu’il s’agisse de l’explorer ou de l’exploiter, l’espace se trouve aujourd’hui à la croisée de deux chemins : celui d’une responsabilité commune et partagée et celui d’un individualisme débridé et profiteur. Le choix de la route à emprunter nous appartient ; il n’est pas aisé à faire. Mais, à bien y réfléchir, n’est-il pas celui que nous devrons aussi accomplir pour notre planète Terre ?</p>
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<p><em>Nous proposons cet article dans le cadre du Forum mondial Normandie pour la Paix organisé par la Région Normandie les 23 et 24 septembre 2022 et dont The Conversation France est partenaire. Pour en savoir plus, visiter le site du <a href="https://normandiepourlapaix.fr/">Forum mondial Normandie pour la Paix</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143020/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jacques Arnould ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La conquête de l’espace se renouvelle, et nous sommes à la croisée de deux chemins : celui d’une responsabilité commune et partagée et celui d’un individualisme débridé et profiteur.Jacques Arnould, Expert éthique, Centre national d’études spatiales (CNES)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1437012020-08-18T17:55:10Z2020-08-18T17:55:10ZLe volume de déchets électroniques explose et leur taux de recyclage reste ridicule<p>Chaque année, le volume total d’équipements électriques et électroniques que l’on utilise dans le monde <a href="https://globalewaste.org/news/surge-global-waste/">augmente de 2,5 millions de tonnes</a>. Téléphones, radios, jouets, ordinateurs – s’ils disposent d’une alimentation électrique ou d’une batterie, ils rejoindront une montagne croissante de « déchets électroniques » après utilisation.</p>
<p>Rien qu’en 2019, le monde en a généré 53,6 millions de tonnes. Ce qui représente 7,3 kilogrammes par personne et l’équivalent en poids de 350 bateaux de croisière. L’Asie a produit la part du lion – 24,9 millions de tonnes – suivie par l’Amérique (13,1) et l’Europe (12), tandis que l’Afrique et l’Océanie en ont généré respectivement 2,9 et 0,7 million.</p>
<p>D’ici à 2030, cette masse annuelle planétaire devrait atteindre les 74,7 millions de tonnes. En seulement 16 ans, elle aura donc presque doublé. Ce qui en fait le flux de déchets domestiques à la croissance la plus rapide au monde, alimentée principalement par le fait que davantage de personnes achètent des produits électroniques ayant un cycle de vie plus court et offrant moins de possibilités de réparation.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/346615/original/file-20200709-87086-1pb82yb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/346615/original/file-20200709-87086-1pb82yb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/346615/original/file-20200709-87086-1pb82yb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/346615/original/file-20200709-87086-1pb82yb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/346615/original/file-20200709-87086-1pb82yb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/346615/original/file-20200709-87086-1pb82yb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/346615/original/file-20200709-87086-1pb82yb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les produits électriques et électroniques mis au rebut constituent le flux de déchets domestiques qui connaît la croissance la plus rapide au monde.</span>
<span class="attribution"><span class="source">UNU/Unitar Scycle/Yassyn Sidki</span></span>
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<p>Ces produits contribuent à améliorer les conditions de vie, et il est bon que de plus en plus de gens aient les moyens de les acquérir. Mais la demande mondiale en flèche outrepasse désormais notre capacité à les recycler et à les détruire en toute sécurité. Une fois obsolètes et délaissés, ces objets finissent en partie par s’accumuler dans l’environnement, polluant les habitats et nuisant à la faune et aux personnes.</p>
<h2>L’Europe meilleure élève en matière de recyclage</h2>
<p>Seuls 17,4 % des déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) de 2019 ont formellement été collectés et recyclés. Depuis 2014, le volume recyclé n’a progressé que de 1,8 million de tonnes par an. La quantité totale de déchets générés a augmenté quant à elle de 9,2 millions de tonnes sur la même période. Au même moment, le volume de DEEE non documentés s’est accru.</p>
<p>Dans une <a href="https://globalewaste.org/">nouvelle recherche</a>, nous avons établi que l’Europe dispose du meilleur taux de collecte et de recyclage, puisqu’il couvre environ 42,5 % du total de déchets électroniques générés en 2019. L’Asie apparaît en second avec 11,7 %, les Amériques et l’Océanie affichent un taux proche de 9,4 % et 8,8 %, et l’Afrique recense le taux le plus bas, de 0,9 %. Ce qui se passe avec les 82,6 % restants n’est pas clair.</p>
<p>Dans les pays à forts revenus, environ 8 % des DEEE semblent jetés dans la poubelle de déchets, tandis que 7 à 20 % sont exportés. Dans les pays à faibles revenus, le panorama est plus flou, puisque ces déchets sont principalement gérés de façon informelle.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/346690/original/file-20200709-26-1en9wzl.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/346690/original/file-20200709-26-1en9wzl.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/346690/original/file-20200709-26-1en9wzl.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=444&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/346690/original/file-20200709-26-1en9wzl.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=444&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/346690/original/file-20200709-26-1en9wzl.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=444&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/346690/original/file-20200709-26-1en9wzl.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=558&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/346690/original/file-20200709-26-1en9wzl.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=558&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/346690/original/file-20200709-26-1en9wzl.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=558&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Comment le monde a géré ses déchets électriques et électroniques en 2019.</span>
<span class="attribution"><span class="source">UNU/Unitar Scycle/Nienke Haccoû</span></span>
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<h2>Une menace sanitaire et environnementale</h2>
<p>Sans un système fiable de gestion des déchets, les substances toxiques contenues dans les objets électroniques comme le mercure, les retardateurs de flamme bromés, les chlorofluorocarbures et les hydrochlorofluorocarbures sont plus susceptibles d’être libérées dans l’environnement et de nuire aux personnes qui vivent, travaillent et jouent dans les « parcs à ferraille » où ils atterrissent.</p>
<p>Le mercure est présent dans les écrans d’ordinateur et les éclairages fluorescents, mais l’exposition à cette substance peut provoquer des lésions cérébrales. Nous avons estimé que ces flux non documentés de déchets électroniques en contiennent environ 50 tonnes, rejetées dans la nature chaque année.</p>
<p>Les DEEE ne constituent pas seulement un risque sanitaire. Ils contribuent aussi directement au réchauffement climatique. Les équipements d’échange de température mis au rebut, que l’on trouve dans les réfrigérateurs et les climatiseurs, libèrent lentement des gaz à effet de serre. On estime qu’environ 98 millions de tonnes s’échappent des parcs à ferraille chaque année, soit 0,3 % des émissions mondiales du secteur de l’énergie.</p>
<h2>Une opportunité économique négligée</h2>
<p>Hormis ces toxines, les déchets électroniques contiennent aussi de précieux métaux et matières premières très utiles comme l’or, l’argent, le cuivre et le platine. La valeur totale de tous ces composants a été évaluée pour l’année 2019 (de façon approximative) à 57 milliards de dollars (48 milliards d’euros) – une somme supérieure au PIB de la plupart des pays.</p>
<p>Mais tandis que seuls 17,4 % des DEEE ont été collectés et recyclés en 2019, seuls 10 milliards de dollars ont été récupérés d’une façon responsable sur le plan environnemental. Seules 4 millions de tonnes de matières premières disponibles au recyclage.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/346609/original/file-20200709-87080-10upcy7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/346609/original/file-20200709-87080-10upcy7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/346609/original/file-20200709-87080-10upcy7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/346609/original/file-20200709-87080-10upcy7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/346609/original/file-20200709-87080-10upcy7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/346609/original/file-20200709-87080-10upcy7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/346609/original/file-20200709-87080-10upcy7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les déchets électroniques abandonnés ne constituent pas seulement un problème environnemental, ils peuvent aussi représenter une opportunité économique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">UNU/Unitar Scycle/Yassyn Sidki</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Heureusement, le monde s’éveille lentement à l’ampleur du problème. À la fin 2019, 78 pays couvrant 71 % de la population mondiale disposaient d’une politique de gestion de ce type de déchets ou étaient en train d’en mettre une en place – une augmentation de 5 % par rapport à 2017. Mais dans nombre de ces pays, les politiques ne sont toujours pas juridiquement contraignantes et la réglementation n’est pas appliquée.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=336&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=336&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=336&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les gouvernements du monde entier promulguent de nouvelles lois pour mieux gérer les déchets électroniques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">UNU/Unitar Scycle/Nienke Haccoû</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En tant que chercheurs, nous continuerons à surveiller l’évolution des déchets électroniques dans le monde pour accompagner la création d’une économie circulaire et de sociétés plus durables. Nous espérons que nos efforts pour évaluer ce problème grandissant inciteront les gouvernements à agir aussi rapidement que le défi l’exige, en adoptant et en mettant en œuvre des lois qui augmentent drastiquement la proportion de déchets recyclés en toute sécurité.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été traduit de l’anglais par <a href="https://theconversation.com/profiles/nolwenn-jaumouille-578077">Nolwenn Jaumouillé</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143701/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Vanessa Forti est membre de la United Nations University (UNU) / United Nations International Training and Research (UNITAR) - SCYCLE.</span></em></p>La demande de produits électriques et électroniques dans le monde alimente l’augmentation fulgurante des déchets qui en découlent, encore trop peu recyclés.Vanessa Forti, Programme Associate at Sustainable Cycles (UNU-ViE-SCYCLE), United Nations UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1414062020-07-13T21:38:49Z2020-07-13T21:38:49ZÀ qui appartiennent Mars, la Lune et leurs ressources naturelles ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/346911/original/file-20200710-189208-161znwo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C671%2C2895%2C2042&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les États-Unis tentent de renvoyer des hommes sur la Lune à l'horizon 2024. Prochain objectif : Mars. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/CzSoJM4OuO8">Martin Adams / Unsplash </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Ce 16 juillet, la <a href="https://www.emiratesmarsmission.ae/">mission émiratie <em>Hope</em></a> devrait s’élèver vers Mars, suivie par les missions <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tianwen-1">chinoise <em>Tianwen-1</em></a> et <a href="https://mars.nasa.gov/mars2020/">américaine <em>Mars 2020</em></a> dont les lancements sont prévus les 23 et 30 juillet. Les États-Unis préparent aussi un retour de l’humanité sur la Lune dès 2024, et des acteurs privés entrent dans le jeu spatial, comme SpaceX. Ce renouveau de la conquête spatiale pose, de façon pressante, la question de la propriété des planètes et des astéroïdes, ainsi que des conditions de leur exploitation.</p>
<h2>Exploiter les ressources naturelles des corps célestes</h2>
<p>La perspective de voir l’humanité exploiter les corps célestes pour leurs ressources naturelles peut sembler <a href="https://diacritik.com/2019/12/02/la-conquete-spatiale-comme-faillite-symbolique/">provocatrice</a> à l’heure où les méfaits liés à la surexploitation des ressources de notre planète font l’objet d’une prise de conscience mondiale.</p>
<p>Or, le <a href="https://www.nasa.gov/specials/artemis/">programme américain Artemis</a>, qui vise le retour de l’être humain sur la Lune à l’horizon 2024 – un prélude à l’objectif ultime que constitue la conquête de Mars, postule que l’exploration viable et durable de la Lune et de Mars repose sur <a href="https://www.nasa.gov/what-is-artemis">l’utilisation de ses ressources naturelles</a>.</p>
<p>De nombreuses problématiques juridiques accompagnent cette activité – en premier lieu : l’exploitation des ressources spatiales est-elle possible d’un point de vue juridique, et qui décide en la matière ?</p>
<h2>Un cadre juridique international incertain</h2>
<p>Elaboré concomitamment à la conquête lunaire des années 60 et 70, dans le cadre d’un comité spécialisé de l’ONU dédié aux <a href="https://onu-vienne.delegfrance.org/BAS-et-CUPEEA">utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique</a>, le droit international de l’espace trouve sa première expression contraignante dans le <a href="https://treaties.un.org/Pages/showDetails.aspx?objid=0800000280128cbd&clang=_fr">Traité de l’espace</a> de 1967, de son vrai nom « traité sur les principes régissant les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes ».</p>
<p>Ce traité ratifié par la majeure partie des États, dont l’ensemble des principales puissances spatiales – États-Unis, Russie, Chine, France et Japon – prévoit comme principe premier la <em>liberté</em> : liberté d’exploration et liberté d’utilisation de l’espace sont consacrées comme étant « l’apanage de l’humanité tout entière ».</p>
<p>Le traité encadre toutefois cette liberté, afin de préserver l’espace et les corps célestes d’un certain nombre de vicissitudes, comme la guerre et la prédation territoriale. L’exploration et l’utilisation de l’espace ne pourront ainsi être entreprises qu’à des fins pacifiques – ce qui, de l’interprétation quasi générale des États, n’interdit pas l’envoi de satellites destinés à leur défense nationale.</p>
<p>Ainsi, toute forme d’appropriation des corps célestes est prohibée par le traité. Alors que l’exploitation industrielle et commerciale de ressources naturelles semble nécessairement reposer sur l’appropriation des ressources des corps célestes, est-il possible, et licite, de procéder à l’appropriation des <em>ressources</em> sans méconnaître le principe de non-appropriation des corps célestes qui les contiennent ?</p>
<h2>La Lune, patrimoine commun de l’humanité ?</h2>
<p>Un autre <a href="https://treaties.un.org/Pages/ViewDetails.aspx?src=IND&mtdsg_no=XXIV-2&chapter=24&lang=fr">traité international</a> a établi en 1979 deux principes supplémentaires. D’une part, la Lune, les autres corps célestes et leurs ressources naturelles constituent « le patrimoine commun de l’humanité » et ces ressources ne peuvent dès lors « devenir la propriété d’États, d’organisations internationales […], d’organisations nationales ou de personnes physiques ». D’autre part, les États s’engagent à établir « un régime international régissant l’exploitation des ressources naturelles de la Lune [et des autres corps célestes] lorsque cette exploitation sera sur le point de devenir possible », devant notamment permettre une « répartition équitable entre tous les États parties des avantages qui résulteront de ces ressources, une attention spéciale étant accordée aux intérêts et aux besoins des pays en développement ». L’orientation quasi collectiviste de ce second accord a largement compromis son acceptation par la communauté internationale, à commencer par les États-Unis : à l’heure actuelle, seuls dix-huit États sont parties à l’accord de 1979, parmi lesquels ne figure aucune grande puissance spatiale.</p>
<h2>Les États-Unis dégainent les premiers</h2>
<p>Au début des années 2010, la perspective d’une exploitation des ressources spatiales prend corps aux États-Unis, entre la création de sociétés privées, par exemple <a href="https://www.planetaryresources.com/">Planetary Resources</a>, et la diffusion de <a href="https://cei.org/issue-analysis/homesteading-final-frontier">rapports de think tanks</a> sur la propriété privée dans l’espace.</p>
<p>Le <a href="https://www.congress.gov/bill/114th-congress/house-bill/2262">Space Act</a> américain est adopté en novembre 2015 et autorise les citoyens américains impliqués dans la récupération de ressources spatiales à se prévaloir de ces ressources, ce qui inclut leur possession, leur propriété, leur transport, leur utilisation et leur vente. Les États-Unis considèrent ce faisant que cette activité n’est <a href="https://www.congress.gov/114/crpt/hrpt153/CRPT-114hrpt153.pdf">pas contraire au principe de non-appropriation du Traité de l’espace</a>, dans la mesure où les ressortissants américains ne s’approprieraient pas les corps célestes eux-mêmes mais uniquement leurs ressources, une fois extraites.</p>
<p>Une partie importante des experts juridiques <a href="https://www.thespacereview.com/article/3355/1">considère</a> en revanche qu’il est douteux que le principe de non-appropriation des corps célestes tolère l’appropriation de leurs ressources.</p>
<p>Il semble difficile de trancher de façon ferme ce débat juridique. La problématique de l’exploitation des ressources naturelles dans l’espace ne se posait pas à l’époque de l’élaboration du Traité de l’espace, et ses dispositions lapidaires en matière de non-appropriation ne permettent pas d’appréhender finement les questionnements juridiques actuels.</p>
<h2>D’autres États embrayent, l’ONU dans l’ornière</h2>
<p>En 2017, le Luxembourg imita le pionnier américain et adopta une <a href="http://legilux.public.lu/eli/etat/leg/loi/2017/07/20/a674/jo">loi</a> statuant explicitement que « les ressources de l’espace sont susceptibles d’appropriation ». En février 2020, les Émirats arabes unis, acteur montant du secteur spatial, adoptèrent une <a href="https://www.space.gov.ae/Page/20122/20171/Federal-Law-on-Regulating-The-Space-Sector-">législation analogue</a>.</p>
<p>L’ONU se saisit en 2016 de la question, mais les travaux sont limités pour l’heure à un échange de vues entre États et le comité concerné ne dispose d’aucun mandat qui lui permettrait d’entamer de quelconques travaux à caractère normatif. De fait, les points de vue des États sont pour le moins contrastés, certains d’entre eux, comme la Russie, exprimant une opposition farouche aux initiatives nationales tendant à réglementer unilatéralement l’activité.</p>
<p>Plusieurs États, dont la France, considèrent que le comité de l’ONU constitue l’enceinte compétente et devrait conduire des travaux approfondis sur la question de l’encadrement de l’exploitation des ressources spatiales. Las, la proposition faite par plusieurs États européens de constituer un groupe de travail <em>ad hoc</em> n’a pu pour l’heure aboutir, faute de consensus.</p>
<p>Cette paralysie relative et l’incapacité à entreprendre une initiative normative multilatérale, que l’on peut malheureusement constater au fil du temps sur l’ensemble des nouvelles problématiques du droit des activités spatiales, laisse le champ libre aux initiatives nationales et à une certaine forme d’unilatéralisme.</p>
<h2>L’initiative des <em>Artemis Accords</em> : la déchéance du droit international de l’espace ?</h2>
<p>D’autant que les États-Unis viennent de passer la vitesse supérieure : un <a href="https://www.whitehouse.gov/presidential-actions/executive-order-encouraging-international-support-recovery-use-space-resources/"><em>Executive Order</em></a> (décret présidentiel) du 6 avril 2020 consacre la position juridique exprimée par le Space Act de 2015 et réaffirme le droit des citoyens américains à récupérer, posséder et utiliser les ressources spatiales. Ce texte exprime en particulier la volonté de trouver des positions communes sur l’exploitation des ressources spatiales et de conclure des accords en ce sens avec les pays affinitaires, ce qui fut concrétisé quelques semaines plus tard par l’annonce des <a href="https://www.nasa.gov/specials/artemis-accords/index.html"><em>Artemis Accords</em></a>. </p>
<p>Les <em>Artemis Accords</em> consisteront <em>a priori</em> en des accords bilatéraux entre les États-Unis et ses partenaires, ayant pour objet d’établir des principes communs régissant les activités civiles d’exploration et d’utilisation de la Lune et certainement, <em>in fine</em>, de Mars. La signature de ces accords par les États concernés constituera à n’en pas douter un préalable à leur implication dans le programme américain d’exploration. L’exploitation des ressources spatiales figure naturellement parmi les problématiques qui seront traitées par ces accords, de même que la question épineuse des <a href="https://www.thespacereview.com/article/3962/1"><em>safety zones</em></a> que la NASA estime nécessaires à l’activité.</p>
<p>La NASA a rappelé à plusieurs reprises que la gouvernance des activités sur les corps célestes devra être en pleine conformité avec le droit international existant, en particulier le Traité de l’espace de 1967. À l’heure où les États-Unis dénoncent un certain nombre d’accords internationaux et remettent en cause la légitimité de certaines organisations et entités internationales, comme l’Organisation mondiale de la Santé ou la <a href="https://www.courrierinternational.com/article/justice-internationale-les-etats-unis-menacent-les-magistrats-de-la-cpi">Cour pénale internationale</a>, il peut être rassurant de constater qu’ils n’entendent pas expressément s’affranchir des règles qui ont permis jusqu’alors une utilisation pérenne et pacifique de l’espace extra-atmosphérique par les États et les opérateurs spatiaux.</p>
<p>Mais la formalisation de principes communs autour d’un centre de gravité américain constitue toutefois une certaine remise en cause du multilatéralisme onusien, le comité de l’ONU sur l’espace étant jusqu’ici l’unique enceinte d’élaboration des normes internationales applicables aux activités spatiales. En comblant de fait certains silences du Traité de l’espace de 1967, les <em>Artemis Accords</em> feront certainement œuvre créatrice de normes juridiques pour les activités spatiales, en lieu et place d’éventuels instruments internationaux multilatéraux. De plus, la capacité de négociation des futurs partenaires des États-Unis sera très certainement réduite à la portion congrue. Les <em>Artemis Accords</em> consisteront essentiellement <em>in fine</em> en une forme de contrat d’adhésion à la vision américaine de la régulation des activités humaines sur les corps célestes.</p>
<p>Les premières réactions que cette initiative suscite au niveau international sont parfois vives, comme celle du directeur général de l’agence spatiale russe Roscosmos, <a href="https://www.thetimes.co.uk/article/us-plan-for-moon-mining-is-like-iraq-invasion-says-russia-sqgvpvqvt">qui la place au même niveau qu’une invasion de l’Irak ou de l’Afghanistan</a> et promettent de riches échanges à l’ONU entre puissances spatiales.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/141406/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Mariez ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>À l’heure du renouveau de la conquête spatiale, la question de la propriété se pose pour tous les corps célestes, dont Mars.Julien Mariez, Chef du service juridique, Centre national d’études spatiales (CNES)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1389742020-06-16T20:52:44Z2020-06-16T20:52:44ZCes métaux qui viennent à manquer, un enjeu pour les sociétés de demain<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/342183/original/file-20200616-23243-zxdylq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=19%2C31%2C2568%2C1909&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le minerai de zinc peut contenir d'importantes ressources en métaux critiques utiles pour les nouvelles technologies. Ici, microscopie de minerai d’Arre-Anglas (Pyrénées).</span> <span class="attribution"><span class="source">Alexandre Cugerone</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>De nombreux métaux sont indispensables pour les technologies du XXI<sup>e</sup> siècle, et notamment de nombreuses technologies « vertes », par exemple les batteries, <a href="https://ec.europa.eu/environment/ecoap/about-eco-innovation/experts-interviews/32_fr#:%7E:text=Les%20cellules%20solaires%20photovolta%C3%AFques%20font,la%20production%20d%E2%80%99%C3%A9nergie%20solaire.&text=Les%20cellules%20solaires%20%C3%A0%20base,de%2080%20%25%20des%20applications%20satellitaires.">panneaux solaires</a>, aimants d’<a href="https://theconversation.com/des-chars-aux-eoliennes-irremplacables-terres-rares-64788">éoliennes</a>, ou encore la <a href="https://www.journaldunet.com/solutions/cloud-computing/1031260-reseaux-de-telecommunications-de-nouvelle-generation-plus-durables-et-ecologiques/">fibre optique</a>. Certains de ces métaux sont dits <a href="https://ec.europa.eu/transparency/regdoc/rep/1/2017/FR/COM-2017-490-F1-FR-MAIN-PART-1.PDF">« critiques »</a>, car leur approvisionnement est incertain.</p>
<p>Nous cherchons à comprendre comment se concentrent certains métaux critiques dans la croûte terrestre pour les extraire plus facilement, afin d’inspirer de nouvelles méthodes d’exploration et de valorisation écoresponsable de certains déchets issus de l’exploitation minière passée, notamment en France et en Europe.</p>
<p>En effet, on trouve ces métaux critiques (<a href="https://theconversation.com/des-chars-aux-eoliennes-irremplacables-terres-rares-64788">terres rares</a>, <a href="http://www.mineralinfo.fr/sites/default/files/upload/documents/Fiches_criticite/fichecriticitecobalt-180102.pdf">cobalt</a>, lithium, <a href="http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-63169-FR.pdf">platinoïdes</a>, germanium, etc.) soit en infimes quantités, disséminés dans les minerais de base comme, par exemple le <a href="http://alternatives-projetsminiers.org/wp-content/uploads/docs/Minerais/Cadmium_Germanium.pdf">zinc et le cuivre</a>, soit, parfois, dans des minéraux hyperconcentrés, plus petits qu’un dixième de millimètre. Pour bien comprendre cette différence fondamentale avec un exemple de tous les jours, considérons un seul gâteau au chocolat, avec du chocolat fondu réparti uniformément dans la pâte à gâteau, et des pépites de chocolat. Sous quelle forme le chocolat est-il le plus facile à récupérer pour les gourmands une fois le gâteau réalisé ? Les pépites bien sûr ! Le principe est le même dans notre étude : il est plus facile d’extraire les métaux critiques dans des petits minéraux concentrés (nos pépites de chocolat) plutôt que disséminés dans le minerai de base (le chocolat fondu dans la masse du gâteau).</p>
<h2>L’approvisionnement difficile des métaux « de demain »</h2>
<p>De nombreuses substances métalliques naturelles sont toujours exploitées aujourd’hui, comme les <a href="https://www.lajauneetlarouge.com/wp-content/uploads/2012/07/647-page-016-019.pdf">métaux de base et métaux ferreux</a> (cuivre, zinc, fer, manganèse, etc.) ou les métaux précieux (or, argent, platine, etc.). Les <a href="https://www.dunod.com/sciences-techniques/quels-metaux-pour-demain-enjeux-ressources-minerales">« métaux technologiques »</a>, comme le <a href="https://theconversation.com/les-materiaux-de-la-transition-energetique-le-lithium-105429">« lithium »</a>, les <a href="https://lejournal.cnrs.fr/billets/les-terres-rares-et-apres">« terres rares »</a>, le tungstène, ou d’autres métaux rares (germanium, gallium, indium), ont été rendus indispensables par la révolution numérique, et sont aussi cruciaux pour le développement de « technologies vertes ».</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourquoi-parle-t-on-de-criticite-des-materiaux-105258">Pourquoi parle-t-on de « criticité » des matériaux ?</a>
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<p>Si nous continuons à extraire ces métaux technologiques, au rythme actuel et dans ces conditions, alors que la plupart sont considérés comme <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52017DC0490&from=EN">critiques</a>, nous <a href="https://theconversation.com/critical-minerals-are-vital-for-renewable-energy-we-must-learn-to-mine-them-responsibly-131547">pourrions être confrontés</a> à une crise d’approvisionnement et à des effets environnementaux importants.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/340874/original/file-20200610-34692-1s5vp77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/340874/original/file-20200610-34692-1s5vp77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=321&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/340874/original/file-20200610-34692-1s5vp77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=321&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/340874/original/file-20200610-34692-1s5vp77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=321&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/340874/original/file-20200610-34692-1s5vp77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=404&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/340874/original/file-20200610-34692-1s5vp77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=404&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/340874/original/file-20200610-34692-1s5vp77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=404&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Utilisations actuelles et futures des métaux rares associés aux gisements de zinc.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Parmi ces métaux critiques, les éléments du groupe des <a href="https://theconversation.com/terres-rares-notre-ultra-dependance-a-la-chine-et-comment-en-sortir-125855">« terres rares »</a>, mais aussi le <a href="https://www.planete-energies.com/fr/medias/decryptages/la-batterie-lithium-ion-comment-ca-marche">lithium</a> et le <a href="http://www.mineralinfo.fr/sites/default/files/upload/documents/Plaquettes/rp-63626-fr-cobalt.pdf">cobalt</a>, sont essentiels aux nouvelles technologies automobiles et informatiques. Le <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fchem.2020.00230/full">tungstène</a> est précieux dans certains <a href="http://www.mineralinfo.fr/sites/default/files/upload/documents/Fiches_criticite/fichecriticitetungstene-publique170921.pdf">alliages aéronautiques</a>. Des métaux rares comme le gallium, le germanium et l’indium <a href="https://books.openedition.org/septentrion/15969?lang=fr">sont essentiels</a> à la fabrication de la fibre optique, de panneaux solaires et de systèmes électroniques, et pourraient améliorer les rendements des <a href="https://www.lesnumeriques.com/voiture/batterie-a-electrolyte-solide-revolution-pour-l-automobile-a3395.html">batteries lithium-ion</a>. Ces derniers sont extraits principalement en sous-produit du sulfure de zinc, dans lequel ils sont dilués.</p>
<h2>Où sont concentrés les métaux rares et comment mieux les extraire ?</h2>
<p>Notre <a href="https://doi.org/10.1130/G46791.1">étude</a> montre que les métaux rares comme le germanium, le gallium et l’indium peuvent exister en infimes quantités, disséminés dans des cristaux de métaux de bases, mais aussi dans de petits minéraux porteurs hyperconcentrés. Nous avons mis en évidence que la déformation du minerai de sulfure de zinc, contemporaine de la formation de chaînes de montagnes, favorise la re-concentration du germanium dans des minéraux hyperconcentrés (nos pépites de chocolat) au cœur des chaînes de montagnes, ici, les Pyrénées.</p>
<p>En conséquence, il devient très intéressant de rechercher les sites miniers où la déformation par des processus géologiques naturels a joué un rôle de « concentrateur naturel » de métaux rares.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/340873/original/file-20200610-34696-1n80pro.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/340873/original/file-20200610-34696-1n80pro.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/340873/original/file-20200610-34696-1n80pro.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/340873/original/file-20200610-34696-1n80pro.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/340873/original/file-20200610-34696-1n80pro.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/340873/original/file-20200610-34696-1n80pro.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=576&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/340873/original/file-20200610-34696-1n80pro.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=576&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/340873/original/file-20200610-34696-1n80pro.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=576&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Une veine de sulfure de zinc (ZnS) riche en germanium et naturellement déformée dans une ancienne mine à Arre dans les Pyrénées Atlantiques. A. Affleurement d’une veine de sulfure de zinc (modifié depuis Cugerone et coll., 2019). B. Déformation naturelle dans le sulfure de zinc au microscope, matérialisée par la présence de nombreux plans de schistosité. C. Minéraux à germanium associés au sulfure de zinc.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Ceci peut s’appliquer aux métaux rares énoncés, mais pourrait aussi apparaître pour d’autres métaux technologiques, comme les éléments du groupe des terres rares. De nombreux sites miniers ont anciennement été exploités pour leurs métaux de base (uniquement) et, actuellement, de nombreux terrils ou résidus miniers provenant de cette exploitation passée pourraient être valorisés. Il pourrait exister d’importantes concentrations en métaux rares dans ces terrils miniers, notamment dans les Pyrénées, le Massif central mais aussi <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00501-018-0818-5">dans les Alpes</a>, ou dans les montagnes scandinaves du nord de l’Europe, et peuvent constituer de potentielles ressources en métaux rares.</p>
<p>De plus, quand un métal rare, par exemple le germanium, est disséminé dans le minerai, l’<a href="https://www.techniques-ingenieur.fr/base-documentaire/materiaux-th11/elaboration-et-recyclage-des-metaux-non-ferreux-42370210/metallurgie-du-germanium-m2372/">extraction est complexe</a>, nécessite des processus hydrométallurgiques lourds et induit de fortes pertes durant son <a href="https://pubs.usgs.gov/periodicals/mcs2020/mcs2020-germanium.pdf">extraction</a>. Par contre, si ces métaux rares sont concentrés (comme des pépites de chocolat dans un gâteau) dans de petits minéraux, leur séparation par divers procédés mécaniques pourrait être améliorée et être mieux exploitée, que ce soit dans les sites miniers actuels ou dans certains terrils ou déchets miniers.</p>
<p>Notre étude suggère des techniques rapides et peu coûteuses qui permettent de caractériser la texture minéralogique (taille et forme des cristaux) et la chimie d’échantillons de roches et d’y localiser les métaux rares et évaluer leur concentration et leur extraction potentielle.</p>
<h2>Sortir de la dépendance européenne quasi totale des ressources métalliques ?</h2>
<p>Actuellement, le marché mondial en métaux rares (gallium, germanium, indium) mais aussi en <a href="https://doi.org/10.1016/j.oregeorev.2015.09.019">terres rares</a> est dominé par la Chine. La dépendance de l’Europe est <a href="http://www.editionslesliensquiliberent.fr/livre-La_guerre_des_m%C3%A9taux_rares-9791020905741-1-1-0-1.html">quasi totale</a> vis-à-vis de l’Asie, des Amériques et de l’Afrique. Mais quelles seraient les conséquences économiques sur nos industries si une crise d’approvisionnement en ressources minérales, notamment en « métaux technologiques », se présentait entre nos pays ou continents ?</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/340879/original/file-20200610-34670-nxwxva.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/340879/original/file-20200610-34670-nxwxva.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/340879/original/file-20200610-34670-nxwxva.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/340879/original/file-20200610-34670-nxwxva.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/340879/original/file-20200610-34670-nxwxva.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/340879/original/file-20200610-34670-nxwxva.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/340879/original/file-20200610-34670-nxwxva.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/340879/original/file-20200610-34670-nxwxva.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Carte des pays représentant la plus grande part du marché mondial pour chaque métal dit « critique » par l’Union européenne. Les métaux rares sont encadrés en rouge. (situation en 2017).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://ec.europa.eu/growth/sectors/raw-materials/specific-interest/critical_en">Commission européenne</a></span>
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</figure>
<h2>Impacts sociaux et environnementaux</h2>
<p>L’importation de ressources métallifères pour nos technologies du XXI<sup>e</sup> siècle, dont certains avec une forte connotation « verte » ou « renouvelables », en provenance de pays lointains avec des règles environnementales d’exploitation <a href="https://ecoinfo.cnrs.fr/2010/08/06/4-quels-impacts/">laxistes ou inexistantes</a>, est particulièrement paradoxale.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/terres-rares-notre-ultra-dependance-a-la-chine-et-comment-en-sortir-125855">Terres rares : notre ultra-dépendance à la Chine (et comment en sortir)</a>
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<p>Une solution ne serait-elle pas d’extraire nos métaux, par exemple dans certains terrils miniers riches en métaux critiques en Europe, de manières écoresponsables et respectueuses de l’environnement ? Nous avons besoin de mieux comprendre comment les minéraux critiques se forment et se concentrent en termes chimiques et géologiques, ce qui pourrait permettre de revisiter certaines anciennes mines et valoriser leurs terrils miniers.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/138974/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Alexandre Cugerone a reçu des financements provenant d'une bourse de thèse BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) dans le cadre du projet RGF (Référentiel géologique de France), et d'un financement du programme Tellus de l'INSU-CNRS.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Bénédicte Cenki-Tok receives funding from European Union’s Horizon 2020 research and innovation program under grant agreement No 793978. She has received funding from French national program “Référentiel Géologique de France” (RGF-Pyrénées) of the French Geological Survey (Bureau de Recherches Géologiques et Minières; BRGM), and the INSU-CNRS Tellus program. She is affiliated with The University of Sydney as well. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Emilien OLIOT ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Il reste des métaux dans les mines et déchets miniers. La géologie permet de comprendre comment mieux valoriser ces déchets et assurer l’approvisionnement en éléments chimiques rares mais cruciaux.Alexandre Cugerone, Docteur en Géosciences - Géologie Minière/Métallogénie - Géosciences Montpellier, Université de MontpellierBénédicte Cenki, Associate professor at Montpellier University, EU H2020 MSCA visiting researcher at Sydney University, Université de MontpellierEmilien OLIOT, Maître de Conférences en Sciences de la Terre, Université de MontpellierLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1385812020-06-01T17:20:57Z2020-06-01T17:20:57ZRelocaliser l’extraction des ressources minérales : en Europe, les défis du lithium<p>Parmi les défis qui nous attendent dans « le monde d’après », celui de la relocalisation de notre approvisionnement en matières premières minérales est essentiel. La France <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/sites/default/files/2018-10/chiffres-stats761-matieres-mai2016.pdf">importe en effet</a> près de 100 % de ses métaux et une partie significative des roches et minéraux de son industrie. </p>
<p>En ce début août 2021, on apprenait ainsi que le groupe Renault venait de <a href="https://www.caradisiac.com/renault-signe-un-accord-pour-un-approvisionnement-en-lithium-191369.htm">signer un partenariat avec Vulcan Energy</a>, une société australienne incontournable dans la production de lithium, pour sécuriser la fourniture de ce métal essentiel à la fabrication des batteries de véhicules électriques. </p>
<h2>Un cas d’école</h2>
<p>Outre une plus grande indépendance stratégique, cette relocalisation serait aussi un moyen d’améliorer les bilans carbone et économique de notre appareil productif. Importer du bout du monde des matières premières à grand renfort de rejet de CO<sub>2</sub> n’est pas une solution durable et cette crise nous aidera peut-être à en prendre conscience.</p>
<p>Car les matières premières de la transition énergétique et digitale se trouvent en fait dans notre sous-sol, sous nos pieds. Ces métaux tels que le nickel, le cuivre, le cobalt, le lithium ou encore les terres rares, entrent notamment dans la composition des batteries de nos ordinateurs, tablettes, smartphones, mais surtout dans celles équipant les véhicules électriques. Les économistes s’accordent pour prédire une très forte augmentation de leur nombre dans le parc automobile dans les années à venir.</p>
<p>Le potentiel en <a href="http://www.mineralinfo.fr/">ressources minérales de la France</a> est très largement <a href="http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-68321-FR.pdf">sous valorisé à ce jour</a>. Le pays abrite en effet d’importantes ressources en roches et minéraux industriels ainsi que de nombreux métaux (tungstène, antimoine, or, plomb, zinc, germanium, cuivre, lithium et molybdène).</p>
<p>L’exemple du lithium est à ce titre un cas d’école. Malgré des ressources très conséquentes et des besoins grandissants, nous continuons d’importer massivement depuis l’autre bout du monde des métaux qui se trouvent sous nos pieds dans notre sous-sol. Aujourd’hui, le lithium est en effet raffiné principalement en Chine mais est produit massivement en Australie et au Chili.</p>
<p>En Europe, les principales ressources en Lithium sont <a href="http://www.frame.lneg.pt/wp-content/uploads/2019/06/FRAME-Newsletter-Issue-3.pdf">localisées</a> à <a href="https://mc-56397411-4872-452d-b48e-428890-cdn-endpoint.azureedge.net/-/media/Content/Documents/Operations/Jadar/RT-Jadar-Fact-sheet-EN.pdf">Jadar en Serbie</a>, au Portugal, en Espagne, en Finlande, en Autriche et dans le <a href="http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-68321-FR.pdf">Massif central en France</a> (granites de Beauvoir, de Montebras, etc.).</p>
<h2>Le sous-sol français riche en lithium</h2>
<p>Les ressources minérales contenant du lithium sont diverses et variées sur le <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0169136818308011">territoire national et européen</a>. Le lithium est contenu à différentes teneurs dans des roches telles que les granites à métaux rares, les pegmatites ou encore les minéraux argileux. Or, toutes ces ressources ne sont que très peu exploitées et valorisées à ce jour.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/338865/original/file-20200601-95032-1jqjizo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338865/original/file-20200601-95032-1jqjizo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338865/original/file-20200601-95032-1jqjizo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338865/original/file-20200601-95032-1jqjizo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338865/original/file-20200601-95032-1jqjizo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338865/original/file-20200601-95032-1jqjizo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338865/original/file-20200601-95032-1jqjizo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338865/original/file-20200601-95032-1jqjizo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Exemple de roche riche en lithium qui donne la couleur violette de cette roche appelée pegmatite composée de micas lithinifères,de feldspath et de quartz. Chédeville˗en˗Ambazac (Haute-Vienne). La pointe d’un marteau de géologue donne l’échelle.</span>
<span class="attribution"><span class="source">E. Gloaguen (BRGM)</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le <a href="http://wwwbrgm.fr">BRGM</a> a réalisé en 2018 un inventaire des <a href="http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-68321-FR.pdf">ressources en lithium métropolitaines</a>, qui a mis en lumière certaines sources de lithium dans des roches dont le potentiel de valorisation est certain, essentiellement dans le Massif central et le Massif armoricain. Elles ont notamment l’avantage d’associer le lithium à des roches et minéraux industriels comme les feldspaths, le quartz, le kaolin, ou à des métaux comme l’étain, le tantale ou le tungstène.</p>
<p>Si des procédés de traitement des minerais sont mis au point, la France pourrait être autonome pour le lithium (roche dure du Massif central et saumures géothermales d’Alsace) avec un potentiel dépassant les 200 000 t de lithium métal.</p>
<p>Comme la majorité de ses voisins européens, le France importe à ce jour en grandes quantités les métaux nécessaires à son industrie. Cette délocalisation des filières nous permet d’occulter les conditions d’extraction de ces substances. Ces procédés, si appliqués sans normes et contrôles, peuvent provoquer des dégâts sur le plan environnemental avec des rejets sauvages de déchets (effluents acides) et font généralement travailler des ouvriers sans leur garantir les normes de protection nécessaires. Ils posent également des problèmes en matière de <a href="https://theconversation.com/au-chili-changer-la-constitution-pour-repenser-lacces-aux-ressources-127460">partage et d’accès à l’eau potable</a> dans des zones désertiques, par exemple dans les salars d’Amérique du Sud.</p>
<p>Un des exemples le plus frappant est celui illustré dans l’ouvrage de Guillaume Pitron, <em>La guerre des métaux rares. La face cachée de la transition énergétique et numérique</em>. Il dénonce notamment les conditions sociales, d’hygiène et de sécurité des mines en Asie pour l’extraction des terres rares (essentiels à la fabrication des aimants), et insiste également sur les impacts environnementaux dévastateurs, notamment la pollution des sols et des eaux souterraines engendrée par des activités minières n’appliquant pas les règles et usages d’un développement durable.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1054904984075202561"}"></div></p>
<h2>Les défis technologiques de la relocalisation</h2>
<p>Pour envisager la relocalisation de cette filière en France, le premier enjeu est scientifique. Nos chercheurs (géologues, géochimistes, métallogénistes) travaillent à développer des méthodes pour mieux comprendre comment se forment ces ressources, à la fois pour une exploitation plus efficiente et pour découvrir des gisements cachés au plus proche des centres de consommation afin de réduire l’impact environnemental associé.</p>
<p>Par ailleurs, nous devrons déployer une capacité à développer des méthodes d’extraction pour les ressources minérales en lien avec notre géologie à l’échelle nationale. Si les ressources en lithium sont diverses, variées et distribuées de façon hétérogène dans notre sous-sol, les procédés industriels pour extraire le lithium des différents réservoirs géologiques ne sont pas pour l’instant tous opérationnels. Soit <a href="http://www.mineralinfo.fr/ecomine/marche-lithium-en-2020-enjeux-paradoxes">pour des raisons technologiques, soit pour des raisons de rentabilité</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338868/original/file-20200601-95065-1lkzjey.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338868/original/file-20200601-95065-1lkzjey.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=120&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338868/original/file-20200601-95065-1lkzjey.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=120&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338868/original/file-20200601-95065-1lkzjey.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=120&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338868/original/file-20200601-95065-1lkzjey.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=151&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338868/original/file-20200601-95065-1lkzjey.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=151&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338868/original/file-20200601-95065-1lkzjey.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=151&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le granite à métaux rares de Beauvoir, dans l’Allier, actuellement exploité pour le kaolin (2012).</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Melleton</span></span>
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<p>Cette transition énergétique passe donc par de l’innovation en matière de recherche et développement pour l’extraction de ces ressources minérales, à la fois pour optimiser les procédés existants en les rendant moins nocifs sur le plan environnemental et pour développer de nouvelles méthodes. Cette activité de recherche en lien avec le monde académique et universitaire peut être un levier de croissance très important pour l’ensemble de la filière à l’échelle de la France.</p>
<h2>Une filière encouragée par l’Europe</h2>
<p>Au niveau européen, l’Union œuvre à promouvoir la filière lithium en finançant des projets de recherche avec <a href="https://eitrawmaterials.eu/">l’Institut européen d’innovation et de technologie, section matières premières</a> au sein de projets comme le projet <a href="http://www.frame.lneg.pt/">H2020 GeoERA FRAME</a> sur les métaux critiques européens et à travers <a href="https://www.lithium-institute.eu/">l’Institut européen du Lithium</a> dont le BRGM est l’un des membres fondateurs.</p>
<p>Dans les prochains mois et années, de nombreux projets de fabrication d’usines de batteries (les « Gigafactory ») pourraient également voir le jour sur le Vieux continent. L’objectif à court terme serait de bâtir une filière européenne forte économiquement : une <a href="https://ec.europa.eu/growth/industry/policy/european-battery-alliance_fr">sorte « d’Airbus des batteries »</a>. Dans ce contexte, il est certain qu’il faudra diversifier les sources d’approvisionnement en lithium afin de faire face à une demande croissante.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/338866/original/file-20200601-95049-1ps0ae9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338866/original/file-20200601-95049-1ps0ae9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338866/original/file-20200601-95049-1ps0ae9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338866/original/file-20200601-95049-1ps0ae9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338866/original/file-20200601-95049-1ps0ae9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338866/original/file-20200601-95049-1ps0ae9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338866/original/file-20200601-95049-1ps0ae9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338866/original/file-20200601-95049-1ps0ae9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Pegmatite à spodumène de Mina Alberto, Espagne (2010).</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Melleton</span></span>
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<p>Pour cela, l’extraction de substances minérales contenues dans les eaux chaudes <a href="http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-55729-FR.pdf">appelées eaux géothermales</a> et situées dans le fossé rhénan à la frontière franco-allemande, constitue une piste intéressante. Ces eaux riches en sels minéraux sont actuellement exploitées pour la production d’électricité et de chaleur. Elles sont très souvent enrichies en lithium et autres métaux grâce aux interactions, aux échanges entre l’eau et la roche qui se produisent en profondeur.</p>
<p>Elles constituent une ressource de lithium dormante en Europe qui n’attend qu’à être valorisée. Il s’agit ici d’une valorisation gagnant-gagnant des ressources énergétiques de notre sous-sol : l’eau géothermale est pompée, va produire de l’électricité (la vapeur d’eau faisant tourner des turbines), peut aussi produire de la chaleur (échangeur thermique) et avant d’être réinjectée, les substances minérales seront <a href="https://www.brgm.fr/projet/eugeli-extraction-lithium-partir-saumure-geothermale-europe">extraites de cette eau salée</a>.</p>
<p>Pour les acteurs de la filière européenne, les enjeux des années à venir seront d’apprendre à produire localement, durablement et de façon plus vertueuse du lithium à partir de différentes sources géologiques. Cette diversification est essentielle mais ne doit pas occulter l’obligation d’augmenter nos capacités de recyclage pour ne pas dilapider nos ressources.</p>
<p>Enfin, une évolution de la prise en compte des enjeux environnementaux et sociaux locaux représente un passage obligé afin de redévelopper une activité minière en France et dans une partie de l’Europe.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/138581/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Millot a reçu des financements de l'EIT Raw Materials pour un projet de recherche (EuGeLi).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Eric Gloaguen a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche (ANR)</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jérémie Melleton a reçu des financements de l'EIT Raw Material pour un projet de recherche (Projet UpDeep). Jérémie Melleton est membre de la Société Géologique de France. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Blandine Gourcerol et Gaetan Lefebvre ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Le lithium fait partie des matériaux essentiels à la transition énergétique. En Europe, il est importé alors que le continent en abrite des ressources considérables.Romain Millot, Chercheur, géochimiste, BRGMBlandine Gourcerol, Chercheuse, BRGMEric Gloaguen, Researcher at BRGM and associated researcher at ISTO, BRGMGaetan Lefebvre, Chercheur, BRGMJérémie Melleton, Chercheur, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1388422020-05-29T17:13:54Z2020-05-29T17:13:54ZPenser l’après : Les limites physiques de la planète<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/338316/original/file-20200528-51445-7my5wn.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C150%2C1488%2C840&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La physique fixe des bornes à notre vie sur Terre.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/argonne/32229215831/in/photostream/">Sean M. Couch, MSU</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p><em>Les chercheuses et les chercheurs qui contribuent chaque jour à alimenter notre média en partageant leurs connaissances et leurs analyses éclairées jouent un rôle de premier plan pendant cette période si particulière. En leur compagnie, commençons à penser la vie post-crise, à nous outiller pour interroger les causes et les effets de la pandémie, et préparons-nous à inventer, ensemble, le monde d’après.</em></p>
<hr>
<p>Le confinement mis en place pour lutter contre la pandémie de Covid-19 a radicalement modifié nos vies en stoppant de nombreuses activités. Une des conséquences de cette crise sanitaire est la <a href="https://theconversation.com/covid-et-baisse-des-emissions-de-co-une-nouvelle-etude-fait-le-point-secteur-par-secteur-138971">diminution de nos émissions</a> de CO<sub>2</sub> la <a href="https://www.lemonde.fr/blog/huet/2020/05/11/covid-19-combien-de-co2-evite/">plus importante</a> depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale : <a href="https://arxiv.org/abs/2004.13614">7 % sur les quatre premiers mois de 2020</a>. Respecter l’objectif de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Accord_de_Paris_sur_le_climat">Accord de Paris</a> pour limiter le réchauffement à 1,5 °C nécessite une baisse des émissions équivalente à celle imposée par le Covid-19, mais <em>en continu</em> <a href="https://www.unenvironment.org/resources/emissions-gap-report-2019">durant les prochaines décennies</a>.</p>
<p>La pandémie a aussi révélé la fragilité de notre société. Quelles seraient les conséquences humaines d’une telle pandémie combinée avec un phénomène naturel extrême – <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/05/21/le-cyclone-amphan-devaste-l-inde-et-le-bangladesh_6040335_3244.html">ouragan</a>, <a href="https://www.franceculture.fr/environnement/2019-annee-sous-les-feux">incendie géant</a>, canicule – dont la probabilité et l’amplitude <a href="http://documents.irevues.inist.fr/handle/2042/56362">augmentent</a> à cause du réchauffement climatique ?</p>
<p>Il est grand temps de prendre des mesures face aux risques futurs – qui se cumuleront – et d’augmenter l’intensité des efforts consentis pour être en état d’y faire face. Deux oublis sont à l’origine de nos imprudences : l’oubli de principes de base de la physique et l’oubli des limites physiques de notre planète.</p>
<h2>La physique ne se laisse pas oublier</h2>
<p>L’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89nergie_(physique)">énergie</a> est une notion fondamentale de la physique, qui quantifie la capacité à transformer la matière. Déplacer un objet, le construire ou le détruire, le chauffer, et toute autre transformation, nécessitent de l’énergie, et d’autant plus d’énergie que la transformation est importante.</p>
<p>Depuis sa maîtrise du feu, l’humanité a domestiqué de nombreuses <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ressources_et_consommation_%C3%A9nerg%C3%A9tiques_mondiales">formes d’énergie</a>, classées en deux groupes : <a href="https://www.pourlascience.fr/sd/energie/energie-de-stock-ou-energie-de-flux-1973.php">énergies <em>de flux</em> et énergies <em>de stock</em></a>. Voici une analogie. En cas de soif, vous pouvez vous abreuver à une source – il est impossible de choisir son débit, mais elle coule en permanence. Avec une bouteille d’eau, l’eau peut être bue d’un coup ou progressivement, mais la quantité totale consommée est fixée par le stock initial – la taille de la bouteille.</p>
<p>Les énergies de flux sont le vent, le solaire, l’hydraulique au fil de l’eau, les courants marins et la géothermie. Elles ont une puissance limitée et nous devons l’accepter. Impossible de faire souffler le vent plus fort, ou de tirer du Soleil plus de lumière que la Terre n’en reçoit.</p>
<p>Les énergies de stocks sont les énergies fossiles – pétrole, gaz, charbon – et l’énergie nucléaire. Avec celles-ci, la contrainte est la quantité totale qui est disponible moyennant un effort considéré comme acceptable. En pratique, le débit d’énergie (la puissance) résultant de l’exploitation d’une énergie de stock est si grand que le rythme des transformations s’accroît considérablement tant que le stock n’atteint pas une valeur critique. À cause de la difficulté à estimer « ce qu’il reste dans le puits » (l’état du stock), il est fréquent d’être leurré par le mirage d’une source illimitée, alors qu’en réalité un stock utilisé finit par s’épuiser.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Différents types d’énergie, différentes contraintes.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-illustration/black-background-form-3d-illustration-rendering-797190190">Angelatriks/Shutterstock</a></span>
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</figure>
<p>Les matériaux extraits de la croûte terrestre utiles à nos sociétés, comme les métaux, forment aussi un stock. Or des <a href="https://www.pnas.org/content/112/20/6295">métaux importants</a> sont dispersés dans la roche avec des teneurs parfois aussi faibles que quelques grammes par tonne. <a href="https://ecoinfo.cnrs.fr/2014/09/03/2-lenergie-des-metaux/">Concentrer la matière</a> est une étape clé qui utilise d’énormes <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959652609003199">quantités d’énergie, souvent à haute puissance</a>. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959378017313031">90 milliards de tonnes de matériaux</a> sont extraits chaque année et l’état des stocks devient <a href="https://www.zeit.de/wissen/2015-06/ressourcen-rohstoffe.pdf">critique</a>. De plus, cette matière concentrée artificiellement n’est pas toujours bien recyclée : sur une soixantaine de métaux <a href="http://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/8702">34 ont un taux de recyclage inférieur à 1 %</a>, dont beaucoup sont demandés par les nouvelles technologies.</p>
<h2>Les trois limites de la planète : matière, énergie, environnement</h2>
<p>Matière, énergie et environnement forment un triptyque interconnecté et indissociable. Par exemple, transformer la matière grâce à l’énergie modifie l’environnement : directement par l’extraction et la production, indirectement par les déchets qui en résultent inéluctablement. Agir sur une seule des crises qui touchent ce triptyque aboutit souvent à aggraver les deux autres.</p>
<p>Il est désormais acquis que le <a href="https://ipbes.net/news/Media-Release-Global-Assessment-Fr">déclin rapide de la biodiversité</a> et le changement climatique menacent <a href="https://advances.sciencemag.org/content/6/19/eaaw1838">l’habitabilité de notre planète</a> et la survie à long terme de l’espèce humaine, requérant des <a href="https://theconversation.com/rapport-de-lipbes-sur-la-biodiversite-lheure-nest-plus-aux-demi-mesures-116473">actions urgentes</a>. <a href="http://vaclavsmil.com/2012/12/21/harvesting-the-biosphere-what-we-have-taken-from-nature/">L’empreinte de l’humanité sur la biosphère</a> prend de <a href="https://science.sciencemag.org/content/347/6223/1259855.abstract">multiples formes</a> et a considérablement augmenté depuis qu’aux énergies de flux utilisées traditionnellement se sont ajoutées les énergies de stock.</p>
<p>Nous entrons dans une période où nous disposerons sans doute de moins en moins d’énergie à cause de la <a href="https://www.lemonde.fr/blog/petrole/2019/02/04/pic-petrolier-probable-dici-a-2025-selon-lagence-internationale-de-lenergie/">raréfaction des stocks d’énergies fossiles</a>. Surtout, il est indispensable que nous en réduisions sensiblement notre consommation pour limiter le réchauffement climatique qui posera <a href="https://www.refletsdelaphysique.fr/articles/refdp/abs/2015/01/refdp201543p46/refdp201543p46.html">certainement des problèmes avant l’épuisement des stocks</a>. Développer le nucléaire pour compenser cette réduction <a href="https://www.refletsdelaphysique.fr/dossiers/255-l-electricite-nucleaire-questions-ouvertes-et-points-de-vue">n’est pas la solution idéale</a>, en particulier à cause des déchets.</p>
<p>Disposer de moins d’énergie, volontairement ou non, c’est effectuer des déplacements moins nombreux et moins rapides, produire moins d’objets manufacturés, réduire l’usage du numérique, altérer les services publics, bref avoir moins de capacités à affronter les catastrophes naturelles ou les effets de la société de consommation. Si l’on pense à la pandémie actuelle, cela veut dire moins de masques, et plus de difficulté à les laver.</p>
<p>On pourrait certes espérer que la solution passe par l’amélioration de l’efficacité de nos machines, les perfectionnant pour qu’elles rendent le même service en consommant moins d’énergie et de matière. Mais tant qu’on reste attaché aux énergies fossiles et aux hautes puissances, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_rebond_(%C3%A9conomie)">l’effet rebond</a> menace : un gain d’efficacité visant à réduire la consommation d’une machine en énergie ou en matière est souvent annulé par une augmentation de son usage et donc de sa consommation globale.</p>
<p>Certains rêvent d’aller chercher des <a href="https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/exploration-spacex-elon-musk-promet-million-personnes-mars-2050-79254/">régions habitables</a> ou des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Exploitation_mini%C3%A8re_des_ast%C3%A9ro%C3%AFdes">minerais</a> hors de notre planète. Une telle tentative détournerait à son profit des ressources d’énergie et de matière considérables, sans avoir démontré au préalable qu’elle rapporterait effectivement plus d’énergie qu’elle n’en consomme. On peut aussi craindre une exportation des problèmes environnementaux.</p>
<h2>De quels leviers disposons-nous ?</h2>
<p>Pour l’instant, notre société ne lance des projets et ne prend des décisions que sous l’angle du profit monétaire. Pourquoi ne pas faire preuve désormais de prévoyance, en calculant les coûts d’abord selon le triptyque matière-énergie-environnement et de ses limites ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Quels leviers pour faire avec moins ?</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-vector/vector-ink-swirling-water-isolated-cloud-204927085">Duvanova/Shutterstock</a></span>
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<p>Concernant la matière : le cycle entier de la production – extraction, fabrication, distribution, usage, fin de vie, retour à la fabrication ou à l’usage – doit être pensé pour diminuer la dégradation spontanée. En l’occurrence une triple dégradation : l’énergie se transforme en des formes de moins en moins utilisables, et se dilue <em>in fine</em> en chaleur ; les matières se mélangent et se diluent ; l’environnement est de moins en moins adapté à la vie. Le recyclage, tel qu’il est pratiqué, est <a href="https://theconversation.com/pourquoi-ne-recycle-t-on-que-22-des-plastiques-49626">limité</a> et n’est <a href="https://www.linkedin.com/pulse/la-d%C3%A9sillusion-dune-start-up-de-l%C3%A9conomie-circulaire-charles-dauzet/">pas la solution</a>. La robustesse, la modularité et la facilité de réparation permettraient de passer de l’obsolescence à la durabilité, et de l’irresponsabilité à la responsabilité vis-à-vis des objets que nous utilisons.</p>
<p>Constatant que les énergies de stocks ne sont pas durables, il serait judicieux de se tourner vers la seule source qui l’est : le Soleil, qui devrait encore briller pendant <a href="https://www.futura-sciences.com/sciences/questions-reponses/astronomie-soleil-notre-etoile-va-t-elle-mourir-9545/">5 milliards d’années</a>. Le flux solaire reçu par la Terre est directement ou indirectement à l’origine de nos énergies solaires, hydroélectrique, éolienne et alimentaire. Il a une puissance considérable : <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Irradiation_solaire">174 000 térawatts, à peu près dix mille fois</a> supérieure à la consommation de l’humanité entière. En effet, à titre de comparaison, notons que les ressources fossiles que nous avons brûlées en à peine deux siècles proviennent de l’accumulation de l’énergie solaire captée par la photosynthèse durant cent mille fois plus longtemps.</p>
<p>La puissance reçue du Soleil est distribuée sur toute la surface de la planète. La capter entièrement et la concentrer pour alimenter la société de consommation, par exemple sous forme de panneaux photovoltaïques ou de biocarburants, se heurte à des obstacles en <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Biocarburant#Possibilit%C3%A9_de_remplacement_des_%C3%A9nergies_fossiles">pratique</a>, tant en termes d’utilisation de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89nergie_solaire_photovolta%C3%AFque#Risques_environnementaux">matière première</a> que d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Biocarburant#Utilisation_de_terre_arable">utilisation des sols</a> et d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Biocarburant#Bilan_environnemental">environnement</a>.</p>
<p>Il serait donc judicieux de se restreindre à utiliser des technologies de basse puissance. C’est-à-dire limitées par ce qui arrive sur une surface donnée locale au cours de l’année : le flux solaire, le vent, la pluie et les fleuves, la géothermie, le bois et la végétation qui poussent. Du fait qu’on intègre ces limites, il ne peut y avoir d’effet rebond.</p>
<p>De telles technologies seraient-elles réalisables en pratique ? L’exemple de la vie depuis plusieurs milliards d’années montre qu’il est non seulement faisable, mais aussi durable, de n’utiliser que le flux d’énergie venant du Soleil, et surtout la matière disponible inlassablement recyclée à partir de sources diluées.</p>
<p>Qu’est-ce à dire ? Il y a des éléments dont nos cellules ne peuvent se passer, mais qu’elles emploient en toute petite quantité, le fer par exemple. Qu’ils proviennent de l’eau de mer ou d’une roche, ils y étaient très dilués. Jamais, dans toute la chaîne écologique, il n’y a l’équivalent d’un haut-fourneau qui les utilise sous forme pure avec un coût énergétique élevé. Ils restent plus ou moins dilués dans les cellules, à l’état de trace, et passant ainsi d’un organisme à l’autre. La biochimie fine des cellules limite la dégradation de l’énergie et la déperdition de matière.</p>
<p>Cependant, les leviers d’actions sont loin de se limiter à des choix technologiques. La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Scientisme">foi inconsidérée en la science</a> ou la technique a montré ses limites. Est-il raisonnable d’espérer que la technologie, à elle seule, résoudra les problèmes qu’elle pose ? Qui oserait encore proclamer aujourd’hui que <a href="https://www.albin-michel.fr/ouvrages/homo-deus-9782226393876">« nous sommes parvenus à dominer la famine, les épidémies et la guerre »</a> ? Un premier levier d’action consisterait à forger les outils mentaux qui nous permettront de réagir à une situation encore jamais vue.</p>
<p>De la pandémie, nous pouvons tirer une leçon d’<a href="https://theconversation.com/face-au-mur-de-la-croissance-exponentielle-135331">anticipation</a>, <a href="https://editions-metailie.com/livre/histoire-dun-escargot-qui-decouvrit-limportance-de-la-lenteur/">sans confondre urgence et précipitation</a>. La prudence, vertu recommandable, consiste à imaginer les conséquences de nos actes, et aussi à admettre que certaines nous échappent. La pandémie rappelle crûment qu’il y a deux durées distinctes : celle de la prise de décision – brève – et celle au bout de laquelle les conséquences des décisions deviennent perceptibles – potentiellement longue. Les physiciens savent bien qu’une telle situation est difficilement pilotable et potentiellement <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9troaction#Boucle,_cha%C3%AEne_et_oscillation">instable</a>.</p>
<p>La pandémie a aussi changé notre perception de la mobilité incessante, réputée indispensable auparavant et désormais source de diffusion du danger. Le confinement nous a donné un exemple collectif d’autolimitation, d’une ampleur inédite dans l’histoire récente de l’humanité. La <a href="https://theconversation.com/pourquoi-leconomie-circulaire-ne-doit-pas-remplacer-la-sobriete-119021">sobriété</a>, vertu tout aussi recommandable que la prudence, dépend de nos capacités à nous limiter nous-mêmes.</p>
<p>À l’échelle de l’individu, viser plus de sobriété nécessite de rétablir le lien entre nos actions et la perception de leurs conséquences. Par exemple, dans les pays industrialisés, nous consommons l’eau du robinet sans prêter aucune attention à la somme colossale d’efforts individuels, collectifs, industriels, technologiques et scientifiques que requiert son arrivée apparemment miraculeuse. Expliquer, enseigner, persuader peut amener à changer nos comportements. Ici aussi, le confinement a contribué au <a href="https://theconversation.com/trier-reemployer-reparer-entretenir-confines-quatre-conseils-pour-une-consommation-plus-sobre-136915">changement d’attitude</a>.</p>
<p>À l’échelle collective, il existe des tentatives de répartir les contraintes concernant la pollution, comme le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Budget_carbone">budget carbone</a>. La subvention ou la taxe, le quota ou le rationnement, la norme ou la loi, bref tous les mécanismes collectifs de limitation peuvent être des leviers d’action s’ils sont justifiés et compris. L’enjeu, dans toute sa complexité, est bien sûr que ces contraintes soient équitables pour être acceptées : là encore, la pandémie a été un <a href="https://theconversation.com/dans-les-cites-le-sentiment-dinjustice-sintensifie-avec-le-confinement-137135">révélateur</a>.</p>
<h2>Leçons collectives à tirer</h2>
<p>Les termes de « croissance verte » ou de « développement durable » sont des <a href="https://reporterre.net/Les-mensonges-de-la-croissance">oxymores</a> : sans croissance de la consommation d’énergie <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01151590">pas de croissance</a> du flux formel d’échanges monétaires, aussi appelé PIB. Parce qu’il semble <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/13563467.2019.1598964">impossible</a>, ou extrêmement difficile, de consommer moins d’énergie tout en maintenant la croissance économique telle qu’elle est définie actuellement, il est irresponsable de miser sur la perpétuation de cette dernière.</p>
<p>La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9croissance">décroissance</a> n’est pas l’opposé de la croissance économique : elle se place sur un plan plus large, positif, aussi qualitatif que quantitatif. Considérant que la société de consommation apporte plus de nuisances que de bienfaits, elle invite à repenser l’économie, la culture et la politique afin de limiter tant la consommation d’énergie que l’empreinte écologique tout en réduisant les inégalités. Ce n’est donc pas une simple diminution quantitative : c’est un changement de structure. Si la société de consommation était comparée à une voiture, la croissance économique et énergétique serait son carburant. Passer à la décroissance ne consisterait pas à priver la voiture de carburant, mais plutôt à la remplacer par un vélo.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La pandémie a montré que nous pouvons nous autolimiter, individuellement et collectivement, en nous réorganisant.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-illustration/smooth-curles-colorful-strings-on-white-1303569259">Evgeniy Zebolov/Shutterstock</a></span>
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<p>Longtemps confinée aux <a href="http://www.decroissance.org/">cercles militants</a>, la notion de décroissance est depuis un an reprise par les milieux <a href="https://www.pnas.org/content/113/22/6105">académiques</a> puis <a href="https://www.usinenouvelle.com/blogs/julien-fosse/la-croissance-verte-ideal-ou-illusion.N853460">économiques</a>. Elle suscite des remises en cause inattendues, <a href="https://www.linkedin.com/pulse/la-d%C3%A9sillusion-dune-start-up-de-l%C3%A9conomie-circulaire-charles-dauzet/">d’un startupper</a> comme de l’<a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/mon-probleme-avec-la-croissance-1158702">éditorialiste des Échos</a>. La réflexion gagne une frange de <a href="https://www.lemonde.fr/campus/article/2019/11/03/ces-jeunes-ingenieurs-qui-choisissent-la-decroissance_6017843_4401467.html">jeunes ingénieurs</a>. Quand un sondage indique que <a href="http://www.odoxa.fr/sondage/barometre-economique-doctobre-francais-plus-ecolos-jamais/">54 % des Français préfèrent la décroissance à une croissance « verte »</a>, le journal <em>La Décroissance</em> titre ironiquement : <a href="http://www.ladecroissance.net/?chemin=journal&numero=165">« On a gagné ? ! »</a>.</p>
<p>La pandémie fait basculer le statut du débat croissance/décroissance, devenu un sujet <a href="https://lbbe.univ-lyon1.fr/Francois-Graner-Matiere-et-Systemes-Complexes-CNRS-Univ-de-Paris-Diderot.html">scientifique</a>. Il peut désormais être abordé dans les <a href="https://www.franceinter.fr/societe/agricultrice-entrepreneur-autrice-on-a-demande-aux-moins-de-35-ans-ce-qu-ils-veulent-pour-le-monde-d-apres">médias grand public</a>. Des <a href="https://labos1point5.org/nos-objectifs/">scientifiques</a> s’engagent – au nom des limites physiques de la planète – et œuvrent pour réorienter les politiques publiques de façon à s’affranchir du <a href="https://theshiftproject.org/article/crise-climat-plan-transformation-economie-chantier-urgence-crowdfunding/">pari incertain et périlleux de la croissance</a>.</p>
<h2>À quoi sommes-nous prêts pour survivre ?</h2>
<p>La pandémie frappe de manière très <a href="https://theconversation.com/logement-comment-la-crise-sanitaire-amplifie-les-inegalites-135762">inégalitaire</a>, et une crise économique frappe beaucoup plus violemment à mesure que l’on est moins riche. De la même façon, la crise écologique et énergétique qui s’annonce risque de frapper plus fortement les pays et les personnes les plus pauvres. Pour nous autolimiter dans un cadre de collaboration plutôt qu’en compétition, une réforme profonde de notre système politico-économique est nécessaire.</p>
<p>L’un des rares <a href="https://www.thomassankara.net/sankarisme-et-environnement-communication-de-meng-nere-fidele-kientega/">chefs d’État ayant commencé à implémenter une politique écologique</a> a été assassiné après quelques années. On peut imaginer qu’un changement profond vers une <a href="https://editions-libertaires.org/?p=885">écologie politique assumée</a> aurait à surmonter de fortes résistances. Pourtant, la pandémie met aussi en lumière que, même dans des sociétés basées sur la concurrence, les <a href="https://theconversation.com/dossier-la-solidarite-en-temps-de-crise-138670">solidarités</a> prennent parfois le dessus.</p>
<p>Elle apporte aussi la preuve que les États peuvent prendre, au nom de la survie, la décision d’arrêter la machine économique et industrielle. Bien sûr, la brutalité de cet arrêt a eu des conséquences très graves : en premier lieu, la faim, de l’<a href="https://www.la-croix.com/Monde/Asie-et-Oceanie/En-Inde-peur-faim-prevaut-celle-coronavirus-2020-04-05-1201087921">Inde</a> à la <a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/coronavirus-la-pandemie-aggrave-la-crise-alimentaire_3934589.html">Colombie</a> en passant par les États-Unis où l’on peut voir des <a href="https://www.youtube.com/watch?v=iWT9aOE0OGo">Mercedes dans une queue</a> pour recevoir de l’aide alimentaire gratuite. Dans le futur, mieux vaudrait étaler ces changements dans le temps, les anticiper et les piloter, plutôt que les subir.</p>
<p>Face à cette pandémie qui ne contient qu’un seul risque, certes très grave, une large frange de l’humanité a donné un coup de frein d’une ampleur encore jamais vue. Face à la crise globale énergétique, matérielle et environnementale, face aux risques bien plus nombreux, tout aussi certains, et au moins aussi <a href="https://advances.sciencemag.org/content/6/19/eaaw1838">mortels</a>, mais à une échéance plus étalée, consentirons-nous les efforts indispensables ?</p>
<hr>
<p><em>Cet article a bénéficié de discussions avec Emmanuelle Rio, Jean‑Manuel Traimond et Aurélien Ficot. Nous remercions aussi les nombreux relecteurs</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/138842/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La pandémie confirme les limites de la croissance, incite à repenser nos relations aux technologies en tenant compte du triptyque énergie-matière-environnement, et ouvre le débat de la décroissance.Roland Lehoucq, Chercheur en astrophysique, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)François Graner, Directeur de recherche CNRS, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1367402020-04-26T18:52:28Z2020-04-26T18:52:28ZMême avec zéro cas, l’Afrique aurait sévèrement souffert du Covid-19<p>S’il peut être difficile de prévoir à ce stade les conséquences sanitaires qu’aura la pandémie de Covid-19 en Afrique subsaharienne, tout indique que l’économie de la région sera durement affectée. D’une part, les pays de cette zone dépendent largement de l’exportation des matières premières – pétrole, cacao, coton, etc. – qui voient leurs cours baisser avec la chute de la demande mondiale. <a href="https://unctad.org/en/PublicationsLibrary/gds_tdr2019_covid2_en.pdf">Selon les données de la CNUCED</a>, la baisse des prix des matières premières est de 37 % en glissement annuel au 25 mars 2020 dans leur globalité. Elle est de 55 % pour les hydrocarbures ; le cours du cacao subit une baisse de 11 %, celui du coton de quasiment 23 %. <a href="https://www.lesechos.fr/finance-marches/marches-financiers/le-petrole-americain-rebondit-1196617">Des développements plus récents semblent accentuer cette tendance à la baisse</a>.</p>
<p>D’autre part, les <a href="http://www.fao.org/3/I9542FR/i9542fr.pdf">pays africains sont importateurs des denrées de première nécessité</a> dont les chaînes d’approvisionnement sont très perturbées. La baisse du volume des exportations associée à la détérioration des termes de l’échange conduiront donc à un problème de soutenabilité des comptes extérieurs de ces pays.</p>
<p>En plus de cette transmission via les échanges commerciaux, un grand nombre de pays africains dépendent des transferts des migrants qui constituent pour eux une source majeure de financement externe. Ils seront vraisemblablement affectés par la baisse de ces flux due à la perturbation de l’activité économique dans les pays développés. Enfin, n’oublions pas que certains pays africains, dont le tourisme occupe une part importante dans l’économie, sont déjà pénalisés avec le coup d’arrêt des vols commerciaux.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1252013689504497666"}"></div></p>
<p>Ce degré de prévisibilité des conséquences du Covid-19, dans un horizon d’incertitude planétaire, démontre pour ainsi dire que pour l’Afrique, au moins, cette pandémie n’est pas de l’ordre de la conjoncture – au sens d’un système qui fait face, à un moment donné, à un choc –, mais plutôt de l’ordre du structurel – au sens d’un système parti pour subir des chocs perpétuels. Et si c’est donc la structure des économies africaines qui fait problème, les réponses à la pandémie de Covid-19 en Afrique ne devraient pas s’affranchir d’intégrer la composante structurelle. Une condition essentielle pour cela réside dans la capacité des élites politiques, administratives, économiques et intellectuelles à percevoir les ressources naturelles dont dépendent les pays africains comme une opportunité de transformer leurs économies au lieu de les percevoir comme des rentes pérennes – ce qu’elles ne sont pas.</p>
<h2>Les ressources naturelles : ce n’est pas rien mais ce n’est pas tout !</h2>
<p>S’il y a bien un pays dont les élites ont été confrontées aux mêmes opportunités et défis associés aux ressources naturelles, et que les élites africaines devraient étudier de près à défaut de s’en inspirer, c’est la Malaisie. Les exemples des dragons d’Asie sont en réalité assez peu informatifs pour les pays africains, en raison des différences de caractéristiques initiales des économies. A contrario, la Malaisie, quant à elle, possédait une structure initiale de l’économie comparable à celle des pays africains, car dépendant des ressources naturelles – à savoir, l’étain, le caoutchouc, l’huile de palme, et le pétrole.</p>
<p>Lors du premier choc pétrolier de 1973, le revenu réel par habitant de la Malaisie – 2400 dollars US, en termes constants – se situait à des niveaux comparables à ceux des pays d’Afrique subsaharienne au même moment – 1460 dollars US en moyenne. En 2018, soit 45 ans plus tard, le revenu réel par habitant de la Malaisie a quintuplé – il s’élève désormais à 12 120 dollars US –, tandis que ceux de ses homologues africains n’ont quasiment pas bougé – <a href="https://data.worldbank.org/indicator/NY.GDP.PCAP.KD">1660 dollars US en moyenne</a>.</p>
<p>En exploitant les opportunités offertes par les ressources naturelles, et en contrecarrant les défis, les élites malaisiennes démontrent que posséder des ressources n’est pas rien, mais bien aussi que posséder des ressources n’est pas tout non plus ! À noter qu’à ce jour, la Malaisie est le pays d’Asie du Sud-Est le plus touché par le Covid-19. Mais les éléments factuels qui précèdent montrent que la Malaisie est mieux préparée que les pays africains pour affronter l’épidémie et pour protéger sa population tant du point de vue économique que sanitaire.</p>
<p>Les élites malaisiennes y sont arrivées en saisissant les <a href="http://documents.worldbank.org/curated/en/617611574179512389/pdf/Agricultural-Transformation-and-Inclusive-Growth-The-Malaysian-Experience.pdf">ressources naturelles pour transformer leur économie</a> via notamment des fondamentaux de la croissance à long terme – institutions, capital physique (infrastructures) et capital humain (éducation et santé). Une meilleure interprétation par les élites africaines de ces fondamentaux pourrait permettre d’enclencher la diversification du tissu économique, de présenter plus de résilience face aux chocs de court terme tout en plaçant les économies sur une trajectoire de long terme de développement.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1180449771112353794"}"></div></p>
<p>Sans être exhaustif, si l’on prend le cas du capital humain, une constante en Afrique pour l’un des éléments qui permettent son accumulation – l’éducation – est de mettre l’accent sur la <a href="https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/SE.SEC.ENRR?locations=ZG&name_desc=false">quantité (taux de scolarisation)</a>. En revanche, l’orientation des élèves et étudiants est passée à la trappe. Les pays africains se retrouvent donc avec des effectifs pléthoriques dans des filières de formation en lettres, sciences humaines et sociales au détriment des formations scientifiques, techniques et professionnelles.</p>
<p>Une orientation des élèves et étudiants vers des filières conformes aux réalités économiques – telles que de la production des cultures vivrières et l’agro-industrie – permettrait une meilleure insertion professionnelle des jeunes et serait source d’une croissance économique soutenue, à la différence d’une allocation en faveur des filières de formation en lettres, sciences humaines et sociales, dont la surreprésentation qui en découle est plutôt associée à des activités non productives de recherche et de capture de la rente publique – bref, à la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0304387814001564">corruption</a>.</p>
<p>La lutte contre la corruption requiert elle-même une structuration des institutions qui doivent présenter de réels contre-pouvoirs. Ce qui est loin de la pratique usuelle consistant simplement à organiser des élections – ce qu’on appelle la <a href="https://theconversation.com/afrique-dune-democratie-des-elections-a-une-democratie-de-developpement-129242">démocratie des élections</a></p>
<h2>Qui peut le moins pourra-t-il le plus ?</h2>
<p>Comme il est précédemment noté, la dépendance à l’égard des exportations en matières premières, dont la baisse des cours liée au Covid-19 va impacter négativement les économies, ne date pas d’aujourd’hui. Par ailleurs, le système sanitaire qui a démontré sa déficience depuis des années dans la lutte contre les maladies diverses – notamment le paludisme – qui affectent au quotidien les citoyens des pays africains, ne peut raisonnablement pas être prêt à affronter la pandémie de Covid-19, et cela ne date pas de la présente période. La structure des activités économiques, tirées par le secteur informel, auquel une majorité des citoyens de grandes villes africaines doivent leur pain quotidien, et qui rend les mesures de confinement inopérantes pour ces populations sinon les expose même à plus de vulnérabilité – ne date pas non plus d’aujourd’hui.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1252759232400719873"}"></div></p>
<p>De manière factuelle, le seul élément nouveau est le confinement des élites africaines dans leurs pays. De façon inédite dans la mondialisation actuelle, les élites de différents pays d’Afrique sont appelées à devoir vivre avec les populations de leurs pays et peut-être même comme ces dernières pendant quelques semaines. Ce confinement des élites – politiques, économiques, administratives ou intellectuelles – dans les pays d’Afrique va-t-il les inciter à tout faire pour mettre en œuvre dans leurs pays le <a href="https://theconversation.com/african-politicians-seeking-medical-help-abroad-is-shameful-and-harms-health-care-82771">bien-être qu’elles vont si souvent chercher ailleurs</a> ?</p>
<p>Une réponse positive à cette question appelle d’ores et déjà, à court terme, à un redéploiement urgent des dépenses courantes non nécessaires – missions à l’étranger, bons de carburant dans la haute administration, etc. – vers les plus vulnérables. Les sociétés civiles devraient également porter plus d’attention à l’allocation des dettes contractées pour faire face aux conséquences du Covid-19. Une dette contractée aujourd’hui sera remboursable demain… pourvu qu’elle ait été allouée aux investissements productifs – notamment aux infrastructures essentielles qui manquent cruellement aux pays africains –, et non à la consommation. De tels pas à court terme peuvent ouvrir la voie à des choix plus judicieux à moyen et long termes. Dans le cas d’une réponse négative, alors, hélas pour l’Afrique, la pandémie de Covid-19 sera malheureusement de l’ordre du déjà-vu !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/136740/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’économie des pays d’Afrique subsaharienne, très dépendante des exportations de matières premières, va se ressentir durement du ralentissement des échanges dû à l’épidémie.Dramane Coulibaly, Enseignant-chercheur au laboratoire EconomiX-CNRS, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLuc-Désiré Omgba, Professeur de sciences économiques, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1369642020-04-22T08:34:26Z2020-04-22T08:34:26ZMais que s’est-il passé sur le marché du pétrole ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/329686/original/file-20200422-108531-1jpanhr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=47%2C80%2C975%2C617&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le prix au comptant du West Texas Intermediate (WTI) a atteint moins 40,32 dollars le baril le lundi 20&nbsp;avril.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Nous venons d’assister à un effondrement des prix du pétrole sans précédent, ce qui a entraîné les prix en <a href="https://www.smh.com.au/business/markets/oil-price-plunges-below-zero-as-demand-collapses-stocks-dip-20200421-p54lm2.html">territoire négatif</a> le 20 avril.</p>
<p>Le prix au comptant du West Texas Intermediate (WTI), le type de pétrole utilisé comme standard dans la fixation du prix du brut, a ainsi atteint <a href="https://www.indexmundi.com/commodities/?commodity=crude-oil-west-texas-intermediate">moins 40,32 dollars américains</a> le baril. Le prix à terme de mai (c’est-à-dire du pétrole livrable sous forme physique) est quant à lui passé à moins 37,63 dollars américains le baril, soit le niveau le plus bas de l’histoire.</p>
<p>Il n’y a pas eu de meilleur indicateur de l’étendue des dégâts économiques provoqués par le coronavirus. Avec la fermeture des frontières et le fait qu’une grande partie de la population mondiale reste aujourd’hui confinée, les transports se sont pratiquement arrêtés.</p>
<h2>Comment un prix peut-il devenir négatif ?</h2>
<p>Le plongeon des cours tient au fait que l’industrie pétrolière n’a pas été en mesure de ralentir la production assez rapidement pour contrer la baisse de la demande. Quant au stockage du pétrole américain, l’autre mécanisme qui stabilise normalement les prix, il semble avoir atteint ses limites en termes de capacité.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/329395/original/file-20200421-82699-15j5m18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/329395/original/file-20200421-82699-15j5m18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=971&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/329395/original/file-20200421-82699-15j5m18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=971&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/329395/original/file-20200421-82699-15j5m18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=971&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/329395/original/file-20200421-82699-15j5m18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1220&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/329395/original/file-20200421-82699-15j5m18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1220&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/329395/original/file-20200421-82699-15j5m18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1220&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le site de stockage de pétrole de Cushing en Oklahoma, le plus grand du monde.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.crudeoildaily.com/2017/12/oil-prices-started-week-pulling-back.html">Crude Oil Daily</a></span>
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<p>Le WTI est en effet généralement stocké dans les cuves de Cushing, en Oklahoma, qui sont en <a href="https://www.reuters.com/article/us-usa-energy-cushing-idUSKCN0X20A9">passe d’être pleines</a>. Le site de Cushing serait pourtant capable de contenir quelque 62 millions de barils de pétrole, soit assez pour remplir tous les réservoirs de la moitié des voitures aux États-Unis !</p>
<p>C’est pourquoi les prix sont devenus négatifs. Les négociants qui ont des contrats pour prendre livraison du pétrole en mai craignent de ne plus pouvoir le stocker. Ils sont donc prêts à payer pour ne pas avoir à l’acquérir physiquement, car ils n’ont nulle part où le mettre.</p>
<p>Cependant, les contrats pétroliers ne sont pas tous devenus négatifs. Ceux qui concernent le WTI pour juin et les mois suivants sont restés en territoire positif, ce qui reflète le sentiment que le déséquilibre entre l’offre et la demande sera bientôt corrigé.</p>
<p>Le <a href="http://www.livecharts.co.uk/MarketCharts/brent.php">brent</a>, le prix de référence international, est ainsi resté positif, tombant à 25,57 dollars US, soir une baisse d’environ 9 %. Contrairement au WTI, les livraisons de brent peuvent être en effet mises sur des navires et transportées vers des installations de stockage partout dans le monde.</p>
<h2>Pas seulement aux États-Unis</h2>
<p>Actuellement, il n’y a toutefois aucune garantie que les problèmes de stockage aux États-Unis ne s’étendront pas à d’autres marchés, et ce malgré la décision de l’OPEP-Plus (l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, plus la Russie et d’autres anciens États soviétiques) de réagir à la chute libre en réduisant la production de 9,7 millions de barils par jour. Une décision qui d’ailleurs met ainsi fin au récent duel sur les niveaux de production entre l’OPEP et la Russie.</p>
<p>L’avenir s’annonce donc relativement sombre sur les marchés pétroliers. Avec la hausse du chômage, les économies en récession et l’effondrement des marchés financiers, les perspectives de reprise substantielle semblent lointaines.</p>
<p>Les États-Unis, qui sont aujourd’hui eux-mêmes exportateurs de pétrole de schiste, souffriront de la même manière que les exportateurs traditionnels du Moyen-Orient. Historiquement, les marchés pétroliers ont été considérés comme de bons indicateurs pour prédire les récessions. Or, dans le contexte actuel, c’est bien l’inverse qui semble se produire.</p>
<p>À ce stade, l’industrie pourrait ainsi commencer à considérer que le meilleur endroit pour stocker le pétrole est un endroit naturel : en le laissant dans le sol.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/136964/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christina Nikitopoulos a reçu des financements de l'Australian Research Council. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Warren Hogan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La crise économique mondiale et la saturation des capacités de stockage américaines expliquent pourquoi les prix sont entrés en territoire négatif en début de semaine.Christina Nikitopoulos, Senior Lecturer, Finance Discipline Group, University of Technology SydneyWarren Hogan, Industry Professor, University of Technology SydneyLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.